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Spain Gourmetour No. 66 (French)

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EDIT

ORédactrice en chefCathy Boirac

CoordinationAlmudena Muyo GonzálezAlmudena Martín Rueda

PigisteSantiago Sánchez Segura

CorrecteurRodrigo Vicuña

Archives photographiquesMabel Manso

Secrétaire de rédactionÁngela Castilla

Design et Direction artistiqueManuel Estrada, Diseño Gráfico

Adaptation de la maquetteChema Bermejo

CartesJavier Belloso

PhotogravureEspacio y Punto

Imprimé parArtes Gráficas Luis Pérez S.A.

PublicitéCEDISATél. : (34) 913 080 644Fax : (34) 913 105 [email protected]

D.L. : M-33759-1988

ISSN : 0214-2937

NIPO : 705-068-040-0

ÉditeurICEXSecrétariat d’Etat au Tourisme et au Commerce,ministère de l’Industrie, du Tourisme et duCommerce.Pº de la Castellana, 1428046 MadridTél. : (34) 913 496 243Fax : (34) 914 358 876www.icex.es

CouvertureJuan Manuel Sanz/©ICEX

Information et Abonnement :Spain Gourmetour est une revue éditée parl’ICEX (Institut Espagnol du CommerceExtérieur), attaché au Secrétariat d’Etat auTourisme et au Commerce, ministère del’Industrie, du Tourisme et du Commerce. Elleest destinée à promouvoir à l’étranger lesproduits agroalimentaires de l’Espagne, sagastronomie ainsi que sa culture. Trois numérossont publiés chaque année, en anglais,français, allemand et espagnol, dont ladistribution gratuite est exclusivement etseulement destinée aux professionnels etinstitutions de ce secteur.Si vous désirez avoir plus d’informations,adressez-vous aux Bureaux Economiques etCommerciaux des Ambassades d'Espagne (voirliste, page 126). Les opinions des auteurs denos articles ne sont pas nécessairement cellesde l’Institut Espagnol du Commerce Extérieurqui ne peut, en aucun cas, être responsable deserreurs ou omissions dans ces textes.

Quelques gouttes d’huile d’olive vierge extra de la province de Jaen, un poivron

rouge de La Rioja ou vert, de Galice (oui, vous avez bien lu !), quelques grains de

sel de Majorque ou des Îles Canaries. Un bon début pour une bonne salade.

Sortez une jolie nappe, voici l’été. Dans l’hémisphère Nord, en tous cas !

Puis osez la Godello, cépage qui frôla la disparition et renaît aujourd’hui, en Galice

(oui, toujours elle !), grâce à l’enthousiasme de quelques chais. Vous pouvez aussi

impressioner vos invités avec quelques bouteilles made in Spain, aux étiquettes

surprenantes, pas du tout ringardes. Vous verrez comment quelque chose bouge

de ce côté-là aussi.

Et pour parfaire votre invitation, découvrez les nouvelles techniques de certains

de nos chefs.

Enfin, si le cœur vous en dit, venez nous voir : Ávila et Cáceres, moins connues

mais tout de même villes du patrimoine mondial de l’Unesco, vous attendent.

Quoique l’automne y serait moins chaud.

Et, en fin de lecture, faites nous part de vos impressions, de vos suggestions.

Cathy Boirac

Rédactrice en Chef

[email protected]

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2 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 3

Editorial ..................................1

Gros planSel. La fièvre de l’or blanc .......14

VinCépages espagnols II.En attendant Godello ..............28Vin et design ...........................44

GastronomieLe défi de l’actualisationtechnique ...............................56

Tours et détoursVilles patrimoine II.Richesses d’hier, trésorsd’aujourd’hui...........................72

EssentielsLe poivron tout en douceur.....88

SOM

MAI

RESPAINGOURMETOURMAI-AOÛT 2009Nº 66

RecettesPepe Vieira ............................102Poivron .................................104Sel ........................................112

EntreprisesEn marche.............................114Castillo de Canena.Les perles de Canena.............116

ÉpiloguePalette de saveurs.Nature morte avec pastèqueset pommes dans un paysage..122

RepèresAnnonceurs ..........................124Exportateurs ........................125Infos sur l’Espagne ................126Iconographie.........................128

01-SUMARIO FR-66.qxd 18/4/09 02:30 Página 2 (FRANCES plancha)

SELLe sel est sorti de l’anonymat. Au cours des dix dernières années, les variétés de sel se sont

multipliées au point de composer une longue liste de produits caractérisés par différentes

qualités et méthodes d’obtention et de traitement. Le considérer comme objet d’une simple

nécessité de base dont l’origine n’aurait aucune importance fait maintenant partie du passé.

Le sel rose de l’Himalaya, la fleur de sel de Camargue et de Guérande, en France, le sel Maldon

anglais, le Hale Mon du pays de Galles, le sel noir de Hawaii ou le sel de Maras du Pérou ne

sont que quelques-uns des noms devenus populaires dans la gastronomie internationale,

conséquence d’un phénomène dans lequel l’origine géographique de ce minéral est

fondamentale. Dans ce contexte, l’Espagne réclame sa place sur la carte du sel en utilisant

de solides arguments : une tradition millénaire remontant à une époque antérieure à la

domination romaine ; des conditions naturelles parfaites pour l’obtention d’un produit aussi

exquis que la fleur du sel ; et finalement l’opiniâtreté et l’audace créative d’un groupe de

pionniers qui occuperont une place importante dans cet article.

Lafièvre de l’orblanc

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2 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 3

Editorial ..................................1

Gros planSel. La fièvre de l’or blanc .......14

VinCépages espagnols II.En attendant Godello ..............28Vin et design ...........................44

GastronomieLe défi de l’actualisationtechnique ...............................56

Tours et détoursVilles patrimoine II.Richesses d’hier, trésorsd’aujourd’hui...........................72

EssentielsLe poivron tout en douceur.....88

SOM

MAI

RE

SPAINGOURMETOURMAI-AOÛT 2009Nº 66

RecettesPepe Vieira ............................102Poivron .................................104Sel ........................................112

EntreprisesEn marche.............................114Castillo de Canena.Les perles de Canena.............116

ÉpiloguePalette de saveurs.Nature morte avec pastèqueset pommes dans un paysage..122

RepèresAnnonceurs ..........................124Exportateurs ........................125Infos sur l’Espagne ................126Iconographie.........................128

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Une Valeur SûreRioja de Touts Coeur

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SELLe sel est sorti de l’anonymat. Au cours des dix dernières années, les variétés de sel se sont

multipliées au point de composer une longue liste de produits caractérisés par différentes

qualités et méthodes d’obtention et de traitement. Le considérer comme objet d’une simple

nécessité de base dont l’origine n’aurait aucune importance fait maintenant partie du passé.

Le sel rose de l’Himalaya, la fleur de sel de Camargue et de Guérande, en France, le sel Maldon

anglais, le Hale Mon du pays de Galles, le sel noir de Hawaii ou le sel de Maras du Pérou ne

sont que quelques-uns des noms devenus populaires dans la gastronomie internationale,

conséquence d’un phénomène dans lequel l’origine géographique de ce minéral est

fondamentale. Dans ce contexte, l’Espagne réclame sa place sur la carte du sel en utilisant

de solides arguments : une tradition millénaire remontant à une époque antérieure à la

domination romaine ; des conditions naturelles parfaites pour l’obtention d’un produit aussi

exquis que la fleur du sel ; et finalement l’opiniâtreté et l’audace créative d’un groupe de

pionniers qui occuperont une place importante dans cet article.

Lafièvre de l’orblanc

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SELLe sel est sorti de l’anonymat. Au cours des dix dernières années, les variétés de sel se sont

multipliées au point de composer une longue liste de produits caractérisés par différentes

qualités et méthodes d’obtention et de traitement. Le considérer comme objet d’une simple

nécessité de base dont l’origine n’aurait aucune importance fait maintenant partie du passé.

Le sel rose de l’Himalaya, la fleur de sel de Camargue et de Guérande, en France, le sel Maldon

anglais, le Hale Mon du pays de Galles, le sel noir de Hawaii ou le sel de Maras du Pérou ne

sont que quelques-uns des noms devenus populaires dans la gastronomie internationale,

conséquence d’un phénomène dans lequel l’origine géographique de ce minéral est

fondamentale. Dans ce contexte, l’Espagne réclame sa place sur la carte du sel en utilisant

de solides arguments : une tradition millénaire remontant à une époque antérieure à la

domination romaine ; des conditions naturelles parfaites pour l’obtention d’un produit aussi

exquis que la fleur du sel ; et finalement l’opiniâtreté et l’audace créative d’un groupe de

pionniers qui occuperont une place importante dans cet article.

Lafièvre de l’orblanc

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L’île de Majorque est le point de départgéographique de notre voyage dans lemonde des sels espagnols. Bienqu’anecdotique, la première prise decontact avec le sel autochtone est trèssignificative : dans le buffet du petitdéjeuner d’un hôtel du centre dePalma, nous remarquons une table où,sous l’inscription « Rincón mallorquín »(Coin majorquin) les aliments les plustraditionnels de l’île, comme lesensaimadas et la sobrasada, laissent uneplace d’honneur à un petit tas de sel età son conditionnement, un petit pot audesign soigné sur lequel brillel’étiquette Flor de sal d’Es Trenc. Unretour dans le passé démontrerait fortprobablement que nous n’aurions pasvu ce sel figurer ce matin-là commel’un des emblèmes de la gastronomielocale si la Suisse Katja Woehr n’avaitpas débarqué sur l’île quelques annéesauparavant. À son arrivée, début 2002,Katja ne possédait qu’une vieillevoiture, trois cent cinquante euros et laferme intention de consacrer sa vie ausel de Majorque. Aujourd’hui, lamarque Flor de sal d’Es Trenc estprésente dans des restaurants etépiceries fines aux États-Unis, auCanada, au Japon, en Allemagne, enSuisse, en Autriche, au Royaume-Uni,en Norvège, en Belgique et en Islande,et son entreprise, Gusto MundialBalearides, fait un chiffre d’affaires deprès de 500 000 euros par an.Les mêmes eaux de la Méditerranéequi entourent l’île de Majorquebaignent le delta de l’Èbre (Nord-Estde l’Espagne), l’embouchure du fleuveau plus grand débit de la péninsuleIbérique, où se trouvent les Salinas de

Trinidad qui, depuis des siècles,approvisionnent en sel cette région dulittoral catalan et l’exportentactuellement vers plus de vingt pays. Ily a seulement six ans qu’Infosa,l’entreprise qui gère l’exploitationdepuis 1946, a commencé à récolter lafleur de sel dans ses installations et àfournir les différentes marques quirépondent à la demande croissante dece produit sur le marché. À partir dusel du delta de l’Èbre, des marquescomme Casanovas Barcelona ouCarolingia Sal Preciosa ont exploré denouvelles possibilités culinaires avecdes produits innovants comme le selliquide ou une vaste collection de selsparfumés. Un tel succès a conduitInfosa à rénover l’an dernier sesinstallations afin de disposer de troiscents petits bassins de cristallisationexclusivement destinés à l’obtention dela fleur de sel et à lancer sa propremarque de sels gourmet, Flor delDelta, un projet pour lequel elle abénéficié de la collaboration ducuisinier catalan Joan Roca (El Cellerde Can Roca, deux étoiles Michelin, àGérone).Très loin de là, dans les Îles Canaries,Andrés Hernández gère avec son pèreles Salinas de Fuencaliente, construitespar son grand-père il y a plus dequarante ans. Situées dans un sitespectaculaire de l’île de La Palma(déclarée Réserve mondiale de labiosphère par l’Unesco), ces salines onttoujours produit la fleur de sel, maiselle était uniquement destinée à laconsommation des travailleurs. Jusqu’àce que la valorisation de la fleur de selcomme produit gourmet ait rendu

possible sa commercialisation depuisl’été 2007. Un phénomène décisif pourla survie des salines artisanales commecelles de la famille Hernández, quirencontrent d’énormes difficultés àrivaliser avec les coûts générés par lesméthodes industrielles de productionde sel de table mais qui peuvent parcontre élaborer un produit de hautequalité gastronomique.Ces trois histoires illustrent, aux ÎlesBaléares, en Catalogne et aux ÎlesCanaries, la manière dont le boom dessels gourmet en Espagne au cours descinq dernières années a donnénaissance à de nouveaux noms etproduits, modifié les habitudesd’élaboration et de commercialisationde vieilles entreprises du secteur etsignifié une nouvelle opportunité pourde petites entreprises salinesartisanales. Tout ceci avec un type desel très particulier : la fleur de sel.

Le sel le plus priséIl y a plus de vingt ans que la fleur desel a commencé à se faire une placedans le monde de la haute gastronomieinternationale grâce à la production dela côte atlantique française,concrètement celle des marais salantsde Guérande. Katja Woehr, qui enconnaissait déjà les propriétésgastronomiques, avoue avoir étéfascinée, lors d’un voyage en Bretagnependant l’été 2001, par la techniquespéciale d’obtention du sel. Elle putainsi satisfaire son désir de trouver unproduit marin, totalement naturel danssa composition et artisanal dans sonélaboration, à partir duquel travailler

TEXTESANTIAGO SÁNCHEZ

SEGURA/©ICEX

TRADUCTIONFRANÇOISE CHUFFART/©ICEX

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L’île de Majorque est le point de départgéographique de notre voyage dans lemonde des sels espagnols. Bienqu’anecdotique, la première prise decontact avec le sel autochtone est trèssignificative : dans le buffet du petitdéjeuner d’un hôtel du centre dePalma, nous remarquons une table où,sous l’inscription « Rincón mallorquín »(Coin majorquin) les aliments les plustraditionnels de l’île, comme lesensaimadas et la sobrasada, laissent uneplace d’honneur à un petit tas de sel età son conditionnement, un petit pot audesign soigné sur lequel brillel’étiquette Flor de sal d’Es Trenc. Unretour dans le passé démontrerait fortprobablement que nous n’aurions pasvu ce sel figurer ce matin-là commel’un des emblèmes de la gastronomielocale si la Suisse Katja Woehr n’avaitpas débarqué sur l’île quelques annéesauparavant. À son arrivée, début 2002,Katja ne possédait qu’une vieillevoiture, trois cent cinquante euros et laferme intention de consacrer sa vie ausel de Majorque. Aujourd’hui, lamarque Flor de sal d’Es Trenc estprésente dans des restaurants etépiceries fines aux États-Unis, auCanada, au Japon, en Allemagne, enSuisse, en Autriche, au Royaume-Uni,en Norvège, en Belgique et en Islande,et son entreprise, Gusto MundialBalearides, fait un chiffre d’affaires deprès de 500 000 euros par an.Les mêmes eaux de la Méditerranéequi entourent l’île de Majorquebaignent le delta de l’Èbre (Nord-Estde l’Espagne), l’embouchure du fleuveau plus grand débit de la péninsuleIbérique, où se trouvent les Salinas de

Trinidad qui, depuis des siècles,approvisionnent en sel cette région dulittoral catalan et l’exportentactuellement vers plus de vingt pays. Ily a seulement six ans qu’Infosa,l’entreprise qui gère l’exploitationdepuis 1946, a commencé à récolter lafleur de sel dans ses installations et àfournir les différentes marques quirépondent à la demande croissante dece produit sur le marché. À partir dusel du delta de l’Èbre, des marquescomme Casanovas Barcelona ouCarolingia Sal Preciosa ont exploré denouvelles possibilités culinaires avecdes produits innovants comme le selliquide ou une vaste collection de selsparfumés. Un tel succès a conduitInfosa à rénover l’an dernier sesinstallations afin de disposer de troiscents petits bassins de cristallisationexclusivement destinés à l’obtention dela fleur de sel et à lancer sa propremarque de sels gourmet, Flor delDelta, un projet pour lequel elle abénéficié de la collaboration ducuisinier catalan Joan Roca (El Cellerde Can Roca, deux étoiles Michelin, àGérone).Très loin de là, dans les Îles Canaries,Andrés Hernández gère avec son pèreles Salinas de Fuencaliente, construitespar son grand-père il y a plus dequarante ans. Situées dans un sitespectaculaire de l’île de La Palma(déclarée Réserve mondiale de labiosphère par l’Unesco), ces salines onttoujours produit la fleur de sel, maiselle était uniquement destinée à laconsommation des travailleurs. Jusqu’àce que la valorisation de la fleur de selcomme produit gourmet ait rendu

possible sa commercialisation depuisl’été 2007. Un phénomène décisif pourla survie des salines artisanales commecelles de la famille Hernández, quirencontrent d’énormes difficultés àrivaliser avec les coûts générés par lesméthodes industrielles de productionde sel de table mais qui peuvent parcontre élaborer un produit de hautequalité gastronomique.Ces trois histoires illustrent, aux ÎlesBaléares, en Catalogne et aux ÎlesCanaries, la manière dont le boom dessels gourmet en Espagne au cours descinq dernières années a donnénaissance à de nouveaux noms etproduits, modifié les habitudesd’élaboration et de commercialisationde vieilles entreprises du secteur etsignifié une nouvelle opportunité pourde petites entreprises salinesartisanales. Tout ceci avec un type desel très particulier : la fleur de sel.

Le sel le plus priséIl y a plus de vingt ans que la fleur desel a commencé à se faire une placedans le monde de la haute gastronomieinternationale grâce à la production dela côte atlantique française,concrètement celle des marais salantsde Guérande. Katja Woehr, qui enconnaissait déjà les propriétésgastronomiques, avoue avoir étéfascinée, lors d’un voyage en Bretagnependant l’été 2001, par la techniquespéciale d’obtention du sel. Elle putainsi satisfaire son désir de trouver unproduit marin, totalement naturel danssa composition et artisanal dans sonélaboration, à partir duquel travailler

TEXTESANTIAGO SÁNCHEZ

SEGURA/©ICEX

TRADUCTIONFRANÇOISE CHUFFART/©ICEX

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en exploitant ses possibilitésgastronomiques. Lorsqu’elle sesouvient de ses projets de l’époque,Katja transmet cette déterminationpresque mystique qui la portait : « Jedevais me consacrer à la mer, fairequelque chose avec la mer. » Elle avaittravaillé pendant plus de 19 ans dansdes pays aussi différents que laNouvelle-Zélande, l’Australie, laThaïlande et la Jamaïque, toujoursdans le secteur du tourisme et de larestauration, mais allait finalementdécider que l’endroit où elle allait selancer dans un nouveau projet seraitencore différent : les salines d’Es Trenc,dans le Sud de Majorque.En choisissant les Îles Baléares, Katjaretrouvait le destin des Phéniciens, desCarthaginois, des Romains et desArabes qui, au cours de l’histoire, ontextrait du sel dans la région et dans lessalines de l’île voisine d’Ibiza. Bienavant que cette dernière ne soitdevenue une référence touristiqueinternationale, le sel d’Ibiza fitconnaître le nom de l’île à l’étranger.Aujourd’hui, on produit dans sessalines un sel d’excellente qualité,particulièrement adapté à l’industrie dela salaison du poisson (on l’exporte àcette fin depuis des décennies vers despays comme la Norvège et leDanemark) et avec lequel on élaboreles produits de la marque qui porteson nom : Sal de Ibiza. Là-bas, commeailleurs dans le Sud et le Levantespagnol,existent lescirconstancesparfaites pourl’obtention dela fleur de sel,

un produit dont l’exclusivité estdéterminée en grande partie par lesconditions naturelles particulièresnécessaires à sa formation et qui enfont un bien rare et recherché.Les cristaux irréguliers de fleur de selse forment sur la surface aquatique desbassins par l’interaction de troiséléments physiques : la lumière dusoleil, l’humidité relative de l’air etl’action du vent. Les journées chaudeset ensoleillées où l’humidité est faibleet où souffle une brise légère quifavorise l’évaporation sans agiterexagérément l’eau, donnent lieu à lacréation de fines couches de cristauxde sel, la fleur de sel, appelé de façontrès imagée « sel de glace » dans lessalines de San Vicente (Cadix,Sud de l’Espagne)

Ce processus particulier decristallisation, qui le

différencie tantde celui du selcommun danslequel le sel seprécipite aufond du marais,influe sur sa

composition. La fleur de sel contientmoins de chlorure de sodium etdavantage d’oligoéléments comme lemagnésium, le potassium et lecalcium. Dans ses applicationsculinaires, cela révèle des propriétéssalines plus subtiles (c’est pourquoicertains disent que c’est un sel qui salemoins) et cependant, comme lemagnésium est un exhausteur naturelde goût, il permet de condimenter lesplats en utilisant moins de sel. « Dansnotre cuisine, nous essayons d’utiliserun sel le plus pur possible », dit JoanRoca, « et la fleur de sel correspond lemieux à notre manière de concevoirl’assaisonnement ». La fleur de sel neconserve toutes ses propriétésorganoleptiques et sa texturecroquante que si on l’emploiedirectement sur le plat juste avant deservir, sans le cuire ni le dissoudre et,comme le dit un autre cuisinier, leBritannique Marc Fosh installé àMajorque, collaborateur de Flor de Sald’Es Trenc, « il est particulièrementapproprié pour peaufiner un plat enlui donnant une dernière touche desaveur ».

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SEL

GROSPLAN

SEL

GROSPLAN

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MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 31

J’en ai eu un aperçu prometteurlorsque j’ai eu l’occasion de le dégusterpour la première fois. C’était un blancojoven du nom de Guitián, fin et bienstructuré, quoique discret, qui avaitattiré mon attention sur la liste de vinsd’un restaurant de l’arrière-payscatalan. Bien que décevant sur le planaromatique, son palais bien équilibréet sa structure étoffée accompagnaientà merveille le plat de morue (nonsalée) qui m’avait été servi, cuisantencore sur une plaque d’ardoisebrûlante (bacalao a la llosa). Je neconnaissais guère, à l’époque,l’importance de l’ardoise dans cemariage d’ingrédients.Le godello avait été au bord del’extinction. Les épidémies dephylloxéra des années 1900,particulièrement virulentes dans leNord-Ouest, avaient rayé de la carte denombreux cépages en Espagne. Pourrégénérer les vignobles dévastés decette région, les autorités avaient alorsdécidé d’importer des cépages à hautrendement, permettant de reconstituer

rapidement les stocks de vins. Ainsi,de vastes plantations de palomino, uncépage très productif que les Galicienssurnommaient le « Jerez », allaientresserrer l’étau sur les rares parcellesde godello qui avaient survécu.Célèbre en Andalousie pour laproduction de Xérès, le palomino tendà produire en Galice des vins ternes,sans grand intérêt, plutôt axés sur laquantité que sur la qualité.Dans les années 1950-60, la vie étaittrès dure en Galice et de nombreuxGaliciens furent obligés d’émigrer pourtrouver du travail. Ceux qui restaientessayaient tant bien que mal desurvivre de la pêche, de l’agriculture etde l’industrie de l’ardoise. La Galiceabritait l’une des plus belles ardoisesd’Europe et certaines des meilleurescarrières du continent, à tel point quecette pierre était appelée oro negro (ornoir) dans la région. Certains espritséclairés du secteur vinicole réalisèrentque l’élaboration de vins decoopérative simples et bon marchén’était pas la meilleure solution pour

encourager l’emploi. L’un d’eux était

un responsable régional de

l’agriculture, Salvador Chico.

« Salvador eut l’idée de m’envoyer en

Allemagne pour y étudier les vins qui

connaissaient un grand succès

commercial parce qu’ils plaisaient aux

consommateurs », explique Horacio

Fernández Presa. Horacio n’avait

jamais bu d’alcool, mais il fut tellement

impressionné par les producteurs

allemands de vins Kabinett qu’il

entreprit une conversion digne de saint

Paul pour se lancer dans ce qui allait

être la passion de sa vie. « Ils avaient

adopté la vinification dans des cuves

en inox, une technologie totalement

hygiénique empruntée à l’industrie

laitière », souligne Horacio. C’était en

1972 et il était désormais évident que

l’on ne pouvait pas compter sur le

palomino pour entreprendre une

révolution qualitative dans le monde

du vin. Il fallait donc sélectionner des

cépages plus appropriés.

TEXTEHAROLD HECKLE/©ICEX

TRADUCTIONSYNONYME.NET/©ICEX

PHOTOSPATRICIA R. SOTO/©ICEX

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en exploitant ses possibilitésgastronomiques. Lorsqu’elle sesouvient de ses projets de l’époque,Katja transmet cette déterminationpresque mystique qui la portait : « Jedevais me consacrer à la mer, fairequelque chose avec la mer. » Elle avaittravaillé pendant plus de 19 ans dansdes pays aussi différents que laNouvelle-Zélande, l’Australie, laThaïlande et la Jamaïque, toujoursdans le secteur du tourisme et de larestauration, mais allait finalementdécider que l’endroit où elle allait selancer dans un nouveau projet seraitencore différent : les salines d’Es Trenc,dans le Sud de Majorque.En choisissant les Îles Baléares, Katjaretrouvait le destin des Phéniciens, desCarthaginois, des Romains et desArabes qui, au cours de l’histoire, ontextrait du sel dans la région et dans lessalines de l’île voisine d’Ibiza. Bienavant que cette dernière ne soitdevenue une référence touristiqueinternationale, le sel d’Ibiza fitconnaître le nom de l’île à l’étranger.Aujourd’hui, on produit dans sessalines un sel d’excellente qualité,particulièrement adapté à l’industrie dela salaison du poisson (on l’exporte àcette fin depuis des décennies vers despays comme la Norvège et leDanemark) et avec lequel on élaboreles produits de la marque qui porteson nom : Sal de Ibiza. Là-bas, commeailleurs dans le Sud et le Levantespagnol,existent lescirconstancesparfaites pourl’obtention dela fleur de sel,

un produit dont l’exclusivité estdéterminée en grande partie par lesconditions naturelles particulièresnécessaires à sa formation et qui enfont un bien rare et recherché.Les cristaux irréguliers de fleur de selse forment sur la surface aquatique desbassins par l’interaction de troiséléments physiques : la lumière dusoleil, l’humidité relative de l’air etl’action du vent. Les journées chaudeset ensoleillées où l’humidité est faibleet où souffle une brise légère quifavorise l’évaporation sans agiterexagérément l’eau, donnent lieu à lacréation de fines couches de cristauxde sel, la fleur de sel, appelé de façontrès imagée « sel de glace » dans lessalines de San Vicente (Cadix,Sud de l’Espagne)

Ce processus particulier decristallisation, qui le

différencie tantde celui du selcommun danslequel le sel seprécipite aufond du marais,influe sur sa

composition. La fleur de sel contientmoins de chlorure de sodium etdavantage d’oligoéléments comme lemagnésium, le potassium et lecalcium. Dans ses applicationsculinaires, cela révèle des propriétéssalines plus subtiles (c’est pourquoicertains disent que c’est un sel qui salemoins) et cependant, comme lemagnésium est un exhausteur naturelde goût, il permet de condimenter lesplats en utilisant moins de sel. « Dansnotre cuisine, nous essayons d’utiliserun sel le plus pur possible », dit JoanRoca, « et la fleur de sel correspond lemieux à notre manière de concevoirl’assaisonnement ». La fleur de sel neconserve toutes ses propriétésorganoleptiques et sa texturecroquante que si on l’emploiedirectement sur le plat juste avant deservir, sans le cuire ni le dissoudre et,comme le dit un autre cuisinier, leBritannique Marc Fosh installé àMajorque, collaborateur de Flor de Sald’Es Trenc, « il est particulièrementapproprié pour peaufiner un plat enlui donnant une dernière touche desaveur ».

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En attendant

« Ne perdez pas de vue le godello. » C’est

ce que le prestigieux critique œnologique

néerlandais Hubrecht Duijker m’avait glissé

à l’oreille à la fin des années 1980, tout en

me signant un exemplaire de son

remarquable Wine Atlas of Spain. Grand

voyageur et éminent expert, il avait été

frappé par quelque chose de spécial lors

des recherches effectuées pour son livre et, parmi toutes les merveilles de la

corne d’abondance espagnole, il avait jeté son dévolu sur un cépage blanc du

Nord-Ouest inconnu. Cependant, les années passèrent et le godello ne faisait

toujours pas parler de lui. Il semblait évident qu’il n’allait pas rivaliser avec

La Rioja. Qu’est-ce qui n’avait pas marché pour que les pronostics de Duijker

ne se réalisent pas ? Le temps était venu de s’intéresser à la question.

GODELLO

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L’intérêtde l’artisanatPour Antoni Torradas, directeur dudépartement gourmet d’Infosa, lapureté de la fleur de sel et son modetraditionnel d’obtention sont liés : « Ily a des milliers d’années qu’elle estproduite pratiquement avec les mêmesméthodes artisanales qui sont encoreemployées de nos jours. » Une visitedes salines à l’époque de la récolte,entre juin et septembre, permetd’observer ce curieux processus aucours duquel sont utilisées destechniques qui tiennent plus dumonde agricole que des systèmesd’extraction minérale (ce n’est pas unhasard si pour le décrire on utiliseparfois le terme de récolte). Les joursoù se forme une couche de fleur de seldans les bassins, celle-ci est prélevéeen utilisant l’outil que les saliculteursfrançais appellent lousse, une percheavec un filet adapté au bout quirecueille les cristaux en le traînant surl’eau. Ensuite, le sel est déposé sur degrandes planches à côté des salines oùil finit de sécher au soleil, puis il estacheminé sur les lieux où il estconditionné manuellement. ManuelRuiz, biologiste associé à l’entreprisefamiliale qui gère les salines de SanVicente, insiste sur le fait que lescaractéristiques propres de la fleur desel la dispensent de tout additifchimique dans son traitement : « Autoucher, on sent bien que c’est un seltrès détaché, ce qui définit une fleur desel d’excellente qualité qui ne nécessitepas d’antiagglomérants avant sonconditionnement, comme c’est le caspour le sel commun. »Son passage de la mer à la cuisinepratiquement sans interventionhumaine donne à la fleur de sel unevaleur écologique qui, dans le cas dessalines de San Vicente, a été reconnuepar le mouvement Slow Food et qui ladifférencie d’autres sels actuellementtrès populaires. Ainsi le sel del’Himalaya, d’origine fossile et extraitavec des pelles ou des machines ; oules sels paillettes dont la cristallisation

La tradition salinière espagnole va bienau-delà de ses 3 500 kilomètres decôtes. Selon les informations del’association culturelle Amigos de lasSalinas de Interior, au cours dessiècles, le sel a été extrait dans plus desept cents exploitations intérieuresdans la péninsule Ibérique. Cependant,durant la seconde moitié du XXe siècle,la généralisation des méthodesindustrielles dans les salines marines,dont les coûts de production rendaienttoute concurrence impossible, etl’amélioration des communications quia permis l’approvisionnement depuis lacôte de régions qui dépendaientjusqu’alors d’exploitations plusproches, provoquèrent l’abandon de laplupart d’entre elles.

En réaction à ce processus, au coursdes dernières années, mouvementssociaux et organismes publics ontdéfendu la valeur historique etethnographique de ce type de maraissalants comme ceux de Pozas de laSal (Burgos, Nord de l’Espagne), lessalines d’Imón et de la Olmeda deJadraque (toutes deux à Guadalajara,Centre de l’Espagne) ou Gerri de la sal(Lérida, Nord-Est de l’Espagne).Classé Monument national en 1987, le

Valle Salado des Salinas d’Añana, dans leSud-Ouest du Pays basque, est l’exemplele plus avancé de ces efforts. Au flanc descollines entre lesquelles coule la rivière saléequi les alimente, s’étagent plus de cinq millebassins qui tirent parti du dénivellement duterrain pour canaliser l’eau. Ils évoquent degigantesques gradins de pierre, de bois etd’eau et constituent un théâtre idéal pouraccueillir un parcours touristique où levisiteur peut découvrir le processusd’extraction artisanal de leur sel (figurant surla liste de produits Slow Food) et la valeurhistorique, naturelle et culturelle de cessalines.

Dans le cas de Gerri de la Sal, larevalorisation gastronomique du sel a étédéterminante pour la récupération dessalines. Presque totalement ravagées par lacrue du Noguera Pallaresa en 1982, ellesn’étaient plus productives depuis huit ansjusqu’à ce que, l’année dernière, un couplede la région contribue au renouveau del’une des 450 salines, alimentées end’autres temps par la source d’eau saléequi jaillit au centre du village et capable deproduire 15 000 litres d’eau par heure.Actuellement, Enric Canut, l’un des plusgrands spécialistes en fromagesd’Espagne, affectivement attaché à lalocalité, berceau de sa famille, a entrepris

l’élaboration d’un plan plus ambitieux quienvisage la récupération de 30 salines.Selon les prévisions, les travaux derestauration commenceront au secondsemestre de cette année, et on espère avoirrécupéré pour l’été 2010 un hectare sur lesneuf que ces salines occupèrent jadis. Cesinstallations sont destinées à l’extraction età la commercialisation de 150 000kilogrammes de sel durant cette période et,à partir de la suivante, à la production desel tout au long de l’année : pendant lesmois d’hiver, la chaleur nécessaire àl’évaporation de l’eau salée et à lacristallisation du sel en paillettes seraproduite par la combustion de la biomasseforestière.

L’émergence d’une nouvelle culture de lagastronomie et du sel basée sur l’artisanatet l’écologie, le retour aux origines, apporteune valeur différentielle à cette production,comme l’explique Canut : « Tout le mondene peut pas offrir du sel récolté dans lesinstallations de bois, de pierre et d’argile debassins de 30 m2, en pleines Pyrénées. Lesel de l’intérieur est le sel qui était dans laterre il y a 40 millions d’années ; les mersasséchées, dont le sel se trouve à présentsous forme de mines, sont des mersmillénaires, lorsque l’eau était d’uneextrême pureté. »

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L’intérêtde l’artisanatPour Antoni Torradas, directeur dudépartement gourmet d’Infosa, lapureté de la fleur de sel et son modetraditionnel d’obtention sont liés : « Ily a des milliers d’années qu’elle estproduite pratiquement avec les mêmesméthodes artisanales qui sont encoreemployées de nos jours. » Une visitedes salines à l’époque de la récolte,entre juin et septembre, permetd’observer ce curieux processus aucours duquel sont utilisées destechniques qui tiennent plus dumonde agricole que des systèmesd’extraction minérale (ce n’est pas unhasard si pour le décrire on utiliseparfois le terme de récolte). Les joursoù se forme une couche de fleur de seldans les bassins, celle-ci est prélevéeen utilisant l’outil que les saliculteursfrançais appellent lousse, une percheavec un filet adapté au bout quirecueille les cristaux en le traînant surl’eau. Ensuite, le sel est déposé sur degrandes planches à côté des salines oùil finit de sécher au soleil, puis il estacheminé sur les lieux où il estconditionné manuellement. ManuelRuiz, biologiste associé à l’entreprisefamiliale qui gère les salines de SanVicente, insiste sur le fait que lescaractéristiques propres de la fleur desel la dispensent de tout additifchimique dans son traitement : « Autoucher, on sent bien que c’est un seltrès détaché, ce qui définit une fleur desel d’excellente qualité qui ne nécessitepas d’antiagglomérants avant sonconditionnement, comme c’est le caspour le sel commun. »Son passage de la mer à la cuisinepratiquement sans interventionhumaine donne à la fleur de sel unevaleur écologique qui, dans le cas dessalines de San Vicente, a été reconnuepar le mouvement Slow Food et qui ladifférencie d’autres sels actuellementtrès populaires. Ainsi le sel del’Himalaya, d’origine fossile et extraitavec des pelles ou des machines ; oules sels paillettes dont la cristallisation

La tradition salinière espagnole va bienau-delà de ses 3 500 kilomètres decôtes. Selon les informations del’association culturelle Amigos de lasSalinas de Interior, au cours dessiècles, le sel a été extrait dans plus desept cents exploitations intérieuresdans la péninsule Ibérique. Cependant,durant la seconde moitié du XXe siècle,la généralisation des méthodesindustrielles dans les salines marines,dont les coûts de production rendaienttoute concurrence impossible, etl’amélioration des communications quia permis l’approvisionnement depuis lacôte de régions qui dépendaientjusqu’alors d’exploitations plusproches, provoquèrent l’abandon de laplupart d’entre elles.

En réaction à ce processus, au coursdes dernières années, mouvementssociaux et organismes publics ontdéfendu la valeur historique etethnographique de ce type de maraissalants comme ceux de Pozas de laSal (Burgos, Nord de l’Espagne), lessalines d’Imón et de la Olmeda deJadraque (toutes deux à Guadalajara,Centre de l’Espagne) ou Gerri de la sal(Lérida, Nord-Est de l’Espagne).Classé Monument national en 1987, le

Valle Salado des Salinas d’Añana, dans leSud-Ouest du Pays basque, est l’exemplele plus avancé de ces efforts. Au flanc descollines entre lesquelles coule la rivière saléequi les alimente, s’étagent plus de cinq millebassins qui tirent parti du dénivellement duterrain pour canaliser l’eau. Ils évoquent degigantesques gradins de pierre, de bois etd’eau et constituent un théâtre idéal pouraccueillir un parcours touristique où levisiteur peut découvrir le processusd’extraction artisanal de leur sel (figurant surla liste de produits Slow Food) et la valeurhistorique, naturelle et culturelle de cessalines.

Dans le cas de Gerri de la Sal, larevalorisation gastronomique du sel a étédéterminante pour la récupération dessalines. Presque totalement ravagées par lacrue du Noguera Pallaresa en 1982, ellesn’étaient plus productives depuis huit ansjusqu’à ce que, l’année dernière, un couplede la région contribue au renouveau del’une des 450 salines, alimentées end’autres temps par la source d’eau saléequi jaillit au centre du village et capable deproduire 15 000 litres d’eau par heure.Actuellement, Enric Canut, l’un des plusgrands spécialistes en fromagesd’Espagne, affectivement attaché à lalocalité, berceau de sa famille, a entrepris

l’élaboration d’un plan plus ambitieux quienvisage la récupération de 30 salines.Selon les prévisions, les travaux derestauration commenceront au secondsemestre de cette année, et on espère avoirrécupéré pour l’été 2010 un hectare sur lesneuf que ces salines occupèrent jadis. Cesinstallations sont destinées à l’extraction età la commercialisation de 150 000kilogrammes de sel durant cette période et,à partir de la suivante, à la production desel tout au long de l’année : pendant lesmois d’hiver, la chaleur nécessaire àl’évaporation de l’eau salée et à lacristallisation du sel en paillettes seraproduite par la combustion de la biomasseforestière.

L’émergence d’une nouvelle culture de lagastronomie et du sel basée sur l’artisanatet l’écologie, le retour aux origines, apporteune valeur différentielle à cette production,comme l’explique Canut : « Tout le mondene peut pas offrir du sel récolté dans lesinstallations de bois, de pierre et d’argile debassins de 30 m2, en pleines Pyrénées. Lesel de l’intérieur est le sel qui était dans laterre il y a 40 millions d’années ; les mersasséchées, dont le sel se trouve à présentsous forme de mines, sont des mersmillénaires, lorsque l’eau était d’uneextrême pureté. »

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se produit par évaporation de l’eau aumoyen de plaques métalliqueschauffantes ressemblant à de grandespoêles (le sel Maldon britannique estpeut-être l’exemple le plus connu de cetype de sel).En outre, la fleur de sel présente laparticularité de se différencier enfonction de son lieu d’origine. « Entant que fruit de la mer, le produitvarie d’une région à l’autre et mêmed’une année à l’autre, en fonction de lacomposition des eaux », dit Torradas.Une nuance qui permet de distinguerla fleur de sel prélevée dansl’Atlantique de celle de laMéditerranée. Et au sein même decette zone, le sel provenant des maraissalants de San Pedro del Pinatar, situésdans la plus grande lagune saléed’Europe, Mar Menor, à l’extrême sud-est de la côte méditerranéenneespagnole, se distingue de celui dessalines de La Trinidad, dans le delta del’Èbre, à l’extrême nord-est.Cependant, il existe un trait significatifcommun à tous les marais salants citésdans cet article pour évaluer la puretéde leurs eaux et, par extension, de lafleur de sel que l’on y récolte : leurclassement par les autorités espagnolescomme espaces naturels protégés. Cesont des régions possédant un habitatde grande valeur biologique et bienque certaines ne soient pas ouvertes aupublic, d’autres constituent un attraittouristique comme les marais salantsde Fuencaliente, enclavés entre lesvolcans Teneguía et San Antonio dansl’île de La Palma, auxCanaries.Les salines deFuencaliente sontégalement un

exemple de production artisanale nonseulement de fleur de sel mais aussi desel commun. En tant que propriétairedes salines et coordinateur del’Association espagnole des maraissalants artisanaux qui regroupe unedizaine de saliculteurs traditionnels dela côte atlantique espagnole, AndrésHernández espère que l’émergenced’une alimentation de qualité, verslaquelle on tend de plus en plus, vafavoriser la survie du patrimoinenaturel et culturel représenté par cespetites exploitations quel’industrialisation de la productionsalinière a failli faire disparaître. Sessalines, comme dans celles de Janubio,dans l’île de Lanzarote, ou celles deSan Vicente et d’Isla Cristina, sur lacôte andalouse, offrent du sel marinartisanal, récolté manuellement et sansadditifs chimiques, « un produit detrès haute qualité, fruit de l’actiond’éléments naturels puisquel’évaporation sous l’effet du soleil est leseul mécanisme de précipitation ».

Alchimistes du selÀ partir d’un produit traditionnel, lacréativité des cuisiniers a multiplié cesdernières années les possibilitésculinaires du sel. Dans le cas del’Espagne, les combinaisons saléescouvrent des saveurs fortementenracinées dans la culturegastronomique nationale comme lessels aux herbes aromatiquesméditerranéennes, aux agrumes, ausafran, à la tomate, aux olives noires,

aux champignons ou au pimentón(sorte de paprika espagnol) ; etd’autres sels d’origine plusexotique comme les sels au

caviar, chili, hibiscus oucurry. Carlos Pardo,propriétaire de lamarque Carolingia SalPreciosa, affirme : « Lafonction des selsaromatiques n’est passeulement

d’assaisonner un plat ; ils le dotentaussi d’un arôme et d’un goût qui, unisaux qualités propres de la fleur de sel,sont une aide précieuse pour lecuisinier. » Ainsi, ce que Joan Rocaapprécie le plus dans ce type demélanges, c’est la possibilité dedisposer dans sa cuisine « d’unassaisonnement complexe qui,élaborée avec une précision proche destechniques pâtissières, garantittoujours le même résultat ». Depuisdes années, des sels parfumés étaientconcoctés dans l’atelier de sonrestaurant, Celler de Can Roca, pour leseul plaisir de ses clients jusqu’à cequ’Infosa, qui le fournissait déjà àl’époque en fleur de sel du delta del’Èbre, lui propose de travaillerensemble à sa commercialisation.Marc Fosh, qui a effectué une grandepartie de sa trajectoire professionnelleen Espagne depuis ses années deformation aux côtés de MartínBerasategui, a connu Katja Woehr en2002, quelques mois avant queBaccus, le restaurant de l’Hôtel Readsque le chef anglais a dirigé jusqu’enjanvier dernier, obtienne sa premièreétoile Michelin. Lorsqu’il parle de leurpremière rencontre, Fosh esquisse unsourire : « Si vous connaissiez Katja,vous sauriez que c’est une personnequi transmet beaucoup d’énergie, sonattitude positive est communicative. Àl’époque, elle ne savait pas encoreclairement comment construire sonprojet, mais quand elle m’expliqua sonidée, simplement pour connaître monavis, cela me plut beaucoup et je l’aiencouragée à aller de l’avant. Avec lerecul, ce qui semble incroyable c’estque l’Espagne étant le pays du soleil— et la lumière du soleil étant l’unedes conditions indispensables àl’obtention de fleur de sel — on n’aitpas jusqu’alors commercialisé de fleurde sel espagnole, alors que tout lemonde connaissait déjà la fleur de selfrançaise. » Quelques mois plus tard,lorsque Katja envisagea la possibilité

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se produit par évaporation de l’eau aumoyen de plaques métalliqueschauffantes ressemblant à de grandespoêles (le sel Maldon britannique estpeut-être l’exemple le plus connu de cetype de sel).En outre, la fleur de sel présente laparticularité de se différencier enfonction de son lieu d’origine. « Entant que fruit de la mer, le produitvarie d’une région à l’autre et mêmed’une année à l’autre, en fonction de lacomposition des eaux », dit Torradas.Une nuance qui permet de distinguerla fleur de sel prélevée dansl’Atlantique de celle de laMéditerranée. Et au sein même decette zone, le sel provenant des maraissalants de San Pedro del Pinatar, situésdans la plus grande lagune saléed’Europe, Mar Menor, à l’extrême sud-est de la côte méditerranéenneespagnole, se distingue de celui dessalines de La Trinidad, dans le delta del’Èbre, à l’extrême nord-est.Cependant, il existe un trait significatifcommun à tous les marais salants citésdans cet article pour évaluer la puretéde leurs eaux et, par extension, de lafleur de sel que l’on y récolte : leurclassement par les autorités espagnolescomme espaces naturels protégés. Cesont des régions possédant un habitatde grande valeur biologique et bienque certaines ne soient pas ouvertes aupublic, d’autres constituent un attraittouristique comme les marais salantsde Fuencaliente, enclavés entre lesvolcans Teneguía et San Antonio dansl’île de La Palma, auxCanaries.Les salines deFuencaliente sontégalement un

exemple de production artisanale nonseulement de fleur de sel mais aussi desel commun. En tant que propriétairedes salines et coordinateur del’Association espagnole des maraissalants artisanaux qui regroupe unedizaine de saliculteurs traditionnels dela côte atlantique espagnole, AndrésHernández espère que l’émergenced’une alimentation de qualité, verslaquelle on tend de plus en plus, vafavoriser la survie du patrimoinenaturel et culturel représenté par cespetites exploitations quel’industrialisation de la productionsalinière a failli faire disparaître. Sessalines, comme dans celles de Janubio,dans l’île de Lanzarote, ou celles deSan Vicente et d’Isla Cristina, sur lacôte andalouse, offrent du sel marinartisanal, récolté manuellement et sansadditifs chimiques, « un produit detrès haute qualité, fruit de l’actiond’éléments naturels puisquel’évaporation sous l’effet du soleil est leseul mécanisme de précipitation ».

Alchimistes du selÀ partir d’un produit traditionnel, lacréativité des cuisiniers a multiplié cesdernières années les possibilitésculinaires du sel. Dans le cas del’Espagne, les combinaisons saléescouvrent des saveurs fortementenracinées dans la culturegastronomique nationale comme lessels aux herbes aromatiquesméditerranéennes, aux agrumes, ausafran, à la tomate, aux olives noires,

aux champignons ou au pimentón(sorte de paprika espagnol) ; etd’autres sels d’origine plusexotique comme les sels au

caviar, chili, hibiscus oucurry. Carlos Pardo,propriétaire de lamarque Carolingia SalPreciosa, affirme : « Lafonction des selsaromatiques n’est passeulement

d’assaisonner un plat ; ils le dotentaussi d’un arôme et d’un goût qui, unisaux qualités propres de la fleur de sel,sont une aide précieuse pour lecuisinier. » Ainsi, ce que Joan Rocaapprécie le plus dans ce type demélanges, c’est la possibilité dedisposer dans sa cuisine « d’unassaisonnement complexe qui,élaborée avec une précision proche destechniques pâtissières, garantittoujours le même résultat ». Depuisdes années, des sels parfumés étaientconcoctés dans l’atelier de sonrestaurant, Celler de Can Roca, pour leseul plaisir de ses clients jusqu’à cequ’Infosa, qui le fournissait déjà àl’époque en fleur de sel du delta del’Èbre, lui propose de travaillerensemble à sa commercialisation.Marc Fosh, qui a effectué une grandepartie de sa trajectoire professionnelleen Espagne depuis ses années deformation aux côtés de MartínBerasategui, a connu Katja Woehr en2002, quelques mois avant queBaccus, le restaurant de l’Hôtel Readsque le chef anglais a dirigé jusqu’enjanvier dernier, obtienne sa premièreétoile Michelin. Lorsqu’il parle de leurpremière rencontre, Fosh esquisse unsourire : « Si vous connaissiez Katja,vous sauriez que c’est une personnequi transmet beaucoup d’énergie, sonattitude positive est communicative. Àl’époque, elle ne savait pas encoreclairement comment construire sonprojet, mais quand elle m’expliqua sonidée, simplement pour connaître monavis, cela me plut beaucoup et je l’aiencouragée à aller de l’avant. Avec lerecul, ce qui semble incroyable c’estque l’Espagne étant le pays du soleil— et la lumière du soleil étant l’unedes conditions indispensables àl’obtention de fleur de sel — on n’aitpas jusqu’alors commercialisé de fleurde sel espagnole, alors que tout lemonde connaissait déjà la fleur de selfrançaise. » Quelques mois plus tard,lorsque Katja envisagea la possibilité

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de lancer plusieurs mélanges, en plusde sa fleur de sel naturelle, ilcommença à participer activement auprojet : « À cette époque-là, il n’y avaitguère de diversité sur le marchéespagnol, à part le sel aux plantesaromatiques, et nous avons décidé detravailler avec d’autres goûts pourprofiter de l’expérience acquise dansmon restaurant avec ce type de sels. »Quant au critère de sélection dessaveurs, Fosh l’explique comme unedichotomie qui essaie « d’un côté derecueillir les éléments les pluspopulaires, comme les herbesaromatiques méditerranéennes, et d’unautre côté de chercher des saveursdifférentes telles que les sels àl’hibiscus et aux olives noires, penséssurtout pour les cuisiniers ». C’estjustement sur ce point qu’insiste RosaBeviá, propriétaire de la gamme de selsgourmet Sal La Cococha, en se basantsur les 80 années d’expériencefamiliale dans le secteur du sel et sur laconnaissance des marchés commecelui des États-Unis vers lequel sonentreprise exporte depuis une dizained’années. Pour illustrer sa ténacitédans la recherche de mélangesdifférents de ceux déjà présents dans le

commerce, elle nous invite à goûter sesalgues en pétales de fleur de sel qui,grillées à feu doux avec un peu d’huiled’olive vierge, révèlent une texturecroustillante originale semblable à unepâte feuilletée de sel et d’algues.Le choix d’ingrédients de qualitéreprésentatifs des différentes culturesgastronomiques de l’Espagne est unautre facteur important dans lacréation de sels aromatiques. Ainsi,quand il nous parle de sa gamme deproduits, Joan Roca prend le temps dedécrire ce mélange comme l’élément leplus particulier : « Nous avons voulufaire un sel aux agrumes car lesagrumes sont particulièrementimportants dans la cuisine espagnoleen général et dans la nôtre enparticulier. Nous les avons utilisés sousdifférentes formes (concentré depeaux, réduction de jus, combinaisonsexotiques) et nous en avons mêmeemployé certains, comme labergamote, qui n’étaient pas présentsauparavant dans la gastronomie. »Dans cette même ligne, parmi lesproduits proposés par Sal La Cococha,il faut distinguer le sel aux amandesmarcona, un fruit typiquementméditerranéen et de renommée

internationale. La marque Sal de SanPedro a décidé quant à elle d’inclureparmi ses sels aromatiques un sel biodont les condiments et les épicesemployés dans son élaborationjouissent du label de qualité délivrépar le conseil régulateur del’Agriculture biologique de la région deMurcie (Sud-Est de l’Espagne).

Curiositéd’explorateurDes combinaisons comme lesprécédentes ne sont qu’une partie d’uncatalogue de préparationsgastronomiques qui continue des’élargir en Espagne et nous permet dedécouvrir de multiples usages etproduits. Un effort de modernisationet de sophistication auquel participentdes entreprises centenaires comme SalCosta, pionnière dans l’introductiondu sel iodé en Espagne au cours duXIXe siècle. Depuis 2003, elle a sapropre gamme de sels gourmets parmilesquels le sel fumé, très apprécié auxÉtats-Unis, élaboré en ajoutant de lafumée liquide naturelle au sel marin.Riche également de plus d’un siècled’histoire, Especias del Sol, est entré

dans le monde des sels il y a quatreans avec le mélange de fleur de sel etde pimentón de La Vera et a depuisdéveloppé sa gamme de produits enempruntant des chemins à peineexplorés en Espagne. « Nouscommençons à travailler à une trèspetite production de fleur de selpaillettes extraite des marais salants deHuelva », dit José Manuel Rodríguez,l’un des propriétaires de cette affairefamiliale. « Nous jouons sur leschangements de température descourants et nous utilisons aumaximum le temps de flottation descristaux de fleur de sel avant leurchute au fond du bassin afin d’obtenirdes lamelles de fleur de sel plusgrandes et plus croquantes, similaires àcelles de la Hale Mon galloise. »Le monde du vin n’est pas étranger àce phénomène. DansLa Rioja, le jeuneœnologue

Gonzalo Gonzalo travaille depuis desmois avec Toño Alcalá, cuisinier durestaurant Caminante, pour inclure lesel sur la liste des produits de TheWine Republic, la marque qu’ilspartagent dans le but de « créer —comme le dit Gonzalo — un mondeoù tout puisse se faire avec du vin ».Après avoir conçu des produits aussiparticuliers que la gélatine et lechocolat au vin, leur dernier projet,pas encore commercialisé, a été decréer un sel de vin utilisant commematière première les bitartrates desodium et de potassium quiprécipitent après la fermentation dumoût dans les réservoirs soumis aufroid. Postérieurement, ces sels, encoretransparents, passent par un processusde dissolution et de recristallisation,cette fois par évaporation, au coursduquel on ajoute du vin pouraugmenter l’intensité de leur couleur.Dans une autre des plus vieillesrégions vinicoles d’Europe, la Castille-et-Léon (Nord-Ouest de l’Espagne), labodega Abadía de Retuerta n’a pasvoulu être en reste et a adopté le selcomme un produit sophistiqué dehaute cuisine. Ici, c’est une techniquefrançaise qui est utilisée, celle de

l’œnologue bordelais Pascal Delbeck,et dont l’origine remonte au XVIe

siècle, lorsque la femme d’un tavernierde la ville de Libourne élabora lespremiers sels de vin de l’histoire àpartir des sacs de sel qui arrivaient auport imbibés du vin avec lequel ilsétaient en contact dans les soutes desbateaux. Aujourd’hui Delbeckréinterprète cette formule selon unerecette secrète, en faisant macérer lesraisins avec de la fleur de sel et desépices pour donner naissance à troistypes de sel qui correspondent auxtrois cépages cultivés dans les vignesd’Abadía de Retuerta : tempranillo,cabernet sauvignon et syrah.Au-delà des aspects strictementculinaires, d’autres facteurs enrichissentune variété de sels qui répond à unenouvelle conception de la gastronomie.Des produits comme les paillettes de selà l’or et à l’argent ou la collection de selsde couleur de Carolingia traduisent,selon Carlos Pardo, « la tendance à lasophistication et la revalorisationesthétique dans la cuisine, et donnentun attrait visuel supplémentaire à uneinterprétation moderne et amusanted’un ingrédient aussi traditionnel que lesel ». Suivant la même démarche,

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de lancer plusieurs mélanges, en plusde sa fleur de sel naturelle, ilcommença à participer activement auprojet : « À cette époque-là, il n’y avaitguère de diversité sur le marchéespagnol, à part le sel aux plantesaromatiques, et nous avons décidé detravailler avec d’autres goûts pourprofiter de l’expérience acquise dansmon restaurant avec ce type de sels. »Quant au critère de sélection dessaveurs, Fosh l’explique comme unedichotomie qui essaie « d’un côté derecueillir les éléments les pluspopulaires, comme les herbesaromatiques méditerranéennes, et d’unautre côté de chercher des saveursdifférentes telles que les sels àl’hibiscus et aux olives noires, penséssurtout pour les cuisiniers ». C’estjustement sur ce point qu’insiste RosaBeviá, propriétaire de la gamme de selsgourmet Sal La Cococha, en se basantsur les 80 années d’expériencefamiliale dans le secteur du sel et sur laconnaissance des marchés commecelui des États-Unis vers lequel sonentreprise exporte depuis une dizained’années. Pour illustrer sa ténacitédans la recherche de mélangesdifférents de ceux déjà présents dans le

commerce, elle nous invite à goûter sesalgues en pétales de fleur de sel qui,grillées à feu doux avec un peu d’huiled’olive vierge, révèlent une texturecroustillante originale semblable à unepâte feuilletée de sel et d’algues.Le choix d’ingrédients de qualitéreprésentatifs des différentes culturesgastronomiques de l’Espagne est unautre facteur important dans lacréation de sels aromatiques. Ainsi,quand il nous parle de sa gamme deproduits, Joan Roca prend le temps dedécrire ce mélange comme l’élément leplus particulier : « Nous avons voulufaire un sel aux agrumes car lesagrumes sont particulièrementimportants dans la cuisine espagnoleen général et dans la nôtre enparticulier. Nous les avons utilisés sousdifférentes formes (concentré depeaux, réduction de jus, combinaisonsexotiques) et nous en avons mêmeemployé certains, comme labergamote, qui n’étaient pas présentsauparavant dans la gastronomie. »Dans cette même ligne, parmi lesproduits proposés par Sal La Cococha,il faut distinguer le sel aux amandesmarcona, un fruit typiquementméditerranéen et de renommée

internationale. La marque Sal de SanPedro a décidé quant à elle d’inclureparmi ses sels aromatiques un sel biodont les condiments et les épicesemployés dans son élaborationjouissent du label de qualité délivrépar le conseil régulateur del’Agriculture biologique de la région deMurcie (Sud-Est de l’Espagne).

Curiositéd’explorateurDes combinaisons comme lesprécédentes ne sont qu’une partie d’uncatalogue de préparationsgastronomiques qui continue des’élargir en Espagne et nous permet dedécouvrir de multiples usages etproduits. Un effort de modernisationet de sophistication auquel participentdes entreprises centenaires comme SalCosta, pionnière dans l’introductiondu sel iodé en Espagne au cours duXIXe siècle. Depuis 2003, elle a sapropre gamme de sels gourmets parmilesquels le sel fumé, très apprécié auxÉtats-Unis, élaboré en ajoutant de lafumée liquide naturelle au sel marin.Riche également de plus d’un siècled’histoire, Especias del Sol, est entré

dans le monde des sels il y a quatreans avec le mélange de fleur de sel etde pimentón de La Vera et a depuisdéveloppé sa gamme de produits enempruntant des chemins à peineexplorés en Espagne. « Nouscommençons à travailler à une trèspetite production de fleur de selpaillettes extraite des marais salants deHuelva », dit José Manuel Rodríguez,l’un des propriétaires de cette affairefamiliale. « Nous jouons sur leschangements de température descourants et nous utilisons aumaximum le temps de flottation descristaux de fleur de sel avant leurchute au fond du bassin afin d’obtenirdes lamelles de fleur de sel plusgrandes et plus croquantes, similaires àcelles de la Hale Mon galloise. »Le monde du vin n’est pas étranger àce phénomène. DansLa Rioja, le jeuneœnologue

Gonzalo Gonzalo travaille depuis desmois avec Toño Alcalá, cuisinier durestaurant Caminante, pour inclure lesel sur la liste des produits de TheWine Republic, la marque qu’ilspartagent dans le but de « créer —comme le dit Gonzalo — un mondeoù tout puisse se faire avec du vin ».Après avoir conçu des produits aussiparticuliers que la gélatine et lechocolat au vin, leur dernier projet,pas encore commercialisé, a été decréer un sel de vin utilisant commematière première les bitartrates desodium et de potassium quiprécipitent après la fermentation dumoût dans les réservoirs soumis aufroid. Postérieurement, ces sels, encoretransparents, passent par un processusde dissolution et de recristallisation,cette fois par évaporation, au coursduquel on ajoute du vin pouraugmenter l’intensité de leur couleur.Dans une autre des plus vieillesrégions vinicoles d’Europe, la Castille-et-Léon (Nord-Ouest de l’Espagne), labodega Abadía de Retuerta n’a pasvoulu être en reste et a adopté le selcomme un produit sophistiqué dehaute cuisine. Ici, c’est une techniquefrançaise qui est utilisée, celle de

l’œnologue bordelais Pascal Delbeck,et dont l’origine remonte au XVIe

siècle, lorsque la femme d’un tavernierde la ville de Libourne élabora lespremiers sels de vin de l’histoire àpartir des sacs de sel qui arrivaient auport imbibés du vin avec lequel ilsétaient en contact dans les soutes desbateaux. Aujourd’hui Delbeckréinterprète cette formule selon unerecette secrète, en faisant macérer lesraisins avec de la fleur de sel et desépices pour donner naissance à troistypes de sel qui correspondent auxtrois cépages cultivés dans les vignesd’Abadía de Retuerta : tempranillo,cabernet sauvignon et syrah.Au-delà des aspects strictementculinaires, d’autres facteurs enrichissentune variété de sels qui répond à unenouvelle conception de la gastronomie.Des produits comme les paillettes de selà l’or et à l’argent ou la collection de selsde couleur de Carolingia traduisent,selon Carlos Pardo, « la tendance à lasophistication et la revalorisationesthétique dans la cuisine, et donnentun attrait visuel supplémentaire à uneinterprétation moderne et amusanted’un ingrédient aussi traditionnel que lesel ». Suivant la même démarche,

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SEL

PLAN

SEL

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ensaimadas qu’il m’offre aimablement,ce jeune pâtissier me raconte quelorsqu’il y a quatre ans il a pris ladirection de Can Selem, la pâtisseriefondée par son père en 1967, il décidad’ajouter à sa gamme de pâtisseriesmajorquines traditionnelles denouveaux produits. Dans une ligneplus créative, il propose des dessertssalés comme le touron de chocolatblanc à la fleur de sel à l’hibiscus, letouron d’amande effilée de Majorqueau chocolat noir, praliné de noisettes etfleur de sel naturel ; ou la mousse dechocolat amer à l’huile d’olive et auxécailles de chocolat légèrement salé.Lors de ses séjours en France, Oliver aeu l’occasion de connaître le maîtrepâtissier Pierre Hermé, une influencedécisive dans sa pâtisserie : « Il emploiela fleur de sel dans presque toutes sespâtes et ses chocolats. Ce que voyant, etsachant qu’à Majorque nous avons unsel de haute qualité, il me parut quec’était une excellente occasion deprofiter d’une ressource naturelle de l’îleet j’ai commencé à l’utiliser dans mapâtisserie. » Comme le dit Oliver, cecaractère local est un attrait de plus pourceux qui venant d’ailleurs apprécient lecontact avec la gastronomie du pays etun motif d’orgueil pour la populationautochtone.Le sel qui, en pâtisserie, était jusqu’à cesdernières années confiné dans un simplerôle de complément pour lafermentation de certaines pâtes s’avèreêtre à présent une nouvelle source desensations gustatives, « une explosion degoût », selon le pâtissier majorquin, parson contraste inattendu avec le sucré.

Santiago Sánchez Segura a travaillécomme journaliste stagiaire à laRadiotélévision de la Principauté desAsturies et au Bureau économique etcommercial de l’Ambassade d’Espagne àMiami. Il collabore actuellement à SpainGourmetour.

Recettes page 102Exportateurs page 125Iconographie page 128

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Casanovas Barcelona, travaille aussiavec le sel du delta de l’Èbre commeproduit de base, joue avec des textureset des matériaux pour créer deuxproduits curieux : le sel liquidearomatisé et les gelées de sel. La familleCasanovas, une saga d’artisanscharcutiers catalans qui ouvrirent leurmaison en 1924, continue sesrecherches afin d’offrir une noteoriginale aux convives du restaurantqu’elle possède dans la capitale catalaneainsi qu’aux consommateurs de samarque. Les gelées de sel sont à base dematières premières marines comme lesel et les algues, combinées dansdifférentes préparations avec des truffes,des agrumes, du safran ou du miel,tandis que le sel liquide, avec ses troisnotes gustatives (herbes aromatiquesméditerranéennes, « braise » et épicée),est une nouvelle manière de doserl’application du sel en utilisant saprésentation sous forme depulvérisateur.

Unis (pays où les bonbons salés sevendent déjà dans les grandes chaînesgrossistes), en Espagne, l’utilisation dusel dans l’élaboration de certainsproduits pâtissiers a cessé d’être lepatrimoine exclusif des grands chefs.On peut ainsi rencontrer des exemplescomme celui de Sandro Desii, glacier àBarcelone, qui a créé une glace à lafleur de sel dont il approvisionne les

restaurants et les glaciers de toutel’Espagne et du Portugal, et découvrirdes petits commerces qui élaborent cetype de produit.De nouveau à Majorque, loin dubrouhaha des lieux les plustouristiques, Jaume Oliver me reçoitdans la pâtisserie qu’il gère à Algaida,un village tranquille de l’intérieur del’île. Parmi les cafés, gâteaux et

GROS

GROS

www.institutodelasal.comInstituto de la SalOrganisme à but non lucratif qui représente le secteur du sel en Espagne et auPortugal et est composé de 18 entreprises (espagnol).

http://salinas.castillalamancha.esAsociación Cultural Amigos de las Salinas de InteriorAssociation de personnes (ouvertes aux institutions et aux entreprises)intéressées par l’étude et la divulgation du patrimoine naturel et culturel associéà ce type de salines. Ses objectifs incluent la protection et la promotion dupatrimoine culturel et naturel des salines et la diffusion des connaissances quecette organisation génère par des débats, conférences, publications etexcursions (espagnol).

www.sal-atlantic.netProjet cofinancé par l’Union européenne visant à la reconnaissance etrevalorisation du sel traditionnel de l’Atlantique ; au rétablissement et à larevalorisation des salines autant qu’à la promotion de leur importanceenvironnementale, économique et culturelle (espagnol, français, portugais).

S I T E S W E B

Petits gâteaux salésLa dernière frontière, la plusrévolutionnaire, du moins au point devue sémantique, a été franchie il y alongtemps dans la haute cuisine etcommence à être accessible à despublics plus larges. Bien que ce ne soitpas encore une pratique aussi étenduequ’en France, en Italie ou aux États-

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SEL

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ensaimadas qu’il m’offre aimablement,ce jeune pâtissier me raconte quelorsqu’il y a quatre ans il a pris ladirection de Can Selem, la pâtisseriefondée par son père en 1967, il décidad’ajouter à sa gamme de pâtisseriesmajorquines traditionnelles denouveaux produits. Dans une ligneplus créative, il propose des dessertssalés comme le touron de chocolatblanc à la fleur de sel à l’hibiscus, letouron d’amande effilée de Majorqueau chocolat noir, praliné de noisettes etfleur de sel naturel ; ou la mousse dechocolat amer à l’huile d’olive et auxécailles de chocolat légèrement salé.Lors de ses séjours en France, Oliver aeu l’occasion de connaître le maîtrepâtissier Pierre Hermé, une influencedécisive dans sa pâtisserie : « Il emploiela fleur de sel dans presque toutes sespâtes et ses chocolats. Ce que voyant, etsachant qu’à Majorque nous avons unsel de haute qualité, il me parut quec’était une excellente occasion deprofiter d’une ressource naturelle de l’îleet j’ai commencé à l’utiliser dans mapâtisserie. » Comme le dit Oliver, cecaractère local est un attrait de plus pourceux qui venant d’ailleurs apprécient lecontact avec la gastronomie du pays etun motif d’orgueil pour la populationautochtone.Le sel qui, en pâtisserie, était jusqu’à cesdernières années confiné dans un simplerôle de complément pour lafermentation de certaines pâtes s’avèreêtre à présent une nouvelle source desensations gustatives, « une explosion degoût », selon le pâtissier majorquin, parson contraste inattendu avec le sucré.

Santiago Sánchez Segura a travaillécomme journaliste stagiaire à laRadiotélévision de la Principauté desAsturies et au Bureau économique etcommercial de l’Ambassade d’Espagne àMiami. Il collabore actuellement à SpainGourmetour.

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Casanovas Barcelona, travaille aussiavec le sel du delta de l’Èbre commeproduit de base, joue avec des textureset des matériaux pour créer deuxproduits curieux : le sel liquidearomatisé et les gelées de sel. La familleCasanovas, une saga d’artisanscharcutiers catalans qui ouvrirent leurmaison en 1924, continue sesrecherches afin d’offrir une noteoriginale aux convives du restaurantqu’elle possède dans la capitale catalaneainsi qu’aux consommateurs de samarque. Les gelées de sel sont à base dematières premières marines comme lesel et les algues, combinées dansdifférentes préparations avec des truffes,des agrumes, du safran ou du miel,tandis que le sel liquide, avec ses troisnotes gustatives (herbes aromatiquesméditerranéennes, « braise » et épicée),est une nouvelle manière de doserl’application du sel en utilisant saprésentation sous forme depulvérisateur.

Unis (pays où les bonbons salés sevendent déjà dans les grandes chaînesgrossistes), en Espagne, l’utilisation dusel dans l’élaboration de certainsproduits pâtissiers a cessé d’être lepatrimoine exclusif des grands chefs.On peut ainsi rencontrer des exemplescomme celui de Sandro Desii, glacier àBarcelone, qui a créé une glace à lafleur de sel dont il approvisionne les

restaurants et les glaciers de toutel’Espagne et du Portugal, et découvrirdes petits commerces qui élaborent cetype de produit.De nouveau à Majorque, loin dubrouhaha des lieux les plustouristiques, Jaume Oliver me reçoitdans la pâtisserie qu’il gère à Algaida,un village tranquille de l’intérieur del’île. Parmi les cafés, gâteaux et

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GROS

www.institutodelasal.comInstituto de la SalOrganisme à but non lucratif qui représente le secteur du sel en Espagne et auPortugal et est composé de 18 entreprises (espagnol).

http://salinas.castillalamancha.esAsociación Cultural Amigos de las Salinas de InteriorAssociation de personnes (ouvertes aux institutions et aux entreprises)intéressées par l’étude et la divulgation du patrimoine naturel et culturel associéà ce type de salines. Ses objectifs incluent la protection et la promotion dupatrimoine culturel et naturel des salines et la diffusion des connaissances quecette organisation génère par des débats, conférences, publications etexcursions (espagnol).

www.sal-atlantic.netProjet cofinancé par l’Union européenne visant à la reconnaissance etrevalorisation du sel traditionnel de l’Atlantique ; au rétablissement et à larevalorisation des salines autant qu’à la promotion de leur importanceenvironnementale, économique et culturelle (espagnol, français, portugais).

S I T E S W E B

Petits gâteaux salésLa dernière frontière, la plusrévolutionnaire, du moins au point devue sémantique, a été franchie il y alongtemps dans la haute cuisine etcommence à être accessible à despublics plus larges. Bien que ce ne soitpas encore une pratique aussi étenduequ’en France, en Italie ou aux États-

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Page 30: Spain Gourmetour No. 66 (French)

En attendant

« Ne perdez pas de vue le godello. » C’est

ce que le prestigieux critique œnologique

néerlandais Hubrecht Duijker m’avait glissé

à l’oreille à la fin des années 1980, tout en

me signant un exemplaire de son

remarquable Wine Atlas of Spain. Grand

voyageur et éminent expert, il avait été

frappé par quelque chose de spécial lors

des recherches effectuées pour son livre et, parmi toutes les merveilles de la

corne d’abondance espagnole, il avait jeté son dévolu sur un cépage blanc du

Nord-Ouest inconnu. Cependant, les années passèrent et le godello ne faisait

toujours pas parler de lui. Il semblait évident qu’il n’allait pas rivaliser avec

La Rioja. Qu’est-ce qui n’avait pas marché pour que les pronostics de Duijker

ne se réalisent pas ? Le temps était venu de s’intéresser à la question.

GODELLO

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En attendant

« Ne perdez pas de vue le godello. » C’est

ce que le prestigieux critique œnologique

néerlandais Hubrecht Duijker m’avait glissé

à l’oreille à la fin des années 1980, tout en

me signant un exemplaire de son

remarquable Wine Atlas of Spain. Grand

voyageur et éminent expert, il avait été

frappé par quelque chose de spécial lors

des recherches effectuées pour son livre et, parmi toutes les merveilles de la

corne d’abondance espagnole, il avait jeté son dévolu sur un cépage blanc du

Nord-Ouest inconnu. Cependant, les années passèrent et le godello ne faisait

toujours pas parler de lui. Il semblait évident qu’il n’allait pas rivaliser avec

La Rioja. Qu’est-ce qui n’avait pas marché pour que les pronostics de Duijker

ne se réalisent pas ? Le temps était venu de s’intéresser à la question.

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MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 31

J’en ai eu un aperçu prometteurlorsque j’ai eu l’occasion de le dégusterpour la première fois. C’était un blancojoven du nom de Guitián, fin et bienstructuré, quoique discret, qui avaitattiré mon attention sur la liste de vinsd’un restaurant de l’arrière-payscatalan. Bien que décevant sur le planaromatique, son palais bien équilibréet sa structure étoffée accompagnaientà merveille le plat de morue (nonsalée) qui m’avait été servi, cuisantencore sur une plaque d’ardoisebrûlante (bacalao a la llosa). Je neconnaissais guère, à l’époque,l’importance de l’ardoise dans cemariage d’ingrédients.Le godello avait été au bord del’extinction. Les épidémies dephylloxéra des années 1900,particulièrement virulentes dans leNord-Ouest, avaient rayé de la carte denombreux cépages en Espagne. Pourrégénérer les vignobles dévastés decette région, les autorités avaient alorsdécidé d’importer des cépages à hautrendement, permettant de reconstituer

rapidement les stocks de vins. Ainsi,de vastes plantations de palomino, uncépage très productif que les Galicienssurnommaient le « Jerez », allaientresserrer l’étau sur les rares parcellesde godello qui avaient survécu.Célèbre en Andalousie pour laproduction de Xérès, le palomino tendà produire en Galice des vins ternes,sans grand intérêt, plutôt axés sur laquantité que sur la qualité.Dans les années 1950-60, la vie étaittrès dure en Galice et de nombreuxGaliciens furent obligés d’émigrer pourtrouver du travail. Ceux qui restaientessayaient tant bien que mal desurvivre de la pêche, de l’agriculture etde l’industrie de l’ardoise. La Galiceabritait l’une des plus belles ardoisesd’Europe et certaines des meilleurescarrières du continent, à tel point quecette pierre était appelée oro negro (ornoir) dans la région. Certains espritséclairés du secteur vinicole réalisèrentque l’élaboration de vins decoopérative simples et bon marchén’était pas la meilleure solution pour

encourager l’emploi. L’un d’eux était

un responsable régional de

l’agriculture, Salvador Chico.

« Salvador eut l’idée de m’envoyer en

Allemagne pour y étudier les vins qui

connaissaient un grand succès

commercial parce qu’ils plaisaient aux

consommateurs », explique Horacio

Fernández Presa. Horacio n’avait

jamais bu d’alcool, mais il fut tellement

impressionné par les producteurs

allemands de vins Kabinett qu’il

entreprit une conversion digne de saint

Paul pour se lancer dans ce qui allait

être la passion de sa vie. « Ils avaient

adopté la vinification dans des cuves

en inox, une technologie totalement

hygiénique empruntée à l’industrie

laitière », souligne Horacio. C’était en

1972 et il était désormais évident que

l’on ne pouvait pas compter sur le

palomino pour entreprendre une

révolution qualitative dans le monde

du vin. Il fallait donc sélectionner des

cépages plus appropriés.

TEXTEHAROLD HECKLE/©ICEX

TRADUCTIONSYNONYME.NET/©ICEX

PHOTOSPATRICIA R. SOTO/©ICEX

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J’en ai eu un aperçu prometteurlorsque j’ai eu l’occasion de le dégusterpour la première fois. C’était un blancojoven du nom de Guitián, fin et bienstructuré, quoique discret, qui avaitattiré mon attention sur la liste de vinsd’un restaurant de l’arrière-payscatalan. Bien que décevant sur le planaromatique, son palais bien équilibréet sa structure étoffée accompagnaientà merveille le plat de morue (nonsalée) qui m’avait été servi, cuisantencore sur une plaque d’ardoisebrûlante (bacalao a la llosa). Je neconnaissais guère, à l’époque,l’importance de l’ardoise dans cemariage d’ingrédients.Le godello avait été au bord del’extinction. Les épidémies dephylloxéra des années 1900,particulièrement virulentes dans leNord-Ouest, avaient rayé de la carte denombreux cépages en Espagne. Pourrégénérer les vignobles dévastés decette région, les autorités avaient alorsdécidé d’importer des cépages à hautrendement, permettant de reconstituer

rapidement les stocks de vins. Ainsi,de vastes plantations de palomino, uncépage très productif que les Galicienssurnommaient le « Jerez », allaientresserrer l’étau sur les rares parcellesde godello qui avaient survécu.Célèbre en Andalousie pour laproduction de Xérès, le palomino tendà produire en Galice des vins ternes,sans grand intérêt, plutôt axés sur laquantité que sur la qualité.Dans les années 1950-60, la vie étaittrès dure en Galice et de nombreuxGaliciens furent obligés d’émigrer pourtrouver du travail. Ceux qui restaientessayaient tant bien que mal desurvivre de la pêche, de l’agriculture etde l’industrie de l’ardoise. La Galiceabritait l’une des plus belles ardoisesd’Europe et certaines des meilleurescarrières du continent, à tel point quecette pierre était appelée oro negro (ornoir) dans la région. Certains espritséclairés du secteur vinicole réalisèrentque l’élaboration de vins decoopérative simples et bon marchén’était pas la meilleure solution pour

encourager l’emploi. L’un d’eux était

un responsable régional de

l’agriculture, Salvador Chico.

« Salvador eut l’idée de m’envoyer en

Allemagne pour y étudier les vins qui

connaissaient un grand succès

commercial parce qu’ils plaisaient aux

consommateurs », explique Horacio

Fernández Presa. Horacio n’avait

jamais bu d’alcool, mais il fut tellement

impressionné par les producteurs

allemands de vins Kabinett qu’il

entreprit une conversion digne de saint

Paul pour se lancer dans ce qui allait

être la passion de sa vie. « Ils avaient

adopté la vinification dans des cuves

en inox, une technologie totalement

hygiénique empruntée à l’industrie

laitière », souligne Horacio. C’était en

1972 et il était désormais évident que

l’on ne pouvait pas compter sur le

palomino pour entreprendre une

révolution qualitative dans le monde

du vin. Il fallait donc sélectionner des

cépages plus appropriés.

TEXTEHAROLD HECKLE/©ICEX

TRADUCTIONSYNONYME.NET/©ICEX

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32 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 33

Valdeorras,une région sauvéedu désastreAu siège de la DO Valdeorras, dans levillage de montagne de Villamartín deValdeorras, le directeur, Jorge LuisMazaira Pérez, nous explique que ceprojet de 1974, baptisé « Renouveau »,a permis de récupérer le godello, quise trouvait au bord de l’extinction. Desessais furent réalisés pour déterminerle porte-greffe le mieux adapté augodello. Plusieurs modes de conduitefurent également testés. « L’un desprincipaux problèmes était sa tendanceà mûrir rapidement », indique Jorge.« Par temps ensoleillé, en automne, ilpeut passer de 11 à 13 degrés enl’espace de deux jours, produisant undegré d’alcool très élevé. » Horacio futl’un des premiers à déceler le potentieldu godello. Comme l’explique JorgeLuis, on lui avait parlé de vignessituées sur un coteau, qui avaientproduit d’excellents vins depuisl’Antiquité.« Il ne restait plus que quelquesplants », souligne Horacio. « Il nedevait guère y survivre plus de1 000 m2 de vignoble. » Il expliqueque le projet Renouveau permit de

sélectionner les meilleurs sols et lesmeilleurs sites. Bodegas Godeval, lechai qu’il prit en charge, furent lespremières à miser sur le godello etaussi parmi les premières en Espagne àemployer les cuves en inox que l’onavait vues en Allemagne. « Notre sallede fermentation a encore l’air neuveaujourd’hui, plus de 20 ans après »,affirme-t-il avec une pointe de fierté.Lors des premiers salons vinicoles oùle godello fut présenté, les chosesétaient souvent faites à la va-vite,reconnaît Jorge Luis. « On savaittoujours que quatre ou cinq vinsallaient être ratés, maintenant celan’arrive plus », explique-t-il. Legodello n’est pas un raisin terpéniquecomme l’albariño ou le muscat,précise-t-il, « il tend à intégrer lesarômes de la fermentation ». Cetteabsence initiale d’un arôme variétalimmédiat l’a rendu moins attrayant surdes marchés tels que la Grande-Bretagne, où le nez est jugé essentieldans la qualité d’un vin. Depuis peu,grâce au travail soigné effectué dans lesvignobles et à la maîtrise totale dudegré de maturité au moment de lavendange, le godello affiche à la fois unarôme attractif et un palais charnu etéquilibré, affirme Jorge Luis. « Ce qu’ily a de formidable avec le godello, c’est

qu’il permet au terroir de s’exprimertout en restant à l’abri d’arômesindésirables. » Il est essentiel dedisposer d’une table de sélection aumoment de la vendange, ajoute-t-il.« Les plants de godello qui avaientsurvécu étaient âgés d’environ 60 anset greffés sur un hybride de Vitisvinifera et de Vitis rupestris », indiqueHoracio dans les Bodegas Godeval.« Le godello que nous connaissonsaujourd’hui descend à 90 % de cematériel génétique initial, composé dequelque 200 plants au départ »,explique-t-il. Une sélection clonale futréalisée et aujourd’hui, avec unemeilleure connaissance de ce que lesvinificateurs recherchent, « noussommes proches de la possibilité d’unenouvelle sélection clonale, maintenantque nous comprenons mieux les vinsque nous élaborons », souligneHoracio. Cependant, il se méfie durisque de réduire excessivement lestock génétique. « Les vignoblespolyclonaux peuvent encore renfermerdes aspects très attractifs », admet-il.Le chai de Bodegas Godeval, bâti surles ruines du monastère de San Miguelde Xagoaza, possède une capacité de150 000 bouteilles et cultive16 hectares de vignes produisant3 kilos par plant. Il élabore

exclusivement ses vins à partir dugodello.Le Godeval 2007 possède une robejaune brillant et un nez herbacé etcitronné, encore assez limité. Il estassez équilibré au palais, avec unebonne structure. Tout le raisin estéqueuté, puis soumis à unefermentation à froid avec des levuresinoculées à 18 ºC pendant environ15 jours. Le grand atout du Godevalréside dans les qualités minéralesissues de l’ardoise. Le Godeval CepasVellas 2007 est élaboré à partir devieilles vignes cultivées sur des solsd’ardoise de la vallée du Sil. Il estégalement encore limité sur le planaromatique, mais offre de bellesperspectives d’évolution etd’épanouissement. Herbacé etcitronné, il est très frais au palais, avecun certain passage à vide en milieu debouche et une finale encore courte.

Un blanc aussiremarquable queles meilleurs rougesRafael Palacios, le frère du célèbreÁlvaro Palacios (Spain Gourmetour,nº 52), s’est lancé en 2004 dans sonprojet de Valdeorras. Sa cote de

dur », affirme Rafael. Son Do Bolo(nom de la région) Louro (second vin)2007, à la robe jaune pâle, affiche unarôme restreint et un palais très raffiné.Il semble pouvoir très bien vieillir enbouteille, bien qu’étant élaboré à partirdes vignes les plus jeunes du domaine,ainsi que de quelques lots de raisinachetés à l’extérieur. Rafael a plantéenviron 12 hectares, qui ont produit26 000 litres en 2008.Tout le raisin est équeuté et pressé. Ilest ensuite refroidi et mis à fermenterdans des foudres et des fûts de chêne,sauf une portion de 20 % fermentéedans des cuves en inox. Lorsque lenouveau chai sera construit àValdagua, à 750 mètres d’altitude,Rafael espère que la totalité de lafermentation pourra s’effectuer en fût.Après la fermentation, le vin reposesur ses lies, avec un bâtonnagehebdomadaire afin d’obtenir un palaisplus rond, glycérique et équilibré.L’As Sortes 2007 est son meilleur vin,élaboré à partir des plus vieilles vignescultivées sur les terrasses de Val doBibei. D’un jaune brillant, il offre unbouquet plus accessible, bien qu’uneévolution future soit prévisible avec levieillissement en bouteille. La qualitésupérieure du raisin fait la différence.Au palais, il affiche une jeunesse bien

popularité est montée en flèchelorsqu’il a décidé d’installer toute safamille dans cette région. Ses enfantsvont à l’école du village. « Le fait qu’unhomme de La Rioja vienne travailler etvivre ici est une marque de confianceformidable pour notre région »,explique une habitante de la zone. Lechai de Rafael est provisoirement situédans une maison moderne desalentours du village.Un nouveau chai va être construit àcôté de vieilles terrasses pierreuses oùRafael a planté des vignes. L’idée est detirer parti du degré de la pente pourpasser de la table de sélection à laphase de vinification, puis à la mise enbouteille. « Le nouveau chai va coûtertrès cher, nous devrons donc travailler

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Valdeorras,une région sauvéedu désastreAu siège de la DO Valdeorras, dans levillage de montagne de Villamartín deValdeorras, le directeur, Jorge LuisMazaira Pérez, nous explique que ceprojet de 1974, baptisé « Renouveau »,a permis de récupérer le godello, quise trouvait au bord de l’extinction. Desessais furent réalisés pour déterminerle porte-greffe le mieux adapté augodello. Plusieurs modes de conduitefurent également testés. « L’un desprincipaux problèmes était sa tendanceà mûrir rapidement », indique Jorge.« Par temps ensoleillé, en automne, ilpeut passer de 11 à 13 degrés enl’espace de deux jours, produisant undegré d’alcool très élevé. » Horacio futl’un des premiers à déceler le potentieldu godello. Comme l’explique JorgeLuis, on lui avait parlé de vignessituées sur un coteau, qui avaientproduit d’excellents vins depuisl’Antiquité.« Il ne restait plus que quelquesplants », souligne Horacio. « Il nedevait guère y survivre plus de1 000 m2 de vignoble. » Il expliqueque le projet Renouveau permit de

sélectionner les meilleurs sols et lesmeilleurs sites. Bodegas Godeval, lechai qu’il prit en charge, furent lespremières à miser sur le godello etaussi parmi les premières en Espagne àemployer les cuves en inox que l’onavait vues en Allemagne. « Notre sallede fermentation a encore l’air neuveaujourd’hui, plus de 20 ans après »,affirme-t-il avec une pointe de fierté.Lors des premiers salons vinicoles oùle godello fut présenté, les chosesétaient souvent faites à la va-vite,reconnaît Jorge Luis. « On savaittoujours que quatre ou cinq vinsallaient être ratés, maintenant celan’arrive plus », explique-t-il. Legodello n’est pas un raisin terpéniquecomme l’albariño ou le muscat,précise-t-il, « il tend à intégrer lesarômes de la fermentation ». Cetteabsence initiale d’un arôme variétalimmédiat l’a rendu moins attrayant surdes marchés tels que la Grande-Bretagne, où le nez est jugé essentieldans la qualité d’un vin. Depuis peu,grâce au travail soigné effectué dans lesvignobles et à la maîtrise totale dudegré de maturité au moment de lavendange, le godello affiche à la fois unarôme attractif et un palais charnu etéquilibré, affirme Jorge Luis. « Ce qu’ily a de formidable avec le godello, c’est

qu’il permet au terroir de s’exprimertout en restant à l’abri d’arômesindésirables. » Il est essentiel dedisposer d’une table de sélection aumoment de la vendange, ajoute-t-il.« Les plants de godello qui avaientsurvécu étaient âgés d’environ 60 anset greffés sur un hybride de Vitisvinifera et de Vitis rupestris », indiqueHoracio dans les Bodegas Godeval.« Le godello que nous connaissonsaujourd’hui descend à 90 % de cematériel génétique initial, composé dequelque 200 plants au départ »,explique-t-il. Une sélection clonale futréalisée et aujourd’hui, avec unemeilleure connaissance de ce que lesvinificateurs recherchent, « noussommes proches de la possibilité d’unenouvelle sélection clonale, maintenantque nous comprenons mieux les vinsque nous élaborons », souligneHoracio. Cependant, il se méfie durisque de réduire excessivement lestock génétique. « Les vignoblespolyclonaux peuvent encore renfermerdes aspects très attractifs », admet-il.Le chai de Bodegas Godeval, bâti surles ruines du monastère de San Miguelde Xagoaza, possède une capacité de150 000 bouteilles et cultive16 hectares de vignes produisant3 kilos par plant. Il élabore

exclusivement ses vins à partir dugodello.Le Godeval 2007 possède une robejaune brillant et un nez herbacé etcitronné, encore assez limité. Il estassez équilibré au palais, avec unebonne structure. Tout le raisin estéqueuté, puis soumis à unefermentation à froid avec des levuresinoculées à 18 ºC pendant environ15 jours. Le grand atout du Godevalréside dans les qualités minéralesissues de l’ardoise. Le Godeval CepasVellas 2007 est élaboré à partir devieilles vignes cultivées sur des solsd’ardoise de la vallée du Sil. Il estégalement encore limité sur le planaromatique, mais offre de bellesperspectives d’évolution etd’épanouissement. Herbacé etcitronné, il est très frais au palais, avecun certain passage à vide en milieu debouche et une finale encore courte.

Un blanc aussiremarquable queles meilleurs rougesRafael Palacios, le frère du célèbreÁlvaro Palacios (Spain Gourmetour,nº 52), s’est lancé en 2004 dans sonprojet de Valdeorras. Sa cote de

dur », affirme Rafael. Son Do Bolo(nom de la région) Louro (second vin)2007, à la robe jaune pâle, affiche unarôme restreint et un palais très raffiné.Il semble pouvoir très bien vieillir enbouteille, bien qu’étant élaboré à partirdes vignes les plus jeunes du domaine,ainsi que de quelques lots de raisinachetés à l’extérieur. Rafael a plantéenviron 12 hectares, qui ont produit26 000 litres en 2008.Tout le raisin est équeuté et pressé. Ilest ensuite refroidi et mis à fermenterdans des foudres et des fûts de chêne,sauf une portion de 20 % fermentéedans des cuves en inox. Lorsque lenouveau chai sera construit àValdagua, à 750 mètres d’altitude,Rafael espère que la totalité de lafermentation pourra s’effectuer en fût.Après la fermentation, le vin reposesur ses lies, avec un bâtonnagehebdomadaire afin d’obtenir un palaisplus rond, glycérique et équilibré.L’As Sortes 2007 est son meilleur vin,élaboré à partir des plus vieilles vignescultivées sur les terrasses de Val doBibei. D’un jaune brillant, il offre unbouquet plus accessible, bien qu’uneévolution future soit prévisible avec levieillissement en bouteille. La qualitésupérieure du raisin fait la différence.Au palais, il affiche une jeunesse bien

popularité est montée en flèchelorsqu’il a décidé d’installer toute safamille dans cette région. Ses enfantsvont à l’école du village. « Le fait qu’unhomme de La Rioja vienne travailler etvivre ici est une marque de confianceformidable pour notre région »,explique une habitante de la zone. Lechai de Rafael est provisoirement situédans une maison moderne desalentours du village.Un nouveau chai va être construit àcôté de vieilles terrasses pierreuses oùRafael a planté des vignes. L’idée est detirer parti du degré de la pente pourpasser de la table de sélection à laphase de vinification, puis à la mise enbouteille. « Le nouveau chai va coûtertrès cher, nous devrons donc travailler

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maîtrisée. Pour le moment, le bois

prédomine, mais l’on peut deviner une

explosion de notes fruitées lorsque la

bouteille atteindra un certain âge. Il est

citronné et bien en bouche. Il séjourne

en fût pendant six mois après la

fermentation. « C’est le vin le plus

complet jusqu’à présent, le plus fruité

et le plus élaboré », explique Rafael.

Il est désormais évident que le godello

est un cépage blanc apte au

vieillissement. Comme le bical, cépage

portugais quasi-éternel, ou le

chardonnay en Bourgogne, il se bonifie

avec l’âge. Avec son bouquet modéré,

une température de consommation

trop froide étoufferait les arômes du

godello, et ceux qui se méfient des

robes jaune sombre ou qui ne sont pas

disposés à s’aventurer dans les

millésimes plus anciens ne sauront

jamais ce qu’ils ont manqué. Donc, si

vous trouvez des millésimes plus vieux

dans le commerce, n’hésitez pas à les

acheter, mais n’abusez pas du seau à

glace !

Tout l’éclatdu terroirBodegas Val de Sil, à Villamartín deValdeorras, possède 26 hectares, parmilesquels de prodigieux vignobles surdes sols d’ardoise à 510 mètres au-dessus du niveau de la mer. L’idée duMontenovo (dont j’ai dégusté unéchantillon de la cuvée 2008) estd’exprimer le terroir à des prixabordables. De robe jaune, avec desnuances de rafle verte au nez, il s’ouvresur un palais extraordinairementéquilibré, même à ce stade précoce deson évolution. Le Val de Sil Sobre Lías2007 arbore une robe jaune pure. Aunez, l’influence des lies apporte unetelle complexité que l’on a l’impressiond’être devant un vin fermenté en fût. Ilest rond, glycérique et plein enbouche.Le Pezas da Portela 2006 est fermentéen fût, puis dans une cuve en inox afind’homogénéiser le tout. D’un jauneprofond, il possède un bouquetéclatant, où les notes de bois se mêlent

au fruité. Des vieilles vignes de11 parcelles différentes sontvendangées pour ce vin. Le Pedrouzos2006 (500 magnums) est élaboré àpartir de vignes cultivées sur des solsd’ardoise accidentés dans le vignoblede Pedrouzos. Bien qu’encoreclairement jeune, il est d’un jauneprofond et exhale un bouquetfabuleux, imprégné de notes de terroirpurement minérales. Il offre unepersistance remarquable, etimpressionne malgré sa jeunesse.La famille de Roberto FernándezGarcía a superbement rénové un chaidu XVIIIe siècle qui avait perdu satoiture. Elle possède 11,5 hectares enbordure de l’ancienne Via Nova, quireliait le Nord-Ouest de l’Ibérie àRome durant le règne de l’empereurVespasien, en l’an 79 ap. J.-C. Ce chai,baptisé A Coroa (« la couronne », engalicien), élabore un vin du mêmenom dont la cuvée 2007 arbore unerobe jaune à reflets verts. Son bouquet,encore discret, est un panaché dereine-claude et de fenouil. Au palais, ilse caractérise par son équilibre, sa

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VIN ET DESIGN

VINS

Traditionnellement, les efforts avant-gardistes en matière de créationd’étiquettes et de marques se limitaientaux vins du Nouveau Monde. Lesexperts citent régulièrement le succèsphénoménal connu par l’étiquetteaustralienne de Yellow Tail, qui avecson motif de kangourou, inspiré de laculture aborigène, est devenu laréférence en matière d’étiquetage desvins contemporains. Évidemment, lesvins du Nouveau Monde ont l’avantagede partir d’une page blanche. Enl’absence de toute perspectivehistorique, les experts du marketing setrouvent dans la position idéale depouvoir donner à leur produit unetouche plus fraîche et moinssolennelle. L’Espagne, de son côté, estriche d’une viniculture millénaire qui atoutefois su, en quelques décennies, seréinventer, en parallèle à la renaissancemoderne du monde de l’art, de lapolitique et de toutes les facettes de laculture. L’image de ses vins commenceà refléter cette évolution.

Le choixdu consommateurJ’ai testé cette hypothèse à La Carte desVins, un magasin vendant des crus dumonde entier et situé dans le quartierbarcelonais d’El Born. Etant donné laprésence massive de touristes et lenombre important de résidents locauxétrangers, on peut sans aucun douteavancer que ses clients choisissent leurvin en fonction de l’image qu’ilprojette. Je commence par demanderau sommelier, Gareth York, sil’Espagne suit la tendance à unétiquetage moderne et attirant desvins. « Évidemment, me répond-il, ilsuffit de voir la différence. Ici, vousavez les vins français », m’indique-t-ilen désignant un casier de bouteillesaffichant sur fond blanc différentschâteaux, armoiries et fontes à

empattements lourds. « Et ici, les vinsespagnols. »Un premier regard rapide révèle desreproductions miniature d’œuvresmodernes, des dessins attirants, unepalette de coloris éclatants, unsymbolisme farfelu et d’autreséléments graphiques et de design forts.Je demande ensuite à York quelles sontles bouteilles qui se sont récemmentvendues le mieux. Il m’indique unLautus, vin à base de tempranillo dudomaine Guelbenzu en Navarre dontl’étiquette rose pâle et or, richementdécorée, rappelle un vieux manuscrit.« Ça marche vraiment bien »,poursuit-il. « L’étiquette est presquemaçonnique, tout en restant féminineet mystérieuse. » Parmi les meilleuresventes figure aussi le Dehesa Gago ‘G’,dont l’étiquette minimaliste estcomposée d’un grand G majusculeblanc posé sur un fond noir, unecréation du viticulteur rebelle TelmoRodríguez. Mais le cru que tous se sontarraché a été le Vi de Gel, un vin douxcatalan présenté dans une élégantebouteille noire et élancée. Selon York,ses clients en achetaient à la douzaineavant même de demander, une fois à lacaisse, de quel type de vin il s’agissait.« Une bonne étiquette peut faire oudéfaire un vin », conclut-il. « Et laplupart des consommateurs admettentd’ailleurs qu’il est parfois leur seulcritère d’achat. »

Un sens du designcontemporainÉtant donné le grand héritage local enmatière d’art et de design et le don dela Catalogne pour les techniquesd’étiquetage, il n’est sans doute passurprenant que certaines des images demarque de vins les mieux conçuesproviennent des vignobles de la région.Parmi les exemples les plus marquantsfigure L’Origan, un vin mousseux, un

cava à l’étiquette de style Art nouveauet dont la bouteille ressemble à unflacon de parfum. N’oublions pasPardas, avec son icône de jabalí(sanglier) espiègle, et Petit Grealo,dont l’étiquette, différente et necomportant qu’un court texte(imaginée par le graphiste JoanBertrán, basé à Barcelone), a étéconçue pour refléter le caractère« avancé » du vin, mélange de syrah,merlot et cabernet sauvignon. Mêmela maison Torres, une bodega de pointequi n’est normalement pas associée àune production aussi novatrice, acommencé à concurrencercette avant-garde.« Pour moi, l’univers du vin espagnol abeaucoup changé ces dernièresannées », affirme Miguel Torres,directeur du Département marketing del’entreprise. « Et son image a évolué enconséquence. » La sociétécommercialise actuellement deux vins,rompant ainsi avec la tradition Torres,vieille de 130 ans. Le premier s’appelleCeleste. Élaboré à partir des raisins del’unique vignoble du domaine dans laDO Ribera del Duero, il dessine leportrait séduisant du ciel pendant lavendange. Nerola, quant à lui, est uncru biologique dont l’étiquette est unhommage aux formes sinueuses (ettout aussi naturelles) de l’architecturemoderniste de Barcelone. En pleinevandange, l’étiquette a été modifiée etredimensionnée pour couvrir toute lacirconférence de la bouteille, à lamanière dont un élément décoratifs’enroulerait autour d’une colonne,imitant une canne de Noël. « Lesventes ont progressé dès sa sortie »,poursuit Torres. « On vend toujoursplus d’un produit quand il sedémarque des autres. Tous les 2 ou3 ans, nous revoyons nos étiquettes.Si vous regardez l’étiquette de Viña Solaujourd’hui, elle n’a rien à voir aveccelle d’il y a 40 ans », déclare-t-il, en

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faisant référence au best-seller blancmoyen de gamme de la maison. « Pource faire, nous apportons desmodifications subtiles aux détails,comme la taille de la police et lapalette de coloris. Bien sûr, il y acertaines bouteilles qu’on peut changerplus que d’autres. Nous ne touchonspas aux crus les plus traditionnels. »La société Espelt, originaire de larégion vinicole relativement jeuned’Empordà, ne pouvait s’inspirer d’unetelle tradition. À la place, elle a engagéJavier Mariscal, fameux créateurd’image catalan qui a accédé à larenommée internationale avec Coby, lechien mascotte des Jeux olympiquesde 1992, organisés à Barcelone. PourEspelt, Mariscal a créé une image quirésume la culture jeune et joyeuserégnant au sein de la bodega. Lesétiquettes et autres supportspromotionnels utilisent un ensemblebariolé de figures longilignes labourantles champs, récoltant les raisins etsautillant dans les vignobles,un verre à la main.« Au départ, le plus important à nosyeux était de créer une image demarque pour notre produit. Nousn’avions ni crédibilité, ni idéeprécise », explique Xavier Cepero,directeur général d’Espelt.« Historiquement, L’Empordà atoujours été étroitement associé aumonde de l’art ; chaque village a sonpropre artiste ou écrivain, si vousvoulez. Nous avons donc contactéJavier Mariscal pour donner naissanceà un concept moderne et plein de vie.C’était risqué. »Cepero admet que la fraîcheur etl’insouciance véhiculées par l’imaged’Espelt ont probablement fait fuirquelques clients potentiels et que lessommeliers plus conservateurs onttendance à ne pas s’intéresser à sesvins. Mais l’avantage est qu’elle aamélioré les ventes du domaine à

VIN ET DESIGN

VINS

Pardas, avecson icône desanglier espiègle

Nerola est un crubiologique dontl’étiquette est unhommage auxformessinueuses del’architecturemoderniste deBarcelone

Celeste, dontl’étiquettedessine leportraitséduisant duciel pendant lavendange

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maîtrisée. Pour le moment, le bois

prédomine, mais l’on peut deviner une

explosion de notes fruitées lorsque la

bouteille atteindra un certain âge. Il est

citronné et bien en bouche. Il séjourne

en fût pendant six mois après la

fermentation. « C’est le vin le plus

complet jusqu’à présent, le plus fruité

et le plus élaboré », explique Rafael.

Il est désormais évident que le godello

est un cépage blanc apte au

vieillissement. Comme le bical, cépage

portugais quasi-éternel, ou le

chardonnay en Bourgogne, il se bonifie

avec l’âge. Avec son bouquet modéré,

une température de consommation

trop froide étoufferait les arômes du

godello, et ceux qui se méfient des

robes jaune sombre ou qui ne sont pas

disposés à s’aventurer dans les

millésimes plus anciens ne sauront

jamais ce qu’ils ont manqué. Donc, si

vous trouvez des millésimes plus vieux

dans le commerce, n’hésitez pas à les

acheter, mais n’abusez pas du seau à

glace !

Tout l’éclatdu terroirBodegas Val de Sil, à Villamartín deValdeorras, possède 26 hectares, parmilesquels de prodigieux vignobles surdes sols d’ardoise à 510 mètres au-dessus du niveau de la mer. L’idée duMontenovo (dont j’ai dégusté unéchantillon de la cuvée 2008) estd’exprimer le terroir à des prixabordables. De robe jaune, avec desnuances de rafle verte au nez, il s’ouvresur un palais extraordinairementéquilibré, même à ce stade précoce deson évolution. Le Val de Sil Sobre Lías2007 arbore une robe jaune pure. Aunez, l’influence des lies apporte unetelle complexité que l’on a l’impressiond’être devant un vin fermenté en fût. Ilest rond, glycérique et plein enbouche.Le Pezas da Portela 2006 est fermentéen fût, puis dans une cuve en inox afind’homogénéiser le tout. D’un jauneprofond, il possède un bouquetéclatant, où les notes de bois se mêlent

au fruité. Des vieilles vignes de11 parcelles différentes sontvendangées pour ce vin. Le Pedrouzos2006 (500 magnums) est élaboré àpartir de vignes cultivées sur des solsd’ardoise accidentés dans le vignoblede Pedrouzos. Bien qu’encoreclairement jeune, il est d’un jauneprofond et exhale un bouquetfabuleux, imprégné de notes de terroirpurement minérales. Il offre unepersistance remarquable, etimpressionne malgré sa jeunesse.La famille de Roberto FernándezGarcía a superbement rénové un chaidu XVIIIe siècle qui avait perdu satoiture. Elle possède 11,5 hectares enbordure de l’ancienne Via Nova, quireliait le Nord-Ouest de l’Ibérie àRome durant le règne de l’empereurVespasien, en l’an 79 ap. J.-C. Ce chai,baptisé A Coroa (« la couronne », engalicien), élabore un vin du mêmenom dont la cuvée 2007 arbore unerobe jaune à reflets verts. Son bouquet,encore discret, est un panaché dereine-claude et de fenouil. Au palais, ilse caractérise par son équilibre, sa

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Face à un rayon proposant desdouzaines de variétés et descentaines de producteurs,l’amateur de vins se trouveconfronté à un choix décon-certant. La recherche a montréque le consommateur avertifait d’abord sa sélection enfonction de la région, puis duprix de la bouteille. Mais, dansun marché très visuel, l’éti-quette du produit peut aussijouer un rôle prépondérant.Que nous l’admettions ou non,nous sommes majoritaires àpenser, du moins inconsciem-ment, que l’habit fait le moine.

VINet design

TexteSuzanne Wales/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

PhotosJuan Manuel Sanz/©ICEX

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structure bien charpentée et une finaleassez courte. Un Coroa 2006commence à s’ouvrir un peu plus surle plan olfactif. Mais c’est la cuvée2005 qui développe une délicieusefragrance d’évolution tertiaire enbouteille, avec une vive acidité entoute fin de bouche.Le chai Adega O Casal, à Rubiá, a étéconstruit pour élaborer sa premièrecuvée en 2008. Comme l’explique JoséLuis García, l’un des cinq associés,l’orientation des vignobles favorise unematuration optimale du godello. À 550mètres au-dessus du niveau de la mer,il est important que le godello mûrisseplus lentement. « L’un des problèmesdu godello est qu’il mûrit sirapidement que son acidité tombe enflèche tandis que le degré d’alcools’amplifie », souligne-t-il. José Luis apassé son enfance en Angleterre,où sa famille avait émigré dans lesannées 1960.Son Casal Novo 2007 mêle la pêche etles fruits tropicaux au nez. « Si nousn’avions pas entrepris ce processus de

renouveau, nous ne ferions pas de vinaujourd’hui », affirme José Luis. « Lepalomino, encore employé par denombreuses coopératives, ne peutdonner du bon vin ici », ajoute-t-il. Ilattribue la puissance aromatique de sesvins à l’orientation et à l’âge des vignes.« La quasi-totalité de nos vignoblesdate de la première plantation, il y a30 ans », explique-t-il, précisant queson chai a une capacité de 60 000litres de vin, élaboré à partir de huithectares de vignes.

Le Bierzoou le triomphede la diversitéLe naturaliste romain Pline l’Ancien(23-79 ap. J.-C.) citait déjà les vins dela colonie ibérique Bergidum Flavium,dans le Nord-Ouest du pays,aujourd’hui appelée El Bierzo. PourRome, le principal intérêt de Bergidumétait l’or, que l’on extrayait endétournant les cours d’eau à travers les

collines riches en minerai. Cetterichesse contraste avec la pauvreté quil’a frappée au XXe siècle, à cause duphylloxéra. La région futparticulièrement touchée par ce fléau,et outre le garnacha tintorera et lepalomino, qui ont été implantés ici parla suite, la grande vedette durenouveau de la zone a été le cépagerouge mencía. Dans la DO Bierzo(Spain Gourmetour, nº 62), fondée en1989, le godello représente à peine400 000 kilos sur un total de17 millions de kilos de raisinpressé chaque année. Malgré cefaible volume, le godello n’a cesséd’intéresser et de fidéliser denombreux producteurset consommateurs.Bodegas y Viñedos Bergidenses estun chai de 10 hectares qui cultive latotalité du godello qu’il vinifie. CarlosFernández, l’un des cinq membres dela famille participant au projet,explique qu’il vendange en deux fois,généralement à trois jours d’intervalle,pour obtenir le mélange idéal de

godello. Son Viña Garnelo 2008 estissu de raisin récolté à trois joursd’intervalle, qui fermente dans deuxcuves séparées. Le raisin de la premièrecuve, le plus mûr, est beaucoup plusactif sur le plan aromatique, tandis quele vin de la seconde cuve apporte unetouche d’acidité fraîche. Les deux vinssont ensuite assemblés afin depanacher ces caractéristiques. « Nousvendons 22 000 litres par an d’uncoupage contenant du cépage blancdoña blanca (appelé valenciana dans larégion) cultivé dans de vieux vignoblesfamiliaux, ainsi qu’une toute petiteproportion de malvasía. » Cetassemblage fait des merveilles.

La passionde la perfectionAu chai Luna Berberide (fondé en1987) à Cacabelos, Alejandro Luna, lefils du fondateur, Bernardo, est unfervent adepte du godello. « Mon pèrea acheté ce domaine de 70 hectares àquelqu’un que l’on appelait le señor

Cascallana, qui avait travaillé pourGonzález Byass, 75 millions de pesetas(environ 450 000 euros), « y comprisle gardien » précise Alejandro, seréférant à l’acte de vente originel.Il y a deux ans, des replantations ontété entamées avec des boutures devieilles vignes. Le domaine comptait1,5 hectare de godello. « Il se vend trèsbien », indique Alejandro. Le LunaBerberide Godello 2008, tout juste misen bouteille, est un godello coupé d’unpeu de doña blanca pour rehausserl’arôme. Son bouquet se distingue parles réminiscences de pomme verte.« La pomme est très caractéristiquedans le godello », affirme Alejandro.Les premières vinifications du chai ontété faites sur les conseils de MarianoGarcía (Spain Gourmetour, nº 65).Deux de ses fils, Alberto etEduardo, ont collaboré à l’élaborationde vin rouge.Le Luna Berberide 2007 est plus richeen couleur mais moins développé surle plan aromatique, avec des notes depomme teintées d’épices. Son palais

savoureux résulte du séjour sur les lies,explique Alejandro. « En 1975,González Byass a fait réaliser une étudedans la région et planté des parcellesexpérimentales de cépages blancsgewürztraminer et sylvaner,probablement les premières enEspagne, avant même le somontano »,précise-t-il.Prada a Tope, dont le siège se trouvedans le Palacio de Canedo (construitvers 1730), magnifiquement restauré,a fourni de gros efforts pour s’orientervers une viticulture plus organique etplus durable. Son propriétaire, unhomme à l’enthousiasme débordant,qui se présente simplement sous lenom de « Prada » avec une poignée demain énergique, est un anciencordonnier. Aujourd’hui, il superviseun empire qui s’étend dans tout lepays et comprend des restaurants, desépiceries fines, un hôtel, des vignobleset un chai. Les poivrons rouge dePrada a Tope son renommés dans toutel’Espagne. Son Godello 2007 est « trèslégèrement filtré » et procure une

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structure bien charpentée et une finaleassez courte. Un Coroa 2006commence à s’ouvrir un peu plus surle plan olfactif. Mais c’est la cuvée2005 qui développe une délicieusefragrance d’évolution tertiaire enbouteille, avec une vive acidité entoute fin de bouche.Le chai Adega O Casal, à Rubiá, a étéconstruit pour élaborer sa premièrecuvée en 2008. Comme l’explique JoséLuis García, l’un des cinq associés,l’orientation des vignobles favorise unematuration optimale du godello. À 550mètres au-dessus du niveau de la mer,il est important que le godello mûrisseplus lentement. « L’un des problèmesdu godello est qu’il mûrit sirapidement que son acidité tombe enflèche tandis que le degré d’alcools’amplifie », souligne-t-il. José Luis apassé son enfance en Angleterre,où sa famille avait émigré dans lesannées 1960.Son Casal Novo 2007 mêle la pêche etles fruits tropicaux au nez. « Si nousn’avions pas entrepris ce processus de

renouveau, nous ne ferions pas de vinaujourd’hui », affirme José Luis. « Lepalomino, encore employé par denombreuses coopératives, ne peutdonner du bon vin ici », ajoute-t-il. Ilattribue la puissance aromatique de sesvins à l’orientation et à l’âge des vignes.« La quasi-totalité de nos vignoblesdate de la première plantation, il y a30 ans », explique-t-il, précisant queson chai a une capacité de 60 000litres de vin, élaboré à partir de huithectares de vignes.

Le Bierzoou le triomphede la diversitéLe naturaliste romain Pline l’Ancien(23-79 ap. J.-C.) citait déjà les vins dela colonie ibérique Bergidum Flavium,dans le Nord-Ouest du pays,aujourd’hui appelée El Bierzo. PourRome, le principal intérêt de Bergidumétait l’or, que l’on extrayait endétournant les cours d’eau à travers les

collines riches en minerai. Cetterichesse contraste avec la pauvreté quil’a frappée au XXe siècle, à cause duphylloxéra. La région futparticulièrement touchée par ce fléau,et outre le garnacha tintorera et lepalomino, qui ont été implantés ici parla suite, la grande vedette durenouveau de la zone a été le cépagerouge mencía. Dans la DO Bierzo(Spain Gourmetour, nº 62), fondée en1989, le godello représente à peine400 000 kilos sur un total de17 millions de kilos de raisinpressé chaque année. Malgré cefaible volume, le godello n’a cesséd’intéresser et de fidéliser denombreux producteurset consommateurs.Bodegas y Viñedos Bergidenses estun chai de 10 hectares qui cultive latotalité du godello qu’il vinifie. CarlosFernández, l’un des cinq membres dela famille participant au projet,explique qu’il vendange en deux fois,généralement à trois jours d’intervalle,pour obtenir le mélange idéal de

godello. Son Viña Garnelo 2008 estissu de raisin récolté à trois joursd’intervalle, qui fermente dans deuxcuves séparées. Le raisin de la premièrecuve, le plus mûr, est beaucoup plusactif sur le plan aromatique, tandis quele vin de la seconde cuve apporte unetouche d’acidité fraîche. Les deux vinssont ensuite assemblés afin depanacher ces caractéristiques. « Nousvendons 22 000 litres par an d’uncoupage contenant du cépage blancdoña blanca (appelé valenciana dans larégion) cultivé dans de vieux vignoblesfamiliaux, ainsi qu’une toute petiteproportion de malvasía. » Cetassemblage fait des merveilles.

La passionde la perfectionAu chai Luna Berberide (fondé en1987) à Cacabelos, Alejandro Luna, lefils du fondateur, Bernardo, est unfervent adepte du godello. « Mon pèrea acheté ce domaine de 70 hectares àquelqu’un que l’on appelait le señor

Cascallana, qui avait travaillé pourGonzález Byass, 75 millions de pesetas(environ 450 000 euros), « y comprisle gardien » précise Alejandro, seréférant à l’acte de vente originel.Il y a deux ans, des replantations ontété entamées avec des boutures devieilles vignes. Le domaine comptait1,5 hectare de godello. « Il se vend trèsbien », indique Alejandro. Le LunaBerberide Godello 2008, tout juste misen bouteille, est un godello coupé d’unpeu de doña blanca pour rehausserl’arôme. Son bouquet se distingue parles réminiscences de pomme verte.« La pomme est très caractéristiquedans le godello », affirme Alejandro.Les premières vinifications du chai ontété faites sur les conseils de MarianoGarcía (Spain Gourmetour, nº 65).Deux de ses fils, Alberto etEduardo, ont collaboré à l’élaborationde vin rouge.Le Luna Berberide 2007 est plus richeen couleur mais moins développé surle plan aromatique, avec des notes depomme teintées d’épices. Son palais

savoureux résulte du séjour sur les lies,explique Alejandro. « En 1975,González Byass a fait réaliser une étudedans la région et planté des parcellesexpérimentales de cépages blancsgewürztraminer et sylvaner,probablement les premières enEspagne, avant même le somontano »,précise-t-il.Prada a Tope, dont le siège se trouvedans le Palacio de Canedo (construitvers 1730), magnifiquement restauré,a fourni de gros efforts pour s’orientervers une viticulture plus organique etplus durable. Son propriétaire, unhomme à l’enthousiasme débordant,qui se présente simplement sous lenom de « Prada » avec une poignée demain énergique, est un anciencordonnier. Aujourd’hui, il superviseun empire qui s’étend dans tout lepays et comprend des restaurants, desépiceries fines, un hôtel, des vignobleset un chai. Les poivrons rouge dePrada a Tope son renommés dans toutel’Espagne. Son Godello 2007 est « trèslégèrement filtré » et procure une

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sensation aromatique naturelle etagréable. Le palais est à la hauteurdu bouquet, bien que la finale soitun peu courte.Parmi les défenseurs les pluspassionnés du godello se trouventGinés Fernández López et son épouse,Juani Gancedo Hidalgo. Leur chai,Bodegas y Viñedos Gancedo, à Quilos,a été fondé en 1998 sur un domainede 13 hectares, complété par du raisincultivé par des fournisseurs externessur 10 hectares. Leur godello est coupéd’un peu de doña blanca, expliqueGinés, qui vendange avec un soinextrême 63 parcelles séparées. Laplupart de leur godello vient du Val dePaxariñas, précise Ginés.Leur Capricho 2007 Val de Paxariñas(19 000 bouteilles) « sent la fleur degenêt », affirme Ginés. Il contient20 % de doña blanca, « qui apporte dela ‘sagesse’ au mélange. » Latempérature de la bouteille estessentielle, souligne-t-il. « Si on lalaisse augmenter bien au-dessus de8 ºC, il devient trop prévisible etmoins plaisant. À sa bonnetempérature, le godello est vraimentsplendide », estime Ginés. Le vin estsoumis à une très lente fermentation àtempérature ambiante, pendant unepériode prolongée. « Il détruit ainsi leslevures, donnant l’impression qu’il aété élevé sur ses lies », explique-t-il.Une fermentation lente et prolongéeproduit une sensation gustative plusprofonde et plus pleine, indique Ginés.D’après lui, l’éternel problème duvinificateur avec le godello est qu’ilfaut le vendanger vert. « Si l’on attendla pleine maturité, l’alcool prend ledessus et gâche tout. Mais en lecueillant vert, on est confronté audilemme de savoir quoi faire avec lafinale légèrement amère », observe-t-il.Leur Herencia del Capricho 2006(1 200 bouteilles) a été vinifié dans le

style bourguignon et fermenté dansdes fûts de 225 litres. D’une robe jaunebrillant, il regorge de notes boisées,accompagnant un fruité citrique teintéde fleur de jasmin. La sensationgustative est pleine, raffinée, moelleuseet longue, avec une finale fraîche ettrès persistante.

Les terrassesd’ardoise millénairede Ribeira SacraLe potentiel de l’ardoise en Espagnes’est révélé au monde entier avecl’émergence de la région catalane de laDO Priorat, productrice de vins detout premier plan au niveauinternational. Álvaro Palacios adécouvert que les vieilles vignescultivées sur les terrasses d’ardoisemillénaire de la zone produisaient desvins puissants, exprimant pleinementleur terroir. Il n’est donc passurprenant qu’en Galice certainsvinificateurs aient décidé de réhabiliterles magnifiques et très anciennesterrasses d’ardoise très abruptes deRibeira Sacra.Bien que la production de vin remonteici à des temps immémoriaux, ce n’estqu’en 1993 que cette région a étéautorisée à vendre des Vinos de laTierra, cette appellation ayant étésuivie, en 1996, par la création de laDO. Elle compte 3 000 hectares devignobles et 2 600 viticulteurs, une

structure typique de la Galice où lesystème d’héritage basé sur leminifundio (petites parcelles) morcellela propriété foncière, comme enBourgogne. La parcelle moyenne nedépasse pas 500 mètres carrés. Autotal, 2,5 millions de kilos de raisin,surtout du rouge, sont vendangéschaque année. Les vins sont élaborés àpartir des cépages godello, albariño,loureira, treixedura, torrontés et doñablanca.Adega Pena das Donas (une dona estun personnage mythologique, un elfeféminin, dans la culture galicienne) setrouve dans le petit hameau de Ribasdel Sil. Ce chai possède un hectare devignes, auquel s’ajoutent deux autreshectares cultivés sous sa supervision.L’une des parcelles est située à SanCosmede, dans une vallée en forme de« V » incroyablement escarpée. Lesviticulteurs empruntent des routesdont la pente est à la limite dupraticable, comme l’explique lepropriétaire Jesús Vázquez Rodríguez :« Je laisse souvent les portes de monLand Rover ouvertes, au cas où jedevrais sauter en marche. »Jesús y cultive la vigne depuis 50 anset a fondé ce chai, il y a trois ans. Sonépouse, Elvira, l’aide à tailler les plants.Dans ce paysage spectaculaire, chaqueparcelle mesure de 20 à 30 mètrescarrés, explique-t-il. Selon la traditiondu minifundio, encore pratiquéeaujourd’hui, un tiers de la propriétédoit être divisé à parts égales entre tousles enfants (la legítima), un autre tierspeut être réparti équitablement oudonné en totalité à l’aîné (la mejora) etle dernier tiers (la libre disposición) peutêtre utilisé librement, voire mêmelégué à une amante. Pour constituerson hectare, Jesús a dû acquérir trenteactes de propriété, appelés escrituras.Son Almalarga, un 100 % godellovinifié sur ses lies, a été élaboré avec

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sensation aromatique naturelle etagréable. Le palais est à la hauteurdu bouquet, bien que la finale soitun peu courte.Parmi les défenseurs les pluspassionnés du godello se trouventGinés Fernández López et son épouse,Juani Gancedo Hidalgo. Leur chai,Bodegas y Viñedos Gancedo, à Quilos,a été fondé en 1998 sur un domainede 13 hectares, complété par du raisincultivé par des fournisseurs externessur 10 hectares. Leur godello est coupéd’un peu de doña blanca, expliqueGinés, qui vendange avec un soinextrême 63 parcelles séparées. Laplupart de leur godello vient du Val dePaxariñas, précise Ginés.Leur Capricho 2007 Val de Paxariñas(19 000 bouteilles) « sent la fleur degenêt », affirme Ginés. Il contient20 % de doña blanca, « qui apporte dela ‘sagesse’ au mélange. » Latempérature de la bouteille estessentielle, souligne-t-il. « Si on lalaisse augmenter bien au-dessus de8 ºC, il devient trop prévisible etmoins plaisant. À sa bonnetempérature, le godello est vraimentsplendide », estime Ginés. Le vin estsoumis à une très lente fermentation àtempérature ambiante, pendant unepériode prolongée. « Il détruit ainsi leslevures, donnant l’impression qu’il aété élevé sur ses lies », explique-t-il.Une fermentation lente et prolongéeproduit une sensation gustative plusprofonde et plus pleine, indique Ginés.D’après lui, l’éternel problème duvinificateur avec le godello est qu’ilfaut le vendanger vert. « Si l’on attendla pleine maturité, l’alcool prend ledessus et gâche tout. Mais en lecueillant vert, on est confronté audilemme de savoir quoi faire avec lafinale légèrement amère », observe-t-il.Leur Herencia del Capricho 2006(1 200 bouteilles) a été vinifié dans le

style bourguignon et fermenté dansdes fûts de 225 litres. D’une robe jaunebrillant, il regorge de notes boisées,accompagnant un fruité citrique teintéde fleur de jasmin. La sensationgustative est pleine, raffinée, moelleuseet longue, avec une finale fraîche ettrès persistante.

Les terrassesd’ardoise millénairede Ribeira SacraLe potentiel de l’ardoise en Espagnes’est révélé au monde entier avecl’émergence de la région catalane de laDO Priorat, productrice de vins detout premier plan au niveauinternational. Álvaro Palacios adécouvert que les vieilles vignescultivées sur les terrasses d’ardoisemillénaire de la zone produisaient desvins puissants, exprimant pleinementleur terroir. Il n’est donc passurprenant qu’en Galice certainsvinificateurs aient décidé de réhabiliterles magnifiques et très anciennesterrasses d’ardoise très abruptes deRibeira Sacra.Bien que la production de vin remonteici à des temps immémoriaux, ce n’estqu’en 1993 que cette région a étéautorisée à vendre des Vinos de laTierra, cette appellation ayant étésuivie, en 1996, par la création de laDO. Elle compte 3 000 hectares devignobles et 2 600 viticulteurs, une

structure typique de la Galice où lesystème d’héritage basé sur leminifundio (petites parcelles) morcellela propriété foncière, comme enBourgogne. La parcelle moyenne nedépasse pas 500 mètres carrés. Autotal, 2,5 millions de kilos de raisin,surtout du rouge, sont vendangéschaque année. Les vins sont élaborés àpartir des cépages godello, albariño,loureira, treixedura, torrontés et doñablanca.Adega Pena das Donas (une dona estun personnage mythologique, un elfeféminin, dans la culture galicienne) setrouve dans le petit hameau de Ribasdel Sil. Ce chai possède un hectare devignes, auquel s’ajoutent deux autreshectares cultivés sous sa supervision.L’une des parcelles est située à SanCosmede, dans une vallée en forme de« V » incroyablement escarpée. Lesviticulteurs empruntent des routesdont la pente est à la limite dupraticable, comme l’explique lepropriétaire Jesús Vázquez Rodríguez :« Je laisse souvent les portes de monLand Rover ouvertes, au cas où jedevrais sauter en marche. »Jesús y cultive la vigne depuis 50 anset a fondé ce chai, il y a trois ans. Sonépouse, Elvira, l’aide à tailler les plants.Dans ce paysage spectaculaire, chaqueparcelle mesure de 20 à 30 mètrescarrés, explique-t-il. Selon la traditiondu minifundio, encore pratiquéeaujourd’hui, un tiers de la propriétédoit être divisé à parts égales entre tousles enfants (la legítima), un autre tierspeut être réparti équitablement oudonné en totalité à l’aîné (la mejora) etle dernier tiers (la libre disposición) peutêtre utilisé librement, voire mêmelégué à une amante. Pour constituerson hectare, Jesús a dû acquérir trenteactes de propriété, appelés escrituras.Son Almalarga, un 100 % godellovinifié sur ses lies, a été élaboré avec

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l’aide d’Antonio Lombardía. La cuvée2008 (échantillon de cuve) est issued’une fermentation naturelle (sansajout de levure) de grappesvendangées à la main et remontées lelong des pentes sur des mini-rails,dans le style alpin. Ce vin aux tons depomme et de groseille estétonnamment charpenté et opulent enbouche. « L’élevage sur les lies aide àobtenir un vin qui a de l’ampleur »,explique Antonio. Son Almalarga 2007offre un bouquet remarquable,exhalant une fragrance sophistiquée.D’après Jesús, le secret réside dans lestrès vieilles vignes qui produisent deminuscules grappes.

Des moinesbourguignonau conceptbiodynamiqueTrois fleuves, le Miño, le Sil et le Bubal,arrosent Ribeira Sacra. Depuis le portromain de Portus Polumbaris, sur leSil, on exportait des vins très appréciésprovenant d’un domaine local appeléAmandi. Les couvercles des tombeauxde la petite chapelle de Temes,fabriqués à l’aide de pierres italiennesqui servaient de ballast aux navires quidébarquaient ici, sont la preuve d’uncommerce autrefois florissant. À partirdu VIe siècle, après le départ desRomains, des esthètes commencèrent às’installer dans les vallées pour y vivreen ermites. De nombreuses églisesromanes magnifiques furent érigées surles pentes. La vinification connut ungrand essor avec l’arrivée d’ordresmonastiques, notamment de moinesde Cluny.

Adega Algueira, dans un village appeléSober, élabore un coupage de 45 % degodello et 45 % d’albariño, complétéspar le cépage treixedura. Lepropriétaire, Fernando AlgueiraGonzález, exploite 10 hectares. « Laqualité minérale de nos sols esttoujours très présente dans nos vins.Nous avons beaucoup d’ardoise. » Lesterrasses aménagées sur ces pentesexcessivement abruptes sont appeléesbancales. Fernando fait fermenter sesblancs en barrique, puis les laissemûrir pendant un an dans des fûtsfrançais de 750 litres. Il obtient desarômes mielleux de bois, teintés denotes acides de pamplemousse.« Le godello est extraordinaire, ilproduit toujours des arômes fruitéscitronnés et une belle structure »,affirme Fernando.« Si nous pouvions travailler comme lefaisaient nos ancêtres dans lesvignobles, ce serait formidable, mais ilsy consacraient tant de temps etd’efforts physiques que ce seraitimpossible aujourd’hui. » Leur pointfaible était la mauvaise qualité de l’eau,qui empêchait une bonne vinification,explique-t-il. Aujourd’hui, les chaissont propres et capables d’élaborer degrands vins, mais les vignobles nepeuvent plus être cultivés à la maincomme autrefois, souligne Fernando.Dominio do Bibei, à Langullo,Manzaneda, se trouve à 550 mètresau-dessus du niveau de la mer, sur des

collines entourées de vignobles et debroussailles. Laura Lorenzo, ingénieuragronome de 26 ans spécialisée enviticulture, y travaille depuis cinq ansen employant des engrais biologiqueset en taillant la vigne à la pleine lune.« En Galice, la pleine lune a toujoursété considérée propice pour la tailleou pour se faire couper les cheveux »,explique-t-elle. Elle cultive30 hectares, donc cinq de très vieillesvignes. La cuvée 2008 de Bibeiro, à700 mètres au-dessus du niveau de lamer (échantillon de cuve), possèdeune vivacité aromatique spectaculaire,regorgeant de fraîcheur et de fruité puret mûr. Deux clones de godello sontemployés dans son élaboration. Lebâtonnage régulier permet d’obtenirun vin bien en bouche.Javier Domínguez, le propriétaire duchai, affirme que le godello est « lemeilleur cépage blanc d’Espagne, sansaucun doute ». Après la vendange, leraisin est entreposé pendant trois joursdans des chambres de refroidissementet de séchage. « Lorsqu’il pleut, ceschambres sont cruciales », expliqueJavier. Ici, la vinification s’effectue pargravité. Le raisin est trié à la main surune table, puis pressé dans un petitpressoir pneumatique. Le moût estensuite transvasé dans de grands fûtsen bois, puis dans des foudresautrichiens et finalement dans des« œufs » de Nomblot. Le FrançaisMarc Nomblot s’est spécialisé dans lafabrication de cuves en béton dans lesannées 1980. Ses cuves en formed’œuf se distinguent par uneremarquable inertie thermique, unemicro-oxydation contrôlée et uneneutralité aromatique. Elles sontdevenues très à la mode, notammentchez les producteurs biodynamiques

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l’aide d’Antonio Lombardía. La cuvée2008 (échantillon de cuve) est issued’une fermentation naturelle (sansajout de levure) de grappesvendangées à la main et remontées lelong des pentes sur des mini-rails,dans le style alpin. Ce vin aux tons depomme et de groseille estétonnamment charpenté et opulent enbouche. « L’élevage sur les lies aide àobtenir un vin qui a de l’ampleur »,explique Antonio. Son Almalarga 2007offre un bouquet remarquable,exhalant une fragrance sophistiquée.D’après Jesús, le secret réside dans lestrès vieilles vignes qui produisent deminuscules grappes.

Des moinesbourguignonau conceptbiodynamiqueTrois fleuves, le Miño, le Sil et le Bubal,arrosent Ribeira Sacra. Depuis le portromain de Portus Polumbaris, sur leSil, on exportait des vins très appréciésprovenant d’un domaine local appeléAmandi. Les couvercles des tombeauxde la petite chapelle de Temes,fabriqués à l’aide de pierres italiennesqui servaient de ballast aux navires quidébarquaient ici, sont la preuve d’uncommerce autrefois florissant. À partirdu VIe siècle, après le départ desRomains, des esthètes commencèrent às’installer dans les vallées pour y vivreen ermites. De nombreuses églisesromanes magnifiques furent érigées surles pentes. La vinification connut ungrand essor avec l’arrivée d’ordresmonastiques, notamment de moinesde Cluny.

Adega Algueira, dans un village appeléSober, élabore un coupage de 45 % degodello et 45 % d’albariño, complétéspar le cépage treixedura. Lepropriétaire, Fernando AlgueiraGonzález, exploite 10 hectares. « Laqualité minérale de nos sols esttoujours très présente dans nos vins.Nous avons beaucoup d’ardoise. » Lesterrasses aménagées sur ces pentesexcessivement abruptes sont appeléesbancales. Fernando fait fermenter sesblancs en barrique, puis les laissemûrir pendant un an dans des fûtsfrançais de 750 litres. Il obtient desarômes mielleux de bois, teintés denotes acides de pamplemousse.« Le godello est extraordinaire, ilproduit toujours des arômes fruitéscitronnés et une belle structure »,affirme Fernando.« Si nous pouvions travailler comme lefaisaient nos ancêtres dans lesvignobles, ce serait formidable, mais ilsy consacraient tant de temps etd’efforts physiques que ce seraitimpossible aujourd’hui. » Leur pointfaible était la mauvaise qualité de l’eau,qui empêchait une bonne vinification,explique-t-il. Aujourd’hui, les chaissont propres et capables d’élaborer degrands vins, mais les vignobles nepeuvent plus être cultivés à la maincomme autrefois, souligne Fernando.Dominio do Bibei, à Langullo,Manzaneda, se trouve à 550 mètresau-dessus du niveau de la mer, sur des

collines entourées de vignobles et debroussailles. Laura Lorenzo, ingénieuragronome de 26 ans spécialisée enviticulture, y travaille depuis cinq ansen employant des engrais biologiqueset en taillant la vigne à la pleine lune.« En Galice, la pleine lune a toujoursété considérée propice pour la tailleou pour se faire couper les cheveux »,explique-t-elle. Elle cultive30 hectares, donc cinq de très vieillesvignes. La cuvée 2008 de Bibeiro, à700 mètres au-dessus du niveau de lamer (échantillon de cuve), possèdeune vivacité aromatique spectaculaire,regorgeant de fraîcheur et de fruité puret mûr. Deux clones de godello sontemployés dans son élaboration. Lebâtonnage régulier permet d’obtenirun vin bien en bouche.Javier Domínguez, le propriétaire duchai, affirme que le godello est « lemeilleur cépage blanc d’Espagne, sansaucun doute ». Après la vendange, leraisin est entreposé pendant trois joursdans des chambres de refroidissementet de séchage. « Lorsqu’il pleut, ceschambres sont cruciales », expliqueJavier. Ici, la vinification s’effectue pargravité. Le raisin est trié à la main surune table, puis pressé dans un petitpressoir pneumatique. Le moût estensuite transvasé dans de grands fûtsen bois, puis dans des foudresautrichiens et finalement dans des« œufs » de Nomblot. Le FrançaisMarc Nomblot s’est spécialisé dans lafabrication de cuves en béton dans lesannées 1980. Ses cuves en formed’œuf se distinguent par uneremarquable inertie thermique, unemicro-oxydation contrôlée et uneneutralité aromatique. Elles sontdevenues très à la mode, notammentchez les producteurs biodynamiques

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qui pensent que la forme contribue àtransmettre les qualités minérales duterroir, à renforcer la charpente du vinainsi que l’intensité du fruité.L’échantillon de la cuvée 2008, issue devignes cultivées dans la plaine fertile,est encore marqué par le bois maisexhale un bouquet spectaculaire. « Lesterrains fertiles tendent à produire uneacidité moins satisfaisante », expliqueJavier. Pourtant, ce vin dégage deremarquables tons herbacés, avec unenote de chardon prononcée.L’échantillon de la cuvée 2007 estréellement spectaculaire. Il a séjournésix mois dans du chêne neuf, puis septmois dans du vieux chêne et sept moisdans des foudres autrichiens, avant depasser sept mois dans un œuf en

béton. « Il vieillira ensuite 14 moisen bouteille », précise Javier.Le Lapena 2006, qui seracommercialisé en novembre 2009,est très sophistiqué, avec un bouquetunique et assez particulier. Il estglycérique au palais, avec une notepresque salée. L’acidité, marquée etcomplexe, semble très propice àl’évolution future de ce vin. Sara Pérez(Spain Gourmetour, nº 53) et RenéBarbier collaborent au sein de ceprojet. Lorsque Javier leur a demandéde l’aider, ils sont venus dansl’intention de refuser, mais ils ont vitechangé d’avis en découvrant l’ardoise,explique-t-il.Le Lapena 2005 est sur le marchédepuis novembre 2008 et semble

pouvoir se bonifier à l’avenir. Mieuxvaut le garder en cave pour le moment.Quant au Lapena 2004, il commencetout juste à s’épanouir. Le bois y estencore présent, mais le bouquetcommence à émerger doucement. Unvin à suivre.Javier et Laura admettent tous deuxqu’il y a eu un problème avec leLapena 2003. Assez spectaculaire enbouche, il est chargé d’un arômesulfureux provoqué par « un problèmeavec la levure, en avons-nous conclu ».Le Lapena 2002 a été le premier vinaffichant une fusion totale du bois, dufruité et de l’acidité. L’intégrationaromatique est remarquable et intense,avec une fragrance tertiaire. Il possèdeune belle acidité et un fruité prononcé,

ainsi qu’une longue finale, indiquantclairement que le godello est un vin declasse mondiale. Cela montre que legodello, très agréable à boire quand ilest jeune, peut également êtreextraordinaire lorsqu’il est vinifiépour vieillir. L’attente en vaudrasûrement la peine.

Harold Heckle est correspondantd’Associated Press. Depuis son premierséjour en Espagne lorsqu’il était étudiant,il est toujours resté en contact avec laculture gastronomique espagnole.Il a travaillé comme journaliste sur cethème pour la BBC et des magazines telsque Decanter, Wine Magazine etWine & Spirits.

www.dovaldeorras.comConseil régulateur DO Valdeorras(espagnol).

www.ribeirasacra.orgCette page permet d’accéder auxinformations sur la DO Ribeira Sacraainsi qu’au portail touristique de laRibeira Sacra (anglais, espagnol,galicien).

www.crdobierzo.esConseil régulateur de la DO Bierzo(espagnol).

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GODELLO

VIN

qui pensent que la forme contribue àtransmettre les qualités minérales duterroir, à renforcer la charpente du vinainsi que l’intensité du fruité.L’échantillon de la cuvée 2008, issue devignes cultivées dans la plaine fertile,est encore marqué par le bois maisexhale un bouquet spectaculaire. « Lesterrains fertiles tendent à produire uneacidité moins satisfaisante », expliqueJavier. Pourtant, ce vin dégage deremarquables tons herbacés, avec unenote de chardon prononcée.L’échantillon de la cuvée 2007 estréellement spectaculaire. Il a séjournésix mois dans du chêne neuf, puis septmois dans du vieux chêne et sept moisdans des foudres autrichiens, avant depasser sept mois dans un œuf en

béton. « Il vieillira ensuite 14 moisen bouteille », précise Javier.Le Lapena 2006, qui seracommercialisé en novembre 2009,est très sophistiqué, avec un bouquetunique et assez particulier. Il estglycérique au palais, avec une notepresque salée. L’acidité, marquée etcomplexe, semble très propice àl’évolution future de ce vin. Sara Pérez(Spain Gourmetour, nº 53) et RenéBarbier collaborent au sein de ceprojet. Lorsque Javier leur a demandéde l’aider, ils sont venus dansl’intention de refuser, mais ils ont vitechangé d’avis en découvrant l’ardoise,explique-t-il.Le Lapena 2005 est sur le marchédepuis novembre 2008 et semble

pouvoir se bonifier à l’avenir. Mieuxvaut le garder en cave pour le moment.Quant au Lapena 2004, il commencetout juste à s’épanouir. Le bois y estencore présent, mais le bouquetcommence à émerger doucement. Unvin à suivre.Javier et Laura admettent tous deuxqu’il y a eu un problème avec leLapena 2003. Assez spectaculaire enbouche, il est chargé d’un arômesulfureux provoqué par « un problèmeavec la levure, en avons-nous conclu ».Le Lapena 2002 a été le premier vinaffichant une fusion totale du bois, dufruité et de l’acidité. L’intégrationaromatique est remarquable et intense,avec une fragrance tertiaire. Il possèdeune belle acidité et un fruité prononcé,

ainsi qu’une longue finale, indiquantclairement que le godello est un vin declasse mondiale. Cela montre que legodello, très agréable à boire quand ilest jeune, peut également êtreextraordinaire lorsqu’il est vinifiépour vieillir. L’attente en vaudrasûrement la peine.

Harold Heckle est correspondantd’Associated Press. Depuis son premierséjour en Espagne lorsqu’il était étudiant,il est toujours resté en contact avec laculture gastronomique espagnole.Il a travaillé comme journaliste sur cethème pour la BBC et des magazines telsque Decanter, Wine Magazine etWine & Spirits.

www.dovaldeorras.comConseil régulateur DO Valdeorras(espagnol).

www.ribeirasacra.orgCette page permet d’accéder auxinformations sur la DO Ribeira Sacraainsi qu’au portail touristique de laRibeira Sacra (anglais, espagnol,galicien).

www.crdobierzo.esConseil régulateur de la DO Bierzo(espagnol).

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Face à un rayon proposant desdouzaines de variétés et descentaines de producteurs,l’amateur de vins se trouveconfronté à un choix décon-certant. La recherche a montréque le consommateur avertifait d’abord sa sélection enfonction de la région, puis duprix de la bouteille. Mais, dansun marché très visuel, l’éti-quette du produit peut aussijouer un rôle prépondérant.Que nous l’admettions ou non,nous sommes majoritaires àpenser, du moins inconsciem-ment, que l’habit fait le moine.

VINet design

TexteSuzanne Wales/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

PhotosJuan Manuel Sanz/©ICEX

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Face à un rayon proposant desdouzaines de variétés et descentaines de producteurs,l’amateur de vins se trouveconfronté à un choix décon-certant. La recherche a montréque le consommateur avertifait d’abord sa sélection enfonction de la région, puis duprix de la bouteille. Mais, dansun marché très visuel, l’éti-quette du produit peut aussijouer un rôle prépondérant.Que nous l’admettions ou non,nous sommes majoritaires àpenser, du moins inconsciem-ment, que l’habit fait le moine.

VINet design

TexteSuzanne Wales/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

PhotosJuan Manuel Sanz/©ICEX

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VIN ET DESIGN

VINS

Traditionnellement, les efforts avant-gardistes en matière de créationd’étiquettes et de marques se limitaientaux vins du Nouveau Monde. Lesexperts citent régulièrement le succèsphénoménal connu par l’étiquetteaustralienne de Yellow Tail, qui avecson motif de kangourou, inspiré de laculture aborigène, est devenu laréférence en matière d’étiquetage desvins contemporains. Évidemment, lesvins du Nouveau Monde ont l’avantagede partir d’une page blanche. Enl’absence de toute perspectivehistorique, les experts du marketing setrouvent dans la position idéale depouvoir donner à leur produit unetouche plus fraîche et moinssolennelle. L’Espagne, de son côté, estriche d’une viniculture millénaire qui atoutefois su, en quelques décennies, seréinventer, en parallèle à la renaissancemoderne du monde de l’art, de lapolitique et de toutes les facettes de laculture. L’image de ses vins commenceà refléter cette évolution.

Le choixdu consommateurJ’ai testé cette hypothèse à La Carte desVins, un magasin vendant des crus dumonde entier et situé dans le quartierbarcelonais d’El Born. Etant donné laprésence massive de touristes et lenombre important de résidents locauxétrangers, on peut sans aucun douteavancer que ses clients choisissent leurvin en fonction de l’image qu’ilprojette. Je commence par demanderau sommelier, Gareth York, sil’Espagne suit la tendance à unétiquetage moderne et attirant desvins. « Évidemment, me répond-il, ilsuffit de voir la différence. Ici, vousavez les vins français », m’indique-t-ilen désignant un casier de bouteillesaffichant sur fond blanc différentschâteaux, armoiries et fontes à

empattements lourds. « Et ici, les vinsespagnols. »Un premier regard rapide révèle desreproductions miniature d’œuvresmodernes, des dessins attirants, unepalette de coloris éclatants, unsymbolisme farfelu et d’autreséléments graphiques et de design forts.Je demande ensuite à York quelles sontles bouteilles qui se sont récemmentvendues le mieux. Il m’indique unLautus, vin à base de tempranillo dudomaine Guelbenzu en Navarre dontl’étiquette rose pâle et or, richementdécorée, rappelle un vieux manuscrit.« Ça marche vraiment bien »,poursuit-il. « L’étiquette est presquemaçonnique, tout en restant féminineet mystérieuse. » Parmi les meilleuresventes figure aussi le Dehesa Gago ‘G’,dont l’étiquette minimaliste estcomposée d’un grand G majusculeblanc posé sur un fond noir, unecréation du viticulteur rebelle TelmoRodríguez. Mais le cru que tous se sontarraché a été le Vi de Gel, un vin douxcatalan présenté dans une élégantebouteille noire et élancée. Selon York,ses clients en achetaient à la douzaineavant même de demander, une fois à lacaisse, de quel type de vin il s’agissait.« Une bonne étiquette peut faire oudéfaire un vin », conclut-il. « Et laplupart des consommateurs admettentd’ailleurs qu’il est parfois leur seulcritère d’achat. »

Un sens du designcontemporainÉtant donné le grand héritage local enmatière d’art et de design et le don dela Catalogne pour les techniquesd’étiquetage, il n’est sans doute passurprenant que certaines des images demarque de vins les mieux conçuesproviennent des vignobles de la région.Parmi les exemples les plus marquantsfigure L’Origan, un vin mousseux, un

cava à l’étiquette de style Art nouveauet dont la bouteille ressemble à unflacon de parfum. N’oublions pasPardas, avec son icône de jabalí(sanglier) espiègle, et Petit Grealo,dont l’étiquette, différente et necomportant qu’un court texte(imaginée par le graphiste JoanBertrán, basé à Barcelone), a étéconçue pour refléter le caractère« avancé » du vin, mélange de syrah,merlot et cabernet sauvignon. Mêmela maison Torres, une bodega de pointequi n’est normalement pas associée àune production aussi novatrice, acommencé à concurrencercette avant-garde.« Pour moi, l’univers du vin espagnol abeaucoup changé ces dernièresannées », affirme Miguel Torres,directeur du Département marketing del’entreprise. « Et son image a évolué enconséquence. » La sociétécommercialise actuellement deux vins,rompant ainsi avec la tradition Torres,vieille de 130 ans. Le premier s’appelleCeleste. Élaboré à partir des raisins del’unique vignoble du domaine dans laDO Ribera del Duero, il dessine leportrait séduisant du ciel pendant lavendange. Nerola, quant à lui, est uncru biologique dont l’étiquette est unhommage aux formes sinueuses (ettout aussi naturelles) de l’architecturemoderniste de Barcelone. En pleinevandange, l’étiquette a été modifiée etredimensionnée pour couvrir toute lacirconférence de la bouteille, à lamanière dont un élément décoratifs’enroulerait autour d’une colonne,imitant une canne de Noël. « Lesventes ont progressé dès sa sortie »,poursuit Torres. « On vend toujoursplus d’un produit quand il sedémarque des autres. Tous les 2 ou3 ans, nous revoyons nos étiquettes.Si vous regardez l’étiquette de Viña Solaujourd’hui, elle n’a rien à voir aveccelle d’il y a 40 ans », déclare-t-il, en

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faisant référence au best-seller blancmoyen de gamme de la maison. « Pource faire, nous apportons desmodifications subtiles aux détails,comme la taille de la police et lapalette de coloris. Bien sûr, il y acertaines bouteilles qu’on peut changerplus que d’autres. Nous ne touchonspas aux crus les plus traditionnels. »La société Espelt, originaire de larégion vinicole relativement jeuned’Empordà, ne pouvait s’inspirer d’unetelle tradition. À la place, elle a engagéJavier Mariscal, fameux créateurd’image catalan qui a accédé à larenommée internationale avec Coby, lechien mascotte des Jeux olympiquesde 1992, organisés à Barcelone. PourEspelt, Mariscal a créé une image quirésume la culture jeune et joyeuserégnant au sein de la bodega. Lesétiquettes et autres supportspromotionnels utilisent un ensemblebariolé de figures longilignes labourantles champs, récoltant les raisins etsautillant dans les vignobles,un verre à la main.« Au départ, le plus important à nosyeux était de créer une image demarque pour notre produit. Nousn’avions ni crédibilité, ni idéeprécise », explique Xavier Cepero,directeur général d’Espelt.« Historiquement, L’Empordà atoujours été étroitement associé aumonde de l’art ; chaque village a sonpropre artiste ou écrivain, si vousvoulez. Nous avons donc contactéJavier Mariscal pour donner naissanceà un concept moderne et plein de vie.C’était risqué. »Cepero admet que la fraîcheur etl’insouciance véhiculées par l’imaged’Espelt ont probablement fait fuirquelques clients potentiels et que lessommeliers plus conservateurs onttendance à ne pas s’intéresser à sesvins. Mais l’avantage est qu’elle aamélioré les ventes du domaine à

VIN ET DESIGN

VINS

Pardas, avecson icône desanglier espiègle

Nerola est un crubiologique dontl’étiquette est unhommage auxformessinueuses del’architecturemoderniste deBarcelone

Celeste, dontl’étiquettedessine leportraitséduisant duciel pendant lavendange

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VIN ET DESIGN

VINS

Traditionnellement, les efforts avant-gardistes en matière de créationd’étiquettes et de marques se limitaientaux vins du Nouveau Monde. Lesexperts citent régulièrement le succèsphénoménal connu par l’étiquetteaustralienne de Yellow Tail, qui avecson motif de kangourou, inspiré de laculture aborigène, est devenu laréférence en matière d’étiquetage desvins contemporains. Évidemment, lesvins du Nouveau Monde ont l’avantagede partir d’une page blanche. Enl’absence de toute perspectivehistorique, les experts du marketing setrouvent dans la position idéale depouvoir donner à leur produit unetouche plus fraîche et moinssolennelle. L’Espagne, de son côté, estriche d’une viniculture millénaire qui atoutefois su, en quelques décennies, seréinventer, en parallèle à la renaissancemoderne du monde de l’art, de lapolitique et de toutes les facettes de laculture. L’image de ses vins commenceà refléter cette évolution.

Le choixdu consommateurJ’ai testé cette hypothèse à La Carte desVins, un magasin vendant des crus dumonde entier et situé dans le quartierbarcelonais d’El Born. Etant donné laprésence massive de touristes et lenombre important de résidents locauxétrangers, on peut sans aucun douteavancer que ses clients choisissent leurvin en fonction de l’image qu’ilprojette. Je commence par demanderau sommelier, Gareth York, sil’Espagne suit la tendance à unétiquetage moderne et attirant desvins. « Évidemment, me répond-il, ilsuffit de voir la différence. Ici, vousavez les vins français », m’indique-t-ilen désignant un casier de bouteillesaffichant sur fond blanc différentschâteaux, armoiries et fontes à

empattements lourds. « Et ici, les vinsespagnols. »Un premier regard rapide révèle desreproductions miniature d’œuvresmodernes, des dessins attirants, unepalette de coloris éclatants, unsymbolisme farfelu et d’autreséléments graphiques et de design forts.Je demande ensuite à York quelles sontles bouteilles qui se sont récemmentvendues le mieux. Il m’indique unLautus, vin à base de tempranillo dudomaine Guelbenzu en Navarre dontl’étiquette rose pâle et or, richementdécorée, rappelle un vieux manuscrit.« Ça marche vraiment bien »,poursuit-il. « L’étiquette est presquemaçonnique, tout en restant féminineet mystérieuse. » Parmi les meilleuresventes figure aussi le Dehesa Gago ‘G’,dont l’étiquette minimaliste estcomposée d’un grand G majusculeblanc posé sur un fond noir, unecréation du viticulteur rebelle TelmoRodríguez. Mais le cru que tous se sontarraché a été le Vi de Gel, un vin douxcatalan présenté dans une élégantebouteille noire et élancée. Selon York,ses clients en achetaient à la douzaineavant même de demander, une fois à lacaisse, de quel type de vin il s’agissait.« Une bonne étiquette peut faire oudéfaire un vin », conclut-il. « Et laplupart des consommateurs admettentd’ailleurs qu’il est parfois leur seulcritère d’achat. »

Un sens du designcontemporainÉtant donné le grand héritage local enmatière d’art et de design et le don dela Catalogne pour les techniquesd’étiquetage, il n’est sans doute passurprenant que certaines des images demarque de vins les mieux conçuesproviennent des vignobles de la région.Parmi les exemples les plus marquantsfigure L’Origan, un vin mousseux, un

cava à l’étiquette de style Art nouveauet dont la bouteille ressemble à unflacon de parfum. N’oublions pasPardas, avec son icône de jabalí(sanglier) espiègle, et Petit Grealo,dont l’étiquette, différente et necomportant qu’un court texte(imaginée par le graphiste JoanBertrán, basé à Barcelone), a étéconçue pour refléter le caractère« avancé » du vin, mélange de syrah,merlot et cabernet sauvignon. Mêmela maison Torres, une bodega de pointequi n’est normalement pas associée àune production aussi novatrice, acommencé à concurrencercette avant-garde.« Pour moi, l’univers du vin espagnol abeaucoup changé ces dernièresannées », affirme Miguel Torres,directeur du Département marketing del’entreprise. « Et son image a évolué enconséquence. » La sociétécommercialise actuellement deux vins,rompant ainsi avec la tradition Torres,vieille de 130 ans. Le premier s’appelleCeleste. Élaboré à partir des raisins del’unique vignoble du domaine dans laDO Ribera del Duero, il dessine leportrait séduisant du ciel pendant lavendange. Nerola, quant à lui, est uncru biologique dont l’étiquette est unhommage aux formes sinueuses (ettout aussi naturelles) de l’architecturemoderniste de Barcelone. En pleinevandange, l’étiquette a été modifiée etredimensionnée pour couvrir toute lacirconférence de la bouteille, à lamanière dont un élément décoratifs’enroulerait autour d’une colonne,imitant une canne de Noël. « Lesventes ont progressé dès sa sortie »,poursuit Torres. « On vend toujoursplus d’un produit quand il sedémarque des autres. Tous les 2 ou3 ans, nous revoyons nos étiquettes.Si vous regardez l’étiquette de Viña Solaujourd’hui, elle n’a rien à voir aveccelle d’il y a 40 ans », déclare-t-il, en

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faisant référence au best-seller blancmoyen de gamme de la maison. « Pource faire, nous apportons desmodifications subtiles aux détails,comme la taille de la police et lapalette de coloris. Bien sûr, il y acertaines bouteilles qu’on peut changerplus que d’autres. Nous ne touchonspas aux crus les plus traditionnels. »La société Espelt, originaire de larégion vinicole relativement jeuned’Empordà, ne pouvait s’inspirer d’unetelle tradition. À la place, elle a engagéJavier Mariscal, fameux créateurd’image catalan qui a accédé à larenommée internationale avec Coby, lechien mascotte des Jeux olympiquesde 1992, organisés à Barcelone. PourEspelt, Mariscal a créé une image quirésume la culture jeune et joyeuserégnant au sein de la bodega. Lesétiquettes et autres supportspromotionnels utilisent un ensemblebariolé de figures longilignes labourantles champs, récoltant les raisins etsautillant dans les vignobles,un verre à la main.« Au départ, le plus important à nosyeux était de créer une image demarque pour notre produit. Nousn’avions ni crédibilité, ni idéeprécise », explique Xavier Cepero,directeur général d’Espelt.« Historiquement, L’Empordà atoujours été étroitement associé aumonde de l’art ; chaque village a sonpropre artiste ou écrivain, si vousvoulez. Nous avons donc contactéJavier Mariscal pour donner naissanceà un concept moderne et plein de vie.C’était risqué. »Cepero admet que la fraîcheur etl’insouciance véhiculées par l’imaged’Espelt ont probablement fait fuirquelques clients potentiels et que lessommeliers plus conservateurs onttendance à ne pas s’intéresser à sesvins. Mais l’avantage est qu’elle aamélioré les ventes du domaine à

VIN ET DESIGN

VINS

Pardas, avecson icône desanglier espiègle

Nerola est un crubiologique dontl’étiquette est unhommage auxformessinueuses del’architecturemoderniste deBarcelone

Celeste, dontl’étiquettedessine leportraitséduisant duciel pendant lavendange

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l’investissement de départ du coupledans l’entreprise, en anciennes pesetas.A l’époque, un « kilo » représentait unmillion de pesetas en argot.Aujourd’hui, « 4Kilos » équivalent à24 000 euros). « Nous avons doncinvesti dans notre page Internet. Nousavons décidé de nous amuser avec ceprojet et de faire quelque chose dedifférent. Pour moi, la culture du vinest un peu ennuyeuse et les étiquettesmodernes ont souvent l’air engoncés.Ils se sont donc inspirés des vins duchâteau français Mouton Rothschild,les premiers à avoir utilisé des œuvresd’art sur leurs étiquettes, et ontdemandé à deux artistescontemporains connus la permissiond’utiliser leurs créations sur leursbouteilles. Conséquence : les crus4Kilos affichent l’imagerie fleurie etmystique de l’artiste canadien MarcelDzama, alors que les millésimes12Volts font appel au travail avant-gardiste et proche du graffiti del’illustrateur Gary Baseman, installé àLos Angeles. Tous deux sont despersonnalités pionnières de la scèneartistique et du design underground.Visuellement saisissants, leursétiquettes pour 4Kilos ont provoquéune révolution en Espagne, créant unlien entre les bons vins et la culturepop, tout en permettant à la société des’implanter sur les marchés du

Nouveau Monde (4Kilos exporteenviron 50 % de sa productionannuelle de 10 000 bouteilles).

L’art du vinLa relation entre art et viniculture estaussi ancienne que le savoir lui-même.Les Romains représentaientrégulièrement Baco, dieu du vin, surtous types d’artefacts pendant que lespeintres de la Renaissance soulignaientle lien entre la consommation de vin etle processus créatif (« Je me régale devin et de pain, un festin », aurait ditMichel-Ange). Les pionniers de l’artmoderne ont encore renforcé ce lienavec l’image de l’artiste bohème vivantà la dure, se forgeant une place dans laconscience collective.En Espagne, la bodega aragonaiseEnate est l’un des exemples de cetteutilisation — reprise de l’idée propre àcertains propriétaires de chai du XIXe

siècle ou à ceux, originaires de Jerez,du début du XXe siècle — de l’artcontemporain comme élement del’image de marque dans la DOSomontano (Spain Gourmetour, n° 63).Ses étiquettes, frappantes etintemporelles, affichent des œuvres decertains des artistes internationaux lesplus connus, dont Antoni Tàpies,Eduardo Chillida et Antonio Saura.Fondée en 1992, cette entreprisefamiliale a décidé, dès le départ, desortir du moule. « A l’époque, lemarché du vin était très traditionnel »,explique Ramon Justes, directeurartistique et des communicationsd’Enate. « Il y a tellement de bodegasen Espagne qu’il faut se faire uneplace. Nous y sommes parvenus enrompant avec la tradition et en optantpour une communication moderne. »Enate est alors partie à la recherched’artistes intéressés par son approche.Elle procède toujours de la mêmefaçon aujourd’hui. Chacun goûte le vinet crée cinq tableaux inspirés dessensations ressenties. La société choisitensuite une œuvre destinée àl’étiquette, mais achète tous les

l’étranger (Espelt exporte 50 % de saproduction annuelle, forte de 500 000bouteilles) et qu’elle a été essentiellepour attirer les consommateurs plusjeunes et plus sensibles au design.Selon Javier, la marque estparticulièrement populaire auJapon où l’imagerie proche de labande dessinée de Mariscal touchela génération ayant grandi avecles mangas.

Influencesd’avant-gardeSur l’île méditerranéenne de Majorque,deux sociétés vinicoles ont tout misésur l’esthétique de l’outsider. L’imageried’Ánima Negra, centrée sur le diable etla religion, s’est inspirée du cépage àfaible rendement majoritairementutilisé pour l’élaboration de ses vins :l’autochtone callet, dont la couleuroscille entre le pourpre et le noir.Avec le logo ‘AN’ inscrit en rougesur un fond noir d’encre, les étiquettes,grossièrement découpées, donnentl’impression d’avoir été faitessur mesure pour une réunionde gothiques.Du côté plus léger de la gamme setrouve 4Kilos, une petite bodega chiccréée en 2006 par Francesc Grimalt(qui avait auparavant travaillé pourÁnima Negra et à qui la variété calletdoit en grande partie d’avoir été sauvéede l’oubli) et Sergio Caballero, l’un desfondateurs du festival barcelonaisSónar, rassemblement multimédia trèscouru de musique moderne. Étantdonné leurs origines, il n’est pasétonnant qu’ils aient choisi uneapproche inédite pour lacommercialisation de leurs deuxmarques (4Kilos et 12Volts). Le site de4Kilos propose d’utiles fonctionnalitéscomme une plate-forme vidéo YouTube et des liens Google Earth versles vignobles.« Nous n’avions pas les moyensd’engager un architecte renommé pournotre bodega », rigole Sergio Caballero(l’appellation « 4Kilos » vient de

Les étiquettesd’Espelt utilisentun ensemblebariolé de figureslongilignes quirésument laculture jeune etjoyeuse régnantau sein de labodega

Les crus 4Kilosaffichentl’imagerie fleurieet mystique del’artiste canadienMarcel Dzama,alors que lesmillésimes12Volts fontappel au travailavant-gardiste etproche du graffitide l’illustrateurGary Baseman,installé à LosAngeles

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l’investissement de départ du coupledans l’entreprise, en anciennes pesetas.A l’époque, un « kilo » représentait unmillion de pesetas en argot.Aujourd’hui, « 4Kilos » équivalent à24 000 euros). « Nous avons doncinvesti dans notre page Internet. Nousavons décidé de nous amuser avec ceprojet et de faire quelque chose dedifférent. Pour moi, la culture du vinest un peu ennuyeuse et les étiquettesmodernes ont souvent l’air engoncés.Ils se sont donc inspirés des vins duchâteau français Mouton Rothschild,les premiers à avoir utilisé des œuvresd’art sur leurs étiquettes, et ontdemandé à deux artistescontemporains connus la permissiond’utiliser leurs créations sur leursbouteilles. Conséquence : les crus4Kilos affichent l’imagerie fleurie etmystique de l’artiste canadien MarcelDzama, alors que les millésimes12Volts font appel au travail avant-gardiste et proche du graffiti del’illustrateur Gary Baseman, installé àLos Angeles. Tous deux sont despersonnalités pionnières de la scèneartistique et du design underground.Visuellement saisissants, leursétiquettes pour 4Kilos ont provoquéune révolution en Espagne, créant unlien entre les bons vins et la culturepop, tout en permettant à la société des’implanter sur les marchés du

Nouveau Monde (4Kilos exporteenviron 50 % de sa productionannuelle de 10 000 bouteilles).

L’art du vinLa relation entre art et viniculture estaussi ancienne que le savoir lui-même.Les Romains représentaientrégulièrement Baco, dieu du vin, surtous types d’artefacts pendant que lespeintres de la Renaissance soulignaientle lien entre la consommation de vin etle processus créatif (« Je me régale devin et de pain, un festin », aurait ditMichel-Ange). Les pionniers de l’artmoderne ont encore renforcé ce lienavec l’image de l’artiste bohème vivantà la dure, se forgeant une place dans laconscience collective.En Espagne, la bodega aragonaiseEnate est l’un des exemples de cetteutilisation — reprise de l’idée propre àcertains propriétaires de chai du XIXe

siècle ou à ceux, originaires de Jerez,du début du XXe siècle — de l’artcontemporain comme élement del’image de marque dans la DOSomontano (Spain Gourmetour, n° 63).Ses étiquettes, frappantes etintemporelles, affichent des œuvres decertains des artistes internationaux lesplus connus, dont Antoni Tàpies,Eduardo Chillida et Antonio Saura.Fondée en 1992, cette entreprisefamiliale a décidé, dès le départ, desortir du moule. « A l’époque, lemarché du vin était très traditionnel »,explique Ramon Justes, directeurartistique et des communicationsd’Enate. « Il y a tellement de bodegasen Espagne qu’il faut se faire uneplace. Nous y sommes parvenus enrompant avec la tradition et en optantpour une communication moderne. »Enate est alors partie à la recherched’artistes intéressés par son approche.Elle procède toujours de la mêmefaçon aujourd’hui. Chacun goûte le vinet crée cinq tableaux inspirés dessensations ressenties. La société choisitensuite une œuvre destinée àl’étiquette, mais achète tous les

l’étranger (Espelt exporte 50 % de saproduction annuelle, forte de 500 000bouteilles) et qu’elle a été essentiellepour attirer les consommateurs plusjeunes et plus sensibles au design.Selon Javier, la marque estparticulièrement populaire auJapon où l’imagerie proche de labande dessinée de Mariscal touchela génération ayant grandi avecles mangas.

Influencesd’avant-gardeSur l’île méditerranéenne de Majorque,deux sociétés vinicoles ont tout misésur l’esthétique de l’outsider. L’imageried’Ánima Negra, centrée sur le diable etla religion, s’est inspirée du cépage àfaible rendement majoritairementutilisé pour l’élaboration de ses vins :l’autochtone callet, dont la couleuroscille entre le pourpre et le noir.Avec le logo ‘AN’ inscrit en rougesur un fond noir d’encre, les étiquettes,grossièrement découpées, donnentl’impression d’avoir été faitessur mesure pour une réunionde gothiques.Du côté plus léger de la gamme setrouve 4Kilos, une petite bodega chiccréée en 2006 par Francesc Grimalt(qui avait auparavant travaillé pourÁnima Negra et à qui la variété calletdoit en grande partie d’avoir été sauvéede l’oubli) et Sergio Caballero, l’un desfondateurs du festival barcelonaisSónar, rassemblement multimédia trèscouru de musique moderne. Étantdonné leurs origines, il n’est pasétonnant qu’ils aient choisi uneapproche inédite pour lacommercialisation de leurs deuxmarques (4Kilos et 12Volts). Le site de4Kilos propose d’utiles fonctionnalitéscomme une plate-forme vidéo YouTube et des liens Google Earth versles vignobles.« Nous n’avions pas les moyensd’engager un architecte renommé pournotre bodega », rigole Sergio Caballero(l’appellation « 4Kilos » vient de

Les étiquettesd’Espelt utilisentun ensemblebariolé de figureslongilignes quirésument laculture jeune etjoyeuse régnantau sein de labodega

Les crus 4Kilosaffichentl’imagerie fleurieet mystique del’artiste canadienMarcel Dzama,alors que lesmillésimes12Volts fontappel au travailavant-gardiste etproche du graffitide l’illustrateurGary Baseman,installé à LosAngeles

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originaux qui seront ultérieurementexposés dans la galerie intégrée ausiège de la société, dont l’architecture,œuvre de Jesús Manzanares, architectebasé à Madrid et connu pour sontravail dans des vignobles de pointe,est aussi moderne qu’étonnante.L’engagement fort du domaine enfaveur de l’art contemporain se traduitégalement dans l’existence d’unebourse, décernée une fois par an, à unartiste prometteur et d’expositionstemporaires de la collection, organiséesdans les plus grands centres culturelsdu pays.Outre son admirable activité demécénat, l’engagement d’Enate enfaveur de l’art contemporain lui apermis d’occuper une place privilégiéesur le marché (aujourd’hui, la sociétéproduit plus de 2,5 millions debouteilles par an, dont 20 % sontexportées). « Nous essayons detransmettre plusieurs messages »,poursuit Justes. « Le premier est quenous proposons un produitcontemporain de grande qualité. Ledeuxième est qu’il s’agit d’un produit àpartager, que vous devez être fier demettre sur votre table. Et puis, l’artcontemporain n’est lié à aucuneculture particulière, ce qui est aussi unavantage. Cette même œuvre d’artaurait pu être créée par un artistechinois ou de n’importe quelle autrenationalité. »

Exporter une imageMême si Enate a su créer une imagelibre de toute contrainte culturelle,nombreuses sont encore les entreprisespour lesquelles cela reste un vrai défi.L’exportation est une activité vitalepour la plupart des viniculteurs

espagnols, puisqu’ils produisent engénéral des volumes bien supérieurs àceux nécessaires à la consommationlocale. Catavino est un cabinet deconseil qui aide les producteursespagnols à entrer sur les marchésétrangers. Ryan Opaz, P-DG deCatavino, affirme que souvent desvinificateurs viennent lui présenterleurs très belles bouteilles en étant sûrsqu’ils en vendront beaucoup, grâce àleur design. Dans son bureau, situédans la Catalogne rurale, il poursuit enrigolant : « les lois en matièred’étiquetage en Espagne se sontconsidérablement assouplies cesdernières années. Il existe doncbeaucoup de jolies étiquettes, mais quien font trop. Pour de nombreuxproducteurs, je pense qu’il s’agit demettre la charrue avant les bœufs ».De l’avis d’Opaz, sur la scèneinternationale, le vin espagnol, dont lanature est intrinsèquement régionale,ne présente pas une image cohérenteet commercialisable. Selon lui, lesproducteurs doivent réfléchir avec soinà leur image avant de se lancer àl’export et, d’une manière générale,créer une image personnalisée pourchacun de leurs marchés.Le Madrilène Javier Romero, du WineBranding Group, est d’accord aveccette seconde recommandation. Il apassé les 15 dernières années àconcevoir des étiquettes de vinespagnoles destinés au marchéaméricain.« Si vous voulez réussir ici, vousdevez comprendre comment réfléchitle consommateur », déclare Romerodepuis son atelier du Connecticut.« En Espagne, la conscience de cequ’est le vin est bien plus forte. Il y ena toujours sur la table et dès notre

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VIN ET DESIGN

VINS

L’emballage est la peau des produits. Ilfournit les principales informations qu’exigele citoyen-consommateur, toujours mieuxinformé, dans une société chaque jour plusexigeante et normalisée.

En même temps, le conditionnement est unespace de séduction. La diversité de lagamme de produits encourage uneconcurrence féroce et une forte sélectionnaturelle. Les marchandises incapablesd’attirer l’attention de l’acheteur, d’éveillerson désir et de susciter l’achat, sontrapidement remplacées par d’autres, larotation au niveau des points de vente étanttoujours plus rapide. Soit les produits sevendent, soit ils disparaissent.

Le marché est animé par une logiqueinexorable. La qualité est nécessaire, maispas suffisante. Elle doit apparaîtrenettement, ne laissant aucune place audoute. C’est ce qui explique, en partie, quel’emballage soit l’un des supportstraditionnels où le graphisme et lesstratégies de marque se sont rencontrés, unsupport marqué tant par des considérationséconomiques que culturelles.

Cependant, les concepteurs doivent iciéviter certains effets collatéraux. La quantitéet le bruit risquent de nuire à la qualité. Si laseule chose qui importe est de se faire voir,l’esthétisme des messages et leuradaptation aux contenus finissent par êtresacrifiés sur l’autel du volume et du cri,devenus valeurs uniques. Des designspropres et conceptuels imaginés parRaymond Loewy pour Lucky Strike auximages d’aujourd’hui, les niveaux decontamination sémiotique n’ont cesséd’augmenter.

Comme pour la gastronomie etl’architecture, le design espagnol entre dansl’âge intéressant de la maturité, avec uncertain décalage par rapport à d’autresbranches du secteur en Europe. Cet écarts’explique, en partie, par l’exceptionpolitique et culturelle qu’a été l’Espagnejusqu’aux années 1970.

Mais, ce retard est en train d’être comblégrâce à l’intense activité de l’édition, dugraphisme institutionnel et de la publicitéainsi que du packaging et de la conceptionde produits. L’évolution du monde du vinest, en ce sens, particulièrementintéressante.

En quelques années, l’émergence denouvelles idées et tendances, dans unmonde qui semblait fermé et appelé àune éternelle répétition, a été telle que cesecteur s’est transformé en unintéressant observatoire des tendancesgraphiques et des propositionsconceptuelles.

Il est évident que la nouveauté n’est pasforcément synonyme de qualité. Mais,l’irruption du design dans l’univers du vinprouve qu’il y avait beaucoup à faire et àdire à propos des étiquettes et desbouteilles. Et c’est ce qui se passeaujourd’hui.

Le monde du vin est en pleine expansion.Les personnes sachant faire la différenceentre un vin soigné et une boisson demauvaise qualité, un « vino peleón »,comme on dit en Espagne, sont de plusen plus nombreuses. Ajoutons à cela quela concurrence entre domaines,dénominations d’origine, régions et paysest chaque jour plus marquée.

Cette réalité explique l’accélération dudéveloppement des processus et desméthodes permettant de renforcerrapidement les normes et les exigencesen matière de qualité.

En parallèle, on cherche toujoursdavantage à faire ressortir la qualité duvin au niveau de son conditionnement, desa présentation. A l’instar du parfum, levin présente une grande valeur ajoutée.Cette valeur doit être visible surl’emballage, le papier et l’impression del’étiquette, dans sa couleur et satypographie, dans le choix du verre etl’aspect du bouchon. Tous ces élémentsdoivent se savourer et s’apprécier,comme la boisson elle-même. L’imagedu vin doit aider à fixer et à comprendresa saveur, à rappeler la bodega et àvaloriser et renforcer la réputation de sonpays d’origine.

Il existe des vins espagnols et un designespagnol. Ils sont étroitement liés.

Restons attentifs : les récoltes desprochaines années s’annoncentprometteuses sur les deux tableaux.

Manuel Estrada Graphisteet directeur artistique dumagazine SpainGourmetour

B O N N E R É C O L T E P O U RL E D E S I G N E S P A G N O L

Ysios, le domaine imaginépar Calatrava. Leur étiquettedépouillée, en arc, rappelleles formes sinueuses de lapoétique structure réaliséepar Calatrava

VINS

VIN ET DESIGN

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ingrédients solides. C’est quelquechose dont on se rend compte enobservant, tout simplement. »L’apport de Carlos Cidón (Vivaldi, uneétoile Michelin, à Léon) se centre sur lacuisson des légumes secs (SpainGourmetour, nº 59), bien qu’il se soitégalement intéressé aux champignons.En se basant sur la rhéologie, Cidón aobservé les légumes secs et les a étudiésau microscope, ce qui lui a permis deconstater que la porosité de la peau dupois chiche de la variété castillane PicoPardal augmentait si on le faisaittremper dans de l’eau à 60 ºC. « Onobtient ainsi — explique-t-il — unehydratation de l’intérieur, car la pointede la petite racine s’ouvre davantage etla peau ne se sépare pas du pois chichependant la cuisson. » Il a égalementvérifié empiriquement que lepourcentage de graisse dans le liquidede cuisson influe sur la texture dulégume de sorte que si les pois chichescuisent dans un bouillon plus ou moinsgras, ils sont plus onctueux que s’ilsbouillent simplement dans de l’eau.Les changements les plus significatifs

concernant la cuisson des légumesverts sont le fait des cuisiniersnavarrais qui ont eu l’audace des’écarter de la tradition espagnole etd’offrir à leurs convives des légumescroquants, éclatants de couleur etriches en vitamines. Enrique Martínez(Maher, à Cintruénigo — SpainGourmetour, nº 64), Koldo Rodero(Rodero, une étoile Michelin, àPampelune) et Ricardo Gil(Restaurante 33, une étoile Michelin,à Tudela) ont été le fer de lance de cepetit « mouvement vert ». Rodero, encollaboration avec l’agriculteur FlorenDomezain — probablement le plusgrand connaisseur de légumesd’Espagne (sa société, Floren, frutas yverduras selectas S.L., est devenue laprincipale entreprise de distributionespagnole de légumes de qualité) —,a parfaitement analysé l’univers végétalde la plaine maraîchère de Navarre.« Chaque légume est un monde — faitremarquer Rodero —, on ne peut pasgénéraliser mais il existe trois facteursimportants : le nettoyage, latempérature de cuisson et la qualité del’eau. Traditionnellement, pourconserver la couleur des légumes, onajoutait d’autres ingrédients à l’eau decuisson (citron, farine, persil). Nousavons remarqué qu’en nettoyant leschardons ou les bourraches au jet,c’est-à-dire en maintenant lerenouvellement de l’eau, il n’y a rien àajouter. On ne doit pas non plus retirerles fibres en tirant car ce mouvementlibère dans le végétal une enzyme quifavorise l’oxydation ; on doit nettoyerle légume au moyen de coupeslongitudinales faites avec la pointed’un couteau très affilé. » Roderorecommande également de ne pasdépasser 70 ºC — température àlaquelle le liquide n’arrive pas àébullition — et d’étudier le type d’eauafin d’y adapter la cuisson.De récentes analyses ont démontré quele magnésium aide à fixer lachlorophylle, c’est pourquoi dans unecuisson à forte teneur en sels, lescouleurs des légumes sont plus vives.Rodero se déclare adepte des cuissonssous vide : « Les asperges, cuites sousvide, sans aucun liquide, sont

sensationnelles car elles conserventtoutes leurs tonalités terreuses et denitrates ainsi que la douceur qui lescaractérise lorsqu’elles sontassaisonnées. Je dis toujours que dansla cuisson de l’asperge, c’est l’eau quigagne. Le vide est la meilleure façond’éviter cela. »Les travaux de Ricardo Gil encollaboration avec Laboratorios Olealui ont permis de quantifier l’avantaged’utiliser de l’eau osmotisée pour lacuisson des légumes verts, de préciserleur taux d’oxydation et d’éviter celle-ci en réduisant le niveau d’eau tout enposant un couvercle sur les légumes demanière qu’ils soient totalementimmergés. De même, il a développédes paniers pour chacune des variétésde légumes ; ces paniers sont placésdans les marmites de sorte qu’une foisterminé le processus de la cuisson, leslégumes conservent leur formeoriginelle, sans aucune altérationmorphologique.Enrique Martínez, Koldo Rodero,Ricardo Gil, chacun à sa façon, guidéspar l’intuition, suivent leur proprechemin avec un but commun :améliorer les systèmes de cuissondes légumes.Le Gastrovac est un curieux appareilconçu par Sergio Torres (Dos Cielos, àBarcelone) et Javier Andrés (LaSucursal, à Valence) en collaborationavec l’Université polytechnique deValence et commercialisé par la sociétécatalane International CookingConcepts ICC (Spain Gourmetour,nº 63). Un genre d’autocuiseur où lesaliments cuisent sous vide à bassetempérature. À l’intérieur est créée uneatmosphère artificielle à bassepression, sans oxygène, où l’on peutcuire et même frire à bassetempérature. Lorsque l’on restitue lapression atmosphérique normale, leproduit absorbe (effet éponge)immédiatement le liquide dans lequelil est plongé. Cette fonction permet de‘transformer’ le goût des aliments. Onpeut très bien imaginer une pommeayant le goût de la menthe ou unmorceau d’ananas ayant le goût de lanoix de coco, tout en respectant lestextures, la couleur et les nutriments

Pois chiches Pico Pardal frits avec crevettes sauceà l’ail et crustillant de crevettes(Garbanzos de pico de pardal fritoscon gambas al ajillo y crujiente de gamba)

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originaux qui seront ultérieurementexposés dans la galerie intégrée ausiège de la société, dont l’architecture,œuvre de Jesús Manzanares, architectebasé à Madrid et connu pour sontravail dans des vignobles de pointe,est aussi moderne qu’étonnante.L’engagement fort du domaine enfaveur de l’art contemporain se traduitégalement dans l’existence d’unebourse, décernée une fois par an, à unartiste prometteur et d’expositionstemporaires de la collection, organiséesdans les plus grands centres culturelsdu pays.Outre son admirable activité demécénat, l’engagement d’Enate enfaveur de l’art contemporain lui apermis d’occuper une place privilégiéesur le marché (aujourd’hui, la sociétéproduit plus de 2,5 millions debouteilles par an, dont 20 % sontexportées). « Nous essayons detransmettre plusieurs messages »,poursuit Justes. « Le premier est quenous proposons un produitcontemporain de grande qualité. Ledeuxième est qu’il s’agit d’un produit àpartager, que vous devez être fier demettre sur votre table. Et puis, l’artcontemporain n’est lié à aucuneculture particulière, ce qui est aussi unavantage. Cette même œuvre d’artaurait pu être créée par un artistechinois ou de n’importe quelle autrenationalité. »

Exporter une imageMême si Enate a su créer une imagelibre de toute contrainte culturelle,nombreuses sont encore les entreprisespour lesquelles cela reste un vrai défi.L’exportation est une activité vitalepour la plupart des viniculteurs

espagnols, puisqu’ils produisent engénéral des volumes bien supérieurs àceux nécessaires à la consommationlocale. Catavino est un cabinet deconseil qui aide les producteursespagnols à entrer sur les marchésétrangers. Ryan Opaz, P-DG deCatavino, affirme que souvent desvinificateurs viennent lui présenterleurs très belles bouteilles en étant sûrsqu’ils en vendront beaucoup, grâce àleur design. Dans son bureau, situédans la Catalogne rurale, il poursuit enrigolant : « les lois en matièred’étiquetage en Espagne se sontconsidérablement assouplies cesdernières années. Il existe doncbeaucoup de jolies étiquettes, mais quien font trop. Pour de nombreuxproducteurs, je pense qu’il s’agit demettre la charrue avant les bœufs ».De l’avis d’Opaz, sur la scèneinternationale, le vin espagnol, dont lanature est intrinsèquement régionale,ne présente pas une image cohérenteet commercialisable. Selon lui, lesproducteurs doivent réfléchir avec soinà leur image avant de se lancer àl’export et, d’une manière générale,créer une image personnalisée pourchacun de leurs marchés.Le Madrilène Javier Romero, du WineBranding Group, est d’accord aveccette seconde recommandation. Il apassé les 15 dernières années àconcevoir des étiquettes de vinespagnoles destinés au marchéaméricain.« Si vous voulez réussir ici, vousdevez comprendre comment réfléchitle consommateur », déclare Romerodepuis son atelier du Connecticut.« En Espagne, la conscience de cequ’est le vin est bien plus forte. Il y ena toujours sur la table et dès notre

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VIN ET DESIGN

VINS

L’emballage est la peau des produits. Ilfournit les principales informations qu’exigele citoyen-consommateur, toujours mieuxinformé, dans une société chaque jour plusexigeante et normalisée.

En même temps, le conditionnement est unespace de séduction. La diversité de lagamme de produits encourage uneconcurrence féroce et une forte sélectionnaturelle. Les marchandises incapablesd’attirer l’attention de l’acheteur, d’éveillerson désir et de susciter l’achat, sontrapidement remplacées par d’autres, larotation au niveau des points de vente étanttoujours plus rapide. Soit les produits sevendent, soit ils disparaissent.

Le marché est animé par une logiqueinexorable. La qualité est nécessaire, maispas suffisante. Elle doit apparaîtrenettement, ne laissant aucune place audoute. C’est ce qui explique, en partie, quel’emballage soit l’un des supportstraditionnels où le graphisme et lesstratégies de marque se sont rencontrés, unsupport marqué tant par des considérationséconomiques que culturelles.

Cependant, les concepteurs doivent iciéviter certains effets collatéraux. La quantitéet le bruit risquent de nuire à la qualité. Si laseule chose qui importe est de se faire voir,l’esthétisme des messages et leuradaptation aux contenus finissent par êtresacrifiés sur l’autel du volume et du cri,devenus valeurs uniques. Des designspropres et conceptuels imaginés parRaymond Loewy pour Lucky Strike auximages d’aujourd’hui, les niveaux decontamination sémiotique n’ont cesséd’augmenter.

Comme pour la gastronomie etl’architecture, le design espagnol entre dansl’âge intéressant de la maturité, avec uncertain décalage par rapport à d’autresbranches du secteur en Europe. Cet écarts’explique, en partie, par l’exceptionpolitique et culturelle qu’a été l’Espagnejusqu’aux années 1970.

Mais, ce retard est en train d’être comblégrâce à l’intense activité de l’édition, dugraphisme institutionnel et de la publicitéainsi que du packaging et de la conceptionde produits. L’évolution du monde du vinest, en ce sens, particulièrementintéressante.

En quelques années, l’émergence denouvelles idées et tendances, dans unmonde qui semblait fermé et appelé àune éternelle répétition, a été telle que cesecteur s’est transformé en unintéressant observatoire des tendancesgraphiques et des propositionsconceptuelles.

Il est évident que la nouveauté n’est pasforcément synonyme de qualité. Mais,l’irruption du design dans l’univers du vinprouve qu’il y avait beaucoup à faire et àdire à propos des étiquettes et desbouteilles. Et c’est ce qui se passeaujourd’hui.

Le monde du vin est en pleine expansion.Les personnes sachant faire la différenceentre un vin soigné et une boisson demauvaise qualité, un « vino peleón »,comme on dit en Espagne, sont de plusen plus nombreuses. Ajoutons à cela quela concurrence entre domaines,dénominations d’origine, régions et paysest chaque jour plus marquée.

Cette réalité explique l’accélération dudéveloppement des processus et desméthodes permettant de renforcerrapidement les normes et les exigencesen matière de qualité.

En parallèle, on cherche toujoursdavantage à faire ressortir la qualité duvin au niveau de son conditionnement, desa présentation. A l’instar du parfum, levin présente une grande valeur ajoutée.Cette valeur doit être visible surl’emballage, le papier et l’impression del’étiquette, dans sa couleur et satypographie, dans le choix du verre etl’aspect du bouchon. Tous ces élémentsdoivent se savourer et s’apprécier,comme la boisson elle-même. L’imagedu vin doit aider à fixer et à comprendresa saveur, à rappeler la bodega et àvaloriser et renforcer la réputation de sonpays d’origine.

Il existe des vins espagnols et un designespagnol. Ils sont étroitement liés.

Restons attentifs : les récoltes desprochaines années s’annoncentprometteuses sur les deux tableaux.

Manuel Estrada Graphisteet directeur artistique dumagazine SpainGourmetour

B O N N E R É C O L T E P O U RL E D E S I G N E S P A G N O L

Ysios, le domaine imaginépar Calatrava. Leur étiquettedépouillée, en arc, rappelleles formes sinueuses de lapoétique structure réaliséepar Calatrava

VINSVIN ET DESIGN

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Encouragés par l’exemple d’elBulli, denombreux cuisiniers ont commencé àchercher de nouvelles manières detravailler. Des alternatives techniquesqui leur permettraient d’obtenir desrésultats impossibles à atteindre par lessystèmes traditionnels. Une traverséedu désert sans presque aucuneréférence ; un chemin parsemé dedoutes et d’interrogations — etégalement d’incompréhension — quiallaient être élucidés à mesure queleurs essais obtenaient de bonsrésultats. Ils ont fait pour la cuisine ceque les restaurateurs d’art firent pourles cathédrales : ils ont nettoyé, poli,fait reluire, donné de la splendeur...et ils n’ont pas hésité à utiliser latechnologie la plus moderne, tout entenant compte du poids culturel de lamémoire gustative de chaque peuple.Toutes les techniques nouvellesdéveloppées au cours de ces années,et les technologies qui les ont renduespossibles, ne furent pas inutiles, bienau contraire : elles ont étendu laconnaissance. Nous pouvonsprobablement nous passer des mousses— symbole de tant d’excès —, maisaprès ce cyclone qui semblait vouloiren finir avec la cuisine traditionnelle,la vérité c’est que nous savons mieuxcomment frire, comment faire bouillir,comment rôtir et, plus importantencore, cette connaissance ne se limitepas au secteur de la haute cuisine oude la restauration, elle a touché denombreuses couches sociales, lesménages, les hôpitaux, lesétablissements scolaires.« C’est paradoxal — dit FerranAdrià — mais après tout ce que nousavons innové, créé, inventé, je penseque notre plus grande provocation futde présenter sur les tables d’elBulli, audébut des années 90, des légumesgrillés et un poisson à la plancha. Cen’étaient pas des plats de restaurantgastronomique, c’étaient des plats debar et de chiringuito (buvette-restaurant) de plage. Nous en avonsfait de la haute cuisine. Nous n’avonspas eu d’autre objectif que de créer unlangage différent capable de mieuxrépondre à de nouveaux concepts pourlesquels nous avons développé des

techniques inédites qui ont donnénaissance à des préparationsnovatrices. »Tous les livres d’elBulli furentimportants, mais c’est dans El sabordel Mediterráneo (Les saveurs de laMéditerranée), 1993, que se trouve lasemence de la révolution. « La placedes produits de la mer dans la grandecuisine nous semble essentielle —affirme Adrià. Nous avons réduit lestechniques de traitement des poissonset des fruits de mer à leur plus absoluesimplicité, chose alors impensabledans la haute cuisine. »

Cuisson : de lamarmite au Roner« L’une des premières choses que j’aichangée lorsque j’ai commencé àcuisiner — explique Arzak — fut lemode de préparation des plats delégumes secs de ma mère. Elle, commetout le monde à son époque, mettaittous les ingrédients à bouillir ensembledans la marmite, les viandes, leslégumes verts, les légumes secs...Et je me suis rendu compte qu’il étaitpréférable de faire cuire chaqueélément séparément de façon à luidonner la consistance appropriée, sansprendre le risque que les pommes deterre se désagrègent ou que le chorizoreste dur. Depuis 1965, chez Arzak(trois étoiles Michelin, à Saint-Sébastien), toutes les cuissons sontfaites ainsi, séparément. Cela peutsembler négligeable, mais il n’en estrien ; c’est en réalité une avancéefondamentale. »L’initiative du chef Arzak fut suivie parbeaucoup de cuisiniers et chacun à samanière a continué à améliorer lacuisson d’éléments solides dans unliquide. Martín Berasategui (MartínBerasategui, trois étoiles Michelin,dans la province de Guipuscoa) utiliseune méthode similaire pour préparer lepopulaire marmitako (ragoût à base debonite et de pommes de terre) :« Naguère, on faisait bouillirlongtemps la bonite avec les autresingrédients et le poisson était sec etinsipide. Actuellement, je prépare unbon bouillon de bonite, un fumet très

goûteux. Je le répands sur lemarmitako (les pommes de terre, lespoivrons...) et lorsque le ragoût est àpoint, je fais rissoler à part les dés debonite et les ajoute au reste pour qu’ilsbouillent légèrement. Ils sont ainsijuteux, délicieux. » Andoni L. Aduriz(Mugaritz, deux étoiles Michelin, dansla province de Guipuscoa) est connupour l’importance qu’il accorde auxbouillons et aux fonds quiaccompagnent ses plats. Des liquidesriches, parfaitement dégraissés ettranslucides, des jus prodigieux quisuscitent une grande admiration.« Préparer un bouillon, c’est simplemais long. Il faut d’abord faire cuire,dégraisser, clarifier... Pour faciliter unepartie du processus, il suffit d’éviterune cuisson violente qui dénature leliquide. Il faut contrôler au maximumla température d’ébullition de façonque le bouillon frémisse à peine et quedes particules ne se détachent pas des

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Bouillon d’artichaut, légumes verts enmicrolamelles, petites fèves et petits pois.(Caldo de alcachofa, microláminas deverduras, habitas y guisantes)

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restant directe et branchée, tout ensurmontant l’obstacle de la rationalitédes vins espagnols. Son Albariño Paco& Lola, spécialement conçu pourl’exportation (un tiers de la productionannuelle de 150 000 bouteilles part àl’étranger) est une illustrationlumineuse de la commercialisationd’un certain mode de vie. A l’instard’Apple avec ses ordinateurs, cemarketing reconnaît l’importance duconsommateur autant que du produitet vend une « expérience ». Labouteille est dotée d’une étiquette chicen noir et blanc, à pois, et d’une baguebleu turquoise. Sur le blog de Paco &Lola, les consommateurs peuvent toutsavoir sur les soirées et lancementsauxquels a participé le « duo divin »(dont la première à Los Angeles dudernier film de Woody Allen Vicky,Cristina, Barcelona) et trouver des liensvers les bibles du style comme lemagazine britannique Wallpaper et TheSartorialist, influent webzine consacréà la mode de rue.« Nous sommes une équipe assezjeune et nous avons donc décidé trèstôt que notre image était capitale »,déclare la directrice de marketing dePaco & Lola, Elvira Furelos. « Leproblème que nous avons rencontréétait que personne ne savait rien denous. À l’étranger, les gensconnaissaient Barcelone ou Madrid,mais sûrement pas la Galice. Nousavons donc décidé de faire quelquechose de très « espagnol », d’où lespois que l’on retrouve sur les robes deflamenco. En ce qui concerne le nom,Furelos explique que même si Paco etLola sont des prénoms assezibériques, ils passent bien dansd’autres langues et ne présententquasiment aucun problème deprononciation. Ces particularitéspermettent au vin d’avoir un attraitmondial, puisque ni le réalisateurberlinois, ni le créateur de mode deShanghai n’auront du mal à dire sonnom, deux groupes cible typiques dePaco & Lola.

Vin et architecturePuisque châteaux, masías (fermesdestinées à l’agriculture ou à l’élevage,typiques de l’Aragon et de laCatalogne), monastères, villas etautres sites traditionnels devinification sont légion sur denombreuses étiquettes, il est logiqueque les efforts actuels de marketingrendent hommage aux derniers palaisdu vin espagnols. Santiago Calatrava,Frank Gehry et Zaha Hadid ne sontque quelques-uns des architectesrenommés qui ont, depuis dix ans,appliqué leur vision à la nouvellegénération de vignobles de La Rioja,dans le cadre d’une initiative visantprincipalement à promouvoir letourisme œnologique dans la région.Toutefois, l’apparence osée desbouteilles, similaire à celle de leurdomaine de provenance, est unetendance relativement récente. Lescréateurs d’Ysios, domaine imaginépar Calatrava appartenant au groupeDomecq Bodegas, sont parmi lespremiers à s’être orientés dans cesens. Leur étiquette dépouillée, enarc, rappelle les formes sinueuses dela poétique structure réalisée parCalatrava. En Navarre, le vignobleSeñorío de Arínzano (groupe Chivite)est allé encore plus loin. Sa premièreétiquette de vinos de pago (vins dedomaine) utilise les esquissesarchitecturales originales de RafaelMoneo, architecte lauréat du prixPritzker à qui l’on doit l’élégance etl’harmonie des lieux. Le site associel’ancien domaine du XVIIIe siècle avecdes bureaux et des ailes modernes.N’oublions pas l’édition limitée (5 000bouteilles) et sélection de Frank Gehrypour Marqués de Riscal, qui aremporté le premier prix dans lacatégorie « Avec mention » de l’édition2009 du Guide œnologique Repsol. Sonconditionnement exubérant reprendun dessin abstrait de l’architecte star etutilise les mêmes tons dorés, argentéset bordeaux que son fameux City of

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plus jeune âge, nous en apprenons lessubtilités. Mais aujourd’hui, lesAméricains consomment plus de vinque de bière : il y a donc eu undéplacement de la consommation. Ici,le segment de marché porteur estcelui des jeunes pour qui boire du vinest synonyme d’un certain mode devie. Cette population est plus sensibleà la marque et au conditionnement ouà des crus présentés différemment. »Ceci étant dit, Romero est prudentlorsqu’il aborde la tendance actuelleen Espagne à privilégier une imagerieconceptuelle pour lacommercialisation du vin. « C’estdevenu n’importe quoi. Tout lemonde semble être à la recherched’une identité et essaye deconcurrencer le Nouveau Monde. Lesproducteurs espagnols doiventtrouver leur propre identité et seressaisir. On s’y perd dans toute cettefolie abstraite. »L’un des efforts ciblés les plus réussisdu Wine Branding Group a consisté àrepenser l’image de Marqués deGelida, un cava associant sur sonélégante étiquette des éléments dedesign traditionnels et symboliques.« Ce qui m’a le plus impressionné danscette transformation a étél’immédiateté de l’impact », affirmeRomero. « Dès le lancement de lanouvelle bouteille, les ventes ontexplosé. Je n’en croyais pas mesyeux ». En prenant cette initiativecomme exemple et étant donné quel’étiquette est la seule forme depublicité pour de nombreuxproducteurs, Romero pense qu’il estcapital pour ces derniers d’investirdans leur identité visuelle.« Nombreuses sont les nouvellesétiquettes à n’avoir aucune intégrité enmatière de design et les consommateursle sentent. Les étiquettes doivent avoirune forte personnalité. Inutiled’exagérer ; il suffit de raconterune histoire. »La société galicienne Rosalia de Castroy est parvenue avec élégance, en

VIN ET DESIGN

VINS

La bodega aragonaise Enate utilise l’artcontemporain comme élement de sonimage de marque. Ses étiquettes affichentdes œuvres d’art d’Antoni Tàpies,Eduardo Chillida et Antonio Saura

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Carlos Meña Bayón,créateur del’étiquette de Manía.La bouteille afficheun délicieux motif depapillon, aussi légeret optimiste que levin qu’elle contient

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restant directe et branchée, tout ensurmontant l’obstacle de la rationalitédes vins espagnols. Son Albariño Paco& Lola, spécialement conçu pourl’exportation (un tiers de la productionannuelle de 150 000 bouteilles part àl’étranger) est une illustrationlumineuse de la commercialisationd’un certain mode de vie. A l’instard’Apple avec ses ordinateurs, cemarketing reconnaît l’importance duconsommateur autant que du produitet vend une « expérience ». Labouteille est dotée d’une étiquette chicen noir et blanc, à pois, et d’une baguebleu turquoise. Sur le blog de Paco &Lola, les consommateurs peuvent toutsavoir sur les soirées et lancementsauxquels a participé le « duo divin »(dont la première à Los Angeles dudernier film de Woody Allen Vicky,Cristina, Barcelona) et trouver des liensvers les bibles du style comme lemagazine britannique Wallpaper et TheSartorialist, influent webzine consacréà la mode de rue.« Nous sommes une équipe assezjeune et nous avons donc décidé trèstôt que notre image était capitale »,déclare la directrice de marketing dePaco & Lola, Elvira Furelos. « Leproblème que nous avons rencontréétait que personne ne savait rien denous. À l’étranger, les gensconnaissaient Barcelone ou Madrid,mais sûrement pas la Galice. Nousavons donc décidé de faire quelquechose de très « espagnol », d’où lespois que l’on retrouve sur les robes deflamenco. En ce qui concerne le nom,Furelos explique que même si Paco etLola sont des prénoms assezibériques, ils passent bien dansd’autres langues et ne présententquasiment aucun problème deprononciation. Ces particularitéspermettent au vin d’avoir un attraitmondial, puisque ni le réalisateurberlinois, ni le créateur de mode deShanghai n’auront du mal à dire sonnom, deux groupes cible typiques dePaco & Lola.

Vin et architecturePuisque châteaux, masías (fermesdestinées à l’agriculture ou à l’élevage,typiques de l’Aragon et de laCatalogne), monastères, villas etautres sites traditionnels devinification sont légion sur denombreuses étiquettes, il est logiqueque les efforts actuels de marketingrendent hommage aux derniers palaisdu vin espagnols. Santiago Calatrava,Frank Gehry et Zaha Hadid ne sontque quelques-uns des architectesrenommés qui ont, depuis dix ans,appliqué leur vision à la nouvellegénération de vignobles de La Rioja,dans le cadre d’une initiative visantprincipalement à promouvoir letourisme œnologique dans la région.Toutefois, l’apparence osée desbouteilles, similaire à celle de leurdomaine de provenance, est unetendance relativement récente. Lescréateurs d’Ysios, domaine imaginépar Calatrava appartenant au groupeDomecq Bodegas, sont parmi lespremiers à s’être orientés dans cesens. Leur étiquette dépouillée, enarc, rappelle les formes sinueuses dela poétique structure réalisée parCalatrava. En Navarre, le vignobleSeñorío de Arínzano (groupe Chivite)est allé encore plus loin. Sa premièreétiquette de vinos de pago (vins dedomaine) utilise les esquissesarchitecturales originales de RafaelMoneo, architecte lauréat du prixPritzker à qui l’on doit l’élégance etl’harmonie des lieux. Le site associel’ancien domaine du XVIIIe siècle avecdes bureaux et des ailes modernes.N’oublions pas l’édition limitée (5 000bouteilles) et sélection de Frank Gehrypour Marqués de Riscal, qui aremporté le premier prix dans lacatégorie « Avec mention » de l’édition2009 du Guide œnologique Repsol. Sonconditionnement exubérant reprendun dessin abstrait de l’architecte star etutilise les mêmes tons dorés, argentéset bordeaux que son fameux City of

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plus jeune âge, nous en apprenons lessubtilités. Mais aujourd’hui, lesAméricains consomment plus de vinque de bière : il y a donc eu undéplacement de la consommation. Ici,le segment de marché porteur estcelui des jeunes pour qui boire du vinest synonyme d’un certain mode devie. Cette population est plus sensibleà la marque et au conditionnement ouà des crus présentés différemment. »Ceci étant dit, Romero est prudentlorsqu’il aborde la tendance actuelleen Espagne à privilégier une imagerieconceptuelle pour lacommercialisation du vin. « C’estdevenu n’importe quoi. Tout lemonde semble être à la recherched’une identité et essaye deconcurrencer le Nouveau Monde. Lesproducteurs espagnols doiventtrouver leur propre identité et seressaisir. On s’y perd dans toute cettefolie abstraite. »L’un des efforts ciblés les plus réussisdu Wine Branding Group a consisté àrepenser l’image de Marqués deGelida, un cava associant sur sonélégante étiquette des éléments dedesign traditionnels et symboliques.« Ce qui m’a le plus impressionné danscette transformation a étél’immédiateté de l’impact », affirmeRomero. « Dès le lancement de lanouvelle bouteille, les ventes ontexplosé. Je n’en croyais pas mesyeux ». En prenant cette initiativecomme exemple et étant donné quel’étiquette est la seule forme depublicité pour de nombreuxproducteurs, Romero pense qu’il estcapital pour ces derniers d’investirdans leur identité visuelle.« Nombreuses sont les nouvellesétiquettes à n’avoir aucune intégrité enmatière de design et les consommateursle sentent. Les étiquettes doivent avoirune forte personnalité. Inutiled’exagérer ; il suffit de raconterune histoire. »La société galicienne Rosalia de Castroy est parvenue avec élégance, en

VIN ET DESIGN

VINS

La bodega aragonaise Enate utilise l’artcontemporain comme élement de sonimage de marque. Ses étiquettes affichentdes œuvres d’art d’Antoni Tàpies,Eduardo Chillida et Antonio Saura

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Carlos Meña Bayón,créateur del’étiquette de Manía.La bouteille afficheun délicieux motif depapillon, aussi légeret optimiste que levin qu’elle contient

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VIN ET DESIGN

petite masía dans la région duPenedès. Les clients peuvent participerà toutes les étapes du processusd’élaboration du cava, y compris laconception de leurs propres bagueset étiquettes.Associer le vin à la mode est égalementtendance. Depuis 2006, la CibelesMadrid Fashion Week, principalfestival de mode espagnol,commémore chaque édition encommandant une sélection spéciale etpersonnalisée, choisie aprèsdégustation à l’aveugle de crus de laDO Vinos de Madrid. Les noms des31 designers ayant participé àl’événement figurent sur le label rougeet noir, élégant et au graphisme direct,imaginé par le créateur localModest Emperador.

L’avenirÉtant donné le nombre croissant dejeunes œnologues à réclamer leurplace dans l’industrie du vinespagnole, nous pouvons être certainsque son image reflétera les idéauxesthétiques et les goûts de cettenouvelle génération. Carlos MeñaBayón, créateur basé à Valladolid, est letémoin de cette évolution, dans lecadre de ses activités de créationd’étiquettes pour les vignerons de laDO Ribera del Duero. « C’est engénéral lorsque leurs enfantsreprennent l’entreprise que l’image decelle-ci change », affirme-t-il. « Oulorsque le vigneron commence àproduire un vino de autor ». Ilmentionne son travail pour Manía, unverdejo créé par la deuxièmegénération de propriétaires duvignoble Felix Lorenzo Cachazo. Labouteille affiche un délicieux motif depapillon, aussi léger et optimiste que levin qu’elle contient. « Manía s’est bienvendu grâce à son image », poursuitBayón. « Mais le vin aussi est bon etc’est ce que reflète la bouteille. »Bientôt, les créateurs comme Bayóndevront faire face à de nouveaux défis.Avec la popularité croissante, sur les

marchés étrangers, des vins vendusdans des boîtes en aluminium, desbarriques en carton, des bouteillesminiature et même des tubes, lesdesigners devront travailler sur desformats bien plus divers que la simplebouteille en verre traditionnelle.(Freixenet a d’ores et déjà pris lesdevants dans le secteur des cavasvendus en petites quantités, avec sonMini Black, adapté aux soirées etcommercialisé dans une bouteille noireet blanche branchée disposant d’uneflûte intégrée). Opaz de Catavinoconsidère que les étiquettes interactivesdeviendront bientôt la norme : lesconsommateurs pourront ainsi obtenirsur leur téléphone portable desinformations et le classement des vinsgrâce à un code QR intégré (ou codebarres bidimensionnel). À l’avenir,blogs, sites de socialisation en réseau etautres supports numériques pourraientégalement faire pencher les

consommateurs d’un côté ou de l’autrelors de l’achat de leur prochainebouteille.D’ici là, l’étiquette est notre fenêtre surle monde du vin. Depuis les signesdistinctifs retrouvés sur les amphoresdans la tombe du roi Toutankhamonjusqu’à la cacophonie actuelle del’imagerie créative en passant par lespremières étiquettes rectangulaires dudébut du XIXe siècle, le design des cessupports reflète un passé social etartistique aussi riche et nuancé que legoût du vin lui-même.

Suzanne Wales, née en Australie, estune journaliste indépendante basée àBarcelone. Les voyages, le design etl’architecture sont ses sujets deprédilection. Ses articles ont été publiés,entre autres, dans des magazines commeWallpaper, Vogue, Frame Magazineet Concierge.

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4Kiloswww.4kilos.comVins du terroir des îles Baléares(espagnol).

Ànima Negrawww.annegra.comVins du terroir des îles Baléares (anglais,catalan, espagnol).

Enatewww.enate.esDO Somontano (anglais, espagnol).

Espelt Viticulteurswww.cellerespelt.comDO Ampurdán-Costa Brava (anglais,catalan, espagnol).

Felix Lorenzo Cachazowww.cachazo.com.DO Rueda (allemand, anglais,espagnol).

Guelbenzuwww.guelbenzu.esVins du terroir de Ribera del Queiles(allemand, anglais, espagnol, français).

L’ Origanwww.lorigancava.comDO Cava (anglais, catalan, espagnol).

Marqués de Riscalwww.marquesderiscal.comSélection Frank Ghery et DOCa Rioja(allemand, anglais, basque, chinois,espagnol, français, japonais).

Paco & Lolawww.pacolola.comDO Rías Baixas (anglais, espagnol).

Pago del Vicariowww.pagodelvicario.comVins de terroir de Castille (anglais,espagnol).

Pardaswww.pardas.netDO Penedès (anglais, catalan, espagnol).

Torreswww.torres.esCeleste, de la DO Ribera del Duero, etNerola et Viña Sol, de la DO Cataluña(anglais, catalan, espagnol).

Ysioswww.domecqbodegas.com/caste/bodegas/index.php?bodega=ysiosDOCa Rioja (anglais, espagnol).

The Wine Branding Groupwww.winebrandinggroup.com(anglais).

J E T E Z - Y U N C O U P D ’ Œ I L

Wine, hôtel cinq étoiles situé dans ledomaine Marqués de Riscal, àEl Ciego (La Rioja).

La personnalisationdu vinLes technologies numériquesmodernes ont fait de lapersonnalisation du vin un instrumentde marketing puissant et abordable.Une étiquette sur mesure est un outilattrayant et prestigieux pour lesentreprises et les organisateursd’événements. Aujourd’hui, unepoignée de compagnies se spécialisentdans cette activité. Les étiquettes rareset personnalisées peuvent aussidevenir des objets de culte. Une foispar an, La Fábrica, agence de publicitéet de communication branchée,contacte un artiste en vogue pour qu’ilconçoive une étiquette pour son cruMatador, ensuite commercialisé surson site.Une poignée de bodegas poussentencore plus loin ce concept enimpliquant le consommateur auprocessus de vinification. Chez Ysios,les clients achetant un fût entier dutempranillo homonyme peuvent faireimprimer leur nom sur l’étiquettelorsque le vin est prêt à être mis enbouteille. Non loin de Ciudad Real,Pago del Vicario, un petit domainechic à la fois vignoble et hôtel, proposeune option similaire. Cal Celdoni,petite bodega de la DO catalane Concade Barberá, détenue en partie parFerran Adrià (fameux créateurd’elBulli), invite ses clients à investirdans la société en achetant leurspropres pieds de vigne. Ceux quel’idée séduit obtiennent pendant25 ans la propriété de 20 ceps dans ledomaine haut de gamme de CalCeldoni, qu’ils peuvent localiser parGPS, ainsi que 42 bouteillespersonnalisées par an, une fois leprocessus de production terminé.ArtCava propose de son côté uneactivité encore plus concrète : unprojet innovant géré à partir d’une

Depuis 2006, la Cibeles Madrid FashionWeek, principal festival de modeespagnol, commémore chaque éditionen commandant une sélection spécialeet personnalisée, choisie aprèsdégustation à l’aveugle de crus de laDO Vinos de Madrid

VINS

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VIN ET DESIGN

petite masía dans la région duPenedès. Les clients peuvent participerà toutes les étapes du processusd’élaboration du cava, y compris laconception de leurs propres bagueset étiquettes.Associer le vin à la mode est égalementtendance. Depuis 2006, la CibelesMadrid Fashion Week, principalfestival de mode espagnol,commémore chaque édition encommandant une sélection spéciale etpersonnalisée, choisie aprèsdégustation à l’aveugle de crus de laDO Vinos de Madrid. Les noms des31 designers ayant participé àl’événement figurent sur le label rougeet noir, élégant et au graphisme direct,imaginé par le créateur localModest Emperador.

L’avenirÉtant donné le nombre croissant dejeunes œnologues à réclamer leurplace dans l’industrie du vinespagnole, nous pouvons être certainsque son image reflétera les idéauxesthétiques et les goûts de cettenouvelle génération. Carlos MeñaBayón, créateur basé à Valladolid, est letémoin de cette évolution, dans lecadre de ses activités de créationd’étiquettes pour les vignerons de laDO Ribera del Duero. « C’est engénéral lorsque leurs enfantsreprennent l’entreprise que l’image decelle-ci change », affirme-t-il. « Oulorsque le vigneron commence àproduire un vino de autor ». Ilmentionne son travail pour Manía, unverdejo créé par la deuxièmegénération de propriétaires duvignoble Felix Lorenzo Cachazo. Labouteille affiche un délicieux motif depapillon, aussi léger et optimiste que levin qu’elle contient. « Manía s’est bienvendu grâce à son image », poursuitBayón. « Mais le vin aussi est bon etc’est ce que reflète la bouteille. »Bientôt, les créateurs comme Bayóndevront faire face à de nouveaux défis.Avec la popularité croissante, sur les

marchés étrangers, des vins vendusdans des boîtes en aluminium, desbarriques en carton, des bouteillesminiature et même des tubes, lesdesigners devront travailler sur desformats bien plus divers que la simplebouteille en verre traditionnelle.(Freixenet a d’ores et déjà pris lesdevants dans le secteur des cavasvendus en petites quantités, avec sonMini Black, adapté aux soirées etcommercialisé dans une bouteille noireet blanche branchée disposant d’uneflûte intégrée). Opaz de Catavinoconsidère que les étiquettes interactivesdeviendront bientôt la norme : lesconsommateurs pourront ainsi obtenirsur leur téléphone portable desinformations et le classement des vinsgrâce à un code QR intégré (ou codebarres bidimensionnel). À l’avenir,blogs, sites de socialisation en réseau etautres supports numériques pourraientégalement faire pencher les

consommateurs d’un côté ou de l’autrelors de l’achat de leur prochainebouteille.D’ici là, l’étiquette est notre fenêtre surle monde du vin. Depuis les signesdistinctifs retrouvés sur les amphoresdans la tombe du roi Toutankhamonjusqu’à la cacophonie actuelle del’imagerie créative en passant par lespremières étiquettes rectangulaires dudébut du XIXe siècle, le design des cessupports reflète un passé social etartistique aussi riche et nuancé que legoût du vin lui-même.

Suzanne Wales, née en Australie, estune journaliste indépendante basée àBarcelone. Les voyages, le design etl’architecture sont ses sujets deprédilection. Ses articles ont été publiés,entre autres, dans des magazines commeWallpaper, Vogue, Frame Magazineet Concierge.

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4Kiloswww.4kilos.comVins du terroir des îles Baléares(espagnol).

Ànima Negrawww.annegra.comVins du terroir des îles Baléares (anglais,catalan, espagnol).

Enatewww.enate.esDO Somontano (anglais, espagnol).

Espelt Viticulteurswww.cellerespelt.comDO Ampurdán-Costa Brava (anglais,catalan, espagnol).

Felix Lorenzo Cachazowww.cachazo.com.DO Rueda (allemand, anglais,espagnol).

Guelbenzuwww.guelbenzu.esVins du terroir de Ribera del Queiles(allemand, anglais, espagnol, français).

L’ Origanwww.lorigancava.comDO Cava (anglais, catalan, espagnol).

Marqués de Riscalwww.marquesderiscal.comSélection Frank Ghery et DOCa Rioja(allemand, anglais, basque, chinois,espagnol, français, japonais).

Paco & Lolawww.pacolola.comDO Rías Baixas (anglais, espagnol).

Pago del Vicariowww.pagodelvicario.comVins de terroir de Castille (anglais,espagnol).

Pardaswww.pardas.netDO Penedès (anglais, catalan, espagnol).

Torreswww.torres.esCeleste, de la DO Ribera del Duero, etNerola et Viña Sol, de la DO Cataluña(anglais, catalan, espagnol).

Ysioswww.domecqbodegas.com/caste/bodegas/index.php?bodega=ysiosDOCa Rioja (anglais, espagnol).

The Wine Branding Groupwww.winebrandinggroup.com(anglais).

J E T E Z - Y U N C O U P D ’ Œ I L

Wine, hôtel cinq étoiles situé dans ledomaine Marqués de Riscal, àEl Ciego (La Rioja).

La personnalisationdu vinLes technologies numériquesmodernes ont fait de lapersonnalisation du vin un instrumentde marketing puissant et abordable.Une étiquette sur mesure est un outilattrayant et prestigieux pour lesentreprises et les organisateursd’événements. Aujourd’hui, unepoignée de compagnies se spécialisentdans cette activité. Les étiquettes rareset personnalisées peuvent aussidevenir des objets de culte. Une foispar an, La Fábrica, agence de publicitéet de communication branchée,contacte un artiste en vogue pour qu’ilconçoive une étiquette pour son cruMatador, ensuite commercialisé surson site.Une poignée de bodegas poussentencore plus loin ce concept enimpliquant le consommateur auprocessus de vinification. Chez Ysios,les clients achetant un fût entier dutempranillo homonyme peuvent faireimprimer leur nom sur l’étiquettelorsque le vin est prêt à être mis enbouteille. Non loin de Ciudad Real,Pago del Vicario, un petit domainechic à la fois vignoble et hôtel, proposeune option similaire. Cal Celdoni,petite bodega de la DO catalane Concade Barberá, détenue en partie parFerran Adrià (fameux créateurd’elBulli), invite ses clients à investirdans la société en achetant leurspropres pieds de vigne. Ceux quel’idée séduit obtiennent pendant25 ans la propriété de 20 ceps dans ledomaine haut de gamme de CalCeldoni, qu’ils peuvent localiser parGPS, ainsi que 42 bouteillespersonnalisées par an, une fois leprocessus de production terminé.ArtCava propose de son côté uneactivité encore plus concrète : unprojet innovant géré à partir d’une

Depuis 2006, la Cibeles Madrid FashionWeek, principal festival de modeespagnol, commémore chaque éditionen commandant une sélection spécialeet personnalisée, choisie aprèsdégustation à l’aveugle de crus de laDO Vinos de Madrid

VINS

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TECHNIQUEEt si une autre cuisine était possible ?Et si un même ingrédient pouvait êtrepréparé autrement et mieux ? Et sinous réussissions à perfectionner lesrecettes traditionnelles… ?

Le défi de l’actualisationTexteJulia Pérez/©ICEX

PhotosToya Legido/©ICEX

TraductionFrançoise Chuffart/©ICEX

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TECHNIQUEEt si une autre cuisine était possible ?Et si un même ingrédient pouvait êtrepréparé autrement et mieux ? Et sinous réussissions à perfectionner lesrecettes traditionnelles… ?

Le défi de l’actualisationTexteJulia Pérez/©ICEX

PhotosToya Legido/©ICEX

TraductionFrançoise Chuffart/©ICEX

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Pour comprendre l’évolution de lacuisine, il faut la considérer selon unecertaine perspective historique. Lestechniques culinaires ne sont qu’unensemble de gestes que répètentmachinalement ceux qui cuisinent sansprendre le temps de réfléchir à despossibilités d’innovation ni à l’intérêtd’une modification permettantd’obtenir un meilleur résultat.Pourquoi doit-on faire comme ceci etpas comme cela ? Personne ne doute,personne ne s’interroge, personne neprend le temps de réfléchir. Nousassumons tous la routine culinairecomme une vérité immuable. Unsavoir acquis, transmis de générationen génération et tellement intérioriséqu’il n’admet aucune discussion.Jusqu’au jour où, soudain, quelquepart, un esprit éclairé s’interroge,refuse l’ordre établi et fait crépiterl’étincelle de la rébellion.L’anticonformisme, véritable moteur del’évolution, prend la situation en main.De tels moments de rupture, detransgression, se succèdent au cours del’histoire de la gastronomie etmarquent toujours une avancée dans lapensée gastronomique. Une petiterévolution qui, sans le vouloir, élève leniveau culinaire. Il se produit quelquechose de semblable dans le monde del’art et dans certaines disciplinesscientifiques : tout apport signifie unpas en avant.Traditionnellement, l’apparition denouveaux modèles gastronomiques aété déterminée par des changements

sociologiques. Si nous remontons lecours des siècles, nous trouvons lesexemples de La Varenne (1618 - 1678),Menon (XVIIIe siècle), Marie-AntoineCarême (1784 - 1833), AugusteEscoffier (1846 - 1935)... Ils ont tousreprésenté un saut qualitatif, lanaissance d’un nouveau système avecses normes et ses règles. La fin del’aristocratie précipita en France lanaissance de la restauration publique :les cuisiniers des nobles se mirent àcuisiner pour les bourgeois, non pas àleur domicile mais dans des restaurants.Cependant, au XXe siècle, le rôle ducuisinier et son rapport à la cuisine ontmarqué un autre type detransformations. La naissance de lanouvelle cuisine en France répond à lafois à des interrogations personnellesdes professionnels et à leur besoind’établir de nouveaux rapports avec leurclientèle.

Trente annéesdécisivesEn ce qui concerne l’Espagne, pourposer les bases des dernierschangements, il nous faut aller au Paysbasque où de jeunes cuisiniers (Arzak,Subijana, Arguiñano, Irizar, Castillo...)ont osé proclamer en 1977 que lasauce verte (à base d’ail et de persil etliée avec un peu de farine), emblèmede la cuisine régionale, ne se préparaitpas avec de la farine (tous les livres decuisine de l’époque l’incluaient dansles ingrédients pour lui donnerl’épaisseur voulue). Ils commencèrentà alléger les recettes traditionnelles,influencés pas la diététique modernede la nouvelle cuisine. Il est vrai qu’ilsont commis quelques excès — nuln’est parfait —, qu’ils ont bourré lescartes de terrines et de puddings et ontbordé trop d’assiettes de fleurs detomate, d’herbes aromatiques et decrème fraîche liquide qui n’avaient rienà voir avec la cuisine basque. Cesexagérations ont fini par disparaître,mais l’essentiel est resté et leurinfluence a été indiscutable. Leschangements dans ce premier épisodeaffectèrent moins les techniques queles ingrédients, les temps de cuisson,les présentations. La cuisine estdevenue plus légère, plus salutaire, les

temps de cuisson ont été réduits etl’esthétique a atteint une importancedes plus surprenantes.Le deuxième acte de cette histoire — etle plus remarquable — eut pourprotagoniste principal, au milieu desannées 90, un jeune homme intelligentde l’Hospitalet de Llobregat(Barcelone), doté d’une intuitionnaturelle qui, après plusieurs succès etéchecs, décida un beau jour de mettrela cuisine en examen, de toutreconsidérer et d’appliquer la méthodescientifique à l’art modeste desfourneaux. Réellement insolite ! Il nes’agit pas de chauvinisme ni de désird’ériger Ferran Adrià en héros national,mais il est clair que dans l’histoire de lagastronomie espagnole — etmondiale — sa figure marque un pointd’inflexion, un avant et un après. Si sonapport technique à la cuisine d’avant-garde est indiscutable, sa contributionintellectuelle est plus importanteencore ; une profondeur qui a réussi àréveiller l’esprit de centaines de sescollègues à travers le monde en leurinoculant curiosité et liberté. Tout celagrâce au grand Jacques Maximin quiavait dit un jour à Adrià que « créern’est pas copier », et celui-ci — trèsobstiné — suivit ce conseil jusqu’à sesdernières conséquences : la créationd’un nouveau paradigme culinaire, larévolution Adrià.

Cuisine, scienceet technologieN’oublions pas qu’à peu près à lamême époque, certains scientifiquescomme Hervé This en France, HaroldMcGee aux États-Unis ou Davide Cassien Italie ont relevé des défissemblables dans le domaine de lascience. À leur manière, ils cherchaienteux aussi la réponse aux questions quese posait Adrià. Que se passe-t-il aucœur des aliments pendant la cuisson ?Est-il possible d’éviter certainesréactions pour renforcer la saveur, latexture, la couleur ?À la fin des années 90, cuisine etcréation se rencontrent et commencentà avancer la main dans la main et àouvrir de nouveaux horizons,inquiétants pour les uns, stimulantspour d’autres.

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Pour comprendre l’évolution de lacuisine, il faut la considérer selon unecertaine perspective historique. Lestechniques culinaires ne sont qu’unensemble de gestes que répètentmachinalement ceux qui cuisinent sansprendre le temps de réfléchir à despossibilités d’innovation ni à l’intérêtd’une modification permettantd’obtenir un meilleur résultat.Pourquoi doit-on faire comme ceci etpas comme cela ? Personne ne doute,personne ne s’interroge, personne neprend le temps de réfléchir. Nousassumons tous la routine culinairecomme une vérité immuable. Unsavoir acquis, transmis de générationen génération et tellement intérioriséqu’il n’admet aucune discussion.Jusqu’au jour où, soudain, quelquepart, un esprit éclairé s’interroge,refuse l’ordre établi et fait crépiterl’étincelle de la rébellion.L’anticonformisme, véritable moteur del’évolution, prend la situation en main.De tels moments de rupture, detransgression, se succèdent au cours del’histoire de la gastronomie etmarquent toujours une avancée dans lapensée gastronomique. Une petiterévolution qui, sans le vouloir, élève leniveau culinaire. Il se produit quelquechose de semblable dans le monde del’art et dans certaines disciplinesscientifiques : tout apport signifie unpas en avant.Traditionnellement, l’apparition denouveaux modèles gastronomiques aété déterminée par des changements

sociologiques. Si nous remontons lecours des siècles, nous trouvons lesexemples de La Varenne (1618 - 1678),Menon (XVIIIe siècle), Marie-AntoineCarême (1784 - 1833), AugusteEscoffier (1846 - 1935)... Ils ont tousreprésenté un saut qualitatif, lanaissance d’un nouveau système avecses normes et ses règles. La fin del’aristocratie précipita en France lanaissance de la restauration publique :les cuisiniers des nobles se mirent àcuisiner pour les bourgeois, non pas àleur domicile mais dans des restaurants.Cependant, au XXe siècle, le rôle ducuisinier et son rapport à la cuisine ontmarqué un autre type detransformations. La naissance de lanouvelle cuisine en France répond à lafois à des interrogations personnellesdes professionnels et à leur besoind’établir de nouveaux rapports avec leurclientèle.

Trente annéesdécisivesEn ce qui concerne l’Espagne, pourposer les bases des dernierschangements, il nous faut aller au Paysbasque où de jeunes cuisiniers (Arzak,Subijana, Arguiñano, Irizar, Castillo...)ont osé proclamer en 1977 que lasauce verte (à base d’ail et de persil etliée avec un peu de farine), emblèmede la cuisine régionale, ne se préparaitpas avec de la farine (tous les livres decuisine de l’époque l’incluaient dansles ingrédients pour lui donnerl’épaisseur voulue). Ils commencèrentà alléger les recettes traditionnelles,influencés pas la diététique modernede la nouvelle cuisine. Il est vrai qu’ilsont commis quelques excès — nuln’est parfait —, qu’ils ont bourré lescartes de terrines et de puddings et ontbordé trop d’assiettes de fleurs detomate, d’herbes aromatiques et decrème fraîche liquide qui n’avaient rienà voir avec la cuisine basque. Cesexagérations ont fini par disparaître,mais l’essentiel est resté et leurinfluence a été indiscutable. Leschangements dans ce premier épisodeaffectèrent moins les techniques queles ingrédients, les temps de cuisson,les présentations. La cuisine estdevenue plus légère, plus salutaire, les

temps de cuisson ont été réduits etl’esthétique a atteint une importancedes plus surprenantes.Le deuxième acte de cette histoire — etle plus remarquable — eut pourprotagoniste principal, au milieu desannées 90, un jeune homme intelligentde l’Hospitalet de Llobregat(Barcelone), doté d’une intuitionnaturelle qui, après plusieurs succès etéchecs, décida un beau jour de mettrela cuisine en examen, de toutreconsidérer et d’appliquer la méthodescientifique à l’art modeste desfourneaux. Réellement insolite ! Il nes’agit pas de chauvinisme ni de désird’ériger Ferran Adrià en héros national,mais il est clair que dans l’histoire de lagastronomie espagnole — etmondiale — sa figure marque un pointd’inflexion, un avant et un après. Si sonapport technique à la cuisine d’avant-garde est indiscutable, sa contributionintellectuelle est plus importanteencore ; une profondeur qui a réussi àréveiller l’esprit de centaines de sescollègues à travers le monde en leurinoculant curiosité et liberté. Tout celagrâce au grand Jacques Maximin quiavait dit un jour à Adrià que « créern’est pas copier », et celui-ci — trèsobstiné — suivit ce conseil jusqu’à sesdernières conséquences : la créationd’un nouveau paradigme culinaire, larévolution Adrià.

Cuisine, scienceet technologieN’oublions pas qu’à peu près à lamême époque, certains scientifiquescomme Hervé This en France, HaroldMcGee aux États-Unis ou Davide Cassien Italie ont relevé des défissemblables dans le domaine de lascience. À leur manière, ils cherchaienteux aussi la réponse aux questions quese posait Adrià. Que se passe-t-il aucœur des aliments pendant la cuisson ?Est-il possible d’éviter certainesréactions pour renforcer la saveur, latexture, la couleur ?À la fin des années 90, cuisine etcréation se rencontrent et commencentà avancer la main dans la main et àouvrir de nouveaux horizons,inquiétants pour les uns, stimulantspour d’autres.

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Encouragés par l’exemple d’elBulli, denombreux cuisiniers ont commencé àchercher de nouvelles manières detravailler. Des alternatives techniquesqui leur permettraient d’obtenir desrésultats impossibles à atteindre par lessystèmes traditionnels. Une traverséedu désert sans presque aucuneréférence ; un chemin parsemé dedoutes et d’interrogations — etégalement d’incompréhension — quiallaient être élucidés à mesure queleurs essais obtenaient de bonsrésultats. Ils ont fait pour la cuisine ceque les restaurateurs d’art firent pourles cathédrales : ils ont nettoyé, poli,fait reluire, donné de la splendeur...et ils n’ont pas hésité à utiliser latechnologie la plus moderne, tout entenant compte du poids culturel de lamémoire gustative de chaque peuple.Toutes les techniques nouvellesdéveloppées au cours de ces années,et les technologies qui les ont renduespossibles, ne furent pas inutiles, bienau contraire : elles ont étendu laconnaissance. Nous pouvonsprobablement nous passer des mousses— symbole de tant d’excès —, maisaprès ce cyclone qui semblait vouloiren finir avec la cuisine traditionnelle,la vérité c’est que nous savons mieuxcomment frire, comment faire bouillir,comment rôtir et, plus importantencore, cette connaissance ne se limitepas au secteur de la haute cuisine oude la restauration, elle a touché denombreuses couches sociales, lesménages, les hôpitaux, lesétablissements scolaires.« C’est paradoxal — dit FerranAdrià — mais après tout ce que nousavons innové, créé, inventé, je penseque notre plus grande provocation futde présenter sur les tables d’elBulli, audébut des années 90, des légumesgrillés et un poisson à la plancha. Cen’étaient pas des plats de restaurantgastronomique, c’étaient des plats debar et de chiringuito (buvette-restaurant) de plage. Nous en avonsfait de la haute cuisine. Nous n’avonspas eu d’autre objectif que de créer unlangage différent capable de mieuxrépondre à de nouveaux concepts pourlesquels nous avons développé des

techniques inédites qui ont donnénaissance à des préparationsnovatrices. »Tous les livres d’elBulli furentimportants, mais c’est dans El sabordel Mediterráneo (Les saveurs de laMéditerranée), 1993, que se trouve lasemence de la révolution. « La placedes produits de la mer dans la grandecuisine nous semble essentielle —affirme Adrià. Nous avons réduit lestechniques de traitement des poissonset des fruits de mer à leur plus absoluesimplicité, chose alors impensabledans la haute cuisine. »

Cuisson : de lamarmite au Roner« L’une des premières choses que j’aichangée lorsque j’ai commencé àcuisiner — explique Arzak — fut lemode de préparation des plats delégumes secs de ma mère. Elle, commetout le monde à son époque, mettaittous les ingrédients à bouillir ensembledans la marmite, les viandes, leslégumes verts, les légumes secs...Et je me suis rendu compte qu’il étaitpréférable de faire cuire chaqueélément séparément de façon à luidonner la consistance appropriée, sansprendre le risque que les pommes deterre se désagrègent ou que le chorizoreste dur. Depuis 1965, chez Arzak(trois étoiles Michelin, à Saint-Sébastien), toutes les cuissons sontfaites ainsi, séparément. Cela peutsembler négligeable, mais il n’en estrien ; c’est en réalité une avancéefondamentale. »L’initiative du chef Arzak fut suivie parbeaucoup de cuisiniers et chacun à samanière a continué à améliorer lacuisson d’éléments solides dans unliquide. Martín Berasategui (MartínBerasategui, trois étoiles Michelin,dans la province de Guipuscoa) utiliseune méthode similaire pour préparer lepopulaire marmitako (ragoût à base debonite et de pommes de terre) :« Naguère, on faisait bouillirlongtemps la bonite avec les autresingrédients et le poisson était sec etinsipide. Actuellement, je prépare unbon bouillon de bonite, un fumet très

goûteux. Je le répands sur lemarmitako (les pommes de terre, lespoivrons...) et lorsque le ragoût est àpoint, je fais rissoler à part les dés debonite et les ajoute au reste pour qu’ilsbouillent légèrement. Ils sont ainsijuteux, délicieux. » Andoni L. Aduriz(Mugaritz, deux étoiles Michelin, dansla province de Guipuscoa) est connupour l’importance qu’il accorde auxbouillons et aux fonds quiaccompagnent ses plats. Des liquidesriches, parfaitement dégraissés ettranslucides, des jus prodigieux quisuscitent une grande admiration.« Préparer un bouillon, c’est simplemais long. Il faut d’abord faire cuire,dégraisser, clarifier... Pour faciliter unepartie du processus, il suffit d’éviterune cuisson violente qui dénature leliquide. Il faut contrôler au maximumla température d’ébullition de façonque le bouillon frémisse à peine et quedes particules ne se détachent pas des

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Bouillon d’artichaut, légumes verts enmicrolamelles, petites fèves et petits pois.(Caldo de alcachofa, microláminas deverduras, habitas y guisantes)

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Encouragés par l’exemple d’elBulli, denombreux cuisiniers ont commencé àchercher de nouvelles manières detravailler. Des alternatives techniquesqui leur permettraient d’obtenir desrésultats impossibles à atteindre par lessystèmes traditionnels. Une traverséedu désert sans presque aucuneréférence ; un chemin parsemé dedoutes et d’interrogations — etégalement d’incompréhension — quiallaient être élucidés à mesure queleurs essais obtenaient de bonsrésultats. Ils ont fait pour la cuisine ceque les restaurateurs d’art firent pourles cathédrales : ils ont nettoyé, poli,fait reluire, donné de la splendeur...et ils n’ont pas hésité à utiliser latechnologie la plus moderne, tout entenant compte du poids culturel de lamémoire gustative de chaque peuple.Toutes les techniques nouvellesdéveloppées au cours de ces années,et les technologies qui les ont renduespossibles, ne furent pas inutiles, bienau contraire : elles ont étendu laconnaissance. Nous pouvonsprobablement nous passer des mousses— symbole de tant d’excès —, maisaprès ce cyclone qui semblait vouloiren finir avec la cuisine traditionnelle,la vérité c’est que nous savons mieuxcomment frire, comment faire bouillir,comment rôtir et, plus importantencore, cette connaissance ne se limitepas au secteur de la haute cuisine oude la restauration, elle a touché denombreuses couches sociales, lesménages, les hôpitaux, lesétablissements scolaires.« C’est paradoxal — dit FerranAdrià — mais après tout ce que nousavons innové, créé, inventé, je penseque notre plus grande provocation futde présenter sur les tables d’elBulli, audébut des années 90, des légumesgrillés et un poisson à la plancha. Cen’étaient pas des plats de restaurantgastronomique, c’étaient des plats debar et de chiringuito (buvette-restaurant) de plage. Nous en avonsfait de la haute cuisine. Nous n’avonspas eu d’autre objectif que de créer unlangage différent capable de mieuxrépondre à de nouveaux concepts pourlesquels nous avons développé des

techniques inédites qui ont donnénaissance à des préparationsnovatrices. »Tous les livres d’elBulli furentimportants, mais c’est dans El sabordel Mediterráneo (Les saveurs de laMéditerranée), 1993, que se trouve lasemence de la révolution. « La placedes produits de la mer dans la grandecuisine nous semble essentielle —affirme Adrià. Nous avons réduit lestechniques de traitement des poissonset des fruits de mer à leur plus absoluesimplicité, chose alors impensabledans la haute cuisine. »

Cuisson : de lamarmite au Roner« L’une des premières choses que j’aichangée lorsque j’ai commencé àcuisiner — explique Arzak — fut lemode de préparation des plats delégumes secs de ma mère. Elle, commetout le monde à son époque, mettaittous les ingrédients à bouillir ensembledans la marmite, les viandes, leslégumes verts, les légumes secs...Et je me suis rendu compte qu’il étaitpréférable de faire cuire chaqueélément séparément de façon à luidonner la consistance appropriée, sansprendre le risque que les pommes deterre se désagrègent ou que le chorizoreste dur. Depuis 1965, chez Arzak(trois étoiles Michelin, à Saint-Sébastien), toutes les cuissons sontfaites ainsi, séparément. Cela peutsembler négligeable, mais il n’en estrien ; c’est en réalité une avancéefondamentale. »L’initiative du chef Arzak fut suivie parbeaucoup de cuisiniers et chacun à samanière a continué à améliorer lacuisson d’éléments solides dans unliquide. Martín Berasategui (MartínBerasategui, trois étoiles Michelin,dans la province de Guipuscoa) utiliseune méthode similaire pour préparer lepopulaire marmitako (ragoût à base debonite et de pommes de terre) :« Naguère, on faisait bouillirlongtemps la bonite avec les autresingrédients et le poisson était sec etinsipide. Actuellement, je prépare unbon bouillon de bonite, un fumet très

goûteux. Je le répands sur lemarmitako (les pommes de terre, lespoivrons...) et lorsque le ragoût est àpoint, je fais rissoler à part les dés debonite et les ajoute au reste pour qu’ilsbouillent légèrement. Ils sont ainsijuteux, délicieux. » Andoni L. Aduriz(Mugaritz, deux étoiles Michelin, dansla province de Guipuscoa) est connupour l’importance qu’il accorde auxbouillons et aux fonds quiaccompagnent ses plats. Des liquidesriches, parfaitement dégraissés ettranslucides, des jus prodigieux quisuscitent une grande admiration.« Préparer un bouillon, c’est simplemais long. Il faut d’abord faire cuire,dégraisser, clarifier... Pour faciliter unepartie du processus, il suffit d’éviterune cuisson violente qui dénature leliquide. Il faut contrôler au maximumla température d’ébullition de façonque le bouillon frémisse à peine et quedes particules ne se détachent pas des

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Bouillon d’artichaut, légumes verts enmicrolamelles, petites fèves et petits pois.(Caldo de alcachofa, microláminas deverduras, habitas y guisantes)

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ingrédients solides. C’est quelquechose dont on se rend compte enobservant, tout simplement. »L’apport de Carlos Cidón (Vivaldi, uneétoile Michelin, à Léon) se centre sur lacuisson des légumes secs (SpainGourmetour, nº 59), bien qu’il se soitégalement intéressé aux champignons.En se basant sur la rhéologie, Cidón aobservé les légumes secs et les a étudiésau microscope, ce qui lui a permis deconstater que la porosité de la peau dupois chiche de la variété castillane PicoPardal augmentait si on le faisaittremper dans de l’eau à 60 ºC. « Onobtient ainsi — explique-t-il — unehydratation de l’intérieur, car la pointede la petite racine s’ouvre davantage etla peau ne se sépare pas du pois chichependant la cuisson. » Il a égalementvérifié empiriquement que lepourcentage de graisse dans le liquidede cuisson influe sur la texture dulégume de sorte que si les pois chichescuisent dans un bouillon plus ou moinsgras, ils sont plus onctueux que s’ilsbouillent simplement dans de l’eau.Les changements les plus significatifs

concernant la cuisson des légumesverts sont le fait des cuisiniersnavarrais qui ont eu l’audace des’écarter de la tradition espagnole etd’offrir à leurs convives des légumescroquants, éclatants de couleur etriches en vitamines. Enrique Martínez(Maher, à Cintruénigo — SpainGourmetour, nº 64), Koldo Rodero(Rodero, une étoile Michelin, àPampelune) et Ricardo Gil(Restaurante 33, une étoile Michelin,à Tudela) ont été le fer de lance de cepetit « mouvement vert ». Rodero, encollaboration avec l’agriculteur FlorenDomezain — probablement le plusgrand connaisseur de légumesd’Espagne (sa société, Floren, frutas yverduras selectas S.L., est devenue laprincipale entreprise de distributionespagnole de légumes de qualité) —,a parfaitement analysé l’univers végétalde la plaine maraîchère de Navarre.« Chaque légume est un monde — faitremarquer Rodero —, on ne peut pasgénéraliser mais il existe trois facteursimportants : le nettoyage, latempérature de cuisson et la qualité del’eau. Traditionnellement, pourconserver la couleur des légumes, onajoutait d’autres ingrédients à l’eau decuisson (citron, farine, persil). Nousavons remarqué qu’en nettoyant leschardons ou les bourraches au jet,c’est-à-dire en maintenant lerenouvellement de l’eau, il n’y a rien àajouter. On ne doit pas non plus retirerles fibres en tirant car ce mouvementlibère dans le végétal une enzyme quifavorise l’oxydation ; on doit nettoyerle légume au moyen de coupeslongitudinales faites avec la pointed’un couteau très affilé. » Roderorecommande également de ne pasdépasser 70 ºC — température àlaquelle le liquide n’arrive pas àébullition — et d’étudier le type d’eauafin d’y adapter la cuisson.De récentes analyses ont démontré quele magnésium aide à fixer lachlorophylle, c’est pourquoi dans unecuisson à forte teneur en sels, lescouleurs des légumes sont plus vives.Rodero se déclare adepte des cuissonssous vide : « Les asperges, cuites sousvide, sans aucun liquide, sont

sensationnelles car elles conserventtoutes leurs tonalités terreuses et denitrates ainsi que la douceur qui lescaractérise lorsqu’elles sontassaisonnées. Je dis toujours que dansla cuisson de l’asperge, c’est l’eau quigagne. Le vide est la meilleure façond’éviter cela. »Les travaux de Ricardo Gil encollaboration avec Laboratorios Olealui ont permis de quantifier l’avantaged’utiliser de l’eau osmotisée pour lacuisson des légumes verts, de préciserleur taux d’oxydation et d’éviter celle-ci en réduisant le niveau d’eau tout enposant un couvercle sur les légumes demanière qu’ils soient totalementimmergés. De même, il a développédes paniers pour chacune des variétésde légumes ; ces paniers sont placésdans les marmites de sorte qu’une foisterminé le processus de la cuisson, leslégumes conservent leur formeoriginelle, sans aucune altérationmorphologique.Enrique Martínez, Koldo Rodero,Ricardo Gil, chacun à sa façon, guidéspar l’intuition, suivent leur proprechemin avec un but commun :améliorer les systèmes de cuissondes légumes.Le Gastrovac est un curieux appareilconçu par Sergio Torres (Dos Cielos, àBarcelone) et Javier Andrés (LaSucursal, à Valence) en collaborationavec l’Université polytechnique deValence et commercialisé par la sociétécatalane International CookingConcepts ICC (Spain Gourmetour,nº 63). Un genre d’autocuiseur où lesaliments cuisent sous vide à bassetempérature. À l’intérieur est créée uneatmosphère artificielle à bassepression, sans oxygène, où l’on peutcuire et même frire à bassetempérature. Lorsque l’on restitue lapression atmosphérique normale, leproduit absorbe (effet éponge)immédiatement le liquide dans lequelil est plongé. Cette fonction permet de‘transformer’ le goût des aliments. Onpeut très bien imaginer une pommeayant le goût de la menthe ou unmorceau d’ananas ayant le goût de lanoix de coco, tout en respectant lestextures, la couleur et les nutriments

Pois chiches Pico Pardal frits avec crevettes sauceà l’ail et crustillant de crevettes(Garbanzos de pico de pardal fritoscon gambas al ajillo y crujiente de gamba)

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ingrédients solides. C’est quelquechose dont on se rend compte enobservant, tout simplement. »L’apport de Carlos Cidón (Vivaldi, uneétoile Michelin, à Léon) se centre sur lacuisson des légumes secs (SpainGourmetour, nº 59), bien qu’il se soitégalement intéressé aux champignons.En se basant sur la rhéologie, Cidón aobservé les légumes secs et les a étudiésau microscope, ce qui lui a permis deconstater que la porosité de la peau dupois chiche de la variété castillane PicoPardal augmentait si on le faisaittremper dans de l’eau à 60 ºC. « Onobtient ainsi — explique-t-il — unehydratation de l’intérieur, car la pointede la petite racine s’ouvre davantage etla peau ne se sépare pas du pois chichependant la cuisson. » Il a égalementvérifié empiriquement que lepourcentage de graisse dans le liquidede cuisson influe sur la texture dulégume de sorte que si les pois chichescuisent dans un bouillon plus ou moinsgras, ils sont plus onctueux que s’ilsbouillent simplement dans de l’eau.Les changements les plus significatifs

concernant la cuisson des légumesverts sont le fait des cuisiniersnavarrais qui ont eu l’audace des’écarter de la tradition espagnole etd’offrir à leurs convives des légumescroquants, éclatants de couleur etriches en vitamines. Enrique Martínez(Maher, à Cintruénigo — SpainGourmetour, nº 64), Koldo Rodero(Rodero, une étoile Michelin, àPampelune) et Ricardo Gil(Restaurante 33, une étoile Michelin,à Tudela) ont été le fer de lance de cepetit « mouvement vert ». Rodero, encollaboration avec l’agriculteur FlorenDomezain — probablement le plusgrand connaisseur de légumesd’Espagne (sa société, Floren, frutas yverduras selectas S.L., est devenue laprincipale entreprise de distributionespagnole de légumes de qualité) —,a parfaitement analysé l’univers végétalde la plaine maraîchère de Navarre.« Chaque légume est un monde — faitremarquer Rodero —, on ne peut pasgénéraliser mais il existe trois facteursimportants : le nettoyage, latempérature de cuisson et la qualité del’eau. Traditionnellement, pourconserver la couleur des légumes, onajoutait d’autres ingrédients à l’eau decuisson (citron, farine, persil). Nousavons remarqué qu’en nettoyant leschardons ou les bourraches au jet,c’est-à-dire en maintenant lerenouvellement de l’eau, il n’y a rien àajouter. On ne doit pas non plus retirerles fibres en tirant car ce mouvementlibère dans le végétal une enzyme quifavorise l’oxydation ; on doit nettoyerle légume au moyen de coupeslongitudinales faites avec la pointed’un couteau très affilé. » Roderorecommande également de ne pasdépasser 70 ºC — température àlaquelle le liquide n’arrive pas àébullition — et d’étudier le type d’eauafin d’y adapter la cuisson.De récentes analyses ont démontré quele magnésium aide à fixer lachlorophylle, c’est pourquoi dans unecuisson à forte teneur en sels, lescouleurs des légumes sont plus vives.Rodero se déclare adepte des cuissonssous vide : « Les asperges, cuites sousvide, sans aucun liquide, sont

sensationnelles car elles conserventtoutes leurs tonalités terreuses et denitrates ainsi que la douceur qui lescaractérise lorsqu’elles sontassaisonnées. Je dis toujours que dansla cuisson de l’asperge, c’est l’eau quigagne. Le vide est la meilleure façond’éviter cela. »Les travaux de Ricardo Gil encollaboration avec Laboratorios Olealui ont permis de quantifier l’avantaged’utiliser de l’eau osmotisée pour lacuisson des légumes verts, de préciserleur taux d’oxydation et d’éviter celle-ci en réduisant le niveau d’eau tout enposant un couvercle sur les légumes demanière qu’ils soient totalementimmergés. De même, il a développédes paniers pour chacune des variétésde légumes ; ces paniers sont placésdans les marmites de sorte qu’une foisterminé le processus de la cuisson, leslégumes conservent leur formeoriginelle, sans aucune altérationmorphologique.Enrique Martínez, Koldo Rodero,Ricardo Gil, chacun à sa façon, guidéspar l’intuition, suivent leur proprechemin avec un but commun :améliorer les systèmes de cuissondes légumes.Le Gastrovac est un curieux appareilconçu par Sergio Torres (Dos Cielos, àBarcelone) et Javier Andrés (LaSucursal, à Valence) en collaborationavec l’Université polytechnique deValence et commercialisé par la sociétécatalane International CookingConcepts ICC (Spain Gourmetour,nº 63). Un genre d’autocuiseur où lesaliments cuisent sous vide à bassetempérature. À l’intérieur est créée uneatmosphère artificielle à bassepression, sans oxygène, où l’on peutcuire et même frire à bassetempérature. Lorsque l’on restitue lapression atmosphérique normale, leproduit absorbe (effet éponge)immédiatement le liquide dans lequelil est plongé. Cette fonction permet de‘transformer’ le goût des aliments. Onpeut très bien imaginer une pommeayant le goût de la menthe ou unmorceau d’ananas ayant le goût de lanoix de coco, tout en respectant lestextures, la couleur et les nutriments

Pois chiches Pico Pardal frits avec crevettes sauceà l’ail et crustillant de crevettes(Garbanzos de pico de pardal fritoscon gambas al ajillo y crujiente de gamba)

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des aliments. Les meilleurs résultatssont obtenus avec les légumes et lespoissons, dont le fondant est renforcé.Quique Dacosta (El Poblet, deuxétoiles Michelin, à Denia, Est del’Espagne) a écrit une véritable thèsesur la cuisson du riz dans son ouvrageArroces contemporáneos (Rizcontemporains). Il y expose, outre uneanalyse des variétés, des préparationset des ustensiles, sa méthode decuisson en deux temps : un systèmequi permet aux restaurants de préparerles riz à l’avance et d’en achever lacuisson lorsque le convive fait sacommande, et cela sans que le mets ensouffre. Il ne s’agit pas de précuire leriz et de le mélanger ensuite au sofrito,mais d’interrompre sa cuissonnaturelle. « C’est la nécessité de servirun riz parfaitement cuit au milieu d’unmenu — explique Dacosta — qui nousa amenés à nous interroger sur ce quise produirait si nous interrompions lebouillonnement au bout de 8 minuteset si nous le reprenions 4 minutesavant de le présenter à la table. Ladifficulté était de déterminer encombien de temps 98 % du grain segélatinise selon les variétés. » Leprocédé est simple. On cuit le riz à lamanière traditionnelle et au bout de8 minutes, on l’égoutte, on réserve lebouillon dans un récipient puis onplace les grains dans un bain-marieinverse, c’est-à-dire glacé, pour qu’ilrefroidisse, étape pendant laquelle lacuisson évoluera de 10 %. Le momentvenu, on réchauffe le bouillon et on yverse le riz pour conclure le processus.Dacosta a également expérimenté lescuissons de riz sous vide, méthode àlaquelle Joan Roca (El Celler de CanRoca, deux étoiles Michelin, à Gérone)a consacré une partie de ses études.Cette technique permet aux cuisiniersde travailler avec une précisionabsolue, grâce au Roner (SpainGourmetour, nº 63), un appareil utilisédans l’industrie pharmaceutique et queRoca a transposé à la cuisine avec unsuccès énorme. Au point que bien desarrocerías de grande consommation oudes traiteurs préparent leurs riz sousvide et simplifient ainsi leur logistique.Le processus, comme le dit Dacosta,

« consiste à conditionner le riz sousvide avec la quantité de bouillon tièdenécessaire. On met le sachet au Roneret on le cuit à 82 ºC pendant 60minutes. Le temps peut varier enfonction du type de riz. On refroiditensuite le sachet en le plongeant dansun bain glacé. Le riz est prêt à êtrerégénéré (chauffé au bain-marie) aumoment de servir. »L’utilisation de la cuisson sous videappliquée à une infinité d’ingrédients aété d’une grande utilité technique,remplaçant même ou complétant desméthodes aussi classiques que lacuisson au four. Nombreux sont lescuisiniers qui, au lieu de rôtir lesmorceaux d’agneau ou de cochon delait, les cuisent sous vide avant de lespeaufiner à la plancha pour obtenir ladélicieuse texture d’une peaucroustillante et de rivaliser ainsi avecles résultats obtenus au four. Au cœurmême de la Castille (Centre del’Espagne) où sont incontournables lesviandes rôties dans des fours à bois etoù les maîtres rôtisseurs maîtrisentcette technique ancestrale, beaucoupde jeunes cuisiniers, riches de ce savoircomme Jesús Ramiro junior (Ramiro’s,une étoile Michelin, à Valladolid),préfèrent utiliser le système de cuissonsous vide dans leur restaurant, leurlogistique s’en trouvant simplifiée.Ce qui caractérise les cuissons sousvide c’est que les ingrédients, quelsqu’ils soient, conservent leur jus, leur

arôme et leurs propriétésnutritionnelles. La possibilité deprolonger longtemps la cuisson à destempératures très basses est un autrefacteur qui joue efficacement sur lapréservation des caractéristiquesorganoleptiques des produits.La combinaison basse température/videapparaît comme l’une des techniquesles plus respectueuses du produit.Grâce à la cuisson à faible température,les cuisiniers peuvent contrôler à laseconde le point de cuisson d’unélément aussi délicat que le jauned’œuf. Cette technique a été développéetrès minutieusement par Andoni L.Aduriz. Des dizaines de consistancesdifférentes pour un seul ingrédient,allant de la texture terreuse veloutéed’un jaune totalement cuit à la fluiditéextrême d’un jaune d’œuf liquide.

Escabèches,conservation ouassaisonnement ?Le vide est également utilisé dans lapréparation des escabèches, l’une desrecettes les plus anciennes etcaractéristiques de la cuisineespagnole, héritée de la tradition arabeet qui est parvenue presque inchangéejusqu’à nos jours. On trouve desrecettes d’escabèche dans les premierslivres de recettes espagnols etégalement dans des manuels hispano-arabes comme La cocina hispanomagrebí durante la época almohade (Lacuisine hispano-maghrébine à l’époquealmohade), traduction d’un manuscritanonyme réalisée par Ambrosio Huici(Editions Trea), dans lequel cettetechnique porte le nom de sikbay.À son origine, la principale fonction del’escabèche était de préserver lesaliments et de les conserver, surtout enété où les matières premières sedécomposaient rapidement. Pour cefaire, il était nécessaire de mettre leproduit au contact d’un milieu acide(le vinaigre) auquel on ajoutait desépices, des herbes aromatiques et descondiments aux propriétésantiseptiques (ail, coriandre, laurier,poivre, peau d’agrumes). La cuisson se

prolongeait un certain temps de façonà éviter l’éventuelle prolifération debactéries. De nos jours, comme celan’est plus nécessaire, nous sommespassés des escabèches de conservationaux escabèches à consommationimmédiate, comme l’a si souventexpliqué Iñaki Camba (Arce, Madrid).Ainsi, l’escabèche devient unassaisonnement, une sauce et il n’estplus utile de soumettre la préparationaux longues cuissons d’antan ni auxfritures préalables, comme on le faisaitpour les truites ou les sardines. Oncherche simplement à être fidèle auxgoûts qu’acquéraient ainsi certainsaliments parce que c’est quelque chosequi fait partie de notre mémoiregustative. « En ce sens, notre travail aconsisté à simplifier les recettes— explique Pepe Rodríguez Rey (ElBohío, une étoile Michelin, à Tolède —,à les rendre plus délicates, moinsfortes. Bref, à sublimer l’escabèche.Élaborée sous vide ou suivant laméthode traditionnelle, nous en avonschangé les proportions, en diminuantla puissance du vinaigre dont la qualitéest en outre meilleure car nousutilisons maintenant d’excellentsvinaigres de Xérès. »

La friture, révolutiondes poêlesLa friture, l’une des techniquesculinaires les plus traditionnellesd’Espagne, a été l’objet d’une étudeminutieuse de la part du cuisinier deMalaga Dani García (Calima, une étoileMichelin, Malaga), en collaborationavec le professeur d’anatomiepathologique de l’Université deGrenade, Raimundo García del Moral.Résultat : la fameuse « friture du XXIe

siècle », technique suivant laquelle lespoissons sont frits tout entiers, avec lapeau et les écailles, de sorte quecelles-ci se transforment sous l’effet dela chaleur en papillote naturelle danslaquelle cuit la chair du poisson quiconserve ainsi tout son jus. « Au coursd’une conversation — raconte DaniGarcía —, Raimundo García del Moralm’a expliqué qu’à Casa Joaquín(Almería, Sud de l’Espagne) il avait

Soupe tiède de ciboule, ails sauvages et poissons bleus(Sopa tibia de cebollino, ajos silvestres y pescados azules)

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des aliments. Les meilleurs résultatssont obtenus avec les légumes et lespoissons, dont le fondant est renforcé.Quique Dacosta (El Poblet, deuxétoiles Michelin, à Denia, Est del’Espagne) a écrit une véritable thèsesur la cuisson du riz dans son ouvrageArroces contemporáneos (Rizcontemporains). Il y expose, outre uneanalyse des variétés, des préparationset des ustensiles, sa méthode decuisson en deux temps : un systèmequi permet aux restaurants de préparerles riz à l’avance et d’en achever lacuisson lorsque le convive fait sacommande, et cela sans que le mets ensouffre. Il ne s’agit pas de précuire leriz et de le mélanger ensuite au sofrito,mais d’interrompre sa cuissonnaturelle. « C’est la nécessité de servirun riz parfaitement cuit au milieu d’unmenu — explique Dacosta — qui nousa amenés à nous interroger sur ce quise produirait si nous interrompions lebouillonnement au bout de 8 minuteset si nous le reprenions 4 minutesavant de le présenter à la table. Ladifficulté était de déterminer encombien de temps 98 % du grain segélatinise selon les variétés. » Leprocédé est simple. On cuit le riz à lamanière traditionnelle et au bout de8 minutes, on l’égoutte, on réserve lebouillon dans un récipient puis onplace les grains dans un bain-marieinverse, c’est-à-dire glacé, pour qu’ilrefroidisse, étape pendant laquelle lacuisson évoluera de 10 %. Le momentvenu, on réchauffe le bouillon et on yverse le riz pour conclure le processus.Dacosta a également expérimenté lescuissons de riz sous vide, méthode àlaquelle Joan Roca (El Celler de CanRoca, deux étoiles Michelin, à Gérone)a consacré une partie de ses études.Cette technique permet aux cuisiniersde travailler avec une précisionabsolue, grâce au Roner (SpainGourmetour, nº 63), un appareil utilisédans l’industrie pharmaceutique et queRoca a transposé à la cuisine avec unsuccès énorme. Au point que bien desarrocerías de grande consommation oudes traiteurs préparent leurs riz sousvide et simplifient ainsi leur logistique.Le processus, comme le dit Dacosta,

« consiste à conditionner le riz sousvide avec la quantité de bouillon tièdenécessaire. On met le sachet au Roneret on le cuit à 82 ºC pendant 60minutes. Le temps peut varier enfonction du type de riz. On refroiditensuite le sachet en le plongeant dansun bain glacé. Le riz est prêt à êtrerégénéré (chauffé au bain-marie) aumoment de servir. »L’utilisation de la cuisson sous videappliquée à une infinité d’ingrédients aété d’une grande utilité technique,remplaçant même ou complétant desméthodes aussi classiques que lacuisson au four. Nombreux sont lescuisiniers qui, au lieu de rôtir lesmorceaux d’agneau ou de cochon delait, les cuisent sous vide avant de lespeaufiner à la plancha pour obtenir ladélicieuse texture d’une peaucroustillante et de rivaliser ainsi avecles résultats obtenus au four. Au cœurmême de la Castille (Centre del’Espagne) où sont incontournables lesviandes rôties dans des fours à bois etoù les maîtres rôtisseurs maîtrisentcette technique ancestrale, beaucoupde jeunes cuisiniers, riches de ce savoircomme Jesús Ramiro junior (Ramiro’s,une étoile Michelin, à Valladolid),préfèrent utiliser le système de cuissonsous vide dans leur restaurant, leurlogistique s’en trouvant simplifiée.Ce qui caractérise les cuissons sousvide c’est que les ingrédients, quelsqu’ils soient, conservent leur jus, leur

arôme et leurs propriétésnutritionnelles. La possibilité deprolonger longtemps la cuisson à destempératures très basses est un autrefacteur qui joue efficacement sur lapréservation des caractéristiquesorganoleptiques des produits.La combinaison basse température/videapparaît comme l’une des techniquesles plus respectueuses du produit.Grâce à la cuisson à faible température,les cuisiniers peuvent contrôler à laseconde le point de cuisson d’unélément aussi délicat que le jauned’œuf. Cette technique a été développéetrès minutieusement par Andoni L.Aduriz. Des dizaines de consistancesdifférentes pour un seul ingrédient,allant de la texture terreuse veloutéed’un jaune totalement cuit à la fluiditéextrême d’un jaune d’œuf liquide.

Escabèches,conservation ouassaisonnement ?Le vide est également utilisé dans lapréparation des escabèches, l’une desrecettes les plus anciennes etcaractéristiques de la cuisineespagnole, héritée de la tradition arabeet qui est parvenue presque inchangéejusqu’à nos jours. On trouve desrecettes d’escabèche dans les premierslivres de recettes espagnols etégalement dans des manuels hispano-arabes comme La cocina hispanomagrebí durante la época almohade (Lacuisine hispano-maghrébine à l’époquealmohade), traduction d’un manuscritanonyme réalisée par Ambrosio Huici(Editions Trea), dans lequel cettetechnique porte le nom de sikbay.À son origine, la principale fonction del’escabèche était de préserver lesaliments et de les conserver, surtout enété où les matières premières sedécomposaient rapidement. Pour cefaire, il était nécessaire de mettre leproduit au contact d’un milieu acide(le vinaigre) auquel on ajoutait desépices, des herbes aromatiques et descondiments aux propriétésantiseptiques (ail, coriandre, laurier,poivre, peau d’agrumes). La cuisson se

prolongeait un certain temps de façonà éviter l’éventuelle prolifération debactéries. De nos jours, comme celan’est plus nécessaire, nous sommespassés des escabèches de conservationaux escabèches à consommationimmédiate, comme l’a si souventexpliqué Iñaki Camba (Arce, Madrid).Ainsi, l’escabèche devient unassaisonnement, une sauce et il n’estplus utile de soumettre la préparationaux longues cuissons d’antan ni auxfritures préalables, comme on le faisaitpour les truites ou les sardines. Oncherche simplement à être fidèle auxgoûts qu’acquéraient ainsi certainsaliments parce que c’est quelque chosequi fait partie de notre mémoiregustative. « En ce sens, notre travail aconsisté à simplifier les recettes— explique Pepe Rodríguez Rey (ElBohío, une étoile Michelin, à Tolède —,à les rendre plus délicates, moinsfortes. Bref, à sublimer l’escabèche.Élaborée sous vide ou suivant laméthode traditionnelle, nous en avonschangé les proportions, en diminuantla puissance du vinaigre dont la qualitéest en outre meilleure car nousutilisons maintenant d’excellentsvinaigres de Xérès. »

La friture, révolutiondes poêlesLa friture, l’une des techniquesculinaires les plus traditionnellesd’Espagne, a été l’objet d’une étudeminutieuse de la part du cuisinier deMalaga Dani García (Calima, une étoileMichelin, Malaga), en collaborationavec le professeur d’anatomiepathologique de l’Université deGrenade, Raimundo García del Moral.Résultat : la fameuse « friture du XXIe

siècle », technique suivant laquelle lespoissons sont frits tout entiers, avec lapeau et les écailles, de sorte quecelles-ci se transforment sous l’effet dela chaleur en papillote naturelle danslaquelle cuit la chair du poisson quiconserve ainsi tout son jus. « Au coursd’une conversation — raconte DaniGarcía —, Raimundo García del Moralm’a expliqué qu’à Casa Joaquín(Almería, Sud de l’Espagne) il avait

Soupe tiède de ciboule, ails sauvages et poissons bleus(Sopa tibia de cebollino, ajos silvestres y pescados azules)

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goûté une sole “enflée” dont la peauservait de protection naturelle etpermettait une double cuisson dupoisson. Je me suis alors rendu compteque dans certains bars populairesconnus pour leur friture, les petitsanchois arrivaient sur le comptoir avecla peau cloquée. C’est ainsi que j’aicommencé à réfléchir à la techniquede la friture car, dans la cuisined’avant-garde, ce procédé est enprincipe écarté. » Réussir à frire decette manière n’est pas simple, et tousles poissons ne s’y prêtent pasfacilement. Les meilleurs résultats sontobtenus avec la sole et le turbot, maisl’équipe de Calima a réussi avec succèsà le faire avec les petits rougets, lespetites et grosses dorades et même leSaint-Pierre. Il est indispensable que lepoisson conserve sa peau et ses écaillesintactes. S’il comporte des coups oudes coupures, il est inutilisable. Celarequiert une sélection soigneuse desexemplaires. La température est aussiun facteur important. Le poisson doitêtre entre 1 ºC et 2 ºC, pas plus, pourque se produise un fort contrastethermique quand il est plongé dansl’huile à 180 ºC. C’est ainsi que la peaugonfle en se séparant des filets quicuisent à la vapeur dans leur juspuisque la graisse ne traverse pas lapeau, elle ne fait que la rendrecroustillante. « Je me suis renducompte — ajoute García — que dansun restaurant de haute cuisine nous nepouvions pas servir le poisson entier etqu’en outre les convives retirentgénéralement la peau et ne la mangentpas. Cela m’a obligé à revoir la recette ;nous avons fini par servir des filetsdépouillés, accompagnés d’unemblanco (bouillon typique de Malagaà base d’eau, de sel et de poisson)comme sauce, avec la peau à partcomme un croustillant. Pour cela, lespoissons sont débarrassés en cuisinede leur peau, que nous faisons frire ànouveau jusqu’à ce qu’elle soitcroquante. Le plat fut un grand succèsmais il est d’une extrême complexitépour le service, et c’est pourquoi iln’est pas toujours sur la carte. »Fasciné par la friture, García n’a cesséde faire des recherches et son dernier

apport est une nouvelle version despetites omelettes traditionnelles deCadix aux minuscules crevettes, bienque, dans ce cas, la nouveauté neréside pas dans la technique mais dansles ingrédients. La pâte à la farine a étéremplacée par deux fines galettesd’amidon transparentes — ingrédientque García a découvert au Japon —entre lesquelles on dépose les petitescrevettes en dessinant une spirale. Lerésultat est une dentelle croustillante,fragile et très délicate, sublimation dela friture de Cadix dans laquelle legoût du crustacé n’est masqué ni par lafarine ni par l’huile. De la poésie àl’état pur.Le cuisinier de La Rioja, FrancisPaniego (Echaurren, une étoileMichelin, à Ezcaray, Nord del’Espagne), a également apporté unenouveauté importante au monde de lafriture. Utilisant une technique moinscomplexe que celle de García, sonfameux « Merlu à la romaine confit à45 ºC » a fait le tour de l’Espagne etdes centaines de cuisiniers — maisaussi des maîtresses de maison — lepréparent tous les jours.« L’idée, explique Paniego, m’est venueen regardant faire ma mère. Lorsqu’elledirigeait le restaurant, elle faisait frireles morceaux de merlu à fortetempérature et les laissait ensuitequelques minutes dans l’huile defriture hors du feu. J’ai pensé alors quenous pouvions réussir la même chose,mais en contrôlant les temps, enfaisant frire le merlu quelquessecondes dans une huile à hautetempérature jusqu’à ce que se formeune couche extérieure croustillante eten le plongeant à la fin cinq minutesdans une huile à 45 ºC. Le résultatdevait être exceptionnel car onobtiendrait ainsi une espèce deconfit. » Il ne s’est pas trompé. Sonmerlu avec une soupe de riz et despoivrons frits est l’un des plats les plussimples et délicats que j’aie jamaisgoûté : sous une enveloppe dorée,apparaît un poisson blanc, immaculé,qui se défait en gros feuillets juteux,frais et très goûteux ; un véritablefestival de sensations gustatives.

Les émulsions,soupes et saucesles plus délicatesIl existe des préparations qui sont lefruit de l’émulsion d’une graisse etd’autres éléments. On distingue parmicelles-ci des sauces telles que lespopulaires aïolis (sauce à base d’huiled’olive vierge extra et d’ail) du Levant,le pil-pil basque (émulsion d’huiled’olive et de gélatine de peau demorue) et les traditionnelles soupesfroides andalouses : gazpacho (à basede tomate), ajoblanco (à based’amandes moulues), salmorejo (à based’eau, de tomate, de vinaigre, d’huiled’olive, sel et poivre), porrad’Antequera (à base de mie de pain).Toutes ces recettes ont connu dans leurpréparation une évolution importante,soit en raison de l’apparition denouveaux appareils, comme leThermomix — capable d’émulsionnercomme on ne l’avait jamais imaginéauparavant — ; de changements dansla phase même d’élaboration, commepour le pil-pil ; de modifications dansle traitement de l’ingrédient principal,comme l’ail dans les aïolis modernes ;ou encore à cause de l’incorporationd’autres ingrédients, facteur commun àtoutes ces préparations.« Nous n’aurions jamais imaginé,

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Marmitako (ragoût à base de boniteet de pommes de terre)

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Comme un parfummystique dans l’air« Je suis né à Ávila, l’ancienne villefortifiée, et je pense que son silence et sasérénité quasi mystiques ont imprégnémon âme à ma naissance », a écritMiguel Delibes (né en 1920), l’un desplus importants auteurscontemporains espagnols. De fait,malgré son atmosphère bien vivante, lalocalité est empreinte d’une singulièrequiétude. Ávila n’est pas seulement laville des nobles gens, elle est aussi lelieu de naissance de sainte Thérèse

(1515–1582), l’une des grandesmystiques universelles espagnoles.Dans cette ville qui l’a vue naître, elle aécrit ses fameuses œuvres et y a passél’essentiel de sa vie, en particulier aumonastère de l’Incarnation(Monasterio de La Encarnación). Situéà environ trois kilomètres de la vieilleville, sa visite vaut le détour. Maisrendons-nous plutôt au couvent et aumusée de sainte Thérèse enpassant par la place centrale d’Ávila,appelée place du Mercado Chico, enraison du marché traditionnel qui s’ytient encore tous les vendredis.

Ses arcades sont dominées par lamairie et des ruelles en partent, pleinesde petites échoppes, en direction desquatre points cardinaux vers le murd’enceinte. Dans le couvent carmélitebaroque, populairement appelé « LaMaison de la Sainte », vous pourrezvisiter la chapelle érigée sur le lieu denaissance de Thérèse. Elle abrite unestatue de la sainte, ainsi qu’unemagnifique sculpture du Christ. Lemusée adjacent contient desmanuscrits, des vêtements et d’autresobjets de la religieuse. L’anniversaire desa mort, survenue un 15 octobre, estcélébré par une longue procession etune messe solennelle qui attirent desmilliers de fidèles dans le centrehistorique.Mais, si nous mettons de côté cetteferveur religieuse, Ávila est aussi le siègedu premier Centre internationald’études mystiques, fondé par le conseilmunicipal, avec le soutien de plusieursinstitutions publiques et privées, et del’Unesco, qui coopère étroitement augrand nombre d’événementsd’envergure internationale organisés àÁvila : congrès et séminairesmonographiques, performancesmusicales ou d’une autre nature etexpositions, comme la dernière, intitulée

aussi prendre soin de notre corps, etnous sommes justement au bonendroit. En passant par la Puerta delRastro, juste en face, des effluves defeu de bois nous attirentirrémédiablement vers le Mesón ElRastro, qui est sans doute actuellementle meilleur restaurant d’Ávila. Sarenommée n’est pas uniquement due àla gentillesse de ses serveuses commeMariluz, qui travaille ici depuis plus de40 ans et connaît le nom de plusieursgénérations de clients assidus.Souvent, le week-end, certainsviennent même exprès de Madrid poury déjeuner. « Nous sommes unegrande famille », nous dit PilarSánchez qui, avec son frère, représentela quatrième génération aux rênes del’entreprise familiale. C’est l’endroitidéal pour goûter les typiques patatasrevolconas (dés de pomme de terrelentement poêlés à l’huile d’olivejusqu’à ce qu’ils aient presque laconsistance d’une purée, aromatisée delard frais, de pimentón piquant et d’ail)ou les judías de l’IGP El Barco de Ávila(voir Spain Gourmetour, n° 58), unragoût de haricots blancs d’une grandefinesse. Ces spécialités ne sontcependant que des entrées. En platprincipal, essayez le cochon de lait,tendre et croustillant, ou la fameusechuleta d’Ávila, côte de veau dont laviande fond en bouche comme dubeurre. Les desserts sont tous faitsmaison et avec votre café, si vousn’avez pas encore succombé à latentation, demandez des Yemas deSanta Teresa, quintessence sucréed’Ávila à base de jaunesd’œuf (« De petites bouchées deparadis », page 78).Avant de quitter la ville, empruntez laPuerta del Puente (Porte du Pont) ettraversez le pont romain bien conservéqui enjambe la rivière Adaja pour vousrendre au monument des CuatroPostes (Quatre Piliers), d’où vousadmirerez un panorama spectaculairede la ville fortifiée. Mais, ici encore,inutile d’aller aussi loin. Juste après le

Que faire des jaunes ? Cette question estjudicieuse dans une région où le Xérèstraditionnel était affiné avec des blancsd’œuf. Les ordres religieux étaient lesbénéficiaires idéaux de cet ingrédient etc’est justement dans les couvents duSud-Est de l’Espagne que l’élaborationdes Yemas (jaunes) est censée être néeavant de gagner d’autres couvents,dispersés un peu partout dans le pays. Ilexiste donc des Yemas de Sevilla, d’Ecijaou de Cádiz, mais n’oublions pas lesYemas de San Pablo, les plus connuesétant sans doute les Yemas de SantaTeresa d’Ávila. Toutefois, pas de religieusedirectement impliquée ici. C’est IsabeloSánchez qui a imaginé cette douceur en1860. Même si, pendant plus d’un siècle,l’entreprise a été familiale, la ville d’Ávilaest devenue indissociable de ces

fameuses pâtisseries à base de jaunes, àtel point qu’afin d’en garantir la qualité leproduit a dû être breveté, des imitationsapparaissant un peu partout. Voustrouverez donc dans les innombrablespâtisseries locales les Yemas d’Ávila,alors que seules trois épiceries fines, lesFlor de Castilla, vendent les Yemas deSanta Teresa originales, qui sontaujourd’hui entièrement préparées à lamain à partir des meilleurs ingrédients.Les jaunes d’œuf sont lentementincorporés à un sirop et laissés sesolidifier juste assez pour pouvoir êtreroulés à la main et recouverts de sucre enpoudre. Leur texture aérienne, leursublime couleur jaune et leur goûtexceptionnel font de ces douceurs devraies petites bouchées de paradis.

D E P E T I T E S B O U C H É E S D E P A R A D I S

Place du Grand Marché, Ávila

« Art et mysticisme » qui a placé dans lecentre ville plusieurs statues en bronzede l’artiste cubiste d’origine lithuanienneJacques Lipchitz (1891–1973). Lafondation accueille également unnouveau Centre d’interprétationmystique où, sur plusieurs étages etaccompagnés d’un dépliant, vous êtesinvités à faire l’expérience de votrepropre mysticisme.

Faire attentionà son corpsL’esprit ne doit pas être le seul à fairel’objet de toutes nos attentions ; il faut

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goûté une sole “enflée” dont la peauservait de protection naturelle etpermettait une double cuisson dupoisson. Je me suis alors rendu compteque dans certains bars populairesconnus pour leur friture, les petitsanchois arrivaient sur le comptoir avecla peau cloquée. C’est ainsi que j’aicommencé à réfléchir à la techniquede la friture car, dans la cuisined’avant-garde, ce procédé est enprincipe écarté. » Réussir à frire decette manière n’est pas simple, et tousles poissons ne s’y prêtent pasfacilement. Les meilleurs résultats sontobtenus avec la sole et le turbot, maisl’équipe de Calima a réussi avec succèsà le faire avec les petits rougets, lespetites et grosses dorades et même leSaint-Pierre. Il est indispensable que lepoisson conserve sa peau et ses écaillesintactes. S’il comporte des coups oudes coupures, il est inutilisable. Celarequiert une sélection soigneuse desexemplaires. La température est aussiun facteur important. Le poisson doitêtre entre 1 ºC et 2 ºC, pas plus, pourque se produise un fort contrastethermique quand il est plongé dansl’huile à 180 ºC. C’est ainsi que la peaugonfle en se séparant des filets quicuisent à la vapeur dans leur juspuisque la graisse ne traverse pas lapeau, elle ne fait que la rendrecroustillante. « Je me suis renducompte — ajoute García — que dansun restaurant de haute cuisine nous nepouvions pas servir le poisson entier etqu’en outre les convives retirentgénéralement la peau et ne la mangentpas. Cela m’a obligé à revoir la recette ;nous avons fini par servir des filetsdépouillés, accompagnés d’unemblanco (bouillon typique de Malagaà base d’eau, de sel et de poisson)comme sauce, avec la peau à partcomme un croustillant. Pour cela, lespoissons sont débarrassés en cuisinede leur peau, que nous faisons frire ànouveau jusqu’à ce qu’elle soitcroquante. Le plat fut un grand succèsmais il est d’une extrême complexitépour le service, et c’est pourquoi iln’est pas toujours sur la carte. »Fasciné par la friture, García n’a cesséde faire des recherches et son dernier

apport est une nouvelle version despetites omelettes traditionnelles deCadix aux minuscules crevettes, bienque, dans ce cas, la nouveauté neréside pas dans la technique mais dansles ingrédients. La pâte à la farine a étéremplacée par deux fines galettesd’amidon transparentes — ingrédientque García a découvert au Japon —entre lesquelles on dépose les petitescrevettes en dessinant une spirale. Lerésultat est une dentelle croustillante,fragile et très délicate, sublimation dela friture de Cadix dans laquelle legoût du crustacé n’est masqué ni par lafarine ni par l’huile. De la poésie àl’état pur.Le cuisinier de La Rioja, FrancisPaniego (Echaurren, une étoileMichelin, à Ezcaray, Nord del’Espagne), a également apporté unenouveauté importante au monde de lafriture. Utilisant une technique moinscomplexe que celle de García, sonfameux « Merlu à la romaine confit à45 ºC » a fait le tour de l’Espagne etdes centaines de cuisiniers — maisaussi des maîtresses de maison — lepréparent tous les jours.« L’idée, explique Paniego, m’est venueen regardant faire ma mère. Lorsqu’elledirigeait le restaurant, elle faisait frireles morceaux de merlu à fortetempérature et les laissait ensuitequelques minutes dans l’huile defriture hors du feu. J’ai pensé alors quenous pouvions réussir la même chose,mais en contrôlant les temps, enfaisant frire le merlu quelquessecondes dans une huile à hautetempérature jusqu’à ce que se formeune couche extérieure croustillante eten le plongeant à la fin cinq minutesdans une huile à 45 ºC. Le résultatdevait être exceptionnel car onobtiendrait ainsi une espèce deconfit. » Il ne s’est pas trompé. Sonmerlu avec une soupe de riz et despoivrons frits est l’un des plats les plussimples et délicats que j’aie jamaisgoûté : sous une enveloppe dorée,apparaît un poisson blanc, immaculé,qui se défait en gros feuillets juteux,frais et très goûteux ; un véritablefestival de sensations gustatives.

Les émulsions,soupes et saucesles plus délicatesIl existe des préparations qui sont lefruit de l’émulsion d’une graisse etd’autres éléments. On distingue parmicelles-ci des sauces telles que lespopulaires aïolis (sauce à base d’huiled’olive vierge extra et d’ail) du Levant,le pil-pil basque (émulsion d’huiled’olive et de gélatine de peau demorue) et les traditionnelles soupesfroides andalouses : gazpacho (à basede tomate), ajoblanco (à based’amandes moulues), salmorejo (à based’eau, de tomate, de vinaigre, d’huiled’olive, sel et poivre), porrad’Antequera (à base de mie de pain).Toutes ces recettes ont connu dans leurpréparation une évolution importante,soit en raison de l’apparition denouveaux appareils, comme leThermomix — capable d’émulsionnercomme on ne l’avait jamais imaginéauparavant — ; de changements dansla phase même d’élaboration, commepour le pil-pil ; de modifications dansle traitement de l’ingrédient principal,comme l’ail dans les aïolis modernes ;ou encore à cause de l’incorporationd’autres ingrédients, facteur commun àtoutes ces préparations.« Nous n’aurions jamais imaginé,

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Marmitako (ragoût à base de boniteet de pommes de terre)

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Commencée au XIIe siècle, il a fallu

attendre le XVIe siècle pour voir

s’achever la construction de ce lieu de

culte, qui est non seulement la plus

vieille cathédrale gothique d’Espagne,

mais aussi l’un des plus beaux

exemples d’église forteresse du

continent. Son abside est soutenue par

une triple rangée de remparts de très

grande taille abritant des galeries

intérieures et des meurtrières situées

dans le mur d’enceinte. Vous pouvez

d’ailleurs voir le tout de vos propres

yeux en longeant la cathédrale et en

passant par la Puerta del Peso de la

Harina (Porte de la Pesée de la Farine)

pour atteindre l’autre côté du mur.

Extra civitatemnulla securitasUne fois sur place commence à votregauche ce qui est sans doute la partiela plus intéressante de ce mur sobre etimposant en granit qui, heureusement,n’a plus besoin de s’en tenir à lasentence citée, signifiant « pas desécurité en dehors de la ville ». Lesfortifications sont restées en grandepartie intactes, sans doute en raison del’extrême pauvreté de la région auXIXe siècle qui a empêché la ville des’étendre et de supprimer l’ancienne.Ce mur a été érigé au XIIe siècle, avecl’aide et le savoir-faire des ouvriersmaures et des artisans juifs, afin

d’établir un bastion solide durant laméticuleuse reconquête de cette partiede la péninsule Ibérique occupée parles Arabes. Cette période est connuesous le nom de Reconquista. Souvent,les vestiges des colonies romainesvoisines étaient utilisés ; une pratiqueclairement visible ici. Juste à côté dumur extérieur, vous verrez aussi unensemble de constructions plusmodestes qui accueillaient desboucheries approvisionnant la ville.Aujourd’hui, les étables municipalesabritent La Bodeguita de San Segundo,un bar à vins animé (ouvert jusqu’à1h30 du matin), où vous pourrezgoûter tous les vins au verre,accompagnés d’une petite tapa.

« A Ávila, elles sont gratuites », rappelleEmilio Rufes, le jovial propriétaire deslieux. Vous y trouverez aussi unesélection de jambon Ibérico, unedélicieuse cecina (charcuterie de bœufséchée typique du nord de la région),un excellent carpaccio et même le steaktypique, ces deux derniers plats étantpréparés à partir de la fameuse Carne deÁvila (« Une région unique produit desviandes uniques », page 83). Il n’est pasétonnant que le New York Times y aitconsacré un article. Rufes est dans lecommerce du vin depuis près dequarante ans. Avec son épouse, Paqui, ildirige aussi la Vinoteca voisine, quipropose plus de 1 300 référencesœnologiques. Vous y trouverez des

conseils avisés sur tous les vins.Reprenons ensuite notre promenade : àdeux portes de là se trouve l’atelier deTeo Legido. Arrêtez-vous pour bavarder

et jeter un coup d’œil à ses créations debijoux en or, minimalistes, élégants etcontemporains. Pourquoi ne pas épaterun ami avec un cadeau unique ?

Muraille d’Ávila

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affirme Dani García, qu’une humblesoupe froide populaire comme legazpacho pouvait devenir un plat dehaute cuisine. À 22 ans, en 1998, j’aifait mon premier gazpacho depouces-pieds, inspiré du gazpacho dehomard de Ferran Adrià. Il s’agissaitd’une provocation mais c’était unesoupe élégante, harmonieuse, trèsraffinée qui n’avait rien à envier auxvichyssoises des restaurants français dehaute cuisine. » Dans ce cas, latechnologie et l’usage modéré decertains ingrédients comme l’ail ont étédécisifs pour rénover de façonpositive la recette.Mari Carmen Vélez (La Sirena,Alicante) a fait quelque chose desemblable avec l’aïoli du Levant. JosepPla (journaliste et écrivain espagnol ;1897-1981) disait que c’était une« sauce de jeunesse » qui excitait lessens et favorisait l’hyperbole. L’aïoliapparaît pour la première fois dans ledictionnaire de la langue espagnole en1600, et bien que la formule ne soitpas reprise dans les livres de cuisine deSent Soví (XIVe siècle, cuisinierespagnol qui publia le premier livre derecettes de cuisine catalane médiévale)ni de Ruperto de Nola (XVe siècle,cuisinier et auteur du Libro deGuisados, manjares y potajes (Livre desragoûts, mets et potages), il faisait déjàpartie du patrimoine culinairepopulaire.Sous son aspect inoffensif d’émulsiondélicate et légère, il dissimule toute lapuissance de l’ail. Lier l’Allium sativumet la graisse n’est pas chose facile.Depuis toujours, on a eu recours àl’ajout d’un autre émulsifiant : eau,bouillon, vinaigre, quelques gouttes decitron ou du jaune d’œuf. Une pratiquequi a dégénéré dans ces « faux aïolis »que l’on trouve actuellement partout etqui sont en réalité des mayonnaisesaromatisées à l’ail.Traditionnellement, l’aïoli se faisaitdans un mortier de marbre ou deporcelaine, en pilant avec du sel lesgousses crues de l’ail pour obtenir unepâte crémeuse. Peu à peu, on ajoutaitde l’huile jusqu’à l’obtention d’une

CUISSONBouillons

Méthode traditionnelle : Fairebouillir ensemble tous lesingrédients, égoutter etdégraisser. Laisser reposer pouréviter les turbidités et filtrer denouveau.

Méthode actualisée : Importanteréduction de la matière grasse.On ne fait pas revenir ni sauter lesingrédients. Cuisson de tous lesingrédients ensemble à feu trèsdoux, longuement, en lesmaintenant presque à leur pointd’ébullition afin qu’aucunmouvement ne rende trouble leliquide, ce qui permet d’éviter lesfiltrages postérieurs.

Légumes secsMéthode traditionnelle : On faittremper et on cuit les légumessecs sans contrôler ni latempérature ni le temps. On cuitensemble tous les ingrédients.

Méthode actualisée : Contrôledes températures durant letrempage et la cuisson. Cuissonséparée des ingrédients enfonction de leurs caractéristiques.

Légumes vertsMéthode traditionnelle : Il n’y a pas defaçon particulière de les laver. On les cuitdans une eau abondante. D’autresproduits sont ajoutés pour éviter oudissimuler l’oxydation.

Méthode actualisée : Une méthode delavage particulière est établie pourchaque légume afin d’éviter l’oxydation.

RagoûtsMéthode traditionnelle : Faire cuireensemble tous les ingrédients.Inconvénient : perte de qualitésnutritionnelles et organoleptiques.

Méthode actualisée : cuisiner chaqueingrédient séparément en respectant letemps propre à chaque ingrédient defaçon à en conserver les qualitésnutritionnelles et organoleptiques.

RizMéthode traditionnelle : 18-20 minutesen un seul temps de cuisson.

Méthode actualisée : Cuisson en deuxtemps. Cela permet de précuisiner le rizet de le terminer juste au moment deservir. Le processus de préparationtraditionnelle n’est pas modifié maisdivisé en deux temps.

CUISSON SOUS VIDECette nouvelle méthode de cuissonprésente de grands avantages car ellepermet de préparer les aliments sansrien y ajouter ; ils conservent ainsi touteleur saveur et leurs qualitésnutritionnelles. Remplace aussi bien lescuissons que les rôtis traditionnels(mouton, cochon de lait, poisson).

ESCABÈCHEMéthode traditionnelle : longue cuissonde l’aliment en milieu acide,généralement du vinaigre, dansl’intention de le conserver longtemps.

Méthode actualisée : Réduction destemps de cuisson et utilisation devinaigres de qualité de façon qu’ilsimprègnent les aliments de leursarômes. On ne prétend pas dans ce casconserver le produit mais le doter d’ungoût et d’une texture particulière.

FRITUREConfit

Méthode traditionnelle : Consiste àplonger des portions de poisson pannédans l’huile à 170 ºC. Une fois la croûteextérieure formée, on laisse reposerplusieurs minutes dans l’huile horsdu feu.

Méthode actualisée : On calculeexactement la durée et la température.On fait frire d’abord à feu vif lesmorceaux de poisson et l’on continue lafriture à 40 ºC pour que le poisson soitcuit à point. C’est comme si on leconfisait dans l’huile d’olive.

Traditionnelle – XXIe siècleMéthode traditionnelle : Consiste àplonger les poissons entiers pannésdans l’huile à 170 ºC. On utilise toujoursdes poissons de petite taille (anchois,petits poissons, rougets).

Méthode actualisée : La technique estidentique à la technique traditionnelle,mais on utilise de grands poissons afinque leur peau fasse office de papilloteproduisant ainsi une double cuisson del’aliment qui sera croustillant et ferme àl’extérieur et doucement cuit à l’intérieursans être imbibé d’huile.

ÉMULSIONSAïoli

Méthode traditionnelle : émulsion d’ailcru et d’huile d’olive par broyage manuelavec du sel ; on obtient une pâteonctueuse.Méthode actualisée : utilisation d’ailscuits ou grillés pour les adoucir etémulsion manuelle ou à la machine.Incorporation de nouveaux ingrédients.

Pil-pilMéthode traditionnelle : La cuisson dela morue avec sa peau dans de l’huiled’olive émulsionnée avec la gélatineproduite par le poisson donne lieu aupil-pil.

Méthode actualisée : La préparationséparée du pil-pil en utilisant les peauxde morue cuites dans l’huile d’oliveprovoque l’émulsion. On verse ensuite lasauce sur les morceaux de morue misau four à une température très doucependant 12 minutes environ.

Soupes froidesMéthode traditionnelle : Broyage desingrédients et ajout d’eau et d’huiled’olive pour obtenir l’émulsion. Textureépaisse, parfois grumeleuse.

Méthode actualisée : Usageindispensable d’un robot permettantd’émulsionner à grande vitesse pourobtenir une texture très fine d’unegrande délicatesse.

H I E R E T A U J O U R D ’ H U I

Riz crémeuxd’artichaut,clovisse et

fromageManchego

(Arroz cremosode alcachofa,

almeja y QuesoManchego)

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affirme Dani García, qu’une humblesoupe froide populaire comme legazpacho pouvait devenir un plat dehaute cuisine. À 22 ans, en 1998, j’aifait mon premier gazpacho depouces-pieds, inspiré du gazpacho dehomard de Ferran Adrià. Il s’agissaitd’une provocation mais c’était unesoupe élégante, harmonieuse, trèsraffinée qui n’avait rien à envier auxvichyssoises des restaurants français dehaute cuisine. » Dans ce cas, latechnologie et l’usage modéré decertains ingrédients comme l’ail ont étédécisifs pour rénover de façonpositive la recette.Mari Carmen Vélez (La Sirena,Alicante) a fait quelque chose desemblable avec l’aïoli du Levant. JosepPla (journaliste et écrivain espagnol ;1897-1981) disait que c’était une« sauce de jeunesse » qui excitait lessens et favorisait l’hyperbole. L’aïoliapparaît pour la première fois dans ledictionnaire de la langue espagnole en1600, et bien que la formule ne soitpas reprise dans les livres de cuisine deSent Soví (XIVe siècle, cuisinierespagnol qui publia le premier livre derecettes de cuisine catalane médiévale)ni de Ruperto de Nola (XVe siècle,cuisinier et auteur du Libro deGuisados, manjares y potajes (Livre desragoûts, mets et potages), il faisait déjàpartie du patrimoine culinairepopulaire.Sous son aspect inoffensif d’émulsiondélicate et légère, il dissimule toute lapuissance de l’ail. Lier l’Allium sativumet la graisse n’est pas chose facile.Depuis toujours, on a eu recours àl’ajout d’un autre émulsifiant : eau,bouillon, vinaigre, quelques gouttes decitron ou du jaune d’œuf. Une pratiquequi a dégénéré dans ces « faux aïolis »que l’on trouve actuellement partout etqui sont en réalité des mayonnaisesaromatisées à l’ail.Traditionnellement, l’aïoli se faisaitdans un mortier de marbre ou deporcelaine, en pilant avec du sel lesgousses crues de l’ail pour obtenir unepâte crémeuse. Peu à peu, on ajoutaitde l’huile jusqu’à l’obtention d’une

CUISSONBouillons

Méthode traditionnelle : Fairebouillir ensemble tous lesingrédients, égoutter etdégraisser. Laisser reposer pouréviter les turbidités et filtrer denouveau.

Méthode actualisée : Importanteréduction de la matière grasse.On ne fait pas revenir ni sauter lesingrédients. Cuisson de tous lesingrédients ensemble à feu trèsdoux, longuement, en lesmaintenant presque à leur pointd’ébullition afin qu’aucunmouvement ne rende trouble leliquide, ce qui permet d’éviter lesfiltrages postérieurs.

Légumes secsMéthode traditionnelle : On faittremper et on cuit les légumessecs sans contrôler ni latempérature ni le temps. On cuitensemble tous les ingrédients.

Méthode actualisée : Contrôledes températures durant letrempage et la cuisson. Cuissonséparée des ingrédients enfonction de leurs caractéristiques.

Légumes vertsMéthode traditionnelle : Il n’y a pas defaçon particulière de les laver. On les cuitdans une eau abondante. D’autresproduits sont ajoutés pour éviter oudissimuler l’oxydation.

Méthode actualisée : Une méthode delavage particulière est établie pourchaque légume afin d’éviter l’oxydation.

RagoûtsMéthode traditionnelle : Faire cuireensemble tous les ingrédients.Inconvénient : perte de qualitésnutritionnelles et organoleptiques.

Méthode actualisée : cuisiner chaqueingrédient séparément en respectant letemps propre à chaque ingrédient defaçon à en conserver les qualitésnutritionnelles et organoleptiques.

RizMéthode traditionnelle : 18-20 minutesen un seul temps de cuisson.

Méthode actualisée : Cuisson en deuxtemps. Cela permet de précuisiner le rizet de le terminer juste au moment deservir. Le processus de préparationtraditionnelle n’est pas modifié maisdivisé en deux temps.

CUISSON SOUS VIDECette nouvelle méthode de cuissonprésente de grands avantages car ellepermet de préparer les aliments sansrien y ajouter ; ils conservent ainsi touteleur saveur et leurs qualitésnutritionnelles. Remplace aussi bien lescuissons que les rôtis traditionnels(mouton, cochon de lait, poisson).

ESCABÈCHEMéthode traditionnelle : longue cuissonde l’aliment en milieu acide,généralement du vinaigre, dansl’intention de le conserver longtemps.

Méthode actualisée : Réduction destemps de cuisson et utilisation devinaigres de qualité de façon qu’ilsimprègnent les aliments de leursarômes. On ne prétend pas dans ce casconserver le produit mais le doter d’ungoût et d’une texture particulière.

FRITUREConfit

Méthode traditionnelle : Consiste àplonger des portions de poisson pannédans l’huile à 170 ºC. Une fois la croûteextérieure formée, on laisse reposerplusieurs minutes dans l’huile horsdu feu.

Méthode actualisée : On calculeexactement la durée et la température.On fait frire d’abord à feu vif lesmorceaux de poisson et l’on continue lafriture à 40 ºC pour que le poisson soitcuit à point. C’est comme si on leconfisait dans l’huile d’olive.

Traditionnelle – XXIe siècleMéthode traditionnelle : Consiste àplonger les poissons entiers pannésdans l’huile à 170 ºC. On utilise toujoursdes poissons de petite taille (anchois,petits poissons, rougets).

Méthode actualisée : La technique estidentique à la technique traditionnelle,mais on utilise de grands poissons afinque leur peau fasse office de papilloteproduisant ainsi une double cuisson del’aliment qui sera croustillant et ferme àl’extérieur et doucement cuit à l’intérieursans être imbibé d’huile.

ÉMULSIONSAïoli

Méthode traditionnelle : émulsion d’ailcru et d’huile d’olive par broyage manuelavec du sel ; on obtient une pâteonctueuse.Méthode actualisée : utilisation d’ailscuits ou grillés pour les adoucir etémulsion manuelle ou à la machine.Incorporation de nouveaux ingrédients.

Pil-pilMéthode traditionnelle : La cuisson dela morue avec sa peau dans de l’huiled’olive émulsionnée avec la gélatineproduite par le poisson donne lieu aupil-pil.

Méthode actualisée : La préparationséparée du pil-pil en utilisant les peauxde morue cuites dans l’huile d’oliveprovoque l’émulsion. On verse ensuite lasauce sur les morceaux de morue misau four à une température très doucependant 12 minutes environ.

Soupes froidesMéthode traditionnelle : Broyage desingrédients et ajout d’eau et d’huiled’olive pour obtenir l’émulsion. Textureépaisse, parfois grumeleuse.

Méthode actualisée : Usageindispensable d’un robot permettantd’émulsionner à grande vitesse pourobtenir une texture très fine d’unegrande délicatesse.

H I E R E T A U J O U R D ’ H U I

Riz crémeuxd’artichaut,clovisse et

fromageManchego

(Arroz cremosode alcachofa,

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émulsion. Cela peut paraître simple,mais demande pourtant un certaintemps. Pour que la sauce prenne bien,il faut une grande habileté du poignetet beaucoup de patience.Vélez (Spain Gourmetour, nº 64) estdevenue la grande experte en aïolid’Espagne pour deux raisons : ladélicatesse avec laquelle elle l’élabore etl’étude exhautive qu’elle en a faite. Laparfaite connaissance qu’elle possèdedu comportement des ingrédients lapousse à utiliser différents types d’ail etpas toujours crus. Comme elle lereconnaît elle-même, un ail violet deLas Pedroñeras n’a pas grand-chose àvoir avec un ail blanc. En le cuisant ouen le grillant, son intensité diminue et lasauce n’en est que plus délicate. C’est cequi lui permet d’élaborer des centainesd’aïolis différents : au lait d’amande, àl’orange, au foie gras, aux algues...Incroyable mais vrai ! Dans des livres derecettes traditionnels, on y ajoute de lapoire, du coing, de la pomme de terre,du pain. Mari Carmen Vélez a fait decet assaisonnement à l’ail et huiled’olive vierge extra une sauce éléganteoù la puissance de l’ail estrigoureusement contrôlée pour ne pasaltérer le goût des autres ingrédients.« Selon le type d’aïoli que nous voulonspréparer — explique Mari Carmen —,l’ail est traité de façon différente. Onretire le germe et l’ail n’est pas toujoursutilisé cru, parfois on le fait cuire,parfois on le grille. Il perd ainsi de saforce tout en conservant sescaractéristiques sapides. »Le pil-pil basque a connu le mêmesort : des cuisiniers comme MartínBerasategui ou Senen González(Sagartoki, dans la province d’Álava)ont ajouté de nouveaux ingrédients etobtenu des saveurs inhabituelles.« Préparer le pil-pil dans le restaurantest compliqué pour des raisonslogistiques — explique Berasategui. Ilconvient de préparer d’abord la sauceet d’y ajouter la morue au momentvoulu. Je ne pouvais pas procédercomme ma mère et ma tante. »Traditionnellement, le pil-pil sepréparait en faisant chauffer de l’huile

d’olive et de l’ail et en y incorporantdes morceaux de morue, la peau versle bas, au contact du récipient afinque, sous l’effet de la chaleur et d’unléger mouvement de va-et-vient, lepoisson libère la gélatine qui devaitservir d’émulsifiant. L’inconvénientc’est que les morceaux de moruepeuvent se défaire en se heurtant lesuns aux autres — ce qui enlève au platsa prestance — et qu’il faut lespréparer au dernier moment, rationpar ration. « Je me suis arrangé — faitremarquer Berasategui — pourpréparer la sauce en émulsifiant l’huileet l’ail avec la gélatine que libéraientles peaux de morue, en maintenantl’huile à très basse température. Et aumoment de servir, j’arrosais avecl’émulsion les morceaux de morueparfaitement découpés et je les passaisau four également à basse température,de sorte qu’en une douzaine deminutes l’huile d’olive pénétrait et lecœur de la morue atteignait la bonnetempérature. » Il fut aussi le pionnierdes pil-pils aux agrumes dont il utilisela peau pour aromatiser l’émulsion.Ce rapide coup d’œil sur les techniquesculinaires d’Espagne ne doit pas nousfaire oublier Víctor Arginzoniz(Etxebarri, province de Guipuscoa),véritable innovateur en matière de gril,technique ancestrale à laquelle SpainGourmetour consacra un chapitre dansson numéro 61, et qui a démontré quedes produits aussi délicats que le caviarou les civelles, peuvent gagnerbeaucoup à passer sur les braises.

Julia Pérez est journaliste et critiquegastronomique. Elle travaille depuis plusde 15 ans comme éditrice de gastronomiedans différentes revues féminines (MíaCocina, Vogue, Gala, Elle, Biba). Ellecollabore régulièrement au quotidien ElMundo et aux revues Esquire,Spanorama et Vino y Gastronomía,ainsi qu’à d’autres médias nationaux ouétrangers. Elle a publié plusieurs ouvrageset guides de restaurants. En 2005, ellereçut le prix national de Gastronomie aumeilleur travail journalistique.

Adrià, Ferran. El sabor delMediterráneo. elBulli Libros.

Adrià, Ferran. Los secretos de elBulli.Editions Altaya.

Adrià, Ferran. Cocina con firma.El País Aguilar.

Adrià, Ferran. elBulli 1983-2005.elBulli Libros.

Capel, José Carlos et Plana, Lourdes.El desafío de la cocina española.Lunwerg Editores.

Dacosta, Quique. Arrocescontemporáneos. Montagud Editores.

Neirinch, E. et Poulain, J.P. Historia dela cocina y los cocineros.Edition Zendrera Zariquiey.

Paniego, Francis et Sánchez, Marisa.Echaurren : El sabor de la memoria.Montagud Editores.

Roca, Joan et Brugués, Salvador.La cocina al vacío. Montagud Editores.

L I V R E S

Spain Gourmetour remercie la chefClaudia Bertorelli pour sacollaboration pendant les prises de vuephotographiques réalisées dans lacuisine de La Huerta del Emperadoravec la participation d’Alambique(boutique et école de cuisine).

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émulsion. Cela peut paraître simple,mais demande pourtant un certaintemps. Pour que la sauce prenne bien,il faut une grande habileté du poignetet beaucoup de patience.Vélez (Spain Gourmetour, nº 64) estdevenue la grande experte en aïolid’Espagne pour deux raisons : ladélicatesse avec laquelle elle l’élabore etl’étude exhautive qu’elle en a faite. Laparfaite connaissance qu’elle possèdedu comportement des ingrédients lapousse à utiliser différents types d’ail etpas toujours crus. Comme elle lereconnaît elle-même, un ail violet deLas Pedroñeras n’a pas grand-chose àvoir avec un ail blanc. En le cuisant ouen le grillant, son intensité diminue et lasauce n’en est que plus délicate. C’est cequi lui permet d’élaborer des centainesd’aïolis différents : au lait d’amande, àl’orange, au foie gras, aux algues...Incroyable mais vrai ! Dans des livres derecettes traditionnels, on y ajoute de lapoire, du coing, de la pomme de terre,du pain. Mari Carmen Vélez a fait decet assaisonnement à l’ail et huiled’olive vierge extra une sauce éléganteoù la puissance de l’ail estrigoureusement contrôlée pour ne pasaltérer le goût des autres ingrédients.« Selon le type d’aïoli que nous voulonspréparer — explique Mari Carmen —,l’ail est traité de façon différente. Onretire le germe et l’ail n’est pas toujoursutilisé cru, parfois on le fait cuire,parfois on le grille. Il perd ainsi de saforce tout en conservant sescaractéristiques sapides. »Le pil-pil basque a connu le mêmesort : des cuisiniers comme MartínBerasategui ou Senen González(Sagartoki, dans la province d’Álava)ont ajouté de nouveaux ingrédients etobtenu des saveurs inhabituelles.« Préparer le pil-pil dans le restaurantest compliqué pour des raisonslogistiques — explique Berasategui. Ilconvient de préparer d’abord la sauceet d’y ajouter la morue au momentvoulu. Je ne pouvais pas procédercomme ma mère et ma tante. »Traditionnellement, le pil-pil sepréparait en faisant chauffer de l’huile

d’olive et de l’ail et en y incorporantdes morceaux de morue, la peau versle bas, au contact du récipient afinque, sous l’effet de la chaleur et d’unléger mouvement de va-et-vient, lepoisson libère la gélatine qui devaitservir d’émulsifiant. L’inconvénientc’est que les morceaux de moruepeuvent se défaire en se heurtant lesuns aux autres — ce qui enlève au platsa prestance — et qu’il faut lespréparer au dernier moment, rationpar ration. « Je me suis arrangé — faitremarquer Berasategui — pourpréparer la sauce en émulsifiant l’huileet l’ail avec la gélatine que libéraientles peaux de morue, en maintenantl’huile à très basse température. Et aumoment de servir, j’arrosais avecl’émulsion les morceaux de morueparfaitement découpés et je les passaisau four également à basse température,de sorte qu’en une douzaine deminutes l’huile d’olive pénétrait et lecœur de la morue atteignait la bonnetempérature. » Il fut aussi le pionnierdes pil-pils aux agrumes dont il utilisela peau pour aromatiser l’émulsion.Ce rapide coup d’œil sur les techniquesculinaires d’Espagne ne doit pas nousfaire oublier Víctor Arginzoniz(Etxebarri, province de Guipuscoa),véritable innovateur en matière de gril,technique ancestrale à laquelle SpainGourmetour consacra un chapitre dansson numéro 61, et qui a démontré quedes produits aussi délicats que le caviarou les civelles, peuvent gagnerbeaucoup à passer sur les braises.

Julia Pérez est journaliste et critiquegastronomique. Elle travaille depuis plusde 15 ans comme éditrice de gastronomiedans différentes revues féminines (MíaCocina, Vogue, Gala, Elle, Biba). Ellecollabore régulièrement au quotidien ElMundo et aux revues Esquire,Spanorama et Vino y Gastronomía,ainsi qu’à d’autres médias nationaux ouétrangers. Elle a publié plusieurs ouvrageset guides de restaurants. En 2005, ellereçut le prix national de Gastronomie aumeilleur travail journalistique.

Adrià, Ferran. El sabor delMediterráneo. elBulli Libros.

Adrià, Ferran. Los secretos de elBulli.Editions Altaya.

Adrià, Ferran. Cocina con firma.El País Aguilar.

Adrià, Ferran. elBulli 1983-2005.elBulli Libros.

Capel, José Carlos et Plana, Lourdes.El desafío de la cocina española.Lunwerg Editores.

Dacosta, Quique. Arrocescontemporáneos. Montagud Editores.

Neirinch, E. et Poulain, J.P. Historia dela cocina y los cocineros.Edition Zendrera Zariquiey.

Paniego, Francis et Sánchez, Marisa.Echaurren : El sabor de la memoria.Montagud Editores.

Roca, Joan et Brugués, Salvador.La cocina al vacío. Montagud Editores.

L I V R E S

Spain Gourmetour remercie la chefClaudia Bertorelli pour sacollaboration pendant les prises de vuephotographiques réalisées dans lacuisine de La Huerta del Emperadoravec la participation d’Alambique(boutique et école de cuisine).

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RICHESSES

TRÉSORS

En Espagne, treize villes, au total, sont inscrites par l’Unesco auPatrimoine mondial de l’humanité. Treize bijoux étincelant tous deleur propre lumière, mais qui, ensemble, forment un magnifiquejoyau confié depuis 1993 au Groupe des villes espagnoles duPatrimoine mondial. Ces espaces urbains, anciens et préservés, chargésd’histoire et empreints de l’héritage de cultures diverses, brillent à

nouveau de tous leurs feux grâce au savoir-faire et aux compétencesde leurs conservateurs dont nous tous — pas seulement quelques-uns— pouvons en bénéficier. Dans le deuxième article de ce triptyque,nos pas nous mèneront dans les augustes palais, églises et couventsde la ville fortifiée d’Ávila. Nous emprunterons aussi les alléessinueuses et les splendides squares de la médiévale Cáceres.

TexteAnke van WijckAdán/©ICEX

PhotosFernandoMadariaga/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

Muraille d’Ávila

Muraille de Torre de la Yerba, Cáceres

d’hier

d’aujourd’hui

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RICHESSES

TRÉSORS

En Espagne, treize villes, au total, sont inscrites par l’Unesco auPatrimoine mondial de l’humanité. Treize bijoux étincelant tous deleur propre lumière, mais qui, ensemble, forment un magnifiquejoyau confié depuis 1993 au Groupe des villes espagnoles duPatrimoine mondial. Ces espaces urbains, anciens et préservés, chargésd’histoire et empreints de l’héritage de cultures diverses, brillent à

nouveau de tous leurs feux grâce au savoir-faire et aux compétencesde leurs conservateurs dont nous tous — pas seulement quelques-uns— pouvons en bénéficier. Dans le deuxième article de ce triptyque,nos pas nous mèneront dans les augustes palais, églises et couventsde la ville fortifiée d’Ávila. Nous emprunterons aussi les alléessinueuses et les splendides squares de la médiévale Cáceres.

TexteAnke van WijckAdán/©ICEX

PhotosFernandoMadariaga/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

Muraille d’Ávila

Muraille de Torre de la Yerba, Cáceres

d’hier

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Ces villes sont non seulement deprécieuses enclaves monumentalestémoignant d’un passé autrementinatteignable, mais aussi une sourcenon négligeable de revenus dutourisme, une impulsion donnée àl’expansion culturelle aux niveauxnational et international et un facteurde cohésion pour la population locale.Pleinement conscients de la valeur dece patrimoine, les maires de six villes(Ávila, Cáceres, Salamanque, Saint-Jacques-de-Compostelle, Ségovie etTolède) se sont rassemblés pour lapremière fois en 1993 pour unir leursforces et échanger leurs expériences.Petit à petit, ils ont été rejoints pard’autres localités (Alcalá de Henares,Cordoue, Cuenca, Ibiza, Mérida, SanCristóbal de la Laguna et Tarragone).Bientôt, le groupe investira sonnouveau siège permanent, situé dans lepalais des Verdugo, magnifiquementrestauré, qui accueillera également lesarchives complètes d’Ávila et letroisième bureau externe de l’Unesco(après Venise et Moscou). Pourquoialors ne pas choisir ce palais du XVIe

siècle comme point de départ denotre promenade dans lamonumentale Ávila ?

De porte en porteComme des millions de visiteurs avantvous, vous serez frappé, à votre arrivéeà Ávila (qui est, à 1 127 m, la ville laplus haute d’Espagne), par la vueimpressionnante de son murd’enceinte, intact tout au long des2,5 kilomètres, avec ses 87 toursfortifiées, ses 2 500 merlons et ses neufportes imposantes. Une fois sur place,vous avez le choix entre une visite

guidée à pied ou une simplepromenade, carte en main, en passantet repassant par les portes. De fait, lazone protégée par l’Unesco inclutégalement quelques magnifiqueséglises et couvents situés en dehors desmurs. Évidemment, rien ne vousempêche de faire les deux. Ou encore,pour vous imprégner de la vieille villeet admirer le splendide panorama de lasierra de Ávila voisine, vous pouvezemprunter l’adarve (rempart) assezescarpé, magnifiquement restauré, oupeut-être participer à l’une des visitesthéâtralisées régulièrementorganisées en été.A l’époque de sa construction, le palaisdes Verdugo avait une fonction

résolument défensive. Le manoirpossède deux tours latérales, quelquesrares fenêtres à l’étage, ornant unefaçade à la décoration sobre maissomptueuse, un matacán oumâchicoulis (étroit balcon en pierregénéralement placé au-dessus de laporte d’entrée, d’où les attaquantsindésirables pouvaient être repoussés),un large zaguán (vestige del’architecture arabe, ce hall d’entréetypique protège l’intérieur de lademeure des visiteurs ou intrus) et untrès beau patio en arcades permettant àla lumière naturelle d’inonder leslogements avoisinants. Il ne fait aucundoute que ce bâtiment est représentatifde l’architecture civile de cette époquedont Ávila — la « ville des noblesgens » — conserve, grâce au hasard del’histoire, de nombreuses traces.Évidemment, ces constructionsrivalisent par leur beauté avecd’innombrables et splendides couventset églises de style roman ougothique primitif.Impossible de ne pas remarquer, justeen face du palais, la sculpture en pierremassive et rudimentaire qui ressembleà un taureau. Plus de cinquantereprésentations zoomorphes grandeurnature de taureaux ou de sangliers ontété retrouvées et sont toujoursdispersées aux quatre coins de la ville.Elles sont le témoignage de la présenceà Ávila des Vettones, premiersoccupants de la ville et peupled’éleveurs s’étant établi dans l’Ouest del’Espagne, entre les fleuves Duero etTage. Au musée Centro deInterpretación de la Vettonia qui leurest consacré, vous pourrez toutapprendre sur cette culture préromaineet les vestiges bien conservés de leurs

colonies (ou castros) dans la région.À l’instar du conseil municipal, cetteinstitution est située dans lemajestueux Torreón de los Guzmanesqui domine de haut plusieurs manoirsvoisins. La plupart de cesconstructions en pierre, témoignaged’un riche passé, ont étémagnifiquement restaurés et abritentaujourd’hui des instances officielles,des banques, des musées ou deshôtels. Ne manquez pas l’occasion deprendre un verre dans l’éblouissantpatio du palais Renaissance des Velada,aujourd’hui transformé en hôtel.Pourquoi ne pas vous y arrêter aprèsune visite intéressante de l’étrangecathédrale située juste en face ?

VILLES PATRIMOINE

TOURSETDÉTOURS

Muraille d’Ávila Place du Grand Marché, Ávila

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Ces villes sont non seulement deprécieuses enclaves monumentalestémoignant d’un passé autrementinatteignable, mais aussi une sourcenon négligeable de revenus dutourisme, une impulsion donnée àl’expansion culturelle aux niveauxnational et international et un facteurde cohésion pour la population locale.Pleinement conscients de la valeur dece patrimoine, les maires de six villes(Ávila, Cáceres, Salamanque, Saint-Jacques-de-Compostelle, Ségovie etTolède) se sont rassemblés pour lapremière fois en 1993 pour unir leursforces et échanger leurs expériences.Petit à petit, ils ont été rejoints pard’autres localités (Alcalá de Henares,Cordoue, Cuenca, Ibiza, Mérida, SanCristóbal de la Laguna et Tarragone).Bientôt, le groupe investira sonnouveau siège permanent, situé dans lepalais des Verdugo, magnifiquementrestauré, qui accueillera également lesarchives complètes d’Ávila et letroisième bureau externe de l’Unesco(après Venise et Moscou). Pourquoialors ne pas choisir ce palais du XVIe

siècle comme point de départ denotre promenade dans lamonumentale Ávila ?

De porte en porteComme des millions de visiteurs avantvous, vous serez frappé, à votre arrivéeà Ávila (qui est, à 1 127 m, la ville laplus haute d’Espagne), par la vueimpressionnante de son murd’enceinte, intact tout au long des2,5 kilomètres, avec ses 87 toursfortifiées, ses 2 500 merlons et ses neufportes imposantes. Une fois sur place,vous avez le choix entre une visite

guidée à pied ou une simplepromenade, carte en main, en passantet repassant par les portes. De fait, lazone protégée par l’Unesco inclutégalement quelques magnifiqueséglises et couvents situés en dehors desmurs. Évidemment, rien ne vousempêche de faire les deux. Ou encore,pour vous imprégner de la vieille villeet admirer le splendide panorama de lasierra de Ávila voisine, vous pouvezemprunter l’adarve (rempart) assezescarpé, magnifiquement restauré, oupeut-être participer à l’une des visitesthéâtralisées régulièrementorganisées en été.A l’époque de sa construction, le palaisdes Verdugo avait une fonction

résolument défensive. Le manoirpossède deux tours latérales, quelquesrares fenêtres à l’étage, ornant unefaçade à la décoration sobre maissomptueuse, un matacán oumâchicoulis (étroit balcon en pierregénéralement placé au-dessus de laporte d’entrée, d’où les attaquantsindésirables pouvaient être repoussés),un large zaguán (vestige del’architecture arabe, ce hall d’entréetypique protège l’intérieur de lademeure des visiteurs ou intrus) et untrès beau patio en arcades permettant àla lumière naturelle d’inonder leslogements avoisinants. Il ne fait aucundoute que ce bâtiment est représentatifde l’architecture civile de cette époquedont Ávila — la « ville des noblesgens » — conserve, grâce au hasard del’histoire, de nombreuses traces.Évidemment, ces constructionsrivalisent par leur beauté avecd’innombrables et splendides couventset églises de style roman ougothique primitif.Impossible de ne pas remarquer, justeen face du palais, la sculpture en pierremassive et rudimentaire qui ressembleà un taureau. Plus de cinquantereprésentations zoomorphes grandeurnature de taureaux ou de sangliers ontété retrouvées et sont toujoursdispersées aux quatre coins de la ville.Elles sont le témoignage de la présenceà Ávila des Vettones, premiersoccupants de la ville et peupled’éleveurs s’étant établi dans l’Ouest del’Espagne, entre les fleuves Duero etTage. Au musée Centro deInterpretación de la Vettonia qui leurest consacré, vous pourrez toutapprendre sur cette culture préromaineet les vestiges bien conservés de leurs

colonies (ou castros) dans la région.À l’instar du conseil municipal, cetteinstitution est située dans lemajestueux Torreón de los Guzmanesqui domine de haut plusieurs manoirsvoisins. La plupart de cesconstructions en pierre, témoignaged’un riche passé, ont étémagnifiquement restaurés et abritentaujourd’hui des instances officielles,des banques, des musées ou deshôtels. Ne manquez pas l’occasion deprendre un verre dans l’éblouissantpatio du palais Renaissance des Velada,aujourd’hui transformé en hôtel.Pourquoi ne pas vous y arrêter aprèsune visite intéressante de l’étrangecathédrale située juste en face ?

VILLES PATRIMOINE

TOURSETDÉTOURS

Muraille d’Ávila Place du Grand Marché, Ávila

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Commencée au XIIe siècle, il a fallu

attendre le XVIe siècle pour voir

s’achever la construction de ce lieu de

culte, qui est non seulement la plus

vieille cathédrale gothique d’Espagne,

mais aussi l’un des plus beaux

exemples d’église forteresse du

continent. Son abside est soutenue par

une triple rangée de remparts de très

grande taille abritant des galeries

intérieures et des meurtrières situées

dans le mur d’enceinte. Vous pouvez

d’ailleurs voir le tout de vos propres

yeux en longeant la cathédrale et en

passant par la Puerta del Peso de la

Harina (Porte de la Pesée de la Farine)

pour atteindre l’autre côté du mur.

Extra civitatemnulla securitasUne fois sur place commence à votregauche ce qui est sans doute la partiela plus intéressante de ce mur sobre etimposant en granit qui, heureusement,n’a plus besoin de s’en tenir à lasentence citée, signifiant « pas desécurité en dehors de la ville ». Lesfortifications sont restées en grandepartie intactes, sans doute en raison del’extrême pauvreté de la région auXIXe siècle qui a empêché la ville des’étendre et de supprimer l’ancienne.Ce mur a été érigé au XIIe siècle, avecl’aide et le savoir-faire des ouvriersmaures et des artisans juifs, afin

d’établir un bastion solide durant laméticuleuse reconquête de cette partiede la péninsule Ibérique occupée parles Arabes. Cette période est connuesous le nom de Reconquista. Souvent,les vestiges des colonies romainesvoisines étaient utilisés ; une pratiqueclairement visible ici. Juste à côté dumur extérieur, vous verrez aussi unensemble de constructions plusmodestes qui accueillaient desboucheries approvisionnant la ville.Aujourd’hui, les étables municipalesabritent La Bodeguita de San Segundo,un bar à vins animé (ouvert jusqu’à1h30 du matin), où vous pourrezgoûter tous les vins au verre,accompagnés d’une petite tapa.

« A Ávila, elles sont gratuites », rappelleEmilio Rufes, le jovial propriétaire deslieux. Vous y trouverez aussi unesélection de jambon Ibérico, unedélicieuse cecina (charcuterie de bœufséchée typique du nord de la région),un excellent carpaccio et même le steaktypique, ces deux derniers plats étantpréparés à partir de la fameuse Carne deÁvila (« Une région unique produit desviandes uniques », page 83). Il n’est pasétonnant que le New York Times y aitconsacré un article. Rufes est dans lecommerce du vin depuis près dequarante ans. Avec son épouse, Paqui, ildirige aussi la Vinoteca voisine, quipropose plus de 1 300 référencesœnologiques. Vous y trouverez des

conseils avisés sur tous les vins.Reprenons ensuite notre promenade : àdeux portes de là se trouve l’atelier deTeo Legido. Arrêtez-vous pour bavarder

et jeter un coup d’œil à ses créations debijoux en or, minimalistes, élégants etcontemporains. Pourquoi ne pas épaterun ami avec un cadeau unique ?

Muraille d’Ávila

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Commencée au XIIe siècle, il a fallu

attendre le XVIe siècle pour voir

s’achever la construction de ce lieu de

culte, qui est non seulement la plus

vieille cathédrale gothique d’Espagne,

mais aussi l’un des plus beaux

exemples d’église forteresse du

continent. Son abside est soutenue par

une triple rangée de remparts de très

grande taille abritant des galeries

intérieures et des meurtrières situées

dans le mur d’enceinte. Vous pouvez

d’ailleurs voir le tout de vos propres

yeux en longeant la cathédrale et en

passant par la Puerta del Peso de la

Harina (Porte de la Pesée de la Farine)

pour atteindre l’autre côté du mur.

Extra civitatemnulla securitasUne fois sur place commence à votregauche ce qui est sans doute la partiela plus intéressante de ce mur sobre etimposant en granit qui, heureusement,n’a plus besoin de s’en tenir à lasentence citée, signifiant « pas desécurité en dehors de la ville ». Lesfortifications sont restées en grandepartie intactes, sans doute en raison del’extrême pauvreté de la région auXIXe siècle qui a empêché la ville des’étendre et de supprimer l’ancienne.Ce mur a été érigé au XIIe siècle, avecl’aide et le savoir-faire des ouvriersmaures et des artisans juifs, afin

d’établir un bastion solide durant laméticuleuse reconquête de cette partiede la péninsule Ibérique occupée parles Arabes. Cette période est connuesous le nom de Reconquista. Souvent,les vestiges des colonies romainesvoisines étaient utilisés ; une pratiqueclairement visible ici. Juste à côté dumur extérieur, vous verrez aussi unensemble de constructions plusmodestes qui accueillaient desboucheries approvisionnant la ville.Aujourd’hui, les étables municipalesabritent La Bodeguita de San Segundo,un bar à vins animé (ouvert jusqu’à1h30 du matin), où vous pourrezgoûter tous les vins au verre,accompagnés d’une petite tapa.

« A Ávila, elles sont gratuites », rappelleEmilio Rufes, le jovial propriétaire deslieux. Vous y trouverez aussi unesélection de jambon Ibérico, unedélicieuse cecina (charcuterie de bœufséchée typique du nord de la région),un excellent carpaccio et même le steaktypique, ces deux derniers plats étantpréparés à partir de la fameuse Carne deÁvila (« Une région unique produit desviandes uniques », page 83). Il n’est pasétonnant que le New York Times y aitconsacré un article. Rufes est dans lecommerce du vin depuis près dequarante ans. Avec son épouse, Paqui, ildirige aussi la Vinoteca voisine, quipropose plus de 1 300 référencesœnologiques. Vous y trouverez des

conseils avisés sur tous les vins.Reprenons ensuite notre promenade : àdeux portes de là se trouve l’atelier deTeo Legido. Arrêtez-vous pour bavarder

et jeter un coup d’œil à ses créations debijoux en or, minimalistes, élégants etcontemporains. Pourquoi ne pas épaterun ami avec un cadeau unique ?

Muraille d’Ávila

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Comme un parfummystique dans l’air« Je suis né à Ávila, l’ancienne villefortifiée, et je pense que son silence et sasérénité quasi mystiques ont imprégnémon âme à ma naissance », a écritMiguel Delibes (né en 1920), l’un desplus importants auteurscontemporains espagnols. De fait,malgré son atmosphère bien vivante, lalocalité est empreinte d’une singulièrequiétude. Ávila n’est pas seulement laville des nobles gens, elle est aussi lelieu de naissance de sainte Thérèse

(1515–1582), l’une des grandesmystiques universelles espagnoles.Dans cette ville qui l’a vue naître, elle aécrit ses fameuses œuvres et y a passél’essentiel de sa vie, en particulier aumonastère de l’Incarnation(Monasterio de La Encarnación). Situéà environ trois kilomètres de la vieilleville, sa visite vaut le détour. Maisrendons-nous plutôt au couvent et aumusée de sainte Thérèse enpassant par la place centrale d’Ávila,appelée place du Mercado Chico, enraison du marché traditionnel qui s’ytient encore tous les vendredis.

Ses arcades sont dominées par lamairie et des ruelles en partent, pleinesde petites échoppes, en direction desquatre points cardinaux vers le murd’enceinte. Dans le couvent carmélitebaroque, populairement appelé « LaMaison de la Sainte », vous pourrezvisiter la chapelle érigée sur le lieu denaissance de Thérèse. Elle abrite unestatue de la sainte, ainsi qu’unemagnifique sculpture du Christ. Lemusée adjacent contient desmanuscrits, des vêtements et d’autresobjets de la religieuse. L’anniversaire desa mort, survenue un 15 octobre, estcélébré par une longue procession etune messe solennelle qui attirent desmilliers de fidèles dans le centrehistorique.Mais, si nous mettons de côté cetteferveur religieuse, Ávila est aussi le siègedu premier Centre internationald’études mystiques, fondé par le conseilmunicipal, avec le soutien de plusieursinstitutions publiques et privées, et del’Unesco, qui coopère étroitement augrand nombre d’événementsd’envergure internationale organisés àÁvila : congrès et séminairesmonographiques, performancesmusicales ou d’une autre nature etexpositions, comme la dernière, intitulée

aussi prendre soin de notre corps, etnous sommes justement au bonendroit. En passant par la Puerta delRastro, juste en face, des effluves defeu de bois nous attirentirrémédiablement vers le Mesón ElRastro, qui est sans doute actuellementle meilleur restaurant d’Ávila. Sarenommée n’est pas uniquement due àla gentillesse de ses serveuses commeMariluz, qui travaille ici depuis plus de40 ans et connaît le nom de plusieursgénérations de clients assidus.Souvent, le week-end, certainsviennent même exprès de Madrid poury déjeuner. « Nous sommes unegrande famille », nous dit PilarSánchez qui, avec son frère, représentela quatrième génération aux rênes del’entreprise familiale. C’est l’endroitidéal pour goûter les typiques patatasrevolconas (dés de pomme de terrelentement poêlés à l’huile d’olivejusqu’à ce qu’ils aient presque laconsistance d’une purée, aromatisée delard frais, de pimentón piquant et d’ail)ou les judías de l’IGP El Barco de Ávila(voir Spain Gourmetour, n° 58), unragoût de haricots blancs d’une grandefinesse. Ces spécialités ne sontcependant que des entrées. En platprincipal, essayez le cochon de lait,tendre et croustillant, ou la fameusechuleta d’Ávila, côte de veau dont laviande fond en bouche comme dubeurre. Les desserts sont tous faitsmaison et avec votre café, si vousn’avez pas encore succombé à latentation, demandez des Yemas deSanta Teresa, quintessence sucréed’Ávila à base de jaunesd’œuf (« De petites bouchées deparadis », page 78).Avant de quitter la ville, empruntez laPuerta del Puente (Porte du Pont) ettraversez le pont romain bien conservéqui enjambe la rivière Adaja pour vousrendre au monument des CuatroPostes (Quatre Piliers), d’où vousadmirerez un panorama spectaculairede la ville fortifiée. Mais, ici encore,inutile d’aller aussi loin. Juste après le

Que faire des jaunes ? Cette question estjudicieuse dans une région où le Xérèstraditionnel était affiné avec des blancsd’œuf. Les ordres religieux étaient lesbénéficiaires idéaux de cet ingrédient etc’est justement dans les couvents duSud-Est de l’Espagne que l’élaborationdes Yemas (jaunes) est censée être néeavant de gagner d’autres couvents,dispersés un peu partout dans le pays. Ilexiste donc des Yemas de Sevilla, d’Ecijaou de Cádiz, mais n’oublions pas lesYemas de San Pablo, les plus connuesétant sans doute les Yemas de SantaTeresa d’Ávila. Toutefois, pas de religieusedirectement impliquée ici. C’est IsabeloSánchez qui a imaginé cette douceur en1860. Même si, pendant plus d’un siècle,l’entreprise a été familiale, la ville d’Ávilaest devenue indissociable de ces

fameuses pâtisseries à base de jaunes, àtel point qu’afin d’en garantir la qualité leproduit a dû être breveté, des imitationsapparaissant un peu partout. Voustrouverez donc dans les innombrablespâtisseries locales les Yemas d’Ávila,alors que seules trois épiceries fines, lesFlor de Castilla, vendent les Yemas deSanta Teresa originales, qui sontaujourd’hui entièrement préparées à lamain à partir des meilleurs ingrédients.Les jaunes d’œuf sont lentementincorporés à un sirop et laissés sesolidifier juste assez pour pouvoir êtreroulés à la main et recouverts de sucre enpoudre. Leur texture aérienne, leursublime couleur jaune et leur goûtexceptionnel font de ces douceurs devraies petites bouchées de paradis.

D E P E T I T E S B O U C H É E S D E P A R A D I S

Place du Grand Marché, Ávila

« Art et mysticisme » qui a placé dans lecentre ville plusieurs statues en bronzede l’artiste cubiste d’origine lithuanienneJacques Lipchitz (1891–1973). Lafondation accueille également unnouveau Centre d’interprétationmystique où, sur plusieurs étages etaccompagnés d’un dépliant, vous êtesinvités à faire l’expérience de votrepropre mysticisme.

Faire attentionà son corpsL’esprit ne doit pas être le seul à fairel’objet de toutes nos attentions ; il faut

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Comme un parfummystique dans l’air« Je suis né à Ávila, l’ancienne villefortifiée, et je pense que son silence et sasérénité quasi mystiques ont imprégnémon âme à ma naissance », a écritMiguel Delibes (né en 1920), l’un desplus importants auteurscontemporains espagnols. De fait,malgré son atmosphère bien vivante, lalocalité est empreinte d’une singulièrequiétude. Ávila n’est pas seulement laville des nobles gens, elle est aussi lelieu de naissance de sainte Thérèse

(1515–1582), l’une des grandesmystiques universelles espagnoles.Dans cette ville qui l’a vue naître, elle aécrit ses fameuses œuvres et y a passél’essentiel de sa vie, en particulier aumonastère de l’Incarnation(Monasterio de La Encarnación). Situéà environ trois kilomètres de la vieilleville, sa visite vaut le détour. Maisrendons-nous plutôt au couvent et aumusée de sainte Thérèse enpassant par la place centrale d’Ávila,appelée place du Mercado Chico, enraison du marché traditionnel qui s’ytient encore tous les vendredis.

Ses arcades sont dominées par lamairie et des ruelles en partent, pleinesde petites échoppes, en direction desquatre points cardinaux vers le murd’enceinte. Dans le couvent carmélitebaroque, populairement appelé « LaMaison de la Sainte », vous pourrezvisiter la chapelle érigée sur le lieu denaissance de Thérèse. Elle abrite unestatue de la sainte, ainsi qu’unemagnifique sculpture du Christ. Lemusée adjacent contient desmanuscrits, des vêtements et d’autresobjets de la religieuse. L’anniversaire desa mort, survenue un 15 octobre, estcélébré par une longue procession etune messe solennelle qui attirent desmilliers de fidèles dans le centrehistorique.Mais, si nous mettons de côté cetteferveur religieuse, Ávila est aussi le siègedu premier Centre internationald’études mystiques, fondé par le conseilmunicipal, avec le soutien de plusieursinstitutions publiques et privées, et del’Unesco, qui coopère étroitement augrand nombre d’événementsd’envergure internationale organisés àÁvila : congrès et séminairesmonographiques, performancesmusicales ou d’une autre nature etexpositions, comme la dernière, intitulée

aussi prendre soin de notre corps, etnous sommes justement au bonendroit. En passant par la Puerta delRastro, juste en face, des effluves defeu de bois nous attirentirrémédiablement vers le Mesón ElRastro, qui est sans doute actuellementle meilleur restaurant d’Ávila. Sarenommée n’est pas uniquement due àla gentillesse de ses serveuses commeMariluz, qui travaille ici depuis plus de40 ans et connaît le nom de plusieursgénérations de clients assidus.Souvent, le week-end, certainsviennent même exprès de Madrid poury déjeuner. « Nous sommes unegrande famille », nous dit PilarSánchez qui, avec son frère, représentela quatrième génération aux rênes del’entreprise familiale. C’est l’endroitidéal pour goûter les typiques patatasrevolconas (dés de pomme de terrelentement poêlés à l’huile d’olivejusqu’à ce qu’ils aient presque laconsistance d’une purée, aromatisée delard frais, de pimentón piquant et d’ail)ou les judías de l’IGP El Barco de Ávila(voir Spain Gourmetour, n° 58), unragoût de haricots blancs d’une grandefinesse. Ces spécialités ne sontcependant que des entrées. En platprincipal, essayez le cochon de lait,tendre et croustillant, ou la fameusechuleta d’Ávila, côte de veau dont laviande fond en bouche comme dubeurre. Les desserts sont tous faitsmaison et avec votre café, si vousn’avez pas encore succombé à latentation, demandez des Yemas deSanta Teresa, quintessence sucréed’Ávila à base de jaunesd’œuf (« De petites bouchées deparadis », page 78).Avant de quitter la ville, empruntez laPuerta del Puente (Porte du Pont) ettraversez le pont romain bien conservéqui enjambe la rivière Adaja pour vousrendre au monument des CuatroPostes (Quatre Piliers), d’où vousadmirerez un panorama spectaculairede la ville fortifiée. Mais, ici encore,inutile d’aller aussi loin. Juste après le

Que faire des jaunes ? Cette question estjudicieuse dans une région où le Xérèstraditionnel était affiné avec des blancsd’œuf. Les ordres religieux étaient lesbénéficiaires idéaux de cet ingrédient etc’est justement dans les couvents duSud-Est de l’Espagne que l’élaborationdes Yemas (jaunes) est censée être néeavant de gagner d’autres couvents,dispersés un peu partout dans le pays. Ilexiste donc des Yemas de Sevilla, d’Ecijaou de Cádiz, mais n’oublions pas lesYemas de San Pablo, les plus connuesétant sans doute les Yemas de SantaTeresa d’Ávila. Toutefois, pas de religieusedirectement impliquée ici. C’est IsabeloSánchez qui a imaginé cette douceur en1860. Même si, pendant plus d’un siècle,l’entreprise a été familiale, la ville d’Ávilaest devenue indissociable de ces

fameuses pâtisseries à base de jaunes, àtel point qu’afin d’en garantir la qualité leproduit a dû être breveté, des imitationsapparaissant un peu partout. Voustrouverez donc dans les innombrablespâtisseries locales les Yemas d’Ávila,alors que seules trois épiceries fines, lesFlor de Castilla, vendent les Yemas deSanta Teresa originales, qui sontaujourd’hui entièrement préparées à lamain à partir des meilleurs ingrédients.Les jaunes d’œuf sont lentementincorporés à un sirop et laissés sesolidifier juste assez pour pouvoir êtreroulés à la main et recouverts de sucre enpoudre. Leur texture aérienne, leursublime couleur jaune et leur goûtexceptionnel font de ces douceurs devraies petites bouchées de paradis.

D E P E T I T E S B O U C H É E S D E P A R A D I S

Place du Grand Marché, Ávila

« Art et mysticisme » qui a placé dans lecentre ville plusieurs statues en bronzede l’artiste cubiste d’origine lithuanienneJacques Lipchitz (1891–1973). Lafondation accueille également unnouveau Centre d’interprétationmystique où, sur plusieurs étages etaccompagnés d’un dépliant, vous êtesinvités à faire l’expérience de votrepropre mysticisme.

Faire attentionà son corpsL’esprit ne doit pas être le seul à fairel’objet de toutes nos attentions ; il faut

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VILLES PATRIMOINE

ET

pont, vous trouverez El Almacén,ancien silo à grains, aujourd’huidevenu un restaurant tenu par IsidoraBeotas, qui règne aux fourneaux, etson mari, Julio Delgado, chargé del’établissement et de sa cave. La vuedepuis l’immense baie vitrée est toutaussi spectaculaire, surtout la nuitlorsque le mur d’enceinte est illuminé.Alors, pourquoi ne pas en profiter en ysavourant un agréable dîner et un bonverre de vin ?Il ne sera pas aisé de dire au revoir àÁvila, mais nous n’avons aucune raisonde ne pas y revenir. Comme nousl’avons déjà dit dans un précédentarticle, ce triptyque n’a pas l’intentiond’être un guide précis, mais plutôt detransmettre des impressions. Ávilarecèle donc encore de nombreuxtrésors. Vérifiez le calendrier municipalet essayez de faire coïncider votre visiteavec l’un des nombreux événementsou reconstitutions médiévales,organisés tout au long de l’année danscette ville aussi placide qu’accueillante.

Profiterdes panoramaset des produitsSi nous avons suffisamment de temps,nous pouvons poursuivre notreitinéraire jusqu’à Cáceres, notreprochaine étape, située à quelque200 km de là. Notre voyage nousconduit à travers les sierras d’Ávila etde Gredos pour déboucher sur ladélicieuse vallée du Jerte. De là, noustraversons les vastes dehesas (mélanged’espaces boisés et de prairies)d’Estrémadure, remplies de bétailjusqu’à Cáceres. Cet itinéraire incite àfaire plusieurs petits détours

intéressants pour voir les castros,mentionnés plus haut, ou lemagnifique monastère de Yuste. Et, lehasard faisant bien les choses, il nouspermet aussi de goûter certains desmeilleurs produits espagnols sur lechemin. Notre premier arrêt sera à ElBarco de Ávila, lieu de production deharicots secs typiques du pays (SpainGourmetour, n° 58). Leur qualité,prouvée par la texture fondante desharicots cuisinés que vous aurezpeut-être goûtés au Mesón El Rastro, aété officiellement reconnue par l’octroid’une IGP en 1984. Même si septvariétés de haricots sont concernées, lajudía blanca riñón ou haricot rouge et legros judión représentent près de 90 %de la production. Outre le château d’ElBarco et son magnifique pont romain,ne manquez pas l’agréable visite dumagasin de la coopérative, dans laCalle Mayor, où, à côté d’autresproduits et vins régionaux, vouspourrez voir les haricotssoigneusement vendus dans des sacsde un kilo, tous assortis d’uneétiquette numérotée.Nous suivons maintenant une routelongeant contreforts et prairiesvallonnées où paissent les spécimens

de Negra Avileña, race de bétail noirtypique d’Ávila (« Une région uniqueproduit des viandes uniques », page83), avant de monter doucement versle col de Tornavaca. Le Valle del Jertetout entier s’étend à nos pieds,culminant dans un immense réservoirargenté. Cette vue éblouissante ne doitpas nous faire oublier que la beautééphémère de la vallée est à son apogéependant quelques jours au printemps,au moment où les cerisiers plantés surses deux versants sont en pleinefloraison. Cet incroyable paysage attiredes milliers de voyageurs de nombreuxpays. Protégé des vents dominants dunord, il n’est pas surprenantd’apprendre que le microclimat de lavallée permet la récolte de cerises dequalité depuis le XIVe siècle, date deplantation du premier verger. Même siplus de 40 variétés sont cultivées, seulsquelques arbres produisent la fameuseCereza del Jerte, une cerise à la chaircroquante, allant du rouge au pourpre,bénéficiant d’une AOP et toujourscommercialisée sans sa queue. Nous neserons pas non plus surprisd’apprendre que la région, outre denombreuses conserves, produit aussiune eau-de-vie entièrement naturelle et

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Vue de Cáceres

TOURSDÉTOURS

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VILLES PATRIMOINE

ET

pont, vous trouverez El Almacén,ancien silo à grains, aujourd’huidevenu un restaurant tenu par IsidoraBeotas, qui règne aux fourneaux, etson mari, Julio Delgado, chargé del’établissement et de sa cave. La vuedepuis l’immense baie vitrée est toutaussi spectaculaire, surtout la nuitlorsque le mur d’enceinte est illuminé.Alors, pourquoi ne pas en profiter en ysavourant un agréable dîner et un bonverre de vin ?Il ne sera pas aisé de dire au revoir àÁvila, mais nous n’avons aucune raisonde ne pas y revenir. Comme nousl’avons déjà dit dans un précédentarticle, ce triptyque n’a pas l’intentiond’être un guide précis, mais plutôt detransmettre des impressions. Ávilarecèle donc encore de nombreuxtrésors. Vérifiez le calendrier municipalet essayez de faire coïncider votre visiteavec l’un des nombreux événementsou reconstitutions médiévales,organisés tout au long de l’année danscette ville aussi placide qu’accueillante.

Profiterdes panoramaset des produitsSi nous avons suffisamment de temps,nous pouvons poursuivre notreitinéraire jusqu’à Cáceres, notreprochaine étape, située à quelque200 km de là. Notre voyage nousconduit à travers les sierras d’Ávila etde Gredos pour déboucher sur ladélicieuse vallée du Jerte. De là, noustraversons les vastes dehesas (mélanged’espaces boisés et de prairies)d’Estrémadure, remplies de bétailjusqu’à Cáceres. Cet itinéraire incite àfaire plusieurs petits détours

intéressants pour voir les castros,mentionnés plus haut, ou lemagnifique monastère de Yuste. Et, lehasard faisant bien les choses, il nouspermet aussi de goûter certains desmeilleurs produits espagnols sur lechemin. Notre premier arrêt sera à ElBarco de Ávila, lieu de production deharicots secs typiques du pays (SpainGourmetour, n° 58). Leur qualité,prouvée par la texture fondante desharicots cuisinés que vous aurezpeut-être goûtés au Mesón El Rastro, aété officiellement reconnue par l’octroid’une IGP en 1984. Même si septvariétés de haricots sont concernées, lajudía blanca riñón ou haricot rouge et legros judión représentent près de 90 %de la production. Outre le château d’ElBarco et son magnifique pont romain,ne manquez pas l’agréable visite dumagasin de la coopérative, dans laCalle Mayor, où, à côté d’autresproduits et vins régionaux, vouspourrez voir les haricotssoigneusement vendus dans des sacsde un kilo, tous assortis d’uneétiquette numérotée.Nous suivons maintenant une routelongeant contreforts et prairiesvallonnées où paissent les spécimens

de Negra Avileña, race de bétail noirtypique d’Ávila (« Une région uniqueproduit des viandes uniques », page83), avant de monter doucement versle col de Tornavaca. Le Valle del Jertetout entier s’étend à nos pieds,culminant dans un immense réservoirargenté. Cette vue éblouissante ne doitpas nous faire oublier que la beautééphémère de la vallée est à son apogéependant quelques jours au printemps,au moment où les cerisiers plantés surses deux versants sont en pleinefloraison. Cet incroyable paysage attiredes milliers de voyageurs de nombreuxpays. Protégé des vents dominants dunord, il n’est pas surprenantd’apprendre que le microclimat de lavallée permet la récolte de cerises dequalité depuis le XIVe siècle, date deplantation du premier verger. Même siplus de 40 variétés sont cultivées, seulsquelques arbres produisent la fameuseCereza del Jerte, une cerise à la chaircroquante, allant du rouge au pourpre,bénéficiant d’une AOP et toujourscommercialisée sans sa queue. Nous neserons pas non plus surprisd’apprendre que la région, outre denombreuses conserves, produit aussiune eau-de-vie entièrement naturelle et

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Vue de Cáceres

TOURSDÉTOURS

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une liqueur à base de cerises, venduessous l’appellation Valle del Jerte. Lesprojets d’exportation sont bienavancés, alors gardez les yeux ouverts !Nous poursuivons notre route dans lavallée vers la belle Plasencia et, justeavant d’y arriver, faisons un courtdétour vers Jaraiz de la Vera, où setrouve le conseil régulateur de lafameuse AOP Pimentón de la Vera.Cette région, relativement peuétendue, produit la poudre uniquerouge vif à l’odeur de fumée, élaboréeà partir de poivron rouge et connue sousle nom de pimentón. Celle-ci estdisponible sous trois formes différentes :douce, aigre-douce et pimentée, quidépendent du type de poivron utilisé(Jaranda, Jariza et Jeromínrespectivement, provenant tous degraines sélectionnées de Capsicumannum et longum). Sur la Plaza Mayorde Jaraiz, l’agréable musée duPimentón évoque l’histoire et leprocessus de production de cettemerveilleuse épice, très convoitée par

les gourmets avertis et lesprofessionnels. Malgré les faiblesquantités produites, elle est exportéeaux quatre coins du globe. Avant dequitter le village, ne manquez pas lavisite d’un minuscule magasin dechaussures où depuis plus de 150 ans,la famille de Teodoro Sánchez fabriqueà la main des chaussurestraditionnelles magnifiquementbrodées. « Dorin » et sa femme,Ángela, seront ravis de vous montrerleur collection, de prendre votrecommande et de vous l’envoyer où quevous viviez. Heureusement queChristian Lacroix n’a pas (encore)entendu parler d’eux…Notre prochain et dernier arrêt avantd’atteindre Cáceres doit être le villagede Casar, tout proche, où la Torta dumême nom est élaborée, crémeusemais agréablement relevée et odorante.Le numéro 65 de Spain Gourmetourconsacre un dossier complet à cefromage de brebis unique etbénéficiant d’une AOP. Si vous n’y avez

encore jamais goûté, c’est le moment etsi vous le connaissez déjà, vous serezimpatient de le déguster à l’endroitmême où il est né.

Respirer« Cáceres est une ville qui se respire »,affirme Amparo Fernández, saDirectrice du tourisme. Prenons doncune profonde inspiration et laissons-nous emporter. À l’instar d’Ávila, lerepli connu par la région au XIXe sièclea été synonyme de préservation. Dès1968, Cáceres, bien avant d’êtreinscrite au Patrimoine mondial en1986, avait déjà été proclamée3e ensemble monumental d’Europe(après Florence, en Italie, et Tallin, enEstonie). Mais, comparée à lamajestueuse architecture granitiqued’Ávila, quelque peu froide, Cáceressemble plus proche du visiteur.D’ailleurs, son mur d’enceinte,construit par les Almohades (tribuberbère occupant la région) au XIIe

siècle, est essentiellement en pisé.

Quiconque connaît la gastronomieespagnole s’enthousiasmera de cesmerveilleux jambons et autrescharcuteries, mais l’excellente

réputation de sa viande fraîche est bienmoins connue. C’est pourquoi, sousl’égide de l’Institut Innovacarne et grâce ausoutien financier de l’Union européenne, un

groupe de producteurs de viande de bœuf,de veau et d’agneau, tous titulaires d’uneIGP (12 en tout, parmi lesquelles les Carnede Ávila et Ternera de Extremadura, SpainGourmetour n° 57) ont lancé uneambitieuse campagne nationale sur troisans visant à promouvoir et à mettre enavant les qualités organoleptiques etsanitaires officiellement certifiées de leursproduits. Le slogan choisi est : « CarnesÚnicas de Tierras Únicas. » Miguel Morillo,directeur de l’IGP Ternera de Extremadura,nous explique que l’alimentation etl’environnement des bêtes sont essentiels.D’une manière générale, les animauxadultes paissent presque toute l’annéedans des prairies vallonnées, souventouvertes, qui présentent plusieursavantages. Le libre mouvement des bêtespermet une fine infiltration de graisse, cequi rend la viande plus savoureuse et plustendre. L’alimentation à base d’herbe et deplantes donne d’agréables arômes à laviande, tout en générant des substancesbénéfiques pour la santé et en garantissantune meilleure conservation du produit.Alors, la prochaine fois que vous vousrendrez dans ces régions à part, n’hésitezpas à déguster leurs viandes uniques.

U N E R É G I O N U N I Q U EP R O D U I T D E S V I A N D E S U N I Q U E S

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POIVRON RIOJANO

ZoneLa Rioja

Formeconique, légèrement en pointe à l’extrémité

Coleurrouge intense

Peauun peu rugueuse

Longueurentre 16 et 18 cm

Goûtdoux

POIVRON D’HERBÓN

ZoneGalice : La Corogne et Pontevedra

Forme tronconique

Coleur vert brillant

Peau légèrement rugueuse

Longueur entre 3,5 et 6 cm

Goûtdoux pour 90 % et piquant pour 10 %

POIVRON DEFRESNO-BENAVENTE

ZoneNord-Ouest de Castille-et-Léon (Léon,Zamora et Valladolid)

Formerectangulaire

Coleurrouge intense

Peaulisse, avec 3 ou 4 protubérances à uneextrémité

Longueurentre 8 et 12 cm

Goûtdouceur moyenne, peu amer et non piquant

POIVRON DE GERNIKA

ZonePays basque (Guipuscoa, Biscayeet une partie d’Álava)

Forme triangulaire, fruit étroit et allongé, seterminant par une pointe très prononcée

Coleur verte très brillante, d’une tonalitémoyenne à foncée

Peau non parcheminée, tendre et fine

Longueur de 6 a 9 cm

Goût piquant

POIVRON D’O COUTO

ZoneGalice : zone de Ferrol, province deLa Corogne

Formetronconique et trapézoïdale

Coleurvert foncé, légèrement brillante

Peaulégèrement striée

Longueurentre 4 et 8 cm

Goûtdoux

POIVRON D’ARNOIA

ZoneGalice : Orense (commune d’Arnoia etparoisse de Meréns, appartenant à lacommune de Cortegada)

Formeconique, en cloche, avec 3 ou 4 quartierset 4 côtes

Coleurvert-jaune

Peaulisse et brillante

Longueurentre 11,5 et 13,5 cm

Goûttrès doux, non piquant

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POIVROND’OIMBRA

ZoneGalice : zone de Verín, provinced’Orense

Formerégulière et allongée

Coleurvert clair, tirant sur le jaune

Peaulisse et brillante

Longueurentre 8 et 17 cm

Goûtdoux

Riojano Fresno-BenaventeOimbraArnoiaGernikaHerbón

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O Couto

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une liqueur à base de cerises, venduessous l’appellation Valle del Jerte. Lesprojets d’exportation sont bienavancés, alors gardez les yeux ouverts !Nous poursuivons notre route dans lavallée vers la belle Plasencia et, justeavant d’y arriver, faisons un courtdétour vers Jaraiz de la Vera, où setrouve le conseil régulateur de lafameuse AOP Pimentón de la Vera.Cette région, relativement peuétendue, produit la poudre uniquerouge vif à l’odeur de fumée, élaboréeà partir de poivron rouge et connue sousle nom de pimentón. Celle-ci estdisponible sous trois formes différentes :douce, aigre-douce et pimentée, quidépendent du type de poivron utilisé(Jaranda, Jariza et Jeromínrespectivement, provenant tous degraines sélectionnées de Capsicumannum et longum). Sur la Plaza Mayorde Jaraiz, l’agréable musée duPimentón évoque l’histoire et leprocessus de production de cettemerveilleuse épice, très convoitée par

les gourmets avertis et lesprofessionnels. Malgré les faiblesquantités produites, elle est exportéeaux quatre coins du globe. Avant dequitter le village, ne manquez pas lavisite d’un minuscule magasin dechaussures où depuis plus de 150 ans,la famille de Teodoro Sánchez fabriqueà la main des chaussurestraditionnelles magnifiquementbrodées. « Dorin » et sa femme,Ángela, seront ravis de vous montrerleur collection, de prendre votrecommande et de vous l’envoyer où quevous viviez. Heureusement queChristian Lacroix n’a pas (encore)entendu parler d’eux…Notre prochain et dernier arrêt avantd’atteindre Cáceres doit être le villagede Casar, tout proche, où la Torta dumême nom est élaborée, crémeusemais agréablement relevée et odorante.Le numéro 65 de Spain Gourmetourconsacre un dossier complet à cefromage de brebis unique etbénéficiant d’une AOP. Si vous n’y avez

encore jamais goûté, c’est le moment etsi vous le connaissez déjà, vous serezimpatient de le déguster à l’endroitmême où il est né.

Respirer« Cáceres est une ville qui se respire »,affirme Amparo Fernández, saDirectrice du tourisme. Prenons doncune profonde inspiration et laissons-nous emporter. À l’instar d’Ávila, lerepli connu par la région au XIXe sièclea été synonyme de préservation. Dès1968, Cáceres, bien avant d’êtreinscrite au Patrimoine mondial en1986, avait déjà été proclamée3e ensemble monumental d’Europe(après Florence, en Italie, et Tallin, enEstonie). Mais, comparée à lamajestueuse architecture granitiqued’Ávila, quelque peu froide, Cáceressemble plus proche du visiteur.D’ailleurs, son mur d’enceinte,construit par les Almohades (tribuberbère occupant la région) au XIIe

siècle, est essentiellement en pisé.

Quiconque connaît la gastronomieespagnole s’enthousiasmera de cesmerveilleux jambons et autrescharcuteries, mais l’excellente

réputation de sa viande fraîche est bienmoins connue. C’est pourquoi, sousl’égide de l’Institut Innovacarne et grâce ausoutien financier de l’Union européenne, un

groupe de producteurs de viande de bœuf,de veau et d’agneau, tous titulaires d’uneIGP (12 en tout, parmi lesquelles les Carnede Ávila et Ternera de Extremadura, SpainGourmetour n° 57) ont lancé uneambitieuse campagne nationale sur troisans visant à promouvoir et à mettre enavant les qualités organoleptiques etsanitaires officiellement certifiées de leursproduits. Le slogan choisi est : « CarnesÚnicas de Tierras Únicas. » Miguel Morillo,directeur de l’IGP Ternera de Extremadura,nous explique que l’alimentation etl’environnement des bêtes sont essentiels.D’une manière générale, les animauxadultes paissent presque toute l’annéedans des prairies vallonnées, souventouvertes, qui présentent plusieursavantages. Le libre mouvement des bêtespermet une fine infiltration de graisse, cequi rend la viande plus savoureuse et plustendre. L’alimentation à base d’herbe et deplantes donne d’agréables arômes à laviande, tout en générant des substancesbénéfiques pour la santé et en garantissantune meilleure conservation du produit.Alors, la prochaine fois que vous vousrendrez dans ces régions à part, n’hésitezpas à déguster leurs viandes uniques.

U N E R É G I O N U N I Q U EP R O D U I T D E S V I A N D E S U N I Q U E S

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l’Europe du Nord. Le morrón est suivi,en termes de volume de production,par les variétés dénommées cristal,longues et fines, surtout consomméesvertes et dont l’arôme est sucré etpénétrant.Viennent ensuite de nombreusesvariétés, inconnues pour la pluparthors d’Espagne, voire à l’extérieur deleur région d’origine. Il est impossibled’évaluer le nombre de variétés depoivron dans le pays, même pour lesexperts en la matière, compte tenu del’extraordinaire biodiversité quicaractérise le genre Capsicum. Souventcultivées depuis des siècles par desparticuliers dans leur potager, cesvariétés de poivron espagnolesparticulières sont très prisées descuisiniers et des gourmets locaux, maispeu diffusées hors de leur régiond’origine. Pour la grande majorité desconsommateurs, les poivrons ne sontrien d’autre que des poivrons, etcontrairement à ce qu’il se passe avecla tomate ou la pomme de terre, parexemple, ils ne sont pas encoreconscients de l’existence de différentesvariétés.Cependant, des changementss’annoncent en 2009 pour le poivronespagnol. Certaines des meilleuresvariétés locales finissent par êtrereconnues pour leurs qualités uniques,et leur protection au moyen d’une IGP(Indication géographique protégée) oud’une AOP (Appellation d’origineprotégée) est en cours pour une bonnepoignée d’entre elles.

Quand le poivronflirte avec le pimentL’une des variétés qui va bientôtobtenir une AOP (longtemps méritée)est un poivron en plein essor depuisquelques années, dont la réputation necesse de croître en Espagne et même àl’étranger. Le Pimiento de Herbón,

originaire de la Galice (Nord-Est del’Espagne) et devenu célèbre sous lenom commercial de Pimiento dePadrón, doit son succès en partie à unesingularité botanique curieuse : laplupart de ces poivrons ontnaturellement une saveur douce, maisquelques exemplaires sur chaqueplante acquièrent spontanément ungoût piquant. Environ 10 % despoivrons de Herbón sont piquants,mais ce pourcentage augmente si onles laisse plus longtemps sur la plante.C’est pourquoi ce légume possède sonpropre slogan commercial. Le dictontraditionnel de la région d’Herbón,« Unos pican y otros no » (certainspiquent, d’autres non), est désormaisconnu dans toute l’Espagne, à tel pointqu’il est pratiquement devenu unproverbe signifiant que la vie peutparfois être une loterie.

Le Pimiento de Herbón est un petitpoivron, mesurant normalement de 4 à6 cm de long et toujours cueilli vert.Dans les bars à tapas et les restaurantsde Saint-Jacques-de-Compostelle, lagrande ville la plus proche de la zonede production, il a toujours été servisimplement frit à l’huile d’olive etsaupoudré de gros sel. Par la suite, lesPimientos de Herbón — appeléspresque universellement, à tort,poivrons de Padrón — se sont fait uneplace parmi les classiques de la cuisinegalicienne, avec le pulpo a feira (poulpeaux pommes de terre, sel gemme,pimentón doux et huile d’olive) et lelacón con grelos (épaule de porc auxpousses du brocoli-rave avantfloraison). En Galice, les sardinillas conPimiento de Herbón, de petites sardinesfrites accompagnées de poivrons, sontune combinaison très appréciée. A laPlaza de Abastos, le grand marchécentral de Saint-Jacques-de-Compostelle, il est encore fréquent devoir les épouses des agriculteurs assises

à côté de gros paniers remplis depoivrons verts d’Herbón frais, qu’ellesvendent habituellement à la centaine,et non pas au poids.L’aspect « roulette russe » de ladégustation de poivrons d’Herbón,ainsi que leur superbe couleur verte etleur arôme captivant, les rendent trèsagréables à manger. Bien qu’ils aientété cultivés dans la région depuis dessiècles, leur boum a commencé à la findes années 1980, avec l’apparition desystèmes perfectionnés de distributionet de réfrigération. La mode despoivrons d’Herbón a rapidement gagnéla diaspora des bars galiciens dans lesgrandes villes espagnoles, enparticulier à Madrid et à Barcelone, oùde nombreux Gallegos sont venuss’installer. A partir de là, ils ont franchile pas à l’international. La croissancede la demande a donné lieu à laproduction de poivrons de typeHerbón à Murcie et à Almería, voire auMaroc, afin de les exporter enArgentine, aux États-Unis et enGrande-Bretagne. C’est ce « plagiat »de la « marque » originale qui a finipar conduire à la création d’uneappellation d’origine protégée pour lePimiento d’Herbón. La zone délimitéea pour centre l’embouchure de l’Ulla, àla limite des provinces de Pontevedraet de La Corogne, et englobe lesvillages de Padrón, Dadro, Rois,Pontecesures et Valga. Deuxcoopératives, Pimerbón etA Pementeira, contrôlent la majorité dela production de poivron de Herbóndans la zone de l’AOP. La productiontotale de poivrons dans l’appellationest estimée, selon la source consultée,à environ 1 700 kilos par an, surtoutdurant la principale saison deproduction, de mi-mai à fin octobre.Ce poivron parfois piquant, parfoisnon, possède un parent proche dansl’extrême nord du pays, dont lesproducteurs affirment fièrement qu’il

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en protéines et en minéraux tels que lepotassium, le calcium et le phosphore.Il contient beaucoup de vitamine C,mais aussi des vitamines A, B1, B2, E etP. La croyance populaire selon laquelleles poivrons crus sont indigestes est enréalité la version culinaire d’un mytheurbain. C’est exactement l’inverse quiest vrai, puisque la consommation depoivron aiguise l’appétit et facilite la

digestion, tout en exerçant un légereffet désinfectant.L’Espagne est le cinquième producteurmondial de poivron, avec 4,09 % dutotal (derrière la Chine avec 53,85 %,le Mexique avec 6,48 %, l’Indonésieavec 4,22 % et la Turquie avec 4,18 %selon les données de la FAO en 2007),et offre une remarquable gamme de celégume souvent négligé. Le centre de

la culture intensive de poivrons est laprovince d’Almería, où les Capsicumoccupent 40 % de toute la superficiedisponible (sous serre). La productionà grande échelle fait appelessentiellement aux variétés appeléesmorrón, en particulier le Lamuyo — lepoivron de grande taille, charnu etdoux que l’on trouve habituellementdans les rayons des supermarchés de

POIVRON

ESSENTIELS

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(passer ses examens ou trouver unfiancé ou une fiancée). Juste à côté, lepalais des Moraga accueille le Centrede l’artisanat où sont exposés etproposés à la vente sur trois étages detrès beaux objets représentatifs dessavoirs traditionnels et contemporainsles plus variés d’Estrémadure.Monter et descendre ces ruelles pavéesnous aura sans doute aiguisé l’appétit.Rendons-nous donc non loin de là auTorre de Sande, un manoir fortifiérecouvert de plantes grimpantes quiabrite un restaurant intimiste et un trèsbeau jardin, et où César Ráez ravit sesinvités grâce à sa cuisine qu’il qualifiede « classico-audacieuse ». S’appuyantsur des produits régionaux et de saison,celle-ci propose des plats de gibier,l’une des spécialités de la région. Sonlivre, Cocina de Caza (Cuisine de gibier),a été récompensée par le GourmandWorld Cookbook Award en 2006(Meilleur livre de cuisine régionale enEspagne – Spain Gourmetour, n° 60).

Mais, oyez, oyez, bonnes gens ! Sousl’égide du groupe Relais & Châteaux,la construction, juste à côté, d’un hôtelde luxe cinq étoiles avance, imaginéepar l’incroyable tandem formé parToño Perez et José Antonio Polo,propriétaires du fameux restaurantAtrio, deux étoiles Michelin (SpainGourmetour, n° 58), qui attire àCáceres, des quatre coins du globe, lesamateurs de la bonne table et des bonsvins. Et comme la tendance est à parercet environnement historiqueexceptionnel de l’éclat du XXIe siècle, àquelques mètres de là à peine, lemagnifique palais de Torreorgaz, quiaccueille le Parador, sera entièrementrénové à partir de mai 2009.

Au-delà du murEn sortant par la Puerta de la Estrella(Porte de l’Étoile), nous trouvons enaval la Plaza Mayor, dominée par lamagnifique Torre del Bujaco et

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Toutefois, cette caractéristique n’estpas immédiatement visible : avec letemps, la construction s’est retrouvéeen partie encastrée entre les bâtiments.Ici, palais et églises, bien qu’aussiimposants, ont une structure en pierreplus simple, soutenue par des pierresangulaires imposantes et des archessouvent magnifiquement sculptées.Bien qu’il existe encore des traces decultures préhistoriques et préromaines(ici aussi les sangliers vettoniquestraverseront votre chemin), Cáceres estconnue pour son rôle de colonieimportante sur la Route romaine del’argent ou Vía de la Plata. Cependant,la ville a acquis ses lettres de noblessesous l’occupation arabe. N’ayant étéreconquise que deux siècles après Ávila,elle a subi une influence beaucoup plusmarquée des cultures arabe et juive. Lesvestiges conservés sont donc plusnombreux et certains sont encoredécouverts aujourd’hui. Il ne fautabsolument pas manquer la splendide

Aljibe ou citerne du XIe siècle et sesmultiples arches, située au sous-sol dela Casa de las Veletas, qui accueille aussile musée municipal. Juste en face setrouve le manoir fortifié connu sous lenom de Casa de las Cigueñas. Sa hautetour est la seule à n’avoir pas été« décapitée » par Isabelle la Catholique(1451–1504), qui aurait fait abattre lapartie supérieure de toutes les tourspour mettre un terme aux constantesquerelles armées opposant les famillesnobles de la ville. En réalité, la reinesouhaitait favoriser le propriétaire dumanoir qui avait pris parti pour elle lorsde la dispute pour la succession autrône de Castille. Ce manoir nes’appelle pas « Maison des Cigognes »par hasard : ces échassiers font autantpartie de Cáceres que ses monuments,et si la quiétude de l’atmosphère estparfois brisée, c’est par leursclaquements typiques. Il n’existe aucunpoint en hauteur qui n’accueille unecigogne ou un nid. Marcelino

Cardalliaguet, représentant de Birdlifeen Estrémadure, explique que178 couples et plus de 300 cigognesnon reproductrices sont recensés,faisant de cette population la plusurbaine d’Europe.

Soyezles bienvenusIci comme dans de nombreuses villeshistoriques espagnoles, les couventsfont partie intégrante du patrimoinearchitectural. Mais, ils sont aussi deslieux de production où sont élaboréesde délicieuses pâtisseriestraditionnelles. Au couvent de SanPablo (XVe siècle), par exemple, lesreligieuses Clarisses continuentd’élaborer de délicats morceaux deparadis, les fameuses Yemas de SanPablo (« De petites bouchées deparadis », page 78). Laissonsmaintenant nos pas nous mener aucœur de la vieille ville, la Plaza de

Parador, Palacio de Torreorgaz, Cáceres

Santa María, une place auxcontours irréguliers entourée demagnifiques bâtiments médiévaux.À cette époque, Cáceres doit sagrande richesse aux trésorsrapportés du Nouveau Monde parles conquistadors, originaires pourla plupart de la pauvreEstrémadure, ainsi qu’auxindustries lucratives de latranshumance du bétail et de lalaine. Dans l’un des coins del’église du même nom, une statueen bronze de San Pedro deAlcantará (le saint patrond’Estrémadure) est censée exaucerles vœux de ceux qui touchent sespieds, aussi divers soient-ils

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(passer ses examens ou trouver unfiancé ou une fiancée). Juste à côté, lepalais des Moraga accueille le Centrede l’artisanat où sont exposés etproposés à la vente sur trois étages detrès beaux objets représentatifs dessavoirs traditionnels et contemporainsles plus variés d’Estrémadure.Monter et descendre ces ruelles pavéesnous aura sans doute aiguisé l’appétit.Rendons-nous donc non loin de là auTorre de Sande, un manoir fortifiérecouvert de plantes grimpantes quiabrite un restaurant intimiste et un trèsbeau jardin, et où César Ráez ravit sesinvités grâce à sa cuisine qu’il qualifiede « classico-audacieuse ». S’appuyantsur des produits régionaux et de saison,celle-ci propose des plats de gibier,l’une des spécialités de la région. Sonlivre, Cocina de Caza (Cuisine de gibier),a été récompensée par le GourmandWorld Cookbook Award en 2006(Meilleur livre de cuisine régionale enEspagne – Spain Gourmetour, n° 60).

Mais, oyez, oyez, bonnes gens ! Sousl’égide du groupe Relais & Châteaux,la construction, juste à côté, d’un hôtelde luxe cinq étoiles avance, imaginéepar l’incroyable tandem formé parToño Perez et José Antonio Polo,propriétaires du fameux restaurantAtrio, deux étoiles Michelin (SpainGourmetour, n° 58), qui attire àCáceres, des quatre coins du globe, lesamateurs de la bonne table et des bonsvins. Et comme la tendance est à parercet environnement historiqueexceptionnel de l’éclat du XXIe siècle, àquelques mètres de là à peine, lemagnifique palais de Torreorgaz, quiaccueille le Parador, sera entièrementrénové à partir de mai 2009.

Au-delà du murEn sortant par la Puerta de la Estrella(Porte de l’Étoile), nous trouvons enaval la Plaza Mayor, dominée par lamagnifique Torre del Bujaco et

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Toutefois, cette caractéristique n’estpas immédiatement visible : avec letemps, la construction s’est retrouvéeen partie encastrée entre les bâtiments.Ici, palais et églises, bien qu’aussiimposants, ont une structure en pierreplus simple, soutenue par des pierresangulaires imposantes et des archessouvent magnifiquement sculptées.Bien qu’il existe encore des traces decultures préhistoriques et préromaines(ici aussi les sangliers vettoniquestraverseront votre chemin), Cáceres estconnue pour son rôle de colonieimportante sur la Route romaine del’argent ou Vía de la Plata. Cependant,la ville a acquis ses lettres de noblessesous l’occupation arabe. N’ayant étéreconquise que deux siècles après Ávila,elle a subi une influence beaucoup plusmarquée des cultures arabe et juive. Lesvestiges conservés sont donc plusnombreux et certains sont encoredécouverts aujourd’hui. Il ne fautabsolument pas manquer la splendide

Aljibe ou citerne du XIe siècle et sesmultiples arches, située au sous-sol dela Casa de las Veletas, qui accueille aussile musée municipal. Juste en face setrouve le manoir fortifié connu sous lenom de Casa de las Cigueñas. Sa hautetour est la seule à n’avoir pas été« décapitée » par Isabelle la Catholique(1451–1504), qui aurait fait abattre lapartie supérieure de toutes les tourspour mettre un terme aux constantesquerelles armées opposant les famillesnobles de la ville. En réalité, la reinesouhaitait favoriser le propriétaire dumanoir qui avait pris parti pour elle lorsde la dispute pour la succession autrône de Castille. Ce manoir nes’appelle pas « Maison des Cigognes »par hasard : ces échassiers font autantpartie de Cáceres que ses monuments,et si la quiétude de l’atmosphère estparfois brisée, c’est par leursclaquements typiques. Il n’existe aucunpoint en hauteur qui n’accueille unecigogne ou un nid. Marcelino

Cardalliaguet, représentant de Birdlifeen Estrémadure, explique que178 couples et plus de 300 cigognesnon reproductrices sont recensés,faisant de cette population la plusurbaine d’Europe.

Soyezles bienvenusIci comme dans de nombreuses villeshistoriques espagnoles, les couventsfont partie intégrante du patrimoinearchitectural. Mais, ils sont aussi deslieux de production où sont élaboréesde délicieuses pâtisseriestraditionnelles. Au couvent de SanPablo (XVe siècle), par exemple, lesreligieuses Clarisses continuentd’élaborer de délicats morceaux deparadis, les fameuses Yemas de SanPablo (« De petites bouchées deparadis », page 78). Laissonsmaintenant nos pas nous mener aucœur de la vieille ville, la Plaza de

Parador, Palacio de Torreorgaz, Cáceres

Santa María, une place auxcontours irréguliers entourée demagnifiques bâtiments médiévaux.À cette époque, Cáceres doit sagrande richesse aux trésorsrapportés du Nouveau Monde parles conquistadors, originaires pourla plupart de la pauvreEstrémadure, ainsi qu’auxindustries lucratives de latranshumance du bétail et de lalaine. Dans l’un des coins del’église du même nom, une statueen bronze de San Pedro deAlcantará (le saint patrond’Estrémadure) est censée exaucerles vœux de ceux qui touchent sespieds, aussi divers soient-ils

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entourée d’immeubles blancs en stuc.Chaque année, en novembre, l’endroitreprend son apparence d’époque etdevient, pour quelques jours, le centred’un immense marché médiéval qui serépand dans toute la vieille ville etattire plus de 100 000 visiteurs. À unecourte distance de là à pied se trouvele Gran Teatro, qui accueille toutel’année un éventail d’événementsculturels très variés en intérieur. Eneffet, Cáceres, en raison de son climatgénéralement doux, organise aussiplusieurs festivals en plein air trèscourus comme le Womad (musique dumonde), Play! Cáceres (musiquecontemporaine), Irish Fleadh (musiqueceltique) ou des représentations dethéâtre classique.Juste en face du théâtre se trouve l’unedes petites boutiques de GabrielMostaza, qui propose une sélection desmeilleurs produits traditionnelsd’Estrémadure. N’hésitez pas à y entrer :le magasin est un régal pour les yeuxet les effluves qui y règnent titillerontsans doute vos papilles. Il sera alorstemps de terminer notre visite par unrepas — que Juan Mari Arzak (l’un desplus importants chefs espagnols duPays basque) a récemment décritcomme « magique » — à El Figón deEustaquio sur la Plaza de San Juan.Aujourd’hui, l’établissement est dirigépar la nièce d’Eustaquio, Pilar Blanco.« Petite fille, j’étais si heureuse dans lacuisine », se rappelle-t-elle en souriant.Maintenant qu’elle est auxcommandes, elle continue d’irradier lebonheur. La décoration des lieux estsimple, mais accueillante, laissant laplace d’honneur à la nourriture, fidèleà sa réputation. « Ce qui marche n’apas besoin de être changé », affirmePilar. Outre la caractéristique perdizestofada (perdrix à l’étouffée), les platsemblématiques du restaurant restent lefrite (morceaux frits d’agneau,accompagnés de pommes de terre), lerôti d’agneau et le cochon de lait aufour, le chevreuil ou des champignonsrécoltés dans la région et des criadillasde la tierra, un tubercule proche de latruffe. Et en dessert, optez sans hésiter

pour l’exquis bisquit de higo (biscuitaux figues glacé).Notre parcours sur la trace des trésorscachés d’Espagne approche de sa fin. Ilnous a menés à la majestueuse Ávila,mais nous avons omis lesemblématiques Ségovie et Salamanque,pourtant proches. De même, nousnous sommes promenés dans lasplendide Cáceres, mais en omettantles villes uniques et voisines de Trujilloet Mérida. Cela ne fait que prouver ladensité inégalée du patrimoinehistorique et culturel de l’Espagne,toujours abrité dans de splendidespaysages et ravivé par une myriade

d’événements et une délicieusegastronomie. Notre prochain itinérairenous mènera sur les côtesméditerranéennes où nous visiterons laromaine Tarraco, connue de nos jourssous le nom de Tarragone, et laphénicienne Ybshm, l’actuelle Ibiza,inondée de blancheur. Il s’agira d’uneexpérience à part : nous espérons quevous ferez à nouveau partie desnôtres !

Anke van Wijck Adán est sociologue ettitulaire d’un Master en gastronomie del’Université de Boston. Ses articles ont étépubliés dans le Boston Globe.

Place Mayor, Cáceres Place et église de San Juan, Cáceres

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entourée d’immeubles blancs en stuc.Chaque année, en novembre, l’endroitreprend son apparence d’époque etdevient, pour quelques jours, le centred’un immense marché médiéval qui serépand dans toute la vieille ville etattire plus de 100 000 visiteurs. À unecourte distance de là à pied se trouvele Gran Teatro, qui accueille toutel’année un éventail d’événementsculturels très variés en intérieur. Eneffet, Cáceres, en raison de son climatgénéralement doux, organise aussiplusieurs festivals en plein air trèscourus comme le Womad (musique dumonde), Play! Cáceres (musiquecontemporaine), Irish Fleadh (musiqueceltique) ou des représentations dethéâtre classique.Juste en face du théâtre se trouve l’unedes petites boutiques de GabrielMostaza, qui propose une sélection desmeilleurs produits traditionnelsd’Estrémadure. N’hésitez pas à y entrer :le magasin est un régal pour les yeuxet les effluves qui y règnent titillerontsans doute vos papilles. Il sera alorstemps de terminer notre visite par unrepas — que Juan Mari Arzak (l’un desplus importants chefs espagnols duPays basque) a récemment décritcomme « magique » — à El Figón deEustaquio sur la Plaza de San Juan.Aujourd’hui, l’établissement est dirigépar la nièce d’Eustaquio, Pilar Blanco.« Petite fille, j’étais si heureuse dans lacuisine », se rappelle-t-elle en souriant.Maintenant qu’elle est auxcommandes, elle continue d’irradier lebonheur. La décoration des lieux estsimple, mais accueillante, laissant laplace d’honneur à la nourriture, fidèleà sa réputation. « Ce qui marche n’apas besoin de être changé », affirmePilar. Outre la caractéristique perdizestofada (perdrix à l’étouffée), les platsemblématiques du restaurant restent lefrite (morceaux frits d’agneau,accompagnés de pommes de terre), lerôti d’agneau et le cochon de lait aufour, le chevreuil ou des champignonsrécoltés dans la région et des criadillasde la tierra, un tubercule proche de latruffe. Et en dessert, optez sans hésiter

pour l’exquis bisquit de higo (biscuitaux figues glacé).Notre parcours sur la trace des trésorscachés d’Espagne approche de sa fin. Ilnous a menés à la majestueuse Ávila,mais nous avons omis lesemblématiques Ségovie et Salamanque,pourtant proches. De même, nousnous sommes promenés dans lasplendide Cáceres, mais en omettantles villes uniques et voisines de Trujilloet Mérida. Cela ne fait que prouver ladensité inégalée du patrimoinehistorique et culturel de l’Espagne,toujours abrité dans de splendidespaysages et ravivé par une myriade

d’événements et une délicieusegastronomie. Notre prochain itinérairenous mènera sur les côtesméditerranéennes où nous visiterons laromaine Tarraco, connue de nos jourssous le nom de Tarragone, et laphénicienne Ybshm, l’actuelle Ibiza,inondée de blancheur. Il s’agira d’uneexpérience à part : nous espérons quevous ferez à nouveau partie desnôtres !

Anke van Wijck Adán est sociologue ettitulaire d’un Master en gastronomie del’Université de Boston. Ses articles ont étépubliés dans le Boston Globe.

Place Mayor, Cáceres Place et église de San Juan, Cáceres

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Un poivron n’est rien d’autre qu’unpoivron, n’est-ce pas ? Eh bien,non. Il existe des centaines de types

de Capsicum de par le monde, dont une bonne partieest traditionnellement cultivée en Espagne. Certainspiquent, d’autres pas. Certains sont cultivés pourêtre séchés, d’autres pour être moulus sous formede pimentón (sorte de paprika espagnol) et d’autressont produits spécialement pour être consommésfrais. Les gros poivrons rouges renflés du Sud del’Espagne, à la saveur douce et inoffensive et d’unecouleur éclatante, sont omniprésents presque toutel’année dans les rayons des supermarchés européens.Or, l’univers des poivrons espagnols va bien plusloin que les produits cultivés sous serre à Murcie età Almería. De nombreuses variétés traditionnelles,pourtant méconnues hors de leur région d’origine,offrent un éventail inattendu de formes insolites etde qualités aromatiques. Paul Richardson s’estintéressé à ces variétés de poivron espagnolespromises à un bel avenir.

LE POIVRONTextePaul Richardson/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

IllustrationsLuis Serrano

tout en douceur

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Un poivron n’est rien d’autre qu’unpoivron, n’est-ce pas ? Eh bien,non. Il existe des centaines de types

de Capsicum de par le monde, dont une bonne partieest traditionnellement cultivée en Espagne. Certainspiquent, d’autres pas. Certains sont cultivés pourêtre séchés, d’autres pour être moulus sous formede pimentón (sorte de paprika espagnol) et d’autressont produits spécialement pour être consommésfrais. Les gros poivrons rouges renflés du Sud del’Espagne, à la saveur douce et inoffensive et d’unecouleur éclatante, sont omniprésents presque toutel’année dans les rayons des supermarchés européens.Or, l’univers des poivrons espagnols va bien plusloin que les produits cultivés sous serre à Murcie età Almería. De nombreuses variétés traditionnelles,pourtant méconnues hors de leur région d’origine,offrent un éventail inattendu de formes insolites etde qualités aromatiques. Paul Richardson s’estintéressé à ces variétés de poivron espagnolespromises à un bel avenir.

LE POIVRONTextePaul Richardson/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

IllustrationsLuis Serrano

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Pérou ou l’Espagne, font partie dugroupe des annuum.Le poivron fut découvert par lesEspagnols lors du deuxième voyaged’exploration de Christophe Colomb(1493-1496), lorsque le grandconquistador remarqua que lesindigènes mangeait un fruit dont laforme et la couleur rappelaient unepetite cerise. Ces fruits semblaient trèsépicés, ce qui leur fit penser qu’ils

étaient de la famille du poivre — cequi explique la proximité linguistique,et non pas culinaire, entre les deuxmots. En effet, le nom espagnol dupoivre (Piper nigrum en latin) estpimienta, et c’est sous cettedénomination très équivoque queColomb avait rapporté le premierCapsicum en Europe. L’éminentFernández de Oviedo (historien desIndes, 1478-1557) décrivait cette

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Le poivron et les nombreux membresde sa grande famille — vert, rouge,orange, jaune, petit et piquant, grandet doux — font partie des ingrédientsclassiques de la cuisine hispanique ausens large. Dans la gastronomieespagnole, leur application peut êtredivisée en trois grandes catégories. Ilspeuvent être séchés puis moulus pourproduire le pimentón — aromateespagnol sans égal, irremplaçable surtout casier à épices digne de ce nom,de Cadix à La Corogne. Ils peuventégalement être conservés entiers, deplusieurs façons : au vinaigre ou dansla saumure, ou bien épluchés et mis enbocal dans leur jus. Finalement, ilspeuvent surtout être consommés frais,en saison ou hors saison, et servent àélaborer d’innombrables recettesespagnoles. Ils sont si courants quel’on aurait presque tendance à lesoublier, comme la tomate. Pourtant,sans eux, la vie serait assurémentmoins agréable.En cuisine, les poivrons peuvent aussibien occuper le devant de la scène quese mêler discrètement aux autresacteurs, en coulisse. Le poivron vert estun ingrédient essentiel des crèmes

froides, comme le gazpacho, ainsi quedes salades estivales espagnoles tellesque le trempó de Majorque (salade detomates, d’oignons et de poivrons).Des plats de légumes d’ététraditionnels comme le pisto(ratatouille) ou le tumbet (gâteau depommes de terre, d’aubergines et depoivrons au four) seraient toutsimplement inimaginables sanspoivrons, qu’ils soient verts ou rouges.Les poivrons farcis avec un mélange debœuf, de porc et de jambon hachés, demorcilla (boudin), de morue salée, defruits de mer et/ou de riz, sont ungrand classique de la gastronomie deNavarre, de La Rioja et du Paysbasque. Les Basques ajoutent dupoivron vert dans leurs tortillas(omelettes) de pommes de terre et demorue salée, tandis que les Aragonaisemploient le poivron vert et rougepour élaborer leur sauce appeléechilindrón. La richesse culinaire dupoivron est pratiquement illimitée, etpeu de cuisines au monde offrent unedémonstration aussi éclatante de sapolyvalence.Dans ma propre cuisine, il est rare quele panier à légumes ne contienne pas

de poivrons, de quelque type que cesoit. Lors de la semaine qui vient des’écouler, par exemple, j’ai fait frire despoivrons verts entiers à l’huile d’olivepour accompagner des côtelettesd’agneau grillées sur un feu desarments de vigne. J’ai aussi employéun poivron vert finement haché etrissolé à l’huile d’olive avec de latomate et de l’oignon pourconfectionner la base typiquementespagnole (sofrito) d’un ragoût desanglier. Finalement, j’ai coupé despoivrons rouges en gros morceauxpour apporter une touche de couleuret de saveur à un plat de riz au pouletet aux légumes.

Une longue histoireLe genre Capsicum appartient à lafamille des solanacées, qui comprendégalement la pomme de terre,l’aubergine, la tomate et la belladone,plante extrêmement toxique. Parmi lescinq espèces de Capsicum cultivées,celle qui englobe le plus grand nombrede variétés est, de loin, le Capsicumannuum. En effet, la majorité despoivrons cultivés dans le monde, duMexique à l’Italie en passant par le

plante appelée ají (nom donné encoreaujourd’hui au piment dans une bonnepartie d’Amérique du Sud), comme« la pimienta des Indiens, une plantehaute donnant des gousses de la tailled’un doigt, en longueur comme enlargeur », ce qui correspondrait auxdifférentes variétés de ce que l’onappelle aujourd’hui le poivron(pimiento en espagnol).Le poivron est très riche en glucides,

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Pérou ou l’Espagne, font partie dugroupe des annuum.Le poivron fut découvert par lesEspagnols lors du deuxième voyaged’exploration de Christophe Colomb(1493-1496), lorsque le grandconquistador remarqua que lesindigènes mangeait un fruit dont laforme et la couleur rappelaient unepetite cerise. Ces fruits semblaient trèsépicés, ce qui leur fit penser qu’ils

étaient de la famille du poivre — cequi explique la proximité linguistique,et non pas culinaire, entre les deuxmots. En effet, le nom espagnol dupoivre (Piper nigrum en latin) estpimienta, et c’est sous cettedénomination très équivoque queColomb avait rapporté le premierCapsicum en Europe. L’éminentFernández de Oviedo (historien desIndes, 1478-1557) décrivait cette

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Le poivron et les nombreux membresde sa grande famille — vert, rouge,orange, jaune, petit et piquant, grandet doux — font partie des ingrédientsclassiques de la cuisine hispanique ausens large. Dans la gastronomieespagnole, leur application peut êtredivisée en trois grandes catégories. Ilspeuvent être séchés puis moulus pourproduire le pimentón — aromateespagnol sans égal, irremplaçable surtout casier à épices digne de ce nom,de Cadix à La Corogne. Ils peuventégalement être conservés entiers, deplusieurs façons : au vinaigre ou dansla saumure, ou bien épluchés et mis enbocal dans leur jus. Finalement, ilspeuvent surtout être consommés frais,en saison ou hors saison, et servent àélaborer d’innombrables recettesespagnoles. Ils sont si courants quel’on aurait presque tendance à lesoublier, comme la tomate. Pourtant,sans eux, la vie serait assurémentmoins agréable.En cuisine, les poivrons peuvent aussibien occuper le devant de la scène quese mêler discrètement aux autresacteurs, en coulisse. Le poivron vert estun ingrédient essentiel des crèmes

froides, comme le gazpacho, ainsi quedes salades estivales espagnoles tellesque le trempó de Majorque (salade detomates, d’oignons et de poivrons).Des plats de légumes d’ététraditionnels comme le pisto(ratatouille) ou le tumbet (gâteau depommes de terre, d’aubergines et depoivrons au four) seraient toutsimplement inimaginables sanspoivrons, qu’ils soient verts ou rouges.Les poivrons farcis avec un mélange debœuf, de porc et de jambon hachés, demorcilla (boudin), de morue salée, defruits de mer et/ou de riz, sont ungrand classique de la gastronomie deNavarre, de La Rioja et du Paysbasque. Les Basques ajoutent dupoivron vert dans leurs tortillas(omelettes) de pommes de terre et demorue salée, tandis que les Aragonaisemploient le poivron vert et rougepour élaborer leur sauce appeléechilindrón. La richesse culinaire dupoivron est pratiquement illimitée, etpeu de cuisines au monde offrent unedémonstration aussi éclatante de sapolyvalence.Dans ma propre cuisine, il est rare quele panier à légumes ne contienne pas

de poivrons, de quelque type que cesoit. Lors de la semaine qui vient des’écouler, par exemple, j’ai fait frire despoivrons verts entiers à l’huile d’olivepour accompagner des côtelettesd’agneau grillées sur un feu desarments de vigne. J’ai aussi employéun poivron vert finement haché etrissolé à l’huile d’olive avec de latomate et de l’oignon pourconfectionner la base typiquementespagnole (sofrito) d’un ragoût desanglier. Finalement, j’ai coupé despoivrons rouges en gros morceauxpour apporter une touche de couleuret de saveur à un plat de riz au pouletet aux légumes.

Une longue histoireLe genre Capsicum appartient à lafamille des solanacées, qui comprendégalement la pomme de terre,l’aubergine, la tomate et la belladone,plante extrêmement toxique. Parmi lescinq espèces de Capsicum cultivées,celle qui englobe le plus grand nombrede variétés est, de loin, le Capsicumannuum. En effet, la majorité despoivrons cultivés dans le monde, duMexique à l’Italie en passant par le

plante appelée ají (nom donné encoreaujourd’hui au piment dans une bonnepartie d’Amérique du Sud), comme« la pimienta des Indiens, une plantehaute donnant des gousses de la tailled’un doigt, en longueur comme enlargeur », ce qui correspondrait auxdifférentes variétés de ce que l’onappelle aujourd’hui le poivron(pimiento en espagnol).Le poivron est très riche en glucides,

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l’Europe du Nord. Le morrón est suivi,en termes de volume de production,par les variétés dénommées cristal,longues et fines, surtout consomméesvertes et dont l’arôme est sucré etpénétrant.Viennent ensuite de nombreusesvariétés, inconnues pour la pluparthors d’Espagne, voire à l’extérieur deleur région d’origine. Il est impossibled’évaluer le nombre de variétés depoivron dans le pays, même pour lesexperts en la matière, compte tenu del’extraordinaire biodiversité quicaractérise le genre Capsicum. Souventcultivées depuis des siècles par desparticuliers dans leur potager, cesvariétés de poivron espagnolesparticulières sont très prisées descuisiniers et des gourmets locaux, maispeu diffusées hors de leur régiond’origine. Pour la grande majorité desconsommateurs, les poivrons ne sontrien d’autre que des poivrons, etcontrairement à ce qu’il se passe avecla tomate ou la pomme de terre, parexemple, ils ne sont pas encoreconscients de l’existence de différentesvariétés.Cependant, des changementss’annoncent en 2009 pour le poivronespagnol. Certaines des meilleuresvariétés locales finissent par êtrereconnues pour leurs qualités uniques,et leur protection au moyen d’une IGP(Indication géographique protégée) oud’une AOP (Appellation d’origineprotégée) est en cours pour une bonnepoignée d’entre elles.

Quand le poivronflirte avec le pimentL’une des variétés qui va bientôtobtenir une AOP (longtemps méritée)est un poivron en plein essor depuisquelques années, dont la réputation necesse de croître en Espagne et même àl’étranger. Le Pimiento de Herbón,

originaire de la Galice (Nord-Est del’Espagne) et devenu célèbre sous lenom commercial de Pimiento dePadrón, doit son succès en partie à unesingularité botanique curieuse : laplupart de ces poivrons ontnaturellement une saveur douce, maisquelques exemplaires sur chaqueplante acquièrent spontanément ungoût piquant. Environ 10 % despoivrons de Herbón sont piquants,mais ce pourcentage augmente si onles laisse plus longtemps sur la plante.C’est pourquoi ce légume possède sonpropre slogan commercial. Le dictontraditionnel de la région d’Herbón,« Unos pican y otros no » (certainspiquent, d’autres non), est désormaisconnu dans toute l’Espagne, à tel pointqu’il est pratiquement devenu unproverbe signifiant que la vie peutparfois être une loterie.

Le Pimiento de Herbón est un petitpoivron, mesurant normalement de 4 à6 cm de long et toujours cueilli vert.Dans les bars à tapas et les restaurantsde Saint-Jacques-de-Compostelle, lagrande ville la plus proche de la zonede production, il a toujours été servisimplement frit à l’huile d’olive etsaupoudré de gros sel. Par la suite, lesPimientos de Herbón — appeléspresque universellement, à tort,poivrons de Padrón — se sont fait uneplace parmi les classiques de la cuisinegalicienne, avec le pulpo a feira (poulpeaux pommes de terre, sel gemme,pimentón doux et huile d’olive) et lelacón con grelos (épaule de porc auxpousses du brocoli-rave avantfloraison). En Galice, les sardinillas conPimiento de Herbón, de petites sardinesfrites accompagnées de poivrons, sontune combinaison très appréciée. A laPlaza de Abastos, le grand marchécentral de Saint-Jacques-de-Compostelle, il est encore fréquent devoir les épouses des agriculteurs assises

à côté de gros paniers remplis depoivrons verts d’Herbón frais, qu’ellesvendent habituellement à la centaine,et non pas au poids.L’aspect « roulette russe » de ladégustation de poivrons d’Herbón,ainsi que leur superbe couleur verte etleur arôme captivant, les rendent trèsagréables à manger. Bien qu’ils aientété cultivés dans la région depuis dessiècles, leur boum a commencé à la findes années 1980, avec l’apparition desystèmes perfectionnés de distributionet de réfrigération. La mode despoivrons d’Herbón a rapidement gagnéla diaspora des bars galiciens dans lesgrandes villes espagnoles, enparticulier à Madrid et à Barcelone, oùde nombreux Gallegos sont venuss’installer. A partir de là, ils ont franchile pas à l’international. La croissancede la demande a donné lieu à laproduction de poivrons de typeHerbón à Murcie et à Almería, voire auMaroc, afin de les exporter enArgentine, aux États-Unis et enGrande-Bretagne. C’est ce « plagiat »de la « marque » originale qui a finipar conduire à la création d’uneappellation d’origine protégée pour lePimiento d’Herbón. La zone délimitéea pour centre l’embouchure de l’Ulla, àla limite des provinces de Pontevedraet de La Corogne, et englobe lesvillages de Padrón, Dadro, Rois,Pontecesures et Valga. Deuxcoopératives, Pimerbón etA Pementeira, contrôlent la majorité dela production de poivron de Herbóndans la zone de l’AOP. La productiontotale de poivrons dans l’appellationest estimée, selon la source consultée,à environ 1 700 kilos par an, surtoutdurant la principale saison deproduction, de mi-mai à fin octobre.Ce poivron parfois piquant, parfoisnon, possède un parent proche dansl’extrême nord du pays, dont lesproducteurs affirment fièrement qu’il

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en protéines et en minéraux tels que lepotassium, le calcium et le phosphore.Il contient beaucoup de vitamine C,mais aussi des vitamines A, B1, B2, E etP. La croyance populaire selon laquelleles poivrons crus sont indigestes est enréalité la version culinaire d’un mytheurbain. C’est exactement l’inverse quiest vrai, puisque la consommation depoivron aiguise l’appétit et facilite la

digestion, tout en exerçant un légereffet désinfectant.L’Espagne est le cinquième producteurmondial de poivron, avec 4,09 % dutotal (derrière la Chine avec 53,85 %,le Mexique avec 6,48 %, l’Indonésieavec 4,22 % et la Turquie avec 4,18 %selon les données de la FAO en 2007),et offre une remarquable gamme de celégume souvent négligé. Le centre de

la culture intensive de poivrons est laprovince d’Almería, où les Capsicumoccupent 40 % de toute la superficiedisponible (sous serre). La productionà grande échelle fait appelessentiellement aux variétés appeléesmorrón, en particulier le Lamuyo — lepoivron de grande taille, charnu etdoux que l’on trouve habituellementdans les rayons des supermarchés de

POIVRON

ESSENTIELS

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l’Europe du Nord. Le morrón est suivi,en termes de volume de production,par les variétés dénommées cristal,longues et fines, surtout consomméesvertes et dont l’arôme est sucré etpénétrant.Viennent ensuite de nombreusesvariétés, inconnues pour la pluparthors d’Espagne, voire à l’extérieur deleur région d’origine. Il est impossibled’évaluer le nombre de variétés depoivron dans le pays, même pour lesexperts en la matière, compte tenu del’extraordinaire biodiversité quicaractérise le genre Capsicum. Souventcultivées depuis des siècles par desparticuliers dans leur potager, cesvariétés de poivron espagnolesparticulières sont très prisées descuisiniers et des gourmets locaux, maispeu diffusées hors de leur régiond’origine. Pour la grande majorité desconsommateurs, les poivrons ne sontrien d’autre que des poivrons, etcontrairement à ce qu’il se passe avecla tomate ou la pomme de terre, parexemple, ils ne sont pas encoreconscients de l’existence de différentesvariétés.Cependant, des changementss’annoncent en 2009 pour le poivronespagnol. Certaines des meilleuresvariétés locales finissent par êtrereconnues pour leurs qualités uniques,et leur protection au moyen d’une IGP(Indication géographique protégée) oud’une AOP (Appellation d’origineprotégée) est en cours pour une bonnepoignée d’entre elles.

Quand le poivronflirte avec le pimentL’une des variétés qui va bientôtobtenir une AOP (longtemps méritée)est un poivron en plein essor depuisquelques années, dont la réputation necesse de croître en Espagne et même àl’étranger. Le Pimiento de Herbón,

originaire de la Galice (Nord-Est del’Espagne) et devenu célèbre sous lenom commercial de Pimiento dePadrón, doit son succès en partie à unesingularité botanique curieuse : laplupart de ces poivrons ontnaturellement une saveur douce, maisquelques exemplaires sur chaqueplante acquièrent spontanément ungoût piquant. Environ 10 % despoivrons de Herbón sont piquants,mais ce pourcentage augmente si onles laisse plus longtemps sur la plante.C’est pourquoi ce légume possède sonpropre slogan commercial. Le dictontraditionnel de la région d’Herbón,« Unos pican y otros no » (certainspiquent, d’autres non), est désormaisconnu dans toute l’Espagne, à tel pointqu’il est pratiquement devenu unproverbe signifiant que la vie peutparfois être une loterie.

Le Pimiento de Herbón est un petitpoivron, mesurant normalement de 4 à6 cm de long et toujours cueilli vert.Dans les bars à tapas et les restaurantsde Saint-Jacques-de-Compostelle, lagrande ville la plus proche de la zonede production, il a toujours été servisimplement frit à l’huile d’olive etsaupoudré de gros sel. Par la suite, lesPimientos de Herbón — appeléspresque universellement, à tort,poivrons de Padrón — se sont fait uneplace parmi les classiques de la cuisinegalicienne, avec le pulpo a feira (poulpeaux pommes de terre, sel gemme,pimentón doux et huile d’olive) et lelacón con grelos (épaule de porc auxpousses du brocoli-rave avantfloraison). En Galice, les sardinillas conPimiento de Herbón, de petites sardinesfrites accompagnées de poivrons, sontune combinaison très appréciée. A laPlaza de Abastos, le grand marchécentral de Saint-Jacques-de-Compostelle, il est encore fréquent devoir les épouses des agriculteurs assises

à côté de gros paniers remplis depoivrons verts d’Herbón frais, qu’ellesvendent habituellement à la centaine,et non pas au poids.L’aspect « roulette russe » de ladégustation de poivrons d’Herbón,ainsi que leur superbe couleur verte etleur arôme captivant, les rendent trèsagréables à manger. Bien qu’ils aientété cultivés dans la région depuis dessiècles, leur boum a commencé à la findes années 1980, avec l’apparition desystèmes perfectionnés de distributionet de réfrigération. La mode despoivrons d’Herbón a rapidement gagnéla diaspora des bars galiciens dans lesgrandes villes espagnoles, enparticulier à Madrid et à Barcelone, oùde nombreux Gallegos sont venuss’installer. A partir de là, ils ont franchile pas à l’international. La croissancede la demande a donné lieu à laproduction de poivrons de typeHerbón à Murcie et à Almería, voire auMaroc, afin de les exporter enArgentine, aux États-Unis et enGrande-Bretagne. C’est ce « plagiat »de la « marque » originale qui a finipar conduire à la création d’uneappellation d’origine protégée pour lePimiento d’Herbón. La zone délimitéea pour centre l’embouchure de l’Ulla, àla limite des provinces de Pontevedraet de La Corogne, et englobe lesvillages de Padrón, Dadro, Rois,Pontecesures et Valga. Deuxcoopératives, Pimerbón etA Pementeira, contrôlent la majorité dela production de poivron de Herbóndans la zone de l’AOP. La productiontotale de poivrons dans l’appellationest estimée, selon la source consultée,à environ 1 700 kilos par an, surtoutdurant la principale saison deproduction, de mi-mai à fin octobre.Ce poivron parfois piquant, parfoisnon, possède un parent proche dansl’extrême nord du pays, dont lesproducteurs affirment fièrement qu’il

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en protéines et en minéraux tels que lepotassium, le calcium et le phosphore.Il contient beaucoup de vitamine C,mais aussi des vitamines A, B1, B2, E etP. La croyance populaire selon laquelleles poivrons crus sont indigestes est enréalité la version culinaire d’un mytheurbain. C’est exactement l’inverse quiest vrai, puisque la consommation depoivron aiguise l’appétit et facilite la

digestion, tout en exerçant un légereffet désinfectant.L’Espagne est le cinquième producteurmondial de poivron, avec 4,09 % dutotal (derrière la Chine avec 53,85 %,le Mexique avec 6,48 %, l’Indonésieavec 4,22 % et la Turquie avec 4,18 %selon les données de la FAO en 2007),et offre une remarquable gamme de celégume souvent négligé. Le centre de

la culture intensive de poivrons est laprovince d’Almería, où les Capsicumoccupent 40 % de toute la superficiedisponible (sous serre). La productionà grande échelle fait appelessentiellement aux variétés appeléesmorrón, en particulier le Lamuyo — lepoivron de grande taille, charnu etdoux que l’on trouve habituellementdans les rayons des supermarchés de

POIVRON

ESSENTIELS

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POIVRON RIOJANO

ZoneLa Rioja

Formeconique, légèrement en pointe à l’extrémité

Coleurrouge intense

Peauun peu rugueuse

Longueurentre 16 et 18 cm

Goûtdoux

POIVRON D’HERBÓN

ZoneGalice : La Corogne et Pontevedra

Forme tronconique

Coleur vert brillant

Peau légèrement rugueuse

Longueur entre 3,5 et 6 cm

Goûtdoux pour 90 % et piquant pour 10 %

POIVRON DEFRESNO-BENAVENTE

ZoneNord-Ouest de Castille-et-Léon (Léon,Zamora et Valladolid)

Formerectangulaire

Coleurrouge intense

Peaulisse, avec 3 ou 4 protubérances à uneextrémité

Longueurentre 8 et 12 cm

Goûtdouceur moyenne, peu amer et non piquant

POIVRON DE GERNIKA

ZonePays basque (Guipuscoa, Biscayeet une partie d’Álava)

Forme triangulaire, fruit étroit et allongé, seterminant par une pointe très prononcée

Coleur verte très brillante, d’une tonalitémoyenne à foncée

Peau non parcheminée, tendre et fine

Longueur de 6 a 9 cm

Goût piquant

POIVRON D’O COUTO

ZoneGalice : zone de Ferrol, province deLa Corogne

Formetronconique et trapézoïdale

Coleurvert foncé, légèrement brillante

Peaulégèrement striée

Longueurentre 4 et 8 cm

Goûtdoux

POIVRON D’ARNOIA

ZoneGalice : Orense (commune d’Arnoia etparoisse de Meréns, appartenant à lacommune de Cortegada)

Formeconique, en cloche, avec 3 ou 4 quartierset 4 côtes

Coleurvert-jaune

Peaulisse et brillante

Longueurentre 11,5 et 13,5 cm

Goûttrès doux, non piquant

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POIVROND’OIMBRA

ZoneGalice : zone de Verín, provinced’Orense

Formerégulière et allongée

Coleurvert clair, tirant sur le jaune

Peaulisse et brillante

Longueurentre 8 et 17 cm

Goûtdoux

Riojano Fresno-BenaventeOimbraArnoiaGernikaHerbón

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O Couto

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POIVRON RIOJANO

ZoneLa Rioja

Formeconique, légèrement en pointe à l’extrémité

Coleurrouge intense

Peauun peu rugueuse

Longueurentre 16 et 18 cm

Goûtdoux

POIVRON D’HERBÓN

ZoneGalice : La Corogne et Pontevedra

Forme tronconique

Coleur vert brillant

Peau légèrement rugueuse

Longueur entre 3,5 et 6 cm

Goûtdoux pour 90 % et piquant pour 10 %

POIVRON DEFRESNO-BENAVENTE

ZoneNord-Ouest de Castille-et-Léon (Léon,Zamora et Valladolid)

Formerectangulaire

Coleurrouge intense

Peaulisse, avec 3 ou 4 protubérances à uneextrémité

Longueurentre 8 et 12 cm

Goûtdouceur moyenne, peu amer et non piquant

POIVRON DE GERNIKA

ZonePays basque (Guipuscoa, Biscayeet une partie d’Álava)

Forme triangulaire, fruit étroit et allongé, seterminant par une pointe très prononcée

Coleur verte très brillante, d’une tonalitémoyenne à foncée

Peau non parcheminée, tendre et fine

Longueur de 6 a 9 cm

Goût piquant

POIVRON D’O COUTO

ZoneGalice : zone de Ferrol, province deLa Corogne

Formetronconique et trapézoïdale

Coleurvert foncé, légèrement brillante

Peaulégèrement striée

Longueurentre 4 et 8 cm

Goûtdoux

POIVRON D’ARNOIA

ZoneGalice : Orense (commune d’Arnoia etparoisse de Meréns, appartenant à lacommune de Cortegada)

Formeconique, en cloche, avec 3 ou 4 quartierset 4 côtes

Coleurvert-jaune

Peaulisse et brillante

Longueurentre 11,5 et 13,5 cm

Goûttrès doux, non piquant

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POIVROND’OIMBRA

ZoneGalice : zone de Verín, provinced’Orense

Formerégulière et allongée

Coleurvert clair, tirant sur le jaune

Peaulisse et brillante

Longueurentre 8 et 17 cm

Goûtdoux

Riojano Fresno-BenaventeOimbraArnoiaGernikaHerbón

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O Couto

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ne pique jamais. Le Pimiento deO Couto est cultivé exclusivementdans la zone de Ferrol, à la pointenord-ouest de la Galice et del’Espagne. D’après Antonio Rivera, duCentre de recherche agricole deMabegondo, qui a travaillé sur leprojet d’AOP pour le poivrond’Herbón et d’IGP pour le poivrond’O Couto, la similitude entre ces deuxvariétés peut avoir une explicationd’ordre historique. Le poivron estintimement lié aux monastères enEspagne, puisque ce sont souvent lesmoines envoyés dans les missions du

Nouveau Monde qui ont ramené lesnouvelles espèces et commencé à lescultiver de retour au pays. Malgré ladistance qui les sépare, les monastèresd’Herbón et de San Martiño do Coutoappartiennent au même ordre. Ilsemble donc logique que le poivron aitété initialement rapporté d’Amériquedu Sud au XVe siècle et planté par lesmoines dans les potagers de ces deuxmonastères, où au fil du temps, lePimiento de O Couto a évolué defaçon quelque peu différente de soncousin, le poivron d’Herbón. Lepoivron d’O Couto est plus long,

mesurant généralement de 6 à 8 cm, etpousse tout droit sur la plante, tandisque le poivron d’Herbón pend au boutde la tige. Il est cultivé par quelque 40à 60 producteurs sur une superficie d’àpeine 3,5 hectares. Comme c’estsouvent le cas en Galice, cesexploitations sont de type familial.Certains consommateurs perçoivent unarôme plus herbacé dans le poivrond’O Couto que dans celui d’Herbón,mais la principale différence résidedans le piquant, ou plutôt dans sonabsence. Dans cette région du monde,où les saveurs épicées ne sont guères

prisées, le Pimiento de O Couto aacquis sa réputation locale grâce à songoût très doux. Encore inconnu endehors de la région de Ferrol, il reste àvoir si l’IGP (dont les dernièresformalités bureaucratiques devraientêtre réglées dans le courant de l’année)donne à ce produit l’impulsion qu’ilmérite.

Doux et sucréLa Galice est riche en variétés depoivron traditionnelles. Sur lesquelque huit types de Capsicumreconnus au niveau local, au moinsquatre cherchent actuellement àtrouver leur créneau sur un marchéplus vaste. Originaires du sud de larégion, les variétés d’Arnoia etd’Oimbra sont très différentes de leurspetits cousins du Nord, parfoispiquants. Il s’agit de gros poivronsucrés et de couleur pâle, parfaits àcuisiner lorsqu’ils sont verts ou àgriller et à mettre en conservelorsqu’ils deviennent rouges. LePimiento de Oimbra vient de la zonede Verín, où il est cultivé depuisplusieurs générations dans les potagersfamiliaux et hors de laquelle il estpratiquement inconnu — malgré uneinitiative récente d’exportation auRoyaume-Uni. Le Pimiento de Arnoiaest également de bonne taille, allongé eten forme de cloche, avec une peau vert-jaune brillante, et plus petit et léger queson voisin proche, ne dépassant pas 50à 90 g, contre 70 à 400 g.José Manuel García, professeur àl’université de Vigo, connaît cespoivrons mieux que quiconque,puisqu’il a mené des études botaniquesau sein de l’équipe chargée de laconstitution de l’IGP, qui devraitbientôt être octroyée à chacune de cesvariétés. Il souligne la nature trèslocalisée de ces deux types de poivronet leur adaptation parfaite au climat duSud de la Galice, avec ses étés chauds

et ses hivers froids et humides. Dans lapratique, leur culture est biologiquepuisque les familles qui les fontpousser sur de minuscules parcellesemploient rarement d’engrais et depesticides chimiques. Ces variétés sontservies traditionnellement en friture,pour accompagner des viandes rôtiesou lors d’un barbecue estival. Garcíadécrit également une très appétissanteempanada (chausson) confectionnéedans la région de Verín, farcie depoivrons d’Oimbra frits avec del’oignon et de la viande hachée ou desfruits de mer. Pour García, l’avenirculinaire des poivrons d’Arnoia etd’Oimbra se trouve dans le monde destapas espagnoles, en perpétuelrenouveau, où ils pourront fairemontre de leur qualité dans uneratatouille ou sous la forme despoivrons farcis classiques,généralement élaborés avec de laviande hachée. Leur goût sucré etdélicatement parfumé permetégalement, affirme-t-il, de les déclinerde façon plus raffinée dans desmousses et des pasteles (sorte detourtes).L’insigne contribution de la Galice augenre Capsicum est bien connue deMarcelo Tejedor (Casa Marcelo, Saint-Jacques-de-Compostelle — SpainGourmetour, nº 44), qui s’estrapidement affirmé comme le chef leplus influent de cette communautéautonome. A la seule mention dupoivron d’Arnoia durant notreconversation, Marcelo s’extasie sur sa« douceur et son parfum ». « Il estmerveilleux en saison, vous pouvez ledéguster cru, il est croustillant et doux,ou encore grillé ou frit, absolumentdélicieux ! » Marcelo souligne qu’endehors de l’omniprésent poivron dePadrón-Herbón, la famille despoivrons joue un rôle relativementmodeste dans la vie gastronomique dela Galice. Le poivron est surtout

employé dans le sofrito, base d’oignonset de tomate servant à confectionnerles guisos (ragoûts et soupes épaisses),en particulier au poisson et aux fruitsde mer. Cependant, il est aussil’élément central d’autres applicationsculinaires. Fils de marchands deprimeurs, Marcelo se souvient que samère les servait farcis, grillés etconservés à l’huile d’olive. Parmi lesplats de son menu, qui varient selon lasaison, on remarque les sardinesgrillées accompagnées de poivronsd’Herbón, le colin en sauce aigre-douce au poivron rouge et le bar serviavec un bouillon à base de poivronsverts cultivés dans la région. Ilsouligne que ses plats font rarementappel aux poivrons piquants. « Nouspréférons les saveurs plus douces »,affirme-t-il, « et lorsque les poivronsd’Herbón piquent, les gens du coin ontplutôt tendance à les mettre de côté. »

Des racinesbasquesL’aversion généralisée pour la cuisinepiquante et épicée s’étend à tout leNord de l’Espagne, où l’on trouve bonnombre des variétés de poivron lesplus classiques du pays (à quelquesexceptions notoires, telles que laguindilla vasca, un long piment vertextrêmement piquant, conservé auvinaigre et très apprécié des gourmetsbasques). Le célèbre Pimiento deGernika — Gernikako piperra, enbasque — aurait tout d’abord étécultivé sous forme de piment, puisadouci progressivement par plusieurssiècles d’adaptation au climat doux ethumide de la côte Cantabrique.Traditionnellement mûri sur la plante,puis séché en longs chapelets, il étaitsurtout apprécié comme ingrédient deplats typiquement basques comme lebacalao a la vizcaína (morue salée à labasquaise) et les angulas al pil-pil

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POIVRON

ESSENTIELS

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ne pique jamais. Le Pimiento deO Couto est cultivé exclusivementdans la zone de Ferrol, à la pointenord-ouest de la Galice et del’Espagne. D’après Antonio Rivera, duCentre de recherche agricole deMabegondo, qui a travaillé sur leprojet d’AOP pour le poivrond’Herbón et d’IGP pour le poivrond’O Couto, la similitude entre ces deuxvariétés peut avoir une explicationd’ordre historique. Le poivron estintimement lié aux monastères enEspagne, puisque ce sont souvent lesmoines envoyés dans les missions du

Nouveau Monde qui ont ramené lesnouvelles espèces et commencé à lescultiver de retour au pays. Malgré ladistance qui les sépare, les monastèresd’Herbón et de San Martiño do Coutoappartiennent au même ordre. Ilsemble donc logique que le poivron aitété initialement rapporté d’Amériquedu Sud au XVe siècle et planté par lesmoines dans les potagers de ces deuxmonastères, où au fil du temps, lePimiento de O Couto a évolué defaçon quelque peu différente de soncousin, le poivron d’Herbón. Lepoivron d’O Couto est plus long,

mesurant généralement de 6 à 8 cm, etpousse tout droit sur la plante, tandisque le poivron d’Herbón pend au boutde la tige. Il est cultivé par quelque 40à 60 producteurs sur une superficie d’àpeine 3,5 hectares. Comme c’estsouvent le cas en Galice, cesexploitations sont de type familial.Certains consommateurs perçoivent unarôme plus herbacé dans le poivrond’O Couto que dans celui d’Herbón,mais la principale différence résidedans le piquant, ou plutôt dans sonabsence. Dans cette région du monde,où les saveurs épicées ne sont guères

prisées, le Pimiento de O Couto aacquis sa réputation locale grâce à songoût très doux. Encore inconnu endehors de la région de Ferrol, il reste àvoir si l’IGP (dont les dernièresformalités bureaucratiques devraientêtre réglées dans le courant de l’année)donne à ce produit l’impulsion qu’ilmérite.

Doux et sucréLa Galice est riche en variétés depoivron traditionnelles. Sur lesquelque huit types de Capsicumreconnus au niveau local, au moinsquatre cherchent actuellement àtrouver leur créneau sur un marchéplus vaste. Originaires du sud de larégion, les variétés d’Arnoia etd’Oimbra sont très différentes de leurspetits cousins du Nord, parfoispiquants. Il s’agit de gros poivronsucrés et de couleur pâle, parfaits àcuisiner lorsqu’ils sont verts ou àgriller et à mettre en conservelorsqu’ils deviennent rouges. LePimiento de Oimbra vient de la zonede Verín, où il est cultivé depuisplusieurs générations dans les potagersfamiliaux et hors de laquelle il estpratiquement inconnu — malgré uneinitiative récente d’exportation auRoyaume-Uni. Le Pimiento de Arnoiaest également de bonne taille, allongé eten forme de cloche, avec une peau vert-jaune brillante, et plus petit et léger queson voisin proche, ne dépassant pas 50à 90 g, contre 70 à 400 g.José Manuel García, professeur àl’université de Vigo, connaît cespoivrons mieux que quiconque,puisqu’il a mené des études botaniquesau sein de l’équipe chargée de laconstitution de l’IGP, qui devraitbientôt être octroyée à chacune de cesvariétés. Il souligne la nature trèslocalisée de ces deux types de poivronet leur adaptation parfaite au climat duSud de la Galice, avec ses étés chauds

et ses hivers froids et humides. Dans lapratique, leur culture est biologiquepuisque les familles qui les fontpousser sur de minuscules parcellesemploient rarement d’engrais et depesticides chimiques. Ces variétés sontservies traditionnellement en friture,pour accompagner des viandes rôtiesou lors d’un barbecue estival. Garcíadécrit également une très appétissanteempanada (chausson) confectionnéedans la région de Verín, farcie depoivrons d’Oimbra frits avec del’oignon et de la viande hachée ou desfruits de mer. Pour García, l’avenirculinaire des poivrons d’Arnoia etd’Oimbra se trouve dans le monde destapas espagnoles, en perpétuelrenouveau, où ils pourront fairemontre de leur qualité dans uneratatouille ou sous la forme despoivrons farcis classiques,généralement élaborés avec de laviande hachée. Leur goût sucré etdélicatement parfumé permetégalement, affirme-t-il, de les déclinerde façon plus raffinée dans desmousses et des pasteles (sorte detourtes).L’insigne contribution de la Galice augenre Capsicum est bien connue deMarcelo Tejedor (Casa Marcelo, Saint-Jacques-de-Compostelle — SpainGourmetour, nº 44), qui s’estrapidement affirmé comme le chef leplus influent de cette communautéautonome. A la seule mention dupoivron d’Arnoia durant notreconversation, Marcelo s’extasie sur sa« douceur et son parfum ». « Il estmerveilleux en saison, vous pouvez ledéguster cru, il est croustillant et doux,ou encore grillé ou frit, absolumentdélicieux ! » Marcelo souligne qu’endehors de l’omniprésent poivron dePadrón-Herbón, la famille despoivrons joue un rôle relativementmodeste dans la vie gastronomique dela Galice. Le poivron est surtout

employé dans le sofrito, base d’oignonset de tomate servant à confectionnerles guisos (ragoûts et soupes épaisses),en particulier au poisson et aux fruitsde mer. Cependant, il est aussil’élément central d’autres applicationsculinaires. Fils de marchands deprimeurs, Marcelo se souvient que samère les servait farcis, grillés etconservés à l’huile d’olive. Parmi lesplats de son menu, qui varient selon lasaison, on remarque les sardinesgrillées accompagnées de poivronsd’Herbón, le colin en sauce aigre-douce au poivron rouge et le bar serviavec un bouillon à base de poivronsverts cultivés dans la région. Ilsouligne que ses plats font rarementappel aux poivrons piquants. « Nouspréférons les saveurs plus douces »,affirme-t-il, « et lorsque les poivronsd’Herbón piquent, les gens du coin ontplutôt tendance à les mettre de côté. »

Des racinesbasquesL’aversion généralisée pour la cuisinepiquante et épicée s’étend à tout leNord de l’Espagne, où l’on trouve bonnombre des variétés de poivron lesplus classiques du pays (à quelquesexceptions notoires, telles que laguindilla vasca, un long piment vertextrêmement piquant, conservé auvinaigre et très apprécié des gourmetsbasques). Le célèbre Pimiento deGernika — Gernikako piperra, enbasque — aurait tout d’abord étécultivé sous forme de piment, puisadouci progressivement par plusieurssiècles d’adaptation au climat doux ethumide de la côte Cantabrique.Traditionnellement mûri sur la plante,puis séché en longs chapelets, il étaitsurtout apprécié comme ingrédient deplats typiquement basques comme lebacalao a la vizcaína (morue salée à labasquaise) et les angulas al pil-pil

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profond ridée par le soleil automnal.On le trouve aussi grillé et conservé àl’huile d’olive en bocal ou en boîte— savoureux pendant les moisd’hiver. Le poivron Riojano estsurtout consommé lorsqu’il est bienmûr, mais une version intermédiaire,mi-verte mi-rouge, appeléeentreverado, est également appréciéedans la région pour sa saveur douce.Toutefois, le premier rôle dans lacuisine riojana est réservé au poivronrouge, frais et totalement mûr, au

goût légèrement relevé. Il constitue enoutre un élément irremplaçable de lagastronomie locale : l’expression a lariojana, à la mode de La Rioja,implique la présence de poivronsrouges pour agrémenter l’ingrédientprincipal. Comme son cousin deGuernica, le Pimiento Riojano estcher aux cœurs de ceux qui lecultivent et le consomment. Lepoivron farci est un pilier de laculture régionale des tapas. LesPatatas a la riojana, pommes de terre

aux poivrons rouges, au chorizo et aulaurier, sont un plat typique dumonde paysan, souvent préparé etdégusté dans le vignoble même, lorsde froides journées, tandis que lescaracoles a la riojana, l’une desmeilleures recettes d’escargotespagnoles, consistent à relever lasaveur de cet humble mollusque avecdu poivron rouge, de l’oignon, de l’ailet du jambon haché. À l’Echaurren, lerestaurant le plus réputé de la région,à Ezcaray, le chef Francis Paniego

(anguilles servies avec une émulsiond’huile d’olive et de bouillon depoisson). Au fil du temps, cettecoutume s’est perdue ; aujourd’huicette variété est essentiellementutilisée sous forme de poivron vertcueilli encore doux et tendre etdestiné aux fritures. Cultivéprincipalement dans les communesde Txoriherri, Murguía et Busturia, etrécolté d’avril à novembre, il estnormalement de forme conique etallongée, d’un vert profond et brillant,et mesure de six à neuf centimètres delong. L’une des ses caractéristiques lesplus marquantes est sa peau très fine,qui est si délicate qu’elle fondpratiquement dans le bouche après lacuisson.La variété en question tient son nomde Guernica, petite ville proche deBilbao, qui possède une énormeimportance symbolique dans lapolitique et la culture basques (letableau de Picasso intitulé Guernicaévoque le bombardement de la localitépar les Allemands en 1937). La régionde Guernica était non seulement sonberceau et sa zone de productioncentrale, mais aussi son principal pointde vente, sur le marché aux fruits etlégumes qui s’y tenait tous les lundis.Aujourd’hui, le Pimiento de Gernikaest un légume très populaire danstoute la province de Biscaye etreprésente la production agricole laplus importante de la région après lalaitue (40 % de la récolte totale de laprovince est vendue dans d’autresrégions d’Espagne). Depuis 1993, cettevariété est soumise au système decontrôle de qualité des produitsalimentaires basques, qui octroie lelabel « Kalitatea ». Par ailleurs, lepoivron de Gernika devrait obtenir sa

propre AOP dans le courant del’année.Certains livres historiques sur lacuisine basque comme El Amparo(1930) et l’Enciclopedia Culinaria de laMarquise de Parabere (1940)mentionnent le poivron de Gernikaparmi les ingrédients typiques de larégion. Tous les grands chefs basquesactuels, de Martín Berasategui(restaurant Martin Berasategui,Guipuscoa) à Pedro Subijana(restaurant Akelarre, Saint-Sébastien),en passant par Karlos Arguiñano(célèbre pour ses émissions de cuisineà la télévision), sont desinconditionnels de cette variété. Demême, Juan Mari Arzak (restaurantArzak, Saint-Sébastien) admetvolontiers que son plat préféré est lafriture de poivrons de Gernikaaccompagnée d’œufs et de frites. Latendance est assurément à lasimplicité, rien de tel qu’un bain defriture rapide dans de l’huile d’olivefumante et quelques grains de sel demer pour obtenir un poivron doux etfondant. Cependant, la créativitéculinaire espagnole étant ce qu’elleest, des applications plus complexesdu poivron de Gernika voient le jour.Ainsi, lors du concours de pintxos(équivalents basque des tapas) deHondarribia l’année dernière, l’un desprix a été décerné à un txipiron (petitcalmar en basque) en tempura auxpoivrons de Gernika, accompagnéd’une soupe de tomate froide etaromatisé au citron vert, élaboré parRaúl Fernández et Antonio Cristóbal,du restaurant Chelsy, à Pampelune(Navarre). Les chefs les plus avant-gardistes utilisent même de façonastucieuse les graines de cette variété,qui possèdent un goût de fruit sec.

Les habitués du restaurant de JoseanMartínez, au musée Guggenheim deBilbao, se souviendront d’avoir vu surle menu un plat d’agneau en sauce àla cerise, avec une garniture decitrons et de graines de poivron deGernika grillées.

Un délicieuxpoivron rougede La RiojaComme d’autres fruits et légumes, lespoivrons sont souvent liés par desaspects culturels et historiques à leurrégion d’origine en Espagne. En 1896,l’éminent gastronome Angel Muro écritdans son chef-d’œuvre, El Practicón,que « La Rioja jouit d’une réputationbien méritée pour la productionde poivrons » ; de même,Post-Thebussem, pseudonyme deDionisio Pérez, auteur du classiqueGuía del Buen Comer Español (1929),cite le poivron de La Rioja parmi lesmets les plus remarquables d’Espagne.Le poivron typique de la région de LaRioja est souvent appelé pimientonajerano, d’après la commune deNájera, entre Logroño et SantoDomingo de la Calzada, où il a étécultivé pour la première fois. Cepoivron de forme conique et allongéese distingue par son extrémité pointue,le pico, sa robe écarlate intenselorsqu’il est mûr et sa surfaceirrégulière, avec deux ou trois facesdifférentes. Le Pimiento Riojanopossède sa propre IGP.D’une manière ou d’une autre, lepoivron est omniprésent dans la viequotidienne de La Rioja. On le voitsuspendu en guirlandes aux balconsdes maisons, avec sa robe d’un rouge

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Dans ce plat, le goût donné par lessarments de caíño rehausse les saveursdu poivron d’Herbón et des légumes.Légèrement piquants, d’où le proverbe« certains piquent, d’autres non » (unospican y otros no), les poivrons d’Herbónsont parmi les plus réputés.

POUR 4 PERSONNESPour les légumes grillés : 16 poivrons

d’Herbón ; 1 artichaut coupé en quarts ;

1 oignon ; 4 pousses d’ail tendre ; 1 tomate ;

4 blancs d’asperges sauvages ; 1 aubergine ;

1 poivron rouge ; sarments de caíño ; sel ;

huile d’olive vierge extra ; fleur de sel fumée.

Pour l’huile fumée : 250 ml d’huile de

tournesol ; 250 ml d’huile d’olive.

Pour les fromages : 20 g de fromage San

Simón da Costa ; 20 g de fromage

Gamonedo ; 20 g de fromage Tetilla ; 20 g de

fromage Manchego sec.

Légumes grillésPréparer le feu avec les sarments decaíño. Éplucher et détailler leslégumes, en tenant compte quel’artichaut devra être blanchi aupréalable, et les saisir au gril. Faireensuite griller les légumes sur le lit debraises après les avoir salés et arrosésd’huile d’olive.

Huile fuméMélanger l’huile d’olive avec l’huile detournesol dans une casserole.Introduire ensuite les légumes grillésen morceaux et laisser confire à 65 ºCenviron, pendant toute une journée.Égoutter et mettre de côté. L’huilefumée servira à faire briller les légumesavant de servir.

PrésentationDisposer les légumes grillés sur uneardoise chaude et les saupoudrer defleur de sel fumée. Placer ensuite lesfromages découpés en portions.

Temps de préparation1 heure 40 minutes (plus une journéepour le confit)

Temps de cuisson45 minutes

Vin recommandéGoliardo Caíño 06, des Bodegas Forjasdel Selnés (DO Rías Baixas). Plus quepersonne d’autre auparavant, ce sontl’iconoclaste Raúl Pérez et RodrigoMéndez qui ont donné ses lettres denoblesse au cépage galicien autochtonecaíño. La DO Rías Baixas se réinventedans des vins comme celui-ci. Uneforte dose d’originalité et de créativitédans un vin semblable à nul autre.Atlantique à l’état pur, il semble inviterle convive à un jeu parmi les cendreset la fraîcheur, les fumés et le fruité, lesbraises et l’acidité… En définitive, lepoivron est ici clairement influencé parl’éclat du cépage caíño.

Poivron d’Herbónet légumes grillés aux sarmentsde caíño(Pimiento de Herbón y verdurasasadas al sarmiento de caíño)

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profond ridée par le soleil automnal.On le trouve aussi grillé et conservé àl’huile d’olive en bocal ou en boîte— savoureux pendant les moisd’hiver. Le poivron Riojano estsurtout consommé lorsqu’il est bienmûr, mais une version intermédiaire,mi-verte mi-rouge, appeléeentreverado, est également appréciéedans la région pour sa saveur douce.Toutefois, le premier rôle dans lacuisine riojana est réservé au poivronrouge, frais et totalement mûr, au

goût légèrement relevé. Il constitue enoutre un élément irremplaçable de lagastronomie locale : l’expression a lariojana, à la mode de La Rioja,implique la présence de poivronsrouges pour agrémenter l’ingrédientprincipal. Comme son cousin deGuernica, le Pimiento Riojano estcher aux cœurs de ceux qui lecultivent et le consomment. Lepoivron farci est un pilier de laculture régionale des tapas. LesPatatas a la riojana, pommes de terre

aux poivrons rouges, au chorizo et aulaurier, sont un plat typique dumonde paysan, souvent préparé etdégusté dans le vignoble même, lorsde froides journées, tandis que lescaracoles a la riojana, l’une desmeilleures recettes d’escargotespagnoles, consistent à relever lasaveur de cet humble mollusque avecdu poivron rouge, de l’oignon, de l’ailet du jambon haché. À l’Echaurren, lerestaurant le plus réputé de la région,à Ezcaray, le chef Francis Paniego

(anguilles servies avec une émulsiond’huile d’olive et de bouillon depoisson). Au fil du temps, cettecoutume s’est perdue ; aujourd’huicette variété est essentiellementutilisée sous forme de poivron vertcueilli encore doux et tendre etdestiné aux fritures. Cultivéprincipalement dans les communesde Txoriherri, Murguía et Busturia, etrécolté d’avril à novembre, il estnormalement de forme conique etallongée, d’un vert profond et brillant,et mesure de six à neuf centimètres delong. L’une des ses caractéristiques lesplus marquantes est sa peau très fine,qui est si délicate qu’elle fondpratiquement dans le bouche après lacuisson.La variété en question tient son nomde Guernica, petite ville proche deBilbao, qui possède une énormeimportance symbolique dans lapolitique et la culture basques (letableau de Picasso intitulé Guernicaévoque le bombardement de la localitépar les Allemands en 1937). La régionde Guernica était non seulement sonberceau et sa zone de productioncentrale, mais aussi son principal pointde vente, sur le marché aux fruits etlégumes qui s’y tenait tous les lundis.Aujourd’hui, le Pimiento de Gernikaest un légume très populaire danstoute la province de Biscaye etreprésente la production agricole laplus importante de la région après lalaitue (40 % de la récolte totale de laprovince est vendue dans d’autresrégions d’Espagne). Depuis 1993, cettevariété est soumise au système decontrôle de qualité des produitsalimentaires basques, qui octroie lelabel « Kalitatea ». Par ailleurs, lepoivron de Gernika devrait obtenir sa

propre AOP dans le courant del’année.Certains livres historiques sur lacuisine basque comme El Amparo(1930) et l’Enciclopedia Culinaria de laMarquise de Parabere (1940)mentionnent le poivron de Gernikaparmi les ingrédients typiques de larégion. Tous les grands chefs basquesactuels, de Martín Berasategui(restaurant Martin Berasategui,Guipuscoa) à Pedro Subijana(restaurant Akelarre, Saint-Sébastien),en passant par Karlos Arguiñano(célèbre pour ses émissions de cuisineà la télévision), sont desinconditionnels de cette variété. Demême, Juan Mari Arzak (restaurantArzak, Saint-Sébastien) admetvolontiers que son plat préféré est lafriture de poivrons de Gernikaaccompagnée d’œufs et de frites. Latendance est assurément à lasimplicité, rien de tel qu’un bain defriture rapide dans de l’huile d’olivefumante et quelques grains de sel demer pour obtenir un poivron doux etfondant. Cependant, la créativitéculinaire espagnole étant ce qu’elleest, des applications plus complexesdu poivron de Gernika voient le jour.Ainsi, lors du concours de pintxos(équivalents basque des tapas) deHondarribia l’année dernière, l’un desprix a été décerné à un txipiron (petitcalmar en basque) en tempura auxpoivrons de Gernika, accompagnéd’une soupe de tomate froide etaromatisé au citron vert, élaboré parRaúl Fernández et Antonio Cristóbal,du restaurant Chelsy, à Pampelune(Navarre). Les chefs les plus avant-gardistes utilisent même de façonastucieuse les graines de cette variété,qui possèdent un goût de fruit sec.

Les habitués du restaurant de JoseanMartínez, au musée Guggenheim deBilbao, se souviendront d’avoir vu surle menu un plat d’agneau en sauce àla cerise, avec une garniture decitrons et de graines de poivron deGernika grillées.

Un délicieuxpoivron rougede La RiojaComme d’autres fruits et légumes, lespoivrons sont souvent liés par desaspects culturels et historiques à leurrégion d’origine en Espagne. En 1896,l’éminent gastronome Angel Muro écritdans son chef-d’œuvre, El Practicón,que « La Rioja jouit d’une réputationbien méritée pour la productionde poivrons » ; de même,Post-Thebussem, pseudonyme deDionisio Pérez, auteur du classiqueGuía del Buen Comer Español (1929),cite le poivron de La Rioja parmi lesmets les plus remarquables d’Espagne.Le poivron typique de la région de LaRioja est souvent appelé pimientonajerano, d’après la commune deNájera, entre Logroño et SantoDomingo de la Calzada, où il a étécultivé pour la première fois. Cepoivron de forme conique et allongéese distingue par son extrémité pointue,le pico, sa robe écarlate intenselorsqu’il est mûr et sa surfaceirrégulière, avec deux ou trois facesdifférentes. Le Pimiento Riojanopossède sa propre IGP.D’une manière ou d’une autre, lepoivron est omniprésent dans la viequotidienne de La Rioja. On le voitsuspendu en guirlandes aux balconsdes maisons, avec sa robe d’un rouge

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RECETTES

Le chapon est un produit consommésurtout à Noël en Galice. Les chaponsde Villalba sont particulièrementappréciés. De fait, certains documentsnous apprennent que le 21 décembrede chaque année, depuis 1838, lalocalité galicienne de Villalba organisela fête du Chapon, où les meilleursexemplaires peuvent atteindre des prixconsidérables.

POUR 4 PERSONNESPour le chapon de Villalba : 4 cuisses de

chapon ; 1 oignon ; 1 carotte ; 1 poireau ;

1/2 gousse d’ail ; 10 g de sauce tomate ;

1 dl de vin blanc ; 2 dl de bouillon de poulet.

Pour la crème de pois chiches : 100 g de

pois chiches ; 1 feuille de laurier ; 5 grains de

poivre noir ; curry ; sel.

Pour les poivrons de Gernika : 500 g de

poivrons de Gernika, 0,5 g d’agar-agar ;

1 l d’huile de tournesol ; sucre.

Autres : 2 asperges sauvages ; 1 abricot

séché.

Chapon de VillalbaHacher les légumes et les faire dorer.Ajouter ensuite la sauce tomate et levin blanc. Laisser réduire, puis ajouterfinalement le bouillon de poulet.Avant d’introduire les cuisses dans cefond de cuisson, couper la partiesupérieure de l’os afin de pouvoir biendétacher la viande par la suite. Placerensuite le sofrito dans des sachets sous

vide et faire cuire au Gastrovac environ12 heures à 85 ºC. Désosser, sansentailler la viande, et découper chaquecuisse en 4 portions.Par ailleurs, passer et faire réduire lejus de cuisson du chapon.

Crème de pois chichesFaire cuire les pois chiches avec lelaurier, le poivre noir et le sel, suivantcet ordre. Égoutter les pois chiches, lespeler et les mixer, en ajoutant un peude jus de cuisson et le curry.

Poivrons de GernikaFaire blanchir les poivrons deGernika et les passer au mixer. Ajouterle sucre — si nécessaire — et l’agar-agar puis laisser mijoter. Remplir uneseringue de ce liquide et verserquelques gouttes sur l’huile detournesol froide pour les figer.Égoutter et mettre de côté.

Asperges sauvageset abricots séchésCouper les blancs d’asperges en deuxet les saisir à la plancha. Couper lesabricots séchés en julienne et lesmettre de côté.

PrésentationVerser la crème de pois chiches aufond de l’assiette, puis, dans cet ordre,le chapon, les asperges sauvagessautées et les abricots séchés enjulienne. Couronner le tout dequelques pépites de poivron deGernika. Terminer en glaçant avec lejus de cuisson du chapon.

Temps de préparation12 heures et 15 minutes

Temps de cuisson12 heures

Vin recommandéGorvia 05 (DO Monterrei), desBodegas y Viñedos Quinta daMuradella. José Luis Mateo estl’inspirateur de ce petit chai de Quintada Muradella. Ce projet, lancé en1990, vise à élaborer des produits de laplus haute qualité en respectantl’environnement, la tradition, lescépages autochtones, l’identité et lescaractéristiques du terroir. Pour cefaire, il dispose de parcelles devignoble très âgées et d’autres plusjeunes. Un vin frais et vivace enbouche, léger et polyvalent, souple etagréable. Le bois est parfaitementintégré, imperceptible, sans la moindretanicité, tout en velouté et élégance !Une finale longue et plaisantecouronne ce vin de caractère, fortsingulier, qui se mariera à la perfectionavec la viande tendre du chapon et laconsistance sableuse des pois chiches.

Chapon de Villalba aux pépitesde poivrons de Gernika et crème de poischiches épicée(Capón de Villalba con pepitas de Pimientos de Gernikay crema especiada de garbanzos)

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(Spain Gourmetour, nº 44) sert uneformidable morue salée a la riojana,dans le plus pur style local. Il emploieégalement ce poivron local de façonplus originale, dans des créationssophistiquées comme une entrée defromage de chèvre et pousses deharicot sur un fond translucide (qu’ilappelle un « voile ») de jus depoivron rouge, ou encore un mariagesurprenant de poivron et d’ananas,dont la saveur à la fois sucrée etpiquante rehausse — sur le plangustatif comme visuel — la purée dechou-fleur accompagnant unecoquille Saint-Jacques charnue.

Les classiquescastillansPour le moment, outre le Pimiento deHerbón, aucun de ces poivrons ne

peut se targuer d’avoir une véritableprésence commerciale hors de sarégion d’origine. Il existe généralementune bonne raison à cela : les variétésspéciales de poivron en Espagne sontproduites en très faible quantité, etsont si appréciées chez elles qu’ellessortent rarement de leur zone deproduction. Dans le cas du Pimientode Fresno-Benavente, le produit nedépasse pas les limites des Asturies.Le poivron de Fresno-Benaventemontre comment des espèces delégume ramenées d’autres continentspeuvent finir par s’adapter à unensemble de conditions naturellesdéterminé, à condition d’y consacrerdu temps et de la patience. Dans lavallée de la rivière Tera (Nord-Ouestde l’Espagne), où la variété depoivron locale est cultivée dans lesvillages d’Aguilar, Micereces et San

Pedro de la Viña, l’humidité et leshautes températures estivales sontidéales pour sa maturation. Trenteagriculteurs à peine produisent àl’échelle commerciale ce poivron detype morrón, parfumé, charnu et d’unrouge brillant, qui est égalementcultivé par de nombreux horticulteursamateurs dans de petits potagersparticuliers pour leur consommationpersonnelle. Les exploitants de Fresnode la Vega, à quelque 40 km au nordde la province de Léon, affirment queleur variété de poivron locale estcultivée dans la région depuis 1700.Le Pimiento de Fresno-Benavente estcultivé dans une zone de démarcationqualitative unique de 300 hectares,aux frontières des provinces deLéon et de Zamora, qui regroupe90 villages. Ce poivron sera le seulCapsicum, cultivé pour être

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consommé frais et non pas séché ouen conserve, qui bénéficiera d’unlabel de qualité spécifique dans larégion de Castille-et-Léon.Le poivron de Fresno-Benaventereprésente un peu plus d’un quart detoutes les variétés castillanes, mais ilest pratiquement inconnu hors de cettecommunauté autonome. Quiconqueayant suivi l’évolution du secteuralimentaire espagnol lors des dernièresdécennies connaît le scénario : unproduit de haute qualité, spécifique àsa région d’origine, où il est consommédepuis des temps immémoriaux, etpourtant très peu connu dans lemonde extérieur. Viennent ensuite lareconnaissance officielle, la protectionet le contrôle, et enfin la promotion. Leproduit commence à pénétrer lesmarchés étrangers et l’on commencetrès vite à parler des poivronsd’Arnoia, d’Oimbra, d’Herbón,d’O Couto, de Gernika, de La Rioja, deFresno-Benavente à Londres et à Paris,de même que l’on parle des tomatesRaf et des pommes de terre Ratte. Cesexcellents légumes ne sont restés,durant trop longtemps, que des héroslocaux. Fort de ses AOP et de ses IGP,et avec un sentiment de confiancerenouvelé, cependant, le petitmonde du poivron espagnol estpeut-être en passe de réaliser de trèsgrandes choses.

Paul Richardson vit dans une ferme duNord de l’Estrémadure. Journalisteindépendant spécialisé dans les voyages etla gastronomie, il est l’auteur d’A LateDinner : discovering the food of Spain(Bloomsbury, Royaume-Uni, et Scribner,États-Unis).

Recettes page 102Exportateurs page 125

www.mediorural.xunta.es/es/areas/alimentacion/produtos_de_calidade/en_tramitacion/IGP Pimiento de Arnoia, AOP Pimiento de Herbón, IGP Pimiento de Oimbra et IGPPimiento de O Couto (espagnol, galicien).

www.mapa.es/es/alimentacion/pags/Denominacion/hortalizas/pimiento_fresno_benavente.htmIGP Pimiento de Fresno-Benavente (espagnol).

www.euskolabel.net/producto/producto.asp?producto=12AOP Pimiento de Gernika (anglais, espagnol, euskera, français).

www.lariojacalidad.org/igp/pimiento_riojano/informacion/index.htmlIGP Pimiento Riojano (espagnol).

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POIVRON POIVRON

100 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 101

(Spain Gourmetour, nº 44) sert uneformidable morue salée a la riojana,dans le plus pur style local. Il emploieégalement ce poivron local de façonplus originale, dans des créationssophistiquées comme une entrée defromage de chèvre et pousses deharicot sur un fond translucide (qu’ilappelle un « voile ») de jus depoivron rouge, ou encore un mariagesurprenant de poivron et d’ananas,dont la saveur à la fois sucrée etpiquante rehausse — sur le plangustatif comme visuel — la purée dechou-fleur accompagnant unecoquille Saint-Jacques charnue.

Les classiquescastillansPour le moment, outre le Pimiento deHerbón, aucun de ces poivrons ne

peut se targuer d’avoir une véritableprésence commerciale hors de sarégion d’origine. Il existe généralementune bonne raison à cela : les variétésspéciales de poivron en Espagne sontproduites en très faible quantité, etsont si appréciées chez elles qu’ellessortent rarement de leur zone deproduction. Dans le cas du Pimientode Fresno-Benavente, le produit nedépasse pas les limites des Asturies.Le poivron de Fresno-Benaventemontre comment des espèces delégume ramenées d’autres continentspeuvent finir par s’adapter à unensemble de conditions naturellesdéterminé, à condition d’y consacrerdu temps et de la patience. Dans lavallée de la rivière Tera (Nord-Ouestde l’Espagne), où la variété depoivron locale est cultivée dans lesvillages d’Aguilar, Micereces et San

Pedro de la Viña, l’humidité et leshautes températures estivales sontidéales pour sa maturation. Trenteagriculteurs à peine produisent àl’échelle commerciale ce poivron detype morrón, parfumé, charnu et d’unrouge brillant, qui est égalementcultivé par de nombreux horticulteursamateurs dans de petits potagersparticuliers pour leur consommationpersonnelle. Les exploitants de Fresnode la Vega, à quelque 40 km au nordde la province de Léon, affirment queleur variété de poivron locale estcultivée dans la région depuis 1700.Le Pimiento de Fresno-Benavente estcultivé dans une zone de démarcationqualitative unique de 300 hectares,aux frontières des provinces deLéon et de Zamora, qui regroupe90 villages. Ce poivron sera le seulCapsicum, cultivé pour être

ESSENTIELS

ESSENTIELS

consommé frais et non pas séché ouen conserve, qui bénéficiera d’unlabel de qualité spécifique dans larégion de Castille-et-Léon.Le poivron de Fresno-Benaventereprésente un peu plus d’un quart detoutes les variétés castillanes, mais ilest pratiquement inconnu hors de cettecommunauté autonome. Quiconqueayant suivi l’évolution du secteuralimentaire espagnol lors des dernièresdécennies connaît le scénario : unproduit de haute qualité, spécifique àsa région d’origine, où il est consommédepuis des temps immémoriaux, etpourtant très peu connu dans lemonde extérieur. Viennent ensuite lareconnaissance officielle, la protectionet le contrôle, et enfin la promotion. Leproduit commence à pénétrer lesmarchés étrangers et l’on commencetrès vite à parler des poivronsd’Arnoia, d’Oimbra, d’Herbón,d’O Couto, de Gernika, de La Rioja, deFresno-Benavente à Londres et à Paris,de même que l’on parle des tomatesRaf et des pommes de terre Ratte. Cesexcellents légumes ne sont restés,durant trop longtemps, que des héroslocaux. Fort de ses AOP et de ses IGP,et avec un sentiment de confiancerenouvelé, cependant, le petitmonde du poivron espagnol estpeut-être en passe de réaliser de trèsgrandes choses.

Paul Richardson vit dans une ferme duNord de l’Estrémadure. Journalisteindépendant spécialisé dans les voyages etla gastronomie, il est l’auteur d’A LateDinner : discovering the food of Spain(Bloomsbury, Royaume-Uni, et Scribner,États-Unis).

Recettes page 102Exportateurs page 125

www.mediorural.xunta.es/es/areas/alimentacion/produtos_de_calidade/en_tramitacion/IGP Pimiento de Arnoia, AOP Pimiento de Herbón, IGP Pimiento de Oimbra et IGPPimiento de O Couto (espagnol, galicien).

www.mapa.es/es/alimentacion/pags/Denominacion/hortalizas/pimiento_fresno_benavente.htmIGP Pimiento de Fresno-Benavente (espagnol).

www.euskolabel.net/producto/producto.asp?producto=12AOP Pimiento de Gernika (anglais, espagnol, euskera, français).

www.lariojacalidad.org/igp/pimiento_riojano/informacion/index.htmlIGP Pimiento Riojano (espagnol).

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RECETTESRestaurantPepe Vieira

Restaurante Pepe Vieira“Camiño da Serpe”Camiño da Serpe, s/n36992 [email protected]

Texte d’introductionAlmudena Muyo/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

Photos recettesToya Legido/©ICEX

Photos introductionToya Legido/©ICEXPatricia R. Soto/©ICEX

Évolutive, engagée et audacieuse. Tels sont les adjectifs qui définissent la cuisine de Xosé

T. Cannas, qui dirige le restaurant Pepe Vieira Camiño da Serpe, auquel le prestigieux

Guide Michelin vient d’octroyer sa première étoile. Avec son frère, le sommelier Xoan

Torres Cannas, lauréat du prix Nariz de Oro en 2004 — qui s’est chargé d’harmoniser

ces plats —, il a érigé dans un domaine familial de la localité de Raxó (Pontevedra) un

bâtiment avant-gardiste spectaculaire, où règne une grande effervescence culinaire.

Technicien et chercheur infatigable, Xosé T. Cannas, fondateur du Grupo Nove (chef de

file du renouveau de la cuisine galicienne), reste très attaché au produit et à la gastronomie

régionale, tout en fuyant les clichés. La tradition est ainsi un creuset permettant d’élaborer

une cuisine ouverte et mondaine, mais dotée d’une identité. Fort d’un solide bagage

acquis derrière les fourneaux, au Canada, en Ecosse et en France, Xosé est convaincu

que la magie de sa cuisine, dépourvue de tout artifice ou tour de passe-passe, réside dans

la maîtrise totale de la qualité du produit et le soin extrême qu’il y consacre.

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RECETTESRestaurantPepe Vieira

Restaurante Pepe Vieira“Camiño da Serpe”Camiño da Serpe, s/n36992 [email protected]

Texte d’introductionAlmudena Muyo/©ICEX

TraductionSynonyme.net/©ICEX

Photos recettesToya Legido/©ICEX

Photos introductionToya Legido/©ICEXPatricia R. Soto/©ICEX

Évolutive, engagée et audacieuse. Tels sont les adjectifs qui définissent la cuisine de Xosé

T. Cannas, qui dirige le restaurant Pepe Vieira Camiño da Serpe, auquel le prestigieux

Guide Michelin vient d’octroyer sa première étoile. Avec son frère, le sommelier Xoan

Torres Cannas, lauréat du prix Nariz de Oro en 2004 — qui s’est chargé d’harmoniser

ces plats —, il a érigé dans un domaine familial de la localité de Raxó (Pontevedra) un

bâtiment avant-gardiste spectaculaire, où règne une grande effervescence culinaire.

Technicien et chercheur infatigable, Xosé T. Cannas, fondateur du Grupo Nove (chef de

file du renouveau de la cuisine galicienne), reste très attaché au produit et à la gastronomie

régionale, tout en fuyant les clichés. La tradition est ainsi un creuset permettant d’élaborer

une cuisine ouverte et mondaine, mais dotée d’une identité. Fort d’un solide bagage

acquis derrière les fourneaux, au Canada, en Ecosse et en France, Xosé est convaincu

que la magie de sa cuisine, dépourvue de tout artifice ou tour de passe-passe, réside dans

la maîtrise totale de la qualité du produit et le soin extrême qu’il y consacre.

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POIVRON

RECETTES

Le nom de ce plat est inspiré ducélèbre coulant de Michel Bras. Mais lasurprise dans cette version : unemayonnaise au poivron Riojano, qui sedéverse lorsque l’on ouvre le calmar.

POUR 4 PERSONNESPour le calmar : 4 calmars ; 50 g de farine ;

2 œufs ; 50 g de chapelure maison ; sel ;

huile d’olive vierge extra.

Pour la mayonnaise au poivron Riojano :

1 jaune d’œuf ; 1 citron vert ; 2 poivrons

Riojanos ; sel.

Chapelure maisonPour confectionner la chapeluremaison, utiliser du pain de la veille,que l’on fera sécher au four. Aprèsl’avoir laissé refroidir, le mettre sur uneplaque Gastro Norm pourvue d’unegrille. Passer le rouleau autant de foisque nécessaire, jusqu’à ce que le painsoit passé sur la plaque. Le résultat nedoit pas être trop fin.

CalmarNettoyer, tailler en cubes et saler lescalmars. Paner le calmar en exerçantune certaine pression pour que lachapelure adhère bien, et le faire frire àl’huile d’olive vierge extra.

Mayonnaise au poivron RiojanoPour confectionner la rouille, ajouter lepoivron Riojano préalablement grillépuis mixer.

PrésentationPlacer le calmar au centre d’un plat àdécouper, rempli de mayonnaise aupoivron Riojano.

Temps de préparation40 minutes

Temps de cuisson30 minutes

Vin recommandéViña de Martín Escolma 04, desbodegas Luis Anxo Rodríguez Vázquez(DO Ribeiro). Luis Anxo Rodríguez estl’un des grands spécialistes des cépageset des sols de la DO Ribeiro. Aimableet sympathique, il est de ceux quipossèdent le don de surprendre leurentourage. Son discours, crédible etsérieux, s’écarte des modes éphémères,traduisant une parfaite connaissancede la terre qu’il foule. Ses vins reflètentpleinement sa personnalité, et lafraîcheur remarquable du Viña deMartín Escolma 04 permettra quel’acidité du poivron accompagne ettempère la friture, créant un contrasteéquilibré.

Calmar coulant(Calamar coulant)

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POIVRON

RECETTES

Le nom de ce plat est inspiré ducélèbre coulant de Michel Bras. Mais lasurprise dans cette version : unemayonnaise au poivron Riojano, qui sedéverse lorsque l’on ouvre le calmar.

POUR 4 PERSONNESPour le calmar : 4 calmars ; 50 g de farine ;

2 œufs ; 50 g de chapelure maison ; sel ;

huile d’olive vierge extra.

Pour la mayonnaise au poivron Riojano :

1 jaune d’œuf ; 1 citron vert ; 2 poivrons

Riojanos ; sel.

Chapelure maisonPour confectionner la chapeluremaison, utiliser du pain de la veille,que l’on fera sécher au four. Aprèsl’avoir laissé refroidir, le mettre sur uneplaque Gastro Norm pourvue d’unegrille. Passer le rouleau autant de foisque nécessaire, jusqu’à ce que le painsoit passé sur la plaque. Le résultat nedoit pas être trop fin.

CalmarNettoyer, tailler en cubes et saler lescalmars. Paner le calmar en exerçantune certaine pression pour que lachapelure adhère bien, et le faire frire àl’huile d’olive vierge extra.

Mayonnaise au poivron RiojanoPour confectionner la rouille, ajouter lepoivron Riojano préalablement grillépuis mixer.

PrésentationPlacer le calmar au centre d’un plat àdécouper, rempli de mayonnaise aupoivron Riojano.

Temps de préparation40 minutes

Temps de cuisson30 minutes

Vin recommandéViña de Martín Escolma 04, desbodegas Luis Anxo Rodríguez Vázquez(DO Ribeiro). Luis Anxo Rodríguez estl’un des grands spécialistes des cépageset des sols de la DO Ribeiro. Aimableet sympathique, il est de ceux quipossèdent le don de surprendre leurentourage. Son discours, crédible etsérieux, s’écarte des modes éphémères,traduisant une parfaite connaissancede la terre qu’il foule. Ses vins reflètentpleinement sa personnalité, et lafraîcheur remarquable du Viña deMartín Escolma 04 permettra quel’acidité du poivron accompagne ettempère la friture, créant un contrasteéquilibré.

Calmar coulant(Calamar coulant)

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POIVRON

RECETTES

Vin recommandéAs Sortes 06, des bodegas RafaelPalacios (DO Valdeorras). Ce vin deRafael Palacios témoigne de la politiquede qualité menée par certaines zoneshistoriques telles que la DO Valdeorras(Orense), sous l’impulsion de soncépage vedette, le godello. Cette variétéproduit des vins charpentés, trèsonctueux et dotés d’une profondeurminérale, convenant parfaitement à despoissons comme le mérou, savoureux,élégant et moelleux grâce à la gélatineabondante qu’il renferme sous la peau.

Nous avons choisi le poivrond’O Couto, l’un de nos favoris, pour sapointe sucrée qui rehausse le bouillon.

POUR 4 PERSONNES4 mérous de 100 g chacun ; 2 oignons ;

2 carottes ; 2 poireaux ; 1/2 gousse d’ail ;

6 poivrons d’O Couto ; 5 grains de poivre noir ;

1 l de bouillon de volaille ; huile d’olive vierge

extra ; sel ; pétales de fleurs de saison.

Faire cuire les mérous au four à vapeurà 65 ºC, le temps nécessaire pour quel’intérieur des mérous atteigne unetempérature de 45 ºC. Passer ensuite àla plancha, du côté de la peau pourqu’elle soit croustillante.Faire revenir l’oignon, la carotte, lepoireau et l’ail avec les grains depoivre. Une fois rissolés, ajouter lespoivrons d’O Couto, grilléspréalablement sur le gril avec du sel etde l’huile d’olive vierge extra.Ajouter ensuite le bouillon de volailleet laisser cuire le tout de 15 à20 minutes à feu doux. Mixer,passer et saler.

PrésentationVerser le bouillon au fond de l’assietteet disposer le mérou par-dessus.Décorer l’ensemble avec des pétales defleurs de saison.

Temps de préparation30 minutes

Temps de cuisson20 minutes

Mérou au bouillon de poivrond’O Couto grillé(Mero con caldo de Pimiento de O Couto asado)

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POIVRON

RECETTES

Vin recommandéAs Sortes 06, des bodegas RafaelPalacios (DO Valdeorras). Ce vin deRafael Palacios témoigne de la politiquede qualité menée par certaines zoneshistoriques telles que la DO Valdeorras(Orense), sous l’impulsion de soncépage vedette, le godello. Cette variétéproduit des vins charpentés, trèsonctueux et dotés d’une profondeurminérale, convenant parfaitement à despoissons comme le mérou, savoureux,élégant et moelleux grâce à la gélatineabondante qu’il renferme sous la peau.

Nous avons choisi le poivrond’O Couto, l’un de nos favoris, pour sapointe sucrée qui rehausse le bouillon.

POUR 4 PERSONNES4 mérous de 100 g chacun ; 2 oignons ;

2 carottes ; 2 poireaux ; 1/2 gousse d’ail ;

6 poivrons d’O Couto ; 5 grains de poivre noir ;

1 l de bouillon de volaille ; huile d’olive vierge

extra ; sel ; pétales de fleurs de saison.

Faire cuire les mérous au four à vapeurà 65 ºC, le temps nécessaire pour quel’intérieur des mérous atteigne unetempérature de 45 ºC. Passer ensuite àla plancha, du côté de la peau pourqu’elle soit croustillante.Faire revenir l’oignon, la carotte, lepoireau et l’ail avec les grains depoivre. Une fois rissolés, ajouter lespoivrons d’O Couto, grilléspréalablement sur le gril avec du sel etde l’huile d’olive vierge extra.Ajouter ensuite le bouillon de volailleet laisser cuire le tout de 15 à20 minutes à feu doux. Mixer,passer et saler.

PrésentationVerser le bouillon au fond de l’assietteet disposer le mérou par-dessus.Décorer l’ensemble avec des pétales defleurs de saison.

Temps de préparation30 minutes

Temps de cuisson20 minutes

Mérou au bouillon de poivrond’O Couto grillé(Mero con caldo de Pimiento de O Couto asado)

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108 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR

POIVRON

RECETTES

Le chapon est un produit consommésurtout à Noël en Galice. Les chaponsde Villalba sont particulièrementappréciés. De fait, certains documentsnous apprennent que le 21 décembrede chaque année, depuis 1838, lalocalité galicienne de Villalba organisela fête du Chapon, où les meilleursexemplaires peuvent atteindre des prixconsidérables.

POUR 4 PERSONNESPour le chapon de Villalba : 4 cuisses de

chapon ; 1 oignon ; 1 carotte ; 1 poireau ;

1/2 gousse d’ail ; 10 g de sauce tomate ;

1 dl de vin blanc ; 2 dl de bouillon de poulet.

Pour la crème de pois chiches : 100 g de

pois chiches ; 1 feuille de laurier ; 5 grains de

poivre noir ; curry ; sel.

Pour les poivrons de Gernika : 500 g de

poivrons de Gernika, 0,5 g d’agar-agar ;

1 l d’huile de tournesol ; sucre.

Autres : 2 asperges sauvages ; 1 abricot

séché.

Chapon de VillalbaHacher les légumes et les faire dorer.Ajouter ensuite la sauce tomate et levin blanc. Laisser réduire, puis ajouterfinalement le bouillon de poulet.Avant d’introduire les cuisses dans cefond de cuisson, couper la partiesupérieure de l’os afin de pouvoir biendétacher la viande par la suite. Placerensuite le sofrito dans des sachets sous

vide et faire cuire au Gastrovac environ12 heures à 85 ºC. Désosser, sansentailler la viande, et découper chaquecuisse en 4 portions.Par ailleurs, passer et faire réduire lejus de cuisson du chapon.

Crème de pois chichesFaire cuire les pois chiches avec lelaurier, le poivre noir et le sel, suivantcet ordre. Égoutter les pois chiches, lespeler et les mixer, en ajoutant un peude jus de cuisson et le curry.

Poivrons de GernikaFaire blanchir les poivrons deGernika et les passer au mixer. Ajouterle sucre — si nécessaire — et l’agar-agar puis laisser mijoter. Remplir uneseringue de ce liquide et verserquelques gouttes sur l’huile detournesol froide pour les figer.Égoutter et mettre de côté.

Asperges sauvageset abricots séchésCouper les blancs d’asperges en deuxet les saisir à la plancha. Couper lesabricots séchés en julienne et lesmettre de côté.

PrésentationVerser la crème de pois chiches aufond de l’assiette, puis, dans cet ordre,le chapon, les asperges sauvagessautées et les abricots séchés enjulienne. Couronner le tout dequelques pépites de poivron deGernika. Terminer en glaçant avec lejus de cuisson du chapon.

Temps de préparation12 heures et 15 minutes

Temps de cuisson12 heures

Vin recommandéGorvia 05 (DO Monterrei), desBodegas y Viñedos Quinta daMuradella. José Luis Mateo estl’inspirateur de ce petit chai de Quintada Muradella. Ce projet, lancé en1990, vise à élaborer des produits de laplus haute qualité en respectantl’environnement, la tradition, lescépages autochtones, l’identité et lescaractéristiques du terroir. Pour cefaire, il dispose de parcelles devignoble très âgées et d’autres plusjeunes. Un vin frais et vivace enbouche, léger et polyvalent, souple etagréable. Le bois est parfaitementintégré, imperceptible, sans la moindretanicité, tout en velouté et élégance !Une finale longue et plaisantecouronne ce vin de caractère, fortsingulier, qui se mariera à la perfectionavec la viande tendre du chapon et laconsistance sableuse des pois chiches.

Chapon de Villalba aux pépitesde poivrons de Gernika et crème de poischiches épicée(Capón de Villalba con pepitas de Pimientos de Gernikay crema especiada de garbanzos)

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RECETTES

Le chapon est un produit consommésurtout à Noël en Galice. Les chaponsde Villalba sont particulièrementappréciés. De fait, certains documentsnous apprennent que le 21 décembrede chaque année, depuis 1838, lalocalité galicienne de Villalba organisela fête du Chapon, où les meilleursexemplaires peuvent atteindre des prixconsidérables.

POUR 4 PERSONNESPour le chapon de Villalba : 4 cuisses de

chapon ; 1 oignon ; 1 carotte ; 1 poireau ;

1/2 gousse d’ail ; 10 g de sauce tomate ;

1 dl de vin blanc ; 2 dl de bouillon de poulet.

Pour la crème de pois chiches : 100 g de

pois chiches ; 1 feuille de laurier ; 5 grains de

poivre noir ; curry ; sel.

Pour les poivrons de Gernika : 500 g de

poivrons de Gernika, 0,5 g d’agar-agar ;

1 l d’huile de tournesol ; sucre.

Autres : 2 asperges sauvages ; 1 abricot

séché.

Chapon de VillalbaHacher les légumes et les faire dorer.Ajouter ensuite la sauce tomate et levin blanc. Laisser réduire, puis ajouterfinalement le bouillon de poulet.Avant d’introduire les cuisses dans cefond de cuisson, couper la partiesupérieure de l’os afin de pouvoir biendétacher la viande par la suite. Placerensuite le sofrito dans des sachets sous

vide et faire cuire au Gastrovac environ12 heures à 85 ºC. Désosser, sansentailler la viande, et découper chaquecuisse en 4 portions.Par ailleurs, passer et faire réduire lejus de cuisson du chapon.

Crème de pois chichesFaire cuire les pois chiches avec lelaurier, le poivre noir et le sel, suivantcet ordre. Égoutter les pois chiches, lespeler et les mixer, en ajoutant un peude jus de cuisson et le curry.

Poivrons de GernikaFaire blanchir les poivrons deGernika et les passer au mixer. Ajouterle sucre — si nécessaire — et l’agar-agar puis laisser mijoter. Remplir uneseringue de ce liquide et verserquelques gouttes sur l’huile detournesol froide pour les figer.Égoutter et mettre de côté.

Asperges sauvageset abricots séchésCouper les blancs d’asperges en deuxet les saisir à la plancha. Couper lesabricots séchés en julienne et lesmettre de côté.

PrésentationVerser la crème de pois chiches aufond de l’assiette, puis, dans cet ordre,le chapon, les asperges sauvagessautées et les abricots séchés enjulienne. Couronner le tout dequelques pépites de poivron deGernika. Terminer en glaçant avec lejus de cuisson du chapon.

Temps de préparation12 heures et 15 minutes

Temps de cuisson12 heures

Vin recommandéGorvia 05 (DO Monterrei), desBodegas y Viñedos Quinta daMuradella. José Luis Mateo estl’inspirateur de ce petit chai de Quintada Muradella. Ce projet, lancé en1990, vise à élaborer des produits de laplus haute qualité en respectantl’environnement, la tradition, lescépages autochtones, l’identité et lescaractéristiques du terroir. Pour cefaire, il dispose de parcelles devignoble très âgées et d’autres plusjeunes. Un vin frais et vivace enbouche, léger et polyvalent, souple etagréable. Le bois est parfaitementintégré, imperceptible, sans la moindretanicité, tout en velouté et élégance !Une finale longue et plaisantecouronne ce vin de caractère, fortsingulier, qui se mariera à la perfectionavec la viande tendre du chapon et laconsistance sableuse des pois chiches.

Chapon de Villalba aux pépitesde poivrons de Gernika et crème de poischiches épicée(Capón de Villalba con pepitas de Pimientos de Gernikay crema especiada de garbanzos)

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Dans ce plat, le goût donné par lessarments de caíño rehausse les saveursdu poivron d’Herbón et des légumes.Légèrement piquants, d’où le proverbe« certains piquent, d’autres non » (unospican y otros no), les poivrons d’Herbónsont parmi les plus réputés.

POUR 4 PERSONNESPour les légumes grillés : 16 poivrons

d’Herbón ; 1 artichaut coupé en quarts ;

1 oignon ; 4 pousses d’ail tendre ; 1 tomate ;

4 blancs d’asperges sauvages ; 1 aubergine ;

1 poivron rouge ; sarments de caíño ; sel ;

huile d’olive vierge extra ; fleur de sel fumée.

Pour l’huile fumée : 250 ml d’huile de

tournesol ; 250 ml d’huile d’olive.

Pour les fromages : 20 g de fromage San

Simón da Costa ; 20 g de fromage

Gamonedo ; 20 g de fromage Tetilla ; 20 g de

fromage Manchego sec.

Légumes grillésPréparer le feu avec les sarments decaíño. Éplucher et détailler leslégumes, en tenant compte quel’artichaut devra être blanchi aupréalable, et les saisir au gril. Faireensuite griller les légumes sur le lit debraises après les avoir salés et arrosésd’huile d’olive.

Huile fuméMélanger l’huile d’olive avec l’huile detournesol dans une casserole.Introduire ensuite les légumes grillésen morceaux et laisser confire à 65 ºCenviron, pendant toute une journée.Égoutter et mettre de côté. L’huilefumée servira à faire briller les légumesavant de servir.

PrésentationDisposer les légumes grillés sur uneardoise chaude et les saupoudrer defleur de sel fumée. Placer ensuite lesfromages découpés en portions.

Temps de préparation1 heure 40 minutes (plus une journéepour le confit)

Temps de cuisson45 minutes

Vin recommandéGoliardo Caíño 06, des Bodegas Forjasdel Selnés (DO Rías Baixas). Plus quepersonne d’autre auparavant, ce sontl’iconoclaste Raúl Pérez et RodrigoMéndez qui ont donné ses lettres denoblesse au cépage galicien autochtonecaíño. La DO Rías Baixas se réinventedans des vins comme celui-ci. Uneforte dose d’originalité et de créativitédans un vin semblable à nul autre.Atlantique à l’état pur, il semble inviterle convive à un jeu parmi les cendreset la fraîcheur, les fumés et le fruité, lesbraises et l’acidité… En définitive, lepoivron est ici clairement influencé parl’éclat du cépage caíño.

Poivron d’Herbónet légumes grillés aux sarmentsde caíño(Pimiento de Herbón y verdurasasadas al sarmiento de caíño)

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Dans ce plat, le goût donné par lessarments de caíño rehausse les saveursdu poivron d’Herbón et des légumes.Légèrement piquants, d’où le proverbe« certains piquent, d’autres non » (unospican y otros no), les poivrons d’Herbónsont parmi les plus réputés.

POUR 4 PERSONNESPour les légumes grillés : 16 poivrons

d’Herbón ; 1 artichaut coupé en quarts ;

1 oignon ; 4 pousses d’ail tendre ; 1 tomate ;

4 blancs d’asperges sauvages ; 1 aubergine ;

1 poivron rouge ; sarments de caíño ; sel ;

huile d’olive vierge extra ; fleur de sel fumée.

Pour l’huile fumée : 250 ml d’huile de

tournesol ; 250 ml d’huile d’olive.

Pour les fromages : 20 g de fromage San

Simón da Costa ; 20 g de fromage

Gamonedo ; 20 g de fromage Tetilla ; 20 g de

fromage Manchego sec.

Légumes grillésPréparer le feu avec les sarments decaíño. Éplucher et détailler leslégumes, en tenant compte quel’artichaut devra être blanchi aupréalable, et les saisir au gril. Faireensuite griller les légumes sur le lit debraises après les avoir salés et arrosésd’huile d’olive.

Huile fuméMélanger l’huile d’olive avec l’huile detournesol dans une casserole.Introduire ensuite les légumes grillésen morceaux et laisser confire à 65 ºCenviron, pendant toute une journée.Égoutter et mettre de côté. L’huilefumée servira à faire briller les légumesavant de servir.

PrésentationDisposer les légumes grillés sur uneardoise chaude et les saupoudrer defleur de sel fumée. Placer ensuite lesfromages découpés en portions.

Temps de préparation1 heure 40 minutes (plus une journéepour le confit)

Temps de cuisson45 minutes

Vin recommandéGoliardo Caíño 06, des Bodegas Forjasdel Selnés (DO Rías Baixas). Plus quepersonne d’autre auparavant, ce sontl’iconoclaste Raúl Pérez et RodrigoMéndez qui ont donné ses lettres denoblesse au cépage galicien autochtonecaíño. La DO Rías Baixas se réinventedans des vins comme celui-ci. Uneforte dose d’originalité et de créativitédans un vin semblable à nul autre.Atlantique à l’état pur, il semble inviterle convive à un jeu parmi les cendreset la fraîcheur, les fumés et le fruité, lesbraises et l’acidité… En définitive, lepoivron est ici clairement influencé parl’éclat du cépage caíño.

Poivron d’Herbónet légumes grillés aux sarmentsde caíño(Pimiento de Herbón y verdurasasadas al sarmiento de caíño)

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SEL

RECETTES

Temps de préparation30 minutes

Temps de cuisson20 minutes

Vin recommandéContraaparede 04 (DO Rías Baixas),d’Adega dos Eidos, chai situé sur lescoteaux de Padrinán, à une centainede mètres de la mer, considéré commele porte-drapeau d’une nouvelleapproche de vinification ducépage albariño.Un nez très sérieux, qui exprime lescaractéristiques du terrain, avec desnotes de granit, d’aromates sauvages etun certain caractère salin. Les touchesiodées dues à la proximité de la merenrichissent une séquence d’arômescitriques qui, ajoutés aux notes depomme propres à ce cépage, confèrentà ce vin une fraîcheur et une harmoniequi contribuent à rehausser la saveurde la coquille Saint-Jacques marinée.

Marinade de coquillesSaint-JacquesRetirer soigneusement les barbes,nettoyer la noix et le corail descoquilles Saint-Jacques. Préparer unemarinade avec la fleur de sel, le sucre,le jus et les écorces des citrons verts etdes pamplemousses, le genévrier et lepoivre de la Jamaïque. Y plonger lescoquilles Saint-Jacques pendant 20minutes, les sortir et ôter tout reste demarinade.

Gel de pommePasser toutes les pommes au mixer,sauf un quartier, et ajouterimmédiatement l’acide ascorbique et lexanthane. Couper le quartier restanten brunoise et le conserver dans del’huile d’olive vierge extra d’Arbéquine.

PrésentationCouper chaque coquille Saint-Jacquesen quatre et les disposer au fond d’uneassiette creuse. Arroser de quelquesgouttes d’huile d’olive vierge extrad’Arbéquine et ajouter la brunoise depomme Granny-Smith, le poivrenoir, les pétales de chardon et le gelde pomme.

Après d’innombrables recettes à basede coquille Saint-Jacques, nous avonstrouvé une formule qui m’a beaucoupplu. La fleur de sel y joue un rôleimportant et le produit est respecté aumaximum. De plus, l’ensemble meparaît harmonieux, dans la mesure oùla coquille Saint-Jacques se marie à laperfection avec l’acidité des petits désde pomme Granny-Smith.

POUR 4 PERSONNESPour la marinade de coquilles

Saint-Jacques : 4 coquilles Saint-Jacques ;

250 g de sucre ; 1 kg de fleur de sel ;

4 citrons verts ; 2 pamplemousses ; 15 à 20

grains de poivre de la Jamaïque ; 12 baies de

genévrier ; huile d’olive vierge extra

d’Arbéquine ; poivre noir ; pétales de chardon.

Pour le gel de pomme : 2 pommes Granny-

Smith ; acide ascorbique ; xanthane.

Coquille Saint-Jacquesmarinée à la fleur de selcitron vert, pomme et arbéquine(Vieira lañada con flor de sal,lima, manzana y arbequina)

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SEL

RECETTES

Temps de préparation30 minutes

Temps de cuisson20 minutes

Vin recommandéContraaparede 04 (DO Rías Baixas),d’Adega dos Eidos, chai situé sur lescoteaux de Padrinán, à une centainede mètres de la mer, considéré commele porte-drapeau d’une nouvelleapproche de vinification ducépage albariño.Un nez très sérieux, qui exprime lescaractéristiques du terrain, avec desnotes de granit, d’aromates sauvages etun certain caractère salin. Les touchesiodées dues à la proximité de la merenrichissent une séquence d’arômescitriques qui, ajoutés aux notes depomme propres à ce cépage, confèrentà ce vin une fraîcheur et une harmoniequi contribuent à rehausser la saveurde la coquille Saint-Jacques marinée.

Marinade de coquillesSaint-JacquesRetirer soigneusement les barbes,nettoyer la noix et le corail descoquilles Saint-Jacques. Préparer unemarinade avec la fleur de sel, le sucre,le jus et les écorces des citrons verts etdes pamplemousses, le genévrier et lepoivre de la Jamaïque. Y plonger lescoquilles Saint-Jacques pendant 20minutes, les sortir et ôter tout reste demarinade.

Gel de pommePasser toutes les pommes au mixer,sauf un quartier, et ajouterimmédiatement l’acide ascorbique et lexanthane. Couper le quartier restanten brunoise et le conserver dans del’huile d’olive vierge extra d’Arbéquine.

PrésentationCouper chaque coquille Saint-Jacquesen quatre et les disposer au fond d’uneassiette creuse. Arroser de quelquesgouttes d’huile d’olive vierge extrad’Arbéquine et ajouter la brunoise depomme Granny-Smith, le poivrenoir, les pétales de chardon et le gelde pomme.

Après d’innombrables recettes à basede coquille Saint-Jacques, nous avonstrouvé une formule qui m’a beaucoupplu. La fleur de sel y joue un rôleimportant et le produit est respecté aumaximum. De plus, l’ensemble meparaît harmonieux, dans la mesure oùla coquille Saint-Jacques se marie à laperfection avec l’acidité des petits désde pomme Granny-Smith.

POUR 4 PERSONNESPour la marinade de coquilles

Saint-Jacques : 4 coquilles Saint-Jacques ;

250 g de sucre ; 1 kg de fleur de sel ;

4 citrons verts ; 2 pamplemousses ; 15 à 20

grains de poivre de la Jamaïque ; 12 baies de

genévrier ; huile d’olive vierge extra

d’Arbéquine ; poivre noir ; pétales de chardon.

Pour le gel de pomme : 2 pommes Granny-

Smith ; acide ascorbique ; xanthane.

Coquille Saint-Jacquesmarinée à la fleur de selcitron vert, pomme et arbéquine(Vieira lañada con flor de sal,lima, manzana y arbequina)

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EN MARCHE

Palacios Alimentaciónouvre une usineaux États-Unis« L’implantation de ces nouvellesinstallations industrielles à Miami nouspermet de produire plus près d’unmarché croissant comme le marchéétasunien, d’être présents dansdifférents pays du continent, duCanada au Chili, et de nous adaptermieux et plus rapidement à leursbesoins. » C’est ainsi que FlorencioLázaro, directeur financier de PalaciosAlimentación, résume les raisons del’ouverture de sa nouvelle installationdans l’État de Floride, qui a représentéun investissement de 5 257 000 euros.Celle-ci remplace l’ancienne fabriquede Palacios qui a fermé ses portes le31 octobre dernier et qui appartenait àl’entreprise espagnole depuis 2005après l’achat de la firme étasunienneElore Enterprises.Sur les 2 500 mètres carrés desnouvelles installations seront produitsdes chorizos, des boudins, de lacharcuterie et d’autres produits carnéstrès traditionnels en Espagne auxquelss’ajouteront des produits plus récentscomme la ligne des couronnes (pain enforme de couronne fourré comme unsandwich), commercialisées aux

États-Unis sous le nom de Spanwich.En outre, aux produits offerts par legroupe dans le pays s’ajoutent leschorizos et les filets de porc Palacios,importés directement d’Espagne.Fondation : 1983Activités : production etcommercialisation de produitsagroalimentaires réfrigérésEffectifs : 600 salariésChiffre d’affaires 2008 : 130 millionsd’eurosPart des exportations : 8 %www.palacios.es

Ossiano : Santi Santamariaarrive à DubaïPensé comme un pont entre lescultures d’Orient et d’Occident, lerestaurant Ossiano est la premièreexpérience internationale deSanti Santamaría, le cuisinier le pluscouronné de la scène gastronomiqueespagnole sur laquelle ses quatrerestaurants comptent sept étoilesMichelin. Sous la direction deSantamaria, l’offre du restaurant deDubaï combine des ingrédients locauxcomme dattes, agrumes, menthe,couscous ou sumac et les produitsméditerranéens qui arrivent chaquesemaine d’Espagne. La carte des vinsfait une place spéciale à ceux de laCuvée Santamaria, la collection conçuepar Santamaria lui-même encollaboration avec Joan Carles Ibáñez,sommelier à Can Fabes, le premier deses restaurants.L’image de marque de la cuisine dumaître catalan sera pleinementprésente à Ossiano où, selon sespropres paroles, il sera possible de

déguster la même gastronomie « pureet dure » que celle qu’il offre dans sesrestaurants espagnols. Toute l’équipede la cuisine a été formée à Can Fabes,et Santamaria se rendra dans lesÉmirats arabes unis au moins quatrefois par an pour effectuer un rigoureuxcontrôle de qualité.Pour Santamaria, ce projet est « undéfi très important car nous noustrouvons dans un complexe de grandesdimensions ». Des mots qui se réfèrentà Atlantis the Palm, un luxueux resortoù il fait sont entrée à Dubaï. Le cadredu restaurant lui-même est déjà uneexpérience en soi, une recréation dumonde mythologique sous-marind’Atlantis où les convives sontentourés de baies vitrées donnant surl’Ambassador Lagoon, un gigantesqueaquarium avec 250 espèces marinestelles que requins, raies, anguilles,piranhas et une multitude d’autrespoissons exotiques.Fondation : 2008Effectifs : 48 salariésRestaurants de Santi Santamaria :4 en Espagne (Can Fabes, Santceloni,

En marcheEvo et Tierra) et un à Dubaï (Ossiano)Chiffre d’affaires : 35 millions d’eurosMarques : Cuvée Santamaria (vins etcava) et Gourmand Santamaria(alimentation gourmet)www.atlantisthepalm.com/diningentertainment.aspxwww.canfabes.com/santisantamaria

Casa Riera Ordeix entreà KaDeWeDepuis le début de cette année, ledistributeur Antonio Viani Importecommercialise en Allemagne lesproduits de la firme catalane CasaRiera Ordeix. Grâce à l’accord signépar les deux compagnies, Viani ajouteà sa gamme de produits l’excellence duLegítimo Salchichón de Vic RieraOrdeix tandis que cette dernière voitainsi réalisé son désir de trouver unopérateur local en conformité avec saphilosophie entrepreneuriale.Grâce au distributeur allemand, lessaucissons et les fuets de Riera Ordeixinaugurent leur présence dans descommerces aussi luxueux que lesmagasins berlinois KaDeWe, véritableréférence du secteur gourmet dans le

pays. KaDeWe vient ainsi grossir laliste des établissements européens deprestige où sont vendus les produitsdes maîtres charcutiers catalans, uneliste qui incluait depuis déjà un certaintemps des magasins comme Harrods(Londres), Galeries Lafayette (Paris) ouEl Club del Gourmet (Espagne etPortugal).Cet accord représente également un pasen avant dans l’objectif de la compagniede conquérir le marché de l’Europecentrale, un territoire où a prédominétraditionnellement la consommation decharcuterie fumée au goût fort mais quioffre actuellement de grandespossibilités pour les charcuteriesséchées de haute qualité. Casa RieraOrdeix pense à l’avenir et prépare sonentrée sur d’autres marchés prioritairespour ses intérêts comme les États-Unis,la Russie et le Japon. Tout se fonde surl’une des prémisses fondamentales de lamaison : vendre les meilleurs produitsdans les meilleurs établissements dumonde.Fondation : 1852Activités : élaboration etcommercialisation de charcuterieEffectifs : 20 salariésChiffre d’affaires 2007 : 1,8 milliond’eurosPart des exportations : 20 %www.cro.es

Le jambon 5J,star chez HarrodsThe Iberico Ham House est le nomchoisi par le Groupe Osborne pourbaptiser son premier restaurant horsd’Espagne. La ville de Londres accueillece nouveau lieu gastronomique, à

TexteSantiago Sánchez Segura/©ICEX

TraductionFrançoise Chuffart/©ICEX

IllustrationsAVI

ENTREPRISES

l’ambiance typiquement espagnole, dansl’un des magasins emblématiques de lacapitale britannique : Harrods.Tout comme dans les quinze restaurantsque possède le groupe en Espagne, lejambon 5J, considéré par beaucoupd’experts comme l’un des meilleurs dumonde, est la grande vedette de la carte.Cette carte a été conçue par l’un des plusgrands restaurateurs espagnols, PepeRodríguez Rey (restaurant El Bohío, uneétoile Michelin, à Illescas, Centre del’Espagne). Il s’agit d’un jambon Ibéricode gland, fruit de la pureté de la race desporcs élevés en liberté, de leuralimentation composée exclusivementde glands et d’herbes des pâturages,d’une élaboration soignée et d’unesélection faite par les maîtres experts enjambon de Sánchez Romero Carvajal,compagnie appartenant auGroupe Osborne.Les offres de la carte de The Iberico HamHouse vont des plats traditionnelscomme les croquettes de jambon ou lesalmorejo andalou aux combinaisons lesplus sophistiquées comme la julienne delégumes 5J, la côte de porc ibérique ouune délicieuse tarte de légumes frais.Fondation : 1772Activités : Sélection, élaboration etcommercialisation d’aliments et deboissons.Effectifs : 1 000 salariésChiffre d’affaires 2007 : 280 millionsd’euroswww.osborne.es

09-EN MARCHA FR-66.qxd 22/4/09 05:36 Página 114 (FRANCES plancha)

BELGIQUERue Montoyer, 10-1ºB-1000 BruxellesTél. : (2) 551 10 40Fax : (2) 551 10 [email protected]

CANADA2 Bloor St. East, Suite 1506Toronto-Ontario, M4W 1A8Tél. : (416) 967 04 88Fax : (416) 968 95 [email protected]

FRANCE11, Av. d’léna75016 ParisTél. : (1) 53 57 95 50Fax : (1) 47 20 97 [email protected]

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Pour de plus amplesinformations concernant lessujets abordés dans cette revue,à l’exception des thèmestouristiques, veuillez vousadresser aux BureauxÉconomiques et Commerciauxdes Ambassades d'Espagnecorrespondants, enmentionnant sur l’enveloppeRéf. : Spain Gourmetour.

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Pour les demandesd'information concernantles sujets touristiques,adressez-vous à I'Officeespagnol du tourisme leplus proche.

BELGIQUERue Royale, 97 5º1000 BruxellesTéls. : (2) 280 19 26/29Fax : (2) 230 21 [email protected]

CANADA2, Bloor Street West,Suite 3402Toronto, Ontario M4W 3E2Téls. : (416) 961 31 31/40 79Fax : (416) 961 19 [email protected]

FRANCE43, rue Decamps75784 Paris Cedex-16Tél. : (1) 45 03 82 50Fax : (1) 40 72 52 04 ou(1) 45 03 82 [email protected]

SUISSE15, rue Ami-LévrierCH-1211 Genève 1Téls. : (22) 731 11 33/32Fax : (22) 731 13 [email protected]

Seefeldstrasse, 19CH 8008 ZurichTél. : (44) 253 60 51Fax : (44) 252 62 [email protected]

Centrale de Réservationsdes ParadoresRequena, 3 - 28013 MadridTél. : (+34) 915 166 700Fax : (+34) 915 166 663/4/[email protected]

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EN MARCHE

Palacios Alimentaciónouvre une usineaux États-Unis« L’implantation de ces nouvellesinstallations industrielles à Miami nouspermet de produire plus près d’unmarché croissant comme le marchéétasunien, d’être présents dansdifférents pays du continent, duCanada au Chili, et de nous adaptermieux et plus rapidement à leursbesoins. » C’est ainsi que FlorencioLázaro, directeur financier de PalaciosAlimentación, résume les raisons del’ouverture de sa nouvelle installationdans l’État de Floride, qui a représentéun investissement de 5 257 000 euros.Celle-ci remplace l’ancienne fabriquede Palacios qui a fermé ses portes le31 octobre dernier et qui appartenait àl’entreprise espagnole depuis 2005après l’achat de la firme étasunienneElore Enterprises.Sur les 2 500 mètres carrés desnouvelles installations seront produitsdes chorizos, des boudins, de lacharcuterie et d’autres produits carnéstrès traditionnels en Espagne auxquelss’ajouteront des produits plus récentscomme la ligne des couronnes (pain enforme de couronne fourré comme unsandwich), commercialisées aux

États-Unis sous le nom de Spanwich.En outre, aux produits offerts par legroupe dans le pays s’ajoutent leschorizos et les filets de porc Palacios,importés directement d’Espagne.Fondation : 1983Activités : production etcommercialisation de produitsagroalimentaires réfrigérésEffectifs : 600 salariésChiffre d’affaires 2008 : 130 millionsd’eurosPart des exportations : 8 %www.palacios.es

Ossiano : Santi Santamariaarrive à DubaïPensé comme un pont entre lescultures d’Orient et d’Occident, lerestaurant Ossiano est la premièreexpérience internationale deSanti Santamaría, le cuisinier le pluscouronné de la scène gastronomiqueespagnole sur laquelle ses quatrerestaurants comptent sept étoilesMichelin. Sous la direction deSantamaria, l’offre du restaurant deDubaï combine des ingrédients locauxcomme dattes, agrumes, menthe,couscous ou sumac et les produitsméditerranéens qui arrivent chaquesemaine d’Espagne. La carte des vinsfait une place spéciale à ceux de laCuvée Santamaria, la collection conçuepar Santamaria lui-même encollaboration avec Joan Carles Ibáñez,sommelier à Can Fabes, le premier deses restaurants.L’image de marque de la cuisine dumaître catalan sera pleinementprésente à Ossiano où, selon sespropres paroles, il sera possible de

déguster la même gastronomie « pureet dure » que celle qu’il offre dans sesrestaurants espagnols. Toute l’équipede la cuisine a été formée à Can Fabes,et Santamaria se rendra dans lesÉmirats arabes unis au moins quatrefois par an pour effectuer un rigoureuxcontrôle de qualité.Pour Santamaria, ce projet est « undéfi très important car nous noustrouvons dans un complexe de grandesdimensions ». Des mots qui se réfèrentà Atlantis the Palm, un luxueux resortoù il fait sont entrée à Dubaï. Le cadredu restaurant lui-même est déjà uneexpérience en soi, une recréation dumonde mythologique sous-marind’Atlantis où les convives sontentourés de baies vitrées donnant surl’Ambassador Lagoon, un gigantesqueaquarium avec 250 espèces marinestelles que requins, raies, anguilles,piranhas et une multitude d’autrespoissons exotiques.Fondation : 2008Effectifs : 48 salariésRestaurants de Santi Santamaria :4 en Espagne (Can Fabes, Santceloni,

En marcheEvo et Tierra) et un à Dubaï (Ossiano)Chiffre d’affaires : 35 millions d’eurosMarques : Cuvée Santamaria (vins etcava) et Gourmand Santamaria(alimentation gourmet)www.atlantisthepalm.com/diningentertainment.aspxwww.canfabes.com/santisantamaria

Casa Riera Ordeix entreà KaDeWeDepuis le début de cette année, ledistributeur Antonio Viani Importecommercialise en Allemagne lesproduits de la firme catalane CasaRiera Ordeix. Grâce à l’accord signépar les deux compagnies, Viani ajouteà sa gamme de produits l’excellence duLegítimo Salchichón de Vic RieraOrdeix tandis que cette dernière voitainsi réalisé son désir de trouver unopérateur local en conformité avec saphilosophie entrepreneuriale.Grâce au distributeur allemand, lessaucissons et les fuets de Riera Ordeixinaugurent leur présence dans descommerces aussi luxueux que lesmagasins berlinois KaDeWe, véritableréférence du secteur gourmet dans le

pays. KaDeWe vient ainsi grossir laliste des établissements européens deprestige où sont vendus les produitsdes maîtres charcutiers catalans, uneliste qui incluait depuis déjà un certaintemps des magasins comme Harrods(Londres), Galeries Lafayette (Paris) ouEl Club del Gourmet (Espagne etPortugal).Cet accord représente également un pasen avant dans l’objectif de la compagniede conquérir le marché de l’Europecentrale, un territoire où a prédominétraditionnellement la consommation decharcuterie fumée au goût fort mais quioffre actuellement de grandespossibilités pour les charcuteriesséchées de haute qualité. Casa RieraOrdeix pense à l’avenir et prépare sonentrée sur d’autres marchés prioritairespour ses intérêts comme les États-Unis,la Russie et le Japon. Tout se fonde surl’une des prémisses fondamentales de lamaison : vendre les meilleurs produitsdans les meilleurs établissements dumonde.Fondation : 1852Activités : élaboration etcommercialisation de charcuterieEffectifs : 20 salariésChiffre d’affaires 2007 : 1,8 milliond’eurosPart des exportations : 20 %www.cro.es

Le jambon 5J,star chez HarrodsThe Iberico Ham House est le nomchoisi par le Groupe Osborne pourbaptiser son premier restaurant horsd’Espagne. La ville de Londres accueillece nouveau lieu gastronomique, à

TexteSantiago Sánchez Segura/©ICEX

TraductionFrançoise Chuffart/©ICEX

IllustrationsAVI

ENTREPRISES

l’ambiance typiquement espagnole, dansl’un des magasins emblématiques de lacapitale britannique : Harrods.Tout comme dans les quinze restaurantsque possède le groupe en Espagne, lejambon 5J, considéré par beaucoupd’experts comme l’un des meilleurs dumonde, est la grande vedette de la carte.Cette carte a été conçue par l’un des plusgrands restaurateurs espagnols, PepeRodríguez Rey (restaurant El Bohío, uneétoile Michelin, à Illescas, Centre del’Espagne). Il s’agit d’un jambon Ibéricode gland, fruit de la pureté de la race desporcs élevés en liberté, de leuralimentation composée exclusivementde glands et d’herbes des pâturages,d’une élaboration soignée et d’unesélection faite par les maîtres experts enjambon de Sánchez Romero Carvajal,compagnie appartenant auGroupe Osborne.Les offres de la carte de The Iberico HamHouse vont des plats traditionnelscomme les croquettes de jambon ou lesalmorejo andalou aux combinaisons lesplus sophistiquées comme la julienne delégumes 5J, la côte de porc ibérique ouune délicieuse tarte de légumes frais.Fondation : 1772Activités : Sélection, élaboration etcommercialisation d’aliments et deboissons.Effectifs : 1 000 salariésChiffre d’affaires 2007 : 280 millionsd’euroswww.osborne.es

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À titre indicatif et d’après lesinformations fournies par lessources citées, voici une listed’exportateurs. Par manqued’espace, nous avons fait unesélection des principalesentreprises.

EXPORTATEURS

Produitsalimentaires

PoivronsAsociación Profesionalde Productores dePimiento Najerano y deSanto Domingo(IGP Pimiento Riojano)Tél. : (+34) 941 512 571Fax : (+34) 941 512 [email protected]

Consejo Regulador IGPPimiento de Fresno-BenaventeTél./Fax : (+34) 987 770 [email protected]

Fundación Kalitatea(AOP Pimiento de Gernika)Tél. : (+34) 946 030 [email protected]

Instituto Galego daCalidade Alimentaria(IGP Pimiento de Arnoia, IGPPimiento de Oimbra, IGPPimiento de O Couto y AOPPimiento de Herbón)Tél. : (+34) 881 997 276Fax : (+34) 981 546 [email protected]

SelCarolingiaDistribuciones, S.L.Tél. : (+34) 916 335 043Fax : (+34) 916 028 [email protected]

Casanovas CateringTraiteur, S.L.Tél. : (+34) 934 236 508Fax : (+34) 934 233 [email protected]

Especias del SolTél. : (+34) 927 413 868Fax : (+34) 927 484 [email protected]

Gusto MundialBaleárides, S.L.(Flor de Sal d’Es Trenc)Tél. : (+34) 971 649 797Fax : (+34) 971 649 [email protected]

Hijos de Juan BeviáGuijarro, S.L.(Sal La Cococha)Tél. : (+34) 607 214 627Tél./Fax : (+34) 965 665 [email protected]

Infosa(Flor del Delta)Tél. : (+34) 935 884 404Fax : (+34) 935 886 [email protected]

Sal Costa, S.A.Tél. : (+34) 932 237 890Fax : (+34) 932 235 [email protected]

Salinas Marinasde Fuencaliente, S.L.Tél./Fax : (+34) 922 411 523salteneguia@salinasdefuencaliente.comwww.salinasdefuencaliente.com

Salinas y CelebracionesSan Vicente, S.L.Tél. : (+34) 956 881 [email protected]

Salinera Española, S.A.Tél. : (+34) 971 432 255Fax : (+34) 971 432 [email protected]

Source : ICEX

13-EXPORTADORES FR-66.qxd 18/4/09 02:53 Página 125 (FRANCES plancha)

MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 117

CASTILLO DE CANENA

ENTREPRISES

Plein hiver à Madrid. Un grand salonoù flambe une cheminée m’accueille.L’agréable chaleur de cet intérieurcontraste avec le froid de la rue. Je suischez Rosa Vañó, où se trouve le siègemadrilène de Castillo de Canena, carc’est ici qu’elle coordonne les activitéscommerciales, nationales etinternationales, ainsi que les différentslancements et présentations de l’huiled’olive vierge extra produite à Canena,une petite ville de la province de Jaén(Sud de l’Espagne). Le petit déjeunerest dressé sur la table où trônent lesbouteilles emblématiques couleurcerise créées par Sara Navarro (stylistequi a imprimé sa griffe dans lesprincipaux défilés de John Galiano etde Martine Sitbon) pour les huiles dePrimer Día de Cosecha, dont latroisième édition vient de sortir sur lemarché. Des tartines de pain decampagne, grillées ou non, et destomates occupent le second plan. Et aubout de la table, un gâteau maisonparachève le tableau. Je me laisseguider et, négligeant la tomate, nouscommençons à déguster du pain avecde l’huile d’olive vierge extra produiteavec des olives de la variété arbequina,« remarquez les notes de pomme verteet d’artichaut. Leur entrée en boucheest élégante et douce au palais, maisvous allez noter progressivement destouches légèrement piquantes etamères à peine perceptibles », expliqueRosa Vaño.Parallèlement, elle me racontecomment son expérience de près dedix ans comme directrice du marketingà The Coca-Cola Company lui a appris

à transmettre des valeurs, à gérer lesrelations avec les consommateurs,professionnels ou non, à contrôler lesqualités et, surtout, lui a montrél’importance des implicationsémotionnelles. Et ce sont précisémentcelles-ci qui, provoquées par uneremise en question existentielle propreà la quarantaine, l’ont amenée à créeravec son frère, Francisco Vañó, Castillode Canena Olive Juice. « C’est un âgeoù l’on ressent les choses avec unecertaine maturité et beaucoup de force,c’est le moment de faire une pause etde réfléchir à ce que l’on attend de savie et de son avenir. Or, l’idée demonter quelque chose ensemble nouspermettant de raviver nos souvenirsd’enfance liés au monde de l’oliviernous séduisait. Et nous avons décidéque lui s’occuperait des oliveraies etdu moulin, et moi du marketing etde la commercialisation », évoqueRosa Vañó.L’idée n’est pas tombée du ciel et rendjustice à la tradition familiale del’oléiculture qui remonte à 1780.« Mon père, économiste et avocat, estun grand connaisseur du monde de

l’olivier et des huiles mais, jusqu’à il ya cinq ans, il ne produisait que deshuiles en vrac. Mon frère et moi avonsquitté nos emplois dans desmultinationales dans le but de créerune marque de référence mondiale deshuiles d’olive vierges extra haut degamme. Mission compliquée mais nonimpossible si l’on contrôle toute lachaîne du produit : culture, broyage,stockage, mise en bouteille etcommercialisation. »

Produit, innovationet imageLaissons de côté l’histoire del’entreprise pour nous intéresser à latartine qui m’est offerte, arrosée d’huiled’olive vierge extra de la variété picual.C’est un moment où mes sens doiventêtre en alerte pour capter « les arômesbalsamiques avec des touches dementhe, de menthe poivrée et un peud’agrumes, avec une appréciation enbouche d’amer et de piquant trèséquilibré ». Tandis que j’essaie encorede capter toutes les nuances, RosaVañó me parle de l’excellence duproduit, qui commence par le travaildans les oliveraies : « Notre propriété,située en pleine vallée du Guadalquivir(qui traverse l’Andalousie, dans Sud del’Espagne, d’est en ouest), est arroséepar les eaux du fleuve GuadianaMenor. Au moyen d’un système deferti-irrigation par goutteurs, nousadoucissons et équilibrons nos récoltestout en garantissant la consistance desproductions ainsi que des arômes et

TEXTEALMUDENA MUYO/©ICEX

TRADUCTIONFRANÇOISE CHUFFART/©ICEX

PHOTOSCASTILLO DE CANENA

Cette entreprise, portant le nom du

château familial qui se dresse sur la

commune de Canena, dans la région

de Jaén (Sud de l’Espagne), et dont

les liens avec l’oléiculture remontent

à 1780, peut se targuer de contrô-

ler tout le processus d’élaboration

de ses huiles d’olive vierges extra.

Sa qualité, récompensée par le prix

Coq d’Or — remis par le Guide des

Gourmands —, est reconnue dans

plus de 35 pays. De plus, sa poli-

tique de respect de l’environnement

et de développement durable a

conduit cette entreprise à devenir

autosuffisante en énergie électrique,

grâce à l’installation de trois usines

d’énergie photovoltaïque, et à

prendre les rênes d’un projet de

création d’une usine de torréfaction

de déchets végétaux.

CASTILLO DE CANENA

Les perlesde Canena

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Plein hiver à Madrid. Un grand salonoù flambe une cheminée m’accueille.L’agréable chaleur de cet intérieurcontraste avec le froid de la rue. Je suischez Rosa Vañó, où se trouve le siègemadrilène de Castillo de Canena, carc’est ici qu’elle coordonne les activitéscommerciales, nationales etinternationales, ainsi que les différentslancements et présentations de l’huiled’olive vierge extra produite à Canena,une petite ville de la province de Jaén(Sud de l’Espagne). Le petit déjeunerest dressé sur la table où trônent lesbouteilles emblématiques couleurcerise créées par Sara Navarro (stylistequi a imprimé sa griffe dans lesprincipaux défilés de John Galiano etde Martine Sitbon) pour les huiles dePrimer Día de Cosecha, dont latroisième édition vient de sortir sur lemarché. Des tartines de pain decampagne, grillées ou non, et destomates occupent le second plan. Et aubout de la table, un gâteau maisonparachève le tableau. Je me laisseguider et, négligeant la tomate, nouscommençons à déguster du pain avecde l’huile d’olive vierge extra produiteavec des olives de la variété arbequina,« remarquez les notes de pomme verteet d’artichaut. Leur entrée en boucheest élégante et douce au palais, maisvous allez noter progressivement destouches légèrement piquantes etamères à peine perceptibles », expliqueRosa Vaño.Parallèlement, elle me racontecomment son expérience de près dedix ans comme directrice du marketingà The Coca-Cola Company lui a appris

à transmettre des valeurs, à gérer lesrelations avec les consommateurs,professionnels ou non, à contrôler lesqualités et, surtout, lui a montrél’importance des implicationsémotionnelles. Et ce sont précisémentcelles-ci qui, provoquées par uneremise en question existentielle propreà la quarantaine, l’ont amenée à créeravec son frère, Francisco Vañó, Castillode Canena Olive Juice. « C’est un âgeoù l’on ressent les choses avec unecertaine maturité et beaucoup de force,c’est le moment de faire une pause etde réfléchir à ce que l’on attend de savie et de son avenir. Or, l’idée demonter quelque chose ensemble nouspermettant de raviver nos souvenirsd’enfance liés au monde de l’oliviernous séduisait. Et nous avons décidéque lui s’occuperait des oliveraies etdu moulin, et moi du marketing etde la commercialisation », évoqueRosa Vañó.L’idée n’est pas tombée du ciel et rendjustice à la tradition familiale del’oléiculture qui remonte à 1780.« Mon père, économiste et avocat, estun grand connaisseur du monde de

l’olivier et des huiles mais, jusqu’à il ya cinq ans, il ne produisait que deshuiles en vrac. Mon frère et moi avonsquitté nos emplois dans desmultinationales dans le but de créerune marque de référence mondiale deshuiles d’olive vierges extra haut degamme. Mission compliquée mais nonimpossible si l’on contrôle toute lachaîne du produit : culture, broyage,stockage, mise en bouteille etcommercialisation. »

Produit, innovationet imageLaissons de côté l’histoire del’entreprise pour nous intéresser à latartine qui m’est offerte, arrosée d’huiled’olive vierge extra de la variété picual.C’est un moment où mes sens doiventêtre en alerte pour capter « les arômesbalsamiques avec des touches dementhe, de menthe poivrée et un peud’agrumes, avec une appréciation enbouche d’amer et de piquant trèséquilibré ». Tandis que j’essaie encorede capter toutes les nuances, RosaVañó me parle de l’excellence duproduit, qui commence par le travaildans les oliveraies : « Notre propriété,située en pleine vallée du Guadalquivir(qui traverse l’Andalousie, dans Sud del’Espagne, d’est en ouest), est arroséepar les eaux du fleuve GuadianaMenor. Au moyen d’un système deferti-irrigation par goutteurs, nousadoucissons et équilibrons nos récoltestout en garantissant la consistance desproductions ainsi que des arômes et

TEXTEALMUDENA MUYO/©ICEX

TRADUCTIONFRANÇOISE CHUFFART/©ICEX

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Cette entreprise, portant le nom du

château familial qui se dresse sur la

commune de Canena, dans la région

de Jaén (Sud de l’Espagne), et dont

les liens avec l’oléiculture remontent

à 1780, peut se targuer de contrô-

ler tout le processus d’élaboration

de ses huiles d’olive vierges extra.

Sa qualité, récompensée par le prix

Coq d’Or — remis par le Guide des

Gourmands —, est reconnue dans

plus de 35 pays. De plus, sa poli-

tique de respect de l’environnement

et de développement durable a

conduit cette entreprise à devenir

autosuffisante en énergie électrique,

grâce à l’installation de trois usines

d’énergie photovoltaïque, et à

prendre les rênes d’un projet de

création d’une usine de torréfaction

de déchets végétaux.

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118 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR

des saveurs constants à chaque récolte.Sur la base d’un système de productionintégrée, nous planifions à l’avance leprotocole de la récolte et nousréalisons un suivi permanent etexhaustif des oliviers pour déterminerle degré optimal de maturation et dedéveloppement du fruit. Nousramassons les olives à la main ou àl’aide de vibreurs et de parapluies etnous les transportons au moulin enmoins de trois heures où elles sontimmédiatement pressées à froid,garantissant ainsi la fraîcheur, lasalubrité et la faible acidité de noshuiles d’olive vierges extra. » Le travailcontinue dans la cave climatisée où lesréservoirs en acier inoxydable, missous atmosphère totalement inerte,évitent la perte de toute caractéristiqueorganoleptique au moment duconditionnement. Ensuite, la mise enbouteille est finalisée en ajoutant danschaque bouteille une petite dose

d’azote, substance totalementinoffensive qui a la propriétéd’empêcher l’oxydation de l’huile.« Nous étudions actuellement denouveaux gaz moins volatils quel’azote et qui supportent mieux levieillissement », indique Rosa Vañó.Et de fil en aiguille, nous passons duproduit à l’innovation, un sujet qui luitient particulièrement à cœur. « Nousexportons par mer vers des payscomme le Japon, le Brésil ou le Canadaet nous avons commencé une ligne derecherche sur de nouvellesprésentations fabriquées avec desmatériaux peu habituels dans lesecteur de l’huile mais qui supportentmieux les assauts de la mer. » Enoutre, nous travaillons avec deslaboratoires sur un projet de produitscosmétiques ainsi que sur lesplantations avec des traitementsdifférenciés selon les olives.Pour Rosa Vañó, dont les analyses ont

presque toujours le marketing commepoint de référence, l’innovation et leproduit doivent se baser sur une imagepropre et transmettre des valeurs. Etses huiles d’olive vierges extra sont lefidèle reflet de sa maxime : leconditionnement de l’huile Castillo deCanena Reserva Familiar, qu’elle soitde la variété arbequina ou picual, estsobre. L’étiquette arbore l’emblème dela famille, le château, un édifice duXVe siècle qui trouve ses racines dansune vieille construction arabe érigéesur les ruines d’un castrum romain.Classé monument national en 1931, ilest considéré comme l’une des plusbelles constructions de la Renaissanceandalouse. La présentation de PrimerDía de Cosecha (arbequina ou picual)est plus frappante : la bouteille couleurcerise, conçue par Sara Navarro lors desa première édition, a marqué un style.Quant à Aceites del Siglo XXI, quivient de sortir sur le marché avec la

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S E S A R G U M E N T S

CASTILLO DE CANENARESERVA FAMILIARPremière huile d’olive vierge extraà avoir obtenu le prix Coq d’Oraccordé par le Guide desGourmands, édité par PaulBocuse.

• Variété picual.Description : Son olive est grandeet de forme allongée, terminée enpointe. Les arbres sont ouverts etstructurés et d’une intensecouleur argentée.Dégustation : Offre à la vue unebelle couleur jaune doré intenseaux chauds reflets verdâtres,pure. En nez, son arôme estcomplexe et particulier, riche enélégantes notes d’artichaut,eucalyptus, laitue etréminiscences de menthe, basilicet romarin. Harmonieuse et fineen bouche, dotée de tons richesde banane mûre, herbefraîchement coupée et avec unfinal de touches d’amandedouce.

• Variété arbequinaDescription : Une petite oliveronde, un arbre de taillemoyenne, touffu et de couleurvert foncé.Dégustation : Elle se distinguepar son extraordinairedélicatesse, sa rondeur et sagrande complexité, le tout avecune bonne intensité et du corpset, surtout, un fruité exceptionnel,aromatique et goûteux.D’exubérantes fragrancesvégétales : zeste de citron,pissenlit, feuilles de tomate etolives. Et elle possède en boucheun palais croissant, très évolutif,où l’entrée veloutée acquiertprogressivement une explosionde sensations vertes imprégnéesd’une fine amertume et d’un légerpiquant final.

PRIMER DÍA DE COSECHAPour la troisième année consécutive etavec une production de 20 000 bouteilles,Castillo de Canena réunit à nouveau l’huiled’olive et le monde de l’art. À cetteoccasion, le dessin de l’étiquette a étéconfié au créateur de bijoux JoaquínBerao. Le torero Enrique Ponce et lastyliste Sara Navarro, qui a donné à labouteille sa caractéristique couleur cerise,ont été ses prédécesseurs.

• Variété picualRécolte : début novembreDégustation : De couleur vert intense, elle aun fruité moyen d’olive verte ; parfumée etassez complexe, balsamique avec desnotes de menthe, de menthe poivrée et unpeu d’agrumes. En bouche, un corps bienstructuré et persistant avec une amertumeet un piquant très équilibrés.

• Variété arbequinaRécolte : fin octobreDégustation : Fruité doux d’olive fraîche

avec de légères touchesde pomme verte etd’artichaut et la petitenote typique des olivesde la variété arbequinade Jaén, au très fortpourcentage d’aciditéoléique et depolyphénols qui luidonne une stabilitéextraordinaire. En

bouche, elle aune entréeélégante, elle estfluide et douce aupalais, bienqu’apparaissentprogressivementun léger piquant etun goût amer àpeine perceptible.

ACEITES DEL SIGLO XXIL’objectif consiste à créer une collectiond’huiles répondant à différents concepts— chacun ayant sa valeur ajoutéeindépendante — et à de nouvellesmanières d’interpréter et d’apprécier l’huiled’olive vierge extra.

• Royal tempranoÉlaborée avec des olives précoces deroyal, variété autochtone de la province deJaén. Leur culture a connu une récessionimportante depuis la fin du XIXe siècle et ledébut du XXe jusqu’à sa presque totaledisparition ; il ne reste actuellement que1 200 hectares témoins de cette variété.La difficulté de la cueillette des fruits et leurfaible rendement en huile par rapport àd’autres variétés, comme la picual, sont lescauses de ce déclin.Description : Ovale et de grande taille,l’olive royal a une forme pointue et peutpasser durant sa maturation du violet aunoir. L’olivier est d’une vigueur moyenne,d’un port ouvert, avec des branchespendantes et une cime touffue. C’est unolivier aux racines très développées, auxfeuilles plus fortes et plus épaisses quecelles de la variété picual et avec unecapacité supérieure pour supporter unelongue sécheresse.Dégustation : À la vue, elle présente unecouleur verte avec des touches dorées. Enbouche, son élégance surprend avec unelégère présence d’amer et une doucesensation de piquant. Dans son parfumpuissant, on peut distinguer trois arômescomplexes : l’artichaut, la banane verte etl’herbe fraîche. L’union de ces trois arômesdes huiles vierges confère à cette huile uneénorme personnalité qui persistelonguement en bouche.

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des saveurs constants à chaque récolte.Sur la base d’un système de productionintégrée, nous planifions à l’avance leprotocole de la récolte et nousréalisons un suivi permanent etexhaustif des oliviers pour déterminerle degré optimal de maturation et dedéveloppement du fruit. Nousramassons les olives à la main ou àl’aide de vibreurs et de parapluies etnous les transportons au moulin enmoins de trois heures où elles sontimmédiatement pressées à froid,garantissant ainsi la fraîcheur, lasalubrité et la faible acidité de noshuiles d’olive vierges extra. » Le travailcontinue dans la cave climatisée où lesréservoirs en acier inoxydable, missous atmosphère totalement inerte,évitent la perte de toute caractéristiqueorganoleptique au moment duconditionnement. Ensuite, la mise enbouteille est finalisée en ajoutant danschaque bouteille une petite dose

d’azote, substance totalementinoffensive qui a la propriétéd’empêcher l’oxydation de l’huile.« Nous étudions actuellement denouveaux gaz moins volatils quel’azote et qui supportent mieux levieillissement », indique Rosa Vañó.Et de fil en aiguille, nous passons duproduit à l’innovation, un sujet qui luitient particulièrement à cœur. « Nousexportons par mer vers des payscomme le Japon, le Brésil ou le Canadaet nous avons commencé une ligne derecherche sur de nouvellesprésentations fabriquées avec desmatériaux peu habituels dans lesecteur de l’huile mais qui supportentmieux les assauts de la mer. » Enoutre, nous travaillons avec deslaboratoires sur un projet de produitscosmétiques ainsi que sur lesplantations avec des traitementsdifférenciés selon les olives.Pour Rosa Vañó, dont les analyses ont

presque toujours le marketing commepoint de référence, l’innovation et leproduit doivent se baser sur une imagepropre et transmettre des valeurs. Etses huiles d’olive vierges extra sont lefidèle reflet de sa maxime : leconditionnement de l’huile Castillo deCanena Reserva Familiar, qu’elle soitde la variété arbequina ou picual, estsobre. L’étiquette arbore l’emblème dela famille, le château, un édifice duXVe siècle qui trouve ses racines dansune vieille construction arabe érigéesur les ruines d’un castrum romain.Classé monument national en 1931, ilest considéré comme l’une des plusbelles constructions de la Renaissanceandalouse. La présentation de PrimerDía de Cosecha (arbequina ou picual)est plus frappante : la bouteille couleurcerise, conçue par Sara Navarro lors desa première édition, a marqué un style.Quant à Aceites del Siglo XXI, quivient de sortir sur le marché avec la

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S E S A R G U M E N T S

CASTILLO DE CANENARESERVA FAMILIARPremière huile d’olive vierge extraà avoir obtenu le prix Coq d’Oraccordé par le Guide desGourmands, édité par PaulBocuse.

• Variété picual.Description : Son olive est grandeet de forme allongée, terminée enpointe. Les arbres sont ouverts etstructurés et d’une intensecouleur argentée.Dégustation : Offre à la vue unebelle couleur jaune doré intenseaux chauds reflets verdâtres,pure. En nez, son arôme estcomplexe et particulier, riche enélégantes notes d’artichaut,eucalyptus, laitue etréminiscences de menthe, basilicet romarin. Harmonieuse et fineen bouche, dotée de tons richesde banane mûre, herbefraîchement coupée et avec unfinal de touches d’amandedouce.

• Variété arbequinaDescription : Une petite oliveronde, un arbre de taillemoyenne, touffu et de couleurvert foncé.Dégustation : Elle se distinguepar son extraordinairedélicatesse, sa rondeur et sagrande complexité, le tout avecune bonne intensité et du corpset, surtout, un fruité exceptionnel,aromatique et goûteux.D’exubérantes fragrancesvégétales : zeste de citron,pissenlit, feuilles de tomate etolives. Et elle possède en boucheun palais croissant, très évolutif,où l’entrée veloutée acquiertprogressivement une explosionde sensations vertes imprégnéesd’une fine amertume et d’un légerpiquant final.

PRIMER DÍA DE COSECHAPour la troisième année consécutive etavec une production de 20 000 bouteilles,Castillo de Canena réunit à nouveau l’huiled’olive et le monde de l’art. À cetteoccasion, le dessin de l’étiquette a étéconfié au créateur de bijoux JoaquínBerao. Le torero Enrique Ponce et lastyliste Sara Navarro, qui a donné à labouteille sa caractéristique couleur cerise,ont été ses prédécesseurs.

• Variété picualRécolte : début novembreDégustation : De couleur vert intense, elle aun fruité moyen d’olive verte ; parfumée etassez complexe, balsamique avec desnotes de menthe, de menthe poivrée et unpeu d’agrumes. En bouche, un corps bienstructuré et persistant avec une amertumeet un piquant très équilibrés.

• Variété arbequinaRécolte : fin octobreDégustation : Fruité doux d’olive fraîche

avec de légères touchesde pomme verte etd’artichaut et la petitenote typique des olivesde la variété arbequinade Jaén, au très fortpourcentage d’aciditéoléique et depolyphénols qui luidonne une stabilitéextraordinaire. En

bouche, elle aune entréeélégante, elle estfluide et douce aupalais, bienqu’apparaissentprogressivementun léger piquant etun goût amer àpeine perceptible.

ACEITES DEL SIGLO XXIL’objectif consiste à créer une collectiond’huiles répondant à différents concepts— chacun ayant sa valeur ajoutéeindépendante — et à de nouvellesmanières d’interpréter et d’apprécier l’huiled’olive vierge extra.

• Royal tempranoÉlaborée avec des olives précoces deroyal, variété autochtone de la province deJaén. Leur culture a connu une récessionimportante depuis la fin du XIXe siècle et ledébut du XXe jusqu’à sa presque totaledisparition ; il ne reste actuellement que1 200 hectares témoins de cette variété.La difficulté de la cueillette des fruits et leurfaible rendement en huile par rapport àd’autres variétés, comme la picual, sont lescauses de ce déclin.Description : Ovale et de grande taille,l’olive royal a une forme pointue et peutpasser durant sa maturation du violet aunoir. L’olivier est d’une vigueur moyenne,d’un port ouvert, avec des branchespendantes et une cime touffue. C’est unolivier aux racines très développées, auxfeuilles plus fortes et plus épaisses quecelles de la variété picual et avec unecapacité supérieure pour supporter unelongue sécheresse.Dégustation : À la vue, elle présente unecouleur verte avec des touches dorées. Enbouche, son élégance surprend avec unelégère présence d’amer et une doucesensation de piquant. Dans son parfumpuissant, on peut distinguer trois arômescomplexes : l’artichaut, la banane verte etl’herbe fraîche. L’union de ces trois arômesdes huiles vierges confère à cette huile uneénorme personnalité qui persistelonguement en bouche.

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des ailes de poulet sautées avec lavariété picual ou des soufflés élaborésavec la variété arbequina. Cesévénements ont eu lieu dans desendroits aussi différents que HongKong, Dubaï, le Japon, les États-Unis,le Mexique, la France ou le Royaume-Uni. « Le dernier Open day fut celuique nous avons réalisé à la fin del’année dernière à Londres, dansl’espace Ibérica, et qui nous a valu entreautres un article dans The Times. »Afin de mettre en pratique cettepolitique de communication, une sallea été aménagée dans le château deCanena, le siège de la production, oùje me suis rendue il y a quelques moisen compagnie de Francisco Vañó.L’espace, situé dans la partie inférieuredu château, était sans doute à l’origineun vaste garde-manger. La températurey est stable au long de l’année, ce quien fait un lieu parfait pour lesdégustations et les conférences. Onpeut y suivre l’évolution de l’entrepriseen passant en revue les murs qui sontdécorés avec les articles que la presselui a consacrés. En outre, une petitecollection d’huiles d’olive du mondeentier y est exposée, ce qui donne à lasalle un air très personnel.Il n’est donc pas étonnant que leshuiles d’olive vierges extra de Castillode Canena soient présentes dans plusde 35 pays. On les trouve dans leschaînes de produits gourmetles plus emblématiques commeFortnum & Mason, boutique deréférence du Royaume-Uni en épiceriefine qui fournit la maison royaleanglaise, ou à l’hôtel Ritz de Londres

où son chef et président de laChairman of the Academy of CulinaryArts, John Williams, se vante de lesutiliser. Elles sont également présentesdans les chaînes Holesfood etWilliams-Sonoma, aux États-Unis, oùcette dernière est considérée commechef de file pour les produits gourmetdu pays, ainsi que dans le restaurantDaniel, de New York. Le restaurantL’Atelier, de Joël Robuchon à Paris, lePalacio del Hierro, à Mexico, la chaînerusse Globus Gourmet ou l’hôtelsept étoiles Burj Al Arab de Dubaï,dans les Émirats arabes unis, ne sontpas en reste.En outre, comme ne manque pas de lepréciser Rosa Vañó, « Harrods asélectionné notre huile d’olive viergeextra pour l’étiqueter sous sa marqueFamilia Vañó pour Harrods ».D’ailleurs, le Royaume-Uni est lemarché le plus important pour Castillode Canena, avec des ventes d’environ110 000 euros en 2008.L’avenir va dans le sens des huilesd’auteur et du développement deshuiles monovariétales d’olivesandalouses qui suivront celle de lavariété royal temprano dans la gammeAceites del Siglo XXI : les variétéshojiblanca, arbequina, manzanillasevillana ou pico limón. Devant tousces changements, Rosa Vañó, la femmequi vient d’être récemment élueFemme entrepreneur de l’année 2008par la Fédération espagnole desfemmes dirigeantes, cadres supérieur,professionnelles et chefs d’entreprise(Fedepe), a les idées très claires : « Cequi est important, c’est ce que nous

variété royal temprano, elle se présentedans une bouteille noire, arrondie,sérigraphiée en blanc.

Le monde,son marchéSon exposé sur les piliers de Castillode Canena à peine achevé, Rosa Vañóprend le gâteau jusqu’alors simpletémoin discret de notre petit déjeunertypiquement andalou. Elle m’invite à

le goûter et m’explique qu’elle aremplacé le beurre par de l’huiled’olive vierge extra Reserva Familiarde la variété picual et qu’elle leprépare avec de la farine d’épeautre etdu sucre roux, « beaucoup plus sainet digestif ». Léger au palais, ce gâteauest réellement exquis. « En prenant cepetit déjeuner ici, aujourd’hui, nouscréons ce qu’on définirait ailleurscomme une expansion deconsommation, et c’est ce que nousfaisons avec les chefs étrangers

lorsque nous ouvrons des marchés,lorsque nous travaillons avec euxpour voir quels plats de lagastronomie locale peuvent êtreenrichis avec nos huiles. Personne nepeut mieux que nous communiquersur les valeurs du produit. » Ainsi, auJapon, on utilise maintenant son huileCastillo de Canena Reseva Familiardans les marinades au soja et dans lespréparations aux algues, « certainessont très insipides et d’autres ont ungoût trop salin, dans les deux cas,l’huile d’olive vierge extra de la variétéarbequina leur apporte ce qui leurmanque ». En Russie, on l’incorporedans la gastronomie la plus basique,les plats de légumes, surtout leschoux et aux crèmes comme la crèmede betterave. Au Royaume-Uni, c’estla pâtisserie qui y a gagné avec leremplacement des graisses saturées etpolyinsaturées par de l’huile d’olivevierge extra, « surtout de la variétépicual, car elle est plus piquante ».Aux États-Unis et en Norvège, onl’utilise pour les marinades, dans lepremier cas pour les barbecues etdans le second pour les harengs et lessaumons, « en combinaison parfaiteavec de l’aneth et du sucre ».Dans le même esprit mais avec un butdifférent, Rosa Vañó organise cequ’elle appelle des Open day, desjournées portes ouvertes auxquellessont invités des journalistes, descuisiniers, des acheteurs et desleaders d’opinion en général pour unedégustation d’huiles suivie d’uncocktail où ses huiles d’olive viergesextra sont les vedettes de plats commedes fromages marinés avec des huiles,

CASTILLO DE CANENA

ENTREPRISESCASTILLO DE CANENA

Fondation : 2003

Activités : culture, broyage,stockage, conditionnement etcommercialisation de l’huile d’olivevierge extra

Effectifs : 75 salariés

Chiffre d’affaires 2008 :900 000 euros

Part des exportations : 50 %

Principaux marchés d’exportation :Japon, Royaume-Uni, France,États-Unis, Russie

Siège

Remedios, 423420 Canena (Jaén)Tél. : +34 953 770 101Fax : +34 953 770 898

[email protected]

Afin de mettre en pratique les principes derespect de l’environnement, Castillo deCanena possède actuellement troisinstallations d’énergie photovoltaïquecapables de produire 300 kW qui couvrentles besoins en énergie électrique —essentiellement celle nécessaire à la ferti-irrigation de l’oliveraie.Cette initiative en faveur du développementdurable est soutenue par un systèmed’agriculture intégrée qui rationalisel’utilisation de produits phytosanitaires ; parl’entretien de la couverture végétale danstoute l’exploitation qui évite l’emploiindiscriminé d’herbicides, diminue l’érosiondu terrain et préserve la végétationherbacée autochtone ; et par l’utilisationdes restes de l’élagage comme biomassetransformable en combustible écologiquenon contaminant.Un accord a été signé avec la sociétéGeopónica pour mettre à profit les restesde l’émondage des oliviers. Cet accordcomprend l’installation d’une usine detorréfaction de restes végétaux pour leurtransformation en briquettes de charbonvégétal, un combustible écologique.

R E S P E C T D E L ’ E N V I R O N N E M E N T

sommes, et non ce que nous nesommes pas. Et nous devons êtrefidèles à l’essentiel. »

Almudena Muyo a travaillé commejournaliste spécialisée dans le commerceinternational pendant douze ans et estactuellement coordinatrice de la revueSpain Gourmetour.

C A S T I L L OD E C A N E N A

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120 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 121

des ailes de poulet sautées avec lavariété picual ou des soufflés élaborésavec la variété arbequina. Cesévénements ont eu lieu dans desendroits aussi différents que HongKong, Dubaï, le Japon, les États-Unis,le Mexique, la France ou le Royaume-Uni. « Le dernier Open day fut celuique nous avons réalisé à la fin del’année dernière à Londres, dansl’espace Ibérica, et qui nous a valu entreautres un article dans The Times. »Afin de mettre en pratique cettepolitique de communication, une sallea été aménagée dans le château deCanena, le siège de la production, oùje me suis rendue il y a quelques moisen compagnie de Francisco Vañó.L’espace, situé dans la partie inférieuredu château, était sans doute à l’origineun vaste garde-manger. La températurey est stable au long de l’année, ce quien fait un lieu parfait pour lesdégustations et les conférences. Onpeut y suivre l’évolution de l’entrepriseen passant en revue les murs qui sontdécorés avec les articles que la presselui a consacrés. En outre, une petitecollection d’huiles d’olive du mondeentier y est exposée, ce qui donne à lasalle un air très personnel.Il n’est donc pas étonnant que leshuiles d’olive vierges extra de Castillode Canena soient présentes dans plusde 35 pays. On les trouve dans leschaînes de produits gourmetles plus emblématiques commeFortnum & Mason, boutique deréférence du Royaume-Uni en épiceriefine qui fournit la maison royaleanglaise, ou à l’hôtel Ritz de Londres

où son chef et président de laChairman of the Academy of CulinaryArts, John Williams, se vante de lesutiliser. Elles sont également présentesdans les chaînes Holesfood etWilliams-Sonoma, aux États-Unis, oùcette dernière est considérée commechef de file pour les produits gourmetdu pays, ainsi que dans le restaurantDaniel, de New York. Le restaurantL’Atelier, de Joël Robuchon à Paris, lePalacio del Hierro, à Mexico, la chaînerusse Globus Gourmet ou l’hôtelsept étoiles Burj Al Arab de Dubaï,dans les Émirats arabes unis, ne sontpas en reste.En outre, comme ne manque pas de lepréciser Rosa Vañó, « Harrods asélectionné notre huile d’olive viergeextra pour l’étiqueter sous sa marqueFamilia Vañó pour Harrods ».D’ailleurs, le Royaume-Uni est lemarché le plus important pour Castillode Canena, avec des ventes d’environ110 000 euros en 2008.L’avenir va dans le sens des huilesd’auteur et du développement deshuiles monovariétales d’olivesandalouses qui suivront celle de lavariété royal temprano dans la gammeAceites del Siglo XXI : les variétéshojiblanca, arbequina, manzanillasevillana ou pico limón. Devant tousces changements, Rosa Vañó, la femmequi vient d’être récemment élueFemme entrepreneur de l’année 2008par la Fédération espagnole desfemmes dirigeantes, cadres supérieur,professionnelles et chefs d’entreprise(Fedepe), a les idées très claires : « Cequi est important, c’est ce que nous

variété royal temprano, elle se présentedans une bouteille noire, arrondie,sérigraphiée en blanc.

Le monde,son marchéSon exposé sur les piliers de Castillode Canena à peine achevé, Rosa Vañóprend le gâteau jusqu’alors simpletémoin discret de notre petit déjeunertypiquement andalou. Elle m’invite à

le goûter et m’explique qu’elle aremplacé le beurre par de l’huiled’olive vierge extra Reserva Familiarde la variété picual et qu’elle leprépare avec de la farine d’épeautre etdu sucre roux, « beaucoup plus sainet digestif ». Léger au palais, ce gâteauest réellement exquis. « En prenant cepetit déjeuner ici, aujourd’hui, nouscréons ce qu’on définirait ailleurscomme une expansion deconsommation, et c’est ce que nousfaisons avec les chefs étrangers

lorsque nous ouvrons des marchés,lorsque nous travaillons avec euxpour voir quels plats de lagastronomie locale peuvent êtreenrichis avec nos huiles. Personne nepeut mieux que nous communiquersur les valeurs du produit. » Ainsi, auJapon, on utilise maintenant son huileCastillo de Canena Reseva Familiardans les marinades au soja et dans lespréparations aux algues, « certainessont très insipides et d’autres ont ungoût trop salin, dans les deux cas,l’huile d’olive vierge extra de la variétéarbequina leur apporte ce qui leurmanque ». En Russie, on l’incorporedans la gastronomie la plus basique,les plats de légumes, surtout leschoux et aux crèmes comme la crèmede betterave. Au Royaume-Uni, c’estla pâtisserie qui y a gagné avec leremplacement des graisses saturées etpolyinsaturées par de l’huile d’olivevierge extra, « surtout de la variétépicual, car elle est plus piquante ».Aux États-Unis et en Norvège, onl’utilise pour les marinades, dans lepremier cas pour les barbecues etdans le second pour les harengs et lessaumons, « en combinaison parfaiteavec de l’aneth et du sucre ».Dans le même esprit mais avec un butdifférent, Rosa Vañó organise cequ’elle appelle des Open day, desjournées portes ouvertes auxquellessont invités des journalistes, descuisiniers, des acheteurs et desleaders d’opinion en général pour unedégustation d’huiles suivie d’uncocktail où ses huiles d’olive viergesextra sont les vedettes de plats commedes fromages marinés avec des huiles,

CASTILLO DE CANENA

ENTREPRISES

CASTILLO DE CANENA

Fondation : 2003

Activités : culture, broyage,stockage, conditionnement etcommercialisation de l’huile d’olivevierge extra

Effectifs : 75 salariés

Chiffre d’affaires 2008 :900 000 euros

Part des exportations : 50 %

Principaux marchés d’exportation :Japon, Royaume-Uni, France,États-Unis, Russie

Siège

Remedios, 423420 Canena (Jaén)Tél. : +34 953 770 101Fax : +34 953 770 898

[email protected]

Afin de mettre en pratique les principes derespect de l’environnement, Castillo deCanena possède actuellement troisinstallations d’énergie photovoltaïquecapables de produire 300 kW qui couvrentles besoins en énergie électrique —essentiellement celle nécessaire à la ferti-irrigation de l’oliveraie.Cette initiative en faveur du développementdurable est soutenue par un systèmed’agriculture intégrée qui rationalisel’utilisation de produits phytosanitaires ; parl’entretien de la couverture végétale danstoute l’exploitation qui évite l’emploiindiscriminé d’herbicides, diminue l’érosiondu terrain et préserve la végétationherbacée autochtone ; et par l’utilisationdes restes de l’élagage comme biomassetransformable en combustible écologiquenon contaminant.Un accord a été signé avec la sociétéGeopónica pour mettre à profit les restesde l’émondage des oliviers. Cet accordcomprend l’installation d’une usine detorréfaction de restes végétaux pour leurtransformation en briquettes de charbonvégétal, un combustible écologique.

R E S P E C T D E L ’ E N V I R O N N E M E N T

sommes, et non ce que nous nesommes pas. Et nous devons êtrefidèles à l’essentiel. »

Almudena Muyo a travaillé commejournaliste spécialisée dans le commerceinternational pendant douze ans et estactuellement coordinatrice de la revueSpain Gourmetour.

C A S T I L L OD E C A N E N A

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122 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 123

PALETTE DE SAVEURS

ÉPILOGUE

PALETTE DE SAVEURS

ÉPILOGUE

Pour ce numéro de Spain Gourmetour publié pendant les mois d’été de l’hémisphère Nord,

nous avons choisi un tableau qui transmet cette fraîcheur si précieuse durant la saison

estivale. Un après-midi d’été où domine l’un des fruits de saison par excellence, la pastèque,

qui convoque toute la force du tableau avec un jeu habile d’ombres et de lumières. Elle est

entourée de pommes, peintes minutieusement sans omettre le moindre détail de leur texture.

Luis Meléndez (1716–1780)Luis Meléndez est considéré comme l’artisteespagnol des natures mortes le plusimportant du XVIIIe siècle, c’est pourquoi lemusée du Prado lui consacra en 2004 uneexposition qui s’intitulait « Luis Meléndez.Bodegones ». Fils d’un peintre asturien, il

naquit à Naples où son père s’était installéprovisoirement mais la famille rentra enEspagne lorsque Luis avait juste un an. En1748, il retourne à Naples pour complétersa formation et revient en Espagne en 1753,sous le règne de Ferdinand VI d’Espagne

Nature morte avec pastèques et pommes dans un paysage, 1771Huile sur toile, 63 cm x 84 cm© Museo Nacional del Prado de Madrid – Espagne

Photo© Museo Nacional del Prado de Madrid – Espagne

TraductionFrançoise Chuffart

(1713-1759), à la cour duquel il allaittravailler sur commande. C’est sous le règnede Charles III d’Espagne (1716-1788) queLuis Meléndez se spécialise dans les naturesmortes et réalise la série consacrée au princedes Asturies, fils du roi.

NATUREMORTE

avecpastèqueset pommesdans unpaysage

11-ÚLTIMA PARADA FR-66.qxd 22/4/09 05:46 Página 122 (FRANCES plancha)

Page 125: Spain Gourmetour No. 66 (French)

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122 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 123

PALETTE DE SAVEURS

ÉPILOGUE

PALETTE DE SAVEURS

ÉPILOGUE

Pour ce numéro de Spain Gourmetour publié pendant les mois d’été de l’hémisphère Nord,

nous avons choisi un tableau qui transmet cette fraîcheur si précieuse durant la saison

estivale. Un après-midi d’été où domine l’un des fruits de saison par excellence, la pastèque,

qui convoque toute la force du tableau avec un jeu habile d’ombres et de lumières. Elle est

entourée de pommes, peintes minutieusement sans omettre le moindre détail de leur texture.

Luis Meléndez (1716–1780)Luis Meléndez est considéré comme l’artisteespagnol des natures mortes le plusimportant du XVIIIe siècle, c’est pourquoi lemusée du Prado lui consacra en 2004 uneexposition qui s’intitulait « Luis Meléndez.Bodegones ». Fils d’un peintre asturien, il

naquit à Naples où son père s’était installéprovisoirement mais la famille rentra enEspagne lorsque Luis avait juste un an. En1748, il retourne à Naples pour complétersa formation et revient en Espagne en 1753,sous le règne de Ferdinand VI d’Espagne

Nature morte avec pastèques et pommes dans un paysage, 1771Huile sur toile, 63 cm x 84 cm© Museo Nacional del Prado de Madrid – Espagne

Photo© Museo Nacional del Prado de Madrid – Espagne

TraductionFrançoise Chuffart

(1713-1759), à la cour duquel il allaittravailler sur commande. C’est sous le règnede Charles III d’Espagne (1716-1788) queLuis Meléndez se spécialise dans les naturesmortes et réalise la série consacrée au princedes Asturies, fils du roi.

NATUREMORTE

avecpastèqueset pommesdans unpaysage

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Page 126: Spain Gourmetour No. 66 (French)

124 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR

ANNONCEURS Ángel CamachoAlimentación, S.A. (Fragata)Tel: (34) 955 854 700Fax: (34) 955 850 [email protected]: 5

Bodegas Franco EspañolasTel: (34) 941 251 300Fax: (34) 941 262 948francoespanolas@francoespanolas.comwww.francoespanolas.comPage: 9

Bodegas ProtosTel: (34) 983 878 011Fax: (34) 983 878 015www.bodegasprotos.comPage: 127

Consorcio del Jamón SerranoEspañolTel: (+34) 917 356 085Fax: (+34) 917 350 [email protected]: 4, 12

Extenda-Agencia Andaluzade Promoción ExteriorTel: (34) 902 508 525Fax: (34) 902 508 [email protected]: 7

F.J. Sánchez Sucesores, S.A.Tel: (34) 950 364 038Fax: (34) 950 364 [email protected]: 3e de couverture

Federico Paternina, S.A.Tel: (34) 941 310 550Fax: (34) 941 312 [email protected]: 6

Grupo GourmetsTel: (34) 915 489 651Fax: (34) 915 487 [email protected]: 13

Industrial QueseraCuquerellaTel: (34) 926 266 410Fax: (34) 926 266 [email protected]: 126

Loreto Speciality Foods, S.L.Tel: (34) 954 113 825Fax: (34) 955 711 [email protected]: 11

Sánchez Romero CarvajalJabujo, S.A. ( 5 Jotas)Tel: (34) 917 283 880Fax: (34) 917 283 [email protected]: 4e de couverture

Spaingourmetour.comwww.spaingourmetour.comPage: 8

Wines from Spainwww.winesfromspain.comPage: 2e de couverture et 10

12-ANUNCIANTES FR-66.qxd 18/4/09 02:52 Página 124 (FRANCES plancha)

Page 127: Spain Gourmetour No. 66 (French)

MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR 125

À titre indicatif et d’après lesinformations fournies par lessources citées, voici une listed’exportateurs. Par manqued’espace, nous avons fait unesélection des principalesentreprises.

EXPORTATEURS

Produitsalimentaires

PoivronsAsociación Profesionalde Productores dePimiento Najerano y deSanto Domingo(IGP Pimiento Riojano)Tél. : (+34) 941 512 571Fax : (+34) 941 512 [email protected]

Consejo Regulador IGPPimiento de Fresno-BenaventeTél./Fax : (+34) 987 770 [email protected]

Fundación Kalitatea(AOP Pimiento de Gernika)Tél. : (+34) 946 030 [email protected]

Instituto Galego daCalidade Alimentaria(IGP Pimiento de Arnoia, IGPPimiento de Oimbra, IGPPimiento de O Couto y AOPPimiento de Herbón)Tél. : (+34) 881 997 276Fax : (+34) 981 546 [email protected]

SelCarolingiaDistribuciones, S.L.Tél. : (+34) 916 335 043Fax : (+34) 916 028 [email protected]

Casanovas CateringTraiteur, S.L.Tél. : (+34) 934 236 508Fax : (+34) 934 233 [email protected]

Especias del SolTél. : (+34) 927 413 868Fax : (+34) 927 484 [email protected]

Gusto MundialBaleárides, S.L.(Flor de Sal d’Es Trenc)Tél. : (+34) 971 649 797Fax : (+34) 971 649 [email protected]

Hijos de Juan BeviáGuijarro, S.L.(Sal La Cococha)Tél. : (+34) 607 214 627Tél./Fax : (+34) 965 665 [email protected]

Infosa(Flor del Delta)Tél. : (+34) 935 884 404Fax : (+34) 935 886 [email protected]

Sal Costa, S.A.Tél. : (+34) 932 237 890Fax : (+34) 932 235 [email protected]

Salinas Marinasde Fuencaliente, S.L.Tél./Fax : (+34) 922 411 523salteneguia@salinasdefuencaliente.comwww.salinasdefuencaliente.com

Salinas y CelebracionesSan Vicente, S.L.Tél. : (+34) 956 881 [email protected]

Salinera Española, S.A.Tél. : (+34) 971 432 255Fax : (+34) 971 432 [email protected]

Source : ICEX

13-EXPORTADORES FR-66.qxd 18/4/09 02:53 Página 125 (FRANCES plancha)

Page 128: Spain Gourmetour No. 66 (French)

BELGIQUERue Montoyer, 10-1ºB-1000 BruxellesTél. : (2) 551 10 40Fax : (2) 551 10 [email protected]

CANADA2 Bloor St. East, Suite 1506Toronto-Ontario, M4W 1A8Tél. : (416) 967 04 88Fax : (416) 968 95 [email protected]

FRANCE11, Av. d’léna75016 ParisTél. : (1) 53 57 95 50Fax : (1) 47 20 97 [email protected]

SUISSEGutenbergstrasse 143011 BerneTél. : (31) 381 21 71Fax : (31) 382 18 [email protected]

INFOSURL’ESPANGE

Pour de plus amplesinformations concernant lessujets abordés dans cette revue,à l’exception des thèmestouristiques, veuillez vousadresser aux BureauxÉconomiques et Commerciauxdes Ambassades d'Espagnecorrespondants, enmentionnant sur l’enveloppeRéf. : Spain Gourmetour.

Sin título-2 1 14/4/09 18:26:59

PREMIUM QUALITY SPANISH CHEESE

-THE GRANDEE OF SPAIN-

Award winning 12 month matured

Manchego D.O. from La Mancha October 2008

Awarded first prize Manchego cheese at the annual

Manchego cheesemakers guild contest.

TARTESANA, S.L

“Tarquessia de La Mancha”

Ctra. de Toledo, s/n

13420 Malagón (C.Real) Spain

Tel: +(34) 926 266 410

Fax: +(34) 926 266 413

[email protected]

I. QUESERA CUQUERELLA, S.L. - QUESOS ROCINANTE

[email protected] - www.rocinante.es

“The Original Spanish Cheesecake”

INGLÉS 13/11/08 06:34 Página 1

Pour les demandesd'information concernantles sujets touristiques,adressez-vous à I'Officeespagnol du tourisme leplus proche.

BELGIQUERue Royale, 97 5º1000 BruxellesTéls. : (2) 280 19 26/29Fax : (2) 230 21 [email protected]

CANADA2, Bloor Street West,Suite 3402Toronto, Ontario M4W 3E2Téls. : (416) 961 31 31/40 79Fax : (416) 961 19 [email protected]

FRANCE43, rue Decamps75784 Paris Cedex-16Tél. : (1) 45 03 82 50Fax : (1) 40 72 52 04 ou(1) 45 03 82 [email protected]

SUISSE15, rue Ami-LévrierCH-1211 Genève 1Téls. : (22) 731 11 33/32Fax : (22) 731 13 [email protected]

Seefeldstrasse, 19CH 8008 ZurichTél. : (44) 253 60 51Fax : (44) 252 62 [email protected]

Centrale de Réservationsdes ParadoresRequena, 3 - 28013 MadridTél. : (+34) 915 166 700Fax : (+34) 915 166 663/4/[email protected]

14-ESPAÑA EN EL MUNDO FR-66.qxd 18/4/09 02:55 Página 126 (FRANCES plancha)

Page 129: Spain Gourmetour No. 66 (French)

BELGIQUERue Montoyer, 10-1ºB-1000 BruxellesTél. : (2) 551 10 40Fax : (2) 551 10 [email protected]

CANADA2 Bloor St. East, Suite 1506Toronto-Ontario, M4W 1A8Tél. : (416) 967 04 88Fax : (416) 968 95 [email protected]

FRANCE11, Av. d’léna75016 ParisTél. : (1) 53 57 95 50Fax : (1) 47 20 97 [email protected]

SUISSEGutenbergstrasse 143011 BerneTél. : (31) 381 21 71Fax : (31) 382 18 [email protected]

INFOSURL’ESPANGE

Pour de plus amplesinformations concernant lessujets abordés dans cette revue,à l’exception des thèmestouristiques, veuillez vousadresser aux BureauxÉconomiques et Commerciauxdes Ambassades d'Espagnecorrespondants, enmentionnant sur l’enveloppeRéf. : Spain Gourmetour.

Sin título-2 1 14/4/09 18:26:59

PREMIUM QUALITY SPANISH CHEESE

-THE GRANDEE OF SPAIN-

Award winning 12 month matured

Manchego D.O. from La Mancha October 2008

Awarded first prize Manchego cheese at the annual

Manchego cheesemakers guild contest.

TARTESANA, S.L

“Tarquessia de La Mancha”

Ctra. de Toledo, s/n

13420 Malagón (C.Real) Spain

Tel: +(34) 926 266 410

Fax: +(34) 926 266 413

[email protected]

I. QUESERA CUQUERELLA, S.L. - QUESOS ROCINANTE

[email protected] - www.rocinante.es

“The Original Spanish Cheesecake”

INGLÉS 13/11/08 06:34 Página 1

Pour les demandesd'information concernantles sujets touristiques,adressez-vous à I'Officeespagnol du tourisme leplus proche.

BELGIQUERue Royale, 97 5º1000 BruxellesTéls. : (2) 280 19 26/29Fax : (2) 230 21 [email protected]

CANADA2, Bloor Street West,Suite 3402Toronto, Ontario M4W 3E2Téls. : (416) 961 31 31/40 79Fax : (416) 961 19 [email protected]

FRANCE43, rue Decamps75784 Paris Cedex-16Tél. : (1) 45 03 82 50Fax : (1) 40 72 52 04 ou(1) 45 03 82 [email protected]

SUISSE15, rue Ami-LévrierCH-1211 Genève 1Téls. : (22) 731 11 33/32Fax : (22) 731 13 [email protected]

Seefeldstrasse, 19CH 8008 ZurichTél. : (44) 253 60 51Fax : (44) 252 62 [email protected]

Centrale de Réservationsdes ParadoresRequena, 3 - 28013 MadridTél. : (+34) 915 166 700Fax : (+34) 915 166 663/4/[email protected]

14-ESPAÑA EN EL MUNDO FR-66.qxd 18/4/09 02:55 Página 126 (FRANCES plancha)

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128 MAI-AOÛT 2009 SPAIN GOURMETOUR

Vin et designp. 44 Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 45 Illustration : Manuel Estradap. 46 – 47 Juan ManuelSanz/©ICEXp. 48 Etiquette Espelt Viticultors ;Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 49 4kilosp. 50 Illustration : Manuel Estradap. 51 – 54 ; Juan ManuelSanz/©ICEX

Techniques culinairesp. 56 Tomás Zarza/©ICEXp. 57 – 61 Toya Legido/©ICEXp. 62 Restaurante Vivaldip. 63 Toya Legido/©ICEXp. 64 Tomás Zarza/©ICEXp. 65 Toya Legido/©ICEX ;Restaurant Mugaritz/José LuisLópez de Zubiríap. 66 Toya Legido/©ICEXp. 67 Restaurant MartínBerasategui/José Luis López deZubiríap. 68 – 71 Toya Legido/©ICEX

Villes patrimoinep. 72 – 76 FernandoMadariaga/©ICEXp. 77 Fernando Madariaga/©ICEX ; Carte : Javier Bellosop. 78 – 80 FernandoMadariaga/©ICEXp. 81 Carte : Javier Bellosop. 82 Fernando Madariaga/©ICEXp. 83 Fernando Madariaga/©ICEX ; Félix Lorrio/©ICEXp. 84 – 87 FernandoMadariaga/©ICEX

CouvertureJuan Manuel Sanz/©ICEX

Sommairep. 2 Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 3 De haut en bas : Patricia R.Soto/©ICEX ; Toya Legido/©ICEX ;Consejería de Agricultura,Ganadería y Desarrollo Rural-Gobierno de La Rioja ; ToyaLegido/©ICEX

Selp. 14 Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 15 Óscar Pipkin/©ICEX ; JuanManuel Sanz/©ICEXp. 16 Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 17 INFOSAp. 18 Óscar Pipkin/©ICEXp. 19 Mikel Landa ; Juan ManuelSanz/©ICEXp. 20 Óscar Pipkin/©ICEX ;Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 21 Asociación de Amigos de lasSalinas de Interiorp. 22 Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 23 Salina San Vicentep. 24 Óscar Pipkin/©ICEXp. 25 Óscar Pipkin/©ICEX ; Sal deSan Pedrop. 26 Carte : Javier Belloso ;Juan Manuel Sanz/©ICEXp. 27 Salina San Vicente

Godellop. 28 – 38 Patricia R. Soto/©ICEXp. 39 – 40 Harold Heckle/©ICEXp. 41 – 42 Patricia R. Soto/©ICEXp. 43 Photo : Patricia R.Soto/©ICEX. Carte : Javier Belloso

ICONOGRAPHIE Poivronsp. 88 Consejería de Agricultura,Ganadería y Desarrollo Rural-Gobierno de La Riojap. 89 Illustration : Luis Serranop. 90 Consellería do Medio Rural-Xunta de Galiciap. 91 – 99 Illustration : LuisSerranop. 100 Consejería de Agricultura,Ganadería y Desarrollo Rural-Gobierno de La Riojap. 101 Carte : Javier Belloso ;Fundación Kalitatea Fundazioa

Recettesp. 102 – 103 Patricia R.Soto/©ICEX et Toya Legido/©ICEXp. 104 – 113 Toya Legido/©ICEX

En marchep. 114 – 115 Illustrations AVI

EntreprisesCastillo de Canenap. 116 – 121 Castillo de Canena

Palette de saveursp. 122 © Museo Nacional delPrado de Madrid - Espagne

15-IMAGENES FR-66.qxd 17/4/09 17:23 Página 128

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