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Déchets Une seule solution, la prévention! www.amisdelaterre.org Les Amis de la Terre Depuis 1971 3,20 / Eté 2012 N°170

La Baleine 170 - Déchets, une seule solution : la prévention !

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Le journal des Amis de la Terre

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Page 1: La Baleine 170 - Déchets, une seule solution : la prévention !

Déchets Une seule solution,la prévention!!

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Les Amis de la Terre

Depuis 1971 3,20 ! / Eté 2012 N°170

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Édito

Le changement, c’est maintenant ?Ces dernières semaines ont été riches en événements politiques… Un nou-veau président, de nouveaux députés et, en peu de temps, deux ministres del’Ecologie ! Nicole Bricq a fait un bref passage à ce ministère et a été rem-placée par Delphine Batho sans avoir eu l’occasion d’y poser sa marque.L’écologie reste donc le parent pauvre du gouvernement : après avoir étéabandonné par NKM – devenue porte-parole de l’ex président-candidat –, leministère donne l’impression de servir de variable d’ajustement pour les per-sonnalités que le nouveau chef d’État souhaite avoir dans son gouvernement.

La Conférence environnementale est la première victime de ce manquede positionnement politique sur la thématique qui est la nôtre. Alors que lecandidat François Hollande!avait annoncé qu’il souhaitait mettre le dialogueenvironnemental au même niveau que le dialogue social, la réalité montrequ’on est loin du compte. Au jour où j’écris ces lignes (fin juin), ni le timing,ni les thématiques, ni les modalités ne sont encore établis.

Même constat en ce qui concerne les négociations internationales surle climat. Le sommet de Rio+20 a vu triompher les puissances économiqueset financières qui ne voulaient surtout pas d’un accord qui aurait pu contrain-dre leurs projets et nuire à leurs intérêts. Du coup, les seuls engagements prisconsistent à annoncer qu’on décidera... plus tard ! A contrario, les thématiquesdéveloppées au Sommet des Peuples – conférence alternative organisée à Rioen parallèle au sommet de l’ONU – ont connu un remarquable succès média-tique, notamment notre campagne sur la financiarisation de la nature. Les jour-nalistes commenceraient-ils à percevoir ce que nous savons déjà depuis long-temps, à savoir que le changement viendra par la base, par le peuple ?

Car, dans cette désespérante morosité, nous ne nous décourageonspas. Nous avons eu en Avignon, début juin, une Assemblée fédérale des plusencourageantes. Dans un cadre très agréable, et avec un accueil très sympa-thique du groupe local du Vaucluse, nous avons tous “planché” sur les pistesd’élargissement du réseau, d’amélioration des échanges entre les groupes lo-caux et entre les groupes et le “national”. Il s’agissait aussi de trouver des idéespour favoriser l’implication de tous dans nos campagnes et nos mobilisations,de renforcer notre image et notre communication. Les idées ont fusé, démon-trant que l’énergie militante reste intacte, voire renforcée. > MARTINE LAPLANTE

Présidente des Amis de la Terre France

La Fédération des Amis de la Terre France est une association de protection de l’Homme et de l’environnement, à but non lucratif, indépendante

de tout pouvoir politique ou religieux. Créée en 1970, elle a contribué à la fondation du mouvement écologiste français et à la formation du premier

réseau écologiste mondial - Les Amis de la Terre International - présent dans 77 pays et réunissant 2 millions de membres sur les cinq continents.

En France, les Amis de la Terre forment un réseau d’une trentaine de groupes locaux autonomes, qui agissent selon leur priorités locales et relaient

les campagnes nationales et internationales sur la base d’un engagement commun en faveur de la justice sociale et environnementale.

Nos sites internet • www.amisdelaterre.org • www.renovation-ecologique.org • www.ecolo-bois.org • www.produitspourlavie.org

• www.prix-pinocchio.org • www.financeresponsable.orgContactez-nous Les Amis de la Terre - France • 2B, rue Jules-Ferry, 93100 Montreuil • 01 48 51 32 22 • [email protected]

4 > 6 INTERNATIONAL> Rio+20 Face à l’échec de la conférence

of!cielle, les peuples se mobilisent > Changer de paradigme Poser les bonnes

questions pour remettre en cause la croissance perpétuelle

> Japon Le gouvernement s’acharne à relancer le nucléaireConférences-débatsPour une sortie du nucléaire immédiate

7 > 10 FRANCE> Politiques publiques

Stop aux subventions contre-naturePrix Albert-Londres“Zambie, à qui pro!te le cuivre ?”

> L’UE et les OGM Désaccords d’expertssur l’interdiction française du MON810

> Pétrole et gaz de schisteEt c’est reparti pour un tour…

> Ressources Refusons la surconsommationet l’accaparement de terresDeuxième forum européen Non aux grands projets inutiles"!

11 > 17 DOSSIER Déchets Une seulesolution, la prévention> Recyclage Le traitement des déchets,

c’est pas du propreTendance Tri mécano biologique : trop beau pour être vrai

> Initiatives Redevance incitative":l’expérience de Manspach

> Déchets organiques Je composte, tu compostes, il composte…

> Alternatives Donnons une seconde vie à nos objets, pensons à la réparation !

> Emballages alimentaires Descommerçants disent stop au gaspillage Contre le suremballage “Le levier!nancier est le plus ef!cace”

18 ACTIONS> Assemblées générales

de grands groupes français Dénoncerles activités controversées"

19 LE COIN DES LIVRES> Areva en Afrique, de Raphaël Granvaud> Un nouveau site pour les Amis de la Terre20 PRATIQUES> Acheter sans plastique… le parcours

du combattant > Humeurs Ça sent le roussi

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Depuis 1971Le Courrier de la Baleine n°170“Se ranger du côté des baleines n’est pas une position aussi légère qu’il peut le sembler de prime abord.”

Trimestriel • Eté 2012 • n°CCPAP : 0312 G 86222 (en cours de renouvellement)

Direction de la publication Martine Laplante Rédaction en chef Lucile Pescadère Comité de rédaction Sophie Chapelle, Philippe Collet, Alain Dordé, CarolineHocquard, Laurent Hutinet, Caroline Prak Ont collaboré à ce numéro Les Amis de la Terre Haute-Loire, Claude Bascompte, Camille Lecomte, Philippe Le Corneur,Juliette Renaud, Eric Meunier, Ronack Monabay, Annelaure Wittmann, Alain Zolty Mise en pages Edwige Benoit Relations presse Caroline Prak (01 48 51 18 96) Impression sur papier recyclé Offset Cyclus 90g avec encres végétales • Stipa (01 48 18 20 50) Ce numéro comporte en encart jeté la brochure La nature n'a pas de prix ! publiée en juin 2012 par les Amis de la Terre France dans le cadre du Sommet de Rio.

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L’assemblée fédérale des Amis de la Terre France s’est tenue les 2 et 3 juin derniers en Avignon. Au cours de ce temps de réflexion et de convivialité, les membresdes groupes locaux ont élu leurs représentants au conseilfédéral, dont voici la liste!:

Martine Laplante, présidenteChristian Berdot, vice-présidentBénédicte Bonzi, secrétaire fédéraleGérard Eripret, trésorierGeneviève Santelli, trésorière adjointe

Alain Dordé, Olivier Dubuquoy,Christian Foilleret, AlexandreMourot, Véronique Sinou,Annelaure Wittmann, Alain Zolty

Suppléants Thierry Avramoglou,Claude Bascompte, Marie-Christine Gamberini, Lucile Pescadère, Henry Tidy

Avignon, juin 2012Assemblée fédérale desAmis de la Terre France

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En 1972, le Club de Rome publiait le rap-port Meadows, connu en français sous letitre Halte à la croissance. L’étude, deve-nue depuis incontournable, fut l’une destoutes premières à présenter les limitesdes ressources naturelles et à démontrerle caractère irréaliste d’une croissance per-pétuelle dans un monde fini. Quarante ansplus tard, Dennis Meadows vient en Franceprésenter l’édition actualisée de l’ouvrage!.

Il constate d’emblée un échec à main-tenir l’empreinte écologique globale dansle cadre des limites planétaires. En 1965,l’humanité avait besoin de l’équivalent de0,7 planète pour ses activités, aujourd’huielle en consomme 1,5. En quatre décen-nies, le message du rapport Meadows adonc été singulièrement modifié. “Dans lesannées 1970, l’objectif était de ralentir lesystème avant qu’il ne franchisse des li-mites considérées alors comme inattei-gnables!; aujourd’hui, le problème est bienplus compliqué puisqu’il s’agit de revenirdans ces mêmes limites en évitant conflitset catastrophes”, explique l’auteur.

Choisir le cheminementL’issue est selon lui inéluctable et n’offrequ’une alternative : si les hommes ne re-noncent pas à la croissance économiquepar eux-mêmes et ne tracent pas volontai-rement le cheminement vers une sociétécompatible avec les limites planétaires, lanature le fera implacablement et avec perteset fracas. Changements climatiques, raré-faction des ressources, pic pétrolier, épui-sement de la biodiversité, pénuries alimen-taires ou encore crise de l’euro sont autantde prémices de l’effondrement à venir dusystème. Dennis Meadows en est con -vaincu : nous connaîtrons dans les vingtprochaines années autant de bouleverse-

ments politiques, énergétiques, environne-mentaux et du niveau de vie qu’au coursdu siècle passé. Il ne tient qu’à l’hommed’élaborer et de mettre en œuvre une so-ciété soutenable.

Comment y parvenir! ? “Ce n’est pasmon propos, je ne suis pas capable dedonner les réponses, mais j’espère poserles bonnes questions”, répond l’auteur. Sien effet l’objet de l’ouvrage n’est pas d’of-frir une solution à toutes les questions, ilpropose néanmoins trois lignes directrices!:la sobriété, l’efficacité dans l’usage del’énergie et des ressources et le recoursaux énergies renouvelables. Il pointe aussi

la grave erreur qui consiste à se focalisersur la technologie et à considérer qu’elleapportera une solution aux ravages cau-sés par la surexploitation des ressourcesou qu’elle en repoussera les limites.

Un oxymore bien pratiqueSelon Meadows, si une part importante descitoyens comprend et accepte cet indispen-sable retour dans les limites planétaires, leplus difficile reste de concrétiser le change-ment – se défaire des habitudes des uns etdes autres et prendre en compte l’inconfortlié au changement de repères. Dans cetexercice, la tentation de préserver la sacro-sainte croissante en la repeignant de vertest une dangereuse illusion. “On doit biencomprendre que le développement durableest un oxymore qui sert de justification auxmauvaises habitudes”, alerte Dennis Mea-dows. “Une empreinte écologique globale à1,5 planète, cela n’a plus de sens ; on nepeut plus chercher à ‘développer’ ce sys-tème afin qu’il ‘dure’”. Il s’agit plutôt des’orienter vers un système résilient, une so-ciété qui puisse résister aux chocs. Pour ba-liser le chemin de cette mutation, il faut orien-ter la société en pensant à long terme.L’abandon d’un système politique basé surle court terme, la réduction du pouvoir de lafinance et le renforcement des liens sociaux,du respect et de la convivialité figurent icien bonne place. > PHILIPPE COLLET

1 Dennis Meadows, Les Limites à la croissance(dans un monde fini), éd. Rue de l’échiquier, 2012.

Changer de paradigme Poser les bonnes questions pour remettre en cause la croissance perpétuelleLa dernière version du rapport du Club de Rome sur les limites à la croissance vient d’être publiée en français. En quarante ans la situation a bien changé, rendant plus urgente la transition vers une société soutenable.

5INTERNATIONAL

Beaucoup d’énergie, d’énergie positive etcollective… C’est avec ces deux mots qu’onpourrait résumer l’ambiance qui s’est dé-gagée du Sommet des Peuples. Il s’esttenu du 15 au 23 juin à Rio de Janeiro (Bré-sil), en parallèle de la Conférence des Na-tions unies sur le développement durable.Face à l’esprit morose et au pessimismeentourant le sommet officiel de Rio+20 – quis’annonçait comme un échec avant mêmed’avoir commencé –, les représentants demouvements sociaux et d’organisationsdes cinq continents s’étaient donnés ren-dez-vous à l’Aterro do Flamengo.

Une semaine de mobilisationsLa délégation des Amis de la Terre réunis-sait près de cinquante personnes, venuesd’une vingtaine de pays, reflétant la diver-sité et la richesse de la fédération interna-tionale. Le choix avait été fait de concentrerles efforts sur le sommet alternatif, et c’estainsi que Les Amis de la Terre, au premierrang desquels bien sûr les membres brési-liens et latino-américains, s’étaient forte-ment investis depuis plusieurs mois dans l’or-ganisation de cette rencontre internationale.

Le résultat en valait la peine, puisquele Sommet des Peuples a accueilli enmoyenne 40 000 participants par jour. Etmercredi 20 juin, lors de la journée mon-diale de mobilisation, il y avait 80 000 per-sonnes qui défilaient dans les rues de Rio.D’autres manifestations ont ponctué cettesemaine de mobilisation, notamment pourdénoncer les activités et les projets del’entreprise minière brésilienne Vale ou ensolidarité avec les habitants du quartier deVila Autodromo (à Rio de Janeiro, àquelques centaines de mètres du sommetofficiel), menacés d’expulsion par un pro-jet immobilier lié aux jeux olympiques de

2016. Chaque défilé, coloré et rythmé parles percussions et les chants des mani-festants, permettait par son énergie conta-gieuse d’entretenir ce souffle d’espoir in-dispensable pour poursuivre les débats lejour suivant.

L’un des objectifs du Sommet des Peu-ples était de renforcer l’articulation desluttes au niveau mondial et pour cela diffé-rentes assemblées “plénières de conver-gence” ont eu lieu. Si chacune de ces as-semblées était centrée sur une thématiquespécifique – telle que la souveraineté ali-mentaire ou l’énergie et les industries ex-tractives – toutes suivaient néanmoins lamême progression! : la première séanceétait consacrée au décryptage des causesstructurelles de la crise et des fausses so-lutions, la seconde aux alternatives et ladernière, à la construction d’un agendacommun de luttes et de campagnes. Il yavait une volonté réelle de sortir du cadredes combats “sectoriels” – tels que ceuxcontre les grands barrages, contre les agro-carburants, contre les mines ou encorecontre les OGM – afin de trouver les pointsde convergence qui permettent d’agir defaçon globale pour changer les relationsde pouvoir et le système actuel.

Des multinationales omniprésentes En fil conducteur s’est exprimée la volontéde lutter contre l’impunité des entreprisesmultinationales, mais aussi la nécessité dedénoncer et de rompre les relations decomplicité qui les lient aux gouvernementsdu niveau local jusqu’au niveau internatio-nal. C’est d’ailleurs l’un des messagescentraux que portait la fédération des Amisde la Terre international, qui a lancé à l’oc-casion de Rio+20 la campagne “Libéronsl’ONU de l’emprise des multinationales!!”

En effet, le poids démesuré et grandis-sant des lobbies des entreprises dans lesnégociations internationales et dans les dif-férentes agences des Nations unies ex-plique pour une grande part qu’elles aillentd’échec en échec. Au lieu d’apporter dessolutions con crètes et nécessaires pour lebien des peuples, chaque sommet officielest accompagné de mesures et d’“idéesphares”, souvent distillées très en amont,qui ne contribuent qu’à aggraver les crisesécologique, climatique et sociale actuelles.Les grands bénéficiaires en sont les multi-nationales, et en premier lieu celles dessecteurs de l’énergie, de l’eau et du com-plexe agro-industriel! : si elles ont promul’agenda de l’économie verte cette année,c’est parce que la multi plication des outilsde marché et le poids croissant des ac-teurs financiers leur permettent de conti-nuer à détruire l’environnement et à violerles droits des communautés, notammentgrâce aux mécanismes de compensation.Et, pendant qu’on s’enlise dans la créationde ces instruments au service du secteurprivé, on s’éloigne de la signature d’enga-gements contraignants et de la mise enplace des changements et des solutionsindispensables.

Alors que, comme on s’y attendait, lerésultat de la conférence officielle est large-ment décevant, le bilan du Sommet desPeuples est très encourageant. Il a permisnotamment de démasquer les dangers del’économie verte et de la financiarisation dela nature, et de montrer une fois de plusque les peuples sont porteurs d’alternativesconcrètes et réalistes. > JULIETTE RENAUD

Chargée de campagne Finance privée

Pour en savoir plusRejoignez la campagne “La Nature n’est pas à vendre!!” ww.amisdelaterre.org/economieverte

4 INTERNATIONAL

Paris, le 24 mai dernier. Lors d’une conférence publique, Dennis Meadows présentel’édition actualisée du rapport du club de Rome – quarante ans et toutes ses dents.

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Croissance mondiale de la population humaine et de certaines activités anthropiques de 1950 à 2000

évolution évolution1950 1975 sur 25 ans 2000 sur 25 ans

Population mondiale (en millions) 2 520 4 077 160 % 6 067 150 %Véhicules immatriculés (en millions) 70 328 470 % 723 220 %Consommation de pétrole (millions de barils/an) 3 800 20 512 540 % 27 635 130 %Consommation de gaz naturel (milliards de m3/an) 184 1 251 680 % 2 627 210 %Consommation de charbon (millions de tonnes/an) 1 400 3 300 230 % 5 100 150 %Capacité de production d’électricité (millions de Kw) 154 1 606 1 040 % 3 240 200 %Production de maïs (millions de tonnes/an) 131 342 260 % 594 170 %Production de blé (millions de tonnes/an) 143 356 250 % 584 160 % Production de riz (millions de tonnes/an) 150 357 240 % 598 170 %Production de coton (millions de tonnes/an) 5,4 12 230 % 18 150 %Production de pâte à papier (millions de tonnes/an) 12 102 830 % 171 170 %Production de fer (millions de tonnes/an) 134 468 350 % 580 120 %Production d’acier (millions de tonnes/an) 185 651 350 % 788 120 %Production d’aluminium (millions de tonnes/an) 1,5 12 800 % 23 190 %

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Sources : PRB ; American Automobile Manufactures Association ; Ward’s Motor Vehicle Facts & Figures ; Ministère de l’Energie américain ; ONU ; FAO ; CRB

Rio+20 Face à l’échec de la conférence officielle, les peuples se mobilisent Alors que les négociations officielles se sont conclues avec l’adoption d’une déclaration marquée par son extrême faiblesse, le Sommet des Peuples a été un événement réussi et mobilisateur.

Lors de la Marche des femmes, le 18 juin dernier à Rio – l’une des nombreuses mobilisations de cette semaine.

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Malgré les crises écologique et économi -que, la France continue à soutenir la réali-sation d’infrastructures ou à exonérer detaxes des activités qui participent à la des-truction de l’environnement, aux change-ments climatiques, à l’appauvrissement dela biodiversité, à l’artificialisation des sols, àla pollution de l’air et de l’eau et à la sur ex-ploitation des ressources naturelles.

La plus évidente des dénonciationsporte sur les aides – soutiens et exonéra-tions – qui représentent en France plusieursdizaines de milliards d’euros. Plusieurs rap-ports récents, élaborés par la Cour descomptes, le Sénat et le Conseil d’analysestratégique ont pointé du doigt ces aidesdommageables à l’environnement et à lasanté publique. Les exemples les pluscriants sont l’exonération de la taxe inté-rieure pour le kérosène des avions (3,5 mil-liards d’euros) ; le taux réduit pour le fioulutilisé comme carburant (1 milliard d’eu-ros) ; le remboursement partiel de la taxesur l’énergie aux transporteurs routiers(300 millions d’euros) ; la défiscalisation desagrocarburants (196 millions d’euros).

Pour des choix fondés sur l’équité!Les Amis de la Terre soutiennent l’appel“Stop aux subventions à la pollution”. Tou-tefois, il est essentiel de rappeler que la fis-calité n’est qu’un des leviers possibles.

Les choix d’investissements et d’infra-structures, ainsi que des mesures régle-mentaires qui s’appliquent à tous sont in-dissociables d’une démarche résolumentinscrite dans une perspective de justicesociale. Ce qui conduit à penser à d’autresleviers que de nouveaux outils fiscaux.

Supprimer ces exonérations fiscales ouréductions de TVA sans remettre en cause

les extensions d’infrastructures correspon-dantes serait en effet totalement incohé-rent. Par exemple, la suppression de l’exo-nération de taxe pour le kérosène doit s’ac-compagner de l’arrêt des projets denouveaux aménagements d’infrastructuresaéroportuaires. De la même manière, lasuppression des dérogations sur les car-burants et les agrocarburants doit signerl’arrêt des projets d’infrastructures auto-routières. Les mesures fiscales sur les en-grais ne devraient pas être dissociées d’uneconditionnalité des aides et d’une légalisa-tion de la production, de l’échange et del’usage des Produits naturels peu préoccu-pants (PNPP) constituant les alternatives.Et, enfin, pour mettre fin au mésusage queconstituent trop souvent les véhicules d’en-

treprises, il convient de supprimer la distor-sion fiscale de l’avantage en nature parrapport à l’équivalent en rémunération.

Chaque jour, on nous annonce des me-sures d’économies budgétaires pour laFrance… Commençons par nous débar-rasser de ces privilèges injustifiables et deces choix d’investissement contre-nature.

Pour conclure, il est essentiel que cettedémarche induise, comme le revendiquentles Amis de la Terre, une remise en causepar la France des politiques publiques me-nées par des institutions financières natio-nales (Coface, AFD, etc.) et internationales(Banque mondiale, BEI…) : elles financentsouvent des projets au mépris des im-pacts environnementaux et sociaux.

> CLAUDE BASCOMPTE

Politiques publiquesStop aux subventions contre-natureDes associations et de nombreux économistes lancent l’appel “Stop aux subventions à la pollution” quidemande l’arrêt des subventions néfastes à l’environnement. Les Amis de la Terre appellent aussi à des choix d’investissement cohérents et à l’accompagnement de mesures garantissant justice et équité.

7FRANCE6 INTERNATIONAL

L’exonération de la taxeintérieure pour le kérosène fait perdre chaque année à l’Etat 3,5 milliardsd’euros de recettesfiscales.

Les Amis de la Terre se réjouissent de l’attribution du prixAlbert-Londres, le plus prestigieux de la presse francophone,au documentaire “Zambie, à qui profite le cuivre!?”, des journalistes Alice Odiot et Audrey Galley. Ce film s’appuiesur le travail mené par les Amis de la Terre France dans le cadrede leur campagne sur la Banque européenne d’investissement(BEI) et le secteur minier en Afrique. Il dénonce l’implication dela banque publique de l’UE dans la mine de Mopani en Zambie.Les deux réalisatrices expliquent!: “Ce film est parti d’unconstat simple dressé par les Amis de la Terre!: chaque année,de l’argent public européen destiné à lutter contre la pauvretéen Afrique tombe dans les mains de multinationales richissimesqui possèdent et exploitent des mines en Afrique. A travers cefilm et l’exemple de la mine de Mopani nous avons pu mettreen lumière les conséquences sociales et environnementalesdésastreuses de l’extraction du cuivre en Zambie, mais aussil’évasion fiscale massive dont est victime le pays.”

Anne Sophie Simpere, ancienne chargée de campagne aux Amis de la Terre et partie prenante du film, poursuit. “Le documentaire a été une formidable aventure et sa diffusiona largement contribué à l’avancée de notre campagne et a permis à d’autres organisations de se saisir du problème.Mopani est un cas d’école qui a fini par convaincre de nombreux décideurs!».Les Amis de la Terre suivent le projet Mopani depuis 2009, en collaboration avec des ONG zambiennes. La pressionmédiatique, liée notamment à la diffusion du documentaire, la publication de rapports et d’audits fiscaux accablants et la mobilisation de nombreux députés européens ont conduitla BEI à exclure Glencore et toutes ses filiales de sonportefeuille de prêts. Une première pour une Banque qui n’avaitjamais établi de liste noire pour exclure de l’accès à ses fondspublics des entreprises au comportement douteux. Et un succès notable pour les associations.

“Zambie, à qui profite le cuivre ?” Prix Albert-Londres

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L’annonce de la relance de deux réacteursà Ohi a suscité de fortes réactions! : unepétition appelant à l’abandon de l’énergienucléaire a déjà réuni 7 millions de signa-tures, des milliers de manifestants se sontregroupés devant la résidence du Premierministre les 15 et 16 juin, et, le 29 juin, àTokyo, ils étaient des dizaines de milliersdans la rue. Du jamais vu!!

Sur le plan international, une demandede soutien émanant des Amis de la TerreJapon et d’associations asiatiques vigou-reusement opposées à tout redémarragede centrales atomiques au Japon1 a étéformulée. Y faisant suite, les Amis de laTerre France, sans nier “la lourde et multi-forme responsabilité de notre pays dans laprolifération planétaire de matières et tech-nologies nucléaires”, ont écrit à l’ambas-sadeur japonais en France pour qu’il relaieles demandes d’arrêt auprès de monsieurNoda, le Premier ministre japonais2.

Pour Martine Laplante, présidente desAmis de la Terre France, “toute banalisa-tion politicienne du péril planétaire que re-présente aujourd’hui encore la situation àFukushima et des effets de la radioactivitédéjà dispersée au Japon serait d’une in-commensurable gravité pour l’ensemblede l’humanité et ses chances de survie àcourt terme sur cette planète.”

Une protestation nécessaireLa décision de relancer les réacteurs alonguement été préparée. Le premier Mi-nistre a justifié la remise en marche desunités 3 et 4 d’Ohi par de prétendues pé-nuries d’électricité à venir, l’arrêt des réac-teurs privant le pays de 30!% de sa pro-duction électrique antérieure : l’énergie nu-cléaire reste selon lui “une source crucialed’électricité”3. Les deux réacteurs d’Ohi,exploités par Kansai Electric Power, ont étéjugés sûrs par l’Agence de sécurité nu-cléaire, placée, entre autres, sous la tutelledu ministère de l’Industrie, ouvertement

pronucléaire. Les motifs d’opposition sontpourtant nombreux.

De fait, la décision du gouvernementintervient alors qu’on ignore encore la vé-rité sur la fusion de trois réacteurs à Fu-kushima. En outre, les Amis de la TerreJapon soulignent que le Premier ministrejaponais s’appuie sur des stress tests. Or,à ce jour, des mesures de sécurité essen-tielles exigées par ces tests n’ont pas étémises en œuvre à Ohi. De plus, tout nou-veau référentiel de normes de sécurité doitêtre formulé et supervisé par une agencede sûreté nucléaire véritablement indépen-dante... qui n’existe pas encore! : les pro-cédures parlementaires à ce sujet viennentjuste de commencer. Enfin, la forte aug-mentation de l’activité sismique au Japondepuis le tremblement de terre et le tsu-

nami géant du 11 mars 2011 est alar-mante, avec la présence de failles sis-miques actives non loin des réacteurs d’Ohi,et peut-être même sous le site nucléaire.

Malgré l’opposition d’une très largemajorité des Japonais et de certains mem-bres et députés de son propre parti, mon-sieur Noda a affirmé que le gouvernementassumerait pleinement ses responsabilitésdevant la population en cas de relance.

> CAROLINE PRAK

1 Parmi ces associations : Citizens’ NuclearInformation Center, Green Action, No Nukes Asia Forum, Peace Boat et Shut Tomari.

2 Texte complet sur http://www.amisdelaterre.org/Non-au-redemarrage-de-deux.html

3 Annonce faite le 15 juin 2012 lors de laconférence de presse qui s’est tenue à Tokyo.

Japon Le gouvernement s’acharne à relancer le nucléaireLe Premier ministre japonais a ordonné le 16 juin le redémarrage de deux réacteurs nucléaires. Une décision antidémocratique et scandaleuse, face à une opinion japonaise mobilisée pour l’arrêt du recours à l’énergie atomique.

Pierre Lucot est membre du bureau national du mouvement Utopia et conseiller fédéral à EELV. Quant à Jean-Luc Pasquinet, c’est un objecteur de croissance, membre de longue date du comité Stop Nogent. Tous deux, simples citoyens “responsables”, ont co-rédigé Nucléaire, arrêt immédiat.Pourquoi ? Comment ? Refusant le consensus de l’acceptation de la catastrophe que portent de fait les scénarios de sortie “progressive”, ils ont souhaité, par ce court essai édité chez Golias, “dépasserl’approche technicienne volontairement attachée à cette funeste industrie, et apporter leur modestecontribution à la nécessaire et urgente réappropriation populaire d’un choix fondamental de société.”Adhérents, groupes locaux, invitez donc ces auteurs à présenter leur scénario dans le cadre de conférences-débats sur les modalités d’arrêt du nucléaire!! Contacts [email protected] ; [email protected] ; tél. : 06 79 69 53 79.

Pour une sortie du nucléaire immédiateConférences-débats

Les réacteurs de la centrale d’Ohi, au Japon, sont depuis quelques semaines au cœur de vifs débats dans la société nippone.

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Fin 2010, des citoyens et des associa-tions apprennent que des permis d’explo-ration de gaz et de pétrole de schiste ontété accordés par le ministre de l’Ecologiede l’époque, Jean-Louis Borloo, dans laplus grande discrétion. Très vite, ces ci-toyens et ces organisations, qui connais-sent les ravages causés en Amérique duNord par la fracturation hydraulique (tech-nique utilisée pour extraire les gaz et huilesde schiste), se mobilisent et se consti-tuent en collectifs.

Des rassemblements de protestations’organisent un peu partout sur le terri-toire français, comme celui de Villeneuve-de-Berg (Ardèche) qui réunit près de20 000 personnes ou de Doue (Seine-et-Marne). La contestation est telle qu’une loicensée interdire la fracturation hydrauliqueest votée en juillet 2011 – les juristes quiexaminent cette loi de près s’apercoiventcependant très vite qu’elle ne règle rien enréalité et qu’elle n’a pour objectif que decalmer les esprits. La mobilisation s’apaiseainsi provisoirement, jusqu’à ce que deuxévénements relancent les hostilités...

Contourner la loiHiver 2011. Lors d’un colloque présidépar le Premier ministre et la ministre del’Environnement, les participants posentouvertement la question des moyens éven-tuels qui pourraient être utilisés pourcontourner la loi d’interdiction, votée cinq

mois plus tôt. La réaction des militantsest immédiate.

Le collectif Ile-de-France, soutenu pardiverses associations, organise un contre-colloque. Le rassemblement, qui se tientle 17 janvier, réunit près de trois centspersonnes au Conseil régional d’Ile-de-France. Des experts scientifiques recon-nus et des militants engagés de longuedate dans la lutte y présentent les nom-breux dangers liés à l’exploitation des gazet huiles de schiste.

Le second événement marquant a lieuen février. Le site Internet du ministère del’Ecologie met en ligne quatorze nouvellesdemandes de permis de recherche – prin-cipalement en Ile-de-France, mais aussidans l’Ain, dans le Jura et dans plusieursdépartements du Sud-Ouest (la carte despermis de recherche est accessible sur lesite du ministère!). Or on sait que la phased’exploration utilise les mêmes procédésdévastateurs que celle de l’exploitation(voir La Baleine n°165). Une fois de plus,ni les élus locaux, ni la population n’ont étéinformés de ces démarches.

Là encore, la réaction ne se fait pas at-tendre. Les groupes se mobilisent et orga-nisent de nombreuses réunions d’informa-tion et de débats dans les territoires concer-nés. De nouveaux collectifs se créent dansles régions, jusqu’alors peu mobilisées, quidécouvrent cette lutte.

Il est remarquable de trouver dans

ces collectifs des gens qui n’ont pas uneculture militante se rassembler pour dé-fendre leur territoire : des associationsdont ce n’est pas l’objet se mobilisent,des enfants prennent la parole pour dé-fendre leur avenir.

Arrêtés anti gaz de schisteLes habitants ne veulent pas laisser la ri-chesse de leur terre, leur eau, la qualitéde l’air aux mains d’exploitants dont onsait, malgré les propos lénifiants de leurscommunicants, à quel point ils sont sansvergogne. De nombreuses communes ontainsi voté des arrêtés municipaux afin des’opposer à la recherche d’hydrocarburesde schiste. C’est la cas notamment enSeine-et-Marne, dans l’Aisne et dans leVar – où près de 90 % des communesont pris de tels engagements. Partout,des réseaux de vigilance et d’alerte semettent en place afin d’assurer une ré-ponse rapide et structurée à l’éventuellearrivée de foreuses (et des inévitables no-rias de camions qui les accompagnent)dans leur région.

Si la mobilisation semble avoir perduen nombre par rapport au début de l’an-née 2011, elle a sans aucun doute gagnéen vigilance et en organisation. Heureuse-ment, car il va en falloir : les pétroliers sesont récemment réunis en une nouvelleassociation et le célèbre syndicat des fo-reurs, dans une lettre au président de laRépublique, continue d’avancer des argu-ments trompeurs comme l’indépendanceénergétique. Voilà l’exemple parfait d’unejustification fallacieuse : comme l’indiqueen effet l’Agence internationale de l’éner-gie elle-même, les ressources d’hydrocar-bures non conventionnels (catégorie danslaquelle on classe le gaz et pétrole deschiste) restent marginales en France.

Mais les sociétés Toreador et Hess– alias Zaza Energy – ont prévu d’entre-prendre des travaux de forage dans lesecteur de Doue (Seine-et-Marne) à partirdu mois de juillet ; Hess a d’ailleurs inau-guré le 22 juin dernier de nouveaux locauxà la Ferté-Gaucher, non loin de Doue.

Surtout, la crise climatique nous im-pose de revoir notre modèle énergétiqueau plus vite, allant vers une consommationréduite en énergies fossiles, principalecause du réchauffement global de notreplanète. La vigilance reste donc de mise!!

>!PHILIPPE LE CORNEUR

1 http://www.developpement-durable.gouv.fr/-Permis-de-recherche-carte-des-.html

Pour en savoir plus et intégrer l’un des multiples collectifs anti gaz ethuile de schiste http://www.nongazdeschiste.fr

Pétrole et gaz de schisteEt c’est reparti pour un tour…Après l’adoption de la loi Jacob interdisant la fracturation hydraulique, les collectifs anti gaz de schiste avaient un peu suspendu leurs activités. La publication sur le site Internet du ministère de l’Ecologie de nouvelles demandes de permis d’exploration d’hydrocarbures non conventionnels relance la mobilisation.

9FRANCE

Dans leur réponse au mandat de la Com-mission européenne du 23 février dernierportant sur l’interdiction française de miseen culture du maïs MON810, les experts sesont appuyés sur cinq types d’arguments.

Premièrement! : les renvois à un avisantérieur de l’AESA pour les arguments quela France avait déjà utilisés pour justifier sapremière interdiction (adoptée en 2008 etannulée par le Conseil d’État en 2011).Deuxièmement! : les désaccords scienti-fiques entre experts européens et expertsfrançais sur certains articles. Troisième-ment!: les articles lus différemment et quiservent à chacun pour justifier sa position,comme l’étude de Chambers de 2010 uti-lisée par la France pour souligner les ef-fets négatifs du maïs MON810 sur la crois-sance de certains organismes aquatiques,et par l’AESA pour montrer qu’il n’y a au-cune différence observée sur l’abondancede ces organismes. Quatrièmement! : lesaccords sur certains articles mais pourlesquels l’AESA limite la portée ou renvoieà des plans de surveillance post-commer-cialisation. Enfin, les absences de réponsepures et simples.

Mais, quelle que soit l’approche adop-tée, l’AESA conclut, invariablement que “legroupe OGM de l’AESA considère qu’au-cune nouvelle preuve scientifique […]n’était présente dans la documentationapportée par la France en appui de sa dé-cision d’interdiction.”

La France avait surtout pointé que “laréévaluation du MON810 publiée en 2009 n’apas été réalisée selon les nouvelles lignesdirectrices publiées par l’AESA en 2010.”L’AESA ne répond ni à cette critique, ni auxpropos de la France sur l’outil statistique dé-faillant – “la puissance statistique des expé-riences sur les organismes non cibles esttrès limitée”. Or, si l’Etat pétitionnaire doitprésenter une évaluation des risques scien-tifiquement correcte, l’AESA, évaluateur deces risques, doit, elle, juger cette qualité àpartir de ce qui lui est fourni. L’AESA a déjàreconnu cette défaillance de l’outil statis-tique. Pour le maïs MON810, le fait d’avoir va-lidé un dossier sur la base de tests statis-tiques qu’elle juge elle-même inadéquats nesaurait justifier sa persistance dans l’erreur.

Des lacunes dans les donnéesLa conclusion de l’AESA selon laquelle l’in-terdiction française n’est pas justifiée scien-tifiquement est donc à relativiser, car elleporte principalement sur des désaccordsentre experts. Bien malin celui qui tran-chera alors entre des positions divergentes!!

On notera aussi qu’en ce qui concerneles arguments en rapport avec les impactssur les insectes non cibles ou l’apparition derésistance chez les insectes cibles notam-ment, l’AESA renvoie aux plans de surveil-lance après commercialisation – plans dontelle avait pourtant déjà critiqué la mise enœuvre par Monsanto. Et la France rappelle

que de tels plans de surveillance ne sontpas obligatoires, la décision d’autorisationdonnée en 1998 n’en faisant pas état!!

Enfin, la France cite dans son mémoirel’étude récente de Hilbeck et al. qui mon-tre la toxicité de la protéine insecticideBt Cry1Ab sur la coccinelle à deux points(Adalia bipunctata). L’AESA, elle, feint decroire que l’impact évoqué est limité au seulcas décrit de ce coléoptère. Or le pointfondamental de cette publication est bienque la spécificité de la protéine Cry1Abn’est pas limitée à certains papillons (lépi-doptères). La sensibilité d’un coléoptère àcette toxine insecticide soulève donc desproblèmes d’ampleur bien plus généraleau plan environnemental que le seul casde la coccinelle. En viendrait-on à obligerla France à renoncer à l’interdiction duMON810 au prétexte que les études néces-saires pour prendre en compte ces don-nées nouvelles n’ont pas encore été faites!?

Pour la suite, la Commission ne pourraagir seule. Elle pourrait en revanche, surbase de l’avis de l’AESA, proposer aux Etatsmembres d’obliger la France à lever soninterdiction nationale. Mais on imagine malque les sept pays disposant actuellementd’une interdiction nationale (Allemagne,Hongrie, Autriche...) la suivent sur ce ter-rain. Prudente, la Commission a annoncéqu’elle réfléchira à cela après le Conseileuropéen de mi-juin. > ERIC MEUNIER

Délégué général d’Inf’OGM

8 FRANCE

Manifestation des collectifs devant l’Assemblée nationale, à Paris, en mai 2011.

Parlement européen, mai 2010. Rebecca Harms, co-présidente du groupe écologiste, interpelle le président de la Commissioneuropéenne, José Manuel Barroso, au sujet des OGM en France.

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L’UE et les OGM Désaccords d’experts sur l’interdiction française du MON810Les experts du groupe OGM de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) ont estimé, dans un avis publié le 21 mai dernier, que les arguments scientifiques avancés par la France ne permettaient pas de justifier l’interdiction de mise en culture du maïs MON810. Cependant, la lecture minutieuse de cet avis montre que les opinions des experts ne sont pas aussi tranchées.

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10 FRANCE

Ressources Refusons la surconsommation et l’accaparement de terresLes pays les plus riches – infime partie de la population – pillent de plus en plus les ressources des pays du Sud, au détriment des hommes et de l’environnement. En évaluant cette prédation, l’Union européenne fait un geste. Mais il faut continuer à nous mobiliser pour réduire nos consommations.

Alors que les Européens font partie des plusgros consommateurs de ressources aumonde, le Parlement européen a soutenu,le 30 mai dernier, une demande des Amisde la Terre visant à estimer notre utilisationde ressources. Quatre indicateurs ont étéchoisis pour mesurer les impacts cachés denos consommations! : l’empreinte en eau,l’empreinte en terres, la consommation dematières premières et les émissions de car-bone1. Ce premier pas vers une Europe pluséconome dans sa consommation de res-

sources n’est cependant pas un aboutisse-ment. La Commission européenne et lesgouvernements nationaux doivent désor-mais prendre des mesures pour améliorer lafaçon dont nous utilisons les ressources etcesser de retarder leur mise en œuvre. Lesimpacts sociaux et environnementaux de lasurconsommation européenne des res-sources se font en effet déjà sentir.

La pression qu’exerce la consomma-tion européenne sur les terres est sourcede conflits. Dans un monde où la quantité

de terres est limitée, la surconsommationdes uns signifie l’impossibilité pour d’au-tres de répondre à des besoins fonda-mentaux comme cultiver la terre pour senourrir. Sans compter que cela s’accom-pagne d’une dégradation écologique deleurs terres. Actuellement, 60!% des terresque nous consommons sont situés en de-hors de nos frontières2.

Réduire nos consommationsCette surconsommation de terres est laconséquence d’une alimentation trop richeen viande, de notre dépendance à la voi-ture ou encore de la frénésie pour les pro-duits électroniques. Les terres agricolessont ainsi utilisées pour produire l’alimen-tation du bétail ou des agrocarburants,quand elles ne servent pas à installer degigantesques chaînes de production. Cetaccaparement de terres s’accompagned’une extraction de ressources à un rythmeeffréné et engendre des pollutions et desmontagnes de déchets. Les Amis de laTerre interpellent le Commissaire européenchargé de l’Environnement via une péti-tion3 : vous aussi, faites entendre votre voixpour que l’Europe réduise sa consomma-tion en signant cette pétition sur notre siteInternet.

> CAMILLE LECOMTEChargée de campagne Mode de production

et de consommation responsables1 Plus d’informations sur les quatre indicateurs sur http://www.foeeurope.org/resource-use2 Synthèse du rapport “L’Europe, dépendante des terres des autres”3 www.amisdelaterre.org/resources.html

Pour en savoir pluswww.amisdelaterre.org/Dette-ecologique.html

Pétitionwww.amisdelaterre.org/resources.html

Du 7 au 11 juillet dernier s’est tenu à Notre-Dame-des-Landes,près de Nantes, le deuxième forum européen contre les grandsprojets inutiles imposés. Le premier s’était réuni en 2011 à Venaus (Val de Susa, Italie). Le choix de Notre-Dame-des-Landes pour cette deuxièmeédition ne devait bien sûr rien au hasard, la lutte que mènentdepuis des années les habitants contre le projet d’aéroport en faisant un lieu emblématique.Partout en Europe, des projets pharaoniques, dévoreurs de biodiversité, de terres agricoles et de subventions publiques(aménagements et infrastructures de transports, incinérateurs,centrales nucléaires, projets urbains délirants....), ne répondantpas aux besoins des populations mais à ceux d’un systèmeproductiviste, se font concurrence dans la course à la croissance et à la fuite en avant.

L’enjeu de ce forum était d’avancer dans l’identification de ce qu’est un grand projet inutile, de faire converger les luttes et construire ensemble des alternatives. Organiséavec la participation des collectifs No Tav (Italie), Stuttgart 21(Allemagne), Cade (Pays basque), EuroVegas no (Espagne),Stop HS2 (Grande Bretagne) et plusieurs autres, avec le soutien d’associations nationales dont les Amis de la Terre,ce forum a connu deux temps forts : le week-end, une largerencontre entre la population et les différentes lutteseuropéennes, ponctué par une grande action symbolique le dimanche matin ; les trois jours suivants, un travail en ateliersur les nombreuses thématiques liées au thème du forum qui a débouché sur l’adoption d’un texte de conclusion et d’une pétition citoyenne auprès du Parlement européen.

> ALAIN DORDÉ

Non aux grands projets inutiles!! Deuxième forum européen

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Depuis 1971

Eté 2012

DéchetsUne seule solution,la prévention!!“Tout le monde veut sauver la planète, mais personne ne veutsortir les poubelles.” Avant d’en arriver à ce constat, Jean Yanne, auteur decette phrase criante de vérité,! a certainement passébeaucoup de temps à observer les réactions des rive-rains d’usines de traitement des déchets. Florilège depropos entendus au coin d’une benne!: “Il en faut bien,des décharges, mais ‘ils’ n’ont qu’à les construire là oùil n’y a personne” ; ou encore : “Quand même, mainte-nant, avec les technologies modernes, ‘ils’ peuventfaire des usines qui ne polluent pas, qui neutralisent lesodeurs, ou qui produisent même de l’énergie ou de lavapeur d’eau avec les déchets.”

Où se trouve le site" idéal d’implantation d’uneusine"? Quelle est la meilleure technologie d’éli-mination des déchets"? Réponse dans les deuxcas": il n’y en a pas. Un centre de traitement des dé-chets sera toujours une nuisance, même discrète (àl’instar de l’usine d’incinération enterrée d’Issy-les-Moulineaux en région parisienne, aux fumées renduesinvisibles par un système de chauffage) Les Amis de laTerre, impliqués dans plusieurs luttes locales pour unemeilleure gestion des déchets, prennent toujours lesoin de mettre les élus en garde contre la tentation dela fuite en avant technologique. En effet, quelle quesoit la technique retenue pour “gérer” ces déchets

– brûlés, enfouis, compactés, méthanisés, stabilisés… –,cela revient toujours à disperser dans la nature descendres ou des composts remplis de résidus de plas-tiques et de produits toxiques.

Trace indélébile de nos modes de production etde consommation sur notre environnement, l’aug-men tation constante de la quantité et de la toxi-cité des déchets est la racine du problème. Il n’yen fait qu’une seule et unique solution : la prévention. Ilfaut jeter moins. Donc, consommer moins. En France,les quantités d’ordures ménagères et assimilées collec-tées par les municipalités atteignaient 24,8 millions detonnes en 2009, soit une relative stagnation par rapportà 2000. La loi Grenelle 1 vise à réduire la productiond’ordures ménagères et assimilées de 7 % par habitantentre 2008 et 2013, soit 1,5 millions de tonnes enmoins!. Cela représente l’équivalent de presque neuftours Montparnasse! ! Bien que déjà énorme, ce seraitpourtant encore largement insuffisant, compte tenu del’accumulation des déchets des décennies précédentes,qu’aucune technologie n’élimine par magie.

Les reporters de La Baleine ont trouvé aux quatre coinsde France et de Navarre des élus, des entreprises etdes citoyens qui consomment moins, jettent moins… etvivent mieux. > ANNELAURE WITTMANN

Référente Modes de production et de consommation responsables!

1 Source!: Commissariat général au développement durable, 2010.

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exploitants d’incinérateurs y injectent… des produits chimiques.Lesquels génèrent, à leur tour, des effluents liquides et résidus so-lides! : les REFIOM. Hautement toxiques, ces REFIOM sont entrepo-sés dans des centres de stockage spécialisés et constituent unesource de pollution diffuse de l’environnement sur le long terme.

Quant aux fumées évacuées dans l’atmosphère, elles contien-nent toujours, et ce malgré les phases d’épuration, des particulesfines sur lesquelles se sont fixés les polluants. Transportées parles vents, ces particules retombent sur l’environnement, se fixentsur les végétaux et peuvent contaminer toute la chaîne alimen-taire, jusqu’à l’homme. La liste ne s’arrête pas là, puisqu’il fautajouter à cela l’émission de C02 en très grande quantité. “LaFrance, avec ses 127 incinérateurs répartis sur l’ensemble deson territoire, émet près de 10 millions de tonnes de C02 paran”, indique Delphine Lévi Alvarés.

Pollution de l’air et des solsVoici pour l’incinération. Et qu’en est-il de la mise en décharge ?Une fois acheminées sur le site d’une des 250 décharges fran-çaises (aussi nommées centres de stockage ou d’enfouisse-ment), les ordures sont déchargées pêle-mêle dans des trous ap-pelés casiers. Elles sont tassées afin de réduire leur volume et defavoriser la fermentation des matières organiques.

Cette décomposition par fermentation des déchets produit unjus, le lixiviat. Ce jus est chargé de multiples bactéries, de métauxlourds et de substances toxiques provenant des différents dé-chets. Aujourd’hui, les casiers sont tapissés d’une membranecensée isoler le sol de ces jus. Ils sont également équipés dedrains dont le rôle est de capter le lixiviat et de le conduire versdes stations de traitement. “Le problème, précise Delphine LéviAlvarès, c’est que ces membranes ont une efficacité limitée dansle temps. Elles commencent à se fissurer et à perdre leur imper-méabilité avant même que les déchets aient fini de se décompo-ser. D’où des pollutions des sols et des nappes phréatiques.”

La décomposition des déchets produit aussi des gaz et enparticulier du méthane, dont le potentiel d’effet de serre estvingt-cinq fois plus élevé que celui du C02. La législation contraintles exploitants des décharges à mettre en place des systèmesde captation de ces gaz. Sauf qu’en réalité, seule une partie deces derniers est recueillie pour être ensuite transformée en élec-tricité ou en chaleur. Le reste est brûlé dans des torchères, avecpour conséquence le rejet dans l’air de fumées contenant dessubstances toxiques.

A côté de ces deux principaux modes de traitement des dé-chets, se développent d’autres techniques. L’une d’entre elle, letri mécano biologique, est très à la mode (voir encadré ci-des-sous). Delphine Lévi Alvarès décrypte les dessous de ce quipasse pour une panacée. “Attention, le tri mécano biologique estprésenté comme un traitement mais il ne s’agit en fait que d’unpré-traitement. Il ne résout pas du tout le problème car, après lepassage des ordures dans une unité de tri mécano biologique, ilreste encore une grande quantité de déchets qu’il faut soit inci-nérer soit mettre en décharge.”

Le recours à l’incinération n’est pas une fatalitéAlors, que faire ? Les différents modes de traitement des dé-chets utilisés jusqu’à aujourd’hui présentent, tous, des dysfonc-tionnements dont les répercussions sont dramatiques pourl’homme et son environnement.

Pour la référente Modes de production et de consommationdes Amis de la Terre, il existe bien une solution. “La clé, c’est laprévention. Et cela passe notamment par la réduction de laconsommation matérielle. Il faut acheter moins d’objets, privilégierles biens durables, allonger la durée de vie des produits via leurentretien et leur réparation”, déclare-t-elle. “Cela suppose de pro-duire et de mettre sur le marché des produits durables, répara-bles, réutilisables et, dans la même logique, de bannir tout cequi est jetable.”

Annelaure Wittman évoque aussi la question des déchets or-ganiques et insiste là encore sur l’aspect préventif. “En premierlieu, il faut lutter contre le gaspillage alimentaire et faire du com-post. Le compostage de proximité est préférable, pour ne pasavoir à transporter des épluchures dans des camions aux fraisdu contribuable. Il vaut mieux composter chez soi, dans un lom-bricomposteur, un composteur de jardin ou de pied d’immeuble.On peut ensuite utiliser le compost dans son jardin ou dans desespaces publics.” Des collectivités locales et des groupementsde citoyens ont mis en place des actions allant dans ce sens(voir pages suivantes). De toute évidence, le recours à l’inciné-ration et à la mise en décharge n’est pas une fatalité.

> LUCILE PESCADÈRE

1 Chiffres Eurostat pour l’année 20082 Chiffres du Centre national d’information indépendante sur les déchets (Cniid)

Pour en savoir plus www.france-incineration.org

12 DOSSIER DÉCHETS UNE SEULE SOLUTION, LA PRÉVENTION !

Ce matin, en sortant de chez vous, vous avez déposé votre sac-poubelle dans la benne prévue à cet effet. Un geste anodin, ha-bituel… On jette et on passe à autre chose. Mais savez-vous cequi se passe après le passage du camion des éboueurs ?

Gare à la dioxine !En France, un tiers à peine de nos ordures ménagères est recycléou composté. Que deviennent les 68 % restant!? Selon Eurostat,organisme chargé de la production des statistiques officielles del’Union européenne, 36 % des déchets municipaux français sontmis en décharge et 32 % de ces mêmes déchets sont incinérés!.Annelaure Wittmann, référente Modes de production et de consom-mation responsables aux Amis de la Terre, trouve ces chiffres in-quiétants. “Quand on connait la liste des inconvénients liés à cestechniques, ce n’est pas vraiment une bonne nouvelle. Il n’y a pasde mystère : cela signifie que les ordures incinérées ou enfouies,loin de disparaître par magie, se transforment alors en polluants del’air, de l’eau et des sols”, explique-t-elle.

L’incinération, procédé basé sur la combustion des déchets,permet certes de réduire le volume des déchets... Mais elle gé-nère aussi des fumées et des résidus toxiques pour l’hommecomme pour la nature. Chaque tonne d’ordures brûlée dans un

incinérateur produit en moyenne 6 000 m" de fumées, 300 kgde résidus solides – les mâchefers –, ainsi que 40 à 80 kg derésidus d’épuration des fumées (REFIOM)#.

Les mâchefers contiennent des métaux lourds mais aussi dela dioxine, un polluant organique ultra toxique classé cancérigènepar le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). “Leproblème avec la dioxine, c’est qu’il s’agit d’une substance dan-gereuse même à des quantités infimes. On parle de substance‘sans seuil’, car seule l’exposition suffit”, précise Delphine Lévi Al-varès, chargée de mission Incinération et stockage des déchetspour le Centre national d’information indépendante sur les dé-chets (Cniid). Aujourd’hui, les mâchefers sont utilisés commesous-couche routière et disséminés sur tout le territoire françaissans qu’aucune réglementation suffisamment soucieuse de lasanté publique ne vienne encadrer leur utilisation.

Fumées, résidus et effluents toxiquesLa dioxine est aussi présente dans les fumées issues de la com-bustion des déchets. On peut trouver dans ces mêmes fuméesdes métaux lourds, des oxydes d’azote et du soufre. Afin de ré-duire la quantité d’un certain nombre de ces polluants, les fuméessont passées dans différents systèmes de filtration. Pour cela, les

Depuis quelques années, la mode est au tri mécano biologique (TMB). Ses promoteurs le présentent commel’alternative écologique à l’incinération et à l’enfouissement. De quoi s’agit-il!? Le TMB est un procédé industriel qui permetd’effectuer en usine le tri des orduresménagères. Différents systèmes de filtration permettent d’isoler ce qu’on appelle les biodéchets (déchets biodégradables des parcs et jardins, déchets alimentaires et de cuisine, papiers et cartons) afin de les valoriser sous la forme de compost ou d’énergie (biogaz) via une unité de méthanisation. Sur le papier, l’initiative semble tout bénéfice. D’une part, le volume de déchets incinérés ou mis en décharge

diminue et, de l’autre, le biogaz réduitnotre dépendance aux énergies fossiles. Sauf que tout n’est pas si simple.Comme le rappelle Delphine Lévi Alvaresdu Cniid (voir ci-dessus), le TMB ne peut pas être considéré comme un mode de traitement!mais plutôt comme un pré-traitement : plus de la moitié des ordurestransportées sur les sites TMB devrafinalement être incinérée ou enfouie. Ceci pour deux raisons. Premièrement, seules de faiblesquantités de matières recyclablespeuvent être triées par le TMB.Deuxièmement, la qualité du compostainsi produit est sérieusement remise en cause, ce qui conduit à sa mise en décharge plutôt qu’à son épandagesur des terres agricoles. Dans 1 m"

de compost, on peut ainsi trouverjusqu’à 5 kg de verre et métaux, 2 kg de plastiques rigides, 750 g de filmsplastiques, 450 g de métaux lourds, ainsi que des micropolluants(hydrocarbures, paraben, phtalates…)*connus pour leur nocivité – le contactavec ces substances peut provoquer le développement de cancers, de malformations congénitales, de maladies neuro-végétatives et cardio-vasculaires. Craignant une pollution et une dégradation de la qualité des sols,plusieurs chambres d’agriculture,comme en Ile-de-France et dans l’Eure,se sont déclarées défavorables à l’utilisation d’un tel compost.

*Normes NF U44051

Tendance

Tri mécano biologique : trop beau pour être vraiLes cheminées jumelles de l’incinérateur d’Ivry, aux portes de Paris. Le procédé de l’incinération, basé sur la combustion des déchets,permet certes de réduire leur volume... mais il génère aussi des fumées et des résidus toxiques.

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Recyclage Le traitement des déchets, c’est pas du propreChaque année, les ménages français produisent 29 millions de tonnes de déchets!. Seul un tiers de ces ordures est recyclé, le reste est mis en déchargeou incinéré... Une catastrophe pour l’homme et son environnement.""

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Il y a tout juste dix ans, les habitants du pays libournais ont vudébarquer chez eux d’étranges personnes… Elles prétendaientque le contenu de leur poubelle pouvait être récupéré et valorisé.Il n’était pas seulement question du papier et des emballages car-ton mais aussi et surtout des déchets organiques – c’est-à-direl’ensemble des déchets végétaux et alimentaires, appelés “bio-déchets”. Depuis, l’idée – qui, au début, pouvait paraître un peusaugrenue – a fait son chemin. Si tout le monde ne pratique pasencore le tri des biodéchets, une part croissante de la populationa compris l’intérêt d’un tel système de collecte.

Petit retour en arrière. A la fin des années 1990, les élus lo-caux repensent le dispositif de collecte des ordures ménagèresrésiduelles (OMR). Convaincus de l’intérêt que représente un ra-massage sélectif des déchets, ils décident de mettre en place unegestion multi-filières. En toute logique, ils en viennent à s’intéres-ser aux matières organiques (déchets verts et biodéchets) qui re-présentent 40 % du total des OMR – de plus, en territoire viticole,le potentiel local de débouchés pour un compost issu des biodé-chets est important. La conclusion s’impose : pour un tri “à lasource” et une collecte efficaces, il faut impliquer les habitants.

Ne pas culpabiliserC’est ainsi que le Syndicat mixte intercommunal de collecte et devalorisation du Libournais Haute-Gironde (Smicval) met en placeune stratégie pour capter la matière organique. Dans un premiertemps, il conçoit une grande opération de sensibilisation et d’in-formation de la population. Des réunions publiques sont organi-sées dans chacune des 141 communes qui dépendent du syndi-cat. Et les agents du service communication de proximité se lan-cent dans une campagne de porte à porte pour expliquer à chacunl’intérêt et le fonctionnement de la collecte des biodéchets. En par-tant d’un principe simple (toujours d’actualité) : ne pas culpabiliser.

Nicolas Sénéchau, directeur général du Smicval, explique ladémarche. “Surtout pas de discours culpabilisants. D’abordparce que personne ne veut entendre ce genre de propos – etc’est totalement improductif. Le but du jeu, c’est de montrer ceque l’on peut faire avec la matière organique et de présenter les

avantages du dispositif. Nous montrons le compost aux per-sonnes que nous rencontrons, nous leur disons : voilà ce quevous pouvez faire avec les biodéchets qui sont dans votre pou-belle. Nous leur disons aussi : faites ce que vous pouvez. L’es-sentiel, c’est de lancer le processus.”

Composteurs, “bio–seaux” et sacs en amidonEn parallèle, le syndicat organise le dispositif de captation desbiodéchets… ou plutôt les dispositifs. Car là aussi, l’objectif estde faciliter la tâche aux utilisateurs et donc de s’adapter aux par-ticularités locales. Dans les communes rurales, le Smicval distri-bue des composteurs individuels et propose l’aménagement d’es-paces de compostage dans les lotissements. Pour aider les nou-veaux usagers, des “maîtres composteurs” – des volontairesayant bénéficié d’une formation –, organisent régulièrement desanimations sur le sujet. Aujourd’hui, près de 22 % des ménagesdu secteur disposent d’un tel équipement. Dans les zones ur-baines ou semi-urbaines, c’est un système de collecte qui a étémis en place. Les 40!000 habitants des treize communes concer-nées ont désormais un bac de plus sous leur évier (un “bio-seau”)et des sacs en amidon à mettre à l’intérieur. Et le local à poubellesde chaque immeuble a été doté d’un bac conçu pour recevoir cetype de déchets. 130 professionnels (établissements scolaires,commerçants, artisans…) se prêtent aussi au jeu et participent, àtitre expérimental, à cette collecte.

En 2011, 1115 tonnes de biodéchets ont ainsi été compos-tées (soit 24 kg par foyer). Il faut ajouter à cela la matière non me-surable produite par les ménages équipés de composteurs indi-viduels. “C’est relativement faible mais cela s’inscrit dans une dy-namique globale”, déclare Nicolas Sénéchau. “Maintenant, nousréfléchissons à d’autres projets qui nous permettraient de déve-lopper cette filière.” Une étude devrait être lancée dans les moisà venir afin de mieux saisir les réticences éventuelles. Autre piste,en cours d’expérimentation dans l’une des communes!: la baissede la fréquence de collecte du bac d’ordures ménagères au pro-fit des recyclables (emballages et biodéchets). Retours d’expé-riences d’ici un à deux ans. > LUCILE PESCADÈRE

Déchets organiquesJe composte, tu compostes, il composte…En France, des communes et des communautés de communes se sont lancées dans un processus de collecte des déchets organiques. Exemple avec le Smicval, l’organismeresponsable du traitement des ordures dans la région de Libourne.

14 DOSSIER DÉCHETS UNE SEULE SOLUTION, LA PRÉVENTION !

InitiativesRedevance incitative!: l’expérience de ManspachEn 1999, une municipalité du Haut-Rhin mettait en place un nouveau mode de collecte de déchets": la pesée embarquée (aussi appelée redevance incitative). Les Amis de la Terre Haute-Loire et le Collectif valorisons nos déchets (CVD) ont rencontré le maire de la commune. Compte-rendu.

La plate-forme de compostage du Smicval traite les biodéchets préalablement triés par les habitants de la région de Libourne.

Dany Dietmann, maire de Manspach, nous livre son analyse del’expérience collective menée dans sa commune et quelques ré-flexions autour du tri, de la valorisation des déchets et, bien sûr,de la redevance incitative. Compte-rendu.

Première leçon!: il faut porter un autre regard sur les déchets– notamment ne pas oublier que le secteur de la récupération, dutri et du recyclage représente en France un potentiel de 350!000 em-plois. D’autre part, il ne faut pas perdre de vue que le tri sélectifdemande un effort de la part des habitants. Cet effort, pour êtredurable, doit être soutenu par les pouvoirs publics et récompensépar une réduction visible des coûts. Ceci peut être obtenu par unchoix judicieux des investissements publics. Le conseil municipalde Manspach a ainsi refusé en 1990 de participer à la construc-tion de l’incinérateur de Mulhouse car, outre les problèmes sani-taires et environnementaux connus, cela aurait entrainé la multipli-cation par trois du prix du service actuel de gestion des déchets.

Impliquer la populationEnsuite, le dialogue avec les habitants est essentiel. La commu-nauté de communes de la Porte d’Alsace, qui rassemble trente-trois communes et 13 228 habitants, a investi dès le départ dansla participation et l’information de la population. Ainsi, elle a trèsvite organisé des sondages et des débats au sein des conseilsmunicipaux, mis en place un ambassadeur de tri dans les milieuxscolaires et proposé des réunions avec les habitants pour trouverdes solutions concertées...

Dès 1994, l’intercommunalité a promu le compostage via desformations. Il s’agissait d’enseigner à la population les bonsusages en matière de tri et de compostage et de l’aider dans l’uti-lisation de composteurs, individuels ou collectifs. En outre, desplate-formes pour les “biodéchets” avec des accès gérés par ungardien ont été mises à la disposition de la population. Les bio-déchets ainsi collectés représentent 25 à 30 % du poids des dé-chets ménagers. Les effets ont été spectaculaires! : non seule-ment, en soustrayant les biodéchets, le gisement est devenu pluspropre mais, en prime, la masse des ordures ménagères est tom-bée à 200!kg par an et par habitant – contre 375 kg en 1990.

Enfin, pour éviter de pénaliser les personnes à mobilité réduiteet diminuer au maximum les coûts, l’option des déchetteries per-manentes fut écartée au bénéfice de collectes sélectives en porteà porte de certains matériaux (plastiques, papiers et cartons, mé-taux). Le fait de collecter davantage de produits recyclables a pro-curé de nouvelles recettes à la communauté de communes via larevente de ces produits. Ces recettes ont permis d’atténuer lesdépenses réalisées pour mettre en place cette politique de ré-duction des déchets.

Une baisse significativeLa dernière étape a été la mise en place de containers à puces,selon le système de la “pesée embarquée”. Cette innovation tech-nique a donné des résultats à plus long terme : il a fallu dix ans,de 1999 à 2011, pour diminuer significativement la production dedéchets et passer de 200 kg de déchets par an et par habitant à78 kg. Il faut noter enfin que les incivilités (décharges sauvages)ne représentent que 7 m3 de produits résiduels ménagers, soit200 g par an et par habitant.

La communauté de communes de la Porte d’Alsace a conservéla fourniture des bacs (via des marchés publics), la facturation,l’établissement des calendriers de ramassage et la communica-tion. En revanche, elle externalise la collecte et la valorisation desproduits recyclables.

Suite à cette expérience pionnière, les lois Grenelle I et II de2009 et 2010 prévoient la généralisation à l’ensemble du territoirefrançais de la tarification incitative, déclinée soit en taxe (taxed’enlèvement des ordures ménagères, ou TEOM), soit en rede-vance (redevance d’enlèvement des ordures ménagères ou REOM)comprenant une part fixe et une part variable. La part variabledoit être définie en fonction du volume ou du poids des déchetsproduits par un foyer. Toutefois, l’expérience de l’intercommuna-lité de la Porte d’Alsace montre qu’il convient d’avoir une actionsur plusieurs leviers à la fois – notamment sur les leviers péda-gogiques et logistiques –, le seul levier financier ne pouvant tenirlieu de politique publique.

> LES AMIS DE LA TERRE HAUTE-LOIRE

Très efficiente, la démarche de la commune de Manspach s’inscrit cependant dans le long terme : il a fallu dix ans, de 1999 à 2011, pour diminuer la production de déchets et passer de 200 kg de déchets par an et par habitant à 78 kg.

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Depuis un peu plus d’un an, des commerçantsd’un quartier parisien participent à une opération pour réduire la productiond’emballages alimentaires. Témoignages.

Quand les salariés du centre national d’information indépendantesur les déchets (Cniid) sont venus me présenter leur action, j’aitout de suite adhéré. Je ne suis pas une écolo dans l’âme maisça m’a paru important de le faire. C’est ma petite contribution àla protection de l’environnement”, explique Sonia, qui gère avecsa famille la boulangerie “La baguette de Paris”. Cette jeune et dy-namique pâtissière fait partie de la quarantaine de commerçantsdu XIe arrondissement de Paris qui a accepté de jouer le jeu del’opération “Mon commerçant m’emballedurablement”. Mise en place il y a un peuplus d’un an par le Cniid, cette opérationvise à inciter les marchands et leurs clientsà réduire leur consommation d’emballagesalimentaires.

“Un gros travail de sensibilisation”Tous se sont engagés à adopter une ou plu-sieurs des douze propositions d’actionsconçues avec et pour eux. Quelques-unsont décidé de ne pas distribuer automati-quement de sacs ou de couverts en plas-tique, ni de serviettes. Certains ont mis enplace une consigne pour les boîtes et lesbouteilles. D’autres encore invitent les clientsà s’équiper de cabas.

Sonia, elle, a décidé de faire payer lessacs en plastique que, bien sûr, elle ne pro-pose plus systématiquement. Et ça marche.“La quantité de sacs qui sortent du maga-sin a baissé de moitié. Mais ce n’est pastoujours très bien perçu par les clients. Çapeut même parfois donner lieu à des mini-scandales ! Il y a un gros travail de sensibi-lisation à effectuer.”

La jeune femme n’est pas la seule à avoir constaté une réticencede la part des clients. C’est également le cas de Véronique, de la“Boucherie de Charonne”. “Ça ne fonctionne pas du tout. On conti-nue, on s’est engagés, mais c’est très difficile… Les consomma-teurs ne l’acceptent pas. J’ai même perdu une cliente comme ça.”

En revanche, pour Anne-Catherine, la gérante du “Bar àsoupes”, à quelques pas de là, tout se passe bien. “C’est unebonne démarche, cela permet de mettre en commun, de parta-ger les bonnes idées pour produire moins de déchets.” Son petitsecret! : offrir un dessert aux clients qui ramènent régulièrementleurs sacs ou réutilisent les contenants. > L. P.

Pour en savoir plus www.moncommercantmemballedurablement.org

Emballages alimentairesDes commerçants disent stop au gaspillage

16 DOSSIER DÉCHETS UNE SEULE SOLUTION, LA PRÉVENTION !

Notre société de consommation est fondée sur un renouvelle-ment rapide des produits et un culte pour les nouvelles techno-logies. Cette course à l’innovation a pour conséquence un ac-croissement en volume et en toxicité de nos déchets!: vite ache-tés, nos biens sont en général vite jetés. Si le recyclage apparaîtcomme un moyen de valoriser nos déchets, il ne peut constituerla solution ultime car il y aura toujours des déchets qui échap-peront au processus de collecte, de traitement et de valorisa-tion. L’acquisition de nouveaux biens qui ne seront que partiel-lement collectés et recyclés nécessitera le prélèvement de nou-velles ressources.

La réparation permet, elle, de retarder la mise au rebut d’unobjet et donc de réduire notre production de déchets. L’intérêt en-vironnemental de la réparation a été mis en avant par la directivecadre sur les déchets de 2008 qui a érigé le réemploi et la répa-ration comme les options à privilégier dans la gestion des dé-chets, avant même le recyclage. Malgré les bénéfices écono-miques et écologiques de la réparation, le secteur de la répara-tion est en difficulté.

La réparation, un secteur en difficultéLa réparation a été mise à mal par notre modèle de consomma-tion. D’une part, la miniaturisation et la complexification de nosappareils électriques et électroniques ont restreint le recours à laréparation à cause de la difficulté technique et du coût de la ré-paration. Les réparateurs ont dû s’adapter pour réparer nos nou-veaux produits quand, dans le même temps, les constructeurs li-mitaient l’accès aux manuels techniques de réparation et auxpièces détachées.

D’autre part, la baisse des prix dans le secteur du textile aconduit à une surconsommation de vêtements et de linge de mai-son. Ainsi, en France, nous jetons 17 kg de déchets textiles paran et par personne, dont 9 kg de vêtements. Les couturiers ontfait les frais de ce nouveau phénomène. Entre 2006 et 2009, ce

secteur a enregistréune baisse d’activitéimportante!: le nom-bre d’entreprises adiminué de 28 % etle nombre d’emploisde 33 %1. Cepen-dant, avec la criseéconomique et laprise de consciencequ’on ne pouvait plustout jeter, de nou-velles dynamiquesvoient le jour.

Des dynamiquesà encouragerPlus de 50 000 bro-cantes et vide-gre-niers sont organiséschaque année enFrance et les con -sommateurs sont deplus en plus enclinsà acheter des pro-duits de secondemain, comme en té-moigne la progres-

sion régulière des ventes sur les sites de mise en relation typeeBay ou le Bon coin2. Cet engouement pour les produits d’oc-casion est un moyen de faire redécouvrir les savoir-faire des ré-parateurs. Des journées de la réparation commencent ainsi à êtreorganisées par des collectivités ou des associations lors de bro-cantes, pour faire connaître les artisans locaux et redonner auxconsommateurs le réflexe de faire réparer leurs objets3.

La réalisation d’annuaires “de la seconde vie des produits”entre aussi dans cette dynamique. Ces annuaires aident chacunà trouver les bonnes adresses pour faire réparer, louer, emprun-ter, acheter et vendre d’occasion mais aussi donner, échanger ous’informer sur l’allongement de la durée de vie des produits. Uneinitiative à encourager!: une étude a révélé que sur les 63 % deconsommateurs qui avaient l’intention de faire réparer leur objeten panne, seuls 44 % le faisaient effectivement, les autres aban-donnant faute d’avoir trouvé un réparateur en qui ils avaientconfiance1. C’est dans cette logique que Les Amis de la TerreParis lanceront à la rentrée leur annuaire sur le site www.produitspourlavie.org.

Enfin, les structures de l’économie sociale et solidaire, avec entête Emmaüs, Envie et le Réseau des Ressourceries permettentde concilier geste écologique et solidaire. Elles offrent une activitéà des milliers de personnes qui collectent, réparent ou vendent lesobjets, avec pour objectif la lutte au quotidien contre l’exclusion.Toutes permettent de réduire notre pression sur les ressourcesnaturelles et de parvenir à un partage plus équitable des res-sources entre tous les êtres humains. Soutenons-les!!

> CAMILLE LECOMTEChargée de campagne Modes de production et de consommation responsables

1 ADEME, Actualisation du panorama de l’offre de réparation, septembre 2010.2 Mes courses pour la planète, les chiffres de la consommation responsable,édition 2010.3 Pour plus d’informations sur les journées de la réparation : Réseau Idéal,Conseil général de la Dordogne.

AlternativesDonnons une seconde vie à nos objets, pensons à la réparation !La réparation est un geste simple pour réduire nos prélèvements de ressources et notre production de déchets. Faire réparer ses produits permet d’allonger la durée de vie de nos biens et de faire vivre de nombreux artisans de la réparation et les structures de l’économie sociale et solidaire.

Jean-François Patingre est expert en éco-conception. Il a enseigné cette matière pendant plusieurs années à l’université de Cergy-Pontoise. Il évoque pour La Baleine la question du suremballage.

Quelle est la part du suremballage dans notreproduction de déchets ?On ne sait pas répondre facilement à cette question. Selon les dernièresétudes, en ce qui concerne le secteur de l’alimentaire, on estime que 7 à 10% de la production des déchets sont liés au suremballage.Le poids du marketing et le développement des portionsindividuelles sont en grande partieresponsables de cette tendance.

Existe-t-il des réglementationspour contraindre les industrielsà réduire le volume des emballages ?Parmi la multitude de normes et règlements sur les emballages, il existe des directives exigeant des industriels qu’ils n’utilisent que le minimum nécessaire pour emballer leurs produits. Mais cette notion de minimum nécessaire est très floue. Il n’y a pas de contraintesobjectives, d’obligations techniquesnormalisées qui seraient de toute façontrès difficiles à déterminer. De plus, ces réglementations ne s’accompagnentd’aucune mesure coercitive. Dans le domaine de la lutte contre le suremballage, la loi n’est pasforcément l’outil le plus efficace.

Quels sont les leviers d’actionenvisageables ?Le levier le plus efficace est le levierfinancier. Il faudrait augmenter de façon importante la contribution sur les emballages qui ne sont paseffectivement recyclés (ni mêmerecyclables, dans certains cas). Ainsi, les entreprises se tourneraientautomatiquement vers des matériaux etdes conditionnements plus respectueuxde l’environnement. Mais j’insiste aussi sur le rôle fondamental que, nous,consommateurs-citoyens, pouvonsjouer, par exemple en délaissant les portions individuelles, en privilégiantl’achat de pots économiques, d’éco-recharges de lessives, en buvantl’eau du robinet… > PROPOS RECUEILLIS

PAR LUCILE PESCADÈRE

Contre le suremballage “Le levier financier est le plus efficace”

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Anne-Catherine, la gérante du “Bar à soupes”, rue de Charonne, à Paris.

Plus de 50 000 brocantes et vide-greniers sont organisés chaque année en France. Les con sommateurs sont de plus en plus enclins à acheter des produits de seconde main.

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Au cours du mois de mai 2012, les Amisde la Terre se sont invités aux assembléesgénérales (AG) de Total, de BNP-Paribas,du Crédit agricole et de la Société géné-rale. Il s’agissait d’interpeller les dirigeantset d’informer les actionnaires sur les acti-vités désastreuses de ces entreprises.L’objectif est de rendre publics les projetscontroversés dans lesquels ces entre-prises sont impliquées et de faire pres-sion pour obtenir l’arrêt de certains pro-jets – ou, du moins, de réelles avancéesen termes de responsabilité sociale et en-vironnementale.

Lors de l’assemblée générale de Total,les Amis de la Terre ont ainsi interrogél’entreprise sur le très contesté projet d’ex-ploitation de sables bitumeux de Bemo-langa, à Madagascar. Ils en ont profitépour remettre à ses dirigeants un prix Pi-nocchio pour l’ensemble de leur “œuvre”.Malgré le fait que la “transparence” soitl’un des principes fondamentaux affichéspar Total, l’entreprise n’a pas jugé bon dediffuser les questions des actionnaires lorsdes questions orales, sous prétexte qu’il“n’existe aucune obligation légale de re-transmettre l’assemblée générale dansson intégralité”.

Des banques climaticidesEn ce qui concerne la BNP-Paribas, lesquestions ont porté sur son rôle dans la fi-nanciarisation croissante de la nature. Enjanvier dernier, un rapport des Amis de laTerre Europe avait épinglé la banque surses activités et les Amis de la Terre Franceavaient demandé au groupe de retirer dumarché leurs produits dérivés sur les biensalimentaires.

Les responsables de la “banque d’unmonde qui change” ont répondu de façondélibérément ambiguë et ignoré le fait qu’ilscommercialisaient ce type de produits fi-nanciers. Pourtant, en réponse à l’un desquestionnaires qui leur avaient été en-voyés, la banque avait elle-même reconnu,il y a quelques mois, avoir quelque 700 mil-lions d’euros d’exposition aux matièrespremières agricoles – au travers de pro-duits tels que les fonds négociés en bourse(exchange traded funds) et les “produitsdérivés de plusieurs indices de matièrespremières”.

Lors des AG du Crédit agricole et de laSociété générale, les Amis de la Terre ontinterpellé les dirigeants sur leurs investis-sements dans le charbon. En effet, selonle dernier rapport de Banktrack (réseau in-ternational de surveillance des activités dusecteur des banques privées), ces deuxinstitutions appartiennent au club des vingtbanques les plus climaticides. Elles sontnotamment impliquées dans les projets de

centrales à charbon de Kusile et de Me-dupi, en Afrique du Sud. Cette dernièreémettra 25 millions de tonnes de CO2 paran (ce qui équivaut à 5!% des émissionsfrançaises annuelles).

Investissements toxiques Bob Kincaid, un militant étasunien qui luttedepuis de nombreuses années contre l’ex-ploitation du charbon dans les Appalachesétait aux côtés des Amis de la Terre à cesdeux assemblées. La technique utiliséeaux Etats-Unis est appelée le Mountaintopremoval – MTR pour les intimes.

Derrière ces deux mots se cache uneexploitation minière à ciel ouvert quiconsiste à raser à l’explosif jusqu’à 300 mè-tres du sommet des montagnes pour at-teindre les veines de charbon qui se trou-vent en dessous. Cette ruée vers le plustoxique des hydrocarbures nécessite l’uti-lisation quotidienne de plus de 3 000 tonnesd’explosifs. On évalue à plus de cinq centsle nombre de montagnes qui ont déjà étéainsi irrémédiablement détruites, en mêmetemps que quelque 3 200 kilomètres decours d’eau. Or le Crédit agricole et la So-ciété générale détiennent des dizaines demillions d’euros d’actions et d’obligationsdans des entreprises lourdement impli-quées dans le MTR, comme Alpha NaturalRessources, Arch Coal ou Consol Energy.

Bob Kincaid est un homme en colère.Il est président du conseil d’administration

de l’organisation Coal River MountainWatch et l’un des membres fondateurs del’Appalachian Community Health Emer-gency Campaign, deux associations quiluttent contre l’exploitation des mines decharbon dans les Appalaches. Il expliqueque “ce type d’exploitation est un véritablescandale. Il ne pourrait exister sans le sou-tien sans faille des réseaux financiers inter-nationaux. Pourtant, près d’une vingtainede rapports scientifiques prouvent quecette technique d’extraction provoque unnombre considérable de malformationscongénitales, de cancers, de maladies car-diaques et pulmonaires chez les habitantsdes Appalaches.”

Bien entendu, une fois encore, les di-rigeants de ces deux banques ont nié enbloc tout engagement dans ce type deprojets, en invoquant le respect de leurspolitiques sectorielles en matière socialeet environnementale. L’accueil qui fut ré-servé aux Amis de la Terre présents à cesAG fut houleux, mais il en faut plus à Bobpour se décourager. “Aux Etats-Unis, cer-taines assemblées générales se déroulentsous protection policière. Ici, nous avonspeut-être été hués mais certains action-naires sont venus s’entretenir avec nous àla fin. C’est bien la preuve que nous avonsraison d’y aller.” A suivre…

> RONACK MONABAYChargé de campagne

Institutions financières internationales

Assemblées générales de grands groupes françaisDénoncer les activités controversées!Les Amis de la Terre se sont rendus cette année aux assemblées générales de Total et de trois banques françaises. Au programme": sables bitumineux, spéculation sur les matières premières agricoles et mines de charbon. "

18 ACTIONS

Comment la France peut-elleprétendre réduire sa dépendanceénergétique grâce au nucléaire!?Depuis quarante ans, le thème de l’indépendance énergétique grâce au nucléaire civil est un leitmotiv des discours politiques. En réalité, il s’agitd’un mythe, particulièrement vivace, fondésur des manipulations statistiques – dontla principale consiste à considérer, dansles indicateurs officiels, l’uranium commeune banale matière première, alors que le pétrole et le gaz sont comptabiliséscomme des matières énergétiques. Or, dès l’origine de son programmenucléaire, la France importe une largeproportion du combustible et, depuis2001, son intégralité.Pire, cette “indépendance énergétique”revient à considérer le sous-sol des anciennes colonies comme propriétéfrançaise. C’est particulièrement vrai pour certains Etats africains comme le Gabon et le Niger, dont les minesalimentent depuis des décennies le nucléaire français. Nier notredépendance à l’uranium africain revient à passer sous silence la privation desouveraineté et le pillage de leur sous-sol.

On retrouve là une certaine vision de la politique française en Afrique…Cette politique énergétique est au croisement de la propagande nucléaireet de la rhétorique néo-coloniale.

On retrouve les mêmes protagonistes dans chacun de ces deux domaines. De Gaulle est à la fois le fondateur du Commissariat à l’énergie atomique et l’instigateur, avec Jacques Foccart, de la Françafrique. Même chose pour PierreGuillaumat qui a été le père du programmenucléaire français – de la bombe au recoursà l’atome par EDF – puis le premierprésident d’Elf, dont la caisse noire finançales barbouzeries françafricaines. Ce néo-colonialisme s’est perpétué jusqu’à tout récemment : Nicolas Sarkozy a soutenu Areva lors des négociations du prolongement de son contrat au Niger.Areva a aussi recours aux “diplomates”parallèles, tels que le colonel Denamur,ancien attaché militaire à l’ambassade de France au Niger, Dominique Pin, un ancien de la cellule Afrique de l’Élysée,Patrick Balkany, maire de Levallois-Perret,ou le Belge George Forrest – un hommed’affaires surnommé le vice-roi du Katanga [au sud de la Républiquedémocratique du Congo, ex-coloniebelge, cette région est réputée pour la richesse de son sous-sol].

Qu’en est-il des populationsconcernées!?L’exploitation de l’uranium engendre une triple catastrophe. D’abord pourl’environnement : la pollution radioactives’ajoute aux ravages des industriesextractives ; déchets et stériles2 sontlaissés à l’air libre et les nappes

phréatiques et le sol sont contaminés de façon irrémédiable. Pour la santé,ensuite : jusque dans les années 1990,aucune des mesures de protection et de suivi des travailleurs, appliquées dans les mines françaises, n’étaitrespectée dans les mines gabonaises ou nigériennes.Et, bien sûr, pour les populations : les expropriations, la destruction du pastoralisme nomade touareg et le développement de bidonvilles dans lescités minières constituent une catastrophesociale. Quand les mines ferment, ces villes sont abandonnées faute d’activité et à cause de la pollution radioactive. > PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE COLLET

1 Editions Agone.2 stériles!: produits constitués par les sols et les roches lors de l’exploitation d’une mine.

Rencontre L’épopée d’Areva en AfriqueEn publiant Areva en Afrique1, Raphaël Granvaud et l’association Survie dénoncent le mythe de l’indépendance énergétique française et dévoilent les dessous de l’accaparement de l’uraniumafricain par Areva au prix d’ingérences politiques et de conséquences environnementales, sanitaires et sociales catastrophiques pour les populations locales. Entretien avec l’auteur.

19

Les Amis de la Terre ont mené en 2011 un travail importantautour de la refonte du site Internet principal de l’associationwww.amisdelaterre.org, dont le lancement est prévu à la rentrée 2012. Grâce à un menu enrichi, le nouveau siteprésentera les différentes activités de l’association, réparties en cinq sections : transition écologique ; agriculture, ville et biodiversité ; justice économique ; énergie et industriesextractives ; risques et technologies. Une place plus importantesera consacrée à l’identité des Amis de la Terre France : notrefédération, riche de groupes locaux, d’alliés et de partenaires,membre du premier réseau écologiste mondial, pâtitcependant en France d’un réel manque de notoriété. Il est urgent de le combler ! De même, la transversalité des actions menées sur le terrain par les groupes et la fédération sera valorisée, comme les manières d’agir avec les Amis de la Terre, de prendre part à la vie associative,d’exploiter les potentialités offertes par les réseaux sociaux,etc. Enfin, avec un espace dédié, vous trouverez plusfacilement en ligne les articles de La Baleine. Merci à tous les bénévoles et salariés qui ont pris part à ce projet !!

Des journées d’échanges autour de ce site sont prévuesen Rhône-Alpes, en Midi-Pyrénées et en région parisienne.Pour en savoir plus, n’hésitez pas à contacter Caroline Prak,chargée de communication [email protected]

InternetUn nouveau site pour les Amis de la Terre

Des militants étasuniens protestent contre le soutien de Bank of America aux industriesminières. Des banques françaises sont elles aussi impliquées dans le Mountaintopremoval, un procédé qui dévaste les montagnes, notamment celles des Appalaches.

“Nier notredépendance à l’uraniumafricain revient à passer sous silence la privation de souverainetéet le pillage de leur sous-sol.”

Page 11: La Baleine 170 - Déchets, une seule solution : la prévention !

Je suis prêt. J’avance invisible dans l’hy-permarché. Personne ne se doute de cequi se trame. Pourtant, je vais faire, seul,échec au complot mondial de l’emballageplastique.

Premier objectif! : jus de fruits. Unfroid sibérien règne dans les allées. “Bio”en grosses lettres sur l’étiquette desbouteilles. Je touche, c’est mou. Pouah!!Deuxième essai! : emballage d’apparencecarton. Faux. C’est du complexe triplecouche. Mauvais. Que faire! ? Un angepasse avec des jus en bouteilles de verredans son caddy. Cela existe. Je les trouve.Objectif atteint.

Progression vers les fruits et légumes.Haricots verts en vrac. Je vois de multiplesmains d’automates arrachant d’un rouleaudes sacs translucides dans lesquels ellesjettent qui ses tomates bios, qui ses as-perges sauvages, ses olives certifiées, sesconcombres “circuit court”!; un végétal parsac pour la pesée. La polymérisation desmonomères d’éthylène et son aboutisse-ment!: le sac pétro-plastique dans le ven-tre de la tortue luth, connaît pas.

Comment emballer mon poisson!? Que faire avec mes haricots en vrac!? J’aiune illumination. Je déniche les sacs-pou-belle biodégradables à base d’amidon demaïs, sans bisphénol A, s’il vous plaît!! Deretour devant mes haricots, un doute af-freux m’étreint!: et si, à leur place, on plan-tait du maïs transgénique pour fabriquerdes sacs biodégradables! ? Bon, désor-mais, je me servirai en vrac avec mon seulcabas au vrai marché de rue du jeudi.

Aux viandes, c’est sans appel. Tout estsous barquette – non dégradable, non re-cyclable, non réutilisable et, heureusement,non fractionnable. Direction la poissonnerie.

Comment embarquer mon filet de morue!?j’hésite. Une queue s’est formée. La ten-sion monte. Pas de temps à perdre. Fina-lement le préposé abdique et place mamorue dans mon sac-poubelle bio vert-fluoavec une moue de dépit. “Ça va dégouli-ner”, dit-il tristement dans l’indifférence gé-nérale. Je suis toujours invisible du vraimonde. Le sac bio aussi.

Contenants en verreVoilà le beurre dans du papier et les pâtesdans des boîtes en carton. Voici de lacrème fraîche en pot de verre, des yaourtsaussi. Le café! ? A la rigueur la boîte demétal de l’ami Max-l’équitable fera l’affaire.Mais son couvercle en plastique pose pro-blème. J’irai demain me servir chez le tor-réfacteur du coin.

Au rayon fromages, la préposée s’aper-çoit un instant de mon existence parallèleen mettant mon Crottin de Chavignol dansle sac poubelle bio. Elle comprend. Ellemurmure “Ah!! vous avez bien raison…” Etd’un geste d’automate la voilà qui saisit ànouveau un sac pétro-plastique dans lequelelle précipite un excellent Curé-nantais

convoité par la cliente suivante. Ce fut, jel’avoue, une déception terrible. Je faillisabandonner mais, une fois encore, je résis-tais. Huile ? dans du verre. Jambon à la dé-coupe ? dans du papier. Savon ? dans dupapier aussi. Bravo!!

Et puis… catastrophe! ! Produit-vais-selle, lessive, lait longue-conservation : tousotages de contenants carbonés. Commepour la viande, il me faudra sécuriser dessources d’approvisionnements en vracchez les biocoops.

A la caisse, mes sacs poubelles bio-verts chargés de poissons, de choucroute,de haricots, de fromages, défilent joyeuse-ment sans aucun emballage plastique. Jejubile, j’ai vaincu!!

Derrière moi, les clients sont silencieux.Le regard absent. Leurs chariots sont bour-rés à ras bord de produits plastifiés. Au-cune question. Je quitte les lieux, ni vu niconnu. Pourtant, comme disait l’autre surla lune! : j’ai fait un petit pas pour un hu-main, mais un grand bon pour l’humanité.C’est pas rien! ! Il ne me reste plus qu’àpasser à la télé pour que j’existe.

> ALAIN ZOLTY

PratiquesAcheter sans plastique… le parcours du combattant Notre reporter s’est lancé un défi de haute volée": remplir son chariot en évitant tout produit emballé dans du plastique. Récit.

HumeursÇa sent le roussi Dans le domaine des gadgets high-tech, les liseuses numériques ont, semble-t-il, encore des difficultés à trouver acquéreurs. Il est vrai que le livre papier résiste et conserve tout son charme, en sollicitant discrètement d’autres sens que la vue. Pour n’évoquer que l’odorat, qui n’a jamais apprécié l’odeur de poussière des ouvrages d’antan ? Forte de ce constat, une entreprise audacieuse a voulu contribuer à la promotion de la lecture électronique en offrant la possibilité de lire une œuvre numérique tout en ayant la sensation de “sentir” un vrai livre. Ses hardis concepteurs ont créé Smell of Books (odeur de livres), une bombe aérosol qui parfume votre écran en reproduisant l’odeur du papier imprimé. Mais pourquoi s’arrêteren si bon chemin ? Après avoir donné une odeur aux liseuses numériques, pourquoi ne pas personnaliser à leur tour les œuvres qu’elles contiennent ? On pense évidemment à la fragrance d’une petite madeleinetrempée dans le thé pour agrémenter la lecture de la Recherche du temps perdu de Proust, au parfumvénéneux des Fleurs du mal de Baudelaire, aux mille senteurs de la Provence pour l’œuvre de Giono, et aux effluves de goudron frais pour aromatiser Sur la route de Kerouac. Déjà complètement embaumés pour notre part, nous vous laisserons imaginer le fumet de La nausée de Sartre et résoudre le casse-tête du parfum de l’Argent de Zola – puisque, comme chacun sait, celui-ci n’a pas d’odeur ! > ALAIN DORDÉ

Depuis 1971Le Courrier de la Baleine Le journal des Amis de la Terre

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C’est chez le boucher qu’il est le plus difficile d’éviter le plastique...