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Date : 27/03/2012 Page : 45/ 77 Introduction au RET et à ses applications pour étudier les interactions protéine-protéine V APPLICATION DES TECHNIQUES DE RET A LANALYSE DES INTERACTIONS PROTEINE- PROTEINE : CAS DES RECEPTEURS COUPLES AUX PROTEINES G (RCPG) Les RCPG sont des protéines à sept domaines transmembranaires exprimées au niveau de la membrane plasmique des cellules. A l’interface entre le milieu extra- et intracellulaire, ces récepteurs assurent la reconnaissance de stimuli extracellulaires et initient en réponse des cascades d’événements intracellulaires. Les RCPG ont longtemps été considérés comme des récepteurs présents à la membrane uniquement sous forme de monomères. Les avancées techniques de RET et les nombreux travaux réalisés dans le domaine de la réceptologie ont toutefois permis de remettre en question ce dogme. Il a ainsi été proposé que les RCPG pouvaient être aussi exprimés à la membrane plasmique sous forme d’oligomères. La notion d’oligomérisation est un terme général qui décrit l’association de protéines au sein d’un même complexe. La structure minimale d’un oligomère s’organise autour de deux protéines formant un dimère. Une association en homodimères correspond à une interaction entre deux protéines identiques et une association en hétérodimères à deux protéines différentes. Cependant, les techniques d’analyse de RET ne permettent pas toujours de distinguer les formes dimériques des autres formes oligomériques (trimères, tétramères, etc.). L’objet de ce chapitre est de présenter les avantages et les limites des méthodes de RET les plus couramment utilisées pour mettre en évidence des interactions protéine-protéine. De plus, nous discuterons brièvement de l’influence de la taille et du positionnement des sondes fluorescentes par rapport à la taille des complexes protéiques étudiés et par rapport au transfert d’énergie. A/ LES FLUOROPHORES ORGANIQUES EN FRET ET TR-FRET 24 Les fluorophores organiques sont de petites molécules qui nécessitent d’être couplées soit à des groupements réactifs (TétraCystéine FlAsH par exemple) lesquels vont réagir directement avec la protéine cible, soit couplés à des « sondes » (anticorps, SNAP-tag, Halo-tag, etc.). Leur utilisation en RET implique donc d’utiliser des méthodes qui permettent de marquer spécifiquement les protéines d’intérêt avec 24 Voir la revue Cottet M et al., Frontier in Endocrinology 2012.

V – A Les RCPG sont des protéines à sept domaines

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Introduction au RET et à ses applications pour étudier les interactions protéine-protéine

V – APPLICATION DES TECHNIQUES DE RET A L’ANALYSE DES INTERACTIONS PROTEINE-PROTEINE : CAS DES RECEPTEURS COUPLES AUX PROTEINES G (RCPG)

Les RCPG sont des protéines à sept domaines transmembranaires exprimées au

niveau de la membrane  plasmique  des  cellules.  A  l’interface  entre  le  milieu  extra- et

intracellulaire, ces récepteurs assurent la reconnaissance de stimuli extracellulaires

et initient en réponse des cascades d’événements intracellulaires. Les RCPG ont

longtemps été considérés comme des récepteurs présents à la membrane

uniquement sous forme de monomères. Les avancées techniques de RET et les

nombreux travaux réalisés dans le domaine de la réceptologie ont toutefois permis

de remettre en question ce dogme. Il a ainsi été proposé que les RCPG pouvaient

être  aussi   exprimés  à   la  membrane   plasmique   sous   forme  d’oligomères. La notion

d’oligomérisation  est   un   terme  général   qui   décrit   l’association  de   protéines  au   sein  

d’un   même   complexe.   La   structure   minimale   d’un   oligomère   s’organise   autour   de  

deux protéines formant un dimère. Une association en homodimères correspond à

une interaction entre deux protéines identiques et une association en hétérodimères

à deux protéines différentes. Cependant, les   techniques   d’analyse de RET ne

permettent pas toujours de distinguer les formes dimériques des autres formes

oligomériques (trimères, tétramères, etc.).

L’objet  de  ce  chapitre  est  de présenter les avantages et les limites des méthodes de

RET les plus couramment utilisées pour mettre en évidence des interactions

protéine-protéine.  De  plus,  nous  discuterons  brièvement  de  l’influence  de  la  taille  et

du positionnement des sondes fluorescentes par rapport à la taille des complexes

protéiques étudiés et  par  rapport  au  transfert  d’énergie.

A/ LES FLUOROPHORES ORGANIQUES EN FRET ET TR-FRET24

Les fluorophores organiques sont de petites   molécules   qui   nécessitent   d’être  

couplées soit à des groupements réactifs (TétraCystéine FlAsH par exemple)

lesquels vont réagir directement avec la protéine cible, soit couplés à des « sondes »

(anticorps, SNAP-tag, Halo-tag, etc.). Leur utilisation en RET implique donc d’utiliser  

des méthodes qui permettent de marquer spécifiquement les protéines  d’intérêt  avec 24 Voir la revue Cottet M et al., Frontier in Endocrinology 2012.

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des fluorophores soit donneur soit accepteur  d’énergie25. Nous ne décrirons ici que

les techniques couramment utilisées sur la plateforme ARPEGE.

Les sondes de type anticorps

Les anticorps couplés à des fluorophores (anticorps fluorescents) sont utilisés depuis

de nombreuses années en microscopie de fluorescence et en cytométrie de flux.

Depuis les années 2000, les anticorps sont également utilisés comme sondes

fluorescentes pour étudier en RET l’oligomérisation   des   Récepteurs   Couplés   aux  

Protéines G (RCPG) à la surface cellulaire26. La grande diversité des anticorps et

leur facilité de marquage avec des molécules fluorescentes en font un outil très

puissant pour ce genre d’analyse.

Principe de la méthode : Cas  de  l’homodimérisation Des cellules exprimant le récepteur membranaire d’intérêt  sont   incubées  avec  deux  

anticorps monoclonaux portant respectivement les fluorophores donneur et

accepteur  d’énergie.  Ces  deux  anticorps  sont soit dirigés contre le même épitope27

(étude   d’homodimères)   soit dirigés contre deux épitopes différents (étude

d’hétérodimères). Si les deux anticorps marqués   d’un   fluorophore   donneur   et  

accepteur sont dirigés contre le même épitope, il est nécessaire de les utiliser à la

même concentration afin de ne pas favoriser le marquage du récepteur par un

anticorps plutôt que l’autre28. Sous cette condition, les deux anticorps donneur et

accepteur   d’énergie   ont la même probabilité de marquer les récepteurs d’intérêt.

Ainsi, statistiquement 50% des homodimères seront marqués avec un anticorps

donneur  et  accepteur  d’énergie  alors  que  25%  seront marqués avec deux anticorps

donneur et 25% avec deux anticorps accepteurs d’énergie  (Figure 34).

25 Hinner MJ and Johnsson K, Curr Opin Biotechnol. 2010. 26 Maurel D et al., Anal Biochem. 2004. 27 Un  épitope  est  la  partie  d’un  antigène  reconnue  par  un  anticorps.  Dans  le  cas  de  l’étude  de  l’oligomérisation  des RCPG les épitopes sont souvent de petites étiquettes ou tag (HA, FLAG, etc.) insérées au niveau de la séquence codante du domaine N-terminal des RCPG. 28 On   considère   que   le   marquage   chimique   d’un  même   anticorps   avec   un   fluorophore   donneur   ou   accepteur  d’énergie  ne  modifie  pas  l’affinité  pour  son  épitope.

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Donneur Accepteur

Donneur Donneur

Accepteur Accepteur

RET

Pas de RET

Pas de RET

50%

25%

25%

Figure 34. Etude de  l’homodimérisation des RCPG avec des anticorps fluorescents en RET. Le signal de RET mesuré représente 50% des homodimères présents à la membrane. 25% des homodimères sont respectivement marqués soit avec deux anticorps donneur soit avec deux anticorps accepteurs d’énergie qui ne permettent pas un  transfert  d’énergie.

Cas  de  l’hétérodimérisation Pour étudier des hétérodimères de RCPG, deux anticorps monoclonaux distincts

portant les fluorophores donneur  et  accepteur  d’énergie  sont  généralement utilisés.

Les affinités des deux anticorps pour leurs épitopes respectifs peuvent être

différentes et doivent donc être déterminées au préalable en réalisant des courbes

de saturation29.

Dans le cas où les deux anticorps ont la même affinité pour leur cible alors 100% des

hétérodimères seront ciblés par un anticorps donneur et un anticorps accepteur

d’énergie (Figure 35). L’efficacité   du marquage, correspondant au nombre de

récepteurs sur lesquels se fixe un anticorps, dépend  de   l’affinité  des  anticorps  pour  

leurs épitopes. Cette efficacité peut être optimisée en faisant varier la concentration

des anticorps et/ou  le  temps  d’incubation. 29 Les  courbes  de  saturation  consistent  à  incuber  jusqu’à  l’équilibre  des  cellules  exprimant le  récepteur  d’intérêt  avec  des  concentrations  croissantes  d’anticorps.  Des  cellules  n’exprimant  pas  le  récepteur (cellules Mock) sont utilisées pour déterminer le marquage non spécifique des  anticorps  sur  les  cellules.  Une  fois  l’équilibre  atteint, les cellules  sont  lavées  et  le  signal  spécifique  déterminé.  Le  Kd  (constante  de  dissociation)  de  l’anticorps  pour  sa  cible  est  déterminé  en  représentant   le   signal   spécifique  en  fonction  de   la  concentration  d’anticorps  utilisée.  A  l’équilibre,  les  vitesses  d’association et de dissociation des anticorps sur leur épitope sont égales.

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Donneur Accepteur

RET

100%

Figure 35. Etude de  l’hétérodimérisation des RCPG avec des anticorps fluorescents en RET. Le signal de RET mesuré représente 100% des hétérodimères co-marqués (+/- bruit de fond). N.B. : si les récepteurs étudiés ne forment pas que des hétérodimères (existence de

monomères, homodimères, etc.) toutes   les  paires  d’anticorps  ne  donneront   pas  un  

signal de RET. D’autre  part,  si  l’affinité  de  l’anticorps pour son épitope se situe autour

du nanomolaire (nM), il faudra incuber les cellules avec une concentration

d’anticorps  autour  de  10 nM (équivaut à 1.5 g/ml)30 pour être saturant à  l’équilibre31

c’est  à  dire  pour  marquer 90% des épitopes (récepteurs). Enfin, la gêne stérique peut

diminuer  l’accessibilité  des  épitopes  aux  anticorps.

Avantages de cette méthode :

Les anticorps monoclonaux utilisés dans les techniques de RET sont généralement

dirigés contre de petites étiquettes (ou tag) de 6 à 15 résidus (HA, myc, FLAG, 6his,

etc.). L’impact  de  ces  étiquettes  sur  la  conformation  des  récepteurs  est  généralement

faible surtout lorsque celles-ci sont insérées au niveau des domaines N-terminaux

des récepteurs de type RCPG. De plus, les anticorps disponibles dans le commerce

présentent de bonnes affinités pour leurs épitopes ce qui permet de les utiliser à de

faibles concentrations (1 – 10 nM) réduisant ainsi les problèmes de marquage non

spécifique des cellules.

Dans   le  cadre  de   l’étude  des  phénomènes  d’oligomérisation  des  RCPG,   l’utilisation  

d’anticorps   fluorescents   est   un   atout. En effet, les anticorps sont incapables de

traverser la membrane plasmique et par conséquent, seuls les récepteurs exprimés 30 La  masse  molaire  d’un  anticorps de type IgG est de 150000 g/moles. 31 Il  a  été  montré  que  l’équilibre  est  atteint  au  bout  de  8h  à  4°C  pour  un  anticorps  anti-HA-Alexa647 utilisé à 3 nM sur le récepteur HA-V1a (Albizu L. et al., J. Med. Chem. 2006).

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Noyau

Golgi

à la surface des cellules, sont reconnus. Ainsi, les récepteurs intracellulaires encore

engagés dans les voies de synthèse ne sont pas marqués (Figure 36).

Figure 36. Etude de la dimérisation des RCPG avec des anticorps fluorescents en RET. Le signal de RET mesuré provient uniquement de récepteurs exprimés à la surface des cellules qui ont été marqués avec des anticorps fluorescents.

Cette  technique  peut  être  utilisée  en  FRET  classique  via  l’utilisation  de  fluorophores  

organiques ou en TR-FRET  via  l’utilisation  de  cryptates  de  lanthanide (chapitre IV).

Limites de cette méthode :

Les anticorps sont de grosses molécules de 150 KDa qui peuvent potentiellement

perturber le fonctionnement des récepteurs cibles. Leur taille peut aussi avoir une

influence sur les analyses de RET. Schématiquement un anticorps de type

immunoglobuline G (IgG)32 peut être modélisée sous la forme de cylindres33 (Figure

37).

32 Les  IgG  sont  la  classe  d’immunoglobuline  la  plus  abondante  dans  le  sang  (75  à  80  %  des  anticorps circulants). 33 Tiré de Snapp EL et al., Current Protocols in Cell Biology 2006.

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a/ b/

c/ Figure 37. Taille des anticorps et répartition des fluorophores. a) volume théorique dans lequel peut se trouver un fluorophore fixé à la surface   d’un   anticorps.   b)   amplification   du   signal   par   les anticorps.   c)   structures   d’un   dimère   de   RCPG   (PDB : 1N3M) et   d’une   immunoglobuline   G (PDB : 1IGT).

En   tenant   compte   de   la   flexibilité   de   l’anticorps   et   de   la   répartition   aléatoire   des  

fluoropohores sur toute sa surface (un anticorps porte en général de 1 à 8

fluorophores) 34 , on peut schématiquement déterminer le volume théorique dans

lequel peut se trouver un fluorophore. Sa grande taille (3-4  fois  celle  d’un  RCPG)  et  

la distribution aléatoire des fluorophores sur sa surface, font de l’anticorps une

véritable « antenne » qui permet   d’augmenter   la   probabilité   du RET (Figure 37,

anticorps versus protéines fluorescentes). Cette amplification est un atout en terme

de sensibilité du signal mais peut aussi potentiellement représenter une limitation en

favorisant un RET non spécifique entre des récepteurs proches mais non associés.

Enfin, le marquage des récepteurs par les anticorps fluorescents est réversible et le

temps   d’incubation   permettant   d’atteindre   l’équilibre est variable   d’un   anticorps   à  

l’autre ce qui implique  des  étapes  d’optimisation.

34 Les fluorophores organiques sont attachés aléatoirement et de manière covalente par des groupements amines ou thiols sur les anticorps.

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G

O6-methyl

AGT

AGT methyl

G

AGT dégradation

O6-benzylguanine (BG) portant un fluorophore

Guanine

SNAP SNAPprotéine protéine

La technologie SNAP-tag

- La protéine SNAP-tag : Une  autre  manière  de  marquer  une  protéine  d’intérêt  est  d’utiliser  une  protéine auto-

marquante (self-labeling protein tag), tel que SNAP-tag. Cette protéine de 20 kDa est

dérivée   de   l’O6-alkylguanine-DNA alkyltransferase humaine (AGT). L’AGT   est   une  

protéine  nucléaire  de  réparation  de   l’ADN  qui   reconnaît  et  enlève  des  groupements  

alkyls portés par les guanines (Figure 38-a). Cette protéine a été modifiée par

évolution dirigée par les techniques du phage et yeast display dans le but notamment

de supprimer ses propriétés de liaison  à   l’ADN  et  d’accroitre sa spécificité pour de

petits substrats mimétiques des guanines alkylées. Cette protéine peut être ainsi

marquée de manière spécifique et covalente dans les cellules en utilisant des

composés de type O6-benzylguanine (BG) portant le fluorophore. SNAP-tag peut

être   fusionnée   par   biologie   moléculaire   à   une   protéine   d’intérêt   et   ainsi,   marquer

indirectement cette dernière avec un fluorophore (Figure 38-b).

a/ b/

Figure 38. La réaction de marquage SNAP-tag. a) Mécanisme de réparation  de   l’ADN  par   l’O6-alkylguanine-DNA alkyltransferase (AGT). b) Réaction de marquage de la protéine SNAP-tag.

Cas  de  l’homodimérisation : Comme  précédemment   avec   les  anticorps,   il   est   possible   d’utiliser   l’outil SNAP-tag

pour étudier   l’oligomérisation  des  RCPG  (homodimères). Il est nécessaire pour cela

d’optimiser au préalable l’efficacité  de  marquage des récepteurs fusionnés au SNAP-

tag en faisant varier la concentration des substrats donneur (BG-donneur) et

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-9 -8 -7 -6 -5

0

4000

8000

12000

+ BG-donneur à une concentration fixe

[BG-Accepteur] (log M)

Sign

al d

e FR

ET (u

.a.)

SNAP SNAPSNAP SNAP SNAP SNAP

D AD AAD

Donneur Donneur

Accepteur Accepteur

RET

Pas de RET

Pas de RET

SNAP SNAP

Donneur Accepteur

SNAP SNAP

SNAP SNAP

50%

25%

25%

accepteur (BG-accepteur)   afin   d’obtenir un marquage équimolaire (50% des

récepteurs SNAP-tag marqués avec le donneur et 50% marqués avec   l’accepteur)

(Figure 39). Cette étape  d’optimisation est indispensable car en fonction de la nature

des fluorophores portés par le substrat BG, les cinétiques de marquage de la

protéine SNAP-tag peuvent être différentes.

a/ b/

Figure 39. Etude de l’homodimérisation  des  RCPG  avec  la  technologie  SNAP-tag en RET. a) le sommet de la courbe en cloche représente le signal de RET maximum. Il correspond au marquage équimolaire (50/50) des récepteurs SNAP-tag avec les fluorophores donneur et accepteur d’énergie. Dans cet exemple, le BG-donneur est à 5 M   (concentration   fixe   dans   l’expérience)   et   le   pic   de   la  

courbe correspond à 0,2 M de BG-accepteur. Il faut donc 25 fois moins de BG-accepteur que de BG-donneur pour obtenir un marquage équimolaire des protéines SNAP-tag. Ceci reflète la différence de réactivité entre les deux substrats. b) 50% des couples de fluorophores formés au niveau des homodimères permettent un RET. u.a. = unité arbitraire. Avantages de cette méthode :

Par rapport aux anticorps, la protéine SNAP-tag est 7 fois plus petite ce qui réduit les

risques   d’encombrement   stérique 35 . De plus, la réaction de marquage est

35 Volume occupé par une molécule pouvant gêner l'approche d'un réactif ou d'une autre molécule.

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irréversible, rapide36 et stœchiométrique (un seul fluorophore par protéine cible) ce

qui   permet   d’obtenir   des   résultats   quantitatifs (détermination du nombre de

récepteurs marqués). De nombreux substrats fluorescents perméants et non

perméants 37 sont   commercialement   disponibles   ce   qui   permet   d’envisager   des

marquages intracellulaires (substrats perméants) et des marquages spécifiquement

de surface (substrats non perméants). Enfin, il est possible de sélectionner très

facilement différents couples de fluorophores pour des analyses de RET en

changeant simplement les couples de substrats fluorescents sans avoir à refaire les

protéines recombinantes.

Limites de cette méthode :

Bien que la protéine SNAP-tag   soit   plus   petite   qu’un   anticorps,   sa   taille   reste  

toutefois suffisamment importante pour potentiellement générer de   l’encombrement  

stérique. De plus, sa structure (domaines N- et C-terminaux distants), associée à sa

taille, rend difficile l’insertion du SNAP-tag dans une protéine sans  que  cela  n’affecte  

son repliement ou sa fonction. Enfin, comme pour les anticorps il est nécessaire

d’optimiser  les  conditions  de  marquage.

Pour ne pas interférer avec l’activité des récepteurs étudiés, le SNAP-tag est

généralement inséré au niveau du domaine N-terminal du RCPG. Lorsque   l’on  

réalise des études de dimérisation par RET il est essentiel de prendre en compte la

taille de ce  domaine  dans   l’analyse   des   résultats. En effet, les RCPG de classe A

(récepteurs adrénergiques, etc.), ont un petit domaine N-terminal faisant une

trentaine   d’acides   aminés   alors   que   les   récepteurs   de   classe   C   (récepteurs

métabotropiques du glutamate, etc.) ont un long domaine N-terminal très bien

structuré de 600 acides aminés environ. Deux récepteurs avec des domaines N-

terminaux différents pourront donc donner des résultats de RET très variables alors

même que les récepteurs forment des dimères (Figure 40).

36 Généralement  autour  d’une  heure  d’incubation  pour  des  concentrations oscillant entre 100 nM et 1 M selon les substrats (BG-fluorescéine, BG-Cy5, etc.). 37 Propriété des substrats à traverser ou non la membrane plasmique des cellules.

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SNAP-tag k (M-1s-1)*

BG 100000

BC 30

CLIP-tag k (M-1s-1)*

BG < 1

BC 1000

SNAP SNAP SNAP

SNAPRET

Pas de RET

Figure 40. Analyse de la dimérisation des RCPG avec la méthode SNAP-tag en RET. Panel gauche : deux RCPG avec de petits domaines N-terminaux. Panel droite : deux RCPG avec des domaines N-terminaux très différents.

Cas de l’hétérodimérisation : En 2008, un mutant du SNAP-tag, nommé CLIP-tag, réagissant spécifiquement avec

l’O2-benzylcytosine (BC), un substrat différent de celui du SNAP-tag, a été

développé38. L’introduction du CLIP-tag marque une évolution importante de cette

technologie car il permet de réaliser un marquage spécifique de deux récepteurs

différents chacun avec un ou deux fluorophores distincts. Pour conserver la

spécificité du marquage (orthogonalité) SNAP-tag/CLIP-tag, il est indispensable

d’ajouter simultanément les substrats BG et BC. En effet, SNAP-tag,  à   l’inverse  du  

CLIP-tag,  n’est  pas  parfaitement  sélectif  puisqu’il  peut   réagir avec le substrat BC du

CLIP-tag (voir tableau ci-dessous).

* La vitesse de réaction k représente la vitesse de transfert du groupement benzyl-fluorophore porté par la guanine (BG) ou la cytosine (BC) au niveau des protéines SNAP-tag et CLIP-tag. Plus la valeur de k est grande plus le marquage est rapide.

N.B. : des mutants plus rapides du SNAP-tag et du CLIP-tag sont commercialisés

par la société New England Biolabs sous la dénomination, SNAPfast et CLIPfast.

38 Gautier et al., Chemestry and Biology 2008.

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RETSNAP CLIP

Donneur Accepteur

100%

Avantages de cette méthode :

Dans le  cadre  de  l’analyse  de  l’hétérodimérisation  des  RCPG, l’utilisation  du  couple  

SNAP-tag/CLIP-tag simplifie considérablement l’analyse   des   résultats   (pour

comparaison voir Figures 39 et 41).

Figure 41. Etude  de  l’hétérodimérisation  des  RCPG  avec  la  technologie  SNAP-tag/CLIP-tag en RET. Le signal de RET mesuré représente 100% des hétérodimères SNAP-tag et CLIP-tag co-marqués avec un fluorophore donneur et un fluorophore accepteur d’énergie.

Limites de cette méthode :

La réactivité du CLIP-tag pour le BC est beaucoup plus faible que celle du SNAP-tag

pour le BG (voir tableau ci-dessus). Par conséquent,   il   est   nécessaire   d’utiliser   de  

plus hautes concentrations de BC pour marquer CLIP-tag ce qui peut poser des

problèmes de marquage non spécifique des cellules (signal sur bruit). De plus, le

marquage SNAP-tag/CLIP-tag ne sera spécifique que si les deux substrats sont

ajoutés simultanément ou si SNAP-tag  est  d’abord  marqué  avec  le  BG  puis  CLIP-tag

avec le BC.

B/ LE BRET39

Principe de la méthode :

La technique de BRET, décrite dans le chapitre IV, permet d’analyser   un   grand  

nombre   d’interactions  moléculaires   tant   pour   des   protéines exprimées à la surface

cellulaire que pour des protéines intracellulaires. Les avantages et limites de cette

39 Voir la revue Drinovec L. et al., Frontier in Endocrinology 2012.

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Noyau

ReticulumEndoplasmique

Golgi

YFPRluc

méthode qui sont discutés  dans  cette  partie  ne  concernent  que  l’étude des dimères

de RCPG.

Avantages de cette méthode : Les fluorophores sont directement synthétisés par les cellules ce qui évite des

étapes de marquage. Par conséquent aucune optimisation du marquage des

protéines   d’intérêt   n’est   nécessaire. D’autre   part,   la Rluc et la YFP peuvent être

insérées dans différentes régions des récepteurs notamment dans les boucles

intracellulaires (pour analyser par exemple les changements de conformation du

récepteur).

Limites de cette méthode :

Contrairement aux techniques précédentes, il  n’est  pas  possible  en BRET de  séparer  

le signal provenant des  récepteurs  de  surface  de  celui  des  récepteurs  retenus  dans  

les compartiments intracellulaires dont la forte proximité peut générer un signal non

spécifique (Figure 42). Le signal de BRET mesuré reflète donc les interactions de

l’ensemble  des  récepteurs  qui  sont  produits  par  les  cellules.

Figure 42. Etude de la dimérisation des RCPG en BRET. Le signal de RET mesuré provient de l’ensemble  des  récepteurs exprimés dans les cellules.

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Rluc YFP

BRETYFP

Pas de BRET

Rluc

YFP

BRET

Rluc

Pour étudier la dimérisation des RCPG, la Renilla Luciferase (Rluc) et la YFP sont en

général insérées   dans   la   région   carboxy-terminale des récepteurs car elles

n’affectent   pas   leur   fonction   à   cette   position.   La longueur de ce domaine pour les

RCPG  est  variable  d’un  récepteur  à  l’autre.  Elle  peut  aller  de  25  à  150  acides  aminés  

en moyenne ce qui correspond à une longueur de 80 à 480 angströms (Å) en

considérant une forme linéaire de ce domaine. Par conséquent, deux protéines avec

des domaines C-terminaux de longueurs variables, peuvent donner des signaux de

BRET  très  différents  alors  même  qu’elles  sont  en  interaction  (Figure  42).

Figure 42. Analyse de la dimérisation de RCPG en BRET.

En terme de taille, les protéines fluorescentes font 27 KDa de poids moléculaire et

peuvent être assimilées à des cylindres de 40 Å (angströms) de haut et de 30 Å de

diamètre ce qui correspond approximativement aux dimensions des 7 hélices

transmembranaires  d’un  RCPG  inséré  dans  la  membrane  plasmique.  La Rluc quand

à elle fait 34 KDa et peut être assimilée à une sphère de 40 Å de diamètre.