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Reconnue d’utilité publique Messager de la Paix ONU 1988 Rue de la Paix, 7 bis - 1202 Genève La lettre du GIPRI Institut International de Recherches pour la Paix à Genève Avril 2014 - N° 20 EDITORIAL Le GIPRI intègre la Maison de la Paix Il m’échoit de signer l’éditorial de la Lettre n°20 du GIPRI puisque notre Conseil de Fondation m’a fait l’honneur de me porter à sa présidence. Je prends ainsi la suite du Professeur Jacques Diezi, que je remercie du travail accompli depuis le départ du Professeur Jean-Pierre Stroot, auquel j’étais étroitement associé cinq années durant. A un physicien belge auront succédé un médecin, toxicologue et pharmacologue suisse, puis un politologue économiste français. La double dimension internationale et interdisciplinaire de notre Institut de Recherches pour la paix perdure. Les Professeurs Stroot et Diezi restent membres du Conseil, ils me prodiguent leurs appuis et avis. Le Conseil de Fondation se réjouit d’accueillir en son sein un nouveau membre, Marc Guéniat, responsable enquête – Senior Researcher à la Déclaration de Berne et journaliste. Notre commission scientifique s’étoffe. Après le juriste Pierre Saba, c’est au tour du philosophe Guy Haarscher, professeur émérite à l’Université Libre de Bruxelles, de la rejoindre. Le GIPRI développe peu à peu son nouveau site. Cette vitrine présente nos commentaires sur l’actualité brûlante, relate nos actions et nos projets. Les vidéos y occuperont davantage de place qu’auparavant. Le grand changement de 2014 est l’installation de notre institut dans la Maison de la Paix, enfin sortie de terre. Après cinq années passées à Carouge, nous voici revenus dans la commune de Genève. J’en profite pour exprimer notre vive gratitude à la Ville de Genève pour le soutien financier constant qu’elle nous prodigue. Dans l’immédiat, nous occupons, avec d’autres ONG, l’annexe sise dans le bâtiment de l’Office Météorologique Mondial (OMM), à proximité du Palais des Nations et du Jardin botanique, 7 bis rue de la paix. Cette situation nous rapproche d’autres institutions de la Maison de la Paix et par-là même nous permet de renforcer des liens et des partenariats, personnels et institutionnels, au bénéfice des synergies de la Genève internationale. Nous souhaitons en développer d’autres, dans l’esprit de lucidité critique, de pluralisme et d’ouverture intellectuelle qui caractérise notre fondation depuis 30 ans. D’autres projets sont en préparation, dont nous parlerons dans la prochaine Lettre. Le GIPRI rajeunit son équipe dirigeante sans perdre l’état d’esprit de ses fondateurs et prédécesseurs. Un paradoxe de notre époque est la juxtaposition de situations de plus en plus complexes et des simplifications mass- médiatiques et politiques outrancières, belliqueuse, opposant le bien et du mal, les gentils et les méchants, les occidentaux et les autres 1 . Manès l’emporte sur (Edgar) Morin. Les néo- conservateurs ont quitté le devant de la scène aux Etats-Unis, leur influence et leurs héritiers continuent leurs ravages, en Europe aussi. Libre d’attaches partisanes ou nationales, soucieux de se départir des idées reçues, des poncifs à la mode, désireux d’un monde équilibré et diversifié respectueux des personnes et des peuples, notre Institut poursuit opiniâtrement son travail de recherche et d’explication au service de la paix, telle que l’entendait Roy Preiswerk 2 . Gabriel Galice Président du Conseil de Fondation 1 Cf. Régis Debray, « Occident, fiche clinique », supplément au n° 34 de la revue Médium. Janvier-février-mars 2013 et Georges Corm, L'Europe et le mythe de l'Occident, La Découverte, 2009 2 http://www.gipri.ch/?s=preiswerk La lettre du GIPRI, N° 20, Avril 2014

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Reconnue d’utilité publiqueMessager de la Paix ONU 1988Rue de la Paix, 7 bis - 1202 Genève

La lettre du GIPRIInstitut International de

Recherches pour la Paix à GenèveAvril 2014 - N° 20

EDITORIAL

Le GIPRI intègre la Maison de la Paix

Il m’échoit de signer l’éditorial de la Lettre n°20du GIPRI puisque notre Conseil de Fondationm’a fait l’honneur de me porter à sa présidence. Jeprends ainsi la suite du Professeur Jacques Diezi,que je remercie du travail accompli depuis ledépart du Professeur Jean-Pierre Stroot, auquelj’étais étroitement associé cinq années durant. Aun physicien belge auront succédé un médecin,toxicologue et pharmacologue suisse, puis unpolitologue économiste français. La doubledimension internationale et interdisciplinaire denotre Institut de Recherches pour la paix perdure.Les Professeurs Stroot et Diezi restent membresdu Conseil, ils me prodiguent leurs appuis et avis.Le Conseil de Fondation se réjouit d’accueillir enson sein un nouveau membre, Marc Guéniat,responsable enquête – Senior Researcher à laDéclaration de Berne et journaliste.

Notre commission scientifique s’étoffe. Après lejuriste Pierre Saba, c’est au tour du philosopheGuy Haarscher, professeur émérite à l’UniversitéLibre de Bruxelles, de la rejoindre.

Le GIPRI développe peu à peu son nouveau site.Cette vitrine présente nos commentaires surl’actualité brûlante, relate nos actions et nosprojets. Les vidéos y occuperont davantage deplace qu’auparavant.

Le grand changement de 2014 est l’installation denotre institut dans la Maison de la Paix, enfinsortie de terre. Après cinq années passées àCarouge, nous voici revenus dans la commune deGenève. J’en profite pour exprimer notre vivegratitude à la Ville de Genève pour le soutienfinancier constant qu’elle nous prodigue. Dansl’immédiat, nous occupons, avec d’autres ONG,l’annexe sise dans le bâtiment de l’OfficeMétéorologique Mondial (OMM), à proximité duPalais des Nations et du Jardin botanique, 7 bisrue de la paix. Cette situation nous rapproche

d’autres institutions de la Maison de la Paix etpar-là même nous permet de renforcer des liens etdes partenariats, personnels et institutionnels, aubéné f i ce de s syne rg i e s de l a Genèveinternationale. Nous souhaitons en développerd’autres, dans l’esprit de lucidité critique, depluralisme et d’ouverture intellectuelle quicaractérise notre fondation depuis 30 ans.

D’autres projets sont en préparation, dont nousparlerons dans la prochaine Lettre.

Le GIPRI rajeunit son équipe dirigeante sansperdre l’état d’esprit de ses fondateurs etprédécesseurs. Un paradoxe de notre époque est lajuxtaposition de situations de plus en pluscomplexes et des simplifications mass-médiat iques e t pol i t iques outrancières ,belliqueuse, opposant le bien et du mal, les gentilset les méchants, les occidentaux et les autres1.Manès l’emporte sur (Edgar) Morin. Les néo-conservateurs ont quitté le devant de la scène auxEtats-Unis, leur influence et leurs héritierscontinuent leurs ravages, en Europe aussi.

Libre d’attaches partisanes ou nationales,soucieux de se départir des idées reçues, desponcifs à la mode, désireux d’un monde équilibréet diversifié respectueux des personnes et despeuples, notre Institut poursuit opiniâtrement sontravail de recherche et d’explication au service dela paix, telle que l’entendait Roy Preiswerk2.

Gabriel GalicePrésident du Conseil de Fondation

1Cf. Régis Debray, « Occident, fiche clinique », supplément au n° 34 de la revue Médium. Janvier-février-mars 2013 et Georges Corm, L'Europe et le mythe de l'Occident, La Découverte, 20092 http://www.gipri.ch/?s=preiswerk

La lettre du GIPRI, N° 20, Avril 2014

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IRENOLOGIE

ACTEURS ET MEDIATEURS DELA PAIX EN AFRIQUE : ACTEURSENDOGENES

Jean Delors BIYOGUE BI NTOUGOU

La peace research est un ensemble demesures prises et préconisées par les différentsacteurs impliqués dans le processus pour parvenirà la paix qui, “géopolitiquement” parlant, peutêtre définie comme une situation de non guerre,de non-violence ni trouble, à l'intérieur d'un Etatou entre les Etats. Depuis l'irruption de cette quêtedans les préoccupations collectives, en Afriquecomme ailleurs, deux questions fondamentalesconstituent les points d'articulations des réflexionsy relatives, à savoir :

Comment bâtir la paix dans le monde et àl'intérieur des Etats, ou de façon plus globale,entre les peuples et les Nations ?

Quels ou qui vont en être des acteurs ?

La première question fait nécessairementappel aux différentes approches théoriquesdéveloppées dans les milieux universitaires et quivont inspirer les différents mécanismes de paix etde sécurité expérimentés à travers le monde. Dansce débat, les approches classiques et néoclassiques, largement inspirés de Grotius et deKant. L'approche fonctionnaliste de DavidMitrany3 et l'approche de Deutsch4 pour ne citerque ceux – là5, semblent être les approchesdominantes, au détriment, de façon officielle desapproches réalistes. En effet, du systèmeinternational de Paix et de Sécurité de l'ONU auxdifférents mécanismes régionaux de paix et desécurité, la coopération illustrée par l'inter-gouvernementalisme et le régionalisme semblentprendre le pas sur l'approche réaliste qui privilégie

3D. Mitrany in A Working Peace System : An Argument for the functional Development of international Organizations, N.Y., Oxford University Press, 19434Développée sur l'impact positif de la communauté politiqueen se référant à l'Alliance atlantique, voir son ouvrage intitulé : The Resolution of Conflict : Constructive and Destructive Processes, New Haven, Yale University Press, 19735Il est également possible de se référer aux travaux de Boulding, Galtung et Burton

la voie de la puissance et de l'hégémonie d'unenation ou d'un groupe de nations fortes, quiimposeraient leur domination aux autres. C'est lapaix des vainqueurs, elle est fustigée à cause deson caractère injuste et fragile.

Si le système international de Paix et de Sécuritérepose sur le mécanisme de la Charte de l'ONU, etcelui de l'Union européenne sur le mécanisme dela PESC et de la PESD, pour ne citer que ceux –là, le système africain de Paix et de Sécuritérepose sur l'Architecture Africaine de Paix et deSécurité de l'Union africaine. Ces tentativesd’appropriation africaine des questions relatives àla paix et à la sécurité sont le fruit d’un longprocessus débuté en 1963 avec la création del’OUA.Si le mécanisme africain de Paix et de Sécuritéimplique de nombreux acteurs de mise en œuvre,qui sont – ils ? À quel niveau interviennent – ilsdans le processus de la construction de la paix enAfrique? Quelles sont leurs actions?Telles sont les questions qui font l'objet de cettecontribution.

I. Typologie d'acteurs endogènes de la paixen Afrique

Nous entendrons par acteurs endogènes dela paix, toutes les parties prenantes africaines de larecherche de la paix en Afrique. Ils peuvent êtredivisés en deux grandes catégories : les acteurs“formels” (1.1) et les acteurs “non formels” (1.2).Tous sont des composantes de l’ArchitectureAfricaine de Paix et de Sécurité.

1.1. Acteurs formels

Les termes “formel” et “non formel”, ne serontpeut – être pas fidèles à ce que nous voulonsexprimer ici, les juristes nous corrigeront. Il fautsimplement entendre par là, les acteurs classiquesqui en ont la légitimité première. C'est le cas del'Union africaine (A), des CommunautésEconomiques Régionales (CER) (B) et dans unecertaine mesure, des Etats (C)

A. L'Union africaine

L'Union africaine est une institution panafricainequi a pris officiellement la succession del'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), le 9juillet 2002, lors du Sommet de Durban en

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Afrique du Sud, avec pour objectif parmi tantd'autres, de “promouvoir la paix, la sécurité et lastabilité sur le continent6” . Rôle dont elle tire lalégitimité internationale dans la Charte desNations Unies du 26 juin 1945 qui stipule que :“Aucune disposition de la présente Charte nes'oppose à l'existence d'accords ou d'organismesrégionaux destinés à régler les affaires qui,touchant au maintien de la paix et de la sécuritéinternationales, se prêtent à une action àcaractère régional, pourvu que ces accords ouces mécanismes et leur activité soientcompatibles avec les buts et les principes desNations Unies7...”Par ailleurs, le Conseil de Sécurité “encourage ledéveloppement du règlement pacifique desdifférends d'ordre local par le moyen de cesaccords ou de ces organismes régionaux, soit surl'initiative des Etats intéressés, soit sur renvoi duConseil de Sécurité8”

L'intervention de l'Union africaine dans ledomaine de la paix et de la sécurité en Afriquepasse par les actions entreprises par ses organes etpar ses programmes spéciaux. S'agissant des organes, ils sont au nombre de trois,à savoir : la Conférence des Chefs d'Etat et degouvernements, la Commission et le Conseil dePaix et de Sécurité. En matière de Paix et deSécurité, chacun de ces organes joue un rôleimportant.

La Conférence des Chefs d'Etat et deGouvernement a ainsi la responsabilité dedonner “des directives au Conseil exécutif sur lagestion des conflits, des situations de guerre etautres situations d'urgence, ainsi que larestauration de la paix9” . Depuis son institution,la Conférence des Chefs d 'Eta t e t deGouvernement n'a jamais manqué l'occasion decondamner les actes commis contre la paix enAfrique à travers des communiqués et Décisions.Elle est très souvent aussi amenée à veiller àl’exécution des recommandations du Conseil dePaix et de Sécurité.La Commission quant à elle, par le canal de sonPrésident, intervient aussi dans la construction dela paix, en ce sens que, “sous l'autorité du Conseilde Paix et de Sécurité et en consultation avectoutes les parties impliquées dans un conflit,6Article 3 (f) de l'Acte constitutif de l'Union africaine7Article 52 (1)de la Charte des Nations Unies8Article 52 (3) de la Charte des Nations Unies9Article 9 (i) de l'Acte Constitutif de l'UA

déploie tous les efforts et prend toutes lesinitiatives jugées appropriées en vue de laprévention, de la gestion et du règlement desconflits10”.

Enfin, le Conseil de Paix et de Sécurité,conformément au Protocole relatif à sa création,es t “un organe de décision permanent pour laprévention, la gestion et le règlement des conflitset des crises en Afrique11” . Ne disposant pas depouvoir de décision, “il recommande à laConférence, conformément à l'article 4h de l'ActeConstitutif, l'intervention dans un Etat membredans certaines circonstances graves, tels quedéfinis dans les instruments et conventionsinternationaux pertinents12”.Ses activités s'articulent autour de la promotion dela paix, de la sécurité et de la stabilité en Afrique ;alerte rapide et diplomatie préventive ;rétablissement de la paix y compris les bonsoffices, la médiation, la conciliation et l'enquête ;opérations d'appui à la paix ; consolidation de lapaix et reconstruction post-conflit ; actionhumanitaire et gestion des catastrophes...Les actions du Conseil de Paix et de Sécurité sedéploient à travers le Système Continentald'Alerte Rapide, crée pour la prévision et laprévention des conflits, le Groupe des Sagescomposé de “cinq personnalités africaines,hautement respectées, venant de diverses couchesde la société...” ayant “apporté une contributionexceptionnelle à la cause de la paix, de las é c u r i t é e t d u d é v e l o p p e m e n t s u r l econtinent...Sélectionnées par le Président de laCommission, après une consultation des Etatsmembres concernés sur la base de lareprésentation régionale, elles sont nomméespour une période de trois ans par laConférence13”

Ces personnalités ont pour missions, la fournituredes services consultatifs au Conseil de Paix et deSécurité et au Président de la Commission surtoutes les questions relatives au maintien et à lapromotion de la paix, de la sécurité et de lastabi l i té en Afrique, ainsi que l 'appuiinstitutionnel aux efforts du Conseil de Paix et deSécurité, ou au Président de la Commission, dansles domaines de la prévention des conflits ou dans

10Article 10 du Protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité.11Article 2 (1) du Protocole relatif à sa création12Article 7 (e) du Protocole relatif à la création du CPS13Article 11 (2) du Du Protocole

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tout ce qui va dans le sens de la promotion et dumaintien de la paix, de la sécurité et de la stabilitéen Afrique.

Enfin, la Force Africaine Pré positionnée,toujours en attente de mise en place, elle estappelée à jouer un rôle important dans larecherche de la paix en Afrique, à travers entreautres, les missions d'observation et de contrôle,les missions d'appui à la paix, le déploiementpréventif, mission de consolidation de la paixaprès un conflit armé, l'assistance humanitaire etles actions visant à faire face aux catastrophesnaturelles.Son cadre opérationnel d'intervention divisel'Afrique en cinq zones, disposant chacune d’uncontingent de forces armées constituant les ForcesAfricaines en Attente (FAA). (Voir carte ci-dessous).

Nous serons donc ainsi en présence des ForcesAfricaines en Attente Afrique du Nord (FAAN),Afrique de l’Ouest (FAAO), Afrique du Centre(FAAC), Afrique de l’Est (FAAE) et au Sud ducontinent (FAAS). Ainsi que nous l'évoquions plus, l'action del'Union africaine en matière de Paix et de Sécuritéen Afrique est également portée par sesprogrammes spéciaux que sont le NouveauPartenariat Africain pour le Développement(NEPAD) et la Conférence sur la Sécurité, laStabilité, le Développement et la coopération enAfrique (CSSDCA).

Tous ces outils développent aussi des actionsallant dans le sens de la mise en œuvre de laPolitique Africaine de Défense et de SécuritéCommune.

B. Les Communautés Economiques Régionalesafricaines

Les mécanismes de Paix et de sécurité desCommunautés Economiques Régionales obéissentaux mêmes règles et au même schéma que celuide l'Union africaine. Elles entreprennent desactions propres en matière de la paix dans leurespace géographique sous autorisation de l'Unionafricaine, comme elles peuvent également agir enpartenariat avec elle.

La collaboration permanente qui existe entre elleset l'Union africaine repose sur les échangesd'information en matière d'alerte rapide desconflits. Elles peuvent également déployer lesmissions d'appui à la paix comme l'a fait laCEDEAO en Côte d'Ivoire, en Sierra Leone ouencore au Libéria. Ou encore comme le faitactuellement la CEEAC en République deCentrafricaine dans le cadre de la MICOPAX.

C. Les Etats

Le rôle des Etats est souvent assez délicat àaborder à cause des restrictions liées à la notionde souveraineté. De ce qui a été observéjusqu'alors, les Etats interviennent souventcomme pourvoyeurs de contingents dans le cadred'une mission d'appui à la paix en casd'intervention multilatérale. Ils peuvent aussiintervenir seuls, en fonction de leurs capacitésdans le cadre d'une mission d'imposition ou derétablissement de la Paix, cas de l'armée nigérianeen Sierra Léone sous couvert de l'ECOMOG, oude l'armée tchadienne au Nord du Mali, ou encoredes troupes ougandaises en Somalie, dans le cadrede l'AMISOM. Une telle intervention nécessiteune autorisation préalable de l’Union Africaine.

Les Etats participent aussi indirectement à laconstruction de la paix en Afrique lorsqu'ilsoffrent leurs territoires comme point de lancementdes opérations d'appui à la paix ou d'imposition dela paix. Ce furent les cas de la Mauritanie, duSénégal et de l'Algérie dans lors de la récentecrise malienne.

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1.1.2. Acteurs non formels

Nous entendons ici par acteurs non formels, lesacteurs dont la participation à la construction de lapaix n'est pas formellement établie dans le cadreofficiel, il s'agit des acteurs non classiques, parfoisalternatifs que sont souvent des Organisations dela Société Civile, les personnalités religieuses oupolitiques et chefs coutumiers.

Ces acteurs interviennent souvent dans lamédiation, la négociation et la consolidation de lapaix à travers l’administration de la justicetransitionnelle, ou encore le développement desprojets dans les secteurs sociaux de base que sontl’éducation et la santé ou encore l’appui à lareprise des activités agricoles et pastorales, c’estle cas des ONG.

II. Les capacités des acteurs africains àparticiper à l'instauration d'une paix durableen Afrique

2.1. Des acteurs potentiellement efficaces

Les potentialités des acteurs africains en matièrede recherche de la paix sont de plusieurs ordres.D'abord, ils connaissent bien le terrain ainsi queles enjeux de la paix en Afrique, avantage qui leurdonne les capacités d'entreprendre des actionspertinentes et adaptés. Cet avantage est utilelorsqu'il s'agit d'identifier les vrais interlocuteurspour des négociations, ou encore d'identifier lesvraies causes des conflits dont une mauvaiselecture constitue souvent un facteur aggravant.Nous l'avons vérifié dans la crise ivoirienne,pendant que les analystes parlaient d'un conflitidentitaire, en le présentant comme un conflitopposant le Nord et le Sud ou des musulmanscontre des non musulmans, les observateursafricain parlaient de conflit politique qui partaitdes mauvaises conditions dans lesquelles lePrésident Bédié aurait été élu en 1995, descritiques de sa gouvernance qui ont abouti aucoup d'Etat de 1999 aux suites désastreuses. Sarésolution n'est pas venue de l'avenue KLEBERou de Marcoussis, mais des acteurs africains dontnotamment Omar Bongo du Gabon et BlaiseCOMPAORE du Burkina Faso, qui ont convaincuGBAGBO de faire de son principal adversaired'alors à la tête d'une rébellion premier Ministre,ce qui fut fait en 2006, c'est suite à cette

manœuvre que la Côte d'Ivoire va connaître lapaix jusqu'aux élections de 2O11. Dans la récente crise malienne, l'intervention del'Armée tchadienne a été déterminante dans laneutralisation des rebelles islamistes, grâce à leurmai t r i se du te r ra in e t des cont ra in tesgéographiques des bases-arrières de la rébellion.Ces deux exemples sont des preuves concrètes descapacités des acteurs endogènes à contribuer defaçon efficace à l’instauration de la Paix enAfrique.

S'il est clairement établi que seuls les acteursformels interviennent dans tous les domaines de lapeace building, aussi bien au niveau de laprévention des conflits qu'aux niveaux de lagestion et de la résolution des conflits, certainsacteurs comme les ONG interviennent surtout auniveau de la prévention des conflits dans le cadredes mécanismes d'Alerte Rapide, en tant quepourvoyeuses d'informations, ils apportentégalement un appui majeur dans l'identification etla sensibilisation des belligérants, ou encore, ainsique nous le disions plus haut, dans les activitésdestinées à la consolidation de la paix à traversl'exécution des projets aussi bien dans la luttecontre la pauvreté qu'au niveau de la restaurationdes services sociaux de base. C'est le cas desassociations membres du West Africa Network forPeacebuilding (WANEP), en français, RéseauOuest – africain pour l'instauration de la Paix.Certaines autres ONG locales se montrent aussiactives dans l'édification de la paix en Afrique,c'est le cas de « Association for Development Aiddu Libéria, qui propose des stages de réinsertionaux ex combattants, ou encore du Post-conflitReintegration Initiative for Development andEmpowerment. Les Organisations de femmes nesont pas en reste à l'instar du Réseau des Femmesdu Fleuve Mano pour la Paix qui ; en Côted'Ivoire, au Liberia et en Sierra Leone, a mené desactions de médiation et d'interpellation des partiesau conflit. Ces actions comme celle del'Organisation des Femmes d'Eburnie pour la Paixont permis aux belligérants d'amorcer un travailde rapprochement, les membres de cette dernièreont beaucoup travaillé, aussi bien avec les rebellesqu'avec le Front Populaire Ivoirien pour faireconnaître les positions des uns et aux autres.

En Afrique centrale, de nombreux ONG semontrent également dynamiques dans le domainede la peace research, c'est le cas de Action pour laPaix et le Développement en Afrique des Grands

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Lacs ou encore de l'Association Femmes Uniespour la Paix dans la région des Grands Lacs duBurundi. D'autres s'illustrent par la production deréflexions pertinentes sur la recherche de la Paixcomme la Fondation Paul ANGO ELA duCameroun et bien d'autres encore, notamment enAfrique du Sud.Les autres acteurs non formels comme despersonnalités politiques ou religieuses sont trèsprésents dans la résolution des conflits à traversdes médiations – négociations, ou des missions defacilitateur. Cas des évêques de la RépubliqueDémocratique du Congo, de Mgr Desmond TUTUd'Afrique du Sud, de Blaise COMPAORE, dansles crises maliennes et ivoiriennes, pour ne citerque ceux-là.

D’autres initiatives destinées à la consolidation dela Paix ou encore à la prévention de la résurgencedes conflits dans certains pays africains ont étédes occasions de découvrir les compétences desacteurs endogènes issus des Organisations de laSociété civile telles que les ONG africaines et leschefs coutumiers et religieux. Les CommissionsVérité et Réconciliation au Rwanda et Afrique duSud, pour ne citer que ces cas en sont de parfaitesillustrations. On peut citer dans le même ordred'idées, les Opérations DDR au Libéria ou enSierra Leone, où les jeunes des associations àcaractère religieux ont mené des campagnes etdes sensibilisations et d'incitation des enfantssoldats à laisser les armes, non sans prendre desrisques, puisqu'ils allaient jusque dans les maquis.

2.2. Des acteurs réellement confrontés à denombreuses limites

Plusieurs facteurs limitent l'efficacité des acteursendogènes dans la fabrication de la paix enAfrique, parmi eux, la non maitrise del'ambivalence de la multiplication des acteurs, leurfaible prise en considération par les grandespuissances, nous l'avons vu dans la crise libyenneoù l'Union Africaine n'a rien pu contre lepositionnement de la France et ses alliés qui luiont indirectement imposé leur agenda et leur“solution”. Pendant que l'UA privilégiait unesolution politique, la France et ses alliés vontmettre en œuvre une solution militaire.

Si l'UA dans ce cas, comme dans bien d'autress'est montré impuissante, c'est aussi à cause d'uneréelle absence d'approche commune desproblèmes africains d'une part, et d'autre, à cause

de ses faibles capacités opérationnelles ettechniques et le manque de cohérence, surtoutlorsqu'elle se montre souvent incapable desanctionner ainsi que le lui permet son Acteconstitutif.Ces faiblesses, l'UA les partage avec lesCommunautés économiques régionales quiconstituent des composantes essentielles del'Architecture Africaine de paix et de Sécurité.

Conclusion

La construction de la Paix en Afrique, tout enétant une affaire de tous, à cause de laglobalisation des menaces qui fait appel à lanotion de l'interdépendance sécuritaire et de laresponsabilité de protéger, doit d'abord être avanttout, une affaire des africains.

Au regard de tout ce que nous avons dit, lesacteurs africains, lorsqu’ils s’en donnent lesmoyens, ou lorsqu’ils jouissent de larges demanœuvre, peuvent jouer un rôle positif dans laconstruction de la paix en Afrique. C’est d’ailleursun impératif qui serait profitable à tous.L'Occident ne dispose plus de nos jours, lacapacité d'assurer seule la sécurité du monde.Cette réalité doit faire appel au partage équilibrédes responsabilités entre acteurs exogènes etendogènes ce dans toutes les régions du monde.

Pour que chaque acteur joue pleinement son rôledans ce processus, il faut qu'il en dispose desmoyens, d'où la nécessité pour les acteursafricains de renforcer leurs capacités en matièrede paix et de sécurité et pour les autres acteurs deles appuyer dans ce sens. Les transformations desmenaces à la Paix et à la Sécurité conduisent àune seule exigence : Penser un modèle degouvernement du monde axé sur les peuples.

Dr Jean Delors BIYOGUE BI NTOUGOU

Chercheur à l’Institut de Recherche en Sciences Humainesde l’Université Omar Bongo, Chercheur Associé au GRIP etExpert au Réseau Francophone de Recherche sur lesOpérations de maintien de la Paix (ROP)

La lettre du GIPRI, N° 20, Avril 2014 6

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ACTUALITE

FREEDOM OF EXPRESSION ANDACCESS TO INFORMATION INSYRIA TODAY All human beings by nature desire to know

Aristotle

Dr. Inaam Charaf

Introduction

If we assume that people have a right to accessinformation, this means that they should haveaccess to institutions or techniques which provideaccess to that information. The right of access toinformation was established at the internationallevel in 1946, when the UN General Assemblyadopted, at its first session, resolution number 59which states: “Freedom of access to informationis a fundamental human right and the keystoneof all freedoms declared by the UnitedNations”14. Information rights include the right tofreedom of expression, access to information andthe right to read.

For decades the Syrians were deprived of theserights and the access to information was verylimited. Today, we are living a very delicatesituation. A peaceful popular revolutiontransformed into a conflict between the regimeforces and armed opposition. Since the 18 March2011, everything has changed. Syrians beganbreaking the barrier of fear and started calling fortheir right to freedom of expression, one of themost important rights for which they revolted.Freedom of expression requires flexible access toa wealth of information. They have found theirown ways to obtain this access and subsequentlyexpress their thoughts through alternative meanssuch as social networks like Twitter and Skype aswell as other technological means.

14United Nations. 1948. Universal Declaration of Human Rights. http://www.un.org/en/documents/udhr/history.shtml

Keeping this pretext in mind, we will try to shedlight on these issues in the most important kindsof institutions: traditional and new Syrian mediaand libraries.

1. Syrian Media before March 18th 2011

Since the Baath party first seized authority in theearly sixties (1962), it realized the importance ofthe media and its potential to become a seriousthreat to its existence as a totalitarian ruling party.In the second statement it issued, the Baath partygave itself full power to seize all types of media,publishing and printing, public and private.According to this statement, the party also closedall newspapers and magazines issued before the 8March 1963, including partisan newspapers, andkept only the official and party representativenewspapers15.

When Hafez Alassad seized power in 1970,printed media was condensed and represented inonly three national newspapers (Baath, Teshreenand Althawra), severely limiting public opinion.These newspapers were structured in aninstitutional form. One of them (Baath) is underthe authority of the national leadership and thetwo others follow the government directly;however, all of them were and still are dominatedby the security control.

1.1. Law of Publications

After March 1962, printed press became frozenand the number of institutions controlled by theBaath party and executive authority increased. Allthese institutions followed the Only MediaDirected (OMD) policy. Under the OMD policy,everything is under the control of the GeneralCorporation for the Distribution of Publications.The GCDP prevents thousands of publicationsfrom circulating and rips thousands of magazinepages before distribution. Such was the case withAlNakked, AlDomarry and AlNahej magazines, toname a few.

According to the Law of Publications, everypublication should be controlled directly by theMinister of Information and any breach of theauthority principals could cause the cancelation of

15Alsafady,Motaa. 1964. Baath Party: The tragedy of birth and the tragedy of the end. Beirut, Dar Alaadab.

__________________________________________________________________________________________________________________La Lettre du Gipri, n° 20, Avril 2014 7

Page 8: La lettre du GIPRI

this publication, as has happened many times withmultiple publications. Television and radiostations were not included in this Law ofPublications, and are still exclusively under thetotal control of the government.

1.2. Law of Journalists’ Union

According to Article 3 of the law, which wasissued in 1990, the Union of Journalists believesin nation goals and is committed to achievingthese goals in accordance with the decisions of theBaath Party and its directions. Article 54 statesthat the union has the right to penalize anymember who breaches the goals of the union, andno one in Syria can be a journalist without being apart of this union.

2. Alternative Syrian media: Renaissance of Freedom of Expression

From the first day of the popular revolution inSyria, the government occupied the space of themedia and tried to distort the facts, while at thesame time depriving people of delivering theirvoice to the world. International media was alsoforbidden to enter Syria and document what washappening in the country. Syrian activistsrecognized from the beginning the importance ofthe media. They learned from past experience andstarted to create for themselves an independentnew media to be the alternative of the Syrianofficial media16.

The alternative media created by Syrian activistsexpresses the popular vision, thoughts, anddreams of freedom and dignity in total liberty. Intwo years, 80 publications appeared in the formof magazines, newspapers and periodicbulletins. Some of these publications werestopped for financial reasons and others becauseof the situation on the ground and the obstacles ofworking within the escalating violence and lack ofresources.

Most of these publications are still regional, witheach one expressing and covering the local regionwhere it was issued and distributed; however,some of them were able to be more widespread intheir coverage, releasing articles to cover newsthroughout Syria and expressing the views of the

16 Cf. Figure 1

majority of Syrians in several areas such asEnabBaladi, AlmassarAlhor, Dawdaa, and others.

Briefly, during the last two years, Syria has beenseeing a remarkable development in print andaudio-visual media. Several television and radiostations, magazines and newspapers haveappeared and are still trying to deliver a clearpicture of what is happening in the countrywithout any restrictions, borders or pressure ofany kind.

Figure 1

Exemple of new printed and electronic media inSyria (issues of May 2013)

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3. Access to information in Syria beforeand after 18 March 2011

Indeed, according to the human rightsorganization A r t i c l e 1 9 and the l i s t o frecommendations at the end of its report entitled,“Global Trends on the Right to Information”,governments, civil society, and businesses areessentially expected to ensure the access toinformation in any country as summed up in thefollowing brief points17:

• Governments ought to “develop andsupport appropriate systems for thedissemination of information to allmembers of society, taking into accountculture, education, wealth and otherdifferences.”

• Civil Society ought to “develop and applyinnovative and effective methods ofproducing, accessing, disseminating andusing information.”

• Businesses ought to “contribute actively,including through technical and economicsupport, to establishing better systems forinformation generation, storage anddissemination.”

As we discussed above, access to information inSyria was very limited. When applying the abovepoints to the case of Syria, it becomes evident thatnone of them are visible. The Syrian governmentdevelops and supports systems that fit or are inline with its political orientation and objectives,especially at the domestic, political level, withouttaking into consideration differences in culturalbeliefs and education.

Civil society is a strange concept in Syria; civilassociations are not allowed, with the exception ofthose founded by the government or following apolitical decision. All of these associations,including the Syrian Libraries Association, arecontrolled and unable to make independentdecisions. The fact that none of the professionallibrarians were involved or part of this associationfurther illustrates this.

17Human Rights Organization, July 2001. Global Trends on the Right to Information: A survey of South Asia. Chapter 5-Recommendations.

All businesses in Syria focused on commercialaspects and financial investments. Access toinformation was not a priority for these kinds ofprojects, especially in such a controlledenvironment.

3. 2. General Syrian Corporation for theDistribution of Publications

Founded in 1975, the GSCDP’s mission is tocarry out prior censorship on all publicationsdistributed in Syria such as newspapers,magazines and books. According to the law of itsfoundation, it is the only institution authorized todistribute publications in Syria and the Board ofDirectors should be composed of officials fromthe Ministry of Information, the army and theBaath Party. The GSCDP, according to this law,has the right to control and refuse the distributionof any publication. It has the right also todetermine the amount of distributed publicationswithout referring to the publisher or distributor.So within its authorities, and as we mentionedabove, for a long time the GSCDP bannedthousands of books from entering Syria, and torepages of thousands of publications beforedistribution18.

3.2. Access to information today

During the last two years, the only way forSyrians to get information has been through theInternet- particularly social networks. They havebeen able to develop a very wide communicationnetwork, thousands of Facebook pages andthousands of accounts on Twitter and Skype.Many digital projects were developed by Syrians,both inside and outside the country, to ensureaccess to information for all members of thesociety. Televisions (Syrian Revolution TV,Syria Alshabab Channel, Alghad TV, etc.), radiostations (RadionAlkul, Hawa FM, radio Smart,etc.), and all kinds of publications appearedonline, especially outside the country. Today,information is available for all Syrians, but thisavailability of information for those who are stillin Syria is dependent on the availability of18Albonny, Anwar. 2004. Legal mechanism of the dominance of Baath Party in Syria. AlhewarAlmotammaden, N. 989. 17/10/2004. http://www.ahewar.org/debat/show.art.asp?aid=25146[Accessed 14/07/2013]

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electricity and (naturally) the Internet. Manyassociations representative of the Syrian civilsociety were founded during these two years,inside and outside of the country.

Libraries as keystone institutions forinformation access

As librarians, we believe that libraries can serveas a cornerstone institution that can ensure theindividual’s right to access information and canfurther the promotion of the commitment tohuman rights more generally.

The main mission of any library is to providepeople with information, which they otherwisewould not be able to access. Libraries should alsobe concerned to collect, in addition to works ofliterature and accessible reading materials, worksthat address basic information needs relative tothe context. Libraries may serve as places wherepublic and governmental information may bearchived and organized; help promote literacy bygiving people access to books and encourage aliterate culture; and promote digital literacy byproviding access to computers and otherinformation technologies.

In Syria, because of the local laws relative topublications (as mentioned above), all these taskswere done but with very limited access. TheSyrian Library Association was founded on apolitical decision, it does not contain anyprofessional librarian and today all of its activitiesare frozen because of the situation.

Libraries were also affected by the war situation:access to the libraries became very hard with thearmy on the ground, and in addition to dailybombardment, explosions, suicide attacks, etc.,some libraries have also been bombed like thelibraries at Aleppo University, AlBaath Universityin Homs and Damascus University. Thus, due tothis situation, students and employees have beendeprived of access the libraries. Due to itswidespread availability, the Internet remains todaythe only way to access information in Syria.

August 2013

Dr. Inaam CharafAncienne maître de conférences à l'Université de Damas.Coordinatrice du projet de bibliothèque de l'Institut de Doha fondé par le Centre Arabe pour la Recherche et lesEtudes Politiques à Doha /Qatar

Texte reproduit avec l'accord de l'auteur et de l'IFLA /FAIFE (International Federation of Library Associations and Institutions / Committee on Freedom of Access to Information and Freedom of Expression).

NOTES DE LECTURE

Changer de politiqueUne autre politique étrangère pour un monde différent ?Francis Gutmann, Paris, Riveneuve Editions, 2011

Dommage que ce livre soit passé aussi inaperçu,lors de sa parution en 2011. Écrit par unAmbassadeur de France qui fut Secrétaire Généraldu Quai d’Orsay (siège du ministère français desaffaires étrangères) mais aussi dirigeant degrandes entreprises françaises, l’ouvrage fournitdu recul et des perspectives aux conflits en cours.

Pour avoir participé aux fondements de laCommunauté européenne, travaillé avec FrançoisMitterrand, Claude Cheysson ou Jacques Chirac,l’Ambassadeur Francis Gutmann conciliemodération du propos et ambition pour son payset pour le monde. Rédigé avant l’accession deFrançois Hollande à la présidence, il n’a pasbeaucoup vieilli en deux ans tant la continuitéprévaut sur le changement : « La France estarrogante tout en ayant perdu la fierté d’elle-même (…) elle n’ose plus même parlerd’indépendance. Elle aimerait qu’on l’admireencore, alors qu’elle a perdu confiance en elle.(…) Nul n’est crédible pour autrui si son identitése brouille, il n’y a que des sots à vouloir récuserun patriotisme qui en est la vivante expression ; et

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dans les troubles de la Terre, il importerad’autant plus d’avoir des convictions qu’il n’yaura plus de certitudes. »

Sur l’Europe : « Sans doute fut-elle, dès cemoment, frappé du contresens de vouloir fairel’Europe contre les Etats-Nations, alors que ceux-ci demeuraient les seuls pôles véritables destabilité à partir desquels il était possible de bâtirun nouvel ensemble. » (p.62)Abordant le sujet de l’OTAN, l’auteur note :« Trois ans après notre retour dans l’organisationmilitaire intégrée, il faut bien constater déjàcombien, chez nombre de nos militaires, toutesingularité de pensée disparaît sous la pressionde la « machinerie » atlantique. (…) L’OTANaujourd’hui, pour quoi faire ? Elle tend à devenirmoins l’institution d’une défense communequ’une organisation politique réunissant lesAméricains et leurs alliés (…) (p.116-117) notreretour dans l’organisation militaire intégrée del’OTAN lui (la Chine) fait douter de la réalité decette indépendance » (p.252)

A la lumière de la crise en Ukraine, les remarquessur la Russie valent quelques développements :« M. Poutine avait trouvé une effroyable situationpolitique et économique. Toute son action a visé àla restauration de la Russie dans ses limitesresserrées, à la constitution d’un Etat, ainsi qu’àl’assainissement et au redressement d’uneéconomie proche de la faillite (p.125) (…)Washington, soutenu par les Européens, ne cessede prendre ou de favoriser des mesuressusceptibles d’être interprétées par Moscoucomme autant de provocations. Ce sont le soutienà grand bruit et à grand frais de pays de l’exUnion soviétique aux frontières de la Russie, laproposition d’accueillir certains d’entre eux ausein de l’OTAN (mais une OTAN pour quoifaire ?), la reconnaissance de l’indépendance duKosovo, l’affaire – à ses débuts – du bouclieranti-missiles, etc. Madame Condeleeza Rice étaitmême allée naguère à déclarer que les Etats-Unisne laisseraient pas les russes faire obstacle àl’élargissement de l’OTAN. Cette déclaration estassez surprenante car elle revient à dire à unassiégé – ou qui craint de l’être – qu’il ne doitpas s’opposer au renforcement de son siège.(p.128) (…) Quand M. Mendeleïv parla à M.Solana, non plus de « Maison commune » chère àGorbachev, mais d’une sorte d’accord de sécurité

de « Vancouver à Vladivostok », cela auraitmérité d’être creusé. (p.130) (…) L’intérêt del’Europe est de s’entendre avec la Russie plutôtque de participer à son encerclement. (…)L’Europe a besoin d’une Russie nouvelle forte etstable. » (p131) Et de rappeler que ce sont lesEuropéens qui ont dénoncé le système de livraisonde gaz, stable, favorable aux parties, pour luipréférer un régime plus « libéral. » L’auteur passe en revue tous les continents etpréconise des axes d’action. « Oui, souvent, avantde nous ériger en juges, nous devrions chercher àmieux connaître et à comprendre. » (p.288)

Quelles sont les outils d’une nouvelle politique ?L’Etat se voit réhabilité : « Il n’y a pas à être pourou contre l’Etat, le fait est qu’il a seul la vocationet la capacité d’exercer l’autorité au service del’intérêt général et de représenter une nation vis-à-vis de l’extérieur. » (p.284) Or l’Etat, la nation,la démocratie, sont inséparables. « La démocratieest un état de vie, un état d’esprit avant d’être uneforme de gouvernement » (p.289)

Le chantier est immense : « Le monde estdésormais sans ordre et l’Occident n’est plus unmodèle » (p.291) Des Etats sapent l’autorité desNations-Unies : « L’ignorance systématique parIsraël de résolutions le concernant, lareconnaissance du Kosovo par les Etats-Unis etl’Europe, ou encore de l’Ossétie par la Russie, encompromettent l’autorité et en montrent leslimites. » (p.293)

Les institutions économiques internationales tellesle FMI, la Banque Mondiale et l’OMC ne sont pasépargnées par l’auteur. « Le libéralisme le plusexigeant y régnait. « Le FMI (…) n’est pasresponsable de la crise actuelle, il est coupable dene s’être jamais préoccupé des désordres d’unelibéralisation financière conduisant pas ses excèsà une fragilisation générale au risque dedésordres en chaînes. » (p.301) Pour sa part,l’OMC est l’objet d’un commentaire judicieux :« Plutôt que de viser, de cycle en cycle, lalibération des échanges, à faire de monde àmarches forcées un espace ouvert à tous vents,l’Organisation pourrait d’abord chercher à êtrele lieu d’un authentique dialogue entre pays plusanciennement avancés et pays émergents. »(P.306)

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Les Européens sont invités à penser leur défense :« Il faut se départir de l’idée que les Américainsseront toujours là pour défendre l’Europe »(p.320) Au-delà de l’Europe, il convient de semontrer plus équitable en matière de lutte contrela prolifération nucléaire : « Il y a déjà deux poidsdeux mesures. On admet dans la Péninsuleindienne que l’Inde et le Pakistan détiennentchacun la bombe, on n’accepte pas qu’un autrepays qu’Israël la possède au Moyen-Orient ! »(p.329) La prétention étasunienne à la « SpaceDomination » et à l’arsenalisation corolaire n’ira pas sans contestation, dont la Chine montre lechemin.Au-delà du cas français, l’Ambassadeur FrancisGutmann dispense une leçon de lucidité, decourage, de liberté, à celles et à ceux quis’interrogent sur l’ordre du monde et leschangements à y apporter.

Gabriel Galice

RESSOURCES DOCUMENTAIRES

Nous vous recommandons la consultation du siteinternet du CESIM (Centre d'Etudes de SécuritéInternationale et de Maîtrise des armements).http://www.cesim.fr

Le CESIM est un centre d'analyse et de recherchedont els domaines d'expertise recouvrentessentiellement les questions de maîtrise desarmements , de non-prol i féra t ion e t dedésarmement.

Sur la page de l'Observatoire de la non-prolifération, vous pourrez lire dans le n° 88,hors-série 2013, un très intéressant article deCamille GRAND, directeur de la Fondation pourla recherche stratégique.http://www.cesim.fr/documents/onp/fr/88.pdf

Bonne lecture !

PUBLICATION DU GIPRI

Paru en 2013, l'ouvrage Regards croisés sur laguerre et la paix, rapporte les contributions desdifférents chercheurs qui ont participé auséminaire organisé par le Gipri en octobre 2011.L'ouvrage est disponible en librairie.

Gabriel GALICE (Ed.) Regards croisés sur la guerre et la paix. Paris :L'Harmattan. Cahier du GIPRI, n° 9, 2013ISBN : 978-2-343-01366-418€

Les opinions exprimées dans cette lettre n’engagent que leurs auteurs

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INSTITUT INTERNATIONAL DE RECHERCHES POUR LA PAIX

A GENEVE (GIPRI)

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