9782807307353 ANDOLFI CV · 2018. 7. 5. · Maurizio Andolfi ISBN : 978-2-8073-0735-3 ISSN : 1780-9517 Maurizio Andolfi est pédopsychiatre et psychothérapeute familial. Ancien professeur

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ISBN : 978-2-8073-0735-3

www.deboecksuperieur.com

ISSN : 1780-9517

Maurizio Andolfi est pédopsychiatre et psychothérapeute familial. Ancien professeur à l’Université La Sapienza de Rome, il est directeur de l’Accademia di Psicoterapia della Famiglia à Rome et de la revue Terapia Familiare.

Robert Neuburger est médecin psychiatre, psychanalyste et thérapeute de couple et de famille. Il a écrit de nombreux ouvrages.

Angela Macciocchi est psychologue clinicienne, psychothérapeute et thérapeute familiale. Elle est formatrice au sein du Ceccof (Centre d’études cliniques des communications familiales).

Maurizio Andolfi

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En accompagnant le lecteur par de nombreuses vignettes cliniques et méthodologies détaillées, Maurizio Andolfi montre comment la thérapie peut devenir un espace d’expérience cognitive, émotionnelle et humaine au sein duquel le thérapeute et la famille feront des allers-retours entre le passé et le présent. Grâce à ces techniques et modèles, le professionnel peut ainsi appréhender au plus près les nouvelles familles, tenir compte des spécificités culturelles liées à l’immigration, lire le langage corporel des patients, comprendre les dynamiques de couples, etc.

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Maurizio AndolfiPréface de Robert NeuburgerTraduction d’Angela Macciocchi


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© De Boeck Supérieur s.a., 2018Rue du Bosquet, 7 – B-1348 Louvain-la-NeuvePour la traduction et l’adaptation en langue française

Tous droits réservés pour tous pays.Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

Dépôt légal :Bibliothèque nationale, Paris : mars 2018 ISSN : 1780-9517Bibliothèque Royale de Belgique, Bruxelles : 2018/13647/030 ISBN : 978-2-8073-0735-3

Ouvrage original :Maurizio AndolfiLa terapia familiare multigenerazionale. Strumenti e risorse del terapeuta© Maurizio Andolfi – 2015 – 1st edition published by Rafaello Cortina


5Sommaire

Sommaire

Préface 7

Remerciements 11

Introduction 13

Chapitre 1 Fondements de la psychologie relationnelle 19

Chapitre 2 Cycle de vie de la famille et dimension multigénérationnelle 31

Chapitre 3 Mutations sociales et nouvelles configurations familiales 47

Chapitre 4 Modalités d’observation de la famille 61

Chapitre 5 Évaluation du fonctionnement familial 81

Chapitre 6 La construction de l’histoire thérapeutique 95

Chapitre 7 Les langages de la rencontre thérapeutique 113

Chapitre 8 Le langage du corps en thérapie familiale 129


6 La thérapie familiale multigénérationnelle

Chapitre 9 Le silence et le contact physique : deux modalités de rencontre avec la famille 145

Chapitre 10 Le retour à la dimension humaine et relationnelle de la psychothérapie 163

Bibliographie 173

Les auteurs 185

Table des matières 187


19Fondements de la psychologie relationnelle

chapitre 1

Fondements de la psychologie

relationnelle

1. Les origines de la théorie des systèmes

La psychologie relationnelle trouve ses origines dans le contexte culturel amé-ricain des années cinquante, qui vit l’émergence d’une nouvelle vision des phénomènes humains, non plus isolés et morcelés mais considérés comme faisant partie d’un tout (holisme). Cette approche interdisciplinaire fut un terrain fertile pour le développement des sciences sociales telles que l’anthro-pologie et la sociologie, et contribua considérablement à la compréhension du contexte socio-culturel dans lequel le cycle de vie de la famille se déroule et de l’impact du fonctionnement familial sur l’évolution de l’individu.

En psychologie, les théories néo-freudiennes introduiraient un point de vue radicalement différent, en ce sens que l’intérêt pour la dimension interperson-nelle et pour le contexte socio-culturel des phénomènes remplaça l’observation centrée, principalement, sur l’intrapsychique. Lors de la journée d’ouverture de l’International Conference of the Pioneers of Family Therapy, qui eut lieu à Rome en 2000, Salvador Minuchin indiqua le groupe néo-freudien composé par Harry Stack Sullivan, Eric Fromm, Karen Horney et Clara Thompson comme le vrai précurseur du mouvement de thérapie familiale naissant.

C’est dans ce contexte que la théorie des systèmes est née. Elle repré-sente (Bateson, 1979) la « structure qui relie » les différents domaines de la



connaissance (les mathématiques, les sciences naturelles et humanistes) et se base, entre autres, sur les concepts de système, d’organisation, d’autorégula-tion, de totalité et de causalité circulaire. Selon la théorie générale des systèmes introduite par le biologiste Ludwig Von Bertalanffy et définitivement systémati-sée en 1968, l’observateur ne s’intéresse plus aux phénomènes isolés mais « aux complexités organisées ». Cette vision de la réalité parlait avec un langage et un lexique scientifique nouveaux applicables à tous les systèmes : organismes vivants, organisations sociales, systèmes humains et systèmes informatiques. La perspective systémique regardait le monde à travers un objectif grand-angle qui mettait en lumière l’interdépendance et l’interrelation entre tous les phéno-mènes observés. Un tel paradigme de référence, où les propriétés ne peuvent pas être réduites aux parties qui les composent, fut appelé système (Capra, 1982). Ainsi, ce modèle permettait à l’observateur de saisir les caractéristiques com-munes à tous les systèmes considérés comme « un ensemble d’unités qui intera-gissent et qui sont en relation » (Miller, 1978).

Grâce aux travaux de Paul Watzlawick, Don Jackson, Jay Haley et John Weakland du Mental Research Institute de Palo Alto, la vision systémique-cybernétique fut introduite dans l’étude de la famille. Ces auteurs s’inspirèrent des idées de Bateson et empruntèrent les concepts et la terminologie des théo-ries de la communication propres aux études sur le comportement animal et aux sciences informatiques (input, output, feedback, etc.). Le symptôme indivi-duel, considéré comme une distorsion de la communication, devient alors « la porte d’entrée » dans la famille vue comme un système autorégulé qui tend à la cohésion et à l’homéostasie. Selon le groupe de Palo Alto, l’organisation du système familial tend à préserver le statu quo (l’homéostasie) à travers des règles précises de la communication et un ensemble plus ou moins rigide d’in-teractions. Le modèle proposé se focalise essentiellement sur les interactions, et donc sur les aspects observables du comportement et sur la communication dans l’ici et maintenant ; l’observateur cherche les liens entre un style de com-munication et une symptomatologie spécifique.

Vers la moitié des années cinquante, la théorie du double lien (Bateson, Jack-son, Haley et al., 1956) proposa un cadre théorique pour comprendre et traiter les formes de communications dysfonctionnelles qui pouvaient être repérées au sein des relations duelles. Ces auteurs tentaient d’expliquer les pathologies psychiatriques sévères, avant tout la schizophrénie, à partir de l’observation des interactions intrafamiliales selon une logique de causalité circulaire. Toutefois, selon différents auteurs comme Telfener (2002), Telfener et Todini (2002), Ugazio (1985), Minuchin (1974, 2002) et Andolfi et Mascellani (2010), cette approche resta malgré tout emprisonnée dans une logique mécaniciste de causalité linéaire car, en définitive, on continuait à rechercher les causes des symptômes. Le groupe de Palo Alto s’appuya sur la collaboration précieuse de Bateson pour mener un ambitieux projet de recherche sur les différentes formes de communication mais n’arriva pas à saisir la complexité de ses idées



et réitéra le modèle mécaniciste alors que l’objectif était de le remettre en question. Autrement dit, les études sur la famille continuaient à être influencés par la vision étio-pathogénique du modèle médical. L’idée était que la commu-nication dysfonctionnelle au sein d’une relation significative conduisait iné-vitablement à la manifestation d’une pathologie et que la personne n’était pas en mesure de déchiffrer les messages contradictoires envoyés par l’autre. Un exemple de double lien est la communication dysfonctionnelle mère/enfant dans laquelle la mère dit à l’enfant « je t’aime » mais le ton de sa voix et sa posture expriment le contraire. L’hypothèse est que l’enfant reste bloqué dans le paradoxe et, de ce fait, ne peut pas donner un sens à la communica-tion. En réalité, la théorie du double lien fut une intuition intéressante pour la recherche mais son application clinique se révéla un échec. Dans les années quatre-vingt, elle rencontra aux États-Unis une forte opposition de la part des associations de parents qui se sentaient jugés et culpabilisés pour la maladie de leurs enfants. Le déclin de ce modèle théorique fut publiquement reconnu lors de la conférence intitulée « Au-delà de la théorie du double lien » qui eut lieu à New York en 1978 ; au cours de cette même année fut publié un ouvrage avec le même titre (Berger, 1978).

Cependant, l’accent mis sur le langage non verbal, la distinction entre contenu et contexte et la description des axiomes de la communication déclinés dans Une logique de la communication (P. Watzlawick, J.H. Beavin, D.D. Jackson, 1967) restent une incontestable référence théorique pour la thérapie. En effet, il est indéniable que l’approche systémique-cybernétique a permis à la psychologie relationnelle de développer une nouvelle conception de l’être humain. Cette approche a ouvert un débat critique sur la vision monadique de l’individu vu comme prisonnier de son propre mal-être et à la merci des dynamiques intrapsychiques. Elle a replacé cette vision par l’image d’un être social dont le comportement s’inscrit au sein du contexte relationnel dans lequel il vit. Aussi, la communication qui accompagne les événements et les actions est au premier plan. Les comportements sympto-matiques nous signalent la présence d’un mal-être relationnel de toute la famille et indiquent l’existence d’un conflit entre continuité et changement, entre besoin d’appartenance et besoin d’individuation de chaque membre du système familial.

En résumé, la théorie des systèmes propose une nouvelle manière de regar-der la famille et se base sur des concepts fondamentaux :

1. La famille est un système.2. Le comportement, et par conséquent le changement, est une fonction

de la relation, y compris les effets et les réactions qu’il provoque sur l’autre et sur le contexte dans lequel il se manifeste. L’attention se déplace d’une monade artificieusement isolée aux relations entre les parties d’un système plus large (Watzlawick, Beavin, Jackson, 1967).



3. Le concept de contexte appliqué à l’observation des relations fami-liales devient le point central du modèle proposé par P. Watzlawick, J.H. Beavin et D.D. Jackson : « Un phénomène est inexplicable si le champ d’observation n’est pas suffisamment large pour inclure le contexte dans lequel le phénomène apparaît. » Nous pouvons consi-dérer le contexte comme le cadre qui définit et donne un sens au com-portement. Pour Bateson (1979) aussi, les mots et les actes ne sont pas significatifs en dehors du contexte. Prenons l’exemple d’un homme qui fait un clin d’œil à une femme et, plus précisément, considérons le contexte spécifique dans lequel l’action se déroule : si cela se passe dans un restaurant, nous pouvons penser qu’il s’agit d’un geste de séduction ; au contraire, si ce comportement a lieu dans un contexte professionnel, nous pouvons imaginer qu’il s’agit d’un signe d’entente et d’approba-tion. Le contexte ne se définit pas uniquement par l’espace physique dans lequel la relation a lieu mais aussi par la qualité de la relation qui va influencer la communication non verbale et le contenu du discours (Watzlawick, Beavin, Jackson, 1967).

4. Cronen, Johnson et Lannamann (1982) ont ensuite montré que les différents niveaux de la communication s’influencent mutuellement : la relation définit le contexte qui va influencer l’interprétation du contenu de l’échange, mais le contenu a, lui aussi, une dimension rela-tionnelle car il va modifier et signifier le contexte (Andolfi, Angelo, 1987). La prise en compte de la dimension historique et temporelle a permis à ces auteurs de voir le contexte comme une entité en évolution constante, toujours susceptible d’être redéfini. Selon cette acception, le contexte donne forme à notre expérience, devient un lieu d’apprentis-sage qui aide à comprendre la pertinence des différents contextes dans lesquels nous vivons et que nous contribuons à créer.

5. Le symptôme assume une signification différente : il n’est plus uni-quement la manifestation d’une problématique individuelle ou d’une maladie mais exprime un dysfonctionnement dans l’organisation d’un système pris dans sa totalité. La personne porte le symptôme aussi au nom des autres membres du système familial pour signifier la résistance au changement.

En ce qui concerne le groupe de Palo Alto, nous tenons à souligner que Haley (1976) a été le premier à parler de triade comme unité d’observation de la relation. Cette intuition a permis aux thérapeutes de lire les interactions au sein de la famille avec un regard tout à fait original et d’adopter une nouvelle modalité de recueil des informations : nous parlons des questions circulaires. Vers la fin des années soixante, sa description des triangles pervers, c’est-à-dire des configurations triadiques dysfonctionnelles qui apparaissent dans les pathologies individuelles graves, le portera à s’éloigner du modèle de Palo Alto



et à s’ouvrir à d’autres théories : d’abord l’approche stratégique de l’hypnose de Milton Erickson (Haley, 1985) et ensuite l’approche structurale de Sal-vador Minuchin. Néanmoins, Haley resta fondamentalement attaché à une approche systémique focalisée sur l’individu problématique ; il ne s’intéressa pas véritablement à la dimension intergénérationnelle de l’évolution familiale.

2. La théorie des systèmes et la théorie multigénérationnelle : analyse de deux modèles

L’évolution de la théorie des systèmes n’arriva pas à développer un modèle conceptuel et clinique unique applicable à la famille et à la psychopatho-logie individuelle. Dès le début des années soixante, deux écoles, très diffé-rentes entre elles, s’intéressèrent à l’étude du fonctionnement de la famille. Sur la côte ouest des États-Unis, on étudia les axiomes de la communication humaine (ce qui aboutira à la théorie du « double lien »), alors que l’approche psychodynamique influença les chercheurs de la côte est. Parmi ces derniers, citons : Bowen à Washington, Boszormenyi-Nagy et Framo à Philadelphie, Whitaker à Madison et, sous certains aspects, Minuchin et son école structu-rale (Philadelphie). Tous ces auteurs avaient une formation psychodynamique et contribuèrent considérablement à déplacer l’attention vers la perspective évolutive selon laquelle le développement de l’individu s’inscrit au sein du cycle de vie de la famille.

En approfondissant notre analyse, nous pouvons dire que les concepts théo-riques du mouvement systémique (Watzlawick, Beavin, Jackson, 1967 ; Haley, Hoffman, 1981 ; Selvini Palazzoli, Boscolo, Cecchin, 1975) s’appliquaient à l’interaction et à la communication observables au sein du système familial dans l’ici et maintenant et que le processus évolutif dans lequel ces phéno-mènes apparaissent n’était pas véritablement pris en considération. L’obser-vation restait donc confinée à une réalité statique ; le devenir naturel d’un système et son évolution étaient réduits à une dimension temporelle unique : le présent (Andolfi, Angelo, 1987 ; Telfener, 2002). Par conséquent, l’indi-vidu en tant que sujet était une entité impénétrable, une « boîte noire » qui gardait jalousement ses idées, ses émotions, ses motivations, ses attentes, son imaginaire et sa compréhension des phénomènes. C’est la raison pour laquelle la théorie du double lien n’a pas aidé l’individu à résoudre le dilemme de la communication paradoxale, car elle ne lui a pas permis de s’appuyer sur ses propres ressources : les émotions et la pensée.

Nous devons néanmoins reconnaître que cette approche, en introduisant l’étude des nouvelles stratégies de la communication, y compris la dimension analogique, a réussi à contraster les idées dominantes de l’époque. En effet,



l’approche systémique a permis au mouvement systémique relationnel naissant de trouver une identité propre par rapport à la forte tradition psychanalytique centrée sur le passé, sur la dimension intrapsychique et sur la communication verbale. Du point de vue clinique, il est important de rappeler que le groupe du Mental Research Institute (MRI) de Palo Alto avait travaillé pendant trente ans dans un cadre individuel et utilisait des stratégies d’intervention de courte durée : il n’avait jamais véritablement travaillé avec les familles. Pourtant, en Europe, Une logique de la communication (Watzlawick, Beavin, Jackson, 1967) est devenue, pendant longtemps, la « bible » de la thérapie familiale, peut-être grâce à son opposition à la tradition psychanalytique dominante. Cela ne fut pas le cas aux États-Unis, où la spécificité des recherches du groupe de Palo Alto était bien connue.

Dans les années soixante-dix, le « groupe de Milan » dirigé par Mara Selvini Palazzoli s’inspira des travaux de Watzlawick et des « puristes des sys-tèmes » qui défendaient la nécessité de préserver la neutralité du thérapeute. Ce dernier ne devait pas montrer ses émotions face aux patients. C’est dans un tel contexte que Selvini Palazzoli, Boscolo, Cecchin et Prata ont rédigé le célèbre article sur la manière de conduire la séance à partir de trois idées guides : la neutralité du thérapeute, la formulation d’hypothèses relationnelles et l’utilisation de questions circulaires (Selvini Palazzoli, Boscolo, Cecchin, 1980).

En parallèle, d’autres auteurs, influencés par l’approche relationnelle (Boszormenyi-Nagy, Framo, 1965 ; Ackerman, 1958 ; Whitaker, 1989 ; Minuchin, 1974 ; Andolfi, Angelo, Menghi et al., 1982 ; Andolfi, Angelo, De Nichilo, 1989), ont maintenu un lien avec la tradition psychanalytique et se sont davantage intéressés à l’individu et à son évolution personnelle tout en élargissant le champ d’observation à l’histoire familiale et aux contextes de vie. Nous devons à ces auteurs les théories et les concepts clés qui sont à la base des premières études sur la dimension historique et trigénérationnelle de la famille. Nous pensons à Bowen et aux concepts de différenciation du soi et de transmission intergénérationnelle (Bowen, 1978), qui ont profondément influencé les recherches sur la famille ; à Boszormenyi-Nagy et Spark (1973), du Pennsylvania University de Philadelphie, et aux concepts de loyautés invi-sibles et de dettes et crédits intergénérationnels ; à Framo (1992) qui a introduit l’approche intergénérationnelle à la thérapie de couple ; à Whitaker (1989), l’un des représentants les plus cohérents et créatifs de l’approche trigénération-nelle qui a étudié les mythes et qui a introduit l’idée de sauts temporels ; aux brillantes définitions de Minuchin (1974) sur les familles enchevêtrées et désen-gagées et sur les frontières intergénérationnelles, concepts fondamentaux qui ont permis de comprendre l’évolution de l’enfant selon une perspective historique. Nathan Ackerman (1958) qui, dans le contexte des années soixante, peut être considéré comme un pionnier, mérite une attention particulière compte tenu de l’originalité de son interprétation relationnelle des symptômes de l’enfant. Il a été le premier à parler de l’enfant en tant que bouc émissaire des



conflits familiaux et à utiliser la triade primaire comme modèle d’observation et d’inter vention dans le travail avec les familles.

Aucun de ces remarquables cliniciens ne se serait défini comme sys-témicien bien que la théorie des systèmes de Von Bertalanffy (1968), l’approche interdisciplinaire de Bateson et les axiomes de la communica-tion de Watzalwick, Beavin et Jackson (1967) étaient les fondements de leur pensée. Concernant l’attention portée à l’individu et à son contexte cultu-rel, Salvador Minuchin, dans un article paru dans l’ouvrage I pionieri della terapia familiare (Andolfi, 2002), propose une intéressante réflexion critique sur l’approche systémique : « Le langage utilisé par Gregory Bateson dont le groupe de Palo Alto ainsi que les systémiciens se sont inspirés conduit le thé-rapeute à décrire plutôt qu’à prescrire, l’oriente vers les idées mais l’éloigne de la personne et de ses émotions. Il met une distance entre le thérapeute et la famille, en tant que groupe humain, il décrit les caractéristiques des systèmes et des redondances ».

En revanche, les thérapeutes familiaux qui suivent le modèle multigéné-rationnel (Boszormenyi – Nagy, Framo, 1965 ; Ackerman, 1958 ; Zuk, Boszormenyi – Nagy, 1969 ; Bowen, 1979 ; Stierlin, 1975 ; Cigoli, 1983 ; Whitaker, 1989 ; Minuchin, 1974 ; Andolfi, Mascellani, 2010) sont restés proches de la théorie psychodynamique. L’ouvrage de Boszormenyi – Nagy et Framo (1965) devenu le manifeste de la thérapie multigénérationnelle en est un témoignage. Pour les « pionniers » et pour tous ceux qui ont suivi leurs idées, il est évident que chaque famille a une histoire et une singularité dont il faut tenir compte sans pour autant oublier l’individu et son évolution.

Le génogramme familial élaboré par Murray Bowen (1978) est devenu « la carte trigénérationnelle de la famille ». Ce graphique de la famille est utilisé par les thérapeutes du monde entier et permet d’observer la composi-tion de la famille sur au moins trois générations, de repérer les événements déterminants (naissances, décès, séparations, qualité des liens, etc.) et de formuler des hypothèses relationnelles afin de définir le projet thérapeutique. Il est important de souligner que contrairement à ce que les systémiciens prétendaient, du moins dans un premier temps, les auteurs à orientation multigénérationnelle n’ont jamais mis « entre parenthèses » l’individu. Au contraire, lorsque la personne est bloquée dans son évolution et tente de réparer les « coupures émotionnelles » anciennes, le thérapeute l’invite à se reconnecter avec le passé, à se différencier, à vivre le présent de façon authentique et à se libérer des interdits et des injonctions intergénération-nelles. Pour conclure, les « pionniers » nous ont transmis l’importance de resituer le comportement au sein d’un contexte mais aussi la nécessité de ne pas rester uniquement dans le présent. Nous avons hérité l’aspiration à com-prendre la portée relationnelle des symptômes individuels et à rechercher, avec la famille, le chemin vers le changement.



185Les auteurs

Les auteurs

Maurizio Andolfi est pédopsychiatre et psychothérapeute familial. Il a ensei-gné la psychologie du développement et des relations familiales à l’université La Sapienza de Rome. Il est également directeur de l’Accademia di Psicoterapia della Famiglia à Rome et de la revue Terapia Familiare. Il est l’auteur de nom-breux ouvrages, dont deux ont été traduits en français aux éditions De Boeck Supérieur : La thérapie racontée par les familles et Histoires d’adolescence.

Robert Neuburger est médecin psychiatre, psychanalyste et thérapeute de couple et familial. Professeur honoraire de psychologie clinique à l’ULB, ancien vice-président de l’Association française de thérapie familiale, membre de l’EFTA, il forme et supervise des thérapeutes, principalement en Suisse, en France, en Belgique et en Espagne. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, traduits en plusieurs langues et destinés au grand public ou aux professionnels.

Angela Macciocchi est psychologue clinicienne, psychothérapeute et théra-peute familiale formée à la thérapie familiale à Rome par Maurizio Andolfi, Paolo Menghi et Carmine Saccu. Exerçant à Paris, elle est formatrice au sein du Ceccof (Centre d’études cliniques des communications familiales). Elle est auteur d’articles et a notamment traduit les deux ouvrages de Maurizio Andolfi publiés aux éditions De Boeck Supérieur.



187Table des matières

Table des matières

Sommaire 5

Préface 7

Remerciements 11

Introduction 13

Chapitre 1 Fondements de la psychologie relationnelle 19

1. Les origines de la théorie des systèmes 19

2. La théorie des systèmes et la théorie multigénérationnelle : analyse de deux modèles 23

3. Les puristes des systèmes et les conductors 26

4. L’intersubjectivité de l’observation 26

Chapitre 2 Cycle de vie de la famille et dimension multigénérationnelle 31

1. La théorie du cycle de vie de la famille 32

2. Trames multigénérationnelles 34

3. Les loyautés invisibles 35

4. L’acquisition de l’autorité personnelle 36

5. Le mythe : expression et passeur de la culture familiale 37Cas clinique : Dario : une figure mythique 38

6. Le mythe : entrave ou ressource dans le processus d’individuation ? 39Cas clinique : À table avec les enfants : le dévoilement du secret 39



7. La différenciation du soi 40

8. La « coupure émotionnelle » 42

9. L’intimidation intergénérationnelle et « l’enfant chronique » 44Cas clinique : Comment obtenir le diplôme de fils ? 45

Chapitre 3 Mutations sociales et nouvelles configurations familiales 47

1. Les enfants face au divorce et les familles monoparentales 48

2. Familles recomposées 502.1. Élaboration de la séparation ou du divorce 502.2. Loyautés privilégiées et rivalité fraternelle 512.3. Soutenir l’implication de toutes les figures parentales 512.4. Préserver le lien conjugal dans les familles recomposées 51

3. Familles composées d’une seule personne 52

4. Couples et familles pacsés 53

5. Familles adoptives 53Cas clinique : Paroles de familles adoptives 53

6. Couples mixtes et familles immigrées 55Familles immigrées 56

7. Couples homosexuels et enfants avec parents du même sexe 59

Chapitre 4 Modalités d’observation de la famille 61

1. La triade comme unité minimale d’observation 61

2. Les triangles trigénérationnels 63

3. Le génogramme : une représentation graphique du développement de la famille 65Le génogramme de Monica 68

4. L’utilisation du génogramme dans la formation 69

5. Le génogramme en thérapie et en consultance 70Cas clinique : Le symbole jaune de Klevia 71Cas clinique : John, Liz et le génogramme photographique 72

6. La sculpture familiale : un puissant outil non verbal pour les thérapeutes systémiques 72

7. La sculpture familiale en thérapie 737.1. Retour vers le passé 747.2. Le moment présent 747.3. La sculpture en thérapie de couple 75



Cas clinique : Tu ne me regardes pas 75Cas clinique : Tortures conjugales 757.4. Sculpter le futur 767.5. La sculpture en thérapie individuelle 76

8. La sculpture en supervision et dans la formation 76La sculpture des handicaps professionnels 77

9. Le jeu de rôle en thérapie et en supervision 79Cas clinique : Se mettre dans la peau de l’autre et attendre 79Cas clinique : Les chaises vides 80

Chapitre 5 Évaluation du fonctionnement familial 81

1. La maison à trois étages 81

2. Configurations du couple 832.1. Le couple harmonieux 842.2. Le couple conflictuel 852.3. Le couple instable 862.4. Le couple « sandwich », écrasé entre deux générations 87

3. Diagnostic social du fonctionnement du couple 88

4. La naissance de l’enfant : une transformation majeure de la relation conjugale 894.1. Le fugitif et la femme dépendante 904.2. Le miracle de l’adoption 91

5. Évaluation de la relation fraternelle 92

Chapitre 6 La construction de l’histoire thérapeutique 95

1. L’alliance thérapeutique avec la famille 95

2. L’enfant comme co-thérapeute 97

3. Le monde intérieur du thérapeute 99

4. Les compétences relationnelles du thérapeute familial 1014.1. Écoute active et autoréflexivité 1024.2. Joining 102Cas clinique : Le dossier médical comme porte d’entrée 1044.3. Être directs 104Cas clinique : L’histoire de l’hémophilie 105Cas clinique : Le suicide de la mère 1054.4. Jeu et jovialité 1064.5. Jouer avec les mots 1064.6. Jouer avec les objets 1074.7. L’humour et le rire en thérapie 108



5. Rituels et amplification en thérapie familiale 1095.1. Le rituel du divorce 1105.2. Le rituel du frère assassiné 111

Chapitre 7 Les langages de la rencontre thérapeutique 113

1. Les bases du colloque thérapeutique 114

2. Recueil et sélection des informations 1162.1. L’entonnoir renversé 1172.2. Le puzzle thérapeutique 118

3. Redéfinitions et assertions thérapeutiques 119

4. Questions relationnelles 1214.1. Questions individuelles 1224.2. Questions triadiques 1234.3. Questions directes et indirectes 1234.4. Questions comparatives 1244.5. Questions « comme si » 1254.6. Questions métaphoriques 125Cas clinique : La porte fermée à clé 1264.7. Questions intergénérationnelles 126

Chapitre 8 Le langage du corps en thérapie familiale 129

1. Le langage des yeux et des expressions faciales 130

2. Le corps et son langage 131

3. Le corps dans l’espace et les frontières relationnelles 1323.1. Distance intime 1333.2. Distance individuelle 1333.3. Distance sociale 1333.4. Distance publique 133

4. Contact physique 133

5. Système paralinguistique et silence 134

6. Comment utiliser les yeux en thérapie familiale ? 1346.1. Le langage des poumons 1356.2. Comment les membres de la famille choisissent-ils

leur place ? 1366.3. Comment observer le « jeu des regards » ? 137

Les larmes de Giada 138

7. Le mouvement dans l’espace thérapeutique 138L’action concrète et les chemins de la mémoire 140



8. Le mouvement dans la construction de l’alliance thérapeutique 1408.1. Les mouvements du thérapeute 1408.2. Les mouvements de la famille 141Cas clinique : Le roc algérien 143Cas clinique : Comment changer les règles du jeu 143Cas clinique : Comment transformer en collaboration le refus d’une jeune fille indienne 143

Chapitre 9 Le silence et le contact physique : deux modalités de rencontre avec la famille 145

1. Pauses de réflexion 145

2. Le silence du thérapeute et de la famille 146L’écoute du thérapeute par le silence 147

3. Rester en silence avec la souffrance de la famille 1483.1. La famille face à la mort d’un enfant 1493.2. Le mutisme électif comme message 150

4. Le contact physique en thérapie familiale 1504.1. Le contact physique du thérapeute 1504.2. L’utilisation du corps en thérapie 152

5. Le contact physique : un soutien à l’alliance thérapeutique 153

6. Le contact physique pour reconstruire les liens 155Cas clinique : Retrouver une mère trente ans après 156

7. Cas clinique : Les fardeaux de Rob 158

Chapitre 10 Le retour à la dimension humaine et relationnelle de la psychothérapie 163

1. Les limites du modèle médical dans le traitement des troubles mentaux et relationnels 164

2. La recherche sur l’efficacité de la thérapie et l’évaluation à distance de la thérapie familiale 166

3. La thérapie racontée par les familles 168

4. La guérison de Thomas : un miracle ou un processus thérapeutique réussi ? 170

Bibliographie 173

Les auteurs 185


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ISBN : 978-2-8073-0735-3

www.deboecksuperieur.com

ISSN : 1780-9517

Maurizio Andolfi est pédopsychiatre et psychothérapeute familial. Ancien professeur à l’Université La Sapienza de Rome, il est directeur de l’Accademia di Psicoterapia della Famiglia à Rome et de la revue Terapia Familiare.

Robert Neuburger est médecin psychiatre, psychanalyste et thérapeute de couple et de famille. Il a écrit de nombreux ouvrages.

Angela Macciocchi est psychologue clinicienne, psychothérapeute et thérapeute familiale. Elle est formatrice au sein du Ceccof (Centre d’études cliniques des communications familiales).

Maurizio Andolfi

carrefourdespsychothérapies

Préface de Robert NeuburgerTraduction d’Angela Macciocchi


Outils et ressources pour le thérapeute

"À travers cet ouvrage, Maurizio Andolfi nous

présente un modèle de thérapie familiale qui intègre la théorie des systèmes et l’approche

multigénérationnelle. Faces aux difficultés, aux non-dits et aux obstacles qui peuvent se poser lors d’une thérapie, l’auteur part de l’idée que l’histoire familiale renferme la clé de la guérison.

En accompagnant le lecteur par de nombreuses vignettes cliniques et méthodologies détaillées, Maurizio Andolfi montre comment la thérapie peut devenir un espace d’expérience cognitive, émotionnelle et humaine au sein duquel le thérapeute et la famille feront des allers-retours entre le passé et le présent. Grâce à ces techniques et modèles, le professionnel peut ainsi appréhender au plus près les nouvelles familles, tenir compte des spécificités culturelles liées à l’immigration, lire le langage corporel des patients, comprendre les dynamiques de couples, etc.

Qu’ils soient systémiciens ou issus d’autres courants, les professionnels découvriront un modèle humaniste-expérientiel qui voit dans la présence du thérapeute le principal outil qui facilitera le processus de changement.

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9782807307353 ANDOLFI CV · 2018. 7. 5. · Maurizio Andolfi ISBN : 978-2-8073-0735-3 ISSN : 1780-9517 Maurizio Andolfi est pédopsychiatre et psychothérapeute familial. Ancien professeur