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Erosion et paysage Haïti : l’exploitation coloniale et néo-coloniale Histoire d’un saccage

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Erosion et paysage

Haïti : l’exploitation coloniale et néo-colonialeHistoire d’un saccage

Le territoire est à 2 % boisé alors qu’il y a 60 % de mornes.

Ce paysage saccagé a une histoire…

A Haïti…

Les Taïnos : premières modifications du paysage.

Champs et villages occupent les plaines littorales et le bord de mer.

Les Taïnos ne vont pas dans les mornes : pas de routes, les communications se font avec des pirogues.

XIIIe siècle : arrivée des

Taïnos, début de l’agriculture.

• Agriculture sans élevage : pas de fumier pour les sols, pas de traction animale.

• Champs ouverts sans barrières.

Une agriculture fragile

Plans de manioc

Racines de manioc

Génocide des Taïnos

Massacres, choc microbien, famines.

1492 Arrivée et installation des Espagnols.

A Hispaniola :

En 1492 : 400 000

En 1519 : 3 000

En 1535 : 500 ?

La destruction du paysage taïno

Ni population ni agriculture : échec de la colonisation

espagnole.

• Mise en esclavage de la population dans les mines.

• Destruction de l’organisation agricole.

• Arrivée du bétail d’Europe qui mange les champs de manioc.

1605-1606 Dévastations d’Osorio : destructions des établissements du nord et de l’ouest, repli à l’est.

L’île abandonnée est laissée au bétail devenu sauvage (cimarron) qui se multiplie en liberté.

Flibustiers et boucaniers français (1630-1680)

Les boucaniers chassent le bétail cimarron pour la viande fumée (boucanée) et le cuir qui sont vendus aux colonies espagnoles.

Les flibustiers font de la piraterie et du commerce illégal avec les colonies espagnoles.

Les richesses de l’île sont exportées.

Faibles investissements, exploitations familiales.

1660-1680 Sédentarisation et premiers défrichements : le tabac

Une culture simple : défrichements partiels, sans dessoucher.

1685 : début de l’indigo

Une révolution pour les colorants textiles.

Une production de masse : — De grandes unités de production avec un défrichements total. — Usage industriel de l’eau.— De nombreux esclaves.

L’indigo, première culture industrielle (fin XVIIe siècle)

SavanesSucrerie

Aqueduc

Places à vivre des esclaves

Cases des nègres

Maison du maîtreHattes

Coupes de bois

Champs de cannes

Eglise

Tout l’espace disponible est tourné vers la production de sucre.

Le sucre dévore l’espace de Saint-Domingue (XVIIIe siècle)

L’empire du sucre

Une culture d’exportation liée au contexte international

1715 Paix d’Utrecht : démarrage de la production à Saint-Domingue.

1763 Fin de la guerre de Sept Ans : essor de la production de sucre.

Récolte durant dix mois de l’année pour rentabiliser les investissements :

— Sans régénération de la terre.

— Sans repos pour les esclaves. Le profit

immédiat est roi.Les bénéfices se font en métropole

Le café et le déboisement des mornes

Années 1780 La production de café passe à la grande production intensive.

Plan d’une grande cafèterie en 1798

Les grandes plantations de café défrichent totalement les mornes et ont besoin de beaucoup d’eau pour le traitement des cerises de café.

Une culture exportée dont la

plupart des bénéfices restent

en métropole

A la veille de la Révolution, les ressources naturelles de la Perle des Antilles sont déjà gravement entamées : défrichements sans reboisement et épuisement des sols.

Le Cap en 1730

Le déboisement n’a pas encore atteint la crête des mornes.

1789-1804 Révolution à Saint-Domingue et

Indépendance d’Haïti

Richesse de la colonie

Pauvreté d’Haïti indépendante=

Pour les colons, les négociants et les banquiers.

Recherche du profit immédiat, épuisement des sols, pas de reboisement.

Pour les Haïtiens, anciens et nouveaux libres.

XIXe siècle : l’impossible retour à la grande plantationDe nouveaux maîtres du pays (bourgeoisies noires et mulâtres).Des codes ruraux qui veulent reconstituer la grande plantation (1801, 1826, 1864).

Cap Haïtien en 1882 :

La ville coloniale est devenue un maigre bourg et les mornes sont déboisés.

La petite paysannerie défriche les mornes pour son propre compte (cultures vivrières, canne, café).

Echec Les nouveaux libres préfèrent cultiver pour eux-mêmes.

Pas d’investissement dans les grandes plantations.

Années Prix en francs

des 100 kg de café

1821 291,20

1824 160,60

1830 83,70

1843 75,40

1858 116 à 135

1861 160 à 162

Exportations Poids en livres

Café 46 000 000

Bois 39 283 205

Acajou 4 072 641

Tabac 1 725 389

Cacao 442 365

Exportations d’Haïti en volume (1840)

De nouveaux revenus sur les

ressources naturelles

L’impasse de la dette et le déboisement

Comment payer à la France la dette de l’indépendance (150 millions de francs or) ?

Exportations d’Haïti en volume (1840) :

de nouveaux revenus pris sur les

ressources naturelles.

HASCO (Haitian-American Sugar Company) 22 000 acres de concessions dans les plaines du Cul-de-Sac et de Léogane.

L’occupation américaine (1915-1934) Concessions aux entreprises américaines

(plantations de bananes, de sisal et de caoutchouc).

Exploitation de la forêt qui passe de 60 à 21 % du territoire.

L’occupation américaine (1915-1934) Ponction sur le capital humain et naturel.

Expropriations, retour de la corvée, bas salaires, conditions de travail déplorables.

Une petite paysannerie laissée à elle-mêmeDiminution de la taille des exploitations par les partages familiaux :— Accélération des défrichements jusqu’aux crêtes des mornes.— Exploitation de plus en plus intensive des sols et diminution des rendements.— Une agriculture sans investissements : ni engrais, ni irrigation, ni outillage.

Saint-Domingue 1785Haïti années 2000

Le capital naturel, forêts, sols et eau, paye le manque d’investissement dans l’agricultureet dans le paysage : deux siècles de désintérêt politique vis à vis du monde rural.

Vente de charbon de bois à Port au Prince

Le déboisement augmente l’érosion qui appauvrit les sols et diminue les rendements.

Kenskoff

Des plans d’ajustements structurels exigés par les créanciers et le FMI (Fond Monétaire International)

1986-1987 Abaissement des barrières douanières.

1994-1995 Quasi-disparition des droits de douanes : passent de 35% à 3% sur le riz. Le riz subventionné américain

coûte moins cher que le riz haïtien1998 Haïti produit 47 %

de son riz.2008 Haïti produit 15 % de son riz.

Depuis 1986, l’ouverture forcée aux marchés

Le charbonnage seule ressource rentable du monde rural ?

Une ponction dramatique sur le capital naturel.

Maissade

Cap Haïtien

Les carrières : une exploitation dangereuse et sauvage : une ponction sur le capital naturel.

Laboule 12

Morne à Cabrit

Une urbanisation anarchique et exposée aux risques.

Zone de CanaanPort au Prince

Aujourd’hui : une catastrophe humaine, écologique et économique.

Cyclones de 2008 dans la vallée de l’Artibonite

Erosion, fragilisation des sols, diminution des rendements agricoles, fragilité face aux aléas météorologiques, tarissement des sources, faible potentiel hydro-électrique…

Nadine Baggioni-LopezCollège [email protected]