15. Du dveloppement conomique la crise politique
Le remaniement ministriel de 1957, avec l'arrive des
technocrates de l'Opus Dei, ouvre une nouvelle priode de la
dictature franquiste. () dfaut d'tre lgitime le rgime aura dsormais
la prtention d'tre lgal. L'tat franquiste volue ainsi vers une
administration plus efficace et rationnelle. Plusieurs lois sont
proclames pour y parvenir, transformant l'appareil de l'tat en une
machine administrative efficace et rduisant l'intervention de
celui-ci dans le domaine conomique. C'est dans ce dernier domaine
que se produisent les transformations les plus spectaculaires.
La modernisation conomique qui a lieu pendant la priode connue
comme desarrollismo provoque une transformation totale de la socit
espagnole. De rurale et traditionnelle celle-ci devient urbaine et
moderne, le niveau de vie s'lve, les biens de consommation
commencent tre porte de tous, les classes moyennes s'largissent et
se diversifient. L'ouverture l'international, avec l'arrive massive
de touristes europens et le dpart, tout aussi massif, d'Espagnols
pour travailler l'tranger, montre la population combien leurs
moeurs et habitudes taient restes l'cart de la modernit,
prisonnires d'un discours catholique qui soudain apparat
profondment archaque. De nouvelles aspirations de prosprit, d'accs
aux biens matriaux de la socit de consommation et d'ascension
sociale se substituent la vieille rthorique caduque du sacrifice,
de l'hrosme et du service.Or, face cette socit qui avance pas de
gant vers la modernit, le rgime franquiste reste assis sur les mmes
fondements politiques et idologiques sur lesquels il avait t cr,
mme si l'tat devient plus efficace et rationnel et volue -de faon
lente et incomplte- vers un tat gestionnaire plutt que policier. ()
Sans pour autant intgrer forcment les rangs de l'opposition, des
dmocrate-chrtiens, des catholiques de base, des tudiants
universitaires, des professionnels libraux entament ainsi un
loignement progressif du rgime.() Au sein mme des familles
franquistes, le tiraillement entre continuit et rforme commence se
faire sentir, mme si l'objectif reste toujours le mme pour les uns
et les autres: prserver ce que les dirigeants politiques appelaient
l'originalit de la dmocratie l'espagnole, euphmisme qui faisait
allusion la nature foncirement autoritaire du rgime.
Source: Jordi Canal (dir.): Histoire de l'Espagne
contemporaine.
Les protestations universitaires qui eurent lieu pendant l'anne
1956 sont le jalon le plus visible d'un inflchissement dans la
stratgie, la composition et le sens mme de l'opposition la
dictature qui, de fait, s'tait amorc partir de la fin de la lutte
arme et les grves de 1951. En effet, la fin de la gurilla de
l'aprs-guerre signifiait aussi, en quelque sorte, la sortie
dfinitive de la guerrecivile espagnole. ()La constatation de cette
nouvelle donne explique la nouvelle stratgie de rassemblement des
forces de l'opposition propose par le PCE en 1956 aprs
l'enterrement dfinitif de la lutte arme. Cette stratgie fut appele
la rconciliation nationale et elle alimenta aussi la contestation
universitaire qui ne vas plus faiblir ds la premire explosion de
1956. Mouvement ouvrier, opposition politique clandestine et
contestation tudiante sont ainsi trois des noyaux les plus
importants de l'opposition la dictature pendant cette priode ()
Mais ce qui marque surtout la diffrence avec la priode prcdente est
la dsaffection progressive du rgime de la part de secteurs sociaux
autrement proches de celui-ci: les classes moyennes revenus
modestes, les bourgeoisies des rgions priphriques, un secteur des
catholiques, mme une partie des lites intellectuelles proches au
rgime.(...) Les mobilisations furent particulirement intenses en
fvrier 1965, o trois professeurs universitaires qui avaient
manifest leur sympathie pour le mouvement (Tierno Galvn, Lpez
Aranguren et Garca Calvo) furent expulss de leurs chaires, mais
surtout en fvrier 1969, o les dsordres universitaires qui suivirent
la mort au commissariat d'un tudiant conduirent le gouvernement
declarer pour deux mois l'tat d'exception dans tout le territoire.
La rpression sera d'ailleurs de plus en plus dure, avec des membres
de la Brigade politico-sociale (la police politique du rgime)
infiltrs parmi les tudiants, des dtentions, des tortures, des
charges de policiers cheval pour dissoudre les
manifestations...
Source: Jordi Canal (dir.): Histoire de l'Espagne
contemporaine.
La virulence avec laquelle la dictature ragissait face toute
manifestation de dissidence se dcouplera dans le cas d'une
organisation qui utilisait la violence et qui s'attaquait
directement aux reprsentants de l'autorit
Source: Jordi Canal (dir.): Histoire de l'Espagne
contemporaine.
Le procs de Burgos (1970)
C'est dans cette ambiance mouvemente que le gouvernement entame
son projet d'encadrement de la participation politique des citoyens
par l'laboration des statuts pour la cration d'associations
politiques, consquence logique de la loi de 1969. () Les plus
ractionnaires des procureurs avaient peur que ces associations
politiques ouvrent la voie la cration de partis politiques dguiss;
les partisans des rformes (et le prince Juan Carlos lui-mme)
craignaient, au contraire, que ces associations politiques
n'empchent la cration ultrieure de vritables partis. Finalement, le
gouvernement Arias Navarro prsenta des statuts a minima, qui
empchaient de facto toute association politique non infode au
Movimiento.() Pendant l't 1974, la sant de Franco se dtriora
gravement au point qu'il dut cder momentanment la magistrature
suprme de l'tat Juan Carlos, ce qui accentua les espoirs rformistes
de l'opposition tolre. () Le PCE fut ainsi l'origine d'une Junte
dmocratique qui prnait l'ide d'une rupture dmocratique avec la
dictature, et ce avant mme la mort de Franco. Pour sa part, le PSOE
renouvel aprs son congrs de Suresnes en 1974, o les militants de
l'intrieur prirent la direction ceux de l'exil, et conduit par un
jeune militant andalou, Felipe Gonzlez, organisait une plateforme
de convergence dmocratique pour prendre ses marques face au
PCE.
Source: Jordi Canal (dir.): Histoire de l'Espagne
contemporaine.
Le procs 1001 (1973) avaitincarcr toute la direction
desCommissions ouvrires
Cinq condamns (2 militants de l'ETAEt 3 du FRAP) furent excuts
le27 septembre 1975
