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Le Québec sceptique Une petite histoire des Sceptiques du Québec par Philippe Thiriart * L es associations sceptiques sont apparues suite à une évolution malheureuse de la société occiden- tale : même si le ni- veau de scolarité de la population a fortement augmenté dans les pays concernés, la capacité de différencier la réalité de la fiction ne s'est pas accrue. Au contraire, l'école entretient un univers verbal et la télévision un univers d'images où les fantasmes ont pré- séance sur la réalité concrète. Le personnage central de notre société est le comédien ou la comédienne dont la profession consiste à savoir faire semblant. Autrefois, les personnes plus instrui- tes avaient plus rarement des croyances magiques que les person- nes moins instruites. Par exemple, encore au début des années cinquan- te, très peu d'élèves universitaires étaient favorables à l'astrologie. Aujourd'hui, ils sont nombreux à croire qu'il doit y avoir quelque chose de vrai dans l'astrologie, sans qu'aucun fait nouveau ne soit venu la soutenir. L'augmentation de la scolarité de la population n'a guère été accompagnée par une meilleure capacité d'examiner la réalité. Un niveau de scolarité élevé ne garantit pas qu'une personne ait moins d'il- a reçu une lettre de Mark Plummer deman- dant si elle accepterait de participer à la fon- dation d'une associa- tion sceptique au Qué- bec association qui poursuivrait les mêmes buts généraux que le CSICOP, tout en étant légalement indépen- dante. Les fondateurs des Sceptiques du Québec : Jean Ouellet- te et Philippe Thiriart. lusions, ses illusions auront simple- ment un style différent. Du côté des médias, les journalistes, bien que plus scolarisés qu'autrefois, ont été rarement formés à la pensée rationnelle et empirique. Au lieu de raisonner, la plupart se contentent de résonner en écho aux fantasmes à la mode, de sorte que les organisa- tions sceptiques ont été fondées pour fournir de l'information démystifica- trice au public et aux médias. De plus, elles permettent aux sceptiques de communiquer avec leurs sembla- bles plutôt que de rester isolés dans une société où le verbiage et le fantasme régnent (1) . Les premières étapes En 1986, une quarantaine de person- nes au Québec étaient abonnées au Skeptical Inquirer, la revue du CSI- COP américain (2) . Chacune d'elles J'avais répondu que je pourrais traduire de temps à autre un article de l'anglais au français pour le futur bulletin québécois. Le 7 février 1987, nous avons été invités à une réunion à Montréal pour rencontrer Mark Plummer et mettre en route l'asso- ciation québécoise. Nous n'étions alors qu'une douzaine de personnes à nous rencontrer ainsi. À cette occasion, j'ai répété que je ne voulais pas m'engager au-delà de la traduction occasionnelle d'articles. Cependant, j'ai poussé Jean Ouel- lette à s'engager dans l'organisation de la nouvelle association. Jean et moi, nous nous connaissions depuis l'été 1986 à la suite de la parution de l'un de mes articles (3) . Nous nous étions rencontrés en août 1986, et nous sommes alors devenus de bons amis. Jean s'occupait déjà de la Libre pensée québécoise, j'avais perçu ses * Philippe Thiriart est Tun des cinq membres ayant fondé la corporation des Sceptiques du Québec. Il agit aujourd'hui comme conseiller senior du groupe. (1) Le désir de cerner la réalité n'empêche pas les sceptiques d'être ouverts à l'imaginaire. Isaac Asimov a écrit des romans dans lesquels les personnages avaient des dons paranormaux alors qu'il était membre du CSICOP. Ce qui est décevant chez le crédule ordinaire, c'est son incapacité à différencier l'imaginaire du réel. (2) «Committee for the Scientific Investigation of Claims of the Paranormal» Le CSICOP existe depuis 1976. On peut s'abonner au Skeptical Inquirer en envoyant 25 $ US au CSICOP : Box 703, Buffalo, N.Y., 14226-0703. U.S.A. (3) «Une douloureuse théorie du plaisir» publié dans La petite revue de philosophie, vol. 6, no 2, printemps 1985, p. 95-119. CD180593

Une petite histoire des Sceptiques du Québec

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Le Québec sceptique

Une petite histoire des Sceptiques du Québecpar Philippe Thiriart *

L es associationssceptiques sont

apparues suite à uneévolution malheureusede la société occiden-tale : même si le ni-veau de scolarité de lapopulation a fortementaugmenté dans lespays concernés, lacapacité de différencierla réalité de la fictionne s'est pas accrue.Au contraire, l'écoleentretient un universverbal et la télévision un universd'images où les fantasmes ont pré-séance sur la réalité concrète. Lepersonnage central de notre sociétéest le comédien ou la comédiennedont la profession consiste à savoirfaire semblant.

Autrefois, les personnes plus instrui-tes avaient plus rarement descroyances magiques que les person-nes moins instruites. Par exemple,encore au début des années cinquan-te, très peu d'élèves universitairesétaient favorables à l'astrologie.Aujourd'hui, ils sont nombreux àcroire qu'il doit y avoir quelquechose de vrai dans l'astrologie, sansqu'aucun fait nouveau ne soit venula soutenir. L'augmentation de lascolarité de la population n'a guèreété accompagnée par une meilleurecapacité d'examiner la réalité. Unniveau de scolarité élevé ne garantitpas qu'une personne ait moins d'il-

a reçu une lettre deMark Plummer deman-dant si elle accepteraitde participer à la fon-dation d'une associa-tion sceptique au Qué-bec — association quipoursuivrait les mêmesbuts généraux que leCSICOP, tout en étantlégalement indépen-dante.

Les fondateurs des Sceptiques du Québec : Jean Ouellet-te et Philippe Thiriart.

lusions, ses illusions auront simple-ment un style différent.

Du côté des médias, les journalistes,bien que plus scolarisés qu'autrefois,ont été rarement formés à la penséerationnelle et empirique. Au lieu deraisonner, la plupart se contententde résonner en écho aux fantasmesà la mode, de sorte que les organisa-tions sceptiques ont été fondées pourfournir de l'information démystifica-trice au public et aux médias. Deplus, elles permettent aux sceptiquesde communiquer avec leurs sembla-bles plutôt que de rester isolés dansune société où le verbiage et lefantasme régnent(1).

Les premières étapes

En 1986, une quarantaine de person-nes au Québec étaient abonnées auSkeptical Inquirer, la revue du CSI-COP américain (2). Chacune d'elles

J'avais répondu que jepourrais traduire de

temps à autre un article de l'anglaisau français pour le futur bulletinquébécois. Le 7 février 1987, nousavons été invités à une réunion àMontréal pour rencontrer MarkPlummer et mettre en route l'asso-ciation québécoise. Nous n'étionsalors qu'une douzaine de personnesà nous rencontrer ainsi.

À cette occasion, j'ai répété que jene voulais pas m'engager au-delà dela traduction occasionnelle d'articles.Cependant, j'ai poussé Jean Ouel-lette à s'engager dans l'organisationde la nouvelle association. Jean etmoi, nous nous connaissions depuisl'été 1986 à la suite de la parutionde l'un de mes articles (3). Nousnous étions rencontrés en août 1986,et nous sommes alors devenus debons amis.

Jean s'occupait déjà de la Librepensée québécoise, j'avais perçu ses

* Philippe Thiriart est Tun des cinq membres ayant fondé la corporation des Sceptiques du Québec. Il agit aujourd'hui commeconseiller senior du groupe.

(1) Le désir de cerner la réalité n'empêche pas les sceptiques d'être ouverts à l'imaginaire. Isaac Asimov a écrit des romansdans lesquels les personnages avaient des dons paranormaux alors qu'il était membre du CSICOP. Ce qui est décevant chezle crédule ordinaire, c'est son incapacité à différencier l'imaginaire du réel.

(2) «Committee for the Scientific Investigation of Claims of the Paranormal» Le CSICOP existe depuis 1976. On peuts'abonner au Skeptical Inquirer en envoyant 25 $ US au CSICOP : Box 703, Buffalo, N.Y., 14226-0703. U.S.A.

(3) «Une douloureuse théorie du plaisir» publié dans La petite revue de philosophie, vol. 6, no 2, printemps 1985, p. 95-119.

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talents d'organisateur et je pensaisque cela lui conviendrait de s'occu-per de la future association scepti-que.

À son tour, Jean insista pour que jevienne le 3 avril à une réunion où sejoindraient à nous Robert Carswellet Raymond Charlebois. C'est cejour-là qu'a été formé le premierConseil d'administration et que lesfonctions ont été attribuées à chacun(j'ai accepté la responsabilité dubulletin). Le 13 mai 1987 a été si-gnée la demande d'incorporation parcinq personnes : Robert, Raymond,Jean et moi, ainsi que Jacques Des-biens (qui n'est toutefois pas de-meuré longtemps dans le C.A. paircequ'il a obtenu un emploi hors deMontréal).

Un scepticisme modéré

Une décision importante, prise dèsle début, a été d'établir que lespersonnes qui seraient mandatéespour élire les futurs membres duConseil d'administration seraientdésignées par le C.A. lui-même.Cette procédure a été instaurée afind'éviter que la corporation soit unjour noyautée par un groupe q[uel-conque (qu'il s'agisse, par exemple,de «médiums» qui s'en seraient faitsmembres subrepticement afin de ladiscréditer). En outre, le fait que leC.A. choisisse les membres votantspermet de maintenir à l'écart lessceptiques trop extrémistes ou har-gneux dans leurs positions.

Il nous semble, en effet, préférablede ne pas mépriser les personnescroyant au paranormal et de ne pass'attaquer avec hargne aux individusqui exploitent la crédulité populaire.L'expérience montre en effet que detelles attitudes entraînent le plussouvent le rejet du sceptique par lepublic, alors qu'il s'agit pour nous,justement, de gagner leur sympathie.

Les Sceptiques de la première heure : Philippe Thiriart, RaymondCharlebois, Robert Carswell, Pierre Cloutier (debout), DominicLarose et Jean Ouellette (assis).

C'est ainsi que les Sceptiques duQuébec ont adopté un scepticismemodéré (qui est explicité dans deuxtextes <4)).

La devise des Sceptiques du Qué-bec pourrait d'ailleurs être :«comprendre, informer et s'amu-ser».

En effet, lorsque l'existence d'unphénomène paranormal est avancée,la personne sceptique cherche d'a-bord à comprendre ce qui s'estréellement passé. Elle cherche deplus à comprendre les illusions etles trucages qui alimentent la crédu-lité humaine, et à saisir pourquoi lesgens ont besoin de croire au pointde renoncer souvent à leur senscritique. Ensuite, ce sceptique trans-met au public les informations dé-mystificatrices établies — mais ilne se rend pas malheureux si seule-ment une minorité des gens acceptede recevoir ces informations. Fina-lement, il est souhaitable que la«croisade» du sceptique pour lavérité contribue à son propre bon-heur. C'est pour cela qu'il évite dese prendre trop au sérieux et qu'il sepermet de se moquer un peu de lafaçon dont les gens vivent.

Les premiers Sceptiques

Voici une brève présentation desfondateurs des Sceptiques du Qué-bec.

Robert Carswell est avocat en droitdes compagnies. Il apparaît commeun homme discret et aimable, quin'élève jamais la voix, évite lesvains affrontements, mais qui s'entient à ce qu'il pense. Robert effec-tua l'incorporation légale des Scepti-ques du Québec et prépara les sta-tuts et règlements en s'inspirant deceux d'une association de préser-vation de la nature à laquelle ilappartenait déjà. Il initia aussi lademande d'accréditation commeorganisme de «charité», ce qui vouspermet de recevoir un reçu reconnupar l'impôt lorsque vous faites undon aux Sceptiques du Québec.

Raymond Charlebois travaillaitcomme directeur pédagogique dansune école qui s'occupait d'enfantshandicapés mentaux. Il supervisaitle travail des éducateurs. Physique-ment, il avait l'air d'un gouroubedonnant et barbu. Ses qualitésd'animateur et sa grande aisance enpublic et face aux caméras de télévi-sion en firent le premier président

(4) C'est-à-dire : «Le scepticisme des Sceptiques du Québec», reproduit à la page 12 de ce bulletin, et «Les Sceptiques duQuébec face aux croyances», Le Québec sceptique #23, septembre 1992, p. 15-16.

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Le Québec sceptique

du groupe.

Jean Ouellette est comptable agréé.Il travaillait à son compte, volontai-rement à mi-temps. Jean n'aime pasles grands groupes, de sorte qu'on levoit rarement en public, mais il estorganisé et persévérant. Lorsqu'ilpromet de faire quelque chose, il lefait toujours. Depuis le tout début,et jusqu'à aujourd'hui, Jean s'oc-cupe de la comptabilité de la cor-poration, nous assurant ainsi gratui-tement les services d'un profession-nel en la matière.

Pierre Cloutier est venu à sa pre-mière réunion du C.A. en août 1987(à cette époque, le bulletin avait 22abonnés !). Pierre travaille commetechnicien audio à Radio-Québec etil a une voix d'annon-ceur radio. Il aimeénoncer avec douceurdes opinions catégori-ques pour amorcer debonnes discussionsintellectuelles. (Pierres'occupe aujourd'huide la liste de nosabonnés, qui compteplus de 300 noms...)

Pour ma part, j'enseigne la psycho-logie au Collège Édouard-Montpetitde Longueuil. J'ai écrit plusieursarticles en psychologie et en philo-sophie des sciences. Comme monemploi ne m'occupait qu'à tempspartiel et que je produisais le Qué-bec sceptique, je suis devenu lereprésentant le plus visible de l'é-quipe.

En plus d'avoir produit les 17 pre-miers numéros du bulletin, j'ai été leprésident des Sceptiques pendantdeux ans. Depuis 1991, le C.A. m'anommé conseiller senior, un postepar lequel on attend de moi de bonsconseils ainsi qu'une certaine gou-verne dans l'orientation du groupe.Marc Aras était présent à la pre-mière rencontre avec Mark Plummer

Un autre collaborateurqui s'est joint à nousdès le début est Nor-mand Larouche. Étu-diant en sciences,

La «nouvelle génération» (g. à d.) : Laurent Lafleur, Benoit Desjar-dins, Donald Gilbert, Claude Lafleur, Claude Mac Duff, Denis La-belle, Normand Larouche (partiellement caché) et Denys Desjardins.

Normand occupeposte de trésorier.

aujourd'hui le

Dominic Larose est venu à sa pre-mière réunion sceptique en novem-bre 1987. Dominic est spécialisé enmédecine d'urgence. Il doit perce-voir rapidement l'ensemble d'unesituation, et il sait comment y réagirhabilement. Dominic possède aussiune compréhension profonde de ladémarche scientifique <5). Ce sontces capacités qui le feront élireprésident des Sceptiques du Québecen 1990.

du CSICOP. Au début, Marc nevoulait pas trop s'engager, mais plustard il a organisé le Comité d'inves-tigation.

Nous avons ainsi formé la premièreéquipe qui de son mieux a fait fonc-tionner la corporation jusqu'à l'étéde 1990. À cette époque, les Scep-tiques n'étaient qu'un groupe minus-cule ; il nous est arrivé de tenir desréunions pendant lesquelles nousn'étions que trois personnes seule-ment !

En plus des membres du Conseild'administration, plusieurs personnesont contribué au Québec sceptique.Notamment, Guy Châtillion a écritle premier article publié : «J'ai vu lavoyante, et c'était plutôt navrant».Professeur de statistiques à l'Univer-sité du Québec à Trois-Rivières, ilavait déjà publié les résultats derecherches scientifiques menées dansle domaine du paranormal. Depuisplusieurs années, il luttait activementcontre la superstition, tout en sedéfinissant comme catholique.

Pour le bulletin numéro 4, le philo-sophe Jean-Claude Simard, du Col-lège de Rimouski, a écrit «Du nou-veau sur la plaine de Nazca». Cetexcellent article impressionna favo-rablement les Sceptiques belges qui

décidèrent de le re-produire dans leurbulletin.

Je ne m'étendrai passur les autres auteursdu bulletin puisqu'onpeut trouver facile-ment leurs articlesdans les anciens nu-méros du Québecsceptique — numé-ros que vous pouvezd'ailleurs toujourscommander.

Quelques événe-ments marquants

Pendant l'automne 1987, la Librepensée québécoise avait obtenu deVidéotron la possibilité de réaliser etde diffuser une série d'émissions encâblodistribution. C'était notam-ment Pierre Cloutier qui coordonnaitla réalisation technique de ces émis-sions auxquelles les Sceptiques duQuébec ont été invités par deux fois.L'impact auprès du public a étéfaible, mais la réalisation de cesémissions s'est néanmoins révéléeune bonne expérience. Entre 1987

(5) Voir à cet effet son article «Requins, science et parapsychologie», QS #10, mars 1989, p. 3-5.

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Numéro 25 printemps 1993

A gauche : remise du premier prix Fosse sceptique à René Perron (au centre) par Dominic Larose et PhilippeThiriart. À droite : les Sceptiques au Salon de Fésotérisme : Denis Lessard, Claude Mac Duff et Benoit Desjardins.

et 1990, nous avons été de temps àautre invités par la radio ou par latélévision.

Comme autres exposés publics, nousavons organisé quelques «séances dedémystification». Ainsi, le 10 fé-vrier 1988 au Collège Édouard-Montpetit, Guy Châtillon s'est faitpasser pour un médium devant unauditoire de plus de 80 personnes.Sur scène, j'étais chargé de mettre àl'épreuve ses dons et je tenais lerôle (ingrat) de critiquer ses réussi-tes spectaculaires. Les succès denotre «médium» lui ont d'ailleursattiré les applaudissements nourrisdu public, majoritairement convain-cu d'assister à une démonstrationauthentique de pouvoirs paranor-maux. (On trouvera le compterendu de la démonstration dans LeQuébec sceptique #4, mars 1988, p.7-9.)

Dans les années qui ont suivi, cettemystification a été reprise plusieursfois, avec de nouveaux comparses(dont Dominic Larose, Denis La-belle, Donald Gilbert, Laurent La-fleur et Marie-Soleil Gauthier) et,chaque fois, le médium a rempDrtéun vif succès (voir le plus récentexemple à la page 16 de ce bulle-tin).

La journaliste Sylvie Laplante étaitprésente à notre première mystifica-

tion et elle rapporta l'événementdans son article «Esprit critique, es-tu là ?» publié dans la revue Châte-laine en juillet 1988. Cet articleprésentait pour la première foisnotre groupe au grand public.

Lucie Page avait déjà écrit «Au nomde la raison» qui nous présentait auxlecteurs de Québec Science (avril1988). En décembre 1987, cetterevue publia «Les fausses sciences»,où je synthétise ma conception de lascience et de la vie. Ce court articlea été repris par les Sceptiques belgeset les Rationalistes français (6).

Durant l'été 1988, lors d'un voyageen Europe, j'ai pris contact avecmon compatriote belge JacquesTheodor. Celui-ci offrait une boursede 3 000 000 Francs belges à toutepersonne capable de démontrer unpouvoir paranormal en respectant lesexigences de la science. C'est à lasuite de cette prise de contact que,en janvier 1989, les Sceptiqueslancèrent leur Défi des 100 000 dol-lars. Marc Aras est alors devenuresponsable du comité chargé d'exa-miner les candidats.

Sur ces entrefaites, à l'été 1989,Guy Châtillon est malheureusementdécédé à la suite d'un cancer.

Les 20, 21 et 22 octobre 1989, Do-minic Larose et moi sommes allés à

Buffalo, siège du CSICOP. Nousavons participé à un séminaire quinous a permis de rencontrer lesgrands sceptiques américains, no-tamment James Alcock et Ray Hy-man, ainsi que Paul Kurtz, présidentdu CSICOP.

C'est le 26 octobre 1989 qu'a eulieu une importante Assembléegénérale annuelle des Sceptiques duQuébec. En effet, nous avons pro-fité de cette occasion pour annoncernotre Défi des 100 000 dollars etpour divulguer les premiers lauréatsde nos prix Sceptique et Fosse scep-tique.

Ces prix ont pour fonction d'indi-quer au public quelles sont les per-sonnes qui, déjà connues dans lesmédias, contribuent le plus et lemoins à la formation du sens criti-que (voir p. 17 de ce bulletin).René Perron, réalisateur de l'émis-sion «Caméra 89», est gentimentvenu chercher son prix Fosse scepti-que, qui consistait en une pyramidemagique. Quant au prix Sceptique,il a été décerné à Pierre Foglia deLa Presse (QS #12, décembre 1989,p. 5-8). Notons qu'après avoirremporté son prix, René Perron aproduit quelques reportages quiauraient pu en faire un candidat auprix Sceptique.

Dans le marché du paranormal, bien

(6) Voir Le Québec sceptique #5, avril 1988, p. 12.

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Édes individus prétendent posséderdivers pouvoirs qu'ils exerceraientchaque fois qu'un client fait appel àeux. Si ces dons étaient réels, cesindividus devraient pouvoir lesdémontrer assez facilement dans uncadre scientifique — qui consistesimplement à s'assurer qu'une réus-site éventuelle ne soit pas due à unfacteur autre que le don paranormalinvoqué.

Or, lorsque des sceptiques offrentune importante somme d'argent àqui démontrera un pouvoir para-normal, les candidats ne réussissentpas la performance qu'ils ont eux-mêmes accepté de viser. L'exis-tence du Défi des 100 000 dollarspermet de rappeler au public qu'ungouffre existe entre les prétentionsdes soi-disant doués du paranormalet leurs performances vérifiées.

La deuxième générationprend la relève

Au début de 1990, de nouveauxmembres se sont joints au groupe.C'est ainsi que Claude Lafleur etClaude Mac Duff sont venus à notresouper public de février. Par lasuite se sont ajoutés Robert Kurylo,Benoit Desjardins, Denis Labelle,Laurent Lafleur, Donald Gilbert,Robert Giguère, Denys Desjardins etRaymond Chevalier.

Les 20 et 21 octobre 1990 marquentun tournant pour les Sceptiques duQuébec alors que nous avons animéun kiosque au Salon international del'ésotérisme et des arts divinatoiresde Montréal (voir QS #15, novembre1990, p. 1). Cette participationengagea durablement les nouveauxmembres dans les activités de l'as-sociation.

Ce même automne, j'ai laissé laprésidence des Sceptiques au profit

de Dominic Larose qui, lui, l'assu-mera pendant deux ans. ClaudeLafleur est devenu vice-président,chargé des relations avec les médias,alors que Claude Mac Duff héritaitdu secrétariat.

Au printemps de 1991, Claude La-fleur a pris en main les destinées duQuébec sceptique et en a fait l'ex-cellente revue que vous lisez mainte-nant.

À cette époque également, BenoitDesjardins a mis en branle la ventedes tee-shirts portant le logo desSceptiques du Québec (un pointd'interrogation). Ces tee-shirts ontdéjà été portés à bien des endroitsdans le monde (notamment en Eu-rope et au Mexique) et ils intéres-seront sans doute quelques collec-tionneurs.

Le 23 mars 1991, Marc Aras et De-nis Labelle ont mis à l'épreuve lapremière candidate officielle à notreDéfi des 100 000 dollars : madameKatalin Fitos. Celle-ci prétendaitêtre en communication avec desentités «extraterrestres», mais ellen'a pu réussir une simple démons-tration (QS #18, mai 1991, p. 1, 4-5).

En octobre 1991, Donald Gilbert acoordonné notre participation à laQuinzaine des sciences, durant la-quelle nous avons donné cinq confé-rences (QS #20, janvier 1992, p. 1 et4).

Au cours de l'automne de 1991,sous la direction de Jean Ouellette,le groupe procéda à un sondageauprès de la population québécoiseà propos de la croyance en diversaspects du paranormal. Des 445personnes interrogées, environ lamoitié croyaient à l'un ou l'autredes phénomènes. Les hommes

croient autant que les femmes ; laseule différence notable réside dansle fait que les premiers croient da-vantage aux ovnis que les femmes...et l'inverse en ce qui a trait à l'as-trologie (QS #22, juin 1992, p, 1, 4-5).

Le 22 juin 1992, le Comité d'inves-tigation, animé cette fois par DonaldGilbert et Denis Labelle, dévoila lesrésultats de l'expérience avec ladeuxième candidate au prix de100 000 dollars, l'astrologue AgatheVir Landriault (QS #23, septembre1992, p. 1, 4-10). Entre-temps,Denis Labelle accédait à la prési-dence du groupe alors que RaymondChevalier devenait vice-président.

À présent, Le Québec sceptique estdevenu la principale revue sceptiquefrancophone. Claude Lafleur, Clau-de Mac Duff, Laurent Lafleur etd'autres membres ont donné plusd'une centaine d'entrevues à la radioet à la télévision.

Nous avons notamment été invités à«Parler pour parler», l'émission deJanette Bertrand qui nous a fait con-naître d'une belle façon (QS #22,juin 1992, p. 6-7). Les articlespubliés dans maints journaux etrevues à propos du paranormalmentionnent souvent notre existenceet nos positions. Nos soupers-confé-rences rassemblent mensuellementune bonne cinquantaine de person-nes.

L'association continue de croître àbon rythme. Le noyau des Scepti-ques actifs se compose à présentd'une trentaine de personnes (voir laliste à la page 1). Le défi qui sepose actuellement aux administra-teurs de la corporation est d'animerde façon agréable et de coordonnerde façon efficace les efforts de toutun chacun. •

N.D.L.R.: À l'automne de 1992, Jacques Theodor a porté le montant de sa bourse à quelque 250 000 $, alors qu'un autresceptique québécois, Alain Bonnier, s'est joint à notre groupe afin d'offrir 10 000 S à tout concurrent qui réussirait l'étapepréliminaitre de notre Défi (voir le QS #24, décembre 1992, p. 5).

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