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Une introduction ` a la relativit´ e restreinte Alexis Bres 28 novembre 2019 Introduction La relativit´ e restreinte (1905), associ´ ee ` a Einstein, apporte une r´ eponse ´ el´ egante ` a l’un des deux probl` emes majeurs de la physique de la fin du XIX` eme si` ecle 1 : Comment rendre compatible la notion de r´ eferentiel galil´ een et les ´ equations de Maxwell ? Pour r´ esoudre ce probl` eme nous sommes amen´ es ` a totalement remettre en question les notions de temps et d’espace auxquelles nous sommes habitu´ es et se r´ esoudre ` a consid´ erer que nous ´ evoluons dans un ”espace-temps” dans lequel temps et espace ne peuvent ˆ etre consid´ er´ es s´ epar´ ement. Le principe de relativit´ e sera pr´ esent´ e ainsi que sa premi` ere cons´ equence : la dilatation du temps. Nous verrons que celle-ci peut ˆ etre v´ erifi´ ee exp´ erimentalement dans deux cas de figure : — les exp´ eriences ultra-pr´ ecises — les exp´ eriences dans lesquelles les vitesses mises en jeu sont extr` emes 2 . La notion associ´ ee de contraction des longueurs ainsi que les bases de la relativit´ e g´ en´ erale 3 seront rapidement ´ evoqu´ ees en conclusion. 1 ecessit´ e du principe de relativit´ e 1.1 Le principe de relativit´ e de Galil´ ee Dans son ouvrage Dialogue concernant les deux plus grands syst` emes du monde publi´ e en 1632, Galil´ ee donne l’explication suivante : Enfermez-vous avec un ami dans la cabine principale ` a l’int´ erieur d’un grand bateau et prenez avec vous des mouches, des papillons, et d’autres petits animaux volants. Prenez une grande cuve d’eau avec un poisson dedans, suspendez une bou- teille qui se vide goutte ` a goutte dans un grand r´ ecipient en dessous d’elle. Avec le bateau ` a l’arrˆ et, observez soigneusement comment les petits animaux volent ` a des vitesses ´ egales vers tous les cˆ ot´ es de la cabine. Le poisson nage indiff´ eremment dans toutes les directions, les gouttes tombent dans le r´ ecipient en dessous, et si vous lancez quelque chose ` a votre ami, vous n’avez pas besoin de le lancer plus fort dans une direction que dans une autre, les distances ´ etant ´ egales, et si vous sautez ` a pieds joints, vous franchissez des distances ´ egales dans toutes les directions.Lorsque vous aurez observ´ e toutes ces choses soigneusement (bien qu’il n’y ait aucun doute que lorsque le bateau est ` a l’arrˆ et, les choses doivent se passer ainsi), faites avancer le bateau ` a l’allure qui vous plaira, pour autant que la soit uniforme [c’est-` a-dire constante] et ne fluctue pas de part et d’autre. Vous ne verrez pas le moindre chan- gement dans aucun des effets mentionn´ es et mˆ eme aucun d’eux ne vous permettra de dire si le bateau est en mouvement ou ` a l’arrˆ et ... Pour prendre un exemple plus proche du quotidien, vous avez tous fait cette exp´ erience simple : Vous vous trouvez dans un train en gare et vous observez par la fenˆ etre de votre voiture les voitures du train immobile du quai d’en face. Apr` es le coup de sifflet du chef de gare vous 1. Le deuxi` eme ´ etant les spectres discrets ´ emis par les vapeurs atomiques qui m` enera `a la d´ ecouverte de la ecanique quantique dont Einstein est aussi l’un des p` eres fondateurs (L’effet photo-´ electrique : 1905). 2. Une fraction significative de la vitesse de la lumi` ere 3. Au-del` a des comp´ etences exigibles au niveau TS 1

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Une introduction a la relativite restreinte

Alexis Bres

28 novembre 2019

Introduction

La relativite restreinte (1905), associee a Einstein, apporte une reponse elegante a l’un desdeux problemes majeurs de la physique de la fin du XIXeme siecle 1 : Comment rendre compatiblela notion de referentiel galileen et les equations de Maxwell ? Pour resoudre ce probleme noussommes amenes a totalement remettre en question les notions de temps et d’espace auxquellesnous sommes habitues et se resoudre a considerer que nous evoluons dans un ”espace-temps”dans lequel temps et espace ne peuvent etre consideres separement.

Le principe de relativite sera presente ainsi que sa premiere consequence : la dilatation dutemps. Nous verrons que celle-ci peut etre verifiee experimentalement dans deux cas de figure :

— les experiences ultra-precises— les experiences dans lesquelles les vitesses mises en jeu sont extremes 2.

La notion associee de contraction des longueurs ainsi que les bases de la relativite generale 3

seront rapidement evoquees en conclusion.

1 Necessite du principe de relativite

1.1 Le principe de relativite de Galilee

Dans son ouvrage Dialogue concernant les deux plus grands systemes du monde publie en1632, Galilee donne l’explication suivante :

Enfermez-vous avec un ami dans la cabine principale a l’interieur d’un grandbateau et prenez avec vous des mouches, des papillons, et d’autres petits animauxvolants. Prenez une grande cuve d’eau avec un poisson dedans, suspendez une bou-teille qui se vide goutte a goutte dans un grand recipient en dessous d’elle. Avecle bateau a l’arret, observez soigneusement comment les petits animaux volent ades vitesses egales vers tous les cotes de la cabine. Le poisson nage indifferemmentdans toutes les directions, les gouttes tombent dans le recipient en dessous, et sivous lancez quelque chose a votre ami, vous n’avez pas besoin de le lancer plus fortdans une direction que dans une autre, les distances etant egales, et si vous sautez apieds joints, vous franchissez des distances egales dans toutes les directions.Lorsquevous aurez observe toutes ces choses soigneusement (bien qu’il n’y ait aucun douteque lorsque le bateau est a l’arret, les choses doivent se passer ainsi), faites avancerle bateau a l’allure qui vous plaira, pour autant que la soit uniforme [c’est-a-direconstante] et ne fluctue pas de part et d’autre. Vous ne verrez pas le moindre chan-gement dans aucun des effets mentionnes et meme aucun d’eux ne vous permettrade dire si le bateau est en mouvement ou a l’arret ...

Pour prendre un exemple plus proche du quotidien, vous avez tous fait cette experiencesimple : Vous vous trouvez dans un train en gare et vous observez par la fenetre de votre voitureles voitures du train immobile du quai d’en face. Apres le coup de sifflet du chef de gare vous

1. Le deuxieme etant les spectres discrets emis par les vapeurs atomiques qui menera a la decouverte de lamecanique quantique dont Einstein est aussi l’un des peres fondateurs (L’effet photo-electrique : 1905).

2. Une fraction significative de la vitesse de la lumiere3. Au-dela des competences exigibles au niveau TS

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observez les fenetres de la voiture d’en face defiler. Mais est-ce votre train qui s’est mis enmouvement ou celui du train du quai d’en face ?

Cette observation communement admise a ete elevee au rang de principe 4 nomme prin-cipe de relativite de Galilee. Commencons par rappeler comment se transforment les lois de lacinematique sous l’effet d’une transformation Galileenne.

1.2 Transformation de Galilee

La notion centrale de la cinematique (la discipline traitant de la description du mouvementdes objets) est celle de referentiel.

Un referentiel est un ensemble d’observateurs, immobiles les uns par rapportsaux autres. Ces observateurs peuvent constater le passsage du mobile a leur position. Laconnaissance de la position des observateurs concernes permet alors de determiner la trajectoiredu mobile.

On peut bien sur convenir d’un repere pour reperer ces positions au moyen de trois coor-donnees d’espace. Chaque observateur est muni d’une horloge, permettant de noter l’instantauquel le mobile passe en face d’eux. Nous supposerons que toutes les horloges de tous les ob-servateurs d’un meme referentiel sont synchronisees (indiquent la meme valeur au memeinstant).

En cinematique classique, cette synchronisation ne pose aucune difficulte, puisque temps etespace sont decouples. Il suffit, par exemple, que tous les observateurs se retrouvent en un memepoint pour synchroniser leurs horloges a un instant donne.

O O'

z z'

y y'

x x'

u

Figure 1 – Choix des axes dans deux referentiels R et R′ en mouvement relatif par rapport aR.

Un mouvement dans un referentiel 5 R est alors defini, dans un repere cartesien, par les troisfonctions x(t), y(t), z(t) representant la position en fonction du temps commun des observateurs.Le mouvement serait decrit dans un autre referentielR′, en mouvement par rapport aR, par troisautres fonctions du temps commun des observateurs de R′ : x′(t′), y′(t′), z′(t′). En mecaniqueclassique, on admet sans restriction l’identite des temps des observateurs de R et R′. Il est alorspossible de donner la transformation qui fait se correspondre les mouvement vus dans deuxreferentiels differents.

Dans le cas le plus simple, ou les deux referentiels sont en translation uniforme l’un parrapport a l’autre, cette transformation est la transformation dıte de Galilee. Sans restreindredu tout la generalite de la transformation, on peut choisir les axes dans R et R′ (voir fig. 1) detelle maniere que :

4. par H. Poincare au XXeme siecle5. Soyez precautionneux avec les notations qui varient d’un auteur a l’autre et parfois meme d’un exercice a

l’autre. Pour rendre votre cours plus clair vous pouvez utiliser des noms explicites pour vos referentiels ou descouleurs differentes.

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— les axes Ox et O′x′ coıncident a tout instant et sont paralleles a la vitesse u de R′ parrapport a R,

— les origines O et O′ sont confondues a l’instant t = 0,— les axes Oy et O′y′, d’une part, et les axes Oz et O′z′, d’autre part, sont constamment

paralleles et coıncident a t = 0.La loi de transformation de Galilee s’ecrit alors trivialement

x′(t) = x(t)− ut,y′(t) = y(t),

z′(t) = z(t).

1.3 Difficulte des la cinematique classique

Le principe de relativite de Galilee n’est pas compatible avec l’electromagnetismede Maxwell. La consequence la plus importante des equations de Maxwell est en effet laprediction de l’existence d’ondes se propageant a la celerite c.

Le probleme qui apparaıt immediatement est celui du referentiel dans lequel cette vitesse estdefinie, le seul donc dans lequel les equations de Maxwell seraient directement applicables.

Le sentiment le plus naturel, qui predominait tres largement a la fin du XIXeme siecle, etaitque les ondes electromagnetiques se propageaient dans un milieu baignant l’univers entier : l’etherluminifere. L’analogie entre ondes electromagnetiques et ondes sonores etait en effet presente atous les esprits. Les difficultes apparaissent toutefois tres vite des qu’on examine les proprietesde cet hypothetique ether. Il doit en effet etre omnipresent et infiniment rigide pour propager desperturbations transverses a grande vitesse. Mais il doit, dans le meme temps, etre imponderableet infiniment permeable au mouvement des corps materiels (puisque, par exemple, l’etude surquelques siecles de la rotation terrestre ne revele aucun frottement).

Enfin, des difficultes experimentales ont joue un role majeur dans la genese de la theorie dela relativite, particulier l’experience de Michelson-Morley qui aurait du mettre en evidence lemouvement relatif de l’ether par rapport a la Terre mais n’y parvint jamais.

C’est en 1905 qu’Einstein ouvrit la voie d’une nouvelle theorie dans son celebre article ”Surl’electrodynamique des corps en mouvement”. Le principe fondamental de cette nouvelle phy-sique, le ”principe de relativite” est expose dans la prochaine section.

1.4 Principe de relativite

Enonce��

��

Il existe une classe de referentiels privilegies, en translation uniforme les uns parrapport aux autres (que nous continuerons a appeler ”referentiels galileens”), danslesquels toutes les lois de la physique prennent la meme forme.

Le principe de relativite d’Einstein n’est pas qu’une affirmation de la validite du principede Galilee. C’est une propriete que se doivent de verifier tous les modeles physiques ”valides”.La consequence la plus importante etant que si toutes les lois de la physique prennent la memeforme, les equations de Maxwell sont valides dans tous les referentiels et la celerite de lalumiere c est donc la meme dans tous les referentiels.

C’est cette propriete de la lumiere qui explique que les astronomes mesurent les distances entemps de vol de la lumiere.

1.5 Experiences historiques mettant en evidence l’invariance de la celeritede la lumiere

Experience du prisme mobile d’Arago (1810) En 1810, Francois Arago presente a l’Academiedes Sciences un compte-rendu sur le celerite de la lumiere. L’experience consiste a mesurer une

3

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variation de la deviation de la lumiere dans un prisme. Pour cela, il observait les etoiles pendantla nuit. Selon l’heure d’observation, en raison du mouvement relatif de la Terre par rapport auxetoiles, la deviation devait varier et correspondre a une augmentation ou une diminution relativede la celerite de la lumiere.

La sensibilite du dispositif 6 etait suffisante pour detecter une telle variation mais il n’enobserva aucune.

Experience de Michelson Morley (1887) On supposait a l’epoque que la celerite de lalumiere par rapport a l”ether luminifere”, un milieu hypothetique, etait egale a c. Le but del’experience etait de mettre en evidence le mouvement relatif de la Terre par rapport a l’ether. Lemouvement de la Terre sur son orbite par rapport au Soleil s’effectue a km·s−1. Ainsi, suivantla maniere dont s’effectue la composition des vitesses avec la lumiere (ou l’ether), la celerite de lalumiere devrait etre soit plus grande soit plus faible de km·s−1 dans le referentiel terrestre.Les variations relatives de la celerite seraient alors de l’ordre de . Michelson proposa unemethode optique, interferometrique pour mesurer une telle variation.

miroir M1

miro

ir M2sé

para

trice

source delumière

observationfranges d'interférences

vitesse de déplacement par rapport à l'éther

v

Fixe dans le

réferentiel du

laboratoire

L1

L2

Figure 2 – Interferometre de Michelson. Un des deux bras est suppose etre aligne avec le vecteurvitesse de l’ether par rapport au referentiel du laboratoire.

Un interferometre de Michelson 7 fut alors construit (voir fig. 2). Suivant la difference demarche entre les deux bras de l’interferometre (cf. TD optique), on obtient de franges d’in-terference a la sortie de l’interferometre. Si la lumiere suit les lois de la mecanique classique, letemps mis par la lumiere pour parcourir un aller-retour dans un bras va dependre de la celeritede la lumiere dans ce bras et donc de l’alignement ou non du bras avec la direction du ventd’ether. Donc, si on fait tourner l’interferometre, on s’attend a voir un defilement des franges.Le dispositif etait place sur un bloc de pierre, elle meme reposant sur une piece en bois placedans un bain de mercure (taille de l’ordre du metre pour chaque bras). On peut montrer que,si on note v la vitesse du laboratoire par rapport a l’ether, la difference des durees de parcoursde la lumiere dans les deux bras est de

∆t ≈

ou L1, resp. L2, est la longueur du bras du miroir M1, resp. M2. En utilisant un repliementastucieux des rayons, la longueur identique des bras etant de l’ordre de 11 metres, et pour une

6. Dont le principe physique est basee sur la vieille theorie corpusculaire de la lumiere et qui ne sera donc pasdeveloppe plus avant ici.

7. Pour une lecon de physique sur ce sujet, c’est le seul dispositif experimental (a ma connaissance) que l’onpeut eventuellement montrer aux eleves, sans le faire fonctionner.

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lampe a vapeur de sodium de longueur d’onde de 589 nm, on s’attend a un defilement defranges en faisant tourner le dispositif. Bien que la sensibilite de l’appareil permettait de detecterune variation de l’ordre de 0,01 frange, Michelson et Morley n’ont jamais observe de defilementde franges ce qui les amenera a la conclusion suivante :

Si il y a un mouvement relatif entre la Terre et l’ether luminifere, il doit etre trespetit.

Il s’agit la de l’un des plus celebres resultats scientifiques negatifs de la physique qui vaudra aMichelson le prix Nobel de physique 1907. A partir de cet echec certains physiciens ont commencea serieusement douter de l’existence de l’ether.

Experience d’Alvager (1964) Cette experience est plus recente, et a ete effectuee au CERNen utilisant un faisceau de particules, des pions neutres Π0. Ils sont produits par l’entree encollision de protons de haute energie sur une cible en Beryllium. Ces pions ont une energie de 6GeV, et une vitesse voisine de 0.99975c. Cette particule instable a une duree de vie de l’ordrede 0.84 · 10−16 s. Elle se desintegre en deux photons γ selon Π0 −→ γ + γ. On dispose ainsid’une source de lumiere qui se deplace a une vitesse de 0.99975c par rapport au referentiel dulaboratoire.

Les experimentateurs ont mesure le temps mis par des ”paquets” de photons pour parcourirla distance entre deux detecteurs A et B (31.450 ± 0.0015 metres). ils trouverent 104.9 ns. Lavitesse de ces photons emis par des sources en mouvement est donc de . Soitune precision relative par rapport a la mesure de la celerite de la lumiere emise par une sourceimmobile (c=299 792 458 m.s−1) de . Les experimentateurs conclurent donc a l’invariancerelativiste de la celerite de la lumiere.

2 Temps propre et dilatation des durees (1905)

Une fois le principe de la relativite d’Einstein accepte, voyons quelles sont les consequencessur notre comprehension de l’espace-temps. Nous allons faire dans la suite de ce TD-cours unesuccession d’experiences de pensees (Gedankenexperiment). Cette methodologie scientifiquebien que fort ancienne a ete abondamment utilisee par Einstein pour expliquer la relativiterestreinte et son utilisation est grace a lui devenue omnipresente en physique theorique. Ainsi1905 est-t-elle aussi l’annee d’une revolution en epistemologie.

2.1 Une premiere experience de pensee : l’horloge de lumiere

Une horloge est un dispositif technique permettant de mesurer l’intervalle temporel entredeux evenements (les durees). Les horloges dont il a ete questions n’ont pas ete explicitees, nousallons considerer une horloge imaginaire : l’horloge de lumiere qui permet de comprendre l’effetdu principe de la relativite d’Einstein sur l’ecoulement du temps.

Considerons deux referentiels R et R′, ce dernier se deplacant a la vitesse v par rapport aR. Un emetteur emet des pulses lumineux tres courts dans une direction perpendiculaire a v.Cet emetteur est immobile dans R′, avec un miroir en face de lui a une distance d, egalementimmobile (voir figure 3). Cet emetteur peut egalement fonctionner comme detecteur de ces pulseslumineux, et donc mesurer le temps mis entre l’emission et la reception.

— On suppose que les photons se deplacent a c dans R′ et que leur vitesses obeissent auxlois classiques de la compositions des vitesses. Exprimer la vitesse des photons dans Ret en deduire l’intervalle dans temps entre emission et detection dans R. Le comparer al’intervalle de temps correspondant dans R′.

— Desormais on suppose que les photons ont toujours la vitesse c en norme, quelque soit lereferentiel. Reprendre le raisonnement precedent. Conclure.

Nous concluons de cet exercice que la duree mesuree affichee par l’horloge en mouvementobservee depuis le referentiel fixe est proportionnelle a la duree affichee par l’horloge observeedepuis le referentiel de l’horloge :

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source - récepteur

d

évènement B évènement A

MIROIR

cΔt0=2d cΔt=2(d2+(vΔt/2)2)1/2

d

vΔt

MIROIR

v

Figure 3 – ”Horloges de lumiere”. On considere une source emettrice d’impulsion lumineuses,solidaire d’un miroir se deplacant a la vitesse v par rapport a un referentiel galileen.

T = γT ′, avec γ =1√

1− v2

c2

.

Le facteur γ est toujours superieur a 1, il est appele facteur de dilatation des temps. Laconsequence immediate du postulat de relativite est que le temps n’est pas universel.

Par ailleurs, le facteur γ n’existe que si la vitesse relative des deux referentiels est plus petiteque c. Si ce n’etait pas le cas, l’impulsion lumineuse qui se reflechit normalement sur le miroirdans R′ n’arriverait jamais a rattraper ce miroir dans R. Deux referentiels galileens ne peuventdonc etre animes l’un par rapport a l’autre d’une vitesse superieure (ou meme egale) a c. Commeon peut attacher un referentiel galileen a tout objet en translation uniforme, c apparaıt aussicomme une vitesse limite pour tous les objets materiels.

Le temps propre correspond au temps dans le referentiel ou l’”horloge” (uneparticule) est immobile. Le temps mesure dans un autre referentiel sera toujourssuperieur ou egal au temps propre. C’est pour cela qu’on parle de dilatation desdurees 8.

2.2 Definition de la seconde

D’apres le BIPM (Bureau Internationale du Poids et des Mesures), la seconde est definie dela maniere suivante :�

�� La seconde est la duree de 9 192 631 770 periodes de la radiation correspondant a la

transition entre les deux niveaux hyperfins de l’etat fondamental de l’atome de Cs.

Cette definition se refere a un atome de cesium au repos, a une temperature de 0K. Pour larealisation pratique de la definition de l’unite de temps, une annexe precise que pour l’horlogeatomique, ”La definition de la seconde doit etre comprise comme la definition de l’unite detemps propre : elle s’applique dans un petit domaine spatial qui accompagne l’atome de cesiumdans son mouvement”. Les corrections de relativite restreinte sont explicitement evoquees dansla definition de la seconde.

8. Une remarque de vocabulaire : Il est impropre de parler de dilatation du temps car les horloges ne mesurentpas le temps mais les durees.

6

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2.3 Notion d’evenement

Comme nous venons de le voir, le temps n’est plus universel et n’est plus separable descoordonnees spatiales. Il faudra decrire les experiences en termes d’evenements, i.e. il s’estpasse quelque chose quelque part. Un evenement, c’est par exemple l’allumage du signal A oula reflexion de la lumiere sur le miroir dans notre experience de pensee. On peut caracteriserun evenement par quatres nombres : les cooordonnees spatiales de l’observateur et le temps,i.e. la donnee d’un quadruplet de nombres (ct,x,y,z), ou le facteur c est rajoute pour avoirun objet homogene. Les coordonnees spatio-temporelles du meme evenement dans un autrereferentiel sont differentes, et le lien entre elles est donne par une transformation qui remplacela transformation de Galilee.

ct

x

Figure 4 – Un evenement, une ligne d’univers et un cone de lumiere. Un evenement estrepresente par un point dans un espace x, ct. Une ligne d’univers est l’ensemble des evenementscorrespondant aux positions successives d’une particule. Le cone de lumiere d’un evenement estconstitue des lignes d’univers d’un signal lumineux passant par cet evenement.

On utilise souvent des representations geometriques des evenements. On peut representer unevenement comme un point dans un espace a quatre dimensions. Par simplicite, on se limiteraa une dimension d’espace. On represente alors un evnement comme sur la figure 3.5. Pourdes raison de commodite, l’axe vertical porte le produit ct et les deux coordonnees ont ainsila meme dimension. On peut alors considerer le mouvement d’un point dans un referentielcomme une suite d’evenements. Une telle suite forme dans l’espace-temps une ligne, appelee”ligne d’univers”. La ligne d’univers d’une particule qui se deplacerait a la celerite de la lumiereserait parallele, a la premiere ou a la deuxieme bissectrice. Dans l’espace a quatre dimensions,l’ensemble des lignes d’univers partant d’un point et correspondant a un mouvement a c formele ”cone de lumiere” de cet evenement. Les evenement anterieurs a l’evenement de referenceforment le passe du cone de lumiere, les autres le futur. Comme c est une vitesse limite, toutesles lignes d’univers passant par un evenement donne doivent etre a l’interieur du cone de lumiere.Deux evenement ne pourront etre relies par un signal ou une relation causale, que s’ils sont dansle cone de lumiere l’un de l’autre.

3 Mise en evidence experimentale de la dilatation des durees

3.1 Ordres de grandeurs en jeu

Commencons par calculer le facteur de dilatation du temps (γ) lors de l’observation desobjets suivants mouvement :

— un velo (v = 20km/h) :— un TGV (v = 300km/h) :

7

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— un navette spatiale (v = 7.7km/s) :— un muon cosmique (v = 0.993c) :Supposons que l’on dispose des horloges ci-dessous, quelle vitesse typique minimal l’objet

que j’observe doit-il posseder pour que je puisse observer une correction a la physique classiquedue aux effets relativistes :

— une pendule ancienne a balancier compense qui derive de moins d’une minute par jour :

— une montre a quartz qui derive de moins de 15s sur 30j :— une horloge a quartz stabilisee en temperature utilisee pour la navigation maritime qui

derive de 5s par an :— les horloges atomiques du projet de satellites PHARAO (SYRTE/ENS) qui derivent de

moins de 0.1ns sur 10j :Conclusion :

3.2 Muons cosmiques : experience de D.H. Frisch et J.H. Smith (1963)

Les muons sont des particules instables qui se desintegrent en un electron ou un positron enproduisant des neutrinos. Par exemple, pour un muon negatif, on peut ecrire la reaction sous laforme suivante :

µ− −→ e− + νe + νµ,

ou µ− designe le muon negatif, e− l’electron, νe l’anti-neutrino electronique et νµ le neutrinomuonique. La duree de vie dans le referentiel ou les muons sont au repos vaut τµ = 2.2 µs,ceux-ci se desintegrant selon une loi exponentielle N(t) = N0e

−t/τµ .Les muons cosmiques sont produits par les rayons cosmiques, essentiellement des protons,

qui rentrent en collision avec les molecules de la haute atmosphere, ce qui cree des particules encascade. L’experience de Frisch et Smith, realisee en 1963, consiste a compter les muons qui sedesintegrent dans un detecteur concu pour selectionner des muons de vitesses comprises dansune tranche fixee au voisinage de 0.993c, pendant une duree determinee. Deux capteurs sontintalles respectivement au sommet du mont Washington a une altitude de h = 1900m environet d’autre part a Cambridge au niveau de la mer. En effectuant des comptages pendant uneduree d’une heure, Frisch et Smith ont mesure au sommet du mont Washington N1 = 563± 10desintegrations et au niveau de la mer N2 = 408 ± 9 desintegrations. La vitesse moyenne desmuons selectionnes est de 0.993c± 0.0015c, ce qui donne un coefficient γ= .

Soit τlab la duree de vie des muons cosmiques mesuree dans le referentiel du laboratoire.En utilisant N1 et N2 on trouve τlab= s. L’utilisation de la formule de dilatation desdurees τlab = γτµ permet une seconde determination de γ a .

Cette valeur est compatible avec celle de la premiere determination et constitue une preuvede la dilatation des durees.

3.3 GPS et relativite (1977)

Attention : Le traitement exact du probleme du GPS fait appel aux corrections de relativitegenerale.

Le principe du GPS repose sur un ensemble de 24 satellites, chacun muni d’une horlogeprecise. Pour se reperer, il faut etre en mesure de receptionner le signal envoye par au moinstrois de ces satellites.

Pour simplifier le probleme, considerons le probleme a une dimension. On considere un ob-servateur desirant se localiser, disposant d’une horloge precise mais pas forcement synchroniseeavec les horloges de deux balises entre lesquelles il se situe. On note A et B ces deux balises. Cesbalises definissent un axe sur lequel se trouve l’observateur, a la distance dA de la balise A. Lesdeux balises sont distantes de d, et ont ete prealablement synchronisees.

Exercice 4 : comment repere-t-on sa position a l’aide de deux horloges distantes ?

8

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A l’instant tA, la balise A emet un signal lumineux qui est recu par le promeneur a une datet′AM mesure par l’horloge locale du promeneur qui peut etre en retard ou en avance de τ parrapport au temps des balises : on a t′ = t+ τ . On definit de meme les dates tB et t′BM pour labalise B. On obtient alors la valeur de dA

dA =

et donc l’observateur peut determiner sa position en mesurant des durees. A la surface de laTerre, il est necessaire d’utiliser balises donc satellites et un recepteur portatifpour determiner sa position dans l’espace et disposer aussi de l’heure. C’est le principe utilisepour le positionnement GPS.

Places a une altitude de plus de 20 000 km, les satellites ont une vitesse de 3.87 km/s : ilsne constituent pas un reseau de balises fixes, ils sont mobiles par rapport au promeneur dont ondesire obtenir la position. Pour evaluer les distances, il faut disposer a chaque instant des tempsqu’indiqueraient des horloges fictives fixes par rapport au sol et se trouvant au meme endroitque les satellites. C’est ici qu’intervient le phenomene de dilatation des durees : si un observateurterrestre mesure la periode de l’horloge atomique d’un satellite, il mesurera une periode toujoursplus grande.

Si l’on souhaite se positionner au metre pres, il faut faire des mesures a moins de ns pres,ce qui impose d’utiliser des horloges tres precises. Les corrections relatives, liees au phenomenede dilatation des durees, sont de l’ordre de 1

2v2

c2, ce qui represente par exemple ps par

seconde, et donc les horloges embarquees retardent de µs par jour, ce qui, exprime en termede distance, represente une derive de positionnement de plus de kilometres par jour. Onnote bien que cette derive doit imperativement etre corrigee.

Il est necessaire de prendre en compte un autre effet decrit par la relativite generale. Pour leshorloges des satellites, la gravite est plus faible qu’au niveau du sol. Les horloges des satellitesont un rythme augmente et donc avancent par rapport a celles situees au niveau du sol. Cetteavance est de l’ordre de µs par jour.

Si l’on combine les deux effets precedents, on constate que les horloges des satellites avancentde par jour. En pratique, un synthetiseur de frequence permet de com-penser cette avance.

3.4 Une deuxieme experience de pensee : Le paradoxe des jumeaux de Lan-gevin

Si nous considerons deux jumeaux dont l’un est astronaute et l’autre est comptable. A l’agede 25 ans, le premier embarque sur une fusee (tres rapide 0.99c) pour une destination lointainetandis que le second reste sur Terre. Cinquante ans plus tard l’astronaute revient, en raisonnantdans le referentiel terrestre, quel age aura-t-il ?Reprenez le raisonnement depuis le referentiel de l’astronaute, le jumeau sur Terre sera-t-il plusage ou plus jeune dans ce cas ? Ou est la faille dans le raisonnement ?

Ainsi, le temps s’ecoule differemment pour deux jumeaux. Ceci constitue un paradoxe pourla physique classique mais absolument pas pour la physique relativiste. Ceci peut nous semblerchoquant car, dans ces conditions, deux de vos cellules qui se sont formees par mitose depuis lameme cellule-mere ne peuvent pas avoir strictement le meme age ! Le temps s’ecoule differemmentpour tous les objets.

3.5 Horloges atomiques embarquees : experience de Hafele et Keating (1971)

Attention : Le traitement exact de l’experience de Hafele et Keating fait appel aux correctionsde relativite generale.

En 1971, Hafele et Keating ont fait voler quatres horloges atomiques au Cesium a bordd’avions commerciaux et compare leurs indications avec celle d’une reference au repos a l’Ob-servatoire naval de Washington. Deux parcours ont ete empruntes par les quatres horloges : lepremier vers l’est a dure 65.4 heures et le second vers l’ouest et a dure 41.2 heures. La duree

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totale de l’observation du rythme des quatres horloges atomiques s’est etendue sur plus de 600heures.

Ils ont obtenus les ecarts suivants par rapport a la reference sur Terre :

∆τ (ns) mesure ∆τ (ns) calcule

voyage vers l’est −59± 10 −40± 23

voyage vers l’ouest +273± 7 +275± 21

Le signe negatif indique que les horloges voyageant vers l’est ont pris du retard par rapport acelle restee sur Terre.

L’analyse de cette experience est delicate : Nous negligerons la revolution de la Terre autourdu Soleil et considererons le referentiel associe au centre de la Terre et trois etoiles lointainesqui est Galileen sur les echelles de temps de l’experience. Plus l’horloge se deplace rapidementpar rapport a ce referentiel galileen, plus la dilatation du temps est importante, ce qui expliqueque l’horloge embarquee voyageant vers l’est a du retard et que celle voyageant vers l’ouest del’avance par rapport a l’horloge au sol.

Exercice 4 : Calculez les ecarts attendus par rapport a la reference sur Terre d’apres larelativite restreinte :

∆τ (ns) calcule (rr)

voyage vers l’est

voyage vers l’ouest

Les differences avec les resultats experimentaux viennent des corrections importantes derelativite generale dues notamment aux accelerations des referentiels en rotation les uns parrapport aux autres.

4 La simultaneite existe-t-elle ?

Considerons deux evenements reperes, dans un referentiel donne, par (ct1, x1, y1, z1) et (ct2, x2, y2, z2).Si ces deux evenements sont sur le cone de lumiere l’un de l’autre, ils peuvent etre relies par unsignal lumineux se propageant a la vitesse c. On a donc dans ce cas

c2(t1 − t2)2 = (x1 − x2)2 + (y1 − y2)2 + (z1 − z2)2.

On definit alors l’intervalle s1,2 entre ces deux evenements selon

s21,2 = c2(t1 − t2)2 − (x1 − x2)2 − (y1 − y2)2 − (z1 − z2)2.

L’intervalle joue le role d’une distance dans l’espace-temps. L’intervalle s’annule quand les deuxevenements sont sur le cone de lumiere l’un de l’autre. Cette propriete est independante dureferentiel : le fait pour deux evenement d’etre ou non relies par un signal lumineux ne dependpas de la description du mouvement. Un intervalle nul est donc un invariant dans un changmentde referentiel.

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— Si s21,2 > 0, les deux evenements peuvent etre relies par un signal se propageant moins

vite que la lumiere, il peut y avoir un lien de causalite entre eux. On parle d’intervalledu genre temps.

— Si s21,2 < 0, aucun signal ne peut relier ces deux evenements, ce qui exclut tout lien de

causalite. On parle d’intervalle du genre espace— Si s2

1,2 = 0, les deux evenements peuvent etre relies par un signal se propageant a lacelerite de la lumiere. On parle d’intervalle du genre lumiere.

Pour deux evenements infiniment proches, on definit un intervalle infinitesimal, dans lereferentiel R

ds2 = c2dt2 − dx2 − dy2 − dz2.

On peut montrer que l’intervalle infinitesimal est invariant par changement dereferentiel.

Considerons un intervalle de temps dt dans R, ou une particule de deplace de dl = vdt.L’intervalle entre les deux evenements correspondant vaut

ds2 = c2dt2 − dl2 = c2 dt2(

1− v2

c2

).

Dans le referentiel R′ ou la particule est au repos, on a ds2 = ds′2 = c2dt′2. On appelle alors”temps propre” l’intervalle de temps s’ecoulant dans R′ et nous le noterons dτ = dt′. On obtientalors

dt = γdτ, avec γ =1√

1− v2

c2

.

On retrouve ainsi, de maniere tres generale, la dilatation des temps par rapport au temps propres,temps de reference dans le referentiel ou la particule est au repos.

5 La relativite au dela de la dilatation des durees

5.1 La contraction des longueurs

La dilatation des durees n’est pas la seule consequence de la relativite. Vue depuis unreferentiel fixe, la longueur d’un objet en mouvement semble se contracter. La contraction deslongueurs est donnee par la formule δx′ = δx/γ qui est a rapprocher de la dilatation des dureesqui vaut δt′ = γδt.

Exemple surprenant : passage d’une regle dans un trou.

5.2 La transformation de Lorentz

Les transformations generales des durees et longueurs par changement de referentiel galileensont donnees par les transformations de Lorentz qui remplacent les transformations de Galilee.

5.3 La composition des vitesses

Un resultat particulierement important est l’abandon de la formule d’additivite des vitesses.En effet, si un objet A a la vitesse u envoie un objet B (dans la meme direction) a la vitesse v, endynamique galileenne on s’attend a ce que, vu depuis le referentiel fixe, l’objet B ait une vitessew = u+ v. Si tel etait le cas il serait possible de depasser la vitesse de la lumiere ce qui n’a pasde sens. (Comme on l’a vu dans ce cas la notion meme de causalite serait remise en cause.) Lestransformations de Lorentz donnent une nouvelle expression pour la composition des vitesses

w =u+ v

1 + uv/c2

Aux petites vitesses devant la vitesse de la lumiere on retrouve l’additivite des vitesses et auxgrandes vitesses, la correction apportee empeche de depasser la celerite de la lumiere.

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5.4 Energie de masse et dynamique relativiste (1905)

5.5 Le principe de relativite generale

Vous etes dans une cabine d’ascenceur. Jusqu’a present tout etait normal, mais soudain, vousne ressentez plus aucune gravite. Est-ce que la cabine est en chute libre ou bien est-ce que laTerre a purement et simplement disparue ?

En affirmant comme principe que l’on ne peut pas differencier la gravite de l’acceleration 9

on accede au postulat de la relativite generale :

Les lois de la physique sont identiques dans tous les referentiels, galileens ou non.

Par des raisonnements similaires a ceux de la relativite restreinte (mais beaucoup plus com-plexes) sur l’expression des lois de la physique dans tous les referentiels (plus seulement lesreferentiels galileens) on deduit les proprietes geometriques de l’espace-temps de le cas general.(En particulier la dilatation du temps dans un champ de pesanteur necessaire pour expliquerl’experience des horloges embarquees de Hafele et Keating ou conserver la precision du systemeGPS).

5.6 Perspective historique : la revolution d’Einstein et les bases de la phy-sique moderne

Plus d’un siecle apres sa decouverte, la paternite de la relativite est encore sujette a contro-verse. En effet, les transformations mathematiques decrivant la dilatation des durees (et conjoin-tement la contraction des longueurs) furent decouvertes par Poincare et Lorentz avant l’articlesur ”l’electrodynamique des corps en mouvement” d’Einstein. Ce fait entre en contradiction avecl’image populaire iconique associee a Einstein, celle d’un genie isole revolutionnant la physique.En realite Einstein travaille a partir des travaux experimentaux et des mathematiques de sontemps et son travail est indissociable de ceux de Lorentz, Poincare, mais aussi Herz, Michelson etMorley. Si la figure d’Einstein est restee celebre c’est parce qu’il reinterprete de maniere radicaleles theories physiques ouvrant ainsi une perspective a la fois elegante et fertile pour les travaux avenir. Tandis que Lorentz essaie de reconcilier la mecanique galileenne et l’electromagnetisme enpreservant l’hypothese ancienne de l’ether luminifere qui reste pour lui une sorte de referentielabsolu (dont les proprietes supposees semblent de plus en plus etrange au fur et a mesures queles resultats experimentaux s’accumulent), Einstein realise qu’il faut non seulement s’affranchirde cette hypothese (ce que Poincare avait deja compris) mais aussi remettre en question notreinterpretation de ce qu’est l’espace et le temps. C’est a ce titre que l’on parle justement derevolution scientifique dans le sens ou la perspective d’observation est renversee. Dans ses tra-vaux sur la relativite (mais pas uniquement), Einstein a par ailleurs le soucis de presenter unetheorie physique qui puisse s’exprimer avec un formalisme leger (on parle d’”elegance” d’unetheorie physique) et qui ne possede pas de redondance dans la description des phenomenes phy-siques (on parle de ”principe de parcimonie”). La construction des theories suit par ailleurs unprincipe d’universalite (a posteriori necessaire). Par exemple le principe de relativite enonce queles lois de la physique prennent la meme forme dans l’ensemble des referentiels galileens. Cetteidee d’invariance des lois (qui est en fait absolument necessaire : quel sens aurait une theoriephysique si ses lois variaient en fonction de la position dans l’espace et dans le temps ?) s’estrevelee extremement fructueuse et a amene les theoriciens a considerer les theories physiquescomme une branche (particulierement complexe) de la geometrie.

9. Consequemment la masse inertielle et la masse ponderale sont identiques.

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