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mag #32 Réseau Socialiste des Organisations de Jeunesse 5 01 01 Belgique - België P.P. 1099 BRUXELLES 1 1/1844 Éditeur responsable : Yonnec Polet - Boulevard de l’Empereur 15 - 1000 Bruxelles ||| Autorisation de fermeture : 1099 BRUXELLES 1 / 1844 Écrit périodique Résolument Jeunes - Publication Trimestrielle : septembre - octobre - novembre 2010 | Bureau de dépôt : 1099 Bruxelles | n o d’agrément : P 605078

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mag #32

Réseau Socialiste des Organisations de Jeunesse

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0101

Belgique - BelgiëP.P.

1099 BRUXELLES 11/1844

Éditeur responsable : Yonnec Polet - Boulevard de l’Empereur 15 - 1000 Bruxelles ||| Autorisation de fermeture : 1099 BRUXELLES 1 / 1844 Écrit périodique

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Édito Carlos Crespo - Yonnec Polet

« Le socialisme est-il soluble dans l’écologie politique ? » : compte-rendu de la conférence de Jérôme Battout CePPecs - Jean-Marie Lacrosse

Aide à la jeunesse, lorsque le parent paraît CePPecs - Bruno Sedran

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« Des signes religieux ? Et alors ? » Entretien avec Pierre Galand, Président du Centre d’Action Laïque Alain Detilleux

Signes religieux à l’école : la position de la FBJS Fédération Bruxelloise des Jeunes Socialistes

La « Chasse aux chômeurs » et son impact sur les jeunes : entretien avec Yvan Mayeur, Président du CPAS de Bruxelles Alain Detilleux

Onem et CPAS : double activation = double exclusion ? Jeunes FGTB

Contre le discours néo-libéral dominant : Brochure DÉTOX ! Jeunes FGTB

« Tous aux Francos » : les backstage d’un projet qui roule Latitude Jeunes + For’J + ACMJ

Entretien avec Catherine Moureaux, députée régionale bruxelloiseEntretien avec Ozlem Ozen, députée fédérale Carlos Crespo

La lente gangraine populiste de la République française Carlos Crespo

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édito

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Comité de rédaction

Rédacteur en chefAlain Detilleux

PrésidentYonnec Polet

Secrétaire généralCarlos Crespo

Coordinatrice de projetsCynthia Lesenfants

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Coordination, Infographie et Mise en pageAlain Detilleux

Logistique et communicationMichèle Thommès

SecrétariatMarielle Delbaere

- - - - - - - - -

Éditeur responsableYonnec Polet

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Rédaction de Résolument JeunesRé.S.O.-J asbl

(Réseau Socialiste des Organisations de Jeunesse)bd de l’Empereur 15|3 - 1000 Bruxelles

T. 02 513 99 62F. 02 502 49 47

[email protected]

Les propos tenus dans les textes relèvent de l’entière responsabilité de leurs auteurs.

Nous remercions sincèrement tous les intervenants extérieurs qui ont apporté leur contribution à ce numéro.

La Rédaction

En cette période de rentrée, il est de bon ton de faire le bilan des vacances qui s’achèvent et d’établir des perspectives pour les mois à venir. Comment revenir sur l’actualité politique de ces dernières semaines sans souligner l’énorme travail réalisé par Elio Di Rupo dans le cadre de sa tâche de préformateur ? L’homme a inlassablement tenté de faire la synthèse entre des vues diamétralement opposées en vue de construire un accord de gouvernement. Malheureusement, la démarche n’a pu, à ce stade, être couronnée de succès en raison de l’aveuglement idéologique et du jusqu’au-boutisme destructeur de la N-VA. Mais Elio Di Rupo aura démontré qu’il a incontestablement la stature d’un homme d’état, capable d’incarner un projet fédérateur. Il est toutefois temps que le mouvement social fasse à nouveau entendre sa voix et se déploie pour réaffirmer son attachement à la solidarité et aux acquits sociaux. La rentrée sociale doit être l’occasion de mettre la droite et le patronat en demeure de renoncer à leurs velléités contre les services publics et les mécanismes de redistribution des richesses. Car si 25 milliards sont nécessaires, il faut faire comprendre à De Wever, Thomaes et consorts qu’on ne les laissera pas aller les chercher dans les poches des travailleurs !

Mais il est également impossible d’évoquer la période estivale qui touche à sa fin sans revenir sur l’été populiste en France. La majorité présidentielle semble prête à tout pour masquer l’échec total de ses politiques et pour occulter les agissements frauduleux de certains de ses cadors. Certes, il était prévisible que le président Sarkozy lance un contre-feu médiatique pour faire baisser la pression sur Eric Woerth son Ministre le plus sur la sellette. Toutefois, la déportations des Roms vers l’Est constitue la plus grande infamie perpétrée par les autorités hexagonales depuis le recours à la torture, par l’armée française, durant la guerre de libération de l’Algérie. Il ne fait pas bon être un bouc émissaire aujourd’hui dans le pays de Voltaire et Rousseau, où désormais, les dirigeants semblent déterminés à ne plus s’embarrasser du respect de la Constitution et du Droit international. Le silence complice de la Commission Européenne, pourtant gardienne des traités garantissant les droits humains en Europe, est à cet égard affligeant. Un article revient plus en détail sur cette question dans les pages intérieures de cette revue.

Si le Résolument jeunes est une revue d’opinion avec parfois des positions très tranchées, il se veut aussi un espace de débat avec une ouverture pour des points de vues divergents. Ainsi, dans ce numéro, la délicate question des signes religieux à l’école a été abordée. La parole a été donnée au Centre d’Action Laïque et à la Fédération Bruxelloise des Jeunes Socialistes. Les premiers insistent davantage sur le refus de l’immixtion du religieux dans l’école publique et les seconds sur les risques d’exclusion sociale qu’une interdiction du voile engendrerait.

Le social est aussi abordé, en cette année européenne de la lutte contre la pauvreté, à travers une interview d’Yvan Mayeur, président du CPAS de Bruxelles, qui s’exprime sur les effets de la « Chasse aux chômeurs », pour les jeunes.

En tant qu’association fédérative, le Réseau Socialiste des Organisations de Jeunesse valorise les actions et les réalisations de ses membres. Dans cet exemplaire, les jeunes FGTB, Latitude Jeunes et For’J sont mis à l’honneur.

Enfin, pour ce qui est de donner des perspectives, l’interview de deux jeunes députées, issues du MJS et qui sont en place depuis les dernières élections, a de quoi rassurer sur le fait que l’associatif progressiste dispose de relais importants au sein du pouvoir législatif.

Carlos CrespoSecrétaire général

Yonnec PoletPrésident

09.2010

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Le socialisme est-il soluble dans l’écologie politique ? *

Au sein de son cycle de conférences sur le socialisme, dont Ré.S.O.-J a déjà rendu compte à plusieurs reprises, le CePPecs avait programmé deux séances spécialement consacrées à la question écologique1, une question dont l’importance cruciale n’est heureusement plus à plaider mais qui, malgré et à travers cette reconnaissance, reste marquée par de profondes ambiguïtés que l’échec retentissant du sommet de Copenhague a rendu sensibles et qui se révèlent dans l’oxymore même que nous avons forgé à ce sujet : « croissance durable » ou « développement durable ».

Une clarification philosophique s’imposait donc, à partir de laquelle seulement on pourrait mieux poser la question d’une vision spécifiquement socialiste de l’écologie, s’éloignant résolument de la pensée qui domine actuellement sur ces sujets : l’écologie politique.

Sous le titre : « Volonté d’abondance, volonté de croissance », c’est cette salutaire clarification que nous propose Jérôme Batout. L’entreprise exige préalablement une déconstruction / reconstruction en règle de deux concepts clés de la modernité : production d’une part, valeur de l’autre.

Inutile de rappeler la centralité de l’idée de production pour le socialisme dans son ensemble et pour Marx en particulier : rapports de production, forces productives, modes de production, etc. C’est, prévient Jérôme Batout, cette centralité même qui risque de laisser dans l’ombre une question sous-jacente, celle non pas du rapport de production, mais du rapport à la production porté par l’idéal socialiste. Nous allons y revenir.

L’idée de valeur2 est passible de la même analyse. Chez Marx, encore lui, il n’est question, en économie politique, que de valeur : valeur travail, valeur d’usage, valeur

1| Le 13 février 2010, Jérôme Batout, Volonté d’abondance, volonté de croissance, et, le 4 mai 2010, Hervé Juvin, Un socialisme sans limites ? La chute d’un mythe du XXe siècle.

2| Jérôme Batout est l’auteur d’une thèse sur la valeur récemment défendue à l’EHESS, « L’Itinéraire de la valeur. Contribution à la généalogie du concept moderne de valeur ».

d’échange, etc. Et Nietzsche, faut-il le rappeler, fait de la valeur le concept central de sa philosophie politique (notion qu’il forge semble-t-il après avoir lu des traités d’économie politique). Encore un rappel qui s’impose à l’heure où, face à la « valeur » économique des néolibéraux, nous ne trouvons rien de mieux à opposer que nos « valeurs » éthiques.

Un détour par l’histoire est nécessaire si nous voulons sortir de ces faux dilemmes : production versus conservation, valeur économique versus valeur éthique. Une citation intrigante de Keynes nous met sur la piste : en 1930, en pleine crise économique, Keynes envisage un décuplement probable du niveau de vie des pays développés (ce en quoi l’histoire lui a donné raison). Mais il ajoute : « À long terme, tout cela signifie que l’humanité est en train de résoudre le problème économique » et que donc, alors que « le problème économique, la lutte pour la subsistance, a toujours été jusqu’à présent le problème primordial, et le plus pressant de l’espèce humaine (…), pour la première fois depuis sa création, l’homme sera confronté à son problème véritable et permanent : quel usage faire de sa liberté, une fois dégagé de l’emprise des préoccupations économiques ? »3

Keynes envisage donc un point terminal où, parvenus à un niveau d’abondance jugé suffisant, les hommes choisiront d’arrêter la croissance de la production pour se consacrer à autre chose et poursuivre d’autres « valeurs » que la croissance.

Si ce point de vue nous intrigue, c’est parce que nous ne parvenons pas, nous, contemporains, à seulement imaginer un tel horizon, un point final où la croissance s’arrêterait purement et simplement. Keynes, suggère Jérôme Batout, vivait dans un monde où régnait la « volonté d’abondance » alors que nous vivons dans un monde où ce qui s’impose à nous comme une évidence relève d’une « volonté de croissance ». Deux configurations distinctes à laquelle s’en ajoute une troisième qu’a clairement révélé la discipline anthropologique au XXe siècle et plus particulièrement les travaux de Lévi-Strauss, une « volonté de constance » des sociétés traditionnelles, étrangères à l’idée même de croissance ou de progrès et tout entières vouées à la conservation et à la reproduction de leur être. La formule est devenue classique : les sociétés traditionnelles sont des sociétés froides.

3| « Perspectives économiques pour nos petits enfants », in J. M. Keynes, La pauvreté dans l’abondance (Gallimard, 2002), p. 113

* Ce texte est un compte-rendu d’une des conférences données au CePPecs, au cours du cycle « Qu’est-ce que le socialisme ? », de février à mai 2010. www.ceppecs.eu

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Ainsi relu, ce qui pouvait passer pour un problème d’écologie politique – sortir de la rareté pour atteindre un stade terminal d’abondance – devient une question de conscience historique : Keynes comme Hegel, Marx et bien d’autres avant lui, vivait dans une perspective de « fin de l’histoire » et c’est ce sens de l’histoire comme vouée à une fin, au double sens de finalité et de terminus, qui nous est devenu étranger.

Du coup, nous percevons mieux ce que signifie pour nous cette valeur accordée à la croissance et à la production : nous les valorisons précisément parce que la valeur fondatrice de notre condition de modernes est l’autonomie, c’est-à-dire, pour parler en termes nietzschéens, la production des valeurs par l’humanité elle-même. Nous ne voyons donc ni comment ni pourquoi une telle perspective pourrait aujourd’hui disparaître ou s’inverser. Voilà pourquoi, pour revenir au point de départ, se pose pour nous, au-delà de la question des rapports de production chère à Marx, la question du rapport que nous, modernes, entretenons à la production.

Sommes-nous mieux armés, après ce long détour, pour poser le problème de la croissance écologique ? C’est ce dont tente de nous convaincre notre orateur. Il existe deux manières de comprendre et de prendre en charge l’impératif écologique. La première nous est familière : elle est celle de l’écologie politique orchestrée par ses plus fameux théoriciens comme, en premier lieu, Hans Jonas. L’écologie y est comprise comme une manière pour l’homme de se réinscrire dans la nature, de reconnaître son appartenance au cosmos, à la Terre-mère, Gaïa, Pachamama, etc. Bref d’abandonner l’hubris (c’est-à-dire l’arrogance et la démesure) qui l’a fait se concevoir pendant quelques siècles comme « maître et possesseur de la nature », selon la célèbre formule de Descartes.

Cette piste, pense Jérôme Batout, ne mène nulle part. Il faut en chercher une autre qui fasse droit à notre condition de modernes, c’est-à-dire de producteurs. Une perspective qui, soit dit en passant, entretient des liens de parenté étroits avec l’idéal socialiste, fils exemplaire lui-même de la modernité et de l’autonomie humaine. Cet idéal n’est pas moins exigeant ni moins impérieux que le premier, au contraire. Mais il présente l’inestimable avantage, plutôt que de prendre à rebrousse-poil nos valeurs modernes, d’envisager leur approfondissement. Il se donne ainsi de bien meilleures chances de réussir. Il repose sur des principes qui, contrairement à ce que l’on entend souvent dire ces derniers temps, sont totalement en phase avec une vision du monde

moderne et progressiste : l’efficience, la régulation, le sens de la limite (le titre véritable du rapport de Rome de 1972 était non pas « Halte à la croissance ? » selon la malheureuse traduction française mais « The Limits of growth »). Mieux que de croissance durable, on devrait parler de croissance responsable, suggère Jérôme Batout.

On le voit, notre orateur a entrouvert ici une porte qui n’est pas près de se refermer et qui s’ouvrira sans doute toute grande lorsque se seront précisés les malentendus et les impasses où nous conduit l’écologie politique, telle que nous la comprenons majoritairement aujourd’hui, c’est-à-dire comme pure négation de la modernité que deux facteurs essentiels ont contribué à accréditer. Il s’agit de la catastrophe totalitaire du XXe siècle, de la culpabilité qu’elle continue d’entretenir et du doute chronique qu’elle suscite vis-à-vis du projet moderne d’autonomie humaine. Le deuxième facteur tient à la découverte à la même époque des sociétés traditionnelles dont la logique d’inclusion dans le cosmos est aux antipodes de la nôtre, ces fameuses sociétés froides de Lévi-Strauss. Ce serait ainsi la prise de conscience même de l’exception que représente, à l’échelle humaine, la modernité qui amène à douter de la consistance de son projet.

En conclusion (provisoire), l’orateur concrétise par deux exemples l’alternative qu’il a dessinée.

Le premier touche à la formidable dé-différenciation de l’humain et du non-humain à laquelle nous assistons actuellement après quatre siècles d’accentuation de la différence. Faut-il y voir l’abandon par l’homme de sa posture de « maître et possesseur de la nature » ou bien n’y a-t-il là qu’un trompe-l’œil ? Si nous ne voyons plus nettement la différence, n’est-ce pas plutôt parce que nous appliquons à la nature humaine, elle-même, les procédés que nous appliquions jusqu’ici aux autres espèces naturelles ? Parce que, en d’autres termes, l’homme aussi, et de plus en plus, est produit par l’homme.

Le second porte sur l’idée même de responsabilité4. En elle-même, l’idée ne pose aucun problème. En principe, la responsabilité marche du même pas que la modernité. Au destin la modernité substitue la responsabilité. Le problème survient quand se pose la question : nous avons bien sûr à répondre de nos actes mais répondre de quoi et devant qui ? Vis-à-vis de qui, de quel autre, avons-nous une dette ? Un autre qui nous domine et nous précède, Gaïa, la planète, le Grand Autre, Dieu lui-même (dira Hans Jonas) ? Ou bien l’autre que nous sommes à nous-mêmes, un autre qui est en continuité profonde avec nous, les générations futures par exemple ?

Nul doute, à mon sens, que le débat initié par notre orateur aura une longue postérité et connaîtra d’importants développements au fur et à mesure que se révèleront les impasses dans lesquelles nous nous sommes fourvoyés aujourd’hui.

En fait, nous en avons déjà une en grand sous les yeux : à l’opposé des néolibéraux, qui prônent la dérégulation tous azimuts, les écologistes acceptent et valorisent la régulation. Mais cette volonté de régulation est à la fois très ambitieuse et très peu en consonance avec notre modernité. Elle se présente comme une imposition morale rigide, procédant d’un devoir plus que d’un vouloir, vouloir et maîtrise raisonnable que la modernité a placés au poste de commande du devenir humain. Que voulons-nous faire de ce que nous sommes ? Voilà le cœur du questionnement proprement moderne. Nous sommes en train de le constater, une régulation vouée à l’échec a les mêmes effets que la volonté de ne pas réguler.

Jean-Marie Lacrosse

4| Le livre de Hans Jonas s’intitule d’ailleurs : « Le principe responsabilité : une éthique pour la civilisation technologique » (Flammarion, 2008)

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10 11Aide à la jeunesse, lorsque le parent paraît

Au milieu des années 1970, une émission radio intitulée « Lorsque l’enfant paraît » et animée par Françoise Dolto voyait le jour sur les ondes de France Inter. Cette émission avait pour objectif d’introduire au sein du cercle familial une nouvelle conception de l’enfant. Ce n’est plus une vision de l’enfant centrée sur ses besoins corporels et physiologiques, un nourrisson, mais sa prise en considération comme un individu à part entière, une personne, un bébé. L’enfant devient un être au progrès permanent dont la phase infantile est déterminante pour le futur. Raison pour laquelle les parents de la génération 68 étaient à l’écoute de conseils et de recettes pédagogiques offrant la possibilité d’entendre la souffrance de l’enfant en lien avec l’éducation répressive. Comme le souligne Laurence Gavarin1 : « Un savoir acquis ne suffit probablement pas à transformer les représentations sociales en profondeur. C’est donc plutôt l’ambition créatrice et radicale de toute une génération qui a permis de jeter un autre regard sur le berceau ». Ce nouveau rapport à l’enfant que Dolto vulgarise via les ondes de France Inter est en lien avec un souci éducatif de plus en plus important qui vise à préparer les nouveaux venus à l’avenir. Souci éducatif conjugué notamment à la nécessité de parler à l’enfant dont Dolto introduit le concept de « communication humanisée ». L’enfant est en souffrance et la parole du parent a une fonction d’apaisement. Ce concept met en lumière la transformation du rapport entre les adultes et les enfants. La domination éducative n’est plus de mise. Elle est remplacée par un modèle éducatif et relationnel basé sur un statut d’égal à égal : l’enfant est une personne, tout comme l’adulte. Dans le même mouvement, de nombreux espoirs d’émancipation vont se transférer sur les enfants et se traduire par d’un côté, un nombre croissant de propositions pédagogiques à travers le développement psychomoteur et des jeux pour éveiller les enfants ; de l’autre, les lieux d’accueil vont être progressivement perçus comme des lieux, si ce n’est de répression, du moins des lieux traumatisants : « Ils sont les théâtres de ces inévitables traumatismes liés aux séparations décelées

1| Gavarini Laurence, La passion de l’enfant, Paris , 2001, Éditions Denoël, p. 56

à la lumière des travaux sur les enfants placés hors de leur famille. »2 Aucune structure traditionnelle de garde ou d’éducation ne sera épargnée par la critique. En effet, les capacités d’innovation et de changement de l’enfant deviennent progressivement de nouvelles valeurs sociales d’une génération « révolutionnaire »3.

Depuis, de nombreux livres s’intéressent à la question de la place de l’enfant dans notre société, il sera tour à tour, victime, roi, tyran… On s’inquiète dorénavant de la question de l’autorité, des limites qui auraient disparu. Mais ces enfants sont-ils vraiment des rois ou des tyrans ? Ils sont effectivement idéalisés et choyés, mais dans les faits ils sont confrontés à des situations familiales, des parcours scolaires et sociaux de plus en plus complexes, souvent difficiles et surtout organisés par des adultes, eux-mêmes pris dans des tensions éducatives. Ces enfants ne seraient-ils pas le produit de notre société mais aussi le miroir de la famille contemporaine ? Famille que Louis Roussel qualifie d’« incertaine »4 et dont les repères éducatifs sont brouillés par une affectivité qui barre toute référence au collectif. Dès lors, il devient nécessaire de comprendre les transformations du rapport que les parents entretiennent aux institutions pour comprendre certaines difficultés vécues par les enfants ou les adolescents.

Pour capter ce rapport des parents aux institutions, le travail dans l’Aide à la jeunesse en Milieu Ouvert est un bon observatoire des tensions entre famille et institution, tout particulièrement avec l’école. Ce type de service propose un accompagnement pour des jeunes de 0 à 18 ans et leur famille. Les demandes sont de tous types mais la majorité d’entre elles concerne l’école et la famille. Sur le plan scolaire, ce sont essentiellement des problématiques qui tournent autour de l’orientation (choix d’un type d’enseignement, d’une école…) et du renvoi en cours d’année pour des raisons principalement liées à des problèmes de violence, de racket, d’incivilité et de vols. Les familles qui poussent la porte du service sont généralement d’un niveau socio-économique bas et cumulent souvent plusieurs difficultés : non maîtrise de langue, famille nombreuse, moyens matériels insuffisants… Elles se présentent rarement de leur propre chef car elles sont orientées par l’école, le PMS ou, dans des cas plus difficiles, par le Service d’Aide à Jeunesse et le Conseil des Pouvoirs organisateurs

2| Ibidem, p. 98

3| Ibidem, p. 85

4| Roussel Louis, La famille incertaine, Paris, 1989, Éditions Odile Jacob.

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de l'Enseignement Officiel Neutre. Dès la première rencontre, l’attente des parents est forte : quelque soit la problématique, ils désirent immédiatement une réponse à leur problème. Dans le cadre d’un renvoi par exemple, ils ne comprennent pas la nécessité à faire un travail avec l’enfant. Ils situent le problème à l’extérieur du cercle familial (l’école, les professeurs, les jeunes…). D’autant plus que la responsabilité d’inscrire l’élève exclu dans une autre école ou dans une autre institution permettant de satisfaire à l’obligation scolaire, doit être assumée par l’école source (décret « Missions » du 24 juillet 1997). À ce titre, rencontrer les parents s’avère parfois difficile et il arrive que l’adolescent se présente seul dans le service. Or s’il s’agit d’un renvoi, les causes sont diverses car elles peuvent provenir d’un acte de violence ponctuel ou d’incivilités répétées. L’importance d’une rencontre avec les parents est donc nécessaire pour connaître le passé scolaire de l’élève ainsi que son environnement familial, d’autant plus que ceux-ci sont souvent en manque d’informations et ne connaissent pas le système éducatif.

En ce qui concerne la scolarité, que ce soit pour une simple orientation ou une recherche d’école dans le cadre d’un renvoi, il apparaît très vite que la relation que la famille entretient avec l’institution scolaire est chargé d’un lourd climat de méfiance. Les parents restent toujours concernés par la réussite scolaire de leur enfant mais ils ne montrent aucun intérêt pour l’institution. Ils demandent une bonne école, stricte, avec un cadre, sans violence, sans « voyous », une école qui permettra de socialiser l’enfant, de l’éduquer à la civilité et à la citoyenneté. Mais cette préoccupation pour l’établissement se traduit par une attitude défensive, inquiète et surtout revendicative face à l’école. En effet, il n’est pas rare qu’un parent désire porter plainte contre l’école parce que celle-ci a renvoyé son enfant et menace donc l’avenir de ce dernier. Même si peu de parents passent à l’acte car la procédure est lourde, on constate que le nombre de recours contre les décisions des conseils de classe concernant la réussite d’un élève dans l’enseignement secondaire a augmenté de 15 % au cours de l’année scolaire 2008-2009.

Si la famille est considérée comme le lieu privilégié de l’épanouissement de l’enfant, l’école est devenue un terrain que les parents ne maîtrisent pas, un endroit potentiellement dangereux pour l’enfant. Son rôle doit s’inscrire dans un objectif d’éducation tout en n’envahissant surtout pas l’espace du cercle familial. Les parents précisent qu’il ne peut y avoir aucune contrainte à la maison mais que si contraintes

il y a, celles-ci ne doivent en aucun cas peser sur la vie des parents. Ils ont assez de stress dans leur travail et ils ne veulent pas d’un stress supplémentaire apporté par l’école. L’école est donc perçue comme une contrainte pesant sur leur enfant et sur la vie familiale sans aucune anticipation d’un retour positif, autrement dit, les parents n’imaginent même pas que les contraintes actuelles vécues par l’enfant sont nécessaires pour le futur. Comme nous le confirme cette maman, il n’y a plus d’attente de satisfaction pour plus tard, l’enfant doit être heureux et s’épanouir ici et maintenant : « Ce n’est pas possible, mon fils est un ange à la maison ! Mais à l’école, il ne trouve rien pour lui. Je crois qu’il n’est pas fait pour ça… Il faut lui trouver autre chose car je vois bien qu’il est malheureux ».

Dans une éducation où l’extérieur est à l’origine des problèmes de l’enfant, il n’est pas étonnant de voir surgir un comportement de défiance de la part du jeune envers les institutions, les intervenants, les autres, mais aussi un sentiment que rien ne dépend de lui. Ce type d’éducation est insécurisant pour l’enfant et conduit ce dernier à ne produire aucun effort pour réussir à l’école mais aussi aucun effort pour se réinsérer dans une nouvelle école en cas de renvoi, puisque l’institution scolaire est à l’origine de tous ses malheurs. Dans un entretien individuel, un jeune confie : « Je m’en fous ! Elle n’avait pas à me parler comme ça … [la prof] ! C’est toujours la même chose, on fait sa vie, son business mais pas moyen d’avoir la paix. Elle ne devait pas me parler sur ce ton et tout cela ne serait jamais arrivé. Si je l’ai poussée contre le mur c’est parce qu’elle ne me respecte pas » et « de toute façon c’est la même chose partout, ils nous saoulent avec leurs histoires », pour finir par « c’est vot’ job de me retrouver une école… ». Dans certains cas, le jeune changera régulièrement de type d’enseignement et d’école jusqu’à ses 18 ans, moment où il ne sera plus soumis à l’obligation scolaire et se sentira enfin libre : « Plus que 6 mois à tirer ! Je vais pas encore attendre deux années de mécanique avec ces bâtards. Moi, dès que j’ai mes 18 ans, je me casse. Je fais mon business, je trace ma vie. »

Une autre difficulté surgit de façon récurrente lorsque, en tant que travailleur, il faut s’adresser aux parents en vue de leur exposer la réalité de l’institution scolaire, son univers de normes et de règles mais aussi ses missions pédagogiques. Ils ne veulent entendre parler que de leur enfant, de ses difficultés particulières en vue de trouver l’école qui l’acceptera comme tel. Tout ce qui est de l’ordre de l’accès à des règles, à des normes, à des savoirs abstraits, à un rapport à l’autre, paraît difficilement acceptable. En effet, l’école, c’est-à-dire la classe, les éducateurs, les professeurs, les cours, doit s’adapter à la personnalité de l’enfant : « C’est inadmissible ! Mon enfant est tête en l’air. Il est toujours dans la lune, oublie des affaires, un peu distrait quoi ! Et voilà, il oublie souvent son journal de classe donc il ne sait pas faire ses devoirs. Sans journal de classe, comment il saurait quoi faire ? Alors ensuite, il arrive à l’école sans avoir rien fait et la prof lui met des punitions ! Sa prof est cassante ! C’est trop stressant ce système. Ce serait pourtant plus simple de comprendre que mon fils est comme ça, on va pas le changer ! » Si d’un côté, nous pouvons faire le constat d’une certaine sécurité gagnée au niveau familial (allocations, aide de l’État, services sociaux), d’un autre, il apparaît que les parents rencontrés ont d’énormes difficultés à se représenter le rôle parental. Ils se concentrent sur le bonheur actuel de leur enfant ou adolescent, mais l’idée d’une préparation conjuguée au futur, d’une aide à l’émancipation au sens propre, c’est-à-dire à sortir de la tutelle parentale pour aller vers autre chose, est une idée qui semble avoir disparu. Ils s’inquiètent de la situation économique future de l’enfant mais sans aucune conscience quant à la nécessité d’acquérir une culture qui va permettre de s’insérer dans le monde social, dans lequel il sera toujours difficile de trouver sa place.

Rappelons que la famille est considérée comme une institution lorsqu’elle garde des rapports avec la société publique. Or la vie publique est aujourd’hui pensée en termes d’indépendance radicale des individus et non plus en termes d’aptitude à se conduire selon des règles que l’on a librement acceptées, autrement dit en devenant autonome. Si l’enfant est postulé comme

être dont l’autonomie n’est pas à conquérir, disposant d’une liberté et d’une indépendance dès la naissance, il ne doit donc pas faire un travail sur lui-même. Dans le cas qui nous intéresse ici, nous constatons que les parents ne vont pas signifier à l’enfant qu’il va vers autre chose et que, méthodiquement, les institutions vont essayer de le conduire vers des apprentissages, des normes sociales… L’enfant n’apprend pas cela dans sa famille et n’intériorise donc pas ce rapport pédagogique qu’il retrouvera à l’école. On comprend dès lors la difficulté de l’enfant à tenir en place dans un lieu dont il n’arrive pas à saisir l’essence même. Pour ajouter à cette incompréhension, les familles considèrent le fait qu’il est nécessaire de tout expliquer, de tout justifier vis-à-vis de leur enfant. Cela amène de nombreuses situations délicates dans lesquelles le parent, ne sachant pas justifier sa position, se tourne vers le travailleur pour que celui-ci prenne la responsabilité à sa place. On retrouve alors un discours du type : « Moi, je te laisse le choix mais tu vois, c’est monsieur qui décide. », ce qui enferme la discussion dans un rapport de personne à personne et permet au parent de préserver la relation sans heurt qu’il vise à entretenir avec l’enfant.

Pour conclure, force est de constater que l’institution scolaire, dans sa mission socialisante, peut difficilement s’appuyer sur le ressort de la famille. « Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille applaudit à grands cris », écrivait le poète5, mais aujourd’hui cela semble avoir pour effet d’éclipser la part d’articulation de la famille à la vie publique. Il n’y a donc pas de véritable démission des familles, car il se transmet toujours quelque chose, mais ce qui est transmis semble jouer contre les institutions et donc, contre la famille elle-même. Il est dès lors important de souligner qu’il est nécessaire d’articuler l’aide apportée aux jeunes et une action décisive en direction des familles. Un travail doit être réalisé en vue d’opérer une prise de conscience de la part des parents que leurs attitudes ne sont pas sans conséquences.

Bruno Sedran

5| « Lorsque l’enfant paraît » est un poème de Victor Hugo, extrait de son recueil Les feuilles d’automne, 1831.

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« Des signes religieux ? Et alors ? » Entretien avec Pierre Galand, Président du CAL

Suite à la parution de la brochure « Des signes religieux ? Et alors ? », éditée par la Centre d’Action Laïque, il nous a semblé important de faire écho à ce débat, qui touche bon nombre de jeunes (surtout les filles), jusque dans les écoles. Dans cette optique, nous avons rencontré Pierre Galand, Président du CAL qui a accepté de

répondre à quelques questions.

Résolument jeunes : Comment est née la nécessité de réaliser la brochure « Des signes religieux ? Et alors ? » et à quel public considérez-vous qu'elle soit destinée, a priori ? Les jeunes, par exemple, vous semblent-t-ils parmi les premiers concernés par et dans ce débat ?

Pierre Galand : Il faudrait peut-être remettre rapidement les choses dans leur contexte. Le CAL a été averti, durant toute l'année 2008-2009, de dérives qui se produisaient au niveau de l'école, où des professeurs de Morale, d'Histoire, de Gymnastique, etc., exprimaient leur gêne à l'égard d'une certaine réactivité d'élèves vis-à-vis du contenu des cours, de la mixité en certaines circonstances (piscine, gymnastique)… Un professeur de Pédagogie s’est entendu dire, par un élève futur enseignant, lors d'un examen de fin de cycle, parlant de Darwin : « Je n'enseignerai jamais cela, c'est contraire à mes convictions ! »Deuxième étape, à la rentrée 2009, des parents ont attaqué en justice les préfets de certaines écoles d'Anvers, Dison, etc., afin d’obtenir la possibilité pour leurs filles de porter le voile dans l’établissement, malgré un règlement d’ordre intérieur très clair sur ce point. Était-ce sous la pression d'imams ? Malgré les 20 % d'élèves retirés d'une école d'Anvers, la préfète a maintenu sa position, soutenue par la Communauté flamande qui a pris acte et décidé qu'il n'y aurait plus de signes religieux dans les écoles flamandes. En février de cette année, une journaliste du Soir est retournée dans cet Athénée, et a constaté que la plupart des élèves qui avaient été retirés de l'école l'avaient déjà réintégrée, qui plus est avec les remerciements des enfants, voire de certaines mamans, lesquelles ont confirmé qu'il s'était bien agi d'une opération organisée. À la même période, un élève a commencé une grève de la faim, en Allemagne, à Berlin, parce que son école publique n'offrait pas de lieu de prière – et il a gagné, car un juge lui a donné raison !

On s'aperçoit donc qu'il y a judiciarisation du processus, puisque les parents recourent à la Justice contre les directeurs et préfets. Là, nous avons dit : « Attention ! Un combat

communautariste et identitaire est mené dans des écoles, au lieu d'un combat pour la liberté d'expression. » Nous avons alors pris position et fait connaître cette position à l'ensemble de la classe politique.1 Et l’on s'est rendu compte d'un réel soulagement au sein du milieu enseignant, du fait qu'enfin quelqu'un ait pris une position qui clarifiait le débat, que ce soit dans l'Enseignement, ou dans la Fonction publique en général.De là est née la présente brochure « Des signes religieux ? Et alors ? », car il était nécessaire de concevoir un document simplifié à destination d'un large public (enseignants, élèves, parents, etc.), qui permette de diffuser la position du CAL, de manière claire et légère. Cette brochure connaît effectivement un succès retentissant et est sans doute un des meilleurs outils que le CAL ait jamais diffusé.

Considérez-vous que de prendre une position claire dans ce débat sensible, par l'édition de ce type de brochure, est de nature à pacifier à terme les rapports entre les principes de la laïcité et les mouvements religieux, ou cela risque-t-il de les crisper, comme le pensent certains ?

Les mouvements religieux sont vite crispés. On vient encore d'en avoir un exemple avec les réactions du Vatican et du Pape lui-même, qui montrent que les institutions religieuses sont à cran sur des positions objectivement archaïques, notamment à propos de la pédophilie, où ces gens n'ont pas évolué par rapport aux normes du droit qui ont été adaptées à la protection de l'enfance, pour faire de l'enfant un sujet de droit dans notre pays et dans le monde. Cela montre une Église qui se croit au-dessus de la loi, en camouflant les actes de certains prêtres, en contournant le droit, etc. Je cite souvent cette devise des républicains français du début du XXe siècle, qui résume l’esprit de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État : « La loi est là pour protéger la foi, tant que la foi ne veut pas faire la loi. » Or, on se rend compte qu'au-delà du milieu catholique, dans les milieux islamiques, orthodoxes et protestants évangélistes et pentecôtistes, on a affaire à des gens qui veulent réaffirmer, petit à petit, qu'au-delà de la société civile et du droit, ils auraient un droit supplémentaire, qui vient de préceptes religieux ou de dogmes, lesquels n'ont rien à voir avec le vivre ensemble. Donc, ils nous attaquent aisément sur le terrain du « vous allez empêcher la pacification », alors que c'est en clarifiant et en fixant le cadre que l'on va, au contraire, favoriser

1| Voir la brochure, Extériorisation des signes d’appartenance, CAL, Bruxelles, 2009.

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un vivre ensemble élargi, permettant à chaque enfant d'être de plus en plus maître de sa destinée. Car, tout de même, c'est ce qu'on demande à l'école : de faire des citoyens à part entière, dotés de capacités à vivre dans cette société et d'y être heureux. Ce sont des choses élémentaires pour nous, mais que certains, aujourd'hui, voudraient cadenasser d'une manière ou d'une autre ou contingenter à leur façon. Aux mouvements religieux, comme Président du CAL, je dirais : « C'est vous qui tentez de faire un retour dans la sphère publique, via la société civile, et ce, en vue de reconquérir des parts de marché. » Nous ne voulons pas dénoncer le fait religieux (que nous respectons), mais nous entendons qu'il puisse être acquis par choix et en pleine conscience individuelle par l'enfant. Une fois ce choix fait, il est respectable, mais il ne donne pas le droit d'empiéter sur la sphère publique et sur la démocratie. Or, entre autre exemple, une fondation turque a fait distribuer par milliers d’exemplaires un gros livre de sept kilos dans les écoles de notre pays, pour vanter le créationnisme2 – si ce n'est pas là une ingérence dans le système éducatif en Belgique, ça y ressemble tout de même beaucoup !Les religions aujourd'hui, face au mouvement objectif de sécularisation de la société, ont tendance à se radicaliser, que ce soit par le prosélytisme, l'entrisme dans les écoles, par des tentatives de rogner sur les lois, et nous devons donc nous mettre en alerte à ces différents niveaux. Simplement parce qu'au niveau de l'Europe certains de ces phénomènes sont déjà bien connus avant d'arriver chez nous : en Roumanie, le ministre de l'Enseignement a donné son agrément à la publication de livres créationnistes pour l'enseignement secondaire ; en Irlande, le ministre de la Justice a fait voter une loi contre le blasphème ; en Italie, 80 % des médecins refusent toute IVG au nom de l'objection de conscience, etc.Nous avons donc senti un certain nombre de dérapages (dans les faits, dans la judiciarisation du processus, etc.), rapportés par des acteurs de terrain. Le principe du CAL est donc de prendre position, de clarifier le débat et de rappeler le monde politique à ses obligations, en faisant des propositions.

Vous partagez, sur le principe, l'avis de la Ligue des Droits de l'Homme ou d'Amnesty International à propos de la libre expression des signes religieux dans l'espace public. Cependant, toutes deux « condamne[nt] » (Amnesty) la récente loi fédérale belge sur l'interdiction de la burqa ou du niqab, la jugeant prise « dans l’urgence, sans débat sérieux » (LDH). Quelle

2| L’atlas du créationnisme, par Harun Yahya.

est la position du CAL à propos de cette loi et des conditions de son vote à la Chambre ?

D'abord, la chute du Gouvernement a fait que la loi n'a pas été votée au Sénat, mais seulement à la Chambre. Je soutiens la position des parlementaires qui disent qu'on ne se promène pas dans la rue à visage couvert. En effet, on ne verrait pas un motard entrer dans une administration avec un casque sur la tête ; on penserait tout de suite à un hold-up ! Il y a donc une façon de se présenter en public qui fait que je dois pouvoir reconnaître mon interlocuteur, comme il doit pouvoir me reconnaître ; c'est une tradition chez nous et cela apparaît dans pas mal de règlements de police, comme le soulignent certains – encore aurait-il fallu que toutes les communes adoptent ce règlement pour qu’il ait quelque valeur. De l’autre côté, vous avez ceux qui disent, on va donner ça, puis ça, et demain, il y aura partout des femmes qui vont devoir porter cet accoutrement qui porte atteinte à la dignité humaine.Ma position est que, plutôt que de laisser se développer un processus dégradant pour la femme, en disant qu'« il n'y a que deux cents femmes qui portent la burqa », prenons position à temps, d'autant qu'en l'espèce, ce n'est pas un signe religieux, mais un vêtement traditionnel, archaïque, dans certaines ethnies afghanes. Si ce n'est pas un signe religieux, on peut dire : « Avec quoi venez-vous en disant que l'on brime la liberté religieuse ou les croyances ? » Or, comment croire que c'est développer une société que de laisser s'y développer des archaïsmes ?Je suis néanmoins aussi d'accord avec Philippe Moureaux quand il dit : « N'est-ce pas utiliser un maillet pour écraser une mouche ? », mais je vais au-delà (et là, je crains qu'il ne soit plus d'accord avec moi), en disant : « Prenons des règles générales qui ne soient pas tout à coup focalisées sur la burqa, car là, il s'agit vraiment de viser un groupe ad hominem (ou plutôt ici, ad feminem), là où il aurait fallu voter une loi à l'encontre de tous les signes extérieurs, en fonction des circonstances. » Dans l'espace public, tout le monde est libre de se promener comme il l'entend. Et j'irais même plus loin :

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la Région bruxelloise)3. Car, par exemple, quand un sénateur participe à une cérémonie officielle, il représente le Sénat et doit être neutre, en ne portant pas de signe religieux. Donc, il faut clarifier la situation dans la loi.

Que pensez-vous des positions du mouvement « R.A.P.P.E.L.! » qui, au départ d'une dénonciation de « l'immixtion du religieux à l'école », revendique, entre autre, « le remplacement des cours de religion et de morale par un cours commun à tous les élèves [en vue] de faire de chacun un citoyen libre et responsable et une conscience autonome douée d’esprit critique » ?

J'apprécie beaucoup le mouvement R.A.P.P.E.L. !, que ce soit clair, et je soutiens le travail que fait Nadia Geerts, en particulier. L'origine du R.A.P.P.E.L. ! est la revendication d’une inscription du principe de laïcité dans la Constitution. Ceci est bien beau, mais on n’y arrivera jamais sans étapes intermédiaires. Comme, par exemple, une loi reconnaissant la séparation de l'Église et de l'État, comme celle dont j’ai déposé la proposition dès 2003 en tant que sénateur, sur base d’un texte auquel le CAL avait activement collaboré. J’ai réussi à le faire signer par une majorité de chefs de groupe au Sénat. Donc, c'est notre axe depuis toujours. Un texte rafraîchi a été déposé en 2007 par Philippe Mahoux et Christine Defraigne, qui a rencontré des difficultés énormes parce que, déjà au sein du PS, il y avait des hésitations, et, pour éviter d'effaroucher l'électorat, on n'osait pas avancer. Nous avons donc dû y aller au forceps et le jour où la proposition de loi devait passer en Commission des Affaires institutionnelles du Sénat, comme par hasard, elle est sortie de l'agenda. Il semble donc qu'un accord soit intervenu entre les Présidents de groupe, pour dire que ce n'était pas le moment. Ce n'est donc pas facile, y compris au sein du PS, car certains disent, que si l'on avance dans ce sens, on divise. Or, je ne divise pas ; je tente seulement de faire avancer les propositions pour que le

3| Élection de Mahinur Özdemir, en juin 2009, qui a prêté serment, avec le hijab, comme Députée au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale.

Bureau du Parti les examine, et ensuite, on voit.

Pour ce qui est des cours de Morale et de Religion, nous avons sorti un document au sein du CEDEP4 (« Réflexions en vue d'un système éducatif plus performant pour tous les enfants. », NDLR), dans lequel nous plaidons clairement pour le réseau unique et pour qu'on revoie l'ensemble des cours. Entre-temps, nous avons travaillé avec les ministres Arena et Dupont sur une proposition selon laquelle, dans l'ensemble des cours de morale, de religion, etc., existerait un tronc commun qui serait l'amorce d'un cours de civisme, dans la première partie de la scolarisation, et d'un cours de philosophie et d'histoire des religions, dans la seconde partie du cycle. Donc, tout cela est bien au cœur de nos préoccupations. Le R.A.P.P.E.L. ! mène son combat comme organisation laïque et je suis très heureux que, dans ces organisations, certains engagent ces combats, comme Nadia Geerts, avec beaucoup de talent.

Entretien réalisé par Alain Detilleux 07.2010

La brochure « Des signes religieux ? Et alors ? » est disponible gratuitement auprès du CAL :

Campus de la Plaine ULB, cp 236, Av. Arnaud Fraiteur - 1050 Bruxellestéléphone : 02 627 68 11mail : [email protected]

ou sur le site Web, au format PDF :www.ulb.ac.be/cal/presse/campagne/2010/see/download/brochure_see_campagne2010.pdf

4| Le Centre d’Étude et de Défense de l’École Publique (CEDEP) est une association de fait, fondée en 1985, qui est constituée de onze associations représentant des pouvoirs organisateurs, des directeurs, des enseignants, des parents et des sympathisants de mouvements laïques. La brochure est disponible en ligne, au format PDF, sur : www.cedep.be/downloads/Brochure_CEDEPdef_web_%282%29.pdf

lors de la procession du Saint-Sang, à Bruges, des types sont cagoulés et demandent une autorisation de police pour ce faire. Même s'ils ont envie de se flageller avec des cordes devant tout le monde, je dirais que tant qu'ils ne portent pas atteinte aux autres ou à leur vie, ça ne pose pas de problème. Mais je ne vois pas les mêmes types aller cagoulés à leur boulot, le lundi !La question est donc de savoir quelle est la règle qui permet un vivre ensemble harmonieux. De la même manière, dans les administrations publiques, il faut la même règle pour tout le monde. Comment permettre à ceux qui ne sont pas en contact avec le public de porter des signes religieux, et l'interdire aux autres ? Ce serait clairement discriminatoire. Donc, la règle doit être : zéro signe extérieur dans la fonction publique, qu'il soit religieux, politique ou convictionnel.

Quant à la neutralité des services publics et des fonctionnaires, que pensez-vous des réactions manifestées depuis le dernier scrutin électoral, à l'encontre des assesseures qui ont porté des signes évidents de convictions religieuses (voile islamique noir intégral, hijab) ou de certains bureaux de vote dans lesquels étaient présents des crucifix ?

Au niveau des bureaux de vote, les présidents ont un mandat et remplissent une fonction publique ; ils ne doivent pas porter de signes. Pour les assesseurs, c’est moins simple, mais il serait logique qu’ils soient neutres, puisqu’ils sont amenés à devoir éventuellement assister les votants. Charles Piqué, Ministre-président de la Région bruxelloise, avait, à la veille des dernières élections, déjà pris une mesure en ce sens. Notons qu'une virulente campagne de dénigrement a aussitôt eu lieu à son encontre, parce qu'il avait exactement dit quelle était la règle.Pour ce qui est des crucifix, dans une école, par exemple, c'est la même chose : ils doivent être retirés du bureau de vote. Dès cet instant, ce jour-là, ce n'est plus une école, mais un bureau de vote et il doit être neutre. La seule exception que je voie concernerait une école avec un passé culturel extraordinaire et dont des signes religieux, une Vierge ou autre, seraient sur un socle comme une pièce de musée. On aurait donc affaire, là, à un objet culturel, et pas cultuel (comme dans certains prétoires où subsistent des crucifix). Certains demandent qu'on mette un voile devant ces objets lors des séances, et ils ont raison, mais de là à aller jusqu'à les enlever… Donc, cela vaut aussi pour les bureaux de vote, il faudrait masquer les objets de ce type. Cela dit, ce n'est pas de

la faute d'un président si un crucifix reste en place dans son bureau de vote, car ce sont les organisateurs du bureau qui doivent, sur instruction du ministère de l'Intérieur, veiller à ce genre de choses.

La brochure « Des signes religieux ? Et alors ? » souligne la nécessaire interdiction des signes religieux à l'école et dans tous les services publics, mais quelle est la position du CAL à propos des élu(e)s arborant des signes religieux, aux divers niveaux de pouvoir (communal, régional, fédéral, etc.) ? Est-ce acceptable au regard de l'exemple qu'ils/elles incarnent nécessairement auprès des jeunes citoyens ?

C'est une très bonne question, avec une double entrée.Premièrement, un élu, ce n'est pas un fonctionnaire, il n'exerce pas une « fonction publique », c'est un élu de la Nation. Donc, si demain on avait, dans notre communauté (comme en Australie, par exemple), une population entière dont les membres portent des signes extérieurs d'appartenance très visibles, on ne serait pas choqué qu'ils soient élus et qu'ils viennent avec leurs signes. Mais, quand on demande : « Est-ce qu'une élue qui porterait le voile a priori, doit l'enlever dans l'enceinte où elle a été élue ? », c'est une question à laquelle je n'ai pas de réponse.Par contre, si cette élue est amenée à remplir des fonctions qui sont en lien avec la Fonction publique (ce qui est souvent le cas), comme la représentation, l'accompagnement d'un ministre, etc., elle ne doit pas porter de signes religieux.Donc, il y a une incohérence, puisqu'on accepte des élues voilées dans l'enceinte parlementaire, mais qui devraient enlever le voile dès lors qu'elles exerceraient certaines fonctions publiques. Dès lors, le seule bonne réponse à donner – et en cela elle se rapproche du cas des administrations publiques elles-mêmes – est celle-ci : comme il y a une contradiction, il faut prendre une règle générale, qui aille dans le sens de la continuité du mandat à exercer (de ce point de vue, le cdH a d'ailleurs joué un jeu dangereux, au niveau du Gouvernement de

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Signes religieux à l’école :la position de la FBJS

La Fédération Bruxelloise des Jeunes Socialistes a pris note du changement de position du CAL qui demande actuellement que tous les signes distinctifs religieux, philosophiques ou partisans soient exclus, tant pour le personnel éducatif que pour les élèves.

Par conséquent, le CAL postule, pour tous les établissements d’enseignement organisés ou subventionnés par la Communauté française, l’interdiction des signes ostentatoires religieux.

Si nous partageons le point de vue du CAL quant à l’interdiction générale pour le personnel éducatif ou dans les administrations publiques, l’interdiction du port du voile pour les élèves du secondaire n’apparaît pas comme souhaitable.

Après de longues discussions, les Jeunes socialistes bruxellois ont voté une résolution1 refusant la mise en place d’une mesure répressive d’interdiction du port du voile à l’école secondaire qui serait contre-productive. En effet, ce type de mesure serait, notamment à Bruxelles, un vecteur d’exclusion non acceptable.

Force est de constater en premier lieu que le débat a été mis sur la table pour de mauvaises raisons. Il est certain que plusieurs adeptes de la thèse de l’interdiction, parmi les plus médiatisés, visent un électorat conservateur inquiet, nourri du fantasme de la dangereuse propagation de l’« influence musulmane » en Belgique, et n’ont pas pour but la défense des principes laïcs.

Cependant, le débat doit être ouvert et la situation clarifiée. D’autres personnalités

1| Résolution de la Fédération Bruxelloise des Jeunes Socialistes (FBJS) sur la question de l’interdiction éventuelle du port du voile à l’école secondaire :www.fbjs.blogspot.com

mènent un combat dans le sens de l’interdiction, mus par des motifs sincères et louables, ayant à cœur des principes de laïcité et d’égalité. Et il est important que les jeunes participent à ce débat.

La Fédération Bruxelloise des Jeunes Socialistes a bien conscience que le débat est complexe et que certaines questions sensibles ne peuvent pas être écartées. Les convictions religieuses ne doivent bien entendu pas perturber les cours. Il est inconcevable qu’elles puissent interférer avec d’autres activités obligatoires dans le cadre de la vie scolaire, comme les visites médicales par exemple.

Il est important de cadrer le débat. S'il n’est pas question d’autoriser le port des signes ostentatoires religieux aux élèves de l’école maternelle ou primaire, la FBJS s’oppose à une interdiction générale du port du voile à l’école secondaire.

L’école doit être un lieu où les élèves se sentent bien, un lieu d’égalité, d’ouverture, d’émancipation et d’apprentissage de la tolérance. Dans le contexte actuel de stigmatisation de la communauté de confession musulmane de Bruxelles, une telle mesure, exclusivement répressive, serait vecteur d’exclusion vers cette communauté.

Une telle mesure n’engendrerait qu’un repli identitaire plus marqué. Pratiquement, cela pourrait entraîner la mise à l’écart du système scolaire officiel de nombreux élèves issus de familles bruxelloises de confession musulmane, dont une grande partie est issue des milieux les plus populaires de la région. Or, les jeunes socialistes ont à cœur l’émancipation des élèves issus des milieux les plus modestes, qui reste en outre l’objectif primordial de l’école.

Au-delà du débat sur l’interdiction du voile à l’école, il convient de se concentrer sur les enjeux prioritaires et majeurs à Bruxelles. Le manque de mixité sociale dans nos écoles est un des ces enjeux prioritaires : l’objectif du vivre ensemble ne pourra être atteint si nos écoles ne sont pas plus mixtes. Sans négliger ce débat, il est peut-être temps de répondre aux problèmes auxquels est confrontée la jeunesse à Bruxelles : disposer d’un travail et d’un logement décents ou lutter contre les discriminations et contre toutes les formes d’intégrisme.

FBJS - 08.2010

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La « Chasse aux chômeurs » et son impact sur les jeunes : entretien avec Yvan Mayeur,

Président du CPAS de Bruxelles

D'une manière générale, le Plan de Contrôle des chômeurs a-t-il fait augmenter significativement les demandes d'aide auprès du CPAS ?

Le phénomène de transfert entre le chômage et les CPAS est une réalité à laquelle nous sommes confrontés depuis plusieurs années.

Pour le CPAS de Bruxelles, le nombre de demandes en raison d’une exclusion temporaire du droit aux allocations chômage s’élève à une moyenne de 13 par mois en 2008, 20 par mois en 2009 et déjà 200 en 2010, soit une moyenne de 28 par mois.Nous constatons donc une augmentation des demandes d’année en année et ce depuis 2007, soit au moment où le plan d’accompagnement a été étendu à l’ensemble des chômeurs.

Le plan d’accompagnement n’est cependant pas la seule explication à l’augmentation des demandes ressenties par les CPAS. Les sanctions pour omission de déclaration d’une période de travail sont également une illustration de ce phénomène. L’effet « Banque Carrefour » joue un rôle dans l’augmentation des sanctions prononcées. Si ces sanctions ont toujours existé, elles ont pris une ampleur accrue par la possibilité qu’a aujourd’hui l’ONEm de constater des infractions remontant à plusieurs années.Nous avons cependant pu constater une stabilisation des sanctions prononcées dans ce cadre au cours de l’année 2009.

Quelle proportion de jeunes constate-t-on parmi les demandeurs ? A-t-elle augmenté depuis la mise en place du plan ?

Selon nos chiffres de 2008 et 2009, nous constatons que 17,5 % des demandeurs ayant fait appel à l’aide du CPAS durant la période de sanction de l’ONEm sont des

jeunes entre 18 et 25 ans.Sur les 200 demandes déjà traitées en 2010, le nombre de jeunes entre 18 et 25 ans s’élève à 31, soit 15 %.

La tranche d’âge 26 à 35 ans représente 37,5 % du nombre total des demandes d’aide de chômeurs sanctionnés.

Le plan d’accompagnement mis en application depuis 2004 pour les jeunes, et progressivement étendu à tous les chômeurs, a, depuis la mise en place du plan, forcément donné lieu à un plus grand nombre d’exclusions parmi les jeunes chômeurs. Il apparaît cependant que les chômeurs âgés de 26 à 35 ans représentent le public majoritairement visé par les sanctions.

D'une manière générale, constate-t-on une aggravation de la situation sociale des jeunes au sortir des études, depuis quelques années ? Si oui, à quels facteurs socioéconomiques cela serait-il dû, selon vous ?

Les personnes disposant d’un niveau de scolarité primaire et secondaire inférieur sont manifestement davantage touchées par les sanctions de l’ONEm. Même si ce faible niveau de qualification n’a pas d’influence sur le risque d’être touché par une sanction, il est évident qu’il est à l’origine de l’état de chômage de ces personnes.

Par ailleurs, les jeunes ayant terminé ou arrêté leurs études ont déjà quitté ou quittent le domicile parental pour diverses raisons : que ce soit la configuration du logement qui les oblige au partage de leur chambre avec un membre de la famille ou la mise en autonomie suite à des mésententes avec les parents ou encore un projet de vie de couple. Nous avons pu constater une augmentation des demandes de prises en charge introduites par des jeunes désireux de quitter le logement familial pour les raisons évoquées.La situation socioéconomique des parents détermine également souvent le partage des responsabilités : dès la fin des études, le jeune est supposé pouvoir se prendre en charge.

Il en résulte que les jeunes ayant terminé leurs études se trouvent souvent en situation de précarité financière et font appel à l’aide des CPAS.

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Outre l'aspect financier évident, quels autres problèmes la « Chasse aux chômeurs » entraîne-t-elle au niveau des CPAS, notamment en matière de surcharge de travail concernant la recherche d'emploi, théoriquement dévolue à Actiris ?

La durée moyenne des sanctions, parfois limitée à quelques semaines, ne permet généralement pas l’ébauche d’un travail social adapté. Les efforts en vue d’une (ré)insertion socioprofessionnelle ne se concentrent pas davantage sur les personnes pouvant récupérer leur droit aux allocations chômage à court terme. Les exclusions de plus de 4 mois, voire définitives, entraînent un suivi social qui vise une recherche active d’emploi ou le renforcement des aptitudes de la personne via des formations qualifiantes.

À noter que les exclusions définitives prononcées par l’ONEm font suite au non respect du deuxième contrat d’activation. Les effets de ces sanctions ne nous parviennent donc que progressivement mais ont déjà triplé entre 2008 et 2009. Une augmentation est encore attendue en 2010.La charge de travail liée à l’élaboration d’un processus d’insertion socioprofessionnelle augmentera à mesure des exclusions prononcées.

Certains chômeurs exclus définitivement avaient ouvert le droit aux allocations de chômage à la suite d’une mise au travail dans le cadre d’un art. 60§7. Leur exclusion implique un retour vers le CPAS et, le cas échéant, une nouvelle mise au travail par ce dernier.

Comme socialiste et responsable d'un CPAS, quelle est votre analyse de l'impact social du Plan de Contrôle des chômeurs, et pensez-vous qu'il soit bon de le poursuivre tel quel, là où certains exigent un moratoire, voire son retrait pur et simple ?

Le plan d’accompagnement devrait être réexaminé à la lumière des constats de terrain qui ont pu avoir lieu depuis sa mise en place, notamment au niveau des CPAS.

Le plan d’accompagnement des chômeurs se résume malheureusement trop souvent au bilan des efforts que le chômeur a produits pour trouver un emploi. Les constats de manque de qualifications ainsi que la réalité économique actuelle supposerait cependant que l’accent soit davantage mis sur l’offre de formation

afin de préparer les chômeurs à une insertion dans les secteurs qui se relancent avec des stages en entreprises à l’appui.

Les sanctions sont disproportionnées dans le sens où elles obligent les chômeurs à s’adresser au CPAS.Les sanctions devraient permettre aux chômeurs de conserver une allocation équivalente au revenu d’intégration de leur catégorie.

Outre la nécessité de prévoir l’absence de transfert de charge vers les CPAS pour les sanctions de courtes durées, les cas d’exclusions définitives resteraient une source de charge supplémentaire pour les CPAS.En effet, le nombre croissant d’exclusions définitives enregistrées en 2009 tend à indiquer une évolution dans ce sens. Une telle éventualité aurait pour conséquence une charge de longue durée pour les CPAS, la personne exclue ne pouvant prétendre à la réouverture du droit aux allocations de chômage qu’après avoir à nouveau presté le nombre de journées de travail requis pour sa catégorie d’âge.Il nous semble donc indispensable d’insister pour qu’un accompagnement spécifique soit organisé au sein d’Actiris (par exemple via la constitution d’une cellule qui serait composée de personnel qualifié et formé à ce travail), particulièrement au cours de la période du second contrat d’activation.

Entretien réalisé par Alain Detilleux07.2010

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ONEm et CPAS : double activation = double exclusion ?

Depuis juillet 2004, les demandeurs d’emploi sont soumis à un « plan d’activation du comportement de recherche d’emploi ». Selon ce plan, l’ONEm évalue, au cours de différents entretiens, les démarches effectuées par le demandeur d’emploi pour chercher du travail. Le délai de procédure instaure d’emblée une discrimination selon l’âge : les moins de 25 ans sont convoqués après 15 mois de chômage (stage d’attente compris) et les plus 25 ans après 21 mois. Le « facilitateur » de l’ONEm évalue les « efforts » faits par le chômeur : formations, inscriptions dans des bureaux d’intérim, nombre de candidatures envoyées, etc. Si les démarches sont jugées insuffisantes, le chômeur doit signer un « contrat » comprenant un certain nombre d’actions qu’il devra réaliser par la suite. En cas de non respect de ces obligations, les premières sanctions tombent.

Le chômeur doit respecter à la lettre les obligations imposées ! On en arrive ainsi à des situations grotesques : un chômeur est exclu car il n’a pas pu prouver ses démarches de recherche d’emploi… parce que sa maison a brûlé (et ses papiers avec, forcément) ; une chômeuse est exclue parce qu’elle n’a pas répondu à assez d’offres sur internet… alors qu’elle a mené au total plus de démarches que ce que son « contrat » lui imposait, etc.

Les personnes sanctionnées ou définitivement exclues n’ont souvent plus d’autre choix, du moins si elles ne trouvent pas un emploi rapidement, que de s’adresser au CPAS. Si le nombre de personnes sanctionnées ou exclues par l’ONEm augmente chaque année, le pourcentage de celles-ci qui bénéficient d’une aide CPAS s’est réduit de 46 % en 2007 à 38 % en 20081. Il reste peu de choix aux autres : solidarité familiale, exclusion, travail au

1| CHERENTI, R., Les exclusions ONEm – Implications pour les CPAS, Fédérations des CPAS, février 2009, p. 9.

noir. La solidarité collective se voit ainsi remplacée par la solidarité familiale ou par… rien. Est-ce là le type de société que nous voulons en Belgique ? Qu’en est-il de la possibilité pour les jeunes (et moins jeunes) exclus par l’ONEm d’avoir droit à un « Revenu d’Intégration Sociale » (RIS) ou à une aide sociale ? Les demandeurs de moins de 25 ans doivent obligatoirement signer un « Projet Individualisé d’Intégration Sociale » (PIIS).Concrètement, le PIIS vise à contrôler la « disposition au travail » du bénéficiaire d’aides du CPAS par le biais de plusieurs obligations, telles que celles de rechercher activement un emploi ou de s’inscrire à des formations. En cas de non respect de ces obligations, le RIS ou l’aide du CPAS sera raboté ou supprimé.Comment ne pas aussi constater des similitudes entre ces mesures et l’obligation progressive pour les jeunes demandeurs d’emploi de signer un « Contrat » avec le FOREM ou Actiris ? Même logique, mêmes conséquences : les exclusions touchent les plus jeunes de plein fouet… Sans nullement faire baisser le taux de chômage des moins de 25 ans qui prend des proportions dramatiques.2

L’ « activation » propre au CPAS pose problème pour de nombreuses raisons :

Premièrement, la nature de ce « contrat » est viciée : ▪pour être valable, un contrat doit être librement consenti par les deux parties !

Deuxièmement, si le contrôle du respect des ▪obligations est plus souple au CPAS qu’à l’ONEm, les règles d’appréciation sont floues et peuvent donc être appliquées « à la tête du client ». Vu la situation financière difficile des CPAS (due notamment aux exclusions de l’ONEm) et la responsabilisation individuelle des demandeurs, il est clair que les décisions qui sont prises ne penchent que rarement en leur faveur.

Troisièmement, les mécanismes de mise ▪au travail des allocataires du CPAS posent également problème. Les emplois « article 60 »3 sont généralement mal rémunérés (bien que les employeurs bénéficient d’une exonération de cotisations sociales et d’une allocation) et offrent

2| En moyenne sur l’année 2008 : 34,7 % à Bruxelles et 34 % en Wallonie.

3| Ainsi nommés en référence à l’article 60.7 de la loi organique des CPAS du 8 juillet 1976, qui indique que le CPAS « prend toutes les dispositions de nature à (…) procurer un emploi » à ces allocataires. Il peut également le faire en « agissant lui-même comme employeur ».

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des conditions de travail précaires. Le travailleur « article 60 » est en effet licencié dès qu’il atteint le nombre de jours nécessaires pour bénéficier du chômage. Autre faille dans la logique des « articles 60 » : le rôle schizophrène que joue le CPAS en cas de licenciement anticipé. En effet, le CPAS est à la fois employeur et dispensateur d’aide sociale. Il est donc celui qui peut licencier un travailleur et lui refuser ensuite une demande de RIS. Le travailleur « article 60 » licencié n’a en effet d’autre choix que de se tourner vers le CPAS. Lequel devra examiner la « disposition au travail » du demandeur… qu’il vient juste de licencier. Vous avez dit « piège à c… » ?

Quatrièmement, il ne faut pas oublier que le CPAS ▪est une « dernière chance ». Après l’exclusion de l’ONEm, la chute est, en théorie, amortie par le filet du CPAS. En revanche, après le CPAS, c’est la chute libre !

Assurance Vs. Assistance

Pour rappel, les allocations de chômage sont une assurance contre la perte d’emploi tandis que l’aide sociale relève de l’assistance. Le calcul respectif des indemnités se base sur cette logique. Ainsi, les allocations de chômage sont octroyées d’office à toute personne ayant travaillé le nombre de jours requis. Si le montant de ses allocations peut être influencé par sa situation familiale, cette situation ne peut pas lui faire perdre le droit à ces allocations . À l’inverse, le RIS ou l’aide sociale n’est pas accordé automatiquement au demandeur. Si les revenus de son ménage dépassent 948,74 € par mois, il ne touchera rien. Il s’agit donc bien que du dernier rempart contre la misère la plus totale : quel ménage de 2, 3 ou 4 personnes peut vivre avec moins de 950 € par mois ?

Le caractère d’assurance des allocations de chômage tend ces dernières années à être miné par la montée en force de l’« État social actif ». Pour contrer ce qu’il considère comme une dérive de l’État social « passif », ce courant vise à remplacer l’assurance sans condition par une assistance sous conditions. Avec l’activation des chômeurs et bénéficiaires du CPAS, on passe d’un droit ouvert à tous à un droit soumis au respect d’un contrat individuel. Derrière cette logique se cache une responsabilisation accrue du demandeur d’emploi ou du bénéficiaire de l’aide sociale. Ce qui permet de faire oublier la responsabilité collective d’une société qui n’est pas capable d’assurer le plein-emploi. En effet, quel sens peuvent bien avoir les contrôles ONEm ou

CPAS quand les emplois existants diminuent presque aussi vite que croît la population active ? La responsabilité du chômage de masse ne doit pas reposer sur les épaules des demandeurs d’emploi ! Il est urgent de mettre sur pied une réelle politique de création massive d’emplois durables et de qualité.

Régionalisation cachée de la sécu

Le plan d’activation des chômeurs inclut un transfert de fonds fédéraux supplémentaires aux services régionaux de l’emploi. En revanche, aucun budget spécifique n’est affecté aux CPAS pour aider avec efficacité tous les exclus que l’ONEm leur envoie. Le financement d’une mission de la sécurité sociale est donc « communalisée », les communes les plus pauvres devant très logiquement prendre le plus de demandeurs d’aide sociale à charge. L’exiguïté du budget des CPAS ne favorisant en définitive qu’une application toujours plus pointilleuse des règles des PIIS.

Précarisation accrue et misère des jeunes

Si « seulement » 4,1 % des jeunes wallons de 18 à 24 ans sont bénéficiaires d’allocations du CPAS, on constate toutefois qu’ils représentent près du tiers (31,2 %) de tous les bénéficiaires en Wallonie. En 2006, 6,4 % des jeunes bruxellois de 18 à 25 ans étaient bénéficiaires des allocations du CPAS4. Ils représentaient toutefois 24,9 % de l’ensemble des bénéficiaires (alors qu’ils ne comptent que pour 8,8 % de la population totale de la Région de Bruxelles-Capitale)5.Les statistiques du « plan d’activation » montrent que, depuis sa mise en œuvre, 10 % des demandeurs d’emploi de moins de 30 ans contrôlés ont été sanctionnés ou exclus. D’autre part, les moins de 30 ans représentent 46,6 % des chômeurs contrôlés de tous les âges (et 52,9 % des sanctionnés et exclus), alors qu’ils ne représentaient,

4| Observatoire de la santé et du social – Bruxelles, Baromètre social – Rapport bruxellois sur l’état de pauvreté, Commission Communautaire Commune, édition 2006, p.14.

5| Indicateurs statistiques de la Région de Bruxelles-Capitale – Analyses/Méthodo., Edition 2008, p. 404.

fin 2008, que 19 % du nombre total de demandeurs d’emplois indemnisés.6

Une autre mesure particulièrement cynique touche les jeunes. Lors du deuxième entretien, des sanctions peuvent en effet tomber. À l’inverse des bénéficiaires d’allocations de chômage, dont la situation de famille peut « atténuer » la sanction, les bénéficiaires d’allocations d’attente7 peuvent voir leurs allocations suspendues totalement pendant 4 mois et ce, quelle que soit leur situation familiale.

Deux systèmes, un même résultat

On le voit, si les termes utilisés par l’ONEm et les CPAS différent, la logique « d’activation » reste la même : l’aide sociale sera octroyée sur base, entre autres, de la « disposition au travail ». À la contractualisation de l’assurance sociale vient donc s’ajouter celle de l’assistance sociale. Pris en tenaille entre les contrôles ONEm, l’absence d’emplois en suffisance (1 emploi pour 25 chômeurs en Wallonie8, par exemple) et le rétrécissement du filet de sécurité que représente le CPAS, les jeunes (et moins jeunes) demandeurs d’emploi se retrouvent face à un mur. Les ministres compétent(e)s peuvent fanfaronner sur l’utilité du « plan d’activation » des chômeurs (et des allocataires des CPAS) ou encore sur le nombre d’emplois créés grâce à l’article 60. Le fait est que l’objectif principal visé par les demandeurs d’emploi – un emploi durable et de qualité – s’apparente de plus en plus à une chimère. « On vous demande de chercher un emploi, pas d’en trouver un »9, disait l’autre… Comment ne pas se rendre compte que cette dérive contractualisante et culpabilisatrice est surtout contre-productive ?

6| Office National de l’Emploi, Annuaire statistique 2008, p. 29.

7| Les allocations d’attente sont des allocations de chômage obtenues sur base des études et d’un stage d’attente variant de 6 à 12 mois.

8| Moyenne wallonne du ratio offres d’emploi / demandeurs d’emploi : de janvier à août 2009 – Source : FOREM, 3 septembre 2009.

9| Frank Vandenbroucke en 2004, alors Ministre de l’Emploi et « père » du plan d’activation.

À moins, bien sûr, que les réels objectifs de cette évolution en marche – cachés derrière les pieuses intentions de l’ « État social actif » – ne soient plus insidieux et ne visent finalement qu’à nous faire faire un grand bond en arrière d’un siècle…

Jeunes FGTB - 08.2009

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« Marre de payer pour les chômeurs ! »

« Les services publics ? Toujours en grève ! »

« N’empêche qu’il y avait plus de boulot quand les femmes ne travaillaient pas ! »

« Marre de ces étrangers qui ramènent toute leur famille en Belgique aux frais du contribuable ! »

Qui n’a jamais entendu de telles réflexions lors d’un repas, au comptoir du bar, au supermarché ou au boulot ? On les entend tellement qu’on serait tenté de les trouver « logiques », « de bon sens ». D’ailleurs, si tout le monde les répète, il doit bien y avoir une raison…

Eh bien oui, il y en a une… mais pas celle que l’on croit ! Aujourd’hui, c’est le discours libéral qui domine. Il est facile à retenir car il distille des petites phrases, des slogans, des « formules-choc », souvent relayées par les médias mais rarement remises en question.

Il propose des pensées « prêtes à l’emploi » et surtout il ne pousse pas à la réflexion… bien au contraire !Les Jeunes FGTB ont décidé de ne plus se laisser intoxiquer par la pensée et le discours libéraux ! Ils nous emmènent en cure de désintoxication grâce à leur brochure « Détox ».

Cette brochure a été réalisée pour « casser » ces petites phrases assassines et pour déconstruire le discours libéral en proposant d’autres arguments. Elle est facile à lire, amusante et elle tient dans la poche. Alors emmenez-la partout et contrez l’offensive de la droite !

Que la désintoxication commence !

Vous pouvez recevoir gratuitement la brochure « DETOX » en la demandant auprès des Jeunes FGTB :

Téléphone : 02 506 83 92 ou mail : [email protected]

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« Tous aux Francos » : les backstage d’un projet qui roule

Quoi de plus agréable qu’une collaboration réussie ? Peut-être une semaine de festival (avec de vraies douches), ou de nouvelles rencontres ou réaliser un de ses rêves… Et quand le tout est rassemblé, cela s’approche du projet « Tous aux Francos,

Fanzine 2010 ».

En 1997, un certain projet « Francos Reporters » voit le jour à La Rochelle. Deux-cents cinquante jeunes venus d’un peu partout se retrouvent pour couvrir le festival. Parmi les participants, le Centre de Jeunes de Jupille revient en Belgique avec une idée en tête. Dès l’année suivante, les jeunes jupillois lancent leur propre projet aux Francofolies de Spa. D’années en années, le projet accueillera plus de jeunes, multipliera les partenariats professionnels, utilisera de nouvelles techniques, développera l’aspect international (avec le Québec, la France, le Burkina Faso…). Depuis lors, le projet se maintient, pour le plus grand bonheur des participants, avec des hauts et des bas.

En 2010, de nouveaux partenaires s’associent pour redonner du souffle au projet et repartir sur des bases solides. C’est ici qu’entrent en jeu For’J, Latitude Jeunes et Action Ciné Média Jeunes.

Durant une semaine, 25 jeunes évoluent sur le site des Francofolies de Spa avec pour mission d’endosser le rôle de reporter. La tâche ne leur fait pas peur et l’équipe se fixe des défis un peu fous :

sortir un magazine par jour (le Fanzine, ▪que les jeunes distribueront tous les soirs à 2500 exemplaires) ;réaliser un reportage vidéo et des ▪capsules quotidiennes ; réaliser des capsules radios ; ▪assurer une mise en ligne quotidienne ▪sur le site www.fanzine-mj.be.

Bien plus que les objectifs matériels, le projet a pour but de permettre à des jeunes venus de tout horizon de s’exprimer et de se former en passant à la pratique en un temps record. Si certains se destinent aux métiers de la communication, de l’art ou du reportage, d’autres sont là par curiosité, d’abord intéressés par cette aventure humaine, mais aussi bien vite mordus par le challenge à relever.

Munis d’un pass leur donnant accès au Village Francofou et d’un contact de luxe dans les backstage, l’équipe est partout, à l’affût de la moindre info croustillante. Les journées commencent tôt, finissent tard mais ce timing n’arrête personne. Les jeunes interviewent, écrivent, filment, photographient… Leurs encadrants relisent, mettent en page, encouragent. Puis les reporters en herbe découvrent en souriant l’édition du jour, la plient, partent la distribuer, reviennent en chercher d’autres…

Du talent, de l’enthousiasme, de l’énergie, de la coopération, une bonne préparation : le tour est joué et les objectifs atteints. On a même pu voir des festivaliers venir dans la tente des jeunes reporters pour l’heure où le Fanzine arrivait !

Belle occasion pour For’J et Latitude Jeunes de confirmer leurs capacités de gestion de projets en éducation aux médias. Et surtout, belle réussite pour ces jeunes qui repartent chez eux avec des rêves d’avenir plein la tête et des étoiles plein les yeux.

Retrouvez une partie des articles, les photos, les vidéos, les capsules radio sur www.fanzine-mj.be.

Si ce type de projet vous intéresse, vous pouvez rejoindre le projet Latitude Jeunes Reporters : [email protected] ou 02 515 17 82.

Sans tout à fait quitter le sujet, retrouvez le « Manuel de survie en festival », de Latitude Jeunes sur www.ifeelgood.be.

« Tous aux francos, Fanzine2010 », un projet mené par :

le Centre de Jeunes de Jupille ; –la Maison des Jeunes Le Goéland (sur facebook) –

Avec l’étroite collaboration de :

For’j - – www.forj.beLatitude Jeunes - – www.ifeelgood.beACMJ - – www.acmj.be

Caroline HuartLatitude Jeunes

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Quand et comment as-tu commencé à t’intéresser à la politique ?

Lors des repas de famille, nous discutions évidemment beaucoup de politique. Mais c'est au début de mes études de médecine que j'ai vraiment mis les pieds dedans. C'était le temps de la mobilisation contre le numerus clausus et j'ai été très sensible au problème du libre accès à l'enseignement supérieur. J'ai participé à plusieurs mobilisations, notamment contre la « privatisation » du restaurant universitaire et en faveur des sans-papiers. J'ai alors été élue au conseil d'administration de l'ULB par les étudiants en médecine, puis été envoyée à la Fédération des Étudiants Francophones (FEF) où j'ai appris à connaître bien d'autres dossiers. Par la suite, quand je suis devenue médecin généraliste, j'ai pu mieux approcher la réalité sociale vécue par les différentes classes sociales. Cela m'a donné l'envie de m'engager pour ceux qui en ont besoin et de commencer mon investissement au Parti Socialiste.

Quelles sont tes matières de prédilection ?

La santé et le social suscitent un intérêt particulier chez moi, notamment du fait de mon travail. Je suis également très sensible à la question des discriminations.

Quel est l'apport spécifique d'un jeune député à une assemblée parlementaire ?

Un jeune député peut faire resurgir certains débats. Par sa présence, il peut aussi mieux faire connaître les réalités de certaines composantes de la population, et ainsi mieux refléter la pluralité de la société. Et puis, de manière générale, les jeunes ont une plus grande capacité d'indignation, davantage d'enthousiasme et de volonté de bouger. Autant de qualités qui ont parfois eu tendance à s'éroder chez les parlementaires plus âgés.

Les jeunes s'intéressent-ils beaucoup à la politique ?

Certains jeunes, issus de familles à haut capital socioculturel, disposent de plus de données pour s'y intéresser. Ils ont davantage les moyens de peser. Cela ne veut pas dire qu'ils ont plus de vision, mais qu'ils ont plus les moyens de défendre leurs intérêts, ceux des classes dont ils sont issus. Mobiliser les jeunes qui ont le plus de difficultés dans la vie n'est pas facile mais c'est un enjeu fondamental !

Comment vois-tu les contacts avec l'associatif jeune dans le cadre de l'exercice de ce mandat ?

C'est important de pouvoir être en phase avec les attentes du terrain, sans ça pas de travail parlementaire. J'aspire à travailler avec les acteurs légitimes comme ceux du secteur jeunesse. Si tu pouvais me transmettre tes contacts à ce niveau, je serais intéressée !

Entretien réalisé par Carlos Crespo08.2010

Entretien avec Catherine Moureaux, députée régionale bruxelloise

Entretien avec Ozlem Ozen, députée fédérale

Quand et comment as-tu commencé à t’intéresser à la politique ?

Quand j'étais adolescente, nous avions beaucoup de discussions sur la politique et plus précisément sur les valeurs. J'ai trouvé rapidement que le parti qui correspondait le plus à mes valeur était le PS. J'ai été à ma première réunion politique à l'âge de 17 ans. Ensuite, lors de mes études de droit, j'ai étudié les institutions belges. J'ai été candidate lors des communales de 2006, sans ambitions politiques, juste pour collaborer à l'action de ma section. Le scrutin s'est très bien passé puisque j'ai été élue conseillère communale puis désignée comme échevine de ma commune d'Aiseau-Presle ! Les élections législatives de 2010 étaient en fait le deuxième scrutin auquel j'ai participé. Entre-temps, je me suis de plus en plus impliquée notamment en devenant vice-présidente de la fédération socialiste de Charleroi.

Quelles sont tes matières de prédilection ?

Je m'intéresse beaucoup à tout ce qui concerne la Justice. L'accès pour tous à la Justice mais aussi le système pénitentiaire et les conditions de vie des détenus en milieu carcéral. Je suis également très intéressée par les domaines de l'emploi et la lutte contre les discriminations.

Quel est l'apport spécifique d'un jeune député à une assemblée parlementaire ?

En tant que jeunes, nous sommes porteurs d’énormément d'enthousiasme et d'idéaux. En ce qui me concerne, je pense pouvoir combiner les qualités liées à mon âge (31 ans), avec un certain pragmatisme dû à l'expérience que j'ai acquise grâce à mon échevinat.

Les jeunes s'intéressent-ils beaucoup à la politique ?

Il y a sans doute un certain manque d'intérêt de la part des jeunes vis-à-vis de la politique. Peut être est-ce en raison de la complexité institutionnelle ou du nombre trop important d'élections successives en Belgique ? Il y a aussi le fait que les jeunes aiment parfois être un peu « rebelles » et disent plus facilement qu'ils « s'en foutent ». Par contre, je trouve généralement que les jeunes sont moins fermés que les gens plus âgés lorsqu'on leur parle politique.

Comment vois-tu les contacts avec l'associatif jeune dans le cadre de l'exercice de ce mandat ?

Je suis toujours membre du MJS, que j'ai déjà eu l'occasion de représenter à un congrès Ecosy. Dans le cadre de mon mandat de parlementaire fédérale, j'espère pouvoir renforcer mes liens avec diverses associations de jeunes. Je souhaite être, autant que possible, un relais pour leurs préoccupations ainsi que pour celles d'autres acteurs associatifs.

Entretien réalisé par Carlos Crespo08.2010

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Suite à la survenance de certains faits divers malheureux et surtout à la volonté de la majorité présidentielle d'y réagir, le sécuritaire est revenu à la une de l'actualité politique en France. La teneur que prend le débat ne va pas sans susciter un certain malaise voire une franche indignation. L’opposition ainsi que certains acteurs associatifs1 sont particulièrement critiques à l’égard des sorties médiatiques de Nicolas Sarkozy et de ses lieutenants.

Certes, il n'a échappé à aucun observateur averti de l'actualité politique française que la stratégie du Président Sarkozy et de son gouvernement a pour principale finalité d'occuper l'espace médiatique dans le domaine de la sécurité, afin d'éliminer toute mention à l'affaire Woerth aux « unes » des journaux. Mais n'est-il pas inquiétant de constater le recours systématique, par les élites politiques d'une nation, à une rhétorique populiste et à un propos stigmatisant pour certains groupes de personnes visées, directement ou indirectement, en raison de leurs origines ethniques et/ou de leur mode de vie ? N'est il pas choquant que l'article 1er de la Constitution française qui stipule que : « La République assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d'origine, de race ou de religion » soit, au moins dans l'esprit, bafoué par les dirigeants du pays ?

Le Président Sarkozy a donné le 30 juillet à Grenoble2, d'un ton assurément martial, le tempo de l'offensive populiste contre ceux à qui l'on souhaite faire endosser le costume de bouc émissaire, voire d'ennemi de la Nation, puisqu'il s'agit de partir en guerre « contre la délinquance ». Il est vrai que certaines formes de délinquance sont particulièrement violentes et il importe que les pouvoirs publics prennent des dispositions pour protéger la collectivité contre certains agissements délictueux, mais les responsables politiques doivent également aménager les conditions du vivre ensemble. Lorsque le Président de la République tient des propos belliqueux

1| Notamment la ligue des droits de l’homme, l’union des étudiants juifs de France, SOS racisme.

2| www.20minutes.fr/article/586867/Politique-A-Grenoble-Nicolas-Sarkozy-revient-au-tout-securitaire.php

La lente gangrène populiste de la République française

et promet la déchéance de la nationalité française à « toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un policier, d'un gendarme ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique », il entretient un amalgame douteux entre criminalité et immigration. Le reste de l'intervention présidentielle pourrait se résumer en un fatras de clichés éculés (les immigrés illégaux qui abusent de leurs « droits » (sic), la permissivité séculaire envers la délinquance) et de propositions à la légalité douteuse (engager la responsabilité pénale des parents de jeunes délinquants).

Cette saillie présidentielle n'était qu'une première étape. D'autres ténors de la majorité ont emprunté la voie de la surenchère, à l'instar du Ministre Brice Hortefeux, sarkozyste convaincu et raciste3 notoire, qui annonce4 le « démantèlement de camps illégaux de Roms », « l'expulsion immédiate de certains délinquants vers la Bulgarie ou la Roumanie » ainsi que… l'envoi de 10 inspecteurs du fisc ! Cette dernière disposition, qui pourrait sembler, de prime abord, incongrue, est justifiée de la manière suivante par le Ministre de l'intérieur : « Beaucoup de nos compatriotes sont à juste titre surpris en regardant la cylindrée de certains véhicules qui traînent les caravanes ». Si ce n'est pas propager la haine et l'ignorance envers certaines composantes de la société française, cela y ressemble tout de même un peu. Surtout lorsque l'on sait qu'un tiers des 40 000 tziganes de France a été exterminé sous l'occupation, par les nazis, avec la complicité du régime de Vichy. Outre, sur le sort peu enviable que le Gouvernement français entend réserver aux gens du voyage, Brice Hortefeux s'est étendu sur les modalités de déchéance de la nationalité française. La volonté est d'arriver à des propositions concrètes dès les prochaines semaines. Il n'a pas manqué d'invoquer une nouvelle fois la figure honnie de Liès Hebbadj, « nouveau français » soupçonné de polygamie, de violences sexuelles et de fraude sociale. Il faut dire que depuis que la compagne de cet individu s'est faite arrêté en conduisant avec une Niqab, il y a quelques mois5, le Ministre de l'intérieur s'est démené pour en faire l'archétype de l'« étranger » qui menace les valeurs françaises et rend inévitable l'adoption de mesures fortes pour protéger les fondements de la République.

3| Cet assertion n’est pas gratuite, Brice Hortefeux a été bel et bien condamné pour injure raciale : www.lalibre.be/actu/international/article/587184/hortefeux-condamne-pour-propos-racistes.html

4 | w w w . l e p o i n t . f r / s o c i e t e / l e - g o u v e r n e m e n t -a n n o n c e - d e s - d e m a n t e l e m e n t s - d e - c a m p s - e t - d e s -expulsions-28-07-2010-1219718_23.php

5| www.liberation.fr/societe/0101631758-elle-conduisait-avec-un-niqab-22-euros-d-amende

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Toutes proportions gardées, le visage de cet être odieux semble appelé à incarner, dans l'imagerie gouvernementale, ce que le « Juif Suss », autre « étranger, violeur et voleur », était à la propagande Goebbelsienne. Indubitablement, jeter en pâture à l'opinion publique le nom et le visage d'un individu, innocent jusqu'à preuve du contraire, mais « présumé coupable » par le Ministre6, en dépit des règles de l'état de droit, relève d'un procédé totalitaire.

Comme pour dissiper les doutes de ceux qui rechignaient encore à voir le lien savamment entretenu et pleinement assumé entre sécuritaire et immigration dans les projets gouvernementaux, le Ministre de l'Industrie Christian Estrosi a tenu des propos on ne peut plus clairs : « Voyous ou français, il faut choisir ! »

Il est probable que si des textes légaux sont déposés finalement par la majorité en vue de déchoir certains français de leur nationalité ou de pouvoir faire condamner des parents en raisons des faits délictueux de leurs enfants, le Conseil Constitutionnel juge les dispositions anticonstitutionnelles ou contraires aux conventions internationales (notamment celles sur les apatrides) et renvoie le Gouvernement à ses chères études. Mais le préjudice sera énorme, principalement pour certaines composantes de la population sur lesquelles on aura jeté l'opprobre par aveuglement idéologique ou par calcul politique. Mais aussi pour ceux qui restent attachés au dialogue interculturel et au vivre ensemble. L'Élysée n'est vraisemblablement pas dupe : les risques de voir les lois refusées par le Conseil Constitutionnel ont sans doute été mesurés.

Avec une certaine dose de cynisme, l'objectif est sans doute d'attiser puis d'exploiter politiquement les peurs des gens même si aucun changement législatif n'est apporté in fine. La stratégie de monter les français les uns contre les autres et, surtout, d'exacerber les divisions au sein des classes populaires peut s'avérer payante électoralement pour la droite en 2012 !

Il est à espérer que la gauche et le mouvement social français puissent, dans la lutte contre la politique de Nicolas Sarkozy, retrouver une certaine unité et un élan mobilisateur de nature à apporter un changement bénéfique dans un pays autrefois à l'avant-garde dans la défense des droits humains. À ce stade, la gangrène populiste de la République française n'est pas irréversible mais il est plus que temps d'entendre

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à nouveau la France parler le langage que nous avons appris à aimer d'elle !

Carlos Crespo08.2010

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