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Spinliner par Cayen Wynch À découvrir davantage sur Kindle et SmartPhone avec lapplication Spinliner.

Roman Spinliner - Incipit

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Un roman d'affaires et d'aventures ! Assistante et petite voleuse, Lisa termine les préparatifs pour escroquer son patron. Ce dernier, l'ambitieux Roy Spinliner, ne se doute de rien, lui-même trop occupé à tenter un coup sur un chantier à l'autre bout du monde. Des cafés parisiens aux bidonvilles d’Amérique latine, cette fiction poétique et haletante mêle affaires et aventures. Incipit disponible gratuitement ici sur ISSUU.

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Au lecteur critique ou imposteur, Pourvu qu’il soit l’écrivain de sa vie.

Incipit gratuit

Une aventure en format numérique à retrouver comme application sur Smartphones Android et Apple. Par Cayen Wynch et B.Art Development

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Chapitre 1: Point Final Les rideaux aux fils de soie ondulent sous l’effet de la brise. Les portes-fenêtres entrouvertes laissent pénétrer les rayons de soleil et le bourdonnement sourd des rues de Paris. La moquette claire et épaisse s’enfonce sous la pointe des pieds nus d’une jeune femme. Sa silhouette élancée traverse la pièce. Elle tient dans une main un petit cahier et dans l’autre un verre de vin. Avec une élégance d’un autre temps, Jessica s’assoie face à son bureau, attrape un stylo plume et ouvre le cahier neuf. Un sourire discret s’esquisse sur son visage. Elle trace une ligne soignée qui se dévoile dans une longue continuité courbe. Le trait s’enroule sur lui-même et tarde à se terminer. La spirale est le motif de son inspiration. Jessica n’a jamais eu peur de la feuille blanche : sitôt qu’elle touche un nouveau cahier, les mots viennent. Le format, la texture de la couverture et le grain du papier sont autant de clés qui ouvrent les portes de la composition. Assise avec un maintien qu’elle travaillait autrefois, Jessica écrit la manière dont ce petit cahier lui est venu entre les mains. Elle décrit la libraire, son amie, qui lui remet l’objet avec un sourire complice. Sa plume file, les lettres noircissent le papier. Soudain, le bruit de l’ascenseur qui s’ouvre sur le palier la fait frissonner. Jessica retient son souffle et tend l’oreille. « Est-ce Roy qui rentre ? » se demande-t-elle. Le son des portes d’ascenseur qui se referment n’est pas suivi du cliquetis dans la serrure. Jessica souffle en laissant ses épaules tomber sensiblement. Elle prend une gorgée de vin et, comme une danseuse faisant un assouplissement, elle s’étire. Lorsque sa respiration est calme, elle se replonge dans son texte. En effet, elle a renoncé depuis longtemps à vivre le monde réel et se réfugie dans d’autres univers. Les caractères sur le papier proposent une vérité à laquelle il lui semble plus simple de se raccrocher, qu’il s’agisse de partitions de musique ou de livres. Du matin au soir, elle oscille dans son appartement, s’asseyant tantôt devant le piano, le bureau ou sur le divan, dans une routine douce et monotone qui lui permet de vivre pleinement ses rêveries. Pourquoi s’évertuer à s’enfuir ? Que souhaite-t-elle en réalité ? Ses désirs sont flous ; elle ne sait plus… Et ça lui est bien égal, car elle est ailleurs. Après tout, l’imagination est une vérité comme les autres. Le bruit de l’ascenseur la fait de nouveau tressaillir. Elle retient son souffle, sa plume est en suspens. Toujours rien. Elle regarde l’heure : il est trop tôt, Roy n’est pas près d’arriver. Soulagée, elle termine son verre de vin d’une traite. Puis elle jette un œil sur son cahier ; son cœur s’emballe, son souffle devient court. Elle constate avec effroi que les mots sont collés les uns aux autres

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sans espace ni ponctuation. Ce qu’elle pensait être un texte n’est en fait qu’un immense gribouillis où l’encre est si dense qu’elle étouffe le papier. Mais qu’a-t-elle écrit au juste ? Elle tourne les pages, l’angoisse monte. Son visage se crispe, ses lèvres se pincent. Les mots se succèdent dans un désordre manifeste. Parfois, ils se délitent, scindés par des espaces inappropriés, clairsemés sur une page blanche sans aucune cohérence ni structure. D’autre fois, ils n’apparaissent même plus tant ils sont cachés par une succession interminable de lettres qui s’emmêlent et se bousculent. Pire qu’un charabia, son texte est l’assortiment illisible et difforme de masses d’encre et de vides. Son refuge imaginaire s’écroule. Déroutée, Jessica attrape avec vigueur le cahier sur le bureau. Son mouvement est si ample et maladroit, que sa main heurte le verre à vin. Celui-ci tombe de la table, rebondit sur la moquette et roule sur quelques tours. Pendant ce temps, la jeune femme s’est levée et s’élance pour quitter la pièce. Elle se déplace avec précipitation et, aveuglée par la panique, elle marche sur le verre qui se brise sous son poids. Le tintement de l’objet qui part en éclats est assourdi par la chair de ses pieds nus. La douleur ne fait que renforcer sa fureur. Folle de rage, elle entre dans la cuisine, attrape un briquet et, au-dessus de l’évier, elle met le feu à son cahier. Les doigts de sa main levée, s’ouvrent. Les pages s’embrasent et tombent. De grandes flammes s’élèvent bientôt du bac devant elle. La lumière du feu qui vacille sur son visage souligne ce que les traits de maquillage ne peuvent plus cacher. Ses cernes noirs ressortent, ses rides naissantes laissent des ombres autour de ses lèvres et de ses mains madrées de taches. Bientôt, les flammes s’amenuisent, laissant le carbone recroquevillé seul témoin de son histoire du jour. Jessica quitte la cuisine et traverse la pièce principale. Ses pieds meurtris laissent quelques taches de sang sur la moquette claire. Jessica passe les portes-fenêtres, s’accoude contre la rambarde du balcon, face aux grands boulevards. Elle enfouit sa tête entre ses mains. Après avoir fui le monde réel, voilà que son monde fictif s’effrite à son tour. Comme toujours, apeurée par le changement, Jessica ne parvient pas à cerner ce qu’elle veut. Elle sait d’où elle vient, mais ignore où elle va. Elle n’est pas intimidée par la page blanche, mais elle est terrorisée par l’idée même d’un point final.

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Chapitre 2: Dans la boue La lumière pâle du matin effleure les paysages vallonnés et traverse le voile de la brume amoncelée entre les collines. La nature et la jungle brésilienne renvoient une puissante odeur terreuse et âcre, comme si le sol gorgé d’eau transpirait après la pluie. Seul au sommet de la colline, Oscar s’accroupit. Il attrape une poignée de terre rouge et la pétrit dans ses mains calleuses. Les manches roulées de son habit de chantier laissent apparaître ses bras musclés. Ses yeux, deux fentes au milieu d’un visage buriné par le soleil, se posent sur le site de construction de BTPX qui s’étend en contrebas. Commencé depuis plus d’un an, c’est « son » chantier, c’est sa vie. Sur un sol nettoyé et dans une organisation presque militaire, le site est dominé par ses 5 piliers immenses et autant de grues dressés au-dessus de la rivière. Tous les végétaux ont été rasés laissant un terrain vierge où des camions évoluent dans un ballet parfaitement synchronisé. D’un côté, à l’Ouest du chantier, les bidonvilles s’étendent à perte de vue dans un enchevêtrement de toits rouillés, d’antennes télévision en épi et de bâches en plastique. De l’autre côté, commence la canopée de la jungle où d’immenses arbres peuplés d’orchidées et entrelacés de lianes se hissent vers le ciel dans un camaïeu tentaculaire aux infinies nuances de verts. Dans ce panorama à l’apparence dense et chaotique, le chantier s’impose comme une parenthèse scalpée de terre nue. Cependant, ce n’est ni le village, ni la forêt, ni le chantier qu’Oscar observe, mais la route qui les relie où des secouristes finissent de banaliser le secteur. Le petit glissement de terrain advenu tôt ce matin aurait été anodin, s’il n’avait pas emporté la voiture d’Arthur, le directeur de la filiale sud-américaine de BTPX. Oscar, n’ayant pas le droit de s'approcher, se contente d’observer de son promontoire et écoute avec attention les éclats de voix qui remontent le long de la colline. Même s’il n’est pas du genre à souhaiter du mal aux gens, il ne peut s’empêcher de penser qu’une indisponibilité temporaire d’Arthur pourrait être bénéfique au chantier. Toujours accroupi, la brise chaude faisant vibrer ses cheveux dorés par le soleil sur sa peau brunie, il songe : « Est-ce possible qu’un si petit volume de terre ait emporté la voiture ? » Les secouristes tentent maintenant d’accéder à la voiture pour en extraire les passagers ; probablement Arthur et son chauffeur, sans qui le directeur ne se déplace jamais. Ils s’affairent à mettre un corps sur un brancard, ayant de toute évidence beaucoup de mal sur le sol glissant. Ils se déplacent avec difficulté vers l’ambulance et ne remarquent pas qu’un ouvrier s’approche. Ce dernier, d’un pas sûr d’homme de terrain, les rejoins en quelques bonds et attrape le brancard, pour prêter main forte. Cela provoque un affolement général. Laissant les autres en déséquilibre, un secouriste lâche le tout. Il s’interpose en faisant de grands gestes et oblige le nouvel arrivé à quitter les lieux. Oscar malaxe toujours la terre grasse entre ses doigts et songe : « Des sauveteurs qui ne veulent pas d’aide : c’est étrange… Seule la terre ne ment jamais. »

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L’ouvrier sort de la zone sécurisée, tandis que le brancard est enfourné dans l’ambulance tout terrain. En un clin d’œil, tout le monde s’engouffre à l’intérieur et le véhicule se met en mouvement, avançant laborieusement sur la terre encore meuble. Oscar entend le claquement des portières qui lui arrive avec un peu de retard, du fait de la distance. Ce bruit lointain et suivit par un autre beaucoup plus proche : un moteur diesel pétarade dans son dos. D’un bond alerte, le contremaître se relève et voit une camionnette aux couleurs de BTPX qui s’approche à une allure élevée. Elle s’arrête en dérapant dans la boue et le chauffeur tout essoufflé crie : « Léo est tombé dans le pilier N°5 en coulant le béton… - Il y a combien de temps ? demande Oscar en train de bondir. - Moins de 5 minutes, répond l’ouvrier. - Il est peut-être encore vivant. On y va ! » Les chaussures de sécurité d’Oscar s'enfoncent dans le sol rouge et gras quand il prend l’élan et saute à l’intérieur de la camionnette. Il atterri sur le siège, attrape le talkie-walkie sur le tableau de bord et dit : « Ici, Oscar. À toutes les équipes : alerte au pilier N°5. Un homme est tombé dans le pilier. Je veux Pepi tout de suite sur place. Je répète, Alerte au pilier N°5. Demande Pepi sur place. » La camionnette démarre en trombe. Brinqueballé sur son siège, Oscar a oublié l’ambulance et les mystères qu’elle emporte. Il réfléchit à la conduite à tenir : il n’a pas le droit à l’erreur.

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Chapitre 3: Les portes de Paris Un dernier clic et Lisa commande le service de chauffeur de son chef pour une course express : une opération qu’elle effectue quotidiennement. Elle relève la tête et contemple les immeubles qui rivalisent de grandeur dans le ciel de la Défense. L’après-midi touche à sa fin et les rayons du soleil inondent les locaux de BTPX. Dans son bureau face à la Skyline parisienne, Lisa a tout l’apparence, l’attitude et la qualité de travail d’une assistante sérieuse et dévouée. Qui pourrait imaginer que derrière cette employée-modèle se cache un tempérament à conquérir le monde ? Pour Lisa, en effet, la société se décline en deux catégories : les riches et les autres. N’ayant pas la chance de faire partie de la première, elle est bien décidée à s’y introduire sans complexe ; par exemple en détournant le service de taxi de son patron. Prête pour cette nouvelle expédition secrète, elle prend ses affaires et quitte son poste. Son ombre élancée, étirée par le prisme de la lumière rasante, ondule au rythme du claquement de ses talons. Elle frappe à la porte vitrée de son chef et fait signe qu’elle s’en va. Roy Spinliner est concentré au téléphone, il ne lui prête pas attention. L’a-t-il seulement entendue ? « C'est le moment parfait ! » pense-t-elle avant de filer vers l’ascenseur central en étouffant le plus possible le bruit de ses pas. En bas de la tour, le hall est désert et une impressionnante voiture noire aux vitres teintées attend de l’autre côté des portes de verre. Lisa jette un petit un coup d’œil en arrière en sortant pour vérifier que personne ne l’a remarquée. L’entrée du bâtiment est déserte : tout se présente bien. Le chauffeur remarque le signe de tête que lui fait la jeune femme et sort pour lui ouvrir la portière. Elle s’installe à l’intérieur avec le calme et l’aisance de quelqu’un qui a toujours eu du personnel à sa disposition. Elle s’adresse à lui d’une voix assurée : « La réservation de Roy Spinliner. Nous attendons quelqu’un. Merci. ». Sa voix est chaude et un peu rauque ; un timbre particulier aux fumeurs de longue date. Lisa attend sa complice, une autre assistante, qui comme toujours, sera en retard. Avec ses maladresses, Maggy n’est pas la partenaire idéale pour ce type d’expéditions clandestines, mais elle demeure indispensable, comme alibi au cas où les choses tourneraient mal. Quelques minutes passent. Protégée des regards par les vitres teintées de la berline, Lisa s’étend sur la banquette et savoure le contact du cuir : le luxe lui plaît. Le tour est presque joué. Il ne lui reste plus qu’à se façonner un personnage pour ce soir, elle se délecte de pouvoir modeler sa vie de mensonges. Maggy arrive enfin. Elle ouvre elle-même la portière et s’avachit sur le siège, en soufflant bruyamment. La voiture se met en mouvement dans un ronronnement sourd ; la peinture métallisée de la carrosserie reflète l’image déformée des gratte-ciels des alentours. Les derniers rayons du soleil s’accrochent encore à l’arc de Triomphe lorsque la berline s’engage dans l’avenue qui mène tout droit à la destination prévue.

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« Désolée du retard… As-tu entendu ce qui est arrivé ? demande Maggy encore tout essoufflée. Arthur Grounant, le directeur de la filiale Amérique Latine a eu un accident ce matin… - Oui, je le sais. Roy s'en occupe » répond Lisa par automatisme, trop occupée à examiner les boutiques de l’avenue qualifiée de plus belle du Monde, devant lesquelles quelques enfants mendient. « Les Champs-Elysées » ! Lisa trouve l'endroit fascinant. C’est un carrefour de splendeur et de misère, où l'extrême richesse et la pauvreté se côtoient en faisant semblant de s’ignorer. Cette démesure en fait le paradis des voleurs. Ils se fondent dans la foule, en haillons ou en costumes. Ils opèrent de chaque côté des vitrines ; car pour Lisa, les vendeurs des enseignes sont des escrocs comme les autres. Ils sont aussi malhonnêtes dans leurs magasins aux prix indécents que les pickpockets dans la rue. Tel est l’état d’esprit de la jeune femme lorsque la berline s’arrête devant l’entrée du Club où une file, composée de bourgeois et de VIP en tenue de soirée, s’est déjà formée. Le chauffeur ouvre les portières. Sa livrée attire aussi bien l’attention des badauds que des employés du club qui se précipitent pour assister ces clientes de haut standing. Lisa est une habituée de cette mise en scène. Elle attend quelques instants, puis sort dans un élégant jeu de jambes. Sans prêter attention à Maggy, elle s’avance vers l’entrée avec le chic d’un mannequin sur le podium. Suivant le code de conduite de la Jet Set, quand elle passe l’entrée, elle méprise certaines personnes et en salue d’autres. Il lui suffit ensuite de quelques mots au concierge pour qu’elles soient invitées à l’intérieur, cela évite une longue attente et, avant-tout, le passage à la caisse. « Que le monde est dicté par les apparences ! pense Lisa bien décidée à en tirer parti. Il suffit d’arriver dans une belle voiture et les portes de Paris s’ouvrent à vous. »

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Chapitre 4: Sept de carreau Dans son bureau de verre, l’homme d’affaires réfléchit en se mordant imperceptiblement la lèvre. Sa main posée sur l’accoudoir tient une carte à jouer qui tourne habilement entre ses doigts. Son visage de cire est strié par de petites rides et sur son front tombe une mèche d’un profond brun clairsemée de cheveux gris. Les yeux noirs de Roy Spinliner ne cillent pas quand il apprend la nouvelle : Arthur Grounant est décédé et les directeurs de l’entreprise l’attendent dans une demi-heure. Il raccroche le téléphone sans frémir et, en bon stratège, couche sur le papier tous les scénarios possibles. Il n’oublie aucun détail, aucun acteur dans le jeu complexe d’influence. De près ou de loin, Roy ne laisse rien au hasard. C’est le moment de mettre à profit ce que ce « Sept de carreau » lui a appris. C’était il y a une dizaine d’années, dans la salle d’une « Business School » réputée de New-York. « Prenez connaissance de votre jeu » demandait le professeur après avoir distribué des cartes à jouer à toute la classe « et que ceux qui veulent jouer lèvent la main ».

Chacun retournait ses cartes. Roy regardait les siennes : un deux de trèfle, un trois de pique et un sept de carreau. C’était une mauvaise main, quel que soit le jeu en question. Il fit néanmoins signe qu’il souhaitait participer. « Mais de quel jeu parle-t-on ? » demandait une élève. - C’est moi qui pose les questions ici Mademoiselle Léa. Et je vous demande juste si vous voulez jouer. » La jeune fille se renfonçait dans sa chaise, vexée, en croisant les bras. Dans la classe aucune autre main ne se levait. Le professeur, après avoir compté, inscrit au tableau « 1/3 ». « Seulement un tiers d’entre vous se prête au jeu, dit-il en se retournant vers la classe. Je m’adresse aux deux autres tiers. Ceux qui ne veulent pas jouer, pouvez-vous me dire pourquoi ? » Certains se justifièrent en lançant des explications à la volée, que l’enseignant nota consciencieusement au tableau : « Mes cartes ne sont pas assez bonnes. - Je ne suis pas joueur. - Je ne sais pas de quel jeu il s’agit …» Le professeur reprit d’un ton autoritaire : « Très bien. Je vois qu’il n’y a pas beaucoup de joueurs parmi vous. D’ailleurs, que ceux qui ne sont pas intéressés du tout sortent ! Je ne vous retiens pas, vraiment. Vous pouvez partir, si vous avez mieux à faire ! » La moitié des étudiants se levaient et quittaient la salle. Le petit comité restant profitait de la leçon qui commençait enfin : « Mesdames, Messieurs, c’est ça le business. Je suis le patron, le leader, et vous, vous êtes les jeunes diplômés, mes concurrents en interne ou en externe. C’est moi qui distribue les cartes, c’est moi qui connais les règles le mieux. Pour arriver à mes fins, je sais convaincre et dissuader. »

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Roy buvait les paroles et retint au mot près de la tirade qui suivit : « Alors voilà, vous êtes nouveaux, vous arrivez les mains dans les poches et que je suis le numéro un. Je suis le leader et je compte le rester, je vous donne donc ce que je veux bien vous donner. Je sécurise ma position et je garde les bonnes cartes pour moi. Même chose pour la règle du jeu ; je peux vous expliquer les grandes lignes, mais il vous manquera l’essentiel, c'est-à-dire les ficelles et les bonnes astuces. » Dans la salle presque vide, la voix autoritaire du professeur résonnait comme une messe : « Pour me battre, vous n’avez a priori ni le jeu, ni les compétences. Pourtant, chaque jour de nouveaux arrivants réussissent à détrôner les leaders… Alors comment font-ils ? » Les quelques étudiants présents avaient lâché cahiers, stylos et cartes et demeuraient stupéfaits. Le professeur conclut la leçon peu académique : « Comment font-ils ? C’est une question à plusieurs millions de dollars. En tout cas une chose est certaine, c’est qu’il vous faudra tourner la situation à votre avantage quels que soient les éléments dont vous disposez. En un mot, c’est à vous de changer la donne et de décider quelles règles vous édictez, tout en entrant dans la partie des autres. . . » À la fin de ce cours magistral, le professeur vint à la rencontre de Roy, l’un des élèves les plus attentifs, et lui demanda : « Pouvez-vous me montrer vos cartes Spinliner ? » Roy lui présenta ces trois cartes et le professeur lui dit : « De mauvaises cartes, c’est bien ce que je pensais. Gardez-en une ! Tenez, prenez celle-là et souvenez-vous toujours que ce ne sont pas les cartes en main qui comptent, mais le jeu que vous allez jouer. » En attrapant la carte, le jeune homme avait eu l’impression qu’il venait d’apprendre ce qui serait la plus grande leçon de sa vie. Il glissa le sept de carreau dans sa poche et il se promit de ne jamais s’en séparer. Aujourd’hui, dans le bâtiment de verre, c’est le moment de jouer la bonne carte. Les directeurs de BTPX ont fait la donne et Roy ne connaît ni ses adversaires ni les règles du jeu, mais il est bien décidé à tourner la situation en sa faveur.

La suite de l’histoire disponible sur Kindle et Smartphones

Un concept illustré et moderne proposé par Cayen Wynch et B.Art Development – 2015.