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Quel rôle les femmes ont-elles joué pendant la Révolution Française ? Théroigne de Méricourt Thérésa Cabarrus Madame Rolland Olympe de Gouges Les femmes ont joué un rôle important mais méconnu pendant la Révolution. Elles se sont battues pour avoir des droits, être les égales des hommes. Olympe de Gouges s’est largement investie dans la Révolution, elle avait des idées novatrices. Elle a repris la déclaration des droits de l’homme et du citoyen en remplaçant hommes par femmes / citoyennes. Les femmes ont manifesté leur mécontentement de différentes manières : cahiers de doléances, manifestations, club. Il est fort dommage qu’elle n’est pas obtenue la parité économique, sociale, mais surtout politique (ni électrice, ni éligible). Avant la Révolution, les femmes sont d’éternelles mineures, passant de la tutelle d’un père à celle de leur mari ou en cas de décès d’un homme de la famille,

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Quel rôle les femmes ont-elles joué pendant la Révolution Française ?

Théroigne de Méricourt

Thérésa Cabarrus

Madame Rolland

Olympe de Gouges

Les femmes ont joué un rôle important mais méconnu pendant la Révolution. Elles se sont battues pour avoir des droits, être les égales des hommes. Olympe de Gouges s’est largement investie dans la Révolution, elle avait des idées novatrices. Elle a repris la déclaration des droits de l’homme et du citoyen en remplaçant hommes par femmes / citoyennes. Les femmes ont manifesté leur mécontentement de différentes manières : cahiers de doléances, manifestations, club. Il est fort dommage qu’elle n’est pas obtenue la parité économique, sociale, mais surtout politique (ni électrice, ni éligible).

Avant la Révolution, les femmes sont d’éternelles mineures, passant de la tutelle d’un père à celle de leur mari ou en cas de décès d’un homme de la famille,

La société occidentale du 18ème siècle est chrétienne. Les mentalités sont forgées sur des croyances anciennes, sur les femmes notamment. Au 18ème siècle, même si la société chrétienne européenne a quelque peu changé depuis le Moyen-Age, il est des mythes qui ont la vie dure. Ainsi le mythe de la femme créée non en même temps que l'homme, mais à partir de la côte de l'homme (erreur de traduction côté / côte) Sur ce mythe repose l'essentiel de l’attitude des hommes à l'égard des femmes : la femme doit tout à l'homme, elle lui est soumise... Sans oublier que la femme est à l’origine du malheur du genre humain avec le pêché originel : car, n'est-ce pas, Eve qui, dans la mythologie judéo-chrétienne, incita Adam à manger le fruit interdit, la pomme de la connaissance du bien et du mal ?

Femme faible de par sa constitution, femme tentatrice (créature du diable, sorcière), femme fatale, femme proche de l’animal avec ou sans âme (toujours moins élaboré que celle d’un homme), les femmes, depuis les temps anciens, sont cause de nombreux malheurs. A la veille de la Révolution française, les mentalités n'ont pas vraiment évolué...Nombreux sont ceux qui pensent qu’elles ne peuvent penser par elles mêmes.

En 1789, lors des débats sur les conditions de formation des assemblées primaires, la question du droit de vote des femmes ne fut même pas soulevée à l'Assemblée Constituante. Elles étaient naturellement évincées des droits civiques, sous le poids des préjugés sur la nature des femmes et de la perception de la frontière entre espace privé et public, l'ordre des rapports naturels et sociaux. Citoyenne oui en tant que femme de citoyen.

Les lieux communs sur la nature des femmes sont nombreux. Littérature, philosophie et médecine ont croisé leurs approches afin de " naturaliser " à l'extrême la féminité : " constitution délicate ", " tendresse excessive ", " raison limitée ", " nerfs fragiles « (Hystérie maladie mentale venant de l’utérus et donc ne pouvant toucher que les femmes)… L'accent est mis sur l'infériorité intellectuelle et physique de la femme. Diderot, dans son essai de 1772 Sur les Femmes, note que l'exaltation de la beauté féminine et la célébration du sentiment amoureux ne sont que l'envers de l'enfermement de la femme dans son infériorité physique (prise de conscience d’un homme de plus un philosophe).

Les femmes ne sont pas considérées comme de vrais individus pour les hommes de 1789. Elles doivent se contenter d'une activité domestique, extérieure à la société civile, et sont donc considérées comme des épouses, des mères et / des ménagères (selon le niveau de revenu), loin des fonctions sociales et politiques que certaines désirent. Cette identification de la femme à la communauté familiale dépouille la femme de son individualité. La femme est le principe spirituel (l'âme) du foyer, l'homme en est le principe juridique. Le cantonnement de la femme à la sphère privée s'accentue lorsque l'homme est reconnu dorénavant, avec la Révolution, comme un sujet autonome, participant directement à la souveraineté politique : un citoyen.

" En vérité, je suis bien ennuyée d'être une femme : il me fallait une autre

âme, ou un autre sexe, ou un autre siècle. Je devais naître femme spartiate

ou romaine, ou du moins homme français. [...] Mon esprit et mon coeur

trouvent de toute part les entraves de l'opinion, les fers des préjugés, et

toute ma force s'épuise à secouer vainement mes chaînes. O liberté, idole des

âmes fortes, aliment des vertus, tu n'es pour moi qu'un nom !"

Mémoires de Madame Roland - Jeanne-Marie ou Manon Philippon (1754-

1793).

Les partisan de l’égalité politique

Les partisans de l'égalité politique homme/femme ne sont pas nombreux pendant la Révolution. Leur but est de passer de la nature à la culture, à la société pour comprendre la femme et dénoncer comme de simples préjugés les descriptions traditionnelles de l'être féminin que véhiculent toujours l’Eglise.

Poulain de la Barre : De l'égalité des sexes / De l'éducation des dames / De l'excellence des hommes Dès le XVIIème siècle, François Poulain de la Barre écrit dans De l'égalité des deux sexes :

"Tout ce qui a été écrit par les hommes sur les femmes doit être suspect, car ils sont à la fois juge et partie."

« Nous sommes remplis de préjugés. […] De tous les préjugés, on n'en a point remarqué de plus propre que celui qu'on a communément sur l'inégalité des deux sexes ».

« L’esprit n'a pas de sexe",

Il se sert des ouvrages comme la Bible et les pères de l’Eglise qui ont servi et qui servent encore à dénigrer la femme, à la soumettre pour les détourner et défendre le second sexe voir même le sublimer.

Le marquis de Condorcet Avec le marquis de Condorcet, le mouvement féministe trouve dès 1787 son avocat le plus convaincant mais aussi le plus décevant car il s’arrêtera aux belles idées sans les concrétiser. Il ouvre une voie.

« Je crois que la loi ne devrait exclure les femmes d'aucune place. […] Songez qu'il s'agit des droits de la moitié du genre humain". (C’est toujours le cas !!!!)

Condorcet s’investit dans la cause de tous les opprimés (esclaves, juifs, protestants…) et notamment celle des femmes. En 1789, il trouve une spécialité, à la Convention, dans l'éducation.

D’après lui, l'inégalité des femmes se fonde sur le manque d'instruction dont elles sont victimes. Condorcet ouvre ainsi la voie aux féministes du XIXème qui centreront leur lutte sur l'accession des filles à l'instruction. Parallèlement à son combat pour l'instruction des femmes, Condorcet met l'accent sur leurs droits politiques . Les femmes doivent voter car aucune spécificité naturelle ne peut être une contre indication (telle une maladie). Tous les féministes de la période révolutionnaire développent le même argument.

Les femmes dans la révolution en 1789 Les militantes de 1789 sont surtout des femmes du peuple, du tiers-état: tricoteuses, marchandes de halles , pauvresses, révoltées contre la misère, les inégalités, l'insolence des deux ordres privilégiés. Elles n’ont pas conscience d'un combat pour leurs droits de femme, elles réclament du pain, une vie moins dure, des impôts plus justes. Seules quelques marginales, instruites, vite persécutées, donnent à leurs actes un dimension proprement féministe.

Parmi ces militantes, on peut se pencher plus longuement sur une personnage que nous connaissons mieux, Marie Gouze, dite Marie-Olympe de Gouges, née en 1748 et guillotinée à Paris le 3 novembre 1793 à 45 ans. C’est une femme de lettres française, devenue femme politique et polémiste. Auteure de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, elle a rédigé de nombreux écrits pour les droits civils et politiques des femmes et l’abolition de l’esclavage des Noirs. Elle est devenue le symbole des mouvements pour la liberté des femmes, pour l’humanisme en général. Fille d’un boucher, elle fut en quelques sortes une autodidacte toute sa vie (apprenant auprès de la gente masculine qu’elle fréquentera à Paris) Marie Gouze fut mariée entre 16 et 18 ans , puis eut un fils. Après le décès très précoce de son mari, elle prend conscience de la prison que représente le mariage et refusera toute nouvelle union officielle. A une époque où la femme n’existe qu’en tant qu’épouse et mère. Par ce refus, elle se marginalise, mais ne renoncera jamais à l’amour, Dans le même esprit, elle qualifie le mariage religieux de « tombeau de la confiance et de l’amour » Elle rejoignit sa sœur aînée à Paris. Au début de 1770, elle était à Paris avec son fils à qui elle fit donner une éducation soignée. A Paris elle rencontra un haut fonctionnaire de la marine, Jacques Biétrix de Rozières, directeur d’une puissante compagnie de transports militaires. Grâce au soutien financier de son compagnon, elle put mener un train de vie bourgeois. Grâce à sa bonne éducation et s'adapta aisément à l'élite parisienne. Dans les salons qu’elle fréquentait, elle fit la rencontre d’ hommes de lettres, et elle s'essaya l'écriture. Elle aurait été la fille naturelle de Le Franc de Pompignan, dramaturge. Elle revendiquait l’héritage de son talent, mais ne partageait pas les idées de cet adversaire de Voltaire et des philosophes.

Née en 1762 près de Liège, de parents laboureurs, Anne Josèphe Terwagne dite Théroigne de Méricourt, mène une vie de mondaine qui la conduit d’Angleterre en Italie. Arrivée à Paris en juin 1789, elle est rapidement gagnée aux idées de la Révolution et s’y installe pour suivre les travaux de l’Assemblée, où elle fait son éducation politique, Elle tient, le soir venu, un salon, réservé aux hommes politiques. Vêtue en amazone (voir article diapo suivante) pour se donner une allure masculine, Théroigne devient une figure très populaire des tribunes publiques, qu’elle fréquente ardemment, Elle fonde en janvier 1790, le club des Amis de la Loi. Mais, trop élitiste, ce club, qui avait pour objectif de tenir le peuple informé des travaux de l’Assemblée, n’eut qu’une existence éphémère, et Théroigne tentera sans succès d’en fonder un autre, celui des Droits de l’homme. Pendant ce temps, les journaux royalistes mènent une campagne de dénigrement contre elle, l’accusant à tort d’avoir participé aux journées d’octobre. Un mandat d’arrêt est délivré contre elle en août 1790, alors qu’elle est rentrée en Belgique. Là, elle est soupçonnée de vouloir soulever la population contre l’empereur autrichien et donc de répandre les idées de la révolution française. A son retour à Paris en janvier 1792, elle est accueillie triomphalement. Elle s’engage vivement en faveur de la guerre, réclame la chute de la royauté et prend une part active aux manifestations révolutionnaires, comme lors de l’assaut des Tuileries le 10 août 1792 qui consacre la déchéance du roi. En 1793, elle prend parti pour les Girondins aux côtés de Brissot. En tant que partisane, elle est publiquement dénudée et fessée le 15 mai par des « citoyennes républicaines révolutionnaires » jacobines et sauvée in extremis par Marat. Mais cette humiliation, le sentiment que la révolution est ratée, elle tombe définitivement dans la folie (c’est pourquoi, elle n’est guillotinée comme Olympe de Gouges ou Mme Rolland). Elle sera internée dans un asile en 1795 où elle mourra à la Salpêtrière en 1817 sans avoir retrouvé la raison.

Son héritage : Théroigne de Méricourt est l’une des figures féminines les plus accomplies de l’époque. Elle réclamait le droit de voter à égalité des hommes et des femmes , de participer à la vie politique des clubs et assemblées, et celui de s’organiser en corps d’armée. Le but était de permettre aux femmes d’être des citoyennes à part entière et de sortir de la condition dans laquelle l’histoire des hommes les a enfermées. Mais, ce féminisme remettait en cause la supériorité de l’homme sur la femme, sa fonstion essentielle à la survie de la société et contestait le rôle traditionnellement de la femme : épouse et mère. Citoyenne en tant que femme de citoyen. Tout cela rendit Théroigne de Méricourt suspecte aux yeux des révolutionnaires, Afin de museler les femmes comme elles, à l’automne 1793, toute activité politique féminine fut officiellement interdite, avec la fermeture des clubs de femmes. Ce changement d’attitude prouve que les révolutionnaires restent influencés par l’histoire et Rousseau où l’espace politique était réservé aux hommes, tandis que les femmes devaient s’occuper de leur foyer.

Miniature sur ivoire de Théroigne de Méricourt par : François Hippolyte

DESBUISSONS (1745-1807)

LES AMAZONES de la REVOLUTION Ces françaises libres que l ’on a appelé amazones en référence au peuple mythologique de femmes guerrières utilisant les hommes comme esclaves. Inquiétante, ridicule, l’image des femmes révolutionnaires armées de pique est en général mal vue. Femme masculinisée agressive ou guerrière factice, trop virile pour les phallocrates (machos), trop patriote pour les féministes, L’amazone est souvent rangée parmi les figures typiques, amusantes de la révolution, Pourtant même si les femmes n’ont pas eu un rôle militaire, le patriotisme féminin qui s’exerce avec ferveur à partir de 1792 (la patrie en danger). C’est une mobilisation réelle et la volonté de participer, au côté des hommes, à la défense de la patrie et de la révolution menacées.

Le 6 mars 1792, Pauline Léon (qui sera par la suite à la tête des républicaines révolutionnaires) adresse à l’assemblée une pétition signée par 300 femmes réclamant le droit qu’a tout individu de pourvoir à la défense de sa vie et de sa liberté ». Cela signifiait : « 1. La permission de nous procurer des piques, des pistolets et des sabres, même des fusils pour celles qui en auraient la force de s’en servir, en nous soumettant au règlement de police ; 2. De nous assembler les jours de fêtes et les dimanches au champ de la fédération ou autres lieux convenables pour nous exercer à la manœuvre desdites armes. » Cette requête reste sans réponse.

Le 25 mars Théroigne de Méricourt appelle les citoyennes du faubourg St-Antoine à prendre les armes : « Armons-nous, nous en avons le droit par la nature et par la loi. Montrons aux hommes que nous ne leur sommes inférieures ni en vertu, ni en courage. […]brisons nos fers ; il est temps que les femmes sortent de leur honteuse nullité ou l’ignorance, l’orgueil ou l’injustice des hommes les tiennent asservies depuis si longtemps ». Son discours va sans doute trop loin pour l’époque. Elle n’arrivera pas à recruter son bataillon.

Cette fureur patriote n’est pas réservée à une élite car « les lettres bougrement patriotiques de la mère Duchesne reflètent le même sentiment : « J’offre mes services à la nation en qualité de guerrière. Du premier cours de tambour, je prends les armes, je lève un escadron d’amazones, je me mets à leur tête, et le sabre à la main, j’enfonce les bataillons ennemis comme du beurre »

De ce fait, après le 20 avril 1792, début de la guerre, des femmes s’enrôlent individuellement, sans discours et tambours. Elles partent se battre. Elles sont canonniers, grenadiers, soldats, plus rarement officiers. C’est le cas des sœurs Fernig, Nerwinde. D’autres se déguisent en hommes pour s’enrôler, accompagnant parfois maris ou amis comme Rose Bouillon qui laissa au soin de sa mère ses deux enfants et rejoignit son époux comme volontaire.

Extraits du livre « Citoyennes : les femmes et la révolution française » de Annette Rosa aux éditions Messidor en 1989

Juana Maria Ignazia Thérésa Cabarrus Surnom : Notre-Dame de Bon Secours, puis Notre-Dame de

Thermidor, mais aussi Notre-Dame de septembre

Thérèsa Cabarrus, connue aussi sous le nom de son second époux Madame Tallien, née le 31 juillet 1773, dans un palais, près de Madrid, et morte le 15 janvier 1835. Elle a tenue de nombreux salons. De par ses idées et ses actes, elle a été une personnalité de la Révolution française.

Partisane active des idées nouvelles, notamment la liberté d’expression permettant de débattre dans les salons, les tribunes politiques. Elle doit se réfugier à Bordeaux dans la famille de son père et parmi ses amis Girondins. Comme eux, elle est arrêtée, mais est libérée par Tallien (qui tombe amoureux d’elle). Grâce à son nouveau statut de compagne de Jean-Lambert Tallien, elle aide des centaines de prisonniers à échapper à la guillotine, protège des suspects (en pleine période de terreur contre Robespierre), d’où son surnom de « Notre-Dame de Bon Secours ».

À nouveau emprisonnée, elle est en partie à l’origine du 9 Thermidor an II (27 juillet 1794). Son amant, Jean-Lambert Tallien, parce qu'elle lui écrit qu'elle est condamnée, se décide à participer au coup d'État qui mettra fin à la Terreur en provoquant la chute de Robespierre. D’où son surnom de « Notre-Dame de Thermidor ». Elle se marie avec Tallien en 1794.

Femme d'esprit, amie de nombres artistes elle tient un salon et devient une des reines des Merveilleuses et du Directoire, avec Joséphine de Beauharnais, future impératrice, épouse de Napoléon Ier.

MADAME ROLAND — Jeanne-Marie ou Manon Philippon, Madame Roland (1754-1793). elle s’enflamma pour les idées nouvelles de la révolution et devint la première femme chef de parti celui des Girondins. Historienne et écrivain(e), elle avait avec son mari, Roland de la Platière (1734-1793), un même amour de la littérature et de la philosophie.

Égérie du parti Girondin, son salon attirait, vers 1791, de nombreux hommes politiques d'extrême gauche comme Jacques-Pierre Brissot, Georges Danton, Fabre d'Églantine, Maximilien Robespierre, Camille Desmoulins, marquis de Condorcet et François Nicolas Buzot, son admirateur éperdu d’amour.

Manon décide, au début de la révolution, de faire un salon qui devient le rendez-vous de nombreux hommes politiques influents. Elle se retrouve de ce fait au centre des inspirations politiques et préside un groupe d’hommes de progrès. Grâce à ses relations au sein du parti girondin, Mr Roland devient ministre de l’Intérieur début 1792. Manon suit son mari et va participer à ses décisions, Malgré la passion qui la lie à Nicolas Buzot, Manon reste fidèle à Roland, ce « vénérable vieillard » qu’elle « aime comme un père ». Aux côtés de son mari, elle joue, au ministère de l’Intérieur, un rôle essentiel, rédigeant notamment la lettre dans laquelle Roland demande au roi de revenir sur son veto (Louis XVI met son veto, a la déportation des prêtres réfractaires, et a la constitution d'un camp de volontaires aux portes de Paris, on surnommera Louis XVI Monsieur veto, il sera obligé de les retirés mais se sera une des causes de sa chute), lettre qui provoque son renvoi le 13 juin 1792, Lorsque son mari retrouve son portefeuille après le 10 août (prise des Tuileries), Manon dirige plus que jamais ses bureaux. Après les massacres de Septembre (du 2 au 6, les révolutionnaires massacrent les nobles emprisonnés, La rumeur parle de leur complot avec le roi et l’Autriche contre la révolution) qui la révoltent sans agir. Mais sa haine augmente de jour en jour contre Danton, d’où ses attaques de plus en plus violentes par Buzot. Sachant d’où viennent ces attaques, Danton s’écrit : « Nous avons besoin de ministres qui voient par d’autres yeux que ceux de leur femme ». Manon est furieuse. Les Montagnards et donc Danton multiplient les attaques contre les Girondins et en particulier contre Mr Roland surnommé « Coco Roland », Manon devenant « Madame Coco » ou « la reine Coco ». Les girondins sont arrêtés en masse, son mari et Buzot fuient mais Manon se laisse arrêter, Elle est sereine.

Elle fut conduite à l'échafaud en compagnie de l'élite de son parti. La légende raconte que dans le chariot qui la mène à la guillotine, elle passe devant la statue de la liberté, installée là pour commémorer la prise des Tuileries, et elle dit « Ô Liberté, que de crimes on commet en ton nom ! » Prévenu, son époux ne put supporter une telle nouvelle et s'enleva la vie, sur le champ, Buzot l’apprit peu après et la rejoint dans l’autre monde.

Madame Rolland coiffée du bonnet girondin

REVENDICATIONS ET MOYEN D’EXPRESSION Les femmes ont de nombreuses attentes de la Révolution et expriment leurs revendications par des pétitions, adresses et cahiers de doléances. Leurs revendications portent sur des problèmes quotidiens, propres à toutes les femmes, depuis la nuit des temps : absence d'instruction, mortalité en couches, droit d'exercer un métier, protection des travaux féminins (couturière, brodeuse…) Peu de revendications touchent aux droits politiques car rares sont celles qui ont conscience de leur importance. Les femmes de Provence protestent en 1789 contre la composition des Etats Généraux dont elles sont exclues. Réponse des députés : « ne sont-ils pas, eux, les députés de tous et donc des femmes ? » Par un cahier de doléance, une madame du pays de Caux riposte " Etant démontré avec raison qu'un noble ne peut représenter un roturier (membre du tiers-état), […] les femmes ne pourraient donc être représentées que par des femmes " En plus de revendications écrites, elles revendiquent par l'action : les 5 et 6 octobre 1789 (les journées révolutionnaires), elles constituent l'essentiel du cortège de Versailles et pénètrent dans le château, réclamant du pain , Mais elles seront à l’origine du rapatriement à Paris de la famille royale. Jules Michelet dira : « Ce qu'il y a dans le peuple de plus instinctif, de plus inspiré, ce sont les femmes. […] Les hommes ont pris la Bastille, et les femmes ont pris le Roi », Durant toute la période révolutionnaire, elles occupent la rue dans les insurrections, et appellent les hommes à l'action, en les traitant de lâches. Ainsi, les femmes entrent dans la sphère politique et y jouent un rôle actif. Mais dès que les associations révolutionnaires dirigent l'événement, les femmes sont exclues des délibérations, du corps armé (garde nationale), des comités locaux et des associations politiques. Ne pouvant prendre part aux décisions des assemblées politiques, les femmes prennent place dans les tribunes ouvertes au public. Elles y reçoivent le surnom de " tricoteuses " (1795) : "Tricoteuses : C'est ainsi qu'on appela les femmes d'origine populaire qui suivaient en tricotant les séances de là Convention et apostrophaient les députés depuis les tribunes. Elles se trouvaient aussi sur le chemin menant à l'échafaud et participaient aux "messes rouges", trempant leurs mouchoirs dans le sang des victimes. La plus célèbre des tricoteuses est Aspasie Carlemigelli qui foula aux pieds le cadavre du député Féraud, massacré le 20 mai 1795..." (J. TULARD, J.F. FAYARD, A. FIERRO, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, 1789 1799, Laffont, Paris, 1987). Dans la mentalité populaire, ces tribunes ont une fonction politique capitale et y prendre place signifie exercer une part de souveraineté. Les femmes se regroupent aussi en clubs à Paris et en province. Elles y tiennent des séances régulières où elles lisent des lois et des journaux, discutent des problèmes politiques et s'occupent des tâches humanitaires. A partir de 1792, l'activité des clubs se durcit, et aux côtés de Jacobins (société politique modérée jusqu’en 1792 et se renforce sous Robespierre. Le nom vient de l’ancien couvent qui les abritait). Ces clubs prennent part à la vie politique de leur région. Parmi les plus réputés à Paris on peut citer la Société Patriotique et de Bienfaisance des Amis de la Vérité (1791-1792). Fondé par Etta Palm d'Aedlers, ce club de femmes plaide pour l'éducation des petites filles pauvres puis réclame le divorce et les droits politiques. Enfin, les salons, tenus par les femmes des milieux dirigeants, tels ceux de Mme Roland et de Mme de Condorcet, ont également joué un rôle important sous la Révolution. Le salon est à la fois un espace privé et un espace public, lieu d'échange entre les sexes

La Révolution : un bilan mitigé pour les femmes Les femmes sont exclues des débats politiques, La majeure partie des femmes actives au sein de la Révolution n'a pas conscience d'appartenir à une catégorie particulière. Mais les plus violentes de ces femmes font peur aux révolutionnaires. Lorsque le 18 novembre 1793 Claire Lacombe pénétra au Conseil Général de la Commune de Paris à la tête d’un groupe de femmes très décidées et portant bonnet phrygien, le Procureur Général Chaumette leur en interdit l'accès par un discours misogyne. C’est par la suite que la Convention décréta l'interdiction de tous les clubs et sociétés de femmes. Celles ci n'auront bientôt même plus le droit d'assister aux réunions politiques. La Révolution n'a absolument pas ouvert aux femmes le chemin de le citoyenneté. Pour les plus militantes, la Révolution est surtout une grande insatisfaction, elles ont l’impression d’un vol, on leur a dérobé leur révolution et leurs droits politiques. Tant d’espoir, tant d‘investissement pour être finalement dominées par l’autre sexe, dit le sexe fort. Pourtant, les hommes ont découvert que les femmes ont une place dans la société. La Révolution a permis une remise en cause des rapports entre les sexes, et des questions jusque là impensables ont été abordées, comme la place des femmes dans la cité. Mais découvrir que les femmes avaient une place dans la société ne signifie pas leur donner cette place. Jamais la possibilité de donner le droit de vote aux femmes n’est abordée. Par diverses mesures (interdiction des clubs de femmes, puis interdiction faite aux femmes d'entrer dans les tribunes, puis de se grouper à plus de cinq dans la rue) prises par les révolutionnaires, les femmes se voient exclues des affaires politiques. Des avancées civiles mais toujours pas politiques Cependant, la Révolution a reconnu aux femmes une personnalité civile. Elles sont devenues des êtres humains à part entière. Avec la Déclaration de 1789, les femmes sont libres de leurs opinions, de leurs choix et bénéficient de l'abolition des ordres, de la hiérarchie, de l'esclavage. La Constituante favorise l'émancipation civile des femmes en décrétant l'égalité des droits aux successions. La Constitution de 1791 définit de façon identique pour les hommes et les femmes l'accession à la majorité civile. La Révolution délivre les jeunes filles de la tutelle paternelle : celles ci sont désormais libres de se marier ou non, et d'épouser qui elles veulent. Les grandes lois de septembre 1792 sur l'état civil et le divorce traitent à égalité les deux époux. La femme mariée est délivrée de la tutelle maritale. La loi dit que le mariage se dissout par le divorce, soit par simple incompatibilité d'humeur, soit par consentement mutuel. La marche vers la citoyenneté complète : le suffrage universel masculin (sans les femmes) La Révolution ouvre l'accès aux droits politiques à un plus grand nombre. Auparavant, les droits politiques étaient réservés seulement aux propriétaires. La Constitution de 1791 décrète un suffrage presque universel (à moitié). Pour voter, il faut être français, avoir 21 ou 25 ans, avoir des revenus conséquents ou payer une contribution équivalente à quelques jours de travail, et ne pas être domestique, ni religieux cloitrés et les aliénés (handicapés mentaux ou personnes atteintes de folie).

Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne Olympe de Gouges

1791 Homme, es-tu capable d’être juste ? C’est une femme qui t’en fait la question ; tu ne lui ôteras pas du moins ce droit. Dis-moi ? Qui t’a donné le souverain empire d’opprimer mon sexe ? Ta force ? Tes talents ? Observe le créateur dans sa sagesse ; parcours la nature dans toute sa grandeur, dont tu sembles vouloir te rapprocher, et donne-moi, si tu l’oses, l’exemple de cet empire tyrannique. Remonte aux animaux, consulte les éléments, étudie les végétaux, jette enfin un coup d’œil sur toutes les modifications de la matière organisée ; et rends-toi à l’évidence quand je t’en offre les moyens ; cherche, fouille et distingue, si tu peux, les sexes dans l’administration de la nature. Partout tu les trouveras confondus, partout ils coopèrent avec un ensemble harmonieux à ce chef-d’œuvre immortel. L’homme seul s’est fagoté un principe de cette exception. Bizarre, aveugle, boursouflé de sciences et dégénéré, dans ce siècle de lumières et de sagacité, dans l’ignorance la plus crasse, il veut commander en despote sur un sexe qui a reçu toutes les facultés intellectuelles ; il prétend jouir de la Révolution, et réclamer ses droits à l’égalité, pour ne rien dire de plus.

Préambule Les mères, les filles, les sœurs, représentantes de la nation, demandent d’être constituées en assemblée nationale. Considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de la femme, sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements, ont résolu d’exposer dans une déclaration solennelle, les droits naturels inaliénables et sacrés de la femme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs, afin que les actes du pouvoir des femmes, et ceux du pouvoir des hommes pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés, afin que les réclamations des citoyennes, fondées désormais sur des principes simples et incontestables, tournent toujours au maintien de la constitution, des bonnes mœurs, et au bonheur de tous. En conséquence, le sexe supérieur en beauté comme en courage, dans les souffrances maternelles, reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l’Être suprême, les Droits suivants de la Femme et de la Citoyenne.

Article premier La Femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. II. : Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de la Femme et de l’Homme : ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et surtout la résistance à l’oppression. III. : Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation, qui n’est que la réunion de la Femme et de l’Homme : nul corps, nul individu, ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. IV. : La liberté et la justice consistent à rendre tout ce qui appartient à autrui ; ainsi l’exercice des droits naturels de la femme n’a de bornes que la tyrannie perpétuelle que l’homme lui oppose ; ces bornes doivent être réformées par les lois de la nature et de la raison. V. : Les lois de la nature et de la raison défendent toutes actions nuisibles à la société : tout ce qui n’est pas défendu par ces lois, sages et divines, ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elles n’ordonnent pas. VI. : La Loi doit être l’expression de la volonté générale ; toutes les Citoyennes et Citoyens doivent concourir personnellement ou par leurs représentants, à sa formation ; elle doit être la même pour tous : toutes les Citoyennes et tous les Citoyens, étant égaux à ses yeux, doivent être également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leurs capacités, et sans autres distinctions que celles de leurs vertus et de leurs talents. VII. : Nulle femme n’est exceptée ; elle est accusée, arrêtée, et détenue dans les cas déterminés par la Loi. Les femmes obéissent comme les hommes à cette Loi rigoureuse. VIII. : La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une Loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée aux femmes. IX. : Toute femme étant déclarée coupable ; toute rigueur est exercée par la Loi. X. : Nul ne doit être inquiété pour ses opinions mêmes fondamentales, la femme a le droit de monter sur l ’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la Tribune ; pourvu que ses manifestations ne troublent pas l’ordre public établi par la Loi.

]XI. : La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de la femme, puisque cette liberté assure la légitimité des pères envers les enfants. Toute Citoyenne peut donc dire librement, je suis mère d’un enfant qui vous appartient, sans qu’un préjugé barbare la force à dissimuler la vérité ; sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi. XII. : La garantie des droits de la femme et de la Citoyenne nécessite une utilité majeure ; cette garantie doit être instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de celles à qui elle est confiée. XIII. : Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, les contributions de la femme et de l’homme sont égales ; elle a part à toutes les corvées, à toutes les tâches pénibles ; elle doit donc avoir de même part à la distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l’industrie. XIV. : Les Citoyennes et Citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique. Les Citoyennes ne peuvent y adhérer que par l’admission d’un partage égal, non seulement dans la fortune, mais encore dans l’administration publique, et de déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée de l’impôt. XV. : La masse des femmes, coalisée pour la contribution à celle des hommes, a le droit de demander compte, à tout agent public, de son administration. XVI. : Toute société, dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution ; la constitution est nulle, si la majorité des individus qui composent la Nation, n’a pas coopéré à sa rédaction. XVII. : Les propriétés sont à tous les sexes réunis ou séparés ; elles ont pour chacun un droit lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. Post ambule. Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l’usurpation. L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. Ô femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. Dans les siècles de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit ; que vous reste t-il donc ? La conviction des injustices de l’homme. La réclamation de votre patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature ; qu’auriez-vous à redouter pour une si belle entreprise ? Le bon mot du Législateur des noces de Cana ? Craignez-vous que nos Législateurs français, correcteurs de cette morale, longtemps accrochée aux branches de la politique, mais qui n’est plus de saison, ne vous répètent : femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? Tout, auriez vous à répondre. S’ils s’obstinent, dans leur faiblesse, à mettre cette inconséquence en contradiction avec leurs principes ; opposez courageusement la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité ; réunissez-vous sous les étendards de la philosophie ; déployez toute l’énergie de votre caractère, et vous verrez bientôt ces orgueilleux, non serviles adorateurs rampants à vos pieds, mais fiers de partager avec vous les trésors de l’Être Suprême. Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir ; vous n’avez qu’à le vouloir. Passons maintenant à l’effroyable tableau de ce que vous avez été dans la société ; et puisqu’il est question, en ce moment, d’une éducation nationale, voyons si nos sages Législateurs penseront sainement sur l’éducation des femmes. Les femmes ont fait plus de mal que de bien. La contrainte et la dissimulation ont été leur partage. Ce que la force leur avait ravi, la ruse leur a rendu ; elles ont eu recours à toutes les ressources de leurs charmes, et le plus irréprochable ne leur résistait pas. Le poison, le fer, tout leur était soumis ; elles commandaient au crime comme à la vertu. Le gouvernement français, surtout, a dépendu, pendant des siècles, de l’administration nocturne des femmes ; le cabinet n’avait point de secret pour leur indiscrétion ; ambassade, commandement, ministère, présidence, pontificat, cardinalat ; enfin tout ce qui caractérise la sottise des hommes, profane et sacré, tout a été soumis à la cupidité et à l’ambition de ce sexe autrefois méprisable et respecté, et depuis la révolution, respectable et méprisé.