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Rapport d’expert indépendant
Recherche et Innovation
pollution par les microplastiquespour l’environnement et la santé
Les risques de la
Mécanisme de conseil scientifique (SAM)
Groupe des conseillers scientifiques principauxAvis scientifique nº 6/2019
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux
Commission européenneDirection générale de la recherche et de l’innovationUnité RTD.DDG1.02 – Mécanisme de conseil scientifique
Courriel: [email protected] [email protected]
Commission européenne B-1049 Bruxelles
Imprimé par l’Office des publications de l’Union européenne à Luxembourg
Manuscrit achevé en avril 2019
Le groupe des conseillers scientifiques principaux de la Commission européenne est seul responsable du contenu du présent rapport. Bien que le personnel des services de la Commission ait participé à son élaboration et qu’il ait fourni des informations et une assistance dans ce cadre, les opinions qui y sont exprimées reflètent le point de vue collectif des membres du groupe des conseillers scientifiques principaux, et ne peuvent en aucun cas être considérées comme une prise de position officielle de la Commission européenne.
De nombreuses autres informations sur l’Union européenne sont disponibles sur l’internet via le serveur Europa (http://europa.eu).
Luxembourg: Office des publications de l’Union européenne, 2019
Impression ISBN 978-92-76-02423-1 doi:10.2777/54199 KI-02-19-256-FR-C
PDF ISBN 978-92-76-02425-5 doi: 10.2777/65378 KI-02-19-256-FR-N
© Union européenne, 2019Réutilisation autorisée moyennant mention de la source. La politique de réutilisation des documents de la Commission européenne est régie par la décision 2011/833/UE (JO L 330 du 14.12.2011, p. 39).
Pour toute utilisation ou reproduction de photos ou d’autres éléments non couverts par le droit d’auteur de l’UE, l’autorisation doit être obtenue directement auprès des titulaires du droit d’auteur.Image de la couverture: Filipa Bessa, 2019
COMMISSION EUROPÉENNE
Direction générale de la recherche et de l’innovation2019
pollution par les microplastiques
pour l’environnement et la santé
Les risques de la
Mécanisme de conseil scientifique (SAM)CONSEILS SCIENTIFIQUES INDÉPENDANTS EN VUE DE L’ÉLABORATION DES POLITIQUES
Groupe des conseillers scientifiques principaux Avis scientifique nº 6/2019
(étayé par le rapport «Evidence Review Report» nº 4 du consortium SAPEA)
Bruxelles, le 30 avril 2019
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 3
Table des matières
REMERCIEMENTS .................................................................................................................... 6
Résumé .................................................................................................................................. 8
1. Contexte et introduction ............................................................................................ 15
1.1. Contexte et approche du présent avis .......................................................................... 15
1.2. Principes et postulats pertinents en matière de politiques........................................... 16
1.3. Les plastiques, les microplastiques et l’ampleur de la pollution ................................... 18
1.4. Pourquoi les microplastiques sont-ils devenus le centre de l’attention? ...................... 19
1.5. L’apparition du problème ............................................................................................. 20
1.6. Intégrer la science dans le débat .................................................................................. 20
1.7. La prévention de la pollution par les microplastiques .................................................. 21
2. Recommandations ..................................................................................................... 26
2.1 Élargir le champ d’application des politiques existantes en vue d’empêcher et de réduire la pollution par les microplastiques ............................................................................ 26
2.1.1 Des microplastiques dans l’eau, l’air et le sol ....................................................... 26 2.1.2 La spécificité des substances et des contextes et les utilisations présentant les risques potentiels les plus élevés ........................................................................................ 29 2.1.3 Les nanoplastiques ................................................................................................ 31
2.2 Tenir compte des profondes répercussions socio-économiques et en matière de compromis des actions stratégiques de lutte contre la pollution par les microplastiques ...... 34
2.3 Promouvoir une coopération à l’échelle mondiale, des échanges scientifiques de grande qualité et une certaine cohérence des politiques ........................................................ 38
2.3.1 Coopération à l’échelle mondiale ......................................................................... 38 2.3.2 Qualité et pertinence des études scientifiques sur les microplastiques ............... 40 2.3.3 Normes et méthodes scientifiques internationales .............................................. 41
3. Références ................................................................................................................. 42
LISTE DES FIGURES FIGURE 1 – INCIDENCES DES NANOPLASTIQUES ET DES MICROPLASTIQUES SUR LE BIOTE, RELEVEES A DIFFERENTS
NIVEAUX DE L’ORGANISATION BIOLOGIQUE (UNE EXTREMITE BIOLOGIQUE EST UN MARQUEUR DE
PROGRESSION D’UNE MALADIE). LA PLUPART DES ETUDES ONT ETE MENEES AU NIVEAU DE CERTAINES PARTIES
D’UN ORGANISME ET LES ETUDES MENEES AU NIVEAU COMMUNAUTAIRE OU ECOLOGIQUE SONT ASSEZ RARES
(SAPEA, 2019). ..................................................................................................................... 23
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
4 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
LISTE DES ANNEXES ANNEXE 1 – DECLARATION INITIALE .................................................................................................... 60 ANNEXE 2 – EXPERTS CONSULTES ....................................................................................................... 64 ANNEXE 3 – PARTICIPANTS A LA REUNION DES PARTIES PRENANTES ........................................................... 67 ANNEXE 4 – ABREVIATIONS ............................................................................................................... 68 ANNEXE 5 – GLOSSAIRE .................................................................................................................... 69
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 5
Groupe des conseillers scientifiques principaux
Janusz Bujnicki
Professeur de biologie, Institut international de biologie
moléculaire et cellulaire, Varsovie
Pearl Dykstra
Vice-présidente
Professeure de sociologie, Université Érasme de
Rotterdam
Elvira Fortunato
Professeure, Département des sciences des matériaux
de la Faculté des sciences et de la technologie,
Université NOVA, Lisbonne
Nicole Grobert
Professeure de nanomatériaux, Département des
matériaux, Université d’Oxford
Rolf-Dieter Heuer
Président
Ancien directeur général de l’Organisation européenne
pour la recherche nucléaire (CERN), Genève
Carina Keskitalo
Professeure de sciences politiques, Département de
géographie et d’histoire économique, Université d’Umeå
Paul Nurse
Directeur du Francis Crock Institute, Londres
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
6 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
REMERCIEMENTS
Le présent avis scientifique sur les risques de la pollution par les microplastiques
pour l’environnement et la santé (ci-après l’«avis») a été remis à la Commission
européenne par le groupe des conseillers scientifiques principaux (ci-après les
«conseillers scientifiques») du mécanisme de conseil scientifique (Scientific Advice
Mechanism, SAM). Les conseillers scientifiques chargés de la rédaction de cet avis
étaient Nicole Grobert (corédactrice principale), Pearl Dyksta (corédactrice
principale), Rolf Heuer et Elvira Fortunato. L’avis a été approuvé par tous les
conseillers scientifiques.
Les conseillers scientifiques tiennent à saluer la coopération sur ce sujet avec la
conseillère scientifique en chef du Canada, Mona Nemer, et sa conseillère politique
principale, Sandy Hannah. Grâce à cette coopération, de précieuses contributions
ont permis de travailler sur le présent avis, notamment la discussion sur les aspects
internationaux de la pollution par les microplastiques entre les conseillers
scientifiques en chef ou leurs homologues, des scientifiques de haut niveau et de
hauts fonctionnaires, qui s’est déroulée lors d’une réunion informelle en marge du
G7 à l’ambassade du Canada à Washington D.C. le 13 février 2019.
Les conseillers scientifiques tiennent également à remercier les nombreux
contributeurs pour leur soutien et leur contribution à la préparation du présent avis:
le consortium «Science Advice for Policy by European Academies»
(SAPEA)1 – élément essentiel du mécanisme de conseil scientifique – qui a
fourni un rapport «Evidence Review Report» (ERR) établi sous la direction
de Bart Koelmans et de Sabine Pahl, président et vice-présidente du groupe
de travail du SAPEA, avec l’aide de Jackie Whyte et de Céline Tschirhart,
tous deux membres du SAPEA, et avec le soutien du conseil d’administration
du SAPEA;
les directions générales de la Commission européenne – le Centre commun
de recherche (Guy Van den Eede, Brigitte Toussaint, Amalia Muñoz Pineiro,
Birgit Sokull-Kluettgen et Georg Hanke), la DG Environnement, la
DG Affaires maritimes et pêche, la DG Recherche et innovation, la
DG Marché intérieur, industrie, entrepreneuriat et PME, la DG Santé et
sécurité alimentaire et le secrétariat général, ainsi que l’Agence européenne
des produits chimiques (Peter Simpson);
1 Le SAPEA rassemble les connaissances et l’expertise de plus de 100 académies et sociétés savantes
dans plus de 40 pays d’Europe. Financé au titre du programme «Horizon 2020» de l’UE, le consortium
SAPEA comprend les organismes suivants: Academia Europaea (AE), All European Academies (ALLEA),
European Academies Science Advisory Council (EASAC – conseil consultatif des académies des sciences
européennes), European Council of Academies of Applied Sciences, Technologies and Engineering (Euro-CASE – conseil européen des académies de sciences appliquées, de technologie et d’ingénierie) et
Federation of European Academies of Medicine (FEAM – fédération des académies de médecine
européennes).
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 7
l’équipe d'appui au SAM de la Commission européenne (James Gavigan,
Dulce Boavida, Annabelle Ascher et Michiel de Smet2) ainsi que les autres
membres du personnel de l’unité SAM; et
tous les experts dont les noms figurent à l’annexe 2 qui ont été consultés ou
ont contribué d’une manière ou d’une autre au présent avis.
2 De la DG RTD I.2 – Unité «Éco-innovation»
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
8 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
RESUME
Depuis les années 1950, les matières plastiques constituent une source de
croissance fondée sur l’innovation grâce à leurs propriétés uniques, et elles recèlent
le même potentiel pour l’avenir. De nos jours, les matières plastiques sont très
prisées et essentielles à la vie moderne, mais leur utilisation est ternie par
l’inexorable augmentation3 de la pollution par les matières plastiques et les
microplastiques4.
Le comportement humain est en grande partie responsable de la pollution par les
matières plastiques, dont les sources comprennent: les textiles, les pneumatiques,
les déchets traditionnels, les produits contenant des microplastiques et les
équipements/produits utilisés dans la pêche, l’agriculture et l’industrie. Chaque
année, une proportion importante de déchets plastiques5 qui se fragmentent en
microplastiques se retrouve dans l’environnement, de même que des
microplastiques de fabrication humaine. Si la pollution marine par les
microplastiques a retenu l’attention du public et des décideurs politiques, de récents
rapports sur l’omniprésence des microplastiques dans l’air, le sol, les sédiments, les
eaux douces, les océans, les plantes, les animaux et certaines parties de
l’alimentation humaine ont amplifié les préoccupations à cet égard.
Les recherches sur les microplastiques et les menaces qu’ils peuvent représenter
pour les écosystèmes et les humains sont complexes et n’en sont qu’à leurs
balbutiements – il reste encore de nombreuses incertitudes dans ce domaine. Il
existe relativement peu d’études sur les microplastiques présents dans la nature
dont la taille est égale ou inférieure à 10-50 microns, car ils se trouvent en deçà de
la limite de détection des équipements d’analyse le plus souvent utilisés. Certaines
études expérimentales ont révélé une augmentation des concentrations de
microplastiques de plus en plus petits6, ce qui laisse penser que les concentrations
réelles dans l’environnement pourraient être plus élevées que celles relevées jusqu’à
présent. En outre, la toxicité des microplastiques et la facilité relative avec laquelle
ils traversent les barrières biologiques devraient augmenter à mesure que leur taille
diminue. Ce constat suscite de nouvelles inquiétudes au sujet des microplastiques
de plus petite taille et, en particulier, des nanoplastiques.
De plus en plus de données scientifiques démontrent les dangers que représentent
les risques écologiques non contrôlés, irréversibles et à long terme liés aux
3 Voir Geyer et al. (2017), PlasticsEurope (2018) and Ryan (2015)
4 Les microplastiques sont des particules solides composées de polymères synthétiques et dont la plus
grande dimension est inférieure à cinq millimètres. Aux fins du présent avis, sauf indication contraire, le
terme «microplastiques» englobe les nanoplastiques, c’est-à-dire des particules de moins de
100 nanomètres. 5 En 2015, on estimait la quantité de déchets plastiques mal gérés dans le monde entre 60 et 99 millions
de tonnes (Lebreton & Andrady, 2019). Selon des estimations (Boucher & Friot, 2017), la quantité
annuelle totale de microplastiques se formant ou s’infiltrant dans l’environnement pourrait être de
l’ordre de 11 millions de tonnes. Étant donné que la production et l’utilisation des matières plastiques se
poursuivent, ces chiffres continueront d’augmenter si la situation n’évolue pas. 6 Voir Araujo et al. (2018), Enders et al. (2015) and Lorenz et al.( 2018)
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 9
microplastiques pour certains sédiments et certaines eaux côtières. Selon les
prévisions des scientifiques, si les émissions dans l’environnement se poursuivent au
rythme actuel ou augmentent, les risques écologiques pourraient se généraliser7
d’ici un siècle. Étant donné que la plupart des recherches effectuées en laboratoire
ont jusqu’ici été réalisées dans des conditions qui ne reflètent pas le niveau réel
d’exposition, il est nécessaire de mieux comprendre les effets des différentes
concentrations, compositions, dimensions et formes de microplastiques sur les
écosystèmes et les êtres humains avant de pouvoir tirer des conclusions valables
sur les risques réels.
Bien que les données actuellement disponibles indiquent que, pour l’heure, la
pollution par les microplastiques ne présente pas de risque généralisé pour les
humains ou l’environnement, il y a de sérieuses raisons de s’inquiéter et de prendre
des mesures de précaution. Il est essentiel d’adopter des approches d’évaluation
des risques de grande qualité afin de classer ces mesures par ordre de priorité et de
déterminer où et quand les mettre en œuvre.
Les experts et la société doivent s’entendre sur les niveaux de risque et les réponses
appropriées. Comme les matières plastiques jouent un rôle crucial dans la vie
moderne, il est primordial de modifier le comportement humain. Les valeurs, les
motivations, les incitations et l'existence de conditions propices sont autant de
leviers d'un changement de comportement favorable à l’environnement, aussi bien
de la part des individus que des organisations8. Une compréhension scientifique des
facteurs comportementaux peut aussi permettre de mieux articuler l’interaction
entre les sciences naturelles et la planification de réponses efficaces.
La société n’a pas encore beaucoup exploité les connaissances scientifiques sur la
pollution par les microplastiques pour tirer ses conclusions et lancer son appel à
l’action. Il est donc absolument nécessaire de mettre en place une communication
claire et fondée sur des données objectives quant aux incertitudes relatives à
l’environnement, à l’alimentation et à la santé humaine.
Recommandation nº 1: élargir le champ d’application des politiques
existantes en vue d’empêcher et de réduire la pollution par les
microplastiques
Des microplastiques dans l’eau, l’air et le sol
La Commission devrait tirer parti des dispositions actuelles figurant dans les
instruments juridiques existants en vue d’empêcher et d’atténuer la présence de
microplastiques dans l’eau, l’air et le sol. La pollution de l’air, de l’eau douce et du
sol par les microplastiques devrait faire l’objet d’une politique de même vigueur que
la pollution marine par ces substances. Il convient de mettre en place de nouvelles
7 N.B. La conclusion scientifique générale est qu’à l’heure actuelle, la pollution par les microplastiques ne
constitue pas un risque généralisé. Toutefois, les scientifiques concluent également que, si on ne bride
pas la pollution par les microplastiques, le laisser-faire aboutirait à un dépassement des seuils de
concentration dans un avenir proche ainsi qu’à l’apparition d’un risque généralisé d’ici un siècle (SAPEA,
2019: 2.8) 8 Voir van Valkengoed & Steg (2019)
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
10 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
actions qui s'inscrivent dans la mesure du possible dans le cadre des instruments
pertinents existants. À titre d’exemples potentiellement pertinents, nous pouvons
citer la directive-cadre sur l’eau ainsi que les directives applicables au traitement
des eaux usées urbaines, à l’utilisation de boues d’épuration en tant qu’engrais et à
la qualité de l’air. Outre la législation, des mesures volontaires, économiques ou de
persuasion moins astreignantes devraient également être envisagées dans le but de
promouvoir un changement responsable au moyen d’initiatives commerciales,
sociales ou plus altruistes.
Spécificité des substances et des contextes et utilisations présentant les
risques potentiels les plus élevés
Étant donné que les microplastiques consistent en une multitude de matériaux, il est
essentiel d’adopter une approche pluridimensionnelle. Il faut notamment prendre
des mesures modulées selon les substances et les contextes en utilisant des
paramètres tels que la composition, la forme, l’origine, la localisation, le
cheminement, le milieu concerné et les effets. Les preuves et les avis scientifiques
devraient permettre de déterminer la meilleure mesure à prendre à l’égard de
chaque problème, substance et contexte donné. Il convient par ailleurs de cibler les
sources de microplastiques à volume élevé, à émissions élevées et/ou à risques
intrinsèquement élevés qui présentent les risques potentiels les plus importants. À
court terme, il pourrait notamment s’agir des mesures suivantes: des conditions
d’octroi de licences plus strictes pour les producteurs de granulés de plastique au
titre de la directive sur les émissions industrielles; des normes de performances
rigoureuses en ce qui concerne les machines à laver visant les microplastiques
textiles; et des collecteurs plus performants pour les systèmes de drainage,
permettant d'intercepter les microplastiques rejetés par l’abrasion des
pneumatiques. Il convient en outre de mettre au point des solutions préventives à
long terme plus innovantes et durables.
Nanoplastiques
La Commission devrait prendre des mesures pour permettre à la communauté
scientifique de pallier le manque de connaissances au sujet de la présence, de la
concentration et du comportement de la pollution par les nanoplastiques dans
différentes situations. Tant pour les microplastiques en général que pour les
nanoplastiques, il est important, d’un point de vue politique, que les décideurs
soient eux aussi régulièrement informés et disposent d'outils leur permettant de
prendre des mesures préventives ou d’atténuation des risques, si des preuves
scientifiques relatives à des risques pour l’environnement et la santé humaine et à
des dangers spécifiquement liés aux nanoplastiques venaient à être apportées.
Recommandation nº 2: tenir compte des implications plus vastes des
actions stratégiques de lutte contre la pollution par les microplastiques sur
le plan socio-économique et en matière de compromis à réaliser
Faisabilité politique et socio-économique
Les mesures de prévention de la pollution par les microplastiques doivent être
réalisables sur le plan politique et socio-économique. Dans le but de garantir un
bénéfice net positif et durable pour la société, des analyses quantitatives de facteurs
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 11
généraux (par exemple, les compromis; les stratégies/solutions de substitution; les
évaluations du cycle de vie; et les calculs de rentabilité) devraient figurer au
premier plan dans les analyses d’impact des différentes mesures. En outre,
l’élaboration de ces analyses socio-économiques et analyses de compromis à
effectuer pour les mesures de lutte contre la pollution par les microplastiques
devrait s’inscrire dans une logique d’économie circulaire de «réduction, réutilisation
et recyclage» visant à améliorer les résultats environnementaux, économiques et
sociaux du système plastique dans son ensemble.
Un catalyseur pour d’autres questions liées à la protection de
l’environnement et de la santé
La Commission devrait également profiter des inquiétudes du grand public au sujet
de la pollution par les microplastiques et du consensus relatif à la pollution par le
plastique au sens large pour favoriser l’adoption de mesures difficiles en matière de
protection de l’environnement et de la santé dans d’autres domaines plus contestés.
Recommandation nº 3: promouvoir une coopération à l’échelle mondiale,
des échanges scientifiques de grande qualité et la cohérence des politiques
Coopération à l’échelle mondiale
Promouvoir un traité mondial visant à réduire la pollution par les microplastiques et
d’autres matières plastiques et à s’attaquer à ses racines. Encourager également
une collaboration internationale et interdisciplinaire et le partage à un stade précoce
des nouvelles connaissances et des résultats de recherche. La première chose à
faire serait de promouvoir la création d’une plateforme scientifique mondiale sur la
pollution par les matières plastiques et les microplastiques, qui permettrait un accès
partagé et transfrontière à des données normalisées.
Qualité et pertinence des études scientifiques sur les microplastiques
Prendre des mesures en vue d’améliorer la qualité et la pertinence générales des
recherches sur les microplastiques: i) en favorisant les avancées en matière de
détection, de mesure et d’analyse, ainsi que les méthodes d’évaluation des
risques/incidences de la pollution par les microplastiques; ii) en encourageant une
communication rigoureuse et transparente des procédures expérimentales et des
métadonnées; et iii) en favorisant la réalisation et la publication d’études dose-
réponse et sans effet approfondies afin de générer une base de connaissances
scientifiques plus équilibrée pour sous-tendre les avis scientifiques et les politiques
dans ce domaine.
Normes et méthodes scientifiques internationales
Entreprendre l’élaboration de définitions et de normes internationales consensuelles
pour mesurer et surveiller la pollution par les microplastiques et ses incidences sur
les écosystèmes et la santé humaine, permettant ainsi d’élaborer: i) un tableau
cohérent à l’échelle mondiale de la nature de la pollution par les microplastiques et
des menaces liées à cette pollution, et ii) des prescriptions techniques et des
critères clairs et sans équivoque pour l'adoption de mesures réglementaires, lorsque
celles-ci sont nécessaires.
* * *
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
12 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
Nous espérons que le présent avis contribuera au développement de la réponse
politique à la pollution par les microplastiques au sein de l’UE et à l’échelle
mondiale.
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 13
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
14 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
Contexte et introduction
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 15
1. Contexte et introduction
1.1. Contexte et approche du présent avis
Le présent avis s’appuie sur un inventaire récent des connaissances scientifiques
dans ce nouveau domaine (SAPEA, 2019) et sur d’autres travaux de fond (SAM,
2018, 2019). Notre objectif est de fournir des informations dans un domaine de la
politique de l’UE où une série d’actions relatives aux microplastiques ont été
annoncées dans le cadre de la stratégie européenne sur les matières plastiques
(European Commission, 2018) de janvier 2018, qui se situent à des stades de
développement différents. Dans un contexte scientifique et politique en rapide
évolution, le présent avis devrait contribuer au processus d’élaboration des
politiques en donnant de nouvelles perspectives scientifiques ainsi qu’en jetant un
nouveau regard sur des hypothèses importantes et des logiques stratégiques à la
lumière d’observations scientifiques récentes.
Nous avons pris conscience de la composante maritime de la pollution par les
microplastiques pour la première fois en 2017, en travaillant sur un avis précédent
consacré à la nourriture provenant des océans (SAM, 2017). Avant de proposer à la
Commission d’étudier cette question, nous avons procédé à un examen préliminaire
des données scientifiques disponibles et nous nous sommes penchés sur le débat
public en cours et sur les politiques actuelles. Nous avons ainsi remarqué la rapidité
et l'ampleur avec lesquelles la pollution par les microplastiques a fait son chemin
dans la conscience publique. Des reportages médiatiques forts et évocateurs,
inspirés d’informations fournies par des scientifiques, des militants, des citoyens,
des pouvoirs publics et des journalistes, alimentent ce processus.
Nous avons également constaté que, malgré la rapide augmentation du nombre de
publications scientifiques, le corpus général de données probantes et de
connaissances dans ce domaine demeurait assez maigre. Néanmoins, le dialogue
avec les experts et le fait que l’opinion publique et l’élaboration des politiques
continuent d'évoluer rapidement à ce sujet nous ont convaincus qu’un avis
scientifique sur ce thème pourrait apporter une contribution bienvenue et
opportune.
La Commission a approuvé l’approche que nous avons proposée dans notre
déclaration initiale9 publiée en juillet 2018.
Plusieurs travaux ont été entrepris en vue de préparer le terrain à l’élaboration du
présent avis:
1. un document d’information intitulé «Microplastic Pollution – The Policy Context» (La pollution par les microplastiques: contexte politique) (SAM,
2018) – novembre 2018;
9 https://ec.europa.eu/research/sam/pdf/topics/mp_statement_july-
2018_fr.pdf#view=fit&pagemode=none
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
16 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
2. un examen de la littérature scientifique réalisé par le consortium SAPEA – «A Scientific Perspective on Microplastics in Nature and Society» (Perspective
scientifique sur les microplastiques dans la nature et la société) (SAPEA, 2019) – janvier 2019;
3. un atelier d’experts – «Environmental and Health Impacts of Microplastic Pollution – from scientific evidence to policy advice» (Retombées de la pollution par les microplastiques sur l’environnement et la santé: des preuves scientifiques aux avis stratégiques) – janvier 201910;
Le rapport du SAPEA (SAPEA, 2019) est la principale contribution au présent avis. Il
propose une synthèse objective et indépendante des données et des connaissances
scientifiques pertinentes les plus récentes. Il s’appuie sur les sciences naturelles et
les connaissances apportées par les sciences sociales et comportementales, sur la
manière dont la population et les parties prenantes perçoivent la pollution par les
microplastiques et sont concernées par cette situation, ainsi que sur les efforts
déployés pour lutter contre ce problème.
Le présent avis a également bénéficié d’une coopération bilatérale avec la
conseillère scientifique en chef du Canada et de discussions internationales plus
vastes dans un cadre informel réunissant des conseillers scientifiques en chef ou
leurs homologues des pays membres du G711, ainsi que d’une série de consultations
et de discussions ad hoc avec des experts. Enfin, une réunion des parties prenantes
avec des organisations professionnelles, des ONG, des organisations/agences
scientifiques et politiques a été organisée peu de temps avant la réalisation de l’avis.
Tous les éléments qui précèdent ont contribué à cerner la complexité de la situation
en ce qui concerne à la fois la science et la manière dont la société subit la pollution
par les microplastiques et réagit face à ce problème. Les messages et
recommandations formulés dans le présent avis, sur la façon dont l’UE et d’autres
acteurs politiques à l’échelle mondiale devraient lutter contre la pollution causée par
les microplastiques, tiennent compte de cette complexité.
1.2. Principes et postulats pertinents en matière de politiques
Étant donné que le présent avis concerne le niveau le plus élevé de l’élaboration des
politiques au sein de la Commission européenne, il convient de rappeler les grands
principes et éléments de l’approche de l’Union européenne en matière de protection
de la santé et de l’environnement [en signalant qu’une description plus détaillée du
contexte politique est présentée dans (SAM, 2018) et dans (SAPEA, 2019:
chapitre 4)].
La principale disposition du traité relative à la santé publique12 (article 168) confère
des pouvoirs limités à l’UE. Toutefois, les traités dotent également l’UE d’un mandat
unique, d’obligations et de pouvoirs considérablement plus importants en vue de
10 https://ec.europa.eu/research/sam/pdf/topics/microplastic-sam_workshop-
012019.pdf#view=fit&pagemode=none 11
Résumé des coprésidents http://science.gc.ca/eic/site/063.nsf/fra/h_97763.html
12 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:12012E/TXT&from=FR
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 17
protéger la santé grâce à l’ensemble de ses autres politiques. Les politiques ayant
des répercussions évidentes en matière de protection de la santé concernent
notamment l’environnement, la santé et la sécurité au travail, et la protection des
consommateurs.
De manière similaire à ce que prévoit le traité concernant la politique de santé, la
politique de l’environnement comporte également une «clause d’intégration»
(article 11), en vertu de laquelle la protection de l’environnement doit être intégrée
dans l’ensemble des politiques et activités de l’Union.
L’approche de type réglementaire pour la réalisation du marché unique caractérise
la logique qui sous-tend la législation et les mesures stratégiques dans certains de
ces domaines – par exemple, en ce qui concerne la sécurité alimentaire, l’étiquetage
et les allégations nutritionnelles de santé et l’harmonisation des normes
environnementales. En outre, le présent avis est particulièrement en phase avec
l’importance majeure accordée à la justification, au moyen de preuves scientifiques,
des problèmes concrets et des solutions proposées dans les analyses d'impact ex
ante des mesures stratégiques.
La politique de l’UE dans le domaine de l’environnement vise un niveau de
protection élevé, tenant compte de la diversité des situations dans les régions de
l’Union. Elle repose sur les principes de précaution, d’action préventive et de
correction de la pollution à la source, ainsi que sur le principe du pollueur-
payeur. Ces principes sont ancrés dans des stratégies horizontales et pris en
considération dans les négociations internationales en matière d’environnement.
Le principe de précaution peut être invoqué en cas d’incertitude scientifique au sujet
d’un risque soupçonné pour la santé humaine ou l’environnement résultant d’une
action ou d’une situation donnée (Bourguignon, 2015; European Commission,
2017b). Par exemple, si des doutes surgissent quant aux effets potentiellement
néfastes d’un produit ou d’une substance et si – après une évaluation scientifique
objective – l’incertitude persiste, des instructions peuvent être données en vue
d’arrêter la distribution du produit concerné ou de la substance en cause ou de le/la
retirer du marché. De telles mesures doivent être non discriminatoires et
proportionnées et il convient de les reconsidérer dès que des informations
scientifiques complémentaires sont disponibles.
Il convient également de signaler que, lors d’une récente réunion des conseillers
scientifiques en chef ou de leurs homologues des pays du G7 sur la «coopération en
matière d’avis scientifiques sur la pollution causée par les microplastiques»,
trois autres principes ont été retenus13:
l’intégrité scientifique: les avis scientifiques devraient être fondés sur une
évaluation objective de l’éventail des preuves scientifiques solides et des
connaissances spécialisées disponibles sur les microplastiques, en tirant parti
13 Résumé des coprésidents http://science.gc.ca/eic/site/063.nsf/fra/h_97763.html
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
18 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
de la gamme des sources de recherche fiables dans toutes les disciplines, d’une
manière équilibrée, transparente, responsable et indépendante;
la responsabilité scientifique: les preuves scientifiques devraient être
rendues disponibles en temps opportun sous des formes appropriées et
accessibles pour qu’elles puissent orienter efficacement l’élaboration des
politiques. Il devrait s’agir de l’ensemble des connaissances scientifiques
actuelles, ainsi que des lacunes qu'elles présentent, sur la naissance, le
cheminement, les impacts, les dangers, les risques écologiques et sanitaires
des sources et types de pollution par les microplastiques dans tous les milieux
environnementaux (air, sol et eau);
le contexte élargi de la pollution causée par les plastiques: les avis
scientifiques sur les microplastiques doivent être examinés dans le contexte
élargi de la pollution causée par les plastiques et d’autres polluants, en tenant
compte de la variabilité des incidences et des répercussions en fonction de la
géographie.
Notre avis s’appuie sur l’ensemble des considérations qui précèdent.
1.3. Les plastiques, les microplastiques et l’ampleur de la
pollution14
En raison d’une forte demande à leur égard, de leur coût peu élevé et de leur
gamme de propriétés uniques, les plastiques sont devenus essentiels à la vie
moderne. Depuis le début de l’utilisation massive des matières plastiques dans les
années 1950, le plastique constitue non seulement une solution de substitution à
d’autres matières, mais ses propriétés ont aussi permis d’accroître la polyvalence,
les économies de coûts et d’énergie, la fonctionnalité et les équipements dont la
société et l’économie sont devenues tributaires. Le plastique constitue une source de
croissance fondée sur l’innovation dans des domaines comme l’électronique, la
construction, la sécurité des véhicules, l’économie de carburant, la conversion
énergétique, la conservation des aliments et l’amélioration de la santé humaine
grâce à de nombreuses applications médicales (Andrady & Neal, 2009; P. Kershaw,
2018; PlasticsEurope, 2019). En outre, l’utilisation des matières plastiques en lieu et
place d’autres matériaux peut engendrer des gains nets d’économies d’énergie et de
matériaux (Azapagic, Emsley, & Hamerton, 2003).
Avec une production annuelle mondiale de 350 millions de tonnes en 2017, le
plastique est le troisième matériau artificiel le plus abondant, après l’acier et le
béton (PlasticsEurope, 2018). Depuis les années 1950, un taux de croissance annuel
moyen de 4 % donne lieu à une production cumulative de 8 300 millions de tonnes,
14 Il importe de relever que la science et les réglementations établissent normalement une distinction entre
la contamination et la pollution, la contamination désignant la présence d’une substance dans un
environnement où elle ne devrait pas l’être ou à des concentrations supérieures à la normale, tandis que
la pollution fait référence à une contamination qui entraîne ou peut entraîner des conséquences
biologiques néfastes pour les communautés locales. Tous les polluants sont des contaminants, mais les
contaminants ne sont pas tous des polluants (Chapman, 2007) – dans le présent avis, le terme
«pollution» désigne à la fois la pollution et la contamination.
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 19
dont 4 900 millions de tonnes (60 %) se retrouvent dans des décharges ou dans
l’environnement (Geyer, Jambeck, & Law, 2017), ce qui représente un coût
économique, social et environnemental considérable. En 2015, on estimait la
quantité de déchets plastiques mal gérés dans le monde entre 60 et 99 millions de
tonnes (Lebreton & Andrady, 2019). Selon des estimations (Boucher & Friot, 2017),
la quantité annuelle totale de microplastiques se formant ou s’infiltrant dans
l’environnement pourrait être de l’ordre de 11 millions de tonnes.
Il n’existe encore aucune définition scientifique ou réglementaire consensuelle des
microplastiques. Aux fins du présent avis, nous suivons l’opinion qui domine dans la
littérature scientifique, à savoir que les microplastiques sont considérés comme des
particules solides composées de polymères synthétiques, dont la plus grande
dimension est inférieure à cinq millimètres (Φ ≤ 5 mm)15 et pouvant contenir des
additifs ou d’autres substances. La pollution par les microplastiques représente donc
l’extrémité inférieure du spectre des tailles de la totalité des déchets plastiques,
sachant que tout élément dont la dimension est inférieure à 0,05 mm
(50 micromètres ou µm) est généralement invisible à l’œil nu16. Dans le présent
avis, sauf indication contraire [par exemple, dans le cas des nanoplastiques (Φ
comprise entre 1 nm et 100 nm)], le terme «microplastiques» désigne la totalité des
éléments dont la dimension est inférieure à cinq millimètres.
1.4. Pourquoi les microplastiques sont-ils devenus le centre de
l’attention?
Les microplastiques ont été portés à l’attention du grand public et des décideurs
politiques en raison de l’inquiétude grandissante que suscite la pollution du milieu
marin par les matières plastiques. Le consensus sociétal sur la nécessité de
résoudre le problème de la pollution par les matières plastiques est alimenté par
une combinaison de facteurs, tels que le rejet de la nuisance de la pollution par les
plastiques, visible dans les masses d’eau et les zones côtières; les préoccupations
relatives aux effets physiologiques (notamment en matière de croissance, de
reproduction et de mortalité) et comportementaux (en ce qui concerne
l’alimentation, par exemple) néfastes sur les animaux et le biote; et les conflits avec
les convictions morales des personnes. Ce même consensus est renforcé par des
rapports dénonçant l’omniprésence de la pollution par les microplastiques, y compris
dans les endroits les plus reculés de la Terre, comme l’Arctique, l’Antarctique, les
profondeurs océaniques et les régions montagneuses isolées, ainsi que dans les
denrées alimentaires.
15 La limite supérieure de 5 mm provient de (Thompson et al., 2004) ainsi que d’un atelier organisé
en 2008 par la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA)(Arthur, Baker, & Bamford,
2009) 16 https://www.quora.com/Vision-eyesight-What-is-the-smallest-thing-a-human-eye-can-see-and-why
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
20 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
1.5. L’apparition du problème
Selon Ryan (2015), de nombreuses préoccupations environnementales sur les
déchets plastiques ont été recensées dans les années 1970-1980, y compris la
présence et la formation de petits fragments de plastique dans le milieu marin
(Carpenter & Smith Jr., 1972; Gregory, 1983; Scott, 1972). À l’époque, ces
découvertes et préoccupations ont donné lieu à des progrès en matière de réduction
des déchets plastiques (Chen, 2015). Cependant, la hausse ininterrompue de la
production mondiale de matières plastiques et de déchets plastiques a largement
contrebalancé les gains réalisés. Après une période d’accalmie dans les
années 1990, la recherche a repris son envol à la suite d’une attention accrue
portée au vortex de déchets du Pacifique nord (Lebreton et al., 2018; Moore, 2008;
Rochman, Cook, & Koelmans, 2016; van Sebille, England, & Froyland, 2012) et aux
travaux de Thomson et de ses collaborateurs (Thompson et al., 2004) qui ont
inventé le terme «microplastiques». Ces dernières années, l’attention s’est amplifiée
à la lumière de plusieurs événements comme: le scandale des microbilles de
plastique (Dauvergne, 2018); l’«effet planète bleue»17; les rapports faisant état de
la présence apparente de microplastiques dans des aliments (fruits de mer, eau
potable, sel de table, bières) (EFSA Panel on Contaminants in the Food Chain et al.,
2016; Kosuth, Mason, & Wattenberg, 2018; Toussaint et al., 2019; Smith, Love,
Rochman, & Neff, 2018) et les rapports sur les microplastiques dans les légumes18
et les matières fécales humaines, qui n’ont pas encore été confirmés et examinés
par des pairs (Liebmann et al., 2018)19. Tous ces facteurs ont avivé les inquiétudes
des citoyens et renforcé la détermination politique à lutter contre la pollution par les
matières plastiques et les microplastiques.
1.6. Intégrer la science dans le débat
Une grande partie de l’émotion qui anime le débat actuel diabolise les matières
plastiques, les considérant comme intrinsèquement mauvaises20 (Hartley et al.,
2018), mais il est essentiel de garder une perspective équilibrée. Comme l’ont fait
remarquer Wolf, Baitz, & Kreissig, (2009), aucun matériau n’est intrinsèquement
bon ou mauvais en soi ou, selon un principe de toxicologie fondamental, «c’est
l’excès qui nuit».
Face à un système plastique brisé et coûteux, caractérisé par une production
multipliée par vingt en 50 ans, et seulement 2 % de recyclage en boucle fermée
(Linder, 2017), les citoyens et les politiciens prennent des mesures et appellent au
17 https://www.theguardian.com/environment/2018/nov/13/the-plastic-backlash-whats-behind-our-
sudden-rage-and-will-it-make-a-difference; https://www.britsoc.co.uk/about/latest-
news/2019/march/sociological-perspectives-on-plastic-pollution/ 18
https://www.agrifoodtoday.it/ambiente-clima/plastica-veleno-cibo-contaminato.html
19 https://www.scientificamerican.com/article/microplastics-have-been-found-in-peoples-poop-mdash-
what-does-it-mean/; https://www.nationalgeographic.com/environment/2018/10/news-plastics-
microplastics-human-feces/ 20
https://www.nationalgeographic.com.au/nature/we-made-plastic-we-depend-on-it-now-were-drowning-
in-it.aspx
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 21
changement. Cependant, ils ignorent souvent certaines incertitudes et
connaissances scientifiques importantes. Il est donc primordial d’intégrer la science
dans le débat. Les scientifiques et les conseillers scientifiques peuvent contribuer à
l’adoption de mesures stratégiques plus modérées et d’autres actions des parties
prenantes, qui tiennent pleinement compte de ce qui est connu ou probable dans les
fourchettes d’incertitude et les délais applicables.
1.7. La prévention de la pollution par les microplastiques
La stratégie européenne sur les matières plastiques de 2018 (European
Commission, 2018) s’articule autour de quatre piliers: réutiliser et recycler, réduire
les déchets, parvenir à une circularité totale grâce à l’innovation et à
l’investissement, et favoriser des actions à l’échelle mondiale. Les mesures de la
stratégie relatives aux microplastiques relèvent du pilier sur la réduction des
déchets, qui indique que des mesures ciblées de prévention de la pollution doivent
être mises en œuvre en ce qui concerne différentes sources. Cette stratégie tient
compte du fait que la compréhension des sources et des incidences des
microplastiques reste insuffisante. Le chapitre 4 du rapport «Evidence Review
Report» du consortium SAPEA, qui sous-tend le présent avis, confirme que la
législation relative à la pollution par les matières plastiques et les microplastiques
dispose de peu de fondements scientifiques (SAPEA, 2019: chapitre 4). Il est donc
utile de réexaminer la logique scientifique qui vise à orienter l’élaboration des
politiques actuelles et futures consacrées aux microplastiques à la lumière des
connaissances scientifiques les plus avancées.
Dans l’ensemble, SAPEA (2019) indique que les connaissances scientifiques
disponibles sur la pollution par les microplastiques et ses incidences sont composées
d’un mélange de consensus, de connaissances contestées, d’extrapolations
informées, de spéculations et de nombreuses inconnues. Cela traduit à la fois
l’immaturité de ce domaine et sa complexité intrinsèque.
La littérature des sciences sociales et comportementales sur la pollution par les
microplastiques n’en est qu’à ses débuts. Comme la recherche en sciences sociales
peut se transférer plus facilement que la recherche en sciences naturelles, les
conclusions pertinentes issues d’autres domaines d’études sont résumées dans
(SAPEA, 2019: chapitre 3). Les nouvelles publications décrivent la sensibilisation du
public21 aux microplastiques (SAPEA, 2019: 3.2) et l’opposition morale aux
microplastiques, qui repose sur des sentiments de dégoût et d’indignation, en
particulier en ce qui concerne la présence des microplastiques dans la chaîne
alimentaire (SAPEA, 2019: 3.3). Dans l’ensemble, la littérature soutient le
21 En passant, le fait que la Fendéu (fondation espagnole liée à l’Académie royale espagnole) ait choisi le
terme «microplástico» comme mot de l’année 2018 et que le dictionnaire Collins ait choisi «single-use»
(à usage unique) comme expression de l’année 2018 témoigne du degré d’attention du public. En outre,
une enquête Eurobaromètre de 2017 a révélé que 74 % des citoyens s’inquiétaient des répercussions
que les produits du quotidien en plastique peuvent avoir sur leur santé, tandis que 87 % se tracassaient
de l’incidence des produits en plastique sur l’environnement (European Commission, 2017a).
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
22 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
consensus sur la nécessité d’agir et donne peu d’indications sur les négateurs de
l’existence de la pollution par les matières plastiques (SAPEA, 2019: 3.6).
Les sciences naturelles concernées sont plus avancées que les sciences sociales,
mais ne sont pas encore bien développées. Elles ne permettent pas encore de se
faire une idée exacte des stocks de référence et des flux de microplastiques et des
tendances sous-jacentes, et encore moins de leurs répercussions, même si des
découvertes majeures se font jour. Les effets néfastes de l’exposition
professionnelle aiguë aux microplastiques, de l’expérimentation animale et de ce
que l’on sait des dangers potentiels suscitent des préoccupations et incitent à mener
des recherches plus concluantes.
Certaines études scientifiques sur les microplastiques visaient à caractériser leur
présence, leur devenir ainsi que les variations de leur comportement en fonction de
leur dimension, de leur composition ou de leur concentration dans l’environnement.
Des éléments témoignent de l’ampleur croissante et de la portée mondiale de la
pollution par les microplastiques et de sa pérennité (Barnes et al, 2009). Il a
également été établi que les microplastiques se retrouvent dans la chaîne
alimentaire ainsi que dans tous les compartiments de l’environnement (SAPEA,
2019: chapitre 2).
D’autres chercheurs ont étudié en laboratoire les interactions des microplastiques
avec le biote et d’autres substances (voir la figure 1), notamment la provocation de
réponses au stress en cas d’ingestion par des organismes, le transport de polluants
organiques persistants (POP)22 ou la lixiviation d’additifs toxiques. Les matières
plastiques sont principalement considérées comme inertes sur le plan biochimique.
On peut toutefois retrouver jusqu’à 4 % de monomères résiduels, sous une forme
n’ayant pas réagi, dans des polymères synthétiques, car les réactions de
polymérisation sont rarement complètes (Matlack, 2010). Les précurseurs
monomères et les additifs chimiques utilisés dans la fabrication des matières
plastiques peuvent présenter le niveau de danger chimique le plus élevé23 – voir
Lithner, Larsson, & Dave, (2011). D’autres composants des microplastiques sont
potentiellement dangereux, notamment les catalyseurs et solvants de
polymérisation, ainsi que de nombreux additifs (plastifiants, retardateurs de
flamme, catalyseurs, stabilisants, pigments, etc.) qui peuvent migrer des matières
plastiques dans l’air, dans l’eau ou dans d’autres supports avec lesquels ils sont en
contact, y compris la nourriture (Crompton, 2007).
22 Du fait de leur chimie de surface, les microplastiques constituent une voie d’accès potentielle pour la
bioaccumulation et la bioamplification des substances chimiques nocives. 23
Conformément à l’annexe VI du règlement de l’UE relatif à la classification, à l’étiquetage et à
l’emballage (CLP) fondé sur le système général harmonisé des Nations unies (Parlement européen et
Conseil, 2008).
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 23
Figure 1 – Incidences des nanoplastiques et des microplastiques sur le biote, relevées à différents niveaux de l’organisation biologique (une extrémité biologique est un marqueur de
progression d’une maladie). La plupart des études ont été menées au niveau de certaines parties d’un organisme et les études menées au niveau communautaire ou écologique sont
assez rares (SAPEA, 2019).
Il est important de faire la lumière sur la nature de ces effets et de déterminer s’il
est réellement possible ou non que ces effets aient une incidence négative sur le
biote et les écosystèmes, ou sur la santé humaine lorsque des microplastiques
pénètrent dans le corps (par inhalation, par ingestion d’aliments ou par voie
cutanée). Il existe de plus en plus de recherches de ce type, axées sur l’apparition
ou l’absence d’effets nocifs dans des circonstances contrôlées spécifiques et des
études de terrain. Par exemple, de nombreuses espèces animales ingèrent des
morceaux de plastique croyant qu’il s’agit de nourriture – des grands mammifères,
oiseaux et poissons au minuscule zooplancton. Certains en meurent (de Sá, Oliveira,
Ribeiro, Rocha, & Futter, 2018).
Des expériences en laboratoire montrent que les microplastiques peuvent avoir une
série d’incidences mécaniques, chimiques et biologiques sur le biote, provoquant des
dommages, des dysfonctionnements et des perturbations physiologiques. Elles
démontrent qu’ils peuvent être une cause d’inflammation et de stress, ainsi qu’avoir
des répercussions négatives sur la consommation alimentaire, la croissance, la
reproduction et la survie d’une série d’espèces (SAPEA 2019: 2.5.1).
Si l’on relève de telles incidences pour des concentrations de microplastiques
supérieures à celles généralement mesurées dans la nature, il se peut que ces
dernières soient sous-estimées dans l’attente de meilleures techniques
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
24 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
d’échantillonnage et de mesure (SAPEA, 2019: 2.5.2). La littérature contient aussi
de nombreuses études sans effet24, qui démontrent, par exemple, (Jovanović et al.,
2018; Rist, Carney Almroth, Hartmann, & Karlsson, 2018) qu’il faut se garder
d’émettre des généralisations simplistes. Le consortium SAPEA (2019: 2.5.5)
énumère également une série de troubles de la santé humaine documentés qui
résultent d’une exposition professionnelle à la poussière d’acrylique, de polyester,
de nylon et de polyuréthane, certains de ces troubles datant des années 1970. Il
n’existe toutefois aucune étude des effets sur la santé des êtres humains à l’échelle
de la population.
Ainsi, la petite quantité d’informations connues à ce jour sur les risques pour
l’environnement ou la santé25 est empreinte d’une grande incertitude. Le consortium
SAPEA indique que des risques écologiques existent peut-être déjà, du moins dans
certaines zones côtières et sédimentaires (Bergmann et al., 2017; Fischer, Elsner,
Brenke, Schwabe, & Brandt, 2015; Kanhai et al., 2019). Cependant, la conclusion
scientifique générale est que, pour l’instant, la pollution par les microplastiques ne
constitue pas un risque généralisé (SAPEA, 2019). Le SAPEA conclut également que,
si on laisse la bride libre à la pollution par les microplastiques, le laisser-faire
aboutira à un dépassement des seuils de concentration dans un avenir proche ainsi
qu’à l’apparition d’un risque généralisé d’ici un siècle (SAPEA, 2019: 2.8). En outre,
les scientifiques s’accordent également pour dire que les éléments de preuve
soulèvent de véritables préoccupations et qu’il convient de faire preuve de
précaution à cet égard.
En conclusion, au vu de l’accumulation des preuves scientifiques démontrant les
dangers d’une pollution par les microplastiques incontrôlée, ainsi que de sa
persistance à long terme et de son irréversibilité, il est nécessaire de prendre des
mesures raisonnables et proportionnées26 pour empêcher le rejet de microplastiques
dans l’environnement et leur formation à partir de la décomposition de
macroplastiques. Ces mesures doivent avoir pour but de: a. limiter l’utilisation
inutile des matières plastiques; b. restreindre l’utilisation délibérée des
microplastiques; c. empêcher ou atténuer la formation de microplastiques tout au
long du cycle de vie des matières plastiques et des produits contenant du plastique;
d. éviter le rejet dans l’environnement le plus près possible de la source; et
e. limiter et contrôler les points clés du cheminement de la source au puits.
24 Il convient de noter que l’expression «sans effet» désigne l’absence d’incidence significative sur les
effets mesurés. Une incidence «invisible» reste susceptible d’exister. 25
Dans les grandes lignes, le risque correspond à la probabilité que des conséquences néfastes
apparaissent dans certaines circonstances (Iannone, 2018). 26
Conformément à la hiérarchie des déchets établie par l’UE, à savoir la prévention, la réutilisation, le
recyclage, la valorisation et l’élimination tel qu’indiqué à l’article 4, paragraphe 1, de la directive-cadre
relative aux déchets (UE 2018/851)
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 25
Recommandations
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
26 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
2. Recommandations
2.1 Élargir le champ d’application des politiques existantes en
vue d’empêcher et de réduire la pollution par les
microplastiques
2.1.1 Des microplastiques dans l’eau, l’air et le sol
Comme indiqué précédemment, la science n’a pas encore établi de données de
référence fiables sur les stocks, les flux, le cheminement et les tendances
temporelles des microplastiques dans les différents compartiments de
l’environnement. Toutefois, selon un certain nombre d’estimations publiées, la
pollution des sols et des systèmes terrestres et d’eau douce par les microplastiques
pourrait être plus importante que la pollution estimée pour le milieu marin (Boucher
& Friot, 2017; Hann et al., 2018; Horton, Walton, Spurgeon, Lahive, & Svendsen,
2017). D’après Boucher et al. (2017), 52 % des microplastiques primaires
resteraient piégés dans le sol. L’ECHA (2019) a également conclu que la plupart des
microplastiques délibérément ajoutés à des produits finissaient dans le sol.
Certaines études portent aussi sur les microplastiques en suspension dans l’air libre
et dans des environnements intérieurs (Dris et al., 2015; Dris, Gasperi, Saad,
Mirande, & Tassin, 2016; Prata, 2018), mais plutôt comme un cheminement pour le
transport de microplastiques d’un endroit à l’autre – par exemple, la poussière
provenant de la ville et contenant des microplastiques en suspension dans l’air qui
se transforme en retombées atmosphériques sur le sol et les masses d’eau.
Toutefois, du point de vue de l’incidence sur la santé humaine, les microplastiques
en suspension dans l’air pourraient être importants en ce qui concerne l’inhalation
dans le corps (Gasperi et al., 2018; Wright & Kelly, 2017).
À ce jour, c’est principalement la pollution marine par les microplastiques qui a
retenu l’attention des décideurs politiques, des scientifiques et du grand public.
Cette situation est compréhensible, dans la mesure où le sort de l’océan joue un rôle
majeur en attirant l’attention sur l’omniprésence de la pollution par les matières
plastiques et sur ses effets pernicieux. Nous recommandons que l’objet de
l’attention politique soit élargi à d’autres compartiments de l’environnement en plus
de l’attention dont bénéficie actuellement le milieu marin, et non à son détriment. Il
est important que la pollution marine par les microplastiques demeure une
préoccupation politique majeure en Europe et dans le monde entier (Gajdoš, Šperl,
Kaiser, & Mentl, 2011; Raubenheimmer, Nilufer, Oral, & McIllgorm, 2017; UN
Environment, 2019c).
La directive-cadre «stratégie pour le milieu marin» (DCSMM), par exemple, impose
des obligations aux États membres en ce qui concerne la présence de microdéchets
(y compris les microplastiques). Nous nous félicitons de tous les progrès réalisés
jusqu’à présent dans le cadre de la DCSMM, mais il reste encore beaucoup à faire.
Le fait que, selon les scientifiques, environ 99 % des matières plastiques qui
pénètrent dans l’océan «disparaissent» vient le confirmer. La modélisation
scientifique semble indiquer que ces «matières plastiques manquantes» se
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 27
retrouvent dans des zones côtières reculées, dans les profondeurs de la colonne
d’eau et dans les sédiments, où les concentrations peuvent être quatre à cinq fois
supérieures à celles dans la colonne d’eau (Koelmans, Kooi, Law, & van Sebille,
2017; Worm, Lotze, Jubinville, Wilcox, & Jambeck, 2017). Il est à noter que ces
fortes concentrations dans les sédiments ne signifient pas nécessairement que le
seuil d’effet des risques concernant les effets nuisibles sur l’environnement (comme
indiqué dans le rapport du SAPEA, 2019:2.6) a été dépassé, étant donné que les
sensibilités relatives des espèces exposées doivent également être prises en
considération.
Dernièrement, nous avons observé un regain d’attention scientifique pour les
microplastiques présents dans les systèmes d’eau douce (Wagner & Lambert, 2018).
Cette attention est beaucoup moins marquée en ce qui concerne la pollution du sol
par les microplastiques, pour laquelle il existe très peu d’informations sur le devenir
et le cheminement des microplastiques, bien que certaines études aient été publiées
à ce sujet (Hurley & Nizzetto, 2018; Rillig, 2012).
Compte tenu des éléments de preuve, nous souhaitons signaler un certain nombre
de domaines potentiellement pertinents qui, à la lumière d’études complémentaires,
pourraient déboucher sur des mesures stratégiques concrètes ou sur une adaptation
des mesures existantes:
à la différence de la directive-cadre «stratégie pour le milieu marin», la
directive-cadre sur l’eau n’oblige pas les États membres à prendre des
mesures pour lutter contre les déchets dans les eaux de surface. Dans le
cadre de l’examen détaillé de la directive-cadre sur l’eau et de tout suivi
éventuel de cet examen, la Commission pourrait envisager d’aligner la
directive sur la manière dont les déchets et les microdéchets sont traités au
titre de la directive-cadre «stratégie pour le milieu marin»;
une source importante de la pollution du sol par les microplastiques découle
de l’utilisation agricole des boues d’épuration contenant de fortes
concentrations de microplastiques filtrés des eaux usées. Cette situation fait
ressortir un conflit potentiel entre, d’une part, le fait de retirer un plus grand
nombre de microplastiques du milieu aquatique (par exemple, grâce à un
meilleur filtrage qui pourrait être imposé dans le cadre de la directive relative
au traitement des eaux urbaines résiduaires, si cela s’avère opportun, à la
suite de l’examen en cours qui devrait s’achever en 2019) et, d’autre part, la
probabilité que ces microplastiques se retrouvent dans le sol s’ils ne sont pas
retirés des boues. Cela pourrait également avoir une incidence sur la directive
de 1986 relative à l’utilisation des boues d’épuration en agriculture
(directive 86/278/CEE)27 dont la révision a, à notre connaissance, été
envisagée ces dernières années28 – voir également (European Court of
Auditors, 2015);
27 https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex:31986L0278
28 http://ec.europa.eu/environment/waste/sludge/index.htm
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
28 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
les directives de l’UE relatives à la qualité de l’air ambiant à l’extérieur
contiennent des dispositions détaillées en ce qui concerne les particules en
suspension dans l’air à deux seuils de dimension différents (c’est-à-dire le
diamètre aérodynamique29) – PM10 (particules d’un diamètre de 10 microns
ou moins) et PM2.5 (particules d’un diamètre de 2,5 microns ou moins). Étant
donné qu’aucun type ni aucune composition de matériau ne sont spécifiés,
tous les microplastiques en suspension dans l’air appartenant à ces catégories
de dimensions sont automatiquement concernés. Toutefois, selon les quelques
études disponibles sur les retombées des fibres microplastiques dans l’air (Cai
et al., 2017; Dris et al., 2017), les niveaux de concentration des fibres dont la
longueur est inférieure à 50 µm sont inconnus. La répartition des dimensions
publiée pour les longueurs de 50 µm à l’échelle du millimètre indique des
concentrations plus élevées pour les fibres dont la longueur est inférieure à
50 µm. Parallèlement au bilan de qualité de ces directives en cours, il pourrait
être utile de réexaminer ce problème ainsi que le fait que l’exposition à
l’intérieur n’est pas couverte;
la législation a tendance à être perçue comme le moyen définitif d’apporter les
changements nécessaires. Toutefois, les considérations relatives au
comportement humain et organisationnel peuvent signifier que la législation
n’est pas toujours la meilleure ou la seule solution. Outre les règlements, les
redevances, les interdictions, etc., les mesures d’atténuation de la pollution
par les microplastiques peuvent inclure des accords volontaires et des actions
de sensibilisation, de communication et d’éducation plus douces (SAPEA,
2017: 3.4). Le consortium SAPEA fait remarquer qu’un comportement peut se
modifier rapidement face à de nouvelles circonstances ou de nouveaux
messages médiatiques. Les changements découlant de la législation peuvent
prendre beaucoup de temps en raison de ce qui suit: la lenteur des processus
décisionnels; l’inertie de réponse des personnes visées; et les difficultés de
mise en application. La recherche sur le changement de comportement
semble indiquer qu’il est préférable de combiner différentes interventions et
approches, en s’attaquant à une série de facteurs déterminants du
comportement, tant sur le plan psychologique que situationnel (normes
sociales, attitudes, valeurs, etc.). Les personnes et les organisations sont
susceptibles de modifier leur comportement s’il existe une motivation
suffisante, des solutions faisables ou des conditions favorables et des mesures
incitatives (Brennholt, Heß, & Reifferscheid, 2018; Eriksen, Thiel, Prindiville, &
Kiessling, 2018; SAPEA, 2019; van Valkengoed & Steg, 2019).
La Commission devrait tirer parti des dispositions actuelles figurant dans les
instruments juridiques existants en vue d’empêcher et d’atténuer la présence des
microplastiques dans l’air, le sol et l’eau. La pollution de l’air, de l’eau douce et du
sol par les microplastiques devrait faire l’objet d’une politique dans la même mesure
que la pollution marine par les microplastiques. Il convient de mettre en place de
29 Voir le chapitre 1 dans (World Health Organisation, 1999)
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 29
nouvelles actions dans la mesure du possible dans le cadre des instruments
pertinents existants. À titre d’exemples potentiellement pertinents, nous pouvons
citer la directive-cadre sur l’eau ainsi que les directives applicables au traitement
des eaux usées urbaines, à l’utilisation de boues d’épuration en tant qu’engrais, et à
la qualité de l’air. Les preuves et les avis scientifiques devraient permettre de
déterminer la meilleure mesure à prendre à l’égard de chaque problème, substance
et contexte donné. Outre la législation, des mesures volontaires, économiques ou de
persuasion moins astreignantes devraient également être envisagées dans le but de
promouvoir un changement responsable au moyen d’initiatives commerciales,
sociales ou plus altruistes.
2.1.2 La spécificité des substances et des contextes et les
utilisations présentant les risques potentiels les plus
élevés
Étant donné que leur dimension varie sur plus de six ordres de grandeur et qu’il
existe un large éventail de formes et de compositions, les microplastiques peuvent
constituer une catégorie de substances trop vaste pour être traitée par des mesures
réglementaires ou d’autres mesures de confinement, de restriction ou d’élimination
vérifiables (Rochman et al., 2019). Dans l’attente d’une approche ou d’un
paradigme plus précis et vérifiable pour décrire les microplastiques collectivement, il
convient d’adopter une approche différenciée axée sur les substances et les
contextes30, afin de déterminer clairement et précisément quel matériau et quelle
situation sont visés par chaque mesure spécifique. Dans sa proposition de restriction
des microplastiques ajoutés intentionnellement au titre du règlement REACH,
l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA, 2019) fait référence à
Hartmann et al. (2019) pour illustrer le niveau de précision et de différenciation
requis à des fins réglementaires, en décrivant 14 groupes de produits différents
contenant de tels microplastiques et en proposant une série de mesures de
restriction à leur égard, allant des interdictions aux exigences en matière
d’étiquetage et de déclaration, avec une diversité de dérogations et de régimes
transitoires. Les restrictions proposées s’appuient sur une évaluation des risques
pluridimensionnelle, dont il ressort que les risques découlant du rejet de ces
microplastiques dans l’environnement ne sont pas maîtrisés comme il se doit. Ce
constat pourrait conduire à une restriction juridiquement contraignante d’ici à 2021
(ECHA, 2019; Kentin, 2018).
Indépendamment de la proposition de restriction au titre du règlement REACH,
selon les données scientifiques, les mesures devraient concerner en priorité les
matières plastiques présentant les risques potentiels les plus élevés – c’est-à-dire
les plastiques qui sont utilisés en grande quantité (emballages, plastiques à usage
unique, etc.), les plastiques qui présentent des taux d’émission élevés et/ou les
plastiques qui se caractérisent par d’importantes propriétés dangereuses
30 Par exemple, en fonction d’une combinaison de paramètres tels que la composition, la forme, l’origine, la
localisation, le cheminement, le milieu concerné, l’effet, etc.
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
30 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
intrinsèques (SAPEA, 2019: 4.4.2). Étant donné que plus des deux tiers (en poids)
de la pollution par les microplastiques proviennent de la décomposition d’éléments
de déchets plastiques de plus grande dimension (Boucher & Friot, 2017), la
stratégie européenne sur les matières plastiques, prise dans son ensemble,
concerne directement la pollution par les microplastiques31. Le dernier tiers pénètre
dans l’environnement déjà sous la forme de microplastiques, produits
intentionnellement (par exemple, les granulés de plastique, les microplastiques
ajoutés à des produits) ou issus de l’usure au cours du cycle de vie normal des
produits contenant des matières plastiques (par exemple, les fibres textiles
synthétiques, l’abrasion des pneumatiques, les freins à moteur, le gazon artificiel,
etc.). Les estimations des émissions globales de chacune de ces sources varient
mais, dans l’ensemble, l’abrasion des pneumatiques et les fibres textiles
synthétiques représentent deux des plus grandes proportions. La poussière des
villes et les granulés de plastique représentent également des proportions non
négligeables, bien que les marges d’incertitude soient plus élevées en ce qui les
concerne. Selon les estimations, le rejet annuel de microplastiques ajoutés
intentionnellement à des produits serait de 36 000 tonnes (ECHA, 2019) – un chiffre
analogue à la perte estimée des granulés de plastique (41 000 tonnes (Hann et al.,
2018)).
D’un point de vue scientifique, si la conclusion de l’évaluation des risques de l’ECHA
relative aux microplastiques ajoutés intentionnellement est retenue, la même
logique de restriction devrait s’appliquer à d’autres composantes de la pollution par
les microplastiques. Toutefois, à l’exception des granulés de plastique de
préproduction, il est difficile d’envisager une restriction exécutoire pour des sources
comme les pneumatiques ou les textiles en raison du caractère diffus de la
responsabilité. La stratégie sur les matières plastiques annonçait des travaux visant
à déterminer des options stratégiques permettant de réduire ces émissions. Elle
mentionne des approches en amont de l’utilisation, comme l’étiquetage,
l’amélioration de la conception des matériaux et des produits, etc. – qui
correspondent davantage à l’innovation et modifient le paradigme
production/consommation.
À court terme, des experts laissent entendre que des réductions significatives de
certaines émissions pourraient être réalisées grâce à des solutions «en bout de
chaîne» pratiques, sans qu’il soit nécessaire de mettre en place une nouvelle
législation (SAM, 2019). Cette pratique ne devrait pas compromettre les efforts
visant à trouver, à long terme, des solutions plus durables en amont. Il n’existe
aucune analyse quantitative scientifique coûts-avantages, socio-économique ou
autre similaire à celles de la proposition de restriction de l’ECHA sur lesquelles nous
pourrions nous appuyer pour formuler des recommandations fermes en faveur de
mesures concrètes à court terme. Nous considérons toutefois que les éléments
31 Il convient de noter à cet égard que l’accent est mis sur l’interdiction des plastiques à usage unique, des
oxodégradables et des rejets d’engins de pêche, ainsi que sur l’objectif de recyclage de tous les
emballages plastiques (soit 40 % de l’ensemble des plastiques produits) d’ici à 2030.
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 31
suivants sont suffisamment pertinents pour les porter à l’attention de la
Commission:
les normes de performance obligatoires relatives aux machines à laver à
usage domestique, aux blanchisseries industrielles et aux autres installations
similaires pourraient réduire considérablement les émissions des fibres
textiles grâce à des améliorations techniques progressives;
la pollution par les microplastiques provenant de l’abrasion des pneumatiques
et des déchets broyés de caoutchouc utilisés dans les terrains synthétiques
pourrait être réduite en apportant des modifications aux intercepteurs
d’hydrocarbures pour les réseaux routiers et les systèmes de drainage
spécialisés32;
la dispersion des granulés de plastique de préproduction pourrait être limitée
grâce à l’introduction d’une condition dans les licences intégrées de pollution
et de contrôle au titre de la directive sur les émissions industrielles, qui visait
en premier lieu les risques les plus importants/les principaux pollueurs.
Étant donné que les microplastiques consistent en une multitude de matériaux, il
est essentiel d’adopter une approche pluridimensionnelle. Il faut notamment
prendre des mesures axées sur les substances et les contextes en utilisant des
paramètres tels que la composition, la forme, l’origine, la localisation, le
cheminement, le milieu concerné et les effets. Les preuves et les avis scientifiques
devraient permettre de déterminer la meilleure mesure à prendre à l’égard de
chaque problème, substance et contexte donné. Il convient par ailleurs de cibler les
sources de microplastiques à volume élevé, à émissions élevées et/ou à risques
intrinsèquement élevés, qui présentent les risques potentiels les plus importants. À
court terme, il pourrait notamment s’agir des mesures suivantes: des conditions
d’octroi de licences plus strictes pour les producteurs de granulés de plastique au
titre de la directive sur les émissions industrielles; des normes de performances
rigoureuses en ce qui concerne les machines à laver, visant les microplastiques
textiles; et l’amélioration des intercepteurs du système d’assainissement pour les
microplastiques rejetés par l’abrasion des pneumatiques. Il convient en outre de
mettre au point des solutions préventives à long terme plus innovantes et durables.
2.1.3 Les nanoplastiques
Les limites des équipements scientifiques restreignent la détection, le suivi et la
mesure sur le terrain des microplastiques, en particulier en ce qui concerne les
microplastiques de petite dimension et les endroits difficiles d’accès. Cette situation
se traduit notamment par des études de terrain relativement peu nombreuses en ce
qui concerne le prélèvement d’échantillons de particules appartenant à la catégorie
de dimensions inférieures et par l’absence d’études sur les nanoplastiques – c’est-à-
dire la fraction de la pollution par les matières plastiques dont la dimension est
32 https://www.waterbriefing.org/home/water-issues/item/15892-tyre-abrasion-%E2%80%93-the-dark-
side-of-microplastics-pollution
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
32 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
inférieure ou égale à 100 nm (Bäuerlein et al., 2018; GESAMP, 2016; Lehner,
Weder, Petri-Fink, & Rothen-Rutishauser, 2019; SAPEA, 2019). Une autre
complication possible en matière de mesure et d’analyse concerne la possibilité
d’établir une distinction entre les différents types de nanoparticules
anthropogéniques et d’origine naturelle – voir (Nowack & Bucheli, 2007).
En réalité, la plupart des études relatives aux microplastiques environnementaux
portent sur l’échantillonnage et l’analyse de particules dont la dimension est
inférieure ou égale à 100 µm. Cependant, comme le laissait prévoir la fragmentation
progressive de particules de plus grande dimension, certaines études montrent que
le nombre de particules détectées augmente considérablement lorsqu’il est possible
d’échantillonner des particules de plus petite taille, de 1 à 10 µm, avec toutefois des
marges d’erreur associées plus élevées (Araujo, Nolasco, Ribeiro, & Ribeiro-Claro,
2018; Enders, Lenz, Stedmon, & Nielsen, 2015; Lorenz, Roscher, Meyer, Primpke, &
Gerdts, 2018). Il en découle notamment que les concentrations réelles de
microplastiques environnementaux – nombre de particules par unité de volume –
peuvent être sous-estimées (Adam, Yang, & Nowack, 2019; Conkle, Báez Del Valle,
& Turner, 2018). Cet aspect est important pour plusieurs raisons.
Premièrement, la toxicité devrait augmenter à mesure que la dimension des
particules plastiques diminue (Jeong et al., 2016) (Jeong et al., 2018) en raison
de l’augmentation du rapport surface/volume, du point de vue de la libération
d’additifs toxiques de la matrice plastique ainsi que de l’adsorption possible et
(Velzeboer, Kwadijk, & Koelmans, 2014) de la concentration des substances
toxiques dans le milieu environnant (Rios Mendoza, Karapanagioti, & Álvarez,
2018).
Deuxièmement, la facilité avec laquelle les particules de plastique peuvent être
absorbées par le biote augmente également à mesure que la taille diminue. Par
exemple, en ce qui concerne les organismes mammifères, la valeur 150 µm33
marque un seuil approximatif en dessous duquel une absorption systémique
limitée (≤ 0,3 %) dans l’organisme se produit avec une facilité d’absorption
progressive par inhalation et par ingestion (Wright & Kelly, 2017), les particules
dont la dimension est inférieure à 1,5 µm étant susceptible de pénétrer plus
profondément dans les organes et les particules inférieures ou égales à 250 nm
pouvant traverser les barrières hémato-encéphalique et placentaire (EFSA Panel
on Contaminants in the Food Chain (CONTAM), 2016).
Troisièmement, cela peut vouloir dire que les seuils de concentration pour des
effets utilisés dans la caractérisation quantitative des risques (voir SAPEA, 2019:
2.6; ECHA, 2019: 1.4.4.9 et les références qui s’y trouvent) ont peut-être déjà
été atteints ou dépassés dans différents compartiments de l’environnement, bien
qu’il n’existe pas encore de technique d’analyse pour le prouver ou l’infirmer.
33 En ce qui concerne les microplastiques dont la dimension est supérieure à 150 µm, des effets locaux sur
le système immunitaire et une inflammation de l’intestin sont escomptés.
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 33
Bien que le domaine de la recherche sur les microplastiques soit relativement
nouveau, il est inquiétant de constater que des informations plus détaillées
n’émergent pas plus rapidement en ce qui concerne la présence et le devenir des
particules de plastique submicroniques (c’est-à-dire les nanoplastiques), sans parler
de leurs incidences possibles sur la santé et l’environnement. Les rares nouvelles
données de laboratoires sur les conséquences de l’exposition aux nanoplastiques sur
la morphologie, le comportement et la reproduction (da Costa, Santos, Duarte, &
Rocha-Santos, 2016; Rios Mendoza et al., 2018) et la facilité avec laquelle ils
traversent les barrières biologiques (Al-Sid-Cheikh et al., 2018) concordent, en tout
état de cause, avec la préoccupation susmentionnée du risque accru qu’ils peuvent
représenter. Une innovation récente devrait permettre de faciliter le suivi des
nanoplastiques dans différentes expériences de laboratoire (Koelmans, 2019;
Mitrano et al., 2019).
Pour ce qui est des actuels règlements de l’UE sur les nanoplastiques, le document
le plus pertinent est la récente version révisée des annexes du règlement
REACH (UE) 2018/1881)34. Ces annexes établissent une série de tests devant être
effectués dans le cadre des exigences relatives à l’enregistrement des
nanomatériaux manufacturés. Elles entreront en vigueur en 2020. Elles ne
s’appliquent toutefois qu’aux nanoplastiques qui sont intentionnellement fabriqués
sous une forme correspondant à la définition. Elles ne s’appliquent pas aux
nanoplastiques issus de processus de dégradation. Néanmoins, les analyses
spécifiques des propriétés physicochimiques, de la toxicité et de l’écotoxicité qui
devront être élaborées et réalisées en ce qui concerne les nanomatériaux
manufacturés peuvent contribuer à faire progresser la science et à mieux
comprendre tous les types de nanoplastiques, quelle que soit leur origine – voir
également (Syberg & Hansen, 2016) et (Rist & Hartmann, 2018). Un exemple plus
spécifique – également dans le cadre du règlement REACH – concerne la restriction
possible des microplastiques ajoutés intentionnellement à des produits. Cette
proposition de restriction vise tout particulièrement certaines catégories de
microplastiques fabriqués. Dans la proposition de restriction, la définition des
microplastiques couvre les particules dont la dimension varie de 1 nm à 5 mm, et
couvre donc de facto les nanoplastiques (dont la taille est comprise entre 1 et
100 nm).
La Commission devrait prendre des mesures pour permettre à la communauté
scientifique de pallier le manque de connaissances au sujet de la présence, de la
concentration et du comportement de la pollution par les nanoplastiques dans
différentes situations. Tant pour les microplastiques en général que pour les
nanoplastiques, il est important, d’un point de vue politique, que les décideurs
soient régulièrement informés et capables de prendre des mesures préventives ou
d’atténuation des risques, si des preuves scientifiques relatives aux risques pour
34 Cela repose en partie sur la définition recommandée dans (2011/696/UE) qui a permis de créer des
définitions juridiques pour REACH et d’autres lois sectorielles de l’UE, comme le règlement sur les
produits biocides et celui sur les dispositifs médicaux – voir également (Rauscher et al., 2019)
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32018R1881&from=FR
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
34 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
l’environnement et la santé humaine et aux dangers spécifiques aux nanoplastiques
venaient à être apportées.
2.2 Tenir compte des profondes répercussions socio-
économiques et en matière de compromis des actions
stratégiques de lutte contre la pollution par les
microplastiques
Derrière la question de la pollution par les microplastiques réside le fait que les
matières plastiques sont devenues omniprésentes dans notre quotidien. De cette
situation découlent tous les problèmes que la société, les acteurs économiques et
les politiques doivent affronter parce que nous n’avons pas su mettre au point un
système plastique durable dès le début. L’ensemble de la pollution causée par les
matières plastiques est un symptôme de cet échec. La circularité totale des matières
plastiques est donc le fil conducteur de la stratégie européenne 2018 sur les
matières plastiques et d’initiatives similaires mises en œuvre ailleurs, notamment au
Canada (Canadian Council of Ministers of the Environment, 2018; Pettipas, Bernier,
& Walker, 2017). Il est toutefois nécessaire de s’assurer, lors de l’élaboration de
politiques responsables, que les solutions choisies ne se révèlent pas pires – sur le
plan humain, environnemental, social ou économique – que les problèmes initiaux
(Bach, Lehmann, Görmer, & Finkbeiner, 2018; EEB, 2018; Peake, 2018). Ce casse-
tête met en évidence la nécessité de fonder des mesures stratégiques concrètes sur
une analyse scientifique des compromis, des stratégies/solutions de substitution,
des évaluations du cycle de vie, des calculs de rentabilité, etc. Ce type de
quantification, qui peut se révéler très complexe35 selon la portée et les conditions
limites, n’entre pas dans le champ d’application du présent avis et de l’examen des
preuves scientifiques réalisé par le consortium SAPEA. Elle devrait cependant
s’inscrire explicitement dans l’élaboration et la conception de mesures stratégiques
spécifiques visant à lutter contre la pollution par les microplastiques.
Une autre question générale essentielle concerne l’importance relative de la
pollution par les microplastiques par rapport aux autres polluants dangereux
connus – notamment les pesticides, les antibiotiques résiduels, les hormones, les
métaux lourds, etc. La pollution par les matières plastiques et les microplastiques ne
figure pas dans certaines grandes listes de substances prioritaires. Voir, par
exemple, l’Organisation mondiale de la santé (OMS)36, la Commission Lancet sur la
pollution et la santé (Landrigan et al., 2018); et l’initiative de biosurveillance
humaine37. En revanche, un certain nombre de rapports de l’ONU traitent plus ou
moins en détail de la menace que représente la pollution par les plastiques et les
microplastiques. Il s’agit notamment des rapports «Vers une planète sans pollution»
(United Nations Environment Programme, 2017), «Perspectives mondiales en
35 Les biodégradables comme solutions aux matières plastiques traditionnelles en sont un exemple
concret – voir l’encadré 1. 36
https://www.who.int/heli/risks/en/ 37
https://www.hbm4eu.eu/the-project/, bien que ce projet énumère certaines substances utilisées comme
additifs dans les matières plastiques
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 35
matière de produits chimiques» (UN Environment, 2019a), et du «Sixième rapport
sur l’avenir de l’environnement mondial de l’ONU» (UN Environment, 2019b). L’OMS
procède actuellement à l’examen des effets des microplastiques sur la santé
humaine par une exposition à l’alimentation et à l’air et le comité scientifique des
risques sanitaires, environnementaux et émergents (CSRSEE) de la Commission
européenne (SCHEER - Scientific Committee on Health Environmental and Emerging
Risks, 2018) a récemment publié une déclaration, dans laquelle il cite les
microplastiques et les nanoplastiques présents dans l’environnement comme l’un
des 14 nouveaux problèmes pour la santé et l’environnement. Il existe aussi un
débat pertinent au sein de la communauté scientifique, entre les partisans et les
détracteurs de l’attention consacrée à la pollution par les microplastiques (see
Backhaus & Wagner, 2018; Burton, 2015, 2017; Kramm et al., 2018).
En tant que conseillers scientifiques, nous examinons sérieusement cette question,
d’un point de vue scientifique et de politique publique. Il peut être possible de
classer les polluants par ordre de priorité sur la base d’une évaluation scientifique
objective de leur présence et de leurs propriétés. Toutefois, comme le montrent les
sciences sociales, comportementales et politiques, les décisions relatives aux
mesures stratégiques sont prises en fonction de nombreuses contributions et
réflexions, dont au moins une évaluation scientifique (SAPEA, 2019: chapitre 4). En
fait, il ne faut pas laisser passer l’occasion de fournir des conseils scientifiques en
vue d’éclairer le processus décisionnel, même dans des conditions d’incertitudes, car
les figures politiques, les parties prenantes ainsi que d’autres acteurs agiront
souvent quoi qu’il en soit et seront guidés par d’autres facteurs (SAPEA, 2019:
chapitre 4). Si les connaissances et incertitudes scientifiques relatives aux effets des
chlorofluorocarbones (CFC) n’avaient pas été évoquées lors du débat des
années 1980, la guérison de la couche d’ozone n’aurait peut-être pas pu se produire
(Parson, 2003; Pawson et al., 2010). Les décideurs politiques devraient également
se servir du consensus sur la pollution par les matières plastiques et les
microplastiques comme d’un tremplin en vue d’adopter davantage de mesures
délicates en matière de protection de l’environnement et de la santé dans d’autres
domaines plus contestés et difficiles (Raubenheimer & McIlgorm, 2017).
Les mesures de prévention de la pollution par les microplastiques doivent être
réalisables sur le plan politique et socio-économique. Dans le but de garantir un
bénéfice net positif et durable à la société, des analyses quantitatives de facteurs
généraux (par exemple, les compromis; les stratégies/solutions de substitution; les
évaluations du cycle de vie; et les calculs de rentabilité) devraient figurer de
manière visible dans les analyses d’impact des différentes mesures. En outre,
l’élaboration de telles analyses socio-économiques et en matière de compromis sur
la pollution par les microplastiques devrait s’inscrire dans une stratégie de
«réduction, réutilisation et recyclage» visant à améliorer les résultats
environnementaux, économiques et sociaux du système plastique dans son
ensemble.
La Commission devrait également profiter des inquiétudes du grand public au sujet
de la pollution par les microplastiques et du consensus relatif à la pollution plastique
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
36 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
au sens large pour favoriser l’adoption de mesures complexes en matière de
protection de l’environnement et de la santé dans d’autres domaines plus contestés.
ENCADRÉ 1. Les microplastiques et le problème épineux de la
dégradation38
L’un des aspects inquiétants de la pollution par les matières plastiques à base de
polymères traditionnels concerne sa persistance dans l’environnement sur une
très longue période. Cette durabilité est l’une des propriétés souhaitables des
matières plastiques utilisées dans de nombreuses applications. Toutefois, en ce
qui concerne les déchets plastiques, cela signifie que malgré l’altération
météorique, la fragilisation, la fragmentation, etc. dans des conditions de
température élevée, de disponibilité d’oxygène et d’exposition à la lumière
ultraviolette (par exemple, le soleil), la dégradation (essentiellement
biodégradation) favorisée par des micro-organismes de monomères ou de
simples molécules de méthane, de dioxyde de carbone et d’eau est
extrêmement lente et peut se retrouver au point mort dans le milieu marin (P.
Kershaw, 2018; Nithin & Goel, 2017). En outre, certaines matières plastiques
sont pratiquement impossibles à éliminer biologiquement en toutes
circonstances, notamment les matières plastiques à base de polyesters
aromatiques. L’une de ces matières plastiques est la plus utilisée de toutes: le
polytéréphtalate d’éthylène (PET).
Toutefois, de nombreuses applications transitoires à grand volume de matières
plastiques pour les emballages, en agriculture et en horticulture, etc., qui sont à
l’origine d’une grande partie de la pollution par les matières plastiques,
pourraient se passer d’une telle longévité et tirer parti d’autres propriétés
intéressantes du plastique. En effet, cette réflexion, conjuguée aux inquiétudes
plus générales liées au développement durable, a suscité l’élaboration de
différents types de matières plastiques dont la propension à se dégrader est plus
élevée ou dont l’empreinte écologique est plus faible, notamment ce qu’on
appelle les plastiques oxodégradables, les plastiques biodégradables, les
bioplastiques (fabriqués à partir de matières premières d’origine biologique
plutôt que des matières premières pétrochimiques, bien que ces matières ne
soient pas nécessairement plus biodégradables que les plastiques traditionnels)
et les matières compostables. Les plastiques oxodégradables ne sont pas plus
biodégradables que les matières plastiques traditionnelles. Ils se décomposent
simplement plus vite que les microplastiques et aggravent et accélèrent en
réalité la pollution par les microplastiques. Les matières plastiques
oxodégradables sont donc interdites en France et en Espagne et le seront
bientôt dans toute l’UE en vertu d’une directive sur la réduction de l’incidence de
certains produits plastiques sur l’environnement (la directive sur les plastiques à
38 Pour consulter un examen récent de la biodégradabilité et des normes qui y sont associées, voir
(Harrison, Boardman, O’Callaghan, Delort, & Song, 2018)
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 37
usage unique)39. En ce qui concerne les véritables matières biodégradables, il
est évidemment important qu’elles soient inoffensives pour l’environnement et
que, lors de leur décomposition, elles ne deviennent pas des monomères
toxiques et ne rejettent pas d’additifs toxiques [voir (P. Kershaw, 2018) pour
une liste des dangers/de la toxicité des matières plastiques et des
monomères/précurseurs de plastique].
D’un point de vue réglementaire, dans l’éventualité où des prescriptions en
matière de biodégradabilité ou de compostabilité seraient formulées, il serait
important de définir des critères clairs et précis sur une série de questions,
notamment: a) quel délai (quelle proportion de déchets doivent se biodégrader
et dans quel intervalle de temps?); b) dans quels environnements (par exemple,
la biodégradation s’effectue plus facilement dans un compost chaud et humide
que dans de l’eau sombre, froide et saline); c) dans quelle mesure d’autres
processus de dégradation comme la photo-dégradation, la dégradation chimique
et la dégradation physique seraient pris en considération?; et d) au regard de
quelles normes ou références le respect des critères doit-il être évalué?
(McDevitt et al., 2017). Dans le contexte de l’UE, il s’agit d’une question
potentiellement pertinente à l’heure actuelle et dans un avenir proche en ce qui
concerne les matières plastiques utilisées dans les paillis agricoles et les
dispositions de la directive relative aux engrais40 devant être adoptée en 2019,
selon lesquelles elles peuvent obtenir le marquage CE pour autant que certaines
conditions strictes soient respectées.
Enfin, si l’élaboration de matières plastiques totalement dégradables peut
constituer une option potentiellement attrayante et inoffensive pour
l’environnement en ce qui concerne certaines applications spécifiques (comme
l’agriculture et les matériaux destinés à entrer en contact avec des denrées
alimentaires), de nombreux obstacles subsistent encore, notamment:
a) le coût supplémentaire lié au changement;
b) le fait que l’on rencontre très rarement des conditions de dégradation
complète dans des conditions naturelles;
c) tout ce qui n’est pas conforme aux normes les plus strictes en matière
d’attribution et d’application du marquage «biodégradable» peut aller à
l’encontre du but recherché, étant donné que le public jettera plus
facilement les matières plastiques qu’il estime être biodégradables;
d) les plastiques biodégradables peuvent causer des problèmes lorsqu’ils
finissent dans la chaîne de recyclage des déchets plastiques traditionnels.
39 http://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2014_2019/plmrep/COMMITTEES/ENVI/AG/2019/01-
21/1174364EN.pdf 40
Le règlement révisé a été approuvé par le Conseil de l’UE
(http://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-15103-2018-INIT/en/pdf) puis par le Parlement
européen en mars 2019.
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
38 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
2.3 Promouvoir une coopération à l’échelle mondiale, des
échanges scientifiques de grande qualité et une certaine
cohérence des politiques
2.3.1 Coopération à l’échelle mondiale
La pollution par les microplastiques dans le milieu marin suscite l’intérêt de la
communauté politique internationale (GESAMP, 2010, 2016; Raubenheimer &
McIlgorm, 2017). Plusieurs stratégies régionales, nationales et internationales visent
à empêcher et à réduire la pollution par les matières plastiques et les
microplastiques, mais aucune d’elles ne prévoit un niveau d’engagement à la
mesure de l’ampleur et du rythme de croissance du problème (Borrelle et al., 2017).
Le document du SAM sur le contexte politique (SAM, 2018) présente la réponse
politique internationale et régionale en matière de protection des océans contre la
pollution par les microplastiques. Il n’existe aucune mesure équivalente pour les
autres compartiments de l’environnement.
Dans le même temps, on observe de fortes disparités géographiques au niveau des
causes de la pollution par les microplastiques, à la fois sur la terre, en mer et dans
l’air. L’existence et la disponibilité des données sur la pollution par les
microplastiques sont également réparties de manière inégale sur le plan
géographique (Horton et al., 2017). La capacité à empêcher et à atténuer la
pollution par les microplastiques varie d’une nation et d’une région à l’autre. Les
solutions ne peuvent être efficaces que si elles sont spécifiques au contexte et si
elles tiennent compte des conditions locales (Hamid et al., 2018), car il se peut que
les solutions propres à un territoire ne conviennent pas à un autre. Par exemple, il
est possible de diminuer l’arrivée des microplastiques dans les océans par les
rivières en arrêtant les microplastiques dans les filtres des stations d’épuration des
eaux usées. Cette pratique s’observe couramment dans les pays développés, mais
pas dans de nombreux pays en développement (P. Kershaw, 2016).
Nous pensons que le temps est venu de donner un élan décisif à des initiatives
internationales dans ce domaine. Les décideurs politiques pourraient notamment
prendre des mesures en vue de négocier un traité international visant à réduire la
pollution causée par les microplastiques et d’autres matières plastiques d’une
manière analogue à celle appliquée pour fixer les objectifs de l’accord de Paris sur le
climat – voir (Hugo, 2018) et les références qui y figurent. Ce traité ne devrait pas
se limiter à la pollution marine et devrait s’attaquer aux racines du problème. Il
devrait tirer parti de l’attrait croissant pour une action et une politique marines
internationales coordonnées, comme il ressort clairement des résolutions adoptées
sur les déchets marins et les microplastiques lors des quatre sessions de
l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement (ANUE) – voir les
recommandations adoptées lors de la troisième et de la quatrième ANUE (UN
Environment, 2018, 2019c). Les recommandations les plus récentes (UN
Environment, 2019c) invitent notamment le directeur exécutif du PNUE à organiser
des «initiatives actuelles de consultation scientifique pertinente» afin d’apporter une
contribution concrète au travail continu d’un groupe d’experts ad hoc à composition
non limitée sur le sujet et à mettre en place une nouvelle plateforme multipartite
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 39
chargée de prendre des mesures en faveur de l’élimination à long terme des déchets
marins et des microplastiques. Les travaux de ces organismes peuvent jouer un rôle
déterminant dans la conclusion d’un accord mondial intéressant, en déterminant des
mesures spécifiques à mettre en œuvre ainsi que des moyens permettant aux pays
en développement de coopérer pleinement.
D’un point de vue de gouvernance mondiale, l’état d’avancement des discussions
sur la pollution par les matières plastiques et les microplastiques est au même point
que celui des discussions sur le changement climatique en 1992 (Borrelle et al.,
2017), lorsque la convention-cadre des Nations unies sur les changements
climatiques (CCNUCC) a reconnu le problème du changement climatique, mais n’a
fait qu’encourager un soutien volontaire et indéfini à cet égard. Les décideurs
politiques devraient tirer des leçons de la lenteur des processus internationaux
visant à lutter contre le changement climatique et d’autres problèmes
environnementaux à l’échelle mondiale. Selon nous, il serait à la fois sage et
intelligent d’exploiter le consensus actuel pour parvenir à un accord international sur
la pollution par les microplastiques/matières plastiques de manière accélérée au lieu
d’attendre que la diplomatie internationale y parvienne à son rythme habituel.
La rapidité avec laquelle le protocole de Montréal relatif à des substances qui
appauvrissent la couche d’ozone a été adopté peut servir de modèle. La flexibilité
intégrée dans le protocole de Montréal a permis à celui-ci de tenir compte des
progrès réalisés dans les domaines suivants: normes en matière de science et de
surveillance; échange de données et d’informations; et technologies de recyclage et
de réduction (Raubenheimer & McIlgorm, 2017). Le protocole de Montréal prévoit
également le partage des résultats de recherche, la sensibilisation et l’éducation du
public, ainsi qu’un échange d’informations. Ces éléments, de même que la
production de données normalisées sur la pollution par les microplastiques et l’accès
à celles-ci (comme c’est le cas pour les données sur le climat), pourraient faire
partie d’un tel accord international sur la pollution par les microplastiques. Un
premier exemple possible au sein de l’UE concerne le partage, via EMODnet41, de
mesures normalisées relatives aux plastiques sur les plages et les fonds marins
d’Europe, au titre de la directive-cadre «stratégie pour le milieu marin»42, qui
s’étendra désormais aux microplastiques.
Dans l’ensemble, les initiatives mondiales pourraient profiter grandement d’une
plateforme scientifique sur la pollution par les matières plastiques. Les mesures
susmentionnées préconisées UN Environment (2019c) pourraient contribuer à
former le noyau d’une telle plateforme.
Promouvoir un traité mondial visant à réduire la pollution par les microplastiques et
d’autres matières plastiques et à s’attaquer à leurs racines. Encourager également
une collaboration internationale et interdisciplinaire et le partage à un stade précoce
des nouvelles connaissances et des résultats de recherche. La première chose à
41 Réseau européen d’observation et de données du milieu marin http://www.emodnet.eu/
42 Y compris l’interopérabilité des données prévue avec la Chine
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
40 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
faire serait de promouvoir la création d’une plateforme scientifique mondiale sur la
pollution par les matières plastiques et les microplastiques, qui permettrait un accès
partagé et transfrontalier à des données normalisées.
2.3.2 Qualité et pertinence des études scientifiques sur les
microplastiques
Le consortium SAPEA (2019) fait remarquer que la récente prolifération des études
sur les microplastiques ne s’accompagne pas d’une augmentation proportionnelle
des connaissances en raison de la redondance, de la marginalité et de la qualité
douteuse d’une grande partie de ce qui est publié. Par exemple, selon Koelmans et
al., (2019), sur 50 études sur les microplastiques dans les eaux douces et l’eau
potable, seules quatre études présenteraient une qualité et une fiabilité suffisantes.
Par ailleurs, un examen des microplastiques dans la chaîne alimentaire (Toussaint et
al., 2019) exclut 60 % des publications potentiellement pertinentes de son analyse
en raison de lacunes au niveau de la qualité des données. Voir également Hermsen
et al, (2018) pour un examen similaire de la qualité des études sur les
microplastiques présents dans le biote.
Le fait que le domaine souffre légèrement de partialité dans la publication des
résultats (Fanelli, 2012; Van Assen, Van Aert, Nuijten, & Wicherts, 2014) en faveur
des études qui révèlent un effet, au détriment de celles qui ne le font pas, n’aide
guère non plus (Koelmans, Besseling, et al., 2017; de Sá, Oliveira, Ribeiro, Rocha, &
Futter, 2018b; SAM, 2019)43. Les études sans effet peuvent pourtant être de grande
qualité et d’une grande valeur. Il convient de les publier. Elles sont nécessaires pour
constituer une base de connaissances complète et équilibrée permettant d’orienter
la recherche, les politiques et les pratiques futures (Frank, Engel, Matosin, Lum, &
Newell, 2014). La suppression de la partialité nécessite un changement culturel de
la part de la communauté scientifique et, en particulier, du milieu des éditeurs, en
ce qui concerne les incitations à la reconnaissance académique et les politiques
éditoriales (Edwards & Roy, 2016).
Des améliorations techniques et d’autres innovations s’imposent aussi pour
contourner les limites des équipements en ce qui concerne l’échantillonnage et
l’analyse sur le terrain de la concentration, de la composition, du comportement,
etc. de la pollution par les microplastiques. Il s’agit d’informations de base
essentielles pour les études d’évaluation des risques et des incidences. En outre,
afin de caractériser correctement les risques et incidences éventuels, il convient de
réaliser des études soigneusement préparées en vue de mesurer des courbes dose-
réponse complètes en ce qui concerne les types de microplastiques détectés dans
des situations réelles pour une diversité d’effets différents et un large éventail de
43 L’existence d’une telle partialité caractérisant de nombreux domaines de recherche est connue depuis
des décennies, et ses effets de distorsion documentés (Cook & Therrien, 2017)(Ferguson & Heene,
2012)(Dickersin, Chan, Chalmersx, Sacks, & Smith, 1987); Parmi les domaines les moins touchés par
ce problème figurent notamment la science du changement climatique (Harlos, Edgell, & Hollander,
2017), la physique des hautes énergies (https://lifeandphysics.com/2010/03/22/minimum-bias/) et
certains aspects de la recherche médicale appliquée (Son, Tavakoli, & Bartanusz, 2016)
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 41
concentrations. Nous approuvons donc l’option 6 du rapport du SAPEA (2019), qui
appelle à la mise au point d’approches d’évaluation des risques de grande qualité,
adaptées au but poursuivi et élaborées en fonction de la complexité de la pollution
par les microplastiques – voir également ECETOC (2018) and Koelmans, Besseling,
et al. (2017). Il convient de suivre des procédures rigoureuses en matière
d’assurance et de contrôle de la qualité et de les publier avec toutes les
métadonnées pertinentes. Ce point est indispensable pour assurer la validation, la
reproduction et, à terme, l’utilité des résultats obtenus.
Les scientifiques, les évaluateurs et les rédacteurs de revues, ainsi que les autorités
publiques en ce qui concerne la science de la gestion des risques, ont tous un rôle à
jouer dans les améliorations susmentionnées qu’il convient d’apporter au niveau de
la qualité et de la pertinence des études. La coopération des médias est également
la bienvenue en ce qui a trait à la communication des résultats scientifiques obtenus
et à la formulation d’observations intègres et crédibles.
Prendre des mesures concrètes en vue d’améliorer la qualité et la pertinence
générales des recherches sur les microplastiques en: i) favorisant les avancées en
matière de détection, de mesure et d’analyse, ainsi que les méthodes d’évaluation
des risques/incidences de la pollution par les microplastiques; ii) encourageant une
communication rigoureuse et transparente des procédures expérimentales et des
métadonnées; et iii) favorisant la réalisation et la publication d’études dose-réponse
et sans effet approfondies afin de générer une base de connaissances scientifiques
plus équilibrée pour sous-tendre les avis scientifiques et les politiques dans ce
domaine.
2.3.3 Normes et méthodes scientifiques internationales
Les synthèses ou méta-analyses basées sur l’enrichissement du corpus de
connaissances scientifiques sur la pollution par les microplastiques seraient facilitées
si les études réalisées suivaient des définitions et des techniques de mesure, de
suivi et d’évaluation des incidences normalisées et harmonisées. Celles-ci n’existent
toutefois pas encore.
Si les recherches de haut calibre peuvent et doivent se poursuivre, avec ou sans ces
normes, celles-ci s’avèrent essentielles à des fins de clarté réglementaire et pour les
activités des entreprises concernées. Leur absence est un aspect d’un problème qui
concerne tous les déchets plastiques, bien que la pollution par les microplastiques
ait ses propres caractéristiques. C’est notamment le cas en ce qui concerne la
coopération internationale/mondiale et la cohérence des politiques, en ce que la
normalisation et l’harmonisation permettent d’assurer la comparabilité et
l’application internationales dans des contextes réglementaires à travers plusieurs
juridictions. Les études harmonisées et conformes aux normes facilitent également
une analyse globale du problème de la pollution par les microplastiques, qui pourrait
être réalisée par une plateforme scientifique mondiale sur la pollution par les
plastiques et les microplastiques.
La normalisation et l’harmonisation sont soutenues par le consortium SAPEA (2019)
ainsi que d’autres organismes scientifiques et parties prenantes crédibles et
Avis scientifique
Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
42 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
représentatifs (Baztan et al., 2018; Crippa et al., 2019; ECETOC, 2018; Piha &
Zampoukas, 2011).
Nous estimons qu’il convient d’élaborer et d’adopter au niveau international une
normalisation et une harmonisation pertinentes, en poursuivant sur la lancée de
divers forums internationaux comme l’ONU (GESAMP, 2019; UN Environment,
2019c) et le G7/G20. À cet égard, nous approuvons également l’option 7 du rapport
du SAPEA (2019) relative à l’instigation sans délai d’efforts de surveillance
coordonnés dans l’ensemble de l’UE, que l’on peut comparer à la procédure
WATCHLIST prévue par la directive-cadre sur l’eau (Loos, Marinov, Sanseverino,
Napierskaand, & Lettieri, 2018).
Entreprendre l’élaboration de définitions et de normes internationales consensuelles
pour mesurer et surveiller la pollution par les microplastiques et ses incidences sur
les écosystèmes et la santé humaine, permettant ainsi d’élaborer: i) un tableau
cohérent à l’échelle mondiale de la nature et des menaces liées à la pollution par les
microplastiques, et ii) des prescriptions techniques et des critères clairs et sans
équivoque pour les mesures réglementaires, lorsque celles-ci sont nécessaires.
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World Health Organisation. (1999). Hazard Prevention and Control in the Work Environment: Airborne Dust Chapter 1-Dust: Definitions and Concepts. Retrieved from https://www.who.int/occupational_health/publications/en/oehairbornedust3.pdf?ua=1
Worm, B., Lotze, H. K., Jubinville, I., Wilcox, C., & Jambeck, J. (2017). Plastic as a Persistent Marine Pollutant. Annual Review of Environment and Resources, 42(1), 1–26. https://doi.org/10.1146/annurev-environ-102016-060700
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM Avril 2019 59
Annexes
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
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Annexe 1 – Déclaration initiale
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
64 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
Annexe 2 – Experts consultés
Nom Prénom Appartenance
Aguar Maria Pilar Commission européenne – DG RTD (BE)
Aile Silvija Commission européenne – DG ENV (BE)
Backhaus Thomas Université de Göteborg et membre du GT SAPEA (SE)
Batta Eszter Commission européenne – DG ENV (BE)
Bertato Valentina Commission européenne – DG ENV (BE)
Bessa Filipa Université de Coimbra et membre du GT SAPEA (PT)
Bintein Sylvain Commission européenne – DG ENV (BE)
Blainey Mark Agence européenne des produits chimiques (ECHA) (FI)
Blust Ronny Université d’Anvers (BE)
Brennholt Nicole Institut fédéral d’hydrologie (DE)
Carney-Almroth Bethanie Université de Göteborg (SW)
Clayton Helen Commission européenne – DG ENV (BE)
Collot Anne-Gaelle PlasticsEurope (BE)
Contzen Nadja Université de Groningue et membre du GT SAPEA (NL)
Cornell Sarah Centre de Stockholm pour la résilience (SW)
Cronin Richard Ministère du logement, de la planification, de la communauté et de l’administration locale, Irlande, et membre du GT SAPEA (IL)
D’Cunha Karolina Commission européenne – DG ENV (BE)
de France Jennifer Organisation mondiale de la santé (OMS) (CH)
de Smet Michiel Commission européenne – DG RTD (BE)
Flueh Michael Commission européenne – DG GROW (BE)
Galloway Tamara Écotoxicologie, Université d’Exeter et membre du GT SAPEA (UK)
Gasc Emilien Commission européenne – SG (BE)
Gerdts Gunnar Institut Alfred Wegner (DE)
Gouin Todd TGER (UK)
Gruber Sieglinde Commission européenne – DG RTD (BE)
Hamzawi Nancy Sous-ministre adjointe, Direction générale des sciences et de la technologie d’Environnement et Changement climatique Canada (CDN)
Hanke Georg Commission européenne – DG JRC (IT)
Hart Andy Université de Newcastle et membre du GT SAPEA (UK)
Hartmann Nanna Université technique du Danemark (DK)
Henderson Lesley Université Brunel et membre du GT SAPEA (UK)
Herold Diana Commission européenne – DG SANTE (BE)
Hoeveler Arnd Commission européenne – DG JRC (IT)
Hogg Dominic EUNOMIA (UK)
Hualde Grasa Eva Patrizia Commission européenne – DG GROW (BE)
Hugas Marta Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) (IT)
Janssen Colin Université de Gand (BE)
Kalčíková Gabriela Université de Ljubljana et membre du GT SAPEA (SI)
Kalimo Harri Institut d’études européennes, Université libre de Bruxelles (BE)
Karjalainen Tuomo Commission européenne – DG RTD (BE)
Kelly Frank King’s College London et membre du GT SAPEA (UK)
Kershaw Peter Groupe mixte d’experts chargé d’étudier les aspects scientifiques de la protection de l’environnement marin (GESAMP) (UK)
Kirk Stuart Commission européenne – DG RTD (BE)
Koelmans Bart Université de Wageningue et président du GT SAPEA (NL)
Kołodziejczyk Bartłomiej Université de Stockholm et membre du GT SAPEA (SW)
Kramm Johanna Institut de recherche socio-écologique, Francfrot (DE)
Leroy Cadova Petra Commission européenne – DG GROW (BE)
Lima da Cunha Carlos Eduardo Commission européenne – DG RTD (BE)
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Linder Mats Mats Linder, MLSH Consulting (BE)
Nom Prénom Appartenance
Linge Jens Commission européenne – DG JRC (IT)
Linher Otto Commission européenne – DG GROW (BE)
Mackay Karen Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) (IT)
Maltagliati Silvia Commission européenne – DG RTD (BE)
Manfroni Marco Commission européenne – DG GROW (BE)
Marku Elda Université de Tirana et membre du GT SAPEA (AL)
Marmo Luca Commission européenne – DG ENV (BE)
Misiga Pavel Commission européenne – DG RTD (BE)
Muñoz Pineiro Amalia Commission européenne – DG JRC (BE)
Neale William Commission européenne – DG ENV (BE)
Norager Sofie Commission européenne – DG RTD (BE)
Pahl Sabine Université de Plymouth et vice-présidente du GT SAPEA (UK)
Papadoyannakis Michail Commission européenne – DG ENV (BE)
Penca Jerneja Université euro-méditerranéenne (SI)
Poortinga Wouter Université de Cardiff et membre du GT SAPEA (UK)
Richir Marc Commission européenne – DG ENV (BE)
Rillig Matthias Université libre de Berlin et membre du GT SAPEA (DE)
Rocha Santos Teresa Universidade de Aveiro (PT)
Rochman Chelsea Professeure, université de Toronto (CDN)
Roebben Gert Commission européenne – DG GROW (BE)
Rosenstock Nele-Frederike Commission européenne – DG ENV (BE)
Sadauskas Kestutis Commission européenne – DG ENV (BE)
Schade Sven Commission européenne – DG ENV (BE)
Schally Hugo-Maria Commission européenne – DG ENV (BE)
Shepherd Iain Commission européenne – DG MARE (BE)
Simpson Peter Agence européenne des produits chimiques (ECHA) (FI)
Sokull-Kluettgen Birgit Commission européenne – DG JRC (IT)
Sponar Michel Commission européenne – DG ENV (BE)
Steg Linda Université de Groningue et membre du GT SAPEA (NL)
Steidl Josef Université technique de Prague et membre du GT SAPEA (CZ)
Steinhorst Julia Institut des études avancées sur la durabilité et membre du GT SAPEA (DE)
Syberg Kristian Université de Roskilde et membre du GT SAPEA (DK)
ten Brink Patrick Bureau européen de l’environnement (BE)
Thompson Richard Université de Plymouth et membre du GT SAPEA (UK)
Toussaint Brigitte Centre commun de recherche, Commission européenne (BE)
Van Calster Geert Directeur du département de droit européen et international, KU Leuven, et membre du GT SAPEA (BE)
Van den Eede Guy Commission européenne – DG JRC (BE)
Van Sebille Erik Université d’Utrecht et membre du GT SAPEA (NL)
Van Wezel Anne-Marie Université d’Amsterdam et membre du GT SAPEA (NL)
Vanheusden Veerle Commission européenne – DG SANTE (BE)
Verschoor Anja Évaluation des risques pour l’environnement des substances et produits, Institut national pour la santé publique et l’environnement (NL)
Vighi Marco Institut madrilène d’études avancées sur l’eau (IMDEA) et membre du comité CSRSEE (ES)
Wagner Martin Toxicologie environnementale, Université norvégienne de sciences et de technologie, et membre du GT SAPEA (NO)
Weydert Marco Commission européenne – DG RTD (BE)
Wright Stephanie King’s College London et membre du GT SAPEA (UK)
Wyles Kayleigh Université de Surrey et membre du GT SAPEA (UK)
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
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Annexe 3 – Participants à la réunion des parties prenantes44
Parties prenantes
AISE – Association internationale de la savonnerie, de la détergence et des produits d’entretien
Francesca Angiulli
CEFIC – Conseil européen de l’industrie chimique Blanca Serrano Ramón, Nicolás Fuentes Colomer
Cosmetics Europe Diane Watson
ECETOC – Centre d’écologie et de toxicologie de l’industrie chimique européenne
Lucy Wilmot
ECPA – Association européenne de protection des cultures Sebastien Bonifay
EFfCI – Fédération européenne des ingrédients cosmétiques Clare Liptrot
EFSA – Autorité européenne de sécurité des aliments Marta Hugas
ETRMA – Association européenne des fabricants de pneus et de caoutchouc
Susanne Buchholtz
EUMEPS – Association européenne des fabricants de polystyrène expansé
Elisa Setien
EURATEX – Confédération européenne de l’habillement et du textile
Mauro Scalia
EurEau – Fédération européenne des associations nationales des services d’approvisionnement en eau et de gestion des eaux usées
Oliver Loebel, Bertrand Vallet
EUROCOOP – Communauté européenne des coopératives de consommateurs
Rosita Zilli
Fédération européenne des eaux en bouteille Nizar Benismail
EWF – European Wax Federation Alexander Lichtblau
Fertilizers Europe Leondina Della Pietra
FOODDRINK EUROPE Rebeca Fernandez
IFRA Europe – Association internationale des matières premières pour la parfumerie
Nicole Vaini
IOGP – Association internationale des producteurs de pétrole et de gaz
Bernard Vanheule
Petcore Europe Christian Crépet
Plastic Soup Foundation Madhuri Prabhakar
PlasticsEurope Véronique Fraigneau, Charisiadou Stefania
Polyelectrolyte Producers Group Denis Marroni
Surfrider Foundation Europe Gaëlle Haut
OMS – Groupe de travail européen Environnement et santé Dorota Jarosinska
Mécanisme de conseil scientifique (SAM)
Conseillers scientifiques principaux Pearl Dykstra, Nicole Grobert, Rolf Heuer, Elvira Fortunato
SAPEA Bart Koelmans, Hannah Whittle
DG RTD.02 (Unité SAM) J. Klumpers, J. Gavigan, D. Boavida, A. Ascher
Observateurs de la Commission européenne
DG ENV B.1 Paulo Da Silva Lemos
DG ENV B.2 Sylvain Bintein, Andrej Kobe
DG ENV B.3 Bettina Lorz
DG GROW D.2 Fleur Van-Ooststroom-Brummel
DG GROW D.1 Gert Roebben
DG GROW D.4 Petra Cadova Leroy
DG GROW C.4 Mehdi Hocine
DG GROW F.4 Marco Manfroni
44 Cette réunion s’est tenue à Bruxelles le 25 avril 2019.
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DG JRC – Geel F.6 Andrea Held
DG JRC – Ispra D.1 Elisabetta Balzi
DG MARE – A.1 Maris Stulgis
DG RTD E.5 Tuomo Karjalainen
DG RTD F.2 Silvia Maltagliati
DG RTD F.5 Ivan Conesa Alcolea
DG RTD I.2 Pavel Misiga, Hans-Christian Eberl
DG SG E.2 Emilien Gasc
Annexe 4 – Abréviations
CFC Chlorofluorocarbone
ECHA Agence européenne des produits chimiques
EFSA Autorité européenne de sécurité des aliments
EMODnet Réseau européen d’observation et de données du milieu marin
UE Union européenne
DCSMM Directive-cadre de l’UE «stratégie pour le milieu marin»
ONG Organisation non gouvernementale
PET Polytéréphtalate d’éthylène
ppm parties par million
POP Polluants organiques persistants
REACH Enregistrement, évaluation et autorisation des substances
chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances
SAM Mécanisme de conseil scientifique
SAPEA Science Advice for Policy by European Academies
CSRSEE Comité scientifique des risques sanitaires, environnementaux et
émergents
PUU Plastiques à usage unique
CCNUCC Convention-cadre des Nations unies sur les changements
climatiques
ANUE Assemblée des Nations unies pour l’environnement
OMS Organisation mondiale de la santé
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
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Annexe 5 – Glossaire
Additif: substance ajoutée à une matière plastique afin d’en modifier les propriétés et d’en
accroître les performances (rigidité, flexibilité, couleur, durabilité, etc.). Les stabilisants, les
colorants, les matières de remplissage et les plastifiants sont des additifs.
Adsorption: phénomène par lequel des atomes, des ions ou des molécules se fixent sur une
surface depuis une phase gazeuse, liquide ou une matière solide dissoute.
Anthropogénique: dû à l’activité humaine.
Plastique d’origine biologique: matière plastique (partiellement) dérivée de la biomasse
(plantes). La biomasse utilisée dans les bioplastiques provient, par exemple, du maïs, de la
canne à sucre ou de la cellulose.
Biodégradation: décomposition complète d’un composé chimique organique par des micro-
organismes en présence d’oxygène en CO2, en eau et en sels minéraux de tout autre minéral
présent et en nouvelle biomasse, ou en l’absence d’oxygène en CO2, en méthane, en sels
minéraux et en nouvelle biomasse.
Bioplastiques: matières plastiques d’origine biologique ou biodégradables, ou les deux.
Biote: vie animale et végétale d’une région ou d’une période donnée.
Économie circulaire: approche selon laquelle la valeur des produits, des matériaux et des
ressources est maintenue dans l’économie aussi longtemps que possible – lorsqu’un produit
atteint la fin de son cycle de vie, il est de nouveau utilisé pour créer de la valeur et réduire au
maximum la production de déchets.
Contamination: présence d’une substance dans un environnement où elle ne devrait pas être
ou à des concentrations supérieures à la normale.
Compostage: un matériau est compostable s’il se biodégrade au moyen de processus
biologiques dans des conditions et des délais de compostage domestique ou industriel, ne
laissant aucun résidu toxique.
Dose-réponse: relation entre la quantité d’une substance à laquelle est exposé un organisme,
une population ou un écosystème et la manière dont il ou elle répond (par exemple, en termes
de toxicité).
Écosystème: système comprenant les interactions entre une communauté d’organismes
vivants dans une zone particulière et son environnement non vivant (par exemple, l’air, l’eau
et le sol).
Effet: dans le cadre d’études toxicologiques, résultat physique ou chimique pouvant être
mesuré par un test; par exemple, une modification du poids corporel ou des niveaux d’une
toxine potentielle dans le corps.
Exposition: concentration ou quantité d’une substance donnée absorbée par une personne,
une population ou un écosystème à une fréquence spécifique, dans un intervalle de temps
donné. L’exposition peut se produire par ingestion via l’alimentation, mais aussi par inhalation
ou par contact cutané.
Devenir: destin d’un polluant chimique ou biologique après son rejet dans l’environnement
naturel.
Fragmentation: processus par lequel une matière plastique se décompose en morceaux au fil
du temps. Une matière plastique peut se fragmenter en morceaux microscopiques sans pour
autant être biodégradable.
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
70 Avril 2019 Groupe des conseillers scientifiques principaux du SAM
Danger: dans le cadre du présent avis, potentiel intrinsèque d’une substance d’avoir un effet
nocif sur la santé humaine ou l’environnement. Le danger ne signifie pas nécessairement qu’un
effet nocif se produira: cela dépend du risque, qui est un produit à la fois du danger et de
l’exposition.
Déchet: tout matériau solide persistant, fabriqué ou transformé, quelle que soit sa taille, qui
se retrouve jeté, éliminé ou abandonné de façon inadéquate, sans autorisation, en un lieu
inapproprié.
Microbille: toute particule plastique solide dont la dimension est inférieure à cinq millimètres
et qui est destinée à être utilisée pour exfolier ou nettoyer le corps humain ou une partie de
celui-ci.
Monomère molécule composant la plus petite unité récurrente d’un polymère. Les monomères
subissent une conversion chimique pour former les liaisons qui les relient sous la forme d’un
polymère.
Paillis: couche de matière appliquée à la surface du sol en vue de préserver l’humidité du sol
et d’améliorer la fertilité et la santé du sol.
Sans effet (effet nul/résultat nul): dans le contexte du présent avis, résultat expérimental
n’indiquant aucune incidence significative sur les effets mesurés. Une incidence «invisible»
reste susceptible d’exister.
Oxoplastiques/oxodégradables: matières plastiques contenant des additifs, qui favorisent
l’oxydation du matériau dans certaines conditions. Ce type de plastiques est utilisé dans des
applications telles que les films pour l’agriculture, les sacs poubelles et les sacs de caisse, les
emballages alimentaires et les couches de couvertures de décharge.
Persistance: survie à long terme des matières plastiques dans l’environnement du fait de leur
résistance à la dégradation environnementale par des procédés chimiques, biologiques et
photolytiques.
Pollution: contamination qui a, ou peut avoir, des effets biologiques nocifs pour les
communautés locales.
Polymère: substance constituée de molécules se caractérisant par la séquence d’un ou de
plusieurs types de monomères.
Principe de précaution: principe/approche conçu(e) pour aider les décideurs à adopter des
mesures de précaution lorsque les preuves scientifiques d’un danger pour la santé humaine,
animale ou végétale sont incertaines et que les enjeux sont de taille.
Risque: possibilité ou probabilité qu’un effet nocif se produise ou qu’un effet indésirable soit
ressenti en cas d’exposition à un danger.
Évaluation des risques: processus reposant sur des bases scientifiques et comprenant
quatre étapes: l’identification des dangers, leur caractérisation, l’évaluation de l’exposition et
la caractérisation des risques.
Gestion des risques: processus de mise en balance des alternatives stratégiques en
concertation avec les parties intéressées, en tenant compte de l’évaluation des risques et
d’autres facteurs légitimes et, le cas échéant, sélection de solutions de prévention et de
contrôle appropriées pour protéger les consommateurs, les animaux et l’environnement.
Toxicité: état et mesure dans lesquels une substance peut nuire à un organisme vivant, en
fonction de sa dose.
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Les risques de la pollution par les microplastiques pour l’environnement et la santé
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Incertitude: dans le contexte du présent avis, absence de connaissance totale concernant une
situation ou un résultat possible, qui constitue un élément important de l’évaluation des
risques.
Déchets: toute substance ou tout objet dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou
l’obligation de se défaire.
Sources: règlements pertinents; sites web des DG; rapport de la CE sur l’économie circulaire des matières
plastiques; ERR de SAPEA; ECHA; AEE; rapport d’EUNOMIA (février 2018)
Notes du lecteur
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Comment prendre contact avec l’UE?
EN PERSONNE
Il existe plusieurs centaines de centres d’information Europe Direct, répartis dans toute l’Union européenne. Pour connaître l’adresse du centre le plus proche, visitez la page suivante: http://europa.eu/contact
PAR TÉLÉPHONE OU COURRIER ÉLECTRONIQUE
Europe Direct est un service qui répond à vos questions sur l’Union européenne. Vous pouvez prendre contact avec ce service:
– via un numéro gratuit: 00 800 6 7 8 9 10 11 (certains opérateurs facturent ces appels),
– via le numéro standard suivant: +32 22999696 ou
– bpar courrier électronique via la page suivante: http://europa.eu/contact
Trouver des informations sur l’Union européenne
EN LIGNE
Vous trouverez des informations sur l’Union européenne, dans toutes les langues officielles de l’UE, sur le site web Europa: http://europa.eu
PUBLICATIONS DE L’UNION EUROPÉENNE
Vous pouvez télécharger ou commander des publications gratuites et payantes sur le site EU Bookshop, à l’adresse suivante: https://bookshop.europa.eu. Pour obtenir plusieurs exemplaires de publications gratuites, veuillez contacter Europe Direct ou votre centre d’informations local (voir http://europa.eu/contact).
DROIT DE L’UNION ET DOCUMENTS CONNEXES
Pour accéder aux informations juridiques de l’Union, y compris à l’ensemble des textes législatifs depuis 1951 dans toutes les versions linguistiques officielles, consultez EUR-Lex à l’adresse suivante: http://eur-lex.europa.eu
DONNÉES OUVERTES DE L’UE
Le portail des données ouvertes de l’Union européenne (http://data.europa.eu/euodp/fr/data) donne accès à des ensembles de données provenant de l’UE. Les données peuvent être téléchargées et réutilisées gratuitement, à des fins commerciales ou non commerciales.
Les connaissances des risques que la pollution par les microplastiques fait peser sur l’environnement et la santé font l’objet d’une grande incertitude. Toutefois, si la pollution par les microplastiques se poursuit au rythme actuel, ces risques augmenteront et, en particulier, des risques écologiques généralisés sont susceptibles de voir le jour dans les décennies à venir. En l’absence d’études à l’échelle de la population, il n’est pas encore possible d’évaluer les risques pour la santé humaine.
Les mesures de l’UE envisagées ou en cours visent à réduire l’ensemble de la pollution par les matières plastiques, y compris la pollution par les microplastiques. Mais que faudrait-il faire de plus aujourd’hui, si tant est que cela soit possible, pour se protéger contre les risques futurs liés aux microplastiques?
Le présent avis scientifique, qui s’appuie sur un rapport «Evidence Review Report» du consortium SAPEA, formule des recommandations en vue d’informer le débat, les politiques et les pratiques dans ce domaine et des domaines connexes. Les recommandations suivantes sont notamment émises:
— élargir le champ d’application des politiques existantes afin de prévenir et de réduire la pollution par les microplastiques dans l’eau, l’air et le sol; et fixer des priorités pour les mesures axées sur les substances et les contextes en ce qui concerne les sources à volume élevé et à émissions élevées;
— garantir à la société des mesures de prévention de la pollution par les microplastiques, en tenant compte des analyses socio-économiques et coûts-avantages, des compromis et de nombreux aspects environnementaux dans l’élaboration de telles mesures; et
— mettre au point une réponse internationale coordonnée, qui consiste en une coopération en matière de recherche (notamment en comblant les lacunes dans les connaissances relatives à la pollution par les nanoplastiques), en un partage des données et en l’élaboration de normes relatives aux mesures, au suivi et à l’évaluation des risques.
Études et rapports