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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
LE RÔLE DU LOCUS DE CONTRÔLE SUR LA PRISE DE DÉCISION
RELATIVE À LA CARRIÈRE D’ÉLÈVES DE LA QUATRIÈME ET DE LA
CINQUIÈME SECONDAIRE
ACTIVITÉ SYNTHÈSE DIRIGÉE
PRÉSENTÉE COMME EXIGENCE PARTIELLE
DE LA MAÎTRISE EN CARRIÉROLOGIE
PAR
VÉRONIQUE MORASSE
DÉCEMBRE 2013
TABLE DES MATIÈRES
REMERCIEMENTS ................................................................................................................. 4
SOMMAIRE ............................................................................................................................. 5
INTRODUCTION .................................................................................................................... 7
PREMIER CHAPITRE - PROBLÉMATIQUE ........................................................................ 9
1.1 Les problématiques scolaires à l’ordre d’enseignement secondaire ............................... 9
1.2 Les problématiques du choix de carrière ...................................................................... 11
1.3 Rôle du conseiller en orientation dans les écoles secondaires ...................................... 14
1.4 Études portant sur le locus de contrôle ......................................................................... 18
DEUXIÈME CHAPITRE – CADRE THÉORIQUE .............................................................. 23
2.1 Travaux de Gati sur la prise de décision relative à la carrière ...................................... 23
2.2 Principaux outils de Gati concernant la prise de décision relative à la carrière ............ 25
2.2.1 Le Career Decision-making Difficulties Questionnaire (CDDQ) .......................... 25
2.2.2 Le Career Decision-Making Profile (CDMP) questionnaire ................................. 33
2.3 Conception de la notion de locus de contrôle en orientation ........................................ 44
2.3.1 Locus de contrôle dans la psychologie................................................................... 44
2.3.2 Échelles d’évaluation du locus de contrôle ............................................................ 46
2.3.3 L’internalité ............................................................................................................ 47
2.3.4 Locus de contrôle et développement de carrière .................................................... 48
TROISIÈME CHAPITRE – OBJECTIF DE RECHERCHE .................................................. 53
QUATRIÈME CHAPITRE - MÉTHODOLOGIE ................................................................. 54
4.1 Type de recherche ......................................................................................................... 55
4.2 Stratégie d’échantillonnage ........................................................................................... 55
4.3 Instruments utilisés ....................................................................................................... 57
4.4 Méthode de collecte de données ................................................................................... 58
4.5 Traitement des données ................................................................................................. 59
4.6 Analyse des données ..................................................................................................... 59
4.7 Éthique .......................................................................................................................... 60
CINQUIÈME CHAPITRE - PRÉSENTATION ET INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS
................................................................................................................................................ 62
5.1 Nulle chance, ni destin .................................................................................................. 64
5.2 Juste un peu de chance et de destin ............................................................................... 64
5.3 Chance et destin incontrôlables, parcours incontrôlable ............................................... 65
5.4 L’élève en tant que maître de son avenir ...................................................................... 67
5.5 La chance et le destin comme influences positives sur un parcours professionnel ....... 69
5.6 Aucun contrôle sur son environnement ........................................................................ 70
5.7 Influence de Dieu .......................................................................................................... 72
SIXIÈME CHAPITRE – DISCUSSION ................................................................................ 74
6.1 Nulle chance, ni destin .................................................................................................. 74
6.2 Juste un peu de chance et de destin ............................................................................... 75
6.3 Chance et destin incontrôlables, parcours incontrôlable ............................................... 75
6.4 L’élève en tant que maître de son avenir ...................................................................... 76
6.5 La chance et le destin comme influences positives dans un parcours professionnel .... 77
6.6 Aucun contrôle sur son environnement ........................................................................ 77
6.7 Influence de Dieu .......................................................................................................... 78
CONCLUSION ....................................................................................................................... 81
BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................. 85
ANNEXE1 – Certificat d’éthique ........................................................................................... 93
REMERCIEMENTS
Étape finale et ô combien exigeante, la réalisation d’un essai demande un
investissement total de la part de celui qui le rédige, mais également de tous ceux qui
gravitent autour de lui. Sans les encouragements de mon entourage, sans leur
compréhension, leur disponibilité et leur présence, je ne serais pas parvenue, j’en suis
persuadée, à produire et surtout terminer un tel document.
Plus précisément, j’aimerais remercier ma petite maman, qui par son
dévouement, sa patience, son calme et sa bonne humeur m’a apporté tout le soutien
dont j’avais besoin pour m’amener à gravir, une à une, les étapes qui m’ont mené à la
réussite de mes études. Elle a su me montrer, depuis que je suis toute petite, à quel
point le succès dépend des efforts et de la persévérance que l’on met dans tout ce qui
est entrepris. Maman, merci! Merci aussi à mon papa, qui à sa manière bien discrète,
a toujours gardé un œil sur l’évolution de mon travail. Merci de ton intérêt et de tes
encouragements!
Merci à Guillaume, mon complice, mon amoureux, qui m’a soutenu de toutes
les manières possibles à travers ce long parcours universitaire. En acceptant de faire
de nombreux compromis, il m’a permis de m’investir pleinement dans ce grand
projet. Merci pour tes encouragements et ton support!
Merci à mes grandes sœurs et à ma petite sœur de m’avoir écouté parler de
mon essai à de trop nombreuses reprises! Votre écoute a été précieuse.
Finalement, merci à Louis Cournoyer, qui m’a poussé, peut-être même sans le
vouloir, à prendre part à des projets auxquels je n’aurais jamais pensé participer, mais
qui m’ont permis d’évoluer, de grandir. Merci de m’avoir donné l’opportunité
d’écrire un essai sur un thème qui me rejoignait particulièrement!
SOMMAIRE
De nombreux facteurs ont été répertoriés comme étant susceptibles
d’influencer la prise de décision liée à la carrière. La motivation, le degré de scolarité,
les intérêts, les aptitudes, l’influence de l’entourage et le facteur monétaire sont
quelques-uns des plus connus. Le concept de locus de contrôle, abordé tout d’abord
principalement par Julian B. Rotter, représente également l’un de ces facteurs.
Possiblement moins connue du grand public, cette variable représente toutefois un
intérêt notable dans la communauté scientifique. Force est d’admettre que le nombre
d’ouvrages l’abordant ne cesse de croître, démontrant ainsi la richesse que représente
la compréhension du locus de contrôle dans le fonctionnement de l’être humain. Afin
de valider quel lien peut être établi entre la prise de décision liée à la carrière et le
locus de contrôle, il est question, dans le cas du présent écrit, de décrire le rôle du
locus de contrôle sur la prise de décision relative à la carrière d’élèves de la
quatrième et de la cinquième secondaire. Pour ce faire, les résultats sont basés sur un
échantillon de 45 entretiens semi-dirigés (n=45), auxquels 23 filles et 22 garçons ont
participé. Au niveau de la scolarité, ils sont répartis ainsi : 20 étudient en quatrième
secondaire, et 25 étudient en cinquième secondaire. Plus précisément, 12 filles et 8
garçons de quatrième secondaire, et 11 filles et 14 garçons de cinquième secondaire
ont été rencontrés. Suite à une analyse qualitative réalisée à l’aide des verbatim de ces
entretiens, 7 grands thèmes ont été dégagés, c’est-à-dire nulle chance, ni destin, juste
un peu de chance et de destin, chance et destin incontrôlables, parcours
incontrôlable, l’élève en tant que maître de son avenir, la chance et le destin comme
influences positives dans un parcours professionnel, aucun contrôle sur son
environnement et finalement influence de Dieu. Les résultats démontrent que
contrairement à ce qu’affirme la théorie, c’est-à-dire que le locus de contrôle peut être
qualifié d’interne ou d’externe, il devrait être catégorisé davantage selon une
gradation. Les propos tenus par les élèves sont remplis de nuances, et permettent sans
aucun doute d’affirmer que oui, le locus joue un rôle sur la prise de décision de
carrière, mais pas seulement en termes de « je sens que j’ai le contrôle sur ma
décision » versus « je sens que je n’ai aucun contrôle sur ma décision ».
7
INTRODUCTION
Effectuer un choix de carrière fait partie du rôle de l’étudiant. En effet, que
celui-ci ait envie ou non de prendre cette décision, qu’il s’y sente prêt ou non, qu’il
ait l’appui de son entourage ou non, ou encore qu’il ait une idée bien arrêtée sur un
choix de profession ou non, il devra, un jour ou l’autre, décider de son avenir
professionnel. Il va de soi que plusieurs facteurs influenceront ce choix… Alors que
certains endossent leur décision et mettent toute leur énergie dans l’atteinte de leurs
objectifs, d’autres donnent plutôt l’impression de s’en remettre au destin ou à la
chance, en espérant, un jour ou l’autre, avoir ce qui pourrait être nommé un « éclair
de génie ». Ce facteur est appelé locus de contrôle. La visée de cet essai est donc de
décrire le rôle du locus de contrôle dans la prise de décision liée à la carrière.
Dans un premier temps, cet essai dresse un portrait des problématiques vécues
par les jeunes étudiant au secondaire et des problématiques liées à leur choix de
carrière, pour ensuite expliquer le rôle du conseiller en orientation dans les écoles
secondaires. Afin de démontrer l’importance du locus de contrôle dans la littérature
scientifique, plusieurs recherches qui ont été menées en lien avec ce concept sont
ensuite présentées. Le deuxième chapitre décrit à son tour les fondements théoriques
des principaux questionnaires qui ont servi à produire celui administré aux élèves qui
ont participé à l’étude. La prise de décision relative à la carrière y est donc décrite
selon la perspective de Gati. La notion de locus de contrôle est subséquemment
analysée selon plusieurs auteurs. Le troisième chapitre énonce l’objectif de la
recherche, alors que le quatrième explique la méthodologie utilisée pour réaliser
l’étude, selon une approche qualitative. Les résultats sont présentés dans le chapitre
cinq, suite au regroupement en thèmes des propos tenus par les élèves rencontrés.
Afin de comparer ces résultats à ceux de la littérature dite scientifique, la discussion
constitue le sixième chapitre. À titre de conclusion de cet essai, ses limites sont
exposées de manière à favoriser des pistes de recherches qui pourraient
8
éventuellement conduire à une compréhension encore meilleure du rôle du locus de
contrôle dans la prise de décision liée à la carrière.
9
PREMIER CHAPITRE - PROBLÉMATIQUE
1.1 Les problématiques scolaires à l’ordre d’enseignement secondaire
S’il est une valeur québécoise dont on ne peut nier l’importance, c’est bien
l’éducation. Depuis plus de 70 ans, de nombreux efforts ont été déployés par les
gouvernements qui se sont succédés et ce, dans le but de favoriser l’accessibilité
scolaire. Le premier pas a eu lieu le 26 mai 1943 (Guay, s.d.), lorsque la fréquentation
scolaire est devenue obligatoire pour les enfants de 6 à 14 ans. En 1956, la création
du cours secondaire public, qui s'adresse aux jeunes âgés de 12 à 16 ans, a à son tour
ouvert la porte au gouvernement de Jean Lesage qui impose, dans les années soixante,
la fréquentation scolaire obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans (Lévesque, 2010). Ainsi,
tel qu’indiqué par le MELS (2005) :« si, à la fin des années 50, nous étions peu
nombreux à nous rendre à l’école au-delà du primaire, c’est maintenant tout près de
100 % des jeunes qui la fréquentent jusqu’à l’âge de 16 ans » (p.5). Alors que la
problématique de l’accessibilité scolaire semble désormais chose du passé, une
nouvelle problématique fait son entrée : le décrochage scolaire. Ces propos, tenus
dans un document du Conseil permanent de la jeunesse intitulé « « Raccrocher »
l’école aux besoins des jeunes » (1992) sont éloquents :
« Les élèves sont trop souvent des consommateurs passifs, tenus par une
loi, d’utiliser pendant plus de dix ans un produit scolaire qui correspond
peu à leur image et sur lequel ils n’ont rien à dire. Il est donc peu
surprenant que 35% d’entre eux délaissent l’école en cours de route »
(p.20).
Selon le ministère de l’Éducation du Québec (2002), le taux de décrochage
scolaire se définit donc comme étant « la proportion de la population qui ne fréquente
pas l’école et qui n’a pas obtenu de diplôme du secondaire » (p.101). Par ailleurs, il
est fort important de distinguer les notions de décrochage scolaire et d’abandon
scolaire, puisque celles-ci ne sont pas équivalentes : « le décrochage est une
10
interruption qui n'est pas nécessairement définitive » (Ministère de l’Éducation, 2000,
p.1), alors que l’abandon scolaire l’est.
Selon Ibrahima (2012) plusieurs facteurs représentent les causes du
décrochage scolaire :
« Caractéristiques individuelles (sexe, statut d’immigrant, langue
maternelle, expérience scolaire, personnalité et habitudes de vie);
Facteurs interpersonnels (isolement social, rejet par les pairs);
Facteurs familiaux (structure familiale, valorisation de l’école par les
parents);
Facteurs institutionnels (structure et organisation scolaire et soutien des
adultes à l’école);
Facteurs sociologiques (différences culturelles, rapports de classe);
Facteurs socioéconomiques (revenu familial, scolarité de la mère,
défavorisation socioéconomique) » (p. 1).
L’étude des facteurs explicatifs du décrochage scolaire semble être l’une des
grandes contributions ayant conduit à sa lutte. En connaissant les facteurs pouvant
causer une situation de décrochage, il devient nécessairement plus facile d’agir afin
de le diminuer, ce qui est appuyé par de nombreuses statistiques. Par exemple, pour
l’année 1979-1980, le taux de décrochage scolaire à 19 ans était de 40,5 %, alors que
pour 1999-2000, il était estimé à 19,8 %. (Conseil permanent de la jeunesse, 2002).
Quelques années plus tard, en 2003-2004, ce sont 28% des jeunes de 20 ans et moins
qui n’ont pas obtenu leur diplôme d’études secondaires (MELS, 2006). Encore
aujourd’hui, malgré toutes les mesures mises en place, le décrochage scolaire
demeure élevé : en 2011, ce taux était de 10,1% (Le Québec économique, 2012).
Bref, quoique significativement moins élevé aujourd’hui qu’il ne l’était il y a
30 ans, le taux de décrochage scolaire demeure toujours alarmant en raison des
conséquences parfois désastreuses qu’il implique. En effet, un jeune décrocheur fait
face à d’importants obstacles, particulièrement face à la prise de décision liée à la
11
carrière. Sachant que « de 1990 à 2009, le nombre d’emplois occupés des personnes
n’ayant pas de diplôme d’études secondaires a diminué de 412 000, une baisse de
44,7% » (MELS, 2010, p.110), il est facile de s’imaginer que les possibilités d’emploi
sont largement limitées pour la personne non diplômée. Ainsi, pour le décrocheur,
l’élaboration d’un projet professionnel est un processus laborieux, puisque la prise de
décision liée à la carrière se trouve complexifiée par un parcours scolaire écourté.
Pour l’élève qui reste sur les bancs d’écoles, effectuer un choix de carrière n’est pas
non plus une mince tâche. En effet, de nombreuses statistiques, études, recensions,
etc. démontrent que la prise de décision de carrière des jeunes qui persévèrent à
l’école est source d’inquiétudes et de remises en question. C’est ce qui sera présenté
dans la section qui suit.
1.2 Les problématiques du choix de carrière
Les problématiques liées au choix de carrière ont d’importantes répercussions
sur les élèves de cinquième secondaire quant à leur choix de programme d’études
postsecondaires. Par exemple, «75% des élèves de la cinquième secondaire n’ont
aucune idée de leur orientation en début d’année scolaire» (Landry, 1995; cité dans
Sauvé, 2004, p.18), alors qu’à la fin du secondaire, parmi ceux qui souhaitent étudier
au collège, 59,4% sont indécis quant à leur choix de carrière (CPJ, 1992). Dix ans
plus tard, les statistiques ne sont guère plus encourageantes : « Près des trois quarts
des élèves de cinquième secondaire n’auraient pas d’idée, semble-t-il, de leur
orientation lorsqu’ils amorcent cette dernière année de leurs études secondaires »
(Conseil supérieur de l’éducation, 2002, p.28). Le rapport de la Fédération des
cégeps, publié en 1999, fait état d’un constat similaire en mentionnant que « bon
nombre d'élèves ne prennent vraiment connaissance des orientations et des contenus
de leurs nouveaux programmes que dans les premières semaines de leurs études
collégiales. Pour plusieurs d'entre eux, le premier choix ne sera donc pas définitif »
(p. 53). Également, ce sont plus du tiers des étudiants qui effectuent un changement
12
de programme lors de leurs études collégiales, provoquant ainsi une prolongation de
la durée prévue de leurs études (Fédération des cégeps, 1999).
De plus, la prise de décision des jeunes de cinquième secondaire par rapport à
leur choix de programme d’études collégiales semble souvent de l’ordre d’une
décision hâtive plutôt que d’une décision réfléchie : « le nombre de jeunes qui
s’inscrivent dans un programme « en attendant » de choisir parce qu’ils ne savent pas
vers quelle profession s’orienter est révélateur » (Bergeron, Brien, Cyr et Delisle-
Laberge, 1997 p.19). D’ailleurs, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la
Science (MESS) (1992), dans son rapport intitulé Les changements de programmes
au collégial, affirme qu’au collège, c’est un étudiant sur trois (35,9%) qui change de
programme. En 2004, le Ministère de l’Éducation publie un rapport indiquant que
« près de 36 % des nouveaux inscrits de la cohorte 1997 ont effectué un
changement de programmes au cours de leurs études collégiales ; une
proportion de 4 % est attribuable aux élèves initialement inscrits en
session d’accueil ou de transition » (p.21).
De plus, « malgré une récente amélioration des taux de réussite au collégial,
seulement 41 % des nouveaux inscrits aux programmes préuniversitaires obtiennent
leur diplôme dans les deux années prévues et un total de 68 % l’obtiennent deux ans
après ce délai » (Ministère de l’Éducation, 2009, p.2). Finalement, selon Bégin
(2000), « environ le quart de la population étudiante ne connaît pas réellement la
raison de sa présence au cégep » (p.15), et est incertaine de son choix (Le Québec
économique, 2012).
Bref, les problématiques liées au choix de carrière sont nombreuses et
complexes. Forer (1953, cité dans Bujold et Gingras, 2000), « considère le choix
professionnel comme l’expression de la personnalité » (p.77). Fournier, Drapeau et
Thibault (1995), suite à une importante recension des écrits, mettent en évidence
13
« l’importance de considérer les intérêts de la personne, son degré de
connaissance du marché du travail, la clarté de son concept de soi, sa
capacité à être actif dans sa recherche d’emploi, ses aptitudes, son niveau
de scolarité, sa capacité à prendre des décisions, son niveau d’estime de
soi, ses motivations ainsi que ses aspirations comme facteurs individuels
susceptibles d’affecter l’insertion socio-professionnelle » (p.110-111).
Ainsi, un individu présentant certaines lacunes au niveau des concepts
nommés ci-haut aura des chances de vivre une problématique quelconque liée à la
prise de décision de carrière.
Bujold et Gingras (2000), suite à l’étude de différents modèles décisionnels,
suggèrent qu’« une bonne décision de carrière semble être l’indice d’un degré
approprié de maturité vocationnelle » (p.334). Ainsi, la personne qui fait preuve de
maturité vocationnelle saura faire face aux difficultés liées au choix de carrière de
manière à prendre la « bonne » décision. C’est Super (1955, 1957, cité dans Poirier et
Gagné, 1984) qui a le premier introduit le concept de maturité vocationnelle, qui est
définit comme étant « la congruence entre son comportement observé et
l'acquittement de certaines tâches associées à son stade de développement » (p. 86),
ou encore comme « le niveau atteint par l'individu sur le long continuum allant de
l'exploration au déclin» (Marceau, 1981, p. 319). Ce niveau est déterminé à partir des
cinq dimensions suivantes : « orientation vers un choix professionnel, information et
planification, consistance du choix professionnel, cristallisation des traits, sagesse du
choix professionnel» (Marceau, 1981, p.319). Ces cinq dimensions rappellent
vaguement les quatre sources principales de problème qui sont susceptibles selon
Gati (1986) (traduit par Gingras et Bujold, 2000, p.323), d’intervenir dans le
processus de décision lié à la carrière :
« Le manque d’information concernant les caractéristiques du preneur
de décision ou les options scolaires et professionnelles;
Le manque de ressources (par exemple le manque de temps ou d’argent
pour recueillir l’information requise;
14
Les limites, sur le plan cognitif du preneur de décision qui doit
accumuler et traiter l’information;
Le manque de structure (ou l’absence d’un cadre de référence) pour
repérer et traiter l’information pertinente ».
Gati et Saka (2001), en affirmant que la prise de décision par rapport à son
avenir est, particulièrement pour l’adolescent, une décision complexe à prendre, ne
pouvaient mieux résumer la difficulté de beaucoup de jeunes à effectuer un choix.
Une autre variable venant influencer le choix de carrière, et dont il est
question ici, est le locus de contrôle. Fournier et St-Onge (1995), Fournier et Jeanrie
(1999) et Fournier (2001) ont d’ailleurs mené diverses recherches portant sur ce
concept en lien avec l’insertion socio-professionnelle, et par le fait même le choix de
carrière dans le but de mieux comprendre ses répercussions. La section 1.4 présente
une variété d’études portant sur le locus de contrôle. Toutefois, avant d’y parvenir, il
convient d’aborder le rôle du conseiller en orientation dans les écoles secondaires.
Connaissant la nature de leurs tâches et la problématique des jeunes concernant leur
prise de décision liée à la carrière, il va de soi de s’attarder à l’évolution du rôle du
conseiller en orientation et de son champ de pratique à travers les années.
1.3 Rôle du conseiller en orientation dans les écoles secondaires
C’est au moment où le Québec traverse l’une des pires crises économiques de
son histoire que l’orientation scolaire et professionnelle se fraie tranquillement un
chemin dans les mœurs des Québécois. En effet, « de 1930 à 1945, les promoteurs
de l'orientation scolaire et professionnelle s'efforcent d'asseoir le métier sur des bases
scientifiques, en créant les premiers instituts spécialisés et en délimitant les
conceptions qui alimentent la pratique de cette profession » (Mellouki et
Beauchemin, 1994). C’est ainsi que petit à petit, l’orientation a su se tailler une place
de choix au sein de ses différents champs de pratique (entreprises privées,
15
commissions scolaires, milieux communautaires, etc.). Bien loin des pratiques
initiales qui peignaient plus souvent qu’autrement l’image d’un conseiller en
orientation comme étant un expert « qui suggère des choix à la personne après avoir
fait un diagnostic en tenant compte de ses aptitudes et des exigences des différentes
professions » (Conseil supérieur de l’éducation (2002, p.11), le conseiller
d’orientation a désormais de multiples outils à sa portée visant à soutenir la clientèle
dans sa démarche d’orientation. Il se trouve, selon la Classification nationale des
professions, que
« les conseillers d'orientation et les conseillers en information scolaire et
professionnelle conseillent les étudiants inscrits et éventuels sur leur
formation scolaire, leur carrière et leur développement personnel, et
coordonnent les services de counseling offerts aux étudiants, aux parents,
aux enseignants, aux membres de la faculté et au personnel. Ils travaillent
dans des commissions ou conseils scolaires, des universités et collèges,
des instituts de formation technique, des établissements correctionnels et
des organismes gouvernementaux » (Ressources humaines et
Développement des compétences Canada, 2013).
En somme, le conseiller en orientation accompagne la personne qui réclame
ses services dans une démarche visant à lui permettre de faire un choix éclairé. Par
l’utilisation de compétences relationnelles appropriées, l’apport d’informations
directement liées à la demande et l’utilisation d’outils psychométriques, le conseiller
offre un service personnalisé. La personne qui le consulte dans le but de faire un
choix scolaire et professionnel est donc en droit de s’attendre à recevoir de tels
services. Dans cette optique, il serait souhaitable que les jeunes fréquentant l’école
secondaire considèrent les professionnels œuvrant dans le domaine de l’orientation
comme étant des personnes ressources de premier choix pour toutes questions reliées
à leur expertise. Toutefois, le conseil permanent de la jeunesse (CPJ) (1992 a)
souligne dans son étude « l’importance du questionnement des jeunes au sortir du
secondaire en regard de leur avenir professionnel » (p.10). Rivière (1996) souligne
également « les énormes difficultés que doivent affronter les étudiants lorsqu’il leur
16
faut définir leur orientation scolaire […] » (p.25). Lors de la tenue du Sommet du
Québec et de la jeunesse en l’an 2000, les jeunes s’expriment à leur tour quant aux
services d’orientation scolaire qui leur sont offerts : « leur critique est sévère : trop
peu (de soutien) et trop tard (dans le parcours scolaire) » (Ministère de l’Éducation,
2002 a, p.10). Bref, il apparaît que les services offerts par les conseillers en
orientation en milieu secondaire sont méconnus ou mal utilisés. Question de
comprendre davantage la portée que peut avoir un conseiller en orientation sur le
cheminement scolaire et professionnel d’un jeune, la présentation des besoins des
jeunes en matière d’orientation est présentée ci-dessous. La pyramide fait état de trois
catégories de besoins :
Figure 1 Modèles des besoins en orientation
Source : Matte, L. 2010. « L'orientation: répondre ou non aux besoins des élèves ». En ligne.
<http://www.orientation.qc.ca/Communications/~/media/447BC3B4B5CB434
2AC880D21243A5179.ashx>.
Besoins généraux
outils, information, support
Besoins particuliers
intervention clinique
Besoins distinctifs
aide et accompagnement
17
Tel qu’indiqué sur le site de l’OCCOQ (s.d.):
« Dans le milieu scolaire, cela se traduit par un accompagnement
personnalisé du jeune dans sa découverte de lui-même, l’exploration
concrète et active du monde de l’information scolaire et professionnelle et
du marché du travail, la confirmation de son projet professionnel et sa
réalisation ».
De manière plus pointue, le champ d’exercice du conseiller en orientation se
résume ainsi :
« Évaluer le fonctionnement psychologique, les ressources personnelles et
les conditions du milieu, intervenir sur l’identité ainsi que développer et
maintenir de stratégies actives d’adaptation dans le but de permettre des
choix personnels et professionnels tout au long de sa vie, de rétablir
l’autonomie socioprofessionnelle et de réaliser des projets de carrière
chez l’être humain en interaction avec son environnement » ( Ordre des
conseillers et conseillères d’orientation du Québec, 2010, p.3).
Le fonctionnement psychologique est particulièrement intéressant dans le cas
présent, puisqu’il réfère à la prise en compte des caractéristiques de la personne, de
l’organisation dynamique de son expérience ainsi que de leurs effets sur sa vie
quotidienne (Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec, 2010, p.
6). Ainsi, en s’attardant à cette dimension plus particulièrement, un conseiller en
orientation pourrait être en mesure d’identifier si son client présente un locus de
contrôle davantage interne ou externe, et ainsi adapter ses interventions. De plus, en
ayant exploré davantage l’éventail de compétences que possèdent un conseiller en
orientation, il apparaît qu’un de ses rôles est sans contredit de soutenir un jeune dans
sa prise de décision liée à la carrière. Tel que le mentionne Gadassi, Gati et Dayan
(2012):
« Les décisions de carrière peuvent être abordées comme un cas
particulier de la prise de décision en général. Ainsi, l'un des principaux
rôles des conseillers en orientation est de guider leurs clients dans le
18
processus de prise de décision, en les aidant à prendre des décisions plus
efficacement » (p.612, traduction libre).
De manière à mieux comprendre l’influence du locus de contrôle sur
différentes thématiques, la section suivante fait état de plusieurs études en lien avec
le locus de contrôle.
1.4 Études portant sur le locus de contrôle
Le locus de contrôle apparaît comme une variable individuelle clé au sein de
nombreuses études. Les recherches se multiplient dans le but de mieux comprendre
son influence sur des thèmes plus variés les uns que les autres. Par exemple, en 1992,
De Man, Leduc et Labrèche-Gauthier ont réalisé une étude dans le but de valider la
version française de « l’inventaire des expériences de vie auprès des adolescents ».
Cet inventaire comporte 57 questions, et est une mesure d’auto-évaluation de
plusieurs facteurs, c’est-à-dire l’estime de soi, le locus de contrôle, l’anomie, la
dépression et l’âge. Les chercheurs ont émis l’hypothèse qu’il y aurait une association
négative entre les résultats obtenus à l’inventaire et l’estime de soi, et des associations
positives avec le locus de contrôle externe, l’anomie, la dépression et l’âge. Afin de
confirmer ou d’infirmer cette hypothèse, 110 étudiants francophones âgés entre 11 et
18 ans et de niveau secondaire ont pris part à la recherche. C’est l’échelle de
Levenson (1981) qui a été utilisée dans le but d’évaluer le locus de contrôle. En ce
qui concerne cette variable, les résultats ont démontré que « les adolescents croyant
que la chance contrôle le déroulement de leur vie décrivent des degrés de stress
négatif plus élevés (De Man, Leduc et Labrèche-Gautier, 1992, p. 278)».
Bressoux et Pansu (1998), ont réalisé une recherche sur l’intervention de la
norme d’internalité dans les pratiques d’évaluation scolaire, selon un échantillon de
400 élèves et de 18 enseignants. Le but de leur étude était de « vérifier, si toutes
19
choses étant égales par ailleurs, l’évaluation que portent les enseignants sur la valeur
scolaire de leurs élèves varie selon l’internalité de ces derniers » (p. 21). Leur étude a
démontré que les enseignants ont tendance à favoriser les élèves qui choisissent des
explications internes, mais pour l’évaluation en mathématiques seulement. De plus,
ils sont parvenus à la conclusion que ceux qui performent le mieux au niveau scolaire
sont également les plus internes.
En 2004, Carden, Bryant et Moss ont réalisé une étude appelée « Locus of
control, test anxiety, academic procrastination, and achievement among college
students ». Les chercheurs ont administré à 114 étudiants trois outils différents, c’est-
à-dire l’échelle interne-externe du locus de contrôle, l’échelle de procrastination et le
test d’anxiété de performance. Les résultats ont démontré que « les étudiants ayant un
locus de contrôle interne faisaient moins preuve de procrastination au niveau
académique et présentaient un niveau plus faible d’anxiété que les étudiants ayant un
locus de contrôle externe » (Carden, Bryant et Moss, 2004, p.582, traduction libre).
En 2005, Gagné a mené une étude auprès de 134 étudiants du Collège
Ahuntsic. En distribuant un questionnaire composé d’une section sociopédagogique
et d’une section composée de l’Échelle Multidimensionnelle de Dubois (1985), Gagné
en est venu à la conclusion que « les étudiants ayant un LOC interne ont de meilleurs
résultats académiques que leurs homologues externes » (p.68). De plus, « l’hésitation
face au choix d’orientation professionnelle est davantage prédominante chez les
sujets externes (42,1%) que chez les étudiants internes (24,7%) » (p.53).
En 2006, Paquet a à son tour mené une étude : « Relation entre locus of
control, désir de contrôle et anxiété ». La recherche avait deux objectifs principaux,
c’est-à-dire « étudier la relation entre l’anxiété-trait et la dimension interne du locus
de contrôle, et porter une attention particulière sur la relation entre l’anxiété-trait et
l’écart entre la dimension interne du locus de contrôle et le désir de contrôle » (p.99).
20
Pour ce faire, Paquet s’est basé sur un échantillon de 120 étudiants qui ont complété
un questionnaire. Il en a tiré la conclusion qu’il existerait une relation entre le désir
de contrôle, l’anxiété et le locus de contrôle, mais que ces relations ne sont pas
présentes pour toutes les dimensions du locus de contrôle (p.102). Selon le
chercheur, il existerait une relation négative entre la dimension interne du locus de
contrôle et l’anxiété-trait, de même qu’entre le désir de contrôle et l’anxiété-trait.
Finalement, aucune relation significative entre l’écart entre les dimensions désir de
contrôle, dimension interne du locus de contrôle et anxiété-trait n’a été démontrée.
Paquet, Lavigne et Vallerand (2012), ont quant à eux réalisé une étude
intitulée « Validation d’une échelle courte et multidimensionnelle de locus de
contrôle spécifique au travail (MLCST) ». Le but de la recherche était de valider une
échelle de locus de contrôle à 4 facteurs s’adressant spécifiquement au domaine du
travail. L’échantillon des chercheurs était composé de 239 employés du système
hospitalier français. Les conclusions tirées de cette étude démontrent que cette échelle
représente « un outil intéressant permettant d’étudier les processus de contrôle dans le
domaine du travail et cela de manière plus complète que les échelles
unidimensionnelles précédemment employées » (p.5).
Dans leur étude, Ginevra, Nota, Soresi et Gati (2012), confirment, tel qu’ils
l’avaient anticipé, que les adolescents décidés et indécis diffèrent dans plusieurs des
dimensions du questionnaire CDMP1. Plus précisément,
« ce sont les élèves décidés qui ont rapporté un lieu de contrôle plus
interne et un plus grand engagement (plus d'efforts investis dans le
processus et une prise de décision finale plus rapide), qui ont moins
tendance à procrastiner ou à consulter d'autres personnes. Cela démontre
que les adolescents décidés envisagent leur prise de décision de carrière
différemment des adolescents indécis » (p.383, traduction libre).
1 Voir cadre conceptuel
21
En 2012, Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen publiaient une étude ayant pour
objectif d’évaluer les validités convergente (« qui vise à explorer la mesure dans
laquelle le CDMP possède un construit similaire à ce qu’évaluent les mesures
traditionnelles de la prise de décision liée à la carrière » (Gati, Gadassi et Mashiah-
Cohen, 2012, p.3, traduction libre) ) et incrémentielle (« qui vise à vérifier si le
CDMP présente un avantage par rapport aux autres instruments qui mesurent le
même construit » (Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen, 2012, p.3, traduction libre)) du
Career Decision-making Profile (CDMP). Pour ce faire, deux études ont été réalisées.
Pour la première, 423 personnes ont participé à la recherche en répondant au CDMP
et au VDSI (Vocational Decision Style Indicator), qui étaient disponibles sur le site
internet israélien « Future Directions ». En ce qui a trait à la deuxième étude, 427
personnes ont répondu au CDMP de même qu’au GDMS (General Decision-Making
Style questionnaire), toujours en se rendant sur le site « Future Directions ». Le but
de la recherche était donc de comparer les résultats obtenus par les participants au
CDMP à ceux obtenus au VDSI et au GDMS. Fait intéressant en ce qui a trait aux
résultats : dans la deuxième étude, l’intuition s’est révélée être associée négativement
avec le locus de contrôle. Ceci a été qualifié d’inattendu par les auteurs, puisque ce
résultat ne concorde pas avec certaines conclusions tirées d’autres recherches. De
plus, les chercheurs ont constaté « l'avantage du CDMP par rapport au VDSI pour
prédire les étapes de l’individu dans son processus de prise de décision liée à la
carrière » (Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen, 2012, p.2, traduction libre). En ce qui a
trait aux objectifs de recherche, les résultats obtenus sont les suivants : les deux
études supportent la validité convergente et incrémentielle du CDMP.
Il apparaît donc que le locus de contrôle est une variable fortement utilisée
dans les domaines reliés à la psychologie. D’ailleurs, plusieurs études ont démontré
que le locus de contrôle a un lien avec la prise de décision. Toutefois, peu de
recherches ont fait état de résultats autres que ceux qualifiant le locus de contrôle
22
d’interne ou d’externe. De ce fait, le présent écrit vise à décrire le rôle du locus de
contrôle dans la prise de décision relative à la carrière.
23
DEUXIÈME CHAPITRE – CADRE THÉORIQUE
Ayant produit de nombreux écrits sur le processus de prise de décision relative
à la carrière, Itamar Gati est l’auteur – chercheur tout désigné sur lequel se baser afin
d’établir les concepts du présent écrit, puisqu’il est reconnu mondialement pour ses
travaux en lien avec ce thème. Ses recherches lui ont permis de présenter une
approche d’élimination séquentielle dans la prise de décision de carrière (Gati, 1986),
d’étudier les compromis liés à la carrière (entre autres Gati (1993)), de s’intéresser
aux différences dans la prise de décision de carrière entre les femmes et les hommes
(Gati, Osipow et Givon, 1995), et bien plus encore. Deux des questionnaires créés et
validés par Gati ont ici été utilisés comme principaux éléments du cadre théorique,
soient le Career Decision-making Difficulties questionnaire (CDDQ) et le Career
Decision-making Profile (CDMP). Tel que le disent Bujold et Gingras (2000) : « les
travaux de ce chercheur sur le thème de la prise de décision apportent une
contribution certaine à ce domaine de recherche et de pratique » (p.325). Après avoir
abordé la prise de décision selon Gati, les travaux de Rotter (1954, 1982) viendront
situer le concept de locus de contrôle. Ce chapitre sera conclu par un parcours de
l’œuvre de Fournier, dans le but de servir d’appui à la conception de la notion de
locus de contrôle en orientation scolaire.
2.1 Travaux de Gati sur la prise de décision relative à la carrière
Itamar Gati est chercheur au département de psychologie de l’Université
hébraïque de Jérusalem. Ses travaux de recherches portent principalement sur la prise
de décision. Les dimensions d’analyse de la prise de décision entre autres
développées ici sont le Career Decision-making Difficulties questionnaire (CDDQ) et
le Career Decision-making Profile (CDMP).
24
Selon Gati, Krausz et Osipow (1996), les décisions liées à la carrière ont des
caractéristiques qui sont communes à un grand nombre de décisions. En effet, une
personne qui doit prendre une décision devra choisir un certain nombre d’alternatives
qui seront considérées en fonction de l’évaluation et de la comparaison de nombreux
attributs ou aspects. En plus de ces caractéristiques communes, les décisions liées à la
carrière possèdent également des caractéristiques uniques :
« Premièrement, le nombre d’alternatives potentielles est souvent assez
large (par exemple en raison des employeurs potentiels, du choix de
l’établissement scolaire, etc.). Deuxièmement, une grande quantité
d’informations est disponible pour chaque alternative. Troisièmement, un
grand nombre d'aspects (par exemple, la durée de la formation, le degré
d'indépendance, le type de relation avec les gens) est nécessaire pour
caractériser les occupations et les préférences de l'individu de manière
détaillée et significative. Quatrièmement, l’incertitude joue un rôle majeur
en ce qui concerne les caractéristiques de l'individu et la nature de son
futur choix de carrière. » (Gati, Krausz et Osipow, 1996, p. 511,
traduction libre).
Gati et Asher (2001) ont divisé le processus décisionnel en trois étapes, c’est-
à-dire la présélection (Prescreening), l’exploration en profondeur (In-Depth
Exploration) et le choix (Choice). Pour Gati et Tal (2008, cité dans Ginevra, Nota,
Soresi et Gati, 2012), il est question d’indécision de carrière lorsque l’individu a de la
difficulté à entrer dans le processus de prise de décision, ou à une ou plusieurs des
étapes énumérées précédemment. Gati (2011) différencie toutefois l’indécision et les
difficultés liées à la prise de décision qu’il classe en 4 catégories :
« Le moment auquel elles surviennent (avant ou pendant l’engagement
actuel dans le processus de prise de décision liée à la carrière);
La source de la difficulté (cognitive ou affective);
L’impact de la difficulté sur la décision (bloque le processus ou guide
vers une décision moins optimale);
Le type d’intervention requis pour surmonter la difficulté » (p.2,
traduction libre).
25
Ces distinctions proposées par Gati sont fort pertinentes à prendre en
considération pour tout intervenant travaillant avec des problématiques touchant aux
difficultés de prise de décision ou encore à l’indécision. En effet, elles permettent de
nuancer le qualificatif donné en ce qui a trait à la décision / indécision.
2.2 Principaux outils de Gati concernant la prise de décision relative à la
carrière
Les sections suivantes visent à présenter deux questionnaires élaborés par
Gati, c’est-à-dire le Career Decision-making Difficulties Questionnaire (CDDQ), et le
Career Decision-Making Profile (CDMP) questionnaire.
2.2.1 Le Career Decision-making Difficulties Questionnaire (CDDQ)
La description du CDDQ de même que différentes recherches ayant porté sur
ce questionnaire sont présentées dans les prochaines sections.
2.2.1.1 Description de l’instrument
Le CDDQ est un outil basé sur la taxonomie proposée par Gati et al. (1996),
qui repose entre autres sur le modèle de la prise de décision de carrière idéale. Pour
qu’une décision de carrière soit qualifiée « d’idéale », plusieurs conditions doivent
être respectées (Gati, Osipow, Krausz et Saka, 2000, p.100, traduction libre) : tout
d’abord, la personne doit être consciente du besoin de prendre une telle décision. Par
la suite, elle doit être prête à prendre ce genre de décision, et finalement, elle doit
avoir la capacité de prendre la « bonne » décision (c’est-à-dire une décision qui est
basée sur un processus approprié et qui est compatible avec ses buts et ses
ressources).
26
Pour ces auteurs,
« toute déviation de la prise de décision de carrière idéale est considérée
comme une difficulté potentielle qui peut affecter le processus de prise de
décision de la personne selon ces options: 1) en empêchant l’individu de
prendre une décision et 2) en conduisant l’individu à une décision de
carrière moins optimale » (Gati, Osipow, Krausz et Saka, 2000, p.100,
traduction libre).
Le CDDQ a été développé par Gati dans le but de localiser et d’identifier le
domaine spécifique de difficultés rencontrées par chaque client dans son processus de
prise de décision lié à la carrière. La taxonomie des difficultés de la prise de décision
de carrière selon Gati (2011) se regroupe en 3 niveaux de catégorisation : manque de
préparation, manque d’information et information incohérente (voir tableau page
suivante : adaptation du texte de Gati, 2011, p.3-4, traduction libre).
27
Niveau de
catégorisation
Sous-niveaux de
catégorisation
Description
Manque de
préparation (Lack of
Readiness)
Manque de motivation (Lack of motivation)
Un score élevé reflète un manque de
volonté à prendre une décision.
Indécision (Indecisiveness) Un score élevé reflète une difficulté
générale à prendre des décisions.
Croyances
dysfonctionnelles (Dysfunctional Beliefs)
Un score élevé reflète une perception
déformée du processus de prise de
décision de carrière, et des attentes
irrationnelles et des pensées
dysfonctionnelles vis-à-vis celui-ci.
Manque
d’information (Lack of
information)
Manque d’information à
propos du processus de
prise de décision (Lack of information about the
Decision Making Process)
Un score élevé reflète un manque de
connaissances sur la façon de prendre une
décision réfléchie, et plus précisément un
manque de connaissances en ce qui
concerne les étapes d’un processus de
prise de décision de carrière.
Manque d’information à
propos de soi (Lack of Information about the
Self)
Un score élevé reflète une situation où un
individu sent qu’il n'a pas assez
d’informations sur soi-même (par exemple
par rapport à ses habiletés, ses préférences
au niveau de la carrière).
Manque d’information à
propos des professions (Lack of Information about
Occupations)
Un score élevé témoigne d'un manque
d'informations concernant les possibilités
de carrière, c’est-à-dire quelles
alternatives existent et /ou quelles sont les
caractéristiques de ces alternatives.
Manque d’information à
propos de la manière
d’obtenir de l’information (Lack of Information about
Ways of Obtaining
Information)
Un score élevé reflète un manque
d'informations sur les moyens d’obtenir de
l’information supplémentaire ou de l’aide
pouvant faciliter la prise de décision.
Information
incohérente (Inconsistent
Information)
Information non fiable (Unreliable Information)
Un score élevé indique que l'individu sent
qu'il a des informations contradictoires sur
lui-même ou à propos des professions
envisagées.
Conflits internes (Internal Conflicts)
Un score élevé reflète un état de confusion
interne. Ce conflit interne peut provenir de
la difficulté à faire des compromis entre
les nombreux facteurs que l’individu
considère comme importants lorsque
certains de ces facteurs sont incompatibles
entre eux.
28
2.1.1.2 Recherches menées en lien avec le CDDQ
Une recherche intitulée Validity of the career decision making difficulties
questionnaire counselee versus career counselor perceptions est présentée, dans un
premier temps, dans cette sous-section. En l’an 2000, Itamar Gati, Samuel H.
Osipow, Mina Krausz et Noa Saka ont mené une recherche dans le but d’examiner la
validité du CDDQ. Pour ce faire, les chercheurs ont établi deux critères : un critère
comportemental et un critère basé sur le jugement de conseillers en orientation. En ce
qui a trait au premier critère, les chercheurs désiraient savoir si
« les personnes qui souhaitent recevoir des conseils reliés à la carrière
diffèrent dans la nature et l'ampleur de leurs difficultés et ce, en
comparaison à un groupe de jeunes adultes provenant d’une étude de Gati
et al. réalisée en 1996 » (Gati, Osipow, Krausz et Saka, 2000, p. 102,
traduction libre).
Dans un premier temps, les chercheurs souhaitaient établir la structure des
difficultés impliquées dans le choix de carrière des individus participant à la
recherche. Cette structure a par la suite été comparée à la structure hypothétique du
CDDQ. Les chercheurs ont alors testé l'hypothèse selon laquelle
« les personnes souhaitant être aidées feraient état de difficultés plus
grandes que ne le ferait un groupe général de jeunes adultes (Gati et al.,
1996) dans toutes les catégories de difficultés sauf le manque de
motivation, dans laquelle ils sont censés rapporter moins de difficultés
que les autres » (Gati, Osipow, Krausz et Saka, 2000, p.102, traduction
libre).
Le deuxième critère visait à recueillir les jugements des conseillers portés sur
les difficultés de prise de décision de carrière des personnes faisant appel à leurs
services. Ceci a permis d’analyser et de comparer le modèle de difficultés de prise de
décision reliée à la carrière de 95 personnes ayant reçu les services des conseillers par
rapport au jugement de ces derniers. Plus précisément, les jugements des conseillers
29
ont été obtenus par rapport aux 10 catégories de difficultés de la prise de décision de
la taxonomie. Par la suite, ces jugements ont été comparés aux résultats de l’auto-
évaluation des difficultés vécues par les participants à la recherche, qui a été
complétée à l’aide du CDDQ (Gati, Osipow, Krausz et Saka, 2000, p.103, traduction
libre). L'hypothèse selon laquelle il existe une corrélation positive entre le jugement
des conseillers et l’auto-évaluation des aidés a ainsi été testée. En réponse à
l’hypothèse, des corrélations positives et significatives ont été notées entre les scores
des participants sur les échelles du CDDQ et les jugements des conseillers, mais ces
corrélations se sont avérées plus faibles que prévu. Toutefois, les résultats ont
démontré que « le modèle de difficultés dans la prise de décision de carrière des
participants de cette étude était similaire à celui du modèle théorique, et reproduisait
les conclusions de l'échantillon israélien de Gati et al. (1996) » (Gati, Osipow, Krausz
et Saka 2000, p.109, traduction libre). Cette conclusion vient donc confirmer la
validité du CDDQ.
Selon l’étude de Gati, Osipow, Krausz et Saka (2000), le CDDQ offre de
multiples possibilités d’intervention :
« Un conseiller en orientation pourrait l’administrer à un client, avant leur
première rencontre, de manière à mieux cibler ses interventions. Le
CDDQ pourrait également être utilisé dans le but d’obtenir une évaluation
globale des difficultés d’un individu, ou encore d’obtenir une évaluation
plus précise des trois grandes catégories de difficultés, ou des 10
catégories de difficultés spécifiques » (Gati, Osipow, Krausz et Saka,
2000, p. 111, traduction libre).
En 2001, Gati et Saka ont mené une étude intitulée High school student’s
career-related decision-making difficulties, dans le but d’examiner les difficultés
liées à la prise de décision de carrière parmi 1843 adolescents israéliens devant
choisir une « high school » (9ième année), une « high school » avec cours optionnels
(10ième année), ou encore une carrière militaire.
30
Le but de l’étude était de
« caractériser et de catégoriser les différents types de difficultés liées à la
prise de décision de carrière rencontrées par les adolescents d’Israël, et
qui s’appuient sur le modèle théorique général d’analyse de ces difficultés
récemment proposé par Gati, Krausz, and Osipow (1996) » (Gati et Saka,
2001, p.331, traduction libre).
L’étude visait également à « améliorer la compréhension des conseillers en
orientation par rapport aux difficultés rencontrées par les adolescents dans leurs choix
d’études et de carrière » (Gati et Saka, 2001, p.332, traduction libre). La base
théorique de la recherche de Gati et Saka est fondée sur la taxonomie des difficultés
de la prise de décision de carrière, développée lors de la construction du Career
Decision-making Difficulties Questionnaire (CDDQ) par Gati et al. (1996), dans
lequel chacune des difficultés des 10 catégories est représentée par un énoncé. Ainsi,
« en étudiant un échantillon de jeunes adultes Américains et Israéliens, Gati et al.
(1996) ont trouvé que la structure empirique des 3 catégories majeures et des 10
catégories spécifiques était grandement similaire à la structure théorique illustrée ci-
dessous » (Gati et Saka, 2001, p.333, traduction libre) :
31
Difficultés liées à la prise de décision de carrière
Avant le processus Durant le processus
Figure 2 Taxonomie des difficultés liées à la prise de décision de carrière (Gati et Saka, 2001, p.333, traduction libre)
Manque de
préparation en
raison
D’un
manque de
motivation
De
l’indécision
De croyances
dysfonctionnelles
Du
processus de
prise de
décision
De soi Des
professions
De la
manière
d’obtenir de
l’information
D’informations
non fiables
De conflits
internes
De
conflits
externes
Manque
d’informations
à propos
Information
incohérente en
raison
32
Dans l’étude de Gati et Saka (2001), chaque aspect de la taxonomie des
difficultés initialement proposée par Gati et al. (1996) a été adapté et révisé afin de
correspondre davantage aux difficultés rencontrées par les élèves adolescents
israéliens, ce qui a permis de construire un questionnaire également adapté. Cette
nouvelle structure des difficultés a tout d’abord été examinée de manière empirique,
pour être ensuite comparée à la taxonomie théorique originale. Ceci a permis de
vérifier si, pour chacune des trois situations de décision, « les difficultés de prise de
décision étaient adéquatement représentées par les 10 catégories proposées par Gati et
al. (1996), et si les relations empiriques entre les catégories ressemblaient à la
taxonomie théorique » (Gati et Saka, 2001, p.333, traduction libre).
Les résultats obtenus pour la 9e année suggèrent qu'il existe une distinction
entre les difficultés qui sont rencontrées avant la prise de décision de carrière et celles
qui apparaissent lors du processus. Pour la 10e année, la structure empirique s’est
avérée être très similaire à celle obtenue pour les élèves de 9e année, et similaire mais
non identique au modèle théorique sur lequel repose le questionnaire. Finalement, en
ce qui concerne les résultats obtenus pour la 11e année, la structure empirique obtenue
est très semblable à celle du modèle théorique présenté dans la figure 2.
La grande similitude entre la structure élaborée pour les 9e, 10e et 11e années
dans l’étude de Gati et Saka (2001) et la structure théorique proposée par Gati et al.
(1996) fournit un excellent soutien aux propriétés psychométriques de cette dernière.
Par ailleurs, les résultats suggèrent que « le CDDQ puisse être utilisé pour évaluer
adéquatement les catégories systématiques de difficultés qui partagent des traits
communs tels que la cause, le timing, l'impact, ou les interventions requises » (Gati et
Saka, 2001, p.339, traduction libre). Plus précisément, le CDDQ peut être utilisé dans
le but de procéder à l’évaluation des besoins de groupes dits particuliers. Par
exemple, selon les auteurs, les conseillers œuvrant en milieux scolaires peuvent
utiliser le CDDQ pour faciliter l'identification de groupes d'élèves qui ont des
33
difficultés liées à l'une des trois grandes catégories présentées dans la figure 2, et qui
pourraient, par le fait même, bénéficier du même type d’intervention. Finalement, le
CDDQ permet d’évaluer les résultats des interventions qui visent à réduire les
difficultés liées à la prise de décision de carrière, que celles-ci proviennent des 3
grands sources de difficultés ou encore des 10 catégories de difficultés spécifiques
(Gati et Saka, 2001). Si les différentes dimensions du CCDQ peuvent mettre en relief
la manière dont les individus construisent leur regard de soi et du monde, notamment
selon un locus de contrôle interne ou externe, c’est un autre outil de Gati, le CDMP
(Gati, 2011), qui traite plus spécifiquement de cette question.
2.2.2 Le Career Decision-Making Profile (CDMP) questionnaire
La description du CDMP de même que différentes recherches ayant porté sur
ce questionnaire sont présentées dans les prochaines sections.
2.2.2.1 Description de l’instrument
Le but du CDMP (Gati, 2011) est de « fournir de l’information à propos de la
manière dont les individus ont tendance à prendre leurs décisions de carrière » (p.1,
traduction libre). Ici, Gati préfère parler de profil de prise de décision de carrière
plutôt que de style de prise de décision, tout d’abord parce que
« le terme profil indique qu’il s’agit d’un concept complexe et
multidimensionnel plutôt que d'un seul trait dominant. Deuxièmement,
parce qu’un style de prise de décision de carrière suggère que les
caractéristiques de la personnalité sont de la plus haute importance, alors
que le profil de prise de décision de carrière suggère que la personnalité et
la situation de la personne influencent son comportement de prise de
décision » (Gati, 2011, p.2, traduction libre).
34
Bref, Gati, Landman, Davidovitch, Asulin-Peretz, et Gadassi (2010) ont
affirmé que l'utilisation d'une seule « étiquette » pour caractériser la façon dont les
individus prennent leur décision liée à la carrière (par exemple, rationnelle, intuitive,
dépendante; Harren, 1979) et basée sur le style de prise de décision dominant de
l'individu constitue une simplification excessive. Au contraire, ils ont suggéré
d'utiliser des profils multidimensionnels pour caractériser la façon dont les individus
prennent des décisions de carrière (Ginevra, Nota, Soresi, Gati, 2012).
Dans leur étude de 2010, Gati, Landman, Davidovitch, Asulin-Peretz et
Gadassi ont démontré que « la dimension Information processing (traitement de
l'information) comprend à la fois les styles rationnels et intuitifs, qui se veulent des
pôles opposés de la même dimension » (Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen, 2012, p. 3,
traduction libre). Cependant, selon une étude de Krieshok, Black et McKay (2009,
cité dans Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen, 2012), les processus intuitifs de la prise de
décision ne sont pas à l'opposé des processus rationnels. De plus, en consultant une
étude de Mashiah-Cohen (2010, cité dans Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen, 2012),
qui mentionne que l'aspect intuitif de la prise de décision n'avait pas été suffisamment
représenté dans le modèle original du CDMP, Gati a choisi d’ajouter une douzième
dimension à son questionnaire: l'intuition.
Plusieurs études ont été menées dans le but de vérifier les propriétés
psychométriques du CDMP dans sa version originale comportant 11 dimensions.
Deux études ont conclu que « la cohérence interne du questionnaire, la fiabilité, la
structure interne, la validité de construit et interculturelle, se sont avérées
équivalentes à la fois pour la version hébraïque et la version anglaise du questionnaire
(Gadassi et al., 2012 et Gati et al., 2010) » (Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen, 2012,
p.3, traduction libre). Plus tard, « la cohérence interne, la fiabilité test-retest, la
structure et la stabilité sur la base d’une année entière des 12 dimensions du CDMP
ont été testées par Gati et Levin (2012) » (Gati, Gadassi et Mashiah-Cohen, 2012, p.3,
35
traduction libre). Gati et Levin (2012) ont démontré que la disposition des individus
dans leur groupe par rapport aux différentes dimensions du CDMP ne change pas
beaucoup en deux semaines. De plus, bien que des changements sur une période de 1
an se soient produits, ils sont considérés comme étant négligeables ou faibles. Bref,
« les profils obtenus au CDMP par les individus ont obtenu une meilleure fidélité
test-retest de 2 semaines de même qu’une meilleure stabilité sur une période de 1 an
que les dimensions du CDMP » (Gati et Levin, 2012, p.399, traduction libre). Ces
résultats sont donc compatibles avec ceux de la recherche réalisée par Gadassi et al.
(2011).
Les 12 dimensions du CDMP (Gati, 2011) sont : Information gathering
(collecte d’informations), Information processing (traitement de l’information),
Locus of control (locus de contrôle), Effort invested in the process (efforts investis
dans le processus), Procrastination (procrastination), Speed of making the final
decision (vitesse à laquelle la décision finale se prend), Consulting with others
(consultation avec les autres), Dependence on others (dépendance envers les autres),
Desire to please others (désire de plaire aux autres), Aspiration for an « ideal
occupation » (aspiration à trouver un travail idéal), Willingness to compromise
(volonté à faire des compromis), et using intuition (recours à l’intuition).
En plus de ces 12 dimensions, le CDMP comprend également un énoncé
"warm-up" et deux énoncés de validité, qui permettent de s’assurer que les individus
ne répondent qu'après avoir lu correctement chaque énoncé et surtout, qu’ils ne
répondent pas au hasard.
36
2.2.2.2 Recherches menées en lien avec le CDMP
En 2012, Gadassi, Gati et Dayan publiaient une étude intitulée The
Adaptability of Career Decision-Making Profiles. Le modèle du CDMP a été
développé sur la base des sept énoncés suivants (Gati et al, 2010) :
« Les individus font des choix de carrière de différentes façons ;
L'approche de l'individu dans son processus de prise de décision de
carrière peut être mieux décrite par un profil multidimensionnel que par
un trait dominant unique (ou un style) ;
Chaque dimension du modèle du CDMP représente un continuum entre
deux pôles le long desquels les individus peuvent être caractérisés ;
Bien que les dimensions ne soient pas indépendantes, chacune contribue
à la description de la façon dont les individus prennent leurs décisions de
carrière ;
Comme de nombreuses mesures de personnalité, les dimensions ne
peuvent être combinées pour produire un seul score total ;
En fonction de la dimension, un pôle est souvent plus adapté pour la
prise de décision que l'autre ;
Alors que certaines dimensions sont principalement liées à la
personnalité, d'autres sont plus situationnelles (c’est-à-dire principalement
affectées par la tâche des décisions spécifiques auquel l'individu est
confronté) » (p. 613, traduction libre).
Des recherches antérieures (Gati et al, 2010, Gati et Levin, 2012) ont appuyé
les cinq premiers énoncés énumérés ci-haut, ainsi que « la validité convergente et
incrémentielle par rapport aux précédents modèles de style de prise de décision de
carrière (Gati, Gadassi & Mashiah -Cohen, 2012) » (Gadassi, Gati et Dayan, 2012,
p.613, traduction libre). L’objectif de la recherche était de tester quel pôle de chaque
dimension proposée par Gati est le plus adapté (Gadassi, Gati et Dayan, 2012). Le
concept d’adaptabilité de la prise de décision de carrière est définit ainsi : « la
capacité à prendre des décisions de carrière après avoir examiné suffisamment les
informations nécessaires à la décision, sans retard inutile à chaque étape ou à la fin du
processus » (Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.613, traduction libre).
37
Trois critères ont été utilisés dans le but de déterminer quels pôles des
dimensions du CDMP sont les plus adaptés. Le premier critère était les corrélations
de ces dimensions avec les facteurs du questionnaire Les difficultés de la prise de
décision de carrière reliées à la personnalité et aux émotions (EPCD) (Saka et Gati,
2007; Saka, Gati et Kelly, 2008). Ce questionnaire comprend trois facteurs qui « sont
considérés comme conduisant à des difficultés chroniques, omniprésentes dans la
prise de décision de carrière, c’est-à-dire des visions pessimistes, l’anxiété et le
concept de soi et de l’identité non cristallisés » (Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.613,
traduction libre). Gadassi, Gati et Dayan (2012), en se basant sur le fait que
« des niveaux plus élevés de difficultés liées aux troubles émotionnels et
de personnalité, tel que mesuré par l'EPCD, entravent le processus de
prise de décision de carrière (Gati, Asulin-Peretz, et Fisher, 2012; Saka et
Gati, 2007) et sont associées à des niveaux inférieurs d’auto-efficacité
dans la prise de décision de carrière, à un locus de contrôle davantage
externe, et comme faisant moins avancer le processus de prise de décision
de carrière (Gati et al., 2011) » (Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.613,
traduction libre),
ont émis l'hypothèse qu’une corrélation négative avec l'EPCD indiquerait que
le pôle supérieur de la dimension est le plus adapté.
Le deuxième critère d'évaluation de l'adaptabilité des dimensions du CDMP
était l'inventaire de personnalité NEO (NEO-PI), qui est basé sur le modèle Big Five
des facteurs de personnalité de Costa et McCrae (1992). Ce sont cinq facteurs reliés à
la manière dont la personnalité d’un individu peut être caractérisée qui composent ce
modèle :
« Le facteur Névrosisme indique la tendance d'un individu à éprouver de
la détresse psychologique et de l'instabilité émotionnelle ;
le facteur Extraversion comprend divers traits comme la sociabilité,
l'activité et la tendance à ressentir des émotions positives comme la joie et
le plaisir ;
38
le facteur Ouverture à l'expérience inclut une tendance à la curiosité
artistique et intellectuelle, ainsi que la flexibilité comportementale et
interpersonnelle;
le facteur Agréabilité indique la tendance d'un individu à avoir
confiance aux autres, à être sympathique et coopératif ;
le facteur Conscience indique une tendance à l'ordre, la discipline, la
délibération, la fiabilité et la compétence d'un individu » (Costa et
McCrae, 1989, 1992, cités dans Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.614,
traduction libre).
Une hypothèse a été émise par rapport à cet inventaire de personnalité : « un
niveau inférieur de Névrosisme et des niveaux plus élevés en ce qui a trait à
l'Extraversion et à la Conscience indiqueraient une plus grande adaptabilité des
dimensions CDMP » (Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.614, traduction libre). Les
auteurs de la recherche n’ont toutefois émis aucune hypothèse spécifique en ce qui a
trait aux facteurs Agréabilité et Ouverture à l’expérience.
Le troisième critère visant à évaluer l'adaptabilité des dimensions du CDMP
correspond au stade où se situe l'individu par rapport à son processus de prise de
décision de carrière. Pour ce faire, les chercheurs ont classé chaque participant dans
l’une des catégories suivantes : décidé, en partie décidé, ou indécis, en fonction de la
propre évaluation de l’avancement du processus de prise de décision de carrière du dit
participant. Une autre hypothèse a alors été émise, c’est-à-dire que « les personnes
qui sont plus décidées ont un profil de prise de décision de carrière plus adapté, et
donc le pôle de la dimension qui est le plus frappant dans le groupe le plus décidé est
également le plus adapté » (Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.614, traduction libre).
Afin de réaliser leur recherche, et surtout dans le but de tester les trois
hypothèses décrites ci-dessus, Gadassi, Gati et Dayan (2012) ont recruté leurs
participants parmi des jeunes adultes se trouvant dans une phase de transition, c’est-à-
dire juste avant qu’ils ne débutent des études supérieures ou une formation
39
postsecondaire. Les chercheurs ont recruté les 383 participants en publiant des
annonces sur des sites internet et des forums en ligne israéliens, de même que dans
des magasins. La version du CDMP qui a été utilisée comprend 33 énoncés
représentant les 11 dimensions du CDMP. Pour chaque question, les participants
devaient évaluer, sur une échelle de type Likert en 7 points, jusqu’à quel point ils
étaient d'accord avec l’énoncé (1 = ne sont pas d'accord du tout, 7 = fortement
d'accord).
La recherche de Gadassi, Gati et Dayan (2012) est « la première à étudier
l'adaptabilité des dimensions du CDMP, et plus précisément, quel pôle de chaque
dimension est le plus adapté » (Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.619, traduction libre).
Selon ces auteurs, mettre l'accent sur l'adaptabilité des dimensions spécifiques plutôt
que sur un style global est particulièrement important : des données récentes
provenant de Gati et al. (2012) ont démontré la contribution unique du CDMP dans la
compréhension du processus de prise de décision de carrière, et ce, en comparaison
avec des instruments traditionnels d’évaluation des styles de prise de décision de
carrière (Gadassi, Gati et Dayan, 2012).
En ce qui a trait aux résultats de recherche, la majorité des hypothèses émises
par les chercheurs ont été entièrement ou partiellement appuyées par les résultats.
Plus précisément,
« une collecte d'information plus complète, un traitement plus analytique
de l'information, un locus de contrôle plus interne, des efforts investis, des
niveaux inférieurs de procrastination, une plus grande rapidité de la
décision finale, moins de dépendance aux autres, et moins de désir de
plaire aux autres ont été trouvés comme étant les pôles adaptatifs »
(Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.619, traduction libre).
Les chercheurs ont également conclu que les facteurs de personnalité
généraux, c’est-à-dire ceux mesurés par le NEO-PI, sont moins importants dans le
40
processus décisionnel de carrière que les facteurs de personnalité qui sont
spécifiquement associés au processus de prise de décision de carrière, c’est-à-dire
ceux mesurés par l'EPCD (Gadassi, Gati et Dayan, 2012). Ce résultat met donc en
évidence « l'importance d'utiliser des instruments de prise de décision de carrière
spécifiques dans les processus d'orientation professionnelle » (Gadassi, Gati et
Dayan, 2012, p.619, traduction libre). Les résultats de cette étude, quoique menée
auprès d’un échantillon de participants israéliens, trouvent également écho en
Amérique du Nord. En effet, des études antérieures ont comparé des échantillons
provenant de ces deux populations, et ont démontré que « les difficultés de prise de
décision de carrière temporaires et envahissantes sont assez similaires dans ces deux
cultures (Gati et al., 1996; Saka et al., 2008), tout comme les profils de prise de
décision de carrière des jeunes adultes (Gati et al., 2010) » (Gadassi, Gati et Dayan,
2012, p.620, traduction libre).
Les conclusions de l’étude de Gadassi, Gati et Gayan (2012) peuvent être
utiles de plusieurs manières aux conseillers, surtout en ce qui a trait à la planification
des interventions de carrière. Par exemple, la recherche fournit de l'information à
savoir quel pôle de chaque dimension est le plus adapté, et peut donc apporter de
précieux renseignements afin de déterminer quelle stratégie pourrait être la meilleure
à utiliser pour accompagner le client. Bref, « en étant conscient du profil de prise de
décision de la carrière d'un client, il est possible d’adapter les interventions de
counseling de manière plus sensible au client spécifique (Gati et al., 2010) »
(Gadassi, Gati et Dayan, 2012, p.620, traduction libre).
Une autre recherche en lien avec le CDMP est intitulée Career Decision-
Making Profiles of Italian Adolescents (Journal of Career Assessment), et ses
principales implications sont présentées subséquemment. Le but de l’étude était « de
tester les propriétés psychométriques de la version italienne du CDMP auprès
d’adolescents » (Ginevra, Nota, Soresi et Gati, 2012, p.375, traduction libre). La
41
version traduite en italien a été administrée à 1835 adolescents participants. Chacun
était invité à répondre aux 36 énoncés du CDMP, toujours en utilisant une échelle de
type Likert en 7 points. Afin de prendre part officiellement à l’étude, les participants
devaient se présenter à des activités d'orientation en milieu scolaire, où ils ont eu à
compléter une batterie de tests.
Avant tout chose, Ginevra, Nota, Soresi et Gati (2012) rappellent la taxonomie
des difficultés de prise de décision de carrière fondées sur la théorie de la décision,
élaborée par Gati, Krausz, et Osipow (1996) :
« Cette taxonomie établie une distinction entre les difficultés qui peuvent
survenir avant d'essayer de prendre une décision (par exemple, le manque
de préparation en raison de la faible motivation, l'indécision générale, les
croyances dysfonctionnelles) et celles qui émergent alors que le processus
de décision est en cours (par exemple, le manque d'informations sur le
processus, sur soi et sur les professions; informations incohérentes en
raison de l'information non fiable ou interne et les conflits externes) »
(Ginevra, Nota, Soresi et Gati, 2012, p.376, traduction libre).
En plus de l’objectif de recherche principal, l’un des objectifs de l’étude était
de « comparer les différences entre les profils CDMP des garçons et des filles, ainsi
que des jeunes qui étaient décidés ou indécis quant à leur avenir » (Ginevra, Nota,
Soresi et Gati, 2012, p.377, traduction libre). Les conclusions obtenues sont les
suivantes:
« Les filles ont tendance à investir plus de temps et d'efforts dans le choix
des tâches (entre autres Gati et al, 2010), sont plus influencées par les
autres quand elles prennent une décision (entre autres Gati et al, 2010) et
sont plus lentes que les garçons à prendre leur décision finale (entre autres
Gati et al, 2010) » (Ginevra, Nota, Soresi et Gati (2012, p.377, traduction
libre).
42
Les résultats de l’étude de Ginevra et al. (2012) ont finalement démontré que
ces différences qualifiaient non seulement les participants de la recherche de Gati et
al. (2010), mais également l’échantillonnage italien.
En ce qui concerne la cohérence interne et la validité de construit, les résultats
ont démontré que « le CDMP est une mesure psychométrique adéquate pour décrire
les différences individuelles dans la manière dont les décisions de carrière sont prises,
ce qui est semblable à la version originale hébraïque et états-unienne du CDMP (Gati
et al., 2010) » (Ginevra, Nota, Soresi et Gati, 2012, p.383, traduction libre). Une
analyse a également permis d’appuyer la structure des 11 dimensions du CDMP. La
grande conclusion tirée de cette analyse est que les résultats des échelles ne doivent
pas être combinés en un seul score total. Cela soutient que « la façon dont les
individus prennent leur décision de carrière doit être décrite en termes de profil
multidimensionnel plutôt qu’en termes d'un seul style ou score » (Ginevra, Nota,
Soresi et Gati, 2012, p.383, traduction libre).
La compatibilité de la structure de la version italienne du CDMP avec celle
obtenue à partir des échantillons des États-Unis et d’Israël fournit un support pour la
validité et ce, malgré le fait que la fiabilité de la cohérence interne de quelques
échelles était davantage inférieure à ce qui était espéré, en plus d’être inférieure à
celles des autres versions du questionnaire. Les auteurs attribuent cette différence, du
moins en partie, au fait que « les participants étaient plus jeunes que ceux de l’étude
de Gati et al. (2010) » (Ginevra, Nota, Soresi et Gati, 2012, p.384, traduction libre).
Autre résultat intéressant :
« Parmi les stratégies utilisées par les participants italiens, israéliens et
états-uniens, la dimension dépendance face aux autres a obtenu le score
le plus faible, tandis que la dimension aspiration pour une profession
idéale est celle ayant obtenu le plus haut score. Dans les trois contextes
culturels différents, la tendance à déléguer la responsabilité de la décision
43
aux autres est assez faible » (Ginevra, Nota, Soresi et Gati, 2012, p.384,
traduction libre).
Évidemment, l’étude de Ginevra et al. (2012) comporte également des
implications pratiques. De par l’évaluation multidimensionnelle de la prise de
décision de carrière qu’il permet, le CDMP est un outil fort approprié dans le but
d’évaluer la manière dont les individus abordent et gèrent leur décisions de carrière.
Tel que mentionné par les chercheurs :
« Cela peut aider les praticiens à accorder une attention particulière aux
clients avec des profils moins « avantageux », d'encourager la réflexion
sur les avantages et les inconvénients associés à ces modèles, et stimuler
leurs clients à faire usage de stratégies qui peuvent être plus efficaces
dans la tâche décisionnelle à laquelle ils sont confrontés » (Ginevra, Nota,
Soresi et Gati, 2012, p. 384, traduction libre).
En résumé, le CDMP, en permettant de « tester l'efficacité des interventions
d'orientation professionnelle dont le but est d'améliorer les compétences
décisionnelles » (Ginevra, Nota, Soresi et Gati, 2012, p. 385, traduction libre), et le
CDDQ, qui peut être utilisé dans le but « d’évaluer l'efficacité des interventions
visant à réduire les difficultés de prise de décision de carrière (Gati et al., 1996) »
(Ginevra, Nota, Soresi et Gati, 2012, p. 385, traduction libre), constituent deux outils
fort pertinents par rapport à l’évaluation de la prise de décision.
En tenant compte des objectifs du CDDQ et du CDMP, qui sont de « localiser
et identifier le domaine spécifique de difficultés rencontrées par chaque client dans
son processus de prise de décision lié à la carrière » et de « fournir de l’information à
propos de la manière dont les individus on tendance à prendre leurs décisions de
carrière »,il ne peut être qu’intéressant de jumeler les deux approches de manière à
étudier « le rôle du locus de contrôle sur la prise de décision relative à la carrière »,
objectif du présent écrit. D’ailleurs, tel que souligné par Fournier et St-Onge (1995) :
« la prise de décision est une dimension centrale à investiguer parce que les décisions
44
apparaissent de toute évidence reliées au locus de contrôle et au pouvoir personnel
que s'accorde l'individu dans ses démarches d'orientation et d'insertion socio-
professionnelle » (p.351).
2.3 Conception de la notion de locus de contrôle en orientation
Cette section présente, dans un premier temps, les origines du locus de
contrôle, ce qui permettra de situer les grandes lignes de ce concept provenant de la
psychologie. Différentes échelles d’évaluation du locus de contrôle seront par la suite
présentées, ainsi que la notion d’internalité. Pour terminer ce chapitre, le locus de
contrôle en lien avec le développement de carrière sera abordé.
2.3.1 Locus de contrôle dans la psychologie
Le concept de locus de contrôle, qui découle de la théorie de l’apprentissage
social, a été créé par Rotter en 1954. Rotter y explique le contrôle interne versus le
contrôle externe des renforcements, c’est-à-dire que le contrôle des événements
dépend de l’individu pour celui qui se prête des explications internes, alors que le
contrôle des événements ne dépend pas de l’individu pour celui qui se prête des
explications externes (Dubois, 1987). De façon plus précise, Rotter définit le locus de
contrôle ainsi :
« When a reinforcement is perceived by the subject as following some
action of his own but not being entirely contingent upon his action, then,
in our culture, it is typically perceived as the result of luck, chance, fate,
as under the control of powerful others, or as unpredictable because of the
great complexity of the forces surrounding him. When the event is
interpreted in this way by an individual, we have labeled this a belief in
external control. If the person perceives that the event is contingent upon
his own behavior or his own relatively permanent characteristics, we have
termed this a belief in internal control » (Rotter, 1982, p.171-172).
45
Selon Rotter (1954), plusieurs facteurs déterminent les probabilités qu’un
individu se comporte de telle ou telle manière: « the occurrence of a behavior of a
person is determined not only by the nature or importance of goals or reinforcements
but also by the person’s anticipation or expectancy that these goals will
occur»(p.102). À titre d’exemple, Dubois (1987) explique que l’achat d’un billet de
loterie est motivé par l’attrait du gain, ce qui représente un renforcement positif, et
par l’espoir de gagner, qui représente une expectation. Selon l’auteure, il semblerait
toutefois que pour que le renforcement ait un effet sur l’expectation, il devra être
considéré par l’individu comme étant lié à son comportement (relation causale).
Toutefois, pour Rotter (cité dans Dubois, 1987), afin de rendre compte des choix
comportementaux, plusieurs éléments doivent être pris en compte, et non pas
seulement la représentation du lien conduite-renforcement. Ces variables sont le type
de comportement lui-même, la situation, la nature du renforcement (positif ou
négatif), sa valeur pour l’individu, les expériences et les expectations antérieures.
Rotter (1975, 1990, cité dans Fournier, 2001), prévient d’ailleurs des dangers
de conceptualiser et d’interpréter l’internalité et l’externalité d’une manière qui
« laisserait entendre que les comportements d’une personne interne ne peuvent être
liés qu’à des éléments positifs et souhaitables (good guy) et ceux d’une personne
externe, qu’à des éléments négatifs et non désirables (bad guy) » (p.370).
Bref, la variable contrôle interne-externe des renforcements exprime la part
respective accordée par l’individu aux facteurs situationnels (caractéristiques
particulières des situations) et dispositionnels (les données inhérentes à l’individu
dans ces situations) dans la détermination des renforcements (Dubois, p.37-38).
46
2.3.2 Échelles d’évaluation du locus de contrôle
Le premier instrument de mesure visant à mesurer les différences
individuelles en matière de contrôle a été créé par Phares en 1955. Deux ans plus tard,
James développait un outil dans la continuité de celui de Phares, et qui porte le nom
d’échelle de James Phares. Il faudra attendre 1966 pour que Rotter élabore l’échelle
de contrôle Interne-Externe de Rotter, qui a été inspirée par trois objectifs :
« Créer un instrument d’administration facile;
faiblement relié à la désirabilité sociale (c’est-à-dire peu sensible à la
tendance qui consiste à choisir les énoncés socialement approuvés et
susceptibles de donner une image de soi positive et conforme);
permettant d’évaluer une expectation générale de contrôle à travers un
ensemble très varié de situations et de domaines ». (Dubois, 1987, p. 65).
Les travaux de Rotter ont inspiré grand nombre d’auteurs dans la création de
nouvelles échelles dédiées aux enfants et adolescents, comme celles, pour n’en
nommer que quelques-unes, de Nowicki et Strickland (1973, cités dans Dubois, 1987)
de Nowicki et Duke (1974, cités dans Dubois, 1987) et de Stephen et Delys (1973,
cités dans Dubois, 1987) de même que des échelles pour adultes, dont les plus connues
sont sans doute celles de Levenson (1973, cité dans Dubois, 1987).
Pour Levenson (cité dans Dubois, 1987), la croyance selon laquelle le monde
est régi par le hasard et l’aléatoire devrait être distinguée de la croyance selon
laquelle le monde est ordonné et prédictible sous le contrôle d’autres tout-puissants.
En effet, selon l’auteur, la possibilité de contrôle par l’individu n’est pas la même
dans les deux cas (Dubois, 1987). Son échelle de mesure se distingue donc de celle de
Rotter en ce sens où Levenson distingue trois types d’expectations: les expectations
en un contrôle interne (échelle I), les expectations en un contrôle d’autres tout-
puissants (échelle P), et les expectations en une absence de contrôle (échelle C).
47
2.3.3 L’internalité
Ce sont Jellison et Green (1981, cités dans Bressoux et Pansu, 1998), qui ont
développé la notion de norme d'internalité suite à leur constat que la culture
occidentale préfère les individus internes. Les auteurs ont donc réalisé diverses
expériences visant à démontrer qu’il existe bien une désirabilité sociale liée à
l’internalité. Leurs principaux résultats sont les suivants (cités dans Dubois, 1987) :
« Les individus (ici des étudiants) accordent une plus grande valeur aux
explications internes puisqu’ils jugent favorablement ceux des leurs qui
fournissent le plus grand nombre de réponses internes à l’échelle de
Rotter et jugent plus défavorablement ceux qui en fournissent le moins
(première étude);
Les individus sont conscients de cette valorisation puisqu’ils en tiennent
compte dans leurs stratégies d’auto-présentation : les réponses qu’ils font
à l’échelle de Rotter diffèrent lorsqu’ils répondent « comme un étudiant
moyen » ou lorsqu’ils répondent « en leur nom propre » (consigne
classique). Leurs réponses sont significativement plus internes dans ce
dernier cas (deuxième étude);
Ils en tiennent également compte lorsqu’on leur demande de répondre
pour donner une image soit positive, soit négative d’eux-mêmes
(troisième études) : l’internalité est alors associée à la production d’une
image positive d’eux-mêmes » (p. 172).
Ainsi, « en apportant les preuves que les individus accordent à l’internalité
une valeur positive, Jellison et Green ont incontestablement montré que les
explications internes en matière de contrôle des renforcements font bien l’objet d’une
désirabilité sociale » (Dubois, 1987, p.173). De plus, comme le mentionne Dubois
(1987): «les explications internes en matière de contrôle des renforcements 1) sont
bien l’expression privilégiée de groupes sociaux favorisés, 2) font l’objet
d’acquisition durant le développement et 3) sont socialement désirables » (p.175).
C'est Beauvois (1984) (cité dans Bressoux et Pansu, 1998) qui a « systématisé
la notion de norme d'internalité, en intégrant dans une même perspective les
48
croyances caractéristiques du LOC et les inférences caractéristiques des attributions
causales » (p.20). Pour Beauvois (cité dans Dubois, 1987),
« l’erreur fondamentale décrite par les théoriciens de l’attribution, la
prédominance des explications internes aussi bien que les phénomènes
d’illusion en matière de représentation de la détermination des
renforcements, sans oublier les réactions internalisantes aux catastrophes,
font intervenir un même biais : la surestimation du poids de l’acteur »
(p.174).
Ce biais se traduit par un refus d’admettre que les comportements d’un
individu puissent être contrôlés par des influences externes et que le hasard puisse
intervenir dans ce qui lui arrive. Fournier (2001), critique toutefois le fait que
« la mise en valeur de la norme d’internalité responsabilise à outrance le
sujet en regard des événements qui lui arrivent, un peu comme si la
«responsabilité» d’un événement devait être attribuée soit au sujet (LOC
interne), soit à l’environnement (LOC externe), ce qui laisse peu de place
à une analyse qui privilégierait la notion de «co-responsabilité» pour
comprendre les événements qui surviennent dans la vie de l’individu »
(p.380).
Cette critique est intéressante puisqu’elle rend compte de la facilité à apposer
une « étiquette » à l’individu. Soit la personne se sent en contrôle de la situation et s’y
engage, soit elle se laisse porter par la chance, le hasard, le destin. Pourtant, tout
intervenant agissant auprès d’individus amenés à prendre des décisions sait que la
question n’est pas de savoir si tout est noir ou blanc, mais plutôt de chercher les
nuances afin de trouver la couleur de chacun.
2.3.4 Locus de contrôle et développement de carrière
Il a été démontré précédemment que le locus de contrôle peut influencer de
nombreuses variables. Mais quel lien peut être fait entre le locus de contrôle et le
développement de carrière? Dans un premier temps, Dubois (1987) mentionne que :
49
« D’une façon générale, les individus qui se caractérisent par une
orientation interne de leur LOC sont aussi ceux qui 1) réussissent le
mieux à l’école, à l’université et dans leur métier 2) semblent être plus
motivés par la réussite 3) témoignent d’une certaine efficacité dans le
recueil et l’utilisation de l’information 4) utilisent leurs expériences
antérieures comme sources d’information» (p.117) .
Bref, il semblerait qu’un individu présentant un locus de contrôle interne soit,
d’une certaine manière, avantagé par rapport à la réussite de son cheminement
scolaire et professionnel.
À son tour, Geneviève Fournier, chercheure et directrice du Centre de
recherche et d’intervention sur l’éducation et la vie au travail (CRIEVAT), s’est
intéressée, dans plusieurs de ses travaux, au concept de locus de contrôle en lien avec
le développement de carrière, c’est-à-dire le choix professionnel et l’insertion socio-
professionnelle. Quelques-uns de ses travaux majeurs sont présentés ici.
Fournier (2001) a mené une recherche afin de « mieux connaître les croyances
de contrôle de jeunes en difficulté d’insertion socioprofessionnelle et de développer
une intervention qui colle à leur réalité et leur permet de développer un certain
pouvoir d’action dans cette situation » (p.379). Ses diverses analyses lui ont permis
de constater que la grande variété de croyances émises par des jeunes de 16 à 25 ans
ne pouvaient être simplement classées selon les catégories interne/externe. L’auteure
a ainsi créé une typologie des croyances comprenant cinq catégories distinctes du
locus de contrôle :
« Lorsque ces cinq catégories de croyances sont comparées entre elles, la
représentation de lieu de contrôle marque une progression selon laquelle,
au point de départ, la réalité qu’impose l’extérieur et qui aliène l’action et
la responsabilisation, se diversifie au fur et à mesure que la perception de
contrôle s’intériorise, offrant ainsi un plus grand nombre d’opportunités et
une plus grande temporalité d’action aux individus. Les croyances les
plus externes, les croyances défaitistes (l’individu est déterminé par le
contexte ou les autres), se situent à une extrémité du continuum et les
50
croyances les plus internes, les croyances pro-actives (l’individu
reconnaît à la fois l’impact de ses efforts personnels et des contingences
environnementales sur les événements de sa vie), sont à l’autre extrémité.
Trois autres catégories de croyances s’insèrent entre ces deux pôles : les
croyances de dépendance (l’individu est déterminé par la chance et le
hasard), les croyances de prescription (l’individu est déterminé par les
prescriptions et les normes sociales) et les croyances d’auto-
responsabilisation (l’individu reconnaît une contingence étroite entre ses
actions et les résultats qu’il obtient) » (p.379).
Fournier (2001, p.371) appuie les propos de Marks (1998) selon lesquels les
croyances de contrôle internes et externes varient très souvent chez un même individu
selon les sphères de vie spécifiques, ses diverses expériences et son contexte de vie et
ce, en fonction des valeurs véhiculées par les milieux fréquentés par cet individu.
De nombreuses études nord-américaines citées dans Fournier (2001) ont
permis d’établir des liens significatifs entre l’externalité et l’appartenance à un groupe
minoritaire ou socioéconomiquement moins avantagé (Gurin, Gurin et Morrison,
1978; Levenson, 1981; Wenzel, 1993; Fink et Hjelle (1973), Mirels et Garret (1971)
Nowicki et Duke (1983) Young et Shorr 1986; Lachman et Weaver, 1998). Les
conclusions provenant de chacune de ces études sont identiques :
« Plus la personne a un niveau d’éducation élevé et appartient à une
classe socioéconomiquement favorisée, plus elle obtient des scores élevés
d’internalité. À l’inverse, moins elle est scolarisée et plus elle appartient à
une classe sociale socioéconomiquement défavorisée, plus elle entretient
des croyances de contrôle externes » (Fournier, 2001, p.372).
Dans leur article « Éduquer le locus de contrôle vocationnel par le truchement
des croyances », Fournier et St-Onge (1995), présentent les conclusions d’une
recherche qu’elles ont menée durant trois ans et qui se basait sur l’énoncé suivant :
« l'adoption d'un locus de contrôle interne ou externe est un élément déterminant de la
motivation du sujet à s'occuper ou à ne pas s'occuper de son orientation et/ou de son
développement vocationnel » (p.355). Cette étude portant sur le locus de contrôle
51
vocationnel, Fournier et St-Onge on définit ce concept comme étant « la disposition
de l'individu à se considérer comme le principal agent de sa vie professionnelle et par
la conviction de pouvoir définir et négocier son propre avenir (Fournier, 1992b, cité
dans Fournier et St-Onge, 1995, p.352) ».
À partir des croyances énoncées par les jeunes impliqués dans leur recherche,
les auteures ont identifié différents niveaux d’externalité ou d’internalité du locus de
contrôle qu’elles ont classés en cinq types, rejetant ainsi le principe dichotomique de
locus de contrôle (externe/interne). Les trois premières classes se situent au niveau
des croyances de contrôle externe et regroupent les croyances défaitistes (niveau
extrêmement externe), les croyances de dépendance (niveau externe) et les croyances
de prescription (niveau plus ou moins externe). Les deux dernières classes se situent
quant à elle au niveau des croyances de contrôle interne, c’est-à-dire les croyances
d'auto-responsabilisation (niveau interne) et les croyances pro-actives (niveau très
interne). On constate ainsi que
« le locus de contrôle vocationnel marque une progression selon laquelle,
au point de départ, la réalité qu'impose l'extérieur et qui aliène l'action et
la responsabilisation, se diversifie au fur et à mesure que le locus de
contrôle s'intériorise, offrant ainsi un plus grand nombre d'opportunités et
une plus grande temporalité d'action aux individus » (Fournier et St-
Onge, 1995, p.355).
Cette classification en cinq niveaux représente, pour les auteurs, une
possibilité d’évolution fort intéressante pour un individu, puisqu’en changeant de
niveau petit à petit, la personne « acquiert déjà du pouvoir personnel et de la
motivation à agir et ce, même si c'est encore pour les autres, au moins l'action
apparaît-elle possible » (Fournier et St-Onge, 1995, p.355).
En 1995, Fournier dirigeait la conception du projet Interagir- une stratégie
efficace d’orientation et d’insertion socioprofessionnelle. Ce programme a pour but
52
« d’intervenir sur les croyances de l’individu pour l’aider dans ses difficultés
d’orientation et d’insertion professionnelle (p.9), et également d’éduquer et
d’accroître le locus de contrôle vocationnel des participants (p.79) ».
Fournier démontre qu’une personne qui croit que son succès est en partie
raison de son investissement personnel s’engagera davantage dans sa démarche qu’un
individu qui s’en remet uniquement à des circonstances extérieures, au hasard, au
destin, etc. Selon un locus de contrôle davantage interne ou externe, la personne, au
fil de ses expériences, renforcera ses croyances par rapport à son pouvoir d’action ou
au contraire par rapport à son sentiment d’impuissance vis-à-vis son environnement.
Bref,
« en adoptant de plus en plus d’attitudes proactives, la personne utilise et
accroît son locus de contrôle interne. Si l’individu opte pour une attitude
défaitiste, il devient la victime du quotidien, des événements, de
l’environnement. En donnant à l’extérieur tout le pouvoir sur lui, en
n’utilisant pas les ressources de son milieu, il ne peut plus exercer de
contrôle sur ce qu’il vit tant personnellement que professionnellement.
Cette personne possède un locus de contrôle externe » (Fournier, 1995,
p.55).
Dans le but d’aider un individu à accroître son pouvoir personnel et à acquérir
un locus de contrôle personnel et vocationnel, Fournier suggère une exploration
approfondie de son identité personnelle et professionnelle. Dubois (1987), citée par
Fournier (1995, p.42), propose à son tour que c’est en reconnaissant ce qu’elle veut
privilégier dans sa vie que la personne pourra développer un locus de contrôle plus
interne. Le locus de contrôle apparaît donc comme étant un concept phare dans la
compréhension des facteurs liés à l’insertion socioprofessionnelle, mais également
dans la prise de décision en général.
53
TROISIÈME CHAPITRE – OBJECTIF DE RECHERCHE
Il va sans dire que de nombreuses variables peuvent influencer la prise de
décision relative à la carrière des jeunes de quatrième et de cinquième secondaire. Le
niveau de motivation, le soutien des proches, un projet de carrière bien défini, les
résultats scolaires, pour ne nommer que celles-là, sont toutes des variables pouvant
jouer un rôle lorsque vient le temps, pour un jeune, de décider. Évidemment, pour le
conseiller en orientation qui œuvre auprès d’une clientèle d’âge secondaire présentant
une difficulté à s’orienter, certains facteurs sont plus faciles que d’autres à travailler.
Par ses connaissances du domaine de la psychologie, sa créativité, sa compréhension
du fonctionnement psychologique et son écoute, le conseiller pourra apporter son
soutien au jeune qui, par exemple, est démotivé, a de la difficulté à énoncer un projet
professionnel, manque d’informations scolaires, etc. Bref, en aidant le jeune à
découvrir ses intérêts, ses aptitudes, ses traits de personnalités, son mode de
fonctionnement, etc., le conseiller en orientation pourra apporter un appui
considérable. Toutefois, une variable fort importante, et encore peu étudiée en
carriérologie, peut également venir influencer les interventions auprès d’un client. En
effet, selon que le jeune présente un locus de contrôle interne ou externe, l’appui
apporté par le conseiller en orientation sera bien différent. Il serait effectivement peu
efficace d’agir d’une manière identique envers un jeune qui sent qu’il n’a aucun
contrôle sur son environnement (locus de contrôle externe) versus celui qui au
contraire, sent qu’il a du contrôle (locus de contrôle interne). Ainsi, l’objectif général
de la présente recherche est de décrire le rôle du locus de contrôle sur la prise de
décision relative à la carrière d’élèves de la quatrième et de la cinquième
secondaire.
54
QUATRIÈME CHAPITRE - MÉTHODOLOGIE
Les données utilisées ici proviennent d’un projet de recherche commandé
principalement par une Commission scolaire de la rive nord de Montréal. L’étude est
intitulée Le processus de prise de décision relative à la carrière chez des élèves de 4e
et de 5e secondaire de la Commission scolaire de Laval. Ce projet comporte 3
objectifs principaux :
« 1) Identifier les critères de prise de décision relativement à la carrière
d’élèves de la quatrième et de la cinquième secondaire; 2) Cerner les
principales difficultés qui interfèrent et les facteurs qui influencent la
prise de décision relativement à la carrière d’élèves de la quatrième et de
la cinquième secondaire; 3) Décrire les liens possibles entre son profil de
prise de décision relative à la carrière et de celui des difficultés
rencontrées sur la capacité d’élèves de la quatrième et de la cinquième
secondaire à construire un projet professionnel éclairé » (Cournoyer et
Lachance, 2012).
La recherche a été menée par Louis Cournoyer et Lise Lachance, tous deux
professeurs au département d’éducation et de pédagogie, section carriérologie, avec
la collaboration de deux auxiliaires de recherche, Claire de Lorimier et Véronique
Morasse. L’étude regroupe deux approches : c’est-à-dire l’approche quantitative et
l’approche qualitative. Dans le cadre du présent essai, seule l’analyse qualitative a
été utilisée dans le traitement des données.
La section méthodologie est divisée en 7 sections : le type de recherche, la
stratégie d’échantillonnage, les instruments utilisés, la méthode de collecte de
données, le traitement des données, l’analyse des données, et l’éthique.
55
4.1 Type de recherche
Le type de recherche utilisé pour cet essai est de type qualitatif. Selon
Gaudreau (2011, p.82), « la recherche qualitative suit un raisonnement inductif; la
théorie est dégagée des résultats ». C’est par une analyse thématique que l’objectif de
la présente recherche, qui est de décrire le rôle du locus de contrôle sur la prise de
décision relative à la carrière, pourra être réalisé. Ce type d’analyse est réalisé à l’aide
d’une grille d’analyse, qui est « l’ensemble organisé des thèmes d’analyse divisés en
sous-thèmes, sous-sous-thèmes, etc. » (Gaudreau, 2011, p. 209). Les données sont
donc traitées de façon « brute », en ce sens où aucune donnée ne sera transformée;
elles proviennent intégralement d’entretiens semi-dirigés réalisés préalablement. Bien
que la recherche ait permis d’amasser des données quantitatives et qualitatives, seules
les données provenant des entretiens ont été utilisées pour le présent écrit. C’est
pourquoi les résultats ont été analysés selon une méthode qualitative, et non pas selon
une méthode mixte (provenant d’une analyse qualitative et quantitative).
4.2 Stratégie d’échantillonnage
À la demande des différents partis ayant commandé la recherche intitulée Le
processus de prise de décision relative à la carrière chez des élèves de 4e et de 5e
secondaire de la Commission scolaire de Laval, la sélection des écoles secondaires
devait se faire de manière à sélectionner des écoles appartenant à des niveaux socio-
économiques différents. Des démarches ont donc été entreprises auprès des différents
établissements d’enseignement secondaire de Laval afin de sélectionner les milieux
désirant participer à l’étude. Le chercheur responsable de la recherche a contacté
certaines directions d’école ayant préalablement manifesté leur intérêt à prendre part
au projet afin de leur expliquer l’implication leur étant demandée pour assurer une
participation réussie. Chaque école devait sélectionner un enseignant qui accepterait
de prendre une période de classe afin que les élèves puissent compléter le
56
questionnaire. Cet enseignant devenait donc la référence à contacter afin d’établir un
horaire de passation des questionnaires. Une fois ces premiers contacts réalisés par
M. Cournoyer, la responsabilité d’établir un horaire a été transmise à l’une des
auxiliaires de recherche. Trois écoles ont pris part au projet : l’école X (deux groupes
de quatrième secondaire et trois groupes de cinquième secondaire), l’école Y (deux
groupes de quatrième secondaire et quatre groupes de cinquième secondaire) et
l’école Z (deux groupes de quatrième secondaire et deux groupes de cinquième
secondaire). En tout, six groupes de quatrième secondaire et neuf groupes de
cinquième secondaire ont rempli les questionnaires, pour un total de quinze groupes.
Une auxiliaire de recherche a planifié pour chacune des écoles une rencontre par
classe visant tout d’abord à expliquer le projet de recherche aux élèves et à leur
remettre un formulaire de consentement. Le formulaire devait être signé par l’élève
de même que par un de ses parents, afin d’autoriser l’utilisation des données du
questionnaire complété par l’élève de même qu’une éventuelle participation à un
entretien. Par la suite, lors de la deuxième rencontre, les élèves devaient remplir le
questionnaire. La passation des questionnaires de recherche a été assurée par les deux
auxiliaires de recherche. La récupération des formulaires de consentement a été
effectuée lors de la deuxième rencontre. Grâce à la collaboration des enseignants
impliqués, il a été possible de récupérer certains formulaires en dehors des heures de
classe. L’échantillon a été constitué à partir d’une stratégie d’échantillonnage
aléatoire stratifié, selon le sexe et la scolarité. Un total de 400 élèves ont complété le
questionnaire. Sur ce nombre, 327 questionnaires ont été déclarés valides2. Il est à
rappeler que la recherche comportait deux étapes : la première consistait à la
passation des questionnaires, la deuxième était de rencontrer un échantillonnage
prévu de 40 élèves en entretien privé semi-dirigé. Ainsi, lorsque tous les groupes des
trois écoles participantes ont été rencontrés et que les questionnaires ont tous été
2 Tous les questionnaires où une ou des réponses étaient manquantes, de même que tous ceux où plus
d’une réponse à une même question ont été inscrites ont été jugés invalides.
57
complétés, certains élèves ont été contactés par téléphone afin de planifier une
rencontre visant à participer à un entretien. Une fois de plus, les entretiens se sont
déroulés durant les heures de classe (parfois durant l’heure du dîner), mais cette fois-
ci dans un local privé afin de préserver la confidentialité. Les entretiens ont été menés
par les deux auxiliaires de recherche. 16 candidats ont été rencontrés à l’école X, 18
candidats à l’école Y et 11 candidats à l’école Z, pour un total de 45 entretiens, plutôt
que 40 (ce sont donc ces 45 élèves qui constituent l’échantillonnage du présent écrit).
Les élèves ont été sélectionnés de manière à respecter les 4 critères suivants:
1- Avoir remis le formulaire de consentement signé
2- Être de différentes origines ethniques (selon la répartition pour chacun des
milieux)
3- Rencontrer 50 % de filles et 50 % de garçons
4- Respecter un ratio représentatif des échantillonnages de 4e et 5e secondaire.
Au final, ce sont 23 filles et 22 garçons qui ont participé aux entrevues
individuelles. En ce qui a trait au niveau de scolarité des élèves au moment de leur
participation au projet de recherche, 20 des 45 participants étudiaient en quatrième
secondaire, c’est-à-dire 12 filles et 8 garçons, alors que 25 étudiaient en cinquième
secondaire, c’est-à-dire 11 filles et 14 garçons.
4.3 Instruments utilisés
Le questionnaire administré aux étudiants combine le Career Decision-
Making Profile questionnaire (Gati et al., 2010) et le Career Decision-Making
Difficulties (Gati, Krausz et Osipow, 1996), tous deux en version francophone. Le
CDMP comporte 39 énoncés selon une échelle Likert de 7 choix de réponses alors
que le CDMD comporte 34 énoncés selon une échelle Likert de 9 choix de réponses.
58
Le questionnaire final présenté aux élèves comportait 104 questions à répondre selon
une échelle Likert de 9 choix de réponses.
Un guide d’entretien a été créé par Louis Cournoyer et Lise Lachance, tous
deux professeurs à l’Université du Québec à Montréal et chercheurs, dans le but
d’assurer une uniformité dans les questions posées. Les entretiens ont tous été
enregistrés à l’aide d’un enregistreur vocal. Le guide d’entretien est composé de 42
questions.
4.4 Méthode de collecte de données
Les questionnaires ont été complétés durant les heures de cours des élèves,
sous la supervision des deux auxiliaires de recherche. Dès le début de la période, les
élèves recevaient les explications nécessaires afin d’être en mesure de compléter
correctement le questionnaire. Les élèves étaient invités à inscrire sur leur
questionnaire un pseudonyme composé d’un mot et d’un chiffre afin d’être en mesure
d’identifier, lors des entrevues, le questionnaire appartenant à l’élève rencontré. Les
élèves qui avaient des questions devaient lever la main de manière à préserver un
climat de calme et surtout devaient conserver le silence, afin de favoriser des
conditions de passation optimale. La collaboration de chaque enseignant a été
sollicitée afin de conserver la discipline. Une fois la dernière copie récupérée, les
étudiants étaient remerciés de leur participation. De plus, un rappel concernant
l’importance de rapporter le formulaire de consentement signé était effectué, de
manière à s’assurer du plus haut taux de participation possible. La même procédure a
été appliquée dans les 15 groupes qui ont participé au projet de recherche.
Les élèves qui ont accepté d’être interviewés ont été rencontrés durant les
heures de classe. Au début de chaque entretien, trois éléments étaient rappelés au
participant, c’est-à-dire, les objectifs de la recherche, la durée et le but de l’entrevue.
59
Il a également été rappelé que la confidentialité des réponses et de l’identité même du
participant seraient préservées.
Les réponses fournies par les élèves lors de la passation du questionnaire font
l’objet d’une analyse quantitative, alors que les réponses obtenues lors de l’entretien
sont analysées de façon qualitative. Toutefois, dans le cas du présent écrit, seules les
données provenant des entretiens font l’objet d’une analyse.
4.5 Traitement des données
En ce qui a trait aux données quantitatives, chaque donnée des questionnaires
a été compilée dans un tableau Excel, c’est-à-dire que la réponse de chaque élève à
chacune des questions y a été enregistrée. Afin d’analyser les entretiens, ceux-ci ont
d’abord été retranscrits dans le logiciel Word. Par la suite, les données ont été
classées dans différents nœuds (ou catégories) selon la nature des propos tenus par
l’élève. Le logiciel qui a été utilisé est NVivo version 9. Dans le but de préserver la
confidentialité des réponses, seul le pseudonyme écrit par l’élève a servi à
l’identification des questionnaires et des entretiens.
4.6 Analyse des données
L’analyse des données qualitatives a eu lieu en quatre temps. Gaudreau (2011)
les résume ainsi :
« Le codage qui a lieu en découpant le corpus en segments numérotés qui
correspondent aux unités de sens; le classement, quand les énoncés
apparentés sont rassemblés en distinguant les groupes les uns des autres;
la catégorisation, lors que la catégorie d’appartenance des énoncés est
établie et désignée par un thème et un sous-thème; et l’interprétation
constante qui agit à travers le codage, le classement et la catégorisation »
(p.218).
60
Ces étapes tirées du livre de Gaudreau (2011) sont tout à fait représentatives
de la procédure ayant été appliquée ici afin de réaliser l’analyse des données. Plus
précisément, une fois l’étape des entretiens franchie, chacun d’entre eux a été
transcrit, de manière à produire ce qui est appelé un verbatim. Ainsi, chaque entretien
représente un verbatim, ce qui fait qu’une fois ce processus terminé, 45 verbatim
(pour 45 entretiens) ont été créés. Par la suite, à la lecture de ceux-ci, les propos
tenus par les élèves ont été classés par catégories, en fonction de la nature même de
leurs commentaires; cette classification a été réalisée en utilisant le logiciel NVivo 9.
De ce fait, il est devenu beaucoup plus facile de faire des liens entre chacune des
réponses fournies par les élèves. C’est ce qui a entre autres permis de créer un nœud
nommé locus de contrôle, d’où proviennent l’ensemble des données utilisées ici. Une
fois ces données récupérées, elles ont été divisées selon des thèmes et sous-thèmes
regroupant les propos ayant la même signification, le même sens. Bref, ce sont
chacune de ces étapes de l’analyse des données qui ont permis de générer les résultats
présentés ici.
4.7 Éthique
Avant toute chose, un certificat d’éthique a été émis en juin 2012 par le
Comité institutionnel d’éthique et de la recherche avec des êtres humains de
l’UQAM, de manière à s’assurer que toutes les étapes du projet de recherche
(protocole de recherche) soient réalisées dans le respect des règles éthiques. Par la
suite, un formulaire de consentement devait être signé par tous les élèves de même
que par leurs parents, puis devait être rapporté aux auxiliaires de recherche. Seules les
données des questionnaires ayant été jumelés à un formulaire de consentement ont été
utilisées pour la recherche. De même, seuls les élèves ayant donné leur accord de
participation à un entretien ont pu être contactés. Les questionnaires et les entretiens
ont été identifiés à l’aide d’un pseudonyme et d’un chiffre. Il est donc impossible de
retracer les coordonnées d’un élève ayant participé au projet de recherche. Toutes les
61
données en lien avec le projet de recherche ont été déposées dans un fichier
DROPBOX. Ainsi, seuls les intervenants concernés avaient accès aux informations
liées à la recherche. De plus, autant les chercheurs que les auxiliaires de recherche
sont conscients de l’importance de préserver la confidentialité. Ainsi, aucune donnée
ne sera partagée sans l’autorisation des personnes en cause.
62
CINQUIÈME CHAPITRE - PRÉSENTATION ET INTERPRÉTATION DES
RÉSULTATS
Dans ce chapitre, les résultats de recherche sont présentés et analysés, ce qui a
été réalisé par une analyse thématique. Cette section vise spécifiquement à répondre à
l’objectif de la présente recherche, qui est de décrire le rôle du locus de contrôle sur
la prise de décision relative à la carrière d’élèves de la quatrième et de la cinquième
secondaire. Pour ce faire, un tableau récapitulatif des thèmes et des sous-thèmes
abordés par les élèves ayant accepté de participer à l’entrevue est d’abord présenté.
Par la suite, afin de mieux comprendre la distinction entre les différents thèmes et
sous-thèmes, ceux-ci sont définis et appuyés par des extraits provenant des dits
entretiens. Il est à préciser que la majorité des extraits proviennent de deux questions
que les élèves ont eu à répondre lors de la passation du questionnaire, et qui se
trouvaient également dans le guide d’entretien. Ces questions sont les suivantes : « Je
ne suis pas le seul responsable des résultats de mes décisions. Le destin et la chance
auront également une incidence sur ma future carrière », et « Les facteurs qui sont
hors de mon contrôle (par exemple, le destin) exercent une influence importante sur
mes choix de carrière et leurs retombées ». Ainsi, suite au tableau récapitulatif, les
propos des élèves (en lien avec la signification qu’ils accordent au locus de contrôle)
seront illustrés en fonction des catégories des thèmes et des sous-thèmes énoncés.
Ceci permettra d’analyser le rôle joué par le locus de contrôle par rapport à la prise de
décision relative à la carrière des élèves.
63
Résumé des thèmes et sous-thèmes abordés par des élèves de 4e et 5e secondaire
Thèmes Sous-thèmes
Nulle chance, ni destin
Juste un peu de chance et de destin
Chance et destin incontrôlables,
parcours incontrôlable
Le risque des accidents
Le risque des catastrophes
L’élève en tant que maître de son avenir Efforts investis
Le choix responsable
La chance et le destin comme
influences positives dans un parcours
professionnel
La chance et le destin en tant que
facteurs de découvertes
La chance et le destin en tant que
créateurs d’opportunités
Aucun contrôle sur son environnement Aucun contrôle sur les résultats
scolaires et les compétences de
soi et des autres
Les inéluctables chances et destin
pour atteindre des sommets
Influence de Dieu
Chacun des thèmes et des sous-thèmes énoncés dans le tableau est repris dans
les pages qui suivent de manière à détailler quel contenu ils englobent.
64
5.1 Nulle chance, ni destin
Pour certains élèves, la chance et destin ne sont en aucun cas des facteurs
d’influence sur leur parcours de vie.
Bien ça n’a pas tout le temps rapport moi je pense, le destin et la
chance… pfft! Très peu pour moi… (INT 1)
Ce que je vais faire plus tard, c’est moi qui va choisir et c’est grâce à moi
si ça va fonctionner alors la chance et le destin n’auront rien à voir avec
ça. (MDLS 18)
Mais le choix en tant que tel c’est… le destin ou la chance ça a aucun
rapport pour moi. (MDLS 3)
Bref, ils ne croient aucunement que la chance et le destin pourraient venir
teinter, que ce soit positivement ou négativement, leurs décisions.
5.2 Juste un peu de chance et de destin
Selon plusieurs élèves, la chance et le destin sont sources d’influences, mais
de façon non significative seulement, c’est-à-dire qu’ils croient en l’existence d’une
part d’influence extérieure qui échappe au contrôle individuel.
… mais en même temps, comme j’vous ai dit, « y a rien qui arrive pour
rien dans la vie ». Pis euh… J’pense que ça a quand même euh… pas
beaucoup, beaucoup d’importance, mais ça a quand même un minimum
de… (LEB 10)
Bien en général c’est souvent nous qui prend les décisions et on est pas
seul là-dedans mais c’est nous qui a le dernier mot. Mais c’est sûr qu’il y
a toujours un peu d’incertitude donc…Il y a toujours une chance de
hasard là donc c’est sûr… comme le destin, la chance ça va avoir une
incidence. (INT 2)
65
J’suis d’accord, parce que c’est pas vrai que c’est moi qui sera le seul
responsable du résultat de mes décisions. Y a plusieurs facteurs qui
viendront soit m’aider ou me nuire. Comme, par exemple, c’qui est cité
ici : le destin et la chance. (LEB 5)
Euh… Moi, je trouve que… je suis le seul respon… le seul responsable
de mes décisions, mais je trouve que le hasard peut aussi jouer un peu…
le rôle… sur nos décisions… (MDLS 7)
En somme, pour certains, la chance et le destin peuvent être parfois des
éléments d’influence, mais sans être des déterminants d’avenir. L’élève préfère ici
parler de chance et de destin en tant que facteurs, parmi d’autres, pouvant jouer un
rôle dans la prise de décision.
5.3 Chance et destin incontrôlables, parcours incontrôlable
Alors que pour certains élèves la chance et le destin ne sont pas ou peu
synonymes d’influence, pour d’autres, ce sont deux facteurs très significatifs. En
effet, plusieurs ont mentionné que des événements incontrôlables pourraient survenir
et venir influencer la prise de décision liée à la carrière. Dans tous les cas, ces
événements étaient ou bien reliés aux accidents automobiles, ou bien reliés à
l’avènement d’une catastrophe naturelle.
Les propos des élèves en lien avec les accidents automobiles démontrent que
les séquelles causées par ce type d’accident pourraient avoir d’importantes
conséquences sur leur avenir professionnel, principalement par les limitations
physiques dont ils pourraient être responsables.
Parce que je peux pas tout calculer même si…C’est ça, parce que mettons
je sais pas… mettons j’arrive et je me fais frapper par un accident d’auto,
bien c’est pas prévu là, je veux dire… Ça sera pas les mêmes options de
métier. (LEB 15)
66
Bien la chance, des fois oui elle peut choisir ta carrière, des fois ça
change, ta vie peut changer. Par exemple, bien disons un exemple… je
me fais frapper par une voiture, je deviens handicapé, il y a une grande
liste de métiers que je ne pourrais plus faire à cause de ça, alors la chance,
bien je trouve qu’elle joue un rôle. (MDLS 16)
Parce que oui, c’est vrai, ça peut arriver par exemple, un accident ou peu
importe… pis que… admettons euh… j’suis paralysée là…. C’est sûr que
c’est plate, mais en même temps, j’vais toujours m’arranger pour faire
quand même quelque chose que j’veux faire… même si
j’suis…admettons, j’n’ai plus de jambes ou peu importe là…, j’vais
quand même m’arranger pour le faire. (MDLS 1)
D’un autre côté, certains élèves croient que l’avènement d’une catastrophe
naturelle pourrait venir influencer leur prise de décision liée à la carrière, soit en leur
faisant prendre conscience d’un intérêt ou d’une passion à exploiter à même un
métier, ou encore en faisant office de contrainte forçant un changement de plans.
… mon Dieu! Il y a eu une catastrophe naturelle dans tel pays et tu
ressens le besoin d’aller aider les gens, bien pourquoi qu’au lieu de te
diriger… je sais pas moi… vendeur d’ordinateur, pourquoi tu te dirigerais
pas dans quelque chose qui est plus humanitaire, quelque chose qui est
plus social, quelque chose qui aide les gens si c’est quelque chose qui te
rejoins. (INT 10)
… admettons que le destin il décide que… je sais pas moi, qu’il y a un
ouragan ou quelque chose du genre, bien c’est sûr que je vais avoir des
choix admettons de carrière… admettons que je voulais aller à
l’université en Floride et qu’il y a un ouragan mais ça va influencer mes
choix de ne plus y aller parce qu’il y a eu un ouragan et c’est tout saccagé
là. Mais c’est sûr que… et je vais en choisir mettons une autre université
mais c’est sûr que ça influencer mes choix et mon futur en quelque sorte
là sur ça. (INT 11)
Bref, certains élèves croient que la chance et le destin seront responsables
d’événements incontrôlables qui viendront, directement ou indirectement, jouer un
rôle dans le parcours professionnel, et par le fait même sur leur prise de décision liée
à la carrière.
67
5.4 L’élève en tant que maître de son avenir
Sans nier l’influence de la chance et du destin, l’élève reconnaît ici qu’il est le
principal responsable de son avenir, soit en mentionnant clairement qu’il doit
fournir les efforts nécessaires pour atteindre le niveau de réussite souhaité, soit en
favorisant un choix responsable.
En ce qui a trait aux efforts investis, l’élève reconnaît que pour assurer
l’atteinte de ses objectifs, il devra fournir les efforts nécessaires (exemples : étudier,
faire des recherches, compléter les démarches nécessaires, etc.)
… il y a toujours des imprévus qui peuvent arriver. Il y a toujours quelque
chose qui peut changer le cours de ma vie si on veut, de mes choix; mais
pour moi… bien moi je crois en moi beaucoup, dans le sens que je pense
que je peux avoir un grand impact sur mon avenir et que si je fais les
efforts et que je fais ce qu’il faut, je vais m’en aller pas mal dans ce que je
voulais aller dans le fond. (INT 7)
Bien parce que dans un sens, peut-être que oui il y a comme la chance et
tout mais dans un autre, je me dis qu’il y a comme… c’est à nous de faire
en sorte que ça arrive. Genre c’est à nous de bien travailler et comme de
donner tous les efforts pour que ce qu’on veut qui arrive, arrive justement.
Mais dans un autre, oui quand même il y a de la chance. (LEB 12)
Bien je suis pas mal le seul, je veux dire… je veux m’informer de toutes
les affaires qui m’intéressent donc… mais c’est juste à moi d’aller disons
dans les bibliothèques, chercher des livres pour m’informer dans les
domaines que je veux. C’est pas vraiment le destin qui… il va pas avoir
un livre qui va me tomber sur la tête et… (MDLS 14)
… parce que oui, peut-être que le destin et la chance vont m’donner tsé,
l’opportunité de faire tsé c’que j’veux faire, mais en même temps, y a
beaucoup de moi là-dedans là, j’veux dire. Beaucoup de travail, de
patience… (LEB 4)
La réflexion de l’élève qui reconnaît sa propre responsabilité dans ses prises
de décision porte principalement sur le fait qu’il ne peut pas tout laisser entre les
68
mains de la chance et du destin. Au contraire, il préfère assumer sa part dans l’atteinte
de ses objectifs.
C’est sûr qu’il y a le destin et il y a de la chance là dans la vie, c’est
comme à la loterie mais je suis sûre que si on est… on est responsable de
nos actes mais c’est nous qui fait des décisions alors on doit assumer en
quelque sorte. Alors… je pense qu’on est plus responsable sur nos
décisions que le destin et la chance. C’est juste des petits facteurs dans la
vie je pense, oui. (INT 11)
Parce que oui je crois au destin mais en même temps il y a une partie que
c’est vraiment comme… c’est de notre ressort si on veut et le destin peut
jouer quelque chose là-dessus, mais pour ce qui est de mon choix de
carrière ça c’est moi qui choisis mais ça veut pas dire que je vais rentrer là
mais c’est quand même mon choix, c’est moi qui voudrais faire ça. (INT
8)
Ben… le seul responsable, c’est moi. Ben… Je suis… je suis… Oh ! Mon
Dieu !... Euh… ouais. Moi j’dirais oui. C’est sûr, la chance a un rapport
parfois, parfois tu deviens chanceux, des affaires comme ça… Mais sinon
c’est… c’est moi qui sera responsable des résultats. (LEB 3)
Mais, j’choisis ma carrière, c’est moi qui l’as choisie. C’est pas l’destin
qui m’a dit : « Ah, va là-dedans ». C’est pas le destin qui a « choisi »
d’une certaine façon que lui va aller là-dedans. Fait que… voilà, on va y
mettre le choix dans ‘ tête. C’est… J’ai décidé que j’men allais là-
dedans… C’est… C’est mon choix. Donc ça a aucun rapport avec le
destin ma façon de…faire mes choix, j’pense. (MDLS 3)
En résumé, certains élèves considèrent qu’ils sont maîtres de leurs décisions,
en ce sens où ils choisissent de s’investir pleinement et de plein gré dans leur
processus de décision. Pour ce faire, ils feront les efforts nécessaires, s’impliqueront
dans chacune des étapes de leur démarche menant à la prise de décision, agiront de
manière responsable (c’est-à-dire en s’attribuant la responsabilité de leurs actes), et
seront en mesure de se reconnaître comme étant garants de leurs résultats.
69
5.5 La chance et le destin comme influences positives sur un parcours
professionnel
L’élève reconnaît que la chance et le destin peuvent tous deux influencer
positivement son cheminement de carrière. Par exemple, pour lui, les rencontres, les
opportunités, différents événements, etc. peuvent tous conduire à la découverte de
nouveaux horizons jamais envisagés auparavant.
Plus particulièrement, l’élève reconnaît que la chance et le destin peuvent être
sources de découvertes, en étant, selon lui, des initiateurs de rencontres et
d’événements inattendus.
Je pense que le destin souvent ça l’aide à faire des choix… Aussi mon
plan de carrière je le fais comme… parce que… il s’est passé des
événements dans ma vie qui font qu’aujourd’hui je suis une telle personne
et cette personne-là elle fait que je vais être plus attirée vers un tel métier
qu’un autre là. (INT 10)
… Parce que je dois prendre beaucoup de décisions par moi-même, mais
je pense aussi que parfois ça peut être une question de chance ou de destin
aussi. C’est un peu comme le cas de mon père qui aujourd’hui enseigne
au primaire, c’est pas une question de décision, c’est pas une question de
talent ou de manque de talent non plus, c’est les circonstances qui l’ont
mené à… bien qui l’ont comme déplacé d’école en école. Et je crois que
ça pourrait m’arriver aussi, mais c’est aussi… j’ai une importante part
donc c’est assez moitié/moitié. (INT 3)
Je suis vraiment d’accord avec ça, dans le sens qu’on a bien beau prendre
des décisions, il y a des choses qui arrivent qu’on n’a pas décidées que ça
arriverait, donc des imprévus. La chance et le destin en sont pour
beaucoup là-dedans, donc j’ai eu un exemple à la journée carrière, une
infirmière en formation, elle au début elle voulait devenir médecin et dans
le fond ce qui est arrivé c’est qu’elle est tombée malade et elle est tombée
en amour avec le métier d’infirmière et après ça elle a continué ses études
en infirmière après avoir guérie. Donc je trouve que c’est un bon
exemple, dans le sens qu’elle avait pas prévu d’être malade mais ça l’a
fait qu’elle fait ce qu’elle aime maintenant. (INT 8)
70
De plus, certains élèves considèrent que la chance et le destin jouent un rôle
dans les opportunités qui se présenteront tout au long de leur parcours (personnel et
professionnel).
Parce que dans le sens où, euh… la chance a toujours euh… un certain…
une certaine euh… un certain poids dans l’fond… Exactement… un
certain poids sur c’qui pourrait arriver parce que… des fois, t’as… t’as
une belle opportunité parce que t’as été au bon endroit, au bon moment,
fait que je me dis qu’il faut quand même un peu de chance là-dedans
aussi. (MDLS 4)
Euh ben, j’pense que la… la chance, c’est sûr que des fois ça peut avoir
un effet, être au bon moment au bon endroit. Quand quelqu’un mettons
vient de quitter un poste pis là, y a un poste qui se libère, mais comme,
j’trouve que ça va quand même euh… la chance, ben c’est sûr que toi
aussi t’as…, on a chacun euh… des responsabilités là-dessus… (MDLS
8)
Le destin et la chance… C’est sûr que j’peux changer d’carrière n’importe
quand…Mais l’destin pis la chance… P’t-être qu’y a une opportunité qui
va s’ouvrir en quelque part… pour que j’change un p’tit peu mais… (LEB
2)
Pour certains élèves, la chance et le destin sont donc considérées comme des
influences positives qui permettent d’élargir leurs possibilités en provoquant des
rencontres ou des événements imprévus, mais qui auront une grande portée sur leur
avenir.
5.6 Aucun contrôle sur son environnement
L’élève reconnaît qu’il ne peut pas contrôler certains aspects de son
environnement.
L’élève considère qu’il n’a aucune emprise sur les résultats scolaires des
autres élèves ou sur leurs compétences en général, et en conséquence, c’est une
71
question de destin et de chance s’il est en mesure d’être admis dans le programme de
son choix ou de se démarquer au niveau de l’emploi.
Là je parle de la cote R, admettons si je peux pas être acceptée, s’il y a
quelqu’un qui a plus de chance que moi parce qu’il a eu 0.1 cote R de
plus que moi, mais sinon… (INT 6)
Mais c’est vrai que… bien la grande partie moi je trouve que c’est toi,
mais il y aura toujours une partie qui sera pas sous ton contrôle là, ça va
être… tu sais pas ce qui peut arriver dans la vie ou bien tu vas tomber sur
quelqu’un, je sais pas, qui a peut-être les mêmes compétences que toi et
ça va jouer par d’autre chose que juste la compétence, blabla et les
différents facteurs de la vie. Donc je pense que oui, le destin et la chance
quelques fois aussi ça peut avoir une incidence. Peut-être que quelqu’un a
le même CV que moi ou plusieurs mais je réponds juste __ parce que les
deux sont pareils puis la chance va faire que c’est pas moi ou ça va être
moi et le destin va faire que non, ça va être plus l’autre et… (MDLS 15)
… Pis j’crois en la chance, comme si t’as d’la chance, ça s’rait genre «t’as
été accepté dans ton programme : t’as d’la chance». «Oui j’ai d’la
chance». (MDLS 3)
Dans une autre optique, certains élèves considèrent la chance et le destin
comme étant inéluctables, c’est-à-dire que leur seul espoir de percer au niveau
professionnel sera lié à ces deux facteurs.
Parce qu’en tant que pianiste, tu as… c’est pas juste ton talent qui fait en
sorte que tu vas être de renommée mondiale ou juste locale, c’est aussi ta
manière de… ta promotion, la publicité et tout. Si tu tombes sur
quelqu’un qui va faire comme il faut la promotion de toi ou non, ça
dépend de plein de facteurs comme ça. (INT 4)
…Quand j’ai répondu à ces questions-là, ça j’m’en souviens, y avait le
football dans ma tête. Pis j’me suis dit le destin a sûrement un rôle là-
dedans. C’est ça… (LEB 3)
Ainsi, certains élèves considèrent leur prise de décision liée à la carrière
comme étant tributaire des autres. En n’ayant pas de contrôle sur les résultats et les
72
compétences des autres de même que sur les possibilités de rencontrer une personne
qui sera en mesure de leur ouvrir des portes, certains élèves accordent une part
importante à la chance et au destin. Ils incombent ainsi une part de leur réussite à des
facteurs extérieurs.
5.7 Influence de Dieu
Les croyances en un être supérieur sont également synonymes d’influence
pour certains élèves.
Ben…. Moi j’suis… moi j’crois comme, c’est pas juste moi qui va
décider. Comme, si Dieu veut que j’vas en Arts, j’vais aller en Arts. Pis
comme, si y veut que j’vas… pis que j’fasse plaisir à ma mère, j’vas aller
en Pharmacie. C’est vraiment pas juste moi, j’pense. J’sais pas. (MDLS
5)
Ce type de croyances démontre clairement que l’élève qui s’en remet à une
divinité pour effectuer se prise de décision présente un locus de contrôle externe.
Suite à l’identification des thèmes et sous-thèmes liés aux propos émis par 45
jeunes de quatrième et cinquième secondaire, un constat s’impose : le locus de
contrôle de ces élèves ne peut être qualifié uniquement d’interne ou d’externe. En
effet, les 7 thèmes dégagés des entretiens sont beaucoup plus complexes. Tout
d’abord, le premier thème abordé, c’est-à-dire « nulle chance, ni destin », démontre
que l’élève ne croit aucunement en l’influence de ces deux facteurs. Par la suite, à la
lecture du thème « juste un peu de chance et de destin », les propos des élèves
illustrent que la chance et le destin peuvent venir jouer un rôle par rapport à leur
avenir, sans toutefois être les uniques facteurs d’influence. Le thème suivant, titré
« chance et destin incontrôlables, parcours incontrôlable », démontre que certains
élèves ont conscience que des événements (incontrôlables) peuvent se produire et
ainsi modifier leur trajectoire initialement dessinée. Le thème 4, « l’élève en tant que
73
maître de son avenir », appuie les propos des élèves qui se considèrent comme étant
les principaux acteurs de leur avenir. Pour ce faire, ils constatent l’importance des
efforts à fournir afin d’atteindre les résultats souhaités, et se responsabilisent quant
aux décisions à prendre. Le cinquième thème, « la chance et le destin comme
influences positives dans un parcours professionnel », souligne à quel point certains
élèves font confiance à la vie pour leur faire vivre des expériences ou des rencontres
inattendues, qui agiront alors comme facteurs de changement visant un mieux-être, et
surtout un meilleur accomplissement de leur potentiel. Le thème suivant, « aucun
contrôle sur son environnement », révèle que certains élèves sont soucieux que les
résultats et compétences des autres restreignent leurs possibilités d’avenir
professionnel. De plus, pour certains d’entre eux, la possibilité de percer au niveau
professionnel serait dépendante de la chance et du hasard. Bref, pour ces élèves, la
prise de décision liée à la carrière sera grandement influencée par les autres.
Finalement, les croyances religieuses, présentées sous le thème « influence de Dieu »,
soulignent que peu d’élèves remettent leur choix professionnel entre les mains d’une
puissance supérieure. Tous ces thèmes et sous-thèmes justifient que le locus de
contrôle joue un rôle, bien que différent pour chacun, dans la prise de décision liée à
la carrière.
74
SIXIÈME CHAPITRE – DISCUSSION
La section « analyse et interprétation des résultats » a permis de dégager les
grands thèmes liés au locus de contrôle des 45 élèves de quatrième et de cinquième
secondaire, rencontrés lors d’entretiens réalisés au cours du projet de recherche Le
processus de prise de décision relative à la carrière chez des élèves de 4e et de 5e
secondaire de la Commission scolaire de Laval. La présente section vise à comparer
ces résultats à ceux de la littérature scientifique énoncés dans la problématique et le
cadre conceptuel. Ainsi, il sera possible de constater les similitudes et les éléments
distinctifs entre les deux.
6.1 Nulle chance, ni destin
Tout d’abord, pour certains élèves, la chance et le destin ne sont pas des
facteurs pouvant influencer leur prise de décision. En effet, selon eux, ces concepts
sont tout simplement inexistants. Se sentant totalement en contrôle de leur destinée, le
locus de contrôle de ces élèves pourrait donc être qualifié d’interne. En comparant
leurs croyances à celles définies par Rotter (cité dans Dubois, 1987) par rapport aux
individus qui ont locus de contrôle externe qui sont « ceux qui croient que les
renforcements obtenus ont une origine échappant totalement au contrôle de
l’individu, car dus au hasard, à la chance, ou à d’autres touts-puissants » (Dubois,
1987, p.95), il est évident que les idées énoncées par ces élèves sont à l’opposé même
de cette définition. Il est ainsi possible d’émettre l’hypothèse que le locus de contrôle
des élèves qui ne croient pas en la chance et le destin ne jouera pas de rôle dans leur
prise de décision liée à la carrière.
75
6.2 Juste un peu de chance et de destin
Dans ce deuxième thème, les propos tenus par les élèves démontrent que oui,
la chance et le destin peuvent jouer un rôle dans la prise de décision, mais jusqu’à un
certain point seulement. L’emplacement du locus de contrôle de ces jeunes, s’il était
positionné sur l’échelle interne-externe de Rotter, se trouverait fort probablement au
centre, formant un équilibre parfait. Dans la littérature scientifique, peu d’études ont
fait état de tels résultats. Contrairement à l’étude de Fournier et St-Onge (1995), dont
les résultats suggéraient l’existence de cinq types de croyances (« les croyances
défaitistes, les croyances de dépendance, les croyances de prescription, les croyances
d’auto-responsabilisation, les croyances pro-actives » (p.352)), la recherche ici menée
tend à démontrer qu’une échelle interne-externe graduée permettrait davantage de
préciser où se situe le locus de contrôle d’un individu dont la pensée ne se trouve pas
aux extrémités d’une échelle de mesure du locus de contrôle, et surtout, ce que cela
signifie réellement. Est-ce qu’une telle position suggère l’indécision? Un manque de
connaissance de soi? Une difficulté à s’affirmer? Etc.?
6.3 Chance et destin incontrôlables, parcours incontrôlable
Pour plusieurs élèves, la chance et le destin sont considérés comme deux
éléments qui pourraient être nommés « boîtes à surprises ». Ces élèves sont
conscients que des facteurs hors de leur contrôle (comme la chance et le destin)
pourraient être responsables de changements importants autant dans leur prise de
décision liée à la carrière que tout au long de leur parcours professionnel. La
définition du locus de contrôle qui se trouve dans le texte de Gati, Landman,
Davidovitch, Asulin-Peretz et Gadassi (2009) et qui va ainsi:
« the degree to which individuals believe they control their occupational
future and feel that their decisions affect their career opportunities, or that
76
these are mainly determined by external forces such as fate or luck»
(p.280),
résume très bien la pensée de ces élèves qui croient que leurs opportunités liées à la
carrière seront certainement influencées par ce que ces auteurs nomment des « forces
extérieures ». Il convient toutefois de nuancer les propos des élèves. Il serait facile, de
prime à bord, de penser que ceux-ci ont un locus de contrôle externe, et qu’ils
pourraient avoir tendance à se positionner en tant que « victimes de la chance et du
destin ». Cependant, à la lecture attentive des idées énoncées par les élèves, il apparaît
qu’ils ne se fieront pas sur les probabilités de l’avènement d’un événement imprévu
pour prendre leur décision liée à la carrière, mais qu’ils prendront plutôt une décision,
qui sera, par la suite, possiblement modifiée par ce même événement. Cette précision
est fort importante, puisqu’elle démontre que non seulement le locus de contrôle peut
jouer un rôle dans la prise de décision à la carrière, mais qu’il peut également
engendrer la croyance qu’il pourrait venir interférer dans un parcours professionnel.
6.4 L’élève en tant que maître de son avenir
Les résultats dégagés par ce thème démontrent que pour certains élèves, se
sont les efforts investis et la prise de responsabilités qui seront les principaux facteurs
venant influencer leur prise de décision liée à la carrière. Bien loin d’attendre un coup
de pouce de la chance et du destin, ces élèves préfèrent prendre les choses en main
pour s’assurer d’une décision à leur image, représentative de leurs préférences, et qui
saura les satisfaire. Ces jeunes semblent ainsi en mesure de déployer leurs qualités au
service de leur prise de décision liée à la carrière, ce qui correspond manifestement à
un locus de contrôle interne, puisque inversement, tel que mentionné par Saka, Gati et
Kelly (2008), «those with an external locus of control may be less likely to actively
pursue solutions to problems and challenges» (p.405). Bref, les propos de ces auteurs
signifient qu’un individu ayant un locus de contrôle externe sera moins porté à
77
s’impliquer activement face aux problèmes pouvant surgir sur sa route. Ceci
démontre donc, tel que mentionné, que les jeunes qui agissent en tant que maître de
leur avenir auraient un locus de contrôle interne plutôt qu’externe.
6.5 La chance et le destin comme influences positives dans un parcours
professionnel
Pour d’autres élèves, la chance et le destin sont des créateurs de découvertes et
d’opportunités. « Être au bon endroit au bon moment » est certainement représentatif
du lien qu’ils entretiennent avec ces facteurs incontrôlables. Ces élèves considèrent
que la chance et le destin pourraient, d’une certaine façon, intervenir de manière à
leur faire découvrir des possibilités inattendues, et qui viendraient changer
favorablement leur prise de décision initiale liée à la carrière. Donc, pour ces élèves,
il ne s’agit pas de laisser entre les mains de la chance et du destin leur prise de
décision liée à la carrière, mais bien de laisser la porte ouverte aux nouvelles
opportunités.
6.6 Aucun contrôle sur son environnement
Dans ce thème, les propos des élèves expriment que la chance et le destin
seront les grands responsables de l’atteinte de leurs objectifs scolaires ou
professionnels. La prise de décision de ces jeunes est donc fortement liée à des
facteurs incontrôlables. Bien qu’ils semblent s’inquiéter de la performance des autres,
qui pourrait les empêcher, par exemple, d’être admis dans le programme de leur
choix, ils ne mentionnent en aucun cas la notion d’efforts supplémentaires.... un peu
comme s’ils se pliaient à la décision imposée par le hasard. Ces élèves semblent donc
prêts à accepter de renoncer à leurs projets, puisque la chance et le destin les auront
placés en compétition vis-à-vis des individus plus forts. Cela fait penser aux résultats
de l’étude menée par Ginevra, Nota, Soresi et Gati (2012), qui mentionnent que
78
«decided students reported a more internal locus of control and greater commitment
(investing more effort in the process and making the final decision more quickly),
less of a tendency to procrastinate, or consult with others» (p.383). En effet, d’une
manière ou d’une autre, ces élèves sont dans l’attente : ou bien ils attendent de
connaître les résultats des autres afin de prendre une décision liée à la carrière, soit ils
sont dans l’attente qu’un individu découvre leurs talents et les propulse vers les
sommets.
6.7 Influence de Dieu
Le dernier thème, « influence de Dieu », démontre que les croyances
religieuses, de par l’importance que leur accorde l’élève, seront les uniques facteurs
liés à la prise de décision de carrière. Bien que ce thème rejoigne un petit nombre
d’élèves seulement, il n’en demeure pas moins fort intéressant, et soulève plusieurs
questionnements, ne serait-ce que sur la manière d’intervenir auprès d’un élève qui
s’en remet à une puissance supérieure pour prendre sa décision liée à la carrière. Cette
phrase tirée de l’étude de Saka, Gati et Kelly (2008): «perceiving a lack of control
over the process and outcomes may lead to both indecision and indecisiveness
because it reinforces the perception that it is not worth investing in the process, and
thus it decreases personal motivation» (p.405) résume bien les inquiétudes qui
pourraient être manifestées face à un élève qui démontrerait un locus de contrôle
externe. Les enjeux liés à la motivation et à l’investissement personnel dans la prise
de décision liée à la carrière, mentionnés par Saka, Gati et Kelly, sont beaucoup trop
importants pour être passés sous silence. Que faire pour qu’un élève arrive à se sentir
concerné par son choix professionnel? Voilà qui mériterait une attention
particulière…
Fournier et Jeanrie (1999), ont tiré cette conclusion de leur étude: « while
analysing the young people’s statements on the basis of the orientation of their
79
feeling of control, it quickly became obvious that their beliefs included nuances that
did not easily fit into the traditional internal / external dichotomy» (p.84). En la
comparant avec les résultats obtenus dans la présente recherche, une chose est
certaine : cela ne pourrait mieux résumer les conclusions tirées des propos des 45
élèves s’étant exprimés par rapport au locus de contrôle. En effet, ce serait une erreur
de représenter ce concept sur une échelle ne comportant que deux pôles : interne et
externe. Les propos des élèves démontrent que le locus de contrôle est certes une
variable considérable dans la prise de décision liée à la carrière, mais qu’elle ne peut
être comprise qu’à travers toutes ses nuances.
Au final, les 7 thèmes qui rassemblent les propos tenus par les élèves par
rapport au locus de contrôle démontrent qu’une échelle graduée permettrait une
meilleure représentation de cette variable. En effet, bien que les résultats démontrent
que certains élèves se trouvent aux extrémités de l’échelle de locus de contrôle (le
thème nulle chance, ni destin représenterait le pôle interne, et le thème influence de
Dieu représenterait le pôle externe), les 5 autres thématiques proposent une
conception plus nuancée de la mesure du locus de contrôle. En ce qui a trait au
nombre de mesures, ou encore au nombre de divisions recommandées visant à donner
un titre à l’importance accordée au locus de contrôle (autre qu’interne ou externe) de
chacun, cela reste à valider, puisque pour créer une échelle représentative de
l’ensemble des perceptions entretenues par les élèves, cet essai seul n’est pas
suffisant; il devrait être corroboré par d’autres recherches. En effet, les résultats du
présent écrit ne permettent pas d’émettre une telle recommandation. D’autres études
seraient nécessaires pour parvenir à élaborer une échelle de mesure du locus de
contrôle adaptée à la réalité des jeunes de quatrième et de cinquième secondaire.
Toutefois, afin de représenter les résultats obtenus dans la présente étude, les 7 grands
thèmes regroupant les réponses des élèves sont positionnés sur un continuum interne-
externe (voir figure 2), de manière à visualiser ce à quoi pourrait ressembler une
80
échelle de locus de contrôle qui mettrait davantage en lumière les nuances énoncées
en lien avec ce concept.
Locus de contrôle interne Locus de contrôle externe
Figure 3 Représentation des 7 grands thèmes sur un continuum interne-externe
Cette représentation est bien entendu hypothétique, puisque tel que mentionné
ci-haut, le présent écrit ne permet pas d’établir précisément à quel endroit, sur une
échelle de locus de contrôle, les thèmes obtenus devraient être positionnés.
⧫
Null
e ch
ance
, ni
des
tin
⧫
Infl
uen
ce d
e D
ieu
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Just
e un p
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ance
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⧫
La
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om
me
infl
uen
ces
posi
tives
dan
s un
par
cou
rs p
rofe
ssio
nnel
81
CONCLUSION
Le domaine de l’orientation scolaire et professionnelle permet de découvrir et
de travailler avec chaque facette d’une personne. De par son caractère unique, chaque
individu rencontré présente une complexité propre à son vécu et à sa personnalité. En
reconnaissant la différence de chacun, il peut sembler complexe d’émettre des
théories qui seraient applicables à tous. À ce sujet, en ayant appuyé le présent écrit
sur la conception du locus de contrôle de Rotter, qui qualifie le locus d’interne ou
d’externe, il était fort intéressant de valider si cette dichotomie serait suffisante pour
décrire le rôle du locus de contrôle dans la prise de décision liée à la carrière. Force
est d’admettre, par la richesse des propos des élèves rencontrés, qu’il s’agit là d’une
sur-simplification. Pour en arriver à ce résultat, plusieurs étapes ont été nécessaires.
Tout d’abord, afin de bien comprendre une partie de la réalité des jeunes de
quatrième et cinquième secondaire, la problématique a permis d’énoncer les
difficultés vécues à ces ordres d’enseignement, et leurs impacts sur leur prise de
décision liée à la carrière. En abordant le rôle des conseillers en orientation qui
œuvrent au secondaire, il a été démontré que par la définition même de leur rôle, ils
sont en mesure d’intervenir au niveau du fonctionnement psychologique de leurs
clients, permettant ainsi de les accompagner afin de mieux comprendre, dans le cas
qui nous intéresse, la manière dont le locus de contrôle joue un rôle dans leur prise de
décision. Le cadre conceptuel est venu situer les bases théoriques sur lesquelles cet
écrit s’appuie, et ont permis de saisir plus précisément ce que signifient les concepts
de « prise de décision » et de « locus de contrôle ». Les résultats de recherche sont le
produit d’une étude menée auprès d’étudiants de quatrième et cinquième secondaire
de la commission scolaire de Laval. Après avoir réalisé 45 entretiens semi-dirigés, les
entrevues ont été transcrites. Les verbatim ainsi créés ont permis de faire une analyse
des données de manière à regrouper selon des thèmes, les propos des élèves en ce qui
a trait au locus de contrôle. Cette analyse devait permettre de répondre à l’objectif
82
suivant : décrire le rôle du locus de contrôle sur la prise de décision relative à la
carrière d’élèves de la quatrième et de la cinquième secondaire. Les grands thèmes
font ressortir la variété de rôles que joue le locus de contrôle sur la prise de décision.
En effet, alors que pour certains le locus ne représente aucunement un facteur
d’influence, d’autres sont prêts à accorder à une divinité religieuse la liberté de
prendre une décision à leur place. Quoique ces deux résultats se situent aux deux
pôles théoriques du locus de contrôle, d’autres élèves ont apporté des réponses se
situant davantage au centre. C’est le cas des élèves qui ont mentionné devoir prendre
leurs responsabilités et investir de nombreux efforts afin d’atteindre leurs objectifs,
sans toutefois nier que la chance et le destin puissent venir contrecarrer (positivement
ou négativement) leurs plans. D’autres élèves ont également mentionné qu’un
événement incontrôlable (un accident automobile ou une catastrophe naturelle),
pourrait avoir une grande influence sur leur parcours professionnel. Certains
considèrent également que la vie leur apportera un lot de rencontres improbables, qui
viendront modifier leur trajectoire initiale prévue. Pour d’autres, ce sont les
compétences et les résultats des autres qui seront porteurs de leur décision. Il est donc
difficile pour eux de prendre une décision, puisqu’elle sera totalement dépendante de
ces deux conditions. Finalement, d’autres élèves ont affirmé croire « juste un peu » en
la chance et le destin. Tel que mentionné précédemment, cela correspond à une
position parfaitement centrée entre un locus de contrôle interne et externe.
Bien que ces résultats soient intéressants, la présente étude possède plusieurs
limites. Tout d’abord, une première limite se reflète dans le fait que ce sont deux, et
non pas une auxiliaire de recherche qui ont réalisé les entretiens. Ainsi, il était
difficile d’assurer une uniformité parfaite dans la manière de conduire les entretiens.
Toutefois, étant donné l’obligation de respecter le « guide d’entretien », les mêmes
questions ont été posées aux 45 élèves ayant participé à l’étape de l’entrevue. Ensuite,
il est pertinent de se questionner sur la représentativité des propos tenus par ces 45
élèves. En effet, ce sont 400 élèves qui ont rempli un questionnaire. De ce nombre,
83
327 questionnaires ont été jugés valides. Ainsi, ce sont 13,76 % des élèves qui ont été
interviewés. Ce nombre est-il suffisant pour pouvoir généraliser les conclusions de la
présente étude à l’ensemble des élèves de quatrième et cinquième secondaire du
Québec? Cela resterait à démontrer! Troisièmement, sur l’ensemble des questions
posées lors des entretiens, seulement deux concernaient directement le « locus de
contrôle ». Un questionnaire portant uniquement sur cette variable pourrait donc être
intéressant à utiliser lors d’une prochaine étude, question de voir si un plus grand
nombre d’énoncés permettrait d’apporter encore plus de précisions et de variétés dans
les réponses des élèves. De plus, le questionnaire administré aux élèves (dont certains
énoncés ont été repris dans le « guide d’entretien »), a été traduit librement. De ce
fait, il est possible que certaines questions aient été légèrement décalées de leurs sens
original, causant ainsi une interprétation erronée. Enfin, les conditions de réalisation
des entretiens n’ont pas été optimales en tout temps. En devant composer avec la
réalité du milieu scolaire secondaire, certains élèves ont été rencontrés sur l’heure du
dîner. Ainsi, certains devaient manger en même temps que de répondre aux questions,
par moments la cloche sonnait ou une annonce à « l’intercom » venait interrompre le
fil de pensées de l’élève, la porte du local était parfois ouverte par erreur, etc. Bref,
tous ces facteurs constituaient des éléments pouvant être perturbateurs pour l’élève (et
pour l’intervieweur!), causant ainsi des répercussions sur la qualité des réponses
fournies par l’élève.
Si la notion de locus de contrôle a été fortement étudiée en lien avec plusieurs
variables, le fait de décrire le rôle du locus de contrôle sur la prise de décision liée à
la carrière demeure tout de même novateur. Bien que Fournier (2001), Fournier et
Jeanrie (1999), Fournier et St-Onge (1995) et Fournier, Drapeau et Thibault (1995)
se soient intéressés, selon divers angles, au locus de contrôle vocationnel, peu
d’études québécoises font état de connaissances en lien avec cette variable.
Évidemment, des études étrangères fournissent de précieuses informations sur la
manière dont le locus de contrôle influence le comportement humain. Toutefois, il
84
serait très pertinent de poursuivre ces recherches dans la réalité québécoise. En
s’inspirant de certains travaux de Gati et de ses collaborateurs, qui visent à valider,
entre autres, certains des questionnaires qu’ils ont créés en des versions autres que
celle originale, il serait certainement possible de puiser de nouvelles informations, et
de faire de nouvelles découvertes en ce qui a trait au rôle du locus de contrôle dans la
prise de décision liée à la carrière. Il ne reste qu’à espérer que des chercheurs
continueront à mettre leur savoir au profit de la grande science de l’orientation, de
manière à ce que le travail des conseillers en orientation soit le mieux adapté possible
aux différentes réalités de leurs clients. Qui sait, peut-être qu’un jour les liens entre la
prise de décision de carrière et les différentes variables l’influençant deviendront
d’une telle évidence que les difficultés liées à la décision, ou encore tout simplement
l’indécision, pourront être traitées aussi facilement et rapidement que le temps de les
nommer.
85
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représentation du contrôle chez les personnes âgées». L’Année
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ANNEXE1 – Certificat d’éthique