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Sciences & Environnement Le Temps Mardi 9 avril 2013 14 Sud des Alpes Suisse centrale et orientale Bassin lémanique, Plateau romand et Jura Alpes vaudoises et Valais (500 m) Jour/degré de fiabilité: Ephéméride Soleil Lune Limite des chutes de neige: Situation générale aujourd’hui à 13h Prévisions en Suisse pour le matin et l’après-midi. Les températures sont les valeurs minimales (bleu) et maximales (rouge) à 2 mètres du sol. MétéoSuisse tél. 0900 162 666 en ligne avec nos météorologues, 24 heures sur 24 (fr. 3.- l’appel, fr. 1,50 la minute) Prévisions à cinq jours Haute pression Basse pression Front froid Front chaud Front occlus Isobares (hPa) H B 1015 -15 à -10° moins de -15° 25° et plus -10 à -5° -5 à 0° 0 à 5° 5 à 10° 10 à 15° 15 à 20° 20 à 25° Bâle Lausanne Sion Verbier Locarno Zurich Saint-Gall Coire Saint-Moritz Genève La Chaux-de-Fonds Berne Climat: «Il est crucial d’être totalement transparent» Olivier Dessibourg Moins de six mois. C’est le temps qu’il reste aux scientifiques du Groupe de travail 1, l’une des trois sections du Groupe intergouverne- mental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), pour affiner le con- tenu de leur 5e rapport. Un docu- ment qui prendra en compte toutes les recherches menées jusqu’au 15 mars 2013, afin de dresser l’état des lieux des connaissances; il sera finalisé du 23 au 26 septembre à Stockholm, puis dévoilé dans la fou- lée. Un compendium d’autant plus attendu que le précédant, en 2007, avait suscité plusieurs controverses. La première, fin 2009, a concerné une erreur sur la fonte des glaciers himalayens. Mais la plus vive, nom- mée «climategate», avait mis en question l’intégrité de climatolo- gues liés au rapport. Des affaires qui ont permis aux climato-sceptiques, qui nient le réchauffement ou, pour le moins, ses causes anthropiques, de se faire entendre. Une dizaine d’enquêtes officielles ont été ouver- tes. Mais aucune n’a confirmé les soupçons. Des manquements orga- nisationnels au sein du GIEC ont toutefois été soulignés. Dans quel contexte cette première partie du cinquième rapport du GIEC sera-t-elle divul- guée? Le point avec Thomas Stocker, climato- logue à l’Université de Berne et co- président du Groupe de travail 1. Le Temps: Sur le plan scientifique, quelles sont les avancées par rap- port au 4e rapport du GIEC? Thomas Stocker: Elles touchent trois champs d’activité. Première- ment, les observations: nous avons une bien meilleure vision des phénomènes naturels qui se passent sur la Terre. Concernant les océans, notamment; en 2007, on connaissait mal la quantité de chaleur qu’ils absorbent. Et, dans le 4e rapport, la fonte de la ban- quise et des calottes polaires était uniquement mentionnée. Aujourd’hui, grâce aux mesures satellitaires, on peut mieux quan- tifier celle-ci. Le Groenland, par exemple, perd chaque année environ 200 milliards de tonnes d’eau – l’équivalent de la surface de la Suisse recouverte de 4,8 m de liquide! Cette fonte et celle de la calotte polaire antarctique sont responsables d’un tiers de l’aug- mentation du niveau des mers. Le deuxième domaine est celui de la compréhension de ces phéno- mènes. Un exemple crucial: le rôle des nuages et des aérosols. Nous consacrerons un chapitre central à leur impact sur les systèmes clima- tiques. Cela ne veut pas dire que toutes les questions sont résolues, mais que nous progressons gran- dement dans la compréhension. Enfin, troisième secteur clé: les projections, auxquelles se consa- crent beaucoup plus de cher- cheurs. L’effort de modélisation est aujourd’hui 50 fois plus im- portant qu’en 2007. Nous utilisons quatre nouveaux scénarios d’émission des gaz à effet de serre, et une soixantaine de modèles climatiques, avec une meilleure résolution. Bien sûr, en tenant compte des incertitudes, liées notamment aux décisions politi- ques potentielles. Nous allons émettre des projections pour ce siècle, mais aussi – et c’est une première – pour les deux suivants. – Quel impact espérez-vous de ce 5e rapport? – On espère toujours que cela changera la donne. Notre but n’est pas de faire la une des médias, mais de fournir la base scientifique, solide et absolument crédible pour les décisions à prendre aux niveaux national et international. – La crédibilité absolue du GIEC, justement, a été mise à mal ces dernières années… – Il faut insister sur le fait que l’er- reur concernant les glaciers hima- layens, qui relève la littérature «grise» [pas systématiquement relue par les pairs scientifiques], ne concernait pas les travaux du Groupe 1, qui se base, lui, entre 97 et 100%, sur des études validées par notre communauté, mais ceux du Groupe 2, qui tente d’évaluer les impacts environnementaux. Ce qui ne veut pas dire que des erreurs ne peuvent pas apparaître, dans des commentaires, des corrections, etc. C’est aussi comme cela que se fait la science, et c’est humain. – D’aucuns ont toutefois critiqué le fait qu’il fut très ardu de corriger toute erreur détectée… – Nous espérons avoir mis sur pied un meilleur système de révision. J’ai plaidé pour que les responsables de chaque chapitre consultent beau- coup plus largement les auteurs qui y ont contribué – il y a en a à chaque fois entre 50 et 100. Cela garantit un filtre beaucoup plus important. Et si, malgré tout, une erreur se glisse dans le texte, le protocole sera clair: nous publierons les errata sur notre site internet. Par ailleurs, nous avons ouvert la possibilité à toute personne mon- trant qu’elle connaît bien les scien- ces du climat – donc vous aussi, comme journaliste! – de faire partie de notre pool d’experts relecteurs externes. Jus- qu’aujourd’hui, après deux consul- tations au niveau mondial, nous avons reçu près de 53 000 com- mentaires des 1459 relecteurs. – C’est précisément l’un deux, un blogueur nommé Alec Rawles, qui a publié, fin 2012 sur Internet, un brouillon de votre 5e rapport. Etait-ce donc une si bonne idée? – Faire partie de ces experts ne contenait qu’une clause de con- fiance: respecter la confidentialité. Cette personne n’a simplement pas joué le jeu, qui plus est en diffusant un texte alors largement inachevé. – Mais cela a eu pour effet de relan- cer la polémique climato-sceptique, Alec Rawles citant des passages indiquant que la cause du réchauffe- ment serait liée aux cycles du Soleil. – Le climato-scepticisme ne dispa- raîtra pas. Je préfère donc large- ment, sur 1459 experts, avoir 1458 personnes sérieuses et un «mouton noir», plutôt que res- treindre drastiquement la révision du rapport. Cela dit, comme l’ont très vite souligné la majorité des climatologues dans les médias, ce type s’est rendu ridicule en ex- trayant une ou deux phrases de leur contexte. – Mais le grand public n’a-t-il pas l’impression que le débat perdure? Et que faire pour en changer? – La dissémination d’informations est désormais devenue un droit et un bien public – ce fut longtemps votre privilège à vous, journalistes, mais avec Internet ça ne l’est plus. La situation a complètement changé, elle permet à quiconque de dire au monde ce qu’il veut; et je tiens en plus haute estime la liberté de parole. Il faut vivre avec. Or, cela profite également à la commu- nauté scientifique, qui peut contrer tout aussi rapidement. Cela dit, je doute que des pseudo- «bombes médiatiques» comme le «climategate» fassent à nouveau leur effet. J’ai, par exemple, eu d’intéressantes conversations par courriels avec mes homologues sur le Freedom of Information Act [loi américaine pour la liberté d’infor- mation]. Et je sais que ces échanges ont aussi été piratés lors du «clima- tegate». Je m’attendais, juste avant la Conférence sur le climat, à Doha, en décembre 2012, à ce qu’ils soient divulgués. Mais personne n’en a parlé. Même en Grande-Bretagne, où le terreau du climato-scepti- cisme est très fertile… En fait, c’étaient les mêmes polémiques, et c’eût été lassant aux yeux du public. Donc, je ne suis plus inquiet. – Dès lors, qu’avez-vous tiré comme leçon(s) du «climategate»? – Qu’il est crucial d’être totalement transparent. C’est pourquoi nous avons implémenté une mesure importante. Pour notre Atlas des projections climatiques régionales et globales, comme nous ne pouvons pas expliquer chaque détail à chaque climato-sceptiques indivi- duellement, nous allons rendre publiques sur CD-rom les données ainsi que les méthodes statistiques qui ont servi à en constituer les graphiques. Bien sûr, nous n’avons pas pu contraindre les centres de recherches à livrer tous les codes de leurs modèles climatiques, dont le développement a parfois nécessité des millions de francs d’investisse- ments. Mais de cette manière, quiconque peut se faire son avis. Par ailleurs, nous savons que nous devons être davantage proactifs dans notre manière de communi- quer. L’objectif des trois groupes du GIEC est de pouvoir trouver un consensus sur les faits scientifiques. Mais il est possible qu’une telle vision univoque ne soit pas immé- diatement atteinte. Dans ce cas, il faut le dire. Et expliquer où l’infor- mation se trouve dans le rapport détaillé. Ceci afin que les messages succincts qui composent le Résumé à l’intention des décideurs [l’unique et très bref document que la majo- rité des politiciens et du public lira] puissent être mis en perspective et ne servent pas de base pour une contestation. Nous souhaitons, aussi, mieux communiquer auprès des journalistes pour expliquer comment ces imposants rapports sont générés. – Mais pensez-vous que cela inté- resse vraiment le grand public, que seuls les grandes lignes et messages forts, le plus souvent, atteignent? – C’est un «paquet complet». Dans vos articles, il y aura les gros titres, et j’espère aussi les encadrés expli- catifs. Je doute cependant que cela intéresse effectivement tout le monde; l’on ne peut pas non plus faire des miracles pour rendre toutes ces informations simple- ment digestibles. Glaciers himalayens. Leur fonte totale avait été annoncée pour 2035, au lieu de 2350 dans le 4e rapport du GIEC en 2007. Des procédures ont été mises sur pied pour éviter ces erreurs dans le 5e rapport, en septembre prochain. GLACIER KHUMBU FRANCK GUISIOU/AFP Animaux Chevreuils morts dans l’Oural Près de 150 chevreuils sont morts en une seule semaine, entre le 1er et le 5 avril, dans la région de Kourgan, à l’est de l’Oural, en raison de conditions climatiques particulièrement rigoureuses qui sévissent encore en Russie. L’hiver qui traîne en longueur et la grande quantité de neige rendent plus difficile la recherche de nour- riture pour les animaux sauvages. Très souvent, en faisant leur che- min dans la glace et les congères, les chevreuils se blessent les pattes et meurent d’épuisement. (AFP) Sida Médicament «trois en un» L’Afrique du Sud a lancé lundi un nouveau programme de distribu- tion de médicaments antirétrovi- raux (ARV) pour simplifier le traitement, réduit de trois à un seul comprimé par jour, au prix «le moins cher du monde» (89 rands par mois, soit 7,50 euros). Le pays compte près de 6 millions de séropositifs, soit 11% de sa popula- tion. Le nouveau mode de traite- ment sera administré d’abord aux personnes nouvellement diagnos- tiquées séropositives, aux femmes enceintes et aux mères allaitantes. Les autres patients déjà sous anti- rétroviraux, soit 1,9 million de personnes, passeront à la dose journalière unique après une visite médicale. (AFP) Environnement Nouveau chef de la pêche L’avenir du Bureau suisse de conseil pour la pêche Fiber, sou- tenu conjointement par l’Eawag, l’Office fédéral de l’environne- ment (OFEV) et la Fédération suisse de pêche (FSP), est assuré pour trois nouvelles années. Le nouveau directeur est l’ichtyolo- gue Bänz Lundsgaard-Hansen. (ATS) Technologies Nanofils pour le solaire Construire un panneau solaire plus performant que les meilleurs du marché, mais en utilisant 10 000 fois moins de matière: c’est ce que laisse entrevoir une décou- verte faite à l’EPFL. L’idée consiste à recouvrir la surface de fils de dimension nanométrique, jusqu’à 1000 fois plus fin qu’un cheveu (photo), en arséniure de gallium, ce qui permet d’absorber jusqu’à 12 fois plus de lumière qu’une cellule conventionnelle. Ces tra- vaux ont été publiés le 7 avril dans la revue Nature Photonics. (LT) EPFL/NATURE PHOTONICS Panorama Météo 10° 11° -6° -1° 12° 11° -2° 11° 1020 1015 1010 1005 1000 995 1015 1010 1010 1015 1010 1005 H H H H B B B B Durant toute cette semaine, une situation d’ouest vigoureuse se maintiendra, faisant défiler des perturbations actives et quasi quotidiennes, dans une ambiance de plus en plus douce dès le milieu de semaine. A la faveur d’éclaircies prolongées, l’ambiance pourrait donc tout de même être par moments printanière. Une poussée anticyclonique semble se profiler pour la semaine prochaine; à confirmer… Mercredi 80% Jeudi 70% Vendredi 70% Samedi 60% Dimanche 50% 12° 1000 m 14° 1900 m 12° 1300 m 14° - 18° - 14° - 16° 1900 m 14° 1300 m 18° 1900 m 21° - 12° 1200 m 14° 2000 m 13° 1400 m 15° - 21° - 15° - 14° 1700 m 15° 1400 m 15° - 18° - Mardi 9 avril 2013 lever: 07h00 coucher: 20h15 4 minutes de soleil en plus lever: 06h16 coucher: 19h35 Lune: décroissante taux de remplissage: 1% > Environnement Le 5e rapport du GIEC sera publié en septembre prochain > L’un de ses auteurs responsables, le Bernois Thomas Stocker, démine les possibles polémiques DR

Mardi9avril2013 Climat:«Ilestcruciald’être ...stocker/papers/... · Sciences&Environnement LeTemps 14 Mardi9avril2013 Haute pression Basse pression Front froid Front chaud Front

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Page 1: Mardi9avril2013 Climat:«Ilestcruciald’être ...stocker/papers/... · Sciences&Environnement LeTemps 14 Mardi9avril2013 Haute pression Basse pression Front froid Front chaud Front

Sciences&Environnement Le TempsMardi 9 avril 201314

Sud des Alpes

Suisse centraleet orientale

Bassin lémanique,Plateau romand et Jura

Alpes vaudoiseset Valais (500 m)

Jour/degré de fiabilité:

Ephéméride

Soleil

Lune

Limite des chutes de neige:

Situation générale aujourd’hui à 13h

Prévisions en Suisse pourle matin et l’après-midi. Les températures sont les valeurs minimales (bleu) et maximales (rouge) à 2 mètres du sol.

MétéoSuisse

tél. 0900 162 666

en ligne avec nos météorologues,24 heures sur 24 (fr. 3.- l’appel, fr. 1,50 la minute)

Prévisions à cinq jours

Hautepression

Bassepression

Frontfroid

Frontchaud

Frontocclus

Isobares(hPa)

H

B

1015

-15 à -10°moins de -15° 25° et plus-10 à -5° -5 à 0° 0 à 5° 5 à 10° 10 à 15° 15 à 20° 20 à 25°

Bâle

Lausanne

Sion

Verbier

Locarno

ZurichSaint-Gall

Coire

Saint-Moritz

Genève

La Chaux-de-Fonds Berne

Climat: «Il est crucial d’êtretotalement transparent»

Olivier Dessibourg

Moins de six mois. C’est le tempsqu’il reste aux scientifiques duGroupe de travail 1, l’une des troissections du Groupe intergouverne-mental d’experts sur l’évolution duclimat (GIEC), pour affiner le con-tenu de leur 5e rapport. Un docu-ment qui prendra en compte toutesles recherches menées jusqu’au15 mars 2013, afin de dresser l’étatdes lieux des connaissances; il serafinalisé du 23 au 26 septembre àStockholm, puis dévoilé dans la fou-lée. Un compendium d’autant plusattendu que le précédant, en 2007,avait suscité plusieurs controverses.

La première, fin 2009, a concernéune erreur sur la fonte des glaciershimalayens. Mais la plus vive, nom-mée «climategate», avait mis enquestion l’intégrité de climatolo-gues liés au rapport. Des affaires quiont permis aux climato-sceptiques,qui nient le réchauffement ou, pourle moins, ses causes anthropiques,de se faire entendre. Une dizained’enquêtes officielles ont été ouver-tes. Mais aucune n’a confirmé lessoupçons. Des manquements orga-nisationnels au sein du GIEC onttoutefois été soulignés.

Dans quelcontexte cettepremière partiedu cinquièmerapport du GIECsera-t-elle divul-guée? Le pointavec Thomas

Stocker, climato-logue à l’Université de Berne et co-président du Groupe de travail 1.

Le Temps: Sur le plan scientifique,quelles sont les avancées par rap-port au 4e rapport du GIEC?Thomas Stocker: Elles touchenttrois champs d’activité. Première-ment, les observations: nousavons une bien meilleure visiondes phénomènes naturels qui sepassent sur la Terre. Concernantles océans, notamment; en 2007,on connaissait mal la quantité dechaleur qu’ils absorbent. Et, dansle 4e rapport, la fonte de la ban-quise et des calottes polaires étaituniquement mentionnée.Aujourd’hui, grâce aux mesuressatellitaires, on peut mieux quan-tifier celle-ci. Le Groenland, parexemple, perd chaque annéeenviron 200 milliards de tonnesd’eau – l’équivalent de la surfacede la Suisse recouverte de 4,8 m deliquide! Cette fonte et celle de lacalotte polaire antarctique sontresponsables d’un tiers de l’aug-mentation du niveau des mers.Le deuxième domaine est celui dela compréhension de ces phéno-mènes. Un exemple crucial: le rôledes nuages et des aérosols. Nousconsacrerons un chapitre central àleur impact sur les systèmes clima-tiques. Cela ne veut pas dire quetoutes les questions sont résolues,mais que nous progressons gran-dement dans la compréhension.Enfin, troisième secteur clé: lesprojections, auxquelles se consa-crent beaucoup plus de cher-cheurs. L’effort de modélisationest aujourd’hui 50 fois plus im-portant qu’en 2007. Nous utilisonsquatre nouveaux scénariosd’émission des gaz à effet de serre,et une soixantaine de modèlesclimatiques, avec une meilleurerésolution. Bien sûr, en tenantcompte des incertitudes, liéesnotamment aux décisions politi-ques potentielles. Nous allonsémettre des projections pour cesiècle, mais aussi – et c’est unepremière – pour les deux suivants.

– Quel impact espérez-vous de ce5e rapport?– On espère toujours que celachangera la donne. Notre but n’estpas de faire la une des médias, maisde fournir la base scientifique,

solide et absolument crédible pourles décisions à prendre aux niveauxnational et international.

– La crédibilité absolue du GIEC,justement, a été mise à mal cesdernières années…– Il faut insister sur le fait que l’er-reur concernant les glaciers hima-layens, qui relève la littérature«grise» [pas systématiquementrelue par les pairs scientifiques], neconcernait pas les travaux duGroupe 1, qui se base, lui, entre 97et 100%, sur des études validées parnotre communauté, mais ceux duGroupe 2, qui tente d’évaluer lesimpacts environnementaux. Ce quine veut pas dire que des erreurs nepeuvent pas apparaître, dans descommentaires, des corrections, etc.C’est aussi comme cela que se fait lascience, et c’est humain.

– D’aucuns ont toutefois critiqué lefait qu’il fut très ardu de corrigertoute erreur détectée…– Nous espérons avoir mis sur piedun meilleur système de révision. J’aiplaidé pour que les responsables dechaque chapitre consultent beau-coup plus largement les auteurs quiy ont contribué – il y a en a à chaquefois entre 50 et 100. Cela garantitun filtre beaucoup plus important.Et si, malgré tout, une erreur seglisse dans le texte, le protocolesera clair: nous publierons les erratasur notre site internet.Par ailleurs, nous avons ouvert lapossibilité à toute personne mon-trant qu’elle connaît bien les scien-ces du climat – donc vous aussi,comme journaliste! – de fairepartie de notre pool d’expertsrelecteurs externes. Jus-qu’aujourd’hui, après deux consul-tations au niveau mondial, nousavons reçu près de 53 000 com-mentaires des 1459 relecteurs.

– C’est précisément l’un deux, unblogueur nommé Alec Rawles, qui apublié, fin 2012 sur Internet, unbrouillon de votre 5e rapport.Etait-ce donc une si bonne idée?– Faire partie de ces experts necontenait qu’une clause de con-fiance: respecter la confidentialité.Cette personne n’a simplement pas

joué le jeu, qui plus est en diffusantun texte alors largement inachevé.

– Mais cela a eu pour effet de relan-cer la polémique climato-sceptique,Alec Rawles citant des passagesindiquant que la cause du réchauffe-ment serait liée aux cycles du Soleil.– Le climato-scepticisme ne dispa-raîtra pas. Je préfère donc large-ment, sur 1459 experts, avoir1458 personnes sérieuses et un«mouton noir», plutôt que res-treindre drastiquement la révisiondu rapport. Cela dit, comme l’onttrès vite souligné la majorité desclimatologues dans les médias, cetype s’est rendu ridicule en ex-trayant une ou deux phrases deleur contexte.

– Mais le grand public n’a-t-il pasl’impression que le débat perdure?Et que faire pour en changer?– La dissémination d’informationsest désormais devenue un droit etun bien public – ce fut longtempsvotre privilège à vous, journalistes,mais avec Internet ça ne l’est plus.La situation a complètementchangé, elle permet à quiconque dedire au monde ce qu’il veut; et jetiens en plus haute estime la libertéde parole. Il faut vivre avec. Or, celaprofite également à la commu-nauté scientifique, qui peut contrertout aussi rapidement.Cela dit, je doute que des pseudo-«bombes médiatiques» comme le

«climategate» fassent à nouveauleur effet. J’ai, par exemple, eud’intéressantes conversations parcourriels avec mes homologues surle Freedom of Information Act [loiaméricaine pour la liberté d’infor-mation]. Et je sais que ces échangesont aussi été piratés lors du «clima-tegate». Je m’attendais, juste avantla Conférence sur le climat, à Doha,en décembre 2012, à ce qu’ils soientdivulgués. Mais personne n’en aparlé. Même en Grande-Bretagne,où le terreau du climato-scepti-cisme est très fertile… En fait,c’étaient les mêmes polémiques, etc’eût été lassant aux yeux du public.Donc, je ne suis plus inquiet.

– Dès lors, qu’avez-vous tiré commeleçon(s) du «climategate»?– Qu’il est crucial d’être totalementtransparent. C’est pourquoi nousavons implémenté une mesureimportante. Pour notre Atlas desprojections climatiques régionales etglobales, comme nous ne pouvonspas expliquer chaque détail àchaque climato-sceptiques indivi-duellement, nous allons rendrepubliques sur CD-rom les donnéesainsi que les méthodes statistiquesqui ont servi à en constituer lesgraphiques. Bien sûr, nous n’avonspas pu contraindre les centres derecherches à livrer tous les codes deleurs modèles climatiques, dont ledéveloppement a parfois nécessitédes millions de francs d’investisse-

ments. Mais de cette manière,quiconque peut se faire son avis.Par ailleurs, nous savons que nousdevons être davantage proactifsdans notre manière de communi-quer. L’objectif des trois groupes duGIEC est de pouvoir trouver unconsensus sur les faits scientifiques.Mais il est possible qu’une tellevision univoque ne soit pas immé-diatement atteinte. Dans ce cas, ilfaut le dire. Et expliquer où l’infor-mation se trouve dans le rapportdétaillé. Ceci afin que les messagessuccincts qui composent le Résuméà l’intention des décideurs [l’uniqueet très bref document que la majo-rité des politiciens et du public lira]puissent être mis en perspective etne servent pas de base pour unecontestation. Nous souhaitons,aussi, mieux communiquer auprèsdes journalistes pour expliquercomment ces imposants rapportssont générés.

– Mais pensez-vous que cela inté-resse vraiment le grand public, queseuls les grandes lignes et messagesforts, le plus souvent, atteignent?– C’est un «paquet complet». Dansvos articles, il y aura les gros titres,et j’espère aussi les encadrés expli-catifs. Je doute cependant que celaintéresse effectivement tout lemonde; l’on ne peut pas non plusfaire des miracles pour rendretoutes ces informations simple-ment digestibles.

Glaciers himalayens. Leur fonte totale avait été annoncée pour 2035, au lieu de 2350 dans le 4e rapport du GIEC en 2007.Des procédures ont été mises sur pied pour éviter ces erreurs dans le 5e rapport, en septembre prochain. GLACIER KHUMBU

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AnimauxChevreuils morts dans l’OuralPrès de 150 chevreuils sont mortsen une seule semaine, entre le 1eret le 5 avril, dans la région deKourgan, à l’est de l’Oural, enraison de conditions climatiquesparticulièrement rigoureuses quisévissent encore en Russie. L’hiverqui traîne en longueur et lagrande quantité de neige rendentplus difficile la recherche de nour-riture pour les animaux sauvages.Très souvent, en faisant leur che-min dans la glace et les congères,les chevreuils se blessent les patteset meurent d’épuisement. (AFP)

SidaMédicament «trois en un»L’Afrique du Sud a lancé lundi unnouveau programme de distribu-tion de médicaments antirétrovi-raux (ARV) pour simplifier letraitement, réduit de trois à unseul comprimé par jour, au prix «lemoins cher du monde» (89 randspar mois, soit 7,50 euros). Le payscompte près de 6 millions deséropositifs, soit 11% de sa popula-tion. Le nouveau mode de traite-ment sera administré d’abord auxpersonnes nouvellement diagnos-tiquées séropositives, aux femmesenceintes et aux mères allaitantes.Les autres patients déjà sous anti-rétroviraux, soit 1,9 million depersonnes, passeront à la dosejournalière unique après unevisite médicale. (AFP)

EnvironnementNouveau chef de la pêcheL’avenir du Bureau suisse deconseil pour la pêche Fiber, sou-tenu conjointement par l’Eawag,l’Office fédéral de l’environne-ment (OFEV) et la Fédérationsuisse de pêche (FSP), est assurépour trois nouvelles années. Lenouveau directeur est l’ichtyolo-gue Bänz Lundsgaard-Hansen.(ATS)

TechnologiesNanofils pour le solaireConstruire un panneau solaireplus performant que les meilleursdu marché, mais en utilisant10 000 fois moins de matière: c’estce que laisse entrevoir une décou-verte faite à l’EPFL. L’idée consiste àrecouvrir la surface de fils dedimension nanométrique, jusqu’à1000 fois plus fin qu’un cheveu(photo), en arséniure de gallium,ce qui permet d’absorber jusqu’à12 fois plus de lumière qu’unecellule conventionnelle. Ces tra-vaux ont été publiés le 7 avril dansla revue Nature Photonics. (LT)

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B Durant toute cette semaine, une situation d’ouest vigoureuse semaintiendra, faisant défiler des perturbations actives et quasi quotidiennes,dans une ambiance de plus en plus douce dès le milieu de semaine. A lafaveur d’éclaircies prolongées, l’ambiance pourrait donc tout de même êtrepar moments printanière. Une poussée anticyclonique semble se profilerpour la semaine prochaine; à confirmer…

Mercredi 80% Jeudi 70% Vendredi 70% Samedi 60% Dimanche 50%5°

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Mardi 9 avril 2013

lever: 07h00coucher: 20h15

4 minutes de soleil en plus

lever: 06h16coucher: 19h35Lune: décroissante

taux de remplissage: 1%

> EnvironnementLe 5e rapport du GIECsera publié enseptembre prochain

> L’un de ses auteursresponsables,le Bernois ThomasStocker, démine lespossibles polémiques

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