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EHESS Le soutien du Zemgor aux écoles de la diaspora Author(s): Lidija I. Petruševa Source: Cahiers du Monde russe, Vol. 46, No. 4, L'invention d'une politique humanitaire: Les réfugiés russes et le Zemgor (1921-1930) (Oct. - Dec., 2005), pp. 831-843 Published by: EHESS Stable URL: http://www.jstor.org/stable/20164843 . Accessed: 15/06/2014 15:06 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . EHESS is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers du Monde russe. http://www.jstor.org This content downloaded from 195.34.79.223 on Sun, 15 Jun 2014 15:06:17 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'invention d'une politique humanitaire: Les réfugiés russes et le Zemgor (1921-1930) || Le soutien du Zemgor aux écoles de la diaspora

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EHESS

Le soutien du Zemgor aux écoles de la diasporaAuthor(s): Lidija I. PetruševaSource: Cahiers du Monde russe, Vol. 46, No. 4, L'invention d'une politique humanitaire: Lesréfugiés russes et le Zemgor (1921-1930) (Oct. - Dec., 2005), pp. 831-843Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/20164843 .

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LIDIJA I. PETRUSEVA

LE SOUTIEN DU ZEMGOR AUX ?COLES DE LA DIASPORA

L'histoire de l'assistance aux r?fugi?s a ?t? marqu?e par la cr?ation de nombreuses

organisations sociales dans les diff?rents pays d'accueil. Fond?es par les ?migr?s, ces organisations comprenaient notamment le Comit? des zemstvos et des villes

d'aide aux citoyens russes ? l'?tranger et ses repr?sentations locales. Ce comit?, avec le Zemgor de Prague, a occup? une place singuli?re. L'investissement de cette

organisation, dont l'action a touch? des domaines tr?s vari?s ? de la cr?ation de

cantines gratuites ? l'organisation des migrations de r?fugi?s ?, a ?t? primordial dans le d?veloppement de la vie ?ducative de l'?migration.

D?s 1921, le Comit? avait d?fini parmi ses objectifs prioritaires la cr?ation

d'?coles :

le souci d'?duquer et de former les enfants ? qui, d?j? dans des conditions

normales d'existence, est l'un des devoirs essentiels de l'?tat et de la soci?t? ?

rev?t une signification exceptionnelle dans ce moment difficile, que traverse la

Russie, d'effondrement de l'?conomie et des structures ?tatiques1.

L'?ducation fut ainsi d'embl?e pr?sent?e comme une priorit? dans l'activit? de

l'?migration. La situation des plus jeunes, dont l'enfance avait ?t? marqu?e par

l'?preuve de la guerre civile et qui se trouvaient d?sormais dispers?s dans diff?rents

pays ?trangers, n?cessitait une action sp?cifique. La cr?ation d'?tablissements

russes ne r?pondait pas seulement ? une pr?occupation d'ordre identitaire, ? savoir

pr?server les enfants du risque de d?nationalisation, il s'agissait de recr?er un envi

ronnement familier qui permette de panser leurs traumatismes.

La plupart des ?coles et des lyc?es russes cr??s au cours des ann?es 1920 ensei

gnaient les disciplines classiques russes, mais ?galement de nouvelles mati?res et

des programmes propos?s dans les ?tablissements scolaires europ?ens, de fa?on ?

1. GARF [Gosudarstvennyj Arhiv Rossiskoj Federacii ? Archives d'?tat de la F?d?ration de

Russie],f.R5809,op. 1, d. 185,1.88.

Cahiers du Monde russe, 46/4, Octobre-d?cembre 2005, p. 831-844.

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832 LIDIJA I. PETRUSEVA

donner aux ?l?ves les moyens de poursuivre leur formation sup?rieure ? l'?tranger. Mais ces ?coles, avant tout con?ues pour ?duquer les enfants dans leur culture

d'origine, furent des lieux privil?gi?s de transmission de l'h?ritage identitaire russe.

Comme le faisait remarquer le p?dagogue A. A. Dehtjarev :

ce n'est qu'? l'?cole que les enfants commencent ? conna?tre la Russie, car c'est

l? que br?le, comme le buisson ardent, l'essence de la Russie, c'est l? que l'on

parle constamment de la Russie, et en classe, et dans les dortoirs. L'identit?

russe et le sentiment d'amour de la Russie deviennent des r?alit?s claires et concr?tes de l'existence quotidienne2.

Le nombre d'enfants dans l'?migration varie beaucoup selon les sources et les esti

mations. Les donn?es ?tablies par le Zemgor de Paris en 1921 faisaient ?tat de

19 526 enfants (20 500 d'apr?s la Croix-Rouge russe, dont 10 847 dans les

Balkans, 6 096 en Finlande, 2 420 en Estonie et 1 128 en Afrique)3. Les pays

Baltes, la Pologne, la Turquie, la Bulgarie, la Tch?coslovaquie, la Yougoslavie, la

Gr?ce, ainsi que les pays d'Europe occidentale comptaient parmi les pays d'accueil

disposant d'?tablissements russes soutenus par le Zemgor de Paris. L'organisation recevait des fonds du Conseil des ambassadeurs, des gouvernements des ?tats

slaves, ainsi que d'un certain nombre d'organisations humanitaires ?trang?res. Le

Zemgor soutenait directement 45 des 90 ?coles de l'?migration, soit 5 500 enfants4.

Le Zemgor et les organisations p?dagogiques avaient des objectifs ?ducatifs

communs, mais dans chacun des pays leur activit? ?tait conditionn?e autant par la

situation des groupes de r?fugi?s que par les liens ?tablis avec les autorit?s et les

soci?t?s des pays d'accueil.

En Yougoslavie, Bulgarie et Tch?coslovaquie, les gouvernements manifest?rent

un soutien important aux ?tablissements scolaires russes. Dans les ?tats issus du

d?mant?lement de l'ancien empire russe (Finlande, pays Baltes et Pologne), le

nombre des anciennes ?coles imp?riales chuta spectaculairement malgr? la

pr?sence d'importantes minorit?s russes. Dans les autres pays d'Europe centrale et

occidentale, qui ?taient soit des pays d'accueil tr?s mineurs de l'?migration

(Grande-Bretagne, Gr?ce, Suisse, Autriche, Belgique), soit au contraire des centres

importants (France et Allemagne), la gratuit? de l'enseignement entra?na la scolari

sation de la plupart des enfants dans les ?tablissements nationaux. Dans ces pays, le

Zemgor soutint prioritairement les ?coles secondaires russes qui ?taient en g?n?ral

payantes et dont l'existence ?tait, pour la plupart d'entre elles, redevable ? des

initiatives priv?es. Ainsi, en France ou en Allemagne, la proportion d'enfants scola

ris?s dans les ?tablissements russes ?tait-elle minime par rapport au nombre

d'?migr?s install?s dans ces pays.

2. GARF,f. R 5785, op. 2, d. 29,1.3.

3.GARF,f.R9135,op. l,d.9,1.7.

4. GARF,f. R 5785, op. 2,d. 56,1.1.

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LE SOUTIEN DU ZEMGOR AUX ?COLES DE LA DIASPORA 833

Au IIe congr?s des organisations p?dagogiques tenu ? Prague en 1925,

V. V. Rudnev, membre du Zemgor de Paris et auteur de L'?cole russe ? l'?tranger

(Paris, 1924), fit une intervention sur la situation financi?re et les perspectives des

?tablissements scolaires russes. Il soulignait que seulement 21 % des 16 500 000

francs du budget consacr? ? l'?ducation provenaient de sources russes. Les finances

d?volues aux ?coles variaient consid?rablement selon les pays. Dans les ?tats

slaves, 97 % du budget ?taient assur?s par les ?tats (50 % par la Yougoslavie, 39 %

par la Tch?coslovaquie et 8 % par la Bulgarie5).

L'analyse de la situation et des perspectives de d?veloppement de l'?ducation

russe r?v?lait l'?norme disparit? entre le nombre de r?fugi?s et le nombre d'enfants

scolaris?s dans les ?tablissements de l'?migration. Dans les ?tats slaves, o? l'on

d?nombrait environ 110 000 r?fugi?s, 5 510 enfants ?taient pris en charge dans

42 ?coles. Dans les ?tats issus de l'empire russe (Finlande, pays Baltes, Pologne,

Bessarabie), sur les 220 000 r?fugi?s recens?s, seuls 2 850 enfants fr?quentaient les

31 ?coles russes existantes. Quant aux autres pays d'Europe centrale et occidentale

et leurs 420 000 r?fugi?s, ils ne disposaient que de 17 ?coles qui accueillaient

620 enfants6.

Au cours des premi?res ann?es, le Zemgor de Paris finan?a un certain nombre

d'?tablissements scolaires ? Constantinople : 3 lyc?es (soit plus de 900 ?l?ves), 3 coll?ges, 10 ?coles ?l?mentaires, 2 internats, 10 jardins d'enfants, 6 cantines.

L'aggravation de la situation politique dans la r?gion et les ?vacuations massives

des r?fugi?s russes de Turquie qui s'ensuivirent incit?rent le Zemgor ? transf?rer les

?coles existantes principalement en Bulgarie, en Serbie et en Tch?coslovaquie. Ce

dernier pays joua un r?le particulier dans l'?ducation des jeunes ?migr?s par le biais

du programme, ? L'action russe ?, mis en uvre par le gouvernement de Masaryk.

Des milliers d'enfants et de jeunes purent b?n?ficier de ce programme de soutien ?

l'?ducation gratuite russe (primaire, secondaire et sup?rieure) pris en charge par l'?tat. Le gouvernement finan?a int?gralement 10 ?coles secondaires. L'une d'elles

avait ?t? fond?e ? Constantinople avant d'?tre r?install?e ? Trebova en Moravie. En

1922, ce lyc?e accueillait plus de 500 enfants et encore 419 au cours de l'ann?e

scolaire 1929-1930. L'?tablissement ?tait g?r? par le minist?re de l'?ducation

nationale tch?coslovaque. En septembre 1922, un autre lyc?e russe fut ouvert ?

l'initiative du Zemgor de Prague. ? ses d?buts, il accueillait 16 ?l?ves, 230 en 1924

et 296 en 1929. ? partir de 1928, il fut ?galement pris en charge par le minist?re. En

1935, les deux lyc?es de Moravie et de Prague fusionn?rent pour ne plus former

qu'un ?tablissement dans la capitale. Dans ce pays, les ?tablissements russes ?taient

int?gr?s au r?seau ?ducatif national, ce qui permettait aux enseignants russes d'?tre

assimil?s au corps des fonctionnaires. L'?tat tch?coslovaque contribua, par le biais

des repr?sentants du Zemgor tch?que, au financement d'autres ?coles russes ?

l'?tranger, notamment en 1923, lorsque les financements du Conseil des ambassa

deurs furent subitement r?duits.

5.GARF,f.5785,op.2,d. 18,1. 15-16.

6.GARF,f.5785,op. 2,d. 18,1. 18.

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834 LIDIJA I. PETRUSEVA

Prague ?tait ?galement le centre de la vie p?dagogique russe en ?migration. En

effet, c'est dans cette capitale que le Bureau p?dagogique pour les ?coles ?l?men

taires et secondaires russes fut fond? lors du Ier congr?s des enseignants de ces

?coles en 1923. Ce bureau, qui allait jouer un r?le d?cisif dans l'organisation et

l'harmonisation des programmes d'enseignement, ?tait compos? de 19 personnes, dont 12 d?l?gu?s du congr?s et 7 repr?sentants d'organisations sociales de

l'?migration. Le comit? directeur du Zemgor y ?tait repr?sent? par Z. A. Makseev, le professeur N. M. Mogiljanskij, V. V. Rudnev, P. P. Jurenev ; le comit? central

de l'Union des villes par P. D. Dolgorukov. Plusieurs congr?s annuels de p?dago

gues (de 1924 ? 1927) et d'?tudiants (1921-1922 et 1924) furent organis?s ? Prague au cours des ann?es 1920. Le Zemgor de Prague publia par ailleurs un organe de

liaison, L'?cole russe ? l'?tranger. La Yougoslavie fut celui des pays d'accueil de l'?migration russe qui prit en

charge le plus d'?l?ves et consacra les plus gros budgets ? l'?ducation des jeunes

?migr?s. Selon les donn?es de la commission de soutien aux r?fugi?s russes, 5 317

enfants se trouvaient dans le pays vers 1924, dont 4 025 d'?ge scolaire7 (soit la

moiti? des enfants inscrits dans des ?coles russes en Europe) sur les 38 000 r?fugi?s

enregistr?s ? cette date dans le royaume8. L'?tat yougoslave finan?a la majorit? des

?tablissements scolaires install?s dans le pays, y compris trois ?coles de cadets

?vacu?es de Turquie (celles de Crim?e, du Don et de Russie) et deux instituts de

jeunes filles. La commission de soutien avait ? sa charge sept ?tablissements. Le

comit? directeur du Zemgor fonda quelques-unes des ?coles d'enfants qui furent

prises en charge localement par le Comit? des villes sous la responsabilit? de

V. D. Brjanskij. La Commission de soutien et le Zemgor finan?aient conjointement 14 ?tablissements scolaires.

Les ?coles russes de Yougoslavie avaient le statut d'?tablissements d'?tat. ? la

fin des ann?es 1920, certaines ?taient toujours en activit? (les corps de cadets, les

instituts d?jeunes filles, 5 lyc?es) et accueillaient alors 745 ?l?ves9.

Le Zemgor de Paris manifesta une attention particuli?re ? la situation des enfants

en Bulgarie. Selon les donn?es du Comit?, vers 1923 la Bulgarie avait recueilli

34 000 r?fugi?s, dont 2 000 enfants en ?ge d'?tre scolaris?s. La plupart (1 674) ?taient pris en charge par les ?coles russes, mais 300 d'entre eux se trouvaient hors

de tout cadre scolaire10. Les moyens financiers de l'?cole russe en Bulgarie prove naient de fonds tr?s divers : ceux de l'?tat bulgare, du comit? directeur du Zemgor, de la Soci?t? des Nations, des gouvernements cosaques du Terek et du Don. La

soci?t? de bienfaisance du professeur Whittemore attribuait des bourses d'?tudes ?

des ?l?ves n?cessiteux. Certains des ?tablissements avaient ?t? transf?r?s de

7. V. V. Rudnev,Zarubeznajarusskajaskola, 1920-1924,?'., 1924,p. 26.

8. Les diff?rentes ?valuations du nombre d'?migr?s dans les diff?rents pays proviennent des

archives du GARF (pour les estimations de l'ann?e 1921 : f. R 9135, op. 1, d. 9,1.4 et pour l'ann?e 1924 : f. R 5764,op. 5,d. 1,1.48).

9.GARF,f.R5785,op.l,d. 50,1.1-11.

10.GARF,f.R5809,op. l,d.79,1.73.

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LE SOUTIEN DU ZEMGOR AUX ?COLES DE LA DIASPORA 835

Turquie ou d'Afrique, tels le lyc?e de Gallipoli, le lyc?e V. V. Neratova de Cons

tantinople ou encore le corps des cadets du Don d'Isma?lia. La Bulgarie contribua ?

la mise en place de nouvelles ?coles primaires et ?l?mentaires. En 1922, il en fut

cr?? 19 avec le statut d'?coles d'?tat.

Le premier ?tablissement scolaire russe de Bulgarie fut ouvert ? Varna : il

accueillit de nombreux r?fugi?s d?s avant la fin de la guerre civile. Un lyc?e, dirig?

par S. N. Kononovic (ancien directeur du lyc?e d'Odessa) ouvrait ses portes dans

cette ville en avril 1920. Puis en juin de la m?me ann?e, c'?tait ? Sofia l'ouverture

d'un lyc?e russe plac? sous la responsabilit? de l'ancien directeur du lyc?e n? 3

d'Odessa, A. P. Stepanov, et administr? par le responsable local de l'Union des

villes, le g?n?ral A. V. Arcisevskij. D'autres ?tablissements furent ?galement fond?s ? Chumen, Dol'na Orehovic, Plovdiv et Pechter.

Cependant en 1921-1923, et en d?pit des efforts consentis de part et d'autre, le

r?seau scolaire russe traversa une grave crise financi?re. La situation ?conomique et

politique de la Bulgarie ne permettait plus ? son gouvernement de disposer des

moyens n?cessaires ? la prise en charge des ?coles ; celle-ci revint presque exclusi

vement au Zemgor qui ?prouva les plus grandes difficult?s ? l'assumer. Conscients

de leur incapacit? ? assurer les salaires des professeurs et de l'?tat de malnutrition

des enfants, le Comit? directeur et l'Union des villes intervinrent ? plusieurs

reprises ? ce sujet aupr?s du Haut commissariat pour les r?fugi?s de la Soci?t? des

Nations.

En juillet 1922, le repr?sentant de la SDN, Collins, rencontra ? Sofia les direc

teurs des ?coles russes de Bulgarie et proposa, au cas o? la SDN ne pourrait

r?pondre aux urgences financi?res, que 200 enfants fussent envoy?s en France o?

ils seraient r?partis dans des familles de fermiers. Mais les responsables p?dagogi

ques n'envisag?rent cette solution que pour les orphelins et les ?l?ves de plus de 17

ans et demand?rent que d'autres propositions fussent faites pour la majorit? restante dont ils craignaient que la dispersion dans des familles fran?aises n'entra?n?t une assimilation rapide.

Aucun subside ne vint de la SDN, mais en ao?t 1923, le nouveau gouvernement du professeur Tsankov prit la d?cision de d?bloquer des fonds r?guliers pour les

?coles russes (500 000 lev), ce qui permit, mais en partie seulement, de financer

leur fonctionnement. Vers 1930, les lyc?es de Varna, Chumen, Sofia, Pechter ainsi

que quelques maisons d'enfants r?parties dans diff?rentes villes du pays ?taient

toujours en activit?, rassemblant au total 1 085 enfants11.

Dans les ?tats issus de l'effondrement de l'empire russe, la situation se pr?sen tait diff?remment : ils avaient d? faire face ? deux vagues d'?migration, l'une

g?n?r?e par la guerre civile, la seconde par l'av?nement de la Russie sovi?tique. Les

gouvernements de ces pays, peu favorables aux populations russophones, ne permi rent pas la cr?ation d'?coles d'?tat et r?duisirent m?me le nombre des ?coles russes

cr??es avant la r?volution. Le comit? du Zemgor adressa plusieurs plaintes ? ce

sujet ? la SDN en s'appuyant sur le droit des minorit?s nationales nouvellement

ll.GARF,f.R5785,op.l,d. 46,1. 1-14.

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836 LIDIJA I. PETRUSEVA

garanti ? l'?chelle internationale. La situation scolaire ne s'am?liora pas pour autant

et le r?seau d'?tablissements russes s'effondra rapidement, particuli?rement en

Bessarabie o?, au milieu des ann?es 1920, il n'existait plus que quelques ?coles

priv?es russes menac?es de fermeture par une administration tatillonne qui exigeait d'elles un renouvellement annuel des inscriptions. Cette situation pr?occupante se

trouva au centre des d?bats du IIe congr?s p?dagogique de Prague qui fut alors

conduit ? r?diger la r?solution suivante : ? Face ? la population russe sans d?fense

de Bessarabie, le gouvernement roumain agit dans ses actes et ses r?solutions

comme si les nationaux russes de Bessarabie n'existaient pas ?12.

La situation n'?tait gu?re meilleure en Pologne. En 1924, le pays comptait 60 800 r?fugi?s. Seulement 1 % des enfants ?tait scolaris? dans les ?coles russes,

pour la plupart des ?coles priv?es ou subventionn?es par les organisations sociales

de l'?migration. La situation s'am?liora au cours de la seconde moiti? des ann?es

1920, en particulier gr?ce au soutien apport? ? certains des ?tablissements par des

notables locaux. Mais la pr?carit? apparut telle ? la fin de la d?cennie qu'il fut ques tion de cr?er une ? caisse des ?coles ? pour suppl?er l'incapacit? financi?re des

parents ? fournir aux enfants le mat?riel scolaire le plus ?l?mentaire. En 1927-1928, selon les donn?es du Bureau p?dagogique de Prague, 2 362 enfants ?taient scola

ris?s dans les 16 ?coles russes en activit? ? Varsovie, Wilno, Brest, Rovno, Pinsk,

Lutsk, Grodno (soit, pour la plupart, dans les r?gions orientales du pays peupl?es de

nombreuses minorit?s)13. La situation ?tait plus favorable dans les pays riverains de la Baltique. En Finlande, le nombre de r?fugi?s ne cessa de d?cro?tre dans la premi?re moiti?

des ann?es 1920 passant de 25 000 ? 14 300 en 1924 et les enfants de r?fugi?s furent

pris en charge dans les ?coles russes, anciennement imp?riales. Au milieu de la

d?cennie, la stabilisation des flux de r?fugi?s incita les paroisses et les organisations sociales russes ? prendre quelques initiatives. Le comit? du Zemgor fut amen? ?

subventionner dix ?coles, six d'enseignement secondaire et quatre d'enseignement

?l?mentaire, soit respectivement 80 % et 55 % d'entre elles. En 1926-1927, le Zemgor soutenait financi?rement 14 ?tablissements scolaires r?unissant 662 enfants14.

En Lettonie, le Comit? du Zemgor avait d?velopp? son action d'assistance d?s

1921 et apportait une aide financi?re ? l'?cole russe de Riga avec le concours de la

Croix-Rouge russe et du Comit? des ?migr?s russes. Il participa ? la cr?ation du

jardin d'enfants de la capitale, d'un orphelinat et de l'?cole qui lui ?tait rattach?e

ainsi qu'? la fondation de l'universit? populaire et contribua ? l'enseignement de la

langue lettone. ? partir de 1924, l'amenuisement des fonds du Zemgor ne lui permit

plus de maintenir ces soutiens, l'orphelinat et quelques bourses d'?tudes except?s. En Estonie vers 1924, 91 000 personnes, soit plus de 8 % de la population du

pays, ?taient de nationalit? russe, 19 000 d'entre elles ?taient des r?fugi?s15. Le

12. GARF,f. R 5785,op. 2,d. 46,1.238 bis.

13.GARF,f.R5785,op. l,d.48.

14.GARF,f.R5785,op. l,d.43,1. 1-23.

15. Rudnev, Zarubeznaja russkaja skola, p. 193.

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LE SOUTIEN DU ZEMGOR AUX ?COLES DE LA DIASPORA 837

comit? des ?migr?s russes, dirig? par V. A. Rogoznikov (repr?sentant du Zemgor), fut ? l'origine du d?veloppement du r?seau scolaire russe financ? par le Zemgor

parisien. D'apr?s les statistiques du bureau p?dagogique, 14 des 20 ?tablissements

existants dataient de l'?poque imp?riale. ? la fin des ann?es 1920, on d?nombrait

2 890 enfants scolaris?s16.

En Lituanie, contrairement ? l'Estonie, les ?coles russes imp?riales avaient

toutes disparu au cours de la Premi?re Guerre mondiale en raison de l'occupation de la r?gion par les arm?es des puissances centrales et de l'?vacuation de la majorit? de la population civile en 1915. Le recensement lituanien de 1923 fait ?tat de la

pr?sence de 55 000 Russes. Le premier lyc?e russe de Kaunas (anciennement

Kovno) fut cr?? en 1920 et plac? sous la tutelle du minist?re de l'?ducation natio

nale. En 1925-1926, ce lyc?e payant accueillait 238 ?l?ves, dont 62 ?taient des

enfants d'?migr?s russes. Par la suite, des cours pour adultes y furent dispens?s, d'autres encore ?taient destin?s aux classes ?l?mentaires. Un orphelinat fut ?gale ment ouvert dans la capitale. En 1926-1927, l'effectif scolaire des ?tablissements

russes du pays s'?levait ? 1 000 ?l?ves17.

Dans certains pays d'Europe centrale et du sud-est, tr?s marginaux dans

l'histoire de la diaspora, de r?els efforts furent d?ploy?s au profit de l'?ducation des

enfants russes. Ainsi, en Hongrie (pays qui comptait 5 020 Russes en 1921), ?

l'initiative du Comit? russe en Hongrie et de la branche locale de la Croix-Rouge, les fonds du Zemgor permirent la cr?ation d'une ?cole ?l?mentaire.

En 1926, la Gr?ce comptait 3 040 Russes, dont 152 enfants d'?ge scolaire : 70

d'entre eux fr?quentaient les ?coles russes et 39 des ?tablissements grecs18. En mars

1921, le soutien du Zemgor avait permis l'ouverture d'un lyc?e russe ? Ath?nes qui avait accueilli 54 enfants cette ann?e-l? (40 en 1929)19. Comme toutes les institu

tions ?ducatives russes, le lyc?e d'Ath?nes souffrait d'un manque chronique de

moyens et compl?tait son budget en organisant chaque ann?e un arbre de No?l. Sa

situation financi?re s'aggrava ? l'aube de la nouvelle d?cennie lorsque le Zemgor fut amen? ? pratiquement cesser son aide (lui-m?me priv? des fonds qu'il recevait

jusqu'alors des ?tats-Unis). La direction de l'?tablissement sollicita les organisa tions internationales. L'office Nansen r?pondit ? sa demande en promettant de

fournir 46 500 drachmes20. Le lyc?e russe d'Ath?nes, malgr? sa carence en moyens, fonctionna jusqu'au milieu des ann?es 1930.

En Europe occidentale, l'Allemagne et la France constituaient les p?les d'accueil les plus importants de l'?migration. En Allemagne, la pr?sence d'abord

massive des r?fugi?s (?valu?e ? 300 000 personnes), ne cessa de d?cro?tre avec la

d?t?rioration de la situation ?conomique des ann?es 1923-1924, au profit notam

ment de la France. Mais ni en Allemagne, ni en France, la capacit? d'accueil des

16. GARF, f. R 5785, op

17. GARF,f. R 5785,op

18.GARF,f.R5780,op

19. GARF,f. R 5780,op

20. GARF, f. R 5781, op

l,d. 44,1. 1-25.

l,d.41,1.1-6.

l,d. 11,1. 165.

l,d.ll,1.166.

l,d. 4,1.35.

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838 LIDIJA I. PETRUSEVA

?coles russes ne r?pondait ? la demande. Pratiquement tous les fonds russes et

?trangers d?di?s ? l'?ducation avaient ?t? distribu?s dans les premi?res ann?es de

l'exil aux ?tablissements russes des Balkans et des pays limitrophes de la Russie.

En Allemagne et en France, la tr?s grande majorit? des enfants de r?fugi?s fut scola

ris?e au sein des ?coles publiques gratuites. Les donn?es statistiques relatives ? l'Allemagne ont toujours ?t? incompl?tes

(elles ne fournissent aucun chiffre sur le nombre d'?migr?s en Bavi?re et dans les

r?gions orientales)21. En d?cembre 1920, le pasteur Mazing fut ? l'origine de la

cr?ation du lyc?e priv? Saint-Georges de Berlin. Il accueillait alors 140 ?l?ves et

dispensait un enseignement bilingue, en russe et en allemand. Il comptait encore

une centaine d'?l?ves ? la fin des ann?es 192022. Un nouvel ?tablissement, g?r? par le groupe acad?mique russe avec le soutien financier du Zemgor, vit le jour en

1921. En outre, plusieurs ?coles furent ouvertes, notamment dans les anciens camps de prisonniers de guerre, gr?ce aux subsides fournis par le Zemgor ? son repr?sen tant local F. V. Slippe. En dehors des fonds attribu?s au fonctionnement des ?tablis

sements, le comit? directeur du Zemgor attribua des bourses aux enfants les plus d?munis scolaris?s dans les ?coles allemandes, consacrant ? ce soutien jusqu'? 70 000 marks par mois23.

L'?valuation de la pr?sence russe en France fut tr?s diverse selon les sources. Le

Zemgor estima ? 200 000 le nombre de r?fugi?s (le recensement fran?ais de 1926

en comptabilisa 65 000, mais ? la tribune de la SDN en 1924, les autorit?s fran

?aises avaient affirm? en avoir accueilli 400 000). Le gouvernement, qui avait pris en charge l'accueil des r?fugi?s russes ? Constantinople, d?bloqua de nouveaux

fonds pour l'?ducation des enfants de r?fugi?s arriv?s en France. Il n'y avait pas de

centralisation administrative des ?coles russes. La Commission franco-russe cr??e

au sein de l'Institut des ?tudes slaves pour la distribution des bourses aux ?tudiants

russes fonda une sous-commission pour les ?tablissements scolaires russes anim?e

par deux Russes et un professeur fran?ais, Jules Patouillet. Au cours de ses huit

ann?es d'activit? au sein de la sous-commission, ce dernier favorisa en particulier la

mise en place de sections russes dans les lyc?es fran?ais. Le professeur Jules

Legras, sp?cialiste d'histoire et de litt?rature russe succ?da ? J. Patouillet en 1929.

Mais pour l'essentiel, l'?ducation des enfants russes fut assur?e par les ?migr?s eux-m?mes. ? Nous nous effor?ons d'aider la jeunesse sans l'aide du gouverne

ment, sans le soutien d'un quelconque pouvoir, seulement par notre volont? et nos

forces sociales ? proclamaient les ?migr?s dans la presse24. Mais comme le faisait

remarquer V. V. Rudnev lors du congr?s des p?dagogues russes en mai 1929,

seulement 1 500 des 16 000 ? 20 000 enfants que comptait la population russe

21. En 1921, le Zemgor fait ?tat de 512 enfants dont 343 en ?ge d'?tre scolaris?s (410 selon

d'autres donn?es). Voir GARF, f. R 6006, op. 1, d. 11,1. 109.

22.GARF,f.R5785,op. l,d.42,1.2.

23. GARF,f.R 6006,op. 1, d. 11,1. 117 bis.

24. ? Nasa Smena ?, Poslednie novosti, 3 mars 1929.

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LE SOUTIEN DU ZEMGOR AUX ?COLES DE LA DIASPORA 839

install?e en France (de 150 000 ? 200 000 personnes), ?taient scolaris?s dans des

?tablissements russes25.

En France, la contribution du Zemgor ? l'?ducation consista surtout en dotations

de bourses pour les ?tudes et en subsides pour le mat?riel scolaire. Au cours de la

seconde moiti? des ann?es 1920, face ? l'amenuisement des fonds, le Comit? direc

teur parisien mit en place le syst?me du ? vendredi je?n? ? (les ?migr?s ?taient

invit?s ? se priver de repas ce jour-l? et ? en reverser le prix dans une caisse cr??e ?

cet effet). Cette initiative fut soutenue par de nombreux ?crivains, politiciens et

hommes de lettres (P. Miljukov, A. Remizov, etc.), les dons furent nombreux et

spontan?s, notamment ceux des soci?t?s cin?matographiques ? Mappemonde film ? et la ? Soci?t? g?n?rale de film ? qui, apr?s la sortie de ? Volga.. .Volga ? du

r?alisateur V. Turzanskij, versa 3 120 francs ? la caisse du ? vendredi je?n? ?26. La

France ?tait en effet l'un des rares pays o? le Zemgor pouvait trouver des sources de

financement dans l'?migration m?me. Les aides ? l'?ducation atteignirent 250 000

? 300 000 francs par an27.

L'?cole secondaire de Paris ?tait l'une des plus anciennes de l'?migration. Fond?e en f?vrier 1920 par le consulat russe de Paris, ? l'initiative d'un groupe de

p?dagogues, elle b?n?ficia du soutien de l'ambassadeur V. Maklakov et de sa s ur.

L'?cole fut d'abord plac?e sous la tutelle du Comit? d' uvre de guerre puis sous

celle d'une Soci?t? d'aide ? l'?ducation des enfants r?fugi?s, pr?sid?e par V. Maklakov, assist? de E. P. Kovalevskij. Le directeur de l'?cole, V. P. Nedacin, ?tait l'ancien directeur du lyc?e Medvednikovsk de Moscou. Cette ?cole comptait 30 ?l?ves en 1920,182 en 1929 et en a accueilli 600 au cours de la d?cennie. Elle

?tait financ?e par de nombreuses organisations ?migr?es. Le Zemgor parisien lui

versa 336 000 francs de subsides entre 1922 et 1929. Le gouvernement fran?ais et

la municipalit? parisienne contribu?rent ? son fonctionnement ? hauteur, respecti vement de 25 000 francs et 3 000 francs par an. Lorsque les finances de cet ?tablis sement atteignirent un point critique, de nombreux repr?sentants de l'?migration se

mobilis?rent. La grande princesse Marie Pavlovna fit don de 50 000 francs, la balle

rine A. P. Pavlova organisa en sa faveur une soir?e de bienfaisance qui rapporta 26 850 francs. En 1927, L. P. Deterding intervint de fa?on d?cisive en permettant l'achat d'une propri?t? pr?s de Paris, o? l'?cole fut transf?r?e en 1929. L'?cole prit alors le nom de sa bienfaitrice et resta en fonction jusqu'en 196128.

Parmi les premiers ?tablissements apparus dans l'?migration figure ?galement l'?cole de la marine de Bizerte en Tunisie cr??e par les corps de marine de Sebas

topol et de Vladivostok qui avaient ?t? ?vacu?s en 1920 via la Turquie. En 1921, cette ?cole soutenue financi?rement par le gouvernement fran?ais, et dans une

moindre mesure par le Zemgor, accueillit 350 ?l?ves29.

25. GARF,f. R 5785,op. 2,d. 46,1.42.

26. GARF, f. R 5785,op. 2, d. 73,1.76.

27. GARF,f.R6094,op. l,d. 27,1. 20.

28. GARF,f.R5913,op. l,d.965,1.3.

29. GARF,f.R5912,op. l,d. 214,1. 12.

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840 LIDIJA I. PETRUSEVA

Plusieurs des ?coles russes de France ?taient issues de patronages soutenus par l'aristocratie ?migr?e, en particulier sur la c?te d'Azur o? celle-ci s'?tait ?tablie

massivement. L'?cole russe ? Alexandrino ? de Nice existait ainsi gr?ce aux

subsides du comit? de tutelle du grand prince Andrej Vladimirovic ; l'orphelinat de

Cannes, l'orphelinat des jeunes filles ?taient sous la protection de la grande prin cesse Elena Vladimirovna. Des ?coles ?l?mentaires virent le jour ? l'initiative de

paroisses (Paris, La Chalette, Belfort, Ugine, Nilvange, Le Creuset, Billancourt). Plusieurs sections de russes furent cr??es dans les lyc?es fran?ais.

Dans son rapport sur la situation des ?coles secondaires en France durant les

ann?es 1920-1925, E. P. Kovalevskij mentionna bien d'autres ?tablissements

comme le pensionnat de la famille Rjabusinskij cr?? en 1921 ? Ariane, pr?s de Nice, le foyer pour enfants russes A. Pavlova cr?? en 1922 ? Saint-Cloud et dont les frais

de fonctionnement ?taient assur?s gr?ce aux fonds personnels d'Anna Pavlova30.

Le comit? directeur du Zemgor concentra ?galement ses moyens sur l'aide ? la

formation sup?rieure en France. Ainsi, ? partir de 1924, l'universit? populaire russe

de Paris (cr??e en 1921) fut plac?e sous l'administration du Zemgor qui affecta pr?s de 160 000 francs ? son fonctionnement en 1925-192631. ? cette m?me ?poque, 1 467 personnes fr?quentaient ses diff?rents cours. En outre, le comit? parisien

apporta une aide substantielle ? l'Institut commercial russe de Paris cr?? en 1925 et

dont les dipl?mes ?taient officiellement reconnus par l'?tat fran?ais. Cet ?tablisse

ment, dirig? par V. F. Sollogoub, comptait 65 ?tudiants en 192932. Un bilan

effectu? au d?but de cette ann?e-l? faisait ?tat de 41 ?tablissements russes en

France33.

La crise

? la fin des ann?es 1920 et au d?but des ann?es 1930, l'amoindrissement brutal des

ressources financi?res de l'assistance marqua le d?but de la lutte pour la survie, ainsi

qu'en t?moigne l'?volution des ?coles russes dans la majorit? des pays de la dias

pora. En 1932, la collecte du ? vendredi je?n? ? ne rapporta que 30 000 francs, contre plus de 100 000 l'ann?e pr?c?dente34. Cette m?me ann?e 1932, le comit?

directeur du Zemgor informa la Soci?t? des Nations de la situation critique de

nombreux ?tablissements, en particulier de l'orphelinat de Montmorency

(50 enfants) et de l'universit? populaire. Il sollicita ?galement une aide pour 175

enfants de ch?meurs, des bourses d'?tudes pour 150 personnes en cours de forma

tion professionnelle. En Allemagne, un soutien ?tait demand? pour la cantine des

30. GARF,f.R5912,op. l,d. 214,1. 10.

31. GARF,f.R5785,op. l,d. 70,1. 157.

32. D'apr?s le bulletin du Zemgor (n? 59,1929) 269 adultes y pr?paraient encore leur baccalau

r?at en 1929.GARF,f. 5785,op. 2,d. 50,1. 31.

33. Vozrozdenie, 6 janvier 1929.

34. GARF,f. R 6094,op. l,d. 27,1. 87.

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LE SOUTIEN DU ZEMGOR AUX ?COLES DE LA DIASPORA 841

enfants de Berlin (80 ?l?ves). En Estonie, l'urgence ?tait de sauvegarder le lyc?e russe de Narva (200 ?l?ves), le jardin d'enfants (70 enfants), l'orphelinat (30

enfants), l'h?pital pour enfants. En Pologne, les besoins ?taient surtout pressants

pour le pensionnat russe de Wilno (30 ?l?ves), en Lettonie, pour le pensionnat russe

de Riga (28 enfants). Le Zemgor demanda 50 000 francs pour assurer le fonctionne

ment de l'ann?e scolaire 1932-1933, il en re?ut 32 65035.

Corps enseignant et orientation p?dagogique

Jusqu'ici, il a ?t? peu fait mention du corps enseignant, tr?s mal r?mun?r?, mais qui se d?pensa sans compter au service de l'?ducation. Selon les propos de l'un des

p?dagogues, cette activit? ?tait le plus souvent consid?r?e comme une ? t?che

nationale ? (sluzenje nacional'nomu russkomu delu)36. Outre l'enseignement

proprement dit, il convient de rappeler la contribution d'?minents professeurs ?

l'encadrement du r?seau scolaire ? travers l'animation de comit?s et unions ad hoc, ainsi que leur r?le dans l'?laboration de nouveaux manuels par la suite diffus?s dans

l'ensemble des pays de la diaspora37. Les travaux collectifs effectu?s lors des diff?

rents congr?s de p?dagogues se concentr?rent en priorit? sur les moyens de contrer

la d?nationalisation des enfants. Comme le soulignait le premier bulletin du lyc?e russe de Prague, ? bien que nous soyons ? l'?tranger, nous sommes tous les enfants

d'une seule patrie ?38. Le contenu de cette ?ducation ? nationale ? fut l'objet des

travaux de la conf?rence de 1924 ? laquelle particip?rent, entre autres, V. V. Rudnev, les professeurs D. M. Sokol'cev, A. P. Anciferov, P. E. Butenko,

V. A. Mjakotin, D.M. Odinec et la comtesse Panin. Cette conf?rence souligna la

n?cessit? de renforcer l'enseignement des disciplines russes, d'organiser des camps de vacances l'?t? et, de mani?re plus g?n?rale, des activit?s culturelles parasco laires. Ces travaux furent poursuivis lors des congr?s de 1927 et 1928.

Dans le cours des ann?es 1920, la nouvelle g?n?ration d'enfants n?s en exil ne

connaissait rien de la Russie. Le responsable du lyc?e de Chumen, A.A. Dehtjarev, avait men? une enqu?te aupr?s de 40 ?l?ves n?s en Bulgarie. ? la question de savoir

ce qu'ils connaissaient de la Russie, l'un d'entre eux r?pondit : ? on m'a racont?

des choses sur la Russie, mais j'ai oubli? ?39. Bien que de nombreux parents aient

t?t perdu tout espoir de retour dans la patrie, ils restaient convaincus de la n?cessit?

d'?duquer leurs enfants dans leur culture d'origine. Mais avec la r?duction des

35.GARF,f.R6094,op. l,d.27,1.26.

36. GARF,f.R5785,op. l,d. 30,1.34.

37. Parmi les p?dagogues les plus impliqu?s dans cette t?che, il convient de citer les professeurs D. M. SokoLcev, I.M.Malinin, V.D.Pletnev, N. M.Mogiljanskij, V. V.Zen'kovskij, I.A. Bazanov, E. P. Kovalevskij, G. V. Vernadskij et A. L. Bem.

38. GARF,f.R5809,op. l,d. 235,1. 1.

39. GARF,f.R5785,op. 2,d. 29,1. 1.

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842 LIDIJA I. PETRUSEVA

ressources et la fermeture progressive des ?coles, r?pondre ? cette demande suppo sait de nouvelles initiatives, de nouvelles m?thodes.

C'est ainsi que furent con?ues la Journ?e de la culture russe et la Journ?e de

l'enfant russe, nouvelles f?tes communes ? toute l'?migration qui eurent un impact ind?niable sur la jeunesse. Le comit? du Zemgor prit une part active ? l'organisa tion de ces f?tes annuelles en collaboration avec les enseignants. La premi?re c?l?

bration de la Journ?e de la Culture russe se d?roula ? Prague en 1925, ? l'initiative

du Zemgor de Prague et de l'ensemble des organisations acad?miques et p?dagogi

ques. Par la suite, cette manifestation allait se d?rouler dans de nombreux pays de la

diaspora. Les Journ?es de la culture russe firent l'objet de manifestations particu li?res dans les ?tablissements scolaires de l'?migration. Les responsables du lyc?e de Trebova en Moravie le soulignaient, ? la journ?e de la culture russe est une f?te

o? l'?cole occupe le premier rang, en tant que garant de la sauvegarde et du rayon nement de la culture ?40.

L'id?e de promouvoir la Journ?e de l'enfant russe apparut ?galement ? Prague :

? si chaque Russe, qu'il ait ou non des enfants, ne se sent pas responsable du

destin de tous les enfants russes en ?migration, alors [...] ces'enfants, dans leur

grande majorit?, cesseront d'exister comme Russes, ils s'int?greront in?lucta

blement dans les milieux ?trangers ?41,

soulignait l'un des organisateurs de cette f?te initi?e par le Bureau p?dagogique, le

Zemgor, l'Union des villes et le groupe acad?mique. Les b?n?fices de cette mani

festation ?taient d'abord attribu?s aux lyc?es, puis aux multiples initiatives para scolaires destin?es aux enfants scolaris?s dans les ?coles nationales (organisations

de scouts, cours hebdomadaires de russe, ?coles du dimanche, etc.).

Jusqu'? la Seconde Guerre mondiale, les Journ?es de la culture russe et de

l'enfant se d?roul?rent dans pratiquement tous les pays de la diaspora, y compris en

Chine et aux ?tats-Unis. La Journ?e de l'enfance est toujours c?l?br?e ? San Fran

cisco42. D'autres initiatives m?ritent d'?tre mentionn?es, telle l'organisation du

Foyer des amis de la culture russe par S. Stern ou encore la cr?ation ? Paris en

d?cembre 1926 du th??tre ? Detskaja lira ? sous la direction de l'artiste V. Tsapp

Kanevskij et de la ballerine A. Smolenska.

Fait assez remarquable, le soutien apport? ? l'?ducation des enfants rassembla

des cercles d'horizons tr?s divers. Ainsi le Comit? de tutelle des enfants russes cr??

en France sous la pr?sidence du diplomate et repr?sentant du Conseil des ambassa

deurs, M. N. Giers, ?tait anim? par des responsables paroissiaux, des repr?sentants de la Croix-Rouge russe, du Zemgor, de l'Union des officiers russes, du groupe

acad?mique, etc. Vingt organisations ?taient ainsi repr?sent?es dans ce comit?,

soulignant s'il en ?tait besoin, l'importante mobilisation des diff?rents acteurs de

l'?migration en faveur de l'?ducation des jeunes g?n?rations.

40.GARF,f.R5785,op. l,d. 10,1. 146.

41.GARF,f.R5851,op. l,d. 7,1. 82.

42. En 2004, il s'agissait de la 73e ?dition de cette manifestation.

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LE SOUTIEN DU ZEMGOR AUX ?COLES DE LA DIASPORA 843

En conclusion, et mieux que des donn?es statistiques sur les r?sultats de l'action

?ducative, ce sont les t?moignages des enfants eux-m?mes qui peuvent permettre

d'appr?cier l' uvre entreprise. Suite ? l'initiative prise en 1923-1924 de recueillir

leurs souvenirs depuis l'ann?e 1917, beaucoup d'?l?ves des ?coles russes firent part du caract?re, pour eux, salvateur de ces ?tablissements. Une ?l?ve du lyc?e de

Trebova ?crivait ainsi : ? En arrivant ? Constantinople, je suis tout de suite entr?e

au lyc?e et l? a commenc? une nouvelle vie, pleine d'espoir et de r?ves. Tout le

pass? n'?tait qu'un affreux cauchemar?43. Un autre ?l?ve du lyc?e de Chumen

concluait ses m?moires en affirmant : ? Maintenant, je sens que le lyc?e m'a donn?

beaucoup, beaucoup. Et je remercie chaleureusement et je remercierai toujours nos

chers enseignants ?44. Les citations pourraient ?tre multipli?es, mais toutes t?moi

gnent de la pleine conscience des ?l?ves face ? l'immense effort consenti par les

acteurs sociaux de l'exil pour transmettre l'h?ritage culturel et ?ducatif russes ?

ceux qui n'avaient surtout connu de leur pays qu'une terre ? feu et ? sang.

GARFMoscou

[email protected]

43. Detirusskojemigracii,M. : Terra, 1997,p. 10

44. Ibid., p. 383.

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