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Lhistoire géologique de la région du lac Bowker Rapport remis à lAssociation des propriétaires riverains du lac Bowker Bruno Landry, géomorphologue - 20141130 Introduction Le 28 septembre 2013, une vingtaine de membres de l’Association des propriétaires riverains du lac Bowker étaient réunis à l’Hôtel de ville du Canton de Magog pour assister à une conférence portant sur l’Héritage glaciaire du Québec. Au cours des échanges qui ont suivi l’activité, plusieurs riverains ont manifesté le désir d’en savoir davantage sur lhistoire géologique de la région du lac quils habitent. Le présent rapport vient répondre à cette demande. Ce document débute (point 1) par une courte présentation du principe sur lequel se fonde la plupart des études en géologie et géomorphologie. La région du lac Bowker étant comprise dans les Appalaches, un rappel de la formation de cette chaîne de montagnes est donc nécessaire, même si ce sujet complexe n’est pas facile à résumer en quelques lignes. Pour le rendre plus accessible, je me sers des figures du cours Planète Terre du regretté professeur Pierre-André Bourque de l’Université Laval. Létude des Appalaches est l’objet du point 2. Ensuite, quelques notions fondamentales ayant trait aux roches sont présentées en 3, suivies de la description de celles de la région du lac Bowker au point 4. Enfin, le point 5 renferme quelques commentaires à propos de la dernière glaciation et de lorigine du lac Bowker. Deux annexes de photographies viennent compléter et illustrer quelques-unes des notions présentées. 1. Le présent est la clé du passé En géologie et géomorphologie, on applique un principe mis de l’avant par le géologue anglais Charles Lyell (1797-1875). En 1830, il publie Principles of Geology 1 un ouvrage devenu, au fil du temps, fondamental pour les sciences de la Terre. Avec ce texte, Lyell convertit de nombreux naturalistes de son époque, y compris Charles Darwin, au principe des causes actuelles. Cette idée stipule que les processus naturels du passé sont analogues à ceux du présent. « Les anciens changements produits à la surface de la Terre sont dus à des causes analogues, quant à la nature et à l’intensité, à celles qui agissent de nos jours. » 1 L’ouvrage comptait 3 tomes. Le titre complet du tome 1 indique clairement qu’il ne s’agit pas d’un simple ouvrage de géologie: Principles of Geology, being an attempt to explain the former changes of the earth’s surface by reference to causes now in operation. En mai 1834, l’ouvrage au complet a été réédité en 4 tomes.

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L’histoire géologique de la région du lac Bowker Rapport remis à l’Association des propriétaires riverains du lac Bowker

Bruno Landry, géomorphologue - 20141130

Introduction Le 28 septembre 2013, une vingtaine de membres de l’Association des propriétaires riverains du lac Bowker étaient réunis à l’Hôtel de ville du Canton de Magog pour assister à une conférence portant sur l’Héritage glaciaire du Québec. Au cours des échanges qui ont suivi l’activité, plusieurs riverains ont manifesté le désir d’en savoir davantage sur l’histoire géologique de la région du lac qu’ils habitent. Le présent rapport vient répondre à cette demande. Ce document débute (point 1) par une courte présentation du principe sur lequel se fonde la plupart des études en géologie et géomorphologie. La région du lac Bowker étant comprise dans les Appalaches, un rappel de la formation de cette chaîne de montagnes est donc nécessaire, même si ce sujet complexe n’est pas facile à résumer en quelques lignes. Pour le rendre plus accessible, je me sers des figures du cours Planète Terre du regretté professeur Pierre-André Bourque de l’Université Laval. L’étude des Appalaches est l’objet du point 2. Ensuite, quelques notions fondamentales ayant trait aux roches sont présentées en 3, suivies de la description de celles de la région du lac Bowker au point 4. Enfin, le point 5 renferme quelques commentaires à propos de la dernière glaciation et de l’origine du lac Bowker. Deux annexes de photographies viennent compléter et illustrer quelques-unes des notions présentées.

1. Le présent est la clé du passé En géologie et géomorphologie, on applique un principe mis de l’avant par le géologue anglais Charles Lyell (1797-1875). En 1830, il publie Principles of Geology1 un ouvrage devenu, au fil du temps, fondamental pour les sciences de la Terre. Avec ce texte, Lyell convertit de nombreux naturalistes de son époque, y compris Charles Darwin, au principe des causes actuelles. Cette idée stipule que les processus naturels du passé sont analogues à ceux du présent.

« Les anciens changements produits à la surface de la Terre sont dus à des causes analogues, quant à la nature et à l’intensité, à celles qui agissent de nos jours. »

1 L’ouvrage comptait 3 tomes. Le titre complet du tome 1 indique clairement qu’il ne s’agit pas d’un

simple ouvrage de géologie: Principles of Geology, being an attempt to explain the former changes of the earth’s surface by reference to causes now in operation. En mai 1834, l’ouvrage au complet a été réédité en 4 tomes.

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De plus, à l’encontre de nombreux scientifiques de son époque, y compris le célèbre physicien Lord Kelvin, Lyell prône l’idée que la Terre n’est pas issue d’une catastrophe ancienne ou d’une naissance récente et rapide. Par ses calculs Kelvin, qui a dominé de son prestige la science anglaise des dernières décennies du XIXe siècle, arrivait à une Terre qui n’avait pas plus que 100 Ma2, et même 25 Ma à la fin de sa vie. Cependant, au début du XXe siècle, une découverte majeure, celle de la radioactivité et son application à la datation des roches, allait bousculer les idées reçues et donner raison aux naturalistes, dont Darwin, qui prônait un âge beaucoup plus ancien3. Convaincu de l’idée d’évolution, Darwin estimait que des centaines de millions d’années étaient nécessaires pour que des organismes supérieurs prennent place éventuellement. Depuis, l’âge de la Terre a été calculé : 4,568 ± 0,002 Ga. Au fil du temps, l’uniformitarisme ou actualisme s’est imposé dans la communauté géologique au point de devenir pratiquement un dogme. Ce concept, Lyell l’a résumé par l’expression « the present is the key for the past » (le présent est la clé du passé). Depuis la fin des années soixante, la tectonique des plaques est devenu le nouveau paradigme sur lequel se fonde désormais pratiquement toutes les études géologiques. La théorie des plaques tectoniques considère que l’enveloppe solide externe de la Terre, la lithosphère, est fracturée en un certain nombre d’entités de grandeurs variables. Ces grandes calottes sphériques, porteuses des continents et des océans, qui bougent les unes par rapport aux autres, sont les plaques. On dit des plaques qu’elles forment une mosaïque d’unités cinématiques (fig. 1). La grande richesse de la théorie des plaques tectoniques tient au fait que mise au point à partir d’observations contemporaines, elle peut également s’appliquer aux processus géologiques du passé, cela en droite ligne avec la pensée de Lyell. Nous allons donc y faire appel pour expliquer l’origine des Appalaches.

2 L’écriture du temps géologique suit les règles du Système international d’unités. Le symbole a est pour

années, k pour kilo, M pour Méga et G pour Giga. Ainsi, ka = mille années; Ma = million d’années; Ga = milliard d’années.

3 Les premières datations obtenues sur des roches ont été réalisées par Ernest Rutherford (1871-1937) et

Frederick Soddy (1877-1956) qui oeuvraient à l’Université McGill. Ils ont daté des roches de 500 Ma.

Rutherford a présenté ses résultats en mai 1904, à l’Institut Royal de Londres, devant 800 personnes y

compris le célèbre Kelvin. Celui-ci est décédé en 1907.

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a) Lieux où surviennent la très grande majorité des séismes sur la Terre. Ces endroits correspondent aux limites ou frontières des différentes plaques tectoniques (http://www.lyceedadultes.fr/sitepedagogique/documents/SVT/SVT1S/12_La_lithosph%E8re_et_la_tectonique_des_plaques.pdf).

b) Les principales plaques tectoniques délimitées à partir de l’emplacement des séismes (http://www2.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/intro.pt/planete_terre.htmlurce). Figure 1

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2. Les Appalaches Les Appalaches forment une chaîne de montagnes qui s’étend de l’Alabama, dans le sud des États-Unis, jusqu’à Terre-Neuve, à l’extrême est du Canada. Soulignons que cette grande chaîne trouve son équivalent de l’autre côté de l’Atlantique, depuis l’Irlande jusqu’à l’extrémité nord de la Norvège où elle porte le nom de Calédonides (voir à la fin de la section). L’histoire des Appalaches débute à la fin du Précambrien, il y a plus de 600 Ma, avec la naissance de l’Océan Iapétus. La formation de cette chaîne de montagnes va se poursuivre tout au long du Paléozoïque, une ère géologique qui couvre la période allant de 542 à 251 Ma et qui comprend le Cambrien, l’Ordovicien, le Silurien, le Dévonien, le Carbonifère et le Permien.

La tectonique des plaques nous apprend que les océans naissent, grandissent et meurent. On donne le nom de cycle de Wilson4 aux différentes étapes qui jalonnent la vie d’un océan.

L’Océan Iapétus s’est formé par la séparation de deux masses continentales : Laurentia et Baltica5. Cet océan s'ouvrait grâce à l'étalement des fonds océaniques à partir d'une dorsale. Laurentia comprenait le Bouclier canadien de l’époque. Baltica était formé des noyaux précambriens du nord de l’Europe, notamment de la Scandinavie. Au début du Cambrien, vers 540 Ma, Iapétus est un jeune océan. Sur son plateau continental, du côté de Laurentia, de grandes épaisseurs de sédiments s’accumulent suite à l’érosion des roches du Grenville, cette province géologique représentée notamment par les Laurentides, une chaîne vieille de plus d’un milliard d’années. Ces dépôts forment de nos jours l’épaisse séquence (plus de 1,5 km) de roches sédimentaires très peu déformées de la plate-forme du Saint-Laurent, et que l’on peut observer en de nombreux endroits sur l’île de Montréal6.

4 Le géophysicien canadien J. Tuzo Wilson est l’un des chercheurs qui ont élaboré le scénario expliquant

les déplacements des plaques sur une longue période de temps, et notamment le cycle de vie d’un océan.

5 Les figures qui accompagnent cette section, et qui ne sont pas numérotées, de même qu’une partie du

texte, sont tirées du cours Planète Terre que donnait le professeur Pierre-André Bourque du département de géologie et de génie géologique de la Faculté des sciences et de génie de l’Université Laval. On notera quelques différences de vocabulaire entre le texte et les figures. Le professeur Bourque est décédé lors d’un séjour au Maroc en 2006.

6 Entre autres, de part et d’autre de la voie qui donne accès au pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine,

au départ de Montréal.

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Parvenu à la seconde moitié d’un cycle de Wilson, l’Océan Iapétus commence à se resserrer dès l’Ordovicien, vers 500 Ma. Baltica, accompagné de morceaux de continents plus petits, dont un qui a été appelé le microcontinent Avalonia7, se rapproche de Laurentia. Dans ce contexte, une zone de subduction, soit l’enfoncement de la croûte océanique sous le rebord du continent, se met en place. En descendant dans le manteau supérieur, la plaque entre en fusion partielle et génère du volcanisme. À cause de la sphéricité des plaques qui se font face, les volcans sont disposés en forme d’arc. La ville de Sherbrooke est construite sur les roches volcaniques de l’arc insulaire. Ces dernières peuvent êtres suivies depuis Newport, au sud du lac Memphrémagog, jusqu’en Beauce.

7 Avalonia tire son nom de la péninsule d'Avalon à Terre-Neuve qui est formée par cet ancien

microcontinent.

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La collision de l’arc insulaire et d’un microcontinent (non montré sur la figure) celui des Chain Lakes, avec Laurentia, la masse continentale québécoise de l’époque, correspond à l’orogenèse taconique, la première phase de la construction des Appalaches8. Cette première chaîne de montagnes relativement étroite est représentée de nos jours par les

Green Mountains du Vermont, les monts Sutton (Estrie) et Notre-Dame (Beauce).

La ligne de Logan délimite, à l’ouest, les terrains bouleversés par les plissements appalachiens.

Une portion du fond océanique s’est trouvée pincée durant cette collision et est venue chevaucher le continent à l’ouest. Ainsi, les monts Orford et Ham en Estrie, les collines Belmina, Vimy et le mont Adstock à Thetford Mines, et le mont Albert dans le Parc de conservation de la Gaspésie sont des vestiges de la croûte de l’Océan Iapétus. Comme nous le verrons en 3, des roches de cette même croûte sont présentes dans la région du lac Bokkwer.

8 Le terme orogenèse désigne l’ensemble des processus à l’origine des orogènes, soit un système

montagneux édifié sur une portion de l’écorce terrestre

Ligne de Logan

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Ces mouvements tectoniques conduisent à la situation suivante: entre Laurentia et Avalonia, un bassin marin persiste, toujours rattaché à l'Océan Iapétus et qui, durant tout le Silurien et une grande partie du Dévonien, recevra les sédiments provenant de l'érosion de la jeune chaîne taconique, ainsi que des épanchements volcaniques provenant de fissures dans la croûte continentale nouvellement formée. Vers la fin du Silurien, il y a environ 420 Ma, ce qui reste de la chaîne des monts Sutton, Notre-Dame et de celle des monts Stokes (vestiges de l’arc insulaire) est entouré d’une mer peu profonde. À cette époque, les masses continentales en cause se situent entre les tropiques. Le climat chaud favorise la formation d’une barrière de récifs (coraux) autour des terres émergées et le dépôt de calcaires. En Estrie, on trouve ces roches dans le secteur du lac Memphrémagog et dans la région de Saint-Adolphe-de-Dudswell. De magnifiques coraux, vestiges de cette barrière, peuvent être observés sur un terrain privé en bordure du rang IV Ouest de Stoke. La fermeture progressive et finale d’Iapétus prend place au milieu du Dévonien, vers 390 Ma. Les sédiments, incluant la grande barrière de coraux, les roches volcaniques qui s'étaient déposés durant tout le Silurien et une grande partie du Dévonien ont été soulevés et déformés : c’est l’orogenèse acadienne, la seconde phase d’édification des Appalaches.

Au large d'Avalonia, un océan que les géologues ont appelé l'Océan Rhéïque se referme graduellement. La collision entre toutes les masses continentales, à la fin du Carbonifère donne naissance à la chaîne des Mauritanides (Mauritanie et Maroc), qu'on appelle aussi la chaîne hercynienne. Ces chaînes de montagnes (Appalaches et Mauritanides) se situent désormais à l'intérieur de ce qui est devenu le mégacontinent Pangée. C'est au Trias-Jurassique que la Pangée commence à se fragmenter. La fracture, qui a séparé l'Afrique de l'Amérique s'est faite dans les Mauritanides. Avec l'ouverture de l'Atlantique, des morceaux de ces Mauritanides ─ certains disent des morceaux du

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Maroc ─ sont restés accrochés à la masse continentale américaine (fig. 2). La Floride en est un exemple, ainsi que la demie sud de la Nouvelle-Écosse.

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Figure 2 Les Appalaches, les Mauritanides et les Calédonides, une seule et même chaîne de montagnes à l’intérieur de la Pangée (http://www2.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/intro.pt/planete_terre.html).

3. Les roches ou les archives de la Terre Par bien des aspects, la géologie est une science historique. Les matériaux qui renferment l’histoire de la Terre sont les roches. C’est particulièrement vrai en ce qui a trait aux organismes disparus et retrouvés sous forme de fossiles dans les roches sédimentaires. Les fossiles sont les témoins de l’évolution des espèces. Quant aux roches ignées, elles sont susceptibles de renfermer des minéraux, qui eux-mêmes sont porteurs d’éléments radioactifs, comme l’uranium, que l’on peut mettre à profit à des fins de datation. C’est notamment le cas des zircons de certains granites, un silicate de zirconium (ZrSiO4), susceptible de contenir des quantités variables de dioxyde d’uranium (UO2).

La classification des roches se fonde sur leur origine présumée. On reconnaît ainsi les roches ignées, sédimentaires et métamorphiques.

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Toutes les roches ignées sont du magma (i.e. de la roche fondue) refroidi et durci. Dans de nombreuses situations, le magma s’introduit dans les roches déjà en place (roches encaissantes) sans atteindre la surface. Il arrive que le magma s’infiltre dans des fissures et vienne les combler en donnant des structures en forme de lames. On obtient alors un dyke. En profondeur, le refroidissement se fait lentement et les réactions chimiques donnent naissance à des minéraux bien formés, visibles à l’œil nu ou à la loupe. Le granite est un bon exemple d’une roche intrusive profonde. Un granite renferme toujours du quartz, des feldspaths dits alcalins [à base de potassium (K) ou de sodium (Na)] et des minéraux dits ferromagnésiens, soit à base de fer et de magnésium. La biotite, un mica foncé, riche en fer, en est un exemple. Lorsque le magma atteint la surface, on a une roche volcanique. Ce sera une lave si le magma s’y répand sous la forme de coulées. Le basalte est un exemple de lave. Enfin, lorsque le magma est projeté dans l’atmosphère et se fragmente en différentes grosseurs avant de retomber au sol, il génère des roches volcanoclastiques. Quant aux roches sédimentaires, elles sont divisées en deux grands groupes, définis d’après la nature de la fraction qui dominait dans le dépôt : celles d’origine détritique et celles d’origine chimique et biochimique. Les grès, qui sont du sable durci, sont un bon exemple d’une roche sédimentaire détritique9. Il en est de même des conglomérats, des assemblages de fragments de la grosseur des graviers (> 2 mm). Quand aux calcaires et aux dolomies, ils résultent de la précipitation des carbonates dissous. Ce sont des roches chimiques.

Enfin, le métamorphisme concerne l’ensemble des transformations que subit un corps rocheux placé dans un contexte de pression et de température différent de celui qui régnait au moment de sa naissance. Au cours des transformations, les roches changent de structure (apparence) et acquièrent de nouveaux minéraux. Le terme protolite désigne la roche initiale ou roche-mère qui, par une série de changements physiques et chimiques devient une roche métamorphique. Par exemple, l’ardoise, une roche métamorphique, a pour protolite une roche argileuse, le shale. Les schistes, très communs dans les Appalaches et très diversifiés, sont de bons exemples de roches métamorphiques. Il en est de même des gneiss, largement répandus dans le Bouclier canadien. Précisons que deux éléments fondamentaux sont à retenir en ce qui concerne le métamorphisme : ─ les roches qui subissent les transformations minéralogiques et structurales demeurent à l’état solide;

9 Les sables sont des grains détritiques qui ont une taille comprise entre 62,5 µm et 2 mm.

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─ pour l’essentiel, le métamorphisme est un procédé isochimique, c’est-à-dire que les transformations prennent place sans addition ni soustraction des constituants du protolite. Ainsi, un marbre a la même composition chimique que le calcaire d’origine. En complément à ce survol des trois familles de roches on trouvera, en annexe A, quelques photographies qui en illustrent différents aspects. La majorité des exemples retenus sont du territoire québécois.

4. Description des roches de la région du lac Bowker

La carte de Lac Brompton, à l’échelle 1:20 000, couvre le territoire sous étude. Quatre principaux types de roches constituent l’environnement immédiat du lac Bowker : (1)

wacke quartzofeldspathique interlité de phyllade noir ; (2) ardoise et phyllade; (3) basalte massif et coussiné; (4) ophiolites plus ou moins serpentinisées. Au SE du lac Bowker, on trouve deux autres types de roche que nous allons aussi décrire : (5) tuf rhyolitique gris pâle, laminé; (6) Granite à mica et diorite quartzifère. Toutes ces roches sont disposées selon une orientation NE-SO typique du style structural appalachien. Voyons de plus près ce qu’il en est. 1. Wacke quartzofeldspathique interlité de phyllade noir Un wacke est une roche sédimentaire détritique, ce qui signifie qu’il est formé principalement d’éléments transportés et déposés à l’état de grains solides. Plus précisément, le terme wacke désigne un grès à matrice argileuse (au moins 10 % de la roche). Dans le cas présent, le quartz et des feldspaths (quartzofeldspathique) forment l’essentiel du reste de la roche. Le wacke est interlité de phyllade noir, une roche métamorphique. Le phyllade (comme dans pâte phyllo) est une roche à surface lustrée, riche en micas et en chlorite (un minéral vert), formée à partir d’un protolite argileux (shale). La figure 3 montre un affleurement de ces roches, visible le long du chemin du Dépôt. Quant à la carte géologique de la figure 4, elle montre que le lac Bowker et le lac Lemay logent dans cette unité, la plus commune du territoire sous étude. 2. Ardoise et phyllade Ces roches constituent une bande étroite qui traverse la petite baie non identifiée et qui se trouve à l’extrémité sud-est du lac Bowker. Alors que l’ardoise constitue le premier stade de transformation d’un protolite argileux (shale), un phyllade en est le stade suivant. Dans le cas de l’ardoise, les minéraux sont trop fins pour être visibles à l’œil nu. La plupart des ardoises peuvent se briser en minces plaquettes.

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Figure 3 Affleurement de wacke et de phyllade le long du chemin du Dépôt. (Photographie : Bruno Landry.) 3. Basalte massif et coussiné Le basalte est la roche ignée effusive (lave) la plus abondante sur Terre. Dans le cas présent, il est dit massif et coussiné. Les laves en coussins (pillow lava) sont le principal corps rocheux à faire partie des coulées sous-aquatiques. Ces roches se forment non seulement en milieu océanique profond, mais également lorsque de la lave arrive dans des mers intérieures, des lacs ou des rivières. Les coussins sont délimités par une carapace externe vitreuse, résultat du refroidissement rapide de la lave lors de son arrivée dans l’eau. Le développement précoce de cette carapace entrave le développement d’une coulée massive et favorise la naissance de multiples structures, qui s’empilent les unes sur les autres et susceptibles de prendre de multiples formes : amoncellements bulbeux presque sphériques, tubes allongés, sacs aplatis, lobes divers, etc. Le diamètre des coussins est variable : quelques dizaines de centimètres à plusieurs mètres, et ils montrent souvent un cœur cristallin qui renferme des structures radiales. L’intérieur des gros coussins peut être entièrement cristallisé. Le peu de temps passé sur le terrain n’a pas rendu possible l’observation de telles structures dans l’environnement immédiat du lac Bowker. En Estrie, l’affleurement le plus spectaculaire de telles roches peut être visité le long du chemin du Barrage Allard en direction du mont Adstock (fig. 5).

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Figure 4 Carte géologique de la région du lac Bowker (MRNF, 2009).

Wacke

quartzofeldspathique

interlité de phyllade

noir (O bro2)

Basalte

massif et

coussiné

(O mor4)

(

Ophiolites ±

serpentinisées

(Omor1)

Granite à biotite,

diorite quartzifère

(11Ba)

Tuf rhyolitique gris

pâle, laminé (O bro4)

Ardoise ou

phyllade

souvent lité

(O sda)

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Figure 5 Magnifiques laves en coussins qui affleurent le long du chemin du Barrage Allard, à environ deux kilomètres avant son intersection avec la route 267, laquelle va de Thetford Mines à Saint-Daniel. (Photographie : Annie-Chantal Guibord.)

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4. Ophiolites plus ou moins serpentinisées Les ophiolites constituent en un assemblage de roches dites mafiques et ultramafiques. Ces deux derniers qualificatifs renvoient à une nomenclature largement utilisée pour préciser un aspect particulier de la nature chimique des roches ignées, à savoir leur teneur totale en silice (SiO2). Le tableau 1 résume ce qu’il en est de cette nomenclature. Tableau 1 La teneur en silice, SiO2, est un critère de distinction des roches ignées.

% de SiO2 Nature de la roche

> 65 Felsique

52 - 65 Intermédiaire

45 - 52 Mafique

< 45 Ultramafique

Même s’il faut faire preuve de prudence en cette matière, la teneur en silice des roches ignées influe sur leur couleur. Les roches felsiques, tels le granite et son équivalent effusif la rhyolite, sont généralement de couleur pâle parce que riches en silice. Au contraire, davantage riches en fer et en magnésium, les roches mafiques et ultramafiques sont habituellement foncées. C’est le cas du gabbro et de son équivalent effusif, le basalte. Où trouve-t-on des ophiolites récentes de nos jours ? Essentiellement au niveau des dorsales océaniques. C’est dire que les ophiolites, qui affleurent à la pointe sud du lac Bowker, et qui forment une large bande du côté sud-est englobant les lacs Stukeley, Bran de Scie et Simoneau, constituent une portion de la croûte océanique de l’Océan Iapétus. Dans les Appalaches, le cortège d’ophiolitiques occupe une zone structurale étroite appelée ligne Brompton-Baie Verte. Alors que la première localité est un village de l’Estrie, la seconde est un village situé sur la côte nord-est de Terre-Neuve. Cette ligne marque la suture entre la croûte continentale nord-américaine et une ancienne croûte océanique. Plus précisément, elle démarque des roches déposées originellement sur le talus et le glacis continental de l’Océan Iapétus, et des lambeaux de la croûte océanique. Dans le cas présent, l’assemblage ophiolitique est dit serpentinisée. Certains minéraux ferromagnésiens des roches qui forment le cortège d’ophiolites, notamment l’olivine, se

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transforment en serpentine10. La serpentinisation est ainsi une forme de métamorphisme qui se traduit par la présence, dans la roche, de minéraux fibreux comme le chrysotile11. En quelques endroits en Estrie, les roches des complexes ophiolithiques ont été exploitées pour la production de pierre ornementale. Dans le secteur du lac Bowker en particulier, la serpentine carbonatée du Complexe ophiolitique d'Orford - Chagnon – Baldface a été exploitée à partir des années 194012 (fig. 6). Elle possède des couleurs changeantes allant du vert pâle au vert foncé, souvent traversée de veinules blanches de calcite ou de veinules rouges ondulantes. Le lac de la Mine occuperait les lieux de cette ancienne exploitation.

Figure 6 Front de taille exploité dans les années 1940 au lac Bowker. (Photographie extraite d’un site internet maintenant retiré du ministère des Ressources naturelles.) 5. Tuf rhyolitique gris pâle, laminé On a affaire ici à une roche ignée. Le tuf (du grec tophos, sorte de pierre friable) est une roche volcanoclastique. Les fragments de magma peuvent être des cendres (< 2mm) ou des lapillis (entre 2 et 64 mm). Dans le cas présent, le tuf est dit rhyolitique. Il a donc la composition d’une rhyolite, une lave généralement de couleur pâle, qui a sensiblement la même composition chimique que le granite, riche en quartz et en feldspaths.

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Il faut savoir qu’à l’origine, le mot ophiolite fut synonyme de serpentine. D’ailleurs, ophiolite vient du grec ophis, serpent, à cause de l’aspect de la roche qui rappelle la peau de ces reptiles.

11 L’unique forme fibreuse de serpentine est le chrysotile ou amiante blanc. Ce minéral est un silicate de

magnésium, de formule chimique générale Mg3Si2O5(OH)4. À l’échelle atomique, le chrysotile a la forme d’une feuille roulée, épaisse de 0,8 nanomètre. De par cette structure feuilletée, on définit ce minéral comme un phyllosilicate de magnésium.

12 Information tirée d’un site internet maintenant retiré du ministère des Ressources naturelles.

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6. Granite à biotite et diorite quartzifère Le granite et la diorite sont deux roches ignées intrusives. Comme on l’a appris ci-haut, un granite renferme toujours du quartz, des feldspaths et des minéraux dits ferromagnésiens, soit à base de fer et de magnésium. Quant à la diorite, elle renferme peu ou pas de quartz, sauf exception comme ici. Pour le reste, la roche est principalement composée de feldspaths plagioclases, c’est-à-dire à base de sodium ou de calcium.

5. La dernière glaciation Il y a aussi peu que 20 ka, tout le nord-est de l’Amérique du Nord était encore recouvert d’une immense calotte de glace. On donne le nom d’inlandsis à un glacier d’envergure continentale et d’une taille qui dépasse 50 000 km2. Actuellement, sur Terre, il reste deux glaciers de cette nature, celui qui coiffe le Groenland et celui qui recouvre l’Antarctique. Avec plus de 12 millions de kilomètres carrés, ce dernier est tout à fait semblable à celui qui occupait le territoire nord-américain et que l’on a nommé l’Inlandsis laurentidien (fig. 7). En certains endroits de l’Antarctique, l’épaisseur de la glace dépasse 4 km. Il devait en être ainsi pour quelques secteurs du glacier laurentidien. Ici encore, le présent est la clé du passé.

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Figure 7 Territoire occupé par le dernier grand glacier nord-américain, l’Inlandsis laurentidien (Landry et coll., 2012). La péninsule de Cape Cod, bien connue des Québécois, constitue une moraine terminale qui marque la position la plus avancée de l’Inlandsis sur la côte est des États-Unis (fig. 8). On peut y observer de nombreux blocs erratiques et de magnifiques exemples de kettles ou marmites, soit des dépressions d’origine glaciaire, notamment au camping du Nickerson State Park un des mieux aménagés des États-Unis.

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Figure 8 La péninsule de Cape Cod, dans le Massachusetts aux États-Unis, est une moraine terminale. Le terme moraine s’applique à une accumulation de matériel rocheux de toute nature au front d’un glacier, et en quantité suffisante pour donner un relief reconnaissable. À noter la présence de nombreux petits lacs, en particulier dans le triangle formé par Brewster, Chatham et Harwich. Ces plans d’eau occupent des dépressions (kettles) qui résultent de la fonte tardive de blocs de glace enfouis sous des sédiments.

Ainsi, à l’échelle des temps géologiques, le Québec sort tout juste d’un âge glaciaire. De nombreux faits, observables partout sur le territoire, en témoignent.

D’une part, on recense des marques d’érosion qui vont des stries millimétriques inscrites sur les affleurements rocheux jusqu’aux vallées en U de plusieurs kilomètres de longueur. D’autre part, on y retrouve des sédiments de nature très diverse, certains déposés au moment de la glaciation, d’autres lors des épisodes de fonte du glacier et d’autres dans les lacs et les mers qui ont suivi la période froide du Pléistocène. La figure 9 montre des stries glaciaires observables sur le flanc NO de l’île présente au SE du lac Bowker. Cette île est essentiellement un grand affleurement rocheux. Une recherche en surface n’a pas permis d’observer d’autres marques d’érosion glaciaire. Celles de la figure 9, visibles au niveau de l’eau, montre un écoulement glaciaire vers le

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SE. Une telle direction est conforme à ce que l’on peut mesurer en de nombreux autres endroits en Estrie. De plus, on constate qu’il s’agit d’un mouvement en quelque sorte perpendiculaire au grand axe du lac, lequel est NE-SO. Il est donc hasardeux d’attribuer une origine glaciaire à ce plan d’eau. Son orientation, subparallèle aux diverses formations rocheuses, fait en sorte qu’il est davantage plausible de lui attribuer une origine tectonique, reliée principalement à la structure majeure que constitue la ligne Brompton-Baie Verte. En complément, l’annexe B présente quelques éléments qui témoignent de l’héritage glaciaire du Québec.

Figure 9 Stries glaciaires visibles au niveau de l’eau et conservées sur le flanc NO de la seule île que compte le lac Bowker. (Photographie : Rock Tessier.)

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Références Ministère des Richesses naturelles et de la Faune 2009 : Compilation géologique – Lac Brompton. Carte 31H08-200-0202, à l’échelle 1/20 000. Pour les notions de géologie générale et pour en savoir davantage :

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Annexe A Les roches A.1 Les roches sédimentaires Grâce aux fossiles qu’elles renferment, les roches sédimentaires sont de véritables archives de l’évolution de la vie sur Terre. Celles de la plate-forme du Saint-Laurent, fournissent un cortège impressionnant de fossiles du Paléozoïque. Les trésors de l’île d’Anticosti sont particulièrement spectaculaires. Le Musée de Paléontologie et de l’Évolution a hérité de la collection d’Allen Petryk, géologue au ministère des Ressources naturelles du Québec et décédé en 2008. Allen a recueilli les spécimens pendant les années 1970-1980. On peut admirer ces fossiles sur le site du Musée. Je vous mets le lien. J’en ai tiré la figure 3 de cette annexe. Mais d’abord, voyons deux exemples de roches sédimentaires. http://www.mpe-fossiles.org/

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Figure 1 Les roches sédimentaires sont disposées en strates. Ici, superposition de lits de calcaire (pâle), une roche d’origine chimique, et de shale (foncé), d’origine détritique, en position horizontale. Une roche détritique est formée à partir de fragments transportés et déposés à l’état solide. Le calcaire est une roche carbonatée, formé principalement de calcite, CaCO3, alors que le shale est de l’argile indurée. Carrière Demix, Montréal-Est. (Photographie : Jean Beaulieu, dans Landry et coll., 2012.)

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Figure 2 Un conglomérat, une roche sédimentaire détritique, formée de débris de roches et de minéraux, dont plus de 50 % des grains ont une taille supérieure à 2 mm (classe granulométrique des graviers). Ici, la roche renferme des blocs (> 256 mm) bien arrondis et de nature variée, ce qui donne un conglomérat polygénique. Affleurement le long du rang IV Ouest, municipalité de Stoke. (Photographie : Bruno Landry.)

Un bloc de granite,

bien arrondi.

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Figure 3 Un trilobite (Diacalymene sp.) du Silurien inférieur (443,7 – 416,0 Ma), île d’Anticosti. Arthropode au corps en trois lobes : médian (rachis) et latéraux (pleuraux). Les trilobites ont occupé les mers du Paléozoïque à partir du Cambrien jusqu’à leur extinction au Permien, il y a 251 Ma (Site internet du Musée de Paléontologie et de l’Évolution).

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Figure 4 Des stromatolithes, structures lamellaires fréquemment en boules comme ici ou en colonnes. Ce sont les plus anciennes constructions terrestres qu’il est possible de rattacher à une activité biologique. Elles sont l’œuvre de cyanobactries. Affleurement le long de la rivière des Outaouais, à Gatineau secteur Aylmer, quelques dizaines de mètres à droite sous le pont Champlain, accessible en période d’étiage. (Photographie : Annie-Chantal Guibord.) Le parc national de Miguasha, en Gaspésie, est un site mondialement reconnu pour ses poissons fossiles du Dévonien. En voici deux exemples en complément des quelques fossiles des roches sédimentaires du Québec.

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Figure 5 Le parc national de Miguasha, en Gaspésie, est un site paléontologique de renommée mondiale. Il recèle des poissons, des invertébrés et des plantes fossiles. Les premières fouilles paléontologiques y datent de 1880. Jusqu’à présent, 20 000 spécimens de poissons fossilisés y ont été retrouvés. Ceux-ci appartiennent à une vingtaine d’espèces différentes. La photo est celle d’un Eusthenopteron foordi, un célèbre sarcoptérygien de l’endroit particulièrement bien conservé. On jurerait un poisson frais !! (Photographie : Johanne Kerr, parc national de Miguasha, dans Landry et coll., 2012.)

Figure 6 Le dernier trésor de Miguasha. Spécimen complet de l’Elpistostege watsoni véritable chaînon manquant qui témoigne de l’évolution des vertébrés et de leur passage de l’eau à la terre. Fossile unique au monde âgé de 380 millions d’années ! (Photographie : Johanne Kerr, parc national de Miguasha, comm. pers., 2014.)

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Figure 7 La structure enroulée est une ammonite. On peut l’observer sur une colonne de la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du Québec, édifiée au début du XXe siècle sur la Colline du parlement à Québec. Le parement des colonnes est en marbre d’Italie et les murs lambrissés en marbre de Belgique. La roche qui contient ce fossile est le marbre Rosso Verona, d’âge jurassique (environ 150 Ma). La Première Guerre mondiale ayant retardé la livraison des pierres, la finition intérieure n’a été complétée qu’en 1921 et 1922, alors que la construction avait débuté en 1910. L’intérieur de cet édifice est splendide, une visite s’impose. Et ne manquez pas l’ammonite, venue directement d’Italie pour notre plus grand plaisir !! Suffit de trouver la colonne !! (Photographie : Bruno Landry.)

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A.2 Les roches ignées

Les roches ignées présentent divers modes de structures et de mise en place. En voici quelques exemples.

Figure 8 Un dyke, une structure en forme de lame. Ici, un petit dyke de monzonite à néphéline, déchaussé, logé dans le calcaire de Trenton et décalé par une faille, visible à droite du marteau. Au nord du parc Jeanne-Mance, en bordure du mont Royal, sur Avenue du Parc, à Montréal. (Photographie : Julien Landry-Cloutier.)

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Figure 9 Colonnes de basalte (tholéiite quartzifère) à Southwest Head, sur l’île de Grand Manan au Nouveau-Brunswick. En se refroidissant, il arrive que le basalte se débite en colonnes de tailles et de formes diverses. Ces roches ont été datées à 201 Ma. (Photographie : J. Gregory McHone, dans Landry et coll., 2012.)

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Figure 10 Débit en colonnes. La Chaussée des Géants, comté d’Antrim, en Irlande du Nord. Les basaltes du plateau d’Antrim couvrent environ 3800 km2. L’activité volcanique date de 50 à 60 Ma. L’endroit, et une partie de la côte, font partie des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1986. (Photographie : Charles Aufort, dans Landry et coll., 2012.)

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Figure 11 Une bombe volcanique provenant du Puy de Vivanson (puy = volcan) dans le Département du Puy-de-Dôme, en Auvergne. La bombe trône dans le hall d’accueil du département d’IUT Génie civil (Institut universitaire de technologie) d’Égletons, en Haute Corrèze, France. (Photographie : Bruno Landry.)

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Figure 12 Photographie depuis l’Espace, prise le 18 avril 2007, de trois collines montérégiennes. De l’ouest à l’est, les monts Saint-Hilaire, Rougemont et Yamaska. Les trois sommets sont encore enneigés. La tache blanche sur le mont Saint-Hilaire est le lac Hertel englacé. À l’ouest de ce mont, la ville de Beloeil que traverse la rivière Richelieu. À l’est du mont Rougement, on distingue nettement la rivière Yamaska, qui coule vers le nord, où elle rejoint la rivière Noire, qui arrive du sud-est. Rappelons que ces collines sont des intrusions mises en place sous la surface qui prévalait au Crétacé. Depuis, l’érosion différentielle a dégagé ces masses, plus résistantes que les roches sédimentaires qu’elles ont envahies. (Photographie : International Space Station Crew Earth Observations experiment and the Image Science & Analysis Laboratory, Johnson Space Center, dans Landry et coll., 2012.)

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Annexe B Quelques exemples de l’héritage glaciaire du Québec

Figure 1 Des stries glaciaires bien conservées sur un grand affleurement en bordure du boulevard Monseigneur-Fortier à Sherbrooke. En sortant du Plateau Saint-Joseph, tournez à droite, l’affleurement est à une dizaine mètres à gauche. (Photographie : Bruno Landry.)

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Figure 2 Un des plus gros blocs erratiques sur la rive sud du Saint-Laurent. Sur un terrain privé, dans la municipalité de Stoke, environ 1 km au sud du rang VI Ouest. Le caillou n’est pas visible de la route. (Photographie : Bruno Landry.)

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Figure 3 Un glacier actif laisse au sol un sédiment compact, mal trié et pouvant renfermer de gros blocs (à gauche de la pelle). Un tel sédiment est un till, très commun sur le territoire québécois. Ici, le Till de la Chaudière, sur les bords de la rivière Ascot, près de Johnville. Un till est un mélange de débris rocheux de toutes tailles déposés directement par un glacier sans intervention majeure des eaux de fonte. Le till est donc un sédiment dépourvu de tri par les eaux de fonte. (Photographie : Bruno Landry.)

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Figure 4 Bloc de calcaire dolomitique à stromatolithes (lamelles en colonnes) conservé au Jardin géologique de l’Université Laval (situé entre les pavillons Pouliot et Vachon). Au total, trois blocs de même nature qui proviennent d’un champ de blocs erratiques qui se trouve dans la Réserve faunique des Laurentides, secteur de Laterrière, ont été offerts à l’Université par monsieur Jean-Guy Belley, de Saguenay. Les blocs, d’âge protérozoïque, proviendraient de la région du lac Albanel. Ils ont donc été transportés sur plusieurs centaines de kilomètres. Informations fournies par André Lévesque, conservateur du Musée de géologie René-Bureau de l’Université Laval, comm. pers., 2011. (Photographie : Annie-Chantal Guibord dans Landry et coll., 2012.)

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Figure 5 Squelette de béluga découvert en 2001, à Saint-Félix-de-Valois, et prêté par la Société de paléontologie du Québec au Biodôme de Montréal. Le fossile a été exhumé des sédiments de la Mer de Champlain. Rappelons que cette mer postglaciaire inondait les terres basses de la plaine du Saint-Laurent en amont de Québec jusque vers le sud-est ontarien entre 13 et 10 ka. Cette grande mer épicontinentale dessinait un triangle dont les sommets étaient la ville de Québec, le lac Champlain au sud et les régions de Cornwall et d’Ottawa à l’ouest pour une superficie estimée à 55 000 km2. Au maximum marin, le mont Royal était un ilôt. La rue Sherbrooke à Montréal est aménagée sur une terrasse de la Mer de Champlain. (Photographie : Claude Lafond.)

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Figure 6 Un esker. Les eskers sont relativement communs sur les territoires autrefois englacés. Ce sont des crêtes allongées, rectilignes ou sinueuses (comme ici), continues ou discontinues. Étant donné qu’ils se déposent lors de la fonte de l’inlandsis, ils sont constitués de matériaux bien triés, principalement du sable et du gravier. Ils sont donc une excellente source de granulats pour les routes et le béton de ciment. Région de la rivière Delay, au Nunavik. En Estrie, le meilleur endroit pour observer un magnifique petit esker est au parc écoforestier de Johnville, au sud de Sherbrooke. (Photographie : Michel Parent, CGC-Québec, dans Landry et coll., 2012.)

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Figure 7 Des sédiments glaciolacustres particuliers. De tels dépôts sont caractéristiques des lacs temporaires retenus par des barrages de glace. On note une alternance de lits minces et de lits plus épais. Cette structure unique est due à un contrôle saisonnier du débit des eaux qui alimentent le lac. Au printemps et pendant l’été, les eaux de fonte du glacier sont plus lourdes que l’eau du lac, car elles sont chargées de sédiments. Elles ont tendance à circuler dans les niveaux inférieurs du lac. Ces courants de fond déposent la couche épaisse de sable fin ou de silt. Pendant l’hiver, la fonte du glacier ralentit et l’apport en sédiments grossiers diminue : les particules fines peuvent alors se déposer par décantation. C’est ainsi qu’on obtient généralement une couche épaisse, sédimentée l’été, et une couche mince, sédimentée l’hiver, d’où une périodicité annuel-le. Une séquence de deux couches (ou doublet) représente ainsi la sédimentation d’une année. De tels sédiments sont des varves et leur intérêt est bien sûr de permettre une datation absolue (un doublet = un an) de la durée minimale d’existence de certains lacs proglaciaires. Varves déposés dans le lac glaciaire Barlow, au nord de Ville-Marie, Témiscamingue. (Photographie : Bruno Landry.)