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GT 008 L'ESKER DU LAC BERRY

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Photographie de la couverture: Lac en Coeur. Noter le bleu particulier de l'eau.

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Gouvernement du Québec

Ministere de I'Energie et des Ressources Direction de la Géologie

L'ESKER DU

LAC BERRY J. RONDOT

1982

ISBN 2-550-02223-8

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TABLE DES MATIERES

Page

INTRODUCTION 1

Till 1

Argile varvée 5

Enfoncement et remontée de la

croate terrestre 5

ESKER DU LAC BERRY 7

Rivières sous-glaciaires 7

Provenance des dépôts 8

Construction 9

Cuvettes glaciaires 11

Plages et cordons littoraux 13

Dunes et autres dépôts éoliens 14

Coupe à travers l'esker 17

CONCLUSION 19

RgFgRENCES 19

CARTE GÉOLOGIQUE:

Région du lac Berry (1:20 000) hors texte

III

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INTRODUCTION

Le paysage et la vé-

gétation dans la région de

l'Abitibi témoignent de l'ac-

tion du dernier glacier conti-

nental sur un socle déjà très

aplani. Ce glacier, appelé

laurentidien, a recouvert une

partie de l'Amérique du Nord

au cours des 70 000 dernières

années. Il représente la der-

nière phase de la glaciation

wisconsinienne, laquelle a

connu des avancées et retraits

successifs correspondant à des

périodes de grand froid et de

climat plus doux. Sa fonte

définitive dans la région de

l'Abitibi remonte à environ

].0 000 ans.

Les dépôts laissés

par le glacier ont eu pour ef-

fet de masquer le socle ro-

cheux de l'Abitibi, à tel

point que celui-ci n'affleure

qu'en quelques buttes isolées,

bien visibles à distance à

cause du faible relief. Les

dépôts glaciaires les plus re-

marquables forment des chaînes

de basses collines, au tracé

irrégulier, montrant des rami-

fications ici et là. Ce sont

des eskers, forme particulière

de dépôt relié à la fonte du

glacier. L'un d'eux, qui dé-

bute à 8 km au nord-ouest de

La Motte pour se perdre à

150 km plus au nord, passe par

le lac Berry (figure 1). De

ce fait, nous l'appelons es-

ker du lac Berry.

Avant de parler plus

précisément de l'esker du lac

Berry, il y a lieu de mention-

ner le till et l'argile varvée

qui forment, avec les eskers,

les principaux types de dépôts

glaciaires de l'Abitibi. Nous

serons aussi amenés à faire

état de l'enfoncement de la

croûte terrestre sous le poids

du glacier et de la remontée

de la croûte après la dispari-

tion de celui-ci.

Till

Le till, dépôt typi-

que d'un environnement gla-

ciaire, est composé de débris

de toutes tailles, allant du

gros bloc à la plus fine pous-

sière. Ces débris s'accumu-

lent d'une façon relativement

continue sur toute l'étendue

couverte par un glacier. Ils

échappent â l'observation en

beaucoup d'endroits vu qu'ils

sont peu consolidés et qu'ils

sont ainsi facilement remaniés

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1

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LA SARRE ®

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7

agame Esker

® Ville

• Village

Région cartographiée

~i Mouvement du glacier laurentidien

• ligne de portage des eaux

MATAGAMI

Joutai •

toc Berry

• Clériq ,

®ROUYN

O 20km I 1 I

La Mett.

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SENNETERRE

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toc Malorli<

toc Sennerille

Lar oleo

Vill.ment.l

tar Beoorhomp

FIGURE 1 - Distribution des eskers dans l'Abitibi et locali- sation de la région cartographiée. Modifié de Allard (1974).

ou modifiés par les agents

d'érosion. Ils peuvent aussi

être cachés par d'autres dé-

pôts, comme c'est le cas au

2

lac Berry et en Abitibi en gé-

néral.

Pour imaginer la for-

mation du till, il faut se ré-

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?~o

o.• ô x x x x x x x x x x

x x x x x x x x x XXX x x x x x x x x x x ex x x x x x x x x x x x x

X x XXX x x x x x x x x x x x

Couche affectée par les variations --- ` ---__--__ saisonnières de température. (une vingtaine de mètres)

-3

avance du glacierr...r.. (quelques centimètres par en)

fusion du glacier (une centaine

de mètres par été)

till d'ablation

E o o

-20°C

X x

X x X x

X x

X x X x

férer à l'environnement du

glacier en cause. Celui-ci,

reposant sur une surface rela-

tivement plane, est continuel-

lement en mouvement à partir

ce centres de dispersion cor-

respondant à des points de

haute altitude ou de grande

épaisseur de glace. Il est

alimenté sur toute sa surface

par des précipitations de nei-

ge et son extension territo-

riale n'est limitée que par la

fusion de ses bords.

Sous le glacier en

mouvement, le socle rocheux se

fragmente, s'use et se polit

pour donner des blocs, des

graviers et des particules

très fines qui sont laissés en

une couche plus ou moins

épaisse suivant les dépres-

sions du socle (till de fond) ou sont incorporés à

la base (semelle) du glacier

pour accroître davantage

l'usure et le polissage du so-

cle. Si le socle est déjà

couvert d'anciens dépôts meu-

bles, ceux-ci sont remaniés et

ne peuvent échapper à la

transformation que dans des

endroits privilégiés (dépres-

sions, aire abritée par un es-

carpement rocheux, etc.). Une

autre couche de débris voit le

jour lors de la fonte du gla-

cier. Abandonnés à l'avant de

celui- ci, ils forment le

till d'ablation (figure 2),

dans lequel se reconnaissent

Sublimation, évaporation et formation de lacs

FIGURE 2 - Coupe hypothétique d'une partie retraitante du glacier laurenti-dien. Elle montre le till de fond (qui s'accumule lors de l'avance du gla-tier), le till d'ablation (qui s'accumule lors de la fusion) et les isogrades de température qui recoupent aussi bien le glacier que le till et le socle ro-cheux.

3

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ici et IA des blocs errati-

ques (figure 3 et carte géo-logique).

Le till est donc un

mélange non trié de fragments

de roches de toutes tailles,

depuis des blocs de plusieurs

son épaisseur est de quelques

mètres A plusieurs dizaines de

mètres (2 A 10 m en moyenne).

Les fragments qu'il contient

ne se sont déplacés que de

2 km en moyenne. Certains ont

cependant connu un transport

FIGURE 3 - Bloc erratique abandonné par le glacier laurentidien et maintenant recouvert de végétation. Près du lac en Coeur (voir carte géologique pour lo-calisation.

mètres de diamètre (rares) aux

grains de sable et A l'argile.

D'aspect massif, il ne présen-

te pas de stratification; la

base, toutefois, peut présen-

ter des laminations internes

dues au mouvement du glacier.

Le till forme un ta-

pis plus ou moins épais sur de

grandes surfaces. En Abitibi,

beaucoup plus long, ayant déjà

été déplacés par de précédents

glaciers ou ayant été trans-

portés par des icebergs déta-

chés du glacier laurentidien.

Dans la région du lac

Berry, le till n'est pas visi-

ble. On peut cependant le

voir ailleurs, comme par exem-

ple au voisinage des affleure-

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ments rocheux sur la route en-

tre Berry et Amos.

Argile varvée

Si le till est bien

caché en Abitibi, c'est qu'il

est presque partout recouvert

d'une couche d'argile. En di-

rection nord-sud, cette couche

s'étend du lac Témiscamingue

jusque près de la baie James;

en direction est-ouest, elle

va de Chibougamau jusqu'en On-

tario.

Cette argile est com-

posée de la répétition, plu-

sieurs milliers de fois, d'un

lit d'argile pure et d'un lit

d'une substance un peu plus

grossière que l'on appelle

limon. L'association argile-

Limon constitue une "varve",

dont l'épaisseur est générale-

ment inférieure à 1 cm. L'em-

pilement des varves forme ce

qu'on appelle une "argile var-

vée".

Le matériel des var-

ves provient de la déposition

des matières en suspension

dans un lac glaciaire, le li-

mon en été et l'argile en hi-

ver (voir figure 4). Dans le

cas du territoire qui nous oc-

cupe, il s'est agi du lac Bar-

low-Ojibway, dont les limites

correspondent à celles des ar-

g iles.

Enfoncement et remontée de

la croûte terrestre

Tel que nous venons

de le mentionner, les eaux de

fonte du glacier laurentidien

ont formé en Abitibi-Témisca-

mingue un très grand lac appe-

lé Barlow-Ojibway. Comme la

limite sud de ce lac, dont il

Base du glacier

laurentidien (retraitant)

till d'ablation

O O O O O O O 0 o

o o 0 O O O O 0 0 o

cO o o a

Eté o a

o' o Eté o o▪ o o Eté',,,,':' Eté 0 o o Hiver ot111 de fond o Hiver o 0 o Hiver o a ~o

0

/ 7 / / / / / / 7 7 / / / / 7 / r 7 7 T r r / r T / / / / / / / / / / /

socle rocheux

argile

limon

sable

320m O o ~aTir c

O O o o o O O O

O 0 Oc> O C' C:' p 0 0 0

FIGURE 4 - Coupe schématique illustrant le dépôt des argiles varvées au fond du lac Barlow-0jibway. L'épaisseur des varves est fortement exagérée.

5

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Position actuelle de la ligne de partage des eaux entre la baie d'Hudson et le Saint-Laurent

Aylen environ 200m

La Cave Lac Barlow-Ojibway Témiscaming Angliers Lac Berry

ne reste presque plus rien au-

jourd'hui, dépassait l'actuel-

le ligne de partage des eaux

entre le bassin de la baie

d'Hudson et celui du Saint-

Laurent (figure 1) et comme,

par ailleurs, ce lac ne pou-

vait exister qu'entre le front

du glacier et un déversoir

vers le sud, il faut faire in-

tervenir un mécanisme qui mo-

difie le relief. Ce mécanisme

est celui, aujourd'hui bien

connu et mesurable, de l'en-

foncement de la croûte terres-

tre sous le poids d'un glacier

et la remontée de celle-ci

après la fonte.

Dans la région au

faible relief qu'est l'Abiti-

bi-Témiscamingue, la dépres-

sion dans laquelle se trouvait

le glacier laurentidien a été

le site, à un moment donné,

d'un lac glaciaire (Barlow

dans une première phase et

Ojibway dans une deuxième) qui

s'est déplacé vers le nord

avec le recul du glacier et la

remontée subséquente de la

croûte terrestre. Ce déplace-

ment s'est produit par étapes,

comme en témoignent les dépôts

glaciaires à Aylen, La Cave et

Témiscaming sur la rivière des

Outaouais (figure 5). Ces

étapes correspondent au dépla-

cement du déversoir lors du

recul vers le nord de la rive

sud du lac.

A l'étape Témisca-

ming, le front du glacier com-

mençait tout juste à dépasser

le site actuel du lac Berry.

La profondeur du lac glaciaire

à cet endroit était de 60 m.

Ce chiffre est facile à trou-

ver quand l'on sait que la

colline Saint-Éloi, au nord du

lac Berry (figure 1), est dé-

pourvue de dépôts glaciaires

au-dessus du niveau correspon-

dant à l'altitude maximum at-

teinte par la surface du lac.

Niveau de la croûte au moment du le glacier (retraitant) avait atteint la région du lac Berry

FIGURE 5 — Croquis illustrant la migration vers le nord du lac glaciai—re Barlow—Ojibway et le déplacement de la ligne de partage des eaux.

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Comme ce niveau est aujour- barrière rocheuse a séparé les

d'hui à une altitude de

et que le fond du lac

est à 320 m, une simple

380 m

Berry

sous-

eaux du lac

lac Barlow,

Ojibway, au

en deux masses: le

au sud, et le lac

nord. Le premier

traction fournit la profondeur

cue l'eau avait au front du

glacier.

Le glacier poursui-

vant son recul, le déversoir

du lac glaciaire s'est ensui-

te déplacé à Angliers, sur la

rivière des Quinze, oa une

perdit de plus en plus de son

volume jusqu'à devenir le lac

Témiscamingue actuel; le se-

cond acquit des proportions

considérables avant que le

glacier n'arrive à la baie Ja-

mes et ne crée une ouverture

par oa s'écoulèrent rapidement

toutes ses eaux.

ESKER DU LAC BERRY

Lors de la retraite

du glacier laurentidien, le

till et l'argile varvée dont

nous avons parlé plus haut se

sont étalés sur toute 1'éten-

due du lac glaciaire. Les es-

kers, par contre, se sont mis

en place à une vingtaine de

kilomètres les uns des autres

(figure 1). Ces accumulations

de dépôts très fins à très

grossiers ont quelques centai-

nes de mètres à plus de 2 km

de large et forment des chaî-

nes de petites collines domi-

nant la plaine abitibienne de

plusieurs dizaines de mètres

Lau maximum 60 à 70 m). Leurs

pentes latérales, inférieures

à 10%, sont plus accusées près

des sommets. La ligne de crê-

t: e , en général bien marquée,

est souvent segmentée, avec

décalage d'altitude entre la

fin d'une chaîne de collines

et le début d'une autre.

L'esker du lac Berry

est une construction impres-

sionnante. Il débute à 8 km

au nord-ouest de la Motte

(voir figure 1), sur la ligne

actuelle de partage des eaux

entre les bassins du Saint-

Laurent et de la baie d'Hud-

son, pour se perdre à 150 km

plus au nord.

Rivières sous-glaciaires

Avec le réchauffement

du climat, l'eau formée à la

surface du glacier laurenti-

dien s'est infiltrée, par des

crevasses au front du glacier,

jusqu'au till et à la roche en

place pour constituer des

cours d'eau sous-glaciaires.

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Ceux-ci, ont remanié le till

et transporté ses éléments sur

des distances variables mais

relativement courtes, donnant

naissance aux eskers.

Comme on peut s'en

douter, le volume des rivières

sous-glaciaires dépendait sur-

tout des saisons et du ré-

chauffement climatique; aux

températures plus élevées de

l'été correspondait une fonte

plus rapide et un débit plus

abondant des eaux. En hiver,

au contraire, le débit était

faible ou nul. L'irrégularité

des débits a eu pour consé-

quence une irrégularité cor-

respondante dans la grosseur

des éléments, ainsi qu'on peut

l'observer un peu partout sur

l'esker du lac Berry.

Lors d'hivers rigou-

reux, les dépôts accumulés

dans les rivières sous-gla-

ciaires ont été touchés par le

gel. Surchargés des nouveaux

dépôts du printemps, ils ont

pu casser par blocs avant leur

dégel (figure 6).

Provenance des dépôts

Les sédiments des es-

kers sont habituellement bien

FIGURE 6 - Failles dans des sédiments meubles stratifiés, au milieu de l'esker du lac Berry. De telles cassures nettes avec déplacement le long de la cassu-re n'ont pu se produire que lorsque ces sédiments étaient soudés par le gel. Gravière du ministère des Transports, a 2 km au nord-est du lac Davy (voir fi-gure 1 pour localisation de ce lac).

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arrondis. Comme ils n'ont

parcouru que 10 km en moyenne,

comprenant 2 km de déplacement

dans le till ou dans la glace

elle-même et 8 km de transport

par les rivières sous-glaciai-

tes, cette forme vient du fait

de leur séjour pendant des

centaines et même des milliers

d'années à la semelle du gla-

cier.

Les éléments de l'es-

ker proviennent donc du till

de fond, qui a disparu là oa

se trouve l'esker (voir figure

17), et des débris emprisonnés

à la base du glacier. Ils se

sont déplacés d'une dizaine de

kilomètres vers le sud. Ce

faible déplacement indique que

les rivières n'ont pas été ac-

tives très longtemps aux mêmes

endroits.

Construction de l'esker

Si le déplacement de

gros blocs, de galets et de

graviers n'est que de 8 km par

une rivière sous-glaciaire, il

est beaucoup plus long par une

rivière de surface. C'est

que les matériaux transportés

par la seconde se déplacent

sur un temps très long et dans

une direction qui va de la

source de la rivière vers la

vière sous-glaciaire remontent

une pente et le font dans un

temps très court.

Dans le cas de l'es-

ker du lac Berry, la rivière

qui l'a construit coulait du

nord (à l'intérieur du gla-

cier) vers le sud (au front du

glacier) pour se perdre dans

le lac glaciaire Barlow-Ojib-

way. Elle avait, sous le gla-

cier, un régime torrentiel,

qui s'explique par la pression

énorme de l'eau de fonte em-

plissant des fissures de plu-

sieurs centaines de mètres au-

dessus de la surface rocheuse.

L'eau suivait, sous le gla-

cier, un conduit étroit qui

allait toutefois en s'élargis-

sant à l'approche du lac occa-

sionnant ainsi un changement

de régime qui passait de tor-

rentiel à deltaïque.

Les dépôts de régime

torrentiel sont bien triés et

se présentent en minces cou-

ches parallèles ou se recou-

pant; la grosseur des éléments

est proportionnelle à la force

du courant (figure 7). Les

dépôts deltaïques sont mal

triés et correspondent à un

courant presque nul. Ils sont

empilés en épaisses couches

parallèles sur le sommet de

mer tandis que ceux de la ri- l'édifice (figure 8).

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a.j _

.- - ,• •

FIGURE 7 - Dépôt de type torrentiel (A) sous des dépdts deltaYques (B) dans l'esker du lac Berry. Graviére au nord-ouest de La Motte.

FIGURE 8 - Dép8t deltaïque de sédiments grossiers A fins, en couches subhori-zontales, dans la partie supérieure de l'esker du lac Berry. La disparition de l'argile et le changement de couleur au sommet du dépôt (A) indiquent que celui-ci a été remanié à la disparition du lac glaciaire. Photographie prise au début de l'esker, au sud de la région cartographiée.

10

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Si l'on peut observer

les deux types de dépôt en un

même endroit sur l'esker du

lac Berry, c'est que, pendant

que coulait la rivière vers le

sud, le front du glacier recu-

lait vers le nord, déplaçant

dans cette direction et la

source et l'embouchure de la

rivière de sorte que l'on peut

dire que l'esker s'est cons-

truit A reculons. Ainsi, dans

une même gravière, on peut ob-

server la succession suivante:

. A la base, les tout premiers

dépôts, bien triés et de ty-

pe torrentiel;

. plus haut, les dépôts plus

réguliers (figures 9 et 10);

. à plusieurs dizaines de mè-

tres au-dessus des premiers

dépôts, l'étalement en arche

des derniers sédiments (fi-

gure 11). En certains en- droits, l'arche peut perdre

une partie de ses matériaux,

entratnés plus bas sur la

pente, et être recouverte en

discordance par de nouveaux

dépôts en arche (figure 12).

Cuvettes glaciaires

Il arrive, lors de la

fonte d'un glacier, que des

blocs de glace se détachent

des couloirs oà circulent les

rivières sous-glaciaires et

soient rapidement enterrés

sous les dépôts. Ainsi empri-

sonnés, ces blocs fondent len-

FIGURE 9 - Epais dépôt delta/que dans l'esker du lac Berry. Le sable blanc au milieu de la gravière a été déposé pendant un régime intermédiaire de la rivière sous-glaciaire. Gravière du lac Beauchamp, au sud de la région carto-graphiée (voir figure 1 pour localisation de ce lac).

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FIGURE 10 - Sable fin stratifié au milieu de dépéts grossiers au sommet de l'esker du lac Berry. A 9 km au nord du lac Berry.

FIGURE 11 - Coupe au sommet de l'esker du lac Berry. Les couches supérieures montrent bien la disposition en arche aplatie des sédiments deltaïques au point où la rivière sous-glaciaire se perdait dans le lac. Au sud de la ré-gion cartographiée.

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FIGURE 12 - Discordance dans un dépôt deltaIque. Une nouvelle arche (A) s'est construite sur une autre plus ancienne (B). Gravière du ministère des Trans-ports, à 2 km au nord-est du lac Davy. Voir figure 1 pour localisation de ce lac.

tement et ce n'est que lorsque

le front glaciaire s'est éloi-

gné que leur fonte s'achève.

En disparaissant, ils laissent

des trous que l'on appelle cu-

vettes glaciaires (ou ket-

tles), plus ou moins grandes

suivant la taille des blocs.

Ces cuvettes sont également

plus ou moins profondes selon

le moment du dépôt des blocs;

plus ceux-ci sont précoces,

plus les dépressions qu'ils

laissent sont profondes. El-

les sont remplies d'eau lors-

que le fond est A moins de

326 m d'altitude, comme le

montrent la figure 13 et la

carte géologique.

Plage et cordons littoraux

L'esker du lac Berry

est resté dans le lac glaciai-

re Ojibway jusqu'A ce que ce-

lui-ci ait trouvé une sortie

vers le nord et ait pu commen-

cer â se vider. A son émer-

gence des eaux, il fut assail-

li par les vagues, qui provo-

quèrent une érosion de sa sur-

face et un tri de ses maté-

riaux. Les résultats rappel-

lent ceux qu'on observe en

bordure de grandes masses

d'eau, o0 les vagues produi-

sent un escarpement, une sur-

face plane semée de cailloux

et un amoncellement de sable

sous l'eau. On note plusieurs

13

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FIGURE 13 - Cuvette à fond marécageux, envahie à l'avant-plan par du sable de dune. Près du lac en Coeur (voir localisation sur la carte géologique).

de ces anciens rivages dans la

région du lac Berry, en parti-

cul ier là oa les sédiments

grossiers ont été triés par

les vagues, laissant sur place

de gros galets.

Lorsque le niveau du

lac Ojibway eut suffisamment

baissé, l'environnement de

l'esker devint similaire à ce-

lui que l'on observe actuelle-

ment sur les rivages peu pro-

fonds des côtes de l'Atlanti-

que. Il y eut formation de

cordons littoraux, qui sont

des buttes rectilignes résul-

tant de l'accumulation de sa-

ble et de gravier en avant du

14

rivage sous l'action du vent

et des vagues. Il reste des

traces de ce phénomène de part

et d'autre de l'esker du lac

Berry, autour de 330 m d'alti-

tude. Dans la région de la

carte, les cordons littoraux

montrent une stratification à

pente douce (figure 14).

Dunes et autres dépôts éoliens

Pendant que le lac

Ojibway se vidait, que les dé-

pôts de l'esker étaient rema-

niés par les vagues et que le

froid demeurait suffisamment

vif pour empêcher le dévelop-

pement de la végétation, l'ef-

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FIGURE 14 - Coupe dans un cordon littoral de l'esker du lac Berry. Ce cordon consiste en une butte de sable peu élevée, rectiligne et très longue, formée par le mouvement des vagues sur un rivage à pente faible. En bordure de la route, à 1 km au NE de la pointe nord du lac Berry.

fet du vent se faisait sentir

sur les particules argileuses

et les grains de sable. En se

dispersant au loin, les parti-

cules argileuses ont laissé du

sable blanc, dont les grains

se sont déplacés à ras de ter-

re pour former des dunes ou

s'accumuler dans des dépres-

sions, en particulier sur le

bord des cuvettes glaciaires

(figure 13).

Le vent dominant ve-

nait de l'ouest au moment de

l'émergence de l'esker. Ce-

lui-ci est donc bien garni de

dunes sur tout son flanc occi-

dental (voir carte). Il en

compte beaucoup moins sur

l'autre flanc, les dunes ayant

eu à franchir le sommet de

l'esker pour s'y loger. Les

principaux types de dunes

qu'il est loisible d'observer

sur l'esker sont au nombre de

quatre (figure 15).

. Barkhanes. Dépôts iso-

lés en forme de croissant, à

convexité du côté du vent.

. Dunes paraboliques. Dé-

pôts segmentés, à concavité du

côté du vent.

• Dunes transversales. Dé-

pôts dont la ligne de crête

est perpendiculaire au vent.

Lorsque la convexité des crê-

tes est du côté du vent, ces

dunes sont dites barkhanoïdes;

dans le cas contraire, elles

sont dites ling uoïdes.

Dunes longitudinales.

Dépôts parallêles à la direc-

15

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tion du vent, reliés aux dunes

transversales ici et la.

Les dunes transversa-

les et les dunes paraboliques

sont les plus abondantes sur

l'esker; les dunes longitudi-

nales sont moins fréquentes.

Quant aux barkhanes, elles

sont très rares.

Comme nous l'avons

laissé entendre, les dunes se

construisent par l'accumula-

tion du sable sous l'action du

vent. Les grains transportés,

dont la grosseur dépend de la

force du vent, se déposent sur

la pente abritée et forment

des lits a pente prononcée (20

A 30°), du genre illustré sur

la figure 16.

Les dunes des envi-

rons du lac Berry dépassent

10 m de hauteur par endroits

mais leur largeur ne dépasse

guère 100 m. Le plus souvent,

le sable ne forme que de légè- res proéminences. Il peut

aussi s'accumuler en bordure

des cuvettes glaciaires, sur

a) Barkhane

du

b) Dune parabolique

direction du .--► vent direction vent .--►

c) Dune transversale

direction du vent ---411.

d) Dune longitudinale

direction du vent-0

.~ barkha

T I

linguoi`

~;

.'

Li ... ~'

----.7"

/

FIGURE 15 - Schéma des types usuels de dunes.

16

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FIGURE 16 - Dép8ts de sable en couches successives, sur la pente abritée d'une dune de la région du lac Berry. Sur un sentier a 1.5 km au nord du lac.

la face interne protégée du

vent; c'est le cas de la plu-

part des accumulations au-delà

de la zone de dunes, A 3 km au

nord-nord-ouest du lac Berry.

Les dunes ne bougent

plus depuis longtemps. Elles

se sont rapidement stabilisées

avec le radoucissement du cli-

mat et l'apparition de la vé-

gétation.

Coupe à travers l'esker

(figure 17)

Les divers dépôts

meubles de l'esker du lac Ber-

ry et les caractères géomor-

phologiques hérités de la dé-

glaciation sont illustrés sur

la carte géologique dressée

pour la région du lac Berry.

Même s'il est bien en relief

dans le paysage, l'esker est

très plat et beaucoup plus

large que haut, ainsi que

l'indiquent les coupes de la

figure 17. Ceci est dû au

fait que la voûte sous-gla-

ciaire s'élargissait à l'ap-

proche du lac Ojibway et que

les sédiments pouvaient s'y

étaler. Aux endroits oD le

socle rocheux est relativement

plat, le volume et la composi-

tion de l'esker devraient être

uniformes. Les nombreuses ir-

régularités qu on y observe

sont le reflet de variations

climatiques et saisonnières au

17

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B cordon

Sable éolien

Argile

Sable

Sédiments grossiers

Gravier et sédiments variés

Till

dunes

c ancien rouge sommet de resker

ou56tte(3;n9 route corder irtioral,aréc„e

cuvette lec de cuvette

SOCLE ROCHEUX

sommet

e""P°.°. de l'esker Wancksns mages E358m) rca

N., 4

3

cordon littoral

Om

B' 11111111111111111

littoral

300m SOCLE 300m

ROCHEUX

A sommet A' de resker

awnifoeimaimagmerigiwia 24eli alizetang aux Casions lac Berry (332m) marécage marécage

300m _300m

SOCLE ROCHEUX

FIGURE 17 - Coupes le long des lignes A-A', B-B' et C-C' sur l'esker du lac Berry (voir carte géologi- que pour localisation). On remarque que les sédiments grossiers fins ont remplacé le till de fond.

CO

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cours de la déglaciation. On

estime que le recul annuel du

glacier laurentidien a varié

de 0 à plus de 200 m, comme en

témoignent les largeurs varia-

bles des eskers et la plus ou

moins grande quantité de dé-

pôts au même endroit.

La série de neuf cu-

vettes le long de la ligne de

crête de l'esker (près de la

bordure nord de la région)

pourrait indiquer un recul du

glacier d'une centaine de mè-

tres par année à cet endroit.

Ce chiffre est basé sur l'hy-

pothèse du dépôt d'un bloc de

glace par an pour former cette

suite de cuvettes.

CONCLUSION

En guise de conclu-

sion, rappelons que le glacier

laurentidien s'est mis à fon-

dre, dans la région du lac

Berry, il y a environ 10 000

ans pour laisser place à un

lac glaciaire (Barlow-Ojib-

way) dont la taille était su-

périeure à celle de l'ensemble

des Grands Lacs entre le Cana-

da et les Etats-Unis. Avec la

baisse du niveau du lac sont

apparus les eskers, longues

crêtes de sable et de gravier

que le vent et les vagues ont

modifiées alors qu'il n'y

avait pas encore de végéta-

tion. Il ne reste plus que

des vestiges de la présence de

la glace: petits lacs arron-

dis, argiles varvées, plages

surélevées et dunes érigées

par le vent.

RÉFÉRENCES

ALLARD, M., 1974 - Géomor-phologie des eskers abiti- biens. Cahiers de Géogra- phie du Québec; volume 18, no 44, pages 271-296.

VINCENT, J.-S. - HARDY, L., 1979 - The evolution of gla-cial lakes Barlow and Ojibway. Commission géologique du Ca-nada. Bulletin 316; 24 pages.

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