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Abbé Warré L’APICULTURE POUR TOUS Douzième édition Reproduction

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L'apiculture pour tous par l'Abbé Warré

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  • Abb Warr

    LAPICULTUREPOUR TOUS

    Douzime ditionReproduction

  • Certains droits rservs

  • Abb Warr

    LAPICULTUREPOUR TOUS

    LAPICULTUREFACILE ET PRODUCTIVE

    Douzime ditionReproduction Version 4.01

    LAbb Warr est dcd en 1951. Daprs la loi sur la proprit intellectuelle2, ses hritiers doivent donner leur autorisationpour la diffusion de ses crits.

    Nayant pu contacter ses hritiers, je me permets de diffuser ce document pour un accs tous et toutes, et pour que ce typedapiculture se fasse connatre. Si ce document vous a t utile, vous pouvez me soutenir pour sa diffusion ; modalit sur le siteinternet http://www.apiculture-warre.fr/ (voir galement page 99).

    Guillaume Fontaine3

    1Reproduction 20052009 de ldition de 1948 ; Dpt lgal : 4e trim. 1948.2Art. L. 123-1. Lauteur jouit, sa vie durant, du droit exclusif dexploiter son uvre sous quelque forme que ce soit et den tirer un profit

    pcuniaire.Au dcs de lauteur, ce droit persiste au bnfice de ses ayants droit pendant lanne civile en cours et les soixante-dix annes qui suivent.

    3Ce document est diffus sur le site internet http://www.apiculture-warre.fr/ avec le contrat Creative Commons (cf page 99).

  • Ainsi le voyageur qui, dans son court passage,Se repose un moment labri du vallon,Sur larbre hospitalier, dont il gota lombrage,Avant que de partir, aime graver son nom.

    Lamartine

    Avant que de partir, je veux, chres Avettes, graver mon nom sur ces feuillets, arbuste bni qui apris toute sa sve aux alentours de vos demeures. son ombre, jai repos mes fatigues, jai pans mes blessures. Son horizon suffit mes dsirs, carjy vois les cieux.Sa solitude est plus douce que profonde. Vos amis la visitent. Vous lgayez par vos chants.Et puisque vous ne mourrez pas, chres Avettes, vous chanterez encore et toujours, dans la feuillevoisine, o reposeront mes mnes.Merci.

    . Warr

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  • LAPICULTURE POUR TOUS

    Lutilit de lapicultureLapiculture est lart de cultiver les abeilles dans le but

    de retirer de cette industrie le maximum de rendement avecle minimum de dpenses.

    Or, les abeilles produisent des essaims et des reines, dela cire, du miel.

    La production des essaims et des reines doit tre rser-ve aux spcialistes.

    La production de la cire a quelque importance, maisdiminue par les frais de sa fonte.

    La production du miel est le principal but de lapicul-ture, celui que vise avant tout lapiculteur, parce que ceproduit est important et quil peut tre pes, estim.

    Or, le miel est un excellent aliment, un bon remde, lemeilleur des sucres. Nous le redirons plus longuement. Etce miel, on peut le vendre, comme on peut le consommersous bien des formes : en nature, en confiseries, en ptisse-ries, en boissons hyginiques et agrables : hydromel, cidressans pommes, vins sans raisins.

    Lapiculture est aussi, il faut le noter, un travail pas-sionnant, qui repose par consquent lesprit et mme lecorps.

    Lapiculture est encore un travail moral, puisquilloigne du caf et des mauvais lieux et quil met sous lesyeux de lapiculteur lexemple du travail, de lordre, dudvouement la cause commune.

    Lapiculture est en plus un travail souverainement hy-ginique et bienfaisant, car ce travail se fait le plus souventen plein air, par beau temps, au soleil. Or, le soleil est len-nemi de la maladie puisquil est le matre de la sve et dela force. Le docteur Paul Carton a crit : Ce quil faut,cest enseigner la gnration qui vient la haine de lalcool,le mpris de la viande, la mfiance du sucre, la joie et lahaute valeur du mouvement.

    Car lhomme est un compos. Son corps a besoin dexer-cice ; sinon il satrophie. Son intelligence a galement be-soin dexercice ; sinon elle sannihile. Lintellectuel va ladchance physique. Louvrier, derrire sa machine, va ladchance intellectuelle.

    Le travail de la terre est celui qui rpond le mieux auxbesoins de lhomme. Lintelligence et le corps y trouventleur part.

    Or, dans une socit, il faut des intellectuels, des em-ploys de bureau, des ouvriers pour conduire les machines.videmment ces hommes ne peuvent conduire une ferme.Mais aux heures libres (et ils doivent en avoir), ils peuvent

    jardiner et faire de lapiculture et ainsi satisfaire aux be-soins de leur nature.

    Ce travail vaudrait mieux que tous les sports modernesavec leurs excs, avec leurs promiscuits, avec leurs nudits.

    Si les Franais retournaient ainsi la terre, ils seraientplus forts et plus intelligents. Et, comme la dit le sage En-gerand, la France redeviendrait la terre de lquilibre, o ilny aurait ni les fivres, ni les folies collectives si nfastesaux hommes, elle redeviendrait un pays de mesure et declart, de raison et de sapience, une contre o il fait bonvivre.

    Et puis noublions pas le mot dEdmond About : Leseul capital ternel, inusable et inpuisable, cest la terre.

    Enfin, et cest une chose importante, labeille fcondeles fleurs des arbres fruitiers. Lapiculture contribue, parconsquent, pour une large part, remplir notre fruitier.Cette raison seule devrait suffire pour pousser lapicul-ture, tous ceux qui ont le moindre coin de verger.

    Daprs Darwin, la fcondation dune fleur par elle-mme nest pas la rgle gnrale. La fcondation croise quiintervient le plus communment est ncessite, soit par lasparation des sexes dans les fleurs ou mme sur des piedsdiffrents, soit par la non-concidence de la maturit dansle pollen et dans le stigmate ou par des dispositions di-verses qui empchent une fleur de se fconder elle-mme.Il en rsulte que bien souvent, si une cause trangre nin-tervient pas, nos plantes ne donneront pas de fruits ouen donneront beaucoup moins ; de nombreuses exprienceslont dmontr.

    Or, labeille, comme le dit si bien M. Hommell, labeille,attire par le nectar scrt la base des ptales, pntrejusquau fond des enveloppes florales pour se repatre dessucs labors par les nectaires et sy couvre de la poussirefcondante que les tamines laissent tomber sur elle. Lapremire fleur puise, une seconde offre linfatigable ou-vrire une nouvelle moisson ; le pollen quelle porte tombesur le stigmate et la fcondation qui, sans elle, serait li-vre aux hasards des vents, sopre dune manire certaine.Poursuivant ainsi sans relche sa course, labeille visite desmilliers de corolles et mrite le nom potique, que Micheletlui donne, de pontife ail de lhymen des fleurs.

    M. Hommell essaie mme de chiffrer le bnfice qui r-sulte de la prsence des abeilles. Une colonie, dit-il, quine dispose que de 10 000 butineuses doit tre considrecomme atteignant peine la moyenne et une famille trs

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  • forte loge en grande ruche en possde souvent 80 000. Sup-posons que 10 000 butineuses sortent chaque jour 4 fois ; en100 jours cela fera 4 millions de sorties ; si chaque abeille,avant de revenir au logis, entre seulement dans 25 fleurs, lesabeilles de cette ruche auront visit dans le cours dune an-ne 100 millions de fleurs. Il nest pas exagr de supposerque, sur 10 de ces fleurs, une seule au moins soit fcondepar laction des butineuses et que le gain qui en rsulte soitde 1 centime seulement par 1 000 fcondations. Eh bien,malgr des valuations si minimes, il ressort un bnfice de100 fr. par an produit par la prsence dune seule ruche.Cette conclusion mathmatique est sans rplique.

    Certains producteurs de fruits, des viticulteurs surtout,slvent contre les abeilles, parce quelles vont sucer le jussucr des fruits et des raisins. Mais si lon examine at-tentivement labeille, on saperoit vite quelle dlaisse lesgrains intacts et quelle ne vide que ceux dont la pelliculea dj t perfore par les oiseaux ou les mandibules puis-santes des gupes. Labeille ne recueille quun suc qui, sanselle, se desscherait en pure perte. Labeille est mme danslimpossibilit absolue de commettre le vol dont on lac-cuse : les pices masticatrices de sa bouche ne sont pasassez puissantes pour lui permettre de perforer la pelliculequi protge la pulpe.

    Les bnfices en apicultureJe plains ceux qui ne font de lapiculture que pour sen-

    richir. Ils se privent de bien douces jouissances.Toutefois largent est ncessaire pour vivre. Largent

    est utile ceux qui aiment semer le bonheur autour deux.Il y a donc lieu denvisager ce que peut rapporter lapi-

    culture.Or, la lecture de certains livres et de certains journaux

    peut induire en erreur sur ce point.

    Les mensonges Pour encourager le retour la terre ou pour conduire aux dceptions ceux qui y re-tournent, des apiculteurs en chambre ou des antifranaisfont imprimer dans les journaux des choses renversantes.Parfois aussi des apiculteurs gostes accusent des rsultatsinfrieurs pour ne pas se crer de concurrents.

    Ainsi un dignitaire en apiculture prtend quune rcoltede 10 kg est un rare maximum. Par contre, un professeurprtend que les rcoltes de miel devraient tre portes enmoyenne 100 kg par ruche par ladoption de mthodesrationnelles.

    Un docteur dclare quen Amrique une ruche peutdonner une rcolte moyenne annuelle de 190 kg de miel,quil ne tient qu nous den faire autant.

    Sans doute en donnant chaque ruche 200 kg de sucre.Mais la rpression des fraudes ninterviendrait-elle pas ?

    La vrit Aucune ruche, aucune mthode nechange les pierres en miel, ni ne donne lintelligence lapi-culteur, ni naugmente la fcondit de la reine, ni nam-liore la temprature. Par consquent, le rapport duneruche variera dune rgion lautre, dune ruche lautre,dune anne lautre, comme la richesse mellifre de largion, comme la fcondit de la reine, comme la tempra-ture, comme lhabilet de lapiculteur.

    Quand jhabitais la Somme, je faisais une rcoltemoyenne de 25 kg par ruche. Dans une rgion mellifreon peut rcolter davantage. Ici, Saint-Symphorien, dansun quartier trs peu mellifre, je ne fais quune rcoltemoyenne de 15 kg. Prcisons. En 1940 javais des ruchesqui mavaient cot 300 fr. lune. Elles mont donn cha-cune une rcolte de 15 kg. Or, le prix du miel tait fix 18 fr. en demi-gros, 22 fr. au dtail. Par ailleurs, chaqueruche ne mavait demand quune heure et demie de travaildans le cours de lanne.

    On voit par l comment le travail et le capital sontpays en apiculture, mme dans une rgion peu mellifre.

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  • Lapiculture est une bonne coleLe bonheur, a dit Coppe, cest den donner. Bonheur

    acquis pour les mes dlite. Or, ce bonheur nest pas tou-jours possible, mais on peut trouver un bonheur consid-rable dans la nature.

    La fleur cest la beaut qui se rajeunit sans arrt. Lechien cest la fidlit sans borne, mme dans linfortune, lareconnaissance sans oubli. Labeille cest une matresse etcharmante ducatrice. Elle donne lexemple dune vie sageet raisonne qui console des contrarits de la vie.

    Labeille se contente de la nourriture que lui fournit lanature aux alentours de sa ruche, sans y rien ajouter, sansen rien retrancher. Pas de plats cuisins, pas de primeursdoutre-mer.

    Labeille, si riche soit-elle de provisions, ne consommeque ce qui lui est strictement ncessaire. Pas dexcs detable.

    Labeille se sert de son terrible aiguillon, et jusqu lamort, pour dfendre sa famille et ses provisions. Ailleurs,mme quand elle butine, elle cde aux hommes et aux ani-maux la place dont ils ont besoin, pacifiquement, sans r-crimination, sans lutte. Cest une pacifiste sans faiblesse.

    Chaque abeille a sa besogne, conforme son ge et ses aptitudes. Elle la remplit sans envie, sans rvolte etsans colre. Pour labeille, il ny a pas de travail humiliant.

    La reine, inlassablement, pond, assurant ainsi la perp-tuit de la race. Les ouvrires, avec amour, partagent leuractivit entre les tendres larves, espoirs des essaims fu-turs, et les champs embaums o, de laube au crpuscule,sopre la rcolte du miel. Point de place, dans le bourdon-nant essaim, pour les inutiles. Pas de parlementaires ; carce peuple discret na pas le got des lois nouvelles ni leloisir des discours vains.

    Nous appelons reine labeille pondeuse. Cest indment.Il ny a ni roi, ni reine, ni dictateur dans la ruche. Personnene commande, mais tous travaillent dans lintrt commun.Pas dgosme.

    Labeille observe la loi aussi hyginique quimprieuse,loi souvent oublie par les hommes : Cest la sueurde ton front que tu gagneras ton pain. Et je constateque la sueur de labeille, tout en assainissant son corps, luiest encore dune autre utilit. Sa sueur, en se changeanten paillettes de cire, fournit labeille les matriaux quilui serviront construire ses admirables cellules : greniersain pour ses provisions, doux berceau pour sa progni-ture. Tant il est vrai que lobservation des lois naturellesest toujours rcompense.

    Et labeille travaille sans rpit, jour et nuit. Elle neprend de repos que lorsque le travail fait dfaut. Pas mmede repos hebdomadaire. Chez les abeilles il ny a ni rentiersni retraits.

    Et voyez la devise de labeille qua chante ThodoreBotrel

    Jai dit un jour labeilleRepose-toi donc un peu,Tefforant dtre pareille ce gai papillon bleu

    Sur la rose ou la pense,Vois, il pme en rvassantOui... mais, moi, je suis presse,Ma dit labeille, en passant.Lui montrant la libellule,Je lui dis, un autre jourViens, de laube au crpuscule,Danser comme elle, ton tourNe ladmires-tu, subtile,Valsant, l-bas, sur ltang ?Si... mais, moi, je suis utileMa dit labeille, en partant.Hier, enfin, devant la porteDe son petit temple dorJe laperus, demi-morte,Lourde de son pollen encore :Repose-toi, pauvre bteLui dis-je en la secourantOui... puisque ma tche est faite,Ma dit labeille, en mourant.

    Ce que jadmire le plus chez labeille, a dit Henry Bor-deaux, cest son oubli delle-mme : elle se donne tout en-tire une uvre dont elle ne jouira pas : joie dans leffortet don de soi.

    Et pour moi les abeilles sont ce qutaient les oiseauxpour Andr Theuriet.

    Quand jentends les abeilles bourdonner dans lafeuille, je songe, avec une douce motion, quelles chantentde la mme faon que celles que jcoutais dans mon en-fance, au jardin paternel.

    Les abeilles ont cela de bon quelles semblent toujourstre les mmes. Des annes passent, on devient vieux, onvoit ses amis disparatre, les rvolutions changer la facedes choses, les illusions tomber lune aprs lautre, et, ce-pendant, parmi les fleurs, les abeilles quon a connues dslenfance modulent les mmes phrases musicales, avec lamme voix frache. Le temps ne semble pas mordre surelles, et, comme elles se cachent pour mourir, comme nousnassistons jamais leur agonie, nous pouvons nous figurerpresque que nous avons toujours devant les yeux celles quiont enchant notre premire jeunesse, celles aussi qui, pen-dant notre longue existence, nous ont procur les heuresles plus agrables et les amitis les plus rares.

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  • Comme la dit un amant de la nature : Heureux ce-lui qui, le soir, couch dans lherbe auprs du rucher, encompagnie de son chien, a entendu le chant des abeilles se

    mariant au cri-cri des grillons, au bruit du vent dans lesarbres, au scintillement des toiles, la marche lente desnuages !

    LabeillePlace de labeille dans la nature Les ani-

    maux, qui se distinguent des vgtaux parce quils sontdous de mouvement, se partagent en deux grandes cat-gories : les vertbrs et les invertbrs.

    Les vertbrs, caractriss par une colonne vertbrale,comprennent les poissons, les batraciens, les reptiles, lesoiseaux et les mammifres ; ils ne nous intressent pas ici.

    Les invertbrs, qui nont pas de colonne vertbrale,comprennent plusieurs embranchements : les protozoaires(les infusoires), les spongiaires (les ponges), les clentrs(les mduses, les coraux), les chinodermes (les toiles demer), les vers (les sangsues, les lombrics), les vermidiens,les mollusques (les hutres, les limaces, les pieuvres), lesarthropodes et enfin les chards qui, par leur corde dor-sale, tablissent la transition entre les invertbrs et lesvertbrs.

    Ce sont les arthropodes qui nous intressent.Les arthropodes (du grec arthron , articulation, et

    pous, podos , pied) sont aussi appels articuls. Leurcorps prsente trois rgions distinctes : la tte, le thoraxet labdomen. Ils sont munis dappendices : la tte, lesantennes et organes masticateurs ; au thorax, les membresambulatoires.

    On divise les arthropodes en plusieurs classes : les crus-tacs (les homards), les arachnides (les araignes), les my-riapodes (les scolopendres), les insectes ou hexapodes.

    Un insecte

    Les insectes (du latin in, dans, secare , couper),ou hexapodes (du grec : hex , six, et pous, podos ,pied), se caractrisent par leurs membres qui sont toujoursau nombre de six. Les insectes ont une respiration arienne.

    Leur tte porte deux yeux composs. Le thorax se di-vise en trois parties le prothorax, qui porte une paire depattes ; le msothorax, qui porte une paire de pattes et unepaire dailes ; le mtathorax, qui porte une paire de patteset parfois une paire dailes. Les insectes ont toujours leurssexes spars. La larve, au sortir de luf, doit subir unesrie de mtamorphoses pour arriver ressembler aux pa-rents. Par leur intelligence et leur organisation, les insectessont suprieurs aux autres invertbrs. Les six cent milleespces dinsectes connus sont rparties en huit ordres : les

    orthoptres (sauterelles), les nvroptres (fourmis-lions),les archiptres (les libellules), les hmiptres (les punaises),les diptres (les puces), les lpidoptres (les papillons), lescoloptres (les hannetons) et les hymnoptres.

    A : Bourdon, B : Nid de Bourdon, C : Osmie.

    De haut en bas : Une mre Une ouvrire Un mle(grandeur naturelle)

    Les hymnoptres (du grec : humen , membrane, et pteron , aile) sont caractriss par quatre ailes membra-neuses.

    Les hymnoptres forment la classe des insectes la plushautement organise au point de vue de lintelligence, telpoint que ses manifestations confondent la ntre. Et pour-tant nous ne connaissons encore quimparfaitement leursqualits, comme leur nombre dailleurs, car les vingt cinqmille espces connues permettent dentrevoir le nombre dedeux cent cinquante mille espces.

    Les hymnoptres comprennent deux groupes : les t-rbrants et les porte-aiguillon.

    Les trbrants possdent une tarire abdominale dontils se servent pour scier ou perforer les vgtaux. Cest dansce groupe que sont classs les cepus , dont on trouve lalarve dans le chaume qui porte lpi de bl, et la lydiapiri , dont les larves filent une sorte de rseau de soieenglobant plusieurs feuilles de poiriers.

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  • Les porte-aiguillon portent un aiguillon au bout de lab-domen. Les uns sont des parasites, dont la mission est sou-vent de dtruire des insectes nuisibles, ou des chasseurscomme la gupe vulgaire ou le gros frelon, dont les larvesont besoin dun apport dinsectes ou de viande, et de fouis-seurs (philanthe apicore) qui fouillent souvent la terre poury trouver les larves dont ils se nourrissent, qui dvorentaussi beaucoup dabeilles.

    Les autres sont des formicides ou fourmis, insectes lesmieux dous au point de vue de lintelligence aprs lesabeilles, et enfin les apides.

    Les apides ou mellifres, ce sont les abeilles. Elles nour-rissent leurs larves de miel. Il y en a environ 1 500 espces.Les unes vivent solitaires, comme losmie, dans des trous demurailles, des cavits de vieux bois. Les autres se runissenten socit, ce sont les abeilles sociales : les bourdons, lesmlipones et labeille ordinaire ou apis mellifica .

    Les bourdons (du latin burdo , mulet), de grandetaille, trs velus, ne vivent quen petits groupes et fontleur nid sous la terre.

    Les mlipones, trs petites, vivent en colonies trs nom-breuses, parce quelles ont plusieurs reines, mais seulementdans les pays tropicaux.

    Labeille ordinaire, apis mellifica , est celle dont nousallons nous occuper longuement.

    Composition de la famille de labeille Les familles que forment les abeilles sappellent colonies.Chaque colonie comprend trois sortes dindividus

    1. Une seule femelle, compltement dveloppe et ca-pable de pondre assez dufs pour assurer le maintienet laccroissement de la famille cest la mre, appeleimproprement reine ;

    2. Les ouvrires ou femelles atrophies, incompltementdveloppes, en nombre considrable, cent mille etplus ;

    3. Des mles, qui napparaissent normalement que pen-dant la saison des essaims et disparaissent ds quecessent les apports du miel. Leur nombre varie dequelques centaines quelques milliers.

    Tailles comparatives La mre, les ouvrires etles mles varient de taille. Le tableau ci-dessous la donneapproximativement1

    Longueur Largeur Diamtredes ailes du corseletouvertes

    Mre 16 24 4,0Ouvrires 12 23 3,5Mles 15 28 4,5

    Transformations comparatives Les habi-tants de la ruche se transforment de faons diffrentes.La reine est sous forme duf pendant trois jours, de larvependant cinq jours, de nymphe (dans cellule opercule)pendant huit jours. La naissance a lieu le seizime jour.Elle est fconde vers le septime jour aprs sa naissance.Elle commence pondre deux jours plus tard, soit au mi-nimum vingt-cinq jours, le plus souvent trente jours aprsla ponte de luf.Louvrire est sous forme duf pendant trois jours, delarve pendant cinq jours, de nymphe (dans cellule oper-cule) pendant treize jours. La naissance a lieu le vingtet unime jour. Elle reste dans la ruche, comme nourriceou cirire, environ quinze jours. Elle commence butinertrente trente-six jours aprs la ponte de luf.Le mle est sous forme duf pendant trois jours, delarve pendant six jours et demi. La naissance a lieu levingt-quatrime jour. Il est apte la reproduction vers lecinquime jour aprs sa naissance, soit environ un moisaprs la ponte de luf.

    N. B. Si lon supprime la mre dune colonie, lais-sant aux abeilles le soin de la remplacer, celles-ci, pourpargner du temps, oprent presque toujours sur des larvesges de deux jours, de sorte que les jeunes reines arrivent terme le douzime jour aprs lenlvement de la vieillereine.

    1Mesures en millimtres

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  • La mreNom de la mre Danciens auteurs enseignaient

    que les colonies dabeilles sont gouvernes par des rois.Nous savons aujourdhui quil existe dans chaque colonieune reine, ou mieux une mre, car, de fait, cette reine nestquune femelle complte, fconde, capable dassurer parsa ponte lavenir de la famille. Le grand chef de la coloniecest lintrt gnral. Nous nous conformerons toutefois lusage : la mre de la colonie, nous lappellerons reine.

    Nombre de reines Gnralement, il ny aquune reine dans une colonie. Plusieurs fois, pourtant,nous avons vu deux reines dans une colonie. Dautresapiculteurs ont affirm en avoir vu trois. Ces exceptionspeuvent se produire dans plusieurs cas. Une reine tropvieille na plus lnergie daller tuer sa fille sa naissance,comme son instinct ly avait pousse antrieurement. Oubien, on a introduit successivement plusieurs reines dansune colonie quon croyait orpheline. Les reines se sont trou-ves spares, pousses par les abeilles, dans des directionsdiffrentes. De fait, elles ont form dans la colonie desgroupes diffrents, ayant chacun les lments dune colonie.Cet tat disparat aussitt que les groupes se rapprochentlun de lautre, soit par le dveloppement des deux groupes,soit par larrive du froid. Le dsordre cr par la sortiedes essaims secondaires favorise la prsence momentanede plusieurs reines closes en mme temps.

    Antipathie des reines Quand deux reinesse rencontrent, elles se prcipitent lune sur lautre. Laplus forte, ou la plus habile, transperce la plus faible duncoup daiguillon dans labdomen. La mort en est la cons-quence. Parfois, les deux reines se transpercent mutuelle-ment, comme il arrive deux duellistes, et se tuent.

    Cette antipathie existe entre toutes les reines, quellessoient fcondes, vierges ou mme encore enfermes dansleur cellule.

    Quand les abeilles lvent des reines pour un motifquelconque, elles difient plusieurs cellules royales, dix quinze. Or, la reine close la premire se hte datteindreles alvoles o ses surs prparent leur naissance, et elleles frappe de son dard.

    Je vois l un moyen de slection svre, donn labeillepar la nature. Une seule reine est conserve sur dix ouquinze. Or, cette reine, cest celle qui, la premire, est par-venue soulever le couvercle de sa cellule : cest la plusvigoureuse.

    Disparition de la reine Dans la visite desruches, on voit frquemment une pelote dabeilles serresfortement. Si on carte ces abeilles par la force ou par unefume trs abondante, on trouve au milieu une reine. Unetelle reine est dite emballe.Cette treinte des abeilles a pour cause la joie ou lantipa-thie.

    Quand lapiculteur a maintenu la reine trop longtempsspare de la colonie, quand il na pas favoris assez vitela sortie dune reine de la cage dintroduction, quand il ya pillage et danger pour la reine, les abeilles, dans leur joie

    excessive, sempressent autour de la reine aussitt quellesle peuvent, elles la serrent, ltreignent et ltouffent.

    Dautres fois, cette treinte a pour cause lantipathie ;elle est accompagne de coups de dards et suivie dunemort plus rapide.

    Ce fait a lieu pour les vieilles reines infcondes, peu detemps avant lclosion de leur remplaante ; pour les reinesdont lapiculteur, en les conservant trop longtemps entreles doigts ou dans la main, a chang le parfum particulierqui permet leur peuple de les reconnatre ; pour les jeunesreines qui, au retour de la fcondation, entrent dans uneruche trangre trop rapproche.

    Consquences de la disparition de lareine La colonie dpourvue de reine est appele orphe-line. Si la reine disparue nest pas remplace par lapicul-teur ou par les abeilles, la population de la colonie diminuerapidement, jusqu disparatre.

    Importance de la reine Sa prsence est n-cessaire puisque, seule, la reine pond les ufs destins assurer la perptuit de la famille. Aussi la nature a-t-ellepris toutes les mesures pour protger sa vie.

    Laccouplement de la reine a lieu en vol, dans les airs.Ces circonstances rendent cet acte dangereux pour un in-secte aussi fragile que labeille. Aussi est-il unique.

    Labeille ne rencontre le mle quune seule fois dans savie. Et plus jamais, par la suite, elle ne quittera ses rayons,si ce nest au milieu dun essaim qui va fonder un nouveaufoyer.

    Dure de la vie de la reine La dure de lavie de la reine est de quatre cinq ans ; cest environ cin-quante fois celle des ouvrires, nes au commencement dela mielle. Comme la poule, cest la deuxime anne quellepond le plus.

    ge de la reine Il est assez facile de distinguerles vieilles reines des jeunes. Les jeunes reines dun deuxans ont labdomen plus gros, parce que gonfl dufs, leursailes sont intactes ; leur tte et leur corps sont couverts depoils, leurs mouvements sont vifs. Les vieilles reines de troisans sont glabres ; leurs ailes sont franges ; leur dmarcheest lente.

    Autorit de la reine Cest une erreur de croireque la reine dirige la construction des rayons et distribuele travail aux ouvrires. Le rle de la reine est tout simple-ment de pondre.

    Il nen est pas moins vrai que la prsence de la reineest indispensable lactivit de la colonie. Vu limpor-tance du rle de la reine et la gravit de sa perte, dsquune ruche est orpheline, les ouvrires sinquitent, sap-pellent, courent de tous cts la recherche de la reine ;elles travaillent moins, elles deviennent acaritres. La si-tuation saggrave encore sil ny a pas dans la ruche ducouvain jeune permettant dlever une autre reine.

    Aussi, dans une colonie qui meurt de faim, cest la reinequi survit le plus longtemps, sans doute parce que la reine

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  • est plus forte et plus rsistante, mais aussi parce que lesabeilles lui ont rserv la dernire goutte de miel.

    Imperfections de la reine La reine ne pos-sde ni les organes scrteurs de la cire, ni les appareils dercolte du pollen et du miel.

    La reine ne sait mme pas salimenter elle-mme. Si onlenferme seule dans une bote avec du miel sa porte,elle meurt de faim ct du miel.

    Il parat en tre de mme dans la ruche. Les ouvriresfourniraient la reine, pendant la ponte, une bouillie djlabore par une premire digestion, compose de miel etde pollen ; en dehors de la ponte, du miel pur. Toutefois,daprs le docteur Miller, ce nest pas louvrire qui faitpasser la nourriture dans la bouche de la mre, parce quele dgorgement de la nourriture nest possible quavec lalangue replie en arrire. Cest au contraire la reine qui in-troduit sa langue dans la bouche de louvrire pour prendredans son jabot la bouillie toute prpare.

    Caractre de la reine La reine est extrme-ment timide et craintive. Le moindre bruit insolite leffraye.Elle se cache souvent dans les recoins de la ruche o on peutlcraser, o, en tout cas, il est souvent difficile de laper-cevoir. La reine nose mme faire usage de son dard, saufcontre les jeunes reines.

    Aspect de la reine Laspect de la reine permetde la trouver facilement. Elle est plus grosse et beaucoupplus longue que louvrire. Son abdomen, de nuance plusclaire, dpasse longuement les ailes. Sa dmarche est plusmajestueuse. Elle se distingue galement du mle par soncorps plus svelte. Le mle a le bout de labdomen plusobtus et plus couvert de poils, les ailes plus longues quelabdomen.

    Moyen de trouver la reine Dans la RuchePopulaire avec la grille reine, nous avons un moyen m-canique, absolu, de trouver la reine rapidement sans dan-ger pour celle-ci, et sans que lapiculteur ait de grandesconnaissances apicoles.

    Dans les ruches cadres, il y a un autre moyen qui nousa toujours russi dans notre levage, pour trouver rapide-ment un grand nombre de reines, chaque jour de la bellesaison.

    Pendant la saison de ponte, la reine parat traverserchaque jour lespace occup par le couvain, pour pondredans toutes les cellules libres et allonger le groupe de cou-vain, suivant les possibilits. minuit, la reine doit tretoujours au milieu. En tout cas, midi, la reine est tou-jours une extrmit du couvain, un jour droite, un jour gauche. Il importe, pour navoir pas de mcompte, de nepas effrayer la reine par des mouvements trop brusques oupar une fume trop abondante, comme aussi de remettretoujours la reine sur le cadre o elle a t trouve. Si onnopre pas midi, la reine est aussi loigne de lextrmitdu couvain que lest de midi lheure de lopration.

    Certitude de la prsence de la reine Mme sans lavoir vue on est certain de la prsence de lareine dans une ruche sil sy trouve du couvain douvriresen larves, mais plus particulirement en ufs nouvellementpondus et aussi si les abeilles vont et viennent, apportantdu pollen au retour.

    Odeur de la reine On attribue la reineune odeur forte, tenant de la mlisse, particulire, que lesabeilles de la colonie prendraient plus ou moins.

    Les mlesNom des mles Les mles sont gnralement ap-

    pels faux bourdons, parce quen volant ils font entendreun bruit plus fort que celui de labeille et tout fait dif-frent. Ce nom distingue aussi les mles des bourdons deschamps.

    Particularits des mles Les mles sont plusnoirs. Les extrmits de leur corps sont plus velues. Lespattes sont dpourvues dappareil pour la rcolte du pol-len. Ils nont point daiguillon. Ils exhaleraient une odeurdistincte.

    Odeur des mles Au moment de lessaimage,les mles exhaleraient une odeur plus forte. Ce serait pourla jeune femelle un moyen de les reconnatre, en plus dubruit quils font entendre en volant. Cette odeur permet,dailleurs, de prvoir la sortie des essaims.

    Murs des mles Les mles sont doux et pai-sibles. Dans la ruche, ils semblent toujours sommeiller. Ilsne sortent que vers le milieu de la journe, et par tempsbeau et chaud. Ils passent parfois dune ruche une autre,sans que les abeilles sen irritent.

    Nombre des mles Dans les colonies en bontat il peut y avoir des mles par milliers, jusqu 3 000.

    Fonctions des mles La fonction incontestedes mles est de fconder les jeunes femelles. Nous parta-geons lavis de certains apiculteurs, que les mles seraientencore plus utiles entretenir la chaleur ncessaire lclo-sion du couvain un moment donn. Nous traiterons cettequestion quand nous parlerons des moyens de diminuer leurnombre ou de les supprimer.

    Dure de lexistence des mles Les mles,dans les climats temprs, ne vivent que quelques mois. Ilsapparaissent lapproche de la mielle. Ils sont mis mortpar les ouvrires aussitt quelle cesse. Ils sont, pour untemps, conservs, mme en hiver, dans les ruches qui nontpas de reine.

    Indication de la prsence des mles Laprsence de nombreux mles pendant la mielle parat in-diquer que la colonie est forte et donnera une abondantercolte si les circonstances sont favorables. Au contraire, laprsence des mles en dehors de la mielle indique, dunefaon certaine, que la colonie est en mauvais tat, quelleest orpheline de reine, ou ne possde quune reine puise.

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  • Les ouvriresFonctions des ouvrires Les ouvrires ex-

    cutent les travaux ddification et dentretien de la rucheet les travaux dalimentation. Elles soccupent de llevagedu couvain, de la garde de lhabitation, de sa propret, desa ventilation, etc.

    Il ny a pas lieu de distinguer les ouvrires selon leursfonctions : nourricires, pourvoyeuses, cirires, etc. Les ou-vrires sont toutes destines indistinctement tous les tra-vaux utiles la colonie, suivant les saisons, les heures, lescirconstances. Seules les jeunes ouvrires soccupent exclu-sivement des travaux dintrieur, tant que leur corps nestpas assez dvelopp pour affronter les intempries.

    Heures de sorties On a dit que les ouvriressortent toute la journe au printemps, le matin seulementen t, jamais par la pluie et le froid.

    Il est plus exact de dire que les ouvrires sortent quandla chose leur est possible, aussi souvent quelles ont quelquechance de trouver miel, pollen ou propolis.

    Or la pluie alourdit tellement louvrire quelle lem-pche de voler et au-dessous de 8 degrs, labeille est en-gourdie.

    En t, louvrire recherche surtout le miel. Or le soleilde midi sche les fleurs.

    Au printemps, cest surtout le pollen que recherche lou-vrire. Or ni la chaleur, ni le froid nen arrtent complte-ment la production.

    Quelques chiffres Labeille pse environ undixime de gramme. Elle peut rapporter la moiti de son,poids, soit 0,05 g ; mais souvent elle ne rapporte que 0,02 gpar voyage. Pour un apport de 1 kilogramme de miel, ilfaut donc que labeille fasse 50 000 voyages ou que 50 000abeilles fassent un voyage. Labeille peut faire par jour unevingtaine de voyages de 1 km aller et retour pour rapporter0,40 g de miel. La rcolte de 1 kg de miel reprsente doncplus de 40 000 kilomtres, soit plus que le tour du monde.

    Dure de lexistence de louvrire Lesouvrires peuvent vivre au maximum un an quand se suc-cdent pour elles lorphelinage et la mauvaise saison, cest--dire des priodes o louvrire a peu dactivit.

    Pendant la bonne saison et dans les colonies normales,en raison de leur activit incessante, les ouvrires viventdeux trois mois au maximum, souvent trois quatre se-maines seulement.

    Murs des ouvrires Chez les abeilles dunemme colonie on constate lunion et lentente un degrde perfection qui nexiste nulle part ailleurs. Car toutesles abeilles nont quun seul et mme but, quune seule etmme ambition : la prosprit de la colonie.

    Pour le mme motif, les ouvrires se dfient des abeillesvoisines. Elles les examinent et, sauf certains cas particu-liers, quand elles ont reconnu quelles sont trangres, ellesles chassent et souvent les mettent mort dun coup dai-guillon, sans se douter que cet acte de violence causera leurpropre mort.

    Polymorphisme des abeilles La diffrencia-tion qui existe entre une ouvrire ou une reine vient-elleseulement de la forme de lalvole o se dveloppe la larveet de son alimentation ? Qui oserait laffirmer ?

    Sil ny avait ici quune question de dveloppement plusou moins complet, on pourrait admettre linfluence pr-pondrante de lalimentation et du milieu. Mais il y a entrereine et ouvrire des divergences qui ne sauraient tre attri-bues au rgime et au berceau. Louvrire possde certainsorganes tels que les corbeilles pollen et les glandes ciriresqui font dfaut chez la reine, et cette dernire offre elle-mme des particularits quon ne trouve pas chez labeilleneutre. Or, cette dissemblance dans lorganisme ne peuttre mise sur le compte du rgime. Elle ne peut prove-nir que des nourrices, qui dinstinct savent quel traitementelles doivent faire subir la larve do sortira une ouvrirepour quelle soit doue des organes ncessaires aux fonc-tions quelle aura remplir ; elles savent galement quelfaonnement donner une larve destine produire unereine pour retrancher chez elle ou atrophier des organesdont elle na pas besoin et dvelopper au contraire ceuxquexigeront ses fonctions maternelles.

    Cest l une facult prestigieuse quil nous faut ad-mettre chez les leveuses de la ruche, si nous voulons ex-pliquer le polymorphisme des abeilles.

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  • Ce que lon voit aux alentours dun rucherPar une temprature propice la mielle, il est facile

    de suivre le travail des abeilles, soit dans un champ, soit la lisire dun bois, et sans danger de piqre, nous lavonsdit, car, loin de sa ruche, labeille ne pique jamais.

    On peut mme arriver reconnatre ses propresabeilles, soit parce quelles sont dune race qui nexiste pasdans la rgion, soit parce qu leur sortie de la ruche onles a saupoudres dune poudre quelconque, de farine parexemple.

    Nectar Cest avant tout le nectar que labeille re-cherche dans les fleurs. Arrive sur une fleur labeille carteles ptales, plonge sa tte dans lintrieur de la fleur, al-longe sa trompe et absorbe la gouttelette de nectar quenous aurions pu voir avant son passage.

    Abeille butinant sur une fleur.

    Labeille passe ensuite une autre fleur et opre de lamme manire.

    Il est remarquer que plus le nectar est abondant etplus il y a de butineuses, que labeille ne parat aller dansla mme sortie que sur une seule et mme varit de fleurs,que labeille a ses prfrences et quelle abandonne unefleur visite la veille par une autre abeille.

    Labeille ne rcolte pas de nectar seulement sur lesfleurs, mais aussi parfois sur des plantes, sur les stipules

    de la vesce par exemple et, en saison chaude parfois gale-ment sur les feuilles des chnes, bouleaux, htres, peupliers,tilleuls, etc. ; ce nectar sappelle miellat.

    Pollen Les abeilles rcoltent aussi du pollen dontelles se servent pour nourrir les larves. Les butineuses quicherchent le nectar doivent ramasser, peut-tre involontai-rement, une certaine quantit de pollen, mais il est certainque des butineuses recherchent le pollen sans soccuper dunectar.

    Les abeilles prennent le pollen avec leurs mandibules,le ptrissent, en font une boule, la prennent avec les pattesde devant pour la transporter dans les corbeilles des pattesde derrire.

    Dans certaines fleurs, comme le gent, lillette, il y atant de pollen que le corps de labeille peut en tre enti-rement recouvert.

    On ne voit jamais quune seule couleur au pollen ap-port par une abeille. Il parait donc que labeille chaquesortie ne visite quune seule et mme varit de plantepour recueillir le pollen. Car la couleur du pollen varieavec chaque espce de plante.

    Propolis Des butineuses vont aussi rcolter la pro-polis sur les bourgeons de certains arbres : aunes, peupliers,bouleaux, saules, ormes, etc.

    La propolis est une matire rsineuse, transparente, col-lante. Les abeilles la rapportent par petites pelotes commele pollen. Elles sen servent pour boucher les fentes, com-bler les vides dans lintrieur de la ruche.

    Eau Enfin certaines butineuses vont aussi chercherde leau qui leur sert dlayer la pte destine aux jeunesabeilles, et aussi probablement dissoudre le miel cristal-lis.

    Les abeilles ont des prfrences tranges pour lesgouttes de rose du matin, leau de la mer, les eaux stag-nantes qui ont reu quelque peu de purin dans le voisinagedes fermes.

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  • Ce que lon voit lentre dune rucheQuand la temprature le permet, lentre dune ruche

    on peut voir des mles ou bourdons et des ouvrires.Bourdons Les bourdons ne sortent quaux heures

    chaudes de la journe. Ils sont bruyants et volent sans butet lourdement quoique ne rapportant rien, ni miel ni pollen.

    Ouvrires Ds quil y a une temprature de 8 ,on voit lentre de la ruche des ouvrires toujours occu-pes, mais des fonctions diffrentes. Les unes sont des gar-diennes ou des ventileuses, les autres sont des nettoyeusesou des butineuses.

    Gardiennes Les gardiennes vont et viennent de-vant lentre de la ruche ; elles surveillent les abeilles quiviennent du dehors et ne les laissent rentrer quaprs lesavoir reconnues, sans doute par leur odeur. Elles pour-chassent les abeilles, pourtant semblables, venues duneautre ruche pour prendre le miel de la leur ; elles pour-chassent aussi les gupes, les frelons, les papillons ttede mort qui essaient parfois de rentrer dans la ruche.

    Ventileuses Vers le soir des journes chaudes,surtout sil y a des apports de miel, ct des gardiennes,les ventileuses restent fixes la tte tourne vers lentre,dresses sur leurs pattes. Leurs ailes sagitent rapidementet produisent un bruissement quon peut entendre das-sez loin. Leur but est de ventiler la ruche pour abaisserla temprature et aussi pour activer lvaporation de leaucontenue dans le miel, nouvellement apport.

    Nettoyeuses Le matin, surtout au printemps,on voit aussi des abeilles sortir de la ruche, emportant auloin des dbris de cire, des abeilles mortes, ce sont les net-toyeuses.

    Butineuses Enfin nous voyons sortir de la rucheles butineuses. Elles prennent leur vol rapidement, sans h-sitation, dans une direction dtermine, se souvenant desfleurs visites la veille. Elles rentrent lourdes et tombentparfois sur lherbe avoisinant la ruche parce quelles sontcharges de miel. Dautres rentrent portant sur leurs pattesde derrire deux boules de pollen, jaunes ou de diversescouleurs, quelles ont recueillies sur les tamines des fleurs.

    Soleil dartifice Par les journes chaudes, sur-tout aprs quelques jours de pluie, on voit souvent desabeilles voltiger autour de la ruche en cercles de plus enplus grands. Ce ne sont pas des butineuses, mais de jeunesabeilles qui font la reconnaissance de leur ruche et de sonemplacement. Leur exercice sappelle soleil dartifice .

    Barbe Quand il fait trs chaud, les abeilles man-quant de place lintrieur de la ruche pour scarter lesunes des autres se rpandent au dehors en groupe devantlentre et mme sous la ruche, attaches les unes auxautres par les pattes. On dit alors que les abeilles fontla barbe. Elles font aussi la barbe quand elles se prparent essaimer.

    En avant, une abeille nettoyeuse emporte une abeille morte.Au milieu, deux bourdons, plus courts et plus gros. Prsde lentre, deux ouvrires apportent du pollen quon voit leurs pattes.

    En avant, une gardienne fait la reconnaissance dune abeille.Prs de lentre, des ventileuses ventilent la ruche.

    Les abeilles font la barbe.

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  • Ce que lon voit lintrieur dune rucheRayons Ce quon peroit dabord dans une ruche,

    ce sont les plaques de cire creuses de cavits rgulires. Cesplaques sappellent rayons ou btisses ; ces cavits, cellulesou alvoles. Les unes sont commences, les autres termi-nes. Les rayons sont spars par un intervalle dun centi-mtre environ.

    Rayons commencs vus de face et de profil.

    ufs et larves.

    En haut, cellules non ache-ves, c. Puis cellule dontla reine est sortie nor-malement, ensuite, celluleopercule, renfermant unereine, b. Enfin cellule d-chire dont la reine a ttue, d.

    Cellules de reine.

    Cellules Les cellules sont de dimensions diff-rentes. Les cellules de mles sont les plus grandes ; les cel-lules douvrires sont les plus petites.

    Il y a aussi des cellules irrgulires, dites cellules de rac-cord. Enfin il y a quelquefois des cellules de reine, duneforme spciale, ressemblant extrieurement une caca-hute.

    Les cellules peuvent avoir un couvercle appel oper-cule . Les cellules non couvertes peuvent tre vides oucontenir des ufs, des larves, du pollen ou du miel. Lescellules opercules contiennent du couvain si lopercule estbomb et mat, du miel si lopercule est plat et brillant.

    Les ufs ont la position horizontale le premier jour, laposition incline le deuxime, la position couche le troi-sime. Les larves sorties des ufs varient de grosseur sui-vant leur ge.

    gauche, cellules de bourdons. droite, cellules douvrire. Aumilieu, cellules de raccord.

    Habitants Dans la ruche il y a videmment unereine, des ouvrires et des mles. Nous en avons parl dansun prcdent chapitre.

    La reine na dautre occupation que la ponte. Les ou-vrires vaquent diffrentes occupations : nourrir la reineet les larves ; apporter nectar, pollen, propolis et eau ; net-toyer les cellules et la ruche. Les mles sont dissmins surle couvain sans occupation apparente, probablement pourle chauffer. Aux heures chaudes o on visite la ruche, lesmles sont dehors ou dans les coins de la ruche pour nepas gner les abeilles.

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  • gauche, cellules de boudons opercules plus bombes et mates. droite,cellules douvrires opercules bombes et mates.

    En haut : Cellules opercules contenant du miel, plates et brillantes.

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  • Les difficults de lapicultureLapiculture est utile et agrable : cest incontestable.

    Pourquoi donc nest-elle pas plus dveloppe ? Car il ny apas dabeilles, ou pas assez, partout o il y a des fleurs fconder et du miel butiner.

    Laiguillon de labeille est le premier obstacle. Les com-plications du matriel, comme les complications des m-thodes, en sont un autre. Enfin, lobstacle dcisif, cest lepeu de bnfice que semble laisser la pratique de lapicul-ture.

    Or, nous crivons ce livre pour anantir tous ces obs-tacles. Nous vous dirons la douceur de labeille. Nous vousdonnerons les dimensions dune ruche conomique. Nousvous indiquerons une mthode simple, galement cono-mique. Nous vous garantissons, si vous suivez nos conseils,un bnfice certain et important.

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  • Lapiculture sans piqresLe premier obstacle lextension de lapiculture, cest

    laiguillon de labeille.On peut discourir de longues heures sur labeille, dans

    tous les pays, dans toutes les classes de la socit, on trou-vera partout et toujours des oreilles attentives. Labeille estsympathique, mais les meilleurs amis des abeilles avoue-ront quils ne font pas dapiculture parce quils redoutentlaiguillon de labeille. Cet aiguillon parat, en effet, redou-table ; mais lest-il en ralit ?

    Labeille est souvent maltraite, bouscule par le mois-sonneur, par les animaux, quand elle butine dans une prai-rie artificielle. Or, jamais elle ne les pique.

    Faites vous-mme cette exprience. Quand vos arbressont en fleurs, examinez les abeilles qui butinent sur cesfleurs. Si vous le voulez, pour la mieux distinguer, jetez surlune delles un peu de farine ou de poudre de riz et suivez-la. Poussez-la du bout du doigt, elle va sur une autre fleur.Poussez-la encore, elle va plus loin. Vous pouvez continuerce jeu aussi longtemps que vous voudrez. Labeille ne senira que lorsquelle aura recueilli sa charge de miel. Jamaiselle ne vous piquera.

    Vous avez pu voir des apiculteurs professionnels tra-vailler au milieu de leurs abeilles, sans crainte, sans prcau-tions apparentes, sans mme se couvrir la tte dun voile.

    Dans les premires ditions de mon manuel, jai repro-duit par de nombreuses photos tous les travaux apicoles delanne, mme le transvasement dune ruche vulgaire, tra-vail qui se termine coups de btons. Or, on peut constatersur ces photos quil y a des abeilles dans les ruches opres,que les oprateurs nont ni gants ni voile, quils nont pourtoute arme quun modeste enfumoir Bingham, et quenfinau pied de chaque ruche opre est, tranquillement couch,mon chien, mon ami Polo, un pagneul cocker, longuesoreilles et poils longs : tout ce quil fallait pour quuneseule abeille y ait produit une rvolution sil y avait eudes mcontents. Lune de ces photos est reproduite pageprcdente.

    Les abeilles ne sont donc pas mchantes par leur nature.Mais les abeilles ont pour mission de crer une famille et

    de la faire prosprer, damasser du miel et de le conserver.Et pour dfendre cette famille et ce miel les abeilles ontreu une arme puissante, leur aiguillon et son venin. Ellessen servent contre tout ennemi, rel ou apparent, avec uneprcipitation laquelle personne ne saurait se soustraire,avec une force contre laquelle ne peuvent prmunir ni les

    voiles, ni les gants, ni les gutres, ni les vtements les pluspais.

    Que lapiculteur, toutefois, fournisse ses abeilles unehabitation bien conditionne, des provisions suffisantes,quil se prsente elles en ami, il sera bien accueilli par lesabeilles et aprs quelques instants de fraternit, il pourra,sans danger, secouer ces bonnes abeilles, les bousculer, lesbrosser comme nous le faisons frquemment.Je ne connais pas un seul animal quon puisse traiter aussidurement que labeille.

    Javoue que deux catgories de personnes sont exposes tre souvent piques par les abeilles. Ce sont dabordles personnes violentes, violentes dans leurs gestes, vio-lentes dans leurs paroles. Ce sont ensuite les personnesqui portent une odeur forte, agrable ou non : personneayant une haleine ftide que cette ftidit proviennedune mauvaise dentition, dun mauvais estomac ou de lal-coolisme personnes malpropres personnes parfumes.Mais toutes les autres pourront faire de lapiculture avec lacertitude de ne pas tre piques par les abeilles, une seulecondition, cest quelles ne laisseront souponner en rienquelles sont des ennemies. Or, ce sera chose facile pourceux qui voudront suivre ma mthode, car pour chaqueopration jindiquerai dune faon prcise et dtaille lamanire de procder.

    Malgr mes affirmations sur la douceur des abeilles, jaiconstat chez certaines personnes une apprhension parfoisinsurmontable quand il sagissait dapprocher des abeillesla figure dcouverte. Cest pourquoi, dans ma mthode,jai prvu lemploi dun voile qui donne lapiculteur lacertitude quil ne pourra tre piqu la figure.

    Dailleurs, ma mthode diminue ou supprime le dangerde piqre. Le transvasement se fait distance du rucher.Pendant, cette opration on ne peut donc tre importunni par les abeilles des ruches voisines, ni par les butineusesde la ruche transvase. Aucun rayon nest retir de la rucheles abeilles prsentes ; lapiculteur ne peut donc ni craserni irriter les abeilles. Dans les oprations courantes de lan-ne, la ruche nest dcouverte quune fois, la rcolte ; ilny a donc pas de refroidissement frquent de la chambre couvain, pas de cause dirritation pour les abeilles.

    On peut donc faire de lapiculture sans danger de pi-qre. Je nhsite pas dire : quand un apiculteur est piqupar ses abeilles, il doit toujours se demander : quelle fauteai-je commise ?

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  • Le choix dune rucheLa deuxime difficult pour le dbutant en apiculture,

    cest le choix dune ruche, cest de savoir comment il logerases abeilles.

    Les systmes sont nombreux et diffrents, et tous ontleurs admirateurs et leurs adversaires.

    Cette difficult peut tre surmonte. Et voici comment :

    Systmes de ruches tudies dans mes ruchers : 1. RucheDuvauchelle. 2. Ruche Voirnot, semi-double, conduite deuxcolonies de 8 cadres. 3. Ruche Voirnot 10 cadres. 4. Ruche Dadant-Blatt. 5. Ruche Layens, conduite deuxcolonies de 9 cadres avec hausse. 6. Ruche Layens 12 cadresavec hausse.

    Ne tentez pas lexprience Il nest pas raredentendre le dbutant prendre cette rsolution : Je vaisessayer les deux ou trois systmes les plus en vogue, je lestudierai et je verrai quel est le meilleur.

    Or, la vie est courte, surtout la vie active. Si on nestpas un privilgi, on ne pourra arriver une conclusionsrieuse.

    Pour exprimenter diffrents systmes de ruches, il fautles tudier dans le mme rucher, sous une mme direction,avec un minimum de dix douze ruches de chaque systme,pendant une dizaine dannes. Autrement dit, il est nces-saire que ces ruches soient dans une situation identique etquelles puissent donner une vritable moyenne.

    Or, aprs ces dix ans, on pourra constater que tel sys-tme est parfait lhiver, par exemple, que tel autre est su-prieur lt. On confectionnera donc un systme de rucheso lon fera entrer tous les avantages des deux systmes tu-dis prcdemment. Et on tudiera ce nouveau systme deruches pendant une dizaine dannes. Aprs cette nouvelletude on pourra sapercevoir quon a une ruche parfaitepour labeille, rpondant tous ses besoins, mais mauvaisepour lapiculteur parce quelle lui demande beaucoup tropde surveillance. Fera-t-on une nouvelle exprience de dixans ? Le pourra-t-on ?

    Que des amateurs fassent ces expriences, ils y trouve-ront une grande satisfaction. Ces expriences mont pro-cur moi-mme des heures fort agrables.

    Ceux qui veulent ou doivent produire feront bien desen abstenir.

    Systmes de ruches tudis dans mes ruchers : 7. RucheLayens 9 cadres. 8. Ruche Jarry 12 cadres, btisseschaude. 9. Ruche Congrs 30 x 40, bas, 10 cadres. 10. Ruche Congrs 30 x 40, bas, 8 cadres. 11. Ruche Po-pulaire cadres mobiles. 12. Ruche Populaire rayons fixes(un des premiers modles).

    Dfiez-vous des conseils dautrui Lapi-culteur, quil crive ou quil parle, recommande naturelle-ment sa ruche, quil a cre, quil croit avoir perfectionne,ou celle quil a choisie. Or lamour paternel est aveugle.Lapiculteur ne voit pas les dfauts de sa ruche. Il voustrompera sans sen douter.

    Une passion dirige lhumanit, cest lorgueil. Appelons-le amour-propre.Or, lamour-propre empche lapiculteur davouer quilsest tromp dans le choix de sa ruche, si par hasard il senaperoit. Il dira quelle donne des rsultats merveilleux.Et force de le rpter, peut-tre finira-t-il par senconvaincre. Et sans penser quil vous trompe, il vous accu-sera des rcoltes tonnantes. De fait, vous serez tromp.

    Il faut reconnatre aussi que parfois lintrt guide cer-tains apiculteurs. Ils ne veulent pas que les concurrents semultiplient. Ils conseillent ce quils condamnent.

    Le constructeur, dautre part, sera port conseiller laruche quil fabrique en srie. Elle lui donne plus de bn-fices. Elle nest pas toujours la meilleure. Mieux vaut doncncouter personne. Dautant plus quil y a un moyen in-faillible de connatre la meilleure ruche.

    Basez-vous sur des principes apicoles ou scien-tifiques que tout le monde admet et que personnene peut contester.

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  • La valeur de mes conseilsPendant plus de trente ans jai tudi, dans mes ru-

    chers, les principaux systmes de ruches quon peut voirdans les figures page prcdente.

    Dans mes ruchers, javais 350 ruches de diffrents sys-tmes. Jai pu faire des comparaisons.

    Toutefois je ne veux imposer mon exprience per-sonne. Pour faire valoir ma ruche et ma mthode, fruit de

    mes tudes, je ne mettrai en avant ni mon travail, ni lesrsultats obtenus. Je donnerai simplement les raisons deleur supriorit, raisons bases sur des principes apicoleset scientifiques incontestables.

    Dailleurs, puisque je donne les dimensions de la rucheque je recommande, mes conseils nont rien dintress.

    La meilleure rucheApiculture scientifique Voulez-vous tudier

    labeille dans sa vie, dans son travail ? Pour ce faire, cenest pas seulement une ruche vitre quil vous faut, maisune ruche dont vous pourrez examiner volont tous lesrecoins. Dans ce cas, cest la ruche cadres qui simpose,et encore faudrait-il que les cadres de cette ruche puissentscarter volont. Il faudrait que les cadres soient feuille-tables comme les feuillets dun livre.

    Cest dune ruche de ce genre que se servit FranoisHubert pour ses fameuses observations.Cette ruche vous cotera cher et ne sera daucun rapport.Cest un sacrifice la science.

    Apiculture productive Voulez-vous, aucontraire, retirer de votre rucher un miel certainement na-turel et moins coteux que celui de lpicier ? Voulez-vousfonder une exploitation qui vous nourrisse vous et votrefamille ? Dans ce cas, il vous faut une ruche moins chre,une ruche dont la conduite exige moins de travail, dont lemiel, en un mot, soit dun prix de revient infrieur. Or,seule la ruche rayons fixes peut vous donner ce rsultat.

    Raisons de ce conseil Ce conseil peut pa-ratre tmraire devant le grand nombre de ruches cadresde tous systmes, offertes aux apiculteurs et employs pareux.

    Rflchissez sur ce fait. Quels sont les ruchers modernesqui nont pas t abandonns aprs quelques annes dex-prience ? Ceux des instituteurs, des curs, etc., qui ontdu temps disponible quils nemploieraient pas autrement.Ceux encore des apiculteurs qui ont su et ont pu greffersur leur rucher un commerce quelconque : construction deruches, confiserie, etc.

    Tous les autres ruchers disparaissent vite parce quilsne nourrissent pas leur homme.

    Il nest dailleurs pas ncessaire dtudier comparative-ment les ruches modernes pour se rendre compte de leurnon-valeur : ce qui serait long et coteux, nous lavonsdit. Il suffit de compter ce quelles cotent installer, cequelles exigent dheures de travail pour pouvoir conclure,sans mme tre apiculteur, que leur produit est ncessai-rement dun prix de revient trop lev. Les prix des ruches cadres et de leurs accessoires, on le trouvera dans lescatalogues des constructeurs. Nous ne nous en occuperonspas. Nous considrerons seulement les heures de travail quedemande chaque systme.

    Nombre de systmes Le nombre des modlesde ruches saccrot tous les jours. On enlve un centimtreici, on en ajoute un par l, on fait passer les cadres partoutes les formes gomtriques, et on annonce une nou-velle ruche qui, elle, russira mieux que les autres fairela fortune de lapiculteur. Elle commence par multiplierla mise de fonds, car toutes ces modifications, en gnral,augmentent le prix de la ruche. En tout cas, elles ne consti-tuent pas un systme nouveau parce quelles ne sont pasbases sur un principe apicole essentiel.

    Mais beaucoup dapiculteurs ont la manie de linven-tion. Il faut quils changent quelque chose aux ruches quilspossdent.

    La Ruche Populaire elle-mme est dj la victime desinventeurs. On dit quon lamliore. Or, les amliorationsque je connais sont toutes inutiles, certaines sont nuisibles,quelques-unes absurdes.

    De fait, toutes les ruches du commerce peuvent treramenes quatre systmes : la ruche Dadant, la rucheVoirnot, la ruche Layens et la ruche vulgaire ou commune.

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  • La ruche Dadant

    Ch. Dadant.

    (communiqu par lApiculteur)

    La ruche Dadant contient douze cadres. Les cadres ontles dimensions suivantes : hauteur : 0,266 ; longueur : 0,42 ;ses hausses ont des demi-cadres.

    Sa vogue Aussitt son apparition, la ruche Da-dant eut un grand succs.Un grand dsabus a dit des Franais : Lgret, in-constance, passion pour la nouveaut et pour la mode,quils suivent aveuglment dans les choses les plus srieusescomme dans les plus frivoles. Un diplomate a dit aussi : Les Franais sont de grands enfants qui acceptent sanscontrle les dires dautrui, surtout de ltranger.

    Et un historien a crit : Les Franais ont la maniedexalter ce qui vient du dehors aux dpens de ce quilsont chez eux.

    Or, si Dadant tait dorigine franaise, il habitaitlAmrique. Dailleurs, la ruche Dadant que nous em-ployons nest pas celle quutilisait Dadant. Et Dadant taitun fabricant de cire gaufre plus quun apiculteur. Per-sonne ne sen est proccup.

    Dailleurs, la ruche Dadant offrait une affaire exploi-ter. Des maisons se sont cres et multiplies. Elles onttoutes recommand la ruche Dadant qui les faisait vivre.Avec la ruche vulgaire elles nauraient gure eu de fourni-tures faire.

    Enfin, il faut le reconnatre, la ruche Dadant permet-tait de se servir de lextracteur, invention dont lutilit estincontestable. On ne prvoyait pas quavec quelques modi-fications, on pourrait employer lextracteur pour lextrac-tion du miel des ruches rayons fixes.

    Ses dimensions Les dimensions de la ruche Da-dant exigent videmment plus de bois quune ruche de 0,30x 0,30. Or, le bois cote cher.

    De plus, au printemps, quand la colonie veut allongerson couvain, elle doit chauffer la ruche sur une surface de2 000 cm2 au lieu de 900 comme dans notre ruche. Or, lemiel est le seul combustible de labeille. Do surmenagede labeille et consommation supplmentaire des provisionshivernales.

    Son cadre Certains considrent le cadre commencessaire pour la surveillance de la ruche, pour le traite-ment des maladies, pour lextraction du miel.

    Or, je considre le cadre comme une des principalescauses des maladies. En facilitant les visites, il les multi-plie, do fatigue des abeilles pour rtablir la tempraturede la ruche, do affaiblissement de la race et plus grandeaptitude contracter les maladies. Pas besoin de cadrepour voir ltat des provisions. Si, lautomne, on a laissles provisions ncessaires, il ny a plus lieu de sen occuper.

    Pas besoin de cadres pour voir ltat de la colonie. Si lesabeilles apportent du pollen, il y a reine et couvain. Toutva bien.

    Le nombre des entres et sorties indique la force de lacolonie.

    Sil y a une grande diminution du nombre des sorties, ilest prfrable de supprimer la colonie que lon remplacerapar un essaim ou une chasse. Si dans cette suppression onconstatait une mauvaise odeur ou la pourriture du couvain,il y aurait lieu de dsinfecter la ruche par le feu ou leau

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  • de Javel. Cest plus conomique que tous les traitementsprconiss qui ne conviennent quaux savants qui font destudes.

    Pas besoin, non plus, de cadres pour lextraction dumiel. Nous avons des cages qui permettent lextraction desrayons fixes au moyen de lextracteur. Avec ces cages lerayon fixe tient et rsiste au moins aussi bien que le cadre.

    Et puis, les partisans du cadre doivent le reconnatre,combien de temps la ruche cadres garde-t-elle ses cadresmobiles quand elle est sortie de la menuiserie ? Deux ansau plus. Car la plupart des apiculteurs ne font pas le net-toyage de printemps et les cadres sont vite colls entre euxet avec les parois de la ruche. Alors pourquoi des cadres ?

    En tout cas, comme tout cadre, le cadre Dadant de-mande un rabotage finement fait pour faciliter son net-toyage la visite de printemps. De plus, il exige une grandeprcision. Il faut laisser un vide de 0,0075 entre les paroisde la ruche et les cadres, et le maintenir. Sil y a un videde 0,005, les abeilles le rempliront de propolis. Sil y a unvide de 0,01, les abeilles y construiront des rayons, car lesabeilles ont horreur du vide. Dans les deux cas, les cadrescesseront dtre mobiles. Cette prcision augmente le prixde revient de la ruche.

    De plus, la ruche Dadant a un cadre long et bas. Dix-huit kg de miel rparti entre 12 cadres ne fourniront gureplus dun kg aux cadres du milieu. Il ny aura mme dumiel que dans les angles, rien au milieu. Les abeilles pourhiverner se grouperont sur le miel des angles, en avant ou enarrire de la ruche, du ct du soleil. Quand les abeilles au-ront consomm tout le miel qui se trouve au-dessus de leurgroupe, elles iront se placer lautre extrmit du cadre oil y a encore du miel. Mais si la temprature est basse, ellesne pourront faire ce dplacement parce quelles ne trouve-ront pas au milieu des cadres le viatique ncessaire. Ellesmourront de faim leur place ct de provisions. Granddfaut des ruches cadres bas et longs.

    Enfin, le cadre augmente considrablement le volumede la ruche, nous en avons indiqu les inconvnients.

    La cire gaufre La cire gaufre employe dans laruche Dadant cote cher. Les accessoires quexige sa posecotent cher. La pose de cette cire est minutieuse et prenddu temps. La cire gaufre constitue donc une dpense detemps et dargent considrable et augmente le prix de re-vient de la ruche et, par le fait mme, du miel.

    Or, en dehors de la mielle, la cire gaufre est en ap-port bien minime, elle nconomise que bien peu de mielet moins de temps encore, car les abeilles ne laissent pastoujours les cellules dans ltat o on les leur donne.

    Pendant la mielle, et cest le seul temps o on doitfaire construire des rayons, lapport de la cire gaufre estplus nuisible quutile. La cire nest autre que la sueur delabeille. Or, pendant la mielle, labeille sue beaucoup, carelle donne toujours le maximum deffort dans son travail.La cire gaufre est donc inutile cette poque, elle estmme nuisible, car elle empche les abeilles de construireleurs rayons droits et rguliers.

    Le cadre, garni de cire gaufre, aussitt plac dans laruche, subit des degrs de chaleur diffrents de sa base son sommet.

    Ruche moderne : un des cadres, garni de cire gaufr, estretir de la ruche.

    Il sensuit des dilatations diffrentes de la cire gaufreet du fil de fer qui la soutient, do des gondolements dansle rayon. Sans cire gaufre, les abeilles construisent leursrayons au fur et mesure des besoins, avec de la bonnecire (la leur) et avec lpaisseur ordinaire du rayon. Ellesle solidifient donc au fur et mesure quelles lallongent.

    Voil pourquoi nous nemployons pas la cire gaufre.Nous nous contentons de placer une amorce de 0,005 avecde la cire brute non falsifie.

    Et nous considrons cette amorce non comme une co-nomie de miel, mais comme un moyen dobliger les abeilles construire leurs rayons dans le mme sens pour faciliterle travail de lapiculteur.

    Son peuplement Pour peupler une ruche Da-dant, un essaim de 2 kg ne suffit pas, encore moins unessaim de 1,5 kg. Il faudrait un essaim de 4 kg. On ne letrouvera pas dans le commerce. Un essaim de 2 kg met-tra deux ans et plus pour sinstaller et donner une rcolte.Dans notre ruche un essaim de 2 kg sinstallera la premireanne et donnera une rcolte trois mois aprs son installa-tion.

    Ses planchettes La chambre couvain de laruche Dadant est recouverte de planchettes ou de toile ci-re. Or, dans toute ruche il y a de lhumidit en raison delvaporation du miel et de la respiration animale. Or, cettehumidit, chauffe par le groupe dabeilles, monte dans lehaut de la ruche, sarrte aux planchettes quelle ne peuttraverser, stend vers les extrmits de la ruche o ellese refroidit, tombe en brouillard sur les cadres extrmesdont elle dtriore les rayons. Do perte. Ce brouillardmaintient les abeilles dans un milieu continuellement hu-mide. Ce nest pas hyginique. Notre toit couvre-rayonsvite cette perte et respecte lhygine des abeilles.

    Son coussin Le coussin qui recouvre la chambre couvain de la ruche Dadant na que 3 4 centimtresdpaisseur et il est form par une toile en dessus et endessous. Cette paisseur est insuffisante pour que le cous-sin remplisse son rle disolateur. De plus, la toile du dessusne permet pas de voir si son contenu est toujours isolateur,car lhumidit finit tt ou tard par latteindre. Nous prf-rons notre coussin de 0,10 non recouvert. Il est plus efficaceet le renouvellement de son contenu est plus facile et plusrapide.

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  • La visite de printemps Il est ncessaire devisiter la ruche Dadant, comme toutes les ruches cadresdailleurs, au printemps, en avril dans la rgion parisienne,de midi 14 heures et par beau temps.

    Car il importe que la population ne soit pas trop d-veloppe et que la temprature ne soit pas trop basse. Latemprature sera toujours plus basse que celle de la ruche.Cest pourquoi il est recommand de procder rapidement,quoique sans brutalit.

    Dans cette visite de la ruche, il faut dabord nettoyertous les cadres, ainsi que les parois. Puis il faut enlevertous les vieux cadres. Labeille a horreur du vide.

    Ruche moderne et sa hausse. En bas, chambre ou nid couvain.

    Aussi le vide laiss entre les rayons et les parois de laruche, labeille travaille continuellement le combler avecla propolis. Si on nenlve pas cette propolis, tous les ans,tant aux cadres quaux parois de la ruche, ds la premireanne, le maniement des cadres devient difficile il sera im-possible la deuxime anne ou la troisime anne.

    la visite de printemps, il faut donc prendre tous lescadres un un et en gratter tout le tour pour enlever lapropolis.

    Il faut aussi dplacer les cadres pour pouvoir gratteraussi les parois de la ruche. Aprs ce travail il faut enle-ver tous les vieux cadres noirs. Dans les vieux cadres, lescellules sont diminues par les pellicules que laisse chaqueabeille sa naissance. Si ces vieux cadres taient conservs,les abeilles qui y natraient seraient de plus en plus petites,faibles au travail, incapables de rsister aux maladies. Orces cadres contiennent quelquefois du couvain. Il faut alors

    les dplacer, les loigner du centre, attendre lclosion ducouvain et revenir les enlever.

    Ce travail mcontente les abeilles dont il refroidit lesberceaux, oblige les abeilles consommer des provisionspour rchauffer la chambre couvain et demande un tempsconsidrable lapiculteur. Aussi nhsitons-nous pas af-firmer quun apiculteur seul narrivera pas chaque anne faire cette visite dans quarante ruches.

    Or, notre mthode rduit cette visite de printemps un travail insignifiant, qui peut dailleurs tre fait touteheure et par toute temprature, puisquil ne ncessite paslouverture de la ruche. Il est bon de noter ici que les ruchesdites automatiques ne sont rellement automatiques quechez le menuisier. Au rucher, elles ne le sont plus.

    Son agrandissement Si en hiver le volume dela ruche doit tre rduit un minimum suffisant, en til doit fournir aux abeilles un espace largement suffisantpour le dveloppement de la colonie et pour les apports dumiel. Do la ncessit dajouter des hausses. Or, il ne fautpas placer les hausses trop tt pour viter le refroidisse-ment du couvain et larrt de la ponte. Il ne faut pas nonplus les placer trop tard pour viter lessaimage qui, lui,supprime la rcolte. En principe, on doit placer une haussequand tous les cadres sont occups, sauf un, chaque ex-trmit de la chambre couvain. Il faudra souvent ajouterune deuxime hausse, quand la premire est au trois quartspleine de miel. Il faudra donc ouvrir les ruches pour consta-ter la situation. Or les ruches ne sont pas toutes au mmepoint. Il faudra donc souvent ouvrir les ruches plusieursfois, do dpense de temps, refroidissement de la chambre couvain, consommation de provisions, surmenage et m-contentement des abeilles.

    Or, dans notre mthode, nous plaons les hausses au-dessous et non au dessus de la chambre couvain et sansouvrir la ruche. Nous pouvons en placer plusieurs la foiset aussitt que nous voulons, mme en faisant notre vi-site de printemps, et par toute temprature. Do grandeconomie de temps.

    Ses provisions En raison de ses dimensions etdes visites quelle exige, la ruche Dadant a besoin de 18 kgde provisions pour lhiver. Certains auteurs disent 20 kg.Dans notre ruche 12 kg de provisions suffisent. La diff-rence est grande.

    Aprs cet expos, il nest pas ncessaire davoir pra-tiqu lapiculture pour comprendre que dans la conduitede la ruche Dadant labeille est sans cesse contrarie, sanscesse oblige un surmenage non prvu par la nature, une consommation de miel inutile. Labeille sera donc plusirritable ; elle sera aussi moins rsistante aux maladies, etlapiculteur y perdra quelques kg de miel et beaucoup detemps.

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  • La ruche Voirnot

    Abb Voirnot.

    (Communiqu par lApiculteur)

    Labb Voirnot devait connatre les deux bonnes ruchesfranaises Decouadic et Palteau. Il aurait pu, aussi bienque moi, trouver le moyen de se servir de lextracteur pourextraire les rayons fixes de ces ruches. Son intelligence etsa persvrance dans dautres recherches montrent quil entait capable.

    Or, labb Voirnot na jamais parl de ces deux ruches.Fascin par les avantages de lextracteur, il a accept desuite la ruche cadres qui permettait de suite de se servirde lextracteur.

    Mais il na pas accept la ruche Dadant telle quelle luitait prsente ; il en a compris les dfauts.

    Dimensions Les dimensions de la ruche Dadantlont frapp tout dabord. Aprs des observations bien m-ritoires, labb Voirnot a conclu que 100 dcimtres carrsde rayons donnaient la ruche une dimension ncessaire,mais suffisante pour lhiver et le printemps. Cest la dimen-sion quil a donne sa ruche et qui fait sa supriorit surla ruche Dadant.

    Hauteur et forme Labb Voirnot a donn plusde hauteur au cadre de sa ruche afin que les abeilles aienttoujours toutes leurs provisions au-dessus de leur groupe.Donc, plus de mortalit de colonies ct de bonnes pro-visions.

    Labb Voirnot a donn sa ruche la forme carre,parce que cette forme se rapproche le plus de la forme

    cylindrique, forme o la rpartition de la chaleur se fait leplus galement, mais forme de construction trop coteuse.

    Cette forme carre permet de placer la ruche, volont, btisse chaude ou btisse froide : petit avantage.

    Labb Voirnot a donn aussi sa ruche la forme cu-bique, parce que cette forme se rapproche de la forme sph-rique, forme o la rpartition de la lumire se fait le plusgalement. L, labb Voirnot a commis une erreur. Dans laruche nous navons pas envisager la lumire : les abeillesne dsirent que lobscurit. Et cette forme cubique a em-pch labb Voirnot dlever son cadre autant que M. deLayens. Erreur fcheuse.

    Agrandissement Labb Voirnot a vu aussi lesinconvnients de lagrandissement dans la ruche Dadant.Sur ce point, il sest content de rduire 0,10 la hauteurde la hausse de sa ruche. Cest peu de chose.

    Peuplement et provisions Vu les dimensionsde la ruche Voirnot, un essaim de 2 kg suffit pour la peu-pler et 15 16 kg de miel suffisent comme provisions hi-vernales : deux avantages qui ont leur importance. Maisnoublions pas que dans notre ruche, 12 kg de provisionssuffisent largement.

    part les avantages que nous venons de signaler, laruche Voirnot conserve tous les dfauts de la ruche Da-dant : cadres, cire gaufre, coussin, visite de printemps,agrandissement, provisions, planchettes.

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  • La ruche Layens

    De Layens

    (Communiqu par lApiculteur)

    Comme labb Voirnot, M. de Layens a accept de suitele principe du cadre mobile. Toutefois, par la hauteur quila donne son cadre, il semble stre souvenu des bonnesruches franaises. En tout cas il na pas accept non plusla ruche Dadant avec ses dfauts.

    Son cadre M. de Layens a donn son cadreune hauteur de 0,37. Ce cadre est meilleur que celui dela ruche Voirnot qui na que 0,33. Avec ce cadre, mieuxencore quavec celui de la ruche Voirnot, les abeilles onttoujours toutes les provisions au-dessus de leur groupe. Lnon plus, plus de mortalit de colonies ct de bonnesprovisions. La ruche Layens, rduite 9 cadres par despartitions, donne un hivernage parfait.

    Or, la dimension du cadre Layens, 0,37 x 0,31, se rap-proche de celle des deux rayons superposs de notre ruche,0,40 x 0,30.

    Peuplement et provisions Dans une rucheLayens rduite 9 cadres par des partitions, un essaim de2 kg suffit, et 15 16 kg de miel suffisent galement commeprovisions hivernales. Notez que cest encore 3 4 kg enplus que dans notre ruche.

    Agrandissement M. de Layens a vu aussi degrosses difficults dans la pose de la hausse sur la ruche Da-dant. Catgorique, il a simplement supprim la hausse etil la remplace par des cadres ajouts de chaque ct de lachambre couvain. M. de Layens sest tromp. Quand lesabeilles ont garni de miel le cadre plac contre la chambre couvain, elles ne peuvent passer sur ce cadre pour porterle miel dans les cadres suivants. Il faut surveiller ce cadre.Quand il est moiti garni de miel, il faut lloigner etmettre sa place un cadre vide. Sinon les abeilles essaimentfaute de place utilisable. Les difficults de lagrandissementne sont pas diminues, au contraire.

    La ruche Layens na donc comme avantage que la hau-teur de son cadre. part cela, elle a tous les dfauts de laruche Dadant : cadres, cire gaufre, planchettes, coussin,visite de printemps, agrandissement, provisions.

    Observations On reparle de la ruche Layens mo-dernise. Or il y a une cinquantaine dannes que nousavons abandonn cette ruche neuf cadres avec hausses.Lhivernage sy faisait bien, mais les abeilles ne montaientque rarement dans les hausses. Au sommet des cadreshauts, il reste souvent un peu de miel. Or les abeillesnaiment pas passer sur le miel. Elles prfrent essaimer.

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  • La ruche mixteLapiculture sans principes Je nignore pas

    que beaucoup de propritaires de ruches ne les conduisentpas selon les principes apicoles dont jai parl.

    Ils jettent un essaim dans une ruche. Au printemps, ilsajoutent une hausse. lautomne, ils rcoltent le miel dela hausse. Cest tout.

    Ruche mixte et sa hausse.

    Il y a trop de miel dans le nid couvain et les abeillesessaiment au printemps, faute de place. Ou bien il ny apas assez de miel et les abeilles meurent de faim si on neles sauve pas assez tt par un nourrissement ruineux.

    Les abeilles nes dans les vieux cadres sont faibles, sansrsistance aux maladies, dangereuses pour les ruchers voi-sins.De plus, les cadres du nid couvain cessent bientt dtremobiles.

    Lapiculture logique Pour ces apiculteurs, lesruches modernes ne conviennent pas. Ils devraient adopterla ruche mixte.

    Ruche calotte : A Calotte ; B Corps de ruche.

    La ruche mixte est une ruche vulgaire ou commune rayons fixes sur laquelle on place une hausse cadres mo-biles. Le bas, ou nid couvain, peut tre en paille, en osierou en bois.

    La ruche calotte leur conviendrait galement, mais jeviens de le dire bien haut, ces ruches nont quune qua-lit : elles sont conomiques, dans leur tablissement seule-ment, car elles conduisent des dsastres parce que leursrayons ne sont pas renouvels et parce que les provisionsne sont pas vrifies. Si les provisions sont insuffisantes, lesabeilles mourront. Si les provisions sont trop abondantes,les abeilles essaimeront faute de place ; en tout cas, ellesne monteront ni dans la hausse ni dans la calotte, parcequelles ne passent pas sur le miel.

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  • La ruche vulgaire ou commune ou ruche clocheSes partisans Beaucoup de jeunes amateurs

    dabeilles adoptrent la ruche moderne cadres son ap-parition. Bon nombre de propritaires de ruches vulgairesrestrent pourtant fidles leur systme.

    La plupart sont des paysans prudents qui prfrent lacertitude, mme la probabilit. Or, les annes se sontsuccd sans quils aient eu la preuve de leur erreur.

    Intrieur dune ruche vulgaire ou ruche cloche.

    Voici une observation qui aboutit la mme conclusion.Dans mon village natal, chaque famille avait son rucher.Tous mes camarades denfance consommaient comme moi,chaque hiver, en abondance, de bonnes tartines au miel.Vingt ans plus tard, jtais le seul possder des ruches.Dans quelques jardins, il y avait soit une ruche Dadant, soitune ruche Layens, abandonne, vide bien entendu. Les pro-pritaires staient laiss tenter par la rclame de quelqueexposant dans les concours agricoles. Ils avaient cru fairemieux avec ces ruches modernes. De fait, ils avaient aban-donn la seule ruche, qui leur convenait.

    Ses mthodes Les mthodes suivies avec la ruchevulgaire sont multiples, comme les buts poursuivis par lesapiculteurs. Ces mthodes restent dailleurs pour la plupartmystrieuses. Il est trs difficile darriver les connatre endtail.

    En tout cas, voici ce qui se faisait au rucher paternelo se trouvaient toujours douze quinze ruches vulgaires.

    La ruche tait faite pendant les soires dhiver, avec dela paille de seigle, cousue avec des ronces fendues ou avecde la ficelle.

    Sa contenance tait de 40 litres. Aux plus fortes, aupremier printemps, on ajoutait en guise de hausse, en des-sous, le cercle en bois dun tamis de cuisine dont la soieavait disparu. lautomne, on asphyxiait toutes les ruchesqui pesaient plus de 25 kg. On en rcoltait le miel et lacire.

    Dans le cours de lt, on recevait tous les essaims dansdes ruches vulgaires vides. Au printemps, certains essaimstardifs taient morts de faim. On en rcoltait la cire.

    la maison paternelle, il y avait toujours du miel enabondance pour matres et ouvriers, mme pour les ani-maux de la basse-cour. Tous les amis de la ville avaientaussi leur part chaque anne.

    Ruche cloche en osier : a poigne ; b petit bois ; c enduitde pourget (mlange dargile et de bouse de vache).

    Ruche cloche avec son surtout en paille.

    Ce procd tait simple et peu dispendieux, mais bar-bare, ingrat mme, et aussi irraisonn, car il ne donnait pasle maximum de production. Ce procd, toutefois, procu-rait du miel bon march et des abeilles saines et fortespour repeupler les ruches modernes o la mortalit est fr-quente.

    Un bon procd Pour tirer parti de la ruchevulgaire voici comment on pourrait oprer. Au commen-cement de la grande mielle, faire monter les abeilles dansune ruche vulgaire vide, comme nous lindiquons plus loinau chapitre Transvasement. Le miel et la cire seraient r-colts et le couvain dtruit.

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  • Soyons des sages Les vnements ont poussvers lapiculture nombre de personnes : les unes parmanque de sucre, les autres par ncessit dun petit tra-vail rmunrateur. Des ruchers se sont crs. Des ruchersse sont agrandis. Les petits ruchers disparatront certaine-ment ds que le sucre sera revenu sur le march libre. Ilrestera quand mme plus de ruches que jamais. Il y auradonc une plus grande production de miel.

    Or la consommation actuelle du miel se maintiendra-t-elle ? Oui, si le miel est vendu au prix du sucre, pluttmoins cher, car le sucre est le seul concurrent du miel. Onnachte pas du miel pour remplacer le beurre, on achtedu miel pour remplacer le sucre.

    Le miel est le seul sucre hyginique, cest entendu. Maisle sucre a une puissance sucrante plus forte et il est dunemanipulation plus facile.

    Les optimistes nous disent que le public, oblig dem-ployer le miel depuis quelques annes, a pu en apprcier lesqualits et quil lui restera fidle, et aussi quune publicitintelligente continuera pousser le public vers le miel. Jenen crois rien.

    Jai fait beaucoup de publicit dans ma vie et pour lemiel et pour les plantes mdicinales. Jai eu des correspon-dants, non seulement en France, mais dans le monde entier,en Turquie, aux Indes, en Chine, en Amrique, etc. Or, jaiconstat que partout il y a des hommes raisonnables qui

    savent se soumettre aux lois de la nature et de lhygine,pour avoir une vie sans souffrance et une mort tardive sansdouleur. Oui, mais combien peu ! La plupart des hommes,le grand nombre, prfrent une pilule ou une piqre unetasse de tisane, un morceau de sucre une cuillre de miel,quelques-uns en raison dune conomie apparente, passa-blement en raison de la commodit, beaucoup simplementpour faire comme tout le monde. Et comme tout le monde,ils contractent toutes les maladies possibles, comme toutle monde ils font vivre mdecins et pharmaciens, commetout le monde ils meurent plus tt et pniblement. Un sagena-t-il pas crit que les hommes se tuent en mangeant.Les vnements ont-ils chang les hommes ? Je ne lai pasconstat.

    Donc les apiculteurs devront vendre le miel au prix dusucre pour soutenir la concurrence, et mme moins chersils veulent faire les nouveaux clients dont ils auront be-soin.

    Dans ces conditions, lapiculture sera-t-elle encore r-munratrice ? Oui, mais la condition demployer desruches conomiques et de suivre une mthode conomiquepour obtenir du miel un prix de revient minime. Certai-nement on ne peut obtenir ce rsultat avec les ruches et lesmthodes en vogue dont nous venons de parler. On le peutavec la ruche et la mthode que nous allons vous proposer.

    Origine de la Ruche PopulaireDcid faire de lapiculture, je me trouvais perplexe

    devant divers systmes de ruches modernes.La ruche Dadant tait la plus rpandue. La premire,

    elle avait permis lemploi de lextracteur, invention trsutile ; mais dj les ruches Voirnot et Layens, qui en taientla critique des points de vue diffrents, la concurrenaientsrieusement. Une autre ruche venait dapparatre. Ctaitla ruche Congrs, cadres 30 x 40, sous deux formes,lune basse, lautre haute. Ne pouvant tirer une conclusionraisonne des polmiques retentissantes dalors, je rsolusdadopter tous ces systmes pour les tudier.

    Par ailleurs, les tudes de labb Voirnot sur le volumede la ruche me paraissaient intressantes, dautant plus quele docteur Duvauchelle, mon premier matre en apiculture,venait de modifier sa ruche et de lui donner huit cadres30 x 40 bas, soit 96 dcimtres carrs de rayons. Or, laruche Voirnot avait 100 dcimtres carrs de rayons. Ledocteur Duvauchelle semblait donc adopter les conclusionsde labb Voirnot sur ce point.

    Prcdemment, sa ruche navait que 8 cadres 28 x 36,donc 81 dcimtres carrs de rayons.

    Voulant tudier fond cette question de volume de laruche pendant lhiver, jai construit des ruches avec neufcadres Layens et des ruches avec huit cadres 30 x 40, lesunes basses, les autres hautes. Ces ruches avaient approxi-mativement le volume de la ruche Voirnot.

    Ne voulant pas baser mon exprience sur une ou deuxruches, mais sur une douzaine au moins de chaque systme,jai t amen construire 350 ruches.

    mon grand tonnement, jai constat de suite que lesabeilles consommaient moins de provisions dans les ruches

    parois simples o elles ressentaient cependant plus le froidde lhiver. Cest pourtant normal. Dans les ruches paroissimples, les abeilles sont engourdies, elles sont comme dansun sommeil continuel. Or, qui dort dne. Dans les ruches parois chaudes, les abeilles sont plus longtemps en activit ;elles ont besoin de soutien. La paroi simple conomise doncbois et provisions, jusqu 2 kg de novembre fvrier. Jaivite constat aussi que dans les chambres couvain recou-vertes de planchettes ou de toile cire les rayons extrmesnoircissaient vite et mme pourrissaient sous leffet de lhu-midit. Dans les chambres couvain recouvertes de toile ilnen tait pas de mme.Nous en avons donn les raisons prcdemment.Aprs une quinzaine dannes dobservations, jai cru pou-voir tirer les conclusions suivantes.

    M. de Layens, lavocat des apiculteurs, a raison de direque la ruche Dadant demande trop de dpenses dargent etde temps ; il a cr un bon cadre ; il a indiqu une construc-tion de ruche, facile et conomique. Par contre, il a faitfausse route en remplaant la hausse par des cadres placshorizontalement contre le couvain.

    Labb Voirnot, lavocat des abeilles, a raison quand ilreproche la ruche Dadant de nuire aux abeilles par sonvolume et par celui de sa hausse. La ruche Voirnot consti-tue un grand progrs.

    Je rsolus donc de reprendre les tudes de ces matresen apiculture avec lespoir darriver un meilleur rsultat,puisque, venant aprs eux, je profiterais de leurs travaux.

    Enfin, nous pouvions tirer cette conclusion importante :le volume de la ruche Voirnot est suffisant, quoique plus pe-tit, donc le meilleur, car plus la chambre couvain est r-

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  • duite, plus la consommation hivernale est diminue. Toute-fois, lhivernage se faisait mieux sur les cadres hauts commele cadre Layens et le cadre 30 x 40 haut.

    Nos prfrences allaient au cadre 30 x 40, parce quilfacilitait nos calculs.

    Dailleurs, la forme dune ruche huit cadres 30 x 40se rapproche de la forme de lessaim, et elle permet auxabeilles de placer plus de miel au-dessus de leur groupe,ce qui favorise un bon hivernage, mme en cas de froidprolong.

    De plus, cette forme facilite le dveloppement du cou-vain au printemps. Quand les abeilles veulent descendrele couvain dun centimtre, elles doivent chauffer ce cen-timtre sur toute la surface de la ruche. Or, cette surfacevarie de 900 cm2 dans notre ruche, 2 000 cm2 dans laruche Dadant. Il est vident que le travail de labeille serafacilit dans notre ruche.

    Et encore huit cadres 30 x 40, en nous fournissant lasurface ncessaire, nous donnaient une forme carre. Or,le carr est la forme qui se rapproche le plus de la formecylindrique, forme idale parce quelle favorise le rayonne-ment de la chaleur lintrieur de la ruche, mais forme peupraticable.

    La forme carre permet aussi de placer les ruches, volont, btisses chaudes en hiver, btisses froides ent, ce qui est considrer.

    Javais donc une ruche huit cadres 30 x 40, ruche par-faite pour lhiver. Mais si la ruche doit tre de dimensionsrduites en hiver, en t elle doit fournir aux abeilles, lar-gement, lespace dont elles ont besoin, deux, trois fois plusquen hiver. Que faire ?

    Placer une hausse sur cette ruche ? Ctait retomberdans lerreur reproche la ruche Dadant : passe-temps etrefroidissement du couvain. Dans notre cas, il y avait en-core un autre inconvnient. Nous avions constat que lesabeilles montaient difficilement dans les hausses places surcadres hauts, parce quil reste souvent un peu de miel ausommet de ces cadres. Or labeille passe difficilement surle miel.

    Placer un autre corps de ruche au-dessous comme le fai-sait labb Voirnot dans des ruchers loigns ? Pour beau-coup de ruches, le rsultat tait bon. Les abeilles remplis-saient de miel la ruche suprieure et sinstallaient dans laruche infrieure. Nous enlevions la ruche suprieure pouren rcolter le miel et au printemps nous la placions au-dessous de la ruche habite.

    De ce fait, tous les travaux apicoles se trouvaient sim-plifis. Au printemps, nous procdions au nettoyage du pla-teau aprs avoir dplac la ruche sans la dcouvrir. Nousnavions ni