39
1 L’institutionnalisation de la « culture scientifique et technique », un fait social français (1970 2010). Version du 12 octobre 2011 Olivier LAS VERGNAS, Chercheur invité - équipe "apprenance et formation des adultes" CREF Paris Ouest Nanterre La Défense (EA 1589), directeur de la Cité des métiers Universcience, président de l'association française d'astronomie Champ et méthodologie adoptée Cette note s’appuie sur une revue de la littérature traitant des différents dispositifs, organisations et courants d’acteurs qui ont explicitement joué un rôle dans la mise en valeur sociale de la dimension scientifique des cultures individuelle et collective. Elle se focalise sur la situation française où les discours ont spécifiquement mis en scène la « culture scientifique et technique », tout en tentant de l’éclairer par des publications internationales pertinentes pour saisir les dissemblances et les similarités avec d’autres contextes. Compte tenu des différences et de la polysémie des vocabulaires utilisés (même si on se limite à la France) ainsi que de la pluridisciplinarité des publications, la recherche documentaire classique par mots clefs dans des bases de données générales se révèle peu pertinente 1 . Nous avons donc procédé de manière empirique, d’une part en remontant les arborescences de citations à partir des bibliographies de colloques et de dossiers scientifiques récents et, chaque fois que cela était possible, par des recherches ciblées sur des expressions discriminantes. Résumé (400 mots) Dans les publications françaises, « culture scientifique et technique » (CST) recouvre le champ intitulé ailleurs public understanding of science ou scientific literacy. Avant d’être consacrée par la loi (1982), cette CST a émergé d’hybridations entre acteurs socio-culturels et scientifiques. Un conseil national et un programme mobilisateur, des colloques ou états généraux ainsi qu’un réseau de centres ad hoc ont ensuite fait converger, derrière cette appellation, de multiples organisations. Désignant tout 1 L’exemple le plus frappant est le résultat d’une requête sur l’expression française de « culture scientifique » dans les bases documentaires de référence comme Francis ou Refdoc qui renvoie des réponses très disparates et très fragmentaires par rapports aux citations des auteurs contemporains. On peut noter aussi l’extrême dispersion non significative des mots clefs qui ne sont en rien stabilisés et donc ni sélectifs, ni exhaustifs : ainsi « culture scientifique » renvoie autant à l’objet d’étude CST qu’au contenu des articles.

L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

  • Upload
    others

  • View
    2

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

1

Lrsquoinstitutionnalisation

de la laquo culture scientifique et technique raquo un fait social franccedilais (1970 ndash 2010)

Version du 12 octobre 2011

Olivier LAS VERGNAS

Chercheur inviteacute - eacutequipe apprenance et formation des adultes CREF Paris Ouest Nanterre La Deacutefense (EA 1589) directeur de la Citeacute des meacutetiers ndash Universcience preacutesident de lassociation franccedilaise dastronomie

Champ et meacutethodologie adopteacutee

Cette note srsquoappuie sur une revue de la litteacuterature traitant des diffeacuterents dispositifs

organisations et courants drsquoacteurs qui ont explicitement joueacute un rocircle dans la mise en

valeur sociale de la dimension scientifique des cultures individuelle et collective Elle

se focalise sur la situation franccedilaise ougrave les discours ont speacutecifiquement mis en scegravene

la laquo culture scientifique et technique raquo tout en tentant de lrsquoeacuteclairer par des

publications internationales pertinentes pour saisir les dissemblances et les

similariteacutes avec drsquoautres contextes

Compte tenu des diffeacuterences et de la polyseacutemie des vocabulaires utiliseacutes (mecircme si

on se limite agrave la France) ainsi que de la pluridisciplinariteacute des publications la

recherche documentaire classique par mots clefs dans des bases de donneacutees

geacuteneacuterales se reacutevegravele peu pertinente1 Nous avons donc proceacutedeacute de maniegravere

empirique drsquoune part en remontant les arborescences de citations agrave partir des

bibliographies de colloques et de dossiers scientifiques reacutecents et chaque fois que

cela eacutetait possible par des recherches cibleacutees sur des expressions discriminantes

Reacutesumeacute (400 mots) Dans les publications franccedilaises laquo culture scientifique et technique raquo (CST) recouvre

le champ intituleacute ailleurs public understanding of science ou scientific literacy Avant

drsquoecirctre consacreacutee par la loi (1982) cette CST a eacutemergeacute drsquohybridations entre acteurs

socio-culturels et scientifiques Un conseil national et un programme mobilisateur

des colloques ou eacutetats geacuteneacuteraux ainsi qursquoun reacuteseau de centres ad hoc ont ensuite

fait converger derriegravere cette appellation de multiples organisations Deacutesignant tout

1 Lrsquoexemple le plus frappant est le reacutesultat drsquoune requecircte sur lrsquoexpression franccedilaise de laquo culture scientifique raquo dans les bases

documentaires de reacutefeacuterence comme Francis ou Refdoc qui renvoie des reacuteponses tregraves disparates et tregraves fragmentaires par rapports aux citations des auteurs contemporains On peut noter aussi lrsquoextrecircme dispersion non significative des mots clefs qui ne sont en rien stabiliseacutes et donc ni seacutelectifs ni exhaustifs ainsi laquo culture scientifique raquo renvoie autant agrave lrsquoobjet drsquoeacutetude CST qursquoau contenu des articles

2

autant de la communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats

sur la gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques et se nourrissant drsquoacquis et de travaux rattacheacutes aux sciences de

lrsquoeacuteduction aux SIC ou agrave la sociologie et aux sciences politiques le champ de la

CST a ainsi agglomeacutereacute des corpus disparates sans donner naissance agrave un cadre

conceptuel inteacutegrateur ou agrave des frontiegraveres preacutecises

Ainsi les reacutesultats de ces politiques de CST ne peuvent ecirctre eacutevalueacutes en raison

drsquoamalgames seacutemantiques et les discours en leur faveur se trouvent se reacutepeacuteter

vainement depuis trois deacutecennies Entretenant lrsquoillusion de pouvoir ameacuteliorer agrave la fois

la deacutetection de lrsquoeacutelite et le partage des savoirs par tous ils oublient que le systegraveme

drsquoenseignement initial est reacutegleacute pour ne retenir en bac scientifique qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge et qursquoil renforce ainsi pour les frac34 restants les obstacles

cognitifs individuels en y ajoutant un obstacle laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite

une auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences Drsquoautant

que la CST officielle eacutetant une culture prescrite et non une culture veacutecue elle

renforce la rupture entre savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne

ce qui introduit une nouvelle forme drsquoobstacle eacutepisteacutemologique qualifiable de

laquo scolastique raquo

Coexistent ainsi deux familles de pratiques de CST La premiegravere organise le dialogue

entre scientifiques et profanes sans remettre en cause ce clivage La seconde

favorise lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave le

transgresser Alors que la premiegravere srsquointeacuteresse agrave la deacutemocratie technoscientifique et

non aux questions cognitives la seconde est porteacutee par des courants de lrsquoeacuteducation

populaire et de lrsquoautodirection Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des

apprenances agrave viseacutee drsquoeacutemancipation par exemple pour geacuterer au mieux une

maladie chronique participer agrave des investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers

de loisirs technoscientifiques expeacuterimentaux Mais chacune de ces deux familles

peut-elle exister sans lrsquoautre

Mots clefs (proposition)

Culture scientifique science et socieacuteteacute apprenance deacutesaffection des sciences

obstacle eacutepisteacutemologique

3

1 HISTORIQUE

11 Lrsquoeacutemergence drsquoun laquo sens figureacute raquo de la CST

Des institutions de CST speacutecificiteacute seacutemantique franccedilaise

La question des rapports des habitants aux sciences et aux savoirs scientifiques2

preacuteoccupe les organisations eacuteconomiques ou culturelles internationales et de

nombreux pays du globe (Schiele 1994) mais sa formulation varie beaucoup selon

les contextes Ainsi au sein des pays de lrsquoOCDE des diffeacuterences portent non

seulement sur les repreacutesentations et deacutesignations des activiteacutes scientifiques et

technologiques elles-mecircmes mais aussi sur la faccedilon dont celles-ci sont relieacutees aux

concepts lieacutes agrave la culture agrave la connaissance agrave la gouvernance et agrave lrsquoeacuteducation (Felt

2003)

En France3 lrsquoexpression laquo culture scientifique et technique raquo (CST) srsquoest aujourdrsquohui

geacuteneacuteraliseacutee dans des sphegraveres politiques universitaires ou culturelles pour deacutesigner

non seulement la dimension scientifique et technique de la culture mais aussi par

extension les actions voire les acteurs qui visent agrave la deacutevelopper Il en va

diffeacuteremment dans les pays anglophones ougrave lrsquoon utilise beaucoup plus freacutequemment

les expressions de public understanding of science (PUS) ou science [ou scientific]

literacy que celle de scientific culture4 Certes en France comme dans les autres

pays on voit aussi se multiplier aujourdrsquohui des reacutefeacuterences agrave des actions et des

dispositifs speacutecifiquement qualifieacutes laquo science et socieacuteteacute raquo ou laquo sciences en socieacuteteacute raquo

mais ces appellations secondaires se juxtaposent agrave celle de laquo CST raquo sans la

concurrencer5 Nous appellerons dans la suite ce second sens meacutetonymique6

synonyme de laquo lrsquoaction culturelle scientifique et technique raquo le sens figureacute de CST

Les hybridations militantes des anneacutees 70

Compareacutee agrave lrsquoemploi de formes terminologiques historiques comme les amateurs de

science la science populaire puis la vulgarisation scientifique ou les cabinets puis les

museacutees de sciences qui ont accompagneacute depuis plusieurs siegravecles la formalisation ou

2 Voir par exemple les eurobaromegravetres EBS et les eacutetudes scolaires ou peacuteri-scolaires TIMMS (2005) ROSE 2004 et PISA (2006

2009)

3 La litteacuterature semble indiquer que ce pheacutenomegravene srsquoobserve principalement en France en Belgique francophone et agrave un

degreacute moindre au Queacutebec et au Portugal

4 Le moteur de recherche international Google donnait en deacutecembre 2010 environ 2 millions de reacutesultats pour laquo culture

scientifique raquo et seulement 6 fois moins pour laquo scientific culture raquo en revanche il indiquait pregraves de 500 mille occurrences cumuleacutees pour laquo science literacy raquo laquoscientific literacy raquo ou laquo scientific and technologic literacy raquo contre seulement 100 fois moins pour lrsquoexpression laquo alphabeacutetisation scientifique raquo en franccedilais 5 Lrsquoexpression CST est par exemple au centre des champs seacutemantiques deacuteployeacutes en 2010 et 2011 lors de la creacuteation de

lrsquoeacutetablissement universcience qui est deacutefinit comme laquo eacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST raquo et dans les textes officiels concernant le plan national science agrave lrsquoeacutecole qui instaure dans chaque acadeacutemie un ou plusieurs laquo lyceacutees de CST raquo

6 Il srsquoagit drsquoune forme de meacutetonymie puisque lrsquoexpression laquo CST raquo est alors employeacutee pour deacutesigner non plus seulement

une laquo culture raquo mais lrsquoensemble des acteurs actions et dispositifs concerneacutes par son deacuteveloppement Il srsquoagit drsquoune extension analogue agrave celle subie par lrsquoexpression PJJ (protection judiciaire de la jeunesse) voire la laquo seacutecuriteacute routiegravere raquo

4

la circulation des connaissances scientifiques le recours agrave lrsquoexpression laquo CST raquo

employeacutee au sens figureacute drsquoaction culturelle preacuteciseacute plus haut peut paraicirctre reacutecente

puisque la plupart des auteurs (Bensaude-Vincent 1999 Crozon et Maitte 2001 et

Guyon et Maitte 2008) en font remonter7 la formalisation progressive aux anneacutees 70

et lrsquoeacutemergence aux anneacutees 50 (Schiele 2005 Bensaude-Vincent 2010) En reacutealiteacute

le terme de laquo culture scientifique8 raquo en son sens eacutetymologique est largement

anteacuterieur agrave cette peacuteriode (Hulin 2011) il a eacuteteacute freacutequemment utiliseacute par des

peacutedagogues comme Bachelard (1938) qui emploie souvent agrave propos de laquo lrsquoesprit

scientifique raquo sur la laquo formation raquo duquel il travaille

Ainsi la nouveauteacute des anneacutees 709 et 80 est bien lrsquoapparition du sens laquo figureacute raquo de

CST employeacute pour deacutesigner un ensemble drsquoactions et drsquoorganisations visant agrave

modifier la culture scientifique agrave lrsquoeacutechelle de la socieacuteteacute dans lrsquoesprit de la creacuteation

drsquoun Groupe de liaison pour lrsquoaction culturelle scientifique (GLACS) ou de la

deacutemultiplication drsquoinitiatives croiseacutees de diffeacuterents acteurs issus des sphegraveres

scientifiques culturelles eacuteducatives et socio-eacuteducatives

Concregravetement lrsquoeacutemergence en France drsquoune corporation de la CST est agrave mettre en

relation avec deux mouvements drsquohybridation qui se sont produits au cours de la

deacutecennie 70-80 Le premier donnera naissance en 1974 agrave ce GLACS et le second agrave

lrsquoAssociation nationale sciences techniques jeunesse (ANSTJ) qui succeacuteda en 1977

agrave la Feacutedeacuteration nationale des clubs scientifiques (FNCS creacuteeacutee elle-mecircme en 1968

cf Gautier Las Vergnas et al 2011)

Dans le premier cas des chercheurs (en particulier des physiciens) srsquoeacutetaient

rapprocheacutes des acteurs culturels faisant descendre laquo la science dans la ville raquo ndash

comme lors drsquoAix-pop en septembre 1973 ndash agrave lrsquooccasion de leurs congregraves

anteacuterieurement exclusivement focaliseacute sur la communication entre professionnels

(Detoeuf amp Dauphin 2007) Dans ce nouvel univers est mis explicitement en

exergue la relation laquo science et culture raquo Plus qursquoune dimension classique de

transmission de savoirs il srsquoagit non seulement drsquoun travail politique sur le rapport

entre scientifique et profanes mais aussi de critique des modes de production des

8 PISA 2006 propose dans sa version franccedilaise une deacutefinition de la CS dans son premier sens laquo Par culture scientifique on

entend la mesure dans laquelle un individu (1) possegravede des connaissances scientifiques et les applique pour identifier des questions acqueacuterir de nouvelles compeacutetences expliquer des pheacutenomegravenes de maniegravere scientifique et tirer des conclusions nouvelles fondeacutees sur des faits agrave propos drsquoaspects scientifiques (2) comprend les eacuteleacutements caracteacuteristiques des sciences en tant que forme de recherche et de connaissance humaines (3) est conscient du rocircle des sciences et de la technologie dans la constitution de notre environnement mateacuteriel intellectuel et culturel (4) a la volonteacute de srsquoengager en qualiteacute de citoyen reacutefleacutechi dans des problegravemes agrave caractegravere scientifique et touchant agrave des notions relatives aux sciences La culture scientifique passe par la compreacutehension de concepts scientifiques et renvoie agrave la capaciteacute drsquoappliquer une perspective scientifique et drsquoanalyser les faits de maniegravere scientifique Suit une liste de contenus (connaissances en sciences et connaissances agrave propos des sciences) de compeacutetences requises (taches ou processus scientifiques) puis de contextes et situations drsquoapplication]raquo httpwwwoecdorgdataoecd104539777163pdf p 23

9 Schiele (2005) rappelle que les questions fondatrices de ces hybridations eacutetaient deacutejagrave explicitement formuleacutees lors drsquoun

colloque organiseacute au Palais de la Deacutecouverte et associant les eacutecrivains scientifiques en 1958 mais indique qursquoelles sont devenues visibles pour trois raisons lrsquoacceacuteleacuteration de lrsquoautonomisation de la vulgarisation la prise de conscience que le progregraves se double de nuisances et de risques et la fin des trente glorieuses en lien sans doute pour la France avec la transformation des rapports de pouvoir conseacutecutifs aux eacuteveacutenements de mai 68 (p 21-23)

5

savoirs scientifiques10 comme le suggegraverent les titres des ouvrages de reacutefeacuterence de

lrsquoeacutepoque (par exemple laquo auto-critique de la science raquo Leacutevy-Leblond 1975) et une

inspiration lieacutee agrave des travaux de sociologie des sciences comme Habermas ou

Feyerabend

En ce qui concerne lrsquoautre hybridation elle a reacutesulteacute des initiatives des militants des

clubs de loisirs scientifiques regroupeacutes au sein de la FNCS11 heacutebergeacutee au Palais de

la Deacutecouverte qui acceacuteleacuteregraverent leur rapprochement avec des mouvements de jeunes

et drsquoeacuteducation populaire ces acteurs se reconnaissent dans laquo lrsquoanimation

scientifique raquo12 deacuteveloppant entre autre des formations sanctionneacutees dans le cadre

des speacutecialisations du Brevet drsquoaptitude aux fonctions drsquoanimation (BAFA) Tregraves vite

(1973-1979) ces eacutequipes firent le pont avec des chercheurs en peacutedagogie gracircce agrave

une perception de continuiteacute entre animation de centre de vacances et de loisirs et

animation de classes transplanteacutees (comme Host Deunf travaillant au sein de lrsquoINRP

sur les activiteacutes drsquoeacuteveil scientifique agrave lrsquoeacutecole) Mecircme si agrave lrsquoeacutepoque cette mouvance

laquo eacuteveil et loisirs scientifiques raquo se meacutelange assez peu avec le GLACS elle va agir en

compleacutementariteacute fertilisant des reacuteseaux13 de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire

extrascolaire ou peacuteriscolaire avec de nouvelles pratiques de deacutecouverte voire

drsquoinvestigation scientifique

De fait crsquoest la premiegravere de ces deux hybridations qui en reacutesonnance avec les

publications de plusieurs auteurs (Roqueplo 1974 Levy-Leblond 1975) et les

reacuteflexions sur la geacuteneacuteralisation14 du dispositif de laquo centre de CST raquo dont le premier a

vu le jour agrave Grenoble (en 1979) qui va propulser sur le devant de la scegravene cette

laquo CST raquo au sens figureacute et pousser agrave son institutionnalisation Etienne Guyon et

Bernard Maitte tous deux chercheurs impliqueacutes dans cette mouvance ont publieacute en

2008 un reacutesumeacute15 de cette peacuteriode de mise en place sous le titre laquo le partage des

savoirs scientifiques les centres de CSTI raquo Ils y mettent en perspective le

deacuteveloppement des CCSTI au sein du foisonnement qui srsquoest produit en France de

1973 (premiegravere manifestation laquo Physique dans la rue raquo) agrave 1992 (premiegravere laquo Science

en Fecircte raquo) raquo signalant que

10

Voir par exemple la thegravese de Debailly 2010 laquo La critique radicale de la science en France origines et incidences de la politisation de la science depuis Mai 1968 raquo

11 Gautier et Las Vergnas (2010) ont reacutecemment deacutecrit les conditions drsquoeacutemergence de ce courant en srsquoappuyant entre autres

sur des entretiens de deux principaux fondateurs (Dubost pour lrsquoANCS en 1962 et Guiraudon pour la FNCS en 1968)

12 Au sein mecircme de cette laquo animation scientifique raquo le champ de lrsquoanimation nature qui deviendra eacuteducation agrave

lrsquoenvironnement meacuterite une analyse particuliegravere car il prend progressivement son autonomie avec la creacuteation dans les anneacutees 75 du mouvement laquo eacutecole et nature raquo puis du CFEE

13 Observant que la coupure GLACSANSTJ seacutepare ceux qui questionnent la mise en scegravene (puis en culture) de la science

(expositions deacutebats theacuteacirctre) drsquoune part et ceux qui expeacuterimentent des formes de loisirs ou drsquoateliers peacuteriscolaires drsquoappropriation de savoirs eacutemancipateurs drsquoautre part on peut se demander si elle ne reproduisait pas vis-agrave-vis des activiteacutes scientifiques la ceacutesure laquo culture raquo versus laquo eacuteducation populaire raquo En observant reacutetrospectivement le positionnement du reacuteseau laquo peuple et culture raquo par exemple on constate que la deacutemarcation se situait plus entre mouvements politiques drsquoadultes drsquoune part et mouvements de jeunesse drsquoautre part

14 Rapport Maleacutecot (1981) puis rapport Maitte (1985)

15 Qui complegravete un premier article eacutecrit lui par Bernard Maitte et Michel Crozon (2001) On pourra aussi consulter le reacutecit de

vie de A Berestesky (2009) qui preacutesente la trajectoire de creacuteateur drsquoun CCSTI atypique (car sans murs) dans ce contexte

6

[ce mouvement militant des chercheurs et acteurs culturels] laquo sera accompagneacute drsquoinitiatives

de lrsquoEacutetat la creacuteation en 1972 du Bureau national drsquoinformation scientifique et technique

(BNIST) le lancement en 1979 par Valeacutery Giscard drsquoEstaing du projet de La Villette reprenant

lrsquoideacutee des Science Centers ameacutericains et permettant ndash gracircce au prestige de la science ndash de

sortir de faccedilon honorable des scandales immobiliers sur le site la transformation cette mecircme

anneacutee du BNIST en mission interministeacuterielle (MIDIST) Mais crsquoest lrsquoarriveacutee de la gauche au

pouvoir en 1981 qui va donner lrsquooccasion au mouvement de srsquoeacutepanouir de se structurer et de

srsquoexprimer politiquement Tout semble alors possible et les initiatives fleurissent tant

militantes qursquoinstitutionnelles raquo

La seconde hybridation elle associe laquo clubs scientifiques raquo et laquo activiteacutes drsquoeacuteveil raquo

peacuteriscolaires au sein de lrsquoassociation nationale sciences techniques jeunesse

(ANSTJ neacutee en 1977 du regroupement drsquoassociations de clubs) Selon Gautier

(1989)

laquo LANSTJ se donne pour objectif de faire pratiquer les sciences et les techniques agrave un public

de jeunes [hellip] La structure de projet demeure une constante mais on est passeacute de projets de

reacutealisation technique avec les clubs aeacuterospatiaux du deacutebut agrave des projets de recherche

collective dans des champs diversifieacutes tels que lastronomie leacutenergie solaire linformatique

Parallegravelement un modegravele peacutedagogique orienteacute vers la deacutecouverte de la deacutemarche

expeacuterimentale a eacuteteacute progressivement formaliseacute raquo

Lrsquoobjectif de lrsquoANSTJ nrsquoest pas formuleacute en termes de deacuteveloppement de la CST mais

drsquoapprentissage de meacutethodes meacutethode expeacuterimentale et meacutethode de

deacuteveloppement de projets scientifiques (en particulier en astronomie et en eacutetude des

milieux laquo naturels raquo) ou technologiques (fuseacutees expeacuterimentales avec le CNES ou

eacutenergies renouvelables) Mais comme lrsquoindiquent Las Vergnas Gautier et Piednoel

(2010) deacutecrivant son eacutevolution sur la peacuteriode 1970-1990

laquo Les animateurs plus inteacuteresseacutes par la deacutemarche des laquo savoirs choisis raquo que par la

technologie sont devenus progressivement pluridisciplinaires et vont se rapprocher du monde

peacuteriscolaire et des peacutedagogies de lrsquoeacuteveil scientifique et se professionnaliser [hellip] Les

interactions avec les milieux de la recherche sur lrsquoeacuteveil scientifique pour des formations

drsquoenseignant [hellip] vont appuyer la theacuteorisation des pratiques et des meacutethodes et contribuer agrave la

professionnalisation des formateurs Sous ces deux effets les animateurs et amateurs qui

avaient eacuteteacute entraineacute dans la mouvance laquo manips raquo de 1975 se trouvent ainsi scindeacutes en deux

sous-courants laquo peacutedagogues raquo de la deacutecouverte de la science expeacuterimentale et laquo amateurs raquo

de la mise au point technologique

Affirmer que lrsquoinstitutionnalisation franccedilaise de la CST reacutesulte seulement du

deacuteveloppement symeacutetrique de ces deux courants GLACS et ANSTJ serait reacuteducteur

Drsquoune part agrave leur naissance le GLACS et lrsquoANSTJ sont positionneacutes diffeacuteremment le

GLACS naicirct speacutecifiquement pour deacutevelopper lrsquoaction de culture scientifique et ses

membres seront directement les acteurs de son institutionnalisation dans les anneacutees

80 alors que lrsquoANSTJ centreacutee sur les apprentissages de meacutethodes par des pratiques

7

expeacuterimentales ne se ralliera16 que tregraves progressivement agrave la seacutemantique et aux

instances de la CST Drsquoautre part plus ou moins imbriqueacutes avec le GLACS et

lrsquoANSTJ ont existeacute plusieurs autres courants17 comme celui propre agrave la culture

technique alliant culture des objets techniques (dans la filiation des travaux de

Simondon 1958) et cultures du travail Il a eacutemergeacute avec la creacuteation en 1976 du

groupe laquo ethnotechnologie raquo par Thierry Gaudin chef de bureau au Ministegravere de

lrsquoindustrie qui donnera naissance en 1979 agrave la revue laquo Culture Technique raquo et agrave un

Centre de recherche sur la culture technique (CRCT disparu en 1996) dont Leroi-

Gourhan (1981) preacutefacera le manifeste fondateur en ces termes

laquo La technique et la culture dans nos socieacuteteacutes entretiennent des rapports de caractegravere

hieacuterarchique et lrsquoauteur de cet ouvrage souhaiterait que cela change [hellip] La civilisation repose

sur le deacuteveloppement de lartisanat qui possegravede une veacuteritable culture technique puis sur le

deacuteveloppement de lindustrie qui met en jeu les ressources eacuteconomiques qui subordonnent le

technicien aux deacutetenteurs du pouvoir La conversion du comportement de la socieacuteteacute repreacutesente

un obstacle agrave la mesure des propositions de lauteur La recherche plus ou moins consciente

dune solution pour sortir du cercle infernal dans lequel le monde est en train de senfermer

passera certainement par la prise de conscience des diffeacuterents axes du deacuteveloppement culturel

et lun de ces axes laxe majeur celui sur lequel gravite la connaissance et la pratique

technique meacuterite que son action soit soutenue et amplifieacutee raquo

Lrsquoinstitutionnalisation par la loi de 1982

Les courants reacutesultant de ces hybridations vont prendre de lrsquoampleur pour constituer

le fait social que nous qualifions ici reacutetrospectivement drsquoinstitutionnalisation de la

CST Une des eacutetapes clefs est celle de la promulgation le 16 juillet 1982 de la loi

dorientation de la recherche dont les articles 7 et 24 inscrivent dans la mission

assureacutee par les meacutetiers de recherche laquo la diffusion de la culture et de lrsquoinformation

scientifique et technique dans toute la population raquo On lit dans son annexe publieacutee

au JO18 sous le titre de laquo rapport sur la programmation et lrsquoorientation de lrsquoeffort

national de recherche et de deacuteveloppement technologique

laquo Le second volet du programme a pour ambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture En liaison avec le ministegravere de

16

En 1986 lrsquoANSTJ publiera son premier laquo Guide de la culture scientifique technique et industrielle raquo annuaire des acteurs de la CST mais la terminologie dominante au sein de lrsquoANSTJ (puis de Planegravete sciences agrave partir de 2002) restera celle de lrsquoanimation scientifique et technique Son objet statutaire principal est en effet laquo de favoriser aupregraves des jeunes linteacuterecirct la pratique et la connaissance des sciences et des techniques raquo alors que la mention laquo de deacutevelopper des actions en partenariat avec les structures de culture scientifique et technique raquo nrsquoapparait que dans une longue eacutenumeacuteration (Planegravete Sciences 2002 httpwwwplanete-sciencesorgnationaldocsstatuts_planetesciencespdf)

17 Lrsquoanimation visant agrave la laquo protection de la nature raquo eacutemerge eacutegalement dans le contexte de la confeacuterence de lrsquoONU de

Stockholm (juin 1972) deacuteclarant la neacutecessiteacute de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement Lrsquoanneacutee 1972 voit ainsi la mise en place drsquoun BTSA eacuteponyme au lyceacutee agricole de Neuvic ainsi que la creacuteation du journal peacutedagogique laquo La Hulotte raquo du premier camp de vacances pour adolescents consacreacute agrave laquo lrsquoeacutecologie raquo (FNCS) et des clubs CPN puis (1973) celle du premier laquo centre permanent drsquoinitiation agrave lrsquoenvironnement raquo (CPIE) Ce courant est au deacutepart en forte interaction avec la FNCS-ANSTJ au sein de laquelle ces actions sont coordonneacutees par un groupe laquo E raquo regroupant des animateurs issus en nombre du lyceacutee de Neuvic ce groupe srsquoautonomisera sous la forme du laquo reacuteseau eacutecole et nature raquo en 1983

18 JO du 16 juillet 1982 p 2276 et aussi httpwwwdsicnrsfrRMLRtextesintegrauxvolume111-l82-610htm

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 2: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

2

autant de la communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats

sur la gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques et se nourrissant drsquoacquis et de travaux rattacheacutes aux sciences de

lrsquoeacuteduction aux SIC ou agrave la sociologie et aux sciences politiques le champ de la

CST a ainsi agglomeacutereacute des corpus disparates sans donner naissance agrave un cadre

conceptuel inteacutegrateur ou agrave des frontiegraveres preacutecises

Ainsi les reacutesultats de ces politiques de CST ne peuvent ecirctre eacutevalueacutes en raison

drsquoamalgames seacutemantiques et les discours en leur faveur se trouvent se reacutepeacuteter

vainement depuis trois deacutecennies Entretenant lrsquoillusion de pouvoir ameacuteliorer agrave la fois

la deacutetection de lrsquoeacutelite et le partage des savoirs par tous ils oublient que le systegraveme

drsquoenseignement initial est reacutegleacute pour ne retenir en bac scientifique qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge et qursquoil renforce ainsi pour les frac34 restants les obstacles

cognitifs individuels en y ajoutant un obstacle laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite

une auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences Drsquoautant

que la CST officielle eacutetant une culture prescrite et non une culture veacutecue elle

renforce la rupture entre savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne

ce qui introduit une nouvelle forme drsquoobstacle eacutepisteacutemologique qualifiable de

laquo scolastique raquo

Coexistent ainsi deux familles de pratiques de CST La premiegravere organise le dialogue

entre scientifiques et profanes sans remettre en cause ce clivage La seconde

favorise lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave le

transgresser Alors que la premiegravere srsquointeacuteresse agrave la deacutemocratie technoscientifique et

non aux questions cognitives la seconde est porteacutee par des courants de lrsquoeacuteducation

populaire et de lrsquoautodirection Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des

apprenances agrave viseacutee drsquoeacutemancipation par exemple pour geacuterer au mieux une

maladie chronique participer agrave des investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers

de loisirs technoscientifiques expeacuterimentaux Mais chacune de ces deux familles

peut-elle exister sans lrsquoautre

Mots clefs (proposition)

Culture scientifique science et socieacuteteacute apprenance deacutesaffection des sciences

obstacle eacutepisteacutemologique

3

1 HISTORIQUE

11 Lrsquoeacutemergence drsquoun laquo sens figureacute raquo de la CST

Des institutions de CST speacutecificiteacute seacutemantique franccedilaise

La question des rapports des habitants aux sciences et aux savoirs scientifiques2

preacuteoccupe les organisations eacuteconomiques ou culturelles internationales et de

nombreux pays du globe (Schiele 1994) mais sa formulation varie beaucoup selon

les contextes Ainsi au sein des pays de lrsquoOCDE des diffeacuterences portent non

seulement sur les repreacutesentations et deacutesignations des activiteacutes scientifiques et

technologiques elles-mecircmes mais aussi sur la faccedilon dont celles-ci sont relieacutees aux

concepts lieacutes agrave la culture agrave la connaissance agrave la gouvernance et agrave lrsquoeacuteducation (Felt

2003)

En France3 lrsquoexpression laquo culture scientifique et technique raquo (CST) srsquoest aujourdrsquohui

geacuteneacuteraliseacutee dans des sphegraveres politiques universitaires ou culturelles pour deacutesigner

non seulement la dimension scientifique et technique de la culture mais aussi par

extension les actions voire les acteurs qui visent agrave la deacutevelopper Il en va

diffeacuteremment dans les pays anglophones ougrave lrsquoon utilise beaucoup plus freacutequemment

les expressions de public understanding of science (PUS) ou science [ou scientific]

literacy que celle de scientific culture4 Certes en France comme dans les autres

pays on voit aussi se multiplier aujourdrsquohui des reacutefeacuterences agrave des actions et des

dispositifs speacutecifiquement qualifieacutes laquo science et socieacuteteacute raquo ou laquo sciences en socieacuteteacute raquo

mais ces appellations secondaires se juxtaposent agrave celle de laquo CST raquo sans la

concurrencer5 Nous appellerons dans la suite ce second sens meacutetonymique6

synonyme de laquo lrsquoaction culturelle scientifique et technique raquo le sens figureacute de CST

Les hybridations militantes des anneacutees 70

Compareacutee agrave lrsquoemploi de formes terminologiques historiques comme les amateurs de

science la science populaire puis la vulgarisation scientifique ou les cabinets puis les

museacutees de sciences qui ont accompagneacute depuis plusieurs siegravecles la formalisation ou

2 Voir par exemple les eurobaromegravetres EBS et les eacutetudes scolaires ou peacuteri-scolaires TIMMS (2005) ROSE 2004 et PISA (2006

2009)

3 La litteacuterature semble indiquer que ce pheacutenomegravene srsquoobserve principalement en France en Belgique francophone et agrave un

degreacute moindre au Queacutebec et au Portugal

4 Le moteur de recherche international Google donnait en deacutecembre 2010 environ 2 millions de reacutesultats pour laquo culture

scientifique raquo et seulement 6 fois moins pour laquo scientific culture raquo en revanche il indiquait pregraves de 500 mille occurrences cumuleacutees pour laquo science literacy raquo laquoscientific literacy raquo ou laquo scientific and technologic literacy raquo contre seulement 100 fois moins pour lrsquoexpression laquo alphabeacutetisation scientifique raquo en franccedilais 5 Lrsquoexpression CST est par exemple au centre des champs seacutemantiques deacuteployeacutes en 2010 et 2011 lors de la creacuteation de

lrsquoeacutetablissement universcience qui est deacutefinit comme laquo eacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST raquo et dans les textes officiels concernant le plan national science agrave lrsquoeacutecole qui instaure dans chaque acadeacutemie un ou plusieurs laquo lyceacutees de CST raquo

6 Il srsquoagit drsquoune forme de meacutetonymie puisque lrsquoexpression laquo CST raquo est alors employeacutee pour deacutesigner non plus seulement

une laquo culture raquo mais lrsquoensemble des acteurs actions et dispositifs concerneacutes par son deacuteveloppement Il srsquoagit drsquoune extension analogue agrave celle subie par lrsquoexpression PJJ (protection judiciaire de la jeunesse) voire la laquo seacutecuriteacute routiegravere raquo

4

la circulation des connaissances scientifiques le recours agrave lrsquoexpression laquo CST raquo

employeacutee au sens figureacute drsquoaction culturelle preacuteciseacute plus haut peut paraicirctre reacutecente

puisque la plupart des auteurs (Bensaude-Vincent 1999 Crozon et Maitte 2001 et

Guyon et Maitte 2008) en font remonter7 la formalisation progressive aux anneacutees 70

et lrsquoeacutemergence aux anneacutees 50 (Schiele 2005 Bensaude-Vincent 2010) En reacutealiteacute

le terme de laquo culture scientifique8 raquo en son sens eacutetymologique est largement

anteacuterieur agrave cette peacuteriode (Hulin 2011) il a eacuteteacute freacutequemment utiliseacute par des

peacutedagogues comme Bachelard (1938) qui emploie souvent agrave propos de laquo lrsquoesprit

scientifique raquo sur la laquo formation raquo duquel il travaille

Ainsi la nouveauteacute des anneacutees 709 et 80 est bien lrsquoapparition du sens laquo figureacute raquo de

CST employeacute pour deacutesigner un ensemble drsquoactions et drsquoorganisations visant agrave

modifier la culture scientifique agrave lrsquoeacutechelle de la socieacuteteacute dans lrsquoesprit de la creacuteation

drsquoun Groupe de liaison pour lrsquoaction culturelle scientifique (GLACS) ou de la

deacutemultiplication drsquoinitiatives croiseacutees de diffeacuterents acteurs issus des sphegraveres

scientifiques culturelles eacuteducatives et socio-eacuteducatives

Concregravetement lrsquoeacutemergence en France drsquoune corporation de la CST est agrave mettre en

relation avec deux mouvements drsquohybridation qui se sont produits au cours de la

deacutecennie 70-80 Le premier donnera naissance en 1974 agrave ce GLACS et le second agrave

lrsquoAssociation nationale sciences techniques jeunesse (ANSTJ) qui succeacuteda en 1977

agrave la Feacutedeacuteration nationale des clubs scientifiques (FNCS creacuteeacutee elle-mecircme en 1968

cf Gautier Las Vergnas et al 2011)

Dans le premier cas des chercheurs (en particulier des physiciens) srsquoeacutetaient

rapprocheacutes des acteurs culturels faisant descendre laquo la science dans la ville raquo ndash

comme lors drsquoAix-pop en septembre 1973 ndash agrave lrsquooccasion de leurs congregraves

anteacuterieurement exclusivement focaliseacute sur la communication entre professionnels

(Detoeuf amp Dauphin 2007) Dans ce nouvel univers est mis explicitement en

exergue la relation laquo science et culture raquo Plus qursquoune dimension classique de

transmission de savoirs il srsquoagit non seulement drsquoun travail politique sur le rapport

entre scientifique et profanes mais aussi de critique des modes de production des

8 PISA 2006 propose dans sa version franccedilaise une deacutefinition de la CS dans son premier sens laquo Par culture scientifique on

entend la mesure dans laquelle un individu (1) possegravede des connaissances scientifiques et les applique pour identifier des questions acqueacuterir de nouvelles compeacutetences expliquer des pheacutenomegravenes de maniegravere scientifique et tirer des conclusions nouvelles fondeacutees sur des faits agrave propos drsquoaspects scientifiques (2) comprend les eacuteleacutements caracteacuteristiques des sciences en tant que forme de recherche et de connaissance humaines (3) est conscient du rocircle des sciences et de la technologie dans la constitution de notre environnement mateacuteriel intellectuel et culturel (4) a la volonteacute de srsquoengager en qualiteacute de citoyen reacutefleacutechi dans des problegravemes agrave caractegravere scientifique et touchant agrave des notions relatives aux sciences La culture scientifique passe par la compreacutehension de concepts scientifiques et renvoie agrave la capaciteacute drsquoappliquer une perspective scientifique et drsquoanalyser les faits de maniegravere scientifique Suit une liste de contenus (connaissances en sciences et connaissances agrave propos des sciences) de compeacutetences requises (taches ou processus scientifiques) puis de contextes et situations drsquoapplication]raquo httpwwwoecdorgdataoecd104539777163pdf p 23

9 Schiele (2005) rappelle que les questions fondatrices de ces hybridations eacutetaient deacutejagrave explicitement formuleacutees lors drsquoun

colloque organiseacute au Palais de la Deacutecouverte et associant les eacutecrivains scientifiques en 1958 mais indique qursquoelles sont devenues visibles pour trois raisons lrsquoacceacuteleacuteration de lrsquoautonomisation de la vulgarisation la prise de conscience que le progregraves se double de nuisances et de risques et la fin des trente glorieuses en lien sans doute pour la France avec la transformation des rapports de pouvoir conseacutecutifs aux eacuteveacutenements de mai 68 (p 21-23)

5

savoirs scientifiques10 comme le suggegraverent les titres des ouvrages de reacutefeacuterence de

lrsquoeacutepoque (par exemple laquo auto-critique de la science raquo Leacutevy-Leblond 1975) et une

inspiration lieacutee agrave des travaux de sociologie des sciences comme Habermas ou

Feyerabend

En ce qui concerne lrsquoautre hybridation elle a reacutesulteacute des initiatives des militants des

clubs de loisirs scientifiques regroupeacutes au sein de la FNCS11 heacutebergeacutee au Palais de

la Deacutecouverte qui acceacuteleacuteregraverent leur rapprochement avec des mouvements de jeunes

et drsquoeacuteducation populaire ces acteurs se reconnaissent dans laquo lrsquoanimation

scientifique raquo12 deacuteveloppant entre autre des formations sanctionneacutees dans le cadre

des speacutecialisations du Brevet drsquoaptitude aux fonctions drsquoanimation (BAFA) Tregraves vite

(1973-1979) ces eacutequipes firent le pont avec des chercheurs en peacutedagogie gracircce agrave

une perception de continuiteacute entre animation de centre de vacances et de loisirs et

animation de classes transplanteacutees (comme Host Deunf travaillant au sein de lrsquoINRP

sur les activiteacutes drsquoeacuteveil scientifique agrave lrsquoeacutecole) Mecircme si agrave lrsquoeacutepoque cette mouvance

laquo eacuteveil et loisirs scientifiques raquo se meacutelange assez peu avec le GLACS elle va agir en

compleacutementariteacute fertilisant des reacuteseaux13 de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire

extrascolaire ou peacuteriscolaire avec de nouvelles pratiques de deacutecouverte voire

drsquoinvestigation scientifique

De fait crsquoest la premiegravere de ces deux hybridations qui en reacutesonnance avec les

publications de plusieurs auteurs (Roqueplo 1974 Levy-Leblond 1975) et les

reacuteflexions sur la geacuteneacuteralisation14 du dispositif de laquo centre de CST raquo dont le premier a

vu le jour agrave Grenoble (en 1979) qui va propulser sur le devant de la scegravene cette

laquo CST raquo au sens figureacute et pousser agrave son institutionnalisation Etienne Guyon et

Bernard Maitte tous deux chercheurs impliqueacutes dans cette mouvance ont publieacute en

2008 un reacutesumeacute15 de cette peacuteriode de mise en place sous le titre laquo le partage des

savoirs scientifiques les centres de CSTI raquo Ils y mettent en perspective le

deacuteveloppement des CCSTI au sein du foisonnement qui srsquoest produit en France de

1973 (premiegravere manifestation laquo Physique dans la rue raquo) agrave 1992 (premiegravere laquo Science

en Fecircte raquo) raquo signalant que

10

Voir par exemple la thegravese de Debailly 2010 laquo La critique radicale de la science en France origines et incidences de la politisation de la science depuis Mai 1968 raquo

11 Gautier et Las Vergnas (2010) ont reacutecemment deacutecrit les conditions drsquoeacutemergence de ce courant en srsquoappuyant entre autres

sur des entretiens de deux principaux fondateurs (Dubost pour lrsquoANCS en 1962 et Guiraudon pour la FNCS en 1968)

12 Au sein mecircme de cette laquo animation scientifique raquo le champ de lrsquoanimation nature qui deviendra eacuteducation agrave

lrsquoenvironnement meacuterite une analyse particuliegravere car il prend progressivement son autonomie avec la creacuteation dans les anneacutees 75 du mouvement laquo eacutecole et nature raquo puis du CFEE

13 Observant que la coupure GLACSANSTJ seacutepare ceux qui questionnent la mise en scegravene (puis en culture) de la science

(expositions deacutebats theacuteacirctre) drsquoune part et ceux qui expeacuterimentent des formes de loisirs ou drsquoateliers peacuteriscolaires drsquoappropriation de savoirs eacutemancipateurs drsquoautre part on peut se demander si elle ne reproduisait pas vis-agrave-vis des activiteacutes scientifiques la ceacutesure laquo culture raquo versus laquo eacuteducation populaire raquo En observant reacutetrospectivement le positionnement du reacuteseau laquo peuple et culture raquo par exemple on constate que la deacutemarcation se situait plus entre mouvements politiques drsquoadultes drsquoune part et mouvements de jeunesse drsquoautre part

14 Rapport Maleacutecot (1981) puis rapport Maitte (1985)

15 Qui complegravete un premier article eacutecrit lui par Bernard Maitte et Michel Crozon (2001) On pourra aussi consulter le reacutecit de

vie de A Berestesky (2009) qui preacutesente la trajectoire de creacuteateur drsquoun CCSTI atypique (car sans murs) dans ce contexte

6

[ce mouvement militant des chercheurs et acteurs culturels] laquo sera accompagneacute drsquoinitiatives

de lrsquoEacutetat la creacuteation en 1972 du Bureau national drsquoinformation scientifique et technique

(BNIST) le lancement en 1979 par Valeacutery Giscard drsquoEstaing du projet de La Villette reprenant

lrsquoideacutee des Science Centers ameacutericains et permettant ndash gracircce au prestige de la science ndash de

sortir de faccedilon honorable des scandales immobiliers sur le site la transformation cette mecircme

anneacutee du BNIST en mission interministeacuterielle (MIDIST) Mais crsquoest lrsquoarriveacutee de la gauche au

pouvoir en 1981 qui va donner lrsquooccasion au mouvement de srsquoeacutepanouir de se structurer et de

srsquoexprimer politiquement Tout semble alors possible et les initiatives fleurissent tant

militantes qursquoinstitutionnelles raquo

La seconde hybridation elle associe laquo clubs scientifiques raquo et laquo activiteacutes drsquoeacuteveil raquo

peacuteriscolaires au sein de lrsquoassociation nationale sciences techniques jeunesse

(ANSTJ neacutee en 1977 du regroupement drsquoassociations de clubs) Selon Gautier

(1989)

laquo LANSTJ se donne pour objectif de faire pratiquer les sciences et les techniques agrave un public

de jeunes [hellip] La structure de projet demeure une constante mais on est passeacute de projets de

reacutealisation technique avec les clubs aeacuterospatiaux du deacutebut agrave des projets de recherche

collective dans des champs diversifieacutes tels que lastronomie leacutenergie solaire linformatique

Parallegravelement un modegravele peacutedagogique orienteacute vers la deacutecouverte de la deacutemarche

expeacuterimentale a eacuteteacute progressivement formaliseacute raquo

Lrsquoobjectif de lrsquoANSTJ nrsquoest pas formuleacute en termes de deacuteveloppement de la CST mais

drsquoapprentissage de meacutethodes meacutethode expeacuterimentale et meacutethode de

deacuteveloppement de projets scientifiques (en particulier en astronomie et en eacutetude des

milieux laquo naturels raquo) ou technologiques (fuseacutees expeacuterimentales avec le CNES ou

eacutenergies renouvelables) Mais comme lrsquoindiquent Las Vergnas Gautier et Piednoel

(2010) deacutecrivant son eacutevolution sur la peacuteriode 1970-1990

laquo Les animateurs plus inteacuteresseacutes par la deacutemarche des laquo savoirs choisis raquo que par la

technologie sont devenus progressivement pluridisciplinaires et vont se rapprocher du monde

peacuteriscolaire et des peacutedagogies de lrsquoeacuteveil scientifique et se professionnaliser [hellip] Les

interactions avec les milieux de la recherche sur lrsquoeacuteveil scientifique pour des formations

drsquoenseignant [hellip] vont appuyer la theacuteorisation des pratiques et des meacutethodes et contribuer agrave la

professionnalisation des formateurs Sous ces deux effets les animateurs et amateurs qui

avaient eacuteteacute entraineacute dans la mouvance laquo manips raquo de 1975 se trouvent ainsi scindeacutes en deux

sous-courants laquo peacutedagogues raquo de la deacutecouverte de la science expeacuterimentale et laquo amateurs raquo

de la mise au point technologique

Affirmer que lrsquoinstitutionnalisation franccedilaise de la CST reacutesulte seulement du

deacuteveloppement symeacutetrique de ces deux courants GLACS et ANSTJ serait reacuteducteur

Drsquoune part agrave leur naissance le GLACS et lrsquoANSTJ sont positionneacutes diffeacuteremment le

GLACS naicirct speacutecifiquement pour deacutevelopper lrsquoaction de culture scientifique et ses

membres seront directement les acteurs de son institutionnalisation dans les anneacutees

80 alors que lrsquoANSTJ centreacutee sur les apprentissages de meacutethodes par des pratiques

7

expeacuterimentales ne se ralliera16 que tregraves progressivement agrave la seacutemantique et aux

instances de la CST Drsquoautre part plus ou moins imbriqueacutes avec le GLACS et

lrsquoANSTJ ont existeacute plusieurs autres courants17 comme celui propre agrave la culture

technique alliant culture des objets techniques (dans la filiation des travaux de

Simondon 1958) et cultures du travail Il a eacutemergeacute avec la creacuteation en 1976 du

groupe laquo ethnotechnologie raquo par Thierry Gaudin chef de bureau au Ministegravere de

lrsquoindustrie qui donnera naissance en 1979 agrave la revue laquo Culture Technique raquo et agrave un

Centre de recherche sur la culture technique (CRCT disparu en 1996) dont Leroi-

Gourhan (1981) preacutefacera le manifeste fondateur en ces termes

laquo La technique et la culture dans nos socieacuteteacutes entretiennent des rapports de caractegravere

hieacuterarchique et lrsquoauteur de cet ouvrage souhaiterait que cela change [hellip] La civilisation repose

sur le deacuteveloppement de lartisanat qui possegravede une veacuteritable culture technique puis sur le

deacuteveloppement de lindustrie qui met en jeu les ressources eacuteconomiques qui subordonnent le

technicien aux deacutetenteurs du pouvoir La conversion du comportement de la socieacuteteacute repreacutesente

un obstacle agrave la mesure des propositions de lauteur La recherche plus ou moins consciente

dune solution pour sortir du cercle infernal dans lequel le monde est en train de senfermer

passera certainement par la prise de conscience des diffeacuterents axes du deacuteveloppement culturel

et lun de ces axes laxe majeur celui sur lequel gravite la connaissance et la pratique

technique meacuterite que son action soit soutenue et amplifieacutee raquo

Lrsquoinstitutionnalisation par la loi de 1982

Les courants reacutesultant de ces hybridations vont prendre de lrsquoampleur pour constituer

le fait social que nous qualifions ici reacutetrospectivement drsquoinstitutionnalisation de la

CST Une des eacutetapes clefs est celle de la promulgation le 16 juillet 1982 de la loi

dorientation de la recherche dont les articles 7 et 24 inscrivent dans la mission

assureacutee par les meacutetiers de recherche laquo la diffusion de la culture et de lrsquoinformation

scientifique et technique dans toute la population raquo On lit dans son annexe publieacutee

au JO18 sous le titre de laquo rapport sur la programmation et lrsquoorientation de lrsquoeffort

national de recherche et de deacuteveloppement technologique

laquo Le second volet du programme a pour ambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture En liaison avec le ministegravere de

16

En 1986 lrsquoANSTJ publiera son premier laquo Guide de la culture scientifique technique et industrielle raquo annuaire des acteurs de la CST mais la terminologie dominante au sein de lrsquoANSTJ (puis de Planegravete sciences agrave partir de 2002) restera celle de lrsquoanimation scientifique et technique Son objet statutaire principal est en effet laquo de favoriser aupregraves des jeunes linteacuterecirct la pratique et la connaissance des sciences et des techniques raquo alors que la mention laquo de deacutevelopper des actions en partenariat avec les structures de culture scientifique et technique raquo nrsquoapparait que dans une longue eacutenumeacuteration (Planegravete Sciences 2002 httpwwwplanete-sciencesorgnationaldocsstatuts_planetesciencespdf)

17 Lrsquoanimation visant agrave la laquo protection de la nature raquo eacutemerge eacutegalement dans le contexte de la confeacuterence de lrsquoONU de

Stockholm (juin 1972) deacuteclarant la neacutecessiteacute de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement Lrsquoanneacutee 1972 voit ainsi la mise en place drsquoun BTSA eacuteponyme au lyceacutee agricole de Neuvic ainsi que la creacuteation du journal peacutedagogique laquo La Hulotte raquo du premier camp de vacances pour adolescents consacreacute agrave laquo lrsquoeacutecologie raquo (FNCS) et des clubs CPN puis (1973) celle du premier laquo centre permanent drsquoinitiation agrave lrsquoenvironnement raquo (CPIE) Ce courant est au deacutepart en forte interaction avec la FNCS-ANSTJ au sein de laquelle ces actions sont coordonneacutees par un groupe laquo E raquo regroupant des animateurs issus en nombre du lyceacutee de Neuvic ce groupe srsquoautonomisera sous la forme du laquo reacuteseau eacutecole et nature raquo en 1983

18 JO du 16 juillet 1982 p 2276 et aussi httpwwwdsicnrsfrRMLRtextesintegrauxvolume111-l82-610htm

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 3: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

3

1 HISTORIQUE

11 Lrsquoeacutemergence drsquoun laquo sens figureacute raquo de la CST

Des institutions de CST speacutecificiteacute seacutemantique franccedilaise

La question des rapports des habitants aux sciences et aux savoirs scientifiques2

preacuteoccupe les organisations eacuteconomiques ou culturelles internationales et de

nombreux pays du globe (Schiele 1994) mais sa formulation varie beaucoup selon

les contextes Ainsi au sein des pays de lrsquoOCDE des diffeacuterences portent non

seulement sur les repreacutesentations et deacutesignations des activiteacutes scientifiques et

technologiques elles-mecircmes mais aussi sur la faccedilon dont celles-ci sont relieacutees aux

concepts lieacutes agrave la culture agrave la connaissance agrave la gouvernance et agrave lrsquoeacuteducation (Felt

2003)

En France3 lrsquoexpression laquo culture scientifique et technique raquo (CST) srsquoest aujourdrsquohui

geacuteneacuteraliseacutee dans des sphegraveres politiques universitaires ou culturelles pour deacutesigner

non seulement la dimension scientifique et technique de la culture mais aussi par

extension les actions voire les acteurs qui visent agrave la deacutevelopper Il en va

diffeacuteremment dans les pays anglophones ougrave lrsquoon utilise beaucoup plus freacutequemment

les expressions de public understanding of science (PUS) ou science [ou scientific]

literacy que celle de scientific culture4 Certes en France comme dans les autres

pays on voit aussi se multiplier aujourdrsquohui des reacutefeacuterences agrave des actions et des

dispositifs speacutecifiquement qualifieacutes laquo science et socieacuteteacute raquo ou laquo sciences en socieacuteteacute raquo

mais ces appellations secondaires se juxtaposent agrave celle de laquo CST raquo sans la

concurrencer5 Nous appellerons dans la suite ce second sens meacutetonymique6

synonyme de laquo lrsquoaction culturelle scientifique et technique raquo le sens figureacute de CST

Les hybridations militantes des anneacutees 70

Compareacutee agrave lrsquoemploi de formes terminologiques historiques comme les amateurs de

science la science populaire puis la vulgarisation scientifique ou les cabinets puis les

museacutees de sciences qui ont accompagneacute depuis plusieurs siegravecles la formalisation ou

2 Voir par exemple les eurobaromegravetres EBS et les eacutetudes scolaires ou peacuteri-scolaires TIMMS (2005) ROSE 2004 et PISA (2006

2009)

3 La litteacuterature semble indiquer que ce pheacutenomegravene srsquoobserve principalement en France en Belgique francophone et agrave un

degreacute moindre au Queacutebec et au Portugal

4 Le moteur de recherche international Google donnait en deacutecembre 2010 environ 2 millions de reacutesultats pour laquo culture

scientifique raquo et seulement 6 fois moins pour laquo scientific culture raquo en revanche il indiquait pregraves de 500 mille occurrences cumuleacutees pour laquo science literacy raquo laquoscientific literacy raquo ou laquo scientific and technologic literacy raquo contre seulement 100 fois moins pour lrsquoexpression laquo alphabeacutetisation scientifique raquo en franccedilais 5 Lrsquoexpression CST est par exemple au centre des champs seacutemantiques deacuteployeacutes en 2010 et 2011 lors de la creacuteation de

lrsquoeacutetablissement universcience qui est deacutefinit comme laquo eacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST raquo et dans les textes officiels concernant le plan national science agrave lrsquoeacutecole qui instaure dans chaque acadeacutemie un ou plusieurs laquo lyceacutees de CST raquo

6 Il srsquoagit drsquoune forme de meacutetonymie puisque lrsquoexpression laquo CST raquo est alors employeacutee pour deacutesigner non plus seulement

une laquo culture raquo mais lrsquoensemble des acteurs actions et dispositifs concerneacutes par son deacuteveloppement Il srsquoagit drsquoune extension analogue agrave celle subie par lrsquoexpression PJJ (protection judiciaire de la jeunesse) voire la laquo seacutecuriteacute routiegravere raquo

4

la circulation des connaissances scientifiques le recours agrave lrsquoexpression laquo CST raquo

employeacutee au sens figureacute drsquoaction culturelle preacuteciseacute plus haut peut paraicirctre reacutecente

puisque la plupart des auteurs (Bensaude-Vincent 1999 Crozon et Maitte 2001 et

Guyon et Maitte 2008) en font remonter7 la formalisation progressive aux anneacutees 70

et lrsquoeacutemergence aux anneacutees 50 (Schiele 2005 Bensaude-Vincent 2010) En reacutealiteacute

le terme de laquo culture scientifique8 raquo en son sens eacutetymologique est largement

anteacuterieur agrave cette peacuteriode (Hulin 2011) il a eacuteteacute freacutequemment utiliseacute par des

peacutedagogues comme Bachelard (1938) qui emploie souvent agrave propos de laquo lrsquoesprit

scientifique raquo sur la laquo formation raquo duquel il travaille

Ainsi la nouveauteacute des anneacutees 709 et 80 est bien lrsquoapparition du sens laquo figureacute raquo de

CST employeacute pour deacutesigner un ensemble drsquoactions et drsquoorganisations visant agrave

modifier la culture scientifique agrave lrsquoeacutechelle de la socieacuteteacute dans lrsquoesprit de la creacuteation

drsquoun Groupe de liaison pour lrsquoaction culturelle scientifique (GLACS) ou de la

deacutemultiplication drsquoinitiatives croiseacutees de diffeacuterents acteurs issus des sphegraveres

scientifiques culturelles eacuteducatives et socio-eacuteducatives

Concregravetement lrsquoeacutemergence en France drsquoune corporation de la CST est agrave mettre en

relation avec deux mouvements drsquohybridation qui se sont produits au cours de la

deacutecennie 70-80 Le premier donnera naissance en 1974 agrave ce GLACS et le second agrave

lrsquoAssociation nationale sciences techniques jeunesse (ANSTJ) qui succeacuteda en 1977

agrave la Feacutedeacuteration nationale des clubs scientifiques (FNCS creacuteeacutee elle-mecircme en 1968

cf Gautier Las Vergnas et al 2011)

Dans le premier cas des chercheurs (en particulier des physiciens) srsquoeacutetaient

rapprocheacutes des acteurs culturels faisant descendre laquo la science dans la ville raquo ndash

comme lors drsquoAix-pop en septembre 1973 ndash agrave lrsquooccasion de leurs congregraves

anteacuterieurement exclusivement focaliseacute sur la communication entre professionnels

(Detoeuf amp Dauphin 2007) Dans ce nouvel univers est mis explicitement en

exergue la relation laquo science et culture raquo Plus qursquoune dimension classique de

transmission de savoirs il srsquoagit non seulement drsquoun travail politique sur le rapport

entre scientifique et profanes mais aussi de critique des modes de production des

8 PISA 2006 propose dans sa version franccedilaise une deacutefinition de la CS dans son premier sens laquo Par culture scientifique on

entend la mesure dans laquelle un individu (1) possegravede des connaissances scientifiques et les applique pour identifier des questions acqueacuterir de nouvelles compeacutetences expliquer des pheacutenomegravenes de maniegravere scientifique et tirer des conclusions nouvelles fondeacutees sur des faits agrave propos drsquoaspects scientifiques (2) comprend les eacuteleacutements caracteacuteristiques des sciences en tant que forme de recherche et de connaissance humaines (3) est conscient du rocircle des sciences et de la technologie dans la constitution de notre environnement mateacuteriel intellectuel et culturel (4) a la volonteacute de srsquoengager en qualiteacute de citoyen reacutefleacutechi dans des problegravemes agrave caractegravere scientifique et touchant agrave des notions relatives aux sciences La culture scientifique passe par la compreacutehension de concepts scientifiques et renvoie agrave la capaciteacute drsquoappliquer une perspective scientifique et drsquoanalyser les faits de maniegravere scientifique Suit une liste de contenus (connaissances en sciences et connaissances agrave propos des sciences) de compeacutetences requises (taches ou processus scientifiques) puis de contextes et situations drsquoapplication]raquo httpwwwoecdorgdataoecd104539777163pdf p 23

9 Schiele (2005) rappelle que les questions fondatrices de ces hybridations eacutetaient deacutejagrave explicitement formuleacutees lors drsquoun

colloque organiseacute au Palais de la Deacutecouverte et associant les eacutecrivains scientifiques en 1958 mais indique qursquoelles sont devenues visibles pour trois raisons lrsquoacceacuteleacuteration de lrsquoautonomisation de la vulgarisation la prise de conscience que le progregraves se double de nuisances et de risques et la fin des trente glorieuses en lien sans doute pour la France avec la transformation des rapports de pouvoir conseacutecutifs aux eacuteveacutenements de mai 68 (p 21-23)

5

savoirs scientifiques10 comme le suggegraverent les titres des ouvrages de reacutefeacuterence de

lrsquoeacutepoque (par exemple laquo auto-critique de la science raquo Leacutevy-Leblond 1975) et une

inspiration lieacutee agrave des travaux de sociologie des sciences comme Habermas ou

Feyerabend

En ce qui concerne lrsquoautre hybridation elle a reacutesulteacute des initiatives des militants des

clubs de loisirs scientifiques regroupeacutes au sein de la FNCS11 heacutebergeacutee au Palais de

la Deacutecouverte qui acceacuteleacuteregraverent leur rapprochement avec des mouvements de jeunes

et drsquoeacuteducation populaire ces acteurs se reconnaissent dans laquo lrsquoanimation

scientifique raquo12 deacuteveloppant entre autre des formations sanctionneacutees dans le cadre

des speacutecialisations du Brevet drsquoaptitude aux fonctions drsquoanimation (BAFA) Tregraves vite

(1973-1979) ces eacutequipes firent le pont avec des chercheurs en peacutedagogie gracircce agrave

une perception de continuiteacute entre animation de centre de vacances et de loisirs et

animation de classes transplanteacutees (comme Host Deunf travaillant au sein de lrsquoINRP

sur les activiteacutes drsquoeacuteveil scientifique agrave lrsquoeacutecole) Mecircme si agrave lrsquoeacutepoque cette mouvance

laquo eacuteveil et loisirs scientifiques raquo se meacutelange assez peu avec le GLACS elle va agir en

compleacutementariteacute fertilisant des reacuteseaux13 de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire

extrascolaire ou peacuteriscolaire avec de nouvelles pratiques de deacutecouverte voire

drsquoinvestigation scientifique

De fait crsquoest la premiegravere de ces deux hybridations qui en reacutesonnance avec les

publications de plusieurs auteurs (Roqueplo 1974 Levy-Leblond 1975) et les

reacuteflexions sur la geacuteneacuteralisation14 du dispositif de laquo centre de CST raquo dont le premier a

vu le jour agrave Grenoble (en 1979) qui va propulser sur le devant de la scegravene cette

laquo CST raquo au sens figureacute et pousser agrave son institutionnalisation Etienne Guyon et

Bernard Maitte tous deux chercheurs impliqueacutes dans cette mouvance ont publieacute en

2008 un reacutesumeacute15 de cette peacuteriode de mise en place sous le titre laquo le partage des

savoirs scientifiques les centres de CSTI raquo Ils y mettent en perspective le

deacuteveloppement des CCSTI au sein du foisonnement qui srsquoest produit en France de

1973 (premiegravere manifestation laquo Physique dans la rue raquo) agrave 1992 (premiegravere laquo Science

en Fecircte raquo) raquo signalant que

10

Voir par exemple la thegravese de Debailly 2010 laquo La critique radicale de la science en France origines et incidences de la politisation de la science depuis Mai 1968 raquo

11 Gautier et Las Vergnas (2010) ont reacutecemment deacutecrit les conditions drsquoeacutemergence de ce courant en srsquoappuyant entre autres

sur des entretiens de deux principaux fondateurs (Dubost pour lrsquoANCS en 1962 et Guiraudon pour la FNCS en 1968)

12 Au sein mecircme de cette laquo animation scientifique raquo le champ de lrsquoanimation nature qui deviendra eacuteducation agrave

lrsquoenvironnement meacuterite une analyse particuliegravere car il prend progressivement son autonomie avec la creacuteation dans les anneacutees 75 du mouvement laquo eacutecole et nature raquo puis du CFEE

13 Observant que la coupure GLACSANSTJ seacutepare ceux qui questionnent la mise en scegravene (puis en culture) de la science

(expositions deacutebats theacuteacirctre) drsquoune part et ceux qui expeacuterimentent des formes de loisirs ou drsquoateliers peacuteriscolaires drsquoappropriation de savoirs eacutemancipateurs drsquoautre part on peut se demander si elle ne reproduisait pas vis-agrave-vis des activiteacutes scientifiques la ceacutesure laquo culture raquo versus laquo eacuteducation populaire raquo En observant reacutetrospectivement le positionnement du reacuteseau laquo peuple et culture raquo par exemple on constate que la deacutemarcation se situait plus entre mouvements politiques drsquoadultes drsquoune part et mouvements de jeunesse drsquoautre part

14 Rapport Maleacutecot (1981) puis rapport Maitte (1985)

15 Qui complegravete un premier article eacutecrit lui par Bernard Maitte et Michel Crozon (2001) On pourra aussi consulter le reacutecit de

vie de A Berestesky (2009) qui preacutesente la trajectoire de creacuteateur drsquoun CCSTI atypique (car sans murs) dans ce contexte

6

[ce mouvement militant des chercheurs et acteurs culturels] laquo sera accompagneacute drsquoinitiatives

de lrsquoEacutetat la creacuteation en 1972 du Bureau national drsquoinformation scientifique et technique

(BNIST) le lancement en 1979 par Valeacutery Giscard drsquoEstaing du projet de La Villette reprenant

lrsquoideacutee des Science Centers ameacutericains et permettant ndash gracircce au prestige de la science ndash de

sortir de faccedilon honorable des scandales immobiliers sur le site la transformation cette mecircme

anneacutee du BNIST en mission interministeacuterielle (MIDIST) Mais crsquoest lrsquoarriveacutee de la gauche au

pouvoir en 1981 qui va donner lrsquooccasion au mouvement de srsquoeacutepanouir de se structurer et de

srsquoexprimer politiquement Tout semble alors possible et les initiatives fleurissent tant

militantes qursquoinstitutionnelles raquo

La seconde hybridation elle associe laquo clubs scientifiques raquo et laquo activiteacutes drsquoeacuteveil raquo

peacuteriscolaires au sein de lrsquoassociation nationale sciences techniques jeunesse

(ANSTJ neacutee en 1977 du regroupement drsquoassociations de clubs) Selon Gautier

(1989)

laquo LANSTJ se donne pour objectif de faire pratiquer les sciences et les techniques agrave un public

de jeunes [hellip] La structure de projet demeure une constante mais on est passeacute de projets de

reacutealisation technique avec les clubs aeacuterospatiaux du deacutebut agrave des projets de recherche

collective dans des champs diversifieacutes tels que lastronomie leacutenergie solaire linformatique

Parallegravelement un modegravele peacutedagogique orienteacute vers la deacutecouverte de la deacutemarche

expeacuterimentale a eacuteteacute progressivement formaliseacute raquo

Lrsquoobjectif de lrsquoANSTJ nrsquoest pas formuleacute en termes de deacuteveloppement de la CST mais

drsquoapprentissage de meacutethodes meacutethode expeacuterimentale et meacutethode de

deacuteveloppement de projets scientifiques (en particulier en astronomie et en eacutetude des

milieux laquo naturels raquo) ou technologiques (fuseacutees expeacuterimentales avec le CNES ou

eacutenergies renouvelables) Mais comme lrsquoindiquent Las Vergnas Gautier et Piednoel

(2010) deacutecrivant son eacutevolution sur la peacuteriode 1970-1990

laquo Les animateurs plus inteacuteresseacutes par la deacutemarche des laquo savoirs choisis raquo que par la

technologie sont devenus progressivement pluridisciplinaires et vont se rapprocher du monde

peacuteriscolaire et des peacutedagogies de lrsquoeacuteveil scientifique et se professionnaliser [hellip] Les

interactions avec les milieux de la recherche sur lrsquoeacuteveil scientifique pour des formations

drsquoenseignant [hellip] vont appuyer la theacuteorisation des pratiques et des meacutethodes et contribuer agrave la

professionnalisation des formateurs Sous ces deux effets les animateurs et amateurs qui

avaient eacuteteacute entraineacute dans la mouvance laquo manips raquo de 1975 se trouvent ainsi scindeacutes en deux

sous-courants laquo peacutedagogues raquo de la deacutecouverte de la science expeacuterimentale et laquo amateurs raquo

de la mise au point technologique

Affirmer que lrsquoinstitutionnalisation franccedilaise de la CST reacutesulte seulement du

deacuteveloppement symeacutetrique de ces deux courants GLACS et ANSTJ serait reacuteducteur

Drsquoune part agrave leur naissance le GLACS et lrsquoANSTJ sont positionneacutes diffeacuteremment le

GLACS naicirct speacutecifiquement pour deacutevelopper lrsquoaction de culture scientifique et ses

membres seront directement les acteurs de son institutionnalisation dans les anneacutees

80 alors que lrsquoANSTJ centreacutee sur les apprentissages de meacutethodes par des pratiques

7

expeacuterimentales ne se ralliera16 que tregraves progressivement agrave la seacutemantique et aux

instances de la CST Drsquoautre part plus ou moins imbriqueacutes avec le GLACS et

lrsquoANSTJ ont existeacute plusieurs autres courants17 comme celui propre agrave la culture

technique alliant culture des objets techniques (dans la filiation des travaux de

Simondon 1958) et cultures du travail Il a eacutemergeacute avec la creacuteation en 1976 du

groupe laquo ethnotechnologie raquo par Thierry Gaudin chef de bureau au Ministegravere de

lrsquoindustrie qui donnera naissance en 1979 agrave la revue laquo Culture Technique raquo et agrave un

Centre de recherche sur la culture technique (CRCT disparu en 1996) dont Leroi-

Gourhan (1981) preacutefacera le manifeste fondateur en ces termes

laquo La technique et la culture dans nos socieacuteteacutes entretiennent des rapports de caractegravere

hieacuterarchique et lrsquoauteur de cet ouvrage souhaiterait que cela change [hellip] La civilisation repose

sur le deacuteveloppement de lartisanat qui possegravede une veacuteritable culture technique puis sur le

deacuteveloppement de lindustrie qui met en jeu les ressources eacuteconomiques qui subordonnent le

technicien aux deacutetenteurs du pouvoir La conversion du comportement de la socieacuteteacute repreacutesente

un obstacle agrave la mesure des propositions de lauteur La recherche plus ou moins consciente

dune solution pour sortir du cercle infernal dans lequel le monde est en train de senfermer

passera certainement par la prise de conscience des diffeacuterents axes du deacuteveloppement culturel

et lun de ces axes laxe majeur celui sur lequel gravite la connaissance et la pratique

technique meacuterite que son action soit soutenue et amplifieacutee raquo

Lrsquoinstitutionnalisation par la loi de 1982

Les courants reacutesultant de ces hybridations vont prendre de lrsquoampleur pour constituer

le fait social que nous qualifions ici reacutetrospectivement drsquoinstitutionnalisation de la

CST Une des eacutetapes clefs est celle de la promulgation le 16 juillet 1982 de la loi

dorientation de la recherche dont les articles 7 et 24 inscrivent dans la mission

assureacutee par les meacutetiers de recherche laquo la diffusion de la culture et de lrsquoinformation

scientifique et technique dans toute la population raquo On lit dans son annexe publieacutee

au JO18 sous le titre de laquo rapport sur la programmation et lrsquoorientation de lrsquoeffort

national de recherche et de deacuteveloppement technologique

laquo Le second volet du programme a pour ambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture En liaison avec le ministegravere de

16

En 1986 lrsquoANSTJ publiera son premier laquo Guide de la culture scientifique technique et industrielle raquo annuaire des acteurs de la CST mais la terminologie dominante au sein de lrsquoANSTJ (puis de Planegravete sciences agrave partir de 2002) restera celle de lrsquoanimation scientifique et technique Son objet statutaire principal est en effet laquo de favoriser aupregraves des jeunes linteacuterecirct la pratique et la connaissance des sciences et des techniques raquo alors que la mention laquo de deacutevelopper des actions en partenariat avec les structures de culture scientifique et technique raquo nrsquoapparait que dans une longue eacutenumeacuteration (Planegravete Sciences 2002 httpwwwplanete-sciencesorgnationaldocsstatuts_planetesciencespdf)

17 Lrsquoanimation visant agrave la laquo protection de la nature raquo eacutemerge eacutegalement dans le contexte de la confeacuterence de lrsquoONU de

Stockholm (juin 1972) deacuteclarant la neacutecessiteacute de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement Lrsquoanneacutee 1972 voit ainsi la mise en place drsquoun BTSA eacuteponyme au lyceacutee agricole de Neuvic ainsi que la creacuteation du journal peacutedagogique laquo La Hulotte raquo du premier camp de vacances pour adolescents consacreacute agrave laquo lrsquoeacutecologie raquo (FNCS) et des clubs CPN puis (1973) celle du premier laquo centre permanent drsquoinitiation agrave lrsquoenvironnement raquo (CPIE) Ce courant est au deacutepart en forte interaction avec la FNCS-ANSTJ au sein de laquelle ces actions sont coordonneacutees par un groupe laquo E raquo regroupant des animateurs issus en nombre du lyceacutee de Neuvic ce groupe srsquoautonomisera sous la forme du laquo reacuteseau eacutecole et nature raquo en 1983

18 JO du 16 juillet 1982 p 2276 et aussi httpwwwdsicnrsfrRMLRtextesintegrauxvolume111-l82-610htm

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 4: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

4

la circulation des connaissances scientifiques le recours agrave lrsquoexpression laquo CST raquo

employeacutee au sens figureacute drsquoaction culturelle preacuteciseacute plus haut peut paraicirctre reacutecente

puisque la plupart des auteurs (Bensaude-Vincent 1999 Crozon et Maitte 2001 et

Guyon et Maitte 2008) en font remonter7 la formalisation progressive aux anneacutees 70

et lrsquoeacutemergence aux anneacutees 50 (Schiele 2005 Bensaude-Vincent 2010) En reacutealiteacute

le terme de laquo culture scientifique8 raquo en son sens eacutetymologique est largement

anteacuterieur agrave cette peacuteriode (Hulin 2011) il a eacuteteacute freacutequemment utiliseacute par des

peacutedagogues comme Bachelard (1938) qui emploie souvent agrave propos de laquo lrsquoesprit

scientifique raquo sur la laquo formation raquo duquel il travaille

Ainsi la nouveauteacute des anneacutees 709 et 80 est bien lrsquoapparition du sens laquo figureacute raquo de

CST employeacute pour deacutesigner un ensemble drsquoactions et drsquoorganisations visant agrave

modifier la culture scientifique agrave lrsquoeacutechelle de la socieacuteteacute dans lrsquoesprit de la creacuteation

drsquoun Groupe de liaison pour lrsquoaction culturelle scientifique (GLACS) ou de la

deacutemultiplication drsquoinitiatives croiseacutees de diffeacuterents acteurs issus des sphegraveres

scientifiques culturelles eacuteducatives et socio-eacuteducatives

Concregravetement lrsquoeacutemergence en France drsquoune corporation de la CST est agrave mettre en

relation avec deux mouvements drsquohybridation qui se sont produits au cours de la

deacutecennie 70-80 Le premier donnera naissance en 1974 agrave ce GLACS et le second agrave

lrsquoAssociation nationale sciences techniques jeunesse (ANSTJ) qui succeacuteda en 1977

agrave la Feacutedeacuteration nationale des clubs scientifiques (FNCS creacuteeacutee elle-mecircme en 1968

cf Gautier Las Vergnas et al 2011)

Dans le premier cas des chercheurs (en particulier des physiciens) srsquoeacutetaient

rapprocheacutes des acteurs culturels faisant descendre laquo la science dans la ville raquo ndash

comme lors drsquoAix-pop en septembre 1973 ndash agrave lrsquooccasion de leurs congregraves

anteacuterieurement exclusivement focaliseacute sur la communication entre professionnels

(Detoeuf amp Dauphin 2007) Dans ce nouvel univers est mis explicitement en

exergue la relation laquo science et culture raquo Plus qursquoune dimension classique de

transmission de savoirs il srsquoagit non seulement drsquoun travail politique sur le rapport

entre scientifique et profanes mais aussi de critique des modes de production des

8 PISA 2006 propose dans sa version franccedilaise une deacutefinition de la CS dans son premier sens laquo Par culture scientifique on

entend la mesure dans laquelle un individu (1) possegravede des connaissances scientifiques et les applique pour identifier des questions acqueacuterir de nouvelles compeacutetences expliquer des pheacutenomegravenes de maniegravere scientifique et tirer des conclusions nouvelles fondeacutees sur des faits agrave propos drsquoaspects scientifiques (2) comprend les eacuteleacutements caracteacuteristiques des sciences en tant que forme de recherche et de connaissance humaines (3) est conscient du rocircle des sciences et de la technologie dans la constitution de notre environnement mateacuteriel intellectuel et culturel (4) a la volonteacute de srsquoengager en qualiteacute de citoyen reacutefleacutechi dans des problegravemes agrave caractegravere scientifique et touchant agrave des notions relatives aux sciences La culture scientifique passe par la compreacutehension de concepts scientifiques et renvoie agrave la capaciteacute drsquoappliquer une perspective scientifique et drsquoanalyser les faits de maniegravere scientifique Suit une liste de contenus (connaissances en sciences et connaissances agrave propos des sciences) de compeacutetences requises (taches ou processus scientifiques) puis de contextes et situations drsquoapplication]raquo httpwwwoecdorgdataoecd104539777163pdf p 23

9 Schiele (2005) rappelle que les questions fondatrices de ces hybridations eacutetaient deacutejagrave explicitement formuleacutees lors drsquoun

colloque organiseacute au Palais de la Deacutecouverte et associant les eacutecrivains scientifiques en 1958 mais indique qursquoelles sont devenues visibles pour trois raisons lrsquoacceacuteleacuteration de lrsquoautonomisation de la vulgarisation la prise de conscience que le progregraves se double de nuisances et de risques et la fin des trente glorieuses en lien sans doute pour la France avec la transformation des rapports de pouvoir conseacutecutifs aux eacuteveacutenements de mai 68 (p 21-23)

5

savoirs scientifiques10 comme le suggegraverent les titres des ouvrages de reacutefeacuterence de

lrsquoeacutepoque (par exemple laquo auto-critique de la science raquo Leacutevy-Leblond 1975) et une

inspiration lieacutee agrave des travaux de sociologie des sciences comme Habermas ou

Feyerabend

En ce qui concerne lrsquoautre hybridation elle a reacutesulteacute des initiatives des militants des

clubs de loisirs scientifiques regroupeacutes au sein de la FNCS11 heacutebergeacutee au Palais de

la Deacutecouverte qui acceacuteleacuteregraverent leur rapprochement avec des mouvements de jeunes

et drsquoeacuteducation populaire ces acteurs se reconnaissent dans laquo lrsquoanimation

scientifique raquo12 deacuteveloppant entre autre des formations sanctionneacutees dans le cadre

des speacutecialisations du Brevet drsquoaptitude aux fonctions drsquoanimation (BAFA) Tregraves vite

(1973-1979) ces eacutequipes firent le pont avec des chercheurs en peacutedagogie gracircce agrave

une perception de continuiteacute entre animation de centre de vacances et de loisirs et

animation de classes transplanteacutees (comme Host Deunf travaillant au sein de lrsquoINRP

sur les activiteacutes drsquoeacuteveil scientifique agrave lrsquoeacutecole) Mecircme si agrave lrsquoeacutepoque cette mouvance

laquo eacuteveil et loisirs scientifiques raquo se meacutelange assez peu avec le GLACS elle va agir en

compleacutementariteacute fertilisant des reacuteseaux13 de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire

extrascolaire ou peacuteriscolaire avec de nouvelles pratiques de deacutecouverte voire

drsquoinvestigation scientifique

De fait crsquoest la premiegravere de ces deux hybridations qui en reacutesonnance avec les

publications de plusieurs auteurs (Roqueplo 1974 Levy-Leblond 1975) et les

reacuteflexions sur la geacuteneacuteralisation14 du dispositif de laquo centre de CST raquo dont le premier a

vu le jour agrave Grenoble (en 1979) qui va propulser sur le devant de la scegravene cette

laquo CST raquo au sens figureacute et pousser agrave son institutionnalisation Etienne Guyon et

Bernard Maitte tous deux chercheurs impliqueacutes dans cette mouvance ont publieacute en

2008 un reacutesumeacute15 de cette peacuteriode de mise en place sous le titre laquo le partage des

savoirs scientifiques les centres de CSTI raquo Ils y mettent en perspective le

deacuteveloppement des CCSTI au sein du foisonnement qui srsquoest produit en France de

1973 (premiegravere manifestation laquo Physique dans la rue raquo) agrave 1992 (premiegravere laquo Science

en Fecircte raquo) raquo signalant que

10

Voir par exemple la thegravese de Debailly 2010 laquo La critique radicale de la science en France origines et incidences de la politisation de la science depuis Mai 1968 raquo

11 Gautier et Las Vergnas (2010) ont reacutecemment deacutecrit les conditions drsquoeacutemergence de ce courant en srsquoappuyant entre autres

sur des entretiens de deux principaux fondateurs (Dubost pour lrsquoANCS en 1962 et Guiraudon pour la FNCS en 1968)

12 Au sein mecircme de cette laquo animation scientifique raquo le champ de lrsquoanimation nature qui deviendra eacuteducation agrave

lrsquoenvironnement meacuterite une analyse particuliegravere car il prend progressivement son autonomie avec la creacuteation dans les anneacutees 75 du mouvement laquo eacutecole et nature raquo puis du CFEE

13 Observant que la coupure GLACSANSTJ seacutepare ceux qui questionnent la mise en scegravene (puis en culture) de la science

(expositions deacutebats theacuteacirctre) drsquoune part et ceux qui expeacuterimentent des formes de loisirs ou drsquoateliers peacuteriscolaires drsquoappropriation de savoirs eacutemancipateurs drsquoautre part on peut se demander si elle ne reproduisait pas vis-agrave-vis des activiteacutes scientifiques la ceacutesure laquo culture raquo versus laquo eacuteducation populaire raquo En observant reacutetrospectivement le positionnement du reacuteseau laquo peuple et culture raquo par exemple on constate que la deacutemarcation se situait plus entre mouvements politiques drsquoadultes drsquoune part et mouvements de jeunesse drsquoautre part

14 Rapport Maleacutecot (1981) puis rapport Maitte (1985)

15 Qui complegravete un premier article eacutecrit lui par Bernard Maitte et Michel Crozon (2001) On pourra aussi consulter le reacutecit de

vie de A Berestesky (2009) qui preacutesente la trajectoire de creacuteateur drsquoun CCSTI atypique (car sans murs) dans ce contexte

6

[ce mouvement militant des chercheurs et acteurs culturels] laquo sera accompagneacute drsquoinitiatives

de lrsquoEacutetat la creacuteation en 1972 du Bureau national drsquoinformation scientifique et technique

(BNIST) le lancement en 1979 par Valeacutery Giscard drsquoEstaing du projet de La Villette reprenant

lrsquoideacutee des Science Centers ameacutericains et permettant ndash gracircce au prestige de la science ndash de

sortir de faccedilon honorable des scandales immobiliers sur le site la transformation cette mecircme

anneacutee du BNIST en mission interministeacuterielle (MIDIST) Mais crsquoest lrsquoarriveacutee de la gauche au

pouvoir en 1981 qui va donner lrsquooccasion au mouvement de srsquoeacutepanouir de se structurer et de

srsquoexprimer politiquement Tout semble alors possible et les initiatives fleurissent tant

militantes qursquoinstitutionnelles raquo

La seconde hybridation elle associe laquo clubs scientifiques raquo et laquo activiteacutes drsquoeacuteveil raquo

peacuteriscolaires au sein de lrsquoassociation nationale sciences techniques jeunesse

(ANSTJ neacutee en 1977 du regroupement drsquoassociations de clubs) Selon Gautier

(1989)

laquo LANSTJ se donne pour objectif de faire pratiquer les sciences et les techniques agrave un public

de jeunes [hellip] La structure de projet demeure une constante mais on est passeacute de projets de

reacutealisation technique avec les clubs aeacuterospatiaux du deacutebut agrave des projets de recherche

collective dans des champs diversifieacutes tels que lastronomie leacutenergie solaire linformatique

Parallegravelement un modegravele peacutedagogique orienteacute vers la deacutecouverte de la deacutemarche

expeacuterimentale a eacuteteacute progressivement formaliseacute raquo

Lrsquoobjectif de lrsquoANSTJ nrsquoest pas formuleacute en termes de deacuteveloppement de la CST mais

drsquoapprentissage de meacutethodes meacutethode expeacuterimentale et meacutethode de

deacuteveloppement de projets scientifiques (en particulier en astronomie et en eacutetude des

milieux laquo naturels raquo) ou technologiques (fuseacutees expeacuterimentales avec le CNES ou

eacutenergies renouvelables) Mais comme lrsquoindiquent Las Vergnas Gautier et Piednoel

(2010) deacutecrivant son eacutevolution sur la peacuteriode 1970-1990

laquo Les animateurs plus inteacuteresseacutes par la deacutemarche des laquo savoirs choisis raquo que par la

technologie sont devenus progressivement pluridisciplinaires et vont se rapprocher du monde

peacuteriscolaire et des peacutedagogies de lrsquoeacuteveil scientifique et se professionnaliser [hellip] Les

interactions avec les milieux de la recherche sur lrsquoeacuteveil scientifique pour des formations

drsquoenseignant [hellip] vont appuyer la theacuteorisation des pratiques et des meacutethodes et contribuer agrave la

professionnalisation des formateurs Sous ces deux effets les animateurs et amateurs qui

avaient eacuteteacute entraineacute dans la mouvance laquo manips raquo de 1975 se trouvent ainsi scindeacutes en deux

sous-courants laquo peacutedagogues raquo de la deacutecouverte de la science expeacuterimentale et laquo amateurs raquo

de la mise au point technologique

Affirmer que lrsquoinstitutionnalisation franccedilaise de la CST reacutesulte seulement du

deacuteveloppement symeacutetrique de ces deux courants GLACS et ANSTJ serait reacuteducteur

Drsquoune part agrave leur naissance le GLACS et lrsquoANSTJ sont positionneacutes diffeacuteremment le

GLACS naicirct speacutecifiquement pour deacutevelopper lrsquoaction de culture scientifique et ses

membres seront directement les acteurs de son institutionnalisation dans les anneacutees

80 alors que lrsquoANSTJ centreacutee sur les apprentissages de meacutethodes par des pratiques

7

expeacuterimentales ne se ralliera16 que tregraves progressivement agrave la seacutemantique et aux

instances de la CST Drsquoautre part plus ou moins imbriqueacutes avec le GLACS et

lrsquoANSTJ ont existeacute plusieurs autres courants17 comme celui propre agrave la culture

technique alliant culture des objets techniques (dans la filiation des travaux de

Simondon 1958) et cultures du travail Il a eacutemergeacute avec la creacuteation en 1976 du

groupe laquo ethnotechnologie raquo par Thierry Gaudin chef de bureau au Ministegravere de

lrsquoindustrie qui donnera naissance en 1979 agrave la revue laquo Culture Technique raquo et agrave un

Centre de recherche sur la culture technique (CRCT disparu en 1996) dont Leroi-

Gourhan (1981) preacutefacera le manifeste fondateur en ces termes

laquo La technique et la culture dans nos socieacuteteacutes entretiennent des rapports de caractegravere

hieacuterarchique et lrsquoauteur de cet ouvrage souhaiterait que cela change [hellip] La civilisation repose

sur le deacuteveloppement de lartisanat qui possegravede une veacuteritable culture technique puis sur le

deacuteveloppement de lindustrie qui met en jeu les ressources eacuteconomiques qui subordonnent le

technicien aux deacutetenteurs du pouvoir La conversion du comportement de la socieacuteteacute repreacutesente

un obstacle agrave la mesure des propositions de lauteur La recherche plus ou moins consciente

dune solution pour sortir du cercle infernal dans lequel le monde est en train de senfermer

passera certainement par la prise de conscience des diffeacuterents axes du deacuteveloppement culturel

et lun de ces axes laxe majeur celui sur lequel gravite la connaissance et la pratique

technique meacuterite que son action soit soutenue et amplifieacutee raquo

Lrsquoinstitutionnalisation par la loi de 1982

Les courants reacutesultant de ces hybridations vont prendre de lrsquoampleur pour constituer

le fait social que nous qualifions ici reacutetrospectivement drsquoinstitutionnalisation de la

CST Une des eacutetapes clefs est celle de la promulgation le 16 juillet 1982 de la loi

dorientation de la recherche dont les articles 7 et 24 inscrivent dans la mission

assureacutee par les meacutetiers de recherche laquo la diffusion de la culture et de lrsquoinformation

scientifique et technique dans toute la population raquo On lit dans son annexe publieacutee

au JO18 sous le titre de laquo rapport sur la programmation et lrsquoorientation de lrsquoeffort

national de recherche et de deacuteveloppement technologique

laquo Le second volet du programme a pour ambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture En liaison avec le ministegravere de

16

En 1986 lrsquoANSTJ publiera son premier laquo Guide de la culture scientifique technique et industrielle raquo annuaire des acteurs de la CST mais la terminologie dominante au sein de lrsquoANSTJ (puis de Planegravete sciences agrave partir de 2002) restera celle de lrsquoanimation scientifique et technique Son objet statutaire principal est en effet laquo de favoriser aupregraves des jeunes linteacuterecirct la pratique et la connaissance des sciences et des techniques raquo alors que la mention laquo de deacutevelopper des actions en partenariat avec les structures de culture scientifique et technique raquo nrsquoapparait que dans une longue eacutenumeacuteration (Planegravete Sciences 2002 httpwwwplanete-sciencesorgnationaldocsstatuts_planetesciencespdf)

17 Lrsquoanimation visant agrave la laquo protection de la nature raquo eacutemerge eacutegalement dans le contexte de la confeacuterence de lrsquoONU de

Stockholm (juin 1972) deacuteclarant la neacutecessiteacute de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement Lrsquoanneacutee 1972 voit ainsi la mise en place drsquoun BTSA eacuteponyme au lyceacutee agricole de Neuvic ainsi que la creacuteation du journal peacutedagogique laquo La Hulotte raquo du premier camp de vacances pour adolescents consacreacute agrave laquo lrsquoeacutecologie raquo (FNCS) et des clubs CPN puis (1973) celle du premier laquo centre permanent drsquoinitiation agrave lrsquoenvironnement raquo (CPIE) Ce courant est au deacutepart en forte interaction avec la FNCS-ANSTJ au sein de laquelle ces actions sont coordonneacutees par un groupe laquo E raquo regroupant des animateurs issus en nombre du lyceacutee de Neuvic ce groupe srsquoautonomisera sous la forme du laquo reacuteseau eacutecole et nature raquo en 1983

18 JO du 16 juillet 1982 p 2276 et aussi httpwwwdsicnrsfrRMLRtextesintegrauxvolume111-l82-610htm

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 5: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

5

savoirs scientifiques10 comme le suggegraverent les titres des ouvrages de reacutefeacuterence de

lrsquoeacutepoque (par exemple laquo auto-critique de la science raquo Leacutevy-Leblond 1975) et une

inspiration lieacutee agrave des travaux de sociologie des sciences comme Habermas ou

Feyerabend

En ce qui concerne lrsquoautre hybridation elle a reacutesulteacute des initiatives des militants des

clubs de loisirs scientifiques regroupeacutes au sein de la FNCS11 heacutebergeacutee au Palais de

la Deacutecouverte qui acceacuteleacuteregraverent leur rapprochement avec des mouvements de jeunes

et drsquoeacuteducation populaire ces acteurs se reconnaissent dans laquo lrsquoanimation

scientifique raquo12 deacuteveloppant entre autre des formations sanctionneacutees dans le cadre

des speacutecialisations du Brevet drsquoaptitude aux fonctions drsquoanimation (BAFA) Tregraves vite

(1973-1979) ces eacutequipes firent le pont avec des chercheurs en peacutedagogie gracircce agrave

une perception de continuiteacute entre animation de centre de vacances et de loisirs et

animation de classes transplanteacutees (comme Host Deunf travaillant au sein de lrsquoINRP

sur les activiteacutes drsquoeacuteveil scientifique agrave lrsquoeacutecole) Mecircme si agrave lrsquoeacutepoque cette mouvance

laquo eacuteveil et loisirs scientifiques raquo se meacutelange assez peu avec le GLACS elle va agir en

compleacutementariteacute fertilisant des reacuteseaux13 de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire

extrascolaire ou peacuteriscolaire avec de nouvelles pratiques de deacutecouverte voire

drsquoinvestigation scientifique

De fait crsquoest la premiegravere de ces deux hybridations qui en reacutesonnance avec les

publications de plusieurs auteurs (Roqueplo 1974 Levy-Leblond 1975) et les

reacuteflexions sur la geacuteneacuteralisation14 du dispositif de laquo centre de CST raquo dont le premier a

vu le jour agrave Grenoble (en 1979) qui va propulser sur le devant de la scegravene cette

laquo CST raquo au sens figureacute et pousser agrave son institutionnalisation Etienne Guyon et

Bernard Maitte tous deux chercheurs impliqueacutes dans cette mouvance ont publieacute en

2008 un reacutesumeacute15 de cette peacuteriode de mise en place sous le titre laquo le partage des

savoirs scientifiques les centres de CSTI raquo Ils y mettent en perspective le

deacuteveloppement des CCSTI au sein du foisonnement qui srsquoest produit en France de

1973 (premiegravere manifestation laquo Physique dans la rue raquo) agrave 1992 (premiegravere laquo Science

en Fecircte raquo) raquo signalant que

10

Voir par exemple la thegravese de Debailly 2010 laquo La critique radicale de la science en France origines et incidences de la politisation de la science depuis Mai 1968 raquo

11 Gautier et Las Vergnas (2010) ont reacutecemment deacutecrit les conditions drsquoeacutemergence de ce courant en srsquoappuyant entre autres

sur des entretiens de deux principaux fondateurs (Dubost pour lrsquoANCS en 1962 et Guiraudon pour la FNCS en 1968)

12 Au sein mecircme de cette laquo animation scientifique raquo le champ de lrsquoanimation nature qui deviendra eacuteducation agrave

lrsquoenvironnement meacuterite une analyse particuliegravere car il prend progressivement son autonomie avec la creacuteation dans les anneacutees 75 du mouvement laquo eacutecole et nature raquo puis du CFEE

13 Observant que la coupure GLACSANSTJ seacutepare ceux qui questionnent la mise en scegravene (puis en culture) de la science

(expositions deacutebats theacuteacirctre) drsquoune part et ceux qui expeacuterimentent des formes de loisirs ou drsquoateliers peacuteriscolaires drsquoappropriation de savoirs eacutemancipateurs drsquoautre part on peut se demander si elle ne reproduisait pas vis-agrave-vis des activiteacutes scientifiques la ceacutesure laquo culture raquo versus laquo eacuteducation populaire raquo En observant reacutetrospectivement le positionnement du reacuteseau laquo peuple et culture raquo par exemple on constate que la deacutemarcation se situait plus entre mouvements politiques drsquoadultes drsquoune part et mouvements de jeunesse drsquoautre part

14 Rapport Maleacutecot (1981) puis rapport Maitte (1985)

15 Qui complegravete un premier article eacutecrit lui par Bernard Maitte et Michel Crozon (2001) On pourra aussi consulter le reacutecit de

vie de A Berestesky (2009) qui preacutesente la trajectoire de creacuteateur drsquoun CCSTI atypique (car sans murs) dans ce contexte

6

[ce mouvement militant des chercheurs et acteurs culturels] laquo sera accompagneacute drsquoinitiatives

de lrsquoEacutetat la creacuteation en 1972 du Bureau national drsquoinformation scientifique et technique

(BNIST) le lancement en 1979 par Valeacutery Giscard drsquoEstaing du projet de La Villette reprenant

lrsquoideacutee des Science Centers ameacutericains et permettant ndash gracircce au prestige de la science ndash de

sortir de faccedilon honorable des scandales immobiliers sur le site la transformation cette mecircme

anneacutee du BNIST en mission interministeacuterielle (MIDIST) Mais crsquoest lrsquoarriveacutee de la gauche au

pouvoir en 1981 qui va donner lrsquooccasion au mouvement de srsquoeacutepanouir de se structurer et de

srsquoexprimer politiquement Tout semble alors possible et les initiatives fleurissent tant

militantes qursquoinstitutionnelles raquo

La seconde hybridation elle associe laquo clubs scientifiques raquo et laquo activiteacutes drsquoeacuteveil raquo

peacuteriscolaires au sein de lrsquoassociation nationale sciences techniques jeunesse

(ANSTJ neacutee en 1977 du regroupement drsquoassociations de clubs) Selon Gautier

(1989)

laquo LANSTJ se donne pour objectif de faire pratiquer les sciences et les techniques agrave un public

de jeunes [hellip] La structure de projet demeure une constante mais on est passeacute de projets de

reacutealisation technique avec les clubs aeacuterospatiaux du deacutebut agrave des projets de recherche

collective dans des champs diversifieacutes tels que lastronomie leacutenergie solaire linformatique

Parallegravelement un modegravele peacutedagogique orienteacute vers la deacutecouverte de la deacutemarche

expeacuterimentale a eacuteteacute progressivement formaliseacute raquo

Lrsquoobjectif de lrsquoANSTJ nrsquoest pas formuleacute en termes de deacuteveloppement de la CST mais

drsquoapprentissage de meacutethodes meacutethode expeacuterimentale et meacutethode de

deacuteveloppement de projets scientifiques (en particulier en astronomie et en eacutetude des

milieux laquo naturels raquo) ou technologiques (fuseacutees expeacuterimentales avec le CNES ou

eacutenergies renouvelables) Mais comme lrsquoindiquent Las Vergnas Gautier et Piednoel

(2010) deacutecrivant son eacutevolution sur la peacuteriode 1970-1990

laquo Les animateurs plus inteacuteresseacutes par la deacutemarche des laquo savoirs choisis raquo que par la

technologie sont devenus progressivement pluridisciplinaires et vont se rapprocher du monde

peacuteriscolaire et des peacutedagogies de lrsquoeacuteveil scientifique et se professionnaliser [hellip] Les

interactions avec les milieux de la recherche sur lrsquoeacuteveil scientifique pour des formations

drsquoenseignant [hellip] vont appuyer la theacuteorisation des pratiques et des meacutethodes et contribuer agrave la

professionnalisation des formateurs Sous ces deux effets les animateurs et amateurs qui

avaient eacuteteacute entraineacute dans la mouvance laquo manips raquo de 1975 se trouvent ainsi scindeacutes en deux

sous-courants laquo peacutedagogues raquo de la deacutecouverte de la science expeacuterimentale et laquo amateurs raquo

de la mise au point technologique

Affirmer que lrsquoinstitutionnalisation franccedilaise de la CST reacutesulte seulement du

deacuteveloppement symeacutetrique de ces deux courants GLACS et ANSTJ serait reacuteducteur

Drsquoune part agrave leur naissance le GLACS et lrsquoANSTJ sont positionneacutes diffeacuteremment le

GLACS naicirct speacutecifiquement pour deacutevelopper lrsquoaction de culture scientifique et ses

membres seront directement les acteurs de son institutionnalisation dans les anneacutees

80 alors que lrsquoANSTJ centreacutee sur les apprentissages de meacutethodes par des pratiques

7

expeacuterimentales ne se ralliera16 que tregraves progressivement agrave la seacutemantique et aux

instances de la CST Drsquoautre part plus ou moins imbriqueacutes avec le GLACS et

lrsquoANSTJ ont existeacute plusieurs autres courants17 comme celui propre agrave la culture

technique alliant culture des objets techniques (dans la filiation des travaux de

Simondon 1958) et cultures du travail Il a eacutemergeacute avec la creacuteation en 1976 du

groupe laquo ethnotechnologie raquo par Thierry Gaudin chef de bureau au Ministegravere de

lrsquoindustrie qui donnera naissance en 1979 agrave la revue laquo Culture Technique raquo et agrave un

Centre de recherche sur la culture technique (CRCT disparu en 1996) dont Leroi-

Gourhan (1981) preacutefacera le manifeste fondateur en ces termes

laquo La technique et la culture dans nos socieacuteteacutes entretiennent des rapports de caractegravere

hieacuterarchique et lrsquoauteur de cet ouvrage souhaiterait que cela change [hellip] La civilisation repose

sur le deacuteveloppement de lartisanat qui possegravede une veacuteritable culture technique puis sur le

deacuteveloppement de lindustrie qui met en jeu les ressources eacuteconomiques qui subordonnent le

technicien aux deacutetenteurs du pouvoir La conversion du comportement de la socieacuteteacute repreacutesente

un obstacle agrave la mesure des propositions de lauteur La recherche plus ou moins consciente

dune solution pour sortir du cercle infernal dans lequel le monde est en train de senfermer

passera certainement par la prise de conscience des diffeacuterents axes du deacuteveloppement culturel

et lun de ces axes laxe majeur celui sur lequel gravite la connaissance et la pratique

technique meacuterite que son action soit soutenue et amplifieacutee raquo

Lrsquoinstitutionnalisation par la loi de 1982

Les courants reacutesultant de ces hybridations vont prendre de lrsquoampleur pour constituer

le fait social que nous qualifions ici reacutetrospectivement drsquoinstitutionnalisation de la

CST Une des eacutetapes clefs est celle de la promulgation le 16 juillet 1982 de la loi

dorientation de la recherche dont les articles 7 et 24 inscrivent dans la mission

assureacutee par les meacutetiers de recherche laquo la diffusion de la culture et de lrsquoinformation

scientifique et technique dans toute la population raquo On lit dans son annexe publieacutee

au JO18 sous le titre de laquo rapport sur la programmation et lrsquoorientation de lrsquoeffort

national de recherche et de deacuteveloppement technologique

laquo Le second volet du programme a pour ambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture En liaison avec le ministegravere de

16

En 1986 lrsquoANSTJ publiera son premier laquo Guide de la culture scientifique technique et industrielle raquo annuaire des acteurs de la CST mais la terminologie dominante au sein de lrsquoANSTJ (puis de Planegravete sciences agrave partir de 2002) restera celle de lrsquoanimation scientifique et technique Son objet statutaire principal est en effet laquo de favoriser aupregraves des jeunes linteacuterecirct la pratique et la connaissance des sciences et des techniques raquo alors que la mention laquo de deacutevelopper des actions en partenariat avec les structures de culture scientifique et technique raquo nrsquoapparait que dans une longue eacutenumeacuteration (Planegravete Sciences 2002 httpwwwplanete-sciencesorgnationaldocsstatuts_planetesciencespdf)

17 Lrsquoanimation visant agrave la laquo protection de la nature raquo eacutemerge eacutegalement dans le contexte de la confeacuterence de lrsquoONU de

Stockholm (juin 1972) deacuteclarant la neacutecessiteacute de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement Lrsquoanneacutee 1972 voit ainsi la mise en place drsquoun BTSA eacuteponyme au lyceacutee agricole de Neuvic ainsi que la creacuteation du journal peacutedagogique laquo La Hulotte raquo du premier camp de vacances pour adolescents consacreacute agrave laquo lrsquoeacutecologie raquo (FNCS) et des clubs CPN puis (1973) celle du premier laquo centre permanent drsquoinitiation agrave lrsquoenvironnement raquo (CPIE) Ce courant est au deacutepart en forte interaction avec la FNCS-ANSTJ au sein de laquelle ces actions sont coordonneacutees par un groupe laquo E raquo regroupant des animateurs issus en nombre du lyceacutee de Neuvic ce groupe srsquoautonomisera sous la forme du laquo reacuteseau eacutecole et nature raquo en 1983

18 JO du 16 juillet 1982 p 2276 et aussi httpwwwdsicnrsfrRMLRtextesintegrauxvolume111-l82-610htm

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 6: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

6

[ce mouvement militant des chercheurs et acteurs culturels] laquo sera accompagneacute drsquoinitiatives

de lrsquoEacutetat la creacuteation en 1972 du Bureau national drsquoinformation scientifique et technique

(BNIST) le lancement en 1979 par Valeacutery Giscard drsquoEstaing du projet de La Villette reprenant

lrsquoideacutee des Science Centers ameacutericains et permettant ndash gracircce au prestige de la science ndash de

sortir de faccedilon honorable des scandales immobiliers sur le site la transformation cette mecircme

anneacutee du BNIST en mission interministeacuterielle (MIDIST) Mais crsquoest lrsquoarriveacutee de la gauche au

pouvoir en 1981 qui va donner lrsquooccasion au mouvement de srsquoeacutepanouir de se structurer et de

srsquoexprimer politiquement Tout semble alors possible et les initiatives fleurissent tant

militantes qursquoinstitutionnelles raquo

La seconde hybridation elle associe laquo clubs scientifiques raquo et laquo activiteacutes drsquoeacuteveil raquo

peacuteriscolaires au sein de lrsquoassociation nationale sciences techniques jeunesse

(ANSTJ neacutee en 1977 du regroupement drsquoassociations de clubs) Selon Gautier

(1989)

laquo LANSTJ se donne pour objectif de faire pratiquer les sciences et les techniques agrave un public

de jeunes [hellip] La structure de projet demeure une constante mais on est passeacute de projets de

reacutealisation technique avec les clubs aeacuterospatiaux du deacutebut agrave des projets de recherche

collective dans des champs diversifieacutes tels que lastronomie leacutenergie solaire linformatique

Parallegravelement un modegravele peacutedagogique orienteacute vers la deacutecouverte de la deacutemarche

expeacuterimentale a eacuteteacute progressivement formaliseacute raquo

Lrsquoobjectif de lrsquoANSTJ nrsquoest pas formuleacute en termes de deacuteveloppement de la CST mais

drsquoapprentissage de meacutethodes meacutethode expeacuterimentale et meacutethode de

deacuteveloppement de projets scientifiques (en particulier en astronomie et en eacutetude des

milieux laquo naturels raquo) ou technologiques (fuseacutees expeacuterimentales avec le CNES ou

eacutenergies renouvelables) Mais comme lrsquoindiquent Las Vergnas Gautier et Piednoel

(2010) deacutecrivant son eacutevolution sur la peacuteriode 1970-1990

laquo Les animateurs plus inteacuteresseacutes par la deacutemarche des laquo savoirs choisis raquo que par la

technologie sont devenus progressivement pluridisciplinaires et vont se rapprocher du monde

peacuteriscolaire et des peacutedagogies de lrsquoeacuteveil scientifique et se professionnaliser [hellip] Les

interactions avec les milieux de la recherche sur lrsquoeacuteveil scientifique pour des formations

drsquoenseignant [hellip] vont appuyer la theacuteorisation des pratiques et des meacutethodes et contribuer agrave la

professionnalisation des formateurs Sous ces deux effets les animateurs et amateurs qui

avaient eacuteteacute entraineacute dans la mouvance laquo manips raquo de 1975 se trouvent ainsi scindeacutes en deux

sous-courants laquo peacutedagogues raquo de la deacutecouverte de la science expeacuterimentale et laquo amateurs raquo

de la mise au point technologique

Affirmer que lrsquoinstitutionnalisation franccedilaise de la CST reacutesulte seulement du

deacuteveloppement symeacutetrique de ces deux courants GLACS et ANSTJ serait reacuteducteur

Drsquoune part agrave leur naissance le GLACS et lrsquoANSTJ sont positionneacutes diffeacuteremment le

GLACS naicirct speacutecifiquement pour deacutevelopper lrsquoaction de culture scientifique et ses

membres seront directement les acteurs de son institutionnalisation dans les anneacutees

80 alors que lrsquoANSTJ centreacutee sur les apprentissages de meacutethodes par des pratiques

7

expeacuterimentales ne se ralliera16 que tregraves progressivement agrave la seacutemantique et aux

instances de la CST Drsquoautre part plus ou moins imbriqueacutes avec le GLACS et

lrsquoANSTJ ont existeacute plusieurs autres courants17 comme celui propre agrave la culture

technique alliant culture des objets techniques (dans la filiation des travaux de

Simondon 1958) et cultures du travail Il a eacutemergeacute avec la creacuteation en 1976 du

groupe laquo ethnotechnologie raquo par Thierry Gaudin chef de bureau au Ministegravere de

lrsquoindustrie qui donnera naissance en 1979 agrave la revue laquo Culture Technique raquo et agrave un

Centre de recherche sur la culture technique (CRCT disparu en 1996) dont Leroi-

Gourhan (1981) preacutefacera le manifeste fondateur en ces termes

laquo La technique et la culture dans nos socieacuteteacutes entretiennent des rapports de caractegravere

hieacuterarchique et lrsquoauteur de cet ouvrage souhaiterait que cela change [hellip] La civilisation repose

sur le deacuteveloppement de lartisanat qui possegravede une veacuteritable culture technique puis sur le

deacuteveloppement de lindustrie qui met en jeu les ressources eacuteconomiques qui subordonnent le

technicien aux deacutetenteurs du pouvoir La conversion du comportement de la socieacuteteacute repreacutesente

un obstacle agrave la mesure des propositions de lauteur La recherche plus ou moins consciente

dune solution pour sortir du cercle infernal dans lequel le monde est en train de senfermer

passera certainement par la prise de conscience des diffeacuterents axes du deacuteveloppement culturel

et lun de ces axes laxe majeur celui sur lequel gravite la connaissance et la pratique

technique meacuterite que son action soit soutenue et amplifieacutee raquo

Lrsquoinstitutionnalisation par la loi de 1982

Les courants reacutesultant de ces hybridations vont prendre de lrsquoampleur pour constituer

le fait social que nous qualifions ici reacutetrospectivement drsquoinstitutionnalisation de la

CST Une des eacutetapes clefs est celle de la promulgation le 16 juillet 1982 de la loi

dorientation de la recherche dont les articles 7 et 24 inscrivent dans la mission

assureacutee par les meacutetiers de recherche laquo la diffusion de la culture et de lrsquoinformation

scientifique et technique dans toute la population raquo On lit dans son annexe publieacutee

au JO18 sous le titre de laquo rapport sur la programmation et lrsquoorientation de lrsquoeffort

national de recherche et de deacuteveloppement technologique

laquo Le second volet du programme a pour ambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture En liaison avec le ministegravere de

16

En 1986 lrsquoANSTJ publiera son premier laquo Guide de la culture scientifique technique et industrielle raquo annuaire des acteurs de la CST mais la terminologie dominante au sein de lrsquoANSTJ (puis de Planegravete sciences agrave partir de 2002) restera celle de lrsquoanimation scientifique et technique Son objet statutaire principal est en effet laquo de favoriser aupregraves des jeunes linteacuterecirct la pratique et la connaissance des sciences et des techniques raquo alors que la mention laquo de deacutevelopper des actions en partenariat avec les structures de culture scientifique et technique raquo nrsquoapparait que dans une longue eacutenumeacuteration (Planegravete Sciences 2002 httpwwwplanete-sciencesorgnationaldocsstatuts_planetesciencespdf)

17 Lrsquoanimation visant agrave la laquo protection de la nature raquo eacutemerge eacutegalement dans le contexte de la confeacuterence de lrsquoONU de

Stockholm (juin 1972) deacuteclarant la neacutecessiteacute de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement Lrsquoanneacutee 1972 voit ainsi la mise en place drsquoun BTSA eacuteponyme au lyceacutee agricole de Neuvic ainsi que la creacuteation du journal peacutedagogique laquo La Hulotte raquo du premier camp de vacances pour adolescents consacreacute agrave laquo lrsquoeacutecologie raquo (FNCS) et des clubs CPN puis (1973) celle du premier laquo centre permanent drsquoinitiation agrave lrsquoenvironnement raquo (CPIE) Ce courant est au deacutepart en forte interaction avec la FNCS-ANSTJ au sein de laquelle ces actions sont coordonneacutees par un groupe laquo E raquo regroupant des animateurs issus en nombre du lyceacutee de Neuvic ce groupe srsquoautonomisera sous la forme du laquo reacuteseau eacutecole et nature raquo en 1983

18 JO du 16 juillet 1982 p 2276 et aussi httpwwwdsicnrsfrRMLRtextesintegrauxvolume111-l82-610htm

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 7: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

7

expeacuterimentales ne se ralliera16 que tregraves progressivement agrave la seacutemantique et aux

instances de la CST Drsquoautre part plus ou moins imbriqueacutes avec le GLACS et

lrsquoANSTJ ont existeacute plusieurs autres courants17 comme celui propre agrave la culture

technique alliant culture des objets techniques (dans la filiation des travaux de

Simondon 1958) et cultures du travail Il a eacutemergeacute avec la creacuteation en 1976 du

groupe laquo ethnotechnologie raquo par Thierry Gaudin chef de bureau au Ministegravere de

lrsquoindustrie qui donnera naissance en 1979 agrave la revue laquo Culture Technique raquo et agrave un

Centre de recherche sur la culture technique (CRCT disparu en 1996) dont Leroi-

Gourhan (1981) preacutefacera le manifeste fondateur en ces termes

laquo La technique et la culture dans nos socieacuteteacutes entretiennent des rapports de caractegravere

hieacuterarchique et lrsquoauteur de cet ouvrage souhaiterait que cela change [hellip] La civilisation repose

sur le deacuteveloppement de lartisanat qui possegravede une veacuteritable culture technique puis sur le

deacuteveloppement de lindustrie qui met en jeu les ressources eacuteconomiques qui subordonnent le

technicien aux deacutetenteurs du pouvoir La conversion du comportement de la socieacuteteacute repreacutesente

un obstacle agrave la mesure des propositions de lauteur La recherche plus ou moins consciente

dune solution pour sortir du cercle infernal dans lequel le monde est en train de senfermer

passera certainement par la prise de conscience des diffeacuterents axes du deacuteveloppement culturel

et lun de ces axes laxe majeur celui sur lequel gravite la connaissance et la pratique

technique meacuterite que son action soit soutenue et amplifieacutee raquo

Lrsquoinstitutionnalisation par la loi de 1982

Les courants reacutesultant de ces hybridations vont prendre de lrsquoampleur pour constituer

le fait social que nous qualifions ici reacutetrospectivement drsquoinstitutionnalisation de la

CST Une des eacutetapes clefs est celle de la promulgation le 16 juillet 1982 de la loi

dorientation de la recherche dont les articles 7 et 24 inscrivent dans la mission

assureacutee par les meacutetiers de recherche laquo la diffusion de la culture et de lrsquoinformation

scientifique et technique dans toute la population raquo On lit dans son annexe publieacutee

au JO18 sous le titre de laquo rapport sur la programmation et lrsquoorientation de lrsquoeffort

national de recherche et de deacuteveloppement technologique

laquo Le second volet du programme a pour ambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture En liaison avec le ministegravere de

16

En 1986 lrsquoANSTJ publiera son premier laquo Guide de la culture scientifique technique et industrielle raquo annuaire des acteurs de la CST mais la terminologie dominante au sein de lrsquoANSTJ (puis de Planegravete sciences agrave partir de 2002) restera celle de lrsquoanimation scientifique et technique Son objet statutaire principal est en effet laquo de favoriser aupregraves des jeunes linteacuterecirct la pratique et la connaissance des sciences et des techniques raquo alors que la mention laquo de deacutevelopper des actions en partenariat avec les structures de culture scientifique et technique raquo nrsquoapparait que dans une longue eacutenumeacuteration (Planegravete Sciences 2002 httpwwwplanete-sciencesorgnationaldocsstatuts_planetesciencespdf)

17 Lrsquoanimation visant agrave la laquo protection de la nature raquo eacutemerge eacutegalement dans le contexte de la confeacuterence de lrsquoONU de

Stockholm (juin 1972) deacuteclarant la neacutecessiteacute de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement Lrsquoanneacutee 1972 voit ainsi la mise en place drsquoun BTSA eacuteponyme au lyceacutee agricole de Neuvic ainsi que la creacuteation du journal peacutedagogique laquo La Hulotte raquo du premier camp de vacances pour adolescents consacreacute agrave laquo lrsquoeacutecologie raquo (FNCS) et des clubs CPN puis (1973) celle du premier laquo centre permanent drsquoinitiation agrave lrsquoenvironnement raquo (CPIE) Ce courant est au deacutepart en forte interaction avec la FNCS-ANSTJ au sein de laquelle ces actions sont coordonneacutees par un groupe laquo E raquo regroupant des animateurs issus en nombre du lyceacutee de Neuvic ce groupe srsquoautonomisera sous la forme du laquo reacuteseau eacutecole et nature raquo en 1983

18 JO du 16 juillet 1982 p 2276 et aussi httpwwwdsicnrsfrRMLRtextesintegrauxvolume111-l82-610htm

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 8: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

8

leacuteducation nationale un effort sera reacutealiseacute pour donner une place accrue aux disciplines et

aux meacutethodes scientifiques pour deacutevelopper lesprit critique la creacuteativiteacute et laptitude au

jugement personnel Cet effort prendra notamment appui sur lhistoire et les perspectives des

sciences et des techniques En liaison avec les ministegraveres de la culture du temps libre de la

communication et les autres ministegraveres concerneacutes des actions culturelles seront conduites

visant agrave associer les grands moyens dinformation en particulier les stations de radio et les

chaicircnes de teacuteleacutevision les reacutegions le mouvement associatif les entreprises les syndicats et

dune maniegravere geacuteneacuterale le monde du travail au deacuteveloppement de linformation et de la

culture scientifiques et techniques [hellip]Le renforcement des centres reacutegionaux de culture

scientifique et technique et la creacuteation de la citeacute des sciences et techniques de La Villette

constitueront des instruments de cette politique raquo

En compleacutement agrave son inscription dans la loi de 1982 et agrave la multiplication des

actions sur le terrain de nombreux systegravemes symboliques ndash eacuteponymes pour la

plupart ndash ont contribueacute agrave mettre socialement en scegravene la CST souvent eacutetendue agrave la

CSTI (ougrave le laquo I raquo eacutelargit agrave la dimension Industrielle) ainsi le conseil national de la

CSTI qui a eacuteteacute creacuteeacute en 1983 preacutesideacute par JM Leacutevy-Leblond et le programme

mobilisateur de la CSTI lanceacute en octobre 1985 par le Ministre H Curien De mecircme

se sont succeacutedeacutees une multipliciteacute drsquoassises ou drsquoeacutetats geacuteneacuteraux et a eacuteteacute

institutionnaliseacute le reacuteseau de centres ad hoc les CCSTI dont la geacuteneacuteralisation a eacuteteacute

souhaiteacutee degraves 1985

12 La professionnalisation des meacutediateurs

Consolidations progressives

Les anneacutees 80 voient donc19 la monteacutee en puissance des mouvances issues des

deux hybridations deacutecrites plus haut Mecircme si la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave

La Villette ne parvient pas agrave tenir le rocircle drsquoanimateur national qui lui eacutetait deacutevolu la

peacuteriode est celle de la professionnalisation

(1) Du cocircteacute de ceux qui se reconnaissaient degraves leur naissance dans lrsquointituleacute de CST

(notamment la filiation du GLACS) crsquoest lrsquoassociation des museacutees et centres de

CSTI (AMCSTI creacuteeacutee agrave lrsquooccasion de la mise en place ndash au deacutebut des anneacutees 80 ndash

du projet qui allait devenir la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie agrave La Villette) et le

reacuteseau des CCSTI (Maitte 1985) qui vont progressivement structurer le paysage

mecircme si quelques mouvances srsquoaffirment plus autonomes comme certains de ces

CCSTI (Fondation 93 par exemple cf Berestesky 2009) lrsquoAssociation Sciences

Technologies et Socieacuteteacute (ASTS) ou encore le reacuteseau des laquo boutiques de sciences raquo

(Stewart et Havelange 1989) Plusieurs auteurs (Jantzen 2001 Crozon et Maitte

2001 Guyon et Maitte 2008) ont deacutecrit cette eacutevolution en mettant en avant le

foisonnement drsquoinitiatives locales et reacutegionales la creacuteation de la Fecircte de la Science

(1992) et les deacutesillusions lieacutees agrave la conception principalement laquo intramuros raquo et

parisienne de la Citeacute des sciences (Beretetski 2009 Caillet 2011)

19

Il ne faudrait pas croire que cette mise en scegravene de la CST est speacutecifiquement lieacutee au changement politique de 1981 en France Schiele (2005) a deacutemontreacute que le Royaume Uni avait suivi la mecircme institutionnalisation des politiques de Public understanding of science (ou de Public engagement in science and technology)

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 9: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

9

(2) Cocircteacute loisirs et eacuteveil scientifique lrsquoANSTJ va progressivement eacutelargir son spectre

autour de son objectif initial drsquoappropriation de meacutethodes drsquoinvestigation et de

reacutesolution de problegravemes et en parallegravele ces activiteacutes de laquo deacutecouvertes scientifiques

pour les jeunes raquo vont faire largement tacircche drsquohuile au sein drsquoautres reacuteseaux Ainsi

agrave lrsquooccasion de lrsquoanneacutee de la jeunesse deacutecreacuteteacutee par lrsquoUNESCO pour 1984 les

deacuteveloppeurs de lrsquoANSTJ vont importer20 du Queacutebec en France le concept

drsquoexposcience (preacutesentation annuelle sous forme drsquoun salon ouvert agrave tous les

habitants de dizaines ou centaines de stands preacutesentant des projets scientifiques

de jeunes) et dans cette mouvance reacuteussir agrave entraicircner une dizaine de reacuteseaux

nationaux de jeunesse et drsquoeacuteducation populaire (Escot 1999) et donner naissance

au Collectif interassociatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et techniques

internationales (CIRASTI) qui va enfin reacuteussir agrave amplifier le niveau drsquohybridation

resteacute timide dans les anneacutees 70 Meacutelangeant des associations speacutecialiseacutees en

animation scientifiques et des reacuteseaux geacuteneacuteralistes de lrsquoeacuteducation populaire

(agissant via des MJC foyers ruraux centres de loisirs) il va en effet devenir agrave la

fois un interlocuteur international21 se territorialiser dans la plupart des reacutegions

franccedilaises et devenir un entrelacs de creusets drsquoeacutechanges de nouvelles strateacutegies

et drsquoamplification (Escot 1999) assumant mecircme un rocircle de porte-parole de

lrsquoeacuteducation populaire pour la theacutematique de la CST

Il serait reacuteducteur de deacutecrire le fourmillement des actions de CST dans ces anneacutees

80-90 agrave partir de ces deux seuls courants Dans beaucoup de reacutegions la dimension

de la culture et du patrimoine industriels occupe alors une place importante comme

le montrent les travaux22 de Marie-Jeanne Choffel - Mailfert (2000) De mecircme la

reacuteflexion peacutedagogique sur lrsquoeacuteducation scientifique srsquoest souvent associeacutee agrave des

expeacuteriences non strictement scolaires souvent analyseacutees lors des journeacutees

annuelles de Chamonix ou agrave partir de 1996 au sein du mouvement de laquo la main agrave la

pacircte raquo Certaines speacutecificiteacutes tactiques ou disciplinaires vont aussi marquer le

paysage en particulier dans les champs de lrsquoastronomie et de lrsquoeacuteducation agrave

lrsquoenvironnement23 ainsi le rapprochement de lrsquoANSTJ avec lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie va conduire agrave faire eacutemerger des manifestations embleacutematiques degraves les

anneacutees 80 laquo Au-delagrave de [son] cette acception qualitative de la laquo deacutemocratisation raquo (faire partager une

expeacuterience scientifique) srsquoest progressivement ajouteacutee une autre dimension au sein de

lrsquoANSTJ Celle de favoriser massivement lrsquointeacuterecirct pour lrsquoastronomie elle se concreacutetise

20

Il srsquoagit de Jean-Claude Guiraudon (devenu depuis Preacutesident du MILSET puis du CIRASTI) qui avait deacutejagrave importeacute quelques anneacutees auparavant les outils et les deacutemarches peacutedagogiques des laquo Petits deacutebrouillards raquo

21 Gracircce agrave lrsquoexistence au sein du Mouvement international pour le loisir scientifique ndash MILSET ndash drsquoun systegraveme

drsquoexposciences internationales ougrave srsquoexposent des seacutelections nationales

22 Dans son ouvrage laquo Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture scientifique technique et industrielle

en reacutegion Lorraine 1980-1995 raquo elle propose ainsi quatre analyses imbriqueacutees celles des textes fondateurs nationaux de la CST celles des volets CSTI des laquo livres blancs de la recherche raquo demandeacutes par le gouvernement aux conseils reacutegionaux en 1990 celles des initiatives de CSTI en Lorraine et enfin celle des perceptions des publics de 12 dispositifs de CSTI en Lorraine

23 Voir le reacutecit laquo histoire de famille et saga de lrsquoanimation scientifique et de lrsquoeacuteducation agrave lrsquoenvironnement eacuteclairages lieacutes au

reacuteseau FNCS-ANSTJ entre 1972 et 1985 raquo Las Vergnas 2009

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 10: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

10

drsquoabord agrave Paris en 1985 avec les quinze jours de laquo meacutetro agrave ciel ouvert raquo avec leurs millions

de visiteurs dans 16 stations et leur centaine drsquoanimateurs puis ensuite par les campagnes

nationales drsquoobservation des eacutetoiles filantes en 1987 qui donneront naissance en 1991 agrave la

laquo nuit des eacutetoiles filantes raquo renommeacutee ensuite laquo Nuits des eacutetoiles raquo (Las Vergnas Gautier et

Piednoeumll 2011)

Les formations universitaires teacutemoins de lrsquoinstitutionnalisation

Sur la peacuteriode des anneacutees 90 lrsquoeacuteleacutement qui atteste le plus objectivement de la

professionnalisation est la mise en place de formations diplomantes24 de diffeacuterents

niveaux Elles naissent rattacheacutees soit aux carriegraveres sociales soit aux SIC soit aux

meacutetiers de la culture mais restant paradoxalement25 agrave distance des sciences de

lrsquoeacuteducation

Plusieurs colloques sur cette question de la formation vont ainsi se succeacuteder au

deacutebut des anneacutees 90 (Deveze-Berthet Emptoz 1992) tentant de clarifier le deacutebat

entre deux visions du meacutediateur ideacuteal celle drsquoun laquo scientifique raquo agrave plus-value de

communicant ou celle drsquoun animateur socio-culturel agrave compleacutement scientifique

Dans les filiegraveres laquo jeunesse et sports raquo elles vont prendre la forme drsquoUV du BEATEP

ou du BPJEPS dans lrsquoenseignement supeacuterieur elles sont mises en place degraves les

anneacutees 1980 agrave trois niveaux diffeacuterents Au niveau Bac+2 ou 3 on trouve lrsquoanneacutee

speacuteciale du DUT carriegraveres sociales de lrsquoIUT de Tours creacuteeacutee en 1985 et devenue en

2005 une Licence pro agreacutegeant animation scientifique et eacuteducation relative agrave

lrsquoenvironnement A Bac+5 lrsquooffre se deacutemultiplie rapidement avec des formations

speacutecialiseacutees (Paris 7 Museacuteum national drsquohistoire naturelle Dijon Strasbourg) ou

deacuteveloppant une vision transversale de la meacutediation (Paris 8 Avignon) On assiste

aussi agrave la mise en place drsquoUV en DEUG scientifique (Paris 11) Les questions

poseacutees agrave lrsquoeacutepoque resteront ouvertes dans les deacutecennies qui suivront quel doit ecirctre

le niveau de qualification du meacutediateur entre B+23 ou 5 Quel niveau de formation

scientifique minimum doit-il posseacuteder Les employeurs ont-ils les moyens de

reacutemuneacuterer les niveaux de compeacutetences qursquoils recircvent drsquoembaucher Srsquoagit-il drsquoune

activiteacute occasionnelle au cours des eacutetudes ou drsquoun meacutetier en tant que tel

2 CARACTERISATION

21 Un conglomeacuterat disparate

Les acteurs de la CST comme une corporation de facto

Mecircme si ces formations ont contribueacute agrave identifier les compeacutetences souhaiteacutees pour

les actions de CST force est de constater qursquoelles sont loin drsquoavoir complegravetement

clarifieacute le paysages des professionnels

24

Srsquoaccompagnant souvent drsquoun glissement terminologique drsquoanimateur vers laquo meacutediateur scientifique raquo cf Beaumeloup et Las Vergnas 1986 Caillet Las Vergnas amp Prokhoroff 1993 Caillet 1995 tous reprenant Moles et Oulif (1967) citeacute par Schiele (2005 en note 3)

25 Peut-ecirctre pour affirmer le caractegravere culturel et donc non scolaire de la CST

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 11: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

11

En fait les acteurs constituent aujourdrsquohui une corporation de facto agglomeacuterant des

organisations et des personnes aux origines statuts et missions disparates Certes

toutes leurs activiteacutes ont en commun drsquoecirctre lieacutees de pregraves ou de loin agrave la transmission

ou au partage de savoirs scientifiques techniques ou industriels mais leurs reacuteseaux

et leurs motivations sont particuliegraverement varieacutes allant par exemple drsquoopeacuterations

promotionnelles drsquoeacutetablissement de recherche agrave des deacutemonstrations de rejet de telle

ou telle option technologique on peut drsquoailleurs faire lrsquohypothegravese que ce sont surtout

des effets drsquoaubaines (prioriteacute des financements renforcement de la reconnaissance

par certaines instances) qui ont conduits beaucoup drsquoacteurs agrave adopter la

terminologie de laquo CST raquo

Concregravetement la fabrication de ce conglomeacuterat de la CST a eacuteteacute aussi favoriseacute par de

grands eacutevegravenements instituants -opportuniteacute difficilement refusable de se faire

connaicirctre et reconnaicirctre- comme les laquo eacutetats geacuteneacuteraux de la culture scientifique et

technique raquo mis en place en 1989 par quatre ministegraveres26 le colloque national des

laquo assises de la culture scientifique raquo organiseacute par lrsquoASTS (association sciences

techniques et socieacuteteacute) avec lrsquoUnesco en 2001 ou le colloque de la commission des

affaires culturelles du Seacutenat laquo la culture scientifique et technique pour tous une

prioriteacute nationale raquo en 2003 pour nrsquoen citer que quelques-uns

Ainsi lrsquoAMCSTI organisation de reacutefeacuterence de la corporation revendique aujourdrsquohui

laquo des milliers drsquoacteurs raquo que sa documentation preacutesente27 en ces termes

laquo Depuis une trentaine danneacutees la CSTI sest fortement deacuteveloppeacutee en France Partie

inteacutegrante de la culture au sens large elle doit permettre au citoyen de comprendre le monde

dans lequel il vit et de se preacuteparer agrave vivre dans celui de demain En deacuteveloppant linformation

et la reacuteflexion des publics sur la science et ses enjeux en favorisant les eacutechanges avec la

communauteacute scientifique en partageant les savoirs en eacuteduquant agrave une citoyenneteacute active

elle inscrit la science dans la socieacuteteacute Elle inteacuteresse eacutegalement les collectiviteacutes territoriales

dans leur projet dameacutenagement du territoire ainsi que le secteur eacuteconomique de par son

poids en termes de retombeacutees touristiques et demplois [hellip] En dialogue avec le monde de

leacuteducation et des meacutedias des milliers dacteurs de la CSTI maillent aujourdhui le territoire

- La reacutepartition des museacutees eacutevoque lhistoire des collections naturalistes et des activiteacutes

industrielles Nombre de ces lieux reacutenoveacutes ont trouveacute de nouvelles meacutediations et de

nouveaux publics

- Depuis 1979 ce sont plusieurs dizaines de centres de culture scientifique qui ont vu le jour

Le label Science et socieacuteteacute innovation distinguent ceux qui se sont engageacutes dans un projet

territorial fort

- Plus reacutecemment encore des cellules de culture scientifique ont eacuteteacute creacuteeacutees au sein des

universiteacutes tandis que les eacutecoles dingeacutenieurs deacuteveloppent des actions deacuteducation aux

sciences

- Le monde de leacuteducation populaire intervient en zones urbaines ou rurales par des

approches diverses abordant la science par la pratique expeacuterimentale la deacutemarche

environnementale ou tout autre moyen

26 et srsquoappuyant sur 31 eacutetats geacuteneacuteraux reacutegionaux qui ont servi agrave alimenter les colloque national les 4 5 et 6 deacutecembre 1989 pour tirer bilan laquo des initiatives et expeacuteriences conduites [pendant les] derniegraveres anneacutees [et permettant] de mieux cerner la place de la science et de la technologie dans la culture

27 Cette auto-caracteacuterisation prise dans la documentation de lrsquoAMCSTI montre bien la nature du champ deacutefini en extension

(sont listeacutees les instances sociales existantes) et non en intention (on ne travaille pas agrave partir drsquoune deacutefinition)

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 12: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

12

- Les collectiviteacutes territoriales simpliquent de maniegravere croissante en financcedilant des

eacutetablissements publics en organisant des manifestations ou en accompagnant diverses

structures de terrain

- Les acteurs de la CSTI sont en fait innombrables planeacutetariums PNR maisons de

lenvironnement sans compter le rocircle de certaines entreprises et fondations

- Dautre part des eacuteveacutenements feacutedeacuterateurs marquent au niveau national le deacuteroulement de

lanneacutee Il en est de mecircme pour des festivals et manifestations au rayonnement reacutegional fortraquo

22 Les ambiguumliteacutes protectrices creacuteeacutees par la terminologie laquo CST raquo

Cet inventaire illustre bien ce caractegravere de conglomeacuterat du champ de la CST Autour

des diffeacuterents noyaux se sont agglutineacutes de nouveaux partenaires qui ont adheacutereacute agrave la

seacutemantique de la CST Ce meacutecanisme drsquoaccreacutetion progressive se trouve encourageacute

et renforceacute par des ambiguiumlteacutes seacutemantiques propres agrave lrsquoexpression laquo CST raquo qui peut

recouvrir beaucoup de preacuteoccupations ou de centres drsquointeacuterecirct Ces ambiguiumlteacutes

releveacutees par de nombreux auteurs (comme Jantzen et Schiele) peuvent ecirctre

classeacutees en trois familles celles lieacutees agrave la reacutefeacuterence agrave la laquo culture raquo celles lieacutees agrave

lrsquoamalgame laquo sciences et techniques raquo celles plus speacutecifiquement lieacutees agrave la

repreacutesentation de la laquo science raquo

Un rattachement flottant au champ de la laquo culture raquo

La reacutefeacuterence au signifiant laquo culture raquo dans lrsquoexpression CST creacutee elle-mecircme trois

sous-niveaux drsquoambiguiumlteacute

Le premier est celui deacutejagrave citeacute entre le sens premier de CST utiliseacute pour parler de la

dimension scientifique dans la culture drsquoune personne ou drsquoun groupe et le sens

figureacute que nous eacutetudions dans cette preacutesente note de synthegravese qui lui deacutesigne les

programmes et actions de deacuteveloppement voire de mise en scegravene de cette culture

(lrsquoappareil et les outils qui permettent cette mise en scegravene de la CST)

La deuxiegraveme ambiguiumlteacute concerne la repreacutesentation veacutehiculeacutee par lrsquoideacutee mecircme de

culture culture de lrsquoindividu (Bildung en allemand) ou culture drsquoune socieacuteteacute ou drsquoune

civilisation (Kultur en allemand)

La troisiegraveme enfin est lieacute au glissement seacutemantique entre le raccourci de laquo CST raquo et

la volonteacute inscrite dans la loi du 1982 de laquoreacuteinteacutegrer la dimension scientifique et

technique dans linformation leacuteducation et la culture raquo formulation directement

inspireacutee de lrsquoexpression de Leacutevy-Leblond laquo remettre la science en culture raquo28 Certes

loin de souhaiter lrsquoinstauration drsquoune laquo sous culture raquo scientifique seacutepareacutee les

acteurs suivent Levy-Leblond et agissent pour le deacuteveloppement de la part

scientifique de la culture geacuteneacuterale Or a contrario le vocable culture scientifique

peut laisser croire qursquoil srsquoagit de mettre de la science dans lrsquoaction culturelle

srsquointeacuteresser aux relations entre arts et sciences mettre en valeur le patrimoine

28

Il semble que la formulation franccedilaise de laquo culture scientifique et technique raquo reacutesulte drsquoune eacuterosion seacutemantique de cette expression Dans cette simplification la repreacutesentation drsquoune part scientifique de la culture geacuteneacuterale est devenue celle ndash conceptuellement inverse et anthropologiquement discutable - drsquoune culture speacutecifique

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 13: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

13

scientifiquehellip et mettre de la science dans lrsquoaction culturelle et les ldquopratiques

culturelles institueacuteesrdquo

Voilagrave qui renvoie agrave une question clef (Jantzen 2001 Las Vergnas 2006a) quand

les sciences seront revenues laquo en culture geacuteneacuterale raquo en quoi cela se verra-t-il Au

fait qursquoil srsquoagira drsquoun sujet de conversation dans les cafeacutes au fait que les CCSTI

seront plus freacutequenteacutes au fait que les habitants auront plus drsquoaffection pour la

recherche scientifique ou au fait qursquoils feront mieux appel aux savoirs et savoir-faire

scientifiques pour srsquoapproprier et geacuterer leur environnement

Une telle question volontairement simpliste fournit un analyseur de la difficulteacute agrave

eacutetablir un projet macro social de CST la plupart des acteurs savent reacutepondre agrave la

question de la finaliteacute de leurs actions agrave lrsquoeacutechelle de lrsquoindividu et du petit groupe mais

se retrouvent dans lrsquoincapaciteacute agrave formuler des finaliteacutes creacutedibles agrave la CST agrave lrsquoeacutechelle

socieacutetale Ils semblent ecirctre victimes drsquoun pheacutenomegravene que nous serions tenteacutes de

qualifier de laquo dissonance scalaire raquo propre agrave des objectifs atteignables pour des

individus mais impossibles agrave reacutealiser agrave lrsquoechelle de la socieacuteteacute toute entiegravere en raison

drsquoinvariants sociaux sur lesquels les acteurs ne disposent drsquoaucune prise

Des qualificatifs agrave la fois polyseacutemiques et impreacutecis

Technique Technologie ou Techno-science

Le double qualificatif scientifique et technique est aussi source de problegravemes29

malgreacute les efforts du courant de laquo culture technique raquo de revendiquer une place

autonome pour la part technique de la culture cet amalgame est compris comme

signifiant que la science nrsquoest autre que de la technoscience non seacuteparable de la

dimension technologique voire drsquoindustrialisation Il en reacutesulte de fait une

confiscation de la laquo culture technique raquo et un deacuteni de la speacutecificiteacute des laquo pratiques

techniques raquo au sens traditionnel du terme comme si elles nrsquoeacutetaient qursquoindignes

drsquointeacutegrer la CST distingueacutee A contrario agrave partir du moment ougrave il y a modeacutelisation

induction deacuteduction observation meacutetrologie certaines pratiques techniques de nos

concitoyens celles qui confrontent agrave observer modeacuteliser tirer des conclusions ne

pourraient-elles pas ecirctre consideacutereacutees comme des pratiques culturelles scientifiques

justement profanes ou amateurs Vis-agrave-vis de cette question beaucoup drsquoacteurs

ont une conception restrictive du signifieacute CST comme une alphabeacutetisation

scientifique descendante plutocirct que comme la valorisation des dimensions

scientifiques et techniques de la culture veacutecue par chacun Ce point de vue aggrave

lrsquoobstacle eacutepisteacutemologique (Bachelard 1938) entre savoirs scientifiques et savoirs

issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur les opportuniteacutes

29

Voilagrave qui renvoie agrave la ceacutelegravebre remarque de Latour (1991 p156) sur la faible pertinence de tels adjectifs qualificatifs laquo Les mots science

technique organisation eacuteconomie [hellip] sont de bons substantifs mais de mauvais adjectifs et drsquoexeacutecrables adverbes La science ne se produit pas de faccedilon plus scientifique que la technique de maniegravere technique que lrsquoorganisation de maniegravere organiseacutee ou lrsquoeacuteconomie de maniegravere eacuteconomique raquo in laquo nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes raquo (p 156)

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 14: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

14

drsquoacculturation scientifique que fournissent de nombreuses pratiques techniques

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle dimension agrave cet obstacle30

LrsquoACST Alphabeacutetisation esprit scientifique ou dialogue science-socieacuteteacute

Une autre source drsquoambiguumliteacute est fournie par la question de la deacutefinition mecircme du

laquo scientifique raquo Contrairement agrave ce que lrsquoon pourrait attendre la question classique

eacutepisteacutemologique de la deacutemarcation entre science et non science ne deacutepartage que

marginalement les acteurs de la CST a contrario ils se diffeacuterentient surtout par la

perspective sous laquelle ils envisagent prioritairement lrsquoactiviteacute scientifique Selon

John Durant (1993) existent parmi les acteurs de la CST trois visions diffeacuterentes de ce

qui est signifieacute par laquo les sciences raquo (1) un corpus de savoirs de reacutefeacuterence qui se

transmet par lrsquoenseignement (2) des meacutethodes de reacutesolution de problegravemes (3) la

laquo civilisation scientifique raquo agrave savoir le systegraveme de production socio-eacuteconomique de

savoirs et drsquoinnovations correspondant agrave la big science globaliseacutee au sens ougrave celle ci a

eacuteteacute introduite par Price (1963) par opposition agrave la little science celle des meacutethodes

appropriables agrave lrsquoeacutechelle individuelle de la vision (2) Comme le remarque Bensaude-

Vincent (2010) laquo les pratiques de meacutediation scientifique configurent non seulement le

public mais aussi [notre vision de] la science elle-mecircme raquo

23 Les effets collateacuteraux des ambiguumliteacutes terminologiques

Un champ recouvrant des pratiques qui peuvent viser des objectifs contradictoires

Ce caractegravere tregraves disparate a souvent eacuteteacute vu comme un des teacutemoignages de la

richesse du champ de la CST On peut penser que ces ambiguumliteacutes seacutemantiques ont

faciliteacute lrsquoagglomeacuteration aux discours de CST drsquoune tregraves grande diversiteacute drsquoacteurs de

fait elles ont aussi autoriseacute une coexistence paradoxale de projets aux objectifs

contradictoires Sous la mecircme volonteacute geacuteneacuterale drsquoencourager le deacuteveloppement de la

culture scientifique et technique dans la socieacuteteacute se cocirctoient ainsi des actions visant agrave

la reacuteduction des ineacutegaliteacutes drsquoaccegraves aux savoirs pour tous ou a contrario la deacutetection des

vocations scientifiques pour drsquoautres De mecircme peuvent coexister au sein de la

corporation de la CST des actions visant expresseacutement au deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique vis-agrave-vis de la notion de progregraves technique pendant que drsquoautres deacuteclareront

agir pour la promotion de la consommation des fruits du progregraves drsquoautre part De ce

point de vue le champ de la CST apparait comme un systegraveme de laquo consensus mou raquo

propice aux amalgames

30

Dans un travail reacutecent (Las Vergnas 2011) nous le qualifions drsquoobstacle laquo scolastique raquo pour signifier que la laquo relation agrave la science raquo de

telle ou telle activiteacute de la personne [est] masqueacutee agrave celle-ci scotomiseacutee par le fait que la qualification de laquo scientifique raquo ne peut ecirctre attribueacutee qursquoagrave ce qui prend une forme similaire agrave ce qursquoa eacuteteacute lrsquoexpeacuterience des disciplines scientifiques scolaires Nous employons laquo scolastique raquo en lui attribuant un sens proche de son eacutetymologie signifiant laquo limiteacute strictement agrave ce qui est enseigneacute dans les eacutecoles garantes des dogmes et de la tradition leacutegitime raquo Cela renvoie aussi au laquo complexe du sale raquo introduit par Andreacute Desvalleacutees (1992) agrave propos de lrsquohistoire de la museacuteologie industrielle pour laquelle il fallait laquo montrer de beaux produits (donc des produits dits artistiques) plutocirct que des produits vulgaires (autrement dit seulement utilitaires) [hellip et eacuteviter de parler de hellip] la production qui avait pour corollaire est lrsquoexploitation sociale et en outre [hellip] se faisait dans la crasse raquo

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 15: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

15

Sans aller jusqursquoagrave des oppositions aussi extrecircmes il est de fait courant drsquoobserver que

les ambiguumliteacutes seacutemantiques releveacutees plus haut produisent des ambiguiumlteacutes strateacutegiques

Cela est par exemple le cas en ce qui concerne les discours sur les valeurs

eacutemancipatrices de la CST ou encore sur les enjeux de la CST en matiegravere drsquoorientation

scolaire et professionnelle

Ambiguiumlteacutes concernant la valeur eacutemancipatrice de la CST

Le deacutecoupage proposeacute plus haut par Durant en trois visions de la science (corpus de

savoirs little science de reacutesolution de problegraveme ou big science socio-eacuteconomique

globaliseacutee) peut aussi servir agrave mieux comprendre les diffeacuterences entre les projets

politiques que les acteurs deacutefendent (Las Vergnas 2006a)

Chacune des deux derniegraveres perspectives (little science ou big science) correspond agrave

un projet drsquoeacutemancipation drsquoempowerment31 drsquoeacutechelle diffeacuterente lrsquoun individuel et

lrsquoautre collectif Le premier construit par reacutefeacuterence agrave la vision drsquoune little science se

propose de doter chaque personne de capaciteacutes et drsquooutils de reacuteflexion et de reacutesolution

de ses propres problegravemes Ses promoteurs militent pour le deacuteveloppement de lrsquoesprit

critique et scientifique permettant de distinguer croyances convictions et savoirs

eacutetayeacutes et de limiter lrsquoeffet drsquoarguments drsquoautoriteacute infondeacutes Le second deacutecoulant lui des

craintes associeacutees agrave la big science vise surtout une transformation de la place des

individus dans systegraveme de deacutecision concernant les technosciences et les innovations

Ses promoteurs veulent permettre la reacutegulation et le controcircle par les citoyens du

deacuteveloppement technoscientifique et de ses impacts sur les ecirctres humains et leurs

organisations socio-eacuteconomiques

Or on trouve peu drsquoacteurs associant ces deux projets eacutemancipateurs qui de fait ont

donneacute naissance agrave des programmes drsquoaction et agrave des ideacuteologies seacutepareacutees Le regard

little science se concreacutetise par des pratiques de tacirctonnements expeacuterimentaux ou de

projets de deacutecouverte scientifique qui se retrouvent au sein de la famille du Cirasti (et

autres descendants de lrsquoANSTJ) tandis que le regard big science a conduit au

deacuteveloppement de pratiques du type ateliers deacutelibeacuteratifs confeacuterences de consensus ou

cafeacutes scientifiques voire agrave la creacuteation de nouveau concepts comme celui des lanceurs

drsquoalerte au sein de multiples organisations dont la plus embleacutematique est la Fondation

sciences citoyennes Aujourdrsquohui la question du controcircle deacutemocratique des choix

techno scientifiques et les discours concernant le laquo deacuteveloppement durable raquo

propulsent sur le devant de la scegravene le regard big science alors que le regard

laquo sciences = corpus raquo reste dominant chez les acteurs de lrsquoenseignement initial Le

regard little science srsquoen trouve largement releacutegueacute au second plan y compris pour

certaines organisations drsquoeacuteducation populaire qui se tournent plus vers des formes de

deacutebats publics et moins vers des approches expeacuterimentales concregravetes pour ces

derniegraveres la neacutecessiteacute deacutemocratique dun empowerment social est tellement urgent

qursquoil ne saurait attendre lrsquoempowerment meacutethodologique des individus

31

Au sens fort drsquoeacutemancipation tel qursquoil est deacutefinit par Rappoport (1987) pour les individus et Hawley et Mc Whirter (1991) pour une communauteacute permettant lrsquoexercice drsquoun pouvoir leacutegitime affirmeacute regagneacute ou restaureacute

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 16: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

16

Pourtant peut-on envisager lrsquoun sans lrsquoautre Par la publication du laquo manifeste de

Montsouris raquo (Cirasti et al 2011) les mouvements de jeunesse et drsquoeacuteducation

populaire impliqueacutes dans les actions de deacutecouverte scientifique pour tous CST ont tenu

agrave affirmer que ce nrsquoest pas souhaitable Selon ces mouvements on court aujourdrsquohui

un grand risque agrave reacuteduire la little science agrave un simple rocircle drsquoauxiliaire de lrsquoeacutecole et du

collegravege En effet sans opportuniteacutes concregravetes de deacutecouverte de pratiques scientifiques

pheacutenomeacutenologiques les actions laquo culturelles raquo lieacutees agrave la big science se reacuteduisent agrave des

recueils drsquoopinions meacutethodes dogmatiques drsquoinformation et drsquoassociation des citoyens

mecircme dans des ateliers deacutelibeacuteratifs32 faute drsquoempowerment individuel lrsquoempowerment

collectif ne serait que deacutemagogie33 Comme le preacutecise le manifeste de Montsouris

laquo Il est illusoire drsquoespeacuterer un partage plus deacutemocratique des deacutecisions scientifiques et

techniques en se contentant de chercher agrave combler un preacutesumeacute deacuteficit drsquoinformations des non

speacutecialistes Il le serait tout autant de vouloir recueillir des opinions citoyennes pertinentes

sans favoriser des appropriations de meacutethodes de raisonnement et de reacutesolution de

problegravemes Il le serait encore de croire que lrsquoaction culturelle scientifique et technique ne

puisse se reacutesumer quagrave lrsquoaccroissement de lrsquooffre et la multiplication des ressources raquo

Ambiguiumlteacutes concernant la relation entre CST et orientation

professionnelle lutte contre lrsquoillettrisme ou deacutetection des vocations

Une autre ambiguiumlteacute reacutecurrente obscurcit aussi lrsquoanalyse de lrsquoinstitutionnalisation de la

CST celle qui porte sur la relation entre CST et orientation professionnelle vers les

meacutetiers dits laquo scientifiques et techniques raquo (Doray Gemme et Gibeau 2003 et Las

Vergnas 2006b)

De fait degraves lors qursquoils deacutefendent lrsquointeacuterecirct de la CST la quasi-totaliteacute des discours

institutionnels rapporte des inquieacutetudes creacuteeacutees par une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection raquo des

eacutetudes scientifiques supeacuterieures En cela le secteur de la recherche scientifique nrsquoest

pas diffeacuterent de nombreux autres secteurs professionnels En lrsquooccurrence pour ce qui

le concerne il a eacuteteacute eacutetabli agrave de nombreuses reprises (Bourdin 2003 Convert 2006

Beacuteduweacute 2006)34 que lrsquoon nrsquoobserve pas aujourdrsquohui de peacutenurie patente de recrutement

de chercheurs et seulement occasionnellement des difficulteacutes de recrutement

drsquoingeacutenieurs ou (selon le nombre de places ouvertes aux concours) drsquoenseignants de

matheacutematiques mais beaucoup moins que dans drsquoautres meacutetiers consensuellement

deacuteclareacutes en tension comme certains meacutetiers de bouche du BTP de lrsquohocirctellerie-

32

En la matiegravere le travail de synthegravese de Callon Lascoumes et Barthes (2001) est eacuteclairant sur 350 pages consacreacutees agrave laquo agir dans lrsquoincertitude raquo seules quelques pages explorent la dimension des savoirs et de la formation le reste eacutetant focaliseacute sur la question de lrsquoexpression et du recueil des opinions

33 Preacuteciser cette question neacutecessite de clarifier ce qui peut ecirctre qualifieacute drsquoeacutemancipation et de processus non dogmatique

Comme son eacutetymologie le laisse transparaicirctre la posture traditionnelle de la vulgarisation est descendante voire condescendante et srsquoinscrit dans une logique drsquoadaptation infantilisant celui qui reccediloit le message Se positionner dans une logique drsquoempowerment impose a contrario de srsquointeacuteresser aux strateacutegies de meacutediation dont la maicirctrise est assureacutee par celui qui veut savoir ougrave le laquo sachant raquo ne fait plus les questions et les reacuteponses reversant la logique de la vulgarisation au profit drsquoune logique ascendante Deacutecreacuteter la fin du pouvoir du savoir mecircme agrave si petite eacutechelle est en effet illusoire mais il est possible de chercher agrave lrsquoeacutequilibrer par le pouvoir sur le controcircle du processus En donnant au profane le controcircle de la deacutemarche de meacutediation on prolonge les bases constructivistes des peacutedagogies actives Cela conduit agrave refuser de deacutefinir le but de la meacutediation scientifique comme visant agrave adapter les savoir pour les rendre accessibles (deacutefinition de la vulgarisation par le Petit Robert) mais laquo plutocirct agrave favoriser des pratiques autodidactes (Las Vergnas 1994) 34

Pour la France pour le Queacutebec voir par exemple Foisy et Gingras 2003

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 17: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

17

restauration des services agrave la personne Crsquoest somme toute logique puisque la carte

scolaire nationale est calibreacutee pour que 75 des eacutelegraveves quittent35 les enseignements

scientifiques avant le baccalaureacuteat et que ce choix drsquoun quota dun quart de chaque

classe drsquoacircge obtenant le Bac S reacutesulte dajustements empiriques du systegraveme eacuteducatif

aux possibiliteacutes projeteacutees du marcheacute de lemploi

Il a aussi eacuteteacute montreacute (Las Vergnas 2006b) que ces alertes sur de potentielles peacutenuries

sont moins le reacutesultat drsquoanalyses quantitatives du marcheacute du travail que des projections

de responsables de filiegraveres ou de prospectivistes se preacuteoccupant de trois points (1) du

vieillissement de la population des chercheurs (agrave lrsquoidentique de tous les secteurs

professionnels) (2) du court-circuit des filiegraveres universitaires geacuteneacuterales par les filiegraveres

professionnalisantes (Licence pro en particulier) ce qui autorise drsquoailleurs agrave parler

drsquoune deacutesaffection drsquoune anneacutee agrave llsquoautre de certaines filiegraveres sans qursquoil y ait de

deacutesaffection par rapport aux deacuteboucheacutes disponibles (3) de lrsquoanticipation drsquoune

croissance espeacutereacutee de la fraction de PIB consacreacutee agrave la recherche (initialement preacutevue

dans le processus de Lisbonne pour passer en dix ans de 21 agrave 3 du PIB mais qui

en fait est resteacute constante) que tous les deacutefenseurs de lrsquoinvestissement recherche

continuent drsquoappeler de leurs vœux A elle toute seule cette croissance recircveacutee si elle se

concreacutetisait demanderait par exemple de passer de 6 000 agrave 10 000 theacutesards en

sciences et technologies par an (Bourdin 2003)

Cette question radicalise le rapport des acteurs de la corporation de la CST agrave

lrsquoorientation professionnelle Une grande partie drsquoentre eux est engageacutee dans une

croisade lobbyiste pour stimuler des vocations scientifiques visant agrave donner lrsquoenvie de

suivre des eacutetudes supeacuterieures scientifiques au plus grand nombre attitude qui est

critiqueacutee comme eacutetant un moyen laquo drsquooccuper le territoire raquo de la CST par les

universitaires queacutebeacutecois Doray Gemme et Gibeau (2003 p139-140)

laquo Les agents de la communication publique des sciences et des technologies associent on

lrsquoa vu le deacuteveloppement de leur activiteacute avec lrsquoorientation scolaire et professionnelle des

jeunes vers les professions technologiques et scientifiques Cette strateacutegie qui vise agrave

instituer le lien entre CST et carriegraveres scientifiques et technologiques nrsquoest pas reacutecente mais

a pris de lrsquoampleur ces derniegraveres anneacutees la majoriteacute des intervenants y faisant appel Elle

constitue une forme drsquooccupation du territoire [hellip] Drsquoun point de vue politique on peut

toutefois se demander si cette strateacutegie ne pourrait pas engendrer un effet pervers En effet

qursquoarrivera-t-il aux organismes associeacutes agrave la CST si dans un avenir rapprocheacute nous nous

retrouvions dans une situation ou lrsquoorientation vers les sciences et les technologies

nrsquoapparaissait plus probleacutematique En drsquoautres mots quel sort serait reacuteserveacute agrave un domaine

drsquoactiviteacute qui se preacutesente comme une solution agrave un problegraveme alors que ce dernier nrsquoexiste

plus Il nous semble que les organismes dont nous avons recenseacute les discours publics

preacutesentent avec beaucoup de force leur volonteacute de favoriser lrsquoorientation vers les sciences et

les technologies et ce peut-ecirctre au deacutetriment des autres volets de leur mission qui risquent

moins de tomber en deacutesueacutetude rapidement raquo

35

Concregravetement lrsquoenseignement secondaire eacuteloigne des centres drsquointeacuterecircts scientifiques de nombreux eacutelegraveves non pas agrave cause drsquoune laquo crise des vocations raquo universitaires mais gracircce agrave un filtrage par administration de mauvaises notes instaureacute pour reacuteguler le quota voulu drsquoaccegraves aux Baccalaureacuteats scientifiques ou assimileacutes Crsquoest ainsi qursquoagrave 75 de chaque classe drsquoacircge (ou presque) la carte scolaire fait comprendre par la voix des livrets scolaires et des conseils de classes qursquoils ne font pas partie du quota des aptes agrave poursuivre en 1eres ou Terminales scientifiques

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 18: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

18

Seuls quelques acteurs comme le CNAM les citeacutes des meacutetiers ou par certains aspects

lrsquoASTS se sont fixeacutes lrsquoobjectif plus large drsquoaider agrave deacutecoder lrsquoeffet des eacutevolutions

scientifiques et techniques sur lrsquoensemble des meacutetiers et des qualifications visant ainsi

agrave aider agrave lrsquoorientation et agrave lrsquoeacutevolution professionnelle de tous On peut se demander

pourquoi ils sont si peu nombreux agrave deacutepasser la simple croisade pour les vocations En

reacutealiteacute on observe que la quasi-totaliteacute des courants de la CST restent isoleacutes du

monde de la formation professionnelle continue (hormis celle de leurs propres

professionnels) Les acteurs de la CST parlent de sciences visent une impreacutegnation

culturelle et non des apprentissages scientifiques ou technologiques professionnels

Cela est patent quand on regarde les outils eacutevoqueacutes dans la litteacuterature de la CST Elle

ignore les bilans de compeacutetences la VAE les congeacutes ou droits individuels agrave la

formation les peacuteriodes de professionnalisations les reprises drsquoeacutetudes les contrats de

professionnalisation voire mecircme le plus souvent les autodidactes Ce constat drsquoune

incommunicabiliteacute entre deux visions du rapport aux savoirs scientifiques et techniques

nrsquoest pas nouveau et renvoie au clivage drsquointeacuterecirct entre les acteurs de la CST et ceux de

laquo lrsquoacquisition des savoirs et des compeacutetences raquo tel qursquoil avait eacuteteacute releveacute degraves 1971 par

Ackermann et Dulong Ces auteurs avaient alors publieacute dans la revue franccedilaise de

sociologie un article intituleacute laquo un nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiques raquo A propos des eacutecrits sur laquo limportance sociale de la

diffusion des connaissances scientifiques raquo ils constataient deacutejagrave que

laquo Tout se passe donc comme si on avait sur le mecircme pheacutenomegravene deux langages lun

deacutecrivant la vulgarisation ou leacuteducation des adultes comme acquisition dun savoir dune

compeacutetence lautre deacutecrivant les mecircmes pheacutenomegravenes sous langle de leur signification en

termes de rapports sociaux (gratification sociale motivations ) Pour illustrer ce constat

nous citerons deux eacutetudes en langue franccedilaise qui montrent assez bien les deux points de

vue et leur mutuelle incapaciteacute de se rejoindre [le premier de B Schwartz reacuteflexion sur le

deacuteveloppement de lrsquoeacuteduction permanente et le second de B Jurdant sur la science et son

mythe la scientificiteacute paru respectivement dans la RFP et dans Education permanente]

Ces deux articles sont exemplaires en ce quils expriment chacun dans sa perspective la

place donneacutee aux effets sociaux de la vulgarisation Pour ecirctre complet il convient dajouter

que si B Schwartz traite rapidement le problegraveme que B Jurdant attaque avec rigueur le

contenu que lanalyse de B Jurdant conduit agrave eacutevacuer est preacuteciseacutement ce qui fait le centre du

propos de B Schwartz Tout se passe comme si labord du problegraveme par lune de ses deux

faces interdisait de deacuteboucher en un discours continu de lautre Ou bien on parle de la

communication dun savoir et dune compeacutetence de lacquisition dun outil et on refoule

laspect social agrave larriegravere-plan des supports psychologiques ou sociologiques motivations

institutions etc) ou bien on part du problegraveme sociologique des rapports sociaux qui

fournissent le support du processus et la vulgarisation apparaicirct comme un pheacutenomegravene ougrave la

transmission de connaissances joue un rocircle minime Il serait trop facile den conclure que

nous sommes en preacutesence de deux analyses compleacutementaires dabord parce quil ny a pas

de communication entre elles et ensuite parce que chacun des deux discours est en quelque

sorte la neacutegation de lautre

[hellip] En leacutetat actuel du problegraveme il nous a paru que le meilleur service agrave rendre agrave la

recherche serait de conduire leacutetude de cette distinction de faccedilon agrave manifester son

irreacuteductibiliteacute En montrant comment cette probleacutematique senracine dans le contexte

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 19: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

19

historico-culturel de notre socieacuteteacute on a tenteacute de faire apparaicirctre dans sa rigueur la seacuteparation

des deux langages leur incommunicabiliteacute mutuelle leur rapport conflictuel raquo (p 379-381)

Quarante ans plus tard les revues de litteacuterature montrent que cette eacutetancheacuteiteacute srsquoest

paradoxalement maintenue Alors que la CST agregravege la quasi-totaliteacute des acteurs qui

ont laquo lrsquoambition de reacuteinteacutegrer la dimension scientifique et technique dans

linformation leacuteducation et la culture raquo pour reprendre lrsquoexpression eacutecrite dans la loi

de 1982 elle nrsquointegravegre pas ceux qui visent agrave la formation professionnelle

technologique Il semble que ce soit bien lrsquoopposition entre laquo impreacutegnation

culturelle raquo et laquo appropriation de compeacutetence professionnelle raquo qui marque la limite

du territoire du consensus mou de la CST Sans doute est-ce agrave mettre en perspective

avec la mise agrave distance de la culture technique et le laquo complexe du sale raquo deacutejagrave citeacutes

plus haut

3 ETAT DE LrsquoART

31 La CST nrsquoa pas fait lrsquoobjet drsquoune theacuteorisation propre

Ainsi malgreacute ces ambiguumliteacutes ou plutocirct gracircce agrave elles la terminologie laquo CST raquo domine

aujourdrsquohui le paysage franccedilais de cette impreacutegnation culturelle Les diverses

mouvances et courants issus des hybridations des anneacutees 70 srsquoy sont bon greacute ou

mal greacute rallieacutes36 De nouveaux acteurs comme des fondations pour la promotion

de tel ou tel aspect de la recherche des cellules de communication de consortiums

industriels de projets ou de pocircles universitaires ou de compeacutetitiviteacute des eacutediteurs

les ont rejoints Ainsi se sont agreacutegeacutes derriegravere cette appellation CST des acteurs et

compeacutetences issus de multiples secteurs professionnels incluant tout autant de la

communication des laboratoires de lrsquoeacuteducation populaire des deacutebats sur la

gouvernance de la recherche voire des actions de promotion des eacutetudes

scientifiques

Ce conglomeacuterat a ainsi fort logiquement agreacutegeacute des corpus eacutelaboreacutes dans de multiples

disciplines sans donner naissance agrave un cadre conceptuel inteacutegrateur Crsquoest ainsi que

ses acteurs juxtaposent des acquis issus de plusieurs familles de travaux (1) drsquoune

part celles qui ont traditionnellement partie lieacutee avec la dimension laquo vulgarisation raquo agrave

savoir les sciences de lrsquoeacuteducation37 (comme Giordan De Vecchi Raichvarg) et les

36 Le fait que la terminologie simplificatrice de CST est eacuteteacute utiliseacutee pour deacutesigner des lignes budgeacutetaires les conseils nationaux drsquoexperts et le reacuteseau de reacutefeacuterence labelliseacute par lrsquoEtat explique sa geacuteneacuteralisation malgreacute son caractegravere paradoxal Ne restent que marginalement quelques terminologies speacutecifiques agrave des reacuteseaux theacutematiques comme crsquoest le cas pour laquo lrsquoeacuteducation relative agrave lrsquoenvironnement raquo

37 En lien sans doute avec la prioriteacute donneacutee aujourdrsquohui agrave la perspective laquo sciences et socieacuteteacute raquo on observe aujourdrsquohui une diminution

relative des publications inscrites en sciences de lrsquoeacuteducation la CST nrsquoy est objet de publications que lorsqursquoelle est lieacutee au monde scolaire Felt (2010) Le Marec (2010) Bensaude-Vincent (2010) et Las Vergnas (en cours) proposent drsquoailleurs des analyses compleacutementaires qui montrent que beaucoup drsquoacteurs de la CST non scolaire srsquoeacuteloignent progressivement des preacuteoccupations cognitives leurs prioriteacutes eacutevoluant de plus de plus vers la volonteacute de favoriser des deacutebats drsquoopinion plus vers que la communication de connaissances ou

lrsquoappropriation de savoirs

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 20: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

20

sciences de lrsquoinformation et de la communication (comme Jurdant Le Marec Fayart)

auxquelles on peut ajouter lrsquoethnologie si on considegravere les speacutecificiteacutes de la museacuteologie

(Davallon Schiele Van Praet) (2) drsquoautre part celles sous-tendues par la dimension

laquo science et socieacuteteacute raquo agrave la frontiegravere de la sociologie et des sciences politiques (comme

Latour Callon Lascoumes) voire de la philosophie (Stengers)

32 Approches fragmenteacutees et emprunts disciplinaires

En termes de revue de litteacuterature il nrsquoexiste donc pas drsquoeacutetat de lrsquoart transversal agrave tout le

champ de la CST38 ne sont disponibles que des documents speacutecifiques agrave tel ou tel

champ disciplinaire sous-jacent

Ainsi pour les champs traditionnels de lrsquoappropriation ou de la transmission des

savoirs nous pouvons faire reacutefeacuterence agrave une note de synthegravese intituleacutee laquo vulgarisation

scientifique et eacuteducation scientifique non formelle raquo (Jacobi Schiele amp Cyr 1990) ainsi

que drsquoune note de preacutesentation drsquoun dossier intituleacute laquo opinions et savoirs raquo (Girault amp

Lhoste 2010) qui complegravete la premiegravere en la creusant sous cet angle doublement

pertinent drsquoune part agrave lrsquoeacutechelle individuelle et drsquoautre part par agrave lrsquoeacutechelle socieacutetale

Venturini a - quant agrave lui - publieacute (2007) un ouvrage de synthegravese des travaux sur la

question des rapports aux savoirs scientifiques dans lrsquoenseignement initial De plus la

dimension des eacutevolutions des intentions politiques de la CST en tant que discours a eacuteteacute

documenteacutee et reacutesumeacutee par B Schiele dans une note syntheacutetique titreacutee laquo publiciser la

science Pourquoi faire Revisiter la notion de culture scientifique et

technique raquo (publieacutee en Franccedilais en 2005 et reacuteviseacutee en anglais en 2008 cf plus haut)

Quant au champ de la sociologie et des sciences politiques la litteacuterature est en forte

croissance dans de nombreux pays et U Felt (2010) vient de publier une analyse

europeacuteenne du discours politique concernant le complexe laquo science et socieacuteteacute raquo qui a

repegravere quatre phases dans le deacutebat des derniegraveres deacutecennies (1) lrsquoinformation du

public (2) la sensibilisation des citoyens (3) la participation et la gouvernance (4) la

science dans la socieacuteteacute

Il est aussi agrave noter que compte tenu de la polyseacutemie de lrsquoexpression CST plusieurs

filiegraveres francophones de recherches ont introduit des terminologies nouvelles pour

speacutecifier leur champ de recherche et le situer par rapport agrave des eacutepisteacutemologies deacutejagrave

eacutetablies (en lrsquooccurrence en sciences de lrsquoinformation et de la communication) Jacobi

introduit ainsi laquo socio diffusion raquo des concepts ou de la connaissance raquo (1985) avec

lideacutee quil existe bien au sein du champ scientifique un continuum des pratiques de

socio-diffusion de la connaissance Fayard laquo communication publique raquo (1995) et

Pailliart laquo publicisation des sciences raquo (2005)

33 Points de vue sur lrsquoeffet et le rocircle social de la CST

38

Hormis les descriptions reacutetrospectives citeacutees plus haut comme celle de Maitte et Guyon

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 21: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

21

En ce qui concerne lrsquoeacutevaluation des effets des actions (non scolaires) de CST mecircme

si des baromegravetres ou des sondages lieacutes agrave tel ou tel programme ou publics cibles

fournissent des donneacutees ponctuelles la plupart des auteurs (Jurdant Jacobi Cyr et

Schiele) constatent qursquoil nrsquoest pas possible de mettre en eacutevidence un reacutesultat

macroscopique global des actions (non scolaires) de CST Comme lrsquoobserve Schiele

(2005)

laquo Les unes apregraves les autres toutes [les] enquecirctes reacutepegravetent agrave lrsquoenvi que la probabiliteacute drsquoun

contact avec la culture scientifique lorsqursquoil nrsquoest pas encourageacute sciemment par lrsquoeacutecole

rechercheacute systeacutematiquement par une deacutemarche autodidaxique ou provoqueacute par une

rencontre fortuite ressortit pour lrsquoessentiel agrave lrsquoeacutevaluation du degreacute de scolariteacute en science

comme dans les autres domaines Ce que constatent inlassablement ces enquecirctes [ie les

baromegravetres de CST de toute nature] tout en faignant de plaider pour une plus large

publicisation de la science aupregraves du public est que seule une minoriteacute ndashla plus scolariseacutee-

deacuteveloppe lrsquointeacuterecirct souhaiteacute ou acquiert les compeacutetences voulues pour reacutealiser le

rapprochement espeacutereacute entre science et socieacuteteacute raquo (p 35)

Voilagrave qui renvoie agrave un constat deacutejagrave eacutetabli agrave propos de la vulgarisation scientifique Et

mecircme si lrsquoeacutemergence de lrsquoexpression CST dans les anneacutees 70 nrsquoest pas qursquoun

simple glissement seacutemantique on est neacuteanmoins tenteacute de penser que son

institutionnalisation a repris le rocircle de laquo symptocircme raquo que la vulgarisation jouait selon

la formulation39 de Jurdant (1973)

4 TENDANCES ACTUELLES ET DEVENIR

41 Reacutepeacutetition des discours et chronicisation du symptocircme

Les revues de litteacuterature (focaliseacutees sur le niveau national en raison de la speacutecificiteacute

de lrsquoexpression CST) montrent de fait un paysage particulier on repegravere certes de

multiples discours sur la neacutecessiteacute de la CST pour tous eacutemanant non seulement des

institutions de CST elles-mecircmes mais aussi des pouvoirs publics nationaux et

drsquoexperts Le tableau 1 en donne des exemples40 seacutelectionneacutes sur les peacuteriodes

1979-1989 et 2000 ndash 2010 Mais ce que les revues de litteacuterature montrent

eacutegalement crsquoest que plusieurs auteurs ont constateacute que ces discours se reacutepegravetent

depuis au moins trois deacutecennies41 sans que soit remarqueacute drsquoeffet social notable qui

en aurait deacutecouleacute (Labasse 1999 Doray Gemme Gibeau 2001 Schiele 2005

Las Vergnas 2006b) Il est mecircme frappant de constater que commencent

39 Dans sa thegravese Jurdant conclut de la vulgarisation scientifique laquo crsquoest un symptocircme Ce nrsquoest pas la SCIENCE elle-mecircme le symptocircme crsquoest le moyen qursquoelle se donne pour srsquoinscrire sur le corps social ou plutocirct qursquoune certaine partie de ce corps se donne pour lrsquoinscrire elle la science et en reacutepeacuteter lrsquoacte de refoulement neacutecessaire pour empecirccher lrsquouniversaliteacute qursquoelle implique raquo (p217 dans lrsquoeacutedition de 2010)

40 Ce tableau ne preacutetend pas ecirctre exhaustif ne sont citeacutes que les rapports commandeacutes par les pouvoirs publics Il existe

aussi de multiples contributions drsquoauteur (essais ouvrages collectifs articles) comptes rendus de colloques (scientifiques ou non) de congregraves ou de journeacutees drsquoeacutetudes sur ce mecircme sujet non listeacutes ici 41

Schiele (2005) fait remonter encore plus tocirct cette reacutepeacutetition en analysant les deacutebats drsquoun colloque tenu de feacutevrier 1958 sur la vulgarisation scientifique pour en montrer lrsquoactualiteacute

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 22: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

22

aujourdrsquohui dans une surprenante mise en abicircme agrave se reacutepeacuteter les deacutenonciations de

ces reacutepeacutetitions puisque celles-ci avaient deacutejagrave eacuteteacute repeacutereacutees et eacutepingleacutees en 1999 par

Labasse

Date Titre Commanditaire Auteurs

2010 feacutevrier

CNCE Avis ndeg109 CNCE Cossart Gaudrey et

al

2006 Evaluation des CCSTI pour une labellisation IGEAN Chaumier amp Moreno

2004-2005 Plan national pour la CST Gouvernement Haignereacute

nov 2003 Deacuteveloppement et diffusion de la CST un enjeu

national Parlement Hamelin

2003 Rapport de la Commission du Seacutenat Seacutenat Renar amp Blandin

2002 Socieacuteteacute du Savoir et Citoyenneteacute CES Collectif

2001 La CSTI en 2001 constats pour agir EP-CSI Jantzen

(hellip)

1989 Creacuteer et diffuser de la CST Gouvernement MRT Maitte

1985 Rapport pour le deacuteveloppement des CCSTI Gouvernement MRT Maitte

1981 CST et ameacutenagement du territoire Gouvernement Maleacutecot

1981 Discours de clocircture Chevegravenement Gouvernement Chevegravenement

1979 Rapport pour la creacuteation du MNSTI Preacutesidence de la

Reacutepublique Leacutevy

Tableau exemples de rapports et discours commandeacutes par des pouvoirs publics nationaux et faisant reacutefeacuterence au deacuteveloppement de la CST pour tous en France (peacuteriodes 1979-1989 et 2001-2010)

Ces discours deacuteplorent tous une laquo deacutesaffection raquo agrave lrsquoeacutegard des sciences une laquo perte

de confiance raquo envisageant les mecircmes types de solutions pour y remeacutedier comme le

deacuteveloppement drsquoun enseignement plus concret des sciences en formation initiale

une preacutesence plus forte de la science sur des meacutedias attractifs pour le plus large

public (TV expositions dans des lieux culturels renforcement du reacuteseau de Centres

de culture scientifique) ainsi que lrsquoassociation des citoyens aux choix

technoscientifiques majeurs Certes ces discours diffeacuterent agrave la marge par les

capaciteacutes qursquoils reconnaissent aux ldquoprofanesrdquo agrave se forger eux-mecircmes des savoirs et

Michel Callon (1999) a distingueacute trois points de vue diffeacuterents sur la place qui leur est

confeacutereacutee dans les dispositifs de CST le premier (modegravele I) qursquoil a qualifieacute laquo de

modegravele de lrsquoinstruction publique raquo caracteacuterise la CST comme une eacuteducation

descendante visant agrave combler un deacuteficit de connaissance par lrsquoalphabeacutetisation des

publics le deuxiegraveme (modegravele II) vise agrave organiser un laquo dialogue entre savoirs savants

et profanes raquo tandis qursquoun troisiegraveme (modegravele III) envisage la possibiliteacute de les

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 23: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

23

associer agrave une laquo co-construction de savoirs raquo Mais mecircme si cette typologie permet

ndashcomme nous lrsquoavons deacutejagrave signaleacute- agrave certains auteurs (Felt 2010 et Bensaude-

Vincent 2010) de noter une croissance progressive des deacuteclarations drsquointention en

faveur du deuxiegraveme point de vue voire du troisiegraveme dans certains cas lieacutes agrave des

organisations de malades chroniques ou agrave des revendications eacutecologiques le

constat le plus frappant est bien celui de la reacutepeacutetition systeacutematique des discours que

Bernard Schiele (2005 p27) reacutesume ainsi

laquo hellip la CST est depuis fort longtemps au centre drsquoun projet social Tous les pays ndash agrave des

degreacutes divers certes ndash y ont souscrit Augmenter le niveau drsquoinformation scientifique du

public revaloriser lrsquoimage des sciences impliquer le public dans des deacutebats et engager les

jeunes agrave faire carriegravere en sciencehellip Voilagrave le leitmotiv obligeacute de toutes les politiques et de

toutes les mesures adopteacutees [hellip] Vingt ans apregraves [hellip] il est frappant de constater agrave quel point

les arguments invoqueacutes hier sont aussi ceux drsquoaujourdrsquohui Pourquoi faire comme si tout eacutetait

agrave refaire pour mieux proposer le mecircme programme ou presque Alors pourquoi lrsquoalibi drsquoune

refondation Lrsquoargument comme je lrsquoai rappeleacute est que le fosseacute (knowledge gap) entre la

science et la socieacuteteacute loin de se combler continue de se creuser que les efforts consentis

nrsquoont pas suffisamment porteacute leurs fruits qursquoil faut peacuteriodiquement raviver lrsquointeacuterecirct relancer la

mobilisationhellip raquo

Ce que laisse suggeacuterer cette reacutepeacutetition crsquoest que la repreacutesentation drsquoune

laquo deacutesaffection raquo etou drsquoune laquo crise de confiance raquo agrave deacutenoncer est persistante (et

plus importante que la leveacutee des ambiguiumlteacutes) la situation qui cause cette

deacutenonciation semblant ecirctre de nature chronique et les strateacutegies mises en place pour

la combattre se reacuteveacutelant donc agrave chaque fois nrsquoavoir que peu drsquoeffet notable Bien sucircr

degraves lors que lrsquoon srsquoattelle agrave une analyse des variations entre des projets deacutetailleacutes de

CST comme lrsquoa fait Marie-Jeanne Choffel-Mailfert (1999) en examinant (pp 91 sq)

les laquo eacuteleacutements permettant drsquoalimenter la constitution drsquoun scheacutema reacutegional de la

CST raquo demandeacutes par lrsquoEtat via les DRRT des diffeacuterentes reacutegions franccedilaises en 1991

pour eacutetablir les laquo livres blancs reacutegionaux de la Recherche raquo on observe des eacutecarts

significatifs des diffeacuterentes projections des politiques entre territoires sciences

technologie industrie patrimoines et formations De mecircme les analyses

reacutetrospectives qui commencent agrave voir le jour laissent entrevoir des eacutevolutions dans la

dureacutee (cf encadreacute suivant) qui peuvent ecirctre mises en relation avec les analyses

citeacutees plus haut de Felt Mais au-delagrave de ces eacutevolution temporelles ou variations

locales drsquoappreacuteciation des inteacuterecircts des enjeux et des potentiels (ou des variations

rheacutetoriques) les analyses textuelles des discours nationaux montrent avant tout des

reacutepeacutetitions que lrsquoon peut classer en deux familles

La premiegravere famille de reacutepeacutetitions est celle des jugements porteacutes sur la neacutecessiteacute de

deacutevelopper la CST quelquefois appuyeacutes sur des reacutefeacuterences agrave des eacutetudes drsquoopinion

La seconde famille de reacutepeacutetitions concerne les principales strateacutegies aptes agrave servir

un tel but une approche plus expeacuterimentale des sciences agrave lrsquoeacutecole au collegravege et au

lyceacutee voire agrave lrsquouniversiteacute sans trop preacuteciser les classes viseacutees une preacutesence plus

importante de la science dans les meacutedias de masse et en particulier agrave la TV ainsi

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 24: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

24

que par le deacuteveloppement et le soutien de Centres territoriaux de culture scientifique

et technique (CCST) lrsquoassociation des citoyens (ou de repreacutesentants de ceux-ci) aux

deacutebats lors de choix scientifiques ou techniques majeurs

Deacutebut de lrsquoencadreacute

ENCADRE REGARD RETROSPECTIF SUR LES EVOLUTIONS

Si lrsquoon veut analyser les eacutevolutions des actions de CST sur les derniegraveres deacutecennies ce

sont plutocirct des approches historiographiques deacutecrivant reacutetrospectivement la

constitution de ce champ de la CST vue selon telle ou telle famille drsquoacteurs ainsi que

des ouvrages42 collectifs souvent issus de colloques scientifiques ou non qui dominent

la litteacuterature On y constate que la peacuteriode actuelle se trouve faire charniegravere pour deux

raisons (1) Les hybridations qui enfantegraverent cette mise en scegravene de la CST datent

drsquoune geacuteneacuteration De fait les principaux inventeurs historiques voient les reacuteseaux

dispositifs ou institutions qursquoils ont creacuteeacute ecirctre confieacutees agrave des personnes bien diffeacuterentes

drsquoeux non plus des militants autoproclameacutes mais des professionnels formeacutes agrave

administrer la CST plus clergeacutes que prophegravetes (2) Les reacuteorganisations des politiques

publiques43 ont conduit au regroupement au sein drsquoun eacutetablissement unique intituleacute

laquo universcience raquo et deacutefini comme lrsquoeacutetablissement national de reacutefeacuterence de la CST- de

la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie et du Palais de la Deacutecouverte

Aussi mecircme si la volonteacute est justement explicitement affirmeacutee par plusieurs

personnaliteacutes embleacutematiques de ce domaine agrave entreprendre des analyses

reacutetrospectives et un travail drsquoarchivage afin le rendre lisible aux acteurs y entrant

aujourdrsquohui le risque est grand une perte de meacutemoire qui pourrait conduite agrave

consideacuterer les formes actuelles de CST comme des laquo allants de soi raquo ne neacutecessitant

mecircme pas drsquoecirctre questionneacutees sur leurs finaliteacutes leurs choix ou leurs a priori

Deux facteurs speacutecifiques rendent difficiles le travail reacutetrospectif (1) le manque de

donneacutees quantitatives aussi bien sur les dispositifs que sur leurs effets renforceacute par

le caractegravere autobiographique44 de beaucoup de sources (2) lrsquoarbitraire du choix du

peacuterimegravetre des activiteacutes agrave comparer compte-tenu de lrsquoacception actuelle du terme

CST Ce second point est directement lieacute aux ambiguumliteacutes seacutemantiques citeacutees plus

haut auxquelles srsquoajoute une difficulteacute suppleacutementaire celle du deacuteveloppement de

nouvelles pratiques qualifiables de CST et utilisant lrsquointernet et les autres

technologies de reacuteseau y compris dans de nouvelles formes drsquoactiviteacutes autodirigeacutees

42 Des bibliographies theacutematiques les recensent comme celle de lrsquoOCIM mise en place agrave lrsquooccasion de la constitution de son observatoire de la CST Il est eacutegalement agrave signaler que la multiplication des formations universitaires srsquoest accompagneacutee reacutecemment drsquoune explosion des logs et site web lieacutes aux discours sur la CST

43 Simultaneacutement agrave une territorialisation complexe des politiques eacuteducatives et culturelles

44 Une partie importante des textes reacutetrospectifs sont des reacutecits de vie individuelle ou collective autobiographiques comme ceux de Beretetsky Caillet Crozon Detoeuf Gautier Guyon Las Vergnas Levy-Leblond Maitte Raichvarg on peut a contrario noter lrsquoabsence drsquoun travail historique sur la Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie de La Villette

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 25: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

25

difficiles agrave observer et qursquoil serait reacuteducteur de consideacuterer juste comme une simple

transposition des formes classiques En effet savoirs et contenus scientifiques (a

fortiori techniques) sont largement preacutesents dans les pratiques drsquoexpression en ligne

qualifieacutees de web 20 On entrevoit beaucoup de connotation scientifique dans des

blogs wikis groupes flux sous-reacuteseaux sociaux et pages de fans theacutematiques

(actualiteacutes images du jour partages de videacuteos promotion de produits) ainsi que des

propositions de travaux contributifs distribueacutes (comme Setihome Tela botanica

Galaxyzoo cf Las Vergnas 2011a)

Pour la France dans ce contexte global drsquoagreacutegation des acteurs autour de

lrsquoexpression laquo CST raquo deux facettes semblent en croissance et une autre en

affaiblissement Celles qui ont progresseacute sont (1) les strateacutegies de dialogue public

avec les citoyens sur des questions scientifiques ou technologiques (lanceur drsquoalerte

confeacuterence de citoyens PICRI) avec la creacuteation de lrsquoOPCS en 1983 (2) la

communication institutionnelle des entreprises (publiques et priveacutees) de recherche

des laboratoires et plus reacutecemment des universiteacutes (en particulier suite agrave la LRU de

2007) En revanche est en reacutegression (3) la part des loisirs scientifiques traditionnels

(hors loisirs numeacuteriques) dans les activiteacutes repeacutereacutees comme lieacutees agrave la CST

La monteacutee en puissance des dialogues laquo science et socieacuteteacute raquo

La question des relations entre laquo science et socieacuteteacute raquo ou encore des laquo sciences

citoyennes raquo est un des questions politiques agrave lrsquoorigine de la CST Elle est

aujourdrsquohui en France lrsquoobjet principal de plusieurs mouvements dont le plus

transversal et embleacutematique est lrsquoassociation Pour une Fondation Sciences

Citoyennes (FSC) creacuteeacutee en 2002 et qui se deacutefinit ainsi

laquo Elle a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de reacuteappropriation

citoyenne et deacutemocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun

Sciences Citoyennes fait un double pari Le premier est de reacuteunir des chercheurs scientifiques

critiques et des profanes engageacutes dans des luttes (sociales meacutedicales environnementales)

ougrave ils rencontrent - voire contestent- la technoscience dominante et lrsquoexpertise officielle Le

second est drsquounir dans une reacuteflexion et une action transversale de politisation de la science

et de lrsquoexpertise des acteurs impliqueacutes dans des secteurs souvent compartimenteacutes

(agriculture eacutenergie bio-meacutedical santeacute environnementale NTIC brevetage) Trois axes de

travail sont au cœur de son engagement (1) lrsquoaccroissement des capaciteacutes de recherche et

drsquoexpertise de la socieacuteteacute civile des forces associatives consumeacuteristes syndicales et

citoyennes (creacuteation drsquoun tiers-secteur scientifique) (2) la stimulation de la liberteacute drsquoexpression

et de deacutebat dans le monde scientifique (3) la promotion de lrsquoeacutelaboration deacutemocratique des

choix scientifiques et techniques raquo (httpsciencescitoyennesorgspipphprubrique1 (FSC

2010)

Cette question planeacutetaire est au cœur du reacuteseau international laquo Living Knowledge raquo

feacutedeacuterant agrave la fois les acteurs des laquo science shops raquo45 et drsquoexpeacuteriences de

laquo community based reseach raquo (deacuteveloppeacutees reacutecemment en France sous les

acronymes de PICRI et de QSEC) Les instruments preacuteconiseacutes vont des cafeacutes des

sciences agrave la creacuteation drsquoun statut de laquo lanceur drsquoalerte raquo en passant par les 45 Il srsquoagit de mettre agrave disposition des acteurs et partenaires sociaux des ressources de recherches universitaires pour conduire des recherches souhaiteacutees par des repreacutesentants des habitants (Stewart et Havelange 1989 ) il est agrave noter que les expeacuteriences de boutique de sciences sont toujours resteacutees embryonnaires en France a contrario drsquoautres pays comme les pays scandinaves par exemple

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 26: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

26

boutiques de sciences les deacutebats participatifs ou les confeacuterences de consensus

associant des repreacutesentants De plus en plus explicitement les financements publics

de la CST sont fleacutecheacutes vers ce type drsquoactiviteacutes Au sein de ces pratiques toutes

aujourdrsquohui qualifieacutees de laquo sciences citoyennes raquo sont particuliegraverement distingueacutees

les laquo sciences participatives raquo dans lesquelles les citoyens deviennent producteurs

ou collecteurs de donneacutees voire mecircme associeacutes agrave tout ou partie de lrsquoeacutelaboration du

protocole de recherche (Ifree 2010) ouvrant alors vers lrsquoideacutee drsquoune laquo Impure

science raquo pour reprendre lrsquoexpression introduite degraves 1996 par S Epstein parlant des

malades chroniques srsquoimmisccedilant dans la recherche meacutedicale

La croissance de lrsquooutreach des projets et laboratoires

Les plans de communication de laboratoires ou drsquoeacutequipes de recherche ont fait

progressivement leur apparition dans le champ de la CST agrave une approche classique

de communication institutionnelle drsquoentreprises high tech priveacutees ou publiques puis

de certaines collectiviteacutes territoriales voulant mettre en avant leur dynamisme

technologique pour attirer des emploi (dans une strateacutegie inspireacutee du sommet de

Lisbonne) se sont ajouteacutees des strateacutegies drsquooutreach46 rendues plus ou moins

obligatoires par les financeurs de projets (PCRD hellip) puis plus reacutecemment des

obligations lieacutees agrave la mise en concurrence des universiteacutes avec la loi LRU

La disparition ou la deacutemateacuterialisation des loisirs extrascolaires

Plusieurs auteurs notent un affaiblissement tregraves significatif des formes classiques de

loisirs et clubs scientifiques extra-scolaires (Las Vergnas et Lebras 2009) Mecircme si

le ratio de projets extrascolaire versus scolaires ou peacuteriscolaires est en forte baisse

dans les exposciences ce point nrsquoest pas suffisamment documenteacute aujourdrsquohui pour

ecirctre eacutetudieacute finement car le qualificatif de laquo scientifique raquo est particuliegraverement

impreacutecis voire auto-reacutefeacuterent (crsquoest encore pire si lrsquoon parle des loisirs laquo scientifique et

technique raquo de plus quand on eacutetudie les jeunes drsquoacircge scolaire la notion de laquo loisirs

raquo elle-mecircme nrsquoest pas claire Neacuteanmoins un indicateur indirect est celui du

deacutesengagement des institutions de CST pour les clubs scientifiques sur les 30

derniegraveres anneacutees en France En 1981 le projet naissant de La Villette preacutevoyait la

mise en place dune base technique des clubs scientifiques47 Elle fut effectivement

mise en place en 1986 mais elle fut progressivement utiliseacutee comme centre de

travaux pratiques pour les classes villette avant de fermer deacutefinitivement ses portes

en 1991 Au Palais de la deacutecouverte les clubs Jean Perrin furent arrecircteacutes voici

quelques anneacutees Et aujourdhui aucune activiteacute au sein duniverscience

(eacutetablissement public creacuteeacute par regroupement du Palais et de la CSI pour devenir la

reacutefeacuterence nationale de la CST) nest en lien avec des clubs scientifiques On

pourrait multiplier les exemples de projets institutionnels comme les clubs Inserm-

46 Disseacutemination publique des reacutesultats de recherche par exemple dans le cadre drsquoun projet financeacute par les pouvoirs publics

47 Le premier volume de la collection laquo Les eacutetudes de la Villette raquo destineacute agrave accompagner la mise en place du futur eacutequipement de La Villette titreacute laquo les clubs scientifiques en France raquo y eacutetait mecircme consacreacute

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 27: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

27

jeunesse le dispositif laquo Vacances Plaisir des sciences raquo (Ostrowiecki 2005) ou le

Prix Philips qui nrsquoont pas continueacute

En parallegravele plusieurs auteurs affirment que les activiteacutes de loisir de deacuteveloppement

(pour reprendre la cateacutegorisation des loisirs de Dumazedier 1962) sont en

multiplication profitant en particulier de la geacuteneacuteralisation drsquointernet y compris sous

forme de passions cognitives (Roux Charvolin et Dumain 2009) Flichy (2010)

annonce laquo le sacre de lrsquoamateur raquo et Leadbeater et Miller (2004) la ldquoPro-Am

revolutionrdquo au Royaume-Uni Ces derniers deacuteclarent que 58 de la population laquo is

doing a Pro-Am activity raquo Est-ce agrave dire que la diminution des laquo clubs scientifiques raquo

non scolaires sous les formes classiques drsquoactiviteacutes laquo preacutesentielles raquo pourraient ecirctre

freineacutee voire inverseacutee par la multiplication des nouvelles formes de pratiques ou

drsquoinvestigations personnelles par exemple sur le web48 Malheureusement aucune

eacutetude quantitative ne permet de reacutepondre pour lrsquoinstant drsquoautant que lrsquoon a sans

doute majoritairement affaire agrave des pratiques autodirigeacutees en groupes informels

distribueacutes rejoignant par certains cocircteacutes les laquo sciences participatives raquo

Fin de lrsquoencadreacute

42 Analyse de la chronicisation des discours

Cateacutegorisation scolaire et fonctions des dispositifs de CST

Comment interpreacuteter de telles reacutepeacutetitions de discours et le constat drsquoinefficaciteacute

sociale des dispositifs de deacuteveloppement de la CST qursquoelles sous-tendent

Une des caracteacuteristiques communes agrave tous ces discours crsquoest qursquoils sinteacuteressent agrave

des questions agrave dimension sociale (la relation laquo science et socieacuteteacute raquo) alors qursquoils

utilisent une rheacutetorique affective typique de leacutechelle individuelle (la deacutesaffection)

Or il est facile de reacutefuter lrsquoideacutee selon laquelle ce serait seulement lrsquoexistence

systeacutematique de difficulteacutes cognitives individuelles qui expliquerait lrsquoeacutechec des

politiques de CST par le simple fait que les sciences seraient trop ardues pour ecirctre

accessibles au commun des mortels En effet de nombreux exemples ont montreacute a

contrario qursquoagrave lrsquoeacutechelle individuelle ou du petit groupe des personnes de tout niveau

scolaire peuvent srsquoapproprier des sujets ou des expeacuteriences lieacutes aux sciences

lorsquelles en eacuteprouvent lrsquoenvie ou la neacutecessiteacute et quelles ont lrsquoopportuniteacute de sy

impliquer concregravetement Tel est le cas dans des cadres aussi diffeacuterents que des

clubs drsquoastronomie des associations de malades souffrant de pathologies

chroniques des groupes de passionneacutees drsquoornithologie ou drsquoentomologie de cerfs-

volants drsquoentrainement fractionneacute ou de militants de lrsquoagriculture biologique de

nombreux blogs ou groupes sur les reacuteseaux sociaux en teacutemoignent Pourquoi de

telles situations fondeacutees sur une motivation ou des enjeux personnels (participation agrave

48 Mecircme en se limitant agrave une simple eacutetude quantitative des formes classiques de pratiques extrascolaire (par exemple celles connues dans les mouvements historiques drsquoeacuteducation populaire) sur quels indicateurs se fonder pour objectiver le cas eacutecheacuteant un tel constat De fait nous ne disposons ni de vocabulaire stabiliseacute ni de protocoles dobservation La difficulteacute de ce genre de travaux est illustreacutee par lrsquoinventaire du loisir astronomique produit par Piednoel et al pour lrsquoAfa httpwwwafanetfrafapdfInventaire_n2_2004pdf

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 28: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

28

des clubs ateliers ou reacuteseaux associatifs actions et prises de paroles militantes

eacutepisodes autodidactes via des expos ou drsquoautres meacutedias) nrsquoont-elles pu servir de

levier pour reacuteduire cette repreacutesentation de laquo deacutesaffection raquo Comment interpreacuteter le

fait qursquoune grande varieacuteteacute drsquoindividus ou des petits groupes puissent localement

manifester de tels inteacuterecircts tandis que les politiques nationales nrsquoarrivent pas agrave faire

plus que de deacuteplorer un deacutesinteacuterecirct global

En fait crsquoest plus agrave lrsquoeacutechelle socio-eacuteconomique que doit se rechercher lrsquoexplication

Comme il a eacuteteacute rappeleacute plus haut en France le systegraveme drsquoenseignement initial est

conccedilu et reacutegleacute pour ne retenir en baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute qursquoun quart de

chaque classe drsquoacircge (figure 1) et il instaure de fait une cateacutegorisation entre ceux qui

sont scolairement scientifiques et les autres qui ne le sont pas

Figure 1 reacutepartition des trajectoires scolaire drsquoune classe drsquoacircge en France (2010 graphique OLV donneacutees MEN)

Parmi les frac34 qui nrsquoobtiendront pas de baccalaureacuteat scientifique ou assimileacute la grande

majoriteacute le vivra comme un jugement drsquoinaptitude marqueacute par des notes

insuffisantes dans les domaines scientifiques Une fois devenu adultes il y a fort agrave

parier que ce jugement drsquoinaptitude ne sera pas sans conseacutequence sur leur rapport

aux savoirs scientifiques A lrsquoobstacle cognitif analyseacute par Bachelard (1938)

srsquoajoutera sans doute une forme drsquoobstacle motivationnel que nous qualifierons de

laquo conatif raquo agrave mecircme de produire ensuite comme une reacutesignation apprise voire une

auto-propheacutetie de ne plus ecirctre capable de srsquointeacuteresser aux sciences (Las Vergnas

2011b)

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 29: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

29

Dans ce contexte marqueacute par la cateacutegorisation scolaire comment deacutecrire les

fonctions sociales des dispositifs de CST pour tous Sur la figure 2 on distingue49

quatre types de rocircles diffeacuterents selon les acircges et les positions au regard de la

cateacutegorisation scolaire des publics viseacutes Les dispositifs de type 1 visent agrave eacutelargir les

situations de deacutecouverte scientifique pour tous les jeunes avant lrsquoacircge de la

cateacutegorisation scolaire Crsquoest le cas par exemple de lrsquoexploradome de la Citeacute des

enfants agrave La Villette ou du dispositif laquo petite ourse raquo de lrsquoAssociation franccedilaise

drsquoastronomie Le type 2 vise agrave encourager les vocations technoscientifiques comme

les laquo olympiades de physique raquo Les types 3 et 4 correspondent agrave des dispositifs qui

srsquoadressent agrave des non scientifiques (apregraves lrsquoacircge de la cateacutegorisation scolaire) Ceux

de type 3 se fondent sur la diffeacuterence entre scientifiques et non scientifiques pour

proposer une vulgarisation des savoirs savants ou organiser un dialogue entre ces

savoirs et les opinions profanes on y retrouve les modegraveles I et II de Michel Callon

(cf supra le laquo modegravele de lrsquoinstruction publique raquo et celui du laquo dialogue des savoirs raquo

Enfin a contrario le type 4 correspond agrave des situations ougrave des non scientifiques

transgressent la limite de leur statut de profanes et sont impliqueacutes dans un processus

de production de savoirs et non pas seulement de reacuteception comme crsquoest le cas

dans les situations de laquo science participative raquo sous-tendues par le laquo modegravele de la

coproduction raquo de Callon

Figure 2 reacutepartition des fonctions de la CST pour tous (graphique OLV)

49

Il srsquoagit bien sucircr plus drsquoideal-types que drsquoune typologie fondeacutee sur une partition rigoureusement disjonctive des cas observeacutes

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 30: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

30

La CST et le renforcement de la cateacutegorisation scolaire

Peu de dispositifs de CST institutionnaliseacutee sont de type 4 et de fait la plupart de ceux

promus par les discours officiels ne visent pas agrave contrecarrer la cateacutegorisation scolaire

mais plus agrave permettre drsquoen geacuterer les agrave-cocircteacutes socio-culturels50 donner tout de mecircme un

socle initial agrave tous malgreacute la peacutenurie de formation scientifique des enseignants du

primaire (type 1) seacutelectionner le bon nombre de jeunes ayant la vocation (type 2) puis

organiser le dialogue et la vulgarisation minimum neacutecessaire agrave la productiviteacute agrave la

consommation et au confort individuel et social des adultes dans une socieacuteteacute de boites

noires (type 3)

En revanche si lrsquoon observe non plus les dispositifs institueacutes de la CST mais les

pratiques individuelles ou de groupes on peut alors tenter de faire la diffeacuterence entre la

laquo CST prescrite raquo et la laquo CST veacutecue raquo par les adultes non scientifiques et chercher agrave

identifier des pratiques qui seraient assimilables au type 4 En effet force est de

constater que la volonteacute de laquo mise en culture des sciences raquo a surtout eacuteteacute institueacutee

comme une injection drsquoinstruction publique (au sens du modegravele I de Callon) et non

comme lrsquoencouragement agrave la valorisation des dimensions scientifiques et techniques

de la culture veacutecue par chaque non scientifique En tant que telle la CST officielle

serait drsquoailleurs plutocirct contre-productive pour les adultes en termes de reacuteduction du

clivage scientifiquesnon scientifiques elle renforce la rupture eacutepisteacutemologique entre

savoirs scientifiques et savoirs issus de la vie quotidienne au lieu de mettre en valeur

les opportuniteacutes drsquoacculturation scientifique que leur fournissent de nombreuses

pratiques techniques (jardinage bricolage musique sports cuisine forme et santeacute)

cette conception cliveacutee de la CST introduit une nouvelle forme drsquoobstacle

eacutepisteacutemologique qualifiable de laquo scolastique raquo (Las Vergnas 2011b) en srsquointeacuteressant

en prioriteacute agrave la big science celle sur laquelle il serait plus important socialement

drsquoalphabeacutetiser les adultes Et par ce caractegravere laquo scolastique raquo elle risque drsquoavoir plus

drsquoeffets de renforcement de la cateacutegorisation post scolaire entre scientifique et non

scientifiques en en amplifiant lrsquoeacutetancheacuteiteacute

Ainsi aujourdrsquohui un analyseur de ce champ de la CST pour les adultes est lrsquoeacutetat de la

coexistence des deux types 3 et 4 Si le type 3 organise le dialogue entre scientifiques

et profanes sans remettre en cause ce clivage de cateacutegories le type 4 favorise a

contrario lrsquoappropriation de savoirs scientifiques et de meacutethodes en srsquoautorisant agrave

transgresser la cateacutegorisation scolaire et le steacutereacuteotype qui en deacutecoule poussant agrave

opposer scientifiquenon scientifique Alors que la CST de type 3 peu preacuteoccupeacutee des

obstacles conatifs et scolastiques se situe surtout dans la ligneacutee de la diffusion de

biens culturels de vulgarisation ou lrsquoorganisation de deacutebats drsquoopinion le type 4 est lui

porteacute par des groupes marqueacutes par une vision inspireacutee des courants historiques de

lrsquoeacuteducation populaire Ceux-ci militent pour des laquo savoirs choisis raquo et des apprenances

(Carreacute 2005) agrave viseacutee drsquoeacutemancipation ou drsquoempowerment par exemple pour geacuterer au

mieux une maladie chronique en srsquoappuyant sur les savoirs expeacuterientiels participer agrave

50

On peut faire lrsquohypothegravese qursquoen parallegravele les discours sur laquo la formation tout a long de la vie raquo (version formation professionnelle continue) servent eux agrave en geacuterer les conseacutequences en termes socio-eacuteconomiques et de productiviteacute au travail

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 31: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

31

certaines investigations militantes ou srsquoaccomplir au travers de loisirs

technoscientifiques expeacuterimentaux comme ceux conduits dans les clubs scientifiques

qui offrent des situations de meacutetacognition non scolaire

Voilagrave donc pourquoi les discours sur la CST pour tous ne font que se reacutepeacuteter

paradoxalement la CST institueacutee ne vise pas agrave changer le rapport au savoir

scientifique mais agrave rendre socialement acceptable le rapport construit par la laquo big

science raquo et le systegraveme eacuteducatif formel Crsquoest en cela que les analyses de cette CST

prescrite rejoint celles faites sur la vulgarisation (Jurdant Jacoby Schiele Le Marrec)

et son rocircle de symptocircme une vulgarisation dont Bensaude-Vincent (2010) dit qursquoil faut

la voir laquo sous un autre jour en reacutealiteacute elle creuse elle-mecircme le fosseacute qursquoelle

preacutesuppose en isolant les scientifiques du reste du monde elle contribue agrave sacraliser

la science agrave entretenir la foi dans le progregraves et agrave soumettre le public agrave lrsquoautoriteacute des

experts raquo

Pourrait-il en ecirctre autrement Pourrait-on faire eacutevoluer le rapport de la socieacuteteacute dans

son ensemble aux sciences Pour y arriver sachant que le ratio de 25 de

scientifiques scolaires nrsquoest pas ajustable le seul moyen serait de changer le rapport

des 75 restants aux savoirs scientifiques Or la solution ne peut ecirctre que de

deacutevelopper massivement les situations de transgression du clivage de type 4 une telle

deacutemultiplication est-elle envisageable Reacutepondre agrave une telle question neacutecessite

drsquoabord drsquoidentifier plus preacuteciseacutement ce que seraient ces pratiques Dans un travail

reacutecent (Las Vergnas 2011b) nous avons identifieacute trois familles de pratiques dans

lesquelles on constate des appropriations volontaires de savoirs dans une logique

drsquoempowerment srsquoappuyant sur des savoirs ou meacutethodes scientifiques non cantonneacutes

aux disciplines scolaires Il srsquoagit de la gestion drsquoune maladie chronique dans une

logique drsquoauto-clinique (Jouet et Las Vergnas 2011) les investigations militantes (par

exemple celles qui rejoignent les laquo sciences participatives raquo) et les pratiques de loisirs

scientifiques expeacuterimentaux constituent ainsi des cadres drsquoappropriation autodirigeacutee de

savoirs savants (Las Vergnas 2011a) Elles consistent non pas seulement en la

reacuteception de savoirs vulgariseacutes ou enseigneacutes mais aussi en autoproduction de

nouveaux savoirs savants la plupart du temps en srsquoappuyant sur une dimension

collective donc qualifiables de laquo transgressions raquo Dans chacun drsquoentre eux des

profanes peuvent en effet ecirctre conduits agrave deacutepasser leur sentiment drsquoinefficaciteacute vis-agrave-

vis de la production de savoirs scientifiques et agrave srsquoatteler -individuellement ou en

groupe- agrave un travail leacutegitime de co-construction autodirigeacutee de savoirs scientifiques du

registre de lrsquoImpure science drsquoEpstein

Conclusion Tendances actuelles drsquoeacutevolution des institutions de CST

Inspireacutes par C Snow (1959) et sa deacutenonciation du risque drsquoun clivage entre laquo deux

cultures raquo lrsquoune scientifique et lrsquoautre non les fondateurs des courants qui ont donneacute

naissance aux programmes de CST avaient penseacute que la solution pour eacuteviter que cette

cateacutegorisation deacutegeacutenegravere en un clivage social eacutetait de combler le deacuteficit de

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 32: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

32

connaissance des habitants ou de laquo remettre la science en culture raquo (Levy Leblond

1986)

Quarante ans plus tard de nombreux auteurs ont donc identifieacute le risque paradoxal

que a contrario de cette volonteacute la CST renforce les effets de la cateacutegorisation

scolaire au lieu drsquoen reacuteduire lrsquoeffet Ce qui les conduit agrave cette crainte crsquoest le fait que

beaucoup drsquoacteurs (institutionnels ou non) de la CST se positionnent plus sur

lrsquoorganisation du dialogue entre ces deux cateacutegories (les scientifiques et les non

scientifiques) que sur la question du partage des savoirs Schiele (2005 p49) rappelle

mecircme agrave ce propos ce qursquoeacutecrivait deacutejagrave (en 1974) Roqueplo laquo les meacutedias reproduisent

systeacutematiquement lrsquoeacutecart qursquoils deacutenoncent au lieu drsquoeffectuer le rapprochement auquel

ils preacutetendent ils lui substituent un effet de vitrine raquo Bensaude (2010) dit la mecircme

chose de la vulgarisation et Felt (2010) de la peacuteriode laquo science et socieacuteteacute raquo de la CST

De fait les politiques actuelles de CST gegraverent les conseacutequences reacutesultant du clivage

de la cateacutegorisation scolaire En visant agrave reacuteduire une preacutesumeacutee laquo deacutesaffection des

eacutetudes scientifiques raquo elles veulent srsquoassurer que la socieacuteteacute forme bien suffisamment

de technoscientifiques et en deacuteveloppant le laquo dialogue sciences et socieacuteteacute raquo elles

veulent limiter les conflits entre les opinions non scientifiques et la production des

innovations technoscientifiques Ainsi la prioriteacute des politiques actuelles de CST nrsquoest

pas une laquo socieacuteteacute de la connaissance raquo qui serait fondeacutee sur lrsquoappropriation de savoirs

scientifiques elle est a contrario la consolidation drsquoune socieacuteteacute cliveacutee par une forme de

steacutereacuteotype drsquoun nouveau genre le laquo genre scientifique raquo avec un cocircteacute des savoirs

scientifiques et de lrsquoautre des profanes

Mais alors faut-il souhaiter lrsquoeacuteclatement de cette CST ambigueuml et de son consensus

mou La CST va-t-elle se fissurer par neacutecessiteacute de sortir du cercle vicieux de la

reacutepeacutetition et de la chronicisation du symptocircme Va-t-elle eacuteclater en donnant naissance

agrave des programmes plus lisibles et eacutevaluables comme ceux de lrsquoImpure science et de la

deacutemocratie technologique Le web 20 les reacuteseaux sociaux et surtout les sciences

participatives pourraient-ils bouleverser la donne

(corps principal du texte 81 000 caractegraveres espaces compris

Glossaire des sigles employeacutes

ANSTJ Association nationale sciences techniques jeunesse et devenue aujourdrsquohui

laquo Planegravete sciences raquo httpplanete-sciencesorg

CCSTI Centre de culture scientifique technique et industrielle

CIRASTI Collectif inter associatif pour la reacutealisation drsquoactiviteacutes scientifiques et

techniques internationales Mouvement franccedilais des exposciences httpcirastiorg

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 33: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

33

CNAM conservatoire national des arts et meacutetiers

CSI Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie httpuniversciencefr

CST Culture Scientifique et technique

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 34: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

34

Reacutefeacuterences citeacutees

Ackermann W et Dulong R (1971) ldquoUn nouveau domaine de recherche la diffusion des

connaissances scientifiquesrdquo in Revue franccedilaise de sociologie 12-3 pp 378-405

httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfsoc_0035-

2969_1971_num_12_3_1996 - Consulteacute le 16 janvier 2011

AMCSTI (2010) Le Livre blanc laquo Contribution de lrsquoAMCSTI au Forum territorial organiseacute

par Universcience pour une nouvelle gouvernance de la culture scientifique technique et

industrielle en France raquo Paris httpwwwamcstifrpublicmediasdocslivre_blanc_amcsti-

22-09-2010pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Astolfi J-P Giordan A et al (1978) Quelle eacuteducation scientifique pour quelle socieacuteteacute

Paris PUF

Astolfi J-P (1999) Les ateliers sciences et techniques chemin vers lrsquoabstraction et la

reacuteussite Rapport drsquoeacutetude (dactylographieacute) Nanterre CG92

Bachelard G (1938) La formation de lrsquoesprit scientifique Paris Vrin

Beacuteduweacute C (2006) (coord) ldquoLes filiegraveres scientifiques et lemploirdquo Les dossiers eacutevaluations

et statistiques LIRHE ndash n deg177 Paris DEP-MEN

Bensaude-Vincent B (1999) La science contre lrsquoopinion histoire drsquoun divorce Les

empeacutecheurs de penser en rond ndash Le seuil Paris (reacute-edition 2003)

Bensaude-Vincent B (2010) ldquoSplendeur et deacutecadence de la vulgarisation scientifiquerdquo in

Chavot et Masseran (coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de

communication 17-2010 PUN Nancy

Bensaude-Vincent B (2009) ldquoComment concilier deacutemocratie et science rdquo Table Ronde II

ldquoMieux gouverner les savoirsrdquo Journeacutee drsquoeacutechanges Savoirs et Citoyenneteacute un sceacutenario

drsquoavenir 10 deacutec 2009 organ Petits Deacutebrouillards Ile de France Paris CNAM En ligne agrave

httpsavoirsetcitoyenneteorgwp-

contentuploads201003Mieux_gouverner_les_savoirspdf

Berestetsky A (2009) Petit impreacutecis de culture scientifique LrsquoHarmattan Paris

Bigner M (1983) [preacutesident du groupe de travail] ldquoLes clubs scientifiques en Francerdquo

Collection Les eacutetudes de La Villette ndeg1 Paris EPPV

Blandin M-C Renar Y (2003) [rapporteurs] La Culture scientifique pour tous une prioriteacute

nationale rapport drsquoinformation fait au Seacutenat le 10 juillet 2003 au nom de la commission des

Affaires culturelles par la mission drsquoinformation chargeacutee drsquoeacutetudier la diffusion de la culture

scientifique Paris Seacutenat rapport ndeg 392 En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr02-392r02-

392html [consulteacute le 15 avril 2011]

Bourdin J (2003) les incidences eacuteconomiques drsquoune augmentation des deacutepenses de recherche

en Europe Seacutenat Rapport ndeg391 Paris En ligne agrave httpwwwsenatfrrapr03-391r03-

3911pdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Caillet E (2011) laquo La Citeacute des sciences et de lrsquoindustrie origine et originaliteacute raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRS Ndeg27-28 Paris

Callon M (1999) laquo Des diffeacuterentes formes de deacutemocratie technique raquo Les Cahiers de la

seacutecuriteacute inteacuterieure ndeg 38

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 35: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

35

Callon M Lascoumes P et Barthe Y (2001) Agir dans un monde incertain ndash Essai sur la

deacutemocratie technique Paris Seuil

Carreacute P (2005) Lrsquoapprenance vers un nouveau rapport au savoir Paris Dunod

Choffel-Mailfert M-J (2000) Une politique culturelle agrave la rencontre drsquoun territoire Culture

scientifique technique et industrielle en reacutegion Lorraine 1980-1995 Paris LrsquoHarmattan et

IRTS de Lorraine

Cirasti [collectif] et al (2011) Manifeste de Montsouris Cirasti Paris En ligne agrave

httpmontsourisorg [consulteacute le 7 octobre 2011]

CNCE (2010) Avis ndeg109 Communication drsquoinformations scientifiques et meacutedicales et

socieacuteteacute enjeux eacutethiques Paris CNCE En ligne agrave httpwwwccne-ethiquefrdocsCCNE-

Avis_109pdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Convert B (2006) Les impasses de la deacutemocratisation scolaire sur une preacutetendue crise des

vocations scientifiques Paris Editions Raison drsquoagir

Crozon M et Maitte B (2001) laquo La culture scientifique en France institutions enjeux raquo

Esprit ndeg10 pp 105- agrave 119

Davallon J (1999) LrsquoExposition agrave lrsquoœuvre Strateacutegies de communication et meacutediation

symbolique Paris LrsquoHarmattan

Debailly R (2010) La critique radicale de la science en France Origines et incidences de la

politisation de la science depuis Mai 1968 Thegravese de doctorat Paris IV Sorbonne

Desvalleacutees A (1992) laquo Museacutees scientifiques museacutees techniques museacutees industriels

lrsquoexemple franccedilais raquo in Brigitte Schroeder-Gudehus B (ed) La socieacuteteacute industrielle et ses

museacutees demande sociale et choix politique 1890-1990 Eacuteditions des archives contemporaines

Paris p 97-115

Detoeuf J et Dauphin (2007) Histoire du GLACS 1973 ndash 2007 GLACS En ligne agrave

httpwwwglacsorgpages_0index_histpdf [consulteacute le 7 octobre 2011]

Deveze-Berthet D et Emptoz G (1992) Museacutee et centre de culture scientifique et technique

Quelles formations pour quels meacutetiers OCIM HS ndeg2 Dijon

Doray P Gemme B Gibeau G (2003) Culture scientifique et technique et navigation dans

lrsquoenseignement supeacuterieur raquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture

scientifique Lyon Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Les Presses de lUniversiteacute de

Montreacuteal

Dumazedier J (1962 2e eacuted 1972) Vers une civilisation du loisir Paris Le Seuil

Durant J (1993) Qursquoentendre par culture scientifique Alliage ndeg16-17 Nice

Epstein S (1996) Impure science Berkeley University of California Press

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 36: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

36

Escot C (1999) La culture scientifique et technologique dans lrsquoeacuteducation non formelle

Unesco Paris

Fayart P (1988) La communication scientifique publique Lyon Chronique sociale

Felt U (2010) ldquoVers la construction drsquoun public europeacuteen Continuiteacute et rupture dans les

discours politiques sur les cultures scientifiques et techniquesrdquo in Chavot et Masseran

(coord) dossier ldquoLes cultures des sciences en Europerdquo Question de communication 17-2010

Nancy PUN en ligne agrave

httpsciencestudiesunivieacatfileadminuser_uploaddep_sciencestudiespdf_filespublikat

ionenConstruct_d_un_public_eurpopdf

Felt U (2003) (dir) Optimizing public understanding of science (Final OPUS project

report) University of Vienna 2003 675 p en ligne agrave

httpwwwunivieacatvirusssOPUSReport

Feyerabend P (1975) Contre la meacutethode Esquisse drsquoune theacuteorie anarchiste de la

connaissance Paris Eacuted Le Seuil

Flichy P (2010) Le sacre de lrsquoamateur La reacutepublique des ideacutees Paris Le Seuil

Foisy M Gingras Y (2003) ldquoLa deacutesaffection des jeunes pour les sciences reacutealiteacute ou

fictionrdquo in Schiele B Jantzen R (dir) Les Territoires de la culture scientifique Lyon

Presses universitaires de Lyon Montreacuteal Presses de lUniversiteacute de Montreacuteal

Gautier G (1989) ldquoLANSTJ un projet peacutedagogique et le contexte micro-social de son

eacutelaborationrdquo ASTER ndeg 9 Les sciences hors de leacutecole 1989 INRP en ligne agrave

httpdocumentsirevuesinistfrbitstreamhandle20429144ASTER_1989_9_85pdfsequen

ce=1

Gautier G et Las Vergnas O avec Dubost P-J et Guiraudon J-C (2011) ldquoLoisir

aeacuterospatial et astronomique la saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo I de

1962 agrave 1977 Revue pour lrsquohistoire du CNRS Paris

Giordan A (1978) Une peacutedagogie pour les sciences expeacuterimentales Paris Centurion

Giordan A et De Vecchi G (1987) Les origines du savoir Neuchatel Delachaux [reacuteeacuted

2010 Nice Ovadia]

Girault Y Lhoste Y (2010) Opinions et savoirs positionnements eacutepisteacutemologiques et

questions didactiques Opinions et savoirs (Lhoste Y Girault Y coord) Ndeg1 Recherches en

Didactique des Sciences et des Technologies INRP

Guyon E et Maitte B (2010) ldquoLe partage des savoirs scientifiquesrdquo La revue pour lrsquohistoire

du CNRS [En ligne] 22 | 2008 mis en ligne le 03 octobre 2010 consulteacute le 12 deacutecembre

2010 URL httphistoire-cnrsrevuesorg8322

Habermas J (1968) La technique et la science comme ideacuteologie [Traduction franccedilaise]

Paris Tel Gallimard

Hamelin E (2003) Deacuteveloppement et diffusion de la culture scientifique et technique un

enjeu national rapport eacutetabli agrave la demande du Premier Ministre aupregraves du Ministre de

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 37: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

37

lrsquoEacuteducation nationale du Ministre de la Culture et de la Communication de la Ministre

deacuteleacutegueacutee agrave la Recherche et aux Nouvelles technologies Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0440000230000pdf

Hawley et Mac Whirter E (1991) Empowerment in counseling Journal of Counseling amp

Development 69 Pp 222-227

Hulin N (2011) Culture scientifique et humanisme un siegravecle et demi drsquoengagement sur le

rocircle et la place des science LrsquoHarmattan Paris

Ifree [coll] (2010) Sciences participatives et biodiversiteacute Livret de lrsquoIfree ndeg2 Villiers en

Bois (79) En ligne agrave httpifreeassofrUserFilesLivret_Ifree_n2_Sc-participatives_Coulpdf [consulteacute le 7

octobre 2011]

Jacobi D (1985) ldquoSeacutemiotique du discours de vulgarisation scientifiquerdquo Semen [En ligne]

2 | 1985 mis en ligne le 21 aoucirct 2007 consulteacute le 16 janvier 2011 URL

httpsemenrevuesorg4291

Jacobi D Schiele B (1988) (dir) Vulgariser la science le procegraves de lrsquoignorance Seyssel

Champ Vallon

Jacobi D Schiele B Cyr M-F (1990) ldquoLa vulgarisation scientifique et lrsquoeacuteducation non

formelle note de synthegraveserdquo Revue franccedilaise de peacutedagogie vol 91 - ndeg 1 pp 81-111

En ligne agrave httpwwwperseefrwebrevueshomeprescriptarticlerfp_0556-

7807_1990_num_91_1_1390

Jantzen R (2001) La culture scientifique et technique en 2001 constats pour agir demain

laquo Constater impulser agir raquo rapport de mission agrave Monsieur le Ministre de lrsquoEacuteducation

nationale et agrave Monsieur le Ministre de la Recherche Paris La Documentation franccedilaise

Bibliothegraveque des rapports publics En ligne agrave

httplesrapportsladocumentationfrancaisefrBRP0240000300000pdf

Jouet E Flora L Las Vergnas O (2010) ldquoConstruction et reconnaissance des savoirs

expeacuterientiels des patientsrdquo in Jouet et Flora (coord) ldquoLa part du savoir des malades dans le

systegraveme de santeacuterdquo Pratiques de formation-Analyses ndeg 58-59 pp 13-77 Saint Denis

Universiteacute Paris 8

Jouet E Las Vergnas O (2011 agrave paraicirctre) Les savoirs des malades peuvent-ils ecirctre regardeacutes

comme des savoirs amateurs [Article solliciteacute] par la revue Alliage (ndeg69 consacreacute aux

amateurs) Nice

Jurdant B (1970) ldquoLa science et son mythe la scientificiteacuterdquo Education Permanente (6)

juin 1970

Jurdant B (1973) Les problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Paris Edition

des archives contemporaines [thegravese reacuteeacutediteacutee en 2009 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Jurdant B (2009) ldquoPostface la circulation culturelle des savoirsrdquo in Jurdant B Les

problegravemes theacuteoriques de la vulgarisation scientifique Edition des archives contemporaines

[thegravese reacuteeacutediteacutee 1ere eacutedition dactylographieacute 1973]

Labasse B (1999) Observation sur la meacutediation des connaissances scientifiques et

techniques Rapport pour la DG XII de la Commission europeacuteenne Publieacute en ligne

httpspruniv-lyon1frGEVRapportpdf [consulteacute le 15 avril 2011]

Las Vergnas O (2006a) ldquoLes savoirs scientifiques seront-ils toujours infantilisants rdquo

Alliage ndeg 59 2006 pp 20-28 En ligne agrave

httpwwwtribunescomtribunealliage59page5page5html

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 38: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

38

Las Vergnas O (2006b) ldquoAttractiviteacute des eacutetudes scientifiques crise de foi retour drsquoaffection

et main invisible du progregravesrdquo Communication suivie drsquoun deacutebat aux journeacutees drsquoeacutetudes de

lrsquoassociation nationale laquo Planegravete-sciences raquo mars 2004 Mise agrave jour et publieacutee sur internet en

feacutevrier 2006 httpenviedesavoirorgstockdesaffection42htm [consulteacute en ligne le 15 avril

2011]

Las Vergnas O (2011a agrave paraicirctre) ldquoPratiques amateurs en astronomie et transgression de la

cateacutegorisation scolaire entre scientifiques et non scientifiquesrdquo [Article solliciteacute] par la revue

Alliage (ndeg69 consacreacute aux amateurs) Nice

Las Vergnas O (2011b) La culture scientifique et les non scientifiques entre alleacutegeance et

transgression Note drsquoHDR Universiteacute de Paris Ouest-Nanterre-La Deacutefense Nanterre En

ligne agrave httphdrlasvergnaseu [consulteacute en ligne le 7 octobre 2011]

Las Vergnas O et Lebras J (2009) ldquoLrsquoobservatoire des exposciencesrdquo Revue de lrsquoOCIM

Dijon OCIM

Las Vergnas O Gautier G et Piednoeumll E (2010) ldquoLoisir aeacuterospatial et astronomique la

saga de lAssociation nationale des clubs scientifiquesrdquo II de 1975 agrave 2000 raquo Revue pour

lrsquohistoire du CNRSndeg27-28 CNRS Paris

Latour B (1991) Nous nrsquoavons jamais eacuteteacute modernes essai drsquoanthropologie symeacutetrique

Paris La Deacutecouverte

Leadbeater et Miller (2004) The Pro-AM revolution Demos London

Le Marec J (2005) ldquoLe public dans lrsquoenquecircte et au museacutee face agrave la rechercherdquo in Pailliart

I (dir) La publicisation de la science PUG

Le Marec J (2009) ldquoChercheur de sciencerdquo preacuteface in Jurdant (eacuted 2009) Les problegravemes

theacuteoriques de la vulgarisation scientifique ERSTU ndash Paris Edition des archives

contemporaines

Le Marec J (dir) (2010) Les eacutetudes de sciences pour une reacuteflexiviteacute institutionnelle

ERSTU ndash Paris eacutedition des archives contemporaines

Leacutevy-Leblond J-M et Jaubert A (1975) (Auto) critique de la science Le Seuil Paris

Leacutevy-Leblond J-M (1986) Mettre la science en culture Nice ANAIS

Maleacutecot Y (1981) Culture technique et ameacutenagement du territoire DATAR Paris

Maitte B (1985) Les centres de culture scientifique technique et industrielle MIDIST Paris

Ostrowiecki H (2005) laquo Lrsquoopeacuteration laquo Vacances plaisir des sciences raquo raquo La revue pour

lrsquohistoire du CNRS [En ligne] 12 | 2005 [consulteacute le 07 octobre 2011] httphistoire-

cnrsrevuesorg1393

Pailliart I 2005 [dir] La publicisation de la science Grenoble PUG

Piednoeumll E [coord] [Las Vergnas O dir scient] (2006) Les lieux de pratique drsquoAstronomie

en France inventaire des structures drsquoanimation Paris AFA-MESR

Price (de la Solla) D (1963) Little science big science New York and London Colombia

University Press

Rappaport J (1987) Terms of empowermentexemplars of prevention toward a theory for

community psychology Ameacuterican Journal of Community Psychologie 15 121-148

Roqueplo P (1974) Le partage des savoirs Paris Seuil

Roux Charvolin et Dumain (2009) ldquoLes laquo passions cognitives raquo ou la dimension rebelle du

connaicirctre en reacutegime de passionrdquo Revue danthropologie des connaissances 32009 (Vol 3 ndeg

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert

Page 39: L’institutionnalisation de la « culture scientifique et ...enviedesavoir.org/HDROLV/NDS_OLV_SAVOIRS_12octobre2011.pdf · 3 1. HISTORIQUE 1.1. L’émergence d’un « sens figuré

39

3) en ligne agrave httpwwwcairninforevue-anthropologie-des-connaissances-2009-3-page-

369htm [consulteacute en ligne le 15 avril 2011]

Schiele B [coord] (1994) When science becomes culture Editions multimondes

Boucherville (Quebec)

Schiele B (2005) ldquoPubliciser la science pourquoi faire Revisiter la notion de culture

scientifique et techniquerdquo in Pailliart I (dir) La publicisation de la science Grenoble PUG

p 11-51

Schwartz B (1968) ldquoReacuteflexions sur le deacuteveloppement de leacuteducation permanenterdquo Revue

franccedilaise de Peacutedagogie (4) juill 1968

Snow P C (1968) Les deux cultures Paris Pauvert

Stewart J et Havelange V (1989) laquo Les boutiques de sciences raquo Alliage ndeg1 Nice

Venturini P (2007) Lrsquoenvie drsquoapprendre les sciences Coll ldquoEducation et sciencesrdquo Paris

Fabert