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La Décision Médicale
Faculté de Médecine de Tours
Département de Médecine Générale
12 décembre 2013
Eric DRAHI, Delphine LE GOFF
Déclaration d’intérêts
• Eric DRAHI
– Coordinateur médical du Réseau DIABOLO
– Membre du Conseil Scientifique MOTIVDIA (Laboratoire Merck Serono)
– Membre de la commission « Protocoles de coopération » de la Has.
• Delphine LE GOFF
– Médecin généraliste, CCU Tours
– Membre du bureau du Réseau Diabolo
Objectifs
• Intégrer les temps essentiels de la médecine fondée sur les preuves dans la décision médicale concrète
• Identifier ses stratégies diagnostiques
• Partager la décision avec le patient
• Être à l’aise dans ses basketts pour décider
Programme
La consultation
Relation médecin malade
Le médecin est celui qui sait et le patient est celui
qui souffre Culture
savante
Culture
populaire
Interface
culturelle
La consultation
• L’attente réelle du malade est souvent méconnue ou mal perçue
• Dans la majorité des consultations, le problème présenté en 1er par le patient est considéré comme le vrai motif = 30 secondes.
• Souvent ni la seule ni sa principale préoccupation: « l’agenda caché »
• => « syndrome du pas-de-porte »
Médecine Mai 2010
La relation médecin patient
Agenda du médecin Agenda du patient
Histoire du problème Croyances
Nature du problème Sentiments
Diagnostic différentiel Attente
Recommandations Impact
La consultation
• Durée moyenne: 16 minutes ( 0,3% < 5mn; 4,8% > 30mn).
• Royaume Uni: 13,3 mn; USA: 20 mn
• Avec un temps + long les médecins prescrivent moins.
Consultation= ordonnance= médicaments
Madame Blais , 28 ans , avait appelé le secrétariat dans la journée en insistant car elle a des douleurs pelviennes depuis une semaine.
Eléments de l’interrogatoire :
•Elle est séparée
•Mère monoparentale de 2 enfants de 3 et 5 ans
•Elle porte un DIU au cuivre posé il y a 3 ans
•Elle ne prend pas de médicament
•Elle a toujours eu des cycles irréguliers
•Ses dernières règles remontent à 5 semaines
•Elle a plusieurs partenaires sexuels
•Rapports non protégés
•Elle a laissé ses deux enfants en garde chez la voisine et doit les récupérer dès que possible.
Eléments de l’examen clinique :
•TV : douleur à la mobilisation et à la palpation de l’annexe gauche
•Tous les autres éléments sont normaux.
Qu’est-ce qui vous permet de prendre une décision?
Une décision c’est Quoi ?
• Choix entre différentes possibilités
• Caractérise l’activité humaine
• Précède l’action dont elle est la représentation mentale anticipée
• Résulte d’un jugement entre connaissances médicales, logique, psychologie, valeurs socioculturelles.
Eléments de la décision
• Clinique • Degré d’incertitude • Ethique médicale • Caractéristiques du médecin • Expérience, le mode d’exercice • Accès au plateau technique • Degré d’éducation des malades, désir de partager la décision • Milieu social, revenus du patient • Réglementation • Pression de l’industrie pharmaceutique • Mode de rémunération de l’activité médicale • Valeurs religieuses • …….
Prendre une décision
• Analyser la situation de ce patient dans son contexte
• Formuler des questions élémentaires pour lesquelles il est possible d’apporter une réponse en termes stratégiques
• Faire appel à une documentation (connaître les données actuelles de la science)
• Appliquer les données actuelles de la science à ce patient donné dans ce contexte donné.
Evidence Based Medicine
Un Problème de traduction…
Evidence : tout élément servant à fonder
un jugement ou une décision
Une définition initale :
– “EBM is the conscientious, explicit and judicious use of current best evidence in making decisions about the care of individual patients”
– L’EBM est l’utilisation consciencieuse, explicite et judicieuse des meilleures données actuelles de la recherche clinique dans les décisions concernant les soins individuels des patients
Sackett DL & al. Evidence based medicine : what it is and what it isn't. BMJ 1996;312:71-72.
Une définition actualisée :
• « Integration of best research evidence with clinical expertise and patient values »
• « Intégration des meilleures données de la recherche à la compétence clinique du soignant et aux valeurs du patient »
Sackett DL, Straus SE, Richardson WS & al. Evidence based medicine:
how to practice and teach EBM. 2d ed. Edinburgh: Churchill Livingston, 2000.
Données Actuelles de la Science
État et circonstances cliniques
Préférences et
comportement
du patient
Haynes B & al. EBMJ 2002;7,2:36-8.
Compétence clinique
Ne pas confondre l’EBM avec
• L’EBM
– Eminence Based Medicine
• L’EBM
– Experience Based Medicine
Modèle bio-psycho-social de Engel
BIO
SOCIAL
PSYCHO
MALADIE
SOCIOCULTUREL
Spécificités des soins primaires: la maladie
BIO
SOCIAL
PSYCHO
Faible prévalence des
maladies caractérisées.
Stade précoce des
maladies
Incertitude diagnostique:
70% des cas
Observatoire de la Médecine
Générale 2006
Prendre des décisions adaptées en
situation d’incertitude
Spécificités des soins primaires: le patient
BIO
SOCIAL
PSYCHO
La santé du patient est en interaction
permanente avec:
son
environnement
sa personnalité
Adopter une approche globale
centrée sur le patient
Les Données Actuelles de la Science
Systèmes de classification des preuves et recommandations
Validité de l’information
• 90% des avancées majeures sont publiées dans seulement 150 revues
• Chaque mois plus de 200 revues ne donnent à lire que des résumés d’articles publiés par d’ autres.
• Seuls 10 à 15% des articles imprimés aujourd’hui se révèleront avec le temps porteur d’un message scientifique important et pérenne
UN MEDECIN GENERALISTE QUI SOUHAITERAIT SE TENIR AU COURANT
DES EVOLUTIONS DE SA DISCIPLINE DEVRAIT ASSIMILER 19 ARTICLES
ORIGINAUX PAR JOUR, 365 JOURS PAR AN
48
Pour être efficace il faut….
• Pertinence
• Validité scientifique
….TRIER
Développer son sens critique
Comment se tenir informé? • Abonnement à des revues « papier » indépendantes
– Exercer – Médecine – Minerva – Prescrire
• Abonnement à des fils RSS de sites médicaux – HAS, AFSSAPS, INPES, … ou à leurs lettres mailées d’info
d’actualités
• Abonnement à des fils RSS de sites de réflexion – Atoute, Pharmacritique, Formindep, …
• Abonnement ou visites de sites de Sociétés Scientifiques – CNGE, SFMG, SFTG, SFDRMG
Tout lire ?
• Veille documentaire
• Lire les sommaires
• Lire immédiatement ses pôles d’intérêt
• Utiliser les contenus de manière opportuniste
• Utiliser les bases de données synthétiques validées disponibles
Outils d’aide à la décision en consultation
• Vidal, BCB, etc … • Vidal Recos • Bazuriap • Dictionnaire des Résultats de consultation de la SFMG • Scores
– Medcalc, …
• Outils de la décision partagée avec le patient – Agenda de migraine, de sommeil, de crise d’asthme…
Test
• Quelle est l’option la plus efficace ?
– Réduction du risque relatif de 40 %
– Réduction du risque absolu de 1,6%
– Passage d’un taux de guérison de 96% à 97,6%
– Nombre de patients à traiter pour éviter un événement: 62,5.
La réduction du risque absolu est la traduction du bénéfice
thérapeutique
La réduction du risque relatif est un argument
publicitaire
L’étude a été arrêtée « en raison d’une
amélioration significative des bénéfices sur
la morbidité et mortalité CardioVasculaire »
(Comité d’éthique indépendant)
Rosuvastatine (n = 8901)
Placebo (n = 8901)
RR p
Critère primaire 142 / 0,77 251 / 1,36 0,56 < 0,00001
IDM non fatal 22 / 0,12 62 / 0,33 0,35 < 0,00001
IDM 31 / 0,17 68 / 0,37 0,46 0,0002
AVC non fatal 30 / 0,16 58 / 0,31 0,52 0,003
AVC 33 / 0,18 64 / 0,34 0,52 0,002
Revascularisation 71 / 0,38 131 / 0,71 0,54 < 0,0001
Hospitalisation pour angine instable 16 / 0,09 27 / 0,14 0,59 0,09
IDM, AVC ou décès CV 83 / 0,45 157 / 0,85 0,53 < 0,00001
Décès toutes causes 198 / 1,0 247 / 1,25 0,80 0,02
Calculons la mortalité cardiovasculaire
IDM mortels: Rosuva:31 – 22 = 9 Placebo: 68 – 62 = 6
AVC mortels Rosuva: 33 – 30 = 3 Placebo: 64 – 58 = 6
Mortalité Cardio Vasculaire: Rosuva 12 Placebo 12
Bénéfice sur la mortalité CV qui a fait
arrêter l’étude ?
Les AMM en prévention primaire dans la réduction de la morbi-mortalité
HAS Juillet 2010
Simvastatine Pravastatine Fluvastatine Rosuvastatine Atorvastatine
40 mg 40 mg 80 mg 20mg 10 mg
Hyperchol
modérée à
sévère avec
RCV élevée
WOSCOPS
ASMR 1
JUPITER
ASMR 5
HTA + 3 FdR
hors diabète
(hyperchol +/-)
ASCOT
ASMR 2
Diabète + 1
autre FdR
(hyperchol +/-)
HPS
ASMR 1
CARDS
ASMR 1
Les AMM en prévention secondaire dans la réduction de la morbi-mortalité
simvastatine pravastatine Fluvastatine rosuvastatine atorvastatine
40 mg 40 mg 80 mg 20 mg 10 mg
Patient coronarien (notamment ATCD IDM/angor instable
pour la prava)
4S Hyperchol +/-
ASMR 1
CARE; LIPID LDL-c> 1,25 g/l
CT > 2,5g/l ASMR 1
Post angioplastie coronaire
OUI OUI
LIPS Pas d’ASMR par
rapport à SIMVA et PRAVA
AOMI/AVC
4S Sans
Hyperchol ASMR 1
Post transplantation cardiaque
Etude kobashigawa
ASMR II
Number Needed to Treat
• Nombre de patients à traiter pour éviter un événement sur une durée déterminée
• Formule : 1/RRA
Nombre de sujets à traiter
Intervalles de confiance
En statistiques, un résultat ne s’exprime pas par une valeur,
mais par un intervalle de confiance
Clopidogrel and aspirin versus aspirin alone for the prevention of atherothrombotic events
Test
• Réduction du risque relatif de 40 %
• Réduction du risque absolue de 1,6%
• Passage d’un taux de guérison de 96% à 97,6%
• Nombre de patients à traiter pour éviter un événement: 62,5.
• Risque absolu de non-guérison
– groupe contrôle: 4%
– Groupe traité:2,4%
• RRA: 1,6
• RRR:4-2,4/4= 0,4 ou 40%
• NNT: 100/1,6=62,5
Comment les médecins raisonnent-ils?
Le processus hypothético-déductif
Démarche de la première hypothèse
• Le patient vient avec une demande ou plainte explicite
• Il a une attitude, un comportement
• Il montre certains traits de sa personnalité
• Il présente son ou ses symptômes à un moment précis
• Tout cela n’est pas anodin et suggère une hiérarchie de ses préoccupations
La première hypothèse
• L’ensemble de ces éléments permettent de formuler une première hypothèse sur ce que le patient a, et/ou sur ce qu’il attend.
• Les différentes études sur les démarches diagnostiques des médecins de soins primaires ont montré, que cette première hypothèse est confirmée dans 75 % des cas
Les représentations
Mode de présentation des patients
2 vidéos présentées à des médecins
Même histoire de douleurs thoraciques,
Même mots, même âge
MAIS
Femme
Type femme
d’affaires
Femme
Cabotine,
théatrale
Réponses des Médecins face à ces 2 types de présentation
Femme
d’affaire
Femme
cabotine
Affection cardiaque
comme diagnostic
initial 50% 13%
Maladie fonctionnelle
comme diagnostic initial
30% 73%
Poursuite des
investigations
cardiologiques 93% 53%
Mémoire stage chez le praticien
« Étude du temps mis par le résident pour formuler une
première hypothèse diagnostique, fiabilité de celle-ci et messages utilisés pour y arriver. »
Pierre Metton
• Temps moyen de 1 minute 04 pour formuler une première hypothèse.
• L’hypothèse envisagée s’est vérifiée dans 71% des cas.
• L’interrogatoire a été le message le plus efficace dans 73% des cas.
2 démarches
• Analogique – Rapide
– Efficace
– Mais…
• Analytique – En cas de non congruence
– Revues de plusieurs hypothèses successivement en débutant par la plus prévalente
Plaintes
Représentation du problème
Activation de connaissances organisées
et élaborées
Génération précoce d’hypothèses pertinentes
Acquisition de données supplémentaires pertinentes
Les risques d’une approche exclusivement intuitive
• Prendre ses opinions pour des faits établis…
• Prendre son ignorance pour les limites réelles de la connaissance médicale…
• Le pire ennemi de la vérité n’est pas le mensonge mais la
conviction
Comment raisonnent les médecins ?
Plusieurs études ont analysé les modes de décision des médecins généralistes.
Heneghan C, Glasziou P, Thompson M, Rose P, Balla J, Lasserson D, et al. Diagnostic strategies used in primary care. BMJ.
2009;338:b946.
69
3 étapes
• Entrée dans le diagnostic
• Affinage
• Stratégie diagnostique finale
Des stratégies au sein de chacune de ces étapes
70
Etapes et stratégies diagnostiques
• Le « Tilt » (spot diagnosis)
• Autodiagnostic par le patient
• La plainte (mal au ventre…)
• Reconnaissance de forme (analogie)
Initiation
• Passage en revue des diagnostics différentiels les plus fréquents.
• Affinement par étapes
• Localisation anatomique
• Pathologie sous-jacente supposée
• Raisonnement probabiliste : Bandelette urinaire, foyer pulmonaire, …
• Reconnaissance de forme
• Règle de prédiction clinique (scores…)
Affinage
• Diagnostic connu
• Demande d’examens complémentaires
• Test thérapeutique
• Donner du temps au temps
• Pas d’étiquette
Diagnostic final
Heneghan C, Glasziou P, Thompson M, Rose P, Balla J, Lasserson D, et al. Diagnostic strategies used in primary care. BMJ. 2009;338:b946.
4 modalités d’entrée dans le diagnostic
• Le « Tilt » (spot diagnosis)
• Autodiagnostic par le patient
• La plainte (mal au ventre…)
• Reconnaissance de forme (analogie)
Heneghan C, Glasziou P, Thompson M, Rose P, Balla J, Lasserson D, et al. Diagnostic strategies used in primary care. BMJ. 2009;338:b946.
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Heneghan C, Glasziou P, Thompson M, Rose P, Balla J, Lasserson D, et al. Diagnostic strategies used in primary care. BMJ. 2009;338:b946.
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L’affinage
• Passage en revue des diagnostics différentiels les plus fréquents.
• Affinement par étapes – Localisation anatomique – Pathologie sous-jacente supposée
• Raisonnement probabiliste • Bandelette urinaire, foyer pulmonaire, …
• Reconnaissance de forme • Règle de prédiction clinique (scores…)
Heneghan C, Glasziou P, Thompson M, Rose P, Balla J, Lasserson D, et al. Diagnostic strategies used in primary care. BMJ. 2009;338:b946.
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Stratégie finale
• Résultat de consultation ou diagnostic? • Moins de 50% des consultations se terminent avec un
diagnostic de certitude. – Demande d’examens complémentaires – Test thérapeutique – Donner du temps au temps – Pas d’étiquette :
• Reconvoquer le patient • Examens complémentaires • Partage de l’incertitude avec le patient • Second recours
Heneghan C, Glasziou P, Thompson M, Rose P, Balla J, Lasserson D, et al. Diagnostic strategies used in primary care. BMJ. 2009;338:b946.
76
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Drapeaux rouges
Alertes permettant de reconsidérer le problème:
- Douleur lombaire nocturne…
- Céphalée + photophobie + vomissements
- Purpura fébrile….
78
Des données de la science très actuelles…
Qu’est-ce qui nous permet de mettre en
œuvre une stratégie de prévention pour
nos patients pour chacune de ces
5 problèmes/pathologies ?
• 5 sujets de prévention :
– Statines en prévention primaire
– Cancer du sein
– Cancer de la prostate
– Vaccination anti-HPV
– Cancer colorectal
Vaccination anti-HPV
Kcol: incidence et mortalité
Kcol: Incidence et mortalité
Modélisation Dépistage vs Vaccination
• par rapport à la situation actuelle (dans laquelle prévaut le dépistage individuel), l’organisation du dépistage du cancer du col de l’utérus augmenterait le nombre de lésions précancéreuses diagnostiquées (+21,8 %) mais réduirait le nombre de cancers diagnostiqués et de décès liés à ces cancers (respectivement -16,1 % et -19,5 %) ;
• pour un taux de couverture vaccinale de 30 %, la vaccination des adolescentes de 14 ans, sans organisation du dépistage, aurait un impact épidémiologique limité (-11,2 %, -8,2 % et -6,1 % respectivement sur les lésions précancéreuses, les cancers et les décès) ;
• pour un taux de couverture vaccinale de 80 %, la vaccination des adolescentes de 14 ans, sans organisation du dépistage, aurait un impact épidémiologique plus important sur le nombre de lésions précancéreuses (-29,8 %). Son impact sur les cancers et les décès serait proche de celui de l’organisation du dépistage (respectivement -21,9 % et -16,3 %). L’impact de la vaccination avec une couverture de 80 % est légèrement supérieur à celui de l’organisation du dépistage pour le nombre de cancers diagnostiqués (réduction additionnelle de 6,9 % par rapport à celle obtenue par le dépistage organisé) et légèrement inférieur pour le nombre de décès (réduction inférieure de 3,9 % à celle obtenue par le dépistage organisé) ;
• par rapport à la situation actuelle, sur la base des ratios cout-efficacite , il vaut mieux, dans un premier temps, organiser le dépistage que de vacciner :
• - l’organisation du dépistage, sur le modèle alsacien, présente un
• rapport cout/efficacite de 22700 € par année de vie sauvée si on prend en compte la totalite des couts médicaux et un taux d’actualisation des couts et des bénéfices de 3 %, 11 100 € si on ne prend en compte que la part des couts supportés par l’Assurance maladie (respectivement 14 000 € et 6 900 € si on retient un taux de 1,5 % pour l’actualisation des bénéfices),
• - en l’absence de mise en place d’un dépistage organisé sur le modèle alsacien pour l’ensemble du territoire métropolitain, la vaccination avec un taux de couverture de 80% présenterait, par rapport à la situation actuelle, un rapport cout/efficacite de 45 200 € par année de vie gagnée si on prend en compte la totalite des couts médicaux, de 28 800 € si on ne prend en compte que la part des couts supportés par l’Assurance maladie en retenant un taux d’actualisation identique pour les couts et les bénéfices de 3 % (respectivement 22 200 € et 14 100 € si on retient un taux de 1,5 % pour l’actualisation des bénéfices),
• - en prenant comme point de référence le dépistage organisé, le rapport cout/efficacite de la vaccination avec un taux de couverture de 80 % s’établit à 55 500 € si on prend en compte la totalite des couts médicaux et un taux d’actualisation des couts et des bénéfices de 3 %, 35 400 € si on ne prend en compte que la part des couts supportés par l’Assurance-Maladie (respectivement 27 500 € et 17 500 € si on retient un taux de 1,5 % pour l’actualisation des bénéfices).
Le groupe de travail s’est fondé sur une modélisation de type mathématique et il a conclu qu’ON POUVAIT ESPERER UN BENEFICE SUPPLEMENTAIRE SUR LE NOMBRE DE CAS DE CANCER DU COL DE 16% (c’est-à-dire une diminution supplémentaire de 16% des cas de cancer, on ne parle pas de mortalité) DUVACCIN PAR RAPPORT AU DEPISTAGE ORGANISE. MAIS QUE CE BENEFICE SUPPEMENTAIRE N’APPARAITRAIT QUE DANS 70 ANS. De plus, ce maigre bénéfice ne pourrait être observé que si trois conditions irréalistes se réalisaient : • 1- il faudrait que le vaccin maintienne le maximum d’efficacité qui lui est
attribué, de 70%, pendant 70 ans • 2- que le taux de vaccination des jeunes filles soit au minimum de 80%
pendant 70 ans • 3- que le vaccin ne nécessite aucun rappel Si une seule de ces conditions n’était pas remplie, on ne pourrait espérer aucun bénéfice supplémentaire de la vaccination par le vaccin contre le papillomavirus par rapport au dépistage organisé, malgré son coût exorbitant et les risques qu’il fait courir à des jeunes filles en bonne santé.
Dépistage: 10 critères OMS La liste suivante de critères est extraite de l’ouvrage «Principes et pratique du dépistage des maladies » publié par l’OMS en 1970 .
• 1) La maladie dont on recherche les cas constitue une menace grave pour la santé publique.
• 2) Un traitement d'efficacite démontrée peut etre administré aux sujets chez lesquels la maladie a éte décelée.
• 3) Les moyens appropriés de diagnostic et de traitement sont disponibles.
• 4) La maladie est décelable pendant une phase de latence ou au début de la phase clinique.
• 5) Une épreuve ou un examen de dépistage efficace existe.
• 6) L'épreuve utilisée est acceptable pour la population.
• 7) L'histoire naturelle de la maladie est connue, notamment son évolution de la phase de latence à la phase symptomatique.
• 8) Le choix des sujets qui recevront un traitement est opére selon des critères préétablis.
• 9) Le cout de la recherche des cas (y compris les frais de diagnostic et de traitement des sujets reconnus malades) n’est pas disproportionné par rapport au cout global des soins médicaux.
• 10) La recherche des cas est continue et elle n’est pas considérée comme une opération exécutée « une fois pour toutes ».
Grille de lecture d’une recommandation (HAS 2000)
GRADE
GRADE (2)
Dépistage du cancer du sein
Efficacité du dépistage: • Pas d’évolution de la courbe de mortalité par cancer du
sein (1) • Métaanalyse de la Cochrane (2):
– 7 essais, 600 000 femmes – Études les - biaisées: pas d’efficacité – Études les + biaisées: bénéfice
1. Guérin S, Doyon F, Hill C.La fréquence des cancers en France en 2006 et les
évolutions de la mortalité depuis 1950 et de l’incidence depuis 1980. Bull Cancer 2009; 96:51-57
2. LaGøtzsche PC, Jørgensen KJ. Screening for breast cancer with mammography. Cochrane Database of Systematic Reviews 2013, Issue 6. Art. No.: CD001877. DOI: 10.1002/14651858.CD001877.pub5
• Postulat (2):
– Le dépistage réduit la mortalité de 15% à 13 ans
– Le surdiagnostic et le surtraitement sont de 30%
• Soient:
– 2000 femmes invitées sur 10 ans
– 1 mort par cancer du sein évitée
– 10 femmes traitées inutilement
– 200 femmes en situation de détresse psychologique, anxiété, incertitude pour résultat faussement +
LE CANCER DE LA PROSTATE
• En France c’est le plus fréquent des cancers
• En 2005: 62245 nouveaux cas
• C’est la 2e cause de mortalité par cancer chez l’homme
• Représente 10 décès/100 décès par cancer chez l’homme
LAUNOY guy ;Questions de santé publique; N° 4; Avril 2009
Part relative des différentes localisations cancéreuses dans l’augmentation de l’incidence des
cancers en France
http://SEER.cancer.gov
Incidence des cancers(EU 2003)
Rang Incidence
1 Peau
2 Prostate
3 Sein
4 Poumon
5 Côlon
Incidence, DC (EU 2003)
Rang Incidence DC
1 Peau Poumon
2 Prostate Côlon
3 Sein Sein
4 Poumon Pancréas
5 Côlon Prostate
Incidence, DC, Années de vie perdues (EU 2003)
Rang Incidence DC Années de vie
perdues
1 Peau Poumon Poumon
2 Prostate Côlon Sein
3 Sein Sein Côlon
4 Poumon Pancréas Pancréas
5 Côlon Prostate Leucémies
Dosage du PSA total
• Au quotidien s’est développée une pratique de dépistage individuel par le test de dosage du PSA
• Mortalité a diminué de 2,1% entre 1990 et 2006, alors que l’incidence X 3
• Une diminution est retrouvée dans les pays ou l’utilisation des tests est faible (en rapport avec amélioration prise en charge ?).
• En 2005 en France 25000 prostatectomies totales contre 5000 au RU pour la même mortalité par CaP
Seuil de décision PSA total: 4 ng/ml
• Sensibilité 75% • Probabilité d’avoir un test + quand le sujet est malade
• Spécificité 90% • Probabilité d’avoir un test – quand le sujet n’est pas malade
• VPP: 30% • Probabilité que le diagnostic soit vrai si le Test est +
• VPN 90% • Probabilité que le diagnostic soit faux si le Test est -
• NB: PSA > 4 = 10% des hommes de 50 à 75 ans.
Welch; dois je me faire tester pour
le K; Presses université Laval
Vecteurs de croissance de différents types de cancer
Taille
Taille à laquelle le
K provoque le DC
Taille à laquelle le
K donne des
symptômes
Temps DC par d’autres
causes
Cellule anormale
Non progressif
Très lent
Lent Rapide
4 groupes différents
• Ceux pour qui le K devient clinique, dont le pronostic n’est actuellement modifié par aucun traitement et dont le dépistage n’aurait pas modifié la situation.
• Ceux dont le cancer évolue si vite qu’aucun dépistage ne peut améliorer la situation.
• Ceux dont la maladie dépistée n’aurait jamais évolué et qui ne nécessitent donc aucun traitement.
• Ceux asymptomatiques, qui bénéficient réellement d’un traitement auquel ils n’auraient pas eu accès sans le dépistage
Questions ?
• Pouvons-nous identifier avec une efficacité suffisantes les hommes que menace réellement leur K de la prostate ?
• Avons-nous des preuves de l’efficacité et de l’intérêt pour le patient d’un traitement radical d’un cancer dépisté par le seul PSA ?
• Est-il prouvé qu’un programme de dépistage systématique soit efficace ?
PSA et dépistage des K localisés de la prostate
Les essais randomisés
Essai étatsunien (PLCO)
• 76693 hommes de 50 à 74 ans entre 1993 et 2001
• Suivi prévu: 13 ans
• Résultats intermédiaires à 9 ans
Essai étatsunien (PLCO)
•Mortalité dans le groupe dépistage plus élevé de 11% sans différence significative.
•Groupe dépistage: K prostate chez 9% des participants contre 7,8% dans le groupe témoin
•Commentaires: résultats en défaveur du dépistage. Attendre les résultats finaux.
Essai européen (Erspc)
Commentaires
• Le nombre de cancers de la prostate mortel a été abaissé de 20% dans le groupe Dépistage (Résultats statistiquement significatif).
• Pour arriver à ce résultat on a exclu les 2 tranches d’âge extrême (moins de 55 et plus de 69 ans) ce qui était semble t il prévu dans le protocole initial.
• L’inclusion de ces tranches d’âge conduit à une baisse de la mortalité de 15%, non significative
En résumé
• Sur une durée de suivi moyenne de 9 ans:
– Une homme de 55 à 69 ans qui ne pratique pas de dépistage a environ 4 chances sur mille de mourir d’un cancer de la prostate.
– Celui qui pratique un dépistage par PSA +/- TR voit cette probabilité baisser à 3/ 1000.
Méta-analyse de Djulbegovic BMJ 2010
• ERSPC
• ERSPC France
• Gothenburg
• PLCO
• Norrköping
• Quebec
> 340 000 patients
Dépistage Témoins
72 890 89 353
42 590 42 191
9 952 9 952
38 343 38 350
1 494 7 532
31 133 15 353
Les mortalités
Autrement dit
Grâce au dépistage systématique :
Vous mourrez à la même date, de la meme chose…
…mais vous aurez profité plus longtemps de votre cancer !
Essais comparatifs randomisés du dépistage des cancers du sein par mammographie
Essais globalement fiables
Principales caractéristiques Mortalité Totale (%) Mortalité par cancer du
sein (%)
M T Stat M T Stat
Malmö-1, début en 1976, 42000 femmes, âge 44-68
ans, suivi 13 ans 12,03 12,23 NS 0,42 0,51 NS
NBSS-1, début en 1980, 50000 femmes, âge 40-49
ans, suivi 13 ans 1,66 1,64 NS 0,42 0,43 NS
NBSS-2, début en 1980, 40000 femmes, âge 50-59
ans, suivi 13 ans 3,72 3,50 (a) NS 0,54 0,53 (a) NS
Ukccr, début en 1991, 160000 femmes, âge 40-49
ans, suivi 10 ans 1,78 1,85 NS 0,18 0,22 NS
a = un dépistage par examen clinique annuel a été proposé au groupe témoin
Essais comparatifs randomisés du dépistage des cancers du sein par mammographie
Méta-analyse de méthodologie correcte
Principales caractéristiques Mortalité totale (%) Mortalité par cancer du
sein (%)
M T stat M T stat
Cochrane, 132000 femmes, suivi 13 ans, inclus Malmö-1,
NBSS-1 et NBSS-2 9,6 8,6 NS 0,39 0,41 NS
Uspstf, 456000 femmes, suivi 13 ans, inclus tous les essais
sauf Edinbourg et UkCCR ND ND ND 0,31 0,41 P<0,05
ND= résultat non disponible
Rapport bénéfices-risques d’après les auteurs de la Méta-analyse du Réseau Cochrane
• Pour 2000 femmes invitées au dépistage pendant 10 ans, une a sa vie prolongée
• 10 femmes en bonne santé, qui n’auraient jamais été déclarées cancéreuses en l’absence de dépistage, sont diagnostiquées comme ayant un cancer et traitées inutilement
Recommandation Has 2004 Information des hommes…
Le groupe de travail de l ’ANAES rappelle qu ’ il est recommandé que l’information :
• soit hiérarchisée,
• présente les bénéfices attendus des soins envisagés avant leurs inconvénients et risques éventuels
• précise les risques graves, y compris exceptionnels, c’est-à-dire ceux qui mettent en jeu le pronostic vital ou altèrent une fonction vitale,
• qu’elle soit compréhensible.
• Il est également recommandé que cette information soit personnalisée et transmise selon le rythme et les connaissances du patient.
Médecine centrée sur le patient
• Mc WHINNEY (1989): le médecin essaie d’entrer dans le monde du patient, pour voir la maladie avec ses yeux
• STEWARD (1995): – Explorer à la fois la maladie et ses représentations chez le
patient – Comprendre la personne – Trouver des bases communes pour la prise en charge – Incorporer la prévention et la promotion de la santé – Développer la relation médecin-patient – Être réaliste
Données Actuelles de la Science
État et circonstances cliniques
Préférences et
comportement
du patient
Haynes B & al. EBMJ 2002;7,2:36-8.
Compétence clinique
Quelles sont les étapes pour construire une décision partagée avec les
patients
Comment décider ensemble?
• Communicating evidence for participating decision making. Epstein, 2004.
• Revue de la littérature indexée Medline de 1966 à 2003 • Recense les méthodes et outils disponibles pour
partager la décision • Outils:
– Vocabulaire: termes généraux – Chiffres (pourcentages, proportions) – Représentations graphiques – Outils d’aide à la décision (arbres décisionnels,
informatique)
• Méthode
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Les étapes de la décision partagée
1. Comprendre le vécu et les attentes du patient (et de sa famille)
2. Construire un réel « partenariat »
3. Informer des données actuelles de la science, y compris les incertitudes
4. Exposer clairement la décision
5. Vérifier la compréhension et le partage de la décision
Epstein 2004
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1.Comprendre le vécu et les attentes du patient (et de sa famille)
Patient et médecin doivent avoir la même vision:
• des objectifs
• de l'importance de la décision à prendre.
Comment l’explorer?
Qu’attendez-vous de cette consultation ?
Qu’est-ce qui vous qui gêne le plus dans….?
Pour vous, à quoi sont dus vos symptômes?
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2.Construire un réel « partenariat »
• Ecouter avec empathie
• Dire combien la décision est complexe ou difficile
• Exprimer que l'on a compris le patient
• Améliorer son implication et celle de sa famille
• Proposer formellement que la décision soit vraiment partagée
Cette approche établit la confiance et facilite la communication des informations importantes.
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3.Informer des données actuelles de la science…
• En général, les patients souhaitent plus d'information de la part de leur médecin qu'ils n'en reçoivent.
• Les patients hésitent à poser des questions: – Parce qu’ils n’arrivent pas à les formuler
– Parce que qu’ils hésitent à les poser
– le médecin doit anticiper ces questions et en discuter.
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3…y compris les incertitudes • C’est difficile d’exprimer l’incertitude:
– éviter d'en discuter peut empêcher une totale compréhension d'une décision grave par le patient.
– trop en parler peut également poser problème en
faisant perdre confiance à certains patients. • Limites de la connaissance actuelle: = imperfection inhérente à l'évolution de la science
médicale elle-même . = et non à l'incompétence du praticien.
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4.Exposer clairement la décision
• Préalable: avoir déjà intégré les preuves cliniques et les valeurs du patient.
• Pour des options différentes mais équivalentes:
• aucune de raison d'en privilégier une • il faut les présenter impartialement.
• Quand la balance bénéfice-risque est plus claire, on peut
proposer une ligne de conduite correspondant: • au mieux à la fois aux données actuelles de la science • et aux objectifs du patient.
• Il faut montrer:
• ce qui est fondé sur les preuves scientifiques • ce qui relève de l'expérience ou des choix personnels (ex:les
options religieuses ou financières, les convenances personnelles).
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5.Vérifier la compréhension et le partage de la décision
• Risque= perdre le patient lors des étapes précédentes.
• Vérifier sa compréhension: • « était-ce compréhensible ? » suffit …
• Dans des situations complexes,
• demander au patient de récapituler ce qu'il (elle) comprend • et le pourquoi de ce choix.
• S'il apparaît:
• que le patient n'a pas compris, • semble être d'accord, mais appréhende, • ou est franchement en désaccord,
• Il faut à nouveau l'interroger sur ses valeurs, son opinion et
ses attentes, ou fournir des informations plus précises. 07/10/2011 145
Les étapes de la décision partagée
1. Comprendre le vécu et les attentes du patient (et de sa famille)
2. Construire un réel « partenariat »
3. Informer des données actuelles de la science, y compris les incertitudes
4. Exposer clairement la décision
5. Vérifier la compréhension et le partage de la décision
Epstein 2004
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La relation négociée
Autonomie
Coopération
Dépendance
Passivité
Contrôle
Expertise
Partenariat
Facilitation
+
GIRARD G., GRAND'MAISON P. L'approche négociée, modèle de relation patient-médecin Médecin du Québec. 1993; 28: 29-39.
+ +
+
La médecine est l’art de l’incertitude,
la science de la probabilité
A Huxley
L’expérience est le nom que
l’on donne à ses erreurs
Oscar Wilde