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Histoire du Cinéma Classique V2F01
David Chirol
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SOMMAIRE
I. Transition vers le cinéma parlant …………………………………p3-‐7
1) L’arrivée du son………………………………………………p3 2) Conséquences………………………………………………..p4
II. Hollywood classique : les années 30……………………………..p8-‐10
1) L’âge d’or des studios………………………………………p8-‐10
III. Cinéma français des années 30……………………………………p11-‐17
1) Contexte……………………………………………………….p11 2) Structure, production, réalisateurs…………………….p11-‐13 3) Le réalisme poétique……………………………………….p14-‐17
IV. Cinéma allemand des années 30….p18-‐23
1) Sous la république de Weimar…………………………..p18-‐20 2) Sous le troisième Reich…………………………………...p20-‐22 3) Cinéma d’après guerre…………………………………….p23
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Partie 1 : Transition vers le cinéma parlant
1) L’arrivée du son :
Le 1er film sonorisé à séquences parlantes est « Le chanteur de jazz » de Allan Crosland, avec Al Johnson, sorti en 1927. Seules deux séquences contiennent des paroles, le reste du film est muet mais comporte des effets sonores. Ces films semi parlants seront appelés des « talkies ».
Avant 1927, le son des films était réalisé en direct dans les salles (instrumentistes, bruiteurs, acteurs doublant les dialogues, bonimenteurs). Mais il y a toujours eu des expérimentations pour ajouter le son, mais le principal problème était la synchronisation avec l’image (cependant possible pour les films courts), ainsi que celui de l’amplification du son (au moment de l’enregistrement, et dans les grandes salles ou tout le public doit entendre).
Il existait deux systèmes pour enregistrer le son :
a. Le son sur disque b. Le son optique
a. Le procédé de son sur disque est simple,
le film défile et un gramophone lit la piste sonore contenue dans un disque. Le système le plus utilisé sera celui mis en place par la Warner : le Vitaphone (adopté notamment pour « Le chanteur de jazz » en 1927 et « Don Juan » en 1926). Ce système ne sera utilisé qu’entre 1926 et 1930, et disparaît totalement en 1932, les disques de gramophone s’abimant trop rapidement.
b. Le son optique consiste quand à lui à imprimé directement la piste sonore sur la pellicule (enregistrement des variations électro-‐acoustiques et traduction en variations lumineuses). Plusieurs systèmes seront créés, en particuliers le Phonofilm de Lee Deforest (1919)1 et le Phonophone de Georges Demeny (1895 !)2.
1 En 1927, le producteur Pat Powers en fera une contrefaçon, nommée « Cinephone »
Vitaphone, bobine et disque lus en même temps.
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L’année 1928/1929 fut une année de grande transition, on passe d’une diffusion majoritairement composée de films muets à une transition majoritairement composée de films parlant. À partir de 1930, le monde entier produit des films parlants.
L’arrivée du parlant sera un grand bouleversement dans le monde du cinéma, premièrement au niveau du monde du travail : de nombreuses carrières prennent fin tandis que de nouvelles démarrent. Beaucoup de réalisateurs réputés mettent un terme à leurs carrières (Buster Keaton, David Griffith…) et des réalisateurs venus d’Europe rentrent dans leur pays d’origine (Sjöström, Tourneur…). D’autres réalisateurs passent le cap, comme Lubitsch, Sternberg, Browning… On voit l’arrivée massive du personnel du théâtre venant de la côte est (New York) chez les anciens cinéastes du muet. Ils commencent par simplement les épauler, puis prennent place à la réalisation. Ils seront surtout utiles pour effectuer un nouveau travail dans l’industrie du cinéma : la scénarisation, on a besoin d’écrire les dialogues. Beaucoup de comédiens deviendront acteurs du cinéma, les acteurs n’ayant pas une voix adaptée seront virés et les acteurs à accent étranger n’auront que des rôles secondaires.3
2 Il sera amélioré et servira à Alice Guy pour tourner plus de 100 bandes chantantes entre 1900 et 1907 (source) 3 Des acteurs comme Gish, Pickford ou encore Fairband seront virés, tandis que des acteurs comme Emil Sannings retourneront dans leur pays pour tourner dans leur langue maternelle.
76%
21%
3%
Diffusion en 1928 Muets Semi-‐Parlants Parlant
16%
30% 54%
Diffusion en 1929 Muets Semi-‐Parlants Parlant
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Les métiers de bonimenteurs, bruiteurs et instrumentistes seront évidemment touchés eux aussi, ils subissent des licenciements en masse. Au Japon, ces licenciements entraineront une vague de suicides chez les benshis (bonimenteurs japonais).
L’organisation en studio devra être revue : tout va être lié à la prise de son (costumes, caméras, décors…). Les tournages vont donc demander beaucoup plus de travail, il faut les préparer à l’avance et donc imaginer la forme finale d’une scène dés le départ. L’improvisation prendra une place moindre, le produit cinématographique se standardise. Les équipements techniques sont alourdis (plusieurs caméras doivent être placées dans des caissons pour diminuer le bruit), entrainant des tensions entre les techniciens qui se gênent mutuellement lors du tournage. Ces problèmes seront réglés par la suite lorsque seront mis au point les caméras silencieuses, les perches pour micro et la postsynchronisation. Par souci technique, la fréquence est standardisée à 24 images/seconde.
C’est un bouleversement économique, l’équipement nécessaire coûte très cher : les entreprises prennent des risques. On décide alors de faire des films qui rapportent en utilisant des vedettes : c’est le renforcement du « star-‐system ». Les petites sociétés de production ne tiennent pas le choc et se font engloutir par les grandes firmes.
Bien qu’il existe de grands films parlant (« Scarface », « L’ange bleu »…) , beaucoup de films tournés à la hâte déçoivent. Le parlant sera alors longtemps considéré comme une régression de l’art cinématographique (allongements des plans , tournages en studio…). Le parlant apporte cependant de nouveaux genres irréalisables avant, comme la comédie musicale. On va également adapter des pièces de théâtre au cinéma, les pièces ayant un support dramatique tout prêt (pas besoin d’écrire de dialogue). En France entre 1930 et 1934, 37% des films sortis sont des pièces de théâtre filmées.
En effet dans le cinéma muet, les films étaient facilement exportables, il suffisait de filmer les cartons d’intertitres en plusieurs langues, chose devenue plus compliquée avec le parlant ! Le cinéma Américain dont les recettes proviennent essentiellement de l’exportation est obligé de chercher des solutions.
-‐ Des films « bilingues » apparaissent, comme « Allo Paris, Ici Berlin » de Duvivier ou « No Man’s Land » de Trivas, qui offrent un jeu entre les acteurs parlant les différentes langues.
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On pense aux sous titres mais ils ne seront pas adoptés immédiatement (on sous titre industriellement en France depuis 1933), le problème étant qu’il faut simplifier à l’extrême le texte.
Le doublage, d’abord rejeté par le public, devient une activité régulière à partir de 1931. Les politiques de doublage diffèrent selon les pays.4
Certains films seront tournés en plusieurs versions, avec autant d’équipes de comédiens et de réalisateurs que de langues5. Le 1er film à versions multiples était « Atlantique », paru en Français, Anglais, et Allemand. Cette solution sera abandonnée car trop couteuse et effaçant les éléments sociaux et culturels.
C’est le doublage qui sera retenu, surtout grâce aux progrès du mixage apparu en 1932. On peut alors enregistrer séparément les différents sons, les mixer et ainsi permettre le doublage. La piste sonore des films devient également plus maîtrisée.
4 La Scandinavie ne double aucun film, ils seront tous en VO sous titrés. L’Italie au contraire ne diffuse que des films doublé en Italien : c’est une mesure protectionniste de Mussolini pour « préserver » la culture Italienne. Dans les pays de l’est, on double en voix off par dessus le dialogue original. 5 Le record est détenu par un film ayant été tourné en 13 versions différentes !
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Le cinéma parlant a connu 2 réactions :
1. Certains cinéastes saluent l’arrivée du parlant, le cinéma devient pour eux alors plus réaliste, plus vivant.
2. D’autres considèrent que le son est une dégénérescence du cinéma : c’est une copie du réel plus qu’un travail d’imagination et de montage. C’est le cas d’Eisenstein, Alexandrov, Poudovkine6 et de René Claire7
Le plus grand résistant au cinéma parlant sera Charlie Chaplin. Il n’est pas hostile à l’arrivée du son, au contraire, cela lui permet de composer sa propre musique. Il est cependant hostile à l’arrivée de la parole. Il ne réalisera que 3 films dans les années 30 : 1931 : « Les lumières de la ville », film sonore sans paroles (« comédie pantomime ») 1936 : « Les temps modernes », film sonore avec voix, mais ces dernières ne sont audibles qu’à travers des machines. 1940 : « Le dictateur », son premier film parlant, et son dernier film.
6 Ils vont rédiger un manifeste dénonçant la non coïncidence entre le son et l’image : ils veulent travailler l’un et l’autre sans but réaliste. 7 René Claire considère le cinéma parlant comme « contre nature ».
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Partie 2 : Hollywood classique : les années 30
Les années 30 sont une période de crise (4 octobre 1929 : jeudi noir, début de la grande dépression). Le cinéma n’est pas épargné par cette crise, ce secteur est touché par 20% de chômage et le salaire des ouvriers baisse de ¼ en moyenne. Roosevelt va être élu président en 1933 (jusqu’en 1945), il met en place le New Deal pour lutter contre la crise (rationalisation de l’économie par l’état : état providence). Il suit alors une période d’isolationnisme, les USA n’interviennent pas dans le reste du monde militairement. Les activités cinématographiques sont regroupées à Hollywood, en raison d’un soleil plus fréquent et de prix de terrains plus bas. Dés les années 30, le cinéma Hollywoodien se caractérise par :
-‐ un regroupement en grandes firmes -‐ une organisation en genre -‐ le star-‐system -‐ un système d’autocensure (code Hays) -‐ un drainage des cinéastes du monde entier8
1) L’âge d’or des studios
Studio :
-‐ « Des ateliers de peintures combinés à une usine à la chaîne » -‐ Principalement basés à Los Angeles, ils ont pour but de produire des films en masse. -‐ Dirigés par des patrons, puis des producteurs exécutifs, puis des producteurs -‐ Les patrons ont une grande longévité, certains garderont leur poste pendant des
décennies On retient principalement 5 majors companies (le « Big Five ») produisant chacune 40 à 50 films par an et 3 semi majors (les « Little Three ») produisant chacune environ 20 films par an. Ces studios existaient presque tous déjà depuis les années 20. Après l’arrivée du parlant, la stabilité du système mis en place met fin au règne du metteur en scène, c’est la production qui est principalement chargée du film, on assiste alors à une standardisation du cinéma.
8 Notamment après l’arrivée du nazisme, beaucoup de cinéastes allemand et d’Europe centrale migrent vers les USA.
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1. L’intégration verticale
C’est le modèle économique qui va expliquer la puissance des studios. Le studio se divise en trois secteurs :
Production Distribution Exploitation9
C’est une structure de monopole contestée par des lois anti trust, mais sans effets avant 1949 (puis dans les années 50), il va se créer une séparation entre ces domaines qui entrainera le déclin des majors plus tard. Il existe tout de même des producteurs et distributeurs indépendants mais peu nombreux. (ils produisent souvent des films dédiés à des communautés ethniques) Cette intégration verticale entraine deux pratiques : Le block-‐booking : Les majors vont au moment de louer des films, demander aux exploitants de réserver un groupe de films (ils obligent aux exploitants de montrer d’autres films en plus de celui voulu. Le blind-‐booking : Réservation à l’aveugle, les exploitants louent des films qu’ils n’ont pas visionnés.
2. Organisation en départements internes. Chaque domaine de création artistique a un département (costumes, décors, musiques…). Ces départements ont chacun un chef de département qui devra rendre des comptes directement au producteur et non au réalisateur. D’un film à l’autre on réutilise les mêmes costumes, décors, musiques… Chaque firme va donc petit à petit se forger une identité.
9 Souvent dans les propres salles du studio
Contrôlés par les studios
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3. Employés sous contrat C’est un système dans lequel les employés sont sous contrats, y compris les acteurs, réalisateurs. (MGM : 4 000 employés permanents, environ 20 réalisateurs et 60 scénaristes) Toutes les personnes travaillant sous une firme sont sous contrat, alors qu’aujourd’hui on choisit un projet puis l’on compose son équipe studio. Les vedettes sont des employés (contrats longues durées). Les acteurs ont des closes sur la vie privée : ils règlementent les signes extérieurs de la vie des vedettes (leur vie déborde des films), ils « gèrent » leur vie privée. (Ex : L’acteur Hutson, homosexuel, va être marié de force par Universal)
4. Division entre catégories A et B Le double programme se généralise, une séance contient 2 films en plus de dessins animés, actualités, bande annonces, le tout durant environ 3h). Ils diffusent un film A puis un film B (pas plus de 1h10, petit budget et tourné rapidement). Les majors produisaient eux même les films B avec une équipe spécialisée, mais ont peu à peu délégué leur réalisateurs à d’autres firmes. Certaines firmes se spécialisent donc dans le film B (Monogram, PRC, Republic). Chaque studio comporte une équipe de réalisation de dessins animés. La fréquentation des salles bat des records, elle passe de 80 millions de spectateurs par semaine en 1930 à 100 millions de spectateurs par semaine en 1946 (année record). De nombreuses salles se construisent : des salles d’exclusivités, les « drive-‐in »…
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Partie 4 : Cinéma français des années 30
Contexte Les années sont des années marquées par la crise économique et sociale de la grande dépression qui touche la France à partir de 1931/1932. Les classes moyennes sont durement touchées, le pouvoir est incapable de trouver des solutions, on se trouve dans une période d’instabilité ministérielle avec une série de scandale politico-‐financier, montée de l’antiparlementarisme (manifestation du 6 février 1934 qui tourne à l’émeute). Le fascisme monte, les partis de gauche fondent le Front Populaire. Ils sont au pouvoir à partir de 1936. Beaucoup d’acquis sociaux : la semaine des 40 heures, les congés payés, relèvement des salaires… Une partie de la production cinématographique va donc refléter cette période et cette société en pleine ébullition, ainsi qu’une production militante. Cette période est aussi marquée par la montée des tensions entre Allemagne, France… Le 30 janvier 1929 sort en France « Le Chanteur de Jazz ». Un certain nombre de films vont être rapidement sonorisés pour exploiter les procédés sonores (films muets auxquels on ajoute à la va vite des scènes dialoguées et musicales). Les salles vont s’équiper progressivement mais il faut aussi équiper les studios de tournage, les tous premiers films français parlant vont être tournés en Grande Bretagne qui s’était équipée plus rapidement que la France dans ses studios. Trois grands studios Français qui s’équiperont : -‐ Epinay -‐ Billancourt -‐ Joinville Ils sont tout trois prêt à la fin d’octobre 1929. Il y aura des réussites plus ou moins grandes. L’arrivée du parlant touchera beaucoup d’acteurs, notamment les Russes de Montreuil qui avaient beaucoup contribué au cinéma français des années 20. Les acteurs seront recrutés au théâtre (Michel Simon, Harry Baur, Jules Berry…
Structure de la production Dans les années 30, la profession du cinéma n’est pas structurée, en crise permanente, désorganisé : rien à voir avec les studios américains. Très fragilisé par la crise, la profession misait beaucoup sur l’arrivée du parlant, la transformation des salles, des studios ; mais tous ces investissements ont causé l’endettement de la profession. Les années 30 seront pleines de faillites (notamment 1933), les deux empires du met Pathé et Gaumont vont s’effondrer progressivement de façon assez parallèle.
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La production se dissémine, le cinéma français est soutenu par des entreprises très fragiles, par des sociétés qui on souvent été créées au coup par coup pour produire tel ou tel film, et non pas pour soutenir une production longue : 285 producteur ne sortiront qu’un seul film chacun. Chaque année, plusieurs dizaines de sociétés de production font faillite pendant que du côté de l’état, aucune structure n’encadre le cinéma. L’idée qu’il faudrait structurer la profession apparaît dans les années 30, il va y avoir des réflexions au niveau parlementaire. À la fin des années 30 arrive une loi de réorganisation du cinéma français mais il sera trop tard (1939), c’est le régime de Vichy qui s’en occupera.
Genre des années 30 On associe surtout le cinéma français des années 30 au réalisme poétique. Les séances durent environ 2h50 (double programme), souvent composé de comédie, de théâtre filmé, d’adaptation littéraire… La production courante n’est pas caractérisée par une exigence esthétique, ce n’est pas du cinéma de grande qualité 1934 : 37% des films sont des adaptations de pièces de théâtre (pièces récentes, vaudeville…) Beaucoup de films d’opérette, de music hall (avec Fernandel), et de films avec des ambiances militaro-‐patriotiques. Les auteurs écrivent très vite et s’inspirent en général de l‘actualité, de la rubrique judiciaire des journaux, des faits divers… (Films sur la corruption, l’affairisme). Cette production courante n’est esthétiquement pas très innovante, la mise en scène est plate. L’intérêt de la production réside dans les acteurs (Michel Simon, Raimu, Baur, Arletty…). C’est un cinéma très pauvre dans l’ensemble, très désorganise, mais qui a produit une poignée de films qui ont porté très haut l’image du cinéma français, qui garde aujourd’hui un énorme prestige.
Réalisateurs René Clair avait réalisé plusieurs films d’avant garde à l’époque du muet, des pièces fondées sur le dialogue transcrites sans paroles. C’était également un grand critique des années 20, il voyait l’arrivée du parlant d’un très mauvais œil. Il s’y converti à partir de 1930 avec « Sous les toits de Paris ». Très influencé par Chaplin, il écrit le scénario de tous ses films et apporte au cinéma une vision d’auteur qui va beaucoup influencer l’histoire du cinéma dés les années 30. C’est le premier à développer ce style très personnel, des films animés par des chansons, de la musique, il met en scène un peuple parisien très poétisé, aérien : une vision qui va séduire le monde entier. Il réalise 5 films parlants importants dans les années 30 :
1. Sous les toits de Paris 193010 2. Le million 1931 3. À nous la liberté 1932 4. Quatorze Juillet 1933 5. Le dernier milliardaire 1934
10 Film sonore, musical, chanté mais très peu parlé.
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1 : Histoire d’un chanteur de rue (joué par Albert Préjean). Décors de Lazzare Meerson. Couleurs très claires, images presque transparentes : cinéma qui rejette les contrastes durs, et travaille sur les nuances en demi teinte. L’industrie du cinéma étant liée à l’industrie du disque et de la radio, la chanson du début est un grand succès. 2 : Vaudeville, histoire de deux artistes peintres qui ne gagnent pas leur vie avec la peinture, poursuivis par leur créancier, poursuivent un voleur qui a dérobé une veste contenant un billet de loterie gagnant. Très inventif au niveau du son, une des rares comédies musicales du cinéma français travaillant beaucoup sur les bruitages (scène de bataille pour récupérer la veste ou passe en fond sonore l’enregistrement d’un match de rugby). 3 : met en parallèle entre la vie en prison et le travail en usine : dénonce le machinisme. 4 : présente une vision poétisée du petit peuple parisien René Clair part de France en 1935, il reviendra après la guerre. Jean Vigo : Il a une carrière éclair (mort très tôt), il n’a fait que 4 films dont un seul long métrage. Sa filmographie ne fait au total que 3h. Ce cinéaste fait figure de poète maudit, des films avec un climat très difficile à décrire, un mélange d’étrange et d’élégiaque. Il commence par des documentaires (un sur Nice : « À propos de Nice » 1930, un « point de vue documenté » et un sur Jean Taris « La natation, par Jean Taris, champion de France » 1931), puis réalise un moyen métrage « Zéro de conduite » sur la vie de collège en internat après les vacances, ou le monde des enfants et celui des adultes sont hostiles. Dans ce film, lors de la fête du collège, 4 garçons entre en révolte contre l’institution. Cette scène ne passera pas le coup de la censure, le film sera censuré en 1933 puis ré autorisé seulement en 1945 : « film critiquant de manière ostentatoire le corps enseignant français ». Son dernier film « L’Atalante », un long métrage avec Michel Simon, musique de Maurice Jaubert. C’est une histoire d’amour entre Jean et Juliette, Juliette veut voir Paris mais c’est impossible, elle va être séduite par quelqu’un d’autre acceptant de lui montrer… Film de geste, de regard, très mal accueilli par la profession, la maison de production a massacré le film avant de le sortir, l’a remonté puis renommé « Le chaland qui passe ». C’est seulement après la guerre qu’il sera vu dans les cinéclubs et reconnus. Vigo meurt de la tuberculose en 1934, ses films n’auront pas été vus au moment ou ils ont été tournés et produits, il sera redécouvert et reconnu seulement après la guerre.
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Courant du réalisme poétique : Carné, Duvivier, Grémillon C’est un cinéma très écrit, avec des dialogues très stylisés, on y retrouve les répliques les plus célèbres du cinéma français. Henri Jeanson à l’origine journaliste (au canard enchainé), Charles Spaak qui fait 24 films entre 1935 et 1938 et Jacques Prévert : 10 films entre 1935 et 1938. Jacques Prévert aura un rôle capital dans le cinéma français à l’époque, il fait parti du groupe « octobre » qui fait du théâtre politique à tendance communiste, il sera célèbre pour ses films avec Carné, connu pour son antiaméricanisme et antimilitarisme : les pauvres s’opposent aux malfaisant, aux nuisibles. Cette formule de réalisme poétique a été inventée par la critique littéraire à propos de livres comme ceux de Marcel Aimé, utilisée au cinéma pour un film adapté justement de Marcel Aimé. Ce cinéma propose des personnages en quête d’un ailleurs impossible. On y trouve l’idée d’évasion par l’aventure, par le rêve. Ce cinéma est complètement fabriqué, artificiel, autant dans le scénario que dans le film. Carné détestait cette expression, il parle de « fantastique social ». Pierre Billard parle de populisme tragique. L’expression de réalisme poétique est cependant rentrée dans l’histoire, aussi bien en France qu’à l’étranger. Caractéristiques du cinéma réaliste poétique :
§ un grand pessimisme, une grande noirceur, voir un coté très dépressif. (qui correspond à la période de tension qui traverse la France) Les personnages ont un grand mal de vivre, il y a tendance à la tragédie, la fin malheureuse se généralise dans les films, tout comme un certain fatalisme. Carné rencontrait beaucoup d’hostilité, on l’accusait de morbidité. Les personnages de ces films sont des gens du peuple, des ouvriers, des marginaux atteints du mal de vivre (ce cinéma dit « de la rue »). Une grande importance est donnée au travail, ou plutôt à l’absence de travail.
§ L’acteur principal de ces films est Jean Gabin, c’est l’acteur par excellence du réalisme poétique. À part dans Golgotha (ou il joue Ponce Pilate), il a toujours eu le rôle de l’homme du peuple. C’est sur son nom que comptait les films, il a permis a des films d’être tourné (sans lui certains films ne se serait pas faits). Dans certains de ses contrats, il est prévu que la production n’ait rien le droit de changer sans l’accord de Jean Gabin.
§ Tout un travail sur les décors et la lumière, c’est surtout un cinéma de studio (« Hôtel du nord » est censé se passer sur le canal St Martin, il est en fait tourné en studio ou le canal a été reproduit). Le décorateur principal est Alexandre Trauner, un juif hongrois (il a construit les rues du quai des brumes, la place de « Le jour se lève »…). La lumière vient principalement du travail de Curt Courant et Eugen Schüffan, ils arrivent au milieu des années 30 en France après avoir quitté l’Allemagne nazie. Ils jouent sur une lumière inspirée de la lumière allemande, les grandes ombres, les contrastes violents : gros travail sur la lumière artificielle (précurseur du film noir américain).
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C’est une nouvelle génération du cinéma français menée par des jeunes cinéastes. Parmi les cinéastes, on note Jean Grémillon (« Gueule d’amour » avec Jean Gabin, ou il incarne un cavalier de l’armée française ; « L’étrange Monsieur Victor » avec Raimu), Jacques Feyder, Julien Duvivier (« La Bandera » 1935 avec Jean Gabin, « La belle équipe » 111936 avec Jean Gabin et « Pépé le moko » 1937). Duvivier part en 1938 tourner aux Etats-‐Unis. Carné est l’un des cinéastes les plus importants de la période, il est passé de journaliste de cinéma au stade d’assistant (de Jacques Feyder et René Clair). Il a réalisé un film muet à la fin des années 20 en extérieur. Dans le film « Jennie » 1936, on lui a imposé les techniciens mais il a choisi de travailler avec Prévert. Prévert et Carné inventent des très bon second rôles, assez caractéristiques de la période. 1937 : « drôle de drame », également un scénario de Prévert : échec publique à l’époque, succès après la guerre. « Le quai des brumes » 1938, avec Jean Gabin, Michelle Morguant ; encore une collaboration avec Prévert. Dans ce film, Jean Gabin joue un déserteur de l’armée coloniale. « Hôtel du nord » 1938, Jeanson aux scénarios et aux dialogues. Le film est centré sur deux couples, un couple romantique et un couple plus trivial, cynique et pittoresque. Le film phare de Carné est « Le jour se lève » 1939, dans lequel Jacques Prévert revient pour les dialogues, un des films les plus noirs de l’époque. Le film est très intéressant dans sa construction, le scenario est construit en flashback (scenario de Jacques Viot). Tous les décors sont créés en studio. Les films de Carné sont célèbres grâce aux collaborateurs qui ont travaillé sur ses films (Prévert, Schüfftan…) qui ont contribué à l’atmosphère très noire du film. Il sera cependant une des cibles privilégiées des critiques, notamment par Truffaut.
11 5 chômeurs gagnent à la loterie avec un billet acheté en commun, ils achètent une maison qu’ils décident de retaper. Mais ils s’entendent de moins en moins et se séparent. Deux fins seront tournées, une fin optimiste (réussite d’une entreprise) et une fin pessimiste (l’un tue l’autre) . Le film connaitra un échec commercial, 6 semaines après la sortie du film, un jury populaire est choisi par la production, il leur demande laquelle des fins ils préfèrent, ils choisissent la fin optimiste. Ce film est aussi célèbre par sa chanson interprétée par Gabin « Quand on se promène au bord de l’eau ».
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Jean Renoir a réalisé 14 films dans les années 30, tous très différents les uns des autres. (Adaptations, scénarios originaux…). Il est influencé par le naturalisme de Stroheim (notamment dans « La Chienne » 1931), un goût du spectacle, du théâtre et des décors extérieurs (dans « Boudu sauvé des eaux » 1932). En 1934 il adapte Madame Bovary, produit par les éditions Gallimard (qui a créé un département cinéma). Il réalise « Toni » en 1934, un film dans lequel le personnage avoue par amour un crime qu’il n’a pas commis (reconstitution d’un fait divers). Il réalise ce film en Provence, dans des extérieurs proches de Marseille, proches du fait divers réel, avec des acteurs non professionnels recrutés sur place. Il va d’une certaine façon préfigurer le néoréalisme Italien dans ces méthodes de travail en extérieur. « Le crime de Monsieur Lange » 1936, c’est son unique collaboration avec Prévert et le groupe « octobre ». C’est un film antibourgeois, anticlérical, narrant une maison d’édition gérée par un escroc. Il réalise un film de propagande pour le parti communiste « La vie est à nous ». Puis le film pacifiste « la grande illusion » en 1937 qui met en scène la fraternité, le triomphe entre les hommes. 1938 « La marseillaise », film qui se passe lors de la révolution française. Ce film a été en parti financé par une souscription en partie lancée par la CGT, les figurants étaient des bénévoles. Le film est centré sur le peuple. Il adapte ensuite « La bête humaine » de Zola en 1938. On retrouve un personnage typique du réalisme poétique qui est condamné par la fatalité. En 1939, il réalise « La règle du jeu », comédie qui vire au drame. Il aura peu de succès commercial à l’époque, mais ressortira après la guerre dans une version d’origine (l’originale a été remontée).
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Pagnol et Guitry viennent tous les deux du théâtre, ils font du cinéma de façon originale et arrivent à dépasser le théâtre filmé. Ce sont deux auteurs à succès aussi bien au théâtre qu’au cinéma, ils ne seront pas touchés par la censure mais gagneront le mépris de la critique au détriment d’un succès populaire. Marcel Pagnol vient du théâtre, il arrive au cinéma avec le parlant. Il avait déjà écrit des pièces de théâtre, elles sont représentées à Paris sur scène dans les années 20 ou il connaitra sa consécration théâtrale. Pagnol veut être associé aux adaptations de ses pièces au cinéma. Il considère le cinéma comme une bonne chose, il permet à ses pièces d’avoir une plus large audience. Il sera invité à faire parti d’un comité littéraire chez la Paramount, cela lui permettra de passer beaucoup de temps sur des plateaux de tournage. En 1931 Alexandre Corda adapte « Marius », une pièce de Pagnol dont il exigera que les acteurs soient les comédiens qui ont joué la pièce ; puis en 1932, Marc Allégret adapte la pièce « Fanny ». Pendant ses 1ères années, Marcel Pagnol comprend qu’il sera un cinéaste autonome seulement si il contrôle tous les aspects de la production. Il va alors fonder sa propre société de production ainsi qu’une société d’édition pour vendre ses scénarios. Il permettra à Renoir de tourner « Toni » dans les environs de Marseille. Marcel Pagnol devient alors un artiste indépendant, il développe deux voies :
-‐ des adaptations théâtrales -‐ des films tournés en plein air
Il introduit alors un certain régionalisme dans le cinéma (coutumes pittoresque) Sacha Guitry vient du théâtre, c’est un acteur et auteur adulé de la scène Parisienne. Il a longtemps manifesté contre le cinéma, mais il en fait à partir des années 30. Il réalisé 12 films dans les années 30. La parole a une place primordiale dans ses œuvres, notamment sa propre voix. Par exemple, dans « Le roman d’un tricheur », le film est à 90% commenté en off par Sacha Guitry sur les images du film.
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Cours N°5
Partie 5 : Cinéma Allemand Nous allons étudier trois périodes :
-‐ La république de Weimar : 1929 – 1933 -‐ IIIème Reich : 1933 – 1945 -‐ Partition des deux Allemagnes : 1949
République de Weimar Période courte très fructueuse dans le cinéma allemand, avec une très grande inventivité formelle et une grande liberté de création. C’est une époque politiquement mouvementée, il y a un fort taux de chômage, une montée de la violence, la démocratie se dissipe : un grand désir d’expression se dessine des le cinéma dont certain film sont encore aujourd’hui reconnus par la critique (M le Maudit, L’Ange Bleu… ). Principalement des films musicaux, des films réactionnaires, des films pacifistes...
Principales caractéristiques du genre Allemand de l’époque : L’industrie Allemande de l’époque est très forte et puissante, au moment du passage au parlant, ils sont les premiers à exploiter les procédés sonores. L’industrie Allemande exporte beaucoup, elle est puissante à l’étranger et joue un rôle central sur le marché européen. Berlin devient capitale du cinéma en Europe. L’industrie du cinéma Allemand sera donc peu touché par la crise, elle va continuer à se consolider, elle va être très fortement centralisé autour de la société de production principale : la UFA. (déjà très puissante à l’époque du muet) Elle absorbe presque toutes les autres sociétés de production. Le cinéma sera en grande partie réalisé en studio mais qui va être différent du cinéma américain en terme d’organisation du travail. Le réalisateur garde un grand pouvoir, il est responsable du film jusqu’au montage. La plus grande partie de la production standard sont les comédies musicales. Entre 1929 et 1935, la production est composée pour un tiers de films d’opérettes et de comédies musicales. Un sous genre sera en vogue : le film de voyage (un voyage dont chaque étape est accompagné d’une chanson).
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Deux grands succès internationaux à l’époque : « Le chemin du paradis » Wilhelm Thiele, 1930 La comédie musicale la plus célèbre au début du parlant, déclinée en plusieurs versions. Histoire de trois amis qui deviennent garagistes et vont se disputer les faveurs d’une jolie et riche cliente. Un peu un éloge de la paresse, le film sera censuré en 1937 par les nazis. (Réalisateur juif) Vedette féminine : Lilian Harvey Vedette masculine : Willy Fritsch « Le congrès s’amuse » Erik Charell, 1931 Repose sur les mêmes acteurs, le même compositeur, mais la réalisation est confiée à Erik Charell. Beaucoup de comédies musicales, mais aussi beaucoup de films caractérisés par un courant nationaliste et militariste, et de l’autre coté par un courant pacifiste. Beaucoup de films de guerres vont être produit, exaltant le patriotisme et la revanche contre la France. Un courant internationaliste et pacifiste va être aussi organisé autour notamment de Pabst. Ce courant exalte plutôt des valeurs démocratiques, anti autoritaires et des convexions humanistes. Pabst en 1930 réalise « Quatre de l’infanterie », son premier film sonore, situé pendant la 1ère guerre mondiale au niveau des tranchés. Il va montrer la tuerie que représente le front, la démoralisation des soldats. Il met aussi en scène l’arrière, les répercutions, la misère. Il oppose la fraternité internationale à l’horreur de la guerre. Il est alors considéré comme le grand metteur en scène de gauche. « La tragédie de la mine » en 1931 (Kameradschaft), situé dans l’immédiat après guerre, s’inspire d’une tragédie réelle met en scène le rapprochement entre Allemands et Français. (des secouristes Allemands secourent des Français). Le film est bilingue, il met en scène les deux langues. « L’opéra de quat’ sous » 1931, d’après la pièce de Brecht, sera une comédie musicale très différentes des comédies légères, le film est une satire qui dénonce la pègre, la police et la haute finance. Le film de Slatan Dudow « Ventre glacé » rejoint cette idéologie socialiste, il est même considéré comme profondément Marxiste. Film produit par des communistes, Brecht collabore au scénario, il parle de la lutte des classes, analyse le problème du chômage, dénonce la lutte des classes, le militarisme, les illusions par lesquelles les victimes de la crise croient s’en sortir. « L’ange Bleu » en 1930, produit par Erich Pommer en coproduction avec la Paramount, réalisé par Sternberg. Grand succès commercial.
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« M le maudit » en 1931, premier film parlant de Fritz Lang. Le scénario est écrit par sa femme. Premier rôle de Peter Lorre. C4est l’histoire de… C’est un film très ambivalent, il ne dicte pas au spectateur ce qu’il faut penser, on est dans l’impossibilité de juger le meurtrier. « Le testament du Docteur Mabuse » en 1933, suite des deux parties de docteur Mabuse faites dans les années 20. Dans ce film, Fritz Lang reprend le personnage du commissaire Loman. Mabuse, interné dans un asile de fou, veut imposer la souveraineté du crime : « L’humanité doit être précipitée dans un abime de terreur ». Le commissaire va lui faire la chasse, Mabuse va être tué et le directeur de l’asile va se prendre pour Mabuse et continuer le travail. Analogie avec l’écriture de « Mein Kampf », on peut prendre ce film comme une dénonciation du nazisme avant sa prise de pouvoir(« J’avais placé les slogans nazis dans la bouche d’un criminel fou ». Ce film, finit en 1933, sera interdit par la commission de censure, Hitler arrive au pouvoir au moment du montage du film. M le Maudit sera également interdite après coup. Fritz Lang quitte l’Allemagne peut après.
Cinéma sous le régime nazi Le cinéma est pris en main par les nazis. Hitler est nommé chancelier par le président Hindenburg en janvier 1933. Dés mars il se fait attribuer les pleins pouvoirs et devient président puis Reichführer. Goebbels sera le ministre de la propagande et de l’information. Goebbels et Hitler sont tous deux grand amateurs de cinéma, Hitler se fait projeter un film par soir jusqu’au dernier mois de la guerre (notamment les films muets de Fritz Lang). Goebbels, ministres de la propagande et de l’information donne un discours programmatique devant les professionnels du cinéma, il y cite en modèle plusieurs films dont « Le cuirassé Potemkine » et « Les Nibelungen », il espère que le cinéma Allemand pourra produire un « Cuirassé Potemkine germanique ». Dés le lendemain de ces déclarations, la UFA écarte résolument ses collaborateurs juifs dont Erich Pommer et Erik Charell. Le cinéma s’adapte idéologiquement et structurellement aux services du national socialisme. Le cinéma va adopter lui même le principe de la révolution nationale pronée par les nazis. À partir de ce moment la, le parti nazi a la main mise sur le cinéma, sur le plan administratif, idéologique et économique. Les films adaptés de livres brulés par les nazis sont eux aussi interdits. L’épuration va toucher tous les juifs, ils vont être écartés de la vie du cinéma. On aperçoit alors une vague d’immigration massive. Les artistes opposant au régime vont être poursuivis, les juifs pourchassés, on estime que plus de 1.000 juifs et opposants du milieu du cinéma ont émigrés vers Hollywood. Fritz Lang, bien qu’ayant reçu la proposition de Goebbels de soutenir le régime, s’en va aux USA (en passant par la France. Sa femme cependant rejoint le parti nazi et sera divorcée d’office par les nazis.
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Billy Wilder « Ceux qui avaient du talent sont venus dans les années 20, ils sont venus de leur propre grés. Nous autres sommes venus plus tard, nous n’avions pas le choix » 1500 longs métrages sont réalisés pendant le IIIème Reich. La UFA continue sa politique expansionniste et absorbe un grand nombre de firmes allemandes mais également des sociétés étrangères (polonaises, tchécoslovaques). On a un processus de concentration accéléré de la production mais aussi étatisation des structures. La UFA et la TOBIS contrôlent les ¾ de la production (avec deux autres firmes beaucoup moins importantes). La production va être très concentrée, les salles diffusent 88% de films allemands. En 1942, au milieu de la guerre, les 4 grandes firmes vont se rassembler pour former la UFI (Universum Film Industri). Les films produits ne se confrontent pas à la production étrangère. Goebbels : « Une chose est sûre, je ne serais pas tranquille tant que l’industrie du cinéma européenne ne nous appartiendra pas ». Beaucoup considèrent les films parus entre 1933 et 1945 comme inintéressant cinématographiquement, causé par un étouffement progressif de la création par la politique et l’idéologie. C’est une production caractérisée par un grand gaspillage (hausse des coûts…) 1933 : « Le jeune Hitlérien Quex » par Hans Steinhoff Un fils d’ouvrier communiste va être gagné par l’idéologie nazie, et sacrifie sa vie aux convictions nazies. Le film met en scène l’activité du parti, en opposition à l’activité des militants communistes. Après ce film, l’activité des militants nazis disparaitra du cinéma (« La propagande ne marche plu si sa présence devient visible » Goebbels) Goebbels va privilégier la voie du divertissement grand public, l’intervention idéologique à travers des formes établies, des genres établis. On a alors des films qui vont privilégier des aspects petits bourgeois, rassurants, qui font parti du régime nazi. On peut presque parler de cinéma apolitique (on ne met pas en scène de façon clair et direct ces thématiques) mais elles sont présentes d’une certaine façon, les films procèdent par insinuation avec un message caché, camouflé, sous les dehors du divertissement. (la figure d’Hitler ne sera jamais mise en scène dans les films) Beaucoup de mélodrames, de comédies, de comédies musicales, souvent situées dans le passé, à l’étranger (pour qu’il y ait des prises de liberté possibles avec les mœurs). « Münchhausen » par Josef Von Baky en 1943. Célèbre les 25 ans de la UFA. Film fantastique rempli de trucages, mettant en scène les péripéties du baron de Münchhausen. C’est l’un des plus gros budgets du cinéma Allemand. Le film est en AGFACOLOR. Beaucoup de films historiques sur les grands hommes, les personnages de l’histoire allemande, le militarisme prussien, ainsi que des films anti Napoléonien. (« Le grand empereur » de Veit Harlan ; « Kolberg »). Avant 1939, on pouvait avoir un certain antisémitisme dans les films allemands, mais moins que dans les films Français par exemple. La donne va être inversée plus tard dans les années
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40, il va y avoir une production programmée de film ayant pour but de dénoncer les juifs, qui vont soutenir l’adoption de la solution finale. Les films justifient la politique du régime nazi. Une demi douzaine de long métrage sera dédié à la dénonciation des juifs. Des films de fictions (« Le juif Süss » de Veit Harlan). « Le péril juif », filmé dans le ghetto juif, va montrer les juifs dans leur « état naturel », différent du juif à la ville connu par les allemands. La misère physique infligée par les nazis est présentée comme « l’état naturel des juifs ». C’est une manipulation totale. « Le führer donne une ville aux juifs », documentaire sur un camps de concentration (ironie!). Trafique la réalité, avec des acteurs qui sont engagés, le film montre une image complètement inventée des camps de concentration. Le spectateur qui voit les actualités en images croit les images, comme si elles avaient des valeurs de document. Leni Riefenstahl : Elle jouait dans les années 20 dans des films d’alpinisme dans les montagnes allemandes. Elle est passée à la réalisation plus tard, elle a tourné peu de films, mais ils ont tous connu un grand succès. Bien qu’elle n’ai jamais adhéré au parti, elle a « inventé » une forme cinématographique nazie. « La lumière bleue » 1932, film de montagne, d’alpinisme. Film ayant connu un grand succès. « La victoire de la foi » 1933, premier essai pour son film suivant « Le triomphe de la volonté » 1935, film sur le congrès du parti nazi à Nuremberg en septembre 1934. Documentaire brut commandé par Hitler, c’est simplement la forme cinématographique du congrès. Il s’agit de prouver l’unité de la population, de la jeunesse, sous la figure d’Hitler. Superproduction politique nécessitant deux années de montage. « Les dieux du stade », le film officiel sur les jeux Olympiques de Berlin. Composé de 2 longs métrages : « la fête des peuples », « Jeunesse olympique, ou la fête de la beauté ». Première couverture cinématographique des jeux Olympiques, 30 caméras. Moins explicitement propagandiste mais inscrit dans une volonté de propagande (grandeur de l’Allemagne), une valorisation des corps vigoureux. Le film va proposer un factuel sublimé par le montage, la lumière, la musique…
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Cinéma d’après guerre Après la guerre, l’Allemagne est divisée. La UFI est démantelée, les studios sont détruits : les alliés prennent le contrôle du cinéma. Les exilés allemands partis aux USA ont pris la nationalité américaine, ceux qui essayeront de revenir vont connaître un cuisant échec.
Cinéma français sous l’occupation Cours n°6
Contexte : De septembre 1939 à mai 1940, on est dans la « drôle de guerre », le conflit n’a pas réellement commencé en France. Le cinéma français continue alors de tourner, bien que des acteurs et techniciens ont été mobilisés à la guerre (certains tournages sont interrompus). Il y aura surtout des mélodrames, des films policiers… À partir de l’entrée en guerre, la censure militaire se met en place, elle bannit des écrans les films jugés trop démoralisant (« La règle du jeu », et d’autres films du réalisme poétique). On trouve alors beaucoup de films héroïques, de films patriotiques… En juin 1940, le Blitzkrieg met la France à genou : l’Allemagne occupe un cinquième du territoire jusqu’en 1942 ou ils occuperont aussi la zone libre. Le cinéma va continuer de tourner sous l’occupation : 220 films seront réalisés.
Structures sous l’occupation Le cinéma français va être complètement réorganisé. Le régime de Vichy va s’occuper de cette nouvelle organisation dés octobre 1940, organisation qui perdurera jusqu’à l’après guerre. Il y avait déjà des débats sur la nécessité d’encadrer le cinéma avant la guerre. En aout 1940, une « loi-‐cadre » sur l’industrie est utilisée, prévoyant que chaque secteur de l’industrie doit être organisé en « comités d’organisation », structures administratives composées de professionnelles. Toute la production industrielle va devoir créer ces comités et être organisé autour. Le cinéma est considéré comme une industrie (comme le textile ou l’armement), en octobre 1940 sera alors créé le COIC : Comité d’Organisation de l’Industrie Cinématographique. Le COIC contrôle toutes les phases de la production et de la distribution. Il va devoir encadrer le cinéma sur un plan législatif et règlementaire. C’est la première que l’industrie et le commerce du film sont encadrés par le pouvoir.
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Les principales mesures du COIC : -‐ création d’une autorisation d’exercice pour les entreprises12 -‐ création d’une carte d’identité professionnelle13 -‐ interdiction du double programme14 -‐ mise en place d’un système d’avance à la production15
Le COIC sera aussi à l’origine d’une école de cinéma : l’IDEC16 (Institut des Hautes Études Cinématographiques), en 1944. Par contre il y aura aussi :
-‐ un antisémitisme professionnalisé (par la carte d’identité professionnelle), les juifs sont écartés de la profession
-‐ une très forte censure par les autorités En zone occupée : Les Allemands vont mettre en place la Propaganda Abteilung, un service officiel dépendant de Goebbels. Le but est de « maintenir la paix civile ». Tous les films sont retirés puis passent devant une commission de censure. Ils censurent également la presse cinématographique, surveillent les règlements du COIC, gèrent toutes les questions techniques et aussi de la liquidation des biens confisqués. Beaucoup de mesures antijuives vont toucher la profession, ils en seront éliminés. On va jusqu’à enlever le nom des collaborateurs juifs au générique des films, supprimer des rôles entiers, des séquences entières. Certains juifs vont réussir à continuer de travailler, sans être crédités cependant. Une société de production sera créée : la Continental Film, par la UFA en 1940. C’est une société française, de droits français, mais dont les capitaux sont allemands. Cette société est verticalement intégrée, comme les studios américains :
-‐ la société Continental -‐ les studios de Billancourt -‐ une société de distribution -‐ un réseau de salle
La Continental va produire 30 films sur les 220 de la période. Cela va être donc une entreprise à capitaux allemands mais qui va devoir produire en France des films français pour le public français. Le but est vraiment de produire des films à succès qui vont remplir les caisses du Reich et fournir les devises nécessaires à son économie de guerre. Des réalisateurs, techniciens et acteurs français vont y travailler : le public ignore totalement l’origine de la Continental.
12 Pour éliminer les sociétés frauduleuses, fictives. 13 Obligatoire pour exercer la profession. 14 Favorise la création de courts métrages. 15 Le crédit national va pouvoir avancer aux producteurs jusqu’à 65% du devis. Ils vont pouvoir emprunter cette somme à un taux d’intérêt très faible, favorisant la production. 16 Ancêtre de la FEMIS
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Ceux qui travaillaient pour la Continental étaient souvent recrutés par la menace. Les réalisateurs ont cependant l’assurance qu’on ne leur demandera jamais de créer des œuvres de propagande.
« Pour autant que d’autres États produisent encore des films, ceux ci ne doivent avoir qu’un caractère local et limité »
Goebbels
Production à l’époque 220 films produits malgré la pénurie de matériel. Des réalisateurs ne pouvaient dépasser une prise par plan par manque de pellicule. Les salles de cinéma seront très remplies, leur fréquentation très forte. Les salles étaient dans l’ensemble chauffées, ce qui attirait en hiver. Les français voyaient en grande majorité des films français. Les films anglais puis les films américains ont été interdits par l’autorité allemande.17 La concurrence de Hollywood va donc finir : les films américains étant disparus des écrans. Les spectateurs ont le choix entre les films allemands, quelques films italiens et les films français. Les français se tournent en grande partie vers les films français. Aucun film ne traitait directement l’actualité, n’était marqué par l’idéologie Pétainiste. Ce cinéma était un cinéma d’évasion. On s’évade dans le fantastique, dans le féérique : on trouve une dizaine de films dans ce genre. (« Les visiteurs du soir », « L’éternel retour », « Le baron fantôme », « La nuit fantastique »…) On s’évade aussi à travers le policier, beaucoup de livres de Simenon (personnage de Maigret) seront adaptés (« L’assassinat du père noël », « Un inconnu dans la maison ») ; à travers des reconstitutions historiques (« La symphonie fantastique », « Le capitaine fracasse ») ; à travers des adaptations littéraires (Balzac, Zola, Maupassant)18. Beaucoup de réalisateurs et de metteurs en scène des années 30 vont arrêter de tourner. Parmi le principaux exilés : Duvivier, René Claire, Renoir, Ophuls, Jean Gabin, Michel Morgan, Louis Jouvet… D’autres restent comme Sascha Guitry, Marcel Pagnol19, Abel Gance20. Carné et Prévert se lancent dans la fable et l’histoire pour échapper à la censure (« Les visiteurs du soir », légende médiévale ambitieuse tournée à Paris et dans le midi21, « Les enfants du paradis », fresque historique de 3h des années 1830, dans le monde du théâtre). 17 Certains vont circuler en zone libre jusqu’en 1942. 18 Le coté culturel et littéraire permet d’éviter la censure. 19 Adhère au régime 20 Adhère au régime 21 Beaucoup de cinéastes tourneront à Nice, en zone libre.
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L’absence de ces cinéastes laisse du champ à ceux qui attendaient depuis quelques années de passer derrière la caméra. Une vingtaine de réalisateurs vont débuter parmi lesquels : Yves Allégret, Jacques Becker, Fernandel, Henri Georges Clouzot… Clouzot est à l’origine scénariste (pendant 10ans). Sous l’occupation il devient scénariste en chef à la Continental avant de devenir réalisateur. Il va continuer à écrire les scénarios de tous ses films. Ses films seront caractérisés par une grande noirceur (misanthropie, misogynie…) Il fait principalement deux films pour Continental :
-‐ « L’assassin habite au 21 », histoire d’un tueur en série laissant une carte de visite. L’inspecteur est interprété par Pierre Fresnay
-‐ « Le corbeau », 1943, dépeint l’atmosphère d’une ville de province en France qui semble assez indéterminée. Dans ce bourg, des milliers de lettres anonymes signées « Le corbeau » vont attaquer la vie privée et professionnelle des notables de la ville (médecin accusé d’être un avorteur, etc). On a alors une description rude d’une petite communauté, il n’y a presque aucun personnage positif. Le film sera un succès, et fera indirectement allusion aux lettres de dénonciations qui proliféraient sous l’occupation.
Cinéma français d’après guerre La France sera libérée progressivement (libération de Paris en Aout 1944). Il y a une période d’enthousiasme mais aussi d’incertitude. Dans le cinéma, c’est le début d’une période d’épuration : Clouzot va être interdit de travail à vie22. Son film « Le corbeau » sera interdit, puis ré-‐autorisé dans un second temps en 1947, il pourra tourner de nouveau. Les exilés font leur retour après la guerre. Ils seront mal accueillis dans un premier temps, considérés comme des traîtres. Les structures du cinéma sont repensées pour la reconstruction du cinéma. Ce qui sortira des débats sera une sorte de compromis entre une économie libérale et un dirigisme étatique : une formule mixte qui va être piloté par le CNC, qui existe encore actuellement. Les principales structures mises en place par le régime de Vichy vont être maintenues. Le COIC est remplacé par le CNC (Centre Nation de la Cinématographie) créé en 1946, chargé de contrôler le financement des films, leurs recettes, leur réglementation. Le CNC va être sous la tutelle de différents ministères (à la base un ministère qui évoluera plus tard).
-‐ Ministère de l’information -‐ Ministère de l’industrie et du commerce (1947) -‐ Ministère de la culture (1959)
22 On lui reproche ses activités à la Continental, et son film « Le corbeau » considéré comme antinational, antifrançais, un film destiné à miner le moral des français.
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En 1948 est votée la « loi d’aide ». C’est une taxe sur les billets de cinéma (Taxe spéciale additionnelle) prélevée sur tous les billets de cinéma, redistribuée aux producteurs français et aux exploitants de salles (transformée en 1959, elle alimente le compte de soutien). L’idée est de prélever de l’argent sur les recettes afin de soutenir la production nationale, cela va être une façon de forcer le cinéma à s’autofinancer. Cette mesure perdure encore aujourd’hui. Les films américains reviennent sur le marché français. Les arrangement Blum-‐Byrnes vont faire polémique (porte ouverte au déferlement des productions américaines). On met en place également des coproductions européennes, initiées par la France et l’Italie en 1949. Un film franco-‐italien aura les avantages locaux des deux cotés (aides à la production…). Dans les années 50 (même 60), on aura énormément de coproduction franco-‐italiennes, mais aussi avec l’Espagne, l’Allemagne, l’Angleterre.
Années 50 C’est une période faste, les gens vont beaucoup au cinéma. De 1947 à 1957, on compte autour de 400 millions d’entrées par ans. Elles chutent ensuite, puis se stabilisent vers 1967. La concurrence de la télévision se fera sentir dans les années 60. On parle de « qualité française », c’est une expression utilisée par un journaliste en 1953, il disait que le cinéma français était un cinéma populaire de divertissement mais de qualité (il parle de qualité des sujets et de la fabrication des films, un grand soin y étant apporté). Ce cinéma sera très contesté, méprisé dans la suite de l’histoire du cinéma (suite à la nouvelle vague venant en lutte contre ce cinéma). On continue à adapter Balzac, Stendhal, Zola, des livres de Simenon. C’est un cinéma qui s’inscrit dans la tradition romanesque française. Un cinéma psychologique, qui finalement va être assez frileux : il n’aborde pas les thèmes de l’actualité (par forme de censure, voir d’autocensure). C’est un cinéma loin de la réalité française. 23Les films sont tournés principalement en studio (proéminence des décors construit), même si on voit des excursions extérieures. C’est un cinéma très contrôle par les techniciens, ils sont très importants à l’époque, ont beaucoup de pouvoir. La production est sous le monopole de l’embauche d’un syndicat : la CGT. Pour avoir une carte de professionnelle, il y a un parcours très long à respecter. Il faut avoir fait :
-‐ 3 films comme stagiaire -‐ 3 films comme second assistant -‐ 3 films comme premier assistant Ensuite seulement, on peut devenir réalisateur.
On commence à parler de profession à ce moment là. C’est un cinéma d’artisan et non d’auteur. La production est entre les mains d’une génération en place (cinéastes nés entre 1900 et 1910). 23 On ne traite pas l’histoire récente et controversée de la France.
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Dans les années 30, le principal scénariste était Prévert. Dans les années 50 il s’agit de Jean Orange (scénario) et Pierre Bost (dialogues). Ils travaillaient ensemble et ont imposé un traitement standardisé du scénario. Ils écrivent plus de deux films par an. Ils ont écrit pour Claude Autant-‐Lara, considéré comme un anarchiste de gauche (a beaucoup lutté contre la censure), rejoindra plus tard les rangs du front national. À coté de cette génération en place (Guitry et Pagnol continuent à faire des films), un cinéaste se placera en marge : Max Ophuls. C’est un juif né en Allemagne qui aura plusieurs carrières :
-‐ carrière allemande jusqu’en 1933 -‐ carrière française dans les années 30 -‐ carrière aux USA pendant la guerre -‐ revient en France après la guerre
Ses films sont caractérisés par le mouvement (les plans fixes sont très rares, les mouvements de caméras incessant, nombreux escaliers). Il a réalisé lors de sa carrière française :
-‐ 1950 : « La ronde », d’après Schnitzler, film qui raconte la ronde des couples, commençant avec un couple d’une femme et un homme, puis avec la même femme et un autre homme, puis avec… jusqu’à revenir au début.
-‐ 1952 : « Le plaisir », constitué de trois petits films (adaptés de Maupassant), contient la réplique « pour moi l’art c’est le mouvement.
-‐ 1953 : « Madame de… », histoire de l’épouse d’un général endetté vendant ses boucles d’oreilles, cadeaux de son mari. Les boucles d’oreilles passent de main en main jusqu’à leur revenir.
-‐ 1955 : « Lola Montès » narre l’histoire de la femme « la plus monstrueuse du monde » devenue phénomène de foire. Elle est exhibée, sa vie est racontée, mimée par la troupe du cirque. Les spectateurs lui pose des questions, au fil des questions elle se souvient. Le film comporte 7 retours en arrière. La structure dramatique est assez complexe. Le film est sorti une première fois puis a été remontée dans l’ordre chronologique par le producteur. Ce film dénonce l’exploitation commerciale du malheur, du scandale. C’est un film technologiquement innovant : le premier format large en France (en Scope, en couleur et qui travaille sur la stéréophonie).
Réalisateurs marginaux : Robert Bresson, Jacques Tati, Jean Cocteau. Intervient l’idée que le cinéaste n’est pas seulement un technicien mais un auteur de film, notamment avec Cocteau. Jacques Tati avait fait des courts métrages, puis plusieurs long métrages après la guerre. C’est au départ un cinéaste burlesque, avec le personnage de Monsieur Hulot. C’est un cinéaste à part dans le cinéma français, il réinvente le comique de Buster Keaton notamment avec Mr Hulot, personnage incapable de s’intégrer. Il met en scène des films sur le fond d’une modernité médiatique. Bresson sera un des réalisateurs français à avoir une esthétique des plus singulières. Il ne sera attaché à aucun mouvement. Sa filmographie est marqué par la thématique de la rédemption. ; ainsi que par une évolution vers le dépouillement, l’abstraction. Ses films sous l’occupation vont encore recourir à des comédiens professionnels, des dialogues littéraires,
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des éclairages esthétisants. Mais il va peu à peu se dégager de tout ça. Dans « Les anges du pêché », les dialogues sont de Giraudoux. « Les dames du bois de Boulogne » est adapté de Diderot, avec des dialogues de Cocteau. « Journal d’un curé de campagne » : contient des comédiens professionnel et quelques acteurs amateurs. Il commence à refuser toute psychologie théâtrale ou romanesque, il va travailler avec des comédiens qui seront juste des « modèles ». On aperçoit un dépouillement progressif du jeu des acteurs. À partir de « Un condamnée à mort s’est échappé » il condamne toute musique de film, il ne travaille plus avec des musiciens.
Hollywood années 40-‐50 La seconde guerre mondiale À la fin des années 30, il y a une forte montée des tensions. Instinctivement les USA auraient une certaine solidarité avec les démocraties. Dans l’ensemble du pays à la fin des années 30, il y a une très grande méfiance à l’égard d’une intervention des USA sur le continent européen. À la veille de la guerre, la majorité de l’opinion américaine est isolationniste. Cela va changer un peu à partir de la bataille d’Angleterre (grosses opérations aériennes de la Luftwaffe sur l’Angleterre). Roosevelt va essayer d’amener le pays à une intervention directe dans le conflit. L’opinion devient de plus en plus anti-‐isolationniste. Les évènements de Pearl Harbour en 1941 va clore le débat : les USA partent en guerre. Dans cette période, les patrons des studios sont par tradition assez conservateurs et intéressés par le gain économique : il s’agit avant tout de pas se fermer les marchés espagnoles et allemands. Dans un premier temps, les films américains ne mettent pas réellement en cause le nazisme, l’ensemble de la production est frileuse vis à vis du Nazisme (mise à part de remarquables exceptions). Certains chefs de studios vont s’engager contre Hitler (comme Jack Warner qui va fermer son bureau en Allemagne). Il y a un grand flux de migration européen (fuite du nazisme) se retrouvant à Hollywood : ils vont former en 1936 la « Hollywood Anti Nazi League ». Des films seront explicitement anti nazi, mais seulement à partir de l’engagement réel des USA dans la guerre que cette production sera massive.
Question de la propagande Le cinéma de propagande utilise différents modes, dont trois privilégiés :
-‐ Le documentaire -‐ Le symbole, l’allégorie -‐ La satire
Le documentaire permet de laisser parler les faits, il suffit de les montrer. À Hollywood il y a une certaine méfiance vis à vis du documentaire, souvent assimilé à l’ennui. Le documentaire intégral n’est pas beaucoup utilisé à Hollywood, on se sert d’une forme hybride ou on va intégrer des procédés documentaires dans un récit traditionnel. Ces procédés documentaires vont donner à ce récit traditionnel un caractère de vécu authentique.
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Anti Nazisme En 1939 sort « Les Aveux d’un espion nazi » de Anatole Litvak (Warner). Le film s’inspire de faits divers authentique et montre une infiltration par les nazis, dénonce l’espionnage des USA par l’Allemagne, les plans de sabotage… L’idée du film est de pousser les USA à se doter d’un service de contre espionnage. L’allégorie est beaucoup utilisée, on a recours aux procédés narratifs hollywoodien traditionnels auxquels on ajoute plusieurs niveaux de lecture. Les films situés dans le passé peuvent se lire comme des leçons pour le présent. Par exemple, « L’aigle des mers » de Michael Curtis (1940, Warner). Une figure est assimilée à Hitler, l’Espagne à l’Allemagne nazie, les bateaux espagnols à la Luftwaffe… Il y a un certain nombre de signes qui orientent le spectateur vers le déchiffrement de l’allégorie. Le film satirique sur le nazisme le plus célèbre est « Le Dictateur » de Chaplin (United Artist). Les Cibles sont très facilement reconnaissables : le dictateur Hynkel et son acolyte Garbich, son allié Benito Napaloni… C’est le premier film à clairement dénoncer l’antisémitisme d’Hitler. Après Pearl Harbour, le cinéma s’engage massivement dans le conflit : 400 films ayant un propos patriotique seront produits entre 1942 et 1944 : on est dans une période d’union sacrée entre Hollywood et Washington. Un bureau est créé il assure la liaison entre Washington et Hollywood, agence gouvernementale créée par Roosevelt pour s’occuper de la presse et des médias liés au cinéma. À partir de 1942 les producteurs doivent soumettre leur scénario à cet organisme. Beaucoup de personnes vont partir sous les drapeaux : 140 acteurs et 32 réalisateurs. Les acteurs vont s’investir beaucoup, apparaissant en uniforme dans les magazines, affirmant leur soutien aux troupes. Le cinéma a aussi pour mission de remonter le moral des américain. Des films anti nazis vont appaitre. Cela devient presque un genre, tout le monde fit des films anti nazis. Meme les films d’animation participent à l’effort de guerre. « Correspondant 173 de Hitchcok et « La 5ème colonne », « Lifeboat » sont des films anti nazis. Jean Renoir va réaliser « Vivre libre (This land is mine)» (film sur la résistance dans une petite ville française). L’un des plus farouchement anti nazi va être Fritz Lang : il va réaliser 4 films anti nazi. « Chasse à l’homme », « Espion sur la tamise », « Cap et poignard » et « Les bourreaux meurent aussi » 1943. « Les bourreaux meurent aussi » se passe en Tchékoslovaquie, ou il y a le Reichprotector qui sera tué par la résistance Tchèque. Fritz Lang avec la collaboraiton de Brecht va faire un film sur cette histoire, et sur la résistance Tchèque. Pour faciliter l’identification, les Tchèques sont joués par des américains et les allemands par des allemands. Le film « Hitler’s Madman » de Douglas Sirk traite du même sujet. Le personnage de Hitler devient récurrent, le film anti nazi devient un genre.
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Lubitsch sort en 1942 « To Be Or Not To Be », son propre film anti nazi. « Casablanca » de Michael Curtis (1943) contenant énormément d’immigrés européens. Un homme brisé par l’amour devient cynique, individualiste. Il ouvre un bar à Casablanca et va progressivement s’acheminer vers la résistance grâce à l’amour retrouvé. C’est un film assez unique, à la fois sur la guerre, mélodramatique, noir… On voit l’apparition de films anti japonais qui obtiennent un certain succès. « Behind the rising sun » de Edward Dmytryk, histoire d’un japonais rentrant au Japon après avoir été éduqué et américanisé aux USA : son père veut lui imposer un travail, une épouse… Une série sera produite par le ministère de la guerre : « Pourquoi nous combattons » supervisée par Frank Capra : films d’informations, d’orientation, films en plusieurs épisode de 45minutes environ et ont pour but de décrire aux militaires avant tout la nature du conflit, qui sont les ennemis, « pouruoi nous combattons ». (Bataille de Russie, bataille de chine…). Il faut emporter l’adhésion de tous, il faut que tout le monde participe à l’engagement collectif. Il faut dans ces films montrer la cohésion entre les différetens communautés. Des documentaires destinés au grand public apparaissent également. Le monde du cinéma s’implique réellement dans ces projets, des réalisateurs majeurs réalisent ces films (John Ford, Capra… )
URSS Il y avait quelques films anti soviétique, notamment par Lubitsch. Puis des films prosoviétiques apparaissent, justifiant l’alliance américano-‐russe. Un épisode de « Poruquoi nous combattons » sera sur la bataille de Russie. Un film de Michael Curtis, « Mission à Moscou » sera inspiré d’un mémoire d’un ambassadeur américain : représentation candide du système soviétique, ton solennel, ressemblance entre les deux peuples… Ces films seront ensuites considérés comme subversifs par la comission Mc Carthy.
La chasse aux sorcières Ces films prosoviétiques poseront de graves problèmes à leurs réalisateurs. L’opinion sera obsédée par l’idée de la 5ème colonne, qu’il y a un état dans l’état qui va renverser l’état. Dans cette période, il y aura la chasse aux sorcières, aux communistes. C’est une sorte de revanche de la droite américaine, populiste, isolationniste. Elle va viser les communistes, et plus généralement tous les gens de gauche. Il y aura un certain nombre d’enquêtes dans différents milieux, dans les activités considérés comme antiaméricaines. La chambre des représentants va autoriser le fonctionnement d’une commission spéciale : HUAC : «House Committee on Un-‐American Activities ». Il va y avoir des auditions, des commissions : tout reposait sur l’idée de l’abjuration, il fallait se confesser qu’on avait été communiste, et pour se dédouaner il fallait dénoncer d’autres personnes, livrer des noms.
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La chasse aux sorcières va toucher beaucoup de milieux différents : la médecine, l’armée, le monde scientifique, l’enseignement universitaire. Mais le terrain privilégié de la commission sera le monde du spectacle, avec avant tout le monde du cinéma (dans une moindre mesure la radio, le théâtre et la télévision). En s’attaquant à des vedettes, cela faisait de la pub pour les anti communistes. La commission va convoquer des témoins à Washington. Deux types de témoins :
-‐ témoins amicaux, coopératifs -‐ témoins inamicaux, hostiles
Les témoins amicaux comportent les producteurs (Walt Disney, Jack Warner…), des acteurs (Gary Cooper), des scénaristes, des réalisateurs. Les 11 témoins hostiles sont presque tous des scénaristes, parmi eux : Dalton Trumbo. La commission leur pose deux questions :
-‐ Etes vous membre du syndicat des scénaristes ? -‐ Êtes vous ou avez vous été membre du PC ?
10 personnes vont refuser de répondre, de dire si ils sont ou ont été membre du PC, en invoquant le 1er amendement de la constitution américaine, garantissant la liberté de penser. Les dix de Hollywood sont accusés d’offense au congré : ils obtiennent 1 an de prison plus une amende. Il sera pour eux impossible de retrouver du travail, ils vont travailler en sous main, sous des pseudonymes... La plupart de leur carrières vont être brisées. Les producteurs vont instaurer dans leurs studios le « serment de loyaté ». 3 personnes seulement vont s‘opposer à la liste noire. Ils décident de licensier sur le champs tous ceux qui ne sont pas prêt à déclarer sous serment qu’ils ne sont aps communistes. Les employés vont devoir signer des serments. Des bureaux vont être spécialisés dans la disculpation. Certaines ligues vont appeler au boycott des films réalisés par des personnes « compromises ». 35 films anticommunistes entre 1948 et 1955 vont être réalisés. « Le rideau de fer », « La menace rouge », « J’ai épousé un communiste », « I was a communist for the FBI »… En 1951/52, il y a une seconde commission pendant la guerre de Corée. Mc Carthy, champion de l’anticommunisme, encourage à la délation. 48 témoins vont refuser de répondre, ils vont invoquer le 5ème amendement. « Nul de pourra être contraint de témoigner contre lui même ». 32 témoins vont donner des noms, êtres des délateurs : le scénaristes Martin Berckley va livrer 120 personnes. Il y aura beaucoup d’arrangements, de règlements de comptes. À ce moment la, les rapports sociaux à Hollywood vont être ravagés, ruinés. C’est une préiode qui marque tr ès profondément le milieu du cinéma Hollywoodien, tout le modne se méfie de tout le monde. La liste noire est évaluée à 214 artistes en tout, donc 106 scénaristes, 36 acteurs, 11 réalisateurs et 4 producteurs.
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En 1952, Charlie Chaplin se réfugiera en Europe, victime d’une campagne de presse. Son nom sera enlevé du « Walk of fame » de Hollywood. John Garfield va se scuicider. En 1953/55, il y aura deux autres commissions à NY et Los Angeles avec deux nouveaux délateurs. Mais les temps ont un peu changés, les résistances sont plus fortes. Fin 1954, Mc Carthy sera désavoué par le Sénat, un vote de censure après qu’il ait accusé toute l’armée américaine d’être communiste. Il meurt en 1957. L’idée du péril communiste apparaît comme une quesiton de politique extérieur, et pas comme question politique intérieur après la guerre de Corée. L’époque des commissions va se terminer et peu à peu les blacklistés vont réappaitre au générique des films. En 1958, Kurt Douglas va demander à Dalton Trumbo d’écrire le scénario de Spartacus. Son nom ne sera d’abord pas évoqué les acteurs vont dévoiler à la presse le nom de trumbo par la suite. Des anciens blacklisté obtiennent des oscars, notamment du coté des scénarios. De nouveaux réalisateurs (souvent anciens scénaristes) passent à a réalisation : Billy Wilder, Orson Welles… De nouveaux genres apparaissent, et des genres anciens évoluent. Le film noir apparaît réellement à partir des années 40 (déclinaison du film criminel). La comédie musicale évolue aussi (« Un américain à Paris ») avec l’unité de production Arthur Field travaillant à la MGM, produisant les films de Jim Kelly. Pendant les années 50 se developpe un nouveau genre : le film d’espionnage. Un cinéma de science fiction se développe également, assez métaphorique de la guerre froide, de la peur de l’invasion et de la menace atomique. Le mélodrame évolue fortement vers le mélodrame flamboyant (films de Douglas Sirk). Liés à certaines innovations technologiques (comme l’écran large), on voit un regain du peplum, des épopée bibliques, des superproductions à grand spectacle se situant à l’antiquité. Cette période marque également le début du déclin des studios : une période de grande instabilité pour le système.
Déclin des studios La RKO décline progressivement puis meurt dans les années 50. À la fin des années 40, il va y avoir une forte augmentation des couts de productions et un essort de la télévision, une baisse de fréquentation, le désir d’indépendance des vedettes et des réalisateurs, une loi anti trust appliquée. Les studios reposent sur le système économique de l’intégration verticale qui controle à la fois la production, la distribution et l’exploitation. Cette position dominante est interdite par la loi anti trust (datant de la fin du 19ème, le « Sherman Act ») ; tout ce qui peut empêcher la concurrence d’exister est interdit. Il va y avoir un long processus judiciaire notamment sur Paramount, commençant dans les années 30 (1938), ralenti pendant la guerre, accusant Paramount de ne pas respecter cette loi. Il va y avoir en 1948 un décret nommé « Décret
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Paramount » obligeant les studios à se séparer de leur réseaux de salles. Ils sont alors privés du Block Booking. Les exploitants vont devoir être indépendants. Les salles vont être cédées graduellement jusqu’à la fin des années 50. Les big five seront très touchées par ce décret, leur profit s’effondre. Il y a un désir très fort d’indépendance chez les acteurs et réalisateurs (jusqu’alors sous contrat avec les studios). En 1941 a été votée une loi qui taxe très fortement les personnes qui reçoivent de hauts revenus (90% au dessus de 300.000$). Plutot que d’être taés, ils veuelnt investier eux même dans la production des films. Ils vont se tourner vers les petites structures d’acceuil plus indépendantes et vont devenir des réalisateurs producteurs ou des acteurs producteurs. Les agents artistiques montent en puissance, les vedettes sont de plus en plus importantes économiquement. Les studios connaissent une forte baisse de la fréquentation en salle. La meilleure année en terme de fréquentation était 1946. Après cette année, les chiffres ont peu à peu baissés pour des raisons notamment sociologiques (les soldats sont revenus du front, beaucoup se sont mariés à ce moment la, les jeunes couples s’installent plutot dans des banlieues résidentielles éloignées des salles de cinéma). Mais cela est surtout lié à l’apparition de la télévision. Le conflit avait interrompu l’essort de la télévision, les efforts de l’industrie électroniques étant concentré sur le materiel militaire. C’est à partir de l’après guerre que la télévision va prendre son essort. (chiffres sur poly) 1956 : la télévision couleur est commercialisée. En 1958, 50 millions de postes sont aux USA. Le petit écran va apapraitre dans les jeunes ménages comme un substitu du grand écran cinématographique. La production de série B va diminuer fortement, le personnel sous contrat sera de moins en moins nombreux dans les studios. Pour contrer la menace de la télévision, Hollywood va miser sur des innovations technologiques qui vont augmenter la dimension spectaculaire du cinéma. Parmi ces innovations :
-‐ la couleur -‐ l’écran large -‐ le relief
La couleur était reservée à des films prestigieux. On parle surtout du Technicolor. Le cinéma décide d’accentuer ses dimensions pour faire du spectaculaire. Beaucoup de procédés vont être exploités comme le Cinemascope, le Cinévision… Dans les années 50 les procédés de stéréophonies vont être mis en place, encore une fois pour faire du spectacle.
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Cinéma Italien sous le fascisme Dans les années 20 il y a une grande crise sociale, beaucoup de grèves, d’occupations d’usines… Se créer le parti fasciste en 1921. Dés l’année suivante, Mussolini effectue la marche sur Rome et obtient le mandat pour former le gouvernement et s’emparer du pouvoir. L’opposition est réprimée, il y a des assassinats : on passe à un régime dictatoriale. Dans cette période l’économie du cinéma va être sous contrôle. Les studios turinois et napolitains seront touchés par la crise, la production va s’effondrer : seulement 6 seront réalisés en 1927. Dans les années 30, sous l’impulsion du régime, on observe une poussée fulgurante de l’économie du cinéma : on arrive à 120 film en 1942. Le principe économique qui régit le cinéma est le principe du protectionnisme : on adopte un système autarcique (on évite d’importe trop de films), la production nationale est fortement aidée par le régime, el cinéma va être subventionné. Les primes soutiennent plutôt les gros succès (mêmes schémas, mêmes formules…) et non pas les petits films expérimentaux. Seront inaugurés cette année la, en 1937, les studios du Cinecittà. Dans ces années le cinéma italien va être un cinéma essentiellement de studio. L’état va en 1940 posséder un trust vertical : la Cines. La base de la politique culturelle du régime va être le contrôle des masses médias, de la radio, du cinéma… Le cinéma dépend d’une sous direction d’un ministère qui va être d’abord dirigée par Luigi Freddi à partir de 1934, puis dépend du ministère de la culture populaire (Minculpop). Il s’agit de ne pas éveiller les consciences, de proposer du divertissement, de l’évasion, qui ne soit pas du tout critique par rapport au régime. Il y aura quelques films de propagande explicites comme « Camicia nera » de Giovacchino Forzano ou « Vecchia Guardia » de Alessandro Blasetti. L’institut LUCE est créé en 1924. Il sera dédié à la production de documentaires et d’actualités de propagande. Ces documentaires et actualités permettent Mussolini d’asseoir son pouvoir : selon lui le cinéma était « l’arme la plus forte ». La majorité de la production était un cinéma d’évasion, un cinéma populaire, un cinéma de divertissement qui va viser à endormir les consciences, des films déconnectés du réel. Il y avait la mode des « téléphones blancs », accessoire signifiant le luxe très présent dans le cinéma, un cinéma déconnecté de la réalité italienne. Grand réalisateur de l’époque :
-‐ Vittorio De Sica (surnommé le Lubitsch italien) -‐ Alessandro Blasetti
Comédies mondaines, comédies sophistiquées, drames historiques, films musicaux… Ils étaient influencés par le théâtre.
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La censure n’est pas exercée directement par l’état. Le cinéma doit promouvoir l’ordre moral. Des thèmes comme l’adultère, la prostitution, la criminalité, la délinquance juvénile et le suicide sont interdits. Dans ce système, n’importe qui peut dénoncer le contenu d’un film. Dans ce régime très strict, il y a quelques poches de liberté, quelques espaces de réflexion vers une autre forme de cinéma. On trouve le centre expérimental de la cinématographie qui va être créée en 1935. C’était une école de cinéma qui devait former les cadres cinématographiques du régime. On y trouvait une certaine liberté de parole, parmi les enseignants on trouvait un marxiste. Cette école va avoir dans ses premières promotions des cinéastes comme Antonioni ou De Santis. La revue « Cinema » parue en 1936, dirigée par le fils de Mussolini en 1938, a accueilli des textes de plusieurs intellectuels comme De Santis ou Visconti. En temps de guerre, il y a des films documentaires soutenant l’effort de guerre et aussi des films de fiction, de propagande, notamment les premiers films de Rossellini (la trilogie de la guerre fasciste). On note un courant nommé « calligraphisme », courant esthétisant déconnecté de la réalité autour de réalisateurs comme Castellani ou Soldati. Quelques films vont être précurseurs du néo réalisme en milieu de guerre :
-‐ « 4 pas dans les nuages » de Blasetti -‐ « Les enfants nous regardent » de De Sica -‐ « Ossessione » de Visconti
Néo réalisme Italien – Cinéma de la libération (1945-‐1952) La production est marquée par une certaine continuité, un grand nombre de comédie (1 film sur 3) de mélodrames et des films historiques. Mais naît à l’époque le courant néo réaliste qui va naître d’un besoin d’aller au plus près de la réalité sociale italienne. L’idée est d’être en rupture avec le cinéma factice désincarné, cela va être un cinéma qui veut être témoin du monde contemporain, de la guerre et ses ravages. Ce cinéma est marqué par des influences littéraires (le Vérisme). Zavattini (voir poly) C’est un cinéma né également de nombreuses contraintes matérielles. L’industrie est ravagée, les studios détruits, la pellicule devient rare. En même temps dans ce contexte de pénurie, il faut comprendre qu’il y avait aussi une grande liberté. Le cinéma s’est reconstruit dans une période de grande liberté par rapport aux infrastructures et aussi au pouvoir. Le néo réalisme n’est pas vraiment une école, se sont plusieurs personnes travaillent dans la même direction au même moment. Dans l’après guerre ils vont tous explorer les même thèmes et mettre en œuvre les même innovations techniques.
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Sujets abordés : -‐ volonté de description, de dénonciation sociale -‐ sujets d’actualité -‐ films situés, datés -‐ films proposant une réflexion immédiate, un témoignage -‐ pauvreté -‐ délinquance -‐ conditions de vie des vieillards, femmes, enfants
Ces choix thématiques sont prolongés par des principes de tournage qui touchent les choix de décors, des lumières, des acteurs, du montage… Les films s’attardent peu sur le scénario et le découpage : on privilégie la description brutale et directe. Les films sont donc souvent tournés en extérieur réels (l’Italie de l’après guerre, meurtrie au lendemain de la guerre). Les éclairages naturels sont privilégiés. (Ils n’accentuent pas les sentiments et les actions). Les acteurs sont très souvent des non professionnels (des ouvriers, des pêcheurs) qui jouent leur propre rôle (souvent mêlés à des professionnels). En terme de découpage, on reste dans un refus du découpage classique, les actions sont filmées sous un seul angle, les plans séquences sont privilégiés avec l’improvisation. Les cinéastes et les films néo réalistes ne constituent pas un ensemble homogène. Aucun d’entre eux n’a revendiqué une appartenance au mouvement.
-‐ Visconti -‐ Rossellini -‐ De Sica -‐ Zavattini -‐ (De Santis)
Visconti Issu d’une famille aristocratique de Milan. Il est aussi mariste, c’est un compagnon du parti communiste. Il a participé à la résistance anti fasciste (arrêté quelques mois avant la libération). Il tourne son premier film en 1942 : « Ossessione ». Film noir, pessimiste, dépeint un monde dominé par les passions. Profondeur de champs, plans longs… Une mise en scène stylisée, des comédiens professionnels, on est dans un type de film très marqué par le mélodrame. À la fois réaliste et stylisé. Autre film de Visconti, son seul véritable film néo réaliste : « La terre tremble ». Adaptation du livre de Verga se passant dans un port Sicilien. Une famille tente de se mettre à son compte pour échapper à l’exploitation effectuée par les mareyeurs. C’est un conflit entre exploiteurs et exploités (aspects marxiste de Visconti visibles). Le film a été tourné sur les lieux même de l’action en Sicile, qui dépeint la condition misérable des pêcheurs siciliens. Ils jouent leur propre rôle dans leur propre univers. L’idée est d’être au plus près de la réalité, de ne pas la travestir. Visconti parle de cinéma anthropomorphique. Il va en parallèle être un grand metteur en scène de théâtre et d’opéra. Il fera par la suite « Bellissima » ; « Sento » et « Les Nuits Blanches ».
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Rossellini Il a commencé en tant que cinéaste en faisant des documentaires, quelques courts métrages et des films pendant la guerre, des films de propagande fasciste. Il a réalisé par les suites des films anti fascistes et anti nazis. Ces trois films lui ont valu le titre de père du néo réalisme :
-‐ Rome ville ouverte -‐ Paisà -‐ Allemagne, année zéro
Il montre une réalité crue, une « nature humaine prise sur le vif » (selon lui). Le cinéma doit selon lui rendre compte du réel d’une façon concrète. (Poly) Paisà : suit l’avancée progressive des troupes alliées du sud (de la Sicile au nord de l’Italie). Histoire de la résistance active et passive. Dans ce film, on trouve un style documentaire, une utilisation de comédiens non professionnels (des vrais moines, paysans, officiers anglais). Allemagne année zéro : il s’intéresse ici à Berlin dévasté. Suit l’itinéraire d’un garçon allemand (Edmund) éduqué sous le nazisme avec des principes nazis. Chez lui, deux personnes : son père et son frère ainé. Son ancien maitre d’école ne cesse de répéter qu’il faut éliminer les plus faibles : il empoisonne son père. Théorie du personnage spectateur, voyant. Sa méthode est le refus des formules, ses films sont réduits à l’essentielle niveau équipe technique (ce sont les même d’un film à l’autre.
Zavattini Avant tout scénariste (plus de 100 scénarios dont 22 pour De Sica). Sa théorie est celle de la filature, la caméra doit être comme un détective qui suit les personnages, qui effectue une enquête. Il utilise aussi l’idée du « trou dans le mur ». Pour lui, le scénario idéal et le scénario qui prévoit qu’on suive un homme normal pendant une journée ou il ne se passera peut être rien. En 1953 il coordonne le film « L’amour à la ville » : film à épisodes réalisés par différents réalisateurs. Zavattini s’occupe de l’épisode « Histoire de Catherine », il reconstitue un fait divers, l’histoire d’une mère célibataire qui abandonne son bébé dans un jardin publique. Zavattini lui fait revivre les faits devant la caméra. C’est une reconstitution totale du fait divers avec les personnes impliquées : c’est pour lui l’un des achèvements les plus aboutis du néo réalisme.
De Sica C’est l’acteur vedette des années 30, il a joué dans beaucoup de comédies. Il en réalisera par la suite « Les enfants nous regardent » : premier film qu’il réalise et dans lequel il ne joue pas. C’est sa première collaboration avec Zavattini. C’est l’histoire des conséquences d’un adultère vues par un enfant. Le rôle de l’enfance interviendra souvent dans ses films.
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Bilan du néo réalisme : Énorme succès critique, très grandes répercussions internationales (notamment en France et aux USA). Deux films ont obtenu l’oscar du meilleur film étranger (« Susha » et « Le voleur de bicyclette »). À partir des années 50, le néo réalisme aura pour effet indirect de populariser le tournage extérieur. Il va déboucher sur le cinéma de la modernité, les nouvelles vagues… Mais il gagnera peu de succès auprès du public en raison de ses thèmes austères. Le destin commercial de ces films est incertain, autant les films de De Sica marchent plutôt bien, ceux de Visconti peinent à faire rentrer de l’argent. Le néo réalisme va peu à peu décliner, notamment parce qu’il advient une certaine hostilité des producteurs vis à vis de ce cinéma : les films sont peu rentables et connaissent peu de succès, ont une idéologie antibourgeoise (à l’opposé des producteurs). Le cinéma est repris en main par les producteurs, mais aussi par les autorités politiques. Une nouvelle législation à partir des années 50 va décourager les aventures sur le terrain néo réaliste. Cette législation va accorder des prêts aux maisons de production qui produisent des films sans point de vue politique. Les films considérés comme diffament pouvaient se voir refuser la licence d’exportation. Il y aura des attaques frontales de la part du pouvoir politique. Le sous secrétaire d’état au spectacle Andreotti a notamment écrit une lettre ouverte sur le film de De Sica « Umberto D » dans laquelle il a véritablement accusé le film d’être « anti patriotique, qui étale le linge sale de l’Italie aux yeux du monde entier ». Il mène une véritable croisade contre le néo réalisme. Un des critiques phare du néo réalisme a été envoyé en prison en raison d’un scénario anti patriotique. Les autorités religieuses se montreront aussi distantes envers ce genre. Le style va s’essouffler, devenir étroit, une coquille vide. C’est un cinéma qui va être vraiment très présent, qui va rester présent en filigrane en Italie encore aujourd’hui on se réfère à l’époque du néo réalisme. Son influence dépasse les frontières Italiennes, il a permis de ramener la production cinématographique dans la réalité, au présent. Visconti va surtout faire des adaptations de roman par la suite. Rossellini met de coté le thème de la guerre et va faire plusieurs films qui ne vont plus être sur la réalité sociale mais vont avoir une dimension psychologique. Il y aura toujours un cinéma populaire avec des comédies, des mélodrames. Les comédies traitent beaucoup des sujets de société (du divorce, du système judiciaire…) Fellini, ancien collaborateur de Rossellini et Zavattini, va faire ses premiers films dans une veine qu’on peut qualifier de néo réaliste. À partir des années 60, il va développer une filmographie personnelle. (extraits sur le site de la cinémathèque française) Jean Gilli « L’Italie de Mussolini et son cinéma »
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Le cinéma soviétique Années 30 à 50
Organisation générale de la production En 1919, le gouvernement bolchévique décide de nationaliser le cinéma, il lui attribue des tâches d’éducation, d’information, de propagande (« Le cinéma est le plus important de tous les arts »). S’en suit une grande production de documentaires, de films de propagandes diffusés dans les campagnes grâce aux cinés trains qui parcourent le pays pour projeter des films. À partir de 1924, il y a une certaine libéralisation économique avec ce qu’on a appelé la NEP. Le cinéma va être sous le contrôle d’un organisme : il va dépendre de l’instruction publique. L’idée va être de considérer le cinéma comme un organisme d’éducation des masses. Parallèlement il y aura aussi le cinéma populaire avec beaucoup de comédies.
Contexte des années 30 aux années 50 Le révolutionnaire Lénine meurt en 1924, entrainant des luttes de succession. Staline s’impose et arrive au pouvoir contre Trotski. Il va y avoir une reprise en main idéologique et un grand interventionnisme de l’état et surtout de Staline dans tous les secteurs. Le pays va être engagé très fortement dans el conflit mondial, l’Allemagne et l’union soviétique avait signé un pacte de non agression qui sera rompu en 1941 par l’Allemagne qui va attaquer l’URSS (opération Barbarossa). S’en suit une période de glaciation jusqu’à la mort de Staline en 1953. Après cette date, il y aura une période de « dégel » avec une certaine liberté qui va notamment déboucher sur le rapport Khrouchtchev en 1958 qui va dénoncer les crimes de Staline, le culte de la personnalité.
Organisation générale de la cinématographie Les années 20 sont encore marquées par un certain éparpillement, une hétérogénéité. Ce qui marque les années 3à est au contraire une politique de centralisation progressive, le mouvement qui va caractériser ces années va être ce regroupement. La transition vers le parlant en URSS se fait extrêmement lentement. Les salles sont dans l’ensemble très peu équipées et beaucoup de films finalement, bien que sonores, seront vus en muet. En 1934, il y a 26.000 salles, dont seulement 800 étaient équipées pour projeter des films sonores. Le réseau de salle s’étend progressivement mais ne va jamais être très étendu, il ne le sera jamais assez pour être cet instrument d’éducation des masses dont rêvaient les dirigeants soviétiques. Le cinéma n’a jamais pu pénétrer en profondeur la société soviétique. La production s’effondre : En 1930 : 128 films 1951 : 9 films Le cinéma soviétique va se développer en autarcie, la matière première (pellicule, matériel, caméras) va être fabriquée par les soviétiques (il s’agit de développer un régime soviétique socialiste autonome, indépendant des régimes capitalistes). Ce cinéma va aussi gérer tout seul la transition avec le parlant et va se développer en fermant complètement ses frontières : dans les années 30, aucun film étranger n’est diffusé dans l’union soviétique. Les studios les plus importants seront installés dans les grandes villes (2 grands studios à Moscou : Mosfilm et Sojuzdetfilm)
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Une structure générale va être centralisatrice (une administration centrale) qui va contrôler et encadrer l’ensemble de l’industrie cinématographique. 1930, création de Soyuzkino : dirigé par Boris Choumiatski. Le but à atteindre est le cinéma « pour des millions », un cinéma de masse. Le parti donne les idéologies générales du régime : un ministère s’occupe du cinéma, et dans le parti, une direction va aussi s’occuper du cinéma. En 1938 : comité de création du cinéma (ministère du cinéma en 1946) 1939 : au sein du comité central (du parti communiste), création de la direction de la Agit-‐prop avec Jdanov à sa tête (considéré comme le grand idéologue du régime). Du point de vue économique, le cinéma va devoir obéir à la planification. En 1929, après l’abandon de la NEP, on met en place la politique des plans quinquennaux. La planification consiste à déterminer des objectifs à atteindre avant le lancement de la production. En terme de cinéma, la planification va être annuelle. On planifie :
-‐ le nombre de films -‐ la thématique des films
La production est alors basse est inefficace. On a beaucoup de studios, de matériel, mais au final on ne réalise que très peu de films. Une centaine de films vont être interdits, souvent détruits (censure pour la conformité de l’idéologie). Cela provoque une perte sèche économique.
-‐ il faut que le synopsis soit validé -‐ que la continuité dialoguée soit validée (entrainant souvent des modifications) -‐ que le découpage soit validé (souvent repris) -‐ des relecteurs sont présents au sein du studio, du ministère et de la direction du
comité central La production devient un amas d’aller et retour à n’en plus finir. Une dizaine de décisions vont très fortement ralentir le travail. Beaucoup de scénarios ne seront jamais tournés. Ce n’est pas un face à face entre le créateur et la censure, la censure comporte énormément de niveau de censure, plus personne ne prend se responsabilité. Ce qui sera important dans le cinéma soviétique c’est la doctrine. Pour les dirigeants soviétiques, le cinéma doit avoir une fonction éducative doit rallier les masses à l’idéologie communiste. Il y a une reprise idéologique du cinéma après les années 20 : on critique le caractère bourgeois des films s’inspirant du cinéma étranger et on fustige le cinéma d’avant garde qu’on taxe de formaliste. Il y a des formations sur ce que doit être un film soviétique. Il y a une période d’épuration, de révocation dans les studios au nom de la prolétarisation. Toutes les théories du montage et le cinéma d’Eisenstein seront critiqués. On met en place la doctrine du réalisme socialiste
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Réalisme socialiste Adoptée dans un premier temps pour la littérature, elle sera étendue à tous les arts. Elle sera adoptée par le premier congrès des écrivains soviétiques en 1934, et en 1935 pour le cinéma. Cette doctrine est fortement influencée par Jdanov qui parle des écrivains et des artistes en général comme des « ingénieurs de l’âme » qui doivent « connaître la vie pour être capable de la dépeindre avec véracité dans des œuvres d’arts dans son devenir révolutionnaire». (Voir citation polycopiée, extraite des Statuts de l’Union des écrivains soviétiques). L’art doit se soumettre à cette doctrine. L’art est réaliste dans la forme, socialiste dans le contenu. L’art est conçu comme un instrument du travail politique quotidien. Avec l’adoption de cette doctrine il y a une forte condamnation du modernisme, de l’avant garde (le terme d’avant garde devient une insulte), on revient à une grand académisme. Le film phare de ce mouvement est : « Tchapaïev » réalisé par les frères Vassiliev. Il dépeint un héros de la période révolutionnaire. Les grands types de films produits à l’époque sont au nombre de 3 :
-‐ films historiques à grand spectacle (qui doivent présenter au spectateur le passé de la Russie sous une forme héroïsée, idéalisée) comme « Alexandre Nevski ».
-‐ films révolutionnaires, dépeignant le passé proche de l’union soviétique (« Tchapaïev », le film le plus populaire de la décennie, conte l’histoire d’un héros populaire sans instruction qui est à la tête d’un groupe de partisans remportant victoire sur victoire sur les « blancs ». Le parti envoie à Tchapaïev un émissaire politique chargé de son éducation politique.) Il y a aussi quelques films sur Lénine (de Mikhaïl Romm)
-‐ Films consacrés à la société contemporaine. Soit les films sont centrés sur les exploits de l’homme nouveau, sur la campagne de la collectivisation, sur l’industrie du Stakhanovisme…
Eisenstein En 1930, il va partir aux USA avec un contrat à la Paramount, sauf que tous les scénarios qu’il écrit vont être rejetés, il voit alors son contrat résilié. Avant de partir, il va travailler sur « Que Viva Mexico », qui ne sera jamais achevé. Il revient en URSS et découvre un tout nouveau paysage cinématographique : on condamne tout ce qu’il représentait. Ses projets en général sont rejetés, en 1935 il fait un film « Le pré de Béjine », interdit car fortement critiqué puis détruit par des bombardements. Eisenstein sera victime d’une lourde campagne de presse, on dénonce le coté abstrait et formaliste de ses films : il va devoir se livrer à son autocritique. Le but est de montrer que même un cinéaste comme Eisenstein doit se plier aux exigences du parti, doit servir à l’idéologie communiste. C’est une campagne qui met fin à toutes les recherches artistiques héritées des années 20. Il réalise ensuite « Alexandre Nevski ». Ce film est fondé sur l’appel au patriotisme devant la menace de la guerre.
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Son film phare sera « Ivan le terrible ». Composé de deux parties, elles auront chacune des réceptions différentes. Le projet est accepté et sera tourné à Moscou pour exalter le sentiment national. La première partie sort et obtient une réception très favorable (obtient même le prix Staline, consécration suprême). Mais dans la seconde partie, le personnage du Tsar va être dépeint de façon très différente et devient entouré d’une garde rapproché, devient fou. Certains ont pensé que le film s’attaquait directement à Staline, cette deuxième partie va être censurée (considérant que le peuple est laissé de coté dans le film, que l’image de Ivan est trop faible, trop indécise, il est même dit qu’il ressemble à Hamlet). Le film sera distribué seulement à la fin des années 50, en 1958. Une troisième partie a été tournée mais il n’en reste que quelques minutes. Le film joue beaucoup sur la musique, la couleur (très rouge). Il meurt en 1948, avant sa réhabilitation. La production cinématographique fait également beaucoup de films biographiques et des adaptations de Maxime Gorki (écrivain socialiste soviétique par excellence). Pendant la seconde guerre mondiale, l’URSS mise sa production sur le documentaire d’actualité et sur le cinéma de propagande pour souligner l’effort de guerre (films sur les raids aériens, les défenseurs de Stalingrad). La guerre sera une période de grande difficulté matériel. Les studios vont être évacués (souvent situés à l’ouest, menacés par l’avancée allemande). Après la guerre, les studios sont en mauvais état, le matériel est dépassé, il y a une pénurie de main d’œuvre, de matière première. C’est une période de grande difficulté ne serait ce que matériel. En plus de cela, la période est compliquée idéologiquement. « Ivan le terrible » sera victime d’une campagne contre le cosmopolitisme, contre les esthètes cosmopolites. Certains films seront directement condamnés. Dans les dernières années de Staline au pouvoir, le nombre de thèmes abordés va se réduire considérablement. Il faut célébrer la grandeur de l’union soviétique, célébrer les travailleurs. Il y a surtout une exaltation d’une union soviétique puissante, une dénonciation des influences étrangères. La biographie continue d’être omniprésente (de grands hommes du régime socialiste), ainsi que l’évocation des hauts faits militaires de la seconde guerre mondiale, de films célébrant le génie militaire de Staline (« Le chute de Berlin », « La bataille de Stalingrad »). La figure de Staline va apparaître au cinéma, un acteur sosie le représente. Des films qui traitent de la guerre froide apparaissent (« La question Russe »). ON continue également d’adapter les chefs d’œuvres du patrimoine national. Des spectacles filmés permettent de diminuer les frais. Après la mort de Staline, il va y avoir une période de dégel dans laquelle la production va reprendre assez rapidement, de façon vigoureuse. Elle va augmenter régulièrement, la pression du pouvoir va être un peu moins forte, ainsi que la pression idéologique. Certains des films qui étaient censurés sous Staline vont être autorisés en 1956, à partir de la condamnation des crimes de Staline par le parti communiste.
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L’un des films les plus important de ces années, qui a incarné aux yeux de l’occident le dégel dans le domaine cinématographique : « Quand passent les cigognes » (de Mikhaïl Kalatozov, ancien vice ministre du cinéma). Dans ce film il renoue très fortement avec un cinéma assez formaliste avec une écriture visuelle que certains caractérisent de tape à l’œil. Un couple est sur le point de se fiancer quand la guerre éclate. Le jeune homme s’engage dans l’armée, la jeune fille reste seule à l’arrière à Moscou. L’homme meurt mais la nouvelle de sa mort ne parvient pas à sa famille. Autre cinéaste important : l’ukrainien Donskoï, marqué par la ruralité. Il adapte les œuvres biographiques de Gorki. Dans les années 50, il va faire une nouvelle adaptation de « La mère ».
Le cinéma japonais Années 30-‐50 C’est une industrie structurée en grands studios, un cinéma structuré en genres tout comme le cinéma hollywoodien. Chaque studio, chaque compagnie a ses traditions, ses caractéristiques propres, des réalisateurs, acteurs et techniciens sous contrat (troupes associées à chaque studio).
Grandes compagnies historiques :
-‐ Nikkatsu (1912-‐1939, 1953) La plus ancienne des majors japonais, dissoute en 1939 par le gouvernement pour regrouper les compagnies sous le contrôle du gouvernement pendant la guerre, se reforme en 1953.
-‐ Shochiku (1920) À l’origine une société de vente de gâteaux et de confiseries dans un théâtre de Kyoto en 1896, ils sont devenus peu à peu propriétaires de troupes de théâtre. Ils ont en 1920 élargi leur activité à la production de films. Ils se spécialisent dans les « films de femmes, de famille ».
-‐ Toho (1935) « Trésor de l’est », se spécialise dans les films d’action, les comédies, les super productions, notamment les films de Kurosawa avec Mifune.
-‐ Daiei (1941) « Grands films », produira surtout des films de prestige comme les films de Kurosawa.
Deux compagnies tardives après la guerre :
-‐ Shintoho (1947-‐1961) A l’occasion des grèves rudes (plusieurs mois) à la Toho, des techniciens décident de faire scission et de créer la « nouvelle Toho ». Beaucoup de films de séries.
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-‐ Toei (1951) Films historiques et films de Yakuzas.
Structure en genres Le cinéma classique japonais est également très structuré en genres, bien que les cinéastes ne soient pas forcément spécialisés dans un genre particulier. Il y a une division entre les films « en costume » et les films « contemporains » (avec une catégorie entre deux). 3 grands genres :
-‐ Jidai-‐geki (film historique, Japon médiéval et féodal) L’intrigue est située avant 1868, début de la modernisation du Japon. Ces films se situent dans l’époque féodale, pendant le Shogunat.
-‐ Gendai-‐geki (Japon contemporain) Ces films traitent de la vie contemporaine japonaise, évoquant la guerre, les sujets de société. (« Le 7 samouraïs » … )
-‐ Meiji-‐mono (pendant l’ère Meiji) L’intrigue est située pendant l’ère Meiji, l’ère de modernisation du Japon ayant eu lieu à partir de 1868. C’est une période ou le Japon s’est ouvert à l’Occident, l’empereur a récupéré son autorité. C’est une époque ou le Japon se modernise, devient un état centralisé, un état très puissant, expansionniste. Quelques sous genres :
-‐ Shomin-‐geki (drame du petit peuple) -‐ Chambara (film de sabre) -‐ Yakuza-‐eiga (film de Yakuzas) -‐ Kaiju-‐eiga (film de monstres) -‐ Obake-‐mono (film de fantômes) -‐ Dessin animé (premier dessin animé : 1958 « La légende de madame Pai Niang » de
Yabushita)
Transition muet parlant Elle se fait très lentement, due à une grande résistance des Benshi (bonimenteurs) et du public attaché aux Benshis. Le premier film 100% parlant date de 1931, mais certains réalisateurs continueront à faire des films muets. Ozu par exemple sortira son premier film parlant e 1936.
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Après la première guerre mondiale, il y a une alternance de pouvoirs entre libéraux et militaristes. Ces derniers restent aux pouvoirs et vont amener la poussée expansionniste du Japon. Le Japon va occuper différents territoires notamment la Manchourie et à partir de 1937 déclarer la guerre à la Chine. C’est une période très marquée par la militarisation du Japon. Un politique nationale sera imposée au cinéma, il va être placé sous le contrôle direct du gouvernement. La censure va fortement se renforcer, le cinéma devient un cinéma militaire, notamment pendant la 2ème guerre mondiale. C’est une période peu propice à l’expression artistique personnelle de certains cinéastes, qui vont être contraints d’obéir au « devoir national ». Certains vont essayer de trouver une échappatoire en s’intéressant à des sujets historiques. Mizogushi va faire des biographies d’acteurs par exemple. Après 1945, après les bombes atomiques, la reddition est annoncée. Il y a une période d’occupation américaine, la seule de l’histoire Japonaise, c’est la première fois qu’elle subit une occupation étrangère. L’empereur n’aura qu’une autorité symbolique, les américains vont s’intéresser très directement au cinéma. Ils ne vont pas briser le système des compagnies qui leur permet de contrôler la production. Ils vont par contre instaurer une très forte censure. (Censure américaine de 1945 à 1952) Un organisme va examiner les scénarios, les films terminés, interdire plus de 300 films réalisés dans les années 30 et 40, détruire les copies de ces films ainsi que les négatifs qui propageaient l’esprit féodal japonais. Notre connaissance du cinéma japonais est donc lacunaire, beaucoup de films n’ont pas été conservés et ont disparus. Les USA encouragent les films qui critiquaient la guerre, le militarisme.
Évolution de la production Il y aura une augmentation très forte : 69 films en 1946, 555 en 1960. De nouvelles tendances apparaissent dans le cinéma, comme des films à tendances sociales, des films de monstres issus de l’ère atomique (Godzilla, réalisé par Honda en 1954) et des films de Yakuzas. Premier long métrage animé en 1958). Le cinéma japonais va être reconnu au niveau international. Dans les années 20/40, le cinéma japonais ne s’exportait pas, il était important localement. Un certain nombre de films vont être primés dans les festivals, commentés par les critiques. Le film marquant la révélation du cinéma japonais à l’étranger sera Rashomon de Kurosawa en 1951, qui a eu le Lion d’or de Venise et l’Oscar du meilleur film étranger. C’est la première fois qu’un film japonais gagne un tel prix. Le Japon va songer à exporter les films, le problème étant qu’il y a un manque de coordination entre les majors. Le Japon va créer un organisme en 1957 qui va être « Unijapan Film », un organisme central destiné à l’exportation des films japonais.
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Le Japon va se contrer sur les films à costumes, exotiques pour le public étranger. Ils vont penser dans un premier temps que les films à sujet contemporains ne les intéresseraient pas. Les films d’Ozu ne seront diffusés que bien après sa mort par exemple. C’est un moment marquant dans l’histoire du cinéma japonais, et surtout dans sa perception critique. Mizoguchi, Ozu et Kurosawa sont les plus grands réalisateurs de l’époque. Ils ont tournés exclusivement au Japon ; même lorsqu’ils adaptaient des ouvrages étrangers. Ils sont venus assez tard à la couleur.
Kurosawa Réalisateur prestige de la Toho, son premier film est « La légende du grand judo » en 1943, faisant parti des films interdits par les américains. Il met beaucoup en scène des hommes, son acteur fétiche étant Mifune (vedette maison de la Toho) qui tournera 16 films avec lui. La majorité de ses films sont des Gendai-‐geki. Il est connu plus sur ses fresques épiques que sur ses reconstructions du Japon contemporain. Il a réalisé beaucoup d’adaptation d’œuvres littéraires occidentales, mais qu’il a systématiquement transposé au Japon. Il a adapté McBeth dans « Le château de l’araignée », ainsi que « L’idiot » de Dostoïevski… Le film Rashomon (1951) est celui qui l’a révélé lui et le cinéma japonais au reste du monde. C’est une adaptation de deux nouvelles d’un japonais (Akutagawa). Ce qui a marqué les critiques est la proximité avec les recherches littéraires du dramaturge Italien Pirandello. En 1957 il adapte une pièce de McBeth : « Le château de l’araignée ». Il transpose McBeth dans le japon du 16ème siècle en pleine guerre civile. C’est un mélange entre l’adaptation fidèle de Shakespeare et en même temps un Gendai-‐geki documenté et en costume. Il utilise beaucoup les éléments naturels. Les films de Kurosawa connaitront des remakes occidentaux. (Voir poly)
Mizoguchi Grande prédilection pour le Meiji-‐mono (sauf « La rue de la honte »). Ses films sont des adaptations de romans japonais, bien que certains de ses premiers films soient adaptés de romans étrangers. Il privilégie la question des femmes et la question de l’oppression, de la condition sociale. Beaucoup de films s’intéressent au statut des Geisha. Il a souvent recours au merveilleux, il met en scène des histoires ou le surnaturel a un rôle important. Les critiques ont admiré dans les années 50 son attitude de détachement, son art de la contemplation, il intervient le moins possible dans la dramaturgie, il se tient à distance des personnages et des drames. La caméra bien que mobile est assez lente : beaucoup de plans longs.
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« Femmes de la nuit» se passe au 11ème siècle. Une femme va rejoindre son mari en traversant la forêt avec son fils et sa fille. Mais ils se font enlever, la famille est séparée. La femme est vendue comme courtisane à l’autre bout du Japon, ses enfants deviennent des esclaves d’un intendant.
Ozu Résiste à l’arrivée du parlant, tout comme la couleur. Films essentiellement fondés sur des scénarios originaux. Les films sont inspirés de la vie ordinaire. Le style d’Ozu est l’un des plus reconnaissables dans l’histoire du cinéma. Il refuse toute la grammaire cinématographique.
La nouvelle vague 1959 : « Les cousins », « Le Beau Serge » de Chabrol Festival de Cannes : « Les 400 Coups » et « Hiroshima mon Amour » Agnès Varda Aborde directement le cinéma par le long métrage, elle n’a réalisé aucun court métrage. Elle réalise « La Pointe-‐Courte » de 1954 à 1956. Elle filme la vie quotidienne d’un quartier de pêcheur, et en parallèle la crise d’un couple. C’est un nouvel exemple de film à petit budget, hors système comme l’était « Le silence de la mer ». Ce film a été tourné en décor naturel et en coopérative (Ciné Tamaris). Il est réalisé complètement en dehors du circuit industriel traditionnel, sans autorisation de tournage (car ne respecte pas le CNC). Le film est tourné en 35mm, le format standard commercial qui permettait d’exploiter les films dans les salles. Il y avait aussi le 16mm qui était très utilisé dans les salles non commerciales (tout un circuit), considéré comme un format amateur. Le film sera malgré son tournage en 35mm comme film amateur, aucun distributeur ne pourra le prendre. Après ce film, Varda va se tourner vers le court métrage. Roger Vadim Longtemps assistant de Marc Allégret, réalise en 1956 « Et Dieu créa la femme » avec Brigitte Bardot, film qui lui donnera sa dimension mythique. Elle interprète un personnage de jeune femme libre, se libérant des conventions sociales, innocente et insolente. Tourné en format large, cinémascope et couleur, filmé sur la côte d’azur. Produit par Raoul Levy. La mise en scène est assez plate, seul le type de personnage est novateur. Ce film va être la version cinématographique de la nouvelle vague qu’avait défini Françoise Girou, la jeunesse libérée des conventions sociales, la franchise des mœurs.
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Critiques des cahiers du cinéma : Truffaut, Rohmer, Chabrol, Godard L’expérience de la critique devient le premier critère d’appartenance à la nouvelle vague. Ils développent la politique des auteurs. Notamment un article de Truffaut sera fondamental (plus un pamphlet qu’un article) en janvier 1954 (n°31). Elle est très sélective, fondée sur des jugements de valeurs. L’auteur est le metteur en scène. Cette politique repose plus ou moins sur la mauvaise foi : il n’y a pas d’œuvres, il n’y a que des auteurs. Un film raté d’un auteur sera toujours plus intéressant qu’un film apparemment réussi d’un réalisateur. La nouvelle vague a été très fortement attaquée, la production était très hostile à ce genre. Attaquée sur l’amateurisme, l’idée d’un cinéma fait par des amateurs (article de Robert Benaïoum, dans Positif). L’apolitisme du mouvement est critiqué lui aussi (controversé pendant la guerre d’Algérie de refuser d’aborder les problèmes de société).