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ATLAS DES D.O.M. LA GUYANE Planche 5 1 - LE DISPOSITIF D'ENSEMBLE On distingue traditionnellement en Guyane française les Terres Basses 16 % de la superficie totale, cais- sons 1 à 10) que constitue la frange littorale de sédiments quaternaires et actuels, des Terres Hautes (94 % ) qui correspondent à un compartiment de la croûte terrestre consolidé dès avant le Paléozoïque, où, depuis deux milliards d'années au moins, une histoire géologique complexe et un grand nombre de phases d'érosion extrê- mement active, ont laissé un modelé caractéristique des boucliers. A - Les Terres Basses Le long du littoral, s'étirent 370 000 ha de pripris, marécages de plaine de niveau de base, sur fond d'argi- les marines {ait. 2 à 3 m, caissons 2, 3, 41 surtout à l'Est de Cayenne ; puis 75 000 ha de savanes, surtout à l'Ouest de Cayenne {ait. 6-12 m, caissons 5, 6) ; enfin d'autres niveaux sableux, jusque vers 25-30 m, en majo- rité boisés {caisson 7). La largeur moyenne de cette bande varie de 5 à 40 km (moyenne : 18 km). Le paysage est sillonné d'anciens cordons de sable marquant des lignes de rivages successives. Les galeries forestières, le ·long des cours d'eau, participent au cloisonnement. Çà et là, pointent les roches du vieux socle en forme de collines généreusement appelées « montagnes ». C'est le cas à Organabo et notamment dans l'ile de Cayenne, qui est ainsi nommée car, ancien archipel converti par la sédimentation quaternaire en presqu'île, on peut encore en faire le tour par des chenaux de marée (carton b, planche« Relief »l. En avant du rivage pratiquement rectiligne, écueils et îlots lpar exemple les Ilets de Rémire ou les lies du Salut en face de Kourou), montrent que le plateau continental s'enfonce insensiblement sous l'Océan jusqu'à 70 miles au large. La côte est longée par le Courant des Guyanes qui porte lentement au Nord-Ouest des eaux peu salées et turbides, ce qui explique l'envasement tristement célèbre de presque tout le front de mer. Aussi ce dernier est-il bordé d'une mangrove (caisson 2), originale car presque entièrement composée de palétuviers blancs (Avicennia nitida), alors que les mangliers (Rhizophora mangfe) ne forment qu'un rideau sur les berges des estuaires. Le trait de côte varie, avec des phases d'envasement et de dévasement qui semblent bien liées au cycle undécennal des taches du soleil IM. BOYÉ et B. CHOUBERT, 1959). En fond de tableau, vu de la mer, on apercoit le monde collinaire qui marque le début des Terres Hautes. Comme dans l'ile de Cayenne, surtout vers l'Est entre Approuague et Oyapock, des chaînons, voire des pitons isolés, émergent des sédiments de la plaine littorale de niveau de base. Si l'on compare la carte géomorpholo- gique à la carte géologique, on peut remarquer que le plus souvent, ces sommets de quelques centaines de mètres correspondent à des Roches Vertes. Leurs silhouettes adoucies, aux limites floues, passent éventuelle- ment à des formes à sommets plats, cuirassés de latérites, dominant des versants disséqués en crêtes aiguës. Ces Terres Basses sont traitées plus en détail sur la planche à 1 /350 000 : « Plaine côtière, Sédimento- logie ». B - Les Terres Hautes Quant au reste du territoire (94 %) malgré la monotonie des surfaces d'aplanissement, aggravée par la chape forestière épaisse de 25 à 40 met par une profonde altération de toutes les roches, on peut y distinguer quatre autres ensembles géographiques {carton a), correspondant assez étroitement aux quatre comparti- ments pétrographiques du bouclier précambrien, tels que décrits et présentés, dans la planche« Géologie »et sa notice. 1 - La Chaîne Septentrionale Elle correspond au domaine géosynclinal du Nord (fragment de la chaîne guyano-éburnéenne de B. CHOUBERTJ où se sont déposés des sédiments, d'abord flyschoïdes (caisson 15), puis plus nettement détriti- ques continentaux (série Bonidoro, caisson 18), enfin argilo-schisteux de caractère transgressif {série de l'Orapu, caissons 12, 13, 14). Cette sédimentation, qui paraît être la dernière dans le Précambrien de Guyane française a été plissée et modérément métamorphisée à l'occasion de la granitisation d'âge Caraïbe. 2 - Le Massif Central guyanais C'est la région de l'ancienne plateforme et de sa couverture cratonisée {voir notice, planche« Géologie ») au Nord des montagnes entre Inini et Camopi, où structure et pétrographie ont enregistré tous les mégacycles d'orogénèse et de granitisation depuis l'âge Hyléen jusqu'à l'âge Caraïbe compris. Si l'on considère les types de matériaux qui en ont résulté, la variété des roches cristallines est considérable : gabbros et diorites, quartzi- tes à amphiboles, migmatites des séries métamorphiques les plus anciennes connues (série de l'ile de Cayenne, caisson 21), Granites Caraïbes, les plus feldspathiques de tous les granitoïdes de Guyane, y compris le faciès porphyrique. Entre les deux termes chronologiques, les puissantes formations, dites« Paramaca », dans l'ensemble d'origines volcaniques (magmatisme basique, matériaux pyroclastiques, légende 19) ont été remobilisées par la granitisation d'âge dit« Guyanais »et il en est résulté toute une gamme de Roches Vertes par métamorphisme. Les Granites Guyanais eux-mêmes sont pauvres en feldspaths potassiques, ils sont fré- quemment migmatitisés et parcourus de nombreux filons d'aplites et de pegmatites. 3 - Les Montagnes lnini-Camopi Récemment, B. CHOU BERT (1974) écrit:« Il convient, après les études détaillées qui ont été faites, de distinguer ... la zone lnini-Camopi, montagneuse, séparant le Massif Central de la Pénéplaine Méridionale ... » entre le Lawa et !'Oyapock, d'Ouest en Est par les bassins de l'lnini, de la Haute Mana, de l'lnipi et du Camopi inférieur. C'est la zone des plus hauts sommets, avec un cloisonnement tectonique majeur, correspondant à un synclinorium truffé de granites et de roches plus anciennes mais aussi de sédiments Orapu, surtout à l'Est. 4 - La Pénéplaine Méridionale Couvrant à peu près le 1 /5 méridional du pays, elle est presque exclusivement granitique et d'âge Caraïbe, encore que les Granites Guyanais y occupent une certaine place surtout à l'Ouest; d'autres roches, plus anciennes, sont localement représentées. Extrêmement plate dans son ensemble, elle présente néan- moins le plus grand nombre d'inselbergs de roche nue {caisson 28). Si l'on reprend ces quatre compartiments pétrographiques, en les situant sur la carte des dislocations et de la schistosité {carton b) extraite de B. CHOUBERT, on remarque qu'il s'agit manifestement des régions structurales, indiquées sur la carte de la planche« Géologie ». Mais ce qui importe du point de vue géomor- phologique, c'est le fait que ce schéma général des directions de fractures, complété par celui des litages, des schistosités et de tous les systèmes de diaclases associés, commande strictement le tracé des réseaux hydro- graphiques !par exemple la quasi rectitude de la vallée de !'Oyapock sur plus de 200 km) et jusque dans les détails des biefs : répartition des sauts, éparpillement des lits fluviaux en bras multiples lpar exemple aux Abat- tis Cottica sur le Lawa). On peut même en déduire qu'aucune des boucles de rivières, pourtant innombrables, n'est un méandre véritable, même lorsque les lois de l'hydrodynamique ont normalement joué pour arrondir les angles d'entrecroisement des directions structurales concernées. Il - L'ORIGINALITE DES FORMES DU TERRAIN EN RAISON DE L'ALTERATION A - La "tunique tropicale" ou le rôle morphologique de l'altération des roches Plus déterminant encore est le rôle de la moindre des discontinuités pour la pénétration plus ou moins profonde des actions d'altération physico-chimique. Ces actions, essentiellement biochimiques au sol et dans la zone d'action des racines, et hydrolytiques partout, y compris en profondeur, se combinent avec les varia- tions de l'oxydation au rythme du battement des nappes phréatiques et réagissent même au profil de ces nap- pes {F. LELONG, 1969). Il en résulte la formation d'une couche altérée, variable en épaisseur selon les proprié- tés lithologiques des roches mères, mais généralisée, ou presque sur toute la topographie. C'est la« tunique tropicale», selon l'excellente formule de R. BARBIER (1957). Cependant, celle-ci s'applique d'autant plus pro- fondément que des fractures permettent aux agents d'altération de pénétrer loin avec l'eau chaude (de l'ordre de 26° C), qui est à la fois agent et véhicule des produits d'altération. Tout dépend alors de la plus ou moins grande susceptibilité des minéraux des roches à l'altération ; ainsi les Roches Vertes, alcalines et riches en ferro-magnésiens, sont les plus sensibles, alors que les quartzites sont presque toujours en relief du fait que le quartz est le plus invariant des minéraux sous climat chaud et humide. De même, une roche à feldspaths potassiques se défend mieux qu'une roche à feldspaths calcosodiques. Ce sont des règles maintenant bien connues. C'est pourquoi le dispositif géologique d'ensemble d'un pays est à prendre en compte par le géomorpho- logue, puisqu'il règle la répartition des divers types de roches, à considérer comme autant de matériaux, cha- cun avec son altérabilité spécifique du point de vue minéralogique. Pour autant, dans les processus d'altéra- tion, tout dépend aussi du taux de fracturation des roches ; par exemple, tous les schistes, les gneiss bien lités, les migmatites sont plus altérables que les autres roches. A cet égard, la maille d'un réseau de diaclases, ou si l'on préfère, la fréquence des diaclases dans l'unité de volume, la géométrie des plans de discontinuité et leur inclinaison par rapport à la verticale, conditionnent l'altération différentielle. C'est pourquoi, lorsque tou- tes sortes de discontinuités convergent en un point, il se produit une sorte de focalisation de tous les effets d'altération et de développement d'un alvéole de roche pourrie IJ. TRICART, 1961). Inversement, une fracture nette mais isolée, attire une altération en cloison, avec trace linéaire en surface. Si le plan de la discontinuité est courbe, la cloison l'est aussi. Or, toute altération, quelle qu'elle soit, a pour effet premier d'ameublir la roche mère, non seulement par décohésion de ses bâtis cristallins, mais encore par transformation du matériau en produisant des cristaux de néogénèse, le plus souvent argileux lillite, kaolinite), ou sous forme d'oxydes métalliques plus ou moins hydra- tés. Autrement dit, à la place de la roche mère dure, vient une altérite meuble, le plus souvent argileuse, avec plus ou moins de sable quartzeux résiduel. Ainsi, d'un compartiment altéré à son voisin intact ou moins altéré, s'instaure un couple roche dure - roche tendre, condition nécessaire pour que n'importe quel agent d'érosion mécanique puisse opérer une érosion différentielle. Voilà pourquoi, en Guyane française, comme d'ailleurs dans tous les pays chauds et humides à couver- ture forestière dense, les formes de la topographie sont directement inféodées à la fois à la lithologie et à la structure des roches. C'est au point que le double masque de la forêt (35 à 40 m de hauteur) et de la tunique d'altération 120 à 50 m de profondeur, parfois plus) ne cache pas les caractéristiques du fond rocheux {bedrock en anglais) lorsque l'oeil s'est habitué à distinguer, sur une photographie aérienne, les traits morphologiques du paysage, spécifiques de chaque type de roche {B. CHOUBERT, 1957). Lorsque les processus de l'altération se combinent, ou se sont combinés dans le passé, de telle sorte que les phénomènes d'oxydation soient privilégiés, apparaissent alors des indurations de divers types : nodules, concrétions, cicatrices cimentées par des oxydes, cuirasses de nappe ou de versant, cuirasses sommitales de concentration relative ; c'est-à-dire des matériaux durs. Ce mot de cuirasse évoque la protection et, par rap- port à l'altérite meuble qui existe en-dessous, du fait de l'altération profonde moins oxydante, le couple roche dure - roche tendre est à nouveau inversé. C'est pourquoi en Guyane, les Roches Vertes en particulier sont, ici ou là, coiffées de tables de bauxite, par exemple le Paramaca inférieur des Montagnes de Kaw, au Sud-Est de GEOMORPHOLOGIE Cayenne, ou bien le Paramaca supérieur des Montagnes Tortue sur le Haut Orapu ; de même à l'Ouest et au Nord de Maripasoula, sur le Lawa. Plus significatif encore est l'un des points culminants de la Guyane fran- caise avec 830 m d'altitude, par N et 53°4' W, appelé « Sommet Tabulaire », car c'est une cuirasse bauxito-ferrugineuse plane sur un massif gabbroïque, d'âge peut-être Hyléen, voire plus ancien. B - Les provinces géomorphologiques En fait, les provinces pétrographiques et structurales se traduisent dans les paysages par autant de pro- vinces géomorphologiques. 1 - Les formes de la Chaîne Septentrionale Principale région des plissements du système Orapu - Bonidoro, la Chaîne est bien développée (25 à 35 km de large) à l'Ouest de Sinnamary ; elle se retrécit vers l'Est et même se trouve pincée sur les méridiens de l'ile de Cayenne, entre les mornes résiduels de roches hyléennes qui arment la presqu'île et le craton central plus au Sud. Les schistes y prédominent, donnant des alignements de collines de quelques dizaines de mètres, allongées, dissymétriques, coupées de fractures, au total en dents de peigne (caisson 13). a - Les formes et les paysages en terrains schisteux Cependant, chaque type de schiste présente son allure propre, à cause d'un relief, d'un réseau hydrogra- phique et aussi d'une couverture végétale qui lui sont propres. Par exemple, les schistes à séricite de la Série Orapu, les moins métamorphisés, offrent un dispositif de collines elliptiques, compartimentées en amandes ou en haricots (B. CHOU BERT, 1974). Mais s'ils sont plus métamorphisés, les crêtes sont plus aiguës et l'image en dents de peigne est plus précise ; ainsi pour les roches à faciès schisto-gréseux flyschoïde sur la bordure septentrionale du synclinorium, particulièrement en arrière des Terres Basses, entre Cayenne et lracoubo, quoique le dessin des dents de peigne y soit parfois plus complexe et plus flou {caisson 15). Autre exemple dans la Série Bonidoro : il existe vers le haut de la sédimentation une succession de grès fins schisteux verts et de schistes supérieurs proprement dits, séparés par des arkoses. Alors que les schistes verts donnent des crê- tes bien allongées comme la stratification et des vallées marécageuses à fond plat, les schistes supérieurs, mal- gré un faciès lithologique très uniforme, ont un relief plus irrégulier, avec des vallées encaissées et une végéta- tion plus touffue. Il y a toutefois quelques traits communs à ces morphologies schisteuses variées {voir photographies aériennes, notice planche « Relief »). - Comme ce sont des roches tendres, l'érosion y travaille facilement. Le réseau hydrographique y est très dense mais jamais dendritique, parce qu'il est influencé par la stratification, la schistosité, les plans de diacla- ses qui règlent en particulier la dissymétrie des collines. Elles ont en effet un versant raide, plus ou moins recti- ligne et bien draîné, mais rebelle à l'érosion mécanique, alors que le versant opposé est en pente plus douce avec une tendance à l'évolution vers des formes concaves jusqu'au talweg, que l'on peut qualifier de subsé- quent, puisqu'il longe le pied rectiligne de la crête suivante. C'est pourquoi les vallées, même étroites, sont à fonds plus ou moins plats et toujours assez marécageux car les pentes longitudinales sont faibles. Toutefois, si le plan de diaclase, qui commande le versant le moins incliné, recoupe des joints de stratification ou bien des plans de schistosité plus ou moins proches de l'horizontale, il se forme des nappes phréatiques perchées, par- fois plusieurs superposées. Dès lors, si la roche mère schisteuse a donné une altérite riche en hydroxydes de fer, les sourcins alimentent des cuirassements de versant. Ceux-ci, plus durs, forment des épaulements en éperons, parfois en marches d'escalier. C'est du moins ce que l'on peut observer, y compris sous des averses de l'ordre de 100 mm dans une heure, dans le bassin de la Rivière Orapu, notamment dans les vallées de ses affluents de rive droite (par exemple, la Crique Virgile ou la Crique Tibourou). - La nature essentiellement argileuse des sols, avec comme minéral prédominant la kaolinite, favorise une forêt dense, relativement haute, qui protège les sols de l'érosion. Au sol, la lumière est tamisée ; peu d'essences de lumière, une litière épaisse de quelques feuilles seulement, font que la circulation est assez facile, mis à part les fûts d'arbres morts tombés. Par contre, les talwegs marécageux sont très pénibles à fran- chir en raison d'une densité plus élevée de plantes, aggravée par l'existence de racines aériennes des arbres hygrophiles, soit en échasses, soit en genou, c'est-à-dire en boucles qui sortent du sol. Les vallées des cours d'eau plus importants, le plus souvent sur faille ou fracture, sont plus larges, à fond plat {fiat, en anglais) et à bords abrupts, mais il n'y a pas de terrasse, du moins en règle générale. Fig. 1. Structures concentriques dans les Granites Guyanais. d'après G. C. BROUWER, 1964. IExt. Carte Géologique à 1/100 000, file Paul lsnard. GUYANE). Alluvwns actuelles (a ) ; Terrasses fluviatiles ( t ) ; Amph1bolites Paramaca ( p) ; Filons de Dolérites ((A)) ; Pegmatites ( n) ; Granites Guyanais ( F 2 ) ; Migmatites Guyanais : gneiss ( V 2 /l } ; facies amphibolitiques ( F 2 p) 1

GEOMORPHOLOGIE Il - L'ORIGINALITE DES FORMES DU …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers17-01/42149.pdf · ATLAS DES D.O.M. LA GUYANE Planche 5 1 - LE DISPOSITIF

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  • ATLAS DES D.O.M. LA GUYANE Planche 5

    1 - LE DISPOSITIF D'ENSEMBLE

    On distingue traditionnellement en Guyane française les Terres Basses 16 % de la superficie totale, cais-sons 1 à 10) que constitue la frange littorale de sédiments quaternaires et actuels, des Terres Hautes (94 % ) qui correspondent à un compartiment de la croûte terrestre consolidé dès avant le Paléozoïque, où, depuis deux milliards d'années au moins, une histoire géologique complexe et un grand nombre de phases d'érosion extrê-mement active, ont laissé un modelé caractéristique des boucliers.

    A - Les Terres Basses

    Le long du littoral, s'étirent 370 000 ha de pripris, marécages de plaine de niveau de base, sur fond d'argi-les marines {ait. 2 à 3 m, caissons 2, 3, 41 surtout à l'Est de Cayenne ; puis 75 000 ha de savanes, surtout à l'Ouest de Cayenne {ait. 6-12 m, caissons 5, 6) ; enfin d'autres niveaux sableux, jusque vers 25-30 m, en majo-rité boisés {caisson 7). La largeur moyenne de cette bande varie de 5 à 40 km (moyenne : 18 km). Le paysage est sillonné d'anciens cordons de sable marquant des lignes de rivages successives. Les galeries forestières, le ·long des cours d'eau, participent au cloisonnement. Çà et là, pointent les roches du vieux socle en forme de collines généreusement appelées « montagnes ». C'est le cas à Organabo et notamment dans l'ile de Cayenne, qui est ainsi nommée car, ancien archipel converti par la sédimentation quaternaire en presqu'île, on peut encore en faire le tour par des chenaux de marée (carton b, planche« Relief »l.

    En avant du rivage pratiquement rectiligne, écueils et îlots lpar exemple les Ilets de Rémire ou les lies du Salut en face de Kourou), montrent que le plateau continental s'enfonce insensiblement sous l'Océan jusqu'à 70 miles au large. La côte est longée par le Courant des Guyanes qui porte lentement au Nord-Ouest des eaux peu salées et turbides, ce qui explique l'envasement tristement célèbre de presque tout le front de mer. Aussi ce dernier est-il bordé d'une mangrove (caisson 2), originale car presque entièrement composée de palétuviers blancs (Avicennia nitida), alors que les mangliers (Rhizophora mangfe) ne forment qu'un rideau sur les berges des estuaires. Le trait de côte varie, avec des phases d'envasement et de dévasement qui semblent bien liées au cycle undécennal des taches du soleil IM. BOYÉ et B. CHOUBERT, 1959).

    En fond de tableau, vu de la mer, on apercoit le monde collinaire qui marque le début des Terres Hautes. Comme dans l'ile de Cayenne, surtout vers l'Est entre Approuague et Oyapock, des chaînons, voire des pitons isolés, émergent des sédiments de la plaine littorale de niveau de base. Si l'on compare la carte géomorpholo-gique à la carte géologique, on peut remarquer que le plus souvent, ces sommets de quelques centaines de mètres correspondent à des Roches Vertes. Leurs silhouettes adoucies, aux limites floues, passent éventuelle-ment à des formes à sommets plats, cuirassés de latérites, dominant des versants disséqués en crêtes aiguës.

    Ces Terres Basses sont traitées plus en détail sur la planche à 1 /350 000 : « Plaine côtière, Sédimento-logie ».

    B - Les Terres Hautes

    Quant au reste du territoire (94 %) malgré la monotonie des surfaces d'aplanissement, aggravée par la chape forestière épaisse de 25 à 40 met par une profonde altération de toutes les roches, on peut y distinguer quatre autres ensembles géographiques {carton a), correspondant assez étroitement aux quatre comparti-ments pétrographiques du bouclier précambrien, tels que décrits et présentés, dans la planche« Géologie »et sa notice.

    1 - La Chaîne Septentrionale

    Elle correspond au domaine géosynclinal du Nord (fragment de la chaîne guyano-éburnéenne de B. CHOUBERTJ où se sont déposés des sédiments, d'abord flyschoïdes (caisson 15), puis plus nettement détriti-ques continentaux (série Bonidoro, caisson 18), enfin argilo-schisteux de caractère transgressif {série de l'Orapu, caissons 12, 13, 14). Cette sédimentation, qui paraît être la dernière dans le Précambrien de Guyane française a été plissée et modérément métamorphisée à l'occasion de la granitisation d'âge Caraïbe.

    2 - Le Massif Central guyanais

    C'est la région de l'ancienne plateforme et de sa couverture cratonisée {voir notice, planche« Géologie ») au Nord des montagnes entre Inini et Camopi, où structure et pétrographie ont enregistré tous les mégacycles d'orogénèse et de granitisation depuis l'âge Hyléen jusqu'à l'âge Caraïbe compris. Si l'on considère les types de matériaux qui en ont résulté, la variété des roches cristallines est considérable : gabbros et diorites, quartzi-tes à amphiboles, migmatites des séries métamorphiques les plus anciennes connues (série de l'ile de Cayenne, caisson 21), Granites Caraïbes, les plus feldspathiques de tous les granitoïdes de Guyane, y compris le faciès porphyrique. Entre les deux termes chronologiques, les puissantes formations, dites« Paramaca », dans l'ensemble d'origines volcaniques (magmatisme basique, matériaux pyroclastiques, légende 19) ont été remobilisées par la granitisation d'âge dit« Guyanais »et il en est résulté toute une gamme de Roches Vertes par métamorphisme. Les Granites Guyanais eux-mêmes sont pauvres en feldspaths potassiques, ils sont fré-quemment migmatitisés et parcourus de nombreux filons d'aplites et de pegmatites.

    3 - Les Montagnes lnini-Camopi

    Récemment, B. CHOU BERT (1974) écrit:« Il convient, après les études détaillées qui ont été faites, de distinguer ... la zone lnini-Camopi, montagneuse, séparant le Massif Central de la Pénéplaine Méridionale ... » entre le Lawa et !'Oyapock, d'Ouest en Est par les bassins de l'lnini, de la Haute Mana, de l'lnipi et du Camopi inférieur. C'est la zone des plus hauts sommets, avec un cloisonnement tectonique majeur, correspondant à un synclinorium truffé de granites et de roches plus anciennes mais aussi de sédiments Orapu, surtout à l'Est.

    4 - La Pénéplaine Méridionale

    Couvrant à peu près le 1 /5 méridional du pays, elle est presque exclusivement granitique et d'âge Caraïbe, encore que les Granites Guyanais y occupent une certaine place surtout à l'Ouest; d'autres roches, plus anciennes, sont localement représentées. Extrêmement plate dans son ensemble, elle présente néan-moins le plus grand nombre d'inselbergs de roche nue {caisson 28).

    Si l'on reprend ces quatre compartiments pétrographiques, en les situant sur la carte des dislocations et de la schistosité {carton b) extraite de B. CHOUBERT, on remarque qu'il s'agit manifestement des régions structurales, indiquées sur la carte de la planche« Géologie ». Mais ce qui importe du point de vue géomor-phologique, c'est le fait que ce schéma général des directions de fractures, complété par celui des litages, des schistosités et de tous les systèmes de diaclases associés, commande strictement le tracé des réseaux hydro-graphiques !par exemple la quasi rectitude de la vallée de !'Oyapock sur plus de 200 km) et jusque dans les détails des biefs : répartition des sauts, éparpillement des lits fluviaux en bras multiples lpar exemple aux Abat-tis Cottica sur le Lawa). On peut même en déduire qu'aucune des boucles de rivières, pourtant innombrables, n'est un méandre véritable, même lorsque les lois de l'hydrodynamique ont normalement joué pour arrondir les angles d'entrecroisement des directions structurales concernées.

    Il - L'ORIGINALITE DES FORMES DU TERRAIN EN RAISON DE L'ALTERATION

    A - La "tunique tropicale" ou le rôle morphologique de l'altération des roches

    Plus déterminant encore est le rôle de la moindre des discontinuités pour la pénétration plus ou moins profonde des actions d'altération physico-chimique. Ces actions, essentiellement biochimiques au sol et dans la zone d'action des racines, et hydrolytiques partout, y compris en profondeur, se combinent avec les varia-tions de l'oxydation au rythme du battement des nappes phréatiques et réagissent même au profil de ces nap-pes {F. LELONG, 1969). Il en résulte la formation d'une couche altérée, variable en épaisseur selon les proprié-tés lithologiques des roches mères, mais généralisée, ou presque sur toute la topographie. C'est la« tunique tropicale», selon l'excellente formule de R. BARBIER (1957). Cependant, celle-ci s'applique d'autant plus pro-fondément que des fractures permettent aux agents d'altération de pénétrer loin avec l'eau chaude (de l'ordre de 26° C), qui est à la fois agent et véhicule des produits d'altération. Tout dépend alors de la plus ou moins grande susceptibilité des minéraux des roches à l'altération ; ainsi les Roches Vertes, alcalines et riches en ferro-magnésiens, sont les plus sensibles, alors que les quartzites sont presque toujours en relief du fait que le quartz est le plus invariant des minéraux sous climat chaud et humide. De même, une roche à feldspaths potassiques se défend mieux qu'une roche à feldspaths calcosodiques. Ce sont là des règles maintenant bien connues.

    C'est pourquoi le dispositif géologique d'ensemble d'un pays est à prendre en compte par le géomorpho-logue, puisqu'il règle la répartition des divers types de roches, à considérer comme autant de matériaux, cha-cun avec son altérabilité spécifique du point de vue minéralogique. Pour autant, dans les processus d'altéra-tion, tout dépend aussi du taux de fracturation des roches ; par exemple, tous les schistes, les gneiss bien lités, les migmatites sont plus altérables que les autres roches. A cet égard, la maille d'un réseau de diaclases, ou si l'on préfère, la fréquence des diaclases dans l'unité de volume, la géométrie des plans de discontinuité et leur inclinaison par rapport à la verticale, conditionnent l'altération différentielle. C'est pourquoi, lorsque tou-tes sortes de discontinuités convergent en un point, il se produit une sorte de focalisation de tous les effets d'altération et de développement d'un alvéole de roche pourrie IJ. TRICART, 1961). Inversement, une fracture nette mais isolée, attire une altération en cloison, avec trace linéaire en surface. Si le plan de la discontinuité est courbe, la cloison l'est aussi.

    Or, toute altération, quelle qu'elle soit, a pour effet premier d'ameublir la roche mère, non seulement par décohésion de ses bâtis cristallins, mais encore par transformation du matériau en produisant des cristaux de néogénèse, le plus souvent argileux lillite, kaolinite), ou sous forme d'oxydes métalliques plus ou moins hydra-tés. Autrement dit, à la place de la roche mère dure, vient une altérite meuble, le plus souvent argileuse, avec plus ou moins de sable quartzeux résiduel. Ainsi, d'un compartiment altéré à son voisin intact ou moins altéré, s'instaure un couple roche dure - roche tendre, condition nécessaire pour que n'importe quel agent d'érosion mécanique puisse opérer une érosion différentielle.

    Voilà pourquoi, en Guyane française, comme d'ailleurs dans tous les pays chauds et humides à couver-ture forestière dense, les formes de la topographie sont directement inféodées à la fois à la lithologie et à la structure des roches. C'est au point que le double masque de la forêt (35 à 40 m de hauteur) et de la tunique d'altération 120 à 50 m de profondeur, parfois plus) ne cache pas les caractéristiques du fond rocheux {bedrock en anglais) lorsque l'œil s'est habitué à distinguer, sur une photographie aérienne, les traits morphologiques du paysage, spécifiques de chaque type de roche {B. CHOUBERT, 1957).

    Lorsque les processus de l'altération se combinent, ou se sont combinés dans le passé, de telle sorte que les phénomènes d'oxydation soient privilégiés, apparaissent alors des indurations de divers types : nodules, concrétions, cicatrices cimentées par des oxydes, cuirasses de nappe ou de versant, cuirasses sommitales de concentration relative ; c'est-à-dire des matériaux durs. Ce mot de cuirasse évoque la protection et, par rap-port à l'altérite meuble qui existe en-dessous, du fait de l'altération profonde moins oxydante, le couple roche dure - roche tendre est à nouveau inversé. C'est pourquoi en Guyane, les Roches Vertes en particulier sont, ici ou là, coiffées de tables de bauxite, par exemple le Paramaca inférieur des Montagnes de Kaw, au Sud-Est de

    ~

    GEOMORPHOLOGIE

    Cayenne, ou bien le Paramaca supérieur des Montagnes Tortue sur le Haut Orapu ; de même à l'Ouest et au Nord de Maripasoula, sur le Lawa. Plus significatif encore est l'un des points culminants de la Guyane fran-caise avec 830 m d'altitude, par 3° N et 53°4' W, appelé « Sommet Tabulaire », car c'est une cuirasse bauxito-ferrugineuse plane sur un massif gabbroïque, d'âge peut-être Hyléen, voire plus ancien.

    B - Les provinces géomorphologiques

    En fait, les provinces pétrographiques et structurales se traduisent dans les paysages par autant de pro-vinces géomorphologiques.

    1 - Les formes de la Chaîne Septentrionale

    Principale région des plissements du système Orapu - Bonidoro, la Chaîne est bien développée (25 à 35 km de large) à l'Ouest de Sinnamary ; elle se retrécit vers l'Est et même se trouve pincée sur les méridiens de l'ile de Cayenne, entre les mornes résiduels de roches hyléennes qui arment la presqu'île et le craton central plus au Sud. Les schistes y prédominent, donnant des alignements de collines de quelques dizaines de mètres, allongées, dissymétriques, coupées de fractures, au total en dents de peigne (caisson 13).

    a - Les formes et les paysages en terrains schisteux

    Cependant, chaque type de schiste présente son allure propre, à cause d'un relief, d'un réseau hydrogra-phique et aussi d'une couverture végétale qui lui sont propres. Par exemple, les schistes à séricite de la Série Orapu, les moins métamorphisés, offrent un dispositif de collines elliptiques, compartimentées en amandes ou en haricots (B. CHOU BERT, 1974). Mais s'ils sont plus métamorphisés, les crêtes sont plus aiguës et l'image en dents de peigne est plus précise ; ainsi pour les roches à faciès schisto-gréseux flyschoïde sur la bordure septentrionale du synclinorium, particulièrement en arrière des Terres Basses, entre Cayenne et lracoubo, quoique le dessin des dents de peigne y soit parfois plus complexe et plus flou {caisson 15). Autre exemple dans la Série Bonidoro : il existe vers le haut de la sédimentation une succession de grès fins schisteux verts et de schistes supérieurs proprement dits, séparés par des arkoses. Alors que les schistes verts donnent des crê-tes bien allongées comme la stratification et des vallées marécageuses à fond plat, les schistes supérieurs, mal-gré un faciès lithologique très uniforme, ont un relief plus irrégulier, avec des vallées encaissées et une végéta-tion plus touffue.

    Il y a toutefois quelques traits communs à ces morphologies schisteuses variées {voir photographies aériennes, notice planche « Relief »).

    - Comme ce sont des roches tendres, l'érosion y travaille facilement. Le réseau hydrographique y est très dense mais jamais dendritique, parce qu'il est influencé par la stratification, la schistosité, les plans de diacla-ses qui règlent en particulier la dissymétrie des collines. Elles ont en effet un versant raide, plus ou moins recti-ligne et bien draîné, mais rebelle à l'érosion mécanique, alors que le versant opposé est en pente plus douce avec une tendance à l'évolution vers des formes concaves jusqu'au talweg, que l'on peut qualifier de subsé-quent, puisqu'il longe le pied rectiligne de la crête suivante. C'est pourquoi les vallées, même étroites, sont à fonds plus ou moins plats et toujours assez marécageux car les pentes longitudinales sont faibles. Toutefois, si le plan de diaclase, qui commande le versant le moins incliné, recoupe des joints de stratification ou bien des plans de schistosité plus ou moins proches de l'horizontale, il se forme des nappes phréatiques perchées, par-fois plusieurs superposées. Dès lors, si la roche mère schisteuse a donné une altérite riche en hydroxydes de fer, les sourcins alimentent des cuirassements de versant. Ceux-ci, plus durs, forment des épaulements en éperons, parfois en marches d'escalier. C'est du moins ce que l'on peut observer, y compris sous des averses de l'ordre de 100 mm dans une heure, dans le bassin de la Rivière Orapu, notamment dans les vallées de ses affluents de rive droite (par exemple, la Crique Virgile ou la Crique Tibourou).

    - La nature essentiellement argileuse des sols, avec comme minéral prédominant la kaolinite, favorise une forêt dense, relativement haute, qui protège les sols de l'érosion. Au sol, la lumière est tamisée ; peu d'essences de lumière, une litière épaisse de quelques feuilles seulement, font que la circulation est assez facile, mis à part les fûts d'arbres morts tombés. Par contre, les talwegs marécageux sont très pénibles à fran-chir en raison d'une densité plus élevée de plantes, aggravée par l'existence de racines aériennes des arbres hygrophiles, soit en échasses, soit en genou, c'est-à-dire en boucles qui sortent du sol. Les vallées des cours d'eau plus importants, le plus souvent sur faille ou fracture, sont plus larges, à fond plat {fiat, en anglais) et à bords abrupts, mais il n'y a pas de terrasse, du moins en règle générale.

    Fig. 1. Structures concentriques dans les Granites Guyanais. d'après G. C. BROUWER, 1964. IExt. Carte Géologique à 1/100 000, file Paul lsnard. GUYANE).

    Alluvwns actuelles (a ) ; Terrasses fluviatiles ( t ) ; Amph1bolites Paramaca ( p) ; Filons de Dolérites ((A)) ; Pegmatites ( n) ; Granites Guyanais ( F 2 ) ; Migmatites Guyanais : gneiss ( V 2 /l } ; facies amphibolitiques ( F 2 p)

    1

  • ATLAS DES D.O.M. LA GUYANE Planche 5

    - L'altitude générale est faible et dépasse rarement 100 m dans les schistes, qui paraissent profondément ravinés en bad-lands boisés IG. C. BROUWER, 1965). A voir la lenteur actuelle du décapage, qui se résume au délavage pluvial des colloïdes et aux actions des animaux fouisseurs (fourmis, tatous), on peut penser que cette morphologie date de phases rhéxistasiques, c'est-à-dire de crises d'érosion, par exemple celle du pluvial pré-flandrien, bien identifiable sur les terrains sableux des Terres Basses. En tout état de cause, quel qu'ait été le système de façonnement en action, la structure a toujours dû conduire les altérations et les érosions sur les mêmes lignes de faiblesse.

    b - La morphologie des grès et des quartzites

    Les Séries Bonidoro et Orapu commencent toutes deux par des conglomérats de base ; elles comportent des grès et des quartzites. Ces roches sont plus volontiers en relief et sont soulignées dans le paysage par des végétations moins fournies que sur les schistes, parfois même malingres, spécialement sur les barres de quart-zites (caisson 121. Le dispositif prend des allures appalachiennes, du moins en ce sens qu'altération et érosion différentielles ont mis en valeur les roches les plus dures de la racine des plis. On peut observer, par exemple à Saut Dalles sur la Mana, ou à la Montagne des Chevaux au Sud de Cayenne, des flancs de synclinaux avec versants externes découpés en chevrons. Il s'agit là d'inversions de relief certainement anciennes. En somme, on peut dire qu'il existe à côté du relief schisteux un relief gréseux, ou pour mieux dire, des reliefs liés à l'abon-dance du quartz dans les roches.

    c - Les paysages des granites

    On sait que la granitisation Caraïbe s'est manifestée dans la Chaîne Septentrionale selon trois modes dis-tincts de mise en place qui ont donné des morphologies différentes. C'est essentiellement la moitié occidentale de la chaîne qui est concernée.

    La phase Caraïbe ancienne, granitisant des roches préexistantes et participant plus ou moins aux défor-mations du synclinorium de l'Orapu, a abouti à la formation de granites et de paragneiss. Ces derniers évoluent en molles collines d'altitudes irrégulières, réparties selon une maille assez lâche soulignée par un réseau hydro-graphique qui peut paraître dendritique à première vue parce que la maille des fractures est irrégulière. Lorsque le front de granitisation a été atteint par l'aplanissement, les sommets sont assez plats et très sableux du fait du délavage des arènes. C'est fréquemment le cas dans l'arrière-pays entre le Dôme d'Organabo et la Mana, au point que sur la bordure Nord du synclinorium, il est parfois délicat de distinguer ce type de plateaux cloison-nés des niveaux sableux les plus élevés appartenant aux formes des Terres Basses. Si le front de granitisation est encore protégé par l'enveloppe de micaschistes, les roches granitiques ne se voient que dans les talwegs et le sommet des collines est arrondi : c'est le modelé en demi-orange, couvert d'une forêt de hauteur moyenne mais dominée par des bouquets de grands arbres. Dans les deux cas, les talwegs sont assez profonds et étroits, et les pentes raides. Toutefois, les fractures plus larges appellent également des vallées à fond plat et leurs entrecroisements se signalent par des alvéoles où le relief est en quelque sorte annulé, parce que l'altéra-tion et les eaux courantes s'unissent pour étaler uniformément les altérites en alluvions limono-sableuses. En ce cas, les végétations sont à la fois plus basses et plus denses, comme cela se remarque très bien sur les pho-tographies aériennes. Ce genre de relief existe aussi à l'extrémité Sud-Ouest de la chaîne, vers le Maroni, dans le haut bassin de la Crique Sparouine.

    Entre le Sinnamary et le Maroni, à peu près dans l'axe du synclinorium, les Granites Cara"1bes émergent de la couverture des sédiments Orapu en massifs elliptiques circonscrits. Ce sont des structures brachy -anticlinales qui ont métamorphisé les schistes encaissants. Il en résulte, du point de vue géomorphologique, autant d'inversions de relief en boutonnières avec couronne de schistes ultra-métamorphiques formant des rebords aux crêtes bien dessinées qui cernent un paysage très morne correspondant aux granites décompo-sés. Des fractures transverses permettent au drainage d'évacuer les eaux de ces dépressions, qui sans cela seraient fermées. B. CHOU BERT (1957, 1974)'en décrit plusieurs exemples: Massif du Petit Saut sur le Sinna-mary, Massif du Tamanoir sur la Mana, anticlinal de la Crique Salva (affluent du Maroni) à l'extrême Sud-Ouest du synclinorium.

    Quant à la phase Cara"ibe jeune, dite« Galibi », elle a mis en place quelques intrusions de granites à deux micas, éparpillées sur la bordure Nord du synclinorium. Ces roches donnent des collines surbaissées. Ce serait presque l'absence de relief, par comparaison à celui des roches du système Orapu, qui permet de les repérer sur les photographies aériennes.

    d - Les formes liées aux roches les plus anciennes

    La Chaîne Septentrionale est flanquée de roches de la Série Paramaca, presque tout le long sur son flanc Sud et seulement à partir du fleuve Mahury, vers l'Est, sur son flanc Nord. Ces massifs, le plus souvent allon-gés et disposés en chaîne les uns par rapport aux autres, se distinguent par leur allure nettement plus monta-gneuse, bien que les altitudes restent modestes : 300 m aux Montagnes Plomb entre les fleuves Kourou et Sinnamary ; 375 m à la Montagne Cacao, entre les Rivières Comté et Orapu ; 300 maux Trois Pitons plus à l'Est, vers la Rivière Ouanary. De même, les Montagnes de Kaw et leur dalle sommitale de bauxite atteignent à peine 350 m. Ces dalles de cuirasses latéritiques (caisson 20) ne sont pas toujours continues et se présentent à divers niveaux d'altitude marquant sans doute des moments d'aplanissement différents ; mais comme le cui-rassement est un phénomène d'ordre pédogénétique, donc second dans le temps, il est hasardeux de dater ces surfaces. En outre, particulièrement dans les Montagnes de Kaw, une évolution par dissolution et souti-rage mécanique par les eaux des sourcins provoque la formation d'un pseudo-karst avec dépressions plus ou moins fermées et plus ou moins marécageuses ou mêmes des grottes dans le matériel bauxitique. En fait, cela n'est possible que dans la mesure où les reliefs Paramaca ont des pentes assez raides et un système de drai-nage des versants par des talwegs divergeant des sommets et souvent à profil en V. Néanmoins, il est toujours possible de retrouver dans leur dispositif les indications multiples de la structure et de la lithologie de détail.

    Bien qu'il ne s'agisse plus exactement de la Chaîne Septentrionale, les massifs d'âge Hyléen de l'ile de Cayenne obéissent aux mêmes règles de façonnement des formes : chaînons plus ou moins réguliers et « pitonnant »des collines de quartzites à amphiboles ou amphibolites de la Série de l'ile de Cayenne, répartis selon des axes de plissements anciens (Monts Bourda, Montabo, Cépérou et Massif du Matoury) et un plateau à chapeau latéritique, agrémenté de dépressions, et pentes raides ravinées pour les gabbros et granodiorites de la Table du Mahury.

    Il faut remarquer que ce sont ces vieilles ou très vieilles roches, Paramaca ou Hyléennes qui, malgré leurs âges et leur altérabilité, forment les rares points hauts de la topographie de toute la Chaîne Septentrionale. Signalons aussi les reliefs en dyke, donnés par les venues filoniennes de dolérites post-granites, dernière des manifestations volcaniques recoupant tous les massifs plus anciens, spécialement dans la moitié Nord du pays et jusqu'au littoral, îles comprises.

    2 - Le relief du Massif Central de Guyane

    a - La répartition des types de formes lithologiques

    Depuis la Chaîne Septentionale, jusqu'à la latitude de Sophie (4° NI pour la moitié occidentale et jusqu'à 3°15' N sur !'Oyapock, s'étend une vaste région faiblement inclinée en direction du Nord. Elle est légèrement bombée au centre, entre le Haut Sinnamary et la Haute Mana, sous forme d'une dorsale accidentée (NNW-SSEI culminant au Nord dans les Montagnes de la Trinité vers 500 m d'altitude. Il s'agit de migmatites du complexe de l'ile de Cayenne reprises, successivement P?r les granitisations Guyanaise et Cara'ibe, c'est-à-dire une fois de plus, des Roches Vertes riches en amphiboles. A l'Ouest de la Mana, échelonnés du Nord au Sud, d'autres massifs de la même famille lithologique dominent les rives de la Mana (Montagnes de la Spa-rouine, Massifs Lucifer et Décou-Décou : 500 ml ou du Maroni (Montagnes Françaises : 500 m ; voir photo-graphies aériennes : notice planche« Relief») et, plus au Sud, entre le Lawa et la rivière Abounami, un massif assez important de roches du Paramaca culmine vers 700 m, avec des hautes surfaces cloisonnées, mais cou-ronnées de latérites.

    b - Les caractères particuliers des modelés granitiques

    A part les hauteurs de Roches Vertes faisant effectivement figure de paysages montagneux, tout le reste est un monde de collines toutes semblables, de même altitude, en demi-orange, isolées les unes des autres par un réseau géométrique serré de criques, c'est-à-dire de petites rivières. On a l'impression, vu d'avion, d'un relief en ruche (voir photographies aériennes : notice planche« Relief »).

    Pour les Granites Guyanais qui prédominent dans la moitié Ouest du Massif Central, la maille est très régulière. C'est pourquoi, sur la carte, nous avons choisi de le représenter par un maillage hexagonal très régu-lier, avec en demi-cercle inscrit, le symbole de la demi-orange. Les talwegs suivent des tronçons de droite cor-respondant à autant d'indications structurales. Dans les variétés gneissiques, le réseau des vallons encaissés est franchement polygonal. Les migmatites donnent des formes un peu plus floues. Les collines les plus nette-ment convexes correspondent toujours à des roches profondément arénisées. La forêt y est dense, d'altitude moyenne et très uniforme. Les grandes vallées sont larges, à fond plat, fréquemment rectilignes comme les fractures majeures qu'elles suivent. Elles se dilatent en alvéoles aux entrecroisements de plusieurs fractures et sont alors marécageuses. Sauf exceptions, d'ailleurs difficiles à interpréter, on ne voit pas de système de ter-rasse. Les étroits entre alvéoles correspondent à des secteurs moins altérés qui se manifestent par des sauts du type rapides, à barres de roches en dos de ba'feine, surtout dans les migmatites, ou bien à boules, ce qui est moins fréquent et répond à des granites plus francs, mais pas toujours (J. TRICART, 1961).

    Ce type de relief, à toutes sortes d'égards proprement guyanais, mérite d'être érigé en archétype du modelé d'une pénéplaine granitique sous climat chaud et humide, où l'inféodation des formes d'érosion au canevas structural, par altération interposée, est le facteur fondamental. Il existe en particulier des structures circulaires qui relèvent des caractéristiques du front de granitisation (fig. 1 ). Elles ne sont pas l'apanage des Granites Guyanais ; toutefois, dans la morphologie des granites, elles se traduisent par« l'orientation tour-nante des talwegs et des crêtes et correspondent à des bombements surbaissés à grand rayon de courbure de

    2

    la surface granitisée » (B. CHOUBERT, 1974, p. 93). Ces structures, et les corps morphologiques qu'elles induisent, ·sont circulaires ou légèrement elliptiques ; il s'agit d'indications tournantes et concentriques du litage, au moins lorsque cela concerne les gneiss. Les dimensions sont très régulières : 5 à 6 km le plus sou-vent, parfois 8. Ces structures s'ordonnent en réseaux orientés selon deux directions plus ou moins orthogo-nales, marquées par des failles et fractures rectilignes, en somme un système en dômes et cuvettes. Toutefois, les cuvettes se traduisent rarement en alvéoles, mais se résolvent plutôt en fractures. En outre, les dômes sont très fréquemment affectés de failles radiales, accompagnées de décrochements avec décalage de comparti-ments découpés en secteurs.

    Dans les Granites Caraïbes, de telles structures existent aussi. Ces granites prédominent dans la moitié orientale du Massif Central, soit en granites francs, souvent porphyroïdes, spécialement dans la dorsale au Centre-Sud, mais aussi dans les pays du Haut Approuague, soit en gneiss et migmatites. Partiellement décrits à propos de leurs affleurements dans la Chaîne Septentrionale, précisons ici comment ils se distinguènt des Granites Guyanais. C'est aussi un monde de collines en demi-orange, mais moins monotone car la maille du réseau des fractures utilisées par les talwegs, est à la fois plus lâche et plus irrégulière, de sorte que son dessin polygonal est moins net. Les altitudes sont plus variées, du moins pour les granites francs et les gneiss, car sur les migmatites, au contraire, le relief s'efface, encore plus que pour celles du Granite Guyanais. Ces roches peuvent cependant donner des formes plus trapues et jusqu'à des pains de sucre dénudés, souvent dissymétri-ques et parfois déprimés au sommet. Ce type d'inselberg résulte d'une certaine immunité à l'altération et du décapage facile de la forêt et de la tunique d'altérite, en raison des pentes structurales fortes et convexes des noyaux résistants de la roche. Ils sont souvent isolés, mais alignés sur une direction de fracture, ou au contraire, groupés, mais alors séparés par,de profonds ravins selon le schéma structural ; leur caractère inso-lite, au-dessus d'une forêt assez monoto.ne, serrée mais pas très belle, est traduit par l'expression créole « savane-roche ». Sur la roche à nu, en effet, ne pousse qu'une végétation rase discontinue et xérophytique plus ou moins agrémentée d'îlots arbustifs. Là où les pentes sont les plus convexes, on passe directement en bas de relief, de la roche à nu à la forêt ombrophile ; là où elles sont moins prononcées, il y a des forêts de tran-sition, basses, d'espèces ligneuses à port buissonnant, où la lumière passe aisément et où il fait très chaud. Ce type d'inselberg est relativement fréquent dans l'Est du Massif Central, entre I' Approuague et !'Oyapock. On en trouve aussi au Centre-Nord, dans les Montagnes de la Trinité.

    3 - Les Montagnes Inini - Camopi

    a - Des formes et des versants accusés

    Le relief de cette zone à peu près orientée WNW-ESE, comme les grandes fractures du système syncli-norial au Sud du craton central, est composé d'une succession de massifs assez vastes, profondément dissé-qués et cependant les plus élevés de la Guyane. Ils se distribuent selon une fausse croix, qui serait rompue au croisement des branches et décalée dans le sens N-S, au passage de la haute vallée de l'Approuague. Ce cou-loir, relativement bas, correspond à des affleurements de Granite Caraïbe grossièrement orientés SW-NE. A l'Ouest, les massifs sont tous faits de roches du Paramaca : soit Paramaca inférieur, d'origine sédimentaire comme les Monts Attachi-Baka (782 m) près du fleuve Lawa, soit surtout du Paramaca supérieur d'origine plus franchement volcanique (roches éruptives, laves volcano-sédimentaires). Au Nord de la Crique Grand Inini, c'est le cas des Monts Massialine (775 m). Bellevue (851 ml riche en surfaces latéritisées, Belvédère (760m), Galbao (750 m) près de Saül et, plus au Nord, à l'Est de la Mana, de la Montagne Continent (640 m).

    Dans l'ensemble, les modelés sur ces Roches Vertes sont de la famille de ceux qui se rencontrent dans les massifs de même type lithologique dans l'Ouest du Massif Central (Montagnes Françaises ou Monts de la région de I' Abounami), mais ils sont plus vigoureux et d'un style susceptible d'évoquer, malgré les métamor-phismes, les formes volcaniques initiales. Par exemple, le Massif de gabbros de Galbao (J. BARRUOL, cit. B. CHOUBERT, 1974, p. 391 évoque : « ... une caldera entourée de roches doléritiques, que surmontent des rhyolites >>. Ailleurs, les formes d'érosions des versants par les talwegs tous pareils et divergents comme les génératrices d'un cône, évoquent les barrancos des cônes de cendres. C'est le cas de cette autre Montagne Bellevue (647 ml à une quinzaine de km au Nord de Maripasoula, elle est précisément faite de tufs rhyolitiques, avec d'autres roches volcaniques (G. C. BROUWER, et P. COUDERT, 1966).

    b - Le rôle des sols ferrallitiques

    Il convient ici de souligner que comme pour tous les massifs de Roches Vertes, ailleurs en Guyane, mais plus spécialement sur les roches mères éruptives les plus basiques (gabbros, diorites, pyroxénolites) se déve-loppent les sols ferrallitiques qui présentent les meilleures propriétés physiques : richesse en argiles et hydroxydes, structures favorables à une bonne porosité sur une grande profondeur et donc au meilleur profil hydrique possible, tout en assurant de bonnes conditions d'aération. Certes, dans le cadre discrètement mon-tagnard de la zone lnini-Camopi, la déclivité des pentes joue plus ou moins en sens contraire, et freine le déve-loppement en profondeur des profils d'altération. Cependant, le rajeunissement par l'érosion offre les condi-tions pour avoir les sols avec les meilleures propriétés chimiques : bon pourcentage en bases échangeables, débris de roches mères incomplètement altérées et constituant d'intéressantes réserves en éléments minéraux utiles.

    C'est pourquoi, dans cette région à la fois un peu moins arrosée que le littoral et un peu plus fraîche, l'on rencontre les plus belles futaies de toute la sylve guyanaise, par exemple autour de Saül et sur des versants qui, même raides, se tiennent fort bien. Enfin, jointe à l'altitude, la bonne capacité de rétention en eau des sols, font que la région joue le rôle d'un important château d'eau. Mana, Sinnamary et Approuague y prennent leurs sources, ainsi que certains grands affluents du Lawa, comme le Grand et le Petit Inini, ou de !'Oyapock par l'intermédiaire du Camopi, tels l'lnipi et la Crique Sable ; de même pour les plus importants affluents de I' Approuague : I' Arataye sur rive gauche et la Sapokaye sur rive droite.

    Grands versants convexes striés de rainures pluviales obéissant aux moindres variations d_e pente des génératrices. La grande forêt monte dans les couloirs de fractures; forêt plus basse sur les replats et sommets; végétation rase et xérophytique sur les savanes-roche. !Dessin de M. Seunn, d'après phot. extr. de M. Bayé, 1974.)

    Fig. 2. - Savanes-roche et pains de sucre dans le massif de Mitaraca (extrême SW de la Guyane française).

    4 - La Pénéplaine Méridionale

    Extrêmement monotone, à moins de 250 m d'altitude moyenne, c'est un monde de mamelons forestiers en demi-orange, aux flancs raides, avec un commandement moyen de l'ordre de 40 m. La dénivellation peut atteindre localement 100 m. L'ensemble fait une surface légèrement inclinée vers le Nord. Elle se rélève aux approches de la frontière brésilienne pour former la ligne de partage des eaux - parfois indécise - entre les réseaux hydrographiques qui vont à l'Atlantique vers le Nord et ceux des tributaires de l'Amazone par l'inter-médiaire du Rio Jari. Elle est un peu plus haute à l'Ouest qu'à l'Est. Les deux tiers occidentaux correspondent aux bassins des formateurs du Lawa : Litany,.Marouini, Tempoc et son affluent la Crique Ouaqui ; l'autre tiers correspond aux hauts bassins de !'Oyapock (rive gauche) et de ses affluents Camopi et Yaroupi.

    La moitié méridionale est dominée par une multitude d'inselbergs granitiques (pains de sucre, mornes forestiers à flancs plus ou moins en savanes-roches) d'altitudes très diverses : soit isolés, comme le Mont Bel-védère et son voisin le Mont St-Marcel (550 ml au Sud-Est, soit groupés, par exemple dans le Massif du Mont Mitaraka (670 ml à l'extrême Sud-Ouest, seul relief tangible de la légendaire chaîne des Tumuc-Humac (cais-sons 22-28 et fig. 2).

    GÉOMORPHOLOGIE

    a - Les Régions naturelles

    * * *

    A vrai dire, ce lointain Sud est encore mal connu dans le détail. Cependant, sommets secondaires apla-nis, nombreux replats latéritisés sur les flancs de pitons et même des systèmes de terrasses alluviales le long des fleuves, témoignent d'une histoire longue et complexe de l'érosion, avec probablement un léger rajeunis-sement récent (B. CHOUBERT, 1974, p. 6). Il subsiste encore quelques énigmes : telles ces vastes surfaces d'éluvions continentales, indiquées sur la carte géologique dans le bassin de la Haute Ouaqui ou encore entre le Haut Yaroupi et !'Oyapock. Le relief y est très plat et mal différencié, du moins pour autant que les photogra-phies aériennes le montrent. On peut seulement supposer qu'il s'agit d'une altération aboutissant à une aréni-sation du fait de délavages intenses et, par suite, à des topographies pseudo-alluviales, car on sait que les arè-nes de délavage sont très faciles à étaler par les nappes pluviales ruisselantes, même sous forêt dense (F. RUELLAN, 1952).

    Ainsi, se dessine un type de relief qu'il faut qualifier de guyanais. Il mérite de devenir classique, car il est caractéristique de l'évolution d'un bouclier précambrien plusieurs fois granitisé et placé, au moins depuis la fin de l'Ere Secondaire sous climats chauds et humides en zone équatoriale et sur la façade orientale d'un conti-nent, exposée à l'action des fluides déviés sur l'Ouest par la force de Coriolis et notamment les vents alizés.

    Toutes les formes, sans autre exception que celles liées aux sédiments littoraux, doivent être considérées comme résultant d'une érosion différentie/le au second degré puisque l'altération différentielle, interposée entre les actions du déblaiement mécanique et les prédispositions lithologiques et structurales, guide impérati-vement leur façonnement. Altération et érosion fonctionnent un peu à la manière des révélateurs sur un film sensible. Leurs énergies n'interviennent que si le matériau attaqué et modelé offre, à l'échelle du minéral, la susceptibilité voulue pour la dissociation des édifices cristallins, et, à l'échelle des masses de roches, les fragili-tés structurales permettant aux agents de pénétrer les volumes. Sinon, les reliefs, au sens exact du terme - ce qui reste - sont des formes de résistance tant aux actions physico-chimiques qu'aux actions dynamiques exter-nes. Dès lors, le modelé est forcément induit par les caractéristiques géométriques et pétrographiques des roches concernées. Ce que l'on sait des mécanismes de la granitisation, des divers cas de métamorphisme, des propriétés des différents magmas et des champs de force dans les orogénèses anciennes, suffit à rendre compte, sans accumulation d'hypothèses complémentaires concernant le processus d'évolution, de tous les modelés et de tous les dispositifs recensés sur notre carte.

    C'est pourquoi cette carte apparaît tout naturellement comme une transposition de la carte géologique, faite à l'aide de graphes originaux et d'un choix de couleurs qui n'est pas quelconque (des verts pour les mode-lés sur Roches Vertes, des bistres et des orangés pour les modelés granitiques, le brun rouge pour le système de l'Orapu, du rouge pour les quelques cuirassements latéritiques, etc .. J Ce n'est pas de notre part un parti pris pour illustrer une théorie, parmi d'autres, de la géomorphologie des boucliers tropicaux, mais plutôt une transcription schématisée de ce que sont les paysages, tels qu'on peut les voir d'avion, non seulement en Guyane française, mais aussi ailleurs et même hors de la zone intertropicale humide.

    ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE

    Cartes

    FRANCE. Ministère de l'industrie. Feuille de Lawa-Abounamy, à /'échelfe de 11100 000 et notice explicative par G. C. BROUWER. Paris, Imprimerie Berger-Levrault, 1964 (Carte géologique détaillée de la France. Département de la Guyane).

    FRANCE. Ministère de l'industrie. Feuille de Maripasoula, à l'échelle de 11100 000 et notice explicative par G. C. BROUWER et P. COUDERT. Paris, Imprimerie Berger-Levrault, 1966. (Carte géologique détaillée de la France. Département de la Guyane).

    Ouvrages e! articles

    BARBIER, R. Un problème morphologique au Brésil : pains de sucre et tunique tropicale. Comptes rendus de /'Académie des Sciences (Paris), 245 (25), 1957 : 23-46.

    BOYÉ, M. La géologie des plaines basses entre Organabo et Je Maroni (Guyane française). Paris, Imprimerie Nationale, 1963, 148 p. (Mémoire pour servir à l'explication de la carte géologique détaillée de la France. Département de la Guyane française). (Thèse 3° cycle. Géologie. Paris - Sorbonne. 19601.

    CHOU BERT, B. Essai sur la morphologie de la Guyane. Paris, Imprimerie Nationale, 1957, 48 p. (Mémoire pour servir à l'explication de la carte géologique de la France. Département de la Guyane française).

    CHOU BERT, B. Le Précambrien des Guyanes. Paris, Bureau de Recherches Géologiques et Minières, 1974, 204 p. (Mémoires du Bureau de Recherches Géologiques et Minières. 81 ).

    CHOU BERT, B. ; BOYÉ, M. Envasements et dévasements du littoral en Guyane française. Comptes rendus de l'Académie des Sciences (Paris), 249, 1959: 145-147.

    HURAULT, J, L'érosion régressive dans les régions tropicales humides et/a génèse des inselbergs granitiques. Paris, Institut Géographique National, 1967, 68 p. (Etudes de photo-interprétation. 3).

    LELONG, F. Nature et génèse des produits d'altération de roches cristallines sous climat tropical humide (Guyane française). Nancy, Ecole Nationale Supérieure de Géologie, 1969, 188 p. (Sciences de la Terre, Mémoire. 141.

    RUELLAN, F. Le rôle des nappes d'eau pluviale ruisselante dans le modelé du Brésil. Paris, Ecole Pratique des Hautes Etudes, Laboratoire de Géomorphologie, 1952, 46 p. (Notes, mémoires et documents. 3).

    TRIGART, J. Les caractéristiques fondamentales du système morphogénétique des pays tropicaux humides. Information géographique, 25 (4), 1961 : 155-168.

    Marc BOYÉ - 1976.

  • LA GUYANE - PLANCHE -';i 53°

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    GEOMORPHOLOGIE

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    • la Réunion

    avec le concours des départements de géographie des Universités d'Aix-Marseille Il,

    de Bordeaux 111, des Centres universitaires des Antilles-Guyane et de la Réunion;

    de l'ORSTOM pour l'Atlas de la Guyane.

  • comité de direction

    des Atlas des Départements d'Outre-Mer

    Directeur de la publication

    Guy LASSERRE, Professeur à l'Université de Bordeaux Ill, Directeur du Centre d'Études de Géographie Tropicale du C.N.R.S.

    Conseillers Scientifiques permanents

    Jean DEFOS du RAU, Professeur Honoraire à l'Université d'Aix-Marseille Il Jean-François DUPON, Professeur à l'Université d'Aix-Marseille Il Marc BOYÉ, Maître-assistant à l'Université de Bordeaux Ill Jean-Claude GIACOTTINO, Chargé de Recherche du C.N.R.S. (CEGET) Christian GIRAULT, Attaché de Recherche du C.N.R.S. (CEGET) Jean-Claude MAILLARD, Maître-Assistant à l'Université de Bordeaux Ill Jean MARIEU, Maître-Assistant à l'Université de Bordeaux Ill

    Secrétaire Générale des Atlas des Départements d'Outre-Mer

    Guilène RÉAUD, Ingénieur du C.N.R.S. au Centre d'Études de Géographie Tropicale

    Conseillers techniques principaux

    Gilbert CABAUSSEL, Ingénieur du C.N.R.S., Biogéographe au Centre d'Études de Géographie Tropicale

    Jean MENAULT, Ingénieur du C.N.R.S., Chef du Bureau de Dessin de l'Institut de Géographie de l'Université de Bordeaux Ill

    Jean-Pierre VIDAL, Photographe, Chef du Service de Reprographie du Centre d'Études de Géographie Tropicale

    Ëdi1ions du Ce11tre National de la Recherche Scientifique, 15, quai Anatole-France, 75700 PARIS Centre d'ËtudRs de Géographie Troriicille iCNRSI; Domaine Universitaire de Bordeaux, 33405 TALENCE.

    Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-Mer: 24, rue Bayard, 75008 PARIS.

    (c) - Centre d'Etudes de Géographie Tropicale !C.N.R.S.) - Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-Mer - 1979 N° ISBN 2-222-02501-X

  • Patronage scientifique

    Guy LASSERRE Professeur à

    l'Université Bordeaux Ill Directeur du Centre

    d'Études de Géographie Tropicale du CNRS

    Gilles SAUTTER Professeur à

    l'Université Paris 1 Membre du Comité Technique de Géographie de l'ORSTOM

    ABONNENC Émile

    BELLOT Jean-Marc

    BELLOT-COUDERC Béatrice

    BERNARD Danièle

    BLANCANEAUX Philippe

    BOYÉ Marc

    BRASSEUR Gérard

    CABAUSSEL Gilbert

    CALMONT André

    CALMONT Régine

    CAROFF Danièle

    CHARDON Jean-Pierre

    CHARDONNAUD Monique

    CHEUNG Hung-Ning

    CHOUBERT Boris

    CLÉMENT Jean

    Ingénieur de l'ORSTOM, en retraite.

    Diplômé d'Études Approfondies de Géographie, Allocataire de Recherche DGRST, Université de Bordeaux Ill.

    Diplômée d'Études Approfondies de Géographie, Université de Bordeaux Ill.

    Maître en Géographie, Université de Bordeaux Ill.

    Chargé de Recherche à l'ORSTOM.

    Maître-Assistant à l'Université Bordeaux Ill, Responsable du Laboratoire de Géomorphologie du CEGET.

    Directeur de Recherche à l'ORSTOM.

    Ingénieur du CNRS, Biogéographe au CEGET.

    Docteur en Géographie, Professeur au Collège Zéphir ; Cayenne.

    Maître en Géographie, Professeur au Collège Madeleine ; Cayenne.

    Maître en Géographie, Université de Bordeaux Ill.

    Maître-Assistant au Centre Universitaire Antilles-Guyane ; Martinique.

    Maître en Géographie, Professeur au Lycée de Barbezieux.

    Diplômé d'Études Approfondies de Géographie, Université de Bordeaux 111.

    Géologue, Directeur de Recherche honoraire au CNRS, ancien Directeur de l'Institut Français d'Amérique Tropicale (Centre ORSTOM de Cayenne).

    Chef de division des inventaires du CTFT ; Nogent-sur-Marne.

    rédaction de l'atlas

    Coordination générale

    Marc BOYÉ

    Guilène RÉAUD et

    Gilbert CABAUSSEL

    Jean MENAULT

    Ingénieur du CNRS Chef du bureau de dessin de l'Institut de Géographie

    de l'Université Bordeaux Ill

    Équipe de rédaction

    CONDAMIN Michel

    DECOUDRAS Pierre-Marie

    DEGALLIER Nicolas

    DEMOLLIENS Henri

    Docteur de l'Université de Paris, Chargé de Recherche à l'ORSTOM.

    Docteur en Géographie, Assistant à l'Université Jean-Bedel BOKASSA, Bangui (Empire Centrafricain).

    Diplômé d'Études Approfondies de Biologie, Chargé de Recherche à l'ORSTOM.

    Conseiller de la Jeunesse et des Sports ; Cayenne.

    DIGOUTTE Jean-Pierre Docteur en Médecine, ancien Directeur de l'Institut Pasteur de Cayenne.

    FAUQUENOY SAINT JACQUES Professeur associée à l'Université Simon Fraser, Burnaby Marguerite (Canada).

    FLEURY Marie-France

    GRANVILLE Jean-Jacques de

    GRENAND Françoise

    GRENAND Pierre

    GAZEL Marc

    HAXAIRE Claudie

    HOEPPFNER Laurence

    HOEPPFNER Michel

    JOLIVET Marie-José

    Dr. LAC

    LÉGER Nicole

    Diplômée d'Études Approfondies de Géographie, Alloca-taire de Recherche DGRST.

    Docteur ès Sciences, Chargé de Recherche à l'ORSTOM.

    Attaché de Recherche au CNRS.

    Diplômé de l'EHESS, Chargé de Recherche à l'ORSTOM.

    Ingénieur du GREF, Adjoint au Directeur régional de l'ONF pour la Guyane.

    Botaniste, Faculté de Montpellier.

    Ancien professeur au CES Zéphyr, à Cayenne.

    Ingénieur ENSEIH, Toulouse, Chargé de Recherche à l'ORSTOM.

    Docteur en Sociologie, Maître de Recherche à l'ORSTOM.

    Directeur de la DDASS ; Cayenne.

    Professeur à la Faculté de Pharmacie, Paris.

    Direction scientifique

    Marc BOYÉ Maître-Assistant à

    l'Université Bordeaux Ill Chef du Laboratoire

    de Géomorphologie du CEGET

    LE PONT François

    MONSORO Alain

    MOREAU Jean-Michel

    OTHILY Arthur

    PAJOT François-Xavier

    PAPY Geneviève

    PERROT Yannick

    PETIN Gérard

    PRADINAUD Roger

    PRÉ-AYMARD Pascal

    RADAMONTHE Adèle

    RÉAUD Guilène

    ROBO Rodolphe

    RODIER Jean

    ROSSIGNOL Martial

    SEURIN Maggy

    TURENNE Jean-François

    Gérard BRASSEUR Directeur de

    Recherche à l'ORSTOM

    Technicien (supérieur) de l'ORSTOM.

    Maître en Géographie, Université de Bordeaux Ill.

    Architecte des bâtiments de France, Directeur de I' Associa-tion Départementale d'Urbanisme et d'Aménagement de la Guyane.

    Maître de Recherche à l'ORSTOM.

    Docteur ès Sciences, Maître de Recherche principal à l'ORSTOM.

    Diplômée d'Études Approfondies d'Océanographie, Physi-cienne au CEGET.

    Maître en Géographie, Université de Bordeaux Ill.

    Ingénieur au Département des Études Minières, BRGM ; La Source.

    Docteur en Médecine, Dermatologue ; Cayenne.

    Géographe, Certifié de Cartographie, Université de Bor-deaux Ill.

    Centre ORSTOM ; Cayenne.

    Ingénieur du CNRS, Géographe au CEGET.

    Directeur du Service Culturel Départemental de la Guyane.

    Président du Comité Technique d'Hydrologie de l'ORSTOM, Ingénieur chef de l'EDF.

    Docteur ès Sciences, Directeur de Recherche à l'ORSTOM.

    Ingénieur du CNRS, Géologue au CEGET.

    Docteur ès Sciences, Ingénieur agronome INA, Maître de Recherche à l'ORSTOM.