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Office fédéral des questions conjoncturelles Entretien et rénovation des constructions 1995 724.463 f Evaluation des structures porteuses Systèmes de renforcement

Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

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Page 1: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

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1995 724.463 f

Evaluationdes structures

porteuses

Systèmes derenforcement

Page 2: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Evaluation des structures porteusesSystèmes de renforcement

Les structures porteuses ne sont pas conçues pourdurer éternellement. Cependant, pour la durée d’uti-lisation qui leur est attribuée, elles doivent permettreà l’ouvrage de remplir sa fonction et satisfaire aux exi-gences de sécurité. Ceci implique constamment desmesures de maintenance et de réfection, l’adaptationà des conditions changeantes et, dans certains cas,un renforcement des structures pour assurer lareprise de charges nouvelles. Il s’agit là d’autant d’exi-gences indispensables si l’on veut préserver les per-sonnes et l’environnement de tout danger éventuel.Le maintien de la sécurité structurale passe en pre-mier lieu par une évaluation de cette sécurité, man-dat essentiel et difficile qui investit l’ingénieur d’uneresponsabilité importante. Outre la question de lasécurité, l’ingénieur aura à se prononcer sur les mesu-res éventuelles à prendre. La complexité du problèmenécessite diligence, compétence et expérience.La présente publication, destinée aux ingénieurs-concepteurs et aux maîtres d’ouvrages concernés,veut faire prendre conscience que le maintien de lasécurité d’une structure ne signifie pas obligatoire-ment son renforcement. Toute mesure sera précé-dée d’une évaluation basée sur la connaissance descaractéristiques physiques de la structure, de soncomportement, des situations de risque à envisa-ger. Au terme de cette première phase, une décisioninterviendra sur la marche à suivre. En effet, un ren-forcement irréfléchi peut se révéler être une erreuraussi importante que «ne rien faire».Cette publication débute par une introduction à laproblématique de l’évaluation de la sécurité structu-rale et un aperçu de la démarche lors du calcul sta-tique. Le chapitre sur les aspects juridiques insiste,entre autres points, sur l’importance du devoir dediligence, qui doit être pris en considération dèsl’acceptation du mandat.La deuxième partie présente des mesures et tech-niques courantes ou particulières de renforcementdes structures existantes. Le dernier chapitre, consa-cré aux aspects du renforcement du sol de fondation,illustre bien le mode de pensée qui guide «l’évalua-tion de l’existant», le terrain constituant dans tous lescas une «structure porteuse existante».

ISBN 3-905234-74-2Edition originale: ISBN 3-905234-70-X1995N° de commande 724.463 f

Page 3: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Evaluation des structures porteuses

Systèmes de renforcement

Sécurité structurale

Changement d’affectation

Vieillissement

Programme d’impulsions PI BAT

Entretien et rénovation des constructions – Génie civil

Office fédéral des questions conjoncturelles

Page 4: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Associations de soutien et de patronageSIA Société suisse des ingénieurs et architectesASIC Association suisse des ingénieurs-conseilsUTS Union technique suisse

La présente documentation Evaluation des struc-tures porteuses – Systèmes de renforcement a étéélaborée par le groupe de travail Maintien de lasécurité structurale de PI BAT – Entretien et réno-vation des constructions, groupe thématique Géniecivil.

Membres du groupe de travail Maintien de lasécurité structuraleG. Beck

Wenaweser & Wolfensberger SA, ZurichDr P. Lüchinger

Wenaweser & Wolfensberger SA, ZurichP. Matt

Ingénieur-conseil, IttigenJ.-C. Putallaz

Réalini+Bader et Ass. SA, SionProf. J. Schneider

ETH-IBK, ZurichDr R. Tausky

ZurichDr U. Vollenweider

Dr Vollenweider SA, Zurich

Direction du groupe de travailG. Beck

Wenaweser & Wolfensberger SA, Zurich

Membres du groupe d’expertsE. Braem

C. Zschokke SA, ZurichProf. Dr M.A. Hirt

ICOM-EPFL, LausanneH. Huber

Canton d’Uri, AltdorfDr J. Jacquemoud

Dr J. Pralong SA, SionDr M. Ladner

ZLT, Horw/UsterDr P. Ritz

Schneller, Schmidhalter Ritz SA, Brigue

Liste des auteursChapitre 1 Exposé du problème, G. BeckChapitre 2 Déroulement de l’évaluation des

structures porteuses existantes, Prof. J. Schneider

Chapitre 3 Calcul statique d’ouvrages existants, Prof. J. Schneider

Chapitre 4 Aspects juridiques, Dr R. TauskyChapitre 5 Systèmes de renforcement, G. BeckChapitre 6 Renforcement au moyen de béton,

Dr P. LüchingerChapitre 7 Renforcement au moyen d’acier,

J.-C. PutallazChapitre 8 Renforcement au moyen de la

précontrainte, P. MattChapitre 9 Renforcement du sol de fondation,

Dr U. Vollenweider

RemerciementsNous remercions ici tous les spécialistes, qu’ils soientpracticiens, enseignants ou chercheurs, pour leursprécieuses informations et leurs conseils avisés.

Edition françaiseDirection des cours• J.-C. Putallaz, ingénieur,

Réalini + Bader et Ass. SA, SionTraduction• Y. de Marsano, ingénieur,

Réalini + Bader et Ass. SA, Onex/Genève• Dr D. Bettems, avocat, Lausanne• A. Fontana, ingénieur,

Dériaz & Cie, P.+C. Dériaz & Cie SA, Carouge• Dr R. Suter, ingénieur,

Schindelholz & Dénériaz SA, Bulle• R. Devaud, ingénieur,

Devaud Monigatti et Ass. SA, FribourgCorrection• J.-C. Scheder, Bercher

Coordination/Direction du programmeA. Schmid, architecte, Dommartin

Mise en page et photocomposition• DAC, Lausanne • City Comp SA, Morges

ISBN 3-905234-74-2Edition originale ISBN 3-905234-70-X

Copyright © Office fédéral des questions conjoncturelles,3003 Berne, septembre 1995.Reproduction d’extraits autorisée avec indication de lasource. Diffusion: Coordination romande du programmed’action «Construction et Energie», EPFL-LESO, Casepostale 12, 1015 Lausanne (N° de commande 724.463 f).Form. 724.463 f 9.95 750 U 27611

Evaluation des structures porteuses – Systèmes de renforcement

Page 5: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

D’une durée totale de 6 ans (1990-1995), le pro-gramme d’action «Construction et Energie» secompose des trois programmes d’impulsions sui-vants:

PI BAT– Entretien et rénovation des constructions

RAVEL– Utilisation rationnelle de l’électricité

PACER– Energies renouvelables

Ces trois programmes d’impulsions sont réalisés enétroite collaboration avec l’économie privée, lesécoles et la Confédération. Leur but est de favoriserune croissance économique qualitative. Dans cesens ils doivent conduire à une plus faible utilisa-tion des matières premières et de l’énergie, avecpour corollaire un plus large recours au savoir-faireet à la matière grise.

Le programme PI BAT répond à la nécessité qu’il ya d’entretenir correctement les constructions detous types. Aujourd’hui une partie toujours plusgrande des bâtiments et des équipements de géniecivil souffrent de défauts techniques et fonctionnelsen raison de leur vieillissement ainsi que de l’évo-lution des besoins et des sollicitations. Si l’on veutconserver la valeur de ces ouvrages, il y a lieu deles rénover, et pour ce faire on ne peut s’appuyersur l’empirisme. Le programme d’impulsions PIBAT ne se limite pas aux aspects techniques etd’organisation, il s’étend également au cadre juri-dique, qui jusqu’ici était essentiellement tourné versles constructions neuves. Le programme couvreainsi les trois domaines suivants : bâtiments, géniecivil et problèmes apparentés à la rénovation.

Si l’on veut conserver les qualités techniques etarchitecturales de nos bâtiments et si l’on souhaitepréserver des quartiers, voire des villages, desconnaissances nouvelles doivent être apportéesaux nombreuses personnes concernées: proprié-taires, autorités, concepteurs, entrepreneurs et col-laborateurs de tous niveaux.

Cours, manifestations, publications, vidéos, etc.

Le PI BAT cherche à atteindre ces objectifs parl’information, la formation et le perfectionnementdes fournisseurs et des demandeurs de prestationsdans le domaine de la rénovation. Le transfert deconnaissances est axé sur la pratique quotidienne;basé essentiellement sur des manuels et des cours,

il comprend également d’autres types de manifes-tations. Le bulletin «Construction et Energie», quiparaît trois fois l’an, fournit des détails sur toutesces activités.

Chaque participant à un cours, ou autre manifesta-tion du programme, reçoit une publication spécia-lement élaborée à cet effet. Toutes ces publicationspeuvent également être obtenues en s’adressantdirectement à la Coordination romande du pro-gramme d’action «Construction et Energie» EPFL-LESO, Case postale 12, 1015 Lausanne.

Compétences

Afin de maîtriser cet ambitieux programme de for-mation, il a été fait appel à des spécialistes desdivers domaines concernés; ceux-ci appartiennentau secteur privé, aux écoles, ou aux associationsprofessionnelles. Ces spécialistes sont épaulés parune commission qui comprend des représentantsdes associations, des écoles et des branches pro-fessionnelles concernées.

Ce sont également les associations professionnellesqui prennent en charge l’organisation des cours et desautres activités proposées. Pour la préparation de cesactivités une direction de projet a été mise en place;elle se compose de MM. Reto Lang, Andreas Bouvard,Ernst Meier, Rolf Saegesser, Andreas Schmid, DieterSchmid, Richard Schubiger, Hannes Wuest et EricMosimann de l’OFQC. Une très large part des activi-tés est confiée à des groupes de travail, ceux-ci sontresponsables du contenu de même que du maintiendes délais et des budgets.

Publication

Le présent document traite en premier lieu desmoyens qui doivent être engagés pour apporter uneréponse aux questions auxquelles l’ingénieur estcontinuellement confronté et relatives à la sécuritéstructurale d’un ouvrage existant. Il présente lesdémarches nécessaires à une évaluation des struc-tures porteuses existantes et permettant en sommeune prise de décision quant à la poursuite desdémarches. La limitation du thème traité à l’évalua-tion de la sécurité structurale est clairement explici-tée et justifiée au chapitre concernant le déroule-ment de l’évaluation, chapitre dans lequel estégalement circonscrit le noyau important du pro-blème à résoudre.

Evaluation des structures porteuses – Systèmes de renforcement

Avant-propos

Page 6: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Des problèmes tels que la fatigue et les actions acci-dentelles au sens de la norme SIA 160 sont misentre parenthèses car, d’une part, ils nécessitent leplus souvent un autre point de départ pour leurrésolution et, d’autre part, ils mériteraient à euxseuls une documentation particulière, du fait de leurcomplexité et également de leur importance.

Le groupe de travail accorde une grande importanceà la diffusion du message selon lequel une démar-che de type interactif constitue l’A et l’Ω pour la réso-lution des problèmes relatifs à l’évaluation de lasécurité structurale. L’ingénieur expérimenté con-centre son attention sur l’essentiel du problème etn’entreprend un renforcement que s’il a acquis, auterme d’un examen soigneux de l’ouvrage, la con-viction que cette décision est indispensable pourassurer le maintien de la sécurité structurale.

Les chapitres traitant des aspects juridiques mon-trent clairement le haut degré de responsabilité quiincombe à toutes les personnes concernées par lesproblèmes de «ce qui est existant».

La deuxième partie de la documentation, traitant durenforcement de structures porteuses au moyendes matériaux les plus divers, ne constitue certes

pas un sous-chapitre secondaire. Il ne peut cepen-dant trouver son application dans la pratique sansune préparation liée à l’évaluation.

Le présent document a fait l’objet d’une procédurede consultation. Il a également été soumis à l’appré-ciation des participants au premier cours pilote, cequi a permis aux auteurs d’effectuer les modifica-tions nécessaires. Ceux-ci ont toutefois gardé leurliberté d’appréciation pour les questions où les avisdivergeaient. Ils assument donc aussi la responsabi-lité de leurs textes. Des améliorations sont encorepossibles et les suggestions éventuelles peuvent êtreadressées soit au directeur du cours, soit directementà l’Office fédéral des questions conjoncturelles.

Pour terminer nous tenons à remercier de leur pré-cieuse collaboration toutes les personnes qui ontcontribué à la réalisation de cette publication.

Office fédéral des questions conjoncturellesService de la technologie

Dr B. Hotz-HartVice-directeur

Evaluation des structures porteuses – Systèmes de renforcement

Page 7: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Evaluation des structures porteuses – Systèmes de renforcement

Table des matières

1. Exposé du problème 91.1 Importance du parc immobilier existant 91.2 Contenu et délimitation de la thématique 111.3 Termes et définitions 151.4 Buts de la documentation 161.5 Public visé 17

Bibliographie du chapitre 1 17

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes 212.1 Remarques préliminaires 212.2 Phases de l’évaluation 242.3 Mesures de sécurité 282.4 Conséquences pour l’ingénieur 292.5 Honoraires de l’ingénieur 29

Bibliographie du chapitre 2 30

3. Calcul statique d’ouvrages existants 313.1 Remarques préliminaires 333.2 Mise à jour des informations 343.3 Analyse de la sécurité 37

Bibliographie du chapitre 3 40

4. Aspects juridiques 414.1 Généralités 434.2 La responsabilité sur la base de la maîtrise de fait sur la structure porteuse existante 454.3 La responsabilité résultant de l’évaluation d’une structure porteuse existante 474.4 Classement juridique du renforcement d’une structure porteuse en tant

que prestation matérielle 524.5 Le renforcement de la structure porteuse en tant que complexe de prestations

immatérielles et matérielles 524.6 L’attribution juridique du renforcement d’une structure porteuse en tant que complexe

de prestations 554.7 La position juridique de l’ingénieur en tant que projeteur d’un renforcement

d’une structure porteuse 564.8 Questions particulières 59

Bibliographie du chapitre 4 64

5. Systèmes de renforcement 655.1 Renforcer ne rend pas toujours plus «résistant» 675.2 Synthèse des systèmes de renforcement 675.3 Critères de choix d’un système 68

Bibliographie du chapitre 5 69

Page 8: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

6. Renforcement au moyen de béton 716.1 Exposé du problème 736.2 Matériaux 756.3 Liaison entre deux bétons 776.4 Liaison entre le béton et l’acier 826.5 Liaison entre le béton et le bois 85

Bibliographie du chapitre 6 87

7. Renforcement au moyen d’acier 897.1 Exposé du problème 917.2 Renforcement avec des profilés en acier 927.3 Renforcement par une armature collée 99

Bibliographie du chapitre 7 108

8. Renforcement au moyen de la précontrainte 1098.1 Domaines d’application 1118.2 Matériaux 1148.3 Calcul et dimensionnement 1168.4 Indications constructives 1228.5 Mise en soumission 1298.6 Exécution 130

Bibliographie du chapitre 8 131

9. Renforcement du sol de fondation 1339.1 Avant-propos 1359.2 Situation de départ 1369.3 Le sol de fondation 1399.4 Moyens de renforcement 1429.5 Choix du système 1529.6 Calcul et dimensionnement 1579.7 Remarque finale 163

Bibliographie du chapitre 9 164

Publications du programme d’impulsions PI BAT 165

Evaluation des structures porteuses – Systèmes de renforcement

Page 9: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

1.1 Importance du parc immobilier existant 9

1.2 Contenu et délimitation de la thématique 11

1.3 Termes et définitions 15

1.4 Buts de la documentation 16

1.5 Public visé 17

Bibliographie du chapitre 1 17

1. Exposé du problème

7

1. Exposé du problème

Page 10: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

1.1 Importance du parc immobilier existant

Les recherches récentes effectuées dans le domainedes bâtiments par Wüest & Partner, à Zurich, ontpermis de cerner l’importance économique du por-tefeuille immobilier suisse. Même si les donnéesrelatives au parc immobilier actuel sont régulière-ment publiées – entre autres dans les publicationsde PI BAT –, on mentionnera quelques chiffres édi-tés par Wüest & Partner en 1993.

Parc immobilier

Nombre de bâtiments 2,25 mio

Surface utile (BGF) (m2) 743 mio

Volume construit (m3) 3081 mio

Valeur d’assurance (Fr.) 1550 mia

Figure 1.1: Parc immobilier en Suisse, Wüest & Partner,1993.

Le coût de la réhabilitation de ce parc immobilier estestimé à 1800 milliards de francs, alors que la valeurvénale des parcelles bâties, y compris les terrains,s’élève à 2500 milliards de francs environ.

La figure 1.2 montre le classement, selon l’âge, desbâtiments suisses en fonction de leur nombre et deleur valeur. Un peu plus d’un tiers du volume desbâtiments a été construit avant 1947. Le quart desbâtiments nécessitant une réhabilitation a étéconstruit pendant la haute conjoncture des annéessoixante et au début des années septante.

Les chiffres provenant du génie civil sont aussi par-lants. Le réseau des routes nationales, d’une lon-gueur de 1500 km, comprend plus de 3000 ponts,d’une valeur de reconstruction d’environ 6 milliardsde francs. Si l’on extrapole le nombre de ponts enconsidérant les 71 000 km du réseau routier completet que l’on y ajoute les autres ouvrages annexes, onestime la valeur du patrimoine relatif au seul géniecivil à plus de 300 milliards de francs.

Année de Nombre de Valeurconstruction bâtiments d’assur.

avant 1947 47% 40%

1947-1960 13% 11%

1961-1975 21% 27%

1976-1990 19% 22%

(Source: Gebäudedatenbank Wüest & Gabathuler, Stand 1990)

Figure 1.2: Classement des bâtiments en Suisse en fonc-tion de leur âge.

Bien que l’investissement total dans le bâtiment aitreculé en 1991 par rapport à 1990, ce montant a toutde même atteint 37,8 milliards de francs. La part dece montant investi dans le domaine de la réhabilita-tion est de plus de 10 milliards de francs. A partir de1985, on observe une constante augmentation del’investissement dans la réhabilitation. Cette aug-mentation représente une chance pour l’industrie dela construction dans les années nonante. La ten-dance actuelle montre une croissance de l’entretien,de la réhabilitation et de l’agrandissement des ouvra-ges existants. Le domaine de la rénovation est en toutcas peu sensible à la conjoncture et les besoins enrénovation sont en augmentation constante. Lebesoin d’investissement dans l’entretien et la réha-bilitation à long terme est estimé à 1,5 à 2% de lavaleur à neuf des immeubles. On devrait doncs’attendre à des investissements annuels de 30 à 40 milliards de francs.

Soixante pour cent des zones à bâtir sont déjàconstruites. Plusieurs cantons ont augmenté la den-sité admise pour les zones à bâtir existantes. En uti-lisant ces nouvelles possibilités de densifier les ter-rains déjà construits, on estime qu’il ne sera pour lemoment pas nécessaire de déclasser des terrainsagricoles pour augmenter les surfaces utiles. Lesanciennes zones industrielles situées souvent dansle centre de nos villes se prêtent particulièrementbien à une modification de leur affectation.

Des projets de changement d’affectation de grandessurfaces existent déjà. Comme exemples connus, onpeut citer les surfaces occupées par ABB à Zurich-Oerlikon ou à Baden, par Steinfels au centre deZurich et par Sulzer Frères SA au centre de Winter-thour. La figure 1.3 montre l’ampleur des transfor-mations futures prévues à Winterthour.

1. Exposé du problème

9

1. Exposé du problème

Page 11: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

En plus de l’importance économique du parc immo-bilier existant, on ne doit pas oublier que les pro-priétaires de ces biens-fonds ont des obligations juri-diques liées à leur responsabilité civile. En effet, ilssont tenus d’assurer l’entretien de leurs immeubles.

Au chapitre 4 de ce document, nous traiterons cesaspects juridiques d’une manière détaillée. C’estpourquoi nous ne parlerons ici que des deux articlesde loi les plus importants.

Selon l’art. 58 du CO, le propriétaire d’un bâtimentest responsable des dommages dus à un manqued’entretien de celui-ci (figure 1.4). La responsabilitéest causale, c’est-à-dire indépendante d’un com-portement délictueux du propriétaire.

La responsabilité du propriétaire est aussi unesimple responsabilité causale selon l’art. 679 du CC.Le propriétaire est pourtant responsable de la vio-lation des droits du tiers.

1. Exposé du problème

10

Figure 1.3: Vue aérienne des surfaces occupées par Sulzerprès de la gare de Winterthour (photo: Comet).

Figure 1.4: Art. 58 du CO.

E. Responsabilité pour des bâtiments et autres ouvrages

1. Dommages-intérêts

58. Le propriétaire d’un bâtiment ou de tout autreouvrage répond du dommage causé par des vices deconstruction ou par le défaut d’entretien.

Est réservé son recours contre les personnes res-ponsables envers lui de ce chef.

Figure 1.5: Art. 679 du CC.

V. Responsabilité du propriétaire

679. Celui qui est atteint ou menacé d’un dommageparce qu’un propriétaire excède son droit, peut action-ner ce propriétaire pour qu’il remette les choses enl’état ou prenne des mesures en vue d’écarter le dan-ger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.

Page 12: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

1.2 Contenu et délimitationde la thématique

La qualité d’un ouvrage diminue sous les effets duvieillissement, de son utilisation et de nombreusesagressions externes. C’est pourquoi on définit engénéral des critères d’aptitude au service et de sécu-rité structurale. L’état des immeubles à vocationsdiverses, des installations industrielles et des ouvra-ges d’art vieux de 25 à 45 ans s’est particulièrementdégradé à cause de leur utilisation intensive et d’unenvironnement agressif. Les effets dus à une utili-sation intensive croissante des ouvrages sont per-ceptibles. Un entretien s’avère indispensable.

Un grand nombre d’ouvrages devrait être adaptéaux sollicitations actuelles ou même être trans-formé en vue d’une nouvelle affectation (figures 1.6et 1.7).

Le vaste sujet de la conservation et de la rénovationd’ouvrages ne peut pas être traité sous tous sesaspects dans un seul document. Le programmed’impulsions PI BAT est en train de collecter tout lesavoir à ce sujet au travers de plusieurs projets. Lesujet est abordé sous l’éclairage du diagnostic, destechnologies mises en œuvre, de l’architecture, descoûts, du déroulement des travaux, mais aussi dudroit de la construction, de la gestion et de l’envi-ronnement.

L’évaluation d’un ouvrage nécessite de déterminerl’état des différentes parties de celui-ci ainsi que sescaractéristiques. Le présent document traite de lasécurité structurale des ouvrages. Il montre les voiesà suivre et les moyens permettant d’analyser et derenforcer des ouvrages. Les marches à suivre etméthodes proposées ci-dessous concernent exclu-sivement les problèmes liés au poids propre et auxactions variables ou permanentes agissant sur lesstructures. Le concept de base est développé dansla directive SIA 462 Evaluation de la sécurité struc-turale des ouvrages existants (1994).

1. Exposé du problème

11

Figure 1.6: Restrictions avant la rénovation (photo: SI+A,cahier N° 41, 10.10.1991/975, la chaussée en acier pour larénovation du pont, Hans-Gerhard Dauner, Aigle).

Figure 1.7: Changement d’affectation de la fonderie deFrauenfeld, mise hors service en 1983, en un mélange delogements, de bureaux et de locaux administratifs(photo: K. Keller, Frauenfeld).

Page 13: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Bien que les nombreux problèmes liés à l’évalua-tion et à un éventuel renforcement d’une structuresoient identifiés, on ne peut pas traiter tous lessujets dans notre document. On se limitera à l’étudede la structure porteuse et de sa sécurité structuralecomme indiqué dans la figure 1.8.

Les points suivants sont exclus ou plutôt partielle-ment traités, afin de garder une vue d’ensemble surles problèmes importants :

Réflexions sur la sécurité

Les personnes et l’environnement doivent êtreprotégés contre les effets de la ruine d’un ouvrage.L’exigence d’une sécurité est fondée sur la basedu droit. Il est bien entendu qu’il faut tenir comptede toutes les situations de risques possibles dansles réflexions sur la sécurité. La norme SIA 160énumère les points suivants sous l’article 2 21 2:

• écarts par rapport aux valeurs des actions consi-dérées;

• actions dues au sol de fondation;• actions chimiques (exemple: sel sur les ouvrages

routiers) ;• écarts par rapport aux valeurs de la résistance

ultime définies lors de l’établissement du projet ;• réduction de la résistance ultime due aux effets

du temps (par exemple: corrosion), de la tempé-rature (par exemple: diminution de la ductilité)ou de la variation des charges (exemple: fatigue) ;

• surcharge de la structure porteuse ou réductionde la résistance ultime provoquée, par exemple,par un incendie, une explosion, une rupture deconduite, la grêle, un choc ou un séisme;

• perte de stabilité de l’ensemble de la structure(par exemple: glissement, renversement, soulè-vement).

1. Exposé du problème

12

La documentation traite de: La documentation ne traite pas de:

Structure porteuse Ouvrage existant Eléments non porteurs Agrandissements et installation

d’appareillage

Poids propres Actions permanentes Actions variables

Actions Actions accidentelles

Sécurité structurale Exigences statiques Aptitude au service Sécurité à la fatigue

Figure 1.8: Délimitation de la thématique.

Page 14: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Actions accidentelles

Les actions accidentelles, telles que les chocs,déraillement, explosion, incendie et séisme, fontpartie intégrante des situations de risques à con-sidérer pour la sécurité structurale. Le traitementde ces situations de risques exige le plus souventdes mesures constructives plutôt que des ren-forts. Ceci nous amène à ne pas aborder lescharges accidentelles dans ce document et ànous limiter aux charges statiques (voir aussi lesréflexions du chapitre 5.1).

Les personnes intéressées trouveront des élé-ments complémentaires dans la documentationSIA D097 Verstärkungsmassnahmen für erdbe-bengefährdete Bauwerkeélaborée par le groupeSuisse de génie parasismique et de la dynamiquedes constructions (SGEB). Comme complémentà cet excellent ouvrage, la SGEB a lancé une nou-velle étude sur l’évaluation de la sécurité structu-rale sous l’effet d’actions accidentelles.

La sécurité à la fatigue

La détermination de la sécurité à la fatigue d’unouvrage est à elle seule une entreprise complexe.D’un côté, il est difficile de détecter prématuré-ment des fissures dues à la fatigue et, de l’autre,on dispose de plusieurs moyens pour augmen-ter la sécurité à la fatigue autres que le renforce-ment de la structure (par exemple : percementd’un trou à l’extrémité d’une fissure pour dimi-nuer la concentration des contraintes).

L’aptitude au service

Lors de l’évaluation ou du renforcement éventueld’une structure, on ne peut pas négliger l’aptitudeau service. Les notions d’aptitude fonctionnelle etd’aspect sont très ambiguës. De toute façon, ilconvient d’en débattre avec le propriétaire ouavec l’utilisateur. Là aussi, on dispose de plusieursmoyens pour améliorer l’aptitude au service sanspour autant devoir renforcer la structure (parexemple: isoler une machine source de vibrationdu plancher).

La durabilité sera abordée au chapitre des sys-tèmes de renforcement.

Cette documentation se base sur une série de tra-vaux réalisés dans le cadre du programme PI BAT.Ces travaux retracent les différentes phases de laconservation d’un ouvrage.

La figure 1.9 nous montre les différentes phasesnécessaires à la conservation d’un ouvrage. Ces pha-ses ne concernent que les mesures envisageablessous l’angle de la sécurité structurale. Bien entendu,

1. Exposé du problème

13

Figure 1.9: Phases de la conservation des ouvrages –mesures en relation avec la sécurité structurale.

Déclenchement

Réalisation

PréparationConcept d’examen

Constats

Evaluation de l’état

Recommandationsde mesures

Renforcements

Ne rien faire

Intensification dela surveillance

Restrictiond’utilisation

Démolition,reconstruction

Examen statique

Page 15: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

on peut aussi obtenir une sécurité structurale suffi-sante par des réparations et de l’entretien. Les domai-nes de la maintenance et du diagnostic sont traitésdans les ouvrages suivants: Techniques d’ausculta-tion des ouvrages de génie civil (PI BAT 1991), Lediagnostic des ouvrages de génie civil (PI BAT 1993),Diagnostic sommaire MERIP (PI BAT 1993) et Fein-diagnose im Hochbau (PI BAT 1993). La documenta-tion Evaluation des structures porteuses – Systèmesde renforcement couvre la vérification des calculslors de l’auscultation et l’évaluation de la sécuritéstructurale.

Par mesures, on comprend ici celles agissant sur lasécurité structurale. D’autres ouvrages traitent d’au-tres types de mesures, à savoir Protection desouvrages de génie civil (PI BAT 1992) et Réfectiondes ouvrages en béton (PI BAT 1993).

Chaque ouvrage qui, en cas de ruine, met en périldes personnes ou l’environnement, doit avoir unesécurité structurale suffisante. Les nouvelles cons-tructions sont normalement conçues et dimension-nées dès le départ pour satisfaire à des exigencesissues, en principe, des normes. Elles sont dimen-sionnées de façon à couvrir les imprécisions et irré-gularités qui ne manquent pas de se produire lors

de l’élaboration du projet ou de sa réalisation, sanspour autant porter atteinte à la sécurité structuralenécessaire. Une modification des actions ou de larésistance structurale sera aussi prise en compte.Un ouvrage existant, par contre, comporte, par rap-port aux plans initiaux, des imprécisions dues à laconstruction et des modifications dues à son utili-sation.

L’évaluation d’un ouvrage existant est un processusitératif. Elle part d’une analyse sommaire pour finirpar une analyse détaillée. On débute toujours parune visite des lieux et par l’étude des documentsencore disponibles. Il convient d’y inclure aussi lecomportement observé de l’ouvrage. Selon les pha-ses, on complète par une étude statique sommaireou une vérification détaillée pour déterminer lasécurité structurale de l’ouvrage. Enfin, on doit por-ter un jugement sur la durée de vie restante del’ouvrage et fixer des mesures administratives ouconstructives si elles sont nécessaires.

Si, au terme de la vérification, la sécurité structuraleest insuffisante, l’ouvrage existant ou l’une ou plu-sieurs de ses parties doit être renforcé, à la conditionque cela soit possible.

1. Exposé du problème

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1.3 Termes et définitions

Sauf indication contraire, les termes et définitionsdéveloppés dans cette documentation correspon-dent à ceux définis dans les normes SIA. Le voca-bulaire employé correspond en particulier à celui dela directive SIA 462, Evaluation de la sécurité struc-turale des ouvrages existants, Edition 1994.

Résumé des termes les plus importants :

Ouvrages existantsOuvrages construits et reçus au sens des articles157 et suivants de la norme SIA 118 ou d’unemanière analogue. Le terme ouvrage désigneaussi bien des ouvrages complets que des par-ties d’ouvrages.

Structure porteuseEnsemble des éléments de construction qui assu-rent la stabilité et limitent les déformations d’unouvrage. Des éléments du revêtement extérieur,du second œuvre et de certaines installations fontégalement partie de la structure porteuse.

Sécurité structuraleLa sécurité structurale face à un risque est assu-rée lorsque ce risque est maintenu sous contrôlepar des mesures appropriées ou qu’il reste infé-rieur à un minimum acceptable. On prendra lacapacité de déformation plastique en considéra-tion lors de l’évaluation de la sécurité structurale,en particulier dans le cas d’actions accidentelles.

Durée d’utilisation restanteDurée pendant laquelle un ouvrage peut ou doitrester en service conformément au plan d’utili-sation actualisé. Le cas échéant, elle détermineaussi la date d’une nouvelle évaluation de lasécurité structurale en vue d’une prolongation del’utilisation.

ActualisationContrôle et mise à jour des informations exis-tantes contenues dans les plans, listes et autresdocuments ainsi que les informations recueilliesspécifiques aux problèmes posés. Cette catégoriecomprend en particulier l’actualisation des situa-tions de risques, des dimensions de l’ouvrage,des propriétés des matériaux et des actions agis-sant sur l’ouvrage.

Risques acceptésRisques classés comme étant acceptables etsciemment acceptés par le propriétaire ou l’utili-sateur.

DéfautAbsence d’une qualité que l’ouvrage devrait pré-senter conformément aux normes, à un contratou aux règles de l’art.

Dégâts à l’ouvrageAffaiblissement ou endommagement de l’ouvragequi porte préjudice à sa sécurité structurale ou àson aptitude au service.

Lors de l’évaluation de la sécurité structurale d’unouvrage existant, on devra fréquemment se référeraux normes et directives anciennes et se reporter àd’anciennes notations et d’anciens systèmes d’uni-tés. On veillera dans ce cas à ce qu’aucune méprisene soit possible. Lors de l’évaluation on utilisera lestermes, notations et systèmes d’unités en vigueur.

1. Exposé du problème

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Page 17: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Aspects juridiques

1.4 Buts de la documentation

La formation des ingénieurs civils et les normessuisses éditées jusqu’ici sont principalement baséessur des règles de calcul, de dimensionnement et deconstruction de nouveaux ouvrages. Ces connais-sances acquises lors de la formation pour les projetsde nouveaux ouvrages sont des bases nécessairesqui ne suffisent toutefois pas pour des projets liés àdes constructions existantes.

Cette documentation veut en premier lieu sensibili-ser les spécialistes aux constructions existantes.Elle doit permettre de faire prendre conscience et demettre dans les esprits que l’évaluation de la sécu-rité structurale d’ouvrages existants est un travaildifficile et conséquent. Pour entreprendre une tâchede cette ampleur et d’une telle responsabilité, ilconvient d’être compétent, d’avoir de la méthodedoublée d’une bonne expérience.

La documentation comprend deux chapitres princi-paux à la suite desquels on devrait retirer l’impres-sion que chaque renforcement résulte de décisionsbasées sur une auscultation suffisante et sur uneévaluation de l’état de la structure.

Dans la première partie (figure 1.10), on marque ladifférence entre les calculs statiques d’un nouveau

projet et l’examen statique d’une structure exis-tante. On y décrit les phases permettant d’évaluerun ouvrage existant et les méthodes de calculsnumériques pour déterminer la sécurité structurale.Les exigences de sécurité structurale ne sont pasfixées selon les normes SIA des nouvelles construc-tions, mais elles dépendent de la durée de vie res-tante de l’ouvrage existant. Un autre chapitre estaussi complètement dédié aux importants aspectsjuridiques.

Dans le domaine des renforcements, la documen-tation aborde les problèmes spécifiques au renfor-cement avec du béton, de l’acier (sous forme de pro-filés ou de fers plats), de la précontrainte, del’armature collée et du béton projeté. Ensuite, ontraite des systèmes de renforcement du sol de fon-dation. On décrit aussi les divers domaines d’appli-cation de ces méthodes de renforcement. Les carac-téristiques des matériaux permettent de définir lesrègles de dimensionnement et de construction. Unetransposition vers des applications pratiques estillustrée par des informations sur les soumissionset les modes d’exécution. Pour compléter le dossier,on trouvera aussi des applications pratiques et desrésultats d’essais sur des systèmes de renforce-ment. La figure 1.11 illustre l’organisation du cha-pitre des systèmes de renforcement.

1. Exposé du problème

16

Figure 1.10: Organisation du chapitre traitant de l’éva-luation et des aspects du droit.

Figure 1.11: Organisation du chapitre traitant des sys-tèmes de renforcement.

Calcul statique

Déroulement de l’évaluation

Exposé du problème

EvaluationDroit

Renforcement du sol de fondation

Renforcement avec précontrainte

Renforcement avec acier

Renforcement avec béton

Systèmes de renforcement

Page 18: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

1.5 Public visé

Cette documentation est avant tout destinée auxbureaux d’ingénieurs, aux entreprises et à l’admi-nistration. L’évaluation d’une structure porteuseexistante doit être basée sur une recherche soignéede l’état de la construction et d’un examen desconditions statiques. Un renforcement éventuelrésulte d’une évaluation de la sécurité structurale etde l’aptitude au service. Dans le cadre de l’entretienet de la rénovation d’ouvrages, on doit faire face àune tâche difficile comportant de grandes respon-sabilités. Ce document est un outil permettant derésoudre ces problèmes particuliers mis à la dispo-sition de l’ingénieur expérimenté dans la réalisationde nouveaux ouvrages.

Dans ce document, on explique les règles régissantun examen statique et l’évaluation de la sécuritéstructurale. Dans le domaine des renforcements, ony présente quelques mesures spécifiques, depuis lechoix du système de renfort jusqu’à sa réalisation.Avec l’aide d’exemples, on devrait être finalementcapable de résoudre judicieusement les cas qui seprésentent.

Bibliographie du chapitre 1

PI BAT: Techniques d’auscultation des ouvrages degénie civil (1991).

PI BAT: Diagnostic sommaire MERIP (1993).

PI BAT: Untersuchungsmethoden im Hochbau:Feindiagnose für Baukonstruktionen undHaustechnik (1993).

PI BAT: Le diagnostic des ouvrages de génie civil(1993).

PI BAT: Protection des ouvrages de génie civil (1995).

PI BAT: Réfection des ouvrages en béton (1994).

Directive SIA 462: Evaluation de la sécurité structurale desouvrages existants (1994).

Wüest & Partner: Bau- und ImmobilienmarktSchweiz, MONITORING 1993, Zürich 1993

1. Exposé du problème

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Page 19: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

2.1 Remarques préliminaires 212.1.1 Raisons d’une évaluation 212.1.2 Sécurité structurale: le résultat d’une appréciation 212.1.3 Devoirs et responsabilités 222.1.4 Variantes de décisions 23

2.2 Phases de l’évaluation 242.2.1 Phase I : Evaluation sommaire préliminaire 242.2.2 Phase II : Examen approfondi 262.2.3 Phase III : Recours à un collège d’experts 272.2.4 Projet de remise en état 27

2.3 Mesures de sécurité 282.3.1 Mesures urgentes de sécurité 282.3.2 Mesures de sécurité supplémentaires 282.3.3 Renforcement des structures 282.3.4 Mise hors service, démolition 28

2.4 Conséquences pour l’ingénieur 29

2.5 Honoraires de l’ingénieur 29

Bibliographie du chapitre 2 30

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

Page 20: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

2.1 Remarques préliminaires

2.1.1 Raisons d’une évaluation

Il y a plusieurs raisons pour entreprendre l’évalua-tion d’une structure porteuse existante, notam-ment:• les résultats d’un contrôle périodique;• l’expiration de la durée d’utilisation restante déter-

minée lors d’un contrôle précédent;• un défaut de dimensionnement ou d’exécution;• un changement d’affectation planifié de l’ouvrage;• un doute sur la sécurité structurale à la suite de

dommages visibles;• une aptitude au service manifestement défec-

tueuse;• des événements exceptionnels survenus pen-

dant l’utilisation (comme par exemple: choc d’unvéhicule, avalanche, incendie dans un immeuble,séisme, etc.), et qui peuvent avoir endommagé lastructure porteuse;

• des soupçons sur l’influence possible de maté-riaux, de modes ou de systèmes de constructionsur la sécurité structurale, ou aussi

• un simple soupçon, né sans que l’on puisse toutd’abord en définir l’origine précise, que l’on veutécarter.

Avec l’expérience, on se rend compte que le plus dif-ficile est d’évaluer la sécurité structurale d’ouvragesexistants. On doit souvent déterminer le comporte-ment de la structure porteuse dans des situationsextrêmes, qui sortent en général du domaine desconnaissances acquises. A cela on doit ajouter qu’ilest souvent difficile de se prononcer sur l’état réeld’un élément porteur, alors que ce diagnostic peutse révéler capital dans l’évaluation de la sécuritéstructurale (par exemple dans les cas de corrosion).

L’évaluation de l’état d’une structure porteuse sou-mise à des actions dynamiques est aussi complexe,notamment en ce qui concerne la fatigue. La détec-tion précoce fiable de fissures dues à la fatigue n’estpossible qu’avec l’engagement de gros moyens etnécessite que soient menées des recherches pous-sées sur les parties d’ouvrage exposées.

Des doutes sur l’aptitude au service d’un ouvragesont rares. En effet, soit l’ouvrage a un comporte-ment satisfaisant en service, soit les défauts corres-pondant à un type de sollicitation sont connus. Desdéformations, la formation de fissures, la caracté-

ristique du comportement sous vibrations, etc., semanifestent dans des conditions d’utilisation nor-males et permettent sans autre une affirmation con-cluante. On peut éventuellement se poser des ques-tions sur l’acceptabilité de ces phénomènes s’ils’agit d’ouvrages soumis à des vibrations ou à desébranlements.

La question de la durabilité d’ouvrages existants sepose différemment. En effet, alors que pour un nou-veau projet on manque fréquemment d’expérience,on peut, dans le cas d’ouvrages existants, détermi-ner plus facilement une tendance de l’évolution ense basant sur l’état actuel. La détermination desmesures nécessaires à la conservation de l’ouvrageest comparativement plus facile dans le cas d’ou-vrages existants.

Dans le cas du projet et du dimensionnement d’unenouvelle structure, les problèmes sont exactementinverses. La sécurité structurale selon les normesest facilement contrôlée sur la base de modèles sta-tiques simples, alors que l’aptitude au service estplus difficile à modéliser et à prédire par manqued’informations sur l’utilisation finale réelle de l’ou-vrage. Il est encore plus difficile de prédire la dura-bilité d’ouvrage alors que l’on se trouve au stade del’étude du projet.

2.1.2 Sécurité structurale: le résultat d’une appréciation

La sécurité ou le manque de sécurité d’une struc-ture porteuse existante n’est plus directement liéeà l’ouvrage, mais avant tout liée à l’expressiond’une confiance en une personne (par exemple unexpert). Le jugement est influencé par les proprié-tés physiques souvent mal connues de la structure,par une idée sur le comportement de la structureainsi que par les situations de risque prévisible pen-dant la durée de vie restante.

Chaque jugement sur la sécurité d’une structureporteuse existante est subjectif et correspond audegré de connaissance atteint par l’auteur du juge-ment. Ainsi, les opinions d’experts, souvent diver-gentes, se rapprochent au travers d’un échange devue et finissent par tendre vers une unité de vue.

La sécurité structurale d’un ouvrage existant estdans beaucoup de cas le résultat d’une analyse soi-gnée de son état et de son comportement. Ce quipeut, par exemple, paraître au premier abord

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

Page 21: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

comme dépourvu de sécurité, peut avec l’apportd’informations complémentaires et selon les cir-constances se révéler sûr. Les propriétés objectivesréellement observées sur une structure porteuse ontensuite une influence sur l’estimation subjective dela sécurité structurale. Cette démarche est repré-sentée dans la figure 2.1, et abordée d’une manièreplus approfondie dans le chapitre 3.1.

Contrairement à ce qui précède, on peut tout à faitdécrire la sécurité d’un projet de structure commeune caractéristique objective du projet car le juge-ment de la sécurité structurale se base en généralsur quelques éléments de détermination clairementdécrits dans les normes afférentes. C’est pourquoila sécurité d’un projet de structure peut être objec-tivement évaluée avec les calculs statiques et lesplans.

2.1.3 Devoirs et responsabilités

Les devoirs et responsabilités des intervenants sonttraités de façon approfondie dans le chapitre 4. C’estpourquoi nous n’aborderons ici que deux sujets.

Il est manifeste que, en fonction des informationsou des intentions de l’utilisateur, le propriétaire del’objet en question est responsable d’entamer uneévaluation de son ouvrage. En effet il répond de ladéfaillance de sa structure d’une manière causale.Dans une telle situation, il est généralement con-seillé de mandater un ingénieur expérimenté pourdébuter un premier examen. Le contrat les liant doitêtre soigneusement rédigé et formulé. Selon la dif-ficulté de la tâche, il est indispensable que le pro-priétaire ait une confiance absolue en l’ingénieurmandaté.

L’ingénieur est naturellement tenu d’accomplir soi-gneusement son mandat. Il doit en particulier éla-borer un rapport d’expert sur la sécurité de la struc-ture et sur les mesures éventuelles à prendre. Lesmoyens permettant d’établir le rapport sont engénéral de la compétence de l’ingénieur. C’est pour-quoi les calculs et les auscultations effectués cor-respondent essentiellement à l’opinion qu’il se faitdu problème. Il est aussi tenu d’informer le man-dant sur une impossibilité éventuelle d’accomplir lemandat et de le refuser. Il est bon de savoir que siun spécialiste donne un conseil même sans êtrerétribué, il est soumis au droit du contrat et que saresponsabilité se trouve engagée.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Figure 2.1: Démarche d’évaluation et variantes de décision.

Page 22: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Dans les cas concrets de procédure, le juge se pro-noncera avant tout en examinant si l’ingénieur a faitface à son difficile mandat avec tout le soin néces-saire. La justesse des conclusions d’un ingénieur nedonne pas lieu à un grand débat, puisque chaquehomme, même le meilleur spécialiste, ne peut êtreinfaillible. Tout plaignant doit aussi apporter des élé-ments de preuves. Il doit prouver que l’ingénieur aviolé son devoir de diligence (voir aussi Briner, 1992).

Le propriétaire est finalement tenu de tenir comptedes dispositions et des conseils de l’ingénieur. S’iln’est pas prêt à le faire, alors l’ingénieur est tenu dele mettre en garde clairement sur les conséquencespossibles de son choix. Dans le cas où des person-nes sont mises en danger, la responsabilité de l’ingé-nieur est engagée et il a l’obligation d’annoncer lesfaits critiques à l’autorité de surveillance compétenteou, en cas de nécessité, au procureur général.

Face à un grand risque potentiel ou à des coûts pro-hibitifs, on peut se demander si l’ingénieur doitprendre seul la responsabilité d’une décision. A-t-ilsuffisamment de poids pour faire exécuter lesmesures nécessaires? Est-il raisonnable d’accepterque des risques exceptionnels soient laissés à sonseul jugement?

2.1.4 Variantes de décisions

L’ingénieur, mandaté pour évaluer une structureporteuse existante, doit avant tout trouver desréponses aux questions suivantes:• Quelle est la sécurité de la situation telle que

trouvée?• Est-elle suffisamment sûre?• Qui décide?• Comment arriver à la décision?• Comment défendre la décision?• Comment imposer la décision?

Après mûre réflexion, l’ingénieur mandaté doit par-venir à une décision et en faire part au maître del’ouvrage. Décider de la suffisance ou de l’insuffi-sance de la sécurité d’une structure a une grandeportée.

Dans le premier cas, on interrompt la procédured’évaluation et on a une confiance totale dans lesaffirmations de l’ingénieur. Dans le deuxième cas,on doit déterminer ce qu’il reste à faire. On dispose

alors d’une série de variantes, qui va d’une intensi-fication de la surveillance de la construction jusqu’àsa démolition et à sa reconstruction. La figure 2.1montre les variantes de décision et leurs consé-quences.

Il est évident que l’on va choisir la variante présen-tant un risque acceptable avec le coût le plus faible.Dans le futur, pour des raisons de politique écono-mique, nous serons amenés à apprendre à vivreavec de plus gros risques. Ces risques n’ont toute-fois pas le même poids selon le type de construc-tion examiné.

En règle générale, c’est le propriétaire ou l’utilisateurqui prendra de jure la décision finale. Pour les ouvra-ges publics, elle est prise par la direction des cons-tructions, c’est-à-dire par le gouvernement ou uneinstance similaire. Fréquemment, ces organes nesont pas compétents et se basent sur l’avis du oudes experts nommés. On peut donc dire que l’ingé-nieur décide souvent de facto, ce qui ne lui simplifiepas la situation.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Page 23: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

2.2 Phases de l’évaluation

L’expérience montre que l’évaluation d’un ouvrageexistant se décompose en trois phases (voir la direc-tive SIA 462). Chacune des trois phases doit être étu-diée pour elle-même et présentée pour une libredécision au maître de l’ouvrage. A la vérité, cetteliberté est restreinte par les recommandations résu-mées à la fin de chaque phase par l’ingénieur et parles ordonnances du Code des obligations et du Codepénal.

Il est évident que chacune des trois phases devraitêtre formulée avec précision et par écrit dans lecontrat. Le mandant et le mandataire doivent rédi-ger ce contrat ensemble.

La figure 2.2 schématise le déroulement d’une éva-luation.

2.2.1 Phase I : Evaluation sommaire préliminaire

Dans beaucoup de cas, l’évaluation sommaire préli-minaire est la phase la plus importante et nécessitede grandes connaissances. Elle a pour objet d’écar-ter les doutes existants avec des moyens appropriésou, si cela n’est pas possible, de faire des proposi-tions raisonnables pour d’autres investigations.

L’évaluation sommaire préliminaire comprend uneobservation visuelle, un inventaire des documentsexistants, une actualisation des plans d’utilisation etde sécurité d’entente avec le maître d’ouvrage oul’utilisateur, un contrôle rapide de la sécurité struc-turale et finalement un rapport.

a) Visite des lieux

Une visite de l’objet en question est extrêmementimportante. Un but parmi d’autres est de détecterles situations de risque locales typiques, qui pour-raient menacer la structure porteuse dans le futur.Il s’agit en plus de constater des défauts, des dom-mages et tous les signes de surcharges.

Lors de cette visite, on devrait aussi procéder à uneévaluation préliminaire intuitive de la sécurité struc-turale. En cas de nécessité, on peut aussi ordonnerdes mesures de sécurité complémentaires urgentes.

Une telle visite des lieux doit être bien préparée, sansque cette préparation n’amène d’idées préconçues.On trouve des conseils avisés dans (PI BAT, 1993).

b) Analyse des documents existants

Dans une deuxième partie de la phase I, on effectueune analyse des documents existants disponibles,tels que: plans, calcul statique, journal de la cons-truction, soumissions, décomptes, protocoles deréception, plans de transformations, etc.

Lors de l’étude de ces documents, il convient de sereplacer dans le contexte de l’époque: quels étaientles buts fixés, quels modes de construction ont étéutilisés et quels matériaux ont été mis en œuvre?Dans quel climat économique et d’organisation tra-vaillait-on? Est-ce que le travail était pressant? Tousces éléments constituent des indicateurs qualitatifs.

L’examen des notes de calcul apporte aussi unefoule d’informations, notamment sur les normes,les méthodes de calcul et de dimensionnement, lesystème statique admis et les moyens de calculsdisponibles à cette époque. Sur la base des connais-sances et des moyens de calcul actuels, on peutalors tout de suite déterminer les zones comportantdes réserves de sécurité ou non.

c) Complément et mise à jour des documents

Les plans d’utilisation et de sécurité, imposés parles nouvelles normes de construction, n’existentque pour peu d’ouvrages existants. Ces plans doi-vent être créés ou complétés selon les cas en fonc-tion de la durée d’utilisation restante. Ils constituentensuite une base importante pour déterminer si unouvrage peut rester en service, sous quelles condi-tions et avec quelles dispositions.

Ensuite, il convient de fixer les risques que l’on estprêt à accepter. Il est vivement conseillé d’effectuerune liste de ces risques et de la soumettre pouraccord au maître d’ouvrage. De cette façon, on saitexactement qui porte les conséquences financièresen cas de dégâts. Accepter consciemment ou parnégligence que des personnes soient mises en dan-ger est inadmissible et ne nécessite pas d’explica-tions complémentaires.

Les règles d’utilisation selon SIA 169, les plans desurveillance et les plans d’entretien jouent un rôleimportant dans les ouvrages existants. Ils permet-tent de fixer et d’assurer le comportement de l’ou-vrage pour la durée d’utilisation restante.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Page 24: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Figure 2.2: Les phases de l’évaluation.

Page 25: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Finalement, pour conserver les éléments impor-tants d’une évaluation récente, il faut procéder àune récolte soignée des documents essentiels, afinque ces bases soient sans équivoque et sans lacunedans l’optique d’une future évaluation.

d) Evaluation statique sommaire

On arrive en général à faire une première estimationsommaire de la sécurité structurale disponible en sebasant sur les plans d’utilisation et de sécurité, ainsique sur les plans et les calculs statiques. Le chapitre3 traite de la marche à suivre la plus appropriée.

Une remarque complémentaire est nécessaire pourles structures qui présentent un comportement nonsatisfaisant à des sollicitations dynamiques. Dansces cas, en plus de la sécurité structurale, on tien-dra compte de la rigidité de la structure qui est déci-sive dans le comportement vis-à- vis des vibrations.Le renforcement d’une construction entraîne engénéral une augmentation de la rigidité qui n’estpas forcément bienvenue. Il faut porter une atten-tion particulière aux questions dynamiques dansl’évaluation de la sécurité au séisme, notammentparce que la relation entre la résistance ultime et laductilité d’une structure porteuse est très sensible.Renforcer une construction en augmentant sa rigi-dité peut avoir pour conséquence un affaiblisse-ment de l’ouvrage.

e) Rapport

Toutes les connaissances acquises pendant laphase I doivent faire l’objet d’un rapport résuméremis au mandant. Si les doutes ayant amené lemandat n’ont pas pu être levés pendant la phase I,alors il conviendra d’effectuer des pas complémen-taires dans la phase II.

2.2.2 Phase II : Examen approfondi

Il est souhaitable de poursuivre les travaux de laphase II avec le même ingénieur, pour tirer profitdes connaissances acquises.

a) Examens de l’ouvrage

La phase II est caractérisée par les examens del’ouvrage. On effectue une mise à jour des infor-mations relatives à l’ouvrage. A cet effet, on fait en

général appel à des spécialistes ou à des instancesspécialisées. On trouve des informations impor-tantes sur ce thème dans (Favre et al., 1987; PI BAT,1992; Ladner, 1988; Wicke, 1987).

Souvent on essaie d’examiner tous les élémentspossibles, par exemple diamètre et écartement desarmatures, profondeur de carbonatation, teneur enchlorures, fissures et écartement de celles-ci, fis-sures superficielles, fissures dues à la fatigue, résis-tances, comportements en charge, déformations,ancrages, injection des câbles de précontraintes,etc. Une telle démarche désordonnée est préjudi-ciable. D’autre part, certains examens approfondissont l’occasion d’un endommagement souvent inu-tile de la structure.

Il est beaucoup plus sensé et financièrement plus rai-sonnable de se baser sur les résultats de la phase Ipour fixer un programme d’examens et d’essais àentreprendre. Les essais devraient être superviséspar l’ingénieur mandataire responsable. Pour autantque ce soit possible, il devrait aussi participer à laformulation du rapport d’investigation.

b) Vérification par un calcul

Les informations complémentaires obtenues doi-vent être intégrées au calcul pour lever ou confir-mer les doutes qui subsistaient après la phase I. Ilconvient de mettre à jour les valeurs et de modifierles modèles statiques utilisés.

c) Rapport

Toutes les conclusions de la deuxième phase sontrésumées dans un rapport qui, à nouveau, seraremis au mandant. Le rapport donnera avant toutdes informations sur la question de la sécurité struc-turale. Si l’on conclut à une sécurité structuraleinsuffisante, il convient d’intensifier les mesures desurveillance, de fixer des limites d’utilisation, derenforcer et d’envisager éventuellement la misehors service de l’ouvrage.

En général, la décision de mettre en place l’une deces mesures justifie largement l’arrêt des examensde la phase II. C’est notamment le cas si aucune per-sonne n’est mise en danger et que les risques d’unendommagement des choses ou des valeurs sontpris en compte. Si la vie de personnes n’est pas encause, on peut même étayer la décision par desréflexions de coût et d’utilisation.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Page 26: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Une telle fin du processus d’évaluation est aussi jus-tifiée si l’on décide de réhabiliter, c’est-à-dire de ren-forcer l’ouvrage ou de le démolir pour le remplacer,sous réserve bien entendu que les conséquencesfinancières ne soient pas disproportionnées.

Si tous ces critères ne s’appliquent pas, on est alorsface à un problème complexe où toute décision auraune grande portée. Dans le rapport de la phase II,l’ingénieur responsable devra proposer la mise enroute de la phase III.

Le mandant devrait aussi être partie prenante à cestade de l’évaluation, ce qui garantit un jugementéquilibré et objectif.

2.2.3 Phase III : Recours à un collège d’experts

Dans de rares cas et pour des problèmes de grandeportée, on a recours à un collège d’experts. Celui-ciest chargé d’étudier soigneusement les proposi-tions de décision. En plus de l’ingénieur mandaté,le collège devrait compter deux autres spécialistesexpérimentés. En règle générale, le propriétaire oul’utilisateur n’appartient pas au collège mais se tientà disposition pour toutes les informations nécessai-res. Il est avant tout intéressé par le côté qualitatifdu débat, c’est pourquoi il ne sera présent qu’en tantqu’observateur.

En portant un jugement sur l’ouvrage existant, un telcollège d’experts se substitue aux normes, ces der-nières garantissant un niveau de sécurité équilibréet satisfaisant pour de nouveaux projets. Le principed’accepter des risques plus élevés ne devrait êtreréservé qu’à un tel collège.

L’ingénieur mandaté pour les phases I et II fourniraau collège tous les éléments disponibles et il expli-quera ses propositions de mesures à prendre. Lecollège au complet ferait bien ensuite de visiterl’ouvrage et d’en discuter en commun.

Le collège peut reporter sa décision afin de faireeffectuer des examens supplémentaires de l’ou-vrage. Avant de prendre une décision, il peut aussiexiger que des recherches complémentaires soientréalisées par l’ingénieur mandataire. Cette décisiondoit être unanime et défendue auprès du proprié-taire ou, le cas échéant, devant la collectivité. Lesmembres du collège ont une responsabilité collec-tive vis-à-vis du propriétaire.

En dernière instance, le collège d’experts conseilleau maître de l’ouvrage ou à l’utilisateur de mettreen œuvre les mesures choisies. S’il existe un dan-ger pour les personnes et eu égard au caractère obli-gatoire face à la collectivité, toutes les dispositionsnécessaires doivent être prises pour faire appliquerles mesures préconisées, même si elles sont con-traignantes pour le propriétaire ou l’utilisateur.

2.2.4 Projet de remise en état

L’élaboration de la remise en état ou du projet derenforcement ne fait plus partie des phases décritesprécédemment. Elle correspond plutôt à un nou-veau mandat d’ingénieur. D’un côté, il serait préfé-rable de mandater l’ingénieur qui s’est occupé desphases précédentes afin d’utiliser au mieux lesconnaissances déjà acquises, mais d’un autre côtéon risque de ne pas détecter une éventuelle erreurd’évaluation.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Page 27: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

2.3 Mesures de sécurité

La figure 2.2 illustre les principales mesures desécurité disponibles. A celles-ci, il convient d’ajou-ter toutes les mesures urgentes de sécurité néces-saires en cas de situation critique. Ces diversesmesures sont décrites succinctement ci-dessous.

2.3.1 Mesures urgentes de sécurité

Dès qu’il apparaît nécessaire de protéger des per-sonnes ou l’environnement, il faut mettre en placedes mesures urgentes de sécurité. C’est, en parti-culier, immédiatement le cas quand il apparaît quela sécurité structurale n’est pas suffisante.

Comme mesures d’urgence on envisagera:• la restriction significative de l’utilisation;• des dispositions constructives (étayage, soutè-

nement) ;• la fermeture de parties d’ouvrage;• la mise hors service et la fermeture de l’ouvrage.

2.3.2 Mesures de sécurité supplémentaires

Il est souvent judicieux d’intensifier la surveillancedes ouvrages, pour autant qu’elle soit à même defaire détecter à temps une dégradation progressivede la sécurité structurale. C’est en général le cas avecdes défaillances annonciatrices d’une ruine possible,comme des déformations croissantes, l’apparition defissures, des ruptures successives de torons, etc. Unetelle intensification de la surveillance est inutile dansles constructions où l’on s’attend plutôt à une rupturefragile, sans signe annonciateur.

Souvent, il convient aussi de prendre des mesuresadministratives sur place, telles que la réduction descharges utiles. Il est important d’étudier l’efficacitéet l’applicabilité de telles mesures.

Lorsque l’on choisit cette option pour réduire lerisque, il est conseillé de consigner ces mesuresdans un document que l’on pourrait appeler plan derisques et de le soumettre au maître d’ouvrage ouà l’utilisateur.

2.3.3 Renforcements des structures

Lorsque des parties d’ouvrages sont à renforcer, ontendra à appliquer alors les normes SIA de construc-tions régissant les nouvelles structures.

Si l’on renforce des parties importantes ou mêmetout un ouvrage, alors le dimensionnement des ren-forts se fera aussi sur la base de ces normes.

2.3.4 Mise hors service, démolition

Dans de rares cas, on doit mettre temporairementou définitivement l’ouvrage hors service en raisond’un manque de sécurité structurale.

Les ingénieurs doivent être conscients que la démo-lition d’un ouvrage par défaut de sécurité n’esteffectuée qu’en tout dernier ressort. Dans un certainsens, on peut même dire que l’ingénieur a failli à samission et qu’il n’a pas pu justifier d’autre moyenque la démolition pour prolonger la durée de vie del’ouvrage.

Si l’on est obligé de remplacer la structure, on pla-nifiera la démolition et on fera le projet d’un nouvelouvrage. Celui-ci sera alors conçu selon les normesde construction en vigueur.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Page 28: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

2.4 Conséquences pour l’ingénieur

On a pu constater que l’ingénieur est impliqué d’unemanière ou d’une autre dans toutes les variantes dedécisions mentionnées. En guise de conclusion, onle montrera par l’exemple suivant :

Un toit isolé sous lequel se trouve pratiquementtoujours quelqu’un (par exemple une pompe àessence ou un poste de douane), donne lieu à desinquiétudes (fissures, déformations, etc.). Un ingé-nieur est alors mandaté pour lever ces inquiétudesou pour les confirmer. Sa réponse déclenche la miseen œuvre de mesures de sécurité correspondantesqui peuvent être très coûteuses.

Les variantes de base possibles mentionnées dansla réponse sont très claires: on peut démolir la struc-ture en question et la reconstruire plus solidement,on peut la renforcer, on peut exiger des examenssupplémentaires ou même ne rien faire et laisserl’ouvrage en service. Quelle solution l’ingénieurdoit-il conseiller à l’utilisateur de l’ouvrage?

Pour clarifier certaines questions par des essais demise en charge, il faudrait compter 20 000 francsenviron; la démolition et la reconstruction sont devi-sées à 500 000 francs; ne rien faire coûte peut-être1000 francs, correspondant aux honoraires de l’ingé-nieur mandaté. Cette somme est dérisoire. Quelconseil donner au mandant?

Il est manifeste que, avec sa décision, l’ingénieurassume une responsabilité considérable et encourtun risque: s’il conseille de laisser l’ouvrage en ser-vice et que celui-ci s’écroule ensuite, il sera alors tra-duit en justice. S’il conseille la démolition suivied’une reconstruction, on se demandera alors sil’ingénieur n’est pas trop prudent et si cette solutionextrême est vraiment nécessaire. De plus, l’ingé-nieur ne sera peut-être pas suivi dans ses conclu-sions. S’il conseille des essais de charges et qu’ilconclut que la sécurité de la structure est pleine-ment garantie, on peut alors éventuellement luireprocher d’avoir demandé des essais et entraînéainsi des dépenses inutiles.

Il est manifeste qu’il faut essayer de limiter la res-ponsabilité de l’ingénieur à un niveau acceptable,d’influencer la jurisprudence dans ce sens et derégler les questions d’honoraires.

2.5 Honoraires de l’ingénieur

Le règlement SIA fixant les honoraires est essen-tiellement conçu pour de nouvelles constructions,tout comme la norme 160 et les normes de cons-truction. Pour ce qui est des honoraires relatifs àl’évaluation de la sécurité structurale d’un ouvrageexistant, il ne convient pas du tout.

Les honoraires pour des prestations effectuées surdes ouvrages existants ne sont pas une question denombre d’heures de travail. Même un grand nombred’heures ne permet pas de régler le problème. Cen’est pas non plus une question de pourcentagepuisque, selon les moyens de renforcement ou desécurité mis en œuvre, ce pourcentage ne permetmême pas de couvrir les frais. Il faut en fait trouverun dédommagement équitable en fonction de la res-ponsabilité assumée par l’ingénieur.

Avec l’augmentation de ce type de mandats, ildevient urgent que la SIA se penche sur la questionet apporte les éléments de réponse nécessaires.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Page 29: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Bibliographie du chapitre 2

Briner, H. : Nutzungs-/Sicherheits- /Kontrollplan – Recht-liche Fragen und Antworten zur Norm SIA 160,Schweizer Ingenieur und Architekt, 26, Seiten525 ff und 35, Seiten 633 ff, 1992.

Favre, R., Andrey, D. & Suter, R. :Maintenance des ouvrages d’art – Méthodo-logie de surveillance, Département fédéral destransports, de l’énergie, Office fédéral desroutes, Berne, 1987.

PI BAT: Le diagnostic des ouvrages de génie civil –Manuel pour ingénieurs civils, Office fédéraldes questions conjoncturelles, 1993.

Ladner, M.: Zustandsuntersuchungen von Bauwerken,Forschungs- und Arbeitsberichte, Abteilung116, Massivbau, Bericht Nr. 116/3, EMPAZürich, 1988.

SIA 160: Actions sur les structures porteuses, Sociétésuisse des Ingénieurs et Architectes, Zurich,1989.

SIA 169: Maintenance des ouvrages de génie civil,Recommandation, Société suisse des Ingé-nieurs et Architectes, Zurich, 1987.

SIA 462: Evaluation de la sécurité structurale desouvrages existants, Directive, Société suissedes Ingénieurs et Architectes, Zurich, 1994.

Wicke, M. et al. : Verfahren zur Vorhersage des Umfangs vonBrückensanierungen, Bundesministerium fürWirtschaftliche Angelegenheiten, Strassen-forschung, Heft 338, 1987.

2. Déroulement de l’évaluation des structures porteuses existantes

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Page 30: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

3.1 Remarques préliminaires 333.1.1 Préparation des bases 333.1.2 Analyse de sensibilité 33

3.2 Mise à jour des informations 343.2.1 Actions 343.2.2 Résistances et autres caractéristiques des matériaux 353.2.3 Dimensions 353.2.4 Systèmes statiques 353.2.5 Méthodes de calcul 363.2.6 Méthodes de dimensionnement 363.2.7 Défauts et dommages 363.2.8 Histoire de la construction 36

3.3 Analyse de la sécurité 373.3.1 Méthodes 373.3.2 Evaluation sommaire préliminaire 373.3.3 Vérification par le calcul selon les normes en vigueur 373.3.4 Vérification par le calcul avec des valeurs mises à jour 383.3.5 Modification des facteurs de sécurité 383.3.6 Méthodes pour les cas particuliers 393.3.7 Détermination qualitative de la sécurité structurale 393.3.8 Mesures de sécurité complémentaires 39

Bibliographie du chapitre 3 40

3. Calcul statique d’ouvrages existants

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3. Calcul statique d’ouvrages existants

Page 31: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

3.1 Remarques préliminaires

3.1.1 Préparation des bases

Un plan d’utilisation et un plan de sécurité sontindispensables pour l’évaluation de la sécuritéstructurale d’un ouvrage existant. Ils doivent êtremis à jour en fonction de la durée d’utilisation res-tante, qui est déterminante. Si ces plans manquentpour des ouvrages anciens, il convient alors d’enétablir de nouveaux.

Par durée d’utilisation restante d’un ouvrage, oncomprend la durée pendant laquelle l’ouvrage doit,respectivement peut encore rester en service selonle plan d’utilisation. Le cas échéant, ce plan fixeaussi une date limite d’utilisation à laquelle ilconviendra d’effectuer une nouvelle évaluation dela sécurité structurale.

La durée d’utilisation restante sera mentionnéedans un plan d’utilisation et résultera d’un équilibreraisonnable entre risque et coût. Cette durée pourravarier en fonction des résultats de l’examen.

Dans un plan de sécurité, il convient de tenir compte,avec une attention particulière, des situations derisques possibles au cours de la durée d’utilisationrestante.

Dans de nombreux cas, il est nécessaire d’effectuerun lever in situ des caractéristiques de la structure.On est alors confronté à divers problèmes d’inter-prétation. Les mesures effectuées sur un ouvragesont difficilement comparables aux valeurs normées,qui sont plutôt destinées aux nouveaux ouvrages. Lechapitre 3.2, Mise à jour des informations, traite del’ensemble de ces questions.

3.1.2 Analyse de sensibilité

Dans les situations critiques, les ingénieurs expéri-mentés n’omettent que rarement d’effectuer descalculs avec des valeurs extrêmes. De cette façon,ils testent la sensibilité du système et ils recherchentensuite les valeurs déterminantes. C’est ce que l’onappelle une analyse de sensibilité.

Dans une telle analyse, il est judicieux de ne fairevarier qu’une seule variable à la fois, pendant que lesautres paramètres restent constants. On peut alorsobserver une variation des résultats, par exemple lamarge de sécurité M = R – S ou le facteur de sécu-

rité structurale γ = R/S. Cette méthode atteint cepen-dant rapidement ses limites dans le cas où les para-mètres sont multiples et les formules complexes.

L’expérience montre que seuls deux voire trois para-mètres, parmi de nombreux autres, influent réelle-ment sur le système. Dans les cas concrets, il estinutile de traquer des effets d’importance secon-daire. On consacre par exemple souvent trop d’éner-gie pour déterminer la résistance d’un béton. Il esten revanche primordial de mettre l’accent sur lamise à jour des paramètres principaux et sur leuractualisation. Les méthodes probabilistes sont alorsd’un grand secours (voir Schneider, 1994).

3. Calcul statique d’ouvrages existants

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3. Calcul statique d’ouvrages existants

Page 32: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

3.2 Mise à jour des informations

La phase II, présentée dans le chapitre 2, concerneprincipalement la mise à jour des connaissancesd’une structure. Le vocable de mise à jour ou d’actua-lisation concerne le remplacement des informationsprovenant par exemple de plans, de listes et d’autressources, par des informations spécifiques recueilliessur l’ouvrage ainsi que dans les plans de sécurité etd’utilisation. On peut citer en particulier la mise à jourdes situations de risques, des actions, des dimensionsde l’ouvrage et des caractéristiques des matériaux.

La première source importante d’informations pourla mise à jour provient des documents de l’ouvrage.Dans la mesure du possible, si ceux-ci existent etsont disponibles, on procédera à un contrôle de leurvéracité et de leur intégralité. Il convient de vérifieren particulier si les divers travaux d’entretien, detransformation, de rénovation et de démolition yont bien été reportés. Les pas suivants de cette miseà jour se déroulent en général sur l’ouvrage même.

La mise à jour porte sur plusieurs types de pro-blèmes. L’approche de ceux-ci doit faire l’objet detoute l’objectivité possible. Il convient notammentd’examiner:• les actions;• les résistances;• les dimensions;• les systèmes statiques;• les méthodes de calcul ;• les méthodes de dimensionnement;• les défaut et les dommages.

Chacun des points mentionnés est développé ci-dessous.

3.2.1 Actions

On a une bien meilleure idée sur les actions prévi-sibles en se basant sur le plan d’utilisation déjàactualisé lors de la phase I et sur le plan de sécurité,tenant compte de la durée d’utilisation restante.

Il faut être conscient que, depuis la réalisation del’ouvrage en question, l’intensité des actions solli-citant une structure a été parfois considérablementaugmentée. Par exemple, les actions dues à la neigede la norme SIA 160 ont été augmentées à chaque

nouvelle version de la norme. La même observationest valable pour les charges utiles des ponts rou-tiers.

Pour les actions climatiques (neige, vent, séisme,etc.), il paraît évident de réduire la période de retourde ces événements de façon raisonnable. On peutpar exemple la fixer à cinq fois la durée d’utilisationrestante.

Normalement, de telles interprétations sont baséessur des théories de la probabilité. Concrètement, lesphénomènes climatiques sont basés sur une répar-tition de Gumbel. On peut admettre qu’un facteur decharge de 1,35 de la norme SIA 160 correspond àune période de retour de 50 à 100 ans. Le facteur 1,35correspond au facteur 1,5 de l’action prépondéranteréduit d’un facteur tenant compte de l’imprécisiondu modèle.

Pour la construction des droites caractéristiques dela répartition de Gumbel, l’autre point de référencesera constitué par la valeur annuelle, qu’il est pos-sible d’estimer à partir de propre expérience. Ontrouve de plus amples informations dans le livre de(Schneider, 1994).

Alors que les charges de neige et les forces dues auséisme peuvent être directement interpolées, on nedevrait pas le faire pour les forces dues au vent. Dansce dernier cas, il convient d’interpoler sur la vitessedu vent et de la transformer ensuite en forces.

Une actualisation du poids propre et des chargespermanentes est nécessaire et judicieuse. Les char-ges permanentes donnent souvent lieu à des sur-prises (chapes supplémentaires, murs mitoyensnon considérés, etc.). Il ne faut cependant pas croirequ’après une telle actualisation on puisse se per-mettre de ne plus considérer les facteurs de chargecorrespondants. On pourra alors, tout au plus, pro-céder à une réduction de ces facteurs en raison dela levée de certaines incertitudes.

Les charges dans des dépôts ou des fabriques doi-vent aussi être actualisées. Dans ces cas, il fautabsolument prendre des mesures pour que les ins-tructions d’utilisation soient sans équivoque etqu’une surveillance adéquate permette d’éviter undépassement des charges admissibles. Une réduc-tion des facteurs de charge n’est pas opportune ici.

Les charges admises sur les ponts routiers et ferro-viaires peuvent être réduites, pour autant que des

3. Calcul statique d’ouvrages existants

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Page 33: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

mesures fiables soient prises. On doit par exemplegarantir que les valeurs maximales imposées nepuissent pas être dépassées et que les règles deconduite soient respectées. Ici aussi, les facteurs decharge à appliquer sont ceux fixés dans les normesen vigueur.

3.2.2 Résistances et autres caractéristiquesdes matériaux

A l’époque du dimensionnement de l’ouvrage exa-miné, on a fixé certaines exigences pour les carac-téristiques des matériaux. Le risque que certainesexigences ne soient pas respectées à la réalisationde l’ouvrage était couvert par certaines réservesprovenant des prescriptions de sécurité définiesdans la norme correspondante.

Lors d’une évaluation, nous avons de bien meil-leures informations sur les principales caractéris-tiques des matériaux en effectuant un prélèvementd’échantillon in situ. Il est justifié d’introduire cesconnaissances améliorées à l’évaluation et de dimi-nuer une certaine réserve de sécurité. D’un autrecôté, l’évaluation doit aussi tenir compte des obser-vations relatives à la corrosion, la fatigue, une dété-rioration, un éclatement et à des effets locauxcomme une entaille. Toutes les observations effec-tuées doivent être soigneusement consignées envue d’un éventuel renforcement. On pense notam-ment à la soudabilité de certains aciers, etc.

Il faut être conscient que les données mesurées autravers de quelques essais ou échantillons d’unouvrage ne sont pas très représentatives. Cesvaleurs ne doivent être considérées que comme desindications à compléter par des données de l’expé-rience. Par exemple, on doit considérer que lescaractéristiques des matériaux d’ouvrages anciensprésentent une dispersion beaucoup plus grandeque celle d’ouvrages récents.

On arrive par exemple souvent à identifier la pro-venance d’un acier au moyen d’un bulletin de livrai-son. On trouve ensuite les caractéristiques précisesde celui-ci en contactant l’usine qui l’a produit ouauprès de l’EMPA.

Avec un petit nombre d’échantillons, il est difficiled’interpréter les résultats d’essais. Afin d’améliorerl’interprétation, il est conseillé de se baser sur uneétude de probabilité. Pour effectuer une extrapola-tion sur les fractiles, il faut tenir compte de la quan-

tité d’échantillons prélevés. La norme SIA 162 fixeainsi des règles pour le contrôle de la résistance desbétons.

Une actualisation des caractéristiques des maté-riaux peut être évitée à condition que ces donnéesressortent clairement et avec toutes les garanties defiabilité du dossier de l’ouvrage ou des normes envigueur à l’époque et qu’il n’existe pas de doutesquant à une apparition de signes de vieillissementou de déviations importantes de ces valeurs. On n’apas le droit de négliger un doute quelconque.

3.2.3 Dimensions

En cas de nécessité, il convient de remplacer toutesles dimensions par des dimensions mesurées.Celles-ci seront considérées aussi bien dans les casfavorables que dans les cas défavorables.

Si des documents d’ouvrage manquent, si des trans-formations ont eu lieu ou encore si un doute subsistequant à des dispersions importantes, on contrôleraalors les dimensions déterminantes de l’ouvrage insitu.

3.2.4 Systèmes statiques

Les conditions statiques et cinématiques des bordsinfluant sur le comportement de l’ouvrage sont àvérifier (par exemple: encastrements, conditionsd’appui, liberté de déplacement des appuis, jointsde dilatation, etc.). Ces conditions fixent les sys-tèmes statiques permettant d’évaluer la sécuritéstructurale.

Les systèmes statiques de l’époque étaient plussimples et plus sommaires eu égard aux moyens decalculs alors à disposition. Avec des modèles plusdétaillés, par exemple tenant compte de l’effet spa-tial d’une structure, on arrive souvent à trouver desréserves de portance. Ce n’est pourtant pas toujourspossible; par exemple dans le cas des dalles croi-sées, on voit souvent des dalles dimensionnées etarmées dans une seule direction. On peut détecteraussi des faiblesses au niveau de la transmissiondes efforts dans les zones d’appui, ce qui interditune modification des trajectoires de forces. Selonles cas, il est judicieux ou nécessaire d’imposer desinspections ultérieures pour s’assurer de cette zone.

3. Calcul statique d’ouvrages existants

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Page 34: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

D’un autre côté, les ouvrages ont souvent des élé-ments non porteurs, qui, après vérification, s’avè-rent être porteurs malgré eux. Un exemple typiquevient des murs non porteurs qui ont souvent un effetstabilisateur déterminant pour une structure. Il estpossible d’intégrer cet effet dans les calculs. On doitalors s’assurer que cet élément peut garder cettefonction pendant la durée d’utilisation restante.

Un autre exemple provient de poutres de facto conti-nues, alors qu’initialement on avait prévu une sériede poutres articulées à leurs extrémités. Le caséchéant, on peut admettre un effet de continuité par-tielle dans le calcul et mobiliser ainsi des réserves.

Dans la mise à jour d’un système statique, il faut évi-demment aussi tenir compte des modifications duesà des dégâts, affaiblissements et transformations.

3.2.5 Méthodes de calcul

Les méthodes de calcul ont aussi évolué dans letemps. Ainsi, jusqu’aux années septante, il était cou-rant lors d’un dimensionnement d’utiliser les valeursextrêmes (enveloppes) données par un calcul élas-tique. Aujourd’hui, nous sommes plus larges. Nousnous dirigeons plus facilement vers la déterminationde la combinaison de charges déterminantes en utili-sant en règle générale les méthodes statiques du cal-cul à la charge ultime. Ceci nous permet de décelerune certaine réserve lors d’une vérification par le cal-cul. On sera prudent en utilisant la méthode cinéma-tique parce que, comme on le sait, elle surestime lacharge ultime.

3.2.6 Méthodes de dimensionnement

Jusque dans les années septante, les éléments por-teurs ont été dimensionnés sur la base des con-traintes admissibles. Aujourd’hui, on compare larésistance d’une section aux sollicitations expri-mées en tant qu’efforts intérieurs. Ici aussi, on arrivesouvent à mobiliser des réserves.

Dans la construction métallique, on utilise mieux etdepuis plus longtemps les capacités portantes dis-ponibles. Il en résulte que l’augmentation possiblede la sollicitation dépasse rarement les 5%. Enbéton armé, les possibilités d’augmenter la sollici-tation de l’armature de flexion tendue d’un élément

sont très modestes, alors que, dans les parties oùles contraintes de béton étaient déterminantes, ondispose aujourd’hui de réserves considérables.

D’un autre côté, il faut être attentif au fait que cer-tains modèles de dimensionnement figurant dansdes anciennes normes se sont révélés peu sûrs.Dans les normes actuelles, ces exigences sont deve-nues plus sévères. Parmi ces changements, ontrouve par exemple des problèmes de stabilité enconstruction métallique et des problèmes dedimensionnement au cisaillement et au poinçonne-ment en béton armé.

3.2.7 Défauts et dommages

La structure porteuse doit être soigneusement exa-minée à la recherche de défauts, de dommages et detout signe de vieillissement. Tous les phénomènesobservés (défauts, dommages, effets dus à desdéplacements, déformations, vieillissement, corro-sion et fatigue) doivent être pris en compte dansl’évaluation de la sécurité structurale.

L’existence de défauts majeurs cachés sur des struc-tures anciennes est peu probable, parce qu’en leurprésence ces structures n’auraient pas duré aussilongtemps.

3.2.8 Histoire de la construction

On peut aussi obtenir de précieuses informations enétudiant l’histoire de l’ouvrage: que c’est-il passépendant la durée de vie de l’ouvrage? Il vaut la peinede rechercher ces informations. On apprend parexemple que plusieurs tremblements de terred’intensités diverses ont eu lieu sans générer dedommages sur la structure. Ce genre d’informationa de l’importance dans l’évaluation de la sécurité auséisme d’un ouvrage. On peut faire des raisonne-ments similaires pour d’autres situations de risquesauxquelles l’ouvrage a résisté, comme on peut enfaire la preuve.

3. Calcul statique d’ouvrages existants

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Page 35: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

3. Calcul statique d’ouvrages existants

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3.3 Analyse de la sécurité

3.3.1 Méthodes

Le but d’une analyse de sécurité est d’obtenir unecote pour la sécurité structurale et une valeur decomparaison déterminante qui sera une aide dansla recherche d’une solution et la prise d’une décision.

On doit garder le chapitre 2 en mémoire et se rap-peler que non seulement la sécurité structurale,mais aussi et en conséquence les valeurs de réfé-rence et de comparaison, ont un caractère subjectifet ne sont pas des données de l’ouvrage. Il s’agit,entre autres, d’estimations non chiffrées qu’a pufaire l’ingénieur mandaté, par exemple des indica-tions du style «c’est mieux que...» ou «c’est plusmauvais que...».

On dispose de méthodes déterministes et de métho-des probabilistes pour effectuer une analyse desécurité. La méthode probabiliste est plutôt utiliséedans les cas exceptionnels.

L’utilisation de règles et de facteurs déterministes,tels que définis dans les normes, n’est souvent pasd’un grand secours. En effet, ils sont plutôt destinésau dimensionnement de nouveaux ouvrages. Dansce même contexte, les sources d’incertitudes quisubsistent dans un ouvrage existant sont souventsans importance. D’un autre côté, les paramètresprincipaux ont été actualisés (voir paragraphe 3.2).

La vérification de la sécurité structurale par le calculest un élément important de l’évaluation d’unouvrage existant.

On procédera à une vérification:

• lorsqu’aucun calcul statique n’est disponible ;

• lorsque des écarts significatifs justifiant unereprise du calcul sont constatés entre les hypo-thèses initiales ou les données du dossier d’ou-vrage et les relevés de l’état de l’ouvrage;

• lorsque, du fait de l’actualisation du plan de sécu-rité, de nouvelles situations de risques doiventêtre considérées.

Il est judicieux de procéder en quatre étapes.

3.3.2 Evaluation sommaire préliminaire

Un jugement préliminaire intuitif de la sécuritéstructurale, basé sur le premier coup d’œil, estd’une extrême importance. On doit en effet déter-miner si la situation nécessite des mesures urgentesde sécurité. Les prémisses d’anomalie seront rele-vés afin de prévoir les examens à effectuer pourconfirmer ou infirmer celles-ci.

Pour des ouvrages en service depuis longtemps, onpeut présumer que la sécurité structurale est suffi-sante si, à la suite d’un contrôle détaillé et appro-fondi, aucun défaut suspect (déplacement, défor-mation, affaiblissement, fissures, traces de rouille,etc.) n’est détecté. Il convient d’être prudent dansles cas où le mode de rupture peut être fragile (pasde signes annonciateurs).

Lors de cette évaluation sommaire préliminaire, il estévident que la présence d’un ingénieur expérimentédans les domaines de la technologie des matériaux,de la statique, de la construction, des pratiques deconstruction, etc., est très importante et qu’elle per-met de mieux cerner les problèmes particuliers.

3.3.3 Vérification par le calcul selon les normes en vigueur

On essaiera d’abord de vérifier que la sécurité struc-turale satisfait les conditions des normes en vigueur.Cette vérification est basée sur l’examen sommaire,les plans d’utilisation et de sécurité actualisés. Onréussit ainsi en général à déterminer rapidement lasécurité structurale. A cette fin, on utilisera lesmodèles statiques et les modèles de résistance lesplus appropriés à disposition des ingénieurs.

Une sécurité structurale est suffisante si la conditionsuivante est remplie:

RSd ≤ —γR

où:Sd : valeur de dimensionnement de la sollicitationR : résistance ultime calculéeγR : facteur de résistance

La valeur de dimensionnement de la sollicitation secalcule conformément à la norme SIA 160.

Page 36: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

La résistance ultime calculée doit être déterminéeen respectant les règles des normes de constructioncorrespondantes. Les résistances des matériaux uti-lisées dans les calculs auront des valeurs prudenteset respecteront les marges de sécurité définies dansles normes de construction correspondantes.

Dans certains cas et lorsqu’une justification théo-rique ou expérimentale peut être apportée, il estpermis d’utiliser des modèles de résistances pou-vant s’écarter des prescriptions de la norme deconstruction correspondante. Les facteurs de résis-tance sont toutefois ceux des normes de construc-tion et demeurent inchangés.

3.3.4 Vérification par le calcul avec des valeurs mises à jour

Si le nouveau calcul effectué selon les normes envigueur ne donne pas les résultats escomptés, onessaiera alors de mettre en évidence une sécuritésuffisante avec des actions et des résistances actua-lisées. A ce sujet, il convient d’essayer tout d’abordde respecter les actions et les facteurs de résistancenormalisés.

Il est très important d’actualiser les situations derisques agissant sur la structure porteuse en tenantcompte de la durée d’utilisation restante souhaitée.On tiendra particulièrement compte de l’utilisationde la structure elle-même et des actions de l’envi-ronnement comme la neige, le vent, le séisme, etc.Dans le cas d’une durée d’utilisation restante courte,on peut utiliser des valeurs représentatives plusfaibles.

3.3.5 Modification des facteurs de sécurité

En respectant certaines obligations, il est possibled’adapter certains facteurs de sécurité. Même si leurvaleur a été modifiée, le niveau de sécurité resteinchangé. Seules des parties des incertitudes, cou-vertes conventionnellement par des facteurs, sontlevées consécutivement à certains relevés ou aurespect de certaines obligations.

Dans cette optique, il est souvent judicieux d’intensi-fier la surveillance des ouvrages, pour éviter surtoutque certaines situations d’utilisation n’échappent aucontrôle. Au travers d’une telle surveillance, on arriveaussi à découvrir à temps une dégradation de lasécurité structurale d’une construction. Ce n’est en

fait le cas que si l’on détecte à temps une défaillancequelconque (augmentation des déformations, desfissures, rupture successive de torons, etc.) del’ouvrage.

On prend aussi souvent sur place des mesures admi-nistratives comme une restriction des surcharges oude l’utilisation, etc. Il est important de vérifier l’effica-cité de ces mesures de sécurité et leur applicabilité.

On peut justifier, par exemple, la diminution du fac-teur de charge du poids propre de 1,3 à 1,15, pourautant que des sondages sur les parties concernéesde l’ouvrage confirment les dimensions admisesdans le calcul.

Les facteurs de charge des surcharges peuvent aussiêtre diminués par rapport aux valeurs de la normeSIA 160, pour autant que les surcharges réelles soientfiables quant à leurs intensités et à leurs emplace-ments. Le facteur ne devrait pas être réduit en des-sous de celui du poids propre.

On ne devrait pourtant pas s’écarter, pour lesactions prépondérantes et toutes les actions conco-mitantes, des facteurs de charge préconisés dans lanorme SIA 160, notamment parce que, en actuali-sant les actions, on a généralement épuisé toutepossibilité de réserve.

Les facteurs de résistance définis dans les normesde construction doivent ou peuvent être exception-nellement modifiés.

Si des sondages sur un ouvrage montrent que lesincertitudes à propos des caractéristiques d’unmatériau ou du comportement de la structure sontau-dessus de la moyenne, il faut même augmenterce facteur de résistance.

Le facteur de résistance γR ne tient finalement pascompte des incertitudes admises au niveau de larésistance des matériaux. Ces incertitudes sont déjàintégrées lors de la détermination des caractéris-tiques de calcul des matériaux. Le facteur de résis-tance γR, relativement petit, est uniquement prévupour couvrir les imprécisions suivantes :

• différences entre le système porteur réel et le sys-tème admis dans le calcul ;

• simplifications et imprécisions du modèle derésistance;

• imprécisions des sections.

3. Calcul statique d’ouvrages existants

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Page 37: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Tant que ces incertitudes ne sont pas levées par uneactualisation du système, du modèle de résistanceet des dimensions, il n’est pas question de réduirele facteur de résistance. Il peut par contre être réduitsi le modèle de résistance admis pour le cas concretse trouve du bon côté de la sécurité et si des con-trôles périodiques sont imposés pour permettre dedéceler à temps une surcharge trop forte sur les par-ties d’ouvrage.

Si, même avec ces dispositions, on n’arrive pas à unniveau de sécurité structurale satisfaisant, on devraalors soit renforcer la structure, soit la remplacer.

3.3.6 Méthodes pour les cas particuliers

Dans les cas exceptionnels, l’évaluation de la sécu-rité structurale d’ouvrages existants peut être baséesur des méthodes probabilistes.

Dans cette méthode, on détermine un indice de sécu-rité β ou un indice nominal de ruine pf pour l’élémentcritique étudié. On les compare ensuite avec le niveaude sécurité défini selon les normes en vigueur lors del’examen de la structure. On s’appuie enfin sur deuxthéorèmes, qui ont valeur d’axiomes:

• Une structure, considérée à un moment précis,est, dans le contexte des normes utilisées, répu-tée sûre et peut servir de repère par rapport auniveau de sécurité exigé, si son dimensionne-ment a été effectué correctement selon cesnormes. L’indice de sécurité β0 de cette structurede référence caractérise le niveau de sécuritéexigé par rapport aux normes.

• Une structure porteuse existante et dimension-née sans erreur, qui subit un changement desconditions et des propriétés d’exploitation, peutêtre considérée comme sûre, si son indice desécurité β est égal ou supérieur au niveau desécurité obtenu sur une structure de référencedimensionnée selon les normes en vigueur.

Les décisions sont alors basées sur la comparaisondes indices de sécurité. Si β ≥ β0 la structure por-teuse est alors réputée sûre. Si β est plus petit queβ0, on doit prendre des mesures de sécurité supplé-mentaires, par exemple selon le paragraphe 3.3.8.

Il faut savoir que l’application de cette méthode pré-suppose des connaissances à son sujet. Il ne suffit

pas de se procurer et d’utiliser simplement un pro-gramme d’ordinateur qui est capable de calculer cetindice de sécurité β.

Un exemple de calcul d’un cas simple selon cetteméthode est présenté dans le livre de Schneider,1990. On trouvera des informations essentielles sup-plémentaires par exemple dans (Schneider 1994).

3.3.7 Détermination qualitative de la sécurité structurale

Dans des cas particuliers, un calcul de la sécuritéstructurale n’est soit pas possible, soit pas assezfiable. On doit alors se contenter d’évaluer qualita-tivement la sécurité structurale.

Pour un ouvrage en service depuis une longuepériode, on peut supposer que la sécurité structu-rale est suffisante si aucun défaut (déplacements,déformations, affaiblissements, fissures, traces derouille, etc.) n’est détecté à la suite d’un contrôleminutieux par une personne compétente.

Pour une évaluation qualitative de la sécurité struc-turale dans le cas d’ouvrages importants, il estconseillé de réunir un collège d’experts au sens duparagraphe 2.2.3. Ce collège base ses travaux surles examens entrepris, fixe la durée d’utilisation res-tante pendant laquelle l’ouvrage peut rester en ser-vice et se prononce sur les éventuelles mesures desécurité supplémentaires à prendre.

Le comportement d’un ouvrage évalué de cette façondoit être surveillé pendant la durée d’utilisation res-tante admise. Le collège d’expert fixera l’intervalleentre les interventions et les moyens appropriés àmettre en œuvre.

3.3.8 Mesures de sécurité complémentaires

Si les facteurs de sécurité sont réduits au sens duparagraphe 3.3.5 ou si, conformément au paragra-phe 3.3.6, la probabilité de ruine calculée est légè-rement plus grande ou encore si la sécurité struc-turale a été fixée uniquement qualitativement ausens du paragraphe 3.3.7, alors des mesures desécurité supplémentaires ou complémentaires sontà prendre.

3. Calcul statique d’ouvrages existants

39

Page 38: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

De telles mesures de sécurité complémentaires sedéfinissent en observant les critères suivants :

• Importance de l’ouvrage.

• Potentiel des dommages.

• Contrôlabilité du comportement de l’ouvrage.

• Contrôlabilité de l’utilisation.

• Réflexions sur le rapport coût-risque.

• Possibilités de limiter les dommages.

Comme mesures de sécurité complémentaires, onpeut envisager par exemple les possibilités suivantes :

• Limitation suffisante de l’utilisation.

• Mesures constructives comme, par exemple,l’étayage de parties d’ouvrage.

• Surveillance périodique ou permanente du com-portement de la structure et /ou de l’utilisation.

• Installation de systèmes d’alarme et de sécuritéautomatiques.

• Préparation de mesures d’urgence.

• Dispositifs d’alarme et d’information.

• Préparation de plans d’évacuation.

• Concertation sur les risques acceptés avec le pro-priétaire, l’utilisateur et les autorités de surveil-lance concernées.

Bibliographie du chapitre 3

Hirt, M.A. :Nutzungs- /Sicherheits- /Kontrollplan,Schweizer Ingenieur und Architekt, 1-2, 1992.

PI BAT:Le diagnostic des ouvrages de génie civil –Manuel pour ingénieurs civils, Office fédéraldes questions conjoncturelles, 1993.

Ladner, M.:Zustandsuntersuchungen von Bauwerken,Forschungs- und Arbeitsberichte, Abteilung 116, Massivbau, Bericht Nr. 116/3,EMPA Zürich, 1988.

Schneider, J. :Beurteilung der Tragsicherheit bestehenderTragwerke, Schweizer Ingenieur und Architekt,46, 1990.

Schneider, J. :Sicherheit und Zuverlässigkeit im Bauwesen,vdf/Teubner, 1994.

SIA Dokumentation D 041:Einführung in die Norm SIA 160 Einwirkungenauf Tragwerke und die Empfehlung SIA 169Erhaltung von Ingenieurbauwerken,Schweizerischer Ingenieur- und Architekten-Verein, Zürich, 1989.

SIA 160:Actions sur les structures porteuses, Sociétésuisse des Ingénieurs et Architectes, Zurich,1989.

SIA 169:Maintenance des ouvrages de génie civil,Recommandation, Société suisse desIngénieurs et Architectes, Zurich, 1987.

SIA 462:Evaluation de la sécurité structurale desouvrages existants, Directive, Société suissedes Ingénieurs et Architectes, Zurich, 1994.

3. Calcul statique d’ouvrages existants

40

Page 39: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

4.1 Généralités 434.1.1 Distinction formelle 434.1.2 Points forts du contenu 434.1.3 La notion de responsabilité 434.1.4 Sources juridiques 434.1.5 Responsabilité fautive et responsabilité causale 444.1.6 La structure porteuse existante en tant que notion juridique 44

4.2 La responsabilité sur la base de la maîtrise de fait sur la structure porteuse existante 45

4.2.1 Responsabilités causales simples selon les art. 58 CO et 679 CC 454.2.2 Responsabilité pour risque inhérent instituée par diverses lois spéciales 46

4.3 La responsabilité résultant de l’évaluation d’une structure porteuse existante 474.3.1 Nature et classification juridique 474.3.2 La situation contractuelle de l’ingénieur civil 474.3.3 Devoir de diligence et responsabilité liée au défaut de soin 474.3.4 Le défaut de prise en charge 484.3.5 Personnel auxiliaire et sous-mandataires 484.3.6 Le collège d’experts 494.3.7 Le devoir d’information et le devoir de conseil 514.3.8 Le devoir de livraison 51

4.4 Classement juridique du renforcement d’une structure porteuseen tant que prestation matérielle 52

4.4.1 Le renforcement en tant que réparation ou en tant que modification d’une structure porteuse 524.4.2 La réparation en tant que correction complémentaire 52

4.5 Le renforcement de la structure porteuse en tant que complexede prestations immatérielles et matérielles 52

4.5.1 Avant-propos 524.5.2 Conception et exécution en général 524.5.3 Contrôle des fournitures et des matériaux 534.5.4 La participation du maître de l’ouvrage 534.5.5 Planification de l’exécution 544.5.6 Le défi de l’ingénieur 54

4.6 L’attribution juridique du renforcement d’une structure porteuseen tant que complexe de prestations 55

4.6.1 Le concept de base pour la compréhension juridique de la conception et de l’exécution 554.6.2 Le classement du renforcement de la structure porteuse dans le concept juridique de base 55

4.7 La position juridique de l’ingénieur en tant que projeteur d’un renforcementd’une structure porteuse 56

4.7.1 L’ingénieur en tant que partenaire d’un contrat de planification 564.7.2 L’ingénieur dans le contrat d’entreprise globale 574.7.3 Comparaison entre les deux formes d’organisation 574.7.4 Effets juridiques relatifs à la responsabilité de l’ingénieur 58

4.8 Questions particulières 594.8.1 La marge d’approximation des prévisions de coûts 594.8.2 Fourniture des matériaux et responsabilité en cas de défauts 594.8.3 Observations sur un long terme et droits en cas de défauts 604.8.4 Responsabilité du fait des produits 614.8.5 La prescription des actions en réparation à l’encontre de l’ingénieur 62

Bibliographie du chapitre 4 64

4. Aspects juridiques

41

4. Aspects juridiques

Page 40: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

4.1 Généralités

4.1.1 Distinction formelle

Evaluation et renforcement d’ouvrages existantssont deux complexes d’activités qui, d’une part,sont clairement distinctes et, d’autre part, sont logi-quement liées entre elles. Le renforcement présup-pose une évaluation préalable et constitue l’une desconséquences possibles pouvant en découler. Lafigure 2.1 (voir chapitre 2) illustre cette relation.

Les deux complexes d’activités présentent desaspects juridiques qui sont résumés dans ce cha-pitre. Les paragraphes 4.2 et 4.3 ont comme optiquela structure porteuse existante et son évaluation; lesparagraphes 4.4 à 4.8 traitent des aspects juridiquesdu renforcement.

4.1.2 Points forts du contenu

Globalement considéré, trois acteurs entrent enscène que nous caractérisons tout d’abord et demanière un peu vague en tant que maître de l’ou-vrage, intervenants dans le cadre de l’évaluation etintervenants dans le cadre du renforcement.

Avant même qu’il ne fasse appel à quelqu’un et dusimple fait de son droit de disposition sur la structureporteuse, le maître de l’ouvrage est le détenteur dedroits et de devoirs. Parmi ces derniers, c’est la res-ponsabilité qui nous intéresse avant tout. Le contenude cette responsabilité, relative à la structure por-teuse faisant l’objet d’une évaluation et d’un renfor-cement, constitue le premier point essentiel dontnous nous occuperons.

Les rapports juridiques entre le maître de l’ouvrageet son partenaire ne relèvent pas du même type decontrat, car il faut tenir compte de l’activité déployée(évaluation ou renforcement de la structure por-teuse). Les droits et obligations en matière d’éva-luation d’une structure porteuse relèvent essentiel-lement du droit du mandat. En ce qui concerne lerenforcement de structures porteuses, on distin-guera entre la conception et l’exécution. La concep-tion est le fruit soit également d’un mandat, soitd’un contrat mixte, mélangeant des éléments dudroit du mandat et du droit du contrat d’entreprise.Si le projet et l’exécution sont réglés au sein d’unmême contrat (contrat d’entreprise totale), le projetest contenu, du point de vue juridique, dans l’exé-

cution et le contrat relève du droit du contratd’entreprise.

Les droits et les obligations, au nombre desquellesla responsabilité, sont réglés de manière différenteselon les divers types de contrats. La situation juri-dique de l’ingénieur à l’intérieur des diversesconstellations possibles constitue le deuxième pointfort de notre exposé. Il sera fait, dans ce contexte,mention de quelques importantes conséquencesjuridiques qui peuvent en résulter.

4.1.3 La notion de responsabilité

Dans le domaine juridique, cette notion prend d’unepart un sens large, d’autre part un sens restrictif.Dans le présent exposé, c’est la notion dans sonsens le plus large qui est la plus appropriée. Danscette optique, on comprend, sous le terme respon-sabilité, le devoir de répondre des conséquencespréjudiciables d’un comportement, d’une situationou d’un événement.

De ce fait et à la différence de conceptions plus res-trictives de la notion de responsabilité, on inclutaussi bien les dommages résultant d’un contratentre auteur du dommage et lésé que ceux qui seproduisent en dehors d’une relation contractuelle.On parle de dommages contractuels et de dom-mages hors contrat.

La responsabilité étant une notion de droit civil, lessanctions pénales n’entrent pas dans la conceptionla plus large de la notion de responsabilité. Le droitde punir, qui est une partie du droit public, lie dessanctions de droit criminel à des manières détermi-nées d’agir des hommes. Un même comportementpeut aussi bien avoir des conséquences sur le planpénal que sur le plan du droit civil.

4.1.4 Sources juridiques

Pour ce qui concerne la notion, en droit civil, dudevoir de répondre, les sources juridiques relativesau droit de responsabilité se trouvent dans le droitcivil suisse.

Le droit des obligations (CO) en est la source prin-cipale. Il constitue un code en lui-même (avec uneliste séparée d’articles), bien qu’il soit lié formelle-ment et matériellement avec le Code civil suisse

4. Aspects juridiques

43

4. Aspects juridiques

Page 41: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

(CCS): formellement, le CO est désigné commeétant la cinquième partie du CCS, mais, matérielle-ment, il existe un lien étroit entre le CO et le CCS parun renvoi général et des règles d’interprétationcommunes.

Pour ce qui concerne les structures porteuses exis-tantes et leur évaluation, on trouve dans le CO lesnormes juridiques relatives à la responsabilité con-tractuelle et au traitement de la plupart des faitsdélictueux dans un cadre de responsabilité horscontrat. Dans le contexte qui nous intéresse, le faitdélictueux tout aussi essentiel et relatif à la respon-sabilité du propriétaire du fonds est cependant, pourdes raisons de systématique, traité dans le CCS.

Tous les cas de responsabilité qui nous intéressentici ne sont cependant pas réglés dans la source prin-cipale CO/CCS. Il s’y ajoute ce que l’on appelle leslois annexes de caractère obligatoire. Pour le thèmequi nous occupe, la Loi sur la protection des eaux(LEaux) entre principalement en ligne de compte.En outre, les lois fédérales suivantes peuvent revê-tir une importance: Loi concernant les installationsélectriques à faible ou fort courant, Loi sur les ins-tallations de canalisation pour le transport des com-bustibles ou carburants, Loi sur la responsabilitécivile en matière nucléaire (LRCN).

La source principale pour l’analyse des relationsjuridiques entre le maître de l’ouvrage et ceux qu’ila appelés pour l’évaluation d’une structure por-teuse est le CO, en particulier le contrat d’entreprise(art. 363 et ss.), le droit du mandat (art. 392 et ss.) etencore, pour ce qui concerne le collège d’experts,le droit de la société simple (art. 530 et ss.).

Les titres, respectivement les articles mentionnés,figurent tous dans la deuxième partie du CO intitu-lée «Des diverses espèces de contrats».

Les contrats mixtes ne sont réglés directement nidans le CO ni dans une loi spéciale. Ils forment legroupe principal des contrats innommés qui, repo-sant sur le CO, ont été développés par la doctrinejuridique pour répondre aux besoins de la marchedes affaires.

4.1.5 Responsabilité fautive et responsabilité causale

Sous le terme responsabilité fautive, on comprendun devoir de répondre présupposant une faute per-sonnelle du responsable. Le droit s’est appuyé

jusque dans la deuxième moitié du siècle derniersur le principe qu’une responsabilité sans fauten’avait pas sa place dans le système juridique. Cetteconsidération dogmatique a perdu du terrain avecla progression technologique de l’activité écono-mique et les modifications sociologiques quil’accompagnent. Le principe de responsabilité fau-tive a dû faire place au principe de responsabilitécausale que ce soit dans quelques domaines régléspar le CO ou dans la jurisprudence développée parles juges. On désigne par les termes responsabilitécausale un devoir de répondre qui n’est pas lié à lacondition d’une faute de l’auteur du dommage.

Pour ce qui est des responsabilités causales, on dis-tingue entre responsabilités simples et de mise endanger. La caractéristique de la première catégorieest l’existence d’une violation du devoir de diligencepar le responsable, même si cette violation n’est pasla condition de la responsabilité. La deuxième caté-gorie est caractérisée par le potentiel particulier demise en danger qu’entraîne une activité ou une prisede mesures. Au chapitre 4.2 sont présentés des faitsdélictueux correspondant aux deux catégories.

Les dispositions contenues dans les lois annexes,instituant des cas spéciaux de responsabilité (voirplus haut 4.1.4), appartiennent sans exception à unecatégorie de responsabilité causale et illustrentainsi la tendance générale du développement de laresponsabilité. Cette tendance est empreinte de ten-tatives de répartition des risques, d’une part pourdes raisons sociales, d’autre part pour des motifséconomiques. Il faut toutefois constater qu’aujour-d’hui encore le principe de faute constitue, dans ledroit suisse, la règle de la responsabilité et que lacausalité objective n’est qu’une exception.

4.1.6 La structure porteuse existante en tant que notion juridique

La définition d’une structure porteuse ne se trouvedans aucune loi. Si nous voulons étudier les ques-tions juridiques liées à une structure porteuse exis-tante, nous devons d’abord, à défaut de définitionlégale, avancer à tâtons vers cette notion.

Partant tout d’abord du terme principal d’ouvrage,l’art. 58 CO parle du propriétaire d’un bâtiment oude tout autre ouvrage. La question de savoir sil’ouvrage devrait pour le moins présenter une cer-taine similitude avec un bâtiment a été posée. Ellea reçu une réponse affirmative d’une partie de la

4. Aspects juridiques

44

Page 42: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

doctrine et, à l’inverse, une réponse négative dansla jurisprudence. A ce jour, on peut partir du prin-cipe que peuvent être qualifiés d’ouvrages aussibien une excavation en terrain argileux ou une modi-fication artificielle importante du terrain qu’uneconduite aérienne ou encore des routes et des trot-toirs. Dans les lois récentes, comme la loi sur l’amé-nagement du territoire, on parle de constructions etd’installations.

Un ouvrage est ainsi projeté, réalisé ou transformépar les hommes dans le dessein de remplir unefonction. Il est directement ou indirectement lié avecle sous-sol, de telle sorte qu’il présente au moins lastabilité exigée pour permettre que sa fonction soitremplie.

La définition de la structure porteuse existante nousapparaît plus clairement sous l’angle de la tech-nique. Sous cette acceptation, la structure porteuseest l’ensemble des éléments qui remplissent unefonction partielle et sont désignés pour empêcher,avec une sécurité suffisante, une ruine de l’ouvrageou de l’une de ses parties sous des sollicitationsdéfinies.

La notion juridique de structure porteuse existante,c’est-à-dire l’ouvrage complet au sens de l’art. 157al. 1 de la SIA 118, résulte d’une imbrication de lanotion juridique d’ouvrage et de la notion techniquede structure porteuse.

La notion juridique de structure porteuse existantequi se dégage ainsi ne coïncide exactement ni avecla définition de la norme SIA 160, ni avec le sens, ànouveau différent de ce qui précède, de l’art. 0.14de la directive SIA 169. Ces divergences sont liées àla définition des buts spécifiques des ouvrages nor-matifs précités.

4.2 La responsabilité sur la base de la maîtrisede fait sur la structureporteuse existante

4.2.1 Responsabilités causales simplesselon les art. 58 CO et 679 CC

Lorsque nous parlons de structure porteuse exis-tante, la responsabilité du propriétaire d’un ouvrageselon l’art 58 CO se situe au premier plan. Il doitrépondre pour un état défectueux en tant que tel etnon pour un comportement auquel on pourraitéventuellement rattacher cet état.

L’exonération unilatérale de la responsabilité dupropriétaire de l’ouvrage, par exemple au moyend’écriteaux, est en principe sans effet. Savoir si uneexonération par contrat, par exemple entre pro-priétaire et locataire, est autorisée demeure un pointcontroversé.

La loi désigne comme responsable le propriétaire,ainsi celui qui jouit de l’intégralité des droits surl’ouvrage. Ce critère formel a cependant été aban-donné par la jurisprudence. Selon le l’art. 58 CO,celui qui réalise un ouvrage sur un fonds, sur lequelil n’a ni droit de propriété ni un quelconque droitréel, peut le cas échéant être responsable. La res-ponsabilité est conférée à celui qui a réalisél’ouvrage, à celui qui l’utilise et, en fait, en disposeet doit ainsi veiller à son entretien.

Cette responsabilité est rattachée uniquement à uneinstallation ou une fabrication défectueuse ainsiqu’à un entretien déficient. Avec cette dernièremention, l’art. 58 CO implique toutefois un devoirde diligence, qui peut cependant ne pas être illimité.La mesure de la perfection dépend du danger effec-tif et de la prévisibilité du dommage, notions appré-ciées au regard, d’une part, des moyens mis enœuvre par le propriétaire de l’ouvrage et, d’autrepart, du but et de la fonction de l’ouvrage.

Un ouvrage appartenant à une collectivité publiqueet qui causerait des dommages par suite de défautstombe en principe également sous le coup de l’art. 58CO. Il faut cependant relever deux particularités:l’entretien des biens publics, en particulier des routeset des ponts, est réglé par le droit public. La jurispru-dence a plus largement étendu la notion de la prévi-sibilité en faveur de la collectivité publique.

4. Aspects juridiques

45

Page 43: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Si l’apparition d’un dommage est une conséquenceinévitable de l’exercice souverain des tâches incom-bant à la collectivité publique, la prétention à la com-pensation du dommage devra être traitée selon ledroit de l’expropriation matérielle.

La responsabilité du propriétaire selon l’art. 679 CCest également une responsabilité causale ordinaire.

Alors que la responsabilité selon l’art. 58 CO pré-suppose un défaut à l’ouvrage et implique de ce faitla violation du devoir d’entretien, la notion de res-ponsabilité selon l’art 679 CC prend pour conditionle fait qu’un propriétaire excède son droit de voisi-nage. Le propriétaire ne répond par conséquent paspour les cas de force majeure, pour le cas fortuit,pour des fautes personnelles ou pour le comporte-ment de tiers non autorisés. Avec la condition d’undéfaut matériel échappe la question de la prévisibi-lité et ainsi toute possibilité de se dégager par lapreuve de la diligence.

Des personnes ayant un droit réel limité, comme parexemple le titulaire d’un droit de construire, sontmises sur un pied d’égalité avec le propriétaire dufonds dans le cadre du droit d’utilisation qui leur estaccordé. Dans le cas d’une propriété par étage, lepropriétaire d’un lot répond seul de la chose surlaquelle il a un droit de jouissance exclusif et en tantque copropriétaire pour ce qui concerne les partiescommunes du bâtiment. La jurisprudence a de plusétendu la responsabilité du propriétaire du fonds aulocataire ou au preneur d’un bail à ferme.

La responsabilité du propriétaire du fonds n’est paslimitée aux dommages qui ont pour origine directele fonds du responsable. Des canalisations se trou-vant hors de ce fonds et le desservant tombent sousle coup de l’art. 676 al. 1 CC et les dommages qui enrésulteraient sont imputés au propriétaire à qui ellesprofitent. De même, un fonds étranger qu’un pro-priétaire foncier utilise pour des travaux de construc-tion est mis sur le même pied que son propre fonds.

Le cercle des personnes protégées par l’art. 679 CCest très large. Conformément à une pratique de plu-sieurs décennies et qui n’est pas indiscutable, lajurisprudence a concrétisé cette notion. Les déci-sions montrent que l’on est, d’une part, parti d’unélément de droit de voisinage et, d’autre part, quecette notion de voisinage est prise au sens large.

Les fonds appartenant à une collectivité publiquetombent aussi sous le coup de l’art. 679 CC, avec à

nouveau la limitation qui a été mentionnée à pro-pos de l’art. 58 CO pour la responsabilité du pro-priétaire de l’ouvrage.

Si les conditions pour une demande de réparationsont remplies aussi bien pour l’art. 58 CO que pourl’art. 679 CC, la demande peut être fondée sur cesdeux dispositions: il s’agit de prétentions alterna-tives en concours.

4.2.2 Responsabilité pour risque inhérentinstituée par diverses lois spéciales

Le risque potentiel générateur de responsabilité(voir paragraphe 4.1.5) est, dans la Loi fédérale surla protection des eaux, entièrement révisée le 24janvier 1991, une entreprise ou une installation fixepouvant présenter un danger particulier pour leseaux. Dans le cadre de la loi sur les installations élec-triques, ce sont les dommages qui peuvent décou-ler de l’utilisation de courant fort ou faible ; danscelui de la loi sur les transports par canalisations, cesont les dommages pouvant résulter de l’utilisationou, lorsque l’installation n’est pas en service, dedéfauts ou d’erreurs de manipulation.

Enfin, conformément à la Loi fédérale sur la res-ponsabilité en matière nucléaire, l’exploitant d’uneinstallation nucléaire répond de manière illimitéedes dommages d’origine nucléaire causés par dessubstances nucléaires se trouvant dans son instal-lation et des dommages causés par des substancesprovenant de son installation qui, au moment oùces dommages sont survenus, n’avaient pas étéreprises par un tiers exploitant. Le concept d’instal-lation englobe non seulement les installations quiservent à produire de l’énergie mais égalementtoutes celles qui permettent de produire, utiliser,entreposer ou retraiter des substances nucléaires, ycompris les dépôts de déchets radioactifs.

4. Aspects juridiques

46

Page 44: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

4. Aspects juridiques

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4.3 La responsabilité résultant de l’évaluationd’une structure porteuseexistante

4.3.1 Nature et classification juridique

Les notions de responsabilité et de structure por-teuse existante, au sens juridique, ont été explici-tées aux paragraphes 4.13 et 4.16.

On entend par évaluation d’une structure porteuseexistante une activité composée, sur un plan tech-nique, d’une inspection, de la formation d’un avis etd’une prise de position.

Le spécialiste compétent est un ingénieur civil, exer-çant son activité de manière indépendante, qui tra-vaille sur la base et dans le cadre d’un contratd’ingénieur civil. L’ingénieur civil en tant que partiecontractuelle peut être une personne physique, unecommunauté au sens juridique (par exemplesociété en nom collectif X, Y & Z) ou une personnemorale. Le contrat d’ingénieur civil est juridique-ment traité en principe comme le contrat d’archi-tecte. Tous les deux représentent des types decontrat de conception.

Globalement considérée, la nature juridique descontrats de conception n’est pas controversée. Lesprestations qui constituent l’objet du contrat d’éva-luation d’une structure porteuse existante sont clai-rement des prestations de mandataire. Le contratdu professionnel appelé pour une évaluation d’unestructure porteuse existante relève ainsi du droit dumandat selon les art. 394 et ss. du CO.

Pour simplifier, nous désignerons par la suite ce spé-cialiste tout simplement comme l’ingénieur civil,bien que tout ingénieur civil ne soit pas un spécia-liste de l’évaluation des structures porteuses exis-tantes et que le mandataire puisse exceptionnelle-ment appartenir à une autre profession.

4.3.2 La situation contractuelle de l’ingénieur civil

A la différence d’autres contrats du droit des obli-gations ayant pour but la fourniture de travaux, lesdeux partenaires contractuels sont égaux en droitdans le cas du mandat.

Le mandataire n’est pas intégré dans l’organisationdu travail de son partenaire contractuel comme l’estl’employé dans un contrat de travail. Dans l’exécu-tion de ses devoirs contractuels, il dispose d’uneplus grande marge de manœuvre que l’entrepre-neur dans un contrat d’entreprise. Dans le cadre del’accord conclu et en particulier pour atteindre le butfixé par le mandant, le mandataire détermine libre-ment la forme et le déroulement des actes qu’ilentreprend. En vertu des connaissances profession-nelles qu’on lui prête, il est maître des moyens à uti-liser, tandis que le mandant est et reste le maître dumarché.

Ainsi considéré, l’art. 404 CO, relatif à la révocationunilatérale du mandat, possible en tout temps, etqui est une disposition très discutée et jugée impé-rative par le Tribunal fédéral, apparaît comme senséet justifié.

4.3.3 Devoir de diligence et responsabilitéliée au défaut de soin

Selon ce qui a été dit précédemment, le mandataireest tenu de fournir un travail. Ce travail doit tendrevers un but, une réussite, être de nature à produirele résultat escompté. Le mandataire n’a pas à répon-dre du fait que la réussite à laquelle on aspirait nesoit pas atteinte. Il doit cependant répondre du faitque son travail et /ou les actes entrepris pour obte-nir le but aient été de médiocre qualité et qu’unéchec en soit résulté qui provoque un dégât lié àcette cause. La raison de cet échec s’appelle, en lan-gage juridique, l’absence de diligence.

L’absence de diligence a deux aspects : objective-ment, elle est une violation du contrat et, subjecti-vement, elle contient une faute (négligence). Lemandataire prend l’engagement, sur un plan objec-tif, d’un comportement approprié et, sur un plansubjectif, d’une pensée et d’une volonté mises enœuvre dans ce but. Son devoir de répondre d’unenégligence est une responsabilité contractuelle quiest liée à la faute.

Pour évaluer s’il y a eu violation du contrat et sanature, il faut considérer les normes universelle-ment obligatoires de responsabilité, les disposi-tions du contrat concrètement établi, tout commeles dispositions particulières éventuellement for-mulées dans le contrat, telles qu’elles ont été pré-vues par les deux parties dans leur accord indivi-duel. Parmi ces dispositions, les directives SIA sont

Page 45: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

les plus fréquemment utilisées. Le cas échéant, ilfaudra pourtant prendre également en considéra-tion, dans les éléments du contrat, les conditionsgénérales émises par le mandant. Enfin, la respon-sabilité contractuelle de l’ingénieur peut aussiconcourir avec une responsabilité du fait d’un acteillicite, selon les articles 41 et suivants du CO.

Si le mandant prétend que le mandataire a violé sondevoir de diligence, il doit donner une substance àson affirmation, c’est-à-dire qu’il doit expliquerconcrètement en quoi elle consiste et il doit appor-ter la preuve de la violation du contrat. Si la preuvepeut être apportée, il demeure pour le mandataire lapossibilité de se disculper en justifiant qu’aucunefaute ne lui incombe.

Les paragraphes suivants traitent du devoir de dili-gence, dont il faut particulièrement tenir comptedans le cadre de l’évaluation d’une structure por-teuse existante.

4.3.4 Le défaut de prise en charge

On entend par là une faute et une négligence du spé-cialiste qui accepte un mandat sans disposer descapacités nécessaires à son accomplissement réussi.

L’évaluation appropriée de la sécurité des struc-tures porteuses existantes présuppose des connais-sances théoriques et pratiques particulières dans ledomaine de la technologie des matériaux, de la sta-tique, de la construction ainsi que, au besoin, dansd’autres domaines en liaison avec le problèmeconcret. Lorsqu’il accepte le mandat, l’ingénieurcivil doit s’assurer, par une autocritique, que lesconditions précitées soient remplies.

Pour la majorité des ingénieurs aujourd’hui en acti-vité, cela n’est possible qu’en suivant une formationcontinue au terme de leurs études.

Le défaut de prise en charge ne constitue pas seu-lement, comme cela ressort de la dénomination,une faute mais aussi un manquement à la diligencenécessaire à l’accomplissement qui équivaut à uneviolation du contrat. Afin de ne pas tomber danscette faute au niveau de la prise en charge, l’ingé-nieur civil devrait donc décliner un mandat d’éva-luation d’une structure porteuse si les capacités exi-gées dans ce cadre lui font défaut. Dans la pratique,

il est cependant courant que le spécialiste, mêmesérieux, recule devant cette démarche.

C’est le cas, par exemple, quand l’évaluation exigéeest une partie d’un mandat très étendu où des pro-blèmes particuliers se situent au-dessus des possi-bilités du mandataire. L’ordre juridique met ici à dis-position des institutions qui peuvent être utiles àl’ingénieur civil.

4.3.5 Personnel auxiliaire et sous-madataires

Si le mandataire ne dispose pas personnellement oualors que partiellement des capacités nécessaires, ilpeut d’abord envisager de recourir, pour le complé-ter et le soutenir, par exemple à un collaborateur desa propre organisation, à un «collaborateur libre»ou à une entreprise indépendante telle qu’un labo-ratoire de construction.

L’auxiliaire fournit sa prestation sous la surveillanceet la direction du mandataire. La compétence des’adjoindre un auxiliaire est, chez l’ingénieur civil,largement admise, aussi longtemps que son activitépeut être considérée comme subordonnée dans lecadre du mandat confié. Il faut cependant prendreen considération deux particularités:

Le mandataire répond, de manière causale, auprèsdu mandant, d’une erreur de son auxiliaire. Celasignifie qu’il doit être responsable de la mêmemanière que s’il agissait lui-même avec négligence.

L’engagement d’un auxiliaire, sous la forme préci-tée, est a priori inacceptable si l’ingénieur doit pro-céder à l’évaluation d’une structure porteuse exis-tante en qualité d’expert juridique.

Des auxiliaires engagés comme décrit précédem-ment, il faut distinguer le substitué ou sous-manda-taire engagé par le mandataire. Le substitué assumela responsabilité du mandataire et agit pour sonpropre compte. Il faut donc l’accord du mandantpour s’adjoindre un sous-mandataire.

Avec l’engagement non autorisé d’un substitué, lemandataire commet une violation du contrat et ilrépond auprès du mandant comme pour un auxiliaire.Si l’autorisation lui en est donnée, sa responsabilitéquant à la diligence adéquate à apporter se réduit lorsdu choix et de l’instruction du sous-mandataire

4. Aspects juridiques

48

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4.3.6 Le collège d’experts

La figure 2.2 (voir chapitre 2) sert de point de départ:si le rapport II de l’ingénieur mandaté, résultant dumandat II, montre que la décision quant à la marcheà suivre implique des conséquences importantes, ledécideur (direction commerciale d’une entreprise,organe politique) se voit souvent obligé de renfor-cer les bases techniques de décision. Dans ce but, iladjoint à l’ingénieur mandaté un collège d’experts,désigné ci-après par CE.

Le chapitre traite de la situation juridique, des prin-cipaux droits et obligations ainsi que de la respon-sabilité du CE. La suite est consacrée à des indica-tions quant à la forme du mandat d’experts et, enfin,à des considérations quant au rapport entre le CE etl’ingénieur mandaté.

a) Situation juridique du CE

Sous le rapport juridique d’un mandat proprementdit, le CE agit ainsi selon le droit privé, qu’il s’agisse,en tant que partenaire contractuel, d’une personnede droit privé ou d’un représentant d’une adminis-tration publique.

Il n’est a priori pas clair si les membres du CE cons-tituent un groupe de personnes qui ont acceptéconjointement un mandat au sens de l’art. 403 al. 2CO ou s’il s’agit d’une société simple des art. 530 ss.CO. Le critère déterminant est la volonté des mem-bres de se constituer en groupe pour poursuivre lebut du mandat. La dénomination «collège» pré-suppose que telle est la volonté des intervenants.On conseillera cependant au CE, de manière à ceque la situation soit claire, de manifester nettementcet accord. Nous admettrons pour la suite que le CEest une société simple au sens des art. 530 ss. CO.

Pour parvenir à cette situation, il suffit de conclureun contrat sans forme particulière, voire même seu-lement d’adopter un comportement concluant.

La société simple est une communauté juridique etne dispose pas en tant que telle d’une personnalitéjuridique propre, à la différence d’une corporation.Selon l’art. 530 aI. 1 CO, les membres peuvent êtredes personnes physiques ou morales. Dans le casd’un CE, il faut cependant prendre en compte qu’ils’agit d’un collège d’experts. Ces derniers sont tou-jours des personnes physiques: en effet, leur faculté(professionnelle) de juger est au centre des «condi-

tions naturelles de l’homme» au sens de l’art. 53 CC,faculté à laquelle tient nécessairement l’activitéd’expert.

La situation juridique du CE peut ainsi être caracté-risée comme suit : une société simple, formée depersonnes physiques, qui ont accepté du mêmemandant un mandat identique mais dans le cadred’un travail collectif.

b) Droits et obligations du CE

Les droits et obligations résultent d’une part du droitdu mandat proprement dit et d’autre part du droitde la société simple.

Pour ce qui concerne l’aspect juridique du mandat,le devoir de diligence est au premier plan. En com-paraison avec le devoir de diligence de l’ingénieurmandaté, celui des experts englobe aussi la capacitéet la volonté d’apprécier et d’évaluer objectivement,de manière impartiale et en même temps critique, letravail présenté par ses collègues spécialistes.

Pour ce qui concerne l’aspect juridique de la société,le devoir de remplir le contrat confié aux experts enunissant les forces et les moyens est au premierplan. Chaque membre du CE a par conséquent àfournir une contribution du même rang mais pasforcément identique. Le travail peut ainsi êtreréparti au sein du collège selon la spécialisation etla prestation. Les contributions doivent cependantavoir une transparence suffisante pour permettre àchaque collègue une prise de position compétentesur l’ensemble des questions posées au CE.

Des droits et des obligations résultent enfin del’interpénétration du droit du mandat et de celui dela société. Ainsi, l’adjonction de sous-mandatairesne présuppose pas seulement une autorisation dela part du mandant mais également l’aval de tousles membres du CE, aval qui est indispensable carcette adjonction peut aboutir pratiquement à unchangement de la société (CO 542).

La prise de position du CE est une décision de lasociété simple au sens de l’art. 534 CO et exige, àdéfaut d’autre convention au sein du CE, l’unani-mité. Etant donné les conséquences, présuméesimportantes dans ce cas, pour la formation de sadécision, la mandant est intéressé à ce que la prisede position du CE ait lieu à l’unanimité. Il est évidentque l’unanimité ne peut être forcée car les droitspersonnels des membres du CE seraient violés. Il

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faut cependant, eu égard à l’objectif du mandatd’expert – remise d’une base amplement étayéepour les décisions futures du mandant – tendre aumoins au consensus, en tant que forme plus élas-tique de l’unanimité.

Si l’obtention d’un consensus menace d’échouer,c’est la réussite du mandat d’experts qui est enquestion. Sur la base de l’art. 400 al. 1 CO, le CE estdéjà tenu, d’après cela, d’informer le mandant surles divergences qui se dessinent et de solliciter desconsignes complémentaires.

c) Responsabilité du CE

En tant que société simple, les membres du CErépondent individuellement de l’accomplissementcorrect ou incorrect du mandat d’expert et ceci demanière primaire, exclusive et illimitée. De plus, ilsrépondent solidairement, selon l’art. 544 al. 3 CO.On ne peut imposer au mandant de découvrir levéritable auteur de la partie du mandat incorrecte-ment remplie. Au contraire, il peut émettre toutesses prétentions à la réparation des dommagesenvers chaque membre du CE, à son libre choix.

d) Mise sur pied du contrat d’expert

Le premier aspect de la mise sur pied du contratd’expert a trait à la liberté du choix des partenaires,qui, dans le cadre de l’autonomie contractuelle,garantit à chaque sujet de droit la compétence dechoisir seul ses partenaires contractuels. Lors de laformation du CE, il faut en outre considérer qu’ils’agit de constituer une société simple, formée despécialistes qui se groupent pour poursuivre un buten commun, fournir au mandant, en réunissantleurs forces, la base spécialisée pour que soit priseune décision aux conséquences considéréescomme très importantes. Au paragraphe a), on aconstaté que la volonté de chaque membre du CEétait nécessaire. La doctrine juridique se réfère à cetégard à l’expression latine de l’affectio societatis.Cette expression désigne bien plus que la «bonnevolonté» en vue d’un travail commun. Elle exprimeque les membres doivent être déterminés à la pour-suite commune d’un but. L’élément subjectif de lavolonté d’obtenir ensemble une solution à un tra-vail difficile peut être déterminant pour la réussite.L’exercice pratique de la liberté dans le choix despartenaires, effectué par le mandant, comprend

donc aussi et ceci dans son propre intérêt, la clarifi-cation la plus soigneuse suivante: les membrespressentis pour le CE peuvent-ils être «coopératifs»au sens décrit plus avant?

Quant au deuxième aspect, on rappellera que le CEest le destinataire du mandat. Il a en face de lui unmandant qui a le pouvoir, à chaque instant, de diri-ger son travail par des instructions. Quant au pou-voir de donner des instructions, son exercice par unprofane (complet ou en partie) de la branche,confronté à la compétence de spécialistes et à desregards critiques et professionnels, est tout saufsimple. L’appréhension naissante peut conduire àun blocage ou à un dérapage et les deux phéno-mènes mettre en péril la réussite du mandat. Il estdonc conseillé de fixer par écrit, contractuellement,le devoir d’établir régulièrement des rapports, telqu’il résulte de l’art. 400 al. 1 CO. Cette formule esten général propre à développer les fondementsd’une confiance et peut en particulier fournir uneaide au dépistage rapide de points faibles à l’inté-rieur du CE et à leur élimination, si nécessaire, enélargissant le collège. En cas de nécessité, l’établis-sement périodique de rapports peut être étendu àl’établissement de rapports intermédiaires. Au lieude confronter le mandant, qui n’y est pas préparé,à un volumineux rapport, la formation continue deson jugement, qui sera finalement mûrement réflé-chi, doit lui être facilitée.

e) Rapports entre le CE et l’ingénieur en charge du mandat

On revient finalement à la figure 2.2 Phase III, selonlaquelle l’ingénieur en charge du mandat travailleraensemble avec le CE. La coopération abordée ici esten principe d’un autre type que celle existant à l’inté-rieur du CE et entre le CE et le mandant. A la diffé-rence des deux rapports précités, il n’y a pas decontrat entre l’ingénieur en charge du mandat et leCE. La coopération n’est rien d’autre qu’un devoird’information à un tiers que l’ingénieur doit exercerdans un esprit coopératif, conformément aux con-signes qui lui sont données par le mandant. Le droitd’audition de l’ingénieur en charge du mandat sepose face à ce devoir. Une relation triangulaire doitainsi être mise en place. Cette relation est à la foisétayée par des intérêts communs et, dans certainscas, mise en danger par des intérêts qui s’opposent.Quoi qu’il en soit, le défi commun est la création, envue du but fixé, d’une base de décision technique-ment solide.

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4.3.7 Le devoir d’information et le devoir de conseil

L’inspection, le fait de jeter un regard à l’intérieur del’ouvrage est la première phase de l’évaluationd’une structure porteuse existante (voir 4.3.2). A cemoment ou parfois aussi dans un stade plus avancéde l’évaluation, de nouveaux faits et situations seprésentent souvent au spécialiste. S’il ne peutexclure que leur connaissance pourrait amener lemandant à modifier le contenu du contrat, de cer-taines consignes ou de dispositions particulières, lemandataire est tenu au devoir d’information. Dansce contexte, les constatations effectuées par lemandataire qui peuvent générer des plus-valuessont particulièrement importantes, par exemple lanécessité ou l’opportunité d’essais sur matériaux,non prévus à l’origine.

Le devoir d’information conduit ensuite au devoirde conseil. Son objet est simplement tout ce qui, ausens le plus large, est propre à favoriser la réussitedu mandat vers laquelle on tend ou à protéger lepartenaire contractuel de dégâts en relation avecl’objet du contrat. Selon un jugement du Tribunalfédéral, il peut également par exemple inclure ledevoir de conseiller au maître de l’ouvrage la con-clusion d’une assurance de responsabilité civile dumaître d’ouvrage, eu égard à des risque particuliers.

Ceci démontre que l’inspection est plus qu’un sim-ple regard à l’intérieur et qu’elle exige aussi pru-dence. Elle englobe aussi, comme le jugement pré-cité le montre, l’environnement et le voisinage.

La doctrine va encore un pas plus loin : si l’on pré-sume qu’également des structures porteuses voi-sines pourraient, puisque construites à la mêmeépoque et de manière analogue, présenter desdégâts similaires à ceux relevés sur la structure por-teuse inspectée et constituer de ce fait un dangerpour l’environnement, l’ingénieur civil devra con-seiller au mandant d’en informer le voisin.

Ceci sera fait dans l’idée de protéger, en cas dedégât, le mandant de prétentions à des réparationssur la base du droit de voisinage.

4.3.8 Le devoir de livraison

A la différence du devoir de diligence, il s’agit là d’undevoir de prestation. L’objet en est une prestationen nature, et en particulier dans ce cas, le devoir du

mandataire de remettre ce qu’il a produit au coursde l’accomplissement de son mandat.

En comparaison avec les autres tâches de l’ingé-nieur civil, ce devoir de livraison occupe une placecentrale dans le cadre de l’évaluation des structuresporteuses existantes. L’inspection et le résultat del’évaluation, souvent divisés en un rapport prélimi-naire et un rapport final, seront remis au mandantpour son dossier de l’ouvrage.

Le devoir de livraison est un devoir essentiel et pri-mordial de prestation dans le cadre de contratsd’évaluation de structures porteuses existantes. Ala différence par exemple du devoir de diligence, onpeut directement, sur la base des art. 107 ss. CO,exiger son exécution et, le cas échéant, actionner envue d’obtenir de plus des dommages et intérêts.

Dans ce sens, l’ingénieur civil répond vis-à-vis dumandant de la livraison du résultat de son travailsous la forme et dans le délai convenus.

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4.4 Classement juridique durenforcement d’une struc-ture porteuse en tant queprestation matérielle

4.4.1 Le renforcement en tant que réparation ou en tant que modification d’une structure porteuse

En ce qui concerne la qualification juridique d’uncontrat ayant pour objet le fait d’entreprendre le ren-forcement d’une structure porteuse, il est sans impor-tance qu’il s’agisse d’une réparation ou d’une modi-fication dans le but d’une adaptation à de nouvellesexigences. Les deux cas tombent sous le coup dudroit du contrat d’entreprise, au même titre que la réa-lisation d’une nouvelle construction. Tout est ras-semblé sous la terminologie exécution d’un ouvrageselon l’art. 363 CO.

Le contrat de livraison d’ouvrage est l’une desformes les plus importantes du contrat d’entreprise.

4.4.2 La réparation en tant que correctioncomplémentaire

Il peut être question, dans le cas d’une réparation,de savoir de quoi elle résulte. S’il s’agit, lors du ren-forcement d’une structure porteuse, de supprimerun défaut au sens juridique – une faute de projet oud’exécution ou un dégât apparu au cours d’une uti-lisation présupposée ou conforme au contrat –, laquestion se pose de savoir si la réparation repré-sente une correction complémentaire sur la basedes droits de garantie invoqués dans le cadre d’uncontrat de construction déjà existant. S’il peut êtrerépondu affirmativement à cette question ens’appuyant sur le contrat concret, en prenant aussien compte les délais de prescription, l’entrepreneurdoit entreprendre la réparation en remplissant ainsison devoir de correction complémentaire.

4.5 Le renforcement de lastructure porteuse en tant que complexe deprestations immatérielleset matérielles

4.5.1 Avant-propos

La transposition en termes juridiques de n’importequel état de fait peut être assimilée à la traductiond’un texte original en une autre langue. Une tra-duction significative ne peut être réussie que si letraducteur peut comprendre la matière dans lalangue originale.

Il s’agit, dans les états de fait concernés ici, de matièrestechniques. Aussi longtemps que nous décrivions lerenforcement d’une structure porteuse simplementcomme une prestation technique et matérielle, satransposition en langage juridique ne présentaitaucune difficulté. L’état de fait était sans autre com-préhensible et l’on disposait du vocabulaire juridiquecorrespondant.

Il en va un peu différemment si nous considérons lerenforcement d’une structure porteuse globalementcomme des prestations immatérielles et matérielles.Le complexe formé par le processus technique estun état de fait plus récent. Avant que nous nousapprêtions à le comprendre au sens juridique, il fautque nous soyons au clair sur ses particularités.

Nous essayons donc dans ce chapitre de dégageret de rendre compréhensible, autant que faire sepeut, les caractéristiques de ces états de fait tech-niques du «substant réel», de telle sorte que nouspuissions entreprendre, au chapitre suivant, l’attri-bution juridique avec une compréhension suffi-sante des choses. Pour ce faire, nous devons appro-fondir la question.

4.5.2 Conception et exécution en général

Si l’on considère le rapport entre la conception etl’exécution d’un ouvrage – chaque ouvrage, qu’ils’agisse d’une nouvelle construction ou d’unetransformation –, la conception apparaît, dans unepremière approche, comme la phase préparatoirede l’exécution. Cette manière de voir néglige le faitque la conception ne sert pas uniquement à la pré-paration de l’exécution mais également l’accom-

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pagne. Il est donc plus juste de comprendre la con-ception comme la sous-structure spirituelle de laproduction corporelle. Le concepteur en accomplitune partie, l’entrepreneur en accomplit l’autre. Enlieu et place de la distinction temporelle, on opèrealors, sur la base de cette compréhension plusrécente, une distinction orientée selon la prestationentre le concepteur et l’entrepreneur. Cependant, leproblème constructif posé est du type renforcementd’une structure porteuse existante, cette séparation«nette» entre conception et exécution ne peut aussiêtre maintenue.

4.5.3 Contrôle des fournitures et des matériaux

La première complication résulte du fait que l’onintervient sur une structure porteuse existante. Il nes’agit pas d’une quelconque réparation ou transfor-mation d’un ouvrage mais d’une intervention sur sastructure de base. Au sens le plus strict du mot, celaa rapport et coïncide avec la réussite ou l’échec del’intervention projetée. Les décisions qui sont àprendre dans ce cas par les responsables confèrentà deux domaines d’activité un poids plus importantque celui qui leur est donné dans la plupart desautres tâches de la construction: le contrôle et lafourniture des matériaux.

Il faut procéder au contrôle non seulement desmatériaux dont la mise en œuvre est prévue mais,en premier lieu, à celui des propriétés essentielles,pour l’aptitude au renforcement, des matériaux dela structure porteuse existante. Le résultat de cecontrôle permet tout d’abord de répondre à la ques-tion de savoir si la structure se prête véritablementau renforcement, éventuellement à la condition quedes mesures préalables de remise en état oud’assainissement soient prises. En outre, ce con-trôle permet de tirer des déductions quant auxmodes possibles de renforcement de la structure. Ilfournit en conséquence les données de base néces-saires à la conception.

Il appartient au concepteur de définir quelles pro-priétés des matériaux doivent être contrôlées, euégard aux trois buts déterminés.

Il s’agit souvent de livrer non pas des matériaux ausens habituel d’articles de commerce mais des sys-tèmes de matériaux, c’est-à-dire des combinaisonsque ne doivent pas uniquement faire leurs preuvessous les actions et dans les conditions d’utilisation

prévues mais qui doivent aussi prendre en consi-dération les données de l’ouvrage existant et pren-dre en compte les conditions spécifiques de miseen œuvre. Le produit, en tant que système de maté-riaux, est le résultat d’une action commune duconcepteur, du fabriquant et, de ce fait, de l’ingé-nieur, du fournisseur et de l’entrepreneur. On pour-rait citer ici comme exemple les systèmes à base derésine époxy qui sont utilisés pour le collage desarmatures extérieures.

L’aspect particulier, présenté ici, que revêt la tâcheconstructive «renforcement d’une structure por-teuse» conduit de ce fait à la revalorisation de deuxactivités, le contrôle et la livraison des matériaux, età celle des gens qui les exécutent.

4.5.4 La participation du maître de l’ouvrage

La planification et l’exécution de tout projet deconstruction se déroulent à l’intérieur de la sphèred’intérêt du maître de l’ouvrage. Il est donc habilitéet tenu à des actions de participation précises ettypiques.

Dans le cas de renforcements d’une structure por-teuse s’ajoute une action particulière de participa-tion, qui revêt un poids considérable: la formulationdes conditions de service sous lesquels les travauxde renforcement sont à exécuter. Un pont doit-il être,durant son renforcement, praticable sans encombreou partiellement praticable? La circulation des clientsdoit-elle être maintenue dans un local commercialdont le plafond doit être renforcé? Une structure por-teuse peut-elle être renforcée en une seule fois ou lestravaux doivent-ils être exécutés par étape? Voiciquelques-unes des questions qui se posent à un maî-tre d’ouvrage et auxquelles il ne peut être apporté deréponse sans sa participation.

Souvent, il se simplifie trop la tâche en donnant uneréponse spontanée à de telles questions. En effet, lamarge de manœuvre au niveau de la conception serétrécit sous une pression croissante des conditionsimposées et les coûts de construction s’élèvent.L’explication approfondie de la portée de ses déci-sions fait du maître de l’ouvrage un participant actifdans le processus d’optimalisation. Le concepteurne peut le dispenser de cette tâche. En effet, il appar-tient au maître de l’ouvrage d’évaluer et de mettredans la balance les conséquences financières pour

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son entreprise. Sous cet angle, le maître de l’ouvragedevient un participant à la conception.

4.5.5 Planification de l’exécution

L’exécution efficace et concurrentielle d’un renfor-cement d’une structure porteuse dépasse générale-ment le cadre pur d’une activité artisanale. Elle nese limite pas à exécuter un travail sans défaut, effec-tué selon les instructions de l’ingénieur qui dirigeles travaux; elle exige aussi de l’entrepreneur unequantité non négligeable de travaux propres deconception.

Quand ces travaux trouvent-ils leur place? Dansl’idéal, à chaque stade, car une répercussion derésultats intermédiaires sur les travaux de concep-tion de l’ingénieur est possible et peut apporter unecontribution. Les échanges réciproques entre l’ingé-nieur et l’entrepreneur, auxquels s’adjoignent lecontrôleur et le fournisseur des matériaux et aux-quels participe le maître d’ouvrage, initialisent unprocessus d’apports successifs à la recherche d’unesolution optimale au problème constructif.

Ainsi considérée, la conception du renforcementd’une structure porteuse représente plus que lasous-structure spirituelle de son exécution maté-rielle. La conception imprègne plutôt l’ensemble dela tâche constructive.

4.5.6 Le défi de l’ingénieur

Le renforcement d’une structure porteuse existanteest un «ouvrage complet» au sens de l’art. 3.3 (pres-tation complète) du règlement SIA 103. Selon cerèglement, l’activité de l’ingénieur mandaté sedécompose fondamentalement en trois types defonctions:

• en tant que projeteur, selon l’article 4.1 du règle-ment;

• en tant que conseiller du mandant, selon l’article 3.3.1 ;

• en tant que représentant du mandant, selonl’article 3.3.1.

L’ingénieur est confronté à une particularité quiconsiste dans le fait que la compétence au niveaudu projet et les éléments qui lui sont associés nedépendent pas uniquement de lui, comme nous

l’avons vu précédemment. Le mandant qui doit con-seiller l’ingénieur ainsi que l’entrepreneur auprèsduquel il représente le mandant participent égale-ment au projet.

Il en résulte un défi particulier pour l’ingénieur ; ildoit accepter dans son processus de décision qu’ilne connaît pas toute chose au mieux, tout en devantgarder de manière permanente en main la directiongénérale qui lui a été confiée. Il doit apprendre à diri-ger aussi, en participation, une équipe ad hoc qu’iln’a pas obligatoirement formée lui-même.

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4.6 L’attribution juridique du renforcement d’une structure porteuseen tant que complexe de prestations

4.6.1 Le concept de base pour la compréhension juridique de la conception et de l’exécution

Deux parties sont face à face au sein d’un contratd’ouvrage: le maître de l’ouvrage qui commandel’ouvrage et l’entrepreneur qui le réalise. Selonl’idée du législateur, la compétence appartient àl’entrepreneur (le «constructeur») et le maître del’ouvrage se fait en conséquence souvent conseilleret représenter auprès de l’entrepreneur, pour se pla-cer à cet effet à égalité avec son partenaire contrac-tuel, par un spécialiste, architecte (le «chef cons-tructeur») ou ingénieur.

La définition de l’ouvrage à réaliser ou du moins lapossibilité de la définir est une condition objectiveessentielle pour que puisse exister un contrat d’en-treprise. Cela ne signifie rien d’autre que cetouvrage doit être planifié, au moins jusqu’au stadeoù cette condition de «possibilité de définir l’ou-vrage» est remplie. Les prestations qui y correspon-dent constituent généralement la matière d’un oude plusieurs contrats de conception(contrat d’archi-tecte et /ou d’ingénieur) que conclut le maître del’ouvrage.

La «construction juridique» de la conception et dela réalisation regroupe ainsi, dans sa forme de base,le contrat d’entreprise entre le maître de l’ouvrageet l’entrepreneur ainsi que le contrat de conceptionpassé entre le maître de l’ouvrage et le concepteur.Ce dernier contrat doit impliquer: la conception del’ouvrage, les activités de conseil au maître de l’ou-vrage et de représentation auprès de tiers.

En ce qui concerne l’activité de conseil, on notera cequi suit: elle est d’une part un élément de l’activitéde conception, attendu que la conception se dérouleen dialogue avec le maître de l’ouvrage; d’autre part,ce devoir de conseil va au-delà de la conception,parce qu’il regroupe tout simplement tout ce qui, ausens le plus large, est propre à favoriser la réussitevisée de la conception ou à mettre à l’abri le maîtrede l’ouvrage des préjudices correspondants. Cetteobligation étendue de conseil qui incombe au con-

cepteur se confond avec les prestations liées à laconception au sein du contrat même de conception.

Une remarque peut encore être formulée pour cequi a trait à la représentation. Elle est réglée, en tantqu’institution juridique, dans la partie «Dispositionsgénérales» du CO à l’art. 32 et ss., qui traite de laconclusion du contrat, quel qu’il soit. Les principesqui y sont mentionnés sont, sur la base du renvoide l’art. 7 CC, également applicables à d’autresdomaines normés. Il en est ainsi du pouvoir de rem-placement (procuration), qui a pour effet que lereprésentant a qualité de remplacer et engage lepartenaire contractuel qu’il représente, non seule-ment à la conclusion du contrat mais par ses actestout au long du déroulement du contrat.

La représentation est liée à deux conditions : leconsentement du représenté et la communicationdu représentant au tiers.

Le consentement du représenté justifie le pouvoir dereprésentation. Son contenu et son étendue dépen-dent de la volonté du représenté et sont fixés dansle contrat sur la base duquel agit le représentant. Sice contrat est un mandat au sens des art. 394 ss. CO,il contient (art. 396 al. 2 CO) – à la condition que riend’autre n’ait été convenu – le pouvoir de faire lesactes juridiques nécessaires à son exécution. Lecontenu demeure ouvert (appelé: définition juri-dique ouverte) et nécessite une interprétation ducontrat concret. Le droit du mandat englobe cepen-dant fondamentalement le pouvoir de représenta-tion vis-à-vis des autres intervenants contractuels.

4.6.2 Le classement du renforcement de la structure porteuse dans le concept juridique de base.

Il apparaît en premier lieu que le concept de base,ainsi qu’il a été décrit précédemment, convient toutà fait au cas du renforcement de structures por-teuses existantes et ceci bien qu’il s’agisse dans cecas d’un type très particulier d’ouvrage et de condi-tions de conception. Sous l’angle juridique, la con-ception et l’exécution constituent un contrat d’entre-prise entre le maître de l’ouvrage et l’entrepreneuret ceci en dépit des particularités mentionnées auchapitre précédent.

A cela s’ajoute que tout le droit du contrat d’entreprise(art. 363 ss. CO) est de caractère dispositif. Cela signi-fie que des accords à caractère de contrat individuel

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qui s’en écarteraient, pour autant qu’ils se situent dansle cadre des limites générales de l’ordre juridique etdes dispositions légales qui le chapeautent, rempla-cent les dispositions du contrat d’entreprise instituéespar les art. 363 ss. CO. Le caractère dispositif du droitfixé par la loi du contrat d’entreprise confère uneimportante élasticité supplémentaire au concept juri-dique de base.

La pratique de la construction en fait abondammentusage. Les parties liées par contrat utilisent d’unepart cette marge de manœuvre pour des accordsindividuels et se reportent à des paquets préformu-lés de normes. La plus importante en est la normeSIA 118. En alternative ou en complément sontaussi utilisées les dispositions générales de collec-tivités publiques habituées à construire, d’entre-prises publiques et d’entreprises privées. Il y a unpoint commun à tous les accords formulés : ils nesont valables que s’ils sont mentionnés par les par-ties dans leur contrat privé. Ils présentent le carac-tère et la nature juridique de clauses générales demarché.

4.7 La position juridique de l’ingénieur en tant que projeteur d’un renforcement d’une structure porteuse

4.7.1 L’ingénieur en tant que partenaired’un contrat de planification

Rappelons-nous tout d’abord qu’un projeteur estnécessaire dans la mesure où et parce que le maîtred’œuvre ne dispose généralement pas des connais-sances spécialisées nécessaires et qu’il serait, de cefait, dans une position inconfortable dans sa rela-tion contractuelle avec l’entrepreneur.

Il est plutôt rare que le maître d’œuvre dispose desconnaissances spécialisées suffisantes et les engagedans les tâches du projet, qu’il soit un privé dansl’organisation du travail de son entreprise ou unecollectivité dans une section de l’administration.Nous nous limiterons dans la suite au cas général.

Le maître d’œuvre qui désire faire renforcer unestructure porteuse existante fera appel, pour la rai-son citée plus haut, à un ingénieur et conclura aveclui un contrat. Le maître d’œuvre est alors le parte-naire de deux contrats, le contrat d’entreprise et lecontrat de projet dont nous allons brièvement trai-ter ici.

En génie civil, la substance d’un contrat de projetest constituée par des prestations immatériellesdestinées à permettre la réalisation, la modificationou la réparation d’un ouvrage ou de l’une de sesparties. Le contrat de projet du renforcement d’unestructure existante est un contrat d’ingénieur com-prenant, à l’intérieur de ce type de contrat, norma-lement un contrat général, les domaines centrauxque sont le projet, la mise en soumission, l’élabo-ration des plans et la direction des travaux.

A la différence du contrat d’entreprise de l’entrepre-neur, les contrats d’ingénieur et d’architecte ne sontpas réglés juridiquement. Leur nature juridique estcontroversée dans la doctrine et la jurisprudence. Ence qui concerne le contrat général, deux avis s’oppo-sent. L’un le qualifie de contrat de type propre, unmélange d’éléments du type contrat d’entreprise etd’éléments du droit contractuel. L’autre le présentecomme un mandat. Cette interprétation, à laquellel’auteur de ces lignes s’associe, paraît s’imposer

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aujourd’hui et elle est à la base des explications quisuivent. En conséquence, l’ingénieur qui projette lerenforcement d’une structure porteuse agit, juridi-quement parlant, en tant que mandataire du maîtred’œuvre au sens des art. 394 ss. CO Le rapport juri-dique couvre en principe toutes les trois fonctions,soit projet, conseil et représentation du maître del’ouvrage.

4.7.2 L’ingénieur dans le contrat d’entreprise globale

Pour la réalisation du renforcement d’une structure, lemaître d’œuvre peut également utiliser une autreforme d’organisation et conclure un seul contrat, uncontrat d’entreprise globale, en lieu et place des deuxcontrats précités – un contrat avec l’ingénieur, uncontrat d’entreprise avec l’entrepreneur. Ce contratest qualifié, de manière unanime par la théorie et ladoctrine juridique, de contrat d’entreprise. La planifi-cation se fond pour ainsi dire dans la réalisation; laréalisation englobe la planification et définit la naturejuridique de l’ensemble «planification + réalisation».La position de l’ingénieur au sein du contrat d’entre-prise globale (contrat d’entreprise) dépend de laforme juridique que l’entrepreneur global s’est donné.

Il peut s’agir d’une entreprise dont le but de l’acti-vité comprend la planification et la réalisation, parexemple une entreprise de construction organisée,avec sa propre section d’ingénierie, pour le renfor-cement de structures. L’ingénieur qualifié est alorsintégré en tant qu’employé dans l’organisation deson employeur. Ce dernier est seul partenaire con-tractuel du maître d’œuvre.

Il est aussi possible qu’une entreprise de construc-tion entre dans le jeu en tant qu’entrepreneur glo-bal et s’adjoigne un ingénieur indépendant pour laplanification. Cet ingénieur agit donc sur la based’un mandat ordinaire et est partenaire contractuelde l’entrepreneur global et non du maître d’œuvre.

Une entreprise de construction peut former, avec uningénieur indépendant, une communauté de travailad hoc, qui sera le partenaire contractuel du maîtred’œuvre. L’entrepreneur global ainsi formé est juri-diquement une société simple au sens des art. 530ss. CO. Les droits et obligations de l’ingénieur résul-tent alors du contrat de société simple, dans ledomaine du droit de la société simple. Souvent, ladirection commerciale de la société n’est pas enmain de l’ingénieur.

4.7.3 Comparaison entre les deux formesd’organisation

Le contrat d’entreprise générale, décrit sous les troisformes selon lesquelles il peut apparaître, apportefondamentalement au maître d’œuvre une simplifi-cation dans le déroulement du renforcement d’unestructure: il n’a qu’un seul partenaire contractuel.En cas de litige, il devient inutile de rechercher si lafaute relève de la planification ou de l’exécution. Leprojet de contrat, dans lequel la planification se fondpour ainsi dire dans la réalisation, tient compte enparticulier des faits mentionnés au chapitre 4.5, àsavoir que les frontières entre planification et exé-cution disparaissent. La simplification de la constel-lation juridique a pourtant son prix.

Le maître d’ouvrage abandonne au profit de l’élé-ment prix les deux domaines du conseil et de lareprésentation, qui ne sont couverts «automatique-ment» que dans le rapport de mandat entre maîtred’œuvre et ingénieur. Comment faut-il apprécier lavaleur de cet abandon et comment peut-on lecontrecarrer?

Le rapport de conseil comporte, outre l’élémentdécisif objectif, un élément personnel non négli-geable, «la même longueur d’onde». En outre, il s’ymêle une composante organisationnelle : le liendirect à la personne du conseiller peut laisser à dési-rer et ceci malgré l’engagement contractuel ; ce lienpeut également fonctionner sans engagement con-tractuel formel. Il est du ressort du maître d’œuvred’évaluer dans quelle forme d’organisation il trou-vera pour son projet de construction les meilleuresconditions sur le plan de la compétence, des rela-tions personnelles et de l’organisation.

Si tant est qu’elle soit encore nécessaire dans laforme de l’entreprise générale, la représentationauprès de tiers peut et doit être réglée au sein ducontrat correspondant.

Une solution de remplacement peut être offerte parla possibilité de s’adjoindre un accompagnateurpour la construction, au sens d’un guide ou d’unmandataire pour la construction, en la forme d’uneinstance de contrôle essentiellement administra-tive. On peut s’adjoindre, dans les deux formesd’organisation, un ingénieur contrôleur pour le con-trôle technique des prestations d’ingénieur.

S’il abandonne le droit de mandater directement uningénieur, le maître d’œuvre perd alors le droit

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d’instruction, très important, qui lui revient selonl’art. 397 CO dans le cadre du mandat proprementdit.

A sa place s’inscrit, dans le contrat d’entreprise glo-bale, le droit bien moins étendu conféré par l’art. 369CO, qui relève du droit du contrat d’entreprise. Ils’agit, dans ce cas, d’ordres précisant commentl’entrepreneur doit procéder en détail lors de l’exécu-tion de l’ouvrage. Pour le renforcement d’une struc-ture existante, on peut sans doute partir du fait quede tels ordres sont a priori confinés dans des limitestrès étroites du fait du manque de connaissances spé-cialisées du maître d’œuvre. Des indications quidépassent ce cadre nécessitent en général une modi-fication contractuelle résultant d’un échange dedéclarations de volonté correspondantes.

Des indications qui vont au-delà de ce cadre prati-quement illusoire sont des modifications de com-mande et exigent généralement, dans le cadre derenforcements d’une structure, un contrat de modi-fication ainsi que des déclarations concordantes devolonté.

Les conditions mises par écrit dans le contrat d’entre-prise globale, y compris au sujet de la planification,permettent inversement au maître de l’ouvrage demieux se prémunir contre les dépassements de coûtset de délais. La condition en est cependant qu’iln’affaiblisse pas sa position en cours de contrat pardes modifications de commande. Dans le cas de ren-forcements d’ouvrage, cela peut en particulier sur-venir s’il pose de nouvelles conditions d’exploitation.

Les contrats d’entreprise totale ont souvent la pré-férence lorsque le maître de l’ouvrage n’est pas, demanière déterminante, un individu particulier maisse présente en tant que corporation de droit privéou de droit public. Lorsque la taille et /ou la com-plexité d’une tâche constructive s’accroissent, lesavantages de cette forme d’organisation augmen-tent. Un regard jeté sur le mode d’attribution auniveau international le montre également pour cequi concerne aussi les renforcements de structure.Les deux formes précédemment décrites apparais-sent toutefois.

4.7.4 Effets juridiques relatifs à la responsabilité de l’ingénieur

Il a été exposé au paragraphe 4.7.1 que le contrat deconception conclu avec l’ingénieur, généralement

un contrat globaldans le cas de renforcements d’unestructure, n’est pas traité de manière homogène parla doctrine et la jurisprudence. Selon l’une des inter-prétations, il s’agit d’un mandat proprement dit ausens des art. 394 ss. CO. Selon l’autre, il s’agit d’uncontrat mixte qui, outre des éléments du droitcontractuel, présente aussi des éléments du contratd’entreprise régi par les art. 363 ss. CO.

De la qualification juridique incertaine du contratqui le lie, résulte, pour l’ingénieur, une insécurité ence qui concerne sa responsabilité contractuelle. Sile droit du mandat est seul utilisé, il est assujetti àla responsabilité pour faute (voir paragraphe 4.1.5).La situation est moins simple vue sous l’angle dudroit du contrat d’entreprise: la responsabilité pourles défauts de l’ouvrage est une responsabilité cau-sale, la responsabilité pour dégâts résultant dedéfauts est une responsabilité pour faute. En consé-quence, si l’on s’attache à l’interprétation selonlaquelle le contrat d’ingénieur pour le renforcementd’une structure porteuse est un contrat mixte,l’ingénieur est responsable des insuffisances dansla réalisation des prestations partielles que l’on peutconsidérer comme relevant du droit du contratd’entreprise. Ainsi, par exemple, sa responsabilitéest causale, c’est-à-dire également en l’absence defaute, dans le cas de plans d’exécution et de listesde pièces incorrects. Des défauts à la structure quiont été provoqués de manière causale à la suited’erreurs de plans sont en revanche des dégâtsconsécutifs à des défauts par suite d’erreurs dansles plans et relèvent de la responsabilité pour faute.

Pratiquement, au niveau de la responsabilité juri-dique, les conséquences de l’incertitude dans leclassement juridique des contrats d’ingénieur con-cernant un renforcement des structures ne sont pastrès importantes. Les cas de dégâts importantsconcernent l’ouvrage lui-même ou y prennent ori-gine et la responsabilité de l’ingénieur présupposeune faute, que l’on se place sous l’angle du mandatou sous celui du contrat d’entreprise, puisque dansce dernier cas il s’agit de dommages consécutifs audéfaut.

Il en est de même, par analogie, quand le travail del’ingénieur est fixé en tant que contenu de presta-tion d’un contrat d’entreprise totale et est à consi-dérer pour cette raison et en bloc comme relevantdu contrat d’entreprise, ainsi que cela a été exposéau paragraphe 4.7.2.

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4.8 Questions particulières

4.8.1 La marge d’approximation des prévisions de coûts

Cette formulation est empruntée au titre en margede l’art. 3.7 du règlement SIA 103. La définition fixetout d’abord que l’ingénieur est tenu de renseignerle mandant sur les bases des prévisions de coûts etleur marge d’approximation. Ce devoir contractuelfait partie du devoir général d’information selonl’art. 400 CO. Il existe donc également lorsque lerèglement SIA 103 n’a pas été inclus par les partiesdans le contenu du contrat.

La définition de la SIA établit des règles en ce quiconcerne les marges d’approximation des coûts.Elles varient en fonction du stade de la conception.Il faut relever ici quelques points relatifs à la portéede ces règles.

On retiendra en premier lieu qu’il ne s’agit pas derègles fixes mais de règles indicatives.

Les règles concernant les marges d’approximationont la nature juridique de présomptions de faits. Lapartie qui y est intéressée est autorisée à fournir lapreuve que la présomption qui la charge ne se réa-lise pas. Pour cette raison, on la caractérise aussi entant que preuve d’apparence. Concrètement, lemaître de l’ouvrage a ainsi le droit de démontrer quel’ingénieur n’a pas évalué soigneusement les prévi-sions des coûts, bien que ceux-ci demeurent dansles limites des marges d’approximation. Récipro-quement, il est permis à l’ingénieur de fournir lapreuve qu’il a agi avec soin, bien que les limites deces marges aient été dépassées.

La définition mentionnée, tirée du règlement SIA,utilise l’expression: «Cette marge est en général…».Il se pose donc la question de savoir quels typesd’ouvrages représentent les règles générales. Lathéorie et la jurisprudence n’apportent pas deréponse à la question de savoir si les transforma-tions appartiennent à ce cadre.

Il n’a jamais été décidé, à ma connaissance, ce qu’ilen était pour ce qui concerne le renforcement destructures porteuses existantes. Selon mon expé-rience, de telles tâches de conception sont à consi-dérer cependant comme des transformations quali-fiées. Elles vont chercher pour ainsi dire au cœur del’ouvrage existant et touchent à son existence future.En ce qui concerne les coûts, il peut arriver que sur-

gissent, à un stade avancé de la conception seule-ment ou lors de l’exécution, des situations qui fontapparaître la nécessité inéluctable de prendre desmesures constructives non prévues. Ceci se dis-tingue des transformations en général, dans les-quelles le management des coûts permet plutôt dedesserrer ici un peu les brides et de les tendre là.

Eu égard à la dominance de la sécurité et de l’apti-tude au service, les renforcements de structuresporteuses n’appartiennent donc pas, pour ce quiconcerne la marge d’approximation des prévisionsde coûts, à la règle générale des transformations niégalement à celle des ouvrages globaux.

Le devoir d’information, évoqué en introduction,prend donc ainsi une importance supplémentaire. Ilcomprend aussi l’explication des raisons qui peu-vent mettre en question le maintien d’une margedéfinie d’approximation des coûts. Ces motifs rési-dent le plus souvent non dans le domaine du ren-forcement proprement dit mais dans les travauxpréalables de remise en état, qui sont à entreprendrepour permettre la «renforçabilité» de la structureexistante. Un devis plus précis ou une estimation detels coûts d’assainissement est souvent possible, àla condition que le maître de l’ouvrage prenne encompte, dans une phase antérieure de la planifica-tion, un montant plus élevé pour les contrôles desmatériaux. Discuter de ces points avec le maître del’ouvrage et lui donner son avis, particulièrement ence qui concerne les coûts/avantages des dépensesde conception auxquelles on donnerait la préfé-rence, étendent l’acte d’information à celui duconseil en général. La marge d’approximation desprévisions de coûts qui finalement en résulterait està fixer d’un commun accord.

4.8.2 Fourniture des matériaux et responsabilité en cas de défauts

Dans le contrat d’ouvrage, les parties doivent éga-lement convenir quel partenaire contractuel, lemaître de l’ouvrage ou l’entrepreneur, fournira lesmatériaux. La loi permet les deux éventualités.Aussi bien le droit du contrat d’entreprise (art. 363et ss. CO) que le droit contractuel préformulé(norme SIA 118) contiennent des réglementationsrelatives aux deux alternatives. Celles-ci font desdifférences: soit la fourniture est effectuée par lemaître, que ce soit directement à l’entrepreneur ouen tant qu’achat effectué par l’entrepreneur au nomet pour le compte du maître, soit la fourniture est

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effectuée par l’entrepreneur, qualifié pour la réali-sation de l’ouvrage selon le contrat mais libre pourle reste en ce qui concerne le choix des matériauxet des sources d’approvisionnement.

Une possibilité supplémentaire existe, qui se situeen quelque sorte entre les deux alternatives préci-tées: fourniture par l’entrepreneur, mais selon lesordres du maître. Dans le cas du renforcement destructures porteuses existantes, où des systèmes dematériaux sont utilisés – que ce soit pour le renfor-cement proprement dit ou pour des remises en étatpréalables –, la compétence technique pour la défi-nition du système de matériaux appartient large-ment au concepteur. Si le contrat d’entrepriseenglobe la conception – contrat d’entreprise totale –,il se pose moins de problèmes parce que la compé-tence technique et la fourniture des matériaux sesituent du côté du même partenaire contractuel. Il enest différemment lorsque le concepteur agit parordre du maître. En tant que son représentant, il exé-cute les bases d’offre et prépare l’attribution des tra-vaux. Son catalogue de prestations contient desdonnées relatives à la fourniture des matériaux, aux-quelles est conféré le caractère d’instructions don-nées par celui qui potentiellement commande.

Il peut en résulter des problèmes quant à la res-ponsabilité de défauts, problèmes que nous allonsaborder ci-après.

Si l’entrepreneur constate ou devait constater déjàau stade du travail sur l’offre ou des négociations ducontrat que les instructions sont mal appropriées etque, de ce fait, la réussite des travaux de renforce-ment pouvait être remise en question, il lui incombeun devoir pré-contractuel d’éclaircissement. S’il leviole, il agit à l’encontre de la bonne foi et est, confor-mément à l’art. 2 CC, responsable envers celui quil’a commandé des dommages qui en résulteraient.Si celui qui l’écrit maintient ses ordres, alors que ledevoir d’éclaircissement a été rempli, ses droits deréclamation pour défaut, qui lui sont conférés en tantque commanditaire et provenant du contrat d’entre-prise, tombent par sa propre faute.

Si l’entrepreneur n’effectue les constatations préci-tées qu’au cours du déroulement du contrat, il esten règle générale tenu par le devoir d’avertissementselon l’art. 369 CO. S’il l’exécute et que celui quipasse commande maintient ses ordres, ce dernierest de ce fait responsable de manière causale dedéfauts à l’ouvrage qui en résulteraient et l’entre-preneur est dégagé de sa responsabilité.

Le dégagement de la responsabilité peut aussi seproduire, exceptionnellement, quand l’entrepreneurn’a pas discerné l’inadéquation des ordres et n’étaitpas tenu de la discerner en considérant l’état sup-posé de ses connaissances spécialisées.

L’exception vaut pour l’artisan local, c’est-à-direl’entrepreneur en tant que pur artisan, et n’a en con-séquence qu’une importance très marginale pource qui concerne le domaine des renforcements destructures.

4.8.3 Observations sur un long terme et droits en cas de défauts

Le moment de la livraison de l’ouvrage déterminele délai de vérification. Selon l’art. 367 al. 1 CO, cedélai débute avec la livraison; selon l’art. 158 para-graphe 2 de la norme SIA 118, il débute dans le délaid’un mois. La durée de vérification se définit d’aprèsla marche des affaires et la faisabilité, qui se juge enoutre d’après le type de l’ouvrage. Pour des struc-tures porteuses, la vérification peut englober desessais de mesure et de charge. En résumé, on diraque la vérification doit débuter le plut tôt possibleaprès la livraison et doit avoir une durée relative-ment courte mais, dans le domaine du raisonnable,d’une durée suffisamment mesurée. Le résultat dela vérification montre si des défauts clairs ont étéconstatés et, si oui, de quels types ils sont.

Dans le cas de renforcements de structures, il n’est,à l’heure qu’il est, le plus souvent rien fait en ce quiconcerne les essais de mesure et de charge évoquésdans la littérature juridique. Même quand le délai devérification est largement calculé, on pense cepen-dant toujours à des procédures d’essais relative-ment courtes. L’aptitude au service de la structureporteuse renforcée, fixée contractuellement et con-venue, ne se vérifie souvent que sur la base d’obser-vations sur un long terme. Il en est ainsi du com-portement au fluage ou du comportement sous lesactions climatiques et toute autre action provo-quant une corrosion. La durée de l’observations’étend sur des années. Les défauts qui se révéle-raient sont des défauts cachés et, par conséquent,des défauts qui n’étaient pas décelables au cours del’examen décrit plus haut.

Juridiquement parlant, une distinction est effectuéeentre les défauts manifestes et les défauts cachés,pour ce qui concerne l’acceptation de l’ouvrage etla perte des droits en cas de défauts.

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L’acceptation de l’ouvrage est une déclaration decelui qui l’a commandé, selon laquelle cet ouvragedoit être libre de défauts manifestes. Il perd ainsi sesdroits des défauts pour ce qui concerne les défautsmanifestes mais pas pour ce qui concerne les défautscachés. S’il découvre par la suite, sur la base d’obser-vations sur le long terme, des défauts cachés, il esttenu selon l’art. 370 al. 3 CO, de les signaler immé-diatement. S’il ne le fait pas, il perd également sesdroits en cas de défauts.

Les droits en cas de défauts non acceptés et doncnon disparus se prescrivent (voir paragraphe 4.8.5pour le terme prescription et pour sa nature). Si uneaction est ouverte pour des droits qui sont prescrits,le défendeur peut élever l’objection de prescription.Tous les droits en cas de défauts se prescrivent,selon l’art. 371 CO ou l’art. 180 de la norme SIA 118,par cinq ans à partir de la réception de l’ouvrage(exception: dix ans pour des défauts intentionnel-lement dissimulés par l’entrepreneur). Les clausescitées ont un caractère dispositifs. La durée peutainsi être réduite par les partenaires contractuels ouprolongée, jusqu’à un maximum de 10 ans toute-fois selon CO 127.

Dans le cas de renforcements d’une structure, onexaminera avant la conclusion du contrat si le délaide prescription de cinq ans pour les défauts cachésest suffisant et ceci en relation avec la durée d’utili-sation prévue.

4.8.4 Responsabilité du fait des produits

Conformément à la définition du terme donnée auparagraphe 4.1.3, on comprend sous responsabilitédu fait des produits le devoir de répondre des consé-quences préjudiciables de la qualité d’un produit.Selon l’art. 3, alinéa 1 lettre a, de la nouvelle Loi surla responsabilité du fait des produits, le terme pro-duit s’applique à toute chose mobile, également s’ils’agit d’une partie d’une autre chose mobile ouimmobile.

On a attiré l’attention, au paragraphe 4.8.2, surl’importance particulière que revêt la livraison desmatériaux dans le cas de renforcements d’une struc-ture. Les matériaux mis en œuvre dans ce cas repré-sentent souvent des produits au sens de systèmesde matériaux, qui sont fournis consécutivement àune étroite collaboration du projeteur, du fournis-seur et du constructeur. Qui donc doit pouvoir êtremis en cause au sens juridique et sur quelle base de

revendication cela est-il possible si un dégât est à rat-tacher à une qualité défectueuse du système dematériaux ou de l’un de ses composants?

Il n’existe pas toujours une relation contractuelleentre le lésé et tous ceux qui peuvent entrer enconsidération en tant qu’auteurs du dommage. Labase juridique adéquate est à rechercher dans ledomaine du dommage extra-contractuel (voir para-graphe 4.1.3).

Si nous considérons ensuite le paragraphe 4.1.5,nous constatons que les faits délictueux de respon-sabilité qui présupposent une faute personnelle duresponsable sont trop restrictifs. Seule une régle-mentation ayant pour fondement une responsabilitécausale est capable de suffire à satisfaire les besoinsd’une société ayant un haut degré de technicité.

La nouvelle Loi sur la responsabilité du fait des pro-duits (LRFP), en vigueur depuis le 1er janvier 1994,offre cette opportunité. Il s’agit d’une loi particulièrequi est essentiellement orientée sur les principesdes directives CEE et qui a le rang d’une loi acces-soire fondée sur le droit des obligations.

Le fabricant est responsable, selon l’art. 1, alinéa 1lettre a, des dommages aux personnes et, selonl’art. 1, alinéa 1 lettre b, des dommages aux choses.Dans ce dernier type de dommage, il n’est cepen-dant responsable que si est endommagée oudétruite une chose qui, selon sa nature, est destinéeà un emploi privé et que le lésé a utilisé essentiel-lement à titre privé sur la base de ces limitations.Les défauts à une structure porteuse renforcée netombent qu’à peine dans le domaine d’applicationde la LFRP. A ce sujet, le lésé demeure renvoyé à laresponsabilité en cas de défauts selon le contratd’entreprise.

Pour ce qui se rapporte au renforcement des struc-tures porteuses existantes, le domaine d’utilisationde la LFRP se concentre sur les dommages aux per-sonnes. Chaque personne qui a subi un dommagedirect à cause d’une chose défectueuse est un ayantdroit.

LA LFRP règle la responsabilité en s’appuyant surune conception fondamentalement nouvelle. Ledroit antérieur considère le problème de la respon-sabilité du fait des produits du point de vue du fabri-cant qui confectionne un produit pour un usagebien défini et le commercialise. On peut lui repro-cher des erreurs qu’il commettrait au cours de ces

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processus: lors de la construction et de la fabrica-tion, lors de l’instruction ou en violation de sondevoir de surveillance du produit. Quoique l’exten-sion à la responsabilité causale ait été réalisée – onaurait tendance à dire de manière très abstraite –, ilse cache derrière les catégories d’erreurs une repré-sentation de la faute. Les «erreurs» qui ne sont pascouvertes par cette représentation, les inévitables«fugueurs» et les risques de l’évolution, ne sontpas touchés par la responsabilité. La LFRP consi-dère le point de vue de l’utilisateur en lieu et placede celui du fabricant. Selon l’art. 4, alinéa 1, un pro-duit est défectueux quand il ne présente pas la sécu-rité que l’on est en droit d’attendre compte tenu detoutes les situations. Il s’en suit une liste nonexhaustive de telles situations. L’attribution d’unefaute à une catégorie est inutile. La notion juridiquede la non-réponse à l’attente légitime de l’utilisateurdevra être commentée par la jurisprudence. Dansce cas, les connaissances spécialisées, présuppo-sées, du cercle particulier des utilisateurs ainsi queleurs expériences seront sans doute à prendre enconsidération.

Le cercle des sujets à responsabilité est très étendu.Il englobe, selon l’art. 2, alinéa 1, le fabricant (pro-duit final, produit de base, produit semi-fini), lequasi-fabricant (celui qui appose sur le produit sonnom, sa marque déposée ou un autre signe dereconnaissance et se fait passer pour le fabricant),par principe l’importateur et, selon l’alinéa 2, demanière secondaire, le fournisseur.

4.8.5 La prescription des actions en réparation à l’encontre de l’ingénieur

Comme en principe pour chaque action, celles rela-tives à la réparation sont soumises à prescription.Dans le cadre de la responsabilité liée à la construc-tion, cette institution juridique revêt une grandeimportance. Le présent chapitre traite de la notionet de la nature de la prescription, des délais de pres-criptions et de l’effet d’une prescription.

a) Notion et nature de la prescription

Une action en réparation est le droit appartenant àchacun d’agir en justice contre une ou plusieurs per-sonnes, groupements et associations pour obtenirune prestation de remplacement. La prescription neconcerne pas le droit lui-même, mais le droit d’agir.A la base de cette institution juridique se trouve la

considération suivante: dans l’intérêt de la sécuritédu droit, un créancier ne devrait pas pouvoirattendre indéfiniment avant d’exercer son droit àl’encontre d’un débiteur. La possibilité d’intenter uneaction ne disparaît pas simplement avec l’entrée envigueur de la prescription. Cette possibilité estsubordonnée cependant au fait que le débiteur nefasse pas valoir d’objection à la prescription.Autrement dit, au droit du créancier d’intenter uneaction prescrite est opposé, dans le cas d’une actionjudiciaire, le droit du débiteur de faire valoir l’objec-tion de la prescription. Le fait de faire valoir cetteobjection ne supprime pas le droit du plaignant maisson effet est «paralysé». En ce sens, la prescriptionpeut être décrite comme la paralysie d’une actionpar expiration du temps.

b) Délais de prescription

Comment cette «expiration du temps» est-elleconcrétisée? En d’autres termes: quand commencele délai de prescription et quelle est sa durée? Le CO127, alinéa 1, fournit la base juridique: «Toutes lesactions se prescrivent par dix ans, lorsque le droitcivil n’en dispose pas autrement». Les délais deprescription entrent en vigueur dès l’exigibilité del’action. Le droit fixe une période de dix ans commedélai ordinaire et d’autres délais comme extraordi-naires.

Dans le cadre du thème traité ici, «Evaluation et ren-forcement d’une structure porteuse existante», laquestion des délais de prescription doit être exami-née séparément pour chacune des activités.

Le contrat pour l’évaluation relève du droit du man-dat proprement dit conformément aux art. 394 ss.CO (voir paragraphe 4.3.1). Aucune «autre disposi-tion», au sens de l’art. 127 alinéa 1 CO, n’est conte-nue, l’ingénieur remplit sa dernière prestation prin-cipale en livrant son rapport final (voir paragraphe4.3.8) et, par là, les actions réciproques deviennentexigibles. Le délai ordinaire de prescription de dixans s’applique donc à l’évaluation d’une structureexistante à partir du jour de la remise du rapportfinal. L’article 1.8 ch.1 du règlement SIA 103 récapi-tule le contenu de la réglementation juridique.

L’attribution juridique du contrat d’ingénieur pour lerenforcement d’une structure porteuse existante estcontroversée (voir paragraphe 4.7.1) et dépend enoutre de la forme d’organisation dans laquelle lesprestations d’ingénieur sont intégrées (voir 4.7.2-4.7.4). Cependant et indépendamment de ce «flou

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juridique», prévaut en principe pour ce qui concernela prescription des prestations d’ingénieurs, la dis-position du droit du contrat d’entreprise (art. 371 ali-néa 2 CO), qui fixe un délai extraordinaire de pres-cription de cinq ans. L’art.1.8 ch.2 du règlement SIA103 suit cette disposition juridique.

A la différence de la situation juridique claire quiprévaut pour l’évaluation des structures porteusesexistantes, une complication survient toutefois lorsdu renforcement: l’ensemble du droit relatif aucontrat d’entreprise et, par conséquent, l’art. 371 ali-néa 2 CO est de nature dispositive (voir paragraphe4.6.2). Il peut donc être modifié par des conventionscontractuelles particulières, dans la mesure où cesconventions ne dépassent pas les limites généralesde l’ordre juridique et des dispositions légales quiprévalent. Pour ce qui concerne le délai de pres-cription, cela signifie que le délai légal (à caractèredispositif) de cinq ans peut être raccourci par lesdeux parties contractantes ou, ce qui en pratique estbeaucoup plus rare, il peut être étendu au maxi-mum au délai ordinaire de dix ans.

La marge de manœuvre concédée par l’ordre juri-dique dans le cadre de l’autonomie privée joue unrôle important en ce qui concerne les mandatsd’ingénieur. Les administrations et les entreprisesqui construisent fréquemment font en particulierusage de cette possibilité en incluant dans leurscontrats d’ingénieur leurs propres conditions géné-rales commerciales. Il y figure certaines dispositionsqui étendent le cadre temporel de la mise à contri-bution de l’ingénieur quant à sa responsabilité juri-dique. Cela peut prendre la forme d’un allongementdu délai de prescription. Il peut aussi être convenud’un terme plus lointain à partir duquel l’action peutêtre exigible qui repousse ainsi le début du délai deprescription. Ainsi, par exemple, le déplacementpeut aller de la réception du renforcement de lastructure en tant que partie d’une transformationjusqu’à la réception finale de l’œuvre.

On conseillera la plus grande prudence à l’ingé-nieur, en tant que partenaire contractuel d’un con-trat de projet et de direction des travaux de renfor-cement d’une structure, dans l’acceptation de tellesdispositions. Il court en effet le risque de porteratteinte de manière grave à sa position en cas dedégâts et ceci sous deux aspects. En premier lieu,l’assurance responsabilité-civile professionnelle del’ingénieur ne couvre en général que les prétentionslégales et non les prétentions de type contractuelqui vont au-delà du contrat «usuel». Ensuite, il est

fait abstraction du motif qui a conduit en son tempsle législateur à synchroniser, dans l’art. 371 alinéa 2CO, le délai de prescription pour les travaux de pro-jet avec celui de la réalisation: le but était d’éviterque le projeteur ne puisse faire valoir d’éventuelsdroits de recours à l’encontre de l’entrepreneurparce que les actions à l’encontre de ce dernier sontdéjà prescrites. Ceci est également d’actualité,attendu que la norme SIA 118 (art. 180.1), en accordavec le CO, fixe à cinq ans, en cas de défauts, la pres-cription des droits du maître de l’œuvre à l’encontrede l’entrepreneur.

c) Effets de la prescription

La prescription d’une action fournit au débiteur ledroit d’opposer au créancier qui engage la procé-dure, l’objection de la prescription. La possibilité defaire usage de ce droit est réservée au seul débiteur.Conformément à l’art. 142 CO, le juge ne peut pastenir compte d’office de la prescription. Le débiteurpeut renoncer à l’invoquer. Les renonciations sontfréquentes dans le domaine de la construction.

Les litiges les plus fréquents concernant les actionsen dommages et intérêts liées à des contrats d’ingé-nieurs sont réglés en fait par une transaction. Lespourparlers nécessitent souvent un temps considé-rable et, sur ces actions du maître d’œuvre, plane lamenace de la prescription. Afin d’éviter ce problème,l’on dispose de deux possibilités: primo, le maître del’ouvrage engage une action à l’encontre de l’ingé-nieur, ce qui interrompt le délai de prescription ausens de la loi, ou, deuxième cas de figure, l’ingénieursigne une déclaration selon laquelle il renonce pen-dant une période donnée à lever l’objection du délaide prescription. Cette variante sauve les négociationsen vue d’une conciliation en surmontant l’écueil dudélai de prescription; elle met aussi les parties, durantla période convenue, à l’abri des risques et de la dyna-mique résultant d’une procédure.

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4. Aspects juridiques

64

Page 62: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

5.1 Renforcer ne rend pas toujours plus «résistant» 67

5.2 Synthèse des systèmes de renforcement 67

5.3 Critères de choix d’un système 68

Bibliographie du chapitre 5 69

5. Systèmes de renforcement

65

5. Systèmes de renforcement

Page 63: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

5.1 Renforcer ne rend pas toujours plus «résistant»

Chaque partie d’une construction subit toujours uneforce et une déformation. Comme pour les nou-velles constructions, les parties renforcées doiventpouvoir montrer des déformations annonciatricesd’une rupture. En effet, ce n’est qu’à ce moment quel’on peut réagir à temps face à une menace de ruine.En plus d’un état d’équilibre, on doit porter unegrande attention à la ductilité.

Une action peut avoir la forme d’une charge, d’undéplacement imposé ou d’un mouvement. On cons-tate qu’il y a une relation directe entre une sollicita-tion et une déformation.

Pour la plupart des types d’actions, une construc-tion trop faible peut être renforcée et remise en étatpar le renforcement de la structure porteuse.

Mais ces types de renforcement ne conviennent pastoujours pour les actions accidentelles de la normeSIA 160. Dans le cas de vibrations et de déformationsimposées, la sollicitation est directement influencéepar le comportement à la déformation de la structure.On doit en premier se poser la question de savoir s’iln’est pas approprié de modifier la rigidité de la struc-ture et la capacité de déformation plastique (ducti-lité). L’augmentation de la rigidité d’une structureaugmente par exemple sa fréquence propre et influ-ence alors son comportement vis-à-vis des vibra-tions. Souvent, une diminution de la rigidité de lastructure est beaucoup plus indiquée. Pour les ouvra-ges soumis à un risque de séisme, un seul contrôledes actions et de la capacité portante ne suffit plus.

Le problème de la protection des structures por-teuses contre les explosions, chocs, séisme, etc., esttrès complexe et ne peut pas être abordé de façonadéquate dans ce cours.

Le Groupe suisse de Génie parasismique et de ladynamique des constructions (SGEB) a publié ladocumentation SIA D097 Verstärkungsmassnah-men für erdbebengefährdete Bauwerke. Pour desouvrages existants, ce document décrit de manièredétaillée les grandes différences entre une évalua-tion de la sécurité structurale sous des actions detype statique et une évaluation de la sécurité parrapport à l’action d’un séisme. Les personnes inté-ressées y trouveront aussi une foule de conseils surles mesures et les systèmes de renforcement.

Dans le présent document par contre, lorsque nousparlons de sécurité structurale et de renforcementde structures porteuses, nous nous limitons stricte-ment aux problèmes de type «statique».

5.2 Synthèse des systèmes de renforcement

Il existe plusieures méthodes de renforcement. Onpeut renforcer en remplaçant les éléments défec-tueux ou endommagés, en ajoutant des élémentsporteurs ou en redistribuant les charges par undéplacement imposé. La différence fondamentaleentre les différentes méthodes de renforcementd’ouvrages existants est de savoir si le système derenforcement utilisé est passif ou actif.

Pour un renforcement qui a pour objet d’augmenterla résistance ultime, un renforcement passif avecune connexion ultérieure entre ancienne et nouvellepartie est en général suffisante. Mais il peut aussiarriver que l’ancienne partie doive même supporterle poids propre de l’élément de renforcement. Lerenfort ne pourra reprendre qu’une partie propor-tionnelle de la surcharge appliquée. Cette partievarie en fonction du rapport de la rigidité entrel’ancienne et la nouvelle partie. Pour que le renfor-cement participe à la reprise d’une charge, il faut uneaugmentation de la charge, c’est-à-dire une défor-mation supplémentaire de l’ancienne structure.

On peut en déduire qu’un renforcement passif pourgarantir un état d’aptitude au service durable n’estadmissible qu’avec des réserves. La compatibilitédes matériaux joue ici un rôle important. Lors d’uneréfection où l’aptitude au service est déterminante,on doit mettre en œuvre des renforcements actifs.Pour agir sur l’ancienne construction, on doit soit ladécharger, soit lui imposer des déformations. Laplupart du temps, on obtient ce résultat au moyende précontrainte.

Dans les chapitres prochains, on abordera plus endétail les systèmes de renforcements suivants :• renforcements au moyen de béton;• renforcements par des profilés métalliques et des

lames d’acier collées;• renforcements au moyen de la précontrainte ;• renforcements du sol de fondation.

5. Systèmes de renforcement

67

5. Systèmes de renforcement

Page 64: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

5.3 Critères de choix d’un système

Les exigences générales pour un renforcement, parrapport à la sécurité structurale et à l’aptitude au ser-vice, se réfèrent à la durée d’utilisation restante del’ouvrage. Le type et le degré d’exigences peuventdonc différer de ceux des nouvelles constructions.

Le domaine des renforcements possibles est vaste;cela nous contraint de choisir soigneusement le sys-tème adapté au problème à résoudre. Dans les cha-pitres suivants qui traitent de la plupart des systèmesde renforcement, on définira en détail le domained’application caractéristique de chaque système derenforcement. C’est pourquoi nous résumons ici descritères généraux valables permettant un choix préli-minaire.

a) Hypothèses et restrictions d’exploitation

Alors que dans les nouveaux ouvrages on peut tenircompte des nécessités de la statique dans le projet,dans le cas d’ouvrages existants, les données ren-contrées influent sur le choix du système de ren-forcement nécessaire.

Le respect des gabarits de passage dans les bâti-ments, sous les ponts, dans les tunnels et le long demurs de soutènement peut limiter la place à dispo-sition pour des renforcements à envisager.

Dans la plupart des cas, les travaux de rénovation etde renforcement doivent être menés tout en garan-tissant une continuation partielle ou totale de l’ex-ploitation. C’est aussi souvent pour cette même rai-son que l’on préfère la réhabilitation d’un ouvrage àson remplacement.

b) Possibilités d’exécution

Un critère très significatif pour le choix du systèmede renforcement est la garantie d’une mise en œuvreirréprochable du renfort. Les conditions nécessairesà cette garantie sont une bonne accessibilité et laqualité des conditions de travail.

c) Compatibilité des matériaux

En principe, on préférera des mesures de renforce-ment utilisant des matériaux s’approchant des maté-riaux existants. Les parties renforcées se comportentalors de préférence conformément à l’ouvrage exis-

tant. Il va de soi que ce principe ne peut pas toujoursêtre satisfait. Si des circonstances spécifiques impo-sent d’autres solutions, il faudra alors porter uneattention particulière à la compatibilité des maté-riaux. Par exemple, dans l’adhérence entre unancien et un nouveau béton, la compatibilité desdeux «mêmes» matériaux n’est pas du tout évi-dente. Ce problème est abordé au paragraphe 6.2.Les problèmes de compatibilité apparaissent en par-ticulier aussi dans le renforcement de maçonneries.

d) Rapport coût-avantages

La question du rapport coût-avantages d’un renfor-cement doit toujours rester présente à l’esprit del’ingénieur lorsqu’il essaie de résoudre son pro-blème. Cette question est très clairement illustrée auparagraphe 9.5.3 dans l’exemple de renforcementd’une fondation. On ne doit pourtant pas se limiterau seul problème du coût d’investissement, mais ondoit aussi tenir compte des coûts d’exploitation, decontrôles ultérieurs et de l’entretien. Il convient iciaussi de s’adapter à la durée d’utilisation restantefixée avec le maître de l’ouvrage. Les exigences et laqualité offerte ne doivent pas être maximales maiscorrespondre à un optimum réaliste.

e) Autres critères

La liste des critères de choix du système de renfor-cement adapté est aussi vaste que le nombre de pro-blèmes qui peuvent survenir lors du renforcementd’un ouvrage existant. C’est pourquoi il est impos-sible d’en fixer une liste complète au préalable et sur-tout sous la forme d’une check-list. Nous énuméronsci-dessous quelques suggestions de points supplé-mentaires à examiner selon les cas:

• physique des constructions;

• comportement lors d’un incendie;

• contrôlabilité et accessibilité ;

• entretien;

• esthétique.

5. Systèmes de renforcement

68

Page 65: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Bibliographie du chapitre 5

SIA D097:Verstärkungsmassnahmen für erdbebenge-fährdete Bauwerke, 1993.

Jungwirth, Beyer, Grübel :Dauerhafte Betonbauwerke, Beton-Verlag,Düsseldorf 1986.

Jungwirth, Bridge:Rehabilitation, Darmstadt 1992.

FIP:Guide to good practice, Repair and strengthe-ning of concrete structures, 1991.

5. Systèmes de renforcement

69

Page 66: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

6.1 Exposé du problème 736.1.1 Propriétés des sections mixtes 736.1.2 Limites d’application 746.1.3 Planification des mesures de renforcement 75

6.2 Matériaux 756.2.1 Exigences 756.2.2 Connaissance des matériaux existants 766.2.3 Choix du type de béton 77

6.3 Liaison entre deux bétons 77

6.4 Liaison entre le béton et l’acier 82

6.5 Liaison entre le béton et le bois 85

Bibliographie du chapitre 6 87

6. Renforcement au moyen de béton

71

6. Renforcement au moyen de béton

Page 67: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

6.1 Exposé du problème

Si l’examen et les calculs d’un ouvrage existantrévèlent que des mesures de renforcement de lastructure sont nécessaires pour obtenir une sécuritéstructurale ou une aptitude au service suffisante, onrecourt souvent au béton pour renforcer l’ouvrage.Les principaux avantages du béton sont décrits ci-dessous:

• Le béton coulé s’adapte particulièrement bien àune structure existante, quelle que soit sa forme.

• Le béton est transportable en petites quantités(poids limité). Avec du béton, on arrive donc àrenforcer des parties difficilement accessibles etbiscornues.

• Le béton est par nature un matériau adhérent : lapâte de ciment relie les agrégats. Dans le bétonarmé, la liaison existe en outre entre le béton etl’acier d’armature.

6.1.1 Propriétés des sections mixtes

On ne renforce pas seulement des constructions enbéton avec du béton, mais aussi des structuresmétalliques ou des structures en bois. Quand unestructure doit être renforcée avec du béton, on réa-lise normalement une liaison entre un ancien élé-ment et un nouvel élément. La liaison rigide de cesdeux éléments de construction augmente bien larésistance ultime mais ne suffit souvent pas. Engénéral, chacun des éléments d’une constructiontravaille indépendamment des autres éléments et larelation entre leurs déformations n’est que partielle.Par exemple, dans une poutre fléchie comme cellede la figure 6.1, les deux parties subissent la mêmedéformation. La surface de contact entre l’ancienneet la nouvelle partie est le lieu de glissements diffé-rentiels. La résistance ultime du système global estcomposée par une addition des résistances ultimesde l’ancien et du nouvel élément. Ce n’est quelorsque l’adhérence des surfaces de contact entreles deux parties est effective que la résistance ultimecroît d’une façon marquante ou que les déforma-tions peuvent être réduites.

Lorsque l’adhérence des surfaces de contact estcomplètement mobilisée et que plus aucun glisse-ment ne peut se produire, on parle d’une liaisonrigide (connexion rigide). Parmi les différents sys-

tèmes de construction utilisés aujourd’hui, on trouveaussi bien des systèmes avec connexion rigidequ’avec connexion partielle ou nulle.

Figure 6.1: Effet de la liaison entre deux éléments.

Les forces en jeu au niveau des surfaces de contactdans le cas d’une liaison rigide sont illustrées dansla figure 6.2. Une poutre encastrée composée d’unesection mixte est sollicitée jusqu’à la résistanceultime de la section à l’encastrement de la poutre.L’élément nouveau situé du côté des fibres tendues(face supérieure) atteint la limite élastique sousl’effet de ces sollicitations. Dans les autres sectionsde la poutre, la force de traction correspond au tracédu diagramme des moments de flexion. Cette forceest nulle à l’extrémité libre de la poutre. La partieinférieure de la section sera comprimée, pour desraisons d’équilibre. La force de traction qui se déve-loppe depuis l’extrémité libre jusqu’à l’encastrementde la poutre est en équilibre, dans chaque section,avec une force de compression équivalente. La forcede liaison transmise au travers de la surface decontact s’appelle l’effort rasant. En utilisant la capa-cité portante à l’encastrement, la force de traction estindépendante du type d’action agissant sur la poutreet toujours égale à la force de limite élastique. Par

6. Renforcement au moyen de béton

73

6. Renforcement au moyen de béton

Page 68: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

contre, sa répartition le long de la poutre varie enfonction du type d’actions et de l’introduction desforces. Dans le cas d’un moment de flexion appliquéà l’extrémité de la poutre, la totalité de la force detraction doit être transmise sur une très faible dis-tance. Pour une charge concentrée, l’effort rasant estconstant le long de la poutre. Dans le cas d’unecharge répartie, l’effort rasant augmente de façoncontinue. Cet effort rasant est donc proportionnel àl’effort tranchant.

La connexion entre les deux éléments peut être réa-lisée ponctuellement ou régulièrement sur la sur-face de liaison. Habituellement, dans les construc-tions en béton, la liaison se développe le long de lasurface de contact, alors qu’en construction métal-lique elle est généralement ponctuelle. Pour calcu-

6. Renforcement au moyen de béton

74

Figure 6.2: Exemple d’une poutre encastrée.

ler la sécurité structurale, il est préférable de déter-miner l’effort rasant à l’aide de la théorie de la plas-ticité. Pour la vérification de l’aptitude au service, lesdéformations seront calculées selon la théoried’élasticité. Les conditions d’équilibre nécessairesau calcul des efforts et des contraintes dans un élé-ment de barre d’une longueur dx sont représentéesà la figure 6.3.

6.1.2 Limites d’application

Pour l’ingénieur, augmenter la sécurité structuraled’une structure par la liaison rigide d’un ancien et d’unnouvel élément est une solution classique. Il arriveaussi que l’on ait à réparer des parties endommagéesou défectueuses d’une structure qui n’ont pas de fonc-tions porteuses essentielles. On doit pourtant aussipouvoir garantir un comportement monolithiqueentre les anciens et les nouveaux éléments dans cettedeuxième forme de réfection. Dans le domaine dubéton, on parle aussi du reprofilage d’une section. Lesdomaines d’application, les méthodes et le déroule-ment des travaux de réfection en génie civil sont trai-tés en détail dans l’ouvrage «Protection des ouvragesde génie civil» (PI-BAT, 1992).

Figure 6.3: Jeu de forces agissant sur la surface de con-tact, cas d’une liaison rigide.

Page 69: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

6.1.3 Planification des mesures de renforcement

L’analyse globale du problème, la mise en œuvrede mesures de renforcement adéquates et lecontrôle de l’exécution conduisent au succès d’unrenforcement. Au premier plan des mesures de ren-forcement, on a:

• le choix du système mixte approprié au problème ;

• une étude complète des problèmes constructifs ;

• un dimensionnement suffisant;

• un choix étudié des matériaux à mettre en œuvre;

• une exécution soignée, dans les règles de l’art.

Dans le cas du renfort d’une structure existante avecdu béton, le choix du matériau joue un rôle pré-pondérant. En plus des exigences liées au renfor-cement lui-même, il faut aussi porter une attentionparticulière aux caractéristiques des matériaux exis-tants, pour pouvoir garantir une bonne compatibi-lité de comportement entre eux. C’est pourquoi ontraitera des exigences pour le béton, dans un ren-forcement, dès le prochain paragraphe. Les ques-tions spécifiques aux effets d’adhérence entre lesmatériaux et leurs solutions seront abordées plusloin en fonction du système mixte étudié.

6.2 Matériaux

6.2.1 Exigences

On attend d’une structure qu’elle ait une capacitéportante suffisante et un comportement au servicesatisfaisant. On peut en déduire les performancesrequises du béton. Sa résistance contribue à la sécu-rité structurale. Si l’on considère l’aptitude au ser-vice, le béton doit présenter des caractéristiques par-ticulières supplémentaires. Selon son utilisation, ildoit être étanche et/ou résistant aux sels de déver-glaçage, résistant à l’abrasion et finalement auxagressions chimiques. Ces caractéristiques peuventêtre exigées aussi bien pour le béton de construc-tions nouvelles que pour celui des renforcements.

En plus de ces exigences générales pour le béton,on doit, dans les systèmes mixtes, particulièrementgarantir la compatibilité entre le béton du renforce-ment et l’ancien béton. La compatibilité du bétons’établit selon les critères de la figure 6.4:

Le comportement face aux déformations

En général, les anciens et les nouveaux élémentsn’ont pas le même comportement face aux défor-mations. Le diagramme contrainte-déformationpeut être différent ou bien les déformations diffèrenten cas de variation de température et d’humidité. Lebéton, de même que le bois, subit du fluage et duretrait. Toutes ces caractéristiques relatives au com-portement face aux déformations permettent sur-tout de déterminer les critères de choix du matériaueu égard à l’aptitude au service de la structure.

Il n’y a pas que les déformations et par là l’aptitudeau service de l’ouvrage qui soient influencées parces caractéristiques. La durabilité est aussi large-ment concernée. En effet, il peut arriver par exempleque, sous l’effet de contraintes, on voie apparaîtreentre l’ancien et le nouveau béton des fissures pré-judiciables ou même une séparation des deux élé-ments.

La capacité portante n’est en général pas influencéepar un comportement différentiel des déformationsentre les anciens et les nouveaux éléments. Ceci estvrai pour autant que la capacité de déformation plas-tique (ductilité) puisse être mobilisée jusqu’à la ruinede l’ouvrage. Mais, si les dégâts mentionnés portentpréjudice à la durabilité et à la liaison mixte, alors lacapacité portante peut aussi être réduite.

6. Renforcement au moyen de béton

75

Page 70: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

L’interaction physique

L’ajout d’une nouvelle couche de béton peut ame-ner une modification fondamentale du comporte-ment physique de la construction. La différence dedensité de chacune des couches a une influence surla diffusion de l’humidité et des gaz.

Une nouvelle couche étanche évite bien la pénétra-tion de produits nuisibles par la surface extérieuremais, en inversant le flux de transport, on peut avoirune accumulation de produits dans l’ancien bétonsusceptibles de conduire à des dégâts.

Les influences chimiques réciproques

La compatibilité chimique doit être garantie. Il estpar exemple connu que certains mortiers de cimentet bétons utilisés pour renforcer les maçonneriespeuvent gravement endommager les pierres natu-relles existantes.

Ce problème a d’ailleurs été clairement évoquédans le cadre du cours «Protection des ouvrages degénie civil» (PI BAT, 1992).

Enfin, le choix du matériau est aussi dépendant desexigences d’exécution. On peut mentionner entreautres l’accessibilité, le lieu de l’intervention et l’ex-position de l’élément. L’épaisseur de la couche oude l’élément d’ouvrage peut aussi jouer un rôledéterminant dans le choix du matériau.

6. Renforcement au moyen de béton

76

6.2.2 Connaissance des matériauxexistants

Lorsque l’on doit renforcer une structure en bétonexistante, il faut être conscient que les caractéris-tiques initiales du béton ont évolué dans le temps.Par exemple, la résistance du béton augmente et lemodule d’élasticité croît aussi proportionnellement.D’après le CEB (1990), la résistance tend vers unevaleur limite qui dépasse d’environ 30% la valeurnominale à 28 jours. La courbe correspondante estreprésentée à la figure 6.5. On trouve dans cettemême figure des exemples de résistances mesuréesà des moments différents. Les résultats de ces rele-vés se situent au-dessus de la courbe théorique. Ondoit pourtant évoquer une restriction: le vieillisse-ment du béton n’améliore pas a priori toujours sescaractéristiques. Les caractéristiques du béton sontdéterminées essentiellement par sa structure. Lesagressions physiques et/ou chimiques, comme legel et le sel de déverglaçage, peuvent provoquer desdésordres de cette structure, qui ont pour consé-quence un développement négatif de ses caracté-ristiques.

Figure 6.4: Exigences relatives au béton.

En plus du contrôle des caractéristiques du béton,il faut examiner de près la structure du béton dansle cas où l’ouvrage existant a été soumis à de tellesagressions.

Figure 6.5: Evolution de la résistance du béton.

Page 71: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

6.2.3 Choix du type de béton

Les exigences par rapport à la sécurité structurale età l’aptitude au service en général et par rapport ausystème mixte choisi en particulier permettent dedéterminer le type de béton à mettre en place. Letype de béton doit être choisi dans chaque cas aprèsune analyse soignée des critères déterminants.

La classification et la dénomination des types debéton sont définies conformément aux exigencesretenues dans la norme SIA 162. Pour simplifier lechoix du béton adéquat, on peut classifier les typesde béton disponibles en fonction de critères spéci-fiques:

• A la fabrication, on différencie le béton mis enplace à la grue, le béton pompé et le béton pro-jeté. Dans ce contexte, on tient principalementcompte du lieu d’utilisation, de son accessibilitéet de son exposition.

• Quand le supplément de poids doit rester le plusfaible possible, dans les constructions en bois parexemple, il est alors judicieux d’utiliser du bétonléger.

• Plus encore que dans les nouvelles construc-tions, on étudiera de près la composition dubéton. La liaison de couches minces avec un élé-ment plus épais ou les critères drastiques decompatibilité nécessitent souvent l’utilisationd’adjuvants et d’ajouts. On pense aujourd’hui enpremier lieu à l’utilisation de fumée de silice.

L’apport de fumée de silice dans les mortiers etbétons permet de réaliser des matériaux de hauterésistance. Ceux-ci conviennent fréquemment dansles cas d’exigences élevées et souvent contradic-toires. La fumée de silice est disponible sur le mar-ché sous forme de suspension (Slurry) ou depoudre (Fume). La fumée de silice, composée departicules sphériques très fines, joue un rôle de filleret permet d’augmenter la densité du béton. Leshautes résistances de ces bétons peuvent aussi êtreobtenues sur les chantiers. La haute densité et lefaible volume des pores capillaires permettentd’avoir une très bonne tenue au gel et aux sels dedéverglaçage.

6. Renforcement au moyen de béton

77

6.3 Liaison entre deux bétons

En guise de préambule, on rappellera que le bétonarmé fait toujours appel à l’adhérence acier-bétonet que, pour le béton précontraint, l’adhérence estde mise dans la plupart des cas. En plus de cetteremarque fondamentale, on constate que la liaisonentre l’ancien et le nouveau béton s’avère être uneméthode très appropriée pour renforcer desouvrages existants. De telles mesures permettentun renforcement significatif de dalles de bâtimentset de tabliers de ponts. La figure 6.6 illustre le ren-forcement d’un tablier.

Figure 6.6: Renforcement d’un tablier (photo: Service destravaux publics, canton d’Uri).

Page 72: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Dans le cas d’une résistance au cisaillement insuffi-sante de l’âme de poutres, on peut aussi renforcerces âmes en les épaississant. Dans la plupart des cas,il suffit de noyer des étriers supplémentaires néces-saires dans le béton, en n’épaississant que la faceintérieure de l’âme.

La figure 6.7 montre l’exemple du renforcementlourd de l’âme d’une poutre de pont avec un épais-sissement des deux côtés de l’âme. Ce renfort étaitrendu nécessaire par l’élargissement de la chaus-sée, allié à un renfort du tablier ainsi qu’à un chan-gement de système statique.

Lorsque des piliers en béton sont enrobés par dubéton, la raison principale n’est pas toujours uneaugmentation de la portance (figure 6.8) mais fré-quemment aussi une augmentation de la résistanceà la corrosion. On pense notamment au domaineroutier où des parties d’ouvrage sont exposées àdes conditions extrêmes.

Pour renforcer les dalles de bâtiments et les tabliersde ponts, on prépare la face supérieure des dalles eton y coule une nouvelle couche de béton, en géné-ral armé. Selon le signe du diagramme desmoments, la nouvelle couche se trouve en zone com-primée ou tendue.

6. Renforcement au moyen de béton

78

Dans le premier cas, cette surépaisseur reprend lesforces de compression du moment de flexion et,dans le deuxième cas, elle est porteuse de l’armaturede traction. Cette nouvelle couche doit être suffi-samment épaisse pour que, premièrement, le bétonsitué entre l’ancien béton et les armatures puisse êtrefacilement mis en œuvre et vibré pour augmenter sadensité et que, deuxièmement, le recouvrement surles armatures soit suffisant. L’expérience montre quel’épaisseur des couches devrait avoir plus de 100 mmd’épaisseur.

La figure 6.9 illustre le renforcement d’un tablier. Ony indique l’ordre de grandeur des forces de cisaille-ment (effort rasant) qui agissent à la surface decontact. Dans cet exemple, la surépaisseur est de120 mm. L’armature supérieure du nouvel élément

Figure 6.7: Renforcement de l’âme d’une poutre (photo:Service des travaux publics, canton d’Uri).

Figure 6.8: Renforcement d’un pilier (photo: Service destravaux publics, canton d’Uri).

Page 73: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

est dimensionnée de telle façon que, dans la sectiond’encastrement, elle atteigne la limite d’élasticité àl’état de ruine. Le taux d’armature maximal admis-sible dans une section est limité par la capacité dedéformation. Un comportement ductile est garantijusqu’à la ruine si la position de l’axe neutre nedépasse pas la moitié de la hauteur de la poutre.

De l’extrémité du porte-à-faux jusqu’à l’encastre-ment, la force de traction correspondant à la plasti-fication des armatures à la ruine doit pouvoir êtretransmise dans sa totalité au travers de la surface decontact et ceci par une liaison adéquate. Avec unélancement de 1/8 de la dalle en porte-à-faux, lescontraintes d’adhérence représentent le 5% de larésistance à la compression du béton. Dans le casd’une préparation soignée de la surface de l’ancienbéton et d’une exécution conforme aux règles del’art, la contrainte de cisaillement réelle est inférieureà la résistance de la liaison.

6. Renforcement au moyen de béton

79

On ne doit pourtant pas oublier que le nouveaubéton rapporté subit un retrait. Le comportement àla déformation et les forces en jeu sont illustrés à lafigure 6.10. Sans liaison, la nouvelle couche glissesur l’ancienne. En cas de liaison rigide, on observela formation de contraintes de traction significativesdans la nouvelle couche; ce sont des contraintesrésiduelles dues au raccourcissement de retrait. Sila résistance à la traction du béton est faible, il y aalors apparition de fissures qui permettent uneréduction au moins partielle des pointes de con-trainte. Les forces de cisaillement au niveau de la sur-face de contact se concentrent sur une relativementpetite distance à l’endroit des extrémités. Si l’adhé-rence est insuffisante, on a le risque de voir un décol-lement entre l’ancienne et la nouvelle couche.

Figure 6.10: Retrait du nouvel élément d’ouvrage.

Les deux exemples mentionnés montrent claire-ment à quels endroits de la liaison il faut porter uneattention particulière. On voit avant tout apparaîtreaux extrémités de grandes pointes de contraintesdues au retrait. La seule adhérence entre les deuxcouches de béton ne suffit en général pas pourreprendre ces forces de cisaillement concentrées.Des goujons ou d’autres mesures constructivesadéquates doivent améliorer la liaison entre lescouches. Les termes de goujon et cheville sont équi-valents.

Figure 6.9: Ordre de grandeur de τb dans une section debéton.

Page 74: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Si l’adhérence entre l’ancien et le nouveau béton estfaible et que le nombre de connecteurs est peuimportant, on aura alors, à l’état de ruine, un glis-sement d’une couche par rapport à l’autre le longde la surface de contact. Les goujons (chevilles)agissent au niveau du cisaillement (figure 6.11).Avec une grande résistance au cisaillement et uneforte connexion de la section mixte, on constatel’apparition d’une bielle de compression très plate.Dans ce cas, les goujons se comportent comme desgoujons tendus. Le flux des forces peut être repré-senté à l’aide d’un modèle de treillis (figure 6.12).L’inclinaison des bielles de compression est fixéepar l’équilibre des forces. La faible inclinaison de labielle de compression est limitée par les conditionsstatiques et cinématiques de bord dans la surfacede contact et dans les zones d’ancrage des bielles.On peut calculer approximativement avec un anglede 15° à 25°. Des exemples de chevilles du com-merce sont représentés à la figure 6.13.

Figure 6.11: Modèle de glissement.

6. Renforcement au moyen de béton

80

Figure 6.12: Modèle de treillis.

Figure 6.13: Chevilles chimiques et chevilles à expansion(photo: Hilti).

Page 75: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Une façon de butées constructives aux extrémités duporte-à-faux est équivalente à une liaison au moyende connecteurs. Un exemple d’une telle butée sur letablier d’un pont est représenté à la figure 6.14. Dansles rares cas où la nouvelle couche est appliquée surla face inférieure (difficultés de réalisation), elle devraitse prolonger au-delà des appuis et la résistance de laliaison (de cisaillement) dans les zones d’appui est for-tement augmentée par la compression latérale dansla zone d’appui (figure 6.15). Il convient d’effectuer lecalcul de la sollicitation de cisaillement admissibleavec la réaction d’appui minimale dans l’esprit de laprise en compte des situations de risques.

Figure 6.14: Liaisons dans les zones de bord.

Figure 6.15: Compression latérale dans les zones d’appui.

L’effet mixte est obtenu par différentes mesures.Parmi celles-ci, on peut citer le choix d’un matériauadéquat, une exécution soignée, des dispositionsconstructives bien étudiées et un dimensionnementcorrect. Le retrait occasionne les plus grandes solli-citations de cisaillement au niveau de la surface decontact. Du point de vue de la technologie des maté-riaux, on donne aujourd’hui la priorité à l’utilisationde bétons à faible retrait ou à retrait compensé. Unerésistance initiale élevée diminue partiellement lerisque de formation de fissures de retrait. A l’opposé,on doit savoir que ces bétons à résistance initiale éle-vée présentent des ciments à mouture fine, plusfavorables à un développement du retrait. A l’état deservice, le nouveau béton devrait avoir un compor-tement aux déformations semblable aux élémentsexistants de la construction. Toutes ces conditionsparfois partiellement contradictoires sont difficiles àsatisfaire sans trouver une solution de compromis.

Du point de vue de l’exécution, la préparation de lasurface de béton existante est fondamentale. Pouratteindre la rugosité nécessaire à une bonne adhé-rence, il est courant d’utiliser aujourd’hui des moyenshydrodynamiques éventuellement combinés avec dusablage. Les méthodes courantes et les travaux depréparations nécessaires sont décrits dans l’ouvragePI BAT, 1993. La figure 6.16 montre l’état d’un tablieraprès un décapage hydrodynamique. La profondeurde décapage répond à différents critères. Dès qu’unesurface est contaminée par des chlorures, on doitprendre en compte les critères relatifs à la corrosion.Si une armature est dégagée, la profondeur du déca-page devrait être telle que cette armature soit entiè-rement enrobée par le nouveau béton. Pour juger siune couche d’accrochage est nécessaire ou non, ondoit remarquer que le changement de la texture et dela structure d’un béton âgé peut réduire son adhé-rence. La couche d’accrochage doit aussi remplird’autres fonctions: elle doit éviter que, lors du béton-nage d’une nouvelle couche, l’ancien béton nepompe toute l’eau nécessaire à son durcissement.Sans couche d’accrochage, l’ancien béton doit êtremouillé avant le bétonnage jusqu’au refus capillaired’absorption. Dans ce cas, l’eau d’arrosage ne doitpas non plus former de flaques dans les aspérités dela surface au moment du bétonnage.

Un renforcement se prépare au moyen d’essais préa-lables spécifiques, réalisés de préférence in situ. Laqualité de l’exécution sera surveillée de près aumoyen de contrôles détaillés. Ce qui présente un inté-rêt particulier, c’est l’adhérence de la surface de con-tact. Elle est contrôlée par des essais d’arrachement.

6. Renforcement au moyen de béton

81

Page 76: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Il est également important de garantir un ancrage irré-prochable des goujons (chevilles) forés. Des essaisd’arrachement in situ doivent confirmer leur efficacité.

Des essais complets sur le comportement combinéd’anciens et de nouveaux bétons ont été menés àl’EPFZ mais aussi dans d’autres pays, en particulieren Suède et aux Etats-Unis. Les résultats détaillésde ces nouvelles connaissances sont présentésdans divers ouvrages comme celui de C. Menn etal., 1992 et celui de G. König, A.S. Nowak et al, 1992.

6. Renforcement au moyen de béton

82

6.4 Liaison entre le béton et l’acier

Le mode de construction mixte béton-acier se pra-tique aussi bien dans le bâtiment que dans la cons-truction de ponts. Dans le bâtiment, on connaît sur-tout les planchers mixte tôle-béton (figure 6.17).Pendant la réalisation, les tôles profilées jouent lerôle de coffrage et, au stade final, elles représententl’élément de traction de la section mixte. Pour lesstructures métalliques existantes, on peut aussienvisager ces deux types d’application. Les modesd’exécution abordés ci-dessous se limitent à desréflexions sur la connexion entre l’acier et le béton.Les phénomènes de base sont décrits à l’aide d’in-formations ponctuelles. Pour une recherche pluspoussée sur les ponts mixtes, il faut se référer à lathèse de J.-P. Lebet, 1987. Le comportement desplanchers mixtes est décrit en détail dans les ouvra-ges de B. Daniels, M. Crisinel, 1987 et B. Daniels, A.Isler, M. Crisinel, 1990.

Pour la réalisation de structures mixtes acier-béton,on utilise couramment les deux méthodes sui-vantes:

• La dalle de béton préfabriquée est posée sur lesprofilés métalliques. Les connecteurs sont ensuitesoudés sur le profilé au travers de réservationsprévues à cet effet dans la dalle de béton. La liai-son entre l’acier et le béton est obtenue après lebétonnage des réservations.

• La dalle de béton est coulée en place. Les con-necteurs seront soudés sur place avant le béton-nage dans le cas de structures existantes et depréférence en atelier dans le cas de nouvellesstructures. On peut aussi prévoir ici des réserva-tions autour des goujons avec un scellement ulté-rieur. L’avantage de cette méthode est d’éviter oude réduire fortement les contraintes résiduellesdues au retrait ou à la mise en précontrainte éven-tuelle de la dalle de béton.

Ces deux modes d’exécution exigent que les con-necteurs soient regroupés (figure 6.18). Les réser-vations doivent être scellées avec soin et dans lesrègles de l’art, de façon à ce que ces points stati-quement importants restent à l’abri de toute corro-sion éventuelle.

Figure 6.16: Etat d’un tablier après un décapage hydro-dynamique.

Page 77: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Nous abordons maintenant les thèmes du jeu desforces et du comportement ultime des structuresmixtes:• rigidité de la connexion, glissement au niveau de

la surface de contact ;• fissuration de la dalle de béton;• disposition des connecteurs.

Pour éviter un cisaillement, la dalle de béton doit êtrefixée avec des connecteurs au profilé métallique.Dans le calcul, on admet que seuls les connecteursreprennent les forces de cisaillement. On donnera lapréférence aux connecteurs souples qui, tout enconservant leur résistance au cisaillement, per-mettent un glissement relatif suffisant entre la pou-tre métallique et la dalle en béton avant la rupture.

6. Renforcement au moyen de béton

83

On admet donc un glissement au niveau de la sur-face de contact à l’état de ruine. Le jeu des forces etla répartition des contraintes dans une section mixtesont illustrés à la figure 6.19 dans les cas d’uneconnexion rigide, respectivement souple. Il en res-sort que, dans le cas d’une connexion souple, tant leprofilé métallique que la dalle de béton peuvent subirune sollicitation plus élevée que dans le cas d’uneconnexion rigide. Avec les glissements atteints dansles constructions actuelles, cette sollicitation plus éle-vée des sections ainsi que les déformations corres-pondantes sont négligeables. Par contre, les sollici-tations des connecteurs sont notablement réduites.Ces résultats sont illustrés dans la figure 6.20.

Dans le cas de poutres mixtes sur plusieurs travées,avec une précontrainte partielle ou sans précon-trainte, la dalle de béton se fissure dans les zonesd’appui dès que la résistance à la traction du bétonest atteinte. Après cette fissuration, il n’y a plus queles barres d’armatures pour reprendre les forces detraction dues au moment fléchissant (figure 6.21) etle béton ne participe plus à la traction. Les momentsfléchissants se redistribuent ensuite en fonction desrapports de rigidité, comme illustré à la figure 6.22.La sollicitation sur appui est réduite et le momenten travée augmente.

Globalement, les efforts intérieurs restent toujoursen équilibre avec les actions extérieures. On assisteuniquement à la formation d’un nouvel état d’équi-libre. Tant que la résistance à la flexion en travéepeut supporter l’augmentation de la sollicitation, lasécurité structurale du système n’est pas mise encause. Par contre, la formation de fissures a une

Figure 6.17: Construction mixte (photo: ICOM-EPFL).

Figure 6.18: Connecteurs soudés en atelier (photo: ICOM-EPFL).

Figure 6.19: Connexion et rigidité (J.-P. Lebet, thèse N° 661, EPFL).

Page 78: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

influence considérable sur la déformation de lapoutre. La déformation augmente avec la fissura-tion.

Dans le passé, on déterminait le nombre de connec-teurs en fonction de la distribution linéaire élastiquedes efforts rasants dans la surface de contact. Cesefforts rasants ont une distribution affine aux effortstranchants de la section mixte. Dans le début de nospropos, nous avons pourtant prôné une dispositiongroupée des connecteurs. Dans ce cas, les effortsrasants ne sont transmis de l’acier au béton queponctuellement et selon un certain entraxe. Lesforces agissant sur les connecteurs, les sollicitationsde la dalle de béton et de la poutre métallique sontmodélisées à l’aide d’un treillis comme illustré à lafigure 6.23.

6. Renforcement au moyen de béton

84

Figure 6.20: Effet de la rigidité d’une connexion sur lessollicitations.

Figure 6.21: Section mixte fissurée et non fissurée.

Figure 6.22: Moments fléchissants, stade fissuré et nonfissuré.

Figure 6.23: Modèle statique admis.

Page 79: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

6.5 Liaison entre le bétonet le bois

Les poutres en bois avec de faux planchers ont étélargement employées dans les anciennes construc-tions datant d’avant-guerre jusqu’à l’après-guerre.Dans le cadre de la rénovation de telles structures,on dispose, en plus du remplacement de ces plan-chers par une dalle en béton, de la possibilité de créerdes planchers mixtes bois-béton. La figure 6.24montre une dalle d’étage avec ses poutres en bois,juste avant le bétonnage. Les possibilités de liaisonpour ce type de dalles mixtes sont énumérées dansles ouvrages de B. Meyer, 1990 et de Natterer etHoeft, 1987.

L’objet premier de la création d’une liaison mixtebois-béton ne résulte pas de la nécessité d’une aug-mentation de la capacité portante mais bien plus del’augmentation du confort d’utilisation, c’est-à-dired’une amélioration sensible de l’aptitude au service.Les déformations sont diminuées, les vibrations etles craquements de ces anciens planchers sont éli-minés. La résistance phonique est aussi fortementaméliorée.

Le principe de réalisation d’une dalle mixte bois-béton est illustré à la figure 6.25. Dans le bâtiment,les connecteurs généralement utilisés sont consti-tués par des vis à bois ou plus rarement par des clousplacés dans des trous percés au préalable (figure6.26). Le percement préalable (préperçage) peut êtreévité en utilisant des vis spéciales. Ceci peut amenerun gain de temps appréciable. La feuille de sépara-tion entre le bois et le béton a pour objet d’éviter quele bois n’absorbe toute l’eau nécessaire à l’hydrata-tion du béton. L’épaisseur de la dalle est fixée essen-tiellement selon des impératifs constructifs. La lon-gueur saillante des vis est de 50 mm environ. Lerecouvrement des vis par le béton, pour des plan-chers non soumis aux changements d’humidité etde température, est de 20 mm. On en déduit quel’épaisseur minimale à prévoir pour une dalle debéton est de 70 mm.

On utilise la théorie élastique pour dimensionner lesdalles mixtes bois-béton. Les connecteurs (clous)utilisés sur les poutres en bois pour la liaison mixtesont très souples. On peut obtenir une améliorationsensible en plaçant les vis ou les clous à 45° par rap-port à l’axe de la poutre. Ils sont dès lors principa-lement sollicités à la traction, respectivement à la

6. Renforcement au moyen de béton

85

Figure 6.24: Dalle mixte de bâtiment avant le bétonnage(photo: Uldry-Dufour).

Figure 6.25: Composition d’une dalle mixte.

Page 80: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

compression. La faible rigidité à la flexion de cesconnecteurs n’exerce alors plus qu’une influenceinsignifiante sur le déplacement de la surface decontact. En inclinant les connecteurs, on évite aussila formation d’une pression latérale dans le bois. Laréalisation d’encoches dans la poutre en bois pouraméliorer la liaison mixte représente beaucoup detravail pour un résultat peu probant. La souplessede la surface de contact entre le bois et le bétoninfluence particulièrement les déformations. A ceseffets défavorables on doit ajouter les déformationsà long terme dues au retrait du béton et au fluagedu bois. Il en résulte que les possibilités de renfor-cement de dalles par une construction mixte bois-béton sont limitées. Ce sont donc des réflexionsd’aptitude au service qui conduiront au choix de cetype de construction mixte pour une rénovation.

Le comportement à la ruine des poutres mixtesbois-béton est habituellement ductile. La ruine estannoncée par de très grosses déformations. On doitporter une attention particulière au contrôle deszones d’appui. L’effet mixte se limite à la sollicita-tion à la flexion. Par contre, l’effort tranchant n’estrepris que par les poutres en bois. La surfaced’appui des poutres en bois sur la maçonnerie doitêtre suffisante pour transmettre la totalité de lacharge. Un contrôle des contraintes d’appui estnécessaire.

La résistance au feu de ces structures mixtes estplus élevée que celle des planchers entièrement enbois. En cas d’incendie cependant, la chaleur monteet commence par endommager la face inférieure dela dalle, c’est-à-dire les poutres porteuses en bois.Les poutres en bois sans revêtement ont une résis-tance au feu maximale de F 30. Pour des résistancesau feu supérieures, il faut prévoir soit la pose d’unfaux plafond soit un enrobage ignifuge des poutres.

6. Renforcement au moyen de béton

86

Figure 6.26: Liaison mixte avec des vis à bois (photo:Uldry-Dufour).

Page 81: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Bibliographie du chapitre 6

PI BAT:Protection des ouvrages de génie civil, Officefédéral des questions conjoncturelles, OCFIM,Berne, 1993.

PI BAT:Réfection des ouvrages en béton, Office fédéraldes questions conjoncturelles, OCFIM, Berne,1994.

CEB:(Comité Euro-International du Béton), CEB-FIPModel Code 1990, Paris 1990.

Daniels, B., Crisinel, M. :Essais de dalles mixtes avec tôle profiléeHibond 55, ICOM - EPFL, Lausanne 1987.

Daniels, B., Isler, A., Crisinel, M. :Modelling of composite slabs with thin walledcold-formed decking, ICOM - EPFL, Lausanne1990.

König, G., Nowak, A.S., et al. :Bridge Rehabilitation, Ernst & Sohn, Berlin1992.

Lebet, J.-P. :Comportement des ponts mixtes acier-bétonavec interaction partielle de la connexion et fis-suration du béton, Thèse N° 661, EPFL,Lausanne 1987.

Menn, C., et al. :Verbindung von altem und neuem Beton,Institut für Baustatik und Konstruktion ETHZ,Zürich 1992.

Meyer, B. :Verstärkung alter Holzbalkendecken mitLeichtbeton, Cementbulletin Nr. 10, Wildegg1990.

Natterer und Hoeft :Zum Tragverhalten von Holz-Beton-Verbundkonstruktionen, IBOIS – EPFL,Lausanne 1987.

6. Renforcement au moyen de béton

87

Page 82: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7.1 Exposé du problème 917.1.1 Types de renforcements/particularités 917.1.2 Types de liaisons 91

7.2 Renforcement avec des profilés en acier 927.2.1 Fonctions des éléments de renforcement 927.2.2 Domaines d’application 927.2.3 Matériaux 947.2.4 Concept de renforcement 957.2.5 Choix des moyens d’assemblage 96

7.3 Renforcement par une armature collée 997.3.1 Domaines d’application 997.3.2 Matériaux 997.3.3 Concept pour le projet et l’exécution 1007.3.4 Calcul et dimensionnement 1017.3.5 Dispositions et exigences constructives 1017.3.6 Mise en soumission/particularités 1067.3.7 Domaines actuels d’investigation 106

Bibliographie du chapitre 7 108

7. Renforcement au moyen d’acier

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7. Renforcement au moyen d’acier

Page 83: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7.1 Exposé du problème

Profilés en acier de construction, fers plats ou tôlessont fréquemment utilisés pour le renforcement destructures porteuses existantes. Ils sont disposés ensupport de la structure existante ou en complémentde la section à renforcer.

Le présent chapitre décrit un certain nombre de pos-sibilités d’application de l’acier au renforcement destructures en béton, maçonnerie, bois et métal. Il viseà fournir une aide dans le choix et l’évaluation du typede renforcement projeté. Il veut également rendre lesintervenants attentifs aux particularités constructiveset aux aspects de contrôle de l’exécution.

Les questions de détermination de la capacité por-tante d’une section renforcée ainsi que les problè-mes de comportement à la fatigue ne sont que par-tiellement abordés. Ce dernier thème est par ailleurstraité en détail dans (SBB 1992) et (P. Kunz 1992).

7.1.1. Types de renforcements/particularités

Un renforcement par de l’acier peut soit conduire àune modification du système porteur existant, soitconsister en un complément de la section résistanteen place (voir 7.2.1). Le type de liaison réalisée entrel’acier et l’élément de construction existant peut ser-vir à caractériser le genre de renforcement (voir 7.1.2).

Le renforcement au moyen de profilés ou de tôlesconstitue un renforcement de type passif (voir 5.2).

7.1.2 Types de liaisons

Si une liaison est projetée entre l’élément à renforceret l’élément de renforcement, les principaux moyensd’assemblage utilisés sont les suivants:

a) Liaisons de type ponctuel : Liaisons mécaniques:

• Acier-acier = boulons, rivets, pinces.• Bois-acier = goujons, clous, vis,

broches, crampons.• Béton-acier = goujons, équerres,

chevilles. Soudures:

• Liaison acier-acier par points de soudures.

b) Liaisons de type linéaire: Soudure:

• Liaison acier-acier par cordons d’angles et demi-Y.

c) Liaisons de type complet : Soudure:

• Liaison acier-acier par soudurecomplètement pénétrée.

d) Liaisons par contact entre les surfaces: Collage:

• Liaison béton-acier (armature collée). Frottement:

• Liaison acier-acier (boulons précontraints).

Les particularités principales liées aux différents typesd’assemblage sont mentionnées au chapitre 7.2.5.

Le degré de connexion obtenu est à déterminerdans chaque cas pour pouvoir définir le comporte-ment de la section composée.

7. Renforcement au moyen d’acier

91

7. Renforcement au moyen d’acier

Page 84: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7.2 Renforcement avec des profilés en acier

7.2.1. Fonctions des éléments de renforcement

La fonction attribuée à l’élément de renforcementpeut être de deux types distincts, parfois combinéspour certaines applications particulières :

Type A)L’élément de renforcement est un élément porteurcomplémentaire du système porteur existant ouremplace l’un de ses éléments.

Exemples: introduction de sommier, pilier, tirant,etc.

Type B)L’élément de renforcement est un complémentapporté à la section résistante existante.

Exemples: armature collée, blindage d’un pilierbéton, etc.

7. Renforcement au moyen d’acier

92

Les fonctions A et B sont schématisées dans lafigure 7.1. A titre d’exemple, les vérifications sui-vantes sont examinées:

• Vérification de la sécurité structurale : Sd < R/γ

• Vérification de la flèche(aptitude au service) : w = α · 1/EI

7.2.2 Domaines d’application

L’acier est utilisé pour le renforcement de structuresexistantes en béton, maçonnerie, bois et métal. Lesfigures 7.2 à 7.6 présentent quelques exemplestypes d’application. Le cas particulier du renforce-ment au moyen d’une armature collée sera traité auchapitre 7.3.

Figure 7.2: Pont métallique/poutres maîtresses à treillis.Eléments renforcés:• Montants comprimés: avec des profilés en acier type LNP.• Diagonales comprimées: avec des fers plats.

Figure 7.1: Exemple de corrélation entre la fonction durenforcement et son influence dans la vérification par lecalcul. Corrélation existante.(*) Exemple = poutre mixte (béton - acier).

Sd R α γ El

(*)

Type A

Type B

Page 85: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7. Renforcement au moyen d’acier

93

Figure 7.3: Dalle en béton/création d’une ouverture; ren-forcement par une mise en place de profilés en acier.

Figure 7.4: Dalle en béton/création d’une ouverture; ren-forcement au moyen d’une armature collée.

Figure 7.5: Plancher en bois; renforcement par mise enplace d’un tirant en acier.

Figure 7.6: Maçonnerie/voûte; renforcement par mise enplace d’un tirant en acier.

Page 86: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

La liberté de conception d’un renforcement au moyend’acier peut, dans certains cas, être limitée par des cri-tères tels que, par exemple:

a) Possibilité de transfert des charges sur l’élé-ment de renforcement.

b) Conditions d’appui.

c) Compatibilité entre les différents matériauxassemblés.

d) Résistance aux températures élevées, à la cor-rosion, aux agressions chimiques.

e) Possibilité de mise en place du renforcement.

f) Possibilité d’exécution des assemblages.

7.2.3 Matériaux

a) Matériaux de renforcement (acier)

Les aciers utilisés en construction métallique, dontles caractéristiques sont fixées au chapitre 5 Maté-riaux de la norme SIA 161 (1990), sont les plus fré-quemment employés pour ce type de renforcement.

b) Matériaux de l’élément à renforcer (béton,bois, acier, maçonnerie)

L’actualisation des caractéristiques déterminantesdes matériaux de la structure existante à renforcers’effectuera selon les critères développés au cha-pitre 2.2 de la présente publication. On tiendracompte également, dans cette première phase, desobservations effectuées sur l’ouvrage (par exemplecorrosion, fatigue, fissuration, signes de pourrisse-ment et de vieillissement, etc.).

Dans le cas du renforcement d’ouvrages métal-liques, la connaissance du type d’acier utilisé lorsde la construction est particulièrement importante.On en définira les caractéristiques essentielles, tel-les que la résistance à la traction, l’allongement à larupture et, dans certains cas, la soudabilité.

La connaissance des propriétés des aciers de l’élé-ment à renforcer revêt une importance qui peut jus-tifier, dans certains cas, des essais en laboratoire surde petits échantillons.

La directive des CFF (SBB, 1992), qui est le résultatd’une large campagne d’examens et d’essais, four-nit une masse importante de renseignements surles types d’aciers produits et utilisés aux différentesépoques.

c) Matériaux des assemblages

Les matériaux des assemblages usuels sont décritsdans les normes SIA 161 (acier), SIA 162 (béton) SIA164 (bois) ainsi que dans les notices techniques desfabricants. La compatibilité avec les matériaux assem-blés doit en chaque cas être contrôlée.

Les assemblages en acier sont les plus utilisés.

7. Renforcement au moyen d’acier

94

Page 87: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7.2.4 Concept de renforcement

Un concept pour le projet d’un renforcement d’unestructure existante avec de l’acier est schématisédans la figure 7.7.

Il est distingué, dans ce tableau, entre les deux typesde fonctions A, respectivement B (voir 7.2.1).

7. Renforcement au moyen d’acier

95

Figure 7.7: Concept pour le projet d’un renforcement au moyen d’acier.

Bases : Phases I, II, évtl. III (voir chap. 2)

Conclusion : Un renforcement est nécessaire

Choix : Renforcement au moyen d’acier

Type A:Renforcement par mise enplace d’un élément porteurcomplémentaire (ex. pilier)

Type B:Complément de la section existante

• Transfert de charge sur l’élé-ment de renforcement

• Conditions d’appui• Mise en place de l’élément de

renforcement• Possibilité d’exécution des

assemblages (y c. compatibilité)

• Conditions d’appui

• Concept de liaison

• Possibilité d’exécution desassemblages (y c. compatibilité)

Calcul /dimensionnement

• Liaisons: détails

• Mesures de protection éventuellescontre corrosion, chaleur, etc.

Mise en soumission

Exécution et contrôle

Page 88: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7.2.5 Choix des moyens d’assemblage

Le comportement du système formé par l’élémentà renforcer + l’élément de renforcement dépendessentiellement du concept retenu pour le type deliaison ainsi que du choix du moyen d’assemblage.

L’analyse du comportement d’une section renfor-cée (= section composée) et le mode de transfert dessollicitations sur les différents éléments assemblésà l’intérieur de la section sont effectués au chapitre6.1 du présent document.

Les critères de choix du moyen d’assemblage demême que les dispositions constructives particu-lières correspondantes sont brièvement traités ci-après, en distinguant entre les types de matériauxassemblés et les types de liaison.

a) Liaison acier-acier

Le choix du type d’assemblage dépend du type desollicitations de l’assemblage (faibles ou élevées,uni- ou bidirectionnelles, statiques ou dynamiques),de la déformabilité de l’assemblage, de la facilité etde la rapidité de mise en place, de la compatibilité.

• Assemblages boulonnés et rivetés

Les assemblages peu déformables ou sollicités à lafatigue sont en général réalisés avec des boulonsprécontraints. La préparation de la surface de l’élé-ment en place revêt en conséquence une grandeimportance. L’impact, parfois important, de la créa-tion de trous dans l’élément à renforcer doit enoutre être analysé.

7. Renforcement au moyen d’acier

96

Figure 7.8: Création d’une ouverture dans une dalle; renforcement par des profilés en acier.

Page 89: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

• Assemblages soudés

Avantages:

– assemblages rigides, peu déformables;

– pas de perçage sur le chantier.

Inconvénients:

– nécessité d’un contrôle de la soudabilité desaciers;

– accentuation des risques de rupture fragile et defatigue;

– modification locale de l’état des contraintes dansl’élément existant.

Les assemblages soudés peuvent faire l’objet d’uncontrôle non destructif (par exemple: examenvisuel, radiographie, ultrasons) à l’issue des travaux.

• Assemblages collés

Il s’agit là d’une technique en cours de développe-ment, combinant l’utilisation d’une colle avec cellede boulons précontraints (avantage: augmentationdu coefficient de frottement et de la pression de ser-rage par les boulons précontraints).

• Assemblages par pinces

Les assemblages par pinces, dont le domaine essen-tiel d’utilisation est la fixation de rails, permettentd’éviter le perçage ou la soudure sur l’élément à ren-forcer. Cependant, bien qu’ils n’autorisent généra-lement que la reprise de forces perpendiculaires à

7. Renforcement au moyen d’acier

97

Figure 7.9: Pont routier en acier; renforcement du treillis métallique par de l’acier.

Page 90: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

l’axe de la pince, on peut, dans le cadre d’un ren-forcement, envisager leur emploi pour la stabilisa-tion latérale d’un profilé comprimé.

Le dimensionnement des assemblages précités etles détails de conception et d’exécution sont traitésdans la norme SIA 161 (1990) et dans les publica-tions spécialisées (par exemple textes des cours deconstruction métallique EPF).

b) Liaison bois-acier

La résistance et la déformation des assemblagesbois-acier dépendent essentiellement des proprié-tés de l’élément en bois. Les principaux moyensd’assemblage suivants peuvent être envisagés :clous (avec ou sans préperçage), broches et bou-lons ajustés, vis et boulons de charpente, cram-pons, goujons annulaires, etc. Les critères de choixdu type d’assemblage sont essentiellement : lespropriétés de l’élément bois en place, le type de sol-licitation à transmettre, la possibilité d’exécution del’assemblage, la déformabilité de l’assemblage,l’affaiblissement éventuel créé dans la sectiondéterminante du bois, les excentricités locales inhé-rentes au type d’assemblage, l’aspect de la struc-ture après renforcement.

Les caractéristiques et valeurs de calcul des diffé-rents types d’assemblage sont mentionnées dans lanorme SIA 164. Leur dimensionnement est traitépar exemple dans les Tables pour la construction enbois (Lignum).

c) Liaison béton-acier

Le présent paragraphe concerne les liaisons de typeponctuel. Les liaisons par collage sont traitées auchapitre 7.3 (armature collée).

L’assemblage est le plus souvent réalisé de tellesorte que les éléments de liaison entre le béton etl’acier assurent la reprise de la totalité des efforts decisaillement (connexion totale). Les éléments deliaison doivent en conséquence avoir une capacitéde déformation suffisante.

La liaison peut être réalisée par des goujons ou deséquerres (voir 6.4), soudés sur le profilé de renfor-cement et qui prendront place à l’intérieur des évi-dements préalablement effectués dans la structureen béton puis remplis à l’issue de la mise en placedu profilé. Une autre possibilité consiste en la miseen œuvre de tiges métalliques, scellées (scellementchimique ou mécanique) dans des évidements réa-lisés par préperçage dans la structure béton.

Le comportement des éléments mixtes (acier-béton) ainsi constitués est analysé au chapitre 6 duprésent document.

On trouvera dans la norme SIA 161 (1989) ainsi quedans la littérature spécialisée (par exemple Poutresmixtes dans le bâtiment, SZS A3) des informationscomplémentaires concernant les détails de concep-tion et de dimensionnement ainsi que les vérifica-tions nécessaires et les conditions limites.

7. Renforcement au moyen d’acier

98

Page 91: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7.3 Renforcement par une armature collée

7.3.1 Domaines d’application

Le renforcement d’une structure en béton armé, res-pectivement précontraint, peut être réalisé par col-lage d’une armature complémentaire. Depuis sespremières applications, il y a plus de 25 ans, ce pro-cédé a fait l’objet de larges développements et con-siste en l’application, par collage, de lames d’aciersur la surface extérieure de l’élément en béton à ren-forcer. La section résultante est de type composé.

Les domaines courants d’application se situent dansle cadre de:

• Transformations et interventions sur la structureporteuse (création d’ouvertures, modificationdes conditions d’appui), entraînant une nouvellerépartition des efforts intérieurs dans les élé-ments de la structure existante.

• Modification des sollicitations (par exemple suiteà un changement d’affectation).

• Assainissement et réfection d’éléments porteurs.

• Réparation de défauts et de dégâts survenus àune structure porteuse.

• Blindage d’éléments en béton.

L’armature collée sert au renforcement de struc-tures porteuses soumises essentiellement à desactions de type statique. Elle est en principe égale-ment applicable, sur la base d’un examen préalablesoigneux des conditions de base, à des structuressoumises à des charges mobiles de trafic ou à desactions de type dynamique.

Le niveau de la sécurité structurale d’une construc-tion renforcée par une armature collée dépend del’état de la structure avant le renforcement et de lagarantie de la participation de l’armature collée (parexemple sous des températures élevées). De manièregénérale, on respectera le principe suivant:

La sécurité structurale ne doit jamais dépendre quede la seule armature collée.

Le principal domaine d’application est celui du ren-forcement d’éléments de structure soumis essen-tiellement à une sollicitation de flexion (par exemple

dalles). L’armature collée peut cependant aussi êtreutilisée pour des éléments de structure soumis àdes sollicitations combinées (par exemple flexion +cisaillement).

Parmi les critères pouvant conduire au choix préfé-rentiel d’un renforcement de type armature collée,on peut citer :

• Une modification faible du gabarit d’espace libre.

• Une intervention généralement limitée à l’inté-rieur ou à la surface de la structure existante.

• La préparation des lames en atelier, effectuéeparallèlement aux travaux préparatoires in situ,d’où souvent une durée réduite d’interventionsur le chantier.

L’utilisation de cette technique est toutefois res-treinte par certaines limitations:

• Résistance aux températures élevées (parexemple incendie) et aux agents chimiques.

• Possibilités d’ancrage des lames.

• Etat du béton en place, respectivement de la sur-face du béton.

• Possibilité d’exécuter les travaux de collage sousactions de type mobile (par exemple trafic).

7.3.2 Matériaux

A ce jour, le renforcement est essentiellement réa-lisé à l’aide de lames en acier.

Il est fait également usage, depuis quelques années,de lames en fibres de verre ou en fibres de carbone(CFK) (voir 7.3.7).

Dans le présent document, on se limitera au cas del’utilisation de lames en acier.

a) Lames en acier

L’acier couramment utilisé est du type Fe E 235.Dans certains cas, des aciers de qualité supérieureou de type inoxydable peuvent être employés.Leurs caractéristiques mécaniques doivent cepen-dant être parfaitement connues pour procéder audimensionnement.

7. Renforcement au moyen d’acier

99

Page 92: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

b) Mortier de collage

Les mortiers de collage à base de résine époxy, quisont les plus fréquemment utilisés, ont les proprié-tés suivantes:

• Maniabilité assurée dans un large spectre de tem-pérature et pendant une période assez longuepour assurer une bonne mise en place.

• Consistance adaptée.

• Développement du durcissement aussi peu dépen-dant que possible de la température et de l’humi-dité ambiantes.

• Bonne adhérence sur le béton et sur les lames.

• Bonne résistance aux agressions provenant del’environnement et aux variations de tempéra-ture.

c) Béton (structure existante en béton)

La qualité du renforcement par une armature colléedépend de manière importante de la qualité du sup-port existant (béton).

Dans ce but, il est nécessaire de pouvoir déterminerau préalable les qualités suivantes du béton: résis-tance à la compression, résistance à l’arrachementà la surface du béton (contrainte d’adhérence). Lesessais préliminaires, la préparation de la surface dubéton et les qualités exigées sont traitées au para-graphe 7.3.5.a).

La limite d’élasticité de l’acier d’armature disposédans la section doit également être connue pourdimensionner la nouvelle section mixte.

7.3.3 Concept pour le projet et l’exécution

a) Projet

• Inventaire des documents concernant la structureà renforcer et constat de l’état de cette structure.Détermination de l’armature intérieure existante.

• Détermination de la résistance à la compressiondu béton, respectivement de la contrainte d’adhé-rence.

• Détermination des possibilités d’ancrage deslames, des possibilités d’étayage de la structure etdes moyens d’application de la pression de collage.

• Contrôle de la régularité du support existant(béton) et contrôles préalables de l’humidité rela-tive de l’air et de la température.

• Etablissement du concept pour le projet et l’exé-cution.

• Mise en soumission.

b) Préparation de l’exécution

• Mise en place des échafaudages et étayagesnécessaires. Préparation des dispositifs d’appli-cation de la pression de collage et des équipe-ments divers (appareils de mesure, coffrages etplaques métalliques pour les prismes d’essais,équipements de nettoyage et de chauffage éven-tuel, etc.).

• Préparation de la surface du béton, reprofilage sinécessaire des inégalités et forage pour lesancrages.

• Préparation et ajustement des lames, contrôle deleur planéité.

c) Exécution et contrôles

• Mesure et surveillance des températures de l’airet du béton.

• Détermination de la teneur en humidité du béton.

• Contrôle de la propreté de la surface des lameset du béton.

• Préparation du mortier de collage et mise enœuvre sur les lames.

7. Renforcement au moyen d’acier

100

Page 93: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

• Réalisation des échantillons d’essais.

• Mise en place des lames et application de la pres-sion de collage, y compris enlèvement du mor-tier superflu.

• Contrôle de la planéité des lames. Recherche desvides éventuels (en frappant).

• Analyse des résultats des essais et des protocolesde chantier.

7.3.4 Calcul et dimensionnement

Le calcul et le dimensionnement d’un élément destructure renforcé par une armature collée sont trai-tés en détail dans les publications suivantes (R.Tausky 1993, M. Ladner/J. Pralong/Ch. Weder 1990).

Les documents importants sont le plan d’utilisationet le plan de sécurité.

a) Vérification de la sécurité structurale

Le plan de sécurité fixe les situations de risque pourlesquelles un contrôle numérique de la sécuritéstructurale est effectué. Comme déjà mentionné auchapitre 7.3.1, la sécurité structurale ne doit jamaisdépendre que de la seule contribution de l’armaturecollée.

La vérification à la flexion et au cisaillement s’effec-tue généralement selon la norme SIA 160 (1989).

b) Vérification de l’aptitude au service

Les exigences d’aptitude au service sont fixées dansle plan d’utilisation.

La vérification de l’aptitude au service est effectuéeselon la théorie du modèle élastique-linéaire desmatériaux.

Comme indiqué au chapitre 7.3.1, le comportementfutur à la fissuration est amélioré; par contre, l’in-fluence sur la valeur des flèches est faible.

c) Vérification de la longueur d’ancrage

Selon les essais de Ranisch, la longueur d’ancragenécessaire est fonction de:

• La force de traction dans la lame.

• La largeur respectivement l’épaisseur de la lame.

• La contrainte de liaison de collage (en fonction dela contrainte d’adhérence).

Si les longueurs d’ancrage nécessaires ne peuventêtre réalisées, on pourra recourir à des solutionstelles que celles présentées au paragraphe 7.3.5 f).

7.3.5 Dispositions et exigences constructives

Le renforcement par une armature collée nécessitela prise en compte de différentes dispositions et exi-gences constructives.

a) Préparation de la surface du béton/exigencesde qualité

L’efficacité d’un renforcement par une armature col-lée dépend directement à la fois de la qualité de pré-paration de la surface du béton et d’une bonneadhérence entre ce support et le mortier de collage.

Les exigences sont les suivantes:

• L’enlèvement de la laitance de ciment et des agré-gats mal solidarisés.

• Une surface exempte de salissure et de graisse.

• Une surface sèche (humidité relative à la surface :maximum 6%).

Le choix du type de préparation peut dépendre del’accessibilité de la surface à traiter ainsi que de laposition de cette surface (face horizontale, verticale,etc.). Exemple de type de préparation de la surfacedu béton: sablage.

Contrôle de la contrainte d’adhérence à la surfacedu béton après préparation: essai d’arrachement

L’essai d’arrachement décrit à la figure 7.10 permetde déterminer une valeur moyenne de la contrainted’adhérence (environ 1,0 à 3,0 N/mm2) et de contrô-ler que la rupture se produit effectivement dans lebéton. En fonction du délai entre le moment du col-lage et celui de l’essai, cet essai permet aussi d’obser-ver le développement du durcissement dans le jointde collage en regard des températures ambiantesmesurées.

7. Renforcement au moyen d’acier

101

Page 94: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

b) Travaux de reprofilage, contrôles et corrections des irrégularités

Lorsque les irrégularités de la surface du béton sonttrop importantes, il peut être nécessaire d’appliquerau préalable un mortier de reprofilage.

c) Dimensions des lames: limitations

Largeur des lames

L’optimalisation du choix de la largeur des lamesdépend des critères techniques suivants :

• Lors du collage d’une lame large, le risque de for-mation de bulles d’air importantes dans la sur-face de collage s’accroît.

• L’état de sollicitation des lames très larges n’estpas uniforme sur toute la largeur de la lame. Ilpeut en résulter des états de sollicitation com-plexes dans le joint de collage, d’où un risqueplus élevé de défaillance.

Dans le cas normal, la largeur des lames se situeentre 50 et 200 mm.

Figure 7.10: Essai d’arrachement.

Epaisseur des lames

L’optimalisation du choix de l’épaisseur des lamess’effectue en tenant compte des critères suivants :

• Les lames de très petite épaisseur, dont la rigiditéest en conséquence faible, ne se laissent que dif-ficilement mettre en place sans risquer l’appari-tion de grandes ondulations générant des con-traintes de traction perpendiculaires au joint decollage.

• Les lames épaisses, donc rigides, s’adaptentmoins aisément à la forme de la surface du béton.

• Le traitement préliminaire par sablage des lamesminces présente des difficultés de réalisation.

• Les effets de l’apparition d’une corrosion sontplus pénalisants sur les lames minces.

• Une épaisseur importante de la lame conduit àune augmentation des contraintes de tractionperpendiculaires au joint de collage car la dis-tance entre ce dernier et la résultante de tractiondans la lame s’accroît.

Dans les cas courants, l’épaisseur des lames se situeentre 3 et 10 mm.

d) Répartition des lames

Pour des dalles, l’écartement entre les lames estgénéralement limité à :

a < 5 · d resp. < 0,2 · Lx

a = écartement entre les axes des lamesd = épaisseur de la dalleLx = plus petite portée

e) Croisement de lames

Le croisement de lames, par exemple dans le cas dedalles portant dans les deux directions, présentedes difficultés de réalisation.

Il est généralement renoncé au raccord de lamespar soudure. Les solutions adoptées le plus fré-quemment sont de deux types:

• Fraisage d’une engravure dans le béton pour lapose de la 1re nappe de lames (figure 7.11).

7. Renforcement au moyen d’acier

102

Page 95: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

• Choix d’une lame plus épaisse pour la deuxièmenappe et fraisage de cette lame au droit du croi-sement (figure 7.12). Cette solution est limitée aucas de structures soumises à des sollicitations detype statique. Sous sollicitations de type mobile,l’encoche pratiquée peut être à l’origine de dégâtsdus à la fatigue.

Figure 7.11: Croisement de lames.

Figure 7.12: Croisement de lames: utilisation seulementsous action de type statique.

Une solution, parfois adoptée, consiste en la miseen place de plaques d’acier de grandes dimensions,percées à intervalles réguliers de trous permettantle contrôle du collage.

f) Ancrages: dispositifs de sécurité

Dans certains cas, les conditions particulières del’objet ne permettent pas de réaliser les longueursd’ancrage nécessaires. Une solution envisageableconsiste alors en l’ancrage des lames par des fixa-tions mécaniques. La figure 7.13 décrit des exem-ples de réalisation de tels ancrages.

7. Renforcement au moyen d’acier

103

Figure 7.13: Ancrages des lames: exemples de disposi-tifs de sécurité.

g) Déviations: dispositifs de sécurité

Lorsque l’élément à renforcer est courbe ou en formede voûte, des forces de traction apparaissent per-pendiculairement au joint de collage (figure 7.14).

Dans ce cas, on prévoira un goujonnage, dimen-sionné de façon à reprendre l’intégralité de cesforces de traction.

Page 96: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

h) Exigences pour les travaux de collage/pres-sion de serrage

Humidité de la surface du béton:

Un contrôle visuel de traces d’humidité constitue lepremier mode de reconnaissance de la teneur enhumidité de la surface du béton. Par chauffage decette même surface, il est ainsi possible de décelerles zones humides, qui présentent une colorationplus claire.

Propreté et planéité des lames:

Les lames ne doivent présenter aucune trace dedépôt d’huile ni de corrosion et doivent être parfai-tement planes.

Sur le chantier, les lames seront stockées à l’abri etdéposées sur une surface plane de manière à évitertoute déformation. Elles seront à nouveau net-toyées avant leur mise en œuvre.

Préparation du mortier de collage:

Les méthodes de mélange des divers composantset l’homogénéité de la masse sont les critères lesplus importants.

Température:

Pendant toute la durée du collage et du durcisse-ment du mortier de collage, la température de l’airet celle des supports ne doivent pas être inférieuresà environ 10° C.

7. Renforcement au moyen d’acier

104

Mise en œuvre du mortier de collage:Aussitôt après sa préparation, le mortier de collagesera réparti sur les lames à l’aide d’une spatule den-telée, en partant du centre de la lame et en se diri-geant vers le bord (répartition en forme de toit). Lesdentelures ainsi créées permettront à l’air de s’échap-per latéralement lors du pressage des lames sur lebéton.

La surface du mortier de collage s’altère rapidementau contact de l’air. Ce processus de détériorations’accélère d’autant plus lorsque la teneur en humi-dité de l’air ambiant s’élève.

Mise en œuvre des lames:Lors du serrage des lames, on prendra toutes les pré-cautions nécessaires pour éviter la formation debulles d’air dans le joint de collage. Les lames serontpressées contre le béton de manière régulière et sur

Figure 7.14: Exemples de lames courbes.

Figure 7.15: Exemples de dispositifs d’application de lapression de serrage.

Page 97: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

toute leur surface (pression de collage environ 0,5N/mm2) de sorte que le mortier de collage excédentpuisse s’échapper sur les 2 côtés et que les éventuellesbulles d’air incluses soient évacuées (figure 7.15).

On évitera au maximum d’ébranler la structuredurant le processus de durcissement.

i) Mortier de collage/contrôle de qualitéLa qualité du mortier de collage peut être contrôléecomme suit durant les travaux de collage:

• Contrôle de la résistance à la traction par flexion etde la résistance à la compression sur cube, réalisésur prismes 40x40x160 mm (figures 7.16a et b).

• Contrôle de la résistance au cisaillement, réalisésur une éprouvette dans laquelle le mortier estplacé en sandwich entre des lamelles de métal(figure 7.16c).

7. Renforcement au moyen d’acier

105

j) Protection contre la chaleur /protection contrel’incendie

A des températures se situant au-delà d’environ70°C (par exemple incendie), les colles époxy per-dent une grande partie de leur résistance. Des dis-positions constructives adaptées (revêtements iso-lants, béton projeté) constituent des mesures deprotection dont la valeur doit dans chaque cas fairel’objet d’un examen critique. La figure 7.17 présenteune variante d’exécution de cette protection.

De manière à éviter leur chute sur les équipes desecours en cas d’incendie, les lames sont ancréespar exemple au moyen de goujons.

Figure 7.17: Exemple d’un revêtement de protectioncontre l’incendie.

k) Protection contre la corrosion

La protection initiale des lames contre la corrosions’effectue par l’application en atelier d’un primer,après un sablage préalable. Après leur mise enœuvre et le durcissement de la colle, les lames sontrecouvertes d’une couche de protection à base derésine époxy.

l) Contrôles au terme de l’exécution

Contrôle de la planéité des lames:

Contrôle essentiellement visuel.

Contrôle de la présence d’éventuelles inclusionsd’air dans le joint de collage:

Contrôle réalisé en frappant (par exemple avec unmarteau).

Figure 7.16: Essais pour le contrôle de la qualité du mor-tier de collage.

Page 98: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Dans le cas de vides importants (> environ 5 cm2),on peut procéder au perçage de la lame et à l’injec-tion de résine. La pression d’injection doit naturel-lement être maîtrisée de manière à ne pas provo-quer un décollement des lames.

Contrôle des protocoles d’essais :

Tous les protocoles des observations, mesures etessais effectués durant les travaux sont contrôlés àl’achèvement de ces derniers.

m) Exécution des travaux de collage dans des conditions d’ébranlements

La situation particulière créée par une exécutionsous charges de trafic représente le cas le plustypique de conditions nécessitant une attentiontoute spéciale. En particulier, il faut veiller à ce queles dispositifs assurant l’application de la pressionde collage conservent toute leur efficacité durant lapériode du durcissement, quels que soient les chocset ébranlements qui peuvent survenir.

A ce jour, les expériences relatives à l’effet d’ébran-lements ou de secousses sur le processus de dur-cissement et la résistance finale du joint de collagedemeurent limitées et des conclusions définitivesfont encore défaut. Les expériences effectuées surdes bétons pourraient laisser cependant présumerque les éventuels préjudices causés à la résistancesur cube de ces bétons sont très limités, voire nuls.

Dans la majorité des cas de ponts routiers, les varia-tions de sollicitations dues aux voitures ne jouenten général qu’un rôle inférieur par rapport auxvariations engendrées par le trafic de poids lourds.

En présence de zones fissurées, sur lesquelles seraitprévue l’application d’une armature collée, le phé-nomène de variations de l’ouverture des fissuressous charges de trafic n’autorise un renforcementpar une armature collée que sous certaines condi-tions relatives à la limitation de la variation d’ouver-ture de ces fissures. Les expériences faites à ce jourlimitent son utilisation au cas de fissures présentantune variation d’ouverture inférieure à 0,003 mm.

7.3.6 Mise en soumission/particularités

Les fournitures et travaux suivants, spécifiques dela réalisation d’un renforcement par collage d’arma-ture sur la structure de béton, font l’objet de l’offre :

• Travaux préparatoires éventuels : protections,étayages de la structure.

• Préparation des surfaces de béton, y compris réa-lisation éventuelle d’engravures.

• Reprofilages des surfaces béton, si nécessaire.

• Fourniture et pose des lames (y compris traite-ment préliminaire de surface) ; collage.

• Plus-values pour fraisage, perçage, etc.

• Dispositifs particuliers pour les ancrages deslames.

• Protection contre la corrosion et, éventuellement,contre le feu et les agressions chimiques.

• Réalisation des essais sur béton et sur mortier decollage.

L’entrepreneur précisera dans son offre le moded’application de la pression de collage. Celui-ci feral’objet d’une approbation préalable à toute exécution.

7.3.7 Domaines actuels d’investigation

a) Nouveaux domaines d’application

Renforcement de murs en maçonnerie :

Des parois en maçonnerie, dont la stabilité est miseen cause, peuvent faire l’objet d’un renforcement aumoyen de lames d’acier collées, disposées sur lesdeux faces du mur et reliées ponctuellement par desboulons d’ancrage.

Renforcement de poutres en bois :

Le principe d’application d’une armature collée surune poutre en bois est similaire à celui adopté usuel-lement pour une structure béton. Cette technique adéjà fait l’objet d’applications pratiques, en particu-lier pour le renforcement de poutres de support d’an-ciens planchers.

b) Lames CFK

L’idée d’utiliser des lames CFK en lieu et place delames en acier a déjà fait son chemin et les recher-ches effectuées ont été concrétisées par des applica-tions pratiques dans le domaine du bâtiment et desouvrages d’art. Le propos du présent document nes’étend pas à cette technique et référence est faite iciaux publications spécialisées (H. Kaiser, 1989; G. Yvanyi/W. Buschmeyer, 1992; M. Ladner, 1993; M. Deuring, 1993;M. Deuring, 1994).

7. Renforcement au moyen d’acier

106

Page 99: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

7. Renforcement au moyen d’acier

107

Figure 7.18: Exemples de renforcements au moyen d’armature collée (photos: Stahlton SA, Zurich).

Page 100: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Bibliographie du chapitre 7

Baudirektion SBB:Richtlinie für die Beurteilung von genietetenEisenbahnbrücken, Berne 1992.

Deuring, M.:Verstärken von Stahlbeton mit gespanntenFaserverbundwerkstoffen, EMPA,Bericht Nr. 224, Dübendorf 1993.

Deuring, M.:CFK-Lamellen im Bauwesen, Verstärkung vonTragwerken aus Beton, Schweizer Ingenieurund Architekt Nr. 26, 1994.

Ivanyi, G., Buschmeyer, W. :Verstärkungen von Spannbetonbrücken durchStahllaschen, Anwendungskriterien, Beton undStahlbetonbau 88 Hefte 11/12, 1992.

Kaiser, H. :Bewehren von Stahlbeton mit Kohlenstoff-faserverstärkten EpoxidharzenDissertation ETHZ Nr. 8918, Zürich, 1989.

Kunz, P. :Probalistisches Verfahren zur Beurteilung derErmüdungssicherheit bestehender Brücken ausStahl, Thèse Nr. 1023, EPFL, Lausanne, 1992.

Ladner, M., Weder, Ch. :Geklebte Bewehrung im Stahlbetonbau,EMPA/Bericht Nr. 206, Dübendorf 1981.

Ladner, M., Pralong, J., Weder, Ch. :Geklebte Bewehrung: Bemessung undErfahrungen, EMPA/Forschungs- undArbeitsbericht, Nr. 116/5, Dübendorf 1990.

Ladner, M.:Geklebte Bewehrung - Stahl oder CFK?Schweizer Ingenieur und Architekt 1993.

SIA 160:Actions sur les structures porteuses, Norme,Société suisse des Ingénieurs et Architectes,Zurich, 1989.

SIA 162:Ouvrages en béton, Norme, Société suisse desIngénieurs et Architectes, Zurich, 1989.

SIA 169:Maintenance des ouvrages de génie civil,Recommandation, Société suisse desIngénieurs et Architectes, Zurich, 1987.

SIA 462:Evaluation de la sécurité structurale desouvrages existants, Directive, Société suissedes Ingénieurs et Architectes, Zurich, 1994.

Tausky, R. :Betontragwerke mit Aussenbewehrung,Birkhäuser Verlag, Basel 1993.

7. Renforcement au moyen d’acier

108

Page 101: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.1 Domaines d’application 111

8.2 Matériaux 114

8.3 Calcul et dimensionnement 1168.3.1 Eléments de base sur la précontrainte 1168.3.2 Précontrainte avec et sans adhérence 1178.3.3 Choix du degré de précontrainte 1208.3.4 Introduction des forces d’ancrage et des forces de déviation 1218.3.5 Pertes dues au frottement 121

8.4 Indications constructives 1228.4.1 Disposition des câbles de précontrainte 1228.4.2 Conception des zones d’ancrage 1238.4.3 Conception des zones de déviation 1268.4.4 Exigences relatives aux câbles de précontrainte extérieurs 127

8.5 Mise en soumission 129

8.6 Exécution 130

Bibliographie du chapitre 8 131

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

109

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

Page 102: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.1 Domaines d’application

La précontrainte ultérieure d’un ouvrage existantpeut avoir pour objet aussi bien une améliorationde l’aptitude au service (fermeture de fissures, dimi-nution des déformations, amélioration du compor-tement aux vibrations, etc.), qu’une augmentationde la sécurité structurale (flexion, effort tranchant,effort normal).

La précontrainte est généralement réalisée aumoyen de câbles. Dans certains cas particuliers,l’application d’une déformation imposée à une struc-ture peut elle aussi avoir des effets positifs. Cettedeuxième méthode ne sera pourtant pas traitée ci-dessous, notamment parce que le retrait et le fluagedu béton atténuent fortement ces effets (influencevariable selon l’âge de la structure existante) etqu’elle ne sert à rien au stade ultime. La précontrainteultérieure de structures existantes est généralementréalisée au moyen de câbles de précontrainte situésà l’extérieur de celle-ci. Les câbles de précontraintene sont alors liés à la structure qu’au travers desancrages et des bossages de déviation. Dans certainscas, les câbles de précontrainte sont mis en place àl’intérieur de la structure au travers de trous forés aupréalable et mis en tension (câbles de précontrainteintérieurs). Ce type de renforcement correspond à laprécontrainte avec adhérence, définie comme le casgénéral dans la norme. On peut aussi procéder à desrenforcements au moyen d’ancrages dans le sol etles parois. Ces applications particulières seront abor-dées dans le chapitre 9.

La précontrainte convient avant tout dans les cas oùelle a une influence positive sur l’état de contrainteet de déformation. Contrairement aux renforce-ments métalliques non précontraints mentionnésdans le chapitre 7, la précontrainte permet une amé-lioration du comportement d’une structure existanteet agit de manière active:• Influence positive et durable sur les déforma-

tions.• Fermeture des fissures (en combinaison avec une

injection de celles-ci) ; de cette façon, on aug-mente la durabilité et l’aptitude au service del’ouvrage (par exemple dans le cas de réservoirsnon étanches).

• Augmentation de la résistance à la fatigue.

Le projet et la réalisation de mesures de renforce-ment au moyen de la précontrainte nécessitent desconnaissances particulières.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

111

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

Figure 8.1: Pont à treillis d’acier sur l’Aar à Aarwangen,précontraint au moyen de câbles clos ø 63 mm, réalisa-tion en 1967 (Müller, 1969).

Figure 8.2: Pont sur la Reuss à Wassen. Etat du pont avantle levage et la mise en place de câbles de précontrainteextérieurs (Lüpold, 1988).

Page 103: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

On peut mettre en œuvre des câbles de précontrainteextérieure dans divers matériaux comme le bétonarmé ou précontraint, l’acier, le bois ou la maçon-nerie. Ce mode de réalisation est envisageable etpossible dans toutes sortes de structures et il a déjàété utilisé dans les domaines suivants:

• ponts (figures 8.1 jusqu’à 8.3) ;

• poutres et toitures dans les bâtiments (figure 8.4) ;

• enveloppes de bâtiments (figure 8.5) ;

• réservoirs et silos (figures 8.6 et 8.7).

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

112

Figure 8.3: Pont sur la Reuss à Wassen. Disposition de la précontrainte extérieure (Moretti, 1989).

Page 104: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

113

Figure 8.4: Précontrainte de poutres en béton dans unbâtiment industriel, réalisation en 1988/89 (Heer, 1989).

Figure 8.5: Villa endommagée par le séisme dans le Frioul et renforcée par des câbles de précontrainte placés juste endessous de la toiture, réalisation en 1987 (VSL, 1988).

Figure 8.6: Réhabilitation du digesteur de la station d’épu-ration d’Alpnach au moyen de câbles de précontrainte cir-culaires, réalisation en 1987 (Weder/Heer, 1987).

Page 105: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.2 Matériaux

Les câbles de précontrainte extérieure sont essen-tiellement composés des éléments suivants :

• Eléments tendus en acier de précontrainte (depuisquelques années, on teste l’utilisation d’élémentstendus en matériaux composites dans des projetspilotes; ces produits n’ont pas atteint une maturitésuffisante; c’est pourquoi on ne parlera ici que desaciers de précontrainte pour les éléments tendus).

• Ancrages (mécaniques ou par adhérence).

• Systèmes anticorrosion (gaine, coulis de ciment,graisse, cire, etc.).

• Réalisation de bossages pour la déviation descâbles de précontrainte.

• Appareils de mesure permettant une surveil-lance permanente (par exemple des cellulesdynamométriques).

On dispose aujourd’hui de plusieurs types de pré-contrainte extérieure. Le choix parmi les systèmesdépend des contraintes imposées par le maître del’ouvrage, des problèmes à résoudre ainsi que dudéveloppement technologique actuel.

Les aciers de précontrainte sont utilisés commetirants. La norme SIA 162 permet d’utiliser des filsétirés, des torons et des barres écrouies. Pour lescâbles de précontrainte extérieure déviés, on nepeut en général utiliser que des fils de ø 7 mm oudes torons de ø 13 mm et de ø 15 mm. L’utilisationde barres écrouies lisses ou nervurées n’est con-seillée que pour des éléments tendus rectilignes.

La norme SIA 162 spécifie sous le chiffre 5 45 quel’on contrôlera les performances des dispositifs deprécontraintepar un examen initial et des contrôlespériodiques, conformément à la norme SIA 162/1,chiffre 4 3. Les chiffres 5 42 à 5 44 de la norme SIA162 définissent en outre des exigences pour les dis-positifs d’ancrage et d’accouplement, les gaines etles coulis d’injections. Les personnes ayant élaboréces textes de norme n’avaient pas à l’esprit à cet ins-tant la précontrainte extérieure mais uniquement laprécontrainte avec adhérence, la plus fréquemmenten usage en Suisse. Dans les chiffres mentionnésci-après, on aborde pourtant bien le thème de la pré-contrainte sans adhérence mais elle concerne en

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

114

fait les monotorons utilisés dans le cas de dalles etde planchers-dalles (c’est-à-dire des monotoronsgraissés dans une gaine de protection en polyéthy-lène):

• Chiffre 5 43 2 (gaines) :

«Dans le cas de la précontrainte sans adhérence,les gaines seront réalisées de manière à assurerune protection durable de l’acier de précontraintecontre toutes les agressions mécanique ou chi-mique et seront compatibles avec les produits deprotection utilisés.»

Figure 8.7: Réhabilitation d’un silo à klinker en Indonésieau moyen de câbles de précontrainte circulaires, réalisa-tion en 1986 (VSL, 1988).

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• Chiffre 5 44 6 (coulis d’injection) :

«Dans le cas de la précontrainte sans adhérence,il est nécessaire de protéger durablement contrela corrosion les câbles et les ancrages. Cette pro-tection sera généralement réalisée au moyend’une graisse de nature appropriée, exempte detoute substance nocive susceptible d’attaquerl’acier de précontrainte et qui soit compatibleavec la gaine; cette graisse devra remplir toute lagaine sans y laisser subsister de vide.»

Ces contraintes techniques ainsi que les mesures decontrôle pour une précontrainte extérieure peuventêtre librement appliquées. On peut aussi utiliser lescâbles de précontrainte extérieure avec une injec-tion de ciment. Pour les matériaux injectés, on sebasera sur les directives correspondantes des nor-mes SIA 162 et 162/1.

Pour un projet donné, la fixation des exigences et lechoix d’une variante parmi celles proposées parl’entreprise de précontrainte sont du ressort dumaître de l’ouvrage responsable ou de l’auteur duprojet. Les extraits des normes SIA 162 et 162/1mentionnés ci-dessus et les indications ci-dessousdevraient être des aides à la décision. Ces explica-tions sont aussi valables pour les haubanages,puisque des haubans peuvent aussi être considéréscomme des moyens de renforcement dans certainscas particuliers.

Pour être complet, on mentionnera la prénormeeuropéenne ENV 1992-1-5 en anglais : «The use ofunbonded and external prestressing tendons»(Utilisation de la précontrainte intérieure et exté-rieure sans adhérence) éditée en mars 1993. Il s’agitde la 5e partie de la prénorme européenne EC 2 ouSIA V 162.001: «Calcul des structures en béton».Cette prénorme contient aussi bien des indicationstechniques que des éléments de dimensionnementd’ouvrages précontraints sans adhérence.

L’auteur du projet spécifiera dans la soumission siles câbles de précontrainte doivent être réglables,contrôlables et remplaçables. La précontrainte exté-rieure donne la possibilité de satisfaire, en cas denécessité, à chacune de ces propriétés. Ceci n’est tou-tefois possible que si les câbles de précontrainte etsurtout les ancrages sont initialement conçus dansce sens. Voici quelques indications à cet effet:

• Possibilités de réglage:

Le réglage de la force de précontrainte dans uncâble peut s’avérer souhaitable pour différentesraisons. On peut par exemple vouloir augmenterou diminuer la tension de précontrainte, voirerelâcher complètement le câble. Il est évident quela protection contre la corrosion ne doit pas êtremise en danger par ces opérations.

• Possibilités de surveillance:

On peut surveiller la tension d’un câble extérieurau moyen de cellules dynamométriques perma-nentes ou temporaires. On peut aussi effectuerune mesure périodique de la force à l’aide d’unvérin de mise en tension, pour autant que le sys-tème de précontrainte le permette et que l’on dis-pose d’une place suffisante.

On développe depuis quelques temps un systèmede précontrainte dans lequel le câble de précon-trainte et le mécanisme d’ancrage sont électri-quement isolés de l’ouvrage (Matt, 1990). Parmiles avantages d’un tel système, on peut citer lecontrôle de l’intégrité de la gaine en plastique autravers de mesures de résistivité électrique.

• Possibilités de remplacement :

Les câbles de précontrainte extérieure devraientêtre conçus et réalisés de telle façon qu’ils puis-sent être changés en cas de besoin. La prise enconsidération de l’effet d’une action accidentellecomme le feu peut être une raison valable deprendre de telles mesures. Il ne convient pas seu-lement de choisir un type de câble de précon-trainte remplaçable mais il faut aussi en tenircompte dans la conception de l’ouvrage et de sastructure. Par exemple dans les ponts, il faut pré-voir que ce remplacement n’occasionne pas delimitation de l’aptitude au service.

On trouvera d’autres indications à propos descâbles de précontrainte extérieure dans les para-graphes 8.3.5 et 8.4.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

115

Page 107: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.3 Calcul et dimensionnement

8.3.1 Eléments de base sur la précontrainte

Nous allons rappeler ici quelques éléments de basesur la précontrainte à l’aide d’un exemple de poutreen béton armé. Dans le cas de structures en acier,en bois, en maçonnerie ou mixtes, on peut appli-quer ces indications par analogie.

Avec de la précontrainte, on génère un état d’auto-contrainte. Une force de précontrainte engendredes efforts et des contraintes dans la section debéton et influe sur la déformation de la structure.Dans le cas de systèmes hyperstatiques, on a desefforts supplémentaires dus à une déformationempêchée (moments parasitaires). Ceux-ci doiventtoujours être pris en compte lors de la vérificationde l’aptitude au service (fissures, déformations). Aceci, il faut ajouter les effets des pertes de précon-trainte dues au frottement des câbles, au raccour-cissement élastique de la structure, au retrait etfluage du béton ainsi qu’à la relaxation de l’acier deprécontrainte.

Pour la vérification de la sécurité structurale, onadmet en Suisse que la précontrainte agit du côtéde la résistance MR:

MRMd ≤ —–γR

Md : valeur de dimensionnement selon la norme SIA 160

MR : résistance à la flexion selon la norme SIA 162

γR : facteur de résistance (en général : γR = 1,2)

L’état d’autocontrainte ne peut être pris en comptedans le calcul de la résistance ultime lorsque la tota-lité de la force de traction dans le câble est mobilisée.

La précontrainte sera considérée comme une actionextérieure si elle peut être la cause de dommageslocaux (voir 8.3.4) ou de ruine de la structure.

Dans d’autres pays, l’effet de la précontrainte estplacé du côté des actions. Cette méthode est parti-culièrement indiquée dans le cas d’une précon-trainte extérieure. Si elles sont correctement utili-sées, les deux méthodes donnent le même résultat.La figure 8.8 montre le cas d’une poutre simple avec

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

116

une précontrainte extérieure réalisée par un tracépolygonal des câbles. On y démontre que l’onobtient la même charge ultime en utilisant les deuxméthodes de calcul. Dans le cas a) les câbles fontpartie du système résistant de la structure. Dans lecas b), les câbles sont dissociés de la poutre enbéton et les forces correspondantes de déviation,d’ancrage et de frottement sont appliquées sur lapoutre. Les forces de frottement sont annulées dansl’exemple mentionné, si les câbles de précontrain-tes sont tendus des deux côtés.

Figure 8.8: Effet d’une précontrainte extérieure sur unepoutre:a) précontrainte comme résistance;b) précontrainte comme action extérieure.Les deux méthodes de calcul donnent la même chargeultime F.

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Le cas général des forces générées à l’endroit d’unbossage de déviation est illustré à la figure 8.9. Onpeut aussi démontrer que les deux méthodes con-duisent au même résultat dans le cas de systèmeshyperstatiques et que les moments parasitaires nefont que de déplacer la ligne de fermeture du dia-gramme des moments.

Lors de la vérification de la sécurité structurale, onobtient des résultats différents en fonction des fac-teurs de charge et de résistance appliqués. C’est pour-quoi il est conseillé d’appliquer la méthode a) avec lesnormes SIA 160 et 162, et la méthode b) avec les pré-normes européennes ENV 1992-1-1 (publiée sous ladénomination SIA V 162 001) et ENV 1992-1-5.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

117

8.3.2 Précontrainte avec et sans adhérence

En Suisse, on emploie aussi bien la précontrainteavec adhérence que sans adhérence, ce derniermode étant surtout utilisé dans les dalles de bâti-ments. On admet que les différences du comporte-ment des structures entre les deux modes d’exécu-tion sont connues quant à leurs principes et que l’onn’a pas besoin d’entrer ici dans les détails (voir parexemple Ritz, 1978).

La figure 8.10 montre une poutre avec une précon-trainte extérieure. Tant que l’on n’a pas atteint lacharge de fissuration de la poutre, on ne distingueaucune différence de comportement par rapport à la

Figure 8.9: Forces dans les bossages de déviation.

Figure 8.10: Poutre avec précontrainte extérieure après ledépassement de la charge de fissuration.

Page 109: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

précontrainte avec adhérence. Après que la chargede fissuration ait été dépassée, on voit apparaître aumilieu de la travée une fissure ou quelques petitesfissures très espacées, en fonction du diagrammedes moments, surtout si l’on n’a pas ou peu d’arma-tures de flexion passives. Les câbles de précontraintepeuvent s’allonger librement, abstraction faite deseffets dus au frottement, sur toute leur longueurentre deux ancrages. Ceci signifie que le supplémentde contrainte dans les câbles dû à l’ouverture w desfissures est très faible. Même avec une faible aug-mentation suivante de la charge, on observe alorsune forte augmentation de la largeur w des fissureset de la déformation. L’axe neutre de la section cri-tique se déplace rapidement vers le haut et on obtientune forte déformation concentrée du béton, pourfinir par une rupture fragile (éclatement) de la zonecomprimée du béton. La rupture peut se produire,selon les cas, déjà à 1,1 jusqu’à 1,3 Ffissure, ce qui veutdire que l’augmentation de la contrainte dans l’acierde précontrainte n’est souvent pas suffisante pourque soit atteinte la limite d’écoulement de celui-ci.Donc, contrairement à la précontrainte avec adhé-rence, la limite d’écoulement fpy n’est généralementmême pas atteinte et la résistance ultime dans le casd’une précontrainte sans adhérence est souvent plusfaible.

Sous un autre point de vue, il faut considérer queles efforts tranchants et par là les contraintes decisaillement au milieu d’une poutre simple sontgénéralement très faibles. On observe alors unebonne répartition des fissures. Par contre, les effortstranchants au droit du pilier d’un système hyper-statique ou à l’encastrement d’une poutre encastréesont importants et ceci conduit à la formation d’uneseule fissure. Dans le cas de poutres continues, cephénomène n’est pas grave, puisque l’on disposegénéralement de réserves de portance en travée.Pour les poutres encastrées, ces réserves sontinexistantes. L’effondrement du porte-à-faux dupont de Cannavino en Italie, réalisé par encorbelle-ment, illustre parfaitement ce problème. Cet acci-dent s’est produit alors que la poutre en encorbel-lement était déjà largement réalisée, juste avantl’injection des câbles de précontrainte. On ne dis-posait donc pas encore d’une adhérence continueavec la structure (Wittfoht, 1981).

Le professeur Menn a démontré, dans ses essaisréalisés sur des poutres de pont précontraintes parun sous-tirant, qu’en prenant des mesures cons-tructives, comme la mise en place d’ancrages inter-médiaires, on arrivait aussi à atteindre la limite

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

118

d’écoulement des aciers dans le cas d’une précon-trainte extérieure (Menn, 1987 et 1990). Ces mesu-res sont particulièrement coûteuses dans le casd’un renforcement ultérieur d’une structure. Pouraméliorer sensiblement le comportement à la ruinede la structure (augmentation de la ductilité), il con-vient naturellement d’avoir une armature de flexionsuffisante et bien répartie ainsi qu’un bon frettagedes zones de béton comprimé.

Dans la pratique, il est en général conseillé derenoncer à tenir compte des possibilités d’augmen-tation de la contrainte lors du calcul de la sécuritéstructurale. Ceci est d’ailleurs conseillé sous lechiffre 3 24 18 de la norme SIA 162. Ce qui est impor-tant, c’est de calculer la force de précontrainte agis-sant réellement sur la structure en tenant comptede toutes les pertes de tension. Pour les structuresexistantes, les effets du fluage et du retrait sontréduits du fait de l’âge de celles-ci.

Dans certains cas particuliers, il peut être malgrétout nécessaire d’évaluer plus précisément l’apti-tude au service. Un calcul plus précis est possibleen effectuant l’intégration des allongements le longde l’axe du câble de précontrainte. Il s’agit là d’uncalcul non linéaire et itératif que nous n’aborderonspas en détail dans ce document. Des indicationsimportantes ont été publiées sur ce sujet (par exem-ple Virlogeux, 1983; Zimmermann, 1985; Eibl et al,1990; Gauvreau, 1993).

On obtient une bonne estimation de l’allongementdes câbles de précontrainte avec la méthode de lacharge ultime (figure 8.11). On utilise avec satisfaction

Figure 8.11: Allongement des câbles de précontrainte ∆Là l’apparition de la flèche maximale ∆R.

Page 110: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

cette méthode depuis de nombreuses années pour lesdalles de bâtiment. La norme SIA 162 stipule aussi quel’état de rupture conventionnel est caractérisé parl’apparition d’une flèche maximale de 2,5% de la por-tée déterminante, en admettant que l’allongement descâbles est réparti de manière uniforme sur la longueurentre les ancrages.

Alors que cette méthode a fait ses preuves pour lesdalles et qu’elle s’appuie sur des bases théoriques, onne peut pas l’utiliser sans autre pour les poutres. Ondoit par exemple tenir compte des effets du deuxièmeordre. La figure 8.12 illustre le cas d’un câble rectilignelié à la structure par les seuls ancrages. Lorsque lastructure se déforme, le bras de levier de la force deprécontrainte se réduit d’autant. Cette réduction estun phénomène du second ordre et, selon les condi-tions géométriques, ses effets ne sont pas négli-geables. On améliore la situation en disposant des

bossages de déviation permettant de fixer les câbles,perpendiculairement à l’axe de la poutre (figure 8.13).De plus, il faut prendre des mesures pour garantir unecapacité de rotation suffisante dans les zones cri-tiques, de façon à ce que les déformations limites cor-respondantes puissent être atteintes.

Si la force de précontrainte est déterminée à l’étatde rupture, c’est-à-dire en utilisant la valeur de P∞après déduction de toutes les pertes ou en y ajou-tant l’augmentation précise de précontrainte ∆P, lasécurité structurale se calcule alors avec les métho-des de calcul traditionnelles.

En conclusion et en résumé, on doit constater que,du point de vue de l’aptitude au service, on n’a pasde différence entre une précontrainte avec ou sansadhérence, mais qu’elle existe pour la sécuritéstructurale.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

119

Figure 8.12: Influence de la déformation d’une poutre surl’excentricité d’un câble rectiligne lié à la structure par lesseuls ancrages.

Figure 8.13: Influence de la déformation d’une poutre surl’excentricité d’un câble rectiligne lié, en plus des ancra-ges, par deux bossages de déviation (liaison perpendicu-laire à l’axe de la poutre).

Page 111: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.3.3 Choix du degré de précontrainte

Pour choisir le degré de précontrainte d’une pré-contrainte extérieure complémentaire, il est indis-pensable de procéder à une évaluation aussi pré-cise que possible de la structure à renforcer parrapport à la sécurité structurale et à l’aptitude auservice. Les chapitres 2 et 3 donnent les élémentsnécessaires à cette évaluation.

Si le résultat de ces investigations montre que,parmi les variantes possibles de renforcement, lastructure doit être renforcée par de la précontrainte,on procédera alors à la détermination du degré deprécontrainte. Il est aussi important de définir untracé possible du câble, comme par exemple dansle cas de poutres (voir paragraphe 8.4.1).

Si la structure présente une aptitude au service défail-lante, il peut alors s’agir des situations suivantes :

• Déformations inadmissibles de poutres compo-sées de divers matériaux, dans le bâtiment et legénie civil :

La précontrainte est choisie de telle façon que, encomplément à une précontrainte éventuellementexistante, on puisse ramener les déformations àdes valeurs admissibles. La méthode des chargeséquivalentes se prête particulièrement bien à ladétermination de la précontrainte nécessaire (voirfigure 8.14).

Dans le cas de structures en béton armé ouprécontraint, on observe souvent, en plus dedéformations importantes, des fissures exces-sives. Dans ce cas, malgré une précontrainte sup-plémentaire, on n’arrive plus à refermer complè-tement les fissures à cause des modificationssurvenues entre-temps à l’endroit des bords desfissures. En cas de nécessité, il convient d’injec-ter les fissures juste après la mise en tension desnouveaux câbles. On n’arrive en général pas nonplus à compenser la totalité des déformationssubies (modifications des bords des fissures,déformations irréversibles dues au fluage).

• Fissures trop grandes, mettant en cause la fonc-tionnalité initiale, comme dans le cas de réser-voirs d’eau en béton armé ou précontraint ; la pré-contrainte doit être choisie de telle façon que,après toutes les pertes de précontrainte, on dis-pose encore d’une contrainte résiduelle de 1 à 2 N/mm2, le réservoir étant plein.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

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Dans tous les cas mentionnés, il convient de finirpar un contrôle de la sécurité structurale. Celle-ci nedevrait pas être déterminante. Il faut aussi toujoursgarder à l’esprit les situations de risque pour tenircompte de cas où les charges permanentes neseraient pas actives.

Si la sécurité structuraleest insuffisante, il peut alorss’agir des cas suivants:

Augmentation des actions à la suite d’une modifi-cation du plan d’utilisation ou manque de sécuritéstructurale due à une erreur de dimensionnementou à une diminution de la résistance ultime (corro-sion, résistance insuffisante du béton, surchargedue à une action ou à un événement accidentel).

La sécurité structurale déficiente (flexion, force decisaillement) est à déterminer pour pouvoir définirle supplément de précontrainte à appliquer. On doitvérifier si la structure existante est à même de sup-porter sans problème la précontrainte choisie. Si cen’est pas le cas, il faut alors soit renforcer les partiesd’ouvrage exposées, soit réduire la précontraintechoisie en prenant des mesures complémentairescomme le collage d’armatures (voir chapitre 7).

Figure 8.14: Principe de la méthode des charges équiva-lentes.

Page 112: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.3.4 Introduction des forces d’ancrage et des forces de déviation

Les ancrages et les bossages de déviation trans-mettent les forces de précontrainte dans la structureexistante au travers de nouveaux éléments de cons-truction. On doit alors être particulièrement attentifau fait que ces forces sont introduites dans des par-ties de structure non prévues initialement à cet effet.Ainsi que l’explique Matt /Hirt, 1992, la totalité de laforce Qd agissant dans la zone d’introduction desforces doit être considérée comme une action pré-pondérante lors du dimensionnement de celle-ci :

Qd = γQ · Qr = 1,5 σp · Ap

avec σp = 0,75 ftk (SIA 162, chiffre 5 41 1), on obtient :

Qd = 1,5 · 0,75 · ftk · Ap = 1,125 Ptk

où Ptk est la force ultime nominale de l’acier de pré-contrainte.

Avec ces vérifications, on peut garantir une ductilitésuffisante de la structure (fortes déformations annon-ciatrices avant la rupture de l’acier de précontrainte),sans rupture fragile des zones d’ancrage.

8.3.5 Pertes dues au frottement

Par analogie à la précontrainte traditionnelle avecadhérence, on peut calculer les pertes dues au frot-tement de câbles extérieurs déviés avec la formulesuivante:

P(x) = Po · e-µ (αx + ∆α · x)

La partie µ · ∆α · x, due à la déviation involontaire,est généralement négligée, puisque les câbles deprécontrainte sont rectilignes entre deux bossagesde déviation. On obtient alors la formule simplifiéesuivante:

P(x) = Po · e-µ · αx

Les valeurs du coefficient de frottement µ présen-tées dans le tableau de la figure 8.15 sont baséessur des résultats d’essais et sur l’expérience.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

121

Coefficients de frottement µmoyens Torons Fils étirés

– non graissé sur un déviateur en acier 0,25 0,22

– graissé sur un déviateur en acier 0,18 0,16

– non graissé dans une gaineplastique sur un déviateur 0,14 0,12

– graissé, monotorons dans unegaine plastique sur un déviateur 0,06

Figure 8.15: Coefficients de frottement µ moyens pourdes torons et des fils étirés avec différentes exécutions dedéviateurs.

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8.4 Indications constructives

8.4.1 Disposition des câbles de précontrainte

Suivant les données du problème, les câbles de pré-contrainte longitudinaux des poutres, dans laconstruction de pont et de bâtiment, peuvent avoirun tracé rectiligne ou polygonal. La figure 8.16 pré-sente quelques cas typiques. Si le tracé des câblesest extérieur au gabarit de la structure, il faut seposer la question de savoir si les câbles n’encourentde ce fait pas un risque particulier (par exemplechoc de véhicules).

Les bossages de déviation seront soigneusementconçus; ceci vaut particulièrement lorsque les pointsde déviation des câbles doivent se situer dans une

zone extérieure à la section. Des réflexions d’ordreéconomique jouent un rôle important dans la déci-sion quant au choix d’un tracé rectiligne ou polygo-nal des câbles. On constate souvent, dans ce cas,qu’un tracé rectiligne se révèle la solution optimale,du fait des coûts élevés inhérents aux bossages dedéviation.

Les figures 8.17 et 8.18 présentent schématique-ment des possibilités d’amélioration du comporte-ment au cisaillement au moyen d’une précontrainteverticale ou inclinée (généralement au moyen debarres précontraintes). Dans le cas de câbles incli-nés, on prêtera une attention particulière à la tra-jectoire des forces ainsi qu’à leur diffusion dans lazone d’appui (équilibre, empêchement d’une for-mation de fissures.)

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

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Figure 8.16: Dispositions possibles des câbles dans lesens longitudinal de la poutre.

Figure 8.18: Renforcement au cisaillement au moyen decâbles inclinés.

Figure 8.17: Renforcement au cisaillement au moyen decâbles verticaux.

Page 114: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.4.2 Conception des zones d’ancrage

Il faut prêter une attention suffisante à une concep-tion correcte des zones d’ancrage. La figure 8.19présente différentes possibilités d’introduction desforces d’ancrages de câbles extérieurs dans unesection en caisson existante d’un pont.

• Figure 8.19 a:

L’ancrage des câbles extérieurs à l’arrière de lazone existante d’appui exige une modification dela zone de culée. Un espace suffisant pour la miseen tension et la surveillance ultérieure des câblesest ainsi créé. Le report des forces sur la structureexistante s’effectue essentiellement en compres-sion et, de ce fait, relativement sans problème.

• Figure 8.19 b:

Les forces de précontrainte sont introduites dansles âmes au moyen de consoles ou bossages enbéton ou en acier. L’état de la structure existante estgénéralement déterminant pour le dimensionne-ment. L’introduction de la force peut être modéli-sée à l’aide d’un treillis dans lequel le flux des forcesdoit se conformer à la théorie de l’élasticité. Si unnouveau béton est à lier avec un ancien béton, lebéton existant doit être rendu rugueux, par exem-ple en utilisant un jet d’eau sous haute pression, detelle sorte que les grains soient mis à nu. Des dia-gonales comprimées avec une inclinaison jusqu’à60° par rapport au joint peuvent ainsi être trans-mises (coefficient de frottement µ = 1,73), ce qui estéquivalent à un béton monolithique. Si des bos-sages préfabriqués en béton sont utilisés (joint sec),le glissement commence lorsque µ = 0,70 (= 35°). La figure 8.20 présente des possibilités detransmission des forces de traction au béton exis-tant, parmi lesquelles seules quelques-unes peu-vent avoir une fonction porteuse (a, b, d, e). De lagéotechnique et de la construction de tunnels noussont connus des types d’ancrage qui peuvent seprêter aussi à l’ancrage de forces de traction dansune construction en béton. La figure 8.21 présentequelques caractéristiques essentielles de telsancrages. Des indications relatives à la durabilitérespectivement à la protection contre la corrosionfont défaut. Lors du choix, il faut en particulierencore prendre en compte le fait que les forces detraction doivent pouvoir le plus possible être trans-mises à l’endroit désiré et sans qu’il y ait glisse-ment. Des barres de traction précontraintes s’y prê-tent ainsi au mieux. Elles doivent, le cas échéant,être retendues à plusieurs reprises pour réduire auminimum les pertes de tension.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

123

Figure 8.19: Formes possibles de zones d’ancrage (FIP,1991):a) à l’extrémité de la poutre (culée) ;b) en travée au moyen de nouveaux bossages;c) à l’endroit de l’entretoise sur un appui intermédiaire;d) idem c) mais avec une construction en acier pour

répartir les forces.

• Figure 8.19 c et d:L’introduction des forces de précontrainte àl’endroit d’un appui intermédiaire s’effectue surles entretoises existantes. Les passages pour lescâbles sont réalisés au moyen de forages. Sil’entretoise existante n’est pas en mesure dereprendre les forces, une construction métalliquecomplémentaire peut être mise en place (d).

Page 115: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Il est important de remarquer ici qu’il faut évaluersoigneusement ce que la construction existante estcapable de supporter dans les zones d’ancrage. Ilfaut ensuite vérifier non seulement l’introductionlocale de la force mais encore sa diffusion danstoute la structure porteuse existante.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

124

Figure 8.20: Possibilités de transmission de forces de trac-tion au béton existant (Jungwirth et al. 1986); seuls a, b,d, et e peuvent entrer en ligne de compte pour assurerune portance statique.

Figure 8.21: Report de forces de traction sur le béton exis-tant au moyen d’ancrages (Jungwirth et al, 1986).Remarques:– Des mesures complémentaires sont à prendre pour

assurer la durabilité et, respectivement, la protectioncontre la corrosion.

– Mode et localisation de l’introduction de la force dansle béton: à déterminer en fonction des données du pro-blème. Une tige précontrainte qui traverse de part enpart constitue souvent la seule solution correcte (voirfigure 8.20b).

goujonner a

traverser depart en part b

coller c

entourer d

sceller e

«tirer» (chasser) f

Mortierde résine

Pitond’expansion

Jointd’étanchéité

Calotted’appui

Ecrou à 6 pans

Ancragescellé àla résine

Ancrageà piton

d’expansion

Ancragescellé aumortier

Ecrou à 6 pans

Plaqued’ancrage

plane

Coulis deciment

Plaque decalotte

SpécificationsAncrage

scellé à larésine

Ancrage à piton

d’expansion

Ancrageau

mortier

Résistance du béton exigée

Efficacité après

Précontrainte

Efficacité dansforage humide

Diamètre de forage possiblepour des diamètresde tige 20-28 mm

Utilisation en tantqu’ancrage isolé

tendre/dur

30 sec.

avec/sans

avec réserve

28-48 mm

bon

dur

de suite

avec

bon

43-53 mm

bon

tendre/dur

env. 12 h

sans

bon

38-80 mm

non économique

Page 116: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Les figures 8.22 et 8.23 représentent des exemplesd’exécution de renforcements au moyen de câblesextérieurs.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

125

Figure 8.23: Forme de la zone d’ancrage à l’exemple duviaduc los Chorros (Zahn/Voumard, 1992).Remarque: pour obtenir une introduction sans heurt dela force, les ancrages individuels sont échelonnés. Desentretoises en béton armé ont dû être introduites pourassurer la reprise de la sollicitation due aux excentricitésdes câbles par rapport aux axes des âmes.

Figure 8.22: Forme de la zone d’ancrage à l’exemple dupont sur la Muota, Suisse (Müller, 1992).

Page 117: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.4.3 Conception des zones de déviation

Les zones de déviation doivent également être réali-sés avec le plus grand soin. En général, les câblessont placés, localement, dans des tubes métalliquescoudés (figure 8.24). La figure 8.25 indique les rayonsminimaux à respecter.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

126

L’introduction des forces dans la structure existantepeut-être réalisée au moyen d’une construction enbéton (voir figure 8.24) ou en acier (voir figure 8.26).Selon l’ENV 1992-1-5, les tubes métalliques coudéssont à dimensionner et à réaliser comme suit:

• Les forces radiales et tangentielles doivent pou-voir être transmises.

• A l’endroit de l’entrée des câbles, respectivementde leur sortie, aucune modification angulaire localequi serait inadmissible ne doit se produire; la limitesupérieure en est fixée à 0,02 rad.

Figure 8.24: Zone de déviation – introduction des forcesau moyen d’une construction en béton armé (FIP, 1991).

Grandeur du câble(Données pour torons)

Rayon minimalR[m]

19Ø13 mm ou 12Ø15 mm 2,5

31Ø13 mm ou 19Ø15 mm 3,0

55Ø13 mm ou 37Ø15 mm 5,0

Figure 8.25: Rayons minimaux des câbles à l’endroit desdéviations (pour des fils de précontraintes ayant une forcede rupture identique, les valeurs à prendre en comptesont les mêmes).

Figure 8.26: Zone de déviation – introduction des forcesau moyen d’une construction en acier (Zahn/Voumard,1992).

Page 118: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

La figure 8.27 montre différentes conceptions de laliaison entre le tube métallique coudé et le câble deprécontrainte. D’autres combinaisons sont possi-bles. Ainsi, une liaison par adhérence du câble peutêtre réalisée sur piles en utilisant deux tubes s’em-boîtant l’un dans l’autre et en injectant le câble avecun coulis de ciment. Le remplacement demeurecependant possible. Les tubes seront liés entre euxde manière adéquate pour permettre la reprise del’augmentation des forces à l’état de rupture (atten-tion aux diamètres différents des tubes adoptés envue du montage et des tolérances de courbure).

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

127

8.4.4 Exigences relatives aux câbles de précontrainte extérieurs

Au fil des années, les entreprises de précontrainteont développé une foule de solutions, en s’efforçantpar ailleurs de satisfaire aux exigences, croissantesdans le même temps, des maîtres de l’ouvrage.

Comme mentionné au chapitre 8.2, le projeteur doitdécider dès le début si :

a) les câbles doivent être réglables en ce qui con-cerne la force de précontrainte et, si c’est la cas,dans quelles limites;

b) les câbles doivent être remplaçables; dans cedomaine, plusieurs solutions sont connues, solu-tions qui se distinguent par exemple en fonctiondu volume de travail requis;

c) les câbles doivent être contrôlables en ce quiconcerne la force de précontrainte et l’efficacitéde la protection contre la corrosion.

La conception des ancrages et des bossages dedéviation doit être telle que les exigences poséessoient respectées. Pour ce qui concerne les ancra-ges, cela signifie que ces derniers sont générale-ment différents des ancrages prévus dans le casd’une précontrainte avec adhérence.

Les gaines utilisées sont habituellement réalisées àpartir de polyéthylène. On a déjà également fait usagede tubes métalliques. Dans ce dernier cas, il faudrapenser au fait que des liaisons par soudure sont inter-dites à proximité d’un acier de précontrainte.

Figure 8.27: Formes possibles pour la liaison entre le tubemétallique coudé et le câble. Le type 1 est généralementutilisé dans les cas a) et b) et le type 2 dans le cas c) (figure8.28).

Page 119: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

La figure 8.28 montre les formes habituelles de lasection de câbles extérieurs de précontrainte. Lestypes 1 et 2 se différencient principalement par lefait que le type 2 offre un barrage supplémentairede protection contre la corrosion et que les pertesdues au frottement sont inférieures. De plus, la forcede précontrainte peut faire l’objet de réglages.

Selon les critères de décision retenus se pose laquestion de savoir quel type de câbles est à choisirpour un projet donné. En plus des aspects de carac-tère économique et de technique d’exécution, lesindications suivantes peuvent être utiles :

• Il apparaît opportun de partir des actions prove-nant de l’environnement des câbles et de leurexposition. Les classes d’environnement selon letableau 4.1, SIA V 162 001, peuvent servir de base.

• Les câbles du type 2 entrent en ligne de comptes’il est indispensable de pouvoir régler les forcesde précontrainte au cours de la durée de vie dela structure. Il est cependant possible d’utiliser,pour les câbles du type 1, de la graisse ou de lacire en lieu et place du ciment. Pour ce type d’uti-lisation dans laquelle les volumes à remplir sontrelativement importants, la solution précitée pré-sente toutefois des inconvénients : coût élevé,manipulation compliquée, variations de volumeen cas de changements de température. Lesancrages doivent eux aussi être conçus de tellesorte que la régulation des forces de précon-trainte soit possible.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

128

• Selon les types, les coefficients de frottementvarient très fortement, comme cela a été montrédans la figure 8.15. Les pertes dues au frottementsont ainsi beaucoup plus petites pour les câblesdu type 2, ce qui peut être un critère de décisiondans le cas de longs câbles avec des déviations.

La figure 8.29 présente les critères techniques destypes de câbles et formule des propositions dechoix.

Figure 8.28: Forme de la section de câbles extérieurs(VSL, 1988).

Câble type 1 Câble type 2

Cl. environnement

– Classe 1

– Classe 2

– Classe 3

– Classe 5

Réglage de la force de précontrainte:

– non

– oui

Frottement:

– câble court etpetites déviations

– câble long etgrandes déviations

Figure 8.29: Critères techniques pour le choix du type decâble. Classes d’environnement selon le tableau 4.9 SIAV 162.001.

Page 120: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

L’efficacité de la protection contre la corrosion peutêtre contrôlée, par exemple au moyen d’une mesurede la résistance électrique. Pour qu’une surveillancepermanente soit possible, il faut que, en plus de l’uti-lisation de gaines en matière plastique et de la réali-sation d’une barrière primaire contre la corrosion, lesancrages soient aussi isolés par rapport au reste del’ouvrage (figure 8.30). Dans la pratique existent déjàaujourd’hui des solutions qui ont été appliquées avecsuccès (SIA DO57, 1990).

De plus, il faut penser que les câbles extérieurs sontexposés à des risques particuliers tels le feu, lerayonnement UV et le choc. Des mesures adéquatessont à prévoir si de tels risques sont à redouter.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

129

8.5 Mise en soumission

Le renforcement d’une structure porteuse existanteau moyen de câbles extérieurs peut comprendre lesprincipaux travaux suivants :

• Réalisation des zones d’ancrages et des bossagesde déviation (par exemple travaux de piquage,perçages, repiquage des surfaces de béton, gou-jonnages, travaux de soudure, coffrage, ferrail-lage, bétonnage).

• Fourniture, mise en place, mise en précontrainte etinjection des câbles extérieurs, conformément auxcaractéristiques exigées dans le cadre du projet.

Pour ce qui concerne les câbles extérieurs, le CANne se prête qu’à titre de fil conducteur. Il est conseilléde ne fixer que les exigences essentielles, respecti-vement que les critères de prestations. L’entreprisede précontrainte doit, entre autre, fournir avec sonoffre les indications suivantes:

• la description technique du système avec lesprincipales données caractéristiques;

• le type de protection contre la corrosion;

• la méthode de mise en œuvre (y compris les indi-cations sur les tolérances de pose à respecter) ;

• le genre et l’étendue des contrôles de qualité.

Les données fournies seront analysées par le pro-jeteur. Consécutivement au choix du système, legenre et l’étendue des contrôles de qualité serontinventoriés dans le plan de contrôle.

Figure 8.30: Principe d’un câble isolé électriquement demanière permanente (Matt, 1990).

Page 121: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

8.6 Exécution

La réalisation des zones d’ancrages, des zones dedéviation et de retenue, exige savoir-faire et soin dela part de l’entreprise chargée de l’exécution ainsique de la direction des travaux. Il est en particulierimportant que soit clairement déterminé ce qui estdu devoir de l’entreprise pilote et ce qui est de lacompétence de l’entreprise chargée de la précon-trainte (par exemple en ce qui concerne les tolé-rances).

On peut distinguer, dans la fabrication et la mise enplace d’un câble extérieur, entre les méthodes sui-vantes:

• câbles confectionnés en usine, enroulés surbobines, déroulés sur le chantier et placés dansleur position définitive;

• installation des gaines vides et, ensuite, enfilagedes faisceaux de fils ou de torons ou poussageindividuel des torons.

En fonction des conditions existantes, l’une oul’autre des méthodes peut s’avérer correcte.

En ce qui concerne les travaux de mise en tension,il n’y a rien de particulier à mentionner ici. Dans denombreux cas cependant, l’espace restreint à dis-position pour le personnel et les presses peut êtresource de problèmes. L’expérience montre qu’ilvaut la peine de se créer une place suffisante.

Une exécution dans les règles de l’art de l’injectiondes câbles revêt une grande importance pour ce quiconcerne la durabilité. Si l’on utilise pour l’injectionune suspension à base de ciment, il faut tenir compteà la fois des exigences des normes SIA 162 et 162/1et des nouvelles connaissances (Matt, 1990; FIP,1990). Une connaissance technique particulière estindispensable si l’on utilise de la graisse ou de lacire en tant que coulis d’injection. Mentionnonsaussi que, pour un câble extérieur, les gaines sontcomplètement soumises à la pression d’injection.On l’appliquera et la tiendra donc sous contrôle, detelle sorte que les gaines ne soient ni trop sollicitéesni complètement détruites durant l’injection.

La réalisation de la protection contre la corrosiondans la zone d’ancrage relève des travaux de fini-tion. Elle consiste généralement en un capuchon decouverture ainsi qu’une protection de la têted’ancrage et, éventuellement, de la zone située àl’arrière de la plaque d’ancrage.

8. Renforcement au moyen de la précontrainte

130

Page 122: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

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8. Renforcement au moyen de la précontrainte

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8. Renforcement au moyen de la précontrainte

132

Page 124: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.1 Avant-propos 135

9.2 Situation de départ 1369.2.1 Motif d’un renforcement 1369.2.2 Analyse de l’état de la structure porteuse 1379.2.3 Connaissances préliminaires 138

9.3 Le sol de fondation 1399.3.1 Hypothèse générale 1399.3.2 Analyse du comportement du sol de fondation 1399.3.3 Valeurs de la résistance au cisaillement 1409.3.4 Conclusion 141

9.4 Moyens de renforcement 1429.4.1 Avant-propos 1429.4.2 Classification générale 1429.4.3 Reprises en sous-œuvre 1439.4.4 Micropieux 1449.4.5 Les pieux poussés 1459.4.6 Pieux de clouage 1469.4.7 Ancrages en terrain meuble et en rocher 1479.4.8 Clouages 1489.4.9 Injections 1499.4.10 Jetting 151

9.5 Choix du système 1529.5.1 Hypothèses 1529.5.2 Critères de décision 1529.5.3 Considérations coûts-avantages (profits) 1539.5.4 Moyens: méthode d’observation 154

9.6 Calcul et dimensionnement 1579.6.1 Avant-propos 1579.6.2 Précisions 1579.6.3 Méthodologie du dimensionnement 1589.6.4 Recommandation pour le dimensionnement 160

9.7 Remarque finale 163

Bibliographie du chapitre 9 164

9. Renforcement du sol de fondation

133

9. Renforcement du sol de fondation

Page 125: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.1 Avant-propos

Le mode de traitement du thème «Renforcement dusol de fondation» diffère dans sa forme commedans son contenu de la structure homogène deschapitres qui la précèdent. Ce choix a ses raisons.Le sol de fondation en tant que structure porteuse,et le terrain en tant que matériau, ne peuvent êtremis sur le même pied que les types classiques deconstructions tels qu’acier, béton ou bois. La prin-cipale différence est la suivante: le sol n’est en géné-ral pas un produit qui peut être fabriqué industriel-lement, selon des recettes éprouvées, et avec unequalité standardisée. En conséquence, par rapportaux autres modes de construction, la prise encompte du terrain en tant que matériau ou du solde fondation en tant que structure porteuse obéit àd’autres règles.

Il existe encore une raison supplémentaire pour con-férer une forme différente au présent chapitre. Lethème général «Renforcement du sol de fondation»regroupe un cercle très large de thèmes particuliers.Il s’étend, par exemple, de la pure modification du solde fondation par un traitement chimique ou physiquejusqu’à la mise en œuvre de pieux et d’ancrages des-tinés à l’amélioration de la portance d’ouvrages defondation.

Parmi l’abondance d’informations dont il faudraitfaire rapport, en relation avec des mesures de ren-forcement du sol de fondation, la présente contribu-tion se limite à l’essentiel et aux généralités propresà toute mesure de renforcement du sol de fondation.L’accent principal est mis sur la systématique dansl’analyse et dans la résolution des problèmes deconstruction posés. Sans sortir du cadre fixé, il estabsolument impossible dans ce contexte de traiter àfond et de manière analogue aux chapitres précé-dents les différents systèmes de renforcement.

9. Renforcement du sol de fondation

135

9. Renforcement du sol de fondation

Figure 9.1

Page 126: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.2 Situation de départ

9.2.1 Motif d’un renforcement

Il y a essentiellement deux raisons qui, sous unpoint de vue technique, peuvent nécessiter le ren-forcement d’une structure porteuse:

• Cas A:L’ouvrage présente, au moment considéré, unequalité insuffisante.

• Cas B:La qualité de l’ouvrage est influencée négative-ment par un changement d’affectation ou par unemodification du système porteur.

Le terme utilisé de «qualité» peut se référer à lasécurité structurale, à l’aptitude au service ou à ladurabilité. Les influences susceptibles d’affecter laqualité peuvent provenir de modifications sur leplan des actions (par exemple changements d’affec-tation) comme sur celui de la résistance (par exem-ple modifications du système porteur).

Dans le cas A, le motif d’un renforcement est pres-que toujours une portance insuffisante, ou unedéformation, du sol de fondation. Il est plus rare-ment dû à une insuffisance de la portance propredes éléments porteurs (fondations, pieux, ancrages,clouages, etc.). Dans le cas B, la cause premièreréside dans des actions extérieures ou dans uneintervention sur le système porteur. Plus rarement,

9. Renforcement du sol de fondation

136

Figure 9.2

si tant est, elle est à rechercher dans une capacitéportante trop limitée au sol de fondation.

Le motif qui nécessite un renforcement d’une struc-ture porteuse est toujours important pour le choixet le dimensionnement de la mesure de renforce-ment. Ceci est tout particulièrement valable pour lesrenforcements du sol de fondation.

Page 127: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.2.2 Analyse de l’état de la structure porteuse

Alors que, dans le cas A, un constat et une analysede l’état de la structure porteuse ainsi qu’une clarifi-cation du comportement de la structure fournissenttoujours aussi une indication quant aux limites de lacapacité portante de cette structure, il en est rare-ment de même dans le cas B. Lorsqu’un ouvrageprésente des dommages, on peut ainsi par exempletirer des conclusions sur le mécanisme de formationdes dégâts ainsi que sur la localisation et l’impor-tance des faiblesses structurales à partir d’un relevédes fissures (image, largeur et augmentation des fis-sures). En vue de l’assainissement respectivementdu renforcement de la structure porteuse, l’examendes dégâts permet d’obtenir des indications précisessur le comportement et les limites de la portanced’une fondation.

Les conditions sont tout à fait différentes dans le casd’un bâtiment intact qui doit être renforcé, selon lecas B, pour des raisons d’un changement prévu del’affectation. On sait certes que les fondations sontsuffisantes dans l’état existant mais on ne connaît leslimites de la capacité portante en général que sur labase de considérations d’ordre théorique. Des déci-sions sur l’étendue et le degré des renforcementssont, dans le cas d’un bâtiment intact (cas B), fré-quemment plus difficiles à prendre que dans le casd’un bâtiment déjà endommagé (cas A). Exprimé demanière simplifiée: dans le cas A, les renforcementspeuvent être déterminés sur la base de l’examen ducomportement de la structure porteuse alors que,dans le cas B, ils doivent être dimensionnés sur labase de calculs statiques.

9. Renforcement du sol de fondation

137

Figure 9.3

Page 128: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.2.3 Connaissances préliminaires

La mise en place de mesures de renforcement dusol de fondation présuppose idéalement la connais-sance des données de base suivantes, spécifiquesà l’objet :

• Objectif du renforcement: quel niveau de qualitédoit-on atteindre?

• Type de construction et mode de portance de lastructure à renforcer.

• Connaissance de la surcharge durant la duréed’utilisation restante projetée.

• Sollicitation à laquelle est soumise la structuresous la surcharge effective.

• Constitution du sol de fondation, en particulier ladisposition des couches qui la composent ainsique les propriétés géotechniques.

• Mode de portance du sol de fondation, y comprisla connaissance du processus de déformation enfonction de la charge et du temps.

• Liste des raisons qui nécessitent les mesures derenforcement du sol de fondation.

Une clarification précise des conditions limites etdes données de base est une hypothèse incontour-nable pour une bonne résolution du problème posé.

9. Renforcement du sol de fondation

138

Figure 9.4

Page 129: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.3 Le sol de fondation

9.3.1 Hypothèse générale

Une connaissance, adaptée au problème, de laconstitution du sol de fondation et de son compor-tement, y compris des conditions hydrogéologiques,est indispensable pour la conception, le projet etl’exécution des mesures de renforcement de ce solde fondation. Alors que les principales données rela-tives à sa constitution peuvent être connues demanière relativement fiable au moyen d’une recon-naissance du sol, la connaissance précise du com-portement du sol de fondation en relation avec l’ou-vrage se heurte à des difficultés considérables. Il fautcependant toujours non seulement considérer la pro-blématique des états limites mais avoir une connais-sances ou au moins une représentation adéquate ducomportement global du système ouvrage-sol defondation.

9.3.2 Analyse du comportement du sol de fondation

Pour des ouvrages qui présentent déjà des défautset dégâts bien définis (type A), on peut tirer desconclusions quant à l’interaction du système com-plet ouvrage-sol de fondation à partir de l’image desdégâts et du comportement des tassements. Parconséquent, il est très important, pour de tels ouvra-ges, de pouvoir reconnaître et mesurer rapidementles signes particuliers tels que tassements, déplace-ments, augmentations de la fissuration. De telsconstats devraient toujours être accompagnés d’unedescription, la plus précise possible, des circons-tances ayant causé les tassements (charges, rem-blais, déblais, niveaux de l’eau, etc.). Si des mesuress’étendant sur une période aussi longue que pos-sible sont souhaitables pour établir un pronosticfiable, une affirmation basée sur quelques mesures,même en petit nombre, est toujours meilleure quesi aucune mesure n’est disponible. A l’aide de laconnaissance de la géotechnique et en se basantsur:

• la description du sol de fondation,

• l’état de l’ouvrage,

• le processus de déformation,

on peut déjà tirer des conclusions, souvent trèsfiables, quant au comportement porteur, son méca-

9. Renforcement du sol de fondation

139

Figure 9.5

nisme ainsi qu’aux caractéristiques déterminantesqui le décrivent. Il faudra déterminer de manière sûresi le processus observé (comportement de la fissu-ration, du tassement, etc.) est dégressif, stationnaireou progressif. Au cours de tous ces examens, onconsidérera toujours qu’une affirmation basée surl’observation et des mesures du comportement esttoujours supérieure à la même information obtenuesur la base de considération théoriques.

Page 130: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.3.3 Valeurs de la résistance au cisaillement

En plus de sa déformabilité, il est toujours intéres-sant de connaître la limite de portance du sol de fon-dation et du terrain. Cette limite est, en général,caractérisée par le paramètre de résistance aucisaillement, soit par l’angle de frottement interne ø’et par la cohésion c’. La résistance des sols et lesvaleurs qui lui son associées dépendent de multiplesfacteurs tels que sa composition, sa densité, l’état decontrainte, un préchargement, etc. Elles sont, en par-ticulier, également fonction de la vitesse de défor-mation de la sollicitation au cisaillement et ceci toutspécialement dans le cas de sols cohérents. Bien quecette hypothèse soit souvent effectuée pour des rai-sons de simplification, les valeurs ø’ et c’ ne sont deloin pas des constantes du matériau (Gudehus,Leinenkugel, 1978). La donnée rhéologique men-tionnée revêt une importance particulière dans lecadre de l’assainissement des phénomènes de glis-sement et de fluages. La résistance au cisaillement etla vitesse de fluage sont couplées par une loi rhéo-logique, ce qui est important eu égard aux phéno-mènes d’apparitions du fluage et au dimensionne-ment d’un assainissement de versants soumis à cephénomène. Lorsque la sollicitation au cisaillementaugmente, par exemple à cause de la pression ducourant due à une modification du niveau d’eau dansle versant, la vitesse de fluage s’élève jusqu’à un nou-vel état d’équilibre.

Si, au contraire, la sollicitation au cisaillement dimi-nue, par exemple sous influence de mesures de sta-bilisation d’un versant (ancrages, goujonnages,etc.), la vitesse de fluage se réduit de manière cor-respondante. La géotechnique moderne fournit despoints de repère pour permettre au moins une esti-mation de l’ordre de grandeur du rapport entre résis-tance au cisaillement et vitesse de fluage (loi defluage). Sur cette base, on peut par exemple dimen-sionner un assainissement de versant (Vollen-weider, 1989).

Si l’on peut, à partir d’une évaluation de l’état d’unouvrage, conclure à un problème de stabilité, il estpossible, en admettant un modèle représentatif duterrain et en effectuant un calcul récurrent, de con-naître les conditions limites du point de vue de latechnologie des matériaux. En admettant que lastructure, dans sa globalité, se trouve à un étatlimite (γ= 1,0), on peut, au travers d’une considéra-tion d’équilibre, en déduire une liste des valeursdéterminantes de dimensionnement pour ce qui

9. Renforcement du sol de fondation

140

Figure 9.6

Figure 9.7

Page 131: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

concerne la stabilité (ø’, c’, u, etc.) et pour lesquellesl’équation d’équilibre considérée est remplie. Il estsouvent insignifiant dans ce contexte de savoir siles valeurs qui résultent d’un tel calcul récurent cor-respondent ou non avec les valeurs effectives. Dansde nombreux cas, une «considération relative» suf-fit pour l’étude du renforcement d’une structure por-teuse. Il est exigé dans ce cadre, pour la sécurisa-tion de la qualité de l’ouvrage, que la réduction dela sollicitation respectivement l’augmentation de larésistance se montent à un certain pourcentage dela valeur de base de la sollicitation, respectivementde la résistance. Dans ce mode de raisonnement,les erreurs systématiques se compensent dans laprise en compte du modèle de calcul et desvariables de base (ø, c’, u, etc.) si bien que le calculfournit un résultat utilisable même sur la base devaleurs et d’hypothèses partiellement inexactes.

9.3.4 Conclusion

Fondamentalement, on devrait toujours tirer profit decette particularité qu’un ouvrage, présentant desdéfauts ou des dégâts, peut toujours être considérécomme un essai à l’échelle 1: 1. Au travers d’une ana-lyse soignée de l’état et du comportement de la struc-ture, on sera en mesure de fixer les ordres de gran-deur déterminants et ceci souvent et de façonmeilleure que par tout autre moyen. En géotech-nique, on peut citer par exemple: la pression desterres, la pression d’eau, la résistance au cisaillement,la rigidité, le fluage, etc. Dans de nombreux cas, lesdonnées de base ainsi obtenues sont bien plus fiablesque les valeurs déterminées par d’autres moyens(valeurs empiriques, valeurs tirées de tables, essaisde laboratoire, essais sur modèles, etc.). On se trouvetoujours dans des conditions optimales pour ledimensionnement d’un renforcement lorsque l’ondispose en même temps de la description du sol, dela connaissance géotechnique, de la connaissanceempirique et de l’analyse du comportement de lastructure pour définir les variables déterminantes debase (ø’, c’, u, etc.).

9. Renforcement du sol de fondation

141

Figure 9.8

Figure 9.9

Page 132: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.4 Moyens de renforcement

9.4.1 Avant-propos

Il ne peut en aucun cas s’agir de traiter ici de manièreexhaustive des moyens de renforcement des fonda-tions ni de décrire complètement leurs possibilitésd’application, leurs propriétés et leurs limites. Lespages suivantes sont consacrées exclusivement àune brève description et à une caractérisation desmoyens et procédés les plus courants. Cette énu-mération doit en outre être considérée plus commeun aide-mémoire que comme une information tech-nique exhaustive. Un développement plus completnécessiterait à lui seul le volume d’une documenta-tion PI BAT. On pourra également se référer au trèsbon traitement de ce thème dans le Grundbau-Taschenbuch, volumes 2 et 3, 4e édition 1992.

9.4.2 Classification générale

Dans le cas de renforcements d’une structure por-teuse par des moyens d’infrastructure, il peut s’agird’un renforcement:

• d’une fondation;

• d’un ouvrage de soutènement artificiel ;

• d’un ouvrage en terre proprement dit.

Le renforcement peut être destiné au maintien

• de la sécurité structurale ;

• de l’aptitude au service;

• de la durabilité.

Le renforcement peut, enfin, viser à:

• une amélioration du comportement du sol defondation;

• une amélioration de la capacité portante construite.

En fonction de la manière dont se pose le problème,l’un ou l’autre des procédés ou moyens peut s’avé-rer optimal, approprié ou adéquat.

9. Renforcement du sol de fondation

142

Il serait très attrayant à ce stade de mettre en cor-respondance, pour chaque type d’ouvrage, d’unetypologie donnée, les procédés et moyens quiconviennent. Le résultat en serait un tableau certai-nement très intéressant mais qui ne contribueraitvraisemblablement que peu à la solution d’un pro-blème spécifique. Le schéma serait trop rigide pours’adapter aux multiples possibilités de variantes ren-contrées dans le domaine de l’infrastructure. Lesexécutions décrites ci-après se limitent en consé-quence à une brève caractérisation des procédés etmoyens. Il est renoncé à une classification à carac-tère obligatoire du type «quoi, quand, où et com-ment doit-on procéder».

Figure 9.10

Page 133: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.4.3 Reprises en sous-œuvre

La reprise en sous-œuvre est le transfert de lacharge d’une fondation d’un ouvrage fondé super-ficiellement sur une couche du sol plus profonde etd’une capacité portante supérieure (Hilmer, 1991;Smoltcyk, 1991). L’emploi d’une reprise en sous-œuvre est lié aux deux conditions essentielles sui-vantes:

• Présence à une profondeur atteignable d’unecouche du sol de capacité portante supérieure.

• Capacité portante suffisante de la structure por-teuse, y compris de ses fondations, pour per-mettre le transfert et la reprise des sollicitationsdans les états critiques de construction.

La reprise en sous-œuvre d’une fondation est exé-cutée généralement par étape, dans la largeur, par-tiellement aussi dans la profondeur. L’ordre desétapes de travail sera planifié avec soin, en l’adap-tant à la construction du bâtiment. Au besoin, lastructure porteuse du bâtiment sera renforcée pourassurer le transfert et le report des charges et cecipréalablement à l’exécution de la reprise en sous-œuvre. Les parties d’ouvrage rigides (angles du bâti-ment) seront autant que possible reprises en pre-mier. Les cas avec potentialité de mouvement autourd’un appui fixe sont, si possible, à éviter. Le com-portement à la déformation dans les états deconstruction ne peut être que difficilement prévisible.

Les travaux de reprise en sous-œuvre seront tou-jours accompagnés de mesures et d’observations. Ils’agit également de planifier et éventuellement depréparer la mise en œuvre des mesures qui seraientnécessaires si le comportement devenait inaccepta-ble. Des tassements et des déformations peuvent aubesoin être compensées au moyen de vérins plats.Une reprise en sous-œuvre n’est pas exécutablesans certaines déformations de l’ouvrage.

La reprise en sous-œuvre est un mode de construc-tion ancien et confirmé qui doit certes être exécutéavec soin mais ne nécessite pas l’engagement d’en-gins spéciaux.

9. Renforcement du sol de fondation

143

Figure 9.11

Page 134: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.4.4 Micropieux

Micropieu est un terme général pour désigner lespieux forés ou battus de petit diamètre, inférieur àenviron 300 mm. Les micropieux sont réalisés pourune part de la même manière que des pieux conven-tionnels et pour une autre part aussi selon la tech-nique des ancrages en terrain meuble et en rocher(Franke, 1992; Neummann, 1986; Spann-Stahl). A cejour, le domaine d’utilisation est très étendu et ne selimite plus, comme précédemment, aux seuls casspéciaux (renforcements des fondations, conditionsde travail limitées, bâtiments et ouvrages voisinssensibles, conditions particulières de fondations).

La part la plus importante est prise à ce jour par lespieux forés injectés, aussi appelés pieux racines (paliradici). La technique utilisée s’apparente largementà celle de la mise en place d’ancrages. Une ou, aubesoin, plusieurs barres d’acier (par exemple Gewi),diamètre 30 à 50 mm, ou un tube d’acier de diamètre100 à 200 mm sont introduits dans des forages dediamètre 100 à 250 mm. L’espace annulaire est rem-pli parfois aussi sous pression, avec un coulisd’injection à base de ciment. Lorsque les conditionsde place sont limitées (exécution dans des locauxtels que caves), on peut utiliser de petites installa-tions de forage et le pieu d’acier est constitué depetits éléments d’environ 1,00 à 1,50 m qui serontcouplés. Pour garantir la protection contre la corro-sion, on offre aujourd’hui sur le marché des pieuxcomplètement isolés. De manière à augmenter lacapacité portante extérieure, une injection de cimentavec double obturateur et des injections répétéespeuvent être exécutées. En admettant que la capa-cité portante du pieu lui-même soit suffisante, lacharge de service que l’on peut atteindre, en com-pression axiale, se situe généralement entre environ200 et 400 kN pour un sol de mauvaise qualité(limono-argileux, de compacité lâche) jusqu’à 600 et800 kN environ dans un bon sol (gravier-sableux, decompacité moyenne à forte). Pour des pieux en trac-tion chargés axialement, les valeurs correspon-dantes pourraient être réduites d’un facteur 1,3 à 1,5.

L’emploi de micropieux est fondamentalement liéaux mêmes hypothèses que celles présidant à l’uti-lisation d’ancrages en terrain meuble et en rocher,à savoir :

• une connaissance suffisante des conditions dusol ;

• une vérification soigneuse de la capacité portante(essais de charge des pieux).

9. Renforcement du sol de fondation

144

Pour des micropieux travaillant essentiellement enfrottement, le pieu foré injecté avec injections secon-daires devrait offrir les avantages les plus impor-tants. Pour des pieux travaillant essentiellement enpointe, le pieu battu injecté ou le petit pieu foré tra-ditionnel entrent aussi tout à fait en ligne de compte.Lors de l’utilisation de micropieux, on prêtera uneattention particulière à l’introduction des forces del’ouvrage au pieu et, au besoin, à la stabilité au flam-bage. L’un ou l’autre des systèmes peut, pour cesdeux raisons, s’avérer inapproprié.

Le micropieu est un système de pieu moderne etéconomique, qui supplantera dans de nombreuxcas le pieu foré ou battu traditionnel.

Figure 9.12

Page 135: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.4.5 Les pieux poussés

Le pieu poussé est un pieu en béton armé constituéd’éléments préfabriqués, réalisés en atelier, qui sontenfoncés hydrauliquement dans le sol et reliés soli-dairement par des goujons d’acier (Jansen, 1989).Des sections d’acier peuvent également être utilisées.

Les pieux poussés conviennent particulièrement bienà l’assainissement et au renforcement de fondationsd’ouvrages existants. Leur diamètre se situe habi-tuellement entre 300 et 500 mm et la longueur deséléments de pieu entre 400 et 500 mm. La charge deservice est de l’ordre de 200 à 500 kN.

L’emploi des pieux poussés est lié aux hypothèsesparticulières suivantes:

• Image claire de la constitution du sol, comme celaest indispensable pour toutes les fondations parpieux.

• Capacité portante suffisante de la structure por-teuse, de manière à pouvoir assurer la reprise dela force de réaction lors du vérinage.

• Qualité élevée, grande expérience puis contrôlesoigneux lors de la fabrication et, plus particuliè-rement, lors du fonçage des pieux.

Parmi les principaux avantages des pieux pousséson peut citer :

• Mise en œuvre dans un espace très réduit, sansutilisation de gros engins.

• Travail n’entraînant ni bruit ni vibration.

• Le fonçage et le montage des pieux donnent lapossibilité d’un contrôle fiable de la capacité por-tante.

• Elimination préalable des tassements ultérieursen raison du préchargement du sol de fondationconsécutif aux travaux de fonçage.

Par contre, les principaux désavantages sont lessuivants:

• Exigences élevées de qualité et de soin néces-saires lors de la production des pieux.

• Difficultés en cas de rencontre d’obstacles pourles pieux (blocs, etc.).

9. Renforcement du sol de fondation

145

• Limitation importante de la capacité portante encas d’excentricités (déviation du pieu, dispositionde la presse).

• Résistance à la flexion du pieu: faible ou mêmetrès faible (pratiquement : chaîne d’articulations).

Suite au développement de la technique des micro-pieux, l’utilisation de pieux poussés a considéra-blement perdu de son importance.

Figure 9.13

Page 136: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.4.6 Pieux de clouage

Ces pieux servent essentiellement à l’assainissementet à la stabilisation de versants en glissement rapideou lent (Brandl, 1992, Vollenweider, 1989). La résis-tance au cisaillement du versant est augmentée aumoyen des pieux, de manière à obtenir une amélio-ration suffisante de la stabilité. Tous les éléments quiengendrent une résistance au cisaillement du terrainpeuvent entrer en ligne de compte pour les clouagesdes pentes. On peut citer: des petits pieux forés, desgrands pieux forés, des pieux battus, des barrettes etdes puits de grandes dimensions.

L’utilisation d’un clouage de versant est liée, pourl’essentiel, aux hypothèses de base suivantes :

• connaissance de la composition du sol en ce quiconcerne la géologie, la géotechnique et l’hydro-logie;

• connaissance du mécanisme de déplacementquant au type de mouvement, à la profondeur duplan de glissement et à la dimension de la massede terrain qui se trouve en mouvement ;

• possibilité de surveillance et de contrôle du com-portement du clouage du versant ainsi que, aubesoin, d’effectuer son renforcement.

En fonction de la rigidité, respectivement de l’élance-ment de l’élément mis en œuvre, on prendra en consi-dération des comportements très différents à la défor-mation. De petits éléments, tels que par exemple desmicropieux, ne résistent que sur une faible longueuraux mouvements de la pente. Des éléments degrandes dimensions, plus massifs, subissent aucontraire un déplacement par rotation qui est presqueexclusivement monolithique. Selon les différences demouvement, on considérera des modèles de calculdifférents pour chacun des deux cas précités.

Les difficultés du dimensionnement des élémentsde clouage (goujons) résident dans l’évaluation etl’introduction des charges de poussée des terres,respectivement de la butée des terres, et dans lechoix de l’appréciation du facteur de sécurité. Lathéorie ainsi que la littérature (Brandl, 1992) four-nissent quelques indications à ce sujet. Il ne faut pasnégliger dans ce contexte qu’une bonne solutionexige un haut degré d’expérience pratique et desensibilité aux aspects géotechniques du problème.Une précision de calcul exagérée ne sert à rien dansla pratique.

9. Renforcement du sol de fondation

146

Partout où cela est possible, un clouage de pentedevrait être réalisé avec un élément de cisaillementprésentant une ductilité élevée et avec un dispositifde sécurisation de la tête de pieu dont l’élasticité soitsuffisante (ancrage). Le système optimal sera choisien fonction de chaque objet, sur la base d’analysesdu type coûts-bénéfices (= relation entre investisse-ment et gain de qualité).

Figure 9.14

Page 137: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.4.7 Ancrages en terrain meuble et en rocher

Les ancrages en terrain meuble et en rocher sontdes éléments de traction, qui sont ancrés dans le solafin de reprendre les pressions du terrain et d’eauou, directement, des forces de traction (Ehl, 1986 ;Ostermayer, 1991). L’ancrage est constitué d’un élé-ment en acier, mis en place dans un trou foré de dia-mètre environ 80 à 150 mm, qui est ancré à sonextrémité, côté terrain, dans un corps réalisé par unmortier de ciment injecté sous pression.

Les ancrages en terrain meuble ou en rocher se rap-portent au sol (terrain meuble ou rocher) dans ledomaine de la longueur d’ancrage. En général, l’élé-ment de traction est constitué, selon le type d’an-crage, par une barre de précontrainte de ø 26 à 36mm, un faisceau d’éléments de précontrainte, des filsde ø 7 à 12 mm ou des torons de ø 0,5“ à 0,6“. L’élé-ment de précontrainte est habituellement mis en ten-sion ce qui devrait, à vrai dire, toujours être recher-ché. Pour des ancrages précontraints, les chargesadmissibles (niveau charges de services) que l’onpeut atteindre sont environ les suivantes:

• Mauvais terrain:limons argileux, meubles 200 – 350 kN

• Bon terrain:gravier sableux, compact 450 – 650 kN

• Ancrage en rocher:mauvaise qualité 300 – 500 kN

• Ancrage en rocher:bonne qualité 1000 – 1500 kN

Les valeurs indiquées présupposent une injectionsoignée du corps d’ancrage. Pour des ancrages dehaute qualité, on exécutera généralement des ancra-ges réinjectables (une ou plusieurs fois). Une trèsbonne capacité portante du bloc d’ancrage estatteinte si l’on utilise un système d’injection avecdouble obturateur et plusieurs réinjections.

Pour des ancrages permanents il est exigé d’utiliserdes systèmes avec une protection complète contrela corrosion. La technique moderne des ancrages aeffectué de grands progrès dans le domaine (vonMatt, 1994). Des ancrages avec des protections fia-bles contre la corrosion et contrôlables de manièresûre (mesure de résistance électrique) sont aujour-d’hui utilisés.

9. Renforcement du sol de fondation

147

L’emploi des ancrages est fondamentalement liéaux hypothèses suivantes:

• connaissance suffisante des conditions de sol etde nappe;

• contrôle soigné de la capacité portante des ancra-ges au moyen d’essais d’ancrage et d’essais demise en tension;

• contrôle de la protection contre la corrosion pourles ancrages permanents;

• contrôle sur une longue durée de l’ouvrage et del’ancrage.

Figure 9.15

Page 138: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Il est un principe qu’il faut prendre en considération:les ancrages permanents ne seront utilisés que làoù leur emploi apportera des avantages essentielset justifiés par rapport à d’autres solutions tech-niques. Un micropieu de traction, à action passive,ne peut, dans ce cas, être toujours considéré sansréserve comme une bonne alternative.

Le projet et l’exécution d’ancrages précontraints pré-supposent une connaissance technique élevée dansles domaines de la géotechnique et de la techniquedes ancrages (Ostermayer, 1991). La directive del’Office fédéral des routes (Directives 1993) concer-nant les ancrages en terrain meuble et en rocher faitmention des prescriptions, obligations et remarquesà prendre en considération. Moyennant l’observa-tion des prescriptions correspondantes, les ancra-ges sont un moyen sûr et économique pour assurerla sécurité d’un ouvrage de soutènement.

9.4.8 Clouages

Les clouages en sol meuble et en rocher sont deséléments de soutènement qui agissent en tantqu’éléments mixtes (Brandl, 1992; Nitzsche, 1989;Stocker, 1983). L’élément de soutènement est forméde trois éléments:• le sol ou le sol en place;• les clous mis en place;• la peau de protection sur la face de la paroi.La réalisation d’un tel élément de soutènements’effectue pas à pas. Le terrain est enlevé par étapesde 0,7 à 1,5 m de hauteur libre, en fonction de la sta-bilité du terrain. La surface de paroi mise à nu estrapidement protégée au moyen d’un béton projetéarmé. Après durcissement du béton, les clous, envi-ron 0,5 à 2 pièces par m2 de paroi, sont placés dansles trous forés et scellés au mortier. Avec le durcis-sement du coulis d’injection, les têtes des clous sontliées solidairement mais sans mise en précontrainteavec le béton projeté.

On peut utiliser un béton avec fibres d’acier ou unbéton coulé en place en lieu et place du béton pro-jeté. L’épaisseur de la paroi de protection va de 8 à15 cm environ pour des clouages provisoires et de15 à 25 cm environ pour des éléments de soutène-ments permanents.

Comme «clous» sont utilisés des barres d’acier etdes barres en matière synthétique. Le diamètre desbarres est de 20 à 30 mm environ. Généralement,tous les clous sont exécutés avec la même longueur;

9. Renforcement du sol de fondation

148

selon les cas, ces longueurs peuvent aussi être éche-lonnées. La longueur des clous vaut en général(valeur indicative) 50 à 70% environ de la hauteur dela paroi. Toutefois, les clous peuvent aussi, parexemple dans des parois en glissement, être beau-coup plus longs. Pour des ouvrages permanents desoutènement, il faut prévoir une protection des clouscontre la corrosion. La tête du clou sera bétonnée.NB: Les «Recommandations CLOUTERRE 1991» fran-

çaises différencient les ouvrages à:– maillage serré avec 1 à 2 clous par m2, de longueur

L = 50 à 70% de H,– maillage large avec 0,15 à 0,4 clous par m2, de lon-

gueur L = 80 à 120% de H.

Une capacité portante propre suffisante du terrainen place, du moins dans le court terme, respective-ment une stabilité suffisante sont des conditions debase pour l’exécution d’une paroi clouée.

Si un nombre suffisant de clous est disposé, leclouage du terrain se comporte comme un mono-lithe. Dans le cas de sols rigides, les déformationsdes parois clouées sont relativement faibles en rai-son de l’effet d’adhérence.

Lors du dimensionnement des éléments de soutène-ment, la stabilité «intérieure» tout comme la stabilité«externe» sera vérifiée. Cela signifie que des consi-dérations d’équilibre sont à effectuer pour toutes les

Figure 9.16

Page 139: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

surfaces potentielles de glissement (dimensionne-ment des éléments de traction) et que, également,une vérification similaire à ce qui serait à faire pourun mur de soutènement normal (théorie monolithi-que) est à entreprendre.

Les «clous» injectés constituent un type spécial declouage. Dans ce cas, des tubes en acier perforéssont placés dans le sol. Le sol et les tubes en aciersont injectés. Les tubes en acier restent dans le sol.Le clouage est une méthode constructive intéres-sante, moderne, dont l’utilisation est toutefois rela-tivement limitée. En particulier, on agira avec pré-caution dans le cas de sols meubles ou mous.

9. Renforcement du sol de fondation

149

9.4.9 Injections

Dans le cas d’une injection, il s’agit d’injecter souspression un coulis dans les pores ou les vides duterrain pour augmenter sa résistance au cisaille-ment, diminuer sa compressibilité, et sa perméabi-lité (jusqu’à 10-9 m/sec) ou augmenter son homo-généité (Idel, 1991).

Selon le type de terrain et d’application, on utilisedes procédés d’injection à base de ciment, d’argile,

de gel de silicate et de résine synthétique sous formede solutions, suspensions, pâtes ou émulsions. Lechoix du procédé est fonction des données du pro-blème et de la composition du sol de fondation. Dansla plupart des cas, on utilise cependant un coulisd’injection à base de mortier de ciment.

Certains composants entraînent des problèmes surle plan de l’environnement qui ne peuvent être maî-trisés dans chaque cas, même après le durcissement.

Dans le cas de vides existants de grandeur moyennedans le terrain, l’injection se réalise avec une faiblepression. Si le sol se révèle peu perméable, la pression

d’injection s’élève et provoque l’ouverture d’autreschemins d’écoulements. Une pression élevée peutconduire à des soulèvements de la surface souhaitésdans certains cas et non désirés dans d’autres.

Les pressions d’injection varient fortement selon lahauteur du recouvrement, le type de sol et de cou-lis d’injection (2-30 bar). Selon les cas, il peut aussiêtre avantageux d’échelonner les pressions d’injec-tion, éventuellement en combinaison avec unemodification du dosage du produit d’injection.

Figure 9.17 Figure 9.18

Page 140: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Un examen soigné du sol de fondation est indis-pensable. La faisabilité, le choix du coulis d’injectionet du mode de forage, le procédé d’injection toutcomme la répartition des injections sont influencésentre autre chose par les courbes granulométriques,la disposition des couches, les perméabilités, lessystèmes de faille. Des essais préliminaires sont pra-tiquement toujours indispensables.

En raison de l’hétérogénéité du sol, la surveillanceet le contrôle des travaux d’injection (forage, coulisd’injection, quantité, endroit, pression, vitessed’écoulement) et de l’entourage (milieu) prennentune grande importance. On peut, par ce moyen,tirer des déductions importantes quant à la réparti-tion probable du coulis d’injection dans le sol. Larépartition effective peut être évaluée plus précisé-ment au moyen d’examens complémentaires (son-dages, essais de perméabilité et de charge, etc.).

9. Renforcement du sol de fondation

150

Une clarification complète ne peut être obtenuequ’au travers d’une mise à nu du bloc injecté.

Les forages seront exécutés soigneusement et avecgrande précision, de manière à éviter le plus pos-sible les claquages dans la zone de mise en pres-sion. Une répartition en séries de forages avec unquadrillage toujours plus serré est souvent la solu-tion la mieux adaptée (par exemple de 8 à 4, 2, 1,0,5 m de distance). L’injection proprement dite suitle forage et est exécutée par étapes avec un obtu-rateur simple ou double et avec une pression plusou moins élevée. Il peut être éventuellement néces-saire d’effectuer des injections complémentaires.

Les résistances à la compression qui peuvent êtreobtenues varient fortement en fonction du coulisd’injection utilisé ou du type de terrain. Si les condi-tions (composition du terrain) sont favorables, il estpossible d’atteindre, avec des injections à base deciment, une résistance comparable à celle du béton.

La technique d’injection est une méthode ancienneet éprouvée pour l’assainissement et l’étanchementdes sols et des ouvrages de fondation. La techniqued’injection est cependant remplacée par de nou-velles méthodes (micropieux, jetting) dans l’objec-tif d’une amélioration de la capacité portante.

Figure 9.19 Figure 9.20

Page 141: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.4.10 Jetting (colonnes injectées)

Le procédé de jetting (Jet Grouting, Soilcrete, Terra-jet) est une méthode dans laquelle le sol est injectéà haute pression, de telle sorte que se produit unéchange de matériau ou du moins un mélange dusol avec le coulis d’injection (GKN Keller).

Ce système est utilisé pour l’amélioration du sol (repri-ses en sous-œuvre, assainissement de fondations,blocs de soutènement, etc.) et son étanchement.

La réalisation des colonnes injectées débute parl’exécution d’un forage à la profondeur voulue(phase 1). Au cours de la remontée de la tige d’injec-tion, le sol en place est déchiré par un jet d’eau ou desuspension, avec ou sans adjonction d’air, à unepression jusqu’à 1000 bars (phase 2). Le sol ainsifraisé est en partie rincé à la surface. Dans le mêmetemps où est exécuté le fraisage, le terrain estmélangé avec une suspension de ciment-bentonite(phase 3). Le durcissement de la suspension entraînela formation d’éléments de soutènement.

Selon le mouvement donné aux buses on obtientdes éléments porteurs du type colonne ou typeparoi. L’adjonction d’air permet d’agrandir l’élémentde soutènement (jusqu’à 2 m de diamètre). On peutréaliser des éléments verticaux mais aussi des élé-ments inclinés.

En faisant se recouper les zones traitées et en lescombinant à volonté, on peut réaliser des massifsplus grands et de tout genre.

La résistance des colonnes injectées est variable(paramètres: vitesse de remontée et de rotation dutrain de buses, coulis d’injection). Selon le type desol et selon le cas, on peut atteindre des résistancesde 3 à 25 N/mm2.

L’utilisation de cette méthode est limitée par lacourbe granulométrique du sol. Dans les sols orga-niques, il faut obtenir selon le cas des donnéescomplémentaires. La réalisation de telles colonnesjusqu’à proximité de la surface du sol est aussi unesource de problèmes (résistance insuffisante, sou-lèvements).

La réalisation de puits filtrants (y compris la régé-nération de puits existants) et de drains (en gravier)est un autre domaine d’application. Dans ce cas, lejet d’un fluide à haute pression sépare les particulesdu sol ; un échange partiel du sol en place avec ungravier drainant est exécuté.

9. Renforcement du sol de fondation

151

La méthode «Jet» offre les avantages suivants parrapport aux autres techniques d’injection:• emploi également possible dans les sols fins;• utilisation de suspensions anorganiques en lieu

et place de produits chimiques comme coulisd’injection.

Le procédé «Jet» est une méthode moderne,variée, qui présuppose une grande expérience, unebonne connaissance de la géotechnique et une cla-rification soignée de la possibilité d’utilisation.

Figure 9.22

Figure 9.21

Page 142: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.5 Choix du système

9.5.1 Hypothèses

La décision relative à un renforcement de l’infra-structure d’une structure porteuse présupposeidéalement la connaissance des données de basementionnées au chapitre 9.2. Dans la pratique, onne possédera que rarement une connaissancefiable et complète de toutes ces données. Les déci-sions relatives au renforcement seront en consé-quence prises fréquemment sur la base d’uneconnaissance incomplète pour ce qui concerne lacomposition et le comportement du sol de fonda-tion. La connaissance manquante sera compenséedans ce cas par des considérations de probabilitéset de risques.

9.5.2 Critères de décision

La décision quant au choix du moyen ou du procédéde réalisation le plus approprié pour le renforce-ment d’une structure porteuse présente souventdes difficultés. En effet, il n’est pas rare en géotech-nique que de telles décisions doivent être prises surdes bases incertaines et incomplètes. Pour ces rai-sons, une attention soigneuse portée aux aspectstechniques du système et du procédé ainsi qu’auxconsidérations de techniques probabilistiques et detechniques de risques revêt une importance parti-culière dans le processus de recherche de décision.Les critères particuliers du système tout comme lescritères objectifs feront l’objet d’une attention spé-ciale lors du choix du moyen ou du procédé le plusapproprié.

Certains modes de réalisation doivent dès le débutêtre exclus sur la base de certains critères, car ils nesatisfont pas à des exigence minimales posées àl’ouvrage respectivement au projet de construction(exemples: restrictions de circulation, émissions,etc.). D’autres seront modifiés ou prévus, lors de larecherche de solution, avec un bonus ou un malus.L’objectif est de quantifier tous les avantages etinconvénients propres au système et à l’objet, demanière à pouvoir rendre le processus de décisiontransparent, neutre et pondérable.

9. Renforcement du sol de fondation

152

Figure 9.23

Page 143: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.5.3 Considérations coûts-avantages (profits)

Si, dans un processus, des incertitudes et des risquesdoivent être pris en compte, ce qui est toujours le cas,à des degrés divers, pour des problèmes géotech-niques, la décision sur le choix optimal d’un systèmene peut finalement être prise de manière neutre quesur la base d’une analyse coûts-profits respective-ment coûts-risques (relation investissement-gain dequalité). Ceci peut apparaître comme très académi-que et théorique. En réalité, chaque bon ingénieur sedécidera pourtant, intuitivement ou consciemment,sur la base de tels critères et considérations. Des cir-constances et événements invraisemblables sontconsciemment exclus de toute considération plusavancée. Les considérations de type coûts-profits-

risques devraient être, avec plus de force qu’habi-tuellement, portées à la connaissance de l’ingénieurdans la résolution de problèmes constructifs. Ceci estparticulièrement le cas en géotechnique où la poten-tialité d’incertitudes et de risques est élevée.

Un moyen utilisable dans la recherche des pointsfaibles à coûts et risques modérés est donné par laquestion d’une modification optimale du projet.Dans ce cas, tous les aspects touchants au projet deconstruction, y compris tous les délais, etc., sont àprendre en considération. On doit se poser la ques-tion suivante: quelles mesures devraient être pro-posées d’un point de vue technique d’ingénieur, siles coûts de réalisation pouvaient être augmentésde 10% par exemple ou, respectivement, devaientêtre abaissés de 10%?

9. Renforcement du sol de fondation

153

Figure 9.24 Figure 9.25

Page 144: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

La marge de manœuvre peut concerner dans ce casune modification de l’une des mesures citées briè-vement ci-après:

• reconnaissance du sous-sol ;

• examens de laboratoire;

• concept de la structure porteuse;

• affectation de l’ouvrage;

• système de la structure porteuse;

• prédimensionnement de la structure porteuse;

• dimensionnement de la structure porteuse;

• planification de la sécurité ;

• moyens pour assurer la sécurité ;

• surveillance et contrôles;

• conseils d’experts ;

• etc.

Il est intéressant de noter que l’on découvre trèsvite, dans ce type de problèmes, les moyens aveclesquels on pourrait atteindre une qualité maxi-male, en limitant au minimum les risques, ou dansd’autres cas quelles mesures d’économie devraientêtre prises en admettant certains inconvénients.

9.5.4 Moyens: méthode d’observation

Une tâche essentielle dans le processus de recher-che de solution d’infrastructure réside dans l’iden-tification, la quantification et l’acceptation cons-ciente des risques. La méthode coûts-profits doitsurtout montrer ce que l’on est prêt à prendre encompte comme risques, dans le sens d’une opti-malisation du problème. Dans l’enseignement clas-sique de la construction, il est peu parlé des risques.Ceux-ci sont pratiquement dans leur intégralité cou-verts par les notions de coefficient de sécurité(Normes SIA).

En géotechnique, les risques ne peuvent que rare-ment être éliminés dans une même proportion etceci pour des considération d’ordre économique. Onpense par exemple à l’assainissement d’un versanten glissement, rapide ou lent. La géotechnique pos-sède sa propre stratégie pour le traitement de cescas, résumée sous le terme méthode d’observation(Vollenweider 1994). Le terme méthode d’observa-tion n’est dans ce cas purement qu’un néologismepour désigner une manière d’agir ancienne, confir-mée et propre à l’ingénieur.

Dans la méthode d’observation, certains risques sontacceptés consciemment sur la base de réflexionscoûts-profits. Le point de départ de cette méthode estconstitué par le fait que, dans le domaine de l’exécu-tion des travaux ou du renforcement d’ouvrage, seu-les des affirmations en partie incertaines ou seulementrelatives à des probabilités sont possibles pour ce quiconcerne certaines assertions techniques. Au cours del’exécution des travaux ou aussi de l’utilisation del’ouvrage, des informations complémentaires sur lesvaleurs de détermination auparavant manquantespeuvent être obtenues. On pense dans ce cas à:• la composition et au comportement du sol de

fondation avant, pendant et à l’issue de l’exécu-tion des travaux;

• l’effet et à la portance des moyens de renforce-ment pour eux-mêmes et /ou en liaison avec lastructure porteuse à assurer ;

• aux problèmes liés à l’exécution, résultant d’uneexpérience insuffisante dans la mise en œuvredes moyens de sécurisation.

Ce processus dynamique de connaissance doit,dans la méthode d’observation, être intégré dans lastratégie destinée à assurer la qualité exigée. L’exé-cution des travaux ou l’utilisation de l’ouvragedevraient, dans la mesure du possible, fournir lesinformations qui manquaient.

9. Renforcement du sol de fondation

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Page 145: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

Le cas échéant, une modification, une adaptation ouun renforcement du projet de construction s’impo-sent au cours de ce processus décrit au sein de laméthode des observations.

Dans ce contexte, on peut citer par exemple les tra-vaux d’ancrage à l’aide d’ancrages précontraints, aucours desquels seul l’essai de mise en tension four-nit une donnée fiable sur la portance et où, si les exi-gences minimales ne sont pas remplies, des mesu-res complémentaires de renforcement ou de sécuritésont nécessaires. L’emploi de la méthode des obser-vations n’est cependant pas libre de toute contrainte.

En particulier, il est lié aux cinq hypothèses restric-tives, résumées en abrégé ci-après:

• Le risque encouru doit toujours demeurer en pro-portion avec le profit économique.

• Des limites préalables seront fixées en ce qui con-cerne le comportement du sol de fondation etcelui de l’ouvrage, pour le domaine de compor-tement acceptable et pour le domaine critique.Dans un cas (limites de l’intervention), elles nedoivent pas être dépassées.

9. Renforcement du sol de fondation

155

Figure 9.26

Page 146: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

• Des contrôles sont à planifier et exécuter pour lasurveillance du comportement du sol de fonda-tion et de la structure porteuse et la préventionde situations de risque.

• Des mesures constructives seront préparées ettoutes les mesures de sécurité nécessaires quipourraient exclure les cas de risque ou, au moins,en réduire les conséquences seront réservées.

• En ce qui concerne les risques admis, un accordclair sera conclu avec le mandant, respective-ment le maître d’œuvre, incluant la mention desconséquences et de leur coût.

L’emploi de la méthode d’observation présente desavantages économiques, spécialement dans la géo-technique. Elle exige cependant de l’ingénieur, uneanalyse complète des risques et une planification dela sécurité lors de l’élaboration du projet ainsi que,conséquemment, une surveillance de l’ouvrage lorsde l’exécution et de l’utilisation de l’ouvrage. Cesexigences sont plutôt inhabituelles.

Lors de l’utilisation de la méthode d’observation, ilest exigé beaucoup plus de l’ingénieur et ceci danstous les domaines par rapport au cas où il fournit,dès le tout début, une solution sûre mais, en contre-partie, peut-être non économique.

9. Renforcement du sol de fondation

156

Figure 9.28

Figure 9.27

Page 147: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.6 Calcul et dimensionnement

9.6.1 Avant-propos

Les réflexions ci-après, relatives au calcul et audimensionnement, n’ont qu’un caractère de prin-cipes de base. Ni les méthodes de calcul, ni celles dedimensionnement ne sont traitées en détail. Pour cespoints, il est fait référence à la littérature spécialisée,très abondante, et en premier lieu au GrundbauTaschenbuch (volumes 1, 2 et 3, quatrième édition,1991/1992) qui est remarquablement conçu. Ferontcependant ici l’objet d’un traitement les points spé-ciaux qu’il faut prendre particulièrement en considé-ration lors du dimensionnement de renforcements.

9.6.2 Précisions

Il est un principe en vigueur pour tous les problèmesde calcul et de dimensionnement géotechnique:considérer spécialement la précision d’un calcul entenant compte de la précision des hypothèses demodèle et de calcul faites se rapportant au problèmeeffectif à traiter. Dans bien des cas, la possibilité depouvoir mieux solutionner un problème de dimen-sionnement à l’aide d’un calcul très affiné est sanc-tionnée radicalement. La pression active des terressur une paroi de soutènement, les tassements d’unefondation ou la capacité portante d’un pieu sont, entant que problème numérique, calculés avec unegrande précision. La définition des valeurs de base,par exemple le choix correct et adapté au problèmedu modèle de sol et des propriétés de matériauxcaractérisant de manière fiable le comportement dece sol, présente des difficultés bien plus impor-tantes. En outre, la portance de certains élémentsporteurs d’infrastructure, comme par exemple lesmicropieux ou les ancrages, ne peut de toute façonpratiquement être déterminée que sur la base del’expérience empirique ou des essais de portance.Les calculs géotechniques ne permettent là que biendifficilement d’atteindre l’objectif. Il faudra toujoursen tenir compte de manière réaliste lors du dimen-sionnement d’éléments porteurs en géotechnique.Avant d’entreprendre un calcul statique pour ledimensionnement d’une structure, on devrait tou-jours s’interroger sur l’exactitude et la fiabilité desvaleurs de calcul et de dimensionnement, ainsi quesur le modèle de calcul. Une bonne «solution d’ingé-nieur» requiert une balance harmonieuse de tousces facteurs.

9. Renforcement du sol de fondation

157

Figure 9.30

Figure 9.29

Page 148: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

9.6.3 Méthodologie du dimensionnement

Les considérations valables pour le dimensionne-ment d’éléments d’infrastructure de renforcementd’une structure porteuse existante sont en principeidentiques à celles valables pour le dimensionne-ment d’une nouvelle structure. La démarche de cal-cul suit en général et de manière itérative les étapessuivantes:

• définition des situations de risque;

• sélection des situations de risque;

• choix des mécanismes de ruine;

• choix des paramètres de dimensionnement ;

• calcul des sollicitations dans l’élément porteur ;

• dimensionnement de l’élément porteur.

Chacune des étapes précitées est entachée de cer-taines imprécisions, incertitudes ou situations floues,qui seront à couvrir par des mesures et prescriptionsde sécurité. Le processus du choix du type de cons-truction et de son dimensionnement est plusieursfois itératif et ne peut que rarement être conclu rapi-dement. Il faut normalement examiner plusieurssituations de risque et, également, plusieurs méca-nismes de ruine pour le dimensionnement de lastructure porteuse ou de l’un de ses éléments.

En ce qui concerne le déroulement du dimensionne-ment, les mêmes considérations s’appliquent aussibien au cas d’ouvrages existants qu’à celui de nou-veaux ouvrages. On peut donc se référer, pour ce quiconcerne ces objets, à l’enseignement, à la littéra-ture et à la pratique correspondante.

Sur trois points cependant, le dimensionnement durenforcement d’une structure existante diffère trèsconsidérablement de celui d’une structure nouvelle,à savoir :

• la recherche et l’évaluation du comportementporteur;

• le choix des principes de sécurité pour couvrir lesincertitudes;

• la prise en compte des réserves de résistances.

9. Renforcement du sol de fondation

158

a) Le comportement porteur

Comme déjà exposé, des informations précieusessur les paramètres essentiels de dimensionnementet sur le comportement porteur peuvent être tiréesd’un relevé de l’état et de mesures effectuées surl’ouvrage existant. Dans de nombreux cas, la qua-lité de ces informations est un peu meilleure quedans le cas comparable du dimensionnement d’unestructure nouvelle. Les données sont corroboréespar l’existence et le comportement de la structure.De cette façon, certaines incertitudes peuvent êtreéliminées.

Dans le cas d’un ouvrage existant, il est possible deprocéder à partir d’un point fixe vérifié dans lamatrice «sollicitation de la structure – comporte-ment de la structure». Une interpolation ou uneextrapolation du comportement de la structure sou-mise à des modifications de charges ou des chan-gements constructifs est possible dans ce cas. Pourcette raison, il est généralement plus facile de men-tionner des mesures qui améliorent nettement laqualité de l’ouvrage. Il faut profiter de cet avantageincontestable lors du dimensionnement du renfor-cement d’une structure existante.

Figure 9.31

Page 149: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

b) Principes de sécurité

Lors du dimensionnement d’une structure ou del’un de ses éléments, les insécurités sont à couvrirgénéralement par les mesures de sécurité qui s’yrapportent. Il faut penser ici aux facteurs suivantsqui influencent le dimensionnement et le compor-tement d’une structure:

• simplification des situations de risque;

• simplification du modèle des actions;

• simplification du modèle de calcul ;

• dispersion des valeurs de dimensionnement ;

• précision du calcul ;

• tolérances d’exécution;

• imprécision de l’exécution.

Selon les normes SIA, toutes les imprécisions etinsécurités sont couvertes par les choix des valeursde dimensionnement et des coefficients spécifiquesde sécurité. Dans le cas d’un renforcement d’unestructure existante, la nécessité d’une prescriptionde sécurité correspondante tombe, au moins par-tiellement. Ainsi peuvent être vérifiés, par exempleà l’aide d’une calculation de type récurrent appli-quée à l’ouvrage existant, aussi bien le modèle decalcul que certaines valeurs de dimensionnement.Ces grandeurs influentes (simplification, modèle decalcul, dispersion des grandeurs de dimensionne-ment) ne demandent pour cette raison aucune pres-cription de sécurité ou alors des valeurs réduites.

9. Renforcement du sol de fondation

159

Figure 9.32

Page 150: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

c) La réserve de résistance

En comparaison avec le dimensionnement de nou-velles structures, celui du renforcement de struc-tures existantes se distingue en général aussi par laprescription de réserves de résistance. Pour desstructures, un certain renforcement des élémentsporteurs respectivement une augmentation de lasécurité structurale n’entraîne que des coûts sup-plémentaires modérés. A partir de considérationsdu type coûts-avantages, il est pour cette raison,tout à fait opportun et utilisé comme tel dans la pra-tique de prendre une partie de la résistance por-teuse comme réserve pour des événements, res-pectivement des risques imprévisibles.

Pour des ouvrages existants, un renforcementmodéré entraîne dans de nombreux cas déjà desplus-values hors de proportion. Dans l’esprit d’uneoptimalisation des coûts, on demeurera donc trèsréservé sur l’appréciation de ces réserves. Dans cecas également, on préférera plutôt un dimensionne-ment selon la méthode des observations à undimensionnement couvrant toutes les situations derisques. Ici encore, le choix judicieux du niveau desécurité sera fonction du cas particulier, en considé-rant l’influence de toutes les valeurs déterminantes.

9.6.4 Recommandation pour le dimensionnement

Dans le cas où une structure porteuse présente uncomportement porteur insuffisant (cas A) ou danscelui où un tel comportement peut être attendu con-sécutivement à une sollicitation supplémentaire(cas B), la capacité portante de cette structure devraêtre améliorée ou sa résistance porteuse augmen-tée et ceci par des mesures de renforcement. Le faitque la qualité peut également être améliorée pard’autres voies (par exemple restriction d’utilisation,etc.) n’est mentionné ici que pour mémoire. Dans lecas d’une insuffisance au niveau des fondations, lesmoyens suivants peuvent entrer en ligne de comptepour le renforcement:

• élargissement de la fondation;

• reprise en sous-œuvre de la fondation;

• micropieux;

• pieux poussés;

• colonnes injectées (jetting, terrajet, etc.) ;

• injections du sol.

9. Renforcement du sol de fondation

160

Dans le cas d’une sécurité insuffisante quant à larupture du terrain ou dans celui d’une stabilisationd’un versant en mouvement, on peut mentionnerles procédés suivants pour améliorer la qualité :

• ancrages;

• clouages;

• goujonnages;

• assainissements;

• ouvrages de soutènement.

Quel que soit le moyen utilisé dans chaque cas par-ticulier, on recherchera par là, pour la structureconsidérée, une amélioration bien définie de la capa-cité portante, respectivement de la résistance por-teuse. Une considération globale suffit souvent pourle dimensionnement du renforcement. Une qualité

Figure 9.33

Page 151: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

suffisante doit dans ce cas être atteinte si la résis-tance porteuse existante est augmentée d’un degréprécis. Ce degré d’augmentation dépend essentiel-lement du cas de dimensionnement, du type destructure porteuse et des critères techniques et éco-nomiques, spécifiques à l’objet.

Dans les paragraphes suivants sont présentées desrègles simples de dimensionnement pour les deuxcas de dimensionnement mentionnés au chapitre 9.2.Les hypothèses et limitations correspondantes doi-vent cependant toujours être prises en considération.

a) Cas de dimensionnement A

Structure porteuse présentant des défauts et desdégâts. Un renforcement est nécessaire en raisondu défaut de qualité.

Principe de dimensionnement: ∆R = r · Ro

∆R : augmentation globale de la résistanceRo : résistance existanter : degré de l’augmentation de résistance

9. Renforcement du sol de fondation

161

La détermination de la valeur r s’effectue en prenanten considération les critères suivants, spécifiques àl’objet :• potentiel de dégât à l’objet ;• degré de l’endommagement;• caractéristique du mécanisme des dégâts ;• caractéristiques de la sollicitation;• prévisibilité de la sollicitation;• prévisibilité du comportement de la structure ;• possibilité d’un renforcement ultérieur de la

structure;• fiabilité du système de renforcement ;• âge de l’objet.

Cette détermination est faite avant tout à partir deréflexions du type coûts-profits (chapitre 9.5.3) et dela possibilité d’application de la méthode d’obser-vation (chapitre 9.5.4).

Valeurs indicatives pour r

Type d’ouvrage r

Fondation 0,10-0,40

Ouvrage en terre 0,05-0,25

Figure 9.35

Figure 9.34

Page 152: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

b) Cas de dimensionnement B

Structure porteuse ne présentant pas de défauts nidégâts. Un renforcement est nécessaire en raisond’un changement d’affectation.

Principe de dimensionnement: ∆R = s · ∆S

∆R : augmentation globale de la résistance∆S : sollicitation supplémentaire actualiséeSo : sollicitation totales : degré de couverture de la sollicitation

supplémentaire

9. Renforcement du sol de fondation

162

Valeurs indicatives pour s

Sollicitations supplémentaires ∆S/So s

faible : ∆S/So < 10% 0

moyenne : 10% < ∆S/So < 20% 0-0,5

élevée : ∆S/So > 20% 0,5-1,0

Les critères déjà cités pour le cas de dimensionne-ment A sont valables pour le choix de la valeur s.

Dans des cas particuliers, la valeur s peut s’écartercomplètement des valeurs indicatives données:

• vers le bas dans le cas d’un sol de fondation trèsrésistant (par exemple rocher) ;

• vers le haut dans le cas d’un sol de fondation pré-sentant une sensibilité de structure (par exemplecraie lacustre).

Pour ce qui concerne le dimensionnement du ren-forcement approprié au problème, les difficultés ontdéjà été évoquées dans les chapitres 9.2.2. et 9.3.2.

c) Cas de dimensionnement C

Combinaison des cas A et B: structure porteuse pré-sentant des défauts et dégâts ainsi qu’un change-ment d’affectation.

Principe de dimensionnement: ∆R = r · Ro + s · ∆S

La détermination de r et de s s’effectue selon lesdonnées pour les cas de dimensionnement A et B.

Figure 9.37

Figure 9.36

Page 153: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

d) Limitations des règles de dimensionnement

Les indications pour le dimensionnement, cas A àC, sont valables avec les hypothèses et limitationssuivantes:

• Pour les structures du type A (défauts et dégâts),on fera l’hypothèse de l’existence d’un état limite.Pour les structures du type B (aucun défaut nidégât), on ne supposera, en l’absence de connais-sance contraire qui le confirmerait, qu’une faibleréserve de portance pour une sollicitation sup-plémentaire.

• La détermination de la résistance Ro existantes’effectuera en prenant en compte les valeursactualisées, issues d’un calcul récurrent.

• La sollicitation So et ∆S sera définie sur la basede la norme SIA 160 en prenant en compte lesvaleurs actualisées.

• La vérification, par des calculs de mécanique dessols à partir de paramètres de dimensionnementbien étalonnés, ne doit pas conduire à un dimen-sionnement différent du renforcement.

• La compatibilité entre la structure et son renfor-cement est assurée.

• Au moyen des mesures de renforcement, on cher-chera à atteindre une augmentation de la résis-tance, en considérant pour cela les exigences desnormes de construction.

9.7 Remarque finale

Il n’est pas rare qu’un renforcement d’infrastructuredoive être déterminé sur la base d’une évaluationessentiellement qualitative. Il suffit de penser dans cecadre à la reprise en sous-œuvre d’un bâtiment ou aurenforcement d’une paroi rocheuse par des ancrages.Des considérations de mécanique des sols livrentcertes des précieux points de référence mais ils nepeuvent cependant jamais constituer l’unique critèreconduisant à une décision exacte. Dans ce cas, la déci-sion est aussi supportée par une expérience empi-rique, des considérations comparatives et la pureintuition de l’ingénieur. Il est important alors que lesrisques soient reconnus, que le risque accepté soitlimité et que la situation de risque soit surveillée pardes mesures (méthode d’observation). Dans le casd’un doute, l’engagement d’un collège d’experts pourclarifier la situation et limiter la responsabilité peutconstituer une mesure appropriée.

9. Renforcement du sol de fondation

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Page 154: Evaluation des structures porteuses, Système de renforcement

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9. Renforcement du sol de fondation

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