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trimestriel • 9,5 Revue des professionnels des espaces naturels 27 juillet 2009 Une démarche opérationnelle Définir le Goûtez les paysages Sites remarquables du goût Caractère d’un territoire Accès libre à l’information environnementale Appliquer la convention d’Aarhus et la directive Inspire Initiatives et partenaires Droit et police de la nature

Définir le Caractère d’un territoire · Accès libre à l’information environnementale ... les États-Unis ou l’Afrique du Sud, en France chercheurs et pêcheurs ne se parlent

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trimestriel • 9,5 €

Revue des professionnels des espaces naturels27

juillet 2009

Une démarche opérationnelle

Définir le

Goûtez les paysagesSites remarquables du goût

Caractère d’un territoire

Accès libre à l’information environnementaleAppliquer la convention d’Aarhus et la directive Inspire

Initiatives et partenaires

Droit et police de la nature

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juillet 2009 • n°27

Tarif des abonnements : 1 an (4 numéros) : 33,50 €ISSN N° 1637-9896 - Commission paritaire 0510 G 83179

3 ÉDITO Opter pour l’intelligence de l’espace.

4 L’ACTU

10 DES MOTS POUR LE DIREBon état écologique.

DOSSIER

sommaire Photo de couverture : Parc national de la Guadeloupe© Patrick Desgraupes

[ Les propositions de sujets d’articles àtraiter dans la revue sont à adresser à :[email protected]

ACCUEIL • FRÉQUENTATION

28 L’observatoire Bountîles prône le sur-mesure.

DROIT • POLICE DE LA NATURE

30 Accès libre à l’informationenvironnementale.

MANAGEMENT • MÉTIERS

32 La mission culture au cœur d’un parc.

34 Des compétences pour faire face au changement.

INITIATIVES • PARTENAIRES

35 Patrimoine géologique atout du développement.

36 Goûtez les paysages.

PÉDAGOGIE • ANIMATION

37 Communiquer sur la biodiversité.

AILLEURS

38 Mauritanie. Dix ans de surveillanceparticipative.

40 LECTEUR PENSEUR

42 PARUTIONS

43 L’AGENDA

35

11

36Sites remarquablesdu goût Goûtez les paysages

Le patrimoinegéologique atout dudéveloppement

DossierDéfinir le

caractère d’unterritoire

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© Philippe Fretault

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Définir le caractère d’un territoireUne démarche opérationnelle

11 Esprit es-tu là?12 Vingt ans après, Beauport fidèle

à lui-même.13 Connais-toi toi-même.14 Explorer l’imaginaire pour orienter

le développement.16 Parc national de La Réunion.

Encadrer la gestion par un texte fondateur.17 Parc national de la Vanoise.

Les stations de ski, élément du caractère?18 Devant les tribunaux. Agir pour protéger

un territoire en s’appuyant sur son caractère.

19 Sites classés.20 Au cœur d’une question juridico-politique.21 Convenons de matérialiser l’immatériel.

ÉTUDES • RECHERCHES

22 Surveiller les limicoles pour comprendre le littoral.

GESTION PATRIMONIALE

24 La fin programmée de l’ibis sacré en France. « Les télévisions voulaient filmer les tirs. »

MÉTHODES • TECHNIQUES

25 Le bon chemin pour restaurer les sentiers.

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PRÉSIDENT DU RÉSEAU

DES GRANDS SITES

DE FRANCE,DÉPUTÉ DE SAÔNE

ET LOIRE

>>> Mél : [email protected]

GÉRARD VOISIN

éditorial

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Cent ans séparent la ratification par la France de la Convention européennedu paysage1 de la première loi sur la protection des sites, intervenue en1906 (suivie par la loi du 2 mai 1930). Depuis cette date, 2 700 sites ont

été classés et 4 800 sites ont été inscrits pour leur valeur paysagère. Ilscouvrent aujourd’hui au total plus de 4 % du territoire. Une grande partie d’entreeux est intégrée dans le réseau Natura 2000, comme ils le seront dans la trameverte et bleue, mettant ainsi en exergue le lien entre diversité paysagère etbiodiversité.Ce bilan, nous le devons à des générations d’inspecteurs des sites quiidentifient les sites remarquables, en explicitent les valeurs, conduisent lesprocédures d’inscription et de classement, gèrent les autorisations de travaux,réfléchissent en partenariat avec les élus et les acteurs locaux aux modesappropriés de gestion.À l’aune de l’expérience des grands sites dont l’attractivité touristique estparticulièrement forte, quelques enseignements peuvent être tirés et nous aiderà mieux gérer l’ensemble des territoires.On retiendra d’abord que la protection d’un site n’interdit pas sondéveloppement ou son évolution. Le classement ne signifie ni immobilisme, niinterdiction de tout aménagement ou construction. Simplement, pour êtreautorisées, les interventions doivent être pensées, argumentées, réalisées enlien direct avec les valeurs du site et les caractéristiques paysagères qui ontmotivé son classement, et dans le cadre d’un projet global, créatif et sensible.On constatera ensuite que les démarches paysagères, parce qu’elles reposentsur une compréhension fine des caractéristiques historiques, géographiques,écologiques et fonctionnelles, sont à même d’enrichir considérablementl’approche des outils de planification du territoire (Scot, Plu) et les décisionsd’aménagement à plus petite échelle.La question n’est pas celle du montant de ces démarches. Il est dérisoirecomparé au coût économique, social et écologique lié au gaspillage des terres,à l’étalement urbain ou encore au désastre des entrées de ville, pour ne prendreque ces exemples.Les méthodes existent, les savoir-faire des professionnels du paysage aussi. À nous tous, élus, État, décideurs, de faire le choix d’une « réelle intelligence del’espace ». ■

© Jean-Pol Grandmont - Wikipedia

DIRECTEUR DE LA PUBLICATIONYves Vérilhac

COMITÉ ÉDITORIALCoordination : Michelle Sabatier• Secrétariat : Gwénaëlle Arons• Rubriques : Actualités MarcMaury • Études, RecherchesJohn Thompson • Gestionpatrimoniale Anne Douard,Hélène Michaud, NathalieBerger • Accueil, FréquentationAnne Vourc’h, Armelle Hélou •Pédagogie, Animation NicolasGérardin • Management,Métiers André Léchiguero •Droit, Police de la nature Louis-Gérard d’Escrienne, HélèneTripette • Méthodes,Techniques BernardCommandré, Véronique Vinot •Initiatives, Partenaires CécileBirard, Bruno Mounier, ThierryMougey • Aménagement,Développement, TerritoireArnaud Callec, Annick Faucon •Ailleurs Christian Perennou.

RÉDACTIONDirectrice de la rédaction :Michelle SabatierRédactrice en chef : Moune PoliMaquette : Vanina Bellini •Camille Prosperi • Rédaction :Moune Poli • Joël Demasson•Correctrice : Magali FloriMediaterra Route Royale 20600 Bastia Mél : [email protected]él. : 0495311221

ADMINISTRATION,ABONNEMENTSMediaterra Laetizia GiampietriRoute Royale - 20600 Bastia Tél. : 0495311221

ÉDITEUR AtenAtelier technique des espaces naturelsEnsam - 2 place Viala34060 Montpellier cedex 2Tél. : 0467043030

IMPRESSIONImprimerie Chirat744, rue de Sainte-Colombe42540 Saint-Just-la-Pendue

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 3

1. Le 17 mars 2006,la France

reconnaissait lepaysage comme unevaleur essentielle du

cadre de vie et unenjeu économique

majeur et s’engageaità mieux le protéger,gérer et aménager,

qu’il soit rural ouurbain, remarquable

ou ordinaire.

Opter pour l’intelligence de l’espace

POINTE DE LAPARATA, ÎLES

SANGUINAIRES(AJACCIO),DERNIERS

TERRITOIRES ÀAVOIR REJOINT LE

RÉSEAU DESGRANDS SITES DE

FRANCE.

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4 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

RÉSERVES NATURELLESNATIONALES Quatrenouvelles réservesnaturelles nationales ontvu le jour. Étang de Saint-Paul(Réunion), décret n°2008-4 du 2 janvier2008, 166e réserve naturelle nationale,447 ha • Grotte et pelouses d’Acquin-Westbécourt et des côteaux de Wavrans-sur-l’Aa (Pas-de-Calais), décret n°2008-219 du 5 mars 2008, 167e réservenaturelle nationale, 54 ha • Étangs duRomelaëre (Nord - Pas-de-Calais), décretn°2008-220 du 5 mars 2008, 168e réservenaturelle nationale, 104 ha • Astroblèmede Rochechouart-Chassenon (Haute-Vienne et Charentes), décret n°2008-977du 5 mars 2008, 169e réserve naturellenationale, 50 ha. >>> www.ecologie.gouv.fr

SCIENCES Premierobservatoire desescargots. En mars dernier, leMuséum national d’histoire naturelle etl’association Noé Conservation lançaientle premier Observatoire des escargots etlimaces. Cette nouvelle initiative fait suiteà l’Observatoire des papillons de jardinsqui, depuis quatre ans maintenant, épouseavec succès et pertinence la mêmephilosophie de participation du grandpublic à la science. Les deuxobservatoires visent la mise en place d’unréseau de surveillance nationale desespèces communes de papillons de jour,d’escargots et de limaces dans les jardinsau service de la biodiversité. >>> www.noeconservation.org

MARCEL-PIERRE CLÉACHSénateur, il vient de publier un rapport “Marée amère.Pour une gestion durable de la pêche”.

«La ressource halieutique est en danger »Dans votre rapport, vous proposez de rétablir le dialogue entre pêcheurs,

scientifiques et décideurs et, pour cela, d’user de fortes incitations administratives etfinancières. Cette proposition résoudrait-elle la question de la ressource halieutique?

Contrairement à plusieurs grands pays comme le Canada, les États-Unis ou l’Afriquedu Sud, en France chercheurs et pêcheurs ne se parlent pas assez. Ils ne se com-prennent pas et entrent en conflit. Pourtant, aucune gestion durable des pêches n’estpossible si pêcheurs et scientifiques ne partagent pas une certaine communautéde vue. Il est donc absolument nécessaire qu’ils soient incités à se retrouver surdes projets communs. Cela peut passer par des incitations financières tels lescontrats bleus ou, pour les chercheurs, par le fait de reconnaître dans leur notationce type d’activités en partenariat.Parmi les outils imaginables, un existe déjà : les aires marines protégées (AMP). Sileur gestion est bien conduite, elles seront un point de rencontre et un lieu de réa-lisation d’initiatives. En effet, pour bien pêcher, il faut du poisson en abondance etdonc un environnement sain et préservé. Cet objectif est intimement lié à uneconnaissance plus poussée des milieux : l’halieutique doit être une priorité de larecherche. En effet, la mer fournit environ 20% des protéines animales ; l’humanitéest dépendante de cette ressource. L’aquaculture ne peut la remplacer.Mes propositions n’ont pas unanimement été bien reçues par les intéressés.Cependant, l’essentiel est que l’analyse soit partagée et que les questions soientposées. En effet, la pêche connaît une crise grave et prolongée. Celle-ci est parti-culièrement complexe et possède des dimensions multiples : scientifiques, éco-nomiques, administratives, politiques… Le dernier rapport de l’organisation del’Onu pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) vient de souligner que, au niveaumondial, l’activité de pêche, hors amont et aval, coûte plus cher en subventions etpertes de revenus qu’elle ne rapporte par la valeur des produits débarqués. Maissi on ne fait rien, l’issue est malheureusement connue : la fin de la pêche. La prisede conscience de la gravité de la situation est donc primordiale pour susciter uneaction collective appropriée. L’objectif est que la pêche reste une activité rentablequi permette de nourrir les populations dans la durée. Il faut donc que les stockshalieutiques soient bien connus, bien gérés et maintenus à un niveau suffisant. ■

>>> Mél : [email protected]

échosdesprosL’actu

Question à

Un fruticicola fruticum.

COMMUNICATION Expo durable dans le métro

La station de métro parisien Sèvres-Babylone de la ligne 10 accueille depuisavril et pour une durée d’un an l’exposition «Passez au durable, ça marche ! ».À travers huit vitrines, les thématiques de la consommation durable sont inter-

prétées de manière artistique. De part et d’autre de chaque vitrine, des pan-neaux fournissent aux voyageurs des informations sur les éco-gestes à adopterau quotidien. Pour la métamorphose de la station de métro, le ministère encharge de l’Écologie a choisi Bellinda, une jeuneartiste montpelliéraine active dans la culture gra-phique et le pop art. L’artiste revisite les thèmesde la consommation durable : l’habitat, l’énergie,les achats quotidiens, la biodiversité, le trans-port, les loisirs, l’eau, les déchets… ■>>> www.developpement-durable.gouv.fr/article.php3?id_article=4730&var_recherche=metro

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Le chiffre

POLITIQUES PUBLIQUES Les ateliers «Grenelle» désormais en œuvre dans les territoires

129 agendas 21 ont été examinés àla loupe par Entreprises, territoires etdéveloppement afin de mettre en lumière lesdomaines d’intervention les plus mobilisés par lescollectivités. 16 domaines sont issus du cadre deréférence du ministère de l’Écologie en matière dedéveloppement durable. Arrivent en tête :conservation de la biodiversité et préservation desressources naturelles • gestion responsable etservices au public • énergie • urbanisme,aménagement, logement • déplacement, transport,infrastructure. Moins souvent cités : accès à laconnaissance, solidarité et coopérationdécentralisée, développement économique,tourisme, sécurité, prévention des incivilités, sportset loisir, culture, santé. ■ La lettre du développement

local, hors-série «Développement durable », n° 3 - 2009.

CONSERVATION Stratégienationale pour le grandtétras. Le ministère de l’Écologielance une stratégie nationale deconservation du grand tétras, espèceactuellement en déclin au niveaunational. Le groupement chargé de sonélaboration est constitué de la Liguepour la protection des oiseaux, l’ONF etRéserves naturelles de France. Leschasseurs et des représentants de laforêt privée sont également associés.Cette stratégie sera finalisée fin 2009.>>> www.developpement-durable.gouv.fr

«Le territoire est le laboratoire du Grenelle. » C’est fort de cette convictionqu’Hubert Falco, secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoire,a donné le coup d’envoi des Ateliers territoriaux du Grenelle. Dix terri-

toires volontaires, tant urbains que ruraux, ont été retenus pour accueillir cesateliers et faire travailler ensemble de jeunes professionnels achevant leur formationdans des écoles d’urbanisme, d’architecture et de paysage. Dans chaque terri-toire, une équipe associant un certain nombre de jeunes talents, aura à construireun projet novateur et durable, apportant des réponses concrètes aux enjeux duGrenelle. Ces différents projets, ayant vocation à servir d’exemples, devronttraiter de l’un au moins des thèmes suivants : étalement urbain, rénovationurbaine dans les secteurs anciens, paysages où s’inscrivent des activités de pro-duction d’énergies renouvelables ou de production pour circuits courts, trameverte et bleue.Cinq thématiques et dix territoires sont sélectionnés :• L’étalement urbain : région urbaine grenobloise, Marne, Brosse et Gondoire,Parc naturel régional Scarpe-Escaut, Pays de la Provence verte.• La rénovation urbaine et les secteurs anciens : Pays des Cévennes, Parc naturelrégional de la Brenne.• Les paysages de l’énergie : Parc naturel régional du Lubéron, Parc naturelrégional du Haut-Languedoc, Parc naturel régional de la Brenne.• Les paysages de la proximité : Parc naturel régional des Volcans d’Auvergne.• La trame verte et bleue : Parc naturel régional Normandie-Maine.Le site internet du ministère décline l’ensemble des projets en indiquant leursenjeux, objectifs, calendrier ainsi que le travail attendu. ■>>> www.developpement-durable.gouv.fr/article.php3?id_article=4689

Un Parc national méditerranéen, en projet sur le site emblématique des

Calanques de Marseille et de Cassis devrait voir le jour fin 2010 selon le ministre en charge

de l’Écologie. ■ Préparez un plan d’administration exemplaire

visant à prendre en compte les object i fs d'un développement durable dans le

fonctionnement des services de l'État. C’est ce qu’a demandé François Fillon à chacun de

ses ministres dans une ci r culai re du 3/12/08. ■ Le comité pour la

biodiversité, qui vise à mettre en œuvre la Stratégie nationale pour la biodiversité,

est composé de quatre collèges : parlementaires et élus, associations de protection de

l’environnement, syndicats employeurs et salariés, chercheurs et scientifiques. ■

texto

CONSERVATION Internet pourrecenser la restaurationécologique des coursd’eau. Une nouvelle plate-formeinternet permet de recenser lesopérations de restauration écologique descours d’eau en France. Il s’agit d’unpremier recensement national. Ce projet,universitaire, s’inscrit dans le cadre de laparticipation française à un programmeeuropéen - IWRM-Net/Forecaster. >>> www.restauration.georiv.fr

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 5

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Grandtétras.

Le Parc naturel régionalScarpe-Escaut travaille

sur la notiond’étalement urbain.

Une thématique forte.Chaque année, 60000

hectares de surfacesagricoles disparaissent.Un bétonnage trois fois

plus important enFrance qu’en

Allemagne.

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CONSERVATION Une espèce de mammifère sur dix menacée en France métropolitaine

Le nouveau chapitre de la liste rouge desespèces menacées révèle : 11 espèces demammifères sur 119 sont menacées de dis-

parition du territoire métropolitain (10 espècescontinentales et 1 marine). 119 espèces de mam-mifères (99 continentales et 20 marines) ont étépassées au crible.Sur les 33 espèces de chauve-souris évaluées, 7figurent dans la catégorie « quasi-menacée »,

notamment en raison du déclin de leur population, et 4 autres sont menacées d’ex-tinction. C’est le cas du minioptère de Schreibers, classé « vulnérable », et du rhi-nolophe de Méhely, «en danger critique». La situation actuelle de ces espèces estla conséquence de nombreuses menaces : dérangement dû à une fréquentationaccrue des principaux gîtes, dégradation de leurs habitats causée par l’urbanisationet raréfaction des proies due à l’utilisation intensive de pesticides.Concernant les cétacés, la moitié des espèces a dû être placée dans la caté-gorie « données insuffisantes », en raison du manque de données disponibles.Pourtant, certains de ces mammifères marins pourraient bien être menacés enFrance, car ils sont affectés par de multiples pressions incluant la pollution sonoredue au trafic maritime et aux sonars militaires, les pollutions chimiques, les cap-tures accidentelles liées à l’utilisation de filets maillants et la surpêche affai-blissant leurs ressources alimentaires.Enfin, d’autres espèces, autrefois présentes sur le territoire métropolitain, enont aujourd’hui totalement disparu. C’est le cas du bouquetin des Pyrénées, dela baleine des Basques, et du phoque moine, disparu des côtes provençalesdans les années 30 et de Corse à la fin des années 70.Pour répondre à certaines situations alarmantes, des plans de restauration sontmis en œuvre en faveur de différentes espèces, comme le vison d’Europe et legrand hamster, tous deux «en danger » en France. À cet égard, la loutre d’Europeet le bouquetin des Alpes sont de bons exemples de réels progrès obtenus grâceà une action des pouvoirs publics et des associations de protection de la nature.En situation précaire il y a encore quelques décennies, la loutre, aujourd’huiclassée en «préoccupation mineure », recolonise progressivement différents sec-teurs du territoire. Et après avoir quasiment disparu de l’arc alpin français, lebouquetin des Alpes a désormais repeuplé plusieurs départements.Après les reptiles, les amphibiens, les oiseaux nicheurs et les mammifères de métro-pole, les prochains chapitres de la liste rouge porteront sur les poissons d’eaudouce, les crustacés et les orchidées de métropole, ainsi que sur l’outre-mer. ■>>> http://www.uicn.fr

POLITIQUE PUBLIQUE La Convention alpinecontre le changementclimatique. La 10e conférence de laConvention alpine (1991) a réuni, à Évianles 11 et 12 mars dernier, les huit Étatsparties prenantes (Allemagne, Autriche,France, Italie, Lichtenstein, Monaco,Slovénie, Suisse). Un plan d’action pour lalutte contre le changement climatique aété adopté (le massif alpin est trois foisplus exposé que la moyenne). Lesministres des États alpins ont notammentdécidé de travailler à la régulation dutransit des marchandises, de valoriser lesopérateurs touristiques proposant desséjours « économes en carbone », deréaliser une trame verte transalpine, demettre en place une approche communedu suivi des forêts de montagnes.>>> www.developpement-durable.gouv.fr

POLITIQUE PUBLIQUE Le Parcnational de forêt feuilluede plaine cherche sonsite. Prévu par le « Grenelle del’environnement », le Parc national de forêtfeuillue de plaine en France métropolitaineverra-t-il le jour sur le site de Bitche(Moselle), de Châtillon, Chateauvillain etArc-en-Barrois (entre Côte-d’Or et Haute-Marne) ou de Verdun (Meuse) ? Laconsultation a été officiellement lancée enmars dernier sous l’égide des préfets. Lescopies ont été rendues en juin en vue duchoix par le gouvernement de la zonefinalement retenue. Un GIP depréfiguration devrait être mis en place dèsla fin de l’année. >>> www.developpement-durable.gouv.fr/article.php3?id_article=4461

échosdesprosL’actu

6 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

Le sited’Arc-en-Barrois.©

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Mammifères continentaux

NT : quasi-menacéeLC : préoccupation mineure

DD : données insuffisantes

RE : éteinte en métropole

CR : en danger critique d’extinction

EN : en danger

VU : vulnérable

�© Dodoni - wikipédia

Leminioptère

deSchreibers,

menacéd’extinction.

Répartition des mammifères en fonction des catégories de la liste rouge�

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 7

En vueRESPONSABILITÉ ENVIRONNEMENTALE

Dysfonctionnements hydrologiques et tourisme

Une forte pression touristique peut amener des dysfonctionnements hydro-logiques et une dégradation de l’état des milieux. Avec 561 lits/km2, la régionLanguedoc-Roussillon (Petite Camargue, étangs de Thau, de l’Or, de Canet,

du Narbonnais)… est la première concernée. Les risques sont indirects : pollutionpar les eaux usées, disparition de milieux connexes en raison d’aménagement. Après le Languedoc-Roussillon viennent la Bretagne (156 lits/km2), le Poitou-Charentes (128 lits/km2), les Pays de la Loire (122 lits/km2) ; des zones qui abri-tent d’importantes surfaces de sites classés Natura 2000 (78% de leur super-ficie sur le littoral atlantique, 85% sur la Méditerranée) avec des habitats et desespèces d’intérêt communautaire, rares, menacés ou en danger d’extinction.D’une manière générale, 20% de la capacité d’hébergement en France concerneles zones humides (4 millions de lits) essentiellement dans les communes du lit-toral : la moitié pour la Manche et la mer du Nord, le quart pour la Méditerranée(avec une densité huit fois supérieure à la moyenne nationale). ■ Source Ifen -Observatoire national des zones humides - Fiche indicateur, janvier 2009.

Métiers&concoursUn recrutement d’agents techniques del’environnement (144 postes prévus) et detechniciens de l’environnement

(73 postes prévus) est en cours. Leconcours devrait avoir lieu à

l’automne 2009, et en 2010.Les postes à pourvoir sontprévus à l’Office national dela chasse et de la faune

sauvage, l’Office national del’eau et des milieux aquatiques et

les parcs nationaux. ■ Bernard Commandré - Aten >>> http://www2.equipement.gouv.fr/recrutement/home.htm

Gemina est en ligne. Cette base de données référence les documents traitant de la gestion des milieux naturels de

Rhône-Alpes et de Suisse. >>> www.gemina.fr/Alexphp ■ Le Parc naturel régional des Pyrénées

ariègeoises a été crée le 28 mai dernier. C’est le 46e PNR de France. ■ Pollution lumineuse. Création, le 11 juin

dernier, d’une réserve du ciel étoilé au pic du Midi (Hautes-Pyrénées). >>> 01 43 38 92 22 ■ La chaudière biomasse

de Cransac (Midi-Pyrénées) est alimentée par des noyaux de fruits. Inauguré en avril, le réseau de chaleur consomme 300 tonnes

de noyaux et produit 709 MWh par an. >>> [email protected] ■ L’État vient de créer un fonds dédié à

la recherche scientifique et à la sensibilisation au sein des réserves naturelles, doté en 2009 de 300000 €.

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CONSERVATION Quel bilan pour les oiseaux?

La directive Oiseaux du 2 avril 1979 fête son 30e anniversaire. Le statut deprotection de nombreuses espèces prioritaires s’améliore en France. Sur les88 espèces de l’annexe 1 qui nichent en France, 37% sont en augmenta-

tion, grâce à des mesures de protection ciblées sur des espèces spécifiques(vautour moine, cigogne, grue cendrée) mais aussi du fait de la création d’espacesprotégés. Néanmoins, 17% de ces 88 espèces sont en déclin, et deux d’entre elles,le traquet rieur et le pluvier guignard, ont disparu de France.Dans le même temps, la situation se dégrade pour les oiseaux communs, notam-ment ceux présents dans les milieux agricoles (alouette des champs, bruantjaune, perdrix grise, caille des blés…). ■ Source LPO.

Tendance des populations

Toutes espèces(287)

Espèces enAnnexe 1

dir. Oiseaux(88)

Déclin 33% 17%

Augmentation 28% 37%

Stable - fluctuant 17% 25%

Inconnu 20% 21%

Tendances d’évolution des populations d’oiseaux nicheurs de France

Bruant jaune.

DROIT Responsabilitéenvironnementale : le décret publié. Le décretrelatif à la prévention et à la réparationde certains dommages causés àl’environnement, qui rend applicable la loisur la responsabilité environnementale du1er août 2008, a été publié au JO.Constituent des dommages causés àl’environnement : les détériorationsmesurables de l’environnement qui créentun risque d’atteinte grave à la santéhumaine du fait de la contamination dessols, qui affectent gravement l’étatécologique des eaux, ou le maintien ou lerétablissement des espèces ou de leurshabitats dans un état de conservationfavorable. La responsabilité est reconnue,y compris en l’absence de faute ou denégligence, pour une série d’activitésprofessionnelles dont la liste est fixéepar le décret. >>> www.legifrance.gouv.frDécret n°2009-468 23 avril 2009

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ALPES Une analyse démographiquerassurante pour l’avenir du gypaète barbu

La réintroduction dugypaète barbu est unsuccès. Exterminés il

y a un peu plus d’un siècle,réintroduits à grands fraisdès 1986, à raison de 2 à 10 oiseaux lâchés parannée, ils sont aujourd’huiune dizaine de couples ter-ritoriaux dans les Alpes. Deschercheurs de l’universitéde Berne et de la stationornithologique suisse vien-

nent de publier les résultats d’une modélisation démographique qui évalue leschances de survie du gypaète barbu dans les Alpes. Les perspectives semblentexcellentes, pour autant, toutefois, que la mortalité des oiseaux n’augmentepas dans le futur. Parmi les menaces potentielles, il y a l’utilisation illégale dupoison qui tend à se répandre dans la lutte clandestine contre le retour du loup :des appâts empoisonnés déposés dans la nature risquent aussi d’intoxiquer lescharognards, dont le gypaète. ■ Raphaël Arlettaz Professeur de biologie de la conservation. Université de Berne (Suisse). >>> Mél : [email protected]

8 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

RHÔNE-ALPES Valoriserl’adhésion à Natura 2000.Une gamme de panneaux d’informationest proposée aux bénéficiaires decontrats Natura 2000, ainsi qu’auxcommunes, afin de promouvoir leurengagement. La démarche estexpérimentale, elle vise à sensibiliser legrand public à l’intérêt de productionsrespectueuses des milieux. Uneévaluation sur les sites participant au testsera bientôt réalisée. Une expériencesimilaire est en cours en Franche-Comté.>>> Audrey Orcel, David Marailhac - Diren Rhône-Alpes

LOT Natura 2000 enfants.Le bulletin d’actualité Natura 2000 desCausses du Quercy n’oublie pas les plusjeunes. Sous forme de jeu, une rubrique

entière leur est consacrée (relieles points, labyrinthe...). Ils

sont également invités àchoisir leur mascotte. Uneillustratrice a dessiné cinq

des espèces d’intérêtcommunautaire présentes sur

les sites du territoire. Les petitslecteurs doivent voter pour leur animalpréféré. >>> Amandine Bonnelles. Parcnaturel régional des Causses du Quercy.

CONSERVATION Un atlas desactions en faveur de labiodiversité. Le réseau descentres permanents d’initiatives pourl’environnement met en ligne une base dedonnées gratuite de ses actionscontribuant à améliorer la biodiversité. Ce site web permet d’identifier des savoir-faire, expériences et compétencesmobilisables dans les territoires.>>> www.atlas-biodiversite-cpie.fr

échosdes territoiresL’actu

© Laure Gomez

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ISÈRE Petite université du piafComme chaque année au printemps, la Ligue pour la protection des oiseaux de l’Isère a proposéla «Petite université du piaf » aux apprentis ornithologues. Cette formation à la découverte des chantsd’oiseaux a rassemblé une quarantaine de débutants : quatre séances en salle, deux ou trois sor-ties de terrain, un programme de reconnaissance de plusieurs dizaines d’espèces communes del’Isère. De longues séances d’écoute en milieu naturel ont permis à chacun de trouver son rythmede progression. Ambiance décontractée et souriante, voire contemplative… ■ Gérard Goujon>>> http://www.isere.lpo.fr

Gypaète barbu.

D’après la LPo, un récent projet d’installation sur le site du cirque deNavacelles d’une entreprise touristique de démonstrations de rapacescaptifs en vol (à destination du grand public) menace la survie du couple

d’aigles royaux installé sur place, ainsi que les circaètes, grands-ducs d’Europeet vautours fréquentant le secteur. Ces espèces sont menacées en France, ce quijustifie d’ailleurs le classement de ce territoire remarquable en site Natura 2000.Le vol de rapaces exotiques, au cœur du site de reproduction des aigles royaux,là où le vautour percnoptère semble préparer son retour, là où le circaète Jean-le-Blanc et les craves à bec rouge s’alimentent, perturberait ces espèces locales(notamment lors de leur période de nidification), entraînant leur disparition du siteà court terme. ■Bertrand Eliotout - LPO Grands Causses. >>> Tél. : 0565626140

LARZAC Le projet de volerie des aigles au cirquede Navacelles met les rapaces locaux en danger

Mésange bleue.

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- LPO

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 9

�NIÈVRE Chantiers naturepour les jeunes. Les jeunesNivernais peuvent désormais, durant une

période de vacancesscolaires, participer à deschantiers nature. Le résultatdoit être visible et pérenne.Le conseil général lance

cette expérience dans lecadre de sa politique Espaces

naturels sensibles. Le premierchantier qui s’est déroulé en février 2009sur le site du Coteau de Chaumois(commune de Parigny-les-Vaux) a permisde créer plusieurs petites mares desubstitution pour la reproduction dusonneur à ventre jaune. >>> [email protected]

VANOISE Le public invité aux Saisons du paysage

L’Observatoire photographique du Parc national de la Vanoise est conçupour reconduire des prises de vue à périodes régulières, à partir du mêmepoint de vue. Un volet rétrospectif offre une série de 230 images anciennes,

reconduites avec le même cadrage par les gardes-moniteurs du parc national. Lacomparaison permet de mesurer les transformations. Par ailleurs, 121 photo-graphies réalisées entre 2006 et 2008 par l’artiste Beatrix von Conta visent àtémoigner de l’état des paysages et à anticiper leurs évolutions. Le public pourraprendre connaissance de cette richesse photographique à l’occasion des Saisonsdu paysage 2009 (printemps, été). Expositions, soirées et randonnéesseront animées en juillet et août par ceux qui tissent un lien par-ticulier avec les paysages : les gardes-moniteurs du parc national.Un séminaire sur le paysage aura lieu à l’automne. ■

Programme sur : www.parcnational-vanoise.com

BOUCHES-DU-RHÔNE Les anciens marais des Baux de Provence réhabilités

La concertation autour des anciens marais des Baux de Provence ouvre unenouvelle phase d’intervention. Elle vise à co-construire des plans de gestionintégrés sur quatre propriétés privées pilotes. Le document d’objectifs

Natura 2000 et les mécanismes de compensation écologique offrent ainsi desopportunités nouvelles pour la restauration de ces anciens marais, avec un sou-tien renouvelé de l’Agence de l’eau, de la Région et la Diren Paca.Le travail a été initié en décembre 2003 pendant les fortes inondations d’Arles.2700 ha des anciens marais des Baux étaient sous les eaux. L’association envi-ronnementale A Rocha France avait alors réalisé un travail de cartographie desinondations, d’estimation des volumes d’eau stockés et de son impact sur labiodiversité. Elle s’est vue ensuite confier une mission de concertation localeafind’envisager l’avenir. Dans le même temps, le Parc naturel des Alpilles a initié uneétude hydraulique. Celle-ci devrait prochainement aboutir à un schéma intégréde gestion des eaux.Cette concertation a permis de confronter les points de vue en s’appuyant sur unprogramme d’éducation à l’environnement et six études d’approfondissement(moustiques, agriculture, tourisme, biodiversité, histoire, perceptions et atti-tudes). Aujourd’hui, la peur du moustique, de l’inondation généralisée et mêmede « l’écolo» s’est dissipée. Elle fait place à une meilleure compréhension des fonc-tions des zones humides et de la réhabilitation des anciens paluds.L’opération a permis l’implication nouvelle d’un sagneur (coupeur) de roseaux, dedeux éleveurs et d’un pêcheur. ■ François Tron >>> [email protected]://www.marais-des-baux.fr

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Le village deLanslevillard.

BRETAGNE Le «Grenelle »par la formation. L’institutrégional du patrimoine de Bretagne aconçu un programme de formation àl’intention des acteurs (décideurs,professionnels, citoyens…) en vue decontribuer à la traduction, sur le terrain,des orientations du « Grenelle del’environnement ». Le programme estpensé pour concevoir l’urbanisme defaçon globale, lutter contre l’étalementurbain, préserver la biodiversité etretrouver une bonne qualité de l’eau. Lesformations visent une qualité scientifiquereconnue et des approchesméthodologiques éprouvées. Unpartenariat est engagé avec l’universitéde Bretagne occidentale.>>> www.irpa-bretagne.org

Initiative

À Voiron (39), une vingtaine de volontaires del’association Pic Vert ont tressé de vieilles cordesde spéléologie et d’escalade périmées. Cettepasserelle pour écureuils, disposée à 7 m dehauteur entre deux grands arbres, permet à cesanimaux de traverser la route de l’Agnelas sansrisque. ■ >>> www.lepicvert.asso.fr

Passerellepour écureuils

© JF Noblet

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10 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

L’actu

L’expression «bon état écologique» a été popu-larisée par la directive cadre sur l’eau1. Elle esttrop souvent présentée comme un terme nor-

matif : l’état de référence « pristine2 », qui précé-derait toute intervention humaine. Cependant,comme cet état n’existe plus, on se réfère aux milieuxqui sont supposés les moins perturbés, mesuréspar leur «gradient de naturalité».En réalité, le « bon état écologique » est uneconstruction sociale qui évolue sans cesse. Ce n’estpas l’état figé d’un écosystème, c’est au contraire un

état dynamique qui préserve des fonctions clés de l’écosystème. Il devraitdonc reposer à la fois :• sur des principes écologiques, liés à l’hétérogénéité et la variabilitédans le temps et dans l’espace : ce sont là en effet les conditions d’ex-pression de la diversité biologique3 ;• sur des choix sociaux : les fonctions clés de l’écosystème que nous souhai-tons préserver pour remplir une fonction ou pratiquer une activité. Ce n’estpas seulement une donnée (référence rétrospective), mais une construction(référence prospective) à partir d’attentes et de revendications.Le « bon état » ne doit pas être un objectif nostalgique mais renvoyeraux fonctions exercées par les écosystèmes. Dispose-t-on des systèmesd’auto-épuration, de production biologique, de récréation, de paysages ?Le «bon état» n’a pas de caractère immuable. La nature que nous dési-rons aujourd’hui détermine notre perception actuelle du « bon état »mais elle n’est pas forcément la nature que nous voudrons demain.Or l’écosystème est le plus souvent approché par sa structure, supposéestable. Il faut la mesurer, quantifier, normaliser, ce qui conduit irrémé-diablement à la figer. Des indicateurs biotiques sont utilisés, censésrendre compte de la diversité biologique, mais ces indicateurs globalisent,figent la perception de la nature, et en masquent le caractère dynamique.Le «bon état» écologique, terme issu des politiques publiques, trop sou-vent présenté comme un concept scientifique, ne relève donc effective-ment pas de la science. C’est à la société de s’en saisir collectivement etd’y donner sens en respectant les contraintes d’expression des dyna-miques naturelles. ■

Christian Levêque*

Bon état écologique

>>> Mél : [email protected]

* Cette chronique a été réalisée par Christian Lévêque, directeurde recherches émérite IRD, Xavier Lafon, chargé de mission Eauet milieux aquatiques, au service de la recherche du ministèreen charge du Développement durable, et Olivier Sirost,anthropologue à l’université de Méditerranée.

desmotspour le direchronique

Gilles Bœuf a été nommé présidentdu Muséum national d’histoire naturelle enfévrier, succédant à André Menez. Depuisdix ans, il enseigne la physiologieenvironnementale, la biodiversité et les

ressources vivantes de l’océan à l’université de Paris VI.Ancien président du conseil scientifique du Muséum, il estaujourd’hui membre du conseil scientifique du patrimoinenaturel et de la biodiversité auprès du Meeddat et présidentde la Réserve naturelle de la Massane (Pyrénéesorientales). >>> [email protected]

Audrey Tapiero a rejoint laFédération des conservatoires d’espacesnaturels en mars 2009. Basée à la maisonde l’environnement de Franche-Comté, elleest chargée de mission « plan national de

restauration des chiroptères », plan validé pour 2008-2012.Auparavant, Audrey Tapiero a été chargée de mission« tor tues marines » au sein de la délégation outre-mer del’ONCFS, en Guyane, durant deux ans. >>> [email protected]

Roger Genet. Le Cemagref a unnouveau directeur général. Nommé pardécret présidentiel, il succède à PascalViné. Chercheur engagé dans les politiquespubliques de recherche et d’innovation,

Roger Genet était auparavant directeur adjoint des sciencesdu vivant au Commissariat à l’énergie atomique et directeurdu Centre de recherche de Fontenay-aux-Roses, en chargede l’assainissement du site et de sa reconversion vers lestechnologies de santé. >>> [email protected]

Lucile Rambaud est désormaischef de bureau du réseau Natura 2000(Meeddat). Depuis janvier, elle remplaceIsabelle Couprie. Auparavant, LucileRambaud travaillait au ministère de

l’Agriculture, sous-direction de la recherche et del’innovation de la direction générale de l’Enseignement etde la recherche.>>> [email protected]

Les gens

Terme issu despolitiques

publiques, le « bonétat écologique »est trop souvent

présenté comme unterme scientifique.

Or le concept nerelève pas de la

science.

1. Du 8 mars 2004. Actualisée le 22 février 2007.2. Terme anglais renvoyant à l’idée d’un état vierge, antérieur à toutealtération d’origine humaine.3. L’article 2 de la Convention sur la diversité biologique, 1992 définitainsi la diversité biologique (ou biodiversité) : « La variabilité desorganismes vivants de toute origine y compris, entre autres, lesécosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques etles complexes écologiques dont ils font partie ; cela comprend ladiversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle desécosystèmes. »

Directeur de recherches émérite IRD

Biodiversité, la Commission européenne plaide l’urgenceLa conférence sur la biodiversité organisée à Athènes en avril par laCommission a débouché sur un message concernant la future politique del’Union européenne dans le domaine de la biodiversité. « Il est important deprivilégier la protection des écosystèmes plutôt que celle des espèces. Ilfaut veiller à ce que les fonds disponibles servent effectivement à financerdes projets de protection de la nature. » La Commission s’est dotée d’unplan en huit points. « Si un effort n’est pas consenti, l’engagement d’enrayerla diminution de la biodiversité dans l’Union européenne à l’horizon 2010 nesera pas atteint. » >>> http://europa.eu

Dernière heure

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 11

>>> Mél : [email protected]

Les lois, celle de 1930 sur la protection des sitesmais aussi plus récemment celle de 2006 concer-nant les parcs nationaux, font appel à la notion

de «caractère» pour justifier leur protection. À l’imagedes inspecteurs des sites, les gestionnaires ont dû argu-menter pour objectiver cette notion avec les acteurslocaux en envisageant, en dernier recours, l’éventua-lité d’une décision de justice.Les gestionnaires d’espaces naturels veulent défendrele caractère d’un territoire pour le transmettre et lerévéler en même temps. Or leur réussite dépendra deleur capacité d’entraînement et de conviction ainsique de la légitimité dont ils sauront enrichir leurdémarche. Car, effectivement, les pièges sont nom-breux. Il en est ainsi du « fétichisme patrimonial» quivoudrait que rien de bon ne soit à attendre du présentou encore de l’ignorance des états antérieurs : le ter-ritoire a évolué, il évolue et il évoluera. Alors quelle estl’époque « juste» de référence? Ne se situe-t-elle pasdans l’avenir ?De même, pour transmettre le caractère d’un terri-toire, on est souvent tenté de faire référence au«cliché», à la carte postale la plus convenue.La question fondamentale est de savoir sur quoi repose

véritablement ce caractère et de concevoir que l’es-prit d’un lieu résulte d’une composition complexe arti-culée autour d’un cadre physique, de représentationset de valeurs sociales. Les parcs nationaux1 le résu-ment ainsi : « Intérêt spécial que présentent le milieunaturel (la faune, la flore, le sol, le sous-sol, l’atmo-sphère, les eaux), les paysages, le patrimoine culturel,matériel ou immatériel, dans leur diversité, leur com-position, leur aspect et leur évolution, en prenant encompte la pluralité de perceptions et de valeurs quileur sont rattachées.»Mais pour transmettre cet esprit des lieux et dépasserles difficultés, il faut conduire une démarche collectivedestinée à enrichir la notion : ce n’est pas la froide des-cription qui l’exprime, mais essentiellement l’émo-tion surgie de la rencontre d’un lieu et d’une sensibi-lité. La création qu’il a suscitée sous des aspectsmultiples : artistique, artisanale, paysagère, culinaire,légendaire… Sans oublier l’empreinte qu’en portent eneux ceux qui l’habitent ou le fréquentent : car le ter-ritoire façonne l’homme aussi, il pose sa marque. ■MICHELLE SABATIERATELIER TECHNIQUE DES ESPACES NATURELS

1. Lydia Beuneiche, « Le caractère d’un parcnational : recherche dedéfinitions autour de lanotion de caractère », Parcs nationaux de France,07 décembre 2007.

LEVER DE LUNE SUR TRIÈVES, VANOISE.

Dossier préparé par Michelle Sabatier, Anne Vourc’h,Jean-Marie Petit

Définir le caractèred’un territoire

Une démarche opérationnelle

Esprit es-tu là?© Imberdis Ludovic - PN Vanoise

Dossier

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12 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

Vingt ans après, Beauport fidèle à lui-mêmeLa définition de l’esprit des lieux sert de fil rouge à un projet vivant

Entre terre et mer… Depuis longtemps abandonnépar la vie monastique, l’abbaye prémontrée deBeauport est acquise en 1993 par le Conservatoire

du littoral qui envisage immédiatement sa restaura-tion : le lieu est «complexe et fascinant », il convientde garder sa spécificité. Cependant, au-delà de cetteappréciation globale, la définition reste floue : que faut-il respecter sans concession aucune? Comment déclinerl’esprit de lieux dans la pratique d’un projet de restau-ration ? Avec l’appui du cabinet Urbanis, les élus, lapopulation locale, des touristes sont interrogés afin decerner les éléments caractéristiques du domaine deBeauport et de retenir un scénario de réhabilitationarchitecturale et paysagère. Que veut-on faire de cesite dans quinze, vingt ans ? Que doit-on éviter ? En1995, après deux ans de travail, Beauport se définitcomme une ruine romantique intimiste, un paysageouvert, un lieu symbolique lié au repliement monacal…Trois concepts contradictoires. Ont-ils évolué, se sont-ils figés ? « Ils constituent toujours aujourd’hui le réfé-rent pour la gestion du site naturel et architecturalmais également pour le choixdes activités humaines et cultu-relles qui habitent le lieu, livreLaurence Meiffret, la conserva-trice du site. C’est à travers ceprisme que nous nous posonsdes questions sur les choix degestion, d’aménagement, d’ac-tivités. Cette définition initialesert de fil rouge et nous oblige àdes discussions régulières.Il m’arrive de reprendre mesécrits de l’époque et, dans cettefinesse d’analyse, je cherche àvoir si l’on n’est pas en train de déraper. Telle activité, telaménagement a-t-il sa place ou trahit-il quelque chose de fondamental ?»Ainsi, la notion de ruine roman-tique oblige à conserver lesambiances intimistes de fouillisvégétal, du cœur desquelles sor-tent un mur ou un bas-reliefmédiéval. On aurait vite fait detrop tondre, de faire trop propre.Ici, il faut mettre la barre de coupe un peu plus haut ;même s’il faut « repasser » dans huit jours ; même sicertains prétendent que c’est mal entretenu, à com-mencer par les jardiniers qui sortent des écoles. «Nousavons opté pour une cristallisation de la ruine tout en

1930, UN

PHOTOGRAPHE

FIXE LES IMAGES

DE LA «RUINE

ROMANTIQUE».CETTE

REPRÉSENTATION

ARTISTIQUE

ORIENTE LE

REGARD DES

VISITEURS ET FAIT

PARTIE DE

L’ESPRIT DES

LIEUX.

rendant plus lisible la géographie dans laquelle s’ins-crivent le monument et le jardin.» Adossée à la forêt deBeauport, l’abbaye possédait son port, aujourd’huienvasé. La colonisation végétale a bouché la vue vers lamer et ne permet plus au visiteur de comprendre larelation du monument avec l’eau. Faut-il débroussaillerla digue ou garder le hallier littoral pour ne pas dérangerles couples de tadornes qui nichent dans le marais ?Rien n’est tranché. Les discussions se poursuivent,arbre par arbre, branche par branche. Révéler une carac-téristique majeure des lieux peut donc entrer en contra-diction avec de strictes données ornithologiques. Et,puisque Beauport est un espace symbolique lié au replie-ment monacal et porté par le motif du moine au travail,le lieu doit garder sa vocation d’apprentissage et d’ini-tiation. Aujourd’hui sous la forme de chantier d’insertionde détenus et de nombreuses activités pédagogiques. Demême, un verger conservatoire permet de produire ducidre et un grand jardin mêle plantes potagères et orne-mentales. Par la force de son esprit respecté, Beauportn’est pas devenu un monument-musée. ■À PARTIR DES PROPOS DE LAURENCE MEIFFRET CONSERVATRICE

ET D’ALAIN FREYTET PAYSAGISTE DPLG

>>> Méls : [email protected]@libertysurf.fr

1. LA CARTE DES

PAYSAGES INSCRIT LES

LIEUX DANS LEUR

CONTEXTE ET PERMET

D’EN COMPRENDRE

L’ESPRIT. ELLE

DÉTERMINE LA

STRATÉGIE

D’AMÉNAGEMENT MAIS

AUSSI LE DÉTAIL DE

PETITES INTERVENTIONS

PROPRES À CONFORTER

L’ESPRIT DES LIEUX.2. LES DIFFÉRENTS

TRAVAUX DU DOMAINE

MONASTIQUE ÉTAIENT

JUSQU’AU 14E SIÈCLE,EFFECTUÉS PAR DES

FRÈRES CONVERS.

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Définir le caractère d’un territoireDossier

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 13

Le portrait identitaire d’un territoire oriente son développement

Lorsque le cabinet CoManaging réalise le Portraitidentitaire d’un territoire, il le conçoit commeune rencontre destinée à révéler son ADN et sa

personnalité à un moment déterminé de son histoire. Quelle que soit son échelle (région, pays, ville, quar-tier, site…), des composantes très diverses s’entremê-lent dans le creuset identitaire. Si la réalité factuelle, qui concerne le climat, la topo-graphie, le patrimoine, la démographie, l’histoire…peut s’appréhender pour une part par des données objec-tives, chiffrées, datées, quantifiables, la nature de l’es-prit des lieux est autrement plus complexe. En effet,c’est un mélange de réalité vécue et ressentie subjecti-vement par chaque individu (néanmoins évaluable pardes enquêtes), d’atmosphère, d’imaginaire, de dimen-sions symbolique et artistique.À cette profusion de matière, s’ajoute encore la confu-sion entre identité et image, à démêler elle aussi ; l’imageétant généralement simplificatrice, réductrice, voirefausse, avec sa tendance à «cartepostaliser». Dans le Portrait identitaire, ce sont ainsi plus de trente-cinq thèmes qui sont explorés. Couleurs, lumière, qua-lité environnementale, architecture, accessibilité, savoir-faire, mais aussi appartenance, questions d’ego, rapportà l’histoire, art de vivre, affinités artistiques ou encorenoms et emblèmes sont analysés, comparés, synthétisés.Ils aboutissent à proposer des outils opérationnels quiconstituent un socle identitaire de traits saillants, detransversalités, de spécificités et d’éléments clés (valeurs,mots, visuels, symboles et concepts clés), points névral-giques et opportunité. Cette vision complète et holis-tique de son identité irrigue tous les projets et le « faire-savoir» du territoire. Elle enrichit son diagnostic et luipermet de mieux piloter son développement en sedémarquant des concurrents par des stratégies « surmesure» élaborées en fonction de sa singularité. C’est ainsi par exemple que le comité régional du tou-risme de Picardie a su utiliser les conclusions du Portraitidentitaire et les recommandations marketing qui en ontdécoulé. Les valeurs humaines de simplicité et d’ac-

cueil des Picards ont donné lieu à une «stratégie d’am-bassadeurs » mettant les habitants au centre de tousles dispositifs et invitant au partage de « leur» Picardie.Picardie corps et âme, un livre, a été édité. Esprit dePicardie, un site et un magazine participatifs ont étémis en place. Ils comptent déjà plus de 100 000 lec-teurs dont 47% de Picards !Quant à des valeurs commel’espace et l’immensité, elles se donnent à voir sur lenouveau site internet1.Autre exemple, dans le Valais. La réflexion identitaire ainspiré une politique de développement durable, avecune stratégie de «marque partagée de territoire». Elles’est notamment concrétisée dans le «guide de marque»et le label «Valais excellence», lesquels permettent dedistinguer les entreprises les plus performantes et lesplus citoyennes2.Les applications et les effets du Portrait identitaire sontmultiples : création de consensus entre acteurs, ren-forcement de l’attractivité et de la fierté d’appartenancedes habitants au territoire, définition d’un positionne-ment ou d’une plate-forme de marque, améliorationde la communication… Concrètement, il devient pos-sible de briefer un photographe ou de définir un codede marque capable de traduire les valeurs du territoireen logo, identité graphique, site web, produits.Outre les outils et résultats pragmatiques, le fait de s’en-gager dans une réflexion sur son identité constitue unemanière de progresser collectivement. par une métho-dologie participative et un meilleur partage des valeurspar ceux qui sont impliqués sur le territoire.Dans le prolongement de l’exigeant «Connais-toi toi-même» des philosophes antiques, cette approche élèvele degré de connaissance et de conscience de ceux quiy œuvrent, donne plus de sens à leur action, l’inscrivantà la fois dans une démarche durable et une philosophieprofondément humaniste. ■SOPHIE DE PAILLETTE - COMANAGING

>>> Mél : [email protected] 1. http://picardietourisme.com http://www.espritdepicardie.com

2. http://www.marquevalais.org

http://www.comanaging.net Dossier « Le nouveau marketingtouristique », réalisé enpartenariat avec CoManaging par la revue Espaces n°262,septembre 2008.

En savoir plus

Connais-toi toi-même

Ne pas confondrel’identité et l’image.

Cette seconde,simplificatrice,

s’apparente à la cartepostale.”

L’ESPACE ET L’IMMENSITÉ INTÈGRENT

L’IDENTITÉ DU TERRITOIRE PICARD. SUR

LE SITE INTERNET DE LA RÉGION PICARDIE,LE CHOIX DES IMAGES FAIT ÉCHO À CES

VALEURS PAYSAGÈRES. VUE DE ST-VALÉRY.© CRT Picardie/baieattitude.com

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14 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

Explorer l’imaginaire pour orienter le développementPlus on va loin dans la connaissance de l’identité du territoire, plus on

possède une compréhension fine de son potentiel et mieux on est àmême de gérer son apparence et d’élaborer une stratégie de

développement sur le long terme.

Le chemin de Compostelle ! Classé itinéraire cul-turel européen par le Conseil de l’Europe en 1987,puis inscrit au patrimoine mondial de l’humanité

par l’Unesco en 1988, son devenir est un enjeu impor-tant pour les régions qu’il traverse. Aussi, en 2003, uneétude se penche sur les publics qui l’empruntent dansle but d’aboutir à un projet de développement ainsiqu’à des préconisations d’aménagement du chemin :un des enjeux majeurs étant la sauvegarde de son iden-tité profonde. En effet, pour un territoire comme pourun individu, la meilleure façon d’exister et de s’épa-nouir réside dans sa capacité à être en phase avec cetteidentité.

Analyse identitaire? L’analyse identitaire du terri-toire ne relève donc, ni de la seule observation des pra-tiques, ni d’une étude d’image classique, elle s’appuiesur la perception de l’imaginaire collectif, l’analyse desmythes fondateurs, la connaissance des valeursidentitaires…En effet, autour d’un «objet» matériel, culturelou social, chaque groupe humain construit unimaginaire au travers de récits mythiques ousimplement métaphoriques. Mis en situation,chacun va spontanément proposer une inter-prétation cohérente de son réel et dessiner les contenus identitaires enracinés dans laconscience collective. Il en est ainsi pour lechemin de Compostelle dont la réalité tangiblen’est pas une vérité univoque et stable. Elle existesurtout à travers « la reconstruction » imagi-naire de ceux qui l’appréhendent.C’est ce principe qui a guidé l’exploration auprèsdes divers types de cheminants ayant volontiersaccepté de s’exprimer. Il a été, alors, possible dedessiner les contenus identitaires enfouis et d’enrévéler le sens.Qu’a-t-on découvert? L’imaginaire lié au cheminde Compostelle est balisé par quatre points car-dinaux (voir schéma). Son identité se base surdeux piliers fondamentaux de la construction dela mémoire collective de l’humanité : le mythe(ou l’histoire) et la spiritualité (ou la religion).Ces valeurs fondatrices constituent le noyau sym-bolique de ce chemin. Elles en assurent la péren-nité, elles en constituent l’essence et le sens.Au demeurant, il est intéressant de noter que

cet imaginaire exceptionnel est conforté par l’expé-rience tangible des cheminants. Autrement dit, la réa-lité vécue du chemin (l’expérience que l’on vit lors-qu’on le parcourt) reflète le chemin imaginaire ou viceet versa. Il en ressort avec certitude que tout aména-gement, tout projet de développement doit préserver cetéquilibre, et venir conforter l’imaginaire, sous peinede perte d’identité.Comprendre quelles sont les représentations qui, pourle cheminant, confèrent une existence au chemin, parquels processus il s’identifie à lui, permet de déceler lavaleur symbolique d’une pratique apparemment simi-laire (marcher, d’une halte à l’autre, sur le chemin deCompostelle, avec chaussures de marche et sac à dos…)et qui en fait dissimule des représentations et des enjeuxbien différents.Comme cette valeur symbolique (inconsciente) ne peutêtre atteinte au travers du discours social, intrinsè-quement rationalisé, il faut donc analyser le « langageimaginaire» qui s’exprime principalement au travers designifiants (images et métaphores).

De l’analyse à l’opérationnalité. Les valeurs por-tées par son territoire imaginaire et les attentesqu’il convoque: dépouillement, simplicité, convi-vialité, liberté, universalité… indiquent lesactions à mener en termes d’aménagement, d’hé-bergement, d’accueil. Elles permettent la défi-nition d’un cadre de développement coordonné:• autour des valeurs fondatrices qu’il va s’agirde préserver et pérenniser en tant que valeurspatrimoniales de l’humanité (Unesco) ;• autour de la symbolique de lien et d’échangequi appelle le développement et la valorisation desterritoires traversés grâce à des échanges tanthumains qu’économiques par opposition à uneexploitation purement mercantile…L’étude permet aussi d’aboutir à la formulationde préconisations concrètes en matière de service,d’équipements, de communication, d’informa-tion, de promotion et d’organisation. Dans cecas-là, il s’agit de privilégier un aménagement àminima: se contenter d’aménagements basiqueset fonctionnels tels le développement de pointsd’eau potable, la sécurisation des passages surles routes, le balisage directionnel dans les villes.Et spécifiquement pour répondre aux attentesde certains types de cheminants (cf. typologie),on signalera des sites dignes d’intérêt et on déve-loppera quelques services « facilitants», tels despoints d’information dans les haltes ou des par-kings dans les principales villes départs.

Le chemin de Compostelle à la recherche de son identité

Si elle ne se démarquepas par le sens, son sens,

son essence, la stratégie

de développement risque d’échouer.

Le chemin de Compostelle est balisé parquatre points cardinaux, chacun limité par sadérive potentielle. Authenticité : confidentialité, notion d’effort,obtention de quelque chose que l’on gagne,versus consommation, facilitation.Sacré : signes et patrimoine religieux,respect du tracé officiel contemporain.Ouverture : échange avec le tissu local,coexistence harmonieuse des publics,identité et altérité.Accompagnement : liberté des cheminants,signalétique du chemin (chemin guidé),répartition des hébergements, informations.

L’authenticité Le sacré

L’ouverture L’accompagnement

L’artifice

Le programmé

Le profane

Le touristique

Un territoire imaginaire fortet ses contraires ”

Définir le caractère d’un territoireDossier

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 15

Par ailleurs, le chemin sera matérialisé par une signalé-tique complémentaire permettant de l’associer au patri-moine jacquaire en suivant la charte graphique du Conseilde l’Europe.Au cours de la dernière décennie, la fréquentation deschemins de Compostelle s’est fortement amplifiée. ■SYLVIE REBILLARD - SÉMIOLOGUE QASSIOPÉ RECHERCHE

SÉMIOTIQUE ET SOCIOLOGIQUE APPLIQUÉ AU MARKETING

>>> Mél : [email protected]

Pôle découverte•Les randonneurs touristesaffichent une préoccupationpatrimoniale et touristique.Ils ont à la fois une approchecognitive et émotionnelle. Ils désirent voir les lieux,connaître l’architecture et lagastronomie. Ce sont lesseuls à s’écarter du chemin.

Pôle recherche de sens• Pèlerins mystiques, leurquête spirituelle s’appuie surles contenus symboliques duchemin. Ils cherchent à

revivre l’histoire etl’expérience des pèlerinsd’antan.• Pèlerins métaphysiques. Ilssouhaitent se retrouver seulset se mettre à l’épreuve.Leur recherche spirituellerepose sur le détachementde l’aspect matériel del’existence.Les pèlerins mystiques et lespèlerins métaphysiques sonttous les deux en quête d’unchemin peu fréquenté et peuaménagé, balisé de signes etsymboles compostellans.

Pôle aventure• Randonneurs sportifs, leurmotivation principale est dese mettre à l’épreuve. Lechemin est considéré pourson envergure sportive maisc’est également un cheminépique.

Pôle recherche identitaire• Pèlerins traditionalistes, lechemin est pour eux unequête religieuse mais aussiune occasion de rencontressociales.

Éprouver

À quo

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j’app

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ns? Qui suis-je ?

De quoi

suis-je capable?Où

vais-

je?

CHEMINEMENT

S’éprouver

La quête,voyageintérieur

L’exploration vers de

nouveaux horizons

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PÔLEAVENTURE

Sentir,ressentir,

tourné vers les autres

Recherche de repères,

réassurance

Aventure à revivre

comme pèlerin, jusqu’où

je peux aller, le défi par

rapport à soiRe

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Se mettre à l’épreuve, se prouver,

tourner vers soi

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Limite : la

compétition Limite

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Limite : l’ésotérisme

26%randonneurstouristes

19% pèlerinstraditionalistes

10% pèlerinsmétaphysiques

24% pèlerinsmystiques

21%randonneurssportifs

Rechercher la vérité

Élargir sesconnaissances

1. «PANNEAU COMMENTAIRE »RÉALISÉ EN 2004 PAR LECONSEIL GÉNÉRAL DU GERS,INSTALLÉ AUX PRINCIPALESENTRÉES DU CHEMIN.2. RANDONNEUR SUR LECHEMIN DE SAINT-JACQUES. 3. UN « CYPRÈS KILOMÈTRE».

Approche typologique des cheminants et buts visés

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Récemment, nous avons aménagéle sentier de Compostelle sur35 km. Notre intention était de

sécuriser le cheminement qui emprun-tait souvent les routes départementales.

Le conseil général a acheté des bandesde terre en parallèle de la route afin que la

randonnée ne se fasse plus sur le bitume. Ensuite, pourisoler les marcheurs sur cette bande, nous avons implantédes haies d’un côté et un alignement d’arbres de l’autre.De temps en temps, des fenêtres permettent de voir lescôteaux. Tous les kilomètres nous avons planté un cyprès.Pourquoi un cyprès ? Pourquoi pas. C’est une jolie bornepour ponctuer l’itinéraire. À chaque changement de direc-tion, nous avons mis trois charmes pyramidaux. Cesrepères sont répertoriés sur un panneau d’informationqui explique ce code du département.À certains endroits, nous avons planté des arbres fruitiers :cerisier, pommier… des arbres échelonnés dans la saison.Nous avons également travaillé sur les ombres afin dedonner du confort au marcheur. Et puis nous avons aussiconstruit des passerelles au-dessus des ruisseaux.Nous avons conçu cet aménagement en pensant aux ran-donneurs, à leur confort, leur besoin d’ombre, d’aire derepos, de repères kilométriques. Tout cela n’est pas enlien direct avec l’histoire mais, globalement, si j’y réfléchis,cela respecte assez l’esprit d’authenticité. ■

>>> Mél : [email protected]

Christian LaprébendeRESPONSABLE DU SERVICE DES ROUTES AU CONSEIL GÉNÉRAL DU GERS

«Penser l’aménagementpour les randonneurs »

Avec cette étude nous disposonsde données pour mieux cerner lademande de la clientèle jacquaire.

Ainsi, par exemple, la déterminationdes typologies de cheminants nous fait

comprendre qu’ils constituent plusieursclientèles, chacune d’elles étant prédisposée

pour un type d’hébergement : l’une va préférer un gîted’étape, la seconde une chambre d’hôte… La conclusionqui s’impose : attention à ne pas mettre en place un mono-produit d’hébergement le long des chemins. Il y auraitun problème de viabilité économique à le faire.Les données portent également sur le type d’accueil etd’information qui doivent être délivrés. Aujourd’hui, noussommes en mesure de préconiser la mise en place de ser-vices : alimentation, pharmacie, prestation de transport…Nous conseillons aux hébergeurs d’avoir une connaissancedu chemin afin de pouvoir dialoguer avec leur clientèle.Globalement, nous sommes plus armés. ■

>>> Mél : [email protected]

Thierry BlanchardRESPONSABLE DE SERVICE DEVELOPPEMENT AU

COMITÉ DÉPARTEMENTAL DU TOURISME DU GERS

«Pouvoir cerner le type d’offres»

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16 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

Encadrer la gestion par un texte fondateurFaire du «caractère» un texte juridiquement opposable

Le 6 mars 2007, le Parc national de La Réunion estcréé et, avant cette date, toutes les étapes ont étéfacilitées par la conviction d’être réunis autour

d’un élément fédérateur : un patrimoine exceptionnel,dont certaines facettes restent à révéler. Même les raresopposants au projet ont exprimé leur attachement à cepatrimoine.C’est dans ce contexte que la tentative de définition offi-cielle du caractère du cœur du parc national a été éla-borée et proposée afin d’être intégrée dans le décret declassement. Quelques phrases et quatre items devenaientun socle fondateur, pour une île en quête d’identité.

Ainsi on peut lire « Le cœur du Parc national de LaRéunion présente les caractères principaux suivants :1° Un ensemble exceptionnel, étagé en altitude, d’éco-systèmes non perturbés, notamment forestiers, repré-sentatifs des Mascareignes, marqué par sa dimension,une grande diversité des habitats et des espèces, ainsiqu’un fort taux d’endémisme.2° Des paysages naturels grandioses, façonnés par une acti-vité volcanique et par des processus érosifs vigoureux.3° Un paysage culturel, comprenant dans les cirques desîlets isolés et sans desserte routière, façonnés et occupéspar l’homme.4° Une surface représentant une proportion très impor-tante de l’île, supposant le recours possible aux dispositionsdu I de l’article L. 331-15 du code de l’environnement.»Cette rédaction a finalement été retirée du décret decréation. Sur recommandation du Conseil d’État, le gou-vernement ne l’a pas retenue comme fondement pérenne.Cet article a été renvoyé à la charte qui traduit, elle, leprojet périodique de l’établissement public (dix ans pourl’outre-mer).

La définition du caractère dans les textes officiels avaitcependant une visée précise : donner du poids à ce texte.S’entendre sur un socle hiérarchisé de valeurs com-munes, pour inspirer les futures décisions de gestiondans la protection (avis, autorisations, subventions).L’affichage de ce socle rendant plus lisible, plus prévi-sible, plus compréhensible la politique du parc national.Aujourd’hui, le chantier d’élaboration de la charte estofficiellement ouvert depuis mai 2008. Il s’appuie surcette définition : un texte concis déjà validé (à travers ledossier d’enquête publique ayant précédé la création duparc). Il inspire un projet de territoire global reliant cœuret aire d’adhésion.

Explication de texte. À l’heure où la communautéscientifique internationale mais aussi les acteurs duGrenelle de l’Environnement ont fait émerger le pro-blème des espèces exotiques envahissantes comme unepréoccupation majeure, la mention dans le premier alinéa« d’écosystèmes non perturbés » comme élément ducaractère est fondamentale. Les autorisations que déli-vrera ou refusera le parc pour toute intervention dansle cœur devront être motivées et viser les éventuelsrisques de perturbation de l’écosystème en cause, s’ap-puyant sur un point zéro, établi par les scientifiques.En effet, dans le cœur du parc, les cibles patrimonialesnaturelles ayant justifié le classement du territoire ont étéidentifiées. Leur description fine, leur localisation précise,préalables à la définition d’objectifs de gestion et desmodalités d’application de la réglementation, puis d’ou-tils de suivi et d’évaluation de la charte, ne feront quecompléter et illustrer la définition de base.Le second alinéa parle, lui, de paysages naturels gran-dioses. Or, si certains descripteurs sont mesurables (diver-sité, nombre d’espèces endémiques, surfaces occupéespar les habitats, nombre d’occupants des îlets…) ou indis-cutables (gradient altitudinal, sans desserte routière…),d’autres, tel le caractère grandiosed’un paysage, sont aucontraire sujets à interprétation. La charte pourra doncpuiser dans le riche dossier de candidature présenté parLa Réunion pour le classement de ses pitons, cirques etremparts au patrimoine mondial pour affiner cette notionsubjective, voire la faire évoluer vers une description plusobjective (dénivelés, présence d’une chaîne de pitons…).L’alinéa trois évoque les îlets isolés. Il est alors évident queleur classement lié à l’absence de route interdit toutepossibilité future d’équipement de ce type dans le cirquede Mafate.

Cœur du parc et aire d’adhésion. Cette définition s’ap-plique au cœur du parc ; elle ne peut suffire pour l’aire

>>> Parc national de La Réunion

Le texte décrivant lecaractère du site devaitappartenir au décret de

création. Cette insertion, quin’est pas sans incidence, a ete discutee jusqu’au

dernier moment.

Donner du sens au territoire, asseoir les décisions du parc sur lecaractère des lieux, afin qu'elles soient juridiquement inattaquables et

opposables, telle était l'ambition portée par les initiateurs du Parcnational de La Réunion.

�VUE SUR CILAOSDEPUIS LA ROCHEMERVEILLEUSE.

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Définir le caractère d’un territoireDossier

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 17

d’adhésion. Cette île, soumise à une forte pression démo-graphique, traduite par des besoins croissants en espace,présente des visages très hétérogènes. La mission de créa-tion du parc national avait proposé de «limiter l’aire d’ad-hésion aux […] territoires constitués des paysages natu-rels et ruraux des Hauts présentant un lien de solidaritéécologique et sociale avec le cœur». Or, la limite retenueenglobe des zones à caractère quasi urbain.À l’occasion de l’élaboration de la charte, le débat a doncété réouvert et le recours à une carte de vocation des

sols devrait permettre de cerner les territoires agricoleset les secteurs d’habitat rural.La définition du modèle de ruralité réunionnaise est unnouveau chantier. Il devra laisser la place aux facultésd’adaptation et d’évolution que la société des Hauts a tou-jours su développer. ■

MARYLÈNE HOARAUDIRECTRICE ADJOINTE DU PARC NATIONAL DE LA RÉUNION

>>> Mél : [email protected]

Les stations de ski, élément du caractère?Pour définir son caractère, le Parc national de la Vanoise a

pris une option : ne pas se limiter au cœur du parc maistraiter l’ensemble du territoire. Un tel choix n’est pas sans

conséquence. En effet, les plus grands domaines skiables d’Europefont partie de l’aire d’adhésion. Doit-on alors considérer qu’ils fontpartie du caractère du parc et qu’il faut les préserver de toute alté-ration? Probablement, non. La question cependant s’est vite avéréedélicate.En effet, dès les premiers exercices de caractérisation spontanée, lecontraste entre «protection» et «aménagement» s’est révélé être unélément structurant les perceptions du territoire et cristallisant defortes oppositions. L’occulter, c’était prendre le risque de passer à côtéd’une caractéristique essentielle et déterminante pour la charte.S’en saisir, c’était s’exposer à affronter des points de vue très diver-gents, au risque de compromettre les chances d’aboutir à une largeadhésion. C’est la démarche adoptée pour définir le caractère duparc qui a permis de résoudre ce problème. La question liminaireétant liée à la légitimité de ceux et celles qui prétendent définir lecaractère.La constitution d’un comité de pilotage, regroupant des membresdésignés par le conseil d’administration et le conseil scientifique, despersonnalités qualifiées et des agents du parc, a permis d’apporterla réponse. Présent à toutes les étapes du processus, du choix de laméthode, jusqu’à la validation finale, le groupe de travail a fourni lecadre du débat nécessaire et la caution des instances officielles duparc. Ceci étant, il a tout de même fallu préciser le statut qu’il conve-nait d’accorder à cette caractéristique particulière (contraste entreprotection et aménagement).La structure du texte lui a permis de trouver toute sa place en la

situant cependant sur un plan différent des autres dimensions ducaractère. En effet, dans une première partie, la définition du carac-tère dresse le portrait de la «Vanoise éternelle». On y trouve leséléments à l’origine de la création du parc et qu’il importe de pré-server. Une deuxième partie aborde le contraste entre secteurs pro-tégés et aménagés. Elle rappelle la genèse des deux projets : de pro-tection d’un patrimoine exceptionnel et de développement dutourisme hivernal. Elle évoque également les conséquences de cecontraste sur la perception des lieux. Une troisième partie traite dela contribution du parc national au caractère du territoire. Ellepermet d’évoquer la charte dont un des gros enjeux sera de récon-cilier les deux projets de territoire.La structure du texte étant adoptée, restait alors à trouver le bon équi-libre et le juste ton pour exprimer des points de vue très tranchés surce sujet contesté. En effet, l’enquête sociologique réalisée en 2007avait identifié les postures des différents acteurs et repéré les valeursmises en jeu. Elle révélait l’ambivalence de ce territoire tiraillé entredeux logiques également légitimes qui, perçues au départ commecomplémentaires, ont engendré deux projets concurrents.Pour rendre recevable aux yeux de tous la définition proposée, unepremière version du texte fut soumise à une large consultation. Ce«texte martyr» suscita des réactions qui permirent de procéder à desajustements. Le but étant de «garder un texte fort» mais non par-tisan et de revoir certaines formulations perçues comme des juge-ments de valeur. Grâce à cette élaboration progressive et collective,la définition a été validée par le comité de pilotage. ■VÉRONIQUE PLAIGE - PARC NATIONAL DE LA VANOISE

>>> Mél : [email protected]

>>> Parc national de la Vanoise

1. VANOISEÉTERNELLE. COL DE LA VANOISE(PRALOGNAN-LA-VANOISE)2. LA STATION DESKI DES MENUIRESFAIT PARTIE D’UNDES PLUS GRANDSDOMAINES SKIABLESD’EUROPE (SAINT-MARTIN DEBELLEVILLE).

Pour une démarchede définition du

caractère du parc.

Duréemai 2007

à mai 2009Comité de pilotage

24 membres8 réunions

Texte résultanttexte de référence :

10 pagesversion courte :

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18 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

Devant les tribunauxrare et fragile, la préservation d’un lieu de passaged’une espèce migratoire, etc. La démonstration de l’intérêt écologique sera d’au-tant plus facile si le territoire est déjà inscrit parmiles zones naturelles d’intérêt écologique floristique etfaunistique (Znieff), s’il a fait l’objet d’un arrêté deprotection de biotope, s’il est inscrit dans le réseauNatura 2000, s’il se situe dans un parc national, uneréserve naturelle, un parc naturel régional ou unezone de protection du patrimoine architectural,urbain et paysager (ZPPAUP).L’intérêt général se retrouve ici dans la protection dela nature et la préservation de la biodiversité, intérêtreconnu explicitement par la Constitution de 1958 etsa charte de l’environnement2.Du point de vue culturel. La question se pose desavoir si la beauté d’un paysage est un élément objec-tif justifiant la protection. Il s’agit d’un point très déli-cat qui renvoie à la notion de site pittoresque3.Dans une décision rendue en 1975 et relative à la pro-tection d’un site pittoresque sur le territoire des com-munes de Narbonne, Vinassan et autres, la 2e sectiondu contentieux du Conseil d’État s’est rendue surplace, afin d’en vérifier la beauté effective et soncaractère pittoresque4.Le juge n’a pas hésité à se déplacer. En l’espèce, celasignifie que le caractère d’un site se définit très malsur le papier, et qu’un constat visuel est parfois indis-pensable. Néanmoins, ces transports sur les lieux nesont obligatoires qu’en matière d’expropriation, etsont peu fréquents lorsque le code ne le prévoit pas.Par ailleurs, un paysage est objectivement remar-quable si, d’un point de vue culturel, il s’inscrit dansun contexte historique particulier. Ce peut être un évé-nement avéré (lieu d’une bataille célèbre, lieu de nais-sance d’une personnalité politique ou artistique…),comme ce peuvent être des faits légendaires (lesromans de la Table ronde, la forêt de Brocéliande…). Dans tous les cas, il faut établir en quoi la préserva-tion des lieux a un intérêt pour la mémoire collective.L’intérêt général se retrouve ici dans le devoir demémoire : il s’agit d’un intérêt culturel, dont la pro-tection est garantie notamment par la loi du31 décembre 1913 sur les monuments historiques etla loi du 2 mai 1930 relative à la réorganisation de laprotection des monuments naturels et des sites decaractère artistique, historique, scientifique, légen-daire ou pittoresque (cf. page 19).Démontrer l’intérêt général. À charge donc, pourcelui qui entend protéger un site, de démontrer qu’ilest « caractéristique », c’est-à-dire qu’il présente unintérêt général pour la collectivité à la fois sur lesplans écologique et culturel (un des deux élémentspouvant être suffisant dans certains cas).Des exemples jurisprudentiels montrent que le juge

1. Issues des lois du31 décembre 1913, du 2 mai1930, du 8 janvier 1993, etc.Voir les lois de 1985 et 1986relatives à la protection de lamontagne et du littoral, lesarticles L.146-6 et L.145-3 ducode de l’urbanisme, ainsi quela loi du 8 janvier 1993relative aux paysages.2. Intégrée au préambule parla loi constitutionnellen° 2005-205 du 1er mars2005.3. CE, 2 mai 1975, Unionsyndicale de défense despropriétaires du massif de laClape, req. n° 911924. Cf. loi du 2 mai 1930.5. CE, 30 avril 1997, syndicatintercommunal du portd’Albert, req. n° 158945.

Admettre qu’un lieu a du caractère peut per-mettre d’y appliquer des mesures réglemen-taires de protection ; l’objectif étant de préserver

son intégrité contre d’éventuels projets de construc-tions ou contre diverses nuisances et pollutions. Lesmesures de protection réglementaires sont nom-breuses et variées1. En pratique, la question se pose desavoir comment convaincre l’administration (et encas de contentieux, le juge) qu’un territoire possèdeun caractère remarquable et qu’à ce titre, il mérited’être protégé.Pas de définition concrète. La législation françaiseutilise fréquemment le terme site « caractéristique »sans en donner de définition concrète. Il ne faut pascroire pour autant qu’il s’agit d’un oubli ou d’unenégligence de la part du législateur. L’absence de défi-nition n’est pas anodine : elle permet à l’administra-tion d’apprécier, au cas par cas, si un espace estcaractéristique ou non (on considère que l’adminis-tration se trouve en situation de pouvoir discrétion-naire). Dès lors, tout le travail d’une personne quientend faire reconnaître un site comme caractéris-tique consiste à convaincre l’administration du bien-fondé de sa démarche préventive ou contentieuse.La difficulté. Elle réside dans le processus d’objectiva-tion permettant de démontrer la notion de caractère.Nous sommes à mi-chemin entre le subjectif et l’ob-jectif. Jacques Lacan, médecin et psychanalyste, n’af-firmait-il pas que «ce qui est important ce n’est pasla chose que l’on regarde, mais la façon dont on laregarde ». S’agissant des sites caractéristiques, cetteformule trouve à s’appliquer. La personne qui entendfaire reconnaître un site comme caractéristique doitdémontrer en quoi cet espace naturel lui paraîtremarquable. Or, pour convaincre l’administration(dont l’action doit toujours être justifiée par des élé-ments objectifs tendant à la satisfaction de l’intérêtgénéral), il faut établir en quoi le site est remar-quable d’un point de vue objectif, autrement dit, enquoi sa protection relève d’un intérêt général pour lacollectivité ou la nation.Concrètement, les caractéristiques objectives d’unlieu sont de deux types : naturel et culturel.Du point de vue écologique. Un site est objective-ment remarquable si, du point de vue écologique, ilreprésente un intérêt spécial. Cet intérêt spécial peutêtre la protection d’une espèce animale ou végétale

Au-delà des sites classés par la loi de 1930, le juge apprécierales menaces qui affecteraient le caractère d’un espace naturel

ou culturel en fonction des impacts et non pas seulement sur lefait d’avoir été créé par un acte réglementaire objectivant la

qualité intrinsèque du site.

Agir pour protéger un territoire en s’appuyant sur son caractère

Il convient d’établir en quoi

la préservation du site a un intérêt pour lamémoire collective.”

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 19

administratif à l’instar du législateur est enclin à pro-téger les sites remarquables ainsi que leurs environsproches. Ainsi, l’article L.146-6 du code de l’urbanis-me dispose que les communes littorales sontcontraintes de préserver les sites ou paysages remar-quables présents sur leur territoire.En 1997, le Conseil d’État a déduit de cette obliga-tion générale qu’un établissement public de coopéra-tion intercommunale ne pouvait pas prévoir lacréation d’une zone d’aménagement concertée (ZAC)proche d’une zone humide abritant une avifaunecaractéristique, car « l’extension du golf sur les rivesde l’étang de Pinsolle et la création d’une zone urbai-ne à proximité immédiate d’une partie du courant deSoustons sont de nature à préjudicier à la préserva-tion de leur équilibre écologique naturel»5. En l’espèce, le Conseil d’État reproche à la communed’avoir prévu des constructions et aménagementsinadaptés en ce sens qu’ils étaient projetés dans unpérimètre proche de certains sites remarquables, cequi risquait de nuire à leur équilibre écologique.Différents exemples jurisprudentiels montrent que lejuge procède à une étude au cas par cas pour déter-miner si le projet de construction doit être empêchéou pas. Cette approche casuistique, faite par le jugeadministratif, empêche de tirer des conclusions géné-rales sur cette question, d’autant qu’au regard de la for-mulation des arrêts du Conseil d’État, il est quasimentimpossible de connaître les motifs factuels qui ont faitpencher la balance dans un sens ou dans un autre. ■

CHANTAL GIL FOURNIER - AVOCATE

>>> Mél : [email protected]

Caractère. Cette notion, récurrente en droit français,n’est pas toujours définie. Le meilleur exemple en estla loi du 2 mai 1930 relative à la protection des

monuments naturels et des sites de caractère artistique,historique, scientifique, légendaire ou pittoresque. Ici, lelégislateur a utilisé le mot caractère dans le titre de la loi.Mais ce mot n’apparaît pas dans le corps du texte où uneautre formulation a été adoptée. Ainsi peut-on lire1 : « Ilest établi dans chaque département une liste des monu-ments naturels et des sites dont la conservation ou la pré-

servation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique,légendaire ou pittoresque, un intérêt général […].»Une circulaire DNP/SP n° 2000-1 du 30 octobre 2000 relative aux orien-tations pour la politique des sites vient préciser chacun de ces caractèresdans son point 2-1 « Champ d’application et critères des mesures deprotection» : «La législation sur les sites est utilisée pour protéger desespaces remarquables de caractère artistique, historique, scientifique,légendaire ou pittoresque, éventuellement cumulés, chacun devantêtre précisément défini et justifié dans tous les documents éclairant lamotivation de l’inscription ou du classement.» On retiendra alors ces quelques repères :Caractère artistique. Le lieu est associé à la vie et à l’œuvre d’unartiste (peintre, architecte, écrivain…). Quelques exemples : Giverny(Claude Monet), la montagne Sainte-Victoire (Paul Cézanne), le domainede Malagar (François Mauriac).Caractère historique . Le lieu est associé à un événement marquant del’histoire (bataille, personnalité exceptionnelle, fête mémorable…). Telsla pointe du Hoc, la carrière des Fusillés de Châteaubriant, Colombey-les-deux-églises, et plusieurs dizaines d’arbres de la Liberté. Il peut aussiporter la marque d’activités socio-économiques anciennes ou encoreexistantes, ayant contribué à la création de paysages remarquables repré-sentatifs de l’histoire ou de l’image d’une région: ainsi des marais salantsde Guérande.Caractère scientifique. Le lieu, l’élément naturel, la création dontl’intérêt scientifique égale ou dépasse la valeur esthétique peuventrelever de l’application de la législation sur les sites (espaces riches enfaune et flore rares, grottes à concrétions, ouvrages d’art…). Ainsi ontété récemment classés, entre autres, l’ascenseur à bateaux desFontinettes, le canal du Midi.Caractère légendaire. Le lieu est associé à une légende locale ounationale. Ce thème a été peu mobilisé à ce jour. Exemple : l’ensembledes sites dits «des romans de la Table ronde».Caractère pittoresque . Généralement, voire systématiquement évoquépour justifier l’inscription ou le classement d’un site, le caractère pit-toresque des monuments naturels et des sites rattache clairement lalégislation sur les sites aux législations de protection patrimonialed’ordre culturel et esthétique, en tant que pittoresque signifie « quifrappe l’attention par sa beauté, son agrément» (Larousse), «qui estdigne d’être peint, attire l’attention, charme ou amuse par un aspect ori-ginal» (Robert). S’imposera là, le plus souvent, la notion de paysageremarquable, relayée fréquemment par celle de paysage culturel miseen avant depuis quelques années par le Comité du patrimoine mon-dial de l’Unesco. ■ LYDIA BEUNEICHE - PARCS NATIONAUX DE FRANCE

>>> Mél : [email protected]

Sites classés

1. Article 5de la loi

codifiée àl’article

L.341-1 ducode de

l’environ-nement.

La loi du 2 mai 1930 a introduit la notion de protection de sites remarquables. Ellereconnaît près de 2700 sites classés et4800 sites inscrits (voir encart) en Francequ’elle qualifie « de caractère ».

LE CARACTÈRE SE DÉFINIT COMME UN SIGNE DISTINCTIF, UNE MARQUEPARTICULIÈRE QUI SIGNALE UNE CHOSE OU UNE PERSONNE À L’ATTENTION.LE CARACTÈRE PEUT AUSSI SIGNIFIER L’EXISTENCE D’UNE SPÉCIFICITÉ.ICI UN PAYSAGE « DE CARACTÈRE » DU PARC NATIONAL DES PYRÉNÉES.

La loi sur la protection des sites prévoit deux niveaux deprotection : l’inscription et le classement qui peuvent, le cas

échéant, être complémentaires. Ces protections n’entraînent pasd’expropriation mais instituent une servitude sur le bien protégé. En site classé, tous les travaux susceptibles de modifier l’état ou

l’aspect du site ne peuvent être réalisés qu’après autorisationspéciale de l’État. Le site inscrit fait l’objet d’une surveillance pluslégère, sous forme d’avis de l’architecte des Bâtiments de France

sur les travaux qui y sont entrepris.Cf. Lieux de beauté, lieux de mémoires,

les sites classés en France (Meeddat). ■

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Sans doute fallait-il que l’ex-périence d’une rencontreavec l’île de Port-Cros fût

forte pour susciter une tentativede définition de son caractère,au-delà de l’expression visible oudiffuse du paysage.Le besoin de transcrire le carac-tère du lieu, d’en préciser lescontours m’est ainsi apparu trèsvite et tout aussi vite s’est imposéela difficulté de saisir l’immatériel,de parler seul au nom de tous etpour des temps divers, voire dechoisir la bonne échelle entre lecaractère du lieu, le caractère deslieux, ou encore les caractères deslieux.Si la réalité du caractère d’un site s’exprime d’aborddans l’immédiateté d’une séduction, d’une surprise,d’un vertige ou parfois d’une peur, définir son contenuappelle un processus, une maturation lente, une atten-tion à la pluralité des regards. Aller à la recherche ducaractère d’un lieu, c’est aller au cœur de sa person-nalité, rechercher le sens profond des choses, le lienentre le présent et le passé. À certains égards, cettedémarche s’apparente à une psychanalyse où sontdécryptées les marques singulières laissées dans lesreplis d’un paysage par la mémoire de son histoirenaturelle et humaine.Dans cet entrecroisement de critères qui relèvent à lafois de la nature et de la culture, l’approche naturalisteest un premier révélateur. En décrivant l’évolution desformes géologiques et des formations végétales qui lescouvrent, l’imbrication des communautés terrestres etmarines et la diversité des habitats et des espèces (par-fois endémiques), la connaissance scientifique a sou-ligné l’originalité de Port-Cros. L’étude génétique expli-quant la cohabitation, sur ce petit territoire, d’olivierssauvages issus de populations de Méditerranée orientaleavec des oliviers ensauvagés, cultivés dès l’époqueromaine et retournés depuis à l’état sauvage, en àconfirmé à elle seule toute la richesse et la complexité. Mais la reconnaissance du caractère unique de l’île nese réduit pas pour autant à ces aspects «objectifs». Lepaysagiste s’est penché sur la mise en scène des com-posants naturels et bâtis dans le cours du temps passéet présent, dans l’étude des volumes, des couleurs, deslumières et des rythmes saisonniers. Ne nous a-t-il pasfait remarquer combien la densité végétale, sa couleurvert sombre, son foisonnement jusqu’au plus près de la

20 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

L’arrêté du 23 février 2007 sur les prin-cipes fondamentaux applicables à tous lesparcs nationaux stipule la nécessité d’iden-

tifier les principaux éléments constitutifs ducaractère du parc national, même pour les parcsnationaux déjà créés.

Cette exigence de définition a minima peut surprendre. Elle reposeen fait sur une dimension tactique qui permettra au contrôle de léga-lité de s’exercer en se référant à ces «principaux éléments constitutifsdu caractère ». C’est par la concertation autour de la charte que lesacteurs du territoire feront émerger les quelques mots schématisant ce«caractère». Des distinctions liées aux secteurs géographiques appa-raîtront probablement mais une hiérarchisation des éléments énoncéss’imposera, pour ne retenir que les «principaux éléments constitutifs».Comme pour la définition de l’esprit des lieux, des interprétations trèsdifférentes, voire opposées, vont logiquement apparaître. Elles dépen-dent des vision, culture, philosophie, religion et de manière plus géné-rale des intérêts matériels et immatériels de chacun. Mais ici, l’enjeu,se fait autre : le caractère, qui conditionne l’esprit des lieux, porte unedimension juridique. C’est là que le bât blesse.Jusqu’ici, la loi impose aux conseils scientifiques de délivrer un avis pourapprécier les incidences d’un projet sur le cœur du parc national.Lorsque les projets concernent l’aire d’adhésion, le principe de pré-caution est souvent appliqué en conditionnant l’avis favorable à l’ab-sence d’incidences notables sur le cœur du parc. Les conseils scienti-fiques statuent au cas par cas, souvent après expertise de terrain etconfrontation transdisciplinaire. Quarante ans de pratique démon-trent que cette approche est efficace pour apprécier la compatibilité aucaractère du parc national.A contrario, une définition « squelettique» du caractère fait courir lerisque de voir le pouvoir d’appréciation des conseils scientifiques limité.En effet, cette définition aura nécessairement pour incidence de cadrerles critères de compatibilité des autorisations, et donc de canaliser lesavis des conseils scientifiques. Ceux-ci verront leurs analyses juridi-quement contraintes par les éléments retenus dans la charte (ce neserait pas pour déplaire à certains…). Par exemple, si on considérait quele pastoralisme était un élément principal constitutif du caractère d’unparc national, comment dès lors ne pas autoriser de piste nouvelled’accès pour cette activité dans le cœur du parc? Jusqu’à présent, l’avisdu conseil scientifique était plutôt défavorable compte tenu des inci-dences sur le milieu naturel protégé.Ainsi, les «principaux éléments constitutifs du caractère» réduiraientla large mission d’appréciation donnée aux conseils scientifiques. Undécret peut-il réduire la portée légale du caractère par quelques mots-clés (les principaux éléments), cela à la demande d’un arrêté ?Les parcs nationaux sont soumis à de très forts enjeux territoriaux,lesquels n’ont souvent rien à voir avec la conservation du patrimoine.C’est pourquoi les conseils scientifiques doivent garder leur libertéd’appréciation. Car, aujourd’hui plus que jamais, un double enjeuattend les gestionnaires des parcs nationaux : la préservation d’unmaximum d’espaces non aménagés dans les cœurs, avec un dévelop-pement durable du territoire exemplaire dans les aires d’adhésion. ■

>>> Mél : [email protected]

Tribune André EtchelecouPRÉSIDENT DU CONSEIL SCIENTIFIQUE DU PARC NATIONAL DES PYRÉNÉES. COORDINATEUR DE LA

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS DE CONSEILS SCIENTIFIQUES DES PARCS NATIONAUX (2007-2008).

Au cœur d’une questionjuridico-politique

Le travail de l’historien a,lui aussi, permis

de cernerl’esprit des lieux.

PORT-CROS.

Définir le caractère d’un territoireUne démarche opérationnelle Do

ssier

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 21

mer s’apparentent aux îles tropicales et inspirent à celuiqui les découvre, ce sentiment particulier d’outre-mer.Le travail de l’historien a lui aussi grandement servi lepropos. Il a fait ressurgir la densité, la force des événe-ments qui ont marqué le territoire jusqu’à se graverdans sa toponymie. Il a fait revivre dans les nuages duvent d’Est le monstre de l’Alycastre, il a mis comme desjalons dans le temps les felouques des barbaresques dansles criques, dans les creux des vallons les jardins closdes ménageset les charbonnières, sur les remparts du fortle tonnerre des canons et, dans la baie de Port-Man, lesvoix des ouvriers de l’usine de soude. N’a-t-il pas faitrenaître sur les traces ostensibles ou discrètes que l’his-toire nous laisse, notre capacité à rêver d’autres temps?C’est aussi le travail de l’artiste, écrivain ou peintre,qui a «inventé», au sens premier du terme, «l’esprit des

lieux», comme Jean Aycard suggérant «…et tout autour,ce même air vibrant, subtil, alerte qu’il suffit de res-pirer, croirait-on, pour être gai de la gaieté légère desGrecs et des Provençaux». C’est enfin, en termes plusopérationnels, le travail de l’enquêteur qui, par sa lec-ture sensible de l’espace, en décrypte la partition pourdresser un schéma d’interprétation. Celui du gestion-naire qui, avec humilité mais sans pusillanimité (carl’histoire humaine comme l’histoire naturelle ne s’ar-rêtent pas), s’attache à respecter, tout en le renouve-lant dans le langage de la modernité, le sens ou l’iden-tité d’un territoire d’exception. ■EMMANUEL LOPEZ - ANCIEN DIRECTEUR DU PARC NATIONAL

DE PORT-CROS - DIRECTEUR DU CONSERVATOIRE DU LITTORAL

>>> Mél : [email protected]

Chercher à définir lecaractère d’un lieu?Cette démarche aquelque chose depsychanalytique.Néanmoins, alors que ladimension scientifique aété le premier révélateurd’une part fondamentaledu caractère des îlesd’Hyères, l’expressiondu caractère ne peut sesuffire de cetteapproche.

Convenons de matérialiser l’immatérielComplexe et subtile, l’expression du caractère de Port-Cros

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Percevoir le « caractère d’un lieu », c’est s’émouvoir un instant de ce qu’il révèle, vouloir le donner en partage (pour mieux le sauvegarder),c’est s’engager dans une longue recherche de ce qu’il cache.

PORQUEROLLES

© I. Masinski - PN Port-Cros

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22 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

conduire l’observation à l’échelle de l’unitéfonctionnelle ; c’est-à-dire l’ensemble géo-graphique fréquenté par la communautéd’oiseaux et notamment les reposoirs etzones d’alimentation.Aussi, en 1998, le gestionnaire de la réservenaturelle3 a lancé un programme de sur-veillance ambitieux. Il s’appuie pour cela surdes observateurs ornithologues bénévoles.Naturalistes, chasseurs, scientifiques…contribuent, ensemble, à la mise en placedu réseau local « limicoles côtiers».L’outil repose sur des comptages mensuelsdevenant décadaires en période de migra-tion. Il s’applique sur près de soixante kilo-mètres de linéaire côtier. Les recensementsconduits lors de la marée haute (concen-trant les oiseaux) sont synchronisés sur l’en-semble du territoire et mobilisent une quin-zaine d’observateurs. Les informationsrecensées constituent une base interrogeableà chaque instant. Six mois d’analyse (stagemaster 2) ont permis aux 6000 données col-lectées depuis dix ans de nous livrer de pré-cieuses informations.

Littoral Est-Cotentin

Baie des Veys

Situés au sommet de la chaîne alimen-taire, les limicoles côtiers constituentde bons indicateurs des changements

de notre environnement. Et s’ils présententune capacité de déplacement importante, ilest loisible de les suivre sur de largeséchelles de temps et d’espace. On pourraitainsi observer la diminution, voire la dis-parition de certaines espèces au profit (ounon) de l’arrivée de nouvelles, et appréciercomment se modifient les aires de distri-bution. De même, on noterait l’apparition dechangements phénologiques : c’est-à-direles modifications liées aux variations cli-matiques sur la succession des diversesphases du cycle vital des espèces. En lienavec les réseaux internationaux, ces élé-ments permettront d’évaluer les dispositifsde gestion et d’accompagner l’émergencede nouvelles stratégies de conservation,notamment dans le cadre des aires marinesprotégées, de Natura 2000 en mer, ou desparcs naturels marins… et la mise en placed’outils d’aide à la décision pour une ges-tion durable et anticipée de notre littoral.

L’Observatoire des limicoles côtiers.Divers réseaux, interconnectés, observentles populations de limicoles dont les tra-jets annuels s’opèrent sur l’ensemble de lavoie de migration est-Atlantique2. Ils col-lectent ainsi des données à des échelles géo-graphiques emboîtées.Sur le territoire national, Réserves naturellesde France est à l’initiative de l’Observatoiredes limicoles côtiers. Celui-ci vise à définirle statut des espèces tout au long du cycleannuel et organise la surveillance men-suelle des stationnements de ces oiseaux

migrateurs. À l’échelle régionale, chaqueéquipe de gestion applique également unprotocole de surveillance plus précis etadapté à sa localité : ces protocoles territo-riaux visent à identifier les composantesfonctionnelles dont dépendent les oiseaux(zones alimentaires, reposoirs…). Le suivide la baie des Veys et celui du littoral Est-Cotentin, par exemple, s’inscrivent dans cettedémarche (cf. carte ci-dessous).Située entre terre et mer, la Réserve natu-relle nationale du domaine de Beauguillot(505 ha) appartient pour partie au domainepublic maritime, territoire de prédilectiondes limicoles côtiers. Lors des deux pre-miers plans de gestion, les suivis des limi-coles étaient circonscrits au territoire classé.Cependant, l’évaluation du second plan degestion a conclu qu’il s’avérait indispen-sable de dépasser les limites du site et de

Plusieurs niveaux de surveillance secomplètent, ainsi Wetlands Internationalmène une action intercontinentale et meten réseau l’ensemble des sites de la voiede migration est-Atlantique. Sa sectionfrançaise permet de rendre compte, au15 janvier, de l’importance des effectifsfrançais et de mettre à la disposition desgestionnaires des critères d’évaluation.Cette approche des stationnementspermet également d’émettre destendances d’évolution des populationstandis que l’Observatoire des limicolescôtiers travaille davantage sur lespeuplements (assemblage d’espèces) etsur la phénologie.

Surveiller les limicoles pour comprendre le littoral

Zones de surveillance des limicoles

TOURNEPIERRE À COLLIER, LITTORAL EST-COTENTIN. COURLIS CENDRÉS, BAIE DE VEYS (MANCHE ET CALVADOS).

Intéressons-nous aux espèces qui composent les communautés de limicoles côtiers1 et nous seronscapables, demain, de rendre compte des évolutions de nos écosystèmes littoraux.

© F

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Réserveornithologique

RN Beauguillot

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étudesrecherches

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 23

Peuplements de limicoles côtiers de la baie des Veyset de la côte Est-Cotentin : étude des reposoirs dehaute-mer, Marie Bunel, Rapport de stage master 2,Université de Rennes 1 - RNN du Domaine deBeauguillot, 2008.

Refuges et peuplements. L’approchedes peuplements a permis de mettre enavant des enjeux liés au rôle de la réserve.Celle-ci constitue un refuge au cours del’hivernage tandis que les autres sites sontcomplémentaires lors des migrations, leurrichesse en espèces dépasse alors celle dela réserve.Deux méthodes statistiques4 permettantd’étudier les correspondances entre diffé-rentes variables (méthodes multivariées)ont permis d’arriver à ces conclusions. L’une a permis d’extraire les caractéristiquesmajeures des peuplements, l’autre de lesregrouper selon leur degré de similarité.Elles ont contribué à l’analyse des varia-tions intra-annuelles de la composition despeuplements ainsi qu’à la localisation desreposoirs principaux.On constate ainsi que les effectifs les plusélevés sont observés de décembre à févrieret que la richesse spécifique atteint sonmaximum en période de migration. Le peu-plement de la baie des Veys se caractérisepar l’huîtrier pie et le courlis cendré, espècesestuariennes, alors que, sur le littoral Est-Cotentin, sont largement représentés lebécasseau sanderling et le tournepierre àcollier, typiques des côtes ouvertes.Autre conclusion: en baie des Veys, la réservenaturelle, protégeant les bancs sableux lesplus accessibles durant les marées de viveseaux, joue un rôle de première importancepour l’accueil des limicoles. Selon la périodedu cycle annuel, de 60 à 98% des effectifstotaux s’y remisent. Cela représente jusqu’à20000 limicoles, appartenant à vingt-deuxespèces. Ce rôle de refuge est accentuélorsque le reste de la baie est soumis à lachasse. Mais il faut également souligner qued’autres secteurs clés, non protégés, néces-sitent une attention toute particulière.

La surveillance au futur. De ces résul-tats découle un volet opérationnel. En par-tenariat avec le Parc naturel régional desmarais du Cotentin et du Bessin, une sen-sibilisation des usagers et des acteurs locauxest prévue. Elle sera ciblée sur les secteursà enjeux, non soumis à une réglementationparticulière. Par ailleurs, une information destinée auxriverains devrait leur permettre de com-prendre le décret de classement et renforcerla quiétude des reposoirs de la réserve natu-relle. Enfin, pour compléter ce dispositif,de nouvelles investigations sont envisagées,notamment en matière de surveillance de lamacrofaune benthique5, principale ressourcealimentaire des limicoles.Le suivi des limicoles côtiers conduit aussi

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LE RÔLE DEREFUGE DE LARÉSERVE ESTPARTICULIÈREMENTIMPORTANT ENHIVER, MAIS ENPÉRIODE DEMIGRATION, LENOMBRED’ESPÈCESOBSERVÉES ESTPLUS IMPORTANTSUR LE RESTE DELA BAIE.

LE BÉCASSEAUVARIABLE DOMINESUR LES DEUXSECTEURS MAIS ILS’ACCOMPAGNED’AUTRESESPÈCES,TYPIQUEMENTESTUARIENNES ENBAIE DES VEYS,ET INFÉODÉESAUX CÔTESOUVERTES POURLE LITTORAL EST-COTENTIN.

1. Le terme limicole regroupe les petits échassiersfréquentant les zones humides. On qualifie de côtiers leslimicoles fréquentant le littoral maritime pendant lamigration et l’hivernage.2. Entre zones de nidification du nord-est canadien, duGroënland à la Sibérie centrale et zones d’hivernagecomprises entre les Îles britanniques et l’Afrique du Sud.3. Soutenu financièrement par le PNR Marais du Cotentinet du Bessin.4. • L’analyse factorielle des correspondances permetde décrire des jeux de données complexes. Elle définit iciles associations d’espèces caractérisant chacun desrelevés.• Classification ascendante hiérarchique : classificationdes relevés en fonction de leur similarité, elle permet dedégager des groupes de relevés proches au niveau deleur peuplement (assemblage d’espèces).5. La macrofaune benthique, consommée par leslimicoles côtiers, appartient essentiellement aux troisgroupes zoologiques suivants : polychètes, crustacés etmollusques.

En savoir plusà s’interroger sur des actions plus globales,liées notamment à l’intégration des effetsde l’évolution du climat. Même si, locale-ment, la réserve naturelle offre une garantiefonctionnelle de première importance,qu’en sera-t-il demain face aux effets duchangement climatique ?L’élévation annoncée du niveau moyen desmers et ses conséquences (éventuelles modi-fications du trait de côte et réductions dessurfaces intertidales…) rendront-elles nosdispositifs de protection inopérants? Toutesces considérations renforcent l’intérêt denos efforts de surveillance et doivent nousinciter à imaginer de nouveaux dispositifsconservatoires, capables d’accompagner unenature en perpétuelle évolution. ■MARIE BUNEL - UNIVERSITÉ DE RENNES 1.

EMMANUEL CAILLOT - RÉSERVE NATURELLE

NATIONALE DU DOMAINE DE BEAUGUILLOT

ANIMATEUR DE LA THÉMATIQUE LITTORALE RNF

>>> Mél : [email protected]

- - - nb d’espèces pour la baie (hors RN)- - - nb d’espèces pour la RN Beauguillot

----- effectifs baie (hors RN)----- effectifs RN Beauguillot

Baie des Veys. Effectif : 20280 individus.

Littoral Est-Cotentin.Effectif : 6995 individus.

bécasseau variablehuîtrier piepluvier argentécourlis cendré

autresgrand gravelotbécasseau sanderlingtournepierre à collier

12730

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1366

1243

892

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938

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842

81299

Composition des peuplements hivernaux en baie des Veys et pour le littoral Est-Cotentin. Moyenne janvier 2000-2005.

Phénologie des peuplements en baie des Veys (dans et hors réserve naturelle). Moyenne 2000-2005.

Source : Bunel 2008

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24 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

gestionpatrimoniale

En 2005, en application du traité de Berne, le ministère de l’Écologie demande de procéder àl’éradication de l’ibis sacré. Ce bel oiseau venu d’Égypte est une espèce potentiellement invasive1.On a déjà pu constater une prédation sur des colonies de sternes et d’autres oiseaux coloniaux.Son explosion démographique laisse augurer que cet impact pourrait s’amplifier fortement. Dans le

Morbihan et dans l’estuaire de la Loire, l’opération portée par l’Office national de lachasse et de la faune sauvage est bien engagée. La communication évite un aspecttrop émotionnel.

Rencontre avec

En un an, vous avezéliminé 3000 ibis sacrés sur unepopulation invasive comptant 6000individus. Un succès?Le bilan est supérieur à celui escompté.Néanmoins, avant 2008, il y a eu des tâtonne-ments. En 2006 par exemple, l’arrêté préfec-toral encadrant cette opération préconisaitl’enlèvement des œufs! Conclusion, peu detemps après, les oiseaux ont pondu à nouveau.L’année suivante, nous avons eu droit d’effec-tuer des tirs mais… hors période de repro-duction. Dès nos premières interventions, lesoiseaux ont fui… ils ne sont plus revenus.Pourtant, nous le savons: pour réussir ce typed’opération, il faut toucher les adultes.

Comment s’expliquent ces résultats ?Par la pertinence de l’ensemble des moyensmis en œuvre. Les résultats sont dus à l’investissement des agents, aux budgetsaccordés par les Diren pour l’achat desarmes et des munitions. Et de mon pointde vue, par l’aspect interdépartemental del’action. Par ailleurs, les zones de tirs – prin-cipalement des zones de reproduction – ontété bien choisies. Nous avons égalementciblé des décharges à ciel ouvert sur les-quelles les oiseaux viennent s’alimenter.J’ajouterais qu’en 2008, la Ligue pour la pro-tection des oiseaux ainsi que Bretagnevivante se sont engagées dans cette cam-pagne. Leur caution morale, autant que leurtravail, constituent un élément du succès.En effet, suite à leur engagement, l’admi-nistration a pu constater qu’il y avait unconsensus très large sur l’objectif et les fri-losités ont été levées. Par ailleurs, les asso-ciations mènent, avec nous, le travail d’iden-tification des dortoirs et des sites denidification. Nous pouvons tirer à coup sûr,limiter les dérangements et la dispersion.

Qu’en est-il de l’implication des agents ?Les agents de l’Office national de la chasse

«Les télévisions voulaient filmer les tirs»La fin programmée de l’ibis sacré en France

et de la faune sauvage ont été inventifs. Unagent a fabriqué des formes d’ibis qu’il aposées sur les décharges permettant, ainsi,d’atteindre plus aisément les ibis attirés parces formes.L’implication est d’autant plus importanteque nous avons couplé ces opérations d’éra-dication avec un programme d’analyse detoxicologie et de suivi sanitaire mené avecl’école vétérinaire de Nantes et le centre desoin de la faune sauvage. Nos agents sontformés pour effectuer les prélèvements san-guins sur les ibis et sur l’érismature. Surcet oiseau comme sur d’autres, nous cher-chons notamment le H5N1.

Pourquoi certains ont-ils pris positioncontre cette éradication ?L’ibis est un bel oiseau. Un grand oiseau.Majoritairement blanc. Son nom, ibis sacré,renvoie à la mythologie…Il y a également une opposition plus scien-tifique prétendant que cet oiseau n’est pasnéfaste. Certains soutiennent égalementque c’est une espèce protégée. En Afriquecertes où elle est autochtone, mais pas enFrance. Il est vrai cependant que la listenationale des espèces invasives n’est pasencore arrêtée. C’est une brèche juridiquequ’il faudrait très vite combler.

Quel écho dans le grand public ?La presse n’a pas fait d’article assassin sur lesujet ; elle a plutôt développé l’action autitre de la biodiversité. Pourtant a priori,les médias, et surtout la télé, souhaitaientfaire «des images de tirs». Nous avons dis-cuté, expliqué, communiqué mais nousn’avons pas accepté de jouer ainsi sur l’émo-tionnel. Nous avons bien fait.Nous entretenons également un contactrégulier avec la LPO qui sert de relais avecle public. Elle recueille les questions aux-quelles nous répondons. Par exemple, desgens appellent pour signaler des oiseauxmorts sur des îlots, ils s’interrogent sur lepourquoi des choses. Nous expliquons…

Vous prévoyez cinq ans pour réussir…Au vu de ce premier bilan, l’objectif est attei-gnable. Sauf si certains sites hors pro-gramme le demeurent. Les oiseaux pour-raient alors aller s’y reproduire. ■RECUEILLI PAR MOUNE POLI

>>> Mél : [email protected]

1. UNE ÉTUDE DE FAISABILITÉ SUR LA RÉINTRODUCTIONDE L’IBIS SACRÉ EN ÉGYPTE EST EN COURS.2. AGENTS DE L’ONCFS DÉPOSANT DES LEURES.

CARTE DES TIRS EFFECTUÉS EN 2008

Dominique AribertDÉLÉGUÉE INTERRÉGIONALE DE L’ONCFS BRETAGNE-PAYS DE LA LOIRE

1. Se dit d’une espèce introduite qui, par sa pullulationet l’extension de son aire de répartition, produit deschangements significatifs de composition, de structureou de fonctionnement des écosystèmes.

© Else - Wikipédia

MORBIHAN

LOIRE

ATLANTIQUE

VENDÉE

colonie

déchetterie

prairie

dortoir

© ONCFS

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OBJETS CULTURELS, ARCHITECTURAUX ET ÉCOLOGIQUES, LES SENTIERS DOIVENT ÊTRE PROTÉGÉS ET GÉRÉS À LA HAUTEUR DE CE QU’ILS REFLÈTENT.

Le bon chemin pour restaurer les sentiersItaliens et Français éditent un manuel pédagogique et technique

Un fin diagnostic est la clef de la réus-site pour la restauration d’un sen-tier. Un manuel pédagogique et tech-

nique a donc été conçu en ce sens : formerl’œil et l’esprit avant d’utiliser pics etpioches.Le risque est grand, en effet, d’effacer lestraces de notre mémoire collective par unerestauration hâtive, non réfléchie, inadé-quate… privant ainsi les générations à venirdes racines de leur histoire. Nous privantalors, tous, de la compréhension des fon-dements de notre culture née desactivités humaines : commerce,transhumance, pèlerinage…Et puisqu’une immersion dansl’histoire des sentiers est néces-saire pour se rendre compte deleur intérêt patrimonial, alors,naturellement, le premier chapitrede l’ouvrage traite de l’historiquedes sentiers et, ici plus particuliè-rement, de l’espace franco-italienMercantour-Alpi Marittime.On y apprend que certains sentiers furentcréés il y a plus de 5000 ans… mais qu’onne s’y méprenne pas, il ne s’agit pas d’uncours d’histoire. Il s’agit plutôt, pour celuiqui entame l’aventure de la restauration,

de se mettre en condition par l’adoptiond’une posture mentale. À cette étape duguide, une sorte de rapport intime avecl’environnement se joue, où l’on réalise querestaurer c’est intervenir sur l’ouvrage maiségalement sur la transmission du savoir-faire traditionnel qui en est à l’origine : laplupart de ces sentiers ont été réalisésdurant les siècles précédents avec des maté-riaux naturels locaux, en harmonie avec

les milieux, et en utilisant des tech-niques très précises qui malheureu-sement ont tendance à se perdre.En découvrant, par exemple, que lechemin du col de Tende est à jamaisassocié à l’histoire de la route du sel.«Au 17e siècle, près de 6000 tonnesde sel sur le dos de 30 000 muletstransitaient chaque année, au départdu cours Saleya à Nice et à destina-tion du Piémont. Le voyage prenait

plusieurs jours»… on s’imprègne de l’es-sentiel, de l’esprit qu’il convient de sauve-garder lors de la restauration à venir.On peut alors, plus prosaïquement, répondreà cette question, essentielle pour le ges-tionnaire : comment ce sentier constitue-t-

il aujourd’hui un outil pour le développe-ment durable?Photos et anecdotes égrainent ce chapitrepremier long de vingt pages.

Connaître le sentier. L’aspirant restau-rateur poursuit ensuite son parcours initia-tique à travers un deuxième chapitre, plustechnique: «Connaître le sentier et ses pro-blématiques.» L’ouvrage propose de répondreà tout un lot de questionnements et offre,pour ce faire, plusieurs fiches techniquesd’analyse à remplir. Celles-ci visent à l’ob-servation du sentier afin d’y rechercher lescaractéristiques physiques, patrimoniales,d’usages et de gestion. Voici les questionsfondamentales à se poser afin de réaliser undiagnostic fin pour votre projet : quelle fré-quentation, quelle histoire, quelles caracté-ristiques physiques, quel statut foncier,quelles dégradations?Cette étape est indispensable pour établirla stratégie d’approche et la méthode d’amé-nagement du sentier. Les bonnes décisionspassent par la réponse à ces interrogations.Bien sûr, les fiches d’analyse proposées nesont que des exemples, elles donnent au

Les sentiers méritent toute notre attention. Afin de gérer ce patrimoine, un nouveaumanuel technique et pédagogique sur la restauration des sentiers aété édité. Pourquoi un tel ouvrage? Comment s’en servir ?

Comment ce sentier constitue-t-il un outil pour

le développementdurable ?

Guide

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méthodestechniques

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 25

© archives PNM

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26 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

Le guide technique et pédagogiquepour la restauration des sentierspeut être téléchargé gratuitement

sur le site internet du Parc nationaldu Mercantour. Édité par le Parcnational du Mercantour et le Parconaturale Alpi Marittime (avec l’aide duParc national des Écrins et du conseilgénéral des Alpes-Maritimes), l’ou-vrage est amené à évoluer : ajout defiches techniques, amélioration desméthodes de diagnostics et deconstruction d’ouvrages, complémentsd’informations. ■>>> www.mercantour.eu (rubrique téléchargement)

À téléchargergratuitement

gestionnaire le cadre de ce que doit contenir uneétude complète des sentiers. Pour bien com-prendre l’intérêt de ces grilles d’analyse, on sereportera à la fiche concernant les caractéris-tiques techniques reproduites (voir schéma 1).Le chapitre s’attarde sur le diagnostic de dégra-dation. Il propose au lecteur, après qu’il aséquencé l’itinéraire, c’est-à-dire qu’il a décom-posé le sentier en sections, de remplir une grille(tableau 3) lui permettant d’affiner son diagnosticde dégradation et l’autorisant à définir sa stra-tégie d’intervention. Une boîte à outils : ouvragespossibles à réaliser en vue d’une réhabilitationadéquate en fonction des dégradations, est éga-lement proposée.S’agit-il d’une dégradation liée à la mauvaise qua-lité de l’assiette, à l’eau, à la pente? Les versantssont-ils instables? Ou bien faut-il intervenir du faitde l’insécurité (chute de pierres possibles…) oud’atteintes paysagères et environnementales (rac-courcis indésirables, zone écologiquement sen-sible…) ? Des solutions indicatives sont alorsdécrites dans un chapitre trois.Le lecteur l’aura compris, ce troisième chapitreest très technique. Soit dit en passant, il ne man-quera pas d’être utile pour constituer les cahiersdes charges d’appels d’offres. Emportées sur leterrain, ces fiches techniques permettront éga-lement d’adapter les solutions proposées à la réa-lité des lieux.Aménagements de l’assiette du sentier, ouvrages degestion des eaux, revêtements de sols, ouvragesde franchissement de dénivellation, d’élévation etsoutènement, de stabilité de versant, dispositifsde lisibilité du tracé… les ouvrages classés parfamille donnent lieu à des schémas expliquant lesprincipes de mise en œuvre, les domaines d’utili-

sation de chaque ouvrage, les matériaux à utilisermais aussi les conditions de pérennité.C’est ainsi que l’on apprend que, concernant lesmurs de soutènement et murets maçonnés à lachaux : «Si les principes constructifs (y comprisle drainage) ont été correctement respectés, ladurée de vie de ce type d’ouvrage est d’une tren-taine d’années minimum hors désordre géo-technique exceptionnel. »Un exemple repris dans ces deux pages illustre,mieux qu’un long discours, l’utilité de ce volumedont la clarté, la précision et la simplicité sont àmettre en exergue.Afin de ne pas laisser le lecteur seul face à ceschoix, un quatrième chapitre présente des chan-tiers déjà réalisés. On y puise des éléments pourévaluer vos besoins humains, matériels… et biensûr le temps et le coût de réalisation. Il s’agit d’unrésumé de chaque chantier qui présente les choixstratégiques des gestionnaires. ■EMMANUEL GASTAUD - CHARGÉ DE COMMUNICATION

SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE - PARC NATIONAL DU MERCANTOUR

>>> Mél: [email protected]

CARACTÉRISTIQUES OBSERVATIONS REMARQUES

Largeur de l’assiette• < 40 cm• 40 à 80 cm• 80 à 120 cm• 120 à 220 cm• > 220 cm

… …

Structuration• Sans• Revêtement meuble• Revêtement pierre etassise• Autre

… …

Nature du sol• Rocheux• Sableux• Argileux

… …

Milieu naturel traversé• Abords construits• Alpages• Forestiers• Minéral• Ravines• Éboulis

… …

Intensité de la pente• Très fortes• Fortes• Moyennes• Faibles

… …

Matériaux disponibles• Bois• Pierres pour ouvrages• Granulats et fines• Pierres tout venantes

… …

1. Fiche de caractéristiques

2. Observation du sentier

Le bon chemin pour restaurer les sentiers

SAVOIROBSERVER UN

SENTIER DANSSON ENSEMBLEEST UNE ÉTAPEINDISPENSABLE

POUR METTREEN PLACE UNE

STRATÉGIED’APPROCHE ET

UNE MÉTHODED’AMÉNAGEMENT

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méthodestechniques

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 27

DÉGRADATIONS OBSERVÉES QUANTITÉ ÉTAT CONSTAT

A. Mauvaise qualité de l’assiette, trous, creusement à traiter• Zone boueuse• Reprise du profil en travers• Dégradation du revêtement• Reprise du profil en long• Rétrécissement de passage• Pierres roulantes à enlever• Pierres proéminentes• Envahissement par la végétation

… … …

B. Dégradations liées à l’eau• Érosion du sol due aux ruissellements• Écoulement dans l’assiette• Eau stagnante• Gué infranchissable• Dégradation d’ouvrages de franchissement (pont)

… … …

C. Difficultés dues à la pente• Absence d’aménagement par rapport à l’angle de pente• Aménagement dégradé à restaurer (marche)• Aménagement non adapté

… … …

D. Instabilité des versants• Dégradation des murs de soutènement aval ou amont• Instabilité des versants aval ou amont• Effondrement importants des versants

… … …

E. Atteintes paysagères et environnementales• Raccourcis indésirables• Sentiers avec traces diffuses • Zone écologiquement sensible• Mauvaise lisibilité du tracé

… … …

F. Insécurité• Zone glissante (passage rocheux, dalles inclinées)• Zone instable amont ou aval pierres tout venantes

… … …

«Nos sentiers face à l’usure dutemps », Espaces naturels n°8,octobre 2004, p.26-27.

4. Restauration et entretien : exemple des ouvrages de gestion des eaux

3. Fiche de diagnostic par section

En savoir plus

UTILISER UNE FICHE DE DIAGNOSTIC POURCHAQUE SECTION IDENTIFIÉE PERMET D’ÊTRECOMPLET ET DE NE RIEN OUBLIER. AU PRÉALABLE,CHAQUE SECTION DOIT ÊTRE NUMÉROTÉE ETCARACTÉRISÉE PAR SES PARAMÈTRES PRINCIPAUX.À PARTIR DE CES FICHES D’ANALYSE, ONDÉTERMINE LES INTERVENTIONS PAR SECTIONPOUR UN SENTIER.

LE REVERS D’EAU : dispositif ouvragé etproéminent, disposé en travers dusentier, sur lequel viennent buter leseaux de ruissellement pour êtreévacuées vers l’aval du sentier.

LA CUNETTE : passage incurvé, ouvragé,traversant le sentier et permettant unécoulement d’eau important. Sesobjectifs sont autant l’évacuation deseaux que la consolidation de la structured’assise du sentier.

LA MARCHE/REVERS D’EAU : même dispositifque le revers d’eau, il permet, en plus, defranchir une dénivellation. On le trouveradonc dans les secteurs du sentier où lapente est assez soutenue.

LE CANIVEAU OU RIGOLE : dispositif derecueillement des eaux de ruissellementouvragé et enterré qui peut être disposé

transversalement ou longitudinalement. Ilpeut être constitué en pierres ou

simplement en terre.

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Connaître les usagers des espaces pro-tégés, comprendre leurs attentes etanalyser les modalités de fréquenta-

tion, sont quelques-unes des motivations àl’origine des premiers observatoires réaliséssur les îles de Port-Cros et Porquerolles. PourCéline Maurer, directrice adjointe du Parcnational de Port-Cros, «mieux connaître cettefréquentation était un préalable à la mise enœuvre d’une politique de gestion». En l’ab-sence de méthode standardisée, scientifiques,gestionnaires, usagers et professionnels sesont investis depuis 2001. La démarche viseà élaborer un outil d’aide à la gestion de la fréquentation des deux îles. Ainsi est néeBountîles, une base d’observation des usagesnautiques et terrestres. La construction deces observatoires relève d’un projet derecherche appliquée qui se poursuit toujours.L’observatoire présente un double intérêt,soutient Céline Maurer : « Il s’agit de déve-lopper une méthode de suivi novatrice etd’affiner les connaissances dans ledomaine des sciences sociales, domaineplutôt délaissé jusqu’alors par nos ser-vices. L’observatoire, qui s’intéresse aussibien à la fréquentation terrestre quemaritime, fournit aussi une base de dis-cussion avec les différents partenaireset acteurs locaux afin d’apprécier etd’avoir une vision commune.»Mettre en œuvre un observatoire sup-pose, en premier lieu, de réaliser uneétude de fréquentation (la plus précisepossible !) susceptible de révéler cer-tains impacts, physiques, environne-mentaux mais aussi sociaux. Basée surdes approches quantitative, qualitative

Les premiers observatoires de la fréquentation Bountîles1 ont vu le jour sur lesîles de Port-Cros et Porquerolles. Une démarche de long cours dont les travauxsont basés sur des protocoles méthodologiques rarement standardisés.

accueilfréquentation

Mettre en place un observatoire de la fréquentation

et comportementale, elle s’appuie sur la col-lecte de données de terrain originales dontla liste dépend de la spécificité de chacundes sites. Un peu comme une énigme poli-cière, il s’agit, à ce stade, de rechercher deschoses qui ne sont pas évidentes de primeabord. Un exemple? Penser aux fréquenta-tions de nuit ou aux catégories de visiteurs,plus marginaux, ceux qui viennent d’unefaçon différente ou qui ont une autre façond’approcher l’espace.Les données quantitatives découlent essen-tiellement des comptages, qui peuvent sefaire à partir de l’observation directe, avecl’utilisation d’écocompteurs, ou bien de pho-tographies obtenues à partir de moyensaéroportés. Les observations qualitatives

sont obtenues à partir de l’utilisation dequestionnaires élaborés sur la base de sériesd’interviews. Ces techniques d’entretien,de questionnaire ou de sondage permettentde comprendre une réalité sociale. Ilconvient également de mener des observa-tions directes sur le terrain : l’observationcomportementale présente l’intérêt decaractériser les attitudes des visiteurs dansleur espace et de les confronter avec les dis-cours recueillis au cours des entretiens oudans les questionnaires. En effet, au-delàde la caractérisation et de la mesure de lafréquentation, l’étude participe à la miseen œuvre d’un processus de concertationassociant scientifiques, gestionnaires (direc-tion, chefs de secteurs, gardes moniteurs) et

usagers.Les conclusions de l’étude et sonappropriation par les gestionnairesconduisent ensuite à imaginer l’ob-servatoire proprement dit dont leprincipe fondateur vise à disposerd’un outil simple, peu coûteux, opé-rationnel et évolutif. À Port-Cros etPorquerolles, deux années ont éténécessaires à la création de Bountîles.Ainsi, à partir des résultats de l’étudede fréquentation, les personnels duparc national, les scientifiques, cer-tains usagers et professionnels, ontisolé des pistes de suivi prioritaires.Le travail de recherche a consisté àstructurer et hiérarchiser ces pistesafin de définir des indicateurs desuivi cohérents, à tester ces indica-teurs avec les gardes et les profes-sionnels, puis à construire les outilsopérationnels qui font vivre l’ob-servatoire (base de données, recueilméthodologique, tableau de borddes stagiaires).Pour ne pas aboutir à une sommed’indicateurs inapplicables, une répé-tition générale a eu lieu (en 2005)avec les gardes du parc national.Cette étape a matérialisé le passagede relais entre les tests scientifiqueset l’application des indicateurs opé-rationnels sur le terrain.

L’observatoire Bountîles prône le sur-mesure

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Répartition des embarcations île de Port-CrosJeudi 24 juillet 2008 entre 12h et 14h

• 50% de la fréquentation desmouillages est concentrée dansl’anse de Port-Man.

• La flotte hors port est composée de39% de vedettes à moteur. 53% devoiliers. 8% de canots pneumatiques.En 2008, la proportion des voiliersétait souvent la plus importante.

• Nombre moyen de personnes à bord : 4,97

• Nombre total de plaisanciers hors port : 969

Type de bateau

voilier

vedette à moteur

canot pneumatique

bateau de plongée

paquebot croisière

autre embarcation

type indéterminé

1. Based’observationdes usagesnautiques etterrestres sur des îles et littoraux.

Chaque été, les gardes du parcréalisent le comptage desembarcations mouillant autour dePort-Cros. Ces résultats,complétés par des enquêtesauprès des plaisanciers, leurpermettent notamment d’organiserleur tour de surveillance en mer.

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 29

Pour Céline Maurer, « la principale diffi-culté est de maintenir la récolte et la qua-lité des données d’une année sur l’autremême si les indicateurs retenus l’ont étésur des critères de facilité de mise en œuvre.D’ailleurs, le suivi de la fréquentation en“ relatif ” depuis maintenant 2003 nécessi-terait un recalage avec une nouvelle étudeexhaustive de la fréquentation».Toujours en évolution, l’observatoire s’adapteaux préoccupations du moment ou à l’émer-gence d’activités nouvelles.L’accompagnement scientifique permet degarantir la cohérence. « L’avantage deBountîles, c’est qu’il s’agit d’une boîte àoutils à laquelle on peut rajouter de nou-veaux modules en fonction de questionsnouvelles, développe la directrice adjointedu parc. Ainsi, depuis 2003, un suivi de l’ac-tivité plongée a été initié à Port-Cros. En2009, la réflexion porte aussi sur un nouvelindicateur visant le ressenti des habitantsvis-à-vis de la fréquentation. Cette année,nous réfléchissons également à mettre enperspective le suivi de la fréquentation aveccelui des impacts en termes d’érosion,d’usages (déchets, consommation d’eau,etc.)… Ces derniers aspects visent à appro-cher la notion de capacité de charge. Ilsrelèvent d’un nouveau champ de rechercheet devraient permettre une aide à la prisede décision et à la définition d’une politiqueconcertée de la fréquentation.»Chaque année, les principaux résultats sont Riches de l’expérience entamée à Port-Cros et Porquerolles en 2003,

d’autres gestionnaires d’espaces protégés ont fait appel au labora-toire Géomer (CNRS) de l’université de Bretagne occidentale pour se

doter d’outils similaires. C’est ainsi que le Conservatoire du littoral et leSyMEL (Syndicat mixte des espaces littoraux de la Manche) ont souhaitése doter d’un observatoire Bountîles pour l’archipel de Chausey. Sur lesmêmes principes fondateurs, mais en tenant compte des spécificitéslocales, notamment les pratiques de pêche à pied, ce nouvel observatoirevise le suivi des usages récréatifs. En parallèle, des carnets de pêche per-mettent, en collaboration avec des pêcheurs volontaires, de mesurer l’évo-lution des prélèvements. L’intégration de données relatives aux popula-tions de bivalves, en collaboration avec des biologistes, ouvre de nouvellesperspectives.Le dernier observatoire en cours de réalisation concerne le Mont-Saint-Michel. En parallèle, une thèse sur la modélisation de la fréquentation esten cours. C’est une des spécificités des observatoires que de chercher àassocier des développements méthodologiques à partir de travaux dejeunes chercheurs.Autre originalité du projet Bountîles : créer un réseau de gestionnaires. Saréalisation a été possible grâce au programme de recherche national Liteau.L’équipe Géomer a réussi à associer plusieurs organismes gestionnairesautour de réflexions sur des thèmes tels que la capacité de charge tou-ristique, la gestion des flux, la question des mouillages… Ces ateliersréunissent durant deux jours, gestionnaires, scientifiques, usagers et élus.Le dernier atelier Liteau s’est tenu les 11 et 12 juin à Ouessant. ■

Bountîles fait école

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Suivi du ressenti des visiteurs île de Port-Cros 2003 - 2008

La connaissance de la perception de la fréquentation par les visiteursfigure parmi les indicateurs fondamentaux de l’observatoire. En effet,en 2002, une étude de fréquentation a montré que les jours de forte

affluence, plus de la moitié des visiteurs avaient éprouvé un sentiment defoule qui nuisait à la qualité de leur visite. Un tel degré d’insatisfaction avaitalerté le parc national et justifié la recherche de mesure de régulation despics de fréquentation ainsi que la mise en place d’indicateurs de suiviqualitatifs. Depuis 2003, les tendances sont stables. En été, un quart desvisiteurs venus en navette à Port-Cros n’éprouvent aucun sentiment de foule,tandis que 75% d’entre eux éprouvent une gêne au contact des autres visiteurs.Ces résultats ont justifié un approfondissement du suivi en 2009. Il s’agirad’affiner la connaissance des perceptions des visiteurs en différenciant lesdifférents secteurs de l’île (le port, les plages, les sentiers, le village). ■

très dérangeantdérangeant peu dérangeant pas dérangeant sans réponse

résumés sur des fiches de synthèse (quatrepar île). Ils sont présentés aux Port-Crosienset aux Porquerollais lors de réunionspubliques. Les questions sont nombreuseset les débats dépassent souvent la strictethématique de la fréquentation pour s’en-gager sur la question du devenir global desîles. Cette appropriation de l’outil par lesagents, les responsables du parc, et dansune certaine mesure, les usagers et lespopulations locales, est certainement un

des aspects les plus innovants du projet.C’est aussi l’assurance d’une certaine péren-nité pour ces observatoires. ■SOLENN LE BERRE, LOUIS BRIGAND

LABORATOIRE GÉOMER, UNIVERSITÉ DE BRETAGNE OCCIDENTALE

XAVIER LAFON - MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE

>>> Méls : [email protected]@univ-brest.fr

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Les indicateurs de suivi des activités deplongée ne figuraient pas parmi lespriorités de l’observatoire de 2003.Élaborés progressivement, ils sontopérationnels depuis 2006. Les plongeurssont enquêtés par QCM à l’occasion de lasignature de la charte de plongée du parcà la capitainerie.

La mesure du ressentides visiteursrenvoie à laconnaissancedes impactssociaux.

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30 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

droitpolicede lanature

Accès libre à l’information environnementale

La loi tente d’organiser le libre accès à l’information environnementale. Ainsi, par exemple,la directive Inspire trace le cadre d’une organisation nationale des données tandis que la

convention d’Aarhus fait échec au droit d’auteur dans la mesure oùl’information est détenue par une autorité publique.

Appliquer la convention d’Aarhus et la directive Inspire

peut cependant servir qu’à un usage interne,l’utilisation commerciale de cette informa-tion restant soumise à autorisation desauteurs. La loi française a, de plus, limité stricte-ment le prix de cette copie au seul coût dusupport, sans prise en compte du tempspassé ni de la richesse du contenu, inté-grant ainsi l’obligation d’accès dans les mis-sions courantes des services publics.C’est une avancée importante en matièrede démocratie. Certes, ces droits créent descontraintes pour les services publics, maisils sont indiscutablement bénéfiques pourles enjeux environnementaux.Pour rendre plus facile ce droit d’accès, leGrenelle de l’environnement a abouti à laréalisation d’un portail1 facilitant la recherchede cette information publique quand elle estdisponible sur Internet.

Évolution : la directive Inspire. La direc-tive Inspire, dernier texte en date (2007),prévoit de créer au niveau européen uneinfrastructure d’informations géographiquesrépondant aux besoins des politiques envi-ronnementales. Elle impose aux autoritéspubliques de diffuser sur Internet leurs don-nées géographiques environnementalesainsi que les référentiels, le tout selon desmodalités techniques assurant une réelleinteropérabilité.L’infrastructure se composera de métadon-nées (données décrivant les données2), desdonnées géographiques, de services internetpermettant d’y accéder, mais aussi d’accordssur le partage, et de mécanismes de coor-dination entre acteurs. Aussi, même si ladirective n’oblige pas à créer de nouvellesdonnées, elle va nettement plus loin que lesimple droit d’accès.

Depuis 1990, de nombreux textes légis-latifs portent sur la mise à disposi-tion des informations environne-

mentales détenues par les autorités publiques.Ils visent à une plus grande accessibilité deces informations, tant pour permettre aucitoyen de s’informer et débattre, que pourfaciliter le travail des services publics.

L’accès à l’information. La conventiond’Aarhus, transposée en directives euro-péennes en 2003, pose le principe que, enmatière d’environnement, chacun a le droitd’être informé, de s’impliquer dans les déci-sions et d’exercer des recours.Elle prévoit en particulier que toute per-sonne peut obtenir une copie d’informationsur l’environnement auprès de toute auto-rité publique qui la détient, sous toute formedisponible, et ceci sans fournir de motivationparticulière. Cet accès à l’information ne

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 31

L’impact de cette directive est évidemmentprimordial pour les services travaillant dansl’environnement :• Les utilisateurs verront l’usage opéra-tionnel de ces données facilité par leur miseà disposition dans des modalités techniquesinteropérables standardisées : utilisation enligne avec les outils SIG, webmapping s’ap-puyant sur les données mises à jour par lesproducteurs, développement de services spé-cifiques… Dans les années à venir, cela per-mettra l’apparition de sites facilitant le débatpublic, l’information du citoyen, mais aussiproposant des services plus ciblés.• Les producteurs de l’information devrontmettre en place une démarche d’adminis-tration de données (métadonnées, politiquede diffusion, licences, standardisation desdonnées…). Ils devront aussi se doter d’ou-tils technologiques modernes, permettantde fournir les services internet demandés.C’est l’opportunité pour chacun d’ouvrir etde faire connaître son patrimoine de don-nées montrant ainsi sa richesse et sa diver-sité. C’est également l’occasion de moder-niser son système d’information.Pour qu’Inspire soit pleinement efficace,encore faut-il que soit organisée une coor-

dination nationale faisant une part équitableaux acteurs non étatiques, quel que soit ledomaine concerné. L’enjeu est en effet d’as-surer une pleine adhésion de chacun auxprincipes d’Inspire, pour obtenir son réeldéploiement.

Propriété intellectuelle. Sauf loi contraire,celui qui détient la propriété intellectuellesur une œuvre décide seul des modalitésd’usage de cette œuvre, sans tenir compte del’intérêt général. En tenant compte de ceprincipe, la propriété intellectuelle pourraitdevenir un frein au souhait du législateurde faciliter la circulation de l’informationenvironnementale.Aussi, pour éviter cet écueil, la conventiond’Aarhus précise que la propriété intellec-tuelle sur une information environnemen-tale n’est pas un obstacle à son accès pour unusage interne, dès lors que cette informa-tion est détenue par une autorité publique.Ainsi, un document d’objectif Natura 2000,réalisé par un bureau d’étude ou une asso-ciation (qui relève de son droit d’auteur) estlibrement accessible auprès de toute autoritépublique qui en détient un exemplaire.En revanche, la propriété intellectuelle d’untiers limite la diffusion et la réutilisation desdonnées publiques. Ainsi une donnée géo-graphique constituée par une entrepriseprivée ne sera pas concernée par l’obliga-

tion de la diffuser dans le cadre d’Inspire,sans l’accord de l’auteur.La notion de propriété intellectuelle restecependant délicate à appréhender3. Ainsi,une base de données sur la présence d’es-pèces relève de différentes propriétés : ledroit d’auteur sur la structure de la base, ledroit du producteur, pour les moyensinvestis dans sa réalisation, éventuellementle droit d’auteur sur les photos, les textes…En revanche, il n’existe pas de propriétéintellectuelle sur la «découverte» de telleespèce à tel endroit, car tout autre scienti-fique suffisamment formé aurait pu trouverla même chose.Ce cadre législatif, s’il est pleinement appliquépar les services publics, permettra que laconnaissance de l’information environne-mentale devienne progressivement une réa-lité pour tous: la prise en compte de l’envi-ronnement dans notre vie s’en trouverafacilitée. ■LAURENT COUDERCY - MEEDDAT

>>> Mél : [email protected]

S’abonner ? Remplir le bulletin page 41 de ce magazine : Espaces naturels • Mediaterra • Route Royale • 20600 Bastia • 0495311221 • [email protected]

Espaces naturels est un support d’échanges professionnels pour tous les métiers de la sauvegarde desespaces et du patrimoine naturels, en poste ou en devenir. La revue s’adresse aux acteurs et relais de la

gestion des territoires et des paysages. Les auteurs y présentent, évaluent et discutent les expériences etsavoir-faire issus des territoires, et portent à la connaissance des intéressés les actualités, recherches, textes

et initiatives dans ces domaines.

Édité par le groupement d’intérêt public Atelier technique des espaces naturels

1. www.toutsurlenvironnement.fr2. Elles se composent d’éléments relatifs à l’identification(l’auteur), la qualité, le contenu, les modalités d’accès et dediffusion…3. Plus de renseignements :http://www.naturefrance.fr/spip.php?rubrique16

1 an4 numéros33,50 €

seulement

www.espaces-naturels.fr

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À la fin du siècle dernier, lorsque l’on diffusait des émissions dont le titre a laisséquelques traces dans les mémoires des plus anciens d’entre nous : « Le pays d’ici »,

« Le bon plaisir »… Marion Thiba était « documentariste radio » etproductrice à France Culture. Depuis, elle a rejoint la Narbonnaiseoù elle est chargée de mission culturelle.

Marion Thiba Chargée de mission culturelle du Parc naturel régional de la Narbonnaise autour du «Territoire réel, imaginaire, rêvé».

Rencontre avec

32 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

Comment devient-on productrice à France Culture ?Une semaine d’émission en doublure et puisle grand bain: il faut se jeter à l’eaupour 50 minutes en direct. Un cau-chemar! Heureusement, les équipeschargées de la réalisation sont trèssolides et m’ont beaucoup épaulée.Au début, je comprenais 10% de ceque me disaient mes invités… Cinqans après, j’étais passée à 90%. Ilavait fallu tout ce temps. C’est lapratique qui fait le métier. J’ai faitbeaucoup d’émissions sur cessujets : typographe, cheminot, ouvrier,domestique, médecin de famille d’avant laguerre de 40, etc.

Cette première expérience vous apermis d’acquérir le savoir-faire quevous exercez maintenant…Avec toutefois un aspect très différent: main-

tenant, j’agis sur un territoire. Quand onfait un reportage, on rencontre, on écoute,on enregistre, on s’en va. Revenu à la Maison

de la radio, on monte et on diffuse.Mais on n’est plus sur place, on nese « coltine » pas les conséquencessur les gens et les choses. Il fautpourtant faire des choix: entre l’anec-dotique et le significatif, le singulieret l’universel, le fabriqué et l’au-thentique, le déjà vu et l’inédit, lesincère et… Il faut choisir et hiérar-chiser. Il faut donc écarter et ce n’estpas le plus facile. Bien sûr, il ne faut

pas faire ça tout seul, il faut s’appuyer surdes compétences et une méthode.

Aujourd’hui, que produisez-vousexactement ?Essentiellement la collection des «Archivesdu sensible» et le festival « Identiterres».Les « Archives », c’est la volonté de resti-

tuer un territoire à travers le savoir théo-rique enrichi de l’expérience vécue. Nousproduisons avec la Drac Languedoc-Roussillon, les archives départementales,l’association Garae1. Avec eux, nous avonsconstitué un groupe de projet qui sert deréférent à chaque nouvelle publication, enassociant quelquefois le Centre permanentd’initiatives pour l’environnement.En premier lieu, une étude documentaireexhaustive est commandée : ethnologique,historique, artistique… Parmi les sources,il y a souvent des photos. Puis une bro-chure sur le même thème est éditée à des-tination du grand public, faite par l’auteurde l’étude ou par un autre chercheur. Deplus en plus souvent, nous complétons avecun film en vidéo. C’est ainsi que nous avonstraité le thème de la chasse, avec plusieursregards portés sur le sujet et l’analyse d’unethnologue.Ou bien sur le «bétou» : le bateau de tra-

La mission culture au cœur d’un parc

« J’aime travailler avec les gens de

conviction qui allientsavoir-faire et

tempérament. »

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managementmétiers

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 33

vail des étangs ; la «robine» (la vie des gensdu canal du Midi). Dans le même esprit,nous avons également réalisé «La Nadière,l’île paradoxale2 », construit autour dutémoignage de la dernière personne qui yest née.La Nadière, l’île de l’étang de Bages-Sigeanoù vivaient des pêcheurs privés d’eau etd’électricité, régulièrement inondés et quiavaient obtenu du pouvoir central, à Paris,à la fin du 19e siècle, une passerelle qui leurpermettait d’envoyer leurs enfants à l’école.Le documentaire sur cette île «paradoxale»,au cœur de l’identité de la Narbonnaise,évoque des souvenirs de rudesse et de dif-ficultés.C’est à partir de là que la collection a vrai-ment pris son essor avec « La Nautique »publié pour le centenaire de la société denavigation de plaisance et les portraits depersonnages choisis pour leur capacité àincarner « l’esprit des lieux». Des «passeursde territoire » qui explorent ses richesseset le réinventent chaque jour. Piet Moget,un peintre d’origine néerlandaise, peint lalumière qui se dégage de la mer derrière lajetée. Marc Pala, un viticulteur géologueet archéologue spécialiste de « l’anciennefrontière» entre la Catalogne et l’Occitanie.François Marty, un pêcheur formé à l’eth-nologie dont le texte est illustré par lesaquarelles de son épouse. Jürgen Schilling,historien de l’art et plasticien, qui analysel’esthétique des paysages d’ici, ses muta-tions et la construction du «pittoresque».

C’est cela le projet culturel du Parcnaturel régional de la Narbonnaise ?L’idée, c’est de travailler sur l’enracinementà travers le thème du « territoire réel, ima-ginaire et rêvé». Mais pas l’enracinementqui exclut, au contraire : celui qui crée de larelation, pas la racine mais le rhizome. Loinde tout repli identitaire.

Si vous deviez définir le profil du postede «chargé de mission culturelle», quediriez-vous?Tout dépend comment on le conçoit : il peuts’agir d’un profil patrimonial (conservateurdu patrimoine) en relation avec des projetstrès contemporains comme ceux du «Paysd’art et d’histoire3 ». Ou bien d’un profiltrès lié à l’image: un documentariste, pour-

quoi pas, qui associerait le contenu et laforme dans la démarche d’animation.Cela peut-être aussi un « artisan/auteur »capable d’imaginer un programme culturel,avec une ligne directrice : un «auteur» c’estquelqu’un qui ne reproduit pas, qui élaboreau fur et à mesure, qui s’empare des maté-riaux les plus modestes pour en faire« quelque chose », avec un savoir-faire.

Comment sont perçues lespropositions du parc par le publiclocal ?Il n’y a pas d’hiatus entre le patri-moine et l’art contemporain. Tout cequi a trait au patrimoine «modeste»est très bien perçu : c’est «ce à quoion tient»; mais des idées plus décoif-fantes fonctionnent aussi si on sait les rendreaccessibles. Ainsi un spectacle de musiquetrès moderne, avec des sonnailles, parlaitautant aux amateurs de contemporainqu’aux oreilles de ceux qui reconnaissaientles sons d’autrefois. Nous avons un chan-teur, Laurent Cavalié, qui fait des ateliersde «mémoire chantée», avec un travail decollectage et de ré-appropriation auprès deshabitants. Cela pourrait être «ringard» maisc’est tout le contraire, car il est très exi-geant. Il faut qu’une politique de la cultureproduise de la qualité, donc qu’elle écarte cequi n’est pas au niveau exigé. C’est à celaque l’on reconnaît une « ligne éditoriale».Un parc naturel régional doit défendre laqualité dans tous les domaines.Nous faisons des commandes artistiquesaussi : photos, peintures, «bâton de sculp-ture», textes, spectacles. Après quatre ans detravail et suite à une résidence artistique, unouvrage a été édité. Le principe était : unauteur/un nombre de pages défini/un pho-tographe/un nombre de photos défini.Chaque « couple » était associé pour pro-duire un regard sur le paysage : certainsavaient des origines locales, d’autres

Marion Thiba : [email protected]

n’étaient jamais venus ici. Le résultat estsaisissant4.Pour ma part, j’aime à travailler avec desgens de conviction qui allient le savoir-faireet le tempérament. Bien sûr cela supposedes controverses, voire des conflits : maisce sont les compromis que l’on signe quinous font avancer. ■

RECUEILLI PAR MICHELLE SABATIER

1. Groupe audois de recherche etd’animation ethnologique.

2. www.parc-naturel-narbonnaise.fr/actus/articles/la_nadiere_le_carnet_et_le_film

3. Le ministère de la Culture et dela communication assure depuis

1985 la mise en œuvre d’une politiqued’animation et de valorisation dupatrimoine, en partenariat avec lescollectivités territoriales, qui seconcrétise par l’attribution d’un label« Villes et pays d’art et d’histoire ».

4. La Narbonnaise en Méditerranée,regards croisés sur un parc naturelrégional, ouvrage collectif, Éditions del’Aube, 2006.

CI-CONTRE, LA CARABANE, SCÈNE ITINÉRANTEMI-CABANE MI-CARAVANE, ÉTABLIE ICI SUR LESRUINES DU CHÂTEAU DE LEUCATE.

«Une politique de laculture doit produire de la qualité. Il faut

écarter tout ce qui n’apas le niveau exigé».

En savoir plus

LE PARC SOUTIENT L’ART CONTEMPORAIN EN

ACQUÉRANT DES ŒUVRES OU EN ORGANISANT

DES SPECTACLES. CI-CONTRE, BÂTON DE

SCULPTURE DE SERGE PEY, CRÉATION SUR LA

THÉMATIQUE DU VENT. DESSOUS À GAUCHE,TRIPTYQUE DE BÉATRICE SLASAK QUI

RÉINVENTE LA CHAMBRE NOIRE SUR

L’APPAREIL PHOTO NUMÉRIQUE. DESSOUS À

DROITE, UN SPECTACLE DE MUSIQUE,«SIESTE HAUT-PARLANTE », À NOTRE-DAME

DES OUBIELS (PORTEL DES CORBIÈRES).

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© Béatrice Slasak

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34 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

managementmétiers

Des compétences pour faire face au changement

s’appuie sur la forme théâtrale2. «Celle-cifacilite l’expression des résistances et l’adop-tion de comportements écoresponsables. »

S’inscrire dans un projet. L’implicationdans l’action est le meilleur levier pours’inscrire dans une logique de changement.Se doter de buts communs, identifier desopportunités de projets, adopter des modesde fonctionnement tout en intégrant lesaléas de parcours, pour faire court « semettre en mode projet », est la meilleurefaçon de se rendre collectivement plus apteà digérer le changement et en faire uneopportunité.Fort de son expérience menée au Parcnational du Mercantour3, Florent Favier,responsable de la communication déve-loppe: «La capacité collective à se mettre enmode projet doit pouvoir faire écho descapacités individuelles d’interroger régu-lièrement son projet personnel (profes-sionnel et de vie), à être en prise avec sesenvies, ses priorités, ses capacités, les évo-lutions de son métier. Il faut être à même dedégager les lignes directrices qui nourri-ront son implication et sa motivation.»

Plus que jamais. La capacité à développerses compétences est une autre clé majeure.Collectivement, il s’agira de mettre en place

1. Isabelle Rambaud Carassus aégalement accompagné la démarche« référentiel métiers » de l’Aten.>>> www.metiers.espaces-naturels.fr2. Cf. Espaces naturels n°17 - janvier 2007 - page 31.3. Une stratégie de communication et demanagement a été déployée afind’accompagner les agents du parc nationaldu Mercantour vers les changementsinduits par la nouvelle loi Parcs de 2006.

En novembre dernier se déroulait le séminaire Jobs for nature. Isabelle Rambaud1 y animait l’atelier «Managerle changement ». Souvent amenés à solliciter chez d’autres un changement de leurs valeurs et de leurscomportements, les gestionnaires d’espaces naturels n’ont pas toujours conscience de la difficulté que cela

représente. Eux-mêmes pourtant, dans de multiples circonstances, doivent agir dans unedynamique de changement. Analyser les processus en œuvre permet de mieux lescomprendre et donc de développer des compétences particulières. Lesquelles ?

Métiers de la nature: savoir s’adapter aux évolutions pour rester performant

des modes de fonctionnement « appre-nants» qui font la part belle à l’expérimen-tation, l’innovation, mais aussi l’évaluationdes pratiques, le retour sur expérience, letravail collaboratif. L’enjeu : développer l’in-telligence collective, apprendre à fonc-tionner ensemble de façon plus souple, plusefficace.Individuellement, il est nécessaire de seconsidérer comme le premier gestionnairede ses compétences, identifier ses besoins,évaluer sa pratique professionnelle, consa-crer du temps à sa formation.

Changer. Comment apprendre à changer?Probablement en étant régulièrement placéen situation de reconsidérer ses façons depenser et d’agir. Un processus qui sera faci-lité par un management adapté, capable derassurer, de rendre lisibles les évolutions àvenir, d’accepter les manifestations de résis-tances et de contribuer au cheminement dechacun. Sans oublier les outils et disposi-tifs conçus pour mieux prendre en main sadestinée professionnelle : bilans de compé-tences, validation des acquis de l’expérience(VAE) et, au niveau des espaces naturels, lerépertoire des métiers et le dictionnaire descompétences des gestionnaires des espacesnaturels. ■ISABELLE RAMBAUD CARASSUS

ADVISEA CONSEIL

>>> Mél : [email protected]

Être en prise avec son environne-ment et traiter l’information. Êtreen capacité de changer suppose de

s’informer en permanence sur l’évolution deson environnement et de savoir traiter l’in-formation recueillie. Clive Walmsley, res-ponsable des impacts environnementauxau Countryside council for Wales (Écosse),insiste sur l’importance de mettre en œuvrede nouvelles pratiques de planification etde gestion des espaces naturels afin d’éva-luer l’impact probable du changement cli-matique. «L’approche doit être scientifiqueet rationnelle : veille réglementaire et technique sont indispensables mais unedémarche plus globale doit permettre d’ap-précier les évolutions à venir, dans leur glo-balité et leur complexité. À la manière deMonsieur Jourdain, chacun, peu ou prou,met cette approche en œuvre. Mais elle doits’appuyer sur un travail soutenu d’infor-mation, de développement et d’entretiende réseaux professionnels. Elle interpellefortement nos capacités à traiter, analyser,hiérarchiser, donner du sens à des infor-mations pléthoriques mais fractionnées.»

Faire le deuil des équilibres passés. Leschangements répétés mettent à mal leséquilibres que nous avions mis du temps àconstruire. Telle est la principale originedes résistances au changement que,d’ailleurs, chacun peine à reconnaître. Êtreen capacité de changer, c’est accepter decheminer pour renoncer aux équilibrespassés avec la volonté d’en créer de nou-veaux. Plus facile à dire qu’à faire ? Sansdoute, puisqu’il s’agit de prendre consciencede ses résistances, d’en situer l’origine, d’ac-cepter l’inconnu et d’y voir une source d’op-portunités… L’exemple développé parStéphanie Savel, directrice de recherchechez ASG (cabinet d’étude et de conseil),concerne la sensibilisation et la mise enœuvre de la démarche écoresponsable. Elleexplique que cette évolution s’opère d’au-tant plus facilement que les résistances sontacceptées et verbalisées. Pour ce faire, elle

DÉVELOPPERSES CAPACITÉSD’ADAPTATION.

© MT

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Espaces naturels n°27 • juillet 2009 35

Patrimoine géologique atout du développement de partenaires. Avec les accompagnateurs,restaurateurs, gestionnaires de gîtes, d’hô-tels, de campings, artisans, bibliothèques,elle cherche à créer de nouveaux produitsspécifiques (touristiques, pédagogiques,artisanaux, culturels). Il lui faut alors déli-vrer des formations ad hoc et organiser desrencontres afin d’aider les partenaires à sedévelopper et faire connaître leurs produits.Des circuits de découverte et des pôlesmuséographiques consacrés à un thème enlien avec le patrimoine géologique sontcréés. Il en est ainsi de la Route du tempspartant de Sisteron. De l’horloge florale,aux estrans fossiles en passant par lescadrans solaires, le visiteur découvre larichesse des vallées et des massifs locaux.Sur un autre registre, la réserve développeune politique d’organisation d’accueil decolloques ou de rencontres professionnelles,drainant ainsi un nouveau public de scien-tifiques, gestionnaires d’espaces naturels,techniciens d’institutions…Une autre expérience : le projet « Refugesd’art» consiste en un itinéraire de décou-verte associant la géologie à l’art contem-porain. Fruit d’un partenariat entre laréserve géologique et le musée Gassendide Digne, ce parcours attire les amateursd’art, public généralement plus capté parles thématiques culturelles que naturelles.Globalement, le projet génère des retombéesquantifiables, tous les travaux d’aménage-ment ayant été réalisés par des entreprises

1. PAIN EN FORME D’AMMONITE • 2. GRANDES AMMONITESDÉROULÉES À L’ENTRÉE DE BARRÊME • 3. VITRINE SUR LESITE DE MÉLAN • 4 & 5. TABLETTE DE LECTURE ETAMÉNAGEMENTS SUR LE SITE L’ICHTYOSAURE DE LA MÉLAIE.

2 3

54

initiativespartenaires

locales. Le budget global de l’opération surcinq ans atteint les 500000 euros. Uneenquête, menée par l’agence régionale dupatrimoine, estime à 1,6 million d’euros lesretombées induites par 31000 nuitées par an.Les difficultés n’ont pas manqué. Elles sontprincipalement liées au facteur temps et àl’accompagnement d’actions lancées dansle cadre de programmes à court terme. Avecla fin du programme Leader II et des contratsEmplois jeunes par exemple, la dynamiquedes réseaux initiés par la réserve a périclité.Un agent de développement avait bien étérecruté, mais ce poste n’a pu être pérennisé,même par une autre structure.Par ailleurs, le bilan économique est diffi-cilement quantifiable. En effet, sur un ter-ritoire de cette grandeur, les retombées éco-nomiques sont souvent diffuses.La notoriété de la réserve et de ses parte-naires s’est également trouvée renforcée,comme en témoigne le nombre croissant,de délégations d’élus et de techniciensvenant découvrir cette expérience.Quoi qu’il en soit, le constat s’impose : lepatrimoine géologique est un atout pourles acteurs locaux. La complémentaritéacteurs « de la nature » et professionnelsde l’économie peut constituer une synergie,à condition de travailler de concert. ■MYETTE GUIOMAR

RÉSERVE NATURELLE DE HAUTE-PROVENCE

>>> Mél : [email protected]

La Réserve géologique de Haute-Provence s’attèle au géotourisme1

1. Tourismedéveloppé

autour de ladécouverte

dupatrimoine

géologique.

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Le développement économique ne faitpas partie des missions d’une réserve?Depuis dix ans pourtant, la Réserve

géologique de Haute-Provence travaille ausoutien du tissu économique local et constateune appropriation du patrimoine géologiquepar les habitants, contribuant ainsi à sa pré-servation. Il est vrai que la réserve présentela particularité d’avoir un périmètre de pro-tection très vaste (2300 km2) permettantd’asseoir une notion de territoire: un conceptessentiel pour bâtir un projet de développe-ment et faire adhérer à une dynamique iden-titaire les institutions, habitants, sociopro-fessionnels, élus…Au commencement du projet, un constatrécurrent : certaines zones du territoiresouffrent d’une sous-fréquentation touris-tique, alors que d’autres (gorges du Verdon)sont saturées en haute saison. La réserveimagine alors de générer de nouveaux fluxtouristiques vers les secteurs défavorisés.Des sites géologiques de grand intérêt exis-tent dans les coins les plus reculés du ter-ritoire, le long de petites routes départe-mentales, parfois à proximité de gîtes ouautres lieux d’accueil : pourquoi ne pas pro-fiter de cet atout ?La réserve conçoit alors un projet de déve-loppement du géotourisme1 qu’elle met enœuvre dans le cadre du programme euro-péen Leader II.Dans un premier temps, l’association ges-tionnaire initie une dynamique de réseaux

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36 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

initiativespartenaires

Goûtez les paysagesdes énergies et génère de l’enthousiasme.Ainsi à Bouzigues, le site animé au départpar la mairie est aujourd’hui porté par uneassociation locale dont le président, AlainSacaze, est également celui de l’organisa-tion des producteurs qui regroupe plus decent ostréiculteurs engagés dans unedémarche de qualité. L’association LesGalapians propose aux centres de loisirs etmaisons de retraite mais aussi aux écoles etvillages de vacances du territoire des ani-mations qui associent «écologie» et «goût».L’association des amis du musée de l’étangde Thau, le centre d’initiatives pour valo-riser l’agriculture et le milieu rural, des res-taurateurs mais également une agenceimmobilière qui gère des locations saison-nières, sont tous membres de l’associationlocale du Site remarquable du goût de laLagune de Thau. Des programmations tou-ristiques associent aux dégustations et repasdes balades et visites, des cours de cuisine etdes animations pédagogiques dans desséjours de deux ou trois jours. L’un des pro-jets de l’association est d’aménager un masostréicole et d’y installer, avec l’appui de laFondation du patrimoine, un laboratoire etune cuisine pédagogiques pour mieux rece-voir scolaires et visiteurs. L’ensemble s’ins-crit dans le schéma de cohérence du bassinde Thau.Un examen d’aptitude est en préparationpour les guides du goût. Il viendra recon-naître des compétences de médiateur maisaussi des connaissances et des pratiquesassociant approche sensorielle et interpré-tation des paysages, conjuguant approcheartistique avec tourisme et développementdurable. ■MURIELLE BOUSQUET - EX-DIRECTRICE ASSOCIATION

NATIONALE DES SITES REMARQUABLES DU GOÛT

>>> Mél : [email protected]

Lier patrimoine et produit alimentaire emblématique d’un territoire

Les dossiers de candidaturesont étudiés par une commis-

sion composée de représentantsdes ministères en charge de l’agri-culture et de la pêche, de la culture,de l’écologie et du développementdurable, du tourisme. Le dossier decandidature peut être téléchargé :www.sitesremarquablesdugout.com

Comme à Thau, des dizaines d’autres Sitesremarquables du goût en France travaillentà faire évoluer le regard des visiteurs, desdécideurs et des habitants sur les richessespatrimoniales. Déguster un vin amènera àposer des questions sur le milieu naturel,sur l’économie ; à lire le paysage et à s’in-téresser à l’architecture.Le décideur va s’interroger sur le maintiend’une qualité paysagère et va faire réaliserune étude paysagère pour en identifier lasingularité. L’agriculteur va trouver de nou-veaux arguments pour maintenir une raced’élevage ou un savoir-faire traditionnel.L’enjeu d’un Site remarquable du goût viseà renforcer l’attractivité d’un territoire etle concept favorise les collaborations entreacteurs peu habitués à travailler en parte-nariat. Il dote des groupes de personnes d’uncadre pour concevoir des projets, canalise

Poser sa candidature

Les Sites remarquables du goût mobilisent le gourmet qui est ennous pour lui faire goûter le paysage.

PROMENADE « DES GOÛTS ET DES SAVEURS »,SPECTACLE ÉCRIT PAR STÉPHANIE TESSON.

JOUÉ ICI À VERSAILLES (2008) PAR LESCOMÉDIENS DE PHÉNOMÈNE ET CIE.

LA SAYNÈTE «ET QUE ÇA SAUTE » MET ENSCÈNE LE SITE REMARQUABLE DU GOÛT DE

L’AVENUE DE CHAMPAGNE À EPERNAY.

© Philippe Fretault

Le local de l’association d’éducation àl’environnement Les Galapians (CPIEdu bassin de Thau) est investi par un

petit groupe de vacanciers de passage àBouzigues. Ambiance joyeuse et studieusepour un cours de cuisine où se prépare unesoupe d’huîtres. Tablier blanc noué à lataille, Jean-Michel Manibal dirige lamanœuvre. Ce cuisinier de formation estaujourd’hui l’un des animateurs impliquésdans le Centre permanent d’initiatives pourl’environnement : il intervient dans le cadredu Site remarquable du goût de la Lagunede Thau. Et maintenant, précisément, ilpousse la réflexion des participants sur laqualité du milieu. Il porte le dialogue surl’enjeu que représente la qualité des eauxpour les centaines de paysans de la mer quivivent de l’ostréicultureet sont les garantsd’une faune et d’une flore exceptionnelles.Au milieu des plats, trône une maquettesur laquelle Aura Penloup, directrice desGalapians, montre comment se mêlent eauxdouces et eaux salées. Demain, elle accom-pagnera les visiteurs pour une petite pêched’observation : elle leur parlera du rôle defiltre du Lido et les incitera à regarder dif-féremment le paysage, avant une dégusta-tion dans un mas ostréicole de l’étang deThau (34).Comme Jean-Michel, d’autres exercent lamême activité. Annaïg Boulo, conjointe depaludier, accompagne des visites senso-rielles dans les marais salants de Guérande(Loire-Atlantique). Nelly Choffrut, agri-cultrice à Billom, fait visiter son exploita-tion dans le cadre d’un circuit proposé parl’office de tourisme et qui associe paysagesde la Limagne et culture de l’ail rosed’Auvergne. Tous trois ont suivi une for-mation de guide du goût.

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pédagogieanimation

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 37

Périodiquement se pose le problème des compétences des gestionnaires en matière decommunication : y a-t-il les « spécialistes » et les autres, qui seraient dispensés de ce savoir-faire ?

Mais ne pas communiquer, ou mal communiquer, n’est pas neutre : cela produit des effets…

• l’intelligence corporelle s’exprime par desactions physiques : elle pourra passer par larandonnée ou le parcours sportif ;• l’intelligence sensorielle répond forte-ment aux images, aux sons, aux odeurs, auxgoûts : elle convainc d’autant plus que l’ex-périence est intime ;• l’intelligence verbale a besoin du fil rougedu récit : avec un début, un déroulement,une fin ;• l’intelligence logique fait appel aux caté-gories de la cause et de l’effet, les mathé-maticiens apprécieront.Il y a aussi une forme d’intelligence quiemploie le registre de l’humour, du ridi-cule, de l’insolite ou de l’absurde : elleconsiste à se regarder agir avec une dis-tance amusée. Attention aux effets perversdans des contextes culturels inexplorés !Dans tout public, il y a forcément plusieurstypes d’intelligences et il faut donc utiliserplusieurs registres.

Entrer en relation. Interagir avec soninterlocuteur est bien plus convaincant quede lui adresser un dépliant trois volets !Qu’on lui parle directement, qu’on l’inviteà réagir au cours d’un exposé, qu’on orga-

nise l’expression autour de tables rondesou d’ateliers ! Cette démarche demande del’expérience et/ou de la formation :• s’entendre au préalable sur le rôle dechacun et l’interdépendance qui en résulte ;• clarifier le sens des mots pour les uns oupour les autres ;• établir des règles acceptées par tous ;• ne pas incriminer la personne qui sou-tient une position antagoniste ;• distinguer clairement ce qui peut êtrechangé de ce qui ne le peut pas ;• avoir assez de latitude pour « bouger »dans la position défendue, etc.3

Quoi qu’il en soit, difficile de ne pas faired’erreurs et pour ne parler que de la plusfréquente : ne pas savoir s’arrêter à temps !Pour communiquer, il faut doser sonapproche ! En laisser pour les autres, etpour d’autres jours. Communiquer n’estpas une science, c’est un art qui se perfec-tionne à condition de se remettre en causeassez souvent. ■MICHELLE SABATIER

ATEN, RESPONSABLE COMMUNICATION ET DOCUMENTATION

>>> Mél :[email protected]

1. Pensez aussi à ne pas « gober »tous les argumentsqui sont dans l’air :que pensez-vousaujourd’hui desmédecins quivantaient l’usage dutabac voici 50 ans?Qu’en est-il desdiscours sur la« chaîne » écologiqueà laquelle aucunmaillon ne devaitmanquer quand onsait aujourd’hui quela biodiversité estun conceptdynamique et queses perturbationsfont partie duprocessusd’évolution?

2. Gardner H.,Frames of mind,Basic Books, NewYork, 1983.

3. D’aprèsCommuniquer etnégocier pour laconservation de laNature, TomKavocs, ECNC,Aten, 2002.

Communiquer sur la biodiversité

© MT

Il n’y a pas de communication sans stra-tégie. Tout d’abord bien réaliser «d’oùl’on parle » : ce n’est pas du tout la

même chose de convaincre un public detéléspectateurs du bien-fondé de la protec-tion de la biodiversité, quand ce messagene vient en rien contredire le déroulementde leurs activités ou de leurs projets, et deconvaincre, par ailleurs, un conseil muni-cipal de renoncer à un aménagement pourcause d’espèce en danger. Ce n’est pas lamême chose de s’adresser à l’individu, entant que tel, et de s’adresser à l’individudans son rôle institutionnel, représentantl’État, le conseil municipal, la chambred’agriculture, etc. On passe du relationnelau jeu de rôles. Il faut savoir décrypter cesjeux sociaux pour ne pas se laisser entraînertrop loin. Et il n’y a pas de communicationsans légitimité acceptée par l’auditeur : peuimporte votre légitimité institutionnelle,si votre discours n’a pas de « fond», si vousvous contentez de répéter ce que l’on vousa dit, de croire sans critiquer, de dire sansapprofondir, alors votre communication seravite perçue comme quantité négligeable.N’avancez d’arguments que lorsqu’ils sontappuyés sur votre vécu et votre engagement:ne parlez pas au nom d’untel (fut-il unesommité) mais au nom de vos convictionset en mesurant («principe de précaution»)jusqu’à quel point elles sont étayées1.

Multipliez les registres. La premièrechose est d’établir le contact. Tout se jouedans les trente premières secondes. Et poury parvenir, il n’y a qu’un moyen : connaîtreassez le public auquel vous vous adressez,là, immédiatement, dans sa singularité,pour entrer en empathie avec lui. Danscette tentative d’établir un contact, vousmesurerez l’importance de la communica-tion non verbale. Ensuite, il faut panacherles propositions car nous ne réagissons pastous aux mêmes stimulus en fonction desdiverses facettes de notre intelligence2 :• l’intelligence sensible, qui fait appel àl’émotion, en est une : le sentiment esthé-tique fait partie de ce registre ;

Interagir avec son interlocuteur pour le convaincre

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38 Espaces naturels n°27 • juillet 2009

ses partenaires nationaux et internationaux,a mis en place un système de surveillancemaritime. Efficace, il est également res-pectueux des populations locales : la navi-gation d’embarcations motorisées est inter-dite ; la surveillance maritime est assuréepar des contrôles en mer. Ce contrôle,exercé de manière permanente sur la zonemarine du parc, garantit aux pêcheurs imra-guen un accès exclusif à la ressource.Les cent quatorze lanches1 autorisées àpêcher sur le banc d’Arguin sont, elles aussi,soumises à un contrôle. Des accords régis-sent leurs conditions d’accès à la ressource ;ils sont régulièrement négociés avec lespopulations locales, dans le cadre d’un pro-cessus de gestion participative.Une surveillance participative. Le sys-tème de surveillance mis en place en 1998par les autorités, en collaboration avec laFondation internationale du banc d’Arguin(avec l’appui financier du WWF, de l’Unioneuropéenne puis de la Coopération espa-gnole), a la particularité d’être participatif.C’est une collaboration étroite entre le parc,la délégation à la surveillance des pêcheset au contrôle en mer (DSPCM) et les popu-

>>> Mauritanie

Dix ans de surveillance participative

LES VEDETTES D’INTERVENTION RAPIDE PATROUILLENT TOUSLES JOURS. LES ÉQUIPAGES SONT COMPOSÉS D’UN CHEF DEBORD, D’UN ÉQUIPIER DE LA DÉLÉGATION À LA SURVEILLANCEDES PÊCHES, D’UN AGENT DU PARC ET D’UN GUIDE IMRAGUEN.

© Antonio Araujo - FIBA

DÉBARQUEMENTDE LA PÊCHEAU VILLAGE

DE R’GUEIBA. LES IMRAGUENBÉNÉFICIENTD’UN DROITD’ACCÈSEXCLUSIF À LARESSOURCEPOUR PRATIQUERLEUR PÊCHETRADITIONNELLEÀ LA VOILE.

Le Parc national du banc d’Arguin organise la surveillance maritime avec la population

Une population de pêcheurs tradition-nels habite là, en Mauritanie, sur leterritoire du Parc national du banc

d’Arguin (PNBA) dont le littoral s’étend surplus de 200 km. Les Imraguen qui résidentau sein de huit villages bénéficient d’undroit ancestral et aujourd’hui exclusifd’accès à la ressource halieutique dans lecadre de leur pêche traditionnelle. Ce droitpermet notamment de sauvegarder la seuleculture maritime du pays et une des der-nières flottilles de pêche à la voile au monde.L’aire est d’importance mondiale sur le planécologique. Le parc est une zone de nour-ricerie et de reproduction pour plusieursespèces de poissons et d’oiseaux marins.C’est également un site d’accueil pourd’énormes concentrations d’échassiersmigrateurs. En effet, l’ancien estuaire, avecses herbiers de phanérogames et les hautsfonds de différents substrats, constitue unrefuge irremplaçable pour plusieurs espècesmenacées (tortues, dauphins, requins etraies) ainsi que pour d’autres populations(crevettes, mulets, courbines, daurades…).Très convoité. Si le Parc national du bancd’Arguin contribue au maintien des res-

ailleurs

sources halieutiques, il est très convoitépar la pêche artisanale comme par la flottilleindustrielle internationale qui sillonne enpermanence ses eaux limitrophes.La protection de la zone est donc essen-tielle. Certes en termes de biodiversité, maiségalement pour contribuer au maintien dela pêche: activité économique majeure pourla Mauritanie. C’est pourquoi, le Parcnational du banc d’Arguin, avec l’aide de

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lations résidentes qui donne tout son sensà cet adjectif.Dans le cadre de ces accords, les équipagesdes vedettes de surveillance comprennentun agent du parc, un guide imraguen etdeux agents de la DSPCM, dont le chef debord. Les intérêts des différentes partiesprenantes sont représentés. Cette mixité àbord garantit une efficacité accrue de la sur-veillance et une transparence optimale. Leurrôle vise en effet à la fois le contrôle et lacoercition.Aujourd’hui, le système de surveillancemaritime repose sur trois radars et sixvedettes d’intervention rapide dont au moinstrois actives en permanence. Une embarca-tion supplémentaire est destinée presqueexclusivement au ramassage des filets posésillégalement et abandonnés à la dérive dansles eaux du parc. Le fonctionnement de ceséquipements induit, bien sûr, l’existence demoyens à terre, mobilisés pour la continuitéde la surveillance maritime, la gestion dupersonnel ainsi que sa formation.Toute une logistique a été mise en placepermettant le ravitaillement en carburant,l’entretien des vedettes et des moyens decommunication.Effet dissuasif. Le fonctionnement de lasurveillance est évalué mensuellement et lesmissions en mer font l’objet de rapports jour-naliers. Les missions logistiques sont orga-nisées en fonction de besoins exprimés viades messages radios lancés par les respon-sables du terrain, au moins une fois par mois.Les contrevenants arraisonnés (issus engrande majorité de la pêche artisanale piro-guière) voient leur embarcation immobi-lisée sur le rivage. Leur dossier est trans-féré à Nouadhibou devant la Commissionrestreinte de transaction pour la pêche arti-sanale, une juridiction qui statue sur lesinfractions commises dans le cadre de lapêche artisanale en Mauritanie. Une fois lesamendes payées au Trésor et la situationrégularisée, les propriétaires peuvent récu-pérer leurs embarcations.L’ampleur des enjeux et les moyens mis enœuvre impliquent nécessairement une for-mation adaptée des personnels embarqués.C’est pourquoi des cycles de formation dis-pensés par l’Office national de la chasse etde la faune sauvage ont lieu annuellement,sur des thèmes comme la navigation, l’uti-lisation du matériel de positionnement oul’interpellation des contrevenants.Le coût de la surveillance, environ 150000 €

par an, est encore entièrement à la chargedes partenaires du parc, dont la Fondationinternationale du banc d’Arguin et le WWFdans le cadre du Programme régional marinet côtier (PRMC). Cependant, le parc estaujourd’hui techniquement autonome ence qui concerne l’organisation et la gestionde cette activité.Quelques chiffres sont nécessaires pouravoir une idée de l’effort de surveillanceannuel dans le parc : en 2008, 390 missionsont été réalisées pour 2250 heures en meret 172 embarcations arraisonnées. Soit enmoyenne une mission par jour équivalenteà six heures de surveillance en mer pourl’arraisonnement d’une embarcation tousles deux jours.Ces chiffres ont beaucoup évolué depuis

1. Embarcation de pêche, non motorisée. Dotée d’unevoile latine (sans baume), il s’agit d’une constructiontrès simple en bois. Le mât est maintenu en place grâceà des cales. La voile est manœuvrée à l’aide de palans.

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LES PIROGUESMOTORISÉESSONTARRAISONNÉESDE PLUS ENPLUS LOINDES ZONESCÔTIÈRESFRAGILES.

Points d’arraisonnement

© Observatoire de l’environnement du PNBA - MohamedAhmed Ould Sidi Cheikh

1998 : l’effort de surveillance a augmentéet, parallèlement, le nombre d’arraisonne-ments ne cesse de diminuer depuis la créa-tion du système de surveillance.Malgré la situation de plus en plus drama-tique de la pêche artisanale côtière en Afriquede l’Ouest qui fait face à l’effondrement desressources, la surveillance sur le PNBAsemble avoir un effet dissuasif remarquable.À ce titre, on peut également souligner queles positions géographiques des points d’ar-raisonnement ont reculé au large du parc,contre sa limite. L’analyse des cartes de lasurveillance montre que ces points sontdésormais loin des zones littorales les plussensibles (voir cartes). On pourrait même endéduire que les pêcheurs reconnaissent etacceptent l’existence de cette zone inter-dite à la pêche motorisée. Il n’y a d’ailleursjamais eu de conflits majeurs entre les bri-gades de surveillance et les pêcheurs de l’ex-térieur du parc.Dix ans d’expérience. Malgré son coûtélevé et les interrogations qui se posent sursa durabilité, cette surveillance maritimecapitalise plus de dix ans d’expérience. Faceaux menaces d’intrusions venant de l’exté-rieur, on peut affirmer qu’elle a fait sespreuves. Quant à l’intérieur du parc, lecontrôle de la pêcherie des populations rési-dentes continue d’évoluer pour intégrer aumieux les enjeux écologiques.Ce système de surveillance est aujourd’huiun modèle reproduit au sein du réseau desaires marines protégées d’Afrique de l’Ouest.Le Parc national du banc d’Arguin renforceainsi son rôle de zone d’expérimentationau profit de la conservation et du dévelop-pement durable dans cette région. ■MARION BROQUÈRE - ASSISTANTE TECHNIQUE DE

PROJET FONDATION INTERNATIONALE DU BANC D’ARGUIN

AU PARC NATIONAL DU BANC D’ARGUIN

>>> Mél : [email protected]

Aire protégée marine et côtière, le Parcnational du banc d’Arguin (PNBA) s’étendsur un tiers de la côte de la République isla-

mique de Mauritanie. Il couvre une superficie de12 000 km2 dont environ 6 000 km2 de zonemarine. Créé en 1976, le PNBA est reconnu siteRamsar en 1982 et site du patrimoine mondialde l’Unesco en 1989. En 2002, l’ONG WWF inter-national déclare le parc « don à la Terre ». Cettedéclaration fait suite à la promulgation d’une loigarantissant l’avenir de cette réserve protégéed’importance planétaire. ■

Patrimoine mondial

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2008

Parcnationaldu bancd’Arguin

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Nouadhibou

Parcnationaldu bancd’Arguin

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LE PARC NATIONAL DUBANC D’ARGUIN EST UNSITE D’IMPORTANCEMONDIALE POUR LESOISEAUX, NOTAMMENTLES ESPÈCESMIGRATRICES. ICI LASPATULE BLANCHE.

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UN GOÉLAND RAILLEURAVEC SON POUSSIN. LE

SALIN D’AIGUES-MORTES A ACCUEILLI LA

SEULE COLONIEFRANÇAISE DE CETTE

ESPÈCE EN 2008 GRÂCEÀ LA CRÉATION D’ILOTS.

SORTIEEN JOËLETTE.

1. L’absence de jurisprudence concernant les espaces naturels incite à laprudence, et notamment à concevoir les nouveaux sites d’accueil avecassociations de handicapés, bureaux d’études spécialisés… Une attentionparticulière sera portée à l’intention du propriétaire du site, vérifiant notammentles démarches d’études de faisabilité qui auront été faites.

handicap…) et aux bureaux de contrôle compétents pourla sécurité.Il faut, aussi, identifier les compétences et les motivationsinternes et prévoir les formations nécessaires, pour lesanimateurs comme pour les décideurs, notamment par des«mises en situation» de handicap.En matière d’aménagement : trouver la juste mesureentre « adapter le terrain » (aménagement lourd) et« adapter à la personne » (équipements individuels).Dans le domaine de l’interprétation : penser à s’appuyersur tous les sens (ouïe, odorat, toucher), pas seulementsur la vue.Il faut penser aussi à toutes les innovations qui ont vu lejour ces dernières années. Il est en effet plus facile detrouver des financements pour des projets innovants quepour une mise aux normes (Conversor Pack pour lesmalentendants, I-Cane system intégrant un GPS et undétecteur d’obstacle, tire-à-l’eau pour la baignade, joëlettehumano-tractée pour la randonnée, émetteurs et capteurssonores pour l’escalade, maquettes tactiles, fil d’ariane…).Chacun de nous, en vieillissant, pouvant être confronté àdes difficultés de déplacement, de vision, d’audition, demémoire, l’amélioration de l’accessibilité profite à tous.Pour les catégories sociales peu habituées aux loisirs denature, des approches participatives pourront avoir unrésultat appréciable.C’est pourquoi on peut utilement imaginer de co-construire un projet territorial, d’associer des centresd’accueil thérapeutique à l’entretien de la nature et,inversement, faire de la nature un « soin » pour cespersonnes, d’attribuer des marchés à des centres d’aidepar le travail. Et bien sûr, d’embaucher des personnelshandicapés (la loi impose 6% de l’équipe pour lesstructures de plus de 30 personnes). ■

MONIQUE FABBRO - ATEN

POUR LE COMITÉ D’ORGANISATION DU FORUM

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A”«Pour une nature ouverte à tous » : le Forum desgestionnaires s’est tenu à Lille les 5 et 6 marsderniers. Je retiendrais une idée force : à quoi faut-ilpenser pour rendre les sites naturels accessibles àtous? aux personnes handicapées (moteur, visuel,auditif, mental) mais aussi à ceux qui ne sont pastrès alertes (personnes agées, femmes enceintes,jeunes enfants, personnes accidentées…) ou qui nese sentent pas vraiment « chez eux » en nature(milieux socio-culturels éloignés du contact avec lanature ou en difficulté économiques et sociales).

La loi de 2005 sur le handicap stipule que toutespace recevant du public doit être accessible, entout temps, aux personnes handicapées de

manière autonome. Même sans décret d’application,cette loi impose une obligation de résultats sous peinede sanctions pénales (au moins théoriquement)1. On retiendra cependant que les personnes concernéespar le handicap savent faire la différence entre lesbarrières que la société leur impose et celles que lanature dresse devant elles : le sommet du mont Blancne sera pas rendu accessible par une rampe à 5% !Ces personnes ont besoin d’une information précise :où sont situés les accès? quand sont-ils disponibles?quel niveau de difficulté vont-elles rencontrer ? quellesécurité leur est offerte ? quelle est la durée duparcours? Etc.L’approche des gestionnaires doit donc être globale. Ilconvient de penser aux parkings, aux toilettes, àl’hébergement-restauration, aux centres d’intérêtsaccessibles mais aussi aux services proposés auxenvirons. Pour cela, il est utile de s’entourer decompétences appropriées. Le mieux d’ailleurs est defaire appel aux associations (Association des paralysésde France, Access-Cible, maisons départementales du

En savoir plus :http://forumdesgestionnaires.espaces-naturels.fr

Améliorer l’accessibilité des sitesprofite à tous

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seulementLes salins méditerranéens sont devéritables réserves naturellesaccueillant une faune et une flore

dont l’importance est reconnue par demultiples zonages de protection. Laplupart des salins sont d’ailleursinclus dans la liste Ramsar des zoneshumides d’importance internationale.De plus, en Europe, ils sont tousintégrés au réseau Natura 2000. Lessalins abritent plus de la moitié desespèces visées par la directiveOiseaux et la plupart des milieuxsaliniers représentent un intérêtprioritaire d’après la directive Habitats.Du reste, le groupe Salins, producteurde sel sur plusieurs sites de la côteméditerranéenne (ils représententenviron 25000 ha en France,3 100 ha en Espagne et 2600 ha enTunisie) intègre ces nouvellesexigences dans sa gestion courante.• Ainsi, les sites espagnols, touslocalisés dans des parcs naturels,suivent la démarche Natura 2000 enappliquant des instruments légauxdéjà existants : au niveau territorial, leplan d’Ordenación de los recursosnaturales définit la planification et lagestion des espaces naturels ; auniveau des espaces naturelsprotégés, le plan Rector de uso ygestion définit des objectifs et desmesures de gestion. Les parcsnaturels sont particulièrementimpliqués dans la mise en œuvre deces actions. Ils réalisent eux-mêmesdes actions de connaissance et deconservation de la nature sur lessalins.• En France, le groupe Salins,(représenté par la compagnie desSalins du Midi) s’est impliquéactivement dans la mise en œuvre de

Natura 2000. Une responsable desespaces naturels a été recrutée pourdéfinir et mettre en œuvre la stratégieenvironnementale qui implique lespartenaires scientifiques et lepersonnel salinier.Pour chaque site, un plan de gestionécologique doit être défini. Cedocument vient d’ailleurs d’êtrefinalisé sur le salin d’Aigues-Mortes(www.salins.com). Sa première partieévalue les aspects sociaux,économiques et écologiques tandisque la seconde précise les objectifsde conservation de la nature,d’amélioration des connaissancesbiologiques et de valorisation desproduits saliniers.Pour réaliser certaines de cesopérations, le groupe Salins peuts’engager auprès des autoritéslocales françaises en utilisant deuxinstruments : le contrat Natura2000qui contient des engagementsd’investissement et la charte Natura2000 qui énonce des engagementscommuns de gestion. Cesdispositions permettent aupropriétaire de bénéficier d’uneexonération partielle des taxesfoncières.En 2008, Salins a signé un contratNatura 2000 afin de créer des sitesde nidification destinés aux laro-limicoles coloniaux. Il pourra adhérerà la charte Natura 2000 dès que cetoutil sera disponible. ■

SONIA SÉJOURNÉCOMPAGNIE DES SALINS DU MIDI ET DES SALINES DE L’EST

>>> Mél : [email protected]

ILOT DE NIDIFICATION CRÉÉ - SALIN D’AIGUES-MORTES.

La production de sel de mer protège les zones humides

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PARUTIONS

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● Enjeux sociaux

● Bonnes pratiques

● Science

● International

● Gestion

Aires protégées,espaces durables?Les aires protégéesreprésentent 12% dessurfaces émergées.Elles servent desobjectifs de conservationde la biodiversité et dedéveloppement social.Quelles sont leursnouvelles formesjuridiques? Comments’inscrivent-elles dansles infrastructuresnaturelles régionales etréseaux écologiquestransnationaux? Quellevalorisation économiquepeuvent-elles offrir ?Écologues, juristes,anthropologues,géographes tentent derépondre. C. AUBERTIN ET E. RODARY • 104 PAGES • IRD ÉDITIONS •25 EUROS.

Gestion durable des solsLe bilan desdégradations des sols etdes solutions pour leurgestion durable : cetouvrage synthétise lesrésultats d’unprogramme de recherchesur la gestion dupatrimoine sol. Il fournitde nouvellesconnaissances sur lesdifférents types dedégradation constatés. Il propose également des méthodesalternatives de gestiondes sols destinées àpréserver durablementleurs fonctionsenvironnementales.Accessible.L. CITEAU ET AL. • 336 PAGES

• ÉDITION QUAE • 45 EUROS.

Aspects sociaux des politiquesenvironnementalesDans le cadre de débatssur les inégalitésécologiques, le rapportfait le point sur la qualitéde l’environnement enfonction du lieu derésidence des ménages.Ainsi par exemple, lestravaux rapprochantpratiquesenvironnementales etcaractéristiques socialesmontrent que si unrevenu plus élevé favorisel’adoption de « gestes »environnementaux, lerevenu n’est pas le seulcritère déterminant.RAPPORT DE LA COMMISSION

DES COMPTES ET DE

L’ÉCONOMIE DE

L’ENVIRONNEMENT • 118 PAGES

• LA DOCUMENTATION

FRANÇAISE • 17 EUROS.

Les Grands Sites à l’épreuve de la photographieLa dixième Rencontre duréseau des Grands Sitesde France avait pourthème la photographie.Comment renouvelerl’image stéréotypée desGrands Sites? Commentla photographie peut-ellerendre compte de leursvaleurs? De nombreuxprofessionnels del’image tentent derépondre à ces questionspar leur expérience, leursavoir-faire. RÉSEAU DES GRANDS SITES

DE FRANCE • 88 PAGES • 23 EUROS.

Les parcs nationauxdans le mondeTreize chercheurstravaillant sur les parcsnationaux apportentleurs éclairages sur dessituations très diversesoffrent un tour d’horizondes problématiques deprotection et dedéveloppement durableautour des aires deconservation. C’est sousl’angle de la gestion, etnotamment celle de lacompatibilité entreactivités humaines etobjectifs depréservation, que seconstruit cet ouvrage.S. HÉRITIER ET L. LASLAZ •312 PAGES • CNRS -ELLIPSES • 25 EUROS.

● Éducation

Dans la peau d’un animateurTéléchargeable, ce guidea pour objectif de fairepartager quelques expériencesd’animation de réunionset séances de CopilNatura 2000. Commentfavoriser la créativité d’un groupe? Commentdéciderdémocratiquement ?Comment apaiser lestensions? Toutes cesréflexions sont issues duvécu. Ce document estaussi disponible dansvotre Diren. Destiné auxopérateurs des sitesNatura 2000.DIREN PACA - DIALTER, • 20PAGES • MEEDDAT •GRATUIT.

● Espèce

L’ours brun. Biologieet histoire, desPyrénées à l’OuralDe très nombreusesphotographies, réaliséespour la plupart en milieunaturel, accompagnentcette monographie. Celle-ci synthétise toutes lesconnaissances actuellesen Europe et dans lesPyrénées. Le lecteur ytrouve des informationssur la biologie del’espèce et sur sesrelations avec l’homme.L’ouvrage intègre unemultitude d’anecdotesvécues par les auteurs.Des carnets de terrainssont repris sous formede 19 fiches pratiquespour reconnaîtrefacilement les indices dela présence de l’ours.P. ETIENNE ET J. LAUZET •399 PAGES • PUBLICATION

SCIENTIFIQUE DU MUSÉUM -BIOTOPE • 43 EUROS.

● Éducation

● Politiques publiques

● Gouvernance

Environnement:décider autrementDans la décennie 1990,la montée de laconcertation s’esttraduite par unemultiplicationd’expériences. Dans lecadre du programme«Concertation, décisionet environnement », trenteéquipes de recherche ontétudié ce foisonnement.Une sélection de travauxest présentée ici. Chaqueauteur développe uneréflexion sur lesmodalités de laconcertation, ses enjeux,ses problèmes etperspectives.L. MERMET ET M. BERLAN-DARQUÉ • 370 PAGES •L’HARMATTAN • 34 EUROS.

Les océans françaisen 36 interviewsLa France possède11 millions de km2

d’océans et 350 îles : ledeuxième patrimoinemaritime au mondeaprès les États-Unis. Or, « les potentialitéséconomiques de la mersont considérables etexacerbent lesconvoitises », expliqueYves Jégo, secrétaired’État à l’outre-mer quisigne la préface de cetouvrage où 36personnalités proches dela mer sont interviewées.La lecture montre que laFrance ne semble pas sepréoccuper de luttercontre un désastreécologique menaçant.B. DE LA RONCIÈRE • 258 PAGES • L’HARMATTAN •25 EUROS.

Le guide nature duParc naturel régionalPérigord-Limousin«Ce guide, nous levoulions beau comme lesont nos paysages, maisaussi propre à attiservotre curiosité, pour qu’àvotre tour vous partiez àla découverte du parc »,expliquent les auteurs dece petit livret où semélangent informationsnaturalistes sur leshabitats, les espèces, lepaysage… Un joli carnetde voyage.TEXTES A. LOMBARDI,ILLUSTRATIONS P. VANARDOIS •52 PAGES • PNR PÉRIGORD-LIMOUSIN • GRATUIT.

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Développement local6 au 8 juillet - Clermont-FerrandEntre projets locaux de développementet globalisation de l’économie : quelséquilibres pour les espacesrégionaux? Quels dispositifs devalorisation des aires protégées? Cecolloque traitera des instrumentséconomiques et juridiques à adopter

ainsi que des formes degouvernance. Organisé parl’association de Science

régionale de langue française.◗ http://asrdlf.u-bordeaux4.fr

Environnement marin31 août et 1er septembre - ConcarneauOrganisé par la station de biologiemarine de Concarneau, ce colloquenational s’adresse aux chercheurs,aux agents territoriaux, élus,gestionnaires d’espaces naturels…◗ Yves Le Gal, [email protected]

Rencontres nationales del’animation scientifique10 et 11 septembre - ToursCes journées professionnelles veulentpermettre aux acteurs, médiateurs etanimateurs de prendre connaissancedes nouveaux outils éducatifs et defaire le point sur l’évolution del’exercice de leurs pratiques.◗ [email protected]

Espaces protégés, acceptation sociale et conflits16 au 18 septembre - ChambéryColloque international, il rassemblerades chercheurs en sciences socialestravaillant sur les espaces protégés.La problématique? La prise en comptedes contextes conflictuels dans lapolitique de gestion des espacesprotégés, en vue de meilleurs

fonctionnements. Organisé par Edytem(université de Savoie).◗ [email protected]

Écologie humaine24 et 25 septembre -MontpellierLors de ces 21e journées scientifiques,la Société d’écologie humaineabordera le thème des transmissionsentre générations et de leur incidencesur la gestion de l’environnement ; lestransmissions : investissementparental et interactions au sein de lacellule familiale.◗ [email protected]

Université d’été Environnement30 septembre au 1er novembre -LyonRendez-vous majeur pour lesprofessionnels de l’environnement, del’énergie et du développementdurable, la 4e édition de cetteuniversité d’été vise à valoriser lessavoir-faire et les éco-technologies,encourager les projets collaboratifs,développer la performance desparticipants.◗ www.universite-ete-environnement.org

Grands Sites15 et 16 octobre - Pas-de-Calais« Valeurs universelles, valeurs locales.Pour qui, pour quoi un site est-ilgrand? » Ce colloque, co-organisé parIcomos France et le réseau desGrands Sites de France, propose auxresponsables de sites patrimoniauxfrançais et étrangers de réfléchir sur laquestion du partage des valeurs dessites qu’ils gèrent. Deux jours pouridentifier les conditions permettantd’établir durablement le dialogue.◗ lauremaraval@grandsitedefrance. com

BROCHURES

Un jeu qui sensibilise à la gestion différenciée

L’arrivée de la nature en ville nécessite une sensibilisation des usagers, du personnel et desélus à la mise en place de la gestion différenciée. Pour ce faire, un jeu coopératif peutconstituer un excellent outil. Celui-ci, conçu par la mission gestion différenciée Nord-Pas-de-

Calais se nomme «Un peu, beaucoup, passionnément…» et permet d’initier le grand public auxproblématiques de gestion des espaces verts urbains et aux principes de gestion plus écologique.Guidés par un animateur, les joueurs sont amenés à faire des choix de gestion ou d’aménagementen respectant l’environnement, en tenant compte des usages par les habitants, sur des thèmescomme la haie, la prairie, les pieds d’immeubles… Le paysage de la ville se constitue ainsi, petit àpetit, sur un plateau évolutif. Cet outil pédagogique, qui trouvera sa place lors de fêtes,formations, réunions de concertation… coûte 100 euros.Il est disponible au prêt sur le territoire du Nord-Pas-de-Calais. Les futurs animateurs peuvent suivre une journéed’appropriation afin d’exploiter son potentiel. Unesession est organisée à partir de 10 inscrits (60€). ■Plus d’infos?www.gestiondifferenciee.org/spip.php?article100 • Marjorie Duchêne: 0320128500

Espaces naturels n°27 • juillet 2009 43

Le Grenelle en marche. 20 pages, pour expliquer les13 domaines d’action du projet de loi adopté en premièrelecture au Parlement. >>> www.legrenelle-environnement.fr

Les roselières de France ; recencementet caractérisation. Edité par l’Office national dela chasse et de la faune sauvage. 16 pages. Cartes etphotos à l’appui. >>> www.oncfs.gouv.fr

Les espaces protégés français : une diversitéd’outils au service de la protection de la biodiversité. UICNFrance. 67 pages pour expliquer chaque statut et localiser lessites. >>> www.uicn.fr

Travailler avec les mammifères marins.Pour s’ouvrir des perspectives de carrières. Institutocéanographique. 32 pages >>> www.oceano.org

Le réseau Natura 2000 en France. 48 pagesqui présentent toutes les facettes de ce réseau. >>> www.developpement-durable.gouv.fr

Réseau Plantes invasives du bassin Loire-Bretagne.La nouvelle plaquette informant des démarches et outils vientde paraître. >>> 02 38 24 55 00

l’AGENDA

Vautours en Baronnies

Déifiés en Égypteancienne, considéréscomme l’image de la

protection en Afrique, lesvautours ont été

persécutés en France.Dans les années 60, seul

un petit nombre devautours fauves survivait àl’ouest des Pyrénées. Lesvautours moines avaient

disparu. Illustré desplendides photos signées

Thierry Vezon, l’ouvrageexplique pourquoi les

vautours fauves sont deretour dans les Baronnies

provençales, suivisquelques années plus tardpar les vautours moines etles percnoptères d’Égypte(un vautour migrateur). Ildécrit le mode de vie des

trois espèces.

>>> R. MORVAN - T. VEZON •105 PAGES • ÉDITIONS HESSE

• 25 EUROS.

Internet dédié auxespèces exotiquesenvahissantes enoutre-merCe site rassemblenotamment : • une base de données munie d’un moteur derecherche permettantl’accès à des informationssur plus de 600 espècesintroduites en outre-mer •une base bibliographiqueavec près de 400références sur le sujet •un accès direct aux textesde réglementationsnationales • desdocuments disponibles entéléchargement • unesérie de liens utiles et denombreux contactsd’experts et personnesressources dans toutesles collectivités d’outre-mer.HTTP://WWW.ESPECES-ENVAHISSANTES-OUTREMER.FR

● Conservation

COUP DE CŒUR

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Nombre de sites, petits ou grands, sont menacés d’altération, de dégradation, voire d’indif férence.Cet ouvrage s’adresse à ceux que cette situation préoccupe ou qui entretiennent une démarche degestion ou de sauvegarde fondée sur l’esprit des lieux. Ce guide de bonnes pratiques repose surl’expérience des grands sites de France depuis 1976 (enrichi d’exemples de sites étrangers). Ilpropose des réponses ou des pistes de réflexions à plusieurs questions fondamentales. COORDONNÉ PAR J.P. THIBAULT • 220 PAGES • ACTES SUD - ICOMOS • 39 EUROS.