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La 5 e édition des Journées de la relève en recherche s’est tenue les 21 et 22 septembre, à Québec. Coorganisé par l’Association franco- phone pour le savoir (Acfas) et les Fonds de recherche du Québec, cet événement est notamment l’occasion de célébrer l’apport des étu- diants-chercheurs au système de recherche québécois dans le cadre d’une remise de prix. Le Devoir vous présente ici les lauréats de l’édition 2017. Prix Acfas – IRSST Concilier santé et sécurité au travail I 3 Prix du Concours de vulgarisation de la recherche I 4 LES SAMEDI 23 ET DIMANCHE 24 SEPTEMBRE 2017 CAHIER SPÉCIAL I Durant deux jours, jeudi et vendredi derniers, 225 étudiants inscrits à la maîtrise, au doctorat et au postdoctorat pour certains se sont donné rendez- vous à Québec, dans le cadre des cinquièmes Jour- nées de la relève en recherche. Un événement coor- ganisé par le Fonds de recherche du Québec (FRQ) et l’Association pour le savoir francophone (Acfas) et destiné à mieux outiller les jeunes chercheurs à la recherche de débouchés. HÉLÈNE ROULOT-GANZMANN Collaboration spéciale «L’ objectif du doctorat, c’est de développer à la fois des connaissances de pointe et ses capa- cités de recherche, indique le président de l’Acfas, Frédéric Bouchard. Des compétences qui peuvent être utiles dans bien des secteurs de la société. Trop de gens croient que seules les universités ont besoin de docto- rants. Mais tant les entreprises que les OBNL [orga- nismes à but non lucratif] ou encore les ministères ont be- soin de gens ayant des connaissances pointues et capables par exemple d’interpréter des résultats de recherche. » M. Bouchard, par ailleurs professeur titulaire au Dé- partement de philosophie et doyen de la Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal, ex- plique que le nombre de doctorants a considérable- ment augmenté ces dernières années sans que de nou- veaux postes de professeurs se soient ouverts. Résul- tat : de plus en plus d’étudiants en fin de troisième cycle doivent trouver du travail en dehors de l’université. Une réalité à laquelle ils rechignent ? « Pas nécessairement, répond-il. Seulement, la carrière universitaire leur semble la plus naturelle et ils n’ont sou- vent pas imaginé faire autre chose. Nous devons les sensi- biliser à cette possibilité plus que nous le faisons au- jourd’hui. Il ne s’agit pas de les décourager de rester à l’université — parce que nous avons besoin d’eux —, mais de leur ouvrir des perspectives. En leur montrant que leurs connaissances pourraient bénéficier à toute la société s’ils décidaient d’embrasser une autre carrière. » Employabilité Certains ateliers proposés ces deux derniers jours à Québec portaient donc justement sur l’employabilité des jeunes chercheurs et leur capacité à trouver un tra- vail après plusieurs années passées à travailler — sou- vent seuls — sur un sujet assez hermétique pour le commun des mortels. Comment réussir un entretien ? Comment convaincre un employeur que son parcours apportera une réelle valeur ajoutée à ses ser vices ? « De ce point de vue, le Canada et le Québec sont des so- ciétés en retard par rapport à d’autres pays de l’OCDE, note Frédéric Bouchard. Nous constatons une sous- performance en matière d’innovation organisationnelle et sociale. » Un manque d’innovation qui fait en sorte que le monde non universitaire continue à embaucher dans ses bassins traditionnels, faisant ainsi barrage à la diver- sité, pourtant reconnue aujourd’hui comme vecteur d’in- novation. Un cercle vicieux en quelque sorte. « Il y a des secteurs, comme la haute technologie ou la pharmacie, qui sont plus habitués à recruter des doctorants, précise le président de l’Acfas. Les occasions y sont plus visibles. Mais prenons le secteur des politiques publiques : il y a icide la place pour des diplômés de maîtrise ou de docto- rat, et certains y font déjà de belles carrières. Mais ce n’est pas un débouché auquel les étudiants pensent d’emblée. » La vie après le doctorat VOIR PAGE I 2 : DOCTORANTS Relève en recherche ISTOCK

CAHIER SPÉCIAL I Relève - Le Devoir€¦ · voir utiliser les réseaux sociaux. Il s’agit d’être capable de traduire pour différents publics nos passions en recherche.» Parce

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Page 1: CAHIER SPÉCIAL I Relève - Le Devoir€¦ · voir utiliser les réseaux sociaux. Il s’agit d’être capable de traduire pour différents publics nos passions en recherche.» Parce

La 5e édition des Journées de la relève en recherche s’est tenue

les 21 et 22 septembre, à Québec. Coorganisé par l’Association franco-

phone pour le savoir (Acfas) et les Fonds de recherche du Québec,

cet événement est notamment l’occasion de célébrer l’apport des étu-

diants-chercheurs au système de recherche québécois dans le cadre d’une

remise de prix. Le Devoir vous présente ici les lauréats de l’édition 2017.

Prix Acfas –IRSSTConcilier santé

et sécurité

au travail I 3

Prix du Concours devulgarisationde la rechercheI 4

LES SAMEDI 23 ET DIMANCHE 24 SEPTEMBRE 2017

CAHIER SPÉCIAL I

Durant deux jours, jeudi et vendredi derniers, 225

étudiants inscrits à la maîtrise, au doctorat et au

postdoctorat pour certains se sont donné rendez-

vous à Québec, dans le cadre des cinquièmes Jour-

nées de la relève en recherche. Un événement coor-

ganisé par le Fonds de recherche du Québec (FRQ)

et l’Association pour le savoir francophone (Acfas)

et destiné à mieux outiller les jeunes chercheurs à

la recherche de débouchés.

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

Collaboration spéciale

«L’objectif du doctorat, c’est de développer à lafois des connaissances de pointe et ses capa-cités de recherche, indique le président de

l’Acfas, Frédéric Bouchard. Des compétences qui peuventêtre utiles dans bien des secteurs de la société. Trop degens croient que seules les universités ont besoin de docto-rants. Mais tant les entreprises que les OBNL [orga-nismes à but non lucratif] ou encore les ministères ont be-soin de gens ayant des connaissances pointues et capablespar exemple d’interpréter des résultats de recherche.»

M. Bouchard, par ailleurs professeur titulaire au Dé-partement de philosophie et doyen de la Faculté desarts et des sciences de l’Université de Montréal, ex-plique que le nombre de doctorants a considérable-ment augmenté ces dernières années sans que de nou-veaux postes de professeurs se soient ouverts. Résul-tat : de plus en plus d’étudiants en fin de troisième cycledoivent trouver du travail en dehors de l’université.Une réalité à laquelle ils rechignent ?

«Pas nécessairement, répond-il. Seulement, la carrièreuniversitaire leur semble la plus naturelle et ils n’ont sou-vent pas imaginé faire autre chose. Nous devons les sensi-biliser à cette possibilité plus que nous le faisons au-jourd’hui. Il ne s’agit pas de les décourager de rester àl’université — parce que nous avons besoin d’eux —,mais de leur ouvrir des perspectives. En leur montrantque leurs connaissances pourraient bénéficier à toute lasociété s’ils décidaient d’embrasser une autre carrière. »

EmployabilitéCertains ateliers proposés ces deux derniers jours àQuébec portaient donc justement sur l’employabilitédes jeunes chercheurs et leur capacité à trouver un tra-vail après plusieurs années passées à travailler — sou-vent seuls — sur un sujet assez hermétique pour lecommun des mortels. Comment réussir un entretien ?Comment convaincre un employeur que son parcoursapportera une réelle valeur ajoutée à ses services?« De ce point de vue, le Canada et le Québec sont des so-ciétés en retard par rapport à d’autres pays de l’OCDE,note Frédéric Bouchard. Nous constatons une sous-performance en matière d’innovation organisationnelleet sociale. »

Un manque d’innovation qui fait en sor te que lemonde non universitaire continue à embaucher dansses bassins traditionnels, faisant ainsi barrage à la diver-sité, pourtant reconnue aujourd’hui comme vecteur d’in-novation. Un cercle vicieux en quelque sorte. «Il y a dessecteurs, comme la haute technologie ou la pharmacie,qui sont plus habitués à recruter des doctorants, précise leprésident de l’Acfas. Les occasions y sont plus visibles.Mais prenons le secteur des politiques publiques : il y aicide la place pour des diplômés de maîtrise ou de docto-rat, et certains y font déjà de belles carrières. Mais ce n’estpas un débouché auquel les étudiants pensent d’emblée.»

La vie après le doctorat

VOIR PAGE I 2 : DOCTORANTS

Relèveen recherche

ISTO

CK

Page 2: CAHIER SPÉCIAL I Relève - Le Devoir€¦ · voir utiliser les réseaux sociaux. Il s’agit d’être capable de traduire pour différents publics nos passions en recherche.» Parce

R E L È V E E N R E C H E R C H EL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 S E P T E M B R E 2 0 1 7I 2

FinancementEt pourtant, certains d’entre eux auront à y

penser plus tôt qu’ils ne l’auraient souhaité.En avril dernier, le rapport Naylor révélait quela recherche fondamentale manquait cruelle-ment de financement au Canada, en raison descompressions subies dans le secteurces dix dernières années. Le gouver-nement fédéral avait promis de réin-vestir rapidement, mais l’argent se faittoujours attendre.

« C’est la relève qui en pâtit, car c’estsouvent le premier poste budgétairequi tombe , explique Frédéric Bou-chard. C’est problématique, car nousavons des étudiants motivés et pleinsde talent qui ont beaucoup à nous of-frir, mais qui se voient obligés de met-tre un terme à leur carrière de façon abruptefaute de financement. »

D’où la tenue d’un atelier pratico-pratique surla production des demandes de bourse, oucomment mettre toutes les chances de son côtépour obtenir le financement désiré. Car lesJournées de la relève en recherche ne font pasque regarder vers l’avenir. Elles ont égalementcomme objectif d’outiller les étudiants cher-cheurs dans leur travail de tous les jours.

Certains ont ainsi suivi un atelier sur l’art et

la manière de gérer son stress durant lesétudes, d’autres sont allés chercher des trucspour bien rédiger leur mémoire ou leur thèse.D’autres encore ont pu prendre des renseigne-ments sur les possibilités offertes en matièrede mobilité internationale.

Communication« De nombreux ateliers ont également porté surla communication, souligne le président del’Acfas. Comment bien partager ses résultats à la

fois avec les non-universitaires, maisaussi à l’intérieur même de l’université?Parce que de plus en plus de recherchessont interdisciplinaires. Savoir vulgari-ser est devenu important, mais aussi sa-voir utiliser les réseaux sociaux. Il s’agitd’être capable de traduire pour différentspublics nos passions en recherche. »

Parce que de la passion, il y en a, etdu talent aussi, ajoute-t-il. Résultat : leschercheurs québécois présentent desrésultats d’une très grande qualité, et

ayant un rayonnement bien plus important quece que la taille de la province pourrait laisserprésager, juge-t-il.

«Nous sommes reconnus à l’étranger alors quenous sommes une toute petite société de re-cherche, conclut-il. Si l’on regarde le nombre depublications, de citations ou encore de prix inter-nationaux, le Québec a une influence réelle dansle monde scientifique. Mais cette bonne santé vadevenir de plus en plus fragile si le financementpromis ne survient pas rapidement. »

SUITE DE LA PAGE I 1

DOCTORANTS

La relève scientifique québécoise en ingénierie de l’eau possède dans ses rangs une cher-cheuse prometteuse en la personne de Marie-Ève Jean. La jeune chercheuse, lauréate duprix Acfas Ressources naturelles, a déjà tout un parcours derrière elle qui laisse présagerun bel avenir professionnel.

PRIX ACFAS – RESSOURCES NATURELLES,PARRAINÉ PAR RESSOURCES NATURELLES CANADA

Quand l’étude en génie des eauxdevient une véritable passion

S T É P H A N E G A G N É

Collaboration spéciale

L a doctorante Marie-ÈveJean croit qu’il y a beau-

coup de pain sur la planchedans le domaine du génie deseaux. C’est la raison pour la-quelle son parcours universi-taire gravite autour de l’eau.

Réduire les débordements des réseaux d’égout

En pause pour un congé dematernité, Mme Jean poursui-vra bientôt sa recherche àl’Institut national de la re-cherche scientifique (INRS)Eau Terre Environnementpour trouver des moyens deréduire les débordements desréseaux d’égout unitaires enintégrant des mesures decontrôle à la source et entemps réel. Le projet constitueun des volets d’un vaste pro-gramme de recherche qui s’in-téresse notamment à la qualitéde l’eau et à l’efficacité des pa-vés filtrants et des réseauxd’égout séparés.

En association avec la firmede génie-conseil Tetra TechCSO, Mme Jean examineracomment la combinaison desmesures de contrôle à lasource et en temps réel peutréduire les rejets d’eaux plu-viales dans les cours d’eau.

Mais d’abord, qu’est-ce queces mesures ? Le contrôle à lasource se traduit, par exemple,par l’aménagement de bassinsde rétention où les eaux plu-viales se dirigent, surtout lorsde grosses pluies. Elles se re-trouvent là plutôt que dans leréseau d’égout, ce qui réduit lapression sur ce réseau.

Le contrôle en temps réelconsiste à optimiser le réseau àl’aide d’outils informatiquesqui permettent par exemple dedévier les surplus d’eau danscertaines conduites vers d’au-tres moins sollicitées. Lors degrosses pluies, cela doit pou-voir se faire en temps réel pourque la mesure soit efficace.

Pourquoi est-ce si importantd’étudier ces aspects ? Au Qué-bec, comme dans bien d’au-tres endroits dans le monde, lamajorité des réseaux d’égoutsont unitaires (sauf dans lesnouveaux quartiers), ce qui si-

gnifie qu’ils évacuent à la foisles eaux domestiques et leseaux pluviales. Or, un réseauunitaire cause des problèmeslors de grosses averses, carles eaux mélangées sont ache-minées vers les stations d’épu-ration où elles sont traitées.Les eaux pluviales ne nécessi-tent cependant pas un traite-ment aussi poussé que leseaux provenant des égouts sa-nitaires. Cela se traduit parune hausse des coûts de traite-ment et parfois, par des débor-dements aux graves consé-quences (ex. : inondations).Adopter des mesures pour ré-duire le volume des eaux plu-viales devient donc un enjeuéconomique et environnemen-tal. Mme Jean examinera s’ilexiste une méthode ef ficacepour réduire les coûts desdeux mesures de contrôlequ’elle étudie. « Nous souhai-tons aussi rendre plus accessi-bles ces mesures pour les petitesmunicipalités, car les grandesvilles comme Montréal et Qué-bec les appliquent déjà. »

Un parcours remarquableL’intérêt de Marie-Ève Jean

pour l’eau remonte à plusieursannées. Selon elle, les ques-tions entourant ce sujet consti-tuent une préoccupation uni-verselle qui touche la planèteentière. « J’ai opté pour ce do-maine d’études parce que j’aiun grand intérêt pour la coopé-ration internationale et la pro-tection de l’environnement, et jesouhaite m’investir dans ces do-maines», affirme-t-elle.

En 2013, elle complétait donc

un baccalauréat en génie deseaux à l’Université Laval. Du-rant ses études, elle a fait unesession en Argentine où elle apu parfaire sa connaissance dela langue espagnole et mieuxcomprendre comment est gé-rée l’eau dans ce pays.

Très impliquée dans sa com-munauté, elle donnait aussidurant cette période desconférences dans les écolesprimaires et secondaires surles problématiques d’accès àl’eau dans le monde.

Par la suite, Marie-Ève Jeanentreprenait une maîtrise engestion des barrages à des finsd’irrigation à l’Université del’Alberta, qu’elle a terminée en2015. Un stage de quatre moisà l’UNESCO a suivi, au coursduquel elle s’est intéresséeaux enjeux d’accès à l’eaudans le monde.

En 2016, elle amorçait ledoctorat qu’elle poursuit en cemoment. Un an plus tard, ellerempor tait la prestigieusebourse d’études supérieuresVanier. Cette bourse d’excel-lence est attribuée en tenantcompte de plusieurs facteursdont l’excellence de la re-cherche du candidat, son lea-dership et son implicationdans la communauté.

Enfin, l’intérêt pour l’eau etl’environnement de Marie-ÈveJean prend parfois une tour-nure plus « pratique ». C’estainsi qu’elle et cinq autres étu-diants de l’INRS ont développéune application web et mobile,appelée Go-Explo, éducative etludique, qui vise à valoriser lefleuve Saint-Laurent.

LINKEDIN

Les travaux de Marie-Ève Jean se concentrent sur la recherche de moyenspour réduire les débordements des réseaux d’égout unitaires.

FrédéricBouchard

Les autres lauréatsPrix de thèse en cotutelle Québec-France et France-QuébecParrainés par le ministère des Relations internationales et de la Francophonie et le consulat géné-ral de France à Québec Jean-Sébastien Boisvert, Université de Montréal et Université de PerpignanKevin Cazelles, Université de Montpellier et Université du Québec à Rimouski

Prix ADESAQParrainés par l’Association des doyennes et des doyens des études supérieures au Québec et les Fonds de recherche du QuébecSciences naturelles et génie : Emily Coffrey, Université McGillSciences de la santé : Jean-François Lemay, Université de SherbrookeSciences sociales et humaines, arts et lettres : Katharine Glover, Université McGill

Jean-SébastienBoisvert

Kevin Cazelles

Emily Coffrey

Jean-FrançoisLemay

KatharineGlover

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R E L È V E E N R E C H E R C H EL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 S E P T E M B R E 2 0 1 7 I 3

Ce cahier spécial a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, grâce au soutien des annonceurs qui y figurent. Ces derniers n’ont cependant pas de droit de regard sur les textes. Pour toute informationsur le contenu, vous pouvez contacter Aude Marie Marcoux, directrice des publications spéciales, à [email protected]. Pour vos projets de cahier ou toute autre information au sujet de la publicité,

contacter [email protected].

MAÎTRISE

Poursuivre une vie active sans souffrance physique

C A M I L L E F E I R E I S E N

Collaboration spéciale

L a lauréate du prix Acfas – IRSST maîtrise,parrainé par l’Institut de recherche Robert-

Sauvé en santé et en sécurité du travail, Marie-Christine Richard, vient d’entrer dans la phased’analyse de sa recherche. Pour cela, elle ad’abord recueilli des données auprès d’unequinzaine de personnes à travers des rencon-tres individuelles. « J’ai interrogé des gens quiont un travail manuel, par exemple menuisiersou manutentionnaires, et des gens pour qui letravail physique constitue 30 à 40 % de leurstâches, comme des commis de bibliothèques aucomptoir, mais qui doivent parfois ranger des li-vres dans les étagères », précise-t-elle.

Il n’y avait pas de critère de diagnostic, maistoutes ces personnes souffraient de douleurschroniques, comme des maux de dos ou d’articu-lations. C’est le cas d’un quart des gens de plusde 50 ans. Or ce sont eux que les entreprisesvont de plus en plus devoir inciter à rester pluslongtemps en poste. «Je ne pense pas que cela vaêtre rare, bientôt, de voir des gens de 55 ans et plusse maintenir au travail et je pense qu’il faut sepréoccuper de savoir qui sont ces gens.»

Physiothérapeute en clinique pendant plu-sieurs années, Mme Richard connaît bien la ré-currence de ces problèmes de santé chez cettepopulation. Aussi professionnelle de rechercheau sein du Centre d’action en prévention et réa-daptation de l’incapacité au travail de l’Univer-sité de Sherbrooke, elle s’est intéressée dansses précédents travaux à l’incapacité au travailet l’absentéisme.

Cette fois, ces entrevues lui ont permis decomprendre les raisons qui poussent des gensaffaiblis physiquement à continuer leur travail.Pour certains, il s’agit de subvenir aux besoinsde la famille, tandis que d’autres font davantageréférence à des valeurs associées au travail.

« C’est important de comprendre comment lesgens perçoivent leur travail, si c’est un objet pourse réaliser, etc. »

Elle a d’ailleurs remarqué que, si le travail estcentral dans la vie de ces personnes, celles-civont avoir tendance à accepter davantage la dou-leur, ou encore à changer leurs activités hors dutravail. «Ces gens-là vont cesser de faire des chosespour pouvoir aller travailler le lendemain», rap-porte-t-elle. Ce coût sur la vie sociale doit aussiêtre pris en compte, pense la chercheuse.

Une recherche novatriceIl s’agit d’une étude exploratoire, indique

Mme Richard, car il existe très peu d’informa-tions à ce sujet. « Il y a très peu de données surles gens qui restent. On parle plus de ceux quis’absentent. »

Pourtant, le taux d’emploi de ces personnesétait de près de 60% au Canada d’après les don-nées de l’OCDE en 2011, et de 54% pour le Qué-bec seul. Dans d’autres pays européens, le tauxétait parfois plus significatif, comme en Suèdeoù ce chif fre dépassait 70 %. En revanche, enFrance, à peine plus de 40 % de personnes de55 ans et plus travaillaient.

Ce prix Acfas constitue donc une belle recon-naissance quant au fait qu’il s’agit d’un sujet im-portant, considère Mme Richard. « C’est un en-couragement à continuer dans cette direction, etainsi voir quel impact on peut avoir sur la popu-lation au travail », pense-t-elle.

Perspectives d’avenirL’étude pourrait d’ailleurs servir aux entre-

prises à lancer des pistes de réflexion, croitMme Richard. En connaissance de cause, il seraplus facile pour ces dernières de développerdes outils pour venir en aide à ces employésaux besoins spécifiques.

Parmi les facteurs à mettre en avant, la cher-cheuse cite la flexibilité des horaires de travail

et le soutien physique aux employés pour ac-complir certaines tâches. «Bien sûr, la taille del’entreprise joue ainsi que les milieux profession-nels : s’il y a suf fisamment de main-d’œuvre ouune pénurie par exemple», nuance-t-elle.

Marie-Christine Richard espère avoir ter-

miné son mémoire, sous forme d’articles quipourront être soumis à des revues spécialisées,début 2018. Elle compte poursuivre ses étudesau doctorat et ainsi approfondir ses re-cherches, afin que des solutions concrètespuissent se dessiner.

Les Québécois en âge de travailler sont de moins en moins nombreux. La population vieillit

et se trouve souvent aux prises avec des douleurs musculosquelettiques. Partant de ce

constat, Marie-Christine Richard, étudiante en maîtrise à l’Université de Sherbrooke, tente

de déterminer quels facteurs pourraient aider ces personnes de 55 ans et plus à se mainte-

nir au travail.

DOCTORAT

Essayer la psychologie, c’est l’adopter

PRIX ACFAS – IRSST, PARRAINÉS PAR L’INSTITUT DE RECHERCHE ROBER T-SAUVÉ EN SANTÉET SÉCURITÉ AU TRAVAIL

NANCY LEE

Marie-Christine Richard essaie de trouver des solutions pour prolonger la durée de travail des quinquagénairessans que ces derniers souffrent de douleurs physiques liées à leur activité professionelle.

C’est important de comprendre comment les gensperçoivent leur travail, si c’est un objet pour se réaliserMarie-Christine Richard, étudiante en maîtrise à l’Université de Sherbrooke

« »

J E A N - F R A N Ç O I S V E N N E

Collaboration spéciale

Maxime For tin s’est faitprendre à son propre jeu.

Il a voulu ajouter à sa formationde technique policière un bacca-lauréat en psychologie. L’idée,au départ, était d’augmenter sesconnaissances et de décrocherun diplôme universitaire, néces-saire pour quiconque ambi-tionne de monter en grade dansles corps policiers.

Le voici maintenantrendu au doctorat,«accro» à la psycholo-gie et lauréat d’unprestigieux prix de larelève en rechercheremis par l’Associa-t i on f rancophonepour le savoir (Acfas)et parrainé par l’Insti-tut de recherche Ro-ber t-Sauvé en santéet en sécurité du tra-vail (IRSST), le prixAcfas – IRSST docto-rat. Content ? « Sur-pris, mais très heu-reux oui, admet lejeune chercheur. C’est valori-sant d’être reconnu par de telles

organisations. En recherche,chaque bourse, prix ou distinc-tion compte pour obtenir du fi-nancement pour de prochainsprojets, donc ça a aussi un im-pact très concret. »

Un trouble aux multiples visages

Sa passion pour la rechercheen psychologie, Maxime Fortinla consacre au traitement dutrouble de stress post-trauma-

tique (TSPT). Ce n’estpas un hasard. À l’âgede 16 ans, il s’était en-rôlé comme réser-viste des Forces ar-mées canadiennes, in-tégrant par la suiteune unité de premiersrépondants. Plusieursformations l’avaienta l o r s é v e i l l é a u xrisques et aux consé-quences du TSPT.

Présentement, lathérapie cognitivo-compor tementa le(TCC), laquelle viseà modifier des pen-sées et des compor-

tements problématiques, estla plus reconnue pour traiter

le TSPT. Toutefois, environ 20à 30 % des patients qui l’entre-prennent abandonnent en che-min. De plus, la moitié des pa-tients ne répondent pas à cetraitement.

«Environ 80% des gens souf-frant de TSPT ont d’autres pro-blèmes, comme la dépression oules troubles du sommeil, ex-plique Maxime Fortin. Or, lathérapie ne s’attaque qu’auTSPT, en supposant que, si l’onréussit à le traiter, les autresproblèmes disparaîtront. L’hypo-thèse que je vérifie, c’est si l’ap-proche serait plus efficace en ré-pondant à tous les besoins dupatient. »

Des résultatsencourageants

Le projet est réalisé sous ladirection des Drs Ghassan El-Baalbaki et Christophe Fortin.Il s’agit de rendre la TCC plusflexible, en allongeant le nom-bre possible de séances, le-quel peut aller jusqu’à 32, eten ajoutant des interventionspour traiter les problèmesconnexes au trouble de stresspost-traumatique.

Sous la super vision du

Dr Stéphane Guay, du Centred’étude sur le trauma, 60 pa-tients font par tie du projet.Maxime Fortin souhaite déter-miner l’effet de la nouvelle ap-proche sur la qualité de viedes par ticipants et sur leursproblèmes connexes commela dépression ou les troublesdu sommeil, afin de les compa-

rer aux résultats de la mé-thode traditionnelle. « Nouscherchons à vérifier lequel deces deux formats est le plus ef fi-cace pour le traitement duTSPT, dans l’objectif de clari-fier laquelle des deux approchesest à privilégier en thérapie »,précise-t-il.

Les patients répondront-ils

mieux au traitement et se-ront-ils moins nombreux àabandonner ? Les premiers ré-sultats laissent penser queoui. « On voit une diminutiondes symptômes du TSPT et desautres problèmes, ainsi qu’uneaugmentation de la qualité dev i e , c ’ e s t encouragean t » ,conclut le chercheur.

ROUMI MANDJEE

Sa passion pour la recherche en psychologie, Maxime Fortin la consacre au traitement du trouble de stresspost-traumatique (TSPT).

Le trouble de stress post-traumatique peut faire dérailler une vie, et les traitements ne

sont pas efficaces pour tous. Doctorant en psychologie à l’Université du Québec à Mont-

réal, Maxime Fortin propose une nouvelle approche pour mieux venir en aide aux patients.

CHAPEAU AUX NOUVELLES TÊTES CHERCHEUSES

PRIX ACFAS IRSST – DOCTORAT −Santé et sécurité au travail Maxime FortinDoctorant en psychologie

CONCOURS DE VULGARISATION DE LA RECHERCHE DE L’ACFAS−Reportage vidéoPaméla Trudeau-FisetteDoctorante en linguistique

«Environ 80%des genssouffrant deTSPT ontd’autresproblèmes,comme ladépression oules troublesdu sommeil

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R E L È V E E N R E C H E R C H EL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 S E P T E M B R E 2 0 1 7I 4

Prendre, et étudier, la parole

P I E R R E V A L L É E

Collaboration spéciale

Pourquoi un jeune doctoranten études anciennes, déjà

passablement occupé par sonpropre travail, voudrait-il faire dela vulgarisation de la recherche?C’est pourtant le choix que faitPhilippe Therrien.

« Les études anciennes sontpour moi une véritable passion,raconte-t-il, et cette passion, j’aienvie de la partager avec d’autrespersonnes que mes seuls pairs. Etla vulgarisation me permet de lefaire. En diffusant ainsi le savoir,j’essaie de contribuer à l’enrichis-sement de la culture générale.»

Philippe Therrien amorce undoctorat en études anciennes eten théologie en cotutelle avecl’Université Laval et l’Universitéde Lausanne. Son champ d’ex-pertise est le christianisme an-cien. «Je m’intéresse particulière-ment à la littérature chrétiennede l’Antiquité. Mon approche estmoins théologique, bien que lathéologie soit un outil commode,que littéraire et historique. Pourmoi, ces textes chrétiens sont unephoto des idées qui ont cours àun moment historique précis.»

L’approcheà la vulgarisation

Le texte qu’il a soumis au

Concours de la vulgarisation dela recherche de l’Acfas, dont ilest l’un des lauréats, porte surles Clémentines. Les Clémen-tines comprennent deux textes,soit les Homélies et les Recon-naissances du Pseudo-Clément.Ces deux textes racontent l’his-toire de Clément de Rome, qui,aux prises avec des questionne-ments existentiels, trouve ré-ponse auprès de l’apôtre Pierre.

Ces deux textes sont desécrits apocryphes, en ce sensque l’on ne connaît pas avec cer-titude ni leur auteur ni le mo-ment précis et le lieu de leur ré-

daction. On estime qu’ils datentde 300 à 400 ans après Jésus-Christ. De plus, les écrits apo-cryphes ne font pas partie ducanon chrétien, comme d’autresécrits tels les quatre Évangileset les Épîtres de Paul.

D’entrée de jeu, le texte dePhilippe Therrien dévoile l’ap-proche qu’il préconise en vul-garisation de la recherche. Ilinvite le lecteur à cette ré-flexion. S’il est possible d’ob-server la faune en regardantpar une fenêtre et d’y aperce-voir à coup sûr au moins unécureuil, si l’on veut dénicherl’oiseau rare, il faudra sansdoute sortir des sentiers bat-tus. Les écrits apocryphes, se-lon lui, sont cet oiseau rare.

«Les écrits apocryphes témoi-gnent de la diversité des sys-tèmes de pensée dans l’Antiquitéet sont la preuve du foisonne-ment de la vie intellectuelle àcette époque, soutient-il. Deplus, aussi modernes que nouspuissions être, nous demeuronsles descendants et les héritiersde ces modes de pensée.»

Une fois son doctorat enpoche, Philippe Therrien seprépare à une carrière de pro-fesseur et de chercheur univer-sitaire, bien qu’il demeure ou-ver t à d’autres possibilités.Mais peu impor te son trajetprofessionnel, une chose de-meure. « Je vais toujours conti-nuer à faire de la vulgarisationde la recherche, soit des miennesou celles de mes pairs.»

Les études anciennesdécryptées

Quand la science mène à la vulgarisation

Rachel Hussherr est une jeune chercheuse qui aimerait bien mener une carrière en science

tout en faisant de la vulgarisation scientifique en parallèle. «L’écriture, c’est ma drogue, dé-

clare-t-elle, et tout m’intéresse. Si c’était possible, j’aimerais bien faire les deux à 50-50»,

explique cette lauréate d’un prix du Concours de vulgarisation de la recherche de l’Acfas,

qui rentre tout juste d’une expédition de six semaines dans le Grand Nord.

Le cœur à la science et à la communication

PRIX DU CONCOURS DE VULGARISATION DE LA RECHERCHE, PARRAINÉS PAR LE SECRÉTARIATÀ LA POLITIQUE LINGUISTIQUE DU QUÉBEC

A N D R É L A V O I E

Collaboration spéciale

«J e dois souvent spécifier que la phonétique, celane concerne ni la littérature ni la traduction,

et que ce n’est surtout pas la science de l’ortho-graphe!» souligne en riant Paméla Trudeau-Fi-sette, habituée à apporter précisions et nuancessur un sujet qu’elle explore depuis le début de sonbaccalauréat en linguistique en 2010 à l’UQAM.

Lauréate de l’un des prix du Concours de vulga-risation de la recherche de l’Acfas, parrainés par leSecrétariat à la politique linguistique du Québec,elle voit cette reconnaissance comme un encoura-gement à poursuivre avec ferveur un travail desensibilisation essentiel pour la linguistique, et sur-tout pour la recherche fondamentale «afin de fairecomprendre ce que l’on fait ». «Les gens ont ten-dance à croire que c’est moins important parce queles résultats ne sont pas visibles dans un futur

proche», déplore la doctorante. «Au contraire! Cesont des travaux longs, exigeants, qui demandentbeaucoup de ressources matérielles ou humaines;sans bourse ni subvention, on n’y arrive pas.»

Dans son domaine, les possibilités lui semblentinfinies, et fort utiles par exemple pour les ortho-phonistes — dont la rareté dans nos écoles estsouvent déplorée. «Nos recherches vont leur per-mettre d’améliorer leurs évaluations et leurs inter-ventions.» C’est sans compter les développementsfulgurants de la reconnaissance vocale. «Nous en-trons dans un monde où la technologie de la parolesera de plus en plus présente, mais beaucoup reste àfaire : comment reconnaître la voix de quelqu’unqui a subi un accident, qui a un accent, ou quimarmonne? Pour l’instant, ça ne marche pas.»

Sortir de sa coquillePaméla Trudeau-Fisette ne cache pas sa joie

d’avoir participé aux Journées de la relève en

recherche, consciente qu’elle a encore beau-coup à apprendre, dont la façon de faire saplace dans le milieu universitaire. « Dans mondépar tement, de jeunes professeurs veulentaussi nous aider, car rédiger un curriculumvitæ universitaire ou se préparer à une entre-vue pour un poste en enseignement supérieur, cesont des défis particuliers. »

Son propre parcours ne manque pas d’éton-ner, jalonné de nombreux prix, bourses etmentions d’honneur, sans pause ni paren-thèses depuis le début de son baccalauréat.Aurait-elle quelques secrets à partager pourmaintenir cette ferveur ? « Très tôt, j’ai intégréun laboratoire de recherche en phonétique, untravail qui m’a permis de me faire connaîtreauprès des gens de mon programme, et de madirectrice de recherche. S’impliquer dans lemonde universitaire, c’est une bonne façond’apprendre. » Et même si elle admet ne pastoujours être douée pour les « relations pu-bliques », discuter avec les gens du milieu dela recherche lui paraît essentiel. « Il y a pleinde choses qu’il faut apprendre ailleurs que surles bancs d’école ! », conclut cette passionnéede la parole.

MARIE BELLAVANCE-COURTEMANCHE

Paméla Trudeau-Fisette

La linguistique, cette science des langues, et la phonétique, celle de la parole, rendent per-

plexe l’entourage de Paméla Trudeau-Fisette. Pas étonnant que cette doctorante de l’Uni-

versité du Québec à Montréal (UQAM) qui ne se fait jamais prier pour remettre les pen-

dules à l’heure fasse partie des lauréats du Concours de vulgarisation de la recherche.

• Université du Québec à Montréal

• Université du Québec à Trois-Rivières

• Université du Québec à Chicoutimi

• Université du Québec à Rimouski

• Université du Québec en Outaouais

• Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue

• École de technologie supérieure

• Télé-université

www.uquebec.ca

Bienvenue à Québec !

L’INRS, l’ENAP, la TÉLUQ et le siège de l’Université du Québec sont heureux d’accueillir les étudiants chercheurs et les chercheurs postdoctoraux

Journées de la relève en recherche dans la vieille capitale.

C L A U D E L A F L E U R

Collaboration spéciale

I l y a cinq ans, Mme Hussherr est venue ter-miner son baccalauréat en biologie dans le

cadre d’un programme d’échange étudiant en-tre l’Université de Lausanne et l’Université La-val. C’est à cette époque qu’elle écrit ses pre-miers ar ticles, publiés notamment dans lejournal étudiant Impact Campus, de l’Univer-sité Laval. Elle est ensuite entrée au servicedu laboratoire de biogéochimie océanique di-rigé par le professeur Maurice Levasseur. « Çam’a vraiment plu, j’ai donc décidé d’y faire mamaîtrise », lance-t-elle.

De retour du Grand NordSa maîtrise achevée en novembre dernier,

Rachel Hussherr a trouvé un contrat de re-cherche pour le ministère des Pêches et desOcéans du Canada. Durant six semaines cetété, elle a participé à une expédition dans lamer de Beaufort, en Antarctique. « Je suis partielà-bas en qualité de biologiste afin d’échantillon-ner le phytoplancton, explique-t-elle, et d’évaluerles concentrations en nutriments, les espèces dephytoplanctons présents dans l’eau, etc. »

Ce projet de recherche de Pêches et Océans,qui devrait s’étendre sur trois ans, vise à carac-tériser l’écosystème de la mer de Beaufort afind’obtenir une vision d’ensemble de toute la viemarine qui s’y trouve.

« Si on me propose de par ticiper aux pro-chaines expéditions, c’est sûr que ça va me faireplaisir, indique Mme Hussherr. Mais on ne saitjamais puisque comme je n’ai pas de poste per-manent, c’est toujours au jour le jour…»

La chercheuse vient tout juste de rentrer duGrand Nord et ne sait donc pas trop ce qui l’attend.

Science, vulgarisation… ou les deux?Pour le moment, son cœur balance encore

entre une carrière en recherche et la communi-cation scientifique. Si elle était certaine de vou-loir faire carrière en recherche, elle entrepren-drait un doctorat. Toutefois, elle est tout autantattirée par la vulgarisation scientifique.

«Je cherche encore un peu ma voie, observe-t-elle, et je pense que ça va déprendre des occasionsqui se présenteront ces prochaines années. C’est cequi déterminera ce que je vais devenir.» Idéale-ment, son plan de carrière serait de pouvoir faireles deux, «mais seul l‘avenir le dira!» conclut-elleavec philosophie.

SARAH THERRIEN

Philippe Therrien

VALÉRIE CYPIHOT

Rachel Hussherr tenant une pieuvre dans sa main

C L A U D E L A F L E U R

Collaboration spéciale

L a u r é a t e d ’ u n p r i x d uConcours de vulgarisation

de la recherche de l’Acfas,Mme Paris vient tout juste deter miner une maîtr ise enscience de l’eau au Centre EauTerre Environnement de l’Ins-titut national de la recherchescientifique (INRS). Ses tra-vaux sont orientés en écotoxi-cologie et visent à faciliter ladétection des métaux dans lescours d’eau. Plus précisément,l’équipe pour laquelle elle tra-vaille cherche à mettre aupoint une méthode pour amé-liorer la détection des métauxdans les cours d’eau environ-nant l’industrie minière, au Nu-navuk. « Le Nunavik est parti-culièrement concerné par cettecontamination puisque c’estune région en plein essor àcause du Plan Nord », préciseMme Paris.

Par conséquent, la cher-cheuse s’est rendue à cinq re-prises dans cette région afind’échantillonner le périphyton,la couche gluante qu’on trouvesur les roches dans les ri-

vières. « Il s’agissait pour moide voir si le périphyton consti-tue un bon marqueur au Nuna-vik », explique-t-elle. C’est lecas pour cer tains métauxcomme le cuivre, a-t-elle ob-ser vé, mais pas nécessaire-ment pour le cadmium. « Il fau-dra poursuivre nos études », in-dique Mme Paris.

Mais ces prochains mois,Louise-Emmanuelle Paris réa-lisera un stage auprès de laCommission des Grands Lacs,l’organisation qui regroupe leQuébec et l’Ontario et huitÉtats américains, dans le butde protéger ces importantesréserves d’eau. Son stage seterminera le 1er avril. « Et pourla suite, dit-elle, on verra ceque la vie m’offrira. Qui sait si,là-bas, je ne découvrirai pasma voie ? »

Cap sur la vulgarisationLouise-Emmanuelle Paris

confie avoir tiré deux grandsconstats de ses études de maî-trise. Premièrement, elle n’a pasle goût de se super-spécialiserdans un domaine puisqu’ellepréfère apprendre «un peu surtout», dit-elle. Deuxièmement,

elle a confirmé qu’elle adoreavant tout la communicationscientifique. En conséquence,elle se dirige à présent dans cedomaine.

Il y a un an déjà, elle a crééune émission intitulée ScienceÉnergie, diffusée sur les ondesde CKIA-FM, la radio commu-nautaire de la région de Québec.

« Je reçois des scientifiques detous les domaines et des auteursde livres, ce qui me permet d’ap-prendre sur tous les sujets, dé-

clare-t-elle avec ravissement. Jejubile dans ce milieu ! » Cetteémission est aussi disponibleen balado sur la page FacebookScience énergie CKIA FM.

« M o n g r a n d p l a i s i r e nscience, c’est de présenter leschoses différemment afin de cap-tiver les gens», explique Mme Pa-ris. Elle cherche ainsi à mon-trer qu’il y a toujours une façonde rendre la matière accessibleà tous. « C’est le but de monémission radio», résume-t-elle.

Louise-Emmanuelle Paris est une jeune chercheuse qui

vient de découvrir que ce qui la passionne avant tout dans

la vie, c’est de communiquer la science. Et à 27 ans, elle

anime déjà sa propre émission radio de vulgarisation

scientifique.

LOUISE-EMMANUELLE PARIS

Louise-Emmanuelle Paris

Page 5: CAHIER SPÉCIAL I Relève - Le Devoir€¦ · voir utiliser les réseaux sociaux. Il s’agit d’être capable de traduire pour différents publics nos passions en recherche.» Parce

R E L È V E E N R E C H E R C H EL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 S E P T E M B R E 2 0 1 7 I 5

Faire le ménage entre ses deux oreillesDans l’enfer du stress des étudiants à l’université

M A R I LY S E H A M E L I N

Collaboration spéciale

É tienne Hébert étudie l’im-pact du stress sur la santé

mentale depuis des années, no-tamment auprès des athlètes.Il explique d’emblée que lephénomène n’a pas, à la base,de « couleur af fective » positiveou négative, mais qu’il reposeplutôt sur une soustractiontoute simple : les ressourcesqui sont à notre disposition,moins le défi auquel on estconfronté.

«Quand le résultat est positif,les gens parlent rarement destress, ils vont plutôt dire qu’ilssont excités, qu’ils ont hâte,mais, en fait, il s’agit d’uneréaction de stress, explique-t-il.Le vrai terme pour parler de çaest “eustress”, une contractionentre euphorie et stress. La réac-tion positive provient de laconviction d’être en pleine pos-session de ses moyens pour faireface au défi. »

A contrario, la sensation quel’on qualifie de stress découled’un résultat négatif à la for-mule mathématique. « Le faitd’être convaincu de ne pas êtreen mesure de répondre à la de-mande engendre de la détresse,indique le doyen. Pour y remé-dier, il importe de bien cerner àla fois les ressources à notre dis-position et les défis auxquelsl’on est confronté. »

Une dose de réalisme,s.v.p. !

D’un côté de l ’équation,donc, on retrouve les res-sources. Par là, le professeurn’entend pas seulement lescompétences et la formationde l’étudiant, mais aussi le sou-tien social dont il bénéficie,que ce soit de la part de sa fa-mille, des amis ou du conjoint,de même qu’une chose aussibanale en apparence qu’essen-tielle, le fait d’avoir une rou-tine de travail bien établie.

D’autre part, il y a les défis,qu’il importe selon lui de dé-partager en deux catégories.Il y a d’abord ceux d’ordreconcret, objectifs, comme lavolonté d’obtenir un diplômede maîtrise, de doctorat ou decréer un réseau de contactsen recherche. Selon le profes-seur, ceux-là ne posent pasproblème.

Il en va tout autrement desdemandes plus subjectives,souvent celles que l’on se fait àsoi-même. Des exemples? Desétudiants ont avoué au doyendes études souhaiter écrireune thèse qui serait un pro-gramme de recherche en soi,publier quatre ou cinq articlesmarquants dans des revues im-portantes, se créer rapidementun réseau de contacts étenduet même être le meilleur étu-diant qu’ait connu un directeurde maîtrise ou de thèse, voirede tout le réseau de l’Univer-sité du Québec !

« Le problème vient souventdes attentes complètement dis-proportionnées et irréalistes, ré-sume-t-il. On tombe dans l’affec-tif avec des demandes qui n’ontpas de bon sens et qui nous im-posent énormément. »

Être son propre bourreauSelon Étienne Hébert, il y a

une limite aux stresseurs quepeut encaisser une même per-sonne, et ce, que ce soit del’eustress ou de la détresse.«Faire des études universitairesdans un autre pays, ç’a beauêtre positif, c’est aussi uneénorme source de stress, illustrele psychologue. Il faut s’adap-ter à un nouveau milieu. Tropsouvent l’étudiant va se dire“j’ai été choisi par tel directeur,je dois écrire mon projet dethèse en trois mois pour luiprouver ma valeur”. »

Lors de ses ateliers, qui setiennent dans la convivialitéet la bonne humeur, précisele principal intéressé, il n’hé-site pas à exposer aux étu-diants leurs attentes ir réa-l istes, car c’est de ce côté

qu’il est possible d’agir.« Prouver ta valeur, qu’est-ce

que ça veut dire exactement ?Peux- tu m’expl iquer ça entermes concrets ? Quelle est laressource qui va te permettre decontinuer à projeter ad vitamæternam cette image de l’étu-diant parfait que tu n’es pas ?La réponse est que cette res-source n’existe pas. »

Plutôt que de faire comme sile stress et l’épuisement n’exis-taient pas, on gagne, selon lepsychologue clinicien, à jouercar tes sur table et s’avouerqu’on en a trop pris, que ça dé-borde. « Faites une liste de vosdemandes et de vos ressources,conseille-t-il. Si ça ne balancepas, vous êtes dans le trouble,arrêtez de vous conter desblagues ! »

Trop souvent à son avis, laconfusion règne entre ce quiest réellement attendu desétudiants et ce qu’ils estimentqu’on leur demande. « Il n’y a

pas un directeur de thèse quiveut faire échouer ses étu-diants, assure-t-il. Allez leurparler ! Ils vont s’asseoir et re-garder avec vous. »

Il ajoute que d’autres res-sources sont à leur dispositionpour faire baisser la tension,comme le fait d’avoir un planB. « J’entends souvent “si je ne

finis pas mon doctorat, je nesais pas ce que je vais faire dema vie”, illustre-t-il. Le plan Bpermet de relativiser. »

Toxique et dangereuxSelon Étienne Hébert, nous

sommes collectivement parti-culièrement mauvais pour dé-celer nos propres symptômes

et manifestations de stress.«Quand je leur demande, les

étudiants me récitent : mainsmoites, mal de tête, fatigue,jambe molle, mal au ventre,problème de concentration,mais ça, c’est parce qu’ils l’ontappris, explique-t-il. Maisquand vient le temps de se l’ap-pliquer à soi-même, c’est une

autre histoire. Je leur dis :“Quand vous avez mal à la tête,quand vous dormez mal, pen-sez-vous que c’est peut-être lestress?”»

Le psychologue essaie deles faire cheminer vers unemeilleure prise en compte dessymptômes. «Les gens s’imagi-nent qu’ils sont capables de tolé-rer des situations de stress àl’infini », déplore-t-il.

Pour le doyen des études, ils’agit là d’une autre équationassez simple. « On finit pars’épuiser à gérer le stress et c’estlà que l’on tombe malade, in-dique-t-il. Et pas seulement entombant en dépression, enéprouvant des troubles anxieux,ou toute autre sor te de pro-blèmes de santé mentale. Lespersonnes qui absorbent ou en-durent le stress pendant unecer taine période vont aussiavoir des maux physiques, vontêtre plus susceptibles d’être im-pliquées dans des accidents dela route, de subir des blessuresphysiques et de développer destroubles psychosomatiques. Enfait, c’est le système immuni-taire qui flanche au bout d’uncertain temps. »

Le professeur propose doncune démarche « d’empower-ment», parce que « le stress, cen’est pas une bibite invincible,au contraire, il faut seulementl’apprivoiser».

Une ambiance compétitive règne aux cycles d’études su-périeures et le stress aigu y est monnaie courante, notam-ment parce que les étudiants se mettent beaucoup depression sur les épaules, estime Étienne Hébert, Ph. D.,psychologue clinicien, professeur et doyen des études àl’Université du Québec à Chicoutimi. Il tentera de leur ve-nir en aide en donnant pour une deuxième année de suiteun atelier spécial dans le cadre des Journées de la relèveen recherche.

ISTOCK

Selon Étienne Hébert, Ph. D., psychologue clinicien, professeur et doyen des études à l’Université du Québecà Chicoutimi, il y a une limite aux stresseurs que peut encaisser une même personne, et ce, que ce soit del’eustress ou de la détresse.

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R E L È V E E N R E C H E R C H EL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 S E P T E M B R E 2 0 1 7I 6

Pour connaître l’ensemble de nos actions pour la relève, visitez acfas.ca/releve

LA RELÈVEEN RECHERCHEAU DE NOTRE PLAN STRATÉGIQUE

RECHERCHE INTERNATIONALE

Les étudiants québécois n’ont pas une grande culture de la mobilité

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

Collaboration spéciale

«Chez nous, les chif fres de la mobilité inter-nationale sont stables depuis plusieurs an-

nées, indique Nicole Lacasse, directrice des af-faires internationales et de la francophonie àl’Université Laval. Ça fait vingt ans que nousproposons d’aller étudier à l’étranger et force estde constater que nous avons atteint un plafond.On voudrait que ça accélère, on multiplie le typede mobilités proposées notamment. Mais nousn’obtenons pas le succès escompté pour l’instant. »

Chaque année, entre 900 et 1000 étudiants del’Université Laval poursuivent leur cursus àl’étranger. L’établissement a conclu des parte-nariats avec 500 partenaires dans 70 pays : deséchanges de quelques mois pour les étudiantsau baccalauréat — stages, écoles d’été — maisaussi, aux cycles supérieurs, des formations bi-diplomantes et des cotutelles leur permettantde passer plusieurs semestres dans des labora-toires de recherche à l’étranger.

ErasmusLe principal partenaire de mobilité de l’Uni-

versité Laval demeure la France. Entre 2011 et2016, 1150 étudiants sont partis dans un établis-sement français dans le cadre du programmede mobilité internationale, soit environ le quartdes candidats au départ. Dans le même temps,2300 étudiants français ont fréquenté un pro-gramme offert par l’Université Laval.

« Je ne parle pas là d’étudiants réguliers, pré-cise Mme Lacasse, mais bien d’étudiants qui,dans le cadre de la mobilité internationale, vien-nent passer un semestre ou deux chez nous. »

Un partenariat privilégié assumé des deuxcôtés de l’Atlantique puisque, sur les 78 000Français qui étudient à l’étranger, 12 500 se re-trouvent dans une université québécoise, soit16% de l’effectif. Les Français représentent éga-lement 38% de tous les étudiants étrangers pré-sents sur le sol québécois. Pendant ce temps,1500 étudiants québécois étudient en France,dont 1100 en mobilité longue.

«Je serais tentée de dire “seulement”, commentela consule générale de France à Québec et fer-vente défenseure de la mobilité internationale,Laurence Haguenauer. Mais il faut bien avouerque les étudiants québécois n’ont pas la même cul-ture de la mobilité que les Français. Nous avons30 ans d’Erasmus derrière nous et c’est, selon moi,l’une des grandes réussites de l’Union européenne.»

Erasmus est un programme d’échange d’étu-diants et d’enseignants entre les universités, lesgrandes écoles et des établissements d’ensei-gnement à travers l’Europe. Un programmedont la grande majorité des étudiants profitentà un moment ou à un autre de leur cursus.

«En général, les étudiants européens ne se de-mandent pas s’ils vont partir étudier à l’étranger,mais plutôt quand et où», précise la consule.

Valeur ajoutéeLes étudiants québécois n’auraient donc pas

la même culture de la mobilité que leurs homo-

logues français. Mme Haguenauer avance no-tamment l’idée que le territoire québécois esttellement vaste que, pour un étudiant de Sept-Îles, venir étudier à Québec peut déjà semblerêtre de la mobilité. Elle souligne également quele modèle d’affaires des universités, qui reçoi-vent des subventions en fonction du nombred’élèves inscrits, peut faire en sorte qu’elles hé-sitent à laisser partir ceux-ci…

Ça ne semble cependant pas être le cas ducôté de l’Université Laval. Pour expliquer ceplafond que son établissement rencontre, Ni-cole Lacasse évoque quant à elle à la fois unecrainte de la part des étudiants et des jeuneschercheurs de ne pas pouvoir valoriser ce par-cours, de manquer de ressources financièresou de ne pas retrouver leur place dans leur la-boratoire à leur retour, et un manque de straté-gie de la part du Canada.

« Le Québec encourage [les séjours à l’étran-ger] avec des bourses, indique-t-elle. Mais au ni-veau du fédéral, franchement, ça pourrait êtrelargement mieux. »

Quant à savoir si ces cursus bidiplomantssont un atout dans un CV, les deux femmes ensont persuadées. Elles évoquent bien sûr lesnouvelles connaissances acquises, la capacitéd’adaptation également, le développement decompétences en ce qui a trait à la résolution deproblèmes notamment. Mais elles insistentaussi sur les nouvelles approches, les nouvellesperspectives avec lesquelles ces étudiants sontdésormais capables de composer.

« Beaucoup d’entreprises d’ici travaillentavec la France, quand elles ne sont pas toutsimplement françaises, souligne Laurence Ha-guenauer. Les étudiants qui par tent enFrance reviennent avec une double culture.C’est forcément un atout. »

« Il y a des bénéfices mesurables, note quant àelle Mme Lacasse. Nous n’avons pas d’études ca-nadiennes sur le sujet, mais il est prouvé, en Eu-rope, que les étudiants qui bougent obtiennent demeilleures moyennes à leurs examens, qu’ils ontun meilleur taux de placement et de meilleurs sa-laires après plusieurs années. »

Expérience enrichissanteDe quoi sans doute réjouir Jean-Sébastien

Boisvert, étudiant en post-doc à l’Institut natio-nal de la recherche scientifique (INRS), quicherchera du travail d’ici quelques mois. Celauréat d’un des Prix de thèse en cotutelle, par-rainés par le consulat général de France àQuébec et le ministère des Relations interna-tionales et de la Francophonie du Québec, re-mis lors des Jour nées de la relève en re-cherche de l’Acfas, a réalisé son doctorat enphysique sous une cotutelle de l’Université deMontréal et de celle de Perpignan, en France.Une expérience qu’il referait sans l’ombred’un doute… même si, lorsqu’il a appris qu’ildevrait quitter le Québec pour poursuivre sesétudes, il n’a pas sauté de joie.

« Je n’ai pas cherché à bouger, avoue-t-il. Mondoctorat était en cotutelle, je n’ai donc pas eu lechoix. Sur le plan de mes recherches, ç’a été une

grande chance parce que j’ai pu ainsi travailleravec des équipes qui avaient des expertises com-plémentaires dans mon domaine, le plasma.Deux manières différentes de travailler et d’abor-der les problèmes. J’ai aussi eu l’occasion de voya-ger en Europe pour assister à des conférences.Mais pour ce qui est de l’organisation et de la pa-perasse, ç’a été très lourd et je regrette de ne pasavoir été plus soutenu par mon établissement.»

Si elle admet qu’on peut toujours faire mieux,Nicole Lacasse croit quant à elle que l’Univer-sité Laval est bien rodée de ce côté-là.

« Nous organisons des séances d’informationsur la mobilité internationale, puis des forma-tions pré-dépar t, indique-t-elle. Une fois surplace, l’étudiant n’est pas laissé à lui-même. Et àson retour, un suivi est fait pour “débriefer” etveiller à sa réadaptation. Nous avons égalementmis en place des cellules qui s’assurent de leur sé-curité lorsqu’ils sont à l’étranger. Lorsqu’un évé-nement survient, nous cherchons à savoir où ilssont. En ce moment, nous nous penchons sur lesouragans. Cet été, nous avions 15 étudiants auBurkina Faso [un attentat dans la capitale, Oua-gadougou, y a fait 19 morts et 21 blessés]. Nousavons tout de suite fait le suivi. »

RéseautageLa France a quant à elle mis en place un opé-

rateur, appelé Campus France, et ouvert 200espaces et antennes dans le monde afin d’aiderles étudiants étrangers à venir en France. L’und’eux se trouve à Montréal. Tous les étudiantscandidats au dépar t dans un établissementd’éducation supérieure en France peuvent ytrouver de l’information et du soutien.

« On y présente le fonctionnement de l’univer-

sité, les dif férentes filières, le financement, lesbourses également, puisque la France en of freaux étudiants étrangers, explique LaurenceHaguenauer. Puis, lorsque le projet est plusabouti, on aide les étudiants à constituer leurdossier en vue d’obtenir leur visa. Enfin, avantle départ, on organise des sessions d’informa-tion sur la vie étudiante et le quotidien enFrance pour qu’ils ne soient pas trop perdus àleur arrivée sur leur campus. »

Campus France se rend également dans lesuniversités québécoises pour y tenir desséances d’information. Les Journées de la re-lève en recherche sont aussi une belle occa-sion. Une représentante de l’espace montréa-lais y a d’ailleurs animé un atelier, aux côtésdu ser vice des af faires internationales del’Université Laval.

C’était l’occasion de promouvoir la mobilitéétudiante et de répondre à toutes les questions.Et d’évoquer notamment l’importance du ré-seautage.

« Pour faire carrière tant à l’université qu’enentreprise, le réseautage est aujourd’hui primor-dial, souligne Nicole Lacasse. Avoir fait unepartie de ses études à l’étranger, c’est s’assurerd’avoir des contacts dans le pays dans lequel vousavez étudié, mais aussi partout dans le monde,car il y avait cer tainement d’autres étudiantsétrangers dans votre laboratoire. »

« Nous favorisons la rencontre entre les an-ciens élèves passés par nos espaces partout dansle monde, ajoute Mme Haguenauer. Nous per-mettons donc la connexion entre des personnesqui souvent accèdent à des responsabilités im-portantes dans leurs pays respectifs. C’est unevéritable opportunité. »

Quelque 1500 étudiants québécois fréquentent une université française chaque année. Un

nombre que le Québec comme la France aimeraient bien voir augmenter, mais certaines ré-

sistances font en sorte qu’un plafond semble être atteint. Plusieurs des acteurs de la mobi-

lité étudiante étaient présents ces deux derniers jours aux Journées de la relève en re-

cherche pour tenter de faire sauter les verrous.

ISTOCK

Chaque année, entre 900 et 1000 étudiants de l’Université Laval poursuivent leur cursus à l’étranger.