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REPUBLIQUE DU BENIN ------- FRATERNITE – JUSTICE – TRAVAIL ------- CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL ------- QUATRIEME MANDATURE ------- COMMISSION DU DEVELOPPEMENT RURAL ET DE L'ENVIRONNEMENT ------- Sur le thème : Adopté par la plénière en sa séance du 22 décembre 2011 LA DEFORESTATION AU BENIN : ENJEUX ET PERSPECTIVES

OLOUFADE Oumorou. rapport

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REPUBLIQUE DU BENIN -------

FRATERNITE – JUSTICE – TRAVAIL

-------

CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL -------

QUATRIEME MANDATURE -------

COMMISSION DU DEVELOPPEMENT RURAL ET DE L'ENVIRONNEMENT -------

Sur le thème :

Adopté par la plénière en sa séance du 22 décembre 2011

LA DEFORESTATION AU BENIN : ENJEUX ET

PERSPECTIVES

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COMPOSITION DE LA COMMISSION DU DEVELOPPEMENT RURAL ET

DE L'ENVIRONNEMENT

(Commission n° 2)

N°d'ordre Conseillers Fonctions

01 Emmanuel TIANDO Président

02 Nestor NINKO Premier Rapporteur

03 Noubayé HOUNKPOSSI Deuxième Rapporteur

04 Michel BOKO Membre

05 Philippe CAPO-CHICHI Membre

06 Tabé A. GBIAN Membre

07 Vincent KOBA Membre

08 Arouna O. LAWANI Membre

09 Abdoulaye MAMA DJIMA Membre

10 Pascal TODJINOU Membre

Personnel d’appui

01 Julien HODIGUE Assistant

02 Alain ZOULIN Assistant

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SOMMAIRE PAGES Sigles et abréviations…………………………………………………….....................5

Introduction………………………………………………………………………………..6

I - Objectifs de l’étude……………………………………………………………………8

1.1- Objectif général……………………………………………………………..........8 1.2- Objectifs spécifiques………………………………………………………………8 II - Démarche méthodologique…………………………………………………………8 2.1-Elaboration des termes de référence (TDR)…………………………………..8 2.2-Identification des personnes ressources et élaboration du calendrier

des auditions………………………………………………………………………..9

2.3- Visites de terrain…………………………………………………………………10 2.4- Recherche et revue documentaires………………………………………….10 .

III- Généralités sur le patrimoine forestier béninois ……………………………11

3.1- Typologie et fonctions des forêts………………………………………………11

3.1.1- Typologie des forêts……………………………………………………………11

3.1.2- Fonctions des forêts…………………………………………………………..11

3.2-Cadre juridique et institutionnel régissant le patrimoine forestier……14 3.2.1- Le cadre juridique …………………………………………..………………..14

3.2.2- Le cadre institutionnel……………………………………………………….15 IV- Etat des lieux de la déforestation au Bénin…………………………………..16

4.1- Les manifestations de la déforestation………………………………………16

4.1.1- La disparition du couvert végétal………………………………………….16

4.1.2- La disparition de la faune …………………………..………………………18

4.1.3- Situation géographique des zones les plus marquées par la

déforestation……………………………………………………………………19

4.1.4- Les statistiques en matière de coupe forestière………………………..19

4.2- Les causes de la déforestation…………………………………………………21

4.2.1- Les causes directes.…………………………………………………………..21

4.2.2- Les causes indirectes…………………………………………………………24

4.2.3- Autres causes……………………….………………………………………….25

4.3- Les acteurs de la déforestation……………………………………………….27

4.3.1- Les acteurs directs……..……………………………………………………..27

4.3.2- Les acteurs indirects……..…………………………………………………..27

4.4- Impacts de la dégradation du couvert végétal…………………………….27

4.4.1- Les impacts écologiques……………………………………………………..27

4.4.2- Les impacts économiques……………………………………………………28

4.4.3- Les impacts sociaux…………………………………………………………..29

4.4.4- Les impacts sanitaires………………………………………………………..30

4

4.5- Evaluation des mesures de protection des ressources forestières……30

4.5.1- La mise en place des aires protégées……………………………………..30

4.5.2- Les reboisements………………………………………………………………31

V- Mesures préconisées pour une gestion durable des ressources

forestières………………………………………………………………………………31

5.1- A court terme……………………………………………………………………..32 5.2- A moyen et long termes…………………………………………………………33 Conclusion…………………………………………………………………..................34

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SIGLES ET ABREVIATIONS

CENAGREF : Centre National de Gestion des Réserves de Faune

CENATEL : Centre National de Télédétection et du suivi écologique

CES : Conseil Economique et Social

CERF : Centre d’Etude, de Recherche et de Formation Forestière

DGFRN : Direction Générale des Forêts et des Ressources Naturelles

ONAB : Office National du Bois

SNAFOR : Société Nationale des Forêts

TDR : Termes De Référence

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INTRODUCTION

Les forêts comptent parmi les écosystèmes les plus riches et les plus

utiles de la planète, abritant plus de 50 % de la biodiversité terrestre. Les

ressources forestières constituent donc une composante majeure de

l’environnement.

Maillons essentiels de la chaîne de la vie, elles jouent un rôle crucial

dans le cycle de l'eau, la régulation des climats et l'exploitation des bois pour

divers usages. Elles constituent un enjeu d'avenir pour les pays par leur

potentiel écologique, économique et social.

Selon une étude réalisée par Messieurs Gominan Ibrahim MAHAZOU,

Mahouna TCHIWANOU et Benoît AVONOMADEGBE (2004), Ingénieurs des

Eaux, Forêts et Chasse, le Bénin a un couvert végétal modéré, d’environ

42%, principalement composé de Tectona grandis. Mais, la majorité des

terres restantes est classée dans la catégorie <<autres terres boisées>>. Plus

de 2% de la superficie totale des terres sont protégés dans deux parcs

nationaux et trois zones cynégétiques (dont le Parc transnational W et les

autres zones officiellement protégées).

Avec un taux d’accroissement de la population de l’ordre de 3,2 %

(INSAE, 2004) et ses corollaires d’augmentation en besoins de tous genres à

satisfaire, les formations forestières sont sous la pression de plus en plus

forte de l’agriculture, de l’élevage, de l’exploitation forestière et de

l’urbanisation (FAO, 2005). Ces pratiques conduisent à une destruction

sauvage et anarchique du couvert forestier y compris les forêts classées et

forêts dites sacrées, jadis protégées et à la disparition de milliers d’espèces

qu’elles hébergent. Le taux de dégradation du couvert forestier à l’échelle

nationale est estimé à 70.000 hectares par an (FAO, 2002). Ce taux national

du recul du couvert forestier pourrait cacher de profondes disparités selon

les régions.

Aujourd’hui, ces forêts sont dans un état de dégradation avancée

mettant ainsi en péril la stabilité des écosystèmes et entrainant de fait le

phénomène de la déforestation dans notre pays.

Or, les spécialistes estiment que 20% des gaz à effet de serre émis

dans l’atmosphère proviennent de la déforestation.

7

C'est donc un phénomène qui devient de plus en plus un fléau dans

notre pays.

A cet égard, il suffit de circuler dans les différentes localités du pays

pour constater cette dégradation progressive du couvert forestier.

Il suffit aussi de se rendre compte de l’ampleur que prend l’exportation

du bois par les multinationales, entrainant de fait des coupes sauvages de

bois notamment les espèces les plus rares et à longue durée de croissance,

lesquelles, parfois, de surcroît disposent de vertus thérapeutiques.

Paradoxalement, on observe un faible renouvellement de ces forêts

surtout en ce qui concerne les essences rares et à longue durée de

croissance.

Au total, la dégradation forestière tient à deux

phénomènes fondamentaux : l’exploitation abusive des forêts à des fins agro-

pastorales, la coupe sauvage des ligneux à des fins commerciales.

La survie de l’homme dépendant presqu’entièrement de la nature, la

dégradation du patrimoine forestier béninois ne peut que susciter des

inquiétudes. C'est pourquoi, le Conseil Economique et Social (CES), dans

son rôle de veille citoyenne a abordé le sujet à travers les questionnements

ci-après:

- quelles sont les manifestations de la déforestation au Bénin ?

- quelles sont les réelles causes de la déforestation au Bénin ?

- quels sont les impacts sociaux, sanitaires, économiques,

environnementaux et culturels induits par la déforestation au

Bénin?

- quelles sont les conditions des échanges de nos ressources

forestières avec l’extérieur ?

- toutes les ressources nationales doivent-elles faire l’objet de

transaction au risque de ne plus rien disposer pour nous-mêmes et

pour la postérité?

- que faire pour garantir la pérennité du patrimoine écologique

national ?

8

Ces interrogations traduisent réellement la pertinence et l’opportunité

du thème et amènent à préciser d’abord les acteurs et les mécanismes de la

déforestation au Bénin, à analyser ensuite les impacts sociaux, sanitaires,

économiques et environnementaux induits, afin d’en indiquer les approches

de solution.

C’est dans la recherche des solutions à proposer aux gouvernants par

rapport à ce problème préoccupant que le CES s’est auto saisi du thème

‘’ la déforestation au Bénin : enjeux et perspectives’’.

I. OBJECTIFS DE L'ETUDE

L'objectif général et les objectifs spécifiques du sujet d'auto saisine

sont définis ainsi qu'il suit :

1.1- Objectif général : Contribuer à une meilleure protection des

ressources forestières du Bénin.

1.2- Objectifs spécifiques

- Faire l’état des lieux du phénomène de la déforestation;

- Identifier les causes, les acteurs et les mécanismes de la

déforestation;

- Cerner ses impacts sociaux, sanitaires, économiques et

environnementaux ;

- Apprécier la réglementation en vigueur ;

- Proposer des approches de solutions pour assurer la protection et

la pérennité des forêts et de l’environnement.

II. DEMARCHE METHODOLOGIQUE

La démarche méthodologique adoptée lors de l'étude du sujet d'auto-

saisine a comporté les étapes suivantes :

2.1- Elaboration des termes de référence (TDR)

De riches et fructueux débats menés en plénière et au cours des

travaux en commission ont permis aux conseillers d’avoir un éclairage plus

approfondi sur le thème, de définir les objectifs de l’étude et d'élaborer les

TDR qui ont été communiqués aux personnes ressources auditionnées.

9

2.2- Identification des personnes ressources, élaboration et mise en

œuvre du calendrier d'audition

Pour bien cerner les contours du sujet d’auto saisine afin d’en avoir

une compréhension plus approfondie, cinq (5) personnes ressources ont été

identifiées et programmées pour être auditionnées. Elles ont toutes répondu

favorablement. Les auditions se sont déroulées conformément au tableau ci-

après :

Tableau n°1: Calendrier d'audition des personnes ressources.

Dates Heures Personnalités invitées Thèmes exposés Lieux

10 octobre

2011

10h 15

à

11h 30

Monsieur WOROU Laurent,

ancien Directeur des Eaux et

Forêts

La déforestation au Bénin:

état des lieux et

perspectives;

Salle de

Commission

n° 2

11 octobre

2011

10h 15

à

10h 35

Monsieur COVI Célestin,

Directeur des Politiques, du

Suivi et de Contrôle de

l’Exploitation Forestière au

Ministère en charge de

l’Environnement

Cadre juridique et

institutionnel de la gestion

du patrimoine

forestier au Bénin

Salle de

Commission

n°2

12 octobre

2011

10h 15

à

11h 30

Madame Ernestine

ATANASSO, Directrice

Générale du Commerce

Extérieur

L’exportation des produits

forestiers au Bénin : enjeux

et

Perspectives

Salle de

Commission

n°2

13 octobre

2011

10h 15

à

11h 30

Monsieur Brice SINSIN,

Professeur Titulaire à la

faculté des Sciences

Agronomiques

Les causes et les impacts

de la déforestation au Bénin

Salle de

Commission

n° 2

14 octobre

2011

10h 15

à

11h 30

Monsieur DJOGBENOU

Pascal, Ingénieur des Eaux,

Forêts et des Ressources

Naturelles

La déforestation au Bénin:

perspectives pour une

meilleure gestion des

ressources forestières au

Bénin

Salle de

Commission

n° 2

Source : Travaux en commission

10

2.3- Visites de terrain

Pour que l’étude du sujet d’auto-saisine puisse refléter la réalité et

l’ampleur du phénomène, les Conseillers et Assistants de la Commission n°2

ont effectué du 03 au 07 octobre 2011, des visites de terrain dans les

Départements du Zou-Collines (Communes de Bantè, de Djidja et de

Zogbodomey), de la Donga (Commune de Bassila) et du Borgou-Alibori

(Communes de N'dali, de Gogounou, de Kandi et de Banikoara) afin de tenir

des séances de travail avec les acteurs des ressources forestières et de visiter

certaines forêts de ces localités.

Deux groupes ont été constitués à cet effet. Le premier s’est rendu

dans les Départements du Zou-Collines et de la Donga et le second dans

ceux du Borgou et de l’Alibori.

Les visites sur le terrain ont permis de mieux cerner l'étendue du sujet

et de constater que la déforestation est devenue une calamité face à laquelle

notre pays doit réagir très vite pour arrêter les dégâts et offrir une chance à

la promotion d’un développement harmonieux et durable.

2.4- Recherche et revue documentaires

La recherche documentaire sur les différents aspects du sujet s’est

appuyée sur :

- les archives du centre de documentation ‘’Sévérin AKANDO’’ du

Conseil Economique et Social ;

- les recherches sur site internet ;

- les différents supports de communication produits par les personnes

ressources auditionnées et enfin ;

- les investigations individuelles des conseillers.

La revue documentaire a permis de tirer l'essentiel des informations

qui ont servi à rédiger le présent rapport.

11

III- GENERALITES SUR LE PATRIMOINE FORESTIER BENINOIS

Une forêt est une étendue boisée, relativement dense, constituée d'un

ou de plusieurs peuplements d'arbres et d'espèces associées.

La forêt est aussi un milieu de vie et une source de revenus pour

l'homme. Elle abrite la faune sauvage et autres ressources biologiques et

exerce des effets bénéfiques sur le milieu naturel (sol, climat, biodiversité,

régime des eaux ...).

Les forêts au Bénin sont de divers types et remplissent plusieurs

fonctions.

3.1- Typologie et fonctions des forêts

3.1.1- Typologie des forêts

Au Bénin, sur une superficie de 112 622 km2, le taux du couvert

végétal est estimé en 2005 à 76 700 km2, soit 68,10% de la superficie du

territoire (Image Lansat TM). De nos jours, la couverture forestière du

domaine classé de l’Etat est d’environ 27 000 km2, soit 19% de la superficie

du Bénin. Elle comprend 48 forêts classées (1 436 500 ha), deux parcs

nationaux et trois zones cynégétiques (1 263 000 ha), 4 périmètres de

reboisement (500 ha).

Les différents types de formations forestières au Bénin se présentent

ainsi qu’il suit :

- la forêt dense sèche ;

- la forêt claire et savane arborée ;

- les savanes arborées et arbustives ;

- les mosaïques cultures - jachères

- la steppe et la prairie ;

- les plantations forestières ;

- les formations forestières édaphiques.

3.1.2- Les fonctions des formations forestières

Elles sont aussi nombreuses, importantes que diverses. On en

distingue :

12

A- Les fonctions écologiques

Le couvert végétal présent sur les terres exploitées les protège contre

toutes les formes d’érosions (hydrique, éolienne et les réchauffements). Le

rôle de l’arbre n’est plus à démontrer dans la pédogénèse (formation,

maintien et entretien de la structure des sols de culture). L’arbre nourrit les

plantes cultivées en faisant remonter à la surface du sol des matières

nutritives élaborées (la sève). Il participe à la formation de la matière

organique (composante essentielle de la production des engrais).

Ainsi, les forêts ont un rôle essentiel et important de préservation de la

diversité biologique, de lutte contre la sécheresse et la désertification, la

protection des bassins versants et du sol, la séquestration et la réduction

des gaz à effet de serre. Le couvert forestier permet également le

développement des activités pastorales en palliant au caractère aléatoire du

tapis herbacé.

B- Les fonctions alimentaires et économiques

Les forêts jouent un rôle important dans l’alimentation et le

développement économique du Bénin.

Ainsi, les produits forestiers non ligneux participent pour une large

part à l’alimentation des populations (fruits, champignons, graines

oléagineuses, légumes,…).

L’essentiel de l’énergie domestique est fourni par le bois.

Les formations forestières fournissent des produits ligneux (bois

d’œuvre, bois de service) pour les industries, l’artisanat, le transport, le

commerce. L’exploitation et la commercialisation de ces produits participent

à la formation du PIB à hauteur de 6%.

A titre d’exemple, les parcs nationaux constituent des ressources

naturelles pour l’éco-tourisme.

C- Les fonctions sociales des formations forestières

L’exploitation des ressources forestières crée des emplois à de milliers

d’acteurs que sont des manœuvres utilisés pour la production des plants, la

conduite et l’entretien des pépinières , les travaux d’aménagement des forêts,

les travaux de coupe, de débardage d’arbres, de manutentions, de transport

13

et de transformation de bois. Des revenus substantiels distribués permettent

aux différents acteurs de vivre et de satisfaire leurs besoins d’alimentation,

de scolarisation de leurs enfants, de se soigner et de se loger décemment.

Les produits de cueillette (fruits, feuilles, viande, miel, champignon etc.)

fournis par les formations forestières participent à l’alimentation et à la

nutrition des populations rurales et urbaines.

D- Les fonctions culturelles, récréatives assurées par les formations

forestières

Les forêts sont le siège des rites traditionnels des communautés

locales en abritant des cérémonies initiatiques.

En effet, l’espace défriché pour la culture porte des peuplements

d’arbres dont la composition, la densité, le mode d’utilisation sont chargés

de signification. Par sa composition et par le rôle qui lui est assigné, le

peuplement arboré de l’espace agricole apparait comme la révélation de la

stratégie que chaque société conduit à l’égard du milieu où elle est insérée.

Les forêts et arbres sacrés représentent des symboles cultuels.

A l’intérieur des forêts sacrées des rites d’initiation sont pratiqués. Les

forêts des divinités « oro » sont encore très respectées aujourd’hui.

Par ailleurs, dans les centres urbains, des espaces verts sont créés

pour le loisir, la distraction et le repos.

E- Les fonctions de sécurité et de protection séculaire des formations

forestières

Il s’agit des fonctions de défense directement liées autrefois aux

périodes et aux situations d’insécurité. Lorsque le couvert forestier présente

une densité suffisante et qu’il est bien protégé et enrichi, il est perçu non

seulement comme un refuge contre les razzias, les guerres tribales et autres

incursions des populations ennemies mais aussi comme un centre de

protection des formations forestières.

Pour parvenir à une conservation progressive des formations

forestières du pays, l’Etat, les collectivités publiques, les organisations de la

14

société civile, les communautés rurales ont pris des mesures parmi

lesquelles figure la mise en place de cadres juridique et institutionnel.

3.2- Cadres juridique et institutionnel régissant le patrimoine forestier

3.2.1- Le cadre juridique

Le cadre juridique de la gestion des forêts est constitué par des lois,

des décrets et des arrêtés.

Au titre des lois, nous citerons :

- la loi 93-009 du 02 juillet 1993 portant régime des forêts en

République du Bénin ;

- la loi 2002-16 du 18 octobre 2004 portant régime de la faune en

République du Bénin ;

Ces lois disposent des décrets d’application qui sont :

- décret n° 96-271 du 02 juillet 1996 portant modalités d’application de

la loi 93 -009 du 02 juillet 1993 ;

- décret n° 20011-374 du 28 mai 2011 portant modalités de

conservation, de Développement et de Gestion Durable de la Faune et

de ses Habitats en République du Bénin.

A ces décrets d’application s’ajoute le décret n° 2005-708 du 17

novembre 2005 portant modalités d’exploitation, de transport, de commerce,

d’industrie et de contrôle des produits forestiers en République du Bénin.

Dans le cadre de la perception des redevances et taxes,

l’administration forestière s’appuie sur les lois des finances 2007 et 2008.

Dans le cadre de la mise en œuvre de ces différents textes, des arrêtés

ont été également pris. Et nous pouvons en citer quelque uns notamment :

- l’arrêté interministériel n° 0053/MEPN/MIC/DC/SGM/DGFRN/DGCE du

04 septembre 2007 portant modalités d’importation et d’exportation

du bois en République du Bénin ;

- l’arrêté interministériel n° 0036/MEPN/MEF/DC/SGM/DGFRN/SA du

16 mai 2008 portant modalités de recouvrement et de répartition des

taxes et redevances perçues en matière d’exploitation, de transport, de

commerce, d’industrie et de contrôle des produits forestiers en

République du Bénin ;

15

- l’arrêté interministériel n°0040/MEPN/MDGLAAT/DC/SGM/DGFRN/SA

du 29 juin 2009 déterminant les types, modèles et modalités de

délivrance et de contrôle des coupons de transport du bois en

République du Bénin ;

- l’arrêté interministériel n° 0041/MEPN/MDGLAAT/DC/SGM/DGFRN/SA

du 29 juin 2009 portant condition d’agrément de modalités

d’organisation et de fonctionnement des marchés ruraux de bois.

Enfin, toutes les forêts appartenant au domaine classé de l’Etat disposent

d’arrêté de classement.

Des conventions, des accords et traités internationaux en matière de

conservation, de gestion et de protection de ressources forestières ont été

signés et ratifiés par la République du Bénin.

3.2.2- Le cadre institutionnel

Il regroupe les structures et organismes chargés de la gestion des

ressources forestières au Bénin. Il s’agit de :

- la Direction Générale des Forêts et des Ressources Naturelles (DGFRN)

dont le rôle se limite à l’élaboration et à la veille de la mise en œuvre

de politique, stratégie et planification forestières, à l’édiction des règles

et normes d’utilisation et d’exploitation, à la mise en place d’outils de

gestion durable, de contrôle et de suivi de leur mise en œuvre.

- l’Office National du Bois (ONAB) qui assure des fonctions de gestion

effective des ressources forestières en collaboration avec les

collectivités territoriales décentralisées. Son rôle s’élargit aux activités

d’aménagement des forêts naturelles ;

- le Centre National de Gestion des Réserves de Faune (CENAGREF) qui

gère les parcs nationaux et les zones cynégétiques ;

- le Centre National de Télédétection et du suivi écologique (CENATEL)

qui est chargé du suivi de l’évolution des ressources naturelles ;

- le Centre d’Etude, de Recherche et de Formation Forestière (CERF),

nouvellement créé qui devra assurer un renforcement continu des

capacités des agents forestiers ;

16

- les Collectivités Territoriales Décentralisées dont le rôle est d’assurer

la gestion durable des ressources naturelles ;

D’autres structures non moins importantes sont concernées par la

gestion des forêts. On peut citer la Direction Générale du Commerce

Extérieur, le Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche, les

collectivités locales.

Après la description des ressources forestières et des cadres juridique

et institutionnel qui les régissent, il convient d’examiner maintenant les

caractéristiques du phénomène de la déforestation et ses conséquences au

Bénin.

IV- ETAT DES LIEUX DE LA DEFORESTATION AU BENIN

Il sera question de :

- apprécier les manifestations de la déforestation au Bénin;

- identifier les causes et les acteurs de la dégradation des ressources

forestières ;

- identifier les impacts écologiques, socio-économiques et sanitaires induits

par la déforestation ;

- évaluer les dispositions déjà prises par l'Etat béninois pour assurer la

protection des ressources forestières.

4.1- Les manifestations de la déforestation

Au Bénin, la déforestation se manifeste à travers la disparition des

essences de valeur et de la faune. La situation géographique des zones les

plus marquées et les statistiques en matière de coupe forestière en sont des

indices palpables.

4.1.1- La disparition du couvert végétal

Depuis le début des années 70, on observe une disparition progressive

de plusieurs essences de « valeur » pourvoyeuses de bois d’œuvre. Au

départ, par exemple, les consommateurs préféraient le bois d’iroko (Milicia

exelsa) à tous les autres types de bois d’œuvre. Par la suite, il est devenu

difficile de satisfaire la demande des consommateurs en ce bois. En

17

l’absence d’une réaction prompte du service forestier, les usagers se sont

rabattus sur le bois de Khaya senegalensis (caïlcédrat). Constatant à

nouveau au milieu des années 80 que la nouvelle préférence (Khaya

senegalensis) devenait rare, ils se sont rabattus cette fois-ci sur le bois de

Isoberlinia doka, puis sur ceux de Afzelia africana (lingué), de Pterocarpus

erinaceus (vène) et de Anogeissus leiocarpa (bouleau d’Afrique).

Quelques exemples peuvent être donnés aussi sur les forêts classées

soumises au régime restrictif du droit d’usage. Il s’agit des forêts classées de

Guéné, de l’Atlantique, de Dogo-Kétou, d’Agoua, de l’Alibori Supérieur, des

trois rivières, de l’Ouémé supérieur, de Nonsinansou … qui sont envahies

par les exploitants forestiers et n’existent aujourd’hui que de nom. Les taux

d’occupation de la plupart de ces forêts classées par les cultures vont de 25

à 40 %. Par exemple, à N’dali, dans l’arrondissement de Bori situé à 30 km,

le spectacle est ahurissant.

De même, la création de la Zone Franche Industrielle de Sèmè a

contribué à la disparition progressive du périmètre de reboisement de cette

localité. Le même phénomène s’observe en ce qui concerne les périmètres de

reboisement de Parakou et de Natitingou.

Il est aussi courant de remarquer que des exploitants étrangers, avec

la complicité de certains acteurs et personnalités locales ou nationales,

trompent la vigilance des populations en justifiant la coupe des bois par le

besoin de réalisation sociales.

Les espèces forestières de valeur cèdent par conséquent la place à des

espèces à croissance rapide moins intéressantes pour la production de bois

d’œuvre. Sont ainsi en voie de disparition, Milicia exelsa (iroko), Triplochiton

scleroxylon (Samba), Afzelia africana (lingué), Pterocarpus erinaceus (vène),

Khaya senegalensis (caïlcédrat) etc.

Le phénomène nouveau observé est celui de l’extension des espaces

agricoles pour la culture du coton (Photo n°1) et des ignames (Photo n°2)

entraînant de fait une destruction massive des arbres accompagnée de la

production intensive de charbon de bois.

18

Ce phénomène entraine l’apparition de plages de désertification dans

beaucoup de régions du pays (communes de Banikoara, Djidja, Glazoué,

Ouèssè, Bantè etc.).

Une autre manifestation de la déforestation est la régression

significative de la structure diamètrique des arbres dans nos forêts

naturelles à travers l’utilisation de la tronçonneuse détruisant plusieurs

arbres et ne favorisant pas la régénérescence forestière.

Clichés ADJAKPA, 2011

Aujourd’hui, très peu de sujets exploitables ont un diamètre à hauteur

d’homme supérieur à 50 cm. Les diamètres moyens des arbres dans les

différentes formations forestières dépassent rarement 20 cm.

4.1.2- La disparition de la faune

La déforestation entraine également une régression des populations

animales sauvages, élément important de la diversité biologique. Elle prive

par ailleurs le bétail de fourrages aériens qui sont des compléments

alimentaires nécessaires pour l’élevage des bovins, ovins et caprins. La

coupe des mangroves pour la production du sel a des effets dévastateurs sur

la faune aquatique de ces milieux fragiles qui ne disposent plus de frayères.

Ainsi, plusieurs massifs forestiers avec la faune qu’ils contiennent ont

disparu de tout le paysage.

En République du Bénin quelles sont les zones où la déforestation est

intense ?

Photo 1 : Champ de coton installé en pleine forêt dans les trois rivières

Photo 2 : Champ d’igname installé en pleine forêt dans les trois rivières

19

4.1.3- Situation géographique des zones les plus marquées par la

déforestation

La déforestation sévit dans tous les départements du territoire

national.

La partie méridionale du Bénin, est évidemment la plus exploitée en

raison de la pression démographique. Ainsi, en dehors des plantations de

teck à Djigbé, Toffo.., des acacias et eucalyptus à Pahou, des eucalyptus et

filao à Sèmè relevant du domaine de l’Etat et des plantations des

particuliers, les départements de l’Atlantique, du Mono, Couffo, de l’Ouémè

et du Plateau ne disposent que de quelques lambeaux de forêts naturelles

surexploitées.

Le centre du Bénin constitue une zone de transition non seulement

sur le plan géographique mais aussi sur le plan démographique et du

couvert végétal. Il dispose d’une dizaine de forêts classées de petites et

moyennes dimensions. La plus petite est celle de Sètto (1013 ha) et la plus

étendue, celle d’Agoua (63 183 ha). Ces forêts classées et celles des

domaines protégés sont exploitées pour la fourniture de bois d’œuvre, de

service et d’énergie. C’est la cas des communes de Djidja, de Dassa–zoumè,

de Glazoué, de Savè, de Ouèssè et de Bantè où la production du charbon de

bois fait des ravages depuis ces dix (10) dernières années.

Quant à la partie nord du Bénin, elle a toujours fourni à partir de ses

forêts naturelles du bois d’œuvre pour la consommation intérieure et pour

l’exportation. Les massifs forestiers de la région de Bassila, les forêts

classées des monts Couffé de Wari-Maro au niveau des communes de

Tchaourou, de Djougou, celles de l’Ouémé supérieur, de l’Alibori supérieur et

des Trois Rivières, les forêts du domaine protégé des communes de Parakou,

de N’dali, de Kérou Kouandé Pehunco) etc. font l’objet de surexploitation.

4.1.4- Les statistiques en matière de coupe forestière

Des recherches effectuées, il apparait que la Direction Générale des

Forêts et des Ressources Naturelles ne dispose malheureusement pas de

statistiques fiables. Ce qui ne permet pas d’évaluer avec certitude la quantité

de coupes forestières dans notre pays. Les quelques chiffres obtenus sont en

deçà de la réalité comme l’indiquent les tableaux ci-après :

20

Tableau n°2 : Situation des exploitations forestières contrôlées de 2005 à 2009

Année

Désignation

2005 2006 2007 2008 2009

Bois d’œuvre en m3 13 056 16 312

ND

10 299 17 497

Billes en nombre 184 555 152 191 190 640 136 165

Bois de service en nombre

de perches et poteaux 267 521

Perches

777 025

perches

2 900 poteaux

1 756 711 perches

1595303

perches +1060

poteaux

Bois de feu en stères 14 947 45 218 - 57 667

Sacs de 50 kg de charbon 221 736 375 430 659 826 786 571

Palmiers et autres (pieds) 81 465 - 82 211 palmiers +

63 rôniers

73 148 palmiers

+ 29 rôniers

Plantes médicinales,

écorces et éponges

-

- 100 sacs + 600 kg

d’écorces + 39 kg de

racines + 1380 kg

d’éponges

288 sacs

Source : Communication de Monsieur WOROU ; NB : ND = Non disponible

Tableau n°3 : Quantité des produits exploités par départements en 2010

Désignation Départements

PBF II

ONAB

Total

Ata/Don

Atl/Lit

Bor/Ali

Mo/Cou

Oué/Plat

Zo/coll

Bois d’œuvre

sauf teck m3 12 345 56 3091 752 686 6350 - - 23 288

Teck en billes 62304 - 14423 51639 - 279

525

20406 47609

m3

428297

Bois de

service

perche et

poteau

100 138318

4

- 42198 280796 41050 20 - 174734

8

Bois de feu

(stères)

232 22207 1475 180 1861 11243 7811 - 45009

Sacs de

charbon de

bois de 50 kg

45345 - 21902 3121 191447 981227 - - 124304

2

Pieds de

palmier à

huile

7 - - 27086 18018 - - - 45111

Plantes

médicinales

en sacs

71 - - - - - - - 71

Source : Communication de Monsieur WOROU

21

En définitive, les dégâts de la déforestation sont manifestes et

tangibles partout sur le territoire béninois. Cette déforestation inquiétante

est due à une série de causes interdépendantes.

4.2- Les causes de la déforestation

Deux niveaux se dégagent dans la typologie des causes de la

dégradation des ressources forestières : les causes directes et les causes

indirectes. Les causes directes de dégradation du couvert forestier sont les

activités humaines qui touchent directement le couvert forestier en modifiant

sa structure et sa composition. Les causes indirectes sont les facteurs qui

sous-tendent les causes directes.

4.2.1- Les causes directes de la dégradation du couvert forestier

Au Bénin, les principales causes directes de la dégradation du couvert

végétal sont : l’agriculture, l’élevage, l’exploitation forestière non contrôlée, la

carbonisation et les feux de végétation.

A- Agriculture

A l’instar de nombreuses régions d’Afrique, l’agriculture itinérante sur

brûlis est la principale technique culturale au Bénin et demandeuse de

grandes superficies de terres à déficher.

En effet, les défrichements agricoles dénudent le couvert forestier des

espèces ligneuses de toutes tailles. Une fois qu’une parcelle est défrichée, les

arbres et les arbustes qui s’y trouvent sont détruits pour permettre aux

cultures de profiter au maximum de la lumière solaire (Photo n°3). Les

espaces agricoles sont pratiquement dépourvus de ligneux. Contrairement

aux méthodes agricoles traditionnelles qui respectent la capacité de

récupération des sols et du couvert forestier, la culture sur brûlis appauvrit

le sol.

Aussi, l’agriculture extensive procède-t-elle à une réduction

considérable de la diversité au niveau des écosystèmes naturels.

Par ailleurs, certains paysans se confortent dans la monoculture du

coton encouragée par l’Etat et exploitent de vastes espaces même dans les

forêts classées qui normalement ne sont exploitées que sur la base d’un plan

22

d’aménagement. Aujourd’hui, les cinq forêts classées de l’Alibori sont

occupées par les agriculteurs.

B- Elevage

L’élevage extensif, transhumant et non contrôlé est la deuxième cause

principale de dégradation des ressources forestières à travers des émondages

sévères d’arbres ainsi que leur mutilation (Photo n°4). Il s’accompagne de

l’allumage des feux de végétation qui calcinent des arbres quand ils

surviennent tard en saison sèche.

En effet, l’élevage du gros bétail, est essentiellement transhumant avec

environ 1.300.000 têtes de bovins et plus 2.000.000 de têtes

d’ovins/caprins. Chaque année, près de 100 000 têtes supplémentaires de

gros et petits ruminants transhumants en provenance des pays limitrophes

comme le Burkina Faso, le Niger, le Mali et le Nigéria se déversent sur le

territoire béninois provoquant une surcharge du pâturage en saison sèche.

Cette augmentation continuelle et considérable de la charge sur les

pâturages entraîne des conséquences fâcheuses aux plans écologique, socio-

économique et culturel.

Par ailleurs, l’essentiel du fourrage consommé par les bovins en saison

sèche provient essentiellement des espèces fourragères ligneuses. Ainsi, la

strate ligneuse qui constitue l’élément stable du couvert forestier est

sérieusement perturbée. L’élevage des bovins constitue donc une cause

importante de la régression du couvert forestier.

C- Exploitation forestière et la carbonisation

L’exploitation forestière concerne la coupe du bois d’œuvre et du bois

de service (Photo n°5). La carbonisation quant à elle, est la fabrication du

charbon de bois à partir des essences ligneuses.

Ainsi, les exploitations insuffisamment contrôlées et frauduleuses des

ressources forestières sont aujourd’hui une des plus importantes causes de

dégradation des forêts au Bénin. Elles sont en croissance exponentielle dans

le pays cette dernière décennie.

De 2008 à 2010 par exemple, la production de bois d’œuvre a

augmenté de 226%. La production de charbon de bois est passée de 39 300

tonnes en 2009 à 62 500 tonnes en 2010.

23

L’augmentation fulgurante du niveau de l’exploitation des forêts pour

la fourniture du bois d’œuvre est principalement due à la recherche de

satisfaction par les exploitants forestiers de la demande croissante en bois

tropicaux notamment le vène par les industries étrangères. Celle du charbon

de bois est considérée comme une réponse à l’approvisionnement insuffisant

du pays en gaz de cuisine. Les produits forestiers non ligneux (fruits,

feuilles, fleurs, champignons etc.) font aussi l’objet de consommation

courante par les ruraux sans que les données ne soient disponibles et prises

en compte dans les statistiques.

Les exploitants forestiers et les charbonniers coupent les essences de

valeur comme Khaya senegalensis, Pterocarpus erinaceus, Afzelia africana,

Prosopis africana, Burkea africana, Anogeissus leiocarpa et Pseudocedrela

kotchyi.

Ainsi, la recherche effrénée de bois de service, de feu et de fabrication

de charbon est préjudiciable à la survie des populations de certaines espèces

végétales. C’est le cas de Manilkara obovota (wewetin), Rhizophora racemosa

(winto) et de Avicennia africana (kpontin) pour le chauffage de la saumure

dans la vallée du Mono.Par ailleurs, d’importantes menaces pèsent sur le

Triplochiton scleroxylon (Samba) qui subit la mutilation de la part des

populations locales du Sud du pays à cause du culte «Oro» qui y est

fortement pratiqué.

Clichés ADJAKPA, 2011

Photo 3 : Champ de maïs installé en pleine forêt Photo 4 : Champ de coton installé en dans les Trois Rivières pleine forêt dans les Trois Rivières

24

D- Feux de végétation

Les feux de brousse consument toute la végétation comprenant le

couvert forestier et la composante herbacée surtout dans la zone

soudanienne du Bénin. Ces feux sont allumés par les agriculteurs au cours

des défrichements culturaux ou par les chasseurs pour dégager les milieux

giboyeux. Il y a aussi des feux de végétation provoqués sans aucune raison.

4.2.2- Causes indirectes de la dégradation du couvert forestier

Les causes indirectes de dégradation du couvert forestier sont : la

croissance démographique, les changements climatiques et la faible capacité

d’intervention de l’administration forestière exacerbée par l’inefficacité, le

laxisme et la corruption qui sont malheureusement entretenus par les

pouvoirs publics et politiques.

A- Croissance démographique

De façon générale, l'augmentation rapide de la population humaine

entraîne logiquement l'augmentation des divers besoins : nourriture, énergie,

logement, eau, bois et autres biens et services fournis par la végétation. La

satisfaction de ces besoins entraine des menaces sur l’environnement.

Au Bénin, la répartition inégale de la population constitue une cause

prépondérante de la dégradation des ressources forestières.

En effet, sur à peine 10% de la superficie du territoire national dans le

sud–Bénin, vivent 60% d’habitants qui sont à une date récente des

producteurs agricoles et des pêcheurs. La densité moyenne avoisine 500

Clichés ADJAKPA, 2011

Photo 5 : Production de bois d’œuvre en pleine forêt dans les trois rivières

Photo 6 : Elevage non contrôlé en pleine forêt dans les trois rivières

25

habitants au km2, ce qui induit une pression de plus en plus insupportable

sur les maigres ressources forestières résiduelles.

B- Changements climatiques

Les changements climatiques sont une autre cause de modification du

couvert forestier car ils viennent bouleverser le régime des précipitations et

toutes les activités liées à l’exploitation des ressources naturelles. Une baisse

généralisée des précipitations peut induire des changements majeurs du

couvert forestier.

C- Défaillances de l’administration forestière : inefficacité et corruption

Aujourd’hui, force est de constater que le Bénin vit une situation de

laisser-aller dans son administration forestière. Malgré un renforcement

récent des effectifs de l’administration, certains agents forestiers béninois

dont la vocation première est pourtant d’assurer la gestion durable

(protection, conservation, développement et valorisation) des ressources ne

s’acquittent plus convenablement de leur devoir. C’est ainsi que l’on constate

une forte propension à la fiscalisation de la fraude au détriment d’une

politique de protection. Ce qui ouvre la possibilité à toutes les formes de

corruption.

En définitive, les agents forestiers n’assurent toujours pas la

protection de la ressource naturelle, l’appui-conseil au profit des

communautés et collectivités locales, mais plus souvent un rôle de police

forestière sous la forme de constats d’infractions qui leur sont

avantageusement rentables. De fait, dans leur grande majorité, les Maires ne

connaissent pas les Responsables des Sections Communales de

l’Environnement et de la Protection de la Nature de leurs Communes alors

qu’ils sont supposés être leurs conseillers en matière de protection de

l’Environnement et de gestion des ressources naturelles.

4.2.3- Autres causes

Elles ont pour nom : pêche, insuffisances des textes, pression

financière et pression politique.

26

A- La pêche

La pratique de pèche qui consiste à utiliser les acadjas (pièges à

poissons) sur les plans d’eau, entraine un prélèvement excessive des tiges

feuillées d’arbustes dans les formations forestières et jachères arborées.

Cette pratique accélère par ailleurs le comblement des lacs et fleuves.

B- Les insuffisances des textes

Il faut d’abord faire remarquer que la non application de la législation

forestière favorise la déforestation rapide et anarchique.

Ensuite, la loi sur la décentralisation souffre d’un certain nombre de

précisions de telle sorte qu’il existe sur le terrain des conflits d’attribution

entre les Maires et les agents forestiers.

Lors de la visite de terrain effectuée par des Conseillers du CES, les

autorités communales n’ont pas manqué d’évoquer le clair sombre qui

caractérise la loi sur la décentralisation et elles se demandent à qui incombe

la gestion des ressources naturelles en général et les ressources forestières

en particulier et le pouvoir d’arrêter l’exploitation abusive forestière.

En effet, les forestiers dont le rôle est la sauvegarde et la protection de

ces ressources imposent leur véto, ignorent l’autorité des Maires et gèrent les

forêts comme bon leur semble. Devant les incompréhensions et les

différentes approches interprétatives qui caractérisent les textes régissant la

gestion des forêts dans notre pays, les autorités communales se résignent et

subissent les affres de destruction de leurs forêts. En conséquence, les

populations s’en prennent souvent à elles.

C- La pression financière

Il a été aussi constaté sur le terrain que des pressions financières sont

fréquemment exercées par les opérateurs économiques d’origine asiatique

sur l’administration forestière et locale (Maires, Délégués) et surtout sur la

population, qui, du fait de la pauvreté cède à la tentation de l’argent au

détriment de la sauvegarde des ressources naturelles et de l’environnement.

D- La pression politique

Selon les informations recueillies, des cas de pression émaneraient

d’hommes politiques en vue de faciliter l’exploitation forestière à leurs

proches, à leurs amis et à leurs partenaires commerciaux. A titre d’exemple,

27

l’année 2011 aura été dans la partie septentrionale et surtout à Kandi une

année charnière dans la déforestation à cause des élections législatives.

4.3- Les acteurs de la déforestation

On peut distinguer deux groupes à savoir : les acteurs directs et les

acteurs indirects.

4.3.1- Les acteurs directs

Il s’agit de personnes qui dégradent le couvert forestier par leurs

pratiques peu respectueuses de l’environnement, en l’occurrence les

producteurs agricoles, les éleveurs, les pêcheurs, les producteurs de charbon

de bois et de sel, les opérateurs économiques du secteur de l’exploitation du

bois et les braconniers.

4.3.2- Les acteurs indirects

Ils appartiennent à divers systèmes installés et légalisés. Il s’agit des

agents de surveillance, de contrôle et de poursuite des délinquants et

contrevenants en matière de gestion des ressources forestières ; du

personnel des systèmes judiciaires qui banalisent les infractions et délits

forestiers ; des autorités politico-administratives nationales et locales ; des

populations riveraines des massifs forestiers classés et non classés et les

leaders d’opinion.

On constate donc que, ce sont les hommes avec leurs pratiques qui

constituent la cause fondamentale de la déforestation au Bénin. C’est

pourquoi, il est important d’analyser les impacts induits par cette

déforestation.

4.4- Impacts de la dégradation du couvert végétal

Le couvert forestier est une composante majeure du système

environnemental. Sa dégradation aboutit inexorablement à des impacts

écologiques, économiques, sociaux et sanitaires.

4.4.1- Les impacts écologiques

La disparition des essences de valeur est le premier impact de la

déforestation. Au Bénin, les essences de valeur comme Khaya senegalensis,

28

Afzelia africana, Milicia exelsa sont déjà sur la liste rouge des espèces

menacées de disparition.

La déforestation entraine aussi les conséquences écologiques

suivantes : la dégradation du sol, la disparition de la faune sauvage,

l’érosion, les inondations, les modifications diverses du régime des eaux et

du climat, la désertification.

En effet, la déforestation jette les bases d'une érosion hydrique et

éolienne très active accompagnée d'une perte de terres par lessivage. En

saison sèche, en l’absence du couvert forestier, le vent enlève au sol les

éléments constitutifs indispensables à sa structure et sa richesse. En saison

pluvieuse, les eaux des fortes averses entraînent par les éclaboussements et

le ruissellement, la formation de vastes glacis, les ravins, les inondations, les

lessivages et la réduction de l'infiltration.

Les inondations et la dévastation de milliers d’hectares de cultures

sont également une résultante de la déforestation galopante notamment au

niveau des exploitations en forêts galeries ou en aval des terrains

montagneux dans les Départements de l’Atacora et des Collines en

particulier.

A mesure que l’ampleur du déboisement augmente, l’impact sur le

climat se fait ressentir plus fortement. Dans les communes de Karimama,

Matéri, Ouaké, Tanguiéta, Boukombé, Malanville, en période normalement

pluvieuse, on enregistre beaucoup plus de vents très violents dont la force

aurait pu être atténuée par un bon taux de couverture forestière. On a

également des pluies erratiques qui viennent avec beaucoup de retard et se

concentrent sur quelques jours. La pluviométrie est faible (moins de 800

mm) et toute l’eau tombe en une période très courte au lieu de se répartir

sur plusieurs jours par mois, entraînant des inondations dévastatrices.

4.4.2- Les impacts économiques

La satisfaction de la grande partie des besoins économiques des

populations du Bénin est liée aux ressources naturelles dont le couvert

forestier constitue l’une des bases essentielles.

29

A cet effet, l'appauvrissement et la dégradation des sols, la diminution

des ressources halieutiques dans les cours d'eau, la disparition de la faune,

la raréfaction du bois suite à la dégradation de la végétation ont pour

conséquence la paupérisation progressive des populations rurales et

périurbaines. La déforestation constitue donc un véritable frein au

développement des activités économiques telles que l’agriculture, l’élevage, la

pêche, l’exploitation forestière et la chasse.

Par exemple, la baisse locale de la fertilité des sols entraîne la

nécessité pour les agriculteurs, soit de se contenter des rendements décrus

et de récolter moins pour autant d'effort, soit de compenser par le recours à

plus d'intrants et de récolter autant avec plus de dépenses ou plus d'efforts.

Dans les deux cas, la productivité de l'agriculture, qui est un facteur clé du

progrès économique du Bénin est négativement affectée, tant pour le

producteur que pour l'ensemble de l'économie nationale. Il en est de même

des autres activités économiques liées directement ou indirectement aux

ressources naturelles.

L’impact économique immédiat de la déforestation est le

renchérissement du coût des produits forestiers. Par exemple, de nos jours,

le bois d’énergie coûte plus cher. Le sac de 50 kg de charbon est passé de

1.200 F CFA à Cotonou en 1989 à 6.500 F CFA actuellement.

4.4.3- Les impacts sociaux

Les impacts sociaux de la dégradation du couvert forestier touchent à

la fois le milieu rural et le milieu urbain.

En milieu rural, les revenus d’une frange importante de la population

sont assurés par l’exploitation forestière, l’élevage, la carbonisation qui sont

des activités basées sur l’exploitation des ressources végétales. La

dégradation de ces ressources affecte le développement de ces activités, ce

qui a des impacts sur les revenus et par ricochet sur les conditions de vie

des populations rurales.

En milieu urbain, les populations sont souvent atteintes par les

impacts de la dégradation du couvert forestier car les villes sont souvent

30

approvisionnées par le bois d’énergie et le charbon de bois provenant des

milieux ruraux.

Ensuite, la déforestation accélère et envenime les conflits entre les

différents utilisateurs concurrents des ressources naturelles notamment

entre les agriculteurs et les éleveurs, les éleveurs et les exploitants forestiers.

Enfin, la déforestation entraine la migration environnementale. On

parle ainsi des refugiés environnementaux qui sont des populations

déplacées temporairement suite aux catastrophes naturelles comme les

sécheresses, les inondations... Au Bénin, les départements du Zou et des

Collines accueillent un grand nombre d’immigrants provenant des savanes

soudaniennes et ce depuis les années 1940.

4.4.4- Les impacts sanitaires

Au Bénin, pour se soigner, la population fait souvent recours à la

médecine traditionnelle. Or, on constate qu'avec la déforestation, non

seulement les distances entre les lieux de collecte et de consommation des

plantes médicinales s’allongent, mais aussi que certaines essences utilisées

dans le traitement de diverses maladies sont menacées de disparition.

Face aux impacts majeurs de la dégradation du couvert forestier, des

mesures de conservation des forêts ont été prises. Il est donc important

d’évaluer ces mesures afin d’explorer d’autres voies prometteuses de

sauvegarde des ressources forestières.

4.5- Evaluation des mesures de protection des ressources

forestières

La constitution d’aires protégées et le reboisement constituent les deux

grandes mesures prises dans notre pays comme partout ailleurs pour lutter

contre la dégradation de la végétation.

4.5.1- Mise en place des aires protégées

Au Bénin, les catégories d’aires protégées mises en place sont : les

Parcs Nationaux, les zones cynégétiques, les forêts classées et les périmètres

de reboisement.

31

En évaluant ces aires protégées (2005 ; 2010), monsieur DJOGBENOU

Pascal, Colonel des eaux et forêts est parvenu à la conclusion que, tant du

point de vue quantitatif que qualitatif, les résultats ne sont pas à la mesure

des investissements consentis dans les forêts classées par plusieurs

bailleurs de fonds (Banque mondiale, Coopération allemande, Banque

Africaine de Développement) car la gestion de ces aires n’a pas globalement

amélioré les conditions de vie des populations locales et la santé des

écosystèmes forestiers. On peut alors dire que les aires protégées à elles

seules ne peuvent pas arrêter la déforestation au Bénin surtout qu’elles

représentent un faible pourcentage.

4.5.2- Les reboisements

Pour freiner la déforestation et faire face aux besoins croissants en

bois-d’énergie, en bois d’œuvre et en bois de service, les programmes de

reboisement ont été initiés avec le plus souvent l’option des plantations

d’essences exotiques à croissance rapide et à rendement élevé en produits

ligneux. Ces reboisements sont réalisés surtout avec des essences exotiques

telles que Eucalyptus camaldulensis, Acacia auriculiformis, Casuarina

equisetifolia, Tectona grandis au détriment des espèces locales.

Malheureusement, certaines de ces espèces comme les eucalyptus

contribuent à l’appauvrissement des sols.

Au total, les reboisements effectués avec les essences exotiques

conduisent à un déséquilibre écologique et ne permettent pas une

reconstitution des formations forestières sur la base des essences

autochtones.

Que faire pour freiner la déforestation en République du Bénin ?

V- MESURES PRECONISEES POUR UNE GESTION DURABLE DES

RESSOURCES FORESTIERES

Au regard du rythme inquiétant de la déforestation, de l’ampleur et de

la gravité de ses impacts écologiques, économiques et sociaux et à la lumière

des résultats mitigés obtenus par les programmes et projets de gestion des

32

ressources forestières, il importe d’explorer de nouvelles approches de

gestion des ressources forestières. A cet effet, le Conseil Economique et

Social préconise les mesures ci-après:

5.1- A court terme

1- suspendre par voie réglementaire l’exploitation abusive des ressources

forestières sur toute l’étendue du territoire en attendant une étude

conséquente;

2- faire intégrer dans le nouveau cadre juridique sur le code forestier

actuellement en cours d’élaboration dans notre pays, les

recommandations issues de la présente étude ;

3- mettre en place une commission ad hoc chargée de faire le point de la

situation de la déforestation sur toute l’étendue du territoire ;

4- accélérer la mise en place du fonds de reforestation ;

5- apporter un appui financier significatif à la recherche en génétique

pour les espèces à croissance lente et pour les espèces en voie de

disparition ;

6- faire respecter la règlementation en matière de gestion des ressources

naturelles et les textes en vigueur par tous les acteurs intervenant

dans l’exploitation des ressources forestières;

7- clarifier et actualiser la loi sur la décentralisation en matière de

gestion des ressources naturelles en mettant l’accent sur la gestion

décentralisée et communautaire des forêts et sur les rôles des parties

prenantes;

8- amener les agents forestiers à effectuer des visites de terrain pour

évaluer l’état des essences de valeur avant toute exploitation des

ressources forestières dans les forêts classées dotées de plans

d’aménagement ;

9- sensibiliser les populations à travers les comités villageois et les

associations de développement sur les impacts négatifs de la

dégradation des ressources forestières ;

10- informer et sensibiliser tous les acteurs du milieu judiciaire sur la

réglementation en matière de gestion de ressources forestières en

33

mettant un accent particulier sur leurs responsabilités dans le

jugement des mis en cause dans l’exploitation forestière sauvage ;

11- punir sévèrement tout acte de destruction du patrimoine naturel

commis par des individus mal intentionnés;

12- amener les Institutions en charge de la gestion des ressources

naturelles à exercer effectivement et pleinement leurs fonctions ;

13- prendre des mesures d’urgence pour subventionner le gaz domestique

afin d’amoindrir la carbonisation qui détruit les forêts ;

14- encourager la culture intensive dans les zones de production de coton

par des engrais organiques ;

15- faire élaborer les statistiques fiables et exhaustives en matière de

coupe forestière par la Direction Générale des Forêts et des Ressources

Naturelles.

5.2- A moyen et long termes

1- définir par un arrêté du Ministre en charge des forêts un nouveau

mécanisme de contrôle de l’exploitation forestière ;

2- rendre le secteur agricole performant à travers la promotion et la

diversification des filières agricoles;

3- élaborer un programme national intensif de reboisement en mettant

l’accent sur les essences menacées d’extinction et aussi sur celles à

croissance rapide pour satisfaire les besoins immédiats en bois

d’œuvre, en bois de service et en bois-énergie ;

4- mettre en place un système de suivi des plants après les opérations de

reboisement ;

5- inscrire toutes les mesures de sauvegarde des ressources forestières

dans le cadre général de l’aménagement du territoire.

34

CONCLUSION

La dégradation des ressources forestières qui se manifeste par la

réduction du couvert végétal, la disparition des essences ligneuses de valeur

et la disparition de nombreuses espèces fauniques forestières a des

conséquences à la fois écologique, économique, sociale et sanitaire. Plusieurs

causes sont à la base de cette dégradation du couvert forestier au Bénin. Il

s’agit entre autres de l’agriculture, de l’exploitation forestière anarchique, de

la carbonisation, de l’élevage, des feux de brousse incontrôlés, de la

croissance démographique, du régime foncier, de l’inefficacité et de la

déliquescence de l’administration forestière.

Les actions sectorielles de conservation des ressources forestières à

travers la création, l’aménagement et la gestion des aires protégées ainsi que

le reboisement n’arrivent pas à endiguer cette dégradation effrénée du

couvert forestier. C’est pourquoi, il est important d’adopter une approche

globale de conservation des ressources forestières en inscrivant toutes les

mesures y relatives dans le cadre général de l’aménagement du territoire.

Tout ceci ne sera une réalité que sous l’impulsion d’un changement de

mentalités des béninois en général et des acteurs de la protection des

ressources forestières en particulier. Il s’agit aussi de mettre en œuvre une

politique volontariste des décideurs à tous les échelons en évitant surtout

l’abus d’autorité et de pouvoir qui ne constitueraient qu’un frein à la gestion

saine et durable des ressources forestières.

Cotonou le……………..2011

Le Président de la Commission

Emmanuel TIANDO

Le Premier Rapporteur Le Deuxième Rapporteur

Nestor NINKO Noubayé HOUNKPOSSI