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| 1 ENJEUX SANTé | nº4 LA SITUATION éPIDéMIOLOGIQUE DES FACTEURS DE RISQUE CARDIO-VASCULAIRE POTENTIELLEMENT MODIFIABLES CHEZ LES ADULTES RéSIDANT AU LUXEMBOURG, EN 2007-2008 Ala’a Alkerwi 1 , Nicolas Sauvageot 1 , Anne Nau 1 , Guy Weber 2 , Agnès Columeau 1 , Jean Beissel 3 , Charles Delagardelle 3 , Sophie Couffignal 1 , Marie-Lise Lair 1 1 Centre d'études en Santé - CRP-Santé - 2 Direction de la Santé - 3 Centre Hospitalier de Luxembourg Résultats de l’étude ORISCAV-LUX « Observation des Risques et de la Santé Cardio-vasculaire au Luxembourg » Etude financée par le Ministère de la Santé et le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Mots clés : facteurs de risque cardio-vasculaire, population générale, étude transversale, santé publique

La situation épidémiologique des facteurs de risque cardio-vasculaire potentiellement modifiables chez les adultes résidant au Luxembourg, en 2007-2008

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EnjEux Santé | nº4

La situation épidémioLogique des facteurs de risque cardio-vascuLaire

potentieLLement modifiabLes chez Les aduLtes résidant au

Luxembourg, en 2007-2008

ala’a alkerwi1, nicolas sauvageot1, anne nau1, guy Weber2, agnès columeau1, Jean beissel3, charles delagardelle3, sophie couffignal1, marie-Lise Lair1

1 centre d'études en santé - crp-santé - 2 direction de la santé - 3 centre hospitalier de Luxembourg

résultats de l’étude oriscav-Lux « observation des risques et de la santé cardio-vasculaire au Luxembourg »

etude financée par le ministère de la santé et le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche

mots clés : facteurs de risque cardio-vasculaire, population générale, étude transversale, santé publique

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EnjEux Santé | nº4

introduction

Les maladies cardio et cérébro-vasculaires demeurent depuis plusieurs décennies, les maladies occasionnant le plus grand nombre de décès et les plus coûteuses, en Europe et dans le monde entier, représentant ainsi un enjeu principal de santé publique et un fardeau pour l’individu, la société et le système de financement des soins de santé.

au Grand Duché de Luxembourg, les maladies de l’appareil circulatoire étaient responsables de 1323 décès en 2009, représentant 36,5% de tous les décès[1]. Les maladies cardio-vasculaires sont également une des premières causes d’hospitalisation tant pour le nombre d’admissions que pour le nombre de journées d’hospitalisation selon les statistiques 2009 de la Caisse nationale de Santé.

Les formes graves, tels que les accidents vasculaires cérébraux, ont un impact majeur sur la qualité de vie, se manifestant notamment par une limitation des activités et un accroissement du risque d’invalidité. Pourtant, les maladies cardio et cérébro-vasculaires et leurs complications sont souvent évitables par un changement des modes de vie. afin de prévenir la survenue et/ou l’évolution de ces maladies, il est nécessaire d’identifier les facteurs de risque de la population et de mettre en place des programmes de prévention. un facteur de risque se définit comme un état physiologique, pathologique ou une habitude de vie, associé à une incidence accrue de la maladie. La lutte contre les facteurs de risque cardio-vasculaire est donc un défi capital pour les autorités publiques.

La mise en évidence des facteurs de risque au sein de la population permet d’évaluer le risque individuel de morbidité et de mortalité cérébro-cardio-vasculaire, le besoin d’un dépistage précoce de la maladie, l’orientation des soins thérapeutiques et, à plus large échelle, de déterminer la stratégie préventive appropriée et de l’évaluer. Le contrôle des facteurs de risque est l’approche principale pour la réduction de la morbidité et de la mortalité liées à ces maladies. Les études épidémiologiques ont clairement démontré que les facteurs de risque agissent de façon synergique. Les notions de risque cardio-vasculaire absolu et de prise en charge globale sont fondamentales.

Du point de vue prévention, on distingue deux types de facteurs de risque: non-modifiables (irréversibles) comme l’âge, le sexe et les antécédents familiaux ; et modifiables ou parfois appelés «évitables, réversibles ou contrôlables» comme le tabagisme, l’hypertension artérielle, le diabète, la dyslipidémie, l’obésité, l’inactivité physique et les habitudes alimentaires déséquilibrées.

À partir des données de la première enquête nationale sur les facteurs de risque cardio-vasculaire « ORISCaV-Lux », ce fascicule a pour objectif de dresser un panorama instantané 2007-2008 de la situation épidémiologique des facteurs de risque cardio-vasculaire chez les adultes résidant au Luxembourg.

L’enquête ORISCaV-Lux représente un élément central pour mettre en place un système national d’information correspondant d’une part à la stratégie StEP-Wise recommandée par l’OMS (Figure 1), et d’autre part, répondant aux besoins de la Charte Européenne du Cœur. Dans ce contexte, les autorités publiques pourront, sur base des résultats, orienter leur politique de prévention et l’adapter aux besoins réels de la population (evidence-based interventions).

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The WHO’s STEPS-Wise strategy for monitoring risk factors (2001)

Figure 1. Les étapes de collecte des données selon la stratégie Step-wise de l’OMS

biochemical measurements

1

2

3

physical measurements

behavioral risk factors

méthodoLogie

L’enquête ORISCaV-Lux de type transversale a été réalisée de novembre 2007 à janvier 2009, auprès d’un échantillon représentatif de la population résidant sur le territoire luxembourgeois. À partir du registre de l’Inspection Générale de la Sécurité Sociale, 4496 personnes ont été sélectionnées par une méthode d’échantillonnage probabiliste stratifiée sur l’âge (18 à 69 ans), le sexe (hommes, femmes) et le district de résidence (Luxembourg, Grevenmacher et Diekirch), afin d’assurer une représentativité de l’ensemble de la population-cible, c’est-à-dire, les adultes des groupes d’âges désignés résidant au Luxembourg. n’ont pas été incluses, les femmes enceintes, les personnes en institutions (hôpital, maison de repos pour plus d’un mois, maison de soins, prison, foyer…) ou dans l’incapacité de répondre pour des raisons diverses (p.ex. démence, handicap grave physique ou mental, non compréhension des 4 langues proposées du questionnaire) ainsi que les personnes décédées au cours du recrutement.

Les sujets sélectionnés furent invités par une lettre personnalisée à participer à l’étude. Ils ont signé un formulaire de consentement avant leur participation à l’étude. au total, 1432 individus provenant de tout le pays ont accepté de participer aux 3 étapes principales de l’enquête ORISCaV-Lux (Figure 2) :

1. remplir un questionnaire auto-administré portant sur les habitudes de vie dont le tabagisme, l’activité physique, l’alimentation, la prise de médicaments, les antécédents personnels et familiaux ; le questionnaire Food Frequency Questionnaire de l'université de Liège a été utilisé.

2. effectuer des mesures anthropométriques du poids, taille, tour de taille et tour de hanche, ainsi que des mesures de la tension artérielle ;

3. réaliser une prise de sang et d’urine pour la détermination des lipides et du glucose.

4. réaliser une prise de cheveux pour la détermination de l'exposition à la pollution.

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courrier postal(invitation et information)

avec coupon-réponsecontact téléphonque pour un rdv dans un centre d'enquête

1er volet

2e volet

3e volet

tension artérielle

prise de sang

taille

urinecheveux

information et consentement questionnaire

poidstour de taille et de hanches

Figure 2. Schéma illustratif du déroulement de l’étude ORISCAV-LUX

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représentativité de L’échantiLLon

Le plan d’échantillonnage prévoyait près de 1300 répondants et un taux de participation de 30% pour assurer la puissance statistique de l’étude. Le nombre final des participants (1432) et le taux de participation (32.2%) sont ainsi conformes, voir supérieurs à ce qui était prévu. L’échantillon recruté dans ORISCaV-Lux était représentatif de la population résidente (d’après les données du recensement StatEC 2001) au niveau du sexe, du district de résidence, mais pas de l’âge. Les jeunes de 18 à 34 sont sous-représentés, alors que les tranches d’âge supérieures à 35 ans étaient surreprésentées dans l’échantillon. afin de corriger ce biais, un redressement a donc été effectué pour tous les calculs.

En plus, une étude comparative, menée dans le but d’identifier un biais potentiel lié aux non-répondants, n’a pas révélé de différences des profils démographiques et cardio-vasculaires entre les participants et les non-participants. Cette étude a été réalisée, à partir des données de l’Inspection Générale de la Sécurité Sociale, sur les indicateurs démographiques suivants : sexe, âge, district, nationalité, statut professionnel, ainsi que sur les indicateurs de consommation des soins de santé dans l’année précédant l’enquête, à savoir : admission à l’hôpital, médicaments prescrits et actes médicaux. L’absence de différences entre les deux profils (participants versus non-participants) a permis de valider et de généraliser les résultats sur la population-cible[2].

contrôLe de quaLité

une attention particulière a été portée au contrôle de la qualité et à la standardisation des procédures des mesures anthropométriques. La même équipe d’infirmières a procédé aux mesures tout au long de l’enquête après avoir reçu une formation. Des contrôles de mesures inter-observateurs ont été réalisés.

Les questionnaires relatifs aux modes de vie provenaient d’instruments validés. La tension artérielle a été mesurée trois fois à intervalle d’au moins 5 minutes, à l’aide d’un appareil automatique Omrom® Mx3 plus (O-HEM-742-E, Matsusaka, japon), dont la validité est démontrée dans les études de population[3]. La moyenne des deux dernières mesures a été considérée pour l’analyse statistique.

Les analyses biochimiques des échantillons sanguins ont été réalisées dans le même laboratoire, selon la même technique, au Centre Hospitalier de Luxembourg.

Les mesures directes du poids, de la taille, du tour de taille et de la tension artérielle sont plus fiables que les estimations auto-déclarées des participants.

définition des facteurs de risque

Dans une optique de prévention en santé publique, les définitions des facteurs de risque cardio-vasculaire potentiellement modifiables ou contrôlables comme le tabagisme, l’obésité, l’hypertension artérielle, le diabète, la dyslipidémie et l’inactivité physique, utilisées dans ORISCaV-Lux, sont présentés ci-après.

Le tableau 1 dresse la liste des principaux facteurs de risque dits contrôlables, c’est-à-dire, ceux sur lesquels on peut agir pour réduire les risques de maladies coronariennes et d’accident vasculaire cérébral. Les habitudes alimentaires déséquilibrées seront présentées dans une prochaine publication.

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Le tabagisme actuel est défini comme une consommation régulière d’au moins une cigarette par jour ou une consommation occasionnelle de moins d’une cigarette par jour.

L’inactivité physique est évaluée par l’absence d’activité physique auto-déclarée, selon le questionnaire IPaQ (International physical activity questionnaire). Le score IPaQ est basé sur le calcul de la dépense énergétique du sujet par semaine. Il est composé de trois catégories :

• catégorie 1 (inactif) : c'est le niveau le plus bas de l'activité physique. Les individus ne répondant pas aux critères des catégories 2 ou 3, sont considérés comme «inactifs».

• catégorie 2 (suffisamment ou modérément actif) qui correspond à un des 3 critères suivants :- 3 jours ou plus d’activité physique intense pour au moins 20 minutes par

jour, ou- 5 jours ou plus d’activité modérée ou de marche pour au moins 30 minutes

par jour, ou- 5 jours ou plus de toute combinaison de la marche, de l'activité modérée

ou de l’activité intense atteignant au moins 600 MEt-minutes/semaine1.

• catégorie 3 (actif) qui correspond à un des 2 critères suivants :- exercer une activité intense pour au moins 3 jours et accumuler au moins

1500 MEt-minutes/semaine, ou- exercer pendant 7 jours toute combinaison de la marche, de l'activité

modérée ou de l’activité intense réalisant au minimum 3000 MEt-minutes/semaine.

Dans les recommandations nationales du Programme national Santé (Plan national d’action pour la promotion de l’alimentation saine et de l’activité physique), 2006-2012, il est recommandé pour la population générale adulte d’adopter un régime de vie actif qui inclut la pratique d’au moins 30 minutes d’activité physique d’intensité moyenne par jour. Cette consigne correspond à la catégorie 2 (suffisamment ou modérément actif) du score IPaQ.

L’indice de masse corporelle (IMC) est la méthode la plus utilisée pour déterminer les sujets présentant un surpoids ou une obésité. Il est le rapport du poids (en kilogrammes) sur la taille (en mètres) au carré. Selon le système de classification du poids corporel établi par l’International Obesity Task Force sous l’égide de l’OMS (2003), l’individu adulte ayant un IMC supérieur ou égal à 30 kg/m2 est classé comme obèse[4], supérieur ou égal à 25 et inférieur à 30 est classé en surpoids, supérieur ou égal à 18,5 et inférieur à 25 est classé en poids normal, inférieur à 18,5 est classé en insuffisance pondérale.

Le diabète est défini chez l’adulte par une glycémie à jeun ≥ 126 mg/dl ou une prise de médicaments antidiabétiques.

1 Les équivalents métaboliques (MEt), sont couramment employés pour exprimer l’intensité des activités physiques. Le MEt exprime le rapport entre la vitesse du métabolisme pendant une activité physique et la vitesse du métabolisme au repos.

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L’hypertension artérielle se définit par une pression artérielle systolique ≥ 140 mmHg et/ou une pression artérielle diastolique ≥ 90 mmHg ou une prise de médicaments anti-hypertenseurs. Pour estimer la prévalence du facteur de risque d’hypertension artérielle, les recommandations de la Société Européenne de Cardiologie ont été utilisées à savoir :

- chez le sujet diabétique, la pression artérielle systolique doit être ≥ 130 mmHg et/ou la pression artérielle diastolique ≥ 80 mmHg,

- chez le sujet à risque cardio-vasculaire élevé, la pression artérielle systolique doit être ≥ 120 mmHg et/ou la pression artérielle diastolique ≥ 80 mmHg.

La dyslipidémie : selon les guidelines de la Société Européenne de Cardiologie, les dyslipidémies sont définies par des taux élevés de cholestérol total ≥ 190 mg/dl, de LDL cholestérol ≥ 115 mg/dl, et de triglycérides ≥ 150 mg/dl, un taux faible de HDL cholestérol < 40 mg/dl pour les hommes et < 46 mg/dl pour les femmes. Dans cette analyse, l’individu est considéré comme dyslipidémique s’il est sous médicaments hypolipémiants et/ou s’il a présenté une des anomalies susmentionnées. Il est à noter que cette définition est légèrement différente de celle établie par le conseil scientifique national uniquement pour le LDL cholestérol (≥100 mg/dl) 2.

En résumé, les définitions ayant servi de référence pour calculer les facteurs de risque de la population résidant au Luxembourg en 2007-2008 sont les suivantes :

facteur de risque définition selon les guidelines

Obésité[4] BMI ≥ 30 kg/m2

Hypertension artérielle[5]

tension artérielle systolique ≥ 140 mmHgtension artérielle diastolique ≥ 90 mmHgtraitement par médicaments anti-hypertenseurs

Diabète[6] Glycémie à jeun ≥ 126 mg/dltraitement par médicaments antidiabétiques

Dyslipidémie[7] au moins une des anomalies suivantes :Cholestérol total ≥ 190 mg/dl,triglycérides ≥ 150 mg/dl,Cholestérol de type LDL ≥ 115 mg/dl,Cholestérol de type HDL < 40 mg/dl pour les hommes et < 46 mg/dl pour les femmes,traitement par médicaments hypolipémiants

tabagisme actuel[8] au moins une cigarette par jour ou occasionnellement moins d’une cigarette par jour

Inactivité physique absence d’activité physique déclarée selon l’IPaQ, c’est-à-dire, catégorie 1 (inactif)

2 Conseil scientifique dans le Domaine de la Santé. Modalités de prise en charge des dyslipidémies au Luxembourg. Information consultable sur la page web :

http://www.conseil-scientifique.lu/fileadmin/files/Gt_maladies_vasculaires/dyslipidemies.pdf

Tableau 1. Définition des facteurs de risque cardio-vasculaire selon les guidelines

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anaLyse statistique

Les variables catégorielles sont résumées sous forme de fréquences (%) pour chaque catégorie. Les résultats sont présentés de façon graphique sous forme de diagrammes de fréquences. L’association entre les facteurs de risque et les facteurs explicatifs est étudiée par une analyse univariée et multivariée. En analyse univariée, l’association est évaluée par l’odds ratio et son intervalle de confiance à 95% et un test du χ². L’association entre un facteur de risque et plusieurs facteurs est étudiée par une régression logistique multivariée. une modélisation pas à pas est utilisée pour construire le modèle multivarié en commençant avec un modèle saturé comprenant toutes les variables ayant une p-valeur inférieure à 0.10 en analyse univariée. Les variables non significatives en multivariée sont ensuite retirées du modèle.

afin de tenir compte de la méthode d’échantillonnage aléatoire stratifiée par district de résidence, sexe et tranche d’âge, avec allocation proportionnelle à la taille utilisée lors du recrutement des sujets, des analyses statistiques pondérées ont été utilisées, grâce au module d’échantillon complexe de SPSS®.

L’analyse statistique a principalement été réalisée à l’aide du logiciel PaSW® pour Windows® version 18.0 (ce logiciel s'appelait anciennement SPSS Statistics Inc Chicago, Illinois).

résuLtats

afin de pouvoir caractériser la population à risque cardio-vasculaire dans la population résidente au Luxembourg, ces 6 facteurs de risque sélectionnés ont été étudiés selon certaines caractéristiques démographiques et socio-économiques, comme le sexe, l’âge, le niveau d’instruction (le diplôme le plus élevé obtenu), le pays de naissance, le statut d’emploi, le statut conjugal et le niveau économique décrit par le seuil de pauvreté.

Cette approche permet de comparer les facteurs de risque, en termes de manifestation dans la population supposée saine. Elle souligne en conséquence la nécessité de combiner les efforts de prévention dans une stratégie multidisciplinaire ciblant l’ensemble des facteurs de risque.

En plus du profil épidémiologique de chaque facteur de risque cardio-vasculaire, l’accent a été mis sur le taux de sujets à risques multiples, ainsi que sur le traitement des pathologies associées au risque cardio-vasculaire.

La prévaLence des facteurs de risque seLon Le genre

au Luxembourg, en 2007-2008, la dyslipidémie (69,9%), suivie par la tension artérielle (34,5%) sont les facteurs de risque prédominants parmi les 6 facteurs de risque cardio-vasculaire sélectionnés, pour tous les genres confondus. Ces deux pathologies exposent le sujet à un risque majeur d’athérosclérose, et peuvent provoquer des accidents thrombotiques et hémorragiques aigus. La prévalence du tabagisme était de 22,3%, c’est-à-dire, une personne sur 5 fumait (régulièrement

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au moins une cigarette par jour ou occasionnellement moins d’une cigarette par jour). L’obésité dans la population étudiée est estimée à 21%. Elle est plus élevée chez les hommes (23%) que chez les femmes (18,7%). Quant à l’activité physique, uniquement 18% des participants (20,7% des hommes et 14,9% des femmes) se déclarent inactifs pendant les 7 derniers jours avant l’enquête, n’atteignant pas le seuil d’activité physique recommandé à la population générale (30 minutes ou plus d’activité physique d’intensité modérée). La prévalence globale du diabète calculée à 4,4% était sans différence statistiquement significative entre les hommes et les femmes. Globalement, les hommes présentaient un profil de risque cardio-vasculaire significativement plus élevé que les femmes (p<0.0001), sauf pour le diabète (Figure 3).

figure 3. Prévalence des facteurs de risque cardio-vasculaire selon le genre chez les participants à l’étude ORISCAV-LUX 2007-2008.

La prévaLence des facteurs de risque seLon Les groupes d’âge

De manière générale, la prévalence de l’obésité, de l’hypertension artérielle, du diabète et de la dyslipidémie augmente rapidement avec l’âge. toutefois, l’hypertension artérielle augmente de manière spectaculaire avec l’âge, pour toucher prés de la moitié (53,6%) des 50-59 ans et plus de trois quarts (75,6%) des plus de 60 ans. Pareillement, la dyslipidémie touche tragiquement toutes les tranches d’âge, même les jeunes de 18 à 29 ans (42,5%). après l’âge de 50 ans, plus de 90% des sujets sont atteints. alors que les pathologies associées au risque cardio-vasculaire, à savoir, l’obésité, l’hypertension artérielle, le diabète et la dyslipidémie augmentent avec l’âge, la proportion de fumeurs diminue avec l’âge. La tranche d’âge la plus concernée par le tabagisme est celle de 18 à 29 ans. La prévalence de l’inactivité physique reste sans différence remarquable entre les groupes d’âge (p=0.201) (Figure 4).

0

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Pré

vale

nce

(%)

Homme 23,0 41,9 5,2 74,3 24,9 20,7

Femme 18,7 27,1 3,5 65,5 19,7 14,9

Total 20,9 34,5 4,4 69,9 22,3 17,8

ObésitéHypertension

artérielle Diabète Dyslipidémie Tabagisme actuel Inactivité physique

p=0.036

p<0.0001

p=0.10

p<0.0001

p=0.022p=0.006

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La prévaLence des facteurs de risque seLon Le niveau d’éducation

Globalement, le niveau d’éducation a un impact sur le risque cardio-vasculaire. Selon l’enquête ORISCaV-Lux 2007-2008, l’obésité, l’hypertension artérielle, le diabète, la dyslipidémie et le tabagisme étaient plus fréquents chez les non diplômés par rapport à ceux ayant un diplôme supérieur. Par contre, aucune différence significative n’a été observée concernant l’inactivité physique entre les 4 niveaux d’éducation (Figure 5).

Figure 4. Prévalence des facteurs de risque cardio-vasculaire selon

les catégories d’âge chez les participants à l’étude

ORISCAV-LUX 2007-2008.

0

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40

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Pré

vale

nce

(%)

18-29 ans 6,5 7,8 0,5 42,5 33,7 17,5

30-39 ans 17,3 21,0 0,6 61,5 20,0 14,3

40-49 ans 23,7 38,7 3,1 76,3 20,7 18,1

50-59 ans 27,7 53,6 7,1 90,8 21,4 22,3

60-69 ans 39,0 75,6 16,7 94,1 10,9 18,7

ObésitéHypertension

artérielle Diabète Dyslipidémie Tabagisme actuel Inactivité physique

p<0.0001

p<0.0001

p<0.0001

p<0.0001

p<0.0001

p=0.20

Figure 5. Prévalence des facteurs de risque

cardio-vasculaire selon le niveau d’éducation des

participants à l’étude ORISCAV-LUX 2007-2008.

0

10

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30

40

50

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Pré

vale

nce

(%)

Aucun diplôme 28,1 41,0 6,5 75,4 25,8 19,5

Diplôme professionel 25,3 40,2 4,9 71,7 24,1 15,3

Diplôme d'études secondaires 17,0 29,7 2,8 65,6 26,9 14,6

Diplôme supérieur 12,4 26,8 2,9 66,5 13,0 20,7

ObésitéHypertension

artérielle Diabète Dyslipidémie

Tabagisme actuel

Inactivité physique

p<0.0001

p<0.0001

p=0.038

p=0.027

p<0.0001

p=0.11

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La prévaLence des facteurs de risque seLon Le pays de naissance

Bien que la prévalence de l’hypertension, des troubles lipidiques et de l’inactivité physique soit sensiblement différente selon le pays de naissance, aucune différence significative n’a été observée pour l’obésité, le diabète et le tabagisme (Figure 6).

Figure 6. Prévalence des facteurs de risque cardio-vasculaire selon le pays de naissance des participants à l’étude ORISCAV-LUX 2007-2008.

La prévaLence des facteurs de risque seLon Le statut d’empLoi

De manière générale, le statut d’emploi influence significativement la prévalence des facteurs de risque cardio-vasculaire. Le tabagisme le plus élevé est enregistré dans la catégorie des étudiants et chômeurs, comparé aux autres statuts d’emploi. Les pathologies associées à l’âge (obésité, hypertension artérielle, diabète et dyslipidémie) sont évidemment plus fréquentes chez les retraités (Figure 7).

Figure 7. Prévalence des facteurs de risque cardio-vasculaire selon le statut d’emploi des participants à l’étude ORISCAV-LUX 2007-2008.

0

10

20

30

40

50

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Pré

vale

nce

(%)

Luxembourg 21,5 37,1 4,7 70,5 23,1 16,5

Portugal 23,6 37,6 3,1 68,3 21,4 23,2

Autres pays européens 18,4 28,1 4,7 73,3 21,1 14,8

Pays non européens 17,7 25,4 2,1 56,3 20,4 30,3

ObésitéHypertension

artérielle Diabète Dyslipidémie

Tabagisme actuel

Inactivité physique

p=0.46

p=0.008

P=0.51

p=0.039

p=0.87p=0.004

0

10

20

30

40

50

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100

Prév

alen

ce (%

)

Travail (employé) 19,0 30,2 2,3 67,5 22,7 17,3

Non-employé 7,0 10,7 2,2 48,5 31,2 23,0

Femmes au foyer 28,8 41,6 5,6 79,3 18,2 10,9

35,7 71,4 15,4 92,3 16,2 21,3

ObésitéHypertension

artérielle Diabète Dyslipidémie Tabagisme actuel

Inactivité physique

P<0.0001

P<0.0001

P<0.0001

P<0.0001

P=0.008

P=0.029

Invalide ou retraité

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La prévaLence des facteurs de risque seLon Le statut conJugaL

Le fait de vivre avec un partenaire ou non influence de manière significative la prévalence de l’obésité, l’hypertension artérielle, les troubles lipidiques et le tabagisme. Ces facteurs de risque sont moins élevés chez les personnes vivant seules sauf pour la consommation du tabac (Figure 8).

Figure 8. Prévalence des facteurs de risque cardio-vasculaire selon le statut conjugal des participants à l’étude

ORISCAV-LUX 2007-2008.

La prévaLence des facteurs de risque seLon Le niveau économique

Parmi les facteurs de risque cardio-vasculaire sélectionnés, uniquement le tabagisme actuel est significativement associé au niveau économique (p<0,0001). Les sujets ayant un revenu inférieur au seuil de pauvreté fumaient plus que les sujets ayant un niveau économique plus élevé (Figure 9).

Figure 9. Prévalence des facteurs de risque cardio-

vasculaire selon le seuil de risque de pauvreté

des participants à l’étude ORISCAV-LUX 2007-2008.

0

10

20

30

40

50

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70

80Pr

éval

ence

(%

)

Vit en couple 23,0 39,2 4,7 75,3 18,4 16,6

vit seul 16,6 25,4 3,8 59,2 29,8 20,1

ObésitéHypertension

artérielle Diabète Dyslipidémie Tabagisme actuel

Inactivité physique

p=0.005

p<0.0001

p=0.43

p<0.0001

p<0.0001

p=0.12

0

10

20

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40

50

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70

80

Pré

vale

nce

(%)

Inférieur au seuil de pauvreté 24,7 33,9 5,9 67,4 32,7 16,9

Supérieur au seuil de pauvreté 19,6 35,1 4,0 71,4 18,2 16,7

ObésitéHypertension

artérielle Diabète Dyslipidémie

Tabagisme actuel

Inactivité physique

p=0.062

p=0.72

p=0.17

p=0.24

p<0.0001

p=0.96

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Les déterminants démographiques et socio-économiques des facteurs de risque cardio-vascuLaire dans La popuLation étudiée

En utilisant une analyse de régression logistique multivariée, la figure 10 illustre les rapports de côtes (Odds ratios) des pathologies associées au risque cardio-vasculaire (diabète, dyslipidémie et hypertension artérielle) ajustés au sexe, âge, niveau d’éducation, pays de naissance, statut d’emploi, statut conjugal et statut économique.

À part l’âge, qui est lié naturellement à ces pathologies, on constate que le sexe masculin est un facteur déterminant de développer une hypertension artérielle et/ou une dyslipidémie. Comparés aux femmes, les hommes ont donc 2,4 et 1,7 fois plus de risque d’être respectivement touchés par une hypertension artérielle ou une dyslipidémie, après l’ajustement de tous les facteurs démographiques et socio-économiques étudiés. L’hypertension artérielle varie également en fonction du pays de naissance. Les portugais ont 1,5 fois plus de risque d’être touchés par l’hypertension artérielle que les luxembourgeois.

Figure 10. Analyse multivariée des facteurs de risque cardio-vasculaire (diabète, dyslipidémie et hypertension artérielle) (odds ratios ajustés et intervalle de confiance 95%).

Le niveau d’éducation est un facteur indépendant qui détermine le risque d’obésité ; les personnes n’ayant aucun diplôme ont 2,4 fois plus de risque d’être obèses que les personnes avec un diplôme supérieur, quelque soit leur âge, sexe, statut socio-économique (Figure 11).

Quant aux comportements liés au risque cardio-vasculaire, il est constaté que le tabagisme est influencé de manière significative par l’âge, le sexe masculin, le niveau bas d’éducation, le fait de vivre seul et le niveau économique faible. Comparé à celles avec un diplôme supérieur, les personnes n’ayant aucun diplôme sont 2 fois plus à risque de fumer que les personnes avec des diplômes professionnels et d’études secondaires. Les personnes vivant seules sont 1,7 fois plus à risque de fumer que les personnes vivant en couple. De même, les sujets avec un revenu inférieur au seuil de pauvreté ont 1,7 fois plus de risque de fumer par rapport aux personnes avec un revenu supérieur au seuil de pauvreté (Figure 11).

OR 95% CL P

Hypertension artérielle

Sexe Homme2.44 1.87 3.19 <0.0001

âge en continu 1.10 1.08 1.11 <0.0001

Pays de naissance

Portugal 1.49 1.02 2.19 <0.0003

Autres pays européens

0.65 0.47 0.91

Pays non européens

0.84 0.49 1.44

Diabète âge en continu 1.10 1.08 1.13 <0.0001

Dyslipidémie Sexe Homme 1.67 1.28 2.20 <0.0001

âge en continu 1.08 1.07 1.09 <0.0001

0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4

odd ratio ajusté et 95% ic

value

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Concernant les déterminants de l’inactivité physique, le pays de naissance est le seul des facteurs choisis qui reste encore significatif après ajustement. Cela signifie qu’il existe une disparité en matière de pratique de l’activité physique. Les portugais et les sujets nés dans des pays non-européens demeurent plus inactifs comparés aux luxembourgeois (Figure 11).

Figure 12. Distribution du cumul des 6 facteurs de risque cardio-vasculaire selon le sexe,

ORISCAV-LUX 2007-2008

une partie importante de La popuLation est “muLtirisque”

Figure 11. Analyse multivariée des facteurs

de risque cardio-vasculaire (obésité, tabagisme et

inactivité physique) (odds ratios ajustés et intervalle de

confiance 95%).

OR 95% CL P

Obésité Sexe Homme 1.38 1.06 1.81 0.018

âge en continu 1.05 1.04 1.06 <0.0001

Diplôme Aucun diplôme 2.44 1.64 3.62 <0.0001

Diplôme professionnel 2.08 1.39 3.12

Diplôme d'études secondaires 1.49 0.97 2.29

Tabagisme Sexe Homme 1.41 1.05 1.90 0.023

âge en continu 0.98 0.97 0.99 <0.0001

Diplôme Aucun diplôme 2.06 1.30 3.27 0.001

Diplôme professionnel 2.08 1.33 3.25

Diplôme d'études secondaires 2.37 1.49 3.75

Statut conjugal Vivre seul 1.71 1.24 2.35 0.001

Revenu Inférieur au seuil de pauvreté 1.70 1.20 2.41 0.003

Inactivité physique

Pays de naissance Portugal 1.53 0.99 2.35 0.005

Autres pays européens 0.88 0.60 1.28

Pays non européens 2.19 1.29 3.72

0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4

odd ratio ajusté et 95% ic

value

0

5

10

15

20

25

30

35

40

Pré

vale

nce

(%)

Homme 11,4 27,1 32,5 20,2 6,8 1,9 0,1

Femme 19,4 36,6 27,5 12,1 3,6 0,7 0,1

Total 15,4 31,9 16,2 5,2 1,3 0,1

0 FRCV 1 FRCV 2 FRCV 3 FRCV 4 FRCV 5 FRCV 6 FRCV

p<0.0001

30,0

En 2007-2008, l’enquête ORISCaV-Lux a révélé que les résidents au Luxembourg présentaient un risque élevé de développer une maladie cardio-vasculaire. uniquement 15,4% des personnes âgées de 18 à 69 ans n’avaient aucun facteur de risque, alors que 84,6% affichaient au moins un des facteurs de risque sélectionnés

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(obésité, hypertension artérielle, diabète, dyslipidémie, tabagisme et inactivité physique). Près de 32% présentaient un seul facteur de risque, et 23% accumulaient 3 facteurs de risque et plus. Le profil à risque multiple était plus fréquent chez les hommes que chez les femmes (Figure 12). naturellement, la présence de 2 facteurs et plus augmente significativement avec l’âge. (Figure 13).

Figure 13. Distribution du cumul des 6 facteurs de risque cardio-vasculaire selon les groupes d’âge, ORISCAV-LUX 2007-2008

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

Pré

vale

nce

(%)

18-29 ans 29,7 41,8 20,2 7,4 1,0 0,0 0,0

30-39 ans 21,6 39,4 26,1 9,8 3,2 0,0 0,0

40-49 ans 10,9 32,2 32,2 19,0 4,5 0,9 0,3

50-59 ans 4,2 22,8 37,4 24,6 8,4 2,3 0,4

60-69 ans 1,8 12,3 40,3 27,2 13,4 5,1 0,0

0 FRCV 1 FRCV 2 FRCV 3 FRCV 4 FRCV 5 FRCV 6 FRCV

p<0.0001

Figure 14. La prévalence des pathologies associées au risque cardio-vasculaire (diabète, dyslipidémie et hypertension artérielle) traitées et non-traitées, selon le sexe

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

Pré

vale

nce

(%)

Non traité 31,9 38,9 85,1 88,8 66,6 60,2

Traité 68,1 61,1 14,9 11,2 33,4 39,8

Homme Femme Homme Femme Homme Femme

Diabete Dyslipidémie Hypertension artérielle

Le traitement des pathoLogies associées au risque cardio-vascuLaire (diabète, dysLipidémie et hypertension artérieLLe) seLon Le sexe

Globalement, parmi les sujets touchés par le diabète, la dyslipidémie et l’hypertension artérielle, il est remarqué que la proportion de sujets déclarant être non-traités est comparable entre les deux sexes (p= 0.54, p= 0.053, p= 0.105, respectivement). Près de 1/3 des diabétiques ne sont pas traités. Ces chiffres sont encore plus alarmants pour les hypertendus (67% des hommes et 60% des femmes) ou ayant des troubles lipidiques (85% des hommes et 89% des femmes) (Figure 14).

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Le traitement des pathoLogies associées au risque cardio-vascuLaire (diabète, dysLipidémie et hypertension artérieLLe) seLon Les groupes d’âge

De manière générale, les proportions de sujets déclarant être sous traitement pour ces trois pathologies, fortement associées au risque cardio-vasculaire, n’étaient pas suffisantes, pour tous les groupes d’âge. Concernant le diabète, la moitié des patients de la tranche d’âge 40 à 49, et un tiers des sujets diabétiques âgés de plus de 55 ans n’ont pas déclaré de prise de médicaments.

Quant aux troubles lipidiques et à l’hypertension artérielle, les chiffres sont particulièrement inquiétants. tous les groupes d’âge, même les plus âgés ne prennent pas de médicaments contre ces pathologies, pouvant avoir des conséquences graves sur la santé cardio-vasculaire et la qualité de vie en générale (Figure 15).

Figure 15. La prévalence des pathologies associées au risque cardio-vasculaire

(diabète, dyslipidémie et hypertension artérielle)

traitées et non-traitées, selon les groupes d’âge

0,0

10,0

20,0

30,0

40,0

50,0

60,0

70,0

80,0

90,0

100,0

Pré

vale

nce

(%)

Non traité 100,0 38,8 55,5 29,0 27,4 97,9 97,0 93,4 81,2 63,6 100,0 84,4 74,7 57,4 43,5

Traité 0,0 61,2 44,5 71,0 72,6 2,1 3,0 6,6 18,8 36,4 0,0 15,6 25,3 42,6 56,5

18-29 30-39 40-49 50-59 60-69 18-29 30-39 40-49 50-59 60-69 18-29 30-39 40-49 50-59 60-69

Diabète Dyslipidémie Hypertension artérielle

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discussion et concLusion

Les résultats de l’étude ORISCaV-Lux démontrent un profil inquiétant de facteurs de risque cardio-vasculaire chez les adultes résidant au Luxembourg. Plus de 80% de la population affiche au moins un facteur de risque contrôlable des maladies cardio-vasculaires. Les hommes présentent un risque plus élevé de maladies cardio-vasculaires que les femmes. Ce risque s’accroît avec l’âge, dans les deux sexes. L’hypertension artérielle, le diabète et les troubles lipidiques sont souvent silencieux et asymptomatiques. De plus, ces pathologies ne sont majoritairement pas traitées. Il est cru à tort que les pathologies associées au risque cardio-vasculaire touchent essentiellement les personnes âgées. Dans la population adulte résidante au Luxembourg, l’hypertension artérielle et les troubles lipidiques sont particulièrement hauts même chez les jeunes de 18 à 29 ans. Or cela est d’autant plus important que ces pathologies sont associées à un taux élevé de tabagisme dans cette tranche d’âge. toutefois, l’évolution du tabagisme avec l’âge est encourageante, puisqu’il diminue en général chez les personnes plus âgées.

Selon les résultats de l’enquête ORISCaV-Lux, la dyslipidémie est le facteur de risque prédominant pour les deux sexes et dans toutes les catégories d’âge. Cette observation devrait néanmoins être interprétée avec précaution, en particulier, en tenant compte des seuils très stricts des cholestérols pour définir les sujets ayant des troubles lipidiques. autrefois, le traitement des troubles lipidiques à ces seuils était considéré comme prophylactique pour les sujets à faible risque. Bien que l’absence d’une définition précise des troubles lipidiques complique la comparaison internationale avec les autres études de la population adulte, ce taux de prévalence au Luxembourg est parmi les plus hauts rapporté dans la littérature. Il pourrait aussi expliquer la prévalence élevée de l’obésité dans la population étudiée.

La prévalence des facteurs de risque varie selon le niveau d’éducation, le statut socio-économique et le pays de naissance. En général, les personnes moins scolarisées sont plus nombreuses à présenter des facteurs de risque cardio-vasculaire (obésité et tabagisme) que celles qui ont fait des études supérieures. De nombreux éléments contribuent probablement à la prévalence accrue des facteurs de risque cardio-vasculaire chez les personnes ayant un faible revenu et un niveau de scolarité bas. Le manque de connaissance sur les habitudes de vie saine est associé à l’insuffisance de ressources, d’aptitudes et de soutien social. De plus, les produits alimentaires favorables à la santé sont souvent plus chers, ce qui impose pour le groupe de la population à faible revenu un accès limité à des choix sains. Ces deux facteurs peuvent inciter les gens à adopter parfois des habitudes nocives pour la santé[9].

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recommandations

Les informations issues de l’enquête ORISCaCV-Lux sont importantes pour les citoyens, les professionnels de la santé, ainsi que pour les décideurs politiques. La lutte contre les facteurs de risque cardio-vasculaire permettra de prévenir non seulement les maladies cardio-vasculaires, mais aussi de nombreuses autres maladies chroniques qui partagent les mêmes facteurs de risque, comme le cancer.

Les autorités publiques mènent depuis plusieurs années des programmes et actions concertés entre plusieurs ministères contribuant à la lutte contre les facteurs de risque cardio-vasculaire. Cet effort considérable se doit d’être continué au regard des résultats de l’étude ORISCaV-Lux. La concertation gouvernementale pour créer des environnements au sein de la société, favorables à la prévention des facteurs de risque cardio-vasculaire est à encourager. En renforçant une approche holistique de santé publique, qui responsabilise tous les acteurs dans la démarche de prévention, cela permettra d’intégrer les habitudes de vie saines dans tous les secteurs publics (communes, écoles, cantines, transport, travail, sport, etc...).

La mise en œuvre du médecin référent à partir de 2012 devrait contribuer à lutter contre les facteurs de risque cardio-vasculaire identifiés. De même les programmes de bilan de santé réguliers au cours de la vie proposés à la population devraient concourir à diminuer les facteurs de risque cardio-vasculaire.

toutefois, pour lutter contre ces facteurs fortement associés au risque cardio-vasculaire, il est important de mener des stratégies parallèles :

• continuer les politiques de prévention primaire en menant des campagnes d’éducation à la santé dès le plus jeune âge afin de permettre l’acquisition de comportements de santé sains très tôt dans la vie,

• continuer des campagnes de promotion globale pour rappeler aux adultes les comportements de santé adaptés à leur âge, tant en termes nutritionnels qu’activité physique, et les encourager à maintenir un « poids-santé »,

• mener des stratégies de prévention plus ciblées pour les groupes de population présentant plus de risques, comme les hommes, les personnes à faible niveau d’éducation, les personnes à faible revenu, les personnes d’origine portugaise,

• mettre en œuvre des politiques de prévention ciblées sur les facteurs de risque les moins bien maîtrisés générant un risque de morbidité ou de mortalité plus fréquents. Les efforts devront être renforcés dans certains domaines, tels que le traitement de l’hypertension artérielle ou de la dyslipidémie.

À cet effet, il sera nécessaire de coordonner les actions de prévention entre l’ensemble des acteurs pouvant être en contact avec l’individu aux différents moments de sa vie : médecine scolaire et universitaire, médecine du travail, médecine générale et médecine hospitalière. Chaque point de contact doit représenter une opportunité pour l’individu de faire le point sur ses facteurs de risque cardio-vasculaire et de mettre en place des stratégies de prévention efficaces ou des stratégies thérapeutiques adaptées à ses besoins.

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En parallèle, il est proposé de renforcer les actions auprès des professionnels de la santé afin qu’ils :

• prennent en compte le risque cardio-vasculaire global plutôt que purement coronarien, selon les recommandations de la 3ème European Task Force en matière de prévention cardio-vasculaire [7],

• réalisent régulièrement, chez leurs patients, un bilan complet du risque cardio-vasculaire afin de mettre en œuvre de manière préventive des stratégies d’éducation à la santé ou des stratégies thérapeutiques adaptées au risque,

• adoptent une approche multidisciplinaire visant à mettre en œuvre des stratégies thérapeutiques concertées entre plusieurs spécialités, pour réduire simultanément l’ensemble des facteurs de risque cardio-vasculaire,

• participent de manière régulière aux séminaires et aux cycles de formation continue afin d’augmenter leur vigilance dans la prévention, la détection et la prescription de thérapies appropriées,

• se forment à l’éducation thérapeutique des patients, car la modification des facteurs de risque cardio-vasculaire passe par une modification des comportements (de style de vie), ce qui nécessite le développement d’une motivation suffisante chez l’individu concerné pour réussir à moyen et long terme,

• sensibilisent leurs patients pour développer une culture d’auto-mesure de la tension artérielle, afin de prévenir les conséquences graves sur la santé cardio-vasculaire, tels que les accidents vasculaires cérébraux,

• recommandent aux jeunes adultes de faire vérifier régulièrement leur bilan sanguin, et plus souvent en présence d’autres facteurs de risque (comme le diabète ou l’obésité),

• encouragent vivement tous les fumeurs à arrêter de fumer et les soutenir dans leurs efforts du sevrage pour y parvenir, en accentuant leurs efforts sur le groupe d’âge 18 à 29 ans.

toutefois, ces actions devront être accompagnées de programmes de formation afin d’aider les professionnels à exercer leur rôle d’éducation à la santé. Le système d’incitation à la formation, déjà mis en place pour les professionnels de la santé, devrait leur permettre une mise à jour de leurs connaissances, afin de soutenir ces objectifs.

Finalement, il apparait important de continuer la surveillance épidémiologique des facteurs de risque cardio-vasculaire au minimum tous les 5 ans afin de suivre l’évolution temporelle des facteurs de risque, ainsi que l’impact des politiques de prévention. Sur ces informations statistiques objectives, les décideurs pourront adapter au besoin les politiques mises en œuvre.

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références

1. national Statistics of all causes of death, Statistiques des causes de décès, Direction de la Santé. In, Directorate of Health, Ministry of Health, Luxembourg, 2009.

2. alkerwi a, Sauvageot n, Couffignal S, albert a, Lair ML, Guillaume M: Comparison of participants and non-participants to the ORISCaV-Lux population-based study on cardiovascular risk factors in Luxembourg. BMC Med Res Methodol 2010;10:80.

3. El assaad Ma, topouchian ja, Darne BM, asmar RG: Validation of the Omron HEM-907 device for blood pressure measurement. Blood Press Monit 2002;7:237-241.

4. Clinical Guidelines on the Identification, Evaluation, and treatment of Overweight and Obesity in adults-the Evidence Report. national Institutes of Health. Obes Res 1998;6 Suppl 2:51S-209S.

5. Mancia G, De Backer G, Dominiczak a, Cifkova R, Fagard R, Germano G, Grassi G, Heagerty aM, Kjeldsen SE, Laurent S, narkiewicz K, Ruilope L, Rynkiewicz a, Schmieder RE, Struijker Boudier Ha, Zanchetti a, Vahanian a, Camm j, De Caterina R, Dean V, Dickstein K, Filippatos G, Funck-Brentano C, Hellemans I, Kristensen SD, McGregor K, Sechtem u, Silber S, tendera M, Widimsky P, Zamorano jL, Kjeldsen SE, Erdine S, narkiewicz K, Kiowski W, agabiti-Rosei E, ambrosioni E, Cifkova R, Dominiczak a, Fagard R, Heagerty aM, Laurent S, Lindholm LH, Mancia G, Manolis a, nilsson PM, Redon j, Schmieder RE, Struijker-Boudier Ha, Viigimaa M, Filippatos G, adamopoulos S, agabiti-Rosei E, ambrosioni E, Bertomeu V, Clement D, Erdine S, Farsang C, Gaita D, Kiowski W, Lip G, Mallion jM, Manolis aj, nilsson PM, O’Brien E, Ponikowski P, Redon j, Ruschitzka F, tamargo j, van Zwieten P, Viigimaa M, Waeber B, Williams B, Zamorano jL, the task force for the management of arterial hypertension of the European Society of H, the task force for the management of arterial hypertension of the European Society of C: 2007 Guidelines for the management of arterial hypertension: the task Force for the Management of arterial Hypertension of the European Society of Hypertension (ESH) and of the European Society of Cardiology (ESC). Eur Heart j 2007;28:1462-1536.

6. Ryden L, Standl E, Bartnik M, Van den Berghe G, Betteridge j, de Boer Mj, Cosentino F, jonsson B, Laakso M, Malmberg K, Priori S, Ostergren j, tuomilehto j, thrainsdottir I, Vanhorebeek I, Stramba-Badiale M, Lindgren P, Qiao Q, Priori SG, Blanc jj, Budaj a, Camm j, Dean V, Deckers j, Dickstein K, Lekakis j, McGregor K, Metra M, Morais j, Osterspey a, tamargo j, Zamorano jL, Deckers jW, Bertrand M, Charbonnel B, Erdmann E, Ferrannini E, Flyvbjerg a, Gohlke H, juanatey jR, Graham I, Monteiro PF, Parhofer K, Pyorala K, Raz I, Schernthaner G, Volpe M, Wood D: Guidelines on diabetes, pre-diabetes, and cardiovascular diseases: executive summary. the task Force on Diabetes and Cardiovascular Diseases of the European Society of Cardiology (ESC) and of the European association for the Study of Diabetes (EaSD). Eur Heart j 2007;28:88-136.

7. De Backer G, ambrosioni E, Borch-johnsen K, Brotons C, Cifkova R, Dallongeville j, Ebrahim S, Faergeman O, Graham I, Mancia G, Manger Cats V, Orth-Gomer K, Perk j, Pyorala K, Rodicio jL, Sans S, Sansoy V, Sechtem u, Silber S, thomsen t, Wood D: European guidelines on cardiovascular disease prevention in clinical practice. third joint task Force of European and Other Societies on Cardiovascular Disease Prevention in Clinical Practice. Eur Heart j 2003;24:1601-1610.

8. alkerwi a, Sauvageot n, Donneau aF, Lair ML, Couffignal S, Beissel j, Delagardelle C, Wagener Y, albert a, Guillaume M: First nationwide survey on cardiovascular risk factors in Grand-Duchy of Luxembourg (ORISCaV-Lux). BMC Public Health 2010;10:468.

9. Suivi des maladies du coeur et des accidents vasculaires cérébraux au Canada. 2009:1-115.

remerciements

Ce travail a été soutenu par le fonds national de la recherche.

nous tenons a remercier tous les participants à l'étude ORISCaV-Lux ainsi que la stëftung hëllef doheem pour sa contribution au déroulement de l'enquête.

nous remercions également l'université de Liège, école de santé publique, pour nous avoir permis d'utiliser le Food Frequency Questionnaire.