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En 1466, au cours du voyage qui le conduisit de Prague à Saint-Jacques de Compostelle et retour, et lui fit visiter les souverains et princes occidentaux, afin, notamment, de déterminer leur position quant au conflit qui mettait alors aux prises, sur la question hussite, le pape Paul II et le roi de Bohême Georges de Poděbrady, Léon, seigneur de Rozmital et de Blatna, beau-frère du précédent, fut manifestement fort étonné lorsqu’il se trouva mis en pré- sence, à la cour de Philippe le Bon, de ceux qu’il déclare appelés spurii en Bohême, les bâtards en l’occurrence, trois des fils illégitimes du duc pour être précis. Il remarque en particulier qu’ils ne sont pas tenus pour quantité négli- geable, qu’ils partagent le repas du comte de Charolais, que, dans ces régions, de tels enfants sont dotés de domaines, de biens qu’ils conservent au décès de leur père, et qu’un prince légitime ne peut en aucun cas leur refuser un duel. Mais, a-t-il soin de préciser, les cartels sont bien moins nombreux en ces contrées qu’en son pays 1 . À l’image de ce seigneur bohémien, la recherche 1. — L’un des deux récits de ce voyage, écrit en tchèque, ne subsiste que sous la forme d’une tra- duction latine : VENCESLAS SAšEK DE BIřKOV , Commentarius brevis et iucundus itineris atque per- egrinationis, pietatis et religionis causa suscepta ab illustri et magnifico domino, domino Leone, libero barone de Rosmital et Blatna, éd. K. Hrdina, Prague, 1951, p. 26, ici, comme infra, pour le passage qui m’intéresse. L’édition usuelle en pays tchèque est celle de R. URBáNEK, dans Ve službách Jiříka krále. Deníky panoše Jaroslava a Václava Šaška z Bířkova, Prague, 1940, p. 54. Trad. fr.: Voyage par les pays d’Occident du seigneur de Bohême Léon de Rozmitál, chevalier, ambassadeur et pèlerin, dans De la Bohême jusqu’à Compostelle. Aux sources de l’idée d’union européenne. Projet du roi Georges de Podebrady (1464). Récit du voyage en Europe du seigneur Léon de Rozmitál (1465-1467), éd. D. Péricard-Méa, Biarritz, 2008, p. 163 ; trad. angl. : The Travels of Leo of Rozmital through Germany, Flanders, England, France, Spain, Portugal and Italy 1465- 1467, éd. et trad. M. Letts, Cambridge, 1957, p. 39-40. Je remercie vivement mes collègues univer- sitaires tchèques et français de Tchéquie, MM. Vojtěch Bažant, Martin Nejedly et Nicolas Richard qui m’ont permis de citer l’édition de référence de ce récit. Le lecteur de la présente étude sera atten- tif au fait que je n’ai apporté d’informations à caractère biographique que sur les personnages qui me semblaient avoir eu de réelles relations avec Corneille de Bourgogne. Pour son élaboration, j’ai pu compter sur l’appui de mes collaborateurs Christophe Masson (Université de Liège) et Jonathan Dumont (Fonds de la Recherche Scientifique-FNRS – Université de Liège), de Kevin Schneider CORNEILLE, BÂTARD DE BOURGOGNE (ca 1426-1452) ALAIN MARCHANDISSE REVUE DU NORD - N° 31 HORS SERIE COLLECTION HISTOIRE - 2015, P. 53-89

Corneille, Bâtard de Bourgogne (ca 1426–1452)

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En 1466, au cours du voyage qui le conduisit de Prague à Saint-Jacques deCompostelle et retour, et lui fit visiter les souverains et princes occidentaux,afin, notamment, de déterminer leur position quant au conflit qui mettait alorsaux prises, sur la question hussite, le pape Paul  II et le roi de BohêmeGeorges de Poděbrady, Léon, seigneur de Rozmital et de Blatna, beau-frèredu précédent, fut manifestement fort étonné lorsqu’il se trouva mis en pré-sence, à la cour de Philippe le Bon, de ceux qu’il déclare appelés spurii enBohême, les bâtards en l’occurrence, trois des fils illégitimes du duc pour êtreprécis. Il remarque en particulier qu’ils ne sont pas tenus pour quantité négli-geable, qu’ils partagent le repas du comte de Charolais, que, dans ces régions,de tels enfants sont dotés de domaines, de biens qu’ils conservent au décès deleur père, et qu’un prince légitime ne peut en aucun cas leur refuser un duel.mais, a-t-il soin de préciser, les cartels sont bien moins nombreux en cescontrées qu’en son pays1. À l’image de ce seigneur bohémien, la recherche

1. — L’un des deux récits de ce voyage, écrit en tchèque, ne subsiste que sous la forme d’une tra-duction latine : VENCESLAS SAšEk DE BIřkOV, Commentarius brevis et iucundus itineris atque per-egrinationis, pietatis et religionis causa suscepta ab illustri et magnifico domino, domino Leone,libero barone de Rosmital et Blatna, éd. k. Hrdina, Prague, 1951, p. 26, ici, comme infra, pour lepassage qui m’intéresse. L’édition usuelle en pays tchèque est celle de R.  URBáNEk, dans Veslužbách Jiříka krále. Deníky panoše Jaroslava a Václava Šaška z Bířkova, Prague, 1940, p. 54.Trad. fr. : Voyage par les pays d’Occident du seigneur de Bohême Léon de Rozmitál, chevalier,ambassadeur et pèlerin, dans De la Bohême jusqu’à Compostelle. Aux sources de l’idée d’unioneuropéenne. Projet du roi Georges de Podebrady (1464). Récit du voyage en Europe du seigneurLéon de Rozmitál (1465-1467), éd. D. Péricard-méa, Biarritz, 2008, p. 163 ; trad. angl. : The Travelsof Leo of Rozmital through Germany, Flanders, England, France, Spain, Portugal and Italy 1465-1467, éd. et trad. m. Letts, Cambridge, 1957, p. 39-40. Je remercie vivement mes collègues univer-sitaires tchèques et français de Tchéquie, mm. Vojtěch Bažant, martin Nejedly et Nicolas Richardqui m’ont permis de citer l’édition de référence de ce récit. Le lecteur de la présente étude sera atten-tif au fait que je n’ai apporté d’informations à caractère biographique que sur les personnages qui mesemblaient avoir eu de réelles relations avec Corneille de Bourgogne. Pour son élaboration, j’ai pucompter sur l’appui de mes collaborateurs Christophe masson (Université de Liège) et JonathanDumont (Fonds de la Recherche Scientifique-FNRS – Université de Liège), de kevin Schneider

CORNEILLE, BÂTARD DE BOURGOGNE(ca 1426-1452)

ALAIN mARCHANDISSE

REVUE DU NORD - N° 31 HORS SERIE COLLECTION HISTOIRE - 2015, P. 53-89

historique a été, elle aussi, intriguée par la bâtardise princière bourguignonneet, tout spécialement, par la ribambelle d’enfants illégitimes que le duc deBourgogne Philippe le Bon conçut avec la trentaine de ses amies de cœur2. Laplupart d’entre eux, les mieux documentés tout au moins, ont fait l’objetd’analyses scientifiques d’ampleur et de type divers. Antoine de Bourgogne,le Grand Bâtard3, a été maintes fois évoqué, en ce compris dans des textes degrande valeur, mais l’on conviendra que la biographie de référence du per-sonnage reste encore à écrire ; Baudouin de Bourgogne, lui, a fait l’objetd’une analyse exemplaire de la part de J.-m. Cauchies4. Parmi les hommesd’église, David et Philippe de Bourgogne, tous deux notamment évêquesd’Utrecht, ont été bien étudiés par S.  Zilverberg5 et J.  Sterk6. Il en va demême de la bibliothèque de l’abbé de Saint-Bavon Raphaël de mercatel,

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1. — (suite) (doctorant à l’Université de Liège), de collègues et amis, Jean-marie Cauchies(Universités Saint-Louis, à Bruxelles, et catholique de Louvain), monique maillard-Luypaert(Grand Séminaire de Tournai  –  Université Saint-Louis, à Bruxelles), Pit Peporte (Université duLuxembourg), Nicolas Ruffini-Ronzani (Université de Namur), Frédérick Vanhoorne (Université deLiège) et B. Van Hofstraeten (Université de maastricht) ainsi que sur la lecture attentive, augmentéed’utiles compléments, de la part de mon ami Bertrand Schnerb (Université de Lille 3). Que tous ensoient chaleureusement remerciés.2. — Sur la question de la bâtardise noble, l’étude de base reste celle de m. HARSGOR, « L’essor desbâtards nobles au xVe siècle », Revue historique, t. 253, 1975, p. 319-354. Voir en outre m. CARLIER,Kindere van de minne? Bastaarden in het vijftiende-eeuwse Vlaanderen, Bruxelles, 2001. Il existetoute une littérature consacrée aux bâtards ducaux bourguignons – à consulter cependant, pour l’es-sentiel, avec prudence : F. DE REIFFENBERG, « Enfants naturels du duc Philippe-le-Bon », Bulletins del’Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, t. 13/1, 1846, p. 172-187 ; t. 14/1, 1847, p. 585-597 (sur Corneille (= C.), voir p. 588-589) ; « Bourgogne. Descendanceillégitime de Jean sans Peur et de Philippe le Bon », Annuaire de la Noblesse de Belgique, t. 13,1859, p. 53-78 (C., p. 67-68) ; m. BERGé, « Les bâtards de la maison de Bourgogne et leur descen-dance », L’Intermédiaire des Généalogistes, t. 60, 1955, p. 316-408 (C., p. 588-589), ainsi que plu-sieurs mémoires de fin d’études : S. GILLOEN, La vie et le statut des enfants illégitimes : l’exempledes bâtards de Philippe le Bon, mémoire de maîtrise en Histoire, Université Charles-de-Gaulle – Lille 3, 1992, (C., p. 136-140, 170-171) ; V. VAN ELEwyCk, Les bâtards de Philippe le Bon,duc de Bourgogne. Étude critique, t.  2, mémoire de licence en Histoire, Université Libre deBruxelles, 1988-1989, (C., p. 187-191) – lorsque des cotes de documents d’archives sont mention-nées en note, ces deux mémoires affichent l’un, des erreurs répétées, l’autre, une réelle impréci-sion  –, et, surtout, D.  LéONARD, Corneille, Grand bâtard de Bourgogne, mémoire de licence enHistoire, Université de Liège, 2003-2004, un travail de qualité, dont la présente étude a tiré parti.3. — Voir en dernier lieu A. mARCHANDISSE, C. mASSON, « Les tribulations du Grand Bâtard Antoinede Bourgogne en Italie (1475) », Bourguignons en Italie, Italiens dans les pays bourguignons (xIVe-xVIe s.), éd. J.-.m. Cauchies, Publication du Centre européen d’Études bourguignonnes (xIVe-xVIe s.),t. 49, 2009, p. 23-49, spéc. p. 24 n. 2, pour la bibliographie.4. — J.-m. CAUCHIES, « Baudouin de Bourgogne (v. 1446-1508), bâtard, militaire et diplomate. Unecarrière exemplaire? », Revue du Nord, t. 77, 1995, p. 257-281 ; version mise à jour dans Château-fort de Fallais. Une alliance européenne au xVe siècle. Baudouin, bâtard de Bourgogne, et MarinaManuel, fondateurs de la branche Bourgogne-Fallais, [éd. A. de marneffe], Bruxelles, 2008, p. 56-87.5. — S. ZILVERBERG, David van Bourgondië, bisschop van Terwaan en van Utrecht (± 1427-1496),Groningue-Djakarta, 1951.6. — J. STERk, Philips van Bourgondië (1465-1524). Bisschop van Utrecht als protagonist van deRenaissance. Zijn leven en maecenaat. Philip of Burgundy (1465-1524). Bishop of Utrecht asProtagonist of the Renaissance. His Life and Maecenate, Zutphen, 1980.

confiée aux bons soins d’A.  Derolez7. Restait l’aîné de la fratrie bâtarde,Corneille de Bourgogne, jusqu’à présent parfaitement négligé par l’historio-graphie bourguignonne : nous allons tenter, dans les pages qui viennent, d’enbrosser un portrait aussi suggestif que possible, portrait à poursuivre, à creu-ser, sans doute – nous n’ambitionnons pas d’écrire ici une biographie exhaus-tive du personnage –, en particulier par une étude de son patrimoine foncier,de la gestion de celui-ci, et plus largement des questions financières y évo-quées, sujet qui sera loin d’être épuisé ici8.

* * *Corneille de Bourgogne porte un prénom biblique et thaumaturgique assez

rare chez les Valois de Bourgogne9. Filius ducis naturalis senior10, qui, préci-sons-le d’emblée, n’a jamais précédé son demi-frère Antoine dans le titre deGrand Bâtard de Bourgogne et porte tout simplement celui de Bâtard deBourgogne11, lequel pourrait bien être l’équivalent, pour le premier desbâtards, du titre de comte de Charolais, octroyé au duc héritier12, il naquit,

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7. — A. DEROLEZ, The Library of Raphael de Marcatellis, abbot of St. Bavon’s, Ghent, 1437-1508,Gand, 1979. L’on ne peut enfin passer sous silence la véritable étude consacrée à Anne deBourgogne, fille naturelle de Philippe le Bon et de Jacqueline van Steenberghe, par G.  DUPONT,Art. Anne van Bourgondië, Nationaal biografisch Woordenboek, t. 18, Bruxelles, 2007, p. 11-19.8. — Nous comptons, Bertrand Schnerb et moi, éditer tout ou partie d’un riche ensemble de quit-tances et certifications, conservées à Lille, Archives départementales du Nord (= AD Nord), B 2006et rendant compte, sous un jour particulièrement évocateur, des aléas financiers de la vie, tout spé-cialement privée, du personnage (voir infra). J’aurai donc l’occasion, dans cette publication, derevenir, avec toute la précision que ne nécessite pas l’approche biographique assignée à la présenteétude, sur la question du budget et des moyens pécuniaires à la disposition du Bâtard.9. — Ce prénom pourrait être inspiré de celui de ce centurion qui, dans les Actes des apôtres, appa-raît comme le premier « gentil » disciple du Christ après sa mort et premier baptisé, au Ier siècle,considéré comme saint et dont la fête est célébrée le 2 février (F. BROSSIER, « Corneille, premierpaïen converti », Aux origines du christianisme, Paris, 2000, p. 266). mais il m’apparaît plus plau-sible de penser qu’il s’agit plutôt ici du pape (251-253), martyr et saint Corneille, fêté le 14 sep-tembre, l’un des principaux guérisseurs, avec saint Ghislain, des convulsions, plus globalement del’épilepsie – aussi appelée « mal saint Corneille » – et des maladies nerveuses (m. BROCARD, Élogeet pratique des saints guérisseurs, yens-sur-morge, 2003, p. 50). Il semble aussi avoir été invoquépour une autre maladie convulsive, l’ergotisme, en particulier en Flandre, notamment à Ninove, quiavait Corneille comme patron (J. PIETERS, « Saint Corneille invoqué à Ninove contre le mal desArdents », Æsculape, t. 6, 1935, p. 150-156).10. — ADRIEN DE BUT, Continuatio Chronodromis Brandonis et Bekae, dans Chronique relatives àl’histoire de la Belgique sous la domination des ducs de Bourgogne (Textes latins), éd. J.-B.-m.-C. kervyn de Lettenhove, Bruxelles, 1870, p. 332.11. — C’est très exactement ainsi qu’il signe les lettres qu’il adresse à sa belle-mère, la duchesseIsabelle : La correspondance d’Isabelle de Portugal, duchesse de Bourgogne (1430-1471), éd.m. Sommé, Ostfildern, 2009, p. 189-194, tout comme d’ailleurs les documents très personnels évo-qués à la n. 8. Cette appellation apparaît également sur son « sceau armorié », lequel se révèle être,ici, un cachet (Bruxelles, Archives générales du Royaume (= AGR), Chambre des Comptes (= CC),Acquits des Chambres à Bruxelles, no 2130 (20 janvier 1447) ; J. T. DE RAADT, Sceaux armoriés desPays-Bas et des pays avoisinants (Belgique – royaume des Pays-Bas – Luxembourg – Allemagne –France). Recueil historique et héraldique, t. 1, Bruxelles, 1898, p. 310).12. — m. E. VAN DEN HEUVEL, « De verdediging van bastaarden door Olivier de la marche, eenvijftiende-eeuwse Bourgondische hoveling », Handelingen der Maatschappij voor Geschiedenis enOudheidkunde te Gent, nlle sér., t. 45, 1991, p. 59.

selon toute vraisemblance, aux environs de l’année 142613 des amours dePhilippe le Bon et de la dénommée Catherine de le Bourch, dite Scaers, elle-même de naissance illégitime14. De cette dernière, que le duc considéraitcomme sa bien amee damoiselle15, l’on peut probablement dire qu’elle élevason fils durant moins d’une dizaine d’années et l’on pressent qu’elle devaitavoir un certain talent de gestionnaire. Du 1er octobre 1437 au 1er mars 1441,notamment, elle officiera en effet comme bailli et receveur d’Elverdinge et deVlamertinge, deux seigneuries situées près d’ypres, au nom de Corneille, lelégitime détenteur desdites terres16, puis, après sa mort, du 16  septembre1457 au 16 septembre 1459, au nom de ses petits-fils, Jean et Jérôme17, les

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13. — Selon le Journal d’un bourgeois de Paris (1405-1449), éd. A. Tuetey, Paris, 1881, p. 304, destrois bâtards qui apparaissent aux côtés de leur père Philippe le Bon à Paris en avril 1435, le plus vieulx– Corneille, en l’occurrence – n’avoit pas plus de dix ans ou environ, ce qui fixerait l’année de sa nais-sance à 1425, date compatible avec les propos tenus dans un document, daté du 19 février 1435, parlequel Philippe le Bon confère Elverdinge et Vlamertinge à Corneille et où il est demandé à ce que lesgens de compte de Lille et tout un ensemble d’officiers ducaux fassent en sorte que le dessusnomméCornille bastard de Bourgogne par lui quant il sera en aage et durant sa minorité par cellui ou ceulxqui de par nous pour lui comme aiant de lui le bail, gouvernement et administration sont a ce ordon-nez et commis puisse(nt) jouir pleinement des biens en question (Lille, AD Nord, B 1606, fol. 44v– pour ce document comme pour les suivants, soit B 1607 et B 1609, j’utilise la pagination moderne enchiffres arabes et non, celle, contemporaine du document, en chiffres romains), tout comme avec celleattribuée à la naissance d’Antoine, cadet et successeur de Corneille au titre de premier bâtard de la fra-trie naturelle, par J.-m. CAUCHIES, Art. Antoine de Bourgogne, dit le Grand Bâtard, comte de La Roche(Ardenne), Sainte-menehould, Guînes, seigneur de Crèvecœur et Beveren (-waas), Les Chevaliers de l’Ordre de la Toison d’or, éd. R.  De Smedt, 2e éd., Francfort–Berlin–Berne–Bruxelles–New york–Oxford–Vienne, 2000, p. 129, sur la base de la déposition d’Antoine dans une enquête fran-çaise concernant l’authenticité du sauf-conduit accordé par le duc Charles le Téméraire au roi Louis xIà Péronne, recueillie le 30 mai 1478, où il y est dit âgé de « 50 ans ou environ » (Paris, Bibliothèquenationale de France (= BnF), ms. fr. 5042, fol. 9r), soit ca 1428. L’on pourrait peut-être cependant opterpour une date qui ne détonne en rien par rapport à ce qui précède, à savoir 1426, après le 4 juillet, dansla mesure où Corneille n’apparaît pas dans le premier testament de son père, daté du 4 juillet 1426 (éd.m. Gaude-Ferragu, dans ID., « métamorphoses testamentaires. Les dernières volontés de Philippe leBon, duc de Bourgogne (1426; 1441)  », Herrscher- und Fürstentestamente im WesteuropäischenMittelalter, éd. B. kasten, Cologne–weimar–Vienne, 2008, p. 473-486), alors qu’il est mentionné enbonne place dans le second testament, daté, lui, du 8 décembre 1441 (Lille, AD Nord, B 456/14764).Tout cela, en revanche, n’est pas en phase avec les dates avancées par m. SOmmé, « Les jeunes noblesà la cour de Bourgogne sous Philippe le Bon », Erziehung und Bildung bei Hofe. 7. Symposium derResidenzen-Kommission der Akademie der Wissenschaften zu Göttingen, Celle, 23. bis 26. September2000, éd. w. Paravicini, J. wettlaufer, Stuttgart, 2002, p. 71, pour laquelle Corneille et Antoine sont nésrespectivement en 1420 et 1421.14. — ID., Isabelle de Portugal, duchesse de Bourgogne. Une femme au pouvoir au xVe siècle,Villeneuve-d’Ascq, 1998, p. 65-67, extrêmement utile pour les développements du présent para-graphe. La bâtardise de Catherine Scaers est évoquée dans un acte de Philippe le Bon du 13 mai1457 (Lille, AD Nord, B 1607, fol. 177r-v).15. — Par exemple Ibid., fol. 176v-177v ; R. VAUGHAN, Philip the Good. The Apogee of Burgundy,rééd., woodbridge, 2002, p. 135.16. — Bruxelles, AGR, CC, nos 13929-13934 – deux comptes concernent les années évoquées ; s’yajoutent « quatre comptes, rendus par Jean du Gavere, commis au gouvernement desdites terres etseigneuries, au lieu de Catherine Scaers » –, pour la période 1er mars 1441-1er mars 1445 ; La cor-respondance d’Isabelle de Portugal, p. 213-214, no 149 (14 octobre 1447) ; J. VAN ROmPAEy, HetGrafelijk baljuwsambt in Vlaanderen tijdens de boergondische periode, Bruxelles, 1967, p.  625.Elverdinge : Belgique, prov. Flandre occidentale, arr. ypres, comm. ypres ; Vlamertinge : id.17. — Jérôme, chanoine en 1471, avec une dispense du pape Sixte IV (H. NéLIS, « Les bâtards de lamaison de Bourgogne », Revue belge de Philologie et d’Histoire, t. 1, 1922, p. 341, d’après Vatican,Archivio Segreto Vaticano, Registra Vaticana 660, fol. 80v-90r), protonotaire apostolique, eut lui

deux bâtards que Corneille avait eus de marguerite de Corbaulde, Corbaudeou Corbeau, selon les diverses formes attestées18. Entre-temps, après lesquelque 37 livres délivrées en 1434 pour lui aidier a soustenir son estat etavoir ses neccessitez19, Catherine Scaers avait à tout le moins reçu dePhilippe le Bon une pension de 500  livres parisis monnaie de Flandreoctroyée sur les tonlieux de Damme et de l’écluse20. Plus tard, alors que leBâtard est déjà décédé, il est question de 300 livres parisis de 20 gros mon-naie de Flandre portant sur les revenus des seigneuries d’Elverdinge et deVlamertinge21. Elle est décédée avant le 29 mai 1460, date à laquelle l’inven-taire de son mobilier est rédigé22. Une fois suffisamment âgé pour y faire sonentrée23, Corneille, comme ses frères et sœurs bâtards Antoine, David et

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17. — (suite) aussi un fils bâtard, Antoine, légitimé en 1530. Jean, légitimé en juillet 1470 (Lille, ADNord, B 1609, fol. 71r-v), † en 1479 à la bataille de Guinegate, fut conseiller-chambellan de Charlesle Téméraire, bailli de Cassel dès le 14 août 1470 (Ibid., B 4181, fol. 14v ; B 17708, chemise « Baillide Cassel » ; SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 138 et n. 73) ; il épousa marie de Hal(l)ewyn, dont ileut deux filles. À leur propos, voir DE REIFFENBERG, « Enfants naturels du duc Philippe-le-Bon »,t. 14/1, 1847, p. 588-589 ; « Bourgogne. Descendance illégitime de Jean sans Peur et de Philippe leBon », p. 68 ; BERGé, « Les bâtards de la maison de Bourgogne », p. 360-361 ; LéONARD, Corneille,p.  93-94 ; GILLOEN, La vie et le statut des enfants illégitimes, p.  139-140 ; VAN ELEwyCk, Lesbâtards de Philippe le Bon, p. 188.18. — Après avoir accordé (28 septembre 1452) la jouissance des revenus de ces biens à CatherineScaers durant l’année qui suivit la mort de Corneille, Philippe le Bon, inquiet de la situation de sesdeux petits-fils naturels mineurs, leur concéda, le 13 mai 1457, plusieurs terres, à titre viager, dontcelles dont il est ici question ; il chargea par ailleurs la même C. Scaers de s’occuper des enfants etde la gestion des biens qui leur avaient été concédés – deux comptes de Catherine Scaers concernentla période allant du 15 septembre 1457 au 16 septembre 1459 ; l’héritage de cette dernière, illégi-time, on l’a dit, ira également à ses petits-fils : Lille, AD Nord, B 1607, fol. 37v, 176r-177v, 182v-183r ; B 2037/62645 ; B 17667, chemise « De le Bourch (Catherine) dit Scaers, mère de Cornille, filzbastard de mgr le duc, apanage » ; B 17673, chemise « Bourgogne (Cornille, bâtard de). Terre deBeveren » ; B 17674 ; Bruxelles, AGR, CC, nos 13942-13943.19. — Lille, AD Nord, B 1951, fol. 139v (37 livres 4 sous du prix de 40 gros monnaie de Flandre,1434) = L. DE LABORDE, Les ducs de Bourgogne. Études sur les lettres, les arts et l’industrie pendantle xVe siècle, 2e part., t. 1, Preuves, Paris, 1849, p. 339, no 1136 (erreurs). Signalons encore qu’en1432, 45 francs 18 sous sont payés à Jacquemart de Langle, marchand de drap, pour 34 aunes dedrap d’ypres accordées par le duc aux mères de ses bâtards durant la période considérée (Ibid.,p. 262, no 916).20. — Lille, AD Nord, B 1999/60220 (25 mars 1448), 60219 (20 mai 1448) ; B 2003/60386 (23 mai1449) – quittances de 125 livres parisis pour les deux premiers termes de paiement de 1448 et lesecond de 1449, les 20 février et mai. Damme: Belgique, prov. Flandre occidentale, arr. Bruges ;L’écluse/Sluis : Pays-Bas, prov. Zélande.21. — Ibid., B 2011/61010 (12 mars 1453) ; B 2019/61499 (26  juin 1454) – quittances pour lestermes de Noël et de la Saint-Jean Baptiste.22. — Bruxelles, AGR, CC, no 50693.23. — Il est difficile de préciser cet âge. SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 65, parle d’une dizained’années. Elle se fonde sur GILLOEN, La vie et le statut des enfants illégitimes, p. 21, laquelle évoqueun âge de onze ou douze années, en faisant référence, sans doute sur la base d’H. PARENTy, « Jeannele maire, dame de Presles. Origines de monseigneur le Grand Bâtard », Mémoires de l’Académiedes Sciences, Lettres et Arts d’Arras, 2e sér., t. 32, 1901, p. 206, à un mandement de Philippe le Bondu 17  décembre 1432, selon lequel Jeanne le marie, dite de Presles, la mère du Grand BâtardAntoine, aurait résidé 29 jours à Arras, en compagnie de ce dernier, de sa cousine, d’une chambrièreet d’un serviteur, avant de rejoindre le duc à Bruges. Elle assumait donc semble-t-il la garded’Antoine à l’âge qu’il avait à ce moment-là. Si l’on retient la date de naissance avancée par J.-m. Cauchies (n. 13), soit les alentours de 1428, ce ne peut être guère plus que quatre ans environ. Sil’on opte pour celle proposée par m. Sommé (id.), cet âge passe à onze.

marie, tous trois nés avant Charles de Charolais, gagna la cour de Bourgogne.Des dépenses y seront consenties en 1432 pour les vêtements des deuxbâtards aînés du duc24, et, en 1433 et en 1435, pour des bijoux offerts à troispetits enfants bastards25, puis à ceux dont le nombre, entre-temps, est passé àquatre. Le 14 avril 1435, Corneille et d’autres bâtards ducaux participent àl’entrée de Philippe le Bon à Paris, à son retour de Bourgogne. Il se déplace àcheval là où Charolais occupe une litière26. En 1436, comme d’autres filsnaturels, il fait des études à Louvain27. Il y travaillera sous la férule d’AntoineHaneron28, le diplomate et humaniste français bien connu, futur précepteurde Charles, un duc héritier dont Corneille et d’autres bâtards partagèrentl’existence. Le compte de l’aumônier de Charolais fait en effet état desoffrandes de l’ensemble de la fratrie29. L’épisode louvaniste constitue pourl’historien l’une des premières occasions de saisir combien Isabelle dePortugal, la troisième épouse de Philippe le Bon, qui n’a pas connu la nais-sance de Corneille, puisque celle-ci a eu lieu, à notre estime, alors quePhilippe le Bon était veuf de sa seconde épouse, Bonne d’Artois, se montraparticulièrement attentive au bien-être de Corneille et, plus largement, desbâtards de son époux. En octobre 1438, compte tenu de l’épidémie de pestequi règne alors à Louvain, elle y envoie un chevaucheur chargé de ramenerles bâtards ducaux à Lille30. Dans la suite, la duchesse témoignera régulière-ment son affection à Corneille. Le 20  novembre 1437, déjà, le contrat demariage avec Jean  II de Neuchâtel de l’une de ses demoiselles d’honneur,marguerite de Castro, stipulait que si cette dernière venait à mourir sans héri-tier, la seigneurie de Saint-Aubin31 et une moitié d’une somme de 10 000saluts ou de l’équivalent en biens qu’elle lui avait concédés devaient revenirà la duchesse puis, à sa mort, à Corneille et à sa sœur marie, ou à leursenfants32. Isabelle s’investira également dans la gestion des biens deCorneille, protégeant ses avoirs, tout comme ceux de sa mère d’ailleurs, dès144133. En 1447, elle veille à ce que Catherine Scaers, alors à la tête des

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24. — Item pour la façon et estoffes de deux robes de gris a grans manches fronchees et decoppeespar dessoubz au fer et au taillant pour les deux bastards de monseigneur […] Item a Louvain deuxmanteaulx de brunette pour les deux bastards de monseigneur pour façon de chascun manteau […].Lille, AD Nord, B 1945, fol. 201r.25. — LABORDE, Les ducs de Bourgogne, 2e part., t. 1, Preuves, p. 324, 344, nos 1090, 65.26. — Journal d’un bourgeois de Paris, p. 304.27. — Lille, AD Nord, B 1957, fol. 321v ; B 1966, fol. 118r.28. — Sur ce personnage, voir H.  STEIN, «  Un diplomate bourguignon du xVe siècle : AntoineHaneron », Bibliothèque de l’École des chartes, t. 98, 1937, p. 283-348 ; R. wELLENS, Art. Haneron(Antoine), Biographie nationale, t.  35, Supplément, t.  7, Bruxelles, 1970, col.  338-343 ; SOmmé,Isabelle de Portugal, p. 56-58 ; Prosopographie des secrétaires de la cour de Bourgogne (1384-1477), éd. P.  Cockshaw, Ostfildern, 2006, p.  133-134, no 230. Voir aussi, ici même, l’art. dem. maillard-Luypaert, sur Jean de Bourgogne, n. 10.29. — Lille, AD Nord, B 1972, fol. 241r.30. — Ibid., B 1966, fol. 155v.31. — Saint-Aubin : France, dép. Jura, arr. Dôle, cant. Chemin.32. — Paris, BnF, ms. Naf. 8727, fol. 64r, mentionné par SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 66-67.33. — Lille, AD Nord, B 1972, fol. 103r.

avoirs de Corneille à Elverdinge, ne soit pas pénalisée par la situation plusque précaire qu’avaient abandonnée les précédents gestionnaires et entendgarder un œil sur tout34. Il n’en ira pas autrement après le décès de Catherine.Isabelle prendra alors en charge la tutelle des enfants de Corneille35. Enfin,pour en terminer avec les relations entre ce dernier et sa belle-mère, ilconvient de signaler combien la correspondance échangée, en mai 1445, parces deux personnes qui n’étaient pas unies par le sang, trahit confiance,connivence, affection, du côté de Corneille, une certaine autorité, un réelascendant sur son beau-fils, de la part d’Isabelle36.

Si Corneille s’acquitta de sa première obligation officielle, la premièredont nous ayons connaissance tout au moins, en faisant partie de l’escortequi, en juin-juillet 1443, accompagna le duc Philippe le Bon lorsque celui-cirencontra, à Chalon-sur-Saône, le duc Louis Ier de Savoie et son épouse, Annede Lusignan37, c’est la campagne de Luxembourg qui constitua la première etl’une des deux principales expéditions militaires auxquelles Corneille parti-cipa38. On le sait, la cession toute temporaire de l’administration de l’enga-gère luxembourgeoise qu’avait consentie le margrave Josse de moravie, en1401, au duc Philippe le Hardi, tout comme les deux mariages successifs, en1402 et en 1409, de l’oncle de Philippe le Bon, Antoine de Bourgogne, toutd’abord avec Jeanne de Luxembourg, la fille de waleran de Luxembourg,comte de Saint-Pol, membre d’une branche cadette du lignage deLuxembourg, puis avec élisabeth de Görlitz, bientôt détentrice en viager eten mort-gage du duché de Luxembourg, son époux devenant mambour et gar-dien de la même terre, offrait quelque légitimité à toute prétention bourgui-gnonne à la succession du duché de Luxembourg. Après plusieurs accordsavec élisabeth, veuve d’Antoine puis de Jean de Bavière, l’ancien élu deLiège, qui avait fait de Philippe son héritier pour les fortes positions qu’ils’était ménagées en Hollande et en Zélande, ce dernier fut investi de l’en-semble des droits luxembourgeois de la duchesse. Philippe s’était trouvé dansl’intervalle en butte à l’opposition de l’oncle d’élisabeth, l’empereur

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34. — Les gens de comptes sont chargés par la duchesse d’enquêter sur la gestion, par les prédéces-seurs de Catherine Scaers, des biens, en bien mauvais état, qui ont été remis à celle-ci (14 octobre1447). La correspondance d’Isabelle de Portugal, p. 213-214, no 149.35. — Ibid., p. 304-305, no 216 (13 août 1463).36. — Ibid., p. 189-194, nos 131-133 (7, 15 et 28 mai [1445]).37. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, éd. H. Beaune, J. d’Arbaumont, t. 1, Paris, 1883, p. 257-258 (p. 257 n. 3 : le duc de Savoie arriva à Chalon alors que Philippe le Bon y achevait son séjour[29 juin-10 juillet 1443]).38. — Sur cet épisode, aux tenants et aboutissants extrêmement complexes et dont l’on n’évoque icique la trame générale, voir les synthèses de B. SCHNERB, L’État bourguignon. 1363-1477, Paris,1999, p. 214-223 et de VAUGHAN, Philip the Good, p. 274-285. Plus largement, voir F. RICHTER, DerLuxemburger Erfolgestreit in den Jahren 1438-1443, Leipzig, 1888-1889 ; A. GATHON, La politiqued’annexion des ducs de Bourgogne à l’égard du duché de Luxembourg, mémoire de licence enHistoire, Université de Liège, 1938 – encore mentionné comme référence par A. ATTEN, « Jeanne-Claude des Armoises – ein Abenteuer zwischen maas und Rhein – 1436 », Kurtrierisches Jahrbuch,t. 19, 1975, p. 65 n. 34.

Sigismond, de ses héritiers, sa fille élisabeth, son gendre le duc d’Autrichepuis roi des Romains Albert II de Habsbourg, de ceux auxquels élisabeth deLuxembourg, faute de moyens financiers, céda ses droits sur le Luxembourg,à savoir sa fille aînée Anne et son gendre le duc Guillaume III de Saxe, sou-tenu par le roi des Romains Frédéric, et, potentiellement, du fils de la mêmeélisabeth, Ladislas le Posthume, le tout ponctué par les interventions territo-rialement très intéressées de l’archevêque de Trèves Jacques de Sierck. C’estalors que Philippe le Bon choisit de s’immiscer militairement dans les terri-toires luxembourgeois. À l’été 1443, à Dijon, il prit la tête d’une armée corus-cante qui comptait dans ses rangs notamment les neveux du duc, Jean etAdolphe de Clèves39, le comte Charles Ier de Nevers, Philippe de Bourbon,seigneur de Beaujeu, neveu et peut-être filleul de Philippe le Bon, etCorneille, Bâtard de Bourgogne, qui, ce jour […] tira son premier estandartaux champs, et fit l’assemblée des cent lances qu’il avoit de charge, en laplace qui est devant la chapelle de la Thoison d’or, et bailla son estandart àporter et en garde à ung escuyer de la conté de Bourgoingne, nommé Jehande Monfort40. Cette armée fit toute l’admiration de celui auquel l’on doit lacitation précédente, Olivier de La marche, à l’époque tout jeune page ducal,lequel a conservé le souvenir de quelques-unes des interventions de Corneilleau cours de cette expédition. Celui-ci se trouve entouré des hommes d’armesque la duchesse Isabelle et Corneille lui-même avaient conviés à lerejoindre41 et à l’entourer en sa premiere armée, formée d’une centaine delances42, à savoir Thibaut, bâtard de Neufchâtel43, Guillaume de Grenant44,

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39. — Il s’agit des fils d’Adolphe  Ier, duc de Clèves (1373-1448), et de marie de Bourgogne(† 1463), la sœur de Philippe le Bon : Jean  Ier, duc de Clèves-La marck (* 1419-1449-1481), etAdolphe, seigneur de Ravenstein (* 1425-1450-1492). Voir P. DE wIN, Art. Jean Ier, duc de Clèves,comte de La marck et Adolphe de Clèves, seigneur de Ravenstein, de wijnendale et de Dreischor,Les Chevaliers de l’Ordre de la Toison d’or, p. 109-112, 131-134.40. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, Paris, 1884, p. 10-11. Sur l’escouade de Corneille,voir également Ibid., p. 4.41. — Ibid., t. 2, p. 12 ; Lille, AD Nord, B 1978, fol. 104r-v.42. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 4, 12.43. — Il s’agit du fils bâtard de Jean  Ier de Neuchâtel, seigneur de montaigu et de Fontenoy-le-Château, et d’Isabelle de Villers, lui-même seigneur de Nanteuil-la-Fosse (1423), Arrentières(1424), Courtignon, Herpont, Void et Conflans (1428), de Chemilly, Breuxey, Cernay-en-Dormois,Saint-Lambert, Imecourt (1432), chambellan du duc, capitaine légitimé en 1424 par le roid’Angleterre Henri VI et à l’origine d’une descendance comtoise et champenoise. Il épousa Amelinede Bavans, puis Catherine de Vergy. Voir J. DEBRy, Art. Jean Ier de Neuchâtel, seigneur de montaiguet de Fontenoy-le-Château, Les Chevaliers de l’Ordre de la Toison d’or, p. 54 ; SOmmé, Isabelle dePortugal, p. 279, 432 ; D. SCHwENNICkE, Europäische Stammtafeln, nlle sér., t. 11, Familien vomMittel- und Oberrhein und aus Burgund, marbourg, 1986, tabl. 142 ; J.-F. RICHARD, Recherches his-toriques et statistiques sur l’ancienne seigneurie de Neuchâtel, au comté de Bourgogne, Besançon,1840, p. 196.44. — Seigneur de Pailly, écuyer d’écurie de Philippe le Bon, capitaine de gens d’armes de ce der-nier dès 1435, capitaine de Luxembourg et lieutenant du gouverneur Rodophe de Hochberg denovembre 1468 à sa mort le 20 avril 1477 – en particulier contre les ennemis internes, mais aussiexternes, en provenance de France et de Lorraine –, des fonctions qu’il assumait déjà en 1445-1447.Il sera nommé au Conseil de Luxembourg le 4  avril 1475 (infra). Voir Recueil du Fay. DieBriefsammlung des Claude de Neufchâtel zur Geschichte Karls des Kühnen 1474-1477 (1505),

les seigneurs de Couches45 et de Saint-Bris46, Jean du Bois, écuyer tranchantde Charolais47, Antoine de Saint-Simon, échanson du duc48, d’autres encore.À Cattenom, près de Thionville49, où l’armée ducale fait halte, Corneilleréside en compagnie de Jean, comte d’étampes50, participe aux escar-mouches portées contre la ville la plus hostinée contre le duc qui fust en toutle pays51, puis assume le commandement de l’armée en compagnie du même

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44. — (suite) éd. T.  Sgryska, P. k-Schnocks, H.  von Seggern, Ostfildern, 2003, p.  23, 64-65 etn. 160, 98-101, 104-106 ; OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 49, 302 et n. 4 ; A. TUETEy, Lesécorcheurs sous Charles VII. Épisodes de l’histoire militaire de la France au xVe siècle d’après desdocuments inédits, t. 1, montbéliard, 1874, p. 31-32, 359 et n. 2, 364 ; t. 2, p. 98 et n. 1, 217, 221-223, 226, 233, 424-427 ; é. BAUER, Négociations et campagnes de Rodolphe de Hochberg, comte deNeuchâtel et marquis de Rothelin, gouverneur de Luxembourg (1427 (?)-1487), Neuchâtel, 1928,p. 34 n. 2 ; N. VAN wERVEkE, « Notice sur le Conseil provincial de Luxembourg avant sa réorganisa-tion par Charles-Quint (c. 1200-1531) », Publications de la Section historique de l’Institut royalgrand-ducal de Luxembourg, t. 40, 1889, p. 263, qui donne 1446 comme date du début de sa pre-mière mission de lieutenant du gouverneur du Luxembourg.45. — Il pourrait s’agir de Claude de montaigu, seigneur de Couches, né vers 1406 et décédé en1471, conseiller-chambellan ducal ca 1438 et fait chevalier de la Toison d’or lors du 11e chapitre, àBruges, le 14  mai 1468. Voir J.  RICHARD, Art. Claude de montaigu, seigneur de Couches, LesChevaliers de l’Ordre de la Toison d’or, p. 163-164.46. — Sachant que la mère de Claude de montaigu, seigneur de Couches (n. précédente), est Jeannede mello, dame d’époisses et de La Ferté-Chauderon, l’on peut légitimement se demander si ce sei-gneur de Saint-Bris n’est pas un membre de la branche Saint-Bris du lignage de mello. Jeanne demello, dont l’on vient de parler, était l’arrière-petite-fille de Guillaume Ier de mello, † 1283/1285,seigneur d’époisses et de Givry, et d’Agnès de Saint-Vérain, dame de Vézinnes et Givry. Son frèreDreu  III (ou  V) de mello, †  1310, seigneur de Bréchard, Saint-Bris, époisses, Château-Chinon,Baulche, Lormes, Givry, et sa troisième épouse, Jeanne de Trie, † apr. 1309, eurent pour arrière-petit-fils Dreu VI de mello, † av. 1417, marié à Isabelle de Noyers, dame de Vandeuvre, † apr. 1446,auxquels l’on attribue un fils, Charles de mello, seigneur de Saint-Bris et de Vendeuvre, encore envie en 1450, marié, en premières noces, à Isabeau Aycelin de montaigu, dame de Listenois et de laRoche-milay, en secondes à Catherine de Rougemont, dame de Rougemont, de Tilchâtel, de Ruffey,d’Augey et de Saint-Bris. Peut-être peut-on, à titre d’hypothèse, retenir cette identification. VoirIbid. ; L. mORERI, Le Grand dictionnaire historique, t. 4, Paris, 1732, p. 1003 ; URL : http://racine-shistoire.free.fr/LGN/PDF/mello.pdf (consultation le 18 juillet 2012).47. — Il apparaît comme tel dans l’ordonnance de l’hôtel, perdue et reconstituée, de Philippe le Bonpour Charles de Charolais de 1456. Voir Die Hofordnungen der Herzöge von Burgund, t. 1, HerzogPhilipp der Gute, 1407-1467, éd. H. kruse, w. Paravicini, Ostfildern, 2005, no 18, p. 345-346, § 24,63. Dans OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 4, Paris, 1888, p. 210-211, il est différencié de Jeandu ou de Bois, alias Jean de Vos, Ost ou Fox, lieutenant du capitaine du château de Gavre, et de Jeandu Bois ou du Bos, seigneur du Bois, Hannekin, Vermelles, bailli de Cassel, conseiller-chambellandu duc de Bourgogne, qui était mort en 1496.48. — SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 269 n. 70. Il était le fils de Gaucher de Rouvroy, seigneur deSaint-Simon et de Raches-lez-Douai, chambellan du duc de Bourgogne (1416), et de Jeanne dewavrin († ca 1421). Voir OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 4, p. 320 ; URL : http://racineshis-toire.free.fr/LGN/PDF/wavrin.pdf (consultation le 24 juillet 2012).49. — Cattenom: France, dép. moselle, arr. Thionville-Est, chef.-lieu de cant. ; Thionville : France,dép. moselle, chef.-lieu d’arr. et de cant.50. — Jean de Bourgogne (* 1415-1491), comte d’étampes, était le fils de Philippe de Bourgogne–  le troisième fils de Philippe le Hardi  – et de Bonne d’Artois, laquelle sera aussi la deuxièmeépouse de Philippe le Bon. Il était aussi le frère cadet de Charles, comte de Nevers, mentionné plushaut, mort sans descendance, ce qui permit à Jean de prendre le titre de comte de Nevers et deRethel. Voir m.-T. CARON, Art. Jean de Bourgogne, comte d’étampes, Les Chevaliers de l’Ordre dela Toison d’or, p. 125-129 ; ID., « Jean, comte d’étampes, en 1437-1438 : un prince dans les allées dupouvoir  », Finances pouvoirs et mémoire. Hommage offerts à Jean Favier, éd. J.  kerhervé,A. Rigaudière, Paris, 1999, p. 313-322.51. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 21.

étampes, prend position avec lui à Esch-sur-Alzette et guerroyoient et que-roient leurs advantures chascun d’ung cousté et d’aultre52. Le hérautQuesnoy se rendra auprès d’Ernest, comte de Gleichen et seigneur deBlankenhain53, principal représentant du duc de Saxe dans le Luxembourg,afin de lui proposer, en vain d’ailleurs, un combat singulier avec étampes,Corneille ou un autre des Bourguignons54. En fait, en octobre 1443, la cam-pagne était déjà en passe de s’achever. Tout le duché est conquis, hormisThionville et Luxembourg, cette dernière ville passant sous contrôle bourgui-gnon dans la nuit du 20 au 21 novembre de la même année, une prise à l’es-calade à laquelle le Bâtard, qualifié de bon chef de guerre par La marche,contribua par la préparation des actions militaires mises en œuvre à cetteoccasion55. Corneille accueillera Philippe le Bon lors de son entrée dans laville56. Par le traité qui fit suite aux actions militaires, les Saxons acceptèrentd’évacuer Thionville, tandis que le couple ducal de Saxe prétendait renoncerà ses prétentions sur le duché de Luxembourg contre une importante sommed’argent. Ces accords ne furent guère suivis d’effets, ce qui n’empêcha pas leduc de Bourgogne d’imposer sa mainmise sur le Luxembourg, comme« mambour et gardien ». C’est tout naturellement son fils Corneille, aupara-vant capitaine et prévôt des ville et prévôté de Luxembourg57, qu’il substi-tuera, en février 1444, au comte Ruprecht (Robert) IV de Virneburg, cheva-lier de la Toison d’or58, au titre de lieutenant et capitaine general ès devantdit pays de Luxembourg et Chiny, un Corneille jeusne, et […] pas encore bien

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52. — Ibid., t. 2, p. 33-35. Esch-sur-Alzette, Grand-duché de Luxembourg, dist. Luxembourg, cant.Esch-sur-Alzette, ch.-l. de canton.53. — Il s’agit d’Ernest  Ix de Gleichen, seigneur de Blankenhain et d’Altenberga (1416), deRemda, Schauenforst et krakendorf (1432), membre du conseil privé de l’électeur de Saxe, gouver-neur du Luxembourg (1439), bailli de weida (1457), documenté de 1415 à 1458, † 1461 ; marié àélisabeth Vitzthum von Apolda, seigneur de Remda (1461), documentée de 1453 à 1492, † 1492,fille d’Appel II Vitzthum von Apolda (1379-1438) et de klara von Bernwalde (1381-1443). VoirD. SCHwENNICkE, Europäische Stammtafeln, nlle sér., t. 19, Zwischen Weser und Oder, Francfort,2000, tabl. 99.54. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 34.55. — Ibid., t. 2, p. 39.56. — Ibid., p. 41.57. — C’est-à-dire lieutenant du premier représentant du duc, mambour et gouverneur des duchié deLuxembourg et conte de Chiny, appelé lieutenant général es duchié de Luxembourg et conté deChiny, soit Virnebourg, évoqué plus bas. Voir F.-x.  wüRTH-PAQUET, «  Table chronologique deschartes et diplômes relatifs à l’histoire de l’ancien pays de Luxembourg  », Publications de laSection historique de l’Institut royal grand-ducal de Luxembourg, t. 29, 1875, p. 20, no 21.58. — Sur ce personnage, voir V. RöDEL, Art. Ruprecht IV, comte de Virneburg, Les Chevaliers del’Ordre de la Toison d’or, p. 80-81. Le 11 février 1444, les échevins de Luxembourg, qui souhai-taient que le successeur de Virneburg saiche le pays, le langaige, et qu’il ait grande puissance etautorité tant sur le Ryn que aultre part, et pour pourveoir aux affaires du dit pays en votre absence,et qu’il ait puissance de resister, si aulcune affaire survenait, et que par grands amys soit soustenu,demandent à Philippe le Bon d’opter pour le propre fils du défunt, ce que le duc déclare ne pas pou-voir faire, puisque, avant réception des lettres scabinales, il avait désigné Corneille (voir wüRTH-PAQUET, « Table chronologique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 29, p. 21-22, nos 22-23 etn. suivante).

expert ès affaires desdits pays59, et dès lors flanqué par son père d’unensemble de conseillers60 parmi lesquels, semble-t-il, notamment, évrard de

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59. — Ibid., p. 22-23, no 23 ; OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 48-49 ; ADRIEN DE BUT,Continuatio, p. 274 ; GEORGE CHASTELLAIN, Chronique, 1430-1431, 1452-1453, dans ID., Œuvres,t. 2, Bruxelles, 1863, p. 234 ; ID., Le livre des faits du bon chevalier messire Jacques de Lalaing,dans ID., Œuvres, t. 8, Bruxelles, 1866, p. 38 ; mATTHIEU D’ESCOUCHy, Chronique, éd. G. du Fresnede Beaucourt, t. 2, Paris, 1863, p. 43 ; HENRI D’OPPREBAIS, Chronique rimée de l’abbaye de Floreffe,dans Monuments pour servir à l’histoire des provinces de Namur, de Hainaut, de Luxembourg, éd.F.  de Reiffenberg, t.  8, Bruxelles, 1848, p.  161 ; JEAN DE STAVELOT, Chronique, éd. A.  Borgnet,Bruxelles, 1861, p.  524 ; CORNEILLE DE ZANTFLIET, Chronicon, éd. E.  martène, U.  Durand,Amplissima Collectio, t. 5, Paris, 1729, col. 449.60. — Selon OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 48-50, et demoura son gouverneur avec luyung nommé Guillaume de Sainct Saigne, ung moult notable escuyer, et aussi Phillibert de Vauldrey,Guillaume de Grenant et grant foison de Bourguignons. Les éditeurs précisent p. 50 n. 1, qu’ils for-ment le Conseil de justice, c’est-à-dire le Conseil (provincial)/du duché/du pays de Luxembourg,composé, d’après J. BERTHOLET, Histoire ecclésiastique et civile du duché de Luxembourg et comtéde Chiny, t. 7, Luxembourg, 1743, p. 443, outre Corneille, de Jean l’Orfèvre, chancelier de Brabant,président, de Jean de Raville, seigneur de Septfontaines, chevalier, de Guillaume de Bolant, sei-gneur de Rollé, de Guillaume de Saint-Seine, seigneur de Charmaille, capitaine du château deLuxembourg, et d’Henri de Remerschen, licencié en droit. D’après wüRTH-PAQUET, « Table chrono-logique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 29, p. 22, no 23, soit le texte de la désignation deCorneille, comme son représentant, par Philippe le Bon, le 16 février 1444, édité d’après deux édi-tions déclarées fautives et sans renvoi à un document d’archive, avons ordonné et commis pour luyassister et conseiller, messire Bernard de Breschiet et messire Everard de Grypremont et le seigneurde Soleuvre et Philippe de Vauldrey, par advis et conseil desquels et des aultres de nostre conseil pardelà, dit Corneille se debura gouverner et conduire en toute manière que lui surviendront. Si l’on encroit VAN wERVEkE, « Notice sur le Conseil provincial de Luxembourg », p. 257-258, 260, 272-273,lors de sa prise de fonctions à Luxembourg, Corneille se trouva entouré d’un conseil formé d’ungouverneur, président, lui-même en l’occurrence – un lieutenant gouverneur, en l’absence du gou-verneur  –, et de six membres –  là où le comte Ruprecht de Virneburg n’aurait eu que deuxconseillers, évrard de Gymnich et messire Bract de Bricourt, vostre bailly de Bourgogne : wüRTH-PAQUET, « Table chronologique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 29, p. 21, no 22 –, conseilexerçant l’ensemble du pouvoir civil et militaire (nomination et destitution des officiers, publicationdes ordonnances, justice en appel), soit : évrard de Gymnich, Bernard de Burscheid, Jean deRollingen/Raville, de Bensdorf, seigneur de Septfontaines (D.  SCHwENNICkE, EuropäischeStammtafeln, nlle sér., t.  26, Zwischen Maas und Rhein 2, Francfort, 2009, tabl.  75), Jean deBolchen/Boulay (Ibid., tabl.  69) et Guillaume de Boland, seigneur de Rollé (Ibid., nlle sér., t.  7,Familien des alten Lotharingien, marbourg, 1979, tabl. 113), précisant que tous ne furent pas payéssur la recette du Luxembourg, ce qui signifie qu’ils ne furent pas explicitement nommés membresdu Conseil du pays de Luxembourg, mais attachés directement au gouverneur. Reste que Raville(†  15  avril 1461), et plus encore Boland (†  18  février 1466), nommés conseiller à la mort deGymnich, le 6 septembre 1448, pour le premier, probablement à celle de Bourscheid, le 19 octobre1453, pour le second, furent agrégés au Conseil bien après la désignation de Corneille. Quant àBoulay, nommé le 14 mars 1452, puis le 4 août 1468, † 18 décembre 1468, est-il identifiable au per-sonnage homonyme que Philippe le Bon désigne en 1444, ce que ne pense pas van werveke – unecharte datée du 9 mai 1398 contient les noms de Jean de Boulay, seigneur de Soleuvre, mentionnéensuite le 23 octobre 1451, et de Jean, seigneur de Soleuvre, une autre, du 18 septembre 1416, deJean de Boulay et de Jean de Soleuvre, ce qui implique, compte tenu du demi-siècle séparant 1398et 1451, l’existence d’au moins deux Boulay ; le second Soleuvre restant pour sa part, distinct et àl’identité imprécise, même si ce dernier semble avoir appartenu à l’entourage des ducs deLuxembourg et avoir été maître d’hôtel d’élisabeth de Görlitz (1416) : A. VERkOOREN, Inventairedes chartes et cartulaires du Luxembourg (Comté puis duché), t. 4, Bruxelles, 1917, p. 51-59, 139-140, 162-164, 166-168, 187-188, 255-256, 552, nos 1415, 1538, 1568, 1569, 1573, 1574, 1597,1683. L’on peut légitimement se demander si les propos de La marche concernent le Conseil pro-vincial ou, plutôt, un entourage informel issu de celui qui assista Corneille durant les événementsmilitaires qui concoururent à la prise du duché de Luxembourg.

Gymnich, seigneur de Berbourg61, un ancien conseiller d’élisabeth deGörlitz, jadis gouverneur du Luxembourg, Bernard, seigneur deBourscheid62, lui aussi un proche de la duchesse, Philibert de Vaudrey63,conseiller et chambellan du duc, des conseillers auxquels s’ajoutèrent sans

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61. — évrard de Gymnich –  issu d’une très ancienne famille des environs de Cologne dont unebranche cadette prit pied dans le Luxembourg vers le milieu xIIIe puis une importance majeure ausein de la noblesse de ces pays –, seigneur de Dudelange et de Berbourg, membre du conseil deBrabant et de Luxembourg en 1390, gouverneur du Luxembourg (pour le quartier allemand) en1413 (nommé le 26 août) et du 25 janvier 1421 au 11 mars 1423, décédé entre le 7 janvier et sep-tembre 1448. évrard est le digne représentant d’un lignage qui traditionnellement fournissait desconseillers aux princes luxembourgeois  – son père, winemar, à l’égard de Baudouin deLuxembourg, archevêque de Trèves, son frère, prénommé aussi winemar, tout comme lui, envers leroi wenceslas, Josse de moravie puis Antoine de Bourgogne. Voir SCHwENNICkE, EuropäischeStammtafeln, t. 26, tabl. 118 ; VERkOOREN, Inventaire des chartes et cartulaires du Luxembourg, t. 4,p. 166-167, 187, 232-233, nos 1573, 1597, 1655 ; m. mARGUE, Recherches sur la noblesse du duchéde Luxembourg au xVe siècle. Essai de classification et étude des relations interfamiliales, mémoirede maîtrise, Université de Strasbourg, 1981-1982, p. 48-50, n. p. 42-43, tabl. 12. VAN wERVEkE,« Notice sur le Conseil provincial de Luxembourg », p. 259, 272, dit de lui qu’il accompagna élisa-beth de Görlitz lors de ses voyages à Dijon, et qu’il fut nommé conseiller aux gages annuels de300 florins du Rhin par patentes datées du 21 février 1444, des gages concédés jusqu’au 31 mars1449, après sa mort, donc. P.  PEPORTE souligne, dans Identity in Later Medieval Luxembourg,mémoire de master of Science, Université d’édimbourg, 2003, p.  33, que les Gymnich et lesBourscheid (infra) sont les seules familles du duché qui, à la fois, participèrent au pouvoir dès lexIVe siècle et garderont des positions influentes après la conquête bourguignonne, la stratégie despremiers consistant à soutenir le détenteur du duché, quel qu’il soit, là où Bourscheid, dont il va êtrequestion, en revanche, change de camp plus radicalement, au gré des pots de vins qui lui sontoctroyés.62. — Bernard Ier (1394-1451/3), seigneur de Bourscheid, körich et Bertrange (1433), vassal del’archevêque de Trèves (1401), prévôt de Thionville (1409), prévôt de Luxembourg (1409-1421),drossard du duché de Berg (1433), patricien de Cologne (1438), décédé entre le 24 août 1451 et le13  janvier 1453 (Schwennicke) ; prévôt de Luxembourg du 7  mai 1409 au 24  novembre  1411,proche, conseiller du duc de Juliers-Berg (1422-1444), Aussenbürger, Edelbürger, bourgeois forainnoble de Cologne en 1440, dernière mention le 24 août 1451 (Vannérus) ; Decker, mêmes informa-tions que Schwennicke à propos de Trèves, Thionville, Luxembourg (prévôt, 1409-1411, le suivantapparaît en 1421), Cologne, †  février 1453. Voir SCHwENNICkE, Europäische Stammtafeln, t.  26,tabl. 55 ; Regesten des Archivs der Herren von Bourscheid, éd. F. Decker, t. 1, 1224-1558 (RegestenNr. 1-494), Bourscheid/Luxembourg–Coblence, 1989, p. 50-69 ; J. VANNéRUS, « Les Seigneurs deBourscheid. II. De Bernard Ier (1394-1451) à Bernard IV (1476-1512) », Les Cahiers luxembour-geois, 1939/2, p. 149-171 ; VAN wERVEkE, « Notice sur le Conseil provincial de Luxembourg »,p. 272, selon lequel sa nomination se fit à la même date et aux mêmes gages qu’évrard de Gymnich,lesquels gages furent acquittés jusqu’au 1er mars 1453.63. — Chevalier, écuyer d’écurie, conseiller-chambellan du duc, gouverneur du Tonnerois et del’Auxerrois, bailli d’Amont, prévôt d’Arlon, † 4 mars 1453 : OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 4,p. 334 ; bailli de Dole de 1436 au 19 décembre 1438 : J. THEUROT, Dole. Genèse d’une capitale pro-vinciale. Des origines à la fin du xVe siècle. Les structures et les hommes, t. 2, Dole, 1998, p. 403 ;maître de l’artillerie ducale (1442-1455) avec 100  francs de pension annuelle : SCHNERB, L’Étatbourguignon, p. 268-269 ; mATTHIEU D’ESCOUCHy, Chronique, t. 2, p. 569. Il fut lieutenant du gou-verneur du Luxembourg entre le 16 février 1444 et 1445 : VAN wERVEkE, « Notice sur le Conseilprovincial de Luxembourg  », p.  263. Voir aussi wüRTH-PAQUET, «  Table chronologique  »,Publications de l’Institut grand-ducal, t. 29, p. 43, 47, 70-71, nos 44, 54, 140.

doute Guillaume de Saint-Seine64, alors moult notable escuyer65, Guillaumede Grenant et Antoine de Saint-Simon, déjà mentionnés66. Corneille conser-vera ce poste lorsque, à la mort d’élisabeth de Görlitz, en 1451, Philippe leBon abandonnera la mambournie du duché de Luxembourg pour en devenirle seigneur engagiste, reconnu comme tel par les états luxembourgeois67.

La lieutenance et capitainerie générale de Corneille de Bourgogne partageapour l’essentiel le calme que connut le duché de Luxembourg jusqu’en 1451.Le Bâtard y suscrira essentiellement des actes de la pratique, lettre de sauve-garde, consignation d’actes féodaux, de reliefs de fiefs, de décisions de jus-tice, confirmations de privilèges68, etc., des actes pour l’élaboration desquels

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64. — Seigneur de Charmoilles, maître de l’hôtel du duc Charles le Téméraire, lieutenant du gou-verneur du Luxembourg entre 1452 et 1468, fait échanson ducal en 1465, membre du conseil deLuxembourg entre 1463 – nommé par lettres patentes le 11 décembre 1463 – et août 1475, date desa mort. Voir D. SCHwENNICkE, Europäische Stammtafeln, nlle sér., t. 15, La Bourgogne au MoyenÂge, marbourg, 1993, tabl.  163 (le dit †  après 1478) ; OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t.  4,p.  320 ; VAN wERVEkE, «  Notice sur le Conseil provincial de Luxembourg  », p.  263, 274-275 ;Recueil du Fay, p. 113 n. 759, 132, 134, 139, 140, 141 ; H. STEIN, Catalogue des Actes de Charles leTéméraire (1467-1477), mit einem Anhang: Urkunden und Mandate Karls von Burgund, Grafenvon Charolais (1433-1467), éd. S. Dünnebeil, Ostfildern, 1999, p. 689, no 2793.65. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 49.66. — Sur ces personnages, voir n. 44 et 48.67. — Ibid., t. 2, p. 206-207 ; wüRTH-PAQUET, « Table chronologique », Publications de l’Institutgrand-ducal, t. 30, 1876, p. 13-17, nos 15-16.68. — Par exemple Luxembourg, Archives nationales (= AN), Section ancienne, Fonds anciens,A–LII–14, Archives de la Maison Mohr de Waldt-Reinach, Chartes et titres divers, 1440-1448,nos 1554 (C. lieutenant et gouverneur général des duché de Luxembourg et comté de Chiny, 11 sep-tembre 1445), 1584 (= wüRTH-PAQUET, « Table chronologique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 29, p. 74, no 162 ; ID., « Chartes de la famille de Reinach déposées aux Archives du Grand-duché de Luxembourg », Publications de la Section historique de l’Institut royal grand-ducal deLuxembourg, t. 33, 1879, p. 272-273, no 1584) (C. lieutenant gouverneur et capitaine général desduché de Luxembourg et comté de Chiny, 24 septembre 1447) ; Luxembourg, AN, Section histo-rique de l’Institut grand-ducal de Luxembourg, Abt.  17, no 32 (C. gouverneur du duché deLuxembourg, 24 janvier 1447) ; wüRTH-PAQUET, « Table chronologique », Publications de l’Institutgrand-ducal, t. 29, p. 45, 68, 75, 79, 80-81, 100, nos 49 (C. lieutenant général et capitaine général duduché de Luxembourg et comté de Chiny, 27 août 1444), 131 (C. lieutenant gouverneur et capitainegénéral des duché de Luxembourg et comté de Chiny ; témoin : Guillaume de Saint-Seine,21 décembre 1446), 166 (= Cartulaire ou recueil des documents politiques et administratifs de laville de Luxembourg, éd. F.-x.  würth-Paquet, N.  van werveke, Luxembourg, 1881, p.  92-95)(C. gouverneur et capitaine général ès duché de Luxembourg et comté de Chiny, 4 novembre 1447),192 (C., lieutenant gouverneur et capitaine général des duché de Luxembourg et comté de Chiny,8  août 1448), 194 (11  septembre 1448), 258 (C. gouverneur du Luxembourg, 1451) ; wüRTH-PAQUET, « Chartes de la famille de Reinach », p. 267, 298-299, 320-321, nos 1534 (C. lieutenant etgouverneur-général des duché de Luxembourg et comté de Chiny pour le duc de Bourgogne et deBrabant, mambour des dits pays pour la duchesse en Bavière et de Luxembourg, comtesse de Chiny,21 septembre 1445), 1729 (feu C., chevalier et gouverneur des duché de Luxembourg et comté deChiny, 2 décembre 1457), 1834 (feu C. chevalier, lors gouverneur des dits duché de Luxembourg etcomté de Chiny, 28  juin 1463) ; ID., N.  VAN wERVEkE, «  Archives de Clervaux analysées etpubliées », Publications de la Section historique de l’Institut royal grand-ducal de Luxembourg,t. 36, 1883, p. 186, 192, nos 920 (C. lieutenant et gouverneur-général du duché de Luxembourg et ducomté de Chiny pour le duc de Bourgogne, mambour des dits pays pour la duchesse de Bavière,9 octobre 1445), 951 (C. lieutenant du duc de Bourgogne dans les pays de Luxembourg et de Chiny,5 août 1448) ; VERkOOREN, Inventaire des chartes et cartulaires du Luxembourg, t. 4, p. 201, no 1724(C. lieutenant et gouverneur général des duché de Luxembourg et comté de Chiny, 11 juin 1445) ;R.  PETIT, Inventaire des archives du prieuré du Val-des-Écoliers à Houffalize, Bruxelles, 1971,p. 144, no 151 (C. gouverneur des duché de Luxembourg et comté de Chiny, 16 mai 1446).

il ne s’affranchira jamais du conseil dont l’avait flanqué Philippe le Bon.Ainsi, par exemple, évrard de Gymnich, Bernard de Burscheid et Philibert deVaudrey apparaissent-ils comme témoins dans l’acte par lequel, le 15 avril1445, Corneille, par l’advis et deliberation des gens du conseil de notre dittrès redoubté seigneur, estans delez nous, déclare que les habitants demarville peuvent contraindre les clercs, nobles et officiers acquéreurs debiens issus de la bourgeoisie à contribuer au paiement des aides et à l’entre-tien des fortifications de la ville69. En définitive, trois épisodes belliqueuxseulement semblent avoir scandé la mission luxembourgeoise du Bâtard.Début mai 1445, Corneille, que la duchesse Isabelle de Portugal, qui menaitalors, à Châlons-en-Champagne, la délégation bourguignonne qui devaitintervenir au cours des conférences visant à régler l’ensemble des litiges quis’étaient multipliés depuis le traité d’Arras70, avait convié à la rejoindre afinqu’il puisse lui rendre compte des intrusions françaises constatées dans lesterres soumises à son autorité, lui déclare ne pas pouvoir se rendre enChampagne. Il met en avant les déprédations commises notamment parRobert de Floques71 et ses troupes d’écorcheurs, lesquels ont, selon le Bâtard,après peut-être Arlon et messancy et avant notamment Orval, porté leurattaque sur la prévôté d’Arlon, assaillant une vingtaine de villages, emmenantune centaine de prisonniers et plusieurs milliers de têtes de bétail. Le dauphinLouis, le maréchal de France André de Laval, le sénéchal Pierre de Brézés’efforcèrent d’obtenir réparation de Floques, mais ce dernier s’y refusa,arguant de dommages subis de son côté, notamment de la part du demi-frèrede Corneille, Antoine, le futur Grand Bâtard. Aussi Corneille, qui récusetoute exaction commise par ses hommes – mais il s’est tousiours excusé quese n’avoient point fait ses gens, et les miens sont tousiours demourés mors etdestroussés, déclare Floques72 –, demanda-t-il à Isabelle de tenter d’obtenirgain de cause auprès du roi Charles VII, à coup sûr commanditaire de cesexactions visant à peser, en faveur de la France, sur les pourparlers alors encours, à raison des 5  606 florins auxquels il estimait les pertes subies73.

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69. — wüRTH-PAQUET, « Table chronologique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 29, p. 50-51, no 70. Un autre témoin est appelé Guillaume de Sainct-Nanque. Il est probable qu’il s’agisse deGuillaume de Saint-Seine. marville : France, dép. meuse, arr. Verdun, cant. montmédy.70. — SCHNERB, L’État bourguignon, p. 192 ; SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 404-408.71. — Sur cet écuyer d’écurie du roi de France, capitaine royal lors du siège de meaux et de la prised’évreux, en 1439 et en 1441, bailli et capitaine d’évreux dès cette même année (1441-1461), éga-lement l’un des capitaines des compagnies de l’ordonnance (1445), maréchal de Normandie (1461),voir A. PLAISSE, Un chef de guerre du xVe siècle, Robert de Flocques, bailli royal d’Évreux, maré-chal héréditaire de Normandie, conseiller et chambellan du roi, évreux, 1984 ; J.  FAVIER, Art.Floques (Robert de), Dictionnaire de la France médiévale, Paris, 1993, p. 420.72. — PLAISSE, Robert de Flocques, p. 252.73. — La correspondance d’Isabelle de Portugal, p. 189-196, nos 131-134 ; OLIVIER DE LA mARCHE,Mémoires, t. 2, p. 7 n. 2 ; PLAISSE, Un chef de guerre, p. 107-108, 252-255 ; J. RIGAULT, « Ravages dela guerre de Cent ans. Les écorcheurs en Luxembourg et en Rethelois en 1445 », 104e Congrèsnational des Sociétés savantes, Bordeaux, 1979, Bulletin philologique et historique, 1981/1, p. 153-160. messancy : Belgique, prov. Luxembourg, arr. Arlon, comm. messancy ; Orval : abbaye de cis-terciens à Villers-devant-Orval, Belgique, prov. Luxembourg, arr. Virton, comm. Florenville.

Corneille connut des problèmes parfaitement similaires avec évrard deLa marck74, un autre allié de la France et par ailleurs très proche parent duprince-évêque de Liège Jean de Heinsberg, et les écorcheurs français qu’ilavait pris à sa solde et auxquels il avait confié diverses forteresses. Les ten-sions entre cet évrard et Philippe le Bon seront tellement exacerbées qu’ellessusciteront, en cette même année 1445, les prémices d’une guerre entreHeinsberg et le duc, l’intervention épiscopale contre évrard, son filleul, depréférence à une expédition menée par Philippe, et diverses intrusions duBâtard et d’Antoine de Croÿ, premier gouverneur et capitaine général ducomté de Namur, dans les états épiscopaux75. Corneille ravagera en particu-lier les terres de Rochefort et de marcourt76. En août, il conseillera enrevanche à l’évêque de faire en sorte que la forteresse de Rochefort, teileplache et si belle fortrechte, ne soit pas anéantie et assistera à la reddition decelle d’Agimont77. En 1447, le Bâtard sera encore partie prenante dans unconflit territorial opposant les princes de Clèves, le duc Adolphe et son filsaîné Jean, à l’archevêque de Cologne Thierry II de moers, soutenu par le ducde Saxe78. Le 2 juillet 1447, Philippe le Bon, qui s’adresse au maréchal deBourgogne, ainsi qu’aux gens de conseil et de comptes de Dijon, signifiequ’il entend bien que les divers nobles auxquels il écrit par ailleurs se mettentsus en armes chacun à certaine quantité de gens, jusques aud. nombre dequatre-vingt-cinq hommes, ainsi qu’il aparra plus à plain par les Lettres quesurce escript ledit Bâtard au maréchal, afin qu’ils puissent aller portersecours à Corneille, qui pourrait bien alors se trouver confronté à unGuillaume de Saxe qui avait de nouveau manifesté son intention d’envahir leLuxembourg79. En fin de compte, cette troupe constitua sans doute, pour

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74. — Sur ce personnage, fils d’évrard  II de La  marck, seigneur d’Arenberg, et d’Agnès dewalcourt-Rochefort, voir J. DE CHESTRET DE HANEFFE, Histoire de la Maison de la Marck, y comprisles Clèves de la seconde race, Liège, 1898, p. 107-109. Sur ce qui suit et sur le prélat liégeois (1419-1455), voir A. mARCHANDISSE, «  Jean de Heinsberg ou le dilemme d’un prince-évêque de Liègeécartelé par des options politiques antagonistes », Hommes d’Église et pouvoirs à l’époque bourgui-gnonne (xIVe-xVIe s.), éd. J-.m. Cauchies, Publication du Centre européen d’Études bourguignonnes(xIVe-xVIe s.), t. 38, 1998, p. 74.75. — JEAN DE STAVELOT, Chronique, p. 552-559, 564-567 ; ADRIEN D’OUDENBOSCH, Chronicon, éd.C. de Borman, Liège, 1902, p. 23-25 ; CORNEILLE DE ZANTFLIET, Chronicon, col. 453-454, 459-460 ;mATTHIEU D’ESCOUCHy, Chronique, t.  1, Paris, 1863, p.  72-79 ; ENGUERRAND DE mONSTRELET,Chronique, éd. L. Douët d’Arcq, t. 5, Paris, 1860, p. 230.76. — JEAN DE STAVELOT, Chronique, p. 556 ; ADRIEN D’OUDENBOSCH, Chronicon, p. 24 ; Voir aussiLa correspondance d’Isabelle de Portugal, p.  189-190, 196, nos 131, 135. Rochefort : Belgique,prov. Namur, arr. Dinant ; marcourt : Belgique, prov. Luxembourg, arr. marche-en-Famenne, comm.Rendeux.77. — JEAN DE STAVELOT, Chronique, p. 565, 567. Agimont : Belgique, prov. Namur, arr. Dinant,comm. Hastière.78. — mATTHIEU D’ESCOUCHy, Chronique, t.  1, p.  99-106, spécialement p.  103 ; OLIVIER DELA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 113-114 ; VAUGHAN, Philip the Good, p. 282-283.79. — U. PLANCHER, Histoire générale et particulière de Bourgogne, t. 4, Dijon, 1781, Preuves,p. CxCV-CxCVI – le maréchal doit transmettre les injonctions ducales ; le Bâtard lui fera par ailleurssavoir quand le duc souhaite que le maréchal les reçoive et les passe à montre ; sont par ailleurs défi-nis le montant de la solde assignée à ces militaires et les voies et moyens qui doivent permettre aumaréchal de rassembler la somme nécessaire à ces paiements ; OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires,

partie, la force de soutien aux Clèves que commandèrent le Bâtard et Louisde Luxembourg, comte de Saint-Pol80. Fin 1451-début 1452, enfin, Corneillese verra reprocher par l’archevêque de Trèves Jacques de Sierck des interven-tions jugées illicites dans des territoires revendiqués par chacun d’eux81.

Si les sources ne nous permettent pas de décrire dans le détail la vie offi-cielle, publique, de Corneille, laquelle semble d’ailleurs avoir eu la discrétionde ce que l’on serait tenté d’appeler des débuts dans la vie, il nous est enrevanche parfaitement loisible d’évoquer sa vie privée de prince bourguignondu milieu du xVe siècle, et ce en particulier grâce à un très riche ensemble dequittances et certifications conservées aux Archives du Nord à Lille, la quasi-totalité d’entre elles concernant l’année 1450 et des achats réalisés dans lepays de Luxembourg où le Bâtard officiait82. L’on précisera tout d’abord que,manifestement, Corneille disposait de moyens financiers tout à fait considé-rables. Le 19 février 1435, Philippe le Bon lui concéda en viager les seigneu-ries d’Elverdinge et de Vlamertinge83, puis, le 20  janvier 1443, celle

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79. — (suite) t. 2, p. 48-49 n. 1. Voir encore mATTHIEU D’ESCOUCHy, Chronique, t. 1, p. 105 n. 2, oùil est précisé que les troupes mandées par le duc se mirent en route après le 6 août et que des lettresdu maréchal et des gens de conseil de Dijon, les 13 et 27 juillet, demandèrent que leur rassemble-ment soit accéléré, avec renvoi à Paris, BnF, Coll. de Bourgogne, t. 21, fol. 85-88.80. — mATTHIEU D’ESCOUCHy, Chronique, t. 1, p. 103 ; OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2,p. 113-114. Le Bâtard disposait de 55 hommes d’armes ou de trait, payés 12 fr. par mois, d’après unmandement de Philippe le Bon du 19 novembre 1447, Lille, AD Nord, B 1994.81. — Le 4 décembre 1451, l’archevêque demande à Philippe le Bon de faire en sorte que Corneillene fasse pas «  des emprises  » dans ses états, notamment à raison de la seigneurie de Bruch(Allemagne, Land Rhénanie-Palatinat, Landkreis Bernkastel-wittlich), frappée d’interdit pontifical,et lui envoie la correspondance ad hoc. Le 26 janvier 1452, il offre à Corneille de lui prouver queladite seigneurie a appartenu à l’archevêché, lui demandant de produire les documents contrairesémanant du Luxembourg. Le 28 janvier, il scelle un compromis remettant le jugement à une dateultérieure, si un accord ne s’est pas fait jour dans l’intervalle. wüRTH-PAQUET, « Table chronolo-gique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 30, p. 19, no 23.82. — Lille, AD Nord, B 2006. L’on aurait pu aussi disposer, semble-t-il, de six rouleaux de parche-min représentant les comptes des dépenses de la maison de Corneille pour juin, juillet, août etdécembre 1450, ainsi que pour janvier 1451, mais ces derniers se sont révélés introuvables lors denotre passage dans leur lieu de conservation : Bruxelles, AGR, Audience et papiers d’état, no 21/1-6. Voir H.  NELIS, Inventaire analytique des Archives de l’audience et des papiers d’État, t.  1,Bruxelles, 1992, n. p. ; http://search.arch.be/ead/pdf/BE-A0510_000799_003354_FRE.ead.pdf (à lap. 51).83. — Lille, AD Nord, B 1606, fol. 44v. Outre les comptes de Catherine Scaers ou de celui qui luifut substitué (voir n.  16), l’on possède un compte de Jean Voet, depuis le xxVIIe jour de janvierM CCCC xxxIIII (1435 n.  st.) qu’il fu commis et institué oudit office par monseigneur le duc deBourgoingne et de Brabant, conte de Flandre, et pour lui jusques au xIIIIe jour de may aprés ensui-vant mil CCCC xxxV lun et lautre jours inclux. Et depuis ledit xIIIIe jour de may jusques a la saintRemy mil CCCC xxxVII excluz pour et ou nom de Cornille de Bourgoingne, filz illegitisme de monditseigneur le duc et deux autres pour la période allant du 24 avril 1445 au 23 avril 1447. Bruxelles,AGR, CC, nos 13928, 13935. Un autre, concernant les années 1443-1450, est conservé à Bruges,Archives de l’état, Fonds de la ville et châtellenie de Furnes, no 1157 bis, anc. Bruxelles, AGR, CC,no 44750, d’après R.-H. BAUTIER, J. SORNAy, F. mURET, Les sources de l’histoire économique etsociale du Moyen Âge, t. 2, Les États de la Maison de Bourgogne, vol. 1, Archives des principautésterritoriales, 2, Les principautés du Nord, Paris, 1984, p. 100.

d’Espierres-Helchin et une maison près de Zeveren84, les deux premiers bienset l’ensemble ayant été détenus auparavant, respectivement, par Louis, dit LeHaze de Flandre, puis par Robert de Flandre, fils illégitimes du comte deFlandre Louis de male85. Le 19 février 1444, la donation en viager sera élar-gie à la descendance légitime de Corneille, mais fera retour au comté deFlandre si cette dernière fait défaut86, ce qui n’empêchera pas Philippe leBon, on l’a vu, de concéder Elverdinge et Vlamentinge aux enfants bâtards deCorneille87. En 1442, semble-t-il, Vlissingen, westkapelle et Domburg s’yajouteront ; Adriaan van Borsele88, qui n’était pas encore l’époux d’Anne deBourgogne, fille bâtarde de Philippe le Bon, en recevra le bail à ferme pourneuf années à la mort de Corneille, laquelle transaction n’est pas remise encause par la vente que Philippe le Bon opère, l’année suivante, à Henri II vanBorsele, seigneur de Veere89. Avant 1446 et le 18 janvier 1448, c’est au tourde la seigneurie de Nieuwkerk90, puis, notamment, d’une maison sise àBruges91, destinée à Catherine Scaers, puis à Corneille et à ses enfants légi-times de tomber dans l’escarcelle de Corneille. Le 8  août 1449, enfin, la seigneurie de Beveren92 est concédée au Bâtard, et, a priori, là encore, à ses

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84. — Lille, AD Nord, B  1606, fol.  89r-v.  Espierres-Helchin/Spiere-Helkijn : Belgique, prov.Flandre occidentale, arr. Courtrai ; Zeveren : Belgique, prov. Flandre orientale, arr. Gand, comm.Deinze.85. — CARLIER, Kindere van de minne ?, p. 150-151, le fait remarquer.86. — Lille, AD Nord, B 1606, fol. 89r-v.87. — Pour le destin de ces biens et la gestion de ces derniers par leur grand-mère Catherine Scaers,voir n. 18.88. — Adriaan van Borselen, chevalier, seigneur de Brigdamme, Zoutelande et Saint-Laurent (1417-† 1468), fils de Jacques van Borssele et d’Anne de Hennin, châtelain et drossard de Gouda (1444),capitaine de Biervliet (1453), bailli de mons (1464), conseiller-chambellan des ducs Philippe etCharles de Bourgogne, marié en secondes noces, le 5 décembre 1457, à Anne, la fille naturelle dePhilippe le Bon, laquelle Anne, veuve d’Adriaan, se remariera avec Adolphe de Clèves, seigneur deRavestein. D. SCHwENNICkE, Europäische Stammtafeln, nlle sér., t. 18, Zwischen Maas und Rhein,Francfort, 1998, tabl. 38 ; A. w. E. DEk, Genealogie der Heren van Borselen, Zaltbommel, 1979,p. 31-32 ; H. OBREEN, « Bijdragen tot de kennis der middeleeuwsche geslachten van Holland enZeeland. Het geslacht van Borselen », De Nederlandsche Leeuw, t.  45, 1927, col.  329-330 ;Art.  Borssele (Adriaan van), Biographisch Woordenboek der Nederlanden, t.  1, Harlem, 1852,p.  292 ; A.  F.  VAN BEURDEN, Art.  Borselen, Adriaan van, Nieuw Nederlandsch biografischWoordenboek, t. 9, Leyde, 1933, réimpr. Amsterdam, 1974, col. 86-87 (erreurs).89. — Lille, AD Nord, B 1606, fol. 210r; éd. A. SANDER(U)S, Flandria illustrata, t. 3, La Haye, 1735,p.  218; Cartularium van de heren van Veere uit het geslacht van Borsele 1282-1481, 1555, éd.I. P. Back, P. Blom, P. A. Henderikx, H. J. Vader, J. w. Zonderlan, Hilversum, 2007, p. 40 († 1469), 157-162, 172-181. Vlissingen: Pays-Bas, prov. Zélande; westkapelle: id., comm. Veere; Domburg: id.90. — Lille, AD Nord, B 1997/60147 (20 novembre 1447). Nieuwkerk/Neuve-église : Belgique,prov. Flandre occidentale, arr. ypres, comm. Heuvelland.91. — Ibid., B 1606, fol. 168v-169r ; B 17687, chemise « Bourgogne (Jean et Jérôme de), enfants dubatard Cornille  ». La maison en question, dite maison «  mourquerque  », sise dans laNoortsantstrate, appartenait aux biens d’un bâtard, Philippe de Roulers/Roeselare, biens qui échu-rent à Philippe le Bon.92. — Ibid., fol. 210r ; éd. SANDER(U)S, Flandria illustrata, t. 3, p. 216-218 ; Bruxelles, AGR, CC,Chartes du sceau de l’Audience, Chartes, no 176. L’enquête que commanda le duc sur la valeur de laseigneurie (terre, rentes, revenus, fiefs, justice) réalisée par le receveur de Flandre et le receveur desexploits du Conseil de Flandre, et la « prisée », par ces derniers, de ladite seigneurie, en 1449, sontconservées. S’y ajoute un compte du châtelain et receveur de la seigneurie de Beveren pour lesannées 1451-1452. Voir Ibid., Carton 2151 et no 6889.

descendants après lui, mais, en fin de compte, après retour au domaine ducalà la mort de Corneille93, c’est le Bâtard Antoine qui en devient propriétaire94.Le 11 mai 1446, Corneille bénéficia par ailleurs, à compter du 1er mai de lamême année, d’une pension annuelle de 3 000 francs de 32 gros monnaie deFlandre le franc, laquelle pension sera perçue jusqu’à ce que le duc aitoctroyé à son fils VIm francs de rente heritable en fortresses, terres, seignou-ries, rentes et revenues chascun an, comprise en ce la revenue des terres etseignouries de Elverdinghes et de Vlessinghes situees es pays de Flandres etde Zeelande dont ledit Cornille possesse apresent95. Alors que, en août 1449,la seigneurie de Beveren lui est concédée par le duc, ce dernier précise qu’illui a pieça ordonné jusques à la somme de six mil frans […] de revenu par anpour luy, en faire assiete et assignation en nos pays et seignouries, à titrehéréditaire légitime, et que cette concession lui est faite pour la valeur que lesbiens en question pevent et pourront valoir par chascun an en deduction etrabat de ladicte somme de six mille frans96. Outre quelque somme d’argentpour des dépenses ponctuelles ou de courtoisie97 et bien sûr tout l’argentnécessaire au plein exercice de ses responsabilités luxembourgeoises et à lagestion militaire du duché98, il sera par ailleurs alloué à Corneille, à plusieursreprises, une partie des aides imposées au Luxembourg, notamment quelque5450 florins du Rhin prélevés par le duc en mai 1446 et en mars 1450,compte tenu des dépenses que la charge du gouverneur occasionnait auBâtard, en particulier l’entretien des gens de guerre qu’il tient soubz lui esdiz

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93. — Lille, AD Nord, B 17673, chemise « Bourgogne (Cornille, bâtard de). Terre de Beveren ».94. — Par un acte de Philippe le Bon daté du 23 juillet 1452 (Beveren, Archives de l’état, Land vanwaas, 3194, fol. 45v-48r – copie de 1675).95. — Ibid., B 1991, fol. xLVIIIr.96. — Voir n. 92.97. — Quelques exemples : 1) un don de 20 sous pour avoir aucunes ses menues necessitez en 1440– on n’est sans doute pas loin ici d’« un argent de poche », puisque Corneille, selon l’hypothèse quenous posons (n. 13), avait alors quatorze ans – (Ibid., B 1969, fol. IIC LxIIIr) ; 2) quatre cens soixantedouze livres dix solz [40 gros monnaie de Flandre] pour recheter son scelle qu’il avoit baillé audamoiseau de Commercy pour la finance a quoy il avoit mis a rancon Jehan de Rochebaron et Ectordu Sovet, nommez cy devant, lesquelz ledit Commercy avoit prins et detenoit prisonniers au tempsque mondit seigneur avoit guerre a luy (Ibid., B 1988, fol. VIIIxx xIIIIr, 1er avril 1445-31 mars 1446)(d’autres dons pour des chevaux [Ibid., fol. VIIIxxv, IxxxVIIIv]) ; deux cents écus d’or [même valeur],le 25 avril 1450, venant de la composicion de certains compaignons nagaires prins et detenuz auditVlissinghes a cause du ravissement par eulx fait d’une femme vesve du paus de Flandres, […] pourconsideracion des bons et agreables services qu’il lui a fais et espoire que encore faire doye outemps advenir (Ibid., B 2004, fol. IIC LxxIIIv-IIC LxxIVr). Il est évidemment question ici de Robert deSarrebrück, seigneur de Commercy (*  ca 1400-†  ca  1462), plutôt «  Armagnac aux confins duroyaume », qui constitue un alter ego pour les Robert de Floques et autres écorcheurs, mentionnéssupra, et fit de la rançon l’un des éléments fondamentaux de l’« économie de la guerre » dont il futle chantre. Voir, récemment, V.  TOUREILLE, Robert de Sarrebrück ou l’honneur d’un écorcheur,Rennes, 2014.98. — Ainsi Lille, AD Nord, B 1988, fol. IIC LIIIr-LVr (1444-1445) (financement de troupes et part deCorneille dans celui-ci) ; B 2004, fol. LVIIIv (id.), IIc LxxIIIIr (achat de douze harnois de guerre pourlui et ses hommes), IIIC LxxIIIIv-IIIC LxxVr (financement de troupes) (1450) ; B 17304 (pension de1000 florins par an).

pais de Luxembourg99. En 1450 et 1451 – il est permis de s’en étonner,compte tenu de ce qui précède –, il est toujours question d’une pension de3000 francs, pour partie de laquelle Corneille émet des quittances100. Enfin,dans son testament du 8 décembre 1441, le duc Philippe préconisait de luiléguer la somme de 6 000 livres101. À la mort du Bâtard, Guillaume de Saint-Seine, un de ses très proches conseillers, sera chargé, très probablement surinitiative ducale, de régler les dettes que son maître avait contractées102.manifestement, Corneille avait un très large usage de tout l’argent qui luiétait concédé. De celui-ci, mais aussi de ceux auprès desquels le Bâtard ledépense ou d’autres le font pour lui, la comptabilité bourguignonne nousoffre une vision vraiment très précise, tout spécialement pour les années1450-1451. Ses fournisseurs, nombre de membres de son entourage, en parti-culier ceux qui, d’une manière ou d’une autre, gèrent son argent, et, plus lar-gement, tous ceux qui peuplent son quotidien s’y trouvent mentionnés. Parmices derniers, il y a lieu d’évoquer Nicolas Finet, son chapelain103, égalementchapelain et sous-aumônier, puis aumônier de la duchesse Isabelle dePortugal en 1452 et 1453104 et de marguerite d’york, chargé de s’occuper desdépenses extraordinaires de Corneille par le duc Philippe, Louis le

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99. — Ibid., B 1992/59828, 59855 ; B 2004, fol. LIxr ; B 2007/60716 (citation) ; wüRTH-PAQUET,« Table chronologique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 29, p. 57-58, 91, nos 105, 232.100. — Lille, AD Nord, B 2004, fol. IIIIxx Ixv-IIIIxx xr ; des quittances de 2000 francs sont donnéespar Corneille les 12  mars 1450 et 13  avril 1451 : Bruxelles, AGR, Acquits de Lille, Cartons,nos 1148B, 1148E-1149A, aux dates indiquées ; NéLIS, « Les bâtards de la maison de Bourgogne »,p. 341 (information erronée).101. — Item, a Cornille nostre filz Bastard, non obstant quelque chevance qu’il ait d’autrepart,donnons et laissons six mille frans monnoie roial de rente a heritaige [de] laquelle rente lui voulonsestre baillee et assignee bien et seurement en noz pays de pardeca de Brabant, Flandres, Artois,Haynnau, Hollande, Zelande ou Namur, dedens ung an aprés nostre decez, esquelles six mil frans derente voulons et entendons estre comprinses les rentes et revenues des terres et seignouries que desmaintenant il a ou aura de nous cy aprés avant nostre trespas, et ce que restera dicelles six mil fransde rente au jour de nostre dit trespas, nosdiz executeurs lui parfourniront realment et de fait desbiens de nostre dite execution ainsi que dit est, et par condicion que s’il aloit de vie a trespas sanshoir de son corps en loial mariage comme dit est, ladicte rente et assignacions baillees pour icelleretourneroient a nostre heriter ou heritiers qu’il appartendroit, et aussi que se pour la ditte rente luiestoit baillees comme vraisemblablement le convendra aucunes terres de nostre seignourie etdemaine, nostre heritier ou heritiers qu’il appartendra penriont recouvrer en lui baillant premiere-ment autant de terre autrepart qui ne soit point de domaine de noz seignouries aussi bien assise etaussi bien revenant en noz pays dessusdiz comme icelles qui premiere baillies lui auroient esté.Lille, AD Nord, B 456/14764 ; A. mIRAEUS, J. F. FOPPENS, Opera diplomatica, 2e éd., t. 2, Louvain,1723, p. 1259 (éd. d’une trad. latine).102. — Le 22 juillet 1457, c’est par exemple sur avis de Guillaume de Saint-Seine que Philippe leBon autorise le prévôt de marville et d’Arrancy, Alexandre de manteville, de prélever annuellement100 florins du Rhin sur la recette de sa charge, en plus des 200 qui lui avaient déjà été assignés en1443, afin de se rembourser notamment des dépenses jadis consenties pour élisabeth de Görlitz etCorneille de Bourgogne : VERkOOREN, Inventaire des chartes et cartulaires du Luxembourg, t. 4,p. 367-368, 378-379, nos 1830, 1842 ; Lille, AD Nord, B 2010/60912 ; B 2014/61171 ; B 17304 ;B 20156/155947.103. — Ibid., B 1980/58866-58869 ; B 1981/58958 (1443). Voir également n. 115.104. — SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 74, 333-334, 475, 501.

Philippe105, le secrétaire et le receveur, l’« agent payeur » si l’on peut dire, dumême Corneille, engagé dans chacune des opérations financières dont leBâtard est partie prenante106, ou encore Guillaume de Saint-Seine107, lui aussitrès présent dans tout ce qui concerne les finances de son maître, en particu-lier pour certifier que Philippe a bien réalisé les dépenses souhaitées par leBâtard. L’on pense encore à Henri de Vars108, barbier et valet de chambre deCorneille, qui convoie tissus, fourrures et chaussures pour son maître109, Jeande Couvignon110, son maître d’hôtel111, michelet112, Thibaut113, ysembart114– peut-être s’agit-il d’ysembert du Bourg, huissier d’armes, valet de chambred’Isabelle de Portugal, l’un de ses plus fidèles officiers de la motte-au-Bois115 – et Jean Raguenel116, d’autres valets et chapelains du Bâtard, le dernier étant défrayé pour certaines bulles que j’ay nagueres obtenu en courtde Rome pour monditseigneur le bastard117. Et puis il y a ses pages118, ses

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105. — Clerc du secrétaire de la chancellerie ducale Jean Hibert en 1436, secrétaire du duc et rece-veur de l’aide de 10000 florins du Rhin accordés par les états de Luxembourg en 1446, secrétaire etreceveur du Luxembourg sous Corneille. Voir Prosopographie des secrétaires, p. 51-52, 126, 154,nos 44, 200, 379.106. — Lille, AD Nord, B 1992/59828, 59855 ; B 1995/60097 ; B 2005/60442 ; B 2006, 60500-60656, passim ; B 2007/60716 ; B 20151/155906 ; B 20156/155947.107. — Ibid., B  2005/60442 ; B  2006/60500-60656, passim ; B  2007/60716. Voir aussi n.  102,supra.108. — Henri de Vers ou de Vars apparaît dans les listes de gages de l’hôtel de la duchesse Isabellede Portugal, pour les années 1452 (6 sous, monnaie de Flandre), 1453, 1454 et 1456 (12 s.). SOmmé,Isabelle de Portugal, p. 507. Il est par ailleurs barbier et valet de chambre, à mi-temps, dans l’hôteldu comte de Charolais en 1456 et 1457 (12 sous de gage). En avril, mai et septembre 1457, il reçoit30 lions d’or pour le vol de l’un de ses serviteurs à La Haye, 42 s. pour l’achat de deux peignes enivoire, et 6 écus d’or pour un vêtement. H. kRUSE, Hof, Amt und Gagen. Die täglichen Gagenlistendes burgundischen Hofes (1430-1467) und der erste Hofstaat Karls des Kühnen (1456), Bonn,1996, p. 199, 205, 222, 255.109. — Lille, AD Nord, B 2006/60502, 60504, 60506, 60507, 60513, 60516, 60521, 60531, 60548,60580, 60586 (?), 60589 ; B 20156/155947.110. — Jean de Couvignon apparaît dans les listes de gages de l’hôtel de la duchesse Isabelle dePortugal, pour les années 1433 (3 sous, 4 deniers, monnaie de Flandre), 1435-1437, 1439 (3 s.),1441-1443 (3 s. puis 3 s., 4 d., puis 3 s.). SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 507.111. — Lille, AD Nord, B 2006/60546, 60553, 60563, 60569, 60571, 60574, 60580, 60583, 60592,60598, 60600, 60603, 60607, 60622, 60624, 60631 ; B 2010/60912.112. — Ibid., B 2006/60512, 60611, 60639 ; B 2010/60912 ; B 20156/155947.113. — Ibid., B 2006/60539, 60637, 60648.114. — Ibid., B 2006/60554, 60571, 60572, 60598, 60599.115. — SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 122 (huissier, 1461), 326, 361 (valet, 1464), 364, 457-458.116. — Lille, AD Nord, B 2006/60529, 60562, 60566 (citation infra).117. — Est probablement du nombre de ces documents produits ou obtenus en cour de Rome la sup-plique adressée par Corneille au pape Nicolas V, dans laquelle certains bénéfices sont demandésnotamment en faveur de Nicolas Finet, magister in artibus, clerc du diocèse de Cambrai, et leditRaguenel, prêtre du même diocèse et chapelain de celui d’évreux (Vatican, Archivio SegretoVaticano, Registra Supplicationum 443, fol. xxIIr-xxIIIr).118. — Ibid., B 2006/60520 (Jean de Grenant, notamment), 60521 (Thierry de Charmes, Grenant etle petit bâtard), 60524 (Bastien, le petit bâtard), 60532 (le petit bâtard de Thrembroum), 60542,60557 (Lalemant, valet d’étable), 60558, 60560 (id.), 60586 (Bastien), 60618 (Thierry de Charmes,Lalemant), 60657 (Bastien) ; B 2010/60912 (id.) ; B 20156/155947 (le petit bâtard, Grenant).

braconniers119, Joquesus, le fou du Bâtard120, et son épouse121, le hérautBourgogne122, qui souvent sert de messager, de truchement entre Corneille etses fournisseurs ou d’hôte pour Alffons Portugallois123, Alphonse lePortugais – on peut peut-être penser à un autre très proche d’Isabelle dePortugal, son médecin Alphonse de Lucène124 –, dont le Bâtard rembourserales dépenses, Jean de maupas125, enfin, chargé par Corneille de se rendre àmilan afin de lui procurer des harnois de guerre126. Si les dépenses de bouches’en trouvent complètement exclues, les quelque cent cinquante quittanceslilloises épinglent, parmi les divers créneaux auxquels le Bâtard consacrad’importants montants, de très nombreux achats de vêtements. Drap, soie,velours, satin, damas, coton, futaine, blanchette de doublure, torchons pour lavaisselle se comptent par centaines d’aunes ; les robes, les manteaux, lespourpoints, les hoquetons par garde-robes entières ; les houseaux, les sou-liers, les chausses, qu’ils soient commandés pour Corneille, pour ses pagesou, par exemple, pour Thirion127, le valet de pied d’Isabelle de Portugal128,par centaines de paires129. Le Bâtard achètera également nombre d’agneauxpour metre en une robe noire130 et des plumes131, probablement de grandesplumes d’autruche, dont le faisceau forme ce plumas tellement illustratif,

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119. — Ibid., B 2006/60555, 60590, 60593 (Corneille finance partiellement les noces d’un de sesbraconniers), 60596, 60638.120. — Ibid., B 2006/60508 (30 novembre 1450), dépense pour du tissu noir et bleu, ainsi que pourde la doublure destinée à la confection d’une robe pour ce personnage.121. — Ibid., B 2006/60518 (même date).122. — Ibid., B 2006/60533, 60534, 60540, 60561, 60569, 60588, 60632 ; B 2010/60912.123. — Ibid., B 2006/60561, 60569.124. — Frère de juriste – Vasco Fernandes de Lucena – et de médecin – Rodrigo de Lucena –, méde-cin lui-même, auprès de la duchesse en 1434, puis seulement à partir du 22  novembre 1448,conseiller et médecin de Philippe le Bon en 1458, duquel il reçoit des informations secrètes en jan-vier 1462. J. PAVIOT, Portugal et Bourgogne au xVe siècle (1384-1482). Recueil de documents extra-its des archives bourguignonnes, Lisbonne-Paris, 1995, p.  106 ; SOmmé, Isabelle de Portugal,p. 122, 142, 252 (conseiller et médecin, commence à servir le 22 novembre 1448), 257 (entouragede la duchesse après 1445), 326, 331 (mort avant 1468), 340, 358, 359, 364, 503 ; ID., «  LesPortugais dans l’entourage de la duchesse de Bourgogne Isabelle de Portugal (1430-1471) », Revuedu Nord, t. 77, 1995, p. 326-327.125. — Lille, AD Nord, B  2006/60523, 60551, 60565, 60570, 60617, 60620, 60640, 60644 ;B 2010/60912.126. — L’Italie et en particulier milan étaient spécialisés dans la fabrication de ce type d’armement ;l’on venait de loin pour s’y approvisionner. Ce fut ainsi l’une des raisons du grand voyage italien duGrand Bâtard Antoine en 1475. Sur ce point, voir mARCHANDISSE, mASSON, « Les tribulations duGrand Bâtard Antoine de Bourgogne en Italie (1475) », p. 47-48, et, plus largement, en dernier lieu,le texte très stimulant de B. SCHNERB, « Le corps armé du prince : le duc de Bourgogne en guerre »,Le corps du Prince, éd. é. Bousmar, H. Cools, J. Dumont, A. marchandisse, Florence, 2014, p. 301-303.127. — Ibid., B 1981/58958.128. — Un Thirion est aide de paneterie. SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 256, 337, 506.129. — Lille, AD Nord, B 1980/58866, 58868 ; B 2006/60500-60656, passim.130. — Ibid., B 2006/60504, 60513, notamment.131. — Ibid., B 1980/58867.

lorsqu’il trône au sommet d’un « harnois de tête », de la richesse et du cou-rage, de l’emblématique aussi, de ce duc en second et courageux soldatqu’était Corneille132 ; ce qui ne l’empêchera pas de faire réaliser un pourpointpour ung poure homme nommé Alof133 ou d’aider financièrement son valet à(se) rabillier134. Corneille multiplie en outre les achats de chevaux, avecl’équipement ad hoc, des selles et des housses135 en particulier, pour sonusage personnel ou pour en faire des présents136. Ainsi le cheval sur poil grisacheté pour le bâtard de Rosimbos137 ou ung harnois de cuir […] fait pour lepetit garson de monditseigneur138. Pour toutes ces montures, mais aussi pourses chiens – le Bâtard évoque ceux mors d’un chien enragié139 –, Corneilleaura soin de faire ériger écurie140 et chenils141 devant le château deLuxembourg, des bâtiments dont il assumera financièrement à la fois le grosœuvre et la finition, dépense après dépense, du toit au pavement. Sur le planmilitaire ou cynégétique, l’on retiendra la cotte d’armes, les deux bannièresde trompette et l’étendard142 que Jean de Boulogne143, valet de chambre etpeintre de Philippe le Bon, a réalisés pour Corneille, et l’achat de très nom-breux cranequins de corne144. Et puis il y a encore et surtout les dépensesliées au divertissement, au jeu. Corneille, comme nombre de ses contempo-rains, se plut à jouter. Lors du Pas de l’Arbre de Charlemagne, organisé enjuillet 1443 à marsannay-la-Côte, près de Dijon, par Pierre de Bauffremont,

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132. — Sur ce plumas et l’ensemble de la parure ducale de guerre, voir SCHNERB, « Le corps armédu prince ».133. — Lille, AD Nord, B 2006/60597.134. — Ibid., B 2006/60611.135. — Ibid., B 2005 ; B 2006/60522, 60525, 60531, 60549, 60621, 60655, 60656 ; B 2010/60912 ;B 20151/155906 ; B 20156/155947.136 Ibid., B  2005 ; B  2006/60501, 60530, 60531, 60542, 60551, 60563, 60564, 60565, 60628,60632, 60637, 60640, 60641 ; B 2010/60912 ; B 20151/155906 ; B 20156/155947.137. — Ibid., B 2006/60501 ; B 20151/155906.138. — Ibid., B 2006/60525.139. — Ibid., B 2006/60596.140. — Ibid., B 2006/60545, 60550, 60556, 60576, 60577, 60581, 60591, 60595, 60626, 60627,60631 ; B 17671, Chemise « Finance. Luxembourg / écuries à chevaux ».141. — Ibid., B 2006/60595.142. — Ibid., B 2006/60500 ; B 20151/155906.143. — membre d’une dynastie de peintres officiels, qui travaillèrent pour les cours d’Artois puis deBourgogne, en particulier à la réalisation, l’entretien et la réparation des peintures du châteaud’Hesdin, Jean de Boulogne, valet de chambre et peintre du duc, a œuvré dans les années 1425-1450à la cour ducale, dans le cadre de travaux essentiellement héraldiques. Il avait succédé dans lacharge à son père Hue en 1451, dont il ne fut guère le successeur dans tout ce qui concernait la pein-ture pour la Toison d’or, remplacé qu’il fut, très rapidement par Jean Coustain. La dernière mentionde ce personnage, en 1454, concerne la création des étendards pour la croisade décidée lors du ban-quet du Faisan. Voir F. JOUBERT, « Les peintres du vœu du faisan », Le Banquet du faisan. 1454 :l’Occident face au défi de l’Empire ottoman, éd. m.-T. Caron, D. Clauzel, Arras, 1997, p. 188 etn. 4 ; F. ROBIN, « L’artiste de cour en France. Le jeu des recommandations et des liens familiaux(xIVe-xVe siècles) », Artistes, artisans et production artistique au Moyen Âge. Colloque internatio-nal. Centre national de la Recherche Scientifique, Université de Rennes  II –  Haute-Bretagne, 2-6 mai 1983, éd. x. BARRAL I ALTET, t. 1, Les hommes, Paris, 1986, p. 552.144. — Lille, AD Nord, B 2006/60543, 60552, 60553, 60567, 60578, 60584, 60622-60625, 60635,60636, 60639, 60642 ; B 2010/60912.

seigneur de Charny145, le Bâtard participera à une joute d’entraînement, pourapprendre le mestier. Et gaigna le prix de dedans le bastard de Bourgoigne,comme le précise La marche, qui profite du récit pour dire tout le bien qu’ilpensait du défunt Corneille146. En février, une réparation avait été faite à sonharnois, dans un cadre similaire147, et, le 3  juillet, le valet de pied de laduchesse est défrayé pour avoir par deux fois mené Corneille jouter àDijon148. Le Bâtard participera encore à des joutes et en organisera même,dans les années 1450 et 1451, à Bruges et à Luxembourg149. mais Corneilles’adonne également à d’autres sports et surtout aux jeux de hasards150. Ainsiest-il battu au jeu de paume151 par Nicolas de Vervoz, l’abbé de Saint-Hubert152, et Jean de Bourgogne153, l’évêque de Cambrai154, ou aime-t-il àsoy esbatre au jeu de lunasse avec Adrian de Bourssele155, Adriaan vanBorsele156, son futur beau-frère en l’occurrence. Pour les seconds, il nesemble pas spécialement doué : qu’il s’agisse du jeu de boules – du golf, ducroquet ou du hockey, selon les circonstances –, des jeux de cartes ou detables157, Corneille perd beaucoup, ici au bénéfice de mademoiselle

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145. — Sur ce personnage, voir m.-T. CARON, Art. Pierre de Bauffremont, comte de Charny, sei-gneur de Couchey, La Borde Reullée, molinot, Courtivron, montfort, Villaines-les-Prévôtes, Auxey,Villers-les-Pots, Les Chevaliers de l’Ordre de la Toison d’or, p. 45-47.146. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 1, p. 286-287. marsannay-la-Côte : France, dép. Côted’Or, arr. Dijon, cant. Chenôve.147. — Lille, AD Nord, B 1980/58869.148. — Ibid., B 1981/58958.149. — Ibid., B 2004, fol. IIICxxxVIIv : le 22 mai 1450, le duc accorde une somme d’argent à ses filsCorneille et Antoine, afin que soit confectionnée une couverture de cheval en damas blanc pour jou-ter à Bruges ; B 2010/60912 ; é. VAN DEN NESTE, Tournois, joutes, pas d’armes dans les villes deFlandre à la fin du Moyen Âge (1300-1486), Paris, 1996, p. 138. Sur cette question, voir le récentouvrage de S. NADOT, Le Spectacle des joutes. Sport et courtoisie à la fin du Moyen Âge, Rennes,2012.150. — Sur ces questions, il y a lieu de mentionner avant tout : J.-m. mEHL, Les jeux au royaume deFrance du xIIIe au début du xVIe siècle, Paris, 1990 ; ID., Des jeux et des hommes dans la sociétémédiévale, Paris, 2010. Voir encore : ID., Jeux de princes, jeux de vilains, éd. È. Netchine, Paris,2009.151. — Lille, AD Nord, B 2006/60649. Voir aussi Ibid., B 2006/60570, 60594, 60651, 60653, 60654.152. — Sur ce personnage, abbé de Saint-Hubert du 28 mai 1444 au 30 novembre 1474, qui, en1447, grâce à son intervention auprès de Philippe le Bon, permit aux habitants de Saint-Hubert depouvoir tenir marché franc tous les mardis, et qui assista, le 25 octobre 1451, à l’assemblée des étatsdu Luxembourg au cours de laquelle le duc Philippe fut reconnu comme seigneur engagiste de cettemême terre, voir A. DESPy-mEyER, P.-P. DUPONT, « Saint-Hubert », Monasticon belge, t. 5, Provincede Luxembourg, Liège, 1975, p. 58-59.153. — Sur ce personnage, voir m.  mAILLARD-LUyPAERT, Art.  de Bourgogne, Jean, évêque deCambrai (1439-1480), Nouvelle Biographie Nationale, t. 11, Bruxelles, 2012, p. 69-72 ; ID., « Lechapitre cathédral de Cambrai et l’évêque Jean de Bourgogne (1452) : un dialogue de sourds? »,Revue du Nord, t. 94, 2012, p. 127-147 ; ID., « Jean de Bourgogne, bâtard de Jean sans Peur, évêquede Cambrai de 1439 à 1480 », ici même, p. 11-51 ; ID., A. mARCHANDISSE, « Les dernières volontésde Jean de Bourgogne, évêque de Cambrai (1439-1480). édition critique des testaments et codi-cilles », Le Moyen Âge, t. 119, 2013, p. 85-129.154. — Lille, AD Nord, B 2006/60651. Voir aussi Ibid., B 2006/60570, 60594, 60653, 60654.155. — Ibid., B 2006/60515.156. — Voir n. 88.157. — Ibid., B 2006/60536, 60586.

d’Escornaix158, demeurant à Luxembourg, là en compagnie du comte d’étampes159. L’on a enfin envie de mentionner le gobelet d’argent doré qu’ilfait confectionner160 pour le baptême de l’un des enfants de Jean de Poitiers,seigneur d’Arcis, de Vadans et de Souvans, et de son épouse Isabelle deSousa161, l’une des deux dames d’honneur portugaises de la duchesseIsabelle, arrivées en Flandre pour le mariage ducal de 1429, enfant qu’il atenu sur les fonts en compagnie de Jacques de Coïmbre, le neveu de laduchesse Isabelle, futur cardinal162. Et ces quelques mots très évocateurs,parce que des plus sibyllins, à propos de trois francs prêtés à Corneille pouraucunes choses dont monditseigneur ne veult icy autre declaracion estrefaite163.

C’est de nouveau un champ de bataille qui constituera le théâtre des der-niers instants de l’existence de Corneille de Bourgogne, en l’occurrence celuide la guerre de Gand des années 1450164, soit la plus démonstrative des réac-tions d’un Philippe le Bon bien courroucé lorsque son projet de réforme fis-cale du milieu des années 1440 fut repoussé par les Quatre membres deFlandre et, tout particulièrement, par Gand. Confrontés à la volonté ducaled’étouffer l’autonomie urbaine gantoise et aux mesures drastiques qui furentprises en ce sens, avec notamment de premières intrusions princières, dès

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158. — Ibid., B 2006/60506 (4 octobre 1450). Difficile de préciser l’identité du personnage. Faut-ilpenser à l’une des descendantes d’Arnold  VI de Gavre, dit «  d’Escornaix  », †  1er mai 1418,conseiller du duc Jean sans Peur, et d’Isabelle de Ghistelles, † 1435, l’une ou l’autre de leurs petites-filles, Isabelle de Gavre, qui épousa Olivier van der Vichte, seigneur de Vichte, maréchal héréditaire,ou Jeanne de Gavre-Escornaix, veuve de Victor, bâtard de Flandre, qui, en 1441, épousa Simon deLalaing, seigneur de montignies, chevalier de la Toison d’or, † 15 mars 1477 (P. DE wIN, Art. Simonde Lalaing, seigneur de montignies, Les Chevaliers de l’Ordre de la Toison d’or, p.  60 ; m.-T. CARON, Les vœux du faisan, noblesse en fête, esprit de croisade. Le manuscrit français 11594de la Bibliothèque nationale de France, Turnhout, 2003, p. 290-291, no 107). Ou à une descendantede ces derniers ? Il faut bien reconnaître que l’usage du nom de l’époux ou du père serait plus pro-bable…159. — Lille, AD Nord, B 2006/60511 (8 novembre 1450). Voir encore Ibid., B 2006/60647. Il joueégalement avec le comte de Petite Piere, c’est-à-dire de la Petite-Pierre ou de Lützelstein, en Basse-Alsace (ibid., B 2006/60648) (France, dép. Bas-Rhin, arr. Saverne, cant. La Petite-Pierre).160. — Ibid., B 2006/60645 (11 novembre 1450).161. — Conseiller et chambellan du duc, Jean de Poitiers épouse, à Bruges, en 1431 et en présencedes ducs, Isabelle de Sousa, de haute noblesse portugaise, qui vivait à la cour depuis 1430, parmi lepersonnel féminin d’Isabelle de Portugal. Il participa à la guerre de Gand et aux Vœux du faisan de1454. Voir CARON, Les vœux du faisan, p. 231-232, no 2 ; SOmmé, Isabelle de Portugal, p. 148, 264,269, 272-274, 280, 281, 284, 285, 288 ; Die Hofordnungen der Herzöge von Burgund, t. 1, no 7,p. 103, § 26.162. — Sur ce personnage, voir A. mARCHANDISSE, C. mASSON, « Jacques de Coïmbre (1433-1459),un cardinal lusitano-bourguignon  », Évêques et cardinaux princiers et curiaux (xIVe-débutxVIe siècle). Des acteurs du pouvoir, éd. m. maillard-Luypaert, A. marchandisse, B. Schnerb, souspresse.163. — Lille, AD Nord, B 2006/60610 (parmi bien d’autres).164. — Sur cet épisode, voir les synthèses de SCHNERB, L’État bourguignon, p. 380-391 ; VAUGHAN,Philip the Good, p. 303-333.

1447, dans le processus de désignation du gouvernement urbain, gens demétier et commun peuple gantois adoptèrent des positions de plus en plushostiles au duc et à tous ceux qui étaient considérés comme ses créatures,optant même pour l’exécution de certaines d’entre elles. Philippe se prononçadès lors pour un blocus de Gand, une ville qui n’eut guère de succès dansl’appel à une grande coalition urbaine qu’elle fit à ses diverses consœurs fla-mandes. Une fois rendu public le manifeste du 31 mars 1452, où se trouvaientdécrits tous les crimes dont il estimait les Gantois coupables, le duc résolut deramener à la raison, par la force, ceux qu’il considérait comme des brebisgaleuses. Le 14 avril 1452, après avoir occupé le château comtal de Gavre,Helchin et le pont d’Espierres, les Gantois entamèrent le siège d’Audenarde,tenu par des Bourguignons chargés d’assurer le blocus de Gand, côtéTournai165. Durant ce siège, qui dura dix jours et fut un complet échec,Philippe le Bon se trouvait à Grammont, accompagné de son fils Corneille,qui, peu de temps auparavant, avait sévi, en compagnie des gens du duc, dansle bailliage de Tournai, en particulier à Esquelmes166. En Flandre, pour lors[il] n’avoit charge de gens d’armes que de ceulx de son hostel, pour ce quel’on attendoit les Bourguignons, que le mareschal estoit alé querre ; et luydevoit on bailler cent lances, avecques ceulx de Lucembourg, qui encoiresn’estoient pas arrivez167. Le 1er mai, Corneille, son demi-frère Antoine, lecomte d’étampes, Adolphe de Clèves, seigneur de Ravenstein, et Jean, bâtardde Luxembourg, seigneur de Haubourdin, mènent une expédition assezpauvre en résultats contre Gand168. Fin mai, le Bâtard participera encore auxmanœuvres bourguignonnes dans le pays de waes, en particulier à Lokeren età Overmere, où il sera fait chevalier169. À cette occasion, alors que le Bâtard

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165. — Gavre/Gavere : Belgique, prov. Flandre orientale, arr. Gand ; Helchin/Helkijn : Belgique,prov. Flandre orientale, arr. Gand, comm. Espierres-Helchin/Spiere-Helkijn ;Audenarde/Oudenaarde : Belgique, prov. Flandre orientale, arr. Audenarde/Oudenaarde.166. — Paris, Bnf, ms. Naf. 7627, fol.  435r. Esquelmes : Belgique, prov. Hainaut, arr. Tournai,comm. Pecq.167. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 234 ; JEAN DE wAVRIN, Recueil des croniques etanchiennes istories de la Grant Bretaigne, a present nommé Engleterre, éd. w.  Hardy,E. L. C. P. Hardy, t. 5, From A. D. 1447 to A. D. 1471, Londres, 1891, p. 198 ; GEORGE CHASTELLAIN,Chronique, t.  2, p.  234. Grammont/Geraardsbergen : Belgique, prov. Flandre orientale, arr.Alost/Aalst.168. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 245-246.169. — Ibid., t. 2, p. 250-252 ; JEAN DE wAVRIN, Recueil des croniques et anchiennes istories de laGrant Bretaigne, t.  5, p.  203 ; GEORGE CHASTELLAIN, Chronique, t.  2, p.  264 ; ADRIEN DE BUT,Continuatio, p. 332. Selon VAN DEN HEUVEL, « De verdediging van bastaarden door Olivier de lamarche  », p.  59, le messire dont est assortie l’expression bâtard de Bourgogne, à propos deCorneille, est destiné à rappeler son adoubement. Il précise encore, Ibid., p. 62-63, que Corneilleressortissait à la plus haute noblesse bourguignonne, celle réunie au sein de la Toison d’or, mais res-tait inférieur à des princes, des seigneurs et à leur famille directe. Ainsi Adolphe de Clèves, frère duduc Jean II. Entre autres exemples, lors de la réception des ducs de Savoie par Philippe le Bon en1443, Corneille est mentionné après les princes et les enfants légitimes de ceux-ci, alors qu’une plusbasse noblesse n’apparaît pas. Lors des combats luxembourgeois, il apparaît toujours à la suite ducomte d’étampes. Le pays de waes/Waasland est une région naturelle de Belgique située entreAnvers et Gand ; Lokeren : Belgique, prov. Flandre orientale, arr. Saint-Nicolas/Sint-Niklaas ;Overmere : Belgique, prov. Flandre orientale, arr. Termonde, comm. Berlare.

poursuivait des Gantois en fuite, Guillaume de Saint-Seine, l’écuyer qui gou-vernoit et avoit norry Corneille, dont il a déjà été plusieurs fois question plushaut170, appela ce dernier à davantage de modération, celle que méritait etobtint finalement une noblesse susceptible de le suivre au plus profond deslignes adverses, dans les conditions difficiles du moment – en pesantesarmes, par telle chaleur et à pied –, et à laquelle il ferait immanquablementcourir d’inutiles dangers, surtout si l’ennemi choisissait de rebrousser che-min171. Le 16 juin, enfin, lors de la bataille de Rupelmonde172, où Corneilleavait conduit avec habileté l’étendard ducal porté par Hervé de mériadec173,les troupes gantoises furent lourdement défaites. Ainsi que nous le disent Lamarche et wavrin, le Bâtard Corneille, quand il veit les Gantois branler, sedesroba de la bataille où il estoit avecques le duc, son pere, et fut suivy desjosnes gens de sa chambre en petit nombre, comme Jacques Dorsan, PierreChenu, Thierry de Charmes, Jehan de Longchamp, et peu d’autres. Il croisaalors des Gantois et les affronta immédiatement, sans réfléchir. Il coucha salance et les rompit, et en abatit plusieurs de celluy rencontre174, mais serafinalement ataint de la picque dun Flameng en la gorge, car il navoit point degorgerir175. La marche a soin de préciser qu’il fut touché en la bouche d’uncop en monstant, tellement qu’il eut la teste percée en dessus, et luy cheut lesang et la cervelle en la bouche, et prestement mourut176. Grant deuil et grant

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170. — Voir supra et n. 64, 102, 107.171. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 252-253.172. — JEAN DE wAVRIN, Recueil des croniques et anchiennes istories de la Grant Bretaigne, t. 5,p. 205 ; GEORGE CHASTELLAIN, Chronique, t. 2, p. 298 ; JACQUES DU CLERCQ, Mémoires, 2e éd., t. 2,Bruxelles, 1835, p.  40 ; ADRIEN DE BUT, Continuatio, p.  332-334. Rupelmonde : Belgique, prov.Flandre orientale, arr. Saint-Nicolas, comm. kruibeke.173. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 265. Ce Breton passa du service d’Arthur deRichemont, duc de Bretagne (1457-1458), à celui du beau-frère de ce dernier, le duc de Bourgogne(1435). Pourvu de nombreuses charges (héraut ducal, bailli de Tournai, porte-épée du duc, entreautres) et pensions, mériadec jouit également de la confiance de Philippe le Bon, à tel point qu’ildevint l’un de ses conseillers les plus écoutés. Il assuma ses fonctions de héraut jusqu’à la mort duduc en 1467, mais conserva des fonctions honorifiques au sein de l’Hôtel du nouveau duc Charles.Voir w. PARAVICINI, « Un tombeau en Flandre : Hervé de mériadec », Francia, t. 34/1, 2007, p. 85-146.174. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 269.175. — JEAN DE wAVRIN, Recueil des croniques et anchiennes istories de la Grant Bretaigne, t. 5,p. 206 ; JACQUES DU CLERCQ, Mémoires, t. 2, p. 42 ([…] en cachant et tuant lesdits Gantois, fustferru d’advanture d’ung Gantois, d’une pique au hastrel, et n’avoit point ledit Cornille de gorgerin,duquel coup il mourut prestement) ; Suite d’un Abrégé d’histoire chronologique, 1400-1467, dansHistoire de Charles  VII, éd. D.  Godefroy, Paris, 1661, p.  351 (Messire Cornille, Bastard deBourgongne y fut tué, par faute d’avoir laissé son gorgerin).176. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 270. Voir aussi JEAN DE wAVRIN, Recueil des cro-niques et anchiennes istories de la Grant Bretaigne, t. 5, p. 206 ; JACQUES DU CLERCQ, Mémoires,t.  2, p.  42 (Corneille mourut prestement) ; GEORGE CHASTELLAIN, Chronique, t.  2, p.  306-307 ;mATTHIEU D’ESCOUCHy, Chronique, t. 2, p. 4-5, 43 (Corneille termina vie par mort devant la placede Ripplemonde) ; ADRIEN DE BUT, Continuatio, p. 334 (des fuyards, quorum unus per fossatum sal-tando recepit eum acuto baculo suo, sicque vulneravit in capite ut spiritum infra duos dies exhala-ret) ; Livre des trahisons de France, dans Chronique relatives à l’histoire de la Belgique sous ladomination des ducs de Bourgogne (Textes français), éd. J.-B.-m.-C.  kervyn de Lettenhove,Bruxelles, 1873, p. 224 (Corneille mourut prestement) ; JEAN GERmAIN, Liber de virtutibus PhilippiBurgundiae et Brabantiae ducis, dans Chroniques relatives à l’histoire de la Belgique sous la

regretz fit le bon duc à part de son bastard, que moult aymoit, un Corneilleque, plus prompte encore que Philippe le Bon, si cela était possible, Isabellede Portugal, sa belle-mère, fera inhumer moult honnorablement ; car elle l’ai-moit moult pour ses bonnes vertus177, dans le chœur de la cathédrale Sainte-Gudule de Bruxelles178, près du charnier là où il (le duc) faisoit mettre sesenfants légitimes quand ils alloient de vie à trépas, nous préciseChastellain179, c’est-à-dire auprès de Josse et d’Antoine, décédés en bas âge,et fut mise sur luy sa banniere, son estendard et son pennon180 une sépulturequi n’a manifestement pas été préservée. Le 28 mars 1455, Philippe le Bonfera verser 36 livres de 40 gros, monnaie de Flandre, à son aumônier pour lacélébration d’une messe de requiem journalière à Sainte-Gudule du1er octobre 1454 au 30 septembre 1455181, messe qui devint perpétuelle le18 avril 1456. À cette date, le duc précise, par ailleurs, que le célébrant diracette messe dans le chœur de l’église, à l’autel situé derrière le maître-autel,dès avant prime, puis gagnera la tombe de Corneille où il prononcera le Deprofundis et la bénira. Une commémoration perpétuelle, à vigiles à neuf

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176. — (suite) domination des ducs de Bourgogne (Textes latins), éd. Id., Bruxelles, 1876, p. 109-110 ; Chronique des Pays-Bas, de France, d’Angleterre et de Tournai, dans Recueil des chroniquesde Flandre, éd. J.-J. de Smet, t. 3, Bruxelles, 1856, p. 494-495 (il y est précisé que Corneille non sepovant soustenir, ses gens prirent et ramenèrent à Tenremonde, où prestement il expira, ce quisemble tout de même assez peu réaliste, compte tenu de la gravité de ses blessures) ; HENRID’OPPREBAIS, Chronique rimée de l’abbaye de Floreffe, p. 161 ; ADRIEN D’OUDENBOSCH, Chronicon,p. 36 ; CORNEILLE DE ZANTFLIET, Chronicon, col. 479.177. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 270-271. Le chagrin, considéré comme hono-rable, de Philippe le Bon est inséré dans le cadre d’une analyse de la réalité paternelle au moyen Âgepar m. CARLIER, « Paternity in Late medieval Flanders », Secretum Scriptorum Liber alumnorumWalter Prevenier, éd. w. Blockmans, m. Boone, T. de Hemptinne, Apeldoorn, 1999, p. 253-254 etn. 70.178. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 270-271 ; JEAN DE wAVRIN, Recueil des croniqueset anchiennes istories de la Grant Bretaigne, t. 5, p. 206 ; GEORGE CHASTELLAIN, Chronique, t. 2,p. 307 ; Chronique des Pays-Bas, de France, d’Angleterre et de Tournai, p. 495. Si l’on en croitBesançon, Bibliothèque municipale, Coll. Chifflet, ms. 64, fol. 28r, il fut inhumé devant le grandautel, seule information à retenir des fol. 28r-30v, 52r et non tout « an account of his funeral atSt. Goedele in Brussels », comme il est dit par B. HAGGH, « Singing for the most Noble Souls :Funeral and memorials for the Burgundian and Habsbourg Dynasties in Dijon and Brussels asmodels for the Funeral of Philip the Fair in 1507 », Tod in Musik und Kultur. Zum 500. TodestagPhilipps des Schönen, éd. S. Gasch, B. Lodes, Tutzing, 2007, p. 64 n. 31. Son épitaphe était la sui-vante : Chi gist feu noble et vaillant Chevalier / Cornille, Fils Bastard de très hault / Très excellentet très puissant Prince Philipes / Duc de Bourgogne et de Brabant, en / son temps Sr. de Bevere et deFlessin- / -gue, et Gouverneur du Pays et Duché de Luxembourg, qui trespassa de ce siè- / -cle auPays dec Waes à la bataille de / Baesele auprès de Rupelmonde, le 16 jour de / Juing M. CCCC. LII.Priez pour son ame. BERGé, «  Les bâtards de la maison de Bourgogne  », p.  360, d’aprèsJ. A. ROmBAUT, Bruxelles illustrée ou description chronologique et historique de cette ville, t. 1,Bruxelles, 1777, p. 62 (variantes : « et » remplacé par « & », trait d’union après « très », « Païs » aulieu de « Pays », «  très-passa » pour «  trespassa », «  siecle » pour «  siècle », « Bataille » pour« bataille », « 16. » pour « 16 »).179. — GEORGE CHASTELLAIN, Chronique, t. 2, p. 307.180. — OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 2, p. 271, qui précise : […] et depuis me dist Thoisond’or qu’il n’appertenoit à homme ces trois choses estre mises en parure sur sa sepulture, s’il n’es-toit mort en bataille ; mais bien l’ung ou les deux et non point les trois ensemble.181. — Lille, AD Nord, B 2018/61364, 61379.

leçons, laudes, messe à diacre et sous-diacre, sonnerie et luminaire est égale-ment prévue chaque jour anniversaire de la mort de Corneille, tout ainsi et enla maniere que l’on a accostumé de faire en ladite eglise les obits fondez desprinces et princesses illec gisans et reposans, le tout pour la somme de700 écus ou couronnes d’or au prix de 48 gros, monnaie de Flandre182. Il serapar ailleurs commémoré dans l’obituaire des grands chanoines de Sainte-Gudule183. Entre-temps, souvenant lors de la mort de son bastard quil amoitdurement, [il] commanda a brusler tout le pays de Wast184 et voulust pourréparation de sondict filz et pour perpétuelle mémoire avoir close à Gand laporte par laquelle ceuls de Gand vuidèrent quand sondict filz fust tué185…C’est un chevalier ayant un beau commencement de vaillance autant qu’il yen pouvoit avoir en un jeune homme […], taillé de bien servir le duc son pèreet aussi son fils le comte de Charolais186, et donc autant d’espoirs placés enlui, qui venaient de s’éteindre. Le châtiment ne s’était pas fait attendre…

* * *Que retenir de cette approche du personnage de Corneille de Bourgogne

que j’ai souhaitée biographique? Que se révèle être ce bâtard ducal de

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182. — Bruxelles, AGR, Chartes de Brabant, n° 9615, 18 avril 1456 ; Ibid., CC, reg. 133, fol. 38r-39r (lettres réversales du chapitre de Sainte-Gudule en date du 1er juin 1456) ; éd. d’un texte appro-chant, mais à la troisième personne, dans JACQUES DU CLERCQ, Mémoires, 2e éd., t. 1, Bruxelles,1835, p. 215-216, no xLII ; éd. ici même, en annexe, de l’acte ducal ; wüRTH-PAQUET, « Table chro-nologique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 30, p. 138, no 183. Cette messe sera transféréeà l’église du Coudenberg par Philippe le Beau le 15 novembre 1495 (Bruxelles, AGR, Archivesecclésiastiques, liasse 6882, d’après P. LEFÈVRE, « Le caveau ducal de la collégiale Sainte-Gudule àBruxelles », Archives, Bibliothèques et Musées de Belgique, t. 22/1, 1951, p. 155-156 n. 4).183. — Dominus Cornelius de Bourgundia miles, filius naturalis domini Philippi ducisBourgundie etc. 6 ½ fl. Ren. communes med. minus pro fabrica 21 pl. et pro custidibus 5 st. Solvitdominus de Gaesbeke de 1 fl. supra Heeze etc. Il apparaît aussi dans l’Obituaire des chapelains deSainte-Gudule (1480[-1485  ?]) et dans le Registre des sépultures (1615-1617) (Bruxelles, AGR,Archives de Sainte-Gudule, nos G 8167, 8184). D. GUILARDIAN, L’obituaire des grands chanoines duchapitre Sainte-Gudule de Bruxelles (1506), Bruxelles, 2002, p.  103 et n.  644 ; LEFÈVRE, «  Lecaveau ducal », p. 155 et n. 4 (un autre libellé : dominus Cornelius bastardus de Burgundia, miles,jacet in medio chori, d’après Bruxelles, AGR, Archives de Sainte-Gudule, reg.  1437, coteancienne?). Le 29 janvier 1461, walter Loenii, chanoine de Sainte-Gudule, achète, de Philippe deHornes, seigneur de Baucignies et de Gaesbeek, pour son chapitre, une rente de cinquante florins duRhin, pour la célébration d’une messe quotidienne et d’un anniversaire pour la mémoire deCorneille. Voir J.  T.  DE RAADT, «  Le mobilier et la bibliothèque d’un riche ecclésiastique duxVe siècle. Inventaire de la maison mortuaire de walter Leonii (Leonijs), chanoine de Sainte-Gudule, à Bruxelles », Annales de la Société d’Archéologie de Bruxelles, t. 10, 1896, p. 18. Le cha-noine Jérôme de Bourgogne, fils naturel de Corneille est aussi commémoré à Sainte-Gudule(GUILARDIAN, L’obituaire, p. 200).184. — JEAN DE wAVRIN, Recueil des croniques et anchiennes istories de la Grant Bretaigne, t. 5,p. 207 ; Livre des trahisons de France, p. 224.185. — PHILIPPE wIELANT, Recueil des Antiquités de Flandre, dans Recueil des Chroniques deFlandre, éd. J.-J. de Smet, t. 4, Bruxelles, 1865, p. 79.186. — GEORGE CHASTELLAIN, Chronique, t. 2, p. 306-307. Voir aussi, pour des appréciations com-parables du personnage : OLIVIER DE LA mARCHE, Mémoires, t. 1, p. 287 ; mATTHIEU D’ESCOUCHy,Chronique, t. 2, p. 5 ; JACQUES DU CLERCQ, Mémoires, t. 2, p. 42-43 ; JEAN DE wAVRIN, Recueil descroniques et anchiennes istories de la Grant Bretaigne, t. 5, p. 203 ; Livre des trahisons de France,p. 224 ; Chronique des Pays-Bas, de France, d’Angleterre et de Tournai, p. 495.

Bourgogne qui, manifestement, n’a pas vécu assez longtemps, à mon avis26 ans à peine, pour donner la pleine mesure de son talent, ni même pour fairesouche légitime? Homme de gestion, d’administration, à coup sûr, celle duduché de Luxembourg, mais, en l’espèce, les sources ne le révèlent guère.Homme de guerre aussi, sans doute, mais de peu de guerres, il faut bien lereconnaître. Homme de cour, en fin de compte, telle est la facette du person-nage que l’on perçoit le mieux, sans doute parce que la saine gestion comp-table bourguignonne et la chance nous ont conservé un riche ensemble dedocuments qui éclairent d’une vive lumière ses dépenses et les diversdomaines dans lesquels elles ont été effectuées. Bien sûr la brillance de la viede Corneille ne fut pas celle d’un Antoine Grand Bâtard ou d’un Baudouin deBourgogne, elle n’eut pas non plus la richesse culturelle de celle de Raphaëlde mercatel. mais, décidément, à sa manière, eu égard notamment auxaspects curiaux de sa brève existence, tout au moins de ce qu’il nous est pos-sible d’en saisir, et pour répondre à la question que posait J.-m. Cauchies àpropos du bâtard Baudouin, Corneille nous semble bien avoir été un témoinreprésentatif de son milieu et de son temps.

Mots-clés : Corneille de Bourgogne, Philippe le Bon, duc de Bourgogne,bâtardise noble, vie privée, mort noble, campagne de Luxembourg (1442-1443), guerres de Flandre (année 1452).

Alain mARCHANDISSE, maître de recherches du Fonds de la Recherche Scientifique–FNRS,Université de Liège, « Transitions ». Département de recherches sur le moyen Âge tardif & lapremière modernité.

CORNEILLE, BÂTARD DE BOURGOGNE (CA 1426-1452) 81

ANNEXES

1Philippe, duc de Bourgogne, ordonne au garde de son épargne de délivrer à

Mathieu de Bra(c)kele, son aumônier, la somme de 36 livres pour que soit célébrée,chaque jour durant un an, une messe de requiem pour l’âme de Corneille, Bâtard deBourgogne, en l’église Sainte-Gudule de Bruxelles où il est enterré.

28 mars 1455 (n. st.)A. Original sur papier, 310,5 mm x 140,5 mm. Lille, AD Nord, B 2018/61364. Au

verso : 1454 28 mars av. p., cachet des AD Nord et immatriculation no 61365.mention : J. DUmONT, A. mARCHANDISSE, « La signature dans les lettres du duc de

Bourgogne Philippe le Bon », L’épistolaire politique II. Authentiques et auto-graphes (VIe-xVIe s.), éd. B. Dumézil, L. Vissière, Paris, 2015, sous presse.

Phelippe, duc de Bourgogne, de Brabant et de Lembourg, conte de Flandres amaistre Gautier de la mandre187, notre conseillier et garde de nostre espargne, nousvoulons et vous mandons que des deniers de nostre dite espargne vous payez, bailliezet delivrez à messire mathieu de Brache188, nostre conseillier et aumosnier, la sommede trente six livres de xL gros monnoye de nostre pays de Flandres la livre pour fairedire et celebrer pour l’ame de feu messire Cornille, bastard de Bourgogne, en l’eglisede Sainte Goudele en nostre ville de Brouxelles ou il est enterré, une messe derequiem tous les jours ung an durant commencant le premier jour d’octobre darraine-ment passé mil IIIIc LIIII et finissant le darrenier jour de septembre mil IIIIc LV prou-chain venant, laquelle messe avons ordonné audit nostre aumosnier faire dire enicelle eglise en la maniere dite et y est icelle commenciee dez ledit premier jour d’oc-tobre et se y continue chascun jour ainsi que nostredit aumosnier nous a affermé. Etpar rapportant ceste nostre lettre laquelle avons signé de nostre main commetantdudit nostre aumosnier seulement par laquelle il se charge et promet de faire dire etcelebrer icelle messe en la maniere que dit est ledit an durant et nous en acquittier.Nous vous allouerons et par ceulx que commectrons a oir voz comptes voulons etmandons estre allouee en la despense d’iceulx voz comptes ladite somme de

82 ALAIN mARCHANDISSE

187. — Secrétaire ducal à partir du 14 décembre 1444, il devient conseiller ducal au 31 décembre1448 et est décédé le 26 août 1459. Voir La correspondance d’Isabelle de Portugal, p. 100 n. 487 ;Die Hofordnungen der Herzöge von Burgund, t. 1, no 11, p. 182, § 390 ; Prosopographie des secré-taires, p. 61-62. Il est dit garde du trésor de l’épargne le 15 janvier 1446 par Cockshaw.188. — mathieu de Brache/Brakel (obituaire)/Bra(c)kele apparaît comme chapelain chantant à lachapelle ducale bourguignonne au cours des années 1430-1432, 1436 et 1443, sous-aumônier dePhilippe le Bon dès 1437 et en janvier 1438, puis comme son aumônier dès 1441, en août 1445 et enavril 1447. Il est mentionné une seule fois comme le conseiller du duc et entre au chapitre de Sainte-Gudule en 1437. Il en devient doyen le 7 février 1447. Il fut aussi doyen de chrétienté de Bruxelleset prévôt de Sainte-Pharaïde de Gand. Voir Die Hofordnungen der Herzöge von Burgund, t. 1, no 11,p. 184, § 399 ; no 15, p. 252, § 344 ; no 16, p. 305 n. 2, § 503 ; Bullaire de la province de Reims sousle pontificat de Pie II, éd. H. Dubrulle, Lille, 1905, p. 50 ; GUILARDIAN, L’obituaire, p. 79 ; B. VANHOFSTRAETEN, « Patronage and Brokerage in the Burgundian-Habsburg Netherlands (1430-1555).The Case of the Chapter of Saint-Gudule and Saint-michael in Brussels », Revue d’Histoire ecclé-siastique, t. 108, 2013, p. 742 ; F. VAN DE PUTTE, « Droits et gages des dignitaires et employés à lacour de Philippe-le-Bon », Annales de la Société d’Émulation de Bruges  / Handelingen van hetGenootschap voor Geschiedenis te Brugge, t. 28, 1876-1877, p. 18 ; SOmmé, Isabelle de Portugal,p. 333.

xxxVI livres dite monnoye sanz difficulté ne avoir sur ce de nous autre ordonnance,mandement ou commandement que ceste nostre dicte lettre. Donné en nostre ville deBruges le xxVIIIe jour de mars l’an de grace mil CCCC cinquante quatre avant Pasques.

Phe

2Mathieu de Bra(c)kele, aumônier du duc de Bourgogne, donne quittance de la

somme de 36 livres versée par le garde de l’épargne du duc pour la célébration d’unemesse de requiem quotidienne, durant un an, en l’église Sainte-Gudule de Bruxelles,pour l’âme de Corneille, Bâtard de Bourgogne.

1er avril 1455 (n. st.)A. Original sur papier, 300 mm x 105 mm. Lille, AD Nord, B 2018/61379. Au verso :

Matthieu de Bracle, étiquette avec mention « No B2018 9 », immatriculationno 61379, 1454 1er avril av. p.

mention : DUmONT, mARCHANDISSE, « La signature ».Je mathieu de Bracle, conseiller et aumosnier de monseigneur le duc de

Bourgogne et de Brabant, confesse avoir eu et receu de maistre Gautier de la mandre,aussy conseiller et garde de l’espargne de monseigneur, la somme de trente six livresde xL gros monnoie de Flandres chascune livre que mondit seigneur luy a ordonnémoy bailler et delivrer pour faire dire et continuer une messe de requiem ung andurant en commenchant le premier jour d’octobre l’an mil CCCC LIIII darrainementpassé et finissant le derrenier jour de septembre l’an mil CCCC LV prochain a venir,laquelle messe on dit et continue en la maniere que dit est en l’eglise de SainteGoudele a Brouxelle pour l’ame de messire Cornille bastard de Bourgogne cuy Dieupardoint, qui est enterré en icelle église. De laquelle somme de xxxVI livres audit prisde xL gros monnoie de Flandres chacune livre je suy content et me charge et promesde faire dire et continuer icelle messe en la maniere que dit est et en acquitter leditmaistre Gautier et tous autres qu’il appartendra. Tesmoing mon saing manuel cy misle premier jour d’avril l’an mil CCCC cinquante quatre devant Pasques.

m de Bracle

3Philippe, duc de Bourgogne, fonde une messe de requiem quotidienne et perpé-

tuelle, pour l’âme de Corneille, Bâtard de Bourgogne, ainsi que la commémorationde ce dernier, en l’église Sainte-Gudule de Bruxelles.

18 avril 1456A. Original inconnu.B. Copie sur parchemin, avec réglure, 490 mm x 365 mm, avec repli de 75 mm, dans

l’original des lettres réversales, émanant du chapitre de la collégiale Sainte-Gudule de Bruxelles, en date du 18 avril 1456, de l’acte du duc de Bourgogne,

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conservé à Bruxelles, AGR, Chartes de Brabant, no 9615. Le document com-porte un repli sur lequel est appendu le sceau du chapitre de Saint-Gudule, encire verte, pendant sur double queue de parchemin. Au recto : en haut, àgauche, cachet à l’encre «  Archives du royaume de Belgique  » ; en margegauche, deux accolades xIxe s., l’une de couleur bleue, l’autre en rouge, déli-mitent, respectivement les actes du chapitre et du duc, avec mention, sur lahauteur, de la date de chacun d’eux. Les clauses finales de chaque acte sontsoulignées dans les mêmes couleurs. Sur le repli, en écriture du xVe s. : àgauche de l’accolade bleue : duplica ; à gauche de la double queue de parche-min : per capitulum ; à droite de la même double queue : Quoad premissa Jo.Jakemins et, en dessous, Registrata. Au verso : en haut, cachet à l’encre« Archives du royaume de Belgique » ; au-dessus de la queue de parchemin,en écriture du xVe s. : touchans une messe de requiem cotidienne et ung obitpour l’ame de feu messire Cornille bastart de Bourgogne ; plus bas : .LIJ. ; plushaut : IV. a. l. 20.

C. Copie de B., conservée à Bruxelles, AGR, Chambre des comptes, reg.  133,fol. 38r-39r. Au fol. 38r, en marge, au début du texte, d’une écriture contem-poraine : « no, Bruxelles, 1er juin 1456 » ; fol. 38v, en haut, en marge : « no,Bruges, 18 avril 1456 » ; fol. 39r : en bas du texte, Sic signata per capitulumQue ad premissa Jo. Jaquemins189 ; plus bas, en marge : duplicata ; sous cettemention : Volonté est faicte aux lettres originalles baillees a maistre Adrienpour les mettre en la tresorie le xVII jour d’aoust l’an xIIIc LVI.

édition : JACQUES DU CLERCQ, Mémoires, t. 1, p. 215-216, no xLII (éd. d’un texteapprochant, mais à la troisième personne).

mentions : wüRTH-PAQUET, «  Table chronologique  », Publications de l’Institutgrand-ducal, t.  30, p.  138, no 183 (mentions de B., de C. et de l’éd.) ;A. VERkOOREN, Chartes et cartulaires des duchés de Brabant et de Limbourget des pays d’Outre-Meuse, 3e part., Chartes originales et cartulaires (1427-1789). Oorkonden en cartularia van de hertogdommen Brabant en Limburgen van de Landen van Overmaas, 3e part., Originele Oorkonden en Cartularis(1427-1469), 1450-1469, Bruxelles, 1989 (mentions de B. et C.).

édition d’après B., selon la tradition qui est celle proposée par wüRTH-PAQUET,« Table chronologique », Publications de l’Institut grand-ducal, t. 30, p. 138,no 183 : «  Cette lettre est insérée dans celle cotée lij. Parmi les chartes deBrabant, arm. IV infra, lay. a. fondat. Voir lettre reversales du chapitre de Ste-Gudule en date du 1er juin 1456, reg. chartes chambre des comptes en Brabantmarqué lett. C, no 14, fol. 38, 39. – Cité par de Reiffenberg. mémoires de duClercq, t.  I, 215.  » L’acte ducal est précédé de Nos, decanus et capitulumecclesie collegiate Sancte Gudile Bruxellensis Cameracensis diocesis, notumfacimus universis presentibus et futuris fatemurque nos realiter et in pecunianumerata habuisse et recepisse ab illustrissimo principe domino nostrometuendissimo domino Philippo duce Burgundie et Brabantie per manusvenerabilis viri magistri Galteri de Mandra ecclesiarum Beate MarieBrugensis et Sancti Petri Casletensis prepositi eiusdem domini nostri ducis

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189. — Jean Jaquemyns, petit chanoine de Sainte-Gudule, mort en 1465. Voir GUILARDIAN,L’obituaire, p. 48.

consiliarii ac sui thesauri secreti custodis summam septingentorum scutorumsive coronarum auri quadraginta octo grossis monete Flandrie pro quolibetscuto sive corona computatis. Quam summam ipse idem princeps et dominusnoster metuendissimus dominus dux nobis tradi et deliberari mandavit adopus unius misse de requiem cotidiane et perpetue atque unius obitus siveanniversarii perpetuia in ecclesia nostra perpetuis temporibus fiendorum etcelebrandorum pro anima quondam defuncti nobilis domini Cornelii bastardiBurgundiae modo et forma in litteris prefati domini nostri ducis latius conten-tis et expressatis. Quarum tenor de verbo ad verbum sequitur et est talis. Il estsuivi de : Sic signatur Phe. De quaquidem summa septingentorum scutorumsive coronarum auri quolibet scuto pro xLVIII grossis flandrie ut preferturcomputato, nos tenemus pro bene contentis et persolutis ac inde quitamus etquitos clamamus dominum nostrum metuendissimum dominum ducem mag-istrumque Galterum de Mandra prepositum prenominatos ac alios quoslibetquorum interest aut interesse poterit in futurum. Et insuper promittimusharum presentium tenoreb mediante summa predicta per nos ut premittiturrecepta missam de requiem et obitum sive anniversarium de quibus in dictislitteris ipsius domini nostri ducis superius transscriptis fit mentio benefideliter et laudabiliter per nos et nostros facere dicere et celebrare in ecclesianostra predicta perpetuis temporibus diebus modoque et forma in ipsis litterisdesignatis ac prout et quemadmodum prefatus dominus noster dux per eas-dem suas litteras fieri vult ordinat et requirit absque fraude et defectu quibus-cumque. Et ad hoc obligamus nos omniaque et singula bona et redditus eccle-sie nostre predicte presentia et futura quecumque. In cuius rei testimoniumsigillum nostrum ad causas quo utimur litteris presentibus duximus apponen-dum. Datum Bruxelle in loco nostro capitulari consueto anno domini milles-imo quadringentesimo quinquagesimo sexto mensis junii die prima. Outre lesdifférences signalées en notes textuelles, il y a lieu de remarquer que les lignesqui viennent d’être reproduites, dans C., sont elles-mêmes précédées du titresuivant : Contrelettre des doyen et chappitre de sainte goudile à Bruxelles acelebrer une messe cothidienne et ung anniversaire en ladite eglise pour feumessire Cornille bastart de Bourgogne.

Phelippe, par la grace de Dieu, duc de Bourgoigne, de Lothier, de Brabant et deLembourg, conte de Flandres, d’Artois, de Bourgogne palatin, de Haynnauc, deHollande, de Zellanded et de Namur, marquis du Saint Empire, seigneur de Frise, deSalins et de malines, maistre Gautier de la mandre, notre conseiller et garde denostre espargne, savoir vous faisons que nous avons ordonné, ordonnons et voulonsestre fait, dit et celebré en l’eglise de Sainte Goudile, en nostre ville de Brouxelles,une messe de requiem cothidienne et perpetuelle, tous les jours, pour l’ame de feumessire Cornille, bastard de Bourgoingne, enterré et gisant au cuer d’icelle eglise,laquelle sera dite chacun jour audit cuer d’icelle eglise, devant le commenchementede prime, a l’autel qui est darrieref le grant autel, et sera tenu cellui qui dira laditemesse d’aler chacun jour tantost aprés icelle messe finieg a la tombe dudit feu messireCornille et y dire leh psalme de profundis, et de geteri l’eaue benoite sur icelle tombea chacune foysj. Et avec ce ordonnons et voulons en icelle eglise estre dit et fait ungobit ou anniversaire perpetuel pour l’ame ……………k dudit feu messire Cornilletous les ans au jour de son trespas solemnelement, a vigilles a neuffl lecons, laudes,

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commendaces, messe a diacre et soubzdyacrem, sonnerie et luminaire tout ainsi et enla maniere que l’on a accostumén de faire en ladite eglise les obitso fondez des princeset princesses illec gisans et reposans. Et entendons que les doyen et chapittre deladite eglise de Sainte Gudile seront tenusp et chargiez de faire et faire faire et direlesdites messes de requiem et obit, et de supporter ladite charge de sonnerie et lumi-naire en la maniere dessus declaréq. Et pour ce faire avons ordonné et ordonnons leurestre payé, baillié et delivré la somme de sept cens escuzr ou couronnes d’or du prisde xLVIII groz monnoye de nostre pays de Flandres piece ou aultres monnoye a lavaleur, pour une fois, assavoir VIc escuzt pour ladite messe de requiem cothidienne etperpetuelle et C escuzu pour ledit obit moyennant laquelle somme ilz nous baillerontleurs lettres souffisantes ou seront incorporees de mot a mot ces presentes par les-quelles ilz se chargeront, promettrontv et obligeront pour eulx et leurs successeurs defaire et faire faire, accomplir et entretenir ledit service et office de messe de requiemet d’obit ainsi et par la maniere que dit est lesquelles lettres voulons estre enregis-treezw en la Chambre de noz comptes audit lieu de Brouxelles et aprés mises et gar-dees ou Tresor de noz lettres et chartes de Brabant qu’il appartendra. Si voulons etvous mandons que des deniers de nostre dite espargne vous payez bailliez et delivrezausdits doyen et chapittre ladite somme de sept cens escuzx ou couronnes d’or duditpris de xLVIIIy groz de nostre dite monnoye de Flandrez piece ou aultreaa monnoye ala valeur pour une foysbb a l’euvre de la fondation dessusdite. Et par rapportant cestenostre lettre laquelle avons signee de nostre maincc avecques lettres de quitanced’iceulx doyen et chapittre de la dite somme seulement contenant les promessedd etobligation dessus declaireesee et enregistrees en nostre dite Chambre des Comptes aBrouxelles comme dit est. Nous vous alouerons et par ceulx que commettrons a oirvoz comptes voulons et mandons estre allouee en la despense d’iceulx vos comptesicelle somme de VIIc escuzff ou couronnes d’or du pris piece que dessus sans contreditou difficulté ne avoir sur ce de nous aultregg ordonnement mandement ou comman-dement que ceste nostre dite lettre. Donné en nostre ville de Bruges le xVIIIe jourd’avril l’an de grace mil CCCC cinquante six, aprés Pasques.

Notes textuelles : a Perpetus] C. – b tenere] C. – c Haynau] C. – d Zeelande] C. – e commencement]C. – f derriere] C. – g finee] C. – h la] C. – i getter] C. – j fois] C. – k om.] C. – l neuf] C. – m soub-dyacre] C. – n accoustumé] C. – o obis] C. – p tenuz] C. – q declaree] C. – r escus] C. – s aultre] C. –t escus] C. – u escus] C. – v prometteront] C. – w enregistrees] C. – x escus] C. – y quarante huit] C. –z Flandres] C. – aa autre] C. – bb fois] C. – cc nom] C. – dd promesses] C. – ee declariees] C. – ff escus]C. – gg autre] C.

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Acte de Corneille, Bâtard de Bourgogne, 20 janvier 1447.Bruxelles, AGR, CC, Acquits des Chambres à Bruxelles, n° 2130.

Cachet de Corneille, Bâtard de Bourgogne, 20 janvier 1447.Bruxelles, AGR, CC, Acquits des Chambres à Bruxelles, n° 2130.

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Acte de Corneille, Bâtard de Bourgogne, 11 septembre 1445.Luxembourg, Archives nationales, Section ancienne, Fonds anciens, A-LII-14, Archives de la

maison mohr de waldt-Reinach, Chartes et titres divers, 1440-1448, n° 1554.

Sceau de Corneille, Bâtard de Bourgogne, 11 septembre 1445.

Luxembourg, Archives nationales,Section ancienne, Fonds anciens,

A-LII-14, Archives de la maison mohr de waldt-Reinach,

Chartes et titres divers, 1440-1448, n° 1554.

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Certification de Louis le Philippe, 29 août 1450.Lille, AD Nord, B 2006/60562.

Signature de Corneille de Bourgogne, 29 août 1450.Lille, AD Nord, B 2006/60562.