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Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
Remerciements
Régis Juanico et Jean-Frédéric Poisson remercient Myriam El Khomri, ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation
professionnelle et du Dialogue social pour avoir prononcé le discours d’ouverture de ces Rencontres, Etienne Mercier,
directeur du pôle Opinion et Santé d’Ipsos Public Affairs pour son pitch, Alan Fustec, président-directeur général du cabinet
Goodwill Management, auteur de l’étude pour le MEDEF et le CNOSF sur l’impact du sport au travail et Marie-Christine
Oghly, vice-présidente de la Fédération française de sport en entreprise pour leur focus, Isaac Getz, professeur à l’ESCP
Europe, co-auteur de Liberté and Cie pour son intervention lors du déjeuner, Alain Ducardonnet, journaliste sur BFMTV pour
avoir animé les débats de cette matinée, leurs collègues, Anne-Yvonne Le Dain, députée de l’Hérault, Jean-Marc Gabouty,
sénateur de la Haute-Vienne, Michèle Rivasi, députée européenne et Gérard Sebaoun, député du Val-d’Oise ainsi que
l’ensemble des intervenants qui, par leur expertise et leur contribution aux débats, ont concouru au succès de cette
manifestation.
Ces Rencontres ont également été rendues possibles grâce au soutien institutionnel de l’Anact, ANDRH, Fédération française du Sport d’entreprise et la FIRPS, à l’implication et au soutien de ses partenaires :
Groupe APICIL
Siaci Saint Honoré
Ayming HR Performance
Reed Smith
Wellness Training
RATP
IFAS
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu
définitif vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
Sommaire
Ouverture des Rencontres
1 Myriam El Khomri
Ministre du Travail, de l’Emploi,
de la Formation professionnelle
et du Dialogue social
PITCH
Les Français et le bien-être au travail
5 Etienne Mercier
Directeur du pôle Opinion et Santé,
Ipsos Public Affairs
SESSION I
Plan national santé au travail
2015-2019, quelles avancées ?
8 Introduction
Régis Juanico, député de la Loire
9 les trois grands axes du PST 3 et
comment les partenaires sociaux y
ont contribué
Hervé Garnier, secrétaire national
de la CFDT
10 Un plan favorable à la santé
au travail
Hervé Lanouzière, directeur général
de l’ANACT
12 La santé au travail
et la performance de l’entreprise
sont compatibles
Jean-Marc Gabouty, sénateur
de la Haute-Vienne
14 La place de la démarche de
prévention plutôt que de
réparation au sein des entreprises
Paul Frimat, professeur de médecine
du travail à l’Université Lille II
16 Comment instaurer une culture de
prévention par les principes de la
qualité de vie au travail ?
Fabien Piazzon, consultant qualité de
vie au travail, Ayming HR
Performance
18 DÉBATS
21 Le cadre réglementaire, aspect
pénibilité et burn out
Maître Laura Ferry, avocat à la Cour,
Counsel, Reed Smith LLP
23 Les maladies psychiques au travail
et le burn out
Gérard Sebaoun, député du Val-
d’Oise, président du groupe d’études
"Pénibilité du travail, santé au travail
et maladies professionnelles"
24 Les perturbateurs endocriniens et
l’exposition aux produits
chimiques
Michèle Rivasi, députée européenne
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Sommaire
26 Comment l’ouvrage Santé au
travail : pour une nouvelle
dynamique – Constats et ouvertures
s’inscrit dans
le PST 3
Dr Pierre Jansou, médecin du travail,
co-auteur du livre Santé au travail :
pour une nouvelle dynamique -
Constats et ouvertures
28 DÉBATS
FOCUS
Le sport : un enjeu de performance
sociale et économique pour l’entreprise
31 Les conséquences du sport dans
les entreprises
Alan Fustec, président-directeur
général du cabinet Goodwill
Management, auteur de l’étude pour
le MEDEF et le CNOSF sur l’impact
du sport au travail
32 Comment encourager le sport
au sein des entreprises ?
Marie-Christine Oghly, vice-
présidente de la Fédération française
du sport d’entreprise
SESSION II
Santé et bien-être au travail, quelles
innovations au travail ?
34 Introduction
Jean-Frédéric Poisson, député des
Yvelines, membre de l’Observatoire
national du suicide
35 L’étude québécoise SALVEO sur la
santé mentale en entreprise
Laurence Breton-Kueny, membre
du bureau national de l’ANDRH
37 L’innovation managériale
et la santé au travail
Catherine d’Aléo, directrice du
développement de la performance
sociale du Groupe APICIL
39 Quelles sont les innovations
souhaitables pour réduire les RPS
et développer le bien-être au
travail ?
Jean-Pierre Durand, professeur de
sociologie du travail à l’Université
d’Evry, auteur du livre L’innovation
dans le travail
41 La vigilance raisonnable
Anne-Yvonne Le Dain, députée de
l’Hérault, vice-présidente du groupe
d’études "Pénibilité au travail, santé
au travail et maladies
professionnelles"
42 Concilier performance sociale et
performance économique
Laurent Grouas, directeur innovation
et partenariats de Siaci Saint Honoré
44 Travaux sur les nouvelles
technologies de la santé au travail
Stéphane Pimbert, directeur général
de l’Institut national de recherche et
de sécurité pour la prévention des
accidents du travail et des maladies
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professionnelles (INRS)
Sommaire
46 Retour d’expérience sur la
détection des comportements
à risque
Michel Rota, directeur général
de Wellness Training
47 Betterise Health Tech au service
de la santé et du bien-être
Christophe Brun, co-fondateur de la
société Betterise Health Tech
48 Le bien-être autour de l’innovation
managériale
et la psychologie positive
Laurence Saunder, dirigeante de
l’Institut français d’action sur le
stress (IFAS) et vice-présidente de la
Fédération des intervenants en
risques psychosociaux (FIRPS)
49 DÉBATS
Clôture des Rencontres
51 Jean-Frédéric Poisson
Député des Yvelines, membre
de l’Observatoire national du suicide
Déjeuner débat
53 Isaac Getz
Professeur à l’ESCP Europe, co-
auteur de Liberté & Cie
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Animation
des débats
Alain Ducardonnet est médecin et
journaliste. Il exerce toujours en cardiologie
et est spécialisé en activité physique et
sportive appliquée au diagnostic et au
traitement des maladies cardio-vasculaires.
Il a été pendant 11 ans médecin sur le Tour
de France. Comme journaliste et consultant
santé, il a collaboré avec Europe 1, puis 11
ans avec LCI et TF1. Il est maintenant
spécialiste santé pour le groupe
NextRadioTV (BFMTV-BFM Business-RMC)
pour le News. Alain Ducardonnet et ses
invités éclairent chaque semaine dans
“Votre santé m’intéresse” les
téléspectateurs sur les grandes thématiques
du monde de la santé. Il est en charge de la
page santé du Parisien Aujourd’hui en
France Magazine depuis 2014.
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1
Ouverture des
Rencontres
Myriam El Khomri
Alain Ducardonnet, journaliste sur BFMTV
Bienvenue à ces 6es Rencontres parlementaires pour la Santé au travail. Je laisse à
Madame Myriam El Khomri le soin d’ouvrir les débats.
e suis très heureuse de pouvoir
ouvrir ces Rencontres
parlementaires. Le programme
est dense, la liste des intervenants de
très grande qualité et l’assistance
nombreuse. Autorisez-moi toutefois
d’emblée à contester le caractère
interrogatif de l’intitulé de cette
matinée : "Le bien-être au travail :
contrainte ou opportunité
d’efficacité ?". Vous ne serez pas
surpris que la ministre du Travail que je
suis apporte une réponse claire et
nette à une telle question.
Malheureusement, il existe une
histoire sombre du travail faite
d’oppression et de domination sociale.
C’est encore le cas aujourd’hui dans
nombre de pays du monde.
Tristement, c’est encore le cas chez
nous parfois, lorsque le travail est fait
d’aliénation, de rapports de force
brutaux, de violences psychiques ou
symboliques, d’inégalités, de
discriminations, de précarité, de
tâches émiettées ou de temps
fractionnés. De très nombreuses
enquêtes illustrent ces exemples, ce
constat est valable encore ici et
maintenant dans l’organisation du
travail de la sixième puissance
économique mondiale.
J’agis d’ailleurs de façon très
volontariste pour que l’Europe
réglemente encore davantage le
travail détaché, qui subit
d’importantes fraudes et voit parfois
des personnes placées dans des
situations professionnelles tout à fait
indignes. Nous ne devons pas ignorer
cette réalité, nous devons la combattre
sans relâche, mais nous devons, dans
le même temps, promouvoir une autre
histoire et une autre conception du
travail, vue dans sa dimension
émancipatrice : l’identité
professionnelle, le métier, le savoir-
faire, la place que l’on occupe au sein
J
Myriam El Khomri étudie le droit public à l’Université de Bordeaux IV. Boursière, elle poursuit
ses études à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne où elle obtient un DESS de droit public en 2001. Elle e ectue son stage de n d’études à la
Délégation interministérielle à la ville. En 2001, elle est la collaboratrice de Daniel Vaillant, maire du
18e arrondissement, député de Paris et ancien ministre et participe à l’élaboration du contrat
local de sécurité du 18e arrondissement. En 2004, elle participe à l’élaboration du plan “crack du
nord-est parisien” de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt).
Après le 21 avril 2002, Myriam El Khomri a choisi de s’engager plus activement en politique. Elle
adhère alors au Parti socialiste. Elle siège au conseil national du Parti Socialiste, puis au bureau
national en 2012, et devient secrétaire nationale du Parti socialiste chargée des questions de
sécurité en 2014. En 2008, Myriam El Khomri est élue adjointe au maire de Paris, chargée de la
protection de l’enfance et de la prévention spécialisée, puis, de 2011 à 2014, de la prévention et de la sécurité. Elle est, en avril 2014, élue vice-présidente du conseil général et adjointe d’Anne
Hidalgo, maire de Paris, chargée à ce titre de la sécurité, la prévention, la politique de la ville et l’intégration. Elle est également conseillère de
Paris du 18e arrondissement. Elle démissionne de toutes ses fonctions exécutives le 27 août 2014,
après son entrée au Gouvernement Manuel Valls II, comme secrétaire d’État chargée de la politique
de la Ville, auprès de Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. Le 2 septembre
2015, elle est nommée ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du
Dialogue social, suite à l’élection de François Rebsamen en tant que maire de Dijon.
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du système productif, les relations que
l’on tisse, ces éléments font partie
intégrante d’une construction
individuelle. Cette vision positive du
travail, je la défends et souhaite que
nous la fassions prospérer
collectivement. Oui, le bien-être au
travail peut être une réalité.
Aujourd’hui, en écho à une
revendication de plus en plus partagée,
vie professionnelle et vie personnelle
doivent absolument s’articuler pour
garantir le bien-être et l’efficacité des
travailleurs. Je pense que les lieux de
travail peuvent et doivent être des
lieux d’accomplissement personnel. Il
s’agit d’une ambition à portée de main,
qui passe par la reconnaissance de la
place de chacun, par l’autonomie et
par la participation. C’est tout l’enjeu
de la qualité de vie au travail.
Le second axe stratégique du Plan
santé au travail, que j’ai lancé en
décembre dernier, s’intitule justement
« Améliorer la qualité de vie au travail,
levier de santé, de maintien en emploi
des travailleurs et de performance
économique et sociale de
l’entreprise ». En effet, aucune société,
aucune entreprise ne peut avancer
sans une approche qui mêle
étroitement l’amélioration du bien-
être de ses salariés et de sa
performance. Nous défendons l’idée
que la réalisation individuelle sert
évidemment, mécaniquement,
harmonieusement, le succès collectif.
L’une ne peut se construire sans
l’autre. Cette idée chemine désormais,
elle correspond à celle défendue par
les partenaires sociaux. Ils l’ont
défendue dans le cadre de l’accord
national interprofessionnel du
19 juin 2013, intitulé "Vers une
politique d’amélioration de la qualité
de vie au travail et de l’égalité
professionnelle". À cette occasion, les
partenaires sociaux ont affirmé que la
préservation de la santé et de la
sécurité au travail et l’amélioration des
conditions de travail constituent un
levier de performance pour
l’entreprise. Je ne peux que saluer
cette démarche, qui rejoint celle de la
loi Dialogue social et Emploi du
17 août 2015. Elle a introduit un temps
spécifique consacré à la négociation
autour de ce thème.
Pour une entreprise, miser sur la
"QVT" consiste à reconnaître que tout
salarié qui se sent respecté, impliqué,
écouté, valorisé, souhaitera se rendre
utile et efficace afin de réaliser sa part
de travail dans un projet collectif. Cela
pour une raison simple et de bon sens :
le salarié n’est-il pas souvent le mieux
placé pour identifier les
dysfonctionnements ? Proposer des
pistes d’amélioration ? Demander ou
procurer de l’aide à ses collègues ? En
somme, pour mettre son intelligence
au service du collectif.
Se soucier du bien-être au travail
des salariés implique aussi de savoir
anticiper le changement et d’en
évaluer l’impact pour les personnes
concernées. Aucun changement
organisationnel ne doit faire
l’économie d’une réflexion au sujet de
sa faisabilité et de son acceptabilité.
Un tel travail d’anticipation nécessite
d’associer les managers de proximité,
les représentants du personnel et les
services pluridisciplinaires de santé au
travail.
En matière de santé au travail,
justement, la loi que j’ai présentée
jeudi dernier en Conseil des ministres
prévoit de poursuivre la réforme de la
« Je pense que les lieux
de travail peuvent et
doivent être des lieux
d’accomplissement
personnel. »
Myriam El Khomri
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3
médecine du travail. Les évolutions
introduites par la loi du 17 août dernier,
et aujourd’hui prolongées, ont été très
largement inspirées par le rapport du
député Michel Issindou, qui constitue
un travail remarquable et une véritable
boussole pour l’action qui est la nôtre.
Le système actuel, malgré ses
ambitions, ne garantit pas dans les
faits un réel suivi des salariés. Nous
devons tirer toutes les leçons des
failles de notre système afin de
l’améliorer. Regardons la réalité en
face et reconnaissons la pénurie des
ressources médicales à laquelle nous
sommes de plus en plus
dangereusement confrontés. Les
projections actuelles tablent sur un
passage de 5 000 médecins aujourd’hui
à 2 500 médecins d’ici 2020. Une telle
évolution va nous conduire à repenser,
sans attendre et sans tabou,
l’organisation de notre médecine du
travail. Aujourd’hui déjà, sur
20 millions de recrutements effectués
chaque année, compte tenu de ces
manques, seules 3 millions de visites
médicales d’embauche sont réalisées.
Comment pouvons-nous nous en
satisfaire ? Les médecins du travail
représentent les acteurs centraux de la
prévention des risques professionnels,
et doivent bien évidemment le rester.
Dans cette optique, ils doivent
impérativement pouvoir adapter leurs
interventions et celles des équipes
pluridisciplinaires (les infirmiers, les
psychologues au travail, les
ergonomes, les préventeurs) placées
sous leur autorité, en tenant compte
des situations et des enjeux différents
en fonction des secteurs d’activité, des
entreprises, des salariés.
Contrairement à ce que j’ai pu
entendre, la réforme de la médecine
du travail que je porte ne va pas
affaiblir la protection et le suivi des
salariés. D’ailleurs, les partenaires
sociaux réunis au sein du COCT m’ont
adressé, le 16 mars dernier, une note
concernant le suivi des salariés par la
médecine du travail. Dans ce
document, ils défendent également la
volonté de proportionner le suivi des
salariés au risque professionnel
encouru. Il s’agit de sortir d’une
logique dépassée selon laquelle chacun
devrait être traité de manière
uniforme. La réponse se situe au
contraire dans la pluridisciplinarité et la
prévention pour rendre le suivi plus
adapté, mieux ciblé et plus efficace.
L’ambition reste entière puisque le
projet de loi introduit pour la première
fois au niveau législatif le principe
selon lequel tout travailleur bénéficie
d’un suivi individuel de son état de
santé, assuré par le médecin du travail
et sous l’autorité de celui-ci, par les
autres professionnels de santé
membres de l’équipe pluridisciplinaire,
qu’il anime et coordonne. Cet objectif
nécessite de miser sur une approche
qui privilégie la prévention et qui
donne la priorité à ceux qui ont le plus
besoin d’être accompagnés.
Concrètement, tous les salariés
bénéficieront d’un suivi médical et
d’une visite d’embauche. Les
professionnels amenés à occuper des
postes à risque rencontreront un
médecin du travail. Quant aux autres,
ils bénéficieront d’une visite de
sensibilisation et de prévention au
risque professionnel, réalisée par les
membres de l’équipe pluridisciplinaire,
infirmiers, ergonomie ou encore
psychologues du travail, tous
professionnels de la santé au travail,
qui interviendront sous l’autorité du
médecin du travail.
« Les projections
actuelles tablent sur un
passage de
5 000 médecins
aujourd’hui à
2 500 médecins
d’ici 2020. »
Myriam El Khomri
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4
Pour terminer, je souhaiterais ouvrir
sur une autre avancée contenue dans
cette loi, en matière de qualité de vie
au travail, avec l’instauration d’un droit
à la déconnexion. En effet, nous
voulons éviter que la révolution
numérique à l’œuvre, par ailleurs
source d’opportunité et de progrès
fantastique, n’engendre une nouvelle
forme d’aliénation. D’ailleurs, comme
le soulignait le rapport de Bruno
Mettling qu’il m’a remis en
septembre 2015, l’essor du numérique
au travail peut être un levier de
développement de la qualité de vie au
travail, mais également un facteur
d’accroissement des risques
psychosociaux. Il est indéniable que si
les nouvelles technologies offrent plus
d’autonomie au salarié, elles
engendrent aussi des effets négatifs,
difficiles à maîtriser.
Comme l’indiquent les
responsables, les experts de l’Anact –
je salue à cette occasion Hervé
Lanouzière, son directeur général –,
l’hyperconnexion présente à elle seule
de vrais risques pour la santé des
travailleurs. La rapidité et la facilité des
échanges via le numérique
développent une culture de l’urgence
et de l’immédiateté potentiellement
néfaste. La conciliation des temps est
de ce fait devenue un enjeu majeur de
la production de la technologie de
l’information dans le quotidien des
salariés. Il est impossible de ne pas
faire le lien avec la question essentielle
du burnout ou syndrome d’épuisement
professionnel. Même si les causes en
sont parfois complexes, le burnout fait
partie des risques psychosociaux dont
l’origine est à rechercher dans les
conditions d’emploi, l’organisation du
travail ou les relations du travail. Le
Gouvernement s’est déjà saisi
pleinement de ce sujet grave,
notamment en instaurant l’article 27
de la loi relative au dialogue social et à
l’emploi d’août 2015. C’est-à-dire la
pleine reconnaissance du burnout
parmi les maladies psychiques et son
traitement dans le cadre des comités
régionaux de reconnaissance des
maladies professionnelles. Ce travail
législatif et administratif a donc permis
à notre pays de se doter d’un cadre
adéquat pour travailler à la réparation
de ce nouveau fléau. Nous partageons
la volonté des partenaires sociaux de
donner désormais la priorité à la
prévention de ce phénomène. Un
rapport d’analyse sur les modalités de
reconnaissance du burnout vous sera
très prochainement remis à ma
demande et devrait nous permettre
d’avancer en ce sens dans le cadre du
débat parlementaire. En tout état de
cause, nous devons œuvrer pour
prendre la mesure de notre
responsabilité collective et de notre
intérêt commun. La santé au travail, le
bien-être professionnel sont des clés
indispensables pour garantir notre
performance économique et sociale.
Le bien-être des uns fait le bien-être
des autres et, je crois, la réussite de
tous.
« La santé au travail, le
bien-être professionnel
sont des clés
indispensables pour
garantir notre
performance
économique et sociale. »
Myriam El Khomri
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5
PITCH
Les Français et le bien-
être au travail
Etienne Mercier
Alain Ducardonnet
J’invite Etienne Mercier, directeur du pôle Opinion et Santé d’Ipsos Public Affairs, à vous
présenter les résultats d’une enquête publiée mi-2015, consacrée au bien-être des
Français en général. Des données concernant plus précisément les salariés en ont été
extraites. Je vous donne la parole.
onjour et merci de m’accueillir.
Je vais vous présenter quelques
chiffres que nous avons extraits
d’une enquête consacrée au bien-être
au travail, et menée sur un échantillon
représentatif de salariés français. Je
rappelle d’abord que les Français sont
très attachés à la valeur travail, plus que
dans les autres pays de l’Union
européenne. Elle constitue un élément
fort de la construction de soi.
Néanmoins, il existe de véritables
problèmes de bien-être en entreprise,
mais aussi dans le secteur public. Les
attentes sont fortes avec le sentiment
que peu d’actions sont menées
aujourd’hui. La première question
posée aux salariés était de savoir s’ils
sont rarement ou fréquemment sujets à
des souffrances liées à leur travail. Vous
le constatez, les niveaux de prévalence
et de souffrance semblent
extrêmement importants. Le stress est
fréquent, la majorité des salariés dit
souffrir d’émotions pénibles ou
négatives. De nombreux salariés
souffrent alors d’intenses fatigues, voire
de troubles du sommeil pour un salarié
sur deux. À l’extrême, ces souffrances
peuvent engendrer des troubles
alimentaires, des maux de ventre et des
variations de poids. Ces données ne
sont pas anodines, puisqu’un tiers des
salariés estiment fréquemment être
atteints de ces maux.
Il ne faut pas oublier les problèmes
physiques, à l’image des troubles
musculo-squelettiques qui concernent
B
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6
plus d’un salarié sur deux. Cinq ans
auparavant, nous constations des
variations liées aux statuts des salariés,
qui sont moins évidentes aujourd’hui.
Ce constat est identique dans tous les
secteurs d’activité.
Deuxième élément, seulement un
salarié sur cinq estime que des actions
sont menées pour améliorer la
situation. Ce sentiment est partagé
dans le privé comme dans le public. Des
actions sont pourtant menées, mais il
s’avère qu’elles pâtissent d’un manque
de communication. Nous constatons
qu’il demeure un problème
d’information et d’éducation auprès des
salariés. De nouveau, il n’apparaît pas
de grandes différences sur ce constat
entre les structures importantes de plus
de 1 000 salariés et les entreprises plus
modestes.
Enfin, le dernier résultat significatif
concerne les mesures plébiscitées par
les salariés. Une liste non exhaustive
leur a été soumise. Nous relevons des
attentes quant à l’amélioration du poste
de travail. La ministre l’a également
souligné, l’idée de déconnexion est
aussi très présente avec le
développement d’espaces de détente,
l’organisation d’événements de
convivialité entre les collègues en
dehors du travail. Les salariés
demandent aussi des conseils de
spécialistes, de disposer de formation
leur permettant de mieux gérer leur
stress, leur temps et leur relation aux
autres. En conclusion, il semble
nécessaire de parfaire cette éducation
des salariés.
« De nombreux salariés
souffrent d’intenses
fatigues, voire de
troubles du sommeil. »
Etienne Mercier
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7
SESSION I
Plan national santé au travail 2015-2019,
quelles avancées ?
Président
Régis Juanico
Député de la Loire
Intervenants
Maître Laura Ferry
Avocat à la Cour, Counsel,
Reed Smith LLP
Paul Frimat
Professeur de médecine du travail
à l’Université Lille II
Jean-Marc Gabouty
Sénateur de la Haute-Vienne
Hervé Garnier
Secrétaire national de la CFDT
Dr Pierre Jansou
Médecin du travail, co-auteur du livre
Santé au travail : pour une nouvelle
dynamique - Constats et ouvertures
Animateur
Alain Ducardonnet
Journaliste sur BFMTV
Hervé Lanouzière
Directeur général de l’ANACT
Fabien Piazzon
Consultant qualité de vie au travail,
Ayming HR Performance
Michèle Rivasi
Députée européenne
Gérard Sebaoun
Député du Val-d’Oise, président
du groupe d’études "Pénibilité du
travail, santé au travail et maladies
professionnelles"
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définitif vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants
Introduction
Régis Juanico
Alain Ducardonnet
Avant un premier tour de table, quelques mots d’introduction de Régis Juanico, député
de la Loire et membre du groupe d’études "Pénibilité du travail, santé au travail et
maladies professionnelles".
onjour à tous, je suis ravi de
coprésider ces Rencontres pour
la cinquième fois. Il est
important de conserver ce lieu de
débats réguliers qui permet un suivi de
ces thématiques sur la santé au travail.
Il est nécessaire que les différents
acteurs puissent nous interpeller et
nous questionner. Je remercie Myriam
El Khomri d’avoir ouvert cette édition.
Je ne peux m’empêcher de constater
que chaque année, ces rencontres se
déroulent dans un contexte de débat
législatif sur le travail avec une loi
supplémentaire. L’an dernier, la loi sur la
modernisation du dialogue social était
en préparation, cette année il s’agit
d’une loi sur les libertés et les
protections pour les entreprises et les
actifs. En tant que législateur, je crois
qu’il faudrait un peu moins de textes de
loi et un peu plus de lieux d’évaluation
des politiques menées.
De nouveaux débats naissent, à
l’image de l’impact du numérique sur
l’organisation du travail. Nous avons
aussi abordé toute à l’heure la question
du droit à la déconnexion. Je termine
avec deux remarques. Concernant la
question du burnout, nous avons
déposé, avec 80 autres députés, une
proposition de loi afin de reconnaître ce
syndrome d’épuisement professionnel
et de faciliter cette reconnaissance par
les comités régionaux.
Enfin, le second point concerne
l’activité physique au travail. Nous
avons ouvert une brèche importante au
niveau du Code de la santé publique.
Grâce à un amendement, les bienfaits
de l’activité physique et sportive sont
désormais reconnus pour la santé
publique. Nous avons, dans un article,
donné la possibilité au médecin de
prescrire sur ordonnance des activités
physiques adaptées aux patients
atteints de maladies de longue durée.
Ce qui représente 9 millions de patients
en France. Ces avancées peuvent très
bien être retrouvées dans le monde de
l’entreprise. Cette notion de bienfaits
pourrait, pourquoi pas, être introduite
également dans les prochains mois
dans le Code du travail. Il s’agit de
donner des outils aux entreprises pour
faciliter ces activités, qui réduisent de
nombreux maux.
"Nous avons proposé une loi pour
B
Député de la Loire depuis juin 2007,
Régis Juanico est également membre du
groupe d’études “Pénibilité du travail,
santé au travail et maladies
professionnelles”, et conseiller
départemental de la Loire. Membre de la
mission d’information parlementaire de
la commission des Affaires sociales sur
les risques psychosociaux en 2011, ainsi
que du conseil d’administration de
l’Agence nationale pour l’amélioration
des conditions de travail (ANACT), Régis
Juanico a également été co-rapporteur
de la mission d’information sur la
pénibilité dans les petites entreprises et
membre de la mission d’information sur
la pénibilité au travail en 2008. Ancien
trésorier du Parti socialiste et ancien
président national du Mouvement des
jeunes socialistes, Régis Juanico a
successivement travaillé au cabinet du
ministre de la Défense, à la délégation
interministérielle aux restructurations de
défense, et à l’ANACT, avant de devenir
attaché territorial à la direction des
ressources humaines de la région
Rhône-Alpes.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu
définitif vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants
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que le burnout soit reconnu comme un syndrome d’épuisement professionnel."
Le trois grands axes du
PST3 et comment les
partenaires sociaux y ont
contribué
Hervé Garnier
Alain Ducardonnet
Il est vrai que ces thérapeutiques non médicamenteuses représentent des alternatives à
prendre en compte, et qu’il faut savoir prescrire et partager. Je vous propose de débuter
le tour de table, avec Hervé Garnier, au sujet de la méthodologie utilisée pour ce Plan
santé au travail 3.
our expliquer ce PST 3, il est
nécessaire de rappeler la
volonté des partenaires sociaux
de faire évoluer le conseil d’orientation
des conditions de travail. Ce dernier
comporte deux missions : une
d’orientation qu’il n’assumait pas, et
une de consultation pour laquelle les
avis étaient peu pris en compte. Il fallait
ainsi réfléchir à une autre méthode de
travail. Le PST 3 apparaît comme la
partie visible de l’iceberg autour de la
prise en charge des partenaires sociaux
sur les questions de santé et de
conditions de travail. J’ai écouté
Myriam El Khomri, et je crois que c’est
assez rare dans la vie d’un ministre de
proposer un plan qui corresponde aux
attentes des organisations patronales
et syndicales. Ce plan représente
l’aboutissement d’un vrai travail de
réflexion, la méthode fonctionne.
ALAIN DUCARDONNET
La méthodologie fait consensus.
Mais qu’allons-nous en tirer ? Je reviens
vers Hervé Garnier. Quels sont les
points forts que vous retenez de ce
PST 3 ?
HERVÉ GARNIER
Je propose d’appuyer sur les points
qui ne seront pas repris par les autres
intervenants. La prochaine étape
importante dans la construction de ce
PST 3 implique la définition des plans
régionaux de santé. Ce document n’a
pas vocation à être lu par tout le
monde, mais à créer une synergie entre
les différents acteurs. L’implication de
P
Secrétaire National de la CFDT, Hervé
Garnier, berger de profession, a été
représentant des salariés à l’Assemblée
permanente des chambres d’agriculture
(APCA) de 1989 à 1994. Entre 1999 et
2006, il est successivement chargé des
négociations collectives de la production
agricole, de l’industrie et de l’artisanat
alimentaires. Il a été secrétaire général de
la Fédération générale agroalimentaire
(FGA CFDT) de 2002 à 2007. Il est membre
de la commission exécutive de la
Confédération CFDT depuis 2007, en
charge du développement syndical, de la
politique de la formation syndicale et de la
politique en direction des jeunes. Depuis
2012, il assume la responsabilité de la
politique de la CFDT en matière
d’organisation et de vie au travail, du
temps de travail, de la santé au travail et
du handicap.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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chacun permettra d’apporter des
réponses aux entreprises, et surtout aux
PME. C’est pourquoi la dimension
régionale apparaît importante.
Dans les priorités de ce PST 3, je
retiens trois éléments : acquérir une
culture de prévention primaire,
renforcer le dialogue social et repenser
la désinsertion professionnelle.
Un plan favorable à la santé
au travail
Hervé Lanouzière
Alain Ducardonnet
Hervé Lanouzière, vous qui avez participé à la construction de ce PST 3, comment avez-
vous vécu cette expérience sur le plan de la méthodologie ?
ous l’avons vécu de manière
très positive. Ce troisième plan
est le premier à être pensé. Il
ne s’agit pas d’une agrégation de nos
actions comme ça avait pu être le cas
pour les précédents plans. Nous avons
appris. Ce plan est fondé sur les
orientations travaillées par les
partenaires sociaux, qui ont fait
l’unanimité. Notre programme
d’activités s’en trouve légitimé. Et je
confirme que la ministre nous a bien
expliqué que notre feuille de route était
basée sur ces orientations. Il n’existe
aucun projet lié au PST sur lequel nous
n’avons pas travaillé avec d’autres
acteurs.
Lu par un employeur d’une PME, ce
plan peut paraître stratosphérique et
incantatoire. Le premier point qui serait
pertinent dans ce PST 3 est de
s’intéresser aux déterminants des
conditions de travail, et pas seulement
aux effets. Jusqu’à présent, nous avons
toujours travaillé sur les effets avec une
approche par les risques. C’était
nécessaire, bien entendu.
Nous sommes en train de découvrir
que le travail fait partie des facteurs de
santé et qu’il peut être une ressource.
Autrement dit, mettre en place des
conditions de travail favorables peut
créer de la performance dans les
entreprises. Les partenaires sociaux
réalisent ce lien et nous expliquent qu’il
faut aider les entreprises à prendre
conscience de la façon dont elles
peuvent construire ces conditions de
travail. Cette notion peut paraître
théorique, mais pour nous, les
appareillages à mettre en œuvre auprès
des PME et TPE sont différents. Dans
les déterminants, ils n’existent pas
seulement des facteurs individuels,
N
Directeur du travail, Hervé Lanouzière a été
nommé directeur de l’Agence nationale
pour l’amélioration des conditions de
travail (ANACT) en 2012. Auparavant, il a
occupé plusieurs postes au sein du
ministère du Travail. Après avoir participé
notamment à la réécriture du Code du
travail (2005/2008), il est devenu en 2008 le
conseiller technique à la sous-direction des
conditions de travail de la direction
générale du travail (DGT), où il a,
notamment, piloté la cellule “risques
psychosociaux». Précédemment, il a été
directeur adjoint du travail à la direction du
travail du Rhône, responsable du
département formation initiale à l’Institut
national du travail de l’emploi et de la
formation professionnelle (INTEFP), et
inspecteur du travail. Hervé Lanouzière a
publié Prévenir la santé et sécurité au
travail, aux Éditions Lamy. Il a remis à la
ministre du Travail, en été 2015, un rapport
sur les gestes répétitifs, dont les
conclusions ont été reprises dans le décret
paru au JO du 31 décembre sur la pénibilité.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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mais aussi des facteurs
organisationnels. Ce sont ces derniers
que nous considérons dans la qualité de
vie au travail. Nous devons travaillons
en amont dès à présent sur
l’organisation et la conception des
systèmes de travail, car nombre
d’entreprises sont confrontées à des
bouleversements. Si l’organisation est
mise en place sans réflexion, par la
suite, l’approche ne sera que corrective.
Quand un plan nous incite à travailler
dans ce sens, la dynamique suit.
Enfin, vous avez parlé de la
prévention de la désinsertion, on parle
aussi du maintien de l’emploi.
Aujourd’hui, dans les entreprises, les
professionnels vont travailler de plus en
plus longtemps. Nous constatons que
de plus en plus de personnes
développent des maladies chroniques
évolutives, et qu’ils vont devoir
travailler avec. Les employeurs vont
devoir, eux-aussi, travailler avec ces
populations. Il s’agit de définir la
capacité d’une organisation à accueillir
ces personnes, indépendamment de
leurs caractéristiques physiques ou de
santé. L’enjeu s’annonce donc très
important, y compris pour l’entreprise
qui est confrontée à des questions
d’absentéisme ou de turnover. Nous le
constatons au sein de l’Anact. Il faut
trouver de nouvelles modalités, tout
simplement parce que la société se
transforme. Ce plan nous paraît une
nouvelle fois attaquer les bonnes causes
sur les déterminants, et nous amène à
travailler sur la conception très en
amont.
« Nous constatons que
de plus en plus de
personnes développent
des maladies chroniques
évolutives, et qu’ils vont
devoir travailler avec. »
Hervé Lanouzière
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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La santé au travail et la
performance de
l’entreprise sont
compatibles
Jean-Marc Gabouty
Alain Ducardonnet
Jean-Marc Gabouty, partagez-vous cette vision positive de cette méthodologie de
travail ?
e n’avais jamais lu intégralement
ce PST, j’ai fait l’effort de
l’examiner. On ne peut être que
d’accord avec les objectifs poursuivis
avec un certain nombre d’orientations.
J’ai trouvé que ce document, même s’il
suscite l’unanimité, était très indigeste.
Il introduit, à mon sens, plus de
complexité que de simplification, qu’il
veut pourtant promouvoir en direction
des PME et des TPE, notamment pour
l’accessibilité à un certain nombre de
dispositifs de droit et de qualité au
travail. Je réagis davantage en tant que
chef d’entreprise, mais je n’ai pas
compris certains passages. Il me paraît
difficile de faire croire aux PME que ces
dispositions sont facilement
applicables. C’est pourquoi j’émets
quelques réserves sur ce document.
Néanmoins, l’un des principaux axes
abordés que représente la qualité de vie
au travail me paraît effectivement
essentiel. Ce thème fait écho à un
ressenti qui diffère selon les individus et
un grand nombre de paramètres. Je ne
crois pas à une modélisation du
système qui amènerait du bien-être au
travail.
Je vous fais part de deux brèves
réflexions. La première est de
J
Crédit Photo Antoine Rozes
Sénateur de la Haute-Vienne, Jean-Marc
Gabouty est membre de la commission
des A aires sociales - qui l’a désigné
secrétaire de la commission spéciale sur
la loi Macron et futur rapporteur sur la loi
dite "Travail". Il siège dans la délégation
sénatoriale aux entreprises, la
délégation aux collectivités territoriales
et à la décentralisation, et la délégation
à l’outre-mer. Jean-Marc Gabouty est
également membre du Conseil
d’orientation pour l’emploi et du conseil
de surveillance du fonds de réserve pour
les retraites. Maire de Couzeix, il a été
conseiller général de la Haute-Vienne,
président puis vice-président de la
communauté de communes l’Aurence et
Glane développement.
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vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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surmonter un handicap culturel qui
remonte à une quinzaine d’années. La
société des loisirs dans laquelle le travail
était relégué au second plan. Le cas est
similaire à celui de la
désindustrialisation qui implique des
aspects psychologiques. Il ne faut pas
oublier que le travail représente un
facteur d’intégration sociale et
économique, mais aussi d’émancipation
personnelle. Aujourd’hui, on ne parle
que des personnes qui travaillent, mais
ceux qui sont touchés par des
souffrances sont aussi ceux qui n’ont
pas d’emploi. Ils sont les plus pénalisés
dans le système où nous évoluons.
Ensuite, concernant la médecine du
travail, je suis quelque peu inquiet par
rapport à la loi travail. J’ai lu les articles
de cette loi qui impliquent cette
thématique et j’estime qu’il demeure
quelques contradictions. La ministre l’a
indiqué tout à l’heure, le nombre de
médecins va baisser et on trouve le
moyen de mettre en place une nouvelle
organisation pour progresser.
Cependant, je reste sceptique, pour moi
l’équipe pluridisciplinaire n’est présente
que pour masquer cette diminution du
nombre de médecins. Quel est le rôle
du médecin du travail dans une
entreprise ? Il n’est pas de constater les
dégâts occasionnés par le travail.
Quand un salarié, par négligence
personnelle ou pour d’autres raisons, ne
consulte le médecin du travail que tous
les trois ou quatre ans, comment
voulez-vous dans ce système permettre
la détection précoce ? L’un des choix à
effectuer serait donc que la médecine
du travail dépasse le cadre de
l’entreprise et joue pleinement un rôle
de santé publique en matière de
prévention. C’est pourquoi, selon moi, il
existe des distorsions entre les objectifs
du PST 3 et les éléments présents dans
la loi, avec une visite tous les cinq à
six ans pour les professions qui ne
présentent pas de risques.
« On ne parle que des
personnes qui travaillent,
mais ceux qui sont
touchés par des
souffrances sont aussi
ceux qui n’ont pas
d’emploi. »
Jean-Marc Gabouty
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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La place de la démarche
de prévention plutôt que
de réparation au sein des
entreprises
Paul Frimat
Alain Ducardonnet
Paul Frimat, pouvez-vous nous donner votre vision universitaire toujours concernant
cette méthodologie et la notion de réunir les forces en présence ?
e pense que le système français
est basé sur la problématique du
dialogue social. Je partage l’avis
d’Hervé Lanouzière, ce plan est le
premier signé par l’ensemble des
acteurs. Le PST 1 a permis la création
d’agences de sécurité sanitaire, j’invite
les sénateurs à veiller à leur viabilité.
Avec le PST 2, on a essayé de faire
travailler les acteurs ensemble, mais les
moyens n’étaient pas présents. Après
ces deux premiers plans, le PST 3
représente une révolution avec des axes
originaux.
Trop souvent, le système a été
construit pour des entreprises d’une
certaine taille, qui constituent certes la
force de notre pays. Néanmoins, 80 %
des entreprises comptent moins de
50 salariés. Soit on veut une prévention
et une santé travail qui s’adressent à
tous, y compris aux TPE et PME, soit
une distension va naître. Cette loi
contient des sujets de tension, je pense
donc qu’il faut faire très attention.
Concernant la méthodologie, je
salue le travail des partenaires sociaux
qui ont mis en place au sein du COCT,
un dispositif leur permettant
d’échanger régulièrement. Ils discutent
de tout, y compris des sujets qui
fâchent.
ALAIN DUCARDONNET
Nous avons bien perçu comment le
J
Ancien Chef du service de médecine du
travail et pathologie professionnelle au
centre hospitalier régional universitaire
(CHRU) de Lille, Paul Frimat est
professeur des Universités, praticien
hospitalier en médecine et santé au
travail à l’Université de Lille II. Il est
président de l’Institut de santé au travail
du Nord de la France. Président du
conseil scientifique de l’Agence nationale
de sécurité sanitaire, de l’alimentation,
de l’environnement et du travail (Anses)
depuis septembre 2010, Paul Frimat est
également vice-président chargé des
affaires transversales de l’Université de
Lille II depuis 2005, ainsi que du comité
d’orientation de l’Association régionale
de l’amélioration des conditions de
travail Nord-Pas de Calais. Paul Frimat
a, par ailleurs, été chargé par les
ministères de réaliser différents rapports
sur l’évaluation de la médecine du travail
et la formation des différents acteurs
dans ce domaine.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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plan pouvait être appliqué sur le terrain.
Paul Frimat, les éléments que nous
venons d’évoquer correspondent-ils à
une mécanique qui se met en place ?
PAUL FRIMAT
Pour l’instant non. Je retiens
quatre points, dont deux qui n’ont pas
encore été traités. Le premier, nous
l’avons dit, concerne l’affichage de cette
prévention primaire. Notre société a
mis en place un dispositif qui n’a traité
que de la tertiaire, puis un peu de
secondaire. La directive de 89 nous a
rappelé qu’il fallait faire du primaire.
J’espère que ce sera le cas, mais à
l’heure actuelle, les dispositifs législatifs
ne sont pas à la hauteur. Il apparaît
nécessaire de réaliser de la prévention
primaire, encore faut-il s’en donner les
moyens. Le problème majeur de notre
système est qu’il se basait sur la
réparation.
Deuxièmement, le maintien à
l’emploi ou la lutte contre la
désinsertion professionnelle
représentent un enjeu fondamental
pour notre société. Je pense, par
exemple, aux maladies chroniques, et
aux risques cardiovasculaires qui vont
être de plus en plus présents à l’avenir.
Comment gérer ces problématiques ? Il
convient d’échanger avec les
partenaires sociaux, avec les
entreprises.
Les deux points qui n’ont pas été
évoqués, et qui pour moi sont des
enjeux, concernent d’abord la notion de
rapprochement entre santé travail et
santé publique. Elle est fondamentale.
La santé travail est-elle une médecine
de réparation ou fait-elle partie des
politiques de santé au service d’une
population particulière qui est
l’entreprise ? Cette question en pose
une autre, celle de la territorialisation.
Comment allons-nous procéder pour
coordonner, animer avec l’ensemble
des acteurs, en particulier avec l’ARS ?
Comment établir le lien s’il n’est pas
prévu ? Nous voyons bien que les
conseillers régionaux ont un rôle très
important à jouer.
Dernier élément, dans le PST 3 il
demeure un petit point qui était plus
conséquent dans le 1 et qui avait
disparu dans le 2. Il concerne la
problématique de la formation et de la
recherche dans le domaine de la santé
travail. Notre pays accumule un retard,
nous perdons des capacités d’expertise
alors que les agences en ont besoin. Le
maintien de cette expertise est
pourtant nécessaire sinon la santé au
travail basculera avec, dans trente ans,
une problématique de consultanat
plutôt qu’une problématique de suivi de
population, tel que c’est le cas
actuellement dans les entreprises.
« La directive de 89 nous
a rappelé qu’il fallait
faire du primaire. J’espère
que ce sera le cas, mais à
l’heure actuelle, les
dispositifs législatifs ne
sont pas à la hauteur. »
Paul Frimat
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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Comment instaurer une
culture de prévention par
les principes de la qualité
de vie au travail ?
Fabien Piazzon
Alain Ducardonnet
Un mot de Fabien Piazzon. Vous êtes en première ligne dans l’accompagnement de ces
futurs textes. Quelle est votre vision à ce sujet ?
ous accompagnons les
entreprises pour la partie
opérationnelle afin qu’elles
soient plus efficaces en matière de
santé, de sécurité et, globalement, de
qualité de vie au travail. Le PST 3
corrobore la réalité opérationnelle du
terrain avec deux axes principaux. Le
premier est de poursuivre la démarche
de prévention en aidant notamment
les entreprises de petite taille à
développer des conditions de travail
favorables, et à limiter les accidents du
travail et les maladies professionnelles.
La deuxième approche correspond
aussi à une autre réalité, celle des
entreprises qui doivent générer de
l’attractivité, et baisser l’absentéisme
et le désengagement d’un certain
nombre de collaborateurs. C’est
pourquoi ce plan correspond bien aux
besoins réels des entreprises.
ALAIN DUCARDONNET
Fabien Piazzon, vous qui évoluez sur
le terrain, les propos qui viennent d’être
dits correspondent-ils aux évolutions
prochaines dans les entreprises ?
FABIEN PIAZZON
Ces évolutions ont déjà débuté. Je
peux vous exposer deux cas très
opérationnels. Le premier concerne la
Fédération nationale des industriels des
commerçants en gros de viande. Le
projet est financé par le Fact, merci à
l’Anact pour la stratégie. Nous avons
créé avec cette fédération des outils
pour les TPE et PME de ce secteur très
particulier, dont les conditions de travail
sont spécifiques. Ces outils
opérationnels s’avèrent simples et
accessibles à ces entreprises. La
FNICGV représente environ
300 entreprises, elle est le deuxième
N
Fabien Piazzon est consultant en qualité de
vie au travail au sein d’une équipe de 30
experts depuis une quinzaine d’années.
Conseiller stratégique de grands groupes
français, il accompagne les dirigeants dans
leur engagement en qualité de vie au
travail. Avec une équipe de consultants
spécialisés, il cartographie et diagnostique
les cultures d’absentéisme, de prévention et
de qualité de vie au travail d’établissements
industriels, de services ou publics.
Coordinateur de projet culturel, il pilote les
plans de communication et déploie,
accompagné d’une équipe de consultants
pédagogues, des formations auprès des
équipes d’encadrement et de l’ensemble
des collaborateurs. Enseignant à Polytech
Grenoble et à la faculté de Grenoble, il
forme les futurs ingénieurs en prévention
des risques professionnels.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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employeur du monde agroalimentaire
représenté. Le premier axe du plan
consiste à continuer d’acculturer les
entreprises, les TPE et PME au sujet des
bienfaits, de l’efficacité du bien-être au
travail sur leur productivité et leur
mobilisation de salariés. Avec cette
fédération, nous avons développé des
outils pragmatiques et adaptés pour un
déploiement sur le terrain. Il s’agit d’un
projet au long cours, amorcé il y a
quelques années, qui s’inscrit
aujourd’hui dans cette continuité
d’éducation des entreprises. Nous
traduisons le plan de manière
pragmatique.
En revanche, si je poursuis avec le
second exemple, certaines entreprises
ont une longueur d’avance. Je prends
l’exemple d’une entreprise assez
conséquente, dans le domaine de la
logistique. Cette entreprise de
8 000 salariés se constitue d’un
ensemble d’agences. Le travail est donc
défini par le directeur d’agence qui
encadre entre 30 et 50 personnes. Nous
avons commencé à l’accompagner, car
les dirigeants étaient confrontés à un
taux d’absentéisme trop élevé, de plus
de 10 %.
Dans l’optique du PST 3, nous avons
réalisé un diagnostic de l’absentéisme
et nous l’avons orienté justement par
rapport au plan stratégique. Nous avons
demandé aux dirigeants pourquoi ils
n’entameraient pas une réflexion au
sujet de la qualité de vie au travail
plutôt que de lutter contre
l’absentéisme. La direction a décidé de
se lancer dans la QVT. Le principal
problème en lien avec le PST 3 est que
la QVT n’est pas si simple
techniquement à mettre en œuvre.
Pour innover avec cette entreprise,
nous avons éduqué leurs directeurs
d’agence. Il s’agit de professionnels qui
ont débuté sur le terrain, à qui nous
avons expliqué que le monde du travail
sur lequel ils se sont formés ne
correspond plus au monde du travail
qu’ils managent aujourd’hui. Nous
avons mis en place des formations et les
avons réunis pour qu’ils s’interrogent
sur les actions à mettre en œuvre
auprès de leurs collaborateurs. Une
cinquantaine de directeurs d’agence se
sont engagés dans cette démarche et
ont développé 32 actions de qualité de
vie au travail de manière personnelle.
Ces 50 agences ont constaté ensuite
une baisse de leur taux d’absentéisme
de plus de 25 %. En effet, quand on
donne des outils très simples aux
managers de terrain, on arrive à
changer les relations au travail.
"Une cinquantaine d’agences ont
mis en place des actions de qualité de
vie au travail. Leur taux d’absentéisme a
baissé de plus de 25 %."
« Nous avons mis en
place des formations et
les avons réunis pour
qu’ils s’interrogent sur les
actions à mettre en
œuvre auprès de leurs
collaborateurs. »
Fabien Piazzon
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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DÉBATS
RÉGIS JUANICO
Nous ne sommes plus dans une
perspective "à risque" et uniquement
correctrice ; nous tentons plutôt
d’identifier en amont comment
l’organisation du travail peut être
modifiée afin de faire en sorte que la
santé soit un facteur de richesses pour
l’entreprise.
Les objectifs du plan de santé au
travail (maintien dans l’emploi,
prévention de la désinsertion
professionnelle, etc.) consistent-ils
véritablement à mettre tous les moyens
nécessaires pour les salariés exposés à
des risques particuliers ?
RÉGIS DELAUNAY BELLEVILLE,
chargé de relation Entreprises, Pôle
Emploi
Les moteurs d’une bonne politique
de santé au sein des entreprises ne
seraient-ils pas avant tout
l’engagement et la confiance ?
HERVÉ LANOUZIÈRE
Du point de vue de l’engagement, il
est vrai que les entreprises doivent
convaincre leurs employés que les
modifications de l’organisation du
travail leur seront à terme bénéfiques.
Par ailleurs, le dialogue social mériterait
d’être professionnalisé, c’est-à-dire que
les managers doivent avoir conscience
des difficultés des salariés, et les
salariés doivent pouvoir s’impliquer et
agir sur les conditions de travail dans
lesquelles ils sont placés. C’est ainsi que
l’engagement des équipes pourra se
développer.
ALAIN DUCARDONNET
Il a beaucoup été question du
secteur privé, mais comment le secteur
public pourrait-il bénéficier des
nouvelles approches mentionnées ?
HERVÉ LANOUZIÈRE
Un décret du 31 juillet 2015 a modifié
le statut et les missions de l’Anact et
dispose que ce dernier est habilité à
intervenir dans le secteur public. Et, en
effet, les transformations du secteur
public entraînent des tensions et de
difficiles conditions de travail qui
doivent être appréhendées et résolues.
FABIEN PIAZZON
Au-delà des textes, les employeurs,
privés ou publics, éprouvent un fort
besoin de performance. Les salariés
doivent être investis dans leur travail.
Les employeurs ont généralement
conscience qu’un salarié en bonne santé
qui s’engage dans son travail est un
atout indéniable du point de vue de la
performance et de la productivité de
« Dialogue social
mériterait d’être
professionnalisé, c’est-à-
dire que les managers
doivent avoir conscience
des difficultés des
salariés, et les salariés
doivent pouvoir
s’impliquer et agir sur les
conditions de travail
dans lesquelles ils sont
placés. »
Hervé Lanouzière
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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l’entreprise. Cette question se pose de
façon flagrante dans le secteur public.
Le taux d’absentéisme est un bon
indicateur pour juger de l’engagement
des salariés pour leur entreprise. Or, à
l’heure actuelle, nous constatons un
taux d’absentéisme plus élevé dans le
public que dans le privé, bien que l’écart
reste modeste.
PAUL FRIMAT
Cela ne fonctionne pas car, dans la
fonction publique, l’État est son propre
juge. Ainsi, il n’existe pas de réel corps
d’inspection efficace ; d’où les dérives
que l’on constate.
HERVÉ GARNIER
Je partage tout à fait cette analyse.
Nous avons un État interlocuteur, mais
pas un État employeur. Les sujets
abordés peuvent fâcher : ils sont
déstabilisants pour les deux côtés. Cela
signifie que, sans engagement, nulle
confiance ne peut naître.
JEAN MARSAC, président, Aphysia
La situation des hôpitaux est le reflet
de la société dans son ensemble : les
gens souffrent dans leur corps et dans
leur âme. Le système est en difficulté.
En vérité, il est très difficile de définir le
bien-être et le mal-être au sein de
l’entreprise.
En ce qui concerne la prévention
primaire, elle semble n’être que le
reliquat de la prévention secondaire et
tertiaire, alors qu’elle devrait être
effective bien plus en amont. Quant à
l’adéquation de la formation au poste,
les infirmières et les chefs de service
doivent comprendre que leur métier
évoluera au moins trois fois au cours de
leur vie professionnelle. Les écoles
d’infirmières, et plus largement les
institutions chargées de la santé
publique, ont un rôle essentiel de
formation. Enfin, ne nous voilons pas la
face : l’argent manque. Tout le monde
sait ce qu’il faudrait faire, en termes
d’organisation et de dispositifs, encore
faut-il avoir les fonds nécessaires.
CHRISTIAN GÉRAUT, membre
titulaire, Académie nationale de
Médecine
Il a été question de la "carence" en
médecine du travail. Madame la
ministre l’a rappelé à plusieurs reprises.
Comment, dès lors, expliquer que de
grandes villes de France n’aient plus
aucun enseignant de médecine du
travail ?
MARTIAL BRUN, directeur général,
Cisme
J’ai entendu le scepticisme quant à
l’évolution actuelle des choses.
Malheureusement, ce scepticisme
n’apporte en lui-même aucune solution.
Les équipes pluridisciplinaires animées
et coordonnées par les médecins du
travail sont aujourd’hui à l’œuvre.
Certains départements sont en effet
largement sinistrés en matière de
médecine du travail. Toutefois, les
instances médicales ont su développer
des prises en charge de suivis
individuels de l’état de santé, des
actions pluridisciplinaires sur le lieu de
travail, des sensibilisations à la culture
de prévention, etc.
Toutes ces évolutions sont à l’œuvre.
Ce qui ne l’est pas, en revanche, ce sont
les textes réglementaires évoqués
précédemment ; ces derniers ne sont
plus en phase avec la réalité du terrain.
Votre scepticisme est dû à un manque
de communication : dans leur grande
majorité, les médecins du travail ont su,
d’une part, développer des pratiques en
accord avec les nécessités du terrain et,
« Les équipes
pluridisciplinaires
animées et coordonnées
par les médecins du
travail sont aujourd’hui à
l’œuvre. »
Martial Brun, directeur
général, Cisme
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
20
d’autre part, transmettre ces mêmes
pratiques.
L’équipe pluridisciplinaire est la seule
solution pour atteindre toutes les
entreprises et tous les salariés de
France au sein du secteur privé. Il me
semble que les partenaires sociaux ont
pris conscience de cette réalité. Il
importe de pouvoir cibler les priorités
d’actions, les priorités de suivi
individuel, avec plus de médecins du
travail, ce qui exige leur formation. Tout
cela doit être financièrement soutenu.
Enfin, le cadre juridique doit également
évoluer afin que tout le monde ne soit
pas systématiquement renvoyé dans le
cabinet médical pour une visite
d’aptitude, et ce, pour les 20 millions de
nouveaux contrats que mentionnait la
ministre du Travail.
SYLVIE GALAM, psychosociologue
des organisations au service Santé
Travail, RATP
J’aimerais réagir à propos de la
prévention primaire. Je travaille dans un
service de santé au travail de la RATP.
Toute la notion de prévention primaire
et de pluridisciplinarité représente un
ensemble de problématiques
quotidiennes. Nos discussions ont
avancé des solutions qui, cependant, ne
sont pas aisément applicables. Nous
sommes confrontés à un changement
de paradigme, lequel exige un temps
d’adaptation relativement long.
Monsieur Paul Frimat, quelles
seraient vos propositions afin de pallier
les insuffisances de la prévention
primaire ?
PAUL FRIMAT
En substance, ce que monsieur
Marsac a dit : il faudrait que les équipes
pluridisciplinaires se développent
davantage ; que la décision de santé
soit non pas définie par un texte
réglementaire, mais par une réponse à
des besoins particuliers. Il est vrai,
cependant, que nous communiquons
mal et que certaines expériences
régionales originales gagneraient à être
connues. L’importance de l’activité
physique, par exemple, a été
mentionnée. Mais, bien souvent, les
entreprises la promeuvent déjà.
FABIEN PIAZZON
Dès lors que le dirigeant de
l’entreprise prend conscience du fait
que le bien-être de ses collaborateurs
est primordial pour la productivité de
son entreprise, nous pouvons parler de
déclic, de changement de paradigme.
HERVÉ LANOUZIÈRE
Nous portons le concept de qualité
de vie au travail depuis treize ans déjà.
C’est un travail de longue haleine et les
affaires au sein des entreprises ne
changeront pas fondamentalement
avant au moins dix bonnes années.
Autrefois, nous prêchions dans le
désert. Aujourd’hui, les instances
publiques et les partenaires sociaux
s’accordent enfin sur son importance.
Des démonstrations pratiques,
tangibles doivent encore être réalisées
au sein des entreprises afin de
convaincre le plus largement possible
de la validité de ce concept, tant d’un
point de vue psychologique
qu’économique.
HERVÉ GARNIER
Certes, c’est un changement de
paradigme, mais le troisième plan de
santé au travail ne donne pas encore
suffisamment à voir, aux yeux des
dirigeants, l’efficacité de ce nouveau
paradigme. Le succès ne peut être que
progressif, il ne peut advenir qu’à petits
« Il faudrait que les
équipes
pluridisciplinaires se
développent davantage ;
que la décision de santé
soit non pas définie par
un texte réglementaire,
mais par une réponse à
des besoins
particuliers. »
Paul Frimat
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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pas. Le changement de paradigme ne
peut être accepté d’emblée, d’un bloc.
Le cadre réglementaire,
aspect pénibilité et burn
out
Maître Laura Ferry
e suis Avocat au barreau de Paris.
Dans le cadre de ma profession,
j’ai constaté un accroissement des
contentieux en matière de maladies
professionnelles et de fautes
inexcusables. Cela m’incite à
m’interroger sur l’efficacité des
politiques mises en œuvre jusqu’à ce
jour. À cet égard, la volonté de
prévention, qui transparaît dans le
nouveau Plan santé au travail, me
semble particulièrement intéressante.
Dans la pratique, j’ai relevé un intérêt
certain de la part de nos clients à
propos du sujet de la prévention.
Toutefois, le volet relatif à la
réparation reste très important. En
effet, je plaide régulièrement dans le
cadre de ces contentieux et nos
juridictions sont débordées par ce type
d’ affaires.
Sur le Plan santé au travail, l’un
des axes stratégiques inclut la
prévention de la pénibilité et les
risques psychosociaux. La création du
compte de pénibilité a pris en compte
des facteurs de risques, parmi lesquels
des risques liés aux contraintes
physiques, ceux liés aux
environnements agressifs, et des
risques liés au rythme de travail. À
l’heure actuelle, seuls quatre facteurs
de risques sont en vigueur depuis le
premier janvier 2015 : le travail de nuit,
le travail en équipes successives
alternantes, le travail répétitif et les
activités exercées en milieu hyperbare.
Six facteurs de risques ne sont donc
toujours pas pris en compte, mais
devraient l’être normalement à partir
du 1er juillet 2016. Ce système est
financé par des cotisations à la charge
des entreprises.
Aujourd’hui, nous constatons que
ce système est particulièrement
complexe et coûteux. Le rapport publié
par le Centre d’observation
économique et de recherches estime
J
Avocat au Barreau de Paris, Laura Ferry est
counsel au sein de l’équipe européenne de
contentieux du cabinet d’avocats Reed
Smith. Titulaire d’un troisième cycle en
droit privé général à l’Université Paris II
Panthéon- Assas, complété d’un troisième
cycle en droit de la santé à l’Université
Paris V, Laura Ferry a développé une solide
pratique en contentieux général ainsi que
dans le domaine médical et
pharmaceutique. Elle assiste ses clients,
parmi lesquels gurent d’importantes
sociétés françaises et internationales, des
groupes pharmaceutiques, des fabricants
de dispositifs médicaux et des groupes
hospitaliers, dans le cadre de la gestion du
pré-contentieux et des contentieux, dont
notamment la responsabilité du fait des
produits et des risques industriels,
assurance, droit de la sécurité sociale. Elle
conseille également ses clients dans la
prévention et la gestion de leur risque.
Laura Ferry anime de nombreux séminaires
et des formations auprès de ses clients sur
le thème de la gestion des risques
professionnels.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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que le coût de ce système s’élèvera à
1,7 milliard en 2030 et à 6,3 milliards en
2060. Leur rapport conclut donc que ce
système de prévention de la pénibilité
aura un impact important sur le coût
du travail et, par conséquent, sur la
compétitivité des entreprises. La perte
d’emplois pourrait ainsi être de
100 000 postes à long terme.
Par ailleurs, ce système de
prévention de la pénibilité n’a pas pris
en compte les risques psychosociaux.
Ces risques sont l’objet de la loi du
17 août 2015, dans laquelle les
maladies psychiques sont reconnues
comme des maladies professionnelles.
La création d’un tableau de maladies
professionnelles propres au burn out
avait été envisagée, mais elle semble
aujourd’hui ne plus faire partie des
débats. Un tel tableau semblait de
toute façon difficile, sinon impossible à
mettre en œuvre puisque trois
conditions sont requises pour
l’instauration d’un tableau de
maladies : une maladie, un délai de
prise en charge et des travaux
susceptibles d’engendrer cette
maladie. Or, le burn out n’est pas à
proprement parler une maladie, mais
un syndrome qui peut s’exprimer de
manières diverses. Quant à
l’exposition, le burn out n’est pas
propre à une catégorie particulière de
travailleurs.
Voilà pourquoi cette option a été
écartée, à la faveur du système
complémentaire, c’est-à-dire le
CRRMP. Dans ce système, il faut, d’une
part, prouver que la maladie est liée à
une activité habituelle au travail et,
d’autre part, que le taux d’incapacité
soit supérieur à 25 %. À l’heure
actuelle, certains législateurs songent
à abaisser, voire à supprimer ce taux
d’incapacité. En effet, en matière de
maladie psychique, ce taux est
particulièrement élevé.
Enfin, il est intéressant de voir que,
dans un système législatif qui se veut
de plus en plus protecteur vis-à-vis des
salariés, certains juges semblent plus
favorables à l’employeur. En effet,
deux arrêts récents de la Cour de
cassation portant sur le sujet des
risques psychosociaux ont assoupli la
nature de l’obligation de sécurité mise
à la charge de l’employeur en
s’orientant vers une obligation de
moyens renforcée au lieu d’une
obligation de résultat
traditionnellement reconnue en la
matière.
« Il est intéressant de voir
que, dans un système
législatif qui se veut de
plus en plus protecteur
vis-à-vis des salariés,
certains juges semblent
plus favorables à
l’employeur. »
Maître Laura Ferry
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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Les maladies psychiques
au travail et le burn out
Gérard Sebaoun
Alain Ducardonnet
Gérard Sebaoun, j’ai cru déceler en vous un certain scepticisme quant à l’inefficacité
du compte de pénibilité.
e PST 3 constitue une révolution
à l’égard de la prévention
primaire. Cependant, la
complexité des articles de loi que ce
plan contient m’inquiète. La santé au
travail est un problème de santé
publique, comme l’a souligné le
professeur Frimat. Je me réjouis que la
problématique de la prévention soit
intégrée à ce plan, certes, mais
l’expression de ces lois est trop
complexe.
Je m’interroge en effet sur les
mesures que propose une partie du
patronat. Dire que la loi ne prétend pas
à la prévention est clairement faux. En
effet, la loi sur la pénibilité comporte
trois axes : la formation, la possibilité
du temps partiel et la retraite anticipée
pour certaines catégories de
travailleurs. La loi sur le compte de
pénibilité a été qualifiée d’usine à gaz.
Toutefois, cette loi renvoie à des
référentiels de branches qui doivent
être actés par les acteurs. Par
conséquent, ces derniers ont un rôle à
jouer quant à la lourdeur ou à la
légèreté du dispositif. De plus, le
compte de pénibilité fait l’objet d’une
déclaration unique une fois par an. Est-
ce réellement si compliqué ? Quant à la
cotisation destinée à financer ce
dispositif, elle est particulièrement
minime. Je pense donc que le compte
de pénibilité fait l’objet d’un mauvais
procès.
Enfin, en ce qui concerne l’article 44
de cette loi, celui qui concerne la
médecine du travail, j’estime certes
que tout n’est pas à rejeter dans cet
article, mais certains de ses aspects me
semblent néfastes. En cas
d’inaptitude, par exemple, à l’heure
actuelle le salarié ou l’employeur fait
appel à l’inspection du travail. Or,
l’article 44 aimerait changer cette
disposition et renvoyer le salarié, ou
l’employeur, aux tribunaux des
L
Député du Val-d’Oise depuis 2012,
Gérard Sebaoun est également
président du groupe d’études
“Pénibilité du travail, santé au travail
et maladies professionnelles” et
membre du groupe d’études
“Professions de santé et coordination
sanitaire”. De 2004 à 2011, il a été
conseiller général, puis vice-président
du conseil général du Val-d’Oise. De
2001 à 2014, il a été conseiller
municipal de Franconville. Diplômé en
cardiologie et en médecine du travail,
Gérard Sebaoun est médecin du
travail de profession. Il a exercé au
sein de SOS cardiologie, en clinique,
en centre de santé et dispensaire et en
tant que cardiologue libéral.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
prud’hommes, dont chacun sait les
difficultés de fonctionnement…
En guise de conclusion, je dirais que
poser la question du bien-être au
travail revient fondamentalement à
poser la question de notre bien-être au
quotidien.
Les perturbateurs
endocriniens et l’exposition
aux produits chimiques
Michèle Rivasi
‘aimerais établir un lien entre
l’Europe et la France. La loi est
complexe en partie à cause des
lobbies. Le cancer est la première
cause de mortalité d’un point de vue
professionnel. Les maladies
cardiovasculaires arrivent en seconde
position. La loi est bonne sous l’aspect
préventif. Nous, législateurs, avons dû,
pour ce faire, établir des limites
d’expositions. D’où la force des
lobbies, notamment de l’industrie
chimique.
ALAIN DUCARDONNET
Quel est votre avis à propos de la
prévention des maladies, et
notamment de celles que nous ne
connaissons pas encore ?
MICHÈLE RIVASI
Un rapport européen voté en 2015
portait sur la santé au travail. Il met
l’accent sur la prévention, bien en
amont, des maladies professionnelles.
Il existe de plus en plus de substances
cancérigènes, et la population et les
pouvoirs publics en ont clairement pris
conscience. Les femmes semblent être
les plus vulnérables à ces substances ;
et plus encore, naturellement,
lorsqu’elles sont enceintes. Par ailleurs,
les cancers représentent la première
catégorie de maladies
professionnelles. Par conséquent, il est
demandé à la Commission européenne
d’instaurer des taux limites
d’exposition à ces substances les plus
bas possibles. De plus, la population
devrait régulièrement effectuer des
tests sanguins afin d’évaluer les
diverses expositions et de mieux les
corréler avec les activités
professionnelles pratiquées.
En outre, le cas des perturbateurs
endocriniens a soulevé un important
débat au sein du Parlement européen.
Les lobbies de l’industrie chimique
(plastique, pesticide, etc.) ont
demandé à élaborer une étude
économique. Quel serait l’impact
économique pour l’Union européenne
de l’adoption de telles ou telles
J
Députée européenne, Michèle Rivasi est
professeur agrégée en biologie, ancienne
élève de l’École normale supérieure de
Fontenay-aux-Roses et professeur d’IUFM.
Elle a fondé la Commission de recherche et
d’information indépendantes sur la
radioactivité (CRIIRAD) après l’accident de
Tchernobyl de 1986. Députée de la Drôme
de1997 à 2002, elle a été directrice de
Greenpeace France entre 2003 et 2004. Au
Parlement européen, Michèle Rivasi est
membre de la commission Environnement
& santé publique (ENVI) et de la
commission Industrie, recherche et énergie
(ITRE). Nucléaire, gaz de schiste,
médicaments, perturbateurs endocriniens,
plantes médicinales, OGM, ondes
électromagnétiques, responsabilité
sociétale des entreprises, éthique de la
recherche: Michèle Rivasi souhaite placer
ces nombreuses thématiques de société au
centre du débat public.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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définitions, plus ou moins strictes, des
perturbateurs endocriniens ? La
ministre de la Santé suédoise a attaqué
la Commission en estimant qu’il était
inadmissible de retarder, au prétexte
d’une étude d’impacts, l’adoption
d’une définition légale des
perturbateurs endocriniens. J’ai moi-
même tâché de faire en sorte que le
Parlement européen attaque la
Commission. Huit États membres ont
ainsi attaqué, et nous avons obtenu
gain de cause en décembre 2015,
puisque la Cour européenne a
condamné la Commission au motif
d’une violation du traité de Lisbonne.
En juin 2016, le commissaire européen
de la Santé a déclaré que les critères de
définition des perturbateurs
endocriniens seront adoptés. En
conséquence, certaines molécules
devront être substituées, sinon
interdites. Quant au burn out, il
constitue un véritable problème de
bien-être au sein des entreprises, un
problème croissant.
Afin de contextualiser nos
problématiques sanitaires, gardons à
l’esprit que chaque État membre tente
de protéger ses propres industries, et
sera donc d’autant plus réticent à
interdire des substances qui
constituent une partie de ses intérêts
économiques. En outre, à l’heure
actuelle, les lobbies ont une influence
considérable sur la Commission, alors
même que cette dernière doit réviser
la directive de 2004, à la faveur d’un
renforcement de l’inspection du travail
et de la prévention des maladies. Soit
dit en passant, nous manquons de
médecins du travail. Le problème
relève exclusivement de la volonté
politique. Des fonds supplémentaires
doivent être alloués, bien évidemment,
mais des contrôles plus stricts doivent
également être appliqués, car une
excellente réglementation ne vaut rien
si aucune sanction n’est possible en
pratique.
ALAIN DUCARDONNET
Monsieur Juanico, que faire en
pratique ?
RÉGIS JUANICO
Je me suis très impliqué dans le
texte qui concernait la pénibilité, tant
sur le volet prévention que sur le volet
réparation. Je me méfie beaucoup des
prétendues études d’impact du
compte pénibilité à l’horizon de 2030
et 2060. Je ne crois pas un seul instant
à leurs conclusions catastrophistes. La
loi a été votée, les décrets ont été pris.
Toutefois, chaque semaine, nous
continuons de recevoir des
communiqués de la part de certaines
organisations d’employeurs nous
demandant de ne pas mettre en place
le compte de pénibilité. Le dialogue
social a pu facilement fonctionner pour
certaines mesures, notamment pour le
plan de santé au travail, mais il
mériterait d’être approfondi sur la
question du compte pénibilité car, à ce
sujet, les tensions persistent.
« Le cas des
perturbateurs
endocriniens a soulevé
un important débat au
sein du Parlement
européen. »
Michèle Rivasi
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Comment l’ouvrage Santé
au travail : pour une
nouvelle dynamique –
Constats et ouvertures
s’inscrit dans le PST 3
Dr Pierre Jansou
Alain Ducardonnet
Docteur Pierre Jansou, pourriez-vous nous parler des expérimentations que vous avez
menées dans votre région ?
e suis médecin du travail à
Toulouse. J’ai participé à l’écriture
d’un livre qui rapporte les
expérimentations menées en 2011 par
des équipes pluridisciplinaires. Ces
expérimentations s’inscrivaient dans le
cadre de la prévention primaire. Elles
ont été accompagnées par des
formations, notamment en sociologie
clinique et en ergonomie. La
problématique de nos études était la
suivante : en quels lieux la médecine
du travail fonctionne-t-elle
correctement ou, du moins, le moins
mal possible ? Nous avons remarqué
que la médecine du travail fonctionnait
relativement bien dans les entreprises
où il existait des relais (un ingénieur
sécurité ou un DRH soucieux des
questions de santé, etc.). Nous avons
donc essayé de développer ce que
nous nommons des appuis. Il ne
s’agissait pas pour nous de faire de la
prévention, mais de la faire réaliser par
ces appuis.
L’un des exemples les plus
caractéristiques que nous ayons
examiné était une entreprise d’aides
ménagères, dont de nombreux
employés avaient subi divers
accidents. Pour remédier à leurs
difficultés, nous avons décidé de
définir une personne ressource, en
l’occurrence l’assistante RH de
l’entreprise. Cette dernière avait
recensé les accidents du travail des
J
Médecin du travail depuis de longues années,
Pierre Jansou a toujours privilégié la prévention
des e ets du travail sur la santé à leur
réparation. Dernièrement il a coordonné avec
Marcel Drulhe, professeur de sociologie, un
ouvrage intitulé : Santé au travail, pour une
nouvelle dynamique ; s’appuyant sur une
expérimentation menée dans son service inter-
entreprises. Il propose aux équipes
pluridisciplinaires d’accompagner l’obligation de
résultats de sécurité : dans le cadre du CHSCT
avec la personne ressource désignée par
l’employeur, les accidents du travail sont
analysés, le rapport Lachmann est présenté en
réunion aux encadrants de proximité pour ré
échir avec eux à la manière de prévenir les
risques psycho- sociaux, les postes de travail
sont étudiés d’une manière participative avec la
méthode SOBANE. L’ensemble de ces activités
s’inscrit dans le processus dynamique de
l’évaluation des risques professionnels laissant
à l’entreprise la responsabilité des actions
de prévention.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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employés, mais ne les avait pas
analysés de façon systématique. C’est
cette démarche que nous avons donc
tenté d’effectuer. Dans une entreprise
de déménagement, nous avons
appliqué la méthode Sobane de
gestion des risques. Enfin, dans une
entreprise d’ingénierie industrielle,
nous nous sommes servis du rapport
Lachmann afin de permettre à des
échelons hiérarchiques différents
d’échanger sur certaines
problématiques de la production.
« Nous avons remarqué
que la médecine du
travail fonctionnait
relativement bien dans
les entreprises où il
existait des relais (un
ingénieur sécurité ou un
DRH soucieux des
questions
de santé, etc.). »
Dr Pierre Jansou
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DÉBATS
CAROLINE FERTÉ, avocat associé,
Fidal
Où en êtes-vous quant à
l’élaboration des référentiels de
branches et des accords de branches
afin d’aider les entreprises dans leurs
diagnostics ?
GÉRARD SEBAOUN
Ce travail est en cours de
progression. Tous les référentiels ne
sont pas encore établis. Les
organisations syndicales et patronales
s’étaient mises d’accord pour lister des
facteurs de risques que la loi a
transcrits. Cependant, ce qui
m’inquiète personnellement, c’est que
le Gouvernement peine à publier les
décrets restants en raison d’un
lobbying persistant.
BERNARD SALENGRO, médecin
du travail, CFE-CGC
Madame Rivasi, le plan de santé au
travail ne consiste-t-il pas en la simple
application du programme REFIT
européen, lequel prévoit de diminuer
toutes les contraintes au niveau des
entreprises afin de fluidifier leurs
affaires, alléger leurs charges
réglementaires, etc. ?
MICHÈLE RIVASI
Vous n’avez pas tort. Toutefois,
certaines directives renforcent le
pouvoir de l’inspection sur le plan de la
santé au travail. Certaines directives, il
est vrai, sont contradictoires. Le credo
de la commission européenne est
qu’une meilleure réglementation est
une réglementation allégée. Réduire le
chômage à l’échelle européenne exige,
selon eux, une flexibilité radicale à
l’échelle des entreprises, donc moins
de contraintes pour ces dernières.
Toutefois, les scandales sanitaires ont
tendance à renverser ce processus.
PAUL FRIMAT
Je pense que la sage décision des
élus, quant au burnout, a été de ne pas
prévoir de tableau. Une autre décision
sage serait de renforcer les CRRMP.
Cependant, je ne suis pas en accord
avec l’analyse juridique : le taux de
25 % d’incapacité n’est pas, à l’heure
actuelle, une nécessité pour définir un
syndrome dépressif.
MAÎTRE LAURA FERRY
En principe, pour que le dossier soit
transmis au CRRMP, cette condition
est nécessaire. Il faut, d’abord, que le
dossier passe entre les mains du
service médical de la CPAM avant de
parvenir au CRRMP afin quece dernier
« Le Gouvernement
peine à publier les
décrets restants en
raison d’un lobbying
persistant. »
Gérard Sebaoun
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établisse l’existence d’un lien entre la
maladie et l’activité professionnelle.
MARTINE BLOT, chargée de
prévention, Institut Cochin
Ma question porte sur les futurs
critères de pénibilité. Dans la
recherche française publique, nous
sommes soumis à des risques
d’exposition à des produits dangereux,
chimiques ou radioactifs, et nous
aimerions que ces risques soient pris
en compte dans un cadre légal plus
général qu’il ne l’est aujourd’hui. Il
serait bon que ces risques soient
intégrés dans la carrière des agents.
GÉRARD SEBAOUN
Bien entendu. L’émergence de
nouveaux risques doit être prise en
considération.
Plus généralement, le législateur
est face à un dilemme entre une
réglementation simple, qui n’entraîne
pas de lourdeur réglementaire, et une
réglementation suffisamment
détaillée et précise afin qu’elle soit
clairement applicable.
« Le taux de 25 %
d’incapacité n’est pas, à
l’heure actuelle, une
nécessité pour définir un
syndrome dépressif. »
Paul Frimat
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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FOCUS
Le sport : un enjeu de
performance sociale et
économique pour
l’entreprise
Président
Régis Juanico
Député de la Loire
Intervenants
Alan Fustec
Président-directeur général
du cabinet Goodwill Management,
auteur de l’étude pour le MEDEF et le
CNOSF sur l’impact du sport au
travail
Animateur
Alain Ducardonnet
Journaliste sur BFMTV
Marie-Christine Oghly
Vice-présidente de la Fédération
française du sport d’entreprise
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Les conséquences du sport
dans les entreprises
Alan Fustec
Alain Ducardonnet
Alan Fustec, je vous laisse la parole afin que vous nous présentiez votre étude sur les
conséquences sociales et économiques du sport pour les entreprises.
ette étude traitant de l’impact du
sport sur la productivité du
travail a été commanditée par un
consortium de trois grands acteurs : le
Comité olympique, le Medef et AG2R La
Mondiale. Nous l’avons réalisée en 2015
sur une période d’environ six mois. Je ne
vous en présenterai qu’un bref aperçu.
La sérénité d’une personne
augmente en fonction de son activité
sportive. La courbe est
asymptomatique ; en d’autres termes :
moins vous faites de sport dans la
situation initiale, plus une augmentation
du temps passé à pratiquer une activité
sportive sera bénéfique. À partir d’un
certain seuil, l’incrément d’activité
sportive n’engendre plus de hausse de
sérénité.
En outre, d’autres tableaux
académiques établissent un lien entre
l’efficacité au travail et le niveau de
sérénité. Plus une personne est stressée,
plus sa vitesse de travail est basse (prise
de décisions, faculté de mémorisation,
etc.).
Le rapprochement de ces
deux informations nous a permis
d’établir un modèle de calcul de
l’efficacité du travail d’une personne en
fonction de son activité sportive. Il
apparaît clairement, à l‘aune de ces
calculs, que le sport en entreprise
engendre une amélioration de la
sérénité au travail, du bien-être physique
et de la santé générale de l’employé,
ainsi qu’une hausse de l’attention, mais
aussi une baisse de l’absentéisme et du
turnover.
Toute la question, pour l’employeur,
est de savoir si la hausse de la
productivité compense suffisamment le
coût de la pratique du sport. Or, nous
sommes parvenus, à la suite de nos
multiples simulations, à la conclusion
que l’entreprise est gagnante, non
C
Président fondateur de Goodwill-
Management, Alan Fustec est docteur
ingénieur agro ENSAR. Il a été précé-
demment président du directoire
d’AEDIAN (groupe coté au second
marché), auteur des livres L’entreprise
neuronale et Valoriser le capital im-
matériel (prix spécial du jury Turgot
2007), enseignant à HEC et expert
APM. Il est également directeur scien-
tifique de l’Observatoire de
l’immatériel, directeur général de
l’Agence Lucie (premier label
ISO26000 français).
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
seulement lorsqu’elle incite ses
employés à faire du sport, mais
également lorsqu’elle investit de l’argent
afin que ces derniers puissent pratiquer
une activité sportive sur leur lieu de
travail. L’accroissement de la
productivité du travail dans ce second
cas varie entre 1 et 14 %.
Comment encourager le
sport au sein des
entreprises ?
Marie-Christine Oghly
Alain Ducardonnet
Marie-Christine Oghly, vous êtes présidente de la FFSE, la Fédération française du
sport en entreprise. Comment l’activité peut-elle être concrètement encouragée au
sein des entreprises ?
ien entendu, les entreprises ont
des capacités différentes en
fonction de leur taille.
Aujourd’hui, la population es trop
grosse, trop sédentaire et manque
d’activité physique. L’entreprise s’est
transformée, les employés travaillent
souvent assis derrière un bureau.
Je dirige personnellement une TPE
et n’ai pas la place pour installer une
salle de sport. Cependant, mes
collègues qui courent à l’heure du
déjeuner aimeraient pouvoir accéder à
des douches. Aussi ai-je loué un couloir
de course au stade de Boulogne afin de
permettre à mes collaborateurs de
pouvoir accéder aux douches dont il
dispose. La FFSE peut aider les
entreprises à organiser de tels
dispositifs, soit individuellement, soit
dans le cadre de partenariat avec
d’autres entreprises.
Dans la table ronde précédente, je
me suis senti agressée, en tant que
chef d’entreprise, par les orateurs qui
estimaient que le législateur devait
nécessairement intervenir afin
d’améliorer les conditions de travail au
sein des entreprises ; des conditions
jugées exécrables généralement par
des gens qui n’y ont jamais mis les
pieds.
En outre, je suis tout à fait
favorable à l’égalité de condition
entre hommes et femmes au sein de
l’entreprise. Quant aux conditions de
vie particulières de ces dernières, les
B
Vice-présidente de la Fédération française du
sport d’entreprise (FFSE), Marie-Christine
Oghly est viceprésidente de la commission et
du pôle international du MEDEF et présidente
des Femmes de l’économie. En Février 2015,
elle devient présidente de Cap Santé
Entreprise. Depuis mai 2015, elle est membre
du conseil d’administration du laboratoire de
l’égalité et a été élue vice-présidente en
charge des partenariats de PWN en Juin 2015.
Elue secrétaire générale et vice-présidente des
Femmes chefs d’entreprises mondiales en
2013, Marie-Christine Oghly a été conseiller
du commerce extérieur de la France et
conseiller économique, social et
environemental régional (CESER Ile de
France). En 2012, elle a été élue vice-
présidente de l’AFNET, après avoir été
présidente de Solendi, l’un des acteurs
majeurs nationaux du 1% logement, en 2010
et présidente du MEDEF île-de-France, ainsi
que membre du conseil exécutif du MEDEF, en
2008.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
entreprises, notamment les grandes,
peuvent mettre en place des
structures qui offrent la possibilité,
aux jeunes mamans en particulier, de
faire du sport avec leurs enfants.
SESSION II
Santé et bien-être au travail, quelles
innovations au travail ?
Président
Jean-Frédéric Poisson
Député des Yvelines, membre
de l’Observatoire national du suicide
Intervenants
Catherine d’Aléo
Directrice du développement
de la performance sociale
du Groupe APICIL
Laurence Breton-Kueny Membre du bureau national del’ANDRH
Christophe Brun
Co-fondateur de la société Betterise
Health Tech
Jean-Pierre Durand
Professeur de sociologie du travail à
l’Université d’Evry, auteur du livre
L’innovation dans le travail
Laurent Grouas
Directeur innovation et partenariats de
Siaci Saint Honoré
Animateur
Alain Ducardonnet
Journaliste sur BFMTV
Anne-Yvonne Le Dain
Députée de l’Hérault, vice-présidente
du groupe d’études "Pénibilité au
travail, santé au travail et maladies
professionnelles"
Stéphane Pimbert
Directeur général de l’Institut national
de recherche et de sécurité pour la
prévention des accidents du travail et
des maladies professionnelles (INRS)
Michel Rota
Directeur général
de Wellness Training
Laurence Saunder
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu
définitif vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants
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Dirigeante de l’Institut français
d’action sur le stress (IFAS)
et vice-présidente de la Fédération des
intervenants en risques psychosociaux
(FIRPS)
Introduction
Jean-Frédéric Poisson
Alain Ducardonnet
Jean-Frédéric Poisson, avez-vous un message introductif à nous présenter à l’occasion
de cette seconde table ronde sur les innovations en matière de bien-être et de santé au
travail ?
i jamais les organisations ne
prennent pas massivement en
compte les demandes
exprimées par les générations qui
arrivent sur le marché du travail en
termes de santé, elles ne recruteront
plus. Pour l’instant, elles ne s’en
rendent pas compte, car nous sommes
encore en situation de crise et
l’employé n’est pas véritablement en
situation de choix lorsqu’il cherche du
travail, mais lorsque cette crise aura
été résolue, les choses seront bien
différentes. Les organisations devront
proposer des conditions de travail
qualitatives qui les démarquent de
leurs concurrentes.
S
Député des Yvelines élu en 2007 et réélu en
2012, Jean-Frédéric Poisson est président
du Parti Chrétien Démocrate et vice-
président de la commission des Lois à
l’Assemblée nationale depuis 2013. Prési-
dent de la communauté d’agglomération
Rambouillet Territoires, il est, en 2008, le
premier adjoint au maire de Rambouillet,
chargé de l’urbanisme. Directeur de cabinet
de madame Christine Boutin entre 1994 et
2004, il est président-directeur général d’un
cabinet de conseil en organisation et res-
sources humaines de 2004 à 2007. Il est
également l’auteur en 2008 d’un rapport
“Prévenir et compenser la pénibilité au
travail” à l’Assemblée nationale.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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L’étude québécoise SALVEO
sur la santé mentale
en entreprise
Laurence Breton-Kueny
Alain Ducardonnet
Laurence Breton-Kueny, vous êtes membre du bureau national et présidente de
l’Association nationale des directeurs en ressources humaines.
e représente l’ANDRH qui
regroupe plus de 500 000 DRH en
France. Avant de mentionner
l’étude SALVEO (qui signifie, en latin,
« je vais bien, je suis en bonne santé »),
j’aimerais mentionner trois points. En
tant que DRH, nous sommes très
soucieux de la santé globale (physique,
sociale et mentale) des salariés.
Deuxièmement, nous serons
confrontés, d’ici 2020, à de nouveaux
enjeux de santé mentale. Enfin, nous
sommes très engagés dans le sujet de
la performance sociale, laquelle est
indispensable à la performance
économique sur le long-terme.
Le professeur Alain Marchand a
démontré que le stress est lié à
quatre facteurs. Le premier est la
profession, à proportion de 4 % ; le
deuxième : les conditions de travail à
35 % ; le troisième : la famille et le
soutien en dehors du travail, à 35 %
également ; enfin, le quatrième facteur
est celui de l’individualité, à hauteur de
26 %.
L’étude SALVEO a duré deux ans au
Québec et a concerné plus de deux
mille personnes dans soixante-
trois environnements de travail. Cette
étude portait notamment sur la
déprime, la dépression et l’épuisement
professionnel. Parmi les facteurs
organisationnels, il apparaît que deux
d’entre eux sont des facteurs de
protection : d’une part, la bonne
utilisation des compétences ; d’autre
part, les exigences physiques. Quant
aux facteurs de risque, plusieurs
d’entre eux sont à noter : les exigences
psychologiques (aussi nommées
"supervision abusive"), les
comportements agressifs, et
l’insécurité d’emploi.
Du point de vue individuel, notons,
en tant que facteurs de risque les
tensions conjugales, les tensions
J
Membre du bureau national depuis 2015,
Laurence Breton-Kueny est présidente de
l’ANDRH 93 depuis 2009. Docteur ès
Sciences de gestion, HYTEN, elle
commence sa carrière comme
enseignant-chercheur en RH, puis
consultante avant de devenir chef de
service RH à l’ANAES puis HAS, et de
rejoindre le Groupe AFNOR comme
directrice des ressources humaines,
membre du COMEX en 2006. Elle est
également responsable du comité santé
et mieux-être au sein du Groupe Afnor
depuis 2010. Certi ée ICA en
responsabilité sociétale, et
accompagnatrice attestée de la
démarche entreprise en santé
québécoise, elle est reconnue pour sa
compétence en santé et qualité de vie au
travail et auteure de di érents ouvrages
dont Santé et bien-vivre au travail.
Membre de la délégation française pour
la norme ISO TC 260 sur la gestion des
RH et du groupe gouvernance humaine
depuis 2011, elle a fait partie de la
commission miroir ISO 26000.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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parentales, les conflits entre le travail
et la famille, les problèmes de santé
chroniques, la consommation d’alcool,
de tabac, etc., ainsi que les
événements stressant vécus durant
l’enfance.
Les facteurs de protection au point
de vue individuel sont une vie de
couple épanouie, la présence d’enfants
(notamment mineurs), le soutien à
l’extérieur du travail, l’âge, l’activité
physique, ainsi que l’estime de soi.
En conclusion, tous ces aspects
doivent être pris en compte afin de
façonner au mieux des dispositifs de
santé globale et des démarches de
prévention utiles, en premier lieu aux
salariés, mais également à l’entreprise
ainsi qu’à l’État.
ALAIN DUCARDONNET
Merci, je mentionne le titre de votre
dernier livre : Hygiène de vie et bien-
être au travail, 100 questions pour
comprendre et agir.
« Les facteurs de
protection au point de
vue individuel sont une
vie de couple épanouie,
la présence d’enfants
(notamment mineurs), le
soutien à l’extérieur du
travail, l’âge, l’activité
physique, ainsi que
l’estime de soi. »
Laurence Breton-Kueny
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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L’innovation managériale
et la santé au travail
Catherine d’Aléo
Alain Ducardonnet
Catherine d’Aléo, vous êtes directrice des relations humaines au sein du groupe
APICIL. Pourriez-vous nous présenter votre société et votre activité ?
e groupe APICIL est un groupe
de protection sociale. Nous
intervenons sur quatre métiers :
la santé et la prévoyance, ainsi que
l’épargne et la retraite
complémentaire. La particularité d’un
groupe de protection sociale relève de
sa gouvernance paritaire, de sorte que
le dialogue social est intrinsèquement
constitutif de notre société.
Nous avions publié, en 2007, un livret
blanc sur le thème de la santé au
travail. Nous développons en outre des
produits, en collaboration avec nos
clients, afin de répondre aux
problématiques de ce sujet. Ainsi
avons-nous développé le programme
"Ambition-Santé" qui s’adresse aussi
bien aux travailleurs non-salariés
qu’aux TPE et PME et aux grandes
entreprises. Ce programme considère
le problème de la santé au travail sous
différentes perspectives : physique,
psychologique, et organisationnelle.
ALAIN DUCARDONNET
Quelles initiatives souhaitez-vous
nous présenter ?
CATHERINE D’ALÉO
Notre programme s’intéresse au
sujet de la santé de manière globale, à
partir d’un questionnaire de santé d’où
découle un plan d’actions. Au sein
d’Apicil, nous nous focalisons sur la
question du travail, notamment entre
employés et managers. Ces derniers
pensent l’organisation mais pas
toujours le travail, alors que cela
permet d’identifier les bonnes
pratiques et les sources d’amélioration.
Dans le cadre d’une réorganisation
interne, nous avons donc formé nos
managers afin qu’ils puissent discuter
de la réalité concrète de travail avec
leurs collaborateurs, et que ces
derniers soient proactifs dans la
recherche de solution face aux
problèmes concrets rencontrés.
Par exemple, dans une équipe de
relation client chargée de répondre aux
appels de premier niveau, le besoin de
prise en charge de certains actes de
gestion a été mis au jour. Par cette
prise en charge, les problèmes des
clients sont réglés plus rapidement, ce
L
Après une expérience de responsable des a
aires sociales et juridiques dans l’industrie,
Catherine d’Aléo a successivement exercé
les fonctions de directrice des relations
sociales et de directrice des relations
humaines au sein du Groupe APICIL. Elle
occupe aujourd’hui la fonction de directrice
du développement de la performance
sociale. Dans le cadre du Programme
APICIL Ambition Santé, elle accompagne
les entreprises engagées dans une
démarche de qualité de vie au travail,
convaincues que la santé de leurs
collaborateurs est un enjeu stratégique et
un levier de performance. Titulaire d’un
master en droit social à l’Institut d’études
du travail de Lyon et d’un executive master
ressources humaines à Science Po Paris, ses
domaines d’intervention sont
l’accompagnement des transformations
des organisations, le développement du
dialogue social et les pratiques de
management.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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qui réduit la frustration de cette équipe
et améliore la satisfaction des clients.
Dans un souci de développement de
compétence et de satisfaction
personnelle, le service offert aux
clients a ainsi été amélioré, conciliant
qualité de vie au travail et qualité du
travail.
Comme le dit Yves Clot, il n’y a pas
de bien-être sans bien-faire.
« Comme le dit Yves Clot,
il n’y a pas de bien-être
sans bien-faire. »
Catherine d’Aléo
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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Quelles sont les
innovations souhaitables
pour réduire les RPS et
développer le bien-être au
travail ?
Jean-Pierre Durand
Alain Ducardonnet
Jean-Pierre Durand, vous êtes professeur de sociologie à l’université d’Évry et avez
également publié un livre sur les innovations possibles et souhaitables dans le monde
du travail.
n tant que sociologue,
j’interviens dans les entreprises
au nom du CHSCT. Je dois bien
reconnaître que mon travail n’est pas
toujours facile, dans la mesure où mes
conclusions sont trop souvent déniées
par les directions.
Aujourd’hui, je vous présenterai mes
conclusions sur deux grandes
transformations à l’œuvre depuis une
trentaine d’années : l’arrivée du flux
tendu à main-d’œuvre réduite, d’une
part, et la généralisation du numérique
d’autre part, tout particulièrement dans
les dispositifs de pilotage du travail. Ces
deux grandes transformations n’ont pas
de conséquences univoques, néfastes
ou bénéfiques. Elles rendent à la fois le
travail plus dur et plus intéressant.
Cette ambivalence est résumée par le
concept d’implication-contrainte. Ce
nouveau concept m’amènera à
remettre en cause le concept de risques
psychosociaux. En effet, il serait plus
judicieux de parler, non pas de risques,
mais de troubles psychosociaux
(puisque dans le cas du suicide, le stade
du risque, me semble-t-il, a amplement
été dépassé). Mieux encore, nous
devrions parler de troubles
sociopsychiques, c’est-à-dire placer
l’aspect social avant l’aspect individuel,
afin de mieux souligner l’importance du
contexte social dans l’évolution
psychologique individuelle.
ALAIN DUCARDONNET
E
Professeur de sociologie à l’Université
d’Evry, Jean-Pierre Durand a fondé le
Centre Pierre Naville. Il est l’auteur de
plusieurs ouvrages de sociologie générale
(dont Sociologie contemporaine, Vigot,
2005 pour la 3ème édition). Il enseigne et
publie aussi en sociologie du travail et des
organisations et a dirigé ou participé à
l’écriture de plusieurs ouvrages sur la santé
au travail tels que Violence au travail,
Octarès, 2011, Innovation dans le travail,
et travail d’innovation, Toulouse, Octarès,
2014 ou le Dictionnaire des troubles
psychosociaux, PUF, 2014. Jean-Pierre
Durand est le directeur de la Nouvelle
Revue du Travail (nrt.revues.org). Nombre
de ses ouvrages et articles sont traduits en
anglais, en japonais, en turc, en chinois, en
espagnol. Parallèlement à ses
enseignements et à ses recherches, il
intervient dans les entreprises et les
administrations publiques à la demande
des CHSCT ou des directions.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
40
Jean-Pierre Durand, que tirez-vous
de ces initiatives et de ces innovations ?
JEAN-PIERRE DURAND
J’estime que le bien-être est une
question sociétale, elle pose la question
du sens du travail et des entreprises.
Le flux tendu à main d’œuvre réduite
et du juste-à-temps s’est totalement
généralisé, de l’industrie aux services en
passant par le management public. Or
au sein du service de recherche et
développement d’EDF, 15 % des
employés sont suivis en permanence et
au moins 35 % d’entre eux ont connu
des phases délicates au niveau mental.
Cela s’explique notamment par le fait
que dans un système à flux tendu,
même dans la conception, tout retard
d’un maillon pénalise et met en péril
l’aval de la chaîne. Les moyens sont-ils
en accord avec les objectifs ? Pas
toujours, car le travail est considéré
comme un coût et non pas comme un
investissement. Il conviendrait donc de
réformer notre façon de penser le
travail.
Je trouve étrange que nous n’ayons
pas entendu parler ce matin du concept
de charge de travail : elle ne se calcule
pas, mais elle est à la source des
troubles sociaux psychiques.
Dans un système où le pilotage
numérique se fait dans l’immédiateté,
le suivi est raffiné et multiplié, jusqu’au
bas de la chaîne, ce qui coûte beaucoup
de temps : d’après les expériences
menées sur ce sujet, les cadres passent
jusqu’à 25 % de leur temps de travail à
remplir et à corriger leurs outils de
pilotage – en effet, chaque cadre doit
non seulement renseigner des tableaux
de bord, mais il doit également
"arranger" les données lorsqu’elles ne
sont pas conformes aux objectifs fixés.
Pour les exécutants, ce temps consacré
au reporting fluctue entre 12 et 15 %.
Ces dispositifs constituent des
pressions sur les salariés, envahis par les
délais et les jalons. Dans ce cadre, le
droit à la déconnexion peut faire sourire
car il est bien difficile de le mettre en
œuvre.
Dans ces conditions travail, ne peut
pas être soigné. Les contraintes doivent
être desserrées, les moyens humains ne
doivent plus être victimes d’économies
excessives. La prévention arrive trop
tard car les causes sont structurelles. Il
convient d’accorder du temps au
collectif afin de parler du cœur du
travail.
Les 7 millions de chômeurs
pourraient trouver un emploi si nous
travaillions un peu moins et si notre
système social répartissait autrement
les emplois et les revenus. En effet, le
coût du chômage atteint 65 milliards
d’euros, soit l’équivalent du budget du
ministère de l’Éducation nationale ou
de la Défense.
« D’après les expériences
menées sur ce sujet, les
cadres passent jusqu’à
25 % de leur temps de
travail à remplir et à
corriger leurs outils de
pilotage. »
Jean-Pierre Durand
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
41
La vigilance raisonnable
Anne-Yvonne Le Dain
Alain Ducardonnet
Anne-Yvonne Le Dain, vous êtes députée de l’Hérault et vice-présidente du groupe
d’étude "Pénibilité au travail, santé au travail et maladies professionnelles".
vant d’être députée, j’ai
exercé des activités de
direction dans des
laboratoires de recherche. J’ai donc
une pratique concrète de nos
problématiques. En tant que directrice,
j’ai été stupéfaite d’apprendre, par un
concours de circonstances, par pur
hasard donc, que plusieurs de mes
employés avaient subi des opérations
ou étaient en situation de handicap.
Afin d’améliorer leurs conditions de
travail, j’ai fait appel à un ergonome,
lequel a pu remédier à leurs problèmes
à peu de frais.
Les conditions de travail et le bien-
être qui peut en découler sont autant
de problèmes qui doivent être traités
par la hiérarchie, c’est là une évidence.
ALAIN DUCARDONNET
Que pensez-vous des innovations
dont nous avons parlé ce matin ?
ANNE-YVONNE LE DAIN
J’estime que l’on ne peut pas être
performant si on est malheureux, or la
plupart des études montrent que notre
pays se situe en bas de l’échelle de
mesure de la bonne humeur, ce qui,
dans un aussi beau pays, est quand
même sidérant.
Pour ma part, je m’inquiète de la
permanence de la connexion au sein
des entreprises, où l’on attend la
réponse à un email dans les deux
heures, y compris pendant le weekend.
Ce problème se pose aux cadres et aux
non-cadres, hors du système
d’astreinte. La question du reporting,
notamment, est centrale : tout le
monde en demande, tout le temps,
mais comment est-il consolidé et par
qui ? Les tableaux de bord se
multiplient grâce aux outils
numériques mais la question de leur
utilisation et des responsabilités à cet
égard n’est jamais posée, or ce sujet
est capital car le reporting génère un
stress considérable.
A
Députée de l’Hérault depuis 2012, Anne-
Yvonne Le Dain est membre de la
commission des Lois et vice- présidente de
l’O ce parlementaire d’évaluation des choix
scienti ques et technologiques (OPECST).
Elle est également membre du groupe
français de l’Union interparlementaire,
membre titulaire du Conseil national de
sécurité civile, du conseil d’administration
de l’Institut des hautes études pour la
science et la technologie. Ingénieure
agronome et docteure en sciences de la
Terre, Anne-Yvonne Le Dain était encore
récemment déléguée aux évaluations,
après avoir été directrice de département
au Centre international de recherche
agronomique pour le développement
(CIRAD).
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
42
Concilier performance
sociale et performance
économique
Laurent Grouas
Alain Ducardonnet
Laurent Grouas, vous êtes directeur de l’innovation et des partenariats au sein du
groupe Siaci Saint Honoré. Vous vous intéressez aux problématiques de l’individu en
relation aux performances de l’entreprise.
e dirige en effet la direction de
l’innovation et des partenariats
au sein d’un cabinet de courtage
qui accompagne plus de
3 500 entreprises sur l’ensemble des
champs de la protection sociale,
comprise au sens large. Nous avons
investi ce champ car il se situe dans la
continuité de notre activité première
de conseils et d’accompagnement des
entreprises. Nous tentons pour ainsi
dire de réconcilier l’irréconciliable : la
collectivité et l’individu. Aussi avons-
nous développé une démarche
participative de la prévention afin que
l’ensemble des acteurs collaborent sur
une situation donnée et trouvent des
moyens de financement adéquats.
Notre tâche consiste à concilier
différentes notions car les Français ne
gèrent pas leur santé, ils gèrent des
périodes de soin. Il convient donc
d’imbriquer l’ensemble des services
afin de donner une colonne vertébrale
à la chaîne de services disponibles
financés par le système de santé, la
mutuelle ou l’individu lui-même. Nous
devons nous assurer que le dispositif
soit accessible à l’ensemble des
salariés, au même endroit.
Depuis l’origine nous avons la
volonté d’offrir à nos clients le ROI de
la prévention ; si c’est une politique de
long terme en matière de santé, c’est
en revanche beaucoup plus visible au
niveau de la motivation et de
l’absentéisme. La logique de ROI en
matière de prévention est centrale.
Je rappelle qu’un décret de 2014
dans le cadre de l’ANI impose aux
régimes santé des branches de prévoir
au minimum 2 % de la cotisation santé
pour le financement d’actions de
J
Diplômé de l’European Business &
Management School (spécialisation
nances), Laurent Grouas débute sa carrière
en 1994 dans l’univers de la grande
distribution où il évolue dans le cadre de
missions d’audit, d’organisation puis de
direction de centres de pro ts. En 1996, il
rejoint le monde du conseil et se passionne
pour le secteur de la santé et de la
protection sociale. Successivement co-
fondateur de la société Almerys puis du
cabinet de conseil KADRIS, il accompagne
pendant quinze ans les directions générales
des acteurs de l’assurance de personnes
(publics, privés ou institutionnels) sur leurs
problématiques stratégiques et métiers.
Début 2014, Laurent Grouas a rejoint le
groupe SIACI Saint Honoré, cabinet de
courtage et de conseil en assurance, pour
créer la direction de l’innovation et des
partenariats et développer les activités de
conseil en matière de stratégie, gestion du
risque, santé au travail et qualité
de vie au travail.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
43
solidarité et de prévention. Les
partenaires sociaux travaillent sur la
façon d’utiliser cette enveloppe au
profit d’une prévention active.
Grâce à notre système, les
entreprises peuvent changer de
courtier tout en conservant leur
dispositif car avoir des services gérés
par les assureurs peut poser un
problème de portabilité. Le partage du
coût et de l’investissement par
l’ensemble des thématiques est
également important. Notre offre
repose donc sur des services digitaux
et sur un réseau d’intervenants en
entreprise (psychologues, médecins,
ergonomes, etc.) qui répondent à un
besoin face aux aléas sociaux et à ceux
de l’entreprise, pour agir sur les
questions individuelles et cibler les
problèmes internes par un
investissement intelligent, dans une
politique qui offre un bon ROI.
« La logique de ROI en
matière de prévention
est centrale. »
Laurent Grouas
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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Travaux sur les nouvelles
technologies de la santé
au travail
Stéphane Pimbert
Alain Ducardonnet
Stéphane Pimbert, vous êtes directeur général de l’Institut national de recherche et de
sécurité. Vous avez beaucoup travaillé sur les nouvelles technologies.
out à fait. Historiquement,
toutefois, le rôle de l’INRS était
de travailler sur les stratégies
d’évitement des accidents liés au
travail. Aujourd’hui, je vous parlerai
des travaux de l’INRS portant sur les
outils liés au bien-être au travail, ainsi
que de nos travaux de prospective, et
notamment sur la collaboration
homme-robot.
Le rôle de l’INRS consiste à passer
de la recherche à des solutions de
prévention : sur le sujet du burn out,
des RPS ou des nanoparticules, il faut
poursuivre la recherche mais
également mettre sur pied des
solutions dans les entreprises. Sur le
bien-être, nous avons créé des outils
au bénéfice des entreprises (à
retrouver sur le site web de l’INRS).
Dans le domaine des nouvelles
technologies, nous organiserons une
conférence sur les outils numériques,
la santé et la prévention dans le cadre
d’un colloque du 29 au 31 mars 2017.
Dans le secteur de la logistique, où les
contradictions entre le comportement
des salariés et les injonctions des
systèmes automatiques sont parfois
contradictoires, nous avons par
exemple travaillé sur des
recommandations de prévention.
Par ailleurs, nous menons des
travaux sur l’utilisation des
technologies de l’information et son
impact sur l’organisation du travail,
avec là aussi l’émission de
recommandations.
Au sein de l’INRS, nous avons
également développé des travaux de
prospective, conduits avec différents
partenaires, par exemple sur la
collaboration homme-robot qui
concerne non seulement le secteur
automobile mais également le
bâtiment ou l’agro-alimentaire, qui
commence à utiliser des exosquelettes
pour prévenir l’apparition des TMS. Au
niveau européen, les discussions sur ce
sujet sont poussées assez loin, avec
T
Directeur général de l’Institut de recherche
et de sécurité (INRS), qui a pour mission la
prévention des maladies professionnelles et
accidents du travail en France et dont le
siège est à Paris. Nommé en juillet 2009,
Stéphane Pimbert a été précédemment
directeur du centre de recherches de l’INRS
de 2007 à 2009. Diplômé en droit et
sciences politiques, il a exercé les fonctions
de consultant en organisation au sein du
cabinet Eurogroup Consulting et de
secrétaire général de la branche services de
l’Association française pour l’assurance de
la qualité/Association française de
normalisation (AFAQ/AFNOR). Il est
membre en tant que personne quali ée du
Conseil national des conditions de travail
(COCT) auprès du ministère du Travail. Il
est également président du comité
«Recherche» de l’Association internationale
de sécurité sociale (AISS).
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants.
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des questions comme "le robot peut-il
taper l’homme ?" et inversement.
Nous travaillons par ailleurs sur
l’uberisation et ses conséquences sur la
santé au travail : où est le médecin du
travail et quelle est la prévention pour
ces travailleurs indépendants ?
Anticiper le changement, comme le
disait ce matin Myriam El Khomri, c’est
non seulement faire de la prévention
mais c’est également préparer les
évolutions et les anticiper le mieux
possible, pour l’industrie et le tertiaire.
Selon moi, il est très important que les
partenaires sociaux aient réorienté le
système vers la prévention au
détriment de la réparation.
Pour conclure, j’aimerais souligner
deux anecdotes : d’une part, les
Émirats Arabes Unis se sont dotés d’un
ministère du Bonheur et d’autre part le
sentiment de bonheur des Irakiens est
plus élevé que celui des Français.
« Il est très important
que les partenaires
sociaux aient réorienté le
système vers la
prévention au détriment
de la réparation. »
Stéphane Pimbert
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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Retour d’expérience sur la
détection des
comportements à risque
Michel Rota
Alain Ducardonnet
Michel Rota, votre société propose des services de prise en charge globale et d’activité
physique dans l’entreprise.
out à fait. Depuis 10 ans,
Wellness Training propose une
politique de prévention
primaire à 10 000 salariés suivis au
quotidien car nous souffrons d’un
manque d’activité physique (1 % du
temps contre 30 % au début du
XXe siècle). Notre intervention
concerne l’activité physique,
l’alimentation et la récupération. Nos
70 préventeurs sillonnent la France,
nous avons besoin du contact humain
pour sensibiliser les personnes à la
santé et au numérique. Le travail
pédagogique à effectuer est important
car les besoins en dépense énergétique
sont élevés et les comportements ne
sont pas adaptés.
Nos programmes captent 30 % des
salariés, qui ont souvent des
problèmes de sommeil, de prise de
poids ou d’inadéquation entre leur
alimentation et leurs besoins réels.
Dans ce contexte, notre travail
consiste à apporter du bon sens et à
aider les personnes à faire évoluer
leurs comportements. C’est un long
processus dans le quel
l’accompagnement est fondamental.
Nos 70 préventeurs aident par exemple
les personnes à reprendre un niveau
d’activité physique suffisant pour
éviter les maux les plus courants et les
plus évitables.
T
Michel Rota est co-fondateur de l’entreprise
Wellness Training, leader de la remise en
forme en entreprise. Ancien sportif de haut
niveau et diplômé en STAPS, Michel Rota
intervient depuis plus de 20 ans dans
l’univers de la remise en forme. Il est en
outre le premier à avoir développé une
vision globale du bien-être dans l’entreprise
en enrichissant les prestations tness pour
les adapter aux besoins des salariés.
Wellness Training intervient aujourd’hui
dans plus de 50 entreprises au travers de la
gestion et l’animation de salles de remise
en forme, des prestations prévention-santé
pour le salarié (ostéopathie, kinésithérapie,
sophrologie, luminothérapie, coaching
nutritionnel) et des formations, conférences
ou ateliers sur les problématiques
d’activités physiques, de récupération
et de nutrition.
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Betterise Health Tech au
service de la santé et du bien-
être
Christophe Brun
os outils digitaux permettent
d’accompagner les gens pour
améliorer leur vie et leur
santé. Nous personnalisons nos
approches pour proposer le bon
conseil à la bonne personne et au bon
moment. La prévention primaire a du
mal à percer en France, le message
passerait mieux s’il était plus
personnalisé. À travers nos actions,
nous nous assurons que cette
personnalisation fonctionne très bien.
Nos clients B-to-B proposent nos
services aux entreprises et nous
travaillons pour l’industrie de la chimie
et leurs salariés. Par exemple, nos
applications permettent
d’accompagner les personnes en leur
donnant des informations et des
conseils personnalisés, fondés sur plus
de 1 000 critères. Le système apprend
à connaître la personne et à adapter
ses services : c’est la vertu du digital.
Dans un grand groupe, un dirigeant
nous avait reproché de supprimer le
droit à être malade, alors que nous
visons juste à améliorer la vie des
personnes, ce qui a des répercussions
sur leur vie familiale, leur vie
professionnelle et leur entreprise.
Certes, la confidentialité des données
est un sujet sensible et nous nous
assurons que les données soient
séquestrées, comme avec Harmony
Mutuelle qui paye notre service, ce qui
rend inutile la vente des données que
nous collectons, contrairement à
Facebook qui pour vivre vend les
données de ses utilisateurs.
Bien sûr, nos outils sont
performants, ils ne coûtent pas très
cher et permettent de modifier le
comportement des salariés.
N
Co-fondateur associé de la société
Betterise Health Tech, Christophe Brun
est spécialiste des marques, de leur
environnement métier et des enjeux qui
sont les leurs dans le développement et
l’exploitation du digital. Christophe Brun
a commencé sa carrière dans la publicité
chez Audour Soum Larue / SMS en 1990.
En 1991, il rejoint la marque Eden Park
en tant que directeur marketing et
communication. En 2000, il entre chez
Havas Entertainment où il occupe le
poste de directeur conseil. En 2005, il
devient directeur du Public Système
Sport avant d’intégrer en 2008 le Groupe
WPP, au sein de l’agence de stratégie
des moyens Mediaedge: CIA.
Parallèlement, en 2009, Christophe Brun
crée Bemobee, agence conseil dans
l’univers du mobile. En mai 2012, il
rejoint le Groupe MNG, pour prendre la
direction du département stratégie et
consulting au sein de Bemobee qui avait
alors intégré le Groupe. Christophe Brun
quitte MNG et Bemobbe en février 2013
pour lancer Betterise.
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
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Le bien-être autour de
l’innovation managériale
et la psychologie positive
Laurence Saunder
Alain Ducardonnet
Laurence Saunder, vous dirigez l’Institut français d’action sur le stress. Vous nous
proposerez donc des solutions en la matière.
onjour à toutes et à tous. Je
dirige en effet l’IFAS. Je
m’intéresse tout
particulièrement au sujet du
management au sein de l’entreprise.
Le cadre réglementaire est certes
important, mais il ne peut créer le
bien-être des salariés. Ce n’est pas là le
rôle des lois. L’enjeu du bien-être au
travail est un problème d’évolution de
culture. À cet égard, les financements
ne constituent pas véritablement un
problème, puisqu’une telle évolution
peut se réaliser sans dépenser
d’argent. Et en effet, comme il a été
dit, les nouvelles générations et le
numérique représentent des enjeux de
transformations considérables.
Le bien être physique ne vas pas
sans bien être psychique. Le bien être
se mesure, grâce à des questionnaires
spécifiques, et se développe. Pourtant,
il est difficile de faire du feed back
positif et d’encourager les salariés en
entreprise, notamment en raison des
managers et des dirigeants, alors que
les bénéfices du bien-être sont réels.
Dans l’Union européenne, 28 % des
salariés se trouvent en situation de sur-
stress ; une action régulière sur ces
sources de stress fait baisser cette part
à 26 % mais une action occasionnelle
fait bondir ce taux à 41 %. Le premier
défi consiste donc à convaincre
dirigeants et managers.
Les entreprises doivent oser faire
autrement, en définissant une
stratégie, elles font par exemple
évoluer leur modèle en passant de la
"culture produit" à la "culture client" et
en développant "l’expérience
collaborateur", ce qui est une approche
originale d’évaluation du travail du
management.
B
Dirigeante de l’Institut français d’action sur
le stress (IFAS) depuis 2000, Laurence
Saunder est vice- présidente de la
Fédération des intervenants en risques
psychosociaux (FIRPS) et administrateur de
Syntec Conseil. Son domaine d’expertise
est la prévention des risques psychosociaux
avec une spécialité spéci que concernant
l’élaboration des politiques de prévention et
la mise en conformité juridique (DUER). Elle
dirige le département recherche de l’IFAS
en lien avec des partenaires extérieurs,
CNRS, universités... Elle intervient chez
APM sur le sujet de l’intelligence
émotionnelle et le stress et dans di érents
cours d’études supérieures d’université
(DESU). Elle est l’auteur de L’énergie des
émotions (Éditions d’Organisation, 2007) et
co-auteur de Stress.fr (Éditions
d’Organisation, 2010) qui a reçu le prix
spécial de la qualité et performance 2010.
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DÉBATS
BERNARD SALENGRO, médecin
du travail, CFE-CGC
En tant qu’administrateur de
l’INRS, j’estime que cet établissement
produit de très beaux travaux, mais
son budget est réduit, les chercheurs
et l’investissement disparaissent. C’est
autant de recherches en moins sur les
accidents de travail, et autant de coûts
en plus pour la branche accidents du
travail.
JEAN-CHRISTOPHE KETELS,
conseiller technique, CFTC
Je rappelle que la principale
préoccupation réside dans la
récupération permettant de fournir le
maximum de travail le lendemain :
cette problématique fonde le lien entre
santé et travail. Avec son service
sociologique qui conseillait ses salariés
sur leur hygiène de vie, Henri Ford
avait une vision paternaliste, tout
comme Laurence Breton-Kueny.
LAURENCE BRETON-KUENY
Faire de la prévention pour ses
collaborateurs n’est pas du
paternalisme, c’est une nouvelle forme
de responsabilité des entreprises. Ne
pas le faire serait manquer à nos droits
et à nos devoirs d’employeurs.
JEAN-CHRISTOPHE KETELS,
conseiller technique, CFTC
Les entreprises américaines font
appel à des sociétés de services qui
récupèrent des données de santé de
leurs salariés et les analysent afin de
prédire leurs risques de tomber
malade. Ces nouveaux services fondés
sur les applications d’e-santé ne font-
elles pas peser un risque d’atteinte au
secret médical ?
LAURENT GROUAS
La protection des données
personnelles est en effet un sujet
majeur. L’hébergement de nos
données est assuré en France,
personne n’y a accès, ce qui n’est pas le
cas lorsque l’on utilise des applications
basées à l’étranger.
Aujourd’hui, un salarié absent plus
de 20 jours aura beaucoup de difficulté
à reprendre son travail, or notre
système permet de repérer ces
personnes et d’alerter la CNAM, mais
l’utilisation des données à cette fin ou
à d’autres du même type se heurte à
une question de consentement de
l’utilisateur. La protection des données
est importante, mais n’oublions pas
que leur utilisation peut être bénéfique
pour tous.
« Avec son service
sociologique qui
conseillait ses salariés
sur leur hygiène de vie,
Henri Ford avait une
vision paternaliste, tout
comme Laurence Breton-
Kueny. »
Jean-Christophe Ketels,
conseiller technique, CFTC
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CHRISTOPHE BRUN
Je tiens à distinguer protection des
données et utilisation des données.
Nous utilisons les données de nos
utilisateurs dans un objectif de
prévention et si l’utilisateur ne
souhaite plus qu’elles soient
exploitées, nous les supprimons
physiquement de nos bases. Nos CGU
sont strictes et précises, et nous nous
engageons à travers divers documents
qui assurent un respect de la vie privée
et de la sécurité des données.
« La protection des
données est importante,
mais n’oublions pas que
leur utilisation peut être
bénéfique pour tous. »
Laurent Grouas
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Clôture des
Rencontres Jean-Frédéric Poisson
appelons tout d’abord que le
but premier d’une organisation
consiste à rendre service à ses
clients ou à ses usagers dans des
conditions économiques satisfaisantes.
Ce matin, le mot le plus important
prononcé ce matin est « collectif ». Je
suis très attristé et inquiet de voie
disparaître peu à peu les collectifs de
travail, sous l’effet du développement
des emails et des SMS au détriment
des échanges en direct. Le
cloisonnement, l’individualisation des
tâches et le reporting personnalisé
fragilisent le collectif de travail et, dans
ce contexte, les DRH ont beaucoup de
mal à reconstituer des collectifs de
travail, face à des collaborateurs de
moins en moins enclins à "obéir".
Aujourd’hui, le combat du port des
EPI existe toujours, et des
réglementations restent nécessaires,
et je regrette que dans certains cas le
DRH n’ait pas le soutien nécessaire
pour les faire appliquer.
Au sujet du paternalisme, rappelons
que les chefs d’entreprises ont une
obligation de résultat eu égard à la
santé de leurs salariés, or la prévention
est un des moyens d’y parvenir. Le
suicide d’un salarié de Renault
Guyancourt est éloquent : le juge,
malgré la liste impressionnante
d’actions mises en place par Renault
pour assurer la santé et la sécurité de
ses salariés, a condamné l’employeur.
Si elle est nécessaire et légitime, cette
obligation de résultat qui pèse sur les
employeurs est trop floue et incertaine
sur le plan juridique et justifie ce
déploiement massif de parachutes et
de précautions. La réponse réside sans
doute dans l’implication des acteurs et
le dépassement de l’antinomie entre
individualisation de la santé et collectif
de travail.
Au sujet de la déconnexion, qui
figure parmi les cibles du projet de loi
de Myriam El Khomri, j’estime que la
cause réside dans le management par
la peur : les collaborateurs sont en
situation de risque, ils restent
connectés à leur travail et continuent
R
Député des Yvelines élu en 2007 et réélu en
2012, Jean-Frédéric Poisson est président
du Parti Chrétien Démocrate et vice-
président de la commission des Lois à
l’Assemblée nationale depuis 2013. Prési-
dent de la communauté d’agglomération
Rambouillet Territoires, il est, en 2008, le
premier adjoint au maire de Rambouillet,
chargé de l’urbanisme. Directeur de cabinet
de madame Christine Boutin entre 1994 et
2004, il est président-directeur général d’un
cabinet de conseil en organisation et res-
sources humaines de 2004 à 2007. Il est
également l’auteur en 2008 d’un rapport
“Prévenir et compenser la pénibilité au
travail” à l’Assemblée nationale.
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de travailler hors de l’entreprise car ils
manquent d’espaces et de lieux pour
expliquer qu’ils n’y arrivent pas ou
qu’ils manquent de temps. C’est la
raison pour laquelle le droit à la
déconnexion s’apparente à de
l’affichage : la loi ne réglera rien.
Jeune organisateur dans une
société de financement, voici 27 ans,
j’avais observé qu’au delà de
4 secondes le temps de réaction d’un
ordinateur était jugé trop long par
l’utilisateur ; donc ce sujet ne date pas
d’aujourd’hui : l’impatience humaine
est réelle, nous n’attendons pas la
réponse à un email dans les 2 heures
mais dans les 2 minutes.
Prenons conscience que le
changement d’habitude rend triste et
inquiet, comme le notent nombre de
philosophes. C’est ce qui rend
nécessaires les mécaniques
d’accompagnement qui doivent être
dûment considérées par les dirigeants,
au bénéfice de leurs DRH.
Penser une organisation pour les
plus fragiles bénéficie à tout le monde,
y compris au client, mais nous vivons
dans une société de domination des
forts au détriment des faibles.
Je vous remercie pour ces
Rencontres et je serai heureux de vous
retrouver l’année prochaine si j’en ai
l’occasion, en espérant que la santé au
travail ait encore progressé d’ici là.
« Au sujet du
paternalisme, rappelons
que les chefs
d’entreprises ont une
obligation de résultat eu
égard à la santé de leurs
salariés, or la prévention
est un des moyens
d’y parvenir. »
Jean-Frédéric Poisson
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Déjeuner
débat Isaac Getz
Alain Ducardonnet
Nous avons le plaisir d’accueillir Isaac Getz qui va nous parler des entreprises libérées.
orsque l’on voit des gens qui ont
l’air de s’amuser, on pense qu’ils
sont en vacances. Pourtant, de
nombreux salariés sont heureux de
travailler, sont épanouis lorsqu’ils
retrouvent leur domicile après leur travail
et sont impatients d’y retourner le
lendemain.
La part des salariés français que l’on
peut qualifier de "collaborateurs
engagés" est de 9 %, selon Gallup, soit le
pire résultat en Europe avec les
Néerlandais (les premiers de ce
classement sont les Danois, avec une
part de 21 %). La part des collaborateurs
désengagés est de 65 % ; ces derniers,
après avoir pointé, n’attendent qu’une
chose : dépointer. Ils sont compétents et
font le travail qui leur est demandé, mais
pas plus. Enfin, 26 % des salariés français
sont activement désengagés, c’est-à-
dire qu’ils sont malheureux au travail, le
font savoir, et sabotent le travail de leurs
collègues engagés. Dans une
organisation classique, un collaborateur
engagé est souvent mal vu : par sa
hiérarchie car elle craint une demande
d’augmentation, et par ses collègues car
ils ont peur de voir le standard
d’exigence augmenter par sa faute.
Pour la majorité des gens, le travail
revêt une fonction alimentaire, ce qui
peut être mis en relation avec le taux de
survie des entreprises au-delà de 40 ans :
1 % seulement.
En 2013, l’absentéisme atteignait
8,7 % dans les collectivités locales (6 %
dans les petites communes, 10 % dans
les grandes) et 75 % de consultations
médicales étaient dues au stress au
travail, dont la cause numéro 1 est le
manque de contrôle sur ses tâches et les
tensions avec sa hiérarchie… Imaginez
donc en quoi des lois pourraient
améliorer cette situation !
Une entreprise libérée laisse ses
salariés libres et responsables
d’entreprendre toutes les actions qu’ils
L
Professeur à l’ESCP Europe, Isaac Getz a
conduit de nombreux travaux sur des sujets
tels que l’innovation et la créativité,
l’engagement des salariés, l’excellence, le
leadership, la liberté et la responsabilité en
entreprise. À ce jour, il a étudié plus de 300
entreprises dans 25 pays. Conférencier
international sur les thèmes des
organisations continuellement innovantes,
de l’entreprise libérée, de l’initiative et de
l’engagement des salariés, du leadership
libérateur, il a animé des conférences dans
trois quart des entreprises du CAC40, ainsi
que dans des centaines d’autres entreprises
et organisations sur quatre continents. Isaac
Getz est l’auteur de nombreuses
publications. Son dernier ouvrage Freedom,
Inc. sur les leaders libérateurs, la démarche
et la philosophie de libération d’entreprise
est déjà paru dans six pays. En France, il est
paru sous le titre Liberté & Cie, chez Fayard
et chez Flammarion.
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estiment les meilleures pour l’entreprise.
En effet, qui mieux que le salarié sait
comment faire son travail ? Dès lors, exit
les procédures, les contrôles et la
hiérarchie : dirigeants et managers se
mettent au service des salariés, comme
un jardinier qui se met au service de ses
plantes. Bien sûr, cela nécessite une
vision d’entreprise exaltante, des règles
de savoir-vivre et, de la part du dirigeant,
un peu de travail sur son ego. Les
entreprises libérées surperforment, dans
tous les secteurs et sur tous les
continents.
Il n’existe pas de modèle, à chaque
entité son propre modèle, en respectant
les gens et leur héritage. Pour dresser un
bon diagnostic, il convient de poser les
bonnes questions, notamment
"pourquoi les salariés sont-ils devenus
désengagés ?". Pour motiver les salariés
désengagés, il est inutile de proposer un
Blackberry, une carte Total ou encore un
bureau avec fenêtre : il faut leur
demander ce dont ils ont besoin, comme
le jardinier qui doit connaître les besoins
de ses fleurs. Dans les entreprises
libérées, les managers n’utilisent pas les
carottes et les bâtons, ils créent un
environnement dans lequel les salariés
sont auto-motivés. Par exemple, un
enfant que l’on autorise à jouer au
football avant le dîner ne rentre pas (en
tout cas pas avant le coucher du soleil),
même s’il a faim, même s’il est blessé car
il s’amuse, il prend du plaisir.
L’enjeu consiste donc à donner aux
gens envie d’aller au travail. Pour une
entreprise de taille moyenne, cette
démarche s’apparente à l’ascension
d’une montagne alpine ; pour les grands
groupes, c’est l’Himalaya.
Les trois besoins universels des
collaborateurs sont les suivants :
L’égalité intrinsèque : les êtres
humains ne demandent pas à être traités
comme des êtres supérieurs, mais ils
veulent surtout ne pas être traités
comme des personnes inférieures. Ils
veulent du respect et de la confiance
dans leur intelligence et leur capacité à
trouver les solutions par eux-mêmes.
La réalisation de soi, en libérant
le potentiel des personnes.
L’auto-direction : les êtres
humains n’aiment pas qu’on leur dise
quoi faire.
Dans chaque être humain réside une
grandeur, que l’on peut révéler en le
laissant agir par lui-même, au bénéfice
de l’organisation entière.
Parmi les entreprises engagées dans
une démarche de "libération" citons
Michelin, Airbus, Decathlon, Kiabi,
Norauto, des unités militaires ou encore
la mairie d’une ville de 40 000 habitants.
Voici l’exemple de l’entreprise
Chrono Flex : lors de la crise de 2009, elle
dut se séparer de 30 % de ses salariés
pour faire face à la chute de 34 % de son
chiffre d’affaires. S’engageant alors dans
sa « libération », elle reconstruisit sa
vision, définit quatre valeurs (la
performance par le bonheur, l’amour du
client, une équipe respectueuse et
responsable, l’ouverture d’esprit et
l’esprit d’ouverture) et supprima les
signes de pouvoir. Depuis 2012, les
équipes cooptent leur "capitaine", le
pouvoir de décision est transféré et
exercé par le vote. Grâce à cette
transformation, l’entreprise est parvenue
à surmonter la crise de 2014, pourtant
beaucoup plus dure que celle de 2009.
J’aimerais vous présenter un dernier
chiffre : le pourcentage de salariés
absents au moins une fois par an :
« 26 % des salariés
français sont activement
désengagés. »
Isaac Getz
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28 % dans le secteur privé.
32 % dans la fonction publique
d’État.
33 % dans la fonction publique
hospitalière.
35 % dans la fonction publique
territoriale.
Je vous invite donc à tenter de
devenir la première collectivité libérée de
France.
JEAN-JACQUES LASSERRE,
sénateur des Pyrénées-Atlantiques
Je suis frappé par le taux
d’absentéisme de 8 % dans les
collectivités locales. De surcroît, ce taux
est plus élevé dans le public que dans le
privé : quelles en sont les raisons ?
Quelles sont les bonnes clés d’entrée ?
ISAAC GETZ
Le sujet dont nous parlons n’est pas
de nature intellectuelle, mais
émotionnelle, ou tribale. Si le patron
considère que les personnes sont dignes
de confiance, ont un potentiel et
préfèrent s’auto-diriger, il peut envisager
de réorganiser sa structure.
L’organisation pyramidale provient d’un
constat mathématique selon lequel ce
modèle permet d’encadrer le plus de
personnes avec le moins de managers,
mais à l’origine on n’a pas envisagé que
les personnes puissent s’auto-diriger.
Pourquoi plus la taille augmente plus
les impacts sont graves ? Parce que plus
la structure est grosse, plus les contrôles
sont nombreux et écrasent
l’organisation : par exemple, un dirigeant
passe 30 % de son temps à contrôler les
budgets. Dans les groupes comme
Michelin, les dirigeants optent pour des
unités de 250 personnes maximum car
des relations de confiance impliquent de
connaître le prénom des collègues.
J’ajouterais que le phénomène du
"village gaulois" provient de la même
logique : il est difficile de gérer et diriger
à une grande échelle.
ANNE-YVONNE LE DAIN
Comment gérez-vous les
augmentations de salaire ?
ISAAC GETZ
Il convient de s’assurer que les
personnes considèrent qu’elles sont
rémunérées de façon équitable, par
rapport à la grille de salaire et au marché
du travail.
Au sujet de la part variable,
j’ajouterais que le salaire dépend de la
contribution à l’activité : celui qui a
décidé de faire le minimum touche le
minimum. Pour les plus méritants,
beaucoup d’entreprises privilégient le
versement d’un bonus, mais il ne confère
pas de considération, c’est juste un
« os », une récompense : il est préférable
de verser une augmentation de salaire.
En outre, il convient d’expliquer de
façon pédagogique qu’en cas de
bénéfice les actionnaires et les banques
sont rémunérées les premiers, puis une
enveloppe est réservée aux
investissements et, enfin, l’éventuelle
survaleur est partagée, selon des règles
variées. De cette manière, le système est
transparent, et les salariés sont dûment
informés et éduqués.
LAURENT GROUAS
Combien d’entreprises font de ce
système un réel mode de gouvernance ?
ISAAC GETZ
L’organisation doit être cohérente à
100 % car les salariés guettent le
moindre faux pas. Les nouvelles
pratiques de management doivent se
« Pour motiver les
salariés désengagés, il
est inutile de proposer
un Blackberry, une carte
Total ou encore un
bureau avec fenêtre : il
faut leur demander ce
dont ils ont besoin. »
Isaac Getz
Ce compte rendu est rédigé à titre provisoire. Attention : Il n’a pas été validé par les intervenants à ce stade. Il vous est destiné personnellement. Merci de ne pas le reproduire. Un compte rendu définitif
vous sera adressé après la validation des actes par les intervenants
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développer à tous les niveaux, y compris
à celui des actionnaires.
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