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Extrait de la publication
BULLETIN D'OCTOBRE 1956SUPPLÉMENT A LA NOUVELLE N. R. F.
DU I" OCTOBRE 1956
N° 46i
TïïfPUBLICATIONS DU 15 JUILLET
AU 15 SEPTEMBRE 1956(Renseignements bibliographiques.)
On trouvera ici tous les renseignements bibliographiques sur les ouvrages effec-tivement parus du 15 juillet au I5~septembre 1956.
ROMANS
ADAM George Le Sang de César. 288 p., in-8° soleil. Col-lection blanche 750 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre 2.900 fr.
BLOCH-MICHEL Jean. Un Homme estimable. '296 p., in-16 doublecouronne. Collection blanche. 690 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 2.500 fr.
BOCRAT Henri La Reine de Tullé. 288 p., in-16 doublecouronne. Collection blanche 650 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 2.000 fr.
EKMAN P. A. La Praia. 272 p., in- 16 double couronne.Collection blanche 690 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 1.900 fr.
FRÈRE Claude. Le Carabinier de Bologne. 144 p., in-166double couronne. Collection blanche 350 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 1.200 fr.
MASSIP Renée. La Petite Anglaise. 240 p., in-16 doublecouronne. Collection blanche 550 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 1.700 fr.
OTTINO Georges Oisive Jeunesse. 256 p., in-16 double cou-ronne. Collection blanche. 650 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 1.900 fr.REINER Silvain Le Train pour l'Océan. 288p., in- 1 6double
cour. Collection blanche. 690 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre 2.500 fr.
SALA Marcel. Le Feu noir. 256 p., in-16double cou-ronne. Collection blanche. 650 fr.
20 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 1.900 fr.
Extrait de la publication
BULLETIN D'OCTOBRE 1956
SALMON André Sylvère ou La Vie moquée. 344 p., in-16double couronne. Collection blanche. 750 fr.
30 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 2.200 fr.
VRIGNY Roger Lauréna. 280 p., in- 166 d. c. Coll. blanche. 690 fr.30 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 2.500 fr.
TRADUCTIONS
ALGREN Nelson L'Homme au Bras d'Or. Traduit de l'amé-
ricain par Boris Vian. 368 p., in-8° soleil.Collection «Du Monde Entier », sous
couvre-livre illustré photographique. 800 fr.30 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 2.000 fr.
PARISE Goffredo Odeur de Sainteté. Traduit de l'italien
par Michel Arnaud, 336p., in-16 doublecouronne. Collection « La Méridienne ». 750 fr.
CONTES ET NOUVELLES
TRADUCTIONS
Introduction aux Littératures soviétiques.Contes et Nouvelles. Préface d'Ara-
gon. 304 p., in-8o soleil. Collection« Littératures Soviétiques». 780 fr.
ESSAIS LITTÉRATURE
DUTOURD Jean. Les Taxis de la Marne. 280 p., in-16 doublecouronne. Collection blanche 590 fr.
10 ex. num. hollande. 3.500 fr. (épuisé)50 ex. num. pur fil Lafuma Na-varre. 1.800 fr. (épuisé)
TRADUCTIONS
FREYRE Gilberto. Terres du Sucre. Traduit du portugaispar Jean Orecchioni. 296 p., in-16 doublecouronne. Collection « Croix du Sud ». 690 fr.
35 ex. num. pur fil Lafuma Navarre. 1.900 fr.
SÉRIE NOIRE
KEENE Day. La Bête à l'Affût. Traduit de l'américainpar Noël Grison.
DOMINIQUE A. L. Entre le Gorille, et les Corses.
KANE Henry Cadavériquement vôtre. Traduit de l'amé-ricain par Michel Sablier.
FARR John Fauve qui peut. Traduit de l'américainpar F. Gromaire.
MARSTEN Richard Panique à Bord. Traduit de l'américainpar J. Hérisson.
BRETT Martin La Fêteà la Grenouille. Traduit de l'amé-
ricain par C. Wourgaft et S. Bernard.
DOMINIQUE A. L. Couscous Gorille.
CHASE J. H. Fais-moi Confiance. Traduit de l'anglaispar F. M. Watkins.
JESSUP Richard Un Bruit de Chaînes. Traduit de l'améri-cain par Bruno Martin.
GEORGIUS (Jo Barnais) Tornade chez les Flambeurs.
Chacun' de ces dix volumes• 220 fr.
Extrait de la publication
BULLETIN D'OCTOBRE 1956
ÉDITIONS RELIÉES ILLUSTRÉES(ET RENNES 1956-1957)
JEAN GIONO
ROMANSCOLLINE LE GRAND TROUPEAU
trois aquarelles par CAVAILLÈS quatre aquarelles par M. SARTHOU
UN DE BAUMUGNES LE CHANT DU MONDE
trois aquarelles par GUERRIER quatre aquarelles par HANS ERNI
REGAIN QUE MA JOIE DEMEUREtrois aquarelles par ÉLIE LASCAUX sept aquarelles par P.-Yves TRÉMOIS
BATAILLES DANS LA MONTAGNEhuit aquarelles par FONTANAROSA
Un volume de 1.056 pages au format 230 X 180. Le texte, composé en.Plantin de corps 9, imprimé sur vélin « Plumex » des papeteries Téka par l'Impri-merie Floch, à Mayenne; les illustrations, gravées en offset par Cornevin-B'reton etpar la Société Technique d'offset, et tirées sur vélin spécial Téka sur les presses de laS. I. D. I. à Levallois (Seine). Reliure en chagra ivoire, décorée de fers spéciaux bleus,verts et or, d'après la maquette de PAUL BONET, avec laquelle est harmonisée la'typographie, en deux encres, de la page de titre, laquette en matière plastique
transparente. Prix 5. lOOfr.Prix 5.100 fr.
Selon le vœu de l'auteur, le terme de roman doit être entendu dans une accep-tion voisine de celle des grands romans médiévaux. C'est, en quelque sorte, unesuite d'épopées lyriques dont la plupart atteignent à d'amples proportions. Lethème commun à ces récits exalte les êtres et les paysages de la haute Provence,ses âpres et savoureux prestiges dans la changeante lumière des saisons. L'amour etle respect du sol, des arbres et des eaux s'y expriment avec une violence et unetendresse passionnées. Un même héroïsme anime et transfigure tous les gestesfamiliers des personnages dans une grandeur épique. Œuvre vraiment unique, par saforte carrure et ses inflexions délicates, toute imprégnée des odeurs de la rocaille,de la prairie et de la forêt, parcourue de battements d'ailes, de chants d'oiseaux etdes voix mystérieuses des bêtes sauvages et fraternelles. Ces romans se composentàla façon d'un choral, d'une vaste polyphonie aux développements luxuriants. C'estvraiment un « chant du monde» avec toutes ses résonances qui s'exhale de cetteœuvre généreuse, en présence de laquelle on évoque les noms d'Homère et de Mistral.
Nous nous sommés toujours souciés d'attirer vers l'illustration du livre des peintresdont la plupart ont connu la célébrité, et de révéler des talents nouveaux. A côtéde quelques-uns des maîtres du livre illustré comme Hans Erni, Fontanarosa ou ÉlieLascaux, des peintres jeunes, d'une réputation justifiée, affirment ici leur personna-lité. Le brillant coloriste Cavaillès y fait ses débuts d'illustrateur, cependant quePierre-Yves Trémois, virtuose de la gravure, aborde pour la première fois le domainede la couleur. Chacun, selon son tempérament et sa facture propre, a su ressentir etexprimer la vertu dramatique de l'oeuvre et en restituer, en même temps que lesimages pittoresques, l'atmosphère envoûtante et l'intense poésie.
Extrait de la publication
BULLE'TIN D'OCTOBRE 19566
BIBLIOTHÈQUE DE LA PLÉIADE
ŒUVRES DE
DOSTOÏEVSKII
Vient de paraître
Tome V
L'ADOLESCENT
LES NUITS BLANCHES LE SOUS-SOL'
LE JOUEUR L'ÉTERNEL MARITraductions et notes de
PIERRE PASCAL, BORIS DE SCHLOEZER et SYLVIE LUNEAU
Introduction de PIERRE PASCAL
Chronologie par SYLVIE LUNEAU
Un volume de I. I 60 pages, in-16 double cour., sur papier Bible. Reliure pleine peau.2.400 fr.
•
RAPPEL
Tome I. '-Crime et Châtiment. Journal de Raskolnikov. Les Carnetsde Crime et Châtiment. Souvenirs de la Maison des Morts. 2.600 fr.
Tome II. Les Frères Karamazov. Les Carnets des Frères Karamazov.
Nietotchka Niezvanov 2.600 fr.
Tome III. L'Idiot. Les Carnets de l'Idiot. Humiliés et Offensés.. 2.600 fr.
Tome IV. Les Démons. Carnets des Démons. Les Pauvres Gens. 2.600 fr.
•
Tous ces volumes présentés sous étui en matière plastique transparente.
BULLETIN D'OCTOBRE 1956
EXTRAITS DE PRESSE
SCHLUMBERGER (Jean) MADELEINE ET ANDRÉ GIDE.
Un vol. 256 p. in- 1double cour. Coll. blanche. 650 fr.0ex. num. sur hollande. 3.500 fr. (épuisé)160 ex. num. sur pur fil Lafuma Navarre. 1.800 fr.
PASSION
Un vol. 144 p. in- 1double cour. Coll. blanche. 390 fr.60 ex. num. sur pur fil Lafuma Navarre.1.200 fr.
.s. [Tel est le résumé] du volume de M. Schlumberger, courageux, je le répète,parce qu'il a «déstalinisé» son Gide.
Jean MARTEAU, La Tribune de Genève, 14 juillet 1956.
sur ce que fut la vie conjugale d'André Gide, Schlumberger nous apporte ledouble témoignage de la vérité et de l'amitié.
André ROUSSEAUX, Figaro Littéraire, 14 juillet 1956.
En même temps que cette mise au point et ce noble témoignage d'amitié, M. JeanSchlumberger fait paraître un mince recueil de nouvelles sous forme de lettresPassion, qui m'a donné cette semaine une grande joie d'esprit que je voudrais fairepartager à nos lecteurs.
Émile HENRIOT, Le Monde, 18 juillet 1956.
Fidèle ami de Gide, mais point jusqu'à l'aveuglement, M. Jean Schlumbergerentreprend avec beaucoup de talent et de sensibilité de redonner vigueur et véritéà l'image inexacte que l'auteur de Et nunc manet in te a laissée de sa femme. CeMadeleine et André Gide était un livre nécessaire.
Claude MAURIAC, Figaro, 18 juillet 1956.
Voici donc un livre qui rend caduques toutes les biographies de Gide.
R. M., Les Nouvelles Littéraires, 19 juillet 1956.
.Jean Schlumberger publie un ouvrage capital et définitif sur le couple que for-mèrent Madeleine et André Gide.
Jacques BRENNER, Paris-Normandie, 20 juillet 1956.
Le livre de Jean Schlumberger, André Gide l'eût écrit, avec le même tact, dansle même esprit, à l'égard de tout autre que lui.
Jean CAILLENS, Havre Libre, 31 juillet 1956.
Il y aurait bien d'autres choses à dire de ce livre sans mensonge, sans flatterie,sans complaisance pour personne il est de ceux qui nous aideront à mettre l'oeuvrede Gide et son personnage dans la juste lumière qu'il a cherchée toute sa vie.
Henri PETIT, Le Parisien Libéré, 21 août 1956.
Les futurs biographes ne pourront se passer de cette remarquable relation.
L'Express, 24 août 1956.
Le probe et sensible romancier d'Un Homme heureux et du Lion devenu vieux,l'exaltant essayiste de Plaisir à Corneille et des Dialogues avec le corps endormi,vient de faire une éclatante rentrée littéraire avec deux ouvrages un essai etun roman écrits d'une même encre, et consacrés au même objet la passion.
Pierre de BOISDEFFRE, Demain, 26 août 1956,
BULLETIN D'OCTOBRE 1956
ÉCHOS PROJETS
• Le sixième Prix Italia (« Oscareuropéen) a été décerné, le14 septembre,dans la catégorie dramatique, à La Composition de Calcul adaptation par JeanForest, et mise en ondes par Éléonore Cramer, d'un conte de Jacques Perret, quel'on trouvera dans le volume intitulé Objets perdus.
• Encyclopédie de la Pléiade.
M. Robert Fawtier, Membre de l'Institut, a présenté à l'Académie des Inscriptionset Belles-Lettres, au cours de la dernière séance de L'année 1955-1956, le Tome
de l'Histoire Universelle de l'Encyclopédie de la Pléiade.
Le troisième volume de l'Encyclopédie de la Pléiade paraîtra en librairie ennovembre. Ce sera le Tome Il de l'Histoire des Littératures, dirigée par RaymondQueneau.
Ce Tome sera consacré aux littératures occidentales, en entendant par là égale-ment les littératures de même origine qui se sont développées hors des frontièresnaturelles de l'Europe.
Les littératures ne sont pas classées suivant les familles linguistiques auxquelleselles appartiennent, mais en principe selon leur ordre d'apparition, ordre qui setrouve être également géographique. En effet, les plus anciennes ont pris naissancedans les îles de l'Extrême-Occident (Grande-Bretagne, Irlande et Islande), et lesplus récentes se situent à l'Est et au Sud-Est. Une place à part étant consacrée auxlittératures française et provençale, elles ne figureront que dans le Tome III.
Des chapitres préliminaires retracent l'évolution générale des littératures occi-dentales, depuis la création des littératures nationales jusqu'aux mouvementslittéraires les plus récents. Viennent ensuite quatre chapitres relatifs à la littératurelatine chrétienne et moderne. Puis Littératures Insulaires (islandaise, irlandaise,galloise, anglaise, anglaise des Dominions, anglaise des États-Unis) LittératuresPéninsulaires du Sud (espagnole, hispano-américaines, portugaise, brésilienne,catalane, italienne, néo-hellénique) Littératures Péninsulaires du Nord (danoise,norvégienne, suédoise, finnoise) Littératures Continentales du Nord (allemande,néerlandaise, flamande, frisone, yiddisch [à laquelle est rattachée l'israélienne],romanche); Littératures d'Europe Centrale (polonaise, tchèque, slovaque, sorabe,hongroise) Littératures Balkaniques (bulgare, serbe, croate, dalmate, slovène,albanaise, roumaine) Littératures d'U.R. S.S. (balte, russe, ukrainienne, biélo-russienne, carpathorusse). Un chapitre spécial est consacré aux littératures non-slaves d'U. R. S. S. nées depuis la Révolution de 1917.
L'ouvrage est complété par un index des noms propres, un index des titres, deuxtableaux synchroniques (l'un pour le présent volume, l'autre pour l'ensemble destrois tomes), un diagramme comparatif, une table de concordance entre les chapitresgénéraux et les monographies, une table alphabétique des littératures, une tableanalytique, un glossaire des genres littéraires. M. J.-M. Lambert a assuré l'établis-sement de ces tables et index avec l'aide de Mn\Durand-Dasté.
• Nouvelles Collections.
En octobre, paraîtra le troisième volume de la Collection Connaissance de l'Orient.Après les Psaumes du Pèlerin de Toukâram et les Contes de Pluie et de Lune, ceseront les Hymnes spéculatifs du Véda, traduits du sanskrit par Louis Renou dansune langue qui nous rappelle que la grandeur toujours coïncide avec la simplicité.Les dernières Rencontres Internationales de Genève auxquelles a participéEtiemble, directeur de la Collection, s'interrogeaient sur la part de la penséeorientale dans un humanisme à la mesure de l'homme actuel la publication enfrançais de cette somme poétique et religieuse, qui nous ouvre d"un ÇQUP l'Indeancienne et une partie de l'Inde moderne, arrive donc à son heure,
Extrait de la publication
BULLETIN D'OCTOBRE 1956
Pour la Musique.
Cette nouvelle collection sera dirigée par le compositeur Roland-Manuel, profes-seur au Conservatoire, dont l'émission Plaisir de la Musique est l'une des plusécoutées de la Radio française. Les personnalités les plus compétentes y signeront
.des études originales, spécialement écrites.Pour la Musique veut participer à l'effort qui, depuis une cinquantaine d'années,
tend adonnerala culture musicale sa juste place dans un humanisme complet.Son titre, emprunté à un livre de Léon-Paul Fargue, la place sous l'invocation
d'un poète dont le lyrisme s'apparente à ceux de Ravel et Debussy, au momentoù les Français retrouvaient le sens de leur musique et de la musique.
Une telle collection s'adresse aux lecteurs curieux de notions générales sur lesstyles, les écoles, les grands courants de la pensée musicale. Chaque volume seraillustré, accompagné d'une discographie et d'un index des noms et des ouvragescités, de manière à en faire un instrument detravail. Analyses, synthèses, bilanset perspectives nouvelles seront donc mis à la portée d'un public d'amateurs maisnon de spécialistes, à l'écart de la vulgarisation des monographies et de l'éruditionmusicologique.
Les deux premiers volumes7 qui doivent paraître en octobre, sont La Franceet la Musique occidentale, par Henry Barraud, et Le Lied romantique allemand,par Marcel Beaufils.
La collection Vocations, dirigée par Henri Mondor, de l'Académie Française,où ont déjà paru le Mallarmé Lycéen, d'Henri Mondor lui-même, La Jeunesse deLaennec, d'Édouard Rist, et le premier volume de La Jeunesse d'André Gide, parJean Delay, a inscrit à son programme du mois d'octobre Henri Poincaré ou laVocation souveraine, par André Bellivier.
La Bibliothèque Idéale, nouvelle collection dirigée par Robert Mallet, a pourbut d'offrir une synthèse aussi ^complète que possible des plus grands écrivainsfrançais et étrangers contemporains. Sa formule doit la différencier des collectionssimilaires. En effet, cette somme d'informations comportera des éléments quin'ont jusqu'à ce jour jamais été systématiquement réunis et exploités, par exemplele compte rendu analytique de chacun des ouvrages de l'écrivain.
Les livres, d'un format pratique, d'un prix peu élevé, seront abondammentillustrés. Ils seront signés par les critiques les plus qualifiés.
Parmi les premiers titres à paraître, citons Paul Claudel, par Stanislas FumetAndré Gide, par Yvonne Davet André Malraux, par Gilbert Sigaux; -AlbertCamus, par Jean-Claude Brisvillej; Kafka, par Marthe Robert Hemingway, parJohn Brown T.-E. Lawrence, par Roger Stéphane.
Dans la collection Littératures Soviétiques, dirigée par Aragon, où a été publiéeen juillet l'Introduction aux Littératures Soviétiques, va paraître en octobreBoukhara, traduit du tadjik par Paul Kolodkine et Serge Borodine.
0 Le Livre et la Scène.
La Comédie-Française donnera la première représentation de la nouvelle pièceen trois actes d'Henry de Montherlant Brocéliande, le 24 octobre. Publicationen librairie au mois de novembre. Le volume sera complété par un texte inédit deMontherlant L'Art et la Vie.
L'adaptation à la scène française, par Albert Camus, du roman dialogué de Faul-kner Requiem pour une Nonne, actuellement représentée au Théâtre des Mathu-rins, vient de paraître dans la collection Le Manteau d'Arlequin.
C'est dans la même collection que paraîtra Une Femme trop honnête, d'ArmandSalacrou, qui sera créée en novembre, au Théâtre Édouard VII,avec la mise en scènede Georges Vitaly, l'auteur ayant attendu deux ans la liberté de Mlle Sophie Des-marets, à quiil réserve le rôle principal. D'autre part, Histoire de Rire poursuitsa carrière au Théâtre Saint-Georges, et une autre pièce nouvelle de SalacrouLe Miroir, vient de commencer la sienne au Théâtre des Ambassadeurs. Enfin, la
Comédie-Française a décidé d'inscrire à son répertoire La Terre est ronde, mise en
Extrait de la publication
BULLETIN D'OCTOBRE 1956
scène par Jean Meyer, avec Henri Rollan dans le rôle de Savonarole créé par Dullin.A Bruxelles, le Théâtre du Parc annonce pour octobre des représentations deL'Archipel Lenoir.
Toujours au programme de la collection Le Manteau d'Arlequin (publicationsd'octobre) la nouvelle pièce de Schehadé, Histoire de Vasco, qui sera créée le15 octobre par la Compagnie Madeleine Renaud-Jean-Louis Barrault au Schau-spielhaus de Zurich, où sera également représenté Le Personnage combattant, deJean Vauthier et Aujourd'hui, première pièce de Michel Vinaver (le jeuneet brillant romancier de L'Objecteur), qui sera donnée aux Mardis de l'Œuvre,après avoir été créée, le 6 octobre, à Lyon, par le Théâtre de la Comédie.
Un roman de James Hadley Chase Traquenard (Série Noire), vient d'être adaptépour la scène. Représentations au Théâtre Charles de Rochefort, à Paris, à partirdu 17 octobre.
Quatre importantes reprises, dès l'ouverture de la saison théâtrale parisienneLes Oiseaux de Lune, de Marcel Aymé, à l'Atelier Le Mal court, d'Audiberti,chez Georges Vitaly au Théâtre La Bruyère L'Homme, la Bête et la Vertu,au Théâtre en Rond M. Le Trouhadec saisi par la Débauche, de Jules Romains,et La Machine à écrire, de Jean Cocteau, à la Comédie-Française.
Marguerite Duras a porté à la scène son roman Le Square, spectacle actuel duStudio des Champs-Elysées.
A Dublin, représentations de La Cantatrice chauve, d'Eugène Ionesco, par lePike Theatre.
Pour paraître en octobre, le Tome VII du Théâtre de Pirandello, comprenantLa Raison des Autres, le Bonnet du Fou, l'Étau, Bellavitu, Le Brevet (Version française deMarie-Anne Comnène.)
• Le Livre et la Radio.
La Marguerite, d'Armand Salacrou, sera diffusée prochainement en langue irlan-daise à Dublin, au poste Radio Eireann, et L'Inconnue d'Arras sera donnée par laTélévision belge.
0 Georges Friedmann, qui publie en octobre Le Travail en Miettes, a été élu
comme président pour la période 1956-1959 par l'Association Internationale deSociologie, au cours de son troisième Congrès mondial, qui vient de se tenir àAmsterdam.
• Traductions.
Les Enfants gâtés vont paraître en langue portugaise, à Sao Paulo. Dix traductionsde ce roman de Philippe Hériat avaient déjà paru antérieurement Danemark,Italie, Suède, Argentine (langue espagnole), Hollande, Tchécoslovaquie, deuxtraductions anglaises (Angleterre et États-Unis) et deux traductions allemandes,dont une en édition populaire.
Doucin, de Jean Dutourd, vient de paraître en Amérique chez Simon et Schuster,sous le titre Cinq Heures du matin, et les premières réactions de la critique sontéminemment favorables.
• Pour paraître en octobre, le nouveau roman d'Elsa Triolet Le Rendez-vousdes Étrangers. La femme qui vous attend au rendez-vous ne vous aime pas forcé-ment. Et il faut être deux pour aimer. Et votre pays, l'aimez-vous ?Si vous avezun pays si vous avez ce bonheur de naître et de mourir à la même place. Et sivous avez deux pays? et si vous n'avez pas de pays ? Ily a plus d'amours malheureuxqu'on ne croit. Même si le lieu du rendez-vous est beau, si votre cœur bat pourcelle que vous y rencontrez.
• Pour paraître en octobre, entre autres les romans de Gabriel Veraldi LeChasseur captif, de Jean Blanzat La Gartempe, et de Pierre Humbourg,Mort de Vieillesse; l'enquête de Serge Groussard Demain est là l'essai deRoger Caillois sur L'Incertitude qui vient des Rêves, et celui de Jean QuevalDe l'Angleterre la traduction, par Maurice-Edgar Coindreau, d'un volumede nouvelles de William Goyen Le Fantôme et la Chair et, dans la collec-tion «L'Air du. Temps », Visa pour l'Amérique du Sud, par Michel-Droit.
Extrait de la publication
LA NOUVELLE
NOUVELLE
Revue Française
VANINA
A Bona.
La plage de Sainte-Lucie-de-Siniscola est une longue
étendue de sable entre le rivage du golfe et des rives
d'eaux saumâtres où les roseaux prospèrent. Devant lesétangs, il y a de petites dunes pointues de chardonssecs et de coquillages d'autres derrière, plus élevées, et
puis une pinède de jeunes arbres que l'on planta naguère
pour fixer un sol tellement léger qu'il se mouvait à tous
les coups de vent. Quelques eucalyptus, apport nouvel
aussi, ont poussé démesurément au-dessus des pins qui,
d'être trop serrés, s'étiolent, des pistachiers, des arbou-
siers, des pauvres myrtes que l'on trouve en tous lieux
de la Sardaigne, île où rien n'existe dans la faune et la
flore qui ne soit menu ou rabougri en comparaison avec
les espèces de la grande terre.
Des algues en masses, que la tempête arracha des her-
biers et que les vagues roulèrent, hors du sable où elles
sont contenues font paraître des touffes, noires ou vertes
sous l'eau, blanchies par le soleil ailleurs. Elles longent1
Extrait de la publication
LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
la plage sur plusieurs kilomètres, fournies avec plus oumoins d'abondance comme du poil sur le corps d'une fille
monstrueuse, et elles répandent une odeur forte, qui n'estpas désagréable cependant. Entre les roseaux, quandl'autre bord est accessible, il a des bois flottés, des racines
aux formes curieusement humaines ou bestiales, divers
débris comme des ordures. Un rapport profond et trouble
ne manque pas de s'établir, pour un esprit sensible à la
nature des choses, entre la violente pureté marine quihabite l'eau du golfe, saturée de sel, et la corruption unpeu sournoise de l'eau douce-amère des étangs, qui vajusqu'à puer vraiment dans les bras morts, où elle est
couverte d'une mousse jaune, aussi lourde que du cuir etdont on ne sait plus si c'est écume ou végétation.
Toute nature est un sanctuaire, suivant que l'onregarde c'est-à-dire idée de création mise à part
qu'elle est habitée par un dieu (ou plusieurs). Ici, le dieune saurait être que Pan.
Vanina était depuis trois jours dans ce domainepanique.
Sur le sable allongée, la jeune fille avait couvert son
visage d'un coin de son peignoir, comme on dit que, deleur manteau, faisaient les empereurs, après la batailleperdue (retraite coupée), pour se remettre entièrement àla discrétion du vainqueur et attendre que celui-ci les
tuât ou les chargeât de chaînes. Respirant par le canal
d'un pli qu'elle avait ménagé dans le tissu éponge (carelle était soigneuse de ces riens que savent les filles, qui
aiment à machiner tous les simples détails de la vie),elle pensait à l'empereur vaincu, séparait l'une del'autre ses jambes afin de les mieux offrir au soleil. Ellepensait aussi à la captivité des reines de légende en
Orient et, cherchant la cause de cette pensée, elle accu-sait l'odeur de l'huile dont elle s'était enduite à profu-sion pour défendre sa peau contre les brûlures aux pre-miers jours de bain, odeur dans laquelle l'enfermait
VANINA
son capuchon improvisé comme à l'intérieur d'une bullede gaz. Il y avait bien assez de miel, de noyau amer et de
musc au fond de cette odeur-là pour évoquer le souk oula bergerie, et, avec un filet de sueur, les mains de Vanina
lui servant de coussin, paumes à plat sous la nuque, leharem n'était pas loin.
Presque midi. Pas de quoi s'étonner si les rayons à laverticale avaient changé le peignoir en gril. Et, malgrél'huile de Chaldée, que sa transpiration d'ailleurs avaitdiluée, elle sentait à l'arrondi des épaules et au sommetdes cuisses un picotement de mauvais augure. Si elle nebougeait pas, elle risquait assurément un coup de soleil,et de souffrir ce soir, et de peler aux jours suivants elle
risquait d'être enlaidie de ces plaies affreuses qu'elleavait vues souvent à des peaux d'Anglaises ou de Nor-végiennes. Elle s'assit, laissant que retombât le manteaude l'imperator, respira fortement pour rétablir le cours dusang. Rentrée dans la vie, elle toucha le bras de la grandefille qui reposait à son côté, étendue sur le ventre, commeune chienne.
« Juliette, dit-elle, réveille-toi. Il est tard. Allons dansl'eau. »
I/a dormeuse s'étira, sans trop de bonne grâce, avantde se tourner. Charpentée plus rudement que Vanina,elle avait des jambes en proportion moins longues queles siennes, une taille beaucoup moins déliée, des brasmoins fins, peu de gorge sur un buste de garçon, lescheveux coupés très courts et qui allaient du châtain aujaune et au roux comme une tête de bouleau en automne,
mais de sa blancheur première il n'y avait plus rien,car elle rougissait au soleil, ou se couvrait d'éphélides,sans vraiment brunir. Quand, à quatre pattes, elle mar-cha vers la mer, jouant aussi à ne pas fermer les yeux, nicligner, bravant des reflets qui auraient aveuglé touteautre personne de l'espèce septentrionale, dont elle fai-
sait un joli spécimen, ses pupilles prirent la couleur
Extrait de la publication
LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
même de l'eau près du bord, avec une transparence telle-
ment parfaite que l'on eût pensé voir le petit gravier dufond.
Par contraste avec le sol brûlant, la mer leur parut
glacée quand l'eau toucha leurs pieds, et elles s'arrê-tèrent avant d'avoir été mouillées plus haut que lesgenoux, si brutalement le froid les avait saisies, si vite il
s'était glissé en elles et insinué, paralysant, jusqu'aucoeur.
Vanina, qui, tout de suite, avait devancé sa compagned'une longueur ou quasiment, songeait que le rivage,déjà lointain, reculait derrière elle à mesure qu'elle allaitet que le fond aussi s'éloignait elle se réjouissait à l'idéeque les mouvements de ses bras et que le battementcontinu de ses pieds approfondissaient la mer à chaqueinstant davantage au-dessous de son corps. Heureuse dene voir devant elle, autour d'elle, que le brillant horizonmarin, elle nageait de plus en plus vite, et elle sentaitl'eau se faire de plus en plus dure sous son ventre et
contre sa poitrine, elle l'entendait bruire en glissant sur le
bonnet qui couvrait ses oreilles, elle aspirait son parfumviolent, elle la saisissait dans ses paumes raides, elle la
rejetait en arrière, vers Juliette, d'une grande pousséesouveraine. Ce n'était pas la moindre part de sa joieque de constater qu'elle ne pensait à rien qu'à cela etde savoir que sa pensée diminuait, s'amenuiserait encore,
jusqu'à être seulement connaissance de l'effort et sensa-
tion pure. Couchée comme sur un lit où elle eût enfoui le
visage et se fût bercée, ses joues entraient dans l'eau,
puis s'exposaient au soleil, passant du froid au chaud
selon qu'elle penchait d'un côté ou de l'autre.
Un peu plus tard, elle s'entendit appeler« Vanina, criait-on, arrête-toiI Nous sommes au
large. Les courants nous empêcheront de revenir. »
« Le large », « les courants » paroles magiques à lafaçon de « golfe », « palme », « cirque », « statue », « devin »
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VANINA
ou « migrateur » traversant le caoutchouc du bonnet,elles émurent la mémoire assoupie de la nageuse, luirendirent le sentiment du passé, l'appréhension du futur.Elle donna un coup de jarrets en ciseaux qui la fitjaillir àmi-corps au-dessus de la grande soie étincelante et,levant les bras, joignant les mains, elle se laissa coulerdans un tourbillon de bulles. Les yeux ouverts, malgré la
morsure du sel, elle vit un bras fendre l'eau devant une
forme claire qui était le flanc de Juliette, et elle res-sortit à côté d'elle en crevant la surface d'une pirouette,
nimbée de mille gouttes.
Alors les deux jeunes filles tinrent des propos de bainelles dirent de ces choses simples qu'il est doux de se direentre amies, quand la mer est bonne, quand le soleilbrûle. Elles se mirent sur le dos et, sans plus faire aucun
mouvement que du bout des pieds, le moins qui fûtnécessaire, elles flottèrent l'une près de l'autre ainsi que
des navires fraternels, qui auraient stoppé leurs ma-chines, ou baissé leurs voiles, pour dériver ensemble
pendant le cours d'unejournée paisible.Dans cette position horizontale où l'homme, regar-
dant le ciel, coïncide avec la limite de l'air et de la mer, il
semble qu'il devrait, comme par un couteau, être tran-ché au fil de la connaissance simultanée du froid et du
chaud, se dédoubler en quelque façon suivant la ligne departage élémentaire. Mais c'est le chaud, généralement,qui est le plus fort. Plongées dans l'eau froide, sauf ce quide leur corps affleurait à la surface, les baigneusesn'avaient conscience que du soleil, grande roue écheve-
lée que leurs yeux éblouis rapprochaient d'elles.« On dirait qu'il va se jeter sur nous comme un tau-
reau, dit Vanina. Cache-toi, Juliette. C'est ton maillot
rouge qui l'attire. »Elle-même n'avait qu'un léger tissu blanc qui allait
bien à la peau brune. Deux pièces d'un coton très fin quine l'empêchait pas de se sentir nue, ni de le paraître
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LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
sans trop contrevenir aux lois. Et les rayons jouaient àtravers cela aussi librement que si elle avait porté de lamousseline de verre.
« Où me cacher ? Si tu veux, dit l'autre, je vais enle-ver mon costume. »
Elle fit glisser une épaulette jusqu'au coude, se déli-vra, un bras après l'autre, offrit sa gorge pâle au feu duciel. Elle aurait continué, rabattant son maillot au
risque de le voir sombrer dans les profondeurs, si Vanina,laquelle se méfiait un peu des lorgnettes des carabi-niers (qui sont, comme tous les policiers, toujours àl'affût de l'innocence), ne l'eût priée, mais en riant, d'êtremoins impudique.
De ce rappel à l'ordre et du geste irrespectueux, ellesrirent ensemble, et elles furent heureuses comme des
enfants, comme de jeunes chats mais sur un tapis sec.Le rivage était très loin. Des oiseaux passaient, plongeantparfois. On voyait d'eux un ventre duveté.
Hors de l'eau, vrai, il faisait encore plus chaud
qu'avant le bain. La fraîcheur qui s'attache à la peaumouillée n'avait pas duré trois minutes, et elles étaient
déjà toutes sèches, poudrées de sel qui leur donnait despicotements. Juliette était sur le dos, elle avait refermé
les yeux, elle goûtait la torpeur de se laisser fondre dansle feu du ciel et gagner par un sommeil qui est à celui de lanuit ce que le blanc, ou le rouge, est au noir, mais
Vanina, couchée sur le ventre à côté de son amie, pourlutter contre cet assoupissement qui lui avait valunaguère de cuisants réveils et des brûlures persistantes,regardait, pensait (attentive à ce qu'elle voyait), cher-chait à maintenir sa sensibilité, à l'accroître autant quepossible par la contemplation des plus petits détails. Descicindèles chassaient, que Vanina suivait des yeux avecune amitié curieuse. En Suisse, elle avait observé des
insectes frères de ceux-là, mais qui avaient les élytresd'un vert vif avec des taches blanches, au lieu du brun
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VANINA
mordoré, ponctué sans différence, de l'espèce méditerra-
néenne. Procédant par marches rapides et courtes envo-lées, la petite bête féroce explorait les ravinements du
sable et, quand elle avait saisi dans ses mandibules un
moucheron, elle en exprimait le suc, puis rejetait, d'un
coup de tête, la dépouille vidée. Vanina fit l'expérienced'étourdir une mouche et de lui froisser les ailes, de la
lancer devant une cicindèle proche, qui s'en emparaaussitôt. Alors la jeune fille, ravie, chercha d'autres
mouches autour d'elle, des moustiques, des moucherons
ou des puces de mer, pour fournir au jeu qu'elle avait
inventé, passionnant comme une chasse au faucon.
« I*es cicindèles sont de beaux êtres dévorants, pen-sait-elle. Je donne des proies aux dévorants. »
Pour ramasser un nombre suffisant de ces proies,
qu'elle enverrait au carnage, Vanina se tournait à droite
et à gauche, passait le bras sur Juliette immobile, fouil-
lait le sable avec des manières de bambin qui creuse un
tunnel ou de chien joyeux qui déterre. Elle n'aperçut
pas tout de suite un jeune homme qui s'était mis non
loin et qui l'observait. Quand elle le vit, d'abord, ellecessa de jouer et feignit de s'intéresser à des nageurs,
un peu confuse, à son âge, de s'être laissé prendre à faire
la gamine. Car le sérieux de son amusement lui avait
échappé sitôt qu'elle s'était vue par l'œil d'autrui.
Après un moment, pendant lequel elle s'efforça de se
tenir tranquille, elle regarda de nouveau et vit que le
jeune homme la regardait encore. Mais il la regardait sans
lui sourire, à la différence de ce que faisaient les hommes,
en général. Sans doute, il n'avait pas cessé de la regar-
der depuis le premier coup d'oeil. Elle pensa qu'il était
beau, elle se sentit heureuse d'être regardée. Elle pensa
aussi que le jeu des cicindèles mettait ses gestes en
valeur, et toute sa personne, et qu'il fallait chercher
d'autres mouches, les attraper, les lancer devant elle au
moins pour se donner du mouvement et ne pas inter-
I,A NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
rompre le spectacle, sinon pour un jeu auquel elle ne
croyait plus. Et puis elle lui montrerait ainsi qu'elle
n'avait pas honte (quand elle l'avait, au contraire) dejouer sous son regard.
Par défi, elle osa marcher (non plus d'un mètre cepen-dant) vers lui à quatre pattes, sachant que sa gorge
n'avait pas à craindre l'épreuve. Elle fut excessive,comme elle s'était promis de l'être, et, ensuite, elle
regretta de l'avoir été. Il la regardait toujours, grave-ment.
Elle bouscula Juliette, qui protesta faiblement, ouvrit
les yeux et s'inquiéta de l'heure.« Il est l'heure de rentrer, dit Vanina, sans avoir tiré
sa montre du sac. Partons. J'ai faim. »
Elle se leva, fit lever son amie, qui bâillait, lui jeta
un peignoir sur le dos et la poussa en avant, suivant à
quelques pas après avoir ajusté ses sandales.
Quand elle fut à côté du jeune homme, que se passa-t-il
dans sa tête ? Elle n'aurait su l'expliquer tant cela fut
rapide, imprévu aussi, mais
« A trois heures, cet après-midi, dans la pinède au sud
du village, lui dit-elle en se baissant vite. J'y serai. »
Et elle rejoignit l'autre, qui ne s'était aperçue de rien.
Juliette et Vanina partageaient avec une pauvre
famille un logement de trois pièces, abri plutôt, d'ail-
leurs, que maison véritable. A travers le toit de feuil-
lage et de terre sèche, le jour passait au petit matin,mais les jeunes filles, un soir d'orage, eurent la bonne sur-
prise de voir que la pluie n'y passait pas, grâce à l'art du
couvreur ou parce qu'il ne pleut pas beaucoup ni sou-vent à Sainte-Lucie-de-Siniscola. Elles dormaient dans
deux chambres étroites, qu'on leur avait louées pour
quelques billets de mille lires. Un pêcheur de langoustes,
Francesco Carone, sa femme, Angela, et leur petite fille
dormaient dans la troisième, où l'on remuait à peineentre le lit, le berceau, la commode et les murs. Ce n'est
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VANINA
guère ensemble qu'ils dormaient, car lui se levait avant
l'aube, chaque nuit, pour relever les nasses que lesbarques avaient mouillées la veille. Et il rentrait tard
dans l'après-midi. S'il rentrait tôt, forcé par le mau-
vais temps, les paniers étaient restés au fond l'on
pouvait au mieux compter sur une poignée de calamars,
pris au filet pendant les premières heures.
Quand elles avaient débarqué à Olbia, une semaine
plus tôt, c'était aux premières heures de la matinée. Une
lumière un peu rose et très pure tombait obliquement sur
les îlots et les écueils éparpillés d'un bout à l'autre de labaie, et le calme était absolu dans le ciel et sur l'eau. Il
flottait un air tout neuf, une splendeur ravissante. Elles
avaient laissé la cohue descendre du blanc paquebot,
puis Vanina, non sans quelque émotion à l'idée de la
manœuvre difficile, avait engagé sa petite voiture (son
« souriceau », comme elle disait) sur la passerelle qui unis-sait au quai le garage du navire. A terre, on leur avait
demandé par quel singulier caprice elles étaient venues
en Sardaigne, et l'homme de la pompe à essence leur
avait conseillé fortement de repartir au plus vite, de ne
pas s'aventurer, surtout, dans le sud de l'île, pays de
bandits selon lui (qui devait être du nord). Vaninan'ayant voulu rien écouter, ni les propos menaçants de
cet homme, ni les craintes avouées par Juliette, elles
avaient pris la direction redoutable, sur une route
poussiéreuse, caillouteuse et tellement défoncée que le
souriceau, conduit pourtant à l'allure la plus réduite,
gémissait par tous ses joints, secouait ses tôles et faisaittout le bruit d'une carriole de laitier.
Il n'avait pas été difficile à la jeune fille d'obtenir
de son oncle et tuteur, le comte Marino Mari, congé
d'aller avec Juliette passer deux mois d'été en Sardaigne.
La petite voiture qui servait pourtant à visiter les fer-miers, le peu d'argent nécessaire au voyage, on nelui avait
pas marchandé cela non plus. Sur l'idée, seulement, de ce
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voyage, on avait fait quelques observations. Comment,diantre! lui était-elle venue ? « Par hasard », avait
répondu Vanina, qui ne mentait pas. En regardant lacarte, elle s'était sentie curieuse de cette grande île
perdue loin du continent, et puis une amie lui avaitmontré des boucles d'oreilles comme en ont les femmes de
là-bas un anneau d'or, avec un pendant en forme de
goutte qui s'agite au-dessous d'un joli coq en filigrane.Oui, les boucles d'oreilles, le coq surtout, avaient achevé
de la persuader qu'elle devait voir la Sardaigne.
Juliette Combourgeois se trouvait dans la même classe
que Vanina au collège de Lausanne où toutes les deux,
avec un retard qu'elles ne cherchaient point à abréger,« finissaient leurs études », et elle y était sa meilleure amie
(autant qu'il se peut dire, si Vanina se glorifiait en sonfor intérieur de n'avoir jamais eu, se promettait de
n'avoir jamais, une amie intime). Le fait est qu'ellesallaient souvent au cinéma ensemble, ou bien manger des
gâteaux crémeux (Juliette avidement, Vanina non sans
lassitude) dans les pâtisseries à devantures vertes etroses. Elles allaient aussi flâner au bord du lac, à Ouchy,
où Juliette se laissait entraîner par Vanina, que les
cadettes ennuyaient et qui aimait un cygne. Ainsi, parune habitude de décider et d'être suivie, l'Italienne avait
invité la Vaudoise à passer les vacances dans son pays.
Il serait oiseux (quoique possible, assurément) de
remonter plus loin dans le temps. Où s'arrêter, d'ail-
leurs, quand on remonte (et quand on raconte) ? Toutse tient, et si minutieusement que j'inspecterais ce qui
était en train de naître, dix-huit ans auparavant, dans leventre de la comtesse I,idia Mari, belle-sœur du comte
Marino et morte en compagnie de son époux au cours de
sanglants événements qui défrayèrent la chronique de
l'après-guerre, mais dont je ne veux pas maintenant
m'inquiéter, vous ne seriez pas encore renseignés à suf-fisance sur l'héroïne de cette histoire la contessina
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