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9/7/2014 Le Soir 17h
http://jn.lesoir.be/#/article/156214 1/2
La guerre des cerveaux est lancée
© DR
VIOLAINE JADOUL
Plus de 400 scientifiques ont exprimé leur opposition au gigantesque projet financé par
l’Union européenne qui vise à modéliser le cerveau humain. Leur argument ? Nous n’en
savons pas encore assez sur ce super-ordinateur qui nous gouverne.
ls sont 450 et leur nombre ne cesse d’augmenter depuis lundi. Plus de 400 scientifiques ont signé la lettre
ouverte critiquant le gigantesque projet financé par l’Union européenne qui vise à modéliser le cerveau
humain d’ici à 2024. Créer un cerveau virtuel en somme dans lequel il serait possible de naviguer. La Google
Maps du cerveau… De quoi, selon les auteurs du projet, faire des avancées aux niveaux médical et
thérapeutique.
I
Le projet est attirant mais selon les signataires, il est également utopique. En effet, il reste trop d’inconnues
aujourd’hui concernant ce méga ordinateur qui gouverne le moindre de nos gestes. Pour reprendre
l’analogie avec Google Maps, c’est un peu comme si Google avait décidé de lancer son outil alors qu’il n’avait
encore cartographié qu’une partie de la planète…
, explique Pierre-Alexandre Klein,
doctorant à l’UCL et signataire de la lettre ouverte.
« Il y a beaucoup de choses qu’on a tendance à ne pas inclure dans les modèles du cerveau. Ainsi, les
astrocytes, qui nourrissent les neurones, ne sont jamais pris en compte »
, poursuit Pierre-Alexandre
Klein. Un point de vue partagé par Rufin Vogels, professeur à la KUL et également signataire de la lettre
ouverte :
« Modéliser le cerveau devra être fait un jour mais il est encore trop tôt. Nos connaissances sont beaucoup
trop maigres. Avec ce projet-ci, ils parviendront à optimiser des algorithmes »
« Ils veulent modéliser le cerveau mais il nous manque encore énormément d’informations. Nous
devons encore mener des expériences, tant sur les animaux que sur les humains pour appréhender cet
organe ».
Un projet limité aux aspects technologiquesLe cerveau est aujourd’hui étudié dans de nombreux champs : la psychologie, la génétique, la biologie
cellulaire et moléculaire. Pour les auteurs de la lettre, le projet met de côté tous ces aspects pour n’être que
technologique.
Et c’est là le reproche principal fait au projet par les signataires : son étroitesse ! Un projet ultra-précis doté
d’un budget hors norme : 1 milliard d’euros ! C’est la somme qui va être octroyée à ce projet nommé Human
Brain Project, une initiative promue par l’École Polytechnique de Lausanne, en Suisse. Et coordonnée par le
Professeur Henry Markram.
En réalité, ce sont 500 millions d’euros de fonds européens sur une période de dix ans qui est promise au
projet. À condition que les États ou l’industrie cofinancent le projet à la même hauteur.
« Un problème de contenu du projet »Les scientifiques signataires de la lettre proviennent d’Allemagne, de Suisse, du Royaume-Uni, de Belgique
mais aussi des États-Unis, du Japon ou d’Inde. Les institutions auxquelles ils appartiennent sont de
9/7/2014 Le Soir 17h
http://jn.lesoir.be/#/article/156214 2/2
référence : CNRS, Institut Pasteur, Oxford ou Cambridge. Pour n’en citer qu’une partie.
Les auteurs de la lettre ouverte demandent à la Commission de
du projet. Et que ce réexamen soit fait par des experts indépendants.
Dans la plus grande transparence. Sans cela, ils l’assurent, le projet mènera à « un échec ». Et cela sera un
énorme gâchis financier. En tout cas, sans réaction de la Commission, eux, boycotteront le projet. Or,
Markram ne peut pas mener ce projet seul. Il a besoin de partenaires.
« réexaminer avec attention à la fois la
dimension scientifique et la gestion »
, note le Pr Vogels.
« Il aurait peut-être été plus judicieux de distribuer cette somme d’argent à des plus petits projets plus
concrets »
Et à ceux qui affirment que c’est une guerre de clochers et de gens frustrés de ne pas avoir été eux-mêmes
financés, le Pr Vogels répond :
. Pour sa part, Pierre-Alexandre Klein souligne que
.
« Ce n’est pas seulement une question d’argent, c’est un problème de contenu
du projet » « de nombreux signataires sont des pontes en
neurosciences. Ils ont déjà leurs financements. Ils n’ont pas besoin de cela »
Interrogé par le site internet de la revue , Markram n’a pas semblé impressionné par le nombre de
signataires. Il affirme qu’il pourrait en récolter des milliers en soutien à son projet.
.
Science
« Et alors ? Qu’allons-
nous faire ? Une guerre de signatures ? C’est idiot. Ça n’a aucun sens »
La guerre des cerveaux semble pourtant bien lancée.