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Apprentissage d une_diagonale_de_kabat

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Page 1: Apprentissage d une_diagonale_de_kabat

MOTS CLÉS

Apprentissage moteurFacilitation neuromusculaire

KabatPédagogie

Renforcement musculaire

La méthode Kabatse propose d’aider

à la reprogrammationdes gestes en utilisant

des stimulationssensoriellesfacilitantes

APPRENTISSAGE D’UNE DIAGONALEDE KABATJacques FRAUDET1

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n° 474février 2007KS

DANS la méthode de Kabat, l’apprentissagemoteur trouve une place prépondérante.

L’objectif de cet apprentissage vise la repro-grammation d’un schéma moteur complexe tri-dimentionnel selon deux composantes [1, 2] :

– l’activité musculaire, c’est-à-dire réappren-dre aux muscles à travailler ensemble (no-tion de travail en chaîne), de façon coordon-née (chronologie, intensité de la contraction,couplage agoniste antagoniste...), lors d’ungeste complexe (mettant en jeu plusieursarticulations), mais néanmoins inclus dansnotre programme moteur ;

– le déplacement dans l’espace des différentssegments osseux : redonner à l’apprenant,cette sensation du mouvement du corps oud’un membre (ou segment de membre) dansles trois plans de l’espace et dans des direc-tions fonctionnelles.

TECHNIQUES PÉDAGOGIQESPOUR FAIRE EXÉCUTER

CORRECTEMENTUN MOUVEMENT COMPLEXE

EN KABAT

Installation

Les exercices se pratiquent le plus souvent endécubitus.

Il faut expliquer au patient l’obligation dedénuder les zones du corps qui seront encontact avec les mains du thérapeute.

Explication préalable de l’exercice

Il est préférable d’expliquer simplement aupatient, avant l’exercice, que le type de mouve-ment attendu est certainement nouveau pourlui, différent de ce qu’il a pu faire précédemment(si c’est le cas) et peut-être complexe (notion dedirection diagonale, de rotation et de sollicita-tion de plusieurs articulations en même temps).

Mais, en revanche, il faut aiguiser sa curiositéen lui vantant les avantages d’une telleméthode afin qu’il soit vite motivé. Il faut lesensibiliser sur la nécessaire attention qu’ildoit porter aux sensations cutanées qu’il vapercevoir et qui vont guider le mouvement.

Mouvement préalable

Pour certains patients, il est préférable, avantd’entamer la séance, de faire plusieurs foispassivement le mouvement, à des vitesses dif-férentes et en leur demandant de regarder leurmembre au cours du déplacement.

En effet, un certain nombre de patients négli-gent un peu la guidance sensitive et déclen-

1 Kinésithérapeute cadre de SantéCentre hospitalier de Saint-Malo (35)

Pratiqueskinésithérapiques

Les limitesde l’apprentissage

Perspectiveset avenir

Rappelsthéoriques

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chent eux-mêmes le mouvement qu’ils croient être le bon(et qui, généralement, ne l’est pas).

Il arrive malgré tout pour certains patients un peu réfrac-taires (il en existe...) que cette simulation passive ne suf-fise pas et que le mouvement obtenu reste médiocre. Onpeut alors leur proposer une cible à atteindre (la pocheopposée de leur pantalon, un tableau sur le mur...) pourfaciliter la direction du mouvement.

Le choix des mots(fig. 1 et 2)

Les ordres verbaux et leur tonalité ont une grande impor-tance en Kabat. Ils vont avoir pour effet de stimuler l’effortdu patient et de guider le mouvement.

Il faut donc que le choix des mots soit juste, simple etdonc tout à fait compréhensible par le patient : “Tendez lecoude !” peut ne rien vouloir dire pour lui ; il vaut mieuxdire “Garder le coude bien droit”. “Pliez la cheville !” peutne pas être compris ; dites plutôt “Relevez le pied !”, demême que “Tendez les doigts !” qu’il faudrait peut-êtremieux remplacer par “Ouvrez la main !”.

Il ne suffit pas non plus de répéter sans cesse : “Poussez !Poussez ! Poussez !” pour faciliter la qualité de la réponsemusculaire. Il faut bien sûr que le patient comprenne qu’ildoit pousser, mais il est préférable de lui dire sur quoi ildoit le faire : “Poussez sur ma main” est une invitationplus précise.

Pour compléter cette indication, ou pour corriger le mou-vement (si l’on sent qu’il dévie de sa trajectoire prévue) onpeut faire bouger sa main sur la peau du patient (sans laquitter) pour relancer l’information sensitive direction-nelle verbale.

On peut également en cours d’exercice, modifier ou préci-ser l’ordre verbal pour compléter la localisation d’unepoussée : “Poussez plus sur ma main !” ou “Tournezplus”, ou “Serrez la main plus fort !”.

Lorsque l’on pratique des techniques “d’inversions len-tes” (mouvements aller-retour), on peut simplifier les or-dres en utilisant les expressions “Tirez !” (lorsque lemembre se rapproche de l’axe du corps), et “Poussez !”(lorsqu’il s’en éloigne). Ces deux expressions en alter-nance sont très stimulantes pour le patient, car elles sontsimples, suffisamment précises et ne l’embarrassent plusd’autres informations directionnelles qui ne sont plusnécessaires (au stade des inversions lentes, puisque cel-les-ci supposent un “apprentissage” préalable par la pra-tique des pivots simples de nombreuses fois).

L’écoute des réactions du corps

Pour arriver à une qualité du mouvement garante d’uneréponse musculaire adaptée, il faut non seulement bienexpliquer ce que l’on veut obtenir mais être capable demodifier ou compléter au cours du mouvement, si néces-saire, les stimulations (verbales ou tactiles, comme vuprécédemment) qui facilitent ce mouvement (feedback).

APPRENTISSAGE D’UNE DIAGONALE DE KABAT

▲ Figure 1Position de départ de la diagonale B-A

Figure 2 ▲Position d’arrivée de la diagonale B-A▲

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Il ne faut pas hésiter également à “aider” un patient qui adu mal à répondre correctement aux diverses stimula-tions, en refaisant en passif le mouvement plusieurs fois,afin de lui permettre de mieux le ressentir.

La résistance

C’est un élément important de cette méthode. Il faut l’uti-liser de façon progressive, pour ne pas décourager le pa-tient en lui proposant d’emblée un effort trop important.

Cette résistance doit être asservie à la force du patient cequi demande de la part du thérapeute une vigilance per-manente des réactions du patient (exemple : si le mouve-ment obtenu est trop long, c’est certainement que larésistance proposée est trop forte).

La patience

Certains patients peuvent mettre un certain temps à exé-cuter de façon correcte ces mouvements complexesKabat. Il faut en avoir conscience et accepter de leur don-ner ce temps.

La réussite dépend aussi de la faculté du thérapeute à seremettre en cause sur les raisons de cette difficulté. Il nefaut pas penser que le patient est le seul fautif (même sicertains sont moins “doués” que d’autres). Il est néces-saire comme nous l’avons dit précédemment de s’adapteraux capacités individuelles de nos patients en s’assurantque toutes nos stimulations sont bien perçues et que lepatient les comprend bien.

Le cas échéant, il peut être utile de repartir à zéro dansl’explication ou dans le dosage des résistances.

Les commentaires du patient

Le patient qui vient de faire un effort physique et deconcentration (comme c’est le cas pour un exercice deKabat) pour satisfaire à la demande de “son kiné” appré-cie quelques compliments mais aussi qu’on lui demanded’exprimer ce qu’il a ressenti au cours de cet exercicecomplexe : quelles sont les sensations particulières per-çues ? Qu’a-t-il trouvé de différent par rapport à un exer-cice plus classique ? Apprécie-t-il ce type d’exercice ?...

DISCUSSION SUR LA MÉTHODE KABATET L’APPRENTISSAGE

Apprentissage

Dans la méthode, il y a bien multiplication des contrôlesarticulaires, on peut donc parler de nécessité d’appren-tissage.

Kabat et notion de temps

Si pour un réel apprentissage, c’est-à-dire une mémorisa-tion du geste, la notion de durée (fréquence des répéti-tions du geste) est importante. On ne peut pas dire quedans la méthode Kabat cette notion soit primordiale, caron sait que le nombre de mises en situation est faible :quelques mouvements par séance, une ou 2 séances parjour, et ce pendant de nombreuses semaines seulement.

Quand on parle de durée d’apprentissage pour un geste(sportif par exemple), on envisage des durées souventbeaucoup plus longues : des heures de travail par jour etplusieurs jours par semaine, pendant des semaines.

Kabat et notion d’environnement

Environnement matériel

Ce n’est pas un élément essentiel pour la méthode. Lepatient est dans une position peu habituelle dans sonfonctionnement gestuel : en décubitus, sur une table derééducation, sans repère facilitant.

Environnement humain

Beaucoup plus intéressant, car le soignant prenant encharge le patient va s’évertuer à lui faciliter la tâche par satechnicité, sa vigilance, et ses encouragements.

Kabat et notion de représentation

Il est assez souvent conseillé, pour certain sujet (surprispar la complexité apparente du geste), de faire une oudeux fois le mouvement passivement afin que le patientse représente mentalement le déplacement de son mem-bre, ce qui peut améliorer la qualité de sa réalisation.

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APPRENTISSAGE D’UNE DIAGONALE DE KABAT

Kabat et notion de couplage(approche émergente de l’environnement)

Couplage perception-action

• 1er postulat : l’environnement appelle certaines actions.• C’est tout à fait vrai en Kabat en ce qui concerne l’in-

fluence de l’environnement humain puisque les explica-tions, les corrections, les encouragements de la part duthérapeute vont permettre au patient d’améliorer saqualité du mouvement recherché et d’augmenter samotivation (élément propice à la performance).

• Cela paraît beaucoup moins vrai en ce qui concerne l’en-vironnement matériel, puisqu’il ne répond en rien à unesituation facilitante.

• 2e postulat : le comportement moteur est un phéno-mène émergent d’un réseau de contraintes liées.

• C’est un des principes de la méthode Kabat : la “facilita-tion”. L’action est induite directement par son couplageavec un certain nombre de stimulations ou contraintesqui vont progressivement permettre l’amélioration de lacoordination (qualité) du geste (notion d’adaptation).

Kabat et notion d’adaptation

“L’apprentissage entraîne, à partir de l’expérience anté-rieure, dans une situation proche et de l’expérience acquisedans la situation actuelle, une modification adaptative ducomportement (amélioration des habiletés motrices)”.

Approche cognitiviste et Kabat

“Connaître le monde extérieur pour s’y adapter en y pré-levant les informations qu’il contient”.

En Kabat, nous sommes plutôt dans cette approche cogni-tiviste, puisque l’amélioration du geste se fait à partird’une analyse précise des stimulations, ce qui amène uneréponse adaptée à celles-ci. Ainsi, il peut y avoir unemémorisation des différents paramètres composant lemouvement (direction, amplitude vitesse) et du pro-gramme moteur en découlant (mouvement “global”, dansles trois plans de l’espace).

Ici, l’expérience acquise lors des exercices répétés dansces mouvements Kabat, remet à jour l’expérience anté-rieure, puisqu’un des objectifs de la méthode est de relan-cer les programmes gestuels (activité musculaire, dépla-

cement articulaire), fonctionnels par une rééducation dite“globale”.

Pour reprogrammer ces gestes et améliorer leur coordina-tion, il faut passer par une phase de réapprentissage néces-sitant l’utilisation d’un certain nombre d’informations sen-sorielles qui vont permettre au patient de mieux ressentir etde mémoriser l’enchaînement des différents déplacementssegmentaires et des contractions musculaires.

Dans la notion d’adaptation, il y a l’idée d’amélioration dela performance antérieure (plus habile, plus rapide, plusstable). En ce qui concerne la méthode de Kabat, si l’onest généralement dans un objectif assez proche (rendrel’apprenant plus performant qu’avant), nous ne visons leplus souvent qu’à atteindre un niveau de performancesensiblement égal à celui d’avant l’accident (ou maladie),ce qui est différent de l’apprentissage d’un geste sportif.

Kabat et notion d’expérience corporelle

En Kabat on s’appuie évidemment sur l’expérience corpo-relle, mais celle-ci semble légèrement “gommée” après unaccident ou maladie, comme si le cerveau avait un peuoublié tout ou partie de certains programmes moteursacquis (mauvaise coordination du mouvement).

Ici, l’expérience corporelle antérieure ne suffit pas à“résoudre le problème adaptatif” (meilleure qualité dumouvement), c’est-à-dire atteindre le niveau antérieur quicorrespond à une motricité fonctionnelle normale. C’estpourquoi la méthode Kabat se propose d’aider à la repro-grammation de ces gestes en utilisant des stimulationssensorielles facilitantes. ■

Indexation Internet :Apprentissage

KabatPédagogie

Bibliographie1. KNOTT M, VOSS D. Facilitation neuromusculaire par la proprioception. Paris :

Maloine, 19772. VIEL É, OGHISHIMA E. Rééducation neuromusculaire à partir de la proprioception.

Paris : Masson, 1977.