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Vieillissement et habitat Comment anticiper ? A l’heure où le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement est en débat au
parlement (sa mise en vigueur est prévue début 2016), la prise en compte de l’autonomie
représente un enjeu essentiel pour l’avenir. Ainsi, les Français de 60 ans et plus, au nombre
de 14,5 millions en 2010, seront, selon l’INSEE, 20 millions en 2030 et près de 24 millions en
2060, représentant alors le tiers de la population.
Ce phénomène démographique a des effets sociétaux et économiques. Il incite notre
société à s’adapter et mettre en place les meilleures conditions sociales, économiques,
sanitaires et environnementales possibles pour tous.
Dans cette perspective, le logement représente un enjeu de taille. Souvent en nombre
insuffisant, il n’est pas ou mal adapté au vieillissement. Or, cette adaptation est un facteur
essentiel de la préservation de l’autonomie des personnes âgées ; sans elle, la dépendance
et l’isolement peuvent s’accentuer. Autre facteur important à intégrer dans la réflexion, la
pauvreté. Avec l’âge, le risque de pauvreté augmente ; les revenus peuvent diminuer alors
que les coûts de la vie peuvent augmenter liés à une fragilité croissante.
L’objectif est donc de permettre à chaque personne, quel que soit son âge, son niveau de
dépendance ou ses ressources, de bénéficier de conditions d’habitat dignes, sécurisantes
et confortables, de pouvoir rester le plus longtemps possible autonome et de conserver
une vie sociale. Dans cette optique, deux options se présentent. La première solution
envisagée est celle du maintien de la personne âgée à son domicile. Cette voie rejoint le
souhait de la majorité de rester chez soi le plus longtemps possible. La seconde option
concerne les différentes formes d’hébergement ou de logement spécifique pour les per-
sonnes âgées.
CHIFFRES-CLÉS
9,2 % des Marseillais auront 80 ans
en 2040 contre 5,9% en 2010
79 ans pour les hommes
et 83 ans pour les femmes.
C’est l’âge moyen auquel
débute la perte d’autonomie
2 300 €/mois C’est le coût en établissement avec
un reste à charge de 1400€/mois
1 800 €/mois C’est le coût à domicile avec un
reste à charge de 1000€/mois
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Les enjeux du vieillissementAnticiper les évolutions démographiques
L’accroissement du quatrième âge constitue un enjeu so-
ciétal majeur car c’est en général autour de 75 ans que
débute la perte d’autonomie soit la difficulté accrue à
choisir librement son mode de vie et le besoin de se faire
aider dans les tâches quotidiennes. L’entraide familiale
ne parvient pas toujours à compenser ce besoin de sou-
tien, par manque de temps, de moyens ou de proximité
géographique (recentrement des familles sur la famille
nucléaire, éloignement géographique des familles, dif-
ficultés économiques et précarité des descendants, exi-
guïté des logements).
Au sein du territoire métropolitain, le vieillissement de la
population devrait se poursuivre à un rythme élevé. De
23 % en 2010, la part des 60 ans et plus passera à 28,8 % en
2040. Le rythme de progression des 80 ans et plus devrait
être particulièrement fort (+1,9 % par an) en lien avec l’arri-
vée aux grands âges des générations du baby-boom. Ils
constitueront 9,2 % des Marseillais en 2040, ils sont 5,9 %
en 2010 (soit 50 216 personnes), ils étaient 4,4 % en 1999 !
L’augmentation générale de la durée de la vie s’est ac-
compagnée d’une amélioration de l’état de santé des
personnes âgées : on vit désormais plus longtemps sans
incapacité. Néanmoins, l’accroissement des personnes très
âgées augmente le nombre de personnes dépendantes
pour lesquelles les problèmes de santé sont de plus en plus
récurrents.
Les inégalités de revenus
Depuis les années 60, le revenu moyen des personnes
âgées a connu une progression sans précédent grâce à
la généralisation de la protection sociale pour la vieil-
lesse, dont l’Allocation de Solidarité pour Personnes Agées
(ASPA – anciennement le minimum vieillesse) qui a été
revalorisée à plusieurs reprises et l’augmentation des pen-
sions. Aujourd’hui, l’ASPA est de 9 447,21 € pour une per-
sonne seule (soit 787,27 € par mois) et de 14 667,32 € pour
un ménage (soit 1 222,28 € par mois).
L'INSEE note que les inégalités se creusent entre personnes
âgées, du fait de la progression des revenus du patrimoine
pour les plus favorisés. A Marseille en 2011, la médiane des
revenus des personnes âgées est globalement supérieure
à celle de la population totale (16 456€ en 2011). Mais elle
décroît avec l’âge : de 18 697 € annuels pour les 60-74 ans,
elle n’est plus que de 17 447 € pour les 75 ans et plus. Ce
tassement est à mettre en relation avec le veuvage qui
entraîne une diminution des ressources. Cette diminution
pose le problème de la gestion budgétaire quand par ail-
leurs, les dépenses augmentent : soins médicaux, aides à
domicile et travaux d’adaptation du logement.
On note également une progression de la précarité chez
les personnes âgées. Une proportion non négligeable
d'entre elles vit en dessous du seuil de pauvreté (moins de
977 euros par mois pour une personne seule en 2011). A
Marseille, le niveau de vie des retraités a diminué de 1,1 %
entre 2009 et 2010 et 10,2 % d’entre eux vivent sous le seuil
de pauvreté (+0,3 point). Cette dégradation est à rappro-
cher des constatations faites par le CCAS sur la progression
de la précarité des personnes âgées.
La baisse des revenus au quatrième âge, la part consé-
quente de personnes âgées relevant du minimum vieil-
lesse et l'accroissement futur de ces situations impliquent :
des aides pour maintenir les personnes dans leur loge-
ment (aide à domicile, aide aux dépenses de santé et
de vie courante…) ;
une offre d’hébergement collectif pour les bas revenus
suffisamment importante.
La désagrégation des liens sociaux est une composante de
notre société et touche tous les âges. Les liens sociaux du
travail, de la famille, etc. ont tendance à se défaire.
“ Un enjeu de programmation : l’habitat peut jouer un rôle important dans la lutte contre l’isolement ”
S O C I É T É
3Vieillissement et habitat : comment anticiper ?
Avec l’arrivée de l’âge, les attaches apparaissent plus té-
nues et tiennent à l’implication d'individus moins présents
sur les réseaux sociaux et le collectif en général. L’isole-
ment relationnel des séniors est un élément essentiel à
considérer car il concourt à aggraver les risques de dépen-
dance et de difficultés économiques.
Bien comprendre la dépendance
La dépendance est au cœur des questions liées à l’héber-
gement des personnes âgées et implique des contraintes
et obligations pour l’accueil des personnes. Elle est définie
comme le besoin d’aide pour accomplir les actes essen-
tiels de la vie quotidienne ou le besoin d’une surveillance
régulière. Elle est évaluée par référence à la grille nationale
AGGIR (Autonomie Gérontologie Groupes Iso-Ressources).
Cet outil permet d'évaluer le degré de perte d'autono-
mie ou le degré de dépendance physique ou psychique
d'une personne âgée dans l'accomplissement de ses actes
quotidiens. Les établissements médico-sociaux sont donc
strictement réglementés en raison du fait qu’ils accueillent
un public fragile. Le devenir des personnes en perte d’au-
tonomie en établissement implique un accompagnement
renforcé. D'autant plus que toutes les résidences ne sont
pas habilitées à accueillir un public dépendant. Cela né-
cessite une prise en charge spécifique et un système de
relais vers un établissement médicalisé.
La prise en charge de la dépendance peut être estimée
à 25 milliards d'euros au niveau national, avec une sub-
vention annuelle moyenne de l’ordre de 1 million d'euros
par EHPAD. A terme, la politique va tendre vers une limi-
tation du nombre d’EHPAD, avec une offre inférieure à la
demande (situation déjà ressentie sur le terrain) et l’obli-
gation pour ces structures médicalisées de n’accepter que
des personnes très dépendantes (GIR 1 et 2). L’enjeu de
créer de nouvelles solutions pour la prise en compte de la
vieillesse est à prendre en compte, notamment par l’amé-
nagement de l’habitat existant pour favoriser le maintien
à domicile.
La difficile réforme de la dépendanceLe projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, en cours de discussion actuellement, fait débat. Composée de trois volets (an-ticiper, adapter la société, accompagner les personnes en perte d’autono-mie), cette loi propose des mesures autour de la question de l’autonomie. Ainsi, elle souhaite adapter 80 000 logements privés d’ici 2030, de relever les plafonds de l’allocation personnalisée à l’autonomie à domicile pour toucher potentiellement 700 000 bénéficiaires, et d’instituer des mesures sur la prévention par les technologies nouvelles. La prise en charge de la dépendance coûte environ 28,3 milliards d’euros aux pouvoirs publics et représente un poids financier insupportable pour les familles notamment dû au reste à charge élevé, alors que certains critiquent cette nouvelle loi de ne pas faire assez pour réduire ce coût. La loi mise davantage sur le maintien à domicile afin notamment de réduire les coûts pour les pouvoirs publics liés aux institutions médicalisées, mais il faudrait faire davantage pour accompagner les 4,3 millions d’aidants qui manquent aujourd’hui de reconnaissance pour leur travail. Question de budget ou d’adaptation des mentalités à ce nouveau défi, il semble que ce débat ne soit pas encore clos.
Sources : ministère des Affaires sociales, de la Santé et du Droit des femmes, article paru dans le Monde 11/03/2015 " Perte d’autonomie : grands enjeux, petites avancées "
Les chiffres clés
79 ans83 ans
20602010
2x plus de personnes dépendantes en 50 ans
Le coût pour la France
Le dépendance intervient en moyenne à
1%du PIB
2010
3%du PIB
2060
Un reste à charge élevé
1800 € / moisreste à charge 1000 € / mois
À domicile
2300 € / moisreste à charge 1400 € / mois
En établissement
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4 Vieillissement et habitat : comment anticiper ?
Le maintien à domicile : une approche favorisée par les politiques nationales
Maître-mot des politiques publiques récentes, le maintien
à domicile revient à renforcer et à accompagner l’autono-
mie des personnes vieillissantes, en permettant de rester
chez elles tout en gérant une dépendance grandissante.
Cette approche rejoint le désir exprimé par la majorité des
personnes âgées de vieillir chez elles. Selon un sondage
réalisé en 2012 par Opinionway, 90 % des Français pré-
fèrent adapter leur logement plutôt que de le quitter en
cas de dégradation de leur santé. Mais seulement 6 % des
logements sont adaptés à la perte d'autonomie. L’adapta-
tion du logement n’est pas uniquement perçue comme
une option moins chère que l’hébergement en maison de
retraite, mais plutôt comme un moyen de mieux sécuriser
le domicile, de prévenir les accidents, et de rendre le pas-
sage en institution médicalisée moins nécessaire. Car, la
maison de retraite semble être le seul choix à faire lorsque
la vie quotidienne en logement traditionnel devient trop
difficile. Le coût moyen pour adapter un appartement
varie bien sûr en fonction de la nature des travaux – entre
4 500 € pour l’adaptation d’une salle de bain, à plus de
35 000 € pour l’adaptation totale du logement :
Des aides existent. Dans ce cas, les travaux les plus cou-
rants concernent l’adaptation de la salle de bain, estimés à
4 500 € par logement :
Lorsque le domicile n’est plus une solution
Les retraités souhaitent surtout rester dans leur quartier et
conserver les relations sociales nouées autour de leur lieu
de vie. Ils sont affectivement attachés au logement qu’ils
occupent parfois depuis plusieurs décennies. Contraire-
ment à l’idée couramment avancée, le passage à la retraite
ne constitue pas une véritable période charnière du par-
cours résidentiel des personnes âgées.
Plus que le passage de l’activité à la retraite ou la baisse
du niveau de revenu, ce sont l’isolement, le veuvage ou
la dépendance qui impliquent les déménagements des
personnes âgées.
Autour de 85 ans, la dépendance constitue un véritable
changement du rapport des personnes âgées au loge-
ment. Vers cet âge, une action publique devient néces-
saire pour permettre le maintien à domicile. A domicile,
les personnes peuvent faire appel à des services d’aide
et de soins (à domicile). Pour celles qui déménagent, elles
s’orientent alors presque exclusivement vers des struc-
tures d’accueil collectif. En raison de leur plus grande es-
pérance de vie, les femmes représentent les trois quarts
des pensionnaires de ces établissements.
L’objectif premier recherché par toute personne en perte
d’autonomie est de maintenir le circuit de connexion avec
la société que seule permet la fluidité des accès aux dis-
positifs d’aide et d’accompagnement mis en place par les
politiques publiques.
Quelles solutions ?
ANAH (plafonné suivant ressources et territoires, entre 50 et 60 % du montant, plafonné à 20 000€ par logement) 3 150 €
Crédit d’impôt 25 % du montant restant 338 €
Reste à charge 1 012 €
Total 4 500 €
Maçonnerie, reprise des cloisons 19 400 €
Carrelage, peinture 3 880 €
Sanitaires 3 230 €
Electricité (prises, câbles, plafonniers) 900 €
Fournitures 1 240 €
Monte escalier 7 000 €
Total 35 650 €
N ESTIMATION DES TRAVAUX POUR L’ADAPTATION D'UN LOGEMENT (SOURCE SÛR HABITAT)
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5Vieillissement et habitat : comment anticiper ?
L’offre en hébergement dédié
Maison de retraite, résidence pour séniors, foyer, EHPAD –
de quoi parle-t-on lorsqu’on évoque l’habitat dédié aux
personnes âgées ? Le domaine de l’hébergement pour
personnes âgées est complexe, tant les différentes défini-
tions des gammes de logements se chevauchent, y com-
pris dans les schémas officiels. Ici nous gardons comme fil
rouge la relation à la dépendance, essentielle dans la com-
préhension des différentes formules, dont trois principales.
Pour les personnes autonomes, il existe deux produits prin-
cipaux : l’établissement d’hébergement pour personnes
âgées (EHPA)/logement foyer et la résidence service. Pour
les personnes dépendantes, l’établissement d’héberge-
ment pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Ces
structures représentent la majeure partie de l’offre au ni-
veau national et local, mais il existe d’autres types de struc-
tures, comme le béguinage, les baba yaga, le logement
intergénérationnel, qui répondent à une demande plus
spécifique, mais sont sous-représentées localement.
Une offre locale déséquilibrée, des segments à compléter
Les analyses quantitatives sur l’offre en hébergement
pour personnes âgées sur Marseille portent sur les éta-
blissements agréés par le Conseil général, même s’il existe
d’autres formes d’hébergement aujourd’hui. Cette offre
est essentiellement structurée autour de la dépendance,
avec 76 EHPAD et seulement 14 logements-foyers/EHPA.
L’offre en établissements pour personnes dépendantes
sur Marseille se compose de 6 350 lits en EHPAD avec
un taux d’équipement de 78 places. Ce taux est assez
faible en comparaison des niveaux départementaux (80,6
places) et national (88 places).
Les logements-foyers sont présents dans le 2e arrondisse-
ment, le sud de Marseille et le 13e arrondissement. Quatre
arrondissements ont 1 EHPAD (1er, 5e, 7e, 15e).
Les arrondissements centraux sont sous équipés en éta-
blissements, et les 2e et 3e sont dépourvus en établisse-
ments pour personnes âgées dépendantes. En effet, ce
territoire accueille 32 % de la population de 75 ans et plus,
mais seulement 10 % des EHPAD. Ce sont pourtant les ar-
rondissements les mieux dotés en équipements culturels,
sanitaires et en réseaux de transports en commun. Et ce
alors que, d'après le Pôle Info Séniors 13, les EHPAD ailleurs
à Marseille accusent un faible taux de remplissage.
Très consommateurs de foncier, les EHPAD se trouvent sou-
vent en dehors de l’hyper-centre. S’y ajoutent aussi des im-
plantations dans un cadre "idyllique", en pleine nature. Sur
Marseille, 20 EHPAD sur 76 se situent dans une zone dite de
bonne desserte qui se définit par un rayon de 500 m autour
des stations de métro et des arrêts de tram.
PAROLES D’ACTEUR
Jean-Philippe GENODChargé de mission Logement social
Direction de l'Habitat et de la Cohésion Sociale,
C.C. Marseille Provence Métropole
“ Produire des logements sociaux pour les personnes âgées est difficile dans le cadre actuel, sauf dans le cas des logements foyers comme les EHPAD, qui nécessitent un agrément spéci-fique. Entre rester à domicile, qui est le souhait de la majorité des personnes vieillissantes, et les établissements médicalisés, il faudra développer une offre intermédiaire, ce que dit d’ail-leurs l’étude de l’Agam.Les personnes âgées encore valides avec des revenus mo-destes et peu de solidarité familiale doivent pouvoir se loger à faible coût. Comment répondre à ce besoin ? On a réalisé des logements sociaux classiques adaptés aux personnes âgées, des logements de petite taille par exemple, mais ça ne suffit pas. L’État, notamment, doit réserver son contingent aux plus défavorisés et aux publics prioritaires de la loi du Droit Au Logement Opposable.Finalement, le plus facile à réaliser est la résidence intergé-nérationnelle, en travaillant à la fois sur la typologie des lo-gements, leur adaptation au vieillissement, les services com-muns et les réservations de logements, avec seulement une partie des logements destinés à des personnes âgées dans une opération plus importante.Nous essayons également d’imaginer aujourd’hui de nou-velles façons d’habiter pour les personnes âgées, en dévelop-pant des formes innovantes telles que la colocation entre per-sonnes âgées ou l’habitat participatif. En tant que délégataire des aides à la pierre de l’État, nous souhaitons promouvoir ce type d’opérations expérimentales. Mais elles peinent encore à sortir à cause de problématiques réglementaires que l’État doit nous aider à clarifier.Une autre piste est de favoriser les mutations dans le parc social existant, en permettant à des personnes âgées de quit-ter des logements inadaptés, devenus trop grands, pour des logements accessibles et bien équipés. On peut le faire en mutualisant les demandes et les logements entre bailleurs sociaux. ”
Silver economieLa « silver économie » économie vise à répondre aux nouveaux besoins, adaptations structurelles et services dédiés, générés par la transition démographique. Elle fait l’objet d’un contrat de filière signé en décembre 2013 par le gouvernement et les industriels et figure au rang des domaines d’activités stratégiques identifiés dans la Stratégie Régionale de l’Innovation 2014-2020 de la région PACA. L’aide aux personnes âgées est le secteur qui devrait être le plus créateur d’emplois d’ici 2020, avec une création nette potentielle de 300 000 d’emplois.
La croissance de ce secteur reposera fortement sur l’innovation, avec le développement et la mise sur le marché de technologies nouvelles ou existantes adaptées aux usages nés de cette transi-tion démographique. De nombreux secteurs et thématiques sont concernés : domotique et objets connectés (patchs), lumino et odo-thérapie, serious game, … .
L’un des enjeux pour le développement de la silver économie réside dans l’appropriation de ces nouveaux dispositifs technologiques et des services associés par les seniors ainsi que par les professionnels et accompagnants de la santé et de l’aide à la personne.
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6 Vieillissement et habitat : comment anticiper ?
Le besoin de proximité est crucial pour les personnes
âgées, non seulement en terme d’accès au personnel
soignant, mais également en terme de voisinage. Cette
logique pourrait expliquer la présence d’établissements
autour des noyaux villageois comme Château-Gombert ou
Les Olives, qui pourraient bénéficier de la proximité et du
sentiment d’appartenance à un quartier. Les partenaires
ont également signalé l’importance de l’animation et de la
mixité sociale, notamment entre générations. La résidence
intergénérationnelle est ainsi perçue localement comme
une bonne initiative pour maintenir ou créer des liens
sociaux.
Ce dernier point a été repris par le Centre d’analyse stra-
tégique dans sa note "Vieillissement et espace urbain"
qui présente des propositions pour une ville adaptée à
une population vieillissante. Une ville adaptée au vieillis-
sement est une ville dense et animée, qui garantit la circu-
lation des personnes par de multiples "micro-adaptations"
et qui incite les aînés à rester actifs. Au-delà du logement,
la question de l’adaptation de l’environnement est primor-
diale en termes d’accès et de liens sociaux.
Évolution des trajectoires résidentielles
Il existe des lacunes en terme d’offre, sur lequelles il
convient de s’interroger afin de compléter ce parcours rési-
dentiel, en trouvant des solutions intermédiaires soit dans
l’adaptation et l’évolutivité du parc actuel, soit en multi-
pliant les structures et les démarches innovantes. La ques-
tion du coût est primordiale. Le prix payé par le résident
est conditionné par l’éventail de services, d'équipements,
de soins, de personnels, qui font que certaines structures,
mêmes publiques, représentent une charge lourde pour le
résident.
Développer l’offre en logement intermédiaire représente
une des propositions du Projet de loi pour l’adaptation
de la société au vieillissement, qui vise à l’adaptation de
80 000 logements au niveau national d’ici 2017, la moderni-
sation des logements-foyers et les diverses formes d’habi-
tat groupé et à l’instauration d’un forfait autonomie pour
augmenter la présence humaine.
Vers un parcours complété par une offre adaptéepour prévenir la dépendance
Modèle aujourd’hui remis en question ?
Domicile traditionnel
Domicile traditionnel
Domicile adapté
Établissement médicalisé
Établissement médicalisé
Résidences/foyers
“ Il s’agit de réfléchir à l’échelle de la ville et non plus à celle du logement dans l’adaptation au vieillissement ”
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7Vieillissement et habitat : comment anticiper ?
PAROLES D’ACTEUR
Pierre CICOTTOPrésident de la Sogima
“ La Sogima, lauréat du concours, réalise trois immeubles dans le cadre du programme immobilier d’accompagnement du stade Vélodrome de Marseille. Deux immeubles proposent des logements en locatif libre, dont un en PLI, et nous avons imaginé une résidence intergénérationnelle sur le boulevard Teisseire. Ce projet me tenait à cœur depuis longtemps. Le programme compte 133 logements sociaux dont une partie est réservée aux séniors et aux familles avec 40 logements et une autre partie, avec 90 logements, est réservée aux étu-diants en PLS (prêt locatif social) et 3 autres logements en PLI (prêt locatif intermédiaire). Je souhaitais réunir sur un même lieu plusieurs générations. Et pour favoriser les liens sociaux, nous avons créé à mi-hauteur du bâtiment des ser-vices communs et mutualisés. On y retrouve 2 salles d’étude communicantes, une salle de convivialité (télévision / espace repas), une salle d’activités (informatique / ludothèque), une buanderie et une salle de sport équipée. Ces services sont gérés par un régisseur logé sur place. La livraison est en cours et nous connaissons un vif succès, l’idée séduit énormément les gens. ”
Quelles perspectives ?
Tendances et innovation dans le logement
La recherche de nouvelles formules en hébergement des
personnes âgées part d’un constat que le modèle actuel
ne répond pas aux besoins des personnes âgées en situa-
tions fragiles et que la dépendance et le souhait de vieillir
chez soi ne sont pas bien pris en compte. L’innovation
cherche des alternatives à la maison de retraite médicali-
sée, et le domicile, perçu comme inadapté.
L’innovation porte autant sur la forme du logement pro-
posé que sur les services (développement des technolo-
gies) et les modes d’occupation qui favorisent le lien social
et luttent contre la dépendance. Cette démarche place
la personne âgée et son logement dans son environne-
ment. Les résidences pour personnes âgées représentent
un levier pour l’économie locale, avec les services à la per-
sonne, le développement de filières innovantes, avec des
nouvelles technologies. Elle cherche à lutter contre l’isole-
ment et la dégradation des conditions de vie. Il s’agit non
seulement de trouver de nouvelles façons de construire
ou d’adapter le logement, mais également de nouveaux
modes de financement qui permettent d’obtenir un reste
à charge raisonnable pour les résidents, dans un marché
qui se caractérise par la cherté de l’offre.
Vers une reconnaissance de démarches exemplaires – un label "Haute Qualité du Vieillissement"
Icade, filière de la Caisse des Dépôts et Consignations et
l’association Age Village sont à l’initiative de ce concours
qui intègre trois dimensions : un territoire de vie pour tous,
un territoire de vie qui facilite l’accès aux activités néces-
saires au bien-être quotidien des habitants, un territoire
de vie évolutif et durable, adapté aux besoins actuels et
futurs des citoyens. En effet, certains constatent un empi-
lement d’équipements et services sans prise en compte
des trajectoires et des besoins de la population, avec des
Bibliographie• "Habitat et Longévité humaine : le défi de l’autonomie", Bernard-Hohm, Marie-Christine, A’Urba, juin 2007• "Faut-il investir en résidence séniors ?", Le Particulier Immo N°295 mars 2013• "Vieillissement et espace urbain. Comment la ville peut-elle accompagner le vieillissement en bonne santé des aînés ?",
Centre d’analyse stratégique, note d’analyse n°323 février 2013• "L'adaptation de l'habitat à l'évolution démographique", Boulmier, Muriel, Rapport au Secrétaire d’Etat au Logement 2009• "Rapport sur l’habitat collectif des personnes âgées Autonomes", DGCS, novembre 2013• "Adaptation des logements pour l'autonomie des personnes âgées", Rapport de l’Anah et de la Cnav Décembre 2013
Sites internet• http://www.ccas-marseille.fr/actus• http://www.drees.sante.gouv.fr/• http://www.anah.fr/proprietaires/proprietaires-occupants/anticiper-pour-bien-vieillir-chez-vous/
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Toutes nos ressources @ portée de clic sur www.agam.orgPour recevoir nos publications dès leur sortie, inscrivez-vous à notre newsletter
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programmes d’hébergement destinés à des personnes
âgées sans distinction ni raisonnement à l’échelle du ter-
ritoire (des logements adaptés mais non desservis par les
transports en commun…). En effet, le vieillissement est de
plus en plus appréhendé à l’échelle du territoire ; la notion
d’accessibilité et sa mise en œuvre s’insèrent dans un conti-
nuum qui s’étend du domicile – à travers les tâches quoti-
diennes – au quartier – à travers des liens en transport en
commun, l’aménagement des espaces publics, l’accès aux
commerces et équipements. Avec les innovations en TIC,
on peut également parler d’accessibilité numérique, avec
liaisons entre le domicile et les professionnels de santé à
travers la télémédecine.
Le département du Rhône a développé un cahier des
charges de l’habitat adapté. La charte veut tendre vers un
quota de 20 % ou 25 % de logements dans les immeubles,
avec une offre suffisante pour maintenir la proximité de
services et de vie de quartier des personnes âgées. Ce sont
des logements spécialisés pour les personnes en perte
d’autonomie, mais banalisés et non pas des résidences
pour personnes âgées.
Le groupe Saint-Gobain, spécialisé dans les matériaux pour
l’habitat, a développé le concept de maison multi-confort,
qui a notamment la volonté de créer un habitat durable
à travers une approche qui aborde le confort sous divers
aspects (confort visuel, acoustique, sanitaire, thermique,
modulable et sécurité). L’idée est de créer des maisons en
intégrant en amont la prise en compte progressive de la
dépendance.
Localement, différentes formules sont proposées : finan-
cée avec l’appui du fonds d’innovation pour l’habitat de
MPM, la résidence Soleil Posé dans le 15e arrondissement
de Marseille propose des logements accompagnés et à
prix maîtrisés pour les personnes âgées en difficulté, no-
tamment en termes d’isolement, de précarité et de risque
d’exclusion, des handicaps liés à l’âge ou la maladie. C’est
surtout dans la disposition des pièces et l’accès aux équi-
pements que la résidence innove, avec une hiérarchisa-
tion entre les espaces personnels, les espaces techniques
partagés (buanderie, chambre d’hôte pour les familles,
une serre pour développer l’horticulture), et les espaces
techniques faiblement partagés (cuisine, espace détente
pour 2 ou 3 locataires).
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Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaiseLouvre & Paix – La Canebière – CS 41858 13221 Marseille cedex 01Tél : 04 88 91 92 11 - e-mail : [email protected]
Vieillissement et habitat : comment anticiper ?
Directeur de la publication : Christian BrunnerRédaction : Jonathan AllfreeConception / Réalisation : Pôle graphique AgamMarseille - Juillet 2015Numéro ISSN : 2266-6257