PLU : une vision renouvelée du territoireAvec le nouveau Plan local d’urbanisme (PLU) approuvé le 28 juin dernier,
la ville de Marseille s’est dotée d’un outil de planification majeur. Succé-
dant au Plan d’occupation des sols (POS) qui arrive à son terme, celui-ci
propose un nouveau projet de territoire.
L’un avait permis de renouer avec un dynamisme démographique et éco-
nomique en ouvrant à l’urbanisation l’intégralité des espaces urbanisables
de la ville ; l’autre rompt avec un modèle de développement urbain exten-
sif et propose la poursuite d’un développement ambitieux et la préserva-
tion des espaces naturels et agricoles.
En relevant le défi du renouvellement urbain, le Plan local d’urbanisme
traduit un véritable projet de territoire pour Marseille, deuxième ville
de France et capitale euro-méditerranéenne. Il s’inscrit dans l’esprit du
Schéma de cohérence territoriale approuvé le 29 juin 2012 et dans la
perspective d’un vaste ensemble métropolitain au sein duquel Marseille
entend jouer un rôle moteur.
Son élaboration a nécessité plus de quatre années de travail pour couvrir
les 24 000 hectares de l’immense territoire de la cité phocéenne et pro-
poser un règlement adapté à la multiplicité des formes urbaines marseil-
laises. Cette publication propose de plonger dans ce document de 3 000
pages, illustré de 300 planches graphiques, et de revenir sur les principes
qui ont guidé son élaboration, ses orientations stratégiques et les princi-
pales nouveautés.
ÉditoLe Plan local d'urbanisme de Marseille entré en vigueur
depuis quelques semaines, marque une évolution importante par rapport aux documents précédents, tant dans l’ambition
portée que dans l’innovation des outils mobilisés.La révision du Plan d'occupation des sols, c’est d’abord un projet, une vision du territoire discutée avec tous les élus
et toutes les mairies de secteur. Ce projet a été bâti à partir d’une connaissance du territoire, une sensibilité aux usages,
à l’identité, au relief, à l’histoire et au génie des lieux. Il traduit une analyse des enjeux tant à l’échelle de la ville que de l’espace métropolitain et des orientations capables de consolider la dynamique d’évolution de Marseille et son
ancrage à la grande échelle.Le contenu du document est lui aussi porteur d’innovations,
et d’ambitions dans le rapport à la nature, à travers le soin apporté aux espaces de développement économique, de propositions concrètes sur l’intensification urbaine et sur la cohérence entre l’urbanisme et les transports
et d’anticipations pour la préparation de futures opérations d’aménagement.
Dans un contexte de profonde modification institutionnelle, ce document a vocation à servir de référence dans le niveau
d’exigence que l’on est en droit d’attendre d’un document d’urbanisme moderne.
portrait
portrait
t e r r i t o i r e s
n O v E M b r E 2 0 1 3 : n ° 1 4
PLU de Marseille
L'expression d'un projet de territoire Marseille, dans vingt ans…
Après dix années d’application d’un Plan d’occupation
des sols approuvé le 22 décembre 2000, le contexte
urbain et réglementaire a profondément évolué. Mar-
seille a renoué avec la croissance mais a atteint ses li-
mites urbaines. Le temps du renouvellement urbain se
confirme. Selon les dispositions législatives en vigueur,
les Plans locaux d’urbanisme doivent désormais déter-
miner les conditions permettant tout à la fois d’assurer
l’équilibre entre développement urbain et préservation
des espaces naturels, de promouvoir la diversité des
fonctions urbaines et la mixité sociale.
La révision du POS de Marseille visait ainsi à définir un
projet à l’échelle de la deuxième ville de France pour les
vingt prochaines années. Un projet qui concilie équi-
libre du territoire et poursuite d’un développement
ambitieux pour une capitale euro-méditerranéenne at-
tractive. bien que conduite dans un calendrier contraint
et en concomitance avec d’autres démarches de planifi-
cation à l’échelle de la Communauté urbaine - le Schéma
de cohérence territoriale, notamment, son élaboration a
favorisé une articulation entre échelles et thématiques
(habitat, transports, économie, etc).
Le Plan local d’urbanisme de Marseille pose ainsi les bases
d’une évolution urbaine de grande ampleur suivant deux
principes : la poursuite d’une dynamique et le dévelop-
pement durable. Prenant en compte, en outre, la double
échelle de la métropole et de la proximité, il repense les
modalités du développement urbain pour renforcer le
rôle de Marseille au sein d’un vaste ensemble métropoli-
tain et répondre aux attentes de tous les Marseillais.
Qu’est-ce qu’un Plan local d’urbanisme ?Introduit par la loi Solidarité et renouvellement urbain du 13 décembre 2000, le Plan local d’urbanisme représente le principal document de planification à l’échelle communale en ce domaine. Il est régi par le Code de l’urbanisme et succède à l’ancien Plan d’occupation des sols. Il a vocation à proposer un projet d’aménagement, cohérent et durable, sur un territoire donné et à préciser, par voie réglementaire, les utilisations possibles des sols pour mettre en œuvre le projet.
Différentes pièces le composent : un rapport de présentation, des orientations d’aménagement (facultatives), un règlement et ses planches graphiques, des annexes ainsi qu’un Projet d’aménagement et de développement durable (PADD). Nouveauté essentielle, ce dernier expose les grandes orientations d’aménagement du territoire à l’horizon de dix ou vingt ans.
Le Plan local d’urbanisme doit enfin être compatible avec les différents documents de rang supérieur élaborés par l’Etat ou les autres collectivités locales. Les directives territoriales d’aménagement, les Schémas régionaux de cohérence écolo-gique, les Schémas de cohérence territoriale…Chiffres clés du PLU
plans masse
900hectaresde zoneséconomiques
3 000pages
115 000parcelles
25personnesmobilisées
95 litresde café
800réunions
14 zonesdéclinéesen 21 types
19orientationsd’aménagement
à l’ 10 000hectaresd’espacesnaturels 8 000dont
hectares d’espacesprotégés au titrede la loi Littoral
11ZAC850hectares dezones urbainesportuaires
...
......
24 000hectares
t e r r i t o i r e s
2
PLU de Marseille
Au-delà des objectifs quantitatifs (60 000 habitants,
60 000 logements et 60 000 emplois supplémentaires),
ce document intensifie les efforts en matière de dépla-
cement, d’habitat, d’emploi, d’équipement, de service
et de qualité de vie. Des ambitions qui se déclinent
dans chacune de ses "pièces" – et notamment, dans son
Projet d’aménagement et de développement durable
(PADD).
Cinq axes de développement durable
"Pièce" entièrement nouvelle, le PADD constitue le fil
conducteur du Plan local d’urbanisme. Il traduit le projet
municipal et exprime la vision retenue pour l’avenir du
territoire. Il définit les objectifs stratégiques, ainsi que
les orientations générales d’aménagement et de déve-
loppement. Si bien que ses dispositions trouvent leur
traduction dans les "pièces" directement opposables du
PLU que sont le zonage et le règlement.
Le Projet d’aménagement et de développement durable
s’ordonne ainsi autour de cinq axes. Le premier, "Mar-
seille, ville maritime" dotée d’un patrimoine maritime
exceptionnel, confirme le développement de l’activité
portuaire et sa meilleure intégration au fonctionnement
urbain. Le deuxième, "Marseille, capitale euro-médi-
terranéenne attractive", envisage les conditions d’une
croissance de l’emploi en s’appuyant sur des secteurs
économiques porteurs et en recherchant une meilleure
synergie entre entreprises, recherche et enseignement
supérieur.
Le troisième axe, "Marseille, ville respectueuse de son
environnement et de son patrimoine", en préserve les
atouts patrimoniaux exceptionnels, tant naturels qu’ur-
bains. Soucieuse de la qualité de vie de ses habitants,
"Marseille, ville des proximités" vise ensuite à répondre
aux besoins en logement et en services de tous les Mar-
seillais. "Marseille, cap sur le renouvellement urbain",
encourage enfin une mixité fonctionnelle et une den-
sification adaptée aux caractéristiques des différents
tissus – et notamment dans les secteurs géographiques
bien équipés et bien desservis par les transports en
commun.
MARSEILLEVILLE MARITIME
MARSEILLE CAP SUR LE RENOUVELLEMENT URBAINUne ville économe en foncier et en énergie, favorisant les écomobilités
MARSEILLECAPITALE EURO-
MÉDITERRANÉENNE ATTRACTIVE
MARSEILLEVILLE DES PROXIMITÉS
Une offre d’habitat et un bon niveau de services
urbains pour tous les Marseillais
MARSEILLEVILLE RESPECTUEUSE
DE SON ENVIRONNEMENTET DE SON PATRIMOINE
UNE DOUBLE ÉCHELLEDE LA MÉTROPOLE
À LA PROXIMITÉ
POURSUIVRE UN DÉVELOPPEMENTURBAIN INNOVANT,
SOLIDAIRE ET DURABLE CINQ AXESSTRATÉGIQUESPOUR LE PADD
T QUAI D'ArEnC
T LES CInQ AxES StrAtégIQUE DU PADD
t e r r i t o i r e s
3
PLU de Marseille
Entre développement et protection
Un développement à poursuivre
Depuis le début des années 2000, Marseille a retrouvé
un dynamisme démographique, économique et urbain.
La ville redevient attractive, 4 000 emplois et 5 000
logements sont créés chaque année. Afin d’assurer la
pérennité d’une croissance qui reste fragile, le Plan local
d’urbanisme fixe un objectif de 60 000 emplois, 60 000
habitants et 60 000 logements supplémentaires et s’ap-
puie sur des projets urbains moteurs pour le développe-
ment (grand Centre-ville, Euroméditerranée, Marseille
grand Est).
Il encourage le développement économique à travers
une mixité des fonctions dans les tissus du centre mais
accroît aussi la spécialisation des zonages "UE" dédiés à
l’économie afin d’encourager tous les types d’activités
(industrie-logistique, petit artisanat, bureaux et espaces
commerciaux). Il introduit le zonage "UgE" dédié aux
grands équipements métropolitains afin de les moder-
niser et de renforcer leur attractivité.
Enfin, dans un contexte de raréfaction de l’offre fon-
cière, il repense l’ensemble de l’organisation urbaine
et rompt avec un modèle de développement extensif.
Les dernières opérations de lotissements et de maisons
individuelles ont en effet consommé une part impor-
“ 80 % des Français rêvent d’habiter en maison indivi-duelle avec jardin mais aujourd’hui les collectivités doivent s’engager avec les lois SRU et Grenelle à ne pas étendre leur territoire. La question se pose : comment concilier le désir contradictoire des Français et la réalité foncière de nos villes ? La densification pavillonnaire pourrait être une solution, c’est en tout cas l’hypothèse de la recherche BIMBY. En convergence avec les réflexions issues du Plan local d'urba-nisme, s’est engagé à Marseille une expérimentation en par-tenariat avec l’ENSA-M, l’Agam. Sorte de recherche et déve-loppement, elle a conduit à proposer une méthode pour une densification pavillonnaire encadrée. La démarche BIMBY considère le pavillonnaire comme une réserve foncière inex-ploitée. Le principe juridique repose sur la division parcellaire pour construire de nouvelles maisons dans un jardin. La méthodologie proposée a permis de localiser les parcelles pertinentes et d’identifier les secteurs qui présentent un in-térêt de densifier le tissu pavillonnaire selon le quartier et l’environnement structurant : desserte routière et autorou-tière, transport en commun. En corolaire, certains secteurs sont exclus car situés en zone inondable, inconstructible ou encore trop proches des pôles urbains qui justifieraient une densification plus intense. Sur Marseille, une première simulation montre qu’on pourrait alors construire jusqu’à 35 000 maisons sans étalement ur-bain. Mais, ce résultat est à amender par la résistance sociale et les réglementations en cours qui ne sont pas toujours favo-rables à BIMBY. Si les propriétaires peuvent trouver dans la division parcellaire une valorisation financière de leur patri-moine, tous ne souhaitent pas voir leur quartier se densifier. Pour réformer le cadre réglementaire et ne pas perdre l’iden-tité des quartiers, un travail fin devra être mené en concerta-tion avec les habitants, secteur par secteur. Les expériences menées par d’autres équipes dans le cadre de la recherche BIMBY, montrent comment cela est possible. Nous sommes en pointe sur cette question, il ne reste plus qu’à lancer l’expé-rience grandeur nature. ”
Stéphane hanrot Professeur à l’école d’architecture de Marseille (ENSA-M) et responsable scientifique de la participation de l’ENSA-M au projet de recherche BIMBY*
Paroles d’acteur
*BIMBY : acronyme de "Build in my back yard" ou en Français "Construire dans mon jardin". Recherche Initiée par B. Le Foll et D. MIet et financée par l’ANR, l’agence nationale de recherche – en savoir plus : bimby.fr
N LES FLAMAntS
“ Le Plan local d’urbanisme n’ouvre pas de nouveaux espaces à l’urbanisation ”
t e r r i t o i r e s
4
PLU de Marseille
tante du foncier disponible : la ville s’étend désormais
jusqu’au pied des massifs, avec des risques d’atteinte au
paysage ou d’incendie.
Changement de cap
Sauf à renoncer à la double nécessité du développe-
ment et de la protection, l’avenir de Marseille passe par
une maîtrise de l’étalement urbain une l’amplification
de la dynamique de renouvellement.
Dans ce cadre, le Plan local d’urbanisme n’ouvre pas de
nouveaux espaces à l’urbanisation. Il introduit des zo-
nages qui favorisent une densification adaptée aux dif-
férents tissus : bande constructible pouvant aller jusqu’à
25 mètres en "UAe", incitation au renouvellement urbain
en "UAr", projets urbains de grande hauteur en "UAeh",
levée des Coefficients d’occupation des sols (COS) en
"Ut", …
Ce plan accroît la cohérence entre urbanisme et trans-
ports pour améliorer le fonctionnement urbain. Il struc-
ture le territoire autour de centralités, anciennes ou
émergentes, et d’une nouvelle hiérarchisation du réseau
de voirie. La définition des emplacements réservés et le
rôle fondamental dévolu aux "boulevards urbains mul-
timodaux" favorisent, à cet égard, un meilleur maillage
global et un partage amélioré de la voirie au profit des
transports collectifs et des modes doux.
Complément indispensable à toute densification quali-
tative, le PLU veille enfin à la préservation du patrimoine
et des espaces de respiration dans les tissus urbains.
Préservation des espaces naturels
Aux portes du Parc national des calanques, Marseille
dispose entre mer et massifs, d’un patrimoine naturel
remarquable qui répond à de nombreuses fonctions
(environnementale, patrimoniale, touristique, …). Les
massifs sont considérés comme des cœurs de nature
bien conservés. Certaines liaisons écologiques ont ce-
pendant été dégradées par le continuum urbain et les
grandes infrastructures de transport.
Le zonage naturel "n" de ce PLU couvre plus de 10 000
hectares. Il permet la gestion et l’usage régulé des mi-
lieux naturels. Il est décliné d’une protection stricte, au
titre de la loi Littoral, à des dispositions permettant une
évolution limitée des constructions existantes ou des
aménagements pour les loisirs et le tourisme.
Enfin, une attention toute particulière est portée aux
secteurs de franges soumis à la pression de l’urbani-
sation. Ils sont couverts par le zonage "UM" (évolution
très modérée de la constructibilité) et une Orientation
d’aménagement "Franges urbaines" précisant le traite-
ment à donner à ces espaces d’interface ville-nature
particulièrement sensibles.
Au-delà des grands massifs, une autre nature a fait l’objet d’une atten-tion particulière, plus intégrée à l’environnement urbain et présente dans le quotidien des Marseillais - parcs, jardins, berges des cours d’eau...
Le Plan local d’urbanisme a ainsi mis en valeur une trame paysagère importante à l’échelle de la commune, tout en préservant une facilité de gestion afin de conserver ses fonctions récréatives. Il introduit ainsi un zonage et des dispositifs de servitudes complémentaires :
- les zones "UV" couvrent les grands espaces à vocation environne-mentale, récréative et sportive du tissu urbain - et, notamment, les grands parcs publics de Marseille (26e Centenaire, la Moline, berges de l’Huveaune). Soit près de 300 hectares ;
- les servitudes "Espaces Boisés Classés" définissent des sites où sont interdits les changements d’affectation et les modes d’occupation du sol susceptibles de compromettre la conservation de boisements. Soit près de 3 500 hectares ;
- les servitudes "L123.1.7°", nouveautés du "PLU", visent à la protection des boisements mais sont plus souples que les "Espaces boisés classés". Elles permettent une gestion des espaces naturels en milieu urbain en prenant en compte plusieurs fonctionnalités - écologique, environne-mentale, paysagère et sociale. Soit près de 480 hectares.
D’autres dispositions réglementaires visent au verdissement de la ville : protection des jardins privés ou publics, protection des cœurs d’îlots non bâtis et de pleine terre dans les quartiers centraux, pourcentage d’espaces végétalisés obligatoire (dont de pleine terre).
T PArC DE LA MOLInE
Nature en ville
t e r r i t o i r e s
5
Mieux prendre en compte la ville "héritée"
très longtemps réservée aux seuls monuments histo-
riques, la notion de patrimoine a connu au cours des
dernières décennies du 20e siècle, un élargissement sans
précédent dans le temps, dans l’espace et jusque dans
sa nature - quartiers ouvriers, jardins et parcs histo-
riques, bâtiments et sites industriels, architecture bal-
néaire ou ferroviaire, etc. témoignage du passé, le patri-
moine urbain permet en effet de renforcer l’attractivité
résidentielle d’une ville par la création d’espaces publics
de qualité et d’ambiances urbaines représentatives.
Marseille dispose ainsi d’un patrimoine bâti important
mais méconnu : tissus urbains homogènes, trames ré-
gulières, séquences architecturales, formes d’habitat
spécifiques, quartiers en balcon, éléments bâtis remar-
quables, canal de Marseille et ses dérivations. Aussi,
le Plan local d’urbanisme propose-t-il de le concevoir
comme un élément constitutif de tout projet urbain.
Le patrimoine occupe alors une place renforcée pour
construire plus mais mieux, et pour assurer un renouvel-
lement urbain dans le respect de l’identité des quartiers.
Deux sous-secteurs sont créés dans cette perspective :
"Uap" pour les tissus patrimoniaux de centre-ville et
"Ubp" pour les noyaux villageois patrimoniaux. Objec-
tif principal : protéger les formes classiques et struc-
turantes des tissus urbains basées sur des principes
d’alignement, de bande constructible, de cœur d’îlot et
“ Au niveau d’un outil règlementaire comme le PLU, on parle d'abord de territoires, d'architectures, de paysages et en second lieu, on considère le patrimoine architectural en tant que tel. Cependant pour faire une ville, le patrimoine monumental ne suffit pas. Il faut regarder autour des monuments pour identifier des ensembles et des séries d’architectures qui la caractérisent, comme les immeubles "trois fenêtres" marseil-lais qui façonnent les rues. Le patrimoine identitaire de la ville de Marseille (le littoral, le canal de Marseille, les cabanons, l’Huveaune,…) est très riche, sans oublier le patrimoine spé-cifique - maritime, militaire ou ferroviaire. Certains paysages naturels doivent même être considérés comme du patrimoine au sens large. C’est cette démarche qui nous a animé quand il a fallu réfléchir sur le PLU. Celui-ci prend en compte ces éléments. Il doit permettre d'ai-der à la réflexion et se garder de toute démolition intempes-tive tout en favorisant les opérations de mise en valeur. A cet effet, plus de 500 fiches réalisées par l’Agam, annexées au règlement et repérables sur des plans, permettent d’alerter les professionnels et les particuliers. Par ailleurs, on s’est atta-chés à porter ce document auprès des services de l’urbanisme, avec les services instructeurs de la ville ou ceux de l'Etat. Ce sont eux qui sont chargés d'informer les pétitionnaires et d'appliquer "in fine" le règlement du PLU. C’est un long che-min qui a été fait. Au-delà du diagnostic et de la méthode, l’enjeu est également, pour chaque projet, de conserver une partie de l’identité de Marseille, sans figer les choses. L’architecture doit contribuer à l’identité de la ville. Quand on voit un bâtiment, on doit être capable de dire "on est à Marseille". Les grandes opérations en sont la preuve : Euroméditerranée, la tour Zaha Hadid ou en-core le MuCEM ne sont pas de style provençal bien sûr, mais ils façonnent la ville, son identité. Au quotidien, il est nécessaire de garder un certain nombre de caractéristiques identitaires sans empêcher de nouvelles formes urbaines. ”
GilleS Bouillon Architecte des Bâtiments de France et ancien directeur du Service Territorial de l’architecture et du patrimoine des Bouches du Rhône
Paroles d’acteur
N LA MOntéE nOtrE DAME ..
t e r r i t o i r e s
6
PLU de Marseille
de continuité. Les exigences en termes d’aspect exté-
rieur des constructions sont renforcées pour garantir le
meilleur respect de la conception d’origine ainsi qu’une
insertion harmonieuse dans l’environnement urbain.
En complément des quatre Zones de protection du pa-
trimoine architectural et urbain (ZPPAUP) qui couvrent
une grande partie du centre historique, le Plan local
d’urbanisme identifie des éléments ou des ensembles
urbains à valeur architecturale, morphologique, cultu-
relle ou identitaire, et définit des prescriptions ou des
recommandations susceptibles d’assurer leur protection
à travers l’article L123.1.7° du Code de l’urbanisme. Il
élargit ainsi le champ de protection à l’ensemble du
territoire marseillais, instaure une obligation de permis
de démolir et encadre tout aménagement (évolution du
bâti et évolution du quartier).
Protection accrue pour les espaces agricoles
Le Plan d’occupation des sols totalisait 160 hectares de
zone agricole situés essentiellement en cœur de massif
et jouant le rôle de coupe-feux. Le Plan local d’urba-
nisme porte cette surface à 239 hectares, en intégrant
dans cette protection les dernières exploitations agri-
coles souvent placées en frange des massifs ou encla-
vées dans le tissu périurbain.
Une nouvelle approche des espaces agricoles a per-
mis de pérenniser les exploitations existantes dans la
couronne de Marseille. Les terres réservées à cette acti-
vité sont principalement implantées dans les franges
urbaines à forte identité paysagère - Les Mourets, le
vallon des Douces, bessons-giraudy. Le zonage "A2" y
encadre très fortement les constructions nécessaires à
l’agriculture.
Les zones agricoles qui figuraient dans le Plan d’occu-
pation des sols, en cœur de massif et à vocation de
coupe-feux (le plateau de la Mûre et le massif de l’Etoile,
notamment), ont été reconduites dans le nouveau docu-
ment. Elles sont couvertes par le zonage "A1", encore
plus restrictif, car toutes les constructions y sont inter-
dites.
Le Plan local d’urbanisme introduit, en outre, une ser-
vitude "L.123-1 9°" de "terrains cultivés à protéger" qui
s’applique aux terrains en culture en milieu urbain afin
de les réserver tout en permettant leur évolution – les
jardins familiaux Joseph Aiguier ou la ferme pédago-
gique du roy d’Espagne, par exemple. Près de 30 hec-
tares sont ainsi protégés pour répondre aux attentes de
plus en plus fortes en matière de produits locaux frais et
de vente en circuit court.
N ESPACE AgrICOLE - SAInt MArthE
N JArDInS FAMILIAUx - MOntOLIvEt
“ Le Plan local d’urbanisme propose de concevoir le patrimoine comme un élément constitutif de tout projet urbain ”
t e r r i t o i r e s
7
PLU de Marseille
Les principaux zonages du PLU de Marseille
tissu collectifs densesIl s’agit des secteurs d’habitat collectif denses ou offrant des capaci-tés d’évolution vers des tissus urbains et des formes plus denses, mais où la nature en ville est à préserver.
Espaces mixtes de petits collectifs et d’individuelsIl s’agit des tissus de formes diverses ou de moindre densité, dont l’urba-nisation peut être poursuivie sous la forme d’un petit habitat collectif ou de maisons individuelles. La préservation des espaces non-bâtis y est importante afin garder une aération dans le tissu urbain.
tissu pavillonnaireIl s’agit de secteurs déjà urbanisés sous forme de maisons indivi-duelles. Ce zonage permet d’établir une forme pavillonnaire assez dense, tout en maintenant des espaces végétalisés et de pleine terre, afin de conforter la trame végétale grâce à l’existence de jardins privés.
Zones d’activités économiquesIl s’agit de préserver une capacité d’accueil spécifique pour des en-treprises et de l’emploi, tout en distinguant les espaces dévolus aux activités - industries, bureaux, espaces commerciaux, etc. Les règles de hauteur varient selon le type d’activité afin de favoriser l’implantation de bâtiments répondant à des impératifs spécifiques (logistique…). Le Grand Port Maritime de Marseille dispose ainsi d’un zonage spécifique permettant de répondre à son développement et à la spécificité de son activité.
Zones naturelles
tissu de type centralIl s’agit des zones du tissu central où des possibilités d’évolution des formes urbaines existent, dans certains secteurs, tout en protégeant les cœurs d’îlots. Ces zones s’accompagnent de mesures nouvelles comme l’assouplissement des règles de stationnement et une incita-tion à la mixité urbaine au travers, notamment, des rez-de-chaussée - implantation de commerces, artisanat, équipements, services...
Il s’agit des zones de préservation de la nature. Ce zonage permet la gestion et parfois l’usage régulé des milieux naturels.
t e r r i t o i r e s
8
PLU de Marseille
M E R M É D I T E R R A N É E
R A D E D E M A R S E I L L E
I
IIIII
IV
V
VIVII
VIII
IX
X
XI
XII
XIII
XIV
XVXVI
N CartE dEs ZoNagEs siMPLifiÉs
t e r r i t o i r e s
9
PLU de Marseille
Du Plan local d’urbanisme au "PLU" intercommunal
L’approbation du Plan local d’urbanisme, le 28 juin der-
nier, marque la fin d’une étape et ouvre une nouvelle
période, tout aussi stratégique, qui en verra la mise en
œuvre. Les acquis de la phase d’élaboration devront y
être valorisés et des modes d’intervention innovants
seront déployés pour actionner les leviers opérationnels
qui permettront de concrétiser un véritable projet de
territoire.
Une condition préalable s’impose toutefois pour la réus-
site de cette mise en route : ce Plan devra faire l’objet
d’une large appropriation aussi bien par les profession-
nels que par le grand public. Il contribuera activement,
à toutes les démarches liées à la construction de l’espace
Un cadre souple proposé par les orientations d’aménagementLes Orientations d’aménagement sont l’une des pièces constitutives du Plan local d’urbanisme. Elles exposent la manière dont la col-lectivité souhaite mettre en valeur, restructurer ou aménager des secteurs de son territoire, même si elle n’en maîtrise pas le foncier. Elles poursuivent les objectifs du Projet d’aménagement et de déve-loppement durable, complètent le règlement et guident les opéra-teurs dans l’élaboration de projets d’aménagement en assurant une cohérence d’ensemble. Traduction d’études plus pointues, conduites en amont, elles encouragent un urbanisme de projet et améliorent le passage à l’action opérationnelle.
Le Plan local d’urbanisme définit ainsi les premières Orientations d’aménagement territoriales marseillaises. Au nombre de dix-sept, celles-ci couvrent les principaux secteurs de la commune por-teurs d’enjeux qui s’ajoutent aux Zones d’aménagement concerté
et aux espaces relevant de l’Agence nationale de rénovation urbaine ou de l’opération Grand centre-ville. Deux autres Orienta-tions "multi-sites" y figurent aussi : celle des "Franges urbaines" concernant le traitement des interfaces ville-nature, et celle de l’"Habitat" destinée à répondre aux objectifs quantitatifs et qualita-tifs en matière de production de logements et de mixité sociale. Les Orientations d’aménagement marseillaises proposent des principes et des recommandations plutôt que des règles et des prescriptions. Soit un cadre souple. Elles laissent ainsi une latitude certaine au savoir-faire des professionnels et apportent des éléments de dia-logue avec les opérateurs. Chacune d’entre elles propose en outre un parti-pris d’aménagement à travers un plan de situation, un schéma général d’orientations et un texte qui précise les dispositions rela-tives aux affectations, à la composition urbaine, au traitement des espaces publics ou collectifs et des espaces naturels.
Projet de loi : construire plus et mieuxUne grande réforme de l’urbanisme et de l’aménagement est en cours pour répondre à la crise du logement en construisant plus et mieux, mais pas n’importe où. Il s’agit de définir un nouveau cadre juridique pour engager la transition énergétique des territoires, encourager la densification et donner un coup d’arrêt à l’artificialisation des sols.
Cette grande réforme de l’urbanisme utilisera deux vecteurs : les mesures accélérées pour répondre à l’urgence feront l’objet d’ordon-nances (dites "ordonnances Duflot") ; les mesures structurelles qui nécessitent une concertation et un débat parlementaire plus longs seront prises en charge par le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR).
t e r r i t o i r e s
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Plan local d’urbanisme de la ville de Marseille, approuvé par
le Conseil communautaire lors de la séance du 28 juin 2013,
disponible sur le site www.marseille-provence.com
étudesCahiers de territoires - études préalables au diagnostic du PLU,
Agam, Ville de Marseille, juin 2009
Publications • Regards de l’Agam n°13 - Le patrimoine urbain, une nouvelle
ambition, Agam, novembre 2013
• Regards de l’Agam n°5 - Changer de perspective sur
l'agriculture, Agam, avril 2013
• Guide d’utilisation du PLU - Agam, Ville de Marseille,
Communauté urbaine MPM, parution à venir
portrait
portrait
En savoir plus
PLU de Marseille
grenelle 2La loi d’Engagement national pour l’environnement du 12 juillet 2010, dite loi Grenelle II, a modifié par son article 19 le régime et le contenu des Plans locaux d’urbanisme. Compétente désormais en ce domaine, la Communauté urbaine Marseille Provence Métropole, doit élaborer un Plan intercommunal couvrant les dix-huit communes de son territoire avant le 1er janvier 2016.
Certaines des dispositions législatives sont obligatoires :
- le Plan local d’urbanisme doit poursuivre des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de maîtrise de l’énergie, de produc-tion énergétique à partir de sources renouvelables, de préservation de la biodiversité. Ses Orientations d’aménagement deviennent des Orientations d’aménagement et de programmation. Elles comprennent des dispositions sur l’aménagement, l’habitat, les transports et les déplacements ;
- le Projet d’aménagement et de développement durable arrête les orientations générales concernant l’habitat, les transports et les dépla-cements, les communications numériques, l’équipement commercial, le développement économique et les loisirs. Il fixe des objectifs de modération dans la consommation de l’espace et de lutte contre l’éta-
lement urbain. Le diagnostic présente une analyse de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers.
D’autres dispositions sont facultatives :
- le règlement peut fixer une densité minimale de constructions dans des secteurs situés à proximité des transports collectifs existants ou programmés. De même, il peut imposer aux travaux, aux constructions, aux installations et aux aménagements de respecter des performances énergétiques et environnementales renforcées ;
- lorsque les conditions de desserte par les transports publics le per-mettent, le règlement peut enfin fixer un nombre maximal d’aires de stationnement à réaliser lors de la construction de bâtiments destinés à un usage autre que l’habitation. Il peut, en outre, imposer aux construc-tions, travaux, installations et aménagements, de respecter des critères de qualité en matière d’infrastructures et de réseaux de communication électroniques ;
- dans les zones agricoles, il peut aussi délimiter des secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées autorisant éventuellement des construc-tions à condition de ne pas porter atteinte à la préservation des sols, des milieux et des paysages.
métropolitain, à l’amélioration de l’interface ville-port ou
au développement des centralités urbaines, …
Comme tout document de cette nature, le Plan local d’ur-
banisme est amené à évoluer en fonction de la maturité
des projets et des modifications du contexte réglemen-
taire. A très court terme, la déclaration de projet, qui
devient la procédure de droit commun de mise en com-
patibilité du "PLU", devrait occuper une place centrale.
A plus long terme, se profile l’élaboration du Plan local
d’urbanisme intercommunal, tel que l’impose la loi gre-
nelle II. Deux projets de loi devraient d’ailleurs engen-
drer des conséquences importantes sur ces documents
d’urbanisme : le premier concerne l’urbanisme et le loge-
ment, le second la modernisation de l’action publique
territoriale et d’affirmation des métropoles – qui crée,
dans son article 30, la métropole Aix-Marseille-Provence.
Selon la version de la loi adoptée en première lecture, au
mois de juillet dernier, la métropole exercerait, de plein
droit, la compétence en matière de Plan local d‘urba-
nisme en lieu et place des communes. Mais elle pourrait
la déléguer, en partie, à un Conseil de territoire. Ainsi les
périmètres des futurs Plans locaux d’urbanisme intercom-
munal restent encore à préciser.
t e r r i t o i r e s
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T e r r i T o i r e s
Le PLU de Marseille
m iD de Villes sur les impacts urbains des modes de consommation
L’Agam organise le mardi 3 décembre, à 17h30, une confé-
rence sur le thème "Consomm’acteurs : impacts urbains
des modes de consommation" à l’Alcazar avec l’interven-
tion d’Isabelle Van de Walle, directrice du département
Entreprises et action publique du Centre de recherche pour
l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC).
Son intervention sera suivie d’une table ronde animée par
Yves Blisson réunissant les acteurs locaux du commerce
ainsi que les élus locaux concernés par cette thématique.
Les mutations en cours dans le fonctionnement commer-
cial sont intimement liées aux évolutions des dynamiques
urbaines. Les consommateurs et acteurs de la ville re-
définissent leurs choix : recherche de plus de proximité,
e-commerce, prise en compte du coût du transport…
Autant d’éléments qui impactent la manière de consommer
et les attentes urbaines liées au commerce.
m Colloque "participation créative, paysage et urbanisme durable"
Les 5 et 6 décembre 2013, le Pôle développement du-
rable et territoires méditerranéens d'Aix Marseille Univer-
sité, organise un colloque visant à discuter des formes
innovantes de participation dans le domaine du paysage
et de l'urbanisme ainsi que des pratiques des profession-
nels. Groupement de plusieurs centres de recherche rele-
vant des sciences humaines, sociales et de l'environne-
ment, ce pôle a pour ambition de représenter à la fois
une rencontre entre chercheurs et praticiens publics et
privés, et un espace de débats et de propositions dans
une approche pluridisciplinaire et centrée sur la Méditer-
ranée. L’agence d’urbanisme, sensible à ces questions,
a été sollicitée parmi d’autres structures pour un retour
d’expériences sur ses pratiques et ses méthode. Hélène
Balu, responsable du pôle "Territoires durables, Solidari-
tés et Société" animera également deux tables-rondes :
"Participation et parcs naturels" , et "Expériences de parti-
cipation : quelles innovations ?"
m le patrimoine urbain en débat lors des rencontres de l’agam
Le 7 novembre dernier, l’Agence d’urbanisme a réuni au J1,
l’ensemble des professionnels et acteurs du patrimoine pour
une rencontre sur le thème "Patrimoine et projet urbain, les
enjeux de la protection et de la valorisation du patrimoine
urbain". Autour de Claude Vallette, le président de l’Agam,
la table-ronde, animée par Christian Brunner, le directeur
général de l’Agam, a regroupé Christophe Trinquier, chargé
d’étude à l’agence, Hélène Corset, architecte des Bâtiments
de France et chef du Service territorial de l’architecture et
du patrimoine des Bouches-du-Rhône, Roland Carta, archi-
tecte, et Nicolas Mémain, membre de la coopérative Hôtel
du Nord. Après avoir présenté les avancées du Plan local
d'urbanisme sur la question patrimoniale, les échanges
ont abordé les nouvelles dimensions du patrimoine et sa
nécessaire intégration dans le projet urbain. Une visite de
l’exposition "Le Corbusier et la question du brutalisme"
avec Jacques Sbriglio, architecte, commissaire et scéno-
graphe de l’exposition, a ensuite été proposée. Retrouvez
le dossier des Rencontres de l’Agam sur www.agam.org.
N ExPOSItIOn SUr LE COrbUSIEr AU J1
portrait
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Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaiseLouvre & Paix – La Canebière – CS 41858 13221 Marseille cedex 01Tél : 04 88 91 92 31 - e-mail : [email protected]
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Directeur de la publication : Christian BrunnerRédaction : Aurélie Behr, Romain Delaunay, Isabelle ColletConception / Réalisation : Pôle graphique AgamMarseille - Novembre 2013Numéro ISSN : 2266-6257