Points de désaccord entre les jurisprudences nationale et
communautaire
Nathalie Hadjadj-CazierAvocat Associé, DS Avocats
7 décembre 2006
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Marques défensives et obligation d’usage
■ L’existence, au nom d’un même titulaire, de plusieurs marques similaires
Choix stratégique du déposant ou héritage d’un passé ?
■ Seule une des marques déposées est exploitée
■ Risque pour les marques non exploitées ?
1. La Problématique
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■ L’article 15§2 a) du Règlement 40/94 considère comme usage de la marque communautaire son emploi « sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée »
Mais, le règlement ne prévoit pas le cas de dépôts multiples d’un signe similaire
■ L’article L 714-5 du CPI n’envisage pas la présence de marques similaires
Seul « l’usage de la marque sous une forme modifiée n’en altérant pas le caractère distinctif » est assimilé à un usage à titre de marque
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2. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence nationale
Le principe : «l’exploitation d’une marque enregistrée, analogue à une autre marque enregistrée, ne vaut pas exploitation de cette dernière»
Space / Espace – Cass. 17 juillet 1984
Napoléon / N.Napoléon / N. Napoléon et Cie – Cass. 15 janvier 1985
Représentation d’un damier – TGI 27 novembre 1988
Lotus / Au Lotus – Cass.ass.plén. 16 juillet 1992
Rancho / Rancho Fiesta / El Rancho – CA Paris 22 janvier 1999
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2. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence nationale (suite)
Un cas isolé : l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 21 janvier 2000 - Poême / Poeme – SNC Lancôme c/ SARL Papous
«La déchéance étant une sanction, les conditions de son application, doivent être interprétées restrictivement»
L’exploitation d’une marque est assimilée à l’exploitation de l’autre marque déposée sous une forme légèrement modifiée
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2. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence nationale (suite)
Le 14 mars 2006, par trois arrêts, la Cour de Cassation prend position en faveur des marques de défense (Loufrani c/ Pier Import ; Playboy c/ Laporte et Trader Classified ; Media c/ Centrale Directe)
Trois affaires où la Cour d’Appel avait prononcé la déchéance de la marque litigieuse sans prendre en compte l’exploitation de la marque voisine exploitée
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2. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence nationale (suite)
Marque non exploitée Marque exploitée
N°1695775 du 1er octobre 1971 N°97668059 du 28 décembre 1996
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2. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence nationale (suite)
Attendu de principe
L’article L 714-5, alinéas 1 et 2b du CPI « exige seulement que la marque exploitée ne diffère de la marque première enregistrée et non exploitée que par des éléments n’en altérant pas le caractère distinctif, peu important que la marque modifiée ait été elle-même enregistrée »
«La variation du graphisme, de la calligraphie et de la couleur du signe enregistré est minime et n’a eu pour objet que de moderniser la marque en l’adaptant au goût de la clientèle »
Vers une approche pragmatique ?
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3. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence communautaire
Le titulaire de marques italiennes similaires avait échoué dans son opposition à l’encontre d’un dépôt communautaire Bainbridge à défaut d’avoir établi l’usage de ses marques (Bridge, The Bridge, Old Bridge, Over The Bridge, Footbridge, The Bridge Basket The Bridge Waypaker)
L’arrêt Bainbridge du 23 février 2006 - TPICE
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3. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence communautaire (suite)
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Marque communautaire
Marques italiennes
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3. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence communautaire (suite)
La loi italienne admet la validité des marques défensives qui ont pour finalité d’élargir la portée de protection d’une marque antérieure sans être soumise à l’obligation d’usage
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Pour le TPICE, le concept de marque défensive est inconnu du régime de protection de la marque communautaire
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Le Tribunal précise que l’article 15§2 (Rgt 40/94) permet «au titulaire d’une marque d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en modifier le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés» (Point 50).
3. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence communautaire (suite)
Mais, le titulaire ne peut «se soustraire à l’obligation qui lui incombe de faire usage de cette marque en invoquant à son bénéfice l’utilisation d’une marque similaire faisant l’objet d’un enregistrement distinct».
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3. Eléments de réponse apportés par la jurisprudence communautaire (suite)
La prise en compte des enregistrements dits «défensifs» n’est pas compatible avec le régime de protection de la marque communautaire.
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Attention au choix des marques antérieures dans le cadre d’une opposition.
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Incertitudes sur les prérogatives du titulaire
■ L’article 5§1 et 3 dresse le contenu des actes interdits au tiers non autorisé qui fait usage de la marque enregistrée dans la vie des affaires
Sont notamment visés :
L’importation ou l’exportation des produits sous le signe
1. Divergence de rédaction entre les textes communautaires et le Code
L’apposition du signe
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■ Les articles L 716-9 et L 716-10 sanctionnent le fait «d’importer sous tout régime douanier, d’exporter … des marchandises présentées sous une marque contrefaite»
Aucune référence à l’usage dans la vie des affaires
1. Divergence de rédaction entre les textes communautaires et le Code (suite)
■ Le considérant 9 de la Directive qualifie de «fondamental» le fait que « les marques enregistrées jouissent … de la même protection dans la législation de tous les Etats membres»
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■ Les faits : la société Lancôme, titulaire de la marque Nutri-Riche, se voit reprocher par le titulaire de la marque Nutri-Rich, le conditionnement, la détention et l’exportation de produits en vue de leur commercialisation dans un pays tiers
2. L’arrêt Nutri-Rich de la Cour d’Appel de Paris du 1er juin 2005
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2. L’arrêt Nutri-Rich de la Cour d’Appel de Paris du 1er juin 2005 (suite)
■ La Cour procède à une interprétation restrictive de la notion d’usage dans la vie des affaires
• cette notion renvoie à l’univers économique
• suppose l’existence d’un lien avec un client
• et ne peut s’entendre de la circulation de marchandises entre filiales appartenant au même groupe dans un but de gestion et d’organisation interne
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2. L’arrêt Nutri-Rich de la Cour d’Appel de Paris du 1er juin 2005 (suite)
■ La Cour considère que
«le fait de conditionner des produits jamais offerts en France à la vente sous la marque litigieuse détenus uniquement en vue de leur expédition vers une filiale pour être mis licitement sur le marché d’un pays tiers, ne peut être considéré comme un usage dans la vie des affaires »
«n’est donc pas susceptible de porter atteinte à l’objet spécifique du droit des marques»
et
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3. L’arrêt Montex du 9 novembre 2006 (Aff. C-281/05)
Réclamation de Montex
■ Les faits : Montex fabrique des jeans et exporte différentes pièces de Pologne, y compris les signes distinctifs au moyen du scellement douanier – les produits, destinés à être commercialisés en Irlande, transitent par l’Allemagne
Diesel fait retenir par les douanes allemandes la livraison de 5076 pantalons
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3. L’arrêt Montex du 9 novembre 2006 (Aff. C-281/05) (suite)
«la marque enregistrée donne-t-elle à son titulaire le droit d’interdire le transit de marchandises sur lesquelles figure le signe ?»
Condamnation de Montex en première et deuxième instance
Pourvoi devant le Bundesgerichtshof qui surseoit à statuer et pose notamment la question :
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• Concerne les marchandises qui proviennent de pays tiers et qui ne se trouvent pas en libre pratique dans la Communauté
• Toutes les mesures de contrôles ainsi que le versement de droits et taxes sont différés jusqu’au lieu de destination
• Mise sous scellés des marchandises
3. L’arrêt Montex du 9 novembre 2006 (Aff. C-281/05) (suite)
■ L’Analyse de l’Avocat Général
Le régime douanier du transit externe
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• Seuls les actes de commercialisation des marchandises sont de nature à porter atteinte aux droits du titulaire dans l’Etat de transit (Rioglass et Transremar)
• Soupçons/Indices de voir les marchandises commercialisées
− les scellés − le caractère légal ou non de la fabrication dans le pays d’origine − circonstances révélant l’existence d’un risque réel et effectif de fraude (Polo/Lauren et Rolex)
Le transit implique-t-il un usage dans la vie des affaires et donc une violation de la marque ?
3. L’arrêt Montex du 9 novembre 2006 (Aff. C-281/05)– L’analyse de l’Avocat Général (suite)
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■ La Cour considère que :
• Le transit externe, en raison du fait qu’il n’implique aucune commercialisation des marchandises concernées, ne constitue pas un usage de la marque
• Le titulaire d’une marque ne peut interdire le transit que lorsque ces produits font l’objet d’un acte d’un tiers et qui implique nécessairement leur mise dans le commerce
3. L’arrêt Montex du 9 novembre 2006 (Aff. C-281/05) (suite)