Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 3
lesviolences
mieuxfaire
Lutte contre
la France doitfaitesauxfemmes :
CrĂ©Ă©e en 1961 et Prix Nobel de la paix en 1977, Amnesty International est unmouvement mondial composĂ© dâhommes et de femmes venus dâhorizonsdivers et rĂ©partis dans le monde, qui Ćuvrent pour le respect et la protection
de tous les droits inscrits dans la DĂ©claration universelle des droits de lâHomme.Amnesty International est indĂ©pendante de toute tendance politique, de tout intĂ©rĂȘtĂ©conomique ou croyance religieuse et sâappuie sur un rĂ©seau de plus de2,7 millions de membres et de sympathisants dans plus de 150 pays et territoires.Amnesty International mĂšne de front ses missions de recherche et dâaction dansle but de prĂ©venir et de faire cesser les graves atteintes aux droits humains, quelsquâils soient â civils, politiques, sociaux, culturels ou Ă©conomiques. Pour mener Ă bien ces missions, elle ne cherche Ă obtenir ni nâaccepte aucune subvention niaucun don des Etats ou des partis politiques.Amnesty International France (AIF) a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e en 1971. Son financement reposeessentiellement sur la gĂ©nĂ©rositĂ© du public (plus de 200 000 donateurs actifs), surles ventes de produits de soutien et les cotisations de ses membres (prĂšs de 20 000).Amnesty International France est agrĂ©e par le ComitĂ© de la charte du don enconfiance et se soumet Ă son contrĂŽle pour le respect des principes de la charte dedĂ©ontologie : fonctionnement statutaire et gestion dĂ©sintĂ©ressĂ©e, rigueur de la ges-tion, qualitĂ© de la communication et de la collecte de fonds, transparence financiĂšre.
FĂ©vrier 2010SF : SF10F010
RĂ©fĂ©rence : 530.003En couverture : extrait dâun des trois visuels de la campagne gĂ©nĂ©rique « Les violationsdes droits humains sont toujours Ă la mode », rĂ©alisĂ©e par TBWA\PARIS pour AmnestyInternational France - 2010.
AMNESTY INTERNATIONAL FRANCE76 boulevard de la Villette - 75019 Paris
www.amnesty.fr
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire4
En 2006, Amnesty International publiait un rapport « Violences faites aux femmes enFrance. Une affaire dâĂtat ». Amnesty International rappelait Ă lâĂtat ses obligations degarantir et de faire respecter les droits humains, dont la violence faite aux femmes
constitue une violation.
Force est de constater quâaujourdâhui, en France, la violence contre les femmes au sein ducouple nâa pas diminuĂ©. En 2008, 156 femmes sont dĂ©cĂ©dĂ©es, victimes de leur compagnonou ex-compagnon, soit un dĂ©cĂšs tous les deux jours et demi1. Sur la mĂȘme annĂ©e, 27hommes sont Ă©galement dĂ©cĂ©dĂ©s, victimes de leur compagne ou ex-compagne, 11 dâen-tre eux Ă©taient auteurs de violence sur leur partenaire. Les femmes sont donc en trĂšsgrande majoritĂ© victimes de cette violence qui est une violence spĂ©cifique, universelle maispas inĂ©vitable.
Peu de victimes accÚdent à la justice. En 2007 et 2008, moins de 10% des femmes victimesde violence commises par leur conjoint auraient porté plainte2.
De mĂȘme, les mutilations sexuelles fĂ©minines sont en rĂ©gression dans notre pays mais nâontpas disparu. Les mariages forcĂ©s sont un phĂ©nomĂšne encore trĂšs mal Ă©valuĂ© en France. Lesvictimes de la traite des ĂȘtres humains sont mal protĂ©gĂ©es car mal identifiĂ©es.
Pourtant depuis 2006, la France a renforcĂ© la lĂ©gislation et les pratiques visant Ă prĂ©venir etrĂ©primer les violences faites aux femmes. Ces violences relĂšvent de plus en plus du droitpĂ©nal, les auteurs sont de plus en plus poursuivis et punis, les victimes sont davantage sou-tenues et accueillies et la prĂ©vention est renforcĂ©e. Des plans dâactions triennaux (2005-2007et 2008-2010) ont permis une meilleure prise en compte du phĂ©nomĂšne et des outils ont Ă©tĂ©mis en place pour mieux lâĂ©valuer. En 2010, la violence contre les femmes a Ă©tĂ© dĂ©crĂ©tĂ©egrande cause nationale, ouvrant ainsi droit Ă la diffusion gratuite de douze messages sur lesservices des sociĂ©tĂ©s nationales de programme, France TĂ©lĂ©visions et Radio France, pardes organismes Ă but non lucratif labellisĂ©s.
Face Ă lâabsence de rĂ©sultats satisfaisants de sa politique de lutte contre les violences faitesaux femmes, lâĂtat doit donc mieux faire.
Pour Amnesty International, cette lutte doit rester une affaire dâĂtat. LâĂtat a une obligation dediligence, ce qui implique quâil a le devoir dâagir avec diligence pour prĂ©venir et punir les vio-lations des droits humains, quâelles soient commises par ses propres agents ou par des ac-teurs privĂ©s, non Ă©tatiques.
Ainsi, lâĂtat est responsable de ses actes, mais aussi lorsquâil nâagit pas. Le fait de ne paspunir un acte de violence ou de ne pas avoir pris toutes les dispositions pour protĂ©ger une per-sonne susceptible dâĂȘtre victime de violences graves doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un man-quement de lâĂtat Ă ses engagements internationaux.
Pour ĂȘtre efficace, la politique de lutte contre les violences faites aux femmes doit ĂȘtre am-bitieuse. Face Ă ces violences, lâĂ©laboration dâune rĂšglementation dâensemble constitue lefondement dâune riposte globale et appropriĂ©e, qui doit ĂȘtre appliquĂ©e avec cohĂ©rence. Acette fin, elle doit contenir des dispositions qui en garantissent lâapplication effective sur toutle territoire et prĂ©voir les moyens dâĂ©valuation et de suivi.
Si la lĂ©gislation doit encore ĂȘtre amĂ©liorĂ©e, elle serait en rĂ©alitĂ© dĂ©jĂ relativement efficace sielle Ă©tait effectivement utilisĂ©e et appliquĂ©e avec rigueur. Ainsi, trop dâauteurs nâont pas Ă rĂ©-pondre de leurs actes et lâimpunitĂ© subsiste. Les femmes continuent dâĂȘtre victimes, non seu-lement de tels actes mais encore de la procĂ©dure judiciaire appliquĂ©e de maniĂšre hĂ©tĂ©rogĂšne
Introductiongénérale
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 5
sur le territoire. La prĂ©vention et la protection des victimes doivent ĂȘtre au cĆur des dispo-sitifs et des innovations sont nĂ©cessaires pour parfaire le dispositif lĂ©gal.
Enfin, lâefficacitĂ© de la politique de prĂ©vention et de lutte contre les violences faites auxfemmes est conditionnĂ©e Ă une meilleure coordination des moyens mis en Ćuvre et Ă un fi-nancement adĂ©quat de la part de lâĂtat. Sans le financement nĂ©cessaire, les plans de luttene peuvent ni se dĂ©velopper ni se rĂ©vĂ©ler efficaces. Si la volontĂ© politique ne se traduit paspar des moyens financiers suffisants, les dĂ©clarations, aussi ambitieuses soient-elles, restentsymboliques.
LâAssemblĂ©e nationale et le SĂ©nat ont montrĂ© leurs prĂ©occupations dâune lutte plus efficace.Ainsi, Ă lâAssemblĂ©e nationale, la mission dâĂ©valuation de la politique de prĂ©vention et delutte contre les violences faites aux femmes (ci-aprĂšs nommĂ©e mission parlementaire)crĂ©Ă©e en dĂ©cembre 2008, a formulĂ© 65 propositions dans son rapport dâinformation du 7 juil-let 2009 (ci-aprĂšs nommĂ© rapport parlementaire du 7 juillet 2009). Une partie de ces re-commandations a Ă©tĂ© reprise dans une proposition de loi dĂ©posĂ©e le 27 novembre 2009(ci-aprĂšs nommĂ©e proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novembre 2009).Cette proposition de loi recoupe en partie les principaux thĂšmes abordĂ©s par la propositionde loi « relative aux violences au sein des couples et aux incidences de ces derniĂšres sur lesenfants » dĂ©posĂ©e au SĂ©nat le 25 novembre 2009 (ci-aprĂšs nommĂ©e proposition de loi duSĂ©nat du 25 novembre 2009).
En dĂ©cembre 2009, une commission spĂ©ciale a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e Ă lâAssemblĂ©e nationale afin dâĂ©tu-dier la proposition de loi3A. Cette commission a rendu son rapport le 10 fĂ©vrier 20103B, lâexa-men en sĂ©ance publique du texte amendĂ© est prĂ©vu le 25 fĂ©vrier. AuditionnĂ©e par lacommission le 27 janvier, la ministre de la justice et des libertĂ©s, Madame MichĂšle Alliot-Marie, a dĂ©clarĂ© que « Les dĂ©lais de mise en Ćuvre de ce texte seront rapides, dans la me-sure oĂč il ne devrait y avoir que trĂšs peu de dĂ©crets dâapplication. La navette parlementairedevrait elle aussi ĂȘtre brĂšve, notamment si lâon peut espĂ©rer un vote conforme dĂšs la pre-miĂšre lecture.4 »
Enfin, si la connaissance des violences faites aux femmes sâest incontestablement amĂ©lio-rĂ©e, des pans entiers de la problĂ©matique demeurent encore peu ou mal connus aujourdâhui.
Mieux connaĂźtre le phĂ©nomĂšne des violences contre les femmes pour mieux les combattre,amĂ©liorer la coordination des acteurs impliquĂ©s pour en accroĂźtre lâefficacitĂ©, tels sont les ob-jectifs de lâobservatoire dĂ©partemental crĂ©Ă© Ă lâinitiative du Conseil gĂ©nĂ©ral, en Seine Saint-Denis. Premier de ce genre en France, il est Ă la fois un espace dâĂ©changes et de rĂ©flexion,un outil dâanalyse et de recensement et un vecteur de communication et dâinformation. Cetobservatoire constitue un exemple de bonne pratique qui devrait ĂȘtre Ă©tendu aux autres dĂ©-partements et au niveau national.
De mĂȘme, pour amĂ©liorer la connaissance du phĂ©nomĂšne et donc la lutte, le recueil des in-formations statistiques doit ĂȘtre harmonisĂ© afin de pouvoir dresser un Ă©tat des lieux annuelfiable. VĂ©ritable mesure des violences faites aux femmes, cet Ă©tat des lieux permettrait demieux Ă©valuer lâefficacitĂ© des politiques publiques de lutte contre ces violences.
Amnesty International France recommande aux autoritĂ©s de mettre en place dans les plusbrefs dĂ©lais un observatoire national des violences faites aux femmes afin de centraliser larĂ©alisation et la diffusion dâĂ©tudes ayant trait Ă ces violences. ChargĂ© de coordonner la col-lecte de donnĂ©es sexuĂ©es et dâorganiser des enquĂȘtes portant sur les violences faites auxfemmes, son travail serait synthĂ©tisĂ©, chaque annĂ©e, dans un rapport public remis au premierministre et au parlement.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire6
I LES VIOLENCES AU SEIN DU COUPLE........................................................Page 08
1. La prĂ©vention des violences faites aux femmes ....................................................................Page 081.1 Lâinformation et la sensibilisation doivent ĂȘtre une prioritĂ© pour les autoritĂ©s ........Page 08Les campagnes nationales de prĂ©vention et de sensibilisation du grand publicdoivent ĂȘtre multipliĂ©es et pĂ©rennisĂ©es ............................................................................................................Page 09Le rĂŽle de lâEducation nationale ......................................................................................................................Page 101.2 La nĂ©cessitĂ© dâune politique de formation cohĂ©renteet systĂ©matique de tous les acteurs ................................................................................Page 10La formation initiale et continue des personnels de la police et de la gendarmeriedoit ĂȘtre systĂ©matique pour tous les agents ....................................................................................................Page 11La formation des magistrats reste un enjeu primordial dans la prĂ©ventionet la lutte contre les violences faites aux femmes ............................................................................................Page 12
2 La protection des victimes de violences ..................................................................................Page 122.1. La prise en charge des victimes de violences sâest amĂ©liorĂ©e et professionnalisĂ©e,mais des progrĂšs restent Ă faire pour gĂ©nĂ©raliser les bonnes pratiques........................Page 12La prise en charge des victimes dans le parcours judiciaire doit ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©e ..........................................Page 14LâamĂ©lioration de la prise en charge des femmes victimes de violences passe Ă©galementpar le dĂ©veloppement de vĂ©ritables interlocuteurs de proximitĂ© ......................................................................Page 14Des lieux dâaccueil de jours Ă identifier et labelliser ........................................................................................Page 14Lâaccueil et la prise en charge mĂ©dico-lĂ©gale des victimes doivent ĂȘtre harmonisĂ©s et renforcĂ©s ..................Page 15LâĂ©valuation de lâincapacitĂ© totale de travail (ITT) comme preuve des violencesdoit ĂȘtre Ă©tendue aux violences psychologiques et harmonisĂ©e ....................................................................Page 15
2.2 Le traitement judiciaire des violences ......................................................................Page 16Une Ă©volution cohĂ©rente des dispositifs lĂ©gislatifs ..........................................................................................Page 16La rĂ©ponse pĂ©nale aux violences doit ĂȘtre systĂ©matique et prĂ©coce pour« faire cesser la situation de violence avant qu'elle soit enracinĂ©e » ..............................................................Page 17Les mains courantes soient transmises systĂ©matiquement aux parquets........................................................Page 17La circulation de lâinformation entre les juridictions pĂ©nales et civiles doit ĂȘtre mise en place effectivement ......Page 18Une vigilance particuliĂšre est nĂ©cessaire quant au recoursĂ la mĂ©diation pĂ©nale en matiĂšre de violences au sein du couple ..................................................................Page 18Les mesures dâĂ©loignement de lâauteur des violences doivent ĂȘtre effectivement mises en Ćuvre ..............Page 19Au civil, lâĂ©viction du domicile de lâauteur des violences ..................................................................................Page 19Au pĂ©nal, lâĂ©viction du domicile de lâauteur des violences................................................................................Page 20Le bracelet Ă©lectronique : nouvelle mesure de contrĂŽle de lâapplication de lâĂ©loignement du conjoint violent ....Page 20
2.3 La prise en charge des auteurs de violence doit ĂȘtre organisĂ©e,financĂ©e et coordonnĂ©e pour lutter contre les risques de rĂ©cidives ..............................Page 21Des profils qui justifient une prise en charge systĂ©matique..............................................................................Page 21La loi a organisĂ© le suivi des auteurs de violences Ă tous les stades de la procĂ©dure judiciaire ....................Page 21
2.4 La disparitĂ© des politiques pĂ©nales menĂ©es par les parquetsreste un obstacle important Ă lâapplication pleine et uniforme de la loi ........................Page 22
2.5 La protection des victimes Ă©trangĂšres ......................................................................Page 22LâaccĂšs au droit au sĂ©jour des femmes Ă©trangĂšres en situation rĂ©guliĂšre,victimes de violences conjugales. Une adaptation partielle de la rĂ©glementation ..........................................Page 23Des freins trĂšs importants Ă la protection des femmesvictimes de violences qui sont en situation irrĂ©guliĂšre subsistent. ..................................................................Page 23
3. Lâorganisation et la coordination des moyenspour lutter contre les violences faites aux femmes ....................................................................Page 24
3.1 La coordination de la politique de lutte contre les violences faitesaux femmes au niveau national et local doit ĂȘtre renforcĂ©e et systĂ©matisĂ©e................Page 243.2 Le financement des moyens doit ĂȘtre Ă la hauteur des objectifs gouvernementaux ..Page 263.3 Le rĂ©seau associatif est important et polyvalent et doit ĂȘtre activement soutenu....Page 26Les moyens de la plate-forme tĂ©lĂ©phonique du numĂ©ro dâappel national3919 « violences conjugales infos » doivent ĂȘtre renforcĂ©s ............................................................................Page 26Les subventions nationales 2009 aux associations sont en baisse de 18,8% par rapport Ă 2006 ..................Page 27La dĂ©centralisation accroĂźt les disparitĂ©s territoriales et met en pĂ©ril la pĂ©rennitĂ© des fonds ..........................Page 27
Sommaire
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 7
4. LâĂ©volution du droit ................................................................................................................Page 274.1 La proposition de crĂ©ation dâune ordonnance de protection ....................................Page 284.2 La question des dĂ©lits de violences psychologiques ou habituelles ........................Page 28
II LES MUTILATIONS SEXUELLES FĂMININES (MSF) ....................................Page 30
Toute mutilation sexuelle fĂ©minine est un acte de violence contre la femme,qui Ă©quivaut Ă la violation de ses droits fondamentaux ....................................................................................Page 30En FranceâŠ......................................................................................................................................................Page 30
1. La prévention des mutilations sexuelles fémininespasse par la formation et la sensibilisation ............................................................................Page 31
2. Le traitement judiciaire des mutilations sexuelles fĂ©minines2.1 La rĂ©pression des MSF a Ă©tĂ© renforcĂ©e ....................................................................Page 31Le dĂ©lai de prescription en matiĂšre dâaction publique a Ă©tĂ© allongĂ© ................................................................Page 31La rĂ©pression des mutilations sexuelles commises Ă lâĂ©tranger a Ă©tĂ© renforcĂ©e..............................................Page 31Le secret professionnel peut ĂȘtre levĂ© en cas de mutilations sexuelles ..........................................................Page 31La portĂ©e de ces avancĂ©es lĂ©gislatives est amoindrie en raison dâune application hĂ©tĂ©rogĂšne des textes ....Page 32
3. La protection des victimes ......................................................................................................Page 32
III LA LUTTE CONTRE LES MARIAGES FORCĂS ............................................Page 33
Mesurer lâampleur du phĂ©nomĂšne est un prĂ©alable indispensableĂ la prĂ©vention et la rĂ©pression des mariages forcĂ©s ................................................................Page 33La prĂ©vention reste au cĆur de la lutte contre les mariages forcĂ©s..........................................Page 34Les bonnes pratiques....................................................................................................................Page 34La protection des victimes ..........................................................................................................Page 35
La proposition de crĂ©ation dâune ordonnance de protection des victimes de mariage forcĂ©............................Page 35Lâintroduction dans le code pĂ©nal dâun dĂ©lit de contrainte au mariage ............................................................Page 35
IV LA TRAITE DES ĂTRES HUMAINS ..............................................................Page 37
Le phĂ©nomĂšne de la traite des ĂȘtres humains en France ................................................................................Page 38
1. L'identification des personnes victimes de la traite des ĂȘtres humains :un Ă©lĂ©ment crucial de la protection ............................................................................................Page 38
L'absence dâun dispositif national dâidentification des victimes ........................................................................Page 38Lâidentification par la sensibilisation et la formation des agents compĂ©tents....................................................Page 39
2. La protection et lâassistance des victimes : le principe « protection contre coopĂ©ration »....Page 3930 jours : un dĂ©lai de rĂ©flexion et de rĂ©tablissement trop court ........................................................................Page 39Un droit au sĂ©jour conditionnĂ©..........................................................................................................................Page 39
3. La protection des victimes dans le cadre de la procĂ©dure dâasile ........................................Page 40Les conditions de la demande dâasile auprĂšs delâOffice français de protection des rĂ©fugiĂ©s et apatrides (OFPRA) ..................................................................Page 40Les conditions dâaccĂšs Ă une rĂ©elle procĂ©dure dâasile ..................................................................................Page 40La prise en compte par les institutions françaises des persĂ©cutions au titre de la traite ................................Page 41
RECOMMANDATIONS ......................................................................................Page 42
ANNOTATIONS DE BAS DE PAGES..................................................................Page 46
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire8
«Alors qu'un individu rend visite à son ex-épouse et sestrois enfants, ùgés de 3 à 12 ans, il porte à celle-ci unequarantaine de coups de couteau et l'égorge sous les
yeux des enfants. L'auteur, qui n'avait pas accepté la sépara-tion, aurait agi pour le respect de son « honneur ».
« Sorti depuis 15 jours de prison pour des violences sur saconcubine, un individu jaloux et violent revoit sa compagne,qui était hébergée dans un foyer pour femmes. Elle lui expliquene plus vouloir revenir avec lui. Ne le supportant pas, en pleinerue, il lui porte une trentaine de coups de couteau5. »
De l'Ă©tude nationale menĂ©e sur les morts violentes consta-tĂ©es au sein du couple au cours de l'annĂ©e 2008, il ressortquâen France, en moyenne, une femme dĂ©cĂšde tous les deuxjours et demi victime de son compagnon ou ex-compagnon.
Au cours de lâannĂ©e 2008, 184 personnes sont dĂ©cĂ©dĂ©es, vic-times de leur partenaire ou ex-partenaire de vie (conjoint,concubin, pacsĂ© ou « ex » dans les trois catĂ©gories).
ïżœ 156 femmes sont dĂ©cĂ©dĂ©es victimes de leur compagnonou ex-compagnon
ïżœ 27 hommes sont dĂ©cĂ©dĂ©s, victimes de leur compagne ouex-compagne
ïżœ 1 femme est dĂ©cĂ©dĂ©e victime de sa compagne
Cetteviolencesâexerçantdans lecadre familial, neufenfantsontĂ©ga-lement Ă©tĂ© victimes des violences mortelles exercĂ©es par leur pĂšre.
En incluant les suicides des auteurs et les homicides commissimultanément avec ceux du partenaire de vie, ces violencesmortelles ont occasionné au total le décÚs de 254 personnes.
En France, au cours de lâannĂ©e 2006, une femme mourraittous les trois jours sous les coups de son compagnon.
La violence au sein du couple en France nâa donc pas diminuĂ©.
1. LA PRĂVENTION DES VIOLENCESFAITES AUX FEMMES
Lâinformation, la sensibilisation et la formation sont au cĆur dela prĂ©vention des violences faites aux femmes.
En juillet 2009, la mission parlementaire a rappelĂ© aux auto-ritĂ©s que « la prĂ©vention des violences passe par le repĂ©ragedes femmes victimes le plus prĂ©cocement possible, par lesprofessionnels (de santĂ© notamment) et dans tous les lieux oĂčces violences peuvent sâexercer, y compris dans lâentreprise.Mais la prĂ©vention nĂ©cessite une action encore plus en amontqui mobilise lâĂducation nationale et les mĂ©dias afin de faireĂ©voluer des comportements et des reprĂ©sentations stĂ©rĂ©oty-pĂ©s qui peuvent se rĂ©vĂ©ler sources de violence6. »
Pour Amnesty International France, si depuis 2006 des avan-cĂ©es peuvent ĂȘtre constatĂ©es en termes dâinformation et desensibilisation, des progrĂšs importants restent Ă faire concer-nant la formation de tous les acteurs impliquĂ©s dans la luttecontre ces violences.
1.1 Lâinformation et la sensibilisation doiventĂȘtre une prioritĂ© pour les autoritĂ©s
En 2006, dans son rapport sur les violences faites auxfemmes en France, Amnesty international recommandait Ă lâĂtat français de « sâassurer que les numĂ©ros verts et lâinfor-mation sur le droit des femmes soient accessibles Ă tous ettoutes. » et « que des campagnes de sensibilisation soient rĂ©-guliĂšrement organisĂ©es au niveau national7. »
Il est en effet vital pour les victimes dâĂȘtre informĂ©es de leursdroits car cela leur permet de les revendiquer. Sans cette in-formation, beaucoup dâentre elles continueront de souffrir ensilence. Si des mesures visant Ă garantir aux victimes de vio-lences lâaccessibilitĂ© de lâinformation ont Ă©tĂ© mises en placepar les autoritĂ©s françaises, avec notamment la crĂ©ation dela plate forme dâĂ©coute tĂ©lĂ©phonique nationale du 3919 et lesite internet www.stop-violences-femmes.gouv.fr, le deuxiĂšmeplan global triennal (2008-2010) lancĂ© le 21 novembre 2007par le SecrĂ©tariat dâĂtat Ă la SolidaritĂ©, a fait le constat que les« violences sont vĂ©hiculĂ©es par des stĂ©rĂ©otypes inaccepta-bles » et quâ« elles sont Ă©galement encore trop souvent ca-chĂ©es et [que]leur ampleur doit continuer Ă ĂȘtre dĂ©noncĂ©e ».
Pour y remĂ©dier, lâobjectif 4 du plan vise à « accroĂźtre lâeffortde sensibilisation de la sociĂ©tĂ© dans son ensemble [âŠ] pourengager les femmes Ă ne plus subir ces violences sans rĂ©a-gir et Ă leur faire connaĂźtre les dispositifs existants Ă traverslâaction des pouvoirs publics et des rĂ©seaux associatifs8 ».
Depuis 2006, plusieurs campagnes nationales dâinformationet de sensibilisation ont Ă©tĂ© lancĂ©es tant sur le thĂšme des vio-lences au sein du couple que sur celui des mariages forcĂ©s etdes mutilations sexuelles fĂ©minines et une action de rĂ©flexionsur lâimage des femmes dans les mĂ©dias a Ă©tĂ© engagĂ©e parle gouvernement.
DestinĂ©s Ă une large diffusion, plusieurs guides mĂ©thodolo-giques ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s et constituent des rĂ©pertoires debonnes pratiques ou des outils dâinformation pour les victimeset les professionnels9.
Mais la diffusion de ces outils nâest pas toujours gĂ©nĂ©ralisĂ©eou est parfois diffĂ©rĂ©e. Plusieurs mois peuvent sâĂ©couler entrela sortie dâun document et sa diffusion sur tout le territoire. Deplus, leur utilisation par les acteurs concernĂ©s doit ĂȘtre systĂ©-matisĂ©e pour que lâapplication des recommandations quâilscontiennent soit effective et homogĂšne sur le territoire.
Enfin, dans le but de donner une visibilité supplémentaire à lalutte contre les violences faites aux femmes, le premier mi-nistre, Monsieur François Fillon, a annoncé le 25 novembre2009, que la lutte contre les violences faites aux femmes se-rait la « Grande cause nationale 2010 ».
Pour le premier ministre, « lâattribution de ce label, câestd'abord la reconnaissance de lâimportance que le gouverne-ment accorde Ă cette cause. Mais câest aussi la reconnais-sance du travail effectuĂ© par vos associations. Sans votreaction de terrain, la mobilisation des services de l'Ătat ne pour-
I Lesviolencesauseinducouple
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 9
rait pas porter ses fruits. Cette reconnaissance officielle, jepense qu'elle va offrir au combat des associations une visibi-litĂ© accrue et un accĂšs qui est essentiel aux medias pour pour-suivre ce qui est d'abord une Ćuvre de sensibilisation10. »
Les campagnes nationales de prĂ©vention et desensibilisation du grand public doivent ĂȘtremultipliĂ©es et pĂ©rennisĂ©es
Pour Amnesty International, les campagnes nationales desensibilisation sont un moyen dâaction pour lutter contre lesviolences faites aux femmes. Vecteurs dâinformation auprĂšsdes victimes mais aussi des tĂ©moins, ces campagnes per-mettent de « briser le silence ».
En 2008, une campagne sur lâensemble des violences faitesaux femmes "Ne laissez pas la violence sâinstaller. RĂ©agissez"a Ă©tĂ© lancĂ©e par le SecrĂ©tariat dâĂtat Ă la SolidaritĂ©. Cettecampagne a Ă©tĂ© conçue comme le support de communicationdu deuxiĂšme plan global triennal (2008-2010) contre les vio-lences faites aux femmes.
Pour la SecrĂ©taire dâĂtat Ă la SolidaritĂ©, Madame ValĂ©rie LĂ©-tard, cette campagne se voulait une vĂ©ritable rupture avec lesprĂ©cĂ©dentes campagnes en interpellant les femmes victimesde violence, mais Ă©galement les tĂ©moins de ces violences etles auteurs, avec un leitmotiv rappelant que ces violences ontde multiples formes." Psychologique, verbale ou physique, laviolence isole. Parlez-en".
« De campagne en campagne, aux chiffres mortifĂšres corres-pondait la rĂ©pĂ©tition sans fin et sans espoir dâun long martyrqui ne laissait aucune porte de sortie. Le constat dâune cruautĂ©ordinaire conduite Ă son point ultime de non-retour. Peu Ă peusâinstallait lâimage dâune femme meurtrie, Ă terre, gisante,morte : femme battue dans sa cuisine par son mari ou son fils,visage tumĂ©fiĂ©, sac de morgue refermĂ©, femme autopsiĂ©e,fĆtus ensanglantĂ©, nom sur une pierre tombaleâŠ
Cette communication au registre morbide risquait Ă termedâĂȘtre contreproductive parce que dĂ©sespĂ©rante et ne lais-sant aucune place Ă lâaction. Cette longue litanie doloriste ris-quait aussi Ă terme de provoquer la saturation et le rejet. Unerupture Ă©tait nĂ©cessaire. La campagne presse et le site ont encommun le choix dâun registre combatif avec un mot dâordrequi incite Ă lâaction « Ne laissez pas la violence sâinstaller. RĂ©a-gissez11. »
En juin 2009, une campagne tĂ©lĂ©visĂ©e visant spĂ©cifiquementles violences verbales et psychologiques12 a Ă©tĂ© diffusĂ©e surlâensemble des chaĂźnes hertziennes. Cependant, cette cam-pagne nâa durĂ© que du 11 juin 2009 au 1er juillet 2009 et unedurĂ©e aussi brĂšve nâest pas un dĂ©lai pertinent pour avoir unrĂ©el impact.
Comme le relĂšve Madame Ernestine Ronai, responsable delâObservatoire des violences envers les femmes de SeineSaint Denis, « câest par la libĂ©ration de la parole quâelle pro-duit que lâon Ă©value lâimpact dâune campagne ».
Pour ĂȘtre efficaces, les campagnes nationales de sensibilisa-tion doivent donc ĂȘtre de qualitĂ© et sâinscrire dans la durĂ©e.
1. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises dâintensifier son actiondâinformation et de sensibilisation notamment enmultipliant les campagnes dâinformation et desensibilisation, et en pĂ©rennisant leur durĂ©e.
La prévention des violences faites aux femmes relÚve ausside la responsabilité des médias
Pour Amnesty International, lâimage que donnent les mĂ©diasdes femmes et des violences quâelles subissent peut avoir deseffets considĂ©rables13.
Pour quâune plus grande attention soit prĂȘtĂ©e aux contenusportant atteinte Ă lâimage de la femme, voire incitant Ă la vio-lence Ă leur encontre, les mĂ©dias doivent ĂȘtre partie prenantede la prĂ©vention des violences faites aux femmes en garan-tissant le respect de la dignitĂ© humaine. Câest tout le sens dela Recommandation Rec (2002) du ComitĂ© des ministres duConseil de lâEurope qui incite notamment les Ătats membresà « encourager les mĂ©dias Ă promouvoir une image non stĂ©-rĂ©otypĂ©e de la femme et de lâhomme, fondĂ©e sur le respectde la personne humaine et de sa dignitĂ©, et Ă Ă©viter les pro-ductions associant violence et sexe14 ».
Le ComitĂ© pour lâĂ©limination de la discrimination Ă lâĂ©gard desfemmes a demandĂ© aux Ătats parties Ă la Convention « quedes mesures efficaces soient prises pour que les mĂ©dias res-pectent et incitent Ă respecter la femme15 » et, dans ses Ob-servations finales sur le rapport de la France en avril 2008, ilrecommandait Ă la France de continuer dâencourager les mĂ©-dias Ă promouvoir le changement dans les rĂŽles et tĂąches at-tribuĂ©s aux femmes et aux hommes16.
En mars 2008, Madame ValĂ©rie LĂ©tard, SecrĂ©taire dâĂtat Ă laSolidaritĂ©, a chargĂ© Madame MichĂšle Reiser de constituerune commission de rĂ©flexion sur lâimage des femmes dansles mĂ©dias. Lâenjeu Ă©tait dâanalyser le dĂ©calage entre les stĂ©-rĂ©otypes qui continuent Ă sâappliquer Ă lâimage des femmes etla pluralitĂ© de leurs rĂŽles familial et social, de leurs activitĂ©s etde leurs aspirations. Dans son rapport du 25 septembre 2008,la commission constatait alors que le poids des clichĂ©s et desstĂ©rĂ©otypes continue Ă peser et Ă compromettre les progrĂšsen faveur des femmes et que « malgrĂ© les efforts des profes-sionnels de la publicitĂ©, de la presse et de lâaudiovisuel, mal-grĂ© lâadoption de rĂšgles dĂ©ontologiques, certaines images,certains messages ou propos continuent de vĂ©hiculer des re-prĂ©sentations souvent trĂšs stĂ©rĂ©otypĂ©es, parfois mĂȘmes dĂ©-gradantes de lâimage de la femme17. »
En France, lâobligation de garantir le respect de la dignitĂ© hu-maine figure parmi les obligations faites aux sociĂ©tĂ©s audio-visuelles obtenant une autorisation dâĂ©mettre sur le territoirenational. Les textes encadrant lâactivitĂ© des mĂ©dias visent lesnotions dâatteinte Ă la dignitĂ© humaine et dâincitation Ă la vio-lence18.
Le Conseil supĂ©rieur de lâaudiovisuel (CSA) exerce uncontrĂŽle sur les chaĂźnes de tĂ©lĂ©visions et les radios publiqueset privĂ©es avec deux objectifs : la protection de lâenfance et delâadolescence ainsi que lâinterdiction des propos et comporte-ments discriminatoires ou attentatoires au respect de la di-gnitĂ© humaine.
LâAutoritĂ© de rĂ©gulation professionnelle de la publicitĂ© aadoptĂ© en octobre 2001 une recommandation relative à « lâImage de la personne humaine » et signĂ© en novembre2003 une DĂ©claration commune sur le respect de la personnedans la production publicitaire, valant engagements rĂ©ci-proques sur des objectifs communs avec la Ministre dĂ©lĂ©guĂ©eĂ la ParitĂ© et Ă lâĂgalitĂ© professionnelle.
Les pouvoirs dont ces deux instances sont dotĂ©es, ainsi quela Commission de classification des Ćuvres cinĂ©matogra-phiques, leur permettent dâexercer un contrĂŽle au regard tantde la protection de la dignitĂ© humaine que de la rĂ©pressionde la provocation Ă la haine ou Ă la violence en raison dusexe.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire10
Il importe donc que lâattention des instances de rĂ©gulation soitattirĂ©e sur la thĂ©matique particuliĂšre de la lutte contre les vio-lences faites aux femmes. En effet, le rapport sur lâimage desfemmes dans les mĂ©dias constate Ă©galement, de fait, la ten-dance dâun organisme de rĂ©gulation tel que le CSA Ă apprĂ©-hender la question du traitement de lâimage des femmes dansles mĂ©dias de la mĂȘme façon que celle des minoritĂ©s dites «visibles ». Pour les rĂ©dacteurs du rapport, cette approche leconduirait Ă nĂ©gliger les spĂ©cificitĂ©s de la lutte contre les stĂ©-rĂ©otypes sexistes et dĂ©gradants pour lâimage des femmespour ne rĂ©aliser quâun contrĂŽle au regard de la diversitĂ©.
Pour ces raisons, le Collectif national pour les droits desfemmes et le rapport sur lâimage des femmes dans les mĂ©-dias ont proposĂ© dâaccorder aux associations de dĂ©fense desdroits des femmes le droit de saisine du CSA lequel pourraitdĂ©clencher une procĂ©dure de mise en demeure et infliger lessanctions prĂ©vues Ă lâarticle 42 de la loi n° 86-1067 du 30 sep-tembre 1986 relative Ă la libertĂ© de communication.
La proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novem-bre 2009 propose dâouvrir aux associations de dĂ©fense desdroits des femmes le droit de saisine du CSA et dâintroduiredans la loi relative aux publications destinĂ©es Ă la jeunesse,lâinterdiction dâinciter aux prĂ©jugĂ©s sexistes car seuls les prĂ©-jugĂ©s ethniques y sont actuellement mentionnĂ©s19. Ce textepropose Ă©galement dâinclure explicitement les violences faitesaux femmes dans les dispositions relatives Ă la lutte contreles contenus pouvant inciter Ă la violence20.
Le rĂŽle de lâĂducation nationale
En 2006, Amnesty International recommandait Ă lâĂtat fran-çais dâorganiser en lien avec lâĂducation nationale une sensi-bilisation des Ă©lĂšves sur la question de la sexualitĂ© et de laprĂ©vention des comportements sexistes. Un dĂ©cret du 11 juil-let 2006 relatif au socle commun des connaissances et descompĂ©tences mentionne dĂ©sormais explicitement « le respectde soi, des autres et le respect de lâautre sexe ».
Le premier plan global de lutte contre les violences faites auxfemmes (2005-2007) avait fixĂ© un objectif de prĂ©vention enmilieu scolaire centrĂ© sur lâapprentissage du respect de lâau-tre et lâĂ©ducation Ă la mixitĂ© comme valeur rĂ©publicaine. Cetobjectif, qui incombe Ă lâĂducation nationale, a Ă©tĂ© repris parle plan 2008-2010.
Mais en juillet 2009, la mission parlementaire constatait que« si lâĂ©cole sâest emparĂ©e du sujet, la mobilisation est loindâĂȘtre systĂ©matique, les initiatives prises ne sont pas gĂ©nĂ©ra-lisĂ©es et leur mise en Ćuvre peine Ă sâorganiser de façon vĂ©-ritablement coordonnĂ©e21. »
1.2 La nĂ©cessitĂ© dâune politique de formationcohĂ©rente et systĂ©matique de tous lesacteurs
En 2006, Amnesty International soulignait que « la rĂ©ponsede lâĂtat [aux violences contre les femmes] dĂ©pendra de sacapacitĂ© Ă faire Ă©voluer les mentalitĂ©s et les pratiques.ConcrĂštement, cette action passe par la formation et la sen-sibilisation des professionnels [âŠ] Les professionnelsconfrontĂ©s aux questions de violences dans le couple -agents judiciaires, policiers, professionnels de la santĂ© â doi-vent ĂȘtre sensibilisĂ©s et correctement formĂ©s pour que lesdroits des femmes soient pleinement garantis et respec-tĂ©s24. »
En juillet 2008, le rapport dâĂ©valuation du premier plan trien-nal de lutte contre les violences faites aux femmes 2005-2007constatait que, si de rĂ©elles avancĂ©es avaient eu lieu, des pro-grĂšs notables restaient Ă faire.
« Des actions ont Ă©tĂ© conduites dans le secteur sanitaire etsocial, la police, la gendarmerie, ou encore en direction desmagistrats ou des personnels des prĂ©fectures. Ces forma-tions sont cependant trĂšs limitĂ©es en nombre et souvent sui-vies sur la base du volontariat, câest-Ă -dire par despersonnels dĂ©jĂ motivĂ©s. De plus, la mobilitĂ© est Ă©levĂ©e, no-tamment dans la police et surtout dans les secteurs les plusdifficiles. Quand les gens sont formĂ©s, ils sâen vont ! Il fautdonc renouveler sans cesse les formations. Les formationsinterdisciplinaires organisĂ©es localement sont particuliĂšre-ment efficaces. Ceux qui les suivent peuvent y apprendrecomment travaillent leurs collĂšgues dâautres secteurs etnouer des contacts avec eux. Les rĂ©seaux qui se constituentainsi amĂ©liorent lâopĂ©rationnalitĂ©25. »
Le développement des formations interdisciplinaires au ni-veau local est donc également à intensifier car ces actionspermettent de mettre les intervenants en contact les uns avec
2. Amnesty International France invite lesparlementaires Ă adopter la disposition de laproposition de loi « renforçant la protection desvictimes et la prĂ©vention et la rĂ©pression desviolences faites aux femmes » introduisant dans la loirelative aux publications destinĂ©es Ă la jeunesse,lâinterdiction dâinciter aux prĂ©jugĂ©s sexistes car seulsles prĂ©jugĂ©s ethniques y sont actuellementmentionnĂ©s et celle ouvrant aux associations dedĂ©fense des droits des femmes le droit de saisine duConseil supĂ©rieur de lâaudiovisuel (CSA) et leurrecommande dâĂ©largir ce droit de saisine Ă toutes lesassociations de dĂ©fense des droits humains.
3. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises que :- le respect mutuel et l'Ă©galitĂ© entre les sexes soientsystĂ©matiquement enseignĂ©s dans les Ă©coles, lescollĂšges et les lycĂ©es et que les autoritĂ©s veillent Ă ceque tous les stĂ©rĂ©otypes sexistes soient retirĂ©s desmanuels scolaires- la formation initiale et continue de tous lespersonnels de lâĂducation nationale intĂšgre cesproblĂ©matiques.
« A lâĂ©cole, lieu dâapprentissage du respect de lâautre, les ini-tiatives sont nombreuses mais leur mise en Ćuvre relĂšve delâautonomie des Ă©tablissements et les outils sont insuffisam-ment mutualisĂ©s22 ».
Lâarticle 3 de la proposition de loi du SĂ©nat du 25 novembre200923 prĂ©voit de dispenser dans les Ă©coles, les collĂšges etles lycĂ©es une information sur le respect mutuel et lâĂ©galitĂ©entre les sexes Ă raison dâune sĂ©ance mensuelle. CessĂ©ances pourront associer les personnels contribuant Ă la rĂ©-pression des violences Ă lâĂ©gard des femmes, Ă lâaide aux vic-times, ainsi que tout autre intervenant extĂ©rieur.
Pour Amnesty International, lâĂ©ducation sur lâĂ©galitĂ© et le res-pect mutuel entre les sexes, notamment la prĂ©vention de laviolence Ă lâĂ©gard des femmes, doit commencer tĂŽt, dĂšs lâĂ©du-cation des enfants, pour ĂȘtre le plus efficace possible.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 11
La formation initiale et continue des personnelsde la police et de la gendarmerie doit ĂȘtresystĂ©matique pour tous les agents
Le Guide de lâaction publique prĂ©cise « que si tout service en-quĂȘteur est habilitĂ© Ă recevoir la dĂ©nonciation dâinfractions,une bonne pratique consiste Ă affecter Ă ces tĂąches des en-quĂȘteurs formĂ©s Ă la spĂ©cificitĂ© du contentieux des violencesau sein du couple, mieux Ă mĂȘme de tĂ©moigner Ă la victimelâĂ©coute nĂ©cessaire et dâĂ©valuer au travers de ses propos lagravitĂ© de la situation29. »
Pourtant, les formations initiales ne permettent pas de sensi-biliser et de former durablement les policiers et les gendarmesĂ la spĂ©cificitĂ© des violences faites aux femmes. En effet, ellesrestent une simple initiation aux situations de violences ausein du couple, parce que les policiers et les gendarmes doi-vent en effet ĂȘtre formĂ©s Ă de multiples problĂ©matiques en untemps relativement bref30.
Lâaccent est alors mis sur la formation continue. Mais si la for-mation continue tend Ă vĂ©ritablement sâinstitutionnaliser chezles gendarmes, elle sâavĂšre moins frĂ©quente chez les poli-ciers.
En 2005, la gendarmerie a crĂ©Ă© un dispositif de formationcontinue fondĂ© sur un systĂšme pyramidal, afin de toucher tousles militaires : « Au niveau de chaque dĂ©partement et grou-pement de gendarmerie a Ă©tĂ© dĂ©signĂ© un correspondant dĂ©-partemental de lutte contre les violences intrafamiliales et,dans chaque communautĂ© de brigade ou brigade autonome,a Ă©tĂ© dĂ©signĂ© un rĂ©fĂ©rent. » Ces correspondants dĂ©parte-mentaux reçoivent une formation quâils relaient ensuite au-prĂšs des rĂ©fĂ©rents, lesquels devront sensibiliser les militaires:« lâobjectif est de former tous les militaires des unitĂ©s territo-riales Ă prendre en charge une victime de violences31. »
ParallĂšlement Ă ce dispositif, des modules de formation conti-nue sont organisĂ©s sur les violences intrafamiliales, la pro-blĂ©matique de la traite des ĂȘtres humains et lâassistance auxvictimes. Les officiers bĂ©nĂ©ficient par exemple dâun sĂ©minairede formation pluridisciplinaire de trois jours oĂč sont invitĂ©s desprocureurs, des psychiatres, des associations et des mĂ©de-cins lĂ©gistes.
En revanche, la formation continue est moins systématiquedans la police.
Monsieur Michel Ribeiro, commissaire divisionnaire, a dĂ©clarĂ©que « dans la Police nationale, la formation continue sur lesviolences intrafamiliales est dispensĂ©e essentiellement Ă lâĂ©chelon rĂ©gional. Nous proposons de calquer le dispositifsur celui en vigueur dans la gendarmerie. Des correspondantsdĂ©partementaux y sont formĂ©s, qui ensuite dĂ©multiplient lesformations. Les inconvĂ©nients limitĂ©s de cette solution, no-tamment la perte de substance et de qualitĂ© pĂ©dagogiquedue Ă des relais plus nombreux, peuvent ĂȘtre facilement pal-liĂ©s en formant spĂ©cifiquement un « noyau dur » de personnesau sein de chaque dĂ©partement. Aujourdâhui, la direction dela formation de la police nationale semble intĂ©ressĂ©e par cettesolution32. »
En fĂ©vrier 2009, Madame Maryvonne Chapalain, du ministĂšrede lâIntĂ©rieur, a ainsi prĂ©cisĂ© : « Nous essayons dâĂ©largir aumaximum les compĂ©tences des fonctionnaires de police etdes militaires de la gendarmerie, pour que dans chaque unitĂ©et dans chaque commissariat soient prĂ©sents des personnelsspĂ©cifiquement formĂ©s Ă cet effet33. »
En septembre 2009, suite à la création des brigades de pro-tection de la famille, un module de formation continue sur les
les autres et participent ainsi du travail de mise en rĂ©seau quisâavĂšre efficace.
Cet objectif est Ă©galement prĂ©conisĂ© par le SecrĂ©taire gĂ©nĂ©-ral du comitĂ© interministĂ©riel de prĂ©vention de la dĂ©linquance,Monsieur Philippe de Lagune : « Pour les acteurs de terrain,la formation des agents dâaccueil est fondamentale. Un efforta Ă©tĂ© fait sur la formation initiale. Il conviendrait aujourdâhuide mettre en place des formations plus transversales, qui re-grouperaient sur un mĂȘme dĂ©partement les agents de la com-mune, du conseil gĂ©nĂ©ral, de la prĂ©fecture et du TGI [tribunalde grande instance]. De telles initiatives pourraient effective-ment ĂȘtre financĂ©es par le FIPD [Fonds interministĂ©riel de prĂ©-vention de la dĂ©linquance], mais sous deux rĂ©serves : que celasoit inscrit parmi nos prioritĂ©s annuelles et que le montant al-louĂ© au FIPD (âŠ) soit revalorisĂ©, car nos 35 millions annuelsnây suffiront pas !26 ».
Les dĂ©lĂ©guĂ©es rĂ©gionales et les chargĂ©es de mission dĂ©par-tementales aux droits des femmes peuvent jouer un rĂŽle cen-tral dans lâorganisation de ces formations et il est doncnĂ©cessaire de les appuyer en mobilisant les moyens nĂ©ces-saires.
Dans son discours du 25 novembre 2009 Ă lâoccasion de lajournĂ©e internationale contre les violences faites aux femmes,le premier ministre Monsieur François Fillon a dĂ©clarĂ©:
« Nous allons aussi faire des efforts particuliers pour amĂ©lio-rer le repĂ©rage et la prise en charge des victimes. Nous prĂ©-voyons dâoffrir systĂ©matiquement Ă tous les professionnelssusceptibles dâavoir Ă traiter des situations de violences ausein du couple, comme dans le domaine de la protection delâenfance, une formation spĂ©cifique. La formation initiale desprofessionnels de santĂ©, - les mĂ©decins, les infirmiers, lessages-femmes -, qui intĂšgre dĂ©jĂ les mutilations sexuelles fĂ©-minines, inclura aussi Ă lâavenir la gestion des victimes de vio-lences intrafamiliales.
Le ministĂšre chargĂ© de lâIntĂ©gration soutient Ă©galement lâof-fre de formation destinĂ©e aux acteurs de terrain et aux pro-fessionnels de la plate-forme dâĂ©coute du 3919, autour de laproblĂ©matique des mariages forcĂ©s et des mutilationssexuelles. Et en 2010, je lui ai demandĂ© de les dĂ©velopper en-core. »
Pour Amnesty International France, le dĂ©ficit de formation desacteurs impliquĂ©s dans la lutte contre les violences faites auxfemmes en France est encore trop important aujourdâhui etnuit notamment Ă la nĂ©cessaire spĂ©cialisation des compĂ©-tences des acteurs concernĂ©s.
Les travaux parlementaires en cours visent Ă renforcer la for-mation des acteurs impliquĂ©s. Ainsi, la proposition de loi delâAssemblĂ©e nationale du 27 novembre 2009 envisage uneformation systĂ©matique des professionnels susceptiblesdâavoir Ă traiter de situations de violences au sein du couple,sur le modĂšle de celle prĂ©vue dans le domaine de la protec-tion de lâenfance.27 Sur la formation des acteurs impliquĂ©sdans la lutte contre les violences faites aux femmes, la pro-position de loi du SĂ©nat du 25 novembre 2009 pose Ă©gale-ment le principe de la formation de tous les acteurs sociaux,mĂ©dicaux et judiciaires afin dâamĂ©liorer lâaccueil, la protectionet le suivi des victimes de violences conjugales.28
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire12
violences intrafamiliales, dâune durĂ©e de quatre jours, a Ă©tĂ©rĂ©actualisĂ©. Mais la formation continue sur ce thĂšme est rĂ©ser-vĂ©e en prioritĂ© aux agents affectĂ©s Ă une unitĂ© spĂ©cialisĂ©e34.
La formation des magistrats reste un enjeuprimordial dans la prévention et la lutte contreles violences faites aux femmes
En 2006, Amnesty International considĂ©rait que les « avancĂ©espositives vers une meilleure prise en charge des violencesconjugales par les magistrats ne seront suivies dâeffets que sielles sont accompagnĂ©es dâune sensibilisation et dâun renfor-cement de la formation initiale et continue en la matiĂšre35. »
Dans ses observations finales du 8 avril 2008, le ComitĂ© pourlâĂ©limination de la discrimination Ă lâĂ©gard des femmes a in-sistĂ© Ă©galement sur lâimportance de la formation et a engagĂ©lâĂtat français « Ă prendre dâautres mesures pour faire mieuxconnaĂźtre la Convention et son protocole facultatif et Ă infor-mer rĂ©guliĂšrement les magistrats et les procureurs de la por-tĂ©e et de lâimportance de la Convention pour les inciter Ă lâinvoquer dans les procĂšs et pour encourager les juristes Ă faire de mĂȘme ». Il a en outre recommandĂ© « que la Conven-tion, son protocole facultatif et les autres instruments inter-nationaux relatifs aux droits de lâhomme figurentobligatoirement dans les programmes de formation juridiqueet des facultĂ©s de droit françaises ».
La formation des magistrats au contentieux des violencesfaites aux femmes reste ainsi, en 2009, un enjeu primordialdans la prévention et la lutte contre les violences faites auxfemmes.
Concernant la formation initiale, lâenseignement par fonctiona disparu au profit dâun enseignement par thĂšme (pĂŽle de for-mation). En 2009, dans le programme pĂ©dagogique de for-mation initiale des futurs magistrats, la problĂ©matique desviolences intrafamiliales est intĂ©grĂ©e dans le pĂŽle de formation«environnement judiciaire36 ». Pour ce pĂŽle de formation, lâob-jectif pĂ©dagogique est la « capacitĂ© Ă prendre une dĂ©cisioninscrite dans son contexte37. »
Un stage extĂ©rieur de cinq semaines (dans une administra-tion dĂ©concentrĂ©e de lâĂtat, une prĂ©fecture, une administrationcentrale, une collectivitĂ© territoriale, un Ă©tablissement public,une autoritĂ© administrative indĂ©pendante, une association ouune entreprise) est orientĂ© vers « la connaissance du rĂŽle etdu fonctionnement dâun partenaire de lâinstitution judiciaireou dâun acteur de la vie sociale et Ă©conomique38 ».
Concernant la formation continue, les magistrats peuventchoisir une thĂ©matique proposĂ©e dans le catalogue de for-mation ou proposer, Ă lâĂcole nationale de la magistrature,une formation qui les intĂ©resse. Mais dans la pratique, bienquâobligatoire, le systĂšme de formation continue reste large-ment fondĂ© sur le volontariat.
Ainsi, Madame AgnĂšs Le Monnyer, vice-prĂ©sidente du tribunalde grande instance de Toulouse, prĂ©cise que pour un magis-trat, « le temps passĂ© en formation continue est au dĂ©trimentde son activitĂ© quotidienne. Sachant que le travail va sâaccu-muler en son absence, il hĂ©site Ă partir en formation conti-nue39 ». Elle ajoute « la dĂ©concentration de la formationcontinue au niveau des cours dâappel est donc une solutionopĂ©rationnelle car elle rapproche la formation de lâutilisateuret est mieux diffusĂ©e sur tout le territoire ».
En 2009, des coordinateurs rĂ©gionaux de formation ont Ă©tĂ© re-crutĂ©s dans quatre cours dâappel (sur 35) et des recrutementssont prĂ©vus en 201040. Ces coordinateurs sont chargĂ©s demettre en place le plan de formation au niveau rĂ©gional.
2. La protection des victimes de violences
Les femmes ayant subi des violences, et en particulier desviolences conjugales, doivent faire preuve de beaucoup decourage pour sâadresser Ă la justice. La femme reste souventĂ la merci de son conjoint brutal.
La question ne devrait pas ĂȘtre « pourquoi reste-t-elle aveclui ? », ni « pourquoi continue-t-il Ă la battre ? », mais « quelschoix sâoffrent Ă elle ? » ou « pourquoi nâest-il pas traduit enjustice ?41 »
En 2006, Amnesty International constatait que « lâĂtat enFrance a indĂ©niablement fait un certain nombre de pas versune meilleure prise en compte de la problĂ©matique des vio-lences faites aux femmes au sein du couple. Cependant cesdispositions souffrent encore dâun manque de coordination,de volontĂ© et de moyens adĂ©quats, qui donnent lieu Ă une ap-plication trĂšs hĂ©tĂ©rogĂšne sur le territoire français. Les dĂ©-marches Ă entreprendre pour avoir accĂšs Ă la justicedemeurent lentes et complexes, et les femmes qui y sontconfrontĂ©es sont souvent dĂ©couragĂ©es devant ce qui leur ap-paraĂźt comme un vĂ©ritable parcours du combattant (âŠ)42. »
En 2010, si la prise en charge des victimes sâest amĂ©liorĂ©e etprofessionnalisĂ©e, les moyens mis en Ćuvre par lâĂtat sontencore dĂ©ficitaires et les disparitĂ©s des rĂ©ponses pĂ©nales surle territoire demeurent pour les victimes des freins importantsĂ un accĂšs effectif et Ă©galitaire aux droits.
2.1. La prise en charge des victimes deviolences sâest amĂ©liorĂ©e, professionnalisĂ©emais des progrĂšs restent Ă faire pourgĂ©nĂ©raliser les bonnes pratiques
La loi dâorientation et de programmation pour la sĂ©curitĂ© intĂ©-rieure du 29 aoĂ»t 2002 dispose que « lâaccueil, lâinformationet lâaide aux victimes sont pour les services de sĂ©curitĂ© intĂ©-rieure une prioritĂ©. » Ce principe se dĂ©cline notamment Ă tra-vers l'application de la charte de lâaccueil et de lâassistanceaux victimes, l'instauration d'un rĂ©seau de correspondants etle dĂ©veloppement de partenariats.
Ainsi, depuis 2006, la prise en charge des femmes victimes deviolences par lâensemble des diffĂ©rents services sâest incon-
4. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de :- renforcer et systĂ©matiser la formation initiale etcontinue des professionnels (professionnels de santĂ©,magistrats, travailleurs sociaux, personnels de lapolice et de la gendarmerie nationale, acteursassociatifs, agents des services de lâemploi et agentsdâaccueil des collectivitĂ©s locales) sur les questionsde violences Ă lâĂ©gard des femmes, pour mieuxorienter, accompagner et protĂ©ger les victimes.Les programmes de formation doivent notammentfournir les Ă©lĂ©ments dâinformation et de formationnĂ©cessaires pour dĂ©tecter et gĂ©rer des situations decrise et amĂ©liorer lâaccueil, lâĂ©coute et le conseil auxvictimes.- intensifier le dĂ©veloppement des formationsinterdisciplinaires au niveau local- gĂ©nĂ©raliser la dĂ©concentration de la formationcontinue des magistrats Ă tout le territoire, pourfavoriser un meilleur accĂšs et une participation plusimportante de ces derniers.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 13
testablement amĂ©liorĂ©e et le deuxiĂšme plan global triennal(2008-2010) vise Ă dĂ©velopper une « prise en charge globaleet dans la durĂ©e des femmes victimes de violences au seindu couple, tout en leur assurant une rĂ©ponse personnalisĂ©e. »Pour amĂ©liorer lâaccueil et la prise en charge des victimes, lesautoritĂ©s dĂ©veloppent une rĂ©elle politique dâaide aux victimeset ont mis en place plusieurs dispositifs, tant au niveau desservices de police et unitĂ©s de gendarmerie que des tribunauxde grande instance.
Cependant, ces progrĂšs dans la prise en charge des victimesdoivent ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©s Ă lâensemble du territoire et concer-ner toutes les victimes, quelque soit le lieu oĂč elles se ren-dent pour dĂ©noncer les violences.
La prise en charge des victimes par les services de police etles unitĂ©s de gendarmerie sâest amĂ©liorĂ©e mais doit, pour ĂȘtrerĂ©ellement efficace, concerner tout le territoire
Des correspondants départementaux ont été installés dansles services de police et les unités de gendarmerie et sontamenés à jouer un rÎle central dans la lutte contre les vio-lences faites aux femmes.
Pour la police, chaque direction dĂ©partementale de la sĂ©curitĂ©publique a installĂ© un correspondant dĂ©partemental « aideaux victimes ». Il a pour mission d'entretenir des relationsavec les associations, d'organiser l'amĂ©lioration de l'accueil,de centraliser les renseignements utiles aux victimes, d'assu-rer le suivi des procĂ©dures pĂ©nales pour donner l'informationsur le dĂ©roulement des enquĂȘtes.
La gendarmerie, dans chaque dĂ©partement, dispose d'un of-ficier « prĂ©vention partenariat » chargĂ© de suivre et dâanimer,en partenariat avec les diffĂ©rents acteurs locaux (services del'Ătat, collectivitĂ©s territoriales, structures associatives...), lâac-tion menĂ©e dans ce domaine de l'aide aux victimes et de veil-ler Ă la diffusion de l'information. Assumant la fonction decorrespondant d'aide aux victimes et de correspondant dĂ©-partemental de lutte contre les violences intrafamiliales, cetofficier s'assure de la pertinence de la rĂ©ponse apportĂ©e parla gendarmerie au plan local.
NĂ©anmoins, la mission parlementaire a constatĂ© que ce rĂ©-seau de rĂ©fĂ©rents nâĂ©tait pas encore suffisant pour mailler lâen-semble du territoire français et quâil serait nĂ©cessaire, Ă moyen terme, que chaque commissariat et chaque brigadede gendarmerie soit dotĂ© dâun rĂ©fĂ©rent.
Si lâobjectif a Ă©tĂ© atteint pour la gendarmerie43, ce nâest pasencore le cas pour la police. La prĂ©sence des professionnelsdans des commissariats de police ou brigades de gendarme-rie sâest Ă©galement accrue (psychologues, travailleurs so-ciaux)44 et des permanences dâassociations dâaide auxvictimes sont installĂ©es dans certains commissariats et uni-tĂ©s de gendarmerie44.
Cependant, pour ĂȘtre effective et efficace, la professionnali-sation de la prise en charge des victimes doit sâaccompagnerdes moyens adĂ©quats. Pour Amnesty International France, ilsemble important que lâĂtat pĂ©rennise les postes des profes-sionnels (travailleurs sociaux, psychologues) intervenant dansles commissariats et les unitĂ©s de gendarmerie et en ac-croisse le nombre pour une prĂ©sence effective sur tout le ter-ritoire.
Des bureaux d'aide aux victimes ont Ă©galement Ă©tĂ© crĂ©Ă©s ausein de chaque service d'investigations et de recherches etsont chargĂ©s de veiller Ă la cohĂ©rence de l'action policiĂšre toutau long du processus d'intervention sur les lieux de l'infraction,de l'accueil de la victime et de la mise en Ćuvre de mesuresd'urgence lorsqu'elles sont nĂ©cessaires. Ils sont en relation
avec de multiples intervenants (mairie, services sociaux,structures médicales et hospitaliÚres, centres d'héberge-ment). Actuellement au nombre de 341, répartis sur 9546 dé-partements et DOM-COM, ils seraient en voie degénéralisation dans les directions départementales de la sé-curité publique.
5. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de sâassurer que dans chaquecommissariat de police et dans chaque unitĂ© degendarmerie:- un rĂ©fĂ©rent violences conjugales est dĂ©signĂ© etformĂ©- les postes des professionnels (travailleur social,psychologue) sont pĂ©rennisĂ©s- une permanence dâassociation dâaide aux victimesest installĂ©e.
La création de brigades spécialisées dans les services de po-lice et de gendarmerie doit permettre une meilleure prise encompte de la spécificité des violences faites aux femmes
Pour permettre une meilleure prise en compte de la spécificitédes violences faites aux femmes, le gouvernement a décidéen juin 2009, de créer des brigades spécialisées au sein descommissariats de police (Brigade de protection de la famille)et des unités de gendarmerie (Brigade de protection des fa-milles).
Depuis le 1er octobre 2009, et aprĂšs quelques mois dâexpĂ©ri-mentation, ces brigades doivent ĂȘtre dĂ©ployĂ©es dans chaquedĂ©partement. En zone police, les brigades sont crĂ©Ă©es au seindes sĂ»retĂ©s dĂ©partementales ou urbaines. En zone gendar-merie, les brigades s'appuient sur les « rĂ©fĂ©rents » existants,dĂ©jĂ chargĂ©s de lutter contre les violences au sein du couple.
L'idée a été d'élargir ce qui se pratiquait depuis des années ausein des brigades des mineurs. Ces nouvelles brigades deprotection englobent ainsi les brigades des mineurs existanteset leurs missions sont la lutte contre toutes les violences com-mises au sein de la cellule familiale et celles touchant les pu-blics vulnérables (femmes battues, mineurs victimes deviolences, et personnes ùgées maltraitées). Elles incluent destravailleurs sociaux et les « référents violences conjugales ».
Au sein des services de police, les policiers qui les compo-sent prennent en compte l'accueil des victimes et leur Ă©coute,le recueil de leur audition, l'Ă©tablissement du prĂ©judice (cor-porel ou psychologique) et le traitement de la procĂ©dure judi-ciaire. Ces fonctionnaires de la sĂ©curitĂ© dĂ©partementalespĂ©cialement formĂ©s peuvent ĂȘtre saisis sous l'autoritĂ© duParquet. Ils doivent accomplir leurs missions en Ă©troite colla-boration avec le juge aux affaires familiales, le juge des en-fants, les services sociaux et les associations.
Au 30 décembre 2009, les brigades de protection de la famille(police nationale) ont été mises en place dans tous les dé-partements et les brigades de protection des familles (gen-darmerie nationale) existent dans 20 départements.
Amnesty International France se fĂ©licite de la prise en chargespĂ©cifique de ce public vulnĂ©rable par la dĂ©signation dâunitĂ©sde police et de gendarmerie spĂ©cialisĂ©es dans le domaine dela violence Ă lâĂ©gard des femmes.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire14
« Ce financement de lâĂtat reposant sur le principe dâun co-financement, je vous invite Ă rechercher, en tant que de be-soin, dâautres moyens susceptibles de participer aufinancement de ce dispositif notamment auprĂšs des collecti-vitĂ©s locales. »
En juillet 2009, le rapport de la mission parlementaire a re-commandĂ© que les rĂ©fĂ©rents locaux violences conjugalessoient confortĂ©s dans leur rĂŽle dâinterface.51
Madame Elisabeth TomĂ©, chef du Service des droits desfemmes et de l'Ă©galitĂ© (SDFE) prĂ©cise que « Madame ValĂ©-rie LĂ©tard a voulu les rĂ©fĂ©rents de lutte contre les violencespour assurer une prise en charge globale des victimes, dansla durĂ©e [âŠ] pour sâassurer que les femmes ne soient pas per-dues entre deux partenaires (commissariat, association...) ;[les rĂ©fĂ©rents] ont un statut souple, des profils trĂšs diffĂ©rents,membres dâassociation ou associations, personnes physiques[âŠ] ils ont un rĂŽle de coordination si un partenariat local estbien constituĂ© ou prennent en charge directement la vic-time52. »
Dans son discours du 25 novembre 2009 Ă lâoccasion de lajournĂ©e internationale contre les violences faites auxfemmes, le premier ministre Monsieur François Fillon dĂ©cla-rait : « Jâai souhaitĂ© que soit crĂ©Ă© un vĂ©ritable parcoursdâorientation pour les femmes victimes de violences. A cĂŽtĂ©du rĂŽle prĂ©pondĂ©rant jouĂ© par les associations, nous avonsvoulu constituer un rĂ©seau de rĂ©fĂ©rents locaux. Pour lesfemmes victimes, ce rĂ©fĂ©rent est un interlocuteur unique deproximitĂ©. Depuis un an, ils se sont largement dĂ©veloppĂ©s etcâest un progrĂšs. Mais il nous faut aller plus loin. Il faut quenous arrivions Ă un maillage encore plus pertinent du terri-toire en lien avec les associations.
Si 36 "référents violence" ont d'ores et déjà été mis en placedans 32 départements, l'objectif fixé est d'en compter un pardépartement d'ici à la fin du premier semestre 2010. »
Des lieux dâaccueil de jourĂ identifier et labelliser
Des lieux dâĂ©coute, dâaccueil et dâorientation sont rĂ©partis surl'ensemble du territoire et accueillent des femmes victimes deviolences. Leurs prestations sont diverses : orientation, ac-compagnement, conseils juridiques, groupes de parole⊠Cespermanences sont parfois adossĂ©es Ă des centres dâhĂ©ber-gement.
Le premier plan global triennal (2005-2007) prĂ©voyait dâiden-tifier et de labelliser dans chaque dĂ©partement au moins unlieu dâaccueil de jour. Le but Ă©tait que les femmes victimesidentifient un lieu oĂč elles pourraient trouver une Ă©coute etdes renseignements sur leurs droits. Elles pourraient alors soitprĂ©parer leur dĂ©part du domicile conjugal, soit sâinformer surla procĂ©dure dâĂ©viction du conjoint violent.
Cette initiative intĂ©ressante, qui consiste Ă regrouper dansune structure de proximitĂ© lâensemble des Ă©lĂ©ments dâinfor-mation dont peuvent avoir les femmes victimes a cependantĂ©tĂ© trĂšs peu suivie dâeffets.
6. Concernant les unitĂ©s de police et de gendarmeriespĂ©cialisĂ©es dans le domaine de la violence Ă lâĂ©garddes femmes, Amnesty International Francerecommande aux autoritĂ©s françaises de :- prĂ©voir leur dotation financiĂšre Ă une hauteursuffisante pour leur permettre de travailler et deformer leur personnel- sâassurer que les victimes qui le souhaitent aient lapossibilitĂ© de communiquer avec des membresfĂ©minins de ces services spĂ©cialisĂ©s.
7. Amnesty International France recommande auxautorités françaises que les référents locauxviolences conjugales, tels que prévus par la circulaireSDFE/DPS no 2008-159 du 14 mai 2008 « relative à lamise en place de référents pour les femmes victimesde violences au sein du couple », soient effectivementmis en place sur tout le territoire.
La prise en charge des victimes dans leparcours judiciaire doit ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©e
Pour garantir un suivi personnalisĂ© et une aide de proximitĂ©aux victimes, des bureaux dâaide aux victimes ont Ă©tĂ© im-plantĂ©s depuis janvier 200947, dans 13 tribunaux. Ces bureauxsont animĂ©s par des reprĂ©sentants dâassociations dâaide auxvictimes locales et coordonnĂ©s par le juge dĂ©lĂ©guĂ© aux vic-times (JUDEVI) du tribunal de grande instance.
Les autoritĂ©s prĂ©voient dâĂ©tendre le dispositif dans 50 autrestribunaux en 201048.
Toutefois, lâUnion syndicale des magistrats prĂ©cise que« (âŠ) sâils [les bureaux dâaide aux victimes] correspondentassurĂ©ment Ă ce quâil Ă©tait nĂ©cessaire de mettre en placepour davantage accompagner les victimes dans leur par-cours judiciaire, ils nâen sont quâau stade de lâexpĂ©rimenta-tion (âŠ). Il est dĂšs lors difficile dâen tirer toutes lesconclusions et notamment dâapprĂ©cier les consĂ©quencessur lâamĂ©lioration du traitement des victimes par rapport auxdiffĂ©rents systĂšmes qui sâĂ©taient mis en place prĂ©alable-ment de façon spontanĂ©e49. »
L'amélioration de la prise en charge des femmesvictimes de violences passe également par ledéveloppement de véritables interlocuteurs deproximité
Lâobjectif 6-3 du deuxiĂšme plan triennal prĂ©voyait la crĂ©ationau niveau local (dans chaque dĂ©partement) dâun poste de« rĂ©fĂ©rent », interlocuteur unique et de proximitĂ© des femmesvictimes de violences.
La circulaire SDFE/DPS n° 2008-159 du 14 mai 2008 relativeĂ la mise en place de « rĂ©fĂ©rents » pour les femmes victimesde violences au sein du couple a fixĂ© les missions et les com-pĂ©tences attendues dâun « rĂ©fĂ©rent » pour les femmes vic-times de violences au sein du couple, les modalitĂ©s et leniveau pertinents de son intervention et les modalitĂ©s de sĂ©-lection.
La circulaire souligne que « le « rĂ©fĂ©rent » ne se substitue pasaux acteurs et services existants dans le processus dâaidemais [quâ] il veille Ă ce que tout soit mis en oeuvre pourconcourir au retour Ă lâautonomie des femmes victimes deviolences. » En consĂ©quence, « le concours de lâensembledes structures concernĂ©es doit ĂȘtre recherchĂ©, afin de ne pasfragiliser des dispositifs locaux prĂ©existants et qui sâappuientsur les compĂ©tences et les pratiques dâacteurs et de struc-tures spĂ©cialisĂ©s, depuis de nombreuses annĂ©es, dans laprise en charge des femmes victimes de violences. »
Le financement des postes de « rĂ©fĂ©rent » peut bĂ©nĂ©ficierdâun concours des crĂ©dits disponibles au titre du Fonds inter-ministĂ©riel de prĂ©vention de la dĂ©linquance50.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 15
En effet, le rapport dâĂ©valuation du premier plan triennal a re-levĂ© que « la procĂ©dure dâidentification et de labellisation deslieux dâaccueil de jour, prĂ©vue dans le premier plan, nâa pasabouti, bien que ces structures existent dĂ©jĂ dans certainsdĂ©partements, mais avec des modalitĂ©s de fonctionnementvariables. »
Le deuxiĂšme plan global triennal (2008-2010) a rĂ©affirmĂ© cettemesure dans son objectif 11-2, et prĂ©voit la rĂ©daction dâun ca-hier des charges conduisant Ă la labellisation de structures.Ce type de structure pourrait permettre de mutualiser lesmoyens et les compĂ©tences pour lâaccueil des victimes si leurfinancement Ă©tait garanti par des conventions pluriannuelles.
De mĂȘme, les centres dâaccueil intra hospitaliers peuvent ĂȘtreune rĂ©ponse appropriĂ©e. En effet, il est souvent plus facile depasser la porte de lâhĂŽpital que celle du commissariat. Le pro-cessus est lent entre la volontĂ© de sortir de la violence et ledĂ©pĂŽt effectif dâune plainte et une prise en charge globale (jus-tice, santĂ© et social) permet un suivi sur le long terme.
Le financement relĂšve du ministĂšre de la justice. La factura-tion des actes de consultation et des examens complĂ©men-taires est effectuĂ©e conformĂ©ment aux tarifs fixĂ©s par le codede procĂ©dure pĂ©nale et le rĂšglement est assurĂ© par le minis-tĂšre de la justice. Leur nombre est cependant insuffisant pourcouvrir lâensemble du territoire. En outre, leur financement doitĂȘtre sĂ©curisĂ© pour assurer la pĂ©rennitĂ© des unitĂ©s existantes.
Il existe Ă©galement des structures hospitaliĂšres spĂ©cialisĂ©esdans lâaccueil des victimes dâagression, comme Ă Bordeaux,Lille ou encore Ă Rouen.
Le Centre dâaccueil spĂ©cialisĂ© pour les agressions (CASA) deRouen semble ĂȘtre un exemple de bonnes pratiques. La priseen charge par le CASA simplifie le parcours mĂ©dico-judiciairedes victimes, quelle que soit la cause des violences, et faci-lite la prise en charge mĂ©dico-lĂ©gale et le dĂ©pĂŽt des plaintesauprĂšs de la justice. Les victimes peuvent y rencontrer desprofessionnels de santĂ©, une psychologue, une assistante so-ciale et une association d'aide aux victimes. Dans certaines si-tuations (urgence mĂ©dico-lĂ©gale, vulnĂ©rabilitĂ©âŠ), les victimesont aussi la possibilitĂ© d'ĂȘtre mises en contact avec un officierde police judiciaire pour recueillir leur plainte ou les protĂ©ger.En cas de nĂ©cessitĂ©, les victimes bĂ©nĂ©ficient d'une brĂšve hos-pitalisation dans l'UnitĂ© d'hospitalisation de courte durĂ©e(UHCD) du service des urgences. Pour les victimes dĂ©jĂ hos-pitalisĂ©es qui ne peuvent se dĂ©placer (soins intensifs, chirur-gie lourdeâŠ), les acteurs du CASA se rendent Ă leur chevet.
Ce centre a reçu du procureur une dĂ©lĂ©gation pour accueillirles victimes adressĂ©es sur rĂ©quisition dâun officier de police ju-diciaire et peut ainsi prendre en charge globalement (justice,santĂ©, social) les victimes de violences conjugales. Deux litssont disponibles tous les jours pour une Ă©ventuelle hospitali-sation et les services sociaux et des associations sur placeapportent conseil et soutien Ă la victime.
Ce centre conserve également « la mémoire » des agressionsqui peut ultérieurement servir si la victime porte plainte55. Onpeut toutefois regretter que ce centre ne soit pas ouvert aprÚs18 heures.
LâĂ©valuation de lâincapacitĂ© totale de travail(ITT) comme preuve des violences doit ĂȘtreharmonisĂ©e et Ă©tendue aux violencespsychologiques
En 2006, Amnesty International demandait Ă lâĂtat de « sâas-surer que lâĂ©valuation de lâITT soit harmonisĂ©e et quâelleprenne en compte les diffĂ©rentes formes de violences exer-cĂ©es Ă lâencontre des femmes56. »
Le rapport dâAmnesty International pointait Ă©galement les la-cunes de formation des mĂ©decins concernant la rĂ©daction descertificats relevant une incapacitĂ© totale de travail (ITT), en-traĂźnant des disparitĂ©s dans les mentions contenues dans cescertificats mĂ©dicaux.
Dans le cadre de violences, le certificat mĂ©dical de constata-tion est le premier Ă©lĂ©ment objectif sur lequel lâautoritĂ© judi-ciaire pourra sâappuyer pour dĂ©cider de lâorientation de laprocĂ©dure. Ce certificat est essentiel pour la qualification desfaits de violence et les suites de la procĂ©dure contre les vio-lences dĂ©pendent donc de lâexistence et de la qualitĂ© de rĂ©-daction du certificat mĂ©dical. La non existence de ce certificatpeut en effet amener Ă un classement sans suite.
Il peut ĂȘtre rĂ©digĂ© par tout mĂ©decin et constitue un acte au-thentique attestant par Ă©crit, de la part dâun mĂ©decin, lâexis-tence de lĂ©sions traumatiques ou de symptĂŽmes traduisantune souffrance psychologique.
8. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises dâidentifier et de labelliser danschaque dĂ©partement au moins un lieu dâaccueil dejour.
Lâaccueil et la prise en charge mĂ©dico-lĂ©galedes victimes doivent ĂȘtre harmonisĂ©s etrenforcĂ©s
Le Guide pratique Ă destination des professionnels « Luttercontre la violence au sein du couple. Le rĂŽle des profession-nels » Ă©ditĂ© en juin 2006, indique que dans la majoritĂ© descas, le mĂ©decin est le premier tiers extĂ©rieur au cercle fami-lial Ă ĂȘtre informĂ© des faits de violence au sein du couple ouĂ pouvoir les repĂ©rer.
Mais nombre de femmes victimes de violences se soignentmal du fait de leur situation.
Elles ont honte, elles ont peur, elles sont parfois menacĂ©espar leur agresseur et nâosent pas en parler. Pourtant, tousles troubles physiques et psychologiques consĂ©quents Ă laviolence sont autant de signes d'appel pour le repĂ©rage dela violence.
Les professionnels de santé les plus concernés sont les mé-decins généralistes en médecine libérale, les urgentistes dansles hÎpitaux, les gynécologues obstétriciens, les médecins lé-gistes, et il leur revient de repérer les maltraitances, verbali-sées ou non, les constater et signaler objectivement auxinstances ad hoc les privations ou sévices constatés sur leplan physique, sexuel ou psychique53.
L'accueil en urgence des personnes victimes de violences oude mauvais traitements entre dans les fonctions dĂ©volues Ă tout Ă©tablissement de santĂ©. Toutefois, la nĂ©cessitĂ© dâun ac-cueil et dâune prise en charge adaptĂ©s de ces personnes aconduit les pouvoirs publics Ă sâen prĂ©occuper et Ă en orga-niser progressivement les modalitĂ©s, au cours des dix der-niĂšres annĂ©es.
Ainsi, dans un certain nombre dâĂ©tablissements de santĂ©, desunitĂ©s mĂ©dico-judiciaires (UMJ)54 ont Ă©tĂ© mises en place etont pour vocation dâaccueillir et examiner les victimes qui leursont adressĂ©es sur rĂ©quisition dâun officier de police judiciaireet de rĂ©diger un certificat mĂ©dical constatant les lĂ©sions phy-siques et les traumatismes psychologiques et fixant lâincapa-citĂ© totale de travail (ITT) en rĂ©sultant.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire16
LâITT a Ă©tĂ© introduite dans le Code pĂ©nal pour adapter la sanc-tion Ă la gravitĂ© des blessures de la victime ou plus exacte-ment Ă leurs consĂ©quences. Au dĂ©part, lâITT reprĂ©sentait ladurĂ©e pendant laquelle un ouvrier ne pouvait pas gagner savie du fait des blessures. La jurisprudence dĂ©finit la notiondâincapacitĂ© totale de travail comme la durĂ©e pendant laquelleune victime Ă©prouve une gĂȘne notable dans les actes de lavie courante (manger, dormir, se laver, sâhabiller, faire sescourses, se dĂ©placer, se rendre au travail). LâincapacitĂ© neconcerne donc pas le travail au sens habituel du mot, maisles activitĂ©s usuelles de la victime.
LâITT Ă©tant une dĂ©cision prise par le mĂ©decin Ă la suite dâunesituation de violence, le certificat doit clairement expliciter lesraisons conduisant Ă lâĂ©valuation de lâITT, en particulierlorsquâil sâagit de troubles psychologiques.
La violence conjugale est une violence rĂ©pĂ©tĂ©e, et les bles-sures physiques sont parfois de faible gravitĂ© mĂ©dicale. Cequi est destructeur, ce nâest pas seulement la gifle reçue, maisle contexte dĂ©lĂ©tĂšre dâhumiliation qui lâaccompagne. Ainsi,pour rendre compte de la rĂ©alitĂ© vĂ©cue par les victimes de vio-lences conjugales, la notion dâITT doit ĂȘtre Ă©tendue pour in-clure les traumatismes psychologiques des violences.
Le Guide pratique « Lutter contre la violence au sein du cou-ple. Le rĂŽle des professionnels » indique aux praticiens que« lâITT ne traduit pas uniquement des lĂ©sions dâordre phy-sique, mais doit aussi inclure les traumatismes psycholo-giques des violences. Afin dâĂ©valuer le nombre de jours dâITT,le praticien, dans son entretien avec la victime, doit apprĂ©-cier, le plus prĂ©cisĂ©ment possible, lâimpact de sa souffrancepsychologique sur les actes de la vie courante quâelle doit ac-complir. »
Dans un souci dâharmonisation des bonnes pratiques, il sem-ble essentiel que les autoritĂ©s assurent la diffusion de ces di-rectives sur tout le territoire et auprĂšs de tous lesprofessionnels de santĂ©. Les UMJ peuvent jouer un rĂŽle po-sitif dans lâharmonisation de la rĂ©daction de ce certificat. Ceconstat est Ă©galement celui du professeur Proust du CASAde Rouen qui regrette que ce certificat soit rempli en dĂ©pit dubon sens par certains mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes57.
Les mĂ©decins lĂ©gistes sont parfois amenĂ©s Ă rĂ©Ă©valuer lesITT estimĂ©es par les mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes, constate le Doc-teur CĂ©cile Morvant58 qui ajoute que le nom mĂȘme de lâinca-pacitĂ© totale de travail prĂȘte Ă confusion car le terme « totale »porte sur lâincapacitĂ© et le terme travail semble renvoyer Ă uneactivitĂ© professionnelle. Cela explique en partie la difficultĂ©quâont les mĂ©decins gĂ©nĂ©ralistes Ă Ă©valuer cette ITT. Il seraitsouhaitable dâinclure une dĂ©finition de lâITT dans le codepĂ©nal. « Une telle dĂ©finition dans le code pĂ©nal permettrait demieux prendre en compte les retentissements psycholo-giques de la violence, lâincapacitĂ© Ă manger, par exemplepouvant ĂȘtre due Ă une lĂ©sion physique ou Ă une dĂ©pres-sion59. ». Les termes « totale » et « travail » pourraient ĂȘtremodifiĂ©s pour en faciliter la comprĂ©hension.
En juillet 2009, Monsieur Jean-Marie Huet, Directeur des af-faires criminelles et des grĂąces du ministĂšre de la Justice an-nonçait que « sâagissant dâailleurs des fameux certificatsmĂ©dicaux, nous dĂ©battons actuellement avec le ministĂšre dela santĂ© de lâorganisation Ă lâĂ©chelle nationale de la mĂ©de-cine lĂ©gale et plus particuliĂšrement de la prise en compte desvictimes de violences conjugales en milieu hospitalier. Lâob-jectif est de « mailler » suffisamment le territoire pour favori-ser lâaccueil de ces victimes et pour leur offrir un service dequalitĂ©60. »
2.2 Le traitement judiciaire des violences
Amnesty International considĂ©rait en 2006 que « le premierobstacle dans lâaccĂšs Ă la justice des femmes victimes de vio-lences tient Ă la difficultĂ© pour ces femmes de porter plainte(âŠ) et quâelles se retrouvent face Ă des dĂ©marches com-plexes, souvent lentes et difficiles, source de dĂ©couragement,voire dâabandon61. »
Pour mettre fin Ă lâimpunitĂ© et protĂ©ger les victimes, AmnestyInternational recommandait aux autoritĂ©s françaises que« dĂšs lors que les autoritĂ©s compĂ©tentes prennent connais-sance dâune situation de violence, elles doivent sâassurer,sans dĂ©lai que des mesures de protection adĂ©quates soientprises pour protĂ©ger les femmes de nouvelles violences, queles auteurs soient convoquĂ©s sans dĂ©lai devant la justice etĂ©loignĂ©s du domicile si la situation le demande. » Amnesty In-ternational prĂ©cisait « quâen cas dâĂ©loignement, il est indis-pensable que sâopĂšre un suivi, aussi bien auprĂšs de la victimeque de lâauteur62. »
Mais si, sur le plan pĂ©nal, de nombreuses amĂ©liorations sontintervenues depuis 2006, lâapplication des textes nâest pastoujours effective et la disparitĂ© des rĂ©ponses pĂ©nales sur leterritoire constitue toujours un frein important Ă un accĂšs Ă©ga-litaire aux droits.
Une évolution cohérentedes dispositifs législatifs
Le législateur a pris en compte la nécessité de prévenir lesviolences intra familiale en faisant du lien affectif entre l'au-teur des violences et la victime une circonstance aggravantedes faits de violence.
Ainsi, la loi du 4 avril 2006 renforçant la prĂ©vention et la rĂ©-pression des violences au sein du couple a crĂ©Ă© une circons-tance aggravante rĂ©sultant de la qualitĂ© de conjoint, concubinou partenaire dâun pacte civil de solidaritĂ©, de la victime63.Cette circonstance aggravante est Ă©galement constituĂ©elorsque les faits sont commis par lâancien conjoint, lâancienconcubin ou lâancien partenaire liĂ© Ă la victime par un pactecivil de solidaritĂ©. Le domaine dâapplication de cette circons-tance aggravante est dĂ©sormais Ă©tendu au meurtre64, au viol65
et aux autres agressions sexuelles66.
Le lĂ©gislateur a Ă©galement eu le souci dâĂ©viter la rĂ©itĂ©rationdes violences en instaurant, dâune part, lâĂ©viction pĂ©nale duconjoint violent du domicile du couple et, dâautre part, despeines minimales sâappliquant aux violences conjugales encas de rĂ©cidive. La loi du 4 avril 2006 a Ă©galement introduit lareconnaissance du vol entre Ă©poux. Enfin, la loi du 5 mars2007 relative Ă la prĂ©vention de la dĂ©linquance a prĂ©vu d'Ă©ten-
9. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de :- inclure une dĂ©finition de lâincapacitĂ© totale de travail(ITT) dans le code pĂ©nal- former les professionnels de santĂ© au repĂ©rage, Ă lâaccueil des femmes victimes de violences et Ă larĂ©daction des certificats mĂ©dicaux relevant une ITT- dĂ©velopper la diffusion des guides dâaide Ă la priseen charge des victimes et Ă la rĂ©daction des certificatsmĂ©dicaux auprĂšs de tous les professionnels de santĂ©- mettre en place des rĂ©fĂ©rents « violence » dans lesservices dâurgence et dĂ©finir des protocoles de priseen charge des victimes.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 17
Amnesty International France encourage les autoritĂ©s Ă sâas-surer que toute victime dâactes de violence reçoive des auto-ritĂ©s une rĂ©ponse pĂ©nale prĂ©coce et systĂ©matique.
Les mains courantes soient transmisessystématiquement aux parquets
« Toute personne peut rĂ©vĂ©ler des faits, quels que soient leurnature, la date et le lieu de leur commission, auprĂšs de toutparquet ou de tout service enquĂȘteur. ConcrĂštement, la vic-time peut adresser une lettre simple Ă tout service de policeou toute unitĂ© de la gendarmerie et au procureur de la RĂ©pu-blique de tout tribunal, Ă charge pour eux de transmettre laplainte au service ou tribunal territorialement compĂ©tent sâilsne le sont pas eux-mĂȘmes. De la mĂȘme maniĂšre, elle peut seprĂ©senter dans nâimporte quel commissariat de police ouunitĂ© de la gendarmerie, qui est dans lâobligation lĂ©gale de re-cueillir ses dĂ©clarations71. »
Si une victime ne souhaite pas déposer plainte mais seule-ment signaler les violences dont elle a été victime pour en gar-der une trace écrite, elle peut se présenter dans n'importequel service de police pour y déposer une main courante oudans n'importe quelle unité de gendarmerie qui enregistreraun procÚs-verbal de renseignement judiciaire.
La pratique de la main courante est critiquĂ©e par de nom-breuses associations et par certains parquets car aucune en-quĂȘte nâest en principe diligentĂ©e sur la base dâunemain-courante, alors que ces faits peuvent ĂȘtre graves.
La main-courante ou le procĂšs-verbal de renseignement judi-ciaire peuvent seulement ĂȘtre utilisĂ©s en cas de procĂ©dure ju-diciaire ultĂ©rieure.
Certains parquets, comme celui de Douai, ont prescrit auxservices de gendarmerie et de police de ne plus prendre demain courante en matiĂšre de violences intrafamiliales. Pourchaque infraction, le parquet est informĂ© et une enquĂȘte estrĂ©alisĂ©e.
Mais, pour Monsieur Serge Portelli, vice-prĂ©sident du Tribunalde grande instance de Paris, « câest un droit de la personneque de ne pas dĂ©poser plainte. Si une femme sait quâelle a,comme toute autre victime, la possibilitĂ© de signaler la vio-lence et dâen laisser une trace, sans pour autant oblitĂ©rerlâavenir, il y aura un afflux de signalements. Aujourdâhui, lesfemmes que je rencontre sont rebutĂ©es par lâappareil judi-ciaire et lâappareil policier et reculent trĂšs vite. Et encore, cesont celles qui ont dĂ©jĂ franchi ce pas, c'est-Ă -dire une mi-noritĂ©. Il faut accepter cette idĂ©e que lâappareil judiciaire etlâappareil policier sont effrayants. Nous devons faire en sortede trouver un autre endroit qui serve de sas, et qui permetteensuite, si nĂ©cessaire, de basculer vers la voie pĂ©nale72. »
Le Guide de lâAction publique sur la lutte contre la violence ausein des couples prĂ©cise quâau regard de la difficultĂ© des vic-times de violences au sein du couple Ă dĂ©noncer les faits, « ilimporte de saisir toute occasion pour diligenter une enquĂȘtesur une situation parfois dĂ©jĂ ancienne » et que «de simplesmains-courantes ou procĂšs-verbaux de renseignement judi-ciaire ne peuvent rendre compte de la complexitĂ© et ducontexte de faits de cette nature73. »
Mais pour Madame Maryvonne Chapalain « la main couranteprĂ©sente un grand intĂ©rĂȘt car si les violences persistent, elleaura Ă©tĂ© enregistrĂ©e et sera jointe Ă la procĂ©dure. Jâajoute quesi nous insistons trop pour que les victimes dĂ©posent uneplainte sans leur laisser la possibilitĂ© de faire une dĂ©clarationen main courante elles risquent de ne rien faire du tout et au-cune trace ne subsistera alors des violences subies74. »
dre le suivi socio-judiciaire aux auteurs de violences conju-gales et l'injonction de soins en matiÚre correctionnellelorsque les violences présentent un caractÚre habituel.
La rĂ©ponse pĂ©nale aux faits de violences doitĂȘtre prĂ©coce et systĂ©matique pour « fairecesser la situation de violence avantqu'elle soit enracinĂ©e »
Pour Monsieur Luc FrĂ©miot, procureur de la RĂ©publique prĂšsle Tribunal de grande instance de Douai : « Dans le domainede la lutte contre les violences intrafamiliales (âŠ) la politiquepĂ©nale, telle quâelle est menĂ©e, ne correspond pas aux en-jeux. Nous avons donc dĂ©cidĂ© dâintervenir systĂ©matiquement.Nous avons dâabord prescrit aux services de police et de gen-darmerie de ne plus prendre de main courante : ainsi, pourchaque infraction, le parquet est informĂ© et une enquĂȘte estrĂ©alisĂ©e. (âŠ) DĂšs lors que les services de police lancent uneprocĂ©dure sur chaque affaire, le parquet, en contrepartie, sedoit dâapporter une rĂ©ponse systĂ©matique. (âŠ) Il faut interve-nir le plus possible en amont : si nous attendons que desdommages importants soient causĂ©s, nous risquons de voirdes victimes psychologiquement, voire physiquement bri-sĂ©es, et des auteurs enracinĂ©s dans un processus de vio-lence. Le parquet se saisit donc de toutes les affaires, dĂšs lapremiĂšre gifle67. »
La circulaire du 19 avril 2006, qui contient les Ă©lĂ©ments de po-litique pĂ©nale relatifs Ă lâapplication de la loi du 4 avril 200668,a prescrit aux services compĂ©tents dâamĂ©liorer la rĂ©ponse pĂ©-nale apportĂ©e aux faits de violences au sein du couple en as-surant son effectivitĂ© et en privilĂ©giant certaines procĂ©dures.
Ainsi, compte tenu de la spĂ©cificitĂ© des faits de violence ausein du couple et du fait que la victime vit gĂ©nĂ©ralement auxcĂŽtĂ©s du mis en cause, la circulaire indique que « le traite-ment en temps rĂ©el des procĂ©dures » doit ĂȘtre privilĂ©giĂ©.
« Pour ce faire, les services de police ou de gendarmerie de-vront ĂȘtre invitĂ©s Ă informer dans les meilleurs dĂ©lais la per-manence du parquet. Au besoin, un protocole de compte-rendu tĂ©lĂ©phonique pourra ĂȘtre Ă©laborĂ© avec ces services en-quĂȘteurs. De plus, afin dâamĂ©liorer lâexercice de lâaction pu-blique en la matiĂšre, un magistrat rĂ©fĂ©rent centralisant letraitement des procĂ©dures de violences survenant au seindâun couple pourra ĂȘtre dĂ©signĂ©.
En outre, parce quâil nâest pas rare, particuliĂšrement en ma-tiĂšre de violences au sein du couple, quâune victime refusede porter plainte ou dĂ©cide de retirer sa plainte, il est rappelĂ©que lâabsence de toute plainte de la victime ne fait pas obs-tacle Ă ce que des poursuites soient exercĂ©es, de mĂȘmequâun retrait de plainte nâentraĂźne pas le classement sans suitedâoffice de la procĂ©dure par le parquet69 ».
La circulaire du 19 avril 2006 a également proscrit, en la ma-tiÚre, les classements sans suite en pure opportunité.
Enfin, elle prĂ©cisait que « lâexercice des poursuites devra ĂȘtrenuancĂ© pour permettre la rĂ©pression des violences ainsi quela prĂ©vention de la rĂ©cidive, mais Ă©galement rĂ©pondre au be-soin de rĂ©paration de la victime et que lâenquĂȘte sociale ra-pide dâorientation pĂ©nale, prĂ©vue Ă lâarticle 41, alinĂ©a 6, ducode de procĂ©dure pĂ©nale, soit ordonnĂ©e par le procureur dela RĂ©publique au-delĂ des seuls cas oĂč elle est obligatoire ».
Le 20 mai 2009, Madame Rachida Dati, alors ministre de laJustice, rappelait aux parquets quâil convenait « quâune rĂ©-ponse pĂ©nale systĂ©matique et rapide soit apportĂ©e Ă chaqueacte de violence » (âŠ) tout en prĂ©servant la facultĂ© de gra-dation dans la rĂ©ponse pĂ©nale70.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire18
Ainsi, des instructions prĂ©cises ont Ă©tĂ© formulĂ©es dans leGuide de lâAction publique et un protocole de recueil desmains courantes et de rĂ©daction des procĂšs-verbaux de ren-seignement judiciaire a Ă©tĂ© dĂ©taillĂ©. Ces instructions prĂ©cisentaux fonctionnaires que doit figurer expressĂ©ment dans la dĂ©-claration de main courante que la victime elle-mĂȘme ne sou-haite pas dĂ©poser plainte et que cette dĂ©marche ne donneralieu Ă aucune enquĂȘte.
De plus, lorsque la main-courante ou le procĂšs-verbal de ren-seignement judiciaire fait suite Ă une intervention des forcesde lâordre au domicile, une bonne pratique consiste pour lesenquĂȘteurs Ă prendre contact avec la victime 48 heures aprĂšsles faits pour sâassurer quâelle ne souhaite toujours pas dĂ©-poser plainte. Cette vĂ©rification Ă distance de lâĂ©vĂ©nementpermet Ă la victime de rĂ©flĂ©chir plus posĂ©ment aux suitesquâelle souhaite lui donner en toute connaissance de cause.
En conclusion, le Guide indique que le dĂ©pĂŽt dâune main-cou-rante ou la consignation de dĂ©clarations sur un procĂšs-verbalde renseignement judiciaire « ne doit pas constituer un actepassif pour les enquĂȘteurs, mais nĂ©cessite de leur part vigi-lance, apprĂ©ciation critique et rĂ©activitĂ©75 ».
En outre, le décret n° 2009-398 du 10 avril 2009 a complétéle code de procédure civile pour organiser tant la communi-cation des piÚces que des décisions rendues entre les jugeschargés de la procédure familiale, à savoir le juge aux affairesfamiliales, le juge des enfants et le juge des tutelles.
Cependant, alors mĂȘme que cela permettrait une protectionaccrue de la victime et des enfants, la coordination et la cir-culation des informations entre les juridictions pĂ©nales et lesjuges chargĂ©s de la procĂ©dure familiale ne font toujours paslâobjet dâune mise en place effective.
Par exemple, lâinformation est nĂ©cessaire concernant la dĂ©ci-sion pĂ©nale dâĂ©viction du conjoint violent, la dĂ©cision sur lesviolences pour lesquelles le pĂšre est poursuivi et la dĂ©cisiondâorganisation du droit de garde des enfants par le juge auxaffaires familiales.
11. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de sâassurer quâĂ lâinstar desprocĂšs verbaux de renseignement judiciaire, lesmains courantes soient transmises systĂ©matiquementaux parquets et que le dĂ©pĂŽt dâune main courante oudâun procĂšs verbal de renseignement judiciairesâaccompagne systĂ©matiquement dâune orientationvers les associations spĂ©cialisĂ©es.
10. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de sâassurer de lâapplicationeffective des instructions gĂ©nĂ©rales de politiquepĂ©nale en matiĂšre de violences faites aux femmes.
12. Amnesty International France enjoint auxautoritĂ©s françaises de sâassurer dâune mise en placeeffective de la circulation de lâinformation entre lesjuridictions pĂ©nales et civiles.
La circulation de lâinformation entre lesjuridictions pĂ©nales et civiles doit ĂȘtremise en place effectivement
En 2006, Amnesty International dĂ©nonçait les difficultĂ©s etcontradictions rĂ©sultant de la mauvaise articulation entre lecivil et le pĂ©nal en matiĂšre de violences au sein du couple etenjoignait aux autoritĂ©s de sâassurer dâune meilleure articula-tion entre les procĂ©dures civiles et pĂ©nales76.
Le nouveau dispositif en matiĂšre de violences conjugales issude la loi du 26 mai 2004 relative au divorce sâest accompagnĂ©de mesures visant Ă amĂ©liorer lâarticulation entre lâinterven-tion du juge aux affaires familiales saisi sur le fondement delâarticle 220-1, alinĂ©a 3, du code civil et le parquet compĂ©tent.
Ainsi, lorsque les violences exercĂ©es par lâun des Ă©poux met-tent en danger son conjoint, un ou plusieurs enfants, le jugeaux affaires familiales peut ĂȘtre saisi en rĂ©fĂ©rĂ©, en amont detoute procĂ©dure de divorce, en vue de statuer, Ă lâissue dâundĂ©bat contradictoire, sur la rĂ©sidence sĂ©parĂ©e des Ă©poux.
Dans ce cadre, afin dâassurer une protection effective duconjoint victime, la loi prĂ©voit une information obligatoire duministĂšre public, en amont comme en aval de la procĂ©dure(article 1290 du nouveau code de procĂ©dure civile), lâassi-gnation en rĂ©fĂ©rĂ© devant ĂȘtre dĂ©noncĂ©e au ministĂšre publicpar lâhuissier instrumentaire au plus tard le jour de sa remiseau greffe. De la mĂȘme façon, lâordonnance rendue par le jugedoit lui ĂȘtre communiquĂ©e.
Une vigilance particuliÚre est nécessaire quantau recours à la médiation pénale en matiÚre deviolences au sein du couple
Renforcée par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de lajustice aux évolutions de la criminalité, la médiation pénaleest une alternative aux poursuites et constitue une réponsepénale à un délit caractérisé.
Selon la circulaire du 16 mars 2004, elle consiste, « souslâĂ©gide dâun tiers, Ă mettre en relation lâauteur et la victime afinde trouver un accord sur les modalitĂ©s de rĂ©paration, maisaussi de rĂ©tablir un lien et de favoriser, autant que possible, lesconditions de non-rĂ©itĂ©ration de lâinfraction, alors mĂȘme queles parties sont appelĂ©es Ă se revoir ».
Un dĂ©lai dâexĂ©cution de la mesure est fixĂ© par le magistratmandant.
En 2006, Amnesty International émettait de sérieuses ré-serves quant au recours à la médiation pénale dans les casde violences au sein du couple.
Le guide de lâaction publique note que « la disparitĂ© des poli-tiques pĂ©nales est Ă lâorigine de nombreux malentendus sur lamĂ©diation pĂ©nale et sur lâopportunitĂ© du recours Ă cette me-sure en la matiĂšre. Pour la plupart, ces malentendus tiennentĂ une insuffisante apprĂ©ciation par les parquets des procĂ©-dures orientĂ©es en mĂ©diation pĂ©nale et Ă un manque de for-mation des mĂ©diateurs Ă la spĂ©cificitĂ© du contentieux77. »
En effet, les violences au sein du couple traduisent en gĂ©nĂ©ral« un rapport de domination et une emprise de lâagresseur surla victime, qui se trouve privĂ©e de son autonomie. Il peut sâensuivre, pour le mis en cause un sentiment de toute puissancepeu propice Ă dĂ©velopper son sens critique et, chez le plai-gnant, une difficultĂ© Ă se positionner en tant que victime78. »
Ainsi, sous peine de renforcer la vulnĂ©rabilitĂ© de la victime etdâinduire un sentiment dâimpunitĂ© de lâauteur, la mĂ©diation pĂ©-nale ne saurait donc ĂȘtre adaptĂ©e Ă des situations oĂč :
âą il existe des prĂ©cĂ©dents faits de violences, quels quâen soientle contexte, la gravitĂ© et la victime ;
⹠il existe des violences graves ou répétées entre conjoints,concubins ou personnes liées par un pacte civil de solidarité ;
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 19
âą lâauteur est dans une attitude de dĂ©ni quant aux faits repro-chĂ©s ;
âą lâauteur est dâune dangerositĂ© particuliĂšre (rĂ©itĂ©ration ou gra-vitĂ© des faits et de leurs consĂ©quences) ;
âą la victime ou lâauteur sont opposĂ©s Ă la mesure ;
⹠la victime paraßt particuliÚrement traumatisée par la situa-tion ;
⹠une procédure de divorce est en cours (car la possibilité deparvenir à un accord paraßt compromise dÚs lors que le misen cause et la victime sont en conflit parallÚle dans une pro-cédure civile).
En tout Ă©tat de cause, le consentement de la victime doit ĂȘtrerecueilli avant que la mesure ne soit dĂ©cidĂ©e et ĂȘtre actĂ© enprocĂ©dure par procĂšs-verbal. Afin que ce consentement soitparfaitement libre et Ă©clairĂ©, il importe dâexpliquer Ă la victimeen quoi consiste une mĂ©diation pĂ©nale et quâun refus de sapart ne saurait entraĂźner dâoffice un classement sans suite delâaffaire. A lâissue de la mĂ©diation pĂ©nale, le dossier, accom-pagnĂ© dâun rapport prĂ©cis et circonstanciĂ© du mĂ©diateur, estcommuniquĂ© au ministĂšre public.
Pour plus de vigilance encore contre tout risque de dĂ©stabili-sation de la victime, il est recommandĂ© dâinformer les victimesde leur droit Ă ĂȘtre assistĂ©es dâun avocat dans le cadre de lamesure.
Pour Amnesty International France, le recours Ă la mĂ©diationpĂ©nale doit ĂȘtre exceptionnel et cette mesure doit ĂȘtre confiĂ©eĂ un mĂ©diateur formĂ© Ă la spĂ©cificitĂ© du contentieux des vio-lences au sein du couple.
13. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de sâassurer que :- la mĂ©diation pĂ©nale ne soit pas utilisĂ©e dans lessituations oĂč elle nâest pas adaptĂ©e, notammentlorsque:Il existe des prĂ©cĂ©dents faits de violences, quelsquâen soient le contexte, la gravitĂ© et la victimeIl existe des violences graves ou rĂ©pĂ©tĂ©es entreconjoints, concubins ou personnes liĂ©es par un pactecivil de solidaritĂ©Lâauteur est dans une attitude de dĂ©ni quant aux faitsreprochĂ©s ;Lâauteur est dâune dangerositĂ© particuliĂšre(rĂ©itĂ©ration ou gravitĂ© des faits et de leursconsĂ©quences)La victime ou lâauteur sont opposĂ©s Ă la mesureLa victime paraĂźt particuliĂšrement traumatisĂ©e par lasituationUne procĂ©dure de divorce est en cours (car lapossibilitĂ© de parvenir Ă un accord paraĂźt compromisedĂšs lors que le mis en cause et la victime sont enconflit parallĂšle dans une procĂ©dure civile)- les mĂ©diateurs soient systĂ©matiquement formĂ©s Ă laspĂ©cificitĂ© du contentieux des violences au sein ducouple- le guide de lâaction publique soit systĂ©matiquementdiffusĂ© et que les recommandations quâil contientsoient mises en Ćuvre de maniĂšre effective par lesservices concernĂ©s.
Les mesures dâĂ©loignement de lâauteurdes violences doivent ĂȘtre effectivementmises en Ćuvre
Pour Amnesty International France, le dispositif dâĂ©viction dudomicile de lâauteur des violences prĂ©vu par la loi, doit, pourĂȘtre efficace, ĂȘtre rĂ©ellement mis en oeuvre sur tout le terri-toire.
Possible au civil comme au pĂ©nal, lâĂ©loignement du conjointviolent est considĂ©rĂ© comme une avancĂ©e mais qui peine Ă ĂȘtre mise en Ćuvre faute de moyens. « LâĂ©viction du conjointviolent permet lâinversion du rapport de force symboliqueentre lâauteur et la victime par lâattribution du domicile fami-lial Ă cette derniĂšre79. »
Pour le procureur de la RĂ©publique de Douai, Monsieur LucFrĂ©miot, « il est en effet inacceptable que les femmes victimesde violences soient obligĂ©es de partir, parfois en pleine nuit etavec leurs enfants, Ă la recherche dâune solution dâaccueil quide surcroĂźt nâest jamais satisfaisante. Ce sont les agresseursqui doivent sâen aller80. »
Cette possibilitĂ© de conserver le domicile familial est dâautantplus importante quâelle permet de mieux prendre en compteles intĂ©rĂȘts des enfants, qui ne sont pas alors contraints dechanger de domicile et dâĂ©cole.
Au civil, lâĂ©viction du domicilede lâauteur des violences
Sur le plan civil, la loi du 26 mai 2004 relative au divorce ainstaurĂ© un dispositif qui permet au conjoint victime de vio-lences conjugales, avant mĂȘme de dĂ©poser une requĂȘte endivorce, de saisir en urgence le juge aux affaires familialespour solliciter, au terme dâune procĂ©dure contradictoire, lâĂ©vic-tion de son conjoint du domicile conjugal. Câest le « rĂ©fĂ©rĂ©-violence81 ».
En 2006, Amnesty International soulignait les faiblesses decette mesure, notamment lâabsence de dispositif efficace etsystĂ©matique qui permettrait dâassurer un suivi de ces me-sures en termes de protection et dâaccompagnement de lavictime. Pour Amnesty International, « cette mesure devraitsâaccompagner dâune vĂ©ritable stratĂ©gie de protection desvictimes et de sanction des auteurs qui permettrait entres au-tres choses, une meilleure coordination entre le traitementpĂ©nal et le traitement civil dâune affaire, notamment pour laprotection des victimes82. »
En rĂ©alitĂ©, le dispositif du « rĂ©fĂ©rĂ© violence » en matiĂšre civilesâest rĂ©vĂ©lĂ© peu efficace et est peu utilisĂ©. Pour Madame AnneJoncquet, responsable de la permanence du barreau de Bo-bigny, « la procĂ©dure du « rĂ©fĂ©rĂ© violence » (âŠ) est un Ă©chec.ConsidĂ©rĂ©e Ă lâorigine comme un progrĂšs, elle est trĂšs peuutilisĂ©e, car trĂšs chĂšre et trĂšs compliquĂ©e. Non seulementcâest un parcours dâobstacles, mais bien souvent, on nâarrivepas Ă faire exĂ©cuter lâordonnance (âŠ)83 ». En effet, la procĂ©-dure est coĂ»teuse pour la victime car le concours dâun huissierest nĂ©cessaire et lâexĂ©cution de lâordonnance peut sâavĂ©rerdifficile (difficultĂ©s par exemple de faire sortir le conjoint dudomicile ou au contraire de lui signifier lâordonnance sâil aquittĂ© le domicile).
En outre, cette procĂ©dure peut ĂȘtre mise en Ćuvre seulementpour les couples mariĂ©s.
La proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novem-bre 2009, prĂ©voit donc dâĂ©tendre la procĂ©dure dâĂ©viction dudomicile de lâauteur des violences, prĂ©vue Ă lâarticle 220-1 ducode civil, actuellement applicable aux conjoints, aux per-
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire20
14. Amnesty International France invite lesparlementaires Ă adopter la disposition de laproposition de loi « renforçant la protection desvictimes et la prĂ©vention et la rĂ©pression desviolences faites aux femmes » proposant dâĂ©tendre laprocĂ©dure dâĂ©viction du domicile de lâauteur desviolences, prĂ©vue Ă lâarticle 220-1 du code civil,actuellement applicable aux conjoints, aux personnesliĂ©es par un pacte civil de solidaritĂ© et aux concubinsquand ils sont copropriĂ©taires ou cotitulaires du baildu logement commun.
Au pĂ©nal, lâĂ©viction du domicilede lâauteur des violences
Depuis la loi sur la récidive du 12 décembre 2005, en cas depoursuite pénale de l'auteur des violences et avant tout juge-ment, la justice peut prendre des mesures immédiates pourassurer la sécurité de la victime et celle des enfants.
Ainsi, lâautoritĂ© judiciaire peut, Ă tous les stades de la procĂ©-dure pĂ©nale, proposer (dans le cadre dâune composition pĂ©naleou dâune autre procĂ©dure alternative aux poursuites) ou impo-ser (dans le cadre dâun contrĂŽle judiciaire ou dâun sursis avecmise Ă lâĂ©preuve) Ă lâauteur des faits de violence de rĂ©sider horsdu domicile du couple et, le cas Ă©chĂ©ant, de sâabstenir de pa-raĂźtre dans ce domicile ou aux abords immĂ©diats de celui-ci.
Les instructions gĂ©nĂ©rales de politique pĂ©nale donnĂ©es auxprocureurs gĂ©nĂ©raux prĂ©cisent que « le dispositif dâĂ©victiondu domicile de lâauteur des violences prĂ©vu par la loi doit ĂȘtreeffectivement mis en oeuvre sur tout le territoire85. »
Mais selon les chiffres mentionnĂ©s par la garde des Sceauxen 2009, « lâĂ©viction du conjoint en matiĂšre pĂ©nale a Ă©tĂ© pro-noncĂ©e dans 10 % des affaires en 2006, 13 % en 2008 et plusde 18 % depuis le dĂ©but de lâannĂ©e 2009. Elles ont Ă©tĂ© pro-noncĂ©es dans des affaires de meurtre â 68 % â, dâagressionsexuelle â 26 % â de violences graves â 25 % â de violenceslĂ©gĂšres â 8 %. Par ailleurs, 45 % dâentre elles lâont Ă©tĂ© dansle cadre dâun contrĂŽle judiciaire, 30 % dans le cadre dâun sur-sis avec mise Ă lâĂ©preuve, 18 % dans le cadre dâune mesurealternative aux poursuites86. »
La principale difficultĂ© dâapplication de cette mesure rĂ©sidedans le manque de structures permettant dâhĂ©berger leconjoint Ă©vincĂ© quand cela est nĂ©cessaire.
En juillet 2008, le rapport dâĂ©valuation du premier plan globaltriennal 2005-2007 prĂ©conisait donc que des moyens subs-tantiels soient consacrĂ©s Ă lâouverture de places dâhĂ©berge-ment pour les auteurs de violences87.
En effet, dâaprĂšs ce mĂȘme rapport, seuls 36 % des parquetsavaient conclu une convention sur lâaccueil et lâhĂ©bergementdes auteurs de violences avec des partenaires.
En 2008, le Guide de lâaction publique incitait les parquets Ă si-gner de telles conventions88 et la circulaire dâinstructions pĂ©-nale du 1er novembre 2009 leur rappelle quâ« il convientdâamĂ©liorer la prise en charge de lâauteur, pour prĂ©venir la rĂ©i-tĂ©ration du passage Ă lâacte. A cette fin, les mesures tendantĂ lâĂ©viction du conjoint violent du domicile conjugal et les par-tenariats permettant son accueil dans des structures dâhĂ©ber-gement et dâaccompagnement psychologique, dĂ©jĂ mis enplace par de nombreux parquets, doivent ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©s. »
Le bracelet Ă©lectronique : nouvelle mesure decontrĂŽle de lâapplication de lâĂ©loignement duconjoint violent
Pour renforcer la prĂ©vention de la rĂ©cidive et empĂȘcher lesconjoints violents de recommencer, le gouvernement a dĂ©cidĂ©d'expĂ©rimenter dĂšs le dĂ©but 2010 un dispositif de surveillanceĂ©lectronique de lâinterdiction de rentrer en contact avec la vic-time, sur la base de lâexemple espagnol. Ce systĂšme per-mettra de contrĂŽler l'application de la mesure d'Ă©loignementdu conjoint violent et peut ĂȘtre une modalitĂ© dâexercice de lapeine ou ĂȘtre prononcĂ© comme alternative aux poursuites.
La surveillance Ă©lectronique peut prendre toute une sĂ©rie deformes diverses, qui varient en intensitĂ© et qui limitent plus oumoins la libertĂ© de circulation de la personne, sa libertĂ© ausens propre et son droit au respect de sa vie privĂ©e. Les sys-tĂšmes Ă©lectroniques de localisation de type GPS permettentde savoir en permanence oĂč se trouve la personne qui en estmunie. La mĂ©thode du bracelet Ă©lectronique, qui Ă©met un si-gnal vers un rĂ©cepteur fixe, ne permet pas de suivi au-delĂ d'un certain rayon.
Avant de recourir Ă la surveillance Ă©lectronique, il convientdâenvisager des mesures moins contraignantes, dont lâeffica-citĂ© est avĂ©rĂ©e, afin de sâassurer qu'elle est bien nĂ©cessaireet adaptĂ©e Ă lâobjectif lĂ©gitime poursuivi et ce uniquement siet aussi longtemps que des mesures moins coercitives nesemblent pas susceptibles de permettre de parvenir auxmĂȘmes fins.
Le suivi électronique doit faire l'objet d'un contrÎle de la partd'une autorité compétente et indépendante, judiciaire ouautre, afin qu'il ne soit appliqué qu'en cas de stricte nécessitéet de maniÚre proportionnée à l'objectif légitime déclaré et queson usage ne soit ni discriminatoire, ni arbitraire ni indûmentprolongé89.
15. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de sâassurer que le dispositifdâĂ©viction du domicile de lâauteur des violences prĂ©vupar la loi est rĂ©ellement mis en Ćuvre sur tout leterritoire.
16. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises que, au cas oĂč le recours Ă la sur-veillance Ă©lectronique serait appliquĂ© dans le cadredes violences au sein du couple, il soit prĂ©vu par la loiet soit soumis au contrĂŽle d'une autoritĂ© judiciaire.
2.3 La prise en charge des auteurs de violencedoit ĂȘtre organisĂ©e, financĂ©e et coordonnĂ©epour lutter contre les risques de rĂ©cidive
Les pouvoirs publics nâont pris conscience que rĂ©cemment delâenjeu que reprĂ©sente la prise en charge des auteurs dans lapolitique de lutte contre les violences au sein du couple. Celle-ci est pourtant un Ă©lĂ©ment essentiel de la protection des vic-times.
Pour Monsieur Luc FrĂ©miot, procureur de la RĂ©publique Ă Douai : « Câest donc bien de cela que nous manquons : desstructures dâaccueil pour les auteurs de violences. En dĂ©pit denos efforts, des rĂ©sultats que nous obtenons, de leur mĂ©dia-tisation, des contacts que nous nouons, on continue Ă ouvririndĂ©finiment des places dâaccueil pour les victimes, mais au-
sonnes liées par un pacte civil de solidarité et aux concubinsquand ils sont copropriétaires ou cotitulaire du bail du loge-ment commun84.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 21
pour dĂ©pendance Ă lâalcool et dix huit couples ont Ă©tĂ© identi-fiĂ©s comme consommateurs chroniques. Dans vingt cas, lâau-teur des faits Ă©tait suivi psychologiquement oupsychiatriquement, dont six femmes.
La loi a organisé le suivi des auteurs deviolences à tous les stades de la procédurejudiciaire
Avant le jugement, le juge des libertĂ©s et de la dĂ©tention peutordonner un contrĂŽle judiciaire. Au moment du jugement, letribunal peut prononcer une obligation ou une injonction desoins dans le cadre, par exemple, dâun sursis avec mise Ă lâĂ©preuve ou dâun suivi socio-judiciaire.
Avant la décision judiciaire
A la suite de la garde Ă vue de lâauteur, le procureur peut choi-sir de le poursuivre, si les faits sont particuliĂšrement graves,selon la procĂ©dure de la comparution immĂ©diate. Mais si lesfaits sont dâune moindre gravitĂ©, le magistrat peut opter pourune convocation par procĂšs-verbal, pour une audience ultĂ©-rieure, associĂ©e Ă un contrĂŽle judiciaire socio-Ă©ducatif or-donnĂ© par un juge des libertĂ©s et de la dĂ©tention. Les mesuresde contrĂŽle judiciaire sont limitĂ©es Ă deux mois, sauf en cas derenvoi de lâaffaire.
La conclusion de conventions entre les diffĂ©rents acteurs (par-quet, association de contrĂŽle judiciaire et association de suivides auteurs de violences conjugales) permettrait alors de fa-ciliter le suivi des auteurs en lâorganisant et le coordonnant.
AprÚs la décision judiciaire
Le suivi peut ĂȘtre poursuivi si le tribunal prononce une peinedâemprisonnement avec sursis avec mise Ă lâĂ©preuve qui com-porte une obligation de soins ou un suivi socio-judiciaire quiprĂ©voit une injonction de soins. Une peine dâemprisonnementavec sursis et mise Ă lâĂ©preuve signifie que lâemprisonnementne sera pas effectuĂ© si la personne condamnĂ©e respecte, du-rant le dĂ©lai dâĂ©preuve fixĂ© par le tribunal, les obligationsmises Ă sa charge, telle lâobligation de suivre des soins et dâenjustifier auprĂšs du juge d'application des peines. Le suivisocio-judiciaire est une peine qui emporte pour le condamnĂ©lâobligation de se soumettre, sous le contrĂŽle du juge de l'ap-plication des peines, Ă des mesures dâassistance et de sur-veillance destinĂ©es Ă prĂ©venir la rĂ©cidive. En revanche, quandle risque de rĂ©cidive est Ă©cartĂ© (en raison par exemple de lasĂ©paration du couple), les tribunaux prononcent frĂ©quemmentune peine dâemprisonnement assortie dâun sursis simple, cequi interrompt le suivi de lâauteur.
Depuis la loi du 5 mars 2007 relative Ă la prĂ©vention de la dĂ©-linquance, la peine de suivi socio-judiciaire a Ă©tĂ© Ă©tendue auxactes de violence contre les personnes commis par le parte-naire ou lâex-partenaire96. De surcroĂźt, elle est obligatoire enmatiĂšre correctionnelle si les violences sont commises de ma-niĂšre habituelle, sauf en cas de sursis avec mise Ă lâĂ©preuveou de dĂ©cision spĂ©cialement motivĂ©e du tribunal.
Depuis le 1er mars 2008, et sauf dĂ©cision contraire de la juri-diction de jugement, le suivi socio-judiciaire doit comporterune injonction de soins sâil est Ă©tabli aprĂšs une expertise mĂ©-dicale, que la personne est susceptible de faire lâobjet dâuntraitement. Lâinobservation des mesures de surveillance etdes obligations par le condamnĂ© lâexpose Ă la mise Ă exĂ©cu-tion totale ou partielle de lâemprisonnement qui a Ă©tĂ© dĂ©ter-
cune structure nâest crĂ©Ă©e pour les auteurs. [âŠ] Ce qui nousmanque, ce ne sont pas les textes, mais des structures dâac-cueil pour les auteurs90. »
Au niveau national, le taux de rĂ©cidive est de 7,9 % et estdonc plus important que pour les violences en gĂ©nĂ©ral(5,5 %). Ce taux est moindre dans le ressort des tribunaux degrande instance oĂč le procureur mĂšne une politique incluantle suivi de lâauteur (6 % Ă Douai ; 2,5 % dans le Tarn)91.
Cependant « les moyens qui y sont consacrĂ©s sont encorebeaucoup trop faibles et les techniques de suivi sont insuffi-samment Ă©valuĂ©es, faute dâune politique nationale cohĂ©rentedans ce domaine92.»
Il est donc indispensable de mener des Ă©tudes dâensemblesur lâimpact de la prise en charge des auteurs de violencesconjugales pour permettre notamment dâadapter les moyensqui doivent ĂȘtre consacrĂ©s Ă cette politique.
Les moyens, notamment financiers, faisant largement dĂ©faut,la prise en charge des auteurs reste lacunaire sur le territoirefrançais. Le nombre de structures de suivi et de prise encharge des auteurs de violences est trĂšs faible. Le rapport dugouvernement remis au Parlement relatif Ă la politique natio-nale de lutte contre les violences au sein du couple fait Ă©tat durecensement dâune « soixantaine de structures dâaccompa-gnement des auteurs93 », soit environ une structure pour100 000 habitants.
Des moyens doivent donc ĂȘtre rapidement dĂ©gagĂ©s pour pĂ©-renniser les actions existantes et les gĂ©nĂ©raliser. Cependant,cet Ă©tat de fait ne doit pas conduire Ă une rĂ©allocation demoyens, dĂ©jĂ limitĂ©s, destinĂ©s Ă lâaide devant ĂȘtre accordĂ©eaux victimes, mais des actions de prĂ©vention ciblĂ©es sur lespersonnes qui en ont le plus besoin doivent ĂȘtre menĂ©es etdes moyens doivent ĂȘtre spĂ©cifiquement consacrĂ©s au suivides auteurs de violences.
Des profils qui justifientune prise en charge systématique
En 2006, le Docteur Roland Coutanceau avait distingué troisgrands profils psychologiques d'hommes violents94.
- Un profil « à tonalité immaturo- névrotique ». Ces hommesviolents sont parfois conscients de leur responsabilité et peu-vent éprouver de la souffrance pour leur comportement etpour leur victime. Ce profil représenterait 20% des hommesviolents.
- Un profil « d'hommes égocentriques et mal structurés psy-chologiquement » qui banalisent et minimisent les faits. Ceshommes sont sur la défensive et peinent à s'autocritiquer.
- Un profil d'hommes « à la personnalité particuliÚrement pro-blématique » marqué par un fort égocentrisme et une dimen-sion paranoïaque et mégalomaniaque. Ils tentent deconstruire une relation d'emprise et décrivent leur femme« comme mythomane, hystérique ou persécutive ». Dans cegroupe 15% environ souffrent de troubles psychiatriques clai-rement identifiés.
DâaprĂšs lâĂ©tude nationale sur les morts violentes au sein ducouple en 2008, sur 184 homicides, lâalcool Ă©tait prĂ©sent dans54 cas, soit prĂšs de 30% du total95. La progression de pas-sage Ă l'acte sous l'emprise de l'alcool Ă©tait en augmentationde 10% en 2008. LâĂ©tude constate que lâalcool a Ă©tĂ© essen-tiellement consommĂ© par les hommes avant le passage Ă lâacte. Cependant, six femmes auteurs en avaient absorbĂ© aumoment des faits. Dix sept auteurs masculins Ă©taient connus
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire22
minĂ© par la juridiction de jugement. Par les nombreuses me-sures dâassistance et de surveillance quâil permet de mettre enĆuvre et qui peuvent ĂȘtre modifiĂ©es en cas de besoin par lejuge de l'application des peines, le suivi socio-judiciaire estune mesure particuliĂšrement utile pour prendre en charge lesauteurs de violences conjugales.
Il permet Ă©galement de prendre en considĂ©ration les intĂ©rĂȘtsde la victime, puisque le condamnĂ© peut notamment se voirimposer lâindemnisation la victime, lâinterdiction dâentrer en re-lation avec elle ou lâobligation de rĂ©sider en dehors du domi-cile familial.
Cependant, «Les effets de lâextension aux faits de violencesau sein du couple du champ du suivi socio-judiciaire par laloi du 5 mars 2007 sont limitĂ©s par le dĂ©faut de moyens en tra-vailleurs sociaux et en cas de soins, en psychiatres ou psy-chologues spĂ©cialisĂ©s97. »
gal » (conflit ponctuel entre deux personnes Ă Ă©galitĂ©) et « vio-lences conjugales » (processus de long terme de prise decontrĂŽle et de destruction dâune personne par une autre). Denombreux professionnels ont des difficultĂ©s Ă apprĂ©hendercette distinction, en particulier ceux qui nâont pas reçu uneformation adaptĂ©e102. »
Tout en constatant que les bonnes pratiques tendent Ă se dif-fuser dans un nombre croissant de juridictions grĂące Ă unepolitique pĂ©nale volontariste la mission parlementaire consta-tait en juillet 2009, que « les politiques pĂ©nales menĂ©es par lesparquets sont encore divergentes et quâil existe des dispari-tĂ©s gĂ©ographiques importantes dans les rĂ©ponses pĂ©nales etdans les peines prononcĂ©es liĂ©es Ă une implication et Ă desmoyens variables. La mission a pu, au cours de ses dĂ©place-ments et de ses auditions, constater que ces disparitĂ©s per-duraient. Ainsi dans les CĂŽtes d'Armor un parquetparticuliĂšrement dynamique sur la question des violences ausein du couple se saisissait de tous signalements de violence,interdisait la mĂ©diation pĂ©nale et ordonnait l'Ă©viction desconjoints violents. A l'inverse les parquets des deux autresTGI du dĂ©partement, pratiquent la mĂ©diation pĂ©nale (de façonencadrĂ©e) et recourent peu Ă l'Ă©viction du conjoint violent103. »
Si l'on examine les suites données aux plaintes en Ile-de-France et dans le ressort des tribunaux de grande instancede Castres et d'Albi, on constate que 16% des affaires sontclassées sans suite dans la région parisienne et 40% dans leressort d'Albi et de Castres, que 42,5% des affaires donnentlieu à des poursuites dans la région parisienne et 22% dansle ressort des tribunaux d'Albi et de Castres104.
Des disparitĂ©s importantes existent Ă©galement dans lespeines prononcĂ©es. Les juridictions ne prononcent pas tou-jours des peines de mĂȘme ordre pour des faits semblables.
Il semble toutefois que les procureurs se mobilisent de plus enplus. Une enquĂȘte menĂ©e auprĂšs de 183 tribunaux de grandeinstance rĂ©vĂšle que « 91% des procureurs ont donnĂ© des di-rectives pĂ©nales aux services de police et de gendarmerie surle traitement des faits de violences au sein du couple et que74% ont dĂ©signĂ© un magistrat rĂ©fĂ©rent pour ces infractions etorganisĂ© des rĂ©unions de service en interne sur ce thĂšme105. »
17. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises dâamĂ©liorer la prise en chargedes auteurs de violences, de lâintĂ©grer Ă la logique delâaction de lâĂtat dans la lutte contre les violencesfaites aux femmes et de sâassurer que :- lâaccueil des auteurs de violences dans desstructures dâhĂ©bergement et dâaccompagnementfinancĂ©es par lâĂtat est gĂ©nĂ©ralisĂ©.
18. Amnesty International France incite les autoritĂ©sfrançaises Ă mettre en Ćuvre des politiques pĂ©nalesspĂ©cifiques pour lutter contre les violences faites auxfemmes et recommande dâinciter les parquetsgĂ©nĂ©raux Ă progresser vers lâharmonisation despolitiques pĂ©nales sur tout le territoire.
2.4 La disparitĂ© des politiques pĂ©nales98 menĂ©espar les parquets reste un obstacle importantĂ lâapplication pleine et uniforme de la loi
La divergence entre les politiques pĂ©nales menĂ©es par lesparquets est un obstacle important Ă lâapplication pleine etuniforme de la loi.
En 2007, dans leur rapport d'information sur la mise en appli-cation de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la ré-pression des violences au sein du couple ou commises contreles mineurs, les députés Guy Geoffroy et Serge Blisko ju-geaient « inacceptables les disparités flagrantes demeurantentre parquets sur le territoire de la République99. »
Tout en reconnaissant le caractĂšre volontariste de la politiquepĂ©nale menĂ©e par les autoritĂ©s, le rapport sur l'Ă©valuation duplan global 2005 â 2007 de lutte contre les violences faitesaux femmes a analysĂ© la disparitĂ© des rĂ©ponses pĂ©nales ap-portĂ©es par les parquets comme rĂ©sultant Ă la fois « de la po-litique pĂ©nale peu affirmĂ©e de certains procureurs dans lalutte contre les violences faites aux femmes en dĂ©pit desgrandes orientations du ministre et Ă lâinĂ©vitable effet de la di-versitĂ© des rĂ©ponses pĂ©nales mises Ă disposition du magistratdu parquet qui les adapte Ă la fois Ă la situation soumise etaux moyens dont il dispose100. »
En 2008, le Guide de lâaction publique reconnaissait que « side plus en plus de parquets ont dĂ©fini une politique pĂ©naleen matiĂšre de violences au sein du couple, force est deconstater le caractĂšre disparate et diversement appliquĂ© deces directives dâun tribunal Ă lâautre, voire au sein dâun mĂȘmeressort juridictionnel101.»
En fĂ©vrier 2009, lâobservatoire de la paritĂ© entre les femmeset les hommes constatait que « la disparitĂ© des politiques pĂ©-nales sur lâensemble du territoire demeure un rĂ©el obstacle Ă lâefficacitĂ© du travail menĂ© par les diffĂ©rents acteurs, Ă lâĂ©va-luation des diffĂ©rentes mesures de protection des femmesvictimes et Ă lâĂ©galitĂ© de traitement des situations. Cette dis-paritĂ© est due notamment Ă la confusion entre « conflit conju-
2.5 La protection des victimes Ă©trangĂšresdoit ĂȘtre assurĂ©e
En 2006, Amnesty International soulignait quâ« en sus desdiffĂ©rentes difficultĂ©s rencontrĂ©es par lâensemble des femmessoumises Ă des violences au sein de leur couple, les femmesĂ©trangĂšres, particuliĂšrement lorsque leur situation adminis-trative est prĂ©caire, sont confrontĂ©es Ă des obstacles supplĂ©-mentaires. GĂ©nĂ©ralement peu informĂ©es de leurs droits, ellessont souvent plus isolĂ©es lorsquâil sâagit dâorganiser un dĂ©-part, trouver un hĂ©bergement, un travail, une alternative via-ble » et lâorganisation recommandait que « les femmes, quelleque soit leur situation administrative, aient accĂšs Ă la mĂȘmeprotection et prise en compte de la part des autoritĂ©s pu-bliques106. »
Malgré une amélioration de la législation107, il existe souventun lien de dépendance administrative entre la situation de la
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 23
victime Ă©trangĂšre au regard du sĂ©jour et les violences quâellea subies, lien constituĂ© par lâexigence dâune permanence dela communautĂ© de vie.
Or, les situations de violences conjugales peuvent entraßner larupture de la communauté de vie.
Ainsi, si des avancĂ©es lĂ©gislatives ont permis de limiter lerisque de perdre le droit au sĂ©jour pour les conjointes de Fran-çais et les Ă©trangĂšres entrĂ©es au titre du regroupement fami-lial, en revanche, les femmes victimes en situation irrĂ©guliĂšresont confrontĂ©es Ă des obstacles rĂ©dhibitoires pour faire ces-ser les situations de violences et ĂȘtre protĂ©gĂ©es.
LâaccĂšs au droit au sĂ©jour des femmesĂ©trangĂšres en situation rĂ©guliĂšre, victimes deviolences conjugales. Une adaptation partiellede la rĂ©glementation
Selon le droit commun des rĂšgles relatives au sĂ©jour desĂ©trangers en France, le droit au sĂ©jour des conjoints de Fran-çais et des conjoints dâĂ©trangers entrĂ©s au titre du regroupe-ment familial peut ĂȘtre remis en cause en cas de rupture dela vie commune.
Avant la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative Ă lamaĂźtrise de l'immigration, Ă l'intĂ©gration et Ă l'asile, la rĂ©gle-mentation Ă©tait totalement inadaptĂ©e aux situations de vio-lences conjugales puisque les femmes qui en Ă©taient victimesĂ©taient fortement incitĂ©es Ă ne pas saisir la justice, sous lamenace de faire lâobjet dâun refus de sĂ©jour assorti dâune obli-gation de quitter le territoire français.
Des rĂšgles spĂ©cifiques, visant Ă faciliter leur accĂšs au droit, entenant compte des situations de violences, ont progressive-ment Ă©tĂ© adoptĂ©es. Ainsi, il ressort des dispositions de la loidu 20 novembre 2007108 que lâautoritĂ© administrative est obli-gĂ©e de dĂ©livrer un titre de sĂ©jour en cas de violences conju-gales antĂ©rieures Ă lâobtention de celui-ci et quâelle ne peutpas le retirer ou retirer la carte de rĂ©sident dâune victime deviolences conjugales qui se sĂ©parerait de son conjoint.
En revanche, sa dĂ©cision nâest pas liĂ©e en ce qui concerneson renouvellement.
De plus, dans la pratique, les préfectures refusent bien sou-vent de délivrer un premier titre à une épouse alléguant desviolences de la part de son époux de nationalité française, aumotif que ces violences ne sont pas démontrées.
Dans sa rĂ©ponse Ă©crite aux questions de la mission parle-mentaire, le ministĂšre de lâImmigration, de lâIntĂ©gration, delâIdentitĂ© nationale et du DĂ©veloppement solidaire a justifiĂ© lefait quâaucune obligation ne pĂšse sur les prĂ©fets en prĂ©cisantque : « le lĂ©gislateur a toutefois entendu ne pas donner Ă lâau-toritĂ© administrative une compĂ©tence liĂ©e dans ce domaine,pour laisser au prĂ©fet un pouvoir dâapprĂ©ciation lui permet-tant de vĂ©rifier si les violences conjugales sont avĂ©rĂ©es. »
Ce pouvoir dâapprĂ©ciation doit sâexercer selon les recom-mandations des diffĂ©rentes circulaires portant sur le renou-vellement des titres de sĂ©jour et notamment celle du 30octobre 2004, adressĂ©e aux prĂ©fets, qui indique : « Vous veil-lerez Ă faire une application diligente de ces dispositions, auvu des divers justificatifs qui pourront vous ĂȘtre produits (rap-port des services de police, dĂ©pĂŽt de plainte, attestations ettĂ©moignages issus de reprĂ©sentants dâadministrations so-ciales ou du milieu associatif, certificats mĂ©dicauxâŠ) ».
Cette simple possibilité de renouvellement du titre de séjouren cas de rupture de la communauté de vie du fait des vio-
lences engendre des différences importantes de traitemententre préfectures comme en témoigne les associations defemmes étrangÚres regroupées au sein du collectif ADFEM(Action et droits des femmes exilées et migrantes)109.
« Pour le renouvellement du titre de sĂ©jour des conjointes defrançais entrĂ©es avec un visa de long sĂ©jour ou des conjointesdâĂ©tranger en situation rĂ©guliĂšre entrĂ©es au titre du regroupe-ment familial, victimes de violences conjugales les conduisantĂ rompre la communautĂ© de vie, certaines prĂ©fectures de-mandent la reconnaissance dâun divorce pour faute, dâautresla condamnation pĂ©nale du mari. Or la procĂ©dure pĂ©nale estextrĂȘmement longue et complexe et les femmes voient leurdemande de renouvellement rejetĂ©e car elle ne correspondpas aux conditions arbitrairement ordonnĂ©es par les prĂ©fec-tures. Ainsi une femme qui dĂ©cide de rompre la vie communeen raison de violences conjugales est punie dâavoir voulu seprotĂ©ger⊠Nous demandons donc que le renouvellement dutitre de sĂ©jour de ces femmes victimes ne relĂšve plus du pou-voir discrĂ©tionnaire des prĂ©fets et que les pratiques des prĂ©-fectures visant notamment Ă demander des documents quine correspondent pas Ă des conditions lĂ©gales requises (tellesque la condamnation pĂ©nale du conjoint), cessent110. »
Afin de mettre fin Ă cette disparitĂ© dans le renouvellement destitres de sĂ©jour des femmes victimes de violences conjugales,Amnesty International France demande aux autoritĂ©s fran-çaises dâaligner les conditions de la dĂ©livrance et du retrait entransformant la possibilitĂ© quâont les prĂ©fets de renouveler letitre de sĂ©jour en obligation, si les violences conjugales sontconstituĂ©es.
Des freins trÚs importants à la protection desfemmes victimes de violences qui sont ensituation irréguliÚre subsistent
Pour les femmes victimes de violences qui sont en situationirréguliÚre les difficultés sont multiples et la dénonciation desviolences ne leur ouvre pas de droit au séjour.
En effet, comme le relĂšve le rapport de la mission parlemen-taire « les conditions de sĂ©jour des femmes en situation irrĂ©-guliĂšre qui sont victimes de violences constituent toujours unobstacle rĂ©dhibitoire au dĂ©pĂŽt de plainte puisquâelles risquentde devoir quitter le territoire français en cas de dĂ©nonciationdes violences quâelles subissent. »
En outre, elles ne bĂ©nĂ©ficient que de façon dĂ©rogatoire delâaide juridictionnelle, et, du fait de leur situation, elles nâontpas accĂšs aux droits sociaux.
« Ces femmes nâont droit ni Ă un logement, ni Ă un travail niĂ des allocations. Sans ressources, elles sont, avec leurs en-fants, dans une trĂšs grande prĂ©caritĂ© et nâont droit quâau 115,le numĂ©ro d'urgence sociale anonyme et gratuit111. »
Ces difficultés constituent un frein important à toute rupturede la vie commune et accroissent leur vulnérabilité face auconjoint violent.
Or, la situation dramatique que vivent certaines femmes a Ă©tĂ©soulignĂ©e : « Certaines ne portent pas plainte par manque deconnaissance de leurs droits, mais elles sont aussi confron-tĂ©es Ă certaines pratiques policiĂšres. En venant au commis-sariat ou Ă la gendarmerie, certaines sont menacĂ©esdâinterpellation au regard de leur situation, parfois insultĂ©es â« comment peut-on dĂ©poser plainte contre un ressortissantfrançais ! [âŠ] Il est trĂšs difficile pour ces femmes dâaller aucommissariat, dâĂȘtre en confiance, dâarriver Ă expliquer leursituation, de porter plainte contre leur conjoint ou une per-
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire24
sonne de la famille, ou tout simplement de se voir remettreune photocopie de leur plainte112. »
Aucun dispositif nâĂ©tant prĂ©vu, elles ne peuvent demanderquâune mesure humanitaire de la part du prĂ©fet, qui est ac-cordĂ©e si leur situation est digne dâintĂ©rĂȘt, au regard des Ă©lĂ©-ments de situation quâelles prĂ©sentent.
Amnesty International France considĂšre que la dĂ©fense desdroits humains des femmes ne doit pas ĂȘtre conditionnĂ©e Ă larĂ©gularitĂ© de leur situation administrative.
DĂ©but 2010, une rĂ©organisation est intervenue avec la miseen place de la direction gĂ©nĂ©rale de la cohĂ©sion sociale(DGCS). La nouvelle direction intĂšgre la direction gĂ©nĂ©rale delâaction sociale (DGAS), le Service des droits des femmes etde lâĂ©galitĂ© (SDFE)113, la dĂ©lĂ©gation interministĂ©rielle Ă la fa-mille (DIF), la dĂ©lĂ©gation interministĂ©rielle Ă lâinnovation, Ă lâex-pĂ©rimentation sociale et Ă lâĂ©conomie sociale (DIIESES) et lesagents de la direction interministĂ©rielle des personnes handi-capĂ©es (DIPH).
Son directeur gĂ©nĂ©ral, Monsieur Fabrice Heyries est Ă©gale-ment dĂ©lĂ©guĂ© interministĂ©riel aux droits des femmes et Ă lâĂ©galitĂ© entre les femmes et les hommes, dĂ©lĂ©guĂ© intermi-nistĂ©riel Ă la famille et dĂ©lĂ©guĂ© interministĂ©riel Ă lâinnovation,Ă lâexpĂ©rimentation sociale et Ă lâĂ©conomie sociale.
« L'organisation de la nouvelle direction reste fondĂ©e sur sespublics et comporte certaines innovations sans qu'il y ait au-cune fusion des missions de politiques publiques ni aucunesuppression de poste », a soulignĂ© Monsieur Fabrice HeyriĂšslors dâune prĂ©sentation de l'organigramme de cette future di-rection Ă l'ensemble des agents concernĂ©s. « Direction stra-tĂšge, appelĂ©e Ă renforcer son fonctionnementinterministĂ©riel », la DGCS, constituĂ©e de trois services et decinq sous-directions, devra « dĂ©velopper des fonctions nou-velles notamment dans les domaines de la prospective et del'Ă©valuation des politiques », a rappelĂ© le directeur de l'actuelleDGAS114.
Pour Madame Elisabeth TomĂ©, Chef du SDFE, « lâenjeu de larĂ©forme est dâaffirmer cette inter ministĂ©rialitĂ©, en rattachantle SDFE Ă une trĂšs grosse direction, la Direction gĂ©nĂ©rale dela cohĂ©sion sociale (DGCS) et en crĂ©ant une dĂ©lĂ©gation interministĂ©rielle, juridiquement attribuĂ©e au directeur de la cohĂ©-sion sociale (DGCS) mais qui sera de la compĂ©tence du chefdu SDFE, par dĂ©lĂ©gation du directeur115.»
Madame TomĂ© Ă©voque « la mise en place dâun systĂšme de« rĂ©fĂ©rents » prĂ©vu dans chaque administration et cabinet mi-nistĂ©riel, Ă un niveau hiĂ©rarchique suffisant, si possible un ETPavec une rĂ©union mensuelle [âŠ] le programme dâactionconcerne en effet tous les ministĂšres qui doivent sâengager Ă le mettre en Ćuvre. Chaque ministre doit sâengager, il est re-devable de ce que fait son administration116. »
3.1 La coordination de la politique de luttecontre les violences faites aux femmes auniveau national et local doit ĂȘtre renforcĂ©eet systĂ©matisĂ©e
Au plan national
En 2006, Amnesty International enjoignait aux autoritĂ©s de"renforcer la coordination au niveau national" et de "renforcerles moyens du Service aux droits des femmes et Ă lâĂ©galitĂ©117."
Au niveau national, la premiĂšre instance de pilotage et deconcertation est la Commission nationale contre les violencesfaites aux femmes crĂ©Ă©e par dĂ©cret en 2001118, auprĂšs du mi-nistre chargĂ© des droits des femmes. Elle a pour mission dâor-ganiser la concertation des services de lâĂtat avec lesorganismes et associations concernĂ©s, dâanimer le rĂ©seaudes commissions dĂ©partementales, dâĂ©mettre des recom-mandations, de produire des donnĂ©es et de commander desanalyses sur la situation des femmes victimes de violence.
La commission sâappuie sur le Service des droits des femmeset de lâĂ©galitĂ© (SDFE) dont l'organisation fait l'objet d'une im-portante Ă©volution dans le cadre de la rĂ©forme de lâĂtat et dela RĂ©vision GĂ©nĂ©rale des Politiques Publiques (RGPP).
19. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises :- dâaccorder, sauf menace pour lâordre public, lerenouvellement du titre de sĂ©jour des femmes quicessent la communautĂ© de vie parce quâelles sontvictimes de violences conjugales.- dâaccorder un titre de sĂ©jour aux personnes ensituation irrĂ©guliĂšre qui portent plainte pourviolences au sein du couple.- de dĂ©signer des interlocuteurs rĂ©fĂ©rents au sein desprĂ©fectures, spĂ©cifiquement formĂ©s, pour orienter etaccompagner les femmes Ă©trangĂšres victimes deviolence au sein du couple.
QUELQUES REPĂRESâŠ
1981 â 1985 Madame Yvette Roudy, Ministre dĂ©lĂ©guĂ©aux Droits des femmes1988 â 1991 Madame MichĂšle AndrĂ©, SecrĂ©taire dâEtatchargĂ©e des Droits des femmes1995 â 1997 Madame Anne-Marie Couderc, MinistredĂ©lĂ©guĂ©e pour lâemploi au sein du MinistĂšre du travailet des affaires sociales.1997 â 1998 Madame GeneviĂšve Fraisse, DĂ©lĂ©guĂ©einterministĂ©rielle aux Droits des femmes.2004 â 2005 Madame Nicole Ameline, Ministre de laParitĂ© et de lâĂgalitĂ© professionnelle.2005 â 2007 Madame Catherine Vautrin, MinistredĂ©lĂ©guĂ©e Ă la CohĂ©sion sociale et Ă la ParitĂ©.2007 â 2009 Madame ValĂ©rie LĂ©tard, SecrĂ©taire dâĂtatĂ la SolidaritĂ©.2009 Madame Nadine Morano, SecrĂ©taire dâĂtat Ă laSolidaritĂ©.
3. Lâorganisation et la coordination des moyenspour lutter contre les violences faites auxfemmes
Les politiques de lutte contre les violences faites aux femmesmettent en jeu un nombre considĂ©rable dâintervenants et lâac-tion de lâĂtat en matiĂšre de lutte contre les violences faitesaux femmes sâinscrit aujourdâhui tant au niveau national quelocal.
La coordination des moyens mis en Ćuvre est une conditionde lâefficacitĂ© des politiques de prĂ©vention et de lutte contreles violences.
Câest ainsi que le plan triennal 2008-2010 a pour objectif de« coordonner tous les acteurs et relais dâaction » en renfor-çant la politique partenariale.
Lâorganisation et la coordination des moyens mis en Ćuvrepar les autoritĂ©s françaises doivent aussi passer par un fi-nancement adĂ©quat.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 25
Mais pour la mission parlementaire « cette Ă©volution ne doitcependant pas se traduire par une moindre capacitĂ© dâactiondu SDFE sur le plan interministĂ©riel. »
Ce risque a Ă©tĂ© soulevĂ© par Madame Patricia Vienne, coau-teur du rapport des inspections gĂ©nĂ©rales sur le premier planglobal triennal : « Ă lâĂ©chelon national, si le service des droitsdes femmes et de lâĂ©galitĂ© est fusionnĂ© dans une grande di-rection, telle que la direction de la cohĂ©sion sociale, les pro-blĂ©matiques quâil gĂšre risquent aussi de cesser dâĂȘtreinterministĂ©rielles. Une vigilance collective est nĂ©cessairepour maintenir et consolider la transversalitĂ©119. »
De plus, la rĂ©vision gĂ©nĂ©rale des politiques publique (RGPP)a conduit Ă revoir Ă©galement lâorganisation des services dĂ©-concentrĂ©s du SDFE. Les dĂ©lĂ©guĂ©es rĂ©gionales qui devaientinitialement ĂȘtre intĂ©grĂ©es dans les directions rĂ©gionales de lacohĂ©sion sociale vont finalement ĂȘtre rattachĂ©es aux SecrĂ©-taires gĂ©nĂ©raux aux affaires rĂ©gionales (SGAR) des prĂ©fec-tures garantissant Ă ces dĂ©lĂ©guĂ©es une capacitĂ© dâaction etde coordination Ă lâĂ©chelon local.
En revanche, les chargĂ©es de mission dĂ©partementales de-vraient ĂȘtre intĂ©grĂ©es dans les nouvelles directions dĂ©parte-mentales de la cohĂ©sion sociale alors mĂȘme que leur capacitĂ©Ă rĂ©unir et Ă mobiliser les multiples intervenants dĂ©pend deleur position auprĂšs du prĂ©fet120.
Câest pourquoi la mission parlementaire dâĂ©valuation de la po-litique de prĂ©vention et de lutte contre les violences faites auxfemmes a recommandĂ© que « les chargĂ©es de mission dĂ©-partementales aux droits de femmes restent fonctionnelle-ment rattachĂ©es au prĂ©fet. »
La recommandation principale d'Amnesty International FranceĂ©tait et reste une prise en charge de ces questions par le gou-vernement au niveau global et une responsabilisation d'un in-terministĂ©riel fort et clairement affichĂ©. Des recommandationsen ce sens ont Ă©tĂ© Ă©galement portĂ©es par la mission parle-mentaire de 2009. La disparition d'un ministĂšre ou d'un se-crĂ©tariat d'Ătat dĂ©diĂ© uniquement Ă ces questions a Ă©tĂ©considĂ©rĂ©e par le Collectif national droits des femmes (CNDF)comme un signal nĂ©gatif. Le regroupement du SDFE avecd'autres services au sein d'une direction gĂ©nĂ©rale aux prĂ©ro-gatives plus larges n'est pas sans poser des questions dumĂȘme ordre.
Amnesty International France sera particuliÚrement attentiveaux conséquences de ce regroupement et du fonctionnementd'une telle direction générale et au caractÚre réel affirmé dutransfert effectif de la délégation interministérielle au chef duSDFE.
Au plan local
La dimension interministĂ©rielle de la politique de lutte contreles violences faites aux femmes se retrouve au niveau local.Lâaction au niveau local est reconnue comme primordialedans la mesure oĂč elle associe tous les acteurs et tous lespartenaires en fonction de la thĂ©matique traitĂ©e.
CrĂ©Ă©es en 2001, les commissions dĂ©partementales dâactioncontre les violences faites aux femmes121 assuraient le pilo-tage, au niveau local, du plan global triennal de lutte contre lesviolences. Ces commissions prĂ©sidĂ©es par les prĂ©fets et ani-mĂ©es par les dĂ©lĂ©guĂ©s des services dĂ©concentrĂ©s aux droitsdes femmes, constituaient lâinstance dâorganisation et decoordination des actions locales portant, en particulier sur laformation, lâhĂ©bergement et le logement de femmes victimesde violences.
Depuis 2006, les commissions dĂ©partementales sont intĂ©-grĂ©es aux Conseils dĂ©partementaux de prĂ©vention de la dĂ©-linquance, dâaide aux victimes et de lutte contre la drogue, lesdĂ©rives sectaires et les violences faites aux femmes(CDPD)122.
Lâanimation de ces sous-commissions est assurĂ©e par les dĂ©-lĂ©guĂ©es rĂ©gionales et les chargĂ©es de mission dĂ©partemen-tales, ce qui permet de dĂ©cliner les violences faites auxfemmes, au sein du conseil dĂ©partemental de prĂ©vention dela dĂ©linquance.
Cependant, comme le souligne le rapport de la mission par-lementaire dâĂ©valuation de la politique de prĂ©vention et delutte contre les violences faites aux femmes, « les sous-com-missions ne sont gĂ©nĂ©ralement pas prĂ©sidĂ©es par le prĂ©fet,ce qui ne favorise pas la capacitĂ© de mobilisation des acteurset en particulier des services de lâĂtat, alors quâune forte im-plication du prĂ©fet est un Ă©lĂ©ment dĂ©terminant du succĂšs dudispositif. Il en rĂ©sulte une perte de visibilitĂ© certaine desquestions de violences faites aux femmes, qui sont abordĂ©esau travers dâun axe plus large qui est celui des violences in-trafamiliales ou de lâaide aux victimes et dans une logique deprĂ©vention de la dĂ©linquance. En effet, le conseil dĂ©parte-mental de prĂ©vention de la dĂ©linquance travaille essentielle-ment sur la base du rapport sur lâĂ©tat de la dĂ©linquance Ă©tablipar le conseil dĂ©partemental de sĂ©curitĂ© et sur celui relatif auxactions financĂ©es par le FIPD123. »
Faisant le mĂȘme constat, le rapport dâĂ©valuation du premierplan global triennal, avait Ă©galement soulignĂ© le risque dâuneprise en charge des femmes victimes de plus en plus judi-ciaire et policiĂšre et de moins en moins sociale.
Câest pourquoi la mission parlementaire a recommandĂ© auxautoritĂ©s de « rĂ©unir sous lâautoritĂ© du prĂ©fet des commissionsspĂ©cifiquement consacrĂ©es aux violences faites aux femmespermettant dâidentifier cette problĂ©matique, en coordinationavec les politiques de lutte contre la dĂ©linquance124. »
Applicable le 1er janvier 2010, le Plan national de prĂ©ventionde la dĂ©linquance et dâaide aux victimes 2010-2012 lancĂ© parle Gouvernement le 2 octobre 2009, souligne « quâil revient auPrĂ©fet dâinscrire dans ses prioritĂ©s la lutte contre les violencesintrafamiliales et de proposer au conseil dĂ©partemental deprĂ©vention de la dĂ©linquance (CDPD) de crĂ©er en son sein unou plusieurs groupes thĂ©matiques, notamment sur la problĂ©-matique des violences faites aux femmes et aux enfants125. »
Les mesures 46 et 47 du Plan demandent de « prĂ©voir systĂ©-matiquement au sein des conseils dĂ©partementaux de prĂ©-vention de la dĂ©linquance (CDPD) un groupe thĂ©matiquedĂ©diĂ© aux violences intrafamiliales et aux violences faites auxfemmes » et de « systĂ©matiser, au sein des conseils locaux desĂ©curitĂ© et de prĂ©vention de la dĂ©linquance (CLSPD), lesgroupes de travail et dâĂ©change dâinformations nominativesrelatifs aux violences intrafamiliales et aux violences faites auxfemmes. Ces instances devront faire intervenir dans sa miseen Ćuvre les dĂ©lĂ©guĂ©es rĂ©gionales et les chargĂ©es de mis-sions dĂ©partementales aux droits des femmes et Ă lâĂ©galitĂ©qui sont les personnes rĂ©fĂ©rentes sur ces sujets. »
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire26
3.2 Le financement des moyens doit ĂȘtre Ă lahauteur des objectifs gouvernementaux
Pour Amnesty International, un financement adéquat du sys-tÚme de justice pénale, des services et des actions de soutienaux victimes permet de mesurer à quel point les gouverne-ments veulent réellement faire de la protection et du respectdes droits humains une réalité.
Il est trÚs difficile de connaßtre, avec précision, les moyens fi-nanciers mis en place pour lutter contre les violences faitesaux femmes. En effet, cette lutte relevant de politiques pu-bliques interministérielles, les financements dépendent deprogrammes budgétaires de différentes missions.
Cependant, un document de politique transversale (DPT)126
« ĂgalitĂ© entre les femmes et les hommes » a Ă©tĂ© annexĂ©pour la premiĂšre annĂ©e au projet de Loi de finances pour2010, et « cette prĂ©sentation globale et coordonnĂ©e, quiconstitue Ă©galement la rĂ©ponse française Ă la propositiondâinstitutionnalisation du « Gender budgeting », doit apporterĂ la reprĂ©sentation nationale une visibilitĂ© globale de lâactionde la France dans le champ de lâĂ©galitĂ© entre les femmes etles hommes, et permettre de mesurer lâeffet de la politiquedâĂ©galitĂ© entre les femmes et les hommes et son objectif es-sentiel : le changement durable des mentalitĂ©s127. »
Le DPT « ĂgalitĂ© entre les femmes et les hommes » sâarticuleautour de trois axes et dâobjectifs transversaux complĂ©tĂ©s pardes objectifs concourant Ă la politique transversale, notam-ment lâaxe n° 2 « Lutter contre les violences faites auxfemmes et les atteintes Ă leur dignitĂ© en dĂ©veloppant lâaccĂšsdes femmes Ă lâinformation et au droit et en garantissantlâexercice effectif des droits. »
Pour chacun de ces axes, des objectifs particuliers sont dĂ©fi-nis et associĂ©s Ă des indicateurs permettant de sâassurer deleur rĂ©alisation.
Le programme (137) «ĂgalitĂ© entre les hommes et lesfemmes » concourt Ă la politique transversale des autoritĂ©srelative aux droits des femmes et Ă lâĂ©galitĂ© entre les femmeset les hommes et doit permettre au ministĂšre du travail, desrelations sociales, de la famille, de la solidaritĂ© et de la ville,en charge des droits des femmes et de lâĂ©galitĂ© entre lesfemmes et les hommes, dâanimer, de piloter et de coordonnerla mise en Ćuvre de cette politique publique dans chacunedes politiques publiques sectorielles.
Le pilotage du programme est assurĂ© par le SDFE. Ce pilo-tage, qui repose sur une action interministĂ©rielle, doit per-mettre de renforcer lâanimation des partenariats et de favoriserla convergence de leurs actions avec les orientations de lapolitique publique.
Pour les autoritĂ©s, le renforcement de lâefficacitĂ© de la poli-tique publique relative aux droits des femmes et Ă lâĂ©galitĂ©entre les femmes et les hommes doit emporter des rĂ©ponsescoordonnĂ©es des diffĂ©rents acteurs, en particulier de lâĂtat auregard de sa mission dâanimation et de pilotage, pour quelâĂ©galitĂ© de fait rejoigne lâĂ©galitĂ© de droit.
« La dĂ©cision de crĂ©er un document de politique transversale(DPT) relatif aux droits des femmes et Ă lâĂ©galitĂ© entre lesfemmes et les hommes sâinscrit dans cette dĂ©marche128. »
Cependant, le projet de Loi de finances pour 2010 prévoit unedotation de 29 467 735 ⏠pour le programme 137 (contre29 115 344 ⏠en 2009)129.
Cette augmentation nâest pas significative alors mĂȘme que lalutte contre les violences faites aux femmes a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©eGrande cause nationale 2010 par le gouvernement.
3.3 Le rĂ©seau associatif est important,polyvalent, et doit ĂȘtre activement soutenu
Les associations sont, pour les victimes de violences, un pointdâentrĂ©e dans le systĂšme juridique. Elle joue un rĂŽle moteurdans la prĂ©vention et la lutte contre les violences faites auxfemmes.
Leur champ dâaction est extrĂȘmement large puisquâil va de lapremiĂšre Ă©coute, jusquâĂ lâassistance juridique et Ă lâhĂ©ber-gement des victimes.
Elles participent pleinement Ă la mise en Ćuvre de lâaction in-terministĂ©rielle de lâEtat car « pour la mise en Ćuvre de cesobjectifs, l'Etat s'appuie sur des rĂ©seaux d'associations fi-nancĂ©s au niveau national et/ou local dans le cadre deconventions annuelles, pluriannuelles ou de conventionsd'objectifs et de moyens. La coordination de ces finance-ments constitue lâun des objectifs de la politique interminis-tĂ©rielle130. »
En 2006, Amnesty International recommandait dĂ©jĂ Ă lâĂtatde renforcer et pĂ©renniser les moyens allouĂ©s aux associa-tions.
Or, force est de constater que lâinsuffisance et la prĂ©caritĂ© desfinancements des associations restent des problĂšmes ma-jeurs.
Les moyens de la plate forme tĂ©lĂ©phonique dunumĂ©ro dâappel national 3919 « violencesconjugales infos » doivent ĂȘtre renforcĂ©s
La plate-forme tĂ©lĂ©phonique 3919, qui existait auparavantsous le nom de « Violences conjugales â Femmes info ser-vice », a Ă©tĂ© mise en place par les associations. LâĂtat a prisle relais en 2007 en regroupant toutes les plates-formesdâĂ©coute et en donnant les moyens dâune Ă©coute nationaleplus calibrĂ©e destinĂ©e aux victimes et tĂ©moins de violencesconjugales. La plate-forme est gĂ©rĂ©e par la FĂ©dĂ©ration natio-nale solidaritĂ© femmes (FNSF).
Le 3919 est un numĂ©ro dâĂ©coute, dâinformation et dâorienta-tion. Il sâagit dâun numĂ©ro gratuit et anonyme, qui nâapparaĂźtpas sur les factures tĂ©lĂ©phoniques.
En parallĂšle, le 14 mars 2007, une campagne nationale dâin-formation intitulĂ©e « Violences conjugales : parlez-en avant dene plus pouvoir le faire-Appelez le 39-19 », a Ă©tĂ© lancĂ©e« pour imposer le 3919 comme un outil concret de luttecontre les violences conjugales131. »
20. Amnesty International France souhaite unemeilleure capacitĂ© de mobilisation des acteurs etrecommande aux autoritĂ©s françaises que les groupesthĂ©matiques dĂ©diĂ©s aux violences intrafamiliales etaux violences faites aux femmes tels que prĂ©vus parles mesures 46 et 47 du Plan national de prĂ©ventionde la dĂ©linquance et dâaide aux victimes 2010-2012soient rĂ©ellement mis en place au sein des conseilsdĂ©partementaux de prĂ©vention de la dĂ©linquance(CDPD) et quâils fonctionnent de façon efficace enfaisant intervenir dans leur mise en Ćuvre lesdĂ©lĂ©guĂ©es rĂ©gionales et les chargĂ©es de missionsdĂ©partementales aux droits des femmes et Ă lâĂ©galitĂ©.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 27
« Dans 30 % des cas, ce sont des proches (amis, famille, pro-fessionnels) qui appellent pour demander des conseils. Sou-vent, dans un second temps, la victime appelle elle-mĂȘme.
Les appels arrivant Ă cette plateforme constituent souvent lapremiĂšre occasion pour les victimes dâaborder les violencesquâelles subissent : « La moitiĂ© des appels proviennent defemmes qui nâont jamais parlĂ© de cette question. Un grandnombre dâentre elles veulent vĂ©rifier si elles sont ou non vic-times de violences conjugales, car elles souhaiteraient ne pasĂȘtre concernĂ©es.[âŠ] Nous devons aussi les aider Ă se recon-naĂźtre comme victimes qui ont des droits et peuvent sâen sai-sir pour engager des dĂ©marches. Notre travail se situe doncen amont de celui de la police et des associations et consiste,une fois que la victime sait que des gens peuvent lâaider, quela loi est en sa faveur et quâelle peut demander de lâaide Ă lapolice, Ă lâorienter vers les associations spĂ©cialisĂ©es par les-quelles nous savons quâelle pourra ĂȘtre prise en charge132. »
Madame Christine Clamens, directrice gĂ©nĂ©rale de la FNSF aindiquĂ© que le nombre dâappels, par an, est en progressionlente mais constante, sachant quâun appel dure en moyennevingt minutes et que chaque campagne dans les mĂ©dias en-traĂźne une recrudescence du nombre dâappels133.
En 2009, le 3919 a reçu 80 000 appels et en a traitĂ© 33 000134.Pour faire face Ă cette augmentation, les moyens accordĂ©spar lâĂtat ont augmentĂ© car dans le cadre dâune conventiontriennale 2006-2008, le montant annuel de la subvention duSDFE Ă la FNSF pour la gestion de la ligne tĂ©lĂ©phonique aĂ©tĂ© fixĂ© Ă 660 000 âŹ, montant qui a Ă©tĂ© majorĂ© de 252 500 âŹen 2008 pour financer le passage au 3919, soit 912 500 âŹ.
Pour Mme Ăvelyne RĂ©guig, de lâassociation VIFF SOSfemmes, ces moyens sont insuffisants : « En termes demoyens, lâĂ©coute tĂ©lĂ©phonique, qui est lâune des premiĂšrespossibilitĂ©s offertes aux femmes dâĂȘtre entendues et de voirsâouvrir des portes, nâest pas financĂ©e. Les heures que nousconsacrons au 3919 sont prises sur lâaccompagnement socialdes personnes hĂ©bergĂ©es. Câest du bricolage associatif135. »
Il serait donc nécessaire de prévoir un renforcement de cesmoyens de maniÚre permanente, et également durant les pé-riodes de campagne nationale de grande ampleur qui susci-tent de nombreux appels.
Les subventions nationales 2009 auxassociations sont en baisse de 18,8%par rapport Ă 2006
LâĂtat sâappuie Ă©normĂ©ment sur les associations pour luttercontre les violences faites aux femmes mais les subventionsquâil accorde aux associations et permanences locales dâac-cueil, dâĂ©coute, dâorientation et dâaccompagnement desfemmes victimes de violences sont passĂ©es de 3 444 875 âŹen 2006 Ă 2 796 500 ⏠en 2009. Ce sont les associations lo-cales qui ont vu leurs subventions diminuer de 38% (de2 243 396 ⏠en 2006 Ă 1 392 000 ⏠en 2009) tandis que lesassociations nationales ont vu leur subvention progresser de17% (1 201 479 ⏠en 2006 et 1 404 500 ⏠en 2009)136.
La décentralisation accroßt les disparitésterritoriales et met en péril la pérennitédes fonds
Le cofinancement par les collectivités locales, institutions etorganismes divers représente la rÚgle générale. Le problÚmeest de savoir si la baisse de 38% des subventions nationalesaux associations locales de lutte contre les violences faites
aux femmes peut ĂȘtre compensĂ©e par les subventions locales.
Faire subventionner les associations locales par les collecti-vitĂ©s locales risque dâaggraver les disparitĂ©s entre rĂ©gion, lesfinancements Ă©tant dĂ©pendants de lâimplication politique desĂ©lus locaux au problĂšme des violences faites aux femmes.Les diffĂ©rentes sources de financement ne permettent pasdâavoir une visibilitĂ© suffisante sur les aides financiĂšres glo-bales accordĂ©es aux associations.
Lors de son audition devant la mission parlementaire, Mon-sieur Alain Kurkdjian, adjoint Ă la directrice du SDFE a re-marquĂ© que les montants moyens par dĂ©partement sontinsuffisants. Il a prĂ©cisĂ© que « pour le programme 137 « Ega-litĂ© entre les hommes et les femmes137 » le montant moyendisponible par dĂ©partement est, je le rĂ©pĂšte, de lâordre de40 000 âŹ, ce qui est dĂ©risoire138. »
21. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de :- renforcer les moyens allouĂ©s Ă la plate formetĂ©lĂ©phonique du numĂ©ro dâappel national 3919« violences conjugales infos »- pĂ©renniser le financement des structuresassociatives au moyen de conventions pluriannuellesdâobjectifs et de moyens.
4. LâĂ©volution du droit
Dans une dĂ©claration du 23 novembre 2009, Madame Mi-chĂšle Alliot-Marie, ministre d'Ătat, garde des Sceaux, ministrede la Justice et des LibertĂ©s a prĂ©cisĂ© que « les violencesconjugales ne sont pas une fatalitĂ©, (...) il faut aller plus loindans la mobilisation. »
La lutte contre les violences conjugales implique une adapta-tion de notre droit (...). Un texte sera prĂȘt dans une quinzainede jours et je souhaite qu'il vienne devant le parlement d'ici lafin de l'annĂ©e. Ce texte prĂ©voira que des mesures provisoires,comme l'Ă©viction du domicile, une aide matĂ©rielle, des dĂ©ci-sions sur l'autoritĂ© parentale, pourront ĂȘtre ordonnĂ©es dans lecadre d'une protection temporaire. Le juge des affaires fami-liales pourra ĂȘtre saisi par la victime ou le procureur (...). Lerythme de la justice, la lenteur des procĂ©dures est souventinadaptĂ© Ă la rĂ©alitĂ© des situations et aux attentes des vic-times. Il est prĂ©vu d'Ă©tendre aux concubins et pacsĂ©s la pos-sibilitĂ© d'ĂȘtre Ă©loignĂ©s du domicile. (...) Autres objectifs :mettre en place un accompagnement des enfants lors des vi-sites familiales, et faire prendre en compte les violences psy-chologiques139 ».
La proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novem-bre 2009 propose diverses mesures visant Ă amĂ©liorer le droitexistant ou Ă crĂ©er des dispositifs innovants dont certains sontde nature lĂ©gislative. Parmi ces propositions, la crĂ©ation dâuneordonnance de protection des victimes et la crĂ©ation dâun dĂ©litde violences psychologiques sont envisagĂ©es.
La proposition de loi du SĂ©nat du 25 novembre 2009 prĂ©voitde son cĂŽtĂ© la crĂ©ation dâun dĂ©lit rĂ©primant les violences ha-bituelles, physiques ou psychologiques.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire28
4.1 La proposition de crĂ©ation dâune« ordonnance de protection »
Lâarticle 1er de la proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du27 novembre 2009 propose de crĂ©er, aux articles 706-63-2 etsuivants du code de procĂ©dure pĂ©nale, une « ordonnance deprotection des victimes » ayant pour objet de protĂ©ger, en ur-gence, les personnes qui sont en situation de danger, enamont du dĂ©pĂŽt de plainte.
Cette ordonnance pourrait ĂȘtre demandĂ©e par la victime deviolences au sein de son couple, ou pour des violences com-mises par un ex-conjoint ou partenaire, soit directement au-prĂšs du juge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes (JUDEVI), soit parlâintermĂ©diaire des forces de police ou de gendarmerie.
DĂšs la rĂ©ception de la demande dâordonnance de protection,le juge convoquerait pour une audition la partie demande-resse, la partie assignĂ©e, assistĂ©es, le cas Ă©chĂ©ant, dâun avo-cat et le ministĂšre public. Ces auditions pourraient avoir lieusĂ©parĂ©ment et en chambre du conseil.
A lâissue de ces auditions, sâil apparaĂźt quâil existe une situa-tion de danger engendrĂ©e par des violences, le juge dĂ©lĂ©guĂ©aux victimes dĂ©livrerait une ordonnance de protection.
Lâordonnance de protection a une double nature. Dâune part,elle attesterait de la situation de violence pour la durĂ©e de savaliditĂ©. De ce fait, la personne Ă laquelle elle est dĂ©livrĂ©epourrait faire valoir ses droits de maniĂšre plus rapide et plusefficace, notamment auprĂšs des administrations. Dâautre part,la simple demande dâordonnance habiliterait le juge Ă prendredes mesures de protection immĂ©diates et de stabilisation dela situation juridique et financiĂšre de la partie demanderesse.
Il pourrait :
1° interdire Ă la partie assignĂ©e de recevoir ou de rencontrercertaines personnes spĂ©cialement dĂ©signĂ©es par le juge dĂ©-lĂ©guĂ© aux victimes, ainsi que dâentrer en relation avec elles,de quelque façon que ce soit ;
2° interdire à la partie assignée de détenir ou de porter unearme et, le cas échéant, lui ordonner de remettre au greffecontre récépissé les armes dont elle est détentrice ;
3° statuer sur la rĂ©sidence sĂ©parĂ©e, sur les modalitĂ©s dâexer-cice de lâautoritĂ© parentale et sur la contribution aux chargesdu mariage, en application de lâarticle 220-1 du code civil ;
4° dĂ©lier la partie demanderesse, quand elle est cotitulaire dubail, de certaines ou de lâensemble de ses obligations Ă lâĂ©gard du bailleur Ă compter de la date effective de dĂ©part dudomicile de la partie demanderesse ;
5° autoriser la partie demanderesse Ă dĂ©clarer comme domicilelâadresse du commissariat ou de la brigade de gendarmerie ;
6° prononcer lâadmission provisoire Ă lâaide juridictionnelle de lapartie demanderesse en application du premier alinĂ©a de lâarticle20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative Ă lâaide juridique.
Lâordonnance de protection, qui serait au maximum de deuxmois, serait renouvelable une fois.
AuditionnĂ©e par la commission spĂ©ciale dans le cadre delâexamen de la proposition de loi du 27 novembre 2009, la mi-nistre de la justice et des libertĂ©s, Madame MichĂšle Alliot-Marie a cependant prĂ©cisĂ© que « plutĂŽt quâau juge desvictimes â dont le Conseil dâĂtat a rĂ©cemment rappelĂ© quâilnâavait pas de pouvoir juridictionnel propre â câest au juge auxaffaires familiales, juge naturel des conflits intrafamiliaux, quâilrevient de prendre Ă titre temporaire certaines mesures.
Celles-ci relĂšvent bien souvent de son domaine dâinterven-tion : Ă©viction du domicile, hĂ©bergement, exercice de lâauto-ritĂ© parentale, pension alimentaire, ou encore possibilitĂ© dedissimuler sa nouvelle adresse » et quâ « un amendementdevra prĂ©voir dâĂ©tendre sa compĂ©tence aux concubins et auxpartenaires liĂ©s par un Pacs, Ă moins quâil ne suffise que lâin-tention du lĂ©gislateur soit exprimĂ©e clairement lors de la dis-cussion140. »
22. Concernant les ordonnances de protection desvictimes de violence au sein du couple, AmnestyInternational France recommande aux autoritĂ©sfrançaises que la lĂ©gislation prĂ©voit que :- des ordonnances de protection puissent ĂȘtredĂ©livrĂ©es tant dans les procĂ©dures pĂ©nales que dansles procĂ©dures civiles et Ă©galement en dehors detelles procĂ©dures- le dĂ©roulement de la procĂ©dure fasse primer lasĂ©curitĂ© de la victime sur toute considĂ©rationnotamment liĂ©e Ă des biens- dĂšs la rĂ©ception de la demande dâordonnance deprotection, le juge convoque pour une audition lapartie demanderesse, la partie assignĂ©e, assistĂ©es, lecas Ă©chĂ©ant, dâun avocat et le ministĂšre public dans undĂ©lai trĂšs bref- aucune preuve indĂ©pendante â Ă©manant demĂ©decins, de la police, ou autre â ne soitnĂ©cessairement exigĂ©e pour la dĂ©livrance dâuneordonnance- le non respect des ordonnances de protectionconstitue une infraction pĂ©nale.
4.2 La question des délits de violencespsychologiques ou habituelles
Dans son rapport public de 2006, Amnesty International re-commandait Ă lâĂtat dâinclure par voie lĂ©gislative le dĂ©lit deviolences habituelles au sein du couple qui permettrait ainsiune meilleure prise en compte de la violence au sein du cou-ple, aussi bien en termes de sanction des auteurs que de re-connaissance du vĂ©cu des femmes concernĂ©es.
Amnesty International prĂ©cisait alors que « dans le cas desviolences au sein du couple, la violence sâinscrit prĂ©cisĂ©mentdans un cumul dâactes humiliants, dĂ©gradants, et violents etil ne sera pas Ă©vident de pouvoir en isoler un plus que les au-tres. Si un seul de ces actes devait ĂȘtre isolĂ©, il nâest pas Ă©vi-dent quâil soit suffisant en soi pour caractĂ©riser la violence etce malgrĂ© la circonstance aggravante dont bĂ©nĂ©ficient les vio-lences conjugales141. »
Prenant exemple sur le dĂ©lit de harcĂšlement moral, qui neconcerne que les relations professionnelles, lâarticle 17142 dela proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novem-bre 2009 introduit la notion de violences psychologiques.
Ce nouveau délit vise à mieux prendre en compte ces situa-tions au sein du couple, qui ne se traduisent pas forcémentpar des violences physiques, mais peuvent avoir des consé-quences graves pour les personnes qui en sont victimes.
La proposition de loi dĂ©finit les violences psychologiquescomme « des agissements ou des paroles rĂ©pĂ©tĂ©s ayant pourobjet ou pour effet une dĂ©gradation des conditions de vie dela victime susceptible de porter atteinte Ă ses droits et Ă sa di-gnitĂ© ou dâentraĂźner une altĂ©ration de sa santĂ© physique oumentale. »
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 29
La proposition de loi du SĂ©nat 25 novembre 2009 vise no-tamment Ă introduire un nouvel article rĂ©primant les « vio-lences habituelles, physiques ou psychologiques, commisespar le conjoint ou le concubin de la victime ou par le parte-naire liĂ© Ă celle-ci par un pacte civil de solidaritĂ© conformĂ©-ment aux dispositions de lâarticle 222-14143.
Pour Monsieur Serge Portelli, vice-prĂ©sident du tribunal degrande instance de Paris « le dĂ©lit de violences psycholo-giques ferait partie de ces incriminations pour lesquelles lâĂ©lĂ©-ment matĂ©riel est extrĂȘmement tĂ©nu, voire quasimentinexistant. Les policiers, les magistrats, voire les experts se-ront alors exclusivement dĂ©pendants de leurs convictions per-sonnelles et idĂ©ologiques. De tels dĂ©lits ouvrent la porte Ă tousles arbitraires. A partir de quel moment entre-t-on dans ce quiest proprement pĂ©nal ? Comment qualifier le prĂ©judice ?
Comment le mĂ©decin des unitĂ©s mĂ©dico-judiciaires va-t-ilpouvoir affirmer quâil y a eu atteinte morale ? Lors des au-diences en comparution immĂ©diate oĂč sont jugĂ©es des vio-lences avec atteintes physiques, câest dĂ©jĂ difficile. Pour desviolences psychologiques, cela sera vouĂ© Ă lâĂ©chec.
Il y aura trĂšs peu de poursuites, lesquelles ne pourront quedonner lieu Ă des discussions terribles. Les avocats pĂ©nalistessauront dĂ©monter rapidement ce type dâincrimination.
Je suis donc personnellement assez opposĂ© Ă sa crĂ©ation, Ă moins que vous ne parveniez Ă en Ă©laborer une dĂ©finition par-ticuliĂšrement prĂ©cise. Mais jâai bien peur quâon se retrouvealors avec le dĂ©lit de violence que nous connaissons au-jourdâhui : en effet, la seule façon de caractĂ©riser un Ă©lĂ©mentconstitutif de cette infraction serait dâaboutir Ă la constatationdâune incapacitĂ© temporaire de travail144. »
Pour Monsieur Jean-Marie Huet, Directeur des affaires crimi-nelles et des grĂąces du ministĂšre de la Justice, « il ne paraĂźtpas du niveau de la norme lĂ©gislative que de dĂ©finir plus avantque nous le proposons la rĂ©alitĂ© de ce que peuvent ĂȘtre lesviolences psychologiques susceptibles dâoccasionner desconsĂ©quences physiques ou psychiques. Câest par circulairequâil nous appartiendra de le dĂ©finir, mais le dĂ©bat reste ou-vert. La preuve de violences psychologiques pourra aussi ĂȘtre
apportĂ©e par des tĂ©moignages. [âŠ] Le ministĂšre de la justicea longtemps considĂ©rĂ© que la jurisprudence de la Cour decassation permettait de prendre en compte les violences psy-chologiques en donnant son plein sens au texte. On pouvaitdĂ©jĂ avoir en lâabsence de traces physiques un certificat dâar-rĂȘt de travail. Ce n'Ă©tait pas suffisant puisque nous proposonsaujourdâhui, dans un avant-projet de loi, de renforcer la sanc-tion des violences qui nâont pas un caractĂšre physique maisqui ont des consĂ©quences psychiques.
Il me semble hasardeux de dĂ©crire ce que peuvent ĂȘtre lesviolences psychologiques dâautant que le lĂ©gislateur nâa pasdĂ©taillĂ© les violences physiques. Agressions verbales, priva-tion dâaliments, interdiction dâaccĂšs au compte bancaire⊠laliste pourrait ĂȘtre trĂšs longue. Mais surtout, elle ne sera jamaisexhaustive et lâĂ©volution des techniques est susceptible decrĂ©er de nouvelles souffrances qui ne seront pas reconnues.En tout cas, le texte que nous prĂ©sentons ouvre un champsuffisamment large⊠ce qui aura peut-ĂȘtre pour consĂ©-quence dâaugmenter encore le nombre des victimes de vio-lences conjugales. Je nâai pas la prĂ©tention de suggĂ©rer quoique ce soit et il ne sâagit jamais que dâun avant-projet de loiâ il reviendra bien sĂ»r au lĂ©gislateur de dĂ©battre ce texte. Jerappelle cependant que, dans le cadre de la commissionLĂ©ger, le PrĂ©sident de la RĂ©publique nous a demandĂ© de rĂ©-flĂ©chir Ă un nouveau code de procĂ©dure pĂ©nale et Ă un nou-veau code pĂ©nal, plus simples, plus clairs et plus lisibles145. »
23. Dans le cadre dâune modification du droit envigueur, Amnesty International France recommandeaux autoritĂ©s françaises que la lĂ©gislation prĂ©voit quesoient pris en compte et rĂ©primĂ©s :- le caractĂšre rĂ©pĂ©tĂ© des violences physiques et/oupsychologiques- les consĂ©quences de ces violences sur les conditionsde vie de la victime, sur le respect et la jouissance deses droits fondamentaux, de sa dignitĂ© et sur son Ă©tatde santĂ© physique ou mentale.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire30
Les données de l'Organisation mondiale de la santé (OMS)font apparaitre que les mutilations sexuelles féminines(MSF) sont répandues dans 28 pays africains, au Moyen-
Orient et dans certains pays d'Asie (Indonésie, Malaisie et payslimitrophes) et qu'environ 100 à 140 millions de femmes et depetites filles dans le monde ont subi cette pratique, et que,chaque année, environ 4 millions courent ce risque.
Au niveau international, la prise de conscience croissante dece phénomÚne s'inscrit dans une approche générale de laprotection des droits de la femme.
L'OMS a identifiĂ© quatre types de MSF, qui vont de la clitori-dectomie (ablation partielle ou totale du clitoris) Ă l'excision(ablation du clitoris et des petites lĂšvres), cette derniĂšre re-prĂ©sentant 85% environ des MSF, jusqu'Ă la forme la plus ex-trĂȘme, l'infibulation (ablation totale du clitoris et des petiteslĂšvres ainsi que de la superficie interne des grandes lĂšvres etsutures de la vulve pour ne laisser qu'une petite ouverture va-ginale) et l'introcision (piqures, perforations ou incisions du cli-toris ou des lĂšvres.
Toute mutilation sexuelle féminine est un actede violence contre la femme, qui équivaut à laviolation de ses droits fondamentaux
Les MSF provoquent des dommages extrĂȘmement graves et ir-rĂ©versibles, Ă court et Ă long terme, pour la santĂ© psycholo-gique et physique des femmes et des petites filles qui lessubissent. Lâutilisation dâinstruments rudimentaires et lâabsencede prĂ©cautions antiseptiques ont des effets secondaires parti-culiĂšrement graves, de sorte que les rapports sexuels et les ac-couchements risquent dâĂȘtre douloureux, les organes sontirrĂ©mĂ©diablement endommagĂ©s, voire accompagnĂ©s de com-plications (hĂ©morragies, Ă©tat de choc, infections, transmissiondu virus du sida, tĂ©tanos, tumeurs bĂ©nignes), ainsi que de com-plications graves pendant la grossesse ou Ă l'accouchement.
Pour Amnesty International, au-delĂ de la rĂ©alitĂ© dâune terribleviolence causĂ©e par lâablation des organes gĂ©nitaux pouvantentraĂźner la mort Ă court terme, de graves problĂšmes de santĂ©et des troubles psychiques Ă long terme, la pratique des MSFrecouvre une rĂ©alitĂ© tout aussi dramatique : la violation de lalibertĂ© de disposer de son corps et de sa sexualitĂ© ainsi quedu droit Ă la non discrimination.
En FranceâŠ
Les mutilations sexuelles fĂ©minines (MSF) sont aujourdâhuiun phĂ©nomĂšne contre lequel la loi française semble avoir luttĂ©efficacement. Mais si les MSF sont en rĂ©gression dans notrepays, elles nâont cependant pas disparu.
Sâil reste difficile d'observer et de dĂ©terminer prĂ©cisĂ©ment l'in-cidence des MSF, câest que, outre les pratiques exercĂ©esclandestinement, le risque demeure que des fillettes en soientvictimes lors d'un sĂ©jour temporaire dans leur pays d'origine.En outre, câest un sujet tabou sur lequel beaucoup de femmeshĂ©sitent Ă sâexprimer.
Une Ă©tude sur « Excision et handicap » menĂ©e en 2007/08par lâInstitut national dâĂ©tudes dĂ©mographiques (INED) et lâIns-titut national de la santĂ© et de la recherche mĂ©dicale (Inserm)dans le cadre du Plan violence et santĂ© du ministĂšre de lasantĂ© fait une estimation de 53.000 femmes excisĂ©es vivanten France en 2004, dont sans doute 20% lâont Ă©tĂ© enFrance146.
LâĂ©tude rĂ©vĂšle Ă©galement que parmi les filles des femmes ex-cisĂ©es, 11 % sont elles-mĂȘmes excisĂ©es. Ce chiffre est ce-pendant bien plus faible parmi celles qui sont nĂ©es en France(3 %) oĂč la pratique est illĂ©gale. Par ailleurs, la pratique dimi-nue nettement dans les derniĂšres gĂ©nĂ©rations, attestant delâabandon progressif de lâexcision en contexte migratoire, maisaussi dans les pays dâorigine.
Pour la directrice du Groupe pour lâabolition des mutilationssexuelles (GAMS), « vers 2000, on estimait que la pratiqueavait bien reculĂ©. Le constat est plus mitigĂ© aujourdâhui. Eneffet, on se trouve dans une situation paradoxale qui est unesource inquiĂ©tude.
Alors que les observateurs nationaux et internationauxconstatent, Ă la suite des campagnes dâinformation et de prĂ©-vention, des rĂ©sultats encourageants dans les pays dâorigine,les populations vivant dans les pays occidentaux et, notam-ment, en France â y compris de deuxiĂšme et de troisiĂšme gĂ©-nĂ©ration â sâaccrochent, par un phĂ©nomĂšne de repliidentitaire, Ă ce qui peut les rattacher Ă leur pays dâorigine,dont lâexcision.
La rĂ©alitĂ© dâaujourdâhui est faite de ce dĂ©calage entre les paysdâorigine oĂč il y a une avancĂ©e vers lâabandon de lâexcision etles pays europĂ©ens oĂč lâon constate un recul.
Cela impose une remise en question de la pratique des pro-fessionnels de terrain qui accueillent les femmes, les adoles-centes et les petites filles et la poursuite du travaildâinformation, de sensibilisation et de prĂ©vention car le repliidentitaire en Europe risque dâavoir Ă terme des effets perversdans les pays dâorigine. Nous devons poursuivre concomi-tamment notre travail sur les deux continents. »
En fĂ©vrier 2006, en vue de lâĂ©radication des mutilationssexuelles fĂ©minines en France, Amnesty International Ă©mettaitdes recommandations concernant lâamĂ©lioration de :
- la formation et la sensibilisation des professionnels concernés,
- lâinformation et la sensibilisation des migrants concernantlâinterdiction des MSF,
- la protection des victimes,
- le traitement judiciaire des MSF.
Amnesty International France se fĂ©licite que certaines de cesrecommandations aient Ă©tĂ© prises en compte par les autoritĂ©sfrançaises. En effet, la loi du 4 avril 2006 a renforcĂ© le dispo-sitif lĂ©gislatif existant : allongement du dĂ©lai de prescription Ă vingt ans Ă compter de la majoritĂ© de la victime, possibilitĂ© derĂ©primer ces pratiques lorsquâelles sont commises Ă lâĂ©trangersur une victime mineure Ă©trangĂšre rĂ©sidant habituellement en
II Lesmutilationssexuellesféminines
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 31
France et obligation de lever le secret professionnel en casde mutilations sexuelles sur mineure.
Cependant, des progrĂšs restent Ă accomplir, notamment enmatiĂšre de formation des professionnels et de protection desvictimes.
1. La prévention des MSF passepar la formation et la sensibilisation
Pour Amnesty International France, il est essentiel de renforcerla prĂ©vention et lâinformation auprĂšs des populations concer-nĂ©es et des professionnels pour faire Ă©voluer les mentalitĂ©s no-tamment par des campagnes nationales de communication.
En 2009, le secrĂ©tariat dâĂtat Ă la SolidaritĂ© a consacrĂ© Ă lâex-cision une brochure dâinformation et des affichettes. Une pla-quette dâinformation sur lâexcision est dâautre part disponibledepuis juin 2006 sur le site du ministĂšre du travail (www.santĂ©-jeunesse-sports.gouv.fr).
Lâimportance de lâinfluence des mĂ©dias est Ă souligner, no-tamment la diffusion de reportages et dĂ©bats Ă la tĂ©lĂ©vision(qui est un mĂ©dia accessible) et qui ont pu aider Ă une prisede conscience en libĂ©rant la parole dans les familles148. Cevecteur de sensibilisation et dâinformation semble plus effi-cace que les interventions en milieu scolaire qui comportentun risque de stigmatisation et de honte.
Quant Ă la prĂ©vention, lĂ oĂč elle a Ă©tĂ© menĂ©e par les associa-tions, elle a Ă©tĂ© efficace : « aujourdâhui, dans les centres de laProtection Maternelle et Infantile oĂč une opĂ©ration systĂ©ma-tique dâinformation a Ă©tĂ© menĂ©e auprĂšs des mĂšres, le pour-centage de fillettes excisĂ©es est devenu proche de zĂ©ro149. »
2. Le traitement judiciairedes mutilations sexuelles féminines
Il nâexiste toujours pas en droit français de qualification juri-dique spĂ©cifique pour les faits de mutilation sexuelle et cespratiques peuvent actuellement ĂȘtre poursuivies et sanction-nĂ©es en matiĂšre criminelle au titre soit :
âą de violences ayant entraĂźnĂ© une mutilation ou une infirmitĂ©permanente, infraction punie de 10 ans dâemprisonnement etde 150 000 euros dâamende (article 222-9 du code pĂ©nal) et de15 ans de rĂ©clusion criminelle lorsque ces violences sont com-mises Ă lâencontre de mineurs de quinze ans (article 222-10 ducode pĂ©nal) ;
âą de violences ayant entraĂźnĂ© la mort sans intention de la don-ner, infraction punie de 15 ans de rĂ©clusion criminelle (article222-7 du code pĂ©nal), et rĂ©primĂ©e Ă hauteur de 20 ans de rĂ©-clusion criminelle (article 222-8 du code pĂ©nal) lorsquâelleconcerne des mineurs de quinze ans.
Une action en justice peut Ă©galement ĂȘtre engagĂ©e au titre deviolences ayant entraĂźnĂ© une interruption temporaire de travailsupĂ©rieure Ă huit jours, conformĂ©ment Ă lâarticle 222-12 ducode pĂ©nal qui prĂ©voit une sanction de cinq ans dâemprison-nement et de 75 000 euros dâamende lorsque lâinfraction estcommise contre un mineur de moins de 15 ans.
2.1 La répression des MSF a été renforcée
Des modifications importantes ont Ă©tĂ© introduites par la loi du4 avril 2006 et ont vocation Ă rendre plus effective la rĂ©pres-sion de ces pratiques. Elles concernent le dĂ©lai de prescrip-tion, la rĂ©pression des faits commis Ă lâĂ©tranger et la levĂ©e dusecret professionnel.
Le dĂ©lai de prescription en matiĂšre dâaction pu-blique a Ă©tĂ© allongĂ©
Le dĂ©lai de prescription en matiĂšre dâaction publique (article 7du code de procĂ©dure pĂ©nale sâagissant des crimes et article8 concernant les dĂ©lits) a Ă©tĂ© portĂ© Ă 20 ans Ă compter de lamajoritĂ© de la victime pour :
⹠les crimes de violences ayant entraßné une mutilation ou uneinfirmité permanente commis sur mineurs (article 222-10 ducode pénal) ;
⹠les délits de violences ayant entraßné une interruption tem-poraire de travail supérieure à 8 jours, commis sur mineurs(222-12 du code pénal).
Une action en justice peut donc ĂȘtre engagĂ©e 20 ans aprĂšs lamajoritĂ© de la victime, c'est-Ă -dire jusquâĂ ses 38 ans.
La rĂ©pression des mutilations sexuellescommises Ă lâĂ©tranger a Ă©tĂ© renforcĂ©e
Le nouvel article 222-16-2 insĂ©rĂ© dans le code pĂ©nal a pourobjectif dâĂ©tendre lâapplication de la loi française sanctionnantces pratiques aux mineurs de nationalitĂ© Ă©trangĂšre rĂ©sidanthabituellement en France et qui sont victimes Ă lâĂ©trangerdâactes de mutilations sexuelles.
TrĂšs prĂ©cisĂ©ment, lâarticle 222-16-2 prĂ©voit que « dans les casoĂč les crimes et les dĂ©lits prĂ©vus par les articles 222-8, 222-10ou 222-12150 sont commis Ă lâĂ©tranger sur une victime mi-neure rĂ©sidant habituellement sur le territoire français, la loifrançaise est applicable par dĂ©rogation aux dispositions delâarticle 113-7 » de ce mĂȘme code, qui exige normalementque la victime ait la nationalitĂ© française.
Lâarticle 113-8 du code pĂ©nal prĂ©voit que, prĂ©alablement Ă lâengagement de toute poursuite dâun dĂ©lit commis Ă lâĂ©tran-ger, une plainte, soit de la victime, soit de ses ayants droit, ouune dĂ©nonciation de lâĂtat Ă©tranger est nĂ©cessaire mais lesdispositions gĂ©nĂ©rales visĂ©es ne sont pas applicables pourlâinfraction prĂ©vue par lâarticle 222-12 de ce mĂȘme code, Ă sa-voir les violences ayant entraĂźnĂ© une incapacitĂ© totale de tra-vail supĂ©rieure Ă huit jours.
Lâauteur dâune mutilation commise Ă lâĂ©tranger, quâil soit fran-çais ou Ă©tranger, peut donc ĂȘtre poursuivi en France, si la vic-time est de nationalitĂ© française ou bien si elle est Ă©trangĂšreet rĂ©side habituellement en France.
Le secret professionnel peut ĂȘtre levĂ© dans lescas de mutilations sexuelles
Le code pĂ©nal prĂ©voyait dĂ©jĂ , par dĂ©rogation Ă lâarticle 226-13,la levĂ©e du secret professionnel, notamment du secret mĂ©di-cal, en cas dâatteintes sexuelles infligĂ©es Ă un mineur ou Ă toute personne nâĂ©tant pas en mesure de se protĂ©ger en rai-son de son Ăąge ou de son incapacitĂ© physique ou psychique(article 226-14,1°).
Afin de lever toute ambiguĂŻtĂ© possible quant Ă la dĂ©finition destermes, et de favoriser la dĂ©nonciation des cas de mutilationssexuelles, il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de viser ces derniĂšres expressĂ©mentdans lâarticle 226-14 du code pĂ©nal.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire32
La portĂ©e de ces avancĂ©es lĂ©gislatives estamoindrie en raison dâune applicationhĂ©tĂ©rogĂšne des textes
Tout en reconnaissant que la loi constitue une grande avan-cĂ©e, Madame Isabelle Gillette-Faye, directrice du Groupepour lâabolition des mutilations sexuelles (GAMS) constateque la prise en compte de ces problĂšmes est trĂšs hĂ©tĂ©rogĂšneselon les dĂ©partements et dĂ©nonce un certain nombre de dys-fonctionnements quant Ă lâapplication des textes.
« La loi permet normalement de protéger toutes les enfantsrésidant habituellement en France, sans condition relative à lalégalité de leur résidence.
Mais nous nâarrivons pas Ă faire passer ce message. La com-plexitĂ© du contexte, les diffĂ©rences de situations entre les per-sonnes issues des immigrations â situation irrĂ©guliĂšre,situation rĂ©guliĂšre, en voie de rĂ©gularisation â ont conduit lesprofessionnels Ă faire une application simplifiĂ©e du texte. Lemessage nâest plus que lâenfant qui rĂ©side habituellement surle sol français est protĂ©gĂ©e contre lâexcision, mĂȘme si celle-ci est rĂ©alisĂ©e dans le pays dâorigine, mais que lâexcision estinterdite en France.
Il y a des familles dont on sait, avec une probabilitĂ© de 99 %,que lâenfant sera excisĂ©e si elle va au pays avec ses parentset cela arrive tous les jours.
JâĂ©cris rĂ©guliĂšrement aux prĂ©fets et aux parquets, en leur rap-pelant, noir sur blanc, les termes de la loi, pour rĂ©clamer desmesures de protection pour ces enfants. Mais dans les faits,cet aspect de la loi nâest pas appliquĂ©. » (âŠ) « Pour ce quiconcerne lâallongement des dĂ©lais de prescription Ă vingt ansaprĂšs la majoritĂ©, il semblerait quâun certain nombre de vic-times lâutilisent, mais dans les parquets les procureurs clas-sent en gĂ©nĂ©ral lâaffaire sans suite, au motif que, commelâacte nâa pas Ă©tĂ© perpĂ©trĂ© sur le sol français, il est difficile decondamner les auteurs151. »
Enfin, les actes de mutilation sexuelle Ă lâencontre des mi-neures sont jugĂ©s par le tribunal correctionnel alors que câestun crime et quâils devraient systĂ©matiquement relever de lacour dâassises.
Pour le GAMS, « la justice doit souligner par les assises quelâexcision est un crime et non un dĂ©lit. Elle est Ă la fois un ri-tuel et un symbole, il faut donc rĂ©pondre par un autre sym-bole152. »
3. La protection des victimes
La proposition de crĂ©ation dâune « ordonnance de protection» des victimes de mutilations sexuelles fĂ©minines
Lâordonnance de protection des victimes, dont la crĂ©ation estprĂ©vue Ă lâarticle 1er de la proposition de loi de lâAssemblĂ©enationale du 27 novembre 2009 concernerait Ă©galement lesvictimes menacĂ©es de mutilations sexuelles.
Ayant pour objet de protĂ©ger, en urgence, les personnes quisont en situation de danger, le juge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes (JU-DEVI) pourrait la dĂ©livrer Ă leur demande ou Ă celle du minis-tĂšre public. Dans ce cadre, le juge pourrait Ă©galementordonner lâinscription sur le passeport de la personne mena-cĂ©e de lâinterdiction de sortie du territoire français et la faireinscrire sans dĂ©lai au fichier des personnes recherchĂ©es.
24. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de :- renforcer et systĂ©matiser la formation initiale etcontinue des professionnels (professionnels de santĂ©,magistrats, travailleurs sociaux, personnels de la policeet de la gendarmerie nationale, acteurs associatifs,agents des services de lâemploi et agents dâaccueil descollectivitĂ©s locales) sur la question des mutilationssexuelles fĂ©minines pour mieux orienter, accompagneret protĂ©ger les victimes- intensifier son action dâinformation et desensibilisation en multipliant et en pĂ©rennisant lescampagnes dâinformation et de sensibilisationconcernant les mutilations sexuelles fĂ©minines- informer les futurs migrants, par le biais des servicesconsulaires et ambassades français dans les pays
dâorigine, et les primo arrivants lors de leur arrivĂ©e enFrance, sur la plate forme dâaccueil- mettre en place un mĂ©canisme efficace, en rĂ©flexionavec les associations, pour les filles ĂągĂ©es de plus de6 ans en Ă©laborant un questionnaire Ă utiliser par lesprofessionnels qui sont en contact avec des fillessusceptibles dâĂȘtre soumises aux MSF- favoriser la coopĂ©ration entre les structuresfrançaises et les structures dans les pays dâorigineluttant contre les MSF- gĂ©nĂ©raliser lâoctroi de dommages et intĂ©rĂȘts au titrede la rĂ©paration civile des MSF- favoriser la visibilitĂ© des condamnations pĂ©nales pourcrime de MSF en instituant auprĂšs des greffes destribunaux un codage spĂ©cifique pour les dĂ©cisionsrendues en matiĂšre de MSF.
25. Concernant les ordonnances de protection desvictimes de mutilations sexuelles fĂ©minines, AmnestyInternational France recommande aux autoritĂ©sfrançaises que la lĂ©gislation prĂ©voit que :- des ordonnances de protection puissent ĂȘtredĂ©livrĂ©es tant dans les procĂ©dures pĂ©nales que dansles procĂ©dures civiles et Ă©galement en dehors detelles procĂ©dures- le dĂ©roulement de la procĂ©dure fasse primer lasĂ©curitĂ© de la victime sur toute considĂ©rationnotamment liĂ©e Ă des biens- dĂšs la rĂ©ception de la demande dâordonnance deprotection, le juge convoque pour une audition lapartie demanderesse, la partie assignĂ©e, assistĂ©es, lecas Ă©chĂ©ant, dâun avocat et le ministĂšre public dans undĂ©lai trĂšs bref- aucune preuve indĂ©pendante â Ă©manant demĂ©decins, de la police, ou autre â ne soitnĂ©cessairement exigĂ©e pour la dĂ©livrance dâuneordonnance- le non respect des ordonnances de protection consti-tue une infraction pĂ©nale.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 33
Amnesty International rappelle que le droit de consentirlibrement au mariage est un droit fondamental et que lemariage forcé constitue donc bien une violation des
droits fondamentaux de la personne humaine.
Le droit Ă©gal de chacun des Ă©poux au libre et plein consente-ment au mariage est affirmĂ© dans la DĂ©claration universelledes droits de lâhomme et est rĂ©affirmĂ© dans un certain nom-bre de traitĂ©s, dont le Pacte international relatif aux droits ci-vils et politiques154. Ce traitĂ© oblige les Ătats Ă prendre « lesmesures appropriĂ©es pour assurer lâĂ©galitĂ© de droit et de res-ponsabilitĂ© des Ă©poux au regard du mariage, durant le ma-riage et lors de sa dissolution155. » La Convention des Nationsunies pour lâĂ©limination de toutes les formes de discriminationĂ lâĂ©gard des femmes156, de mĂȘme que la Convention inter-nationale relative aux droits de lâenfant157, engagent les Ătatsparties Ă prendre toutes les mesures pour protĂ©ger les en-fants dâun mariage forcĂ©158.
Les mariages forcĂ©s sont aujourdâhui en France lâune desformes les plus insidieuses des violences subies par des ado-lescentes et des jeunes femmes.
PhĂ©nomĂšne encore mal compris et difficile Ă chiffrer, il est,grĂące Ă lâaction de nombreuses associations de terrain, peu Ă peu pris en compte par les autoritĂ©s dans leur lutte contre lesviolences faites aux femmes. Mais, pour la Commission na-tionale consultative des droits de lâhomme, il reste « un phĂ©-nomĂšne social particuliĂšrement prĂ©occupant159. »
Les mariages forcĂ©s sâinscrivent dans les cas de violencesenvers les femmes et les filles dĂ©noncĂ©es par Amnesty Inter-national. Un mariage forcĂ© a notamment pour consĂ©quencedes relations sexuelles non consenties, et pour le droit fran-çais, câest un viol aggravĂ© puni de 20 ans de rĂ©clusion quandil est commis par le conjoint, le concubin ou le partenaire liĂ©Ă la victime par un pacte civil de solidaritĂ©160. Au delĂ , lâatteinteĂ la libertĂ© et Ă lâintĂ©gritĂ© physique, le chantage affectif, la sĂ©-questration, les grossesses non dĂ©sirĂ©es, la dĂ©pression ou ladĂ©scolarisation sont autant de consĂ©quences dramatiquespour la victime dâun mariage forcĂ©.
En 2006, Amnesty International rappelait aux autoritĂ©s fran-çaises quâelles doivent agir avec la diligence nĂ©cessaire pourprĂ©venir les mariages forcĂ©s, enquĂȘter sur ces actes et lespunir conformĂ©ment Ă la lĂ©gislation nationale.
Amnesty International France se fĂ©licite du renforcement delâencadrement pĂ©nal des mariages forcĂ©s opĂ©rĂ© par la loi du4 avril 2006 renforçant la prĂ©vention et la rĂ©pression des vio-lences au sein du couple.
En effet, ce texte renforce la prĂ©vention des mariages forcĂ©sen portant lâage lĂ©gal du mariage de 15 Ă 18 ans. La loi metainsi fin Ă une diffĂ©rence existant depuis 1804 entre leshommes et les femmes face au mariage, en portant lâĂąge mi-nimal lĂ©gal du mariage pour les femmes de 15 Ă 18 ans,comme câĂ©tait dĂ©jĂ le cas pour les hommes. Le nouvel article144 du code civil prĂ©voit dĂ©sormais que « lâhomme et lafemme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans rĂ©-volus ».
La loi a Ă©galement Ă©tendu le dĂ©lai au cours duquel un ma-riage cĂ©lĂ©brĂ© sans le consentement libre des deux Ă©poux oude lâun dâeux peut ĂȘtre attaquĂ©. Lâarticle 181 du code civil portedĂ©sormais le dĂ©lai de recevabilitĂ© de la demande en nullitĂ© dumariage Ă cinq ans. Enfin, par souci de cohĂ©rence, le dĂ©lai derecevabilitĂ© de lâaction en nullitĂ© contre le mariage dâun mi-neur conclu sans lâaccord dâun parent, prĂ©vu par lâarticle 183du code civil, est Ă©galement portĂ© de un an Ă cinq ans.
De mĂȘme, un mariage contractĂ© sans le consentement libredes Ă©poux ou de lâun dâentre eux, en cas notamment de vio-lence physique ou morale, peut dĂ©sormais ĂȘtre attaquĂ© par leministĂšre public et non plus seulement par les Ă©poux ou parcelui des deux dont le consentement nâa pas Ă©tĂ© libre. JusquâĂ prĂ©sent, le procureur ne pouvait engager, une action en nul-litĂ© contre un mariage quâen cas dâabsence totale de consen-tement, conformĂ©ment Ă lâarticle 184 du code civil.
Lâarticle 180 du code civil modifiĂ© par la loi du 4 avril 2006 prĂ©-voit que « lâexercice dâune contrainte sur les Ă©poux ou sur lâundâentre eux, y compris par crainte rĂ©vĂ©rencielle envers un as-cendant, constitue un cas de nullitĂ© du mariage ».
Lâarsenal lĂ©gislatif existant permettrait donc dâaider et de pro-tĂ©ger les femmes et les jeunes filles risquant un mariageforcĂ©. Encore faut-il que les textes soient connus et appliquĂ©sde maniĂšre homogĂšne sur tout le territoire.
En outre, Amnesty International recommandait Ă©galement Ă lâĂtat de mener une politique de prĂ©vention coordonnĂ©e au ni-veau national en effectuant notamment une Ă©tude en profon-deur de ce phĂ©nomĂšne et en adoptant une politique desensibilisation et de formation des professionnels (travailleurssociaux, personnels de lâĂducation nationale, membres desservices de police et de gendarmerie, officiers dâĂ©tat civil) pourles impliquer dans le dĂ©veloppement dâune stratĂ©gie de prĂ©-vention des mariages forcĂ©s, fondĂ©e sur lâĂ©galitĂ© des filles etdes garçons.
Amnesty International recommandait Ă©galement de crĂ©er desstructures dâhĂ©bergement pouvant accueillir les femmes etjeunes filles menacĂ©es ou victimes de mariages forcĂ©s quisont dans lâobligation de quitter leur domicile et de pĂ©renni-ser les subventions accordĂ©es aux associations luttant contrele mariage forcĂ©161.
A ce jour, la plupart de ces recommandations sont encoredâactualitĂ©.
Mesurer lâampleur du phĂ©nomĂšne est unprĂ©alable indispensable Ă la prĂ©vention et larĂ©pression des mariages forcĂ©s
La connaissance du nombre de mariages forcĂ©s en Franceest toujours imparfaite et fait lâobjet dâestimations qui ne peu-vent rendre compte de la rĂ©alitĂ©.
Comme lâa soulignĂ© le rapport de la mission parlementairedâĂ©valuation de la politique de prĂ©vention et de lutte contre lesviolences faites aux femmes en juillet 2009, « si lâon souhaite
III Laluttecontrelesmariagesforcés
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire34
mieux connaĂźtre les mariages forcĂ©s pour mieux pouvoir lescombattre, la mise en oeuvre dâune Ă©tude statistique pouvantdĂ©boucher sur des chiffres fiables est donc un prĂ©alable in-dispensable162 ». Dans son discours du 25 novembre 2009, lepremier ministre François Fillon dĂ©clarait que « dĂšs 2010,nous allons lui consacrer une nouvelle enquĂȘte en nous ba-sant sur les travaux engagĂ©s par lâInstitut National dâEtudesDĂ©mographiques. Et nous allons nous concentrer en particu-lier sur le phĂ©nomĂšne des mariages forcĂ©s afin de mieux lescombattre. »
Amnesty International France accueille favorablement cettedĂ©claration du premier ministre et, pour pouvoir ajuster et ren-forcer les dispositifs de prĂ©vention et de protection des vic-times, engage lâĂtat Ă rĂ©aliser rapidement une telle enquĂȘtepermettant dâestimer lâampleur du phĂ©nomĂšne.
La prĂ©vention reste au cĆur de la luttecontre les mariages forcĂ©s
Comme pour toutes les violences faites aux femmes, lâinfor-mation, la sensibilisation et la formation sont au cĆur de laprĂ©vention des mariages forcĂ©s.
ParallÚlement à des informations mises en ligne sur le site duministÚre de la Justice ainsi que sur le site «www. stop-vio-lences-femmes.gouv.fr », le gouvernement a lancé le 14 avril2009 une campagne nationale de communication pour luttercontre les mariages forcés.
Pour assurer une rĂ©elle prĂ©vention des mariages forcĂ©s, Am-nesty International France recommande Ă lâĂtat dâintensifierson action dâinformation et de sensibilisation notamment enmultipliant les campagnes dâinformation et de sensibilisation,et en pĂ©rennisant leur durĂ©e.
Amnesty International France encourage les autoritĂ©s Ă met-tre en place des campagnes de prĂ©vention dans les Ă©coles,collĂšges et lycĂ©es, adaptĂ©es Ă lâĂąge des enfants visĂ©s, les in-formant de leurs droits, en particulier le droit de se dĂ©terminerlibrement dans le cadre du mariage, celui de choisir son futurconjoint et celui de ne pas se marier avant lâĂąge de 18 ans.
En 2006, un « Guide de lâĂ©galitĂ© entre les hommes et lesfemmes issus de lâimmigration » avait Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© et devait ĂȘtrenotamment distribuĂ© sur les plates-formes dâaccueil delâAgence nationale dâaccueil, des Ă©trangers et des migrations(ANAEM devenu l'Office français pour l'immigration et l'intĂ©-gration).
Mais dans son discours du 25 novembre 2009, le premier mi-nistre a prĂ©cisĂ© que « notre action dâinformation ciblera Ă©ga-lement les professionnels, et notamment ceux qui accueillentles Ă©trangers primo-arrivants sur les plates-formes de l'Officefrançais pour l'immigration et l'intĂ©gration. Nous diffuseronsauprĂšs dâeux le « Guide de lâĂ©galitĂ© entre les femmes et leshommes issus de lâimmigration », qui accorde une place touteparticuliĂšre Ă la lutte contre les mariages forcĂ©s, aux mutila-tions sexuelles fĂ©minines » laissant Ă penser que cette infor-mation nâa pas Ă©tĂ© effectivement relayĂ©e depuis 2006.
Pour prĂ©venir ces situations de violence le plus en amont pos-sible, c'est-Ă -dire avant le dĂ©part de France, lâassociation Voixde femmes propose de crĂ©er une structure unique et aisĂ©-ment identifiable que toute personne qui a connaissance dâunrisque de mariage forcĂ© ou de mutilation sexuelle pourrait sai-sir. Il sâagirait : « dâune « cellule dâalerte, de veille, dâinterven-tion en faveur des jeunes mineurs et majeurs en danger dâunmariage forcĂ© Ă lâĂ©tranger ». Cette structure interministĂ©riellespĂ©cialisĂ©e dans la prĂ©vention du mariage forcĂ© et lâaccom-
pagnement des victimes aurait pour fonction de centraliser,organiser et systématiser les signalements faits par les tra-vailleurs sociaux, les associations et les établissements sco-laires.163 »
Cette structure aurait trois objectifs :
- recenser les interdictions de sortie du territoire demandĂ©espar les victimes potentielles elles-mĂȘmes.
- gĂ©rer un numĂ©ro vert auquel des informations sur un risquede mariage forcĂ© ou de mutilation sexuelle pourraient ĂȘtre si-gnalĂ©es.
- apporter lâaide de la France aux jeunes filles qui se trouventĂ lâĂ©tranger en facilitant et organisant le rapatriement desvictimes qui ont Ă©tĂ© renvoyĂ©es dans leur pays.
Le Royaume-Uni a crĂ©Ă© une telle structure en novembre2008, la « Forced Marriage Unit », qui recense plus de 1600signalements de mariage forcĂ© chaque annĂ©e164. UnitĂ©conjointe du ministĂšre de lâIntĂ©rieur et de celui des AffairesĂ©trangĂšres, elle dispose dâun numĂ©ro dâurgence et Ă©tablit desguides Ă destination de toutes les catĂ©gories de personnessusceptibles dâĂȘtre confrontĂ©es Ă des situations de mariageforcĂ© (victimes, policiers, enseignants notamment). Elle coor-donne Ă©galement lâaide prodiguĂ©e aux jeunes filles vivant auRoyaume-Uni qui se trouvent Ă lâĂ©tranger et permet le rapa-triement de toutes les victimes, mĂȘmes non binationales, encollaboration avec les autoritĂ©s locales des pays dâorigine.
Le Rapport parlementaire du 7 juillet 2009 recommande quâuntel dispositif soit Ă©galement mis en place en France en crĂ©antune cellule commune au ministĂšre de lâIntĂ©rieur et au minis-tĂšre des Affaires Ă©trangĂšres chargĂ©e de prĂ©venir les situationsde mariage forcĂ© et dâexcision et dâaider les femmes qui ensont victimes Ă lâĂ©tranger165.
Amnesty international France recommande aux autoritĂ©s demettre en place une structure interministĂ©rielle spĂ©cialisĂ©edans la prĂ©vention du mariage forcĂ© et lâaccompagnementdes victimes qui aurait pour fonction de centraliser, organiseret systĂ©matiser les signalements faits par les travailleurs so-ciaux, les associations et les Ă©tablissements scolaires.
Les bonnes pratiques
Les réseaux inter associatif, ou les partenariats regroupantassociations, professionnels et autorités se sont développéset constituent autant de bonnes pratiques.
Par exemple, dans lâHĂ©rault, le « RĂ©seau jeunes filles confron-tĂ©es aux violences intrafamiliales » regroupe les institutions etles associations du dĂ©partement de lâHĂ©rault. Il se rĂ©unit rĂ©-guliĂšrement pour Ă©changer et rĂ©flĂ©chir sur les violences intrafamiliales et en particulier sur les mariages forcĂ©s. Depuis sacrĂ©ation, il est pilotĂ© par le Mouvement français pour le plan-ning familial. Il sâest fixĂ© pour objectifs de faire un Ă©tat deslieux sur la problĂ©matique des mariages forcĂ©s et deconstruire des rĂ©ponses adaptĂ©es en terme de prĂ©vention,dâaide et de prise en charge des jeunes filles ou garçons enrupture familiale. Un site web a Ă©galement Ă©tĂ© mis en place en2008 (http://www.mariageforce.fr).
En Seine Saint Denis, un protocole dâaide aux victimes a Ă©tĂ©mis en place. Ce protocole permet, grĂące Ă lâaide du ConseilgĂ©nĂ©ral, un accompagnement social, psychologique et juri-dique de la jeune fille ainsi quâune prise en charge, un soutienfinancier et une aide Ă la recherche dâhĂ©bergement.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 35
La protection des victimes
La proposition de crĂ©ation dâune ordonnance deprotection des victimes de mariage forcĂ©
La proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novembre2009 propose la crĂ©ation dâune ordonnance de protection166
pour les victimes de mariages forcĂ©s et la crĂ©ation dâun dĂ©lit decontrainte au mariage. Lâordonnance de protection pourrait ĂȘtredĂ©livrĂ©e par le juge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes (JUDEVI) aux per-sonnes menacĂ©es de mariage forcĂ©, au sens de lâarticle 224-5-3 du code pĂ©nal, ou de mutilation sexuelle, Ă leur demandeou Ă celle du ministĂšre public. Ă cette occasion, le juge dĂ©lĂ©-guĂ© aux victimes pourrait prendre un certain nombre de me-sures et notamment ordonner lâinscription sur le passeport dela personne menacĂ©e de lâinterdiction de sortie du territoirefrançais et la faire inscrire sans dĂ©lai au fichier des personnesrecherchĂ©es.
Lâintroduction dans le code pĂ©nal dâun dĂ©lit decontrainte au mariage
Lâarticle 18 de la proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationaledu 27 novembre 2009 prĂ©voit Ă©galement lâintroduction dans lecode pĂ©nal dâun dĂ©lit de contrainte au mariage afin de donneraux juges un instrument spĂ©cifique de lutte contre les ma-riages forcĂ©s ayant lieu en France et Ă©tend la lĂ©gislation fran-çaise aux cas de mariage ou dâunion forcĂ©s commis Ă lâĂ©tranger sur des personnes rĂ©sidant de maniĂšre habituelleen France167.
La loi du 4 avril 2006 a renforcĂ© les possibilitĂ©s, sur le plancivil, dâannulation des mariages, lĂ©galisĂ© lâincrimination du violentre Ă©poux et instaurĂ© un dĂ©lit de vol entre Ă©poux. Ces in-fractions peuvent servir de fondement Ă une condamnation.
Cependant, le fait de prĂ©voir une incrimination pĂ©nale spĂ©ci-fique permettrait dâĂ©noncer clairement lâinterdit en indiquantquelles sont les pratiques autorisĂ©es en France et quellessont celles qui ne le sont pas.
En 2005, dans une Ă©tude sur les femmes de lâimmigration, laDĂ©lĂ©gation aux droits des femmes considĂ©rait que « la pĂ©na-lisation des mariages forcĂ©s aurait une portĂ©e symboliqueforte, celle de signifier aux familles quâen France, on ne mariepas les filles sans leur consentement168. »
De surcroĂźt, le Conseil de lâEurope relĂšve que « le fait dâincri-miner en tant que tel le mariage forcĂ© permet de punir plussĂ©vĂšrement cette infraction et dâunifier les peines applicables,ce qui nâest pas le cas lorsque lâon recourt Ă des infractionsde droit commun169. »
De leur cÎté, les associations qui travaillent à la préventiondes mariages forces expriment leurs inquiétudes quant à lasituation trÚs difficile des jeunes femmes de faire condamnerleurs parents.
AuditionnĂ©e le 27 janvier 2010 par la Commission spĂ©cialechargĂ©e dâexaminer la proposition de loi renforçant la protec-tion des victimes et la prĂ©vention et rĂ©pression des violencesfaites aux femmes, la ministre de la justice et des libertĂ©s, Ma-dame MichĂšle Alliot-Marie a dĂ©clarĂ© « jâai moi-mĂȘme beau-coup hĂ©sitĂ© avant dâadopter une position sur le mariage forcĂ©.EmpĂȘcher, en amont de leur cĂ©lĂ©bration, les mariages forcĂ©s
26. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de :- mener une politique de prĂ©vention coordonnĂ©e auniveau national en effectuant notamment une Ă©tudeen profondeur de ce phĂ©nomĂšne et en adoptant unepolitique de sensibilisation et de formation desprofessionnels (travailleurs sociaux, personnels delâĂducation nationale, membres des services de policeet de gendarmerie, officiers dâĂ©tat civil) pour lesimpliquer dans le dĂ©veloppement dâune stratĂ©gie deprĂ©vention des mariages forcĂ©s, fondĂ©e sur lâĂ©galitĂ©des filles et des garçons- intensifier son action dâinformation et desensibilisation notamment en multipliant lescampagnes dâinformation et de sensibilisation, et enpĂ©rennisant leur durĂ©e- multiplier les campagnes dâinformation et deprĂ©vention dans les Ă©coles, collĂšges et lycĂ©es et lesĂ©tendre Ă leurs familles pour renforcer la prĂ©ventiondes mariages forcĂ©s- mettre en place des structures dâaccueil dâurgencepermettant dâĂ©couter, prendre en charge et hĂ©bergerdes personnes qui risquent dâĂȘtre mariĂ©es de force, etles protĂ©geant de la pression des tiers et dâĂ©ventuelsenlĂšvements- pĂ©renniser les subventions accordĂ©es auxassociations luttant contre le mariage forcĂ©- crĂ©er une structure interministĂ©rielle spĂ©cialisĂ©edans la prĂ©vention du mariage forcĂ© etlâaccompagnement des victimes qui aurait pourfonction de centraliser, organiser et systĂ©matiser lessignalements faits par les travailleurs sociaux, lesassociations et les Ă©tablissements scolaires- mettre en place des rĂ©fĂ©rents dans les ambassadeset consulats français spĂ©cifiquement formĂ©s sur laquestion des mariages forcĂ©s.
27. Concernant les ordonnances de protection des vic-times de mariage forcĂ©, Amnesty International Francerecommande aux autoritĂ©s françaises que la lĂ©gisla-tion prĂ©voit que :- des ordonnances de protection puissent ĂȘtre dĂ©li-vrĂ©es tant dans les procĂ©dures pĂ©nales que dans lesprocĂ©dures civiles et Ă©galement en dehors de tellesprocĂ©dures- le dĂ©roulement de la procĂ©dure fasse primer la sĂ©-curitĂ© de la victime sur toute considĂ©ration notam-ment liĂ©e Ă des biens- dĂšs la rĂ©ception de la demande dâordonnance deprotection, le juge convoque pour une audition la par-tie demanderesse, la partie assignĂ©e, assistĂ©es, le casĂ©chĂ©ant, dâun avocat et le ministĂšre public dans undĂ©lai trĂšs bref- aucune preuve indĂ©pendante â Ă©manant de mĂ©de-cins, de la police, ou autre â ne soit nĂ©cessairementexigĂ©e pour la dĂ©livrance dâune ordonnance- le non respect des ordonnances de protection consti-tue une infraction pĂ©nale.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire36
me semble difficile ; les sanctionner exige de pouvoir rĂ©unirdes Ă©lĂ©ments de preuve. En revanche, en faire une circons-tance aggravante dans le cas de violences en vue du mariageou Ă lâintĂ©rieur du couple est plus aisĂ©, puisquâĂ partir du mo-ment oĂč la victime aura dĂ©noncĂ© les violences, lâĂ©lĂ©ment ma-tĂ©riel sera indĂ©niable170. »
Cependant, la crĂ©ation dâun dĂ©lit spĂ©cifique de mariage forcĂ©permettrait de poursuivre les auteurs dâun mariage forcĂ© et delutter contre lâimpunitĂ© sans pour autant avoir recours Ă desinfractions plus graves tels que le viol, les violencessexuelles, etc.
Une comparaison peut ĂȘtre opĂ©rĂ©e avec la lutte contre les mu-tilations sexuelles fĂ©minines.
En effet, lourdement sanctionnĂ©e, la lutte contre la pratiquedes mutilations sexuelles fĂ©minines sâappuie en France surune incrimination ferme et la judiciarisation du problĂšme a Ă©tĂ©efficace pour prĂ©venir et Ă©radiquer le phĂ©nomĂšne.
Pour Madame Nadine Morano, secrĂ©taire d'Ătat auprĂšs du mi-
nistre du travail, des relations sociales, de la famille, de la so-lidarité et de la ville, chargée de la famille et de la solidarité,auditionnée par la Commission spéciale le 2 février « L'enca-drement pénal du mariage forcé, cette atteinte intolérable à laliberté des femmes, nous permettra de donner enfin une ré-ponse collective à ces pratiques171. »
28. Pour renforcer la lutte contre les mariages forcĂ©s,Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de rĂ©primer le fait dâexercer surautrui toute forme de contrainte ayant pour but de luifaire contracter un mariage ou de conclure une unionsans son consentement libre et, par dĂ©rogation auxdispositions de lâarticle 113-7 du code pĂ©nal,dâĂ©tendre la lĂ©gislation française aux cas de mariageou dâunion forcĂ©s commis Ă lâĂ©tranger sur despersonnes rĂ©sidant de maniĂšre habituelle en France.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 37
«à chaque Ă©tape de cet enfer, c'est la dignitĂ© mĂȘme despersonnes victimes de la traite qui est bafouĂ©e. Les vic-times de la traite sont gĂ©nĂ©ralement soumises Ă des vio-
lations multiples des droits humains. Nombre d'entre elles sontenlevĂ©es, gardĂ©es contre leur grĂ© dans des conditions prĂ©-caires, frappĂ©es, soumises Ă des violences sexuelles et Ă d'au-tres formes de torture. Souvent, elles sont privĂ©es de leur droitĂ l'intĂ©gritĂ© physique et mentale ; de leur droit Ă la libertĂ© et lasĂ©curitĂ© de leur personne ; de leur droit de ne pas ĂȘtre sou-mises Ă l'esclavage ou Ă des pratiques similaires ; de leur droitde ne pas ĂȘtre torturĂ©es ou soumises Ă d'autres formes de trai-tements inhumains ou dĂ©gradants ; de leur droit Ă une vie defamille ; de leur droit de circuler librement ; de leur droit au res-pect de leur vie privĂ©e ; de leur droit au meilleur Ă©tat de santĂ©possible ; et de leur droit Ă un logement sĂ»r et stable173 ».
La traite des ĂȘtres humains (TEH) Ă des fins dâexploitationconstitue une atteinte aux droits humains et un crime au regarddu droit international et de la loi française174.
Lâexploitation comprend, au minimum, lâexploitation de la pros-titution dâautrui ou dâautres formes dâexploitation sexuelle, le tra-vail ou les services forcĂ©s, lâesclavage ou les pratiquesanalogues Ă lâesclavage, la servitude ou le prĂ©lĂšvement dâor-ganes».
Des traitĂ©s internationaux obligent les gouvernements Ă agiravec toute la diligence nĂ©cessaire pour empĂȘcher la traite, en-quĂȘter sur les actes qui en relĂšvent et traduire en justice ceuxqui s'en rendent responsables et leur imposent de veiller Ă ceque les victimes aient accĂšs Ă des recours efficaces et Ă desrĂ©parations suffisantes.
Dans son rapport « Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat175 » , Amnesty International avait fait au gou-vernement français un certain nombre de recommandations.
Depuis, la France a pris certaines mesures positives.
La France a ainsi pĂ©nalisĂ© la traite des ĂȘtres humains et a ali-gnĂ© la dĂ©finition lĂ©gale de la traite sur celle qui figure dans laConvention du Conseil de lâEurope sur la lutte contre la traitedes ĂȘtres humains du 16 mai 2005176.
Cependant, force est de constater que les juridictions françaisessemblent rĂ©ticentes Ă sâen saisir.
En novembre 2009, la ministre de la justice et des libertĂ©s, Ma-dame Alliot-Marie a ainsi constatĂ© que « Sâagissant de la traitedes ĂȘtres humains, son incrimination spĂ©cifique prĂ©vue parlâarticle 225-4-1 du Code PĂ©nal paraĂźt nâĂȘtre que trĂšs rare-ment utilisĂ©e. » La ministre a alors rappelĂ© que « sans sous-es-timer les difficultĂ©s rencontrĂ©es pour caractĂ©riser cetteinfraction particuliĂšre, il convient nĂ©anmoins de rappeler quedes poursuites engagĂ©es sur le fondement prĂ©cis de l'article225-4-1 du code pĂ©nal ne sont pas exclusives dâautres qua-lifications (proxĂ©nĂ©tisme, exploitation de la mendicitĂ©, condi-tions de travail et dâhĂ©bergement indignes Ă la personne).Ainsi, et parce quâelle ouvre des droits spĂ©cifiques aux vic-times », la ministre a demandĂ© de « bien veiller Ă ce que cettequalification soit plus souvent retenue177. »
En 2007 et 2009, un dĂ©cret et une circulaire dâapplication sontvenus complĂ©ter le dispositif lĂ©gal178. Ces textes explicitent lesconditions dans lesquelles les victimes Ă©trangĂšres de la traitepeuvent revendiquer un droit au sĂ©jour en France et les condi-tions de mise en Ćuvre des mesures de protection, dâaccom-pagnement social et de soutien financier prĂ©vues par le Code delâentrĂ©e et du sĂ©jour des Ă©trangers et du droit dâasile (CESEDA).Des instructions prĂ©cises sont notamment donnĂ©es aux ser-vices concernĂ©s.
Les premiĂšres Ă©valuations de ces textes montrent cependantquâils font lâobjet dâune application hĂ©tĂ©rogĂšne sur le territoire,nuisant ainsi Ă lâĂ©galitĂ© de traitement des victimes.
En dĂ©cembre 2008, les autoritĂ©s françaises ont mis en place ungroupe de travail interministĂ©riel relatif Ă la protection et la priseen charge des victimes de la traite des ĂȘtres humains. ChargĂ©notamment dâĂ©laborer un Plan national de lutte contre la traitedes ĂȘtres humains, ce groupe de travail, pilotĂ© par les minis-tĂšres de lâIntĂ©rieur et de la Justice a associĂ© des associations Ă ses travaux.
Ce groupe de travail s'est vu Ă©galement confier par le secrĂ©ta-riat gĂ©nĂ©ral des affaires europĂ©ennes une mission de rĂ©flexionrelative au respect, par la France, de la convention du Conseilde l'Europe sur la lutte contre la traite des ĂȘtres humains.
La convention prĂ©voit que « chaque partie prend des mesurespour Ă©tablir ou renforcer la coordination au plan national entreles diffĂ©rentes instances chargĂ©es de la prĂ©vention et de lalutte contre la traite des ĂȘtres humains179 ». Les parties doi-vent ainsi adopter « les mesures nĂ©cessaires pour assurer lacoordination de la politique et de l'action des services de[leur] administration et des autres organismes publics luttantcontre la traite des ĂȘtres humains, le cas Ă©chĂ©ant en mettantsur pied des instances de coordination180 ».
En vue de satisfaire Ă cette obligation, le groupe de travail a Ă©la-borĂ© un projet de dĂ©cret portant crĂ©ation d'une mission intermi-nistĂ©rielle de coordination pour la prĂ©vention et la lutte contre latraite des ĂȘtres humains et la protection des victimes. Ce textea Ă©tĂ© transmis au secrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral des affaires europĂ©enneset au cabinet du premier ministre.
Au cours de la sĂ©ance du 26 janvier 2010 au SĂ©nat, MadameMarie-Luce Penchard, ministre chargĂ©e de l'outre-mer a dĂ©clarĂ©que « conformĂ©ment aux engagements internationaux sous-crits par la France, cette mission interministĂ©rielle devrait ĂȘtrecrĂ©Ă©e dans les prochains mois. »
Amnesty International France a été invitée à participer aux tra-vaux du groupe de travail et se félicite de cette initiative.
29. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises dâadopter les mesuresnĂ©cessaires pour assurer la coordination de lapolitique nationale de lutte contre la traite des ĂȘtreshumains en mettant en place une structure nationalede coordination.
IV LatraitedesĂȘtreshumains
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire38
Pourtant, malgrĂ© ces mesures, Amnesty International FrancedĂ©plore notamment que les droits des personnes exploitĂ©espar les trafiquants ne soient trop souvent ni respectĂ©s, ni pro-tĂ©gĂ©s et que la protection et lâassistance qui leur est accor-dĂ©es soient conditionnĂ©es Ă leur acceptation de tĂ©moigner.
Ainsi que lâa rappelĂ© la Commission nationale consultative desdroits de lâhomme181 « Les normes internationales relativesaux droits de lâhomme sâappliquent aux personnes victimesde traite ou dâexploitation. La France doit, par consĂ©quent etsans discrimination, garantir lâeffectivitĂ© de lâensemble deleurs droits fondamentaux, auxquels viennent sâajouter lesdroits nĂ©s des instruments spĂ©cifiques Ă la traite et Ă lâexploi-tation. En dĂ©coule un statut de victime de traite ou dâexploi-tation qui prĂ©voit, outre le respect du droit dâaccĂ©der Ă lajustice, celui dâĂȘtre rĂ©tabli dans ses droits Ă©conomiques et so-ciaux. Lâaccompagnement global des victimes de traite oudâexploitation apparaĂźt en effet indispensable, les « solutionsparcellaires » risquant dâentraĂźner pour elles des « prĂ©judicessecondaires ».
MĂȘmes reconnus, les droits dâaccĂ©der Ă la justice et dâĂȘtrerĂ©tabli dans ses droits Ă©conomiques et sociaux ne peuventcependant ĂȘtre effectivement exercĂ©s si les victimes de traiteou dâexploitation qui en sont titulaires ne sont pas identifiĂ©escomme telles. Or, tant quâun juge nâa pas tranchĂ© la question,leur identification nâest jamais certaine. Câest pourquoi laConvention de 2005 impose aux Etats de considĂ©rer toutepersonne comme une victime dĂšs lors quâil existe « des mo-tifs raisonnables » de croire quâelle lâest. »
Dans ce cadre, Amnesty International appelle les autoritĂ©sfrançaises Ă mettre la protection des droits fondamentaux despersonnes victimes de la traite au centre de l'action de tousles services engagĂ©s dans la lutte contre la traite et Ă adop-ter et mettre en Ćuvre une stratĂ©gie globale de lutte contre latraite des ĂȘtres humains qui vise la prĂ©vention de la traite desĂȘtres humains, la sanction des auteurs et la rĂ©paration desprĂ©judices subis par les victimes.
Le phĂ©nomĂšne de la traitedes ĂȘtres humains en France
Il est impossible de disposer de chiffres prĂ©cis sur lâampleurde la traite des ĂȘtres humains en France. Cela ne doit pas dis-penser les pouvoirs publics de tenter, autant que possible, defaire la lumiĂšre sur lâampleur de ce phĂ©nomĂšne malgrĂ© les dif-ficultĂ©s inhĂ©rentes Ă une activitĂ© illĂ©gale.
A ce sujet, lors du dernier examen du rapport de la France enjanvier 2008, le ComitĂ© pour l'Ă©limination de la discriminationĂ l'Ă©gard des femmes (CEDAW) sâest inquiĂ©tĂ© du manque destatistiques, de donnĂ©es et de recherches sur le thĂšme de latraite des ĂȘtres humains182. Le ComitĂ© considĂšre que ce typedâinformations pourrait contribuer Ă la lutte contre la traite enpermettant dâagir sur les causes du phĂ©nomĂšne. Il a engagĂ©le gouvernement français Ă procĂ©der rĂ©guliĂšrement Ă la col-lecte et Ă lâanalyse de donnĂ©es, ventilĂ©es par Ăąge et par ori-gine sociale.
1. L'identification des personnes victimes de latraite des ĂȘtres humains : un Ă©lĂ©ment crucialde la protection
Dans son rapport en 2006 concernant les violences faites auxfemmes en France, Amnesty International constatait « quâenlâabsence dâune rĂ©elle volontĂ© politique assortie de moyenspermettant dâidentifier les personnes victimes de la traite desĂȘtres humains aux fins de prostitution, celles-ci sont consi-dĂ©rĂ©es comme des dĂ©linquantes. Elles sont sanctionnĂ©esdâune part comme prostituĂ©es se livrant Ă une activitĂ© de ra-colage et, dâautre part, pour certaines, comme migrantes ensituation irrĂ©guliĂšre183 ».
Aujourdâhui, la question de lâidentification des victimes de latraite reste cruciale dans le cadre de la protection de ces der-niĂšres. En effet, de lâidentification des victimes en tant quetelles dĂ©pend lâaccĂšs Ă lâaide, Ă lâassistance et Ă la protection.
Les victimes qui ne sont pas identifiées comme telles se re-trouvent en danger.
De plus, si elles sont Ă©trangĂšres et en situation irrĂ©guliĂšre,elles risquent d'ĂȘtre notamment sanctionnĂ©es pour sĂ©jour ir-rĂ©gulier ou d'ĂȘtre reconduites vers des pays oĂč elles peuventĂȘtre de nouveau victimes de la traite ou d'autres atteintes Ă leurs droits fondamentaux.
L'absence dâun dispositif nationaldâidentification des victimes
Dans le systĂšme actuellement en vigueur en France, ilnâexiste pas de dispositif national dâidentification des victimesde la traite des ĂȘtres humains, ni de rĂ©els indicateurs et cesderniĂšres sont souvent stigmatisĂ©es en tant que « prosti-tuĂ©es », suspectĂ©es dâĂȘtre des immigrĂ©es « clandestines » oudâĂȘtre « exploitĂ©es volontairement ».
Les victimes de la traite des ĂȘtres humains restent trĂšs sou-vent sous lâemprise des auteurs de ces agissements, dontelles craignent les menaces et les violences, physiques oupsychologiques. La peur les empĂȘche frĂ©quemment de rĂ©vĂ©-ler qu'elles sont victimes de la traite, ce qui les prive parconsĂ©quent de la protection de l'Ătat.
Leur peur des représailles explique qu'elles hésitent généra-lement à se faire connaßtre.
Les agents concernĂ©s (policiers, officiers de protection delâOFPRA, magistrats, notamment Ă la Cour nationale du droitdâasile) doivent en gĂ©nĂ©ral « supposer » que les personnesdont ils examinent la situation peuvent ĂȘtre victimes de latraite des ĂȘtres humains.
Pourtant, un certain nombre dâindices ou de critĂšres indicatifspeuvent ĂȘtre pris en compte afin dâidentifier une victime de latraite : le passage par les routes de la traite (cartographie Ă©ta-blie par Interpol), la surveillance constante par les trafiquants,lâabsence de documents dâidentitĂ© ou la possession de fauxdocuments, lâisolement de la personne (barriĂšre de la langue,limitation de la libertĂ© de mouvement), la peur, les signes demaltraitance. Cette liste nâest pas exhaustive.
Le sentiment est que la prioritĂ© est accordĂ©e Ă la lutte contrela « prostitution » ou « lâimmigration clandestine » au mĂ©prisdes victimes de la traite des ĂȘtres humains. Ces derniĂšres nesont identifiĂ©es quâĂ posteriori, par lâoctroi dâun titre de sĂ©joursur le fondement de lâarticle L.316-1 du CESEDA, seulementsi elles acceptent de coopĂ©rer avec la justice dans le cadred'Ă©ventuelles poursuites contre les exploiteurs prĂ©sumĂ©s.
30. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de procĂ©der, avec les moyens nĂ©-cessaires, Ă la collecte et Ă l'Ă©tude des donnĂ©es sur lephĂ©nomĂšne de la traite des ĂȘtres humains en Franceet de rendre ces informations publiques.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 39
Amnesty International France regrette lâabsence dâun dispo-sitif national dâidentification permettant de dĂ©pister rapidementles victimes de la traite et de les protĂ©ger. Pour Amnesty In-ternational France, le processus dâidentification doit ĂȘtre tota-lement dissociĂ© de la recherche de preuves Ă des finsjudiciaires et il nĂ©cessite une formation adĂ©quate des per-sonnes en contact avec des victimes ainsi que le prĂ©voit laConvention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traitedes ĂȘtres humains (article 10).
Lâidentification par la sensibilisation et laformation des agents compĂ©tents
Le manque de formation rend difficilement capable dâidenti-fier une victime, dâĂȘtre sensible Ă sa situation et de lui donnerles informations sur ses droits et lâaide quâelle peut recevoir.
Il est donc indispensable de former les autoritĂ©s et les pro-fessionnels compĂ©tents pour qu'ils puissent identifier sansdĂ©lai les situations de traite des ĂȘtres humains auxquelles ilssont confrontĂ©s.
Le Rapport explicatif qui accompagne le texte de cetteConvention souligne que ce dĂ©lai de rĂ©flexion doit avoir desconsĂ©quences positives pour la victime elle-mĂȘme, puis pourle tribunal devant lequel l'affaire est jugĂ©e, dans la mesure oĂčil permet Ă la victime de tĂ©moigner de la maniĂšre la plus claireet la plus sereine possible. Le Conseil de l'Europe note que denombreux pays ont adoptĂ© une pĂ©riode de rĂ©flexion de plusde trente jours et que les deux Groupes d'experts sur la traitedes ĂȘtres humains mis en place par le Conseil de lâEurope etpar la Commission europĂ©enne recommandent chacun undĂ©lai d'au minimum trois mois.
La durĂ©e du dĂ©lai de rĂ©flexion en France est dâun mois.
Amnesty International France considĂšre qu'un dĂ©lai dâau mi-nimum trois mois permettrait de mieux garantir que la victimea pris la dĂ©cision de coopĂ©rer librement et en connaissancede cause. Ce dĂ©lai permettrait Ă©galement Ă la victime de bĂ©-nĂ©ficier dâun temps indispensable pour commencer Ă soignerles blessures psychologiques et physiques dont elle peutsouffrir et de se soustraire Ă l'influence de ses trafiquants.
La circulaire du 5 février 2009 est venue expliciter les condi-tions de délivrance du récépissé valant autorisation de séjouren France le temps du délai de réflexion, en subordonnantcette délivrance au signalement exclusif des services de po-lice auprÚs des services préfectoraux.
Amnesty International France sâest adressĂ©e au ministre delâImmigration et espĂšre que ce texte permettra dâharmoniserles pratiques sur le territoire et demande quâune Ă©valuationdu dispositif soit faite pour pouvoir en apprĂ©cier lâeffectivitĂ©.
Un droit au séjour conditionné
Lâarticle L.316-1 du CESEDA prĂ©voit quâune carte de sĂ©jourtemporaire portant la mention « vie privĂ©e et familiale » peutĂȘtre dĂ©livrĂ©e Ă la victime qui coopĂšre avec les services de po-lice en tĂ©moignant ou en dĂ©posant plainte contre les auteursdes infractions en lien avec la traite, en vue du dĂ©mantĂšle-ment du rĂ©seau qui lâexploitait.
La dĂ©livrance de ce document est subordonnĂ©e Ă une volontĂ©avĂ©rĂ©e de coopĂ©ration et de rĂ©insertion de la victime qui doit,de plus, avoir cessĂ© toute activitĂ© illĂ©gale et avoir rompu toutlien avec le milieu lâayant exploitĂ©e. L'accĂšs Ă l'assistance etĂ la protection des pouvoirs publics est ainsi subordonnĂ© Ă savolontĂ© de tĂ©moigner dans les poursuites engagĂ©es contreles prĂ©sumĂ©s trafiquants. Le systĂšme en place est donc, defait, fondĂ© sur le principe du donnant-donnant : protectioncontre coopĂ©ration.
En outre, il existe aujourdâhui une extrĂȘme diversitĂ© dâune prĂ©-fecture Ă lâautre dans lâexamen des demandes de titre de sĂ©-jour dĂ©posĂ©es par les victimes de la traite. En effet, ladĂ©livrance du titre de sĂ©jour et la durĂ©e de ce titre relĂšvent dupouvoir dâapprĂ©ciation du prĂ©fet et lâobtention du titre nâest nul-lement de plein droit. Le mĂȘme problĂšme se pose lors du re-nouvellement de ces titres.
Pour Amnesty International, non seulement un tel systĂšme nepermet pas d'apporter assistance et protection Ă toutes lesvictimes de la traite mais, de plus, il est contraire Ă lâarticle12.6 de la Convention du Conseil de l'Europe sur la luttecontre la traite des ĂȘtres humains qui stipule que « chaquepartie adopte les mesures lĂ©gislatives ou autres nĂ©cessairespour sâassurer que lâassistance Ă une victime nâest pas subor-donnĂ©e Ă sa volontĂ© de tĂ©moigner ».
31. Amnesty International France demande auxautoritĂ©s de concevoir et de mettre en Ćuvre unestratĂ©gie efficace qui permette lâidentification et laprotection des personnes victimes de la traite desĂȘtres humains, notamment en :- considĂ©rant une personne comme victime Ă partir dumoment oĂč il existe des motifs raisonnables de croirequâelle est ou a Ă©tĂ© victime de la traite- mettant en place un dispositif nationaldâidentification des victimes- sâassurant que les personnes et autoritĂ©scompĂ©tentes en lien avec les victimes soientqualifiĂ©es et reçoivent une formation adaptĂ©econcernant lâidentification et la protection desvictimes.
2. La protection et lâassistance des victimes :le principe « protection contre coopĂ©ration »
MĂȘme lorsqu'elles parviennent, malgrĂ© les difficultĂ©s, Ă sefaire identifier comme « victimes de la traite », les personnesexploitĂ©es rencontrent de nombreux obstacles lorsqu'ellescherchent Ă faire valoir leur droit Ă une protection et Ă une as-sistance. Ces obstacles sont essentiellement la consĂ©quencede la prioritĂ© donnĂ©e par les pouvoirs publics français auxpoursuites contre les trafiquants plutĂŽt qu'au respect desdroits de leurs victimes.
Aujourdâhui, une victime de la traite peut faire valoir ses droitsĂ une protection et Ă une assistance de l'Ătat Ă expiration dudĂ©lai de rĂ©flexion de 30 jours184, mais uniquement Ă conditionquâelle accepte de « coopĂ©rer » avec les autoritĂ©s dans lecadre d'Ă©ventuelles poursuites contre les exploiteurs prĂ©su-mĂ©s.
30 jours : un délai de réflexion et derétablissement trop court
Aux termes de la Convention du Conseil de l'Europe sur lalutte contre la traite des ĂȘtres humains, la durĂ©e de la pĂ©riodede rĂ©flexion permettant aux personnes victimes de la traite dedĂ©cider si elles souhaitent ou non collaborer avec les autori-tĂ©s est fixĂ©e Ă trente jours minimum.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire40
Selon le rapport explicatif de la Convention, « la Conventionlaisse la durĂ©e du permis de sĂ©jour Ă lâapprĂ©ciation des Par-ties qui doivent fixer une durĂ©e compatible avec le but decette disposition. A titre dâexemple, la Directive du Conseil delâUnion europĂ©enne du 29 avril 2004 relative au titre de sĂ©jourdĂ©livrĂ© aux ressortissants des Pays tiers qui sont victimes dela traite des ĂȘtres humains ou ont fait lâobjet dâune aide Ă lâim-migration clandestine et qui coopĂšrent avec les autoritĂ©scompĂ©tentes prĂ©voit une durĂ©e minimale de 6 mois ».
A ce moment, les victimes sont surveillĂ©es constamment, ac-compagnĂ©es systĂ©matiquement dans tous leurs dĂ©place-ments et menacĂ©es de reprĂ©sailles si elles parlent. Lesdemandes qui sont alors dĂ©posĂ©es auprĂšs de lâOffice françaisde protection des rĂ©fugiĂ©s et apatrides (OFPRA) en leur nomsont donc faites sous la contrainte et les faits Ă©voquĂ©s ne cor-respondent pas aux vĂ©ritables circonstances Ă lâorigine du dĂ©-part de leur pays. Ces demandes sont gĂ©nĂ©ralement rejetĂ©espar lâOFPRA.
Lorsque ces victimes arrivent Ă Ă©chapper au rĂ©seau de traiteet quâelles rencontrent des personnes qui vont les accompa-gner dans leur demande de protection, elles sont souvent dĂ©jĂ dĂ©boutĂ©es de cette premiĂšre demande dâasile. En consĂ©-quence, câest souvent au moment du recours devant la Cournationale du droit dâasile (CNDA) ou dans le cadre dâun rĂ©-examen185 de leur demande dâasile quâelles vont pouvoir rĂ©-vĂ©ler les Ă©lĂ©ments relatifs Ă leurs persĂ©cutions en tant quevictimes de la traite.
Les conditions dâaccĂšsĂ une rĂ©elle procĂ©dure dâasile
Lâobligation dâinformation sur le droit de demander lâasile a Ă©tĂ©inscrite dans la circulaire du 5 fĂ©vrier 2009 mais le texte a limitĂ©cette information au seul droit de demander la protection subsi-diaire. Cette information est erronĂ©e puisque la protection autitre de lâasile en France nâest pas seulement reconnue Ă ce titre.
32. Amnesty International France demande auxautoritĂ©s françaises de garantir que lâaccĂšs au sĂ©jouret aux droits qui en dĂ©coulent ne soit pas subordonnĂ©au dĂ©pĂŽt dâune plainte ou au tĂ©moignage des victimesde la traite dâĂȘtres humains dans le cadre depoursuites pĂ©nales intentĂ©es contre leurs trafiquantsprĂ©sumĂ©s.
35. Amnesty International France demande auxautoritĂ©s françaises de modifier les dispositions de lacirculaire du 5 fĂ©vrier 2009, sans limiter le droit desolliciter lâasile au seul droit de demander laprotection au titre de la protection subsidiaire.
36. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de sâassurer que la dĂ©livrance dutitre de sĂ©jour prĂ©vu par lâarticle L.316-1 du CESEDAest sans prĂ©judice du droit de demander lâasile et dâenbĂ©nĂ©ficier.
33. Amnesty International France demande auxautoritĂ©s françaises de prolonger le dĂ©lai derĂ©tablissement et de rĂ©flexion Ă trois mois minimumet de sâassurer et de garantir que les victimes de latraite puissent bĂ©nĂ©ficier, sans condition, dâun permisde sĂ©jour de six mois minimum renouvelable.
34. Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de :- Sâassurer que les victimes Ă©trangĂšres de la traite nesoient pas sanctionnĂ©es pour des faits, notamment leracolage et le sĂ©jour irrĂ©gulier, rĂ©sultant delâexploitation dont elles sont victimes.- Offrir assistance et protection Ă toute personnevictime de la traite se trouvant sur le territoirefrançais, notamment en lui garantissant l'accĂšs Ă unhĂ©bergement sĂ»r et protĂ©gĂ©, Ă une assistancematĂ©rielle et Ă des soins et traitements mĂ©dicaux etpsychologiques, tout en exigeant que ces servicessoient fournis sur la base du consentement Ă©clairĂ©, demaniĂšre Ă respecter la dignitĂ© et lâintimitĂ© de lapersonne.- Sâassurer et garantir que les victimes de la traitepuissent obtenir rĂ©paration, notamment sous laforme d'une indemnisation.
3. La protection des victimes au titre de lâasile
Pour Amnesty International France, si toutes les victimes avĂ©-rĂ©es ou potentielles de la traite des ĂȘtres humains ne sau-raient prĂ©tendre Ă une protection au titre de lâasile, danscertaines situations, les dispositions de la Convention de 1951relative au statut de rĂ©fugiĂ©s en vue de lâobtention dâune pro-tection devraient ĂȘtre appliquĂ©es.
Les conditions de la demande dâasile auprĂšs delâOffice français de protection des rĂ©fugiĂ©s etapatrides (OFPRA)
TrĂšs souvent, ce sont les trafiquants qui dĂ©posent une de-mande dâasile fictive au nom de la victime de la traite, notam-ment pour rĂ©gulariser son sĂ©jour sur le territoire pendantquelques mois, facilitant ainsi son exploitation forcĂ©e.
En outre, en cas de demande de rĂ©examen de la demandedâasile, les services prĂ©fectoraux, responsables de lâadmis-sion au sĂ©jour au titre de lâasile, ont tendance Ă nier aux vic-times de la traite le droit de dĂ©poser une nouvelle demandelorsquâelles Ă©noncent ce motif.
Les prĂ©fectures les renvoient souvent vers la procĂ©dure de laloi du 18 mars 2003 relative Ă la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure et il y aalors une confusion entre la rĂ©gularisation administrative ac-cordĂ©e au titre de la coopĂ©ration avec les autoritĂ©s judiciaireset la protection accordĂ©e au titre de lâasile.
Pourtant, la dĂ©livrance du titre de sĂ©jour prĂ©vu par lâarticleL.316-1 du CESEDA doit ĂȘtre sans prĂ©judice du droit de cher-cher asile et dâen bĂ©nĂ©ficier (article 14.5 de la Convention duConseil de lâEurope sur la lutte contre la traite des ĂȘtres hu-mains).
Lorsque les services prĂ©fectoraux permettent lâaccĂšs Ă larĂ©ouverture de la procĂ©dure dâasile, ils considĂšrent gĂ©nĂ©rale-ment la demande en procĂ©dure « prioritaire », sans tenircompte de la situation de contrainte dans laquelle ces per-sonnes se sont trouvĂ©es lors de leur premiĂšre demande.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 41
Cependant, en raison de la complexitĂ© des affaires, il convien-drait que la demande dâasile des victimes de la traite soit exa-minĂ©e dans le cadre dâune procĂ©dure normale ; le facteurtemps, dĂ©jĂ mentionnĂ©, est un Ă©lĂ©ment important pour per-mettre Ă la personne de parler des persĂ©cutions subies. Am-nesty International France sâest adressĂ©e au directeur delâOFPRA et au prĂ©sident de la CNDA mais nâa pas eu de rĂ©-ponses Ă ses courriers.
De plus, les autoritĂ©s administratives, judiciaires et policiĂšresdoivent ĂȘtre sensibilisĂ©es Ă la situation particuliĂšre de ces per-sonnes et Ă leur grande vulnĂ©rabilitĂ© et ĂȘtre formĂ©es pour pou-voir les identifier.
Pour le HCR, lâapplication du concept dâ« appartenance Ă uncertain groupe social » peut ĂȘtre particuliĂšrement pertinentepour les victimes de la traite risquant de subir des persĂ©cu-tions dans leur pays dâorigine.
Par ailleurs, une victime collaborant avec les services de po-lice et judiciaires peut ĂȘtre exposĂ©e Ă des reprĂ©sailles qui peu-vent constituer, en fonction des Ă©lĂ©ments de lâespĂšce, despersĂ©cutions. Ces persĂ©cutions peuvent Ă©galement viser desproches de la victime.
En outre, la personne peut faire lâobjet dâune sorte de stigma-tisation dans sa communautĂ© dâorigine. Face Ă cela, les au-toritĂ©s de lâĂtat dâorigine peuvent manquer de volontĂ© ou demoyens pour agir et assurer sa protection (absence ou inap-plication dâune lĂ©gislation adĂ©quate, corruption).
Tous ces Ă©lĂ©ments sont Ă prendre en compte dans lâexamende la demande dâasile.
Enfin, certaines victimes peuvent Ă©galement craindre des per-sĂ©cutions en raison dâun motif antĂ©rieur Ă la situation de vic-time de la traite, motif qui relĂšve de la Convention de GenĂšve(opinion politique, religion, appartenance ethnique ou natio-nale) et qui se surajoute aux craintes en raison de la situationde victime de la traite.
Mais dans ses dĂ©cisions, la CNDA a Ă©cartĂ© lâapplication de laConvention de GenĂšve au motif notamment que « Les persĂ©-cutions redoutĂ©es nâont pas pour origine lâun des motifs re-tenus par la Convention de GenĂšve qui permettraient deregarder son cas comme relevant du champ dâapplication dela convention prĂ©citĂ©e188.»
La Cour a retenu le fait que les victimes risquaient de subirdes traitements cruels, inhumains et dĂ©gradants en cas de re-tour dans leur pays dâorigine et quâelles ne pourraient utilementse prĂ©valoir de la protection des autoritĂ©s de leur pays. A cetitre, elle leur a accordĂ© le bĂ©nĂ©fice de la protection subsidiaire.
Amnesty International France estime qu'en nâidentifiant pas cer-taines personnes victimes de la traite et en omettant de procĂ©-der Ă un examen de leur demande dâasile qui Ă©value les dangersqui les menacent en cas de retour en tant que victime de latraite, les autoritĂ©s non seulement anĂ©antiraient les efforts dĂ©-ployĂ©s pour combattre la traite des ĂȘtres humains mais expose-raient Ă©galement ces personnes Ă d'autres atteintes Ă leurs droitsfondamentaux en cas de retour dans leur pays, notamment sielles retombent entre les mains de trafiquants.
37. Amnesty International France demande auxautoritĂ©s de sâassurer que les personnes et autoritĂ©scompĂ©tentes dans lâexamen des demandes dâasilesoient sensibilisĂ©es, formĂ©es et qualifiĂ©es pouridentifier une victime de la traite des ĂȘtres humains.
38. Amnesty International France recommande Ă lâOffice français de protection des rĂ©fugiĂ©s etapatrides et Ă la Cour nationale du droit dâasiledâexaminer les demandes de protection au titre delâasile des victimes de la traite au regard desPrincipes directeurs du Haut commissariat pour lesRĂ©fugiĂ©s des Nations Unies sur la protectioninternationale des victimes de la traite et despersonnes risquant dâĂȘtre victimes de la traite.Amnesty International France recommandeĂ©galement lâadoption par lâOFPRA de lignesdirectrices intĂ©grant la problĂ©matique de la traite desĂȘtres humains dans le cadre de la procĂ©dure dâasile etpermettant donc une harmonisation des pratiques.
La prise en compte par les institutionsfrançaises des persĂ©cutions au titrede la traite des ĂȘtres humains
Concernant les situations de victimes de la traite des ĂȘtreshumains, une vingtaine de dĂ©cisions ont Ă©tĂ© rendues depuis2005186 par la Cour nationale du droit dâasile (CNDA, ex-Com-mission des Recours des RĂ©fugiĂ©s). Toutes les victimes pro-tĂ©gĂ©es lâont Ă©tĂ© au titre de la protection subsidiaire et non autitre de la Convention de GenĂšve de 1951 relative au statutdes rĂ©fugiĂ©s comme le recommande pourtant le Haut Com-missariat des Nations unies pour les rĂ©fugiĂ©s (HCR) dans lesPrincipes directeurs sur la protection internationale : Applica-tion de lâArticle 1A (2) de la Convention de 1951 et/ou du Pro-tocole de 1967 relatifs au statut des rĂ©fugiĂ©s aux victimes dela traite et aux personnes risquant dâĂȘtre victimes de la traite(7 avril 2006)187.
En effet, pour le HCR, la traite peut ĂȘtre une forme de persĂ©-cution (souffrances provoquĂ©es, entrave Ă la libertĂ© de circu-ler, rejet de la communautĂ©, discrimination, reprĂ©sailles) etune apprĂ©hension de la traite des ĂȘtres humains dans le cadrede lâasile est donc possible
Diverses situations peuvent fonder une demande de protec-tion internationale au titre de lâasile:
Des personnes peuvent ĂȘtre exposĂ©es Ă la traite du fait decaractĂ©ristiques qui figurent dans la dĂ©finition du rĂ©fugiĂ© Ă©non-cĂ©e par la Convention de 1951 (victime de persĂ©cutions dufait de leur race, de leur religion [âŠ] dans un contexte de tran-sition Ă©conomique ou de post conflit ou de politiques natio-nales discriminatoires). En effet, il arrive que certainesvictimes de la traite soient recrutĂ©es en raison de leur situa-tion de vulnĂ©rabilitĂ©, celle-ci ayant un lien avec lâun des motifsĂ©numĂ©rĂ©s Ă lâarticle 1A (2) de la Convention de 1951. De plus,les raisons Ă lâorigine du dĂ©part de la personne de son paysdâorigine et de lâentrĂ©e dans un rĂ©seau peuvent entrer dans lecadre de la Convention de GenĂšve et donner lieu Ă la protec-tion internationale, comme une fuite afin dâĂ©chapper Ă une ex-cision, Ă un mariage forcĂ©, Ă un crime dâhonneur ou Ă larĂ©pression politique.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire42
Amnesty International France recommande aux autori-tés demettre en place dans les plus brefs délais un ob-
servatoire national des violences faites aux femmes afin decentraliser la rĂ©alisation et la diffusion dâĂ©tudes ayant traitĂ ces violences. ChargĂ© de coordonner la collecte de don-nĂ©es sexuĂ©es et dâorganiser des enquĂȘtes portant sur lesviolences faites aux femmes, son travail sera synthĂ©tisĂ©,chaque annĂ©e, dans un rapport public remis au premiermi-nistre et au parlement.
LES VIOLENCES AU SEIN DU COUPLE
Pour prévenir les violences faites aux femmes
1. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises dâintensifier son action dâinformation et desensibilisation notamment en multipliant les campagnesdâinformation et de sensibilisation, et en pĂ©rennisant leurdurĂ©e.
2. Amnesty International se fĂ©licite de la proposition dâou-vrir aux associations de dĂ©fense des droits des femmes ledroit de saisine du Conseil SupĂ©rieur de lâAudiovisuel (CSA)et dâintroduire dans la loi relative aux publications desti-nĂ©es Ă la jeunesse, lâinterdiction dâinciter aux prĂ©jugĂ©ssexistes car seuls les prĂ©jugĂ©s ethniques y sont actuelle-ment mentionnĂ©s mais recommande dâĂ©largir le droit desaisine du CSA Ă toutes les associations de dĂ©fense desdroits humains sans le limiter aux seules associations dedĂ©fense des droits des femmes.
3. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises que :
⹠le respect mutuel et l'égalité entre les sexes soient sys-tématiquement enseignés dans les écoles, les collÚges etles lycées et que les autorités veillent à ce que tous lesstéréotypes sexistes soient retirés desmanuels scolaires
âą la formation initiale et continue de tous les personnels delâEducation nationale intĂšgre ces problĂ©matiques.
4. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises de :
âą renforcer et systĂ©matiser la formation initiale et continuedes professionnels (professionnels de santĂ©, magistrats,travailleurs sociaux, personnels de la police et de la gen-darmerienationale, acteursassociatifs, agentsdesservicesde lâemploi et agents dâaccueil des collectivitĂ©s locales) surles questions de violences Ă lâĂ©gard des femmes, pourmieux orienter, accompagner et protĂ©ger les victimes.
Les programmes de formation doivent notamment fournirles Ă©lĂ©ments dâinformation et de formation nĂ©cessairespour dĂ©tecter et gĂ©rer des situations de crise et amĂ©liorerlâaccueil, lâĂ©coute et le conseil aux victimes.
⹠intensifier le développement des formations interdisci-plinaires au niveau local
⹠généraliser ladéconcentrationde la formation continuedesmagistrats à tout le territoire, pour favoriser un meilleuraccÚs et une participation plus importante de ces derniers.
Pour protéger les victimes de violences
5. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises de sâassurer que dans chaque commissariatet dans chaque unitĂ© de gendarmerie :
⹠un référent violences conjugales est désigné et formé.
⹠les postes des professionnels (travailleur social, psycho-logue) sont pérennisés
âą une permanence dâassociation dâaide aux victimes est ins-tallĂ©e
6. Concernant les unitĂ©s de police et de gendarmerie spĂ©-cialisĂ©es dans le domaine de la violence Ă lâĂ©gard desfemmes, Amnesty International France recommande auxautoritĂ©s françaises de :
⹠prévoir leur dotation financiÚre à une hauteur suffisantepour leur permettre de travailler et de former leur per-sonnel
âą sâassurer que les victimes qui le souhaitent aient la pos-sibilitĂ© de communiquer avec des membres fĂ©minins deces services spĂ©cialisĂ©s.
7. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises que les référents locaux violences conju-gales, tels que prévus par la circulaire SDFE/DPS no2008-159 du 14mai 2008« relative à lamise en place de ré-férents pour les femmes victimes de violences au sein ducouple », soient effectivement mis en place sur tout le ter-ritoire.
8. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises dâidentifier et de labelliser dans chaque dĂ©-partement au moins un lieu dâaccueil de jour.
9. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises de :
âą inclure une dĂ©finition de lâincapacitĂ© totale de travail (ITT)dans le code pĂ©nal
âą former les professionnels de santĂ© au repĂ©rage, Ă lâac-cueil des femmes victimes de violences et Ă la rĂ©dactiondes certificats mĂ©dicaux relevant une ITT
âą dĂ©velopper la diffusion des guides dâaide Ă la prise encharge des victimes et Ă la rĂ©daction des certificats mĂ©-dicaux auprĂšs de tous les professionnels de santĂ©
âą mettre en place des rĂ©fĂ©rents « violence » dans les ser-vices dâurgence et dĂ©finir des protocoles de prise encharge des victimes.
Recommandations
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 43
10. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises de sâassurer de lâapplication effective desinstructions gĂ©nĂ©rales de politique pĂ©nale en matiĂšre deviolences faites aux femmes.
11. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises de sâassurer quâĂ lâinstar des procĂšs verbauxde renseignement judiciaire, les mains courantes soienttransmises systĂ©matiquement aux parquets et que le dĂ©pĂŽtdâune main courante ou dâun procĂšs verbal de renseigne-ment judiciaire sâaccompagne systĂ©matiquement dâuneorientation vers les associations spĂ©cialisĂ©es.
12. Amnesty International France enjoint aux autoritĂ©sfrançaises de sâassurer dâune mise en place effective de lacirculation de lâinformation entre les juridictions pĂ©nales etciviles.
13. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises de sâassurer que :
âą lamĂ©diation pĂ©nale ne soit pas utilisĂ©e dans les situationsoĂč elle nâest pas adaptĂ©e, notamment lorsque:
Il existe des prĂ©cĂ©dents faits de violences, quels quâensoient le contexte, la gravitĂ© et la victime
Il existe des violences graves ou répétées entre conjoints,concubins ou personnes liées par un pacte civil de solidarité
Lâauteur est dans une attitude de dĂ©ni quant aux faits re-prochĂ©s ;
Lâauteur est dâune dangerositĂ© particuliĂšre (rĂ©itĂ©ration ougravitĂ© des faits et de leurs consĂ©quences)
La victime ou lâauteur sont opposĂ©s Ă la mesure
La victime paraßt particuliÚrement traumatisée par la si-tuation
Une procédure de divorce est en cours (car la possibilité deparvenir à un accord paraßt compromise dÚs lors que lemisen cause et la victime sont en conflit parallÚle dans une pro-cédure civile)
⹠lesmédiateurs soient systématiquement formés à la spé-cificité du contentieux des violences au sein du couple
âą le guide de lâaction publique soit systĂ©matiquement dif-fusĂ© et que les recommandations quâil contient soientmises en Ćuvre de maniĂšre effective par les servicesconcernĂ©s.
14. Amnesty International France invite les parlementairesĂ adopter la disposition de la proposition de loi « renforçantla protection des victimes et la prĂ©vention et la rĂ©pressiondes violences faites aux femmes » proposant dâĂ©tendre laprocĂ©dure dâĂ©viction du domicile de lâauteur des violences,prĂ©vue Ă lâarticle 220-1 du code civil, actuellement applica-ble aux conjoints, aux personnes liĂ©es par un pacte civil desolidaritĂ© et aux concubins quand ils sont copropriĂ©tairesou cotitulaires du bail du logement commun.
15. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises de sâassurer que le dispositif dâĂ©viction dudomicile de lâauteur des violences prĂ©vu par la loi est rĂ©el-lement mis en Ćuvre sur tout le territoire.
16. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises que au cas oĂč le recours Ă la surveillanceĂ©lectronique serait appliquĂ© dans le cadre des violences ausein du couple, il soit prĂ©vu par la loi et soit soumis aucontrĂŽle d'une autoritĂ© judiciaire.
17. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises dâamĂ©liorer la prise en charge des auteursde violences, de lâintĂ©grer Ă la logique de lâaction de lâĂtatdans la lutte contre les violences faites aux femmes et desâassurer que :
âą lâaccueil des auteurs de violences dans des structuresdâhĂ©bergement et dâaccompagnement financĂ©es par lâĂtatest gĂ©nĂ©ralisĂ©.
18. Amnesty International France incite les autoritĂ©s fran-çaises Ă mettre en Ćuvre des politiques pĂ©nales spĂ©ci-fiques pour lutter contre les violences faites aux femmes etrecommande dâinciter les parquets gĂ©nĂ©raux Ă progresservers lâharmonisation des politiques pĂ©nales sur tout le ter-ritoire.
19. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises :
âą dâaccorder, sauf menace pour lâordre public, le renouvel-lement du titre de sĂ©jour des femmes qui cessent la com-munautĂ© de vie parce quâelles sont victimes de violencesconjugales.
âą dâaccorder un titre de sĂ©jour aux personnes en situationirrĂ©guliĂšre qui portent plainte pour violences au sein ducouple.
⹠de désigner des interlocuteurs référents au sein des pré-fectures, spécifiquement formés, pour orienter et accom-pagner les femmes étrangÚres victimes de violence ausein du couple.
Pour amĂ©liorer lâorganisation et la coordination desmoyens pour lutter contre les violences faites auxfemmes
20. Amnesty International France souhaite une meilleurecapacitĂ© de mobilisation des acteurs et recommande auxautoritĂ©s que les groupes thĂ©matiques dĂ©diĂ© aux violencesintrafamiliales et aux violences faites aux femmes tels queprĂ©vus par les mesures 46 et 47 du Plan national de prĂ©-vention de la dĂ©linquance et dâaide aux victimes 2010-2012soient rĂ©ellement mis en place au sein des conseils dĂ©par-tementaux de prĂ©vention de la dĂ©linquance (C.D.P.D.) etquâils fonctionnent de façon efficace en faisant intervenirdans leur mise en Ćuvre les dĂ©lĂ©guĂ©es rĂ©gionales et leschargĂ©es de missions dĂ©partementales aux droits desfemmes et Ă lâĂ©galitĂ©.
21. Amnesty International France recommande aux autori-tés de :
âą renforcer les moyens allouĂ©s Ă la plate forme tĂ©lĂ©pho-nique du numĂ©ro dâappel national 3919 « violences conju-gales infos »
âą pĂ©renniser le financement des structures associatives aumoyen de conventions pluriannuelles dâobjectifs et demoyens.
Pour faire Ă©voluer le droit
22. Concernant les ordonnances de protection des victimesde violence au sein du couple, Amnesty International Francerecommande aux autorités françaises que la législationprévoit que :
âą des ordonnances de protection puissent ĂȘtre dĂ©livrĂ©estant dans les procĂ©dures pĂ©nales que dans les procĂ©duresciviles et Ă©galement en dehors de telles procĂ©dures
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire44
⹠le déroulement de la procédure fasse primer la sécuritéde la victime sur toute considération notamment liée à des biens
âą dĂšs la rĂ©ception de la demande dâordonnance de protec-tion, le juge convoque pour une audition la partie deman-deresse, la partie assignĂ©e, assistĂ©es, le cas Ă©chĂ©ant, dâunavocat et le ministĂšre public dans un dĂ©lai trĂšs bref
âą aucune preuve indĂ©pendante â Ă©manant de mĂ©decins, dela police, ou autre â ne soit nĂ©cessairement exigĂ©e pour ladĂ©livrance dâune ordonnance
⹠le non respect des ordonnances de protection constitueune infraction pénale.
23. Dans le cadre dâune modification du droit en vigueur,Amnesty International France recommande aux autoritĂ©sfrançaises que la lĂ©gislation prĂ©voit que soient pris encompte et rĂ©primĂ©s:
⹠le caractÚre répété des violences physiques et/ou psy-chologiques
⹠les conséquences de ces violences sur les conditions devie de la victime, sur le respect et la jouissance de sesdroits fondamentaux, de sa dignité et sur son état de santéphysique ou mentale.
LES MUTILATIONS SEXUELLES FĂMININES (MSF)
24. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises de :
âą renforcer et systĂ©matiser la formation initiale et continuedes professionnels (professionnels de santĂ©, magistrats,travailleurs sociaux, personnels de la police et de la gen-darmerie nationale, acteurs associatifs, agents des ser-vices de lâemploi et agents dâaccueil des collectivitĂ©slocales) sur la question des mutilations sexuelles fĂ©mi-nines pour mieux orienter, accompagner et protĂ©ger lesvictimes
âą intensifier son action dâinformation et de sensibilisationen multipliant et en pĂ©rennisant les campagnes dâinfor-mation et de sensibilisation concernant les mutilationssexuelles fĂ©minines
âą informer les futurs migrants, par le biais des servicesconsulaires et ambassades français dans les pays dâori-gine, et les primo arrivants lors de leur arrivĂ©e en France,sur la plate forme dâaccueil
âą mettre en place unmĂ©canisme efficace, en rĂ©flexion avecles associations, pour les filles ĂągĂ©es de plus de 6 ans enĂ©laborant un questionnaire Ă utiliser par les profession-nels qui sont en contact avec des filles susceptibles dâĂȘtresoumises aux MSF
âą favoriser la coopĂ©ration entre les structures françaiseset les structures dans les pays dâorigine luttant contre lesMSF
âą gĂ©nĂ©raliser lâoctroi de dommages et intĂ©rĂȘts au titre dela rĂ©paration civile des MSF
⹠favoriser la visibilité des condamnations pénales pourcrime de MSF en instituant auprÚs des greffes des tribu-naux un codage spécifique pour les décisions rendues enmatiÚre de MSF.
25. Concernant les ordonnances de protection des victimesdemutilations sexuelles féminines, Amnesty InternationalFrance recommande aux autorités françaises que la légis-lation prévoit que :
âą des ordonnances de protection puissent ĂȘtre dĂ©livrĂ©estant dans les procĂ©dures pĂ©nales que dans les procĂ©duresciviles et Ă©galement en dehors de telles procĂ©dures
⹠le déroulement de la procédure fasse primer la sécuritéde la victime sur toute considération notamment liée à des biens
âą dĂšs la rĂ©ception de la demande dâordonnance de protec-tion, le juge convoque pour une audition la partie deman-deresse, la partie assignĂ©e, assistĂ©es, le cas Ă©chĂ©ant, dâunavocat et le ministĂšre public dans un dĂ©lai trĂšs bref
âą aucune preuve indĂ©pendante â Ă©manant de mĂ©decins, dela police, ou autre â ne soit nĂ©cessairement exigĂ©e pour ladĂ©livrance dâune ordonnance
⹠le non respect des ordonnances de protection constitueune infraction pénale.
LA LUTTE CONTRE LES MARIAGES FORCĂS
26. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises de :
âą mener une politique de prĂ©vention coordonnĂ©e au niveaunational en effectuant notamment une Ă©tude en profon-deur de ce phĂ©nomĂšne et en adoptant une politique desensibilisation et de formation des professionnels (tra-vailleurs sociaux, personnels de lâĂducation nationale,membres des services de police et de gendarmerie, offi-ciers dâĂ©tat civil) pour les impliquer dans le dĂ©veloppe-ment dâune stratĂ©gie de prĂ©vention des mariages forcĂ©s,fondĂ©e sur lâĂ©galitĂ© des filles et des garçons
âą intensifier son action dâinformation et de sensibilisationnotamment en multipliant les campagnes dâinformationet de sensibilisation, et en pĂ©rennisant leur durĂ©e
âą multiplier les campagnes dâinformation et de prĂ©ventiondans les Ă©coles, collĂšges et lycĂ©es et les Ă©tendre Ă leursfamilles pour renforcer la prĂ©vention desmariages forcĂ©s
âą mettre en place des structures dâaccueil dâurgence per-mettant dâĂ©couter, prendre en charge et hĂ©berger despersonnes qui risquent dâĂȘtre mariĂ©es de force, et lesprotĂ©geant de la pression des tiers et dâĂ©ventuels enlĂš-vements
⹠pérenniser les subventions accordées aux associationsluttant contre le mariage forcé
âą crĂ©er une structure interministĂ©rielle spĂ©cialisĂ©e dans laprĂ©vention dumariage forcĂ© et lâaccompagnement des vic-times qui aurait pour fonction de centraliser, organiser etsystĂ©matiser les signalements faits par les travailleurssociaux, les associations et les Ă©tablissements scolaires
⹠mettre en place des référents dans les ambassades etconsulats français spécifiquement formés sur la questiondes mariages forcés.
27. Concernant les ordonnances de protection des victimesde mariage forcé, Amnesty International France recom-mande que la législation prévoie que :
âą des ordonnances de protection peuvent ĂȘtre dĂ©livrĂ©estant dans les procĂ©dures pĂ©nales que dans les procĂ©duresciviles et Ă©galement en dehors de telles procĂ©dure.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 45
⹠la procédure fasse primer la sécurité de la victime surtoute considération liée à des biens ou autres
âą dĂšs la rĂ©ception de la demande dâordonnance de protec-tion, le juge convoque pour une audition la partie deman-deresse, la partie assignĂ©e, assistĂ©e, le cas Ă©chĂ©ant, dâunavocat et le ministĂšre public dans un dĂ©lai trĂšs bref
âą le tĂ©moignage en personne ou une dĂ©claration orale ouĂ©crite sous serment Ă©manant de la victime constitue unepreuve suffisante pour la dĂ©livrance dâune ordonnance deprotection
âą aucune preuve indĂ©pendante â Ă©manant de mĂ©decins, dela police, ou autre â ne soit exigĂ©e pour la dĂ©livrancedâune ordonnance aprĂšs que la plaignante/survivante atĂ©moignĂ© en personne ou fait une dĂ©claration orale ouĂ©crite sous serment.
⹠le non respect des ordonnances de protection constitueune infraction pénale.
28. Pour renforcer la lutte contre les mariages forcĂ©s, Am-nesty International France recommande aux autoritĂ©s fran-çaises de rĂ©primer le fait dâexercer sur autrui toute formede contrainte ayant pour but de lui faire contracter un ma-riage ou de conclure une union sans son consentement libreet, par dĂ©rogation aux dispositions de lâarticle 113-7 ducode pĂ©nal , dâĂ©tendre la lĂ©gislation française aux cas demariage ou dâunion forcĂ©s commis Ă lâĂ©tranger sur des per-sonnes rĂ©sidant de maniĂšre habituelle en France.
LA TRAITE DES ĂTRES HUMAINS
29. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises dâadopter les mesures nĂ©cessaires pour as-surer la coordination de la politique nationale de luttecontre la traite des ĂȘtres humains en mettant en place unestructure nationale de coordination.
30.Amnesty International France recommandeauxautoritĂ©sde procĂ©der, avec les moyens nĂ©cessaires, Ă la collecte et Ă l'Ă©tude des donnĂ©es sur le phĂ©nomĂšne de la traite des ĂȘtreshumains en France et de rendre ces informations publiques.
Pour mieux identifier les victimesde la traite des ĂȘtres humains
31. Amnesty International France demande aux autoritĂ©sde concevoir et de mettre en Ćuvre une stratĂ©gie efficacequi permette lâidentification et la protection des personnesvictimes de la traite des ĂȘtres humains, notamment en :
âą considĂ©rant une personne comme victime Ă partir dumo-ment oĂč il existe desmotifs raisonnables de croire quâelleest ou a Ă©tĂ© victime de la traite.
âą mettant en place un dispositif national dâidentification desvictimes
âą sâassurant que les personnes et autoritĂ©s compĂ©tentes enlien avec les victimes soient qualifiĂ©es et reçoivent uneformation adaptĂ©e concernant lâidentification et la pro-tection des victimes.
Pour renforcer la protection et lâassistancedes victimes de la traite des ĂȘtres humains
32. Amnesty International France demande aux autoritĂ©sfrançaises de garantir que lâaccĂšs au sĂ©jour et aux droits qui
en dĂ©coulent ne soit pas subordonnĂ© au dĂ©pĂŽt dâune plainteou au tĂ©moignage des victimes de la traite dâĂȘtres humainsdans le cadre de poursuites pĂ©nales intentĂ©es contre leurstrafiquants prĂ©sumĂ©s.
33. Amnesty International France demande aux autoritĂ©sfrançaises de prolonger le dĂ©lai de rĂ©tablissement et de rĂ©-flexion Ă trois mois minimum et de sâassurer et de garantirque les victimes de la traite puissent bĂ©nĂ©ficier, sans condi-tion, dâun permis de sĂ©jour de six mois minimum renouve-lable.
34. Amnesty International France recommande aux autori-tés françaises de :
âą Sâassurer que les victimes Ă©trangĂšres de la traite nesoient pas sanctionnĂ©es pour des faits, notamment le ra-colage et le sĂ©jour irrĂ©gulier, rĂ©sultant de lâexploitationdont elles sont victimes.
âą Offrir assistance et protection Ă toute personne victimede la traite se trouvant sur le territoire français, notam-ment en lui garantissant l'accĂšs Ă un hĂ©bergement sĂ»r etprotĂ©gĂ©, Ă une assistancematĂ©rielle et Ă des soins et trai-tements mĂ©dicaux et psychologiques, tout en exigeantque ces services soient fournis sur la base du consente-ment Ă©clairĂ©, de maniĂšre Ă respecter la dignitĂ© et lâinti-mitĂ© de la personne.
âą Sâassurer et garantir que les victimes de la traite puissentobtenir rĂ©paration, notamment sous la forme d'une in-demnisation.
Pour prendre en compte la situation de victime de la traitedes ĂȘtres humains dans le cadre de lâexamen desdemandes de protection au titre de lâasile
35. Amnesty International France demande aux autoritĂ©sfrançaises demodifier les dispositions de la circulaire du 5fĂ©vrier 2009, sans limiter le droit de solliciter lâasile au seuldroit de demander la protection au titre de la protectionsubsidiaire.
36. Amnesty International France demande aux autoritĂ©sde sâassurer que les personnes et autoritĂ©s compĂ©tentesdans lâexamen des demandes dâasile soient sensibilisĂ©es,formĂ©es et qualifiĂ©es pour identifier une victime de la traitedes ĂȘtres humains.
37. Amnesty International France recommande aux autori-tĂ©s françaises de sâassurer que la dĂ©livrance du titre de sĂ©-jour prĂ©vu par lâarticle L.316-1 du CESEDA est sansprĂ©judice du droit de demander lâasile et dâen bĂ©nĂ©ficier.
38. Amnesty International France recommande Ă lâOfficefrançais de protection des rĂ©fugiĂ©s et apatrides et Ă la Cournationale du droit dâasile dâexaminer les demandes de pro-tection au titre de lâasile des victimes de la traite au regarddes Principes directeurs duHaut commissariat aux rĂ©fugiĂ©sdes Nations Unies sur la protection internationale des vic-times de la traite et des personnes risquant dâĂȘtre victimesde la traite.
Amnesty International France recommande Ă©galementlâadoption par lâOFPRA de lignes directrices intĂ©grant laproblĂ©matique de la traite des ĂȘtres humains dans le cadrede la procĂ©dure dâasile et permettant donc une harmonisa-tion des pratiques.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire46
1 Etude nationale sur les morts violentes au sein du couple, AnnĂ©e2008, ministĂšre de lâIntĂ©rieur, DĂ©lĂ©gation aux victimes, octobre 2009.2 Les chiffres clĂ©s 2008 de lâĂ©galitĂ© entre les hommes et les femmes,publiĂ© par le Service du Droit des Femmes et de lâEgalitĂ© (SDFE).3A AssemblĂ©e nationale, Commission spĂ©ciale chargĂ©e dâexaminer laproposition de loi renforçant la protection des victimes et la prĂ©ventionet rĂ©pression des violences faites aux femmes.3B Rapport fait au nom de la commission spĂ©ciale chargĂ©e dâexaminerla proposition de loi (n° 2121) de Madame Danielle Bousquet, Mon-sieur Guy Geoffroy et plusieurs de leurs collĂšgues renforçant la pro-tection des victimes et la prĂ©vention et la rĂ©pression des violencesfaites aux femmes, par Monsieur Guy Geoffroy, 10 fĂ©vrier 2010.4 Commission spĂ©ciale de lâAssemblĂ©e nationale, Madame MichĂšleAlliot-Marie, Garde des sceaux, ministre de la justice et des libertĂ©s,audition du 27 janvier 2010, p.7.5 Etude nationale sur les morts violentes au sein du couple, AnnĂ©e2008, ministĂšre de lâIntĂ©rieur, DĂ©lĂ©gation aux victimes, octobre 2009.6 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.106.7 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.96.8 DeuxiĂšme plan global triennal (2008-2010), « Douze objectifs pourcombattre la violence faite aux femmes », p.9, ministĂšre du Travail,des Relations sociales et de la SolidaritĂ©, SecrĂ©tariat dâĂtat Ă la So-lidaritĂ©.9 Guide de lâaction publique. La lutte contre les violences au sein ducouple, Septembre 2008 ; Lutter contre la violence au sein du cou-ple : le rĂŽle des professionnels, juin 2006. ; Les associations et la luttecontre les violences au sein du couple. Guide mĂ©thodologique, no-vembre 2006. ; Le guide des droits des victimes, septembre 2007.10 Discours du premier ministre Ă lâoccasion de la JournĂ©e internatio-nale pour lâĂ©limination de la violence Ă lâĂ©gard des femmes, 25 no-vembre 2009, p.3.11 Madame ValĂ©rie LĂ©tard, SecrĂ©taire dâĂtat Ă la SolidaritĂ©, Discoursde lancement de la campagne, 2 octobre 2008.12 Un court mĂ©trage - « La voix » - conçu par lâagence DDB et rĂ©alisĂ©par Jacques Audiard. Ce film de 30 secondes a Ă©tĂ© diffusĂ© sur lâen-semble des chaĂźnes hertziennes, TF1, France TĂ©lĂ©visions, Canal+,M6 et sur les chaĂźnes de la TNT, TMC, NT1, W9, BFM TV, Direct 8,France 4, TV5, Voyage, Discovery Channel, National GĂ©ographic,TVB, NRJ 12.TF1, France TĂ©lĂ©visions et M6 ont offert des espaces gratuits de dif-fusion sur leur antenne afin que ce film soit vu par le plus grand nom-bre de tĂ©lĂ©spectateurs.13 Pour que les droits deviennent rĂ©alitĂ©. Les Ătats ont le devoir decombattre la violence contre les femmes, Amnesty International,2004.14 Recommandation Rec (2002) du ComitĂ© des ministres aux Ătatsmembres du Conseil de lâEurope sur la protection des femmes contreles violences adoptĂ©e le 30 avril 2002.15 ComitĂ© pour lâĂ©limination de la discrimination Ă lâĂ©gard des femmes,Recommandation gĂ©nĂ©rale n°19 (paragraphe 24-d).16 Observations finales sur le rapport de la France, ComitĂ© pour lâĂ©li-mination de la discrimination Ă lâĂ©gard des femmes, 8 avril 2008.17 Rapport sur lâimage des femmes dans les mĂ©dias, Commission de
rĂ©flexion sur lâimage des femmes dans les mĂ©dias, 25 septembre2008.18 Ainsi, la loi du 29 juillet 1881 relative Ă la libertĂ© de la presse rĂ©primeexpressĂ©ment la provocation Ă la haine ou Ă la violence ainsi que lâin-sulte « Ă lâĂ©gard dâune personne ou dâun groupe de personnes Ă rai-son de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap ».Il en va de mĂȘme pour la loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 relative auxpublications destinĂ©es Ă la jeunesse qui rĂ©prime expressĂ©ment lesreprĂ©sentations « prĂ©sentant sous un jour favorable [âŠ] la dĂ©baucheou tous actes qualifiĂ©s crimes ou dĂ©lits ou de nature Ă dĂ©moraliserlâenfance ou la jeunesse » ou revĂȘtant « un caractĂšre licencieux oupornographique » La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative Ă la libertĂ© de communication, quant Ă elle, vise Ă garantir « la protec-tion de lâenfance et de lâadolescence » et le « respect de la dignitĂ© dela personne ».19 Article 13 de la proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27novembre 2009.
I. â La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative Ă la libertĂ© decommunication est ainsi modifiĂ©e :1° Au dernier alinĂ©a de lâarticle 42, les mots : « et les associations fa-miliales » sont remplacĂ©s par les mots : « les associations familialeset les associations de dĂ©fense des droits des femmes ».2° Au dernier alinĂ©a de lâarticle 48-1, les mots : « et les associationsfamiliales reconnues par lâUnion nationale des associations familiales» sont remplacĂ©s par les mots : «, les associations familiales recon-nues par lâUnion nationale des associations familiales et les associa-tions de dĂ©fense des droits des femmes ».II. â Le premier alinĂ©a de lâarticle 2 de la loi n° 49-956 du 16 juillet1949 sur les publications destinĂ©es Ă la jeunesse est complĂ©tĂ© parles mots : « ou sexistes ».
20 Article 14 de la proposition de loi du 27 novembre 2009I. â La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative Ă la libertĂ© decommunication est ainsi modifiĂ©e :1° La deuxiĂšme phrase du premier alinĂ©a du III de lâarticle 33-1 estcomplĂ©tĂ©e par les mots : « Ă raison de la diffusion de toutes formesde contenu audiovisuel faisant lâapologie des crimes contre lâhuma-nitĂ©, valant incitation Ă la haine raciale, Ă la violence, notamment laviolence faite aux femmes, ou vĂ©hiculant des reprĂ©sentations portantatteinte Ă la dignitĂ© de la personne humaine. »2° Au deuxiĂšme alinĂ©a de lâarticle 43-9, aprĂšs le mot : « haine », sontinsĂ©rĂ©s les mots: « ou Ă la violence »,II. â Au troisiĂšme alinĂ©a du 7 du I de lâarticle 6 de la loi n° 2004-575du 21 juin 2004 pour la confiance dans lâĂ©conomie numĂ©rique, aprĂšsle mot : « violence », sont insĂ©rĂ©s les mots : «, notamment lâincitationaux violences faites aux femmes ».21 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, page 82.22 Rapport dâĂ©valuation du plan global 2005-2007 de lutte contre lesviolences faites aux femmes, page 4.23 « Article 3I. â AprĂšs lâarticle L. 312-17 du code de lâĂ©ducation, il est insĂ©rĂ© un ar-ticle L. 312-17-1 ainsi rĂ©digĂ© :« Art. L. 312-17-1. â Une information sur le respect mutuel et lâĂ©galitĂ©entre les sexes est dispensĂ©e dans les Ă©coles, collĂšges et les lycĂ©esĂ raison dâau moins une sĂ©ance mensuelle. Ces sĂ©ances peuvent as-socier les personnels contribuant Ă la rĂ©pression des violences conju-gales et Ă lâaide aux victimes, ainsi que dâautres intervenantsextĂ©rieurs. »24 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.88.
Annotationsdebasdepages
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 47
25 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, audition du Dr PatriciaVienne, inspectrice gĂ©nĂ©rale des affaires sociales le 17 fĂ©vrier 2009,p.8.26 Rapport parlementaire, Tome II, audition de Monsieur Philippe deLagune, SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du comitĂ© interministĂ©riel de prĂ©ventionde la dĂ©linquance le 3 juin 2009.27 Lâarticle 11 de la proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27novembre 2009 propose dâinsĂ©rer dans le code de lâaction sociale etdes familles un article L. 215-5 ainsi rĂ©digĂ© : « Art. L. 215-5. â LesmĂ©decins, les personnels mĂ©dicaux et paramĂ©dicaux, les travailleurssociaux, les magistrats, les personnels de lâĂducation nationale, lespersonnels dâanimation sportive, culturelle et de loisirs et les person-nels de la police et de la gendarmerie reçoivent une formation initialeet continue, en partie commune aux diffĂ©rentes professions et insti-tutions, en matiĂšre de prĂ©vention et de prise en charge des violencesfaites aux femmes. »28 Article 4 de la proposition de loi du SĂ©nat du 25 novembre 2009.« Les mĂ©decins, ainsi que lâensemble des personnels mĂ©dicaux etparamĂ©dicaux, les travailleurs sociaux, les magistrats, les avocats etles personnels de la police nationale et de la gendarmerie nationalereçoivent une formation initiale et continue propre Ă leur permettredâassister les victimes de violences conjugales et de prendre les me-sures nĂ©cessaires de prĂ©vention et de protection quâelles appellent.Cette formation est dispensĂ©e dans des conditions fixĂ©es par dĂ©-cret. »29 Guide de lâaction publique. La lutte contre les violences au sein ducouple, Direction des Affaires Criminelles et des GrĂąces, Septembre2008, p.12.30 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, audition de MmeMaryvonne Chapalain, commandant fonctionnel de la DĂ©lĂ©gation auxvictimes de la direction gĂ©nĂ©rale de la police nationale le 10 fĂ©vrier2009.31 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, audition de MmeKarine Lejeune, Capitaine de gendarmerie, DĂ©lĂ©gation aux victimes32 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, audition de Mon-sieur Michel Ribeiro, Commissaire divisionnaire le 17 fĂ©vrier 2009.33 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, audition de MmeMaryvonne Chapalain, commandant fonctionnel de la DĂ©lĂ©gation auxvictimes de la direction gĂ©nĂ©rale de la police nationale le 10 fĂ©vrier2009.34 DĂ©lĂ©gation aux victimes du ministĂšre de lâIntĂ©rieur. Entretien avecAmnesty International France le 26 novembre 2009.35 Amnesty International. Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, p.93.36 Ăcole nationale de la magistrature, Programme pĂ©dagogique For-mation initiale, promotion 2009, page 4837 Ibid, p.48.38 Ibid, p.39.39 Entretien Amnesty International France du 16 novembre 2009 avecAgnĂšs Le Monnyer, vice-prĂ©sidente du Tribunal de grande instancede Toulouse.40 Quatre coordinateurs sont dĂ©jĂ recrutĂ©s dans les cours dâappel deBordeaux, Douai, Lyon et Rennes, ibid. p.27 Ă 35.41 Pour que les droits deviennent rĂ©alitĂ©. Les Ătats ont le devoir decombattre la violence contre les femmes. Amnesty International, do-cument public, index Act 77/049/2004, p.36.
42 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p20.43 « Depuis 2005, la mise en place dâun rĂ©fĂ©rent est systĂ©matiquedans chaque communautĂ© de brigade ou brigade autonome de gen-darmerie. Ce rĂ©fĂ©rent est formĂ© et informĂ© sur tous les partenariats ettous les dispositifs existants sur le territoire. » Rapport parlementairedu 7 juillet 2009, Tome II, Audition de Madame Karine Lejeune, Capi-taine de gendarmerie, DĂ©lĂ©gation aux victimes du ministĂšre de lâIntĂ©-rieur, 26 mai 2009.44 Dans le cadre du plan national de la prĂ©vention de la dĂ©linquanceet d'aide aux victimes, 129 intervenants sociaux ont Ă©tĂ© installĂ©s dansles commissariats de police et les unitĂ©s de gendarmerie (69 pour laPolice nationale et 40 pour la Gendarmerie). Chiffres donnĂ©s par laDĂ©lĂ©gation aux victimes du ministĂšre de lâIntĂ©rieur le 30 dĂ©cembre2009.45 Le 25 mai 2005 le ministĂšre de l'IntĂ©rieur a signĂ© une conventionavec l'institut national d'aide aux victimes et de mĂ©diation (INAVEM)pour la mise en place de points d'accueil dans les commissariats etbrigades de gendarmerie assurĂ©s par des associations d'aide aux vic-times.Le 7 mars 2006, le ministre de lâIntĂ©rieur a signĂ© une convention na-tionale avec la FĂ©dĂ©ration nationale solidaritĂ© femmes (FNSF) et leCentre national d'information aux droits des femmes (CNIDF) afind'amĂ©liorer la prise en charge et l'accompagnement des femmes vic-times de violence dans les services de police et de gendarmerie.46 Chiffres fournis par la DĂ©lĂ©gation aux victimes du ministĂšre de lâIn-tĂ©rieur le 30 dĂ©cembre 2009.47 Bonneville, Bourg-en-Bresse, Cambrai, ChĂąteauroux, Lille, Lyon,Marseille, Mulhouse, NĂźmes, Pau, Quimper, Sables- dâOlonne, Sen-lis.48 Document de politique transversale, Projet de Loi de finances pour2010, politique de lâĂ©galitĂ© entre les femmes et les hommes, p.29.49 Union syndicale des magistrats. Rachida DATI, une justice sacca-gĂ©e ! Juin 2009.50 La circulaire du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du comitĂ© interministĂ©riel de prĂ©-vention de la dĂ©linquance, en date du 21 fĂ©vrier 2008 et relative auxorientations du Fonds interministĂ©riel de prĂ©vention de la dĂ©linquance(FIDP) pour 2008, jointe en annexe II, mentionne ainsi explicitement,parmi les actions Ă©ligibles au FIPD (cf. point 2.2.2 de la circulaire), lapossibilitĂ© de « contribuer au financement dâun poste dâacteur local rĂ©-fĂ©rent dans le cadre du deuxiĂšme global triennal (2008-2010) destinĂ©Ă combattre les violences faites aux femmes », sachant que « lâaideaux victimes de ces violences [...] constitue un autre domaine dâin-tervention privilĂ©giĂ© du FIPD ».51 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.277.52 Entretien Amnesty International France avec Madame ElisabethTomĂ©, chef du Service des droits des femmes et de l'Ă©galitĂ©, le 4 jan-vier 2010.53 Guide pratique « Lutter contre la violence au sein du couple. LerĂŽle des professionnels. » Ă©ditĂ© par le MinistĂšre de lâemploi, de la co-hĂ©sion sociale et du logement. MinistĂšre dĂ©lĂ©guĂ© Ă la cohĂ©sion so-ciale et Ă la paritĂ© et le Service des droits des femmes et de lâĂ©galitĂ©.Juin 2006.54 La circulaire DH/AF1/98 N°137 du 27 fĂ©vrier 1998 prĂ©cise les mo-dalitĂ©s de crĂ©ation des UMJ.55 Entretien dâAmnesty International France du 7 dĂ©cembre 2009 avecle professeur Proust, directeur du CASA de Rouen.
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire48
56 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.94.57 Entretien Amnesty International France du 7 dĂ©cembre avec le pro-fesseur Proust, directeur du CASA de Rouen.58 Entretien Amnesty International France du 29 janvier 2010 avecCĂ©cile Morvant, mĂ©decin lĂ©giste, spĂ©cialisĂ© dans les violences contreles femmes.59 Id60 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Monsieur Jean-Marie Huet, audition du 27 janvier 2009.61 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.61.62 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p. 54.63 Article 132-80 du code pĂ©nal.64 Article 221-4, 11° du code pĂ©nal.65 Article 222-24, 11° du code pĂ©nal.66 Article 222-28, 7° du code pĂ©nal.67 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Audition du 13 janvier 2009de M. Luc FrĂ©miot, procureur de la RĂ©publique prĂšs le Tribunal degrande instance de Douai, p.1.68 Circulaire prĂ©sentant les dispositions de droit pĂ©nal et de procĂ©-dure pĂ©nale de la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prĂ©-vention et la rĂ©pression des violences au sein du couple ou commisescontre les mineurs CRIM 2006-10 E8/19-04-2006 NOR :JUSD0630054C.69 Ibid.
70 PrĂ©vention et lutte contre les violences faites aux femmes. Discoursde Madame Rachida Dati, Garde des Sceaux, ministre de la Justice.20 mai 2009.71 Guide de lâaction publique. La lutte contre les violences au sein ducouple, Direction des Affaires Criminelles et des GrĂąces, Septembre2008, p.11.72 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, audition du 12 mai 2009.73 Guide de lâaction publique. La lutte contre les violences au sein ducouple, Direction des Affaires Criminelles et des GrĂąces, Septembre2008, p 24.74 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, audition du 10 fĂ©vrier 2009.75 Guide de lâaction publique. La lutte contre les violences au sein ducouple, Direction des Affaires Criminelles et des GrĂąces, Septembre2008, p.16.76 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.54.77 Guide de lâaction publique, La lutte contre les violences au sein ducouple, Direction des Affaires Criminelles et des GrĂąces, Septembre2008, p.48.78 Ibid, p.48.79 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.133.80 Ibid., p.133.81 Article 220-1, alinĂ©a 3 du Code civil.
82 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.25.83 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.216.84 Article 9 de la proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 no-vembre 2009.AprĂšs le chapitre II du titre XIII du livre premier du code civil, il est in-sĂ©rĂ© un chapitre III ainsi rĂ©digĂ© :CHAPITRE IIIDispositions communes« Art. L. 515-9. â Le troisiĂšme alinĂ©a de lâarticle 220-1 est applicableaux partenaires liĂ©s par un pacte civil de solidaritĂ© et aux concubinsqui sont copropriĂ©taire du logement commun ou cotitulaire du bailde ce logement. Les mesures prises sur ce fondement sont caduquesĂ lâexpiration dâun dĂ©lai de quatre mois Ă compter de leur prononcĂ©.»85 La lutte contre les violences au sein du couple : Guide de lâactionpublique. Septembre 2008, p.9.86 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.135.87 Rapport dâĂ©valuation du plan global 2005-2007 de lutte contre lesviolences faites aux femmes, Juillet 2008, page 4.88 « Des conventions ou protocoles dâaccueil doivent ĂȘtre signĂ©s parles chefs de juridiction, le prĂ©fet, les reprĂ©sentants des collectivitĂ©sterritoriales, les services sociaux et les associations. » Guide de lâac-tion publique, La lutte contre les violences au sein du couple, Direc-tion des Affaires Criminelles et des GrĂąces, Septembre 2008, p 9.89 Amnesty International, Migrants en situation irrĂ©guliĂšre et deman-deurs dâasile: des solutions pour Ă©viter la dĂ©tention. Index AI : POL33/001/2009, avril 2009.90 Ibid, P.138.91 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.75, 76.92 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.23.93 Rapport au Parlement relatif Ă la politique nationale de lutte contreles violences au sein du couple, mars 2009, p.24.94 Auteurs de violences au sein du couple. Prise en charge et prĂ©-vention. Rapport du groupe de travail animĂ© par le Docteur RolandCoutenceau, mars 2006.95 Etude nationale sur les morts violentes au sein du couple, AnnĂ©e2008, ministĂšre de lâIntĂ©rieur, DĂ©lĂ©gation aux victimes, octobre 2009,p .8.96 Article. 222-48-1 du Code pĂ©nal.97 Rapport dâĂ©valuation du plan global 2005-2007 de lutte contre lesviolences faites aux femmes, juillet 2008, p.26.98 La politique pĂ©nale est constituĂ©e de lâensemble des orientationsgĂ©nĂ©rales donnĂ©es par le procureur de la RĂ©publique relatives au trai-tement des infractions sur le ressort dâun tribunal de grande instanceen fonction des nĂ©cessitĂ©s de lâordre public. Ces orientations sontmatĂ©rialisĂ©es par des directives donnĂ©es aux magistrats du parquetainsi quâaux services de police et aux unitĂ©s de la gendarmerie.99 Rapport dâinformation dĂ©posĂ© en application de lâarticle 86, alinĂ©a8, du rĂšglement par la commission des lois constitutionnelles, de la lĂ©-gislation et de lâadministration gĂ©nĂ©rale de la rĂ©publique sur la miseen application de la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prĂ©-vention et la rĂ©pression des violences au sein du couple ou commisescontre les mineurs, et prĂ©sentĂ© par MM. Guy Geoffroy et Serge Blisko
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dĂ©putĂ©s, 11 dĂ©cembre 2007, p21, 22.100 Rapport sur l'Ă©valuation du plan global 2005 â 2007 de lutte contreles violences faites aux femmes, juillet 2008, p.25.101 La lutte contre les violences au sein du couple : Guide de lâactionpublique. Septembre 2008, p.3.102 Observatoire de la paritĂ© entre les femmes et les hommes. Faut-ilencore faire Ă©voluer les lois concernant les violences Ă lâĂ©gard desfemmes au sein du couple ? FĂ©vrier 2009, p.4.103 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.226.104 Ibid., p.226.105 Rapport dâĂ©valuation du plan global 2005-2007 de lutte contre lesviolences faites aux femmes, juillet 2008, p.24.106 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.74.107 Le vol entre Ă©poux a Ă©tĂ© pĂ©nalisĂ© par la loi du 4 avril 2006, quipunit le vol de papiers dâidentitĂ©. Cette pratique empĂȘchait de nom-breuses femmes de dĂ©poser plainte. De plus, un article L. 313-12 aĂ©tĂ© insĂ©rĂ© dans le Code de l'entrĂ©e et du sĂ©jour des Ă©trangers et dudroit d'asile et prĂ©voit le renouvellement du titre de sĂ©jour du conjointde Français quand bien mĂȘme la condition de la communautĂ© de vienâest plus remplie sâil est victime de violences conjugales.108 Disposition insĂ©rĂ©e Ă lâarticle L. 313-12 du Code de lâentrĂ©e et dusĂ©jour des Ă©trangers et du droit dâasile.109 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, audition du 2 juin 2009.110 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, audition de Mme ClaudieLesselier, RĂ©seau pour lâautonomie des femmes immigrĂ©es et rĂ©fu-giĂ©es (RAJFIRE) du 2 juin 2009.111 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, audition de MaĂźtre AnneJonquet, responsable de la permanence du barreau de Bobigny du12 mai 2009.112 Ibid.113 Le SDFE comprenait 230 agents rĂ©partis entre une administrationcentrale de 50 personnes et un rĂ©seau dĂ©concentrĂ© de 180 per-sonnes implantĂ©es sur 104 points du territoire (y compris dans les dĂ©-partements et territoires dâOutre Mer).Le service central comprenait quatre bureaux : le bureau des res-sources humaines et des affaires gĂ©nĂ©rales ; le bureau de la commu-nication ; le bureau de lâĂ©galitĂ© professionnelle ; le bureau des droitspersonnels et sociaux , et trois missions : la mission dâanimation du rĂ©-seau dĂ©concentrĂ© ; la mission des affaires europĂ©ennes et internatio-nales et la mission des Ă©tudes des recherches et des statistiques.Le service dĂ©concentrĂ© est composĂ© de 26 dĂ©lĂ©guĂ©es rĂ©gionales et75 chargĂ©es de mission dĂ©partementales actuellement placĂ©es souslâautoritĂ© des prĂ©fets de rĂ©gion ou de dĂ©partement.114 Document SDFE, 31 dĂ©cembre 2009.115 Entretien Amnesty International France avec Madame TomĂ©, le 4janvier 2010.116 Ibid.117 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.54.118 DĂ©cret n° 2001-1240 du 21 dĂ©cembre 2001.119 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, audition du 9 juil-let 2009.
120 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, proposition n° 59.121 CrĂ©Ă©es par la circulaire du 9 mai 2001 et conçues comme des dĂ©-clinaisons locales de la commission nationale Ă©voquĂ©e ci-dessus.122 DĂ©cret n° 2006-665 du 7 juin 2006 relatif Ă la rĂ©duction du nombreet Ă la simplification de la composition de diverses commissions ad-ministratives.123 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.275.124 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, proposition n° 60.125 Plan national de prĂ©vention de la dĂ©linquance et dâaide aux vic-times 2010-2012, p.37.126 Une politique transversale est une politique publique interministĂ©-rielle financĂ©e Ă un niveau significatif par lâĂtat, identifiĂ©e par le Pre-mier ministre, dont la finalitĂ© concerne plusieurs programmes relevantde diffĂ©rents ministĂšres et nâappartenant pas Ă une mĂȘme mission.Pour ces politiques, selon l'article 128 de la loi de finances rectifica-tive pour 2005 n°2005-1720 du 30 dĂ©cembre 2005, des documentsde politique transversale sont prĂ©sentĂ©s sous forme dâannexe gĂ©nĂ©-rale au projet de loi de finances de lâannĂ©e. Ces documents, pourchaque politique concernĂ©e, dĂ©veloppent la stratĂ©gie mise en Ćuvreet regroupent les objectifs et indicateurs des diffĂ©rents programmesy concourant. Ils comportent Ă©galement une prĂ©sentation dĂ©taillĂ©e delâeffort financier consacrĂ© par lâĂtat Ă ces politiques. Pour chaque po-litique transversale, un ministre chef de file, dĂ©signĂ© par le Premier mi-nistre, a la responsabilitĂ© de coordonner les activitĂ©s de lâĂtat relevantdes diffĂ©rents programmes concernĂ©s, en vue de favoriser lâobten-tion de rĂ©sultats socio-Ă©conomiques communs.127 Document de politique transversale, Projet de Loi de finances pour2010, politique de lâĂ©galitĂ© entre les femmes et les hommes, p.11.128 Document de politique transversale, Projet de Loi de finances pour2010, politique de lâĂ©galitĂ© entre les femmes et les hommes, p.11.130 Document de politique transversale, Projet de Loi de finances pour2010, politique de lâĂ©galitĂ© entre les femmes et les hommes, p.70.131 Document de politique transversale, Projet de Loi de finances pour2010, politique de lâĂ©galitĂ© entre les femmes et les hommes, p.63.132 Dossier presse du ministĂšre de lâEmploi, de la CohĂ©sion sociale etdu Logement, ministĂšre dĂ©lĂ©guĂ© Ă la CohĂ©sion sociale et Ă la ParitĂ©,« En France, tous les trois jours, une femme meurt victime de vio-lences conjugales », 14 mars 2007.132 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Madame MarieBellanger de la FĂ©dĂ©ration nationale SolidaritĂ© femmes, audition du10 fĂ©vrier 2009.133 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Madame Cathe-rine Clamens, directrice gĂ©nĂ©rale de la FNSF, audition du 2 juin 2009.134 Entretien Amnesty International France avec Christine Clamens etNicole CrĂ©peau le 9 fĂ©vrier 2010135 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Madame EvelyneRĂ©guig de lâassociation VIFF SOS femmes, audition du 10 fĂ©vrier2009.136 Projet de loi de finances pour 2009.137 Programme qui inclut la lutte contre les violences faites auxfemmes138 Rapport de la mission parlementaire dâĂ©valuation de la politiquede prĂ©vention et de lutte contre les violences faites aux femmes, 7juillet 2009, Tome II ,M. Alain Kurkdjian, audition du 26 mai 2009
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139 Discours du 23 novembre 2009, extraits de la dĂ©pĂȘche de lâAFP,site du ministĂšre.140 Commission spĂ©ciale chargĂ©e dâexaminer la proposition de loi ren-forçant la protection des victimes et la prĂ©vention et rĂ©pression desviolences faites aux femmes, Madame MichĂšle Alliot-Marie, Gardedes sceaux, ministre de la justice et des libertĂ©s, audition du 27 jan-vier 2010, p.2 et 4.141 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, page 29.142 Article 17 de la proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27novembre 2009 : AprĂšs lâarticle 222-13 du code pĂ©nal, il est insĂ©rĂ©un article 222-13-1 ainsi rĂ©digĂ© : « Art. 222-13-1. â Le fait de sou-mettre son conjoint, partenaire liĂ© par un pacte civil de solidaritĂ© ouconcubin ou un ancien conjoint, partenaire liĂ© par un pacte civil desolidaritĂ© ou concubin Ă des agissements ou des paroles rĂ©pĂ©tĂ©sayant pour objet ou pour effet une dĂ©gradation des conditions de viede la victime susceptible de porter atteinte Ă ses droits et Ă sa dignitĂ©ou dâentraĂźner une altĂ©ration de sa santĂ© physique ou mentale estpuni de trois ans dâemprisonnement et de 75 000 euros dâamende ».143 Proposition de loi du SĂ©nat du 25 novembre 2009.« Article 1erLe code pĂ©nal est ainsi modifiĂ© :1° AprĂšs lâarticle 222-14-1, il est insĂ©rĂ© un article 222-14-2 ainsi rĂ©-digĂ© :« Art. 222-14-2. â Les violences habituelles, physiques ou psycholo-giques, commises par le conjoint ou le concubin de la victime ou parle partenaire liĂ© Ă celle-ci par un pacte civil de solidaritĂ© sont puniesconformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 222-14. » ;2° Au deuxiĂšme alinĂ©a de lâarticle 222-48-1, la rĂ©fĂ©rence : « et 222-14 » est remplacĂ©e par les rĂ©fĂ©rences : «, 222-14 et 222-14-2 ».144 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Monsieur SergePortelli, audition du 12 mai 2009.145 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Monsieur Jean-Marie Huet, audition du 27 janvier 2009.146 Institut national dâĂ©tudes dĂ©mographiques (INED), Fiche dâactua-litĂ©, DĂ©cembre 2009.Le nombre de femmes concernĂ©es par lâexcision en France a Ă©tĂ© es-timĂ© en 2004 Ă partir de donnĂ©es de lâInsee (recensement et enquĂȘteFamille) et dâenquĂȘtes de prĂ©valence menĂ©es dans les pays africains.En tenant compte des hypothĂšses sur les risques de perpĂ©tuation delâexcision en fonction de lâĂąge Ă lâarrivĂ©e en France et de lâĂąge Ă lâex-cision, le nombre de femmes excisĂ©es en France a Ă©tĂ© Ă©valuĂ© entre42 000 et 61 000 femmes adultes soit une hypothĂšse moyenne de53 000 femmes.147 Rapport de la mission parlementaire dâĂ©valuation de la politiquede prĂ©vention et de lutte contre les violences faites aux femmes, 7juillet 2009, Tome II, Mme Isabelle Gillette-Faye, directrice du Groupepour lâabolition des mutilations sexuelles , audition du 17 mars 2009.148 Ibid.149 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Isabelle Gillette-Faye, directrice du Groupe pour lâabolition des mutilations sexuelles,audition du 17 mars 2009.150 Soit respectivement des violences ayant entraĂźnĂ© la mort, une mu-tilation ou une interruption temporaire de travail supĂ©rieure Ă 8 jours(ce qui correspond aux qualifications pouvant ĂȘtre retenues poursanctionner les cas de mutilations sexuelles).151 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, Tome II, Mme Isabelle Gil-
lette-Faye, directrice du Groupe pour lâabolition des mutilationssexuelles, audition du17 mars 2009152 Ibid.153 Proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novembre 2009.
« Art. 706-63-6. Une ordonnance de protection peut Ă©galement ĂȘtredĂ©livrĂ©e par le juge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes (JUDEVI) aux personnesmenacĂ©es de mariage forcĂ©, au sens de lâarticle 224-5-3 du codepĂ©nal ou de mutilation sexuelle, Ă leur demande ou Ă celle du minis-tĂšre public.« Ă lâissue de la procĂ©dure prĂ©vue aux deux premiers alinĂ©as de lâar-ticle 706-63-3 du prĂ©sent code, sâil apparaĂźt que la personne est ensituation de danger pour les motifs prĂ©vus par lâalinĂ©a prĂ©cĂ©dent, lejuge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes lui dĂ©livre une ordonnance de protection.« Ă cette occasion, le juge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes est compĂ©tent pourprendre les mesures mentionnĂ©es aux 1° Ă 6° de lâarticle 706-63-4. Ilpeut Ă©galement ordonner lâinscription sur le passeport de la personnemenacĂ©e de lâinterdiction de sortie du territoire français et la faire ins-crire sans dĂ©lai au fichier des personnes recherchĂ©es. Lâarticle 706-63-5 est applicable aux mesures prises sur le fondement du prĂ©sentarticle. »154 Article 23, Pacte international relatif aux droits civils et politiques.155 Ibid.156 Convention sur lâĂ©limination de toutes les formes de discriminationĂ lâĂ©gard des femmes, (Convention CEDAW) adoptĂ©e par lâAssem-blĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies le 18 dĂ©cembre 1979, entrĂ©e en vi-gueur le 3 septembre 1981. Article 16.157 Convention internationale relative aux droits de lâenfant, adoptĂ©epar lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies le 20 novembre 1989,entrĂ©e en vigueur le 2 septembre 1990, article 19 et 24.158 Ibid.159 Commission nationale consultative des droits de lâhomme. Avis surles mariages forcĂ©s. 23 juin 2005160 Article 222-24 du Code pĂ©nal.161 Amnesty International, Les violences faites aux femmes en France.Une affaire dâĂtat. Ăditions Autrement, fĂ©vrier 2006, p.52, 53.162 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.78.163 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.190.Audition du 9 juin2009.164 http://www.fco.gov.uk/en/fco-in-action/nationals/forced-marriage-unit/
165 Rapport parlementaire du 7 juillet 2009, p.190.166 Proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novembre 2009.« Art. 706-63-6.Une ordonnance de protection peut Ă©galement ĂȘtre dĂ©livrĂ©e par lejuge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes aux personnes menacĂ©es de mariageforcĂ©, au sens de lâarticle 224-5-3 du code pĂ©nal ou de mutilationsexuelle, Ă leur demande ou Ă celle du ministĂšre public.« Ă lâissue de la procĂ©dure prĂ©vue aux deux premiers alinĂ©as de lâar-ticle 706-63-3 du prĂ©sent code, sâil apparaĂźt que la personne est ensituation de danger pour les motifs prĂ©vus par lâalinĂ©a prĂ©cĂ©dent, lejuge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes lui dĂ©livre une ordonnance de protection.« Ă cette occasion, le juge dĂ©lĂ©guĂ© aux victimes est compĂ©tent pourprendre les mesures mentionnĂ©es aux 1° Ă 6° de lâarticle 706-63-4. Ilpeut Ă©galement ordonner lâinscription sur le passeport de la personnemenacĂ©e de lâinterdiction de sortie du territoire français et la faire ins-
Lutte contre les violences faites aux femmes : la France doit mieux faire 51
crire sans dĂ©lai au fichier des personnes recherchĂ©es. Lâarticle 706-63-5 est applicable aux mesures prises sur le fondement du prĂ©sentarticle. »167 Proposition de loi de lâAssemblĂ©e nationale du 27 novembre 2009.Article 18AprĂšs la section I du chapitre IV du titre II du livre II du code pĂ©nal, ilest insĂ©rĂ© une section I bis ainsi rĂ©digĂ©e :« Section I bis« De la contrainte au mariage« Art. 224-5-3. â Le fait dâexercer sur autrui toute forme de contrainteayant pour but de lui faire contracter un mariage ou conclure uneunion sans son consentement libre est puni de trois ans dâemprison-nement et de 45 000 euros dâamende.« Les peines sont portĂ©es Ă cinq ans dâemprisonnement et Ă 75 000 âŹdâamende lorsque la victime de lâinfraction dĂ©finie Ă lâalinĂ©a prĂ©cĂ©-dent est un mineur de quinze ans.« Art. 224-5-4. â Dans le cas oĂč le dĂ©lit prĂ©vu par lâarticle prĂ©cĂ©dentest commis Ă lâĂ©tranger sur une victime rĂ©sidant habituellement sur leterritoire français, la loi française est applicable par dĂ©rogation auxdispositions de lâarticle 113-7. Les dispositions de la derniĂšre phrasede lâarticle 113-8 ne sont pas applicables. »168 DĂ©lĂ©gation aux droits des femmes, Rapport n° 2714, 30 novembre2005, p. 40169 Conseil de lâEurope, Les mariages forcĂ©s dans les Ătats membresdu Conseil de lâEurope. LĂ©gislation comparĂ©e et actions politiques,2005, p. 44.170 Commission spĂ©ciale chargĂ©e dâexaminer la proposition de loi ren-forçant la protection des victimes et la prĂ©vention et rĂ©pression desviolences faites aux femmes, Madame MichĂšle Alliot-Marie, Gardedes sceaux, ministre de la justice et des libertĂ©s, audition du 27 jan-vier 2010, p.7.171 Commission spĂ©ciale chargĂ©e dâexaminer la proposition de loi ren-forçant la protection des victimes et la prĂ©vention et rĂ©pression desviolences faites aux femmes, Madame Nadine Morano, secrĂ©taired'Ătat auprĂšs du ministre du travail, des relations sociales, de la fa-mille, de la solidaritĂ© et de la ville, chargĂ©e de la famille et de la soli-daritĂ©, audition du 2 fĂ©vrier 2010, p.4.172 Article 113-7 du code pĂ©nal : « La loi pĂ©nale française est applica-ble Ă tout crime, ainsi qu'Ă tout dĂ©lit puni d'emprisonnement, commispar un Français ou par un Ă©tranger hors du territoire de la RĂ©publiquelorsque la victime est de nationalitĂ© française au moment de l'infra-ction. »173 Amnesty International, DĂ©claration publique du 30 janvier 2008,Une avancĂ©e significative pour la protection des droits des victimesde la traite, AI : IOR 61/003/2008.174 La Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traitedes ĂȘtres humains dĂ©finit la traite des ĂȘtres humains comme Ă©tant« le recrutement, le transport, le transfert, l'hĂ©bergement ou l'accueilde personnes, par la menace de recours ou le recours Ă la force oud'autres formes de contrainte, par enlĂšvement, fraude, tromperie,abus d'autoritĂ© ou d'une situation de vulnĂ©rabilitĂ©, ou par l'offre oul'acceptation de paiements ou d'avantages pour obtenir le consen-tement d'une personne ayant autoritĂ© sur une autre aux fins d'ex-ploitation, notamment par le travail forcĂ© ou la prostitution forcĂ©e »(article 4a).175 Les violences faites aux femmes en France. Une affaire dâEtat, Ed.Autrement. FĂ©vrier 2006.176 Lâarticle 225-4-1 du Code pĂ©nal dispose : « La traite des ĂȘtres hu-
mains est le fait, en Ă©change d'une rĂ©munĂ©ration ou de tout autreavantage ou d'une promesse de rĂ©munĂ©ration ou d'avantage, de re-cruter une personne, de la transporter, de la transfĂ©rer, de l'hĂ©bergerou de l'accueillir, pour la mettre Ă sa disposition ou Ă la dispositiond'un tiers, mĂȘme non identifiĂ©, afin soit de permettre la commissioncontre cette personne des infractions de proxĂ©nĂ©tisme, d'agressionou d'atteintes sexuelles, d'exploitation de la mendicitĂ©, de conditionsde travail ou d'hĂ©bergement contraires Ă sa dignitĂ©, soit de contrain-dre cette personne Ă commettre tout crime ou dĂ©lit. La traite desĂȘtres humains est punie de sept ans d'emprisonnement et de150 000 euros d'amende ».
177 Instructions gĂ©nĂ©rales de politique pĂ©nale, CRIM â n° 9-12/cab -01.11.09, 1er novembre 2009.
178 DĂ©cret n° 2007-1352 du 13 septembre 2007 relatif Ă l'admission ausĂ©jour, Ă la protection, Ă l'accueil et Ă l'hĂ©bergement des Ă©trangersvictimes de la traite des ĂȘtres humains et du proxĂ©nĂ©tisme et modi-fiant le code de l'entrĂ©e et du sĂ©jour des Ă©trangers et du droit d'asile(dispositions rĂ©glementaires). Circulaire N°IMIM0900054C du 5 fĂ©-vrier 2009 sur les conditions dâadmission au sĂ©jour des Ă©trangers vic-times de la traite des ĂȘtres humains ou du proxĂ©nĂ©tisme coopĂ©rantavec les autoritĂ©s administratives et judiciaires.
179 Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite desĂȘtres humains du 16 mai 2005, Article 5.1.
180 Ibid. article 29.2
181 Commission nationale consultative des droits de lâhomme, Avis surla traite et lâexploitation des ĂȘtres humains en France (AdoptĂ© parlâAssemblĂ©e plĂ©niĂšre du 18 dĂ©cembre 2009).
182 Observations finales du ComitĂ© pour lâĂ©limination de la discrimi-nation Ă lâĂ©gard des femmes, paragraphe 30, 8 avril 2008,CEDAW/C/FRA/CO/6.
183 Les violences faites aux femmes en France. Une affaire dâĂtat,p.100, 2006, Ăditions Autrement.
184 DĂ©cret n° 2007-1352 du 13 septembre 2007 relatif Ă l'admission ausĂ©jour, Ă la protection, Ă l'accueil et Ă l'hĂ©bergement des Ă©trangersvictimes de la traite des ĂȘtres humains et du proxĂ©nĂ©tisme et modi-fiant le code de l'entrĂ©e et du sĂ©jour des Ă©trangers et du droit d'asile(dispositions rĂ©glementaires).
185 Une premiĂšre demande de protection est dĂ©posĂ©e auprĂšs de lâOF-PRA. En cas de refus, le demandeur peut faire appel de cette dĂ©ci-sion et prĂ©senter un recours auprĂšs de la Cour nationale du droitdâasile (CNDA). Suite Ă un nouveau rejet, la personne peut demanderle rĂ©examen de sa demande sous rĂ©serve de prĂ©sentation dâĂ©lĂ©mentsnouveaux dans son dossier.
186 Les pays concernĂ©s ont Ă©tĂ©: lâAlbanie, la Bulgarie, la Chine, le Ko-sovo, la Moldavie, le Nigeria et la RĂ©publique dĂ©mocratique duCongo.
187 Principes directeurs sur la protection internationale : Persécutionfondée sur l'appartenance sexuelle dans le cadre de l'article 1A (2) dela Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967 relatifs au statutdes réfugiés (7 avril 2006).
188 Décision du 13 juin 2006, Melle. F, N°560518.