L’Etat antérieur en psychiatrie
Etat antérieur : définition
Ensemble des anomalies (séquelles ou maladies évolutives), préalable à l’évènement, dommageable à l’état fonctionnel du patient, susceptible d’intervenir dans l’évaluation médico-
légale du dommage
Imputabilité et Etat antérieur
Imputabilité : Lien établi de façon formelle entre l’évènement et le
dommage (DIRECT ET CERTAIN) Triade FAUTE – IMPUTABILITE – DOMMAGE
L’éventualité d’un état antérieur : ne modifie pas la certitude du lien d’imputabilité mais l’ampleur des conséquences dommageables
DIRECTEMENT imputables
Une démarche méthodique
1) Connaissance précise du fait initiateur 2) Etat ou prédisposition antérieure ?
L’authenticité de la déclaration de l’état antérieur Elément de preuves de l’état antérieur
3) Détermination de l’état clinique 4) Lien entre l’évènement et l’état clinique ? 5) Lien entre l’évènement et l’EA ?
EA est-il aggravé par l’évènement ? Les séquelles sont-elles aggravées par l’EA ?
Devant le dommage allégué :
Imputabilité et Etat antérieurLien entre évènement et état clinique
Oui Non
Lien entre évènement et Etat Ant
Etat Ant ?
Oui Non
NonOui
Non Imputable
Imputable
(Dommage)
Imputabilité ?
Etat antérieur # Prédisposition
Etat antérieur proprement dit : Expression d’une pathologie reconnue médicalement
Prédisposition : pathologie masquée, non décompensée, non encore
exprimée médicalement. Voire même inconnue ou connue mais compensée,
Vulnérabilité et prédisposition
Renforcement, réactualisation ou extériorisation de conflits névrotiques anciens
Spécificité émotionnelle de la frayeur ? Charcot : incluse dans l’étiologie Hystérique Naissance du concept de S. Psycho-traumatique
Trauma psy minime ou nul Importance du trauma Vécu subjectif
Mission droit commun
« Dans le respect du code de déontologie médicale interroger la victime sur ses antécédents médicaux,
Ne le rapporter et ne les discuter que s'ils constituent un état antérieur susceptible d'avoir une incidence sur les lésions leur évolution et les séquelles présentées. »
« préciser si et dans quelle mesure elles se rattachent à un état antérieur et dans ce cas préciser qu'elle a été l'influence de l'accident »
« préciser si ces lésions sont bien en relation directe et certaine avec l’événement traumatique ; »
Causalité et imputabilité
Causalité (juridique) : « rapport qui unit la cause à son effet » (Dict.
Larousse) Imputabilité (médicale) :
caractère de ce qui est imputable, rattachement d’une situation à un événement.
La causalité juridique est déterminée par l’imputabilité médicale du dommage à «l’accident».
Causalité juridique : 2 théories opposées
Restrictive : « Causalité adéquate » : Seulement la cause qui a joué un rôle déterminant Dissocier l’Etat Ant
Extensive : « Equivalence des conditions » : Cause « sans lequel le dommage ne se serait pas produit. »
TT les causes en jeux Indistinction de l’Etat antérieur
Causalité en cascade : « toutes les causes sont en cause » Accident -- Splénectomie --Transfusion – VIH
Concept très protecteur pour la victime en cas de révélation ou d’aggravation d’un état antérieur par un événement accidentel
Etat Ant et autonomie antérieure Autonomie affectée avant l’accident = « Causalité
adéquate » (Séparation des causes) on distinguera ce qui est imputable à l'état antérieur et ce qui
est imputable à l'accident Invalide avant l’accident (Parkinson, lombalgies) Dépression chronique traitée
Autonomie conservée (sans gêne vie sociale et prof) = « Equivalence des conditions » Tout est imputable : aggravation des séquelles ou aggravation
de l’Etat ant sont pris en charge Déclenchement post traumatique d’une poussée de SEP Borgne devenu aveugle Etat névrotique latent décomposé en dépression chronique
Evaluer le degré de gravité de l’EA
Caractéristiques personnelles et situationnelles, facteurs de risque
Trouble de la personnalité mal définis Troubles de la personnalité avéré Etat antérieur symptomatique non pris en charge Etat antérieur caractérisé en traitement spécialisé
Evaluer l’Impact de l’EA sur l’autonomie
Vie quotidienne, affective professionnelle Impact ++
Arrêt maladie, invalidité, troubles comportementaux Peu d’impact
Psychothérapie, traitement ambulatoire, arrêt maladie bref ou ancien
Pas d’impact Troubles de la personnalité « compensés »
Critères d’imputabilité
Espace : distance « géographique », anatomique, entre le
traumatisme et la lésion Temps :
« temps voisin » Mécanisme :
logique et cohérence physiopathologique
Démarche en somatique : élimination des alternatives causales :
Critères d’imputabilité en psy
Espace : Aucune traduction … sinon symbolique
Temps : « temps voisin » : peut être long Sivadon et Markich estiment que l’apparition tardive
entre deux et 4 ans est un argument médico-légal en faveur de la causalité.
Mécanisme : logique et cohérence physiopathologique
Eliminer les alternatives causales :
Réponse au caractère direct et certain :
Simple : « oui » ou « non » , Douteuse : lien possible, éléments en faveur et
éléments en défaveur, et trancher n’est pas aisé … Présomption d’imputabilité « de fait » lorsque
l’accident est avéré et les lésions corrélatives constatées
Eclairer l’appréciation souveraine que le juge tirera de son intime conviction …
Incomplète : Le lien n’est pas exclusif
notion de cumul causal (trauma réitérés)
Différents impacts
1- Le traumatisme aggrave l’état antérieur Viol sur une personne atteinte de psychose
2- Le traumatisme décompense une prédisposition antérieure Accident de la route chez une personnalité phobique
3- Les prédispositions aggravent les séquelles de l’accident Evolution des blessures chez une personnalité hystérique
4- Les séquelles aggravent l’état antérieur Décompensation d’une personnalité narcissique lié à un
dommage esthétique mineur
Spécificités en psy
Il faut qualifier et quantifier L’état clinique L’état antérieur
Or : Peu ou pas d’élément objectif de discussion
Symptomatologie subjective
Preuves indirectes : Traitements, arrêt maladie, invalidité, Certification des médecins
Confusion entre doléance et état clinique Majoration du symptôme Expression de la revendication Conditions d’examen
Psy : Etat antérieur # Prédisposition
Etat antérieur : toute la pathologie psychiatrique Prise d’un traitement psychotrope Consultations d’un spécialiste Séquences d’hospitalisation ATCD TS
Prédisposition : Troubles de la personnalité : constants
Personnalité hystérique, paranoïaque, phobique, obsessionnelle
Etat limite, déséquilibre psychique léger Personnalité immature et dépressive, dépendante
Evaluer l’impact de l’état antérieur
Sur les Souffrance endurées +++ Conséquences somatiques :
Evènement > lésions > Souffrances endurées Conséquences psychiatriques :
Evènement > lésions = Souffrance psy > Souffrances endurées
Tableaux séquellaires
I - Syndromes psycho-traumatiques
II - Syndromes non spécifiques
Tableaux séquellaires
I - Syndromes psycho-traumatiques
II – Syndromes « intermédiaire »
III- Syndromes non spécifiques
I – « Syndromes psycho-traumatiques »
Un peu de rigueur
Distinction Stress et Trauma
Purement psychiques : Simple réaction émotionnelle Réaction aiguë à un facteur de stress Trouble de l’adaptation Névrose traumatique (1888) Modification durable de la personnalité après une expérience de
catastrophe État de Stress post-traumatique (1980 : PTSD)
Accompagnant un trauma physique: Syndrome subjectif (post commotionnel) Névrose post-traumatique
Sinistrose
PTSD et Trouble de l’adaptation
Intensité du traumatisme PTSD : Evènement hors du commun
Mais toutes les victimes ne développent pas un PTSD à la suite d’une exposition traumatique, quelle qu’elle soit
vitesse différenciée de récupération entre les sujets TA : Facteurs de stress
Prédisposition : TA : vulnérabilité PTSD : non retenue
Des disparités surprenantes
Etudes épidémiologiques sur la population générale :
Les taux d’exposition aux évènements traumatiques surprennent par l’ampleur de leur disparité : De 16,3 % et 90 % des sujets reconnaissent avoir fait
l’expérience d’au moins un événement traumatique au cours de leur vie
Les taux de prévalence du Post-traumatic Stress Disorder au cours de la vie varient de 1 à 9,2 %.
PTSD et actions terroristes
254 victimes d’attentats perpétrés entre 1982 et 1987 en France : PTSD = 18,1 % PTSD partiel = 61,8 %
544 blessés lors des attentats de 1995 et 1996 PTSD = 31 % Symptômes dépressifs = 49 % Forte corrélation avec l’importance des blessures
PTSD et agressions sexuelles
Etude sur 92 victimes de viol (dont 10 % d’hommes) en France (1999) Prévalence du PTSD :
85 % à un mois, 74 % à trois mois 71 % à six mois
Etude sur 51 victimes de viol en Irlande du Nord Prévalence du PTSD :
70,6 % à 9 mois
PTSD et accidents
Survivants d’un accident de car et carambolage (17 morts) PTSD = 16-18 % à 9 mois.
Accidentés de la route PTSD = 36,4 % à 4 mois. Dont rémissions partielles ou totales :
16,7 % à 3 mois, 50 % à 7 mois et 66,7 % à 1 an
PTSD et accidents : personnalité ?
Intensité phase immédiate (1ère semaine) meilleur indice de prédiction du PTSD que ne le sont
les modalités liées à l’accident Le PTSD chronique
est associé à des problèmes médicaux persistants ou un litige juridique
Un trouble additionnel d’ordre affectif ou anxieux est observé chez 67 % des sujets présentant un
PTSD, contre seulement 18 % des sujets qui en sont
exempts
Les raisons des disparités
Méthodologie des études Existence de facteurs de risque et de protection,
liés aux caractéristiques personnelles et situationnelles +++
Exemple : survenu des PTSD lors d’un séisme : Village proche de l’épicentre et sévèrement détruit : 8,5 % Village plus éloigné et faiblement endommagé : 22,7 % à trois
mois et 14,3 % vs 22,7 % à neuf mois. Soutien +++ des autorités au village détruit # peu de sollicitude
au village peu endommagé (Wang & al., 2000).
Phobie post trauma
Phobie de situation Agoraphobie, des transports, travail en hauteur Indication TCC : tt avant consolidation Théorisation sur la névrose trauma s’applique Reviviscence, Crise angoisse panique en situation du choc initial
II – »Syndromes intermédiaires
Réactions anxieuses et dépressives
Anxiété flottante diffuse Pas d’attaque de panique Inhibition morosité repli Indignité, culpabilité : rares
Remplacé par des éléments projectifs Totalité du tableau mise au compte de l’accident
Dépression névrotico réactionnelle Les personnalités hystériques souvent concernées.
Humeur plaintive avec sentiment d’abandon, d’inutilité, de découragement.
quête d’affection et de réassurance L’anxiété est souvent intense. entourage et les bénéfices secondaires sont souvent source de
chronicisation.
Les personnalités obsessionnelles plus souvent de type psychasthénique, Dépression intense avec caractéristiques proches de la mélancolie.
Les personnalités limites et " abandonniques " Importance du lien affectif défaillant situation de rupture sentimentale, d’abandon TS +++
III - Syndromes non spécifiques
Réaction et Névrose hystérique Hystérie masculine traumatique (charcot) dégénérescence Place du terrain ++ Mobilisation théatralisée de l’entourage Plaints itératives spectaculaires Dramatisation des situations courantes Réactions conversionnels au moment de l’examen Perennisation d’un accident conversionnel initial : mutisme cécité,
diplopie … Etat complexe pseudo confusionnel DTS Tr de la mémoire (« voyageur sans bagage ») Grande Dépendance passive – pseudo démence régressif tr du
cractère colère puérile intol frustration régression orale Simulation tant les troubles sont massifs
Névrose obsessionnelle
Jamais un trauma ne créera ex nihilo une NO Aggravation ou décompensation franche
Psychasthénie, doute vérifications procrastination Rumination examen infini du trauma Epuisement avec composante dépressive
Tableaux psychotiques
Exceptionnellement au civil Militaires : épisodes aigues précoces discutables
Délire en secteur de revendication de Brissaud Confusion postraumatique (guerre)
Déstructuration. Remémoration oniriques # Etat crépusculaire quand trauma minime Pseudo démentiel
Délires post traumatique
Ne peut être mis au compte du trauma Trauma = moment révélateur, facteur
déclenchant Registre paranoïaque, sensitifs Psychoses passionnelles – revendication -
procédurier Sthénicité, délire à deux
Grands tableaux Hypocondriaque à la pathogénie fantaisiste, plaintes aberrantes, inaccessibilité à un TT cohérant
PMD post traumatique ?
Révélation par le trauma d’un désordre affectif majeur Seulement au titre d’une rechute… et encore !
A différencier : Dysthymies : Oscillations dépression euphorie Réactions immédiate du deuil
Confirmer la nature endogène ANTCD personnels : crises maniaques ou
mélancoliques et familiaux
Schizo post traumatique
Jamais au compte du trauma Terrain prépsychotique ; ¼ à 1/3 attribuable # : Trauma crânien sévère réorganisation sur
fond de détérioration schizophréniforme
Déséquilibre psychopathique
Un trauma ne fait pas un déséquilibré Importance de la biographie Dimension transgressiveet d’inadaptation
Mais syndrome comportementaux post lésionnels Exploration des fonctions cogitives
Toute la difficulté de l’expertise !
Imputabilité = Pierre angulaire de l’expertise Qualifier et quantifier précisément l’état antérieur
permettra de dégager l’imputabilité De nombreux cas particuliers : tout l’intérêt de cette
démarche – Appréciation de l’« expert » Des situations indéterminées :
Indécision encore plus grande en psy Savoir dire « je ne sais pas » Réduction de la zone d’indécision
Conclusion
Relativité de toute chose …
L’expert donne un avis de technique médicale et ne dit pas le droit
Donner les éléments d’appréciation au juge