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Les 20 ans de Psyclihos
Psychologue agrave lhocircpital
une espegravece agrave proteacuteger
Jeudi 24 novembre 2011
Auditorium de lHEGP
Bulletin de
lAssociation des psychologues cliniciens hospitaliers
de lAssistance Publique - Hocircpitaux de Paris
Bureau
Eacutelodie Sacircles Preacutesidente
Martine Shindo Vice preacutesidente
Eacutelodie Meacutetivet Secreacutetaire geacuteneacuterale
Nicole Sense Secreacutetaire adjointe
Christine Schwanse Treacutesoriegravere
Catherine Holzman Treacutesoriegravere adjointe
Membres du Conseil dAdministration
Franccediloise Adriansen Marie-Victoire Chopin
Ceacuteline Le Bivic Patrice Nomineacute
Ambre Piquard
Preacutesidente drsquohonneur
Martine Bonnet Lecuir
Pour nous joindre PSYCLIHOS
Uniteacute Gatineau - Lebard Hocircpital Sainte Peacuterine - AP-HP 11 rue Chardon Lagache 75 781 Paris cedex 16
contactpsyclihosorg
Ce journal est aussi le
vocirctre Nos pages vous sont ouvertes
Nheacutesitez pas agrave nous faire parve-
nir vos articles originaux ou non
quelques lignes ou plusieurs
pages sur votre pratique clinique
hospitaliegravere des reacuteflexions autour
dun cas ou dune theacutematique ou
la preacutesentation dun travail de re-
cherchehellip
Au plaisir de vous lire
Le contenu des articles qui paraissent dans le bulle-tin de lrsquoassociation (Le Journal) nrsquoengage que la seule responsabiliteacute de leurs auteurs Les membres du Bureau deacutecident de la publication de tout article qui leur est proposeacute et se reacuteservent le droit de sollici-ter les modifications de forme qursquoils jugent neacuteces-saires
Retrouvez nos actualiteacutes mais aussi de nombreux textes reacuteglementaires sur
notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 2
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 3
Le journal Ndeg18 - Janvier 2012
Dans ce numeacutero
Eacuteditorial
Ont participeacute agrave ce numeacutero
Franccediloise ADRIANSEN Marie-Lise BABONNEAU Martine BONNET-LECUIR Marie-Victoire CHOPIN Muriel DEROME Clara DUCHET Anna ELLI-PARDO
Jacqueline FAURE Isabelle FRETIGNY Catherine HOLZMAN Annie KURTZ Nadine LABBE Ceacuteline LE BIVIC Eacutelodie METIVET Patrice NOMINE
Ambre PIQUARD Virginie ROCARD Eacutelodie SALES Christine SCHWANSE Nicole SENSE Natascia SERBANDINI Martine SHINDO Elodie TRAVERS Benoicirct VERDON
Page
Eacuteditorial 3
Ouverture de la journeacutee 7
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles com-
peacutetences
10
Loi HPST titre de psychotheacutera-
peutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
23
Uniteacute dans la diversiteacute des pra-
tiques transversaliteacute de nos
cliniques
49
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
68
Clocircture de la journeacutee 86
Adheacutesion 88
N umeacutero exceptionnel pour commencer
cette nouvelle anneacutee 2012 Nous en pro-
fitons pour vous preacutesenter tous nos
vœux pour cette anneacutee qui commence quelle per-
mette leacutepanouissement de vos projets tant profes-
sionnels que personnels
Voici les actes de notre journeacutee du 24 novembre
2011 organiseacutee agrave loccasion des 20 ans de Psyclihos
Cette journeacutee a eacuteteacute un succegraves comme en teacutemoi-
gnent les nombreux remerciements et encourage-
ments reccedilus ainsi que les eacutevaluations des partici-
pants Cela nous donnera peut-ecirctre leacutenergie de re-
commencer avant notre quart de siegravecle
Vous retrouverez dans ces pages la richesse des
interventions proposeacutees afin de pouvoir prolonger
les reacuteflexions qui se sont engageacutees Les interven-
tions seront prochainement disponibles agrave leacutecoute
sur notre site internet Tregraves bonne lecture agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 4
Le journal Ndeg18 - Janvier 2012
Sommaire deacutetailleacute
Page
Eacuteditorial 3
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles
8
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz
11
Psychologue clinicien en psychotraumatologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet
15
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo
19
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute
24
Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard
32
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute
43
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants africains
Jacqueline Faure
50
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique en
eacutevolution
Muriel Derome
60
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic
63
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau
69
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini
78
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny
Elodie Travers
82
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 5
20 ans de Psyclihos
Psychologue agrave lHocircpital
une espegravece agrave proteacuteger
Eacutedito
Psyclihos est une association loi 1901 creacuteeacutee en 1991 pour promouvoir la
psychologie clinique et le rocircle des psychologues agrave lhocircpital
Par ses nombreuses actions agrave lintention de ses adheacuterents et des
psychologues hospitaliers Psyclihos est reconnue comme un relais et un
interlocuteur aupregraves des diffeacuterentes instances
Pour fecircter ses 20 ans Psyclihos organise cette journeacutee ouverte agrave ses
adheacuterents et agrave lrsquoensemble des psychologues de lrsquoAP-HP Elle offrira
loccasion de renforcer les liens professionnels entre collegravegues et de
partager la richesse des approches cliniques
Nous vous proposons de nous rencontrer autour des
theacutematiques suivantes
gt Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
gt Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip Quels
changements pour le meacutetier de psychologue
gt Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de
nos cliniques
gt Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
DRH AP-HP Centre de la Formation et du
Deacuteveloppement des Compeacutetences - Institut de
Formation des Cadres de Santeacute
En partenariat avec
Comiteacute dorganisation
Catherine Holzmann
Ceacuteline Le Bivic
Ambre Piquard
Elodie Sacircles
Nicole Sense
Comiteacute scientifique
Franccediloise Adriansen
Nadine Labbeacute
Patrice Nomineacute
Elodie Sacircles
Christine Schwanse
Martine Shindo
Benoicirct Verdon
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 6
8h30 Accueil des participants
9h-9h30 Ouverture
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
9h30 - 11h Ecirctre psychologue ou
faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute
Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Lariboisiegravere
gt P s y c h o l o g u e c l i n i c i e n e n
psychotraumatologie du savoir-faire
au savoir-ecirctre
Clara Duchet Tenon
gt Aider agrave penser limpensable en
oncologie
Anna Elli Pardo Saint-Louis
11h - 11h30 Pause
11h30 - 13h Loi HPST titre de
psychotheacuterapeutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen
membre du CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des
textes officiels
Nadine Labbeacute Cochin
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous
avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Sainte Peacuterine
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Fernand Widal
13h -14h30 Repas libre
14h30 - 16h Uniteacute dans la diversiteacute
des pratiques transversaliteacute de nos
cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Fernand
Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute
des patients migrants
Jacqueline Faure Tenon
gt P sycho logue en r eacutean imat i on
peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique
en eacutevolution
Muriel Derome Raymond Poincareacute
gt Seacutejour de vacances quelle place pour
le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Eacutemile Roux
16h - 17h30 Cliniques particuliegraveres
pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Saint
Louis
gt Laccompagnement psychologique par
teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Pitieacute Salpecirctriegravere
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale
de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Jean Verdier
gt Psychologue clinicien aupregraves du
personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Saint Louis
Le programme de la journeacutee
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 7
Ouverture de la journeacutee
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 7
Ouverture
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 8
Ouverture de la journeacutee
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
J e vais commencer par quelques remer-
ciements rapides
En premier lieu vous Monsieur Burdet
vous nous avez fait lhonneur douvrir cette
journeacutee Plus quun honneur votre soutien
nous a eacuteteacute si preacutecieux
Quand nous avions eacutevoqueacute avec vous lideacutee
dune journeacutee anniversaire mais alors de faccedilon
encore lointaine dans nos esprits votre encou-
ragement sans faille degraves lannonce de cette
eacuteventualiteacute nous a donneacute leacutenergie daffronter
lorganisation de cet eacuteveacutenement
Cest pourquoi au nom des membres du con-
seil dadministration des comiteacutes scientifiques
et dorganisation je tiens agrave vous remercier cha-
leureusement de votre soutien et du solide inteacute-
recirct que vous teacutemoignez agrave notre profession
Cet engagement de la Direction des res-
sources Humaines de lAPHP agrave nos cocircteacutes
comme il y a 20 ans nous permet de nous re-
trouver dans ce bel amphi pour partager cette
journeacutee Et nous remercions aussi lInstitut de
Formation des Cadres de Santeacute APHP pour
lefficaciteacute de son aide logistique et de la ges-
tion des inscriptions jusqursquoagrave ce jour et mecircme au
-delagrave
Mes remerciements vont aussi agrave vous tous qui
ecirctes ici aujourdrsquohui Nombre dentre vous nous
connaissent deacutejagrave en tant qursquoadheacuterents actuels
ou passeacutes souvent dune grande fideacuteliteacute au
cours des anneacutees Dautres nous suivent avec
inteacuterecirct sans nous avoir (encore ) rejoints et de
nombreux jeunes collegravegues nous deacutecouvrent
ou ont deacutejagrave deacutecouvert notre site internet
Notre site internet sur lequel vous pouvez
suivre lactualiteacute de notre association nous re-
joindre ou vous inscrire agrave notre infolettre Les-
pace adheacuterent propose de nombreux services
comme les postes agrave pourvoir agrave lAP-HP ou agrave la
FPH qui inteacuteressent tous collegravegues quils soient
titulaires contractuels ou en recherche dem-
ploi Bien eacutevidemment ces services sont reacuteser-
veacutes agrave nos adheacuterents tout comme nos bregraveves
par mail qui vous informent de lactualiteacute et nos
journaux
Degraves sa creacuteation Psyclihos sest donneacute pour
rocircle de teacutemoigner de lrsquoapport de la Psychologie
Clinique agrave lrsquohocircpital et den rsquoaffirmer la preacutesence
Informer communiquer et ecirctre un relais entre
les psychologues eacutechanger non seulement
entre pairs mais ecirctre aussi un interlocuteur
pour linstitution quant agrave notre profession
Lrsquohistoire de lrsquoassociation est intimement lieacutee agrave
celle de notre profession puisque Psyclihos voit
sa naissance en janvier 1991 quelques jours
avant cla parution du deacutecret qui fonde le statut
de psychologue hospitalier
1991 -2011 vingt ans de psychologie agrave lhocircpi-
tal nous y voilagrave
Les 20 ans de Psyclihos ont eacuteteacute loccasion
unique de nous replonger dans les archives de
notre association Nous partageons la richesse
de ce singulier voyage dans le temps dans le
Numeacutero speacutecial 20 ans du journal de Psyclihos
que vous trouverez dans vos pochettes
Il retrace lhistoire de Psyclihos agrave travers celle
de la psychologie agrave lhocircpital en sarrecirctant sur
les grandes dates qui ont jalonneacute le meacutetier de
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 9
Ouverture de la journeacutee
psychologue
1991 le deacutecret portant statut particulier de psy-
chologue hospitalier 1996 le code de deacuteonto-
logie 2003 la deacutecentralisation de gestion au
sein de lAP-HP et les conseacutequences que nous
vivons depuis pour nen citer que quelques
uneshellip
Cette plongeacutee historique loin decirctre nostal-
gique nous permet de rappeler au fil des ar-
ticles parus durant ces deux deacutecennies dans
nos journaux combien lactualiteacute de notre pro-
fession sappuie sur son passeacute Connaicirctre cette
histoire notamment pour nos plus jeunes col-
legravegues nous semble neacutecessaire pour com-
prendre les enjeux qui traversent actuellement
notre profession Il est dailleurs eacutetonnant de
lire combien des articles pourtant anciens gar-
dent toute leur fraicirccheur traitant deacutejagrave de pro-
bleacutematiques qui apparaissent reacutecurrentes ou
abordant des questionnements qui aujourdhui
pourraient sembler novateurshellip
Cest donc autour de quelques grands thegravemes
toujours actuels comme la deacuteontologie des
psychologues la saga des concours sur titres
la Fiche meacutetier la fonction FIR la Psychiatrie
de liaison ou les psychotheacuterapies et la loi que
nous vous invitons agrave plonger dans notre journal
speacutecial
Nous retrouvons aujourdrsquohui certains de ces
sujets dans le programme de cette journeacutee
Il illustre les champs drsquointerventions qui ani-
ment lrsquoassociation depuis sa creacuteation la fonc-
tion de psychologue les changements induits
par la leacutegislation la diversiteacute des pratiques et
les cliniques particuliegravereshellip
Nous souhaitons pouvoir teacutemoigner de la ri-
chesse et de la diversiteacute des pratiques des psy-
chologues cliniciens agrave lhocircpital Bien sucircr en 20
ans la place des psychologues hospitaliers a
eacutevolueacute leur nombre aussi La varieacuteteacute des inter-
ventions teacutemoigne de la richesse des champs
dexercice possibles parfois insoupccedilonneacutes au
sein de notre institution quest lAP-HP
Derriegravere un titre un peu provocateur nous sou-
haitons vous mobiliser dans lancrage toujours
neacutecessaire de notre profession au sein de
lAPHP Le cadre de notre exercice est toujours
fragile voire mis agrave mal En ces temps heurteacutes
et parfois incertains nous espeacuterons pouvoir
partager notre eacutenergie pour proteacuteger notre
exercice si particulier Ecirctre psychologue agrave lhocirc-
pital cest bien sucircr ecirctre agrave la rencontre des pa-
tients et de leurs proches dans leurs singulari-
teacutes mais aussi des eacutequipes soignantes sans
oublier la participation agrave la vie institutionnelle
comme ce sera abordeacute dans les diffeacuterentes in-
terventions que vous allez entendre aujour-
dhui
Sans plus attendre nous ceacutedons la place agrave la
premiegravere session de la matineacutee dans le vif du
sujet ecirctre psychologue ou faire de la psycho-
logie statut fonctions quelles compeacute-
tences modeacutereacutee par Benoicirct Verdon long-
temps psychologue hospitalier maintenant au
sein de lUniversiteacute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 10
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Hocircpital Lariboisiegravere Page 11
gt Psychologue clinicien en psychotrauma-
tologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Page 15
gt Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Hocircpital Saint-Louis Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles compeacutetences
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 11
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Neuropsychologue une espegravece nouvelle Plus reacutesistante
Mieux adapteacutee agrave la vie hospitaliegravere ou aux institutions
Plus respecteacutee des meacutedecins prescripteurs
Annie Kurtz
Service de Neurologie Hocircpital Lariboisiegravere
La reacutealiteacute objective drsquoune atteinte ceacutereacutebrale agrave
lrsquoorigine des troubles preacutesenteacutes par le patient
ne doit jamais occulter le fait drsquoune histoire
drsquoun eacutequilibre psychique et drsquoune individualiteacute
malmeneacutee
Charte des CPCN - Collegraveges des Psycho-
logues Cliniciens speacutecialiseacutes en Neuropsycho-
logie
J rsquoai bien imprudemment accepteacute il y a
quelques mois de prendre la parole pour
ceacuteleacutebrer les 20 ans de lrsquoassociation Psy-
clihos De plus jrsquoai accepteacute de vous faire parta-
ger mes reacuteflexions sur la place du psychologue
dans le champ de la santeacute et cerise sur le gacirc-
teau pour la deacutefense et lrsquoillustration de la neu-
ropsychologie clinique
Mon propos nrsquoest pas de poleacutemiquer mais de
reacutefleacutechir ensemble aux charmes et aux dangers
que repreacutesente le terme de
neuropsychologue si priseacute par certains ac-
tuellement
La preacutesence de psychologues au sein des ser-
vices hospitaliers est ancienne ils ou elles as-
surent agrave la fois le travail de bilan et celui de
soutien aupregraves des patients Mais le genre
neuropsychologue nrsquoexiste que depuis peu
Le terme neuropsychologue seacuteduit beaucoup
les jeunes collegravegues et mecircme certains para-
meacutedicaux comme les orthophonistes les ergo-
theacuterapeutes et mecircme quelques kineacutesitheacutera-
peutes Nombreux sont ceux dans le champ de
la neuropsychologie qui revendique le label
de neuropsychologues Depuis quelques an-
neacutees les lettres de motivation qui accompa-
gnent les demandes de stages srsquoadressent agrave la
neuropsychologue que je suis censeacutee ecirctre et
les candidates et candidats deacuteclarent leur
passion pour le meacutetier de
neuropsychologue Et je mrsquointerroge sur cette
ferveur
Quelle deacutefinition de la neuropsychologie pou-
vons-nous faire nocirctre Il y a 10 ans en mars
2001 le Collegravege des Psychologues Cliniciens
speacutecialiseacutes en Neuropsychologie (CPCN) pour
les Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Psychologie deacutefinis-
sait ainsi la neuropsychologie
La neuropsychologie est la discipline qui traite
des relations entre les processus mentaux
sous-tendant le raisonnement lrsquoattention la
meacutemoire la perception les gnosies les
praxies le langage le comportement eacutemotion-
nel et lrsquoactiviteacute du cerveau Lors des leacutesions ceacute-
reacutebrales les conseacutequences concerneront agrave la
fois lrsquoefficience de la cognition et lrsquoadaptabiliteacute
des conduites de lrsquoindividu Cette neacutecessaire
appreacuteciation analytique et syntheacutetique du psy-
chisme humain caracteacuterise lrsquoapproche neurop-
sychologique
La neuropsychologie est un champ multidisci-
plinaire ougrave se retrouvent diffeacuterents meacutetiers et
les zones de recouvrement peuvent ecirctre larges
pour certains Je milite aujourdrsquohui pour deacute-
fendre le fait qursquoun bilan reacutealiseacute par un psycho-
logue mecircme si les tests utiliseacutes par drsquoautres
intervenants sont identiques reste un bilan dif-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 12
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
feacuterent Ce travail drsquoanalyse et synthegravese rappe-
leacute dans la deacutefinition citeacutee fonde la totaliteacute de
nos pratiques en neuropsychologie
Lrsquoacte le plus freacutequent est le bilan bilan pour
plaintes mneacutesiques diagnostic diffeacuterentiel entre
deacutepression et maladie neurodeacutegeacuteneacuterative seacute-
quelles drsquoaccident vasculaire seacutequelles de
traumatisme cracircnien et nous intervenons eacutega-
lement dans le suivi et la reacutehabilitation dans les
services de soins de suite Mecircme dans le cadre
drsquoune eacutevaluation en vue drsquoune reacuteeacuteducation
nous savons devoir tenir compte des mouve-
ments psychiques agrave lrsquoœuvre dans tout individu
et qui vont peser sur ce travail
Notre code de deacuteontologie speacutecifie que le res-
pect de la vie psychique fonde notre action ce
respect de la vie psychique tout au long de nos
anneacutees drsquoeacutetudes nous avons eacuteteacute formeacutes agrave y
porter une attention toute particuliegravere Nos ac-
quis nos savoirs modifient notre approche
Quel peut ecirctre le sens pour un ou une psycho-
logue agrave vouloir changer de nom
Nrsquoest-ce pas alors en gardant notre position de
psychologue et donc aussi clinicien que nos
actions prennent sens dans la prise en soin
des patients
Ce que je redoute le plus est que cette appella-
tion neuropsychologue ne confine les psycho-
logues dans un exercice limiteacute agrave la passation
des tests et au traitement des chiffres qui en
reacutesultent Comme si le neuropsychologue ne
devait mettre en œuvre aucun savoir clinique Il
est vrai que la formation donneacutee par lrsquouniversiteacute
conditionne en partie nos pratiques et cer-
taines universiteacutes ne semblent plus accorder
de place agrave la structure de la personnaliteacute ni aux
aspects thymiques dans leur master de neu-
ropsychologie Replacer le patient dans son
histoire reste primordial quels que soient les
avatars neurologiques
Qursquoavons-nous agrave gagner en devenant
neuropsychologue
Les offres drsquoemploi sont nombreuses et les
jeunes diplocircmeacutes ne restent pas longtemps
sans emploi Les meacutedecins psychiatres neu-
rologues ou geacuteriatres avec qui nous collabo-
rons veulent travailler avec des
neuropsychologues Le risque me paraicirct
grand qursquoils recherchent essentiellement des
testeurs pour leurs publications ou leurs con-
sultations Dans les recherches il srsquoagit pour
des collegravegues formeacutes agrave la psychologie pendant
au moins 4 ans puis speacutecialiseacutes en deuxiegraveme
anneacutee de Master cest-agrave-dire apregraves 5 anneacutees
drsquoeacutetudes drsquoappliquer des protocoles de test
dont ils nrsquoont mecircme pas eu la possibiliteacute de dis-
cuter le contenu et le choix des outils (Les
textes nous reconnaissent pourtant la liberteacute du
choix de nos outils)
La pratique de la neuropsychologie peut ecirctre
passionnante agrave condition de ne pas ecirctre ins-
trumentaliseacutee par les meacutedecins En preacuteparant
mon intervention il mrsquoest apparu que je pour-
rais citer comme eacutetude de cas nombre de si-
tuations de souffrance de nos collegravegues dans
les institutions Je pourrais vous preacutesenter des
vignettes cliniques ougrave les psychologues se
mettent en danger en srsquoenfermant dans cette
appellation qui convient si bien agrave nos collegravegues
drsquoautres disciplines et agrave nos employeurs Dans
les consultations meacutemoire la place faite aux
neuropsychologues peut ecirctre tregraves diffeacuterente
suivant les attentes et les projets de leurs par-
tenaires meacutedicaux ou institutionnels et parfois
ces exigences entraicircnent une veacuteritable souf-
france pour nos collegravegues Peut-on exercer son
savoir-faire et son savoir ecirctre de psychologue
quand on attend de nous de recevoir 4 ou 6
patients par jour Ces bilans TGV laissent peu
de place agrave lrsquointersubjectiviteacute du psychologue et
du patient alors que dans drsquoautres lieux lrsquoeacuteva-
luation peut respecter la singulariteacute du patient
de sa famille et la deacuteontologie du psychologue
Il y a des temps dans la pratique drsquoun bilan
neuropsychologique qui restent des temps cli-
niques Avant drsquoentreprendre un bilan le psy-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 13
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
chologue speacutecialiseacute en neuropsychologie
comme tous les psychologues doit pouvoir in-
terroger la demande de qui vient cette de-
mande le patient le meacutedecin ou la famille et
qursquoen attendent ces diffeacuterents partenaires
Comment cet examen srsquoinscrit-il dans le projet
theacuterapeutique
Lrsquoentretien preacuteliminaire ne consiste pas agrave re-
prendre lrsquoanamnegravese au sens meacutedical histoire
de la maladie mais au sens psychologique
entendre lrsquohistoire drsquoun sujet Comme lrsquoa eacutecrit
Emmanuelle Truong-Minh actuelle preacutesidente
du CPCN agrave propos de ce temps drsquoun bilan
Inscrite dans la relation porteacutee par le langage
crsquoest cette preacutesence agrave lrsquoautre qui fonde notre
action Dans le temps de la consultation que je
reacutealise un entretien que je propose des tests
que JE parle ou que JE eacutecoute je suis lagrave au
moins lagrave de maniegravere absolue et entiegravere Pour
la personne agrave mon sens il nrsquoest rien de plus
preacutecieux que lrsquoeacutetablissement de cette relation
clinique Car ces instants ougrave lrsquoobjectivation de
difficulteacutes qursquoelles soient psychopathologiques
ou neuropsychologiques risque drsquoadvenir sont
fondamentaux dans le parcours de vie le par-
cours de santeacute et le parcours de la maladie de
la personne Pouvoir prendre appui sur cette
relation permet la mise en perspective des diffi-
culteacutes permet de supporter le traumatisme
psychique eacuteventuel permet de srsquoeacutecrouler peut-
ecirctre sans ecirctre seul
Je me souviens drsquoun patient qui mrsquoa eacuteteacute adres-
seacute pour plaintes mneacutesiques et eacuteventuelles seacute-
quelles drsquoun AIT Ce monsieur de 60 ans eacutetait
marieacute pegravere de 3 enfants cadre dirigeant dans
une entreprise A la suite de son accident
ischeacutemique transitoire il avait le sentiment de
ne plus pouvoir faire face agrave ses obligations pro-
fessionnelles Sa vie professionnelle eacutetait para-
siteacutee par le danger de voir ses difficulteacutes cons-
tateacutees par les autres surtout par son respon-
sable hieacuterarchique Degraves le deacutebut de lrsquoentretien
il semblait eacuteprouver une certaine inhibition an-
xieuse son expression spontaneacutee restait fac-
tuelle et retenue Apregraves quelques eacutepreuves
drsquoattention et de meacutemoire sans reacutesultat patho-
logique je mrsquoautorisai agrave abandonner les
eacutepreuves pour poursuivre lrsquoentretien au cours
duquel jrsquoappris que la veille il avait accompa-
gneacute sa megravere contre son greacute dans une institu-
tion pour patients souffrant de maladie
drsquoAlzheimer Alors qursquoil a des fregraveres et sœurs il
avait eacuteteacute seul agrave faire cette deacutemarche contraint
et forceacute par la santeacute chancelante de son
eacutepouse atteinte drsquoun cancer du seinhellip quand
jrsquoeacutevoque avec lui la possibiliteacute drsquoaller en parler
avec un psy il me dit y avoir deacutejagrave penseacute mais
renonceacute parce qursquoil avait peur de srsquoeffondrer
Nous avons la responsabiliteacute de notre bilan
mais nous ne pouvons deacutelivrer un diagnostic
(crsquoest de la compeacutetence du meacutedecin) pourtant
lrsquoentretien dit de restitution est un temps
drsquoeacutechange privileacutegieacute qui rend au patient sa
place de sujet mais ce temps-lagrave prend du
temps et on ne nous le donne pas toujours
Le temps de lrsquoexamen psychologique nrsquoest pas
celui des examens compleacutementaires prescrits
par les meacutedecins On sait bien qursquoil est toujours
utile de faire preacuteciser la demande de refuser
de tester Monsieur X ou Y on teste une hy-
pothegravese pas un individu de dire non parfois
parce qursquoon sait qursquoon ne reacutepondra pas agrave la
question ou parce que les conditions de lrsquoexa-
men ne respectent pas le patient ou notre auto-
nomie professionnelle Le questionnement sur
lrsquoobjet de la demande est dans le champ de
compeacutetence des psychologues nous avons eacuteteacute
formeacutes agrave ce travail La demande des meacutedecins
de lrsquoeacutequipe du patient ou de sa famille doit ecirctre
analyseacutee
Peut-on imaginer que se faire connaicirctre
comme neuropsychologue lorsqursquoon est psy-
chologue serait un moyen drsquoeacutechapper agrave la diffi-
culteacute de maintenir notre position singuliegravere
dans le monde de la santeacute
Certes la pratique de la neuropsychologie re-
quiert des connaissances sur le fonctionne-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 14
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
ment du cerveau sur les troubles cognitifs as-
socieacutes aux leacutesions ceacutereacutebrales sur la significa-
tion des localisations anatomo-cliniques et ce
travail permanent de reacuteflexion et drsquoeacutechange
avec les autres intervenants dans la prise en
charge drsquoun patient est enrichissante et parfois
passionnante comme peuvent lrsquoexprimer les
lettres de motivation des demandes de stages
Mais pratiqueacutee par des psychologues elle pour
reste un lieu privileacutegieacute ougrave la parole du patient
peut ecirctre entendue pas seulement sur ses
troubles ou ses capaciteacutes preacuteserveacutees mais sur
ce qursquoil comprend de ce qui lui arrive sur son
ressenti et le psychologue est preacutesent pour
lrsquoaccompagner dans ce nouveau travail psy-
chique Ecirctre speacutecialiseacute en neuropsychologie
est une position exigeante comme pour
chaque psychologue crsquoest lrsquoabsolue neacutecessiteacute
drsquoactualiser nos connaissances sur les patholo-
gies les nouveaux outils mais crsquoest aussi
prendre le risque de partager nos doutes sur
notre approche drsquoun patient dont on prend en
compte lrsquohistoire le contexte affectif social
professionnel Crsquoest une tacircche difficile que
drsquoessayer drsquoaborder un patient dans sa globali-
teacute et pas seulement sur ses troubles cognitifs
Personnellement je ne suis jamais sucircre drsquoavoir
bien analyseacute lrsquoensemble des eacuteleacutements que le
patient me permet drsquoappreacutehender jrsquoai la
chance de ne pas ecirctre seule dans mon service
et de pouvoir partager mes doutes avec mes
collegravegues
Enfin le terme neuropsychologue peut repreacute-
senter une menace pour le corps des psycho-
logues
Nous expeacuterimentons chaque jour la difficulteacute agrave
deacutefendre notre place de psychologue On nous
reproche notre image floue drsquoecirctre des
eacutelectrons libres dans les services drsquoecirctre des
produits de luxe sans nomenclature de nos
activiteacutes (si ce nrsquoest dans la CCAM qui ne con-
cerne que les meacutedecins) Le texte qui eacuteclaire
notre champ drsquoactiviteacute le seul qui ait une valeur
leacutegale est celui de 1985 qui deacutefinit notre statut
et nous savons bien combien lrsquoincitation au res-
pect de ce texte est une tacircche reacutecurrente pour
nous Jrsquoai commenceacute agrave travailler agrave lrsquoAP-HP en
1971 la publication de ce texte puis des circu-
laires de 1991 ont repreacutesenteacute un moment drsquoes-
poir mais jrsquoai appris tout au long de mes an-
neacutees drsquoexpeacuterience que ce travail drsquoexplicitation
de ce qursquoest un psychologue nrsquoa pas de fin
Parfois la confusion qui regravegne dans lrsquoesprit de
nos employeurs les arrangent bien pour
exemple des postes de neuropsychologues
animateurs offerts dans les EPHAD Parfois
cette confusion est sincegravere tel nouveau chef
de service qui travaille depuis de longues an-
neacutees avec des psychologues et qui reccediloit de la
DRH un rappel sur le temps FIR et qui srsquoeacutetonne
de son contenuhellip
Notre code de deacuteontologie est une reacutefeacuterence
indispensable pour nous mais nrsquoest toujours
pas un texte opposable agrave un employeur
Ces textes ont eacuteteacute eacutecrits pour les psycho-
logues ce sont des repegraveres pour les psycho-
logues Il a existeacute un mouvement qui souhaitait
diffeacuterencier les psychologues et les neuropsy-
chologues avec la volonteacute drsquoobtenir un statut agrave
part Quand on connaicirct la difficulteacute drsquoune recon-
naissance leacutegale la fragiliteacute du corps des psy-
chologues toujours precirct agrave se morceler en cen-
taines drsquoassociationshellip on peut se demander si
le meacutetier de psychologue nrsquoest pas effective-
ment en danger et se revendiquer neuropsy-
chologue peacutedopsychologue comme le laisse
entendre lrsquoactuelle fiche meacutetier nous expose
encore plus hellip (heureusement cette fiche doit
ecirctre remplaceacutee en 2012)
Notre seule protection repose sur les textes de
loi qui deacutefinissent le titre de psychologue il nrsquoy
a pas de titre de neuropsychologue ni de titre
de psychologue clinicien et ce nrsquoest pas lrsquoaven-
ture du titre de psychotheacuterapeute ni les travaux
en cours agrave la DGOS qui doivent nous rassu-
rerhellip
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 15
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Psychologue clinicien en psychotraumatologie
du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Universiteacute Paris Descartes
E n 1997 un deacutecret du ministegravere de la
Santeacute creacutee le reacuteseau des CUMP
(Cellules dUrgence Meacutedico-
Psychologique) propulsant des psychologues
cliniciens sur le terrain de lurgence aux cocircteacutes
de meacutedecins psychiatres et de parameacutedicaux
De nouvelles missions soffrent agrave ces profes-
sionnels peu formeacutes au deacutepart pour intervenir
dans ces contextes de catastrophes collectives
(accidents agrave retentissement majeur catas-
trophes naturelles guerres terrorisme etc)
Peu agrave peu des reacuteflexions et groupes de travail
speacutecifiques se creacuteent (au sein notamment de
lAFORCUMP - Association de recherche et de
formation des CUMP) afin de mieux deacutefinir les
fonctions et les compeacutetences de chacun dans
ce domaine bientocirct nommeacute
psychotraumatologie Cette nouvelle cli-
nique (dans sa forme institutionnelle et dans
sa dimension traumatique en situations
extrecircmes) a souleveacute de nombreux deacutebats
passionneacutes agrave propos de la leacutegitimeacute ou non de
lintervention de terrain (sur les sites et aux
abords des catastrophes) Cependant il sagira
plutocirct de discuter ici de la speacutecialisation eacuteven-
tuellement neacutecessaire des psychologues dans
ce domaine - du cocircteacute du savoir-faire - comme
des retrouvailles avec une position de clinicien
classique - du cocircteacute du savoir-ecirctre et de la
subjectivation
Agrave lrsquoheure ougrave se multipliaient donc diffeacuterentes
formes de violence et notamment au moment
de lrsquoeacutepoque terroriste parisienne (attentats
meacutediatiseacutes St Michel Port-Royal 1995-1996)
les psychologues ont vu leur champ drsquoaction et
leurs fonctions srsquoeacutelargir des nouvelles mis-
sions et nouvelles structures se deacuteveloppaient
pour venir au secours des victimes agrave la de-
mande de nos gouvernants et de psychiatres
militaires expeacuterimenteacutes dans ce domainehellip Jrsquoai
eu la chance de participer agrave ce processus degraves
le deacutebut et tregraves rapidement je me suis poseacutee
des questions sur ces interventions qui mrsquoap-
paraissaient pour ainsi dire hors cadre
Hors cadre parce que dans lrsquourgence
Hors cadre parce que nombre drsquointerventions
avaient lieu sur le terrain peu apregraves la catas-
trophe loin du confort du cabinet ou de lrsquohocircpi-
tal
Je me souviens agrave lrsquoeacutepoque mrsquoecirctre rueacutee sur le
code de deacuteontologie en vigueur depuis le 22
mars 1996 et me rassurer en lisant
La mission fondamentale du psychologue est
de faire reconnaicirctre et respecter la personne
dans sa dimension psychique Son activiteacute
porte sur la composante psychique des indivi-
dus consideacutereacutes isoleacutement ou collectivement
Oufhellip nous nrsquoeacutetions donc pas compleacutetement
hors-cadrehellip cependant je nrsquoavais pas vrai-
ment appris agrave travailler sur les bancs de la fac
Sans la demande du patient (mecircme pour lrsquoen-
fant le parent eacutetait demandeur sinon lrsquoinstitu-
tion scolairehellip)
Sans un cadre institutionnel classique
Et certainement pas en prise directe avec la
reacutealiteacute drsquoun eacuteveacutenementhellip
Quelques options universitaires tout de mecircme
assureacutees par des enseignants ayant participeacute agrave
des missions humanitaires mrsquoavaient deacutejagrave per-
mis drsquointerroger des dispositifs de soins hors
norme
Dans nos deacutebuts jrsquoai donc co-animeacute un groupe
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 16
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
de travail destineacute speacutecifiquement aux
psychologues pour reacutefleacutechir agrave notre pratique
Voici comment nous nous repreacutesentions alors
les choses
Nouvelles missionshellip = hellip nouvelles compeacute-
tences Ce que jrsquoai nommeacute dans mon introduc-
tion savoir-faire
1 NOUVELLES COMPEacuteTENCES REQUISES
ndash DU COcircTEacute DU SAVOIR-FAIRE
Lors des soins immeacutediats ou
defusing (cagraved sur le terrain dans les
heures qui suivent lrsquoattentat la catastrophe
naturelle la prise drsquootages lrsquoaccident col-
lectif etc)
Le psychologue doit reconstruire un cadre en
fonction de la situation qui se preacutesente agrave lui
crsquoest-agrave-dire en labsence de cadre deacutefini
(configuration du lieu dureacutee de la mission
nombre de sujets agrave prendre en charge etc
sont inconnus agrave lrsquoavance) Ceci neacutecessite de sa
part une capaciteacute dadaptation une souplesse
psychique dans son intervention ainsi qursquoun
cadre theacuteorique interne solide pour ne pas ceacute-
der nous mecircme agrave la panique ou au deacuteborde-
ment eacutemotionnel Le cadre theacuteorique solide
renvoyait surtout pour nous aux eacutecrits sur le
traumatisme et agrave ce qursquoon appelait alors la
victimologie
Pour illustrer ce propos je peux vous parler
drsquoune mission effectueacutee agrave Pointe Noire au Con-
go lorsque nous eacutetions chargeacutes avec un psy-
chiatre militaire de lrsquoeacutevaluation psychopatholo-
gique des ressortissants franccedilais en pleine
guerre civile (octobre 1997) Nous avons effec-
tivement ducirc nous adapter agrave lrsquoabsence de cadre
rassurant dans le sens ougrave nos deacuteplacements
eacutetaient extrecircmement limiteacutes en raison du con-
texte drsquoinseacutecuriteacute permanente marqueacute par des
tirs quotidiens drsquoarmes automatiques Il srsquoagis-
sait eacutegalement drsquoinventer des lieux de consulta-
tions et des modes drsquoapproches originaux pour
cette population bien souvent cloicirctreacutee dans les
appartements deacutevasteacutes par les milices armeacutees
Mais je souhaite citer drsquoautres situations moins
exceptionnelles afin de vous montrer agrave quel
point le psychologue dans ce travail drsquourgence
peut ecirctre ameneacute agrave reacutealiser des entretiens dans
des lieux inhabituels voire insolites comme agrave
bord drsquoun avion lorsque nous avons proceacutedeacute au
rapatriement des victimes du crash drsquoavion du
Seacuteneacutegal (en feacutevrier 1997) ou dans un car lors-
que nous avons accompagneacute les familles des
enfants victimes de lrsquoavalanche des Orres ou
encore dans un aeacuteroport lors de lrsquoaccueil de
populations reacutefugieacutees (du Congo ou du Kosso-
vo) ou dans une citeacute universitaire pour la prise
en charge des victimes drsquoattentats etc
Ici le psychologue doit ecirctre precirct agrave aller vers les
victimes sans attendre une demande de leur
part (drsquoautant plus que les personnes sont sou-
vent en eacutetat de choc de confusion de sideacutera-
tion etc) Alors rappelons-le que notre forma-
tion nous apprend plutocirct agrave travailler avec la de-
mande du patient comme principe inheacuterent agrave
la rencontre theacuterapeutique
Ensuite le psychologue est ameneacute agrave srsquointerro-
ger sur la position de neutraliteacute bienveillante
Alors que neutraliteacute signifie ne pas eacutemettre de
jugements de critiques de deacutesapprobation
nous voyons comment dans lrsquourgence le clini-
cien peut (je dirais mecircme doit) juger de lrsquoadap-
tation drsquoun comportement par exemple quitte agrave
deacutecider drsquoune hospitalisation ou drsquoun rapatrie-
ment En effet le psychologue doit savoir repeacute-
rer et informer les victimes des symptocircmes
psychopathologiques eacuteventuels favoriser la
demande de prise en charge theacuterapeutique ul-
teacuterieure si besoin est repeacuterer et orienter les
personnes les plus fragiles en faisant bien la
distinction entre eacutetat de stress aigu et entreacutee
potentielle dans une pathologie traumatique
Mecircme si ces fonctions de diagnostic drsquoeacutevalua-
tion drsquoorientation existent dans le cadre de
notre profession celles qui visent agrave informer agrave
lrsquoavance et agrave preacutevenir relegravevent habituellement
plutocirct de la speacutecificiteacute meacutedicale
Par ailleurs sur le terrain la position et latti-
tude du psychologue sont encore une fois un
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 17
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
peu particuliegraveres pour lui puisqursquoil doit assurer
une preacutesence rassurante contenante (voire
maternante au sens de Winnicott) apporter de
la chaleur et de lhumaniteacute Lrsquointervention drsquour-
gence se situe du cocircteacute du holding Ferenczi
en charge des soldats en prise avec des neacute-
vroses de guerre soulignait deacutejagrave ce pheacuteno-
megravene de reacutegression des patients les faisant re-
venir agrave un stade archaiumlque (en proie agrave des an-
goisses violentes et massives de destruction
morcellementhellip) et agrave des comportements in-
fantiles (ne plus savoir marcher perdre son
autonomie pour les besoins de la vie quoti-
dienne etc) Ici le traumatisme est externe et
agit par effraction physique et psychique deacute-
sorganisant les modaliteacutes deacutefensives habi-
tuelles On dit aussi que le traumatisme est en-
treacute par tous les pores de la peau et envahit
tous les sens (visuels olfactifs auditifs etc) Il
srsquoagit alors pour le psychologue drsquoexercer une
veacuteritable fonction de pare-excitation
drsquoenveloppe protectrice (Au sens de D Winni-
cott et de D Anzieu) fonction qui peut srsquoac-
compagner de gestes apaisants
Travailler dans ce type de dispositif ne srsquoimpro-
vise pashellip Ainsi le psychologue doit avoir reccedilu
une formation speacutecifique A lrsquoappui un nouvel
Extrait du code de deacuteontologie des psycho-
logues chapitre compeacutetences
Le psychologue tient ses compeacutetences de
connaissances theacuteoriques reacuteguliegraverement mises
agrave jour drsquoune formation continue et drsquoune forma-
tion agrave discerner son implication professionnelle
dans la compreacutehension drsquoautrui
Pour notre domaine drsquointervention la for-
mation porte avant tout sur
1 La clinique traumatique la symptomatologie
de la neacutevrose traumatique de lrsquoESPT mais
aussi de tous les eacutetats de deacutesorganisa-
tion aigus des comportements de panique col-
lective etc elle porte eacutegalement sur le fonc-
tionnement psychique entraveacute par le trauma
donnant lieu agrave des reacuteameacutenagements transi-
toires parfois tregraves eacuteloigneacutes drsquoune clinique clas-
sique
2 La dynamique de groupe un groupe pris
dans une catastrophe repreacutesente une enve-
loppe psychique groupale qui elle-mecircme peut
se trouver effracteacutee par la violence de lrsquoeacuteveacutene-
ment le collectif est alors briseacute et ne pourra
plus fonctionner comme avanthellip Que la prise
en charge soit groupale ou bien mecircme indivi-
duelle il est fondamental drsquoecirctre au clair avec
ces concepts de la clinique groupale
Nous venons de pointer les principales con-
naissances et compeacutetences neacutecessaires au
psychologue qui intervient dans lrsquourgence ou
dans des dispositifs de soins exceptionnels mis
en place suite agrave des eacuteveacutenements qui sortent de
lrsquoordinairehellip pour autant ce savoir-faire nrsquoa de
sens que srsquoil srsquoarticule avec un savoir-ecirctre
propre agrave la fonction habituelle du psychologue
2 LORSQUE LE SAVOIR-FAIRE REJOINT
LE SAVOIR-EcircTRE
Je poursuis ma lecture du code de deacuteontologie
(chapitre compeacutetences) le psychologue est
garant de ses qualifications particuliegraveres et deacute-
finit ses limites propres compte tenu de sa for-
mation et de son expeacuterience Il refuse toute in-
tervention lorsqursquoil sait ne pas avoir les compeacute-
tences requises Ainsi il doit savoir sil peut
assurer un soin immeacutediat dans lrsquourgence ou srsquoil
doit refuser ce type de mission en fonction de
ses limites personnelles et professionnelles de
sa vulneacuterabiliteacute (changeante au fil du temps et
de son histoire personnelle) de ses projections
eacuteventuelles
Il est inviteacute eacutegalement agrave repeacuterer et agrave connaicirctre
ses propres reacuteactions psychiques agrave leacutecoute de
ce type de patients de ce qui tient parfois de
lintoleacuterable savoir ou apprendre agrave repeacuterer
ses limites personnelles ses propres fan-
tasmes de sauveur ou ses mouvements
drsquoidentification agrave la victime crsquoest agrave dire ses
propres eacutelans contre-transfeacuterentiels Ces con-
naissances restent largement favoriseacutees par un
travail personnel au cours duquel le psycho-
logue a appris agrave ecirctre eacutecouteacute et par la mise en
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 18
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
place de supervision reacuteguliegravere
Dans le cadre de lrsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue est le seul agrave de-
voir se passer drsquoinstrument (pas de mateacuteriel
meacutedical ni de theacuterapeutique meacutedicamenteuse
ou encore de mateacuteriel technique reacuteserveacutes aux
meacutedecins infirmiers secouristes etc) De ce
fait comme lrsquoexprime Colette Chiland il devient
son propre instrument celui qui permet de
comprendre et drsquointervenir agrave mains nues
Lrsquooriginaliteacute de sa formation vient du travail sur
soi que le clinicien a effectueacute pour acqueacuterir
une certaine maicirctrise de lui-mecircme comme ins-
trument Autrement dit ce que le psychologue
met au service de lrsquoautre ce ne sont pas seule-
ment ses connaissances mais aussi son appa-
reil psychique sa psycheacute son fonctionnement
sa capaciteacute de ressentir de comprendre et
drsquoeacutelaborer Le savoir du clinicien devient un sa-
voir vivant incarneacute ougrave il paie de sa personne
Crsquoest principalement cette position qui le dis-
tingue drsquoun autre intervenant
Dans la clinique du traumatisme il est fonda-
mental de prendre conscience de ce qursquoon
eacuteprouve lors de lrsquoeacutecoute drsquoun blesseacute psychique
aux prises avec des pheacutenomegravenes drsquoeffractions
internes afin de ne pas ecirctre gouverneacute par des
reacuteactions non controcircleacutees dans la compreacutehen-
sion du patient et dans la reacuteponse qursquoon lui
donnera Nous voyons comment cette eacutecoute
ne peut se contenter drsquoun savoir plaqueacute elle
doit ecirctre au contraire un travail actif qui permet
des allers ndash retours entre probleacutematique per-
sonnelle et ressenti du patient sans que cette
premiegravere nrsquointerfegravere de maniegravere neacutegative Et
crsquoest bien en restant sensible et en acceptant
de le rester dans les limites que nous venons
de fixer que le sujet se sentira libre drsquoexprimer
eacutemotions penseacutees honteuses sentiments de
culpabiliteacute et drsquohumiliation inheacuterents agrave la dyna-
mique traumatique
Enfin nous le savons bien lrsquoeacutecoute srsquoexerce
dans un double registre ce qui est dit et ce qui
nrsquoest pas dit le contenu manifeste et le conte-
nu latent Ces dimensions concernent tout au-
tant le clinicien qui doit savoir se taire pour lais-
ser lrsquoautre parler et parler pour lui faciliter la pa-
role Dans notre contexte drsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue doit eacutegalement
chercher agrave eacutetablir petit agrave petit et degraves que pos-
sible une distinction entre fantasmes
(individuels) et eacuteveacutenements reacuteels (veacutecus par
tous) pour diffeacuterencier angoisse interne
(subjective) et peur (objective) des objets ex-
ternes
Il est ainsi un passeur agrave ce moment de frac-
ture dans lrsquohistoire du sujet Il fait alors le lien
entre le passeacute la bregraveche traumatique et la
reconstruction agrave venir
EN CONCLUSION
Dans un contexte hors du commun puisque
hors cadre et souvent hors demande il me
paraicirct essentiel de garder nos re-
pegraveres classiques de psychologue clinicien
Soulignons que nous restons pour le patient un
psychologue supposeacute savoir Dans cette cli-
nique deacuteroutante et violente bien entendu le
cadre interne tapisseacute de connaissances speacuteci-
fiques devient opeacuterant et garant de notre pro-
fessionnalisme Nous voyons finalement agrave quel
point la speacutecialisation est en partie incontour-
nable (mais comme pour tout autre type de cli-
nique les soins psychiques aupregraves de sujets
deacutependants en fin de vie de patients psycho-
tiques de nourrissons de familles de sans-
logishellip ne srsquoimprovisent pas drsquoavantage) sans
nous faire perdre de vue le socle de formation
commun qui nous reacuteunit et met en exergue la
speacutecificiteacute du Psychologue qui se caracteacuterise
bien par son orientation vers lrsquoeacutecoute qui prend
sens eacutecoute drsquoune parole drsquoun trajet drsquoune
rupture dans la continuiteacute discours drsquoun sujet
agent de son propre destin
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Oncologie meacutedicale Hocircpital Saint-Louis
J ai commenceacute agrave travailler agrave lhocircpital
comme psychologue en oncologie agrave la fin
des anneacutees 80
Le contexte eacutetait diffeacuterent de maintenant
Deux choses mavaient beaucoup marqueacutee et
interpelleacutee
- le manque de prise en charge de la douleur
- lattitude qui consiste agrave cacher la maladie et
sa graviteacute aux patients
La douleur neacutetait pas une cible de laction theacute-
rapeutique elle avait une valeur diagnostique
supposeacutee sameacuteliorer avec les traitements de
la maladie sans une attention particuliegravere agrave son
traitement (1)
Le meacutedecin eacutetait perccedilu comme deacutetenteur dune
veacuteriteacute qui faisait loi
Voilagrave quelques propos quil neacutetait pas rare
dentendre de la part du meacutedecin au patient
Faites-moi confiance ne pensez agrave rien la chi-
miotheacuterapie cest mon problegraveme vous pensez
agrave gueacuterir on aura toujours une moleacutecule pour
vous soigner on va se battre
Au deacutecegraves du patient on pouvait entendre il
est mort mais en reacutemission
Et le meacutedecin sadressant agrave moi ne parlez
pas de la mort aux patients vous savez on a
deacutejagrave vireacute une psychologue
Plusieurs eacuteveacutenements vont faire eacutevoluer la meacute-
decine et son discours dans la prise en charge
du patient
Agrave la fin du XXegraveme siegravecle lOrganisation Mon-
diale de la Santeacute (circulaire du 19-1-1994) a
deacutefini comme prioriteacute la lutte contre la dou-
leur
La creacuteation des eacutequipes anti-douleur sera un
eacuteveacutenement important ainsi que la recherche de
nouveaux antalgiques Lrsquoeacutevolution de cette
prise en charge va se reacutepandre en canceacuterolo-
gie et dans la meacutedecine en geacuteneacuteral
Les premiers Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Ligue
contre le Cancer ont donneacute la parole aux pa-
tients il y a eu une demande de psychologues
dans les services pour une prise en compte de
la deacutetresse psychique
Le Plan Cancer en 2006 va donner des direc-
tives qui reacuteglementent aujourdhui la consulta-
tion dannonce et les soins de supports
La psycho-oncologie neacutee aux Eacutetats-Unis arrive
aussi en Europe et cest en 1994 quest creacuteeacutee
la Socieacuteteacute Franccedilaise de Psycho-Oncologie
(SFPO)
Son but est de deacutevelopper des outils des meacute-
thodes pour deacutepister et ainsi traiter preacutecoce-
ment les risques des difficulteacutes psychologiques
Elle sinscrit dans une approche bio-psycho-
sociale de la maladie canceacutereuse La speacutecifici-
teacute nest pas la prise en compte de la subjectivi-
teacute du patient mais ladaptation de celui-ci aux
diffeacuterentes situations traverseacutees pendant la ma-
ladie Cette discipline qui eacutetudie les attitudes
psychologiques et eacutemotionnelles survenant
pendant la maladie canceacutereuse pourrait laisser
croire quil y a des reacuteactions speacutecifiques agrave cette
maladie Son approche est de plus en plus co-
gnitivo-adaptative avec protocoles reacutefeacuterentiels
deacutemarche qualiteacute
Dans le champ de la psycho-oncologie on
trouve le terme de psycho-oncologue
Ce mot est utiliseacute de faccedilon un peu anarchique
on y trouve le psychologue le psychiatre mais
aussi dautres professionnels intervenant au-
pregraves des malades et de leur famille Ce nest
pas parce que nous avons quelques connais-
sances en oncologie que nous pouvons utiliser
ladjectif oncologue
Ce terme peut ecirctre source de confusion il ne
deacutefinit pas notre speacutecificiteacute et il me paraicirct aussi
seacutegreacutegatif dune pathologie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 20
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Cest pour cela que nous voulons garder le
terme de psychologue clinicien
Dans ce mot il y a la dimension clinique cest agrave
dire lobservation du patient agrave son chevet
Mon travail consiste agrave accompagner soutenir
le patient dans ce parcours difficile quil entre-
prend avec la maladie
Le cancer produit un remaniement identitaire
pour le sujet ce qui neacutecessite de lui offrir un
espace de parole
Cest la psychanalyse qui de mon point de vue
offre les meilleurs outils pour travailler la cli-
nique du reacuteel Cest avec notre propre parcours
analytique que nous psychologues pouvons
bien prendre en compte la dimension incons-
ciente propre agrave lhumain
Je ne me situe donc pas dans le champ de la
psycho-oncologie au discours trop normatif
Notre clinique dans un service dhospitalisation
Cest agrave tout stade deacutevolution de la maladie
quun travail theacuterapeutique peut se mettre en
place avec le psychologue
On a beaucoup parleacute du dispositif dannonce
annonce du diagnostic visant agrave assurer agrave la fois
une bonne administration du soin et son
humanisation
Ces consultations cherchent agrave atteacutenuer limpact
traumatique Il est proposeacute au patient de ren-
contrer un psychologue
Il nest pas rare que le patient me dise ils ne
se rendent pas compte il y a trop dinforma-
tions drsquoun seul coup je nai pas encore reacutealiseacute
que jai un cancer et on me parle de perruque
pour la perte des cheveux de dieacuteteacuteticien de
psy mais je nen suis pas lagrave moi
Pour les patients cest la deacutecouverte brutale du
diagnostic puis le choc des traitements Nous
savons que le temps psychique nest pas le
temps meacutedical et que dans cette clinique cest
au cas par cas que nous pouvons intervenir ce
qui est traumatique pour un patient ne lest pas
pour un autre
Un patient me disait reacutecemment le cancer
menvahit je ne pense quagrave ccedila je ne peux plus
lire regarder un film il est omnipreacutesent Voilagrave
une description du reacuteel
Il sagit de faire entendre agrave une eacutequipe meacutedi-
cale tourneacutee plus vers la maladie que vers le
malade et ce dans une organisation tregraves tech-
nique et de plus en plus sophistiqueacutee la neacuteces-
siteacute de prendre en compte la subjectiviteacute du pa-
tient dans un espace qui en paraicirct deacutepourvu
La demande de leacutequipe vis agrave vis du psy peut
correspondre agrave une demande de compliance
au traitement que le patient refuse elle sou-
haite aussi souvent que le psy reacuteconforte le pa-
tient agrave qui on a donneacute une mauvaise nouvelle
Comme dit Jeacuterocircme Alric dans son article Qui
eacutecoute quoi la sphegravere psychologique de-
vient une fonction constituante de la personne
globale au mecircme titre que la sphegravere digestive
dermatologique et dont il faut soccuper (2)
Au psychologue de faire valoir aupregraves du pa-
tient lintention de lui donner une place pour
entendre et faire entendre sa position subjec-
tive
Souvent je suis interpelleacutee par les soignants
dans des situations de deacutetresse par exemple
quand les antalgiques se reacutevegravelent inefficaces
ou sont refuseacutes Dans les entretiens les pa-
tients deacuteplient leur histoire leur roman fami-
lial La douleur physique se mecircle agrave la souf-
france psychique
Une patiente qui avait un cancer du sein avec
des meacutetastases osseuses me disait jai mal
lagrave en me montrant sa poitrine
Je lui avais demandeacute si elle en avait parleacute au
meacutedecin
Elle me reacutepondit en me regardant droit dans les
yeux cette douleur-lagrave le meacutedecin ne peut
pas me la soigner cest lhistoire avec mon ma-
ri qui me fait mal Celui-ci lavait quitteacutee et elle
se retrouvait seule avec son jeune fils
En quelques mots elle avait situeacute ce qui la fai-
sait souffrir au-delagrave des localisations meacutetasta-
tiques Elle savait faire la diffeacuterence entre le
physique et ce qui venait lagrave sajouter agrave sa
propre histoire douloureuse
Comme dit Clavreul dans Lordre meacutedical la
souffrance renvoie le sujet qui leacuteprouve agrave son
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 21
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
fantasme cest-agrave-dire agrave sa propre histoire et au
discours quil peut tenir sur son histoire Il y a
un seul discours qui se tienne sur la souf-
france et cest celui de la personne qui
leacuteprouve (3)
Un patient encore reacutecemment me disait ne pas
vouloir devenir grabataire comme son pegravere
Il seacutetait occupeacute de lui depuis son plus jeune
acircge il poussait la chaise roulante dans ses deacute-
placements il eacutetait sa beacutequille Mon patient ar-
riveacute en fin de vie voudra jusqursquoau bout se deacute-
placer aux toilettes et rester indeacutependant dans
les gestes du quotidien
Aux soignants qui ne comprenaient pas pour-
quoi il sobstinait agrave vouloir faire tout seul des
gestes devenus si difficiles il a fallu dire sans
reacuteveacuteler le pourquoi combien ceacutetait important
pour le patient de garder cette indeacutependance
Ceacutetait pour lui sa digniteacute sa liberteacute sa volonteacute
Je voudrais mettre laccent sur la singulariteacute de
ces rencontres avec des patients deacutejagrave tregraves gra-
vement atteints et qui degraves le premier entretien
se saisissent de cette possibiliteacute de parole
Il y a la douleur et lautre versant de la souf-
france langoisse
Monsieur O est un patient algeacuterien qui a eacuteteacute
opeacutereacute drsquoun cancer du poumon Avant linterven-
tion chirurgicale il se sentait precirct agrave affronter
cette eacutepreuve cest apregraves quil a senti ses
forces diminuer Jai changeacute je ne suis plus le
mecircme quavant en fait je crois que je nai pas
accepteacute lopeacuteration Il dit regretter il aurait preacute-
feacutereacute vivre avec son cancer il serait mort avec
Ce qui semble bouleverser ce patient nest pas
tant la maladie en elle-mecircme que ses conseacute-
quences Avec ce bout de corps quon lui a reti-
reacute cest aussi toute une part de lui qui semble
partie
Leacutepreuve du cancer entraicircne toujours une at-
teinte de linteacutegriteacute corporelle
Ce corps qui est traiteacute par le meacutedical de faccedilon
organique biologique revient souvent dans le
discours des patients Ce qui eacutemerge cest
lhorreur des amputations des meacutetastases qui
se reacutepandent agrave linteacuterieur du corps mais aussi
ce qui se donne agrave voir agrave toucher Un corps en-
dommageacute que le patient a du mal agrave reconnaicirctre
comme le sien qui se bouche qui enfle qui
eacutetouffe
Le corps peut devenir un objet agrave controcircler per-
seacutecuteur qui nest plus investi de deacutesir Cette
parole descriptive du corps peut prendre toute
la place dans le discours du patient avant que
quelque chose du subjectif nrsquoapparaisse
Cest dans un deuxiegraveme temps que Monsieur
O apregraves avoir exprimeacute limpossibiliteacute daccep-
ter cette perte anatomique ndash une partie du pou-
mon ndash pourra associer sur dautres pertes qui
viennent sintriquer entre passeacute et preacutesent
Langoisse de mort est tregraves freacutequente dans
cette pathologie dans les entretiens il ne sagit
pas de viser directement ce que nous pensons
ecirctre lobjet de cette angoisse mais de soutenir
dans la conversation les deacutetours de cette indi-
cible
Lintervention aupregraves de la famille nest pas
rare
Monsieur L 63 ans a un cancer de la vessie et
il est deacutecrit par leacutequipe soignante comme tregraves
exigeant et peacutenible Je deacutecide daller me preacute-
senter
Il me fait une description assez preacutecise de sa
maladie qui a deacutebuteacute il y a quelques mois Je
lui demande ce quil pense lui de tout ccedila Il me
regarde attend plusieurs secondes et me reacute-
vegravele que sa femme a une maladie heacutematolo-
gique agrave surveiller et quil sinquiegravete beaucoup
pour elle Ils nont pas denfant Il ajoute que
dans le service on ne lui fait pas grand-chose
son eacutetat ne srsquoameacuteliore pas quil serait mieux
avec sa femme En mecircme temps elle ne peut
pas soccuper de lui agrave la maison Il part dans
un SSR (soins de suite et de reacuteeacuteducation)
Quelques semaines apregraves il revient dans le
service et il demande agrave me voir Il va ecirctre tregraves
direct On vient de lui parler de son mauvais
pronostic agrave court terme il veut que je le ren-
contre avec sa femme Il me dit Elle deacuteprime
Si je meurs elle va se laisser mourir Pour moi
cest insupportable Effectivement sa femme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 22
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
est tregraves deacuteprimeacutee affaiblie par sa maladie
mais elle accepte de voir son geacuteneacuteraliste et
prendre un traitement On lui trouve un heacuteber-
gement agrave la Maison des Parents pour lui eacuteviter
lrsquohocirctel Elle sera sur place pour voir son mari
elle pourra eacutechanger avec les familles heacuteber-
geacutees agrave la Maison des Parents Petit agrave petit elle
tisse des liens Son mari deacutecline rapidement je
la vois dans la chambre elle me parle de lui
des choses quils aimaient faire ensemble Elle
est calme rassureacutee par la preacutesence de
lrsquoeacutequipe Apregraves la mort de son mari nous nous
sommes revues puis teacuteleacutephoneacute et rapidement
elle prend la deacutecision de deacutemeacutenager agrave Annecy
pregraves dune amie Elle aura un suivi heacutematolo-
gique lagrave-bas
Jai souvent penseacute agrave cet homme dont le dis-
cours eacutetait centreacute sur la plainte et qui a changeacute
rapidement de registre agrave partir du moment ougrave
on a pris en compte sa souffrance et soutenu
sa femme aupregraves de lui
Dans notre travail il me paraicirct important de
rendre compte aux eacutequipes de nos interven-
tions pour permettre aux soignants des eacuteclair-
cissements sur la souffrance psychologique
des patients Cela peut permettre un change-
ment de rapport soignant-patient dans des si-
tuations ougrave le patient par langoisse sous-
jacente se montre peacutenible pour lrsquoeacutequipe voire
agressif agrave son eacutegard
Toujours pour ce qui concerne la famille une
reacuteelle eacutevolution a eacuteteacute la prise en compte des
enfants du patient Degraves le diagnostic et tout le
long de la maladie une attention particuliegravere de
la part de leacutequipe permet deacuteviter les situations
dramatiques que lon rencontrait dans le pas-
seacute lorsque lenfant deacutecouvrait la graviteacute de la
maladie du parent la veille de la mort de celui-
ci sans avoir eu la possibiliteacute de sy preacuteparer et
den parler
Pour conclure je dirai que la science et la tech-
niciteacute ont beaucoup eacutevolueacute agrave lhocircpital mais quil
y a eu peu de changement du cocircteacute de la prise
en compte meacutedicale de la dimension subjective
des patients
On est passeacute dune prise en charge de la dou-
leur qui eacutetait nieacutee agrave des situations parfois de
surmeacutedicalisation La meacutedecine malgreacute ses
progregraves consideacuterables ne peut pas soulager
toute les douleurs et encore moins de faccedilon
systeacutematique et protocolaire Elle doit tenir
compte de la singulariteacute de chaque patient
De mecircme sil y a encore une vingtaine dan-
neacutees on ne donnait pas suffisamment dinfor-
mations meacutedicales sur la maladie et le devenir
du patient on est passeacute aujourdhui agrave un trop
dinformations dans loptique de dire la veacuteriteacute
au malade et de le preacuteparer sur le chemin de
sa fin de vie
Il nest pas rare que je rencontre un patient agrave
qui on a asseneacute une veacuteriteacute meacutedicale quil ne
voulait pas entendre Pour le patient il sagit de
pouvoir se deacuteprendre de ce savoir meacutedical qui
peut venir empecirccher toute penseacutee le cristalli-
ser dans une angoisse de mort et entraicircner le
sujet vers une mort psychique avant la mort
reacuteelle
Nous sommes lagrave pour partager ce temps avec
lui ce temps qui est incertain et qui permet au
sujet davoir des interrogations exprimer des
affects
Le psychologue dorientation analytique peut
apporter agrave ses eacutequipes un eacuteclairage des situa-
tions
Une collaboration avec les meacutedecins est agrave en-
courager encore faut-il que les meacutedecins puis-
sent prendre le temps et donc se deacutetacher
dune pure gestion des soins pour penser et
analyser leur pratique
1 Baszanger I 1995 Douleur et meacutedecine La
fin dun oubli Le Seuil
2 Alric J 2004 Qui eacutecoute quoi Essai de
repeacuterage de deux postures deacutecoute possible agrave
lhocircpital Eregraves in Collectif sous la direction de
Patrick Ben Soussan Le cancer approche psy-
chodynamique chez ladulte
3 Clavreul J 1978 LOrdre meacutedical Paris Le
Seuil
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 23
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des textes
officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin Page 24
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous avez man-
queacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine Page 32
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal Page 43
Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip
Quels changements pour le meacutetier de
psychologue
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 24
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin
V ingt ans se sont eacutecouleacutes depuis la creacutea-tion de Psyclihos Depuis de nombreux rapports textes officiels ont eacuteteacute diffuseacutes
qui concernent la santeacute dune maniegravere geacuteneacute-rale et plus particuliegraverement la santeacute mentale Quelle place nous psychologues avons-nous dans ces eacutecrits De fait lorsque lon interroge la bibliothegraveque des rapports publics sur le site de la Documen-tation franccedilaise sur le terme Psychologue on saperccediloit que seule une liste constitueacutee dune petite cinquantaine de reacutefeacuterences apparaicirct un peu plus toutefois que pour le terme psychiatre qui apparaicirct dans 47 rapports mais beaucoup moins que celui dinfirmier qui apparaicirct dans 121 rapports Jai choisi parmi ces textes ceux qui mont sem-bleacute les plus significatifs dune certaine image du psychologue vu par les politiques ou ladmi-nistration Je vais maintenant vous preacutesenter cette compilation dextraits dans un ordre chro-nologique Lun des premiers rapports qui cite les psycho-logues porte sur les Strateacutegies drsquoutilisation des antiretroviraux dans lrsquoinfection par le VIH en 1998 Il affirme Le soutien par les psy-chologues est lune des pratiques diverses des services hospitaliers qui meacuteritent drsquoecirctre deacuteve-loppeacutees La mecircme anneacutee un rapport sur les Uniteacutes agrave encadrement eacuteducatif renforceacute et leur ap-port agrave lheacutebergement des mineurs deacutelin-quants fait agrave la demande de lInspection Geacuteneacute-rale des Affaires Sociales preacuteconise Afin de preacutevenir lusure des eacutequipes et aussi de leur apporter une certaine capaciteacute de recul il faut mettre en place des proceacutedures de soutien au moment des crises et de supervision dans les-quelles le recours au psychologue simpose En 2000 un rapport au Premier ministre Lionel Jospin Pour une nouvelle politique publique
daide aux victimes fait le constat suivant Pour le reacuteseau de lINAVEM (Feacutedeacuteration natio-nale daide aux victimes et de meacutediation qui comprend 150 associations) les emplois de psychologue repreacutesentent seulement 9 des emplois salarieacutes Cet aspect pourtant fonda-mental de laide aux victimes nest pas suffi-samment deacuteveloppeacute En 1994 lintervention dun psychologue con-cernait environ un quart des associations daide aux victimes Le rapport propose la creacuteation de centres daide pour enfant-adolescent et adulte com-prenant obligatoirement des psychologues cli-niciens Des groupes de parole et deacutecoute pour en-fants victimes seraient animeacutes par des psycho-logues scolaires ayant suivi une formation speacute-cifique ou des psychologues cliniciens exteacute-rieurs Le projet dinteacutegration de psychologues clini-ciens dans les milieux scolaires semble alors ecirctre au cœur de la nouvelle politique publique daide aux victimes Une politique ambitieuse sur le papier hellip Les suites don-neacutees agrave ce rapport ont eacuteteacute la creacuteation dun numeacutero national daide aux victimes en 2001
Pourtant en 2000 on sinteacuteresse beaucoup agrave nous le rapport du Haut comiteacute de la santeacute pu-blique sur la souffrance psychique des ado-lescents et des jeunes adultes consacre un paragraphe au rocircle du psychologue dans le chapitre intituleacute Lrsquoinstitution scolaire Bilan en CM2 Il est eacutecrit
Le recours agrave un psychologue dans le milieu scolaire est pratiquement limiteacute aux tests drsquoorientation Lrsquoabsence de psychologue dans le secondaire semble faire partie de cette mau-vaise image de la psychiatrie qui persiste dans le grand public Le regard drsquoun psychologue exteacuterieur agrave lrsquoeacuteta-blissement dans des reacuteunions reacuteguliegraveres de synthegravese et de concertation peut ecirctre preacutecieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 25
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Ces contacts auraient de plus lrsquoavantage de relier les prises en charge de situations diffi-ciles entre lrsquointeacuterieur et lrsquoexteacuterieur des eacutetablisse-ments et de faire se connaicirctre les profession-nels des diffeacuterentes structures Ainsi 20 des adolescents pensent avoir be-soin de consulter un psychologue mais 137 disent avoir renonceacute du fait de difficulteacutes finan-ciegraveres Toujours en 2000 au colloque sur lrsquoEnfance maltraiteacutee la Ministre deacuteleacutegueacutee agrave lrsquoEnfance et agrave la famille reacuteclame Un psy pour chaque enfant Dans son second rapport Claire Brisset la deacute-fenseure des enfants sinteacuteresse eacutegalement au rocircle des psychologues et agrave leur formation Pour elle les psychologues souffrent depuis longtemps dun problegraveme didentiteacute du fait dune reconnaissance tardive de leur profes-sion et de lexistence de plusieurs types de psychologues recruteacutes agrave des niveaux deacutetudes diffeacuterents en reacutefeacuterence aux psychologues sco-laires et conseillers dorientation- psycho-logues La Deacutefenseure des Enfants propose d -Institutionnaliser les psychotheacuterapies den-fants et dadolescents par des psychologues cliniciens sur prescription du psychiatre et rembourseacutees par la Seacutecuriteacute sociale De la mecircme faccedilon quun meacutedecin speacutecialiste prescrit des seacuteances de kineacutesitheacuterapie qui sont alors rembourseacutees par la seacutecuriteacute sociale un psychiatre aussi bien dans le public que dans le priveacute doit pouvoir prescrire des theacuterapies effectueacutees par un psychologue clinicien Cette mesure qui se pratique deacutejagrave dans cer-tains pays europeacuteens comme lAllemagne ne peut ecirctre mise en place quaux conditions sui-vantes - quune formation homogegravene de psychologie clinique sanctionneacutee par un diplocircme unique soit organiseacutee - que cette formation permette dacceacuteder agrave un nouveau statut de psychologue clinicien recon-nu par lensemble des administrations concer-neacutees - que cette formation soit agrave la fois theacuteorique et pratique Cette reacuteforme permettrait de - mieux utiliser les compeacutetences des nombreux psychologues qualifieacutes actuellement deacutepour-vus dun emploi agrave temps plein ou contraints faute de poste dexercer dautres meacutetiers
Dans cette hypothegravese le psychiatre aurait le rocircle danimateur de leacutequipe soignante et de supervision des psychotheacuterapies meneacutees par les psychologues cliniciens En outre un tel scheacutema devrait pouvoir sappli-quer non seulement dans les structures pu-bliques mais aussi dans le secteur libeacuteral Les psychologues cliniciens peu nombreux en libeacute-ral pourraient alors sinstaller en cabinet (au mecircme titre que les infirmiegraveres ou les masseurs kineacutesitheacuterapeutes) En ce deacutebut des anneacutees 2000 les politiques sinteacuteressent beaucoup aux questions relatives agrave la santeacute en juillet 2000 Martine Aubry alors ministre de lemploi et de la solidariteacute confie aux Drs Piel et Roelandt une mission de reacute-flexion et de prospective dans le domaine de la santeacute mentale qui donnera lieu un an plus tard agrave un rapport intituleacute De la psychiatrie vers la santeacute mentale Un rapport dans lequel on parle peu des psychologues si ce nest pour dire que leur formation est insuffisante et quun internat en psychologie est neacutecessaire ce dont on reparlera beaucoup dans les anneacutees sui-vantes En aoucirct 2001 Psyclihos travaille sur le 1
er rap-
port deacutetape du groupe de travail de la DGS sur leacutevolution des meacutetiers en santeacute mentale Des psychologues de toute la France choqueacutes et inquiets se reacuteunissent au sein du Collectif Na-tional des Psychologues de la FPH Les me-sures preacuteconiseacutees par le 2
egraveme rapport deacutetape
paru en janvier 2002 mettent le feu aux poudres Pour rappel le rapport insiste sur le deacuteveloppement des reacuteseaux de santeacute la mise en place de proceacutedures de protocoleshellip Et surtout il preacutevoit des niveaux dintervention hieacuterarchiseacutes avec des intervenants de 1
egravere
ligne des professionnels de soins primaires et des intervenants speacutecialiseacutes et deacutejagrave des glisse-ments de compeacutetences vers les infirmiers et les meacutedecins geacuteneacuteralistes Il est agrave nouveau question de transfert de com-peacutetences en 2003 avec le rapport Berland sur la deacutemographie des professions de santeacute au titre eacuteloquent Coopeacuteration des professions de santeacute le transfert de tacircches et de compeacute-tences Le chapitre qui nous concerne sinti-tule Un transfert de compeacutetences en psychia-trie difficile agrave organiser Le Pr Berland eacutecrit Les auditions que jai pu mener lors de la mis-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 26
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
sion deacutemographie des professions de santeacute et les eacutechanges que jai pu avoir avec les psy-chiatres ont reacuteveacuteleacute de reacuteelles difficulteacutes agrave envi-sager le transfert de compeacutetences dans le champ de cette speacutecialiteacute En effet si certains professionnels considegraverent souhaitable la mise en perspective de collaborations organiseacutees avec les psychologues cliniciens dautres la trouvent inutile ou non souhaitablehellip Il est neacute-cessaire denvisager la part de lactiviteacute aujour-dhui assureacutee par les psychiatres qui doit ecirctre confieacutee en toute collaboration agrave des psychologues praticiens formeacutes agrave la fois par les faculteacutes de psychologie et les faculteacutes de meacutedecine pour construire ce nouveau meacutetier qui reacutepond agrave un besoin clairement identifieacute Au mecircme moment est diffuseacute le rapport Cleacutery Melun intituleacute Plan dactions pour le deacutevelop-pement de la psychiatrie et la promotion de la santeacute mentale qui reprend les principales pro-positions des rapports preacuteceacutedents par ex con-cernant la reacuteorganisation des soins en psychia-trie Concernant la formation des psycho-logues Ces formations sont tregraves diverses sui-vant les universiteacutes certaines eacutetant speacuteciali-seacutees dans la psychanalyse ce qui aboutit agrave des formations mono reacutefeacuterenceacutees Il en va de mecircme des stages qui sont souvent difficiles agrave trouver et ne permettent pas toujours dassister aux entretiens avec les patients Enfin dans un contexte de plus en plus seacutelectif les examens theacuteoriques et formels prennent le pas sur lac-complissement dun stage et lobtention dune formation clinique Il poursuit Les psychologues souhaitent eux-mecircmes faire progresser cette situation Ils se sont doteacutes dun code de deacuteontologie qui pose des prin-cipes clairs notamment au regard de leur for-mationhellipAvec un stage qui doit correspondre agrave leacutequivalent dun internat en psychologie dont la dureacutee ne devrait pas ecirctre infeacuterieure agrave 2 se-mestres et dont le contenu devrait faire lobjet dune validation finale Toujours en 2003 il faut un rapport eacutecrit par une psychologue pour que le terme soit citeacute 97 fois soit presque dans une page sur deux Cest le rapport de Marie de Hennezel sur Fin de vie le devoir daccompagnement Elle preacuteconise une preacutesence renforceacutee de psy-chologues dans tous les services sensibles
Pour favoriser le maintien agrave domicile des per-sonnes elle demande que lrsquoon eacutetudie la possi-biliteacute drsquoun financement drsquoun forfait de 3 agrave 5 seacuteances avec un psychologue pour un accom-pagnement de fin de vie sur le modegravele de ce qui est proposeacute dans le plan cancerElle de-mande la creacuteation dau moins un mi-temps de psychologue pour chaque service confronteacute agrave la fin de vie des patients Pour elle la Formation universitaire du psycho-logue ne le preacutepare pas neacutecessairement agrave la confrontation avec la mort drsquoautrui et son cor-tegravege drsquoangoisses et de fantasmes Elle ajoute Crsquoest la raison pour laquelle nous estimons qursquoune formation compleacutementaire personnelle (psychanalyse) ou une formation dans le cadre drsquoun DU de soins palliatifs ou drsquoun stage drsquoune semaine au moins dans une uniteacute de soins palliatifs (USP) doit lui permettre d lsquoeacutevaluer srsquoil est precirct ou non agrave travailler dans un service confronteacute agrave la mort des patients srsquoil peut accueillir sans trop drsquoangoisse celles des autres patients familles soignants Pour les psychologues de ville elle pose la question drsquoun conventionnement de la profes-sion puisque seuls les psychologues libeacuteraux inteacutegreacutes dans un reacuteseau (dans le cadre drsquoun groupement de coopeacuteration sanitaire) et reacutemu-neacutereacutes agrave la vacation sont pris en charge par lrsquoassurance maladie Elle ajoute Cela limite consideacuterablement lrsquooffre drsquoaide psychologique agrave domicile En mars 2005 la Commission Peacuterinataliteacute en-fants et adolescents recommande le renforcement des eacutequipes de materniteacute en psychologues dans le but de Mieux prendre en charge la santeacute mentale et les troubles psy-chiatriques de la megravere etou du couple En 2005 le rapport Santeacute justice et dange-rositeacutes pour une meilleure preacutevention de la reacutecidive eacutevoque les formations initiale et conti-nue des psychologues dans le domaine meacutedico-leacutegal qui devraient ecirctre renforceacutees afin de mieux prendre en consideacuteration les probleacutema-tiques relatives agrave la dangerositeacute psychiatrique dans la pratique clinique et la mise en oeuvre de lrsquoexpertise peacutenale Le rapporteur revendique la possibiliteacute pour les psychologues drsquoassurer le suivi du condam-neacute et demande laugmentation des effectifs des services peacutenitentiaires drsquoinsertion et de proba-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion notamment par lrsquointeacutegration de psycho-logues au sein des eacutequipes Dans son rapport sur Le fonctionnement des services dinformation et dorientation lIns-pection geacuteneacuterale de lEducation nationale re-met largement en question le statut des con-seillers dorientation-psychologues Des divergences de vues interviennent sou-vent entre ceux qui sont issus de la psycholo-gie essentiellement clinique et les autres qursquoils aient eacutetudieacute la psychologie du travail ou la so-ciologie lrsquoeacuteconomie le droit lrsquohistoire ou la phi-losophie Lrsquoouverture drsquoesprit des seconds aux questions du marcheacute de lrsquoemploi ou mecircme aux perspec-tives de deacutecentralisation est freacutequente Les psychologues cliniciens semblent plus autocen-treacutes individualistes voulant se concentrer sur leur pratique au jour le jour de conseil et drsquoac-compagnement des individus deacutesireux drsquoap-porter des solutions au cas par cas(sic ) Lrsquoeacutevolution de la profession qui a gagneacute le titre de psychologue en 1991 va dans le sens drsquoune eacutemancipation tout agrave fait eacutetonnante Les COPsy constituent un cas singulier drsquoexercice libeacuteral au sein mecircme de la fonction publique Ils nrsquoont en fait de comptes agrave rendre agrave personne lrsquoautori-teacute des directeurs est purement formelle (hellip) Et comble les conseillers ne sont pas inspecteacutes() Le rapport propose de scinder le corps des COPsy avec dun cocircteacute des psychologues de lenseignement secondaire et de lautre des conseillers dinformation et dorientation Les missions des psychologues de leacuteducation seraient centreacutees sur le deacutepistage et lexamen des eacutelegraveves pour lesquels on craint une inadap-tation la preacutevention des deacutecrochages la preacute-vention des conduites addictives en lien avec le personnel meacutedico-social leacutecoute un premier accompagnement dans les cas de profondes souffrances psychologiques le lien avec les services exteacuterieurs hellip Dans les eacutetablissements les psychologues complegraveteraient et renforceraient leacutequipe eacutedu-cative et meacutedico-sociale Pour lIGEN il est manifeste que les conseil-lers drsquoorientation-psychologues nrsquoont ni le temps ni les compeacutetences ni les moyens de faire face seuls agrave lrsquoensemble des missions que les usagers (au sens large du terme) pour-raient attendre drsquoeux Si beaucoup de responsables ministeacuteriels re-
grettent fortement lappellation de psycho-logues du statut de 1991 il faut reconnaicirctre que peu de personnels souhaitent labrogation totale de cette appellation y compris parmi ceux qui ont eacuteteacute recruteacutes avant 1990 sans avoir fait deacutetudes initiales de psychologie Il convient aussi de signaler quil y a unanimiteacute pour consideacuterer quon ne peut pas faire de psy-chologie clinique ou theacuterapeutique dans les eacutetablissements Tous pensent mecircme que cest impossible En fait en 1991 il aurait fallu creacuteer par la loi un statut de conseiller qui existe dans dautres pays Pour autant les auteurs concluent que la ques-tion de labrogation du statut de psychologue a eacuteteacute poseacutee mais ils ont consideacutereacute que ce neacutetait pas opportun dans le contexte actuel Mais le recrutement doit ecirctre diversifieacute Il srsquoagit de mettre un terme au monopole des li-cencieacutes en psychologie qui de lrsquoavis de la grande majoriteacute de nos interlocuteurs et notam-ment de lrsquoencadrement des services drsquoorienta-tion et des formateurs nrsquoest nullement imposeacute par lrsquoexercice des missions et a reacuteduit la diver-siteacute intellectuelle qui caracteacuterisait le corps avant 1991 En outre le poids excessif des li-cencieacutes en psychologie a favoriseacute des attitudes drsquoindividualisme et de repli au deacutetriment des autres facettes de la profession Dans le rapport fait au nom de la mission dinformation sur la famille et les droits de lenfant en 2006 Valeacuterie Peacutecresse et Patrick Bloche recommandent de faire prendre en charge par lassurance-maladie les consulta-tions des mineurs et de leur famille aupregraves de psychologues sur prescription meacutedicale afin dameacuteliorer la prise en charge des enfants et de leur famille On reparle encore de formation des psycho-logues en 2006 avec le rapport de la mission parlementaire de Jean-Paul GARRAUD sur la dangerositeacute Il comprend un chapitre impor-tant relatif agrave lexpertise psychologique et au psychologue expert on eacutetait agrave leacutepoque en pleine affaire dOutreau Il souligne encore une fois lrsquoheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute des diplocircmes tous les psy-chologues ne suivent pas une formation en psychopathologie clinique et peuvent avoir des formations theacuteoriques tregraves diverses Il conviendrait de redeacutefinir le champ drsquointerven-tion des psychologues fondeacute sur leur qualifica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 28
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion professionnelle et drsquoenvisager les possibili-teacutes de lrsquoarticulation de leurs expertises avec celles effectueacutees par les psychiatres Organiser une confeacuterence de consensus sur lrsquoexpertise psychologique afin de reacutefleacutechir sur les objectifs et les limites des expertises psy-chologiques lrsquoidentiteacute lrsquoeacutethique et la deacuteontolo-gie des experts leur solitude ainsi que sur les modaliteacutes pertinentes de reacutealisation des exper-tises et de leur eacutevaluation Ceci est resteacute un vœu pieux agrave ce jour hellip Il revendique Une plus grande qualification des formations des psychologues Outre une maturiteacute professionnelle une forma-tion particuliegravere est neacutecessaire (connaissance des diffeacuterents types et champs drsquoexpertise des proceacutedures judiciaires aspects criminolo-giques deacuteontologiqueshellip) Cette speacutecialisation pourrait deacutecouler drsquoun cur-sus post-universitaire en psychologie clinique et pathologique agrave lrsquoexemple des DU sur la pratique de lrsquoexpertise psychologique ou la psy-chologie leacutegale (Universiteacute Lille Aix-Marseille Rouen Poitiershellip) En 2007 les psychologues sont les stars du rapport de lIGAS consacreacute agrave Gestion et utili-sation des ressources humaines dans 6 eacuteta-blissements de santeacute speacutecialiseacutes en psy-chiatrie le terme psychologue apparaicirct 224 fois Les reacuteveacutelations sont lagrave encore fracassantes Il faut adapter le statut et le cursus de forma-tion et de carriegravere des psychologues pour mieux utiliser leurs compeacutetences et les inteacutegrer dans les eacutequipes Les problegravemes de peacutenurie de psychiatres doivent ecirctre anticipeacutes par une seacuterie de mesures - augmenter les attributions des psychologues en leur permettant dans certains cas deffec-tuer des actes jusque lagrave reacuteserveacutes aux meacutede-cins - ouvrir une formation de manager de structure psychiatrique agrave des cadres intermeacutediaires type cadre supeacuterieur de santeacute psychologue cadre socio-eacuteducatif Il serait possible douvrir le concours de cadre supeacuterieur de santeacute agrave dautres professions soi-gnantes psychologues eacuteducateurs speacuteciali-seacutes assistants de service social Les psychologues peuvent-ils remplacer les psychiatres et agrave quel prix Ce nest pas seulement parce quon manque
de psychiatres cest aussi parce que les psy-chologues repreacutesentent une certaine tradition de la psychiatrie europeacuteenne pas uniquement arc-bouteacutee sur les traitements chimiotheacuterapeu-tiques Cest aussi parce quils possegravedent en principe des compeacutetences permettant de deacuteve-lopper des aspects tregraves importants en psychia-trie - eacutevaluation des capaciteacutes cognitives et mise au point de programmes de reacutehabilitation - psychotheacuterapies de diverses natures eacutegale-ment de soutien dans les cas de traitement meacute-dicamenteux lourd - supervision de groupes de soignants pour eacuteviter les pheacutenomegravenes de chroniciteacute de mal-traitance - encadrement deacutequipes notamment de pro-fessionnels dhorizons divers Il est clair quil serait eacutegalement inteacuteressant de pouvoir leur confier des accueils de 1
egravere ligne
degraves lors que nombre de demandes de consul-tation signifient plutocirct une souffrance psychique quune pathologie psychiatrique La question de savoir sils devraient avoir le droit de prescrire ou de renouveler des pres-criptions au long cours meacuterite decirctre poseacutee Une telle eacutevolution neacutecessiterait une speacutecialisa-tion apregraves le diplocircme geacuteneacuteral de psychologue peut-ecirctre linstauration de ce que daucuns ap-pellent un internat et cette fois commun avec linternat en psychiatrie En attendant davoir notre ordonnancier si tant est que nous le souhaitions les tacircches speacuteci-fiques en psychiatrie pour les psychologues tout ce qui sapparente au bilan agrave leacutevaluation aux psychotheacuterapies de diverses obeacutediences Voilagrave ce que pensent les politiques et les admi-nistratifs de notre meacutetier mais ccedila nest pas la reacutealiteacute de notre meacutetier Tout dabord quelques chiffres sur la deacutemogra-phie des psychologues Nous sommes de plus en plus nombreux de 5500 eacutequivalents temps plein en 1997 agrave 11500 en 2009 preuve que notre rocircle est de plus en plus reconnu par les eacutetablissements Il reste encore beaucoup agrave faire en clinique priveacutee ougrave ils ne sont que 350 ETP La preacutecariteacute est tou-jours le lot de notre profession Il y a deux fois plus de psychologues agrave temps partiel que dans les autres emplois non meacutedicaux 40 de psy-chologues sont agrave temps partiel dans le public plus des trois quarts dans le priveacute soit le
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double La profession est tregraves feacuteminiseacutee avec 8 femmes sur 10 psychologues elles ont en moyenne cinq ans de moins que leurs con-fregraveres masculins la moyenne dacircge eacutetant de 42 ans Les femmes de moins de 40 ans repreacute-sentent 38 des effectifs nationaux La densiteacute nationale des psychologues est de 37 psychologues pour 100000 habitants soit un psychologue pour 2700 Par comparaison celle des psychiatres est de 22 pour 100000 habitants La densiteacute en psychologues libeacuteraux est de 7 Concernant les secteurs dactiviteacute 87 des psychologues sont salarieacutes Un tiers exerce dans un eacutetablissement de santeacute principalement du secteur public ougrave 7 sur 10 sont employeacutes agrave plein temps Lexercice en libeacuteral ne concerne que 8 des effectifs Comment les psychologues perccediloivent-ils leur meacutetier Dana Castro et Marie Santiago ont publieacute dans Le Journal des psychologues ndeg 233 deacutec 2005- janv 2006 les Reacutesultats dune enquecircte na-tionale sur Evolution des repreacutesentations et construction identitaire du meacutetier de psy-chologue Les donneacutees ont eacuteteacute recueillies agrave partir de 93 questionnaires suite agrave une enquecircte nationale lanceacutee par le Journal des Psychologues aupregraves de ses lecteurs fin 2004 Les reacutesultats montrent que les psychologues ont une image assez steacutereacuteotypeacutee de leur meacute-tier qui ne se modifie pas significativement ni au cours des eacutetudes ni agrave lentreacutee dans la vie professionnelle Au deacutebut de leurs eacutetudes 50 des reacutepondants perccediloivent le psychologue comme un speacutecialiste de laide et de leacutecoute Pour 27 cest un meacutetier qui sexerce en solitaire 30 disent ne pas en avoir une repreacutesentation preacute-cise La repreacutesentation de la profession eacutevolue pro-gressivement Apregraves quelques anneacutees dexer-cice le psychologue perccediloit davantage sa fonc-tion certes encore comme un meacutetier daide et deacutecoute pour la moitieacute dentre eux mais qui sexerce en eacutequipe pour 21 selon des moda-liteacutes et avec des outils speacutecifiques au premier rang desquels lentretien et lexamen psycholo-giques pour 18 des reacutepondants La repreacutesentation du meacutetier se modifie-t-elle au
cours du cursus universitaire - Non pour 22 des reacutepondants pour lesquels elle reste identique tout au long du parcours - Oui pour 36 pour lesquels elle se modifie gracircce aux enseignements theacuteoriques en lien avec la clinique et la psychopathologie - Encore oui pour 34 pour lesquels elle se transforme gracircce aux stages et au contact des professionnels Dune maniegravere geacuteneacuterale les psychologues comptent sur eux-mecircmes et leurs compeacutetences en matiegravere dexpeacuterience dapprentissage sur le tas de solidariteacute et de travail en eacutequipe plutocirct que sur la qualification qui elle valorise les titres les connaissances formelles la revendi-cation de lautonomie et les distinctions statu-taires Seul 1 des reacutepondants eacutevoque les no-tions dorganisation du travail en terme de sta-tut professionnel de cadre A de reacutemuneacuteration de formation ou de titre proteacutegeacute de psycho-logue Autant dire quil reste beaucoup de tra-vail pour avoir une repreacutesentation profession-nelle qui puisse ecirctre partageacutee tant par les psy-chologues que par leurs partenaires profes-sionnels ougrave compeacutetence personnelle et qualifi-cation professionnelle sont indispensables Pourtant 78 des reacutepondants deacutecrivent des difficulteacutes au sein de leur institution Un sur 5 estime que ses collegravegues ne connaissent pas son meacutetier et quils en ont une image neacutegative qui est veacutecue comme deacutevalorisante 17 se sentent isoleacutes dans les eacutequipes avec lesquelles ils travaillent Une eacutetude plus reacutecente puisquelle date de 2010 vient compleacuteter la preacuteceacutedente il sagit de celle de Elise Marchetti Claude Lafrogne et Sandrine Schoenenberger eacutegalement publieacutee dans le Journal des psychologues ndeg 283 deacutec 2010- janv 2011 et qui sintitule Que pensent-ils de nous Etude des repreacutesentations so-ciales du psychologue Que pensent les psychologues deux-mecircmes Ils eacutevoquent lobjet de leur travail la psycheacute le cadre de leur activiteacute (cadre theacuteorique pra-tique eacutethique) et le contenu mecircme de leur tra-vail agrave savoir leacutevaluation et laccompagnement Chez les professionnels du meacutedico-social nos collegravegues deux repreacutesentations saffrontent Les eacuteducateurs techniques et les reacuteeacuteducateurs (peacutedicure podologue masseur kineacutesitheacutera-peute ergotheacuterapeute psychomotricien ortho-
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phoniste orthoptiste ou dieacuteteacuteticien) ont une vi-sion neacutegative le psychologue se confond avec le psychanalyste le charlatan en lien eacutetroit avec la psychiatrie la folie Les personnels administratifs et les eacuteducateurs ont une vision plus positive et concregraveteet sont plus attacheacutes au cadre cadre de travail du psychologue lui-mecircme mais aussi la contribu-tion quil peut apporter dans le cadre dun tra-vail pluridisciplinaire Quant aux sujets de la population geacuteneacuterale on doit distinguer ceux qui ont deacutejagrave eu recours au psychologue et ceux qui nont jamais consulteacute Ceux qui nont jamais consulteacute ont un discours plutocirct positif mais abstrait centreacute sur la dualiteacute problegraveme-reacutesolution (motifs-beacuteneacutefices) Les autres qui sont plus jeunes et plutocirct des femmes cherchent agrave deacutefinir ce quest un psy-chologue avec une vision plus concregravete de notre activiteacute de nos meacutethodes et une eacutevoca-tion de la sphegravere affective et du veacutecu person-nel Toutefois les sujets ayant deacutejagrave consulteacute un psychologue ont tendance agrave le confondre avec le speacutecialiste meacutedical cest-agrave-dire le psy-chiatre Dans Transformation de la psychiatrie et pratiques des psychologues LASAR Labora-toire danalyse socio-anthropologique du risque Universiteacute de Caen 2002 sous la direction dAnne Golse Le discours dAnne Golse sociologue est plus optimiste Elle eacutecrit La profession de psycho-logue se visibilise de plus en plus que ce soit dans la prise en charge des malades mentaux ou de la souffrance psychique On le voit dans la croissance deacutemographique certes encore modeste de cette profession mais cela sappreacute-hende eacutegalement dans la maniegravere dont les textes administratifs mentionnent (psychiatres psychologues) ou bien (psychiatres ou psycho-logues) Mais cette eacutemergence nouvelle dune certaine pariteacute dans les textes vient eacutegalement reconnaicirctre que de plus en plus de demandes sont directement adresseacutees au psychologue et marque lindividualisation de cette profession agrave coteacute de celles de psychiatres ou dinfirmiers Dans un rapport au Conseil national de lOrdre des meacutedecins en 2001 sur le suivi du malade mental il est dit que les psychologues pren-nent de plus en plus de place dans le monde de la psychiatrie relayant ou mecircme remplaccedilant les psychiatres dont le nombre va en diminuant
tregraves seacuterieusement Toutefois les psychologues ne sont pas satis-faits de leur place au sein de la psychiatrie pu-blique ni personnel meacutedical ni personnel pa-rameacutedical ils elles ont du mal agrave trouver leur place dans lunivers hospitalier marqueacute par lexistence de ce partage clair Le psychologue agrave la fois dedans et dehors eacuteprouve une ab-sence de lien avec linstitution et pour certains un sentiment dinexistence institutionnelle chro-nique Le psychologue nest pas dans le soin mecircme sil contribue aux soins ce qui renvoie agrave sa neacutecessaire place dexteacuterioriteacute et agrave la trans-versaliteacute de sa fonction Comme leacutecrivait Co-lette Chiland en 1983 le statut du psychologue clinicien est une position intermeacutediaire et sin-guliegravere qui le maintien dans un espace pro-fessionnel eacutetriqueacute Certains ressentent de lamertume agrave ecirctre reacuteduits au rocircle de psychotheacute-rapeutes etou estiment ne pas ecirctre reconnus comme des professionnels agrave part entiegravere ils se qualifient de sous-psychiatres quand deacutepen-dants du psychiatre ils ne peuvent directement recevoir les patients qui font appel agrave eux Cette revendication des psychologues est devenue pour certains un carcan qui limite le champ de leur intervention Les psychologues sont lobjet dambivalence Ils peuvent ecirctre consideacutereacutes comme la profession montante en raison de la chute de la deacutemographie des psychiatres et de la de-mande sociale qui leur est adresseacutee les psy-chologues pourraient ecirctre en 1
egravere ligne pour
supplanter ces absences mais la mise en cause de leur statut et de leur formation par le reacutecent statut de psychotheacuterapeute les fragilise Pour conclure je citerai Marc Turpyn au col-loque Le psychologue clinicien le singulier et le collectif La profession de psychologue est-elle un symptocircme de lrsquoinstitution hospita-liegravere Un certain nombre de signes permet depuis longtemps de le penser son identiteacute indeacutefinis-sable sa situation drsquoexception dans un en-semble institutionnel globalement meacutedical son inexistence dans les instances de lrsquohocircpital les oublis reacuteguliers dont elle fait lrsquoobjet dans les textes sa position institutionnelle hors hieacuterar-chie les interrogations reacutecurrentes sur ses sta-tuts lrsquoincompreacutehension de ses outils de travail par les administrations etc Ce qui est nouveau ce sont les nombreuses
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tentatives pour mettre un terme agrave cette position symptomatique volonteacute de faire entrer la pro-fession dans le champ meacutedical fiches meacutetier deacutefinition de compeacutetences introduction de speacute-cialiteacutes preacute-identifieacutees en articulation avec les neurosciences et les approches comportemen-tales circulaire drsquoapplication visant au controcircle ou agrave la disparition des activiteacutes de FIR etc Nrsquooublions pas que la preacutecariteacute entretenue des psychologues le deacutesir de reconnaissance la peur ndash comme lrsquoa montreacute reacutecemment la mise en application du deacutecret sur le titre de psycho-theacuterapeute ndash poussent aussi agrave la normalisation Normaliser la profession serait sans doute la reacuteduire agrave lrsquoombre drsquoelle-mecircme
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Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebut
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine
M AI 1999 PROPOSITION DrsquoAMENDEMENT
PAR B ACCOYER
Devant lrsquoabsence de reacuteglementation autour de lrsquoexercice de la psychotheacuterapie et dans un contexte de lutte contre les deacuterives sectaires sous couvert de psychotheacuterapie un premier amendement est proposeacute par Bernard Accoyer meacutedecin et deacuteputeacute Ce premier amendement porte sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute il est proposeacute le 4 mai 1999 agrave lrsquooccasion de lrsquoexamen du projet de loi relatif agrave la Couverture maladie universelle (CMU) OCTOBRE 1999 PROPOSITION DE LOI PAR
BACCOYER
Lrsquoamendement preacuteceacutedent ayant eacuteteacute refuseacute BAccoyer deacutepose le 13 octobre 1999 la pre-miegravere proposition de loi (ndeg 1844) visant agrave reacute-glementer le titre de psychotheacuterapeute Lrsquounique article preacutecise Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est strictement reacuteserveacute drsquoune part aux titulaires du diplocircme de docteur en meacutedecine qualifieacute en psychiatrie et drsquoautre part aux titulaires drsquoun diplocircme de troisiegraveme cycle en psychologie Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve deux professions de la santeacute mentale sont formeacutees par les universiteacutes franccedilaises les psycho-logues et les meacutedecins psychiatres Les condi-tions daccegraves et dutilisation de ces titres sont eacutetroitement encadreacutees par la loi Pourtant il existe un grave vide juridique concernant lexercice de la psychotheacuterapie La profession de psychotheacuterapeute nest en effet agrave ce jour toujours pas deacutefinie par le code de la santeacute publique Ainsi de trop nombreuses per-sonnes insuffisamment qualifieacutees voire non qualifieacutees se deacuteclarent et sinstituent psycho-theacuterapeutes en toute impuniteacute faisant courir les plus grands dangers agrave des personnes qui
par deacutefinition sont vulneacuterables et risquent de voir leur deacutetresse et leur pathologie aggra-veacutees MARS 2000 est enregistreacutee agrave la Preacutesidence de lAssembleacutee nationale sous le ndeg 2288 une pro-position de loi relative agrave lexercice de la profes-sion de psychotheacuterapeute par les deacuteputeacutes MM Jean-Michel Marchand Andreacute Aschieri Mme Marie-Heacutelegravene Aubert MM Yves Cochet et Noeumll Mamegraverehellip AVRIL 2000 PROPOSITION DE LOI DE
BACCOYER
26 avril 2000 nouvelle proposition de loi de BAccoyer Loi ndeg2342 relative agrave la prescription et agrave la conduite des psychotheacuterapies Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve En labsence de disposition du code de la santeacute publique concernant lusage des psychotheacutera-pies quiconque le souhaite peut actuellement visser sa plaque de psychotheacuterapeute et preacutetendre soigner (hellip) Ainsi le rapport de la mission interministeacuterielle de lutte contre les sectes remis en feacutevrier 2000 au Premier mi-nistre signale que certaines techniques psy-chotheacuterapiques sont devenues un outil au ser-vice de linfiltration sectaire et il suggegravere au se-creacutetariat dEtat agrave la Santeacute de cadrer ces pra-tiques Cest la raison pour laquelle javais dores et deacutejagrave deacuteposeacute le 13 octobre 1999 avec quatre-vingt-un collegravegues une proposition de loi ndeg1844 visant agrave reacuteserver lusage du titre de psychotheacuterapeute agrave des personnes titulaires de diplocircmes universitaires() Dans ce con-texte il convient deacutesormais de consideacuterer les psychotheacuterapies comme un veacuteritable traite-ment A ce titre cest leur prescription et leurs applications qui apparaissent comme devant ecirctre reacuteserveacutees agrave des professionnels deacuteten-teurs de diplocircmes universitaires attestant dune formation institutionnelle garantie dune compeacutetence theacuteorique pouvant ecirctre doubleacutee
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dune expeacuterience pratique et dun travail sur soi (hellip) Cependant certains professionnels bien que non-psychiatres ou non-psychologues cliniciens preacutesentent de solides connaissances et une expeacuterience de la patho-logie mentale et du fonctionnement psychique Il convient donc quun jury composeacute duniversi-taires et de professionnels soit habiliteacute agrave vali-der leurs compeacutetences et agrave autoriser lexercice des psychotheacuterapies agrave ceux qui pratiquent deacute-jagrave depuis plus de cinq anneacutees agrave compter de promulgation de la preacutesente loi
PROPOSITION DE LOI Article unique Il est inseacutereacute apregraves larticle L 360 du code de la santeacute publique un article L 360-1 ainsi reacutedigeacute Les psychotheacuterapies sont des traitements meacutedico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes meacutedecins quali-fieacutes en psychiatrie et psychologues clini-ciens Les professionnels qui dispensent des psychotheacuterapies depuis plus de cinq ans agrave la date de promulgation de la preacute-sente loi pourront poursuivre cette activiteacute theacuterapeutique apregraves eacutevaluation de leurs connaissances et pratiques par un jury composeacute duniversitaires et de profession-nels dont la composition est fixeacutee par deacute-cret en Conseil dEtat
OCTOBRE 2003 AMENDEMENT AU PROJET DE LOI SUR LE CODE DE LA SANTEacute PUBLIC B AC-
COYER
8 Octobre 2003 agrave lrsquoAssembleacutee nationale B Ac-coyer deacutepose un amendement ndeg71 Les psychotheacuterapies sont des traitements meacute-dico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes en psychiatrie de psychologues cliniciens et meacutedecins ayant sui-vis les formations requises Crsquoest la 3eme version (ndeg336) qui est adopteacutee agrave lrsquounanimiteacute le 8 octobre 2003 par lrsquoAssembleacutee Nationale Les psychotheacuterapies constituent des outils theacuterapeutiques utiliseacutes dans le traite-ment des troubles mentaux Les diffeacuterentes ca-teacutegories de psychotheacuterapie sont fixeacutees par deacute-cret du ministre chargeacute de la Santeacute Leur mise en œuvre ne peut relever que de meacutedecins
psychiatres ou de meacutedecins et psychologues ayant les qualifications professionnelles re-quises fixeacute par ce mecircme deacutecret Lrsquoagence Na-tionale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute apporte son concours agrave lrsquoeacutelaboration de ces conditions (hellip) On ne parle plus ici de lrsquousage drsquoun titre de psy-chotheacuterapeute mais drsquoune deacutefinition de la psy-chotheacuterapie JANVIER 2004 AMENDEMENT ACCOYER ANNU-
LANT LE PREacuteCEacuteDENT
Le 19 janvier 2004 lrsquoamendement Accoyer de-venu entre temps amendement 363 About-Matteacutei annulant le preacuteceacutedent est voteacute par le Seacutenat en ces termes Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacute-serveacute aux professionnels inscrits au registre national de psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dis-penseacutes de lrsquoinscription les titulaires drsquoun di-plocircme de docteur en meacutedecine les psycho-logues titulaires drsquoun diplocircme drsquoeacutetat et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations Les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent article sont fixeacutees par deacutecret Ici les psychanalystes reacuteguliegraverement enregis-treacutes dans les annuaires de leurs associations font leur apparition dans la liste des personnes habiliteacutees agrave user du titre de psychotheacuterapeute
AVRIL 2004 AMENDEMENT DUBERNARD
8 avril 2004 est voteacute agrave lrsquoAssembleacutee nationale lrsquoamendement devenu depuis amendement 344 preacutesenteacute par Jean-Marie Dubernard rap-porteur de la commission des affaires cultu-relles familiales et sociales
POLITIQUE DE SANTE PUBLIQUE (Nordm 1364)
(DEUXIEME LECTURE)
Amendement Nordm 344 preacutesenteacute par M Jean-Michel Dubernard rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles familiales et sociales Article 18 quater La conduite des psychotheacuterapies neacuteces-site soit une formation theacuteorique et pra-tique en psychopathologie clinique soit une formation reconnue par les associa-tions de psychanalystes (hellip) Lrsquousage du
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au registre national des psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dispen-seacutes de lrsquoinscription sur la liste viseacutee agrave lrsquoali-neacutea preacuteceacutedent les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psy-chologue dans des conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 portant diverses dispositions drsquoordre social nordm85-772 du 25 juillet 1985 et les psychanalystes reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans les annuaires de leurs asso-ciations
Dans lrsquoexposeacute sommaire on retrouve pour conduire des psychotheacuterapies il est neacutecessaire drsquoavoir suivi une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie La condition de lrsquoinscrip-tion sur le registre national est maintenue (hellip)Lrsquoamendement continue agrave preacutevoir que les titu-laires drsquoun diplocircme de meacutedecine les psycho-logues et les psychanalystes sont dispenseacutes de lrsquoenregistrement Ces professionnels devront satisfaire agrave lrsquoobligation de formation mention-neacutee au premier alineacutea de lrsquoarticle
9 AOUT 2004 LOI SUR LE TITRE DE PSYCHOTHEacute-
RAPEUTE ARTICLE 52
Le 28 juillet 2004 a eu lieu la reacuteunion de la commission mixte paritaire qui reacutevise lrsquoamende-ment qui est examineacute en seacuteances publiques par lrsquoAssembleacutee Nationale et le Seacutenat le 30 juil-let 2004 et devient le 09 aoucirct 2004 la loi ndeg2004-806 lrsquoarticle 52 relative agrave la politique de santeacute publique Sa parution est dans le JO ndeg185 du 11 aoucirct 2004 page 14277 texte ndeg 4 Dans cette loi larticle 18 quater revu par la commission mixte a eacuteteacute inteacutegralement repris et devient larticle 52 de la dite Loi
Article 52 Lusage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes Linscription est enregistreacutee sur une liste dresseacutee par le repreacutesentant de lEtat dans le deacutepartement de leur reacutesidence profes-sionnelle Elle est tenue agrave jour mise agrave la disposition du public et publieacutee reacuteguliegravere-ment Cette liste mentionne les formations suivies par le professionnel En cas de transfert de la reacutesidence professionnelle dans un autre deacutepartement une nouvelle
inscription est obligatoire La mecircme obli-gation simpose aux personnes qui apregraves deux ans dinterruption veulent agrave nou-veau faire usage du titre de psychotheacutera-peute Linscription sur la liste viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent est de droit pour les titulaires dun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par larticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions dordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations Un deacutecret en Conseil dEtat preacutecise les modaliteacutes dapplication du preacutesent article et les conditions de formation theacuteoriques et pratiques en psychopathologie clinique que doivent remplir les personnes viseacutees aux deuxiegraveme et troisiegraveme alineacuteas
Cet article introduit comme condition de lrsquousage du titre une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie clinique alors qursquoil stipule dans le mecircme temps que lrsquoinscription est de droit pour certains professionnels ce qui pose-ra beaucoup de problegravemes pour lrsquoeacutecriture des projets de deacutecret 2005-2009 AVANT-PROJET DrsquoAPPLICATION DE
LA LOI
Les concertations avec les professionnels con-cerneacutes par lrsquoeacutecriture drsquoun avant-projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute deacutebutent en 2005 Beaucoup de versions vont voir le jour et susciter de vives reacuteactions des professionnels Le ministegravere reacuteunit les organi-sations professionnelles agrave plusieurs reprises pour leur soumettre ces projets Quelques exemples des diffeacuterentes versions de lrsquoavant-projet de deacutecret de loi Version de lrsquoavant projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute 10 janvier 2006
Art1 Lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute neacutecessite une deacutemarche volontaire de la part des professionnels pratiquant les psychotheacuterapies Inscription sur une liste deacutepartementale (hellip) Art2 Lrsquoinscription sur la liste deacutepartemen-
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tale est subordonneacutee pour les professionnels viseacutes au 3
egraveme ali-
neacutea lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique lrsquoattestation de lrsquoobtention du diplocircme de docteur en meacutedecine ou de lrsquoun des di-plocircme viseacutes au deacutecret ndeg 90-255 du 22 mars 1990 modifieacute (liste des diplocircmes permettant de faire usage professionnel du titre de psychologue) ou de lrsquoinscrip-tion agrave un annuaire drsquoassociations de psy-chanalystes pour les autres professionnels
Lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique Le cas eacutecheacuteant lrsquoattestation de lrsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profession reacute-glementeacutee dans le champ sanitaire et so-cial Une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le do-maine de la pratique de la psychotheacutera-pie parmi les quatre approches sui-vantes analytique systeacutemique cognitivo-comportementaliste inteacutegrative La deacuteclaration sur lrsquohonneur mentionne notamment lrsquointituleacute et la date drsquoobtention du diplocircme la dureacutee de la formation le nom et les coordonneacutees de lrsquoorganisme de formation public ou priveacute qui a deacutelivreacute le diplocircme (hellip) Art8 Le cahier des charges susviseacute deacutefi-nit les modaliteacutes de la formation en psy-chopathologie clinique laquelle est drsquoun niveau master Il vise agrave permettre au pro-fessionnel souhaitant user du titre de psy-chotheacuterapeute drsquoacqueacuterir Une connaissance du fonctionnement psychique Une capaciteacute de discrimination de base des situations pathologiques en santeacute mentale Une connaissance de la diversiteacute des theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie Une connaissance des 4 principales ap-proches de psychotheacuterapie vali-deacutees scientifiquement (analytique systeacute-mique cognitivo-comportementaliste in-teacutegrative) (hellip)
Il est eacutevoqueacute un niveau master pas de men-
tion drsquoune formation universitaire la loi ne parle que drsquoune formation agrave la psychopathologie cli-nique et stipule ce que seraient les approches psychotheacuterapiques valables scientifiquement ce qui nrsquoest pas sans questionner Titre ouvert aux deacutetenteurs drsquoun diplocircme relatif agrave une pro-fession reacuteglementeacutee dans les champs sani-taires et sociaux ne correspond pas aux preacute requis de la formation en psychopathologie cli-nique Par la suite le descriptif des diffeacuterentes ap-proches de psychotheacuterapie disparaicirct au profit drsquoune connaissance des principales ap-proches utiliseacutees en psychotheacuterapie sans preacute-cision Est indiqueacute le nombre drsquoheures de for-mation theacuteorique (150 heures dans une ver-sion 500 dans une autrehellip) et de stage pra-tique Est stipuleacute que la formation en psychopa-thologie clinique peut ecirctre confieacutee agrave lrsquoUniversiteacute ou agrave des organismes passant convention avec lrsquoUniversiteacute Pour les professionnels inscrits de droit on retrouve les docteurs en meacutedecine quelles que soient leurs speacutecialiteacutes les psycho-logues quelle que soit leur formation et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement inscrits dans un an-nuaire drsquoassociation de psychanalystes ce qui nrsquoest pas un titre proteacutegeacute On exige par ailleurs de ces mecircmes professionnels une formation compleacutementaire en psychopathologie viseacutee agrave lrsquoalineacutea 4 de lrsquoarticle 52 ce qui posera pro-blegraveme certaines professions pouvant faire usage du titre de psychotheacuterapeute de droit doivent dans le mecircme texte de loi attester drsquoune formation compleacutementaire Pour tous les professionnels le cas eacutecheacuteant une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le domaine de la pratique de psychotheacuterapie une attestation drsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profes-sion reacuteglementeacutee par le code de la santeacute pu-blique ou le code de la famille et de lrsquoaction so-ciale Le cahier des charges deacutefinit les modaliteacutes de la formation en psychopathologie clinique pour acqueacuterir ou valider une connaissance des fonctionnements et des processus psychiques une connaissance des critegraveres de discerne-ment des grandes pathologies psychiatriques une connaissance des diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie une connais-sance des principales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le Ministegravere de la Santeacute ne parvient pas agrave faire aboutir lrsquoeacutecriture de deacutecrets drsquoapplication de-vant faire face aux contestations des diffeacuterents professionnels Au printemps 2008 le Ministegravere de la Santeacute deacutecide drsquoarrecircter un des projets de deacutecret drsquoap-plication de lrsquoarticle 52 soumis au CNESER (Conseil National de lrsquoEnseignement Supeacuterieur et de la Recherche) le 16 juin 2008 Dans la note de preacutesentation on retrouve il ne srsquoagit pas de creacuteer une nouvelle profession ni drsquoen-cadrer la formation et la pratique de la psycho-theacuterapie mais de preacuteciser les conditions dans lesquelles il peut ecirctre fait usage de ce titre Il y est exigeacute pour tous professionnels drsquoavoir valideacute une formation theacuteorique de 400 heures (cest-agrave-dire infeacuterieure au total de la formation en psychopathologie clinique drsquoun Master de Psychologie clinique) et un stage pratique de 5 mois Possibiliteacutes de dispenses partielles de forma-tion selon les cateacutegories professionnelles con-cerneacutees (meacutedecins meacutedecins psychiatres psy-chologues psychanalystes) 18 MARS 2009 PROJET DE LOI PORTANT REacute-
FORME DE LrsquoHOcircPITAL ET RELATIF AUX PATIENTS
Agrave LA SANTEacute ET AUX TERRITOIRES
23 JUILLET 2009 ARTICLE 91 DE LA LOI HPST
Lrsquoarticle 91 de la loi HPST du 21 juillet 2009 opegravere une modification de lrsquoarticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 pour reacutesoudre les difficulteacutes rencontreacutees agrave eacutecrire un deacutecret drsquoapplication Il modifie lrsquoarticle 52 portant sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 52 de la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 modifieacute par lrsquoarticle 91 de la loi ndeg 2009
-879 du 21 juillet 2009 Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes [hellip] Un deacutecret en Conseil drsquoEacutetat preacutecise les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent ar-ticle et les conditions de formation theacuteo-rique et pratique en psychopathologie cli-nique que doivent remplir lrsquoensemble des professionnels souhaitant srsquoinscrire au registre national des psychotheacuterapeutes Il deacutefinit les conditions dans lesquelles les ministres chargeacutes de la santeacute et de lrsquoen-
seignement supeacuterieur agreacuteent les eacutetablis-sements autoriseacutes agrave deacutelivrer cette forma-tion Lrsquoaccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires drsquoun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit drsquoexercer la meacutedecine en France ou drsquoun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-chologie ou la psychanalyse Le deacutecret en Conseil drsquoEacutetat deacutefinit les conditions dans lesquelles les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions drsquoordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations peuvent beacute-neacuteficier drsquoune dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique [hellip] Le deacutecret en Conseil drsquoEtat preacutecise eacutegale-ment les dispositions transitoires dont pourront beacuteneacuteficier les professionnels jus-tifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacuterapie agrave la date de publication du deacutecret
Il nrsquoy a plus de notion de professionnels inscrits de droit la formation en psychopatho-logie clinique est exigible de tous et lrsquoaccegraves agrave cette formation requiert un niveau de diplocircme eacuteleveacute titre de docteur en meacutedecine master de psychologie ou de psychanalyse Y sont tou-jours mentionneacutes les psychanalystes reacuteguliegrave-rement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations 20 MAI 2010 DEacuteCRET DrsquoAPPLICATION RELATIF Agrave LrsquoUSAGE DU TITRE DE PSYCHOTHEacuteRAPEUTE (CF
ANNEXE)
Le 20 mai 2010 paraicirct le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute publieacute au JO ndeg0117 du 22 mai 2010 (deacutecret ndeg 2010-534) Ce deacutecret deacutefinit les critegraveres de formation en psychopathologie clinique exigeacutee fixe les con-ditions drsquoagreacutement des eacutetablissements de for-mation preacutecise les dispenses partielles ou to-tales de formation dont peuvent beacuteneacuteficier les meacutedecins psychologues et psychanalystes et enfin arrecircte les dispositions transitoires appli-cables aux psychotheacuterapeutes en exercice agrave
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
la date de publication du deacutecret Il nrsquoy est tou-jours pas fait mention de formation agrave la pra-tique psychotheacuterapique Il preacutecise une condition de diplocircme minimal pour avoir accegraves agrave cette formation Elle est reacute-serveacutee aux personnes titulaires drsquoun doctorat de meacutedecine ou drsquoun master ayant pour men-tion ou pour speacutecialiteacute la psychologie ou la psy-chanalyse Les psychiatres sont exempteacutes de formation compleacutementaire Les meacutedecins non psy-chiatres seront contraints agrave une formation com-pleacutementaire On retrouve la notion de psychologue clinicien qui ne correspond pas agrave un titre proteacutegeacute comme tel ni un parcours de formation identifieacutee Les psychologues clini-ciens nrsquoont pas de dispense totale et devront se soumettre agrave une formation theacuteorique et pra-tique compleacutementaire La formation theacuteorique comprend 400 heures drsquoenseignement pour acqueacuterir ou valider des connaissances relatives au deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques aux critegraveres de discernement des grandes patholo-gies psychiatriques aux diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie aux princi-pales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie Le stage est drsquoune dureacutee minimale de cinq mois Les professionnels justifiant drsquoau moins 5 ans de pratique de la psychotheacuterapie peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale apregraves avis de la commission reacutegionale drsquoinscription Le deacutecret ne preacutecise pas la cateacutegorie professionnelle nrsquoappartenant agrave aucune des cateacutegories preacuteceacutedentes que lrsquoon voit en effet apparaicirctre dans lrsquoannexe du deacutecret Le deacutecret a renforceacute le niveau exigeacute pour agreacuteer les eacutetablissements de formation Les psychologues notamment par le biais de leurs organisations professionnelles et syndi-cales ont deacuteposeacute un recours juridique contre le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute le 12 juillet 2010 Ils contestaient notam-ment que lrsquoon exige drsquoeux des formations com-pleacutementaires qui sont deacutejagrave incluses dans leur formation initiale Le recours a eacuteteacute examineacute le mercredi 21 sep-tembre 2011 Le rapporteur public a conclu au rejet de lrsquoensemble des requecirctes porteacute contre le deacutecret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 arrecirct du Conseil drsquoEtat du 27 octobre 2011 Ce deacutecret
est jugeacute conforme agrave lrsquoarticle 52 de la loi ndeg2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique modifieacutee par la loi ndeg2011-940 du 10 aoucirct 2011-art 47 (V) Les organisations professionnelles de psychologues sont en pourparler et eacutevoquent une modification de lrsquoannexe du deacutecret qui pourrait ecirctre en reacuteeacutecri-ture pour mettre agrave pariteacute psychologues et psy-chiatres pour la dispense totale de lrsquoenseigne-ment theacuteorique et du stage srsquoil a eacuteteacute effectueacute pendant les eacutetudes Fin 2011 les bureaux concerneacutes au Ministegravere de la Santeacute et au Ministegravere de lrsquoenseignement Supeacuterieur et de la Recherche examinent un projet de modification de lrsquoannexe du deacutecret du 20 mai 2010 afin de preacutevoir une dispense de formation theacuteorique compleacutementaire et de stage pour les titulaires du titre de psychologue ayant accompli le stage professionnel lieacute agrave lrsquoob-tention de ce titre dans les conditions preacutevues agrave lrsquoart4 du deacutecret du 20 mai 2010 Une dis-pense de toute formation theacuteorique mais reacuteali-sation drsquoun stage de 2 mois dans les conditions de lrsquoart4 du deacutecret pour les titulaires du titre de psychologue dont le stage professionnel lieacute agrave lrsquoobtention de ce titre nrsquoa pas eacuteteacute reacutealiseacute dans les conditions de cet article (voir sites des orga-nisations professionnelles et syndicales)
CONCLUSION
Au deacutecours de ce long cheminement pour lrsquoeacutela-borer une loi portant sur lrsquousage du titre de psy-chotheacuterapeute on remarquera lrsquoimpasse faite sur la formation agrave la pratique de la psychotheacute-rapie elle-mecircme Ce titre pourra ecirctre en effet deacutelivreacute agrave des personnes dont on nrsquoaura pas exi-geacute de formation agrave la psychotheacuterapie mais une formation agrave la psychopathologie clinique Une confusion suppleacutementaire dans la visibiliteacute des professions et leurs missions est introduite par le biais drsquoun nouveau titre de psychotheacuterapeute Il est agrave souligner que concernant les profes-sions reacuteglementeacutees dont font partie les psy-chologues la pratique de la psychotheacuterapie peut sous reacuteserve drsquoune formation compleacute-mentaire personnelle faire partie de leur activi-teacute Le titre de psychotheacuterapeute ne leur est donc pas neacutecessaire (Cf argumentaires sur le site des organisations professionnelles et syn-dicales)
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Decret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 1 Linscription sur le registre national des psy-chotheacuterapeutes mentionneacute agrave larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee est subordon-neacutee agrave la validation dune formation en psy-chopathologie clinique de 400 heures mini-mum et dun stage pratique dune dureacutee mi-nimale correspondant agrave cinq mois effectueacute
dans les conditions preacutevues agrave larticle 4Laccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires dun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit dexercer la meacutedecine en France ou dun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-
chologie ou la psychanalyse Article 2 Par deacuterogation aux dispositions de larticle preacuteceacutedent les professionnels mentionneacutes au cinquiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi preacuteciteacutee sont dispenseacutes en tout ou partie de la formation et du stage dans les conditions
preacutevues par lannexe 1 du preacutesent deacutecret Article 3 La formation mentionneacutee agrave larticle 1er vise agrave permettre aux professionnels souhaitant user du titre de psychotheacuterapeute dacqueacuterir
et de valider des connaissances relatives 1deg Aux deacuteveloppement fonctionnement et
processus psychiques 2deg Aux critegraveres de
discernement des grandes pathologies psy-
chiatriques 3deg Aux diffeacuterentes theacuteories se
rapportant agrave la psychopathologie 4deg Aux
principales approches utiliseacutees en psycho-
theacuterapie Article 4 Le stage pratique mentionneacute agrave larticle 1er seffectue agrave temps plein ou agrave temps partiel de faccedilon continue ou par peacuteriodes fraction-
neacuteesIl est accompli dans un eacutetablissement
public ou priveacute deacutetenant lautorisation men-tionneacutee agrave larticle L 6122-1 du code de la santeacute publique ou agrave larticle L 313-1-1 du code de laction sociale et des familles Toutefois le site du stage ne peut ecirctre le
lieu de travail de la personne en formationLe stage est placeacute sous la responsabiliteacute conjointe dun membre de leacutequipe de for-mation dun eacutetablissement agreacuteeacute en appli-
cation des articles 10 et 15 et dun profes-sionnel de leacutetablissement mentionneacute au
deuxiegraveme alineacutea maicirctre de stageIl donne
lieu agrave un rapport sur lexpeacuterience profes-sionnelle acquise soutenu devant les res-ponsables du stage et un responsable de la
formation de leacutetablissement agreacuteeacuteLe
stage est valideacute par le responsable de la
formation Article 5 Le contenu de la formation theacuteorique et pra-tique mentionneacutee agrave larticle 1er les critegraveres et modaliteacutes de son eacutevaluation ainsi que les objectifs du stage sont deacutefinis par un cahier des charges pris par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur et publieacute au Journal officiel
de la Reacutepublique franccedilaise Article 6 Leacutetablissement de formation sassure au moment de linscription que le candidat jus-tifie de lun des diplocircmes ou titres de forma-tion mentionneacutes au quatriegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 ou dun di-plocircme ou titre de formation reconnu eacutequiva-lent dans un autre Etat membre de lUnion europeacuteenne ou un autre Etat partie agrave lac-
cord sur lEspace eacuteconomique europeacuteen CHAPITRE II LE REGISTRE NATIONAL DES
PSYCHOTHERAPEUTES Article 7 ― Linscription sur la liste deacutepartementale
mentionneacutee au deuxiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 est effectueacutee par le preacutefet du deacutepar-tement de la reacutesidence profession-
nelle principale du demandeurElle
est gratuite Elle doit avoir eacuteteacute effec-tueacutee avant toute utilisation du titre de
psychotheacuterapeuteDans le cas ougrave le
professionnel exerce dans plusieurs sites en tant que psychotheacuterapeute il est tenu de le deacuteclarer et de mention-ner les diffeacuterentes adresses de ses
lieux dexerciceEn cas de change-
ment de situation professionnelle le professionnel en informe les services
du preacutefet - La demande est adresseacutee au directeur geacute-
neacuteral de lagence reacutegionale de santeacute
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dans le ressort duquel se situe la reacute-sidence professionnelle du deman-deur Celui-ci deacutelivre un accuseacute de reacuteception dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute apregraves reacuteception de lensemble des piegraveces justificatives mentionneacutees agrave larticle 8 et assure linstruction pour le compte du preacutefet Il fait connaicirctre agrave ce dernier son avis sur la demande dinscription dans le deacutelai de 45
joursLe silence gardeacute par lautoriteacute
preacutefectorale agrave lexpiration dun deacutelai de deux mois agrave compter de la reacutecep-tion du dossier complet vaut deacutecision
de rejet de la demande - Lensemble des listes deacutepartementales
constitue le registre national des psy-
chotheacuterapeutes Article 8 I ― En vue de leur inscription sur la liste deacutepartementale les professionnels fournis-
sent 1deg La copie dune piegravece didentiteacute 2deg Lattestation de lobtention du titre de for-mation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute publique ou du diplocircme de
niveau master mentionneacute agrave larticle 6 3deg
Lattestation de la formation en psychopa-thologie clinique mentionneacutee agrave larticle 1er agrave lexception des professionnels beacuteneacuteficiant
dune dispense totale 4deg Le cas eacutecheacuteant
lattestation denregistrement pour les pro-fessions et titres reacuteglementeacutes par le code de la santeacute publique et le code de laction
sociale et des familles II - Les professionnels appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee fournissent en outre se-
lon les cas 1deg Soit lattestation de lobten-
tion du titre de formation de speacutecialiste en
psychiatrie 2deg Soit lattestation de lobten-
tion de lun des diplocircmes mentionneacutes au deacutecret du 22 mars 1990 susviseacute permettant de faire usage professionnel du titre de psy-chologue ou lautorisation obtenue en appli-cation des alineacuteas II et III de larticle 44 de
la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee 3deg Soit
lattestation de lenregistrement reacutegulier dans un annuaire dassociation de psycha-
nalystesCette attestation est eacutetablie par le
preacutesident de lassociation Elle est accom-pagneacutee dune copie de linsertion la plus reacute-cente au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise concernant lassociation et men-
tionnant son objetIII - Les modaliteacutes de
preacutesentation de la demande dinscription et notamment la composition du dossier ac-compagnant la demande sont fixeacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute publieacute au Journal officiel de la Reacutepublique fran-
ccedilaise Article 9 La liste deacutepartementale mentionne pour
chaque professionnel 1deg Son identiteacute 2deg
Son lieu dexercice principal et sil y a lieu
ses lieux dexercice secondaires 3deg Le cas
eacutecheacuteant la mention et la date dobtention des diplocircmes relatifs aux professions de santeacute mentionneacutees dans la quatriegraveme partie du code de la santeacute publique ou agrave la profes-sion de psychologue la date de lautorisa-tion obtenue en application des alineacuteas II et III de larticle 44 de la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee ou le nom de lassociation de psy-chanalystes dans lannuaire de laquelle le professionnel est reacuteguliegraverement enregistreacute
4deg Le nom de leacutetablissement de formation
ayant deacutelivreacute lattestation de formation en psychopathologie clinique ainsi que la date
de deacutelivrance de cette attestationCe docu-
ment preacutesente la liste des inscrits selon leur
profession dorigineCette liste est tenue
gratuitement agrave la disposition du public Elle est publieacutee chaque anneacutee au recueil des
actes administratifs de la preacutefecture
CHAPITRE III AGREMENT DES ETABLISSE-
MENTS DE FORMATION Article 10 ― Les eacutetablissements autoriseacutes agrave deacutelivrer
la formation preacutevue agrave larticle 1er sont agreacuteeacutes pour quatre ans par les ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves avis dune commission reacutegionale dagreacute-
ment - La commission reacutegionale dagreacutement est
composeacutee de six personnaliteacutes quali-fieacutees titulaires et de six personnaliteacutes
qualifieacutees suppleacuteantesCes person-
naliteacutes sont nommeacutees pour trois ans
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psy-chanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quaucune des trois cateacutegories de professionnels men-tionneacutees au cinquiegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 sus-viseacutee ne soit majoritaire au sein de la
commissionParmi ces personnali-
teacutes siegravegent deux professeurs des universiteacutes speacutecialiseacutes en psychia-
trie psychologie ou psychanalyseLe directeur geacuteneacuteral de lagence reacute-gionale de santeacute deacutesigne le preacutesident
de la commissionLe mandat des
membres de la commission est re-
nouvelable une fois Article 11 Lavis motiveacute de la commission est rendu
au regard des eacuteleacutements suivants 1deg La
conformiteacute du contenu de la formation pro-poseacutee aux conditions poseacutees aux articles
1er 2 3 4 et 5 du preacutesent deacutecret 2deg La
conformiteacute des conditions et modaliteacutes de validation de la formation theacuteorique et pra-tique preacutevues par leacutetablissement au regard des dispositions preacutevues par larrecircteacute men-
tionneacute agrave larticle 5 du preacutesent deacutecret 3deg
Lengagement de leacutetablissement dans une deacutemarche deacutevaluation de la qualiteacute de la formation dispenseacutee Il fait lobjet dun dos-sier indiquant la structure publique ou pri-veacutee de son choix agrave laquelle sera confieacutee leacutevaluation en cause ainsi que le processus deacutevaluation retenu Ce dossier preacutecise en outre le statut de leacutevaluation la meacutethode utiliseacutee les indicateurs retenus et les diffeacute-rentes phases de leacutevaluation lidentiteacute et la qualification des eacutevaluateurs ainsi que le
calendrier preacutevisionnel de leacutevaluation 4deg
La qualiteacute de leacutequipe peacutedagogique respon-sable qui est composeacutee notamment densei-gnants permanents de professionnels de santeacute ainsi que de personnes autoriseacutees agrave porter le titre de psychotheacuterapeute Cette eacutequipe est placeacutee sous lautoriteacute dun con-seil scientifique comprenant notamment un
titulaire dun titre de formation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute pu-
blique 5deg Ladeacutequation des moyens peacuteda-
gogiques par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes
anneacutees de formation 6deg La conformiteacute des
locaux en matiegravere de seacutecuriteacute et daccessi-biliteacute ainsi que leur adeacutequation par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes anneacutees de for-
mationLes eacutetablissements denseigne-
ment priveacutes doivent en outre satisfaire aux prescriptions des articles L 731-1 agrave L 731-
17 du code de leacuteducation Article 12 La personne physique ou morale juridique-ment responsable dun eacutetablissement de formation deacutesirant assurer la formation mentionneacutee agrave larticle 1er eacutetablit un dossier
de demande dagreacutementCe dossier est
adresseacute au plus tard six mois avant la date de louverture de la formation au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute dans le ressort duquel leacutetablissement a son
siegravege socialCelui-ci en accuse reacuteception
dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6
juin 2001 susviseacuteLa composition de ce
dossier est fixeacutee par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur Il comporte notamment les statuts de leacutetablissement de formation et sa capaciteacute daccueil la description des forma-tions deacutelivreacutees la description des locaux et des moyens peacutedagogiques Il preacutecise sagissant de la formation en psychopatho-logie clinique le contenu de la formation theacuteorique et pratique deacutelivreacutee le descriptif du corps enseignant (effectifs qualiteacute quali-fication) la nature des activiteacutes et de la par-ticipation agrave la recherche de leacutequipe respon-
sable de la formation Article 13 Tout dossier deacuteposeacute est transmis par le di-recteur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute au secreacutetariat de la commission dans un deacutelai dun mois agrave compter de laccuseacute de
reacuteception de la demande initialeLa com-
mission se reacuteunit sur convocation de son preacutesident et dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 8 juin 2006 susviseacute Elle rend son avis dans le deacutelai de deux mois agrave
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
compter de sa saisineLe repreacutesentant de
leacutetablissement de formation est entendu par la commission reacutegionale sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de la candi-
dature ou agrave la demande de la commissionLavis est notifieacute agrave leacutetablissement qui a in-
troduit la demande Article 14 En cas davis neacutegatif et dans un deacutelai dun mois suivant sa notification le repreacutesentant de leacutetablissement de formation peut de-mander au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute de convoquer une nou-
velle reacuteunion de la commissionCelle-ci
siegravege dans une formation eacutelargie agrave len-semble de ses membres titulaires et sup-
pleacuteantsSon avis se substitue au premier
avis rendu Article 15 La deacutecision dagreacutement intervient au plus tard six mois apregraves le deacutepocirct de la demande initiale En cas de recours dans les condi-tions preacutevues agrave larticle 14 ce deacutelai est pro-
longeacute de deux moisLe silence de ladmi-
nistration agrave lexpiration de ce deacutelai vaut deacute-
cision de rejetLa suspension ou le retrait
de lagreacutement sont prononceacutes par deacutecision motiveacutee des ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves que leacutetablissement a eacuteteacute mis agrave mecircme de preacute-senter ses observations lorsque le contenu ou les modaliteacutes dorganisation de la forma-tion cessent decirctre conformes aux condi-tions preacutevues agrave larticle 11 du preacutesent deacute-
cret CHAPITRE IV DISPOSITIONS TRANSI-
TOIRES Article 16
I ― Les professionnels justifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacutera-pie agrave la date de publication du preacutesent deacutecret peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale mentionneacutee agrave larticle 7 alors mecircme quils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplocircme preacutevues aux articles 1er et 6 du preacutesent deacutecret Cette deacuterogation est accordeacutee par le preacutefet du deacutepartement de la reacutesi-dence professionnelle du demandeur apregraves avis de la commission reacutegionale dinscription Le professionnel preacutesente
cette autorisation lors de sa demande dinscription sur la liste deacutepartementale
des psychotheacuterapeutes II - La commission mentionneacutee au I est preacutesi-
deacutee par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute ou par la personne quil a reacuteguliegraverement deacutesigneacutee pour le repreacutesenter Elle comprend six person-naliteacutes qualifieacutees titulaires et six person-naliteacutes suppleacuteantes appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee et nommeacutees par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psychanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quau-cune de ces trois cateacutegories de profes-sionnels ne soit majoritaire au sein de la commission Ses membres sont nom-meacutes pour une dureacutee de trois ans renou-
velable une foisLa commission se reacuteu-
nit dans les conditions fixeacutees par le deacute-
cret du 8 juin 2006 susviseacuteLes frais de
deacuteplacement et de seacutejour de ses membres sont pris en charge dans les conditions preacutevues par la reacuteglementation
applicable aux fonctionnaires de lEtatLa commission sassure que les forma-tions preacuteceacutedemment valideacutees par le pro-fessionnel et son expeacuterience profession-nelle peuvent ecirctre admises en eacutequiva-lence de la formation minimale preacutevue agrave larticle 1er et le cas eacutecheacuteant du di-plocircme preacutevu agrave larticle 6 Elle deacutefinit si neacutecessaire la nature et la dureacutee de la formation compleacutementaire neacutecessaire agrave linscription sur le registre des psycho-
theacuterapeutesLe professionnel est en-
tendu par la commission sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de son dossier ou agrave la demande de la commis-
sion Article 17 Les professionnels qui souhaitent obtenir une autorisation dinscription sur le registre des psychotheacuterapeutes en application de larticle 16 preacutesentent dans le deacutelai dun an
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 42
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
agrave compter de la publication du preacutesent deacute-cret un dossier en ce sens dans les condi-
tions preacutevues agrave larticle 7Cette demande
est accompagneacutee des piegraveces justificatives notamment administratives attestant de
lexercice de la psychotheacuterapieA la reacutecep-
tion du dossier complet il est deacutelivreacute agrave linteacuteresseacute un accuseacute de reacuteception deacutelivreacute dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute Celui-ci permet au pro-fessionnel qui utilisait preacuteceacutedemment le titre de psychotheacuterapeute de continuer agrave lutiliser
jusquagrave lintervention de la deacutecisionLe si-
lence gardeacute pendant plus de six mois sur une demande preacutesenteacutee au titre du I de lar-ticle 16 vaut deacutecision de rejet Dans les cas ougrave en application de ces dispositions il est demandeacute au candidat de justifier dune for-mation compleacutementaire celle-ci doit ecirctre effectueacutee avant le 1er janvier 2014 Si cette exigence nest pas remplie le preacutefet retire le professionnel des inscrits sur la liste deacute-
partementale des psychotheacuterapeutes Article 18 Les dispositions du preacutesent deacutecret entrent
en vigueur agrave compter du 1er juillet 2010Pour lapplication du preacutesent deacutecret agrave Saint-Pierre-et-Miquelon les compeacutetences deacutevo-lues au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute par le preacutesent deacutecret sont exerceacutees par les services chargeacutes de lad-
ministration territoriale de la santeacute Article 19 Le ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales la ministre de lenseignement supeacuterieur et de la re-cherche la ministre de la santeacute et des sports et la ministre aupregraves du ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales chargeacutee de loutre-mer sont chargeacutes chacun en ce qui le concerne de lexeacutecution du preacutesent deacutecret qui sera pu-blieacute au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise
ANNEXE NOMBRES DHEURES DE FORMATION
EN PSYCHOPATHOLOGIE CLINIQUEEXIGEacuteES DES CANDIDATS AU TITRE DE
PSYCHOTHEacuteRAPEUTE
THEgraveME de formation
PSYCHIATRES Dispense totale
MEacuteDECINS non psychiatres
PSYCHOLOGUES cliniciens
PSYCHOLOGUES non cliniciens
PSYCHANALYSTES Reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans leur annuaires
PROFESSIONNELS nappartenant agrave aucune des cateacutego-ries preacuteceacutedentes
Deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques
0 h
0 h
0 h
0 h
0 h
100 h
Critegraveres de discernement des grandes pathologies psychiatriques
0 h
0 h
50 h
100 h
100 h
100 h
Theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Principale ap-proches utili-seacutees en psycho-theacuterapie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Stage
0 mois
2 mois
2 mois
5 mois
2 mois
5 mois
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 43
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute CSAPA Espace Murger - Service de Psychiatrie
Adulte du Pr Jean Pierre Leacutepine Hocircpital Fernand Widal
L a preacuteoccupation des pouvoirs publics de
reacuteglementer la pratique officielle de la
psychotheacuterapie provoque des turbu-
lences dans le petit monde des psychologues
qui se targuent drsquoen effectuer sous les formes
les plus diverses et qui se voient sommeacutes de
faire la preuve de leur formation dans ce do-
maine agrave deacutefaut de faire de mecircme en ce qui
concerne leur compeacutetence ce qui par ailleurs
nrsquoest guegravere deacutemontrable
Chacun drsquoentre eux peut bien entendu invoquer
son expeacuterience ineffable ou le prestige accordeacute
agrave sa theacuteorie de reacutefeacuterence pour estimer leacutegitime
de srsquoaffranchir drsquoune telle justification tout en
ne perdant pas de vue qursquoun statut estampilleacute
par lrsquoautoriteacute administrative peut garantir la
poursuite sereine de telles activiteacutes Pour les
plus eacuteclectiques le choix drsquoune eacutecole certifiante
ressemblera agrave un mariage de raison
Crsquoest donc au prix drsquoune soumission agrave lrsquoautoriteacute
que lrsquoexercice drsquoune telle liberteacute peut espeacuterer
se perpeacutetuer Crsquoest lagrave lrsquoune des formes de la
reacutesignation peu glorieuse certes agrave laquelle on
pourrait preacutefeacuterer le discernement formulation
bien plus acceptable au regard de lrsquoestime de
soi Crsquoest ce dont semblent avoir manqueacute celui
ou celle ou ceux qui ont cru bon drsquoaller couiner
dans une oreille des plus compatissantes que
la pratique de la psychotheacuterapie devait ecirctre reacute-
serveacutee agrave des professionnels persuadeacutes de sa-
voir y faire et capables de preacutesenter des ga-
ranties plutocirct qursquoagrave des gougnafiers mecircme pas
fichus drsquoexhiber la moindre preuve convain-
cante de la leacutegitimiteacute de leurs preacutetentions Ce
qui est drsquoailleurs la reacutealiteacute Mais comment
srsquoeacutetonner drsquoune telle beacutevue si lrsquoon srsquoen rap-
porte agrave la ceacutelegravebre Loi de Murphy qui eacutenonce
que sil y a plusieurs faccedilons de faire quelque
chose et que lune delles peut aboutir agrave une
catastrophe alors quelquun la choisira
Les mecircmes qui reacuteclamaient la mise en place
drsquoune reacuteglementation officielle reacuteservant le titre
de psychotheacuterapeute agrave des professionnels de
qualiteacute ducircment formeacutes agrave cet effet sont parmi
les premiers agrave protester contre les formes don-
neacutees agrave cette derniegravere par une souveraineteacute deacute-
ficitaire dont lrsquoexercice autoritaire nous rappelle
que nous sommes destineacutes agrave nous faire ap-
prendre ce que lrsquoon sait deacutejagrave par des gens qui
nrsquoy connaissent rien Agrave lrsquoheure de la prolifeacutera-
tion des reacutefeacuterentiels et des protocoles reacuteclamer
encore un peu plus de controcircles et de veacuterifica-
tions suspicieuses ne peut que servir de via-
tique aux frileux de la subjectiviteacute qui sont
friands de contraintes rassurantes Et on ne
srsquoeacutetonnera pas de les voir se formaliser drsquoen
avoir appeleacute agrave Raminagrobis comme dans la
ceacutelegravebre fable de Jean de La Fontaine Le
chat la belette et le petit lapin
Crsquoeacutetait un chat vivant comme un deacutevot ermite
Un chat faisant la chattemite
Un saint homme de chat bien fourreacute gros et
gras
Arbitre expert sur tous les cas
Et de voir se faire croquer tout uniment secta-
teurs et protestataires tout marris drsquoavoir con-
senti agrave lrsquoincompeacutetence et la condescendance
de deacutecideurs comme on dit le sort de leurs
activiteacutes Drsquoougrave la singularisation des heacutesitants
ameacutenagements survenus qui vident du proceacute-
deacute la geacuteneacuteralisation qursquoil visait au profit de re-
connaissances professionnelles plus contrai-
gnantes encore par la judiciarisation des liber-
teacutes du mecircme tonneau Et ce qui ne peut agrave lrsquoeacutevi-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 44
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dence valoir pour tous nrsquoa que peu de chances
de valoir davantage pour chacun Ce seraient
donc des organisations professionnelles qui se
verraient deacutecerner des preacuterogatives pour les
beacuteneacuteficiaires qui auront eu la bonne ideacutee de srsquoy
glisser Cela veacuterifie tout agrave la fois la meacuteta-loi de
Cooper qui eacutenonce qursquoune prolifeacuteration de
nouvelles lois creacutee une prolifeacuteration de nou-
veaux vides juridiques et ce bon vieux pro-
verbe qui dit que le clou qui deacutepasse attire le
marteau
On savait deacutenombrer quelques centaines de
types de psychotheacuterapies pleacutethore drsquoautant
plus deacuterisoire que cette recension ne concerne
le plus souvent que des techniques psychotheacute-
rapiques certes impliqueacutees dans des disposi-
tifs agrave viseacutee theacuterapeutique mais certainement
incapables de deacutefinir la psychotheacuterapie car
comment eacutetablir un modegravele de lrsquoindeacutefinissable
Pour autant il sera difficile de deacutemontrer que la
formation certifieacutee agrave une technique psychotheacute-
rapique est assimilable agrave la performance de sa
mise en oeuvre Car qursquoen est-il vraiment dans
la reacutealiteacute de ces audacieuses pratiques Srsquoagit
-il drsquoune illusion entretenue par les theacuterapeutes
sur lrsquointeacuterecirct de leurs manœuvres Les patients
qui srsquoy exposent ne font-ils que changer de re-
gistre de repreacutesentations ou accegravedent-ils reacuteelle-
ment agrave une autre dimension de leur ecirctre Et
comment srsquoaccommodent-ils des aventures
parfois interminables dans lesquelles de telles
situations les plongent
Ces derniers qui se sont aperccedilus que le destin
commenccedilait agrave leur masser les eacutepaules srsquoils
nrsquoacceptent la perspective du changement que
par neacutecessiteacute et la neacutecessiteacute que parce que
leur sentiment drsquoexistence se trouve en deacutelica-
tesse se trouvent le plus souvent agrave la re-
cherche drsquoun sentiment perdu celui de la com-
pleacutetude Et ce sont eux qui deacutecident finalement
si leur rencontre avec un ou une psychologue
doit prendre cette tournure apregraves avoir eacutepuiseacute
tout ce qui leur avait jusque-lagrave permis drsquoy
eacutechapper Ils nrsquoont plus confiance dans la reacuteali-
teacute qui nrsquoest elle-mecircme apregraves tout qursquoun pres-
sentiment collectif Crsquoest que le patient qui se
reacutesout agrave consulter fait la preuve qursquoil a reacuteussi agrave
surmonter sa honte de devoir neacutecessiter une
telle deacutemarche ce qui deacutemontre lrsquoexistence de
la premiegravere ressource personnelle qui lui ap-
partient Si le patient neacuteglige ce qui le pousse agrave
changer alors le changement lui-mecircme est neacute-
gligeacute Il doit rencontrer une attitude telle qursquoil en
ressentira de la consideacuteration premiegravere res-
source theacuterapeutique en retour agrave la disposition
du psychotheacuterapeute
Et puis on voit tous les jours des patients aller
mieux en deacutepit de nos subtiles interventions
peut-ecirctre gracircce aux perfectibiliteacutes de celles-ci
Le patient met son talent agrave notre service mais
pour le bon deacuteroulement des choses il doit ecirctre
eacuteclaireacute sur ses responsabiliteacutes Prisonnier des
circonstances ce qui le rend malheureux le
patient soucieux de participer agrave son eacutemancipa-
tion doit inciter son ou sa psychotheacuterapeute
par des questions simples et bienveillantes agrave
reformuler ce qursquoil comprend de la situation et agrave
exprimer son ressenti Il est essentiel que le
theacuterapeute se sente eacutecouteacute informeacute et respec-
teacute Il ne doit pas craindre de lrsquoimportuner
puisque de toute faccedilon ce sera le cas En preacute-
servant la liberteacute de penseacutee de ce dernier et en
veillant agrave le faire participer aux orientations de
la theacuterapie le patient doit mettre une grande
conviction agrave le convaincre qursquoil est la personne
concerneacutee en premier lieu par le choix de celle-
ci avec la capaciteacute de reacutefleacutechir et de prendre
les deacutecisions qui le concernent agrave partir des in-
formations qursquoil partage avec lui Le patient de-
vra eacutegalement precircter attention aux signes de
conduites addictives ou aux troubles obses-
sionnels compulsifs du psychotheacuterapeute Un
signe drsquoappel agrave connaicirctre est la position con-
descendante ou le silence obstineacute ou encore
la somnolence difficilement dissimuleacutee qui sont
sans rapport avec les attentes drsquoeacutecoute et de
compreacutehension que le patient tente drsquoexprimer
Le patient doit savoir que la preacutevalence du sui-
cide de la deacutepression du syndrome deacutecision-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 45
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
nel de lrsquoalcoolisme et de la toxicomanie est
bien supeacuterieure chez les psychotheacuterapeutes agrave
celle de la population geacuteneacuterale Il srsquoefforcera
donc de lui faciliter la vie par de petites atten-
tions ou remarques gratifiantes afin de ne pas
alimenter les fameux dysfonctionnements dont
les protocoles theacuterapeutiques se sont enticheacutes
Enfin les interlocuteurs ne devront jamais
perdre de vue que lrsquoon nrsquoest jamais autant deacuteccedilu
que par les illusions que lrsquoon perd Bref pour le
privilegravege drsquoune synergie additive de bon aloi le
patient et son psy doivent parvenir agrave se persua-
der que leur liberteacute de manoeuvre consiste agrave
faire tout ce que permet la longueur de la
chaicircne qui les assujettit Et la principale recom-
mandation exigeacutee pour les deux acteurs de ces
proceacutedeacutes interactifs tant pour le patient que
pour son psy semble devoir se fonder sur une
robuste et saine suspicion mutuelle La reacutecipro-
citeacute est la clef de tous les rapports humains
Si lrsquoon veut bien eacutecarter un instant les passion-
nantes preacutesentations de cas superbement rap-
porteacutes par leurs auteurs et dont les colloques
sont friands ougrave tout est eacutelucideacute et dans les-
quelles tout semble srsquoexpliquer facilement ougrave
la posture adopteacutee par le ou la psychotheacutera-
peute srsquoest trouveacutee bien venue ougrave ses inter-
preacutetations se sont reacuteveacuteleacutees pertinentes et ses
interventions judicieuses qui auront abouti agrave
un reacutesultat suffisamment satisfaisant pour ecirctre
exposeacute on srsquoautorisera agrave penser que ces preacute-
sentations sont sans doute davantage drsquoineacutevi-
tables reconstructions que la traduction fidegravele
du deacuteroulement des eacuteveacutenements de lrsquoordre de
lrsquoimplacable authenticiteacute dont se montre ca-
pable une cameacutera de surveillance de distribu-
teur de billets de banque Apregraves tout si le men-
songe est le secret de la vie amoureuse crsquoest
aussi le ciment de la vie sociale La subjectiviteacute
srsquoinsinue partout peut-ecirctre plus encore dans
les souvenirs que dans les activiteacutes de percep-
tion Un souvenir est un mensonge qui dit tou-
jours la veacuteriteacute a eacutecrit Jean Cocteau recons-
truction conjecturale mais sincegravere expression
dans lrsquoinstant de sa remeacutemoration puisque tout
peut ecirctre exact sans que rien ne soit vrai En
theacuteorie tout srsquoexplique en pratique tout se
complique Ce nrsquoest pourtant pas une raison
pour faire les gros yeux aux garnements de la
psychotheacuterapie Qui srsquointeacuteresserait agrave la pein-
ture dans le seul but de devenir trafiquant
drsquoœuvres drsquoart
Or ce que redoute la theacuterapeutique crsquoest lrsquoer-
reur la faute restant beaucoup plus inconce-
vable qursquoelle est exceptionnelle et lrsquoeacutechec trop
reacutecurrent tandis que ce queacutevite la circonspec-
tion mdash en ne versant daucuns cocircteacutes mdash crsquoest la
partialiteacute Crsquoest donc vrai quelle apparaicirct ordi-
naire commune qursquoelle ne se dissipe pas
comme le fait le theacuteorique dans ses cabrioles
et si elle ne fait pas toujours la preuve drsquoune
grande inventiviteacute elle nrsquoest pas hanteacutee par
lrsquoexigence de la coheacuterence ce spectre des pe-
tits esprits Elle ne cherche pas non plus agrave sus-
citer la contradiction ni ne vise agrave se singulari-
ser en prenant une position mais elle aspire agrave
conserver lrsquoesprit ouvert agrave tous les possibles
quitte agrave cultiver le paradoxe Crsquoest sans doute
pour cette raison que quand lrsquoadresse agrave un pa-
tient se reacutevegravele theacuterapeutique ce nrsquoest pas une
surprise totale crsquoest le plus souvent lrsquoaboutis-
sement drsquoune deacutemarche heuristique Ceux qui
srsquoembarrassent dans un diagnostic ce qursquoils
srsquoimaginent indispensable avant toute entre-
prise et auquel ils finissent par croire et ce fai-
sant faire croire implicitement au patient qursquoil
srsquoapplique agrave lui mecircme quand ils ne cegravedent pas
agrave la tentation de lui en faire la reacuteveacutelation peu-
vent finir par srsquoenfermer dans une illusion com-
mune Une telle disposition est assimilable
dans son essence au preacutesupposeacute On voit la
difficulteacute apparaicirctre dans les efforts drsquoy faire
piegravece et que cela ne preacutesage rien de bon
Pourtant on a bien souvent vu la situation theacute-
rapeutique eacutevoluer favorablement en deacutepit de
ces preacutemisses douteuses Qursquoen penser Si
lrsquoon considegravere que la tacircche fondamentale du
psychotheacuterapeute est bien de reacutesoudre des
problegravemes de maniegravere efficace et dynamique
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 46
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
si lrsquoon peut srsquoeacutecarter un tant soit peu des con-
ceptions traditionnelles des problegravemes psycho-
pathologiques mettre en doute lrsquoexistence de
deacuteficits agrave reacuteparer ou agrave compenser chez le pa-
tient srsquoautoriser agrave penser que la reacutesistance au
changement de ce dernier nrsquoa rien agrave voir avec
la rentabiliteacute speacutecifique de symptocircmes en
terme de pouvoir interpersonnel on peut envi-
sager drsquointroduire des solutions qui ne srsquoentre-
tiennent pas elles-mecircmes et deviennent des
obstacles au changement Alors le theacuterapeute
peut se contenter drsquoamorcer un changement et
deacutecliner la neacutecessiteacute de srsquoengager agrave lrsquoaccompa-
gner jusqursquoagrave son terme Et quand les venues
du patient deviennent plus rares se souvenir
que Freud deacuteclarait que la cure est termineacutee
quand le patient ne vient plus
On connaicirct les dispositions favorables du pa-
tient agrave srsquoidentifier au profil qursquoon lui propose Et
si les patients se montrent rarement agrave la hau-
teur de ce que lrsquoon attend drsquoeux crsquoest parce
que lrsquoon attend quelque chose de leur part qui
soit agrave la hauteur de nos preacutetendues compeacute-
tences dont rappelons-nous il srsquoagit de reacutegle-
menter la mise en oeuvre Or lrsquoobjectif du theacute-
rapeute peut-il ecirctre leacutegitimement de confirmer
ses convictions Srsquoil interpregravete les causes du
mal-ecirctre de ses patients en fonction dun scheacute-
ma geacuteneacuteral et preacuteeacutetabli ne les trahit-il pas Et
serait-il bien congru de proposer des theacuterapies
en precirct-agrave-porter mecircme en demi-taille plutocirct
que faire dans le sur mesure en fonction des
ressources que le patient a lrsquoair de preacutesenter
Les deux acteurs de lrsquoaffaire risquent de rater
ce qursquoils recherchent implicitement en croyant y
gagner quelque chose le theacuterapeute la confir-
mation de ses convictions et le patient un
eacuteclaircissement de ses difficulteacutes en mecircme
temps que son adoption par une autoriteacute qui
lrsquoenteacuterine Toute clarteacute se paie drsquoun mystegravere et
comme une conscience claire est le signe
drsquoune mauvaise meacutemoire on nrsquoen saura pas
beaucoup plus les ideacutees nettes et distinctes
chegraveres agrave Reneacute Descartes nrsquoont guegravere fait la
preuve de leur eacutevidence La responsabiliteacute du
theacuterapeute srsquoeacutemaille de tant de deacuteterminants
que ce dernier est tout agrave fait capable de se ran-
ger agrave ce qursquoil croit justifieacute Mais la croyance
nrsquoest pas seulement une ideacutee que lrsquoesprit pos-
segravede crsquoest eacutegalement une ideacutee qui possegravede
lrsquoesprit Le plus grand deacuteregraveglement de lrsquoesprit
est de croire que les choses sont parce que
lrsquoon veut qursquoelles soient Les psychologues sa-
vent si bien identifier les situations qui se precircte-
ront au beacuteneacutefice de leur clairvoyance qursquoils
sont eacutegalement fortement sujets agrave lrsquoisseacutegoureacutee
facirccheuse pathologie qui deacutesigne un don parti-
culier pour toujours chercher drsquoabord dans la
mauvaise poche
Toutefois une relation de confiance une fois
installeacutee ccedila commence agrave rouler mais au fil du
temps la roue finit par prendre du jeu et les
orientations agrave srsquoinstaller dans le confort agrave srsquoen-
liser dans lrsquoanamnegravese agrave travailler obstineacutement
la reacutepeacutetition agrave se contenter de pointer des meacute-
canismes quant ccedila ne se reacuteduit pas agrave la pro-
duction de regrettables rationalisations Il srsquoagit
plutocirct de reacuteapprendre des conduites au patient
apregraves qursquoil en ait renouveleacute le choix agrave srsquoenga-
ger dans des activiteacutes qui permettent de modi-
fier substantiellement les modes de penseacutee Le
but ultime de la psychotheacuterapie nest pas seu-
lement deacuteliminer des comportements deacuteplo-
rables cest dapprendre agrave mieux geacuterer ses
propres processus mentaux agrave affronter avec
plus de reacuteussite des situations oppressantes et
agrave deacutevelopper des opeacuterations psychiques plus
performantes et une maniegravere drsquoecirctre au monde
plus eacutepanouissante une expression de la
sphegravere psychique privileacutegiant la valorisation
des aspirations individuelles qui deacutebouche sur
la preacutedilection pour lrsquoespace inteacuterieur caracteacuteri-
seacute sur lequel on pense souvent ecirctre suscep-
tible de pouvoir agir Mais comment juger ac-
ceptable que le patient se retrouve dans la po-
sition de celui qui la cleacute de son appartement agrave
la main se voit contraint drsquoactionner la son-
nette pour rentrer chez lui
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 47
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Tout ceci pour suggeacuterer une approche zeacuteteacute-
tique des psychotheacuterapies pour autant qursquoelle
puisse ecirctre soupccedilonneacutee de participer agrave lrsquoactua-
lisation de la confusion des genres qui permet-
trait drsquoeffectuer la distinction entre drsquoune part la
psychotechnique de la theacuterapie que la revendi-
cation du titre de psychotheacuterapeute tendrait agrave
certifier au prix drsquoun reacuteductionnisme preacutejudi-
ciable agrave la pratique clinique et au meacutepris drsquoune
certaine creacuteativiteacute et la conduite drsquoun projet
psychotheacuterapique circonspect avec des tech-
niques approprieacutees et individualiseacutees jouant le
rocircle drsquoun outil directionnel
Les psychologues sont censeacutes distinguer le
subjectif de lrsquoirrationnel Il ne sagit pas dex-
clure la subjectiviteacute ni mecircme de la reacuteduire
mais de la conserver au cœur de la pratique de
la psychologie clinique Cest lagrave au cœur de la
subjectiviteacute de lindividuel que celle-ci peut
justifier sa speacutecificiteacute En revanche on ne se
preacuteoccupera pas des ayatollahs de la psycha-
nalyse au masque douloureux et au regard fil-
trant arborant un air drsquoen savoir long ni des
forceneacutes du dressage cognitif qui se deacutesolent
de ne pas voir le patient marcher mieux que
cela dans la combine Pas plus drsquoailleurs que
de tous les gardes-frontiegraveres des succegraves qui
leur eacutechappent qui sont des envieux comme
tous les censeurs Agrave Theacuterapik Park les psy-
chotheacuteraptors chassent tout autant en meute
qursquoen snipers
Il est important de tendre vers une pratique
permissive en accordant au patient la possibili-
teacute de reacutealiser que lorigine des changements se
trouve en lui comme il pense de celle des pro-
blegravemes qui sont les siens qui pourra de cette
faccedilon acqueacuterir une autonomie dans son pro-
cessus de traitement Mais lrsquoon a appris que ce
reacutesultat ne peut ecirctre obtenu que si lrsquoon accorde
au patient la possibiliteacute de tricher Cette faculteacute
le poussera rarement agrave en user mais sa virtua-
liteacute qursquoil est en mesure de srsquoapproprier facilite-
ra bien souvent la survenue des identifications
rechercheacutees par le theacuterapeute parce que le
patient en fera ainsi plus facilement son affaire
Crsquoest en quelque sorte entrer par la porte de
derriegravere dans le champ complexe de la forma-
tion du reacuteel
Cette approche zeacuteteacutetique estomperait eacutegale-
ment la suspicion de thaumaturgie qui revien-
drait au professionnel qui srsquoappuyant sur la
conviction qursquoil y a quelque chose agrave soigner
chez le patient au titre de lrsquoadheacutesion de ce der-
nier agrave la proposition drsquoune telle assertion
srsquoexempterait du titre en vertu de lrsquoautorisation
qursquoil srsquooctroierait agrave lui-mecircme de pratiquer Pen-
ser par soi-mecircme crsquoest souvent penser tout
seul ou pire penser comme tout le monde
Mieux vaut peut-ecirctre penser contre soi-mecircme
et se faire agrave soi-mecircme les objections des
autres Toutes les psychotheacuterapies ont leurs
chimegraveres apregraves lesquelles elles courent sans
jamais les attraper Mais avantageusement en
chemin elles srsquooctroient des opportuniteacutes qui
ne sont pas toutes neacutegligeables Et sans ou-
blier que quand la sinceacuteriteacute confine agrave lrsquoarbi-
traire on en vient agrave regretter lrsquohypocrisie
comme lrsquoa magistralement exprimeacute Descartes
on peut deacutecider que lrsquoon nrsquoest sucircr de rien et
que lrsquoon nrsquoest mecircme pas sucircr que lrsquoon nrsquoest sucircr
de rien cesser de consideacuterer que les pro-
blegravemes compliqueacutes neacutecessitent forceacutement des
solutions compliqueacutees Il y a aussi des psycho-
theacuterapies qui durent des anneacutees et un mauvais
esprit pourrait eacutetablir une comparaison avec les
banques qui quoiqursquoun virement par ordinateur
ne prenne qursquoune seconde aiment en faire tout
un plat afin que les fonds demeurent un mo-
ment dans leur systegraveme et leur rapportent
Comme nous vivons irreacutesistiblement dans un
monde de repreacutesentations la seacuteduction du titre
peut exciter la convoitise mdash celle-ci constituant
la plus formidable des motivations humaines mdash
de psychotheacuterapeutes en quecircte de reconnais-
sance Mais ce sont les ideacutees les plus seacutedui-
santes qui ont le plus souvent besoin de se re-
maquiller Le terme de trompe-couillon deacutesi-
gnant le maquillage en langue verte est trop
illustratif dans le domaine des psychotheacuterapies
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 48
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
pour deacutecourager complegravetement la tentation de
srsquoinsurger contre lrsquoeacuteventualiteacute de sa pertinence
Le titre de psychotheacuterapeute ressemble agrave la
queue du Mickey de notre enfance qursquoil fallait
attraper pour avoir un tour gratuit de manegravege
On peut bien courir encore longtemps apregraves
son obtention mais si lrsquoon veut finir de rouler le
peacutetard il faudra bien se reacutesoudre au bout drsquoun
moment agrave cesser de rechercher le petit bout de
shit tombeacute sur la moquette marron
Alors psychotheacuterapeute agrave quel titre quand la
proposition theacuterapeutique tiendrait tout entiegravere
en quatriegraveme de couverture Et lrsquoon peut ajou-
ter agrave notre accablement la conjoncture imagi-
naire que nous ne nous en remettrons jamais
et deacutecider que la psychotheacuterapie est devenue
un business Bien sucircr ces consideacuterations ne
srsquoappliquent pas aux psychotheacuterapeutes pour
lesquels rien nrsquoest impossible eacutequipeacutes du tout
agrave lrsquoego agrave soi qui sont si lrsquoon peut dire la protu-
beacuterance de la profession Elles ne srsquoappliquent
pas davantage agrave ces professionnels dont
lrsquoinaptitude est semblable agrave celle des jeunes
paresseux ces mammifegraveres arboricoles de la
forecirct breacutesilienne auxquels il arrive freacutequem-
ment drsquoempoigner leurs propres pattes agrave la
place des branches si bien qursquoils tombent des
arbres
Enfin lrsquoexigence de ce titre fait voir se multiplier
des instituts de formation agrave la psychotheacuterapie
neacutes de la derniegravere pluie qui ne feraient que
precirccher pour leur paroisse agrave des ouailles fasci-
neacutees par la quecircte de la qualification Il suffirait
alors de deacutetenir le titre de psychotheacuterapeute
pour le devenir tandis que ceux ou celles qui
en possegravedent la compeacutetence et qui se risquent
agrave en pratiquer verraient fragiliseacutee leur deacutetermi-
nation agrave y recourir sans lrsquoestampille de sa sa-
cralisation Crsquoest ainsi qursquoun meacutecanicien de la
relation identifieacute comme speacutecialiste du soin et
de la gestion des relations interpersonnelles
viendra disqualifier la prodigieuse diversiteacute des
fonctionnaliteacutes de la psychologie clinique agrave la-
quelle nous sommes tous attacheacutes Et lrsquoon ver-
ra des psychotheacuterapeutes nantis de bons certi-
ficats srsquoeacutevertuer dans la profession et y forger
leur reacuteussite juste pour prouver que crsquoest pos-
sible Les exigences des employeurs se mon-
treront de plus en plus impeacuteratives sur ce point
les assureurs jouant le rocircle drsquoagences de nota-
tion et lrsquoon nrsquoengagera deacutesormais que des
eacutebeacutenistes qualifieacutes comme caissiers chez Ikea
Quand le doute est leveacute il deacutebouche sur une
incertitude et le psychotheacuterapeute ballotteacute au
greacute des vagues de lrsquooceacutean du deacutesir de nou-
velles contraintes reacuteglementaires dans sa lutte
contre la deacutereacuteliction par tous les temps se
trouve embarrasseacute par le choix impossible
entre deux deacutesillusions voir que lrsquoeacutetendue du
champ de la pratique de la psychotheacuterapie se
precircte deacutesormais deacutecideacutement mal agrave son entre-
prise ou constater combien ccedila va ecirctre difficile
de lrsquoentreprendre agrave ses propres conditions
Crsquoest comme eacuteprouver le deacutesappointement de
la dame constatant que la lunette des toilettes
nrsquoest pas abaisseacutee ou la consternation du
monsieur qui deacutecouvre que la mecircme lunette ne
tient pas releveacutee Mais quitte agrave voyager sur le
Titanic pourquoi pas en premiegravere classe
La vie professionnelle nous rappelle combien le
monde peut paraicirctre singulier lorsqursquoon le re-
garde apregraves avoir fait un simple pas sur le cocircteacute
Lrsquoexercice de la psychotheacuterapie srsquoassaisonne
de pas mal drsquohumiliteacute et drsquoun peu de creacuteativiteacute
Peut-on ecirctre agrave la fois malin et intelligent Les
psychologues cliniciens pratiquent volontiers
lrsquousage des deux adverbes fondamentaux qui
eacuteveillent lrsquointelligence des enfants pourquoi
et comment Lrsquointelligence incite agrave la reacute-
flexion et la reacuteflexion conduit au scepticisme
Le scepticisme lui megravene agrave lrsquoironie Lrsquoironie
cette meacutelancolie de la luciditeacute agrave son tour se
preacutesente agrave lrsquoesprit mdash qui se trouve en apport
direct avec lrsquohumour mdash qui fait si bon meacutenage
avec la fantaisie Et la vie devient une chose
deacutelicieuse aussitocirct qursquoon deacutecide de ne plus la
prendre tout agrave fait au seacuterieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 49
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute des pa-
tients migrants africains
Jacqueline Faure Hocircpital Tenon Page 50
gt Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacute-
moignage drsquoune pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute Page 60
gt Seacutejour de vacances quelle place pour le psy-
chologue
Ceacuteline Le Bivic Hocircpital Eacutemile Roux Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques
transversaliteacute de nos cliniques
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 50
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants
africains une approche originale avec lrsquoassociation URACA
Jacqueline Faure Service des maladies infectieuses et
tropicales Centre de la dreacutepanocytose Hocircpital Tenon
Lrsquohomme universel nrsquoexiste pas il est inscrit
dans une culture dans un cadre Or ce cadre
est universel il nrsquoexiste pas drsquohomme sans cul-
ture
L rsquohocircpital Tenon est situeacute agrave lrsquoEst de Paris
bon nombre de patients migrants infec-
teacutes par le VIH y sont soigneacutes Du fait de
lrsquoexistence drsquoune materniteacute au sein de lrsquohocircpital
beaucoup de femmes migrantes apprennent
leur seacuteropositiviteacute agrave lrsquoinfection par le VIH-sida
au cours du suivi de leur grossesse La grande
majoriteacute de ces patients est originaire drsquoAfrique
de lrsquoOuest
Degraves 1993 nous avons mis en place un parte-
nariat avec lrsquoassociation URACA pour aider
les patients en difficulteacute face au diagnostic de
lrsquoinfection par le VIH-sida et aussi les soignants
rencontrant des problegravemes dans la prise en
charge de certains patients
Au deacutebut les soignants et moi-mecircme pensions
que la plupart des patients africains ne com-
prenaient rien Peu agrave peu avec lrsquoaide drsquoURA-
CA nous avons pris conscience que nous-
mecircmes ne les comprenions pas toujours ou
bien encore que nous ne savions pas nous
faire comprendre drsquoeux
Cette association daide aux Africains intervient
dans diffeacuterents domaines accueil aide juri-
dique sociale solidariteacute preacutevention informa-
tion recherche dans le domaine de la santeacute
(toxicomanie SIDA dreacutepanocytose troubles
psychiatriques) et propose aussi des consulta-
tions drsquoethnomeacutedecine
Ainsi bien souvent les difficulteacutes avec les pa-
tients drsquoorigine eacutetrangegravere sont lieacutees agrave des pro-
blegravemes de communication et de compreacutehen-
sion mutuelles dans la relation soignant-soigneacute
En comprenant lrsquoeacuteveacutenement migratoire et son
impact dans la deacutecouverte drsquoune maladie
grave en eacutetant sensibiliseacutes agrave lrsquoimportance de la
dimension culturelle dans le soin nous avons
ainsi ameacutelioreacute lrsquoaccueil et la prise en charge de
ces patients
Un systegraveme culturel est constitueacute drsquoune
langue drsquoun systegraveme de parenteacute drsquoun corpus
de techniques et de maniegraveres de faire (la pa-
rure la cuisine les arts les techniques de
soins les techniques de maternagehellip) Tous
ces eacuteleacutements eacutepars sont structureacutes de maniegravere
coheacuterente par des maniegraveres de penser les re-
preacutesentations [] Les repreacutesentations permet-
tent aux individus dun mecircme groupe dappreacute-
hender le monde selon les modaliteacutes com-
munes repreacutesentations de la mort de la con-
ception
Jemploie ce mot culture agrave contrecœur avec
la crainte decirctre mal compris Par ce terme je
ne deacutesigne pas leacutecume luxueuse dune civilisa-
tion mais lesprit tregraves particulier dun peuple
insaisissable
Cette prise en charge globale avec lrsquoassocia-
tion URACA srsquoeffectue sous 4 formes
1 le soutien communautaire
2 la meacutediation culturelle
3 la consultation dethnomeacutedecine une prise
en charge transculturelle
4 la formation mutuelle partage de savoir
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 51
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
1 LE SOUTIEN COMMUNAUTAIRE
Je me sens coupeacute en deux diviseacute une partie
de moi-mecircme nrsquoest pas ici nous dit tel patient
La deacutecision la plus terrible que jrsquoaie eu agrave pren-
dre dans ma vie crsquoest de rester ici pour me soi-
gner et ecirctre ainsi seacutepareacutee des miens raconte
cette femme dans un sanglot difficilement con-
tenu
Crsquoest tregraves dur drsquoecirctre seulehellipJe ne suis pas ha-
bitueacuteehellipici quand tu sors de ta maison per-
sonne ne se parlehellip
Le soutien communautaire drsquoURACA srsquoorga-
nise de plusieurs faccedilons
Visite hebdomadaire au chevet du patient avec
le port dun repas africain par la nourriture
par le dialogue dans la langue quand cest pos-
sible par la preacutesence de ses pairs quelque
chose du pays est ainsi recreacuteeacutee et apaise le
malade
Accueil quotidien au sein de lrsquoassociation re-
pas atelier couture atelier informatique aides
dans les deacutemarches administratives assem-
bleacutee des femmes Tout ceci dans une am-
biance comme au pays
Ces visites sont proposeacutees aux malades isoleacutes
du fait du diagnostic ou qui nrsquoont pas de famille
ici
La migration est une eacutepreuve qui provoque
chez le sujet une deacutestabilisation une fragiliteacute
lieacutees agrave diffeacuterentes pertes
perte de lrsquoenveloppe culturelle la culture struc-
ture le psychisme humain dans la migration il
nrsquoy a plus ce cadre culturel Changer drsquounivers
implique la perte brutale drsquoune langue drsquoun
systegraveme de reacutefeacuterence drsquoun systegraveme de co-
dage des perceptions des sensations et des
repreacutesentations en un mot une acculturation
[] La perte de lrsquoenveloppe culturelle va donc
provoquer des modifications de lrsquoenveloppe
psychique [hellip]
la perte de repegraveres difficulteacutes au niveau du
changement de climat de la nourriture dans
les deacuteplacements dans la ville dans les deacute-
marches administratives Difficulteacutes et mecircme
souffrance dans la perte de la langue drsquoorigine
Julia Kristeva drsquoorigine bulgare psychanalyste
et eacutecrivain dit ceci hellip il y a mort dans la perte
drsquoune langue natalehellip
la perte drsquoune certaine identiteacute ecirctre Camara
ou Toure ecirctre peul ou bambara nrsquoest pas so-
cialement reconnu le migrant devient un eacutetran-
ger un noir puis agrave lrsquohocircpital eacuteventuellement un
seacuteropositif
la perte du groupe lrsquoisolement est douloureu-
sement ressenti pour tout eacutetranger La solitude
pour un Africain crsquoest mortelhellip nous explique
Monsieur Diarra meacutediateur ethnoclinicien agrave
URACA
Autant drsquoeacuteleacutements qui favorisent un eacutetat de vul-
neacuterabiliteacute propice agrave une deacutecompensation soma-
tique ou psychologique (deacutepression) Le dia-
gnostic drsquoune maladie grave vient renforcer
cette fragiliteacute La solitude dans les chambres
individuelles de nos hocircpitaux modernes - que
nous occidentaux appreacutecions beaucoup - peut
ecirctre mal supporteacutee par le patient africain elle
est mecircme parfois anxiogegravene Un Africain nest
jamais seul Au pays sil est hospitaliseacute sa fa-
mille lentoure dort dans sa chambre
Par ces visites hebdomadaires un tissu rela-
tionnel est ainsi creacuteeacute qui peut se poursuivre agrave
la sortie Le soutien communautaire permet au
patient isoleacute dans la preacutecariteacute de retrouver ce
lien structurant du groupe qui lui faisait deacutefaut
depuis son deacutepart dAfrique Soutien qui va lrsquoai-
der agrave mieux supporter sa maladie et agrave mieux se
soigner Pour un Africain appartenir au groupe
est vital cest pourquoi la grande crainte du
malade est que son entourage soit au courant
du diagnostic et le rejette Le malade ne peut
pas ou ne veut pas partager sa souffrance
avec ses proches La honte la crainte de lex-
clusion peuvent le conduire agrave un retrait difficile
agrave supporter Pour lAfricain lisolement est in-
concevable Sa force vitale est en relation
constante avec celle des ancecirctres proches et
lointains et des membres du groupe La plus
grande calamiteacute consiste agrave en ecirctre retrancheacute et
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 52
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reacuteduit ainsi agrave une existence deacuteficiente sans
protection voueacutee au neacuteant
Cette association communautaire nrsquoest pas
speacutecifiquement cibleacutee SIDA bien que ses
membres soient formeacutes agrave cette pathologie A
lrsquohocircpital elle apporte son aide agrave tout patient
quelle que soit sa maladie Le patient pourra
srsquoil le souhaite aborder son diagnostic et il nrsquoest
pas rare qursquoil le fasse Apaisement et soulage-
ment pour lui de constater que ce dont il
souffre ne fait pas peur Il peut retrouver con-
fiance en lui
2 LA MEacuteDIATION CULTURELLE
Le meacutediateur ethnoclinicien connaicirct bien la cul-
ture du patient originaire drsquoAfrique de lrsquoOuest et
il parle plusieurs langues (peul bambara sara-
koleacute wolof hellip) Il intervient dans diffeacuterentes
situations
Pour faciliter la communication entre le meacutede-
cin et le patient quand des explications concer-
nant la maladie le traitement nrsquoont pas eacuteteacute
comprises Il ne srsquoagit pas drsquoune simple inter-
preacutetation mais drsquoune formulation adapteacutee agrave la
personne agrave sa culture Les messages de preacute-
vention concernant la sexualiteacute par exemple
seront mieux accepteacutes et entendus si la sensi-
biliteacute du patient voire sa pudeur sont respec-
teacutees
Pour aider agrave la reacutesolution de conflits entre pa-
tient-soignant ou patient-famille ou soignant-
famille
Reacutecemment nous avons organiseacute une meacutedia-
tion culturelle pour une patiente ne parlant pas
du tout le franccedilais accompagneacutee de son fils
maicirctrisant parfaitement notre langue Le meacutede-
cin lrsquoassistante sociale le meacutediateur et moi-
mecircme eacutetions reacuteunis pour essayer de com-
prendre le conflit familial Tout eacutetranger utilise
la langue eacutetrangegravere comme un pansement
comme une sorte drsquoonguent de cregraveme sur les
anciennes blessureshellip La langue seconde ne
permet pas drsquo acceacuteder agrave son for inteacuterieur ex-
plique Julia Kristeva Ainsi le fils pouvant tout
agrave fait communiquer avec nous en franccedilais
srsquoest spontaneacutement adresseacute au meacutediateur en
bambara De toute eacutevidence sa langue natale
lui permettait drsquoecirctre au plus pregraves de la situation
douloureuse qursquoil vivait avec sa megravere
Le meacutediateur apporte des eacuteclaircissements sur
le contexte culturel sur le sens de tel conflit
familial sur la place des uns et des autres dans
telle famille (la place de lrsquooncle maternel par
exemple le systegraveme de filiation) Il aide les soi-
gnants souvent deacutestabiliseacutes par le manque de
repegraveres ou qui interpregravetent mal telle attitude
Par exemple lrsquoextension de la deacutenomination
fregravere sœur cousin megravere dans lrsquoentourage du
patient Les soignants ne savent plus qui est
qui Des doutes surgissent voire de la suspi-
cion Les soignants ont lrsquoimpression drsquoecirctre ma-
nipuleacutes ou trompeacutes
Le meacutediateur ethnoclinicien tient selon la for-
mule de T Nathan une sorte de position du
diplomate entre deux univers antagonistes
3 LA CONSULTATION DETHNOMEacuteDECINE UNE
PRISE EN CHARGE TRANSCULTURELLE
La culture permet un codage de lrsquoensemble de
lrsquoexpeacuterience veacutecue par un individu elle permet
drsquoanticiper le sens de ce qui peut survenir et
donc de maicirctriser la violence de lrsquoimpreacutevu et
par conseacutequent du non-sens
Angoisse de mort deacutecompensation psychia-
trique (ideacutees suicidaires syndrome anxio-
deacutepressif eacutetat deacutelirant) incompreacutehension ou
deacuteni du diagnostic deacutetresse psychologique
autant de reacuteactions face agrave la maladie grave qui
peuvent concerner tout patient (occidental ou
non) mais qui neacutecessitent pour certains pa-
tients migrants une approche tenant compte du
contexte de la migration et des speacutecificiteacutes cul-
turelles
Cette maladie je sais drsquoougrave ccedila vient mon pegravere
mrsquoa donneacutee en sorcellerie nous dit cette pa-
tiente qui ne prend pas ses meacutedicaments et
dont lrsquoeacutetat srsquoaggrave
Je suis travailleacute je le sens crsquoest les parents
de ma femme qui nrsquoont jamais accepteacute notre
mariage crsquoest eux qui font des choses sur
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 53
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
moihellip
Ou bien encore ce patient en phase asympto-
matique de lrsquoinfection par le VIH-sida qui ex-
plique Je ne suis pas malade la preuve le
meacutedecin ne me donne pas de traitement
Ainsi dans certains cas le patient en difficulteacute
en souffrance peut refuser de se soigner au
prix drsquoune aggravation de son eacutetat se santeacute De
plus les messages de preacutevention ne sont pas
entendus et les risques de propagation du virus
sont accrus
Cette consultation qui srsquoinspire de lrsquoethnopsy-
chiatrie reacuteunit autour du patient (accompagneacute
ou non de membres de sa famille ou de
proches)
- leacutequipe de lassociation URACA le Dr Mous-
sa Maman meacutedecin et theacuterapeute traditionnel
qui dirige les entretiens le meacutediateur ethnocli-
nicien la psychologue Pendant 10 ans cette
eacutequipe a eacuteteacute compleacuteteacutee par la preacutesence des
tradipraticiens africains gueacuterisseurs tradition-
nels du Nord Beacutenin qui sont venus une fois par
an pour une dureacutee de deux mois (cette action
originale a pu se mettre en place gracircce agrave des
creacutedits le Sidaction par exemple qui nrsquoexistent
plus aujourdrsquohui)
- leacutequipe soignante le meacutedecin reacutefeacuterent les
infirmiegraveres la psychologue linterne les ex-
ternes lassistante sociale sage-femme kineacute-
sitheacuterapeutehellip Les soignants ont ainsi accegraves
en situation clinique agrave lunivers culturel du pa-
tient
Le recours aux pratiques traditionnelles est tregraves
freacutequent en Afrique Les systegravemes traditionnels
de soin relegravevent drsquo une logique complexe
drsquoune rationaliteacute profonde (T Nathan) avec
une capaciteacute agrave srsquoadapter aux nouvelles situa-
tions aux nouvelles maladies Cette deacute-
marche ne remet pas en cause la confiance
envers notre meacutedecine moderne La theacuterapie
traditionnelle apporte des protections fonda-
mentales (T Nathan)
Tregraves souvent en Afrique les theacuterapies tradition-
nelles se deacuteroulent en groupe avec la famille
et ceux qui ont une affiniteacute avec le malade Ici agrave
lhocircpital les participants sont reacuteunis en cercle
autour du patient Le groupe constitue une en-
veloppe psychique qui est en soi theacuterapeu-
tique Les soignants par leur preacutesence accor-
dent une place agrave lrsquoidentiteacute culturelle du patient
agrave ses maniegraveres de vivre de se soignerhellip
Dans les cultures de tradition orale les eacuteveacutene-
ments importants de la vie tels que la nais-
sance le mariage la maladie la mort (avec
lrsquoimportance des ancecirctres) sont penseacutes diffeacute-
remment Il existe une reacutealiteacute invisible on ac-
corde vie force et pouvoir au mineacuteral au veacutegeacute-
tal agrave lrsquoanimal Le sang le lait maternel ont des
pouvoirs beacuteneacutefiques ou maleacutefiques
Les speacutecialistes de lrsquoanthropologie pensent
que le modegravele de lrsquoorganisation sociale com-
munautaire plus freacutequent dans les socieacuteteacutes
non industrialiseacutees ougrave le groupe maintient une
preacutegnance importante sur lrsquoindividu favorise
une expeacuterience du corps veacutecu comme global
il nrsquoy a pas de rupture entre lrsquohomme et le cos-
mos le corps est permeacuteable On lui reconnaicirct
une dimension transcendante et la maladie
qui plus est chronique comme la dreacutepanocy-
tose peut ecirctre inteacutegreacutee dans une reacutealiteacute plus
large exteacuterieure au corps de la meacutedecine des
hocircpitaux
Lors de ces consultations drsquoethnomeacutedecine les
deux systegravemes culturels occidental et tradition-
nel sont reconnus lrsquoun nrsquoexcluant pas lrsquoautre
Le patient peut aborder en toute confiance des
preacuteoccupations qui lui sont speacutecifiques sans
craindre le ridicule Les deux systegravemes de re-
preacutesentations occidentales et traditionnelles
dans lesquels navigue le migrant peuvent
coexister sans sopposer Paradoxalement
lrsquoapproche traditionnelle donne dans certains
cas sens et coheacuterence au discours meacutedical
scientifique Il est difficile de rendre compte
drsquoune consultation drsquoethnomeacutedecine (de mecircme
qursquoil est difficile de parler drsquoune seacuteance de psy-
chotheacuterapie ou drsquoanalyse bien que ce ne soit
pas du mecircme ordre) Il ne srsquoagit pas drsquoune con-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 54
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sultation traditionnelle ce nrsquoest ni le lieu ni le
cadre Nous sommes dans lrsquoentre-deux
Le nom la parenteacute lrsquoappartenance ethnique la
langue natale sont des eacuteleacutements systeacutematique-
ment abordeacutes Ces reacutefeacuterences agrave la filiation agrave
lrsquoethnie rappellent implicitement au malade le
lien agrave sa famille et son appartenance agrave un
groupe Les tradipraticiens se preacutesentent aussi
se nomment racontent dougrave ils viennent Le
dialogue qui srsquoinstaure est bien souvent eacutenig-
matique pour lrsquooccidental Le langage allusif
meacutetaphorique suggestif qui est utiliseacute est tout
agrave fait entendu par le patient agrave la diffeacuterence des
soignants qui sont deacuteconcerteacutes du moins lors
des premiegraveres consultations Peu agrave peu les
soignants vont se familiariser Par la suite ils
peuvent communiquer diffeacuteremment avec tel
patient et mieux deacutecoder sa maniegravere drsquoecirctre ou
de srsquoexprimer
Les repreacutesentations ancestrales de la maladie
et les eacutetiologies traditionnelles (possession es-
prits ou ancecirctres meacutecontents sorcellerie trans-
gression de tabous ou non respect de rituels
familiaux) ne sont pas systeacutematiquement eacutevo-
queacutees et lorsqursquoelles le sont crsquoest toujours de
maniegravere implicite La maladie comme lrsquoacci-
dent la perte drsquoun emploi ou toute autre mani-
festation de malchance de malheur est le
signe drsquoun deacutesordre -dont il faut comprendre le
sens- et qui concerne non seulement le patient
mais aussi sa famille
Monsieur C originaire du Mali connaicirct bien les
diffeacuterents modes de transmission et nous en
discutons ensemble et dans ce mecircme entre-
tien perplexe il se questionne Je ne sais
pas drsquoougrave ccedila vienthellip
Chez nous la maladie quelle soit physique ou
mentale ne concerne pas uniquement lindividu
toucheacute mais aussi sa famille tout le
groupe (M Maman Journeacutee transculturelle
Des gueacuterisseurs agrave lhocircpital des soignants au
village 29 septembre 2001 hocircpital Tenon
Paris) Derriegravere lhistoire de lindividu se profile
toujours le devenir de la communauteacute toute en-
tiegravere [ ] La cause du mal qui rompt leacutequilibre
dun organisme fait peser une lourde menace
sur le corps social
Bien souvent agrave lissu de ces consultations le
patient va contacter la famille au pays qui elle
aussi va intervenir selon ses coutumes par des
priegraveres rituels ou sacrifices
La proposition dune prise en charge transcul-
turelle nest pertinente que si elle fait sens pour
le patient sil se reconnaicirct des liens avec sa
culture dorigine Le patient peut ecirctre occiden-
taliseacute (eacutetudes supeacuterieures vivant en France
depuis de nombreuses anneacutees hellip) ou dorigine
rurale analphabegravete ayant gardeacute des liens avec
son village il peut ecirctre musulman ou chreacutetien
Les indications sont variables
- incompreacutehension du diagnostic Lrsquoexemple
de Monsieur K malgreacute une seacuterologie positive
il reste persuadeacute de nrsquoecirctre pas malade Cepen-
dant il accompagne aux consultations sa
femme et leur fille toutes les deux seacuteropositives
et sous traitement
- refus du traitement les causes sont mul-
tiples Mme T vient reacuteguliegraverement agrave ses con-
sultations le meacutedecin veut deacutesormais lui pres-
crire un traitement qursquoelle refuse Si je dis que
je suis seacuteropositive personne ne voudra se
marier avec moi Une autre patiente
srsquoinquiegravete Je ne veux pas du traitement si je
deviens indeacutetectable alors ougrave sera le virus
- problegraveme drsquoobservance les causes sont va-
rieacutees preacutecariteacute incompreacutehension ou refus du
diagnostic probleacutematique personnelle plus pro-
fonde
- souffrance psychique le patient peut ecirctre
tregraves observant ses reacutesultats biologiques sont
satisfaisants le patient va tregraves bien selon le
meacutedecin mais persiste en lui une douleur mo-
rale difficile parfois agrave repeacuterer Il faut savoir deacute-
coder le sens du sourire (qui ne signifie pas
toujours la joie) lrsquoabsence de plainte Julia
Kristeva explique que les eacutetrangers sont expo-
seacutes aux maladies psychosomatiques ils sont
dans cet espegravece de vernis de la langue se-
conde mais le fond reste douloureux et le fond
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 55
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
eacuteclate sous la forme de la migraine quand ce
nrsquoest pas le cancerhellip
- pathologie psychiatrique troubles du com-
portement (deacutelire agitation violencehellip) syn-
drome deacutepressif risque suicidaire angoisse de
mort plaintes somatiques sans cause orga-
nique (douleurs diffuses sensation de malaise
le corps parle ccedila chauffe ccedila se deacuteplace)
- fin de vie angoisse isolement
- conflits conjugaux ou familiaux aggraveacutes ou
reacuteactionnels agrave la pathologie (risque de divorce
tel mari qui nrsquoassume plus ses responsabiliteacutes
sexualiteacute devenue difficile impossible (refus du
preacuteservatif par exemple)
- Lrsquoannonce du diagnostic Lrsquoannonce drsquoune
maladie grave est toujours une eacutepreuve pour
tout malade Crsquoest un moment-cleacute dans la prise
en charge du patient Dans le cas de lrsquoinfection
par le VIH la formulation peut ecirctre une donneacutee
brutale Tel ce meacutedecin qui annonce agrave
une femme enceinte vih2 asymptomatique
vous avez le SIDA Veacuteritable violence ver-
bale qui provoque un choc psychique avec
risque suicidaire si ce nrsquoest la fuite et le refus
de soin
Actuellement chez certains soignants on as-
siste agrave une banalisation du diagnostic lieacute aux
possibiliteacutes de traitement Mais crsquoest oublier le
deacutecalage avec le niveau de connaissance du
malade et crsquoest aussi meacuteconnaicirctre les effets
sur le patient de la reacutealiteacute dramatique de la ma-
ladie au pays Certains ont vu des proches
mourir du SIDA drsquoune mort lente sans soin et
dans la solitude Tous les patients eacutevoquent
une forte angoisse Deux mois apregraves il y a en-
core en moi cette grande peur quand le meacutede-
cin mrsquoa parleacute En entendant les propos de
lrsquoinfirmier Je vous apporte vos meacutedicaments
du SIDA Mme B nous raconte comment elle
a protesteacute et reacuteagi vivement Vous ne devez
pas dire cela Ainsi dans certains cas le meacute-
decin peut utiliser drsquoautres formulations le
virus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Dans les cultures de tradition orale les mots
ont une force un pouvoir Prononcer le mot SI-
DA activerait en quelque sorte le potentiel mor-
tel de cette maladie Ainsi dans certains cas le
meacutedecin peut utiliser drsquoautres formules le vi-
rus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Deux ou trois consultations ont lieu ainsi agrave lhocirc-
pital pour chaque malade Les tradipraticiens
vont dire ce quils ont vu et vont donner leurs
indications theacuterapeutiques le suivi peut se
poursuivre apregraves leur retour au village ougrave ils
continuent si crsquoest neacutecessaire agrave travailler
pour le patient Les situations sont tregraves varieacutees
et les reacuteponses le sont tout autant
QUELQUES EXTRAITS DE CONSULTATION
Ce patient ne se sent pas malade il nrsquoa aucun
signe de la maladie il ne comprend pas pour-
quoi le meacutedecin insiste pour qursquoil prenne un
traitement qui plus est agrave vie On lui rappelle
qursquoau pays le gueacuterisseur a lui aussi son labo-
ratoire qursquoil voit et qursquoil peut demander de
faire des choses agrave celui qui vient le consulter
pour sa protection ce parfois toute la vie
Cette analogie explicite permet de confirmer la
validiteacute de lrsquoapproche meacutedicale Ce mode drsquoex-
pression imageacutee qui est familiegravere au patient
voir dans le sable faire des rituels pour la
protection reacutesonne en lui et lrsquoaide agrave adheacuterer
aux prescriptions meacutedicales Moi-mecircme jrsquoem-
ploie souvent le terme protection pour parler
du beacuteneacutefice de la tritheacuterapie jrsquoutilise des
images qui font sens pour le patient et je com-
prends mieux celles qursquoil utilise lui-mecircme De
mecircme il mrsquoarrive de lui signaler nos expres-
sions speacutecifiquement franccedilaises ou nos pro-
verbes afin de lui faire connaicirctre aussi notre
propre maniegravere drsquoexprimer certaines choses
Tel autre patient srsquoaggrave il prend mal ses
traitements et il vit dans une grande preacutecariteacute
Drsquoembleacutee lors du premier entretien psycholo-
gique il mrsquoexplique que sa sœur au pays a par-
leacute de sorcellerie Au cours de la consultation
drsquoethnomeacutedecine on lui demande de solliciter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 56
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sa famille au pays pour savoir ce qui doit ecirctre
fait aupregraves de la riviegravere sacreacutee qursquoil a eacutevoqueacutee
En Afrique les deacutefunts les ancecirctres doivent
ecirctre veacuteneacutereacutes par des rituels propres agrave chaque
famille si ce rituel a eacuteteacute abandonneacute des con-
seacutequences neacutegatives peuvent rejaillir sur un de
ses membres mecircme tregraves eacuteloigneacute On peut re-
marquer qursquoici lrsquohypothegravese de la sorcellerie est
eacutecarteacutee crsquoest une autre eacutetiologie traditionnelle
qui est avanceacutee agrave laquelle le patient adhegravere il
va contacter en effet son oncle au sujet de la
riviegravere sacreacutee Le patient devient actif non seu-
lement pour srsquooccuper des choses du pays
mais aussi pour faire des deacutemarches ici sa si-
tuation meacutedicale et sociale va consideacuterable-
ment srsquoameacuteliorer il trouve par la suite un heacute-
bergement puis un travail
Pour cette autre patiente un long temps de la
seacuteance va ecirctre consacreacute au reacutecit de la deacutecou-
verte de sa maladie de son bouleversement
de son angoisse concernant lrsquoavenir Des pa-
roles apaisantes lui sont dites puis on va lui de-
mander drsquoeacutecrire ses recircves de telle et telle nuit
au cours desquelles les gueacuterisseurs
travailleront pour elle Suite au rapport de ses
recircves ils lui prescrivent un traitement elle de-
vra se laver avec une preacuteparation agrave base de
plantes Conjointement le suivi psychologique
classique se poursuit elle reprend confiance
dans la vie
Aacute tel autre il est demandeacute drsquoapporter une petite
boicircte en bois ou encore un tissu blanc et un
parfum Aacute un autre il est dit drsquoaller chercher un
certain nombre de cailloux le long drsquoun cours
drsquoeau ici en France Certaines prescrip-
tions sont plus compliqueacutees sacrifices rituels
agrave effectuer au pays objets agrave rapporter Cela
peut prendre plusieurs semaines Si la pres-
cription est impossible agrave reacutealiser par le patient
lui-mecircme sur place ou par sa famille en
Afrique les gueacuterisseurs le feront en son nom agrave
leur retour au pays Dans la meacutedecine tradition-
nelle lrsquouniteacute cosmique crsquoest-agrave-dire la parenteacute
homme-nature est constamment preacutesente
Lrsquohomme est relieacute au monde mineacuteral veacutegeacutetal
ou animal mais aussi agrave celui des deacutefunts des
esprits et bien-sucircr agrave sa famille agrave son groupe
LE SUIVI DE GROSSESSE DE MME T
Depuis des anneacutees la patiente souffre en plus
de lrsquoinfection par le VIH de troubles du compor-
tement difficiles agrave diagnostiquer elle a un suivi
psychiatrique qui ne suffit pas agrave la soulager
Elle traverse des peacuteriodes drsquoagitation drsquoagres-
siviteacute et mecircme de violence Dans ses crises
elle peut aller jusqursquoagrave lrsquoautomutilation ou la ten-
tative de suicide Agrave drsquoautres moments elle est
totalement abattue leacutethargique Bien qursquoelle
connaisse sa maladie lieacutee au VIH lrsquoobservance
de sa tritheacuterapie est fonction de son eacutetat psy-
chique Elle a beacuteneacuteficieacute agrave plusieurs reprises de
consultations drsquoethnomeacutedecine en particulier
lors de cette derniegravere grossesse Du fait des
mauvais reacutesultats biologiques car elle ne prend
plus ses antireacutetroviraux le risque de contami-
nation megravere-enfant est particuliegraverement eacuteleveacute
Tregraves deacuteprimeacutee elle est transfeacutereacutee dans le ser-
vice de psychiatrie de notre hocircpital et le psy-
chiatre accepte qursquoagrave cocircteacute des traitements clas-
siques (antideacutepresseurs anxiolytiques) elle
fasse les soins traditionnels prescrits Elle a
donc une permission pour aller au marcheacute agrave
cocircteacute de lrsquohocircpital acheter un œuf blanc Elle doit
ensuite mettre cet œuf dans une grosse boicircte
drsquoallumettes exercice un peu difficile car lrsquoœuf
risque de se casser Le tout est mis dans une
calebasse recouverte drsquoun tissu blanc qursquoelle
entrepose sous son lit plus preacuteciseacutement agrave la
tecircte du lit En effet il est important qursquoelle
dorme avec cette calebasse pregraves de sa tecircte
pendant un certain nombre de nuits Puis la ca-
lebasse avec son contenu (lrsquoœuf dans la boicircte)
est remise aux gueacuterisseurs de retour au pays
ils vont effectuer leur travail agrave la termitiegravere sa-
creacutee A son retour en France le Dr Maman
remet un onguent agrave la patiente preacuteparation
faite agrave partir de lrsquoœuf et drsquoautres eacuteleacutements Elle
doit mettre reacuteguliegraverement cette pommade au-
tour de son nombril jusqursquoagrave lrsquoaccouchement
Lrsquoeacutetat psychique de la patiente srsquoameacuteliore elle
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 57
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reprend correctement son traitement lrsquoenfant
naicirct et ne sera pas contamineacute par le VIH Dans
les anneacutees qui suivront son eacutetat psychologique
se deacutegradera agrave nouveau nous nrsquoavons jamais
reacuteussi agrave la stabiliser compleacutetement Nrsquoayant ja-
mais bien suivi sa tritheacuterapie elle deacutecegravede agrave la
suite des complications du sida
A partir de cet exemple nous pouvons voir le
principe de non-seacuteparativiteacute principe essentiel
agrave lrsquoœuvre dans la meacutedecine traditionnelle afri-
caine Nous sommes ici dans un systegraveme de
penseacutee primordiale magique qui fonctionne
par analogie nous sommes dans le non-
seacutepareacute agrave la diffeacuterence de la penseacutee scientifique
qui individualise Dans ce cas clinique on voit
comment tout est relieacute il y a identiteacute entre la
grossesse et lrsquoœuf passage de lrsquohumain agrave
lrsquoanimal et aussi passage drsquoun continent agrave
lrsquoautre les gueacuterisseurs travaillant agrave distance
pour la patiente Citons agrave ce propos Pierre
Lembeye psychiatre et psychanalyste hellip
nous pouvons parler de rsquorsquonon-seacuteparativiteacutersquorsquo de
la meacutedecine traditionnelle par rapport agrave la meacute-
decine occidentale qui privileacutegie le mode seacutepa-
ratif et dont le maicirctre mot est diffeacuterence tandis
que celui des socieacuteteacutes anhistoriques est identi-
teacute La science en particulier la meacutedecine a
fait des progregraves en isolant en seacuteparant Citons
aussi Jean Benoist Lrsquoopposition carteacutesienne
entre le corps et lrsquoacircme a libeacutereacute la biologie et
donc la meacutedecine des interdits qui sacralisent
le corps hellip Lrsquoesprit lrsquoacircme tout ce qui eacutetait cou-
ramment deacutesigneacute par ces termes srsquoest prodi-
gieusement eacuteloigneacute de lrsquohorizon meacutedical
(Benoist 1993) A lrsquohocircpital crsquoest bien lrsquoorgane
malade que lrsquoon soigne mais rarement la per-
sonne dans sa globaliteacute et encore moins son
groupe familial Nous pensons analysons sur
le mode seacuteparatif celui de la coupure et selon
Pierre Lembeye La psychanalyse avec lrsquohy-
pothegravese de lrsquoinconscient opegravere aussi une cou-
pure avec le conscient Les lapsus les recircves
sont des manifestations de lrsquoinconscient alors
que dans la tradition africaine il nrsquoy a pas cette
seacuteparation par exemple chez les Ashantis au
Ghana si un homme recircve qursquoil couche avec sa
voisine il est puni et sa voisine aussi De
mecircme la psychiatrie pense aussi les probleacutema-
tiques sur le mode de la coupure le terme
schizophreacutenie provient de schizo du grec
schizein signifiant fractionnement fissure divi-
sion (P Lembeye) Dans les traitements tradi-
tionnels crsquoest la question du lien qui est au pre-
mier plan Nous avons lrsquoexemple de ce beacutebeacute
acircgeacute de huit mois enfant-cordon preacutesentant
des troubles du comportement et dont le traite-
ment est deacutecrit par Eacuteric de Rosny hellip le cor-
don ombilical le retenant aux entrailles de
lrsquoautre monde nrsquoaurait pas eacuteteacute coupeacute hellip Il srsquoagit
de lui crever les yeux crsquoest-agrave-dire de lui
rendre invisible le monde des Ancecirctreshellip (De
Rosny 1996 123-133)
La penseacutee magique qui est agrave lrsquoœuvre dans les
theacuterapies traditionnelles a-t-elle deacuteserteacute notre
systegraveme de penseacutee occidentale Dominique
Folscheid professeur de philosophie nous rap-
pelle ceci Notre meacutedecine moderniste est
due agrave lrsquoessor de la rationaliteacute mais on a oublieacute
que dans la Gregravece Antique la rationaliteacute deacutebu-
tante (avec les philosophes) srsquoaccompagnait
drsquoune vie mystique florissante Rappelons le
serment drsquoHippocrate premier code de deacuteonto-
logie meacutedical Je jure par Apollon meacutedecin
par Esculape par Hygeacutee et Panaceacutee par tous
les dieux et toutes les deacuteesseshellip Dans son
livre La nuit les Yeux ouverts Eacuteric de Rosny
cite Pierre Fegravevre Ce monde de la gueacuterison et
de la sorcellerie a quelque chose drsquounheimlich
(agrave la fois lsquolsquomysteacuterieuxrsquorsquo et lsquolsquoinquieacutetantrsquorsquo) et pour-
tant il eacuteveille des reacutesonances au plus profond
de nous-mecircmes et lrsquoon ne sait pas les-
quelles (de Rosny 1996 17) Nous-mecircmes
sans en avoir veacuteritablement conscience fonc-
tionnons sur le mode du lien du non-seacutepareacute
par exemple Reneacute Spitz psychiatre et psycha-
nalyste a deacutecrit en 1946 lrsquohospitalisme alteacutera-
tion physique grave srsquoinstallant chez le tregraves
jeune enfant placeacute en institution et seacutepareacute de
sa megravere crsquoest pourquoi aujourdrsquohui en peacutediatrie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 58
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
on facilite la preacutesence de la megravere qui peut dor-
mir au chevet de son enfant un autre
exemple celui du syndrome de glissement des
personnes acircgeacutees hospitaliseacutees qui coupeacutees de
leur environnement habituel se laissent mourir
et dans un autre registre que dire de lrsquoabsence
de chambre ndeg13 dans nos hocircpitaux nos hocirc-
tels
4 FORMATION MUTUELLE PARTAGE DE SAVOIR
Un eacutechange des savoirs srsquoest instaureacute entre les
soignants de lrsquohocircpital et lrsquoassociation
1 au niveau de lrsquoassociation les membres
drsquoURACA sont formeacutes agrave la pathologie du sida
les meacutedecins apportent leur connaissance meacute-
dicale avec des mises agrave jour sur lrsquoeacutevolution de
la pathologie et des traitements Des reacuteunions
agrave thegraveme sont organiseacutees avec un eacutelargisse-
ment agrave drsquoautres pathologies (heacutepatites dreacutepa-
nocytose)
2 au niveau des soignants formation en situa-
tion clinique participation au cycle annuel de
confeacuterences drsquoUraca voyages drsquoeacutetude dans le
village du Dr Maman au Nord-Beacutenin effectueacutes
par des meacutedecins psychiatres psychologues
assistante sociale infirmiegraveres de lrsquoAP-HP
(participation agrave des theacuterapies traditionnelles
dont le culte de danses de possession expeacute-
rience drsquoune certaine situation migratoire vil-
lage dans la brousse repegraveres diffeacuterents cadre
culturel autre adaptation au climat agrave la nourri-
turehellip)
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La nuit les yeux ouverts eacuted Seuil 1996
Justice et sorcellerie Collectif sous la direc-
tion drsquoE de Rosny eacuted Karthala 2006
LrsquoAfrique de lrsquooraliteacute et lrsquoaccueil de lrsquoEacutecriture
Paris Revue Christus ndeg225 2010
Collectif
La notion de personne en Afrique Noire Ed
LHarmattan 1973
Soins et cultures 2egravemes
Rencontres Transcul-
turelles de Tenon-Uraca Les Cahiers de
lrsquoURACA ndeg12 juin 2005 (teacuteleacutechargeable sur le
site wwwuracaorg)
Pratiques theacuterapeutiques et cultures regards
croiseacutes 3egravemes
Rencontres Transculturelles de
Tenon-Uraca 2010 videacuteos de la journeacutee en
ligne sur wwwuracaorg)
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 60
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune
pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute
L e propos de cette preacutesentation sera de
teacutemoigner de leacutevolution drsquoune pratique
de psychologue au sein dun pocircle de peacute-
diatrie bien speacutecifique celui de lrsquoHocircpital Ray-
mond Poincareacute de Garches Laccueil denfants
en deacutecompensation neuro respiratoire souf-
frant de polyhandicap de maladies chroniques
ou arrivant suite agrave un eacuteveacutenement traumatique
brutal (accident intoxication insuffisance respi-
ratoire) rend la preacutesence du psychologue neacute-
cessaire
Avec Jean en phase terminale nous reacutefleacutechi-
rons au rocircle du psychologue dans lrsquoaccom-
pagnement des enfants en fin de vie
Dautres cas cliniques preacutesenteacutes agrave loral illus-
treront ensuite les modaliteacutes de la prise en
charge post-traumatique denfants et de
leurs familles
Enfin nous terminerons par exposer la speacutecifi-
citeacute de notre travail aupregraves des soignants
ACCOMPAGNER DES ENFANTS GRAVEMENT MA-
LADES OU EN FIN DE VIE
Lors de notre premiegravere rencontre Jean nous
dit Je sais que je vais mourir mais les meacutede-
cins sont trop lacircches pour me le dire et mes
parents sont trop tristes pour mrsquoen parler
Nous lui reacutepondons Je ne te connais pas
mais en tout cas je trouve que cest super que
tu puisses en parler et que tu ne gardes pas
tout ccedila pour toi
Tregraves eacutetonneacute il reprend Alors lagrave crsquoest bizarre
drsquohabitude degraves que je dis que je vais mourir
tout le monde me dit rdquoMais arrecircte Nrsquoimporte
quoi Ne raconte pas des becirctisesrdquo Mais moi je
ne suis pas fou je sais ce que je dis et pour-
quoi je le dis et je veux pouvoir en parler
La question redoutable est tregraves vite apparue
Est-ce que crsquoest vrai que je vais mourir Il
faut alors pouvoir reacutepondre Je pense que si
tu dis ccedila crsquoest que tu as de bonnes raisons de
le penserhellip Tu es le seul agrave savoir exactement
ce que tu vis Raconte-moi qursquoest-ce qui te fait
dire ccedila
Jour apregraves jour gracircce agrave un travail psycholo-
gique Jean exprime de plus en plus sa souf-
france Se sentant eacutecouteacute il entre progressive-
ment dans une autre phase celle de lrsquoaccepta-
tion
Accompagner un enfant en fin de vie crsquoest
avant tout rester agrave son eacutecoute affronter les
questions qui mettent si mal agrave lrsquoaise (mecircme si
et surtout si on ne sait pas comment y reacute-
pondre ) Et crsquoest aussi accueillir ses interroga-
tions sur sa propre mort pour lutter contre la
solitude la peur lrsquoangoisse la colegravere
ACCOMPAGNER LES FAMILLES
Avec la megravere de Jean nous deacutecouvrons ce qui
se joue autour de la porte Degraves que nous nous
preacutesentons elle nous reacutepond Merci on nrsquoa
besoin de rien (Puis sortant de la
chambre) mais surtout vous ne lui dites pas
qursquoil va mourir vous ne lui parlerez de rien -
Oh moi non mais lui il en parle beaucoup
Tregraves surprise la megravere accepte alors de venir
en parler dans notre bureauhellip Lrsquoaccompagne-
ment commence
En phase terminale Jean perd toute autonomie
motrice et tous ses sens agrave lrsquoexception de la
vue Il ne peut plus parler Sa megravere terroriseacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 61
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
par la situation demande aux eacutequipes de lui
donner quelque chose pour dormir deacutefiniti-
vement Nous lui montrons alors qursquoune com-
munication subsiste gracircce agrave lrsquoinstauration drsquoun
code (lettres sur un tableau) avec des signes
de tecircte et des clignements drsquoœil Elle srsquoaperccediloit
alors que Jean cherche avant tout agrave savourer
les petits bonheurs de chaque jour Elle reste
ainsi jusquau bout en lien avec son fils
Accompagner les parents cest accueillir
leur eacutepuisement leurs doutes leur ambiva-
lence parfois mecircme leur demande deuthana-
sie et leur redonner une image positive deux-
mecircmes pour leur permettre drsquoinvestir lrsquoinstant
preacutesent et ainsi favoriser un accompagnement
de qualiteacute
ACCOMPAGNER AUSSI LES AUTRES ENFANTS HOS-
PITALISEacuteS ET LEURS FAMILLES
Il nous semble important de susciter des
occasions drsquoaborder le sujet de la mort en lais-
sant les familles libres de saisir ou non ces op-
portuniteacutes
ACCOMPAGNER LES SOIGNANTS
DANS LIMMEacuteDIATETEacute DE LA REacuteALITEacute CLINIQUE
En deacutecalage les eacutequipes srsquointerrogent
Doit-on vraiment lui infliger ccedila jusqursquoau bout
Sa megravere a peut-ecirctre raison on devrait peut-
ecirctre lrsquoendormir pour qursquoil ne se sente pas humi-
lieacute drsquoecirctre si diminueacute Moi je ne supporterais
pashellip Les soignants sont alors tellement preacute-
occupeacutes par la deacutecision qursquoils pensent devoir
prendre qursquoils ne se rendent pas compte que
cette megravere est en train de vivre lrsquoun des plus
grands moments drsquoamour avec son fils Le psy-
chologue devient alors le lien entre les diffeacute-
rents protagonistes en rapportant certains des
propos de Jean Je suis bienhellip Comme ce
rayon de soleil est beau aujourdrsquohuihellip La
communication se remet agrave fonctionner Leurs
regards se posent alors diffeacuteremment sur lui
La peacuteriode de fin de vie drsquoun patient con-
fronte chaque soignant agrave ses limites Chacun
perd ses illusions de toute-puissance et se re-
trouve confronteacute agrave sa propre angoisse de mort
Certains deacutestabiliseacutes ne peuvent pas suppor-
ter lideacutee decirctre confronteacute agrave la proximiteacute de la
mort Pour surmonter sans trop de seacutequelles
la confrontation reacutepeacuteteacutee agrave la maladie grave et agrave
la mort il est neacutecessaire que chacun puisse
ecirctre attentif agrave soi-mecircme agrave ses propres be-
soins pour ecirctre dans un juste rapport agrave lrsquoautre
Il sagit decirctre toucheacute sans ecirctre impliqueacute affecti-
vement cest agrave dire sans tomber dans leacutemotivi-
teacute
Apregraves chaque deacutecegraves le psychologue est
lagrave pour inviter ceux qui le deacutesirent agrave mettre en
mots ce qui a eacuteteacute veacutecu La parole partageacutee per-
met de ne pas fixer des souvenirs culpabili-
sants ou anxiogegravenes
AU LONG COURS LE TRAVAIL INSTITUTIONNEL
Le soutien des eacutequipes pluridisciplinaires
est une part tregraves importante du travail du psy-
chologue en milieu hospitalier Lrsquoeacutecoute et les
eacutechanges contribuent agrave ce que tregraves lentement
les habitudes et les mentaliteacutes eacutevoluent Ces
rencontres pourront selon les situations avoir
lieu de faccedilon formelle ou informelle (le plus
souvent dans les couloirs)
Le soutien au long cours des eacutequipes fait par-
tie inteacutegrante du travail institutionnel Diffeacuterents
outils permettent de lrsquoaccompagner au mieux
LA REacuteUNION DE SYNTHEgraveSE
Dans notre service la reacuteunion de syn-
thegravese hebdomadaire permet de se poser pour
reacutefleacutechir en eacutequipe pluridisciplinaire agrave ce que
nous vivons Il est primordial drsquoaider chaque
intervenant agrave mettre des mots sur les situations
rencontreacutees surtout quand les points de vue
sont divergents Mais il srsquoagit drsquoun travail de
longue haleine car si nous nrsquoy sommes pas
vigilants les discussions restent tregraves meacutedicales
et eacutevitent drsquoaborder lrsquoenfant et sa famille dans
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 62
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
leur globaliteacute Le psychologue par sa faccedilon de
relever les paradoxes de poser les questions
eacutethiques ou simplement de faire entendre une
autre approche que celle purement somatique
aide les eacutequipes agrave reacutefleacutechir agrave leur maniegravere
drsquoaborder les familles
LA SYNTHEgraveSE DES SYNTHEgraveSES
Une fois par an nous prenons le temps
de relire les moments forts de lrsquoanneacutee en met-
tant des mots sur ce qui a reacuteussi ou eacutechoueacute ce
qui nous a manqueacute ce qui nous a marqueacute
choqueacute ou qui est resteacute incompris Mettre des
mots agrave distance sur des malentendus (en lien
avec une famille ou un fonctionnement interne)
permet davancer en eacutequipe Nous veillons
aussi agrave reprendre point par point les eacuteleacutements
positifs rappeler les enfants sauveacutes les fa-
milles qui remercient et valoriser les eacutequipes
est essentiel pour maintenir la motivation et
lrsquoinvestissement de chacun
ET LE PSYCHOLOGUE DANS TOUT CcedilA
Face agrave ces enfants gravement malades ou en
fin de vie nous devons apprendre agrave nous
adapter Il nous faut par exemple pour pouvoir
accueillir un enfant sans aucune autonomie
respiratoire dans notre bureau apprendre au
minimum les gestes de reacuteanimation agrave effectuer
en attendant qursquoun soignant prenne la relegraveve
Alors que nous avons appris agrave ne pas toucher
il nous faut comprendre ce que le patient nous
dit non plus agrave travers des mots mais agrave travers
des maux agrave travers son corps une poigneacutee
de main un regard une mimiquehellip nous de-
vons sentir lrsquoexpression non verbale de lrsquoan-
goisse Deacuteceler si le patient a besoin de silence
ou au contraire srsquoil attend nos questions En-
fin il faut quelquefois avec une extrecircme deacuteli-
catesse et une grande attention chercher agrave re-
formuler ce que le patient nous dit avec des
lettres montreacutees sur un tableau un hochement
de tecircte ou simplement un regard
Ecirctre psychologue va souvent de pair avec une
invitation permanente agrave se remettre en ques-
tion Il srsquoagit drsquoaccepter de douter plutocirct que de
chercher des certitudes Pour srsquoadapter agrave la
speacutecificiteacute de chaque situation il nous faudra
surtout ecirctre creacuteatif et oser inventer Dans le
cas contraire notre travail restera sans doute
superficiel car il apparaicirctra comme en deacuteca-
lage par rapport aux situations veacutecues par les
patients et les eacutequipes qui les prennent en
charge
Au niveau institutionnel le travail du psycho-
logue ne porte de fruits qursquoagrave tregraves long terme
Alors ne nous deacutecourageons pas (Le deacutecou-
ragement nrsquoest-il pas notre pire ennemi ) Veil-
lons agrave prendre soin de nous soyons attentifs agrave
nos propres besoins Ne nous barricadons pas
devant la deacutetresse mais au contraire appre-
nons agrave ralentir et agrave ressentir ce qui est toucheacute
en nous Comme leacutequilibriste sur la corde
nous devons essayer davancer en souplesse
pour ne tomber ni dans lindiffeacuterence ni dans la
fusion avec les situations dramatiques rencon-
treacutees
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Geacuteriatrie Hocircpital Eacutemile Roux
M esure 1 du plan Alzheimer 2008-
2012 deacuteveloppement et diversifica-
tion des structures de reacutepits
Parce qursquoils sont contraints de veiller constam-
ment sur les malades les aidants sont soumis
agrave une pression permanente Il existe des struc-
tures qui leur permettent de souffler en offrant
par ailleurs une prestation theacuterapeutique aux
malades pendant une ou plusieurs demi-
journeacutees
Afin drsquoeacutelargir les missions des accueils de jour
qui ne srsquoadressent qursquoaux personnes malades
ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees les plates-formes drsquoac-
compagnement et de reacutepit Il srsquoagit drsquooffrir aux
aidants et aux couples des activiteacutes de soutien
de reacutepit agrave domicile ou en couple et de deacutevelop-
pement de la vie sociale
Il existe des actions de reacutepit agrave domicile de
garde agrave domicile de nuit drsquoactiviteacutes sociales
culturelles pour le couple maladeaidant et de
seacutejours vacances
Jacqueline agrave la fin drsquoun seacutejour vacances mrsquoa
confieacute deux feuilles de cahier manuscrites Jrsquoai
eacutecrit ccedila Vous le lirez si vous voulez
Je me legraveve agrave 7h Prise des meacutedicaments de
Guy Je deacutejeune moment tranquille je fais ma
toilette Je vais ouvrir les volets chez maman Il
est 8h30 Je preacutepare les meacutedicaments et le pe-
tit deacutejeuner de Guy Quelques fois je le fais
manger si je peux Je fais les lits je com-
mence agrave preacuteparer le deacutejeuner Passage du
SSIAD Pendant ce temps je preacutepare une les-
sive pratiquement une tous les jours Apregraves le
passage du SSIAD souvent il a besoin drsquoaller
aux toilettes le deacuteculotter nettoyer les WC le
reculotter ranger la salle de bain et finir ce qui
a eacuteteacute commenceacute (je ne peux rien faire en sui-
vant) Souvent fais de lrsquoadministratif preacuteparer
le courrier aller agrave la poste et au pain Il vient
avec moi il faut lrsquoaider agrave monter dans la voiture
et souvent lrsquoaider agrave descendre Il est 11h il faut
eacutetendre le linge lrsquoaider agrave faire sa gym preacuteparer
et porter le plateau agrave maman Midi Lrsquoheure de
preacuteparer et donner les meacutedicaments Mettre le
couvert couper les aliments lrsquoaider Pour lui il
faut bien 90 min de pose pour deacutejeuner
Apregraves desservir le preacuteparer pour la sieste le
deacuteculotter et reculotter lrsquoaider agrave se coucher
finir de ranger la cuisine lever et plier le linge
Il est environ 14h Petite pause 15h-15h30 la
sieste est finie Sortie dans le jardin toujours
accompagneacute Lrsquoaider agrave srsquohabiller agrave se deacutesha-
biller 16h prise des meacutedicaments et goucircter
Quelquefois passages agrave la sortie de lrsquoeacutecole
des petits enfants et leur papa Aux beaux
jours travail agrave lrsquoexteacuterieur (plus de 2000m2) La
tonte du gazon est faite par mon garccedilon et jrsquoai
agrave peu pregraves 40h par an par la caisse de retraite
compleacutementaire Jrsquoai une aide-meacutenagegravere 3 h
le mardi matin et 1 h le mercredi matin Jrsquoen
profite pour aller faire les courses ou aller chez
le docteur le dentiste ou le coiffeur ou autre
chose Et 3h le jeudi apregraves-midi Lagrave crsquoest mon
repos hebdomadaire et pas toujours Je vais agrave
lrsquoaquagym avec 2 amies mais juste en peacuteriode
scolaire On est loin des 2 jours de congeacutes par
semaine mais jrsquoen demande pas tant Vers 17h
-17h30 petite promenade dans le jardin apregraves
preacuteparation du dicircner 19h prise des meacutedica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 64
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
ments Le dicircner pour lui il faut compter 90 min
Ensuite desservir Vers 20h30 je vais deacuteshabil-
ler maman Pour lrsquoinstant elle se couche sans
aide mais au deacutebut du printemps jrsquoallais la cou-
cher vers 22h Entre-temps je deacuteshabille Guy
passage aux toilettes prise des meacutedicaments
et apregraves le coucher
Il est 22h Je respire un peu Je fais un brin de
toilette Je prends mon somnifegravere et je me
couche Je mrsquoendors ou je ne mrsquoendors pas Lagrave
on peut pleurer Personne ne le voit Dans la
nuit je me legraveve une ou deux fois quand il a be-
soin de faire son pipi
Et cela 365 jours par an Et je ne me plains
pas Il y a pire Il y a aussi mieux
Jacqueline est comme 35 millions de fran-
ccedilais Elle fait partie des personnes que lrsquoon
nomme aidant familial drsquoun proche Il srsquoagit de
son mari Cela fait 12 ans qursquoil est malade Le
quotidien de Jacqueline est rythmeacute autour de
son eacutepoux et de sa pathologie eacutevolutive
En geacuterontologie le mot aidant est utiliseacute voire
parfois revendiqueacute Un aidant mais qursquoest-ce
que crsquoest Selon lrsquoassurance maladie crsquoest
celui qui apporte seul ou en compleacutement de
lrsquointervention des professionnels lrsquoaide humaine
rendue neacutecessaire par la perte drsquoautonomie de
la personne acircgeacutee ou destineacutee agrave preacutevenir une
perte drsquoautonomie et qui nrsquoest pas salarieacute pour
cette aide
Depuis une quinzaine drsquoanneacutees le veacutecu des
aidants familiaux fait lrsquoobjet de recherches On
sait aujourdrsquohui que 800 000 personnes sont
recenseacutees comme eacutetant en eacutetat de deacutepen-
dance en France crsquoest-agrave-dire qursquoelles ne peu-
vent pas effectuer de maniegravere autonome les
actes de la vie courante Et que cela est forte-
ment correacuteleacute agrave lrsquoavanceacutee en acircge la personne
aideacutee a 76 ans en moyenne
Si le lien familial preacutedomine lrsquoaidant peut aussi
ecirctre un ami ou un voisin Il srsquoagit le plus sou-
vent drsquoune femme acircgeacutee de plus de 50 ans
Bien que deux tiers des aidants srsquooccupent
quotidiennement de la personne aideacutee 60
drsquoentre eux continuent agrave avoir une activiteacute sala-
rieacutee
Lrsquoaide agrave un proche dure en moyenne 7 ans
Dans la relation drsquoaide plusieurs probleacutema-
tiques sont en jeu le deuil du parent conjoint
tel qursquoil eacutetait auparavant le renversement des
rocircles de lrsquoordre des geacuteneacuterations la crainte face
agrave son propre vieillissement les difficulteacutes de
communication avec le proche malade la
crainte de la perte du lien
La relation drsquoaide a ses apports la majoriteacute
des aidants disent se sentir utile et trouver du
plaisir dans cette relation Mais elle a aussi ses
limites et ses risques On sait aujourdrsquohui que
la mortaliteacute des aidants augmenterait de 63
que le risque de deacutepression est multiplieacute par 3
Dans cette aide au quotidien le rythme la reacute-
peacutetition lrsquoeacutevolution de la maladie peuvent ame-
ner agrave des sentiments drsquoisolement de surme-
nage et drsquoeacutepuisement
Si plus de 60 des personnes atteintes de la
maladie drsquoAlzheimer ou apparenteacutees vivent agrave
leur domicile crsquoest gracircce agrave un aidant familial
qui toute la journeacutee est dans le faire Lrsquoaidant
familial contrairement agrave lrsquoaidant professionnel
nrsquoest pas formeacute agrave cet accompagnement il base
sa relation agrave partir drsquoun lien affectif avec la per-
sonne qursquoil aide Il peut ecirctre reacutemuneacutereacute sil a
lrsquoacircge de travailler et qursquoil nrsquoest pas son conjoint
Il nrsquoa pas drsquoheures fixes
On peut donc comprendre le besoin parfois de
se poser un peu
Plutocirct que le mot vacances est apparu reacute-
cemment le mot reacutepit
Des seacutejours de reacutepit pour les aidants
Une expression forte qui vient nommer la souf-
france du proche dans la relation drsquoaide
Agrave croire que la personne dite aideacutee nrsquoa elle
pas besoin de temps de pause et que son quo-
tidien lui suffit parfaitement La femme de
Pierre me dira mon meacutedecin et son neuro-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 65
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
logue mrsquoavaient deacuteconseilleacute de lrsquoemmener ici
En France les vacances sont un droit pour les
salarieacuteshellip
Mais au fait agrave quoi ccedila sert des vacances Eh
bien avant tout agrave couper avec le quotidien An-
dreacute Comte-Sponville eacutevoque les vacances
comme un moment de liberteacute
Srsquoaccorder une pause crsquoest ainsi que nous
avons nommeacute le seacutejour de vacances que je
vais vous preacutesenter
Le seacutejour est proposeacute par une caisse de re-
traite compleacutementaire qui contacte ses adheacute-
rents Le point commun est qursquoil existe entre un
adheacuterent et un de ses proches une relation
drsquoaide au quotidien Le projet a eacuteteacute construit et
penseacute avec une association qui intervient dans
lrsquoaccompagnement de lrsquoavanceacutee en Acircge
Le groupe est composeacute en moyenne de 7
couples la moyenne drsquoacircge des aidants est de
74 ans et celle des aideacutes de 80 ans
Les participants viennent de la France entiegravere
Ils ne se connaissent pas Nous ne les con-
naissons pas
La majoriteacute des aideacutes preacutesentent des pro-
blegravemes cognitifs ou des difficulteacutes motrices
Le lieu est une structure de vacances (type reacute-
sidence hocircteliegravere) adapteacutee aux personnes han-
dicapeacutees
Le seacutejour a eacuteteacute penseacute avec la preacutesence de
deux personnes dite en fil rouge de la se-
maine la coordonnatrice de lrsquoassociation creacutea-
trice du projet et la psychologue Partager le
quotidien du petit deacutejeuner au dicircner de lrsquoac-
cueil jusqursquoau deacutepart
Drsquoautres intervenants (intervenant en Taiuml-Chi
Chuan une socio-estheacuteticienne intervenant en
chant et expression corporelle activiteacute autour
de la terre) rejoignent le groupe en deacutecaleacute afin
de conserver une alternance des pratiques
mais aussi une preacutesence renforceacutee en milieu
de semaine moment ougrave nous pouvons com-
mencer agrave seacuteparer les duos
Lrsquoaspect meacutedicaliseacute parfois neacutecessaire est re-
layeacute par des infirmiegraveres libeacuterales qui intervien-
nent sur le lieu de vacances
Le planning de la semaine est proposeacute avec
des activiteacutes ensemble seacutepareacutees en groupe
individuelles toujours dans la proposition et
non dans la contrainte Le rythme des journeacutees
srsquoadapte tous les jours
Les objectifs de la semaine
Permettre agrave chacun aidant comme aideacute de
srsquoaccorder veacuteritablement une pause en profi-
tant pleinement du site et drsquoun accompagne-
ment qui facilite leur quotidien pendant la se-
maine (absence de tacircches meacutenagegraveres repas
servis au restaurant possibiliteacute drsquoaccompagne-
ment de la personne aideacutee pour quelques
heures proposition drsquoanimations proposition
de temps dlsquoeacutechanges et de paroles)
Favoriser lrsquoacquisition et le partage drsquooutils mecirc-
lant expeacuteriences et connaissances que les per-
sonnes pourront reacuteutiliser une fois de retour au
domicile
Nous ne nommons pas les personnes par leur
fonction aidant ou aideacute mais par leur preacutenom
Chaque duo est composeacute drsquoune personne
ayant un badge vert et lrsquoautre saumon Ainsi
certaines activiteacutes sont proposeacutees agrave tous et
drsquoautres agrave chaque groupe de couleur diffeacuterente
Lrsquoanalyse des questionnaires de satisfaction ou
du bilan oral nous confortent encore dans lrsquoideacutee
que ces objectifs reacutepondent bien agrave ceux des
personnes et sont atteignables dans le cadre
de ces seacutejours
Crsquoest lrsquooccasion de partager une semaine de
vacances tout agrave fait diffeacuterente du quotidien et
des repegraveres de chacun Le groupe se creacutee degraves
les premiegraveres heures de rencontre agrave lrsquoarriveacutee
Tout au long de la semaine chacun eacutevolue
dans sa propre probleacutematique
Les aidants deacutecouvrant drsquoautres pairs eacutechan-
geant avec drsquoautres prenant distance vis agrave vis
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 66
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
de leur veacutecu et deacutecouvrant le comportement de
leur proche avec drsquoautres personnes profes-
sionnels ou non
Les aideacutes qui se sont saisis des possibiliteacutes
offertes de faire autrement deacutecouvrir drsquoautres
vivre des moments de plaisir malgreacute le handi-
cap ou la maladie Eacutechanger avec drsquoautres qui
vivent des situations similaires
Lrsquoeacutevolution du groupe dans lequel une con-
fiance mutuelle srsquoinstalle et permet des interac-
tions et des eacutechanges tregraves riches humaine-
ment Chacun a pu recevoir et apporter agrave
lrsquoautre qursquoil soit aideacute ou aidant
Durant tout le seacutejour tout le monde peut se po-
ser deacutecouvrir lrsquoautre se deacutecouvrir dans des
moments partageacutes individuels ou collectifs
Proposer plein drsquounivers diffeacuterents des compeacute-
tences diffeacuterentes (prof de tai-chi le corps
penseacute le chant le savoir de lrsquoeacutemotion la socio-
estheacuteticienne le mieux avec soi-mecircme)hellip
Et le psychologue dans tout ccedila
Dans ce type de vacances jrsquointerviens en bi-
nocircme avec la responsable du seacutejour du deacutebut
du seacutejour jusqursquoau deacutepart des participants
Je me preacutesente en tant que psychologue Pour
la plupart crsquoest la premiegravere fois qursquoils rencon-
trent quelqursquoun de cette profession Vous allez
mrsquoanalyser me demande Jacques au deacutebut
du seacutejour Finalement vous ecirctes sympas les
psys Vous croyez qursquoil en y en pregraves de chez
moi me demandera-t-il en fin de seacutejour
Je suis tout le temps avec eux du soir au ma-
tin Pas tregraves acadeacutemique comme cadre de tra-
vail et pourtant comme souvent la clinique
vient nous proposer de penser autrement
Le rocircle essentiel du psychologue est que du
deacutebut agrave la fin du seacutejour il propose ce que je
nomme des bras psychiques Les 4 bras les
bras du cadre formel et les bras psychiques Fil
rouge tout le long du seacutejour Crsquoest par ce cadre
-lagrave que chacun va pouvoir se deacutetendre libeacuterer
la parole Lacirccher le faire du quotidien pour
tendre vers le vivre le ressentir et le partager
durant le seacutejour
Pour le psychologue partager le quotidien (du
petit deacutejeuner au dicircner) crsquoest ne pas ecirctre tout
le temps dans la distance mais ecirctre dans la
juste distance Alterner des moments formels
proposition de groupes de parole durant le seacute-
jour pour les personnes en situations drsquoaider et
celles qui reccediloivent de lrsquoaide) et de temps infor-
mels Crsquoest ecirctre disponible Crsquoest garantir lrsquoexis-
tence du maintien de la vie psychique et recon-
naicirctre la personne en tant que sujet pensant
ressentant deacutesirant
Tisser des liens Lacirccher le bras de son malade
changer de bras Faire confiance agrave lrsquoautre et
deacutecouvrir ainsi que lrsquoon peut soutenir lrsquoautre
dans ce qursquoil est capable de donner Faire con-
fiance est possible si le cadre est suffisamment
contenant pour se lrsquoautoriser
Deacutecloisonner les rocircles et les fonctions de cha-
cun Les cloisons tombent Le fil qui nous tient
et nous unit dans le lien agrave lrsquoautre reste Prendre
soin de soi
Exemple du massage des mains avec la socio-
estheacuteticienne En groupe de parole eacutemerge
alors que les mains ne servent pas qursquoagrave se te-
nir ou tenir lrsquoautre les mains se croisent dans
le relationnel et la communication Ne plus ecirctre
dans le soigner la maladie mais dans le pren-
dre soin de ce qui nous lie agrave lrsquoautre
Accompagner lrsquoaidant agrave cheminer vers le si
moi je vais mieux alors lui ira peut ecirctre mieux
au lieu de si il va bien je vais bien
Durant le seacutejour je prends des notes tous les
soirs sur chaque participant Notes drsquoimpres-
sion de ressenti et de questions qui me per-
mettent de comprendre lrsquoeacutevolution psycho-
dynamique de chacun et de chaque duo
Deux fois en moyenne durant le seacutejour jrsquoap-
pelle une collegravegue afin de pouvoir parler pen-
ser et eacutelaborer le veacutecu partageacute
Je propose un moment de reacuteflexion sur la rela-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 67
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
tion drsquoaide avec les aidants Je propose un
temps de parole et drsquoeacutechange sur le veacutecu de
lrsquoaideacute
Lors du bilan le rocircle de la psychologue est tou-
jours valoriseacute Non confondu avec les temps
drsquoanimation crsquoest un espace drsquoeacutechange de soi
et de lrsquointime qui est possible parce qursquoun lien
de confiance dans le quotidien srsquoest creacuteeacute Nous
partageons nos savoirs ceux de ma connais-
sance avec ceux de leur expeacuterience Jrsquoai deacute-
couvert ce que crsquoest une psy Ce nest pas si
grave ccedila srsquoavegravere mecircme plutocirct utile
Ces seacutejours sont lrsquooccasion aussi pour les pro-
fessionnels intervenants drsquoenrichir leurs con-
naissances et leurs pratiques vis-agrave-vis de ce
qursquoest la relation aidant-aideacute en partageant leur
quotidien pendant quelques jours
Comprendre le lien aidantaideacute dans ce qui se
joue au quotidien au plus intime au plus pro-
fond
Le seacutejour ne dure qursquoune semaine Cette se-
maine est en dehors du quotidien de chacun
Elle montre que de vivre eacutechanger rire parta-
ger du plaisir avec drsquoautres est possible et es-
sentiel Elle permet ainsi aux couples ou duos
de se ressourcer et de repeacuterer les plaisirs qui
fondent et nourrissent leur relation partageacutee
Merci de votre attention
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 68
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Hocircpital Saint Louis
gt Laccompagnement psychologique par teacuteleacute-
phone dans les maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere Page 69
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale de
grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Hocircpital Jean Verdier Page 78
gt Psychologue clinicien aupregraves du personnel
missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
Page 82
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 69
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les
maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere
L a Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des
Maladies de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) a
eacuteteacute creacuteeacutee en 2001 par le Ministegravere des
Solidariteacutes de la Santeacute et de la Famille A la
disposition du grand public et des profession-
nels de terrain elle a pour mission lrsquoaide au
diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale so-
ciale et psychologique des patients et de leur
famille
La Cellule est nicheacutee au cœur de lrsquohocircpital de la
Pitieacute-Salpecirctriegravere dans lrsquoune des trois loges au-
trefois destineacutees aux alieacuteneacutes Elle a la particu-
lariteacute de ne pas accueillir physiquement le pu-
blic auquel elle srsquoadresse lrsquoaide qursquoelle pro-
pose srsquoeffectue essentiellement par teacuteleacutephone
En juin 2003 jrsquointegravegre pour un tiers-temps de
psychologue lrsquoeacutequipe deacutejagrave composeacutee drsquoun meacute-
decin coordinateur drsquoun meacutedecin attacheacute
drsquoune assistante sociale drsquoune assistante de
recherche clinique et drsquoune secreacutetaire
A cette eacutepoque je treacutebuche agrave lrsquoenvi sur lrsquoimpro-
nonccedilable Creutzfeldt-Jakob et examine drsquoun
œil dubitatif ma fiche de poste comment assu-
rer un soutien psychologique exclusivement
teacuteleacutephonique Eacutetait-ce reacutealisable efficace ad-
missible
PREacuteAMBULE
Les Maladies de Creutzfeldt-Jakob sont con-
nues de longue date les premiers cas ont eacuteteacute
deacutecrits par Creutzfeldt et Jakob dans les an-
neacutees 1920 Ce sont des maladies neurodeacutegeacute-
neacuteratives rares (qui se traduisent par une deacute-
mence et une grabatisation) 15 cas par mil-
lion drsquohabitants et par an dans tous les pays ougrave
existe une surveillance eacutepideacutemiologique En
France elles concernent une centaine de cas
par an
Principalement connues du grand public sous
le nom de maladie de la vache folle il existe
pourtant trois formes diffeacuterentes de MCJ avec
pour chacune drsquoelles ses speacutecificiteacutes On les
classe en fonction de leur mode de transmis-
sion la forme sporadique (aleacuteatoire) les
formes heacutereacuteditaires (MCJ geacuteneacutetiques syn-
drome de Gertsmann-Straussler-Scheinker
Insomnie Fatale Familiale) et les formes ac-
quises (formes iatrogegravenes des hormones de
croissance variante de la MCJ)
Le poste de psychologue avait eacuteteacute creacuteeacute pour se
consacrer principalement au travail drsquoeacutecoute
des personnes agrave risque de deacutevelopper une
MCJ suite agrave un traitement par hormones de
croissance contamineacutees Puis il srsquoest eacutetendu agrave
lrsquoeacutecoute de toute personne concerneacutee directe-
ment ou non par une MCJ quelle qursquoen soit la
forme
DE LrsquoENTRETIEN PONCTUEL AU SUIVI
La nature teacuteleacutephonique des entretiens psycho-
logiques est le fait drsquoune indeacutepassable reacutealiteacute
la dimension nationale du champ drsquointervention
de la Cellule exclut lrsquoeacuteventualiteacute drsquoentretiens en
face agrave face Mais si en 2011 les suivis psycho-
logiques par teacuteleacutephone se deacuteveloppent agrave
grands pas en 2003 rien nrsquoeacutetait moins eacutevident
que cette forme drsquoaccompagnement lagrave
Agrave cette eacutepoque drsquoailleurs la prise en charge
psychologique au sein de la Cellule se limitait agrave
la proposition drsquoun entretien teacuteleacutephonique pour
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 70
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
faire le point agrave des personnes qui avaient ap-
peleacute pour une toute autre demande principale-
ment drsquoordre meacutedical ou social Agrave lrsquooccasion de
ces demandes certains appelants manifes-
taient des signes de souffrance lieacutee agrave leur si-
tuation peur de la maladie du risque de la deacute-
velopper anxieacuteteacute suite agrave lrsquoannonce de la mala-
die drsquoun proche imminence de son deacutecegraves etc
Les membres de lrsquoeacutequipe les informaient alors
de la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par la psycho-
logue de la Cellule pour parler des difficulteacutes
qursquoils traversaient en ces moments critiques
Ces entretiens teacuteleacutephoniques ponctuels (de 45
minutes) eacutetaient destineacutes agrave contenir les an-
goisses et la deacutetresse des appelants Puis au
besoin jrsquoorganisais un suivi psychologique de
proximiteacute (psychologues ou psychiatres libeacute-
raux Centres Meacutedico-Psychologiques
(CMP)
Ainsi la proceacutedure entretien ponctuel - reacuteorien-
tation nous semblait reacutepondre au besoin ponc-
tuel drsquoeacutetayage des appelants et correspondre
aux exigences de fonctionnement en plate-
forme nationale de la Cellule Circonscrite pla-
nifieacutee et probablement eacuteconomique sur le plan
psychique cette proceacutedure nous rassurait-elle
aussi Quand bien mecircme elle a plieacute sous le
poids de la reacutealiteacute et a consideacuterablement eacutevo-
lueacute depuis 2003
En effet alors que le nombre annuel de ma-
lades concerneacutes par les MCJ demeure stable
le volume annuel drsquoentretiens psychologiques
lui est passeacute de 40 agrave 260 en huit ans Ainsi
110 personnes ont eacuteteacute suivies ou ont beacuteneacuteficieacute
de seacutequences de soutien de plus de 3 entre-
tiens teacuteleacutephoniques Cela repreacutesente 84 des
personnes ayant eu un premier contact avec le
psychologue Et tandis que la proceacutedure preacute-
voyait un ou deux entretiens la dureacutee des sui-
vis est en moyenne de neuf mois (de trois se-
maines agrave trois ans) drsquoune rythmiciteacute allant drsquoun
entretien hebdomadaire agrave un entretien men-
suel en fonction des besoins Comment expli-
quer cette eacutevolution
Faut-il incriminer les traditionnels obstacles re-
latifs agrave la prise en charge psychologique de
proximiteacute rareteacute des psychologues dans cer-
taines reacutegions surcoucirct financier drsquoune theacuterapie
CMP engorgeacuteshellip Peut-ecirctre mais ils ne suf-
fisent pas agrave expliquer lrsquoaugmentation remar-
quable du nombre drsquoentretiens psychologiques
ni lrsquoallongement de la dureacutee des suivis
Aujourdrsquohui nous pouvons avancer drsquoautres
arguments pour expliquer cette eacutevolution ce
sont les particulariteacutes de la maladie tout autant
que celles lieacutees agrave la teacuteleacutephonie qui ont engen-
dreacute ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique
LE CADRE
Un constat les orientations pourtant
travailleacutees (contact teacuteleacutephonique avec le psy-
chologue de proximiteacute informations deacutetailleacutees
sur les speacutecificiteacutes de la maladie et leur impact
sur lrsquoentourage) nrsquoont qursquoexceptionnellement
abouti les patients demandaient agrave reprendre
contact avec la psychologue de la Cellule Par-
tant de ce constat le dispositif drsquoaide psycholo-
gique proposeacute par le psychologue aux per-
sonnes qui appelaient a rapidement eacutevolueacute
Les quelques hypothegraveses concernant la difficul-
teacute du recours agrave la proximiteacute seront abordeacutees
tout au long de cet article
Agrave lrsquoheure actuelle quelle que soit la forme de
MCJ lrsquoappelant contacte la Cellule pour une
demande drsquoaide principalement drsquoordre meacutedi-
cal Les deux meacutedecins nrsquoeacutetant pas preacutesents agrave
la Cellule en permanence crsquoest la secreacutetaire
qui recueille les attentes Elle preacutesente le fonc-
tionnement global de la Cellule et eacutevoque sys-
teacutematiquement la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par
la psychologue Lorsqursquoelle ressent particuliegrave-
rement intenseacutement la deacutetresse de lrsquoappelant
elle insiste sur lrsquoimportance drsquoun entretien avec
la psychologue qui connaicirct tregraves bien la mala-
die un argument de poids pour les personnes
deacutesempareacutees qui heacutesitent pourtant agrave demander
de lrsquoaide
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 71
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Rares sont ceux qui demandent spontaneacutement
un entretien psychologique Mais rares sont
ceux qui le refusent lorsqursquoil leur est proposeacute
Cette invitation agrave ecirctre entendu loin de court-
circuiter la deacutelicate question de la demande
theacuterapeutique nous semble plutocirct lui permettre
drsquoadvenir Agrave ce titre nul doute que le deacutevelop-
pement du nombre de suivis psychologiques
reacutealiseacutes agrave la Cellule est en rapport direct avec
les qualiteacutes drsquoaccueil et lrsquoacuiteacute intuitive de sa
secreacutetaire
Ainsi cette derniegravere prend note des disponibili-
teacutes horaires de lrsquoappelant et apregraves avoir re-
cueilli lrsquoaccord preacutealable de ce dernier me les
transmet au plus vite Mon premier appel au
cours duquel nous eacutevoquons la situation de
crise a souvent lieu dans les 48 heures Cette
reacuteactiviteacute de prise de contact est un eacuteleacutement
deacuteterminant dans lrsquoeacutetablissement drsquoun lien de
confiance la premiegravere pierre drsquoun espace con-
tenant
Nous ne reacutealisons pas ou peu drsquoentretiens en
urgence la Cellule ne srsquoapparente pas agrave une
permanence drsquoeacutecoute 24h24 Drsquoailleurs la
simple date de rendez-vous sur mon agenda a
suffit agrave me calmer (hellip) Jrsquoeacutetais compleacutetement
bloqueacutee paniqueacutee et je me suis remise agrave pen-
ser et agrave geacuterer le quotidien que je ne geacuterais
plus
Ce premier entretien a une tonaliteacute toute parti-
culiegravere Agrave lrsquoinverse peut-ecirctre drsquoun premier ren-
dez-vous en face agrave face lrsquoentretien teacuteleacutepho-
nique semble provoquer un relacircchement des
meacutecanismes de deacutefenses et lrsquoeacutemergence des
processus primaires affolement pleurs pen-
seacutees parfois deacutesorganiseacutees coq agrave lrsquoacircne Lrsquoap-
pelant se deacuteverse deacuteballe tout en vrac Un
relacircchement induit drsquoabord par lrsquoabsence
drsquoinformations visuelles cette sorte de veacutecu
drsquoanonymat qui autorise la leveacutee de la cen-
sure Vous ne me voyez pas alors je peux
tout dire sans conseacutequences Pourtant nom
preacutenom situation familiale et localisation geacuteo-
graphique pourraient objectivement freiner le
veacutecu drsquoanonymat Il nrsquoen est rien Ce premier
entretien ndash et les quelques suivants - souli-
gnent ainsi la primauteacute du voir sur le savoir de
lrsquoautre
Un relacircchement doublement favoriseacute par le fait
que lrsquoappelant demeure dans un espace qui lui
est propre familier choisi Je suis dans ma
chambre jrsquoai fermeacute la porte Je me suis ins-
talleacutee dans ma voiture pour notre rendez-vous
ici je suis tranquille et en seacutecuriteacute
Notons que le psychologue nrsquoeacutechappe pas agrave
cet effet de relacircchement calfeutreacute qursquoil est
dans son espace soustrait au poids du regard
de lrsquoautre Un relacircchement du corps qui favo-
rise le flottement neacutecessaire agrave son travail
drsquoeacutecoute des processus inconscients agrave lrsquoœuvre
chez lrsquoappelant
Dans la tregraves grande majoriteacute des cas le pre-
mier appel donne lieu agrave un second rendez-vous
teacuteleacutephonique dont nous convenons ensemble
des termes (date et heure) Le choix de la du-
reacutee des entretiens (toujours de 45 minutes) deacute-
coule certainement de notre pratique de lrsquoentre-
tien en face-agrave-face mais il srsquoest aveacutereacute tout agrave fait
pertinent dans la pratique de lrsquoentretien teacuteleacute-
phonique puisque trois quarts drsquoheure laissent
le temps agrave la personne drsquoeacutelaborer ses ressen-
tis Cette dureacutee nrsquoest pas drsquoembleacutee annonceacutee
mais plutocirct suggeacutereacutee Nous allons en rester lagrave
pour aujourdrsquohui parce qursquoil est lrsquoheurehellip nous
nous retrouvons donc lehellip agravehellip conclut systeacute-
matiquement nos entretiens
Crsquoest freacutequemment au deacutecours du troisiegraveme
entretien que les questions se posent sur la
poursuite et les modaliteacutes de la prise en
charge Vous consultez ougrave Je vous dois
combien Jrsquoai droit agrave combien drsquoentre-
tiens Agrave ces questions la prise en charge
exclusivement teacuteleacutephonique (aucun deacuteplace-
ment) la gratuiteacute (la Cellule prend en charge
tous les entretiens) et la possibiliteacute drsquoecirctre suivi
tant que le besoin srsquoen fait sentir srsquoapparente agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 72
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
un apaisant holding winicottien Dans ma si-
tuation crsquoest incroyable drsquoavoir le droit de se
laisser porterhellip
Les particulariteacutes du dispositif de suivi teacuteleacutepho-
nique semblent ainsi reacutepondre aux exigences
de la reacutealiteacute des appelants La premiegravere drsquoentre
-elles lrsquoabsence de deacuteplacement et la grande
souplesse drsquoorganisation qui en deacutecoule allegravege
consideacuterablement leur quotidien phagocyteacute par
la maladie Une theacuterapie en cabinet aurait eacuteteacute
inconciliable avec notre reacutealiteacutehellip tout autant
qursquoinfiltreacute de sentiments de culpabiliteacute
Comment prendre le temps de me plaindre
alors qursquoelle est en train de mourirhellip Je sais
que crsquoest important de parler mais je nrsquoaurais
pas pris le temps de consulter pour moi tandis
que ce temps est si preacutecieuxhellip je veux le pas-
ser aupregraves drsquoellehellip ccedila me soigne de ne pas
perdre une minute Ainsi pourtant installeacutes
chez eux ils peuvent srsquoabsenter sans culpabili-
teacute excessive Je ne suis pas loin de lui mais je
suis en consultation juste pour moihellip Je suis
seule avec lui
La seconde particulariteacute du suivi psychologique
par teacuteleacutephone compareacute agrave un dispositif theacutera-
peutique classique reacuteside dans le fait que crsquoest
le psychologue qui appelle systeacutematiquement
le patient Au moment ougrave lrsquoeacutetayage social fami-
lial et parfois professionnel se fissure et ougrave la
difficulteacute drsquoappeler agrave lrsquoaide se fait sentir cette
deacutemarche inverseacutee nrsquoest pas deacutenueacutee drsquoeffet
theacuterapeutique Crsquoest toujours nous qui de-
mandons partout de lrsquoaidehellip et lagrave quel repos
que ce soit vous qui veniez jusqursquoagrave moihellip Je
nrsquoaurais pas eu la force de faire une deacutemarche
de plushellip ccedila mrsquoaide agrave continuerhellip
Enfin ajoutons que dans ce temps extra-
ordinaire ougrave tout leur coucircte ougrave crsquoest nous qui
donnons tout de nous tout notre temps toute
notre eacutenergiehellip la gratuiteacute de la prise en
charge est un eacuteleacutement important pour les per-
sonnes qui appellent Cette gratuiteacute de soins
repreacutesentative des modaliteacutes de prises en
charge psychologiques agrave lrsquohocircpital contribue agrave
restaurer leur sentiment drsquoecirctre consideacutereacutees et
reconnues dans leur souffrance On srsquooccupe
aussi de moi
Neacuteanmoins certains appelants qui avaient en-
visageacute de consulter en libeacuteral ainsi precircts agrave de-
mander de lrsquoaide se deacuteplacer et payer leur
seacuteance srsquoeacutetaient vus confronteacutes agrave un autre
obstacle somme-toute infranchissable le ca-
ractegravere indicible du veacutecu des MCJ Comment
parler agrave quelqursquoun qui nrsquoa jamais vu cette mala-
die monstrueuse (hellip) Il faut la voir pour sa-
voirhellip Ici (agrave la Cellule) je suis en seacutecuriteacute vous
savez de quoi je parle sans que jrsquoen parle vrai-
ment (hellip) vous avez les mecircmes images que
moi dans la tecircte Pour ces appelants qui cher-
chent une communauteacute drsquoexpeacuterience le psy-
chologue se doit drsquoecirctre un sujet dont le savoir
nrsquoest pas que supposeacute
SUIVI POUR QUI SUIVI POUR QUOI
Nous distinguons trois cateacutegories drsquoappelants
les personnes malades crsquoest agrave dire symptoma-
tiques leur entourage (conjoints enfants pa-
rents fregraveres et sœurs) et les personnes agrave
risque de deacutevelopper la maladie (drsquoorigine geacute-
neacutetique ou iatrogegravene) Les appels des profes-
sionnels (assez rares) ne seront pas traiteacutes
dans cet article
En huit ans seulement trois personnes ma-
lades ont eacuteteacute en contact avec le psychologue
par teacuteleacutephone et nrsquoont beacuteneacuteficieacute que de deux
entretiens en moyenne En effet dans la majo-
riteacute des cas la maladie est suspecteacutee tardive-
ment apregraves une longue peacuteriode drsquoerrance meacute-
dicale Si bien que le patient deacutejagrave tregraves sympto-
matique est rarement en capaciteacute de parler
suffisamment distinctement (dysarthrie) pour
beacuteneacuteficier drsquoun entretien teacuteleacutephonique Drsquoautant
que les troubles neuropsychologiques et psy-
chiatriques associeacutes agrave une freacutequente anoso-
gnosie et une eacutevolution preacutecipiteacutee de la mala-
die rendent complexes la mise en place drsquoun
suivi
Monsieur K prend contact avec la Cellule ef-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 73
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
frayeacute par la deacutegradation de son eacutetat il tremble
tombe et perd la meacutemoire Il craint drsquoecirctre atteint
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob dont il se
sait agrave risque suite agrave un traitement par hor-
mones de croissance contamineacutees Je nrsquoose
pas en parler on va me regarder bizarrement
et srsquoinquieacuteter peut-ecirctre pour rien Mais lrsquoentre-
tien est difficile agrave mener au regard des troubles
cognitifs et dysarthriques de Monsieur K Nous
convenons neacuteanmoins drsquoun rendez-vous teacuteleacute-
phonique la semaine suivante Le jour-dit je
lrsquoappelle agrave son domicile Il ne se souvient ni de
moi ni de la raison de mon appel Il comprend
agrave peine les mots que je prononce Il raccroche
Crsquoest donc principalement agrave lrsquoentourage du ma-
lade que srsquoadresse le soutien psychologique
par teacuteleacutephone un entourage deacutemuni devant
cette maladie que personne ne connaicirct qui
effraie tout le monde et qui laisse chacun en
proie agrave un profond sentiment drsquoisolement Freacute-
quemment rencontreacute au deacutecours drsquoautres pa-
thologies neurodeacutegeacuteneacuteratives le sentiment
drsquoisolement semble pourtant exacerbeacute par les
speacutecificiteacutes de cette maladie meacuteconnue que
les meacutedias ont tocirct fait drsquoassimiler agrave une forme
de peste contagieuse foudroyante
monstrueuse Des qualificatifs qui srsquoillustrent
parfois crucircment dans la reacutealiteacute par un compor-
tement exageacutereacutement eacutevitant du corps meacutedical
Ils portent des masques des gants et entrent
prudemment dans la chambre Que dire en-
core de lrsquoamalgame de toutes les formes de
MCJ avec la plus meacutediatiseacutee drsquoentre-elles -la
vache folle - si ce nrsquoest qursquoil en ajoute au senti-
ment drsquoeacutetrangeteacute qursquoelles provoquent deacutejagrave
Ce nrsquoest pas un animal crsquoest un ecirctre hu-
main Mais ce nrsquoest pas tant la maladie qui
est contagieuse que lrsquoidentification menaccedilante
qursquoelle propose lrsquoidentification agrave lrsquoEcirctre animal
archaiumlque et agrave lrsquoEcirctre deacutement qui nrsquoest plus lui-
mecircme agrave la fois posseacutedeacute et deacuteposseacutedeacute de
son humaniteacute Les MCJ quelle qursquoen soit la
forme figureraient-elles la barbarie au sens
eacutetranger et sauvage du terme
Les familles sont comme prises au piegravege de
ces repreacutesentations collectives dont la vio-
lence inouiumle (jamais entendue) semblent les
expulser aux confins de la communauteacute hu-
maine Quand on a dit ce qursquoil avait tout le
monde a disparuhellip On a eu beau expliquer
qursquoil nrsquoy avait pas de risque de transmission
les gens sont terrifieacutes et prennent leur distance
Il nrsquoy a plus personne agrave qui parler Mais cette
expulsion nrsquoest pas toujours le fait du monde
exteacuterieur Lrsquoentourage peut se retirer spontaneacute-
ment du monde pour se soustraire au regard
que ce dernier pourrait porter sur lui Je ne
voulais pas qursquoon nous regarde comme des
becircteshellip alors jrsquoai disparu de la circulation
Dans ce contexte de mise en quarantaine dic-
teacutee ou spontaneacutee la seule ideacutee de lrsquoexistence
de la Cellule fait fonction de terre drsquoasile de
support identificatoire Un support identifica-
toire renarcissisant Ici je peux reprendre
forme humainehellip il y a quelqursquoun au bout du fil
Quelqursquounhellip et je me sens quelqursquoun en mi-
roir Parce qursquoavec tout ce qui nous arrive je
me sens tantocirct comme un chien galeux tantocirct
trimbaleacute comme un objethellip et de par son nu-
meacutero drsquoappel unique doubleacute drsquoune prise en
charge globale un support identificatoire struc-
turant Jrsquoai lrsquoimpression qursquoelle part en mor-
ceauxhellip petit bout par petit bouthellip lrsquoeacutequilibre la
tecircte la marche la vision la parolehellip sa vie
part en lambeauxhellip et moi je nrsquoarrive plus agrave
me rassemblerhellip Mais il y a tout le monde
(meacutedecins assistante sociale psychologue)
ici agrave la Cellulehellip ccedila me rassure de savoir que
vous parlez tous la mecircme langue que vous
faites corps
Outre lrsquoentourage des malades des personnes
dites agrave risque font appel agrave la Cellule des per-
sonnes agrave risque de MCJ suite agrave un traitement
par hormones de croissance contamineacutees et
des personnes agrave risque de MCJ drsquoorigine geacute-
neacutetique Dans les deux cas le veacutecu subjectif de
risque prend en otage les perspectives drsquoave-
nir Parce qursquoil annonce en mecircme temps le pire
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 74
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et la possibiliteacute drsquoy eacutechapper parce qursquoil
nrsquoindique ni la victime ni lrsquoheure de la catas-
trophe le risque peut donner agrave cette derniegravere
un caractegravere omnipreacutesent Quand je vais
bien je me prends agrave espeacuterer que je ne serai
jamais malade que tout ccedila nrsquoeacutetait qursquoun cau-
chemar Mais quand je me sens mal le risque
drsquoecirctre malade se transforme en fataliteacute Je me
sens condamneacutee (hellip) Finalement que ce soit
par lrsquoespoir ou la fataliteacute crsquoest un peu lagrave tout le
temps un peu partout en moi
Et si des moments drsquoaccalmie subsistent crsquoest
souvent un eacuteleacutement de la reacutealiteacute preacutesent ou agrave
venir qui vient attiser les angoisses drsquoecirctre ma-
lade
Concernant le drame des hormones de crois-
sance contamineacutees ce sont principalement les
diffeacuterentes eacutetapes du procegraves (ouverture en
2008 4 mois drsquoaudience rendu de justice en
2009 et mise en appel en 2010) qui ont deacuteclen-
cheacute une recrudescence des appels des per-
sonnes agrave risque Crsquoest cette histoire de pro-
cegraves (hellip) je lis tous les articles dans la presse
(hellip) Depuis je vais reacuteguliegraverement sur le site de
lrsquoInvs pour veacuterifier le nombre de deacutecegraves leurs
acircgeshellip Je me dis que moi crsquoest bon je suis
plus vieille ou jrsquoai reccedilu les hormones plus tard
(hellip) Je comprends ce procegraves mais je le mau-
dis Je me sentais bien ces derniers temps
Jrsquoavais construit mon petit igloo avec mon mari
dedans Et lagrave je souhaite hurler qursquoon mrsquoa cas-
seacute mon igloo Durant tout le deacuteroulement du
procegraves certains de ces jeunes agrave risque ont
eacuteteacute deacutebordeacutes par un puissant sentiment
drsquoambivalence entre le deacutesir et la peur qursquoon
leur reconnaisse le preacutejudice subi crsquoest agrave dire
le coucirct psychique de se savoir contamineacute Re-
connaissance qui aurait signeacute la reacutealiteacute du
risque qursquoils encouraient Si le procegraves vient agrave
statuer que je suis victime je ne pourrai plus
me dire que crsquoest juste un cauchemar et que je
vais me reacuteveiller (hellip) et puis jrsquoai peur que ccedila se
traduise par le deacuteclenchement de la maladie
Paradoxe de cette victimation crsquoest la meacutede-
cine qui a rendu malade Dire que crsquoeacutetait
pour me soignerhellip quelle ironiehellip Je nrsquoai pas
de symptocircme je sais mais je suis deacutejagrave morte
De peur Et en ces temps juridiques agiteacutes la
Cellule et ses meacutedecins tout particuliegraverement
se sont vus parfois pris dans les mecircmes filets
ambivalents On a fait confiance aveugleacutement
agrave la meacutedecine Comment pouvions-nous imagi-
ner que le mal viendrait de lagrave ougrave on lrsquoattendait
le moins A qui faire confiance maintenant
Notamment encourageacutes par les associations
avec lesquelles la Cellule entretient des liens
eacutetroits certains parents de jeunes agrave risque
ont fait appel agrave nous Notre vie est faite de
hauts et de bas Lorsqursquoon apprend qursquoun
jeune est mort toute lrsquohistoire remonte et puis
le temps passe et on fait comme si ccedila nrsquoexistait
plus Mais ces oscillations crsquoest de la tor-
ture Comment ne pas eacutevoquer aussi le veacutecu
dramatique de ces autres parents qui ont perdu
leur enfant parfois il y a longtemps Des pa-
rents encore submergeacutes par la peine et rongeacutes
par un fort sentiment de culpabiliteacute drsquoavoir
donneacute le feu vert aux meacutedecins pour gagner
quelques centimegravetreshellip drsquoavoir moi-mecircme
fait les injections drsquohormones Un sentiment de
culpabiliteacute exacerbeacute par la relaxe geacuteneacuterale des
preacutevenus apregraves 20 ans de proceacutedure Il y a
des victimes il faut des coupables (hellip) Crsquoest
comme si la Justice nous avait deacutesigneacutes cou-
pables agrave leur place
Dans ce contexte ougrave preacutedominent les senti-
ments de culpabiliteacute et parfois de honte le teacuteleacute-
phone est un outil de grand secours puisqursquoil
permet aux personnes de se soustraire au re-
gard de lrsquoAutre Cet Autre objet drsquoimplacables
projections accusatrices Je nrsquoaurais pas pu
consulter un psychologue en face-agrave face Jrsquoau-
rais eu trop peur de lire sur son visage le deacute-
goucirct le rejet le jugementhellip lagrave je peux dire ce
que je veux je ne vois pas votre reacuteactionhellip
crsquoest moins dur Mais pourquoi le psychologue
de la Cellule se precircte-il si rarement aux projec-
tions de nature perseacutecutrice Reacutepond-il agrave la
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 75
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
neacutecessiteacute de sauvegarder un bon objet Un
bon objet inteacuteriorisable susceptible de restaurer
a minima le narcissisme parental
Concernant les formes heacutereacuteditaires de MCJ
dans la majoriteacute des cas lorsque le diagnostic
tombe le malade est deacutejagrave au stade terminal de
la maladie Les membres agrave risque de la fa-
mille se retrouvent donc confronteacutes agrave deux
drames simultaneacutes la perte imminente de leur
proche et lrsquohorreur de leur possible devenir
Voilagrave en une fraction de seconde le monde
bascule Je regardais ma megravere mourir jrsquoima-
ginais que jrsquoallais finir comme elle et je pensais
agrave mes enfants qui auraient peut-ecirctre le mecircme
destin Puis viennent les angoisses pour les
fregraveres et sœurs leurs enfants crsquoest lrsquoheacuteca-
tombehellip
Comment en parler aux enfants Peut-on
continuer agrave vivre normalement en sachant que
tout peut basculer en quelques mois Je
nrsquoarrecircte pas de pleurer est-ce le deacutebut de la
maladie Faut-il faire le test geacuteneacutetique
Autant de questions difficiles agrave adresser agrave lrsquoen-
tourage Jrsquoai appeleacute la Cellule parce que je ne
veux pas affoler mon mari mes enfantshellip (hellip)
et je ne suis pas encore precircte agrave me retrouver
en consultation de geacuteneacutetique (hellip) ce serait trop
reacuteel (hellip) pour lrsquoinstant quand je raccroche je
peux faire comme si ccedila nrsquoexistait pas
NATURE DE LrsquoESPACE TEacuteLEacutePHONIQUE
Mais de quelle nature est cet espace teacuteleacutepho-
nique pour autoriser le patient agrave maintenir en
dehors de sa reacutealiteacute le contenu qursquoil y deacutepose
Lrsquoabsence de corps en preacutesence et lrsquoimmateacuteria-
liteacute de la voix comme unique canal de commu-
nication seraient-elles la clef du choix des pa-
tients drsquoun suivi teacuteleacutephonique plutocirct qursquoen cabi-
net Le teacuteleacutephone permettrait-il au patient de
srsquoaffranchir ponctuellement drsquoun trop de reacuteel et
de se proteacuteger de lrsquoeffraction qursquoopegravere la crudi-
teacute de ses preacuteoccupations mateacuterielles orga-
niques mais aussi existentielles Serait-elle la
figuration de ce temps intra-uteacuterin ougrave tout de la
reacutealiteacute sauf la megravere eacutetait en dehors ce temps
ougrave le lien intime avec elle nrsquoeacutetait que sons Je
vous parle et vous me parlez aussi dans le
creux de lrsquooreillehellip Vous ecirctes un peu mon es-
pace proteacutegeacute mon espace secret Ce temps
reacutevolu ougrave le lieu de rencontre (le ventre mater-
nel) entre la megravere et lrsquoenfant eacutetait lrsquoobjet de tous
les fantasmes Que dire drsquoautre en effet du lieu
de rencontre entre le psychologue et le pa-
tient qursquoil nrsquoest que scegravene psychique pur es-
pace temporel un ensemble chacun chez soi
Un espace qui srsquooffrirait donc plus encore et
plus subitement agrave la reacutegression du patient que
le divan de lrsquoanalyste ou lrsquoentretien agrave domicile
Parce qursquoelle les prive drsquoinformations agrave carac-
tegravere visuel (regards mimiques postures ges-
tuelles) et puisque rien ne fait obstacle ni chez
le patient ni chez le psychologue aux diffeacute-
rentes repreacutesentations fantasmatiques que
chacun a de lrsquoautre la teacuteleacutephonie se precircte agrave
une activiteacute imaginaire deacutebrideacutee Seules des
informations agrave caractegravere sonore telles que le
timbre de la voix les rythmes tons silences
intonations et bruits ambiants (il allume une ci-
garette elle ferme une porte la voix reacutesonne
comme dans un espace vide) donnent force et
forme agrave lrsquoespace theacuterapeutique Elles seules et
dans une immeacutediateteacute remarquable suffisent agrave
faire surgir le visage le corps et le lieu de
lrsquoautre Des lapsus agrave caractegravere visuels srsquoim-
miscent drsquoailleurs dans le discours des pa-
tients et du psychologue Je vois drsquoici la tecircte
que vous faites Nos rencontres teacuteleacutepho-
niques On se voit la semaine prochaine Des
deacutetails comme la silhouette la couleur des
yeux des cheveux des vecirctements un canapeacute
des photos au mur des sourcils fronceacutes ou une
moue deacutefaite sont-ils lrsquoexpression paroxystique
de lrsquoactiviteacute fantasmatique agrave lrsquoœuvre dans la
relation transfeacutero-contre-transfeacuterentielle entre
le patient et son theacuterapeute
Pourquoi lrsquoimage de cette patiente-lagrave tarde agrave se
construire en moi apparaicirct puis disparaicirct sans
que je puisse la saisir Parce qursquoelle joue agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 76
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
cache-cache avec son pegravere malade qui ne
doit pas la voir dans cet eacutetat de terreur Pour-
quoi ai-je oublieacute drsquoappeler ce patient aujour-
drsquohui alors que son nom est surligneacute dans mon
agenda Parce qursquoil me reacutepegravete chaque fois
que tout le monde lrsquooublie Pourquoi cet
autre patient a-t-il exceptionnellement deman-
deacute agrave deacuteplacer son rendez-vous Parce qursquoil
eacutetait justement question lors de notre dernier
entretien de deacuteplacer son agressiviteacute pour
eacutepargner sa femme malade
Pourquoi cette megravere au beau milieu de son
suivi donne-t-elle mon numeacutero au fils qui ne
lrsquoeacutecoute plus Pourquoi ce fils accepte-t-il
drsquoappeler le psychologue de sa megravere Pour-
quoi le psychologue accepte-t-il de suivre seacute-
pareacutement deux membres de la mecircme famille
tandis qursquoil heacutesiterait agrave le faire en cabinet
Parce que les espaces ndash uniquement fantas-
meacutes- sont bien distincts en lui et que leur rela-
tion reacuteclame drsquoecirctre tierciseacutee
Pourquoi cette demande impeacuterieuse de me voir
en consultation Parce que cette patiente non
reconnue par la justice dans son statut de
victime des hormones de croissance contami-
neacutees a besoin drsquoecirctre reconnue au sens pre-
mier du terme par le psychologue
Pourquoi cette crainte en moi agrave lrsquoideacutee de voir
ces patients-lagrave comme on pourrait avoir agrave
craindre de transgresser la regravegle fondamentale
drsquoabstinence Dans ce contexte de suivi teacuteleacute-
phonique -qui induit lrsquoeacuterotisation du lien agrave la
voix et un sentiment paradoxal de grande
proximiteacute voir serait-il devenu un eacutequivalent de
toucher et lrsquoacting out agrave eacuteviter
Ces quelques exemples de questionnements
du psychologue autour des manifestations
transfeacutero-contre-transfeacuterentielles agrave lrsquoœuvre
dans le suivi teacuteleacutephonique nous semblent rele-
ver drsquoun processus de type theacuterapie drsquoinspira-
tion analytique Un processus qui se partage
souvent en deux temps un temps de plainte et
un temps drsquoeacutelaboration psychique complexe au
cours duquel le patient rapporte spontaneacutement
ses recircves Des recircves dont le mateacuteriel fait lrsquoobjet
drsquointerpreacutetations par le psychologue
SUIVI TEacuteLEacutePHONIQUE AVEC OU SANS FIN
Il arrive qursquoapregraves le deacutecegraves de son proche le
patient srsquointerroge sur la leacutegitimiteacute de la pour-
suite du suivi comme si la survie du malade
avait jusqursquoici conditionneacute son droit agrave en beacuteneacutefi-
cier Il nrsquoen est rien alors tout ne srsquoarrecircte pas
pour moi non plus Cet espace temporel
sans corps en preacutesence qui a proteacutegeacute le pa-
tient des angoisses inheacuterentes agrave la reacutealiteacute
drsquoune seacuteparation annonceacutee permet et catalyse
mecircme parfois le travail de deuil Vous ecirctes un
peu comme mon fregravere [mort depuis 3 mois] je
ne le vois pas mais il est lagravehellip je ne le vois pas
mais je lrsquoentends parfoishellip comme avec vous
jrsquoapprends agrave dialoguer agrave lrsquointeacuterieur de moi avec
lui
La sortie du dispositif de soutien teacuteleacutephonique
est longuement travailleacute eacutevocation de lrsquoapregraves
eacutelaboration de la seacuteparation espacement pro-
gressif des entretiens Un cheminement au
cours duquel surgissent plus explicitement les
traces du caractegravere transitionnel de lrsquoespace
teacuteleacutephonique Un espace qui sans ecirctre une
permanence drsquoeacutecoute a eacutetayeacute le sentiment de
permanence drsquoobjet Je ne vous ai jamais
vuehellip alors je nrsquoai pas peur de ne plus vous
voir Vous ecirctes un peu comme toujours lagrave
CONCLUSION
La Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des Mala-
dies de Creutzfeldt-Jakob a pour mission lrsquoaide
au diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale
sociale et psychologique des patients et de leur
famille Lrsquoaide proposeacutee srsquoeffectue essentielle-
ment par teacuteleacutephone
La faisabiliteacute et la leacutegitimiteacute drsquoun soutien psy-
chologique exclusivement teacuteleacutephonique a eacuteteacute
lrsquoobjet de nombreuses interrogations pour le
psychologue quelle est la nature de cet es-
pace particulier drsquoaccompagnement Quels en
sont les beacuteneacutefices Peut-on soutenir un veacuteri-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 77
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
table travail psychique dans le cadre de ce dis-
positif Est-il leacutegitime de parler de travail psy-
chotheacuterapeutique
Les 110 suivis psychologiques effectueacutes agrave la
Cellule depuis 2003 nous permettent aujour-
drsquohui drsquoaffirmer que notre travail de psycho-
logue ne se limite pas agrave une pure fonction de
soutien En effet bien que tregraves eacuteloigneacute de la
situation analytique le processus agrave lrsquoœuvre
dans le dispositif teacuteleacutephonique semble srsquoappa-
renter agrave celui drsquoun dispositif de type psychotheacute-
rapeutique drsquoinspiration analytique le cadre
est poseacute et penseacute par le psychologue
(entretiens de 45 minutes notion de rendez-
vous teacuteleacutephoniques rythmiciteacute souvent hebdo-
madaire suivi au long cours) lrsquoassociation
libre est encourageacutee lrsquointerpreacutetation des dires
lrsquoanalyse des recircves lrsquoanalyse du transfert et du
contre-transfert par le psychologue est freacute-
quente et le patient effectue un veacuteritable travail
drsquoeacutelaboration psychique au deacutecours du suivi
Lrsquoexpeacuterience nous deacutemontre que les particulari-
teacutes de lrsquoaccompagnement teacuteleacutephonique
(notamment privation drsquoinformations visuelles)
ne freinent pas le processus theacuterapeutique
Elles pourraient mecircme le favoriser
(relacircchement du systegraveme deacutefensif)
Ainsi ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique agrave lrsquohocircpital est au service drsquoune
difficulteacute des personnes qui y ont recours la
crainte et ou lrsquoimpossibiliteacute drsquoaller consulter un
psychologue en face-agrave face
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 78
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots
en images
Natascia Serbandini
Service de gyneacutecologie-obsteacutetrique Hocircpital Jean Verdier
A pregraves avoir eacutevoqueacute briegravevement les speacute-
cificiteacutes du deuil peacuterinatal je vais vous
preacutesenter une pratique nouvelle au sein
de lrsquoAPHP un groupe de parole hospitalier
destineacute aux femmes ayant fait une interruption
meacutedicale de grossesse Ce groupe est neacute en
2008 un an apregraves sa creacuteation nous avons choi-
si drsquointroduire une cameacutera lors des seacuteances
Enfin je deacutecrirai lrsquoimpact de la cameacutera sur le
groupe et le projet de film que nous sommes
en train de reacutealiser
LES SPEacuteCIFICITEacuteS DU DEUIL PEacuteRINATAL
La deacutecouverte dune pathologie fœtale incu-
rable pendant la grossesse est un eacuteveacutenement
hautement traumatique pour les parents du fu-
tur beacutebeacute Lhocircpital Jean Verdier unique Centre
Pluridisciplinaire de Diagnostic Preacutenatal du 93
accueille et accompagne les parents degraves lrsquoan-
nonce du diagnostic jusqursquoagrave lrsquointerruption meacutedi-
cale de grossesse quand les parents la deman-
dent
Le deuil peacuterinatal preacutesente des speacutecificiteacutes qui
le distinguent du deuil classique il est toujours
accompagneacute drsquoun fort sentiment de culpabili-
teacute amplifieacute dans le cadre des Interruptions Meacute-
dicales de Grossesse par la prise de deacutecision
(Tous les textes en italique sont issus de teacutemoi-
gnages de femmes lors du groupe de parole)
Pendant le travail je le sentais encore mon
beacutebeacute est neacute vivant jrsquoavais vraiment cette sen-
sation qursquoil voulait se battre Jrsquoai enleveacute tout cet
espoir de vie et je me demande de quel droit
Crsquoest cette impression drsquoavoir le choix sur sa
vie ou sa mort crsquoest tellement lourd agrave porter
Une autre speacutecificiteacute est lrsquoabsence drsquoun veacutecu
partageacute avec cet enfant en dehors de la gros-
sesse Geneviegraveve Delaisi de Parseval
(psychanalyste) Comment faire le deuil de ce
qui nrsquoa pas eu lieu drsquoon ne sait quoi et de
presque rien Lrsquoobjet perdu reste agrave perdre
comment accepter la seacuteparation drsquoavec un ecirctre
que lrsquoon nrsquoa pas connu
Le deuil est un processus intrapsychique con-
seacutecutif agrave la perte drsquoun objet drsquoattachement par
lequel le sujet reacuteussit progressivement agrave se deacute-
tacher de celui ci Jean Philippe Legros
(psychologue psychanalyste au centre de meacute-
decine foetale Cochin-St Vincent de Paul) dans
lrsquoarticle L lsquoarrecirct de vie in utero ou lrsquoerrance des
fœtus un possible deuil preacutecise que dans le
deuil peacuterinatal il srsquoagit drsquoun deacutetachement sans
renoncement
Ensuite il srsquoagit drsquoun deuil feacuteminin un deuil
veacutecu tregraves diffeacuteremment dans le couple
Mon mari lui a pris sa deacutecisionhellipje ne dis pas
que ccedila a eacuteteacute facile ccedila a ducirc ecirctre dur pour lui
aussi moi je la portais je la sentais bouger
Cette mort est intoleacuterable pour la megravere en lien
avec le sentiment drsquoomnipotence propre agrave la
grossesse intoleacuterable pour la megravere qui con-
naissait ce beacutebeacute et qui a ressenti ses mouve-
ments
Ce sentiment de toute puissance est amplifieacute
par le fait que la demande drsquoInterruption Meacutedi-
cale de Grossesse revient agrave la femme seule
signataire selon la loi
Je sais qursquoil souffre qursquoil est malheureux il a
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 79
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
la mecircme peine et la mecircme tristesse que moi
mais il ne llsquoexprime pas pareil il y a une culpa-
biliteacute plus importante chez la megravere
La perte du beacutebeacute est parfois difficilement re-
connue par les pegraveres qui nrsquoosent pas manifes-
ter leur souffrance et qui se projettent plus rapi-
dement dans lrsquoavenir
Leur deacutetresse reacutesulte en grande partie de la
mise agrave mal de la fonction contenante protec-
trice de la femme enceinte qursquoils assuraient
avant lrsquointerruption
Ce deuil est deacutepourvu drsquoune dimension so-
ciale Franccediloise Moleacutenat (peacutedopsychiatre) dit
Iil existe une cicatrice dans le corps de la
megravere mais pas de cicatrice sociale
Beaucoup de personnes mrsquoont dit crsquoest
dingue que lrsquoadministration franccedilaise se mecircle
de ccedila (en parlant de la reconnaissance agrave la
Mairie) alors qursquoil nrsquoy a mecircme pas de beacutebeacute il
eacutetait pas neacute
Les rituels autour du deuil ont une fonction psy-
chique ils offrent au mort un deacutedommagement
symbolique Ils assurent une reconnaissance
de la peine des proches par le groupe
Crsquoest seulement depuis quelques anneacutees que
les rites et rituels sociaux autour des beacutebeacutes
morts in utero ont pris leur place agrave travers la
reconnaissance agrave lrsquoEtat Civil et lrsquoeacutevolution des
pratiques drsquoaccompagnement dans les materni-
teacutes (preacutesentation du corps du beacutebeacute organisa-
tion drsquoobsegraveques)
Ce travail est reacutealiseacute dans le but de creacuteer et
drsquoancrer des souvenirs de cet enfant afin de
faire des parents des parents
Jrsquoavais toujours une photo de mon fils dans
mon portefeuille jrsquoen avais besoin Crsquoest peut
ecirctre parce que je ne voulais pas qursquoon me dise
que crsquoeacutetait rien
LE GROUPE DE PAROLE Agrave JEAN VERDIER
Lors des entretiens avec le gyneacutecologue ou
dans le cadre drsquoun suivi psychologique quelque
temps apregraves les Interruptions Meacutedicales les
femmes eacutevoquaient de maniegravere reacutecurrente leur
solitude lrsquoimpossibiliteacute de partager leur souf-
france et le temps passant de ne plus pouvoir
parler de leur beacutebeacute dans le cercle familial et
amical Cet oubli de lrsquoentourage et la reprise
drsquoune vie normale est source de culpabiliteacute
elles avaient le sentiment drsquoabandonner agrave nou-
veau leur beacutebeacute
Jrsquoai lrsquoimpression que personne ne me com-
prend jrsquoai lrsquoimpression drsquoecirctre seule au monde
de me noyer je survis Les gens ne peuvent
pas comprendre notre situation je nrsquoarrive pas
agrave leur dire ma souffrance immense
De cela est neacutee lrsquoideacutee de proposer un espace
drsquoeacutechanges entre femmes sous forme de
groupe de paroles Ce projet a eacuteteacute creacuteeacute agrave lini-
tiative commune du gyneacutecologue responsable
du Centre de Diagnostic Anteacutenatal et de moi-
mecircme
Il srsquoagit drsquoun groupe ouvert agrave toutes les femmes
ayant veacutecu une Interruption Meacutedicale de Gros-
sesse agrave Jean Verdier
Le groupe se reacuteunit une fois par mois pendant
une heure et demie et est co-animeacute par un bi-
nocircme psychologuepsychiatre et meacutedecinsage
femme
Le groupe constitue un cadre de confiance
une enveloppe psychique comme le dit An-
zieu propice agrave la mise en commun des charges
affectives et agrave lrsquoaccompagnement du deuil
De plus comme le rappelle Jean Philippe Le-
gros apregraves la perte drsquoun enfant par IMG la
crainte de la megravere contrairement aux parents
drsquoenfants porteurs drsquohandicap est lrsquoabsence du
regard des autres dans le reacuteel Cet ecirctre invi-
sible pour les yeux cet enfant que personne
drsquoautre nrsquoa connu risque de disparaicirctre Drsquoougrave
lrsquoimportance de creacuteer un espace physique (par
rapport aux espaces virtuels les forums sur
Internet tregraves freacutequenteacutees par les megraveres en-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 80
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
deuilleacutees) et psychique au sein de lrsquohocircpital afin
de reconnaicirctre lrsquoexistence de ces beacutebeacutes et per-
mettre agrave ces femmes drsquoecirctre megraveres
Les autres nous parlent comme si on avait
perdu quelque chose crsquoest quand mecircme un
ecirctre vivant crsquoeacutetait quand mecircme notre enfant
Lrsquoobjectif principal du groupe est de permettre
le partage drsquoexpeacuterience de ce deuil si particu-
lier drsquoecirctre rassureacutee par le parcours des autres
dans un cadre de reacutefeacuterence suffisamment
bon pour le dire avec les mots de Winnicott
Crsquoest vrai que discuter avec drsquoautres per-
sonnes qui lrsquoont veacutecu il y a longtemps et qui ont
su deacutepasser certaines eacutetapes ccedila aide ccedila
donne des cleacutes pour passer agrave lrsquoeacutetape suivante
LrsquoIDEacuteE DU FILM DES MOTS EN IMAGES
Le groupe a eacuteteacute tregraves freacutequenteacute degraves le deacutebut
Apregraves un an de fonctionnement le gyneacutecologue
a proposeacute drsquointroduire une camera afin de fil-
mer les seacuteances pour teacutemoigner de cette expeacute-
rience positive et faire connaicirctre cette pratique
Cette proposition a eacuteteacute discuteacutee par les
femmes au sein du groupe elles ont adopteacute
cette ideacutee et ont eacutelaboreacute avec nous les objectifs
du film
Teacutemoigner autour du deuil peacuterinatal en deacutecri-
vant les diffeacuterentes eacutetapes et souligner les beacute-
neacutefices drsquoun groupe de parole
A partir de leur veacutecu permettre une reacuteflexion
visant agrave ameacuteliorer les pratiques soignantes
dans les accompagnements du deuil peacuterinatal
agrave lrsquohocircpital
Nous avons filmeacute six seacuteances dune heure
trente avec deux techniques une cameacutera fixe
et une cameacutera mobile Ensuite nous avons eacuteta-
bli ensemble un plan pour le film reacutecit en ordre
chronologique du deacuteroulement de lrsquoIMG Les
diffeacuterents chapitres
Lrsquoannonce et la deacutecision lrsquohospitalisation le
retour agrave la maison lrsquoenterrement lrsquoentourage
lrsquoautopsie la grossesse drsquoapregraves le groupe
La preacutesence de la cameacutera a eu un impact sur
le deacuteroulement des seacuteances les theacutematiques
ont eacuteteacute eacutetablies agrave lrsquoavance ce qui a permis de
structurer davantage les seacuteances tout en gar-
dant la liberteacute drsquoaborder les questions eacutevo-
queacutees spontaneacutement par les femmes
Comme le dit Winnicott lrsquoenfant existe dans les
yeux de sa megravere le visage de lrsquoenfant que lrsquoon
nrsquoa pas vu ne permet pas agrave la megravere de se re-
connaicirctre comme megravere
Le film vient srsquoinscrire dans cette neacutecessiteacute de
reconnaissance de laisser une trace de cette
preacutesence de ce beacutebeacute qui nrsquoa plus de corps
physique mais qui existe dans lrsquohistoire fami-
liale
La preacutesence de la cameacutera a donc eu des effets
beacuteneacutefiques pour les femmes mais aussi pour
les soignants la richesse du mateacuteriel clinique
recueilli nous a permis drsquoobserver lrsquoeacutevolution
des femmes dans le processus de deuil et
drsquoanalyser leur posture au sein du groupe ainsi
que celle des animateurs
Si le groupe a fonction de portage pour cer-
taines pour drsquoautres crsquoest le lieu ougrave elles peu-
vent donner un sens agrave ce qursquoelles ont veacutecu en
partageant leur expeacuterience avec drsquoautres
Nous avons constateacute en visionnant les
seacuteances que plusieurs femmes qui semblent
ecirctre dans un deuil normal continuent agrave freacute-
quenter le groupe alors que leur interruption
remonte agrave il y a trois ou quatre ans
Le besoin de continuer agrave eacutevoquer leur beacutebeacute
nrsquoest pas un signe de deuil pathologique mais
une neacutecessiteacute de la ceacuteleacutebration de la meacutemoire
de ces beacutebeacutes disparus Ces femmes veulent
garder comme le dit Jean Philippe Legros une
dose homeacuteopathique du trauma qui gueacuterit de
lui en ne se seacuteparant jamais
Quand jrsquoai dit agrave ma responsable que je mrsquoab-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 81
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
sentais pour venir au groupe de parole elle
mrsquoa dit Ben tu en as deacutejagrave un (enfant) qui est lagrave
pourquoi tu continues agrave aller agrave ce groupe Je
lui ai dit Crsquoest pas parce que jrsquoai reacuteussi agrave
avoir un petit garccedilon que je vais compleacutetement
oublier ce qui concerne mon premier enfant
justement lui il nrsquoest pas lagrave crsquoest pour ccedila que
je continue agrave aller au groupe pour parler de lui
pour le faire exister
Aujourdrsquohui le projet du film est en cours nous
avons imagineacute deux versions
- une version courte de 20 minutes un teacutemoi-
gnage du groupe sur le deuil peacuterinatal agrave diffu-
ser agrave lrsquoexteacuterieur
- une version longue de 52 minutes destineacutee
aux femmes et en interne agrave lrsquohocircpital Jean Ver-
dier
Le premier montage a eacuteteacute visionneacute par les
femmes qui ont participeacute aux choix des extraits
Nous espeacuterons pouvoir le diffuser dans un ave-
nir proche agrave un large nombre de professionnels
de santeacute
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 82
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions
enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis
Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
P our cette preacutesentation des missions du
psychologue clinicien aupregraves du per-
sonnel agrave
lrsquoAP-HP nous avons choisi de commencer par
reprendre quelques eacuteleacutements agrave lrsquoorigine de la
creacuteation de nos postes
Dans une seconde partie nous deacutefinirons et
preacutesenterons la diversiteacute des missions speacuteci-
fiques aux psychologues du personnel sur site
A la fois clinique et institutionnelle notre pra-
tique nous amegravene agrave ecirctre en contact reacutegulier
avec les diffeacuterents acteurs internes ou ex-
ternes agrave lrsquoinstitution concerneacutes par la protec-
tion de la santeacute au travail Ainsi cette collabo-
ration neacutecessite un important travail de deacuteve-
loppement et drsquoentretien du reacuteseau
Ensuite nous envisagerons les divers ques-
tionnements souleveacutes par ce poste position-
nement parfois drsquoeacutequilibriste cadre speacutecifique
de prise en charge ou encore limites de cette
pratique
HISTORIQUE
Par la loi de 1983 concernant les droits et obli-
gations des fonctionnaires les personnels hos-
pitaliers de par leur statut sont proteacutegeacutes par
leur administration
A la fin des anneacutees 90 le deacuteveloppement de la
preacutevention des violences apparaicirct comme pri-
mordial puis une circulaire intituleacutee Preacutevention
et accompagnement des situations de vio-
lence est reacutedigeacutee en deacutecembre 2000
Le constat de lrsquoaugmentation de la violence au
quotidien dans les hocircpitaux a fait naicirctre au sein
de lrsquoAP-HP des preacuteoccupations et des de-
mandes au niveau institutionnel Ceci a mobili-
seacute un ensemble drsquoacteurs concerneacutes par la
protection de la santeacute des personnels Ainsi la
mise en place drsquoune cellule drsquoaccueil et de
prise en charge des agents victimes de vio-
lence agrave lrsquoAP-HP eacutemane de ces travaux Deux
postes de psychologues cliniciennes ont eacuteteacute
creacuteeacutes au Siegravege en 2000 et 2001 puis drsquoautres
postes de psychologues cliniciens aupregraves du
personnel ont vu le jour sur diffeacuterents sites de
lrsquoAP-HP
Face agrave lrsquoamplification des violences en milieu
hospitalier lrsquoAP-HP a eacutegalement meneacute en 2004
une campagne drsquoinformation sur le thegraveme
Violences de patients drsquoaccompagnants de
visiteurs comment soutenir les personnels qui
en sont victimes Ces derniers ignorent sou-
vent leurs droits et les circuits internes pour ob-
tenir le meilleur accompagnement dans leurs
deacutemarches Lrsquoeacutelaboration drsquoun guide a permis
de deacutecrire les diffeacuterentes modaliteacutes de prise en
charge en cas drsquoagression prise en charge
meacutedico-psychologique sociale meacutedico-
administrative ou encore juridique
Au-delagrave de la preacutevention et de la prise en
charge de la violence agrave lrsquohocircpital les missions
du psychologue clinicien aupregraves du personnel
sont orienteacutees vers deux axes principaux la
clinique individuelle et collective et les activiteacutes
institutionnelles
DEacuteFINITION DU POSTE ET MISSIONS SPEacuteCIFIQUES
Le poste de psychologue du personnel a pour
fonction principale de creacuteer un espace drsquoeacutecoute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 83
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et de prise en charge individuelle ou collective
pour tout le personnel de lrsquohocircpital
Toute personne professionnelle de lrsquohocircpital
peut si elle en a la neacutecessiteacute (si elle le sou-
haite) prendre rendez vous pour une premiegravere
consultation et ce quel qursquoen soit le motif pro-
fessionnel ou personnel
Les bureaux permettent de garantir la confiden-
tialiteacute
Les consultations se font sur rendez-vous afin
drsquoeacuteviter lrsquoattente et pour preacuteserver la discreacutetion
Ils sont libres et totalement confidentiels
Des rendez-vous en soireacutee peuvent ecirctre ameacute-
nageacutes
Le deacutelai maximum drsquoobtention drsquoun rendez-
vous est environ de 15 jours
Le nombre de consultations deacutepend de la de-
mande initiale Il peut aller drsquoun seul entretien agrave
plusieurs Lorsque la personne deacutesire ou neacute-
cessite une prise en charge plus longue elle
est orienteacutee agrave lrsquoexteacuterieur Il est preacuteciseacute agrave tout
agent en deacutebut drsquoentretien que ce lieu de con-
sultation a pour vocation un accompagnement
agrave court ou moyen terme
Il est eacutevident que la fonction de psychologue du
personnel est agrave viseacutee clinique crsquoest agrave dire
- que le psychologue du personnel nrsquointervient
pas directement dans les eacutevaluations utiles agrave la
gestion du personnel et nrsquoeacutemettent aucun avis
concernant lrsquoaptitude au poste de travail des
agents reccedilus en consultation (ce qui est de
lrsquounique ressort du meacutedecin du travail) hellip
- que le psychologue du personnel nrsquoest pas
psychologue du travail donc nrsquointervient pas
dans le reclassement les mobiliteacutes profession-
nelles le recrutementhellipMais nos missions
srsquoaccordent bien sur avec celles du CRH si neacute-
cessaire
Le psychologue du personnel comme les
autres psychologues cliniciens de lrsquoeacutetablisse-
ment deacutepend directement du directeur de lrsquoeacuteta-
blissement et a des liaisons fonctionnelles
avec le drh par exemple ou le meacutedecin du tra-
vail
Il rend un bilan annuel quantitatif indiquant cer-
taines donneacutees de son activiteacute tout en preacuteser-
vant lrsquoanonymat et la confidentialiteacute Il peut arri-
ver que ce bilan soit preacutesenteacute aux instances
types CHSCT
Globalement le temps de travail du psycho-
logue du personnel se reacutepartit comme suit
pratique clinique drsquoune part activiteacutes institu-
tionnelles drsquoautre part
LA PRATIQUE CLINIQUE
bull Clinique individuelle soutien psychologique
du personnel en difficulteacute par entretien indivi-
duel
Notre pratique montre que les deux aspects
professionnels et personnels sont souvent in-
triqueacutes qursquoil peut srsquoagir de souffrance au tra-
vail mais aussi de souffrance personnelle qui
peut avoir des reacutepercussions dans le travail
Les motifs principaux agrave lrsquoorigine de la de-
mande
- sur le plan professionnel sont conflits inter
eacutequipe situations de violence au travail
manque de communication difficulteacutes face aux
pathologies perte du sens du travail voire eacutepui-
sement professionnel
- sur le plan personnel sont difficulteacutes fami-
liales sociales deuils seacuteparations probleacutema-
tiques psychopathologiques maladies chro-
niqueshellip
Ces personnes ne se sont jamais adresseacutees agrave
un professionnel du soin psychique par meacute-
connaissance des professions parfois mais par
meacutefiance eacutegalement et arrivent souvent en
portant des souffrances extrecircmement lourdes
et de longue date
Cateacutegories dominantes qui consultent soi-
gnants et administratifs encadrement
quelques personnels techniques et meacutedico-
techniques et tregraves peu de meacutedecins
Il est difficile drsquoeacutetablir une moyenne du nombre
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 84
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
drsquoagents reccedilus par an sur lrsquoensemble des
postes du personnel Toutefois les demandes
de consultations sont en constantes augmenta-
tions sur la plupart des sites de lrsquoAPHP mais
aussi du fait des regroupements amenant les
psychologues agrave ecirctre solliciteacutees sur plusieurs
eacutetablissements
bull Clinique collective
Les interventions collectives peuvent se
preacutesenter sous deux formes les groupes de
parole et les deacutebriefings psychologiques
Le Groupe de parole permet de creacuteer un lieu
drsquoexpression et drsquoeacutechanges sur un thegraveme don-
neacute ou une probleacutematique speacutecifique au service
(comme par exemple lrsquoagressiviteacute et la violence
des patients notamment aux urgences ou en-
core lrsquoimplication eacutemotionnelle des soignants
lieacutee agrave lrsquoaccompagnement en fin de vie hellip)
Le Deacutebriefing psychologique intervention
collective ponctuelle suite agrave un eacuteveacutenement diffi-
cile ou traumatique (suicide drsquoun patient deacutecegraves
drsquoun personnel agression du personnel par un
patient ou son entouragehellip)
Force est de constater eacutegalement que les de-
mandes de reacutesolution de conflit formuleacutees
comme telles sont aussi tregraves preacutesentes et il
semble utile de distinguer la neacutecessaire reacutesolu-
tion drsquoun conflit qui nrsquoest pas forcement le lieu
et le temps du groupe de parole de la volonteacute
drsquoy trouver un sens Il va de soi que le psycho-
logue nrsquointervient en aucun cas comme meacutedia-
teur car il nrsquoen a pas la formation speacutecifique
mecircme si certaines interventions peuvent par-
fois avoir des effets drsquoapaisement du conflit
Pour ces raisons et preacutealablement agrave toute in-
tervention collective il est important drsquoavoir pu
deacutefinir avec les participants leurs attentes et
pas seulement celles lieacutees au demandeur geacute-
neacuteralement lrsquoencadrement ou la direction
LES ACTIVITEacuteS INSTITUTIONNELLES
bull1- Deacuteveloppement et entretien du reacuteseau
En interne Assistant social du personnel meacute-
decine du travail DRH CRH chef du person-
nel direction des soins psychologues du per-
sonnel drsquoautres sites psychologues des ser-
vices psychiatres hellip
En externe orientation vers les CMP pour les
prises en charge agrave plus long terme etou pour
les suivis psychiatriques orientation vers des
lieux de consultations speacutecialiseacutes (addictologie
consultation douleur troubles du sommeil
troubles du comportement alimentaire associa-
tion drsquoaide aux victimes theacuterapie familiale hellip)
2- Participation aux groupes de travail et de
preacutevention preacutevention des addictions de
lrsquoeacutepuisement professionnel des risques psycho
-sociauxhellip
3- Faire connaicirctre ces postes et notre activiteacute
- A lrsquooccasion drsquoune arriveacutee sur site ou lors
drsquoune creacuteation de poste
- Preacutesentation dans les services directement
aupregraves des eacutequipes
- Preacutesentation lors de formations sur site
propre (accueil des nouveaux arrivants ou sur
des theacutematiques en lien avec nos missions) ou
au Centre de Formation Continue du Personnel
Hospitalier (intervention dans le cadre de la for-
mation Preacutevention du risque psychique et de
lrsquoeacutepuisement professionnel agrave lrsquohocircpital)
- Preacutesentation du rapport drsquoactiviteacutes au Comiteacute
drsquoHygiegravene Seacutecuriteacute et Conditions de Travail
QUESTIONNEMENTS ENJEUX LIMITES
Ce poste nous amegravene en permanence
- agrave repreacuteciser nos missions ce que nous pou-
vons faire et aussi ne pas faire depuis notre
place particuliegravere au sein de lrsquoinstitution
- agrave nous confronter agrave certaines limites
- agrave devoir nous adapter agrave une clinique aussi
riche que varieacutee
Plusieurs limites donc
La question du cadre
- absence de paiement pas de psychotheacutera-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 85
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
pie ce nrsquoest pas agrave lrsquoemployeur de payer on
connaicirct par ailleurs la neacutecessiteacute du paiement
- reacutegulariteacute des horaires il est difficile souvent
impossible pour des personnels ayant des ho-
raires variables qui travaillent en alternance de
pouvoir respecter un horaire fixe de rendez
vous Les annulations les reports sont freacute-
quents agrave cause des changements drsquohoraires
subis par les agents eux-mecircmes Parfois de
notre fait eacutegalement
La question de la confiance
- biais dans la relation
Nous avons le mecircme employeur donc il existe
un biais dans la relation de soutien psycholo-
gique (theacuterapeutique) Pourtant eacutetablir une re-
lation de confiance institutionnelle avec les
agents est essentiel Et faire partie de la mecircme
institution peut parfois paradoxalement rassu-
rer et favoriser une deacutemarche qui ne serait par
ailleurs pas faite
Ayant eacuteteacute recruteacute par la mecircme direction la
question de la confidentialiteacute du travail du
psychologue peut se poser (la confidentialiteacute
est rappeleacute agrave chaque premiegravere rencontre)
- Neacutecessaire et juste distance entre lrsquoinstitution
de son propre travail (visites meacutedicales effec-
tueacutees par un autre meacutedecin du travail attitude
discregravete au sein de lrsquoeacutetablissement hellip)
- Se pose la question du secret partageacute dans
lrsquointeacuterecirct de lrsquoagent et avec son accord cer-
taines informations peuvent parfois ecirctre com-
muniqueacutees (assistantes sociales du personnel
meacutedecin du travailhellip) et inversement
Comment et quand reacuteorienter
- au rythme de chacun (cette premiegravere deacute-
marche a deacutejagrave parfois eacuteteacute extrecircmement longue
et difficile)
- ne marche pas toujours du 1er
coup (combien reviennent parce que cela nrsquoa
pas accrocheacute trop cher tous ces arguments
connus qui peuvent cacher un pas precirct agrave)
Autres limites agrave cette pratique
- question de la neutraliteacute quant au fait de pou-
voir recevoir deux parties drsquoun conflit Nous
sommes lagrave pour tous les agents Et crsquoest bien
lagrave toute la diffeacuterence avec les GH qui ont agrave dis-
position plusieurs psychologues du personnel
- difficulteacute si une personne reccedilue en individuel
participe eacutegalement agrave un groupe de parole hellip
- tous les risques de glissement potentiels aux
places que lrsquoinstitution veut nous faire prendre
lorsque par exemple en lrsquoabsence de meacutedecin
du travail on propose agrave la place de rencon-
trer la psychologue du personnel lorsqursquoil faut
absolument trouver une solution risque drsquoecirctre
interpelleacute en vue de reacutesoudre un conflit avec
ce que cela suppose de rapiditeacute et drsquoefficience
allant agrave lrsquoencontre de la possibiliteacute de penser et
drsquoeacutelaborer
CONCLUSION
Pour le psychologue exercer aupregraves du per-
sonnel appelle parfois agrave des positions drsquoeacutequili-
bristes et neacutecessite de garder une certaine
souplesse
Lrsquointeacuterecirct de ce poste est de faciliter lrsquoaccegraves au
psychologue permettant agrave un public qui nrsquoau-
rait pas forcement fait cette deacutemarche de venir
consulter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 86
Clocircture de la journeacutee
gt Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 87
Clocircture de la journeacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 87
Clocircture de la journeacutee
C ette journeacutee nous a permis de partager
la diversiteacute de nos pratiques La ri-
chesse des interventions nous teacutemoi-
gnent de la vivaciteacute des psychologues hospita-
liers Cest bien la speacutecificiteacute de nos pratiques
qui assure la peacuterenniteacute de nos postes et leur
creacuteation
Jai commenceacute la journeacutee par des remercie-
ments cest ainsi que je vais la clore
Je remercie
le Comiteacute scientifique qui a construit ce pro-
gramme riche et ambitieux qui je lespegravere vous
aura apporteacute de nouvelles ressources
Le Comiteacute drsquoorganisation et les beacuteneacutevoles qui
nous ont reacuteserveacute un accueil souriant et dyna-
mique
Cleacutement ingeacutenieur du son agrave la technique
gracircce agrave qui vous pourrez entendre les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nous vous demandons donc un peu de pa-
tience avant de pouvoir retrouver les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nheacutesitez pas agrave nous rejoindre ce qui renforce
toujours notre dynamisme
En vous remerciant de votre preacutesence qui fait
le succegraves de cette journeacutee et nous poussera
qui sait agrave nous retrouver avec notre quart de
siegravecle -)
Dernier deacutetail administratif noubliez pas de
remplir le questionnaire deacutevaluation de la jour-
neacutee et surtout de rendre votre badge en par-
tant Cest important pour nous
Merci agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
BULLETIN DrsquoADHESION
Cotisation annuelle incluant lrsquoabonnement au journal et laccegraves agrave lespace adheacuterent sur notre site
internet
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Contractuel ou retraiteacute 30 euro
Membres associeacutes Jeune diplocircmeacute lt3ans sans emploi 25 euro
Eacutetudiant (master 1 ou 2) 15 euro
Justificatif obligatoire agrave joindre copie du haut du bulletin de salaire du diplocircme ou du certificat de
scolariteacute
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Nom
Preacutenom
Adresse personnelle
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Courriel
Adresse professionnelle (preacuteciser le nom du chef de service)
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Hocircpitaux de Paris
Bulletin de
lAssociation des psychologues cliniciens hospitaliers
de lAssistance Publique - Hocircpitaux de Paris
Bureau
Eacutelodie Sacircles Preacutesidente
Martine Shindo Vice preacutesidente
Eacutelodie Meacutetivet Secreacutetaire geacuteneacuterale
Nicole Sense Secreacutetaire adjointe
Christine Schwanse Treacutesoriegravere
Catherine Holzman Treacutesoriegravere adjointe
Membres du Conseil dAdministration
Franccediloise Adriansen Marie-Victoire Chopin
Ceacuteline Le Bivic Patrice Nomineacute
Ambre Piquard
Preacutesidente drsquohonneur
Martine Bonnet Lecuir
Pour nous joindre PSYCLIHOS
Uniteacute Gatineau - Lebard Hocircpital Sainte Peacuterine - AP-HP 11 rue Chardon Lagache 75 781 Paris cedex 16
contactpsyclihosorg
Ce journal est aussi le
vocirctre Nos pages vous sont ouvertes
Nheacutesitez pas agrave nous faire parve-
nir vos articles originaux ou non
quelques lignes ou plusieurs
pages sur votre pratique clinique
hospitaliegravere des reacuteflexions autour
dun cas ou dune theacutematique ou
la preacutesentation dun travail de re-
cherchehellip
Au plaisir de vous lire
Le contenu des articles qui paraissent dans le bulle-tin de lrsquoassociation (Le Journal) nrsquoengage que la seule responsabiliteacute de leurs auteurs Les membres du Bureau deacutecident de la publication de tout article qui leur est proposeacute et se reacuteservent le droit de sollici-ter les modifications de forme qursquoils jugent neacuteces-saires
Retrouvez nos actualiteacutes mais aussi de nombreux textes reacuteglementaires sur
notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 2
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 3
Le journal Ndeg18 - Janvier 2012
Dans ce numeacutero
Eacuteditorial
Ont participeacute agrave ce numeacutero
Franccediloise ADRIANSEN Marie-Lise BABONNEAU Martine BONNET-LECUIR Marie-Victoire CHOPIN Muriel DEROME Clara DUCHET Anna ELLI-PARDO
Jacqueline FAURE Isabelle FRETIGNY Catherine HOLZMAN Annie KURTZ Nadine LABBE Ceacuteline LE BIVIC Eacutelodie METIVET Patrice NOMINE
Ambre PIQUARD Virginie ROCARD Eacutelodie SALES Christine SCHWANSE Nicole SENSE Natascia SERBANDINI Martine SHINDO Elodie TRAVERS Benoicirct VERDON
Page
Eacuteditorial 3
Ouverture de la journeacutee 7
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles com-
peacutetences
10
Loi HPST titre de psychotheacutera-
peutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
23
Uniteacute dans la diversiteacute des pra-
tiques transversaliteacute de nos
cliniques
49
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
68
Clocircture de la journeacutee 86
Adheacutesion 88
N umeacutero exceptionnel pour commencer
cette nouvelle anneacutee 2012 Nous en pro-
fitons pour vous preacutesenter tous nos
vœux pour cette anneacutee qui commence quelle per-
mette leacutepanouissement de vos projets tant profes-
sionnels que personnels
Voici les actes de notre journeacutee du 24 novembre
2011 organiseacutee agrave loccasion des 20 ans de Psyclihos
Cette journeacutee a eacuteteacute un succegraves comme en teacutemoi-
gnent les nombreux remerciements et encourage-
ments reccedilus ainsi que les eacutevaluations des partici-
pants Cela nous donnera peut-ecirctre leacutenergie de re-
commencer avant notre quart de siegravecle
Vous retrouverez dans ces pages la richesse des
interventions proposeacutees afin de pouvoir prolonger
les reacuteflexions qui se sont engageacutees Les interven-
tions seront prochainement disponibles agrave leacutecoute
sur notre site internet Tregraves bonne lecture agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 4
Le journal Ndeg18 - Janvier 2012
Sommaire deacutetailleacute
Page
Eacuteditorial 3
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles
8
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz
11
Psychologue clinicien en psychotraumatologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet
15
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo
19
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute
24
Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard
32
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute
43
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants africains
Jacqueline Faure
50
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique en
eacutevolution
Muriel Derome
60
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic
63
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau
69
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini
78
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny
Elodie Travers
82
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 5
20 ans de Psyclihos
Psychologue agrave lHocircpital
une espegravece agrave proteacuteger
Eacutedito
Psyclihos est une association loi 1901 creacuteeacutee en 1991 pour promouvoir la
psychologie clinique et le rocircle des psychologues agrave lhocircpital
Par ses nombreuses actions agrave lintention de ses adheacuterents et des
psychologues hospitaliers Psyclihos est reconnue comme un relais et un
interlocuteur aupregraves des diffeacuterentes instances
Pour fecircter ses 20 ans Psyclihos organise cette journeacutee ouverte agrave ses
adheacuterents et agrave lrsquoensemble des psychologues de lrsquoAP-HP Elle offrira
loccasion de renforcer les liens professionnels entre collegravegues et de
partager la richesse des approches cliniques
Nous vous proposons de nous rencontrer autour des
theacutematiques suivantes
gt Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
gt Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip Quels
changements pour le meacutetier de psychologue
gt Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de
nos cliniques
gt Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
DRH AP-HP Centre de la Formation et du
Deacuteveloppement des Compeacutetences - Institut de
Formation des Cadres de Santeacute
En partenariat avec
Comiteacute dorganisation
Catherine Holzmann
Ceacuteline Le Bivic
Ambre Piquard
Elodie Sacircles
Nicole Sense
Comiteacute scientifique
Franccediloise Adriansen
Nadine Labbeacute
Patrice Nomineacute
Elodie Sacircles
Christine Schwanse
Martine Shindo
Benoicirct Verdon
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 6
8h30 Accueil des participants
9h-9h30 Ouverture
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
9h30 - 11h Ecirctre psychologue ou
faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute
Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Lariboisiegravere
gt P s y c h o l o g u e c l i n i c i e n e n
psychotraumatologie du savoir-faire
au savoir-ecirctre
Clara Duchet Tenon
gt Aider agrave penser limpensable en
oncologie
Anna Elli Pardo Saint-Louis
11h - 11h30 Pause
11h30 - 13h Loi HPST titre de
psychotheacuterapeutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen
membre du CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des
textes officiels
Nadine Labbeacute Cochin
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous
avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Sainte Peacuterine
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Fernand Widal
13h -14h30 Repas libre
14h30 - 16h Uniteacute dans la diversiteacute
des pratiques transversaliteacute de nos
cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Fernand
Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute
des patients migrants
Jacqueline Faure Tenon
gt P sycho logue en r eacutean imat i on
peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique
en eacutevolution
Muriel Derome Raymond Poincareacute
gt Seacutejour de vacances quelle place pour
le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Eacutemile Roux
16h - 17h30 Cliniques particuliegraveres
pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Saint
Louis
gt Laccompagnement psychologique par
teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Pitieacute Salpecirctriegravere
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale
de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Jean Verdier
gt Psychologue clinicien aupregraves du
personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Saint Louis
Le programme de la journeacutee
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 7
Ouverture de la journeacutee
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 7
Ouverture
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 8
Ouverture de la journeacutee
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
J e vais commencer par quelques remer-
ciements rapides
En premier lieu vous Monsieur Burdet
vous nous avez fait lhonneur douvrir cette
journeacutee Plus quun honneur votre soutien
nous a eacuteteacute si preacutecieux
Quand nous avions eacutevoqueacute avec vous lideacutee
dune journeacutee anniversaire mais alors de faccedilon
encore lointaine dans nos esprits votre encou-
ragement sans faille degraves lannonce de cette
eacuteventualiteacute nous a donneacute leacutenergie daffronter
lorganisation de cet eacuteveacutenement
Cest pourquoi au nom des membres du con-
seil dadministration des comiteacutes scientifiques
et dorganisation je tiens agrave vous remercier cha-
leureusement de votre soutien et du solide inteacute-
recirct que vous teacutemoignez agrave notre profession
Cet engagement de la Direction des res-
sources Humaines de lAPHP agrave nos cocircteacutes
comme il y a 20 ans nous permet de nous re-
trouver dans ce bel amphi pour partager cette
journeacutee Et nous remercions aussi lInstitut de
Formation des Cadres de Santeacute APHP pour
lefficaciteacute de son aide logistique et de la ges-
tion des inscriptions jusqursquoagrave ce jour et mecircme au
-delagrave
Mes remerciements vont aussi agrave vous tous qui
ecirctes ici aujourdrsquohui Nombre dentre vous nous
connaissent deacutejagrave en tant qursquoadheacuterents actuels
ou passeacutes souvent dune grande fideacuteliteacute au
cours des anneacutees Dautres nous suivent avec
inteacuterecirct sans nous avoir (encore ) rejoints et de
nombreux jeunes collegravegues nous deacutecouvrent
ou ont deacutejagrave deacutecouvert notre site internet
Notre site internet sur lequel vous pouvez
suivre lactualiteacute de notre association nous re-
joindre ou vous inscrire agrave notre infolettre Les-
pace adheacuterent propose de nombreux services
comme les postes agrave pourvoir agrave lAP-HP ou agrave la
FPH qui inteacuteressent tous collegravegues quils soient
titulaires contractuels ou en recherche dem-
ploi Bien eacutevidemment ces services sont reacuteser-
veacutes agrave nos adheacuterents tout comme nos bregraveves
par mail qui vous informent de lactualiteacute et nos
journaux
Degraves sa creacuteation Psyclihos sest donneacute pour
rocircle de teacutemoigner de lrsquoapport de la Psychologie
Clinique agrave lrsquohocircpital et den rsquoaffirmer la preacutesence
Informer communiquer et ecirctre un relais entre
les psychologues eacutechanger non seulement
entre pairs mais ecirctre aussi un interlocuteur
pour linstitution quant agrave notre profession
Lrsquohistoire de lrsquoassociation est intimement lieacutee agrave
celle de notre profession puisque Psyclihos voit
sa naissance en janvier 1991 quelques jours
avant cla parution du deacutecret qui fonde le statut
de psychologue hospitalier
1991 -2011 vingt ans de psychologie agrave lhocircpi-
tal nous y voilagrave
Les 20 ans de Psyclihos ont eacuteteacute loccasion
unique de nous replonger dans les archives de
notre association Nous partageons la richesse
de ce singulier voyage dans le temps dans le
Numeacutero speacutecial 20 ans du journal de Psyclihos
que vous trouverez dans vos pochettes
Il retrace lhistoire de Psyclihos agrave travers celle
de la psychologie agrave lhocircpital en sarrecirctant sur
les grandes dates qui ont jalonneacute le meacutetier de
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 9
Ouverture de la journeacutee
psychologue
1991 le deacutecret portant statut particulier de psy-
chologue hospitalier 1996 le code de deacuteonto-
logie 2003 la deacutecentralisation de gestion au
sein de lAP-HP et les conseacutequences que nous
vivons depuis pour nen citer que quelques
uneshellip
Cette plongeacutee historique loin decirctre nostal-
gique nous permet de rappeler au fil des ar-
ticles parus durant ces deux deacutecennies dans
nos journaux combien lactualiteacute de notre pro-
fession sappuie sur son passeacute Connaicirctre cette
histoire notamment pour nos plus jeunes col-
legravegues nous semble neacutecessaire pour com-
prendre les enjeux qui traversent actuellement
notre profession Il est dailleurs eacutetonnant de
lire combien des articles pourtant anciens gar-
dent toute leur fraicirccheur traitant deacutejagrave de pro-
bleacutematiques qui apparaissent reacutecurrentes ou
abordant des questionnements qui aujourdhui
pourraient sembler novateurshellip
Cest donc autour de quelques grands thegravemes
toujours actuels comme la deacuteontologie des
psychologues la saga des concours sur titres
la Fiche meacutetier la fonction FIR la Psychiatrie
de liaison ou les psychotheacuterapies et la loi que
nous vous invitons agrave plonger dans notre journal
speacutecial
Nous retrouvons aujourdrsquohui certains de ces
sujets dans le programme de cette journeacutee
Il illustre les champs drsquointerventions qui ani-
ment lrsquoassociation depuis sa creacuteation la fonc-
tion de psychologue les changements induits
par la leacutegislation la diversiteacute des pratiques et
les cliniques particuliegravereshellip
Nous souhaitons pouvoir teacutemoigner de la ri-
chesse et de la diversiteacute des pratiques des psy-
chologues cliniciens agrave lhocircpital Bien sucircr en 20
ans la place des psychologues hospitaliers a
eacutevolueacute leur nombre aussi La varieacuteteacute des inter-
ventions teacutemoigne de la richesse des champs
dexercice possibles parfois insoupccedilonneacutes au
sein de notre institution quest lAP-HP
Derriegravere un titre un peu provocateur nous sou-
haitons vous mobiliser dans lancrage toujours
neacutecessaire de notre profession au sein de
lAPHP Le cadre de notre exercice est toujours
fragile voire mis agrave mal En ces temps heurteacutes
et parfois incertains nous espeacuterons pouvoir
partager notre eacutenergie pour proteacuteger notre
exercice si particulier Ecirctre psychologue agrave lhocirc-
pital cest bien sucircr ecirctre agrave la rencontre des pa-
tients et de leurs proches dans leurs singulari-
teacutes mais aussi des eacutequipes soignantes sans
oublier la participation agrave la vie institutionnelle
comme ce sera abordeacute dans les diffeacuterentes in-
terventions que vous allez entendre aujour-
dhui
Sans plus attendre nous ceacutedons la place agrave la
premiegravere session de la matineacutee dans le vif du
sujet ecirctre psychologue ou faire de la psycho-
logie statut fonctions quelles compeacute-
tences modeacutereacutee par Benoicirct Verdon long-
temps psychologue hospitalier maintenant au
sein de lUniversiteacute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 10
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Hocircpital Lariboisiegravere Page 11
gt Psychologue clinicien en psychotrauma-
tologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Page 15
gt Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Hocircpital Saint-Louis Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles compeacutetences
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 11
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Neuropsychologue une espegravece nouvelle Plus reacutesistante
Mieux adapteacutee agrave la vie hospitaliegravere ou aux institutions
Plus respecteacutee des meacutedecins prescripteurs
Annie Kurtz
Service de Neurologie Hocircpital Lariboisiegravere
La reacutealiteacute objective drsquoune atteinte ceacutereacutebrale agrave
lrsquoorigine des troubles preacutesenteacutes par le patient
ne doit jamais occulter le fait drsquoune histoire
drsquoun eacutequilibre psychique et drsquoune individualiteacute
malmeneacutee
Charte des CPCN - Collegraveges des Psycho-
logues Cliniciens speacutecialiseacutes en Neuropsycho-
logie
J rsquoai bien imprudemment accepteacute il y a
quelques mois de prendre la parole pour
ceacuteleacutebrer les 20 ans de lrsquoassociation Psy-
clihos De plus jrsquoai accepteacute de vous faire parta-
ger mes reacuteflexions sur la place du psychologue
dans le champ de la santeacute et cerise sur le gacirc-
teau pour la deacutefense et lrsquoillustration de la neu-
ropsychologie clinique
Mon propos nrsquoest pas de poleacutemiquer mais de
reacutefleacutechir ensemble aux charmes et aux dangers
que repreacutesente le terme de
neuropsychologue si priseacute par certains ac-
tuellement
La preacutesence de psychologues au sein des ser-
vices hospitaliers est ancienne ils ou elles as-
surent agrave la fois le travail de bilan et celui de
soutien aupregraves des patients Mais le genre
neuropsychologue nrsquoexiste que depuis peu
Le terme neuropsychologue seacuteduit beaucoup
les jeunes collegravegues et mecircme certains para-
meacutedicaux comme les orthophonistes les ergo-
theacuterapeutes et mecircme quelques kineacutesitheacutera-
peutes Nombreux sont ceux dans le champ de
la neuropsychologie qui revendique le label
de neuropsychologues Depuis quelques an-
neacutees les lettres de motivation qui accompa-
gnent les demandes de stages srsquoadressent agrave la
neuropsychologue que je suis censeacutee ecirctre et
les candidates et candidats deacuteclarent leur
passion pour le meacutetier de
neuropsychologue Et je mrsquointerroge sur cette
ferveur
Quelle deacutefinition de la neuropsychologie pou-
vons-nous faire nocirctre Il y a 10 ans en mars
2001 le Collegravege des Psychologues Cliniciens
speacutecialiseacutes en Neuropsychologie (CPCN) pour
les Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Psychologie deacutefinis-
sait ainsi la neuropsychologie
La neuropsychologie est la discipline qui traite
des relations entre les processus mentaux
sous-tendant le raisonnement lrsquoattention la
meacutemoire la perception les gnosies les
praxies le langage le comportement eacutemotion-
nel et lrsquoactiviteacute du cerveau Lors des leacutesions ceacute-
reacutebrales les conseacutequences concerneront agrave la
fois lrsquoefficience de la cognition et lrsquoadaptabiliteacute
des conduites de lrsquoindividu Cette neacutecessaire
appreacuteciation analytique et syntheacutetique du psy-
chisme humain caracteacuterise lrsquoapproche neurop-
sychologique
La neuropsychologie est un champ multidisci-
plinaire ougrave se retrouvent diffeacuterents meacutetiers et
les zones de recouvrement peuvent ecirctre larges
pour certains Je milite aujourdrsquohui pour deacute-
fendre le fait qursquoun bilan reacutealiseacute par un psycho-
logue mecircme si les tests utiliseacutes par drsquoautres
intervenants sont identiques reste un bilan dif-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 12
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
feacuterent Ce travail drsquoanalyse et synthegravese rappe-
leacute dans la deacutefinition citeacutee fonde la totaliteacute de
nos pratiques en neuropsychologie
Lrsquoacte le plus freacutequent est le bilan bilan pour
plaintes mneacutesiques diagnostic diffeacuterentiel entre
deacutepression et maladie neurodeacutegeacuteneacuterative seacute-
quelles drsquoaccident vasculaire seacutequelles de
traumatisme cracircnien et nous intervenons eacutega-
lement dans le suivi et la reacutehabilitation dans les
services de soins de suite Mecircme dans le cadre
drsquoune eacutevaluation en vue drsquoune reacuteeacuteducation
nous savons devoir tenir compte des mouve-
ments psychiques agrave lrsquoœuvre dans tout individu
et qui vont peser sur ce travail
Notre code de deacuteontologie speacutecifie que le res-
pect de la vie psychique fonde notre action ce
respect de la vie psychique tout au long de nos
anneacutees drsquoeacutetudes nous avons eacuteteacute formeacutes agrave y
porter une attention toute particuliegravere Nos ac-
quis nos savoirs modifient notre approche
Quel peut ecirctre le sens pour un ou une psycho-
logue agrave vouloir changer de nom
Nrsquoest-ce pas alors en gardant notre position de
psychologue et donc aussi clinicien que nos
actions prennent sens dans la prise en soin
des patients
Ce que je redoute le plus est que cette appella-
tion neuropsychologue ne confine les psycho-
logues dans un exercice limiteacute agrave la passation
des tests et au traitement des chiffres qui en
reacutesultent Comme si le neuropsychologue ne
devait mettre en œuvre aucun savoir clinique Il
est vrai que la formation donneacutee par lrsquouniversiteacute
conditionne en partie nos pratiques et cer-
taines universiteacutes ne semblent plus accorder
de place agrave la structure de la personnaliteacute ni aux
aspects thymiques dans leur master de neu-
ropsychologie Replacer le patient dans son
histoire reste primordial quels que soient les
avatars neurologiques
Qursquoavons-nous agrave gagner en devenant
neuropsychologue
Les offres drsquoemploi sont nombreuses et les
jeunes diplocircmeacutes ne restent pas longtemps
sans emploi Les meacutedecins psychiatres neu-
rologues ou geacuteriatres avec qui nous collabo-
rons veulent travailler avec des
neuropsychologues Le risque me paraicirct
grand qursquoils recherchent essentiellement des
testeurs pour leurs publications ou leurs con-
sultations Dans les recherches il srsquoagit pour
des collegravegues formeacutes agrave la psychologie pendant
au moins 4 ans puis speacutecialiseacutes en deuxiegraveme
anneacutee de Master cest-agrave-dire apregraves 5 anneacutees
drsquoeacutetudes drsquoappliquer des protocoles de test
dont ils nrsquoont mecircme pas eu la possibiliteacute de dis-
cuter le contenu et le choix des outils (Les
textes nous reconnaissent pourtant la liberteacute du
choix de nos outils)
La pratique de la neuropsychologie peut ecirctre
passionnante agrave condition de ne pas ecirctre ins-
trumentaliseacutee par les meacutedecins En preacuteparant
mon intervention il mrsquoest apparu que je pour-
rais citer comme eacutetude de cas nombre de si-
tuations de souffrance de nos collegravegues dans
les institutions Je pourrais vous preacutesenter des
vignettes cliniques ougrave les psychologues se
mettent en danger en srsquoenfermant dans cette
appellation qui convient si bien agrave nos collegravegues
drsquoautres disciplines et agrave nos employeurs Dans
les consultations meacutemoire la place faite aux
neuropsychologues peut ecirctre tregraves diffeacuterente
suivant les attentes et les projets de leurs par-
tenaires meacutedicaux ou institutionnels et parfois
ces exigences entraicircnent une veacuteritable souf-
france pour nos collegravegues Peut-on exercer son
savoir-faire et son savoir ecirctre de psychologue
quand on attend de nous de recevoir 4 ou 6
patients par jour Ces bilans TGV laissent peu
de place agrave lrsquointersubjectiviteacute du psychologue et
du patient alors que dans drsquoautres lieux lrsquoeacuteva-
luation peut respecter la singulariteacute du patient
de sa famille et la deacuteontologie du psychologue
Il y a des temps dans la pratique drsquoun bilan
neuropsychologique qui restent des temps cli-
niques Avant drsquoentreprendre un bilan le psy-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 13
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
chologue speacutecialiseacute en neuropsychologie
comme tous les psychologues doit pouvoir in-
terroger la demande de qui vient cette de-
mande le patient le meacutedecin ou la famille et
qursquoen attendent ces diffeacuterents partenaires
Comment cet examen srsquoinscrit-il dans le projet
theacuterapeutique
Lrsquoentretien preacuteliminaire ne consiste pas agrave re-
prendre lrsquoanamnegravese au sens meacutedical histoire
de la maladie mais au sens psychologique
entendre lrsquohistoire drsquoun sujet Comme lrsquoa eacutecrit
Emmanuelle Truong-Minh actuelle preacutesidente
du CPCN agrave propos de ce temps drsquoun bilan
Inscrite dans la relation porteacutee par le langage
crsquoest cette preacutesence agrave lrsquoautre qui fonde notre
action Dans le temps de la consultation que je
reacutealise un entretien que je propose des tests
que JE parle ou que JE eacutecoute je suis lagrave au
moins lagrave de maniegravere absolue et entiegravere Pour
la personne agrave mon sens il nrsquoest rien de plus
preacutecieux que lrsquoeacutetablissement de cette relation
clinique Car ces instants ougrave lrsquoobjectivation de
difficulteacutes qursquoelles soient psychopathologiques
ou neuropsychologiques risque drsquoadvenir sont
fondamentaux dans le parcours de vie le par-
cours de santeacute et le parcours de la maladie de
la personne Pouvoir prendre appui sur cette
relation permet la mise en perspective des diffi-
culteacutes permet de supporter le traumatisme
psychique eacuteventuel permet de srsquoeacutecrouler peut-
ecirctre sans ecirctre seul
Je me souviens drsquoun patient qui mrsquoa eacuteteacute adres-
seacute pour plaintes mneacutesiques et eacuteventuelles seacute-
quelles drsquoun AIT Ce monsieur de 60 ans eacutetait
marieacute pegravere de 3 enfants cadre dirigeant dans
une entreprise A la suite de son accident
ischeacutemique transitoire il avait le sentiment de
ne plus pouvoir faire face agrave ses obligations pro-
fessionnelles Sa vie professionnelle eacutetait para-
siteacutee par le danger de voir ses difficulteacutes cons-
tateacutees par les autres surtout par son respon-
sable hieacuterarchique Degraves le deacutebut de lrsquoentretien
il semblait eacuteprouver une certaine inhibition an-
xieuse son expression spontaneacutee restait fac-
tuelle et retenue Apregraves quelques eacutepreuves
drsquoattention et de meacutemoire sans reacutesultat patho-
logique je mrsquoautorisai agrave abandonner les
eacutepreuves pour poursuivre lrsquoentretien au cours
duquel jrsquoappris que la veille il avait accompa-
gneacute sa megravere contre son greacute dans une institu-
tion pour patients souffrant de maladie
drsquoAlzheimer Alors qursquoil a des fregraveres et sœurs il
avait eacuteteacute seul agrave faire cette deacutemarche contraint
et forceacute par la santeacute chancelante de son
eacutepouse atteinte drsquoun cancer du seinhellip quand
jrsquoeacutevoque avec lui la possibiliteacute drsquoaller en parler
avec un psy il me dit y avoir deacutejagrave penseacute mais
renonceacute parce qursquoil avait peur de srsquoeffondrer
Nous avons la responsabiliteacute de notre bilan
mais nous ne pouvons deacutelivrer un diagnostic
(crsquoest de la compeacutetence du meacutedecin) pourtant
lrsquoentretien dit de restitution est un temps
drsquoeacutechange privileacutegieacute qui rend au patient sa
place de sujet mais ce temps-lagrave prend du
temps et on ne nous le donne pas toujours
Le temps de lrsquoexamen psychologique nrsquoest pas
celui des examens compleacutementaires prescrits
par les meacutedecins On sait bien qursquoil est toujours
utile de faire preacuteciser la demande de refuser
de tester Monsieur X ou Y on teste une hy-
pothegravese pas un individu de dire non parfois
parce qursquoon sait qursquoon ne reacutepondra pas agrave la
question ou parce que les conditions de lrsquoexa-
men ne respectent pas le patient ou notre auto-
nomie professionnelle Le questionnement sur
lrsquoobjet de la demande est dans le champ de
compeacutetence des psychologues nous avons eacuteteacute
formeacutes agrave ce travail La demande des meacutedecins
de lrsquoeacutequipe du patient ou de sa famille doit ecirctre
analyseacutee
Peut-on imaginer que se faire connaicirctre
comme neuropsychologue lorsqursquoon est psy-
chologue serait un moyen drsquoeacutechapper agrave la diffi-
culteacute de maintenir notre position singuliegravere
dans le monde de la santeacute
Certes la pratique de la neuropsychologie re-
quiert des connaissances sur le fonctionne-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 14
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
ment du cerveau sur les troubles cognitifs as-
socieacutes aux leacutesions ceacutereacutebrales sur la significa-
tion des localisations anatomo-cliniques et ce
travail permanent de reacuteflexion et drsquoeacutechange
avec les autres intervenants dans la prise en
charge drsquoun patient est enrichissante et parfois
passionnante comme peuvent lrsquoexprimer les
lettres de motivation des demandes de stages
Mais pratiqueacutee par des psychologues elle pour
reste un lieu privileacutegieacute ougrave la parole du patient
peut ecirctre entendue pas seulement sur ses
troubles ou ses capaciteacutes preacuteserveacutees mais sur
ce qursquoil comprend de ce qui lui arrive sur son
ressenti et le psychologue est preacutesent pour
lrsquoaccompagner dans ce nouveau travail psy-
chique Ecirctre speacutecialiseacute en neuropsychologie
est une position exigeante comme pour
chaque psychologue crsquoest lrsquoabsolue neacutecessiteacute
drsquoactualiser nos connaissances sur les patholo-
gies les nouveaux outils mais crsquoest aussi
prendre le risque de partager nos doutes sur
notre approche drsquoun patient dont on prend en
compte lrsquohistoire le contexte affectif social
professionnel Crsquoest une tacircche difficile que
drsquoessayer drsquoaborder un patient dans sa globali-
teacute et pas seulement sur ses troubles cognitifs
Personnellement je ne suis jamais sucircre drsquoavoir
bien analyseacute lrsquoensemble des eacuteleacutements que le
patient me permet drsquoappreacutehender jrsquoai la
chance de ne pas ecirctre seule dans mon service
et de pouvoir partager mes doutes avec mes
collegravegues
Enfin le terme neuropsychologue peut repreacute-
senter une menace pour le corps des psycho-
logues
Nous expeacuterimentons chaque jour la difficulteacute agrave
deacutefendre notre place de psychologue On nous
reproche notre image floue drsquoecirctre des
eacutelectrons libres dans les services drsquoecirctre des
produits de luxe sans nomenclature de nos
activiteacutes (si ce nrsquoest dans la CCAM qui ne con-
cerne que les meacutedecins) Le texte qui eacuteclaire
notre champ drsquoactiviteacute le seul qui ait une valeur
leacutegale est celui de 1985 qui deacutefinit notre statut
et nous savons bien combien lrsquoincitation au res-
pect de ce texte est une tacircche reacutecurrente pour
nous Jrsquoai commenceacute agrave travailler agrave lrsquoAP-HP en
1971 la publication de ce texte puis des circu-
laires de 1991 ont repreacutesenteacute un moment drsquoes-
poir mais jrsquoai appris tout au long de mes an-
neacutees drsquoexpeacuterience que ce travail drsquoexplicitation
de ce qursquoest un psychologue nrsquoa pas de fin
Parfois la confusion qui regravegne dans lrsquoesprit de
nos employeurs les arrangent bien pour
exemple des postes de neuropsychologues
animateurs offerts dans les EPHAD Parfois
cette confusion est sincegravere tel nouveau chef
de service qui travaille depuis de longues an-
neacutees avec des psychologues et qui reccediloit de la
DRH un rappel sur le temps FIR et qui srsquoeacutetonne
de son contenuhellip
Notre code de deacuteontologie est une reacutefeacuterence
indispensable pour nous mais nrsquoest toujours
pas un texte opposable agrave un employeur
Ces textes ont eacuteteacute eacutecrits pour les psycho-
logues ce sont des repegraveres pour les psycho-
logues Il a existeacute un mouvement qui souhaitait
diffeacuterencier les psychologues et les neuropsy-
chologues avec la volonteacute drsquoobtenir un statut agrave
part Quand on connaicirct la difficulteacute drsquoune recon-
naissance leacutegale la fragiliteacute du corps des psy-
chologues toujours precirct agrave se morceler en cen-
taines drsquoassociationshellip on peut se demander si
le meacutetier de psychologue nrsquoest pas effective-
ment en danger et se revendiquer neuropsy-
chologue peacutedopsychologue comme le laisse
entendre lrsquoactuelle fiche meacutetier nous expose
encore plus hellip (heureusement cette fiche doit
ecirctre remplaceacutee en 2012)
Notre seule protection repose sur les textes de
loi qui deacutefinissent le titre de psychologue il nrsquoy
a pas de titre de neuropsychologue ni de titre
de psychologue clinicien et ce nrsquoest pas lrsquoaven-
ture du titre de psychotheacuterapeute ni les travaux
en cours agrave la DGOS qui doivent nous rassu-
rerhellip
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 15
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Psychologue clinicien en psychotraumatologie
du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Universiteacute Paris Descartes
E n 1997 un deacutecret du ministegravere de la
Santeacute creacutee le reacuteseau des CUMP
(Cellules dUrgence Meacutedico-
Psychologique) propulsant des psychologues
cliniciens sur le terrain de lurgence aux cocircteacutes
de meacutedecins psychiatres et de parameacutedicaux
De nouvelles missions soffrent agrave ces profes-
sionnels peu formeacutes au deacutepart pour intervenir
dans ces contextes de catastrophes collectives
(accidents agrave retentissement majeur catas-
trophes naturelles guerres terrorisme etc)
Peu agrave peu des reacuteflexions et groupes de travail
speacutecifiques se creacuteent (au sein notamment de
lAFORCUMP - Association de recherche et de
formation des CUMP) afin de mieux deacutefinir les
fonctions et les compeacutetences de chacun dans
ce domaine bientocirct nommeacute
psychotraumatologie Cette nouvelle cli-
nique (dans sa forme institutionnelle et dans
sa dimension traumatique en situations
extrecircmes) a souleveacute de nombreux deacutebats
passionneacutes agrave propos de la leacutegitimeacute ou non de
lintervention de terrain (sur les sites et aux
abords des catastrophes) Cependant il sagira
plutocirct de discuter ici de la speacutecialisation eacuteven-
tuellement neacutecessaire des psychologues dans
ce domaine - du cocircteacute du savoir-faire - comme
des retrouvailles avec une position de clinicien
classique - du cocircteacute du savoir-ecirctre et de la
subjectivation
Agrave lrsquoheure ougrave se multipliaient donc diffeacuterentes
formes de violence et notamment au moment
de lrsquoeacutepoque terroriste parisienne (attentats
meacutediatiseacutes St Michel Port-Royal 1995-1996)
les psychologues ont vu leur champ drsquoaction et
leurs fonctions srsquoeacutelargir des nouvelles mis-
sions et nouvelles structures se deacuteveloppaient
pour venir au secours des victimes agrave la de-
mande de nos gouvernants et de psychiatres
militaires expeacuterimenteacutes dans ce domainehellip Jrsquoai
eu la chance de participer agrave ce processus degraves
le deacutebut et tregraves rapidement je me suis poseacutee
des questions sur ces interventions qui mrsquoap-
paraissaient pour ainsi dire hors cadre
Hors cadre parce que dans lrsquourgence
Hors cadre parce que nombre drsquointerventions
avaient lieu sur le terrain peu apregraves la catas-
trophe loin du confort du cabinet ou de lrsquohocircpi-
tal
Je me souviens agrave lrsquoeacutepoque mrsquoecirctre rueacutee sur le
code de deacuteontologie en vigueur depuis le 22
mars 1996 et me rassurer en lisant
La mission fondamentale du psychologue est
de faire reconnaicirctre et respecter la personne
dans sa dimension psychique Son activiteacute
porte sur la composante psychique des indivi-
dus consideacutereacutes isoleacutement ou collectivement
Oufhellip nous nrsquoeacutetions donc pas compleacutetement
hors-cadrehellip cependant je nrsquoavais pas vrai-
ment appris agrave travailler sur les bancs de la fac
Sans la demande du patient (mecircme pour lrsquoen-
fant le parent eacutetait demandeur sinon lrsquoinstitu-
tion scolairehellip)
Sans un cadre institutionnel classique
Et certainement pas en prise directe avec la
reacutealiteacute drsquoun eacuteveacutenementhellip
Quelques options universitaires tout de mecircme
assureacutees par des enseignants ayant participeacute agrave
des missions humanitaires mrsquoavaient deacutejagrave per-
mis drsquointerroger des dispositifs de soins hors
norme
Dans nos deacutebuts jrsquoai donc co-animeacute un groupe
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 16
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
de travail destineacute speacutecifiquement aux
psychologues pour reacutefleacutechir agrave notre pratique
Voici comment nous nous repreacutesentions alors
les choses
Nouvelles missionshellip = hellip nouvelles compeacute-
tences Ce que jrsquoai nommeacute dans mon introduc-
tion savoir-faire
1 NOUVELLES COMPEacuteTENCES REQUISES
ndash DU COcircTEacute DU SAVOIR-FAIRE
Lors des soins immeacutediats ou
defusing (cagraved sur le terrain dans les
heures qui suivent lrsquoattentat la catastrophe
naturelle la prise drsquootages lrsquoaccident col-
lectif etc)
Le psychologue doit reconstruire un cadre en
fonction de la situation qui se preacutesente agrave lui
crsquoest-agrave-dire en labsence de cadre deacutefini
(configuration du lieu dureacutee de la mission
nombre de sujets agrave prendre en charge etc
sont inconnus agrave lrsquoavance) Ceci neacutecessite de sa
part une capaciteacute dadaptation une souplesse
psychique dans son intervention ainsi qursquoun
cadre theacuteorique interne solide pour ne pas ceacute-
der nous mecircme agrave la panique ou au deacuteborde-
ment eacutemotionnel Le cadre theacuteorique solide
renvoyait surtout pour nous aux eacutecrits sur le
traumatisme et agrave ce qursquoon appelait alors la
victimologie
Pour illustrer ce propos je peux vous parler
drsquoune mission effectueacutee agrave Pointe Noire au Con-
go lorsque nous eacutetions chargeacutes avec un psy-
chiatre militaire de lrsquoeacutevaluation psychopatholo-
gique des ressortissants franccedilais en pleine
guerre civile (octobre 1997) Nous avons effec-
tivement ducirc nous adapter agrave lrsquoabsence de cadre
rassurant dans le sens ougrave nos deacuteplacements
eacutetaient extrecircmement limiteacutes en raison du con-
texte drsquoinseacutecuriteacute permanente marqueacute par des
tirs quotidiens drsquoarmes automatiques Il srsquoagis-
sait eacutegalement drsquoinventer des lieux de consulta-
tions et des modes drsquoapproches originaux pour
cette population bien souvent cloicirctreacutee dans les
appartements deacutevasteacutes par les milices armeacutees
Mais je souhaite citer drsquoautres situations moins
exceptionnelles afin de vous montrer agrave quel
point le psychologue dans ce travail drsquourgence
peut ecirctre ameneacute agrave reacutealiser des entretiens dans
des lieux inhabituels voire insolites comme agrave
bord drsquoun avion lorsque nous avons proceacutedeacute au
rapatriement des victimes du crash drsquoavion du
Seacuteneacutegal (en feacutevrier 1997) ou dans un car lors-
que nous avons accompagneacute les familles des
enfants victimes de lrsquoavalanche des Orres ou
encore dans un aeacuteroport lors de lrsquoaccueil de
populations reacutefugieacutees (du Congo ou du Kosso-
vo) ou dans une citeacute universitaire pour la prise
en charge des victimes drsquoattentats etc
Ici le psychologue doit ecirctre precirct agrave aller vers les
victimes sans attendre une demande de leur
part (drsquoautant plus que les personnes sont sou-
vent en eacutetat de choc de confusion de sideacutera-
tion etc) Alors rappelons-le que notre forma-
tion nous apprend plutocirct agrave travailler avec la de-
mande du patient comme principe inheacuterent agrave
la rencontre theacuterapeutique
Ensuite le psychologue est ameneacute agrave srsquointerro-
ger sur la position de neutraliteacute bienveillante
Alors que neutraliteacute signifie ne pas eacutemettre de
jugements de critiques de deacutesapprobation
nous voyons comment dans lrsquourgence le clini-
cien peut (je dirais mecircme doit) juger de lrsquoadap-
tation drsquoun comportement par exemple quitte agrave
deacutecider drsquoune hospitalisation ou drsquoun rapatrie-
ment En effet le psychologue doit savoir repeacute-
rer et informer les victimes des symptocircmes
psychopathologiques eacuteventuels favoriser la
demande de prise en charge theacuterapeutique ul-
teacuterieure si besoin est repeacuterer et orienter les
personnes les plus fragiles en faisant bien la
distinction entre eacutetat de stress aigu et entreacutee
potentielle dans une pathologie traumatique
Mecircme si ces fonctions de diagnostic drsquoeacutevalua-
tion drsquoorientation existent dans le cadre de
notre profession celles qui visent agrave informer agrave
lrsquoavance et agrave preacutevenir relegravevent habituellement
plutocirct de la speacutecificiteacute meacutedicale
Par ailleurs sur le terrain la position et latti-
tude du psychologue sont encore une fois un
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 17
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
peu particuliegraveres pour lui puisqursquoil doit assurer
une preacutesence rassurante contenante (voire
maternante au sens de Winnicott) apporter de
la chaleur et de lhumaniteacute Lrsquointervention drsquour-
gence se situe du cocircteacute du holding Ferenczi
en charge des soldats en prise avec des neacute-
vroses de guerre soulignait deacutejagrave ce pheacuteno-
megravene de reacutegression des patients les faisant re-
venir agrave un stade archaiumlque (en proie agrave des an-
goisses violentes et massives de destruction
morcellementhellip) et agrave des comportements in-
fantiles (ne plus savoir marcher perdre son
autonomie pour les besoins de la vie quoti-
dienne etc) Ici le traumatisme est externe et
agit par effraction physique et psychique deacute-
sorganisant les modaliteacutes deacutefensives habi-
tuelles On dit aussi que le traumatisme est en-
treacute par tous les pores de la peau et envahit
tous les sens (visuels olfactifs auditifs etc) Il
srsquoagit alors pour le psychologue drsquoexercer une
veacuteritable fonction de pare-excitation
drsquoenveloppe protectrice (Au sens de D Winni-
cott et de D Anzieu) fonction qui peut srsquoac-
compagner de gestes apaisants
Travailler dans ce type de dispositif ne srsquoimpro-
vise pashellip Ainsi le psychologue doit avoir reccedilu
une formation speacutecifique A lrsquoappui un nouvel
Extrait du code de deacuteontologie des psycho-
logues chapitre compeacutetences
Le psychologue tient ses compeacutetences de
connaissances theacuteoriques reacuteguliegraverement mises
agrave jour drsquoune formation continue et drsquoune forma-
tion agrave discerner son implication professionnelle
dans la compreacutehension drsquoautrui
Pour notre domaine drsquointervention la for-
mation porte avant tout sur
1 La clinique traumatique la symptomatologie
de la neacutevrose traumatique de lrsquoESPT mais
aussi de tous les eacutetats de deacutesorganisa-
tion aigus des comportements de panique col-
lective etc elle porte eacutegalement sur le fonc-
tionnement psychique entraveacute par le trauma
donnant lieu agrave des reacuteameacutenagements transi-
toires parfois tregraves eacuteloigneacutes drsquoune clinique clas-
sique
2 La dynamique de groupe un groupe pris
dans une catastrophe repreacutesente une enve-
loppe psychique groupale qui elle-mecircme peut
se trouver effracteacutee par la violence de lrsquoeacuteveacutene-
ment le collectif est alors briseacute et ne pourra
plus fonctionner comme avanthellip Que la prise
en charge soit groupale ou bien mecircme indivi-
duelle il est fondamental drsquoecirctre au clair avec
ces concepts de la clinique groupale
Nous venons de pointer les principales con-
naissances et compeacutetences neacutecessaires au
psychologue qui intervient dans lrsquourgence ou
dans des dispositifs de soins exceptionnels mis
en place suite agrave des eacuteveacutenements qui sortent de
lrsquoordinairehellip pour autant ce savoir-faire nrsquoa de
sens que srsquoil srsquoarticule avec un savoir-ecirctre
propre agrave la fonction habituelle du psychologue
2 LORSQUE LE SAVOIR-FAIRE REJOINT
LE SAVOIR-EcircTRE
Je poursuis ma lecture du code de deacuteontologie
(chapitre compeacutetences) le psychologue est
garant de ses qualifications particuliegraveres et deacute-
finit ses limites propres compte tenu de sa for-
mation et de son expeacuterience Il refuse toute in-
tervention lorsqursquoil sait ne pas avoir les compeacute-
tences requises Ainsi il doit savoir sil peut
assurer un soin immeacutediat dans lrsquourgence ou srsquoil
doit refuser ce type de mission en fonction de
ses limites personnelles et professionnelles de
sa vulneacuterabiliteacute (changeante au fil du temps et
de son histoire personnelle) de ses projections
eacuteventuelles
Il est inviteacute eacutegalement agrave repeacuterer et agrave connaicirctre
ses propres reacuteactions psychiques agrave leacutecoute de
ce type de patients de ce qui tient parfois de
lintoleacuterable savoir ou apprendre agrave repeacuterer
ses limites personnelles ses propres fan-
tasmes de sauveur ou ses mouvements
drsquoidentification agrave la victime crsquoest agrave dire ses
propres eacutelans contre-transfeacuterentiels Ces con-
naissances restent largement favoriseacutees par un
travail personnel au cours duquel le psycho-
logue a appris agrave ecirctre eacutecouteacute et par la mise en
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 18
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
place de supervision reacuteguliegravere
Dans le cadre de lrsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue est le seul agrave de-
voir se passer drsquoinstrument (pas de mateacuteriel
meacutedical ni de theacuterapeutique meacutedicamenteuse
ou encore de mateacuteriel technique reacuteserveacutes aux
meacutedecins infirmiers secouristes etc) De ce
fait comme lrsquoexprime Colette Chiland il devient
son propre instrument celui qui permet de
comprendre et drsquointervenir agrave mains nues
Lrsquooriginaliteacute de sa formation vient du travail sur
soi que le clinicien a effectueacute pour acqueacuterir
une certaine maicirctrise de lui-mecircme comme ins-
trument Autrement dit ce que le psychologue
met au service de lrsquoautre ce ne sont pas seule-
ment ses connaissances mais aussi son appa-
reil psychique sa psycheacute son fonctionnement
sa capaciteacute de ressentir de comprendre et
drsquoeacutelaborer Le savoir du clinicien devient un sa-
voir vivant incarneacute ougrave il paie de sa personne
Crsquoest principalement cette position qui le dis-
tingue drsquoun autre intervenant
Dans la clinique du traumatisme il est fonda-
mental de prendre conscience de ce qursquoon
eacuteprouve lors de lrsquoeacutecoute drsquoun blesseacute psychique
aux prises avec des pheacutenomegravenes drsquoeffractions
internes afin de ne pas ecirctre gouverneacute par des
reacuteactions non controcircleacutees dans la compreacutehen-
sion du patient et dans la reacuteponse qursquoon lui
donnera Nous voyons comment cette eacutecoute
ne peut se contenter drsquoun savoir plaqueacute elle
doit ecirctre au contraire un travail actif qui permet
des allers ndash retours entre probleacutematique per-
sonnelle et ressenti du patient sans que cette
premiegravere nrsquointerfegravere de maniegravere neacutegative Et
crsquoest bien en restant sensible et en acceptant
de le rester dans les limites que nous venons
de fixer que le sujet se sentira libre drsquoexprimer
eacutemotions penseacutees honteuses sentiments de
culpabiliteacute et drsquohumiliation inheacuterents agrave la dyna-
mique traumatique
Enfin nous le savons bien lrsquoeacutecoute srsquoexerce
dans un double registre ce qui est dit et ce qui
nrsquoest pas dit le contenu manifeste et le conte-
nu latent Ces dimensions concernent tout au-
tant le clinicien qui doit savoir se taire pour lais-
ser lrsquoautre parler et parler pour lui faciliter la pa-
role Dans notre contexte drsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue doit eacutegalement
chercher agrave eacutetablir petit agrave petit et degraves que pos-
sible une distinction entre fantasmes
(individuels) et eacuteveacutenements reacuteels (veacutecus par
tous) pour diffeacuterencier angoisse interne
(subjective) et peur (objective) des objets ex-
ternes
Il est ainsi un passeur agrave ce moment de frac-
ture dans lrsquohistoire du sujet Il fait alors le lien
entre le passeacute la bregraveche traumatique et la
reconstruction agrave venir
EN CONCLUSION
Dans un contexte hors du commun puisque
hors cadre et souvent hors demande il me
paraicirct essentiel de garder nos re-
pegraveres classiques de psychologue clinicien
Soulignons que nous restons pour le patient un
psychologue supposeacute savoir Dans cette cli-
nique deacuteroutante et violente bien entendu le
cadre interne tapisseacute de connaissances speacuteci-
fiques devient opeacuterant et garant de notre pro-
fessionnalisme Nous voyons finalement agrave quel
point la speacutecialisation est en partie incontour-
nable (mais comme pour tout autre type de cli-
nique les soins psychiques aupregraves de sujets
deacutependants en fin de vie de patients psycho-
tiques de nourrissons de familles de sans-
logishellip ne srsquoimprovisent pas drsquoavantage) sans
nous faire perdre de vue le socle de formation
commun qui nous reacuteunit et met en exergue la
speacutecificiteacute du Psychologue qui se caracteacuterise
bien par son orientation vers lrsquoeacutecoute qui prend
sens eacutecoute drsquoune parole drsquoun trajet drsquoune
rupture dans la continuiteacute discours drsquoun sujet
agent de son propre destin
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Oncologie meacutedicale Hocircpital Saint-Louis
J ai commenceacute agrave travailler agrave lhocircpital
comme psychologue en oncologie agrave la fin
des anneacutees 80
Le contexte eacutetait diffeacuterent de maintenant
Deux choses mavaient beaucoup marqueacutee et
interpelleacutee
- le manque de prise en charge de la douleur
- lattitude qui consiste agrave cacher la maladie et
sa graviteacute aux patients
La douleur neacutetait pas une cible de laction theacute-
rapeutique elle avait une valeur diagnostique
supposeacutee sameacuteliorer avec les traitements de
la maladie sans une attention particuliegravere agrave son
traitement (1)
Le meacutedecin eacutetait perccedilu comme deacutetenteur dune
veacuteriteacute qui faisait loi
Voilagrave quelques propos quil neacutetait pas rare
dentendre de la part du meacutedecin au patient
Faites-moi confiance ne pensez agrave rien la chi-
miotheacuterapie cest mon problegraveme vous pensez
agrave gueacuterir on aura toujours une moleacutecule pour
vous soigner on va se battre
Au deacutecegraves du patient on pouvait entendre il
est mort mais en reacutemission
Et le meacutedecin sadressant agrave moi ne parlez
pas de la mort aux patients vous savez on a
deacutejagrave vireacute une psychologue
Plusieurs eacuteveacutenements vont faire eacutevoluer la meacute-
decine et son discours dans la prise en charge
du patient
Agrave la fin du XXegraveme siegravecle lOrganisation Mon-
diale de la Santeacute (circulaire du 19-1-1994) a
deacutefini comme prioriteacute la lutte contre la dou-
leur
La creacuteation des eacutequipes anti-douleur sera un
eacuteveacutenement important ainsi que la recherche de
nouveaux antalgiques Lrsquoeacutevolution de cette
prise en charge va se reacutepandre en canceacuterolo-
gie et dans la meacutedecine en geacuteneacuteral
Les premiers Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Ligue
contre le Cancer ont donneacute la parole aux pa-
tients il y a eu une demande de psychologues
dans les services pour une prise en compte de
la deacutetresse psychique
Le Plan Cancer en 2006 va donner des direc-
tives qui reacuteglementent aujourdhui la consulta-
tion dannonce et les soins de supports
La psycho-oncologie neacutee aux Eacutetats-Unis arrive
aussi en Europe et cest en 1994 quest creacuteeacutee
la Socieacuteteacute Franccedilaise de Psycho-Oncologie
(SFPO)
Son but est de deacutevelopper des outils des meacute-
thodes pour deacutepister et ainsi traiter preacutecoce-
ment les risques des difficulteacutes psychologiques
Elle sinscrit dans une approche bio-psycho-
sociale de la maladie canceacutereuse La speacutecifici-
teacute nest pas la prise en compte de la subjectivi-
teacute du patient mais ladaptation de celui-ci aux
diffeacuterentes situations traverseacutees pendant la ma-
ladie Cette discipline qui eacutetudie les attitudes
psychologiques et eacutemotionnelles survenant
pendant la maladie canceacutereuse pourrait laisser
croire quil y a des reacuteactions speacutecifiques agrave cette
maladie Son approche est de plus en plus co-
gnitivo-adaptative avec protocoles reacutefeacuterentiels
deacutemarche qualiteacute
Dans le champ de la psycho-oncologie on
trouve le terme de psycho-oncologue
Ce mot est utiliseacute de faccedilon un peu anarchique
on y trouve le psychologue le psychiatre mais
aussi dautres professionnels intervenant au-
pregraves des malades et de leur famille Ce nest
pas parce que nous avons quelques connais-
sances en oncologie que nous pouvons utiliser
ladjectif oncologue
Ce terme peut ecirctre source de confusion il ne
deacutefinit pas notre speacutecificiteacute et il me paraicirct aussi
seacutegreacutegatif dune pathologie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 20
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Cest pour cela que nous voulons garder le
terme de psychologue clinicien
Dans ce mot il y a la dimension clinique cest agrave
dire lobservation du patient agrave son chevet
Mon travail consiste agrave accompagner soutenir
le patient dans ce parcours difficile quil entre-
prend avec la maladie
Le cancer produit un remaniement identitaire
pour le sujet ce qui neacutecessite de lui offrir un
espace de parole
Cest la psychanalyse qui de mon point de vue
offre les meilleurs outils pour travailler la cli-
nique du reacuteel Cest avec notre propre parcours
analytique que nous psychologues pouvons
bien prendre en compte la dimension incons-
ciente propre agrave lhumain
Je ne me situe donc pas dans le champ de la
psycho-oncologie au discours trop normatif
Notre clinique dans un service dhospitalisation
Cest agrave tout stade deacutevolution de la maladie
quun travail theacuterapeutique peut se mettre en
place avec le psychologue
On a beaucoup parleacute du dispositif dannonce
annonce du diagnostic visant agrave assurer agrave la fois
une bonne administration du soin et son
humanisation
Ces consultations cherchent agrave atteacutenuer limpact
traumatique Il est proposeacute au patient de ren-
contrer un psychologue
Il nest pas rare que le patient me dise ils ne
se rendent pas compte il y a trop dinforma-
tions drsquoun seul coup je nai pas encore reacutealiseacute
que jai un cancer et on me parle de perruque
pour la perte des cheveux de dieacuteteacuteticien de
psy mais je nen suis pas lagrave moi
Pour les patients cest la deacutecouverte brutale du
diagnostic puis le choc des traitements Nous
savons que le temps psychique nest pas le
temps meacutedical et que dans cette clinique cest
au cas par cas que nous pouvons intervenir ce
qui est traumatique pour un patient ne lest pas
pour un autre
Un patient me disait reacutecemment le cancer
menvahit je ne pense quagrave ccedila je ne peux plus
lire regarder un film il est omnipreacutesent Voilagrave
une description du reacuteel
Il sagit de faire entendre agrave une eacutequipe meacutedi-
cale tourneacutee plus vers la maladie que vers le
malade et ce dans une organisation tregraves tech-
nique et de plus en plus sophistiqueacutee la neacuteces-
siteacute de prendre en compte la subjectiviteacute du pa-
tient dans un espace qui en paraicirct deacutepourvu
La demande de leacutequipe vis agrave vis du psy peut
correspondre agrave une demande de compliance
au traitement que le patient refuse elle sou-
haite aussi souvent que le psy reacuteconforte le pa-
tient agrave qui on a donneacute une mauvaise nouvelle
Comme dit Jeacuterocircme Alric dans son article Qui
eacutecoute quoi la sphegravere psychologique de-
vient une fonction constituante de la personne
globale au mecircme titre que la sphegravere digestive
dermatologique et dont il faut soccuper (2)
Au psychologue de faire valoir aupregraves du pa-
tient lintention de lui donner une place pour
entendre et faire entendre sa position subjec-
tive
Souvent je suis interpelleacutee par les soignants
dans des situations de deacutetresse par exemple
quand les antalgiques se reacutevegravelent inefficaces
ou sont refuseacutes Dans les entretiens les pa-
tients deacuteplient leur histoire leur roman fami-
lial La douleur physique se mecircle agrave la souf-
france psychique
Une patiente qui avait un cancer du sein avec
des meacutetastases osseuses me disait jai mal
lagrave en me montrant sa poitrine
Je lui avais demandeacute si elle en avait parleacute au
meacutedecin
Elle me reacutepondit en me regardant droit dans les
yeux cette douleur-lagrave le meacutedecin ne peut
pas me la soigner cest lhistoire avec mon ma-
ri qui me fait mal Celui-ci lavait quitteacutee et elle
se retrouvait seule avec son jeune fils
En quelques mots elle avait situeacute ce qui la fai-
sait souffrir au-delagrave des localisations meacutetasta-
tiques Elle savait faire la diffeacuterence entre le
physique et ce qui venait lagrave sajouter agrave sa
propre histoire douloureuse
Comme dit Clavreul dans Lordre meacutedical la
souffrance renvoie le sujet qui leacuteprouve agrave son
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 21
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
fantasme cest-agrave-dire agrave sa propre histoire et au
discours quil peut tenir sur son histoire Il y a
un seul discours qui se tienne sur la souf-
france et cest celui de la personne qui
leacuteprouve (3)
Un patient encore reacutecemment me disait ne pas
vouloir devenir grabataire comme son pegravere
Il seacutetait occupeacute de lui depuis son plus jeune
acircge il poussait la chaise roulante dans ses deacute-
placements il eacutetait sa beacutequille Mon patient ar-
riveacute en fin de vie voudra jusqursquoau bout se deacute-
placer aux toilettes et rester indeacutependant dans
les gestes du quotidien
Aux soignants qui ne comprenaient pas pour-
quoi il sobstinait agrave vouloir faire tout seul des
gestes devenus si difficiles il a fallu dire sans
reacuteveacuteler le pourquoi combien ceacutetait important
pour le patient de garder cette indeacutependance
Ceacutetait pour lui sa digniteacute sa liberteacute sa volonteacute
Je voudrais mettre laccent sur la singulariteacute de
ces rencontres avec des patients deacutejagrave tregraves gra-
vement atteints et qui degraves le premier entretien
se saisissent de cette possibiliteacute de parole
Il y a la douleur et lautre versant de la souf-
france langoisse
Monsieur O est un patient algeacuterien qui a eacuteteacute
opeacutereacute drsquoun cancer du poumon Avant linterven-
tion chirurgicale il se sentait precirct agrave affronter
cette eacutepreuve cest apregraves quil a senti ses
forces diminuer Jai changeacute je ne suis plus le
mecircme quavant en fait je crois que je nai pas
accepteacute lopeacuteration Il dit regretter il aurait preacute-
feacutereacute vivre avec son cancer il serait mort avec
Ce qui semble bouleverser ce patient nest pas
tant la maladie en elle-mecircme que ses conseacute-
quences Avec ce bout de corps quon lui a reti-
reacute cest aussi toute une part de lui qui semble
partie
Leacutepreuve du cancer entraicircne toujours une at-
teinte de linteacutegriteacute corporelle
Ce corps qui est traiteacute par le meacutedical de faccedilon
organique biologique revient souvent dans le
discours des patients Ce qui eacutemerge cest
lhorreur des amputations des meacutetastases qui
se reacutepandent agrave linteacuterieur du corps mais aussi
ce qui se donne agrave voir agrave toucher Un corps en-
dommageacute que le patient a du mal agrave reconnaicirctre
comme le sien qui se bouche qui enfle qui
eacutetouffe
Le corps peut devenir un objet agrave controcircler per-
seacutecuteur qui nest plus investi de deacutesir Cette
parole descriptive du corps peut prendre toute
la place dans le discours du patient avant que
quelque chose du subjectif nrsquoapparaisse
Cest dans un deuxiegraveme temps que Monsieur
O apregraves avoir exprimeacute limpossibiliteacute daccep-
ter cette perte anatomique ndash une partie du pou-
mon ndash pourra associer sur dautres pertes qui
viennent sintriquer entre passeacute et preacutesent
Langoisse de mort est tregraves freacutequente dans
cette pathologie dans les entretiens il ne sagit
pas de viser directement ce que nous pensons
ecirctre lobjet de cette angoisse mais de soutenir
dans la conversation les deacutetours de cette indi-
cible
Lintervention aupregraves de la famille nest pas
rare
Monsieur L 63 ans a un cancer de la vessie et
il est deacutecrit par leacutequipe soignante comme tregraves
exigeant et peacutenible Je deacutecide daller me preacute-
senter
Il me fait une description assez preacutecise de sa
maladie qui a deacutebuteacute il y a quelques mois Je
lui demande ce quil pense lui de tout ccedila Il me
regarde attend plusieurs secondes et me reacute-
vegravele que sa femme a une maladie heacutematolo-
gique agrave surveiller et quil sinquiegravete beaucoup
pour elle Ils nont pas denfant Il ajoute que
dans le service on ne lui fait pas grand-chose
son eacutetat ne srsquoameacuteliore pas quil serait mieux
avec sa femme En mecircme temps elle ne peut
pas soccuper de lui agrave la maison Il part dans
un SSR (soins de suite et de reacuteeacuteducation)
Quelques semaines apregraves il revient dans le
service et il demande agrave me voir Il va ecirctre tregraves
direct On vient de lui parler de son mauvais
pronostic agrave court terme il veut que je le ren-
contre avec sa femme Il me dit Elle deacuteprime
Si je meurs elle va se laisser mourir Pour moi
cest insupportable Effectivement sa femme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 22
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
est tregraves deacuteprimeacutee affaiblie par sa maladie
mais elle accepte de voir son geacuteneacuteraliste et
prendre un traitement On lui trouve un heacuteber-
gement agrave la Maison des Parents pour lui eacuteviter
lrsquohocirctel Elle sera sur place pour voir son mari
elle pourra eacutechanger avec les familles heacuteber-
geacutees agrave la Maison des Parents Petit agrave petit elle
tisse des liens Son mari deacutecline rapidement je
la vois dans la chambre elle me parle de lui
des choses quils aimaient faire ensemble Elle
est calme rassureacutee par la preacutesence de
lrsquoeacutequipe Apregraves la mort de son mari nous nous
sommes revues puis teacuteleacutephoneacute et rapidement
elle prend la deacutecision de deacutemeacutenager agrave Annecy
pregraves dune amie Elle aura un suivi heacutematolo-
gique lagrave-bas
Jai souvent penseacute agrave cet homme dont le dis-
cours eacutetait centreacute sur la plainte et qui a changeacute
rapidement de registre agrave partir du moment ougrave
on a pris en compte sa souffrance et soutenu
sa femme aupregraves de lui
Dans notre travail il me paraicirct important de
rendre compte aux eacutequipes de nos interven-
tions pour permettre aux soignants des eacuteclair-
cissements sur la souffrance psychologique
des patients Cela peut permettre un change-
ment de rapport soignant-patient dans des si-
tuations ougrave le patient par langoisse sous-
jacente se montre peacutenible pour lrsquoeacutequipe voire
agressif agrave son eacutegard
Toujours pour ce qui concerne la famille une
reacuteelle eacutevolution a eacuteteacute la prise en compte des
enfants du patient Degraves le diagnostic et tout le
long de la maladie une attention particuliegravere de
la part de leacutequipe permet deacuteviter les situations
dramatiques que lon rencontrait dans le pas-
seacute lorsque lenfant deacutecouvrait la graviteacute de la
maladie du parent la veille de la mort de celui-
ci sans avoir eu la possibiliteacute de sy preacuteparer et
den parler
Pour conclure je dirai que la science et la tech-
niciteacute ont beaucoup eacutevolueacute agrave lhocircpital mais quil
y a eu peu de changement du cocircteacute de la prise
en compte meacutedicale de la dimension subjective
des patients
On est passeacute dune prise en charge de la dou-
leur qui eacutetait nieacutee agrave des situations parfois de
surmeacutedicalisation La meacutedecine malgreacute ses
progregraves consideacuterables ne peut pas soulager
toute les douleurs et encore moins de faccedilon
systeacutematique et protocolaire Elle doit tenir
compte de la singulariteacute de chaque patient
De mecircme sil y a encore une vingtaine dan-
neacutees on ne donnait pas suffisamment dinfor-
mations meacutedicales sur la maladie et le devenir
du patient on est passeacute aujourdhui agrave un trop
dinformations dans loptique de dire la veacuteriteacute
au malade et de le preacuteparer sur le chemin de
sa fin de vie
Il nest pas rare que je rencontre un patient agrave
qui on a asseneacute une veacuteriteacute meacutedicale quil ne
voulait pas entendre Pour le patient il sagit de
pouvoir se deacuteprendre de ce savoir meacutedical qui
peut venir empecirccher toute penseacutee le cristalli-
ser dans une angoisse de mort et entraicircner le
sujet vers une mort psychique avant la mort
reacuteelle
Nous sommes lagrave pour partager ce temps avec
lui ce temps qui est incertain et qui permet au
sujet davoir des interrogations exprimer des
affects
Le psychologue dorientation analytique peut
apporter agrave ses eacutequipes un eacuteclairage des situa-
tions
Une collaboration avec les meacutedecins est agrave en-
courager encore faut-il que les meacutedecins puis-
sent prendre le temps et donc se deacutetacher
dune pure gestion des soins pour penser et
analyser leur pratique
1 Baszanger I 1995 Douleur et meacutedecine La
fin dun oubli Le Seuil
2 Alric J 2004 Qui eacutecoute quoi Essai de
repeacuterage de deux postures deacutecoute possible agrave
lhocircpital Eregraves in Collectif sous la direction de
Patrick Ben Soussan Le cancer approche psy-
chodynamique chez ladulte
3 Clavreul J 1978 LOrdre meacutedical Paris Le
Seuil
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 23
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des textes
officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin Page 24
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous avez man-
queacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine Page 32
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal Page 43
Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip
Quels changements pour le meacutetier de
psychologue
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 24
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin
V ingt ans se sont eacutecouleacutes depuis la creacutea-tion de Psyclihos Depuis de nombreux rapports textes officiels ont eacuteteacute diffuseacutes
qui concernent la santeacute dune maniegravere geacuteneacute-rale et plus particuliegraverement la santeacute mentale Quelle place nous psychologues avons-nous dans ces eacutecrits De fait lorsque lon interroge la bibliothegraveque des rapports publics sur le site de la Documen-tation franccedilaise sur le terme Psychologue on saperccediloit que seule une liste constitueacutee dune petite cinquantaine de reacutefeacuterences apparaicirct un peu plus toutefois que pour le terme psychiatre qui apparaicirct dans 47 rapports mais beaucoup moins que celui dinfirmier qui apparaicirct dans 121 rapports Jai choisi parmi ces textes ceux qui mont sem-bleacute les plus significatifs dune certaine image du psychologue vu par les politiques ou ladmi-nistration Je vais maintenant vous preacutesenter cette compilation dextraits dans un ordre chro-nologique Lun des premiers rapports qui cite les psycho-logues porte sur les Strateacutegies drsquoutilisation des antiretroviraux dans lrsquoinfection par le VIH en 1998 Il affirme Le soutien par les psy-chologues est lune des pratiques diverses des services hospitaliers qui meacuteritent drsquoecirctre deacuteve-loppeacutees La mecircme anneacutee un rapport sur les Uniteacutes agrave encadrement eacuteducatif renforceacute et leur ap-port agrave lheacutebergement des mineurs deacutelin-quants fait agrave la demande de lInspection Geacuteneacute-rale des Affaires Sociales preacuteconise Afin de preacutevenir lusure des eacutequipes et aussi de leur apporter une certaine capaciteacute de recul il faut mettre en place des proceacutedures de soutien au moment des crises et de supervision dans les-quelles le recours au psychologue simpose En 2000 un rapport au Premier ministre Lionel Jospin Pour une nouvelle politique publique
daide aux victimes fait le constat suivant Pour le reacuteseau de lINAVEM (Feacutedeacuteration natio-nale daide aux victimes et de meacutediation qui comprend 150 associations) les emplois de psychologue repreacutesentent seulement 9 des emplois salarieacutes Cet aspect pourtant fonda-mental de laide aux victimes nest pas suffi-samment deacuteveloppeacute En 1994 lintervention dun psychologue con-cernait environ un quart des associations daide aux victimes Le rapport propose la creacuteation de centres daide pour enfant-adolescent et adulte com-prenant obligatoirement des psychologues cli-niciens Des groupes de parole et deacutecoute pour en-fants victimes seraient animeacutes par des psycho-logues scolaires ayant suivi une formation speacute-cifique ou des psychologues cliniciens exteacute-rieurs Le projet dinteacutegration de psychologues clini-ciens dans les milieux scolaires semble alors ecirctre au cœur de la nouvelle politique publique daide aux victimes Une politique ambitieuse sur le papier hellip Les suites don-neacutees agrave ce rapport ont eacuteteacute la creacuteation dun numeacutero national daide aux victimes en 2001
Pourtant en 2000 on sinteacuteresse beaucoup agrave nous le rapport du Haut comiteacute de la santeacute pu-blique sur la souffrance psychique des ado-lescents et des jeunes adultes consacre un paragraphe au rocircle du psychologue dans le chapitre intituleacute Lrsquoinstitution scolaire Bilan en CM2 Il est eacutecrit
Le recours agrave un psychologue dans le milieu scolaire est pratiquement limiteacute aux tests drsquoorientation Lrsquoabsence de psychologue dans le secondaire semble faire partie de cette mau-vaise image de la psychiatrie qui persiste dans le grand public Le regard drsquoun psychologue exteacuterieur agrave lrsquoeacuteta-blissement dans des reacuteunions reacuteguliegraveres de synthegravese et de concertation peut ecirctre preacutecieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 25
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Ces contacts auraient de plus lrsquoavantage de relier les prises en charge de situations diffi-ciles entre lrsquointeacuterieur et lrsquoexteacuterieur des eacutetablisse-ments et de faire se connaicirctre les profession-nels des diffeacuterentes structures Ainsi 20 des adolescents pensent avoir be-soin de consulter un psychologue mais 137 disent avoir renonceacute du fait de difficulteacutes finan-ciegraveres Toujours en 2000 au colloque sur lrsquoEnfance maltraiteacutee la Ministre deacuteleacutegueacutee agrave lrsquoEnfance et agrave la famille reacuteclame Un psy pour chaque enfant Dans son second rapport Claire Brisset la deacute-fenseure des enfants sinteacuteresse eacutegalement au rocircle des psychologues et agrave leur formation Pour elle les psychologues souffrent depuis longtemps dun problegraveme didentiteacute du fait dune reconnaissance tardive de leur profes-sion et de lexistence de plusieurs types de psychologues recruteacutes agrave des niveaux deacutetudes diffeacuterents en reacutefeacuterence aux psychologues sco-laires et conseillers dorientation- psycho-logues La Deacutefenseure des Enfants propose d -Institutionnaliser les psychotheacuterapies den-fants et dadolescents par des psychologues cliniciens sur prescription du psychiatre et rembourseacutees par la Seacutecuriteacute sociale De la mecircme faccedilon quun meacutedecin speacutecialiste prescrit des seacuteances de kineacutesitheacuterapie qui sont alors rembourseacutees par la seacutecuriteacute sociale un psychiatre aussi bien dans le public que dans le priveacute doit pouvoir prescrire des theacuterapies effectueacutees par un psychologue clinicien Cette mesure qui se pratique deacutejagrave dans cer-tains pays europeacuteens comme lAllemagne ne peut ecirctre mise en place quaux conditions sui-vantes - quune formation homogegravene de psychologie clinique sanctionneacutee par un diplocircme unique soit organiseacutee - que cette formation permette dacceacuteder agrave un nouveau statut de psychologue clinicien recon-nu par lensemble des administrations concer-neacutees - que cette formation soit agrave la fois theacuteorique et pratique Cette reacuteforme permettrait de - mieux utiliser les compeacutetences des nombreux psychologues qualifieacutes actuellement deacutepour-vus dun emploi agrave temps plein ou contraints faute de poste dexercer dautres meacutetiers
Dans cette hypothegravese le psychiatre aurait le rocircle danimateur de leacutequipe soignante et de supervision des psychotheacuterapies meneacutees par les psychologues cliniciens En outre un tel scheacutema devrait pouvoir sappli-quer non seulement dans les structures pu-bliques mais aussi dans le secteur libeacuteral Les psychologues cliniciens peu nombreux en libeacute-ral pourraient alors sinstaller en cabinet (au mecircme titre que les infirmiegraveres ou les masseurs kineacutesitheacuterapeutes) En ce deacutebut des anneacutees 2000 les politiques sinteacuteressent beaucoup aux questions relatives agrave la santeacute en juillet 2000 Martine Aubry alors ministre de lemploi et de la solidariteacute confie aux Drs Piel et Roelandt une mission de reacute-flexion et de prospective dans le domaine de la santeacute mentale qui donnera lieu un an plus tard agrave un rapport intituleacute De la psychiatrie vers la santeacute mentale Un rapport dans lequel on parle peu des psychologues si ce nest pour dire que leur formation est insuffisante et quun internat en psychologie est neacutecessaire ce dont on reparlera beaucoup dans les anneacutees sui-vantes En aoucirct 2001 Psyclihos travaille sur le 1
er rap-
port deacutetape du groupe de travail de la DGS sur leacutevolution des meacutetiers en santeacute mentale Des psychologues de toute la France choqueacutes et inquiets se reacuteunissent au sein du Collectif Na-tional des Psychologues de la FPH Les me-sures preacuteconiseacutees par le 2
egraveme rapport deacutetape
paru en janvier 2002 mettent le feu aux poudres Pour rappel le rapport insiste sur le deacuteveloppement des reacuteseaux de santeacute la mise en place de proceacutedures de protocoleshellip Et surtout il preacutevoit des niveaux dintervention hieacuterarchiseacutes avec des intervenants de 1
egravere
ligne des professionnels de soins primaires et des intervenants speacutecialiseacutes et deacutejagrave des glisse-ments de compeacutetences vers les infirmiers et les meacutedecins geacuteneacuteralistes Il est agrave nouveau question de transfert de com-peacutetences en 2003 avec le rapport Berland sur la deacutemographie des professions de santeacute au titre eacuteloquent Coopeacuteration des professions de santeacute le transfert de tacircches et de compeacute-tences Le chapitre qui nous concerne sinti-tule Un transfert de compeacutetences en psychia-trie difficile agrave organiser Le Pr Berland eacutecrit Les auditions que jai pu mener lors de la mis-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
sion deacutemographie des professions de santeacute et les eacutechanges que jai pu avoir avec les psy-chiatres ont reacuteveacuteleacute de reacuteelles difficulteacutes agrave envi-sager le transfert de compeacutetences dans le champ de cette speacutecialiteacute En effet si certains professionnels considegraverent souhaitable la mise en perspective de collaborations organiseacutees avec les psychologues cliniciens dautres la trouvent inutile ou non souhaitablehellip Il est neacute-cessaire denvisager la part de lactiviteacute aujour-dhui assureacutee par les psychiatres qui doit ecirctre confieacutee en toute collaboration agrave des psychologues praticiens formeacutes agrave la fois par les faculteacutes de psychologie et les faculteacutes de meacutedecine pour construire ce nouveau meacutetier qui reacutepond agrave un besoin clairement identifieacute Au mecircme moment est diffuseacute le rapport Cleacutery Melun intituleacute Plan dactions pour le deacutevelop-pement de la psychiatrie et la promotion de la santeacute mentale qui reprend les principales pro-positions des rapports preacuteceacutedents par ex con-cernant la reacuteorganisation des soins en psychia-trie Concernant la formation des psycho-logues Ces formations sont tregraves diverses sui-vant les universiteacutes certaines eacutetant speacuteciali-seacutees dans la psychanalyse ce qui aboutit agrave des formations mono reacutefeacuterenceacutees Il en va de mecircme des stages qui sont souvent difficiles agrave trouver et ne permettent pas toujours dassister aux entretiens avec les patients Enfin dans un contexte de plus en plus seacutelectif les examens theacuteoriques et formels prennent le pas sur lac-complissement dun stage et lobtention dune formation clinique Il poursuit Les psychologues souhaitent eux-mecircmes faire progresser cette situation Ils se sont doteacutes dun code de deacuteontologie qui pose des prin-cipes clairs notamment au regard de leur for-mationhellipAvec un stage qui doit correspondre agrave leacutequivalent dun internat en psychologie dont la dureacutee ne devrait pas ecirctre infeacuterieure agrave 2 se-mestres et dont le contenu devrait faire lobjet dune validation finale Toujours en 2003 il faut un rapport eacutecrit par une psychologue pour que le terme soit citeacute 97 fois soit presque dans une page sur deux Cest le rapport de Marie de Hennezel sur Fin de vie le devoir daccompagnement Elle preacuteconise une preacutesence renforceacutee de psy-chologues dans tous les services sensibles
Pour favoriser le maintien agrave domicile des per-sonnes elle demande que lrsquoon eacutetudie la possi-biliteacute drsquoun financement drsquoun forfait de 3 agrave 5 seacuteances avec un psychologue pour un accom-pagnement de fin de vie sur le modegravele de ce qui est proposeacute dans le plan cancerElle de-mande la creacuteation dau moins un mi-temps de psychologue pour chaque service confronteacute agrave la fin de vie des patients Pour elle la Formation universitaire du psycho-logue ne le preacutepare pas neacutecessairement agrave la confrontation avec la mort drsquoautrui et son cor-tegravege drsquoangoisses et de fantasmes Elle ajoute Crsquoest la raison pour laquelle nous estimons qursquoune formation compleacutementaire personnelle (psychanalyse) ou une formation dans le cadre drsquoun DU de soins palliatifs ou drsquoun stage drsquoune semaine au moins dans une uniteacute de soins palliatifs (USP) doit lui permettre d lsquoeacutevaluer srsquoil est precirct ou non agrave travailler dans un service confronteacute agrave la mort des patients srsquoil peut accueillir sans trop drsquoangoisse celles des autres patients familles soignants Pour les psychologues de ville elle pose la question drsquoun conventionnement de la profes-sion puisque seuls les psychologues libeacuteraux inteacutegreacutes dans un reacuteseau (dans le cadre drsquoun groupement de coopeacuteration sanitaire) et reacutemu-neacutereacutes agrave la vacation sont pris en charge par lrsquoassurance maladie Elle ajoute Cela limite consideacuterablement lrsquooffre drsquoaide psychologique agrave domicile En mars 2005 la Commission Peacuterinataliteacute en-fants et adolescents recommande le renforcement des eacutequipes de materniteacute en psychologues dans le but de Mieux prendre en charge la santeacute mentale et les troubles psy-chiatriques de la megravere etou du couple En 2005 le rapport Santeacute justice et dange-rositeacutes pour une meilleure preacutevention de la reacutecidive eacutevoque les formations initiale et conti-nue des psychologues dans le domaine meacutedico-leacutegal qui devraient ecirctre renforceacutees afin de mieux prendre en consideacuteration les probleacutema-tiques relatives agrave la dangerositeacute psychiatrique dans la pratique clinique et la mise en oeuvre de lrsquoexpertise peacutenale Le rapporteur revendique la possibiliteacute pour les psychologues drsquoassurer le suivi du condam-neacute et demande laugmentation des effectifs des services peacutenitentiaires drsquoinsertion et de proba-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion notamment par lrsquointeacutegration de psycho-logues au sein des eacutequipes Dans son rapport sur Le fonctionnement des services dinformation et dorientation lIns-pection geacuteneacuterale de lEducation nationale re-met largement en question le statut des con-seillers dorientation-psychologues Des divergences de vues interviennent sou-vent entre ceux qui sont issus de la psycholo-gie essentiellement clinique et les autres qursquoils aient eacutetudieacute la psychologie du travail ou la so-ciologie lrsquoeacuteconomie le droit lrsquohistoire ou la phi-losophie Lrsquoouverture drsquoesprit des seconds aux questions du marcheacute de lrsquoemploi ou mecircme aux perspec-tives de deacutecentralisation est freacutequente Les psychologues cliniciens semblent plus autocen-treacutes individualistes voulant se concentrer sur leur pratique au jour le jour de conseil et drsquoac-compagnement des individus deacutesireux drsquoap-porter des solutions au cas par cas(sic ) Lrsquoeacutevolution de la profession qui a gagneacute le titre de psychologue en 1991 va dans le sens drsquoune eacutemancipation tout agrave fait eacutetonnante Les COPsy constituent un cas singulier drsquoexercice libeacuteral au sein mecircme de la fonction publique Ils nrsquoont en fait de comptes agrave rendre agrave personne lrsquoautori-teacute des directeurs est purement formelle (hellip) Et comble les conseillers ne sont pas inspecteacutes() Le rapport propose de scinder le corps des COPsy avec dun cocircteacute des psychologues de lenseignement secondaire et de lautre des conseillers dinformation et dorientation Les missions des psychologues de leacuteducation seraient centreacutees sur le deacutepistage et lexamen des eacutelegraveves pour lesquels on craint une inadap-tation la preacutevention des deacutecrochages la preacute-vention des conduites addictives en lien avec le personnel meacutedico-social leacutecoute un premier accompagnement dans les cas de profondes souffrances psychologiques le lien avec les services exteacuterieurs hellip Dans les eacutetablissements les psychologues complegraveteraient et renforceraient leacutequipe eacutedu-cative et meacutedico-sociale Pour lIGEN il est manifeste que les conseil-lers drsquoorientation-psychologues nrsquoont ni le temps ni les compeacutetences ni les moyens de faire face seuls agrave lrsquoensemble des missions que les usagers (au sens large du terme) pour-raient attendre drsquoeux Si beaucoup de responsables ministeacuteriels re-
grettent fortement lappellation de psycho-logues du statut de 1991 il faut reconnaicirctre que peu de personnels souhaitent labrogation totale de cette appellation y compris parmi ceux qui ont eacuteteacute recruteacutes avant 1990 sans avoir fait deacutetudes initiales de psychologie Il convient aussi de signaler quil y a unanimiteacute pour consideacuterer quon ne peut pas faire de psy-chologie clinique ou theacuterapeutique dans les eacutetablissements Tous pensent mecircme que cest impossible En fait en 1991 il aurait fallu creacuteer par la loi un statut de conseiller qui existe dans dautres pays Pour autant les auteurs concluent que la ques-tion de labrogation du statut de psychologue a eacuteteacute poseacutee mais ils ont consideacutereacute que ce neacutetait pas opportun dans le contexte actuel Mais le recrutement doit ecirctre diversifieacute Il srsquoagit de mettre un terme au monopole des li-cencieacutes en psychologie qui de lrsquoavis de la grande majoriteacute de nos interlocuteurs et notam-ment de lrsquoencadrement des services drsquoorienta-tion et des formateurs nrsquoest nullement imposeacute par lrsquoexercice des missions et a reacuteduit la diver-siteacute intellectuelle qui caracteacuterisait le corps avant 1991 En outre le poids excessif des li-cencieacutes en psychologie a favoriseacute des attitudes drsquoindividualisme et de repli au deacutetriment des autres facettes de la profession Dans le rapport fait au nom de la mission dinformation sur la famille et les droits de lenfant en 2006 Valeacuterie Peacutecresse et Patrick Bloche recommandent de faire prendre en charge par lassurance-maladie les consulta-tions des mineurs et de leur famille aupregraves de psychologues sur prescription meacutedicale afin dameacuteliorer la prise en charge des enfants et de leur famille On reparle encore de formation des psycho-logues en 2006 avec le rapport de la mission parlementaire de Jean-Paul GARRAUD sur la dangerositeacute Il comprend un chapitre impor-tant relatif agrave lexpertise psychologique et au psychologue expert on eacutetait agrave leacutepoque en pleine affaire dOutreau Il souligne encore une fois lrsquoheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute des diplocircmes tous les psy-chologues ne suivent pas une formation en psychopathologie clinique et peuvent avoir des formations theacuteoriques tregraves diverses Il conviendrait de redeacutefinir le champ drsquointerven-tion des psychologues fondeacute sur leur qualifica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 28
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion professionnelle et drsquoenvisager les possibili-teacutes de lrsquoarticulation de leurs expertises avec celles effectueacutees par les psychiatres Organiser une confeacuterence de consensus sur lrsquoexpertise psychologique afin de reacutefleacutechir sur les objectifs et les limites des expertises psy-chologiques lrsquoidentiteacute lrsquoeacutethique et la deacuteontolo-gie des experts leur solitude ainsi que sur les modaliteacutes pertinentes de reacutealisation des exper-tises et de leur eacutevaluation Ceci est resteacute un vœu pieux agrave ce jour hellip Il revendique Une plus grande qualification des formations des psychologues Outre une maturiteacute professionnelle une forma-tion particuliegravere est neacutecessaire (connaissance des diffeacuterents types et champs drsquoexpertise des proceacutedures judiciaires aspects criminolo-giques deacuteontologiqueshellip) Cette speacutecialisation pourrait deacutecouler drsquoun cur-sus post-universitaire en psychologie clinique et pathologique agrave lrsquoexemple des DU sur la pratique de lrsquoexpertise psychologique ou la psy-chologie leacutegale (Universiteacute Lille Aix-Marseille Rouen Poitiershellip) En 2007 les psychologues sont les stars du rapport de lIGAS consacreacute agrave Gestion et utili-sation des ressources humaines dans 6 eacuteta-blissements de santeacute speacutecialiseacutes en psy-chiatrie le terme psychologue apparaicirct 224 fois Les reacuteveacutelations sont lagrave encore fracassantes Il faut adapter le statut et le cursus de forma-tion et de carriegravere des psychologues pour mieux utiliser leurs compeacutetences et les inteacutegrer dans les eacutequipes Les problegravemes de peacutenurie de psychiatres doivent ecirctre anticipeacutes par une seacuterie de mesures - augmenter les attributions des psychologues en leur permettant dans certains cas deffec-tuer des actes jusque lagrave reacuteserveacutes aux meacutede-cins - ouvrir une formation de manager de structure psychiatrique agrave des cadres intermeacutediaires type cadre supeacuterieur de santeacute psychologue cadre socio-eacuteducatif Il serait possible douvrir le concours de cadre supeacuterieur de santeacute agrave dautres professions soi-gnantes psychologues eacuteducateurs speacuteciali-seacutes assistants de service social Les psychologues peuvent-ils remplacer les psychiatres et agrave quel prix Ce nest pas seulement parce quon manque
de psychiatres cest aussi parce que les psy-chologues repreacutesentent une certaine tradition de la psychiatrie europeacuteenne pas uniquement arc-bouteacutee sur les traitements chimiotheacuterapeu-tiques Cest aussi parce quils possegravedent en principe des compeacutetences permettant de deacuteve-lopper des aspects tregraves importants en psychia-trie - eacutevaluation des capaciteacutes cognitives et mise au point de programmes de reacutehabilitation - psychotheacuterapies de diverses natures eacutegale-ment de soutien dans les cas de traitement meacute-dicamenteux lourd - supervision de groupes de soignants pour eacuteviter les pheacutenomegravenes de chroniciteacute de mal-traitance - encadrement deacutequipes notamment de pro-fessionnels dhorizons divers Il est clair quil serait eacutegalement inteacuteressant de pouvoir leur confier des accueils de 1
egravere ligne
degraves lors que nombre de demandes de consul-tation signifient plutocirct une souffrance psychique quune pathologie psychiatrique La question de savoir sils devraient avoir le droit de prescrire ou de renouveler des pres-criptions au long cours meacuterite decirctre poseacutee Une telle eacutevolution neacutecessiterait une speacutecialisa-tion apregraves le diplocircme geacuteneacuteral de psychologue peut-ecirctre linstauration de ce que daucuns ap-pellent un internat et cette fois commun avec linternat en psychiatrie En attendant davoir notre ordonnancier si tant est que nous le souhaitions les tacircches speacuteci-fiques en psychiatrie pour les psychologues tout ce qui sapparente au bilan agrave leacutevaluation aux psychotheacuterapies de diverses obeacutediences Voilagrave ce que pensent les politiques et les admi-nistratifs de notre meacutetier mais ccedila nest pas la reacutealiteacute de notre meacutetier Tout dabord quelques chiffres sur la deacutemogra-phie des psychologues Nous sommes de plus en plus nombreux de 5500 eacutequivalents temps plein en 1997 agrave 11500 en 2009 preuve que notre rocircle est de plus en plus reconnu par les eacutetablissements Il reste encore beaucoup agrave faire en clinique priveacutee ougrave ils ne sont que 350 ETP La preacutecariteacute est tou-jours le lot de notre profession Il y a deux fois plus de psychologues agrave temps partiel que dans les autres emplois non meacutedicaux 40 de psy-chologues sont agrave temps partiel dans le public plus des trois quarts dans le priveacute soit le
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double La profession est tregraves feacuteminiseacutee avec 8 femmes sur 10 psychologues elles ont en moyenne cinq ans de moins que leurs con-fregraveres masculins la moyenne dacircge eacutetant de 42 ans Les femmes de moins de 40 ans repreacute-sentent 38 des effectifs nationaux La densiteacute nationale des psychologues est de 37 psychologues pour 100000 habitants soit un psychologue pour 2700 Par comparaison celle des psychiatres est de 22 pour 100000 habitants La densiteacute en psychologues libeacuteraux est de 7 Concernant les secteurs dactiviteacute 87 des psychologues sont salarieacutes Un tiers exerce dans un eacutetablissement de santeacute principalement du secteur public ougrave 7 sur 10 sont employeacutes agrave plein temps Lexercice en libeacuteral ne concerne que 8 des effectifs Comment les psychologues perccediloivent-ils leur meacutetier Dana Castro et Marie Santiago ont publieacute dans Le Journal des psychologues ndeg 233 deacutec 2005- janv 2006 les Reacutesultats dune enquecircte na-tionale sur Evolution des repreacutesentations et construction identitaire du meacutetier de psy-chologue Les donneacutees ont eacuteteacute recueillies agrave partir de 93 questionnaires suite agrave une enquecircte nationale lanceacutee par le Journal des Psychologues aupregraves de ses lecteurs fin 2004 Les reacutesultats montrent que les psychologues ont une image assez steacutereacuteotypeacutee de leur meacute-tier qui ne se modifie pas significativement ni au cours des eacutetudes ni agrave lentreacutee dans la vie professionnelle Au deacutebut de leurs eacutetudes 50 des reacutepondants perccediloivent le psychologue comme un speacutecialiste de laide et de leacutecoute Pour 27 cest un meacutetier qui sexerce en solitaire 30 disent ne pas en avoir une repreacutesentation preacute-cise La repreacutesentation de la profession eacutevolue pro-gressivement Apregraves quelques anneacutees dexer-cice le psychologue perccediloit davantage sa fonc-tion certes encore comme un meacutetier daide et deacutecoute pour la moitieacute dentre eux mais qui sexerce en eacutequipe pour 21 selon des moda-liteacutes et avec des outils speacutecifiques au premier rang desquels lentretien et lexamen psycholo-giques pour 18 des reacutepondants La repreacutesentation du meacutetier se modifie-t-elle au
cours du cursus universitaire - Non pour 22 des reacutepondants pour lesquels elle reste identique tout au long du parcours - Oui pour 36 pour lesquels elle se modifie gracircce aux enseignements theacuteoriques en lien avec la clinique et la psychopathologie - Encore oui pour 34 pour lesquels elle se transforme gracircce aux stages et au contact des professionnels Dune maniegravere geacuteneacuterale les psychologues comptent sur eux-mecircmes et leurs compeacutetences en matiegravere dexpeacuterience dapprentissage sur le tas de solidariteacute et de travail en eacutequipe plutocirct que sur la qualification qui elle valorise les titres les connaissances formelles la revendi-cation de lautonomie et les distinctions statu-taires Seul 1 des reacutepondants eacutevoque les no-tions dorganisation du travail en terme de sta-tut professionnel de cadre A de reacutemuneacuteration de formation ou de titre proteacutegeacute de psycho-logue Autant dire quil reste beaucoup de tra-vail pour avoir une repreacutesentation profession-nelle qui puisse ecirctre partageacutee tant par les psy-chologues que par leurs partenaires profes-sionnels ougrave compeacutetence personnelle et qualifi-cation professionnelle sont indispensables Pourtant 78 des reacutepondants deacutecrivent des difficulteacutes au sein de leur institution Un sur 5 estime que ses collegravegues ne connaissent pas son meacutetier et quils en ont une image neacutegative qui est veacutecue comme deacutevalorisante 17 se sentent isoleacutes dans les eacutequipes avec lesquelles ils travaillent Une eacutetude plus reacutecente puisquelle date de 2010 vient compleacuteter la preacuteceacutedente il sagit de celle de Elise Marchetti Claude Lafrogne et Sandrine Schoenenberger eacutegalement publieacutee dans le Journal des psychologues ndeg 283 deacutec 2010- janv 2011 et qui sintitule Que pensent-ils de nous Etude des repreacutesentations so-ciales du psychologue Que pensent les psychologues deux-mecircmes Ils eacutevoquent lobjet de leur travail la psycheacute le cadre de leur activiteacute (cadre theacuteorique pra-tique eacutethique) et le contenu mecircme de leur tra-vail agrave savoir leacutevaluation et laccompagnement Chez les professionnels du meacutedico-social nos collegravegues deux repreacutesentations saffrontent Les eacuteducateurs techniques et les reacuteeacuteducateurs (peacutedicure podologue masseur kineacutesitheacutera-peute ergotheacuterapeute psychomotricien ortho-
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phoniste orthoptiste ou dieacuteteacuteticien) ont une vi-sion neacutegative le psychologue se confond avec le psychanalyste le charlatan en lien eacutetroit avec la psychiatrie la folie Les personnels administratifs et les eacuteducateurs ont une vision plus positive et concregraveteet sont plus attacheacutes au cadre cadre de travail du psychologue lui-mecircme mais aussi la contribu-tion quil peut apporter dans le cadre dun tra-vail pluridisciplinaire Quant aux sujets de la population geacuteneacuterale on doit distinguer ceux qui ont deacutejagrave eu recours au psychologue et ceux qui nont jamais consulteacute Ceux qui nont jamais consulteacute ont un discours plutocirct positif mais abstrait centreacute sur la dualiteacute problegraveme-reacutesolution (motifs-beacuteneacutefices) Les autres qui sont plus jeunes et plutocirct des femmes cherchent agrave deacutefinir ce quest un psy-chologue avec une vision plus concregravete de notre activiteacute de nos meacutethodes et une eacutevoca-tion de la sphegravere affective et du veacutecu person-nel Toutefois les sujets ayant deacutejagrave consulteacute un psychologue ont tendance agrave le confondre avec le speacutecialiste meacutedical cest-agrave-dire le psy-chiatre Dans Transformation de la psychiatrie et pratiques des psychologues LASAR Labora-toire danalyse socio-anthropologique du risque Universiteacute de Caen 2002 sous la direction dAnne Golse Le discours dAnne Golse sociologue est plus optimiste Elle eacutecrit La profession de psycho-logue se visibilise de plus en plus que ce soit dans la prise en charge des malades mentaux ou de la souffrance psychique On le voit dans la croissance deacutemographique certes encore modeste de cette profession mais cela sappreacute-hende eacutegalement dans la maniegravere dont les textes administratifs mentionnent (psychiatres psychologues) ou bien (psychiatres ou psycho-logues) Mais cette eacutemergence nouvelle dune certaine pariteacute dans les textes vient eacutegalement reconnaicirctre que de plus en plus de demandes sont directement adresseacutees au psychologue et marque lindividualisation de cette profession agrave coteacute de celles de psychiatres ou dinfirmiers Dans un rapport au Conseil national de lOrdre des meacutedecins en 2001 sur le suivi du malade mental il est dit que les psychologues pren-nent de plus en plus de place dans le monde de la psychiatrie relayant ou mecircme remplaccedilant les psychiatres dont le nombre va en diminuant
tregraves seacuterieusement Toutefois les psychologues ne sont pas satis-faits de leur place au sein de la psychiatrie pu-blique ni personnel meacutedical ni personnel pa-rameacutedical ils elles ont du mal agrave trouver leur place dans lunivers hospitalier marqueacute par lexistence de ce partage clair Le psychologue agrave la fois dedans et dehors eacuteprouve une ab-sence de lien avec linstitution et pour certains un sentiment dinexistence institutionnelle chro-nique Le psychologue nest pas dans le soin mecircme sil contribue aux soins ce qui renvoie agrave sa neacutecessaire place dexteacuterioriteacute et agrave la trans-versaliteacute de sa fonction Comme leacutecrivait Co-lette Chiland en 1983 le statut du psychologue clinicien est une position intermeacutediaire et sin-guliegravere qui le maintien dans un espace pro-fessionnel eacutetriqueacute Certains ressentent de lamertume agrave ecirctre reacuteduits au rocircle de psychotheacute-rapeutes etou estiment ne pas ecirctre reconnus comme des professionnels agrave part entiegravere ils se qualifient de sous-psychiatres quand deacutepen-dants du psychiatre ils ne peuvent directement recevoir les patients qui font appel agrave eux Cette revendication des psychologues est devenue pour certains un carcan qui limite le champ de leur intervention Les psychologues sont lobjet dambivalence Ils peuvent ecirctre consideacutereacutes comme la profession montante en raison de la chute de la deacutemographie des psychiatres et de la de-mande sociale qui leur est adresseacutee les psy-chologues pourraient ecirctre en 1
egravere ligne pour
supplanter ces absences mais la mise en cause de leur statut et de leur formation par le reacutecent statut de psychotheacuterapeute les fragilise Pour conclure je citerai Marc Turpyn au col-loque Le psychologue clinicien le singulier et le collectif La profession de psychologue est-elle un symptocircme de lrsquoinstitution hospita-liegravere Un certain nombre de signes permet depuis longtemps de le penser son identiteacute indeacutefinis-sable sa situation drsquoexception dans un en-semble institutionnel globalement meacutedical son inexistence dans les instances de lrsquohocircpital les oublis reacuteguliers dont elle fait lrsquoobjet dans les textes sa position institutionnelle hors hieacuterar-chie les interrogations reacutecurrentes sur ses sta-tuts lrsquoincompreacutehension de ses outils de travail par les administrations etc Ce qui est nouveau ce sont les nombreuses
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tentatives pour mettre un terme agrave cette position symptomatique volonteacute de faire entrer la pro-fession dans le champ meacutedical fiches meacutetier deacutefinition de compeacutetences introduction de speacute-cialiteacutes preacute-identifieacutees en articulation avec les neurosciences et les approches comportemen-tales circulaire drsquoapplication visant au controcircle ou agrave la disparition des activiteacutes de FIR etc Nrsquooublions pas que la preacutecariteacute entretenue des psychologues le deacutesir de reconnaissance la peur ndash comme lrsquoa montreacute reacutecemment la mise en application du deacutecret sur le titre de psycho-theacuterapeute ndash poussent aussi agrave la normalisation Normaliser la profession serait sans doute la reacuteduire agrave lrsquoombre drsquoelle-mecircme
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Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebut
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine
M AI 1999 PROPOSITION DrsquoAMENDEMENT
PAR B ACCOYER
Devant lrsquoabsence de reacuteglementation autour de lrsquoexercice de la psychotheacuterapie et dans un contexte de lutte contre les deacuterives sectaires sous couvert de psychotheacuterapie un premier amendement est proposeacute par Bernard Accoyer meacutedecin et deacuteputeacute Ce premier amendement porte sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute il est proposeacute le 4 mai 1999 agrave lrsquooccasion de lrsquoexamen du projet de loi relatif agrave la Couverture maladie universelle (CMU) OCTOBRE 1999 PROPOSITION DE LOI PAR
BACCOYER
Lrsquoamendement preacuteceacutedent ayant eacuteteacute refuseacute BAccoyer deacutepose le 13 octobre 1999 la pre-miegravere proposition de loi (ndeg 1844) visant agrave reacute-glementer le titre de psychotheacuterapeute Lrsquounique article preacutecise Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est strictement reacuteserveacute drsquoune part aux titulaires du diplocircme de docteur en meacutedecine qualifieacute en psychiatrie et drsquoautre part aux titulaires drsquoun diplocircme de troisiegraveme cycle en psychologie Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve deux professions de la santeacute mentale sont formeacutees par les universiteacutes franccedilaises les psycho-logues et les meacutedecins psychiatres Les condi-tions daccegraves et dutilisation de ces titres sont eacutetroitement encadreacutees par la loi Pourtant il existe un grave vide juridique concernant lexercice de la psychotheacuterapie La profession de psychotheacuterapeute nest en effet agrave ce jour toujours pas deacutefinie par le code de la santeacute publique Ainsi de trop nombreuses per-sonnes insuffisamment qualifieacutees voire non qualifieacutees se deacuteclarent et sinstituent psycho-theacuterapeutes en toute impuniteacute faisant courir les plus grands dangers agrave des personnes qui
par deacutefinition sont vulneacuterables et risquent de voir leur deacutetresse et leur pathologie aggra-veacutees MARS 2000 est enregistreacutee agrave la Preacutesidence de lAssembleacutee nationale sous le ndeg 2288 une pro-position de loi relative agrave lexercice de la profes-sion de psychotheacuterapeute par les deacuteputeacutes MM Jean-Michel Marchand Andreacute Aschieri Mme Marie-Heacutelegravene Aubert MM Yves Cochet et Noeumll Mamegraverehellip AVRIL 2000 PROPOSITION DE LOI DE
BACCOYER
26 avril 2000 nouvelle proposition de loi de BAccoyer Loi ndeg2342 relative agrave la prescription et agrave la conduite des psychotheacuterapies Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve En labsence de disposition du code de la santeacute publique concernant lusage des psychotheacutera-pies quiconque le souhaite peut actuellement visser sa plaque de psychotheacuterapeute et preacutetendre soigner (hellip) Ainsi le rapport de la mission interministeacuterielle de lutte contre les sectes remis en feacutevrier 2000 au Premier mi-nistre signale que certaines techniques psy-chotheacuterapiques sont devenues un outil au ser-vice de linfiltration sectaire et il suggegravere au se-creacutetariat dEtat agrave la Santeacute de cadrer ces pra-tiques Cest la raison pour laquelle javais dores et deacutejagrave deacuteposeacute le 13 octobre 1999 avec quatre-vingt-un collegravegues une proposition de loi ndeg1844 visant agrave reacuteserver lusage du titre de psychotheacuterapeute agrave des personnes titulaires de diplocircmes universitaires() Dans ce con-texte il convient deacutesormais de consideacuterer les psychotheacuterapies comme un veacuteritable traite-ment A ce titre cest leur prescription et leurs applications qui apparaissent comme devant ecirctre reacuteserveacutees agrave des professionnels deacuteten-teurs de diplocircmes universitaires attestant dune formation institutionnelle garantie dune compeacutetence theacuteorique pouvant ecirctre doubleacutee
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dune expeacuterience pratique et dun travail sur soi (hellip) Cependant certains professionnels bien que non-psychiatres ou non-psychologues cliniciens preacutesentent de solides connaissances et une expeacuterience de la patho-logie mentale et du fonctionnement psychique Il convient donc quun jury composeacute duniversi-taires et de professionnels soit habiliteacute agrave vali-der leurs compeacutetences et agrave autoriser lexercice des psychotheacuterapies agrave ceux qui pratiquent deacute-jagrave depuis plus de cinq anneacutees agrave compter de promulgation de la preacutesente loi
PROPOSITION DE LOI Article unique Il est inseacutereacute apregraves larticle L 360 du code de la santeacute publique un article L 360-1 ainsi reacutedigeacute Les psychotheacuterapies sont des traitements meacutedico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes meacutedecins quali-fieacutes en psychiatrie et psychologues clini-ciens Les professionnels qui dispensent des psychotheacuterapies depuis plus de cinq ans agrave la date de promulgation de la preacute-sente loi pourront poursuivre cette activiteacute theacuterapeutique apregraves eacutevaluation de leurs connaissances et pratiques par un jury composeacute duniversitaires et de profession-nels dont la composition est fixeacutee par deacute-cret en Conseil dEtat
OCTOBRE 2003 AMENDEMENT AU PROJET DE LOI SUR LE CODE DE LA SANTEacute PUBLIC B AC-
COYER
8 Octobre 2003 agrave lrsquoAssembleacutee nationale B Ac-coyer deacutepose un amendement ndeg71 Les psychotheacuterapies sont des traitements meacute-dico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes en psychiatrie de psychologues cliniciens et meacutedecins ayant sui-vis les formations requises Crsquoest la 3eme version (ndeg336) qui est adopteacutee agrave lrsquounanimiteacute le 8 octobre 2003 par lrsquoAssembleacutee Nationale Les psychotheacuterapies constituent des outils theacuterapeutiques utiliseacutes dans le traite-ment des troubles mentaux Les diffeacuterentes ca-teacutegories de psychotheacuterapie sont fixeacutees par deacute-cret du ministre chargeacute de la Santeacute Leur mise en œuvre ne peut relever que de meacutedecins
psychiatres ou de meacutedecins et psychologues ayant les qualifications professionnelles re-quises fixeacute par ce mecircme deacutecret Lrsquoagence Na-tionale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute apporte son concours agrave lrsquoeacutelaboration de ces conditions (hellip) On ne parle plus ici de lrsquousage drsquoun titre de psy-chotheacuterapeute mais drsquoune deacutefinition de la psy-chotheacuterapie JANVIER 2004 AMENDEMENT ACCOYER ANNU-
LANT LE PREacuteCEacuteDENT
Le 19 janvier 2004 lrsquoamendement Accoyer de-venu entre temps amendement 363 About-Matteacutei annulant le preacuteceacutedent est voteacute par le Seacutenat en ces termes Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacute-serveacute aux professionnels inscrits au registre national de psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dis-penseacutes de lrsquoinscription les titulaires drsquoun di-plocircme de docteur en meacutedecine les psycho-logues titulaires drsquoun diplocircme drsquoeacutetat et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations Les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent article sont fixeacutees par deacutecret Ici les psychanalystes reacuteguliegraverement enregis-treacutes dans les annuaires de leurs associations font leur apparition dans la liste des personnes habiliteacutees agrave user du titre de psychotheacuterapeute
AVRIL 2004 AMENDEMENT DUBERNARD
8 avril 2004 est voteacute agrave lrsquoAssembleacutee nationale lrsquoamendement devenu depuis amendement 344 preacutesenteacute par Jean-Marie Dubernard rap-porteur de la commission des affaires cultu-relles familiales et sociales
POLITIQUE DE SANTE PUBLIQUE (Nordm 1364)
(DEUXIEME LECTURE)
Amendement Nordm 344 preacutesenteacute par M Jean-Michel Dubernard rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles familiales et sociales Article 18 quater La conduite des psychotheacuterapies neacuteces-site soit une formation theacuteorique et pra-tique en psychopathologie clinique soit une formation reconnue par les associa-tions de psychanalystes (hellip) Lrsquousage du
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titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au registre national des psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dispen-seacutes de lrsquoinscription sur la liste viseacutee agrave lrsquoali-neacutea preacuteceacutedent les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psy-chologue dans des conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 portant diverses dispositions drsquoordre social nordm85-772 du 25 juillet 1985 et les psychanalystes reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans les annuaires de leurs asso-ciations
Dans lrsquoexposeacute sommaire on retrouve pour conduire des psychotheacuterapies il est neacutecessaire drsquoavoir suivi une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie La condition de lrsquoinscrip-tion sur le registre national est maintenue (hellip)Lrsquoamendement continue agrave preacutevoir que les titu-laires drsquoun diplocircme de meacutedecine les psycho-logues et les psychanalystes sont dispenseacutes de lrsquoenregistrement Ces professionnels devront satisfaire agrave lrsquoobligation de formation mention-neacutee au premier alineacutea de lrsquoarticle
9 AOUT 2004 LOI SUR LE TITRE DE PSYCHOTHEacute-
RAPEUTE ARTICLE 52
Le 28 juillet 2004 a eu lieu la reacuteunion de la commission mixte paritaire qui reacutevise lrsquoamende-ment qui est examineacute en seacuteances publiques par lrsquoAssembleacutee Nationale et le Seacutenat le 30 juil-let 2004 et devient le 09 aoucirct 2004 la loi ndeg2004-806 lrsquoarticle 52 relative agrave la politique de santeacute publique Sa parution est dans le JO ndeg185 du 11 aoucirct 2004 page 14277 texte ndeg 4 Dans cette loi larticle 18 quater revu par la commission mixte a eacuteteacute inteacutegralement repris et devient larticle 52 de la dite Loi
Article 52 Lusage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes Linscription est enregistreacutee sur une liste dresseacutee par le repreacutesentant de lEtat dans le deacutepartement de leur reacutesidence profes-sionnelle Elle est tenue agrave jour mise agrave la disposition du public et publieacutee reacuteguliegravere-ment Cette liste mentionne les formations suivies par le professionnel En cas de transfert de la reacutesidence professionnelle dans un autre deacutepartement une nouvelle
inscription est obligatoire La mecircme obli-gation simpose aux personnes qui apregraves deux ans dinterruption veulent agrave nou-veau faire usage du titre de psychotheacutera-peute Linscription sur la liste viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent est de droit pour les titulaires dun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par larticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions dordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations Un deacutecret en Conseil dEtat preacutecise les modaliteacutes dapplication du preacutesent article et les conditions de formation theacuteoriques et pratiques en psychopathologie clinique que doivent remplir les personnes viseacutees aux deuxiegraveme et troisiegraveme alineacuteas
Cet article introduit comme condition de lrsquousage du titre une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie clinique alors qursquoil stipule dans le mecircme temps que lrsquoinscription est de droit pour certains professionnels ce qui pose-ra beaucoup de problegravemes pour lrsquoeacutecriture des projets de deacutecret 2005-2009 AVANT-PROJET DrsquoAPPLICATION DE
LA LOI
Les concertations avec les professionnels con-cerneacutes par lrsquoeacutecriture drsquoun avant-projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute deacutebutent en 2005 Beaucoup de versions vont voir le jour et susciter de vives reacuteactions des professionnels Le ministegravere reacuteunit les organi-sations professionnelles agrave plusieurs reprises pour leur soumettre ces projets Quelques exemples des diffeacuterentes versions de lrsquoavant-projet de deacutecret de loi Version de lrsquoavant projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute 10 janvier 2006
Art1 Lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute neacutecessite une deacutemarche volontaire de la part des professionnels pratiquant les psychotheacuterapies Inscription sur une liste deacutepartementale (hellip) Art2 Lrsquoinscription sur la liste deacutepartemen-
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tale est subordonneacutee pour les professionnels viseacutes au 3
egraveme ali-
neacutea lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique lrsquoattestation de lrsquoobtention du diplocircme de docteur en meacutedecine ou de lrsquoun des di-plocircme viseacutes au deacutecret ndeg 90-255 du 22 mars 1990 modifieacute (liste des diplocircmes permettant de faire usage professionnel du titre de psychologue) ou de lrsquoinscrip-tion agrave un annuaire drsquoassociations de psy-chanalystes pour les autres professionnels
Lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique Le cas eacutecheacuteant lrsquoattestation de lrsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profession reacute-glementeacutee dans le champ sanitaire et so-cial Une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le do-maine de la pratique de la psychotheacutera-pie parmi les quatre approches sui-vantes analytique systeacutemique cognitivo-comportementaliste inteacutegrative La deacuteclaration sur lrsquohonneur mentionne notamment lrsquointituleacute et la date drsquoobtention du diplocircme la dureacutee de la formation le nom et les coordonneacutees de lrsquoorganisme de formation public ou priveacute qui a deacutelivreacute le diplocircme (hellip) Art8 Le cahier des charges susviseacute deacutefi-nit les modaliteacutes de la formation en psy-chopathologie clinique laquelle est drsquoun niveau master Il vise agrave permettre au pro-fessionnel souhaitant user du titre de psy-chotheacuterapeute drsquoacqueacuterir Une connaissance du fonctionnement psychique Une capaciteacute de discrimination de base des situations pathologiques en santeacute mentale Une connaissance de la diversiteacute des theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie Une connaissance des 4 principales ap-proches de psychotheacuterapie vali-deacutees scientifiquement (analytique systeacute-mique cognitivo-comportementaliste in-teacutegrative) (hellip)
Il est eacutevoqueacute un niveau master pas de men-
tion drsquoune formation universitaire la loi ne parle que drsquoune formation agrave la psychopathologie cli-nique et stipule ce que seraient les approches psychotheacuterapiques valables scientifiquement ce qui nrsquoest pas sans questionner Titre ouvert aux deacutetenteurs drsquoun diplocircme relatif agrave une pro-fession reacuteglementeacutee dans les champs sani-taires et sociaux ne correspond pas aux preacute requis de la formation en psychopathologie cli-nique Par la suite le descriptif des diffeacuterentes ap-proches de psychotheacuterapie disparaicirct au profit drsquoune connaissance des principales ap-proches utiliseacutees en psychotheacuterapie sans preacute-cision Est indiqueacute le nombre drsquoheures de for-mation theacuteorique (150 heures dans une ver-sion 500 dans une autrehellip) et de stage pra-tique Est stipuleacute que la formation en psychopa-thologie clinique peut ecirctre confieacutee agrave lrsquoUniversiteacute ou agrave des organismes passant convention avec lrsquoUniversiteacute Pour les professionnels inscrits de droit on retrouve les docteurs en meacutedecine quelles que soient leurs speacutecialiteacutes les psycho-logues quelle que soit leur formation et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement inscrits dans un an-nuaire drsquoassociation de psychanalystes ce qui nrsquoest pas un titre proteacutegeacute On exige par ailleurs de ces mecircmes professionnels une formation compleacutementaire en psychopathologie viseacutee agrave lrsquoalineacutea 4 de lrsquoarticle 52 ce qui posera pro-blegraveme certaines professions pouvant faire usage du titre de psychotheacuterapeute de droit doivent dans le mecircme texte de loi attester drsquoune formation compleacutementaire Pour tous les professionnels le cas eacutecheacuteant une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le domaine de la pratique de psychotheacuterapie une attestation drsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profes-sion reacuteglementeacutee par le code de la santeacute pu-blique ou le code de la famille et de lrsquoaction so-ciale Le cahier des charges deacutefinit les modaliteacutes de la formation en psychopathologie clinique pour acqueacuterir ou valider une connaissance des fonctionnements et des processus psychiques une connaissance des critegraveres de discerne-ment des grandes pathologies psychiatriques une connaissance des diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie une connais-sance des principales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie
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Le Ministegravere de la Santeacute ne parvient pas agrave faire aboutir lrsquoeacutecriture de deacutecrets drsquoapplication de-vant faire face aux contestations des diffeacuterents professionnels Au printemps 2008 le Ministegravere de la Santeacute deacutecide drsquoarrecircter un des projets de deacutecret drsquoap-plication de lrsquoarticle 52 soumis au CNESER (Conseil National de lrsquoEnseignement Supeacuterieur et de la Recherche) le 16 juin 2008 Dans la note de preacutesentation on retrouve il ne srsquoagit pas de creacuteer une nouvelle profession ni drsquoen-cadrer la formation et la pratique de la psycho-theacuterapie mais de preacuteciser les conditions dans lesquelles il peut ecirctre fait usage de ce titre Il y est exigeacute pour tous professionnels drsquoavoir valideacute une formation theacuteorique de 400 heures (cest-agrave-dire infeacuterieure au total de la formation en psychopathologie clinique drsquoun Master de Psychologie clinique) et un stage pratique de 5 mois Possibiliteacutes de dispenses partielles de forma-tion selon les cateacutegories professionnelles con-cerneacutees (meacutedecins meacutedecins psychiatres psy-chologues psychanalystes) 18 MARS 2009 PROJET DE LOI PORTANT REacute-
FORME DE LrsquoHOcircPITAL ET RELATIF AUX PATIENTS
Agrave LA SANTEacute ET AUX TERRITOIRES
23 JUILLET 2009 ARTICLE 91 DE LA LOI HPST
Lrsquoarticle 91 de la loi HPST du 21 juillet 2009 opegravere une modification de lrsquoarticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 pour reacutesoudre les difficulteacutes rencontreacutees agrave eacutecrire un deacutecret drsquoapplication Il modifie lrsquoarticle 52 portant sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 52 de la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 modifieacute par lrsquoarticle 91 de la loi ndeg 2009
-879 du 21 juillet 2009 Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes [hellip] Un deacutecret en Conseil drsquoEacutetat preacutecise les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent ar-ticle et les conditions de formation theacuteo-rique et pratique en psychopathologie cli-nique que doivent remplir lrsquoensemble des professionnels souhaitant srsquoinscrire au registre national des psychotheacuterapeutes Il deacutefinit les conditions dans lesquelles les ministres chargeacutes de la santeacute et de lrsquoen-
seignement supeacuterieur agreacuteent les eacutetablis-sements autoriseacutes agrave deacutelivrer cette forma-tion Lrsquoaccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires drsquoun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit drsquoexercer la meacutedecine en France ou drsquoun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-chologie ou la psychanalyse Le deacutecret en Conseil drsquoEacutetat deacutefinit les conditions dans lesquelles les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions drsquoordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations peuvent beacute-neacuteficier drsquoune dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique [hellip] Le deacutecret en Conseil drsquoEtat preacutecise eacutegale-ment les dispositions transitoires dont pourront beacuteneacuteficier les professionnels jus-tifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacuterapie agrave la date de publication du deacutecret
Il nrsquoy a plus de notion de professionnels inscrits de droit la formation en psychopatho-logie clinique est exigible de tous et lrsquoaccegraves agrave cette formation requiert un niveau de diplocircme eacuteleveacute titre de docteur en meacutedecine master de psychologie ou de psychanalyse Y sont tou-jours mentionneacutes les psychanalystes reacuteguliegrave-rement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations 20 MAI 2010 DEacuteCRET DrsquoAPPLICATION RELATIF Agrave LrsquoUSAGE DU TITRE DE PSYCHOTHEacuteRAPEUTE (CF
ANNEXE)
Le 20 mai 2010 paraicirct le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute publieacute au JO ndeg0117 du 22 mai 2010 (deacutecret ndeg 2010-534) Ce deacutecret deacutefinit les critegraveres de formation en psychopathologie clinique exigeacutee fixe les con-ditions drsquoagreacutement des eacutetablissements de for-mation preacutecise les dispenses partielles ou to-tales de formation dont peuvent beacuteneacuteficier les meacutedecins psychologues et psychanalystes et enfin arrecircte les dispositions transitoires appli-cables aux psychotheacuterapeutes en exercice agrave
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la date de publication du deacutecret Il nrsquoy est tou-jours pas fait mention de formation agrave la pra-tique psychotheacuterapique Il preacutecise une condition de diplocircme minimal pour avoir accegraves agrave cette formation Elle est reacute-serveacutee aux personnes titulaires drsquoun doctorat de meacutedecine ou drsquoun master ayant pour men-tion ou pour speacutecialiteacute la psychologie ou la psy-chanalyse Les psychiatres sont exempteacutes de formation compleacutementaire Les meacutedecins non psy-chiatres seront contraints agrave une formation com-pleacutementaire On retrouve la notion de psychologue clinicien qui ne correspond pas agrave un titre proteacutegeacute comme tel ni un parcours de formation identifieacutee Les psychologues clini-ciens nrsquoont pas de dispense totale et devront se soumettre agrave une formation theacuteorique et pra-tique compleacutementaire La formation theacuteorique comprend 400 heures drsquoenseignement pour acqueacuterir ou valider des connaissances relatives au deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques aux critegraveres de discernement des grandes patholo-gies psychiatriques aux diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie aux princi-pales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie Le stage est drsquoune dureacutee minimale de cinq mois Les professionnels justifiant drsquoau moins 5 ans de pratique de la psychotheacuterapie peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale apregraves avis de la commission reacutegionale drsquoinscription Le deacutecret ne preacutecise pas la cateacutegorie professionnelle nrsquoappartenant agrave aucune des cateacutegories preacuteceacutedentes que lrsquoon voit en effet apparaicirctre dans lrsquoannexe du deacutecret Le deacutecret a renforceacute le niveau exigeacute pour agreacuteer les eacutetablissements de formation Les psychologues notamment par le biais de leurs organisations professionnelles et syndi-cales ont deacuteposeacute un recours juridique contre le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute le 12 juillet 2010 Ils contestaient notam-ment que lrsquoon exige drsquoeux des formations com-pleacutementaires qui sont deacutejagrave incluses dans leur formation initiale Le recours a eacuteteacute examineacute le mercredi 21 sep-tembre 2011 Le rapporteur public a conclu au rejet de lrsquoensemble des requecirctes porteacute contre le deacutecret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 arrecirct du Conseil drsquoEtat du 27 octobre 2011 Ce deacutecret
est jugeacute conforme agrave lrsquoarticle 52 de la loi ndeg2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique modifieacutee par la loi ndeg2011-940 du 10 aoucirct 2011-art 47 (V) Les organisations professionnelles de psychologues sont en pourparler et eacutevoquent une modification de lrsquoannexe du deacutecret qui pourrait ecirctre en reacuteeacutecri-ture pour mettre agrave pariteacute psychologues et psy-chiatres pour la dispense totale de lrsquoenseigne-ment theacuteorique et du stage srsquoil a eacuteteacute effectueacute pendant les eacutetudes Fin 2011 les bureaux concerneacutes au Ministegravere de la Santeacute et au Ministegravere de lrsquoenseignement Supeacuterieur et de la Recherche examinent un projet de modification de lrsquoannexe du deacutecret du 20 mai 2010 afin de preacutevoir une dispense de formation theacuteorique compleacutementaire et de stage pour les titulaires du titre de psychologue ayant accompli le stage professionnel lieacute agrave lrsquoob-tention de ce titre dans les conditions preacutevues agrave lrsquoart4 du deacutecret du 20 mai 2010 Une dis-pense de toute formation theacuteorique mais reacuteali-sation drsquoun stage de 2 mois dans les conditions de lrsquoart4 du deacutecret pour les titulaires du titre de psychologue dont le stage professionnel lieacute agrave lrsquoobtention de ce titre nrsquoa pas eacuteteacute reacutealiseacute dans les conditions de cet article (voir sites des orga-nisations professionnelles et syndicales)
CONCLUSION
Au deacutecours de ce long cheminement pour lrsquoeacutela-borer une loi portant sur lrsquousage du titre de psy-chotheacuterapeute on remarquera lrsquoimpasse faite sur la formation agrave la pratique de la psychotheacute-rapie elle-mecircme Ce titre pourra ecirctre en effet deacutelivreacute agrave des personnes dont on nrsquoaura pas exi-geacute de formation agrave la psychotheacuterapie mais une formation agrave la psychopathologie clinique Une confusion suppleacutementaire dans la visibiliteacute des professions et leurs missions est introduite par le biais drsquoun nouveau titre de psychotheacuterapeute Il est agrave souligner que concernant les profes-sions reacuteglementeacutees dont font partie les psy-chologues la pratique de la psychotheacuterapie peut sous reacuteserve drsquoune formation compleacute-mentaire personnelle faire partie de leur activi-teacute Le titre de psychotheacuterapeute ne leur est donc pas neacutecessaire (Cf argumentaires sur le site des organisations professionnelles et syn-dicales)
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Decret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 1 Linscription sur le registre national des psy-chotheacuterapeutes mentionneacute agrave larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee est subordon-neacutee agrave la validation dune formation en psy-chopathologie clinique de 400 heures mini-mum et dun stage pratique dune dureacutee mi-nimale correspondant agrave cinq mois effectueacute
dans les conditions preacutevues agrave larticle 4Laccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires dun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit dexercer la meacutedecine en France ou dun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-
chologie ou la psychanalyse Article 2 Par deacuterogation aux dispositions de larticle preacuteceacutedent les professionnels mentionneacutes au cinquiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi preacuteciteacutee sont dispenseacutes en tout ou partie de la formation et du stage dans les conditions
preacutevues par lannexe 1 du preacutesent deacutecret Article 3 La formation mentionneacutee agrave larticle 1er vise agrave permettre aux professionnels souhaitant user du titre de psychotheacuterapeute dacqueacuterir
et de valider des connaissances relatives 1deg Aux deacuteveloppement fonctionnement et
processus psychiques 2deg Aux critegraveres de
discernement des grandes pathologies psy-
chiatriques 3deg Aux diffeacuterentes theacuteories se
rapportant agrave la psychopathologie 4deg Aux
principales approches utiliseacutees en psycho-
theacuterapie Article 4 Le stage pratique mentionneacute agrave larticle 1er seffectue agrave temps plein ou agrave temps partiel de faccedilon continue ou par peacuteriodes fraction-
neacuteesIl est accompli dans un eacutetablissement
public ou priveacute deacutetenant lautorisation men-tionneacutee agrave larticle L 6122-1 du code de la santeacute publique ou agrave larticle L 313-1-1 du code de laction sociale et des familles Toutefois le site du stage ne peut ecirctre le
lieu de travail de la personne en formationLe stage est placeacute sous la responsabiliteacute conjointe dun membre de leacutequipe de for-mation dun eacutetablissement agreacuteeacute en appli-
cation des articles 10 et 15 et dun profes-sionnel de leacutetablissement mentionneacute au
deuxiegraveme alineacutea maicirctre de stageIl donne
lieu agrave un rapport sur lexpeacuterience profes-sionnelle acquise soutenu devant les res-ponsables du stage et un responsable de la
formation de leacutetablissement agreacuteeacuteLe
stage est valideacute par le responsable de la
formation Article 5 Le contenu de la formation theacuteorique et pra-tique mentionneacutee agrave larticle 1er les critegraveres et modaliteacutes de son eacutevaluation ainsi que les objectifs du stage sont deacutefinis par un cahier des charges pris par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur et publieacute au Journal officiel
de la Reacutepublique franccedilaise Article 6 Leacutetablissement de formation sassure au moment de linscription que le candidat jus-tifie de lun des diplocircmes ou titres de forma-tion mentionneacutes au quatriegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 ou dun di-plocircme ou titre de formation reconnu eacutequiva-lent dans un autre Etat membre de lUnion europeacuteenne ou un autre Etat partie agrave lac-
cord sur lEspace eacuteconomique europeacuteen CHAPITRE II LE REGISTRE NATIONAL DES
PSYCHOTHERAPEUTES Article 7 ― Linscription sur la liste deacutepartementale
mentionneacutee au deuxiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 est effectueacutee par le preacutefet du deacutepar-tement de la reacutesidence profession-
nelle principale du demandeurElle
est gratuite Elle doit avoir eacuteteacute effec-tueacutee avant toute utilisation du titre de
psychotheacuterapeuteDans le cas ougrave le
professionnel exerce dans plusieurs sites en tant que psychotheacuterapeute il est tenu de le deacuteclarer et de mention-ner les diffeacuterentes adresses de ses
lieux dexerciceEn cas de change-
ment de situation professionnelle le professionnel en informe les services
du preacutefet - La demande est adresseacutee au directeur geacute-
neacuteral de lagence reacutegionale de santeacute
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dans le ressort duquel se situe la reacute-sidence professionnelle du deman-deur Celui-ci deacutelivre un accuseacute de reacuteception dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute apregraves reacuteception de lensemble des piegraveces justificatives mentionneacutees agrave larticle 8 et assure linstruction pour le compte du preacutefet Il fait connaicirctre agrave ce dernier son avis sur la demande dinscription dans le deacutelai de 45
joursLe silence gardeacute par lautoriteacute
preacutefectorale agrave lexpiration dun deacutelai de deux mois agrave compter de la reacutecep-tion du dossier complet vaut deacutecision
de rejet de la demande - Lensemble des listes deacutepartementales
constitue le registre national des psy-
chotheacuterapeutes Article 8 I ― En vue de leur inscription sur la liste deacutepartementale les professionnels fournis-
sent 1deg La copie dune piegravece didentiteacute 2deg Lattestation de lobtention du titre de for-mation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute publique ou du diplocircme de
niveau master mentionneacute agrave larticle 6 3deg
Lattestation de la formation en psychopa-thologie clinique mentionneacutee agrave larticle 1er agrave lexception des professionnels beacuteneacuteficiant
dune dispense totale 4deg Le cas eacutecheacuteant
lattestation denregistrement pour les pro-fessions et titres reacuteglementeacutes par le code de la santeacute publique et le code de laction
sociale et des familles II - Les professionnels appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee fournissent en outre se-
lon les cas 1deg Soit lattestation de lobten-
tion du titre de formation de speacutecialiste en
psychiatrie 2deg Soit lattestation de lobten-
tion de lun des diplocircmes mentionneacutes au deacutecret du 22 mars 1990 susviseacute permettant de faire usage professionnel du titre de psy-chologue ou lautorisation obtenue en appli-cation des alineacuteas II et III de larticle 44 de
la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee 3deg Soit
lattestation de lenregistrement reacutegulier dans un annuaire dassociation de psycha-
nalystesCette attestation est eacutetablie par le
preacutesident de lassociation Elle est accom-pagneacutee dune copie de linsertion la plus reacute-cente au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise concernant lassociation et men-
tionnant son objetIII - Les modaliteacutes de
preacutesentation de la demande dinscription et notamment la composition du dossier ac-compagnant la demande sont fixeacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute publieacute au Journal officiel de la Reacutepublique fran-
ccedilaise Article 9 La liste deacutepartementale mentionne pour
chaque professionnel 1deg Son identiteacute 2deg
Son lieu dexercice principal et sil y a lieu
ses lieux dexercice secondaires 3deg Le cas
eacutecheacuteant la mention et la date dobtention des diplocircmes relatifs aux professions de santeacute mentionneacutees dans la quatriegraveme partie du code de la santeacute publique ou agrave la profes-sion de psychologue la date de lautorisa-tion obtenue en application des alineacuteas II et III de larticle 44 de la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee ou le nom de lassociation de psy-chanalystes dans lannuaire de laquelle le professionnel est reacuteguliegraverement enregistreacute
4deg Le nom de leacutetablissement de formation
ayant deacutelivreacute lattestation de formation en psychopathologie clinique ainsi que la date
de deacutelivrance de cette attestationCe docu-
ment preacutesente la liste des inscrits selon leur
profession dorigineCette liste est tenue
gratuitement agrave la disposition du public Elle est publieacutee chaque anneacutee au recueil des
actes administratifs de la preacutefecture
CHAPITRE III AGREMENT DES ETABLISSE-
MENTS DE FORMATION Article 10 ― Les eacutetablissements autoriseacutes agrave deacutelivrer
la formation preacutevue agrave larticle 1er sont agreacuteeacutes pour quatre ans par les ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves avis dune commission reacutegionale dagreacute-
ment - La commission reacutegionale dagreacutement est
composeacutee de six personnaliteacutes quali-fieacutees titulaires et de six personnaliteacutes
qualifieacutees suppleacuteantesCes person-
naliteacutes sont nommeacutees pour trois ans
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par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psy-chanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quaucune des trois cateacutegories de professionnels men-tionneacutees au cinquiegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 sus-viseacutee ne soit majoritaire au sein de la
commissionParmi ces personnali-
teacutes siegravegent deux professeurs des universiteacutes speacutecialiseacutes en psychia-
trie psychologie ou psychanalyseLe directeur geacuteneacuteral de lagence reacute-gionale de santeacute deacutesigne le preacutesident
de la commissionLe mandat des
membres de la commission est re-
nouvelable une fois Article 11 Lavis motiveacute de la commission est rendu
au regard des eacuteleacutements suivants 1deg La
conformiteacute du contenu de la formation pro-poseacutee aux conditions poseacutees aux articles
1er 2 3 4 et 5 du preacutesent deacutecret 2deg La
conformiteacute des conditions et modaliteacutes de validation de la formation theacuteorique et pra-tique preacutevues par leacutetablissement au regard des dispositions preacutevues par larrecircteacute men-
tionneacute agrave larticle 5 du preacutesent deacutecret 3deg
Lengagement de leacutetablissement dans une deacutemarche deacutevaluation de la qualiteacute de la formation dispenseacutee Il fait lobjet dun dos-sier indiquant la structure publique ou pri-veacutee de son choix agrave laquelle sera confieacutee leacutevaluation en cause ainsi que le processus deacutevaluation retenu Ce dossier preacutecise en outre le statut de leacutevaluation la meacutethode utiliseacutee les indicateurs retenus et les diffeacute-rentes phases de leacutevaluation lidentiteacute et la qualification des eacutevaluateurs ainsi que le
calendrier preacutevisionnel de leacutevaluation 4deg
La qualiteacute de leacutequipe peacutedagogique respon-sable qui est composeacutee notamment densei-gnants permanents de professionnels de santeacute ainsi que de personnes autoriseacutees agrave porter le titre de psychotheacuterapeute Cette eacutequipe est placeacutee sous lautoriteacute dun con-seil scientifique comprenant notamment un
titulaire dun titre de formation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute pu-
blique 5deg Ladeacutequation des moyens peacuteda-
gogiques par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes
anneacutees de formation 6deg La conformiteacute des
locaux en matiegravere de seacutecuriteacute et daccessi-biliteacute ainsi que leur adeacutequation par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes anneacutees de for-
mationLes eacutetablissements denseigne-
ment priveacutes doivent en outre satisfaire aux prescriptions des articles L 731-1 agrave L 731-
17 du code de leacuteducation Article 12 La personne physique ou morale juridique-ment responsable dun eacutetablissement de formation deacutesirant assurer la formation mentionneacutee agrave larticle 1er eacutetablit un dossier
de demande dagreacutementCe dossier est
adresseacute au plus tard six mois avant la date de louverture de la formation au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute dans le ressort duquel leacutetablissement a son
siegravege socialCelui-ci en accuse reacuteception
dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6
juin 2001 susviseacuteLa composition de ce
dossier est fixeacutee par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur Il comporte notamment les statuts de leacutetablissement de formation et sa capaciteacute daccueil la description des forma-tions deacutelivreacutees la description des locaux et des moyens peacutedagogiques Il preacutecise sagissant de la formation en psychopatho-logie clinique le contenu de la formation theacuteorique et pratique deacutelivreacutee le descriptif du corps enseignant (effectifs qualiteacute quali-fication) la nature des activiteacutes et de la par-ticipation agrave la recherche de leacutequipe respon-
sable de la formation Article 13 Tout dossier deacuteposeacute est transmis par le di-recteur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute au secreacutetariat de la commission dans un deacutelai dun mois agrave compter de laccuseacute de
reacuteception de la demande initialeLa com-
mission se reacuteunit sur convocation de son preacutesident et dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 8 juin 2006 susviseacute Elle rend son avis dans le deacutelai de deux mois agrave
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compter de sa saisineLe repreacutesentant de
leacutetablissement de formation est entendu par la commission reacutegionale sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de la candi-
dature ou agrave la demande de la commissionLavis est notifieacute agrave leacutetablissement qui a in-
troduit la demande Article 14 En cas davis neacutegatif et dans un deacutelai dun mois suivant sa notification le repreacutesentant de leacutetablissement de formation peut de-mander au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute de convoquer une nou-
velle reacuteunion de la commissionCelle-ci
siegravege dans une formation eacutelargie agrave len-semble de ses membres titulaires et sup-
pleacuteantsSon avis se substitue au premier
avis rendu Article 15 La deacutecision dagreacutement intervient au plus tard six mois apregraves le deacutepocirct de la demande initiale En cas de recours dans les condi-tions preacutevues agrave larticle 14 ce deacutelai est pro-
longeacute de deux moisLe silence de ladmi-
nistration agrave lexpiration de ce deacutelai vaut deacute-
cision de rejetLa suspension ou le retrait
de lagreacutement sont prononceacutes par deacutecision motiveacutee des ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves que leacutetablissement a eacuteteacute mis agrave mecircme de preacute-senter ses observations lorsque le contenu ou les modaliteacutes dorganisation de la forma-tion cessent decirctre conformes aux condi-tions preacutevues agrave larticle 11 du preacutesent deacute-
cret CHAPITRE IV DISPOSITIONS TRANSI-
TOIRES Article 16
I ― Les professionnels justifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacutera-pie agrave la date de publication du preacutesent deacutecret peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale mentionneacutee agrave larticle 7 alors mecircme quils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplocircme preacutevues aux articles 1er et 6 du preacutesent deacutecret Cette deacuterogation est accordeacutee par le preacutefet du deacutepartement de la reacutesi-dence professionnelle du demandeur apregraves avis de la commission reacutegionale dinscription Le professionnel preacutesente
cette autorisation lors de sa demande dinscription sur la liste deacutepartementale
des psychotheacuterapeutes II - La commission mentionneacutee au I est preacutesi-
deacutee par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute ou par la personne quil a reacuteguliegraverement deacutesigneacutee pour le repreacutesenter Elle comprend six person-naliteacutes qualifieacutees titulaires et six person-naliteacutes suppleacuteantes appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee et nommeacutees par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psychanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quau-cune de ces trois cateacutegories de profes-sionnels ne soit majoritaire au sein de la commission Ses membres sont nom-meacutes pour une dureacutee de trois ans renou-
velable une foisLa commission se reacuteu-
nit dans les conditions fixeacutees par le deacute-
cret du 8 juin 2006 susviseacuteLes frais de
deacuteplacement et de seacutejour de ses membres sont pris en charge dans les conditions preacutevues par la reacuteglementation
applicable aux fonctionnaires de lEtatLa commission sassure que les forma-tions preacuteceacutedemment valideacutees par le pro-fessionnel et son expeacuterience profession-nelle peuvent ecirctre admises en eacutequiva-lence de la formation minimale preacutevue agrave larticle 1er et le cas eacutecheacuteant du di-plocircme preacutevu agrave larticle 6 Elle deacutefinit si neacutecessaire la nature et la dureacutee de la formation compleacutementaire neacutecessaire agrave linscription sur le registre des psycho-
theacuterapeutesLe professionnel est en-
tendu par la commission sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de son dossier ou agrave la demande de la commis-
sion Article 17 Les professionnels qui souhaitent obtenir une autorisation dinscription sur le registre des psychotheacuterapeutes en application de larticle 16 preacutesentent dans le deacutelai dun an
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agrave compter de la publication du preacutesent deacute-cret un dossier en ce sens dans les condi-
tions preacutevues agrave larticle 7Cette demande
est accompagneacutee des piegraveces justificatives notamment administratives attestant de
lexercice de la psychotheacuterapieA la reacutecep-
tion du dossier complet il est deacutelivreacute agrave linteacuteresseacute un accuseacute de reacuteception deacutelivreacute dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute Celui-ci permet au pro-fessionnel qui utilisait preacuteceacutedemment le titre de psychotheacuterapeute de continuer agrave lutiliser
jusquagrave lintervention de la deacutecisionLe si-
lence gardeacute pendant plus de six mois sur une demande preacutesenteacutee au titre du I de lar-ticle 16 vaut deacutecision de rejet Dans les cas ougrave en application de ces dispositions il est demandeacute au candidat de justifier dune for-mation compleacutementaire celle-ci doit ecirctre effectueacutee avant le 1er janvier 2014 Si cette exigence nest pas remplie le preacutefet retire le professionnel des inscrits sur la liste deacute-
partementale des psychotheacuterapeutes Article 18 Les dispositions du preacutesent deacutecret entrent
en vigueur agrave compter du 1er juillet 2010Pour lapplication du preacutesent deacutecret agrave Saint-Pierre-et-Miquelon les compeacutetences deacutevo-lues au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute par le preacutesent deacutecret sont exerceacutees par les services chargeacutes de lad-
ministration territoriale de la santeacute Article 19 Le ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales la ministre de lenseignement supeacuterieur et de la re-cherche la ministre de la santeacute et des sports et la ministre aupregraves du ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales chargeacutee de loutre-mer sont chargeacutes chacun en ce qui le concerne de lexeacutecution du preacutesent deacutecret qui sera pu-blieacute au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise
ANNEXE NOMBRES DHEURES DE FORMATION
EN PSYCHOPATHOLOGIE CLINIQUEEXIGEacuteES DES CANDIDATS AU TITRE DE
PSYCHOTHEacuteRAPEUTE
THEgraveME de formation
PSYCHIATRES Dispense totale
MEacuteDECINS non psychiatres
PSYCHOLOGUES cliniciens
PSYCHOLOGUES non cliniciens
PSYCHANALYSTES Reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans leur annuaires
PROFESSIONNELS nappartenant agrave aucune des cateacutego-ries preacuteceacutedentes
Deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques
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Critegraveres de discernement des grandes pathologies psychiatriques
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Theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie
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Principale ap-proches utili-seacutees en psycho-theacuterapie
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Stage
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PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 43
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute CSAPA Espace Murger - Service de Psychiatrie
Adulte du Pr Jean Pierre Leacutepine Hocircpital Fernand Widal
L a preacuteoccupation des pouvoirs publics de
reacuteglementer la pratique officielle de la
psychotheacuterapie provoque des turbu-
lences dans le petit monde des psychologues
qui se targuent drsquoen effectuer sous les formes
les plus diverses et qui se voient sommeacutes de
faire la preuve de leur formation dans ce do-
maine agrave deacutefaut de faire de mecircme en ce qui
concerne leur compeacutetence ce qui par ailleurs
nrsquoest guegravere deacutemontrable
Chacun drsquoentre eux peut bien entendu invoquer
son expeacuterience ineffable ou le prestige accordeacute
agrave sa theacuteorie de reacutefeacuterence pour estimer leacutegitime
de srsquoaffranchir drsquoune telle justification tout en
ne perdant pas de vue qursquoun statut estampilleacute
par lrsquoautoriteacute administrative peut garantir la
poursuite sereine de telles activiteacutes Pour les
plus eacuteclectiques le choix drsquoune eacutecole certifiante
ressemblera agrave un mariage de raison
Crsquoest donc au prix drsquoune soumission agrave lrsquoautoriteacute
que lrsquoexercice drsquoune telle liberteacute peut espeacuterer
se perpeacutetuer Crsquoest lagrave lrsquoune des formes de la
reacutesignation peu glorieuse certes agrave laquelle on
pourrait preacutefeacuterer le discernement formulation
bien plus acceptable au regard de lrsquoestime de
soi Crsquoest ce dont semblent avoir manqueacute celui
ou celle ou ceux qui ont cru bon drsquoaller couiner
dans une oreille des plus compatissantes que
la pratique de la psychotheacuterapie devait ecirctre reacute-
serveacutee agrave des professionnels persuadeacutes de sa-
voir y faire et capables de preacutesenter des ga-
ranties plutocirct qursquoagrave des gougnafiers mecircme pas
fichus drsquoexhiber la moindre preuve convain-
cante de la leacutegitimiteacute de leurs preacutetentions Ce
qui est drsquoailleurs la reacutealiteacute Mais comment
srsquoeacutetonner drsquoune telle beacutevue si lrsquoon srsquoen rap-
porte agrave la ceacutelegravebre Loi de Murphy qui eacutenonce
que sil y a plusieurs faccedilons de faire quelque
chose et que lune delles peut aboutir agrave une
catastrophe alors quelquun la choisira
Les mecircmes qui reacuteclamaient la mise en place
drsquoune reacuteglementation officielle reacuteservant le titre
de psychotheacuterapeute agrave des professionnels de
qualiteacute ducircment formeacutes agrave cet effet sont parmi
les premiers agrave protester contre les formes don-
neacutees agrave cette derniegravere par une souveraineteacute deacute-
ficitaire dont lrsquoexercice autoritaire nous rappelle
que nous sommes destineacutes agrave nous faire ap-
prendre ce que lrsquoon sait deacutejagrave par des gens qui
nrsquoy connaissent rien Agrave lrsquoheure de la prolifeacutera-
tion des reacutefeacuterentiels et des protocoles reacuteclamer
encore un peu plus de controcircles et de veacuterifica-
tions suspicieuses ne peut que servir de via-
tique aux frileux de la subjectiviteacute qui sont
friands de contraintes rassurantes Et on ne
srsquoeacutetonnera pas de les voir se formaliser drsquoen
avoir appeleacute agrave Raminagrobis comme dans la
ceacutelegravebre fable de Jean de La Fontaine Le
chat la belette et le petit lapin
Crsquoeacutetait un chat vivant comme un deacutevot ermite
Un chat faisant la chattemite
Un saint homme de chat bien fourreacute gros et
gras
Arbitre expert sur tous les cas
Et de voir se faire croquer tout uniment secta-
teurs et protestataires tout marris drsquoavoir con-
senti agrave lrsquoincompeacutetence et la condescendance
de deacutecideurs comme on dit le sort de leurs
activiteacutes Drsquoougrave la singularisation des heacutesitants
ameacutenagements survenus qui vident du proceacute-
deacute la geacuteneacuteralisation qursquoil visait au profit de re-
connaissances professionnelles plus contrai-
gnantes encore par la judiciarisation des liber-
teacutes du mecircme tonneau Et ce qui ne peut agrave lrsquoeacutevi-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 44
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dence valoir pour tous nrsquoa que peu de chances
de valoir davantage pour chacun Ce seraient
donc des organisations professionnelles qui se
verraient deacutecerner des preacuterogatives pour les
beacuteneacuteficiaires qui auront eu la bonne ideacutee de srsquoy
glisser Cela veacuterifie tout agrave la fois la meacuteta-loi de
Cooper qui eacutenonce qursquoune prolifeacuteration de
nouvelles lois creacutee une prolifeacuteration de nou-
veaux vides juridiques et ce bon vieux pro-
verbe qui dit que le clou qui deacutepasse attire le
marteau
On savait deacutenombrer quelques centaines de
types de psychotheacuterapies pleacutethore drsquoautant
plus deacuterisoire que cette recension ne concerne
le plus souvent que des techniques psychotheacute-
rapiques certes impliqueacutees dans des disposi-
tifs agrave viseacutee theacuterapeutique mais certainement
incapables de deacutefinir la psychotheacuterapie car
comment eacutetablir un modegravele de lrsquoindeacutefinissable
Pour autant il sera difficile de deacutemontrer que la
formation certifieacutee agrave une technique psychotheacute-
rapique est assimilable agrave la performance de sa
mise en oeuvre Car qursquoen est-il vraiment dans
la reacutealiteacute de ces audacieuses pratiques Srsquoagit
-il drsquoune illusion entretenue par les theacuterapeutes
sur lrsquointeacuterecirct de leurs manœuvres Les patients
qui srsquoy exposent ne font-ils que changer de re-
gistre de repreacutesentations ou accegravedent-ils reacuteelle-
ment agrave une autre dimension de leur ecirctre Et
comment srsquoaccommodent-ils des aventures
parfois interminables dans lesquelles de telles
situations les plongent
Ces derniers qui se sont aperccedilus que le destin
commenccedilait agrave leur masser les eacutepaules srsquoils
nrsquoacceptent la perspective du changement que
par neacutecessiteacute et la neacutecessiteacute que parce que
leur sentiment drsquoexistence se trouve en deacutelica-
tesse se trouvent le plus souvent agrave la re-
cherche drsquoun sentiment perdu celui de la com-
pleacutetude Et ce sont eux qui deacutecident finalement
si leur rencontre avec un ou une psychologue
doit prendre cette tournure apregraves avoir eacutepuiseacute
tout ce qui leur avait jusque-lagrave permis drsquoy
eacutechapper Ils nrsquoont plus confiance dans la reacuteali-
teacute qui nrsquoest elle-mecircme apregraves tout qursquoun pres-
sentiment collectif Crsquoest que le patient qui se
reacutesout agrave consulter fait la preuve qursquoil a reacuteussi agrave
surmonter sa honte de devoir neacutecessiter une
telle deacutemarche ce qui deacutemontre lrsquoexistence de
la premiegravere ressource personnelle qui lui ap-
partient Si le patient neacuteglige ce qui le pousse agrave
changer alors le changement lui-mecircme est neacute-
gligeacute Il doit rencontrer une attitude telle qursquoil en
ressentira de la consideacuteration premiegravere res-
source theacuterapeutique en retour agrave la disposition
du psychotheacuterapeute
Et puis on voit tous les jours des patients aller
mieux en deacutepit de nos subtiles interventions
peut-ecirctre gracircce aux perfectibiliteacutes de celles-ci
Le patient met son talent agrave notre service mais
pour le bon deacuteroulement des choses il doit ecirctre
eacuteclaireacute sur ses responsabiliteacutes Prisonnier des
circonstances ce qui le rend malheureux le
patient soucieux de participer agrave son eacutemancipa-
tion doit inciter son ou sa psychotheacuterapeute
par des questions simples et bienveillantes agrave
reformuler ce qursquoil comprend de la situation et agrave
exprimer son ressenti Il est essentiel que le
theacuterapeute se sente eacutecouteacute informeacute et respec-
teacute Il ne doit pas craindre de lrsquoimportuner
puisque de toute faccedilon ce sera le cas En preacute-
servant la liberteacute de penseacutee de ce dernier et en
veillant agrave le faire participer aux orientations de
la theacuterapie le patient doit mettre une grande
conviction agrave le convaincre qursquoil est la personne
concerneacutee en premier lieu par le choix de celle-
ci avec la capaciteacute de reacutefleacutechir et de prendre
les deacutecisions qui le concernent agrave partir des in-
formations qursquoil partage avec lui Le patient de-
vra eacutegalement precircter attention aux signes de
conduites addictives ou aux troubles obses-
sionnels compulsifs du psychotheacuterapeute Un
signe drsquoappel agrave connaicirctre est la position con-
descendante ou le silence obstineacute ou encore
la somnolence difficilement dissimuleacutee qui sont
sans rapport avec les attentes drsquoeacutecoute et de
compreacutehension que le patient tente drsquoexprimer
Le patient doit savoir que la preacutevalence du sui-
cide de la deacutepression du syndrome deacutecision-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 45
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
nel de lrsquoalcoolisme et de la toxicomanie est
bien supeacuterieure chez les psychotheacuterapeutes agrave
celle de la population geacuteneacuterale Il srsquoefforcera
donc de lui faciliter la vie par de petites atten-
tions ou remarques gratifiantes afin de ne pas
alimenter les fameux dysfonctionnements dont
les protocoles theacuterapeutiques se sont enticheacutes
Enfin les interlocuteurs ne devront jamais
perdre de vue que lrsquoon nrsquoest jamais autant deacuteccedilu
que par les illusions que lrsquoon perd Bref pour le
privilegravege drsquoune synergie additive de bon aloi le
patient et son psy doivent parvenir agrave se persua-
der que leur liberteacute de manoeuvre consiste agrave
faire tout ce que permet la longueur de la
chaicircne qui les assujettit Et la principale recom-
mandation exigeacutee pour les deux acteurs de ces
proceacutedeacutes interactifs tant pour le patient que
pour son psy semble devoir se fonder sur une
robuste et saine suspicion mutuelle La reacutecipro-
citeacute est la clef de tous les rapports humains
Si lrsquoon veut bien eacutecarter un instant les passion-
nantes preacutesentations de cas superbement rap-
porteacutes par leurs auteurs et dont les colloques
sont friands ougrave tout est eacutelucideacute et dans les-
quelles tout semble srsquoexpliquer facilement ougrave
la posture adopteacutee par le ou la psychotheacutera-
peute srsquoest trouveacutee bien venue ougrave ses inter-
preacutetations se sont reacuteveacuteleacutees pertinentes et ses
interventions judicieuses qui auront abouti agrave
un reacutesultat suffisamment satisfaisant pour ecirctre
exposeacute on srsquoautorisera agrave penser que ces preacute-
sentations sont sans doute davantage drsquoineacutevi-
tables reconstructions que la traduction fidegravele
du deacuteroulement des eacuteveacutenements de lrsquoordre de
lrsquoimplacable authenticiteacute dont se montre ca-
pable une cameacutera de surveillance de distribu-
teur de billets de banque Apregraves tout si le men-
songe est le secret de la vie amoureuse crsquoest
aussi le ciment de la vie sociale La subjectiviteacute
srsquoinsinue partout peut-ecirctre plus encore dans
les souvenirs que dans les activiteacutes de percep-
tion Un souvenir est un mensonge qui dit tou-
jours la veacuteriteacute a eacutecrit Jean Cocteau recons-
truction conjecturale mais sincegravere expression
dans lrsquoinstant de sa remeacutemoration puisque tout
peut ecirctre exact sans que rien ne soit vrai En
theacuteorie tout srsquoexplique en pratique tout se
complique Ce nrsquoest pourtant pas une raison
pour faire les gros yeux aux garnements de la
psychotheacuterapie Qui srsquointeacuteresserait agrave la pein-
ture dans le seul but de devenir trafiquant
drsquoœuvres drsquoart
Or ce que redoute la theacuterapeutique crsquoest lrsquoer-
reur la faute restant beaucoup plus inconce-
vable qursquoelle est exceptionnelle et lrsquoeacutechec trop
reacutecurrent tandis que ce queacutevite la circonspec-
tion mdash en ne versant daucuns cocircteacutes mdash crsquoest la
partialiteacute Crsquoest donc vrai quelle apparaicirct ordi-
naire commune qursquoelle ne se dissipe pas
comme le fait le theacuteorique dans ses cabrioles
et si elle ne fait pas toujours la preuve drsquoune
grande inventiviteacute elle nrsquoest pas hanteacutee par
lrsquoexigence de la coheacuterence ce spectre des pe-
tits esprits Elle ne cherche pas non plus agrave sus-
citer la contradiction ni ne vise agrave se singulari-
ser en prenant une position mais elle aspire agrave
conserver lrsquoesprit ouvert agrave tous les possibles
quitte agrave cultiver le paradoxe Crsquoest sans doute
pour cette raison que quand lrsquoadresse agrave un pa-
tient se reacutevegravele theacuterapeutique ce nrsquoest pas une
surprise totale crsquoest le plus souvent lrsquoaboutis-
sement drsquoune deacutemarche heuristique Ceux qui
srsquoembarrassent dans un diagnostic ce qursquoils
srsquoimaginent indispensable avant toute entre-
prise et auquel ils finissent par croire et ce fai-
sant faire croire implicitement au patient qursquoil
srsquoapplique agrave lui mecircme quand ils ne cegravedent pas
agrave la tentation de lui en faire la reacuteveacutelation peu-
vent finir par srsquoenfermer dans une illusion com-
mune Une telle disposition est assimilable
dans son essence au preacutesupposeacute On voit la
difficulteacute apparaicirctre dans les efforts drsquoy faire
piegravece et que cela ne preacutesage rien de bon
Pourtant on a bien souvent vu la situation theacute-
rapeutique eacutevoluer favorablement en deacutepit de
ces preacutemisses douteuses Qursquoen penser Si
lrsquoon considegravere que la tacircche fondamentale du
psychotheacuterapeute est bien de reacutesoudre des
problegravemes de maniegravere efficace et dynamique
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 46
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
si lrsquoon peut srsquoeacutecarter un tant soit peu des con-
ceptions traditionnelles des problegravemes psycho-
pathologiques mettre en doute lrsquoexistence de
deacuteficits agrave reacuteparer ou agrave compenser chez le pa-
tient srsquoautoriser agrave penser que la reacutesistance au
changement de ce dernier nrsquoa rien agrave voir avec
la rentabiliteacute speacutecifique de symptocircmes en
terme de pouvoir interpersonnel on peut envi-
sager drsquointroduire des solutions qui ne srsquoentre-
tiennent pas elles-mecircmes et deviennent des
obstacles au changement Alors le theacuterapeute
peut se contenter drsquoamorcer un changement et
deacutecliner la neacutecessiteacute de srsquoengager agrave lrsquoaccompa-
gner jusqursquoagrave son terme Et quand les venues
du patient deviennent plus rares se souvenir
que Freud deacuteclarait que la cure est termineacutee
quand le patient ne vient plus
On connaicirct les dispositions favorables du pa-
tient agrave srsquoidentifier au profil qursquoon lui propose Et
si les patients se montrent rarement agrave la hau-
teur de ce que lrsquoon attend drsquoeux crsquoest parce
que lrsquoon attend quelque chose de leur part qui
soit agrave la hauteur de nos preacutetendues compeacute-
tences dont rappelons-nous il srsquoagit de reacutegle-
menter la mise en oeuvre Or lrsquoobjectif du theacute-
rapeute peut-il ecirctre leacutegitimement de confirmer
ses convictions Srsquoil interpregravete les causes du
mal-ecirctre de ses patients en fonction dun scheacute-
ma geacuteneacuteral et preacuteeacutetabli ne les trahit-il pas Et
serait-il bien congru de proposer des theacuterapies
en precirct-agrave-porter mecircme en demi-taille plutocirct
que faire dans le sur mesure en fonction des
ressources que le patient a lrsquoair de preacutesenter
Les deux acteurs de lrsquoaffaire risquent de rater
ce qursquoils recherchent implicitement en croyant y
gagner quelque chose le theacuterapeute la confir-
mation de ses convictions et le patient un
eacuteclaircissement de ses difficulteacutes en mecircme
temps que son adoption par une autoriteacute qui
lrsquoenteacuterine Toute clarteacute se paie drsquoun mystegravere et
comme une conscience claire est le signe
drsquoune mauvaise meacutemoire on nrsquoen saura pas
beaucoup plus les ideacutees nettes et distinctes
chegraveres agrave Reneacute Descartes nrsquoont guegravere fait la
preuve de leur eacutevidence La responsabiliteacute du
theacuterapeute srsquoeacutemaille de tant de deacuteterminants
que ce dernier est tout agrave fait capable de se ran-
ger agrave ce qursquoil croit justifieacute Mais la croyance
nrsquoest pas seulement une ideacutee que lrsquoesprit pos-
segravede crsquoest eacutegalement une ideacutee qui possegravede
lrsquoesprit Le plus grand deacuteregraveglement de lrsquoesprit
est de croire que les choses sont parce que
lrsquoon veut qursquoelles soient Les psychologues sa-
vent si bien identifier les situations qui se precircte-
ront au beacuteneacutefice de leur clairvoyance qursquoils
sont eacutegalement fortement sujets agrave lrsquoisseacutegoureacutee
facirccheuse pathologie qui deacutesigne un don parti-
culier pour toujours chercher drsquoabord dans la
mauvaise poche
Toutefois une relation de confiance une fois
installeacutee ccedila commence agrave rouler mais au fil du
temps la roue finit par prendre du jeu et les
orientations agrave srsquoinstaller dans le confort agrave srsquoen-
liser dans lrsquoanamnegravese agrave travailler obstineacutement
la reacutepeacutetition agrave se contenter de pointer des meacute-
canismes quant ccedila ne se reacuteduit pas agrave la pro-
duction de regrettables rationalisations Il srsquoagit
plutocirct de reacuteapprendre des conduites au patient
apregraves qursquoil en ait renouveleacute le choix agrave srsquoenga-
ger dans des activiteacutes qui permettent de modi-
fier substantiellement les modes de penseacutee Le
but ultime de la psychotheacuterapie nest pas seu-
lement deacuteliminer des comportements deacuteplo-
rables cest dapprendre agrave mieux geacuterer ses
propres processus mentaux agrave affronter avec
plus de reacuteussite des situations oppressantes et
agrave deacutevelopper des opeacuterations psychiques plus
performantes et une maniegravere drsquoecirctre au monde
plus eacutepanouissante une expression de la
sphegravere psychique privileacutegiant la valorisation
des aspirations individuelles qui deacutebouche sur
la preacutedilection pour lrsquoespace inteacuterieur caracteacuteri-
seacute sur lequel on pense souvent ecirctre suscep-
tible de pouvoir agir Mais comment juger ac-
ceptable que le patient se retrouve dans la po-
sition de celui qui la cleacute de son appartement agrave
la main se voit contraint drsquoactionner la son-
nette pour rentrer chez lui
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 47
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Tout ceci pour suggeacuterer une approche zeacuteteacute-
tique des psychotheacuterapies pour autant qursquoelle
puisse ecirctre soupccedilonneacutee de participer agrave lrsquoactua-
lisation de la confusion des genres qui permet-
trait drsquoeffectuer la distinction entre drsquoune part la
psychotechnique de la theacuterapie que la revendi-
cation du titre de psychotheacuterapeute tendrait agrave
certifier au prix drsquoun reacuteductionnisme preacutejudi-
ciable agrave la pratique clinique et au meacutepris drsquoune
certaine creacuteativiteacute et la conduite drsquoun projet
psychotheacuterapique circonspect avec des tech-
niques approprieacutees et individualiseacutees jouant le
rocircle drsquoun outil directionnel
Les psychologues sont censeacutes distinguer le
subjectif de lrsquoirrationnel Il ne sagit pas dex-
clure la subjectiviteacute ni mecircme de la reacuteduire
mais de la conserver au cœur de la pratique de
la psychologie clinique Cest lagrave au cœur de la
subjectiviteacute de lindividuel que celle-ci peut
justifier sa speacutecificiteacute En revanche on ne se
preacuteoccupera pas des ayatollahs de la psycha-
nalyse au masque douloureux et au regard fil-
trant arborant un air drsquoen savoir long ni des
forceneacutes du dressage cognitif qui se deacutesolent
de ne pas voir le patient marcher mieux que
cela dans la combine Pas plus drsquoailleurs que
de tous les gardes-frontiegraveres des succegraves qui
leur eacutechappent qui sont des envieux comme
tous les censeurs Agrave Theacuterapik Park les psy-
chotheacuteraptors chassent tout autant en meute
qursquoen snipers
Il est important de tendre vers une pratique
permissive en accordant au patient la possibili-
teacute de reacutealiser que lorigine des changements se
trouve en lui comme il pense de celle des pro-
blegravemes qui sont les siens qui pourra de cette
faccedilon acqueacuterir une autonomie dans son pro-
cessus de traitement Mais lrsquoon a appris que ce
reacutesultat ne peut ecirctre obtenu que si lrsquoon accorde
au patient la possibiliteacute de tricher Cette faculteacute
le poussera rarement agrave en user mais sa virtua-
liteacute qursquoil est en mesure de srsquoapproprier facilite-
ra bien souvent la survenue des identifications
rechercheacutees par le theacuterapeute parce que le
patient en fera ainsi plus facilement son affaire
Crsquoest en quelque sorte entrer par la porte de
derriegravere dans le champ complexe de la forma-
tion du reacuteel
Cette approche zeacuteteacutetique estomperait eacutegale-
ment la suspicion de thaumaturgie qui revien-
drait au professionnel qui srsquoappuyant sur la
conviction qursquoil y a quelque chose agrave soigner
chez le patient au titre de lrsquoadheacutesion de ce der-
nier agrave la proposition drsquoune telle assertion
srsquoexempterait du titre en vertu de lrsquoautorisation
qursquoil srsquooctroierait agrave lui-mecircme de pratiquer Pen-
ser par soi-mecircme crsquoest souvent penser tout
seul ou pire penser comme tout le monde
Mieux vaut peut-ecirctre penser contre soi-mecircme
et se faire agrave soi-mecircme les objections des
autres Toutes les psychotheacuterapies ont leurs
chimegraveres apregraves lesquelles elles courent sans
jamais les attraper Mais avantageusement en
chemin elles srsquooctroient des opportuniteacutes qui
ne sont pas toutes neacutegligeables Et sans ou-
blier que quand la sinceacuteriteacute confine agrave lrsquoarbi-
traire on en vient agrave regretter lrsquohypocrisie
comme lrsquoa magistralement exprimeacute Descartes
on peut deacutecider que lrsquoon nrsquoest sucircr de rien et
que lrsquoon nrsquoest mecircme pas sucircr que lrsquoon nrsquoest sucircr
de rien cesser de consideacuterer que les pro-
blegravemes compliqueacutes neacutecessitent forceacutement des
solutions compliqueacutees Il y a aussi des psycho-
theacuterapies qui durent des anneacutees et un mauvais
esprit pourrait eacutetablir une comparaison avec les
banques qui quoiqursquoun virement par ordinateur
ne prenne qursquoune seconde aiment en faire tout
un plat afin que les fonds demeurent un mo-
ment dans leur systegraveme et leur rapportent
Comme nous vivons irreacutesistiblement dans un
monde de repreacutesentations la seacuteduction du titre
peut exciter la convoitise mdash celle-ci constituant
la plus formidable des motivations humaines mdash
de psychotheacuterapeutes en quecircte de reconnais-
sance Mais ce sont les ideacutees les plus seacutedui-
santes qui ont le plus souvent besoin de se re-
maquiller Le terme de trompe-couillon deacutesi-
gnant le maquillage en langue verte est trop
illustratif dans le domaine des psychotheacuterapies
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 48
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
pour deacutecourager complegravetement la tentation de
srsquoinsurger contre lrsquoeacuteventualiteacute de sa pertinence
Le titre de psychotheacuterapeute ressemble agrave la
queue du Mickey de notre enfance qursquoil fallait
attraper pour avoir un tour gratuit de manegravege
On peut bien courir encore longtemps apregraves
son obtention mais si lrsquoon veut finir de rouler le
peacutetard il faudra bien se reacutesoudre au bout drsquoun
moment agrave cesser de rechercher le petit bout de
shit tombeacute sur la moquette marron
Alors psychotheacuterapeute agrave quel titre quand la
proposition theacuterapeutique tiendrait tout entiegravere
en quatriegraveme de couverture Et lrsquoon peut ajou-
ter agrave notre accablement la conjoncture imagi-
naire que nous ne nous en remettrons jamais
et deacutecider que la psychotheacuterapie est devenue
un business Bien sucircr ces consideacuterations ne
srsquoappliquent pas aux psychotheacuterapeutes pour
lesquels rien nrsquoest impossible eacutequipeacutes du tout
agrave lrsquoego agrave soi qui sont si lrsquoon peut dire la protu-
beacuterance de la profession Elles ne srsquoappliquent
pas davantage agrave ces professionnels dont
lrsquoinaptitude est semblable agrave celle des jeunes
paresseux ces mammifegraveres arboricoles de la
forecirct breacutesilienne auxquels il arrive freacutequem-
ment drsquoempoigner leurs propres pattes agrave la
place des branches si bien qursquoils tombent des
arbres
Enfin lrsquoexigence de ce titre fait voir se multiplier
des instituts de formation agrave la psychotheacuterapie
neacutes de la derniegravere pluie qui ne feraient que
precirccher pour leur paroisse agrave des ouailles fasci-
neacutees par la quecircte de la qualification Il suffirait
alors de deacutetenir le titre de psychotheacuterapeute
pour le devenir tandis que ceux ou celles qui
en possegravedent la compeacutetence et qui se risquent
agrave en pratiquer verraient fragiliseacutee leur deacutetermi-
nation agrave y recourir sans lrsquoestampille de sa sa-
cralisation Crsquoest ainsi qursquoun meacutecanicien de la
relation identifieacute comme speacutecialiste du soin et
de la gestion des relations interpersonnelles
viendra disqualifier la prodigieuse diversiteacute des
fonctionnaliteacutes de la psychologie clinique agrave la-
quelle nous sommes tous attacheacutes Et lrsquoon ver-
ra des psychotheacuterapeutes nantis de bons certi-
ficats srsquoeacutevertuer dans la profession et y forger
leur reacuteussite juste pour prouver que crsquoest pos-
sible Les exigences des employeurs se mon-
treront de plus en plus impeacuteratives sur ce point
les assureurs jouant le rocircle drsquoagences de nota-
tion et lrsquoon nrsquoengagera deacutesormais que des
eacutebeacutenistes qualifieacutes comme caissiers chez Ikea
Quand le doute est leveacute il deacutebouche sur une
incertitude et le psychotheacuterapeute ballotteacute au
greacute des vagues de lrsquooceacutean du deacutesir de nou-
velles contraintes reacuteglementaires dans sa lutte
contre la deacutereacuteliction par tous les temps se
trouve embarrasseacute par le choix impossible
entre deux deacutesillusions voir que lrsquoeacutetendue du
champ de la pratique de la psychotheacuterapie se
precircte deacutesormais deacutecideacutement mal agrave son entre-
prise ou constater combien ccedila va ecirctre difficile
de lrsquoentreprendre agrave ses propres conditions
Crsquoest comme eacuteprouver le deacutesappointement de
la dame constatant que la lunette des toilettes
nrsquoest pas abaisseacutee ou la consternation du
monsieur qui deacutecouvre que la mecircme lunette ne
tient pas releveacutee Mais quitte agrave voyager sur le
Titanic pourquoi pas en premiegravere classe
La vie professionnelle nous rappelle combien le
monde peut paraicirctre singulier lorsqursquoon le re-
garde apregraves avoir fait un simple pas sur le cocircteacute
Lrsquoexercice de la psychotheacuterapie srsquoassaisonne
de pas mal drsquohumiliteacute et drsquoun peu de creacuteativiteacute
Peut-on ecirctre agrave la fois malin et intelligent Les
psychologues cliniciens pratiquent volontiers
lrsquousage des deux adverbes fondamentaux qui
eacuteveillent lrsquointelligence des enfants pourquoi
et comment Lrsquointelligence incite agrave la reacute-
flexion et la reacuteflexion conduit au scepticisme
Le scepticisme lui megravene agrave lrsquoironie Lrsquoironie
cette meacutelancolie de la luciditeacute agrave son tour se
preacutesente agrave lrsquoesprit mdash qui se trouve en apport
direct avec lrsquohumour mdash qui fait si bon meacutenage
avec la fantaisie Et la vie devient une chose
deacutelicieuse aussitocirct qursquoon deacutecide de ne plus la
prendre tout agrave fait au seacuterieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 49
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute des pa-
tients migrants africains
Jacqueline Faure Hocircpital Tenon Page 50
gt Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacute-
moignage drsquoune pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute Page 60
gt Seacutejour de vacances quelle place pour le psy-
chologue
Ceacuteline Le Bivic Hocircpital Eacutemile Roux Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques
transversaliteacute de nos cliniques
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 50
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants
africains une approche originale avec lrsquoassociation URACA
Jacqueline Faure Service des maladies infectieuses et
tropicales Centre de la dreacutepanocytose Hocircpital Tenon
Lrsquohomme universel nrsquoexiste pas il est inscrit
dans une culture dans un cadre Or ce cadre
est universel il nrsquoexiste pas drsquohomme sans cul-
ture
L rsquohocircpital Tenon est situeacute agrave lrsquoEst de Paris
bon nombre de patients migrants infec-
teacutes par le VIH y sont soigneacutes Du fait de
lrsquoexistence drsquoune materniteacute au sein de lrsquohocircpital
beaucoup de femmes migrantes apprennent
leur seacuteropositiviteacute agrave lrsquoinfection par le VIH-sida
au cours du suivi de leur grossesse La grande
majoriteacute de ces patients est originaire drsquoAfrique
de lrsquoOuest
Degraves 1993 nous avons mis en place un parte-
nariat avec lrsquoassociation URACA pour aider
les patients en difficulteacute face au diagnostic de
lrsquoinfection par le VIH-sida et aussi les soignants
rencontrant des problegravemes dans la prise en
charge de certains patients
Au deacutebut les soignants et moi-mecircme pensions
que la plupart des patients africains ne com-
prenaient rien Peu agrave peu avec lrsquoaide drsquoURA-
CA nous avons pris conscience que nous-
mecircmes ne les comprenions pas toujours ou
bien encore que nous ne savions pas nous
faire comprendre drsquoeux
Cette association daide aux Africains intervient
dans diffeacuterents domaines accueil aide juri-
dique sociale solidariteacute preacutevention informa-
tion recherche dans le domaine de la santeacute
(toxicomanie SIDA dreacutepanocytose troubles
psychiatriques) et propose aussi des consulta-
tions drsquoethnomeacutedecine
Ainsi bien souvent les difficulteacutes avec les pa-
tients drsquoorigine eacutetrangegravere sont lieacutees agrave des pro-
blegravemes de communication et de compreacutehen-
sion mutuelles dans la relation soignant-soigneacute
En comprenant lrsquoeacuteveacutenement migratoire et son
impact dans la deacutecouverte drsquoune maladie
grave en eacutetant sensibiliseacutes agrave lrsquoimportance de la
dimension culturelle dans le soin nous avons
ainsi ameacutelioreacute lrsquoaccueil et la prise en charge de
ces patients
Un systegraveme culturel est constitueacute drsquoune
langue drsquoun systegraveme de parenteacute drsquoun corpus
de techniques et de maniegraveres de faire (la pa-
rure la cuisine les arts les techniques de
soins les techniques de maternagehellip) Tous
ces eacuteleacutements eacutepars sont structureacutes de maniegravere
coheacuterente par des maniegraveres de penser les re-
preacutesentations [] Les repreacutesentations permet-
tent aux individus dun mecircme groupe dappreacute-
hender le monde selon les modaliteacutes com-
munes repreacutesentations de la mort de la con-
ception
Jemploie ce mot culture agrave contrecœur avec
la crainte decirctre mal compris Par ce terme je
ne deacutesigne pas leacutecume luxueuse dune civilisa-
tion mais lesprit tregraves particulier dun peuple
insaisissable
Cette prise en charge globale avec lrsquoassocia-
tion URACA srsquoeffectue sous 4 formes
1 le soutien communautaire
2 la meacutediation culturelle
3 la consultation dethnomeacutedecine une prise
en charge transculturelle
4 la formation mutuelle partage de savoir
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 51
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
1 LE SOUTIEN COMMUNAUTAIRE
Je me sens coupeacute en deux diviseacute une partie
de moi-mecircme nrsquoest pas ici nous dit tel patient
La deacutecision la plus terrible que jrsquoaie eu agrave pren-
dre dans ma vie crsquoest de rester ici pour me soi-
gner et ecirctre ainsi seacutepareacutee des miens raconte
cette femme dans un sanglot difficilement con-
tenu
Crsquoest tregraves dur drsquoecirctre seulehellipJe ne suis pas ha-
bitueacuteehellipici quand tu sors de ta maison per-
sonne ne se parlehellip
Le soutien communautaire drsquoURACA srsquoorga-
nise de plusieurs faccedilons
Visite hebdomadaire au chevet du patient avec
le port dun repas africain par la nourriture
par le dialogue dans la langue quand cest pos-
sible par la preacutesence de ses pairs quelque
chose du pays est ainsi recreacuteeacutee et apaise le
malade
Accueil quotidien au sein de lrsquoassociation re-
pas atelier couture atelier informatique aides
dans les deacutemarches administratives assem-
bleacutee des femmes Tout ceci dans une am-
biance comme au pays
Ces visites sont proposeacutees aux malades isoleacutes
du fait du diagnostic ou qui nrsquoont pas de famille
ici
La migration est une eacutepreuve qui provoque
chez le sujet une deacutestabilisation une fragiliteacute
lieacutees agrave diffeacuterentes pertes
perte de lrsquoenveloppe culturelle la culture struc-
ture le psychisme humain dans la migration il
nrsquoy a plus ce cadre culturel Changer drsquounivers
implique la perte brutale drsquoune langue drsquoun
systegraveme de reacutefeacuterence drsquoun systegraveme de co-
dage des perceptions des sensations et des
repreacutesentations en un mot une acculturation
[] La perte de lrsquoenveloppe culturelle va donc
provoquer des modifications de lrsquoenveloppe
psychique [hellip]
la perte de repegraveres difficulteacutes au niveau du
changement de climat de la nourriture dans
les deacuteplacements dans la ville dans les deacute-
marches administratives Difficulteacutes et mecircme
souffrance dans la perte de la langue drsquoorigine
Julia Kristeva drsquoorigine bulgare psychanalyste
et eacutecrivain dit ceci hellip il y a mort dans la perte
drsquoune langue natalehellip
la perte drsquoune certaine identiteacute ecirctre Camara
ou Toure ecirctre peul ou bambara nrsquoest pas so-
cialement reconnu le migrant devient un eacutetran-
ger un noir puis agrave lrsquohocircpital eacuteventuellement un
seacuteropositif
la perte du groupe lrsquoisolement est douloureu-
sement ressenti pour tout eacutetranger La solitude
pour un Africain crsquoest mortelhellip nous explique
Monsieur Diarra meacutediateur ethnoclinicien agrave
URACA
Autant drsquoeacuteleacutements qui favorisent un eacutetat de vul-
neacuterabiliteacute propice agrave une deacutecompensation soma-
tique ou psychologique (deacutepression) Le dia-
gnostic drsquoune maladie grave vient renforcer
cette fragiliteacute La solitude dans les chambres
individuelles de nos hocircpitaux modernes - que
nous occidentaux appreacutecions beaucoup - peut
ecirctre mal supporteacutee par le patient africain elle
est mecircme parfois anxiogegravene Un Africain nest
jamais seul Au pays sil est hospitaliseacute sa fa-
mille lentoure dort dans sa chambre
Par ces visites hebdomadaires un tissu rela-
tionnel est ainsi creacuteeacute qui peut se poursuivre agrave
la sortie Le soutien communautaire permet au
patient isoleacute dans la preacutecariteacute de retrouver ce
lien structurant du groupe qui lui faisait deacutefaut
depuis son deacutepart dAfrique Soutien qui va lrsquoai-
der agrave mieux supporter sa maladie et agrave mieux se
soigner Pour un Africain appartenir au groupe
est vital cest pourquoi la grande crainte du
malade est que son entourage soit au courant
du diagnostic et le rejette Le malade ne peut
pas ou ne veut pas partager sa souffrance
avec ses proches La honte la crainte de lex-
clusion peuvent le conduire agrave un retrait difficile
agrave supporter Pour lAfricain lisolement est in-
concevable Sa force vitale est en relation
constante avec celle des ancecirctres proches et
lointains et des membres du groupe La plus
grande calamiteacute consiste agrave en ecirctre retrancheacute et
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 52
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reacuteduit ainsi agrave une existence deacuteficiente sans
protection voueacutee au neacuteant
Cette association communautaire nrsquoest pas
speacutecifiquement cibleacutee SIDA bien que ses
membres soient formeacutes agrave cette pathologie A
lrsquohocircpital elle apporte son aide agrave tout patient
quelle que soit sa maladie Le patient pourra
srsquoil le souhaite aborder son diagnostic et il nrsquoest
pas rare qursquoil le fasse Apaisement et soulage-
ment pour lui de constater que ce dont il
souffre ne fait pas peur Il peut retrouver con-
fiance en lui
2 LA MEacuteDIATION CULTURELLE
Le meacutediateur ethnoclinicien connaicirct bien la cul-
ture du patient originaire drsquoAfrique de lrsquoOuest et
il parle plusieurs langues (peul bambara sara-
koleacute wolof hellip) Il intervient dans diffeacuterentes
situations
Pour faciliter la communication entre le meacutede-
cin et le patient quand des explications concer-
nant la maladie le traitement nrsquoont pas eacuteteacute
comprises Il ne srsquoagit pas drsquoune simple inter-
preacutetation mais drsquoune formulation adapteacutee agrave la
personne agrave sa culture Les messages de preacute-
vention concernant la sexualiteacute par exemple
seront mieux accepteacutes et entendus si la sensi-
biliteacute du patient voire sa pudeur sont respec-
teacutees
Pour aider agrave la reacutesolution de conflits entre pa-
tient-soignant ou patient-famille ou soignant-
famille
Reacutecemment nous avons organiseacute une meacutedia-
tion culturelle pour une patiente ne parlant pas
du tout le franccedilais accompagneacutee de son fils
maicirctrisant parfaitement notre langue Le meacutede-
cin lrsquoassistante sociale le meacutediateur et moi-
mecircme eacutetions reacuteunis pour essayer de com-
prendre le conflit familial Tout eacutetranger utilise
la langue eacutetrangegravere comme un pansement
comme une sorte drsquoonguent de cregraveme sur les
anciennes blessureshellip La langue seconde ne
permet pas drsquo acceacuteder agrave son for inteacuterieur ex-
plique Julia Kristeva Ainsi le fils pouvant tout
agrave fait communiquer avec nous en franccedilais
srsquoest spontaneacutement adresseacute au meacutediateur en
bambara De toute eacutevidence sa langue natale
lui permettait drsquoecirctre au plus pregraves de la situation
douloureuse qursquoil vivait avec sa megravere
Le meacutediateur apporte des eacuteclaircissements sur
le contexte culturel sur le sens de tel conflit
familial sur la place des uns et des autres dans
telle famille (la place de lrsquooncle maternel par
exemple le systegraveme de filiation) Il aide les soi-
gnants souvent deacutestabiliseacutes par le manque de
repegraveres ou qui interpregravetent mal telle attitude
Par exemple lrsquoextension de la deacutenomination
fregravere sœur cousin megravere dans lrsquoentourage du
patient Les soignants ne savent plus qui est
qui Des doutes surgissent voire de la suspi-
cion Les soignants ont lrsquoimpression drsquoecirctre ma-
nipuleacutes ou trompeacutes
Le meacutediateur ethnoclinicien tient selon la for-
mule de T Nathan une sorte de position du
diplomate entre deux univers antagonistes
3 LA CONSULTATION DETHNOMEacuteDECINE UNE
PRISE EN CHARGE TRANSCULTURELLE
La culture permet un codage de lrsquoensemble de
lrsquoexpeacuterience veacutecue par un individu elle permet
drsquoanticiper le sens de ce qui peut survenir et
donc de maicirctriser la violence de lrsquoimpreacutevu et
par conseacutequent du non-sens
Angoisse de mort deacutecompensation psychia-
trique (ideacutees suicidaires syndrome anxio-
deacutepressif eacutetat deacutelirant) incompreacutehension ou
deacuteni du diagnostic deacutetresse psychologique
autant de reacuteactions face agrave la maladie grave qui
peuvent concerner tout patient (occidental ou
non) mais qui neacutecessitent pour certains pa-
tients migrants une approche tenant compte du
contexte de la migration et des speacutecificiteacutes cul-
turelles
Cette maladie je sais drsquoougrave ccedila vient mon pegravere
mrsquoa donneacutee en sorcellerie nous dit cette pa-
tiente qui ne prend pas ses meacutedicaments et
dont lrsquoeacutetat srsquoaggrave
Je suis travailleacute je le sens crsquoest les parents
de ma femme qui nrsquoont jamais accepteacute notre
mariage crsquoest eux qui font des choses sur
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 53
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
moihellip
Ou bien encore ce patient en phase asympto-
matique de lrsquoinfection par le VIH-sida qui ex-
plique Je ne suis pas malade la preuve le
meacutedecin ne me donne pas de traitement
Ainsi dans certains cas le patient en difficulteacute
en souffrance peut refuser de se soigner au
prix drsquoune aggravation de son eacutetat se santeacute De
plus les messages de preacutevention ne sont pas
entendus et les risques de propagation du virus
sont accrus
Cette consultation qui srsquoinspire de lrsquoethnopsy-
chiatrie reacuteunit autour du patient (accompagneacute
ou non de membres de sa famille ou de
proches)
- leacutequipe de lassociation URACA le Dr Mous-
sa Maman meacutedecin et theacuterapeute traditionnel
qui dirige les entretiens le meacutediateur ethnocli-
nicien la psychologue Pendant 10 ans cette
eacutequipe a eacuteteacute compleacuteteacutee par la preacutesence des
tradipraticiens africains gueacuterisseurs tradition-
nels du Nord Beacutenin qui sont venus une fois par
an pour une dureacutee de deux mois (cette action
originale a pu se mettre en place gracircce agrave des
creacutedits le Sidaction par exemple qui nrsquoexistent
plus aujourdrsquohui)
- leacutequipe soignante le meacutedecin reacutefeacuterent les
infirmiegraveres la psychologue linterne les ex-
ternes lassistante sociale sage-femme kineacute-
sitheacuterapeutehellip Les soignants ont ainsi accegraves
en situation clinique agrave lunivers culturel du pa-
tient
Le recours aux pratiques traditionnelles est tregraves
freacutequent en Afrique Les systegravemes traditionnels
de soin relegravevent drsquo une logique complexe
drsquoune rationaliteacute profonde (T Nathan) avec
une capaciteacute agrave srsquoadapter aux nouvelles situa-
tions aux nouvelles maladies Cette deacute-
marche ne remet pas en cause la confiance
envers notre meacutedecine moderne La theacuterapie
traditionnelle apporte des protections fonda-
mentales (T Nathan)
Tregraves souvent en Afrique les theacuterapies tradition-
nelles se deacuteroulent en groupe avec la famille
et ceux qui ont une affiniteacute avec le malade Ici agrave
lhocircpital les participants sont reacuteunis en cercle
autour du patient Le groupe constitue une en-
veloppe psychique qui est en soi theacuterapeu-
tique Les soignants par leur preacutesence accor-
dent une place agrave lrsquoidentiteacute culturelle du patient
agrave ses maniegraveres de vivre de se soignerhellip
Dans les cultures de tradition orale les eacuteveacutene-
ments importants de la vie tels que la nais-
sance le mariage la maladie la mort (avec
lrsquoimportance des ancecirctres) sont penseacutes diffeacute-
remment Il existe une reacutealiteacute invisible on ac-
corde vie force et pouvoir au mineacuteral au veacutegeacute-
tal agrave lrsquoanimal Le sang le lait maternel ont des
pouvoirs beacuteneacutefiques ou maleacutefiques
Les speacutecialistes de lrsquoanthropologie pensent
que le modegravele de lrsquoorganisation sociale com-
munautaire plus freacutequent dans les socieacuteteacutes
non industrialiseacutees ougrave le groupe maintient une
preacutegnance importante sur lrsquoindividu favorise
une expeacuterience du corps veacutecu comme global
il nrsquoy a pas de rupture entre lrsquohomme et le cos-
mos le corps est permeacuteable On lui reconnaicirct
une dimension transcendante et la maladie
qui plus est chronique comme la dreacutepanocy-
tose peut ecirctre inteacutegreacutee dans une reacutealiteacute plus
large exteacuterieure au corps de la meacutedecine des
hocircpitaux
Lors de ces consultations drsquoethnomeacutedecine les
deux systegravemes culturels occidental et tradition-
nel sont reconnus lrsquoun nrsquoexcluant pas lrsquoautre
Le patient peut aborder en toute confiance des
preacuteoccupations qui lui sont speacutecifiques sans
craindre le ridicule Les deux systegravemes de re-
preacutesentations occidentales et traditionnelles
dans lesquels navigue le migrant peuvent
coexister sans sopposer Paradoxalement
lrsquoapproche traditionnelle donne dans certains
cas sens et coheacuterence au discours meacutedical
scientifique Il est difficile de rendre compte
drsquoune consultation drsquoethnomeacutedecine (de mecircme
qursquoil est difficile de parler drsquoune seacuteance de psy-
chotheacuterapie ou drsquoanalyse bien que ce ne soit
pas du mecircme ordre) Il ne srsquoagit pas drsquoune con-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 54
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sultation traditionnelle ce nrsquoest ni le lieu ni le
cadre Nous sommes dans lrsquoentre-deux
Le nom la parenteacute lrsquoappartenance ethnique la
langue natale sont des eacuteleacutements systeacutematique-
ment abordeacutes Ces reacutefeacuterences agrave la filiation agrave
lrsquoethnie rappellent implicitement au malade le
lien agrave sa famille et son appartenance agrave un
groupe Les tradipraticiens se preacutesentent aussi
se nomment racontent dougrave ils viennent Le
dialogue qui srsquoinstaure est bien souvent eacutenig-
matique pour lrsquooccidental Le langage allusif
meacutetaphorique suggestif qui est utiliseacute est tout
agrave fait entendu par le patient agrave la diffeacuterence des
soignants qui sont deacuteconcerteacutes du moins lors
des premiegraveres consultations Peu agrave peu les
soignants vont se familiariser Par la suite ils
peuvent communiquer diffeacuteremment avec tel
patient et mieux deacutecoder sa maniegravere drsquoecirctre ou
de srsquoexprimer
Les repreacutesentations ancestrales de la maladie
et les eacutetiologies traditionnelles (possession es-
prits ou ancecirctres meacutecontents sorcellerie trans-
gression de tabous ou non respect de rituels
familiaux) ne sont pas systeacutematiquement eacutevo-
queacutees et lorsqursquoelles le sont crsquoest toujours de
maniegravere implicite La maladie comme lrsquoacci-
dent la perte drsquoun emploi ou toute autre mani-
festation de malchance de malheur est le
signe drsquoun deacutesordre -dont il faut comprendre le
sens- et qui concerne non seulement le patient
mais aussi sa famille
Monsieur C originaire du Mali connaicirct bien les
diffeacuterents modes de transmission et nous en
discutons ensemble et dans ce mecircme entre-
tien perplexe il se questionne Je ne sais
pas drsquoougrave ccedila vienthellip
Chez nous la maladie quelle soit physique ou
mentale ne concerne pas uniquement lindividu
toucheacute mais aussi sa famille tout le
groupe (M Maman Journeacutee transculturelle
Des gueacuterisseurs agrave lhocircpital des soignants au
village 29 septembre 2001 hocircpital Tenon
Paris) Derriegravere lhistoire de lindividu se profile
toujours le devenir de la communauteacute toute en-
tiegravere [ ] La cause du mal qui rompt leacutequilibre
dun organisme fait peser une lourde menace
sur le corps social
Bien souvent agrave lissu de ces consultations le
patient va contacter la famille au pays qui elle
aussi va intervenir selon ses coutumes par des
priegraveres rituels ou sacrifices
La proposition dune prise en charge transcul-
turelle nest pertinente que si elle fait sens pour
le patient sil se reconnaicirct des liens avec sa
culture dorigine Le patient peut ecirctre occiden-
taliseacute (eacutetudes supeacuterieures vivant en France
depuis de nombreuses anneacutees hellip) ou dorigine
rurale analphabegravete ayant gardeacute des liens avec
son village il peut ecirctre musulman ou chreacutetien
Les indications sont variables
- incompreacutehension du diagnostic Lrsquoexemple
de Monsieur K malgreacute une seacuterologie positive
il reste persuadeacute de nrsquoecirctre pas malade Cepen-
dant il accompagne aux consultations sa
femme et leur fille toutes les deux seacuteropositives
et sous traitement
- refus du traitement les causes sont mul-
tiples Mme T vient reacuteguliegraverement agrave ses con-
sultations le meacutedecin veut deacutesormais lui pres-
crire un traitement qursquoelle refuse Si je dis que
je suis seacuteropositive personne ne voudra se
marier avec moi Une autre patiente
srsquoinquiegravete Je ne veux pas du traitement si je
deviens indeacutetectable alors ougrave sera le virus
- problegraveme drsquoobservance les causes sont va-
rieacutees preacutecariteacute incompreacutehension ou refus du
diagnostic probleacutematique personnelle plus pro-
fonde
- souffrance psychique le patient peut ecirctre
tregraves observant ses reacutesultats biologiques sont
satisfaisants le patient va tregraves bien selon le
meacutedecin mais persiste en lui une douleur mo-
rale difficile parfois agrave repeacuterer Il faut savoir deacute-
coder le sens du sourire (qui ne signifie pas
toujours la joie) lrsquoabsence de plainte Julia
Kristeva explique que les eacutetrangers sont expo-
seacutes aux maladies psychosomatiques ils sont
dans cet espegravece de vernis de la langue se-
conde mais le fond reste douloureux et le fond
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 55
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
eacuteclate sous la forme de la migraine quand ce
nrsquoest pas le cancerhellip
- pathologie psychiatrique troubles du com-
portement (deacutelire agitation violencehellip) syn-
drome deacutepressif risque suicidaire angoisse de
mort plaintes somatiques sans cause orga-
nique (douleurs diffuses sensation de malaise
le corps parle ccedila chauffe ccedila se deacuteplace)
- fin de vie angoisse isolement
- conflits conjugaux ou familiaux aggraveacutes ou
reacuteactionnels agrave la pathologie (risque de divorce
tel mari qui nrsquoassume plus ses responsabiliteacutes
sexualiteacute devenue difficile impossible (refus du
preacuteservatif par exemple)
- Lrsquoannonce du diagnostic Lrsquoannonce drsquoune
maladie grave est toujours une eacutepreuve pour
tout malade Crsquoest un moment-cleacute dans la prise
en charge du patient Dans le cas de lrsquoinfection
par le VIH la formulation peut ecirctre une donneacutee
brutale Tel ce meacutedecin qui annonce agrave
une femme enceinte vih2 asymptomatique
vous avez le SIDA Veacuteritable violence ver-
bale qui provoque un choc psychique avec
risque suicidaire si ce nrsquoest la fuite et le refus
de soin
Actuellement chez certains soignants on as-
siste agrave une banalisation du diagnostic lieacute aux
possibiliteacutes de traitement Mais crsquoest oublier le
deacutecalage avec le niveau de connaissance du
malade et crsquoest aussi meacuteconnaicirctre les effets
sur le patient de la reacutealiteacute dramatique de la ma-
ladie au pays Certains ont vu des proches
mourir du SIDA drsquoune mort lente sans soin et
dans la solitude Tous les patients eacutevoquent
une forte angoisse Deux mois apregraves il y a en-
core en moi cette grande peur quand le meacutede-
cin mrsquoa parleacute En entendant les propos de
lrsquoinfirmier Je vous apporte vos meacutedicaments
du SIDA Mme B nous raconte comment elle
a protesteacute et reacuteagi vivement Vous ne devez
pas dire cela Ainsi dans certains cas le meacute-
decin peut utiliser drsquoautres formulations le
virus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Dans les cultures de tradition orale les mots
ont une force un pouvoir Prononcer le mot SI-
DA activerait en quelque sorte le potentiel mor-
tel de cette maladie Ainsi dans certains cas le
meacutedecin peut utiliser drsquoautres formules le vi-
rus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Deux ou trois consultations ont lieu ainsi agrave lhocirc-
pital pour chaque malade Les tradipraticiens
vont dire ce quils ont vu et vont donner leurs
indications theacuterapeutiques le suivi peut se
poursuivre apregraves leur retour au village ougrave ils
continuent si crsquoest neacutecessaire agrave travailler
pour le patient Les situations sont tregraves varieacutees
et les reacuteponses le sont tout autant
QUELQUES EXTRAITS DE CONSULTATION
Ce patient ne se sent pas malade il nrsquoa aucun
signe de la maladie il ne comprend pas pour-
quoi le meacutedecin insiste pour qursquoil prenne un
traitement qui plus est agrave vie On lui rappelle
qursquoau pays le gueacuterisseur a lui aussi son labo-
ratoire qursquoil voit et qursquoil peut demander de
faire des choses agrave celui qui vient le consulter
pour sa protection ce parfois toute la vie
Cette analogie explicite permet de confirmer la
validiteacute de lrsquoapproche meacutedicale Ce mode drsquoex-
pression imageacutee qui est familiegravere au patient
voir dans le sable faire des rituels pour la
protection reacutesonne en lui et lrsquoaide agrave adheacuterer
aux prescriptions meacutedicales Moi-mecircme jrsquoem-
ploie souvent le terme protection pour parler
du beacuteneacutefice de la tritheacuterapie jrsquoutilise des
images qui font sens pour le patient et je com-
prends mieux celles qursquoil utilise lui-mecircme De
mecircme il mrsquoarrive de lui signaler nos expres-
sions speacutecifiquement franccedilaises ou nos pro-
verbes afin de lui faire connaicirctre aussi notre
propre maniegravere drsquoexprimer certaines choses
Tel autre patient srsquoaggrave il prend mal ses
traitements et il vit dans une grande preacutecariteacute
Drsquoembleacutee lors du premier entretien psycholo-
gique il mrsquoexplique que sa sœur au pays a par-
leacute de sorcellerie Au cours de la consultation
drsquoethnomeacutedecine on lui demande de solliciter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 56
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sa famille au pays pour savoir ce qui doit ecirctre
fait aupregraves de la riviegravere sacreacutee qursquoil a eacutevoqueacutee
En Afrique les deacutefunts les ancecirctres doivent
ecirctre veacuteneacutereacutes par des rituels propres agrave chaque
famille si ce rituel a eacuteteacute abandonneacute des con-
seacutequences neacutegatives peuvent rejaillir sur un de
ses membres mecircme tregraves eacuteloigneacute On peut re-
marquer qursquoici lrsquohypothegravese de la sorcellerie est
eacutecarteacutee crsquoest une autre eacutetiologie traditionnelle
qui est avanceacutee agrave laquelle le patient adhegravere il
va contacter en effet son oncle au sujet de la
riviegravere sacreacutee Le patient devient actif non seu-
lement pour srsquooccuper des choses du pays
mais aussi pour faire des deacutemarches ici sa si-
tuation meacutedicale et sociale va consideacuterable-
ment srsquoameacuteliorer il trouve par la suite un heacute-
bergement puis un travail
Pour cette autre patiente un long temps de la
seacuteance va ecirctre consacreacute au reacutecit de la deacutecou-
verte de sa maladie de son bouleversement
de son angoisse concernant lrsquoavenir Des pa-
roles apaisantes lui sont dites puis on va lui de-
mander drsquoeacutecrire ses recircves de telle et telle nuit
au cours desquelles les gueacuterisseurs
travailleront pour elle Suite au rapport de ses
recircves ils lui prescrivent un traitement elle de-
vra se laver avec une preacuteparation agrave base de
plantes Conjointement le suivi psychologique
classique se poursuit elle reprend confiance
dans la vie
Aacute tel autre il est demandeacute drsquoapporter une petite
boicircte en bois ou encore un tissu blanc et un
parfum Aacute un autre il est dit drsquoaller chercher un
certain nombre de cailloux le long drsquoun cours
drsquoeau ici en France Certaines prescrip-
tions sont plus compliqueacutees sacrifices rituels
agrave effectuer au pays objets agrave rapporter Cela
peut prendre plusieurs semaines Si la pres-
cription est impossible agrave reacutealiser par le patient
lui-mecircme sur place ou par sa famille en
Afrique les gueacuterisseurs le feront en son nom agrave
leur retour au pays Dans la meacutedecine tradition-
nelle lrsquouniteacute cosmique crsquoest-agrave-dire la parenteacute
homme-nature est constamment preacutesente
Lrsquohomme est relieacute au monde mineacuteral veacutegeacutetal
ou animal mais aussi agrave celui des deacutefunts des
esprits et bien-sucircr agrave sa famille agrave son groupe
LE SUIVI DE GROSSESSE DE MME T
Depuis des anneacutees la patiente souffre en plus
de lrsquoinfection par le VIH de troubles du compor-
tement difficiles agrave diagnostiquer elle a un suivi
psychiatrique qui ne suffit pas agrave la soulager
Elle traverse des peacuteriodes drsquoagitation drsquoagres-
siviteacute et mecircme de violence Dans ses crises
elle peut aller jusqursquoagrave lrsquoautomutilation ou la ten-
tative de suicide Agrave drsquoautres moments elle est
totalement abattue leacutethargique Bien qursquoelle
connaisse sa maladie lieacutee au VIH lrsquoobservance
de sa tritheacuterapie est fonction de son eacutetat psy-
chique Elle a beacuteneacuteficieacute agrave plusieurs reprises de
consultations drsquoethnomeacutedecine en particulier
lors de cette derniegravere grossesse Du fait des
mauvais reacutesultats biologiques car elle ne prend
plus ses antireacutetroviraux le risque de contami-
nation megravere-enfant est particuliegraverement eacuteleveacute
Tregraves deacuteprimeacutee elle est transfeacutereacutee dans le ser-
vice de psychiatrie de notre hocircpital et le psy-
chiatre accepte qursquoagrave cocircteacute des traitements clas-
siques (antideacutepresseurs anxiolytiques) elle
fasse les soins traditionnels prescrits Elle a
donc une permission pour aller au marcheacute agrave
cocircteacute de lrsquohocircpital acheter un œuf blanc Elle doit
ensuite mettre cet œuf dans une grosse boicircte
drsquoallumettes exercice un peu difficile car lrsquoœuf
risque de se casser Le tout est mis dans une
calebasse recouverte drsquoun tissu blanc qursquoelle
entrepose sous son lit plus preacuteciseacutement agrave la
tecircte du lit En effet il est important qursquoelle
dorme avec cette calebasse pregraves de sa tecircte
pendant un certain nombre de nuits Puis la ca-
lebasse avec son contenu (lrsquoœuf dans la boicircte)
est remise aux gueacuterisseurs de retour au pays
ils vont effectuer leur travail agrave la termitiegravere sa-
creacutee A son retour en France le Dr Maman
remet un onguent agrave la patiente preacuteparation
faite agrave partir de lrsquoœuf et drsquoautres eacuteleacutements Elle
doit mettre reacuteguliegraverement cette pommade au-
tour de son nombril jusqursquoagrave lrsquoaccouchement
Lrsquoeacutetat psychique de la patiente srsquoameacuteliore elle
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 57
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reprend correctement son traitement lrsquoenfant
naicirct et ne sera pas contamineacute par le VIH Dans
les anneacutees qui suivront son eacutetat psychologique
se deacutegradera agrave nouveau nous nrsquoavons jamais
reacuteussi agrave la stabiliser compleacutetement Nrsquoayant ja-
mais bien suivi sa tritheacuterapie elle deacutecegravede agrave la
suite des complications du sida
A partir de cet exemple nous pouvons voir le
principe de non-seacuteparativiteacute principe essentiel
agrave lrsquoœuvre dans la meacutedecine traditionnelle afri-
caine Nous sommes ici dans un systegraveme de
penseacutee primordiale magique qui fonctionne
par analogie nous sommes dans le non-
seacutepareacute agrave la diffeacuterence de la penseacutee scientifique
qui individualise Dans ce cas clinique on voit
comment tout est relieacute il y a identiteacute entre la
grossesse et lrsquoœuf passage de lrsquohumain agrave
lrsquoanimal et aussi passage drsquoun continent agrave
lrsquoautre les gueacuterisseurs travaillant agrave distance
pour la patiente Citons agrave ce propos Pierre
Lembeye psychiatre et psychanalyste hellip
nous pouvons parler de rsquorsquonon-seacuteparativiteacutersquorsquo de
la meacutedecine traditionnelle par rapport agrave la meacute-
decine occidentale qui privileacutegie le mode seacutepa-
ratif et dont le maicirctre mot est diffeacuterence tandis
que celui des socieacuteteacutes anhistoriques est identi-
teacute La science en particulier la meacutedecine a
fait des progregraves en isolant en seacuteparant Citons
aussi Jean Benoist Lrsquoopposition carteacutesienne
entre le corps et lrsquoacircme a libeacutereacute la biologie et
donc la meacutedecine des interdits qui sacralisent
le corps hellip Lrsquoesprit lrsquoacircme tout ce qui eacutetait cou-
ramment deacutesigneacute par ces termes srsquoest prodi-
gieusement eacuteloigneacute de lrsquohorizon meacutedical
(Benoist 1993) A lrsquohocircpital crsquoest bien lrsquoorgane
malade que lrsquoon soigne mais rarement la per-
sonne dans sa globaliteacute et encore moins son
groupe familial Nous pensons analysons sur
le mode seacuteparatif celui de la coupure et selon
Pierre Lembeye La psychanalyse avec lrsquohy-
pothegravese de lrsquoinconscient opegravere aussi une cou-
pure avec le conscient Les lapsus les recircves
sont des manifestations de lrsquoinconscient alors
que dans la tradition africaine il nrsquoy a pas cette
seacuteparation par exemple chez les Ashantis au
Ghana si un homme recircve qursquoil couche avec sa
voisine il est puni et sa voisine aussi De
mecircme la psychiatrie pense aussi les probleacutema-
tiques sur le mode de la coupure le terme
schizophreacutenie provient de schizo du grec
schizein signifiant fractionnement fissure divi-
sion (P Lembeye) Dans les traitements tradi-
tionnels crsquoest la question du lien qui est au pre-
mier plan Nous avons lrsquoexemple de ce beacutebeacute
acircgeacute de huit mois enfant-cordon preacutesentant
des troubles du comportement et dont le traite-
ment est deacutecrit par Eacuteric de Rosny hellip le cor-
don ombilical le retenant aux entrailles de
lrsquoautre monde nrsquoaurait pas eacuteteacute coupeacute hellip Il srsquoagit
de lui crever les yeux crsquoest-agrave-dire de lui
rendre invisible le monde des Ancecirctreshellip (De
Rosny 1996 123-133)
La penseacutee magique qui est agrave lrsquoœuvre dans les
theacuterapies traditionnelles a-t-elle deacuteserteacute notre
systegraveme de penseacutee occidentale Dominique
Folscheid professeur de philosophie nous rap-
pelle ceci Notre meacutedecine moderniste est
due agrave lrsquoessor de la rationaliteacute mais on a oublieacute
que dans la Gregravece Antique la rationaliteacute deacutebu-
tante (avec les philosophes) srsquoaccompagnait
drsquoune vie mystique florissante Rappelons le
serment drsquoHippocrate premier code de deacuteonto-
logie meacutedical Je jure par Apollon meacutedecin
par Esculape par Hygeacutee et Panaceacutee par tous
les dieux et toutes les deacuteesseshellip Dans son
livre La nuit les Yeux ouverts Eacuteric de Rosny
cite Pierre Fegravevre Ce monde de la gueacuterison et
de la sorcellerie a quelque chose drsquounheimlich
(agrave la fois lsquolsquomysteacuterieuxrsquorsquo et lsquolsquoinquieacutetantrsquorsquo) et pour-
tant il eacuteveille des reacutesonances au plus profond
de nous-mecircmes et lrsquoon ne sait pas les-
quelles (de Rosny 1996 17) Nous-mecircmes
sans en avoir veacuteritablement conscience fonc-
tionnons sur le mode du lien du non-seacutepareacute
par exemple Reneacute Spitz psychiatre et psycha-
nalyste a deacutecrit en 1946 lrsquohospitalisme alteacutera-
tion physique grave srsquoinstallant chez le tregraves
jeune enfant placeacute en institution et seacutepareacute de
sa megravere crsquoest pourquoi aujourdrsquohui en peacutediatrie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 58
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
on facilite la preacutesence de la megravere qui peut dor-
mir au chevet de son enfant un autre
exemple celui du syndrome de glissement des
personnes acircgeacutees hospitaliseacutees qui coupeacutees de
leur environnement habituel se laissent mourir
et dans un autre registre que dire de lrsquoabsence
de chambre ndeg13 dans nos hocircpitaux nos hocirc-
tels
4 FORMATION MUTUELLE PARTAGE DE SAVOIR
Un eacutechange des savoirs srsquoest instaureacute entre les
soignants de lrsquohocircpital et lrsquoassociation
1 au niveau de lrsquoassociation les membres
drsquoURACA sont formeacutes agrave la pathologie du sida
les meacutedecins apportent leur connaissance meacute-
dicale avec des mises agrave jour sur lrsquoeacutevolution de
la pathologie et des traitements Des reacuteunions
agrave thegraveme sont organiseacutees avec un eacutelargisse-
ment agrave drsquoautres pathologies (heacutepatites dreacutepa-
nocytose)
2 au niveau des soignants formation en situa-
tion clinique participation au cycle annuel de
confeacuterences drsquoUraca voyages drsquoeacutetude dans le
village du Dr Maman au Nord-Beacutenin effectueacutes
par des meacutedecins psychiatres psychologues
assistante sociale infirmiegraveres de lrsquoAP-HP
(participation agrave des theacuterapies traditionnelles
dont le culte de danses de possession expeacute-
rience drsquoune certaine situation migratoire vil-
lage dans la brousse repegraveres diffeacuterents cadre
culturel autre adaptation au climat agrave la nourri-
turehellip)
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La nuit les yeux ouverts eacuted Seuil 1996
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tion drsquoE de Rosny eacuted Karthala 2006
LrsquoAfrique de lrsquooraliteacute et lrsquoaccueil de lrsquoEacutecriture
Paris Revue Christus ndeg225 2010
Collectif
La notion de personne en Afrique Noire Ed
LHarmattan 1973
Soins et cultures 2egravemes
Rencontres Transcul-
turelles de Tenon-Uraca Les Cahiers de
lrsquoURACA ndeg12 juin 2005 (teacuteleacutechargeable sur le
site wwwuracaorg)
Pratiques theacuterapeutiques et cultures regards
croiseacutes 3egravemes
Rencontres Transculturelles de
Tenon-Uraca 2010 videacuteos de la journeacutee en
ligne sur wwwuracaorg)
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 60
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune
pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute
L e propos de cette preacutesentation sera de
teacutemoigner de leacutevolution drsquoune pratique
de psychologue au sein dun pocircle de peacute-
diatrie bien speacutecifique celui de lrsquoHocircpital Ray-
mond Poincareacute de Garches Laccueil denfants
en deacutecompensation neuro respiratoire souf-
frant de polyhandicap de maladies chroniques
ou arrivant suite agrave un eacuteveacutenement traumatique
brutal (accident intoxication insuffisance respi-
ratoire) rend la preacutesence du psychologue neacute-
cessaire
Avec Jean en phase terminale nous reacutefleacutechi-
rons au rocircle du psychologue dans lrsquoaccom-
pagnement des enfants en fin de vie
Dautres cas cliniques preacutesenteacutes agrave loral illus-
treront ensuite les modaliteacutes de la prise en
charge post-traumatique denfants et de
leurs familles
Enfin nous terminerons par exposer la speacutecifi-
citeacute de notre travail aupregraves des soignants
ACCOMPAGNER DES ENFANTS GRAVEMENT MA-
LADES OU EN FIN DE VIE
Lors de notre premiegravere rencontre Jean nous
dit Je sais que je vais mourir mais les meacutede-
cins sont trop lacircches pour me le dire et mes
parents sont trop tristes pour mrsquoen parler
Nous lui reacutepondons Je ne te connais pas
mais en tout cas je trouve que cest super que
tu puisses en parler et que tu ne gardes pas
tout ccedila pour toi
Tregraves eacutetonneacute il reprend Alors lagrave crsquoest bizarre
drsquohabitude degraves que je dis que je vais mourir
tout le monde me dit rdquoMais arrecircte Nrsquoimporte
quoi Ne raconte pas des becirctisesrdquo Mais moi je
ne suis pas fou je sais ce que je dis et pour-
quoi je le dis et je veux pouvoir en parler
La question redoutable est tregraves vite apparue
Est-ce que crsquoest vrai que je vais mourir Il
faut alors pouvoir reacutepondre Je pense que si
tu dis ccedila crsquoest que tu as de bonnes raisons de
le penserhellip Tu es le seul agrave savoir exactement
ce que tu vis Raconte-moi qursquoest-ce qui te fait
dire ccedila
Jour apregraves jour gracircce agrave un travail psycholo-
gique Jean exprime de plus en plus sa souf-
france Se sentant eacutecouteacute il entre progressive-
ment dans une autre phase celle de lrsquoaccepta-
tion
Accompagner un enfant en fin de vie crsquoest
avant tout rester agrave son eacutecoute affronter les
questions qui mettent si mal agrave lrsquoaise (mecircme si
et surtout si on ne sait pas comment y reacute-
pondre ) Et crsquoest aussi accueillir ses interroga-
tions sur sa propre mort pour lutter contre la
solitude la peur lrsquoangoisse la colegravere
ACCOMPAGNER LES FAMILLES
Avec la megravere de Jean nous deacutecouvrons ce qui
se joue autour de la porte Degraves que nous nous
preacutesentons elle nous reacutepond Merci on nrsquoa
besoin de rien (Puis sortant de la
chambre) mais surtout vous ne lui dites pas
qursquoil va mourir vous ne lui parlerez de rien -
Oh moi non mais lui il en parle beaucoup
Tregraves surprise la megravere accepte alors de venir
en parler dans notre bureauhellip Lrsquoaccompagne-
ment commence
En phase terminale Jean perd toute autonomie
motrice et tous ses sens agrave lrsquoexception de la
vue Il ne peut plus parler Sa megravere terroriseacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 61
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
par la situation demande aux eacutequipes de lui
donner quelque chose pour dormir deacutefiniti-
vement Nous lui montrons alors qursquoune com-
munication subsiste gracircce agrave lrsquoinstauration drsquoun
code (lettres sur un tableau) avec des signes
de tecircte et des clignements drsquoœil Elle srsquoaperccediloit
alors que Jean cherche avant tout agrave savourer
les petits bonheurs de chaque jour Elle reste
ainsi jusquau bout en lien avec son fils
Accompagner les parents cest accueillir
leur eacutepuisement leurs doutes leur ambiva-
lence parfois mecircme leur demande deuthana-
sie et leur redonner une image positive deux-
mecircmes pour leur permettre drsquoinvestir lrsquoinstant
preacutesent et ainsi favoriser un accompagnement
de qualiteacute
ACCOMPAGNER AUSSI LES AUTRES ENFANTS HOS-
PITALISEacuteS ET LEURS FAMILLES
Il nous semble important de susciter des
occasions drsquoaborder le sujet de la mort en lais-
sant les familles libres de saisir ou non ces op-
portuniteacutes
ACCOMPAGNER LES SOIGNANTS
DANS LIMMEacuteDIATETEacute DE LA REacuteALITEacute CLINIQUE
En deacutecalage les eacutequipes srsquointerrogent
Doit-on vraiment lui infliger ccedila jusqursquoau bout
Sa megravere a peut-ecirctre raison on devrait peut-
ecirctre lrsquoendormir pour qursquoil ne se sente pas humi-
lieacute drsquoecirctre si diminueacute Moi je ne supporterais
pashellip Les soignants sont alors tellement preacute-
occupeacutes par la deacutecision qursquoils pensent devoir
prendre qursquoils ne se rendent pas compte que
cette megravere est en train de vivre lrsquoun des plus
grands moments drsquoamour avec son fils Le psy-
chologue devient alors le lien entre les diffeacute-
rents protagonistes en rapportant certains des
propos de Jean Je suis bienhellip Comme ce
rayon de soleil est beau aujourdrsquohuihellip La
communication se remet agrave fonctionner Leurs
regards se posent alors diffeacuteremment sur lui
La peacuteriode de fin de vie drsquoun patient con-
fronte chaque soignant agrave ses limites Chacun
perd ses illusions de toute-puissance et se re-
trouve confronteacute agrave sa propre angoisse de mort
Certains deacutestabiliseacutes ne peuvent pas suppor-
ter lideacutee decirctre confronteacute agrave la proximiteacute de la
mort Pour surmonter sans trop de seacutequelles
la confrontation reacutepeacuteteacutee agrave la maladie grave et agrave
la mort il est neacutecessaire que chacun puisse
ecirctre attentif agrave soi-mecircme agrave ses propres be-
soins pour ecirctre dans un juste rapport agrave lrsquoautre
Il sagit decirctre toucheacute sans ecirctre impliqueacute affecti-
vement cest agrave dire sans tomber dans leacutemotivi-
teacute
Apregraves chaque deacutecegraves le psychologue est
lagrave pour inviter ceux qui le deacutesirent agrave mettre en
mots ce qui a eacuteteacute veacutecu La parole partageacutee per-
met de ne pas fixer des souvenirs culpabili-
sants ou anxiogegravenes
AU LONG COURS LE TRAVAIL INSTITUTIONNEL
Le soutien des eacutequipes pluridisciplinaires
est une part tregraves importante du travail du psy-
chologue en milieu hospitalier Lrsquoeacutecoute et les
eacutechanges contribuent agrave ce que tregraves lentement
les habitudes et les mentaliteacutes eacutevoluent Ces
rencontres pourront selon les situations avoir
lieu de faccedilon formelle ou informelle (le plus
souvent dans les couloirs)
Le soutien au long cours des eacutequipes fait par-
tie inteacutegrante du travail institutionnel Diffeacuterents
outils permettent de lrsquoaccompagner au mieux
LA REacuteUNION DE SYNTHEgraveSE
Dans notre service la reacuteunion de syn-
thegravese hebdomadaire permet de se poser pour
reacutefleacutechir en eacutequipe pluridisciplinaire agrave ce que
nous vivons Il est primordial drsquoaider chaque
intervenant agrave mettre des mots sur les situations
rencontreacutees surtout quand les points de vue
sont divergents Mais il srsquoagit drsquoun travail de
longue haleine car si nous nrsquoy sommes pas
vigilants les discussions restent tregraves meacutedicales
et eacutevitent drsquoaborder lrsquoenfant et sa famille dans
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 62
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
leur globaliteacute Le psychologue par sa faccedilon de
relever les paradoxes de poser les questions
eacutethiques ou simplement de faire entendre une
autre approche que celle purement somatique
aide les eacutequipes agrave reacutefleacutechir agrave leur maniegravere
drsquoaborder les familles
LA SYNTHEgraveSE DES SYNTHEgraveSES
Une fois par an nous prenons le temps
de relire les moments forts de lrsquoanneacutee en met-
tant des mots sur ce qui a reacuteussi ou eacutechoueacute ce
qui nous a manqueacute ce qui nous a marqueacute
choqueacute ou qui est resteacute incompris Mettre des
mots agrave distance sur des malentendus (en lien
avec une famille ou un fonctionnement interne)
permet davancer en eacutequipe Nous veillons
aussi agrave reprendre point par point les eacuteleacutements
positifs rappeler les enfants sauveacutes les fa-
milles qui remercient et valoriser les eacutequipes
est essentiel pour maintenir la motivation et
lrsquoinvestissement de chacun
ET LE PSYCHOLOGUE DANS TOUT CcedilA
Face agrave ces enfants gravement malades ou en
fin de vie nous devons apprendre agrave nous
adapter Il nous faut par exemple pour pouvoir
accueillir un enfant sans aucune autonomie
respiratoire dans notre bureau apprendre au
minimum les gestes de reacuteanimation agrave effectuer
en attendant qursquoun soignant prenne la relegraveve
Alors que nous avons appris agrave ne pas toucher
il nous faut comprendre ce que le patient nous
dit non plus agrave travers des mots mais agrave travers
des maux agrave travers son corps une poigneacutee
de main un regard une mimiquehellip nous de-
vons sentir lrsquoexpression non verbale de lrsquoan-
goisse Deacuteceler si le patient a besoin de silence
ou au contraire srsquoil attend nos questions En-
fin il faut quelquefois avec une extrecircme deacuteli-
catesse et une grande attention chercher agrave re-
formuler ce que le patient nous dit avec des
lettres montreacutees sur un tableau un hochement
de tecircte ou simplement un regard
Ecirctre psychologue va souvent de pair avec une
invitation permanente agrave se remettre en ques-
tion Il srsquoagit drsquoaccepter de douter plutocirct que de
chercher des certitudes Pour srsquoadapter agrave la
speacutecificiteacute de chaque situation il nous faudra
surtout ecirctre creacuteatif et oser inventer Dans le
cas contraire notre travail restera sans doute
superficiel car il apparaicirctra comme en deacuteca-
lage par rapport aux situations veacutecues par les
patients et les eacutequipes qui les prennent en
charge
Au niveau institutionnel le travail du psycho-
logue ne porte de fruits qursquoagrave tregraves long terme
Alors ne nous deacutecourageons pas (Le deacutecou-
ragement nrsquoest-il pas notre pire ennemi ) Veil-
lons agrave prendre soin de nous soyons attentifs agrave
nos propres besoins Ne nous barricadons pas
devant la deacutetresse mais au contraire appre-
nons agrave ralentir et agrave ressentir ce qui est toucheacute
en nous Comme leacutequilibriste sur la corde
nous devons essayer davancer en souplesse
pour ne tomber ni dans lindiffeacuterence ni dans la
fusion avec les situations dramatiques rencon-
treacutees
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Geacuteriatrie Hocircpital Eacutemile Roux
M esure 1 du plan Alzheimer 2008-
2012 deacuteveloppement et diversifica-
tion des structures de reacutepits
Parce qursquoils sont contraints de veiller constam-
ment sur les malades les aidants sont soumis
agrave une pression permanente Il existe des struc-
tures qui leur permettent de souffler en offrant
par ailleurs une prestation theacuterapeutique aux
malades pendant une ou plusieurs demi-
journeacutees
Afin drsquoeacutelargir les missions des accueils de jour
qui ne srsquoadressent qursquoaux personnes malades
ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees les plates-formes drsquoac-
compagnement et de reacutepit Il srsquoagit drsquooffrir aux
aidants et aux couples des activiteacutes de soutien
de reacutepit agrave domicile ou en couple et de deacutevelop-
pement de la vie sociale
Il existe des actions de reacutepit agrave domicile de
garde agrave domicile de nuit drsquoactiviteacutes sociales
culturelles pour le couple maladeaidant et de
seacutejours vacances
Jacqueline agrave la fin drsquoun seacutejour vacances mrsquoa
confieacute deux feuilles de cahier manuscrites Jrsquoai
eacutecrit ccedila Vous le lirez si vous voulez
Je me legraveve agrave 7h Prise des meacutedicaments de
Guy Je deacutejeune moment tranquille je fais ma
toilette Je vais ouvrir les volets chez maman Il
est 8h30 Je preacutepare les meacutedicaments et le pe-
tit deacutejeuner de Guy Quelques fois je le fais
manger si je peux Je fais les lits je com-
mence agrave preacuteparer le deacutejeuner Passage du
SSIAD Pendant ce temps je preacutepare une les-
sive pratiquement une tous les jours Apregraves le
passage du SSIAD souvent il a besoin drsquoaller
aux toilettes le deacuteculotter nettoyer les WC le
reculotter ranger la salle de bain et finir ce qui
a eacuteteacute commenceacute (je ne peux rien faire en sui-
vant) Souvent fais de lrsquoadministratif preacuteparer
le courrier aller agrave la poste et au pain Il vient
avec moi il faut lrsquoaider agrave monter dans la voiture
et souvent lrsquoaider agrave descendre Il est 11h il faut
eacutetendre le linge lrsquoaider agrave faire sa gym preacuteparer
et porter le plateau agrave maman Midi Lrsquoheure de
preacuteparer et donner les meacutedicaments Mettre le
couvert couper les aliments lrsquoaider Pour lui il
faut bien 90 min de pose pour deacutejeuner
Apregraves desservir le preacuteparer pour la sieste le
deacuteculotter et reculotter lrsquoaider agrave se coucher
finir de ranger la cuisine lever et plier le linge
Il est environ 14h Petite pause 15h-15h30 la
sieste est finie Sortie dans le jardin toujours
accompagneacute Lrsquoaider agrave srsquohabiller agrave se deacutesha-
biller 16h prise des meacutedicaments et goucircter
Quelquefois passages agrave la sortie de lrsquoeacutecole
des petits enfants et leur papa Aux beaux
jours travail agrave lrsquoexteacuterieur (plus de 2000m2) La
tonte du gazon est faite par mon garccedilon et jrsquoai
agrave peu pregraves 40h par an par la caisse de retraite
compleacutementaire Jrsquoai une aide-meacutenagegravere 3 h
le mardi matin et 1 h le mercredi matin Jrsquoen
profite pour aller faire les courses ou aller chez
le docteur le dentiste ou le coiffeur ou autre
chose Et 3h le jeudi apregraves-midi Lagrave crsquoest mon
repos hebdomadaire et pas toujours Je vais agrave
lrsquoaquagym avec 2 amies mais juste en peacuteriode
scolaire On est loin des 2 jours de congeacutes par
semaine mais jrsquoen demande pas tant Vers 17h
-17h30 petite promenade dans le jardin apregraves
preacuteparation du dicircner 19h prise des meacutedica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 64
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
ments Le dicircner pour lui il faut compter 90 min
Ensuite desservir Vers 20h30 je vais deacuteshabil-
ler maman Pour lrsquoinstant elle se couche sans
aide mais au deacutebut du printemps jrsquoallais la cou-
cher vers 22h Entre-temps je deacuteshabille Guy
passage aux toilettes prise des meacutedicaments
et apregraves le coucher
Il est 22h Je respire un peu Je fais un brin de
toilette Je prends mon somnifegravere et je me
couche Je mrsquoendors ou je ne mrsquoendors pas Lagrave
on peut pleurer Personne ne le voit Dans la
nuit je me legraveve une ou deux fois quand il a be-
soin de faire son pipi
Et cela 365 jours par an Et je ne me plains
pas Il y a pire Il y a aussi mieux
Jacqueline est comme 35 millions de fran-
ccedilais Elle fait partie des personnes que lrsquoon
nomme aidant familial drsquoun proche Il srsquoagit de
son mari Cela fait 12 ans qursquoil est malade Le
quotidien de Jacqueline est rythmeacute autour de
son eacutepoux et de sa pathologie eacutevolutive
En geacuterontologie le mot aidant est utiliseacute voire
parfois revendiqueacute Un aidant mais qursquoest-ce
que crsquoest Selon lrsquoassurance maladie crsquoest
celui qui apporte seul ou en compleacutement de
lrsquointervention des professionnels lrsquoaide humaine
rendue neacutecessaire par la perte drsquoautonomie de
la personne acircgeacutee ou destineacutee agrave preacutevenir une
perte drsquoautonomie et qui nrsquoest pas salarieacute pour
cette aide
Depuis une quinzaine drsquoanneacutees le veacutecu des
aidants familiaux fait lrsquoobjet de recherches On
sait aujourdrsquohui que 800 000 personnes sont
recenseacutees comme eacutetant en eacutetat de deacutepen-
dance en France crsquoest-agrave-dire qursquoelles ne peu-
vent pas effectuer de maniegravere autonome les
actes de la vie courante Et que cela est forte-
ment correacuteleacute agrave lrsquoavanceacutee en acircge la personne
aideacutee a 76 ans en moyenne
Si le lien familial preacutedomine lrsquoaidant peut aussi
ecirctre un ami ou un voisin Il srsquoagit le plus sou-
vent drsquoune femme acircgeacutee de plus de 50 ans
Bien que deux tiers des aidants srsquooccupent
quotidiennement de la personne aideacutee 60
drsquoentre eux continuent agrave avoir une activiteacute sala-
rieacutee
Lrsquoaide agrave un proche dure en moyenne 7 ans
Dans la relation drsquoaide plusieurs probleacutema-
tiques sont en jeu le deuil du parent conjoint
tel qursquoil eacutetait auparavant le renversement des
rocircles de lrsquoordre des geacuteneacuterations la crainte face
agrave son propre vieillissement les difficulteacutes de
communication avec le proche malade la
crainte de la perte du lien
La relation drsquoaide a ses apports la majoriteacute
des aidants disent se sentir utile et trouver du
plaisir dans cette relation Mais elle a aussi ses
limites et ses risques On sait aujourdrsquohui que
la mortaliteacute des aidants augmenterait de 63
que le risque de deacutepression est multiplieacute par 3
Dans cette aide au quotidien le rythme la reacute-
peacutetition lrsquoeacutevolution de la maladie peuvent ame-
ner agrave des sentiments drsquoisolement de surme-
nage et drsquoeacutepuisement
Si plus de 60 des personnes atteintes de la
maladie drsquoAlzheimer ou apparenteacutees vivent agrave
leur domicile crsquoest gracircce agrave un aidant familial
qui toute la journeacutee est dans le faire Lrsquoaidant
familial contrairement agrave lrsquoaidant professionnel
nrsquoest pas formeacute agrave cet accompagnement il base
sa relation agrave partir drsquoun lien affectif avec la per-
sonne qursquoil aide Il peut ecirctre reacutemuneacutereacute sil a
lrsquoacircge de travailler et qursquoil nrsquoest pas son conjoint
Il nrsquoa pas drsquoheures fixes
On peut donc comprendre le besoin parfois de
se poser un peu
Plutocirct que le mot vacances est apparu reacute-
cemment le mot reacutepit
Des seacutejours de reacutepit pour les aidants
Une expression forte qui vient nommer la souf-
france du proche dans la relation drsquoaide
Agrave croire que la personne dite aideacutee nrsquoa elle
pas besoin de temps de pause et que son quo-
tidien lui suffit parfaitement La femme de
Pierre me dira mon meacutedecin et son neuro-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 65
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
logue mrsquoavaient deacuteconseilleacute de lrsquoemmener ici
En France les vacances sont un droit pour les
salarieacuteshellip
Mais au fait agrave quoi ccedila sert des vacances Eh
bien avant tout agrave couper avec le quotidien An-
dreacute Comte-Sponville eacutevoque les vacances
comme un moment de liberteacute
Srsquoaccorder une pause crsquoest ainsi que nous
avons nommeacute le seacutejour de vacances que je
vais vous preacutesenter
Le seacutejour est proposeacute par une caisse de re-
traite compleacutementaire qui contacte ses adheacute-
rents Le point commun est qursquoil existe entre un
adheacuterent et un de ses proches une relation
drsquoaide au quotidien Le projet a eacuteteacute construit et
penseacute avec une association qui intervient dans
lrsquoaccompagnement de lrsquoavanceacutee en Acircge
Le groupe est composeacute en moyenne de 7
couples la moyenne drsquoacircge des aidants est de
74 ans et celle des aideacutes de 80 ans
Les participants viennent de la France entiegravere
Ils ne se connaissent pas Nous ne les con-
naissons pas
La majoriteacute des aideacutes preacutesentent des pro-
blegravemes cognitifs ou des difficulteacutes motrices
Le lieu est une structure de vacances (type reacute-
sidence hocircteliegravere) adapteacutee aux personnes han-
dicapeacutees
Le seacutejour a eacuteteacute penseacute avec la preacutesence de
deux personnes dite en fil rouge de la se-
maine la coordonnatrice de lrsquoassociation creacutea-
trice du projet et la psychologue Partager le
quotidien du petit deacutejeuner au dicircner de lrsquoac-
cueil jusqursquoau deacutepart
Drsquoautres intervenants (intervenant en Taiuml-Chi
Chuan une socio-estheacuteticienne intervenant en
chant et expression corporelle activiteacute autour
de la terre) rejoignent le groupe en deacutecaleacute afin
de conserver une alternance des pratiques
mais aussi une preacutesence renforceacutee en milieu
de semaine moment ougrave nous pouvons com-
mencer agrave seacuteparer les duos
Lrsquoaspect meacutedicaliseacute parfois neacutecessaire est re-
layeacute par des infirmiegraveres libeacuterales qui intervien-
nent sur le lieu de vacances
Le planning de la semaine est proposeacute avec
des activiteacutes ensemble seacutepareacutees en groupe
individuelles toujours dans la proposition et
non dans la contrainte Le rythme des journeacutees
srsquoadapte tous les jours
Les objectifs de la semaine
Permettre agrave chacun aidant comme aideacute de
srsquoaccorder veacuteritablement une pause en profi-
tant pleinement du site et drsquoun accompagne-
ment qui facilite leur quotidien pendant la se-
maine (absence de tacircches meacutenagegraveres repas
servis au restaurant possibiliteacute drsquoaccompagne-
ment de la personne aideacutee pour quelques
heures proposition drsquoanimations proposition
de temps dlsquoeacutechanges et de paroles)
Favoriser lrsquoacquisition et le partage drsquooutils mecirc-
lant expeacuteriences et connaissances que les per-
sonnes pourront reacuteutiliser une fois de retour au
domicile
Nous ne nommons pas les personnes par leur
fonction aidant ou aideacute mais par leur preacutenom
Chaque duo est composeacute drsquoune personne
ayant un badge vert et lrsquoautre saumon Ainsi
certaines activiteacutes sont proposeacutees agrave tous et
drsquoautres agrave chaque groupe de couleur diffeacuterente
Lrsquoanalyse des questionnaires de satisfaction ou
du bilan oral nous confortent encore dans lrsquoideacutee
que ces objectifs reacutepondent bien agrave ceux des
personnes et sont atteignables dans le cadre
de ces seacutejours
Crsquoest lrsquooccasion de partager une semaine de
vacances tout agrave fait diffeacuterente du quotidien et
des repegraveres de chacun Le groupe se creacutee degraves
les premiegraveres heures de rencontre agrave lrsquoarriveacutee
Tout au long de la semaine chacun eacutevolue
dans sa propre probleacutematique
Les aidants deacutecouvrant drsquoautres pairs eacutechan-
geant avec drsquoautres prenant distance vis agrave vis
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 66
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
de leur veacutecu et deacutecouvrant le comportement de
leur proche avec drsquoautres personnes profes-
sionnels ou non
Les aideacutes qui se sont saisis des possibiliteacutes
offertes de faire autrement deacutecouvrir drsquoautres
vivre des moments de plaisir malgreacute le handi-
cap ou la maladie Eacutechanger avec drsquoautres qui
vivent des situations similaires
Lrsquoeacutevolution du groupe dans lequel une con-
fiance mutuelle srsquoinstalle et permet des interac-
tions et des eacutechanges tregraves riches humaine-
ment Chacun a pu recevoir et apporter agrave
lrsquoautre qursquoil soit aideacute ou aidant
Durant tout le seacutejour tout le monde peut se po-
ser deacutecouvrir lrsquoautre se deacutecouvrir dans des
moments partageacutes individuels ou collectifs
Proposer plein drsquounivers diffeacuterents des compeacute-
tences diffeacuterentes (prof de tai-chi le corps
penseacute le chant le savoir de lrsquoeacutemotion la socio-
estheacuteticienne le mieux avec soi-mecircme)hellip
Et le psychologue dans tout ccedila
Dans ce type de vacances jrsquointerviens en bi-
nocircme avec la responsable du seacutejour du deacutebut
du seacutejour jusqursquoau deacutepart des participants
Je me preacutesente en tant que psychologue Pour
la plupart crsquoest la premiegravere fois qursquoils rencon-
trent quelqursquoun de cette profession Vous allez
mrsquoanalyser me demande Jacques au deacutebut
du seacutejour Finalement vous ecirctes sympas les
psys Vous croyez qursquoil en y en pregraves de chez
moi me demandera-t-il en fin de seacutejour
Je suis tout le temps avec eux du soir au ma-
tin Pas tregraves acadeacutemique comme cadre de tra-
vail et pourtant comme souvent la clinique
vient nous proposer de penser autrement
Le rocircle essentiel du psychologue est que du
deacutebut agrave la fin du seacutejour il propose ce que je
nomme des bras psychiques Les 4 bras les
bras du cadre formel et les bras psychiques Fil
rouge tout le long du seacutejour Crsquoest par ce cadre
-lagrave que chacun va pouvoir se deacutetendre libeacuterer
la parole Lacirccher le faire du quotidien pour
tendre vers le vivre le ressentir et le partager
durant le seacutejour
Pour le psychologue partager le quotidien (du
petit deacutejeuner au dicircner) crsquoest ne pas ecirctre tout
le temps dans la distance mais ecirctre dans la
juste distance Alterner des moments formels
proposition de groupes de parole durant le seacute-
jour pour les personnes en situations drsquoaider et
celles qui reccediloivent de lrsquoaide) et de temps infor-
mels Crsquoest ecirctre disponible Crsquoest garantir lrsquoexis-
tence du maintien de la vie psychique et recon-
naicirctre la personne en tant que sujet pensant
ressentant deacutesirant
Tisser des liens Lacirccher le bras de son malade
changer de bras Faire confiance agrave lrsquoautre et
deacutecouvrir ainsi que lrsquoon peut soutenir lrsquoautre
dans ce qursquoil est capable de donner Faire con-
fiance est possible si le cadre est suffisamment
contenant pour se lrsquoautoriser
Deacutecloisonner les rocircles et les fonctions de cha-
cun Les cloisons tombent Le fil qui nous tient
et nous unit dans le lien agrave lrsquoautre reste Prendre
soin de soi
Exemple du massage des mains avec la socio-
estheacuteticienne En groupe de parole eacutemerge
alors que les mains ne servent pas qursquoagrave se te-
nir ou tenir lrsquoautre les mains se croisent dans
le relationnel et la communication Ne plus ecirctre
dans le soigner la maladie mais dans le pren-
dre soin de ce qui nous lie agrave lrsquoautre
Accompagner lrsquoaidant agrave cheminer vers le si
moi je vais mieux alors lui ira peut ecirctre mieux
au lieu de si il va bien je vais bien
Durant le seacutejour je prends des notes tous les
soirs sur chaque participant Notes drsquoimpres-
sion de ressenti et de questions qui me per-
mettent de comprendre lrsquoeacutevolution psycho-
dynamique de chacun et de chaque duo
Deux fois en moyenne durant le seacutejour jrsquoap-
pelle une collegravegue afin de pouvoir parler pen-
ser et eacutelaborer le veacutecu partageacute
Je propose un moment de reacuteflexion sur la rela-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 67
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
tion drsquoaide avec les aidants Je propose un
temps de parole et drsquoeacutechange sur le veacutecu de
lrsquoaideacute
Lors du bilan le rocircle de la psychologue est tou-
jours valoriseacute Non confondu avec les temps
drsquoanimation crsquoest un espace drsquoeacutechange de soi
et de lrsquointime qui est possible parce qursquoun lien
de confiance dans le quotidien srsquoest creacuteeacute Nous
partageons nos savoirs ceux de ma connais-
sance avec ceux de leur expeacuterience Jrsquoai deacute-
couvert ce que crsquoest une psy Ce nest pas si
grave ccedila srsquoavegravere mecircme plutocirct utile
Ces seacutejours sont lrsquooccasion aussi pour les pro-
fessionnels intervenants drsquoenrichir leurs con-
naissances et leurs pratiques vis-agrave-vis de ce
qursquoest la relation aidant-aideacute en partageant leur
quotidien pendant quelques jours
Comprendre le lien aidantaideacute dans ce qui se
joue au quotidien au plus intime au plus pro-
fond
Le seacutejour ne dure qursquoune semaine Cette se-
maine est en dehors du quotidien de chacun
Elle montre que de vivre eacutechanger rire parta-
ger du plaisir avec drsquoautres est possible et es-
sentiel Elle permet ainsi aux couples ou duos
de se ressourcer et de repeacuterer les plaisirs qui
fondent et nourrissent leur relation partageacutee
Merci de votre attention
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 68
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Hocircpital Saint Louis
gt Laccompagnement psychologique par teacuteleacute-
phone dans les maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere Page 69
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale de
grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Hocircpital Jean Verdier Page 78
gt Psychologue clinicien aupregraves du personnel
missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
Page 82
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 69
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les
maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere
L a Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des
Maladies de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) a
eacuteteacute creacuteeacutee en 2001 par le Ministegravere des
Solidariteacutes de la Santeacute et de la Famille A la
disposition du grand public et des profession-
nels de terrain elle a pour mission lrsquoaide au
diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale so-
ciale et psychologique des patients et de leur
famille
La Cellule est nicheacutee au cœur de lrsquohocircpital de la
Pitieacute-Salpecirctriegravere dans lrsquoune des trois loges au-
trefois destineacutees aux alieacuteneacutes Elle a la particu-
lariteacute de ne pas accueillir physiquement le pu-
blic auquel elle srsquoadresse lrsquoaide qursquoelle pro-
pose srsquoeffectue essentiellement par teacuteleacutephone
En juin 2003 jrsquointegravegre pour un tiers-temps de
psychologue lrsquoeacutequipe deacutejagrave composeacutee drsquoun meacute-
decin coordinateur drsquoun meacutedecin attacheacute
drsquoune assistante sociale drsquoune assistante de
recherche clinique et drsquoune secreacutetaire
A cette eacutepoque je treacutebuche agrave lrsquoenvi sur lrsquoimpro-
nonccedilable Creutzfeldt-Jakob et examine drsquoun
œil dubitatif ma fiche de poste comment assu-
rer un soutien psychologique exclusivement
teacuteleacutephonique Eacutetait-ce reacutealisable efficace ad-
missible
PREacuteAMBULE
Les Maladies de Creutzfeldt-Jakob sont con-
nues de longue date les premiers cas ont eacuteteacute
deacutecrits par Creutzfeldt et Jakob dans les an-
neacutees 1920 Ce sont des maladies neurodeacutegeacute-
neacuteratives rares (qui se traduisent par une deacute-
mence et une grabatisation) 15 cas par mil-
lion drsquohabitants et par an dans tous les pays ougrave
existe une surveillance eacutepideacutemiologique En
France elles concernent une centaine de cas
par an
Principalement connues du grand public sous
le nom de maladie de la vache folle il existe
pourtant trois formes diffeacuterentes de MCJ avec
pour chacune drsquoelles ses speacutecificiteacutes On les
classe en fonction de leur mode de transmis-
sion la forme sporadique (aleacuteatoire) les
formes heacutereacuteditaires (MCJ geacuteneacutetiques syn-
drome de Gertsmann-Straussler-Scheinker
Insomnie Fatale Familiale) et les formes ac-
quises (formes iatrogegravenes des hormones de
croissance variante de la MCJ)
Le poste de psychologue avait eacuteteacute creacuteeacute pour se
consacrer principalement au travail drsquoeacutecoute
des personnes agrave risque de deacutevelopper une
MCJ suite agrave un traitement par hormones de
croissance contamineacutees Puis il srsquoest eacutetendu agrave
lrsquoeacutecoute de toute personne concerneacutee directe-
ment ou non par une MCJ quelle qursquoen soit la
forme
DE LrsquoENTRETIEN PONCTUEL AU SUIVI
La nature teacuteleacutephonique des entretiens psycho-
logiques est le fait drsquoune indeacutepassable reacutealiteacute
la dimension nationale du champ drsquointervention
de la Cellule exclut lrsquoeacuteventualiteacute drsquoentretiens en
face agrave face Mais si en 2011 les suivis psycho-
logiques par teacuteleacutephone se deacuteveloppent agrave
grands pas en 2003 rien nrsquoeacutetait moins eacutevident
que cette forme drsquoaccompagnement lagrave
Agrave cette eacutepoque drsquoailleurs la prise en charge
psychologique au sein de la Cellule se limitait agrave
la proposition drsquoun entretien teacuteleacutephonique pour
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 70
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
faire le point agrave des personnes qui avaient ap-
peleacute pour une toute autre demande principale-
ment drsquoordre meacutedical ou social Agrave lrsquooccasion de
ces demandes certains appelants manifes-
taient des signes de souffrance lieacutee agrave leur si-
tuation peur de la maladie du risque de la deacute-
velopper anxieacuteteacute suite agrave lrsquoannonce de la mala-
die drsquoun proche imminence de son deacutecegraves etc
Les membres de lrsquoeacutequipe les informaient alors
de la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par la psycho-
logue de la Cellule pour parler des difficulteacutes
qursquoils traversaient en ces moments critiques
Ces entretiens teacuteleacutephoniques ponctuels (de 45
minutes) eacutetaient destineacutes agrave contenir les an-
goisses et la deacutetresse des appelants Puis au
besoin jrsquoorganisais un suivi psychologique de
proximiteacute (psychologues ou psychiatres libeacute-
raux Centres Meacutedico-Psychologiques
(CMP)
Ainsi la proceacutedure entretien ponctuel - reacuteorien-
tation nous semblait reacutepondre au besoin ponc-
tuel drsquoeacutetayage des appelants et correspondre
aux exigences de fonctionnement en plate-
forme nationale de la Cellule Circonscrite pla-
nifieacutee et probablement eacuteconomique sur le plan
psychique cette proceacutedure nous rassurait-elle
aussi Quand bien mecircme elle a plieacute sous le
poids de la reacutealiteacute et a consideacuterablement eacutevo-
lueacute depuis 2003
En effet alors que le nombre annuel de ma-
lades concerneacutes par les MCJ demeure stable
le volume annuel drsquoentretiens psychologiques
lui est passeacute de 40 agrave 260 en huit ans Ainsi
110 personnes ont eacuteteacute suivies ou ont beacuteneacuteficieacute
de seacutequences de soutien de plus de 3 entre-
tiens teacuteleacutephoniques Cela repreacutesente 84 des
personnes ayant eu un premier contact avec le
psychologue Et tandis que la proceacutedure preacute-
voyait un ou deux entretiens la dureacutee des sui-
vis est en moyenne de neuf mois (de trois se-
maines agrave trois ans) drsquoune rythmiciteacute allant drsquoun
entretien hebdomadaire agrave un entretien men-
suel en fonction des besoins Comment expli-
quer cette eacutevolution
Faut-il incriminer les traditionnels obstacles re-
latifs agrave la prise en charge psychologique de
proximiteacute rareteacute des psychologues dans cer-
taines reacutegions surcoucirct financier drsquoune theacuterapie
CMP engorgeacuteshellip Peut-ecirctre mais ils ne suf-
fisent pas agrave expliquer lrsquoaugmentation remar-
quable du nombre drsquoentretiens psychologiques
ni lrsquoallongement de la dureacutee des suivis
Aujourdrsquohui nous pouvons avancer drsquoautres
arguments pour expliquer cette eacutevolution ce
sont les particulariteacutes de la maladie tout autant
que celles lieacutees agrave la teacuteleacutephonie qui ont engen-
dreacute ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique
LE CADRE
Un constat les orientations pourtant
travailleacutees (contact teacuteleacutephonique avec le psy-
chologue de proximiteacute informations deacutetailleacutees
sur les speacutecificiteacutes de la maladie et leur impact
sur lrsquoentourage) nrsquoont qursquoexceptionnellement
abouti les patients demandaient agrave reprendre
contact avec la psychologue de la Cellule Par-
tant de ce constat le dispositif drsquoaide psycholo-
gique proposeacute par le psychologue aux per-
sonnes qui appelaient a rapidement eacutevolueacute
Les quelques hypothegraveses concernant la difficul-
teacute du recours agrave la proximiteacute seront abordeacutees
tout au long de cet article
Agrave lrsquoheure actuelle quelle que soit la forme de
MCJ lrsquoappelant contacte la Cellule pour une
demande drsquoaide principalement drsquoordre meacutedi-
cal Les deux meacutedecins nrsquoeacutetant pas preacutesents agrave
la Cellule en permanence crsquoest la secreacutetaire
qui recueille les attentes Elle preacutesente le fonc-
tionnement global de la Cellule et eacutevoque sys-
teacutematiquement la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par
la psychologue Lorsqursquoelle ressent particuliegrave-
rement intenseacutement la deacutetresse de lrsquoappelant
elle insiste sur lrsquoimportance drsquoun entretien avec
la psychologue qui connaicirct tregraves bien la mala-
die un argument de poids pour les personnes
deacutesempareacutees qui heacutesitent pourtant agrave demander
de lrsquoaide
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 71
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Rares sont ceux qui demandent spontaneacutement
un entretien psychologique Mais rares sont
ceux qui le refusent lorsqursquoil leur est proposeacute
Cette invitation agrave ecirctre entendu loin de court-
circuiter la deacutelicate question de la demande
theacuterapeutique nous semble plutocirct lui permettre
drsquoadvenir Agrave ce titre nul doute que le deacutevelop-
pement du nombre de suivis psychologiques
reacutealiseacutes agrave la Cellule est en rapport direct avec
les qualiteacutes drsquoaccueil et lrsquoacuiteacute intuitive de sa
secreacutetaire
Ainsi cette derniegravere prend note des disponibili-
teacutes horaires de lrsquoappelant et apregraves avoir re-
cueilli lrsquoaccord preacutealable de ce dernier me les
transmet au plus vite Mon premier appel au
cours duquel nous eacutevoquons la situation de
crise a souvent lieu dans les 48 heures Cette
reacuteactiviteacute de prise de contact est un eacuteleacutement
deacuteterminant dans lrsquoeacutetablissement drsquoun lien de
confiance la premiegravere pierre drsquoun espace con-
tenant
Nous ne reacutealisons pas ou peu drsquoentretiens en
urgence la Cellule ne srsquoapparente pas agrave une
permanence drsquoeacutecoute 24h24 Drsquoailleurs la
simple date de rendez-vous sur mon agenda a
suffit agrave me calmer (hellip) Jrsquoeacutetais compleacutetement
bloqueacutee paniqueacutee et je me suis remise agrave pen-
ser et agrave geacuterer le quotidien que je ne geacuterais
plus
Ce premier entretien a une tonaliteacute toute parti-
culiegravere Agrave lrsquoinverse peut-ecirctre drsquoun premier ren-
dez-vous en face agrave face lrsquoentretien teacuteleacutepho-
nique semble provoquer un relacircchement des
meacutecanismes de deacutefenses et lrsquoeacutemergence des
processus primaires affolement pleurs pen-
seacutees parfois deacutesorganiseacutees coq agrave lrsquoacircne Lrsquoap-
pelant se deacuteverse deacuteballe tout en vrac Un
relacircchement induit drsquoabord par lrsquoabsence
drsquoinformations visuelles cette sorte de veacutecu
drsquoanonymat qui autorise la leveacutee de la cen-
sure Vous ne me voyez pas alors je peux
tout dire sans conseacutequences Pourtant nom
preacutenom situation familiale et localisation geacuteo-
graphique pourraient objectivement freiner le
veacutecu drsquoanonymat Il nrsquoen est rien Ce premier
entretien ndash et les quelques suivants - souli-
gnent ainsi la primauteacute du voir sur le savoir de
lrsquoautre
Un relacircchement doublement favoriseacute par le fait
que lrsquoappelant demeure dans un espace qui lui
est propre familier choisi Je suis dans ma
chambre jrsquoai fermeacute la porte Je me suis ins-
talleacutee dans ma voiture pour notre rendez-vous
ici je suis tranquille et en seacutecuriteacute
Notons que le psychologue nrsquoeacutechappe pas agrave
cet effet de relacircchement calfeutreacute qursquoil est
dans son espace soustrait au poids du regard
de lrsquoautre Un relacircchement du corps qui favo-
rise le flottement neacutecessaire agrave son travail
drsquoeacutecoute des processus inconscients agrave lrsquoœuvre
chez lrsquoappelant
Dans la tregraves grande majoriteacute des cas le pre-
mier appel donne lieu agrave un second rendez-vous
teacuteleacutephonique dont nous convenons ensemble
des termes (date et heure) Le choix de la du-
reacutee des entretiens (toujours de 45 minutes) deacute-
coule certainement de notre pratique de lrsquoentre-
tien en face-agrave-face mais il srsquoest aveacutereacute tout agrave fait
pertinent dans la pratique de lrsquoentretien teacuteleacute-
phonique puisque trois quarts drsquoheure laissent
le temps agrave la personne drsquoeacutelaborer ses ressen-
tis Cette dureacutee nrsquoest pas drsquoembleacutee annonceacutee
mais plutocirct suggeacutereacutee Nous allons en rester lagrave
pour aujourdrsquohui parce qursquoil est lrsquoheurehellip nous
nous retrouvons donc lehellip agravehellip conclut systeacute-
matiquement nos entretiens
Crsquoest freacutequemment au deacutecours du troisiegraveme
entretien que les questions se posent sur la
poursuite et les modaliteacutes de la prise en
charge Vous consultez ougrave Je vous dois
combien Jrsquoai droit agrave combien drsquoentre-
tiens Agrave ces questions la prise en charge
exclusivement teacuteleacutephonique (aucun deacuteplace-
ment) la gratuiteacute (la Cellule prend en charge
tous les entretiens) et la possibiliteacute drsquoecirctre suivi
tant que le besoin srsquoen fait sentir srsquoapparente agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 72
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
un apaisant holding winicottien Dans ma si-
tuation crsquoest incroyable drsquoavoir le droit de se
laisser porterhellip
Les particulariteacutes du dispositif de suivi teacuteleacutepho-
nique semblent ainsi reacutepondre aux exigences
de la reacutealiteacute des appelants La premiegravere drsquoentre
-elles lrsquoabsence de deacuteplacement et la grande
souplesse drsquoorganisation qui en deacutecoule allegravege
consideacuterablement leur quotidien phagocyteacute par
la maladie Une theacuterapie en cabinet aurait eacuteteacute
inconciliable avec notre reacutealiteacutehellip tout autant
qursquoinfiltreacute de sentiments de culpabiliteacute
Comment prendre le temps de me plaindre
alors qursquoelle est en train de mourirhellip Je sais
que crsquoest important de parler mais je nrsquoaurais
pas pris le temps de consulter pour moi tandis
que ce temps est si preacutecieuxhellip je veux le pas-
ser aupregraves drsquoellehellip ccedila me soigne de ne pas
perdre une minute Ainsi pourtant installeacutes
chez eux ils peuvent srsquoabsenter sans culpabili-
teacute excessive Je ne suis pas loin de lui mais je
suis en consultation juste pour moihellip Je suis
seule avec lui
La seconde particulariteacute du suivi psychologique
par teacuteleacutephone compareacute agrave un dispositif theacutera-
peutique classique reacuteside dans le fait que crsquoest
le psychologue qui appelle systeacutematiquement
le patient Au moment ougrave lrsquoeacutetayage social fami-
lial et parfois professionnel se fissure et ougrave la
difficulteacute drsquoappeler agrave lrsquoaide se fait sentir cette
deacutemarche inverseacutee nrsquoest pas deacutenueacutee drsquoeffet
theacuterapeutique Crsquoest toujours nous qui de-
mandons partout de lrsquoaidehellip et lagrave quel repos
que ce soit vous qui veniez jusqursquoagrave moihellip Je
nrsquoaurais pas eu la force de faire une deacutemarche
de plushellip ccedila mrsquoaide agrave continuerhellip
Enfin ajoutons que dans ce temps extra-
ordinaire ougrave tout leur coucircte ougrave crsquoest nous qui
donnons tout de nous tout notre temps toute
notre eacutenergiehellip la gratuiteacute de la prise en
charge est un eacuteleacutement important pour les per-
sonnes qui appellent Cette gratuiteacute de soins
repreacutesentative des modaliteacutes de prises en
charge psychologiques agrave lrsquohocircpital contribue agrave
restaurer leur sentiment drsquoecirctre consideacutereacutees et
reconnues dans leur souffrance On srsquooccupe
aussi de moi
Neacuteanmoins certains appelants qui avaient en-
visageacute de consulter en libeacuteral ainsi precircts agrave de-
mander de lrsquoaide se deacuteplacer et payer leur
seacuteance srsquoeacutetaient vus confronteacutes agrave un autre
obstacle somme-toute infranchissable le ca-
ractegravere indicible du veacutecu des MCJ Comment
parler agrave quelqursquoun qui nrsquoa jamais vu cette mala-
die monstrueuse (hellip) Il faut la voir pour sa-
voirhellip Ici (agrave la Cellule) je suis en seacutecuriteacute vous
savez de quoi je parle sans que jrsquoen parle vrai-
ment (hellip) vous avez les mecircmes images que
moi dans la tecircte Pour ces appelants qui cher-
chent une communauteacute drsquoexpeacuterience le psy-
chologue se doit drsquoecirctre un sujet dont le savoir
nrsquoest pas que supposeacute
SUIVI POUR QUI SUIVI POUR QUOI
Nous distinguons trois cateacutegories drsquoappelants
les personnes malades crsquoest agrave dire symptoma-
tiques leur entourage (conjoints enfants pa-
rents fregraveres et sœurs) et les personnes agrave
risque de deacutevelopper la maladie (drsquoorigine geacute-
neacutetique ou iatrogegravene) Les appels des profes-
sionnels (assez rares) ne seront pas traiteacutes
dans cet article
En huit ans seulement trois personnes ma-
lades ont eacuteteacute en contact avec le psychologue
par teacuteleacutephone et nrsquoont beacuteneacuteficieacute que de deux
entretiens en moyenne En effet dans la majo-
riteacute des cas la maladie est suspecteacutee tardive-
ment apregraves une longue peacuteriode drsquoerrance meacute-
dicale Si bien que le patient deacutejagrave tregraves sympto-
matique est rarement en capaciteacute de parler
suffisamment distinctement (dysarthrie) pour
beacuteneacuteficier drsquoun entretien teacuteleacutephonique Drsquoautant
que les troubles neuropsychologiques et psy-
chiatriques associeacutes agrave une freacutequente anoso-
gnosie et une eacutevolution preacutecipiteacutee de la mala-
die rendent complexes la mise en place drsquoun
suivi
Monsieur K prend contact avec la Cellule ef-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 73
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
frayeacute par la deacutegradation de son eacutetat il tremble
tombe et perd la meacutemoire Il craint drsquoecirctre atteint
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob dont il se
sait agrave risque suite agrave un traitement par hor-
mones de croissance contamineacutees Je nrsquoose
pas en parler on va me regarder bizarrement
et srsquoinquieacuteter peut-ecirctre pour rien Mais lrsquoentre-
tien est difficile agrave mener au regard des troubles
cognitifs et dysarthriques de Monsieur K Nous
convenons neacuteanmoins drsquoun rendez-vous teacuteleacute-
phonique la semaine suivante Le jour-dit je
lrsquoappelle agrave son domicile Il ne se souvient ni de
moi ni de la raison de mon appel Il comprend
agrave peine les mots que je prononce Il raccroche
Crsquoest donc principalement agrave lrsquoentourage du ma-
lade que srsquoadresse le soutien psychologique
par teacuteleacutephone un entourage deacutemuni devant
cette maladie que personne ne connaicirct qui
effraie tout le monde et qui laisse chacun en
proie agrave un profond sentiment drsquoisolement Freacute-
quemment rencontreacute au deacutecours drsquoautres pa-
thologies neurodeacutegeacuteneacuteratives le sentiment
drsquoisolement semble pourtant exacerbeacute par les
speacutecificiteacutes de cette maladie meacuteconnue que
les meacutedias ont tocirct fait drsquoassimiler agrave une forme
de peste contagieuse foudroyante
monstrueuse Des qualificatifs qui srsquoillustrent
parfois crucircment dans la reacutealiteacute par un compor-
tement exageacutereacutement eacutevitant du corps meacutedical
Ils portent des masques des gants et entrent
prudemment dans la chambre Que dire en-
core de lrsquoamalgame de toutes les formes de
MCJ avec la plus meacutediatiseacutee drsquoentre-elles -la
vache folle - si ce nrsquoest qursquoil en ajoute au senti-
ment drsquoeacutetrangeteacute qursquoelles provoquent deacutejagrave
Ce nrsquoest pas un animal crsquoest un ecirctre hu-
main Mais ce nrsquoest pas tant la maladie qui
est contagieuse que lrsquoidentification menaccedilante
qursquoelle propose lrsquoidentification agrave lrsquoEcirctre animal
archaiumlque et agrave lrsquoEcirctre deacutement qui nrsquoest plus lui-
mecircme agrave la fois posseacutedeacute et deacuteposseacutedeacute de
son humaniteacute Les MCJ quelle qursquoen soit la
forme figureraient-elles la barbarie au sens
eacutetranger et sauvage du terme
Les familles sont comme prises au piegravege de
ces repreacutesentations collectives dont la vio-
lence inouiumle (jamais entendue) semblent les
expulser aux confins de la communauteacute hu-
maine Quand on a dit ce qursquoil avait tout le
monde a disparuhellip On a eu beau expliquer
qursquoil nrsquoy avait pas de risque de transmission
les gens sont terrifieacutes et prennent leur distance
Il nrsquoy a plus personne agrave qui parler Mais cette
expulsion nrsquoest pas toujours le fait du monde
exteacuterieur Lrsquoentourage peut se retirer spontaneacute-
ment du monde pour se soustraire au regard
que ce dernier pourrait porter sur lui Je ne
voulais pas qursquoon nous regarde comme des
becircteshellip alors jrsquoai disparu de la circulation
Dans ce contexte de mise en quarantaine dic-
teacutee ou spontaneacutee la seule ideacutee de lrsquoexistence
de la Cellule fait fonction de terre drsquoasile de
support identificatoire Un support identifica-
toire renarcissisant Ici je peux reprendre
forme humainehellip il y a quelqursquoun au bout du fil
Quelqursquounhellip et je me sens quelqursquoun en mi-
roir Parce qursquoavec tout ce qui nous arrive je
me sens tantocirct comme un chien galeux tantocirct
trimbaleacute comme un objethellip et de par son nu-
meacutero drsquoappel unique doubleacute drsquoune prise en
charge globale un support identificatoire struc-
turant Jrsquoai lrsquoimpression qursquoelle part en mor-
ceauxhellip petit bout par petit bouthellip lrsquoeacutequilibre la
tecircte la marche la vision la parolehellip sa vie
part en lambeauxhellip et moi je nrsquoarrive plus agrave
me rassemblerhellip Mais il y a tout le monde
(meacutedecins assistante sociale psychologue)
ici agrave la Cellulehellip ccedila me rassure de savoir que
vous parlez tous la mecircme langue que vous
faites corps
Outre lrsquoentourage des malades des personnes
dites agrave risque font appel agrave la Cellule des per-
sonnes agrave risque de MCJ suite agrave un traitement
par hormones de croissance contamineacutees et
des personnes agrave risque de MCJ drsquoorigine geacute-
neacutetique Dans les deux cas le veacutecu subjectif de
risque prend en otage les perspectives drsquoave-
nir Parce qursquoil annonce en mecircme temps le pire
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 74
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et la possibiliteacute drsquoy eacutechapper parce qursquoil
nrsquoindique ni la victime ni lrsquoheure de la catas-
trophe le risque peut donner agrave cette derniegravere
un caractegravere omnipreacutesent Quand je vais
bien je me prends agrave espeacuterer que je ne serai
jamais malade que tout ccedila nrsquoeacutetait qursquoun cau-
chemar Mais quand je me sens mal le risque
drsquoecirctre malade se transforme en fataliteacute Je me
sens condamneacutee (hellip) Finalement que ce soit
par lrsquoespoir ou la fataliteacute crsquoest un peu lagrave tout le
temps un peu partout en moi
Et si des moments drsquoaccalmie subsistent crsquoest
souvent un eacuteleacutement de la reacutealiteacute preacutesent ou agrave
venir qui vient attiser les angoisses drsquoecirctre ma-
lade
Concernant le drame des hormones de crois-
sance contamineacutees ce sont principalement les
diffeacuterentes eacutetapes du procegraves (ouverture en
2008 4 mois drsquoaudience rendu de justice en
2009 et mise en appel en 2010) qui ont deacuteclen-
cheacute une recrudescence des appels des per-
sonnes agrave risque Crsquoest cette histoire de pro-
cegraves (hellip) je lis tous les articles dans la presse
(hellip) Depuis je vais reacuteguliegraverement sur le site de
lrsquoInvs pour veacuterifier le nombre de deacutecegraves leurs
acircgeshellip Je me dis que moi crsquoest bon je suis
plus vieille ou jrsquoai reccedilu les hormones plus tard
(hellip) Je comprends ce procegraves mais je le mau-
dis Je me sentais bien ces derniers temps
Jrsquoavais construit mon petit igloo avec mon mari
dedans Et lagrave je souhaite hurler qursquoon mrsquoa cas-
seacute mon igloo Durant tout le deacuteroulement du
procegraves certains de ces jeunes agrave risque ont
eacuteteacute deacutebordeacutes par un puissant sentiment
drsquoambivalence entre le deacutesir et la peur qursquoon
leur reconnaisse le preacutejudice subi crsquoest agrave dire
le coucirct psychique de se savoir contamineacute Re-
connaissance qui aurait signeacute la reacutealiteacute du
risque qursquoils encouraient Si le procegraves vient agrave
statuer que je suis victime je ne pourrai plus
me dire que crsquoest juste un cauchemar et que je
vais me reacuteveiller (hellip) et puis jrsquoai peur que ccedila se
traduise par le deacuteclenchement de la maladie
Paradoxe de cette victimation crsquoest la meacutede-
cine qui a rendu malade Dire que crsquoeacutetait
pour me soignerhellip quelle ironiehellip Je nrsquoai pas
de symptocircme je sais mais je suis deacutejagrave morte
De peur Et en ces temps juridiques agiteacutes la
Cellule et ses meacutedecins tout particuliegraverement
se sont vus parfois pris dans les mecircmes filets
ambivalents On a fait confiance aveugleacutement
agrave la meacutedecine Comment pouvions-nous imagi-
ner que le mal viendrait de lagrave ougrave on lrsquoattendait
le moins A qui faire confiance maintenant
Notamment encourageacutes par les associations
avec lesquelles la Cellule entretient des liens
eacutetroits certains parents de jeunes agrave risque
ont fait appel agrave nous Notre vie est faite de
hauts et de bas Lorsqursquoon apprend qursquoun
jeune est mort toute lrsquohistoire remonte et puis
le temps passe et on fait comme si ccedila nrsquoexistait
plus Mais ces oscillations crsquoest de la tor-
ture Comment ne pas eacutevoquer aussi le veacutecu
dramatique de ces autres parents qui ont perdu
leur enfant parfois il y a longtemps Des pa-
rents encore submergeacutes par la peine et rongeacutes
par un fort sentiment de culpabiliteacute drsquoavoir
donneacute le feu vert aux meacutedecins pour gagner
quelques centimegravetreshellip drsquoavoir moi-mecircme
fait les injections drsquohormones Un sentiment de
culpabiliteacute exacerbeacute par la relaxe geacuteneacuterale des
preacutevenus apregraves 20 ans de proceacutedure Il y a
des victimes il faut des coupables (hellip) Crsquoest
comme si la Justice nous avait deacutesigneacutes cou-
pables agrave leur place
Dans ce contexte ougrave preacutedominent les senti-
ments de culpabiliteacute et parfois de honte le teacuteleacute-
phone est un outil de grand secours puisqursquoil
permet aux personnes de se soustraire au re-
gard de lrsquoAutre Cet Autre objet drsquoimplacables
projections accusatrices Je nrsquoaurais pas pu
consulter un psychologue en face-agrave face Jrsquoau-
rais eu trop peur de lire sur son visage le deacute-
goucirct le rejet le jugementhellip lagrave je peux dire ce
que je veux je ne vois pas votre reacuteactionhellip
crsquoest moins dur Mais pourquoi le psychologue
de la Cellule se precircte-il si rarement aux projec-
tions de nature perseacutecutrice Reacutepond-il agrave la
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 75
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
neacutecessiteacute de sauvegarder un bon objet Un
bon objet inteacuteriorisable susceptible de restaurer
a minima le narcissisme parental
Concernant les formes heacutereacuteditaires de MCJ
dans la majoriteacute des cas lorsque le diagnostic
tombe le malade est deacutejagrave au stade terminal de
la maladie Les membres agrave risque de la fa-
mille se retrouvent donc confronteacutes agrave deux
drames simultaneacutes la perte imminente de leur
proche et lrsquohorreur de leur possible devenir
Voilagrave en une fraction de seconde le monde
bascule Je regardais ma megravere mourir jrsquoima-
ginais que jrsquoallais finir comme elle et je pensais
agrave mes enfants qui auraient peut-ecirctre le mecircme
destin Puis viennent les angoisses pour les
fregraveres et sœurs leurs enfants crsquoest lrsquoheacuteca-
tombehellip
Comment en parler aux enfants Peut-on
continuer agrave vivre normalement en sachant que
tout peut basculer en quelques mois Je
nrsquoarrecircte pas de pleurer est-ce le deacutebut de la
maladie Faut-il faire le test geacuteneacutetique
Autant de questions difficiles agrave adresser agrave lrsquoen-
tourage Jrsquoai appeleacute la Cellule parce que je ne
veux pas affoler mon mari mes enfantshellip (hellip)
et je ne suis pas encore precircte agrave me retrouver
en consultation de geacuteneacutetique (hellip) ce serait trop
reacuteel (hellip) pour lrsquoinstant quand je raccroche je
peux faire comme si ccedila nrsquoexistait pas
NATURE DE LrsquoESPACE TEacuteLEacutePHONIQUE
Mais de quelle nature est cet espace teacuteleacutepho-
nique pour autoriser le patient agrave maintenir en
dehors de sa reacutealiteacute le contenu qursquoil y deacutepose
Lrsquoabsence de corps en preacutesence et lrsquoimmateacuteria-
liteacute de la voix comme unique canal de commu-
nication seraient-elles la clef du choix des pa-
tients drsquoun suivi teacuteleacutephonique plutocirct qursquoen cabi-
net Le teacuteleacutephone permettrait-il au patient de
srsquoaffranchir ponctuellement drsquoun trop de reacuteel et
de se proteacuteger de lrsquoeffraction qursquoopegravere la crudi-
teacute de ses preacuteoccupations mateacuterielles orga-
niques mais aussi existentielles Serait-elle la
figuration de ce temps intra-uteacuterin ougrave tout de la
reacutealiteacute sauf la megravere eacutetait en dehors ce temps
ougrave le lien intime avec elle nrsquoeacutetait que sons Je
vous parle et vous me parlez aussi dans le
creux de lrsquooreillehellip Vous ecirctes un peu mon es-
pace proteacutegeacute mon espace secret Ce temps
reacutevolu ougrave le lieu de rencontre (le ventre mater-
nel) entre la megravere et lrsquoenfant eacutetait lrsquoobjet de tous
les fantasmes Que dire drsquoautre en effet du lieu
de rencontre entre le psychologue et le pa-
tient qursquoil nrsquoest que scegravene psychique pur es-
pace temporel un ensemble chacun chez soi
Un espace qui srsquooffrirait donc plus encore et
plus subitement agrave la reacutegression du patient que
le divan de lrsquoanalyste ou lrsquoentretien agrave domicile
Parce qursquoelle les prive drsquoinformations agrave carac-
tegravere visuel (regards mimiques postures ges-
tuelles) et puisque rien ne fait obstacle ni chez
le patient ni chez le psychologue aux diffeacute-
rentes repreacutesentations fantasmatiques que
chacun a de lrsquoautre la teacuteleacutephonie se precircte agrave
une activiteacute imaginaire deacutebrideacutee Seules des
informations agrave caractegravere sonore telles que le
timbre de la voix les rythmes tons silences
intonations et bruits ambiants (il allume une ci-
garette elle ferme une porte la voix reacutesonne
comme dans un espace vide) donnent force et
forme agrave lrsquoespace theacuterapeutique Elles seules et
dans une immeacutediateteacute remarquable suffisent agrave
faire surgir le visage le corps et le lieu de
lrsquoautre Des lapsus agrave caractegravere visuels srsquoim-
miscent drsquoailleurs dans le discours des pa-
tients et du psychologue Je vois drsquoici la tecircte
que vous faites Nos rencontres teacuteleacutepho-
niques On se voit la semaine prochaine Des
deacutetails comme la silhouette la couleur des
yeux des cheveux des vecirctements un canapeacute
des photos au mur des sourcils fronceacutes ou une
moue deacutefaite sont-ils lrsquoexpression paroxystique
de lrsquoactiviteacute fantasmatique agrave lrsquoœuvre dans la
relation transfeacutero-contre-transfeacuterentielle entre
le patient et son theacuterapeute
Pourquoi lrsquoimage de cette patiente-lagrave tarde agrave se
construire en moi apparaicirct puis disparaicirct sans
que je puisse la saisir Parce qursquoelle joue agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 76
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
cache-cache avec son pegravere malade qui ne
doit pas la voir dans cet eacutetat de terreur Pour-
quoi ai-je oublieacute drsquoappeler ce patient aujour-
drsquohui alors que son nom est surligneacute dans mon
agenda Parce qursquoil me reacutepegravete chaque fois
que tout le monde lrsquooublie Pourquoi cet
autre patient a-t-il exceptionnellement deman-
deacute agrave deacuteplacer son rendez-vous Parce qursquoil
eacutetait justement question lors de notre dernier
entretien de deacuteplacer son agressiviteacute pour
eacutepargner sa femme malade
Pourquoi cette megravere au beau milieu de son
suivi donne-t-elle mon numeacutero au fils qui ne
lrsquoeacutecoute plus Pourquoi ce fils accepte-t-il
drsquoappeler le psychologue de sa megravere Pour-
quoi le psychologue accepte-t-il de suivre seacute-
pareacutement deux membres de la mecircme famille
tandis qursquoil heacutesiterait agrave le faire en cabinet
Parce que les espaces ndash uniquement fantas-
meacutes- sont bien distincts en lui et que leur rela-
tion reacuteclame drsquoecirctre tierciseacutee
Pourquoi cette demande impeacuterieuse de me voir
en consultation Parce que cette patiente non
reconnue par la justice dans son statut de
victime des hormones de croissance contami-
neacutees a besoin drsquoecirctre reconnue au sens pre-
mier du terme par le psychologue
Pourquoi cette crainte en moi agrave lrsquoideacutee de voir
ces patients-lagrave comme on pourrait avoir agrave
craindre de transgresser la regravegle fondamentale
drsquoabstinence Dans ce contexte de suivi teacuteleacute-
phonique -qui induit lrsquoeacuterotisation du lien agrave la
voix et un sentiment paradoxal de grande
proximiteacute voir serait-il devenu un eacutequivalent de
toucher et lrsquoacting out agrave eacuteviter
Ces quelques exemples de questionnements
du psychologue autour des manifestations
transfeacutero-contre-transfeacuterentielles agrave lrsquoœuvre
dans le suivi teacuteleacutephonique nous semblent rele-
ver drsquoun processus de type theacuterapie drsquoinspira-
tion analytique Un processus qui se partage
souvent en deux temps un temps de plainte et
un temps drsquoeacutelaboration psychique complexe au
cours duquel le patient rapporte spontaneacutement
ses recircves Des recircves dont le mateacuteriel fait lrsquoobjet
drsquointerpreacutetations par le psychologue
SUIVI TEacuteLEacutePHONIQUE AVEC OU SANS FIN
Il arrive qursquoapregraves le deacutecegraves de son proche le
patient srsquointerroge sur la leacutegitimiteacute de la pour-
suite du suivi comme si la survie du malade
avait jusqursquoici conditionneacute son droit agrave en beacuteneacutefi-
cier Il nrsquoen est rien alors tout ne srsquoarrecircte pas
pour moi non plus Cet espace temporel
sans corps en preacutesence qui a proteacutegeacute le pa-
tient des angoisses inheacuterentes agrave la reacutealiteacute
drsquoune seacuteparation annonceacutee permet et catalyse
mecircme parfois le travail de deuil Vous ecirctes un
peu comme mon fregravere [mort depuis 3 mois] je
ne le vois pas mais il est lagravehellip je ne le vois pas
mais je lrsquoentends parfoishellip comme avec vous
jrsquoapprends agrave dialoguer agrave lrsquointeacuterieur de moi avec
lui
La sortie du dispositif de soutien teacuteleacutephonique
est longuement travailleacute eacutevocation de lrsquoapregraves
eacutelaboration de la seacuteparation espacement pro-
gressif des entretiens Un cheminement au
cours duquel surgissent plus explicitement les
traces du caractegravere transitionnel de lrsquoespace
teacuteleacutephonique Un espace qui sans ecirctre une
permanence drsquoeacutecoute a eacutetayeacute le sentiment de
permanence drsquoobjet Je ne vous ai jamais
vuehellip alors je nrsquoai pas peur de ne plus vous
voir Vous ecirctes un peu comme toujours lagrave
CONCLUSION
La Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des Mala-
dies de Creutzfeldt-Jakob a pour mission lrsquoaide
au diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale
sociale et psychologique des patients et de leur
famille Lrsquoaide proposeacutee srsquoeffectue essentielle-
ment par teacuteleacutephone
La faisabiliteacute et la leacutegitimiteacute drsquoun soutien psy-
chologique exclusivement teacuteleacutephonique a eacuteteacute
lrsquoobjet de nombreuses interrogations pour le
psychologue quelle est la nature de cet es-
pace particulier drsquoaccompagnement Quels en
sont les beacuteneacutefices Peut-on soutenir un veacuteri-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 77
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
table travail psychique dans le cadre de ce dis-
positif Est-il leacutegitime de parler de travail psy-
chotheacuterapeutique
Les 110 suivis psychologiques effectueacutes agrave la
Cellule depuis 2003 nous permettent aujour-
drsquohui drsquoaffirmer que notre travail de psycho-
logue ne se limite pas agrave une pure fonction de
soutien En effet bien que tregraves eacuteloigneacute de la
situation analytique le processus agrave lrsquoœuvre
dans le dispositif teacuteleacutephonique semble srsquoappa-
renter agrave celui drsquoun dispositif de type psychotheacute-
rapeutique drsquoinspiration analytique le cadre
est poseacute et penseacute par le psychologue
(entretiens de 45 minutes notion de rendez-
vous teacuteleacutephoniques rythmiciteacute souvent hebdo-
madaire suivi au long cours) lrsquoassociation
libre est encourageacutee lrsquointerpreacutetation des dires
lrsquoanalyse des recircves lrsquoanalyse du transfert et du
contre-transfert par le psychologue est freacute-
quente et le patient effectue un veacuteritable travail
drsquoeacutelaboration psychique au deacutecours du suivi
Lrsquoexpeacuterience nous deacutemontre que les particulari-
teacutes de lrsquoaccompagnement teacuteleacutephonique
(notamment privation drsquoinformations visuelles)
ne freinent pas le processus theacuterapeutique
Elles pourraient mecircme le favoriser
(relacircchement du systegraveme deacutefensif)
Ainsi ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique agrave lrsquohocircpital est au service drsquoune
difficulteacute des personnes qui y ont recours la
crainte et ou lrsquoimpossibiliteacute drsquoaller consulter un
psychologue en face-agrave face
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 78
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots
en images
Natascia Serbandini
Service de gyneacutecologie-obsteacutetrique Hocircpital Jean Verdier
A pregraves avoir eacutevoqueacute briegravevement les speacute-
cificiteacutes du deuil peacuterinatal je vais vous
preacutesenter une pratique nouvelle au sein
de lrsquoAPHP un groupe de parole hospitalier
destineacute aux femmes ayant fait une interruption
meacutedicale de grossesse Ce groupe est neacute en
2008 un an apregraves sa creacuteation nous avons choi-
si drsquointroduire une cameacutera lors des seacuteances
Enfin je deacutecrirai lrsquoimpact de la cameacutera sur le
groupe et le projet de film que nous sommes
en train de reacutealiser
LES SPEacuteCIFICITEacuteS DU DEUIL PEacuteRINATAL
La deacutecouverte dune pathologie fœtale incu-
rable pendant la grossesse est un eacuteveacutenement
hautement traumatique pour les parents du fu-
tur beacutebeacute Lhocircpital Jean Verdier unique Centre
Pluridisciplinaire de Diagnostic Preacutenatal du 93
accueille et accompagne les parents degraves lrsquoan-
nonce du diagnostic jusqursquoagrave lrsquointerruption meacutedi-
cale de grossesse quand les parents la deman-
dent
Le deuil peacuterinatal preacutesente des speacutecificiteacutes qui
le distinguent du deuil classique il est toujours
accompagneacute drsquoun fort sentiment de culpabili-
teacute amplifieacute dans le cadre des Interruptions Meacute-
dicales de Grossesse par la prise de deacutecision
(Tous les textes en italique sont issus de teacutemoi-
gnages de femmes lors du groupe de parole)
Pendant le travail je le sentais encore mon
beacutebeacute est neacute vivant jrsquoavais vraiment cette sen-
sation qursquoil voulait se battre Jrsquoai enleveacute tout cet
espoir de vie et je me demande de quel droit
Crsquoest cette impression drsquoavoir le choix sur sa
vie ou sa mort crsquoest tellement lourd agrave porter
Une autre speacutecificiteacute est lrsquoabsence drsquoun veacutecu
partageacute avec cet enfant en dehors de la gros-
sesse Geneviegraveve Delaisi de Parseval
(psychanalyste) Comment faire le deuil de ce
qui nrsquoa pas eu lieu drsquoon ne sait quoi et de
presque rien Lrsquoobjet perdu reste agrave perdre
comment accepter la seacuteparation drsquoavec un ecirctre
que lrsquoon nrsquoa pas connu
Le deuil est un processus intrapsychique con-
seacutecutif agrave la perte drsquoun objet drsquoattachement par
lequel le sujet reacuteussit progressivement agrave se deacute-
tacher de celui ci Jean Philippe Legros
(psychologue psychanalyste au centre de meacute-
decine foetale Cochin-St Vincent de Paul) dans
lrsquoarticle L lsquoarrecirct de vie in utero ou lrsquoerrance des
fœtus un possible deuil preacutecise que dans le
deuil peacuterinatal il srsquoagit drsquoun deacutetachement sans
renoncement
Ensuite il srsquoagit drsquoun deuil feacuteminin un deuil
veacutecu tregraves diffeacuteremment dans le couple
Mon mari lui a pris sa deacutecisionhellipje ne dis pas
que ccedila a eacuteteacute facile ccedila a ducirc ecirctre dur pour lui
aussi moi je la portais je la sentais bouger
Cette mort est intoleacuterable pour la megravere en lien
avec le sentiment drsquoomnipotence propre agrave la
grossesse intoleacuterable pour la megravere qui con-
naissait ce beacutebeacute et qui a ressenti ses mouve-
ments
Ce sentiment de toute puissance est amplifieacute
par le fait que la demande drsquoInterruption Meacutedi-
cale de Grossesse revient agrave la femme seule
signataire selon la loi
Je sais qursquoil souffre qursquoil est malheureux il a
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 79
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
la mecircme peine et la mecircme tristesse que moi
mais il ne llsquoexprime pas pareil il y a une culpa-
biliteacute plus importante chez la megravere
La perte du beacutebeacute est parfois difficilement re-
connue par les pegraveres qui nrsquoosent pas manifes-
ter leur souffrance et qui se projettent plus rapi-
dement dans lrsquoavenir
Leur deacutetresse reacutesulte en grande partie de la
mise agrave mal de la fonction contenante protec-
trice de la femme enceinte qursquoils assuraient
avant lrsquointerruption
Ce deuil est deacutepourvu drsquoune dimension so-
ciale Franccediloise Moleacutenat (peacutedopsychiatre) dit
Iil existe une cicatrice dans le corps de la
megravere mais pas de cicatrice sociale
Beaucoup de personnes mrsquoont dit crsquoest
dingue que lrsquoadministration franccedilaise se mecircle
de ccedila (en parlant de la reconnaissance agrave la
Mairie) alors qursquoil nrsquoy a mecircme pas de beacutebeacute il
eacutetait pas neacute
Les rituels autour du deuil ont une fonction psy-
chique ils offrent au mort un deacutedommagement
symbolique Ils assurent une reconnaissance
de la peine des proches par le groupe
Crsquoest seulement depuis quelques anneacutees que
les rites et rituels sociaux autour des beacutebeacutes
morts in utero ont pris leur place agrave travers la
reconnaissance agrave lrsquoEtat Civil et lrsquoeacutevolution des
pratiques drsquoaccompagnement dans les materni-
teacutes (preacutesentation du corps du beacutebeacute organisa-
tion drsquoobsegraveques)
Ce travail est reacutealiseacute dans le but de creacuteer et
drsquoancrer des souvenirs de cet enfant afin de
faire des parents des parents
Jrsquoavais toujours une photo de mon fils dans
mon portefeuille jrsquoen avais besoin Crsquoest peut
ecirctre parce que je ne voulais pas qursquoon me dise
que crsquoeacutetait rien
LE GROUPE DE PAROLE Agrave JEAN VERDIER
Lors des entretiens avec le gyneacutecologue ou
dans le cadre drsquoun suivi psychologique quelque
temps apregraves les Interruptions Meacutedicales les
femmes eacutevoquaient de maniegravere reacutecurrente leur
solitude lrsquoimpossibiliteacute de partager leur souf-
france et le temps passant de ne plus pouvoir
parler de leur beacutebeacute dans le cercle familial et
amical Cet oubli de lrsquoentourage et la reprise
drsquoune vie normale est source de culpabiliteacute
elles avaient le sentiment drsquoabandonner agrave nou-
veau leur beacutebeacute
Jrsquoai lrsquoimpression que personne ne me com-
prend jrsquoai lrsquoimpression drsquoecirctre seule au monde
de me noyer je survis Les gens ne peuvent
pas comprendre notre situation je nrsquoarrive pas
agrave leur dire ma souffrance immense
De cela est neacutee lrsquoideacutee de proposer un espace
drsquoeacutechanges entre femmes sous forme de
groupe de paroles Ce projet a eacuteteacute creacuteeacute agrave lini-
tiative commune du gyneacutecologue responsable
du Centre de Diagnostic Anteacutenatal et de moi-
mecircme
Il srsquoagit drsquoun groupe ouvert agrave toutes les femmes
ayant veacutecu une Interruption Meacutedicale de Gros-
sesse agrave Jean Verdier
Le groupe se reacuteunit une fois par mois pendant
une heure et demie et est co-animeacute par un bi-
nocircme psychologuepsychiatre et meacutedecinsage
femme
Le groupe constitue un cadre de confiance
une enveloppe psychique comme le dit An-
zieu propice agrave la mise en commun des charges
affectives et agrave lrsquoaccompagnement du deuil
De plus comme le rappelle Jean Philippe Le-
gros apregraves la perte drsquoun enfant par IMG la
crainte de la megravere contrairement aux parents
drsquoenfants porteurs drsquohandicap est lrsquoabsence du
regard des autres dans le reacuteel Cet ecirctre invi-
sible pour les yeux cet enfant que personne
drsquoautre nrsquoa connu risque de disparaicirctre Drsquoougrave
lrsquoimportance de creacuteer un espace physique (par
rapport aux espaces virtuels les forums sur
Internet tregraves freacutequenteacutees par les megraveres en-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 80
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
deuilleacutees) et psychique au sein de lrsquohocircpital afin
de reconnaicirctre lrsquoexistence de ces beacutebeacutes et per-
mettre agrave ces femmes drsquoecirctre megraveres
Les autres nous parlent comme si on avait
perdu quelque chose crsquoest quand mecircme un
ecirctre vivant crsquoeacutetait quand mecircme notre enfant
Lrsquoobjectif principal du groupe est de permettre
le partage drsquoexpeacuterience de ce deuil si particu-
lier drsquoecirctre rassureacutee par le parcours des autres
dans un cadre de reacutefeacuterence suffisamment
bon pour le dire avec les mots de Winnicott
Crsquoest vrai que discuter avec drsquoautres per-
sonnes qui lrsquoont veacutecu il y a longtemps et qui ont
su deacutepasser certaines eacutetapes ccedila aide ccedila
donne des cleacutes pour passer agrave lrsquoeacutetape suivante
LrsquoIDEacuteE DU FILM DES MOTS EN IMAGES
Le groupe a eacuteteacute tregraves freacutequenteacute degraves le deacutebut
Apregraves un an de fonctionnement le gyneacutecologue
a proposeacute drsquointroduire une camera afin de fil-
mer les seacuteances pour teacutemoigner de cette expeacute-
rience positive et faire connaicirctre cette pratique
Cette proposition a eacuteteacute discuteacutee par les
femmes au sein du groupe elles ont adopteacute
cette ideacutee et ont eacutelaboreacute avec nous les objectifs
du film
Teacutemoigner autour du deuil peacuterinatal en deacutecri-
vant les diffeacuterentes eacutetapes et souligner les beacute-
neacutefices drsquoun groupe de parole
A partir de leur veacutecu permettre une reacuteflexion
visant agrave ameacuteliorer les pratiques soignantes
dans les accompagnements du deuil peacuterinatal
agrave lrsquohocircpital
Nous avons filmeacute six seacuteances dune heure
trente avec deux techniques une cameacutera fixe
et une cameacutera mobile Ensuite nous avons eacuteta-
bli ensemble un plan pour le film reacutecit en ordre
chronologique du deacuteroulement de lrsquoIMG Les
diffeacuterents chapitres
Lrsquoannonce et la deacutecision lrsquohospitalisation le
retour agrave la maison lrsquoenterrement lrsquoentourage
lrsquoautopsie la grossesse drsquoapregraves le groupe
La preacutesence de la cameacutera a eu un impact sur
le deacuteroulement des seacuteances les theacutematiques
ont eacuteteacute eacutetablies agrave lrsquoavance ce qui a permis de
structurer davantage les seacuteances tout en gar-
dant la liberteacute drsquoaborder les questions eacutevo-
queacutees spontaneacutement par les femmes
Comme le dit Winnicott lrsquoenfant existe dans les
yeux de sa megravere le visage de lrsquoenfant que lrsquoon
nrsquoa pas vu ne permet pas agrave la megravere de se re-
connaicirctre comme megravere
Le film vient srsquoinscrire dans cette neacutecessiteacute de
reconnaissance de laisser une trace de cette
preacutesence de ce beacutebeacute qui nrsquoa plus de corps
physique mais qui existe dans lrsquohistoire fami-
liale
La preacutesence de la cameacutera a donc eu des effets
beacuteneacutefiques pour les femmes mais aussi pour
les soignants la richesse du mateacuteriel clinique
recueilli nous a permis drsquoobserver lrsquoeacutevolution
des femmes dans le processus de deuil et
drsquoanalyser leur posture au sein du groupe ainsi
que celle des animateurs
Si le groupe a fonction de portage pour cer-
taines pour drsquoautres crsquoest le lieu ougrave elles peu-
vent donner un sens agrave ce qursquoelles ont veacutecu en
partageant leur expeacuterience avec drsquoautres
Nous avons constateacute en visionnant les
seacuteances que plusieurs femmes qui semblent
ecirctre dans un deuil normal continuent agrave freacute-
quenter le groupe alors que leur interruption
remonte agrave il y a trois ou quatre ans
Le besoin de continuer agrave eacutevoquer leur beacutebeacute
nrsquoest pas un signe de deuil pathologique mais
une neacutecessiteacute de la ceacuteleacutebration de la meacutemoire
de ces beacutebeacutes disparus Ces femmes veulent
garder comme le dit Jean Philippe Legros une
dose homeacuteopathique du trauma qui gueacuterit de
lui en ne se seacuteparant jamais
Quand jrsquoai dit agrave ma responsable que je mrsquoab-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 81
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
sentais pour venir au groupe de parole elle
mrsquoa dit Ben tu en as deacutejagrave un (enfant) qui est lagrave
pourquoi tu continues agrave aller agrave ce groupe Je
lui ai dit Crsquoest pas parce que jrsquoai reacuteussi agrave
avoir un petit garccedilon que je vais compleacutetement
oublier ce qui concerne mon premier enfant
justement lui il nrsquoest pas lagrave crsquoest pour ccedila que
je continue agrave aller au groupe pour parler de lui
pour le faire exister
Aujourdrsquohui le projet du film est en cours nous
avons imagineacute deux versions
- une version courte de 20 minutes un teacutemoi-
gnage du groupe sur le deuil peacuterinatal agrave diffu-
ser agrave lrsquoexteacuterieur
- une version longue de 52 minutes destineacutee
aux femmes et en interne agrave lrsquohocircpital Jean Ver-
dier
Le premier montage a eacuteteacute visionneacute par les
femmes qui ont participeacute aux choix des extraits
Nous espeacuterons pouvoir le diffuser dans un ave-
nir proche agrave un large nombre de professionnels
de santeacute
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 82
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions
enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis
Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
P our cette preacutesentation des missions du
psychologue clinicien aupregraves du per-
sonnel agrave
lrsquoAP-HP nous avons choisi de commencer par
reprendre quelques eacuteleacutements agrave lrsquoorigine de la
creacuteation de nos postes
Dans une seconde partie nous deacutefinirons et
preacutesenterons la diversiteacute des missions speacuteci-
fiques aux psychologues du personnel sur site
A la fois clinique et institutionnelle notre pra-
tique nous amegravene agrave ecirctre en contact reacutegulier
avec les diffeacuterents acteurs internes ou ex-
ternes agrave lrsquoinstitution concerneacutes par la protec-
tion de la santeacute au travail Ainsi cette collabo-
ration neacutecessite un important travail de deacuteve-
loppement et drsquoentretien du reacuteseau
Ensuite nous envisagerons les divers ques-
tionnements souleveacutes par ce poste position-
nement parfois drsquoeacutequilibriste cadre speacutecifique
de prise en charge ou encore limites de cette
pratique
HISTORIQUE
Par la loi de 1983 concernant les droits et obli-
gations des fonctionnaires les personnels hos-
pitaliers de par leur statut sont proteacutegeacutes par
leur administration
A la fin des anneacutees 90 le deacuteveloppement de la
preacutevention des violences apparaicirct comme pri-
mordial puis une circulaire intituleacutee Preacutevention
et accompagnement des situations de vio-
lence est reacutedigeacutee en deacutecembre 2000
Le constat de lrsquoaugmentation de la violence au
quotidien dans les hocircpitaux a fait naicirctre au sein
de lrsquoAP-HP des preacuteoccupations et des de-
mandes au niveau institutionnel Ceci a mobili-
seacute un ensemble drsquoacteurs concerneacutes par la
protection de la santeacute des personnels Ainsi la
mise en place drsquoune cellule drsquoaccueil et de
prise en charge des agents victimes de vio-
lence agrave lrsquoAP-HP eacutemane de ces travaux Deux
postes de psychologues cliniciennes ont eacuteteacute
creacuteeacutes au Siegravege en 2000 et 2001 puis drsquoautres
postes de psychologues cliniciens aupregraves du
personnel ont vu le jour sur diffeacuterents sites de
lrsquoAP-HP
Face agrave lrsquoamplification des violences en milieu
hospitalier lrsquoAP-HP a eacutegalement meneacute en 2004
une campagne drsquoinformation sur le thegraveme
Violences de patients drsquoaccompagnants de
visiteurs comment soutenir les personnels qui
en sont victimes Ces derniers ignorent sou-
vent leurs droits et les circuits internes pour ob-
tenir le meilleur accompagnement dans leurs
deacutemarches Lrsquoeacutelaboration drsquoun guide a permis
de deacutecrire les diffeacuterentes modaliteacutes de prise en
charge en cas drsquoagression prise en charge
meacutedico-psychologique sociale meacutedico-
administrative ou encore juridique
Au-delagrave de la preacutevention et de la prise en
charge de la violence agrave lrsquohocircpital les missions
du psychologue clinicien aupregraves du personnel
sont orienteacutees vers deux axes principaux la
clinique individuelle et collective et les activiteacutes
institutionnelles
DEacuteFINITION DU POSTE ET MISSIONS SPEacuteCIFIQUES
Le poste de psychologue du personnel a pour
fonction principale de creacuteer un espace drsquoeacutecoute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 83
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et de prise en charge individuelle ou collective
pour tout le personnel de lrsquohocircpital
Toute personne professionnelle de lrsquohocircpital
peut si elle en a la neacutecessiteacute (si elle le sou-
haite) prendre rendez vous pour une premiegravere
consultation et ce quel qursquoen soit le motif pro-
fessionnel ou personnel
Les bureaux permettent de garantir la confiden-
tialiteacute
Les consultations se font sur rendez-vous afin
drsquoeacuteviter lrsquoattente et pour preacuteserver la discreacutetion
Ils sont libres et totalement confidentiels
Des rendez-vous en soireacutee peuvent ecirctre ameacute-
nageacutes
Le deacutelai maximum drsquoobtention drsquoun rendez-
vous est environ de 15 jours
Le nombre de consultations deacutepend de la de-
mande initiale Il peut aller drsquoun seul entretien agrave
plusieurs Lorsque la personne deacutesire ou neacute-
cessite une prise en charge plus longue elle
est orienteacutee agrave lrsquoexteacuterieur Il est preacuteciseacute agrave tout
agent en deacutebut drsquoentretien que ce lieu de con-
sultation a pour vocation un accompagnement
agrave court ou moyen terme
Il est eacutevident que la fonction de psychologue du
personnel est agrave viseacutee clinique crsquoest agrave dire
- que le psychologue du personnel nrsquointervient
pas directement dans les eacutevaluations utiles agrave la
gestion du personnel et nrsquoeacutemettent aucun avis
concernant lrsquoaptitude au poste de travail des
agents reccedilus en consultation (ce qui est de
lrsquounique ressort du meacutedecin du travail) hellip
- que le psychologue du personnel nrsquoest pas
psychologue du travail donc nrsquointervient pas
dans le reclassement les mobiliteacutes profession-
nelles le recrutementhellipMais nos missions
srsquoaccordent bien sur avec celles du CRH si neacute-
cessaire
Le psychologue du personnel comme les
autres psychologues cliniciens de lrsquoeacutetablisse-
ment deacutepend directement du directeur de lrsquoeacuteta-
blissement et a des liaisons fonctionnelles
avec le drh par exemple ou le meacutedecin du tra-
vail
Il rend un bilan annuel quantitatif indiquant cer-
taines donneacutees de son activiteacute tout en preacuteser-
vant lrsquoanonymat et la confidentialiteacute Il peut arri-
ver que ce bilan soit preacutesenteacute aux instances
types CHSCT
Globalement le temps de travail du psycho-
logue du personnel se reacutepartit comme suit
pratique clinique drsquoune part activiteacutes institu-
tionnelles drsquoautre part
LA PRATIQUE CLINIQUE
bull Clinique individuelle soutien psychologique
du personnel en difficulteacute par entretien indivi-
duel
Notre pratique montre que les deux aspects
professionnels et personnels sont souvent in-
triqueacutes qursquoil peut srsquoagir de souffrance au tra-
vail mais aussi de souffrance personnelle qui
peut avoir des reacutepercussions dans le travail
Les motifs principaux agrave lrsquoorigine de la de-
mande
- sur le plan professionnel sont conflits inter
eacutequipe situations de violence au travail
manque de communication difficulteacutes face aux
pathologies perte du sens du travail voire eacutepui-
sement professionnel
- sur le plan personnel sont difficulteacutes fami-
liales sociales deuils seacuteparations probleacutema-
tiques psychopathologiques maladies chro-
niqueshellip
Ces personnes ne se sont jamais adresseacutees agrave
un professionnel du soin psychique par meacute-
connaissance des professions parfois mais par
meacutefiance eacutegalement et arrivent souvent en
portant des souffrances extrecircmement lourdes
et de longue date
Cateacutegories dominantes qui consultent soi-
gnants et administratifs encadrement
quelques personnels techniques et meacutedico-
techniques et tregraves peu de meacutedecins
Il est difficile drsquoeacutetablir une moyenne du nombre
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 84
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
drsquoagents reccedilus par an sur lrsquoensemble des
postes du personnel Toutefois les demandes
de consultations sont en constantes augmenta-
tions sur la plupart des sites de lrsquoAPHP mais
aussi du fait des regroupements amenant les
psychologues agrave ecirctre solliciteacutees sur plusieurs
eacutetablissements
bull Clinique collective
Les interventions collectives peuvent se
preacutesenter sous deux formes les groupes de
parole et les deacutebriefings psychologiques
Le Groupe de parole permet de creacuteer un lieu
drsquoexpression et drsquoeacutechanges sur un thegraveme don-
neacute ou une probleacutematique speacutecifique au service
(comme par exemple lrsquoagressiviteacute et la violence
des patients notamment aux urgences ou en-
core lrsquoimplication eacutemotionnelle des soignants
lieacutee agrave lrsquoaccompagnement en fin de vie hellip)
Le Deacutebriefing psychologique intervention
collective ponctuelle suite agrave un eacuteveacutenement diffi-
cile ou traumatique (suicide drsquoun patient deacutecegraves
drsquoun personnel agression du personnel par un
patient ou son entouragehellip)
Force est de constater eacutegalement que les de-
mandes de reacutesolution de conflit formuleacutees
comme telles sont aussi tregraves preacutesentes et il
semble utile de distinguer la neacutecessaire reacutesolu-
tion drsquoun conflit qui nrsquoest pas forcement le lieu
et le temps du groupe de parole de la volonteacute
drsquoy trouver un sens Il va de soi que le psycho-
logue nrsquointervient en aucun cas comme meacutedia-
teur car il nrsquoen a pas la formation speacutecifique
mecircme si certaines interventions peuvent par-
fois avoir des effets drsquoapaisement du conflit
Pour ces raisons et preacutealablement agrave toute in-
tervention collective il est important drsquoavoir pu
deacutefinir avec les participants leurs attentes et
pas seulement celles lieacutees au demandeur geacute-
neacuteralement lrsquoencadrement ou la direction
LES ACTIVITEacuteS INSTITUTIONNELLES
bull1- Deacuteveloppement et entretien du reacuteseau
En interne Assistant social du personnel meacute-
decine du travail DRH CRH chef du person-
nel direction des soins psychologues du per-
sonnel drsquoautres sites psychologues des ser-
vices psychiatres hellip
En externe orientation vers les CMP pour les
prises en charge agrave plus long terme etou pour
les suivis psychiatriques orientation vers des
lieux de consultations speacutecialiseacutes (addictologie
consultation douleur troubles du sommeil
troubles du comportement alimentaire associa-
tion drsquoaide aux victimes theacuterapie familiale hellip)
2- Participation aux groupes de travail et de
preacutevention preacutevention des addictions de
lrsquoeacutepuisement professionnel des risques psycho
-sociauxhellip
3- Faire connaicirctre ces postes et notre activiteacute
- A lrsquooccasion drsquoune arriveacutee sur site ou lors
drsquoune creacuteation de poste
- Preacutesentation dans les services directement
aupregraves des eacutequipes
- Preacutesentation lors de formations sur site
propre (accueil des nouveaux arrivants ou sur
des theacutematiques en lien avec nos missions) ou
au Centre de Formation Continue du Personnel
Hospitalier (intervention dans le cadre de la for-
mation Preacutevention du risque psychique et de
lrsquoeacutepuisement professionnel agrave lrsquohocircpital)
- Preacutesentation du rapport drsquoactiviteacutes au Comiteacute
drsquoHygiegravene Seacutecuriteacute et Conditions de Travail
QUESTIONNEMENTS ENJEUX LIMITES
Ce poste nous amegravene en permanence
- agrave repreacuteciser nos missions ce que nous pou-
vons faire et aussi ne pas faire depuis notre
place particuliegravere au sein de lrsquoinstitution
- agrave nous confronter agrave certaines limites
- agrave devoir nous adapter agrave une clinique aussi
riche que varieacutee
Plusieurs limites donc
La question du cadre
- absence de paiement pas de psychotheacutera-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 85
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
pie ce nrsquoest pas agrave lrsquoemployeur de payer on
connaicirct par ailleurs la neacutecessiteacute du paiement
- reacutegulariteacute des horaires il est difficile souvent
impossible pour des personnels ayant des ho-
raires variables qui travaillent en alternance de
pouvoir respecter un horaire fixe de rendez
vous Les annulations les reports sont freacute-
quents agrave cause des changements drsquohoraires
subis par les agents eux-mecircmes Parfois de
notre fait eacutegalement
La question de la confiance
- biais dans la relation
Nous avons le mecircme employeur donc il existe
un biais dans la relation de soutien psycholo-
gique (theacuterapeutique) Pourtant eacutetablir une re-
lation de confiance institutionnelle avec les
agents est essentiel Et faire partie de la mecircme
institution peut parfois paradoxalement rassu-
rer et favoriser une deacutemarche qui ne serait par
ailleurs pas faite
Ayant eacuteteacute recruteacute par la mecircme direction la
question de la confidentialiteacute du travail du
psychologue peut se poser (la confidentialiteacute
est rappeleacute agrave chaque premiegravere rencontre)
- Neacutecessaire et juste distance entre lrsquoinstitution
de son propre travail (visites meacutedicales effec-
tueacutees par un autre meacutedecin du travail attitude
discregravete au sein de lrsquoeacutetablissement hellip)
- Se pose la question du secret partageacute dans
lrsquointeacuterecirct de lrsquoagent et avec son accord cer-
taines informations peuvent parfois ecirctre com-
muniqueacutees (assistantes sociales du personnel
meacutedecin du travailhellip) et inversement
Comment et quand reacuteorienter
- au rythme de chacun (cette premiegravere deacute-
marche a deacutejagrave parfois eacuteteacute extrecircmement longue
et difficile)
- ne marche pas toujours du 1er
coup (combien reviennent parce que cela nrsquoa
pas accrocheacute trop cher tous ces arguments
connus qui peuvent cacher un pas precirct agrave)
Autres limites agrave cette pratique
- question de la neutraliteacute quant au fait de pou-
voir recevoir deux parties drsquoun conflit Nous
sommes lagrave pour tous les agents Et crsquoest bien
lagrave toute la diffeacuterence avec les GH qui ont agrave dis-
position plusieurs psychologues du personnel
- difficulteacute si une personne reccedilue en individuel
participe eacutegalement agrave un groupe de parole hellip
- tous les risques de glissement potentiels aux
places que lrsquoinstitution veut nous faire prendre
lorsque par exemple en lrsquoabsence de meacutedecin
du travail on propose agrave la place de rencon-
trer la psychologue du personnel lorsqursquoil faut
absolument trouver une solution risque drsquoecirctre
interpelleacute en vue de reacutesoudre un conflit avec
ce que cela suppose de rapiditeacute et drsquoefficience
allant agrave lrsquoencontre de la possibiliteacute de penser et
drsquoeacutelaborer
CONCLUSION
Pour le psychologue exercer aupregraves du per-
sonnel appelle parfois agrave des positions drsquoeacutequili-
bristes et neacutecessite de garder une certaine
souplesse
Lrsquointeacuterecirct de ce poste est de faciliter lrsquoaccegraves au
psychologue permettant agrave un public qui nrsquoau-
rait pas forcement fait cette deacutemarche de venir
consulter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 86
Clocircture de la journeacutee
gt Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 87
Clocircture de la journeacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 87
Clocircture de la journeacutee
C ette journeacutee nous a permis de partager
la diversiteacute de nos pratiques La ri-
chesse des interventions nous teacutemoi-
gnent de la vivaciteacute des psychologues hospita-
liers Cest bien la speacutecificiteacute de nos pratiques
qui assure la peacuterenniteacute de nos postes et leur
creacuteation
Jai commenceacute la journeacutee par des remercie-
ments cest ainsi que je vais la clore
Je remercie
le Comiteacute scientifique qui a construit ce pro-
gramme riche et ambitieux qui je lespegravere vous
aura apporteacute de nouvelles ressources
Le Comiteacute drsquoorganisation et les beacuteneacutevoles qui
nous ont reacuteserveacute un accueil souriant et dyna-
mique
Cleacutement ingeacutenieur du son agrave la technique
gracircce agrave qui vous pourrez entendre les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nous vous demandons donc un peu de pa-
tience avant de pouvoir retrouver les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nheacutesitez pas agrave nous rejoindre ce qui renforce
toujours notre dynamisme
En vous remerciant de votre preacutesence qui fait
le succegraves de cette journeacutee et nous poussera
qui sait agrave nous retrouver avec notre quart de
siegravecle -)
Dernier deacutetail administratif noubliez pas de
remplir le questionnaire deacutevaluation de la jour-
neacutee et surtout de rendre votre badge en par-
tant Cest important pour nous
Merci agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
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BULLETIN DrsquoADHESION
Cotisation annuelle incluant lrsquoabonnement au journal et laccegraves agrave lespace adheacuterent sur notre site
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Membres actifs Titulaire 45 euro
Contractuel ou retraiteacute 30 euro
Membres associeacutes Jeune diplocircmeacute lt3ans sans emploi 25 euro
Eacutetudiant (master 1 ou 2) 15 euro
Justificatif obligatoire agrave joindre copie du haut du bulletin de salaire du diplocircme ou du certificat de
scolariteacute
Renseignements concernant lrsquoadheacuterent
Nom
Preacutenom
Adresse personnelle
Teacuteleacutephone
Courriel
Adresse professionnelle (preacuteciser le nom du chef de service)
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Courriel (pour recevoir nos Bregraveves)
Date et signature
A adresser avec votre chegraveque agrave lordre de Psyclihos agrave
Christine SCHWANSE psychologue
Heacutematologie Adulte - Myosotis 3 Hocircpital Saint Louis
par courrier 1 Avenue Claude Vellefaux ndash 75 010 Paris
Association des Psychologues Cliniciens Hospitaliers de lrsquoAssistance Publique
Hocircpitaux de Paris
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 3
Le journal Ndeg18 - Janvier 2012
Dans ce numeacutero
Eacuteditorial
Ont participeacute agrave ce numeacutero
Franccediloise ADRIANSEN Marie-Lise BABONNEAU Martine BONNET-LECUIR Marie-Victoire CHOPIN Muriel DEROME Clara DUCHET Anna ELLI-PARDO
Jacqueline FAURE Isabelle FRETIGNY Catherine HOLZMAN Annie KURTZ Nadine LABBE Ceacuteline LE BIVIC Eacutelodie METIVET Patrice NOMINE
Ambre PIQUARD Virginie ROCARD Eacutelodie SALES Christine SCHWANSE Nicole SENSE Natascia SERBANDINI Martine SHINDO Elodie TRAVERS Benoicirct VERDON
Page
Eacuteditorial 3
Ouverture de la journeacutee 7
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles com-
peacutetences
10
Loi HPST titre de psychotheacutera-
peutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
23
Uniteacute dans la diversiteacute des pra-
tiques transversaliteacute de nos
cliniques
49
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
68
Clocircture de la journeacutee 86
Adheacutesion 88
N umeacutero exceptionnel pour commencer
cette nouvelle anneacutee 2012 Nous en pro-
fitons pour vous preacutesenter tous nos
vœux pour cette anneacutee qui commence quelle per-
mette leacutepanouissement de vos projets tant profes-
sionnels que personnels
Voici les actes de notre journeacutee du 24 novembre
2011 organiseacutee agrave loccasion des 20 ans de Psyclihos
Cette journeacutee a eacuteteacute un succegraves comme en teacutemoi-
gnent les nombreux remerciements et encourage-
ments reccedilus ainsi que les eacutevaluations des partici-
pants Cela nous donnera peut-ecirctre leacutenergie de re-
commencer avant notre quart de siegravecle
Vous retrouverez dans ces pages la richesse des
interventions proposeacutees afin de pouvoir prolonger
les reacuteflexions qui se sont engageacutees Les interven-
tions seront prochainement disponibles agrave leacutecoute
sur notre site internet Tregraves bonne lecture agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 4
Le journal Ndeg18 - Janvier 2012
Sommaire deacutetailleacute
Page
Eacuteditorial 3
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles
8
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz
11
Psychologue clinicien en psychotraumatologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet
15
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo
19
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute
24
Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard
32
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute
43
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants africains
Jacqueline Faure
50
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique en
eacutevolution
Muriel Derome
60
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic
63
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau
69
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini
78
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny
Elodie Travers
82
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 5
20 ans de Psyclihos
Psychologue agrave lHocircpital
une espegravece agrave proteacuteger
Eacutedito
Psyclihos est une association loi 1901 creacuteeacutee en 1991 pour promouvoir la
psychologie clinique et le rocircle des psychologues agrave lhocircpital
Par ses nombreuses actions agrave lintention de ses adheacuterents et des
psychologues hospitaliers Psyclihos est reconnue comme un relais et un
interlocuteur aupregraves des diffeacuterentes instances
Pour fecircter ses 20 ans Psyclihos organise cette journeacutee ouverte agrave ses
adheacuterents et agrave lrsquoensemble des psychologues de lrsquoAP-HP Elle offrira
loccasion de renforcer les liens professionnels entre collegravegues et de
partager la richesse des approches cliniques
Nous vous proposons de nous rencontrer autour des
theacutematiques suivantes
gt Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
gt Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip Quels
changements pour le meacutetier de psychologue
gt Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de
nos cliniques
gt Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
DRH AP-HP Centre de la Formation et du
Deacuteveloppement des Compeacutetences - Institut de
Formation des Cadres de Santeacute
En partenariat avec
Comiteacute dorganisation
Catherine Holzmann
Ceacuteline Le Bivic
Ambre Piquard
Elodie Sacircles
Nicole Sense
Comiteacute scientifique
Franccediloise Adriansen
Nadine Labbeacute
Patrice Nomineacute
Elodie Sacircles
Christine Schwanse
Martine Shindo
Benoicirct Verdon
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 6
8h30 Accueil des participants
9h-9h30 Ouverture
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
9h30 - 11h Ecirctre psychologue ou
faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute
Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Lariboisiegravere
gt P s y c h o l o g u e c l i n i c i e n e n
psychotraumatologie du savoir-faire
au savoir-ecirctre
Clara Duchet Tenon
gt Aider agrave penser limpensable en
oncologie
Anna Elli Pardo Saint-Louis
11h - 11h30 Pause
11h30 - 13h Loi HPST titre de
psychotheacuterapeutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen
membre du CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des
textes officiels
Nadine Labbeacute Cochin
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous
avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Sainte Peacuterine
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Fernand Widal
13h -14h30 Repas libre
14h30 - 16h Uniteacute dans la diversiteacute
des pratiques transversaliteacute de nos
cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Fernand
Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute
des patients migrants
Jacqueline Faure Tenon
gt P sycho logue en r eacutean imat i on
peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique
en eacutevolution
Muriel Derome Raymond Poincareacute
gt Seacutejour de vacances quelle place pour
le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Eacutemile Roux
16h - 17h30 Cliniques particuliegraveres
pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Saint
Louis
gt Laccompagnement psychologique par
teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Pitieacute Salpecirctriegravere
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale
de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Jean Verdier
gt Psychologue clinicien aupregraves du
personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Saint Louis
Le programme de la journeacutee
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 7
Ouverture de la journeacutee
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 7
Ouverture
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 8
Ouverture de la journeacutee
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
J e vais commencer par quelques remer-
ciements rapides
En premier lieu vous Monsieur Burdet
vous nous avez fait lhonneur douvrir cette
journeacutee Plus quun honneur votre soutien
nous a eacuteteacute si preacutecieux
Quand nous avions eacutevoqueacute avec vous lideacutee
dune journeacutee anniversaire mais alors de faccedilon
encore lointaine dans nos esprits votre encou-
ragement sans faille degraves lannonce de cette
eacuteventualiteacute nous a donneacute leacutenergie daffronter
lorganisation de cet eacuteveacutenement
Cest pourquoi au nom des membres du con-
seil dadministration des comiteacutes scientifiques
et dorganisation je tiens agrave vous remercier cha-
leureusement de votre soutien et du solide inteacute-
recirct que vous teacutemoignez agrave notre profession
Cet engagement de la Direction des res-
sources Humaines de lAPHP agrave nos cocircteacutes
comme il y a 20 ans nous permet de nous re-
trouver dans ce bel amphi pour partager cette
journeacutee Et nous remercions aussi lInstitut de
Formation des Cadres de Santeacute APHP pour
lefficaciteacute de son aide logistique et de la ges-
tion des inscriptions jusqursquoagrave ce jour et mecircme au
-delagrave
Mes remerciements vont aussi agrave vous tous qui
ecirctes ici aujourdrsquohui Nombre dentre vous nous
connaissent deacutejagrave en tant qursquoadheacuterents actuels
ou passeacutes souvent dune grande fideacuteliteacute au
cours des anneacutees Dautres nous suivent avec
inteacuterecirct sans nous avoir (encore ) rejoints et de
nombreux jeunes collegravegues nous deacutecouvrent
ou ont deacutejagrave deacutecouvert notre site internet
Notre site internet sur lequel vous pouvez
suivre lactualiteacute de notre association nous re-
joindre ou vous inscrire agrave notre infolettre Les-
pace adheacuterent propose de nombreux services
comme les postes agrave pourvoir agrave lAP-HP ou agrave la
FPH qui inteacuteressent tous collegravegues quils soient
titulaires contractuels ou en recherche dem-
ploi Bien eacutevidemment ces services sont reacuteser-
veacutes agrave nos adheacuterents tout comme nos bregraveves
par mail qui vous informent de lactualiteacute et nos
journaux
Degraves sa creacuteation Psyclihos sest donneacute pour
rocircle de teacutemoigner de lrsquoapport de la Psychologie
Clinique agrave lrsquohocircpital et den rsquoaffirmer la preacutesence
Informer communiquer et ecirctre un relais entre
les psychologues eacutechanger non seulement
entre pairs mais ecirctre aussi un interlocuteur
pour linstitution quant agrave notre profession
Lrsquohistoire de lrsquoassociation est intimement lieacutee agrave
celle de notre profession puisque Psyclihos voit
sa naissance en janvier 1991 quelques jours
avant cla parution du deacutecret qui fonde le statut
de psychologue hospitalier
1991 -2011 vingt ans de psychologie agrave lhocircpi-
tal nous y voilagrave
Les 20 ans de Psyclihos ont eacuteteacute loccasion
unique de nous replonger dans les archives de
notre association Nous partageons la richesse
de ce singulier voyage dans le temps dans le
Numeacutero speacutecial 20 ans du journal de Psyclihos
que vous trouverez dans vos pochettes
Il retrace lhistoire de Psyclihos agrave travers celle
de la psychologie agrave lhocircpital en sarrecirctant sur
les grandes dates qui ont jalonneacute le meacutetier de
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 9
Ouverture de la journeacutee
psychologue
1991 le deacutecret portant statut particulier de psy-
chologue hospitalier 1996 le code de deacuteonto-
logie 2003 la deacutecentralisation de gestion au
sein de lAP-HP et les conseacutequences que nous
vivons depuis pour nen citer que quelques
uneshellip
Cette plongeacutee historique loin decirctre nostal-
gique nous permet de rappeler au fil des ar-
ticles parus durant ces deux deacutecennies dans
nos journaux combien lactualiteacute de notre pro-
fession sappuie sur son passeacute Connaicirctre cette
histoire notamment pour nos plus jeunes col-
legravegues nous semble neacutecessaire pour com-
prendre les enjeux qui traversent actuellement
notre profession Il est dailleurs eacutetonnant de
lire combien des articles pourtant anciens gar-
dent toute leur fraicirccheur traitant deacutejagrave de pro-
bleacutematiques qui apparaissent reacutecurrentes ou
abordant des questionnements qui aujourdhui
pourraient sembler novateurshellip
Cest donc autour de quelques grands thegravemes
toujours actuels comme la deacuteontologie des
psychologues la saga des concours sur titres
la Fiche meacutetier la fonction FIR la Psychiatrie
de liaison ou les psychotheacuterapies et la loi que
nous vous invitons agrave plonger dans notre journal
speacutecial
Nous retrouvons aujourdrsquohui certains de ces
sujets dans le programme de cette journeacutee
Il illustre les champs drsquointerventions qui ani-
ment lrsquoassociation depuis sa creacuteation la fonc-
tion de psychologue les changements induits
par la leacutegislation la diversiteacute des pratiques et
les cliniques particuliegravereshellip
Nous souhaitons pouvoir teacutemoigner de la ri-
chesse et de la diversiteacute des pratiques des psy-
chologues cliniciens agrave lhocircpital Bien sucircr en 20
ans la place des psychologues hospitaliers a
eacutevolueacute leur nombre aussi La varieacuteteacute des inter-
ventions teacutemoigne de la richesse des champs
dexercice possibles parfois insoupccedilonneacutes au
sein de notre institution quest lAP-HP
Derriegravere un titre un peu provocateur nous sou-
haitons vous mobiliser dans lancrage toujours
neacutecessaire de notre profession au sein de
lAPHP Le cadre de notre exercice est toujours
fragile voire mis agrave mal En ces temps heurteacutes
et parfois incertains nous espeacuterons pouvoir
partager notre eacutenergie pour proteacuteger notre
exercice si particulier Ecirctre psychologue agrave lhocirc-
pital cest bien sucircr ecirctre agrave la rencontre des pa-
tients et de leurs proches dans leurs singulari-
teacutes mais aussi des eacutequipes soignantes sans
oublier la participation agrave la vie institutionnelle
comme ce sera abordeacute dans les diffeacuterentes in-
terventions que vous allez entendre aujour-
dhui
Sans plus attendre nous ceacutedons la place agrave la
premiegravere session de la matineacutee dans le vif du
sujet ecirctre psychologue ou faire de la psycho-
logie statut fonctions quelles compeacute-
tences modeacutereacutee par Benoicirct Verdon long-
temps psychologue hospitalier maintenant au
sein de lUniversiteacute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 10
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Hocircpital Lariboisiegravere Page 11
gt Psychologue clinicien en psychotrauma-
tologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Page 15
gt Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Hocircpital Saint-Louis Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles compeacutetences
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 11
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Neuropsychologue une espegravece nouvelle Plus reacutesistante
Mieux adapteacutee agrave la vie hospitaliegravere ou aux institutions
Plus respecteacutee des meacutedecins prescripteurs
Annie Kurtz
Service de Neurologie Hocircpital Lariboisiegravere
La reacutealiteacute objective drsquoune atteinte ceacutereacutebrale agrave
lrsquoorigine des troubles preacutesenteacutes par le patient
ne doit jamais occulter le fait drsquoune histoire
drsquoun eacutequilibre psychique et drsquoune individualiteacute
malmeneacutee
Charte des CPCN - Collegraveges des Psycho-
logues Cliniciens speacutecialiseacutes en Neuropsycho-
logie
J rsquoai bien imprudemment accepteacute il y a
quelques mois de prendre la parole pour
ceacuteleacutebrer les 20 ans de lrsquoassociation Psy-
clihos De plus jrsquoai accepteacute de vous faire parta-
ger mes reacuteflexions sur la place du psychologue
dans le champ de la santeacute et cerise sur le gacirc-
teau pour la deacutefense et lrsquoillustration de la neu-
ropsychologie clinique
Mon propos nrsquoest pas de poleacutemiquer mais de
reacutefleacutechir ensemble aux charmes et aux dangers
que repreacutesente le terme de
neuropsychologue si priseacute par certains ac-
tuellement
La preacutesence de psychologues au sein des ser-
vices hospitaliers est ancienne ils ou elles as-
surent agrave la fois le travail de bilan et celui de
soutien aupregraves des patients Mais le genre
neuropsychologue nrsquoexiste que depuis peu
Le terme neuropsychologue seacuteduit beaucoup
les jeunes collegravegues et mecircme certains para-
meacutedicaux comme les orthophonistes les ergo-
theacuterapeutes et mecircme quelques kineacutesitheacutera-
peutes Nombreux sont ceux dans le champ de
la neuropsychologie qui revendique le label
de neuropsychologues Depuis quelques an-
neacutees les lettres de motivation qui accompa-
gnent les demandes de stages srsquoadressent agrave la
neuropsychologue que je suis censeacutee ecirctre et
les candidates et candidats deacuteclarent leur
passion pour le meacutetier de
neuropsychologue Et je mrsquointerroge sur cette
ferveur
Quelle deacutefinition de la neuropsychologie pou-
vons-nous faire nocirctre Il y a 10 ans en mars
2001 le Collegravege des Psychologues Cliniciens
speacutecialiseacutes en Neuropsychologie (CPCN) pour
les Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Psychologie deacutefinis-
sait ainsi la neuropsychologie
La neuropsychologie est la discipline qui traite
des relations entre les processus mentaux
sous-tendant le raisonnement lrsquoattention la
meacutemoire la perception les gnosies les
praxies le langage le comportement eacutemotion-
nel et lrsquoactiviteacute du cerveau Lors des leacutesions ceacute-
reacutebrales les conseacutequences concerneront agrave la
fois lrsquoefficience de la cognition et lrsquoadaptabiliteacute
des conduites de lrsquoindividu Cette neacutecessaire
appreacuteciation analytique et syntheacutetique du psy-
chisme humain caracteacuterise lrsquoapproche neurop-
sychologique
La neuropsychologie est un champ multidisci-
plinaire ougrave se retrouvent diffeacuterents meacutetiers et
les zones de recouvrement peuvent ecirctre larges
pour certains Je milite aujourdrsquohui pour deacute-
fendre le fait qursquoun bilan reacutealiseacute par un psycho-
logue mecircme si les tests utiliseacutes par drsquoautres
intervenants sont identiques reste un bilan dif-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 12
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
feacuterent Ce travail drsquoanalyse et synthegravese rappe-
leacute dans la deacutefinition citeacutee fonde la totaliteacute de
nos pratiques en neuropsychologie
Lrsquoacte le plus freacutequent est le bilan bilan pour
plaintes mneacutesiques diagnostic diffeacuterentiel entre
deacutepression et maladie neurodeacutegeacuteneacuterative seacute-
quelles drsquoaccident vasculaire seacutequelles de
traumatisme cracircnien et nous intervenons eacutega-
lement dans le suivi et la reacutehabilitation dans les
services de soins de suite Mecircme dans le cadre
drsquoune eacutevaluation en vue drsquoune reacuteeacuteducation
nous savons devoir tenir compte des mouve-
ments psychiques agrave lrsquoœuvre dans tout individu
et qui vont peser sur ce travail
Notre code de deacuteontologie speacutecifie que le res-
pect de la vie psychique fonde notre action ce
respect de la vie psychique tout au long de nos
anneacutees drsquoeacutetudes nous avons eacuteteacute formeacutes agrave y
porter une attention toute particuliegravere Nos ac-
quis nos savoirs modifient notre approche
Quel peut ecirctre le sens pour un ou une psycho-
logue agrave vouloir changer de nom
Nrsquoest-ce pas alors en gardant notre position de
psychologue et donc aussi clinicien que nos
actions prennent sens dans la prise en soin
des patients
Ce que je redoute le plus est que cette appella-
tion neuropsychologue ne confine les psycho-
logues dans un exercice limiteacute agrave la passation
des tests et au traitement des chiffres qui en
reacutesultent Comme si le neuropsychologue ne
devait mettre en œuvre aucun savoir clinique Il
est vrai que la formation donneacutee par lrsquouniversiteacute
conditionne en partie nos pratiques et cer-
taines universiteacutes ne semblent plus accorder
de place agrave la structure de la personnaliteacute ni aux
aspects thymiques dans leur master de neu-
ropsychologie Replacer le patient dans son
histoire reste primordial quels que soient les
avatars neurologiques
Qursquoavons-nous agrave gagner en devenant
neuropsychologue
Les offres drsquoemploi sont nombreuses et les
jeunes diplocircmeacutes ne restent pas longtemps
sans emploi Les meacutedecins psychiatres neu-
rologues ou geacuteriatres avec qui nous collabo-
rons veulent travailler avec des
neuropsychologues Le risque me paraicirct
grand qursquoils recherchent essentiellement des
testeurs pour leurs publications ou leurs con-
sultations Dans les recherches il srsquoagit pour
des collegravegues formeacutes agrave la psychologie pendant
au moins 4 ans puis speacutecialiseacutes en deuxiegraveme
anneacutee de Master cest-agrave-dire apregraves 5 anneacutees
drsquoeacutetudes drsquoappliquer des protocoles de test
dont ils nrsquoont mecircme pas eu la possibiliteacute de dis-
cuter le contenu et le choix des outils (Les
textes nous reconnaissent pourtant la liberteacute du
choix de nos outils)
La pratique de la neuropsychologie peut ecirctre
passionnante agrave condition de ne pas ecirctre ins-
trumentaliseacutee par les meacutedecins En preacuteparant
mon intervention il mrsquoest apparu que je pour-
rais citer comme eacutetude de cas nombre de si-
tuations de souffrance de nos collegravegues dans
les institutions Je pourrais vous preacutesenter des
vignettes cliniques ougrave les psychologues se
mettent en danger en srsquoenfermant dans cette
appellation qui convient si bien agrave nos collegravegues
drsquoautres disciplines et agrave nos employeurs Dans
les consultations meacutemoire la place faite aux
neuropsychologues peut ecirctre tregraves diffeacuterente
suivant les attentes et les projets de leurs par-
tenaires meacutedicaux ou institutionnels et parfois
ces exigences entraicircnent une veacuteritable souf-
france pour nos collegravegues Peut-on exercer son
savoir-faire et son savoir ecirctre de psychologue
quand on attend de nous de recevoir 4 ou 6
patients par jour Ces bilans TGV laissent peu
de place agrave lrsquointersubjectiviteacute du psychologue et
du patient alors que dans drsquoautres lieux lrsquoeacuteva-
luation peut respecter la singulariteacute du patient
de sa famille et la deacuteontologie du psychologue
Il y a des temps dans la pratique drsquoun bilan
neuropsychologique qui restent des temps cli-
niques Avant drsquoentreprendre un bilan le psy-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 13
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
chologue speacutecialiseacute en neuropsychologie
comme tous les psychologues doit pouvoir in-
terroger la demande de qui vient cette de-
mande le patient le meacutedecin ou la famille et
qursquoen attendent ces diffeacuterents partenaires
Comment cet examen srsquoinscrit-il dans le projet
theacuterapeutique
Lrsquoentretien preacuteliminaire ne consiste pas agrave re-
prendre lrsquoanamnegravese au sens meacutedical histoire
de la maladie mais au sens psychologique
entendre lrsquohistoire drsquoun sujet Comme lrsquoa eacutecrit
Emmanuelle Truong-Minh actuelle preacutesidente
du CPCN agrave propos de ce temps drsquoun bilan
Inscrite dans la relation porteacutee par le langage
crsquoest cette preacutesence agrave lrsquoautre qui fonde notre
action Dans le temps de la consultation que je
reacutealise un entretien que je propose des tests
que JE parle ou que JE eacutecoute je suis lagrave au
moins lagrave de maniegravere absolue et entiegravere Pour
la personne agrave mon sens il nrsquoest rien de plus
preacutecieux que lrsquoeacutetablissement de cette relation
clinique Car ces instants ougrave lrsquoobjectivation de
difficulteacutes qursquoelles soient psychopathologiques
ou neuropsychologiques risque drsquoadvenir sont
fondamentaux dans le parcours de vie le par-
cours de santeacute et le parcours de la maladie de
la personne Pouvoir prendre appui sur cette
relation permet la mise en perspective des diffi-
culteacutes permet de supporter le traumatisme
psychique eacuteventuel permet de srsquoeacutecrouler peut-
ecirctre sans ecirctre seul
Je me souviens drsquoun patient qui mrsquoa eacuteteacute adres-
seacute pour plaintes mneacutesiques et eacuteventuelles seacute-
quelles drsquoun AIT Ce monsieur de 60 ans eacutetait
marieacute pegravere de 3 enfants cadre dirigeant dans
une entreprise A la suite de son accident
ischeacutemique transitoire il avait le sentiment de
ne plus pouvoir faire face agrave ses obligations pro-
fessionnelles Sa vie professionnelle eacutetait para-
siteacutee par le danger de voir ses difficulteacutes cons-
tateacutees par les autres surtout par son respon-
sable hieacuterarchique Degraves le deacutebut de lrsquoentretien
il semblait eacuteprouver une certaine inhibition an-
xieuse son expression spontaneacutee restait fac-
tuelle et retenue Apregraves quelques eacutepreuves
drsquoattention et de meacutemoire sans reacutesultat patho-
logique je mrsquoautorisai agrave abandonner les
eacutepreuves pour poursuivre lrsquoentretien au cours
duquel jrsquoappris que la veille il avait accompa-
gneacute sa megravere contre son greacute dans une institu-
tion pour patients souffrant de maladie
drsquoAlzheimer Alors qursquoil a des fregraveres et sœurs il
avait eacuteteacute seul agrave faire cette deacutemarche contraint
et forceacute par la santeacute chancelante de son
eacutepouse atteinte drsquoun cancer du seinhellip quand
jrsquoeacutevoque avec lui la possibiliteacute drsquoaller en parler
avec un psy il me dit y avoir deacutejagrave penseacute mais
renonceacute parce qursquoil avait peur de srsquoeffondrer
Nous avons la responsabiliteacute de notre bilan
mais nous ne pouvons deacutelivrer un diagnostic
(crsquoest de la compeacutetence du meacutedecin) pourtant
lrsquoentretien dit de restitution est un temps
drsquoeacutechange privileacutegieacute qui rend au patient sa
place de sujet mais ce temps-lagrave prend du
temps et on ne nous le donne pas toujours
Le temps de lrsquoexamen psychologique nrsquoest pas
celui des examens compleacutementaires prescrits
par les meacutedecins On sait bien qursquoil est toujours
utile de faire preacuteciser la demande de refuser
de tester Monsieur X ou Y on teste une hy-
pothegravese pas un individu de dire non parfois
parce qursquoon sait qursquoon ne reacutepondra pas agrave la
question ou parce que les conditions de lrsquoexa-
men ne respectent pas le patient ou notre auto-
nomie professionnelle Le questionnement sur
lrsquoobjet de la demande est dans le champ de
compeacutetence des psychologues nous avons eacuteteacute
formeacutes agrave ce travail La demande des meacutedecins
de lrsquoeacutequipe du patient ou de sa famille doit ecirctre
analyseacutee
Peut-on imaginer que se faire connaicirctre
comme neuropsychologue lorsqursquoon est psy-
chologue serait un moyen drsquoeacutechapper agrave la diffi-
culteacute de maintenir notre position singuliegravere
dans le monde de la santeacute
Certes la pratique de la neuropsychologie re-
quiert des connaissances sur le fonctionne-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 14
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
ment du cerveau sur les troubles cognitifs as-
socieacutes aux leacutesions ceacutereacutebrales sur la significa-
tion des localisations anatomo-cliniques et ce
travail permanent de reacuteflexion et drsquoeacutechange
avec les autres intervenants dans la prise en
charge drsquoun patient est enrichissante et parfois
passionnante comme peuvent lrsquoexprimer les
lettres de motivation des demandes de stages
Mais pratiqueacutee par des psychologues elle pour
reste un lieu privileacutegieacute ougrave la parole du patient
peut ecirctre entendue pas seulement sur ses
troubles ou ses capaciteacutes preacuteserveacutees mais sur
ce qursquoil comprend de ce qui lui arrive sur son
ressenti et le psychologue est preacutesent pour
lrsquoaccompagner dans ce nouveau travail psy-
chique Ecirctre speacutecialiseacute en neuropsychologie
est une position exigeante comme pour
chaque psychologue crsquoest lrsquoabsolue neacutecessiteacute
drsquoactualiser nos connaissances sur les patholo-
gies les nouveaux outils mais crsquoest aussi
prendre le risque de partager nos doutes sur
notre approche drsquoun patient dont on prend en
compte lrsquohistoire le contexte affectif social
professionnel Crsquoest une tacircche difficile que
drsquoessayer drsquoaborder un patient dans sa globali-
teacute et pas seulement sur ses troubles cognitifs
Personnellement je ne suis jamais sucircre drsquoavoir
bien analyseacute lrsquoensemble des eacuteleacutements que le
patient me permet drsquoappreacutehender jrsquoai la
chance de ne pas ecirctre seule dans mon service
et de pouvoir partager mes doutes avec mes
collegravegues
Enfin le terme neuropsychologue peut repreacute-
senter une menace pour le corps des psycho-
logues
Nous expeacuterimentons chaque jour la difficulteacute agrave
deacutefendre notre place de psychologue On nous
reproche notre image floue drsquoecirctre des
eacutelectrons libres dans les services drsquoecirctre des
produits de luxe sans nomenclature de nos
activiteacutes (si ce nrsquoest dans la CCAM qui ne con-
cerne que les meacutedecins) Le texte qui eacuteclaire
notre champ drsquoactiviteacute le seul qui ait une valeur
leacutegale est celui de 1985 qui deacutefinit notre statut
et nous savons bien combien lrsquoincitation au res-
pect de ce texte est une tacircche reacutecurrente pour
nous Jrsquoai commenceacute agrave travailler agrave lrsquoAP-HP en
1971 la publication de ce texte puis des circu-
laires de 1991 ont repreacutesenteacute un moment drsquoes-
poir mais jrsquoai appris tout au long de mes an-
neacutees drsquoexpeacuterience que ce travail drsquoexplicitation
de ce qursquoest un psychologue nrsquoa pas de fin
Parfois la confusion qui regravegne dans lrsquoesprit de
nos employeurs les arrangent bien pour
exemple des postes de neuropsychologues
animateurs offerts dans les EPHAD Parfois
cette confusion est sincegravere tel nouveau chef
de service qui travaille depuis de longues an-
neacutees avec des psychologues et qui reccediloit de la
DRH un rappel sur le temps FIR et qui srsquoeacutetonne
de son contenuhellip
Notre code de deacuteontologie est une reacutefeacuterence
indispensable pour nous mais nrsquoest toujours
pas un texte opposable agrave un employeur
Ces textes ont eacuteteacute eacutecrits pour les psycho-
logues ce sont des repegraveres pour les psycho-
logues Il a existeacute un mouvement qui souhaitait
diffeacuterencier les psychologues et les neuropsy-
chologues avec la volonteacute drsquoobtenir un statut agrave
part Quand on connaicirct la difficulteacute drsquoune recon-
naissance leacutegale la fragiliteacute du corps des psy-
chologues toujours precirct agrave se morceler en cen-
taines drsquoassociationshellip on peut se demander si
le meacutetier de psychologue nrsquoest pas effective-
ment en danger et se revendiquer neuropsy-
chologue peacutedopsychologue comme le laisse
entendre lrsquoactuelle fiche meacutetier nous expose
encore plus hellip (heureusement cette fiche doit
ecirctre remplaceacutee en 2012)
Notre seule protection repose sur les textes de
loi qui deacutefinissent le titre de psychologue il nrsquoy
a pas de titre de neuropsychologue ni de titre
de psychologue clinicien et ce nrsquoest pas lrsquoaven-
ture du titre de psychotheacuterapeute ni les travaux
en cours agrave la DGOS qui doivent nous rassu-
rerhellip
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 15
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Psychologue clinicien en psychotraumatologie
du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Universiteacute Paris Descartes
E n 1997 un deacutecret du ministegravere de la
Santeacute creacutee le reacuteseau des CUMP
(Cellules dUrgence Meacutedico-
Psychologique) propulsant des psychologues
cliniciens sur le terrain de lurgence aux cocircteacutes
de meacutedecins psychiatres et de parameacutedicaux
De nouvelles missions soffrent agrave ces profes-
sionnels peu formeacutes au deacutepart pour intervenir
dans ces contextes de catastrophes collectives
(accidents agrave retentissement majeur catas-
trophes naturelles guerres terrorisme etc)
Peu agrave peu des reacuteflexions et groupes de travail
speacutecifiques se creacuteent (au sein notamment de
lAFORCUMP - Association de recherche et de
formation des CUMP) afin de mieux deacutefinir les
fonctions et les compeacutetences de chacun dans
ce domaine bientocirct nommeacute
psychotraumatologie Cette nouvelle cli-
nique (dans sa forme institutionnelle et dans
sa dimension traumatique en situations
extrecircmes) a souleveacute de nombreux deacutebats
passionneacutes agrave propos de la leacutegitimeacute ou non de
lintervention de terrain (sur les sites et aux
abords des catastrophes) Cependant il sagira
plutocirct de discuter ici de la speacutecialisation eacuteven-
tuellement neacutecessaire des psychologues dans
ce domaine - du cocircteacute du savoir-faire - comme
des retrouvailles avec une position de clinicien
classique - du cocircteacute du savoir-ecirctre et de la
subjectivation
Agrave lrsquoheure ougrave se multipliaient donc diffeacuterentes
formes de violence et notamment au moment
de lrsquoeacutepoque terroriste parisienne (attentats
meacutediatiseacutes St Michel Port-Royal 1995-1996)
les psychologues ont vu leur champ drsquoaction et
leurs fonctions srsquoeacutelargir des nouvelles mis-
sions et nouvelles structures se deacuteveloppaient
pour venir au secours des victimes agrave la de-
mande de nos gouvernants et de psychiatres
militaires expeacuterimenteacutes dans ce domainehellip Jrsquoai
eu la chance de participer agrave ce processus degraves
le deacutebut et tregraves rapidement je me suis poseacutee
des questions sur ces interventions qui mrsquoap-
paraissaient pour ainsi dire hors cadre
Hors cadre parce que dans lrsquourgence
Hors cadre parce que nombre drsquointerventions
avaient lieu sur le terrain peu apregraves la catas-
trophe loin du confort du cabinet ou de lrsquohocircpi-
tal
Je me souviens agrave lrsquoeacutepoque mrsquoecirctre rueacutee sur le
code de deacuteontologie en vigueur depuis le 22
mars 1996 et me rassurer en lisant
La mission fondamentale du psychologue est
de faire reconnaicirctre et respecter la personne
dans sa dimension psychique Son activiteacute
porte sur la composante psychique des indivi-
dus consideacutereacutes isoleacutement ou collectivement
Oufhellip nous nrsquoeacutetions donc pas compleacutetement
hors-cadrehellip cependant je nrsquoavais pas vrai-
ment appris agrave travailler sur les bancs de la fac
Sans la demande du patient (mecircme pour lrsquoen-
fant le parent eacutetait demandeur sinon lrsquoinstitu-
tion scolairehellip)
Sans un cadre institutionnel classique
Et certainement pas en prise directe avec la
reacutealiteacute drsquoun eacuteveacutenementhellip
Quelques options universitaires tout de mecircme
assureacutees par des enseignants ayant participeacute agrave
des missions humanitaires mrsquoavaient deacutejagrave per-
mis drsquointerroger des dispositifs de soins hors
norme
Dans nos deacutebuts jrsquoai donc co-animeacute un groupe
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 16
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
de travail destineacute speacutecifiquement aux
psychologues pour reacutefleacutechir agrave notre pratique
Voici comment nous nous repreacutesentions alors
les choses
Nouvelles missionshellip = hellip nouvelles compeacute-
tences Ce que jrsquoai nommeacute dans mon introduc-
tion savoir-faire
1 NOUVELLES COMPEacuteTENCES REQUISES
ndash DU COcircTEacute DU SAVOIR-FAIRE
Lors des soins immeacutediats ou
defusing (cagraved sur le terrain dans les
heures qui suivent lrsquoattentat la catastrophe
naturelle la prise drsquootages lrsquoaccident col-
lectif etc)
Le psychologue doit reconstruire un cadre en
fonction de la situation qui se preacutesente agrave lui
crsquoest-agrave-dire en labsence de cadre deacutefini
(configuration du lieu dureacutee de la mission
nombre de sujets agrave prendre en charge etc
sont inconnus agrave lrsquoavance) Ceci neacutecessite de sa
part une capaciteacute dadaptation une souplesse
psychique dans son intervention ainsi qursquoun
cadre theacuteorique interne solide pour ne pas ceacute-
der nous mecircme agrave la panique ou au deacuteborde-
ment eacutemotionnel Le cadre theacuteorique solide
renvoyait surtout pour nous aux eacutecrits sur le
traumatisme et agrave ce qursquoon appelait alors la
victimologie
Pour illustrer ce propos je peux vous parler
drsquoune mission effectueacutee agrave Pointe Noire au Con-
go lorsque nous eacutetions chargeacutes avec un psy-
chiatre militaire de lrsquoeacutevaluation psychopatholo-
gique des ressortissants franccedilais en pleine
guerre civile (octobre 1997) Nous avons effec-
tivement ducirc nous adapter agrave lrsquoabsence de cadre
rassurant dans le sens ougrave nos deacuteplacements
eacutetaient extrecircmement limiteacutes en raison du con-
texte drsquoinseacutecuriteacute permanente marqueacute par des
tirs quotidiens drsquoarmes automatiques Il srsquoagis-
sait eacutegalement drsquoinventer des lieux de consulta-
tions et des modes drsquoapproches originaux pour
cette population bien souvent cloicirctreacutee dans les
appartements deacutevasteacutes par les milices armeacutees
Mais je souhaite citer drsquoautres situations moins
exceptionnelles afin de vous montrer agrave quel
point le psychologue dans ce travail drsquourgence
peut ecirctre ameneacute agrave reacutealiser des entretiens dans
des lieux inhabituels voire insolites comme agrave
bord drsquoun avion lorsque nous avons proceacutedeacute au
rapatriement des victimes du crash drsquoavion du
Seacuteneacutegal (en feacutevrier 1997) ou dans un car lors-
que nous avons accompagneacute les familles des
enfants victimes de lrsquoavalanche des Orres ou
encore dans un aeacuteroport lors de lrsquoaccueil de
populations reacutefugieacutees (du Congo ou du Kosso-
vo) ou dans une citeacute universitaire pour la prise
en charge des victimes drsquoattentats etc
Ici le psychologue doit ecirctre precirct agrave aller vers les
victimes sans attendre une demande de leur
part (drsquoautant plus que les personnes sont sou-
vent en eacutetat de choc de confusion de sideacutera-
tion etc) Alors rappelons-le que notre forma-
tion nous apprend plutocirct agrave travailler avec la de-
mande du patient comme principe inheacuterent agrave
la rencontre theacuterapeutique
Ensuite le psychologue est ameneacute agrave srsquointerro-
ger sur la position de neutraliteacute bienveillante
Alors que neutraliteacute signifie ne pas eacutemettre de
jugements de critiques de deacutesapprobation
nous voyons comment dans lrsquourgence le clini-
cien peut (je dirais mecircme doit) juger de lrsquoadap-
tation drsquoun comportement par exemple quitte agrave
deacutecider drsquoune hospitalisation ou drsquoun rapatrie-
ment En effet le psychologue doit savoir repeacute-
rer et informer les victimes des symptocircmes
psychopathologiques eacuteventuels favoriser la
demande de prise en charge theacuterapeutique ul-
teacuterieure si besoin est repeacuterer et orienter les
personnes les plus fragiles en faisant bien la
distinction entre eacutetat de stress aigu et entreacutee
potentielle dans une pathologie traumatique
Mecircme si ces fonctions de diagnostic drsquoeacutevalua-
tion drsquoorientation existent dans le cadre de
notre profession celles qui visent agrave informer agrave
lrsquoavance et agrave preacutevenir relegravevent habituellement
plutocirct de la speacutecificiteacute meacutedicale
Par ailleurs sur le terrain la position et latti-
tude du psychologue sont encore une fois un
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 17
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
peu particuliegraveres pour lui puisqursquoil doit assurer
une preacutesence rassurante contenante (voire
maternante au sens de Winnicott) apporter de
la chaleur et de lhumaniteacute Lrsquointervention drsquour-
gence se situe du cocircteacute du holding Ferenczi
en charge des soldats en prise avec des neacute-
vroses de guerre soulignait deacutejagrave ce pheacuteno-
megravene de reacutegression des patients les faisant re-
venir agrave un stade archaiumlque (en proie agrave des an-
goisses violentes et massives de destruction
morcellementhellip) et agrave des comportements in-
fantiles (ne plus savoir marcher perdre son
autonomie pour les besoins de la vie quoti-
dienne etc) Ici le traumatisme est externe et
agit par effraction physique et psychique deacute-
sorganisant les modaliteacutes deacutefensives habi-
tuelles On dit aussi que le traumatisme est en-
treacute par tous les pores de la peau et envahit
tous les sens (visuels olfactifs auditifs etc) Il
srsquoagit alors pour le psychologue drsquoexercer une
veacuteritable fonction de pare-excitation
drsquoenveloppe protectrice (Au sens de D Winni-
cott et de D Anzieu) fonction qui peut srsquoac-
compagner de gestes apaisants
Travailler dans ce type de dispositif ne srsquoimpro-
vise pashellip Ainsi le psychologue doit avoir reccedilu
une formation speacutecifique A lrsquoappui un nouvel
Extrait du code de deacuteontologie des psycho-
logues chapitre compeacutetences
Le psychologue tient ses compeacutetences de
connaissances theacuteoriques reacuteguliegraverement mises
agrave jour drsquoune formation continue et drsquoune forma-
tion agrave discerner son implication professionnelle
dans la compreacutehension drsquoautrui
Pour notre domaine drsquointervention la for-
mation porte avant tout sur
1 La clinique traumatique la symptomatologie
de la neacutevrose traumatique de lrsquoESPT mais
aussi de tous les eacutetats de deacutesorganisa-
tion aigus des comportements de panique col-
lective etc elle porte eacutegalement sur le fonc-
tionnement psychique entraveacute par le trauma
donnant lieu agrave des reacuteameacutenagements transi-
toires parfois tregraves eacuteloigneacutes drsquoune clinique clas-
sique
2 La dynamique de groupe un groupe pris
dans une catastrophe repreacutesente une enve-
loppe psychique groupale qui elle-mecircme peut
se trouver effracteacutee par la violence de lrsquoeacuteveacutene-
ment le collectif est alors briseacute et ne pourra
plus fonctionner comme avanthellip Que la prise
en charge soit groupale ou bien mecircme indivi-
duelle il est fondamental drsquoecirctre au clair avec
ces concepts de la clinique groupale
Nous venons de pointer les principales con-
naissances et compeacutetences neacutecessaires au
psychologue qui intervient dans lrsquourgence ou
dans des dispositifs de soins exceptionnels mis
en place suite agrave des eacuteveacutenements qui sortent de
lrsquoordinairehellip pour autant ce savoir-faire nrsquoa de
sens que srsquoil srsquoarticule avec un savoir-ecirctre
propre agrave la fonction habituelle du psychologue
2 LORSQUE LE SAVOIR-FAIRE REJOINT
LE SAVOIR-EcircTRE
Je poursuis ma lecture du code de deacuteontologie
(chapitre compeacutetences) le psychologue est
garant de ses qualifications particuliegraveres et deacute-
finit ses limites propres compte tenu de sa for-
mation et de son expeacuterience Il refuse toute in-
tervention lorsqursquoil sait ne pas avoir les compeacute-
tences requises Ainsi il doit savoir sil peut
assurer un soin immeacutediat dans lrsquourgence ou srsquoil
doit refuser ce type de mission en fonction de
ses limites personnelles et professionnelles de
sa vulneacuterabiliteacute (changeante au fil du temps et
de son histoire personnelle) de ses projections
eacuteventuelles
Il est inviteacute eacutegalement agrave repeacuterer et agrave connaicirctre
ses propres reacuteactions psychiques agrave leacutecoute de
ce type de patients de ce qui tient parfois de
lintoleacuterable savoir ou apprendre agrave repeacuterer
ses limites personnelles ses propres fan-
tasmes de sauveur ou ses mouvements
drsquoidentification agrave la victime crsquoest agrave dire ses
propres eacutelans contre-transfeacuterentiels Ces con-
naissances restent largement favoriseacutees par un
travail personnel au cours duquel le psycho-
logue a appris agrave ecirctre eacutecouteacute et par la mise en
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 18
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
place de supervision reacuteguliegravere
Dans le cadre de lrsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue est le seul agrave de-
voir se passer drsquoinstrument (pas de mateacuteriel
meacutedical ni de theacuterapeutique meacutedicamenteuse
ou encore de mateacuteriel technique reacuteserveacutes aux
meacutedecins infirmiers secouristes etc) De ce
fait comme lrsquoexprime Colette Chiland il devient
son propre instrument celui qui permet de
comprendre et drsquointervenir agrave mains nues
Lrsquooriginaliteacute de sa formation vient du travail sur
soi que le clinicien a effectueacute pour acqueacuterir
une certaine maicirctrise de lui-mecircme comme ins-
trument Autrement dit ce que le psychologue
met au service de lrsquoautre ce ne sont pas seule-
ment ses connaissances mais aussi son appa-
reil psychique sa psycheacute son fonctionnement
sa capaciteacute de ressentir de comprendre et
drsquoeacutelaborer Le savoir du clinicien devient un sa-
voir vivant incarneacute ougrave il paie de sa personne
Crsquoest principalement cette position qui le dis-
tingue drsquoun autre intervenant
Dans la clinique du traumatisme il est fonda-
mental de prendre conscience de ce qursquoon
eacuteprouve lors de lrsquoeacutecoute drsquoun blesseacute psychique
aux prises avec des pheacutenomegravenes drsquoeffractions
internes afin de ne pas ecirctre gouverneacute par des
reacuteactions non controcircleacutees dans la compreacutehen-
sion du patient et dans la reacuteponse qursquoon lui
donnera Nous voyons comment cette eacutecoute
ne peut se contenter drsquoun savoir plaqueacute elle
doit ecirctre au contraire un travail actif qui permet
des allers ndash retours entre probleacutematique per-
sonnelle et ressenti du patient sans que cette
premiegravere nrsquointerfegravere de maniegravere neacutegative Et
crsquoest bien en restant sensible et en acceptant
de le rester dans les limites que nous venons
de fixer que le sujet se sentira libre drsquoexprimer
eacutemotions penseacutees honteuses sentiments de
culpabiliteacute et drsquohumiliation inheacuterents agrave la dyna-
mique traumatique
Enfin nous le savons bien lrsquoeacutecoute srsquoexerce
dans un double registre ce qui est dit et ce qui
nrsquoest pas dit le contenu manifeste et le conte-
nu latent Ces dimensions concernent tout au-
tant le clinicien qui doit savoir se taire pour lais-
ser lrsquoautre parler et parler pour lui faciliter la pa-
role Dans notre contexte drsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue doit eacutegalement
chercher agrave eacutetablir petit agrave petit et degraves que pos-
sible une distinction entre fantasmes
(individuels) et eacuteveacutenements reacuteels (veacutecus par
tous) pour diffeacuterencier angoisse interne
(subjective) et peur (objective) des objets ex-
ternes
Il est ainsi un passeur agrave ce moment de frac-
ture dans lrsquohistoire du sujet Il fait alors le lien
entre le passeacute la bregraveche traumatique et la
reconstruction agrave venir
EN CONCLUSION
Dans un contexte hors du commun puisque
hors cadre et souvent hors demande il me
paraicirct essentiel de garder nos re-
pegraveres classiques de psychologue clinicien
Soulignons que nous restons pour le patient un
psychologue supposeacute savoir Dans cette cli-
nique deacuteroutante et violente bien entendu le
cadre interne tapisseacute de connaissances speacuteci-
fiques devient opeacuterant et garant de notre pro-
fessionnalisme Nous voyons finalement agrave quel
point la speacutecialisation est en partie incontour-
nable (mais comme pour tout autre type de cli-
nique les soins psychiques aupregraves de sujets
deacutependants en fin de vie de patients psycho-
tiques de nourrissons de familles de sans-
logishellip ne srsquoimprovisent pas drsquoavantage) sans
nous faire perdre de vue le socle de formation
commun qui nous reacuteunit et met en exergue la
speacutecificiteacute du Psychologue qui se caracteacuterise
bien par son orientation vers lrsquoeacutecoute qui prend
sens eacutecoute drsquoune parole drsquoun trajet drsquoune
rupture dans la continuiteacute discours drsquoun sujet
agent de son propre destin
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Oncologie meacutedicale Hocircpital Saint-Louis
J ai commenceacute agrave travailler agrave lhocircpital
comme psychologue en oncologie agrave la fin
des anneacutees 80
Le contexte eacutetait diffeacuterent de maintenant
Deux choses mavaient beaucoup marqueacutee et
interpelleacutee
- le manque de prise en charge de la douleur
- lattitude qui consiste agrave cacher la maladie et
sa graviteacute aux patients
La douleur neacutetait pas une cible de laction theacute-
rapeutique elle avait une valeur diagnostique
supposeacutee sameacuteliorer avec les traitements de
la maladie sans une attention particuliegravere agrave son
traitement (1)
Le meacutedecin eacutetait perccedilu comme deacutetenteur dune
veacuteriteacute qui faisait loi
Voilagrave quelques propos quil neacutetait pas rare
dentendre de la part du meacutedecin au patient
Faites-moi confiance ne pensez agrave rien la chi-
miotheacuterapie cest mon problegraveme vous pensez
agrave gueacuterir on aura toujours une moleacutecule pour
vous soigner on va se battre
Au deacutecegraves du patient on pouvait entendre il
est mort mais en reacutemission
Et le meacutedecin sadressant agrave moi ne parlez
pas de la mort aux patients vous savez on a
deacutejagrave vireacute une psychologue
Plusieurs eacuteveacutenements vont faire eacutevoluer la meacute-
decine et son discours dans la prise en charge
du patient
Agrave la fin du XXegraveme siegravecle lOrganisation Mon-
diale de la Santeacute (circulaire du 19-1-1994) a
deacutefini comme prioriteacute la lutte contre la dou-
leur
La creacuteation des eacutequipes anti-douleur sera un
eacuteveacutenement important ainsi que la recherche de
nouveaux antalgiques Lrsquoeacutevolution de cette
prise en charge va se reacutepandre en canceacuterolo-
gie et dans la meacutedecine en geacuteneacuteral
Les premiers Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Ligue
contre le Cancer ont donneacute la parole aux pa-
tients il y a eu une demande de psychologues
dans les services pour une prise en compte de
la deacutetresse psychique
Le Plan Cancer en 2006 va donner des direc-
tives qui reacuteglementent aujourdhui la consulta-
tion dannonce et les soins de supports
La psycho-oncologie neacutee aux Eacutetats-Unis arrive
aussi en Europe et cest en 1994 quest creacuteeacutee
la Socieacuteteacute Franccedilaise de Psycho-Oncologie
(SFPO)
Son but est de deacutevelopper des outils des meacute-
thodes pour deacutepister et ainsi traiter preacutecoce-
ment les risques des difficulteacutes psychologiques
Elle sinscrit dans une approche bio-psycho-
sociale de la maladie canceacutereuse La speacutecifici-
teacute nest pas la prise en compte de la subjectivi-
teacute du patient mais ladaptation de celui-ci aux
diffeacuterentes situations traverseacutees pendant la ma-
ladie Cette discipline qui eacutetudie les attitudes
psychologiques et eacutemotionnelles survenant
pendant la maladie canceacutereuse pourrait laisser
croire quil y a des reacuteactions speacutecifiques agrave cette
maladie Son approche est de plus en plus co-
gnitivo-adaptative avec protocoles reacutefeacuterentiels
deacutemarche qualiteacute
Dans le champ de la psycho-oncologie on
trouve le terme de psycho-oncologue
Ce mot est utiliseacute de faccedilon un peu anarchique
on y trouve le psychologue le psychiatre mais
aussi dautres professionnels intervenant au-
pregraves des malades et de leur famille Ce nest
pas parce que nous avons quelques connais-
sances en oncologie que nous pouvons utiliser
ladjectif oncologue
Ce terme peut ecirctre source de confusion il ne
deacutefinit pas notre speacutecificiteacute et il me paraicirct aussi
seacutegreacutegatif dune pathologie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 20
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Cest pour cela que nous voulons garder le
terme de psychologue clinicien
Dans ce mot il y a la dimension clinique cest agrave
dire lobservation du patient agrave son chevet
Mon travail consiste agrave accompagner soutenir
le patient dans ce parcours difficile quil entre-
prend avec la maladie
Le cancer produit un remaniement identitaire
pour le sujet ce qui neacutecessite de lui offrir un
espace de parole
Cest la psychanalyse qui de mon point de vue
offre les meilleurs outils pour travailler la cli-
nique du reacuteel Cest avec notre propre parcours
analytique que nous psychologues pouvons
bien prendre en compte la dimension incons-
ciente propre agrave lhumain
Je ne me situe donc pas dans le champ de la
psycho-oncologie au discours trop normatif
Notre clinique dans un service dhospitalisation
Cest agrave tout stade deacutevolution de la maladie
quun travail theacuterapeutique peut se mettre en
place avec le psychologue
On a beaucoup parleacute du dispositif dannonce
annonce du diagnostic visant agrave assurer agrave la fois
une bonne administration du soin et son
humanisation
Ces consultations cherchent agrave atteacutenuer limpact
traumatique Il est proposeacute au patient de ren-
contrer un psychologue
Il nest pas rare que le patient me dise ils ne
se rendent pas compte il y a trop dinforma-
tions drsquoun seul coup je nai pas encore reacutealiseacute
que jai un cancer et on me parle de perruque
pour la perte des cheveux de dieacuteteacuteticien de
psy mais je nen suis pas lagrave moi
Pour les patients cest la deacutecouverte brutale du
diagnostic puis le choc des traitements Nous
savons que le temps psychique nest pas le
temps meacutedical et que dans cette clinique cest
au cas par cas que nous pouvons intervenir ce
qui est traumatique pour un patient ne lest pas
pour un autre
Un patient me disait reacutecemment le cancer
menvahit je ne pense quagrave ccedila je ne peux plus
lire regarder un film il est omnipreacutesent Voilagrave
une description du reacuteel
Il sagit de faire entendre agrave une eacutequipe meacutedi-
cale tourneacutee plus vers la maladie que vers le
malade et ce dans une organisation tregraves tech-
nique et de plus en plus sophistiqueacutee la neacuteces-
siteacute de prendre en compte la subjectiviteacute du pa-
tient dans un espace qui en paraicirct deacutepourvu
La demande de leacutequipe vis agrave vis du psy peut
correspondre agrave une demande de compliance
au traitement que le patient refuse elle sou-
haite aussi souvent que le psy reacuteconforte le pa-
tient agrave qui on a donneacute une mauvaise nouvelle
Comme dit Jeacuterocircme Alric dans son article Qui
eacutecoute quoi la sphegravere psychologique de-
vient une fonction constituante de la personne
globale au mecircme titre que la sphegravere digestive
dermatologique et dont il faut soccuper (2)
Au psychologue de faire valoir aupregraves du pa-
tient lintention de lui donner une place pour
entendre et faire entendre sa position subjec-
tive
Souvent je suis interpelleacutee par les soignants
dans des situations de deacutetresse par exemple
quand les antalgiques se reacutevegravelent inefficaces
ou sont refuseacutes Dans les entretiens les pa-
tients deacuteplient leur histoire leur roman fami-
lial La douleur physique se mecircle agrave la souf-
france psychique
Une patiente qui avait un cancer du sein avec
des meacutetastases osseuses me disait jai mal
lagrave en me montrant sa poitrine
Je lui avais demandeacute si elle en avait parleacute au
meacutedecin
Elle me reacutepondit en me regardant droit dans les
yeux cette douleur-lagrave le meacutedecin ne peut
pas me la soigner cest lhistoire avec mon ma-
ri qui me fait mal Celui-ci lavait quitteacutee et elle
se retrouvait seule avec son jeune fils
En quelques mots elle avait situeacute ce qui la fai-
sait souffrir au-delagrave des localisations meacutetasta-
tiques Elle savait faire la diffeacuterence entre le
physique et ce qui venait lagrave sajouter agrave sa
propre histoire douloureuse
Comme dit Clavreul dans Lordre meacutedical la
souffrance renvoie le sujet qui leacuteprouve agrave son
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 21
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
fantasme cest-agrave-dire agrave sa propre histoire et au
discours quil peut tenir sur son histoire Il y a
un seul discours qui se tienne sur la souf-
france et cest celui de la personne qui
leacuteprouve (3)
Un patient encore reacutecemment me disait ne pas
vouloir devenir grabataire comme son pegravere
Il seacutetait occupeacute de lui depuis son plus jeune
acircge il poussait la chaise roulante dans ses deacute-
placements il eacutetait sa beacutequille Mon patient ar-
riveacute en fin de vie voudra jusqursquoau bout se deacute-
placer aux toilettes et rester indeacutependant dans
les gestes du quotidien
Aux soignants qui ne comprenaient pas pour-
quoi il sobstinait agrave vouloir faire tout seul des
gestes devenus si difficiles il a fallu dire sans
reacuteveacuteler le pourquoi combien ceacutetait important
pour le patient de garder cette indeacutependance
Ceacutetait pour lui sa digniteacute sa liberteacute sa volonteacute
Je voudrais mettre laccent sur la singulariteacute de
ces rencontres avec des patients deacutejagrave tregraves gra-
vement atteints et qui degraves le premier entretien
se saisissent de cette possibiliteacute de parole
Il y a la douleur et lautre versant de la souf-
france langoisse
Monsieur O est un patient algeacuterien qui a eacuteteacute
opeacutereacute drsquoun cancer du poumon Avant linterven-
tion chirurgicale il se sentait precirct agrave affronter
cette eacutepreuve cest apregraves quil a senti ses
forces diminuer Jai changeacute je ne suis plus le
mecircme quavant en fait je crois que je nai pas
accepteacute lopeacuteration Il dit regretter il aurait preacute-
feacutereacute vivre avec son cancer il serait mort avec
Ce qui semble bouleverser ce patient nest pas
tant la maladie en elle-mecircme que ses conseacute-
quences Avec ce bout de corps quon lui a reti-
reacute cest aussi toute une part de lui qui semble
partie
Leacutepreuve du cancer entraicircne toujours une at-
teinte de linteacutegriteacute corporelle
Ce corps qui est traiteacute par le meacutedical de faccedilon
organique biologique revient souvent dans le
discours des patients Ce qui eacutemerge cest
lhorreur des amputations des meacutetastases qui
se reacutepandent agrave linteacuterieur du corps mais aussi
ce qui se donne agrave voir agrave toucher Un corps en-
dommageacute que le patient a du mal agrave reconnaicirctre
comme le sien qui se bouche qui enfle qui
eacutetouffe
Le corps peut devenir un objet agrave controcircler per-
seacutecuteur qui nest plus investi de deacutesir Cette
parole descriptive du corps peut prendre toute
la place dans le discours du patient avant que
quelque chose du subjectif nrsquoapparaisse
Cest dans un deuxiegraveme temps que Monsieur
O apregraves avoir exprimeacute limpossibiliteacute daccep-
ter cette perte anatomique ndash une partie du pou-
mon ndash pourra associer sur dautres pertes qui
viennent sintriquer entre passeacute et preacutesent
Langoisse de mort est tregraves freacutequente dans
cette pathologie dans les entretiens il ne sagit
pas de viser directement ce que nous pensons
ecirctre lobjet de cette angoisse mais de soutenir
dans la conversation les deacutetours de cette indi-
cible
Lintervention aupregraves de la famille nest pas
rare
Monsieur L 63 ans a un cancer de la vessie et
il est deacutecrit par leacutequipe soignante comme tregraves
exigeant et peacutenible Je deacutecide daller me preacute-
senter
Il me fait une description assez preacutecise de sa
maladie qui a deacutebuteacute il y a quelques mois Je
lui demande ce quil pense lui de tout ccedila Il me
regarde attend plusieurs secondes et me reacute-
vegravele que sa femme a une maladie heacutematolo-
gique agrave surveiller et quil sinquiegravete beaucoup
pour elle Ils nont pas denfant Il ajoute que
dans le service on ne lui fait pas grand-chose
son eacutetat ne srsquoameacuteliore pas quil serait mieux
avec sa femme En mecircme temps elle ne peut
pas soccuper de lui agrave la maison Il part dans
un SSR (soins de suite et de reacuteeacuteducation)
Quelques semaines apregraves il revient dans le
service et il demande agrave me voir Il va ecirctre tregraves
direct On vient de lui parler de son mauvais
pronostic agrave court terme il veut que je le ren-
contre avec sa femme Il me dit Elle deacuteprime
Si je meurs elle va se laisser mourir Pour moi
cest insupportable Effectivement sa femme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 22
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
est tregraves deacuteprimeacutee affaiblie par sa maladie
mais elle accepte de voir son geacuteneacuteraliste et
prendre un traitement On lui trouve un heacuteber-
gement agrave la Maison des Parents pour lui eacuteviter
lrsquohocirctel Elle sera sur place pour voir son mari
elle pourra eacutechanger avec les familles heacuteber-
geacutees agrave la Maison des Parents Petit agrave petit elle
tisse des liens Son mari deacutecline rapidement je
la vois dans la chambre elle me parle de lui
des choses quils aimaient faire ensemble Elle
est calme rassureacutee par la preacutesence de
lrsquoeacutequipe Apregraves la mort de son mari nous nous
sommes revues puis teacuteleacutephoneacute et rapidement
elle prend la deacutecision de deacutemeacutenager agrave Annecy
pregraves dune amie Elle aura un suivi heacutematolo-
gique lagrave-bas
Jai souvent penseacute agrave cet homme dont le dis-
cours eacutetait centreacute sur la plainte et qui a changeacute
rapidement de registre agrave partir du moment ougrave
on a pris en compte sa souffrance et soutenu
sa femme aupregraves de lui
Dans notre travail il me paraicirct important de
rendre compte aux eacutequipes de nos interven-
tions pour permettre aux soignants des eacuteclair-
cissements sur la souffrance psychologique
des patients Cela peut permettre un change-
ment de rapport soignant-patient dans des si-
tuations ougrave le patient par langoisse sous-
jacente se montre peacutenible pour lrsquoeacutequipe voire
agressif agrave son eacutegard
Toujours pour ce qui concerne la famille une
reacuteelle eacutevolution a eacuteteacute la prise en compte des
enfants du patient Degraves le diagnostic et tout le
long de la maladie une attention particuliegravere de
la part de leacutequipe permet deacuteviter les situations
dramatiques que lon rencontrait dans le pas-
seacute lorsque lenfant deacutecouvrait la graviteacute de la
maladie du parent la veille de la mort de celui-
ci sans avoir eu la possibiliteacute de sy preacuteparer et
den parler
Pour conclure je dirai que la science et la tech-
niciteacute ont beaucoup eacutevolueacute agrave lhocircpital mais quil
y a eu peu de changement du cocircteacute de la prise
en compte meacutedicale de la dimension subjective
des patients
On est passeacute dune prise en charge de la dou-
leur qui eacutetait nieacutee agrave des situations parfois de
surmeacutedicalisation La meacutedecine malgreacute ses
progregraves consideacuterables ne peut pas soulager
toute les douleurs et encore moins de faccedilon
systeacutematique et protocolaire Elle doit tenir
compte de la singulariteacute de chaque patient
De mecircme sil y a encore une vingtaine dan-
neacutees on ne donnait pas suffisamment dinfor-
mations meacutedicales sur la maladie et le devenir
du patient on est passeacute aujourdhui agrave un trop
dinformations dans loptique de dire la veacuteriteacute
au malade et de le preacuteparer sur le chemin de
sa fin de vie
Il nest pas rare que je rencontre un patient agrave
qui on a asseneacute une veacuteriteacute meacutedicale quil ne
voulait pas entendre Pour le patient il sagit de
pouvoir se deacuteprendre de ce savoir meacutedical qui
peut venir empecirccher toute penseacutee le cristalli-
ser dans une angoisse de mort et entraicircner le
sujet vers une mort psychique avant la mort
reacuteelle
Nous sommes lagrave pour partager ce temps avec
lui ce temps qui est incertain et qui permet au
sujet davoir des interrogations exprimer des
affects
Le psychologue dorientation analytique peut
apporter agrave ses eacutequipes un eacuteclairage des situa-
tions
Une collaboration avec les meacutedecins est agrave en-
courager encore faut-il que les meacutedecins puis-
sent prendre le temps et donc se deacutetacher
dune pure gestion des soins pour penser et
analyser leur pratique
1 Baszanger I 1995 Douleur et meacutedecine La
fin dun oubli Le Seuil
2 Alric J 2004 Qui eacutecoute quoi Essai de
repeacuterage de deux postures deacutecoute possible agrave
lhocircpital Eregraves in Collectif sous la direction de
Patrick Ben Soussan Le cancer approche psy-
chodynamique chez ladulte
3 Clavreul J 1978 LOrdre meacutedical Paris Le
Seuil
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 23
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des textes
officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin Page 24
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous avez man-
queacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine Page 32
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal Page 43
Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip
Quels changements pour le meacutetier de
psychologue
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 24
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin
V ingt ans se sont eacutecouleacutes depuis la creacutea-tion de Psyclihos Depuis de nombreux rapports textes officiels ont eacuteteacute diffuseacutes
qui concernent la santeacute dune maniegravere geacuteneacute-rale et plus particuliegraverement la santeacute mentale Quelle place nous psychologues avons-nous dans ces eacutecrits De fait lorsque lon interroge la bibliothegraveque des rapports publics sur le site de la Documen-tation franccedilaise sur le terme Psychologue on saperccediloit que seule une liste constitueacutee dune petite cinquantaine de reacutefeacuterences apparaicirct un peu plus toutefois que pour le terme psychiatre qui apparaicirct dans 47 rapports mais beaucoup moins que celui dinfirmier qui apparaicirct dans 121 rapports Jai choisi parmi ces textes ceux qui mont sem-bleacute les plus significatifs dune certaine image du psychologue vu par les politiques ou ladmi-nistration Je vais maintenant vous preacutesenter cette compilation dextraits dans un ordre chro-nologique Lun des premiers rapports qui cite les psycho-logues porte sur les Strateacutegies drsquoutilisation des antiretroviraux dans lrsquoinfection par le VIH en 1998 Il affirme Le soutien par les psy-chologues est lune des pratiques diverses des services hospitaliers qui meacuteritent drsquoecirctre deacuteve-loppeacutees La mecircme anneacutee un rapport sur les Uniteacutes agrave encadrement eacuteducatif renforceacute et leur ap-port agrave lheacutebergement des mineurs deacutelin-quants fait agrave la demande de lInspection Geacuteneacute-rale des Affaires Sociales preacuteconise Afin de preacutevenir lusure des eacutequipes et aussi de leur apporter une certaine capaciteacute de recul il faut mettre en place des proceacutedures de soutien au moment des crises et de supervision dans les-quelles le recours au psychologue simpose En 2000 un rapport au Premier ministre Lionel Jospin Pour une nouvelle politique publique
daide aux victimes fait le constat suivant Pour le reacuteseau de lINAVEM (Feacutedeacuteration natio-nale daide aux victimes et de meacutediation qui comprend 150 associations) les emplois de psychologue repreacutesentent seulement 9 des emplois salarieacutes Cet aspect pourtant fonda-mental de laide aux victimes nest pas suffi-samment deacuteveloppeacute En 1994 lintervention dun psychologue con-cernait environ un quart des associations daide aux victimes Le rapport propose la creacuteation de centres daide pour enfant-adolescent et adulte com-prenant obligatoirement des psychologues cli-niciens Des groupes de parole et deacutecoute pour en-fants victimes seraient animeacutes par des psycho-logues scolaires ayant suivi une formation speacute-cifique ou des psychologues cliniciens exteacute-rieurs Le projet dinteacutegration de psychologues clini-ciens dans les milieux scolaires semble alors ecirctre au cœur de la nouvelle politique publique daide aux victimes Une politique ambitieuse sur le papier hellip Les suites don-neacutees agrave ce rapport ont eacuteteacute la creacuteation dun numeacutero national daide aux victimes en 2001
Pourtant en 2000 on sinteacuteresse beaucoup agrave nous le rapport du Haut comiteacute de la santeacute pu-blique sur la souffrance psychique des ado-lescents et des jeunes adultes consacre un paragraphe au rocircle du psychologue dans le chapitre intituleacute Lrsquoinstitution scolaire Bilan en CM2 Il est eacutecrit
Le recours agrave un psychologue dans le milieu scolaire est pratiquement limiteacute aux tests drsquoorientation Lrsquoabsence de psychologue dans le secondaire semble faire partie de cette mau-vaise image de la psychiatrie qui persiste dans le grand public Le regard drsquoun psychologue exteacuterieur agrave lrsquoeacuteta-blissement dans des reacuteunions reacuteguliegraveres de synthegravese et de concertation peut ecirctre preacutecieux
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Ces contacts auraient de plus lrsquoavantage de relier les prises en charge de situations diffi-ciles entre lrsquointeacuterieur et lrsquoexteacuterieur des eacutetablisse-ments et de faire se connaicirctre les profession-nels des diffeacuterentes structures Ainsi 20 des adolescents pensent avoir be-soin de consulter un psychologue mais 137 disent avoir renonceacute du fait de difficulteacutes finan-ciegraveres Toujours en 2000 au colloque sur lrsquoEnfance maltraiteacutee la Ministre deacuteleacutegueacutee agrave lrsquoEnfance et agrave la famille reacuteclame Un psy pour chaque enfant Dans son second rapport Claire Brisset la deacute-fenseure des enfants sinteacuteresse eacutegalement au rocircle des psychologues et agrave leur formation Pour elle les psychologues souffrent depuis longtemps dun problegraveme didentiteacute du fait dune reconnaissance tardive de leur profes-sion et de lexistence de plusieurs types de psychologues recruteacutes agrave des niveaux deacutetudes diffeacuterents en reacutefeacuterence aux psychologues sco-laires et conseillers dorientation- psycho-logues La Deacutefenseure des Enfants propose d -Institutionnaliser les psychotheacuterapies den-fants et dadolescents par des psychologues cliniciens sur prescription du psychiatre et rembourseacutees par la Seacutecuriteacute sociale De la mecircme faccedilon quun meacutedecin speacutecialiste prescrit des seacuteances de kineacutesitheacuterapie qui sont alors rembourseacutees par la seacutecuriteacute sociale un psychiatre aussi bien dans le public que dans le priveacute doit pouvoir prescrire des theacuterapies effectueacutees par un psychologue clinicien Cette mesure qui se pratique deacutejagrave dans cer-tains pays europeacuteens comme lAllemagne ne peut ecirctre mise en place quaux conditions sui-vantes - quune formation homogegravene de psychologie clinique sanctionneacutee par un diplocircme unique soit organiseacutee - que cette formation permette dacceacuteder agrave un nouveau statut de psychologue clinicien recon-nu par lensemble des administrations concer-neacutees - que cette formation soit agrave la fois theacuteorique et pratique Cette reacuteforme permettrait de - mieux utiliser les compeacutetences des nombreux psychologues qualifieacutes actuellement deacutepour-vus dun emploi agrave temps plein ou contraints faute de poste dexercer dautres meacutetiers
Dans cette hypothegravese le psychiatre aurait le rocircle danimateur de leacutequipe soignante et de supervision des psychotheacuterapies meneacutees par les psychologues cliniciens En outre un tel scheacutema devrait pouvoir sappli-quer non seulement dans les structures pu-bliques mais aussi dans le secteur libeacuteral Les psychologues cliniciens peu nombreux en libeacute-ral pourraient alors sinstaller en cabinet (au mecircme titre que les infirmiegraveres ou les masseurs kineacutesitheacuterapeutes) En ce deacutebut des anneacutees 2000 les politiques sinteacuteressent beaucoup aux questions relatives agrave la santeacute en juillet 2000 Martine Aubry alors ministre de lemploi et de la solidariteacute confie aux Drs Piel et Roelandt une mission de reacute-flexion et de prospective dans le domaine de la santeacute mentale qui donnera lieu un an plus tard agrave un rapport intituleacute De la psychiatrie vers la santeacute mentale Un rapport dans lequel on parle peu des psychologues si ce nest pour dire que leur formation est insuffisante et quun internat en psychologie est neacutecessaire ce dont on reparlera beaucoup dans les anneacutees sui-vantes En aoucirct 2001 Psyclihos travaille sur le 1
er rap-
port deacutetape du groupe de travail de la DGS sur leacutevolution des meacutetiers en santeacute mentale Des psychologues de toute la France choqueacutes et inquiets se reacuteunissent au sein du Collectif Na-tional des Psychologues de la FPH Les me-sures preacuteconiseacutees par le 2
egraveme rapport deacutetape
paru en janvier 2002 mettent le feu aux poudres Pour rappel le rapport insiste sur le deacuteveloppement des reacuteseaux de santeacute la mise en place de proceacutedures de protocoleshellip Et surtout il preacutevoit des niveaux dintervention hieacuterarchiseacutes avec des intervenants de 1
egravere
ligne des professionnels de soins primaires et des intervenants speacutecialiseacutes et deacutejagrave des glisse-ments de compeacutetences vers les infirmiers et les meacutedecins geacuteneacuteralistes Il est agrave nouveau question de transfert de com-peacutetences en 2003 avec le rapport Berland sur la deacutemographie des professions de santeacute au titre eacuteloquent Coopeacuteration des professions de santeacute le transfert de tacircches et de compeacute-tences Le chapitre qui nous concerne sinti-tule Un transfert de compeacutetences en psychia-trie difficile agrave organiser Le Pr Berland eacutecrit Les auditions que jai pu mener lors de la mis-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
sion deacutemographie des professions de santeacute et les eacutechanges que jai pu avoir avec les psy-chiatres ont reacuteveacuteleacute de reacuteelles difficulteacutes agrave envi-sager le transfert de compeacutetences dans le champ de cette speacutecialiteacute En effet si certains professionnels considegraverent souhaitable la mise en perspective de collaborations organiseacutees avec les psychologues cliniciens dautres la trouvent inutile ou non souhaitablehellip Il est neacute-cessaire denvisager la part de lactiviteacute aujour-dhui assureacutee par les psychiatres qui doit ecirctre confieacutee en toute collaboration agrave des psychologues praticiens formeacutes agrave la fois par les faculteacutes de psychologie et les faculteacutes de meacutedecine pour construire ce nouveau meacutetier qui reacutepond agrave un besoin clairement identifieacute Au mecircme moment est diffuseacute le rapport Cleacutery Melun intituleacute Plan dactions pour le deacutevelop-pement de la psychiatrie et la promotion de la santeacute mentale qui reprend les principales pro-positions des rapports preacuteceacutedents par ex con-cernant la reacuteorganisation des soins en psychia-trie Concernant la formation des psycho-logues Ces formations sont tregraves diverses sui-vant les universiteacutes certaines eacutetant speacuteciali-seacutees dans la psychanalyse ce qui aboutit agrave des formations mono reacutefeacuterenceacutees Il en va de mecircme des stages qui sont souvent difficiles agrave trouver et ne permettent pas toujours dassister aux entretiens avec les patients Enfin dans un contexte de plus en plus seacutelectif les examens theacuteoriques et formels prennent le pas sur lac-complissement dun stage et lobtention dune formation clinique Il poursuit Les psychologues souhaitent eux-mecircmes faire progresser cette situation Ils se sont doteacutes dun code de deacuteontologie qui pose des prin-cipes clairs notamment au regard de leur for-mationhellipAvec un stage qui doit correspondre agrave leacutequivalent dun internat en psychologie dont la dureacutee ne devrait pas ecirctre infeacuterieure agrave 2 se-mestres et dont le contenu devrait faire lobjet dune validation finale Toujours en 2003 il faut un rapport eacutecrit par une psychologue pour que le terme soit citeacute 97 fois soit presque dans une page sur deux Cest le rapport de Marie de Hennezel sur Fin de vie le devoir daccompagnement Elle preacuteconise une preacutesence renforceacutee de psy-chologues dans tous les services sensibles
Pour favoriser le maintien agrave domicile des per-sonnes elle demande que lrsquoon eacutetudie la possi-biliteacute drsquoun financement drsquoun forfait de 3 agrave 5 seacuteances avec un psychologue pour un accom-pagnement de fin de vie sur le modegravele de ce qui est proposeacute dans le plan cancerElle de-mande la creacuteation dau moins un mi-temps de psychologue pour chaque service confronteacute agrave la fin de vie des patients Pour elle la Formation universitaire du psycho-logue ne le preacutepare pas neacutecessairement agrave la confrontation avec la mort drsquoautrui et son cor-tegravege drsquoangoisses et de fantasmes Elle ajoute Crsquoest la raison pour laquelle nous estimons qursquoune formation compleacutementaire personnelle (psychanalyse) ou une formation dans le cadre drsquoun DU de soins palliatifs ou drsquoun stage drsquoune semaine au moins dans une uniteacute de soins palliatifs (USP) doit lui permettre d lsquoeacutevaluer srsquoil est precirct ou non agrave travailler dans un service confronteacute agrave la mort des patients srsquoil peut accueillir sans trop drsquoangoisse celles des autres patients familles soignants Pour les psychologues de ville elle pose la question drsquoun conventionnement de la profes-sion puisque seuls les psychologues libeacuteraux inteacutegreacutes dans un reacuteseau (dans le cadre drsquoun groupement de coopeacuteration sanitaire) et reacutemu-neacutereacutes agrave la vacation sont pris en charge par lrsquoassurance maladie Elle ajoute Cela limite consideacuterablement lrsquooffre drsquoaide psychologique agrave domicile En mars 2005 la Commission Peacuterinataliteacute en-fants et adolescents recommande le renforcement des eacutequipes de materniteacute en psychologues dans le but de Mieux prendre en charge la santeacute mentale et les troubles psy-chiatriques de la megravere etou du couple En 2005 le rapport Santeacute justice et dange-rositeacutes pour une meilleure preacutevention de la reacutecidive eacutevoque les formations initiale et conti-nue des psychologues dans le domaine meacutedico-leacutegal qui devraient ecirctre renforceacutees afin de mieux prendre en consideacuteration les probleacutema-tiques relatives agrave la dangerositeacute psychiatrique dans la pratique clinique et la mise en oeuvre de lrsquoexpertise peacutenale Le rapporteur revendique la possibiliteacute pour les psychologues drsquoassurer le suivi du condam-neacute et demande laugmentation des effectifs des services peacutenitentiaires drsquoinsertion et de proba-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion notamment par lrsquointeacutegration de psycho-logues au sein des eacutequipes Dans son rapport sur Le fonctionnement des services dinformation et dorientation lIns-pection geacuteneacuterale de lEducation nationale re-met largement en question le statut des con-seillers dorientation-psychologues Des divergences de vues interviennent sou-vent entre ceux qui sont issus de la psycholo-gie essentiellement clinique et les autres qursquoils aient eacutetudieacute la psychologie du travail ou la so-ciologie lrsquoeacuteconomie le droit lrsquohistoire ou la phi-losophie Lrsquoouverture drsquoesprit des seconds aux questions du marcheacute de lrsquoemploi ou mecircme aux perspec-tives de deacutecentralisation est freacutequente Les psychologues cliniciens semblent plus autocen-treacutes individualistes voulant se concentrer sur leur pratique au jour le jour de conseil et drsquoac-compagnement des individus deacutesireux drsquoap-porter des solutions au cas par cas(sic ) Lrsquoeacutevolution de la profession qui a gagneacute le titre de psychologue en 1991 va dans le sens drsquoune eacutemancipation tout agrave fait eacutetonnante Les COPsy constituent un cas singulier drsquoexercice libeacuteral au sein mecircme de la fonction publique Ils nrsquoont en fait de comptes agrave rendre agrave personne lrsquoautori-teacute des directeurs est purement formelle (hellip) Et comble les conseillers ne sont pas inspecteacutes() Le rapport propose de scinder le corps des COPsy avec dun cocircteacute des psychologues de lenseignement secondaire et de lautre des conseillers dinformation et dorientation Les missions des psychologues de leacuteducation seraient centreacutees sur le deacutepistage et lexamen des eacutelegraveves pour lesquels on craint une inadap-tation la preacutevention des deacutecrochages la preacute-vention des conduites addictives en lien avec le personnel meacutedico-social leacutecoute un premier accompagnement dans les cas de profondes souffrances psychologiques le lien avec les services exteacuterieurs hellip Dans les eacutetablissements les psychologues complegraveteraient et renforceraient leacutequipe eacutedu-cative et meacutedico-sociale Pour lIGEN il est manifeste que les conseil-lers drsquoorientation-psychologues nrsquoont ni le temps ni les compeacutetences ni les moyens de faire face seuls agrave lrsquoensemble des missions que les usagers (au sens large du terme) pour-raient attendre drsquoeux Si beaucoup de responsables ministeacuteriels re-
grettent fortement lappellation de psycho-logues du statut de 1991 il faut reconnaicirctre que peu de personnels souhaitent labrogation totale de cette appellation y compris parmi ceux qui ont eacuteteacute recruteacutes avant 1990 sans avoir fait deacutetudes initiales de psychologie Il convient aussi de signaler quil y a unanimiteacute pour consideacuterer quon ne peut pas faire de psy-chologie clinique ou theacuterapeutique dans les eacutetablissements Tous pensent mecircme que cest impossible En fait en 1991 il aurait fallu creacuteer par la loi un statut de conseiller qui existe dans dautres pays Pour autant les auteurs concluent que la ques-tion de labrogation du statut de psychologue a eacuteteacute poseacutee mais ils ont consideacutereacute que ce neacutetait pas opportun dans le contexte actuel Mais le recrutement doit ecirctre diversifieacute Il srsquoagit de mettre un terme au monopole des li-cencieacutes en psychologie qui de lrsquoavis de la grande majoriteacute de nos interlocuteurs et notam-ment de lrsquoencadrement des services drsquoorienta-tion et des formateurs nrsquoest nullement imposeacute par lrsquoexercice des missions et a reacuteduit la diver-siteacute intellectuelle qui caracteacuterisait le corps avant 1991 En outre le poids excessif des li-cencieacutes en psychologie a favoriseacute des attitudes drsquoindividualisme et de repli au deacutetriment des autres facettes de la profession Dans le rapport fait au nom de la mission dinformation sur la famille et les droits de lenfant en 2006 Valeacuterie Peacutecresse et Patrick Bloche recommandent de faire prendre en charge par lassurance-maladie les consulta-tions des mineurs et de leur famille aupregraves de psychologues sur prescription meacutedicale afin dameacuteliorer la prise en charge des enfants et de leur famille On reparle encore de formation des psycho-logues en 2006 avec le rapport de la mission parlementaire de Jean-Paul GARRAUD sur la dangerositeacute Il comprend un chapitre impor-tant relatif agrave lexpertise psychologique et au psychologue expert on eacutetait agrave leacutepoque en pleine affaire dOutreau Il souligne encore une fois lrsquoheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute des diplocircmes tous les psy-chologues ne suivent pas une formation en psychopathologie clinique et peuvent avoir des formations theacuteoriques tregraves diverses Il conviendrait de redeacutefinir le champ drsquointerven-tion des psychologues fondeacute sur leur qualifica-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion professionnelle et drsquoenvisager les possibili-teacutes de lrsquoarticulation de leurs expertises avec celles effectueacutees par les psychiatres Organiser une confeacuterence de consensus sur lrsquoexpertise psychologique afin de reacutefleacutechir sur les objectifs et les limites des expertises psy-chologiques lrsquoidentiteacute lrsquoeacutethique et la deacuteontolo-gie des experts leur solitude ainsi que sur les modaliteacutes pertinentes de reacutealisation des exper-tises et de leur eacutevaluation Ceci est resteacute un vœu pieux agrave ce jour hellip Il revendique Une plus grande qualification des formations des psychologues Outre une maturiteacute professionnelle une forma-tion particuliegravere est neacutecessaire (connaissance des diffeacuterents types et champs drsquoexpertise des proceacutedures judiciaires aspects criminolo-giques deacuteontologiqueshellip) Cette speacutecialisation pourrait deacutecouler drsquoun cur-sus post-universitaire en psychologie clinique et pathologique agrave lrsquoexemple des DU sur la pratique de lrsquoexpertise psychologique ou la psy-chologie leacutegale (Universiteacute Lille Aix-Marseille Rouen Poitiershellip) En 2007 les psychologues sont les stars du rapport de lIGAS consacreacute agrave Gestion et utili-sation des ressources humaines dans 6 eacuteta-blissements de santeacute speacutecialiseacutes en psy-chiatrie le terme psychologue apparaicirct 224 fois Les reacuteveacutelations sont lagrave encore fracassantes Il faut adapter le statut et le cursus de forma-tion et de carriegravere des psychologues pour mieux utiliser leurs compeacutetences et les inteacutegrer dans les eacutequipes Les problegravemes de peacutenurie de psychiatres doivent ecirctre anticipeacutes par une seacuterie de mesures - augmenter les attributions des psychologues en leur permettant dans certains cas deffec-tuer des actes jusque lagrave reacuteserveacutes aux meacutede-cins - ouvrir une formation de manager de structure psychiatrique agrave des cadres intermeacutediaires type cadre supeacuterieur de santeacute psychologue cadre socio-eacuteducatif Il serait possible douvrir le concours de cadre supeacuterieur de santeacute agrave dautres professions soi-gnantes psychologues eacuteducateurs speacuteciali-seacutes assistants de service social Les psychologues peuvent-ils remplacer les psychiatres et agrave quel prix Ce nest pas seulement parce quon manque
de psychiatres cest aussi parce que les psy-chologues repreacutesentent une certaine tradition de la psychiatrie europeacuteenne pas uniquement arc-bouteacutee sur les traitements chimiotheacuterapeu-tiques Cest aussi parce quils possegravedent en principe des compeacutetences permettant de deacuteve-lopper des aspects tregraves importants en psychia-trie - eacutevaluation des capaciteacutes cognitives et mise au point de programmes de reacutehabilitation - psychotheacuterapies de diverses natures eacutegale-ment de soutien dans les cas de traitement meacute-dicamenteux lourd - supervision de groupes de soignants pour eacuteviter les pheacutenomegravenes de chroniciteacute de mal-traitance - encadrement deacutequipes notamment de pro-fessionnels dhorizons divers Il est clair quil serait eacutegalement inteacuteressant de pouvoir leur confier des accueils de 1
egravere ligne
degraves lors que nombre de demandes de consul-tation signifient plutocirct une souffrance psychique quune pathologie psychiatrique La question de savoir sils devraient avoir le droit de prescrire ou de renouveler des pres-criptions au long cours meacuterite decirctre poseacutee Une telle eacutevolution neacutecessiterait une speacutecialisa-tion apregraves le diplocircme geacuteneacuteral de psychologue peut-ecirctre linstauration de ce que daucuns ap-pellent un internat et cette fois commun avec linternat en psychiatrie En attendant davoir notre ordonnancier si tant est que nous le souhaitions les tacircches speacuteci-fiques en psychiatrie pour les psychologues tout ce qui sapparente au bilan agrave leacutevaluation aux psychotheacuterapies de diverses obeacutediences Voilagrave ce que pensent les politiques et les admi-nistratifs de notre meacutetier mais ccedila nest pas la reacutealiteacute de notre meacutetier Tout dabord quelques chiffres sur la deacutemogra-phie des psychologues Nous sommes de plus en plus nombreux de 5500 eacutequivalents temps plein en 1997 agrave 11500 en 2009 preuve que notre rocircle est de plus en plus reconnu par les eacutetablissements Il reste encore beaucoup agrave faire en clinique priveacutee ougrave ils ne sont que 350 ETP La preacutecariteacute est tou-jours le lot de notre profession Il y a deux fois plus de psychologues agrave temps partiel que dans les autres emplois non meacutedicaux 40 de psy-chologues sont agrave temps partiel dans le public plus des trois quarts dans le priveacute soit le
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
double La profession est tregraves feacuteminiseacutee avec 8 femmes sur 10 psychologues elles ont en moyenne cinq ans de moins que leurs con-fregraveres masculins la moyenne dacircge eacutetant de 42 ans Les femmes de moins de 40 ans repreacute-sentent 38 des effectifs nationaux La densiteacute nationale des psychologues est de 37 psychologues pour 100000 habitants soit un psychologue pour 2700 Par comparaison celle des psychiatres est de 22 pour 100000 habitants La densiteacute en psychologues libeacuteraux est de 7 Concernant les secteurs dactiviteacute 87 des psychologues sont salarieacutes Un tiers exerce dans un eacutetablissement de santeacute principalement du secteur public ougrave 7 sur 10 sont employeacutes agrave plein temps Lexercice en libeacuteral ne concerne que 8 des effectifs Comment les psychologues perccediloivent-ils leur meacutetier Dana Castro et Marie Santiago ont publieacute dans Le Journal des psychologues ndeg 233 deacutec 2005- janv 2006 les Reacutesultats dune enquecircte na-tionale sur Evolution des repreacutesentations et construction identitaire du meacutetier de psy-chologue Les donneacutees ont eacuteteacute recueillies agrave partir de 93 questionnaires suite agrave une enquecircte nationale lanceacutee par le Journal des Psychologues aupregraves de ses lecteurs fin 2004 Les reacutesultats montrent que les psychologues ont une image assez steacutereacuteotypeacutee de leur meacute-tier qui ne se modifie pas significativement ni au cours des eacutetudes ni agrave lentreacutee dans la vie professionnelle Au deacutebut de leurs eacutetudes 50 des reacutepondants perccediloivent le psychologue comme un speacutecialiste de laide et de leacutecoute Pour 27 cest un meacutetier qui sexerce en solitaire 30 disent ne pas en avoir une repreacutesentation preacute-cise La repreacutesentation de la profession eacutevolue pro-gressivement Apregraves quelques anneacutees dexer-cice le psychologue perccediloit davantage sa fonc-tion certes encore comme un meacutetier daide et deacutecoute pour la moitieacute dentre eux mais qui sexerce en eacutequipe pour 21 selon des moda-liteacutes et avec des outils speacutecifiques au premier rang desquels lentretien et lexamen psycholo-giques pour 18 des reacutepondants La repreacutesentation du meacutetier se modifie-t-elle au
cours du cursus universitaire - Non pour 22 des reacutepondants pour lesquels elle reste identique tout au long du parcours - Oui pour 36 pour lesquels elle se modifie gracircce aux enseignements theacuteoriques en lien avec la clinique et la psychopathologie - Encore oui pour 34 pour lesquels elle se transforme gracircce aux stages et au contact des professionnels Dune maniegravere geacuteneacuterale les psychologues comptent sur eux-mecircmes et leurs compeacutetences en matiegravere dexpeacuterience dapprentissage sur le tas de solidariteacute et de travail en eacutequipe plutocirct que sur la qualification qui elle valorise les titres les connaissances formelles la revendi-cation de lautonomie et les distinctions statu-taires Seul 1 des reacutepondants eacutevoque les no-tions dorganisation du travail en terme de sta-tut professionnel de cadre A de reacutemuneacuteration de formation ou de titre proteacutegeacute de psycho-logue Autant dire quil reste beaucoup de tra-vail pour avoir une repreacutesentation profession-nelle qui puisse ecirctre partageacutee tant par les psy-chologues que par leurs partenaires profes-sionnels ougrave compeacutetence personnelle et qualifi-cation professionnelle sont indispensables Pourtant 78 des reacutepondants deacutecrivent des difficulteacutes au sein de leur institution Un sur 5 estime que ses collegravegues ne connaissent pas son meacutetier et quils en ont une image neacutegative qui est veacutecue comme deacutevalorisante 17 se sentent isoleacutes dans les eacutequipes avec lesquelles ils travaillent Une eacutetude plus reacutecente puisquelle date de 2010 vient compleacuteter la preacuteceacutedente il sagit de celle de Elise Marchetti Claude Lafrogne et Sandrine Schoenenberger eacutegalement publieacutee dans le Journal des psychologues ndeg 283 deacutec 2010- janv 2011 et qui sintitule Que pensent-ils de nous Etude des repreacutesentations so-ciales du psychologue Que pensent les psychologues deux-mecircmes Ils eacutevoquent lobjet de leur travail la psycheacute le cadre de leur activiteacute (cadre theacuteorique pra-tique eacutethique) et le contenu mecircme de leur tra-vail agrave savoir leacutevaluation et laccompagnement Chez les professionnels du meacutedico-social nos collegravegues deux repreacutesentations saffrontent Les eacuteducateurs techniques et les reacuteeacuteducateurs (peacutedicure podologue masseur kineacutesitheacutera-peute ergotheacuterapeute psychomotricien ortho-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
phoniste orthoptiste ou dieacuteteacuteticien) ont une vi-sion neacutegative le psychologue se confond avec le psychanalyste le charlatan en lien eacutetroit avec la psychiatrie la folie Les personnels administratifs et les eacuteducateurs ont une vision plus positive et concregraveteet sont plus attacheacutes au cadre cadre de travail du psychologue lui-mecircme mais aussi la contribu-tion quil peut apporter dans le cadre dun tra-vail pluridisciplinaire Quant aux sujets de la population geacuteneacuterale on doit distinguer ceux qui ont deacutejagrave eu recours au psychologue et ceux qui nont jamais consulteacute Ceux qui nont jamais consulteacute ont un discours plutocirct positif mais abstrait centreacute sur la dualiteacute problegraveme-reacutesolution (motifs-beacuteneacutefices) Les autres qui sont plus jeunes et plutocirct des femmes cherchent agrave deacutefinir ce quest un psy-chologue avec une vision plus concregravete de notre activiteacute de nos meacutethodes et une eacutevoca-tion de la sphegravere affective et du veacutecu person-nel Toutefois les sujets ayant deacutejagrave consulteacute un psychologue ont tendance agrave le confondre avec le speacutecialiste meacutedical cest-agrave-dire le psy-chiatre Dans Transformation de la psychiatrie et pratiques des psychologues LASAR Labora-toire danalyse socio-anthropologique du risque Universiteacute de Caen 2002 sous la direction dAnne Golse Le discours dAnne Golse sociologue est plus optimiste Elle eacutecrit La profession de psycho-logue se visibilise de plus en plus que ce soit dans la prise en charge des malades mentaux ou de la souffrance psychique On le voit dans la croissance deacutemographique certes encore modeste de cette profession mais cela sappreacute-hende eacutegalement dans la maniegravere dont les textes administratifs mentionnent (psychiatres psychologues) ou bien (psychiatres ou psycho-logues) Mais cette eacutemergence nouvelle dune certaine pariteacute dans les textes vient eacutegalement reconnaicirctre que de plus en plus de demandes sont directement adresseacutees au psychologue et marque lindividualisation de cette profession agrave coteacute de celles de psychiatres ou dinfirmiers Dans un rapport au Conseil national de lOrdre des meacutedecins en 2001 sur le suivi du malade mental il est dit que les psychologues pren-nent de plus en plus de place dans le monde de la psychiatrie relayant ou mecircme remplaccedilant les psychiatres dont le nombre va en diminuant
tregraves seacuterieusement Toutefois les psychologues ne sont pas satis-faits de leur place au sein de la psychiatrie pu-blique ni personnel meacutedical ni personnel pa-rameacutedical ils elles ont du mal agrave trouver leur place dans lunivers hospitalier marqueacute par lexistence de ce partage clair Le psychologue agrave la fois dedans et dehors eacuteprouve une ab-sence de lien avec linstitution et pour certains un sentiment dinexistence institutionnelle chro-nique Le psychologue nest pas dans le soin mecircme sil contribue aux soins ce qui renvoie agrave sa neacutecessaire place dexteacuterioriteacute et agrave la trans-versaliteacute de sa fonction Comme leacutecrivait Co-lette Chiland en 1983 le statut du psychologue clinicien est une position intermeacutediaire et sin-guliegravere qui le maintien dans un espace pro-fessionnel eacutetriqueacute Certains ressentent de lamertume agrave ecirctre reacuteduits au rocircle de psychotheacute-rapeutes etou estiment ne pas ecirctre reconnus comme des professionnels agrave part entiegravere ils se qualifient de sous-psychiatres quand deacutepen-dants du psychiatre ils ne peuvent directement recevoir les patients qui font appel agrave eux Cette revendication des psychologues est devenue pour certains un carcan qui limite le champ de leur intervention Les psychologues sont lobjet dambivalence Ils peuvent ecirctre consideacutereacutes comme la profession montante en raison de la chute de la deacutemographie des psychiatres et de la de-mande sociale qui leur est adresseacutee les psy-chologues pourraient ecirctre en 1
egravere ligne pour
supplanter ces absences mais la mise en cause de leur statut et de leur formation par le reacutecent statut de psychotheacuterapeute les fragilise Pour conclure je citerai Marc Turpyn au col-loque Le psychologue clinicien le singulier et le collectif La profession de psychologue est-elle un symptocircme de lrsquoinstitution hospita-liegravere Un certain nombre de signes permet depuis longtemps de le penser son identiteacute indeacutefinis-sable sa situation drsquoexception dans un en-semble institutionnel globalement meacutedical son inexistence dans les instances de lrsquohocircpital les oublis reacuteguliers dont elle fait lrsquoobjet dans les textes sa position institutionnelle hors hieacuterar-chie les interrogations reacutecurrentes sur ses sta-tuts lrsquoincompreacutehension de ses outils de travail par les administrations etc Ce qui est nouveau ce sont les nombreuses
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tentatives pour mettre un terme agrave cette position symptomatique volonteacute de faire entrer la pro-fession dans le champ meacutedical fiches meacutetier deacutefinition de compeacutetences introduction de speacute-cialiteacutes preacute-identifieacutees en articulation avec les neurosciences et les approches comportemen-tales circulaire drsquoapplication visant au controcircle ou agrave la disparition des activiteacutes de FIR etc Nrsquooublions pas que la preacutecariteacute entretenue des psychologues le deacutesir de reconnaissance la peur ndash comme lrsquoa montreacute reacutecemment la mise en application du deacutecret sur le titre de psycho-theacuterapeute ndash poussent aussi agrave la normalisation Normaliser la profession serait sans doute la reacuteduire agrave lrsquoombre drsquoelle-mecircme
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Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebut
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine
M AI 1999 PROPOSITION DrsquoAMENDEMENT
PAR B ACCOYER
Devant lrsquoabsence de reacuteglementation autour de lrsquoexercice de la psychotheacuterapie et dans un contexte de lutte contre les deacuterives sectaires sous couvert de psychotheacuterapie un premier amendement est proposeacute par Bernard Accoyer meacutedecin et deacuteputeacute Ce premier amendement porte sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute il est proposeacute le 4 mai 1999 agrave lrsquooccasion de lrsquoexamen du projet de loi relatif agrave la Couverture maladie universelle (CMU) OCTOBRE 1999 PROPOSITION DE LOI PAR
BACCOYER
Lrsquoamendement preacuteceacutedent ayant eacuteteacute refuseacute BAccoyer deacutepose le 13 octobre 1999 la pre-miegravere proposition de loi (ndeg 1844) visant agrave reacute-glementer le titre de psychotheacuterapeute Lrsquounique article preacutecise Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est strictement reacuteserveacute drsquoune part aux titulaires du diplocircme de docteur en meacutedecine qualifieacute en psychiatrie et drsquoautre part aux titulaires drsquoun diplocircme de troisiegraveme cycle en psychologie Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve deux professions de la santeacute mentale sont formeacutees par les universiteacutes franccedilaises les psycho-logues et les meacutedecins psychiatres Les condi-tions daccegraves et dutilisation de ces titres sont eacutetroitement encadreacutees par la loi Pourtant il existe un grave vide juridique concernant lexercice de la psychotheacuterapie La profession de psychotheacuterapeute nest en effet agrave ce jour toujours pas deacutefinie par le code de la santeacute publique Ainsi de trop nombreuses per-sonnes insuffisamment qualifieacutees voire non qualifieacutees se deacuteclarent et sinstituent psycho-theacuterapeutes en toute impuniteacute faisant courir les plus grands dangers agrave des personnes qui
par deacutefinition sont vulneacuterables et risquent de voir leur deacutetresse et leur pathologie aggra-veacutees MARS 2000 est enregistreacutee agrave la Preacutesidence de lAssembleacutee nationale sous le ndeg 2288 une pro-position de loi relative agrave lexercice de la profes-sion de psychotheacuterapeute par les deacuteputeacutes MM Jean-Michel Marchand Andreacute Aschieri Mme Marie-Heacutelegravene Aubert MM Yves Cochet et Noeumll Mamegraverehellip AVRIL 2000 PROPOSITION DE LOI DE
BACCOYER
26 avril 2000 nouvelle proposition de loi de BAccoyer Loi ndeg2342 relative agrave la prescription et agrave la conduite des psychotheacuterapies Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve En labsence de disposition du code de la santeacute publique concernant lusage des psychotheacutera-pies quiconque le souhaite peut actuellement visser sa plaque de psychotheacuterapeute et preacutetendre soigner (hellip) Ainsi le rapport de la mission interministeacuterielle de lutte contre les sectes remis en feacutevrier 2000 au Premier mi-nistre signale que certaines techniques psy-chotheacuterapiques sont devenues un outil au ser-vice de linfiltration sectaire et il suggegravere au se-creacutetariat dEtat agrave la Santeacute de cadrer ces pra-tiques Cest la raison pour laquelle javais dores et deacutejagrave deacuteposeacute le 13 octobre 1999 avec quatre-vingt-un collegravegues une proposition de loi ndeg1844 visant agrave reacuteserver lusage du titre de psychotheacuterapeute agrave des personnes titulaires de diplocircmes universitaires() Dans ce con-texte il convient deacutesormais de consideacuterer les psychotheacuterapies comme un veacuteritable traite-ment A ce titre cest leur prescription et leurs applications qui apparaissent comme devant ecirctre reacuteserveacutees agrave des professionnels deacuteten-teurs de diplocircmes universitaires attestant dune formation institutionnelle garantie dune compeacutetence theacuteorique pouvant ecirctre doubleacutee
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dune expeacuterience pratique et dun travail sur soi (hellip) Cependant certains professionnels bien que non-psychiatres ou non-psychologues cliniciens preacutesentent de solides connaissances et une expeacuterience de la patho-logie mentale et du fonctionnement psychique Il convient donc quun jury composeacute duniversi-taires et de professionnels soit habiliteacute agrave vali-der leurs compeacutetences et agrave autoriser lexercice des psychotheacuterapies agrave ceux qui pratiquent deacute-jagrave depuis plus de cinq anneacutees agrave compter de promulgation de la preacutesente loi
PROPOSITION DE LOI Article unique Il est inseacutereacute apregraves larticle L 360 du code de la santeacute publique un article L 360-1 ainsi reacutedigeacute Les psychotheacuterapies sont des traitements meacutedico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes meacutedecins quali-fieacutes en psychiatrie et psychologues clini-ciens Les professionnels qui dispensent des psychotheacuterapies depuis plus de cinq ans agrave la date de promulgation de la preacute-sente loi pourront poursuivre cette activiteacute theacuterapeutique apregraves eacutevaluation de leurs connaissances et pratiques par un jury composeacute duniversitaires et de profession-nels dont la composition est fixeacutee par deacute-cret en Conseil dEtat
OCTOBRE 2003 AMENDEMENT AU PROJET DE LOI SUR LE CODE DE LA SANTEacute PUBLIC B AC-
COYER
8 Octobre 2003 agrave lrsquoAssembleacutee nationale B Ac-coyer deacutepose un amendement ndeg71 Les psychotheacuterapies sont des traitements meacute-dico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes en psychiatrie de psychologues cliniciens et meacutedecins ayant sui-vis les formations requises Crsquoest la 3eme version (ndeg336) qui est adopteacutee agrave lrsquounanimiteacute le 8 octobre 2003 par lrsquoAssembleacutee Nationale Les psychotheacuterapies constituent des outils theacuterapeutiques utiliseacutes dans le traite-ment des troubles mentaux Les diffeacuterentes ca-teacutegories de psychotheacuterapie sont fixeacutees par deacute-cret du ministre chargeacute de la Santeacute Leur mise en œuvre ne peut relever que de meacutedecins
psychiatres ou de meacutedecins et psychologues ayant les qualifications professionnelles re-quises fixeacute par ce mecircme deacutecret Lrsquoagence Na-tionale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute apporte son concours agrave lrsquoeacutelaboration de ces conditions (hellip) On ne parle plus ici de lrsquousage drsquoun titre de psy-chotheacuterapeute mais drsquoune deacutefinition de la psy-chotheacuterapie JANVIER 2004 AMENDEMENT ACCOYER ANNU-
LANT LE PREacuteCEacuteDENT
Le 19 janvier 2004 lrsquoamendement Accoyer de-venu entre temps amendement 363 About-Matteacutei annulant le preacuteceacutedent est voteacute par le Seacutenat en ces termes Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacute-serveacute aux professionnels inscrits au registre national de psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dis-penseacutes de lrsquoinscription les titulaires drsquoun di-plocircme de docteur en meacutedecine les psycho-logues titulaires drsquoun diplocircme drsquoeacutetat et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations Les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent article sont fixeacutees par deacutecret Ici les psychanalystes reacuteguliegraverement enregis-treacutes dans les annuaires de leurs associations font leur apparition dans la liste des personnes habiliteacutees agrave user du titre de psychotheacuterapeute
AVRIL 2004 AMENDEMENT DUBERNARD
8 avril 2004 est voteacute agrave lrsquoAssembleacutee nationale lrsquoamendement devenu depuis amendement 344 preacutesenteacute par Jean-Marie Dubernard rap-porteur de la commission des affaires cultu-relles familiales et sociales
POLITIQUE DE SANTE PUBLIQUE (Nordm 1364)
(DEUXIEME LECTURE)
Amendement Nordm 344 preacutesenteacute par M Jean-Michel Dubernard rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles familiales et sociales Article 18 quater La conduite des psychotheacuterapies neacuteces-site soit une formation theacuteorique et pra-tique en psychopathologie clinique soit une formation reconnue par les associa-tions de psychanalystes (hellip) Lrsquousage du
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titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au registre national des psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dispen-seacutes de lrsquoinscription sur la liste viseacutee agrave lrsquoali-neacutea preacuteceacutedent les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psy-chologue dans des conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 portant diverses dispositions drsquoordre social nordm85-772 du 25 juillet 1985 et les psychanalystes reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans les annuaires de leurs asso-ciations
Dans lrsquoexposeacute sommaire on retrouve pour conduire des psychotheacuterapies il est neacutecessaire drsquoavoir suivi une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie La condition de lrsquoinscrip-tion sur le registre national est maintenue (hellip)Lrsquoamendement continue agrave preacutevoir que les titu-laires drsquoun diplocircme de meacutedecine les psycho-logues et les psychanalystes sont dispenseacutes de lrsquoenregistrement Ces professionnels devront satisfaire agrave lrsquoobligation de formation mention-neacutee au premier alineacutea de lrsquoarticle
9 AOUT 2004 LOI SUR LE TITRE DE PSYCHOTHEacute-
RAPEUTE ARTICLE 52
Le 28 juillet 2004 a eu lieu la reacuteunion de la commission mixte paritaire qui reacutevise lrsquoamende-ment qui est examineacute en seacuteances publiques par lrsquoAssembleacutee Nationale et le Seacutenat le 30 juil-let 2004 et devient le 09 aoucirct 2004 la loi ndeg2004-806 lrsquoarticle 52 relative agrave la politique de santeacute publique Sa parution est dans le JO ndeg185 du 11 aoucirct 2004 page 14277 texte ndeg 4 Dans cette loi larticle 18 quater revu par la commission mixte a eacuteteacute inteacutegralement repris et devient larticle 52 de la dite Loi
Article 52 Lusage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes Linscription est enregistreacutee sur une liste dresseacutee par le repreacutesentant de lEtat dans le deacutepartement de leur reacutesidence profes-sionnelle Elle est tenue agrave jour mise agrave la disposition du public et publieacutee reacuteguliegravere-ment Cette liste mentionne les formations suivies par le professionnel En cas de transfert de la reacutesidence professionnelle dans un autre deacutepartement une nouvelle
inscription est obligatoire La mecircme obli-gation simpose aux personnes qui apregraves deux ans dinterruption veulent agrave nou-veau faire usage du titre de psychotheacutera-peute Linscription sur la liste viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent est de droit pour les titulaires dun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par larticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions dordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations Un deacutecret en Conseil dEtat preacutecise les modaliteacutes dapplication du preacutesent article et les conditions de formation theacuteoriques et pratiques en psychopathologie clinique que doivent remplir les personnes viseacutees aux deuxiegraveme et troisiegraveme alineacuteas
Cet article introduit comme condition de lrsquousage du titre une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie clinique alors qursquoil stipule dans le mecircme temps que lrsquoinscription est de droit pour certains professionnels ce qui pose-ra beaucoup de problegravemes pour lrsquoeacutecriture des projets de deacutecret 2005-2009 AVANT-PROJET DrsquoAPPLICATION DE
LA LOI
Les concertations avec les professionnels con-cerneacutes par lrsquoeacutecriture drsquoun avant-projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute deacutebutent en 2005 Beaucoup de versions vont voir le jour et susciter de vives reacuteactions des professionnels Le ministegravere reacuteunit les organi-sations professionnelles agrave plusieurs reprises pour leur soumettre ces projets Quelques exemples des diffeacuterentes versions de lrsquoavant-projet de deacutecret de loi Version de lrsquoavant projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute 10 janvier 2006
Art1 Lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute neacutecessite une deacutemarche volontaire de la part des professionnels pratiquant les psychotheacuterapies Inscription sur une liste deacutepartementale (hellip) Art2 Lrsquoinscription sur la liste deacutepartemen-
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tale est subordonneacutee pour les professionnels viseacutes au 3
egraveme ali-
neacutea lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique lrsquoattestation de lrsquoobtention du diplocircme de docteur en meacutedecine ou de lrsquoun des di-plocircme viseacutes au deacutecret ndeg 90-255 du 22 mars 1990 modifieacute (liste des diplocircmes permettant de faire usage professionnel du titre de psychologue) ou de lrsquoinscrip-tion agrave un annuaire drsquoassociations de psy-chanalystes pour les autres professionnels
Lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique Le cas eacutecheacuteant lrsquoattestation de lrsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profession reacute-glementeacutee dans le champ sanitaire et so-cial Une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le do-maine de la pratique de la psychotheacutera-pie parmi les quatre approches sui-vantes analytique systeacutemique cognitivo-comportementaliste inteacutegrative La deacuteclaration sur lrsquohonneur mentionne notamment lrsquointituleacute et la date drsquoobtention du diplocircme la dureacutee de la formation le nom et les coordonneacutees de lrsquoorganisme de formation public ou priveacute qui a deacutelivreacute le diplocircme (hellip) Art8 Le cahier des charges susviseacute deacutefi-nit les modaliteacutes de la formation en psy-chopathologie clinique laquelle est drsquoun niveau master Il vise agrave permettre au pro-fessionnel souhaitant user du titre de psy-chotheacuterapeute drsquoacqueacuterir Une connaissance du fonctionnement psychique Une capaciteacute de discrimination de base des situations pathologiques en santeacute mentale Une connaissance de la diversiteacute des theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie Une connaissance des 4 principales ap-proches de psychotheacuterapie vali-deacutees scientifiquement (analytique systeacute-mique cognitivo-comportementaliste in-teacutegrative) (hellip)
Il est eacutevoqueacute un niveau master pas de men-
tion drsquoune formation universitaire la loi ne parle que drsquoune formation agrave la psychopathologie cli-nique et stipule ce que seraient les approches psychotheacuterapiques valables scientifiquement ce qui nrsquoest pas sans questionner Titre ouvert aux deacutetenteurs drsquoun diplocircme relatif agrave une pro-fession reacuteglementeacutee dans les champs sani-taires et sociaux ne correspond pas aux preacute requis de la formation en psychopathologie cli-nique Par la suite le descriptif des diffeacuterentes ap-proches de psychotheacuterapie disparaicirct au profit drsquoune connaissance des principales ap-proches utiliseacutees en psychotheacuterapie sans preacute-cision Est indiqueacute le nombre drsquoheures de for-mation theacuteorique (150 heures dans une ver-sion 500 dans une autrehellip) et de stage pra-tique Est stipuleacute que la formation en psychopa-thologie clinique peut ecirctre confieacutee agrave lrsquoUniversiteacute ou agrave des organismes passant convention avec lrsquoUniversiteacute Pour les professionnels inscrits de droit on retrouve les docteurs en meacutedecine quelles que soient leurs speacutecialiteacutes les psycho-logues quelle que soit leur formation et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement inscrits dans un an-nuaire drsquoassociation de psychanalystes ce qui nrsquoest pas un titre proteacutegeacute On exige par ailleurs de ces mecircmes professionnels une formation compleacutementaire en psychopathologie viseacutee agrave lrsquoalineacutea 4 de lrsquoarticle 52 ce qui posera pro-blegraveme certaines professions pouvant faire usage du titre de psychotheacuterapeute de droit doivent dans le mecircme texte de loi attester drsquoune formation compleacutementaire Pour tous les professionnels le cas eacutecheacuteant une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le domaine de la pratique de psychotheacuterapie une attestation drsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profes-sion reacuteglementeacutee par le code de la santeacute pu-blique ou le code de la famille et de lrsquoaction so-ciale Le cahier des charges deacutefinit les modaliteacutes de la formation en psychopathologie clinique pour acqueacuterir ou valider une connaissance des fonctionnements et des processus psychiques une connaissance des critegraveres de discerne-ment des grandes pathologies psychiatriques une connaissance des diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie une connais-sance des principales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie
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Le Ministegravere de la Santeacute ne parvient pas agrave faire aboutir lrsquoeacutecriture de deacutecrets drsquoapplication de-vant faire face aux contestations des diffeacuterents professionnels Au printemps 2008 le Ministegravere de la Santeacute deacutecide drsquoarrecircter un des projets de deacutecret drsquoap-plication de lrsquoarticle 52 soumis au CNESER (Conseil National de lrsquoEnseignement Supeacuterieur et de la Recherche) le 16 juin 2008 Dans la note de preacutesentation on retrouve il ne srsquoagit pas de creacuteer une nouvelle profession ni drsquoen-cadrer la formation et la pratique de la psycho-theacuterapie mais de preacuteciser les conditions dans lesquelles il peut ecirctre fait usage de ce titre Il y est exigeacute pour tous professionnels drsquoavoir valideacute une formation theacuteorique de 400 heures (cest-agrave-dire infeacuterieure au total de la formation en psychopathologie clinique drsquoun Master de Psychologie clinique) et un stage pratique de 5 mois Possibiliteacutes de dispenses partielles de forma-tion selon les cateacutegories professionnelles con-cerneacutees (meacutedecins meacutedecins psychiatres psy-chologues psychanalystes) 18 MARS 2009 PROJET DE LOI PORTANT REacute-
FORME DE LrsquoHOcircPITAL ET RELATIF AUX PATIENTS
Agrave LA SANTEacute ET AUX TERRITOIRES
23 JUILLET 2009 ARTICLE 91 DE LA LOI HPST
Lrsquoarticle 91 de la loi HPST du 21 juillet 2009 opegravere une modification de lrsquoarticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 pour reacutesoudre les difficulteacutes rencontreacutees agrave eacutecrire un deacutecret drsquoapplication Il modifie lrsquoarticle 52 portant sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 52 de la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 modifieacute par lrsquoarticle 91 de la loi ndeg 2009
-879 du 21 juillet 2009 Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes [hellip] Un deacutecret en Conseil drsquoEacutetat preacutecise les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent ar-ticle et les conditions de formation theacuteo-rique et pratique en psychopathologie cli-nique que doivent remplir lrsquoensemble des professionnels souhaitant srsquoinscrire au registre national des psychotheacuterapeutes Il deacutefinit les conditions dans lesquelles les ministres chargeacutes de la santeacute et de lrsquoen-
seignement supeacuterieur agreacuteent les eacutetablis-sements autoriseacutes agrave deacutelivrer cette forma-tion Lrsquoaccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires drsquoun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit drsquoexercer la meacutedecine en France ou drsquoun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-chologie ou la psychanalyse Le deacutecret en Conseil drsquoEacutetat deacutefinit les conditions dans lesquelles les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions drsquoordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations peuvent beacute-neacuteficier drsquoune dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique [hellip] Le deacutecret en Conseil drsquoEtat preacutecise eacutegale-ment les dispositions transitoires dont pourront beacuteneacuteficier les professionnels jus-tifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacuterapie agrave la date de publication du deacutecret
Il nrsquoy a plus de notion de professionnels inscrits de droit la formation en psychopatho-logie clinique est exigible de tous et lrsquoaccegraves agrave cette formation requiert un niveau de diplocircme eacuteleveacute titre de docteur en meacutedecine master de psychologie ou de psychanalyse Y sont tou-jours mentionneacutes les psychanalystes reacuteguliegrave-rement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations 20 MAI 2010 DEacuteCRET DrsquoAPPLICATION RELATIF Agrave LrsquoUSAGE DU TITRE DE PSYCHOTHEacuteRAPEUTE (CF
ANNEXE)
Le 20 mai 2010 paraicirct le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute publieacute au JO ndeg0117 du 22 mai 2010 (deacutecret ndeg 2010-534) Ce deacutecret deacutefinit les critegraveres de formation en psychopathologie clinique exigeacutee fixe les con-ditions drsquoagreacutement des eacutetablissements de for-mation preacutecise les dispenses partielles ou to-tales de formation dont peuvent beacuteneacuteficier les meacutedecins psychologues et psychanalystes et enfin arrecircte les dispositions transitoires appli-cables aux psychotheacuterapeutes en exercice agrave
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
la date de publication du deacutecret Il nrsquoy est tou-jours pas fait mention de formation agrave la pra-tique psychotheacuterapique Il preacutecise une condition de diplocircme minimal pour avoir accegraves agrave cette formation Elle est reacute-serveacutee aux personnes titulaires drsquoun doctorat de meacutedecine ou drsquoun master ayant pour men-tion ou pour speacutecialiteacute la psychologie ou la psy-chanalyse Les psychiatres sont exempteacutes de formation compleacutementaire Les meacutedecins non psy-chiatres seront contraints agrave une formation com-pleacutementaire On retrouve la notion de psychologue clinicien qui ne correspond pas agrave un titre proteacutegeacute comme tel ni un parcours de formation identifieacutee Les psychologues clini-ciens nrsquoont pas de dispense totale et devront se soumettre agrave une formation theacuteorique et pra-tique compleacutementaire La formation theacuteorique comprend 400 heures drsquoenseignement pour acqueacuterir ou valider des connaissances relatives au deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques aux critegraveres de discernement des grandes patholo-gies psychiatriques aux diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie aux princi-pales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie Le stage est drsquoune dureacutee minimale de cinq mois Les professionnels justifiant drsquoau moins 5 ans de pratique de la psychotheacuterapie peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale apregraves avis de la commission reacutegionale drsquoinscription Le deacutecret ne preacutecise pas la cateacutegorie professionnelle nrsquoappartenant agrave aucune des cateacutegories preacuteceacutedentes que lrsquoon voit en effet apparaicirctre dans lrsquoannexe du deacutecret Le deacutecret a renforceacute le niveau exigeacute pour agreacuteer les eacutetablissements de formation Les psychologues notamment par le biais de leurs organisations professionnelles et syndi-cales ont deacuteposeacute un recours juridique contre le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute le 12 juillet 2010 Ils contestaient notam-ment que lrsquoon exige drsquoeux des formations com-pleacutementaires qui sont deacutejagrave incluses dans leur formation initiale Le recours a eacuteteacute examineacute le mercredi 21 sep-tembre 2011 Le rapporteur public a conclu au rejet de lrsquoensemble des requecirctes porteacute contre le deacutecret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 arrecirct du Conseil drsquoEtat du 27 octobre 2011 Ce deacutecret
est jugeacute conforme agrave lrsquoarticle 52 de la loi ndeg2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique modifieacutee par la loi ndeg2011-940 du 10 aoucirct 2011-art 47 (V) Les organisations professionnelles de psychologues sont en pourparler et eacutevoquent une modification de lrsquoannexe du deacutecret qui pourrait ecirctre en reacuteeacutecri-ture pour mettre agrave pariteacute psychologues et psy-chiatres pour la dispense totale de lrsquoenseigne-ment theacuteorique et du stage srsquoil a eacuteteacute effectueacute pendant les eacutetudes Fin 2011 les bureaux concerneacutes au Ministegravere de la Santeacute et au Ministegravere de lrsquoenseignement Supeacuterieur et de la Recherche examinent un projet de modification de lrsquoannexe du deacutecret du 20 mai 2010 afin de preacutevoir une dispense de formation theacuteorique compleacutementaire et de stage pour les titulaires du titre de psychologue ayant accompli le stage professionnel lieacute agrave lrsquoob-tention de ce titre dans les conditions preacutevues agrave lrsquoart4 du deacutecret du 20 mai 2010 Une dis-pense de toute formation theacuteorique mais reacuteali-sation drsquoun stage de 2 mois dans les conditions de lrsquoart4 du deacutecret pour les titulaires du titre de psychologue dont le stage professionnel lieacute agrave lrsquoobtention de ce titre nrsquoa pas eacuteteacute reacutealiseacute dans les conditions de cet article (voir sites des orga-nisations professionnelles et syndicales)
CONCLUSION
Au deacutecours de ce long cheminement pour lrsquoeacutela-borer une loi portant sur lrsquousage du titre de psy-chotheacuterapeute on remarquera lrsquoimpasse faite sur la formation agrave la pratique de la psychotheacute-rapie elle-mecircme Ce titre pourra ecirctre en effet deacutelivreacute agrave des personnes dont on nrsquoaura pas exi-geacute de formation agrave la psychotheacuterapie mais une formation agrave la psychopathologie clinique Une confusion suppleacutementaire dans la visibiliteacute des professions et leurs missions est introduite par le biais drsquoun nouveau titre de psychotheacuterapeute Il est agrave souligner que concernant les profes-sions reacuteglementeacutees dont font partie les psy-chologues la pratique de la psychotheacuterapie peut sous reacuteserve drsquoune formation compleacute-mentaire personnelle faire partie de leur activi-teacute Le titre de psychotheacuterapeute ne leur est donc pas neacutecessaire (Cf argumentaires sur le site des organisations professionnelles et syn-dicales)
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Decret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 1 Linscription sur le registre national des psy-chotheacuterapeutes mentionneacute agrave larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee est subordon-neacutee agrave la validation dune formation en psy-chopathologie clinique de 400 heures mini-mum et dun stage pratique dune dureacutee mi-nimale correspondant agrave cinq mois effectueacute
dans les conditions preacutevues agrave larticle 4Laccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires dun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit dexercer la meacutedecine en France ou dun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-
chologie ou la psychanalyse Article 2 Par deacuterogation aux dispositions de larticle preacuteceacutedent les professionnels mentionneacutes au cinquiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi preacuteciteacutee sont dispenseacutes en tout ou partie de la formation et du stage dans les conditions
preacutevues par lannexe 1 du preacutesent deacutecret Article 3 La formation mentionneacutee agrave larticle 1er vise agrave permettre aux professionnels souhaitant user du titre de psychotheacuterapeute dacqueacuterir
et de valider des connaissances relatives 1deg Aux deacuteveloppement fonctionnement et
processus psychiques 2deg Aux critegraveres de
discernement des grandes pathologies psy-
chiatriques 3deg Aux diffeacuterentes theacuteories se
rapportant agrave la psychopathologie 4deg Aux
principales approches utiliseacutees en psycho-
theacuterapie Article 4 Le stage pratique mentionneacute agrave larticle 1er seffectue agrave temps plein ou agrave temps partiel de faccedilon continue ou par peacuteriodes fraction-
neacuteesIl est accompli dans un eacutetablissement
public ou priveacute deacutetenant lautorisation men-tionneacutee agrave larticle L 6122-1 du code de la santeacute publique ou agrave larticle L 313-1-1 du code de laction sociale et des familles Toutefois le site du stage ne peut ecirctre le
lieu de travail de la personne en formationLe stage est placeacute sous la responsabiliteacute conjointe dun membre de leacutequipe de for-mation dun eacutetablissement agreacuteeacute en appli-
cation des articles 10 et 15 et dun profes-sionnel de leacutetablissement mentionneacute au
deuxiegraveme alineacutea maicirctre de stageIl donne
lieu agrave un rapport sur lexpeacuterience profes-sionnelle acquise soutenu devant les res-ponsables du stage et un responsable de la
formation de leacutetablissement agreacuteeacuteLe
stage est valideacute par le responsable de la
formation Article 5 Le contenu de la formation theacuteorique et pra-tique mentionneacutee agrave larticle 1er les critegraveres et modaliteacutes de son eacutevaluation ainsi que les objectifs du stage sont deacutefinis par un cahier des charges pris par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur et publieacute au Journal officiel
de la Reacutepublique franccedilaise Article 6 Leacutetablissement de formation sassure au moment de linscription que le candidat jus-tifie de lun des diplocircmes ou titres de forma-tion mentionneacutes au quatriegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 ou dun di-plocircme ou titre de formation reconnu eacutequiva-lent dans un autre Etat membre de lUnion europeacuteenne ou un autre Etat partie agrave lac-
cord sur lEspace eacuteconomique europeacuteen CHAPITRE II LE REGISTRE NATIONAL DES
PSYCHOTHERAPEUTES Article 7 ― Linscription sur la liste deacutepartementale
mentionneacutee au deuxiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 est effectueacutee par le preacutefet du deacutepar-tement de la reacutesidence profession-
nelle principale du demandeurElle
est gratuite Elle doit avoir eacuteteacute effec-tueacutee avant toute utilisation du titre de
psychotheacuterapeuteDans le cas ougrave le
professionnel exerce dans plusieurs sites en tant que psychotheacuterapeute il est tenu de le deacuteclarer et de mention-ner les diffeacuterentes adresses de ses
lieux dexerciceEn cas de change-
ment de situation professionnelle le professionnel en informe les services
du preacutefet - La demande est adresseacutee au directeur geacute-
neacuteral de lagence reacutegionale de santeacute
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dans le ressort duquel se situe la reacute-sidence professionnelle du deman-deur Celui-ci deacutelivre un accuseacute de reacuteception dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute apregraves reacuteception de lensemble des piegraveces justificatives mentionneacutees agrave larticle 8 et assure linstruction pour le compte du preacutefet Il fait connaicirctre agrave ce dernier son avis sur la demande dinscription dans le deacutelai de 45
joursLe silence gardeacute par lautoriteacute
preacutefectorale agrave lexpiration dun deacutelai de deux mois agrave compter de la reacutecep-tion du dossier complet vaut deacutecision
de rejet de la demande - Lensemble des listes deacutepartementales
constitue le registre national des psy-
chotheacuterapeutes Article 8 I ― En vue de leur inscription sur la liste deacutepartementale les professionnels fournis-
sent 1deg La copie dune piegravece didentiteacute 2deg Lattestation de lobtention du titre de for-mation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute publique ou du diplocircme de
niveau master mentionneacute agrave larticle 6 3deg
Lattestation de la formation en psychopa-thologie clinique mentionneacutee agrave larticle 1er agrave lexception des professionnels beacuteneacuteficiant
dune dispense totale 4deg Le cas eacutecheacuteant
lattestation denregistrement pour les pro-fessions et titres reacuteglementeacutes par le code de la santeacute publique et le code de laction
sociale et des familles II - Les professionnels appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee fournissent en outre se-
lon les cas 1deg Soit lattestation de lobten-
tion du titre de formation de speacutecialiste en
psychiatrie 2deg Soit lattestation de lobten-
tion de lun des diplocircmes mentionneacutes au deacutecret du 22 mars 1990 susviseacute permettant de faire usage professionnel du titre de psy-chologue ou lautorisation obtenue en appli-cation des alineacuteas II et III de larticle 44 de
la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee 3deg Soit
lattestation de lenregistrement reacutegulier dans un annuaire dassociation de psycha-
nalystesCette attestation est eacutetablie par le
preacutesident de lassociation Elle est accom-pagneacutee dune copie de linsertion la plus reacute-cente au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise concernant lassociation et men-
tionnant son objetIII - Les modaliteacutes de
preacutesentation de la demande dinscription et notamment la composition du dossier ac-compagnant la demande sont fixeacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute publieacute au Journal officiel de la Reacutepublique fran-
ccedilaise Article 9 La liste deacutepartementale mentionne pour
chaque professionnel 1deg Son identiteacute 2deg
Son lieu dexercice principal et sil y a lieu
ses lieux dexercice secondaires 3deg Le cas
eacutecheacuteant la mention et la date dobtention des diplocircmes relatifs aux professions de santeacute mentionneacutees dans la quatriegraveme partie du code de la santeacute publique ou agrave la profes-sion de psychologue la date de lautorisa-tion obtenue en application des alineacuteas II et III de larticle 44 de la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee ou le nom de lassociation de psy-chanalystes dans lannuaire de laquelle le professionnel est reacuteguliegraverement enregistreacute
4deg Le nom de leacutetablissement de formation
ayant deacutelivreacute lattestation de formation en psychopathologie clinique ainsi que la date
de deacutelivrance de cette attestationCe docu-
ment preacutesente la liste des inscrits selon leur
profession dorigineCette liste est tenue
gratuitement agrave la disposition du public Elle est publieacutee chaque anneacutee au recueil des
actes administratifs de la preacutefecture
CHAPITRE III AGREMENT DES ETABLISSE-
MENTS DE FORMATION Article 10 ― Les eacutetablissements autoriseacutes agrave deacutelivrer
la formation preacutevue agrave larticle 1er sont agreacuteeacutes pour quatre ans par les ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves avis dune commission reacutegionale dagreacute-
ment - La commission reacutegionale dagreacutement est
composeacutee de six personnaliteacutes quali-fieacutees titulaires et de six personnaliteacutes
qualifieacutees suppleacuteantesCes person-
naliteacutes sont nommeacutees pour trois ans
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psy-chanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quaucune des trois cateacutegories de professionnels men-tionneacutees au cinquiegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 sus-viseacutee ne soit majoritaire au sein de la
commissionParmi ces personnali-
teacutes siegravegent deux professeurs des universiteacutes speacutecialiseacutes en psychia-
trie psychologie ou psychanalyseLe directeur geacuteneacuteral de lagence reacute-gionale de santeacute deacutesigne le preacutesident
de la commissionLe mandat des
membres de la commission est re-
nouvelable une fois Article 11 Lavis motiveacute de la commission est rendu
au regard des eacuteleacutements suivants 1deg La
conformiteacute du contenu de la formation pro-poseacutee aux conditions poseacutees aux articles
1er 2 3 4 et 5 du preacutesent deacutecret 2deg La
conformiteacute des conditions et modaliteacutes de validation de la formation theacuteorique et pra-tique preacutevues par leacutetablissement au regard des dispositions preacutevues par larrecircteacute men-
tionneacute agrave larticle 5 du preacutesent deacutecret 3deg
Lengagement de leacutetablissement dans une deacutemarche deacutevaluation de la qualiteacute de la formation dispenseacutee Il fait lobjet dun dos-sier indiquant la structure publique ou pri-veacutee de son choix agrave laquelle sera confieacutee leacutevaluation en cause ainsi que le processus deacutevaluation retenu Ce dossier preacutecise en outre le statut de leacutevaluation la meacutethode utiliseacutee les indicateurs retenus et les diffeacute-rentes phases de leacutevaluation lidentiteacute et la qualification des eacutevaluateurs ainsi que le
calendrier preacutevisionnel de leacutevaluation 4deg
La qualiteacute de leacutequipe peacutedagogique respon-sable qui est composeacutee notamment densei-gnants permanents de professionnels de santeacute ainsi que de personnes autoriseacutees agrave porter le titre de psychotheacuterapeute Cette eacutequipe est placeacutee sous lautoriteacute dun con-seil scientifique comprenant notamment un
titulaire dun titre de formation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute pu-
blique 5deg Ladeacutequation des moyens peacuteda-
gogiques par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes
anneacutees de formation 6deg La conformiteacute des
locaux en matiegravere de seacutecuriteacute et daccessi-biliteacute ainsi que leur adeacutequation par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes anneacutees de for-
mationLes eacutetablissements denseigne-
ment priveacutes doivent en outre satisfaire aux prescriptions des articles L 731-1 agrave L 731-
17 du code de leacuteducation Article 12 La personne physique ou morale juridique-ment responsable dun eacutetablissement de formation deacutesirant assurer la formation mentionneacutee agrave larticle 1er eacutetablit un dossier
de demande dagreacutementCe dossier est
adresseacute au plus tard six mois avant la date de louverture de la formation au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute dans le ressort duquel leacutetablissement a son
siegravege socialCelui-ci en accuse reacuteception
dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6
juin 2001 susviseacuteLa composition de ce
dossier est fixeacutee par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur Il comporte notamment les statuts de leacutetablissement de formation et sa capaciteacute daccueil la description des forma-tions deacutelivreacutees la description des locaux et des moyens peacutedagogiques Il preacutecise sagissant de la formation en psychopatho-logie clinique le contenu de la formation theacuteorique et pratique deacutelivreacutee le descriptif du corps enseignant (effectifs qualiteacute quali-fication) la nature des activiteacutes et de la par-ticipation agrave la recherche de leacutequipe respon-
sable de la formation Article 13 Tout dossier deacuteposeacute est transmis par le di-recteur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute au secreacutetariat de la commission dans un deacutelai dun mois agrave compter de laccuseacute de
reacuteception de la demande initialeLa com-
mission se reacuteunit sur convocation de son preacutesident et dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 8 juin 2006 susviseacute Elle rend son avis dans le deacutelai de deux mois agrave
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
compter de sa saisineLe repreacutesentant de
leacutetablissement de formation est entendu par la commission reacutegionale sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de la candi-
dature ou agrave la demande de la commissionLavis est notifieacute agrave leacutetablissement qui a in-
troduit la demande Article 14 En cas davis neacutegatif et dans un deacutelai dun mois suivant sa notification le repreacutesentant de leacutetablissement de formation peut de-mander au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute de convoquer une nou-
velle reacuteunion de la commissionCelle-ci
siegravege dans une formation eacutelargie agrave len-semble de ses membres titulaires et sup-
pleacuteantsSon avis se substitue au premier
avis rendu Article 15 La deacutecision dagreacutement intervient au plus tard six mois apregraves le deacutepocirct de la demande initiale En cas de recours dans les condi-tions preacutevues agrave larticle 14 ce deacutelai est pro-
longeacute de deux moisLe silence de ladmi-
nistration agrave lexpiration de ce deacutelai vaut deacute-
cision de rejetLa suspension ou le retrait
de lagreacutement sont prononceacutes par deacutecision motiveacutee des ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves que leacutetablissement a eacuteteacute mis agrave mecircme de preacute-senter ses observations lorsque le contenu ou les modaliteacutes dorganisation de la forma-tion cessent decirctre conformes aux condi-tions preacutevues agrave larticle 11 du preacutesent deacute-
cret CHAPITRE IV DISPOSITIONS TRANSI-
TOIRES Article 16
I ― Les professionnels justifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacutera-pie agrave la date de publication du preacutesent deacutecret peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale mentionneacutee agrave larticle 7 alors mecircme quils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplocircme preacutevues aux articles 1er et 6 du preacutesent deacutecret Cette deacuterogation est accordeacutee par le preacutefet du deacutepartement de la reacutesi-dence professionnelle du demandeur apregraves avis de la commission reacutegionale dinscription Le professionnel preacutesente
cette autorisation lors de sa demande dinscription sur la liste deacutepartementale
des psychotheacuterapeutes II - La commission mentionneacutee au I est preacutesi-
deacutee par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute ou par la personne quil a reacuteguliegraverement deacutesigneacutee pour le repreacutesenter Elle comprend six person-naliteacutes qualifieacutees titulaires et six person-naliteacutes suppleacuteantes appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee et nommeacutees par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psychanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quau-cune de ces trois cateacutegories de profes-sionnels ne soit majoritaire au sein de la commission Ses membres sont nom-meacutes pour une dureacutee de trois ans renou-
velable une foisLa commission se reacuteu-
nit dans les conditions fixeacutees par le deacute-
cret du 8 juin 2006 susviseacuteLes frais de
deacuteplacement et de seacutejour de ses membres sont pris en charge dans les conditions preacutevues par la reacuteglementation
applicable aux fonctionnaires de lEtatLa commission sassure que les forma-tions preacuteceacutedemment valideacutees par le pro-fessionnel et son expeacuterience profession-nelle peuvent ecirctre admises en eacutequiva-lence de la formation minimale preacutevue agrave larticle 1er et le cas eacutecheacuteant du di-plocircme preacutevu agrave larticle 6 Elle deacutefinit si neacutecessaire la nature et la dureacutee de la formation compleacutementaire neacutecessaire agrave linscription sur le registre des psycho-
theacuterapeutesLe professionnel est en-
tendu par la commission sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de son dossier ou agrave la demande de la commis-
sion Article 17 Les professionnels qui souhaitent obtenir une autorisation dinscription sur le registre des psychotheacuterapeutes en application de larticle 16 preacutesentent dans le deacutelai dun an
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
agrave compter de la publication du preacutesent deacute-cret un dossier en ce sens dans les condi-
tions preacutevues agrave larticle 7Cette demande
est accompagneacutee des piegraveces justificatives notamment administratives attestant de
lexercice de la psychotheacuterapieA la reacutecep-
tion du dossier complet il est deacutelivreacute agrave linteacuteresseacute un accuseacute de reacuteception deacutelivreacute dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute Celui-ci permet au pro-fessionnel qui utilisait preacuteceacutedemment le titre de psychotheacuterapeute de continuer agrave lutiliser
jusquagrave lintervention de la deacutecisionLe si-
lence gardeacute pendant plus de six mois sur une demande preacutesenteacutee au titre du I de lar-ticle 16 vaut deacutecision de rejet Dans les cas ougrave en application de ces dispositions il est demandeacute au candidat de justifier dune for-mation compleacutementaire celle-ci doit ecirctre effectueacutee avant le 1er janvier 2014 Si cette exigence nest pas remplie le preacutefet retire le professionnel des inscrits sur la liste deacute-
partementale des psychotheacuterapeutes Article 18 Les dispositions du preacutesent deacutecret entrent
en vigueur agrave compter du 1er juillet 2010Pour lapplication du preacutesent deacutecret agrave Saint-Pierre-et-Miquelon les compeacutetences deacutevo-lues au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute par le preacutesent deacutecret sont exerceacutees par les services chargeacutes de lad-
ministration territoriale de la santeacute Article 19 Le ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales la ministre de lenseignement supeacuterieur et de la re-cherche la ministre de la santeacute et des sports et la ministre aupregraves du ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales chargeacutee de loutre-mer sont chargeacutes chacun en ce qui le concerne de lexeacutecution du preacutesent deacutecret qui sera pu-blieacute au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise
ANNEXE NOMBRES DHEURES DE FORMATION
EN PSYCHOPATHOLOGIE CLINIQUEEXIGEacuteES DES CANDIDATS AU TITRE DE
PSYCHOTHEacuteRAPEUTE
THEgraveME de formation
PSYCHIATRES Dispense totale
MEacuteDECINS non psychiatres
PSYCHOLOGUES cliniciens
PSYCHOLOGUES non cliniciens
PSYCHANALYSTES Reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans leur annuaires
PROFESSIONNELS nappartenant agrave aucune des cateacutego-ries preacuteceacutedentes
Deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques
0 h
0 h
0 h
0 h
0 h
100 h
Critegraveres de discernement des grandes pathologies psychiatriques
0 h
0 h
50 h
100 h
100 h
100 h
Theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Principale ap-proches utili-seacutees en psycho-theacuterapie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Stage
0 mois
2 mois
2 mois
5 mois
2 mois
5 mois
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute CSAPA Espace Murger - Service de Psychiatrie
Adulte du Pr Jean Pierre Leacutepine Hocircpital Fernand Widal
L a preacuteoccupation des pouvoirs publics de
reacuteglementer la pratique officielle de la
psychotheacuterapie provoque des turbu-
lences dans le petit monde des psychologues
qui se targuent drsquoen effectuer sous les formes
les plus diverses et qui se voient sommeacutes de
faire la preuve de leur formation dans ce do-
maine agrave deacutefaut de faire de mecircme en ce qui
concerne leur compeacutetence ce qui par ailleurs
nrsquoest guegravere deacutemontrable
Chacun drsquoentre eux peut bien entendu invoquer
son expeacuterience ineffable ou le prestige accordeacute
agrave sa theacuteorie de reacutefeacuterence pour estimer leacutegitime
de srsquoaffranchir drsquoune telle justification tout en
ne perdant pas de vue qursquoun statut estampilleacute
par lrsquoautoriteacute administrative peut garantir la
poursuite sereine de telles activiteacutes Pour les
plus eacuteclectiques le choix drsquoune eacutecole certifiante
ressemblera agrave un mariage de raison
Crsquoest donc au prix drsquoune soumission agrave lrsquoautoriteacute
que lrsquoexercice drsquoune telle liberteacute peut espeacuterer
se perpeacutetuer Crsquoest lagrave lrsquoune des formes de la
reacutesignation peu glorieuse certes agrave laquelle on
pourrait preacutefeacuterer le discernement formulation
bien plus acceptable au regard de lrsquoestime de
soi Crsquoest ce dont semblent avoir manqueacute celui
ou celle ou ceux qui ont cru bon drsquoaller couiner
dans une oreille des plus compatissantes que
la pratique de la psychotheacuterapie devait ecirctre reacute-
serveacutee agrave des professionnels persuadeacutes de sa-
voir y faire et capables de preacutesenter des ga-
ranties plutocirct qursquoagrave des gougnafiers mecircme pas
fichus drsquoexhiber la moindre preuve convain-
cante de la leacutegitimiteacute de leurs preacutetentions Ce
qui est drsquoailleurs la reacutealiteacute Mais comment
srsquoeacutetonner drsquoune telle beacutevue si lrsquoon srsquoen rap-
porte agrave la ceacutelegravebre Loi de Murphy qui eacutenonce
que sil y a plusieurs faccedilons de faire quelque
chose et que lune delles peut aboutir agrave une
catastrophe alors quelquun la choisira
Les mecircmes qui reacuteclamaient la mise en place
drsquoune reacuteglementation officielle reacuteservant le titre
de psychotheacuterapeute agrave des professionnels de
qualiteacute ducircment formeacutes agrave cet effet sont parmi
les premiers agrave protester contre les formes don-
neacutees agrave cette derniegravere par une souveraineteacute deacute-
ficitaire dont lrsquoexercice autoritaire nous rappelle
que nous sommes destineacutes agrave nous faire ap-
prendre ce que lrsquoon sait deacutejagrave par des gens qui
nrsquoy connaissent rien Agrave lrsquoheure de la prolifeacutera-
tion des reacutefeacuterentiels et des protocoles reacuteclamer
encore un peu plus de controcircles et de veacuterifica-
tions suspicieuses ne peut que servir de via-
tique aux frileux de la subjectiviteacute qui sont
friands de contraintes rassurantes Et on ne
srsquoeacutetonnera pas de les voir se formaliser drsquoen
avoir appeleacute agrave Raminagrobis comme dans la
ceacutelegravebre fable de Jean de La Fontaine Le
chat la belette et le petit lapin
Crsquoeacutetait un chat vivant comme un deacutevot ermite
Un chat faisant la chattemite
Un saint homme de chat bien fourreacute gros et
gras
Arbitre expert sur tous les cas
Et de voir se faire croquer tout uniment secta-
teurs et protestataires tout marris drsquoavoir con-
senti agrave lrsquoincompeacutetence et la condescendance
de deacutecideurs comme on dit le sort de leurs
activiteacutes Drsquoougrave la singularisation des heacutesitants
ameacutenagements survenus qui vident du proceacute-
deacute la geacuteneacuteralisation qursquoil visait au profit de re-
connaissances professionnelles plus contrai-
gnantes encore par la judiciarisation des liber-
teacutes du mecircme tonneau Et ce qui ne peut agrave lrsquoeacutevi-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 44
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dence valoir pour tous nrsquoa que peu de chances
de valoir davantage pour chacun Ce seraient
donc des organisations professionnelles qui se
verraient deacutecerner des preacuterogatives pour les
beacuteneacuteficiaires qui auront eu la bonne ideacutee de srsquoy
glisser Cela veacuterifie tout agrave la fois la meacuteta-loi de
Cooper qui eacutenonce qursquoune prolifeacuteration de
nouvelles lois creacutee une prolifeacuteration de nou-
veaux vides juridiques et ce bon vieux pro-
verbe qui dit que le clou qui deacutepasse attire le
marteau
On savait deacutenombrer quelques centaines de
types de psychotheacuterapies pleacutethore drsquoautant
plus deacuterisoire que cette recension ne concerne
le plus souvent que des techniques psychotheacute-
rapiques certes impliqueacutees dans des disposi-
tifs agrave viseacutee theacuterapeutique mais certainement
incapables de deacutefinir la psychotheacuterapie car
comment eacutetablir un modegravele de lrsquoindeacutefinissable
Pour autant il sera difficile de deacutemontrer que la
formation certifieacutee agrave une technique psychotheacute-
rapique est assimilable agrave la performance de sa
mise en oeuvre Car qursquoen est-il vraiment dans
la reacutealiteacute de ces audacieuses pratiques Srsquoagit
-il drsquoune illusion entretenue par les theacuterapeutes
sur lrsquointeacuterecirct de leurs manœuvres Les patients
qui srsquoy exposent ne font-ils que changer de re-
gistre de repreacutesentations ou accegravedent-ils reacuteelle-
ment agrave une autre dimension de leur ecirctre Et
comment srsquoaccommodent-ils des aventures
parfois interminables dans lesquelles de telles
situations les plongent
Ces derniers qui se sont aperccedilus que le destin
commenccedilait agrave leur masser les eacutepaules srsquoils
nrsquoacceptent la perspective du changement que
par neacutecessiteacute et la neacutecessiteacute que parce que
leur sentiment drsquoexistence se trouve en deacutelica-
tesse se trouvent le plus souvent agrave la re-
cherche drsquoun sentiment perdu celui de la com-
pleacutetude Et ce sont eux qui deacutecident finalement
si leur rencontre avec un ou une psychologue
doit prendre cette tournure apregraves avoir eacutepuiseacute
tout ce qui leur avait jusque-lagrave permis drsquoy
eacutechapper Ils nrsquoont plus confiance dans la reacuteali-
teacute qui nrsquoest elle-mecircme apregraves tout qursquoun pres-
sentiment collectif Crsquoest que le patient qui se
reacutesout agrave consulter fait la preuve qursquoil a reacuteussi agrave
surmonter sa honte de devoir neacutecessiter une
telle deacutemarche ce qui deacutemontre lrsquoexistence de
la premiegravere ressource personnelle qui lui ap-
partient Si le patient neacuteglige ce qui le pousse agrave
changer alors le changement lui-mecircme est neacute-
gligeacute Il doit rencontrer une attitude telle qursquoil en
ressentira de la consideacuteration premiegravere res-
source theacuterapeutique en retour agrave la disposition
du psychotheacuterapeute
Et puis on voit tous les jours des patients aller
mieux en deacutepit de nos subtiles interventions
peut-ecirctre gracircce aux perfectibiliteacutes de celles-ci
Le patient met son talent agrave notre service mais
pour le bon deacuteroulement des choses il doit ecirctre
eacuteclaireacute sur ses responsabiliteacutes Prisonnier des
circonstances ce qui le rend malheureux le
patient soucieux de participer agrave son eacutemancipa-
tion doit inciter son ou sa psychotheacuterapeute
par des questions simples et bienveillantes agrave
reformuler ce qursquoil comprend de la situation et agrave
exprimer son ressenti Il est essentiel que le
theacuterapeute se sente eacutecouteacute informeacute et respec-
teacute Il ne doit pas craindre de lrsquoimportuner
puisque de toute faccedilon ce sera le cas En preacute-
servant la liberteacute de penseacutee de ce dernier et en
veillant agrave le faire participer aux orientations de
la theacuterapie le patient doit mettre une grande
conviction agrave le convaincre qursquoil est la personne
concerneacutee en premier lieu par le choix de celle-
ci avec la capaciteacute de reacutefleacutechir et de prendre
les deacutecisions qui le concernent agrave partir des in-
formations qursquoil partage avec lui Le patient de-
vra eacutegalement precircter attention aux signes de
conduites addictives ou aux troubles obses-
sionnels compulsifs du psychotheacuterapeute Un
signe drsquoappel agrave connaicirctre est la position con-
descendante ou le silence obstineacute ou encore
la somnolence difficilement dissimuleacutee qui sont
sans rapport avec les attentes drsquoeacutecoute et de
compreacutehension que le patient tente drsquoexprimer
Le patient doit savoir que la preacutevalence du sui-
cide de la deacutepression du syndrome deacutecision-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 45
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
nel de lrsquoalcoolisme et de la toxicomanie est
bien supeacuterieure chez les psychotheacuterapeutes agrave
celle de la population geacuteneacuterale Il srsquoefforcera
donc de lui faciliter la vie par de petites atten-
tions ou remarques gratifiantes afin de ne pas
alimenter les fameux dysfonctionnements dont
les protocoles theacuterapeutiques se sont enticheacutes
Enfin les interlocuteurs ne devront jamais
perdre de vue que lrsquoon nrsquoest jamais autant deacuteccedilu
que par les illusions que lrsquoon perd Bref pour le
privilegravege drsquoune synergie additive de bon aloi le
patient et son psy doivent parvenir agrave se persua-
der que leur liberteacute de manoeuvre consiste agrave
faire tout ce que permet la longueur de la
chaicircne qui les assujettit Et la principale recom-
mandation exigeacutee pour les deux acteurs de ces
proceacutedeacutes interactifs tant pour le patient que
pour son psy semble devoir se fonder sur une
robuste et saine suspicion mutuelle La reacutecipro-
citeacute est la clef de tous les rapports humains
Si lrsquoon veut bien eacutecarter un instant les passion-
nantes preacutesentations de cas superbement rap-
porteacutes par leurs auteurs et dont les colloques
sont friands ougrave tout est eacutelucideacute et dans les-
quelles tout semble srsquoexpliquer facilement ougrave
la posture adopteacutee par le ou la psychotheacutera-
peute srsquoest trouveacutee bien venue ougrave ses inter-
preacutetations se sont reacuteveacuteleacutees pertinentes et ses
interventions judicieuses qui auront abouti agrave
un reacutesultat suffisamment satisfaisant pour ecirctre
exposeacute on srsquoautorisera agrave penser que ces preacute-
sentations sont sans doute davantage drsquoineacutevi-
tables reconstructions que la traduction fidegravele
du deacuteroulement des eacuteveacutenements de lrsquoordre de
lrsquoimplacable authenticiteacute dont se montre ca-
pable une cameacutera de surveillance de distribu-
teur de billets de banque Apregraves tout si le men-
songe est le secret de la vie amoureuse crsquoest
aussi le ciment de la vie sociale La subjectiviteacute
srsquoinsinue partout peut-ecirctre plus encore dans
les souvenirs que dans les activiteacutes de percep-
tion Un souvenir est un mensonge qui dit tou-
jours la veacuteriteacute a eacutecrit Jean Cocteau recons-
truction conjecturale mais sincegravere expression
dans lrsquoinstant de sa remeacutemoration puisque tout
peut ecirctre exact sans que rien ne soit vrai En
theacuteorie tout srsquoexplique en pratique tout se
complique Ce nrsquoest pourtant pas une raison
pour faire les gros yeux aux garnements de la
psychotheacuterapie Qui srsquointeacuteresserait agrave la pein-
ture dans le seul but de devenir trafiquant
drsquoœuvres drsquoart
Or ce que redoute la theacuterapeutique crsquoest lrsquoer-
reur la faute restant beaucoup plus inconce-
vable qursquoelle est exceptionnelle et lrsquoeacutechec trop
reacutecurrent tandis que ce queacutevite la circonspec-
tion mdash en ne versant daucuns cocircteacutes mdash crsquoest la
partialiteacute Crsquoest donc vrai quelle apparaicirct ordi-
naire commune qursquoelle ne se dissipe pas
comme le fait le theacuteorique dans ses cabrioles
et si elle ne fait pas toujours la preuve drsquoune
grande inventiviteacute elle nrsquoest pas hanteacutee par
lrsquoexigence de la coheacuterence ce spectre des pe-
tits esprits Elle ne cherche pas non plus agrave sus-
citer la contradiction ni ne vise agrave se singulari-
ser en prenant une position mais elle aspire agrave
conserver lrsquoesprit ouvert agrave tous les possibles
quitte agrave cultiver le paradoxe Crsquoest sans doute
pour cette raison que quand lrsquoadresse agrave un pa-
tient se reacutevegravele theacuterapeutique ce nrsquoest pas une
surprise totale crsquoest le plus souvent lrsquoaboutis-
sement drsquoune deacutemarche heuristique Ceux qui
srsquoembarrassent dans un diagnostic ce qursquoils
srsquoimaginent indispensable avant toute entre-
prise et auquel ils finissent par croire et ce fai-
sant faire croire implicitement au patient qursquoil
srsquoapplique agrave lui mecircme quand ils ne cegravedent pas
agrave la tentation de lui en faire la reacuteveacutelation peu-
vent finir par srsquoenfermer dans une illusion com-
mune Une telle disposition est assimilable
dans son essence au preacutesupposeacute On voit la
difficulteacute apparaicirctre dans les efforts drsquoy faire
piegravece et que cela ne preacutesage rien de bon
Pourtant on a bien souvent vu la situation theacute-
rapeutique eacutevoluer favorablement en deacutepit de
ces preacutemisses douteuses Qursquoen penser Si
lrsquoon considegravere que la tacircche fondamentale du
psychotheacuterapeute est bien de reacutesoudre des
problegravemes de maniegravere efficace et dynamique
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 46
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
si lrsquoon peut srsquoeacutecarter un tant soit peu des con-
ceptions traditionnelles des problegravemes psycho-
pathologiques mettre en doute lrsquoexistence de
deacuteficits agrave reacuteparer ou agrave compenser chez le pa-
tient srsquoautoriser agrave penser que la reacutesistance au
changement de ce dernier nrsquoa rien agrave voir avec
la rentabiliteacute speacutecifique de symptocircmes en
terme de pouvoir interpersonnel on peut envi-
sager drsquointroduire des solutions qui ne srsquoentre-
tiennent pas elles-mecircmes et deviennent des
obstacles au changement Alors le theacuterapeute
peut se contenter drsquoamorcer un changement et
deacutecliner la neacutecessiteacute de srsquoengager agrave lrsquoaccompa-
gner jusqursquoagrave son terme Et quand les venues
du patient deviennent plus rares se souvenir
que Freud deacuteclarait que la cure est termineacutee
quand le patient ne vient plus
On connaicirct les dispositions favorables du pa-
tient agrave srsquoidentifier au profil qursquoon lui propose Et
si les patients se montrent rarement agrave la hau-
teur de ce que lrsquoon attend drsquoeux crsquoest parce
que lrsquoon attend quelque chose de leur part qui
soit agrave la hauteur de nos preacutetendues compeacute-
tences dont rappelons-nous il srsquoagit de reacutegle-
menter la mise en oeuvre Or lrsquoobjectif du theacute-
rapeute peut-il ecirctre leacutegitimement de confirmer
ses convictions Srsquoil interpregravete les causes du
mal-ecirctre de ses patients en fonction dun scheacute-
ma geacuteneacuteral et preacuteeacutetabli ne les trahit-il pas Et
serait-il bien congru de proposer des theacuterapies
en precirct-agrave-porter mecircme en demi-taille plutocirct
que faire dans le sur mesure en fonction des
ressources que le patient a lrsquoair de preacutesenter
Les deux acteurs de lrsquoaffaire risquent de rater
ce qursquoils recherchent implicitement en croyant y
gagner quelque chose le theacuterapeute la confir-
mation de ses convictions et le patient un
eacuteclaircissement de ses difficulteacutes en mecircme
temps que son adoption par une autoriteacute qui
lrsquoenteacuterine Toute clarteacute se paie drsquoun mystegravere et
comme une conscience claire est le signe
drsquoune mauvaise meacutemoire on nrsquoen saura pas
beaucoup plus les ideacutees nettes et distinctes
chegraveres agrave Reneacute Descartes nrsquoont guegravere fait la
preuve de leur eacutevidence La responsabiliteacute du
theacuterapeute srsquoeacutemaille de tant de deacuteterminants
que ce dernier est tout agrave fait capable de se ran-
ger agrave ce qursquoil croit justifieacute Mais la croyance
nrsquoest pas seulement une ideacutee que lrsquoesprit pos-
segravede crsquoest eacutegalement une ideacutee qui possegravede
lrsquoesprit Le plus grand deacuteregraveglement de lrsquoesprit
est de croire que les choses sont parce que
lrsquoon veut qursquoelles soient Les psychologues sa-
vent si bien identifier les situations qui se precircte-
ront au beacuteneacutefice de leur clairvoyance qursquoils
sont eacutegalement fortement sujets agrave lrsquoisseacutegoureacutee
facirccheuse pathologie qui deacutesigne un don parti-
culier pour toujours chercher drsquoabord dans la
mauvaise poche
Toutefois une relation de confiance une fois
installeacutee ccedila commence agrave rouler mais au fil du
temps la roue finit par prendre du jeu et les
orientations agrave srsquoinstaller dans le confort agrave srsquoen-
liser dans lrsquoanamnegravese agrave travailler obstineacutement
la reacutepeacutetition agrave se contenter de pointer des meacute-
canismes quant ccedila ne se reacuteduit pas agrave la pro-
duction de regrettables rationalisations Il srsquoagit
plutocirct de reacuteapprendre des conduites au patient
apregraves qursquoil en ait renouveleacute le choix agrave srsquoenga-
ger dans des activiteacutes qui permettent de modi-
fier substantiellement les modes de penseacutee Le
but ultime de la psychotheacuterapie nest pas seu-
lement deacuteliminer des comportements deacuteplo-
rables cest dapprendre agrave mieux geacuterer ses
propres processus mentaux agrave affronter avec
plus de reacuteussite des situations oppressantes et
agrave deacutevelopper des opeacuterations psychiques plus
performantes et une maniegravere drsquoecirctre au monde
plus eacutepanouissante une expression de la
sphegravere psychique privileacutegiant la valorisation
des aspirations individuelles qui deacutebouche sur
la preacutedilection pour lrsquoespace inteacuterieur caracteacuteri-
seacute sur lequel on pense souvent ecirctre suscep-
tible de pouvoir agir Mais comment juger ac-
ceptable que le patient se retrouve dans la po-
sition de celui qui la cleacute de son appartement agrave
la main se voit contraint drsquoactionner la son-
nette pour rentrer chez lui
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 47
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Tout ceci pour suggeacuterer une approche zeacuteteacute-
tique des psychotheacuterapies pour autant qursquoelle
puisse ecirctre soupccedilonneacutee de participer agrave lrsquoactua-
lisation de la confusion des genres qui permet-
trait drsquoeffectuer la distinction entre drsquoune part la
psychotechnique de la theacuterapie que la revendi-
cation du titre de psychotheacuterapeute tendrait agrave
certifier au prix drsquoun reacuteductionnisme preacutejudi-
ciable agrave la pratique clinique et au meacutepris drsquoune
certaine creacuteativiteacute et la conduite drsquoun projet
psychotheacuterapique circonspect avec des tech-
niques approprieacutees et individualiseacutees jouant le
rocircle drsquoun outil directionnel
Les psychologues sont censeacutes distinguer le
subjectif de lrsquoirrationnel Il ne sagit pas dex-
clure la subjectiviteacute ni mecircme de la reacuteduire
mais de la conserver au cœur de la pratique de
la psychologie clinique Cest lagrave au cœur de la
subjectiviteacute de lindividuel que celle-ci peut
justifier sa speacutecificiteacute En revanche on ne se
preacuteoccupera pas des ayatollahs de la psycha-
nalyse au masque douloureux et au regard fil-
trant arborant un air drsquoen savoir long ni des
forceneacutes du dressage cognitif qui se deacutesolent
de ne pas voir le patient marcher mieux que
cela dans la combine Pas plus drsquoailleurs que
de tous les gardes-frontiegraveres des succegraves qui
leur eacutechappent qui sont des envieux comme
tous les censeurs Agrave Theacuterapik Park les psy-
chotheacuteraptors chassent tout autant en meute
qursquoen snipers
Il est important de tendre vers une pratique
permissive en accordant au patient la possibili-
teacute de reacutealiser que lorigine des changements se
trouve en lui comme il pense de celle des pro-
blegravemes qui sont les siens qui pourra de cette
faccedilon acqueacuterir une autonomie dans son pro-
cessus de traitement Mais lrsquoon a appris que ce
reacutesultat ne peut ecirctre obtenu que si lrsquoon accorde
au patient la possibiliteacute de tricher Cette faculteacute
le poussera rarement agrave en user mais sa virtua-
liteacute qursquoil est en mesure de srsquoapproprier facilite-
ra bien souvent la survenue des identifications
rechercheacutees par le theacuterapeute parce que le
patient en fera ainsi plus facilement son affaire
Crsquoest en quelque sorte entrer par la porte de
derriegravere dans le champ complexe de la forma-
tion du reacuteel
Cette approche zeacuteteacutetique estomperait eacutegale-
ment la suspicion de thaumaturgie qui revien-
drait au professionnel qui srsquoappuyant sur la
conviction qursquoil y a quelque chose agrave soigner
chez le patient au titre de lrsquoadheacutesion de ce der-
nier agrave la proposition drsquoune telle assertion
srsquoexempterait du titre en vertu de lrsquoautorisation
qursquoil srsquooctroierait agrave lui-mecircme de pratiquer Pen-
ser par soi-mecircme crsquoest souvent penser tout
seul ou pire penser comme tout le monde
Mieux vaut peut-ecirctre penser contre soi-mecircme
et se faire agrave soi-mecircme les objections des
autres Toutes les psychotheacuterapies ont leurs
chimegraveres apregraves lesquelles elles courent sans
jamais les attraper Mais avantageusement en
chemin elles srsquooctroient des opportuniteacutes qui
ne sont pas toutes neacutegligeables Et sans ou-
blier que quand la sinceacuteriteacute confine agrave lrsquoarbi-
traire on en vient agrave regretter lrsquohypocrisie
comme lrsquoa magistralement exprimeacute Descartes
on peut deacutecider que lrsquoon nrsquoest sucircr de rien et
que lrsquoon nrsquoest mecircme pas sucircr que lrsquoon nrsquoest sucircr
de rien cesser de consideacuterer que les pro-
blegravemes compliqueacutes neacutecessitent forceacutement des
solutions compliqueacutees Il y a aussi des psycho-
theacuterapies qui durent des anneacutees et un mauvais
esprit pourrait eacutetablir une comparaison avec les
banques qui quoiqursquoun virement par ordinateur
ne prenne qursquoune seconde aiment en faire tout
un plat afin que les fonds demeurent un mo-
ment dans leur systegraveme et leur rapportent
Comme nous vivons irreacutesistiblement dans un
monde de repreacutesentations la seacuteduction du titre
peut exciter la convoitise mdash celle-ci constituant
la plus formidable des motivations humaines mdash
de psychotheacuterapeutes en quecircte de reconnais-
sance Mais ce sont les ideacutees les plus seacutedui-
santes qui ont le plus souvent besoin de se re-
maquiller Le terme de trompe-couillon deacutesi-
gnant le maquillage en langue verte est trop
illustratif dans le domaine des psychotheacuterapies
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 48
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
pour deacutecourager complegravetement la tentation de
srsquoinsurger contre lrsquoeacuteventualiteacute de sa pertinence
Le titre de psychotheacuterapeute ressemble agrave la
queue du Mickey de notre enfance qursquoil fallait
attraper pour avoir un tour gratuit de manegravege
On peut bien courir encore longtemps apregraves
son obtention mais si lrsquoon veut finir de rouler le
peacutetard il faudra bien se reacutesoudre au bout drsquoun
moment agrave cesser de rechercher le petit bout de
shit tombeacute sur la moquette marron
Alors psychotheacuterapeute agrave quel titre quand la
proposition theacuterapeutique tiendrait tout entiegravere
en quatriegraveme de couverture Et lrsquoon peut ajou-
ter agrave notre accablement la conjoncture imagi-
naire que nous ne nous en remettrons jamais
et deacutecider que la psychotheacuterapie est devenue
un business Bien sucircr ces consideacuterations ne
srsquoappliquent pas aux psychotheacuterapeutes pour
lesquels rien nrsquoest impossible eacutequipeacutes du tout
agrave lrsquoego agrave soi qui sont si lrsquoon peut dire la protu-
beacuterance de la profession Elles ne srsquoappliquent
pas davantage agrave ces professionnels dont
lrsquoinaptitude est semblable agrave celle des jeunes
paresseux ces mammifegraveres arboricoles de la
forecirct breacutesilienne auxquels il arrive freacutequem-
ment drsquoempoigner leurs propres pattes agrave la
place des branches si bien qursquoils tombent des
arbres
Enfin lrsquoexigence de ce titre fait voir se multiplier
des instituts de formation agrave la psychotheacuterapie
neacutes de la derniegravere pluie qui ne feraient que
precirccher pour leur paroisse agrave des ouailles fasci-
neacutees par la quecircte de la qualification Il suffirait
alors de deacutetenir le titre de psychotheacuterapeute
pour le devenir tandis que ceux ou celles qui
en possegravedent la compeacutetence et qui se risquent
agrave en pratiquer verraient fragiliseacutee leur deacutetermi-
nation agrave y recourir sans lrsquoestampille de sa sa-
cralisation Crsquoest ainsi qursquoun meacutecanicien de la
relation identifieacute comme speacutecialiste du soin et
de la gestion des relations interpersonnelles
viendra disqualifier la prodigieuse diversiteacute des
fonctionnaliteacutes de la psychologie clinique agrave la-
quelle nous sommes tous attacheacutes Et lrsquoon ver-
ra des psychotheacuterapeutes nantis de bons certi-
ficats srsquoeacutevertuer dans la profession et y forger
leur reacuteussite juste pour prouver que crsquoest pos-
sible Les exigences des employeurs se mon-
treront de plus en plus impeacuteratives sur ce point
les assureurs jouant le rocircle drsquoagences de nota-
tion et lrsquoon nrsquoengagera deacutesormais que des
eacutebeacutenistes qualifieacutes comme caissiers chez Ikea
Quand le doute est leveacute il deacutebouche sur une
incertitude et le psychotheacuterapeute ballotteacute au
greacute des vagues de lrsquooceacutean du deacutesir de nou-
velles contraintes reacuteglementaires dans sa lutte
contre la deacutereacuteliction par tous les temps se
trouve embarrasseacute par le choix impossible
entre deux deacutesillusions voir que lrsquoeacutetendue du
champ de la pratique de la psychotheacuterapie se
precircte deacutesormais deacutecideacutement mal agrave son entre-
prise ou constater combien ccedila va ecirctre difficile
de lrsquoentreprendre agrave ses propres conditions
Crsquoest comme eacuteprouver le deacutesappointement de
la dame constatant que la lunette des toilettes
nrsquoest pas abaisseacutee ou la consternation du
monsieur qui deacutecouvre que la mecircme lunette ne
tient pas releveacutee Mais quitte agrave voyager sur le
Titanic pourquoi pas en premiegravere classe
La vie professionnelle nous rappelle combien le
monde peut paraicirctre singulier lorsqursquoon le re-
garde apregraves avoir fait un simple pas sur le cocircteacute
Lrsquoexercice de la psychotheacuterapie srsquoassaisonne
de pas mal drsquohumiliteacute et drsquoun peu de creacuteativiteacute
Peut-on ecirctre agrave la fois malin et intelligent Les
psychologues cliniciens pratiquent volontiers
lrsquousage des deux adverbes fondamentaux qui
eacuteveillent lrsquointelligence des enfants pourquoi
et comment Lrsquointelligence incite agrave la reacute-
flexion et la reacuteflexion conduit au scepticisme
Le scepticisme lui megravene agrave lrsquoironie Lrsquoironie
cette meacutelancolie de la luciditeacute agrave son tour se
preacutesente agrave lrsquoesprit mdash qui se trouve en apport
direct avec lrsquohumour mdash qui fait si bon meacutenage
avec la fantaisie Et la vie devient une chose
deacutelicieuse aussitocirct qursquoon deacutecide de ne plus la
prendre tout agrave fait au seacuterieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 49
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute des pa-
tients migrants africains
Jacqueline Faure Hocircpital Tenon Page 50
gt Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacute-
moignage drsquoune pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute Page 60
gt Seacutejour de vacances quelle place pour le psy-
chologue
Ceacuteline Le Bivic Hocircpital Eacutemile Roux Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques
transversaliteacute de nos cliniques
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 50
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants
africains une approche originale avec lrsquoassociation URACA
Jacqueline Faure Service des maladies infectieuses et
tropicales Centre de la dreacutepanocytose Hocircpital Tenon
Lrsquohomme universel nrsquoexiste pas il est inscrit
dans une culture dans un cadre Or ce cadre
est universel il nrsquoexiste pas drsquohomme sans cul-
ture
L rsquohocircpital Tenon est situeacute agrave lrsquoEst de Paris
bon nombre de patients migrants infec-
teacutes par le VIH y sont soigneacutes Du fait de
lrsquoexistence drsquoune materniteacute au sein de lrsquohocircpital
beaucoup de femmes migrantes apprennent
leur seacuteropositiviteacute agrave lrsquoinfection par le VIH-sida
au cours du suivi de leur grossesse La grande
majoriteacute de ces patients est originaire drsquoAfrique
de lrsquoOuest
Degraves 1993 nous avons mis en place un parte-
nariat avec lrsquoassociation URACA pour aider
les patients en difficulteacute face au diagnostic de
lrsquoinfection par le VIH-sida et aussi les soignants
rencontrant des problegravemes dans la prise en
charge de certains patients
Au deacutebut les soignants et moi-mecircme pensions
que la plupart des patients africains ne com-
prenaient rien Peu agrave peu avec lrsquoaide drsquoURA-
CA nous avons pris conscience que nous-
mecircmes ne les comprenions pas toujours ou
bien encore que nous ne savions pas nous
faire comprendre drsquoeux
Cette association daide aux Africains intervient
dans diffeacuterents domaines accueil aide juri-
dique sociale solidariteacute preacutevention informa-
tion recherche dans le domaine de la santeacute
(toxicomanie SIDA dreacutepanocytose troubles
psychiatriques) et propose aussi des consulta-
tions drsquoethnomeacutedecine
Ainsi bien souvent les difficulteacutes avec les pa-
tients drsquoorigine eacutetrangegravere sont lieacutees agrave des pro-
blegravemes de communication et de compreacutehen-
sion mutuelles dans la relation soignant-soigneacute
En comprenant lrsquoeacuteveacutenement migratoire et son
impact dans la deacutecouverte drsquoune maladie
grave en eacutetant sensibiliseacutes agrave lrsquoimportance de la
dimension culturelle dans le soin nous avons
ainsi ameacutelioreacute lrsquoaccueil et la prise en charge de
ces patients
Un systegraveme culturel est constitueacute drsquoune
langue drsquoun systegraveme de parenteacute drsquoun corpus
de techniques et de maniegraveres de faire (la pa-
rure la cuisine les arts les techniques de
soins les techniques de maternagehellip) Tous
ces eacuteleacutements eacutepars sont structureacutes de maniegravere
coheacuterente par des maniegraveres de penser les re-
preacutesentations [] Les repreacutesentations permet-
tent aux individus dun mecircme groupe dappreacute-
hender le monde selon les modaliteacutes com-
munes repreacutesentations de la mort de la con-
ception
Jemploie ce mot culture agrave contrecœur avec
la crainte decirctre mal compris Par ce terme je
ne deacutesigne pas leacutecume luxueuse dune civilisa-
tion mais lesprit tregraves particulier dun peuple
insaisissable
Cette prise en charge globale avec lrsquoassocia-
tion URACA srsquoeffectue sous 4 formes
1 le soutien communautaire
2 la meacutediation culturelle
3 la consultation dethnomeacutedecine une prise
en charge transculturelle
4 la formation mutuelle partage de savoir
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 51
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
1 LE SOUTIEN COMMUNAUTAIRE
Je me sens coupeacute en deux diviseacute une partie
de moi-mecircme nrsquoest pas ici nous dit tel patient
La deacutecision la plus terrible que jrsquoaie eu agrave pren-
dre dans ma vie crsquoest de rester ici pour me soi-
gner et ecirctre ainsi seacutepareacutee des miens raconte
cette femme dans un sanglot difficilement con-
tenu
Crsquoest tregraves dur drsquoecirctre seulehellipJe ne suis pas ha-
bitueacuteehellipici quand tu sors de ta maison per-
sonne ne se parlehellip
Le soutien communautaire drsquoURACA srsquoorga-
nise de plusieurs faccedilons
Visite hebdomadaire au chevet du patient avec
le port dun repas africain par la nourriture
par le dialogue dans la langue quand cest pos-
sible par la preacutesence de ses pairs quelque
chose du pays est ainsi recreacuteeacutee et apaise le
malade
Accueil quotidien au sein de lrsquoassociation re-
pas atelier couture atelier informatique aides
dans les deacutemarches administratives assem-
bleacutee des femmes Tout ceci dans une am-
biance comme au pays
Ces visites sont proposeacutees aux malades isoleacutes
du fait du diagnostic ou qui nrsquoont pas de famille
ici
La migration est une eacutepreuve qui provoque
chez le sujet une deacutestabilisation une fragiliteacute
lieacutees agrave diffeacuterentes pertes
perte de lrsquoenveloppe culturelle la culture struc-
ture le psychisme humain dans la migration il
nrsquoy a plus ce cadre culturel Changer drsquounivers
implique la perte brutale drsquoune langue drsquoun
systegraveme de reacutefeacuterence drsquoun systegraveme de co-
dage des perceptions des sensations et des
repreacutesentations en un mot une acculturation
[] La perte de lrsquoenveloppe culturelle va donc
provoquer des modifications de lrsquoenveloppe
psychique [hellip]
la perte de repegraveres difficulteacutes au niveau du
changement de climat de la nourriture dans
les deacuteplacements dans la ville dans les deacute-
marches administratives Difficulteacutes et mecircme
souffrance dans la perte de la langue drsquoorigine
Julia Kristeva drsquoorigine bulgare psychanalyste
et eacutecrivain dit ceci hellip il y a mort dans la perte
drsquoune langue natalehellip
la perte drsquoune certaine identiteacute ecirctre Camara
ou Toure ecirctre peul ou bambara nrsquoest pas so-
cialement reconnu le migrant devient un eacutetran-
ger un noir puis agrave lrsquohocircpital eacuteventuellement un
seacuteropositif
la perte du groupe lrsquoisolement est douloureu-
sement ressenti pour tout eacutetranger La solitude
pour un Africain crsquoest mortelhellip nous explique
Monsieur Diarra meacutediateur ethnoclinicien agrave
URACA
Autant drsquoeacuteleacutements qui favorisent un eacutetat de vul-
neacuterabiliteacute propice agrave une deacutecompensation soma-
tique ou psychologique (deacutepression) Le dia-
gnostic drsquoune maladie grave vient renforcer
cette fragiliteacute La solitude dans les chambres
individuelles de nos hocircpitaux modernes - que
nous occidentaux appreacutecions beaucoup - peut
ecirctre mal supporteacutee par le patient africain elle
est mecircme parfois anxiogegravene Un Africain nest
jamais seul Au pays sil est hospitaliseacute sa fa-
mille lentoure dort dans sa chambre
Par ces visites hebdomadaires un tissu rela-
tionnel est ainsi creacuteeacute qui peut se poursuivre agrave
la sortie Le soutien communautaire permet au
patient isoleacute dans la preacutecariteacute de retrouver ce
lien structurant du groupe qui lui faisait deacutefaut
depuis son deacutepart dAfrique Soutien qui va lrsquoai-
der agrave mieux supporter sa maladie et agrave mieux se
soigner Pour un Africain appartenir au groupe
est vital cest pourquoi la grande crainte du
malade est que son entourage soit au courant
du diagnostic et le rejette Le malade ne peut
pas ou ne veut pas partager sa souffrance
avec ses proches La honte la crainte de lex-
clusion peuvent le conduire agrave un retrait difficile
agrave supporter Pour lAfricain lisolement est in-
concevable Sa force vitale est en relation
constante avec celle des ancecirctres proches et
lointains et des membres du groupe La plus
grande calamiteacute consiste agrave en ecirctre retrancheacute et
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 52
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reacuteduit ainsi agrave une existence deacuteficiente sans
protection voueacutee au neacuteant
Cette association communautaire nrsquoest pas
speacutecifiquement cibleacutee SIDA bien que ses
membres soient formeacutes agrave cette pathologie A
lrsquohocircpital elle apporte son aide agrave tout patient
quelle que soit sa maladie Le patient pourra
srsquoil le souhaite aborder son diagnostic et il nrsquoest
pas rare qursquoil le fasse Apaisement et soulage-
ment pour lui de constater que ce dont il
souffre ne fait pas peur Il peut retrouver con-
fiance en lui
2 LA MEacuteDIATION CULTURELLE
Le meacutediateur ethnoclinicien connaicirct bien la cul-
ture du patient originaire drsquoAfrique de lrsquoOuest et
il parle plusieurs langues (peul bambara sara-
koleacute wolof hellip) Il intervient dans diffeacuterentes
situations
Pour faciliter la communication entre le meacutede-
cin et le patient quand des explications concer-
nant la maladie le traitement nrsquoont pas eacuteteacute
comprises Il ne srsquoagit pas drsquoune simple inter-
preacutetation mais drsquoune formulation adapteacutee agrave la
personne agrave sa culture Les messages de preacute-
vention concernant la sexualiteacute par exemple
seront mieux accepteacutes et entendus si la sensi-
biliteacute du patient voire sa pudeur sont respec-
teacutees
Pour aider agrave la reacutesolution de conflits entre pa-
tient-soignant ou patient-famille ou soignant-
famille
Reacutecemment nous avons organiseacute une meacutedia-
tion culturelle pour une patiente ne parlant pas
du tout le franccedilais accompagneacutee de son fils
maicirctrisant parfaitement notre langue Le meacutede-
cin lrsquoassistante sociale le meacutediateur et moi-
mecircme eacutetions reacuteunis pour essayer de com-
prendre le conflit familial Tout eacutetranger utilise
la langue eacutetrangegravere comme un pansement
comme une sorte drsquoonguent de cregraveme sur les
anciennes blessureshellip La langue seconde ne
permet pas drsquo acceacuteder agrave son for inteacuterieur ex-
plique Julia Kristeva Ainsi le fils pouvant tout
agrave fait communiquer avec nous en franccedilais
srsquoest spontaneacutement adresseacute au meacutediateur en
bambara De toute eacutevidence sa langue natale
lui permettait drsquoecirctre au plus pregraves de la situation
douloureuse qursquoil vivait avec sa megravere
Le meacutediateur apporte des eacuteclaircissements sur
le contexte culturel sur le sens de tel conflit
familial sur la place des uns et des autres dans
telle famille (la place de lrsquooncle maternel par
exemple le systegraveme de filiation) Il aide les soi-
gnants souvent deacutestabiliseacutes par le manque de
repegraveres ou qui interpregravetent mal telle attitude
Par exemple lrsquoextension de la deacutenomination
fregravere sœur cousin megravere dans lrsquoentourage du
patient Les soignants ne savent plus qui est
qui Des doutes surgissent voire de la suspi-
cion Les soignants ont lrsquoimpression drsquoecirctre ma-
nipuleacutes ou trompeacutes
Le meacutediateur ethnoclinicien tient selon la for-
mule de T Nathan une sorte de position du
diplomate entre deux univers antagonistes
3 LA CONSULTATION DETHNOMEacuteDECINE UNE
PRISE EN CHARGE TRANSCULTURELLE
La culture permet un codage de lrsquoensemble de
lrsquoexpeacuterience veacutecue par un individu elle permet
drsquoanticiper le sens de ce qui peut survenir et
donc de maicirctriser la violence de lrsquoimpreacutevu et
par conseacutequent du non-sens
Angoisse de mort deacutecompensation psychia-
trique (ideacutees suicidaires syndrome anxio-
deacutepressif eacutetat deacutelirant) incompreacutehension ou
deacuteni du diagnostic deacutetresse psychologique
autant de reacuteactions face agrave la maladie grave qui
peuvent concerner tout patient (occidental ou
non) mais qui neacutecessitent pour certains pa-
tients migrants une approche tenant compte du
contexte de la migration et des speacutecificiteacutes cul-
turelles
Cette maladie je sais drsquoougrave ccedila vient mon pegravere
mrsquoa donneacutee en sorcellerie nous dit cette pa-
tiente qui ne prend pas ses meacutedicaments et
dont lrsquoeacutetat srsquoaggrave
Je suis travailleacute je le sens crsquoest les parents
de ma femme qui nrsquoont jamais accepteacute notre
mariage crsquoest eux qui font des choses sur
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 53
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
moihellip
Ou bien encore ce patient en phase asympto-
matique de lrsquoinfection par le VIH-sida qui ex-
plique Je ne suis pas malade la preuve le
meacutedecin ne me donne pas de traitement
Ainsi dans certains cas le patient en difficulteacute
en souffrance peut refuser de se soigner au
prix drsquoune aggravation de son eacutetat se santeacute De
plus les messages de preacutevention ne sont pas
entendus et les risques de propagation du virus
sont accrus
Cette consultation qui srsquoinspire de lrsquoethnopsy-
chiatrie reacuteunit autour du patient (accompagneacute
ou non de membres de sa famille ou de
proches)
- leacutequipe de lassociation URACA le Dr Mous-
sa Maman meacutedecin et theacuterapeute traditionnel
qui dirige les entretiens le meacutediateur ethnocli-
nicien la psychologue Pendant 10 ans cette
eacutequipe a eacuteteacute compleacuteteacutee par la preacutesence des
tradipraticiens africains gueacuterisseurs tradition-
nels du Nord Beacutenin qui sont venus une fois par
an pour une dureacutee de deux mois (cette action
originale a pu se mettre en place gracircce agrave des
creacutedits le Sidaction par exemple qui nrsquoexistent
plus aujourdrsquohui)
- leacutequipe soignante le meacutedecin reacutefeacuterent les
infirmiegraveres la psychologue linterne les ex-
ternes lassistante sociale sage-femme kineacute-
sitheacuterapeutehellip Les soignants ont ainsi accegraves
en situation clinique agrave lunivers culturel du pa-
tient
Le recours aux pratiques traditionnelles est tregraves
freacutequent en Afrique Les systegravemes traditionnels
de soin relegravevent drsquo une logique complexe
drsquoune rationaliteacute profonde (T Nathan) avec
une capaciteacute agrave srsquoadapter aux nouvelles situa-
tions aux nouvelles maladies Cette deacute-
marche ne remet pas en cause la confiance
envers notre meacutedecine moderne La theacuterapie
traditionnelle apporte des protections fonda-
mentales (T Nathan)
Tregraves souvent en Afrique les theacuterapies tradition-
nelles se deacuteroulent en groupe avec la famille
et ceux qui ont une affiniteacute avec le malade Ici agrave
lhocircpital les participants sont reacuteunis en cercle
autour du patient Le groupe constitue une en-
veloppe psychique qui est en soi theacuterapeu-
tique Les soignants par leur preacutesence accor-
dent une place agrave lrsquoidentiteacute culturelle du patient
agrave ses maniegraveres de vivre de se soignerhellip
Dans les cultures de tradition orale les eacuteveacutene-
ments importants de la vie tels que la nais-
sance le mariage la maladie la mort (avec
lrsquoimportance des ancecirctres) sont penseacutes diffeacute-
remment Il existe une reacutealiteacute invisible on ac-
corde vie force et pouvoir au mineacuteral au veacutegeacute-
tal agrave lrsquoanimal Le sang le lait maternel ont des
pouvoirs beacuteneacutefiques ou maleacutefiques
Les speacutecialistes de lrsquoanthropologie pensent
que le modegravele de lrsquoorganisation sociale com-
munautaire plus freacutequent dans les socieacuteteacutes
non industrialiseacutees ougrave le groupe maintient une
preacutegnance importante sur lrsquoindividu favorise
une expeacuterience du corps veacutecu comme global
il nrsquoy a pas de rupture entre lrsquohomme et le cos-
mos le corps est permeacuteable On lui reconnaicirct
une dimension transcendante et la maladie
qui plus est chronique comme la dreacutepanocy-
tose peut ecirctre inteacutegreacutee dans une reacutealiteacute plus
large exteacuterieure au corps de la meacutedecine des
hocircpitaux
Lors de ces consultations drsquoethnomeacutedecine les
deux systegravemes culturels occidental et tradition-
nel sont reconnus lrsquoun nrsquoexcluant pas lrsquoautre
Le patient peut aborder en toute confiance des
preacuteoccupations qui lui sont speacutecifiques sans
craindre le ridicule Les deux systegravemes de re-
preacutesentations occidentales et traditionnelles
dans lesquels navigue le migrant peuvent
coexister sans sopposer Paradoxalement
lrsquoapproche traditionnelle donne dans certains
cas sens et coheacuterence au discours meacutedical
scientifique Il est difficile de rendre compte
drsquoune consultation drsquoethnomeacutedecine (de mecircme
qursquoil est difficile de parler drsquoune seacuteance de psy-
chotheacuterapie ou drsquoanalyse bien que ce ne soit
pas du mecircme ordre) Il ne srsquoagit pas drsquoune con-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 54
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sultation traditionnelle ce nrsquoest ni le lieu ni le
cadre Nous sommes dans lrsquoentre-deux
Le nom la parenteacute lrsquoappartenance ethnique la
langue natale sont des eacuteleacutements systeacutematique-
ment abordeacutes Ces reacutefeacuterences agrave la filiation agrave
lrsquoethnie rappellent implicitement au malade le
lien agrave sa famille et son appartenance agrave un
groupe Les tradipraticiens se preacutesentent aussi
se nomment racontent dougrave ils viennent Le
dialogue qui srsquoinstaure est bien souvent eacutenig-
matique pour lrsquooccidental Le langage allusif
meacutetaphorique suggestif qui est utiliseacute est tout
agrave fait entendu par le patient agrave la diffeacuterence des
soignants qui sont deacuteconcerteacutes du moins lors
des premiegraveres consultations Peu agrave peu les
soignants vont se familiariser Par la suite ils
peuvent communiquer diffeacuteremment avec tel
patient et mieux deacutecoder sa maniegravere drsquoecirctre ou
de srsquoexprimer
Les repreacutesentations ancestrales de la maladie
et les eacutetiologies traditionnelles (possession es-
prits ou ancecirctres meacutecontents sorcellerie trans-
gression de tabous ou non respect de rituels
familiaux) ne sont pas systeacutematiquement eacutevo-
queacutees et lorsqursquoelles le sont crsquoest toujours de
maniegravere implicite La maladie comme lrsquoacci-
dent la perte drsquoun emploi ou toute autre mani-
festation de malchance de malheur est le
signe drsquoun deacutesordre -dont il faut comprendre le
sens- et qui concerne non seulement le patient
mais aussi sa famille
Monsieur C originaire du Mali connaicirct bien les
diffeacuterents modes de transmission et nous en
discutons ensemble et dans ce mecircme entre-
tien perplexe il se questionne Je ne sais
pas drsquoougrave ccedila vienthellip
Chez nous la maladie quelle soit physique ou
mentale ne concerne pas uniquement lindividu
toucheacute mais aussi sa famille tout le
groupe (M Maman Journeacutee transculturelle
Des gueacuterisseurs agrave lhocircpital des soignants au
village 29 septembre 2001 hocircpital Tenon
Paris) Derriegravere lhistoire de lindividu se profile
toujours le devenir de la communauteacute toute en-
tiegravere [ ] La cause du mal qui rompt leacutequilibre
dun organisme fait peser une lourde menace
sur le corps social
Bien souvent agrave lissu de ces consultations le
patient va contacter la famille au pays qui elle
aussi va intervenir selon ses coutumes par des
priegraveres rituels ou sacrifices
La proposition dune prise en charge transcul-
turelle nest pertinente que si elle fait sens pour
le patient sil se reconnaicirct des liens avec sa
culture dorigine Le patient peut ecirctre occiden-
taliseacute (eacutetudes supeacuterieures vivant en France
depuis de nombreuses anneacutees hellip) ou dorigine
rurale analphabegravete ayant gardeacute des liens avec
son village il peut ecirctre musulman ou chreacutetien
Les indications sont variables
- incompreacutehension du diagnostic Lrsquoexemple
de Monsieur K malgreacute une seacuterologie positive
il reste persuadeacute de nrsquoecirctre pas malade Cepen-
dant il accompagne aux consultations sa
femme et leur fille toutes les deux seacuteropositives
et sous traitement
- refus du traitement les causes sont mul-
tiples Mme T vient reacuteguliegraverement agrave ses con-
sultations le meacutedecin veut deacutesormais lui pres-
crire un traitement qursquoelle refuse Si je dis que
je suis seacuteropositive personne ne voudra se
marier avec moi Une autre patiente
srsquoinquiegravete Je ne veux pas du traitement si je
deviens indeacutetectable alors ougrave sera le virus
- problegraveme drsquoobservance les causes sont va-
rieacutees preacutecariteacute incompreacutehension ou refus du
diagnostic probleacutematique personnelle plus pro-
fonde
- souffrance psychique le patient peut ecirctre
tregraves observant ses reacutesultats biologiques sont
satisfaisants le patient va tregraves bien selon le
meacutedecin mais persiste en lui une douleur mo-
rale difficile parfois agrave repeacuterer Il faut savoir deacute-
coder le sens du sourire (qui ne signifie pas
toujours la joie) lrsquoabsence de plainte Julia
Kristeva explique que les eacutetrangers sont expo-
seacutes aux maladies psychosomatiques ils sont
dans cet espegravece de vernis de la langue se-
conde mais le fond reste douloureux et le fond
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 55
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
eacuteclate sous la forme de la migraine quand ce
nrsquoest pas le cancerhellip
- pathologie psychiatrique troubles du com-
portement (deacutelire agitation violencehellip) syn-
drome deacutepressif risque suicidaire angoisse de
mort plaintes somatiques sans cause orga-
nique (douleurs diffuses sensation de malaise
le corps parle ccedila chauffe ccedila se deacuteplace)
- fin de vie angoisse isolement
- conflits conjugaux ou familiaux aggraveacutes ou
reacuteactionnels agrave la pathologie (risque de divorce
tel mari qui nrsquoassume plus ses responsabiliteacutes
sexualiteacute devenue difficile impossible (refus du
preacuteservatif par exemple)
- Lrsquoannonce du diagnostic Lrsquoannonce drsquoune
maladie grave est toujours une eacutepreuve pour
tout malade Crsquoest un moment-cleacute dans la prise
en charge du patient Dans le cas de lrsquoinfection
par le VIH la formulation peut ecirctre une donneacutee
brutale Tel ce meacutedecin qui annonce agrave
une femme enceinte vih2 asymptomatique
vous avez le SIDA Veacuteritable violence ver-
bale qui provoque un choc psychique avec
risque suicidaire si ce nrsquoest la fuite et le refus
de soin
Actuellement chez certains soignants on as-
siste agrave une banalisation du diagnostic lieacute aux
possibiliteacutes de traitement Mais crsquoest oublier le
deacutecalage avec le niveau de connaissance du
malade et crsquoest aussi meacuteconnaicirctre les effets
sur le patient de la reacutealiteacute dramatique de la ma-
ladie au pays Certains ont vu des proches
mourir du SIDA drsquoune mort lente sans soin et
dans la solitude Tous les patients eacutevoquent
une forte angoisse Deux mois apregraves il y a en-
core en moi cette grande peur quand le meacutede-
cin mrsquoa parleacute En entendant les propos de
lrsquoinfirmier Je vous apporte vos meacutedicaments
du SIDA Mme B nous raconte comment elle
a protesteacute et reacuteagi vivement Vous ne devez
pas dire cela Ainsi dans certains cas le meacute-
decin peut utiliser drsquoautres formulations le
virus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Dans les cultures de tradition orale les mots
ont une force un pouvoir Prononcer le mot SI-
DA activerait en quelque sorte le potentiel mor-
tel de cette maladie Ainsi dans certains cas le
meacutedecin peut utiliser drsquoautres formules le vi-
rus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Deux ou trois consultations ont lieu ainsi agrave lhocirc-
pital pour chaque malade Les tradipraticiens
vont dire ce quils ont vu et vont donner leurs
indications theacuterapeutiques le suivi peut se
poursuivre apregraves leur retour au village ougrave ils
continuent si crsquoest neacutecessaire agrave travailler
pour le patient Les situations sont tregraves varieacutees
et les reacuteponses le sont tout autant
QUELQUES EXTRAITS DE CONSULTATION
Ce patient ne se sent pas malade il nrsquoa aucun
signe de la maladie il ne comprend pas pour-
quoi le meacutedecin insiste pour qursquoil prenne un
traitement qui plus est agrave vie On lui rappelle
qursquoau pays le gueacuterisseur a lui aussi son labo-
ratoire qursquoil voit et qursquoil peut demander de
faire des choses agrave celui qui vient le consulter
pour sa protection ce parfois toute la vie
Cette analogie explicite permet de confirmer la
validiteacute de lrsquoapproche meacutedicale Ce mode drsquoex-
pression imageacutee qui est familiegravere au patient
voir dans le sable faire des rituels pour la
protection reacutesonne en lui et lrsquoaide agrave adheacuterer
aux prescriptions meacutedicales Moi-mecircme jrsquoem-
ploie souvent le terme protection pour parler
du beacuteneacutefice de la tritheacuterapie jrsquoutilise des
images qui font sens pour le patient et je com-
prends mieux celles qursquoil utilise lui-mecircme De
mecircme il mrsquoarrive de lui signaler nos expres-
sions speacutecifiquement franccedilaises ou nos pro-
verbes afin de lui faire connaicirctre aussi notre
propre maniegravere drsquoexprimer certaines choses
Tel autre patient srsquoaggrave il prend mal ses
traitements et il vit dans une grande preacutecariteacute
Drsquoembleacutee lors du premier entretien psycholo-
gique il mrsquoexplique que sa sœur au pays a par-
leacute de sorcellerie Au cours de la consultation
drsquoethnomeacutedecine on lui demande de solliciter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 56
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sa famille au pays pour savoir ce qui doit ecirctre
fait aupregraves de la riviegravere sacreacutee qursquoil a eacutevoqueacutee
En Afrique les deacutefunts les ancecirctres doivent
ecirctre veacuteneacutereacutes par des rituels propres agrave chaque
famille si ce rituel a eacuteteacute abandonneacute des con-
seacutequences neacutegatives peuvent rejaillir sur un de
ses membres mecircme tregraves eacuteloigneacute On peut re-
marquer qursquoici lrsquohypothegravese de la sorcellerie est
eacutecarteacutee crsquoest une autre eacutetiologie traditionnelle
qui est avanceacutee agrave laquelle le patient adhegravere il
va contacter en effet son oncle au sujet de la
riviegravere sacreacutee Le patient devient actif non seu-
lement pour srsquooccuper des choses du pays
mais aussi pour faire des deacutemarches ici sa si-
tuation meacutedicale et sociale va consideacuterable-
ment srsquoameacuteliorer il trouve par la suite un heacute-
bergement puis un travail
Pour cette autre patiente un long temps de la
seacuteance va ecirctre consacreacute au reacutecit de la deacutecou-
verte de sa maladie de son bouleversement
de son angoisse concernant lrsquoavenir Des pa-
roles apaisantes lui sont dites puis on va lui de-
mander drsquoeacutecrire ses recircves de telle et telle nuit
au cours desquelles les gueacuterisseurs
travailleront pour elle Suite au rapport de ses
recircves ils lui prescrivent un traitement elle de-
vra se laver avec une preacuteparation agrave base de
plantes Conjointement le suivi psychologique
classique se poursuit elle reprend confiance
dans la vie
Aacute tel autre il est demandeacute drsquoapporter une petite
boicircte en bois ou encore un tissu blanc et un
parfum Aacute un autre il est dit drsquoaller chercher un
certain nombre de cailloux le long drsquoun cours
drsquoeau ici en France Certaines prescrip-
tions sont plus compliqueacutees sacrifices rituels
agrave effectuer au pays objets agrave rapporter Cela
peut prendre plusieurs semaines Si la pres-
cription est impossible agrave reacutealiser par le patient
lui-mecircme sur place ou par sa famille en
Afrique les gueacuterisseurs le feront en son nom agrave
leur retour au pays Dans la meacutedecine tradition-
nelle lrsquouniteacute cosmique crsquoest-agrave-dire la parenteacute
homme-nature est constamment preacutesente
Lrsquohomme est relieacute au monde mineacuteral veacutegeacutetal
ou animal mais aussi agrave celui des deacutefunts des
esprits et bien-sucircr agrave sa famille agrave son groupe
LE SUIVI DE GROSSESSE DE MME T
Depuis des anneacutees la patiente souffre en plus
de lrsquoinfection par le VIH de troubles du compor-
tement difficiles agrave diagnostiquer elle a un suivi
psychiatrique qui ne suffit pas agrave la soulager
Elle traverse des peacuteriodes drsquoagitation drsquoagres-
siviteacute et mecircme de violence Dans ses crises
elle peut aller jusqursquoagrave lrsquoautomutilation ou la ten-
tative de suicide Agrave drsquoautres moments elle est
totalement abattue leacutethargique Bien qursquoelle
connaisse sa maladie lieacutee au VIH lrsquoobservance
de sa tritheacuterapie est fonction de son eacutetat psy-
chique Elle a beacuteneacuteficieacute agrave plusieurs reprises de
consultations drsquoethnomeacutedecine en particulier
lors de cette derniegravere grossesse Du fait des
mauvais reacutesultats biologiques car elle ne prend
plus ses antireacutetroviraux le risque de contami-
nation megravere-enfant est particuliegraverement eacuteleveacute
Tregraves deacuteprimeacutee elle est transfeacutereacutee dans le ser-
vice de psychiatrie de notre hocircpital et le psy-
chiatre accepte qursquoagrave cocircteacute des traitements clas-
siques (antideacutepresseurs anxiolytiques) elle
fasse les soins traditionnels prescrits Elle a
donc une permission pour aller au marcheacute agrave
cocircteacute de lrsquohocircpital acheter un œuf blanc Elle doit
ensuite mettre cet œuf dans une grosse boicircte
drsquoallumettes exercice un peu difficile car lrsquoœuf
risque de se casser Le tout est mis dans une
calebasse recouverte drsquoun tissu blanc qursquoelle
entrepose sous son lit plus preacuteciseacutement agrave la
tecircte du lit En effet il est important qursquoelle
dorme avec cette calebasse pregraves de sa tecircte
pendant un certain nombre de nuits Puis la ca-
lebasse avec son contenu (lrsquoœuf dans la boicircte)
est remise aux gueacuterisseurs de retour au pays
ils vont effectuer leur travail agrave la termitiegravere sa-
creacutee A son retour en France le Dr Maman
remet un onguent agrave la patiente preacuteparation
faite agrave partir de lrsquoœuf et drsquoautres eacuteleacutements Elle
doit mettre reacuteguliegraverement cette pommade au-
tour de son nombril jusqursquoagrave lrsquoaccouchement
Lrsquoeacutetat psychique de la patiente srsquoameacuteliore elle
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 57
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reprend correctement son traitement lrsquoenfant
naicirct et ne sera pas contamineacute par le VIH Dans
les anneacutees qui suivront son eacutetat psychologique
se deacutegradera agrave nouveau nous nrsquoavons jamais
reacuteussi agrave la stabiliser compleacutetement Nrsquoayant ja-
mais bien suivi sa tritheacuterapie elle deacutecegravede agrave la
suite des complications du sida
A partir de cet exemple nous pouvons voir le
principe de non-seacuteparativiteacute principe essentiel
agrave lrsquoœuvre dans la meacutedecine traditionnelle afri-
caine Nous sommes ici dans un systegraveme de
penseacutee primordiale magique qui fonctionne
par analogie nous sommes dans le non-
seacutepareacute agrave la diffeacuterence de la penseacutee scientifique
qui individualise Dans ce cas clinique on voit
comment tout est relieacute il y a identiteacute entre la
grossesse et lrsquoœuf passage de lrsquohumain agrave
lrsquoanimal et aussi passage drsquoun continent agrave
lrsquoautre les gueacuterisseurs travaillant agrave distance
pour la patiente Citons agrave ce propos Pierre
Lembeye psychiatre et psychanalyste hellip
nous pouvons parler de rsquorsquonon-seacuteparativiteacutersquorsquo de
la meacutedecine traditionnelle par rapport agrave la meacute-
decine occidentale qui privileacutegie le mode seacutepa-
ratif et dont le maicirctre mot est diffeacuterence tandis
que celui des socieacuteteacutes anhistoriques est identi-
teacute La science en particulier la meacutedecine a
fait des progregraves en isolant en seacuteparant Citons
aussi Jean Benoist Lrsquoopposition carteacutesienne
entre le corps et lrsquoacircme a libeacutereacute la biologie et
donc la meacutedecine des interdits qui sacralisent
le corps hellip Lrsquoesprit lrsquoacircme tout ce qui eacutetait cou-
ramment deacutesigneacute par ces termes srsquoest prodi-
gieusement eacuteloigneacute de lrsquohorizon meacutedical
(Benoist 1993) A lrsquohocircpital crsquoest bien lrsquoorgane
malade que lrsquoon soigne mais rarement la per-
sonne dans sa globaliteacute et encore moins son
groupe familial Nous pensons analysons sur
le mode seacuteparatif celui de la coupure et selon
Pierre Lembeye La psychanalyse avec lrsquohy-
pothegravese de lrsquoinconscient opegravere aussi une cou-
pure avec le conscient Les lapsus les recircves
sont des manifestations de lrsquoinconscient alors
que dans la tradition africaine il nrsquoy a pas cette
seacuteparation par exemple chez les Ashantis au
Ghana si un homme recircve qursquoil couche avec sa
voisine il est puni et sa voisine aussi De
mecircme la psychiatrie pense aussi les probleacutema-
tiques sur le mode de la coupure le terme
schizophreacutenie provient de schizo du grec
schizein signifiant fractionnement fissure divi-
sion (P Lembeye) Dans les traitements tradi-
tionnels crsquoest la question du lien qui est au pre-
mier plan Nous avons lrsquoexemple de ce beacutebeacute
acircgeacute de huit mois enfant-cordon preacutesentant
des troubles du comportement et dont le traite-
ment est deacutecrit par Eacuteric de Rosny hellip le cor-
don ombilical le retenant aux entrailles de
lrsquoautre monde nrsquoaurait pas eacuteteacute coupeacute hellip Il srsquoagit
de lui crever les yeux crsquoest-agrave-dire de lui
rendre invisible le monde des Ancecirctreshellip (De
Rosny 1996 123-133)
La penseacutee magique qui est agrave lrsquoœuvre dans les
theacuterapies traditionnelles a-t-elle deacuteserteacute notre
systegraveme de penseacutee occidentale Dominique
Folscheid professeur de philosophie nous rap-
pelle ceci Notre meacutedecine moderniste est
due agrave lrsquoessor de la rationaliteacute mais on a oublieacute
que dans la Gregravece Antique la rationaliteacute deacutebu-
tante (avec les philosophes) srsquoaccompagnait
drsquoune vie mystique florissante Rappelons le
serment drsquoHippocrate premier code de deacuteonto-
logie meacutedical Je jure par Apollon meacutedecin
par Esculape par Hygeacutee et Panaceacutee par tous
les dieux et toutes les deacuteesseshellip Dans son
livre La nuit les Yeux ouverts Eacuteric de Rosny
cite Pierre Fegravevre Ce monde de la gueacuterison et
de la sorcellerie a quelque chose drsquounheimlich
(agrave la fois lsquolsquomysteacuterieuxrsquorsquo et lsquolsquoinquieacutetantrsquorsquo) et pour-
tant il eacuteveille des reacutesonances au plus profond
de nous-mecircmes et lrsquoon ne sait pas les-
quelles (de Rosny 1996 17) Nous-mecircmes
sans en avoir veacuteritablement conscience fonc-
tionnons sur le mode du lien du non-seacutepareacute
par exemple Reneacute Spitz psychiatre et psycha-
nalyste a deacutecrit en 1946 lrsquohospitalisme alteacutera-
tion physique grave srsquoinstallant chez le tregraves
jeune enfant placeacute en institution et seacutepareacute de
sa megravere crsquoest pourquoi aujourdrsquohui en peacutediatrie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 58
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
on facilite la preacutesence de la megravere qui peut dor-
mir au chevet de son enfant un autre
exemple celui du syndrome de glissement des
personnes acircgeacutees hospitaliseacutees qui coupeacutees de
leur environnement habituel se laissent mourir
et dans un autre registre que dire de lrsquoabsence
de chambre ndeg13 dans nos hocircpitaux nos hocirc-
tels
4 FORMATION MUTUELLE PARTAGE DE SAVOIR
Un eacutechange des savoirs srsquoest instaureacute entre les
soignants de lrsquohocircpital et lrsquoassociation
1 au niveau de lrsquoassociation les membres
drsquoURACA sont formeacutes agrave la pathologie du sida
les meacutedecins apportent leur connaissance meacute-
dicale avec des mises agrave jour sur lrsquoeacutevolution de
la pathologie et des traitements Des reacuteunions
agrave thegraveme sont organiseacutees avec un eacutelargisse-
ment agrave drsquoautres pathologies (heacutepatites dreacutepa-
nocytose)
2 au niveau des soignants formation en situa-
tion clinique participation au cycle annuel de
confeacuterences drsquoUraca voyages drsquoeacutetude dans le
village du Dr Maman au Nord-Beacutenin effectueacutes
par des meacutedecins psychiatres psychologues
assistante sociale infirmiegraveres de lrsquoAP-HP
(participation agrave des theacuterapies traditionnelles
dont le culte de danses de possession expeacute-
rience drsquoune certaine situation migratoire vil-
lage dans la brousse repegraveres diffeacuterents cadre
culturel autre adaptation au climat agrave la nourri-
turehellip)
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La nuit les yeux ouverts eacuted Seuil 1996
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tion drsquoE de Rosny eacuted Karthala 2006
LrsquoAfrique de lrsquooraliteacute et lrsquoaccueil de lrsquoEacutecriture
Paris Revue Christus ndeg225 2010
Collectif
La notion de personne en Afrique Noire Ed
LHarmattan 1973
Soins et cultures 2egravemes
Rencontres Transcul-
turelles de Tenon-Uraca Les Cahiers de
lrsquoURACA ndeg12 juin 2005 (teacuteleacutechargeable sur le
site wwwuracaorg)
Pratiques theacuterapeutiques et cultures regards
croiseacutes 3egravemes
Rencontres Transculturelles de
Tenon-Uraca 2010 videacuteos de la journeacutee en
ligne sur wwwuracaorg)
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 60
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune
pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute
L e propos de cette preacutesentation sera de
teacutemoigner de leacutevolution drsquoune pratique
de psychologue au sein dun pocircle de peacute-
diatrie bien speacutecifique celui de lrsquoHocircpital Ray-
mond Poincareacute de Garches Laccueil denfants
en deacutecompensation neuro respiratoire souf-
frant de polyhandicap de maladies chroniques
ou arrivant suite agrave un eacuteveacutenement traumatique
brutal (accident intoxication insuffisance respi-
ratoire) rend la preacutesence du psychologue neacute-
cessaire
Avec Jean en phase terminale nous reacutefleacutechi-
rons au rocircle du psychologue dans lrsquoaccom-
pagnement des enfants en fin de vie
Dautres cas cliniques preacutesenteacutes agrave loral illus-
treront ensuite les modaliteacutes de la prise en
charge post-traumatique denfants et de
leurs familles
Enfin nous terminerons par exposer la speacutecifi-
citeacute de notre travail aupregraves des soignants
ACCOMPAGNER DES ENFANTS GRAVEMENT MA-
LADES OU EN FIN DE VIE
Lors de notre premiegravere rencontre Jean nous
dit Je sais que je vais mourir mais les meacutede-
cins sont trop lacircches pour me le dire et mes
parents sont trop tristes pour mrsquoen parler
Nous lui reacutepondons Je ne te connais pas
mais en tout cas je trouve que cest super que
tu puisses en parler et que tu ne gardes pas
tout ccedila pour toi
Tregraves eacutetonneacute il reprend Alors lagrave crsquoest bizarre
drsquohabitude degraves que je dis que je vais mourir
tout le monde me dit rdquoMais arrecircte Nrsquoimporte
quoi Ne raconte pas des becirctisesrdquo Mais moi je
ne suis pas fou je sais ce que je dis et pour-
quoi je le dis et je veux pouvoir en parler
La question redoutable est tregraves vite apparue
Est-ce que crsquoest vrai que je vais mourir Il
faut alors pouvoir reacutepondre Je pense que si
tu dis ccedila crsquoest que tu as de bonnes raisons de
le penserhellip Tu es le seul agrave savoir exactement
ce que tu vis Raconte-moi qursquoest-ce qui te fait
dire ccedila
Jour apregraves jour gracircce agrave un travail psycholo-
gique Jean exprime de plus en plus sa souf-
france Se sentant eacutecouteacute il entre progressive-
ment dans une autre phase celle de lrsquoaccepta-
tion
Accompagner un enfant en fin de vie crsquoest
avant tout rester agrave son eacutecoute affronter les
questions qui mettent si mal agrave lrsquoaise (mecircme si
et surtout si on ne sait pas comment y reacute-
pondre ) Et crsquoest aussi accueillir ses interroga-
tions sur sa propre mort pour lutter contre la
solitude la peur lrsquoangoisse la colegravere
ACCOMPAGNER LES FAMILLES
Avec la megravere de Jean nous deacutecouvrons ce qui
se joue autour de la porte Degraves que nous nous
preacutesentons elle nous reacutepond Merci on nrsquoa
besoin de rien (Puis sortant de la
chambre) mais surtout vous ne lui dites pas
qursquoil va mourir vous ne lui parlerez de rien -
Oh moi non mais lui il en parle beaucoup
Tregraves surprise la megravere accepte alors de venir
en parler dans notre bureauhellip Lrsquoaccompagne-
ment commence
En phase terminale Jean perd toute autonomie
motrice et tous ses sens agrave lrsquoexception de la
vue Il ne peut plus parler Sa megravere terroriseacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 61
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
par la situation demande aux eacutequipes de lui
donner quelque chose pour dormir deacutefiniti-
vement Nous lui montrons alors qursquoune com-
munication subsiste gracircce agrave lrsquoinstauration drsquoun
code (lettres sur un tableau) avec des signes
de tecircte et des clignements drsquoœil Elle srsquoaperccediloit
alors que Jean cherche avant tout agrave savourer
les petits bonheurs de chaque jour Elle reste
ainsi jusquau bout en lien avec son fils
Accompagner les parents cest accueillir
leur eacutepuisement leurs doutes leur ambiva-
lence parfois mecircme leur demande deuthana-
sie et leur redonner une image positive deux-
mecircmes pour leur permettre drsquoinvestir lrsquoinstant
preacutesent et ainsi favoriser un accompagnement
de qualiteacute
ACCOMPAGNER AUSSI LES AUTRES ENFANTS HOS-
PITALISEacuteS ET LEURS FAMILLES
Il nous semble important de susciter des
occasions drsquoaborder le sujet de la mort en lais-
sant les familles libres de saisir ou non ces op-
portuniteacutes
ACCOMPAGNER LES SOIGNANTS
DANS LIMMEacuteDIATETEacute DE LA REacuteALITEacute CLINIQUE
En deacutecalage les eacutequipes srsquointerrogent
Doit-on vraiment lui infliger ccedila jusqursquoau bout
Sa megravere a peut-ecirctre raison on devrait peut-
ecirctre lrsquoendormir pour qursquoil ne se sente pas humi-
lieacute drsquoecirctre si diminueacute Moi je ne supporterais
pashellip Les soignants sont alors tellement preacute-
occupeacutes par la deacutecision qursquoils pensent devoir
prendre qursquoils ne se rendent pas compte que
cette megravere est en train de vivre lrsquoun des plus
grands moments drsquoamour avec son fils Le psy-
chologue devient alors le lien entre les diffeacute-
rents protagonistes en rapportant certains des
propos de Jean Je suis bienhellip Comme ce
rayon de soleil est beau aujourdrsquohuihellip La
communication se remet agrave fonctionner Leurs
regards se posent alors diffeacuteremment sur lui
La peacuteriode de fin de vie drsquoun patient con-
fronte chaque soignant agrave ses limites Chacun
perd ses illusions de toute-puissance et se re-
trouve confronteacute agrave sa propre angoisse de mort
Certains deacutestabiliseacutes ne peuvent pas suppor-
ter lideacutee decirctre confronteacute agrave la proximiteacute de la
mort Pour surmonter sans trop de seacutequelles
la confrontation reacutepeacuteteacutee agrave la maladie grave et agrave
la mort il est neacutecessaire que chacun puisse
ecirctre attentif agrave soi-mecircme agrave ses propres be-
soins pour ecirctre dans un juste rapport agrave lrsquoautre
Il sagit decirctre toucheacute sans ecirctre impliqueacute affecti-
vement cest agrave dire sans tomber dans leacutemotivi-
teacute
Apregraves chaque deacutecegraves le psychologue est
lagrave pour inviter ceux qui le deacutesirent agrave mettre en
mots ce qui a eacuteteacute veacutecu La parole partageacutee per-
met de ne pas fixer des souvenirs culpabili-
sants ou anxiogegravenes
AU LONG COURS LE TRAVAIL INSTITUTIONNEL
Le soutien des eacutequipes pluridisciplinaires
est une part tregraves importante du travail du psy-
chologue en milieu hospitalier Lrsquoeacutecoute et les
eacutechanges contribuent agrave ce que tregraves lentement
les habitudes et les mentaliteacutes eacutevoluent Ces
rencontres pourront selon les situations avoir
lieu de faccedilon formelle ou informelle (le plus
souvent dans les couloirs)
Le soutien au long cours des eacutequipes fait par-
tie inteacutegrante du travail institutionnel Diffeacuterents
outils permettent de lrsquoaccompagner au mieux
LA REacuteUNION DE SYNTHEgraveSE
Dans notre service la reacuteunion de syn-
thegravese hebdomadaire permet de se poser pour
reacutefleacutechir en eacutequipe pluridisciplinaire agrave ce que
nous vivons Il est primordial drsquoaider chaque
intervenant agrave mettre des mots sur les situations
rencontreacutees surtout quand les points de vue
sont divergents Mais il srsquoagit drsquoun travail de
longue haleine car si nous nrsquoy sommes pas
vigilants les discussions restent tregraves meacutedicales
et eacutevitent drsquoaborder lrsquoenfant et sa famille dans
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 62
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
leur globaliteacute Le psychologue par sa faccedilon de
relever les paradoxes de poser les questions
eacutethiques ou simplement de faire entendre une
autre approche que celle purement somatique
aide les eacutequipes agrave reacutefleacutechir agrave leur maniegravere
drsquoaborder les familles
LA SYNTHEgraveSE DES SYNTHEgraveSES
Une fois par an nous prenons le temps
de relire les moments forts de lrsquoanneacutee en met-
tant des mots sur ce qui a reacuteussi ou eacutechoueacute ce
qui nous a manqueacute ce qui nous a marqueacute
choqueacute ou qui est resteacute incompris Mettre des
mots agrave distance sur des malentendus (en lien
avec une famille ou un fonctionnement interne)
permet davancer en eacutequipe Nous veillons
aussi agrave reprendre point par point les eacuteleacutements
positifs rappeler les enfants sauveacutes les fa-
milles qui remercient et valoriser les eacutequipes
est essentiel pour maintenir la motivation et
lrsquoinvestissement de chacun
ET LE PSYCHOLOGUE DANS TOUT CcedilA
Face agrave ces enfants gravement malades ou en
fin de vie nous devons apprendre agrave nous
adapter Il nous faut par exemple pour pouvoir
accueillir un enfant sans aucune autonomie
respiratoire dans notre bureau apprendre au
minimum les gestes de reacuteanimation agrave effectuer
en attendant qursquoun soignant prenne la relegraveve
Alors que nous avons appris agrave ne pas toucher
il nous faut comprendre ce que le patient nous
dit non plus agrave travers des mots mais agrave travers
des maux agrave travers son corps une poigneacutee
de main un regard une mimiquehellip nous de-
vons sentir lrsquoexpression non verbale de lrsquoan-
goisse Deacuteceler si le patient a besoin de silence
ou au contraire srsquoil attend nos questions En-
fin il faut quelquefois avec une extrecircme deacuteli-
catesse et une grande attention chercher agrave re-
formuler ce que le patient nous dit avec des
lettres montreacutees sur un tableau un hochement
de tecircte ou simplement un regard
Ecirctre psychologue va souvent de pair avec une
invitation permanente agrave se remettre en ques-
tion Il srsquoagit drsquoaccepter de douter plutocirct que de
chercher des certitudes Pour srsquoadapter agrave la
speacutecificiteacute de chaque situation il nous faudra
surtout ecirctre creacuteatif et oser inventer Dans le
cas contraire notre travail restera sans doute
superficiel car il apparaicirctra comme en deacuteca-
lage par rapport aux situations veacutecues par les
patients et les eacutequipes qui les prennent en
charge
Au niveau institutionnel le travail du psycho-
logue ne porte de fruits qursquoagrave tregraves long terme
Alors ne nous deacutecourageons pas (Le deacutecou-
ragement nrsquoest-il pas notre pire ennemi ) Veil-
lons agrave prendre soin de nous soyons attentifs agrave
nos propres besoins Ne nous barricadons pas
devant la deacutetresse mais au contraire appre-
nons agrave ralentir et agrave ressentir ce qui est toucheacute
en nous Comme leacutequilibriste sur la corde
nous devons essayer davancer en souplesse
pour ne tomber ni dans lindiffeacuterence ni dans la
fusion avec les situations dramatiques rencon-
treacutees
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Geacuteriatrie Hocircpital Eacutemile Roux
M esure 1 du plan Alzheimer 2008-
2012 deacuteveloppement et diversifica-
tion des structures de reacutepits
Parce qursquoils sont contraints de veiller constam-
ment sur les malades les aidants sont soumis
agrave une pression permanente Il existe des struc-
tures qui leur permettent de souffler en offrant
par ailleurs une prestation theacuterapeutique aux
malades pendant une ou plusieurs demi-
journeacutees
Afin drsquoeacutelargir les missions des accueils de jour
qui ne srsquoadressent qursquoaux personnes malades
ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees les plates-formes drsquoac-
compagnement et de reacutepit Il srsquoagit drsquooffrir aux
aidants et aux couples des activiteacutes de soutien
de reacutepit agrave domicile ou en couple et de deacutevelop-
pement de la vie sociale
Il existe des actions de reacutepit agrave domicile de
garde agrave domicile de nuit drsquoactiviteacutes sociales
culturelles pour le couple maladeaidant et de
seacutejours vacances
Jacqueline agrave la fin drsquoun seacutejour vacances mrsquoa
confieacute deux feuilles de cahier manuscrites Jrsquoai
eacutecrit ccedila Vous le lirez si vous voulez
Je me legraveve agrave 7h Prise des meacutedicaments de
Guy Je deacutejeune moment tranquille je fais ma
toilette Je vais ouvrir les volets chez maman Il
est 8h30 Je preacutepare les meacutedicaments et le pe-
tit deacutejeuner de Guy Quelques fois je le fais
manger si je peux Je fais les lits je com-
mence agrave preacuteparer le deacutejeuner Passage du
SSIAD Pendant ce temps je preacutepare une les-
sive pratiquement une tous les jours Apregraves le
passage du SSIAD souvent il a besoin drsquoaller
aux toilettes le deacuteculotter nettoyer les WC le
reculotter ranger la salle de bain et finir ce qui
a eacuteteacute commenceacute (je ne peux rien faire en sui-
vant) Souvent fais de lrsquoadministratif preacuteparer
le courrier aller agrave la poste et au pain Il vient
avec moi il faut lrsquoaider agrave monter dans la voiture
et souvent lrsquoaider agrave descendre Il est 11h il faut
eacutetendre le linge lrsquoaider agrave faire sa gym preacuteparer
et porter le plateau agrave maman Midi Lrsquoheure de
preacuteparer et donner les meacutedicaments Mettre le
couvert couper les aliments lrsquoaider Pour lui il
faut bien 90 min de pose pour deacutejeuner
Apregraves desservir le preacuteparer pour la sieste le
deacuteculotter et reculotter lrsquoaider agrave se coucher
finir de ranger la cuisine lever et plier le linge
Il est environ 14h Petite pause 15h-15h30 la
sieste est finie Sortie dans le jardin toujours
accompagneacute Lrsquoaider agrave srsquohabiller agrave se deacutesha-
biller 16h prise des meacutedicaments et goucircter
Quelquefois passages agrave la sortie de lrsquoeacutecole
des petits enfants et leur papa Aux beaux
jours travail agrave lrsquoexteacuterieur (plus de 2000m2) La
tonte du gazon est faite par mon garccedilon et jrsquoai
agrave peu pregraves 40h par an par la caisse de retraite
compleacutementaire Jrsquoai une aide-meacutenagegravere 3 h
le mardi matin et 1 h le mercredi matin Jrsquoen
profite pour aller faire les courses ou aller chez
le docteur le dentiste ou le coiffeur ou autre
chose Et 3h le jeudi apregraves-midi Lagrave crsquoest mon
repos hebdomadaire et pas toujours Je vais agrave
lrsquoaquagym avec 2 amies mais juste en peacuteriode
scolaire On est loin des 2 jours de congeacutes par
semaine mais jrsquoen demande pas tant Vers 17h
-17h30 petite promenade dans le jardin apregraves
preacuteparation du dicircner 19h prise des meacutedica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 64
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
ments Le dicircner pour lui il faut compter 90 min
Ensuite desservir Vers 20h30 je vais deacuteshabil-
ler maman Pour lrsquoinstant elle se couche sans
aide mais au deacutebut du printemps jrsquoallais la cou-
cher vers 22h Entre-temps je deacuteshabille Guy
passage aux toilettes prise des meacutedicaments
et apregraves le coucher
Il est 22h Je respire un peu Je fais un brin de
toilette Je prends mon somnifegravere et je me
couche Je mrsquoendors ou je ne mrsquoendors pas Lagrave
on peut pleurer Personne ne le voit Dans la
nuit je me legraveve une ou deux fois quand il a be-
soin de faire son pipi
Et cela 365 jours par an Et je ne me plains
pas Il y a pire Il y a aussi mieux
Jacqueline est comme 35 millions de fran-
ccedilais Elle fait partie des personnes que lrsquoon
nomme aidant familial drsquoun proche Il srsquoagit de
son mari Cela fait 12 ans qursquoil est malade Le
quotidien de Jacqueline est rythmeacute autour de
son eacutepoux et de sa pathologie eacutevolutive
En geacuterontologie le mot aidant est utiliseacute voire
parfois revendiqueacute Un aidant mais qursquoest-ce
que crsquoest Selon lrsquoassurance maladie crsquoest
celui qui apporte seul ou en compleacutement de
lrsquointervention des professionnels lrsquoaide humaine
rendue neacutecessaire par la perte drsquoautonomie de
la personne acircgeacutee ou destineacutee agrave preacutevenir une
perte drsquoautonomie et qui nrsquoest pas salarieacute pour
cette aide
Depuis une quinzaine drsquoanneacutees le veacutecu des
aidants familiaux fait lrsquoobjet de recherches On
sait aujourdrsquohui que 800 000 personnes sont
recenseacutees comme eacutetant en eacutetat de deacutepen-
dance en France crsquoest-agrave-dire qursquoelles ne peu-
vent pas effectuer de maniegravere autonome les
actes de la vie courante Et que cela est forte-
ment correacuteleacute agrave lrsquoavanceacutee en acircge la personne
aideacutee a 76 ans en moyenne
Si le lien familial preacutedomine lrsquoaidant peut aussi
ecirctre un ami ou un voisin Il srsquoagit le plus sou-
vent drsquoune femme acircgeacutee de plus de 50 ans
Bien que deux tiers des aidants srsquooccupent
quotidiennement de la personne aideacutee 60
drsquoentre eux continuent agrave avoir une activiteacute sala-
rieacutee
Lrsquoaide agrave un proche dure en moyenne 7 ans
Dans la relation drsquoaide plusieurs probleacutema-
tiques sont en jeu le deuil du parent conjoint
tel qursquoil eacutetait auparavant le renversement des
rocircles de lrsquoordre des geacuteneacuterations la crainte face
agrave son propre vieillissement les difficulteacutes de
communication avec le proche malade la
crainte de la perte du lien
La relation drsquoaide a ses apports la majoriteacute
des aidants disent se sentir utile et trouver du
plaisir dans cette relation Mais elle a aussi ses
limites et ses risques On sait aujourdrsquohui que
la mortaliteacute des aidants augmenterait de 63
que le risque de deacutepression est multiplieacute par 3
Dans cette aide au quotidien le rythme la reacute-
peacutetition lrsquoeacutevolution de la maladie peuvent ame-
ner agrave des sentiments drsquoisolement de surme-
nage et drsquoeacutepuisement
Si plus de 60 des personnes atteintes de la
maladie drsquoAlzheimer ou apparenteacutees vivent agrave
leur domicile crsquoest gracircce agrave un aidant familial
qui toute la journeacutee est dans le faire Lrsquoaidant
familial contrairement agrave lrsquoaidant professionnel
nrsquoest pas formeacute agrave cet accompagnement il base
sa relation agrave partir drsquoun lien affectif avec la per-
sonne qursquoil aide Il peut ecirctre reacutemuneacutereacute sil a
lrsquoacircge de travailler et qursquoil nrsquoest pas son conjoint
Il nrsquoa pas drsquoheures fixes
On peut donc comprendre le besoin parfois de
se poser un peu
Plutocirct que le mot vacances est apparu reacute-
cemment le mot reacutepit
Des seacutejours de reacutepit pour les aidants
Une expression forte qui vient nommer la souf-
france du proche dans la relation drsquoaide
Agrave croire que la personne dite aideacutee nrsquoa elle
pas besoin de temps de pause et que son quo-
tidien lui suffit parfaitement La femme de
Pierre me dira mon meacutedecin et son neuro-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 65
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
logue mrsquoavaient deacuteconseilleacute de lrsquoemmener ici
En France les vacances sont un droit pour les
salarieacuteshellip
Mais au fait agrave quoi ccedila sert des vacances Eh
bien avant tout agrave couper avec le quotidien An-
dreacute Comte-Sponville eacutevoque les vacances
comme un moment de liberteacute
Srsquoaccorder une pause crsquoest ainsi que nous
avons nommeacute le seacutejour de vacances que je
vais vous preacutesenter
Le seacutejour est proposeacute par une caisse de re-
traite compleacutementaire qui contacte ses adheacute-
rents Le point commun est qursquoil existe entre un
adheacuterent et un de ses proches une relation
drsquoaide au quotidien Le projet a eacuteteacute construit et
penseacute avec une association qui intervient dans
lrsquoaccompagnement de lrsquoavanceacutee en Acircge
Le groupe est composeacute en moyenne de 7
couples la moyenne drsquoacircge des aidants est de
74 ans et celle des aideacutes de 80 ans
Les participants viennent de la France entiegravere
Ils ne se connaissent pas Nous ne les con-
naissons pas
La majoriteacute des aideacutes preacutesentent des pro-
blegravemes cognitifs ou des difficulteacutes motrices
Le lieu est une structure de vacances (type reacute-
sidence hocircteliegravere) adapteacutee aux personnes han-
dicapeacutees
Le seacutejour a eacuteteacute penseacute avec la preacutesence de
deux personnes dite en fil rouge de la se-
maine la coordonnatrice de lrsquoassociation creacutea-
trice du projet et la psychologue Partager le
quotidien du petit deacutejeuner au dicircner de lrsquoac-
cueil jusqursquoau deacutepart
Drsquoautres intervenants (intervenant en Taiuml-Chi
Chuan une socio-estheacuteticienne intervenant en
chant et expression corporelle activiteacute autour
de la terre) rejoignent le groupe en deacutecaleacute afin
de conserver une alternance des pratiques
mais aussi une preacutesence renforceacutee en milieu
de semaine moment ougrave nous pouvons com-
mencer agrave seacuteparer les duos
Lrsquoaspect meacutedicaliseacute parfois neacutecessaire est re-
layeacute par des infirmiegraveres libeacuterales qui intervien-
nent sur le lieu de vacances
Le planning de la semaine est proposeacute avec
des activiteacutes ensemble seacutepareacutees en groupe
individuelles toujours dans la proposition et
non dans la contrainte Le rythme des journeacutees
srsquoadapte tous les jours
Les objectifs de la semaine
Permettre agrave chacun aidant comme aideacute de
srsquoaccorder veacuteritablement une pause en profi-
tant pleinement du site et drsquoun accompagne-
ment qui facilite leur quotidien pendant la se-
maine (absence de tacircches meacutenagegraveres repas
servis au restaurant possibiliteacute drsquoaccompagne-
ment de la personne aideacutee pour quelques
heures proposition drsquoanimations proposition
de temps dlsquoeacutechanges et de paroles)
Favoriser lrsquoacquisition et le partage drsquooutils mecirc-
lant expeacuteriences et connaissances que les per-
sonnes pourront reacuteutiliser une fois de retour au
domicile
Nous ne nommons pas les personnes par leur
fonction aidant ou aideacute mais par leur preacutenom
Chaque duo est composeacute drsquoune personne
ayant un badge vert et lrsquoautre saumon Ainsi
certaines activiteacutes sont proposeacutees agrave tous et
drsquoautres agrave chaque groupe de couleur diffeacuterente
Lrsquoanalyse des questionnaires de satisfaction ou
du bilan oral nous confortent encore dans lrsquoideacutee
que ces objectifs reacutepondent bien agrave ceux des
personnes et sont atteignables dans le cadre
de ces seacutejours
Crsquoest lrsquooccasion de partager une semaine de
vacances tout agrave fait diffeacuterente du quotidien et
des repegraveres de chacun Le groupe se creacutee degraves
les premiegraveres heures de rencontre agrave lrsquoarriveacutee
Tout au long de la semaine chacun eacutevolue
dans sa propre probleacutematique
Les aidants deacutecouvrant drsquoautres pairs eacutechan-
geant avec drsquoautres prenant distance vis agrave vis
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 66
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
de leur veacutecu et deacutecouvrant le comportement de
leur proche avec drsquoautres personnes profes-
sionnels ou non
Les aideacutes qui se sont saisis des possibiliteacutes
offertes de faire autrement deacutecouvrir drsquoautres
vivre des moments de plaisir malgreacute le handi-
cap ou la maladie Eacutechanger avec drsquoautres qui
vivent des situations similaires
Lrsquoeacutevolution du groupe dans lequel une con-
fiance mutuelle srsquoinstalle et permet des interac-
tions et des eacutechanges tregraves riches humaine-
ment Chacun a pu recevoir et apporter agrave
lrsquoautre qursquoil soit aideacute ou aidant
Durant tout le seacutejour tout le monde peut se po-
ser deacutecouvrir lrsquoautre se deacutecouvrir dans des
moments partageacutes individuels ou collectifs
Proposer plein drsquounivers diffeacuterents des compeacute-
tences diffeacuterentes (prof de tai-chi le corps
penseacute le chant le savoir de lrsquoeacutemotion la socio-
estheacuteticienne le mieux avec soi-mecircme)hellip
Et le psychologue dans tout ccedila
Dans ce type de vacances jrsquointerviens en bi-
nocircme avec la responsable du seacutejour du deacutebut
du seacutejour jusqursquoau deacutepart des participants
Je me preacutesente en tant que psychologue Pour
la plupart crsquoest la premiegravere fois qursquoils rencon-
trent quelqursquoun de cette profession Vous allez
mrsquoanalyser me demande Jacques au deacutebut
du seacutejour Finalement vous ecirctes sympas les
psys Vous croyez qursquoil en y en pregraves de chez
moi me demandera-t-il en fin de seacutejour
Je suis tout le temps avec eux du soir au ma-
tin Pas tregraves acadeacutemique comme cadre de tra-
vail et pourtant comme souvent la clinique
vient nous proposer de penser autrement
Le rocircle essentiel du psychologue est que du
deacutebut agrave la fin du seacutejour il propose ce que je
nomme des bras psychiques Les 4 bras les
bras du cadre formel et les bras psychiques Fil
rouge tout le long du seacutejour Crsquoest par ce cadre
-lagrave que chacun va pouvoir se deacutetendre libeacuterer
la parole Lacirccher le faire du quotidien pour
tendre vers le vivre le ressentir et le partager
durant le seacutejour
Pour le psychologue partager le quotidien (du
petit deacutejeuner au dicircner) crsquoest ne pas ecirctre tout
le temps dans la distance mais ecirctre dans la
juste distance Alterner des moments formels
proposition de groupes de parole durant le seacute-
jour pour les personnes en situations drsquoaider et
celles qui reccediloivent de lrsquoaide) et de temps infor-
mels Crsquoest ecirctre disponible Crsquoest garantir lrsquoexis-
tence du maintien de la vie psychique et recon-
naicirctre la personne en tant que sujet pensant
ressentant deacutesirant
Tisser des liens Lacirccher le bras de son malade
changer de bras Faire confiance agrave lrsquoautre et
deacutecouvrir ainsi que lrsquoon peut soutenir lrsquoautre
dans ce qursquoil est capable de donner Faire con-
fiance est possible si le cadre est suffisamment
contenant pour se lrsquoautoriser
Deacutecloisonner les rocircles et les fonctions de cha-
cun Les cloisons tombent Le fil qui nous tient
et nous unit dans le lien agrave lrsquoautre reste Prendre
soin de soi
Exemple du massage des mains avec la socio-
estheacuteticienne En groupe de parole eacutemerge
alors que les mains ne servent pas qursquoagrave se te-
nir ou tenir lrsquoautre les mains se croisent dans
le relationnel et la communication Ne plus ecirctre
dans le soigner la maladie mais dans le pren-
dre soin de ce qui nous lie agrave lrsquoautre
Accompagner lrsquoaidant agrave cheminer vers le si
moi je vais mieux alors lui ira peut ecirctre mieux
au lieu de si il va bien je vais bien
Durant le seacutejour je prends des notes tous les
soirs sur chaque participant Notes drsquoimpres-
sion de ressenti et de questions qui me per-
mettent de comprendre lrsquoeacutevolution psycho-
dynamique de chacun et de chaque duo
Deux fois en moyenne durant le seacutejour jrsquoap-
pelle une collegravegue afin de pouvoir parler pen-
ser et eacutelaborer le veacutecu partageacute
Je propose un moment de reacuteflexion sur la rela-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 67
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
tion drsquoaide avec les aidants Je propose un
temps de parole et drsquoeacutechange sur le veacutecu de
lrsquoaideacute
Lors du bilan le rocircle de la psychologue est tou-
jours valoriseacute Non confondu avec les temps
drsquoanimation crsquoest un espace drsquoeacutechange de soi
et de lrsquointime qui est possible parce qursquoun lien
de confiance dans le quotidien srsquoest creacuteeacute Nous
partageons nos savoirs ceux de ma connais-
sance avec ceux de leur expeacuterience Jrsquoai deacute-
couvert ce que crsquoest une psy Ce nest pas si
grave ccedila srsquoavegravere mecircme plutocirct utile
Ces seacutejours sont lrsquooccasion aussi pour les pro-
fessionnels intervenants drsquoenrichir leurs con-
naissances et leurs pratiques vis-agrave-vis de ce
qursquoest la relation aidant-aideacute en partageant leur
quotidien pendant quelques jours
Comprendre le lien aidantaideacute dans ce qui se
joue au quotidien au plus intime au plus pro-
fond
Le seacutejour ne dure qursquoune semaine Cette se-
maine est en dehors du quotidien de chacun
Elle montre que de vivre eacutechanger rire parta-
ger du plaisir avec drsquoautres est possible et es-
sentiel Elle permet ainsi aux couples ou duos
de se ressourcer et de repeacuterer les plaisirs qui
fondent et nourrissent leur relation partageacutee
Merci de votre attention
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 68
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Hocircpital Saint Louis
gt Laccompagnement psychologique par teacuteleacute-
phone dans les maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere Page 69
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale de
grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Hocircpital Jean Verdier Page 78
gt Psychologue clinicien aupregraves du personnel
missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
Page 82
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 69
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les
maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere
L a Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des
Maladies de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) a
eacuteteacute creacuteeacutee en 2001 par le Ministegravere des
Solidariteacutes de la Santeacute et de la Famille A la
disposition du grand public et des profession-
nels de terrain elle a pour mission lrsquoaide au
diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale so-
ciale et psychologique des patients et de leur
famille
La Cellule est nicheacutee au cœur de lrsquohocircpital de la
Pitieacute-Salpecirctriegravere dans lrsquoune des trois loges au-
trefois destineacutees aux alieacuteneacutes Elle a la particu-
lariteacute de ne pas accueillir physiquement le pu-
blic auquel elle srsquoadresse lrsquoaide qursquoelle pro-
pose srsquoeffectue essentiellement par teacuteleacutephone
En juin 2003 jrsquointegravegre pour un tiers-temps de
psychologue lrsquoeacutequipe deacutejagrave composeacutee drsquoun meacute-
decin coordinateur drsquoun meacutedecin attacheacute
drsquoune assistante sociale drsquoune assistante de
recherche clinique et drsquoune secreacutetaire
A cette eacutepoque je treacutebuche agrave lrsquoenvi sur lrsquoimpro-
nonccedilable Creutzfeldt-Jakob et examine drsquoun
œil dubitatif ma fiche de poste comment assu-
rer un soutien psychologique exclusivement
teacuteleacutephonique Eacutetait-ce reacutealisable efficace ad-
missible
PREacuteAMBULE
Les Maladies de Creutzfeldt-Jakob sont con-
nues de longue date les premiers cas ont eacuteteacute
deacutecrits par Creutzfeldt et Jakob dans les an-
neacutees 1920 Ce sont des maladies neurodeacutegeacute-
neacuteratives rares (qui se traduisent par une deacute-
mence et une grabatisation) 15 cas par mil-
lion drsquohabitants et par an dans tous les pays ougrave
existe une surveillance eacutepideacutemiologique En
France elles concernent une centaine de cas
par an
Principalement connues du grand public sous
le nom de maladie de la vache folle il existe
pourtant trois formes diffeacuterentes de MCJ avec
pour chacune drsquoelles ses speacutecificiteacutes On les
classe en fonction de leur mode de transmis-
sion la forme sporadique (aleacuteatoire) les
formes heacutereacuteditaires (MCJ geacuteneacutetiques syn-
drome de Gertsmann-Straussler-Scheinker
Insomnie Fatale Familiale) et les formes ac-
quises (formes iatrogegravenes des hormones de
croissance variante de la MCJ)
Le poste de psychologue avait eacuteteacute creacuteeacute pour se
consacrer principalement au travail drsquoeacutecoute
des personnes agrave risque de deacutevelopper une
MCJ suite agrave un traitement par hormones de
croissance contamineacutees Puis il srsquoest eacutetendu agrave
lrsquoeacutecoute de toute personne concerneacutee directe-
ment ou non par une MCJ quelle qursquoen soit la
forme
DE LrsquoENTRETIEN PONCTUEL AU SUIVI
La nature teacuteleacutephonique des entretiens psycho-
logiques est le fait drsquoune indeacutepassable reacutealiteacute
la dimension nationale du champ drsquointervention
de la Cellule exclut lrsquoeacuteventualiteacute drsquoentretiens en
face agrave face Mais si en 2011 les suivis psycho-
logiques par teacuteleacutephone se deacuteveloppent agrave
grands pas en 2003 rien nrsquoeacutetait moins eacutevident
que cette forme drsquoaccompagnement lagrave
Agrave cette eacutepoque drsquoailleurs la prise en charge
psychologique au sein de la Cellule se limitait agrave
la proposition drsquoun entretien teacuteleacutephonique pour
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 70
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
faire le point agrave des personnes qui avaient ap-
peleacute pour une toute autre demande principale-
ment drsquoordre meacutedical ou social Agrave lrsquooccasion de
ces demandes certains appelants manifes-
taient des signes de souffrance lieacutee agrave leur si-
tuation peur de la maladie du risque de la deacute-
velopper anxieacuteteacute suite agrave lrsquoannonce de la mala-
die drsquoun proche imminence de son deacutecegraves etc
Les membres de lrsquoeacutequipe les informaient alors
de la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par la psycho-
logue de la Cellule pour parler des difficulteacutes
qursquoils traversaient en ces moments critiques
Ces entretiens teacuteleacutephoniques ponctuels (de 45
minutes) eacutetaient destineacutes agrave contenir les an-
goisses et la deacutetresse des appelants Puis au
besoin jrsquoorganisais un suivi psychologique de
proximiteacute (psychologues ou psychiatres libeacute-
raux Centres Meacutedico-Psychologiques
(CMP)
Ainsi la proceacutedure entretien ponctuel - reacuteorien-
tation nous semblait reacutepondre au besoin ponc-
tuel drsquoeacutetayage des appelants et correspondre
aux exigences de fonctionnement en plate-
forme nationale de la Cellule Circonscrite pla-
nifieacutee et probablement eacuteconomique sur le plan
psychique cette proceacutedure nous rassurait-elle
aussi Quand bien mecircme elle a plieacute sous le
poids de la reacutealiteacute et a consideacuterablement eacutevo-
lueacute depuis 2003
En effet alors que le nombre annuel de ma-
lades concerneacutes par les MCJ demeure stable
le volume annuel drsquoentretiens psychologiques
lui est passeacute de 40 agrave 260 en huit ans Ainsi
110 personnes ont eacuteteacute suivies ou ont beacuteneacuteficieacute
de seacutequences de soutien de plus de 3 entre-
tiens teacuteleacutephoniques Cela repreacutesente 84 des
personnes ayant eu un premier contact avec le
psychologue Et tandis que la proceacutedure preacute-
voyait un ou deux entretiens la dureacutee des sui-
vis est en moyenne de neuf mois (de trois se-
maines agrave trois ans) drsquoune rythmiciteacute allant drsquoun
entretien hebdomadaire agrave un entretien men-
suel en fonction des besoins Comment expli-
quer cette eacutevolution
Faut-il incriminer les traditionnels obstacles re-
latifs agrave la prise en charge psychologique de
proximiteacute rareteacute des psychologues dans cer-
taines reacutegions surcoucirct financier drsquoune theacuterapie
CMP engorgeacuteshellip Peut-ecirctre mais ils ne suf-
fisent pas agrave expliquer lrsquoaugmentation remar-
quable du nombre drsquoentretiens psychologiques
ni lrsquoallongement de la dureacutee des suivis
Aujourdrsquohui nous pouvons avancer drsquoautres
arguments pour expliquer cette eacutevolution ce
sont les particulariteacutes de la maladie tout autant
que celles lieacutees agrave la teacuteleacutephonie qui ont engen-
dreacute ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique
LE CADRE
Un constat les orientations pourtant
travailleacutees (contact teacuteleacutephonique avec le psy-
chologue de proximiteacute informations deacutetailleacutees
sur les speacutecificiteacutes de la maladie et leur impact
sur lrsquoentourage) nrsquoont qursquoexceptionnellement
abouti les patients demandaient agrave reprendre
contact avec la psychologue de la Cellule Par-
tant de ce constat le dispositif drsquoaide psycholo-
gique proposeacute par le psychologue aux per-
sonnes qui appelaient a rapidement eacutevolueacute
Les quelques hypothegraveses concernant la difficul-
teacute du recours agrave la proximiteacute seront abordeacutees
tout au long de cet article
Agrave lrsquoheure actuelle quelle que soit la forme de
MCJ lrsquoappelant contacte la Cellule pour une
demande drsquoaide principalement drsquoordre meacutedi-
cal Les deux meacutedecins nrsquoeacutetant pas preacutesents agrave
la Cellule en permanence crsquoest la secreacutetaire
qui recueille les attentes Elle preacutesente le fonc-
tionnement global de la Cellule et eacutevoque sys-
teacutematiquement la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par
la psychologue Lorsqursquoelle ressent particuliegrave-
rement intenseacutement la deacutetresse de lrsquoappelant
elle insiste sur lrsquoimportance drsquoun entretien avec
la psychologue qui connaicirct tregraves bien la mala-
die un argument de poids pour les personnes
deacutesempareacutees qui heacutesitent pourtant agrave demander
de lrsquoaide
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 71
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Rares sont ceux qui demandent spontaneacutement
un entretien psychologique Mais rares sont
ceux qui le refusent lorsqursquoil leur est proposeacute
Cette invitation agrave ecirctre entendu loin de court-
circuiter la deacutelicate question de la demande
theacuterapeutique nous semble plutocirct lui permettre
drsquoadvenir Agrave ce titre nul doute que le deacutevelop-
pement du nombre de suivis psychologiques
reacutealiseacutes agrave la Cellule est en rapport direct avec
les qualiteacutes drsquoaccueil et lrsquoacuiteacute intuitive de sa
secreacutetaire
Ainsi cette derniegravere prend note des disponibili-
teacutes horaires de lrsquoappelant et apregraves avoir re-
cueilli lrsquoaccord preacutealable de ce dernier me les
transmet au plus vite Mon premier appel au
cours duquel nous eacutevoquons la situation de
crise a souvent lieu dans les 48 heures Cette
reacuteactiviteacute de prise de contact est un eacuteleacutement
deacuteterminant dans lrsquoeacutetablissement drsquoun lien de
confiance la premiegravere pierre drsquoun espace con-
tenant
Nous ne reacutealisons pas ou peu drsquoentretiens en
urgence la Cellule ne srsquoapparente pas agrave une
permanence drsquoeacutecoute 24h24 Drsquoailleurs la
simple date de rendez-vous sur mon agenda a
suffit agrave me calmer (hellip) Jrsquoeacutetais compleacutetement
bloqueacutee paniqueacutee et je me suis remise agrave pen-
ser et agrave geacuterer le quotidien que je ne geacuterais
plus
Ce premier entretien a une tonaliteacute toute parti-
culiegravere Agrave lrsquoinverse peut-ecirctre drsquoun premier ren-
dez-vous en face agrave face lrsquoentretien teacuteleacutepho-
nique semble provoquer un relacircchement des
meacutecanismes de deacutefenses et lrsquoeacutemergence des
processus primaires affolement pleurs pen-
seacutees parfois deacutesorganiseacutees coq agrave lrsquoacircne Lrsquoap-
pelant se deacuteverse deacuteballe tout en vrac Un
relacircchement induit drsquoabord par lrsquoabsence
drsquoinformations visuelles cette sorte de veacutecu
drsquoanonymat qui autorise la leveacutee de la cen-
sure Vous ne me voyez pas alors je peux
tout dire sans conseacutequences Pourtant nom
preacutenom situation familiale et localisation geacuteo-
graphique pourraient objectivement freiner le
veacutecu drsquoanonymat Il nrsquoen est rien Ce premier
entretien ndash et les quelques suivants - souli-
gnent ainsi la primauteacute du voir sur le savoir de
lrsquoautre
Un relacircchement doublement favoriseacute par le fait
que lrsquoappelant demeure dans un espace qui lui
est propre familier choisi Je suis dans ma
chambre jrsquoai fermeacute la porte Je me suis ins-
talleacutee dans ma voiture pour notre rendez-vous
ici je suis tranquille et en seacutecuriteacute
Notons que le psychologue nrsquoeacutechappe pas agrave
cet effet de relacircchement calfeutreacute qursquoil est
dans son espace soustrait au poids du regard
de lrsquoautre Un relacircchement du corps qui favo-
rise le flottement neacutecessaire agrave son travail
drsquoeacutecoute des processus inconscients agrave lrsquoœuvre
chez lrsquoappelant
Dans la tregraves grande majoriteacute des cas le pre-
mier appel donne lieu agrave un second rendez-vous
teacuteleacutephonique dont nous convenons ensemble
des termes (date et heure) Le choix de la du-
reacutee des entretiens (toujours de 45 minutes) deacute-
coule certainement de notre pratique de lrsquoentre-
tien en face-agrave-face mais il srsquoest aveacutereacute tout agrave fait
pertinent dans la pratique de lrsquoentretien teacuteleacute-
phonique puisque trois quarts drsquoheure laissent
le temps agrave la personne drsquoeacutelaborer ses ressen-
tis Cette dureacutee nrsquoest pas drsquoembleacutee annonceacutee
mais plutocirct suggeacutereacutee Nous allons en rester lagrave
pour aujourdrsquohui parce qursquoil est lrsquoheurehellip nous
nous retrouvons donc lehellip agravehellip conclut systeacute-
matiquement nos entretiens
Crsquoest freacutequemment au deacutecours du troisiegraveme
entretien que les questions se posent sur la
poursuite et les modaliteacutes de la prise en
charge Vous consultez ougrave Je vous dois
combien Jrsquoai droit agrave combien drsquoentre-
tiens Agrave ces questions la prise en charge
exclusivement teacuteleacutephonique (aucun deacuteplace-
ment) la gratuiteacute (la Cellule prend en charge
tous les entretiens) et la possibiliteacute drsquoecirctre suivi
tant que le besoin srsquoen fait sentir srsquoapparente agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 72
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
un apaisant holding winicottien Dans ma si-
tuation crsquoest incroyable drsquoavoir le droit de se
laisser porterhellip
Les particulariteacutes du dispositif de suivi teacuteleacutepho-
nique semblent ainsi reacutepondre aux exigences
de la reacutealiteacute des appelants La premiegravere drsquoentre
-elles lrsquoabsence de deacuteplacement et la grande
souplesse drsquoorganisation qui en deacutecoule allegravege
consideacuterablement leur quotidien phagocyteacute par
la maladie Une theacuterapie en cabinet aurait eacuteteacute
inconciliable avec notre reacutealiteacutehellip tout autant
qursquoinfiltreacute de sentiments de culpabiliteacute
Comment prendre le temps de me plaindre
alors qursquoelle est en train de mourirhellip Je sais
que crsquoest important de parler mais je nrsquoaurais
pas pris le temps de consulter pour moi tandis
que ce temps est si preacutecieuxhellip je veux le pas-
ser aupregraves drsquoellehellip ccedila me soigne de ne pas
perdre une minute Ainsi pourtant installeacutes
chez eux ils peuvent srsquoabsenter sans culpabili-
teacute excessive Je ne suis pas loin de lui mais je
suis en consultation juste pour moihellip Je suis
seule avec lui
La seconde particulariteacute du suivi psychologique
par teacuteleacutephone compareacute agrave un dispositif theacutera-
peutique classique reacuteside dans le fait que crsquoest
le psychologue qui appelle systeacutematiquement
le patient Au moment ougrave lrsquoeacutetayage social fami-
lial et parfois professionnel se fissure et ougrave la
difficulteacute drsquoappeler agrave lrsquoaide se fait sentir cette
deacutemarche inverseacutee nrsquoest pas deacutenueacutee drsquoeffet
theacuterapeutique Crsquoest toujours nous qui de-
mandons partout de lrsquoaidehellip et lagrave quel repos
que ce soit vous qui veniez jusqursquoagrave moihellip Je
nrsquoaurais pas eu la force de faire une deacutemarche
de plushellip ccedila mrsquoaide agrave continuerhellip
Enfin ajoutons que dans ce temps extra-
ordinaire ougrave tout leur coucircte ougrave crsquoest nous qui
donnons tout de nous tout notre temps toute
notre eacutenergiehellip la gratuiteacute de la prise en
charge est un eacuteleacutement important pour les per-
sonnes qui appellent Cette gratuiteacute de soins
repreacutesentative des modaliteacutes de prises en
charge psychologiques agrave lrsquohocircpital contribue agrave
restaurer leur sentiment drsquoecirctre consideacutereacutees et
reconnues dans leur souffrance On srsquooccupe
aussi de moi
Neacuteanmoins certains appelants qui avaient en-
visageacute de consulter en libeacuteral ainsi precircts agrave de-
mander de lrsquoaide se deacuteplacer et payer leur
seacuteance srsquoeacutetaient vus confronteacutes agrave un autre
obstacle somme-toute infranchissable le ca-
ractegravere indicible du veacutecu des MCJ Comment
parler agrave quelqursquoun qui nrsquoa jamais vu cette mala-
die monstrueuse (hellip) Il faut la voir pour sa-
voirhellip Ici (agrave la Cellule) je suis en seacutecuriteacute vous
savez de quoi je parle sans que jrsquoen parle vrai-
ment (hellip) vous avez les mecircmes images que
moi dans la tecircte Pour ces appelants qui cher-
chent une communauteacute drsquoexpeacuterience le psy-
chologue se doit drsquoecirctre un sujet dont le savoir
nrsquoest pas que supposeacute
SUIVI POUR QUI SUIVI POUR QUOI
Nous distinguons trois cateacutegories drsquoappelants
les personnes malades crsquoest agrave dire symptoma-
tiques leur entourage (conjoints enfants pa-
rents fregraveres et sœurs) et les personnes agrave
risque de deacutevelopper la maladie (drsquoorigine geacute-
neacutetique ou iatrogegravene) Les appels des profes-
sionnels (assez rares) ne seront pas traiteacutes
dans cet article
En huit ans seulement trois personnes ma-
lades ont eacuteteacute en contact avec le psychologue
par teacuteleacutephone et nrsquoont beacuteneacuteficieacute que de deux
entretiens en moyenne En effet dans la majo-
riteacute des cas la maladie est suspecteacutee tardive-
ment apregraves une longue peacuteriode drsquoerrance meacute-
dicale Si bien que le patient deacutejagrave tregraves sympto-
matique est rarement en capaciteacute de parler
suffisamment distinctement (dysarthrie) pour
beacuteneacuteficier drsquoun entretien teacuteleacutephonique Drsquoautant
que les troubles neuropsychologiques et psy-
chiatriques associeacutes agrave une freacutequente anoso-
gnosie et une eacutevolution preacutecipiteacutee de la mala-
die rendent complexes la mise en place drsquoun
suivi
Monsieur K prend contact avec la Cellule ef-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 73
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
frayeacute par la deacutegradation de son eacutetat il tremble
tombe et perd la meacutemoire Il craint drsquoecirctre atteint
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob dont il se
sait agrave risque suite agrave un traitement par hor-
mones de croissance contamineacutees Je nrsquoose
pas en parler on va me regarder bizarrement
et srsquoinquieacuteter peut-ecirctre pour rien Mais lrsquoentre-
tien est difficile agrave mener au regard des troubles
cognitifs et dysarthriques de Monsieur K Nous
convenons neacuteanmoins drsquoun rendez-vous teacuteleacute-
phonique la semaine suivante Le jour-dit je
lrsquoappelle agrave son domicile Il ne se souvient ni de
moi ni de la raison de mon appel Il comprend
agrave peine les mots que je prononce Il raccroche
Crsquoest donc principalement agrave lrsquoentourage du ma-
lade que srsquoadresse le soutien psychologique
par teacuteleacutephone un entourage deacutemuni devant
cette maladie que personne ne connaicirct qui
effraie tout le monde et qui laisse chacun en
proie agrave un profond sentiment drsquoisolement Freacute-
quemment rencontreacute au deacutecours drsquoautres pa-
thologies neurodeacutegeacuteneacuteratives le sentiment
drsquoisolement semble pourtant exacerbeacute par les
speacutecificiteacutes de cette maladie meacuteconnue que
les meacutedias ont tocirct fait drsquoassimiler agrave une forme
de peste contagieuse foudroyante
monstrueuse Des qualificatifs qui srsquoillustrent
parfois crucircment dans la reacutealiteacute par un compor-
tement exageacutereacutement eacutevitant du corps meacutedical
Ils portent des masques des gants et entrent
prudemment dans la chambre Que dire en-
core de lrsquoamalgame de toutes les formes de
MCJ avec la plus meacutediatiseacutee drsquoentre-elles -la
vache folle - si ce nrsquoest qursquoil en ajoute au senti-
ment drsquoeacutetrangeteacute qursquoelles provoquent deacutejagrave
Ce nrsquoest pas un animal crsquoest un ecirctre hu-
main Mais ce nrsquoest pas tant la maladie qui
est contagieuse que lrsquoidentification menaccedilante
qursquoelle propose lrsquoidentification agrave lrsquoEcirctre animal
archaiumlque et agrave lrsquoEcirctre deacutement qui nrsquoest plus lui-
mecircme agrave la fois posseacutedeacute et deacuteposseacutedeacute de
son humaniteacute Les MCJ quelle qursquoen soit la
forme figureraient-elles la barbarie au sens
eacutetranger et sauvage du terme
Les familles sont comme prises au piegravege de
ces repreacutesentations collectives dont la vio-
lence inouiumle (jamais entendue) semblent les
expulser aux confins de la communauteacute hu-
maine Quand on a dit ce qursquoil avait tout le
monde a disparuhellip On a eu beau expliquer
qursquoil nrsquoy avait pas de risque de transmission
les gens sont terrifieacutes et prennent leur distance
Il nrsquoy a plus personne agrave qui parler Mais cette
expulsion nrsquoest pas toujours le fait du monde
exteacuterieur Lrsquoentourage peut se retirer spontaneacute-
ment du monde pour se soustraire au regard
que ce dernier pourrait porter sur lui Je ne
voulais pas qursquoon nous regarde comme des
becircteshellip alors jrsquoai disparu de la circulation
Dans ce contexte de mise en quarantaine dic-
teacutee ou spontaneacutee la seule ideacutee de lrsquoexistence
de la Cellule fait fonction de terre drsquoasile de
support identificatoire Un support identifica-
toire renarcissisant Ici je peux reprendre
forme humainehellip il y a quelqursquoun au bout du fil
Quelqursquounhellip et je me sens quelqursquoun en mi-
roir Parce qursquoavec tout ce qui nous arrive je
me sens tantocirct comme un chien galeux tantocirct
trimbaleacute comme un objethellip et de par son nu-
meacutero drsquoappel unique doubleacute drsquoune prise en
charge globale un support identificatoire struc-
turant Jrsquoai lrsquoimpression qursquoelle part en mor-
ceauxhellip petit bout par petit bouthellip lrsquoeacutequilibre la
tecircte la marche la vision la parolehellip sa vie
part en lambeauxhellip et moi je nrsquoarrive plus agrave
me rassemblerhellip Mais il y a tout le monde
(meacutedecins assistante sociale psychologue)
ici agrave la Cellulehellip ccedila me rassure de savoir que
vous parlez tous la mecircme langue que vous
faites corps
Outre lrsquoentourage des malades des personnes
dites agrave risque font appel agrave la Cellule des per-
sonnes agrave risque de MCJ suite agrave un traitement
par hormones de croissance contamineacutees et
des personnes agrave risque de MCJ drsquoorigine geacute-
neacutetique Dans les deux cas le veacutecu subjectif de
risque prend en otage les perspectives drsquoave-
nir Parce qursquoil annonce en mecircme temps le pire
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 74
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et la possibiliteacute drsquoy eacutechapper parce qursquoil
nrsquoindique ni la victime ni lrsquoheure de la catas-
trophe le risque peut donner agrave cette derniegravere
un caractegravere omnipreacutesent Quand je vais
bien je me prends agrave espeacuterer que je ne serai
jamais malade que tout ccedila nrsquoeacutetait qursquoun cau-
chemar Mais quand je me sens mal le risque
drsquoecirctre malade se transforme en fataliteacute Je me
sens condamneacutee (hellip) Finalement que ce soit
par lrsquoespoir ou la fataliteacute crsquoest un peu lagrave tout le
temps un peu partout en moi
Et si des moments drsquoaccalmie subsistent crsquoest
souvent un eacuteleacutement de la reacutealiteacute preacutesent ou agrave
venir qui vient attiser les angoisses drsquoecirctre ma-
lade
Concernant le drame des hormones de crois-
sance contamineacutees ce sont principalement les
diffeacuterentes eacutetapes du procegraves (ouverture en
2008 4 mois drsquoaudience rendu de justice en
2009 et mise en appel en 2010) qui ont deacuteclen-
cheacute une recrudescence des appels des per-
sonnes agrave risque Crsquoest cette histoire de pro-
cegraves (hellip) je lis tous les articles dans la presse
(hellip) Depuis je vais reacuteguliegraverement sur le site de
lrsquoInvs pour veacuterifier le nombre de deacutecegraves leurs
acircgeshellip Je me dis que moi crsquoest bon je suis
plus vieille ou jrsquoai reccedilu les hormones plus tard
(hellip) Je comprends ce procegraves mais je le mau-
dis Je me sentais bien ces derniers temps
Jrsquoavais construit mon petit igloo avec mon mari
dedans Et lagrave je souhaite hurler qursquoon mrsquoa cas-
seacute mon igloo Durant tout le deacuteroulement du
procegraves certains de ces jeunes agrave risque ont
eacuteteacute deacutebordeacutes par un puissant sentiment
drsquoambivalence entre le deacutesir et la peur qursquoon
leur reconnaisse le preacutejudice subi crsquoest agrave dire
le coucirct psychique de se savoir contamineacute Re-
connaissance qui aurait signeacute la reacutealiteacute du
risque qursquoils encouraient Si le procegraves vient agrave
statuer que je suis victime je ne pourrai plus
me dire que crsquoest juste un cauchemar et que je
vais me reacuteveiller (hellip) et puis jrsquoai peur que ccedila se
traduise par le deacuteclenchement de la maladie
Paradoxe de cette victimation crsquoest la meacutede-
cine qui a rendu malade Dire que crsquoeacutetait
pour me soignerhellip quelle ironiehellip Je nrsquoai pas
de symptocircme je sais mais je suis deacutejagrave morte
De peur Et en ces temps juridiques agiteacutes la
Cellule et ses meacutedecins tout particuliegraverement
se sont vus parfois pris dans les mecircmes filets
ambivalents On a fait confiance aveugleacutement
agrave la meacutedecine Comment pouvions-nous imagi-
ner que le mal viendrait de lagrave ougrave on lrsquoattendait
le moins A qui faire confiance maintenant
Notamment encourageacutes par les associations
avec lesquelles la Cellule entretient des liens
eacutetroits certains parents de jeunes agrave risque
ont fait appel agrave nous Notre vie est faite de
hauts et de bas Lorsqursquoon apprend qursquoun
jeune est mort toute lrsquohistoire remonte et puis
le temps passe et on fait comme si ccedila nrsquoexistait
plus Mais ces oscillations crsquoest de la tor-
ture Comment ne pas eacutevoquer aussi le veacutecu
dramatique de ces autres parents qui ont perdu
leur enfant parfois il y a longtemps Des pa-
rents encore submergeacutes par la peine et rongeacutes
par un fort sentiment de culpabiliteacute drsquoavoir
donneacute le feu vert aux meacutedecins pour gagner
quelques centimegravetreshellip drsquoavoir moi-mecircme
fait les injections drsquohormones Un sentiment de
culpabiliteacute exacerbeacute par la relaxe geacuteneacuterale des
preacutevenus apregraves 20 ans de proceacutedure Il y a
des victimes il faut des coupables (hellip) Crsquoest
comme si la Justice nous avait deacutesigneacutes cou-
pables agrave leur place
Dans ce contexte ougrave preacutedominent les senti-
ments de culpabiliteacute et parfois de honte le teacuteleacute-
phone est un outil de grand secours puisqursquoil
permet aux personnes de se soustraire au re-
gard de lrsquoAutre Cet Autre objet drsquoimplacables
projections accusatrices Je nrsquoaurais pas pu
consulter un psychologue en face-agrave face Jrsquoau-
rais eu trop peur de lire sur son visage le deacute-
goucirct le rejet le jugementhellip lagrave je peux dire ce
que je veux je ne vois pas votre reacuteactionhellip
crsquoest moins dur Mais pourquoi le psychologue
de la Cellule se precircte-il si rarement aux projec-
tions de nature perseacutecutrice Reacutepond-il agrave la
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 75
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
neacutecessiteacute de sauvegarder un bon objet Un
bon objet inteacuteriorisable susceptible de restaurer
a minima le narcissisme parental
Concernant les formes heacutereacuteditaires de MCJ
dans la majoriteacute des cas lorsque le diagnostic
tombe le malade est deacutejagrave au stade terminal de
la maladie Les membres agrave risque de la fa-
mille se retrouvent donc confronteacutes agrave deux
drames simultaneacutes la perte imminente de leur
proche et lrsquohorreur de leur possible devenir
Voilagrave en une fraction de seconde le monde
bascule Je regardais ma megravere mourir jrsquoima-
ginais que jrsquoallais finir comme elle et je pensais
agrave mes enfants qui auraient peut-ecirctre le mecircme
destin Puis viennent les angoisses pour les
fregraveres et sœurs leurs enfants crsquoest lrsquoheacuteca-
tombehellip
Comment en parler aux enfants Peut-on
continuer agrave vivre normalement en sachant que
tout peut basculer en quelques mois Je
nrsquoarrecircte pas de pleurer est-ce le deacutebut de la
maladie Faut-il faire le test geacuteneacutetique
Autant de questions difficiles agrave adresser agrave lrsquoen-
tourage Jrsquoai appeleacute la Cellule parce que je ne
veux pas affoler mon mari mes enfantshellip (hellip)
et je ne suis pas encore precircte agrave me retrouver
en consultation de geacuteneacutetique (hellip) ce serait trop
reacuteel (hellip) pour lrsquoinstant quand je raccroche je
peux faire comme si ccedila nrsquoexistait pas
NATURE DE LrsquoESPACE TEacuteLEacutePHONIQUE
Mais de quelle nature est cet espace teacuteleacutepho-
nique pour autoriser le patient agrave maintenir en
dehors de sa reacutealiteacute le contenu qursquoil y deacutepose
Lrsquoabsence de corps en preacutesence et lrsquoimmateacuteria-
liteacute de la voix comme unique canal de commu-
nication seraient-elles la clef du choix des pa-
tients drsquoun suivi teacuteleacutephonique plutocirct qursquoen cabi-
net Le teacuteleacutephone permettrait-il au patient de
srsquoaffranchir ponctuellement drsquoun trop de reacuteel et
de se proteacuteger de lrsquoeffraction qursquoopegravere la crudi-
teacute de ses preacuteoccupations mateacuterielles orga-
niques mais aussi existentielles Serait-elle la
figuration de ce temps intra-uteacuterin ougrave tout de la
reacutealiteacute sauf la megravere eacutetait en dehors ce temps
ougrave le lien intime avec elle nrsquoeacutetait que sons Je
vous parle et vous me parlez aussi dans le
creux de lrsquooreillehellip Vous ecirctes un peu mon es-
pace proteacutegeacute mon espace secret Ce temps
reacutevolu ougrave le lieu de rencontre (le ventre mater-
nel) entre la megravere et lrsquoenfant eacutetait lrsquoobjet de tous
les fantasmes Que dire drsquoautre en effet du lieu
de rencontre entre le psychologue et le pa-
tient qursquoil nrsquoest que scegravene psychique pur es-
pace temporel un ensemble chacun chez soi
Un espace qui srsquooffrirait donc plus encore et
plus subitement agrave la reacutegression du patient que
le divan de lrsquoanalyste ou lrsquoentretien agrave domicile
Parce qursquoelle les prive drsquoinformations agrave carac-
tegravere visuel (regards mimiques postures ges-
tuelles) et puisque rien ne fait obstacle ni chez
le patient ni chez le psychologue aux diffeacute-
rentes repreacutesentations fantasmatiques que
chacun a de lrsquoautre la teacuteleacutephonie se precircte agrave
une activiteacute imaginaire deacutebrideacutee Seules des
informations agrave caractegravere sonore telles que le
timbre de la voix les rythmes tons silences
intonations et bruits ambiants (il allume une ci-
garette elle ferme une porte la voix reacutesonne
comme dans un espace vide) donnent force et
forme agrave lrsquoespace theacuterapeutique Elles seules et
dans une immeacutediateteacute remarquable suffisent agrave
faire surgir le visage le corps et le lieu de
lrsquoautre Des lapsus agrave caractegravere visuels srsquoim-
miscent drsquoailleurs dans le discours des pa-
tients et du psychologue Je vois drsquoici la tecircte
que vous faites Nos rencontres teacuteleacutepho-
niques On se voit la semaine prochaine Des
deacutetails comme la silhouette la couleur des
yeux des cheveux des vecirctements un canapeacute
des photos au mur des sourcils fronceacutes ou une
moue deacutefaite sont-ils lrsquoexpression paroxystique
de lrsquoactiviteacute fantasmatique agrave lrsquoœuvre dans la
relation transfeacutero-contre-transfeacuterentielle entre
le patient et son theacuterapeute
Pourquoi lrsquoimage de cette patiente-lagrave tarde agrave se
construire en moi apparaicirct puis disparaicirct sans
que je puisse la saisir Parce qursquoelle joue agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 76
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
cache-cache avec son pegravere malade qui ne
doit pas la voir dans cet eacutetat de terreur Pour-
quoi ai-je oublieacute drsquoappeler ce patient aujour-
drsquohui alors que son nom est surligneacute dans mon
agenda Parce qursquoil me reacutepegravete chaque fois
que tout le monde lrsquooublie Pourquoi cet
autre patient a-t-il exceptionnellement deman-
deacute agrave deacuteplacer son rendez-vous Parce qursquoil
eacutetait justement question lors de notre dernier
entretien de deacuteplacer son agressiviteacute pour
eacutepargner sa femme malade
Pourquoi cette megravere au beau milieu de son
suivi donne-t-elle mon numeacutero au fils qui ne
lrsquoeacutecoute plus Pourquoi ce fils accepte-t-il
drsquoappeler le psychologue de sa megravere Pour-
quoi le psychologue accepte-t-il de suivre seacute-
pareacutement deux membres de la mecircme famille
tandis qursquoil heacutesiterait agrave le faire en cabinet
Parce que les espaces ndash uniquement fantas-
meacutes- sont bien distincts en lui et que leur rela-
tion reacuteclame drsquoecirctre tierciseacutee
Pourquoi cette demande impeacuterieuse de me voir
en consultation Parce que cette patiente non
reconnue par la justice dans son statut de
victime des hormones de croissance contami-
neacutees a besoin drsquoecirctre reconnue au sens pre-
mier du terme par le psychologue
Pourquoi cette crainte en moi agrave lrsquoideacutee de voir
ces patients-lagrave comme on pourrait avoir agrave
craindre de transgresser la regravegle fondamentale
drsquoabstinence Dans ce contexte de suivi teacuteleacute-
phonique -qui induit lrsquoeacuterotisation du lien agrave la
voix et un sentiment paradoxal de grande
proximiteacute voir serait-il devenu un eacutequivalent de
toucher et lrsquoacting out agrave eacuteviter
Ces quelques exemples de questionnements
du psychologue autour des manifestations
transfeacutero-contre-transfeacuterentielles agrave lrsquoœuvre
dans le suivi teacuteleacutephonique nous semblent rele-
ver drsquoun processus de type theacuterapie drsquoinspira-
tion analytique Un processus qui se partage
souvent en deux temps un temps de plainte et
un temps drsquoeacutelaboration psychique complexe au
cours duquel le patient rapporte spontaneacutement
ses recircves Des recircves dont le mateacuteriel fait lrsquoobjet
drsquointerpreacutetations par le psychologue
SUIVI TEacuteLEacutePHONIQUE AVEC OU SANS FIN
Il arrive qursquoapregraves le deacutecegraves de son proche le
patient srsquointerroge sur la leacutegitimiteacute de la pour-
suite du suivi comme si la survie du malade
avait jusqursquoici conditionneacute son droit agrave en beacuteneacutefi-
cier Il nrsquoen est rien alors tout ne srsquoarrecircte pas
pour moi non plus Cet espace temporel
sans corps en preacutesence qui a proteacutegeacute le pa-
tient des angoisses inheacuterentes agrave la reacutealiteacute
drsquoune seacuteparation annonceacutee permet et catalyse
mecircme parfois le travail de deuil Vous ecirctes un
peu comme mon fregravere [mort depuis 3 mois] je
ne le vois pas mais il est lagravehellip je ne le vois pas
mais je lrsquoentends parfoishellip comme avec vous
jrsquoapprends agrave dialoguer agrave lrsquointeacuterieur de moi avec
lui
La sortie du dispositif de soutien teacuteleacutephonique
est longuement travailleacute eacutevocation de lrsquoapregraves
eacutelaboration de la seacuteparation espacement pro-
gressif des entretiens Un cheminement au
cours duquel surgissent plus explicitement les
traces du caractegravere transitionnel de lrsquoespace
teacuteleacutephonique Un espace qui sans ecirctre une
permanence drsquoeacutecoute a eacutetayeacute le sentiment de
permanence drsquoobjet Je ne vous ai jamais
vuehellip alors je nrsquoai pas peur de ne plus vous
voir Vous ecirctes un peu comme toujours lagrave
CONCLUSION
La Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des Mala-
dies de Creutzfeldt-Jakob a pour mission lrsquoaide
au diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale
sociale et psychologique des patients et de leur
famille Lrsquoaide proposeacutee srsquoeffectue essentielle-
ment par teacuteleacutephone
La faisabiliteacute et la leacutegitimiteacute drsquoun soutien psy-
chologique exclusivement teacuteleacutephonique a eacuteteacute
lrsquoobjet de nombreuses interrogations pour le
psychologue quelle est la nature de cet es-
pace particulier drsquoaccompagnement Quels en
sont les beacuteneacutefices Peut-on soutenir un veacuteri-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 77
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
table travail psychique dans le cadre de ce dis-
positif Est-il leacutegitime de parler de travail psy-
chotheacuterapeutique
Les 110 suivis psychologiques effectueacutes agrave la
Cellule depuis 2003 nous permettent aujour-
drsquohui drsquoaffirmer que notre travail de psycho-
logue ne se limite pas agrave une pure fonction de
soutien En effet bien que tregraves eacuteloigneacute de la
situation analytique le processus agrave lrsquoœuvre
dans le dispositif teacuteleacutephonique semble srsquoappa-
renter agrave celui drsquoun dispositif de type psychotheacute-
rapeutique drsquoinspiration analytique le cadre
est poseacute et penseacute par le psychologue
(entretiens de 45 minutes notion de rendez-
vous teacuteleacutephoniques rythmiciteacute souvent hebdo-
madaire suivi au long cours) lrsquoassociation
libre est encourageacutee lrsquointerpreacutetation des dires
lrsquoanalyse des recircves lrsquoanalyse du transfert et du
contre-transfert par le psychologue est freacute-
quente et le patient effectue un veacuteritable travail
drsquoeacutelaboration psychique au deacutecours du suivi
Lrsquoexpeacuterience nous deacutemontre que les particulari-
teacutes de lrsquoaccompagnement teacuteleacutephonique
(notamment privation drsquoinformations visuelles)
ne freinent pas le processus theacuterapeutique
Elles pourraient mecircme le favoriser
(relacircchement du systegraveme deacutefensif)
Ainsi ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique agrave lrsquohocircpital est au service drsquoune
difficulteacute des personnes qui y ont recours la
crainte et ou lrsquoimpossibiliteacute drsquoaller consulter un
psychologue en face-agrave face
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 78
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots
en images
Natascia Serbandini
Service de gyneacutecologie-obsteacutetrique Hocircpital Jean Verdier
A pregraves avoir eacutevoqueacute briegravevement les speacute-
cificiteacutes du deuil peacuterinatal je vais vous
preacutesenter une pratique nouvelle au sein
de lrsquoAPHP un groupe de parole hospitalier
destineacute aux femmes ayant fait une interruption
meacutedicale de grossesse Ce groupe est neacute en
2008 un an apregraves sa creacuteation nous avons choi-
si drsquointroduire une cameacutera lors des seacuteances
Enfin je deacutecrirai lrsquoimpact de la cameacutera sur le
groupe et le projet de film que nous sommes
en train de reacutealiser
LES SPEacuteCIFICITEacuteS DU DEUIL PEacuteRINATAL
La deacutecouverte dune pathologie fœtale incu-
rable pendant la grossesse est un eacuteveacutenement
hautement traumatique pour les parents du fu-
tur beacutebeacute Lhocircpital Jean Verdier unique Centre
Pluridisciplinaire de Diagnostic Preacutenatal du 93
accueille et accompagne les parents degraves lrsquoan-
nonce du diagnostic jusqursquoagrave lrsquointerruption meacutedi-
cale de grossesse quand les parents la deman-
dent
Le deuil peacuterinatal preacutesente des speacutecificiteacutes qui
le distinguent du deuil classique il est toujours
accompagneacute drsquoun fort sentiment de culpabili-
teacute amplifieacute dans le cadre des Interruptions Meacute-
dicales de Grossesse par la prise de deacutecision
(Tous les textes en italique sont issus de teacutemoi-
gnages de femmes lors du groupe de parole)
Pendant le travail je le sentais encore mon
beacutebeacute est neacute vivant jrsquoavais vraiment cette sen-
sation qursquoil voulait se battre Jrsquoai enleveacute tout cet
espoir de vie et je me demande de quel droit
Crsquoest cette impression drsquoavoir le choix sur sa
vie ou sa mort crsquoest tellement lourd agrave porter
Une autre speacutecificiteacute est lrsquoabsence drsquoun veacutecu
partageacute avec cet enfant en dehors de la gros-
sesse Geneviegraveve Delaisi de Parseval
(psychanalyste) Comment faire le deuil de ce
qui nrsquoa pas eu lieu drsquoon ne sait quoi et de
presque rien Lrsquoobjet perdu reste agrave perdre
comment accepter la seacuteparation drsquoavec un ecirctre
que lrsquoon nrsquoa pas connu
Le deuil est un processus intrapsychique con-
seacutecutif agrave la perte drsquoun objet drsquoattachement par
lequel le sujet reacuteussit progressivement agrave se deacute-
tacher de celui ci Jean Philippe Legros
(psychologue psychanalyste au centre de meacute-
decine foetale Cochin-St Vincent de Paul) dans
lrsquoarticle L lsquoarrecirct de vie in utero ou lrsquoerrance des
fœtus un possible deuil preacutecise que dans le
deuil peacuterinatal il srsquoagit drsquoun deacutetachement sans
renoncement
Ensuite il srsquoagit drsquoun deuil feacuteminin un deuil
veacutecu tregraves diffeacuteremment dans le couple
Mon mari lui a pris sa deacutecisionhellipje ne dis pas
que ccedila a eacuteteacute facile ccedila a ducirc ecirctre dur pour lui
aussi moi je la portais je la sentais bouger
Cette mort est intoleacuterable pour la megravere en lien
avec le sentiment drsquoomnipotence propre agrave la
grossesse intoleacuterable pour la megravere qui con-
naissait ce beacutebeacute et qui a ressenti ses mouve-
ments
Ce sentiment de toute puissance est amplifieacute
par le fait que la demande drsquoInterruption Meacutedi-
cale de Grossesse revient agrave la femme seule
signataire selon la loi
Je sais qursquoil souffre qursquoil est malheureux il a
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 79
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
la mecircme peine et la mecircme tristesse que moi
mais il ne llsquoexprime pas pareil il y a une culpa-
biliteacute plus importante chez la megravere
La perte du beacutebeacute est parfois difficilement re-
connue par les pegraveres qui nrsquoosent pas manifes-
ter leur souffrance et qui se projettent plus rapi-
dement dans lrsquoavenir
Leur deacutetresse reacutesulte en grande partie de la
mise agrave mal de la fonction contenante protec-
trice de la femme enceinte qursquoils assuraient
avant lrsquointerruption
Ce deuil est deacutepourvu drsquoune dimension so-
ciale Franccediloise Moleacutenat (peacutedopsychiatre) dit
Iil existe une cicatrice dans le corps de la
megravere mais pas de cicatrice sociale
Beaucoup de personnes mrsquoont dit crsquoest
dingue que lrsquoadministration franccedilaise se mecircle
de ccedila (en parlant de la reconnaissance agrave la
Mairie) alors qursquoil nrsquoy a mecircme pas de beacutebeacute il
eacutetait pas neacute
Les rituels autour du deuil ont une fonction psy-
chique ils offrent au mort un deacutedommagement
symbolique Ils assurent une reconnaissance
de la peine des proches par le groupe
Crsquoest seulement depuis quelques anneacutees que
les rites et rituels sociaux autour des beacutebeacutes
morts in utero ont pris leur place agrave travers la
reconnaissance agrave lrsquoEtat Civil et lrsquoeacutevolution des
pratiques drsquoaccompagnement dans les materni-
teacutes (preacutesentation du corps du beacutebeacute organisa-
tion drsquoobsegraveques)
Ce travail est reacutealiseacute dans le but de creacuteer et
drsquoancrer des souvenirs de cet enfant afin de
faire des parents des parents
Jrsquoavais toujours une photo de mon fils dans
mon portefeuille jrsquoen avais besoin Crsquoest peut
ecirctre parce que je ne voulais pas qursquoon me dise
que crsquoeacutetait rien
LE GROUPE DE PAROLE Agrave JEAN VERDIER
Lors des entretiens avec le gyneacutecologue ou
dans le cadre drsquoun suivi psychologique quelque
temps apregraves les Interruptions Meacutedicales les
femmes eacutevoquaient de maniegravere reacutecurrente leur
solitude lrsquoimpossibiliteacute de partager leur souf-
france et le temps passant de ne plus pouvoir
parler de leur beacutebeacute dans le cercle familial et
amical Cet oubli de lrsquoentourage et la reprise
drsquoune vie normale est source de culpabiliteacute
elles avaient le sentiment drsquoabandonner agrave nou-
veau leur beacutebeacute
Jrsquoai lrsquoimpression que personne ne me com-
prend jrsquoai lrsquoimpression drsquoecirctre seule au monde
de me noyer je survis Les gens ne peuvent
pas comprendre notre situation je nrsquoarrive pas
agrave leur dire ma souffrance immense
De cela est neacutee lrsquoideacutee de proposer un espace
drsquoeacutechanges entre femmes sous forme de
groupe de paroles Ce projet a eacuteteacute creacuteeacute agrave lini-
tiative commune du gyneacutecologue responsable
du Centre de Diagnostic Anteacutenatal et de moi-
mecircme
Il srsquoagit drsquoun groupe ouvert agrave toutes les femmes
ayant veacutecu une Interruption Meacutedicale de Gros-
sesse agrave Jean Verdier
Le groupe se reacuteunit une fois par mois pendant
une heure et demie et est co-animeacute par un bi-
nocircme psychologuepsychiatre et meacutedecinsage
femme
Le groupe constitue un cadre de confiance
une enveloppe psychique comme le dit An-
zieu propice agrave la mise en commun des charges
affectives et agrave lrsquoaccompagnement du deuil
De plus comme le rappelle Jean Philippe Le-
gros apregraves la perte drsquoun enfant par IMG la
crainte de la megravere contrairement aux parents
drsquoenfants porteurs drsquohandicap est lrsquoabsence du
regard des autres dans le reacuteel Cet ecirctre invi-
sible pour les yeux cet enfant que personne
drsquoautre nrsquoa connu risque de disparaicirctre Drsquoougrave
lrsquoimportance de creacuteer un espace physique (par
rapport aux espaces virtuels les forums sur
Internet tregraves freacutequenteacutees par les megraveres en-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 80
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
deuilleacutees) et psychique au sein de lrsquohocircpital afin
de reconnaicirctre lrsquoexistence de ces beacutebeacutes et per-
mettre agrave ces femmes drsquoecirctre megraveres
Les autres nous parlent comme si on avait
perdu quelque chose crsquoest quand mecircme un
ecirctre vivant crsquoeacutetait quand mecircme notre enfant
Lrsquoobjectif principal du groupe est de permettre
le partage drsquoexpeacuterience de ce deuil si particu-
lier drsquoecirctre rassureacutee par le parcours des autres
dans un cadre de reacutefeacuterence suffisamment
bon pour le dire avec les mots de Winnicott
Crsquoest vrai que discuter avec drsquoautres per-
sonnes qui lrsquoont veacutecu il y a longtemps et qui ont
su deacutepasser certaines eacutetapes ccedila aide ccedila
donne des cleacutes pour passer agrave lrsquoeacutetape suivante
LrsquoIDEacuteE DU FILM DES MOTS EN IMAGES
Le groupe a eacuteteacute tregraves freacutequenteacute degraves le deacutebut
Apregraves un an de fonctionnement le gyneacutecologue
a proposeacute drsquointroduire une camera afin de fil-
mer les seacuteances pour teacutemoigner de cette expeacute-
rience positive et faire connaicirctre cette pratique
Cette proposition a eacuteteacute discuteacutee par les
femmes au sein du groupe elles ont adopteacute
cette ideacutee et ont eacutelaboreacute avec nous les objectifs
du film
Teacutemoigner autour du deuil peacuterinatal en deacutecri-
vant les diffeacuterentes eacutetapes et souligner les beacute-
neacutefices drsquoun groupe de parole
A partir de leur veacutecu permettre une reacuteflexion
visant agrave ameacuteliorer les pratiques soignantes
dans les accompagnements du deuil peacuterinatal
agrave lrsquohocircpital
Nous avons filmeacute six seacuteances dune heure
trente avec deux techniques une cameacutera fixe
et une cameacutera mobile Ensuite nous avons eacuteta-
bli ensemble un plan pour le film reacutecit en ordre
chronologique du deacuteroulement de lrsquoIMG Les
diffeacuterents chapitres
Lrsquoannonce et la deacutecision lrsquohospitalisation le
retour agrave la maison lrsquoenterrement lrsquoentourage
lrsquoautopsie la grossesse drsquoapregraves le groupe
La preacutesence de la cameacutera a eu un impact sur
le deacuteroulement des seacuteances les theacutematiques
ont eacuteteacute eacutetablies agrave lrsquoavance ce qui a permis de
structurer davantage les seacuteances tout en gar-
dant la liberteacute drsquoaborder les questions eacutevo-
queacutees spontaneacutement par les femmes
Comme le dit Winnicott lrsquoenfant existe dans les
yeux de sa megravere le visage de lrsquoenfant que lrsquoon
nrsquoa pas vu ne permet pas agrave la megravere de se re-
connaicirctre comme megravere
Le film vient srsquoinscrire dans cette neacutecessiteacute de
reconnaissance de laisser une trace de cette
preacutesence de ce beacutebeacute qui nrsquoa plus de corps
physique mais qui existe dans lrsquohistoire fami-
liale
La preacutesence de la cameacutera a donc eu des effets
beacuteneacutefiques pour les femmes mais aussi pour
les soignants la richesse du mateacuteriel clinique
recueilli nous a permis drsquoobserver lrsquoeacutevolution
des femmes dans le processus de deuil et
drsquoanalyser leur posture au sein du groupe ainsi
que celle des animateurs
Si le groupe a fonction de portage pour cer-
taines pour drsquoautres crsquoest le lieu ougrave elles peu-
vent donner un sens agrave ce qursquoelles ont veacutecu en
partageant leur expeacuterience avec drsquoautres
Nous avons constateacute en visionnant les
seacuteances que plusieurs femmes qui semblent
ecirctre dans un deuil normal continuent agrave freacute-
quenter le groupe alors que leur interruption
remonte agrave il y a trois ou quatre ans
Le besoin de continuer agrave eacutevoquer leur beacutebeacute
nrsquoest pas un signe de deuil pathologique mais
une neacutecessiteacute de la ceacuteleacutebration de la meacutemoire
de ces beacutebeacutes disparus Ces femmes veulent
garder comme le dit Jean Philippe Legros une
dose homeacuteopathique du trauma qui gueacuterit de
lui en ne se seacuteparant jamais
Quand jrsquoai dit agrave ma responsable que je mrsquoab-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 81
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
sentais pour venir au groupe de parole elle
mrsquoa dit Ben tu en as deacutejagrave un (enfant) qui est lagrave
pourquoi tu continues agrave aller agrave ce groupe Je
lui ai dit Crsquoest pas parce que jrsquoai reacuteussi agrave
avoir un petit garccedilon que je vais compleacutetement
oublier ce qui concerne mon premier enfant
justement lui il nrsquoest pas lagrave crsquoest pour ccedila que
je continue agrave aller au groupe pour parler de lui
pour le faire exister
Aujourdrsquohui le projet du film est en cours nous
avons imagineacute deux versions
- une version courte de 20 minutes un teacutemoi-
gnage du groupe sur le deuil peacuterinatal agrave diffu-
ser agrave lrsquoexteacuterieur
- une version longue de 52 minutes destineacutee
aux femmes et en interne agrave lrsquohocircpital Jean Ver-
dier
Le premier montage a eacuteteacute visionneacute par les
femmes qui ont participeacute aux choix des extraits
Nous espeacuterons pouvoir le diffuser dans un ave-
nir proche agrave un large nombre de professionnels
de santeacute
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 82
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions
enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis
Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
P our cette preacutesentation des missions du
psychologue clinicien aupregraves du per-
sonnel agrave
lrsquoAP-HP nous avons choisi de commencer par
reprendre quelques eacuteleacutements agrave lrsquoorigine de la
creacuteation de nos postes
Dans une seconde partie nous deacutefinirons et
preacutesenterons la diversiteacute des missions speacuteci-
fiques aux psychologues du personnel sur site
A la fois clinique et institutionnelle notre pra-
tique nous amegravene agrave ecirctre en contact reacutegulier
avec les diffeacuterents acteurs internes ou ex-
ternes agrave lrsquoinstitution concerneacutes par la protec-
tion de la santeacute au travail Ainsi cette collabo-
ration neacutecessite un important travail de deacuteve-
loppement et drsquoentretien du reacuteseau
Ensuite nous envisagerons les divers ques-
tionnements souleveacutes par ce poste position-
nement parfois drsquoeacutequilibriste cadre speacutecifique
de prise en charge ou encore limites de cette
pratique
HISTORIQUE
Par la loi de 1983 concernant les droits et obli-
gations des fonctionnaires les personnels hos-
pitaliers de par leur statut sont proteacutegeacutes par
leur administration
A la fin des anneacutees 90 le deacuteveloppement de la
preacutevention des violences apparaicirct comme pri-
mordial puis une circulaire intituleacutee Preacutevention
et accompagnement des situations de vio-
lence est reacutedigeacutee en deacutecembre 2000
Le constat de lrsquoaugmentation de la violence au
quotidien dans les hocircpitaux a fait naicirctre au sein
de lrsquoAP-HP des preacuteoccupations et des de-
mandes au niveau institutionnel Ceci a mobili-
seacute un ensemble drsquoacteurs concerneacutes par la
protection de la santeacute des personnels Ainsi la
mise en place drsquoune cellule drsquoaccueil et de
prise en charge des agents victimes de vio-
lence agrave lrsquoAP-HP eacutemane de ces travaux Deux
postes de psychologues cliniciennes ont eacuteteacute
creacuteeacutes au Siegravege en 2000 et 2001 puis drsquoautres
postes de psychologues cliniciens aupregraves du
personnel ont vu le jour sur diffeacuterents sites de
lrsquoAP-HP
Face agrave lrsquoamplification des violences en milieu
hospitalier lrsquoAP-HP a eacutegalement meneacute en 2004
une campagne drsquoinformation sur le thegraveme
Violences de patients drsquoaccompagnants de
visiteurs comment soutenir les personnels qui
en sont victimes Ces derniers ignorent sou-
vent leurs droits et les circuits internes pour ob-
tenir le meilleur accompagnement dans leurs
deacutemarches Lrsquoeacutelaboration drsquoun guide a permis
de deacutecrire les diffeacuterentes modaliteacutes de prise en
charge en cas drsquoagression prise en charge
meacutedico-psychologique sociale meacutedico-
administrative ou encore juridique
Au-delagrave de la preacutevention et de la prise en
charge de la violence agrave lrsquohocircpital les missions
du psychologue clinicien aupregraves du personnel
sont orienteacutees vers deux axes principaux la
clinique individuelle et collective et les activiteacutes
institutionnelles
DEacuteFINITION DU POSTE ET MISSIONS SPEacuteCIFIQUES
Le poste de psychologue du personnel a pour
fonction principale de creacuteer un espace drsquoeacutecoute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 83
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et de prise en charge individuelle ou collective
pour tout le personnel de lrsquohocircpital
Toute personne professionnelle de lrsquohocircpital
peut si elle en a la neacutecessiteacute (si elle le sou-
haite) prendre rendez vous pour une premiegravere
consultation et ce quel qursquoen soit le motif pro-
fessionnel ou personnel
Les bureaux permettent de garantir la confiden-
tialiteacute
Les consultations se font sur rendez-vous afin
drsquoeacuteviter lrsquoattente et pour preacuteserver la discreacutetion
Ils sont libres et totalement confidentiels
Des rendez-vous en soireacutee peuvent ecirctre ameacute-
nageacutes
Le deacutelai maximum drsquoobtention drsquoun rendez-
vous est environ de 15 jours
Le nombre de consultations deacutepend de la de-
mande initiale Il peut aller drsquoun seul entretien agrave
plusieurs Lorsque la personne deacutesire ou neacute-
cessite une prise en charge plus longue elle
est orienteacutee agrave lrsquoexteacuterieur Il est preacuteciseacute agrave tout
agent en deacutebut drsquoentretien que ce lieu de con-
sultation a pour vocation un accompagnement
agrave court ou moyen terme
Il est eacutevident que la fonction de psychologue du
personnel est agrave viseacutee clinique crsquoest agrave dire
- que le psychologue du personnel nrsquointervient
pas directement dans les eacutevaluations utiles agrave la
gestion du personnel et nrsquoeacutemettent aucun avis
concernant lrsquoaptitude au poste de travail des
agents reccedilus en consultation (ce qui est de
lrsquounique ressort du meacutedecin du travail) hellip
- que le psychologue du personnel nrsquoest pas
psychologue du travail donc nrsquointervient pas
dans le reclassement les mobiliteacutes profession-
nelles le recrutementhellipMais nos missions
srsquoaccordent bien sur avec celles du CRH si neacute-
cessaire
Le psychologue du personnel comme les
autres psychologues cliniciens de lrsquoeacutetablisse-
ment deacutepend directement du directeur de lrsquoeacuteta-
blissement et a des liaisons fonctionnelles
avec le drh par exemple ou le meacutedecin du tra-
vail
Il rend un bilan annuel quantitatif indiquant cer-
taines donneacutees de son activiteacute tout en preacuteser-
vant lrsquoanonymat et la confidentialiteacute Il peut arri-
ver que ce bilan soit preacutesenteacute aux instances
types CHSCT
Globalement le temps de travail du psycho-
logue du personnel se reacutepartit comme suit
pratique clinique drsquoune part activiteacutes institu-
tionnelles drsquoautre part
LA PRATIQUE CLINIQUE
bull Clinique individuelle soutien psychologique
du personnel en difficulteacute par entretien indivi-
duel
Notre pratique montre que les deux aspects
professionnels et personnels sont souvent in-
triqueacutes qursquoil peut srsquoagir de souffrance au tra-
vail mais aussi de souffrance personnelle qui
peut avoir des reacutepercussions dans le travail
Les motifs principaux agrave lrsquoorigine de la de-
mande
- sur le plan professionnel sont conflits inter
eacutequipe situations de violence au travail
manque de communication difficulteacutes face aux
pathologies perte du sens du travail voire eacutepui-
sement professionnel
- sur le plan personnel sont difficulteacutes fami-
liales sociales deuils seacuteparations probleacutema-
tiques psychopathologiques maladies chro-
niqueshellip
Ces personnes ne se sont jamais adresseacutees agrave
un professionnel du soin psychique par meacute-
connaissance des professions parfois mais par
meacutefiance eacutegalement et arrivent souvent en
portant des souffrances extrecircmement lourdes
et de longue date
Cateacutegories dominantes qui consultent soi-
gnants et administratifs encadrement
quelques personnels techniques et meacutedico-
techniques et tregraves peu de meacutedecins
Il est difficile drsquoeacutetablir une moyenne du nombre
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 84
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
drsquoagents reccedilus par an sur lrsquoensemble des
postes du personnel Toutefois les demandes
de consultations sont en constantes augmenta-
tions sur la plupart des sites de lrsquoAPHP mais
aussi du fait des regroupements amenant les
psychologues agrave ecirctre solliciteacutees sur plusieurs
eacutetablissements
bull Clinique collective
Les interventions collectives peuvent se
preacutesenter sous deux formes les groupes de
parole et les deacutebriefings psychologiques
Le Groupe de parole permet de creacuteer un lieu
drsquoexpression et drsquoeacutechanges sur un thegraveme don-
neacute ou une probleacutematique speacutecifique au service
(comme par exemple lrsquoagressiviteacute et la violence
des patients notamment aux urgences ou en-
core lrsquoimplication eacutemotionnelle des soignants
lieacutee agrave lrsquoaccompagnement en fin de vie hellip)
Le Deacutebriefing psychologique intervention
collective ponctuelle suite agrave un eacuteveacutenement diffi-
cile ou traumatique (suicide drsquoun patient deacutecegraves
drsquoun personnel agression du personnel par un
patient ou son entouragehellip)
Force est de constater eacutegalement que les de-
mandes de reacutesolution de conflit formuleacutees
comme telles sont aussi tregraves preacutesentes et il
semble utile de distinguer la neacutecessaire reacutesolu-
tion drsquoun conflit qui nrsquoest pas forcement le lieu
et le temps du groupe de parole de la volonteacute
drsquoy trouver un sens Il va de soi que le psycho-
logue nrsquointervient en aucun cas comme meacutedia-
teur car il nrsquoen a pas la formation speacutecifique
mecircme si certaines interventions peuvent par-
fois avoir des effets drsquoapaisement du conflit
Pour ces raisons et preacutealablement agrave toute in-
tervention collective il est important drsquoavoir pu
deacutefinir avec les participants leurs attentes et
pas seulement celles lieacutees au demandeur geacute-
neacuteralement lrsquoencadrement ou la direction
LES ACTIVITEacuteS INSTITUTIONNELLES
bull1- Deacuteveloppement et entretien du reacuteseau
En interne Assistant social du personnel meacute-
decine du travail DRH CRH chef du person-
nel direction des soins psychologues du per-
sonnel drsquoautres sites psychologues des ser-
vices psychiatres hellip
En externe orientation vers les CMP pour les
prises en charge agrave plus long terme etou pour
les suivis psychiatriques orientation vers des
lieux de consultations speacutecialiseacutes (addictologie
consultation douleur troubles du sommeil
troubles du comportement alimentaire associa-
tion drsquoaide aux victimes theacuterapie familiale hellip)
2- Participation aux groupes de travail et de
preacutevention preacutevention des addictions de
lrsquoeacutepuisement professionnel des risques psycho
-sociauxhellip
3- Faire connaicirctre ces postes et notre activiteacute
- A lrsquooccasion drsquoune arriveacutee sur site ou lors
drsquoune creacuteation de poste
- Preacutesentation dans les services directement
aupregraves des eacutequipes
- Preacutesentation lors de formations sur site
propre (accueil des nouveaux arrivants ou sur
des theacutematiques en lien avec nos missions) ou
au Centre de Formation Continue du Personnel
Hospitalier (intervention dans le cadre de la for-
mation Preacutevention du risque psychique et de
lrsquoeacutepuisement professionnel agrave lrsquohocircpital)
- Preacutesentation du rapport drsquoactiviteacutes au Comiteacute
drsquoHygiegravene Seacutecuriteacute et Conditions de Travail
QUESTIONNEMENTS ENJEUX LIMITES
Ce poste nous amegravene en permanence
- agrave repreacuteciser nos missions ce que nous pou-
vons faire et aussi ne pas faire depuis notre
place particuliegravere au sein de lrsquoinstitution
- agrave nous confronter agrave certaines limites
- agrave devoir nous adapter agrave une clinique aussi
riche que varieacutee
Plusieurs limites donc
La question du cadre
- absence de paiement pas de psychotheacutera-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 85
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
pie ce nrsquoest pas agrave lrsquoemployeur de payer on
connaicirct par ailleurs la neacutecessiteacute du paiement
- reacutegulariteacute des horaires il est difficile souvent
impossible pour des personnels ayant des ho-
raires variables qui travaillent en alternance de
pouvoir respecter un horaire fixe de rendez
vous Les annulations les reports sont freacute-
quents agrave cause des changements drsquohoraires
subis par les agents eux-mecircmes Parfois de
notre fait eacutegalement
La question de la confiance
- biais dans la relation
Nous avons le mecircme employeur donc il existe
un biais dans la relation de soutien psycholo-
gique (theacuterapeutique) Pourtant eacutetablir une re-
lation de confiance institutionnelle avec les
agents est essentiel Et faire partie de la mecircme
institution peut parfois paradoxalement rassu-
rer et favoriser une deacutemarche qui ne serait par
ailleurs pas faite
Ayant eacuteteacute recruteacute par la mecircme direction la
question de la confidentialiteacute du travail du
psychologue peut se poser (la confidentialiteacute
est rappeleacute agrave chaque premiegravere rencontre)
- Neacutecessaire et juste distance entre lrsquoinstitution
de son propre travail (visites meacutedicales effec-
tueacutees par un autre meacutedecin du travail attitude
discregravete au sein de lrsquoeacutetablissement hellip)
- Se pose la question du secret partageacute dans
lrsquointeacuterecirct de lrsquoagent et avec son accord cer-
taines informations peuvent parfois ecirctre com-
muniqueacutees (assistantes sociales du personnel
meacutedecin du travailhellip) et inversement
Comment et quand reacuteorienter
- au rythme de chacun (cette premiegravere deacute-
marche a deacutejagrave parfois eacuteteacute extrecircmement longue
et difficile)
- ne marche pas toujours du 1er
coup (combien reviennent parce que cela nrsquoa
pas accrocheacute trop cher tous ces arguments
connus qui peuvent cacher un pas precirct agrave)
Autres limites agrave cette pratique
- question de la neutraliteacute quant au fait de pou-
voir recevoir deux parties drsquoun conflit Nous
sommes lagrave pour tous les agents Et crsquoest bien
lagrave toute la diffeacuterence avec les GH qui ont agrave dis-
position plusieurs psychologues du personnel
- difficulteacute si une personne reccedilue en individuel
participe eacutegalement agrave un groupe de parole hellip
- tous les risques de glissement potentiels aux
places que lrsquoinstitution veut nous faire prendre
lorsque par exemple en lrsquoabsence de meacutedecin
du travail on propose agrave la place de rencon-
trer la psychologue du personnel lorsqursquoil faut
absolument trouver une solution risque drsquoecirctre
interpelleacute en vue de reacutesoudre un conflit avec
ce que cela suppose de rapiditeacute et drsquoefficience
allant agrave lrsquoencontre de la possibiliteacute de penser et
drsquoeacutelaborer
CONCLUSION
Pour le psychologue exercer aupregraves du per-
sonnel appelle parfois agrave des positions drsquoeacutequili-
bristes et neacutecessite de garder une certaine
souplesse
Lrsquointeacuterecirct de ce poste est de faciliter lrsquoaccegraves au
psychologue permettant agrave un public qui nrsquoau-
rait pas forcement fait cette deacutemarche de venir
consulter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 86
Clocircture de la journeacutee
gt Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 87
Clocircture de la journeacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 87
Clocircture de la journeacutee
C ette journeacutee nous a permis de partager
la diversiteacute de nos pratiques La ri-
chesse des interventions nous teacutemoi-
gnent de la vivaciteacute des psychologues hospita-
liers Cest bien la speacutecificiteacute de nos pratiques
qui assure la peacuterenniteacute de nos postes et leur
creacuteation
Jai commenceacute la journeacutee par des remercie-
ments cest ainsi que je vais la clore
Je remercie
le Comiteacute scientifique qui a construit ce pro-
gramme riche et ambitieux qui je lespegravere vous
aura apporteacute de nouvelles ressources
Le Comiteacute drsquoorganisation et les beacuteneacutevoles qui
nous ont reacuteserveacute un accueil souriant et dyna-
mique
Cleacutement ingeacutenieur du son agrave la technique
gracircce agrave qui vous pourrez entendre les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nous vous demandons donc un peu de pa-
tience avant de pouvoir retrouver les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nheacutesitez pas agrave nous rejoindre ce qui renforce
toujours notre dynamisme
En vous remerciant de votre preacutesence qui fait
le succegraves de cette journeacutee et nous poussera
qui sait agrave nous retrouver avec notre quart de
siegravecle -)
Dernier deacutetail administratif noubliez pas de
remplir le questionnaire deacutevaluation de la jour-
neacutee et surtout de rendre votre badge en par-
tant Cest important pour nous
Merci agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
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BULLETIN DrsquoADHESION
Cotisation annuelle incluant lrsquoabonnement au journal et laccegraves agrave lespace adheacuterent sur notre site
internet
Membres actifs Titulaire 45 euro
Contractuel ou retraiteacute 30 euro
Membres associeacutes Jeune diplocircmeacute lt3ans sans emploi 25 euro
Eacutetudiant (master 1 ou 2) 15 euro
Justificatif obligatoire agrave joindre copie du haut du bulletin de salaire du diplocircme ou du certificat de
scolariteacute
Renseignements concernant lrsquoadheacuterent
Nom
Preacutenom
Adresse personnelle
Teacuteleacutephone
Courriel
Adresse professionnelle (preacuteciser le nom du chef de service)
Teacuteleacutephone
Courriel (pour recevoir nos Bregraveves)
Date et signature
A adresser avec votre chegraveque agrave lordre de Psyclihos agrave
Christine SCHWANSE psychologue
Heacutematologie Adulte - Myosotis 3 Hocircpital Saint Louis
par courrier 1 Avenue Claude Vellefaux ndash 75 010 Paris
Association des Psychologues Cliniciens Hospitaliers de lrsquoAssistance Publique
Hocircpitaux de Paris
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 4
Le journal Ndeg18 - Janvier 2012
Sommaire deacutetailleacute
Page
Eacuteditorial 3
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles
8
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz
11
Psychologue clinicien en psychotraumatologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet
15
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo
19
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute
24
Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard
32
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute
43
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants africains
Jacqueline Faure
50
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique en
eacutevolution
Muriel Derome
60
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic
63
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau
69
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini
78
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny
Elodie Travers
82
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 5
20 ans de Psyclihos
Psychologue agrave lHocircpital
une espegravece agrave proteacuteger
Eacutedito
Psyclihos est une association loi 1901 creacuteeacutee en 1991 pour promouvoir la
psychologie clinique et le rocircle des psychologues agrave lhocircpital
Par ses nombreuses actions agrave lintention de ses adheacuterents et des
psychologues hospitaliers Psyclihos est reconnue comme un relais et un
interlocuteur aupregraves des diffeacuterentes instances
Pour fecircter ses 20 ans Psyclihos organise cette journeacutee ouverte agrave ses
adheacuterents et agrave lrsquoensemble des psychologues de lrsquoAP-HP Elle offrira
loccasion de renforcer les liens professionnels entre collegravegues et de
partager la richesse des approches cliniques
Nous vous proposons de nous rencontrer autour des
theacutematiques suivantes
gt Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
gt Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip Quels
changements pour le meacutetier de psychologue
gt Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de
nos cliniques
gt Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
DRH AP-HP Centre de la Formation et du
Deacuteveloppement des Compeacutetences - Institut de
Formation des Cadres de Santeacute
En partenariat avec
Comiteacute dorganisation
Catherine Holzmann
Ceacuteline Le Bivic
Ambre Piquard
Elodie Sacircles
Nicole Sense
Comiteacute scientifique
Franccediloise Adriansen
Nadine Labbeacute
Patrice Nomineacute
Elodie Sacircles
Christine Schwanse
Martine Shindo
Benoicirct Verdon
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 6
8h30 Accueil des participants
9h-9h30 Ouverture
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
9h30 - 11h Ecirctre psychologue ou
faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute
Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Lariboisiegravere
gt P s y c h o l o g u e c l i n i c i e n e n
psychotraumatologie du savoir-faire
au savoir-ecirctre
Clara Duchet Tenon
gt Aider agrave penser limpensable en
oncologie
Anna Elli Pardo Saint-Louis
11h - 11h30 Pause
11h30 - 13h Loi HPST titre de
psychotheacuterapeutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen
membre du CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des
textes officiels
Nadine Labbeacute Cochin
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous
avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Sainte Peacuterine
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Fernand Widal
13h -14h30 Repas libre
14h30 - 16h Uniteacute dans la diversiteacute
des pratiques transversaliteacute de nos
cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Fernand
Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute
des patients migrants
Jacqueline Faure Tenon
gt P sycho logue en r eacutean imat i on
peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique
en eacutevolution
Muriel Derome Raymond Poincareacute
gt Seacutejour de vacances quelle place pour
le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Eacutemile Roux
16h - 17h30 Cliniques particuliegraveres
pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Saint
Louis
gt Laccompagnement psychologique par
teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Pitieacute Salpecirctriegravere
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale
de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Jean Verdier
gt Psychologue clinicien aupregraves du
personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Saint Louis
Le programme de la journeacutee
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 7
Ouverture de la journeacutee
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 7
Ouverture
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 8
Ouverture de la journeacutee
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
J e vais commencer par quelques remer-
ciements rapides
En premier lieu vous Monsieur Burdet
vous nous avez fait lhonneur douvrir cette
journeacutee Plus quun honneur votre soutien
nous a eacuteteacute si preacutecieux
Quand nous avions eacutevoqueacute avec vous lideacutee
dune journeacutee anniversaire mais alors de faccedilon
encore lointaine dans nos esprits votre encou-
ragement sans faille degraves lannonce de cette
eacuteventualiteacute nous a donneacute leacutenergie daffronter
lorganisation de cet eacuteveacutenement
Cest pourquoi au nom des membres du con-
seil dadministration des comiteacutes scientifiques
et dorganisation je tiens agrave vous remercier cha-
leureusement de votre soutien et du solide inteacute-
recirct que vous teacutemoignez agrave notre profession
Cet engagement de la Direction des res-
sources Humaines de lAPHP agrave nos cocircteacutes
comme il y a 20 ans nous permet de nous re-
trouver dans ce bel amphi pour partager cette
journeacutee Et nous remercions aussi lInstitut de
Formation des Cadres de Santeacute APHP pour
lefficaciteacute de son aide logistique et de la ges-
tion des inscriptions jusqursquoagrave ce jour et mecircme au
-delagrave
Mes remerciements vont aussi agrave vous tous qui
ecirctes ici aujourdrsquohui Nombre dentre vous nous
connaissent deacutejagrave en tant qursquoadheacuterents actuels
ou passeacutes souvent dune grande fideacuteliteacute au
cours des anneacutees Dautres nous suivent avec
inteacuterecirct sans nous avoir (encore ) rejoints et de
nombreux jeunes collegravegues nous deacutecouvrent
ou ont deacutejagrave deacutecouvert notre site internet
Notre site internet sur lequel vous pouvez
suivre lactualiteacute de notre association nous re-
joindre ou vous inscrire agrave notre infolettre Les-
pace adheacuterent propose de nombreux services
comme les postes agrave pourvoir agrave lAP-HP ou agrave la
FPH qui inteacuteressent tous collegravegues quils soient
titulaires contractuels ou en recherche dem-
ploi Bien eacutevidemment ces services sont reacuteser-
veacutes agrave nos adheacuterents tout comme nos bregraveves
par mail qui vous informent de lactualiteacute et nos
journaux
Degraves sa creacuteation Psyclihos sest donneacute pour
rocircle de teacutemoigner de lrsquoapport de la Psychologie
Clinique agrave lrsquohocircpital et den rsquoaffirmer la preacutesence
Informer communiquer et ecirctre un relais entre
les psychologues eacutechanger non seulement
entre pairs mais ecirctre aussi un interlocuteur
pour linstitution quant agrave notre profession
Lrsquohistoire de lrsquoassociation est intimement lieacutee agrave
celle de notre profession puisque Psyclihos voit
sa naissance en janvier 1991 quelques jours
avant cla parution du deacutecret qui fonde le statut
de psychologue hospitalier
1991 -2011 vingt ans de psychologie agrave lhocircpi-
tal nous y voilagrave
Les 20 ans de Psyclihos ont eacuteteacute loccasion
unique de nous replonger dans les archives de
notre association Nous partageons la richesse
de ce singulier voyage dans le temps dans le
Numeacutero speacutecial 20 ans du journal de Psyclihos
que vous trouverez dans vos pochettes
Il retrace lhistoire de Psyclihos agrave travers celle
de la psychologie agrave lhocircpital en sarrecirctant sur
les grandes dates qui ont jalonneacute le meacutetier de
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 9
Ouverture de la journeacutee
psychologue
1991 le deacutecret portant statut particulier de psy-
chologue hospitalier 1996 le code de deacuteonto-
logie 2003 la deacutecentralisation de gestion au
sein de lAP-HP et les conseacutequences que nous
vivons depuis pour nen citer que quelques
uneshellip
Cette plongeacutee historique loin decirctre nostal-
gique nous permet de rappeler au fil des ar-
ticles parus durant ces deux deacutecennies dans
nos journaux combien lactualiteacute de notre pro-
fession sappuie sur son passeacute Connaicirctre cette
histoire notamment pour nos plus jeunes col-
legravegues nous semble neacutecessaire pour com-
prendre les enjeux qui traversent actuellement
notre profession Il est dailleurs eacutetonnant de
lire combien des articles pourtant anciens gar-
dent toute leur fraicirccheur traitant deacutejagrave de pro-
bleacutematiques qui apparaissent reacutecurrentes ou
abordant des questionnements qui aujourdhui
pourraient sembler novateurshellip
Cest donc autour de quelques grands thegravemes
toujours actuels comme la deacuteontologie des
psychologues la saga des concours sur titres
la Fiche meacutetier la fonction FIR la Psychiatrie
de liaison ou les psychotheacuterapies et la loi que
nous vous invitons agrave plonger dans notre journal
speacutecial
Nous retrouvons aujourdrsquohui certains de ces
sujets dans le programme de cette journeacutee
Il illustre les champs drsquointerventions qui ani-
ment lrsquoassociation depuis sa creacuteation la fonc-
tion de psychologue les changements induits
par la leacutegislation la diversiteacute des pratiques et
les cliniques particuliegravereshellip
Nous souhaitons pouvoir teacutemoigner de la ri-
chesse et de la diversiteacute des pratiques des psy-
chologues cliniciens agrave lhocircpital Bien sucircr en 20
ans la place des psychologues hospitaliers a
eacutevolueacute leur nombre aussi La varieacuteteacute des inter-
ventions teacutemoigne de la richesse des champs
dexercice possibles parfois insoupccedilonneacutes au
sein de notre institution quest lAP-HP
Derriegravere un titre un peu provocateur nous sou-
haitons vous mobiliser dans lancrage toujours
neacutecessaire de notre profession au sein de
lAPHP Le cadre de notre exercice est toujours
fragile voire mis agrave mal En ces temps heurteacutes
et parfois incertains nous espeacuterons pouvoir
partager notre eacutenergie pour proteacuteger notre
exercice si particulier Ecirctre psychologue agrave lhocirc-
pital cest bien sucircr ecirctre agrave la rencontre des pa-
tients et de leurs proches dans leurs singulari-
teacutes mais aussi des eacutequipes soignantes sans
oublier la participation agrave la vie institutionnelle
comme ce sera abordeacute dans les diffeacuterentes in-
terventions que vous allez entendre aujour-
dhui
Sans plus attendre nous ceacutedons la place agrave la
premiegravere session de la matineacutee dans le vif du
sujet ecirctre psychologue ou faire de la psycho-
logie statut fonctions quelles compeacute-
tences modeacutereacutee par Benoicirct Verdon long-
temps psychologue hospitalier maintenant au
sein de lUniversiteacute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 10
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Hocircpital Lariboisiegravere Page 11
gt Psychologue clinicien en psychotrauma-
tologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Page 15
gt Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Hocircpital Saint-Louis Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles compeacutetences
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 11
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Neuropsychologue une espegravece nouvelle Plus reacutesistante
Mieux adapteacutee agrave la vie hospitaliegravere ou aux institutions
Plus respecteacutee des meacutedecins prescripteurs
Annie Kurtz
Service de Neurologie Hocircpital Lariboisiegravere
La reacutealiteacute objective drsquoune atteinte ceacutereacutebrale agrave
lrsquoorigine des troubles preacutesenteacutes par le patient
ne doit jamais occulter le fait drsquoune histoire
drsquoun eacutequilibre psychique et drsquoune individualiteacute
malmeneacutee
Charte des CPCN - Collegraveges des Psycho-
logues Cliniciens speacutecialiseacutes en Neuropsycho-
logie
J rsquoai bien imprudemment accepteacute il y a
quelques mois de prendre la parole pour
ceacuteleacutebrer les 20 ans de lrsquoassociation Psy-
clihos De plus jrsquoai accepteacute de vous faire parta-
ger mes reacuteflexions sur la place du psychologue
dans le champ de la santeacute et cerise sur le gacirc-
teau pour la deacutefense et lrsquoillustration de la neu-
ropsychologie clinique
Mon propos nrsquoest pas de poleacutemiquer mais de
reacutefleacutechir ensemble aux charmes et aux dangers
que repreacutesente le terme de
neuropsychologue si priseacute par certains ac-
tuellement
La preacutesence de psychologues au sein des ser-
vices hospitaliers est ancienne ils ou elles as-
surent agrave la fois le travail de bilan et celui de
soutien aupregraves des patients Mais le genre
neuropsychologue nrsquoexiste que depuis peu
Le terme neuropsychologue seacuteduit beaucoup
les jeunes collegravegues et mecircme certains para-
meacutedicaux comme les orthophonistes les ergo-
theacuterapeutes et mecircme quelques kineacutesitheacutera-
peutes Nombreux sont ceux dans le champ de
la neuropsychologie qui revendique le label
de neuropsychologues Depuis quelques an-
neacutees les lettres de motivation qui accompa-
gnent les demandes de stages srsquoadressent agrave la
neuropsychologue que je suis censeacutee ecirctre et
les candidates et candidats deacuteclarent leur
passion pour le meacutetier de
neuropsychologue Et je mrsquointerroge sur cette
ferveur
Quelle deacutefinition de la neuropsychologie pou-
vons-nous faire nocirctre Il y a 10 ans en mars
2001 le Collegravege des Psychologues Cliniciens
speacutecialiseacutes en Neuropsychologie (CPCN) pour
les Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Psychologie deacutefinis-
sait ainsi la neuropsychologie
La neuropsychologie est la discipline qui traite
des relations entre les processus mentaux
sous-tendant le raisonnement lrsquoattention la
meacutemoire la perception les gnosies les
praxies le langage le comportement eacutemotion-
nel et lrsquoactiviteacute du cerveau Lors des leacutesions ceacute-
reacutebrales les conseacutequences concerneront agrave la
fois lrsquoefficience de la cognition et lrsquoadaptabiliteacute
des conduites de lrsquoindividu Cette neacutecessaire
appreacuteciation analytique et syntheacutetique du psy-
chisme humain caracteacuterise lrsquoapproche neurop-
sychologique
La neuropsychologie est un champ multidisci-
plinaire ougrave se retrouvent diffeacuterents meacutetiers et
les zones de recouvrement peuvent ecirctre larges
pour certains Je milite aujourdrsquohui pour deacute-
fendre le fait qursquoun bilan reacutealiseacute par un psycho-
logue mecircme si les tests utiliseacutes par drsquoautres
intervenants sont identiques reste un bilan dif-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 12
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
feacuterent Ce travail drsquoanalyse et synthegravese rappe-
leacute dans la deacutefinition citeacutee fonde la totaliteacute de
nos pratiques en neuropsychologie
Lrsquoacte le plus freacutequent est le bilan bilan pour
plaintes mneacutesiques diagnostic diffeacuterentiel entre
deacutepression et maladie neurodeacutegeacuteneacuterative seacute-
quelles drsquoaccident vasculaire seacutequelles de
traumatisme cracircnien et nous intervenons eacutega-
lement dans le suivi et la reacutehabilitation dans les
services de soins de suite Mecircme dans le cadre
drsquoune eacutevaluation en vue drsquoune reacuteeacuteducation
nous savons devoir tenir compte des mouve-
ments psychiques agrave lrsquoœuvre dans tout individu
et qui vont peser sur ce travail
Notre code de deacuteontologie speacutecifie que le res-
pect de la vie psychique fonde notre action ce
respect de la vie psychique tout au long de nos
anneacutees drsquoeacutetudes nous avons eacuteteacute formeacutes agrave y
porter une attention toute particuliegravere Nos ac-
quis nos savoirs modifient notre approche
Quel peut ecirctre le sens pour un ou une psycho-
logue agrave vouloir changer de nom
Nrsquoest-ce pas alors en gardant notre position de
psychologue et donc aussi clinicien que nos
actions prennent sens dans la prise en soin
des patients
Ce que je redoute le plus est que cette appella-
tion neuropsychologue ne confine les psycho-
logues dans un exercice limiteacute agrave la passation
des tests et au traitement des chiffres qui en
reacutesultent Comme si le neuropsychologue ne
devait mettre en œuvre aucun savoir clinique Il
est vrai que la formation donneacutee par lrsquouniversiteacute
conditionne en partie nos pratiques et cer-
taines universiteacutes ne semblent plus accorder
de place agrave la structure de la personnaliteacute ni aux
aspects thymiques dans leur master de neu-
ropsychologie Replacer le patient dans son
histoire reste primordial quels que soient les
avatars neurologiques
Qursquoavons-nous agrave gagner en devenant
neuropsychologue
Les offres drsquoemploi sont nombreuses et les
jeunes diplocircmeacutes ne restent pas longtemps
sans emploi Les meacutedecins psychiatres neu-
rologues ou geacuteriatres avec qui nous collabo-
rons veulent travailler avec des
neuropsychologues Le risque me paraicirct
grand qursquoils recherchent essentiellement des
testeurs pour leurs publications ou leurs con-
sultations Dans les recherches il srsquoagit pour
des collegravegues formeacutes agrave la psychologie pendant
au moins 4 ans puis speacutecialiseacutes en deuxiegraveme
anneacutee de Master cest-agrave-dire apregraves 5 anneacutees
drsquoeacutetudes drsquoappliquer des protocoles de test
dont ils nrsquoont mecircme pas eu la possibiliteacute de dis-
cuter le contenu et le choix des outils (Les
textes nous reconnaissent pourtant la liberteacute du
choix de nos outils)
La pratique de la neuropsychologie peut ecirctre
passionnante agrave condition de ne pas ecirctre ins-
trumentaliseacutee par les meacutedecins En preacuteparant
mon intervention il mrsquoest apparu que je pour-
rais citer comme eacutetude de cas nombre de si-
tuations de souffrance de nos collegravegues dans
les institutions Je pourrais vous preacutesenter des
vignettes cliniques ougrave les psychologues se
mettent en danger en srsquoenfermant dans cette
appellation qui convient si bien agrave nos collegravegues
drsquoautres disciplines et agrave nos employeurs Dans
les consultations meacutemoire la place faite aux
neuropsychologues peut ecirctre tregraves diffeacuterente
suivant les attentes et les projets de leurs par-
tenaires meacutedicaux ou institutionnels et parfois
ces exigences entraicircnent une veacuteritable souf-
france pour nos collegravegues Peut-on exercer son
savoir-faire et son savoir ecirctre de psychologue
quand on attend de nous de recevoir 4 ou 6
patients par jour Ces bilans TGV laissent peu
de place agrave lrsquointersubjectiviteacute du psychologue et
du patient alors que dans drsquoautres lieux lrsquoeacuteva-
luation peut respecter la singulariteacute du patient
de sa famille et la deacuteontologie du psychologue
Il y a des temps dans la pratique drsquoun bilan
neuropsychologique qui restent des temps cli-
niques Avant drsquoentreprendre un bilan le psy-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 13
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
chologue speacutecialiseacute en neuropsychologie
comme tous les psychologues doit pouvoir in-
terroger la demande de qui vient cette de-
mande le patient le meacutedecin ou la famille et
qursquoen attendent ces diffeacuterents partenaires
Comment cet examen srsquoinscrit-il dans le projet
theacuterapeutique
Lrsquoentretien preacuteliminaire ne consiste pas agrave re-
prendre lrsquoanamnegravese au sens meacutedical histoire
de la maladie mais au sens psychologique
entendre lrsquohistoire drsquoun sujet Comme lrsquoa eacutecrit
Emmanuelle Truong-Minh actuelle preacutesidente
du CPCN agrave propos de ce temps drsquoun bilan
Inscrite dans la relation porteacutee par le langage
crsquoest cette preacutesence agrave lrsquoautre qui fonde notre
action Dans le temps de la consultation que je
reacutealise un entretien que je propose des tests
que JE parle ou que JE eacutecoute je suis lagrave au
moins lagrave de maniegravere absolue et entiegravere Pour
la personne agrave mon sens il nrsquoest rien de plus
preacutecieux que lrsquoeacutetablissement de cette relation
clinique Car ces instants ougrave lrsquoobjectivation de
difficulteacutes qursquoelles soient psychopathologiques
ou neuropsychologiques risque drsquoadvenir sont
fondamentaux dans le parcours de vie le par-
cours de santeacute et le parcours de la maladie de
la personne Pouvoir prendre appui sur cette
relation permet la mise en perspective des diffi-
culteacutes permet de supporter le traumatisme
psychique eacuteventuel permet de srsquoeacutecrouler peut-
ecirctre sans ecirctre seul
Je me souviens drsquoun patient qui mrsquoa eacuteteacute adres-
seacute pour plaintes mneacutesiques et eacuteventuelles seacute-
quelles drsquoun AIT Ce monsieur de 60 ans eacutetait
marieacute pegravere de 3 enfants cadre dirigeant dans
une entreprise A la suite de son accident
ischeacutemique transitoire il avait le sentiment de
ne plus pouvoir faire face agrave ses obligations pro-
fessionnelles Sa vie professionnelle eacutetait para-
siteacutee par le danger de voir ses difficulteacutes cons-
tateacutees par les autres surtout par son respon-
sable hieacuterarchique Degraves le deacutebut de lrsquoentretien
il semblait eacuteprouver une certaine inhibition an-
xieuse son expression spontaneacutee restait fac-
tuelle et retenue Apregraves quelques eacutepreuves
drsquoattention et de meacutemoire sans reacutesultat patho-
logique je mrsquoautorisai agrave abandonner les
eacutepreuves pour poursuivre lrsquoentretien au cours
duquel jrsquoappris que la veille il avait accompa-
gneacute sa megravere contre son greacute dans une institu-
tion pour patients souffrant de maladie
drsquoAlzheimer Alors qursquoil a des fregraveres et sœurs il
avait eacuteteacute seul agrave faire cette deacutemarche contraint
et forceacute par la santeacute chancelante de son
eacutepouse atteinte drsquoun cancer du seinhellip quand
jrsquoeacutevoque avec lui la possibiliteacute drsquoaller en parler
avec un psy il me dit y avoir deacutejagrave penseacute mais
renonceacute parce qursquoil avait peur de srsquoeffondrer
Nous avons la responsabiliteacute de notre bilan
mais nous ne pouvons deacutelivrer un diagnostic
(crsquoest de la compeacutetence du meacutedecin) pourtant
lrsquoentretien dit de restitution est un temps
drsquoeacutechange privileacutegieacute qui rend au patient sa
place de sujet mais ce temps-lagrave prend du
temps et on ne nous le donne pas toujours
Le temps de lrsquoexamen psychologique nrsquoest pas
celui des examens compleacutementaires prescrits
par les meacutedecins On sait bien qursquoil est toujours
utile de faire preacuteciser la demande de refuser
de tester Monsieur X ou Y on teste une hy-
pothegravese pas un individu de dire non parfois
parce qursquoon sait qursquoon ne reacutepondra pas agrave la
question ou parce que les conditions de lrsquoexa-
men ne respectent pas le patient ou notre auto-
nomie professionnelle Le questionnement sur
lrsquoobjet de la demande est dans le champ de
compeacutetence des psychologues nous avons eacuteteacute
formeacutes agrave ce travail La demande des meacutedecins
de lrsquoeacutequipe du patient ou de sa famille doit ecirctre
analyseacutee
Peut-on imaginer que se faire connaicirctre
comme neuropsychologue lorsqursquoon est psy-
chologue serait un moyen drsquoeacutechapper agrave la diffi-
culteacute de maintenir notre position singuliegravere
dans le monde de la santeacute
Certes la pratique de la neuropsychologie re-
quiert des connaissances sur le fonctionne-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 14
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
ment du cerveau sur les troubles cognitifs as-
socieacutes aux leacutesions ceacutereacutebrales sur la significa-
tion des localisations anatomo-cliniques et ce
travail permanent de reacuteflexion et drsquoeacutechange
avec les autres intervenants dans la prise en
charge drsquoun patient est enrichissante et parfois
passionnante comme peuvent lrsquoexprimer les
lettres de motivation des demandes de stages
Mais pratiqueacutee par des psychologues elle pour
reste un lieu privileacutegieacute ougrave la parole du patient
peut ecirctre entendue pas seulement sur ses
troubles ou ses capaciteacutes preacuteserveacutees mais sur
ce qursquoil comprend de ce qui lui arrive sur son
ressenti et le psychologue est preacutesent pour
lrsquoaccompagner dans ce nouveau travail psy-
chique Ecirctre speacutecialiseacute en neuropsychologie
est une position exigeante comme pour
chaque psychologue crsquoest lrsquoabsolue neacutecessiteacute
drsquoactualiser nos connaissances sur les patholo-
gies les nouveaux outils mais crsquoest aussi
prendre le risque de partager nos doutes sur
notre approche drsquoun patient dont on prend en
compte lrsquohistoire le contexte affectif social
professionnel Crsquoest une tacircche difficile que
drsquoessayer drsquoaborder un patient dans sa globali-
teacute et pas seulement sur ses troubles cognitifs
Personnellement je ne suis jamais sucircre drsquoavoir
bien analyseacute lrsquoensemble des eacuteleacutements que le
patient me permet drsquoappreacutehender jrsquoai la
chance de ne pas ecirctre seule dans mon service
et de pouvoir partager mes doutes avec mes
collegravegues
Enfin le terme neuropsychologue peut repreacute-
senter une menace pour le corps des psycho-
logues
Nous expeacuterimentons chaque jour la difficulteacute agrave
deacutefendre notre place de psychologue On nous
reproche notre image floue drsquoecirctre des
eacutelectrons libres dans les services drsquoecirctre des
produits de luxe sans nomenclature de nos
activiteacutes (si ce nrsquoest dans la CCAM qui ne con-
cerne que les meacutedecins) Le texte qui eacuteclaire
notre champ drsquoactiviteacute le seul qui ait une valeur
leacutegale est celui de 1985 qui deacutefinit notre statut
et nous savons bien combien lrsquoincitation au res-
pect de ce texte est une tacircche reacutecurrente pour
nous Jrsquoai commenceacute agrave travailler agrave lrsquoAP-HP en
1971 la publication de ce texte puis des circu-
laires de 1991 ont repreacutesenteacute un moment drsquoes-
poir mais jrsquoai appris tout au long de mes an-
neacutees drsquoexpeacuterience que ce travail drsquoexplicitation
de ce qursquoest un psychologue nrsquoa pas de fin
Parfois la confusion qui regravegne dans lrsquoesprit de
nos employeurs les arrangent bien pour
exemple des postes de neuropsychologues
animateurs offerts dans les EPHAD Parfois
cette confusion est sincegravere tel nouveau chef
de service qui travaille depuis de longues an-
neacutees avec des psychologues et qui reccediloit de la
DRH un rappel sur le temps FIR et qui srsquoeacutetonne
de son contenuhellip
Notre code de deacuteontologie est une reacutefeacuterence
indispensable pour nous mais nrsquoest toujours
pas un texte opposable agrave un employeur
Ces textes ont eacuteteacute eacutecrits pour les psycho-
logues ce sont des repegraveres pour les psycho-
logues Il a existeacute un mouvement qui souhaitait
diffeacuterencier les psychologues et les neuropsy-
chologues avec la volonteacute drsquoobtenir un statut agrave
part Quand on connaicirct la difficulteacute drsquoune recon-
naissance leacutegale la fragiliteacute du corps des psy-
chologues toujours precirct agrave se morceler en cen-
taines drsquoassociationshellip on peut se demander si
le meacutetier de psychologue nrsquoest pas effective-
ment en danger et se revendiquer neuropsy-
chologue peacutedopsychologue comme le laisse
entendre lrsquoactuelle fiche meacutetier nous expose
encore plus hellip (heureusement cette fiche doit
ecirctre remplaceacutee en 2012)
Notre seule protection repose sur les textes de
loi qui deacutefinissent le titre de psychologue il nrsquoy
a pas de titre de neuropsychologue ni de titre
de psychologue clinicien et ce nrsquoest pas lrsquoaven-
ture du titre de psychotheacuterapeute ni les travaux
en cours agrave la DGOS qui doivent nous rassu-
rerhellip
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 15
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Psychologue clinicien en psychotraumatologie
du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Universiteacute Paris Descartes
E n 1997 un deacutecret du ministegravere de la
Santeacute creacutee le reacuteseau des CUMP
(Cellules dUrgence Meacutedico-
Psychologique) propulsant des psychologues
cliniciens sur le terrain de lurgence aux cocircteacutes
de meacutedecins psychiatres et de parameacutedicaux
De nouvelles missions soffrent agrave ces profes-
sionnels peu formeacutes au deacutepart pour intervenir
dans ces contextes de catastrophes collectives
(accidents agrave retentissement majeur catas-
trophes naturelles guerres terrorisme etc)
Peu agrave peu des reacuteflexions et groupes de travail
speacutecifiques se creacuteent (au sein notamment de
lAFORCUMP - Association de recherche et de
formation des CUMP) afin de mieux deacutefinir les
fonctions et les compeacutetences de chacun dans
ce domaine bientocirct nommeacute
psychotraumatologie Cette nouvelle cli-
nique (dans sa forme institutionnelle et dans
sa dimension traumatique en situations
extrecircmes) a souleveacute de nombreux deacutebats
passionneacutes agrave propos de la leacutegitimeacute ou non de
lintervention de terrain (sur les sites et aux
abords des catastrophes) Cependant il sagira
plutocirct de discuter ici de la speacutecialisation eacuteven-
tuellement neacutecessaire des psychologues dans
ce domaine - du cocircteacute du savoir-faire - comme
des retrouvailles avec une position de clinicien
classique - du cocircteacute du savoir-ecirctre et de la
subjectivation
Agrave lrsquoheure ougrave se multipliaient donc diffeacuterentes
formes de violence et notamment au moment
de lrsquoeacutepoque terroriste parisienne (attentats
meacutediatiseacutes St Michel Port-Royal 1995-1996)
les psychologues ont vu leur champ drsquoaction et
leurs fonctions srsquoeacutelargir des nouvelles mis-
sions et nouvelles structures se deacuteveloppaient
pour venir au secours des victimes agrave la de-
mande de nos gouvernants et de psychiatres
militaires expeacuterimenteacutes dans ce domainehellip Jrsquoai
eu la chance de participer agrave ce processus degraves
le deacutebut et tregraves rapidement je me suis poseacutee
des questions sur ces interventions qui mrsquoap-
paraissaient pour ainsi dire hors cadre
Hors cadre parce que dans lrsquourgence
Hors cadre parce que nombre drsquointerventions
avaient lieu sur le terrain peu apregraves la catas-
trophe loin du confort du cabinet ou de lrsquohocircpi-
tal
Je me souviens agrave lrsquoeacutepoque mrsquoecirctre rueacutee sur le
code de deacuteontologie en vigueur depuis le 22
mars 1996 et me rassurer en lisant
La mission fondamentale du psychologue est
de faire reconnaicirctre et respecter la personne
dans sa dimension psychique Son activiteacute
porte sur la composante psychique des indivi-
dus consideacutereacutes isoleacutement ou collectivement
Oufhellip nous nrsquoeacutetions donc pas compleacutetement
hors-cadrehellip cependant je nrsquoavais pas vrai-
ment appris agrave travailler sur les bancs de la fac
Sans la demande du patient (mecircme pour lrsquoen-
fant le parent eacutetait demandeur sinon lrsquoinstitu-
tion scolairehellip)
Sans un cadre institutionnel classique
Et certainement pas en prise directe avec la
reacutealiteacute drsquoun eacuteveacutenementhellip
Quelques options universitaires tout de mecircme
assureacutees par des enseignants ayant participeacute agrave
des missions humanitaires mrsquoavaient deacutejagrave per-
mis drsquointerroger des dispositifs de soins hors
norme
Dans nos deacutebuts jrsquoai donc co-animeacute un groupe
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 16
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
de travail destineacute speacutecifiquement aux
psychologues pour reacutefleacutechir agrave notre pratique
Voici comment nous nous repreacutesentions alors
les choses
Nouvelles missionshellip = hellip nouvelles compeacute-
tences Ce que jrsquoai nommeacute dans mon introduc-
tion savoir-faire
1 NOUVELLES COMPEacuteTENCES REQUISES
ndash DU COcircTEacute DU SAVOIR-FAIRE
Lors des soins immeacutediats ou
defusing (cagraved sur le terrain dans les
heures qui suivent lrsquoattentat la catastrophe
naturelle la prise drsquootages lrsquoaccident col-
lectif etc)
Le psychologue doit reconstruire un cadre en
fonction de la situation qui se preacutesente agrave lui
crsquoest-agrave-dire en labsence de cadre deacutefini
(configuration du lieu dureacutee de la mission
nombre de sujets agrave prendre en charge etc
sont inconnus agrave lrsquoavance) Ceci neacutecessite de sa
part une capaciteacute dadaptation une souplesse
psychique dans son intervention ainsi qursquoun
cadre theacuteorique interne solide pour ne pas ceacute-
der nous mecircme agrave la panique ou au deacuteborde-
ment eacutemotionnel Le cadre theacuteorique solide
renvoyait surtout pour nous aux eacutecrits sur le
traumatisme et agrave ce qursquoon appelait alors la
victimologie
Pour illustrer ce propos je peux vous parler
drsquoune mission effectueacutee agrave Pointe Noire au Con-
go lorsque nous eacutetions chargeacutes avec un psy-
chiatre militaire de lrsquoeacutevaluation psychopatholo-
gique des ressortissants franccedilais en pleine
guerre civile (octobre 1997) Nous avons effec-
tivement ducirc nous adapter agrave lrsquoabsence de cadre
rassurant dans le sens ougrave nos deacuteplacements
eacutetaient extrecircmement limiteacutes en raison du con-
texte drsquoinseacutecuriteacute permanente marqueacute par des
tirs quotidiens drsquoarmes automatiques Il srsquoagis-
sait eacutegalement drsquoinventer des lieux de consulta-
tions et des modes drsquoapproches originaux pour
cette population bien souvent cloicirctreacutee dans les
appartements deacutevasteacutes par les milices armeacutees
Mais je souhaite citer drsquoautres situations moins
exceptionnelles afin de vous montrer agrave quel
point le psychologue dans ce travail drsquourgence
peut ecirctre ameneacute agrave reacutealiser des entretiens dans
des lieux inhabituels voire insolites comme agrave
bord drsquoun avion lorsque nous avons proceacutedeacute au
rapatriement des victimes du crash drsquoavion du
Seacuteneacutegal (en feacutevrier 1997) ou dans un car lors-
que nous avons accompagneacute les familles des
enfants victimes de lrsquoavalanche des Orres ou
encore dans un aeacuteroport lors de lrsquoaccueil de
populations reacutefugieacutees (du Congo ou du Kosso-
vo) ou dans une citeacute universitaire pour la prise
en charge des victimes drsquoattentats etc
Ici le psychologue doit ecirctre precirct agrave aller vers les
victimes sans attendre une demande de leur
part (drsquoautant plus que les personnes sont sou-
vent en eacutetat de choc de confusion de sideacutera-
tion etc) Alors rappelons-le que notre forma-
tion nous apprend plutocirct agrave travailler avec la de-
mande du patient comme principe inheacuterent agrave
la rencontre theacuterapeutique
Ensuite le psychologue est ameneacute agrave srsquointerro-
ger sur la position de neutraliteacute bienveillante
Alors que neutraliteacute signifie ne pas eacutemettre de
jugements de critiques de deacutesapprobation
nous voyons comment dans lrsquourgence le clini-
cien peut (je dirais mecircme doit) juger de lrsquoadap-
tation drsquoun comportement par exemple quitte agrave
deacutecider drsquoune hospitalisation ou drsquoun rapatrie-
ment En effet le psychologue doit savoir repeacute-
rer et informer les victimes des symptocircmes
psychopathologiques eacuteventuels favoriser la
demande de prise en charge theacuterapeutique ul-
teacuterieure si besoin est repeacuterer et orienter les
personnes les plus fragiles en faisant bien la
distinction entre eacutetat de stress aigu et entreacutee
potentielle dans une pathologie traumatique
Mecircme si ces fonctions de diagnostic drsquoeacutevalua-
tion drsquoorientation existent dans le cadre de
notre profession celles qui visent agrave informer agrave
lrsquoavance et agrave preacutevenir relegravevent habituellement
plutocirct de la speacutecificiteacute meacutedicale
Par ailleurs sur le terrain la position et latti-
tude du psychologue sont encore une fois un
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 17
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
peu particuliegraveres pour lui puisqursquoil doit assurer
une preacutesence rassurante contenante (voire
maternante au sens de Winnicott) apporter de
la chaleur et de lhumaniteacute Lrsquointervention drsquour-
gence se situe du cocircteacute du holding Ferenczi
en charge des soldats en prise avec des neacute-
vroses de guerre soulignait deacutejagrave ce pheacuteno-
megravene de reacutegression des patients les faisant re-
venir agrave un stade archaiumlque (en proie agrave des an-
goisses violentes et massives de destruction
morcellementhellip) et agrave des comportements in-
fantiles (ne plus savoir marcher perdre son
autonomie pour les besoins de la vie quoti-
dienne etc) Ici le traumatisme est externe et
agit par effraction physique et psychique deacute-
sorganisant les modaliteacutes deacutefensives habi-
tuelles On dit aussi que le traumatisme est en-
treacute par tous les pores de la peau et envahit
tous les sens (visuels olfactifs auditifs etc) Il
srsquoagit alors pour le psychologue drsquoexercer une
veacuteritable fonction de pare-excitation
drsquoenveloppe protectrice (Au sens de D Winni-
cott et de D Anzieu) fonction qui peut srsquoac-
compagner de gestes apaisants
Travailler dans ce type de dispositif ne srsquoimpro-
vise pashellip Ainsi le psychologue doit avoir reccedilu
une formation speacutecifique A lrsquoappui un nouvel
Extrait du code de deacuteontologie des psycho-
logues chapitre compeacutetences
Le psychologue tient ses compeacutetences de
connaissances theacuteoriques reacuteguliegraverement mises
agrave jour drsquoune formation continue et drsquoune forma-
tion agrave discerner son implication professionnelle
dans la compreacutehension drsquoautrui
Pour notre domaine drsquointervention la for-
mation porte avant tout sur
1 La clinique traumatique la symptomatologie
de la neacutevrose traumatique de lrsquoESPT mais
aussi de tous les eacutetats de deacutesorganisa-
tion aigus des comportements de panique col-
lective etc elle porte eacutegalement sur le fonc-
tionnement psychique entraveacute par le trauma
donnant lieu agrave des reacuteameacutenagements transi-
toires parfois tregraves eacuteloigneacutes drsquoune clinique clas-
sique
2 La dynamique de groupe un groupe pris
dans une catastrophe repreacutesente une enve-
loppe psychique groupale qui elle-mecircme peut
se trouver effracteacutee par la violence de lrsquoeacuteveacutene-
ment le collectif est alors briseacute et ne pourra
plus fonctionner comme avanthellip Que la prise
en charge soit groupale ou bien mecircme indivi-
duelle il est fondamental drsquoecirctre au clair avec
ces concepts de la clinique groupale
Nous venons de pointer les principales con-
naissances et compeacutetences neacutecessaires au
psychologue qui intervient dans lrsquourgence ou
dans des dispositifs de soins exceptionnels mis
en place suite agrave des eacuteveacutenements qui sortent de
lrsquoordinairehellip pour autant ce savoir-faire nrsquoa de
sens que srsquoil srsquoarticule avec un savoir-ecirctre
propre agrave la fonction habituelle du psychologue
2 LORSQUE LE SAVOIR-FAIRE REJOINT
LE SAVOIR-EcircTRE
Je poursuis ma lecture du code de deacuteontologie
(chapitre compeacutetences) le psychologue est
garant de ses qualifications particuliegraveres et deacute-
finit ses limites propres compte tenu de sa for-
mation et de son expeacuterience Il refuse toute in-
tervention lorsqursquoil sait ne pas avoir les compeacute-
tences requises Ainsi il doit savoir sil peut
assurer un soin immeacutediat dans lrsquourgence ou srsquoil
doit refuser ce type de mission en fonction de
ses limites personnelles et professionnelles de
sa vulneacuterabiliteacute (changeante au fil du temps et
de son histoire personnelle) de ses projections
eacuteventuelles
Il est inviteacute eacutegalement agrave repeacuterer et agrave connaicirctre
ses propres reacuteactions psychiques agrave leacutecoute de
ce type de patients de ce qui tient parfois de
lintoleacuterable savoir ou apprendre agrave repeacuterer
ses limites personnelles ses propres fan-
tasmes de sauveur ou ses mouvements
drsquoidentification agrave la victime crsquoest agrave dire ses
propres eacutelans contre-transfeacuterentiels Ces con-
naissances restent largement favoriseacutees par un
travail personnel au cours duquel le psycho-
logue a appris agrave ecirctre eacutecouteacute et par la mise en
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 18
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
place de supervision reacuteguliegravere
Dans le cadre de lrsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue est le seul agrave de-
voir se passer drsquoinstrument (pas de mateacuteriel
meacutedical ni de theacuterapeutique meacutedicamenteuse
ou encore de mateacuteriel technique reacuteserveacutes aux
meacutedecins infirmiers secouristes etc) De ce
fait comme lrsquoexprime Colette Chiland il devient
son propre instrument celui qui permet de
comprendre et drsquointervenir agrave mains nues
Lrsquooriginaliteacute de sa formation vient du travail sur
soi que le clinicien a effectueacute pour acqueacuterir
une certaine maicirctrise de lui-mecircme comme ins-
trument Autrement dit ce que le psychologue
met au service de lrsquoautre ce ne sont pas seule-
ment ses connaissances mais aussi son appa-
reil psychique sa psycheacute son fonctionnement
sa capaciteacute de ressentir de comprendre et
drsquoeacutelaborer Le savoir du clinicien devient un sa-
voir vivant incarneacute ougrave il paie de sa personne
Crsquoest principalement cette position qui le dis-
tingue drsquoun autre intervenant
Dans la clinique du traumatisme il est fonda-
mental de prendre conscience de ce qursquoon
eacuteprouve lors de lrsquoeacutecoute drsquoun blesseacute psychique
aux prises avec des pheacutenomegravenes drsquoeffractions
internes afin de ne pas ecirctre gouverneacute par des
reacuteactions non controcircleacutees dans la compreacutehen-
sion du patient et dans la reacuteponse qursquoon lui
donnera Nous voyons comment cette eacutecoute
ne peut se contenter drsquoun savoir plaqueacute elle
doit ecirctre au contraire un travail actif qui permet
des allers ndash retours entre probleacutematique per-
sonnelle et ressenti du patient sans que cette
premiegravere nrsquointerfegravere de maniegravere neacutegative Et
crsquoest bien en restant sensible et en acceptant
de le rester dans les limites que nous venons
de fixer que le sujet se sentira libre drsquoexprimer
eacutemotions penseacutees honteuses sentiments de
culpabiliteacute et drsquohumiliation inheacuterents agrave la dyna-
mique traumatique
Enfin nous le savons bien lrsquoeacutecoute srsquoexerce
dans un double registre ce qui est dit et ce qui
nrsquoest pas dit le contenu manifeste et le conte-
nu latent Ces dimensions concernent tout au-
tant le clinicien qui doit savoir se taire pour lais-
ser lrsquoautre parler et parler pour lui faciliter la pa-
role Dans notre contexte drsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue doit eacutegalement
chercher agrave eacutetablir petit agrave petit et degraves que pos-
sible une distinction entre fantasmes
(individuels) et eacuteveacutenements reacuteels (veacutecus par
tous) pour diffeacuterencier angoisse interne
(subjective) et peur (objective) des objets ex-
ternes
Il est ainsi un passeur agrave ce moment de frac-
ture dans lrsquohistoire du sujet Il fait alors le lien
entre le passeacute la bregraveche traumatique et la
reconstruction agrave venir
EN CONCLUSION
Dans un contexte hors du commun puisque
hors cadre et souvent hors demande il me
paraicirct essentiel de garder nos re-
pegraveres classiques de psychologue clinicien
Soulignons que nous restons pour le patient un
psychologue supposeacute savoir Dans cette cli-
nique deacuteroutante et violente bien entendu le
cadre interne tapisseacute de connaissances speacuteci-
fiques devient opeacuterant et garant de notre pro-
fessionnalisme Nous voyons finalement agrave quel
point la speacutecialisation est en partie incontour-
nable (mais comme pour tout autre type de cli-
nique les soins psychiques aupregraves de sujets
deacutependants en fin de vie de patients psycho-
tiques de nourrissons de familles de sans-
logishellip ne srsquoimprovisent pas drsquoavantage) sans
nous faire perdre de vue le socle de formation
commun qui nous reacuteunit et met en exergue la
speacutecificiteacute du Psychologue qui se caracteacuterise
bien par son orientation vers lrsquoeacutecoute qui prend
sens eacutecoute drsquoune parole drsquoun trajet drsquoune
rupture dans la continuiteacute discours drsquoun sujet
agent de son propre destin
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Oncologie meacutedicale Hocircpital Saint-Louis
J ai commenceacute agrave travailler agrave lhocircpital
comme psychologue en oncologie agrave la fin
des anneacutees 80
Le contexte eacutetait diffeacuterent de maintenant
Deux choses mavaient beaucoup marqueacutee et
interpelleacutee
- le manque de prise en charge de la douleur
- lattitude qui consiste agrave cacher la maladie et
sa graviteacute aux patients
La douleur neacutetait pas une cible de laction theacute-
rapeutique elle avait une valeur diagnostique
supposeacutee sameacuteliorer avec les traitements de
la maladie sans une attention particuliegravere agrave son
traitement (1)
Le meacutedecin eacutetait perccedilu comme deacutetenteur dune
veacuteriteacute qui faisait loi
Voilagrave quelques propos quil neacutetait pas rare
dentendre de la part du meacutedecin au patient
Faites-moi confiance ne pensez agrave rien la chi-
miotheacuterapie cest mon problegraveme vous pensez
agrave gueacuterir on aura toujours une moleacutecule pour
vous soigner on va se battre
Au deacutecegraves du patient on pouvait entendre il
est mort mais en reacutemission
Et le meacutedecin sadressant agrave moi ne parlez
pas de la mort aux patients vous savez on a
deacutejagrave vireacute une psychologue
Plusieurs eacuteveacutenements vont faire eacutevoluer la meacute-
decine et son discours dans la prise en charge
du patient
Agrave la fin du XXegraveme siegravecle lOrganisation Mon-
diale de la Santeacute (circulaire du 19-1-1994) a
deacutefini comme prioriteacute la lutte contre la dou-
leur
La creacuteation des eacutequipes anti-douleur sera un
eacuteveacutenement important ainsi que la recherche de
nouveaux antalgiques Lrsquoeacutevolution de cette
prise en charge va se reacutepandre en canceacuterolo-
gie et dans la meacutedecine en geacuteneacuteral
Les premiers Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Ligue
contre le Cancer ont donneacute la parole aux pa-
tients il y a eu une demande de psychologues
dans les services pour une prise en compte de
la deacutetresse psychique
Le Plan Cancer en 2006 va donner des direc-
tives qui reacuteglementent aujourdhui la consulta-
tion dannonce et les soins de supports
La psycho-oncologie neacutee aux Eacutetats-Unis arrive
aussi en Europe et cest en 1994 quest creacuteeacutee
la Socieacuteteacute Franccedilaise de Psycho-Oncologie
(SFPO)
Son but est de deacutevelopper des outils des meacute-
thodes pour deacutepister et ainsi traiter preacutecoce-
ment les risques des difficulteacutes psychologiques
Elle sinscrit dans une approche bio-psycho-
sociale de la maladie canceacutereuse La speacutecifici-
teacute nest pas la prise en compte de la subjectivi-
teacute du patient mais ladaptation de celui-ci aux
diffeacuterentes situations traverseacutees pendant la ma-
ladie Cette discipline qui eacutetudie les attitudes
psychologiques et eacutemotionnelles survenant
pendant la maladie canceacutereuse pourrait laisser
croire quil y a des reacuteactions speacutecifiques agrave cette
maladie Son approche est de plus en plus co-
gnitivo-adaptative avec protocoles reacutefeacuterentiels
deacutemarche qualiteacute
Dans le champ de la psycho-oncologie on
trouve le terme de psycho-oncologue
Ce mot est utiliseacute de faccedilon un peu anarchique
on y trouve le psychologue le psychiatre mais
aussi dautres professionnels intervenant au-
pregraves des malades et de leur famille Ce nest
pas parce que nous avons quelques connais-
sances en oncologie que nous pouvons utiliser
ladjectif oncologue
Ce terme peut ecirctre source de confusion il ne
deacutefinit pas notre speacutecificiteacute et il me paraicirct aussi
seacutegreacutegatif dune pathologie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 20
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Cest pour cela que nous voulons garder le
terme de psychologue clinicien
Dans ce mot il y a la dimension clinique cest agrave
dire lobservation du patient agrave son chevet
Mon travail consiste agrave accompagner soutenir
le patient dans ce parcours difficile quil entre-
prend avec la maladie
Le cancer produit un remaniement identitaire
pour le sujet ce qui neacutecessite de lui offrir un
espace de parole
Cest la psychanalyse qui de mon point de vue
offre les meilleurs outils pour travailler la cli-
nique du reacuteel Cest avec notre propre parcours
analytique que nous psychologues pouvons
bien prendre en compte la dimension incons-
ciente propre agrave lhumain
Je ne me situe donc pas dans le champ de la
psycho-oncologie au discours trop normatif
Notre clinique dans un service dhospitalisation
Cest agrave tout stade deacutevolution de la maladie
quun travail theacuterapeutique peut se mettre en
place avec le psychologue
On a beaucoup parleacute du dispositif dannonce
annonce du diagnostic visant agrave assurer agrave la fois
une bonne administration du soin et son
humanisation
Ces consultations cherchent agrave atteacutenuer limpact
traumatique Il est proposeacute au patient de ren-
contrer un psychologue
Il nest pas rare que le patient me dise ils ne
se rendent pas compte il y a trop dinforma-
tions drsquoun seul coup je nai pas encore reacutealiseacute
que jai un cancer et on me parle de perruque
pour la perte des cheveux de dieacuteteacuteticien de
psy mais je nen suis pas lagrave moi
Pour les patients cest la deacutecouverte brutale du
diagnostic puis le choc des traitements Nous
savons que le temps psychique nest pas le
temps meacutedical et que dans cette clinique cest
au cas par cas que nous pouvons intervenir ce
qui est traumatique pour un patient ne lest pas
pour un autre
Un patient me disait reacutecemment le cancer
menvahit je ne pense quagrave ccedila je ne peux plus
lire regarder un film il est omnipreacutesent Voilagrave
une description du reacuteel
Il sagit de faire entendre agrave une eacutequipe meacutedi-
cale tourneacutee plus vers la maladie que vers le
malade et ce dans une organisation tregraves tech-
nique et de plus en plus sophistiqueacutee la neacuteces-
siteacute de prendre en compte la subjectiviteacute du pa-
tient dans un espace qui en paraicirct deacutepourvu
La demande de leacutequipe vis agrave vis du psy peut
correspondre agrave une demande de compliance
au traitement que le patient refuse elle sou-
haite aussi souvent que le psy reacuteconforte le pa-
tient agrave qui on a donneacute une mauvaise nouvelle
Comme dit Jeacuterocircme Alric dans son article Qui
eacutecoute quoi la sphegravere psychologique de-
vient une fonction constituante de la personne
globale au mecircme titre que la sphegravere digestive
dermatologique et dont il faut soccuper (2)
Au psychologue de faire valoir aupregraves du pa-
tient lintention de lui donner une place pour
entendre et faire entendre sa position subjec-
tive
Souvent je suis interpelleacutee par les soignants
dans des situations de deacutetresse par exemple
quand les antalgiques se reacutevegravelent inefficaces
ou sont refuseacutes Dans les entretiens les pa-
tients deacuteplient leur histoire leur roman fami-
lial La douleur physique se mecircle agrave la souf-
france psychique
Une patiente qui avait un cancer du sein avec
des meacutetastases osseuses me disait jai mal
lagrave en me montrant sa poitrine
Je lui avais demandeacute si elle en avait parleacute au
meacutedecin
Elle me reacutepondit en me regardant droit dans les
yeux cette douleur-lagrave le meacutedecin ne peut
pas me la soigner cest lhistoire avec mon ma-
ri qui me fait mal Celui-ci lavait quitteacutee et elle
se retrouvait seule avec son jeune fils
En quelques mots elle avait situeacute ce qui la fai-
sait souffrir au-delagrave des localisations meacutetasta-
tiques Elle savait faire la diffeacuterence entre le
physique et ce qui venait lagrave sajouter agrave sa
propre histoire douloureuse
Comme dit Clavreul dans Lordre meacutedical la
souffrance renvoie le sujet qui leacuteprouve agrave son
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 21
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
fantasme cest-agrave-dire agrave sa propre histoire et au
discours quil peut tenir sur son histoire Il y a
un seul discours qui se tienne sur la souf-
france et cest celui de la personne qui
leacuteprouve (3)
Un patient encore reacutecemment me disait ne pas
vouloir devenir grabataire comme son pegravere
Il seacutetait occupeacute de lui depuis son plus jeune
acircge il poussait la chaise roulante dans ses deacute-
placements il eacutetait sa beacutequille Mon patient ar-
riveacute en fin de vie voudra jusqursquoau bout se deacute-
placer aux toilettes et rester indeacutependant dans
les gestes du quotidien
Aux soignants qui ne comprenaient pas pour-
quoi il sobstinait agrave vouloir faire tout seul des
gestes devenus si difficiles il a fallu dire sans
reacuteveacuteler le pourquoi combien ceacutetait important
pour le patient de garder cette indeacutependance
Ceacutetait pour lui sa digniteacute sa liberteacute sa volonteacute
Je voudrais mettre laccent sur la singulariteacute de
ces rencontres avec des patients deacutejagrave tregraves gra-
vement atteints et qui degraves le premier entretien
se saisissent de cette possibiliteacute de parole
Il y a la douleur et lautre versant de la souf-
france langoisse
Monsieur O est un patient algeacuterien qui a eacuteteacute
opeacutereacute drsquoun cancer du poumon Avant linterven-
tion chirurgicale il se sentait precirct agrave affronter
cette eacutepreuve cest apregraves quil a senti ses
forces diminuer Jai changeacute je ne suis plus le
mecircme quavant en fait je crois que je nai pas
accepteacute lopeacuteration Il dit regretter il aurait preacute-
feacutereacute vivre avec son cancer il serait mort avec
Ce qui semble bouleverser ce patient nest pas
tant la maladie en elle-mecircme que ses conseacute-
quences Avec ce bout de corps quon lui a reti-
reacute cest aussi toute une part de lui qui semble
partie
Leacutepreuve du cancer entraicircne toujours une at-
teinte de linteacutegriteacute corporelle
Ce corps qui est traiteacute par le meacutedical de faccedilon
organique biologique revient souvent dans le
discours des patients Ce qui eacutemerge cest
lhorreur des amputations des meacutetastases qui
se reacutepandent agrave linteacuterieur du corps mais aussi
ce qui se donne agrave voir agrave toucher Un corps en-
dommageacute que le patient a du mal agrave reconnaicirctre
comme le sien qui se bouche qui enfle qui
eacutetouffe
Le corps peut devenir un objet agrave controcircler per-
seacutecuteur qui nest plus investi de deacutesir Cette
parole descriptive du corps peut prendre toute
la place dans le discours du patient avant que
quelque chose du subjectif nrsquoapparaisse
Cest dans un deuxiegraveme temps que Monsieur
O apregraves avoir exprimeacute limpossibiliteacute daccep-
ter cette perte anatomique ndash une partie du pou-
mon ndash pourra associer sur dautres pertes qui
viennent sintriquer entre passeacute et preacutesent
Langoisse de mort est tregraves freacutequente dans
cette pathologie dans les entretiens il ne sagit
pas de viser directement ce que nous pensons
ecirctre lobjet de cette angoisse mais de soutenir
dans la conversation les deacutetours de cette indi-
cible
Lintervention aupregraves de la famille nest pas
rare
Monsieur L 63 ans a un cancer de la vessie et
il est deacutecrit par leacutequipe soignante comme tregraves
exigeant et peacutenible Je deacutecide daller me preacute-
senter
Il me fait une description assez preacutecise de sa
maladie qui a deacutebuteacute il y a quelques mois Je
lui demande ce quil pense lui de tout ccedila Il me
regarde attend plusieurs secondes et me reacute-
vegravele que sa femme a une maladie heacutematolo-
gique agrave surveiller et quil sinquiegravete beaucoup
pour elle Ils nont pas denfant Il ajoute que
dans le service on ne lui fait pas grand-chose
son eacutetat ne srsquoameacuteliore pas quil serait mieux
avec sa femme En mecircme temps elle ne peut
pas soccuper de lui agrave la maison Il part dans
un SSR (soins de suite et de reacuteeacuteducation)
Quelques semaines apregraves il revient dans le
service et il demande agrave me voir Il va ecirctre tregraves
direct On vient de lui parler de son mauvais
pronostic agrave court terme il veut que je le ren-
contre avec sa femme Il me dit Elle deacuteprime
Si je meurs elle va se laisser mourir Pour moi
cest insupportable Effectivement sa femme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 22
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
est tregraves deacuteprimeacutee affaiblie par sa maladie
mais elle accepte de voir son geacuteneacuteraliste et
prendre un traitement On lui trouve un heacuteber-
gement agrave la Maison des Parents pour lui eacuteviter
lrsquohocirctel Elle sera sur place pour voir son mari
elle pourra eacutechanger avec les familles heacuteber-
geacutees agrave la Maison des Parents Petit agrave petit elle
tisse des liens Son mari deacutecline rapidement je
la vois dans la chambre elle me parle de lui
des choses quils aimaient faire ensemble Elle
est calme rassureacutee par la preacutesence de
lrsquoeacutequipe Apregraves la mort de son mari nous nous
sommes revues puis teacuteleacutephoneacute et rapidement
elle prend la deacutecision de deacutemeacutenager agrave Annecy
pregraves dune amie Elle aura un suivi heacutematolo-
gique lagrave-bas
Jai souvent penseacute agrave cet homme dont le dis-
cours eacutetait centreacute sur la plainte et qui a changeacute
rapidement de registre agrave partir du moment ougrave
on a pris en compte sa souffrance et soutenu
sa femme aupregraves de lui
Dans notre travail il me paraicirct important de
rendre compte aux eacutequipes de nos interven-
tions pour permettre aux soignants des eacuteclair-
cissements sur la souffrance psychologique
des patients Cela peut permettre un change-
ment de rapport soignant-patient dans des si-
tuations ougrave le patient par langoisse sous-
jacente se montre peacutenible pour lrsquoeacutequipe voire
agressif agrave son eacutegard
Toujours pour ce qui concerne la famille une
reacuteelle eacutevolution a eacuteteacute la prise en compte des
enfants du patient Degraves le diagnostic et tout le
long de la maladie une attention particuliegravere de
la part de leacutequipe permet deacuteviter les situations
dramatiques que lon rencontrait dans le pas-
seacute lorsque lenfant deacutecouvrait la graviteacute de la
maladie du parent la veille de la mort de celui-
ci sans avoir eu la possibiliteacute de sy preacuteparer et
den parler
Pour conclure je dirai que la science et la tech-
niciteacute ont beaucoup eacutevolueacute agrave lhocircpital mais quil
y a eu peu de changement du cocircteacute de la prise
en compte meacutedicale de la dimension subjective
des patients
On est passeacute dune prise en charge de la dou-
leur qui eacutetait nieacutee agrave des situations parfois de
surmeacutedicalisation La meacutedecine malgreacute ses
progregraves consideacuterables ne peut pas soulager
toute les douleurs et encore moins de faccedilon
systeacutematique et protocolaire Elle doit tenir
compte de la singulariteacute de chaque patient
De mecircme sil y a encore une vingtaine dan-
neacutees on ne donnait pas suffisamment dinfor-
mations meacutedicales sur la maladie et le devenir
du patient on est passeacute aujourdhui agrave un trop
dinformations dans loptique de dire la veacuteriteacute
au malade et de le preacuteparer sur le chemin de
sa fin de vie
Il nest pas rare que je rencontre un patient agrave
qui on a asseneacute une veacuteriteacute meacutedicale quil ne
voulait pas entendre Pour le patient il sagit de
pouvoir se deacuteprendre de ce savoir meacutedical qui
peut venir empecirccher toute penseacutee le cristalli-
ser dans une angoisse de mort et entraicircner le
sujet vers une mort psychique avant la mort
reacuteelle
Nous sommes lagrave pour partager ce temps avec
lui ce temps qui est incertain et qui permet au
sujet davoir des interrogations exprimer des
affects
Le psychologue dorientation analytique peut
apporter agrave ses eacutequipes un eacuteclairage des situa-
tions
Une collaboration avec les meacutedecins est agrave en-
courager encore faut-il que les meacutedecins puis-
sent prendre le temps et donc se deacutetacher
dune pure gestion des soins pour penser et
analyser leur pratique
1 Baszanger I 1995 Douleur et meacutedecine La
fin dun oubli Le Seuil
2 Alric J 2004 Qui eacutecoute quoi Essai de
repeacuterage de deux postures deacutecoute possible agrave
lhocircpital Eregraves in Collectif sous la direction de
Patrick Ben Soussan Le cancer approche psy-
chodynamique chez ladulte
3 Clavreul J 1978 LOrdre meacutedical Paris Le
Seuil
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 23
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des textes
officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin Page 24
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous avez man-
queacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine Page 32
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal Page 43
Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip
Quels changements pour le meacutetier de
psychologue
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 24
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin
V ingt ans se sont eacutecouleacutes depuis la creacutea-tion de Psyclihos Depuis de nombreux rapports textes officiels ont eacuteteacute diffuseacutes
qui concernent la santeacute dune maniegravere geacuteneacute-rale et plus particuliegraverement la santeacute mentale Quelle place nous psychologues avons-nous dans ces eacutecrits De fait lorsque lon interroge la bibliothegraveque des rapports publics sur le site de la Documen-tation franccedilaise sur le terme Psychologue on saperccediloit que seule une liste constitueacutee dune petite cinquantaine de reacutefeacuterences apparaicirct un peu plus toutefois que pour le terme psychiatre qui apparaicirct dans 47 rapports mais beaucoup moins que celui dinfirmier qui apparaicirct dans 121 rapports Jai choisi parmi ces textes ceux qui mont sem-bleacute les plus significatifs dune certaine image du psychologue vu par les politiques ou ladmi-nistration Je vais maintenant vous preacutesenter cette compilation dextraits dans un ordre chro-nologique Lun des premiers rapports qui cite les psycho-logues porte sur les Strateacutegies drsquoutilisation des antiretroviraux dans lrsquoinfection par le VIH en 1998 Il affirme Le soutien par les psy-chologues est lune des pratiques diverses des services hospitaliers qui meacuteritent drsquoecirctre deacuteve-loppeacutees La mecircme anneacutee un rapport sur les Uniteacutes agrave encadrement eacuteducatif renforceacute et leur ap-port agrave lheacutebergement des mineurs deacutelin-quants fait agrave la demande de lInspection Geacuteneacute-rale des Affaires Sociales preacuteconise Afin de preacutevenir lusure des eacutequipes et aussi de leur apporter une certaine capaciteacute de recul il faut mettre en place des proceacutedures de soutien au moment des crises et de supervision dans les-quelles le recours au psychologue simpose En 2000 un rapport au Premier ministre Lionel Jospin Pour une nouvelle politique publique
daide aux victimes fait le constat suivant Pour le reacuteseau de lINAVEM (Feacutedeacuteration natio-nale daide aux victimes et de meacutediation qui comprend 150 associations) les emplois de psychologue repreacutesentent seulement 9 des emplois salarieacutes Cet aspect pourtant fonda-mental de laide aux victimes nest pas suffi-samment deacuteveloppeacute En 1994 lintervention dun psychologue con-cernait environ un quart des associations daide aux victimes Le rapport propose la creacuteation de centres daide pour enfant-adolescent et adulte com-prenant obligatoirement des psychologues cli-niciens Des groupes de parole et deacutecoute pour en-fants victimes seraient animeacutes par des psycho-logues scolaires ayant suivi une formation speacute-cifique ou des psychologues cliniciens exteacute-rieurs Le projet dinteacutegration de psychologues clini-ciens dans les milieux scolaires semble alors ecirctre au cœur de la nouvelle politique publique daide aux victimes Une politique ambitieuse sur le papier hellip Les suites don-neacutees agrave ce rapport ont eacuteteacute la creacuteation dun numeacutero national daide aux victimes en 2001
Pourtant en 2000 on sinteacuteresse beaucoup agrave nous le rapport du Haut comiteacute de la santeacute pu-blique sur la souffrance psychique des ado-lescents et des jeunes adultes consacre un paragraphe au rocircle du psychologue dans le chapitre intituleacute Lrsquoinstitution scolaire Bilan en CM2 Il est eacutecrit
Le recours agrave un psychologue dans le milieu scolaire est pratiquement limiteacute aux tests drsquoorientation Lrsquoabsence de psychologue dans le secondaire semble faire partie de cette mau-vaise image de la psychiatrie qui persiste dans le grand public Le regard drsquoun psychologue exteacuterieur agrave lrsquoeacuteta-blissement dans des reacuteunions reacuteguliegraveres de synthegravese et de concertation peut ecirctre preacutecieux
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Ces contacts auraient de plus lrsquoavantage de relier les prises en charge de situations diffi-ciles entre lrsquointeacuterieur et lrsquoexteacuterieur des eacutetablisse-ments et de faire se connaicirctre les profession-nels des diffeacuterentes structures Ainsi 20 des adolescents pensent avoir be-soin de consulter un psychologue mais 137 disent avoir renonceacute du fait de difficulteacutes finan-ciegraveres Toujours en 2000 au colloque sur lrsquoEnfance maltraiteacutee la Ministre deacuteleacutegueacutee agrave lrsquoEnfance et agrave la famille reacuteclame Un psy pour chaque enfant Dans son second rapport Claire Brisset la deacute-fenseure des enfants sinteacuteresse eacutegalement au rocircle des psychologues et agrave leur formation Pour elle les psychologues souffrent depuis longtemps dun problegraveme didentiteacute du fait dune reconnaissance tardive de leur profes-sion et de lexistence de plusieurs types de psychologues recruteacutes agrave des niveaux deacutetudes diffeacuterents en reacutefeacuterence aux psychologues sco-laires et conseillers dorientation- psycho-logues La Deacutefenseure des Enfants propose d -Institutionnaliser les psychotheacuterapies den-fants et dadolescents par des psychologues cliniciens sur prescription du psychiatre et rembourseacutees par la Seacutecuriteacute sociale De la mecircme faccedilon quun meacutedecin speacutecialiste prescrit des seacuteances de kineacutesitheacuterapie qui sont alors rembourseacutees par la seacutecuriteacute sociale un psychiatre aussi bien dans le public que dans le priveacute doit pouvoir prescrire des theacuterapies effectueacutees par un psychologue clinicien Cette mesure qui se pratique deacutejagrave dans cer-tains pays europeacuteens comme lAllemagne ne peut ecirctre mise en place quaux conditions sui-vantes - quune formation homogegravene de psychologie clinique sanctionneacutee par un diplocircme unique soit organiseacutee - que cette formation permette dacceacuteder agrave un nouveau statut de psychologue clinicien recon-nu par lensemble des administrations concer-neacutees - que cette formation soit agrave la fois theacuteorique et pratique Cette reacuteforme permettrait de - mieux utiliser les compeacutetences des nombreux psychologues qualifieacutes actuellement deacutepour-vus dun emploi agrave temps plein ou contraints faute de poste dexercer dautres meacutetiers
Dans cette hypothegravese le psychiatre aurait le rocircle danimateur de leacutequipe soignante et de supervision des psychotheacuterapies meneacutees par les psychologues cliniciens En outre un tel scheacutema devrait pouvoir sappli-quer non seulement dans les structures pu-bliques mais aussi dans le secteur libeacuteral Les psychologues cliniciens peu nombreux en libeacute-ral pourraient alors sinstaller en cabinet (au mecircme titre que les infirmiegraveres ou les masseurs kineacutesitheacuterapeutes) En ce deacutebut des anneacutees 2000 les politiques sinteacuteressent beaucoup aux questions relatives agrave la santeacute en juillet 2000 Martine Aubry alors ministre de lemploi et de la solidariteacute confie aux Drs Piel et Roelandt une mission de reacute-flexion et de prospective dans le domaine de la santeacute mentale qui donnera lieu un an plus tard agrave un rapport intituleacute De la psychiatrie vers la santeacute mentale Un rapport dans lequel on parle peu des psychologues si ce nest pour dire que leur formation est insuffisante et quun internat en psychologie est neacutecessaire ce dont on reparlera beaucoup dans les anneacutees sui-vantes En aoucirct 2001 Psyclihos travaille sur le 1
er rap-
port deacutetape du groupe de travail de la DGS sur leacutevolution des meacutetiers en santeacute mentale Des psychologues de toute la France choqueacutes et inquiets se reacuteunissent au sein du Collectif Na-tional des Psychologues de la FPH Les me-sures preacuteconiseacutees par le 2
egraveme rapport deacutetape
paru en janvier 2002 mettent le feu aux poudres Pour rappel le rapport insiste sur le deacuteveloppement des reacuteseaux de santeacute la mise en place de proceacutedures de protocoleshellip Et surtout il preacutevoit des niveaux dintervention hieacuterarchiseacutes avec des intervenants de 1
egravere
ligne des professionnels de soins primaires et des intervenants speacutecialiseacutes et deacutejagrave des glisse-ments de compeacutetences vers les infirmiers et les meacutedecins geacuteneacuteralistes Il est agrave nouveau question de transfert de com-peacutetences en 2003 avec le rapport Berland sur la deacutemographie des professions de santeacute au titre eacuteloquent Coopeacuteration des professions de santeacute le transfert de tacircches et de compeacute-tences Le chapitre qui nous concerne sinti-tule Un transfert de compeacutetences en psychia-trie difficile agrave organiser Le Pr Berland eacutecrit Les auditions que jai pu mener lors de la mis-
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sion deacutemographie des professions de santeacute et les eacutechanges que jai pu avoir avec les psy-chiatres ont reacuteveacuteleacute de reacuteelles difficulteacutes agrave envi-sager le transfert de compeacutetences dans le champ de cette speacutecialiteacute En effet si certains professionnels considegraverent souhaitable la mise en perspective de collaborations organiseacutees avec les psychologues cliniciens dautres la trouvent inutile ou non souhaitablehellip Il est neacute-cessaire denvisager la part de lactiviteacute aujour-dhui assureacutee par les psychiatres qui doit ecirctre confieacutee en toute collaboration agrave des psychologues praticiens formeacutes agrave la fois par les faculteacutes de psychologie et les faculteacutes de meacutedecine pour construire ce nouveau meacutetier qui reacutepond agrave un besoin clairement identifieacute Au mecircme moment est diffuseacute le rapport Cleacutery Melun intituleacute Plan dactions pour le deacutevelop-pement de la psychiatrie et la promotion de la santeacute mentale qui reprend les principales pro-positions des rapports preacuteceacutedents par ex con-cernant la reacuteorganisation des soins en psychia-trie Concernant la formation des psycho-logues Ces formations sont tregraves diverses sui-vant les universiteacutes certaines eacutetant speacuteciali-seacutees dans la psychanalyse ce qui aboutit agrave des formations mono reacutefeacuterenceacutees Il en va de mecircme des stages qui sont souvent difficiles agrave trouver et ne permettent pas toujours dassister aux entretiens avec les patients Enfin dans un contexte de plus en plus seacutelectif les examens theacuteoriques et formels prennent le pas sur lac-complissement dun stage et lobtention dune formation clinique Il poursuit Les psychologues souhaitent eux-mecircmes faire progresser cette situation Ils se sont doteacutes dun code de deacuteontologie qui pose des prin-cipes clairs notamment au regard de leur for-mationhellipAvec un stage qui doit correspondre agrave leacutequivalent dun internat en psychologie dont la dureacutee ne devrait pas ecirctre infeacuterieure agrave 2 se-mestres et dont le contenu devrait faire lobjet dune validation finale Toujours en 2003 il faut un rapport eacutecrit par une psychologue pour que le terme soit citeacute 97 fois soit presque dans une page sur deux Cest le rapport de Marie de Hennezel sur Fin de vie le devoir daccompagnement Elle preacuteconise une preacutesence renforceacutee de psy-chologues dans tous les services sensibles
Pour favoriser le maintien agrave domicile des per-sonnes elle demande que lrsquoon eacutetudie la possi-biliteacute drsquoun financement drsquoun forfait de 3 agrave 5 seacuteances avec un psychologue pour un accom-pagnement de fin de vie sur le modegravele de ce qui est proposeacute dans le plan cancerElle de-mande la creacuteation dau moins un mi-temps de psychologue pour chaque service confronteacute agrave la fin de vie des patients Pour elle la Formation universitaire du psycho-logue ne le preacutepare pas neacutecessairement agrave la confrontation avec la mort drsquoautrui et son cor-tegravege drsquoangoisses et de fantasmes Elle ajoute Crsquoest la raison pour laquelle nous estimons qursquoune formation compleacutementaire personnelle (psychanalyse) ou une formation dans le cadre drsquoun DU de soins palliatifs ou drsquoun stage drsquoune semaine au moins dans une uniteacute de soins palliatifs (USP) doit lui permettre d lsquoeacutevaluer srsquoil est precirct ou non agrave travailler dans un service confronteacute agrave la mort des patients srsquoil peut accueillir sans trop drsquoangoisse celles des autres patients familles soignants Pour les psychologues de ville elle pose la question drsquoun conventionnement de la profes-sion puisque seuls les psychologues libeacuteraux inteacutegreacutes dans un reacuteseau (dans le cadre drsquoun groupement de coopeacuteration sanitaire) et reacutemu-neacutereacutes agrave la vacation sont pris en charge par lrsquoassurance maladie Elle ajoute Cela limite consideacuterablement lrsquooffre drsquoaide psychologique agrave domicile En mars 2005 la Commission Peacuterinataliteacute en-fants et adolescents recommande le renforcement des eacutequipes de materniteacute en psychologues dans le but de Mieux prendre en charge la santeacute mentale et les troubles psy-chiatriques de la megravere etou du couple En 2005 le rapport Santeacute justice et dange-rositeacutes pour une meilleure preacutevention de la reacutecidive eacutevoque les formations initiale et conti-nue des psychologues dans le domaine meacutedico-leacutegal qui devraient ecirctre renforceacutees afin de mieux prendre en consideacuteration les probleacutema-tiques relatives agrave la dangerositeacute psychiatrique dans la pratique clinique et la mise en oeuvre de lrsquoexpertise peacutenale Le rapporteur revendique la possibiliteacute pour les psychologues drsquoassurer le suivi du condam-neacute et demande laugmentation des effectifs des services peacutenitentiaires drsquoinsertion et de proba-
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tion notamment par lrsquointeacutegration de psycho-logues au sein des eacutequipes Dans son rapport sur Le fonctionnement des services dinformation et dorientation lIns-pection geacuteneacuterale de lEducation nationale re-met largement en question le statut des con-seillers dorientation-psychologues Des divergences de vues interviennent sou-vent entre ceux qui sont issus de la psycholo-gie essentiellement clinique et les autres qursquoils aient eacutetudieacute la psychologie du travail ou la so-ciologie lrsquoeacuteconomie le droit lrsquohistoire ou la phi-losophie Lrsquoouverture drsquoesprit des seconds aux questions du marcheacute de lrsquoemploi ou mecircme aux perspec-tives de deacutecentralisation est freacutequente Les psychologues cliniciens semblent plus autocen-treacutes individualistes voulant se concentrer sur leur pratique au jour le jour de conseil et drsquoac-compagnement des individus deacutesireux drsquoap-porter des solutions au cas par cas(sic ) Lrsquoeacutevolution de la profession qui a gagneacute le titre de psychologue en 1991 va dans le sens drsquoune eacutemancipation tout agrave fait eacutetonnante Les COPsy constituent un cas singulier drsquoexercice libeacuteral au sein mecircme de la fonction publique Ils nrsquoont en fait de comptes agrave rendre agrave personne lrsquoautori-teacute des directeurs est purement formelle (hellip) Et comble les conseillers ne sont pas inspecteacutes() Le rapport propose de scinder le corps des COPsy avec dun cocircteacute des psychologues de lenseignement secondaire et de lautre des conseillers dinformation et dorientation Les missions des psychologues de leacuteducation seraient centreacutees sur le deacutepistage et lexamen des eacutelegraveves pour lesquels on craint une inadap-tation la preacutevention des deacutecrochages la preacute-vention des conduites addictives en lien avec le personnel meacutedico-social leacutecoute un premier accompagnement dans les cas de profondes souffrances psychologiques le lien avec les services exteacuterieurs hellip Dans les eacutetablissements les psychologues complegraveteraient et renforceraient leacutequipe eacutedu-cative et meacutedico-sociale Pour lIGEN il est manifeste que les conseil-lers drsquoorientation-psychologues nrsquoont ni le temps ni les compeacutetences ni les moyens de faire face seuls agrave lrsquoensemble des missions que les usagers (au sens large du terme) pour-raient attendre drsquoeux Si beaucoup de responsables ministeacuteriels re-
grettent fortement lappellation de psycho-logues du statut de 1991 il faut reconnaicirctre que peu de personnels souhaitent labrogation totale de cette appellation y compris parmi ceux qui ont eacuteteacute recruteacutes avant 1990 sans avoir fait deacutetudes initiales de psychologie Il convient aussi de signaler quil y a unanimiteacute pour consideacuterer quon ne peut pas faire de psy-chologie clinique ou theacuterapeutique dans les eacutetablissements Tous pensent mecircme que cest impossible En fait en 1991 il aurait fallu creacuteer par la loi un statut de conseiller qui existe dans dautres pays Pour autant les auteurs concluent que la ques-tion de labrogation du statut de psychologue a eacuteteacute poseacutee mais ils ont consideacutereacute que ce neacutetait pas opportun dans le contexte actuel Mais le recrutement doit ecirctre diversifieacute Il srsquoagit de mettre un terme au monopole des li-cencieacutes en psychologie qui de lrsquoavis de la grande majoriteacute de nos interlocuteurs et notam-ment de lrsquoencadrement des services drsquoorienta-tion et des formateurs nrsquoest nullement imposeacute par lrsquoexercice des missions et a reacuteduit la diver-siteacute intellectuelle qui caracteacuterisait le corps avant 1991 En outre le poids excessif des li-cencieacutes en psychologie a favoriseacute des attitudes drsquoindividualisme et de repli au deacutetriment des autres facettes de la profession Dans le rapport fait au nom de la mission dinformation sur la famille et les droits de lenfant en 2006 Valeacuterie Peacutecresse et Patrick Bloche recommandent de faire prendre en charge par lassurance-maladie les consulta-tions des mineurs et de leur famille aupregraves de psychologues sur prescription meacutedicale afin dameacuteliorer la prise en charge des enfants et de leur famille On reparle encore de formation des psycho-logues en 2006 avec le rapport de la mission parlementaire de Jean-Paul GARRAUD sur la dangerositeacute Il comprend un chapitre impor-tant relatif agrave lexpertise psychologique et au psychologue expert on eacutetait agrave leacutepoque en pleine affaire dOutreau Il souligne encore une fois lrsquoheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute des diplocircmes tous les psy-chologues ne suivent pas une formation en psychopathologie clinique et peuvent avoir des formations theacuteoriques tregraves diverses Il conviendrait de redeacutefinir le champ drsquointerven-tion des psychologues fondeacute sur leur qualifica-
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tion professionnelle et drsquoenvisager les possibili-teacutes de lrsquoarticulation de leurs expertises avec celles effectueacutees par les psychiatres Organiser une confeacuterence de consensus sur lrsquoexpertise psychologique afin de reacutefleacutechir sur les objectifs et les limites des expertises psy-chologiques lrsquoidentiteacute lrsquoeacutethique et la deacuteontolo-gie des experts leur solitude ainsi que sur les modaliteacutes pertinentes de reacutealisation des exper-tises et de leur eacutevaluation Ceci est resteacute un vœu pieux agrave ce jour hellip Il revendique Une plus grande qualification des formations des psychologues Outre une maturiteacute professionnelle une forma-tion particuliegravere est neacutecessaire (connaissance des diffeacuterents types et champs drsquoexpertise des proceacutedures judiciaires aspects criminolo-giques deacuteontologiqueshellip) Cette speacutecialisation pourrait deacutecouler drsquoun cur-sus post-universitaire en psychologie clinique et pathologique agrave lrsquoexemple des DU sur la pratique de lrsquoexpertise psychologique ou la psy-chologie leacutegale (Universiteacute Lille Aix-Marseille Rouen Poitiershellip) En 2007 les psychologues sont les stars du rapport de lIGAS consacreacute agrave Gestion et utili-sation des ressources humaines dans 6 eacuteta-blissements de santeacute speacutecialiseacutes en psy-chiatrie le terme psychologue apparaicirct 224 fois Les reacuteveacutelations sont lagrave encore fracassantes Il faut adapter le statut et le cursus de forma-tion et de carriegravere des psychologues pour mieux utiliser leurs compeacutetences et les inteacutegrer dans les eacutequipes Les problegravemes de peacutenurie de psychiatres doivent ecirctre anticipeacutes par une seacuterie de mesures - augmenter les attributions des psychologues en leur permettant dans certains cas deffec-tuer des actes jusque lagrave reacuteserveacutes aux meacutede-cins - ouvrir une formation de manager de structure psychiatrique agrave des cadres intermeacutediaires type cadre supeacuterieur de santeacute psychologue cadre socio-eacuteducatif Il serait possible douvrir le concours de cadre supeacuterieur de santeacute agrave dautres professions soi-gnantes psychologues eacuteducateurs speacuteciali-seacutes assistants de service social Les psychologues peuvent-ils remplacer les psychiatres et agrave quel prix Ce nest pas seulement parce quon manque
de psychiatres cest aussi parce que les psy-chologues repreacutesentent une certaine tradition de la psychiatrie europeacuteenne pas uniquement arc-bouteacutee sur les traitements chimiotheacuterapeu-tiques Cest aussi parce quils possegravedent en principe des compeacutetences permettant de deacuteve-lopper des aspects tregraves importants en psychia-trie - eacutevaluation des capaciteacutes cognitives et mise au point de programmes de reacutehabilitation - psychotheacuterapies de diverses natures eacutegale-ment de soutien dans les cas de traitement meacute-dicamenteux lourd - supervision de groupes de soignants pour eacuteviter les pheacutenomegravenes de chroniciteacute de mal-traitance - encadrement deacutequipes notamment de pro-fessionnels dhorizons divers Il est clair quil serait eacutegalement inteacuteressant de pouvoir leur confier des accueils de 1
egravere ligne
degraves lors que nombre de demandes de consul-tation signifient plutocirct une souffrance psychique quune pathologie psychiatrique La question de savoir sils devraient avoir le droit de prescrire ou de renouveler des pres-criptions au long cours meacuterite decirctre poseacutee Une telle eacutevolution neacutecessiterait une speacutecialisa-tion apregraves le diplocircme geacuteneacuteral de psychologue peut-ecirctre linstauration de ce que daucuns ap-pellent un internat et cette fois commun avec linternat en psychiatrie En attendant davoir notre ordonnancier si tant est que nous le souhaitions les tacircches speacuteci-fiques en psychiatrie pour les psychologues tout ce qui sapparente au bilan agrave leacutevaluation aux psychotheacuterapies de diverses obeacutediences Voilagrave ce que pensent les politiques et les admi-nistratifs de notre meacutetier mais ccedila nest pas la reacutealiteacute de notre meacutetier Tout dabord quelques chiffres sur la deacutemogra-phie des psychologues Nous sommes de plus en plus nombreux de 5500 eacutequivalents temps plein en 1997 agrave 11500 en 2009 preuve que notre rocircle est de plus en plus reconnu par les eacutetablissements Il reste encore beaucoup agrave faire en clinique priveacutee ougrave ils ne sont que 350 ETP La preacutecariteacute est tou-jours le lot de notre profession Il y a deux fois plus de psychologues agrave temps partiel que dans les autres emplois non meacutedicaux 40 de psy-chologues sont agrave temps partiel dans le public plus des trois quarts dans le priveacute soit le
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double La profession est tregraves feacuteminiseacutee avec 8 femmes sur 10 psychologues elles ont en moyenne cinq ans de moins que leurs con-fregraveres masculins la moyenne dacircge eacutetant de 42 ans Les femmes de moins de 40 ans repreacute-sentent 38 des effectifs nationaux La densiteacute nationale des psychologues est de 37 psychologues pour 100000 habitants soit un psychologue pour 2700 Par comparaison celle des psychiatres est de 22 pour 100000 habitants La densiteacute en psychologues libeacuteraux est de 7 Concernant les secteurs dactiviteacute 87 des psychologues sont salarieacutes Un tiers exerce dans un eacutetablissement de santeacute principalement du secteur public ougrave 7 sur 10 sont employeacutes agrave plein temps Lexercice en libeacuteral ne concerne que 8 des effectifs Comment les psychologues perccediloivent-ils leur meacutetier Dana Castro et Marie Santiago ont publieacute dans Le Journal des psychologues ndeg 233 deacutec 2005- janv 2006 les Reacutesultats dune enquecircte na-tionale sur Evolution des repreacutesentations et construction identitaire du meacutetier de psy-chologue Les donneacutees ont eacuteteacute recueillies agrave partir de 93 questionnaires suite agrave une enquecircte nationale lanceacutee par le Journal des Psychologues aupregraves de ses lecteurs fin 2004 Les reacutesultats montrent que les psychologues ont une image assez steacutereacuteotypeacutee de leur meacute-tier qui ne se modifie pas significativement ni au cours des eacutetudes ni agrave lentreacutee dans la vie professionnelle Au deacutebut de leurs eacutetudes 50 des reacutepondants perccediloivent le psychologue comme un speacutecialiste de laide et de leacutecoute Pour 27 cest un meacutetier qui sexerce en solitaire 30 disent ne pas en avoir une repreacutesentation preacute-cise La repreacutesentation de la profession eacutevolue pro-gressivement Apregraves quelques anneacutees dexer-cice le psychologue perccediloit davantage sa fonc-tion certes encore comme un meacutetier daide et deacutecoute pour la moitieacute dentre eux mais qui sexerce en eacutequipe pour 21 selon des moda-liteacutes et avec des outils speacutecifiques au premier rang desquels lentretien et lexamen psycholo-giques pour 18 des reacutepondants La repreacutesentation du meacutetier se modifie-t-elle au
cours du cursus universitaire - Non pour 22 des reacutepondants pour lesquels elle reste identique tout au long du parcours - Oui pour 36 pour lesquels elle se modifie gracircce aux enseignements theacuteoriques en lien avec la clinique et la psychopathologie - Encore oui pour 34 pour lesquels elle se transforme gracircce aux stages et au contact des professionnels Dune maniegravere geacuteneacuterale les psychologues comptent sur eux-mecircmes et leurs compeacutetences en matiegravere dexpeacuterience dapprentissage sur le tas de solidariteacute et de travail en eacutequipe plutocirct que sur la qualification qui elle valorise les titres les connaissances formelles la revendi-cation de lautonomie et les distinctions statu-taires Seul 1 des reacutepondants eacutevoque les no-tions dorganisation du travail en terme de sta-tut professionnel de cadre A de reacutemuneacuteration de formation ou de titre proteacutegeacute de psycho-logue Autant dire quil reste beaucoup de tra-vail pour avoir une repreacutesentation profession-nelle qui puisse ecirctre partageacutee tant par les psy-chologues que par leurs partenaires profes-sionnels ougrave compeacutetence personnelle et qualifi-cation professionnelle sont indispensables Pourtant 78 des reacutepondants deacutecrivent des difficulteacutes au sein de leur institution Un sur 5 estime que ses collegravegues ne connaissent pas son meacutetier et quils en ont une image neacutegative qui est veacutecue comme deacutevalorisante 17 se sentent isoleacutes dans les eacutequipes avec lesquelles ils travaillent Une eacutetude plus reacutecente puisquelle date de 2010 vient compleacuteter la preacuteceacutedente il sagit de celle de Elise Marchetti Claude Lafrogne et Sandrine Schoenenberger eacutegalement publieacutee dans le Journal des psychologues ndeg 283 deacutec 2010- janv 2011 et qui sintitule Que pensent-ils de nous Etude des repreacutesentations so-ciales du psychologue Que pensent les psychologues deux-mecircmes Ils eacutevoquent lobjet de leur travail la psycheacute le cadre de leur activiteacute (cadre theacuteorique pra-tique eacutethique) et le contenu mecircme de leur tra-vail agrave savoir leacutevaluation et laccompagnement Chez les professionnels du meacutedico-social nos collegravegues deux repreacutesentations saffrontent Les eacuteducateurs techniques et les reacuteeacuteducateurs (peacutedicure podologue masseur kineacutesitheacutera-peute ergotheacuterapeute psychomotricien ortho-
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phoniste orthoptiste ou dieacuteteacuteticien) ont une vi-sion neacutegative le psychologue se confond avec le psychanalyste le charlatan en lien eacutetroit avec la psychiatrie la folie Les personnels administratifs et les eacuteducateurs ont une vision plus positive et concregraveteet sont plus attacheacutes au cadre cadre de travail du psychologue lui-mecircme mais aussi la contribu-tion quil peut apporter dans le cadre dun tra-vail pluridisciplinaire Quant aux sujets de la population geacuteneacuterale on doit distinguer ceux qui ont deacutejagrave eu recours au psychologue et ceux qui nont jamais consulteacute Ceux qui nont jamais consulteacute ont un discours plutocirct positif mais abstrait centreacute sur la dualiteacute problegraveme-reacutesolution (motifs-beacuteneacutefices) Les autres qui sont plus jeunes et plutocirct des femmes cherchent agrave deacutefinir ce quest un psy-chologue avec une vision plus concregravete de notre activiteacute de nos meacutethodes et une eacutevoca-tion de la sphegravere affective et du veacutecu person-nel Toutefois les sujets ayant deacutejagrave consulteacute un psychologue ont tendance agrave le confondre avec le speacutecialiste meacutedical cest-agrave-dire le psy-chiatre Dans Transformation de la psychiatrie et pratiques des psychologues LASAR Labora-toire danalyse socio-anthropologique du risque Universiteacute de Caen 2002 sous la direction dAnne Golse Le discours dAnne Golse sociologue est plus optimiste Elle eacutecrit La profession de psycho-logue se visibilise de plus en plus que ce soit dans la prise en charge des malades mentaux ou de la souffrance psychique On le voit dans la croissance deacutemographique certes encore modeste de cette profession mais cela sappreacute-hende eacutegalement dans la maniegravere dont les textes administratifs mentionnent (psychiatres psychologues) ou bien (psychiatres ou psycho-logues) Mais cette eacutemergence nouvelle dune certaine pariteacute dans les textes vient eacutegalement reconnaicirctre que de plus en plus de demandes sont directement adresseacutees au psychologue et marque lindividualisation de cette profession agrave coteacute de celles de psychiatres ou dinfirmiers Dans un rapport au Conseil national de lOrdre des meacutedecins en 2001 sur le suivi du malade mental il est dit que les psychologues pren-nent de plus en plus de place dans le monde de la psychiatrie relayant ou mecircme remplaccedilant les psychiatres dont le nombre va en diminuant
tregraves seacuterieusement Toutefois les psychologues ne sont pas satis-faits de leur place au sein de la psychiatrie pu-blique ni personnel meacutedical ni personnel pa-rameacutedical ils elles ont du mal agrave trouver leur place dans lunivers hospitalier marqueacute par lexistence de ce partage clair Le psychologue agrave la fois dedans et dehors eacuteprouve une ab-sence de lien avec linstitution et pour certains un sentiment dinexistence institutionnelle chro-nique Le psychologue nest pas dans le soin mecircme sil contribue aux soins ce qui renvoie agrave sa neacutecessaire place dexteacuterioriteacute et agrave la trans-versaliteacute de sa fonction Comme leacutecrivait Co-lette Chiland en 1983 le statut du psychologue clinicien est une position intermeacutediaire et sin-guliegravere qui le maintien dans un espace pro-fessionnel eacutetriqueacute Certains ressentent de lamertume agrave ecirctre reacuteduits au rocircle de psychotheacute-rapeutes etou estiment ne pas ecirctre reconnus comme des professionnels agrave part entiegravere ils se qualifient de sous-psychiatres quand deacutepen-dants du psychiatre ils ne peuvent directement recevoir les patients qui font appel agrave eux Cette revendication des psychologues est devenue pour certains un carcan qui limite le champ de leur intervention Les psychologues sont lobjet dambivalence Ils peuvent ecirctre consideacutereacutes comme la profession montante en raison de la chute de la deacutemographie des psychiatres et de la de-mande sociale qui leur est adresseacutee les psy-chologues pourraient ecirctre en 1
egravere ligne pour
supplanter ces absences mais la mise en cause de leur statut et de leur formation par le reacutecent statut de psychotheacuterapeute les fragilise Pour conclure je citerai Marc Turpyn au col-loque Le psychologue clinicien le singulier et le collectif La profession de psychologue est-elle un symptocircme de lrsquoinstitution hospita-liegravere Un certain nombre de signes permet depuis longtemps de le penser son identiteacute indeacutefinis-sable sa situation drsquoexception dans un en-semble institutionnel globalement meacutedical son inexistence dans les instances de lrsquohocircpital les oublis reacuteguliers dont elle fait lrsquoobjet dans les textes sa position institutionnelle hors hieacuterar-chie les interrogations reacutecurrentes sur ses sta-tuts lrsquoincompreacutehension de ses outils de travail par les administrations etc Ce qui est nouveau ce sont les nombreuses
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tentatives pour mettre un terme agrave cette position symptomatique volonteacute de faire entrer la pro-fession dans le champ meacutedical fiches meacutetier deacutefinition de compeacutetences introduction de speacute-cialiteacutes preacute-identifieacutees en articulation avec les neurosciences et les approches comportemen-tales circulaire drsquoapplication visant au controcircle ou agrave la disparition des activiteacutes de FIR etc Nrsquooublions pas que la preacutecariteacute entretenue des psychologues le deacutesir de reconnaissance la peur ndash comme lrsquoa montreacute reacutecemment la mise en application du deacutecret sur le titre de psycho-theacuterapeute ndash poussent aussi agrave la normalisation Normaliser la profession serait sans doute la reacuteduire agrave lrsquoombre drsquoelle-mecircme
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Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebut
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine
M AI 1999 PROPOSITION DrsquoAMENDEMENT
PAR B ACCOYER
Devant lrsquoabsence de reacuteglementation autour de lrsquoexercice de la psychotheacuterapie et dans un contexte de lutte contre les deacuterives sectaires sous couvert de psychotheacuterapie un premier amendement est proposeacute par Bernard Accoyer meacutedecin et deacuteputeacute Ce premier amendement porte sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute il est proposeacute le 4 mai 1999 agrave lrsquooccasion de lrsquoexamen du projet de loi relatif agrave la Couverture maladie universelle (CMU) OCTOBRE 1999 PROPOSITION DE LOI PAR
BACCOYER
Lrsquoamendement preacuteceacutedent ayant eacuteteacute refuseacute BAccoyer deacutepose le 13 octobre 1999 la pre-miegravere proposition de loi (ndeg 1844) visant agrave reacute-glementer le titre de psychotheacuterapeute Lrsquounique article preacutecise Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est strictement reacuteserveacute drsquoune part aux titulaires du diplocircme de docteur en meacutedecine qualifieacute en psychiatrie et drsquoautre part aux titulaires drsquoun diplocircme de troisiegraveme cycle en psychologie Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve deux professions de la santeacute mentale sont formeacutees par les universiteacutes franccedilaises les psycho-logues et les meacutedecins psychiatres Les condi-tions daccegraves et dutilisation de ces titres sont eacutetroitement encadreacutees par la loi Pourtant il existe un grave vide juridique concernant lexercice de la psychotheacuterapie La profession de psychotheacuterapeute nest en effet agrave ce jour toujours pas deacutefinie par le code de la santeacute publique Ainsi de trop nombreuses per-sonnes insuffisamment qualifieacutees voire non qualifieacutees se deacuteclarent et sinstituent psycho-theacuterapeutes en toute impuniteacute faisant courir les plus grands dangers agrave des personnes qui
par deacutefinition sont vulneacuterables et risquent de voir leur deacutetresse et leur pathologie aggra-veacutees MARS 2000 est enregistreacutee agrave la Preacutesidence de lAssembleacutee nationale sous le ndeg 2288 une pro-position de loi relative agrave lexercice de la profes-sion de psychotheacuterapeute par les deacuteputeacutes MM Jean-Michel Marchand Andreacute Aschieri Mme Marie-Heacutelegravene Aubert MM Yves Cochet et Noeumll Mamegraverehellip AVRIL 2000 PROPOSITION DE LOI DE
BACCOYER
26 avril 2000 nouvelle proposition de loi de BAccoyer Loi ndeg2342 relative agrave la prescription et agrave la conduite des psychotheacuterapies Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve En labsence de disposition du code de la santeacute publique concernant lusage des psychotheacutera-pies quiconque le souhaite peut actuellement visser sa plaque de psychotheacuterapeute et preacutetendre soigner (hellip) Ainsi le rapport de la mission interministeacuterielle de lutte contre les sectes remis en feacutevrier 2000 au Premier mi-nistre signale que certaines techniques psy-chotheacuterapiques sont devenues un outil au ser-vice de linfiltration sectaire et il suggegravere au se-creacutetariat dEtat agrave la Santeacute de cadrer ces pra-tiques Cest la raison pour laquelle javais dores et deacutejagrave deacuteposeacute le 13 octobre 1999 avec quatre-vingt-un collegravegues une proposition de loi ndeg1844 visant agrave reacuteserver lusage du titre de psychotheacuterapeute agrave des personnes titulaires de diplocircmes universitaires() Dans ce con-texte il convient deacutesormais de consideacuterer les psychotheacuterapies comme un veacuteritable traite-ment A ce titre cest leur prescription et leurs applications qui apparaissent comme devant ecirctre reacuteserveacutees agrave des professionnels deacuteten-teurs de diplocircmes universitaires attestant dune formation institutionnelle garantie dune compeacutetence theacuteorique pouvant ecirctre doubleacutee
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dune expeacuterience pratique et dun travail sur soi (hellip) Cependant certains professionnels bien que non-psychiatres ou non-psychologues cliniciens preacutesentent de solides connaissances et une expeacuterience de la patho-logie mentale et du fonctionnement psychique Il convient donc quun jury composeacute duniversi-taires et de professionnels soit habiliteacute agrave vali-der leurs compeacutetences et agrave autoriser lexercice des psychotheacuterapies agrave ceux qui pratiquent deacute-jagrave depuis plus de cinq anneacutees agrave compter de promulgation de la preacutesente loi
PROPOSITION DE LOI Article unique Il est inseacutereacute apregraves larticle L 360 du code de la santeacute publique un article L 360-1 ainsi reacutedigeacute Les psychotheacuterapies sont des traitements meacutedico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes meacutedecins quali-fieacutes en psychiatrie et psychologues clini-ciens Les professionnels qui dispensent des psychotheacuterapies depuis plus de cinq ans agrave la date de promulgation de la preacute-sente loi pourront poursuivre cette activiteacute theacuterapeutique apregraves eacutevaluation de leurs connaissances et pratiques par un jury composeacute duniversitaires et de profession-nels dont la composition est fixeacutee par deacute-cret en Conseil dEtat
OCTOBRE 2003 AMENDEMENT AU PROJET DE LOI SUR LE CODE DE LA SANTEacute PUBLIC B AC-
COYER
8 Octobre 2003 agrave lrsquoAssembleacutee nationale B Ac-coyer deacutepose un amendement ndeg71 Les psychotheacuterapies sont des traitements meacute-dico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes en psychiatrie de psychologues cliniciens et meacutedecins ayant sui-vis les formations requises Crsquoest la 3eme version (ndeg336) qui est adopteacutee agrave lrsquounanimiteacute le 8 octobre 2003 par lrsquoAssembleacutee Nationale Les psychotheacuterapies constituent des outils theacuterapeutiques utiliseacutes dans le traite-ment des troubles mentaux Les diffeacuterentes ca-teacutegories de psychotheacuterapie sont fixeacutees par deacute-cret du ministre chargeacute de la Santeacute Leur mise en œuvre ne peut relever que de meacutedecins
psychiatres ou de meacutedecins et psychologues ayant les qualifications professionnelles re-quises fixeacute par ce mecircme deacutecret Lrsquoagence Na-tionale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute apporte son concours agrave lrsquoeacutelaboration de ces conditions (hellip) On ne parle plus ici de lrsquousage drsquoun titre de psy-chotheacuterapeute mais drsquoune deacutefinition de la psy-chotheacuterapie JANVIER 2004 AMENDEMENT ACCOYER ANNU-
LANT LE PREacuteCEacuteDENT
Le 19 janvier 2004 lrsquoamendement Accoyer de-venu entre temps amendement 363 About-Matteacutei annulant le preacuteceacutedent est voteacute par le Seacutenat en ces termes Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacute-serveacute aux professionnels inscrits au registre national de psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dis-penseacutes de lrsquoinscription les titulaires drsquoun di-plocircme de docteur en meacutedecine les psycho-logues titulaires drsquoun diplocircme drsquoeacutetat et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations Les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent article sont fixeacutees par deacutecret Ici les psychanalystes reacuteguliegraverement enregis-treacutes dans les annuaires de leurs associations font leur apparition dans la liste des personnes habiliteacutees agrave user du titre de psychotheacuterapeute
AVRIL 2004 AMENDEMENT DUBERNARD
8 avril 2004 est voteacute agrave lrsquoAssembleacutee nationale lrsquoamendement devenu depuis amendement 344 preacutesenteacute par Jean-Marie Dubernard rap-porteur de la commission des affaires cultu-relles familiales et sociales
POLITIQUE DE SANTE PUBLIQUE (Nordm 1364)
(DEUXIEME LECTURE)
Amendement Nordm 344 preacutesenteacute par M Jean-Michel Dubernard rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles familiales et sociales Article 18 quater La conduite des psychotheacuterapies neacuteces-site soit une formation theacuteorique et pra-tique en psychopathologie clinique soit une formation reconnue par les associa-tions de psychanalystes (hellip) Lrsquousage du
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titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au registre national des psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dispen-seacutes de lrsquoinscription sur la liste viseacutee agrave lrsquoali-neacutea preacuteceacutedent les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psy-chologue dans des conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 portant diverses dispositions drsquoordre social nordm85-772 du 25 juillet 1985 et les psychanalystes reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans les annuaires de leurs asso-ciations
Dans lrsquoexposeacute sommaire on retrouve pour conduire des psychotheacuterapies il est neacutecessaire drsquoavoir suivi une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie La condition de lrsquoinscrip-tion sur le registre national est maintenue (hellip)Lrsquoamendement continue agrave preacutevoir que les titu-laires drsquoun diplocircme de meacutedecine les psycho-logues et les psychanalystes sont dispenseacutes de lrsquoenregistrement Ces professionnels devront satisfaire agrave lrsquoobligation de formation mention-neacutee au premier alineacutea de lrsquoarticle
9 AOUT 2004 LOI SUR LE TITRE DE PSYCHOTHEacute-
RAPEUTE ARTICLE 52
Le 28 juillet 2004 a eu lieu la reacuteunion de la commission mixte paritaire qui reacutevise lrsquoamende-ment qui est examineacute en seacuteances publiques par lrsquoAssembleacutee Nationale et le Seacutenat le 30 juil-let 2004 et devient le 09 aoucirct 2004 la loi ndeg2004-806 lrsquoarticle 52 relative agrave la politique de santeacute publique Sa parution est dans le JO ndeg185 du 11 aoucirct 2004 page 14277 texte ndeg 4 Dans cette loi larticle 18 quater revu par la commission mixte a eacuteteacute inteacutegralement repris et devient larticle 52 de la dite Loi
Article 52 Lusage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes Linscription est enregistreacutee sur une liste dresseacutee par le repreacutesentant de lEtat dans le deacutepartement de leur reacutesidence profes-sionnelle Elle est tenue agrave jour mise agrave la disposition du public et publieacutee reacuteguliegravere-ment Cette liste mentionne les formations suivies par le professionnel En cas de transfert de la reacutesidence professionnelle dans un autre deacutepartement une nouvelle
inscription est obligatoire La mecircme obli-gation simpose aux personnes qui apregraves deux ans dinterruption veulent agrave nou-veau faire usage du titre de psychotheacutera-peute Linscription sur la liste viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent est de droit pour les titulaires dun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par larticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions dordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations Un deacutecret en Conseil dEtat preacutecise les modaliteacutes dapplication du preacutesent article et les conditions de formation theacuteoriques et pratiques en psychopathologie clinique que doivent remplir les personnes viseacutees aux deuxiegraveme et troisiegraveme alineacuteas
Cet article introduit comme condition de lrsquousage du titre une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie clinique alors qursquoil stipule dans le mecircme temps que lrsquoinscription est de droit pour certains professionnels ce qui pose-ra beaucoup de problegravemes pour lrsquoeacutecriture des projets de deacutecret 2005-2009 AVANT-PROJET DrsquoAPPLICATION DE
LA LOI
Les concertations avec les professionnels con-cerneacutes par lrsquoeacutecriture drsquoun avant-projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute deacutebutent en 2005 Beaucoup de versions vont voir le jour et susciter de vives reacuteactions des professionnels Le ministegravere reacuteunit les organi-sations professionnelles agrave plusieurs reprises pour leur soumettre ces projets Quelques exemples des diffeacuterentes versions de lrsquoavant-projet de deacutecret de loi Version de lrsquoavant projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute 10 janvier 2006
Art1 Lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute neacutecessite une deacutemarche volontaire de la part des professionnels pratiquant les psychotheacuterapies Inscription sur une liste deacutepartementale (hellip) Art2 Lrsquoinscription sur la liste deacutepartemen-
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tale est subordonneacutee pour les professionnels viseacutes au 3
egraveme ali-
neacutea lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique lrsquoattestation de lrsquoobtention du diplocircme de docteur en meacutedecine ou de lrsquoun des di-plocircme viseacutes au deacutecret ndeg 90-255 du 22 mars 1990 modifieacute (liste des diplocircmes permettant de faire usage professionnel du titre de psychologue) ou de lrsquoinscrip-tion agrave un annuaire drsquoassociations de psy-chanalystes pour les autres professionnels
Lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique Le cas eacutecheacuteant lrsquoattestation de lrsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profession reacute-glementeacutee dans le champ sanitaire et so-cial Une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le do-maine de la pratique de la psychotheacutera-pie parmi les quatre approches sui-vantes analytique systeacutemique cognitivo-comportementaliste inteacutegrative La deacuteclaration sur lrsquohonneur mentionne notamment lrsquointituleacute et la date drsquoobtention du diplocircme la dureacutee de la formation le nom et les coordonneacutees de lrsquoorganisme de formation public ou priveacute qui a deacutelivreacute le diplocircme (hellip) Art8 Le cahier des charges susviseacute deacutefi-nit les modaliteacutes de la formation en psy-chopathologie clinique laquelle est drsquoun niveau master Il vise agrave permettre au pro-fessionnel souhaitant user du titre de psy-chotheacuterapeute drsquoacqueacuterir Une connaissance du fonctionnement psychique Une capaciteacute de discrimination de base des situations pathologiques en santeacute mentale Une connaissance de la diversiteacute des theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie Une connaissance des 4 principales ap-proches de psychotheacuterapie vali-deacutees scientifiquement (analytique systeacute-mique cognitivo-comportementaliste in-teacutegrative) (hellip)
Il est eacutevoqueacute un niveau master pas de men-
tion drsquoune formation universitaire la loi ne parle que drsquoune formation agrave la psychopathologie cli-nique et stipule ce que seraient les approches psychotheacuterapiques valables scientifiquement ce qui nrsquoest pas sans questionner Titre ouvert aux deacutetenteurs drsquoun diplocircme relatif agrave une pro-fession reacuteglementeacutee dans les champs sani-taires et sociaux ne correspond pas aux preacute requis de la formation en psychopathologie cli-nique Par la suite le descriptif des diffeacuterentes ap-proches de psychotheacuterapie disparaicirct au profit drsquoune connaissance des principales ap-proches utiliseacutees en psychotheacuterapie sans preacute-cision Est indiqueacute le nombre drsquoheures de for-mation theacuteorique (150 heures dans une ver-sion 500 dans une autrehellip) et de stage pra-tique Est stipuleacute que la formation en psychopa-thologie clinique peut ecirctre confieacutee agrave lrsquoUniversiteacute ou agrave des organismes passant convention avec lrsquoUniversiteacute Pour les professionnels inscrits de droit on retrouve les docteurs en meacutedecine quelles que soient leurs speacutecialiteacutes les psycho-logues quelle que soit leur formation et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement inscrits dans un an-nuaire drsquoassociation de psychanalystes ce qui nrsquoest pas un titre proteacutegeacute On exige par ailleurs de ces mecircmes professionnels une formation compleacutementaire en psychopathologie viseacutee agrave lrsquoalineacutea 4 de lrsquoarticle 52 ce qui posera pro-blegraveme certaines professions pouvant faire usage du titre de psychotheacuterapeute de droit doivent dans le mecircme texte de loi attester drsquoune formation compleacutementaire Pour tous les professionnels le cas eacutecheacuteant une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le domaine de la pratique de psychotheacuterapie une attestation drsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profes-sion reacuteglementeacutee par le code de la santeacute pu-blique ou le code de la famille et de lrsquoaction so-ciale Le cahier des charges deacutefinit les modaliteacutes de la formation en psychopathologie clinique pour acqueacuterir ou valider une connaissance des fonctionnements et des processus psychiques une connaissance des critegraveres de discerne-ment des grandes pathologies psychiatriques une connaissance des diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie une connais-sance des principales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie
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Le Ministegravere de la Santeacute ne parvient pas agrave faire aboutir lrsquoeacutecriture de deacutecrets drsquoapplication de-vant faire face aux contestations des diffeacuterents professionnels Au printemps 2008 le Ministegravere de la Santeacute deacutecide drsquoarrecircter un des projets de deacutecret drsquoap-plication de lrsquoarticle 52 soumis au CNESER (Conseil National de lrsquoEnseignement Supeacuterieur et de la Recherche) le 16 juin 2008 Dans la note de preacutesentation on retrouve il ne srsquoagit pas de creacuteer une nouvelle profession ni drsquoen-cadrer la formation et la pratique de la psycho-theacuterapie mais de preacuteciser les conditions dans lesquelles il peut ecirctre fait usage de ce titre Il y est exigeacute pour tous professionnels drsquoavoir valideacute une formation theacuteorique de 400 heures (cest-agrave-dire infeacuterieure au total de la formation en psychopathologie clinique drsquoun Master de Psychologie clinique) et un stage pratique de 5 mois Possibiliteacutes de dispenses partielles de forma-tion selon les cateacutegories professionnelles con-cerneacutees (meacutedecins meacutedecins psychiatres psy-chologues psychanalystes) 18 MARS 2009 PROJET DE LOI PORTANT REacute-
FORME DE LrsquoHOcircPITAL ET RELATIF AUX PATIENTS
Agrave LA SANTEacute ET AUX TERRITOIRES
23 JUILLET 2009 ARTICLE 91 DE LA LOI HPST
Lrsquoarticle 91 de la loi HPST du 21 juillet 2009 opegravere une modification de lrsquoarticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 pour reacutesoudre les difficulteacutes rencontreacutees agrave eacutecrire un deacutecret drsquoapplication Il modifie lrsquoarticle 52 portant sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 52 de la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 modifieacute par lrsquoarticle 91 de la loi ndeg 2009
-879 du 21 juillet 2009 Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes [hellip] Un deacutecret en Conseil drsquoEacutetat preacutecise les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent ar-ticle et les conditions de formation theacuteo-rique et pratique en psychopathologie cli-nique que doivent remplir lrsquoensemble des professionnels souhaitant srsquoinscrire au registre national des psychotheacuterapeutes Il deacutefinit les conditions dans lesquelles les ministres chargeacutes de la santeacute et de lrsquoen-
seignement supeacuterieur agreacuteent les eacutetablis-sements autoriseacutes agrave deacutelivrer cette forma-tion Lrsquoaccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires drsquoun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit drsquoexercer la meacutedecine en France ou drsquoun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-chologie ou la psychanalyse Le deacutecret en Conseil drsquoEacutetat deacutefinit les conditions dans lesquelles les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions drsquoordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations peuvent beacute-neacuteficier drsquoune dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique [hellip] Le deacutecret en Conseil drsquoEtat preacutecise eacutegale-ment les dispositions transitoires dont pourront beacuteneacuteficier les professionnels jus-tifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacuterapie agrave la date de publication du deacutecret
Il nrsquoy a plus de notion de professionnels inscrits de droit la formation en psychopatho-logie clinique est exigible de tous et lrsquoaccegraves agrave cette formation requiert un niveau de diplocircme eacuteleveacute titre de docteur en meacutedecine master de psychologie ou de psychanalyse Y sont tou-jours mentionneacutes les psychanalystes reacuteguliegrave-rement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations 20 MAI 2010 DEacuteCRET DrsquoAPPLICATION RELATIF Agrave LrsquoUSAGE DU TITRE DE PSYCHOTHEacuteRAPEUTE (CF
ANNEXE)
Le 20 mai 2010 paraicirct le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute publieacute au JO ndeg0117 du 22 mai 2010 (deacutecret ndeg 2010-534) Ce deacutecret deacutefinit les critegraveres de formation en psychopathologie clinique exigeacutee fixe les con-ditions drsquoagreacutement des eacutetablissements de for-mation preacutecise les dispenses partielles ou to-tales de formation dont peuvent beacuteneacuteficier les meacutedecins psychologues et psychanalystes et enfin arrecircte les dispositions transitoires appli-cables aux psychotheacuterapeutes en exercice agrave
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la date de publication du deacutecret Il nrsquoy est tou-jours pas fait mention de formation agrave la pra-tique psychotheacuterapique Il preacutecise une condition de diplocircme minimal pour avoir accegraves agrave cette formation Elle est reacute-serveacutee aux personnes titulaires drsquoun doctorat de meacutedecine ou drsquoun master ayant pour men-tion ou pour speacutecialiteacute la psychologie ou la psy-chanalyse Les psychiatres sont exempteacutes de formation compleacutementaire Les meacutedecins non psy-chiatres seront contraints agrave une formation com-pleacutementaire On retrouve la notion de psychologue clinicien qui ne correspond pas agrave un titre proteacutegeacute comme tel ni un parcours de formation identifieacutee Les psychologues clini-ciens nrsquoont pas de dispense totale et devront se soumettre agrave une formation theacuteorique et pra-tique compleacutementaire La formation theacuteorique comprend 400 heures drsquoenseignement pour acqueacuterir ou valider des connaissances relatives au deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques aux critegraveres de discernement des grandes patholo-gies psychiatriques aux diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie aux princi-pales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie Le stage est drsquoune dureacutee minimale de cinq mois Les professionnels justifiant drsquoau moins 5 ans de pratique de la psychotheacuterapie peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale apregraves avis de la commission reacutegionale drsquoinscription Le deacutecret ne preacutecise pas la cateacutegorie professionnelle nrsquoappartenant agrave aucune des cateacutegories preacuteceacutedentes que lrsquoon voit en effet apparaicirctre dans lrsquoannexe du deacutecret Le deacutecret a renforceacute le niveau exigeacute pour agreacuteer les eacutetablissements de formation Les psychologues notamment par le biais de leurs organisations professionnelles et syndi-cales ont deacuteposeacute un recours juridique contre le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute le 12 juillet 2010 Ils contestaient notam-ment que lrsquoon exige drsquoeux des formations com-pleacutementaires qui sont deacutejagrave incluses dans leur formation initiale Le recours a eacuteteacute examineacute le mercredi 21 sep-tembre 2011 Le rapporteur public a conclu au rejet de lrsquoensemble des requecirctes porteacute contre le deacutecret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 arrecirct du Conseil drsquoEtat du 27 octobre 2011 Ce deacutecret
est jugeacute conforme agrave lrsquoarticle 52 de la loi ndeg2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique modifieacutee par la loi ndeg2011-940 du 10 aoucirct 2011-art 47 (V) Les organisations professionnelles de psychologues sont en pourparler et eacutevoquent une modification de lrsquoannexe du deacutecret qui pourrait ecirctre en reacuteeacutecri-ture pour mettre agrave pariteacute psychologues et psy-chiatres pour la dispense totale de lrsquoenseigne-ment theacuteorique et du stage srsquoil a eacuteteacute effectueacute pendant les eacutetudes Fin 2011 les bureaux concerneacutes au Ministegravere de la Santeacute et au Ministegravere de lrsquoenseignement Supeacuterieur et de la Recherche examinent un projet de modification de lrsquoannexe du deacutecret du 20 mai 2010 afin de preacutevoir une dispense de formation theacuteorique compleacutementaire et de stage pour les titulaires du titre de psychologue ayant accompli le stage professionnel lieacute agrave lrsquoob-tention de ce titre dans les conditions preacutevues agrave lrsquoart4 du deacutecret du 20 mai 2010 Une dis-pense de toute formation theacuteorique mais reacuteali-sation drsquoun stage de 2 mois dans les conditions de lrsquoart4 du deacutecret pour les titulaires du titre de psychologue dont le stage professionnel lieacute agrave lrsquoobtention de ce titre nrsquoa pas eacuteteacute reacutealiseacute dans les conditions de cet article (voir sites des orga-nisations professionnelles et syndicales)
CONCLUSION
Au deacutecours de ce long cheminement pour lrsquoeacutela-borer une loi portant sur lrsquousage du titre de psy-chotheacuterapeute on remarquera lrsquoimpasse faite sur la formation agrave la pratique de la psychotheacute-rapie elle-mecircme Ce titre pourra ecirctre en effet deacutelivreacute agrave des personnes dont on nrsquoaura pas exi-geacute de formation agrave la psychotheacuterapie mais une formation agrave la psychopathologie clinique Une confusion suppleacutementaire dans la visibiliteacute des professions et leurs missions est introduite par le biais drsquoun nouveau titre de psychotheacuterapeute Il est agrave souligner que concernant les profes-sions reacuteglementeacutees dont font partie les psy-chologues la pratique de la psychotheacuterapie peut sous reacuteserve drsquoune formation compleacute-mentaire personnelle faire partie de leur activi-teacute Le titre de psychotheacuterapeute ne leur est donc pas neacutecessaire (Cf argumentaires sur le site des organisations professionnelles et syn-dicales)
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Decret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 1 Linscription sur le registre national des psy-chotheacuterapeutes mentionneacute agrave larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee est subordon-neacutee agrave la validation dune formation en psy-chopathologie clinique de 400 heures mini-mum et dun stage pratique dune dureacutee mi-nimale correspondant agrave cinq mois effectueacute
dans les conditions preacutevues agrave larticle 4Laccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires dun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit dexercer la meacutedecine en France ou dun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-
chologie ou la psychanalyse Article 2 Par deacuterogation aux dispositions de larticle preacuteceacutedent les professionnels mentionneacutes au cinquiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi preacuteciteacutee sont dispenseacutes en tout ou partie de la formation et du stage dans les conditions
preacutevues par lannexe 1 du preacutesent deacutecret Article 3 La formation mentionneacutee agrave larticle 1er vise agrave permettre aux professionnels souhaitant user du titre de psychotheacuterapeute dacqueacuterir
et de valider des connaissances relatives 1deg Aux deacuteveloppement fonctionnement et
processus psychiques 2deg Aux critegraveres de
discernement des grandes pathologies psy-
chiatriques 3deg Aux diffeacuterentes theacuteories se
rapportant agrave la psychopathologie 4deg Aux
principales approches utiliseacutees en psycho-
theacuterapie Article 4 Le stage pratique mentionneacute agrave larticle 1er seffectue agrave temps plein ou agrave temps partiel de faccedilon continue ou par peacuteriodes fraction-
neacuteesIl est accompli dans un eacutetablissement
public ou priveacute deacutetenant lautorisation men-tionneacutee agrave larticle L 6122-1 du code de la santeacute publique ou agrave larticle L 313-1-1 du code de laction sociale et des familles Toutefois le site du stage ne peut ecirctre le
lieu de travail de la personne en formationLe stage est placeacute sous la responsabiliteacute conjointe dun membre de leacutequipe de for-mation dun eacutetablissement agreacuteeacute en appli-
cation des articles 10 et 15 et dun profes-sionnel de leacutetablissement mentionneacute au
deuxiegraveme alineacutea maicirctre de stageIl donne
lieu agrave un rapport sur lexpeacuterience profes-sionnelle acquise soutenu devant les res-ponsables du stage et un responsable de la
formation de leacutetablissement agreacuteeacuteLe
stage est valideacute par le responsable de la
formation Article 5 Le contenu de la formation theacuteorique et pra-tique mentionneacutee agrave larticle 1er les critegraveres et modaliteacutes de son eacutevaluation ainsi que les objectifs du stage sont deacutefinis par un cahier des charges pris par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur et publieacute au Journal officiel
de la Reacutepublique franccedilaise Article 6 Leacutetablissement de formation sassure au moment de linscription que le candidat jus-tifie de lun des diplocircmes ou titres de forma-tion mentionneacutes au quatriegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 ou dun di-plocircme ou titre de formation reconnu eacutequiva-lent dans un autre Etat membre de lUnion europeacuteenne ou un autre Etat partie agrave lac-
cord sur lEspace eacuteconomique europeacuteen CHAPITRE II LE REGISTRE NATIONAL DES
PSYCHOTHERAPEUTES Article 7 ― Linscription sur la liste deacutepartementale
mentionneacutee au deuxiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 est effectueacutee par le preacutefet du deacutepar-tement de la reacutesidence profession-
nelle principale du demandeurElle
est gratuite Elle doit avoir eacuteteacute effec-tueacutee avant toute utilisation du titre de
psychotheacuterapeuteDans le cas ougrave le
professionnel exerce dans plusieurs sites en tant que psychotheacuterapeute il est tenu de le deacuteclarer et de mention-ner les diffeacuterentes adresses de ses
lieux dexerciceEn cas de change-
ment de situation professionnelle le professionnel en informe les services
du preacutefet - La demande est adresseacutee au directeur geacute-
neacuteral de lagence reacutegionale de santeacute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 39
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dans le ressort duquel se situe la reacute-sidence professionnelle du deman-deur Celui-ci deacutelivre un accuseacute de reacuteception dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute apregraves reacuteception de lensemble des piegraveces justificatives mentionneacutees agrave larticle 8 et assure linstruction pour le compte du preacutefet Il fait connaicirctre agrave ce dernier son avis sur la demande dinscription dans le deacutelai de 45
joursLe silence gardeacute par lautoriteacute
preacutefectorale agrave lexpiration dun deacutelai de deux mois agrave compter de la reacutecep-tion du dossier complet vaut deacutecision
de rejet de la demande - Lensemble des listes deacutepartementales
constitue le registre national des psy-
chotheacuterapeutes Article 8 I ― En vue de leur inscription sur la liste deacutepartementale les professionnels fournis-
sent 1deg La copie dune piegravece didentiteacute 2deg Lattestation de lobtention du titre de for-mation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute publique ou du diplocircme de
niveau master mentionneacute agrave larticle 6 3deg
Lattestation de la formation en psychopa-thologie clinique mentionneacutee agrave larticle 1er agrave lexception des professionnels beacuteneacuteficiant
dune dispense totale 4deg Le cas eacutecheacuteant
lattestation denregistrement pour les pro-fessions et titres reacuteglementeacutes par le code de la santeacute publique et le code de laction
sociale et des familles II - Les professionnels appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee fournissent en outre se-
lon les cas 1deg Soit lattestation de lobten-
tion du titre de formation de speacutecialiste en
psychiatrie 2deg Soit lattestation de lobten-
tion de lun des diplocircmes mentionneacutes au deacutecret du 22 mars 1990 susviseacute permettant de faire usage professionnel du titre de psy-chologue ou lautorisation obtenue en appli-cation des alineacuteas II et III de larticle 44 de
la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee 3deg Soit
lattestation de lenregistrement reacutegulier dans un annuaire dassociation de psycha-
nalystesCette attestation est eacutetablie par le
preacutesident de lassociation Elle est accom-pagneacutee dune copie de linsertion la plus reacute-cente au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise concernant lassociation et men-
tionnant son objetIII - Les modaliteacutes de
preacutesentation de la demande dinscription et notamment la composition du dossier ac-compagnant la demande sont fixeacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute publieacute au Journal officiel de la Reacutepublique fran-
ccedilaise Article 9 La liste deacutepartementale mentionne pour
chaque professionnel 1deg Son identiteacute 2deg
Son lieu dexercice principal et sil y a lieu
ses lieux dexercice secondaires 3deg Le cas
eacutecheacuteant la mention et la date dobtention des diplocircmes relatifs aux professions de santeacute mentionneacutees dans la quatriegraveme partie du code de la santeacute publique ou agrave la profes-sion de psychologue la date de lautorisa-tion obtenue en application des alineacuteas II et III de larticle 44 de la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee ou le nom de lassociation de psy-chanalystes dans lannuaire de laquelle le professionnel est reacuteguliegraverement enregistreacute
4deg Le nom de leacutetablissement de formation
ayant deacutelivreacute lattestation de formation en psychopathologie clinique ainsi que la date
de deacutelivrance de cette attestationCe docu-
ment preacutesente la liste des inscrits selon leur
profession dorigineCette liste est tenue
gratuitement agrave la disposition du public Elle est publieacutee chaque anneacutee au recueil des
actes administratifs de la preacutefecture
CHAPITRE III AGREMENT DES ETABLISSE-
MENTS DE FORMATION Article 10 ― Les eacutetablissements autoriseacutes agrave deacutelivrer
la formation preacutevue agrave larticle 1er sont agreacuteeacutes pour quatre ans par les ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves avis dune commission reacutegionale dagreacute-
ment - La commission reacutegionale dagreacutement est
composeacutee de six personnaliteacutes quali-fieacutees titulaires et de six personnaliteacutes
qualifieacutees suppleacuteantesCes person-
naliteacutes sont nommeacutees pour trois ans
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 40
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psy-chanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quaucune des trois cateacutegories de professionnels men-tionneacutees au cinquiegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 sus-viseacutee ne soit majoritaire au sein de la
commissionParmi ces personnali-
teacutes siegravegent deux professeurs des universiteacutes speacutecialiseacutes en psychia-
trie psychologie ou psychanalyseLe directeur geacuteneacuteral de lagence reacute-gionale de santeacute deacutesigne le preacutesident
de la commissionLe mandat des
membres de la commission est re-
nouvelable une fois Article 11 Lavis motiveacute de la commission est rendu
au regard des eacuteleacutements suivants 1deg La
conformiteacute du contenu de la formation pro-poseacutee aux conditions poseacutees aux articles
1er 2 3 4 et 5 du preacutesent deacutecret 2deg La
conformiteacute des conditions et modaliteacutes de validation de la formation theacuteorique et pra-tique preacutevues par leacutetablissement au regard des dispositions preacutevues par larrecircteacute men-
tionneacute agrave larticle 5 du preacutesent deacutecret 3deg
Lengagement de leacutetablissement dans une deacutemarche deacutevaluation de la qualiteacute de la formation dispenseacutee Il fait lobjet dun dos-sier indiquant la structure publique ou pri-veacutee de son choix agrave laquelle sera confieacutee leacutevaluation en cause ainsi que le processus deacutevaluation retenu Ce dossier preacutecise en outre le statut de leacutevaluation la meacutethode utiliseacutee les indicateurs retenus et les diffeacute-rentes phases de leacutevaluation lidentiteacute et la qualification des eacutevaluateurs ainsi que le
calendrier preacutevisionnel de leacutevaluation 4deg
La qualiteacute de leacutequipe peacutedagogique respon-sable qui est composeacutee notamment densei-gnants permanents de professionnels de santeacute ainsi que de personnes autoriseacutees agrave porter le titre de psychotheacuterapeute Cette eacutequipe est placeacutee sous lautoriteacute dun con-seil scientifique comprenant notamment un
titulaire dun titre de formation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute pu-
blique 5deg Ladeacutequation des moyens peacuteda-
gogiques par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes
anneacutees de formation 6deg La conformiteacute des
locaux en matiegravere de seacutecuriteacute et daccessi-biliteacute ainsi que leur adeacutequation par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes anneacutees de for-
mationLes eacutetablissements denseigne-
ment priveacutes doivent en outre satisfaire aux prescriptions des articles L 731-1 agrave L 731-
17 du code de leacuteducation Article 12 La personne physique ou morale juridique-ment responsable dun eacutetablissement de formation deacutesirant assurer la formation mentionneacutee agrave larticle 1er eacutetablit un dossier
de demande dagreacutementCe dossier est
adresseacute au plus tard six mois avant la date de louverture de la formation au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute dans le ressort duquel leacutetablissement a son
siegravege socialCelui-ci en accuse reacuteception
dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6
juin 2001 susviseacuteLa composition de ce
dossier est fixeacutee par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur Il comporte notamment les statuts de leacutetablissement de formation et sa capaciteacute daccueil la description des forma-tions deacutelivreacutees la description des locaux et des moyens peacutedagogiques Il preacutecise sagissant de la formation en psychopatho-logie clinique le contenu de la formation theacuteorique et pratique deacutelivreacutee le descriptif du corps enseignant (effectifs qualiteacute quali-fication) la nature des activiteacutes et de la par-ticipation agrave la recherche de leacutequipe respon-
sable de la formation Article 13 Tout dossier deacuteposeacute est transmis par le di-recteur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute au secreacutetariat de la commission dans un deacutelai dun mois agrave compter de laccuseacute de
reacuteception de la demande initialeLa com-
mission se reacuteunit sur convocation de son preacutesident et dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 8 juin 2006 susviseacute Elle rend son avis dans le deacutelai de deux mois agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 41
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
compter de sa saisineLe repreacutesentant de
leacutetablissement de formation est entendu par la commission reacutegionale sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de la candi-
dature ou agrave la demande de la commissionLavis est notifieacute agrave leacutetablissement qui a in-
troduit la demande Article 14 En cas davis neacutegatif et dans un deacutelai dun mois suivant sa notification le repreacutesentant de leacutetablissement de formation peut de-mander au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute de convoquer une nou-
velle reacuteunion de la commissionCelle-ci
siegravege dans une formation eacutelargie agrave len-semble de ses membres titulaires et sup-
pleacuteantsSon avis se substitue au premier
avis rendu Article 15 La deacutecision dagreacutement intervient au plus tard six mois apregraves le deacutepocirct de la demande initiale En cas de recours dans les condi-tions preacutevues agrave larticle 14 ce deacutelai est pro-
longeacute de deux moisLe silence de ladmi-
nistration agrave lexpiration de ce deacutelai vaut deacute-
cision de rejetLa suspension ou le retrait
de lagreacutement sont prononceacutes par deacutecision motiveacutee des ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves que leacutetablissement a eacuteteacute mis agrave mecircme de preacute-senter ses observations lorsque le contenu ou les modaliteacutes dorganisation de la forma-tion cessent decirctre conformes aux condi-tions preacutevues agrave larticle 11 du preacutesent deacute-
cret CHAPITRE IV DISPOSITIONS TRANSI-
TOIRES Article 16
I ― Les professionnels justifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacutera-pie agrave la date de publication du preacutesent deacutecret peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale mentionneacutee agrave larticle 7 alors mecircme quils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplocircme preacutevues aux articles 1er et 6 du preacutesent deacutecret Cette deacuterogation est accordeacutee par le preacutefet du deacutepartement de la reacutesi-dence professionnelle du demandeur apregraves avis de la commission reacutegionale dinscription Le professionnel preacutesente
cette autorisation lors de sa demande dinscription sur la liste deacutepartementale
des psychotheacuterapeutes II - La commission mentionneacutee au I est preacutesi-
deacutee par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute ou par la personne quil a reacuteguliegraverement deacutesigneacutee pour le repreacutesenter Elle comprend six person-naliteacutes qualifieacutees titulaires et six person-naliteacutes suppleacuteantes appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee et nommeacutees par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psychanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quau-cune de ces trois cateacutegories de profes-sionnels ne soit majoritaire au sein de la commission Ses membres sont nom-meacutes pour une dureacutee de trois ans renou-
velable une foisLa commission se reacuteu-
nit dans les conditions fixeacutees par le deacute-
cret du 8 juin 2006 susviseacuteLes frais de
deacuteplacement et de seacutejour de ses membres sont pris en charge dans les conditions preacutevues par la reacuteglementation
applicable aux fonctionnaires de lEtatLa commission sassure que les forma-tions preacuteceacutedemment valideacutees par le pro-fessionnel et son expeacuterience profession-nelle peuvent ecirctre admises en eacutequiva-lence de la formation minimale preacutevue agrave larticle 1er et le cas eacutecheacuteant du di-plocircme preacutevu agrave larticle 6 Elle deacutefinit si neacutecessaire la nature et la dureacutee de la formation compleacutementaire neacutecessaire agrave linscription sur le registre des psycho-
theacuterapeutesLe professionnel est en-
tendu par la commission sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de son dossier ou agrave la demande de la commis-
sion Article 17 Les professionnels qui souhaitent obtenir une autorisation dinscription sur le registre des psychotheacuterapeutes en application de larticle 16 preacutesentent dans le deacutelai dun an
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 42
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
agrave compter de la publication du preacutesent deacute-cret un dossier en ce sens dans les condi-
tions preacutevues agrave larticle 7Cette demande
est accompagneacutee des piegraveces justificatives notamment administratives attestant de
lexercice de la psychotheacuterapieA la reacutecep-
tion du dossier complet il est deacutelivreacute agrave linteacuteresseacute un accuseacute de reacuteception deacutelivreacute dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute Celui-ci permet au pro-fessionnel qui utilisait preacuteceacutedemment le titre de psychotheacuterapeute de continuer agrave lutiliser
jusquagrave lintervention de la deacutecisionLe si-
lence gardeacute pendant plus de six mois sur une demande preacutesenteacutee au titre du I de lar-ticle 16 vaut deacutecision de rejet Dans les cas ougrave en application de ces dispositions il est demandeacute au candidat de justifier dune for-mation compleacutementaire celle-ci doit ecirctre effectueacutee avant le 1er janvier 2014 Si cette exigence nest pas remplie le preacutefet retire le professionnel des inscrits sur la liste deacute-
partementale des psychotheacuterapeutes Article 18 Les dispositions du preacutesent deacutecret entrent
en vigueur agrave compter du 1er juillet 2010Pour lapplication du preacutesent deacutecret agrave Saint-Pierre-et-Miquelon les compeacutetences deacutevo-lues au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute par le preacutesent deacutecret sont exerceacutees par les services chargeacutes de lad-
ministration territoriale de la santeacute Article 19 Le ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales la ministre de lenseignement supeacuterieur et de la re-cherche la ministre de la santeacute et des sports et la ministre aupregraves du ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales chargeacutee de loutre-mer sont chargeacutes chacun en ce qui le concerne de lexeacutecution du preacutesent deacutecret qui sera pu-blieacute au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise
ANNEXE NOMBRES DHEURES DE FORMATION
EN PSYCHOPATHOLOGIE CLINIQUEEXIGEacuteES DES CANDIDATS AU TITRE DE
PSYCHOTHEacuteRAPEUTE
THEgraveME de formation
PSYCHIATRES Dispense totale
MEacuteDECINS non psychiatres
PSYCHOLOGUES cliniciens
PSYCHOLOGUES non cliniciens
PSYCHANALYSTES Reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans leur annuaires
PROFESSIONNELS nappartenant agrave aucune des cateacutego-ries preacuteceacutedentes
Deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques
0 h
0 h
0 h
0 h
0 h
100 h
Critegraveres de discernement des grandes pathologies psychiatriques
0 h
0 h
50 h
100 h
100 h
100 h
Theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Principale ap-proches utili-seacutees en psycho-theacuterapie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Stage
0 mois
2 mois
2 mois
5 mois
2 mois
5 mois
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 43
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute CSAPA Espace Murger - Service de Psychiatrie
Adulte du Pr Jean Pierre Leacutepine Hocircpital Fernand Widal
L a preacuteoccupation des pouvoirs publics de
reacuteglementer la pratique officielle de la
psychotheacuterapie provoque des turbu-
lences dans le petit monde des psychologues
qui se targuent drsquoen effectuer sous les formes
les plus diverses et qui se voient sommeacutes de
faire la preuve de leur formation dans ce do-
maine agrave deacutefaut de faire de mecircme en ce qui
concerne leur compeacutetence ce qui par ailleurs
nrsquoest guegravere deacutemontrable
Chacun drsquoentre eux peut bien entendu invoquer
son expeacuterience ineffable ou le prestige accordeacute
agrave sa theacuteorie de reacutefeacuterence pour estimer leacutegitime
de srsquoaffranchir drsquoune telle justification tout en
ne perdant pas de vue qursquoun statut estampilleacute
par lrsquoautoriteacute administrative peut garantir la
poursuite sereine de telles activiteacutes Pour les
plus eacuteclectiques le choix drsquoune eacutecole certifiante
ressemblera agrave un mariage de raison
Crsquoest donc au prix drsquoune soumission agrave lrsquoautoriteacute
que lrsquoexercice drsquoune telle liberteacute peut espeacuterer
se perpeacutetuer Crsquoest lagrave lrsquoune des formes de la
reacutesignation peu glorieuse certes agrave laquelle on
pourrait preacutefeacuterer le discernement formulation
bien plus acceptable au regard de lrsquoestime de
soi Crsquoest ce dont semblent avoir manqueacute celui
ou celle ou ceux qui ont cru bon drsquoaller couiner
dans une oreille des plus compatissantes que
la pratique de la psychotheacuterapie devait ecirctre reacute-
serveacutee agrave des professionnels persuadeacutes de sa-
voir y faire et capables de preacutesenter des ga-
ranties plutocirct qursquoagrave des gougnafiers mecircme pas
fichus drsquoexhiber la moindre preuve convain-
cante de la leacutegitimiteacute de leurs preacutetentions Ce
qui est drsquoailleurs la reacutealiteacute Mais comment
srsquoeacutetonner drsquoune telle beacutevue si lrsquoon srsquoen rap-
porte agrave la ceacutelegravebre Loi de Murphy qui eacutenonce
que sil y a plusieurs faccedilons de faire quelque
chose et que lune delles peut aboutir agrave une
catastrophe alors quelquun la choisira
Les mecircmes qui reacuteclamaient la mise en place
drsquoune reacuteglementation officielle reacuteservant le titre
de psychotheacuterapeute agrave des professionnels de
qualiteacute ducircment formeacutes agrave cet effet sont parmi
les premiers agrave protester contre les formes don-
neacutees agrave cette derniegravere par une souveraineteacute deacute-
ficitaire dont lrsquoexercice autoritaire nous rappelle
que nous sommes destineacutes agrave nous faire ap-
prendre ce que lrsquoon sait deacutejagrave par des gens qui
nrsquoy connaissent rien Agrave lrsquoheure de la prolifeacutera-
tion des reacutefeacuterentiels et des protocoles reacuteclamer
encore un peu plus de controcircles et de veacuterifica-
tions suspicieuses ne peut que servir de via-
tique aux frileux de la subjectiviteacute qui sont
friands de contraintes rassurantes Et on ne
srsquoeacutetonnera pas de les voir se formaliser drsquoen
avoir appeleacute agrave Raminagrobis comme dans la
ceacutelegravebre fable de Jean de La Fontaine Le
chat la belette et le petit lapin
Crsquoeacutetait un chat vivant comme un deacutevot ermite
Un chat faisant la chattemite
Un saint homme de chat bien fourreacute gros et
gras
Arbitre expert sur tous les cas
Et de voir se faire croquer tout uniment secta-
teurs et protestataires tout marris drsquoavoir con-
senti agrave lrsquoincompeacutetence et la condescendance
de deacutecideurs comme on dit le sort de leurs
activiteacutes Drsquoougrave la singularisation des heacutesitants
ameacutenagements survenus qui vident du proceacute-
deacute la geacuteneacuteralisation qursquoil visait au profit de re-
connaissances professionnelles plus contrai-
gnantes encore par la judiciarisation des liber-
teacutes du mecircme tonneau Et ce qui ne peut agrave lrsquoeacutevi-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 44
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dence valoir pour tous nrsquoa que peu de chances
de valoir davantage pour chacun Ce seraient
donc des organisations professionnelles qui se
verraient deacutecerner des preacuterogatives pour les
beacuteneacuteficiaires qui auront eu la bonne ideacutee de srsquoy
glisser Cela veacuterifie tout agrave la fois la meacuteta-loi de
Cooper qui eacutenonce qursquoune prolifeacuteration de
nouvelles lois creacutee une prolifeacuteration de nou-
veaux vides juridiques et ce bon vieux pro-
verbe qui dit que le clou qui deacutepasse attire le
marteau
On savait deacutenombrer quelques centaines de
types de psychotheacuterapies pleacutethore drsquoautant
plus deacuterisoire que cette recension ne concerne
le plus souvent que des techniques psychotheacute-
rapiques certes impliqueacutees dans des disposi-
tifs agrave viseacutee theacuterapeutique mais certainement
incapables de deacutefinir la psychotheacuterapie car
comment eacutetablir un modegravele de lrsquoindeacutefinissable
Pour autant il sera difficile de deacutemontrer que la
formation certifieacutee agrave une technique psychotheacute-
rapique est assimilable agrave la performance de sa
mise en oeuvre Car qursquoen est-il vraiment dans
la reacutealiteacute de ces audacieuses pratiques Srsquoagit
-il drsquoune illusion entretenue par les theacuterapeutes
sur lrsquointeacuterecirct de leurs manœuvres Les patients
qui srsquoy exposent ne font-ils que changer de re-
gistre de repreacutesentations ou accegravedent-ils reacuteelle-
ment agrave une autre dimension de leur ecirctre Et
comment srsquoaccommodent-ils des aventures
parfois interminables dans lesquelles de telles
situations les plongent
Ces derniers qui se sont aperccedilus que le destin
commenccedilait agrave leur masser les eacutepaules srsquoils
nrsquoacceptent la perspective du changement que
par neacutecessiteacute et la neacutecessiteacute que parce que
leur sentiment drsquoexistence se trouve en deacutelica-
tesse se trouvent le plus souvent agrave la re-
cherche drsquoun sentiment perdu celui de la com-
pleacutetude Et ce sont eux qui deacutecident finalement
si leur rencontre avec un ou une psychologue
doit prendre cette tournure apregraves avoir eacutepuiseacute
tout ce qui leur avait jusque-lagrave permis drsquoy
eacutechapper Ils nrsquoont plus confiance dans la reacuteali-
teacute qui nrsquoest elle-mecircme apregraves tout qursquoun pres-
sentiment collectif Crsquoest que le patient qui se
reacutesout agrave consulter fait la preuve qursquoil a reacuteussi agrave
surmonter sa honte de devoir neacutecessiter une
telle deacutemarche ce qui deacutemontre lrsquoexistence de
la premiegravere ressource personnelle qui lui ap-
partient Si le patient neacuteglige ce qui le pousse agrave
changer alors le changement lui-mecircme est neacute-
gligeacute Il doit rencontrer une attitude telle qursquoil en
ressentira de la consideacuteration premiegravere res-
source theacuterapeutique en retour agrave la disposition
du psychotheacuterapeute
Et puis on voit tous les jours des patients aller
mieux en deacutepit de nos subtiles interventions
peut-ecirctre gracircce aux perfectibiliteacutes de celles-ci
Le patient met son talent agrave notre service mais
pour le bon deacuteroulement des choses il doit ecirctre
eacuteclaireacute sur ses responsabiliteacutes Prisonnier des
circonstances ce qui le rend malheureux le
patient soucieux de participer agrave son eacutemancipa-
tion doit inciter son ou sa psychotheacuterapeute
par des questions simples et bienveillantes agrave
reformuler ce qursquoil comprend de la situation et agrave
exprimer son ressenti Il est essentiel que le
theacuterapeute se sente eacutecouteacute informeacute et respec-
teacute Il ne doit pas craindre de lrsquoimportuner
puisque de toute faccedilon ce sera le cas En preacute-
servant la liberteacute de penseacutee de ce dernier et en
veillant agrave le faire participer aux orientations de
la theacuterapie le patient doit mettre une grande
conviction agrave le convaincre qursquoil est la personne
concerneacutee en premier lieu par le choix de celle-
ci avec la capaciteacute de reacutefleacutechir et de prendre
les deacutecisions qui le concernent agrave partir des in-
formations qursquoil partage avec lui Le patient de-
vra eacutegalement precircter attention aux signes de
conduites addictives ou aux troubles obses-
sionnels compulsifs du psychotheacuterapeute Un
signe drsquoappel agrave connaicirctre est la position con-
descendante ou le silence obstineacute ou encore
la somnolence difficilement dissimuleacutee qui sont
sans rapport avec les attentes drsquoeacutecoute et de
compreacutehension que le patient tente drsquoexprimer
Le patient doit savoir que la preacutevalence du sui-
cide de la deacutepression du syndrome deacutecision-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 45
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
nel de lrsquoalcoolisme et de la toxicomanie est
bien supeacuterieure chez les psychotheacuterapeutes agrave
celle de la population geacuteneacuterale Il srsquoefforcera
donc de lui faciliter la vie par de petites atten-
tions ou remarques gratifiantes afin de ne pas
alimenter les fameux dysfonctionnements dont
les protocoles theacuterapeutiques se sont enticheacutes
Enfin les interlocuteurs ne devront jamais
perdre de vue que lrsquoon nrsquoest jamais autant deacuteccedilu
que par les illusions que lrsquoon perd Bref pour le
privilegravege drsquoune synergie additive de bon aloi le
patient et son psy doivent parvenir agrave se persua-
der que leur liberteacute de manoeuvre consiste agrave
faire tout ce que permet la longueur de la
chaicircne qui les assujettit Et la principale recom-
mandation exigeacutee pour les deux acteurs de ces
proceacutedeacutes interactifs tant pour le patient que
pour son psy semble devoir se fonder sur une
robuste et saine suspicion mutuelle La reacutecipro-
citeacute est la clef de tous les rapports humains
Si lrsquoon veut bien eacutecarter un instant les passion-
nantes preacutesentations de cas superbement rap-
porteacutes par leurs auteurs et dont les colloques
sont friands ougrave tout est eacutelucideacute et dans les-
quelles tout semble srsquoexpliquer facilement ougrave
la posture adopteacutee par le ou la psychotheacutera-
peute srsquoest trouveacutee bien venue ougrave ses inter-
preacutetations se sont reacuteveacuteleacutees pertinentes et ses
interventions judicieuses qui auront abouti agrave
un reacutesultat suffisamment satisfaisant pour ecirctre
exposeacute on srsquoautorisera agrave penser que ces preacute-
sentations sont sans doute davantage drsquoineacutevi-
tables reconstructions que la traduction fidegravele
du deacuteroulement des eacuteveacutenements de lrsquoordre de
lrsquoimplacable authenticiteacute dont se montre ca-
pable une cameacutera de surveillance de distribu-
teur de billets de banque Apregraves tout si le men-
songe est le secret de la vie amoureuse crsquoest
aussi le ciment de la vie sociale La subjectiviteacute
srsquoinsinue partout peut-ecirctre plus encore dans
les souvenirs que dans les activiteacutes de percep-
tion Un souvenir est un mensonge qui dit tou-
jours la veacuteriteacute a eacutecrit Jean Cocteau recons-
truction conjecturale mais sincegravere expression
dans lrsquoinstant de sa remeacutemoration puisque tout
peut ecirctre exact sans que rien ne soit vrai En
theacuteorie tout srsquoexplique en pratique tout se
complique Ce nrsquoest pourtant pas une raison
pour faire les gros yeux aux garnements de la
psychotheacuterapie Qui srsquointeacuteresserait agrave la pein-
ture dans le seul but de devenir trafiquant
drsquoœuvres drsquoart
Or ce que redoute la theacuterapeutique crsquoest lrsquoer-
reur la faute restant beaucoup plus inconce-
vable qursquoelle est exceptionnelle et lrsquoeacutechec trop
reacutecurrent tandis que ce queacutevite la circonspec-
tion mdash en ne versant daucuns cocircteacutes mdash crsquoest la
partialiteacute Crsquoest donc vrai quelle apparaicirct ordi-
naire commune qursquoelle ne se dissipe pas
comme le fait le theacuteorique dans ses cabrioles
et si elle ne fait pas toujours la preuve drsquoune
grande inventiviteacute elle nrsquoest pas hanteacutee par
lrsquoexigence de la coheacuterence ce spectre des pe-
tits esprits Elle ne cherche pas non plus agrave sus-
citer la contradiction ni ne vise agrave se singulari-
ser en prenant une position mais elle aspire agrave
conserver lrsquoesprit ouvert agrave tous les possibles
quitte agrave cultiver le paradoxe Crsquoest sans doute
pour cette raison que quand lrsquoadresse agrave un pa-
tient se reacutevegravele theacuterapeutique ce nrsquoest pas une
surprise totale crsquoest le plus souvent lrsquoaboutis-
sement drsquoune deacutemarche heuristique Ceux qui
srsquoembarrassent dans un diagnostic ce qursquoils
srsquoimaginent indispensable avant toute entre-
prise et auquel ils finissent par croire et ce fai-
sant faire croire implicitement au patient qursquoil
srsquoapplique agrave lui mecircme quand ils ne cegravedent pas
agrave la tentation de lui en faire la reacuteveacutelation peu-
vent finir par srsquoenfermer dans une illusion com-
mune Une telle disposition est assimilable
dans son essence au preacutesupposeacute On voit la
difficulteacute apparaicirctre dans les efforts drsquoy faire
piegravece et que cela ne preacutesage rien de bon
Pourtant on a bien souvent vu la situation theacute-
rapeutique eacutevoluer favorablement en deacutepit de
ces preacutemisses douteuses Qursquoen penser Si
lrsquoon considegravere que la tacircche fondamentale du
psychotheacuterapeute est bien de reacutesoudre des
problegravemes de maniegravere efficace et dynamique
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 46
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
si lrsquoon peut srsquoeacutecarter un tant soit peu des con-
ceptions traditionnelles des problegravemes psycho-
pathologiques mettre en doute lrsquoexistence de
deacuteficits agrave reacuteparer ou agrave compenser chez le pa-
tient srsquoautoriser agrave penser que la reacutesistance au
changement de ce dernier nrsquoa rien agrave voir avec
la rentabiliteacute speacutecifique de symptocircmes en
terme de pouvoir interpersonnel on peut envi-
sager drsquointroduire des solutions qui ne srsquoentre-
tiennent pas elles-mecircmes et deviennent des
obstacles au changement Alors le theacuterapeute
peut se contenter drsquoamorcer un changement et
deacutecliner la neacutecessiteacute de srsquoengager agrave lrsquoaccompa-
gner jusqursquoagrave son terme Et quand les venues
du patient deviennent plus rares se souvenir
que Freud deacuteclarait que la cure est termineacutee
quand le patient ne vient plus
On connaicirct les dispositions favorables du pa-
tient agrave srsquoidentifier au profil qursquoon lui propose Et
si les patients se montrent rarement agrave la hau-
teur de ce que lrsquoon attend drsquoeux crsquoest parce
que lrsquoon attend quelque chose de leur part qui
soit agrave la hauteur de nos preacutetendues compeacute-
tences dont rappelons-nous il srsquoagit de reacutegle-
menter la mise en oeuvre Or lrsquoobjectif du theacute-
rapeute peut-il ecirctre leacutegitimement de confirmer
ses convictions Srsquoil interpregravete les causes du
mal-ecirctre de ses patients en fonction dun scheacute-
ma geacuteneacuteral et preacuteeacutetabli ne les trahit-il pas Et
serait-il bien congru de proposer des theacuterapies
en precirct-agrave-porter mecircme en demi-taille plutocirct
que faire dans le sur mesure en fonction des
ressources que le patient a lrsquoair de preacutesenter
Les deux acteurs de lrsquoaffaire risquent de rater
ce qursquoils recherchent implicitement en croyant y
gagner quelque chose le theacuterapeute la confir-
mation de ses convictions et le patient un
eacuteclaircissement de ses difficulteacutes en mecircme
temps que son adoption par une autoriteacute qui
lrsquoenteacuterine Toute clarteacute se paie drsquoun mystegravere et
comme une conscience claire est le signe
drsquoune mauvaise meacutemoire on nrsquoen saura pas
beaucoup plus les ideacutees nettes et distinctes
chegraveres agrave Reneacute Descartes nrsquoont guegravere fait la
preuve de leur eacutevidence La responsabiliteacute du
theacuterapeute srsquoeacutemaille de tant de deacuteterminants
que ce dernier est tout agrave fait capable de se ran-
ger agrave ce qursquoil croit justifieacute Mais la croyance
nrsquoest pas seulement une ideacutee que lrsquoesprit pos-
segravede crsquoest eacutegalement une ideacutee qui possegravede
lrsquoesprit Le plus grand deacuteregraveglement de lrsquoesprit
est de croire que les choses sont parce que
lrsquoon veut qursquoelles soient Les psychologues sa-
vent si bien identifier les situations qui se precircte-
ront au beacuteneacutefice de leur clairvoyance qursquoils
sont eacutegalement fortement sujets agrave lrsquoisseacutegoureacutee
facirccheuse pathologie qui deacutesigne un don parti-
culier pour toujours chercher drsquoabord dans la
mauvaise poche
Toutefois une relation de confiance une fois
installeacutee ccedila commence agrave rouler mais au fil du
temps la roue finit par prendre du jeu et les
orientations agrave srsquoinstaller dans le confort agrave srsquoen-
liser dans lrsquoanamnegravese agrave travailler obstineacutement
la reacutepeacutetition agrave se contenter de pointer des meacute-
canismes quant ccedila ne se reacuteduit pas agrave la pro-
duction de regrettables rationalisations Il srsquoagit
plutocirct de reacuteapprendre des conduites au patient
apregraves qursquoil en ait renouveleacute le choix agrave srsquoenga-
ger dans des activiteacutes qui permettent de modi-
fier substantiellement les modes de penseacutee Le
but ultime de la psychotheacuterapie nest pas seu-
lement deacuteliminer des comportements deacuteplo-
rables cest dapprendre agrave mieux geacuterer ses
propres processus mentaux agrave affronter avec
plus de reacuteussite des situations oppressantes et
agrave deacutevelopper des opeacuterations psychiques plus
performantes et une maniegravere drsquoecirctre au monde
plus eacutepanouissante une expression de la
sphegravere psychique privileacutegiant la valorisation
des aspirations individuelles qui deacutebouche sur
la preacutedilection pour lrsquoespace inteacuterieur caracteacuteri-
seacute sur lequel on pense souvent ecirctre suscep-
tible de pouvoir agir Mais comment juger ac-
ceptable que le patient se retrouve dans la po-
sition de celui qui la cleacute de son appartement agrave
la main se voit contraint drsquoactionner la son-
nette pour rentrer chez lui
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 47
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Tout ceci pour suggeacuterer une approche zeacuteteacute-
tique des psychotheacuterapies pour autant qursquoelle
puisse ecirctre soupccedilonneacutee de participer agrave lrsquoactua-
lisation de la confusion des genres qui permet-
trait drsquoeffectuer la distinction entre drsquoune part la
psychotechnique de la theacuterapie que la revendi-
cation du titre de psychotheacuterapeute tendrait agrave
certifier au prix drsquoun reacuteductionnisme preacutejudi-
ciable agrave la pratique clinique et au meacutepris drsquoune
certaine creacuteativiteacute et la conduite drsquoun projet
psychotheacuterapique circonspect avec des tech-
niques approprieacutees et individualiseacutees jouant le
rocircle drsquoun outil directionnel
Les psychologues sont censeacutes distinguer le
subjectif de lrsquoirrationnel Il ne sagit pas dex-
clure la subjectiviteacute ni mecircme de la reacuteduire
mais de la conserver au cœur de la pratique de
la psychologie clinique Cest lagrave au cœur de la
subjectiviteacute de lindividuel que celle-ci peut
justifier sa speacutecificiteacute En revanche on ne se
preacuteoccupera pas des ayatollahs de la psycha-
nalyse au masque douloureux et au regard fil-
trant arborant un air drsquoen savoir long ni des
forceneacutes du dressage cognitif qui se deacutesolent
de ne pas voir le patient marcher mieux que
cela dans la combine Pas plus drsquoailleurs que
de tous les gardes-frontiegraveres des succegraves qui
leur eacutechappent qui sont des envieux comme
tous les censeurs Agrave Theacuterapik Park les psy-
chotheacuteraptors chassent tout autant en meute
qursquoen snipers
Il est important de tendre vers une pratique
permissive en accordant au patient la possibili-
teacute de reacutealiser que lorigine des changements se
trouve en lui comme il pense de celle des pro-
blegravemes qui sont les siens qui pourra de cette
faccedilon acqueacuterir une autonomie dans son pro-
cessus de traitement Mais lrsquoon a appris que ce
reacutesultat ne peut ecirctre obtenu que si lrsquoon accorde
au patient la possibiliteacute de tricher Cette faculteacute
le poussera rarement agrave en user mais sa virtua-
liteacute qursquoil est en mesure de srsquoapproprier facilite-
ra bien souvent la survenue des identifications
rechercheacutees par le theacuterapeute parce que le
patient en fera ainsi plus facilement son affaire
Crsquoest en quelque sorte entrer par la porte de
derriegravere dans le champ complexe de la forma-
tion du reacuteel
Cette approche zeacuteteacutetique estomperait eacutegale-
ment la suspicion de thaumaturgie qui revien-
drait au professionnel qui srsquoappuyant sur la
conviction qursquoil y a quelque chose agrave soigner
chez le patient au titre de lrsquoadheacutesion de ce der-
nier agrave la proposition drsquoune telle assertion
srsquoexempterait du titre en vertu de lrsquoautorisation
qursquoil srsquooctroierait agrave lui-mecircme de pratiquer Pen-
ser par soi-mecircme crsquoest souvent penser tout
seul ou pire penser comme tout le monde
Mieux vaut peut-ecirctre penser contre soi-mecircme
et se faire agrave soi-mecircme les objections des
autres Toutes les psychotheacuterapies ont leurs
chimegraveres apregraves lesquelles elles courent sans
jamais les attraper Mais avantageusement en
chemin elles srsquooctroient des opportuniteacutes qui
ne sont pas toutes neacutegligeables Et sans ou-
blier que quand la sinceacuteriteacute confine agrave lrsquoarbi-
traire on en vient agrave regretter lrsquohypocrisie
comme lrsquoa magistralement exprimeacute Descartes
on peut deacutecider que lrsquoon nrsquoest sucircr de rien et
que lrsquoon nrsquoest mecircme pas sucircr que lrsquoon nrsquoest sucircr
de rien cesser de consideacuterer que les pro-
blegravemes compliqueacutes neacutecessitent forceacutement des
solutions compliqueacutees Il y a aussi des psycho-
theacuterapies qui durent des anneacutees et un mauvais
esprit pourrait eacutetablir une comparaison avec les
banques qui quoiqursquoun virement par ordinateur
ne prenne qursquoune seconde aiment en faire tout
un plat afin que les fonds demeurent un mo-
ment dans leur systegraveme et leur rapportent
Comme nous vivons irreacutesistiblement dans un
monde de repreacutesentations la seacuteduction du titre
peut exciter la convoitise mdash celle-ci constituant
la plus formidable des motivations humaines mdash
de psychotheacuterapeutes en quecircte de reconnais-
sance Mais ce sont les ideacutees les plus seacutedui-
santes qui ont le plus souvent besoin de se re-
maquiller Le terme de trompe-couillon deacutesi-
gnant le maquillage en langue verte est trop
illustratif dans le domaine des psychotheacuterapies
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 48
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
pour deacutecourager complegravetement la tentation de
srsquoinsurger contre lrsquoeacuteventualiteacute de sa pertinence
Le titre de psychotheacuterapeute ressemble agrave la
queue du Mickey de notre enfance qursquoil fallait
attraper pour avoir un tour gratuit de manegravege
On peut bien courir encore longtemps apregraves
son obtention mais si lrsquoon veut finir de rouler le
peacutetard il faudra bien se reacutesoudre au bout drsquoun
moment agrave cesser de rechercher le petit bout de
shit tombeacute sur la moquette marron
Alors psychotheacuterapeute agrave quel titre quand la
proposition theacuterapeutique tiendrait tout entiegravere
en quatriegraveme de couverture Et lrsquoon peut ajou-
ter agrave notre accablement la conjoncture imagi-
naire que nous ne nous en remettrons jamais
et deacutecider que la psychotheacuterapie est devenue
un business Bien sucircr ces consideacuterations ne
srsquoappliquent pas aux psychotheacuterapeutes pour
lesquels rien nrsquoest impossible eacutequipeacutes du tout
agrave lrsquoego agrave soi qui sont si lrsquoon peut dire la protu-
beacuterance de la profession Elles ne srsquoappliquent
pas davantage agrave ces professionnels dont
lrsquoinaptitude est semblable agrave celle des jeunes
paresseux ces mammifegraveres arboricoles de la
forecirct breacutesilienne auxquels il arrive freacutequem-
ment drsquoempoigner leurs propres pattes agrave la
place des branches si bien qursquoils tombent des
arbres
Enfin lrsquoexigence de ce titre fait voir se multiplier
des instituts de formation agrave la psychotheacuterapie
neacutes de la derniegravere pluie qui ne feraient que
precirccher pour leur paroisse agrave des ouailles fasci-
neacutees par la quecircte de la qualification Il suffirait
alors de deacutetenir le titre de psychotheacuterapeute
pour le devenir tandis que ceux ou celles qui
en possegravedent la compeacutetence et qui se risquent
agrave en pratiquer verraient fragiliseacutee leur deacutetermi-
nation agrave y recourir sans lrsquoestampille de sa sa-
cralisation Crsquoest ainsi qursquoun meacutecanicien de la
relation identifieacute comme speacutecialiste du soin et
de la gestion des relations interpersonnelles
viendra disqualifier la prodigieuse diversiteacute des
fonctionnaliteacutes de la psychologie clinique agrave la-
quelle nous sommes tous attacheacutes Et lrsquoon ver-
ra des psychotheacuterapeutes nantis de bons certi-
ficats srsquoeacutevertuer dans la profession et y forger
leur reacuteussite juste pour prouver que crsquoest pos-
sible Les exigences des employeurs se mon-
treront de plus en plus impeacuteratives sur ce point
les assureurs jouant le rocircle drsquoagences de nota-
tion et lrsquoon nrsquoengagera deacutesormais que des
eacutebeacutenistes qualifieacutes comme caissiers chez Ikea
Quand le doute est leveacute il deacutebouche sur une
incertitude et le psychotheacuterapeute ballotteacute au
greacute des vagues de lrsquooceacutean du deacutesir de nou-
velles contraintes reacuteglementaires dans sa lutte
contre la deacutereacuteliction par tous les temps se
trouve embarrasseacute par le choix impossible
entre deux deacutesillusions voir que lrsquoeacutetendue du
champ de la pratique de la psychotheacuterapie se
precircte deacutesormais deacutecideacutement mal agrave son entre-
prise ou constater combien ccedila va ecirctre difficile
de lrsquoentreprendre agrave ses propres conditions
Crsquoest comme eacuteprouver le deacutesappointement de
la dame constatant que la lunette des toilettes
nrsquoest pas abaisseacutee ou la consternation du
monsieur qui deacutecouvre que la mecircme lunette ne
tient pas releveacutee Mais quitte agrave voyager sur le
Titanic pourquoi pas en premiegravere classe
La vie professionnelle nous rappelle combien le
monde peut paraicirctre singulier lorsqursquoon le re-
garde apregraves avoir fait un simple pas sur le cocircteacute
Lrsquoexercice de la psychotheacuterapie srsquoassaisonne
de pas mal drsquohumiliteacute et drsquoun peu de creacuteativiteacute
Peut-on ecirctre agrave la fois malin et intelligent Les
psychologues cliniciens pratiquent volontiers
lrsquousage des deux adverbes fondamentaux qui
eacuteveillent lrsquointelligence des enfants pourquoi
et comment Lrsquointelligence incite agrave la reacute-
flexion et la reacuteflexion conduit au scepticisme
Le scepticisme lui megravene agrave lrsquoironie Lrsquoironie
cette meacutelancolie de la luciditeacute agrave son tour se
preacutesente agrave lrsquoesprit mdash qui se trouve en apport
direct avec lrsquohumour mdash qui fait si bon meacutenage
avec la fantaisie Et la vie devient une chose
deacutelicieuse aussitocirct qursquoon deacutecide de ne plus la
prendre tout agrave fait au seacuterieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 49
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute des pa-
tients migrants africains
Jacqueline Faure Hocircpital Tenon Page 50
gt Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacute-
moignage drsquoune pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute Page 60
gt Seacutejour de vacances quelle place pour le psy-
chologue
Ceacuteline Le Bivic Hocircpital Eacutemile Roux Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques
transversaliteacute de nos cliniques
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 50
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants
africains une approche originale avec lrsquoassociation URACA
Jacqueline Faure Service des maladies infectieuses et
tropicales Centre de la dreacutepanocytose Hocircpital Tenon
Lrsquohomme universel nrsquoexiste pas il est inscrit
dans une culture dans un cadre Or ce cadre
est universel il nrsquoexiste pas drsquohomme sans cul-
ture
L rsquohocircpital Tenon est situeacute agrave lrsquoEst de Paris
bon nombre de patients migrants infec-
teacutes par le VIH y sont soigneacutes Du fait de
lrsquoexistence drsquoune materniteacute au sein de lrsquohocircpital
beaucoup de femmes migrantes apprennent
leur seacuteropositiviteacute agrave lrsquoinfection par le VIH-sida
au cours du suivi de leur grossesse La grande
majoriteacute de ces patients est originaire drsquoAfrique
de lrsquoOuest
Degraves 1993 nous avons mis en place un parte-
nariat avec lrsquoassociation URACA pour aider
les patients en difficulteacute face au diagnostic de
lrsquoinfection par le VIH-sida et aussi les soignants
rencontrant des problegravemes dans la prise en
charge de certains patients
Au deacutebut les soignants et moi-mecircme pensions
que la plupart des patients africains ne com-
prenaient rien Peu agrave peu avec lrsquoaide drsquoURA-
CA nous avons pris conscience que nous-
mecircmes ne les comprenions pas toujours ou
bien encore que nous ne savions pas nous
faire comprendre drsquoeux
Cette association daide aux Africains intervient
dans diffeacuterents domaines accueil aide juri-
dique sociale solidariteacute preacutevention informa-
tion recherche dans le domaine de la santeacute
(toxicomanie SIDA dreacutepanocytose troubles
psychiatriques) et propose aussi des consulta-
tions drsquoethnomeacutedecine
Ainsi bien souvent les difficulteacutes avec les pa-
tients drsquoorigine eacutetrangegravere sont lieacutees agrave des pro-
blegravemes de communication et de compreacutehen-
sion mutuelles dans la relation soignant-soigneacute
En comprenant lrsquoeacuteveacutenement migratoire et son
impact dans la deacutecouverte drsquoune maladie
grave en eacutetant sensibiliseacutes agrave lrsquoimportance de la
dimension culturelle dans le soin nous avons
ainsi ameacutelioreacute lrsquoaccueil et la prise en charge de
ces patients
Un systegraveme culturel est constitueacute drsquoune
langue drsquoun systegraveme de parenteacute drsquoun corpus
de techniques et de maniegraveres de faire (la pa-
rure la cuisine les arts les techniques de
soins les techniques de maternagehellip) Tous
ces eacuteleacutements eacutepars sont structureacutes de maniegravere
coheacuterente par des maniegraveres de penser les re-
preacutesentations [] Les repreacutesentations permet-
tent aux individus dun mecircme groupe dappreacute-
hender le monde selon les modaliteacutes com-
munes repreacutesentations de la mort de la con-
ception
Jemploie ce mot culture agrave contrecœur avec
la crainte decirctre mal compris Par ce terme je
ne deacutesigne pas leacutecume luxueuse dune civilisa-
tion mais lesprit tregraves particulier dun peuple
insaisissable
Cette prise en charge globale avec lrsquoassocia-
tion URACA srsquoeffectue sous 4 formes
1 le soutien communautaire
2 la meacutediation culturelle
3 la consultation dethnomeacutedecine une prise
en charge transculturelle
4 la formation mutuelle partage de savoir
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 51
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
1 LE SOUTIEN COMMUNAUTAIRE
Je me sens coupeacute en deux diviseacute une partie
de moi-mecircme nrsquoest pas ici nous dit tel patient
La deacutecision la plus terrible que jrsquoaie eu agrave pren-
dre dans ma vie crsquoest de rester ici pour me soi-
gner et ecirctre ainsi seacutepareacutee des miens raconte
cette femme dans un sanglot difficilement con-
tenu
Crsquoest tregraves dur drsquoecirctre seulehellipJe ne suis pas ha-
bitueacuteehellipici quand tu sors de ta maison per-
sonne ne se parlehellip
Le soutien communautaire drsquoURACA srsquoorga-
nise de plusieurs faccedilons
Visite hebdomadaire au chevet du patient avec
le port dun repas africain par la nourriture
par le dialogue dans la langue quand cest pos-
sible par la preacutesence de ses pairs quelque
chose du pays est ainsi recreacuteeacutee et apaise le
malade
Accueil quotidien au sein de lrsquoassociation re-
pas atelier couture atelier informatique aides
dans les deacutemarches administratives assem-
bleacutee des femmes Tout ceci dans une am-
biance comme au pays
Ces visites sont proposeacutees aux malades isoleacutes
du fait du diagnostic ou qui nrsquoont pas de famille
ici
La migration est une eacutepreuve qui provoque
chez le sujet une deacutestabilisation une fragiliteacute
lieacutees agrave diffeacuterentes pertes
perte de lrsquoenveloppe culturelle la culture struc-
ture le psychisme humain dans la migration il
nrsquoy a plus ce cadre culturel Changer drsquounivers
implique la perte brutale drsquoune langue drsquoun
systegraveme de reacutefeacuterence drsquoun systegraveme de co-
dage des perceptions des sensations et des
repreacutesentations en un mot une acculturation
[] La perte de lrsquoenveloppe culturelle va donc
provoquer des modifications de lrsquoenveloppe
psychique [hellip]
la perte de repegraveres difficulteacutes au niveau du
changement de climat de la nourriture dans
les deacuteplacements dans la ville dans les deacute-
marches administratives Difficulteacutes et mecircme
souffrance dans la perte de la langue drsquoorigine
Julia Kristeva drsquoorigine bulgare psychanalyste
et eacutecrivain dit ceci hellip il y a mort dans la perte
drsquoune langue natalehellip
la perte drsquoune certaine identiteacute ecirctre Camara
ou Toure ecirctre peul ou bambara nrsquoest pas so-
cialement reconnu le migrant devient un eacutetran-
ger un noir puis agrave lrsquohocircpital eacuteventuellement un
seacuteropositif
la perte du groupe lrsquoisolement est douloureu-
sement ressenti pour tout eacutetranger La solitude
pour un Africain crsquoest mortelhellip nous explique
Monsieur Diarra meacutediateur ethnoclinicien agrave
URACA
Autant drsquoeacuteleacutements qui favorisent un eacutetat de vul-
neacuterabiliteacute propice agrave une deacutecompensation soma-
tique ou psychologique (deacutepression) Le dia-
gnostic drsquoune maladie grave vient renforcer
cette fragiliteacute La solitude dans les chambres
individuelles de nos hocircpitaux modernes - que
nous occidentaux appreacutecions beaucoup - peut
ecirctre mal supporteacutee par le patient africain elle
est mecircme parfois anxiogegravene Un Africain nest
jamais seul Au pays sil est hospitaliseacute sa fa-
mille lentoure dort dans sa chambre
Par ces visites hebdomadaires un tissu rela-
tionnel est ainsi creacuteeacute qui peut se poursuivre agrave
la sortie Le soutien communautaire permet au
patient isoleacute dans la preacutecariteacute de retrouver ce
lien structurant du groupe qui lui faisait deacutefaut
depuis son deacutepart dAfrique Soutien qui va lrsquoai-
der agrave mieux supporter sa maladie et agrave mieux se
soigner Pour un Africain appartenir au groupe
est vital cest pourquoi la grande crainte du
malade est que son entourage soit au courant
du diagnostic et le rejette Le malade ne peut
pas ou ne veut pas partager sa souffrance
avec ses proches La honte la crainte de lex-
clusion peuvent le conduire agrave un retrait difficile
agrave supporter Pour lAfricain lisolement est in-
concevable Sa force vitale est en relation
constante avec celle des ancecirctres proches et
lointains et des membres du groupe La plus
grande calamiteacute consiste agrave en ecirctre retrancheacute et
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 52
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reacuteduit ainsi agrave une existence deacuteficiente sans
protection voueacutee au neacuteant
Cette association communautaire nrsquoest pas
speacutecifiquement cibleacutee SIDA bien que ses
membres soient formeacutes agrave cette pathologie A
lrsquohocircpital elle apporte son aide agrave tout patient
quelle que soit sa maladie Le patient pourra
srsquoil le souhaite aborder son diagnostic et il nrsquoest
pas rare qursquoil le fasse Apaisement et soulage-
ment pour lui de constater que ce dont il
souffre ne fait pas peur Il peut retrouver con-
fiance en lui
2 LA MEacuteDIATION CULTURELLE
Le meacutediateur ethnoclinicien connaicirct bien la cul-
ture du patient originaire drsquoAfrique de lrsquoOuest et
il parle plusieurs langues (peul bambara sara-
koleacute wolof hellip) Il intervient dans diffeacuterentes
situations
Pour faciliter la communication entre le meacutede-
cin et le patient quand des explications concer-
nant la maladie le traitement nrsquoont pas eacuteteacute
comprises Il ne srsquoagit pas drsquoune simple inter-
preacutetation mais drsquoune formulation adapteacutee agrave la
personne agrave sa culture Les messages de preacute-
vention concernant la sexualiteacute par exemple
seront mieux accepteacutes et entendus si la sensi-
biliteacute du patient voire sa pudeur sont respec-
teacutees
Pour aider agrave la reacutesolution de conflits entre pa-
tient-soignant ou patient-famille ou soignant-
famille
Reacutecemment nous avons organiseacute une meacutedia-
tion culturelle pour une patiente ne parlant pas
du tout le franccedilais accompagneacutee de son fils
maicirctrisant parfaitement notre langue Le meacutede-
cin lrsquoassistante sociale le meacutediateur et moi-
mecircme eacutetions reacuteunis pour essayer de com-
prendre le conflit familial Tout eacutetranger utilise
la langue eacutetrangegravere comme un pansement
comme une sorte drsquoonguent de cregraveme sur les
anciennes blessureshellip La langue seconde ne
permet pas drsquo acceacuteder agrave son for inteacuterieur ex-
plique Julia Kristeva Ainsi le fils pouvant tout
agrave fait communiquer avec nous en franccedilais
srsquoest spontaneacutement adresseacute au meacutediateur en
bambara De toute eacutevidence sa langue natale
lui permettait drsquoecirctre au plus pregraves de la situation
douloureuse qursquoil vivait avec sa megravere
Le meacutediateur apporte des eacuteclaircissements sur
le contexte culturel sur le sens de tel conflit
familial sur la place des uns et des autres dans
telle famille (la place de lrsquooncle maternel par
exemple le systegraveme de filiation) Il aide les soi-
gnants souvent deacutestabiliseacutes par le manque de
repegraveres ou qui interpregravetent mal telle attitude
Par exemple lrsquoextension de la deacutenomination
fregravere sœur cousin megravere dans lrsquoentourage du
patient Les soignants ne savent plus qui est
qui Des doutes surgissent voire de la suspi-
cion Les soignants ont lrsquoimpression drsquoecirctre ma-
nipuleacutes ou trompeacutes
Le meacutediateur ethnoclinicien tient selon la for-
mule de T Nathan une sorte de position du
diplomate entre deux univers antagonistes
3 LA CONSULTATION DETHNOMEacuteDECINE UNE
PRISE EN CHARGE TRANSCULTURELLE
La culture permet un codage de lrsquoensemble de
lrsquoexpeacuterience veacutecue par un individu elle permet
drsquoanticiper le sens de ce qui peut survenir et
donc de maicirctriser la violence de lrsquoimpreacutevu et
par conseacutequent du non-sens
Angoisse de mort deacutecompensation psychia-
trique (ideacutees suicidaires syndrome anxio-
deacutepressif eacutetat deacutelirant) incompreacutehension ou
deacuteni du diagnostic deacutetresse psychologique
autant de reacuteactions face agrave la maladie grave qui
peuvent concerner tout patient (occidental ou
non) mais qui neacutecessitent pour certains pa-
tients migrants une approche tenant compte du
contexte de la migration et des speacutecificiteacutes cul-
turelles
Cette maladie je sais drsquoougrave ccedila vient mon pegravere
mrsquoa donneacutee en sorcellerie nous dit cette pa-
tiente qui ne prend pas ses meacutedicaments et
dont lrsquoeacutetat srsquoaggrave
Je suis travailleacute je le sens crsquoest les parents
de ma femme qui nrsquoont jamais accepteacute notre
mariage crsquoest eux qui font des choses sur
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 53
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
moihellip
Ou bien encore ce patient en phase asympto-
matique de lrsquoinfection par le VIH-sida qui ex-
plique Je ne suis pas malade la preuve le
meacutedecin ne me donne pas de traitement
Ainsi dans certains cas le patient en difficulteacute
en souffrance peut refuser de se soigner au
prix drsquoune aggravation de son eacutetat se santeacute De
plus les messages de preacutevention ne sont pas
entendus et les risques de propagation du virus
sont accrus
Cette consultation qui srsquoinspire de lrsquoethnopsy-
chiatrie reacuteunit autour du patient (accompagneacute
ou non de membres de sa famille ou de
proches)
- leacutequipe de lassociation URACA le Dr Mous-
sa Maman meacutedecin et theacuterapeute traditionnel
qui dirige les entretiens le meacutediateur ethnocli-
nicien la psychologue Pendant 10 ans cette
eacutequipe a eacuteteacute compleacuteteacutee par la preacutesence des
tradipraticiens africains gueacuterisseurs tradition-
nels du Nord Beacutenin qui sont venus une fois par
an pour une dureacutee de deux mois (cette action
originale a pu se mettre en place gracircce agrave des
creacutedits le Sidaction par exemple qui nrsquoexistent
plus aujourdrsquohui)
- leacutequipe soignante le meacutedecin reacutefeacuterent les
infirmiegraveres la psychologue linterne les ex-
ternes lassistante sociale sage-femme kineacute-
sitheacuterapeutehellip Les soignants ont ainsi accegraves
en situation clinique agrave lunivers culturel du pa-
tient
Le recours aux pratiques traditionnelles est tregraves
freacutequent en Afrique Les systegravemes traditionnels
de soin relegravevent drsquo une logique complexe
drsquoune rationaliteacute profonde (T Nathan) avec
une capaciteacute agrave srsquoadapter aux nouvelles situa-
tions aux nouvelles maladies Cette deacute-
marche ne remet pas en cause la confiance
envers notre meacutedecine moderne La theacuterapie
traditionnelle apporte des protections fonda-
mentales (T Nathan)
Tregraves souvent en Afrique les theacuterapies tradition-
nelles se deacuteroulent en groupe avec la famille
et ceux qui ont une affiniteacute avec le malade Ici agrave
lhocircpital les participants sont reacuteunis en cercle
autour du patient Le groupe constitue une en-
veloppe psychique qui est en soi theacuterapeu-
tique Les soignants par leur preacutesence accor-
dent une place agrave lrsquoidentiteacute culturelle du patient
agrave ses maniegraveres de vivre de se soignerhellip
Dans les cultures de tradition orale les eacuteveacutene-
ments importants de la vie tels que la nais-
sance le mariage la maladie la mort (avec
lrsquoimportance des ancecirctres) sont penseacutes diffeacute-
remment Il existe une reacutealiteacute invisible on ac-
corde vie force et pouvoir au mineacuteral au veacutegeacute-
tal agrave lrsquoanimal Le sang le lait maternel ont des
pouvoirs beacuteneacutefiques ou maleacutefiques
Les speacutecialistes de lrsquoanthropologie pensent
que le modegravele de lrsquoorganisation sociale com-
munautaire plus freacutequent dans les socieacuteteacutes
non industrialiseacutees ougrave le groupe maintient une
preacutegnance importante sur lrsquoindividu favorise
une expeacuterience du corps veacutecu comme global
il nrsquoy a pas de rupture entre lrsquohomme et le cos-
mos le corps est permeacuteable On lui reconnaicirct
une dimension transcendante et la maladie
qui plus est chronique comme la dreacutepanocy-
tose peut ecirctre inteacutegreacutee dans une reacutealiteacute plus
large exteacuterieure au corps de la meacutedecine des
hocircpitaux
Lors de ces consultations drsquoethnomeacutedecine les
deux systegravemes culturels occidental et tradition-
nel sont reconnus lrsquoun nrsquoexcluant pas lrsquoautre
Le patient peut aborder en toute confiance des
preacuteoccupations qui lui sont speacutecifiques sans
craindre le ridicule Les deux systegravemes de re-
preacutesentations occidentales et traditionnelles
dans lesquels navigue le migrant peuvent
coexister sans sopposer Paradoxalement
lrsquoapproche traditionnelle donne dans certains
cas sens et coheacuterence au discours meacutedical
scientifique Il est difficile de rendre compte
drsquoune consultation drsquoethnomeacutedecine (de mecircme
qursquoil est difficile de parler drsquoune seacuteance de psy-
chotheacuterapie ou drsquoanalyse bien que ce ne soit
pas du mecircme ordre) Il ne srsquoagit pas drsquoune con-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 54
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sultation traditionnelle ce nrsquoest ni le lieu ni le
cadre Nous sommes dans lrsquoentre-deux
Le nom la parenteacute lrsquoappartenance ethnique la
langue natale sont des eacuteleacutements systeacutematique-
ment abordeacutes Ces reacutefeacuterences agrave la filiation agrave
lrsquoethnie rappellent implicitement au malade le
lien agrave sa famille et son appartenance agrave un
groupe Les tradipraticiens se preacutesentent aussi
se nomment racontent dougrave ils viennent Le
dialogue qui srsquoinstaure est bien souvent eacutenig-
matique pour lrsquooccidental Le langage allusif
meacutetaphorique suggestif qui est utiliseacute est tout
agrave fait entendu par le patient agrave la diffeacuterence des
soignants qui sont deacuteconcerteacutes du moins lors
des premiegraveres consultations Peu agrave peu les
soignants vont se familiariser Par la suite ils
peuvent communiquer diffeacuteremment avec tel
patient et mieux deacutecoder sa maniegravere drsquoecirctre ou
de srsquoexprimer
Les repreacutesentations ancestrales de la maladie
et les eacutetiologies traditionnelles (possession es-
prits ou ancecirctres meacutecontents sorcellerie trans-
gression de tabous ou non respect de rituels
familiaux) ne sont pas systeacutematiquement eacutevo-
queacutees et lorsqursquoelles le sont crsquoest toujours de
maniegravere implicite La maladie comme lrsquoacci-
dent la perte drsquoun emploi ou toute autre mani-
festation de malchance de malheur est le
signe drsquoun deacutesordre -dont il faut comprendre le
sens- et qui concerne non seulement le patient
mais aussi sa famille
Monsieur C originaire du Mali connaicirct bien les
diffeacuterents modes de transmission et nous en
discutons ensemble et dans ce mecircme entre-
tien perplexe il se questionne Je ne sais
pas drsquoougrave ccedila vienthellip
Chez nous la maladie quelle soit physique ou
mentale ne concerne pas uniquement lindividu
toucheacute mais aussi sa famille tout le
groupe (M Maman Journeacutee transculturelle
Des gueacuterisseurs agrave lhocircpital des soignants au
village 29 septembre 2001 hocircpital Tenon
Paris) Derriegravere lhistoire de lindividu se profile
toujours le devenir de la communauteacute toute en-
tiegravere [ ] La cause du mal qui rompt leacutequilibre
dun organisme fait peser une lourde menace
sur le corps social
Bien souvent agrave lissu de ces consultations le
patient va contacter la famille au pays qui elle
aussi va intervenir selon ses coutumes par des
priegraveres rituels ou sacrifices
La proposition dune prise en charge transcul-
turelle nest pertinente que si elle fait sens pour
le patient sil se reconnaicirct des liens avec sa
culture dorigine Le patient peut ecirctre occiden-
taliseacute (eacutetudes supeacuterieures vivant en France
depuis de nombreuses anneacutees hellip) ou dorigine
rurale analphabegravete ayant gardeacute des liens avec
son village il peut ecirctre musulman ou chreacutetien
Les indications sont variables
- incompreacutehension du diagnostic Lrsquoexemple
de Monsieur K malgreacute une seacuterologie positive
il reste persuadeacute de nrsquoecirctre pas malade Cepen-
dant il accompagne aux consultations sa
femme et leur fille toutes les deux seacuteropositives
et sous traitement
- refus du traitement les causes sont mul-
tiples Mme T vient reacuteguliegraverement agrave ses con-
sultations le meacutedecin veut deacutesormais lui pres-
crire un traitement qursquoelle refuse Si je dis que
je suis seacuteropositive personne ne voudra se
marier avec moi Une autre patiente
srsquoinquiegravete Je ne veux pas du traitement si je
deviens indeacutetectable alors ougrave sera le virus
- problegraveme drsquoobservance les causes sont va-
rieacutees preacutecariteacute incompreacutehension ou refus du
diagnostic probleacutematique personnelle plus pro-
fonde
- souffrance psychique le patient peut ecirctre
tregraves observant ses reacutesultats biologiques sont
satisfaisants le patient va tregraves bien selon le
meacutedecin mais persiste en lui une douleur mo-
rale difficile parfois agrave repeacuterer Il faut savoir deacute-
coder le sens du sourire (qui ne signifie pas
toujours la joie) lrsquoabsence de plainte Julia
Kristeva explique que les eacutetrangers sont expo-
seacutes aux maladies psychosomatiques ils sont
dans cet espegravece de vernis de la langue se-
conde mais le fond reste douloureux et le fond
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 55
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
eacuteclate sous la forme de la migraine quand ce
nrsquoest pas le cancerhellip
- pathologie psychiatrique troubles du com-
portement (deacutelire agitation violencehellip) syn-
drome deacutepressif risque suicidaire angoisse de
mort plaintes somatiques sans cause orga-
nique (douleurs diffuses sensation de malaise
le corps parle ccedila chauffe ccedila se deacuteplace)
- fin de vie angoisse isolement
- conflits conjugaux ou familiaux aggraveacutes ou
reacuteactionnels agrave la pathologie (risque de divorce
tel mari qui nrsquoassume plus ses responsabiliteacutes
sexualiteacute devenue difficile impossible (refus du
preacuteservatif par exemple)
- Lrsquoannonce du diagnostic Lrsquoannonce drsquoune
maladie grave est toujours une eacutepreuve pour
tout malade Crsquoest un moment-cleacute dans la prise
en charge du patient Dans le cas de lrsquoinfection
par le VIH la formulation peut ecirctre une donneacutee
brutale Tel ce meacutedecin qui annonce agrave
une femme enceinte vih2 asymptomatique
vous avez le SIDA Veacuteritable violence ver-
bale qui provoque un choc psychique avec
risque suicidaire si ce nrsquoest la fuite et le refus
de soin
Actuellement chez certains soignants on as-
siste agrave une banalisation du diagnostic lieacute aux
possibiliteacutes de traitement Mais crsquoest oublier le
deacutecalage avec le niveau de connaissance du
malade et crsquoest aussi meacuteconnaicirctre les effets
sur le patient de la reacutealiteacute dramatique de la ma-
ladie au pays Certains ont vu des proches
mourir du SIDA drsquoune mort lente sans soin et
dans la solitude Tous les patients eacutevoquent
une forte angoisse Deux mois apregraves il y a en-
core en moi cette grande peur quand le meacutede-
cin mrsquoa parleacute En entendant les propos de
lrsquoinfirmier Je vous apporte vos meacutedicaments
du SIDA Mme B nous raconte comment elle
a protesteacute et reacuteagi vivement Vous ne devez
pas dire cela Ainsi dans certains cas le meacute-
decin peut utiliser drsquoautres formulations le
virus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Dans les cultures de tradition orale les mots
ont une force un pouvoir Prononcer le mot SI-
DA activerait en quelque sorte le potentiel mor-
tel de cette maladie Ainsi dans certains cas le
meacutedecin peut utiliser drsquoautres formules le vi-
rus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Deux ou trois consultations ont lieu ainsi agrave lhocirc-
pital pour chaque malade Les tradipraticiens
vont dire ce quils ont vu et vont donner leurs
indications theacuterapeutiques le suivi peut se
poursuivre apregraves leur retour au village ougrave ils
continuent si crsquoest neacutecessaire agrave travailler
pour le patient Les situations sont tregraves varieacutees
et les reacuteponses le sont tout autant
QUELQUES EXTRAITS DE CONSULTATION
Ce patient ne se sent pas malade il nrsquoa aucun
signe de la maladie il ne comprend pas pour-
quoi le meacutedecin insiste pour qursquoil prenne un
traitement qui plus est agrave vie On lui rappelle
qursquoau pays le gueacuterisseur a lui aussi son labo-
ratoire qursquoil voit et qursquoil peut demander de
faire des choses agrave celui qui vient le consulter
pour sa protection ce parfois toute la vie
Cette analogie explicite permet de confirmer la
validiteacute de lrsquoapproche meacutedicale Ce mode drsquoex-
pression imageacutee qui est familiegravere au patient
voir dans le sable faire des rituels pour la
protection reacutesonne en lui et lrsquoaide agrave adheacuterer
aux prescriptions meacutedicales Moi-mecircme jrsquoem-
ploie souvent le terme protection pour parler
du beacuteneacutefice de la tritheacuterapie jrsquoutilise des
images qui font sens pour le patient et je com-
prends mieux celles qursquoil utilise lui-mecircme De
mecircme il mrsquoarrive de lui signaler nos expres-
sions speacutecifiquement franccedilaises ou nos pro-
verbes afin de lui faire connaicirctre aussi notre
propre maniegravere drsquoexprimer certaines choses
Tel autre patient srsquoaggrave il prend mal ses
traitements et il vit dans une grande preacutecariteacute
Drsquoembleacutee lors du premier entretien psycholo-
gique il mrsquoexplique que sa sœur au pays a par-
leacute de sorcellerie Au cours de la consultation
drsquoethnomeacutedecine on lui demande de solliciter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 56
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sa famille au pays pour savoir ce qui doit ecirctre
fait aupregraves de la riviegravere sacreacutee qursquoil a eacutevoqueacutee
En Afrique les deacutefunts les ancecirctres doivent
ecirctre veacuteneacutereacutes par des rituels propres agrave chaque
famille si ce rituel a eacuteteacute abandonneacute des con-
seacutequences neacutegatives peuvent rejaillir sur un de
ses membres mecircme tregraves eacuteloigneacute On peut re-
marquer qursquoici lrsquohypothegravese de la sorcellerie est
eacutecarteacutee crsquoest une autre eacutetiologie traditionnelle
qui est avanceacutee agrave laquelle le patient adhegravere il
va contacter en effet son oncle au sujet de la
riviegravere sacreacutee Le patient devient actif non seu-
lement pour srsquooccuper des choses du pays
mais aussi pour faire des deacutemarches ici sa si-
tuation meacutedicale et sociale va consideacuterable-
ment srsquoameacuteliorer il trouve par la suite un heacute-
bergement puis un travail
Pour cette autre patiente un long temps de la
seacuteance va ecirctre consacreacute au reacutecit de la deacutecou-
verte de sa maladie de son bouleversement
de son angoisse concernant lrsquoavenir Des pa-
roles apaisantes lui sont dites puis on va lui de-
mander drsquoeacutecrire ses recircves de telle et telle nuit
au cours desquelles les gueacuterisseurs
travailleront pour elle Suite au rapport de ses
recircves ils lui prescrivent un traitement elle de-
vra se laver avec une preacuteparation agrave base de
plantes Conjointement le suivi psychologique
classique se poursuit elle reprend confiance
dans la vie
Aacute tel autre il est demandeacute drsquoapporter une petite
boicircte en bois ou encore un tissu blanc et un
parfum Aacute un autre il est dit drsquoaller chercher un
certain nombre de cailloux le long drsquoun cours
drsquoeau ici en France Certaines prescrip-
tions sont plus compliqueacutees sacrifices rituels
agrave effectuer au pays objets agrave rapporter Cela
peut prendre plusieurs semaines Si la pres-
cription est impossible agrave reacutealiser par le patient
lui-mecircme sur place ou par sa famille en
Afrique les gueacuterisseurs le feront en son nom agrave
leur retour au pays Dans la meacutedecine tradition-
nelle lrsquouniteacute cosmique crsquoest-agrave-dire la parenteacute
homme-nature est constamment preacutesente
Lrsquohomme est relieacute au monde mineacuteral veacutegeacutetal
ou animal mais aussi agrave celui des deacutefunts des
esprits et bien-sucircr agrave sa famille agrave son groupe
LE SUIVI DE GROSSESSE DE MME T
Depuis des anneacutees la patiente souffre en plus
de lrsquoinfection par le VIH de troubles du compor-
tement difficiles agrave diagnostiquer elle a un suivi
psychiatrique qui ne suffit pas agrave la soulager
Elle traverse des peacuteriodes drsquoagitation drsquoagres-
siviteacute et mecircme de violence Dans ses crises
elle peut aller jusqursquoagrave lrsquoautomutilation ou la ten-
tative de suicide Agrave drsquoautres moments elle est
totalement abattue leacutethargique Bien qursquoelle
connaisse sa maladie lieacutee au VIH lrsquoobservance
de sa tritheacuterapie est fonction de son eacutetat psy-
chique Elle a beacuteneacuteficieacute agrave plusieurs reprises de
consultations drsquoethnomeacutedecine en particulier
lors de cette derniegravere grossesse Du fait des
mauvais reacutesultats biologiques car elle ne prend
plus ses antireacutetroviraux le risque de contami-
nation megravere-enfant est particuliegraverement eacuteleveacute
Tregraves deacuteprimeacutee elle est transfeacutereacutee dans le ser-
vice de psychiatrie de notre hocircpital et le psy-
chiatre accepte qursquoagrave cocircteacute des traitements clas-
siques (antideacutepresseurs anxiolytiques) elle
fasse les soins traditionnels prescrits Elle a
donc une permission pour aller au marcheacute agrave
cocircteacute de lrsquohocircpital acheter un œuf blanc Elle doit
ensuite mettre cet œuf dans une grosse boicircte
drsquoallumettes exercice un peu difficile car lrsquoœuf
risque de se casser Le tout est mis dans une
calebasse recouverte drsquoun tissu blanc qursquoelle
entrepose sous son lit plus preacuteciseacutement agrave la
tecircte du lit En effet il est important qursquoelle
dorme avec cette calebasse pregraves de sa tecircte
pendant un certain nombre de nuits Puis la ca-
lebasse avec son contenu (lrsquoœuf dans la boicircte)
est remise aux gueacuterisseurs de retour au pays
ils vont effectuer leur travail agrave la termitiegravere sa-
creacutee A son retour en France le Dr Maman
remet un onguent agrave la patiente preacuteparation
faite agrave partir de lrsquoœuf et drsquoautres eacuteleacutements Elle
doit mettre reacuteguliegraverement cette pommade au-
tour de son nombril jusqursquoagrave lrsquoaccouchement
Lrsquoeacutetat psychique de la patiente srsquoameacuteliore elle
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 57
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reprend correctement son traitement lrsquoenfant
naicirct et ne sera pas contamineacute par le VIH Dans
les anneacutees qui suivront son eacutetat psychologique
se deacutegradera agrave nouveau nous nrsquoavons jamais
reacuteussi agrave la stabiliser compleacutetement Nrsquoayant ja-
mais bien suivi sa tritheacuterapie elle deacutecegravede agrave la
suite des complications du sida
A partir de cet exemple nous pouvons voir le
principe de non-seacuteparativiteacute principe essentiel
agrave lrsquoœuvre dans la meacutedecine traditionnelle afri-
caine Nous sommes ici dans un systegraveme de
penseacutee primordiale magique qui fonctionne
par analogie nous sommes dans le non-
seacutepareacute agrave la diffeacuterence de la penseacutee scientifique
qui individualise Dans ce cas clinique on voit
comment tout est relieacute il y a identiteacute entre la
grossesse et lrsquoœuf passage de lrsquohumain agrave
lrsquoanimal et aussi passage drsquoun continent agrave
lrsquoautre les gueacuterisseurs travaillant agrave distance
pour la patiente Citons agrave ce propos Pierre
Lembeye psychiatre et psychanalyste hellip
nous pouvons parler de rsquorsquonon-seacuteparativiteacutersquorsquo de
la meacutedecine traditionnelle par rapport agrave la meacute-
decine occidentale qui privileacutegie le mode seacutepa-
ratif et dont le maicirctre mot est diffeacuterence tandis
que celui des socieacuteteacutes anhistoriques est identi-
teacute La science en particulier la meacutedecine a
fait des progregraves en isolant en seacuteparant Citons
aussi Jean Benoist Lrsquoopposition carteacutesienne
entre le corps et lrsquoacircme a libeacutereacute la biologie et
donc la meacutedecine des interdits qui sacralisent
le corps hellip Lrsquoesprit lrsquoacircme tout ce qui eacutetait cou-
ramment deacutesigneacute par ces termes srsquoest prodi-
gieusement eacuteloigneacute de lrsquohorizon meacutedical
(Benoist 1993) A lrsquohocircpital crsquoest bien lrsquoorgane
malade que lrsquoon soigne mais rarement la per-
sonne dans sa globaliteacute et encore moins son
groupe familial Nous pensons analysons sur
le mode seacuteparatif celui de la coupure et selon
Pierre Lembeye La psychanalyse avec lrsquohy-
pothegravese de lrsquoinconscient opegravere aussi une cou-
pure avec le conscient Les lapsus les recircves
sont des manifestations de lrsquoinconscient alors
que dans la tradition africaine il nrsquoy a pas cette
seacuteparation par exemple chez les Ashantis au
Ghana si un homme recircve qursquoil couche avec sa
voisine il est puni et sa voisine aussi De
mecircme la psychiatrie pense aussi les probleacutema-
tiques sur le mode de la coupure le terme
schizophreacutenie provient de schizo du grec
schizein signifiant fractionnement fissure divi-
sion (P Lembeye) Dans les traitements tradi-
tionnels crsquoest la question du lien qui est au pre-
mier plan Nous avons lrsquoexemple de ce beacutebeacute
acircgeacute de huit mois enfant-cordon preacutesentant
des troubles du comportement et dont le traite-
ment est deacutecrit par Eacuteric de Rosny hellip le cor-
don ombilical le retenant aux entrailles de
lrsquoautre monde nrsquoaurait pas eacuteteacute coupeacute hellip Il srsquoagit
de lui crever les yeux crsquoest-agrave-dire de lui
rendre invisible le monde des Ancecirctreshellip (De
Rosny 1996 123-133)
La penseacutee magique qui est agrave lrsquoœuvre dans les
theacuterapies traditionnelles a-t-elle deacuteserteacute notre
systegraveme de penseacutee occidentale Dominique
Folscheid professeur de philosophie nous rap-
pelle ceci Notre meacutedecine moderniste est
due agrave lrsquoessor de la rationaliteacute mais on a oublieacute
que dans la Gregravece Antique la rationaliteacute deacutebu-
tante (avec les philosophes) srsquoaccompagnait
drsquoune vie mystique florissante Rappelons le
serment drsquoHippocrate premier code de deacuteonto-
logie meacutedical Je jure par Apollon meacutedecin
par Esculape par Hygeacutee et Panaceacutee par tous
les dieux et toutes les deacuteesseshellip Dans son
livre La nuit les Yeux ouverts Eacuteric de Rosny
cite Pierre Fegravevre Ce monde de la gueacuterison et
de la sorcellerie a quelque chose drsquounheimlich
(agrave la fois lsquolsquomysteacuterieuxrsquorsquo et lsquolsquoinquieacutetantrsquorsquo) et pour-
tant il eacuteveille des reacutesonances au plus profond
de nous-mecircmes et lrsquoon ne sait pas les-
quelles (de Rosny 1996 17) Nous-mecircmes
sans en avoir veacuteritablement conscience fonc-
tionnons sur le mode du lien du non-seacutepareacute
par exemple Reneacute Spitz psychiatre et psycha-
nalyste a deacutecrit en 1946 lrsquohospitalisme alteacutera-
tion physique grave srsquoinstallant chez le tregraves
jeune enfant placeacute en institution et seacutepareacute de
sa megravere crsquoest pourquoi aujourdrsquohui en peacutediatrie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 58
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
on facilite la preacutesence de la megravere qui peut dor-
mir au chevet de son enfant un autre
exemple celui du syndrome de glissement des
personnes acircgeacutees hospitaliseacutees qui coupeacutees de
leur environnement habituel se laissent mourir
et dans un autre registre que dire de lrsquoabsence
de chambre ndeg13 dans nos hocircpitaux nos hocirc-
tels
4 FORMATION MUTUELLE PARTAGE DE SAVOIR
Un eacutechange des savoirs srsquoest instaureacute entre les
soignants de lrsquohocircpital et lrsquoassociation
1 au niveau de lrsquoassociation les membres
drsquoURACA sont formeacutes agrave la pathologie du sida
les meacutedecins apportent leur connaissance meacute-
dicale avec des mises agrave jour sur lrsquoeacutevolution de
la pathologie et des traitements Des reacuteunions
agrave thegraveme sont organiseacutees avec un eacutelargisse-
ment agrave drsquoautres pathologies (heacutepatites dreacutepa-
nocytose)
2 au niveau des soignants formation en situa-
tion clinique participation au cycle annuel de
confeacuterences drsquoUraca voyages drsquoeacutetude dans le
village du Dr Maman au Nord-Beacutenin effectueacutes
par des meacutedecins psychiatres psychologues
assistante sociale infirmiegraveres de lrsquoAP-HP
(participation agrave des theacuterapies traditionnelles
dont le culte de danses de possession expeacute-
rience drsquoune certaine situation migratoire vil-
lage dans la brousse repegraveres diffeacuterents cadre
culturel autre adaptation au climat agrave la nourri-
turehellip)
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site wwwuracaorg)
Pratiques theacuterapeutiques et cultures regards
croiseacutes 3egravemes
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ligne sur wwwuracaorg)
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toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
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PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 60
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune
pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute
L e propos de cette preacutesentation sera de
teacutemoigner de leacutevolution drsquoune pratique
de psychologue au sein dun pocircle de peacute-
diatrie bien speacutecifique celui de lrsquoHocircpital Ray-
mond Poincareacute de Garches Laccueil denfants
en deacutecompensation neuro respiratoire souf-
frant de polyhandicap de maladies chroniques
ou arrivant suite agrave un eacuteveacutenement traumatique
brutal (accident intoxication insuffisance respi-
ratoire) rend la preacutesence du psychologue neacute-
cessaire
Avec Jean en phase terminale nous reacutefleacutechi-
rons au rocircle du psychologue dans lrsquoaccom-
pagnement des enfants en fin de vie
Dautres cas cliniques preacutesenteacutes agrave loral illus-
treront ensuite les modaliteacutes de la prise en
charge post-traumatique denfants et de
leurs familles
Enfin nous terminerons par exposer la speacutecifi-
citeacute de notre travail aupregraves des soignants
ACCOMPAGNER DES ENFANTS GRAVEMENT MA-
LADES OU EN FIN DE VIE
Lors de notre premiegravere rencontre Jean nous
dit Je sais que je vais mourir mais les meacutede-
cins sont trop lacircches pour me le dire et mes
parents sont trop tristes pour mrsquoen parler
Nous lui reacutepondons Je ne te connais pas
mais en tout cas je trouve que cest super que
tu puisses en parler et que tu ne gardes pas
tout ccedila pour toi
Tregraves eacutetonneacute il reprend Alors lagrave crsquoest bizarre
drsquohabitude degraves que je dis que je vais mourir
tout le monde me dit rdquoMais arrecircte Nrsquoimporte
quoi Ne raconte pas des becirctisesrdquo Mais moi je
ne suis pas fou je sais ce que je dis et pour-
quoi je le dis et je veux pouvoir en parler
La question redoutable est tregraves vite apparue
Est-ce que crsquoest vrai que je vais mourir Il
faut alors pouvoir reacutepondre Je pense que si
tu dis ccedila crsquoest que tu as de bonnes raisons de
le penserhellip Tu es le seul agrave savoir exactement
ce que tu vis Raconte-moi qursquoest-ce qui te fait
dire ccedila
Jour apregraves jour gracircce agrave un travail psycholo-
gique Jean exprime de plus en plus sa souf-
france Se sentant eacutecouteacute il entre progressive-
ment dans une autre phase celle de lrsquoaccepta-
tion
Accompagner un enfant en fin de vie crsquoest
avant tout rester agrave son eacutecoute affronter les
questions qui mettent si mal agrave lrsquoaise (mecircme si
et surtout si on ne sait pas comment y reacute-
pondre ) Et crsquoest aussi accueillir ses interroga-
tions sur sa propre mort pour lutter contre la
solitude la peur lrsquoangoisse la colegravere
ACCOMPAGNER LES FAMILLES
Avec la megravere de Jean nous deacutecouvrons ce qui
se joue autour de la porte Degraves que nous nous
preacutesentons elle nous reacutepond Merci on nrsquoa
besoin de rien (Puis sortant de la
chambre) mais surtout vous ne lui dites pas
qursquoil va mourir vous ne lui parlerez de rien -
Oh moi non mais lui il en parle beaucoup
Tregraves surprise la megravere accepte alors de venir
en parler dans notre bureauhellip Lrsquoaccompagne-
ment commence
En phase terminale Jean perd toute autonomie
motrice et tous ses sens agrave lrsquoexception de la
vue Il ne peut plus parler Sa megravere terroriseacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 61
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
par la situation demande aux eacutequipes de lui
donner quelque chose pour dormir deacutefiniti-
vement Nous lui montrons alors qursquoune com-
munication subsiste gracircce agrave lrsquoinstauration drsquoun
code (lettres sur un tableau) avec des signes
de tecircte et des clignements drsquoœil Elle srsquoaperccediloit
alors que Jean cherche avant tout agrave savourer
les petits bonheurs de chaque jour Elle reste
ainsi jusquau bout en lien avec son fils
Accompagner les parents cest accueillir
leur eacutepuisement leurs doutes leur ambiva-
lence parfois mecircme leur demande deuthana-
sie et leur redonner une image positive deux-
mecircmes pour leur permettre drsquoinvestir lrsquoinstant
preacutesent et ainsi favoriser un accompagnement
de qualiteacute
ACCOMPAGNER AUSSI LES AUTRES ENFANTS HOS-
PITALISEacuteS ET LEURS FAMILLES
Il nous semble important de susciter des
occasions drsquoaborder le sujet de la mort en lais-
sant les familles libres de saisir ou non ces op-
portuniteacutes
ACCOMPAGNER LES SOIGNANTS
DANS LIMMEacuteDIATETEacute DE LA REacuteALITEacute CLINIQUE
En deacutecalage les eacutequipes srsquointerrogent
Doit-on vraiment lui infliger ccedila jusqursquoau bout
Sa megravere a peut-ecirctre raison on devrait peut-
ecirctre lrsquoendormir pour qursquoil ne se sente pas humi-
lieacute drsquoecirctre si diminueacute Moi je ne supporterais
pashellip Les soignants sont alors tellement preacute-
occupeacutes par la deacutecision qursquoils pensent devoir
prendre qursquoils ne se rendent pas compte que
cette megravere est en train de vivre lrsquoun des plus
grands moments drsquoamour avec son fils Le psy-
chologue devient alors le lien entre les diffeacute-
rents protagonistes en rapportant certains des
propos de Jean Je suis bienhellip Comme ce
rayon de soleil est beau aujourdrsquohuihellip La
communication se remet agrave fonctionner Leurs
regards se posent alors diffeacuteremment sur lui
La peacuteriode de fin de vie drsquoun patient con-
fronte chaque soignant agrave ses limites Chacun
perd ses illusions de toute-puissance et se re-
trouve confronteacute agrave sa propre angoisse de mort
Certains deacutestabiliseacutes ne peuvent pas suppor-
ter lideacutee decirctre confronteacute agrave la proximiteacute de la
mort Pour surmonter sans trop de seacutequelles
la confrontation reacutepeacuteteacutee agrave la maladie grave et agrave
la mort il est neacutecessaire que chacun puisse
ecirctre attentif agrave soi-mecircme agrave ses propres be-
soins pour ecirctre dans un juste rapport agrave lrsquoautre
Il sagit decirctre toucheacute sans ecirctre impliqueacute affecti-
vement cest agrave dire sans tomber dans leacutemotivi-
teacute
Apregraves chaque deacutecegraves le psychologue est
lagrave pour inviter ceux qui le deacutesirent agrave mettre en
mots ce qui a eacuteteacute veacutecu La parole partageacutee per-
met de ne pas fixer des souvenirs culpabili-
sants ou anxiogegravenes
AU LONG COURS LE TRAVAIL INSTITUTIONNEL
Le soutien des eacutequipes pluridisciplinaires
est une part tregraves importante du travail du psy-
chologue en milieu hospitalier Lrsquoeacutecoute et les
eacutechanges contribuent agrave ce que tregraves lentement
les habitudes et les mentaliteacutes eacutevoluent Ces
rencontres pourront selon les situations avoir
lieu de faccedilon formelle ou informelle (le plus
souvent dans les couloirs)
Le soutien au long cours des eacutequipes fait par-
tie inteacutegrante du travail institutionnel Diffeacuterents
outils permettent de lrsquoaccompagner au mieux
LA REacuteUNION DE SYNTHEgraveSE
Dans notre service la reacuteunion de syn-
thegravese hebdomadaire permet de se poser pour
reacutefleacutechir en eacutequipe pluridisciplinaire agrave ce que
nous vivons Il est primordial drsquoaider chaque
intervenant agrave mettre des mots sur les situations
rencontreacutees surtout quand les points de vue
sont divergents Mais il srsquoagit drsquoun travail de
longue haleine car si nous nrsquoy sommes pas
vigilants les discussions restent tregraves meacutedicales
et eacutevitent drsquoaborder lrsquoenfant et sa famille dans
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 62
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
leur globaliteacute Le psychologue par sa faccedilon de
relever les paradoxes de poser les questions
eacutethiques ou simplement de faire entendre une
autre approche que celle purement somatique
aide les eacutequipes agrave reacutefleacutechir agrave leur maniegravere
drsquoaborder les familles
LA SYNTHEgraveSE DES SYNTHEgraveSES
Une fois par an nous prenons le temps
de relire les moments forts de lrsquoanneacutee en met-
tant des mots sur ce qui a reacuteussi ou eacutechoueacute ce
qui nous a manqueacute ce qui nous a marqueacute
choqueacute ou qui est resteacute incompris Mettre des
mots agrave distance sur des malentendus (en lien
avec une famille ou un fonctionnement interne)
permet davancer en eacutequipe Nous veillons
aussi agrave reprendre point par point les eacuteleacutements
positifs rappeler les enfants sauveacutes les fa-
milles qui remercient et valoriser les eacutequipes
est essentiel pour maintenir la motivation et
lrsquoinvestissement de chacun
ET LE PSYCHOLOGUE DANS TOUT CcedilA
Face agrave ces enfants gravement malades ou en
fin de vie nous devons apprendre agrave nous
adapter Il nous faut par exemple pour pouvoir
accueillir un enfant sans aucune autonomie
respiratoire dans notre bureau apprendre au
minimum les gestes de reacuteanimation agrave effectuer
en attendant qursquoun soignant prenne la relegraveve
Alors que nous avons appris agrave ne pas toucher
il nous faut comprendre ce que le patient nous
dit non plus agrave travers des mots mais agrave travers
des maux agrave travers son corps une poigneacutee
de main un regard une mimiquehellip nous de-
vons sentir lrsquoexpression non verbale de lrsquoan-
goisse Deacuteceler si le patient a besoin de silence
ou au contraire srsquoil attend nos questions En-
fin il faut quelquefois avec une extrecircme deacuteli-
catesse et une grande attention chercher agrave re-
formuler ce que le patient nous dit avec des
lettres montreacutees sur un tableau un hochement
de tecircte ou simplement un regard
Ecirctre psychologue va souvent de pair avec une
invitation permanente agrave se remettre en ques-
tion Il srsquoagit drsquoaccepter de douter plutocirct que de
chercher des certitudes Pour srsquoadapter agrave la
speacutecificiteacute de chaque situation il nous faudra
surtout ecirctre creacuteatif et oser inventer Dans le
cas contraire notre travail restera sans doute
superficiel car il apparaicirctra comme en deacuteca-
lage par rapport aux situations veacutecues par les
patients et les eacutequipes qui les prennent en
charge
Au niveau institutionnel le travail du psycho-
logue ne porte de fruits qursquoagrave tregraves long terme
Alors ne nous deacutecourageons pas (Le deacutecou-
ragement nrsquoest-il pas notre pire ennemi ) Veil-
lons agrave prendre soin de nous soyons attentifs agrave
nos propres besoins Ne nous barricadons pas
devant la deacutetresse mais au contraire appre-
nons agrave ralentir et agrave ressentir ce qui est toucheacute
en nous Comme leacutequilibriste sur la corde
nous devons essayer davancer en souplesse
pour ne tomber ni dans lindiffeacuterence ni dans la
fusion avec les situations dramatiques rencon-
treacutees
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Geacuteriatrie Hocircpital Eacutemile Roux
M esure 1 du plan Alzheimer 2008-
2012 deacuteveloppement et diversifica-
tion des structures de reacutepits
Parce qursquoils sont contraints de veiller constam-
ment sur les malades les aidants sont soumis
agrave une pression permanente Il existe des struc-
tures qui leur permettent de souffler en offrant
par ailleurs une prestation theacuterapeutique aux
malades pendant une ou plusieurs demi-
journeacutees
Afin drsquoeacutelargir les missions des accueils de jour
qui ne srsquoadressent qursquoaux personnes malades
ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees les plates-formes drsquoac-
compagnement et de reacutepit Il srsquoagit drsquooffrir aux
aidants et aux couples des activiteacutes de soutien
de reacutepit agrave domicile ou en couple et de deacutevelop-
pement de la vie sociale
Il existe des actions de reacutepit agrave domicile de
garde agrave domicile de nuit drsquoactiviteacutes sociales
culturelles pour le couple maladeaidant et de
seacutejours vacances
Jacqueline agrave la fin drsquoun seacutejour vacances mrsquoa
confieacute deux feuilles de cahier manuscrites Jrsquoai
eacutecrit ccedila Vous le lirez si vous voulez
Je me legraveve agrave 7h Prise des meacutedicaments de
Guy Je deacutejeune moment tranquille je fais ma
toilette Je vais ouvrir les volets chez maman Il
est 8h30 Je preacutepare les meacutedicaments et le pe-
tit deacutejeuner de Guy Quelques fois je le fais
manger si je peux Je fais les lits je com-
mence agrave preacuteparer le deacutejeuner Passage du
SSIAD Pendant ce temps je preacutepare une les-
sive pratiquement une tous les jours Apregraves le
passage du SSIAD souvent il a besoin drsquoaller
aux toilettes le deacuteculotter nettoyer les WC le
reculotter ranger la salle de bain et finir ce qui
a eacuteteacute commenceacute (je ne peux rien faire en sui-
vant) Souvent fais de lrsquoadministratif preacuteparer
le courrier aller agrave la poste et au pain Il vient
avec moi il faut lrsquoaider agrave monter dans la voiture
et souvent lrsquoaider agrave descendre Il est 11h il faut
eacutetendre le linge lrsquoaider agrave faire sa gym preacuteparer
et porter le plateau agrave maman Midi Lrsquoheure de
preacuteparer et donner les meacutedicaments Mettre le
couvert couper les aliments lrsquoaider Pour lui il
faut bien 90 min de pose pour deacutejeuner
Apregraves desservir le preacuteparer pour la sieste le
deacuteculotter et reculotter lrsquoaider agrave se coucher
finir de ranger la cuisine lever et plier le linge
Il est environ 14h Petite pause 15h-15h30 la
sieste est finie Sortie dans le jardin toujours
accompagneacute Lrsquoaider agrave srsquohabiller agrave se deacutesha-
biller 16h prise des meacutedicaments et goucircter
Quelquefois passages agrave la sortie de lrsquoeacutecole
des petits enfants et leur papa Aux beaux
jours travail agrave lrsquoexteacuterieur (plus de 2000m2) La
tonte du gazon est faite par mon garccedilon et jrsquoai
agrave peu pregraves 40h par an par la caisse de retraite
compleacutementaire Jrsquoai une aide-meacutenagegravere 3 h
le mardi matin et 1 h le mercredi matin Jrsquoen
profite pour aller faire les courses ou aller chez
le docteur le dentiste ou le coiffeur ou autre
chose Et 3h le jeudi apregraves-midi Lagrave crsquoest mon
repos hebdomadaire et pas toujours Je vais agrave
lrsquoaquagym avec 2 amies mais juste en peacuteriode
scolaire On est loin des 2 jours de congeacutes par
semaine mais jrsquoen demande pas tant Vers 17h
-17h30 petite promenade dans le jardin apregraves
preacuteparation du dicircner 19h prise des meacutedica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 64
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
ments Le dicircner pour lui il faut compter 90 min
Ensuite desservir Vers 20h30 je vais deacuteshabil-
ler maman Pour lrsquoinstant elle se couche sans
aide mais au deacutebut du printemps jrsquoallais la cou-
cher vers 22h Entre-temps je deacuteshabille Guy
passage aux toilettes prise des meacutedicaments
et apregraves le coucher
Il est 22h Je respire un peu Je fais un brin de
toilette Je prends mon somnifegravere et je me
couche Je mrsquoendors ou je ne mrsquoendors pas Lagrave
on peut pleurer Personne ne le voit Dans la
nuit je me legraveve une ou deux fois quand il a be-
soin de faire son pipi
Et cela 365 jours par an Et je ne me plains
pas Il y a pire Il y a aussi mieux
Jacqueline est comme 35 millions de fran-
ccedilais Elle fait partie des personnes que lrsquoon
nomme aidant familial drsquoun proche Il srsquoagit de
son mari Cela fait 12 ans qursquoil est malade Le
quotidien de Jacqueline est rythmeacute autour de
son eacutepoux et de sa pathologie eacutevolutive
En geacuterontologie le mot aidant est utiliseacute voire
parfois revendiqueacute Un aidant mais qursquoest-ce
que crsquoest Selon lrsquoassurance maladie crsquoest
celui qui apporte seul ou en compleacutement de
lrsquointervention des professionnels lrsquoaide humaine
rendue neacutecessaire par la perte drsquoautonomie de
la personne acircgeacutee ou destineacutee agrave preacutevenir une
perte drsquoautonomie et qui nrsquoest pas salarieacute pour
cette aide
Depuis une quinzaine drsquoanneacutees le veacutecu des
aidants familiaux fait lrsquoobjet de recherches On
sait aujourdrsquohui que 800 000 personnes sont
recenseacutees comme eacutetant en eacutetat de deacutepen-
dance en France crsquoest-agrave-dire qursquoelles ne peu-
vent pas effectuer de maniegravere autonome les
actes de la vie courante Et que cela est forte-
ment correacuteleacute agrave lrsquoavanceacutee en acircge la personne
aideacutee a 76 ans en moyenne
Si le lien familial preacutedomine lrsquoaidant peut aussi
ecirctre un ami ou un voisin Il srsquoagit le plus sou-
vent drsquoune femme acircgeacutee de plus de 50 ans
Bien que deux tiers des aidants srsquooccupent
quotidiennement de la personne aideacutee 60
drsquoentre eux continuent agrave avoir une activiteacute sala-
rieacutee
Lrsquoaide agrave un proche dure en moyenne 7 ans
Dans la relation drsquoaide plusieurs probleacutema-
tiques sont en jeu le deuil du parent conjoint
tel qursquoil eacutetait auparavant le renversement des
rocircles de lrsquoordre des geacuteneacuterations la crainte face
agrave son propre vieillissement les difficulteacutes de
communication avec le proche malade la
crainte de la perte du lien
La relation drsquoaide a ses apports la majoriteacute
des aidants disent se sentir utile et trouver du
plaisir dans cette relation Mais elle a aussi ses
limites et ses risques On sait aujourdrsquohui que
la mortaliteacute des aidants augmenterait de 63
que le risque de deacutepression est multiplieacute par 3
Dans cette aide au quotidien le rythme la reacute-
peacutetition lrsquoeacutevolution de la maladie peuvent ame-
ner agrave des sentiments drsquoisolement de surme-
nage et drsquoeacutepuisement
Si plus de 60 des personnes atteintes de la
maladie drsquoAlzheimer ou apparenteacutees vivent agrave
leur domicile crsquoest gracircce agrave un aidant familial
qui toute la journeacutee est dans le faire Lrsquoaidant
familial contrairement agrave lrsquoaidant professionnel
nrsquoest pas formeacute agrave cet accompagnement il base
sa relation agrave partir drsquoun lien affectif avec la per-
sonne qursquoil aide Il peut ecirctre reacutemuneacutereacute sil a
lrsquoacircge de travailler et qursquoil nrsquoest pas son conjoint
Il nrsquoa pas drsquoheures fixes
On peut donc comprendre le besoin parfois de
se poser un peu
Plutocirct que le mot vacances est apparu reacute-
cemment le mot reacutepit
Des seacutejours de reacutepit pour les aidants
Une expression forte qui vient nommer la souf-
france du proche dans la relation drsquoaide
Agrave croire que la personne dite aideacutee nrsquoa elle
pas besoin de temps de pause et que son quo-
tidien lui suffit parfaitement La femme de
Pierre me dira mon meacutedecin et son neuro-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 65
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
logue mrsquoavaient deacuteconseilleacute de lrsquoemmener ici
En France les vacances sont un droit pour les
salarieacuteshellip
Mais au fait agrave quoi ccedila sert des vacances Eh
bien avant tout agrave couper avec le quotidien An-
dreacute Comte-Sponville eacutevoque les vacances
comme un moment de liberteacute
Srsquoaccorder une pause crsquoest ainsi que nous
avons nommeacute le seacutejour de vacances que je
vais vous preacutesenter
Le seacutejour est proposeacute par une caisse de re-
traite compleacutementaire qui contacte ses adheacute-
rents Le point commun est qursquoil existe entre un
adheacuterent et un de ses proches une relation
drsquoaide au quotidien Le projet a eacuteteacute construit et
penseacute avec une association qui intervient dans
lrsquoaccompagnement de lrsquoavanceacutee en Acircge
Le groupe est composeacute en moyenne de 7
couples la moyenne drsquoacircge des aidants est de
74 ans et celle des aideacutes de 80 ans
Les participants viennent de la France entiegravere
Ils ne se connaissent pas Nous ne les con-
naissons pas
La majoriteacute des aideacutes preacutesentent des pro-
blegravemes cognitifs ou des difficulteacutes motrices
Le lieu est une structure de vacances (type reacute-
sidence hocircteliegravere) adapteacutee aux personnes han-
dicapeacutees
Le seacutejour a eacuteteacute penseacute avec la preacutesence de
deux personnes dite en fil rouge de la se-
maine la coordonnatrice de lrsquoassociation creacutea-
trice du projet et la psychologue Partager le
quotidien du petit deacutejeuner au dicircner de lrsquoac-
cueil jusqursquoau deacutepart
Drsquoautres intervenants (intervenant en Taiuml-Chi
Chuan une socio-estheacuteticienne intervenant en
chant et expression corporelle activiteacute autour
de la terre) rejoignent le groupe en deacutecaleacute afin
de conserver une alternance des pratiques
mais aussi une preacutesence renforceacutee en milieu
de semaine moment ougrave nous pouvons com-
mencer agrave seacuteparer les duos
Lrsquoaspect meacutedicaliseacute parfois neacutecessaire est re-
layeacute par des infirmiegraveres libeacuterales qui intervien-
nent sur le lieu de vacances
Le planning de la semaine est proposeacute avec
des activiteacutes ensemble seacutepareacutees en groupe
individuelles toujours dans la proposition et
non dans la contrainte Le rythme des journeacutees
srsquoadapte tous les jours
Les objectifs de la semaine
Permettre agrave chacun aidant comme aideacute de
srsquoaccorder veacuteritablement une pause en profi-
tant pleinement du site et drsquoun accompagne-
ment qui facilite leur quotidien pendant la se-
maine (absence de tacircches meacutenagegraveres repas
servis au restaurant possibiliteacute drsquoaccompagne-
ment de la personne aideacutee pour quelques
heures proposition drsquoanimations proposition
de temps dlsquoeacutechanges et de paroles)
Favoriser lrsquoacquisition et le partage drsquooutils mecirc-
lant expeacuteriences et connaissances que les per-
sonnes pourront reacuteutiliser une fois de retour au
domicile
Nous ne nommons pas les personnes par leur
fonction aidant ou aideacute mais par leur preacutenom
Chaque duo est composeacute drsquoune personne
ayant un badge vert et lrsquoautre saumon Ainsi
certaines activiteacutes sont proposeacutees agrave tous et
drsquoautres agrave chaque groupe de couleur diffeacuterente
Lrsquoanalyse des questionnaires de satisfaction ou
du bilan oral nous confortent encore dans lrsquoideacutee
que ces objectifs reacutepondent bien agrave ceux des
personnes et sont atteignables dans le cadre
de ces seacutejours
Crsquoest lrsquooccasion de partager une semaine de
vacances tout agrave fait diffeacuterente du quotidien et
des repegraveres de chacun Le groupe se creacutee degraves
les premiegraveres heures de rencontre agrave lrsquoarriveacutee
Tout au long de la semaine chacun eacutevolue
dans sa propre probleacutematique
Les aidants deacutecouvrant drsquoautres pairs eacutechan-
geant avec drsquoautres prenant distance vis agrave vis
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 66
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
de leur veacutecu et deacutecouvrant le comportement de
leur proche avec drsquoautres personnes profes-
sionnels ou non
Les aideacutes qui se sont saisis des possibiliteacutes
offertes de faire autrement deacutecouvrir drsquoautres
vivre des moments de plaisir malgreacute le handi-
cap ou la maladie Eacutechanger avec drsquoautres qui
vivent des situations similaires
Lrsquoeacutevolution du groupe dans lequel une con-
fiance mutuelle srsquoinstalle et permet des interac-
tions et des eacutechanges tregraves riches humaine-
ment Chacun a pu recevoir et apporter agrave
lrsquoautre qursquoil soit aideacute ou aidant
Durant tout le seacutejour tout le monde peut se po-
ser deacutecouvrir lrsquoautre se deacutecouvrir dans des
moments partageacutes individuels ou collectifs
Proposer plein drsquounivers diffeacuterents des compeacute-
tences diffeacuterentes (prof de tai-chi le corps
penseacute le chant le savoir de lrsquoeacutemotion la socio-
estheacuteticienne le mieux avec soi-mecircme)hellip
Et le psychologue dans tout ccedila
Dans ce type de vacances jrsquointerviens en bi-
nocircme avec la responsable du seacutejour du deacutebut
du seacutejour jusqursquoau deacutepart des participants
Je me preacutesente en tant que psychologue Pour
la plupart crsquoest la premiegravere fois qursquoils rencon-
trent quelqursquoun de cette profession Vous allez
mrsquoanalyser me demande Jacques au deacutebut
du seacutejour Finalement vous ecirctes sympas les
psys Vous croyez qursquoil en y en pregraves de chez
moi me demandera-t-il en fin de seacutejour
Je suis tout le temps avec eux du soir au ma-
tin Pas tregraves acadeacutemique comme cadre de tra-
vail et pourtant comme souvent la clinique
vient nous proposer de penser autrement
Le rocircle essentiel du psychologue est que du
deacutebut agrave la fin du seacutejour il propose ce que je
nomme des bras psychiques Les 4 bras les
bras du cadre formel et les bras psychiques Fil
rouge tout le long du seacutejour Crsquoest par ce cadre
-lagrave que chacun va pouvoir se deacutetendre libeacuterer
la parole Lacirccher le faire du quotidien pour
tendre vers le vivre le ressentir et le partager
durant le seacutejour
Pour le psychologue partager le quotidien (du
petit deacutejeuner au dicircner) crsquoest ne pas ecirctre tout
le temps dans la distance mais ecirctre dans la
juste distance Alterner des moments formels
proposition de groupes de parole durant le seacute-
jour pour les personnes en situations drsquoaider et
celles qui reccediloivent de lrsquoaide) et de temps infor-
mels Crsquoest ecirctre disponible Crsquoest garantir lrsquoexis-
tence du maintien de la vie psychique et recon-
naicirctre la personne en tant que sujet pensant
ressentant deacutesirant
Tisser des liens Lacirccher le bras de son malade
changer de bras Faire confiance agrave lrsquoautre et
deacutecouvrir ainsi que lrsquoon peut soutenir lrsquoautre
dans ce qursquoil est capable de donner Faire con-
fiance est possible si le cadre est suffisamment
contenant pour se lrsquoautoriser
Deacutecloisonner les rocircles et les fonctions de cha-
cun Les cloisons tombent Le fil qui nous tient
et nous unit dans le lien agrave lrsquoautre reste Prendre
soin de soi
Exemple du massage des mains avec la socio-
estheacuteticienne En groupe de parole eacutemerge
alors que les mains ne servent pas qursquoagrave se te-
nir ou tenir lrsquoautre les mains se croisent dans
le relationnel et la communication Ne plus ecirctre
dans le soigner la maladie mais dans le pren-
dre soin de ce qui nous lie agrave lrsquoautre
Accompagner lrsquoaidant agrave cheminer vers le si
moi je vais mieux alors lui ira peut ecirctre mieux
au lieu de si il va bien je vais bien
Durant le seacutejour je prends des notes tous les
soirs sur chaque participant Notes drsquoimpres-
sion de ressenti et de questions qui me per-
mettent de comprendre lrsquoeacutevolution psycho-
dynamique de chacun et de chaque duo
Deux fois en moyenne durant le seacutejour jrsquoap-
pelle une collegravegue afin de pouvoir parler pen-
ser et eacutelaborer le veacutecu partageacute
Je propose un moment de reacuteflexion sur la rela-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 67
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
tion drsquoaide avec les aidants Je propose un
temps de parole et drsquoeacutechange sur le veacutecu de
lrsquoaideacute
Lors du bilan le rocircle de la psychologue est tou-
jours valoriseacute Non confondu avec les temps
drsquoanimation crsquoest un espace drsquoeacutechange de soi
et de lrsquointime qui est possible parce qursquoun lien
de confiance dans le quotidien srsquoest creacuteeacute Nous
partageons nos savoirs ceux de ma connais-
sance avec ceux de leur expeacuterience Jrsquoai deacute-
couvert ce que crsquoest une psy Ce nest pas si
grave ccedila srsquoavegravere mecircme plutocirct utile
Ces seacutejours sont lrsquooccasion aussi pour les pro-
fessionnels intervenants drsquoenrichir leurs con-
naissances et leurs pratiques vis-agrave-vis de ce
qursquoest la relation aidant-aideacute en partageant leur
quotidien pendant quelques jours
Comprendre le lien aidantaideacute dans ce qui se
joue au quotidien au plus intime au plus pro-
fond
Le seacutejour ne dure qursquoune semaine Cette se-
maine est en dehors du quotidien de chacun
Elle montre que de vivre eacutechanger rire parta-
ger du plaisir avec drsquoautres est possible et es-
sentiel Elle permet ainsi aux couples ou duos
de se ressourcer et de repeacuterer les plaisirs qui
fondent et nourrissent leur relation partageacutee
Merci de votre attention
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 68
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Hocircpital Saint Louis
gt Laccompagnement psychologique par teacuteleacute-
phone dans les maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere Page 69
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale de
grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Hocircpital Jean Verdier Page 78
gt Psychologue clinicien aupregraves du personnel
missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
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Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 69
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les
maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere
L a Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des
Maladies de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) a
eacuteteacute creacuteeacutee en 2001 par le Ministegravere des
Solidariteacutes de la Santeacute et de la Famille A la
disposition du grand public et des profession-
nels de terrain elle a pour mission lrsquoaide au
diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale so-
ciale et psychologique des patients et de leur
famille
La Cellule est nicheacutee au cœur de lrsquohocircpital de la
Pitieacute-Salpecirctriegravere dans lrsquoune des trois loges au-
trefois destineacutees aux alieacuteneacutes Elle a la particu-
lariteacute de ne pas accueillir physiquement le pu-
blic auquel elle srsquoadresse lrsquoaide qursquoelle pro-
pose srsquoeffectue essentiellement par teacuteleacutephone
En juin 2003 jrsquointegravegre pour un tiers-temps de
psychologue lrsquoeacutequipe deacutejagrave composeacutee drsquoun meacute-
decin coordinateur drsquoun meacutedecin attacheacute
drsquoune assistante sociale drsquoune assistante de
recherche clinique et drsquoune secreacutetaire
A cette eacutepoque je treacutebuche agrave lrsquoenvi sur lrsquoimpro-
nonccedilable Creutzfeldt-Jakob et examine drsquoun
œil dubitatif ma fiche de poste comment assu-
rer un soutien psychologique exclusivement
teacuteleacutephonique Eacutetait-ce reacutealisable efficace ad-
missible
PREacuteAMBULE
Les Maladies de Creutzfeldt-Jakob sont con-
nues de longue date les premiers cas ont eacuteteacute
deacutecrits par Creutzfeldt et Jakob dans les an-
neacutees 1920 Ce sont des maladies neurodeacutegeacute-
neacuteratives rares (qui se traduisent par une deacute-
mence et une grabatisation) 15 cas par mil-
lion drsquohabitants et par an dans tous les pays ougrave
existe une surveillance eacutepideacutemiologique En
France elles concernent une centaine de cas
par an
Principalement connues du grand public sous
le nom de maladie de la vache folle il existe
pourtant trois formes diffeacuterentes de MCJ avec
pour chacune drsquoelles ses speacutecificiteacutes On les
classe en fonction de leur mode de transmis-
sion la forme sporadique (aleacuteatoire) les
formes heacutereacuteditaires (MCJ geacuteneacutetiques syn-
drome de Gertsmann-Straussler-Scheinker
Insomnie Fatale Familiale) et les formes ac-
quises (formes iatrogegravenes des hormones de
croissance variante de la MCJ)
Le poste de psychologue avait eacuteteacute creacuteeacute pour se
consacrer principalement au travail drsquoeacutecoute
des personnes agrave risque de deacutevelopper une
MCJ suite agrave un traitement par hormones de
croissance contamineacutees Puis il srsquoest eacutetendu agrave
lrsquoeacutecoute de toute personne concerneacutee directe-
ment ou non par une MCJ quelle qursquoen soit la
forme
DE LrsquoENTRETIEN PONCTUEL AU SUIVI
La nature teacuteleacutephonique des entretiens psycho-
logiques est le fait drsquoune indeacutepassable reacutealiteacute
la dimension nationale du champ drsquointervention
de la Cellule exclut lrsquoeacuteventualiteacute drsquoentretiens en
face agrave face Mais si en 2011 les suivis psycho-
logiques par teacuteleacutephone se deacuteveloppent agrave
grands pas en 2003 rien nrsquoeacutetait moins eacutevident
que cette forme drsquoaccompagnement lagrave
Agrave cette eacutepoque drsquoailleurs la prise en charge
psychologique au sein de la Cellule se limitait agrave
la proposition drsquoun entretien teacuteleacutephonique pour
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 70
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
faire le point agrave des personnes qui avaient ap-
peleacute pour une toute autre demande principale-
ment drsquoordre meacutedical ou social Agrave lrsquooccasion de
ces demandes certains appelants manifes-
taient des signes de souffrance lieacutee agrave leur si-
tuation peur de la maladie du risque de la deacute-
velopper anxieacuteteacute suite agrave lrsquoannonce de la mala-
die drsquoun proche imminence de son deacutecegraves etc
Les membres de lrsquoeacutequipe les informaient alors
de la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par la psycho-
logue de la Cellule pour parler des difficulteacutes
qursquoils traversaient en ces moments critiques
Ces entretiens teacuteleacutephoniques ponctuels (de 45
minutes) eacutetaient destineacutes agrave contenir les an-
goisses et la deacutetresse des appelants Puis au
besoin jrsquoorganisais un suivi psychologique de
proximiteacute (psychologues ou psychiatres libeacute-
raux Centres Meacutedico-Psychologiques
(CMP)
Ainsi la proceacutedure entretien ponctuel - reacuteorien-
tation nous semblait reacutepondre au besoin ponc-
tuel drsquoeacutetayage des appelants et correspondre
aux exigences de fonctionnement en plate-
forme nationale de la Cellule Circonscrite pla-
nifieacutee et probablement eacuteconomique sur le plan
psychique cette proceacutedure nous rassurait-elle
aussi Quand bien mecircme elle a plieacute sous le
poids de la reacutealiteacute et a consideacuterablement eacutevo-
lueacute depuis 2003
En effet alors que le nombre annuel de ma-
lades concerneacutes par les MCJ demeure stable
le volume annuel drsquoentretiens psychologiques
lui est passeacute de 40 agrave 260 en huit ans Ainsi
110 personnes ont eacuteteacute suivies ou ont beacuteneacuteficieacute
de seacutequences de soutien de plus de 3 entre-
tiens teacuteleacutephoniques Cela repreacutesente 84 des
personnes ayant eu un premier contact avec le
psychologue Et tandis que la proceacutedure preacute-
voyait un ou deux entretiens la dureacutee des sui-
vis est en moyenne de neuf mois (de trois se-
maines agrave trois ans) drsquoune rythmiciteacute allant drsquoun
entretien hebdomadaire agrave un entretien men-
suel en fonction des besoins Comment expli-
quer cette eacutevolution
Faut-il incriminer les traditionnels obstacles re-
latifs agrave la prise en charge psychologique de
proximiteacute rareteacute des psychologues dans cer-
taines reacutegions surcoucirct financier drsquoune theacuterapie
CMP engorgeacuteshellip Peut-ecirctre mais ils ne suf-
fisent pas agrave expliquer lrsquoaugmentation remar-
quable du nombre drsquoentretiens psychologiques
ni lrsquoallongement de la dureacutee des suivis
Aujourdrsquohui nous pouvons avancer drsquoautres
arguments pour expliquer cette eacutevolution ce
sont les particulariteacutes de la maladie tout autant
que celles lieacutees agrave la teacuteleacutephonie qui ont engen-
dreacute ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique
LE CADRE
Un constat les orientations pourtant
travailleacutees (contact teacuteleacutephonique avec le psy-
chologue de proximiteacute informations deacutetailleacutees
sur les speacutecificiteacutes de la maladie et leur impact
sur lrsquoentourage) nrsquoont qursquoexceptionnellement
abouti les patients demandaient agrave reprendre
contact avec la psychologue de la Cellule Par-
tant de ce constat le dispositif drsquoaide psycholo-
gique proposeacute par le psychologue aux per-
sonnes qui appelaient a rapidement eacutevolueacute
Les quelques hypothegraveses concernant la difficul-
teacute du recours agrave la proximiteacute seront abordeacutees
tout au long de cet article
Agrave lrsquoheure actuelle quelle que soit la forme de
MCJ lrsquoappelant contacte la Cellule pour une
demande drsquoaide principalement drsquoordre meacutedi-
cal Les deux meacutedecins nrsquoeacutetant pas preacutesents agrave
la Cellule en permanence crsquoest la secreacutetaire
qui recueille les attentes Elle preacutesente le fonc-
tionnement global de la Cellule et eacutevoque sys-
teacutematiquement la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par
la psychologue Lorsqursquoelle ressent particuliegrave-
rement intenseacutement la deacutetresse de lrsquoappelant
elle insiste sur lrsquoimportance drsquoun entretien avec
la psychologue qui connaicirct tregraves bien la mala-
die un argument de poids pour les personnes
deacutesempareacutees qui heacutesitent pourtant agrave demander
de lrsquoaide
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 71
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Rares sont ceux qui demandent spontaneacutement
un entretien psychologique Mais rares sont
ceux qui le refusent lorsqursquoil leur est proposeacute
Cette invitation agrave ecirctre entendu loin de court-
circuiter la deacutelicate question de la demande
theacuterapeutique nous semble plutocirct lui permettre
drsquoadvenir Agrave ce titre nul doute que le deacutevelop-
pement du nombre de suivis psychologiques
reacutealiseacutes agrave la Cellule est en rapport direct avec
les qualiteacutes drsquoaccueil et lrsquoacuiteacute intuitive de sa
secreacutetaire
Ainsi cette derniegravere prend note des disponibili-
teacutes horaires de lrsquoappelant et apregraves avoir re-
cueilli lrsquoaccord preacutealable de ce dernier me les
transmet au plus vite Mon premier appel au
cours duquel nous eacutevoquons la situation de
crise a souvent lieu dans les 48 heures Cette
reacuteactiviteacute de prise de contact est un eacuteleacutement
deacuteterminant dans lrsquoeacutetablissement drsquoun lien de
confiance la premiegravere pierre drsquoun espace con-
tenant
Nous ne reacutealisons pas ou peu drsquoentretiens en
urgence la Cellule ne srsquoapparente pas agrave une
permanence drsquoeacutecoute 24h24 Drsquoailleurs la
simple date de rendez-vous sur mon agenda a
suffit agrave me calmer (hellip) Jrsquoeacutetais compleacutetement
bloqueacutee paniqueacutee et je me suis remise agrave pen-
ser et agrave geacuterer le quotidien que je ne geacuterais
plus
Ce premier entretien a une tonaliteacute toute parti-
culiegravere Agrave lrsquoinverse peut-ecirctre drsquoun premier ren-
dez-vous en face agrave face lrsquoentretien teacuteleacutepho-
nique semble provoquer un relacircchement des
meacutecanismes de deacutefenses et lrsquoeacutemergence des
processus primaires affolement pleurs pen-
seacutees parfois deacutesorganiseacutees coq agrave lrsquoacircne Lrsquoap-
pelant se deacuteverse deacuteballe tout en vrac Un
relacircchement induit drsquoabord par lrsquoabsence
drsquoinformations visuelles cette sorte de veacutecu
drsquoanonymat qui autorise la leveacutee de la cen-
sure Vous ne me voyez pas alors je peux
tout dire sans conseacutequences Pourtant nom
preacutenom situation familiale et localisation geacuteo-
graphique pourraient objectivement freiner le
veacutecu drsquoanonymat Il nrsquoen est rien Ce premier
entretien ndash et les quelques suivants - souli-
gnent ainsi la primauteacute du voir sur le savoir de
lrsquoautre
Un relacircchement doublement favoriseacute par le fait
que lrsquoappelant demeure dans un espace qui lui
est propre familier choisi Je suis dans ma
chambre jrsquoai fermeacute la porte Je me suis ins-
talleacutee dans ma voiture pour notre rendez-vous
ici je suis tranquille et en seacutecuriteacute
Notons que le psychologue nrsquoeacutechappe pas agrave
cet effet de relacircchement calfeutreacute qursquoil est
dans son espace soustrait au poids du regard
de lrsquoautre Un relacircchement du corps qui favo-
rise le flottement neacutecessaire agrave son travail
drsquoeacutecoute des processus inconscients agrave lrsquoœuvre
chez lrsquoappelant
Dans la tregraves grande majoriteacute des cas le pre-
mier appel donne lieu agrave un second rendez-vous
teacuteleacutephonique dont nous convenons ensemble
des termes (date et heure) Le choix de la du-
reacutee des entretiens (toujours de 45 minutes) deacute-
coule certainement de notre pratique de lrsquoentre-
tien en face-agrave-face mais il srsquoest aveacutereacute tout agrave fait
pertinent dans la pratique de lrsquoentretien teacuteleacute-
phonique puisque trois quarts drsquoheure laissent
le temps agrave la personne drsquoeacutelaborer ses ressen-
tis Cette dureacutee nrsquoest pas drsquoembleacutee annonceacutee
mais plutocirct suggeacutereacutee Nous allons en rester lagrave
pour aujourdrsquohui parce qursquoil est lrsquoheurehellip nous
nous retrouvons donc lehellip agravehellip conclut systeacute-
matiquement nos entretiens
Crsquoest freacutequemment au deacutecours du troisiegraveme
entretien que les questions se posent sur la
poursuite et les modaliteacutes de la prise en
charge Vous consultez ougrave Je vous dois
combien Jrsquoai droit agrave combien drsquoentre-
tiens Agrave ces questions la prise en charge
exclusivement teacuteleacutephonique (aucun deacuteplace-
ment) la gratuiteacute (la Cellule prend en charge
tous les entretiens) et la possibiliteacute drsquoecirctre suivi
tant que le besoin srsquoen fait sentir srsquoapparente agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 72
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
un apaisant holding winicottien Dans ma si-
tuation crsquoest incroyable drsquoavoir le droit de se
laisser porterhellip
Les particulariteacutes du dispositif de suivi teacuteleacutepho-
nique semblent ainsi reacutepondre aux exigences
de la reacutealiteacute des appelants La premiegravere drsquoentre
-elles lrsquoabsence de deacuteplacement et la grande
souplesse drsquoorganisation qui en deacutecoule allegravege
consideacuterablement leur quotidien phagocyteacute par
la maladie Une theacuterapie en cabinet aurait eacuteteacute
inconciliable avec notre reacutealiteacutehellip tout autant
qursquoinfiltreacute de sentiments de culpabiliteacute
Comment prendre le temps de me plaindre
alors qursquoelle est en train de mourirhellip Je sais
que crsquoest important de parler mais je nrsquoaurais
pas pris le temps de consulter pour moi tandis
que ce temps est si preacutecieuxhellip je veux le pas-
ser aupregraves drsquoellehellip ccedila me soigne de ne pas
perdre une minute Ainsi pourtant installeacutes
chez eux ils peuvent srsquoabsenter sans culpabili-
teacute excessive Je ne suis pas loin de lui mais je
suis en consultation juste pour moihellip Je suis
seule avec lui
La seconde particulariteacute du suivi psychologique
par teacuteleacutephone compareacute agrave un dispositif theacutera-
peutique classique reacuteside dans le fait que crsquoest
le psychologue qui appelle systeacutematiquement
le patient Au moment ougrave lrsquoeacutetayage social fami-
lial et parfois professionnel se fissure et ougrave la
difficulteacute drsquoappeler agrave lrsquoaide se fait sentir cette
deacutemarche inverseacutee nrsquoest pas deacutenueacutee drsquoeffet
theacuterapeutique Crsquoest toujours nous qui de-
mandons partout de lrsquoaidehellip et lagrave quel repos
que ce soit vous qui veniez jusqursquoagrave moihellip Je
nrsquoaurais pas eu la force de faire une deacutemarche
de plushellip ccedila mrsquoaide agrave continuerhellip
Enfin ajoutons que dans ce temps extra-
ordinaire ougrave tout leur coucircte ougrave crsquoest nous qui
donnons tout de nous tout notre temps toute
notre eacutenergiehellip la gratuiteacute de la prise en
charge est un eacuteleacutement important pour les per-
sonnes qui appellent Cette gratuiteacute de soins
repreacutesentative des modaliteacutes de prises en
charge psychologiques agrave lrsquohocircpital contribue agrave
restaurer leur sentiment drsquoecirctre consideacutereacutees et
reconnues dans leur souffrance On srsquooccupe
aussi de moi
Neacuteanmoins certains appelants qui avaient en-
visageacute de consulter en libeacuteral ainsi precircts agrave de-
mander de lrsquoaide se deacuteplacer et payer leur
seacuteance srsquoeacutetaient vus confronteacutes agrave un autre
obstacle somme-toute infranchissable le ca-
ractegravere indicible du veacutecu des MCJ Comment
parler agrave quelqursquoun qui nrsquoa jamais vu cette mala-
die monstrueuse (hellip) Il faut la voir pour sa-
voirhellip Ici (agrave la Cellule) je suis en seacutecuriteacute vous
savez de quoi je parle sans que jrsquoen parle vrai-
ment (hellip) vous avez les mecircmes images que
moi dans la tecircte Pour ces appelants qui cher-
chent une communauteacute drsquoexpeacuterience le psy-
chologue se doit drsquoecirctre un sujet dont le savoir
nrsquoest pas que supposeacute
SUIVI POUR QUI SUIVI POUR QUOI
Nous distinguons trois cateacutegories drsquoappelants
les personnes malades crsquoest agrave dire symptoma-
tiques leur entourage (conjoints enfants pa-
rents fregraveres et sœurs) et les personnes agrave
risque de deacutevelopper la maladie (drsquoorigine geacute-
neacutetique ou iatrogegravene) Les appels des profes-
sionnels (assez rares) ne seront pas traiteacutes
dans cet article
En huit ans seulement trois personnes ma-
lades ont eacuteteacute en contact avec le psychologue
par teacuteleacutephone et nrsquoont beacuteneacuteficieacute que de deux
entretiens en moyenne En effet dans la majo-
riteacute des cas la maladie est suspecteacutee tardive-
ment apregraves une longue peacuteriode drsquoerrance meacute-
dicale Si bien que le patient deacutejagrave tregraves sympto-
matique est rarement en capaciteacute de parler
suffisamment distinctement (dysarthrie) pour
beacuteneacuteficier drsquoun entretien teacuteleacutephonique Drsquoautant
que les troubles neuropsychologiques et psy-
chiatriques associeacutes agrave une freacutequente anoso-
gnosie et une eacutevolution preacutecipiteacutee de la mala-
die rendent complexes la mise en place drsquoun
suivi
Monsieur K prend contact avec la Cellule ef-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 73
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
frayeacute par la deacutegradation de son eacutetat il tremble
tombe et perd la meacutemoire Il craint drsquoecirctre atteint
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob dont il se
sait agrave risque suite agrave un traitement par hor-
mones de croissance contamineacutees Je nrsquoose
pas en parler on va me regarder bizarrement
et srsquoinquieacuteter peut-ecirctre pour rien Mais lrsquoentre-
tien est difficile agrave mener au regard des troubles
cognitifs et dysarthriques de Monsieur K Nous
convenons neacuteanmoins drsquoun rendez-vous teacuteleacute-
phonique la semaine suivante Le jour-dit je
lrsquoappelle agrave son domicile Il ne se souvient ni de
moi ni de la raison de mon appel Il comprend
agrave peine les mots que je prononce Il raccroche
Crsquoest donc principalement agrave lrsquoentourage du ma-
lade que srsquoadresse le soutien psychologique
par teacuteleacutephone un entourage deacutemuni devant
cette maladie que personne ne connaicirct qui
effraie tout le monde et qui laisse chacun en
proie agrave un profond sentiment drsquoisolement Freacute-
quemment rencontreacute au deacutecours drsquoautres pa-
thologies neurodeacutegeacuteneacuteratives le sentiment
drsquoisolement semble pourtant exacerbeacute par les
speacutecificiteacutes de cette maladie meacuteconnue que
les meacutedias ont tocirct fait drsquoassimiler agrave une forme
de peste contagieuse foudroyante
monstrueuse Des qualificatifs qui srsquoillustrent
parfois crucircment dans la reacutealiteacute par un compor-
tement exageacutereacutement eacutevitant du corps meacutedical
Ils portent des masques des gants et entrent
prudemment dans la chambre Que dire en-
core de lrsquoamalgame de toutes les formes de
MCJ avec la plus meacutediatiseacutee drsquoentre-elles -la
vache folle - si ce nrsquoest qursquoil en ajoute au senti-
ment drsquoeacutetrangeteacute qursquoelles provoquent deacutejagrave
Ce nrsquoest pas un animal crsquoest un ecirctre hu-
main Mais ce nrsquoest pas tant la maladie qui
est contagieuse que lrsquoidentification menaccedilante
qursquoelle propose lrsquoidentification agrave lrsquoEcirctre animal
archaiumlque et agrave lrsquoEcirctre deacutement qui nrsquoest plus lui-
mecircme agrave la fois posseacutedeacute et deacuteposseacutedeacute de
son humaniteacute Les MCJ quelle qursquoen soit la
forme figureraient-elles la barbarie au sens
eacutetranger et sauvage du terme
Les familles sont comme prises au piegravege de
ces repreacutesentations collectives dont la vio-
lence inouiumle (jamais entendue) semblent les
expulser aux confins de la communauteacute hu-
maine Quand on a dit ce qursquoil avait tout le
monde a disparuhellip On a eu beau expliquer
qursquoil nrsquoy avait pas de risque de transmission
les gens sont terrifieacutes et prennent leur distance
Il nrsquoy a plus personne agrave qui parler Mais cette
expulsion nrsquoest pas toujours le fait du monde
exteacuterieur Lrsquoentourage peut se retirer spontaneacute-
ment du monde pour se soustraire au regard
que ce dernier pourrait porter sur lui Je ne
voulais pas qursquoon nous regarde comme des
becircteshellip alors jrsquoai disparu de la circulation
Dans ce contexte de mise en quarantaine dic-
teacutee ou spontaneacutee la seule ideacutee de lrsquoexistence
de la Cellule fait fonction de terre drsquoasile de
support identificatoire Un support identifica-
toire renarcissisant Ici je peux reprendre
forme humainehellip il y a quelqursquoun au bout du fil
Quelqursquounhellip et je me sens quelqursquoun en mi-
roir Parce qursquoavec tout ce qui nous arrive je
me sens tantocirct comme un chien galeux tantocirct
trimbaleacute comme un objethellip et de par son nu-
meacutero drsquoappel unique doubleacute drsquoune prise en
charge globale un support identificatoire struc-
turant Jrsquoai lrsquoimpression qursquoelle part en mor-
ceauxhellip petit bout par petit bouthellip lrsquoeacutequilibre la
tecircte la marche la vision la parolehellip sa vie
part en lambeauxhellip et moi je nrsquoarrive plus agrave
me rassemblerhellip Mais il y a tout le monde
(meacutedecins assistante sociale psychologue)
ici agrave la Cellulehellip ccedila me rassure de savoir que
vous parlez tous la mecircme langue que vous
faites corps
Outre lrsquoentourage des malades des personnes
dites agrave risque font appel agrave la Cellule des per-
sonnes agrave risque de MCJ suite agrave un traitement
par hormones de croissance contamineacutees et
des personnes agrave risque de MCJ drsquoorigine geacute-
neacutetique Dans les deux cas le veacutecu subjectif de
risque prend en otage les perspectives drsquoave-
nir Parce qursquoil annonce en mecircme temps le pire
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 74
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et la possibiliteacute drsquoy eacutechapper parce qursquoil
nrsquoindique ni la victime ni lrsquoheure de la catas-
trophe le risque peut donner agrave cette derniegravere
un caractegravere omnipreacutesent Quand je vais
bien je me prends agrave espeacuterer que je ne serai
jamais malade que tout ccedila nrsquoeacutetait qursquoun cau-
chemar Mais quand je me sens mal le risque
drsquoecirctre malade se transforme en fataliteacute Je me
sens condamneacutee (hellip) Finalement que ce soit
par lrsquoespoir ou la fataliteacute crsquoest un peu lagrave tout le
temps un peu partout en moi
Et si des moments drsquoaccalmie subsistent crsquoest
souvent un eacuteleacutement de la reacutealiteacute preacutesent ou agrave
venir qui vient attiser les angoisses drsquoecirctre ma-
lade
Concernant le drame des hormones de crois-
sance contamineacutees ce sont principalement les
diffeacuterentes eacutetapes du procegraves (ouverture en
2008 4 mois drsquoaudience rendu de justice en
2009 et mise en appel en 2010) qui ont deacuteclen-
cheacute une recrudescence des appels des per-
sonnes agrave risque Crsquoest cette histoire de pro-
cegraves (hellip) je lis tous les articles dans la presse
(hellip) Depuis je vais reacuteguliegraverement sur le site de
lrsquoInvs pour veacuterifier le nombre de deacutecegraves leurs
acircgeshellip Je me dis que moi crsquoest bon je suis
plus vieille ou jrsquoai reccedilu les hormones plus tard
(hellip) Je comprends ce procegraves mais je le mau-
dis Je me sentais bien ces derniers temps
Jrsquoavais construit mon petit igloo avec mon mari
dedans Et lagrave je souhaite hurler qursquoon mrsquoa cas-
seacute mon igloo Durant tout le deacuteroulement du
procegraves certains de ces jeunes agrave risque ont
eacuteteacute deacutebordeacutes par un puissant sentiment
drsquoambivalence entre le deacutesir et la peur qursquoon
leur reconnaisse le preacutejudice subi crsquoest agrave dire
le coucirct psychique de se savoir contamineacute Re-
connaissance qui aurait signeacute la reacutealiteacute du
risque qursquoils encouraient Si le procegraves vient agrave
statuer que je suis victime je ne pourrai plus
me dire que crsquoest juste un cauchemar et que je
vais me reacuteveiller (hellip) et puis jrsquoai peur que ccedila se
traduise par le deacuteclenchement de la maladie
Paradoxe de cette victimation crsquoest la meacutede-
cine qui a rendu malade Dire que crsquoeacutetait
pour me soignerhellip quelle ironiehellip Je nrsquoai pas
de symptocircme je sais mais je suis deacutejagrave morte
De peur Et en ces temps juridiques agiteacutes la
Cellule et ses meacutedecins tout particuliegraverement
se sont vus parfois pris dans les mecircmes filets
ambivalents On a fait confiance aveugleacutement
agrave la meacutedecine Comment pouvions-nous imagi-
ner que le mal viendrait de lagrave ougrave on lrsquoattendait
le moins A qui faire confiance maintenant
Notamment encourageacutes par les associations
avec lesquelles la Cellule entretient des liens
eacutetroits certains parents de jeunes agrave risque
ont fait appel agrave nous Notre vie est faite de
hauts et de bas Lorsqursquoon apprend qursquoun
jeune est mort toute lrsquohistoire remonte et puis
le temps passe et on fait comme si ccedila nrsquoexistait
plus Mais ces oscillations crsquoest de la tor-
ture Comment ne pas eacutevoquer aussi le veacutecu
dramatique de ces autres parents qui ont perdu
leur enfant parfois il y a longtemps Des pa-
rents encore submergeacutes par la peine et rongeacutes
par un fort sentiment de culpabiliteacute drsquoavoir
donneacute le feu vert aux meacutedecins pour gagner
quelques centimegravetreshellip drsquoavoir moi-mecircme
fait les injections drsquohormones Un sentiment de
culpabiliteacute exacerbeacute par la relaxe geacuteneacuterale des
preacutevenus apregraves 20 ans de proceacutedure Il y a
des victimes il faut des coupables (hellip) Crsquoest
comme si la Justice nous avait deacutesigneacutes cou-
pables agrave leur place
Dans ce contexte ougrave preacutedominent les senti-
ments de culpabiliteacute et parfois de honte le teacuteleacute-
phone est un outil de grand secours puisqursquoil
permet aux personnes de se soustraire au re-
gard de lrsquoAutre Cet Autre objet drsquoimplacables
projections accusatrices Je nrsquoaurais pas pu
consulter un psychologue en face-agrave face Jrsquoau-
rais eu trop peur de lire sur son visage le deacute-
goucirct le rejet le jugementhellip lagrave je peux dire ce
que je veux je ne vois pas votre reacuteactionhellip
crsquoest moins dur Mais pourquoi le psychologue
de la Cellule se precircte-il si rarement aux projec-
tions de nature perseacutecutrice Reacutepond-il agrave la
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 75
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
neacutecessiteacute de sauvegarder un bon objet Un
bon objet inteacuteriorisable susceptible de restaurer
a minima le narcissisme parental
Concernant les formes heacutereacuteditaires de MCJ
dans la majoriteacute des cas lorsque le diagnostic
tombe le malade est deacutejagrave au stade terminal de
la maladie Les membres agrave risque de la fa-
mille se retrouvent donc confronteacutes agrave deux
drames simultaneacutes la perte imminente de leur
proche et lrsquohorreur de leur possible devenir
Voilagrave en une fraction de seconde le monde
bascule Je regardais ma megravere mourir jrsquoima-
ginais que jrsquoallais finir comme elle et je pensais
agrave mes enfants qui auraient peut-ecirctre le mecircme
destin Puis viennent les angoisses pour les
fregraveres et sœurs leurs enfants crsquoest lrsquoheacuteca-
tombehellip
Comment en parler aux enfants Peut-on
continuer agrave vivre normalement en sachant que
tout peut basculer en quelques mois Je
nrsquoarrecircte pas de pleurer est-ce le deacutebut de la
maladie Faut-il faire le test geacuteneacutetique
Autant de questions difficiles agrave adresser agrave lrsquoen-
tourage Jrsquoai appeleacute la Cellule parce que je ne
veux pas affoler mon mari mes enfantshellip (hellip)
et je ne suis pas encore precircte agrave me retrouver
en consultation de geacuteneacutetique (hellip) ce serait trop
reacuteel (hellip) pour lrsquoinstant quand je raccroche je
peux faire comme si ccedila nrsquoexistait pas
NATURE DE LrsquoESPACE TEacuteLEacutePHONIQUE
Mais de quelle nature est cet espace teacuteleacutepho-
nique pour autoriser le patient agrave maintenir en
dehors de sa reacutealiteacute le contenu qursquoil y deacutepose
Lrsquoabsence de corps en preacutesence et lrsquoimmateacuteria-
liteacute de la voix comme unique canal de commu-
nication seraient-elles la clef du choix des pa-
tients drsquoun suivi teacuteleacutephonique plutocirct qursquoen cabi-
net Le teacuteleacutephone permettrait-il au patient de
srsquoaffranchir ponctuellement drsquoun trop de reacuteel et
de se proteacuteger de lrsquoeffraction qursquoopegravere la crudi-
teacute de ses preacuteoccupations mateacuterielles orga-
niques mais aussi existentielles Serait-elle la
figuration de ce temps intra-uteacuterin ougrave tout de la
reacutealiteacute sauf la megravere eacutetait en dehors ce temps
ougrave le lien intime avec elle nrsquoeacutetait que sons Je
vous parle et vous me parlez aussi dans le
creux de lrsquooreillehellip Vous ecirctes un peu mon es-
pace proteacutegeacute mon espace secret Ce temps
reacutevolu ougrave le lieu de rencontre (le ventre mater-
nel) entre la megravere et lrsquoenfant eacutetait lrsquoobjet de tous
les fantasmes Que dire drsquoautre en effet du lieu
de rencontre entre le psychologue et le pa-
tient qursquoil nrsquoest que scegravene psychique pur es-
pace temporel un ensemble chacun chez soi
Un espace qui srsquooffrirait donc plus encore et
plus subitement agrave la reacutegression du patient que
le divan de lrsquoanalyste ou lrsquoentretien agrave domicile
Parce qursquoelle les prive drsquoinformations agrave carac-
tegravere visuel (regards mimiques postures ges-
tuelles) et puisque rien ne fait obstacle ni chez
le patient ni chez le psychologue aux diffeacute-
rentes repreacutesentations fantasmatiques que
chacun a de lrsquoautre la teacuteleacutephonie se precircte agrave
une activiteacute imaginaire deacutebrideacutee Seules des
informations agrave caractegravere sonore telles que le
timbre de la voix les rythmes tons silences
intonations et bruits ambiants (il allume une ci-
garette elle ferme une porte la voix reacutesonne
comme dans un espace vide) donnent force et
forme agrave lrsquoespace theacuterapeutique Elles seules et
dans une immeacutediateteacute remarquable suffisent agrave
faire surgir le visage le corps et le lieu de
lrsquoautre Des lapsus agrave caractegravere visuels srsquoim-
miscent drsquoailleurs dans le discours des pa-
tients et du psychologue Je vois drsquoici la tecircte
que vous faites Nos rencontres teacuteleacutepho-
niques On se voit la semaine prochaine Des
deacutetails comme la silhouette la couleur des
yeux des cheveux des vecirctements un canapeacute
des photos au mur des sourcils fronceacutes ou une
moue deacutefaite sont-ils lrsquoexpression paroxystique
de lrsquoactiviteacute fantasmatique agrave lrsquoœuvre dans la
relation transfeacutero-contre-transfeacuterentielle entre
le patient et son theacuterapeute
Pourquoi lrsquoimage de cette patiente-lagrave tarde agrave se
construire en moi apparaicirct puis disparaicirct sans
que je puisse la saisir Parce qursquoelle joue agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 76
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
cache-cache avec son pegravere malade qui ne
doit pas la voir dans cet eacutetat de terreur Pour-
quoi ai-je oublieacute drsquoappeler ce patient aujour-
drsquohui alors que son nom est surligneacute dans mon
agenda Parce qursquoil me reacutepegravete chaque fois
que tout le monde lrsquooublie Pourquoi cet
autre patient a-t-il exceptionnellement deman-
deacute agrave deacuteplacer son rendez-vous Parce qursquoil
eacutetait justement question lors de notre dernier
entretien de deacuteplacer son agressiviteacute pour
eacutepargner sa femme malade
Pourquoi cette megravere au beau milieu de son
suivi donne-t-elle mon numeacutero au fils qui ne
lrsquoeacutecoute plus Pourquoi ce fils accepte-t-il
drsquoappeler le psychologue de sa megravere Pour-
quoi le psychologue accepte-t-il de suivre seacute-
pareacutement deux membres de la mecircme famille
tandis qursquoil heacutesiterait agrave le faire en cabinet
Parce que les espaces ndash uniquement fantas-
meacutes- sont bien distincts en lui et que leur rela-
tion reacuteclame drsquoecirctre tierciseacutee
Pourquoi cette demande impeacuterieuse de me voir
en consultation Parce que cette patiente non
reconnue par la justice dans son statut de
victime des hormones de croissance contami-
neacutees a besoin drsquoecirctre reconnue au sens pre-
mier du terme par le psychologue
Pourquoi cette crainte en moi agrave lrsquoideacutee de voir
ces patients-lagrave comme on pourrait avoir agrave
craindre de transgresser la regravegle fondamentale
drsquoabstinence Dans ce contexte de suivi teacuteleacute-
phonique -qui induit lrsquoeacuterotisation du lien agrave la
voix et un sentiment paradoxal de grande
proximiteacute voir serait-il devenu un eacutequivalent de
toucher et lrsquoacting out agrave eacuteviter
Ces quelques exemples de questionnements
du psychologue autour des manifestations
transfeacutero-contre-transfeacuterentielles agrave lrsquoœuvre
dans le suivi teacuteleacutephonique nous semblent rele-
ver drsquoun processus de type theacuterapie drsquoinspira-
tion analytique Un processus qui se partage
souvent en deux temps un temps de plainte et
un temps drsquoeacutelaboration psychique complexe au
cours duquel le patient rapporte spontaneacutement
ses recircves Des recircves dont le mateacuteriel fait lrsquoobjet
drsquointerpreacutetations par le psychologue
SUIVI TEacuteLEacutePHONIQUE AVEC OU SANS FIN
Il arrive qursquoapregraves le deacutecegraves de son proche le
patient srsquointerroge sur la leacutegitimiteacute de la pour-
suite du suivi comme si la survie du malade
avait jusqursquoici conditionneacute son droit agrave en beacuteneacutefi-
cier Il nrsquoen est rien alors tout ne srsquoarrecircte pas
pour moi non plus Cet espace temporel
sans corps en preacutesence qui a proteacutegeacute le pa-
tient des angoisses inheacuterentes agrave la reacutealiteacute
drsquoune seacuteparation annonceacutee permet et catalyse
mecircme parfois le travail de deuil Vous ecirctes un
peu comme mon fregravere [mort depuis 3 mois] je
ne le vois pas mais il est lagravehellip je ne le vois pas
mais je lrsquoentends parfoishellip comme avec vous
jrsquoapprends agrave dialoguer agrave lrsquointeacuterieur de moi avec
lui
La sortie du dispositif de soutien teacuteleacutephonique
est longuement travailleacute eacutevocation de lrsquoapregraves
eacutelaboration de la seacuteparation espacement pro-
gressif des entretiens Un cheminement au
cours duquel surgissent plus explicitement les
traces du caractegravere transitionnel de lrsquoespace
teacuteleacutephonique Un espace qui sans ecirctre une
permanence drsquoeacutecoute a eacutetayeacute le sentiment de
permanence drsquoobjet Je ne vous ai jamais
vuehellip alors je nrsquoai pas peur de ne plus vous
voir Vous ecirctes un peu comme toujours lagrave
CONCLUSION
La Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des Mala-
dies de Creutzfeldt-Jakob a pour mission lrsquoaide
au diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale
sociale et psychologique des patients et de leur
famille Lrsquoaide proposeacutee srsquoeffectue essentielle-
ment par teacuteleacutephone
La faisabiliteacute et la leacutegitimiteacute drsquoun soutien psy-
chologique exclusivement teacuteleacutephonique a eacuteteacute
lrsquoobjet de nombreuses interrogations pour le
psychologue quelle est la nature de cet es-
pace particulier drsquoaccompagnement Quels en
sont les beacuteneacutefices Peut-on soutenir un veacuteri-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 77
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
table travail psychique dans le cadre de ce dis-
positif Est-il leacutegitime de parler de travail psy-
chotheacuterapeutique
Les 110 suivis psychologiques effectueacutes agrave la
Cellule depuis 2003 nous permettent aujour-
drsquohui drsquoaffirmer que notre travail de psycho-
logue ne se limite pas agrave une pure fonction de
soutien En effet bien que tregraves eacuteloigneacute de la
situation analytique le processus agrave lrsquoœuvre
dans le dispositif teacuteleacutephonique semble srsquoappa-
renter agrave celui drsquoun dispositif de type psychotheacute-
rapeutique drsquoinspiration analytique le cadre
est poseacute et penseacute par le psychologue
(entretiens de 45 minutes notion de rendez-
vous teacuteleacutephoniques rythmiciteacute souvent hebdo-
madaire suivi au long cours) lrsquoassociation
libre est encourageacutee lrsquointerpreacutetation des dires
lrsquoanalyse des recircves lrsquoanalyse du transfert et du
contre-transfert par le psychologue est freacute-
quente et le patient effectue un veacuteritable travail
drsquoeacutelaboration psychique au deacutecours du suivi
Lrsquoexpeacuterience nous deacutemontre que les particulari-
teacutes de lrsquoaccompagnement teacuteleacutephonique
(notamment privation drsquoinformations visuelles)
ne freinent pas le processus theacuterapeutique
Elles pourraient mecircme le favoriser
(relacircchement du systegraveme deacutefensif)
Ainsi ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique agrave lrsquohocircpital est au service drsquoune
difficulteacute des personnes qui y ont recours la
crainte et ou lrsquoimpossibiliteacute drsquoaller consulter un
psychologue en face-agrave face
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feacuterences ainsi que le journal
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PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 78
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots
en images
Natascia Serbandini
Service de gyneacutecologie-obsteacutetrique Hocircpital Jean Verdier
A pregraves avoir eacutevoqueacute briegravevement les speacute-
cificiteacutes du deuil peacuterinatal je vais vous
preacutesenter une pratique nouvelle au sein
de lrsquoAPHP un groupe de parole hospitalier
destineacute aux femmes ayant fait une interruption
meacutedicale de grossesse Ce groupe est neacute en
2008 un an apregraves sa creacuteation nous avons choi-
si drsquointroduire une cameacutera lors des seacuteances
Enfin je deacutecrirai lrsquoimpact de la cameacutera sur le
groupe et le projet de film que nous sommes
en train de reacutealiser
LES SPEacuteCIFICITEacuteS DU DEUIL PEacuteRINATAL
La deacutecouverte dune pathologie fœtale incu-
rable pendant la grossesse est un eacuteveacutenement
hautement traumatique pour les parents du fu-
tur beacutebeacute Lhocircpital Jean Verdier unique Centre
Pluridisciplinaire de Diagnostic Preacutenatal du 93
accueille et accompagne les parents degraves lrsquoan-
nonce du diagnostic jusqursquoagrave lrsquointerruption meacutedi-
cale de grossesse quand les parents la deman-
dent
Le deuil peacuterinatal preacutesente des speacutecificiteacutes qui
le distinguent du deuil classique il est toujours
accompagneacute drsquoun fort sentiment de culpabili-
teacute amplifieacute dans le cadre des Interruptions Meacute-
dicales de Grossesse par la prise de deacutecision
(Tous les textes en italique sont issus de teacutemoi-
gnages de femmes lors du groupe de parole)
Pendant le travail je le sentais encore mon
beacutebeacute est neacute vivant jrsquoavais vraiment cette sen-
sation qursquoil voulait se battre Jrsquoai enleveacute tout cet
espoir de vie et je me demande de quel droit
Crsquoest cette impression drsquoavoir le choix sur sa
vie ou sa mort crsquoest tellement lourd agrave porter
Une autre speacutecificiteacute est lrsquoabsence drsquoun veacutecu
partageacute avec cet enfant en dehors de la gros-
sesse Geneviegraveve Delaisi de Parseval
(psychanalyste) Comment faire le deuil de ce
qui nrsquoa pas eu lieu drsquoon ne sait quoi et de
presque rien Lrsquoobjet perdu reste agrave perdre
comment accepter la seacuteparation drsquoavec un ecirctre
que lrsquoon nrsquoa pas connu
Le deuil est un processus intrapsychique con-
seacutecutif agrave la perte drsquoun objet drsquoattachement par
lequel le sujet reacuteussit progressivement agrave se deacute-
tacher de celui ci Jean Philippe Legros
(psychologue psychanalyste au centre de meacute-
decine foetale Cochin-St Vincent de Paul) dans
lrsquoarticle L lsquoarrecirct de vie in utero ou lrsquoerrance des
fœtus un possible deuil preacutecise que dans le
deuil peacuterinatal il srsquoagit drsquoun deacutetachement sans
renoncement
Ensuite il srsquoagit drsquoun deuil feacuteminin un deuil
veacutecu tregraves diffeacuteremment dans le couple
Mon mari lui a pris sa deacutecisionhellipje ne dis pas
que ccedila a eacuteteacute facile ccedila a ducirc ecirctre dur pour lui
aussi moi je la portais je la sentais bouger
Cette mort est intoleacuterable pour la megravere en lien
avec le sentiment drsquoomnipotence propre agrave la
grossesse intoleacuterable pour la megravere qui con-
naissait ce beacutebeacute et qui a ressenti ses mouve-
ments
Ce sentiment de toute puissance est amplifieacute
par le fait que la demande drsquoInterruption Meacutedi-
cale de Grossesse revient agrave la femme seule
signataire selon la loi
Je sais qursquoil souffre qursquoil est malheureux il a
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 79
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
la mecircme peine et la mecircme tristesse que moi
mais il ne llsquoexprime pas pareil il y a une culpa-
biliteacute plus importante chez la megravere
La perte du beacutebeacute est parfois difficilement re-
connue par les pegraveres qui nrsquoosent pas manifes-
ter leur souffrance et qui se projettent plus rapi-
dement dans lrsquoavenir
Leur deacutetresse reacutesulte en grande partie de la
mise agrave mal de la fonction contenante protec-
trice de la femme enceinte qursquoils assuraient
avant lrsquointerruption
Ce deuil est deacutepourvu drsquoune dimension so-
ciale Franccediloise Moleacutenat (peacutedopsychiatre) dit
Iil existe une cicatrice dans le corps de la
megravere mais pas de cicatrice sociale
Beaucoup de personnes mrsquoont dit crsquoest
dingue que lrsquoadministration franccedilaise se mecircle
de ccedila (en parlant de la reconnaissance agrave la
Mairie) alors qursquoil nrsquoy a mecircme pas de beacutebeacute il
eacutetait pas neacute
Les rituels autour du deuil ont une fonction psy-
chique ils offrent au mort un deacutedommagement
symbolique Ils assurent une reconnaissance
de la peine des proches par le groupe
Crsquoest seulement depuis quelques anneacutees que
les rites et rituels sociaux autour des beacutebeacutes
morts in utero ont pris leur place agrave travers la
reconnaissance agrave lrsquoEtat Civil et lrsquoeacutevolution des
pratiques drsquoaccompagnement dans les materni-
teacutes (preacutesentation du corps du beacutebeacute organisa-
tion drsquoobsegraveques)
Ce travail est reacutealiseacute dans le but de creacuteer et
drsquoancrer des souvenirs de cet enfant afin de
faire des parents des parents
Jrsquoavais toujours une photo de mon fils dans
mon portefeuille jrsquoen avais besoin Crsquoest peut
ecirctre parce que je ne voulais pas qursquoon me dise
que crsquoeacutetait rien
LE GROUPE DE PAROLE Agrave JEAN VERDIER
Lors des entretiens avec le gyneacutecologue ou
dans le cadre drsquoun suivi psychologique quelque
temps apregraves les Interruptions Meacutedicales les
femmes eacutevoquaient de maniegravere reacutecurrente leur
solitude lrsquoimpossibiliteacute de partager leur souf-
france et le temps passant de ne plus pouvoir
parler de leur beacutebeacute dans le cercle familial et
amical Cet oubli de lrsquoentourage et la reprise
drsquoune vie normale est source de culpabiliteacute
elles avaient le sentiment drsquoabandonner agrave nou-
veau leur beacutebeacute
Jrsquoai lrsquoimpression que personne ne me com-
prend jrsquoai lrsquoimpression drsquoecirctre seule au monde
de me noyer je survis Les gens ne peuvent
pas comprendre notre situation je nrsquoarrive pas
agrave leur dire ma souffrance immense
De cela est neacutee lrsquoideacutee de proposer un espace
drsquoeacutechanges entre femmes sous forme de
groupe de paroles Ce projet a eacuteteacute creacuteeacute agrave lini-
tiative commune du gyneacutecologue responsable
du Centre de Diagnostic Anteacutenatal et de moi-
mecircme
Il srsquoagit drsquoun groupe ouvert agrave toutes les femmes
ayant veacutecu une Interruption Meacutedicale de Gros-
sesse agrave Jean Verdier
Le groupe se reacuteunit une fois par mois pendant
une heure et demie et est co-animeacute par un bi-
nocircme psychologuepsychiatre et meacutedecinsage
femme
Le groupe constitue un cadre de confiance
une enveloppe psychique comme le dit An-
zieu propice agrave la mise en commun des charges
affectives et agrave lrsquoaccompagnement du deuil
De plus comme le rappelle Jean Philippe Le-
gros apregraves la perte drsquoun enfant par IMG la
crainte de la megravere contrairement aux parents
drsquoenfants porteurs drsquohandicap est lrsquoabsence du
regard des autres dans le reacuteel Cet ecirctre invi-
sible pour les yeux cet enfant que personne
drsquoautre nrsquoa connu risque de disparaicirctre Drsquoougrave
lrsquoimportance de creacuteer un espace physique (par
rapport aux espaces virtuels les forums sur
Internet tregraves freacutequenteacutees par les megraveres en-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 80
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
deuilleacutees) et psychique au sein de lrsquohocircpital afin
de reconnaicirctre lrsquoexistence de ces beacutebeacutes et per-
mettre agrave ces femmes drsquoecirctre megraveres
Les autres nous parlent comme si on avait
perdu quelque chose crsquoest quand mecircme un
ecirctre vivant crsquoeacutetait quand mecircme notre enfant
Lrsquoobjectif principal du groupe est de permettre
le partage drsquoexpeacuterience de ce deuil si particu-
lier drsquoecirctre rassureacutee par le parcours des autres
dans un cadre de reacutefeacuterence suffisamment
bon pour le dire avec les mots de Winnicott
Crsquoest vrai que discuter avec drsquoautres per-
sonnes qui lrsquoont veacutecu il y a longtemps et qui ont
su deacutepasser certaines eacutetapes ccedila aide ccedila
donne des cleacutes pour passer agrave lrsquoeacutetape suivante
LrsquoIDEacuteE DU FILM DES MOTS EN IMAGES
Le groupe a eacuteteacute tregraves freacutequenteacute degraves le deacutebut
Apregraves un an de fonctionnement le gyneacutecologue
a proposeacute drsquointroduire une camera afin de fil-
mer les seacuteances pour teacutemoigner de cette expeacute-
rience positive et faire connaicirctre cette pratique
Cette proposition a eacuteteacute discuteacutee par les
femmes au sein du groupe elles ont adopteacute
cette ideacutee et ont eacutelaboreacute avec nous les objectifs
du film
Teacutemoigner autour du deuil peacuterinatal en deacutecri-
vant les diffeacuterentes eacutetapes et souligner les beacute-
neacutefices drsquoun groupe de parole
A partir de leur veacutecu permettre une reacuteflexion
visant agrave ameacuteliorer les pratiques soignantes
dans les accompagnements du deuil peacuterinatal
agrave lrsquohocircpital
Nous avons filmeacute six seacuteances dune heure
trente avec deux techniques une cameacutera fixe
et une cameacutera mobile Ensuite nous avons eacuteta-
bli ensemble un plan pour le film reacutecit en ordre
chronologique du deacuteroulement de lrsquoIMG Les
diffeacuterents chapitres
Lrsquoannonce et la deacutecision lrsquohospitalisation le
retour agrave la maison lrsquoenterrement lrsquoentourage
lrsquoautopsie la grossesse drsquoapregraves le groupe
La preacutesence de la cameacutera a eu un impact sur
le deacuteroulement des seacuteances les theacutematiques
ont eacuteteacute eacutetablies agrave lrsquoavance ce qui a permis de
structurer davantage les seacuteances tout en gar-
dant la liberteacute drsquoaborder les questions eacutevo-
queacutees spontaneacutement par les femmes
Comme le dit Winnicott lrsquoenfant existe dans les
yeux de sa megravere le visage de lrsquoenfant que lrsquoon
nrsquoa pas vu ne permet pas agrave la megravere de se re-
connaicirctre comme megravere
Le film vient srsquoinscrire dans cette neacutecessiteacute de
reconnaissance de laisser une trace de cette
preacutesence de ce beacutebeacute qui nrsquoa plus de corps
physique mais qui existe dans lrsquohistoire fami-
liale
La preacutesence de la cameacutera a donc eu des effets
beacuteneacutefiques pour les femmes mais aussi pour
les soignants la richesse du mateacuteriel clinique
recueilli nous a permis drsquoobserver lrsquoeacutevolution
des femmes dans le processus de deuil et
drsquoanalyser leur posture au sein du groupe ainsi
que celle des animateurs
Si le groupe a fonction de portage pour cer-
taines pour drsquoautres crsquoest le lieu ougrave elles peu-
vent donner un sens agrave ce qursquoelles ont veacutecu en
partageant leur expeacuterience avec drsquoautres
Nous avons constateacute en visionnant les
seacuteances que plusieurs femmes qui semblent
ecirctre dans un deuil normal continuent agrave freacute-
quenter le groupe alors que leur interruption
remonte agrave il y a trois ou quatre ans
Le besoin de continuer agrave eacutevoquer leur beacutebeacute
nrsquoest pas un signe de deuil pathologique mais
une neacutecessiteacute de la ceacuteleacutebration de la meacutemoire
de ces beacutebeacutes disparus Ces femmes veulent
garder comme le dit Jean Philippe Legros une
dose homeacuteopathique du trauma qui gueacuterit de
lui en ne se seacuteparant jamais
Quand jrsquoai dit agrave ma responsable que je mrsquoab-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 81
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
sentais pour venir au groupe de parole elle
mrsquoa dit Ben tu en as deacutejagrave un (enfant) qui est lagrave
pourquoi tu continues agrave aller agrave ce groupe Je
lui ai dit Crsquoest pas parce que jrsquoai reacuteussi agrave
avoir un petit garccedilon que je vais compleacutetement
oublier ce qui concerne mon premier enfant
justement lui il nrsquoest pas lagrave crsquoest pour ccedila que
je continue agrave aller au groupe pour parler de lui
pour le faire exister
Aujourdrsquohui le projet du film est en cours nous
avons imagineacute deux versions
- une version courte de 20 minutes un teacutemoi-
gnage du groupe sur le deuil peacuterinatal agrave diffu-
ser agrave lrsquoexteacuterieur
- une version longue de 52 minutes destineacutee
aux femmes et en interne agrave lrsquohocircpital Jean Ver-
dier
Le premier montage a eacuteteacute visionneacute par les
femmes qui ont participeacute aux choix des extraits
Nous espeacuterons pouvoir le diffuser dans un ave-
nir proche agrave un large nombre de professionnels
de santeacute
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PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 82
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions
enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis
Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
P our cette preacutesentation des missions du
psychologue clinicien aupregraves du per-
sonnel agrave
lrsquoAP-HP nous avons choisi de commencer par
reprendre quelques eacuteleacutements agrave lrsquoorigine de la
creacuteation de nos postes
Dans une seconde partie nous deacutefinirons et
preacutesenterons la diversiteacute des missions speacuteci-
fiques aux psychologues du personnel sur site
A la fois clinique et institutionnelle notre pra-
tique nous amegravene agrave ecirctre en contact reacutegulier
avec les diffeacuterents acteurs internes ou ex-
ternes agrave lrsquoinstitution concerneacutes par la protec-
tion de la santeacute au travail Ainsi cette collabo-
ration neacutecessite un important travail de deacuteve-
loppement et drsquoentretien du reacuteseau
Ensuite nous envisagerons les divers ques-
tionnements souleveacutes par ce poste position-
nement parfois drsquoeacutequilibriste cadre speacutecifique
de prise en charge ou encore limites de cette
pratique
HISTORIQUE
Par la loi de 1983 concernant les droits et obli-
gations des fonctionnaires les personnels hos-
pitaliers de par leur statut sont proteacutegeacutes par
leur administration
A la fin des anneacutees 90 le deacuteveloppement de la
preacutevention des violences apparaicirct comme pri-
mordial puis une circulaire intituleacutee Preacutevention
et accompagnement des situations de vio-
lence est reacutedigeacutee en deacutecembre 2000
Le constat de lrsquoaugmentation de la violence au
quotidien dans les hocircpitaux a fait naicirctre au sein
de lrsquoAP-HP des preacuteoccupations et des de-
mandes au niveau institutionnel Ceci a mobili-
seacute un ensemble drsquoacteurs concerneacutes par la
protection de la santeacute des personnels Ainsi la
mise en place drsquoune cellule drsquoaccueil et de
prise en charge des agents victimes de vio-
lence agrave lrsquoAP-HP eacutemane de ces travaux Deux
postes de psychologues cliniciennes ont eacuteteacute
creacuteeacutes au Siegravege en 2000 et 2001 puis drsquoautres
postes de psychologues cliniciens aupregraves du
personnel ont vu le jour sur diffeacuterents sites de
lrsquoAP-HP
Face agrave lrsquoamplification des violences en milieu
hospitalier lrsquoAP-HP a eacutegalement meneacute en 2004
une campagne drsquoinformation sur le thegraveme
Violences de patients drsquoaccompagnants de
visiteurs comment soutenir les personnels qui
en sont victimes Ces derniers ignorent sou-
vent leurs droits et les circuits internes pour ob-
tenir le meilleur accompagnement dans leurs
deacutemarches Lrsquoeacutelaboration drsquoun guide a permis
de deacutecrire les diffeacuterentes modaliteacutes de prise en
charge en cas drsquoagression prise en charge
meacutedico-psychologique sociale meacutedico-
administrative ou encore juridique
Au-delagrave de la preacutevention et de la prise en
charge de la violence agrave lrsquohocircpital les missions
du psychologue clinicien aupregraves du personnel
sont orienteacutees vers deux axes principaux la
clinique individuelle et collective et les activiteacutes
institutionnelles
DEacuteFINITION DU POSTE ET MISSIONS SPEacuteCIFIQUES
Le poste de psychologue du personnel a pour
fonction principale de creacuteer un espace drsquoeacutecoute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 83
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et de prise en charge individuelle ou collective
pour tout le personnel de lrsquohocircpital
Toute personne professionnelle de lrsquohocircpital
peut si elle en a la neacutecessiteacute (si elle le sou-
haite) prendre rendez vous pour une premiegravere
consultation et ce quel qursquoen soit le motif pro-
fessionnel ou personnel
Les bureaux permettent de garantir la confiden-
tialiteacute
Les consultations se font sur rendez-vous afin
drsquoeacuteviter lrsquoattente et pour preacuteserver la discreacutetion
Ils sont libres et totalement confidentiels
Des rendez-vous en soireacutee peuvent ecirctre ameacute-
nageacutes
Le deacutelai maximum drsquoobtention drsquoun rendez-
vous est environ de 15 jours
Le nombre de consultations deacutepend de la de-
mande initiale Il peut aller drsquoun seul entretien agrave
plusieurs Lorsque la personne deacutesire ou neacute-
cessite une prise en charge plus longue elle
est orienteacutee agrave lrsquoexteacuterieur Il est preacuteciseacute agrave tout
agent en deacutebut drsquoentretien que ce lieu de con-
sultation a pour vocation un accompagnement
agrave court ou moyen terme
Il est eacutevident que la fonction de psychologue du
personnel est agrave viseacutee clinique crsquoest agrave dire
- que le psychologue du personnel nrsquointervient
pas directement dans les eacutevaluations utiles agrave la
gestion du personnel et nrsquoeacutemettent aucun avis
concernant lrsquoaptitude au poste de travail des
agents reccedilus en consultation (ce qui est de
lrsquounique ressort du meacutedecin du travail) hellip
- que le psychologue du personnel nrsquoest pas
psychologue du travail donc nrsquointervient pas
dans le reclassement les mobiliteacutes profession-
nelles le recrutementhellipMais nos missions
srsquoaccordent bien sur avec celles du CRH si neacute-
cessaire
Le psychologue du personnel comme les
autres psychologues cliniciens de lrsquoeacutetablisse-
ment deacutepend directement du directeur de lrsquoeacuteta-
blissement et a des liaisons fonctionnelles
avec le drh par exemple ou le meacutedecin du tra-
vail
Il rend un bilan annuel quantitatif indiquant cer-
taines donneacutees de son activiteacute tout en preacuteser-
vant lrsquoanonymat et la confidentialiteacute Il peut arri-
ver que ce bilan soit preacutesenteacute aux instances
types CHSCT
Globalement le temps de travail du psycho-
logue du personnel se reacutepartit comme suit
pratique clinique drsquoune part activiteacutes institu-
tionnelles drsquoautre part
LA PRATIQUE CLINIQUE
bull Clinique individuelle soutien psychologique
du personnel en difficulteacute par entretien indivi-
duel
Notre pratique montre que les deux aspects
professionnels et personnels sont souvent in-
triqueacutes qursquoil peut srsquoagir de souffrance au tra-
vail mais aussi de souffrance personnelle qui
peut avoir des reacutepercussions dans le travail
Les motifs principaux agrave lrsquoorigine de la de-
mande
- sur le plan professionnel sont conflits inter
eacutequipe situations de violence au travail
manque de communication difficulteacutes face aux
pathologies perte du sens du travail voire eacutepui-
sement professionnel
- sur le plan personnel sont difficulteacutes fami-
liales sociales deuils seacuteparations probleacutema-
tiques psychopathologiques maladies chro-
niqueshellip
Ces personnes ne se sont jamais adresseacutees agrave
un professionnel du soin psychique par meacute-
connaissance des professions parfois mais par
meacutefiance eacutegalement et arrivent souvent en
portant des souffrances extrecircmement lourdes
et de longue date
Cateacutegories dominantes qui consultent soi-
gnants et administratifs encadrement
quelques personnels techniques et meacutedico-
techniques et tregraves peu de meacutedecins
Il est difficile drsquoeacutetablir une moyenne du nombre
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 84
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
drsquoagents reccedilus par an sur lrsquoensemble des
postes du personnel Toutefois les demandes
de consultations sont en constantes augmenta-
tions sur la plupart des sites de lrsquoAPHP mais
aussi du fait des regroupements amenant les
psychologues agrave ecirctre solliciteacutees sur plusieurs
eacutetablissements
bull Clinique collective
Les interventions collectives peuvent se
preacutesenter sous deux formes les groupes de
parole et les deacutebriefings psychologiques
Le Groupe de parole permet de creacuteer un lieu
drsquoexpression et drsquoeacutechanges sur un thegraveme don-
neacute ou une probleacutematique speacutecifique au service
(comme par exemple lrsquoagressiviteacute et la violence
des patients notamment aux urgences ou en-
core lrsquoimplication eacutemotionnelle des soignants
lieacutee agrave lrsquoaccompagnement en fin de vie hellip)
Le Deacutebriefing psychologique intervention
collective ponctuelle suite agrave un eacuteveacutenement diffi-
cile ou traumatique (suicide drsquoun patient deacutecegraves
drsquoun personnel agression du personnel par un
patient ou son entouragehellip)
Force est de constater eacutegalement que les de-
mandes de reacutesolution de conflit formuleacutees
comme telles sont aussi tregraves preacutesentes et il
semble utile de distinguer la neacutecessaire reacutesolu-
tion drsquoun conflit qui nrsquoest pas forcement le lieu
et le temps du groupe de parole de la volonteacute
drsquoy trouver un sens Il va de soi que le psycho-
logue nrsquointervient en aucun cas comme meacutedia-
teur car il nrsquoen a pas la formation speacutecifique
mecircme si certaines interventions peuvent par-
fois avoir des effets drsquoapaisement du conflit
Pour ces raisons et preacutealablement agrave toute in-
tervention collective il est important drsquoavoir pu
deacutefinir avec les participants leurs attentes et
pas seulement celles lieacutees au demandeur geacute-
neacuteralement lrsquoencadrement ou la direction
LES ACTIVITEacuteS INSTITUTIONNELLES
bull1- Deacuteveloppement et entretien du reacuteseau
En interne Assistant social du personnel meacute-
decine du travail DRH CRH chef du person-
nel direction des soins psychologues du per-
sonnel drsquoautres sites psychologues des ser-
vices psychiatres hellip
En externe orientation vers les CMP pour les
prises en charge agrave plus long terme etou pour
les suivis psychiatriques orientation vers des
lieux de consultations speacutecialiseacutes (addictologie
consultation douleur troubles du sommeil
troubles du comportement alimentaire associa-
tion drsquoaide aux victimes theacuterapie familiale hellip)
2- Participation aux groupes de travail et de
preacutevention preacutevention des addictions de
lrsquoeacutepuisement professionnel des risques psycho
-sociauxhellip
3- Faire connaicirctre ces postes et notre activiteacute
- A lrsquooccasion drsquoune arriveacutee sur site ou lors
drsquoune creacuteation de poste
- Preacutesentation dans les services directement
aupregraves des eacutequipes
- Preacutesentation lors de formations sur site
propre (accueil des nouveaux arrivants ou sur
des theacutematiques en lien avec nos missions) ou
au Centre de Formation Continue du Personnel
Hospitalier (intervention dans le cadre de la for-
mation Preacutevention du risque psychique et de
lrsquoeacutepuisement professionnel agrave lrsquohocircpital)
- Preacutesentation du rapport drsquoactiviteacutes au Comiteacute
drsquoHygiegravene Seacutecuriteacute et Conditions de Travail
QUESTIONNEMENTS ENJEUX LIMITES
Ce poste nous amegravene en permanence
- agrave repreacuteciser nos missions ce que nous pou-
vons faire et aussi ne pas faire depuis notre
place particuliegravere au sein de lrsquoinstitution
- agrave nous confronter agrave certaines limites
- agrave devoir nous adapter agrave une clinique aussi
riche que varieacutee
Plusieurs limites donc
La question du cadre
- absence de paiement pas de psychotheacutera-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 85
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
pie ce nrsquoest pas agrave lrsquoemployeur de payer on
connaicirct par ailleurs la neacutecessiteacute du paiement
- reacutegulariteacute des horaires il est difficile souvent
impossible pour des personnels ayant des ho-
raires variables qui travaillent en alternance de
pouvoir respecter un horaire fixe de rendez
vous Les annulations les reports sont freacute-
quents agrave cause des changements drsquohoraires
subis par les agents eux-mecircmes Parfois de
notre fait eacutegalement
La question de la confiance
- biais dans la relation
Nous avons le mecircme employeur donc il existe
un biais dans la relation de soutien psycholo-
gique (theacuterapeutique) Pourtant eacutetablir une re-
lation de confiance institutionnelle avec les
agents est essentiel Et faire partie de la mecircme
institution peut parfois paradoxalement rassu-
rer et favoriser une deacutemarche qui ne serait par
ailleurs pas faite
Ayant eacuteteacute recruteacute par la mecircme direction la
question de la confidentialiteacute du travail du
psychologue peut se poser (la confidentialiteacute
est rappeleacute agrave chaque premiegravere rencontre)
- Neacutecessaire et juste distance entre lrsquoinstitution
de son propre travail (visites meacutedicales effec-
tueacutees par un autre meacutedecin du travail attitude
discregravete au sein de lrsquoeacutetablissement hellip)
- Se pose la question du secret partageacute dans
lrsquointeacuterecirct de lrsquoagent et avec son accord cer-
taines informations peuvent parfois ecirctre com-
muniqueacutees (assistantes sociales du personnel
meacutedecin du travailhellip) et inversement
Comment et quand reacuteorienter
- au rythme de chacun (cette premiegravere deacute-
marche a deacutejagrave parfois eacuteteacute extrecircmement longue
et difficile)
- ne marche pas toujours du 1er
coup (combien reviennent parce que cela nrsquoa
pas accrocheacute trop cher tous ces arguments
connus qui peuvent cacher un pas precirct agrave)
Autres limites agrave cette pratique
- question de la neutraliteacute quant au fait de pou-
voir recevoir deux parties drsquoun conflit Nous
sommes lagrave pour tous les agents Et crsquoest bien
lagrave toute la diffeacuterence avec les GH qui ont agrave dis-
position plusieurs psychologues du personnel
- difficulteacute si une personne reccedilue en individuel
participe eacutegalement agrave un groupe de parole hellip
- tous les risques de glissement potentiels aux
places que lrsquoinstitution veut nous faire prendre
lorsque par exemple en lrsquoabsence de meacutedecin
du travail on propose agrave la place de rencon-
trer la psychologue du personnel lorsqursquoil faut
absolument trouver une solution risque drsquoecirctre
interpelleacute en vue de reacutesoudre un conflit avec
ce que cela suppose de rapiditeacute et drsquoefficience
allant agrave lrsquoencontre de la possibiliteacute de penser et
drsquoeacutelaborer
CONCLUSION
Pour le psychologue exercer aupregraves du per-
sonnel appelle parfois agrave des positions drsquoeacutequili-
bristes et neacutecessite de garder une certaine
souplesse
Lrsquointeacuterecirct de ce poste est de faciliter lrsquoaccegraves au
psychologue permettant agrave un public qui nrsquoau-
rait pas forcement fait cette deacutemarche de venir
consulter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 86
Clocircture de la journeacutee
gt Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 87
Clocircture de la journeacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 87
Clocircture de la journeacutee
C ette journeacutee nous a permis de partager
la diversiteacute de nos pratiques La ri-
chesse des interventions nous teacutemoi-
gnent de la vivaciteacute des psychologues hospita-
liers Cest bien la speacutecificiteacute de nos pratiques
qui assure la peacuterenniteacute de nos postes et leur
creacuteation
Jai commenceacute la journeacutee par des remercie-
ments cest ainsi que je vais la clore
Je remercie
le Comiteacute scientifique qui a construit ce pro-
gramme riche et ambitieux qui je lespegravere vous
aura apporteacute de nouvelles ressources
Le Comiteacute drsquoorganisation et les beacuteneacutevoles qui
nous ont reacuteserveacute un accueil souriant et dyna-
mique
Cleacutement ingeacutenieur du son agrave la technique
gracircce agrave qui vous pourrez entendre les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nous vous demandons donc un peu de pa-
tience avant de pouvoir retrouver les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nheacutesitez pas agrave nous rejoindre ce qui renforce
toujours notre dynamisme
En vous remerciant de votre preacutesence qui fait
le succegraves de cette journeacutee et nous poussera
qui sait agrave nous retrouver avec notre quart de
siegravecle -)
Dernier deacutetail administratif noubliez pas de
remplir le questionnaire deacutevaluation de la jour-
neacutee et surtout de rendre votre badge en par-
tant Cest important pour nous
Merci agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
BULLETIN DrsquoADHESION
Cotisation annuelle incluant lrsquoabonnement au journal et laccegraves agrave lespace adheacuterent sur notre site
internet
Membres actifs Titulaire 45 euro
Contractuel ou retraiteacute 30 euro
Membres associeacutes Jeune diplocircmeacute lt3ans sans emploi 25 euro
Eacutetudiant (master 1 ou 2) 15 euro
Justificatif obligatoire agrave joindre copie du haut du bulletin de salaire du diplocircme ou du certificat de
scolariteacute
Renseignements concernant lrsquoadheacuterent
Nom
Preacutenom
Adresse personnelle
Teacuteleacutephone
Courriel
Adresse professionnelle (preacuteciser le nom du chef de service)
Teacuteleacutephone
Courriel (pour recevoir nos Bregraveves)
Date et signature
A adresser avec votre chegraveque agrave lordre de Psyclihos agrave
Christine SCHWANSE psychologue
Heacutematologie Adulte - Myosotis 3 Hocircpital Saint Louis
par courrier 1 Avenue Claude Vellefaux ndash 75 010 Paris
Association des Psychologues Cliniciens Hospitaliers de lrsquoAssistance Publique
Hocircpitaux de Paris
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 5
20 ans de Psyclihos
Psychologue agrave lHocircpital
une espegravece agrave proteacuteger
Eacutedito
Psyclihos est une association loi 1901 creacuteeacutee en 1991 pour promouvoir la
psychologie clinique et le rocircle des psychologues agrave lhocircpital
Par ses nombreuses actions agrave lintention de ses adheacuterents et des
psychologues hospitaliers Psyclihos est reconnue comme un relais et un
interlocuteur aupregraves des diffeacuterentes instances
Pour fecircter ses 20 ans Psyclihos organise cette journeacutee ouverte agrave ses
adheacuterents et agrave lrsquoensemble des psychologues de lrsquoAP-HP Elle offrira
loccasion de renforcer les liens professionnels entre collegravegues et de
partager la richesse des approches cliniques
Nous vous proposons de nous rencontrer autour des
theacutematiques suivantes
gt Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
gt Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip Quels
changements pour le meacutetier de psychologue
gt Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de
nos cliniques
gt Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
DRH AP-HP Centre de la Formation et du
Deacuteveloppement des Compeacutetences - Institut de
Formation des Cadres de Santeacute
En partenariat avec
Comiteacute dorganisation
Catherine Holzmann
Ceacuteline Le Bivic
Ambre Piquard
Elodie Sacircles
Nicole Sense
Comiteacute scientifique
Franccediloise Adriansen
Nadine Labbeacute
Patrice Nomineacute
Elodie Sacircles
Christine Schwanse
Martine Shindo
Benoicirct Verdon
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 6
8h30 Accueil des participants
9h-9h30 Ouverture
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
9h30 - 11h Ecirctre psychologue ou
faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute
Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Lariboisiegravere
gt P s y c h o l o g u e c l i n i c i e n e n
psychotraumatologie du savoir-faire
au savoir-ecirctre
Clara Duchet Tenon
gt Aider agrave penser limpensable en
oncologie
Anna Elli Pardo Saint-Louis
11h - 11h30 Pause
11h30 - 13h Loi HPST titre de
psychotheacuterapeutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen
membre du CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des
textes officiels
Nadine Labbeacute Cochin
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous
avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Sainte Peacuterine
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Fernand Widal
13h -14h30 Repas libre
14h30 - 16h Uniteacute dans la diversiteacute
des pratiques transversaliteacute de nos
cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Fernand
Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute
des patients migrants
Jacqueline Faure Tenon
gt P sycho logue en r eacutean imat i on
peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique
en eacutevolution
Muriel Derome Raymond Poincareacute
gt Seacutejour de vacances quelle place pour
le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Eacutemile Roux
16h - 17h30 Cliniques particuliegraveres
pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Saint
Louis
gt Laccompagnement psychologique par
teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Pitieacute Salpecirctriegravere
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale
de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Jean Verdier
gt Psychologue clinicien aupregraves du
personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Saint Louis
Le programme de la journeacutee
Demandez le programme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 7
Ouverture de la journeacutee
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Page 7
Ouverture
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 8
Ouverture de la journeacutee
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
J e vais commencer par quelques remer-
ciements rapides
En premier lieu vous Monsieur Burdet
vous nous avez fait lhonneur douvrir cette
journeacutee Plus quun honneur votre soutien
nous a eacuteteacute si preacutecieux
Quand nous avions eacutevoqueacute avec vous lideacutee
dune journeacutee anniversaire mais alors de faccedilon
encore lointaine dans nos esprits votre encou-
ragement sans faille degraves lannonce de cette
eacuteventualiteacute nous a donneacute leacutenergie daffronter
lorganisation de cet eacuteveacutenement
Cest pourquoi au nom des membres du con-
seil dadministration des comiteacutes scientifiques
et dorganisation je tiens agrave vous remercier cha-
leureusement de votre soutien et du solide inteacute-
recirct que vous teacutemoignez agrave notre profession
Cet engagement de la Direction des res-
sources Humaines de lAPHP agrave nos cocircteacutes
comme il y a 20 ans nous permet de nous re-
trouver dans ce bel amphi pour partager cette
journeacutee Et nous remercions aussi lInstitut de
Formation des Cadres de Santeacute APHP pour
lefficaciteacute de son aide logistique et de la ges-
tion des inscriptions jusqursquoagrave ce jour et mecircme au
-delagrave
Mes remerciements vont aussi agrave vous tous qui
ecirctes ici aujourdrsquohui Nombre dentre vous nous
connaissent deacutejagrave en tant qursquoadheacuterents actuels
ou passeacutes souvent dune grande fideacuteliteacute au
cours des anneacutees Dautres nous suivent avec
inteacuterecirct sans nous avoir (encore ) rejoints et de
nombreux jeunes collegravegues nous deacutecouvrent
ou ont deacutejagrave deacutecouvert notre site internet
Notre site internet sur lequel vous pouvez
suivre lactualiteacute de notre association nous re-
joindre ou vous inscrire agrave notre infolettre Les-
pace adheacuterent propose de nombreux services
comme les postes agrave pourvoir agrave lAP-HP ou agrave la
FPH qui inteacuteressent tous collegravegues quils soient
titulaires contractuels ou en recherche dem-
ploi Bien eacutevidemment ces services sont reacuteser-
veacutes agrave nos adheacuterents tout comme nos bregraveves
par mail qui vous informent de lactualiteacute et nos
journaux
Degraves sa creacuteation Psyclihos sest donneacute pour
rocircle de teacutemoigner de lrsquoapport de la Psychologie
Clinique agrave lrsquohocircpital et den rsquoaffirmer la preacutesence
Informer communiquer et ecirctre un relais entre
les psychologues eacutechanger non seulement
entre pairs mais ecirctre aussi un interlocuteur
pour linstitution quant agrave notre profession
Lrsquohistoire de lrsquoassociation est intimement lieacutee agrave
celle de notre profession puisque Psyclihos voit
sa naissance en janvier 1991 quelques jours
avant cla parution du deacutecret qui fonde le statut
de psychologue hospitalier
1991 -2011 vingt ans de psychologie agrave lhocircpi-
tal nous y voilagrave
Les 20 ans de Psyclihos ont eacuteteacute loccasion
unique de nous replonger dans les archives de
notre association Nous partageons la richesse
de ce singulier voyage dans le temps dans le
Numeacutero speacutecial 20 ans du journal de Psyclihos
que vous trouverez dans vos pochettes
Il retrace lhistoire de Psyclihos agrave travers celle
de la psychologie agrave lhocircpital en sarrecirctant sur
les grandes dates qui ont jalonneacute le meacutetier de
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 9
Ouverture de la journeacutee
psychologue
1991 le deacutecret portant statut particulier de psy-
chologue hospitalier 1996 le code de deacuteonto-
logie 2003 la deacutecentralisation de gestion au
sein de lAP-HP et les conseacutequences que nous
vivons depuis pour nen citer que quelques
uneshellip
Cette plongeacutee historique loin decirctre nostal-
gique nous permet de rappeler au fil des ar-
ticles parus durant ces deux deacutecennies dans
nos journaux combien lactualiteacute de notre pro-
fession sappuie sur son passeacute Connaicirctre cette
histoire notamment pour nos plus jeunes col-
legravegues nous semble neacutecessaire pour com-
prendre les enjeux qui traversent actuellement
notre profession Il est dailleurs eacutetonnant de
lire combien des articles pourtant anciens gar-
dent toute leur fraicirccheur traitant deacutejagrave de pro-
bleacutematiques qui apparaissent reacutecurrentes ou
abordant des questionnements qui aujourdhui
pourraient sembler novateurshellip
Cest donc autour de quelques grands thegravemes
toujours actuels comme la deacuteontologie des
psychologues la saga des concours sur titres
la Fiche meacutetier la fonction FIR la Psychiatrie
de liaison ou les psychotheacuterapies et la loi que
nous vous invitons agrave plonger dans notre journal
speacutecial
Nous retrouvons aujourdrsquohui certains de ces
sujets dans le programme de cette journeacutee
Il illustre les champs drsquointerventions qui ani-
ment lrsquoassociation depuis sa creacuteation la fonc-
tion de psychologue les changements induits
par la leacutegislation la diversiteacute des pratiques et
les cliniques particuliegravereshellip
Nous souhaitons pouvoir teacutemoigner de la ri-
chesse et de la diversiteacute des pratiques des psy-
chologues cliniciens agrave lhocircpital Bien sucircr en 20
ans la place des psychologues hospitaliers a
eacutevolueacute leur nombre aussi La varieacuteteacute des inter-
ventions teacutemoigne de la richesse des champs
dexercice possibles parfois insoupccedilonneacutes au
sein de notre institution quest lAP-HP
Derriegravere un titre un peu provocateur nous sou-
haitons vous mobiliser dans lancrage toujours
neacutecessaire de notre profession au sein de
lAPHP Le cadre de notre exercice est toujours
fragile voire mis agrave mal En ces temps heurteacutes
et parfois incertains nous espeacuterons pouvoir
partager notre eacutenergie pour proteacuteger notre
exercice si particulier Ecirctre psychologue agrave lhocirc-
pital cest bien sucircr ecirctre agrave la rencontre des pa-
tients et de leurs proches dans leurs singulari-
teacutes mais aussi des eacutequipes soignantes sans
oublier la participation agrave la vie institutionnelle
comme ce sera abordeacute dans les diffeacuterentes in-
terventions que vous allez entendre aujour-
dhui
Sans plus attendre nous ceacutedons la place agrave la
premiegravere session de la matineacutee dans le vif du
sujet ecirctre psychologue ou faire de la psycho-
logie statut fonctions quelles compeacute-
tences modeacutereacutee par Benoicirct Verdon long-
temps psychologue hospitalier maintenant au
sein de lUniversiteacute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 10
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Hocircpital Lariboisiegravere Page 11
gt Psychologue clinicien en psychotrauma-
tologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Page 15
gt Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Hocircpital Saint-Louis Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles compeacutetences
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 11
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Neuropsychologue une espegravece nouvelle Plus reacutesistante
Mieux adapteacutee agrave la vie hospitaliegravere ou aux institutions
Plus respecteacutee des meacutedecins prescripteurs
Annie Kurtz
Service de Neurologie Hocircpital Lariboisiegravere
La reacutealiteacute objective drsquoune atteinte ceacutereacutebrale agrave
lrsquoorigine des troubles preacutesenteacutes par le patient
ne doit jamais occulter le fait drsquoune histoire
drsquoun eacutequilibre psychique et drsquoune individualiteacute
malmeneacutee
Charte des CPCN - Collegraveges des Psycho-
logues Cliniciens speacutecialiseacutes en Neuropsycho-
logie
J rsquoai bien imprudemment accepteacute il y a
quelques mois de prendre la parole pour
ceacuteleacutebrer les 20 ans de lrsquoassociation Psy-
clihos De plus jrsquoai accepteacute de vous faire parta-
ger mes reacuteflexions sur la place du psychologue
dans le champ de la santeacute et cerise sur le gacirc-
teau pour la deacutefense et lrsquoillustration de la neu-
ropsychologie clinique
Mon propos nrsquoest pas de poleacutemiquer mais de
reacutefleacutechir ensemble aux charmes et aux dangers
que repreacutesente le terme de
neuropsychologue si priseacute par certains ac-
tuellement
La preacutesence de psychologues au sein des ser-
vices hospitaliers est ancienne ils ou elles as-
surent agrave la fois le travail de bilan et celui de
soutien aupregraves des patients Mais le genre
neuropsychologue nrsquoexiste que depuis peu
Le terme neuropsychologue seacuteduit beaucoup
les jeunes collegravegues et mecircme certains para-
meacutedicaux comme les orthophonistes les ergo-
theacuterapeutes et mecircme quelques kineacutesitheacutera-
peutes Nombreux sont ceux dans le champ de
la neuropsychologie qui revendique le label
de neuropsychologues Depuis quelques an-
neacutees les lettres de motivation qui accompa-
gnent les demandes de stages srsquoadressent agrave la
neuropsychologue que je suis censeacutee ecirctre et
les candidates et candidats deacuteclarent leur
passion pour le meacutetier de
neuropsychologue Et je mrsquointerroge sur cette
ferveur
Quelle deacutefinition de la neuropsychologie pou-
vons-nous faire nocirctre Il y a 10 ans en mars
2001 le Collegravege des Psychologues Cliniciens
speacutecialiseacutes en Neuropsychologie (CPCN) pour
les Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Psychologie deacutefinis-
sait ainsi la neuropsychologie
La neuropsychologie est la discipline qui traite
des relations entre les processus mentaux
sous-tendant le raisonnement lrsquoattention la
meacutemoire la perception les gnosies les
praxies le langage le comportement eacutemotion-
nel et lrsquoactiviteacute du cerveau Lors des leacutesions ceacute-
reacutebrales les conseacutequences concerneront agrave la
fois lrsquoefficience de la cognition et lrsquoadaptabiliteacute
des conduites de lrsquoindividu Cette neacutecessaire
appreacuteciation analytique et syntheacutetique du psy-
chisme humain caracteacuterise lrsquoapproche neurop-
sychologique
La neuropsychologie est un champ multidisci-
plinaire ougrave se retrouvent diffeacuterents meacutetiers et
les zones de recouvrement peuvent ecirctre larges
pour certains Je milite aujourdrsquohui pour deacute-
fendre le fait qursquoun bilan reacutealiseacute par un psycho-
logue mecircme si les tests utiliseacutes par drsquoautres
intervenants sont identiques reste un bilan dif-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 12
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
feacuterent Ce travail drsquoanalyse et synthegravese rappe-
leacute dans la deacutefinition citeacutee fonde la totaliteacute de
nos pratiques en neuropsychologie
Lrsquoacte le plus freacutequent est le bilan bilan pour
plaintes mneacutesiques diagnostic diffeacuterentiel entre
deacutepression et maladie neurodeacutegeacuteneacuterative seacute-
quelles drsquoaccident vasculaire seacutequelles de
traumatisme cracircnien et nous intervenons eacutega-
lement dans le suivi et la reacutehabilitation dans les
services de soins de suite Mecircme dans le cadre
drsquoune eacutevaluation en vue drsquoune reacuteeacuteducation
nous savons devoir tenir compte des mouve-
ments psychiques agrave lrsquoœuvre dans tout individu
et qui vont peser sur ce travail
Notre code de deacuteontologie speacutecifie que le res-
pect de la vie psychique fonde notre action ce
respect de la vie psychique tout au long de nos
anneacutees drsquoeacutetudes nous avons eacuteteacute formeacutes agrave y
porter une attention toute particuliegravere Nos ac-
quis nos savoirs modifient notre approche
Quel peut ecirctre le sens pour un ou une psycho-
logue agrave vouloir changer de nom
Nrsquoest-ce pas alors en gardant notre position de
psychologue et donc aussi clinicien que nos
actions prennent sens dans la prise en soin
des patients
Ce que je redoute le plus est que cette appella-
tion neuropsychologue ne confine les psycho-
logues dans un exercice limiteacute agrave la passation
des tests et au traitement des chiffres qui en
reacutesultent Comme si le neuropsychologue ne
devait mettre en œuvre aucun savoir clinique Il
est vrai que la formation donneacutee par lrsquouniversiteacute
conditionne en partie nos pratiques et cer-
taines universiteacutes ne semblent plus accorder
de place agrave la structure de la personnaliteacute ni aux
aspects thymiques dans leur master de neu-
ropsychologie Replacer le patient dans son
histoire reste primordial quels que soient les
avatars neurologiques
Qursquoavons-nous agrave gagner en devenant
neuropsychologue
Les offres drsquoemploi sont nombreuses et les
jeunes diplocircmeacutes ne restent pas longtemps
sans emploi Les meacutedecins psychiatres neu-
rologues ou geacuteriatres avec qui nous collabo-
rons veulent travailler avec des
neuropsychologues Le risque me paraicirct
grand qursquoils recherchent essentiellement des
testeurs pour leurs publications ou leurs con-
sultations Dans les recherches il srsquoagit pour
des collegravegues formeacutes agrave la psychologie pendant
au moins 4 ans puis speacutecialiseacutes en deuxiegraveme
anneacutee de Master cest-agrave-dire apregraves 5 anneacutees
drsquoeacutetudes drsquoappliquer des protocoles de test
dont ils nrsquoont mecircme pas eu la possibiliteacute de dis-
cuter le contenu et le choix des outils (Les
textes nous reconnaissent pourtant la liberteacute du
choix de nos outils)
La pratique de la neuropsychologie peut ecirctre
passionnante agrave condition de ne pas ecirctre ins-
trumentaliseacutee par les meacutedecins En preacuteparant
mon intervention il mrsquoest apparu que je pour-
rais citer comme eacutetude de cas nombre de si-
tuations de souffrance de nos collegravegues dans
les institutions Je pourrais vous preacutesenter des
vignettes cliniques ougrave les psychologues se
mettent en danger en srsquoenfermant dans cette
appellation qui convient si bien agrave nos collegravegues
drsquoautres disciplines et agrave nos employeurs Dans
les consultations meacutemoire la place faite aux
neuropsychologues peut ecirctre tregraves diffeacuterente
suivant les attentes et les projets de leurs par-
tenaires meacutedicaux ou institutionnels et parfois
ces exigences entraicircnent une veacuteritable souf-
france pour nos collegravegues Peut-on exercer son
savoir-faire et son savoir ecirctre de psychologue
quand on attend de nous de recevoir 4 ou 6
patients par jour Ces bilans TGV laissent peu
de place agrave lrsquointersubjectiviteacute du psychologue et
du patient alors que dans drsquoautres lieux lrsquoeacuteva-
luation peut respecter la singulariteacute du patient
de sa famille et la deacuteontologie du psychologue
Il y a des temps dans la pratique drsquoun bilan
neuropsychologique qui restent des temps cli-
niques Avant drsquoentreprendre un bilan le psy-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 13
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
chologue speacutecialiseacute en neuropsychologie
comme tous les psychologues doit pouvoir in-
terroger la demande de qui vient cette de-
mande le patient le meacutedecin ou la famille et
qursquoen attendent ces diffeacuterents partenaires
Comment cet examen srsquoinscrit-il dans le projet
theacuterapeutique
Lrsquoentretien preacuteliminaire ne consiste pas agrave re-
prendre lrsquoanamnegravese au sens meacutedical histoire
de la maladie mais au sens psychologique
entendre lrsquohistoire drsquoun sujet Comme lrsquoa eacutecrit
Emmanuelle Truong-Minh actuelle preacutesidente
du CPCN agrave propos de ce temps drsquoun bilan
Inscrite dans la relation porteacutee par le langage
crsquoest cette preacutesence agrave lrsquoautre qui fonde notre
action Dans le temps de la consultation que je
reacutealise un entretien que je propose des tests
que JE parle ou que JE eacutecoute je suis lagrave au
moins lagrave de maniegravere absolue et entiegravere Pour
la personne agrave mon sens il nrsquoest rien de plus
preacutecieux que lrsquoeacutetablissement de cette relation
clinique Car ces instants ougrave lrsquoobjectivation de
difficulteacutes qursquoelles soient psychopathologiques
ou neuropsychologiques risque drsquoadvenir sont
fondamentaux dans le parcours de vie le par-
cours de santeacute et le parcours de la maladie de
la personne Pouvoir prendre appui sur cette
relation permet la mise en perspective des diffi-
culteacutes permet de supporter le traumatisme
psychique eacuteventuel permet de srsquoeacutecrouler peut-
ecirctre sans ecirctre seul
Je me souviens drsquoun patient qui mrsquoa eacuteteacute adres-
seacute pour plaintes mneacutesiques et eacuteventuelles seacute-
quelles drsquoun AIT Ce monsieur de 60 ans eacutetait
marieacute pegravere de 3 enfants cadre dirigeant dans
une entreprise A la suite de son accident
ischeacutemique transitoire il avait le sentiment de
ne plus pouvoir faire face agrave ses obligations pro-
fessionnelles Sa vie professionnelle eacutetait para-
siteacutee par le danger de voir ses difficulteacutes cons-
tateacutees par les autres surtout par son respon-
sable hieacuterarchique Degraves le deacutebut de lrsquoentretien
il semblait eacuteprouver une certaine inhibition an-
xieuse son expression spontaneacutee restait fac-
tuelle et retenue Apregraves quelques eacutepreuves
drsquoattention et de meacutemoire sans reacutesultat patho-
logique je mrsquoautorisai agrave abandonner les
eacutepreuves pour poursuivre lrsquoentretien au cours
duquel jrsquoappris que la veille il avait accompa-
gneacute sa megravere contre son greacute dans une institu-
tion pour patients souffrant de maladie
drsquoAlzheimer Alors qursquoil a des fregraveres et sœurs il
avait eacuteteacute seul agrave faire cette deacutemarche contraint
et forceacute par la santeacute chancelante de son
eacutepouse atteinte drsquoun cancer du seinhellip quand
jrsquoeacutevoque avec lui la possibiliteacute drsquoaller en parler
avec un psy il me dit y avoir deacutejagrave penseacute mais
renonceacute parce qursquoil avait peur de srsquoeffondrer
Nous avons la responsabiliteacute de notre bilan
mais nous ne pouvons deacutelivrer un diagnostic
(crsquoest de la compeacutetence du meacutedecin) pourtant
lrsquoentretien dit de restitution est un temps
drsquoeacutechange privileacutegieacute qui rend au patient sa
place de sujet mais ce temps-lagrave prend du
temps et on ne nous le donne pas toujours
Le temps de lrsquoexamen psychologique nrsquoest pas
celui des examens compleacutementaires prescrits
par les meacutedecins On sait bien qursquoil est toujours
utile de faire preacuteciser la demande de refuser
de tester Monsieur X ou Y on teste une hy-
pothegravese pas un individu de dire non parfois
parce qursquoon sait qursquoon ne reacutepondra pas agrave la
question ou parce que les conditions de lrsquoexa-
men ne respectent pas le patient ou notre auto-
nomie professionnelle Le questionnement sur
lrsquoobjet de la demande est dans le champ de
compeacutetence des psychologues nous avons eacuteteacute
formeacutes agrave ce travail La demande des meacutedecins
de lrsquoeacutequipe du patient ou de sa famille doit ecirctre
analyseacutee
Peut-on imaginer que se faire connaicirctre
comme neuropsychologue lorsqursquoon est psy-
chologue serait un moyen drsquoeacutechapper agrave la diffi-
culteacute de maintenir notre position singuliegravere
dans le monde de la santeacute
Certes la pratique de la neuropsychologie re-
quiert des connaissances sur le fonctionne-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 14
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
ment du cerveau sur les troubles cognitifs as-
socieacutes aux leacutesions ceacutereacutebrales sur la significa-
tion des localisations anatomo-cliniques et ce
travail permanent de reacuteflexion et drsquoeacutechange
avec les autres intervenants dans la prise en
charge drsquoun patient est enrichissante et parfois
passionnante comme peuvent lrsquoexprimer les
lettres de motivation des demandes de stages
Mais pratiqueacutee par des psychologues elle pour
reste un lieu privileacutegieacute ougrave la parole du patient
peut ecirctre entendue pas seulement sur ses
troubles ou ses capaciteacutes preacuteserveacutees mais sur
ce qursquoil comprend de ce qui lui arrive sur son
ressenti et le psychologue est preacutesent pour
lrsquoaccompagner dans ce nouveau travail psy-
chique Ecirctre speacutecialiseacute en neuropsychologie
est une position exigeante comme pour
chaque psychologue crsquoest lrsquoabsolue neacutecessiteacute
drsquoactualiser nos connaissances sur les patholo-
gies les nouveaux outils mais crsquoest aussi
prendre le risque de partager nos doutes sur
notre approche drsquoun patient dont on prend en
compte lrsquohistoire le contexte affectif social
professionnel Crsquoest une tacircche difficile que
drsquoessayer drsquoaborder un patient dans sa globali-
teacute et pas seulement sur ses troubles cognitifs
Personnellement je ne suis jamais sucircre drsquoavoir
bien analyseacute lrsquoensemble des eacuteleacutements que le
patient me permet drsquoappreacutehender jrsquoai la
chance de ne pas ecirctre seule dans mon service
et de pouvoir partager mes doutes avec mes
collegravegues
Enfin le terme neuropsychologue peut repreacute-
senter une menace pour le corps des psycho-
logues
Nous expeacuterimentons chaque jour la difficulteacute agrave
deacutefendre notre place de psychologue On nous
reproche notre image floue drsquoecirctre des
eacutelectrons libres dans les services drsquoecirctre des
produits de luxe sans nomenclature de nos
activiteacutes (si ce nrsquoest dans la CCAM qui ne con-
cerne que les meacutedecins) Le texte qui eacuteclaire
notre champ drsquoactiviteacute le seul qui ait une valeur
leacutegale est celui de 1985 qui deacutefinit notre statut
et nous savons bien combien lrsquoincitation au res-
pect de ce texte est une tacircche reacutecurrente pour
nous Jrsquoai commenceacute agrave travailler agrave lrsquoAP-HP en
1971 la publication de ce texte puis des circu-
laires de 1991 ont repreacutesenteacute un moment drsquoes-
poir mais jrsquoai appris tout au long de mes an-
neacutees drsquoexpeacuterience que ce travail drsquoexplicitation
de ce qursquoest un psychologue nrsquoa pas de fin
Parfois la confusion qui regravegne dans lrsquoesprit de
nos employeurs les arrangent bien pour
exemple des postes de neuropsychologues
animateurs offerts dans les EPHAD Parfois
cette confusion est sincegravere tel nouveau chef
de service qui travaille depuis de longues an-
neacutees avec des psychologues et qui reccediloit de la
DRH un rappel sur le temps FIR et qui srsquoeacutetonne
de son contenuhellip
Notre code de deacuteontologie est une reacutefeacuterence
indispensable pour nous mais nrsquoest toujours
pas un texte opposable agrave un employeur
Ces textes ont eacuteteacute eacutecrits pour les psycho-
logues ce sont des repegraveres pour les psycho-
logues Il a existeacute un mouvement qui souhaitait
diffeacuterencier les psychologues et les neuropsy-
chologues avec la volonteacute drsquoobtenir un statut agrave
part Quand on connaicirct la difficulteacute drsquoune recon-
naissance leacutegale la fragiliteacute du corps des psy-
chologues toujours precirct agrave se morceler en cen-
taines drsquoassociationshellip on peut se demander si
le meacutetier de psychologue nrsquoest pas effective-
ment en danger et se revendiquer neuropsy-
chologue peacutedopsychologue comme le laisse
entendre lrsquoactuelle fiche meacutetier nous expose
encore plus hellip (heureusement cette fiche doit
ecirctre remplaceacutee en 2012)
Notre seule protection repose sur les textes de
loi qui deacutefinissent le titre de psychologue il nrsquoy
a pas de titre de neuropsychologue ni de titre
de psychologue clinicien et ce nrsquoest pas lrsquoaven-
ture du titre de psychotheacuterapeute ni les travaux
en cours agrave la DGOS qui doivent nous rassu-
rerhellip
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 15
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Psychologue clinicien en psychotraumatologie
du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Universiteacute Paris Descartes
E n 1997 un deacutecret du ministegravere de la
Santeacute creacutee le reacuteseau des CUMP
(Cellules dUrgence Meacutedico-
Psychologique) propulsant des psychologues
cliniciens sur le terrain de lurgence aux cocircteacutes
de meacutedecins psychiatres et de parameacutedicaux
De nouvelles missions soffrent agrave ces profes-
sionnels peu formeacutes au deacutepart pour intervenir
dans ces contextes de catastrophes collectives
(accidents agrave retentissement majeur catas-
trophes naturelles guerres terrorisme etc)
Peu agrave peu des reacuteflexions et groupes de travail
speacutecifiques se creacuteent (au sein notamment de
lAFORCUMP - Association de recherche et de
formation des CUMP) afin de mieux deacutefinir les
fonctions et les compeacutetences de chacun dans
ce domaine bientocirct nommeacute
psychotraumatologie Cette nouvelle cli-
nique (dans sa forme institutionnelle et dans
sa dimension traumatique en situations
extrecircmes) a souleveacute de nombreux deacutebats
passionneacutes agrave propos de la leacutegitimeacute ou non de
lintervention de terrain (sur les sites et aux
abords des catastrophes) Cependant il sagira
plutocirct de discuter ici de la speacutecialisation eacuteven-
tuellement neacutecessaire des psychologues dans
ce domaine - du cocircteacute du savoir-faire - comme
des retrouvailles avec une position de clinicien
classique - du cocircteacute du savoir-ecirctre et de la
subjectivation
Agrave lrsquoheure ougrave se multipliaient donc diffeacuterentes
formes de violence et notamment au moment
de lrsquoeacutepoque terroriste parisienne (attentats
meacutediatiseacutes St Michel Port-Royal 1995-1996)
les psychologues ont vu leur champ drsquoaction et
leurs fonctions srsquoeacutelargir des nouvelles mis-
sions et nouvelles structures se deacuteveloppaient
pour venir au secours des victimes agrave la de-
mande de nos gouvernants et de psychiatres
militaires expeacuterimenteacutes dans ce domainehellip Jrsquoai
eu la chance de participer agrave ce processus degraves
le deacutebut et tregraves rapidement je me suis poseacutee
des questions sur ces interventions qui mrsquoap-
paraissaient pour ainsi dire hors cadre
Hors cadre parce que dans lrsquourgence
Hors cadre parce que nombre drsquointerventions
avaient lieu sur le terrain peu apregraves la catas-
trophe loin du confort du cabinet ou de lrsquohocircpi-
tal
Je me souviens agrave lrsquoeacutepoque mrsquoecirctre rueacutee sur le
code de deacuteontologie en vigueur depuis le 22
mars 1996 et me rassurer en lisant
La mission fondamentale du psychologue est
de faire reconnaicirctre et respecter la personne
dans sa dimension psychique Son activiteacute
porte sur la composante psychique des indivi-
dus consideacutereacutes isoleacutement ou collectivement
Oufhellip nous nrsquoeacutetions donc pas compleacutetement
hors-cadrehellip cependant je nrsquoavais pas vrai-
ment appris agrave travailler sur les bancs de la fac
Sans la demande du patient (mecircme pour lrsquoen-
fant le parent eacutetait demandeur sinon lrsquoinstitu-
tion scolairehellip)
Sans un cadre institutionnel classique
Et certainement pas en prise directe avec la
reacutealiteacute drsquoun eacuteveacutenementhellip
Quelques options universitaires tout de mecircme
assureacutees par des enseignants ayant participeacute agrave
des missions humanitaires mrsquoavaient deacutejagrave per-
mis drsquointerroger des dispositifs de soins hors
norme
Dans nos deacutebuts jrsquoai donc co-animeacute un groupe
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 16
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
de travail destineacute speacutecifiquement aux
psychologues pour reacutefleacutechir agrave notre pratique
Voici comment nous nous repreacutesentions alors
les choses
Nouvelles missionshellip = hellip nouvelles compeacute-
tences Ce que jrsquoai nommeacute dans mon introduc-
tion savoir-faire
1 NOUVELLES COMPEacuteTENCES REQUISES
ndash DU COcircTEacute DU SAVOIR-FAIRE
Lors des soins immeacutediats ou
defusing (cagraved sur le terrain dans les
heures qui suivent lrsquoattentat la catastrophe
naturelle la prise drsquootages lrsquoaccident col-
lectif etc)
Le psychologue doit reconstruire un cadre en
fonction de la situation qui se preacutesente agrave lui
crsquoest-agrave-dire en labsence de cadre deacutefini
(configuration du lieu dureacutee de la mission
nombre de sujets agrave prendre en charge etc
sont inconnus agrave lrsquoavance) Ceci neacutecessite de sa
part une capaciteacute dadaptation une souplesse
psychique dans son intervention ainsi qursquoun
cadre theacuteorique interne solide pour ne pas ceacute-
der nous mecircme agrave la panique ou au deacuteborde-
ment eacutemotionnel Le cadre theacuteorique solide
renvoyait surtout pour nous aux eacutecrits sur le
traumatisme et agrave ce qursquoon appelait alors la
victimologie
Pour illustrer ce propos je peux vous parler
drsquoune mission effectueacutee agrave Pointe Noire au Con-
go lorsque nous eacutetions chargeacutes avec un psy-
chiatre militaire de lrsquoeacutevaluation psychopatholo-
gique des ressortissants franccedilais en pleine
guerre civile (octobre 1997) Nous avons effec-
tivement ducirc nous adapter agrave lrsquoabsence de cadre
rassurant dans le sens ougrave nos deacuteplacements
eacutetaient extrecircmement limiteacutes en raison du con-
texte drsquoinseacutecuriteacute permanente marqueacute par des
tirs quotidiens drsquoarmes automatiques Il srsquoagis-
sait eacutegalement drsquoinventer des lieux de consulta-
tions et des modes drsquoapproches originaux pour
cette population bien souvent cloicirctreacutee dans les
appartements deacutevasteacutes par les milices armeacutees
Mais je souhaite citer drsquoautres situations moins
exceptionnelles afin de vous montrer agrave quel
point le psychologue dans ce travail drsquourgence
peut ecirctre ameneacute agrave reacutealiser des entretiens dans
des lieux inhabituels voire insolites comme agrave
bord drsquoun avion lorsque nous avons proceacutedeacute au
rapatriement des victimes du crash drsquoavion du
Seacuteneacutegal (en feacutevrier 1997) ou dans un car lors-
que nous avons accompagneacute les familles des
enfants victimes de lrsquoavalanche des Orres ou
encore dans un aeacuteroport lors de lrsquoaccueil de
populations reacutefugieacutees (du Congo ou du Kosso-
vo) ou dans une citeacute universitaire pour la prise
en charge des victimes drsquoattentats etc
Ici le psychologue doit ecirctre precirct agrave aller vers les
victimes sans attendre une demande de leur
part (drsquoautant plus que les personnes sont sou-
vent en eacutetat de choc de confusion de sideacutera-
tion etc) Alors rappelons-le que notre forma-
tion nous apprend plutocirct agrave travailler avec la de-
mande du patient comme principe inheacuterent agrave
la rencontre theacuterapeutique
Ensuite le psychologue est ameneacute agrave srsquointerro-
ger sur la position de neutraliteacute bienveillante
Alors que neutraliteacute signifie ne pas eacutemettre de
jugements de critiques de deacutesapprobation
nous voyons comment dans lrsquourgence le clini-
cien peut (je dirais mecircme doit) juger de lrsquoadap-
tation drsquoun comportement par exemple quitte agrave
deacutecider drsquoune hospitalisation ou drsquoun rapatrie-
ment En effet le psychologue doit savoir repeacute-
rer et informer les victimes des symptocircmes
psychopathologiques eacuteventuels favoriser la
demande de prise en charge theacuterapeutique ul-
teacuterieure si besoin est repeacuterer et orienter les
personnes les plus fragiles en faisant bien la
distinction entre eacutetat de stress aigu et entreacutee
potentielle dans une pathologie traumatique
Mecircme si ces fonctions de diagnostic drsquoeacutevalua-
tion drsquoorientation existent dans le cadre de
notre profession celles qui visent agrave informer agrave
lrsquoavance et agrave preacutevenir relegravevent habituellement
plutocirct de la speacutecificiteacute meacutedicale
Par ailleurs sur le terrain la position et latti-
tude du psychologue sont encore une fois un
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 17
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
peu particuliegraveres pour lui puisqursquoil doit assurer
une preacutesence rassurante contenante (voire
maternante au sens de Winnicott) apporter de
la chaleur et de lhumaniteacute Lrsquointervention drsquour-
gence se situe du cocircteacute du holding Ferenczi
en charge des soldats en prise avec des neacute-
vroses de guerre soulignait deacutejagrave ce pheacuteno-
megravene de reacutegression des patients les faisant re-
venir agrave un stade archaiumlque (en proie agrave des an-
goisses violentes et massives de destruction
morcellementhellip) et agrave des comportements in-
fantiles (ne plus savoir marcher perdre son
autonomie pour les besoins de la vie quoti-
dienne etc) Ici le traumatisme est externe et
agit par effraction physique et psychique deacute-
sorganisant les modaliteacutes deacutefensives habi-
tuelles On dit aussi que le traumatisme est en-
treacute par tous les pores de la peau et envahit
tous les sens (visuels olfactifs auditifs etc) Il
srsquoagit alors pour le psychologue drsquoexercer une
veacuteritable fonction de pare-excitation
drsquoenveloppe protectrice (Au sens de D Winni-
cott et de D Anzieu) fonction qui peut srsquoac-
compagner de gestes apaisants
Travailler dans ce type de dispositif ne srsquoimpro-
vise pashellip Ainsi le psychologue doit avoir reccedilu
une formation speacutecifique A lrsquoappui un nouvel
Extrait du code de deacuteontologie des psycho-
logues chapitre compeacutetences
Le psychologue tient ses compeacutetences de
connaissances theacuteoriques reacuteguliegraverement mises
agrave jour drsquoune formation continue et drsquoune forma-
tion agrave discerner son implication professionnelle
dans la compreacutehension drsquoautrui
Pour notre domaine drsquointervention la for-
mation porte avant tout sur
1 La clinique traumatique la symptomatologie
de la neacutevrose traumatique de lrsquoESPT mais
aussi de tous les eacutetats de deacutesorganisa-
tion aigus des comportements de panique col-
lective etc elle porte eacutegalement sur le fonc-
tionnement psychique entraveacute par le trauma
donnant lieu agrave des reacuteameacutenagements transi-
toires parfois tregraves eacuteloigneacutes drsquoune clinique clas-
sique
2 La dynamique de groupe un groupe pris
dans une catastrophe repreacutesente une enve-
loppe psychique groupale qui elle-mecircme peut
se trouver effracteacutee par la violence de lrsquoeacuteveacutene-
ment le collectif est alors briseacute et ne pourra
plus fonctionner comme avanthellip Que la prise
en charge soit groupale ou bien mecircme indivi-
duelle il est fondamental drsquoecirctre au clair avec
ces concepts de la clinique groupale
Nous venons de pointer les principales con-
naissances et compeacutetences neacutecessaires au
psychologue qui intervient dans lrsquourgence ou
dans des dispositifs de soins exceptionnels mis
en place suite agrave des eacuteveacutenements qui sortent de
lrsquoordinairehellip pour autant ce savoir-faire nrsquoa de
sens que srsquoil srsquoarticule avec un savoir-ecirctre
propre agrave la fonction habituelle du psychologue
2 LORSQUE LE SAVOIR-FAIRE REJOINT
LE SAVOIR-EcircTRE
Je poursuis ma lecture du code de deacuteontologie
(chapitre compeacutetences) le psychologue est
garant de ses qualifications particuliegraveres et deacute-
finit ses limites propres compte tenu de sa for-
mation et de son expeacuterience Il refuse toute in-
tervention lorsqursquoil sait ne pas avoir les compeacute-
tences requises Ainsi il doit savoir sil peut
assurer un soin immeacutediat dans lrsquourgence ou srsquoil
doit refuser ce type de mission en fonction de
ses limites personnelles et professionnelles de
sa vulneacuterabiliteacute (changeante au fil du temps et
de son histoire personnelle) de ses projections
eacuteventuelles
Il est inviteacute eacutegalement agrave repeacuterer et agrave connaicirctre
ses propres reacuteactions psychiques agrave leacutecoute de
ce type de patients de ce qui tient parfois de
lintoleacuterable savoir ou apprendre agrave repeacuterer
ses limites personnelles ses propres fan-
tasmes de sauveur ou ses mouvements
drsquoidentification agrave la victime crsquoest agrave dire ses
propres eacutelans contre-transfeacuterentiels Ces con-
naissances restent largement favoriseacutees par un
travail personnel au cours duquel le psycho-
logue a appris agrave ecirctre eacutecouteacute et par la mise en
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 18
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
place de supervision reacuteguliegravere
Dans le cadre de lrsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue est le seul agrave de-
voir se passer drsquoinstrument (pas de mateacuteriel
meacutedical ni de theacuterapeutique meacutedicamenteuse
ou encore de mateacuteriel technique reacuteserveacutes aux
meacutedecins infirmiers secouristes etc) De ce
fait comme lrsquoexprime Colette Chiland il devient
son propre instrument celui qui permet de
comprendre et drsquointervenir agrave mains nues
Lrsquooriginaliteacute de sa formation vient du travail sur
soi que le clinicien a effectueacute pour acqueacuterir
une certaine maicirctrise de lui-mecircme comme ins-
trument Autrement dit ce que le psychologue
met au service de lrsquoautre ce ne sont pas seule-
ment ses connaissances mais aussi son appa-
reil psychique sa psycheacute son fonctionnement
sa capaciteacute de ressentir de comprendre et
drsquoeacutelaborer Le savoir du clinicien devient un sa-
voir vivant incarneacute ougrave il paie de sa personne
Crsquoest principalement cette position qui le dis-
tingue drsquoun autre intervenant
Dans la clinique du traumatisme il est fonda-
mental de prendre conscience de ce qursquoon
eacuteprouve lors de lrsquoeacutecoute drsquoun blesseacute psychique
aux prises avec des pheacutenomegravenes drsquoeffractions
internes afin de ne pas ecirctre gouverneacute par des
reacuteactions non controcircleacutees dans la compreacutehen-
sion du patient et dans la reacuteponse qursquoon lui
donnera Nous voyons comment cette eacutecoute
ne peut se contenter drsquoun savoir plaqueacute elle
doit ecirctre au contraire un travail actif qui permet
des allers ndash retours entre probleacutematique per-
sonnelle et ressenti du patient sans que cette
premiegravere nrsquointerfegravere de maniegravere neacutegative Et
crsquoest bien en restant sensible et en acceptant
de le rester dans les limites que nous venons
de fixer que le sujet se sentira libre drsquoexprimer
eacutemotions penseacutees honteuses sentiments de
culpabiliteacute et drsquohumiliation inheacuterents agrave la dyna-
mique traumatique
Enfin nous le savons bien lrsquoeacutecoute srsquoexerce
dans un double registre ce qui est dit et ce qui
nrsquoest pas dit le contenu manifeste et le conte-
nu latent Ces dimensions concernent tout au-
tant le clinicien qui doit savoir se taire pour lais-
ser lrsquoautre parler et parler pour lui faciliter la pa-
role Dans notre contexte drsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue doit eacutegalement
chercher agrave eacutetablir petit agrave petit et degraves que pos-
sible une distinction entre fantasmes
(individuels) et eacuteveacutenements reacuteels (veacutecus par
tous) pour diffeacuterencier angoisse interne
(subjective) et peur (objective) des objets ex-
ternes
Il est ainsi un passeur agrave ce moment de frac-
ture dans lrsquohistoire du sujet Il fait alors le lien
entre le passeacute la bregraveche traumatique et la
reconstruction agrave venir
EN CONCLUSION
Dans un contexte hors du commun puisque
hors cadre et souvent hors demande il me
paraicirct essentiel de garder nos re-
pegraveres classiques de psychologue clinicien
Soulignons que nous restons pour le patient un
psychologue supposeacute savoir Dans cette cli-
nique deacuteroutante et violente bien entendu le
cadre interne tapisseacute de connaissances speacuteci-
fiques devient opeacuterant et garant de notre pro-
fessionnalisme Nous voyons finalement agrave quel
point la speacutecialisation est en partie incontour-
nable (mais comme pour tout autre type de cli-
nique les soins psychiques aupregraves de sujets
deacutependants en fin de vie de patients psycho-
tiques de nourrissons de familles de sans-
logishellip ne srsquoimprovisent pas drsquoavantage) sans
nous faire perdre de vue le socle de formation
commun qui nous reacuteunit et met en exergue la
speacutecificiteacute du Psychologue qui se caracteacuterise
bien par son orientation vers lrsquoeacutecoute qui prend
sens eacutecoute drsquoune parole drsquoun trajet drsquoune
rupture dans la continuiteacute discours drsquoun sujet
agent de son propre destin
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Oncologie meacutedicale Hocircpital Saint-Louis
J ai commenceacute agrave travailler agrave lhocircpital
comme psychologue en oncologie agrave la fin
des anneacutees 80
Le contexte eacutetait diffeacuterent de maintenant
Deux choses mavaient beaucoup marqueacutee et
interpelleacutee
- le manque de prise en charge de la douleur
- lattitude qui consiste agrave cacher la maladie et
sa graviteacute aux patients
La douleur neacutetait pas une cible de laction theacute-
rapeutique elle avait une valeur diagnostique
supposeacutee sameacuteliorer avec les traitements de
la maladie sans une attention particuliegravere agrave son
traitement (1)
Le meacutedecin eacutetait perccedilu comme deacutetenteur dune
veacuteriteacute qui faisait loi
Voilagrave quelques propos quil neacutetait pas rare
dentendre de la part du meacutedecin au patient
Faites-moi confiance ne pensez agrave rien la chi-
miotheacuterapie cest mon problegraveme vous pensez
agrave gueacuterir on aura toujours une moleacutecule pour
vous soigner on va se battre
Au deacutecegraves du patient on pouvait entendre il
est mort mais en reacutemission
Et le meacutedecin sadressant agrave moi ne parlez
pas de la mort aux patients vous savez on a
deacutejagrave vireacute une psychologue
Plusieurs eacuteveacutenements vont faire eacutevoluer la meacute-
decine et son discours dans la prise en charge
du patient
Agrave la fin du XXegraveme siegravecle lOrganisation Mon-
diale de la Santeacute (circulaire du 19-1-1994) a
deacutefini comme prioriteacute la lutte contre la dou-
leur
La creacuteation des eacutequipes anti-douleur sera un
eacuteveacutenement important ainsi que la recherche de
nouveaux antalgiques Lrsquoeacutevolution de cette
prise en charge va se reacutepandre en canceacuterolo-
gie et dans la meacutedecine en geacuteneacuteral
Les premiers Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Ligue
contre le Cancer ont donneacute la parole aux pa-
tients il y a eu une demande de psychologues
dans les services pour une prise en compte de
la deacutetresse psychique
Le Plan Cancer en 2006 va donner des direc-
tives qui reacuteglementent aujourdhui la consulta-
tion dannonce et les soins de supports
La psycho-oncologie neacutee aux Eacutetats-Unis arrive
aussi en Europe et cest en 1994 quest creacuteeacutee
la Socieacuteteacute Franccedilaise de Psycho-Oncologie
(SFPO)
Son but est de deacutevelopper des outils des meacute-
thodes pour deacutepister et ainsi traiter preacutecoce-
ment les risques des difficulteacutes psychologiques
Elle sinscrit dans une approche bio-psycho-
sociale de la maladie canceacutereuse La speacutecifici-
teacute nest pas la prise en compte de la subjectivi-
teacute du patient mais ladaptation de celui-ci aux
diffeacuterentes situations traverseacutees pendant la ma-
ladie Cette discipline qui eacutetudie les attitudes
psychologiques et eacutemotionnelles survenant
pendant la maladie canceacutereuse pourrait laisser
croire quil y a des reacuteactions speacutecifiques agrave cette
maladie Son approche est de plus en plus co-
gnitivo-adaptative avec protocoles reacutefeacuterentiels
deacutemarche qualiteacute
Dans le champ de la psycho-oncologie on
trouve le terme de psycho-oncologue
Ce mot est utiliseacute de faccedilon un peu anarchique
on y trouve le psychologue le psychiatre mais
aussi dautres professionnels intervenant au-
pregraves des malades et de leur famille Ce nest
pas parce que nous avons quelques connais-
sances en oncologie que nous pouvons utiliser
ladjectif oncologue
Ce terme peut ecirctre source de confusion il ne
deacutefinit pas notre speacutecificiteacute et il me paraicirct aussi
seacutegreacutegatif dune pathologie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 20
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Cest pour cela que nous voulons garder le
terme de psychologue clinicien
Dans ce mot il y a la dimension clinique cest agrave
dire lobservation du patient agrave son chevet
Mon travail consiste agrave accompagner soutenir
le patient dans ce parcours difficile quil entre-
prend avec la maladie
Le cancer produit un remaniement identitaire
pour le sujet ce qui neacutecessite de lui offrir un
espace de parole
Cest la psychanalyse qui de mon point de vue
offre les meilleurs outils pour travailler la cli-
nique du reacuteel Cest avec notre propre parcours
analytique que nous psychologues pouvons
bien prendre en compte la dimension incons-
ciente propre agrave lhumain
Je ne me situe donc pas dans le champ de la
psycho-oncologie au discours trop normatif
Notre clinique dans un service dhospitalisation
Cest agrave tout stade deacutevolution de la maladie
quun travail theacuterapeutique peut se mettre en
place avec le psychologue
On a beaucoup parleacute du dispositif dannonce
annonce du diagnostic visant agrave assurer agrave la fois
une bonne administration du soin et son
humanisation
Ces consultations cherchent agrave atteacutenuer limpact
traumatique Il est proposeacute au patient de ren-
contrer un psychologue
Il nest pas rare que le patient me dise ils ne
se rendent pas compte il y a trop dinforma-
tions drsquoun seul coup je nai pas encore reacutealiseacute
que jai un cancer et on me parle de perruque
pour la perte des cheveux de dieacuteteacuteticien de
psy mais je nen suis pas lagrave moi
Pour les patients cest la deacutecouverte brutale du
diagnostic puis le choc des traitements Nous
savons que le temps psychique nest pas le
temps meacutedical et que dans cette clinique cest
au cas par cas que nous pouvons intervenir ce
qui est traumatique pour un patient ne lest pas
pour un autre
Un patient me disait reacutecemment le cancer
menvahit je ne pense quagrave ccedila je ne peux plus
lire regarder un film il est omnipreacutesent Voilagrave
une description du reacuteel
Il sagit de faire entendre agrave une eacutequipe meacutedi-
cale tourneacutee plus vers la maladie que vers le
malade et ce dans une organisation tregraves tech-
nique et de plus en plus sophistiqueacutee la neacuteces-
siteacute de prendre en compte la subjectiviteacute du pa-
tient dans un espace qui en paraicirct deacutepourvu
La demande de leacutequipe vis agrave vis du psy peut
correspondre agrave une demande de compliance
au traitement que le patient refuse elle sou-
haite aussi souvent que le psy reacuteconforte le pa-
tient agrave qui on a donneacute une mauvaise nouvelle
Comme dit Jeacuterocircme Alric dans son article Qui
eacutecoute quoi la sphegravere psychologique de-
vient une fonction constituante de la personne
globale au mecircme titre que la sphegravere digestive
dermatologique et dont il faut soccuper (2)
Au psychologue de faire valoir aupregraves du pa-
tient lintention de lui donner une place pour
entendre et faire entendre sa position subjec-
tive
Souvent je suis interpelleacutee par les soignants
dans des situations de deacutetresse par exemple
quand les antalgiques se reacutevegravelent inefficaces
ou sont refuseacutes Dans les entretiens les pa-
tients deacuteplient leur histoire leur roman fami-
lial La douleur physique se mecircle agrave la souf-
france psychique
Une patiente qui avait un cancer du sein avec
des meacutetastases osseuses me disait jai mal
lagrave en me montrant sa poitrine
Je lui avais demandeacute si elle en avait parleacute au
meacutedecin
Elle me reacutepondit en me regardant droit dans les
yeux cette douleur-lagrave le meacutedecin ne peut
pas me la soigner cest lhistoire avec mon ma-
ri qui me fait mal Celui-ci lavait quitteacutee et elle
se retrouvait seule avec son jeune fils
En quelques mots elle avait situeacute ce qui la fai-
sait souffrir au-delagrave des localisations meacutetasta-
tiques Elle savait faire la diffeacuterence entre le
physique et ce qui venait lagrave sajouter agrave sa
propre histoire douloureuse
Comme dit Clavreul dans Lordre meacutedical la
souffrance renvoie le sujet qui leacuteprouve agrave son
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 21
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
fantasme cest-agrave-dire agrave sa propre histoire et au
discours quil peut tenir sur son histoire Il y a
un seul discours qui se tienne sur la souf-
france et cest celui de la personne qui
leacuteprouve (3)
Un patient encore reacutecemment me disait ne pas
vouloir devenir grabataire comme son pegravere
Il seacutetait occupeacute de lui depuis son plus jeune
acircge il poussait la chaise roulante dans ses deacute-
placements il eacutetait sa beacutequille Mon patient ar-
riveacute en fin de vie voudra jusqursquoau bout se deacute-
placer aux toilettes et rester indeacutependant dans
les gestes du quotidien
Aux soignants qui ne comprenaient pas pour-
quoi il sobstinait agrave vouloir faire tout seul des
gestes devenus si difficiles il a fallu dire sans
reacuteveacuteler le pourquoi combien ceacutetait important
pour le patient de garder cette indeacutependance
Ceacutetait pour lui sa digniteacute sa liberteacute sa volonteacute
Je voudrais mettre laccent sur la singulariteacute de
ces rencontres avec des patients deacutejagrave tregraves gra-
vement atteints et qui degraves le premier entretien
se saisissent de cette possibiliteacute de parole
Il y a la douleur et lautre versant de la souf-
france langoisse
Monsieur O est un patient algeacuterien qui a eacuteteacute
opeacutereacute drsquoun cancer du poumon Avant linterven-
tion chirurgicale il se sentait precirct agrave affronter
cette eacutepreuve cest apregraves quil a senti ses
forces diminuer Jai changeacute je ne suis plus le
mecircme quavant en fait je crois que je nai pas
accepteacute lopeacuteration Il dit regretter il aurait preacute-
feacutereacute vivre avec son cancer il serait mort avec
Ce qui semble bouleverser ce patient nest pas
tant la maladie en elle-mecircme que ses conseacute-
quences Avec ce bout de corps quon lui a reti-
reacute cest aussi toute une part de lui qui semble
partie
Leacutepreuve du cancer entraicircne toujours une at-
teinte de linteacutegriteacute corporelle
Ce corps qui est traiteacute par le meacutedical de faccedilon
organique biologique revient souvent dans le
discours des patients Ce qui eacutemerge cest
lhorreur des amputations des meacutetastases qui
se reacutepandent agrave linteacuterieur du corps mais aussi
ce qui se donne agrave voir agrave toucher Un corps en-
dommageacute que le patient a du mal agrave reconnaicirctre
comme le sien qui se bouche qui enfle qui
eacutetouffe
Le corps peut devenir un objet agrave controcircler per-
seacutecuteur qui nest plus investi de deacutesir Cette
parole descriptive du corps peut prendre toute
la place dans le discours du patient avant que
quelque chose du subjectif nrsquoapparaisse
Cest dans un deuxiegraveme temps que Monsieur
O apregraves avoir exprimeacute limpossibiliteacute daccep-
ter cette perte anatomique ndash une partie du pou-
mon ndash pourra associer sur dautres pertes qui
viennent sintriquer entre passeacute et preacutesent
Langoisse de mort est tregraves freacutequente dans
cette pathologie dans les entretiens il ne sagit
pas de viser directement ce que nous pensons
ecirctre lobjet de cette angoisse mais de soutenir
dans la conversation les deacutetours de cette indi-
cible
Lintervention aupregraves de la famille nest pas
rare
Monsieur L 63 ans a un cancer de la vessie et
il est deacutecrit par leacutequipe soignante comme tregraves
exigeant et peacutenible Je deacutecide daller me preacute-
senter
Il me fait une description assez preacutecise de sa
maladie qui a deacutebuteacute il y a quelques mois Je
lui demande ce quil pense lui de tout ccedila Il me
regarde attend plusieurs secondes et me reacute-
vegravele que sa femme a une maladie heacutematolo-
gique agrave surveiller et quil sinquiegravete beaucoup
pour elle Ils nont pas denfant Il ajoute que
dans le service on ne lui fait pas grand-chose
son eacutetat ne srsquoameacuteliore pas quil serait mieux
avec sa femme En mecircme temps elle ne peut
pas soccuper de lui agrave la maison Il part dans
un SSR (soins de suite et de reacuteeacuteducation)
Quelques semaines apregraves il revient dans le
service et il demande agrave me voir Il va ecirctre tregraves
direct On vient de lui parler de son mauvais
pronostic agrave court terme il veut que je le ren-
contre avec sa femme Il me dit Elle deacuteprime
Si je meurs elle va se laisser mourir Pour moi
cest insupportable Effectivement sa femme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 22
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
est tregraves deacuteprimeacutee affaiblie par sa maladie
mais elle accepte de voir son geacuteneacuteraliste et
prendre un traitement On lui trouve un heacuteber-
gement agrave la Maison des Parents pour lui eacuteviter
lrsquohocirctel Elle sera sur place pour voir son mari
elle pourra eacutechanger avec les familles heacuteber-
geacutees agrave la Maison des Parents Petit agrave petit elle
tisse des liens Son mari deacutecline rapidement je
la vois dans la chambre elle me parle de lui
des choses quils aimaient faire ensemble Elle
est calme rassureacutee par la preacutesence de
lrsquoeacutequipe Apregraves la mort de son mari nous nous
sommes revues puis teacuteleacutephoneacute et rapidement
elle prend la deacutecision de deacutemeacutenager agrave Annecy
pregraves dune amie Elle aura un suivi heacutematolo-
gique lagrave-bas
Jai souvent penseacute agrave cet homme dont le dis-
cours eacutetait centreacute sur la plainte et qui a changeacute
rapidement de registre agrave partir du moment ougrave
on a pris en compte sa souffrance et soutenu
sa femme aupregraves de lui
Dans notre travail il me paraicirct important de
rendre compte aux eacutequipes de nos interven-
tions pour permettre aux soignants des eacuteclair-
cissements sur la souffrance psychologique
des patients Cela peut permettre un change-
ment de rapport soignant-patient dans des si-
tuations ougrave le patient par langoisse sous-
jacente se montre peacutenible pour lrsquoeacutequipe voire
agressif agrave son eacutegard
Toujours pour ce qui concerne la famille une
reacuteelle eacutevolution a eacuteteacute la prise en compte des
enfants du patient Degraves le diagnostic et tout le
long de la maladie une attention particuliegravere de
la part de leacutequipe permet deacuteviter les situations
dramatiques que lon rencontrait dans le pas-
seacute lorsque lenfant deacutecouvrait la graviteacute de la
maladie du parent la veille de la mort de celui-
ci sans avoir eu la possibiliteacute de sy preacuteparer et
den parler
Pour conclure je dirai que la science et la tech-
niciteacute ont beaucoup eacutevolueacute agrave lhocircpital mais quil
y a eu peu de changement du cocircteacute de la prise
en compte meacutedicale de la dimension subjective
des patients
On est passeacute dune prise en charge de la dou-
leur qui eacutetait nieacutee agrave des situations parfois de
surmeacutedicalisation La meacutedecine malgreacute ses
progregraves consideacuterables ne peut pas soulager
toute les douleurs et encore moins de faccedilon
systeacutematique et protocolaire Elle doit tenir
compte de la singulariteacute de chaque patient
De mecircme sil y a encore une vingtaine dan-
neacutees on ne donnait pas suffisamment dinfor-
mations meacutedicales sur la maladie et le devenir
du patient on est passeacute aujourdhui agrave un trop
dinformations dans loptique de dire la veacuteriteacute
au malade et de le preacuteparer sur le chemin de
sa fin de vie
Il nest pas rare que je rencontre un patient agrave
qui on a asseneacute une veacuteriteacute meacutedicale quil ne
voulait pas entendre Pour le patient il sagit de
pouvoir se deacuteprendre de ce savoir meacutedical qui
peut venir empecirccher toute penseacutee le cristalli-
ser dans une angoisse de mort et entraicircner le
sujet vers une mort psychique avant la mort
reacuteelle
Nous sommes lagrave pour partager ce temps avec
lui ce temps qui est incertain et qui permet au
sujet davoir des interrogations exprimer des
affects
Le psychologue dorientation analytique peut
apporter agrave ses eacutequipes un eacuteclairage des situa-
tions
Une collaboration avec les meacutedecins est agrave en-
courager encore faut-il que les meacutedecins puis-
sent prendre le temps et donc se deacutetacher
dune pure gestion des soins pour penser et
analyser leur pratique
1 Baszanger I 1995 Douleur et meacutedecine La
fin dun oubli Le Seuil
2 Alric J 2004 Qui eacutecoute quoi Essai de
repeacuterage de deux postures deacutecoute possible agrave
lhocircpital Eregraves in Collectif sous la direction de
Patrick Ben Soussan Le cancer approche psy-
chodynamique chez ladulte
3 Clavreul J 1978 LOrdre meacutedical Paris Le
Seuil
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 23
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des textes
officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin Page 24
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous avez man-
queacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine Page 32
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal Page 43
Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip
Quels changements pour le meacutetier de
psychologue
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 24
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin
V ingt ans se sont eacutecouleacutes depuis la creacutea-tion de Psyclihos Depuis de nombreux rapports textes officiels ont eacuteteacute diffuseacutes
qui concernent la santeacute dune maniegravere geacuteneacute-rale et plus particuliegraverement la santeacute mentale Quelle place nous psychologues avons-nous dans ces eacutecrits De fait lorsque lon interroge la bibliothegraveque des rapports publics sur le site de la Documen-tation franccedilaise sur le terme Psychologue on saperccediloit que seule une liste constitueacutee dune petite cinquantaine de reacutefeacuterences apparaicirct un peu plus toutefois que pour le terme psychiatre qui apparaicirct dans 47 rapports mais beaucoup moins que celui dinfirmier qui apparaicirct dans 121 rapports Jai choisi parmi ces textes ceux qui mont sem-bleacute les plus significatifs dune certaine image du psychologue vu par les politiques ou ladmi-nistration Je vais maintenant vous preacutesenter cette compilation dextraits dans un ordre chro-nologique Lun des premiers rapports qui cite les psycho-logues porte sur les Strateacutegies drsquoutilisation des antiretroviraux dans lrsquoinfection par le VIH en 1998 Il affirme Le soutien par les psy-chologues est lune des pratiques diverses des services hospitaliers qui meacuteritent drsquoecirctre deacuteve-loppeacutees La mecircme anneacutee un rapport sur les Uniteacutes agrave encadrement eacuteducatif renforceacute et leur ap-port agrave lheacutebergement des mineurs deacutelin-quants fait agrave la demande de lInspection Geacuteneacute-rale des Affaires Sociales preacuteconise Afin de preacutevenir lusure des eacutequipes et aussi de leur apporter une certaine capaciteacute de recul il faut mettre en place des proceacutedures de soutien au moment des crises et de supervision dans les-quelles le recours au psychologue simpose En 2000 un rapport au Premier ministre Lionel Jospin Pour une nouvelle politique publique
daide aux victimes fait le constat suivant Pour le reacuteseau de lINAVEM (Feacutedeacuteration natio-nale daide aux victimes et de meacutediation qui comprend 150 associations) les emplois de psychologue repreacutesentent seulement 9 des emplois salarieacutes Cet aspect pourtant fonda-mental de laide aux victimes nest pas suffi-samment deacuteveloppeacute En 1994 lintervention dun psychologue con-cernait environ un quart des associations daide aux victimes Le rapport propose la creacuteation de centres daide pour enfant-adolescent et adulte com-prenant obligatoirement des psychologues cli-niciens Des groupes de parole et deacutecoute pour en-fants victimes seraient animeacutes par des psycho-logues scolaires ayant suivi une formation speacute-cifique ou des psychologues cliniciens exteacute-rieurs Le projet dinteacutegration de psychologues clini-ciens dans les milieux scolaires semble alors ecirctre au cœur de la nouvelle politique publique daide aux victimes Une politique ambitieuse sur le papier hellip Les suites don-neacutees agrave ce rapport ont eacuteteacute la creacuteation dun numeacutero national daide aux victimes en 2001
Pourtant en 2000 on sinteacuteresse beaucoup agrave nous le rapport du Haut comiteacute de la santeacute pu-blique sur la souffrance psychique des ado-lescents et des jeunes adultes consacre un paragraphe au rocircle du psychologue dans le chapitre intituleacute Lrsquoinstitution scolaire Bilan en CM2 Il est eacutecrit
Le recours agrave un psychologue dans le milieu scolaire est pratiquement limiteacute aux tests drsquoorientation Lrsquoabsence de psychologue dans le secondaire semble faire partie de cette mau-vaise image de la psychiatrie qui persiste dans le grand public Le regard drsquoun psychologue exteacuterieur agrave lrsquoeacuteta-blissement dans des reacuteunions reacuteguliegraveres de synthegravese et de concertation peut ecirctre preacutecieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 25
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Ces contacts auraient de plus lrsquoavantage de relier les prises en charge de situations diffi-ciles entre lrsquointeacuterieur et lrsquoexteacuterieur des eacutetablisse-ments et de faire se connaicirctre les profession-nels des diffeacuterentes structures Ainsi 20 des adolescents pensent avoir be-soin de consulter un psychologue mais 137 disent avoir renonceacute du fait de difficulteacutes finan-ciegraveres Toujours en 2000 au colloque sur lrsquoEnfance maltraiteacutee la Ministre deacuteleacutegueacutee agrave lrsquoEnfance et agrave la famille reacuteclame Un psy pour chaque enfant Dans son second rapport Claire Brisset la deacute-fenseure des enfants sinteacuteresse eacutegalement au rocircle des psychologues et agrave leur formation Pour elle les psychologues souffrent depuis longtemps dun problegraveme didentiteacute du fait dune reconnaissance tardive de leur profes-sion et de lexistence de plusieurs types de psychologues recruteacutes agrave des niveaux deacutetudes diffeacuterents en reacutefeacuterence aux psychologues sco-laires et conseillers dorientation- psycho-logues La Deacutefenseure des Enfants propose d -Institutionnaliser les psychotheacuterapies den-fants et dadolescents par des psychologues cliniciens sur prescription du psychiatre et rembourseacutees par la Seacutecuriteacute sociale De la mecircme faccedilon quun meacutedecin speacutecialiste prescrit des seacuteances de kineacutesitheacuterapie qui sont alors rembourseacutees par la seacutecuriteacute sociale un psychiatre aussi bien dans le public que dans le priveacute doit pouvoir prescrire des theacuterapies effectueacutees par un psychologue clinicien Cette mesure qui se pratique deacutejagrave dans cer-tains pays europeacuteens comme lAllemagne ne peut ecirctre mise en place quaux conditions sui-vantes - quune formation homogegravene de psychologie clinique sanctionneacutee par un diplocircme unique soit organiseacutee - que cette formation permette dacceacuteder agrave un nouveau statut de psychologue clinicien recon-nu par lensemble des administrations concer-neacutees - que cette formation soit agrave la fois theacuteorique et pratique Cette reacuteforme permettrait de - mieux utiliser les compeacutetences des nombreux psychologues qualifieacutes actuellement deacutepour-vus dun emploi agrave temps plein ou contraints faute de poste dexercer dautres meacutetiers
Dans cette hypothegravese le psychiatre aurait le rocircle danimateur de leacutequipe soignante et de supervision des psychotheacuterapies meneacutees par les psychologues cliniciens En outre un tel scheacutema devrait pouvoir sappli-quer non seulement dans les structures pu-bliques mais aussi dans le secteur libeacuteral Les psychologues cliniciens peu nombreux en libeacute-ral pourraient alors sinstaller en cabinet (au mecircme titre que les infirmiegraveres ou les masseurs kineacutesitheacuterapeutes) En ce deacutebut des anneacutees 2000 les politiques sinteacuteressent beaucoup aux questions relatives agrave la santeacute en juillet 2000 Martine Aubry alors ministre de lemploi et de la solidariteacute confie aux Drs Piel et Roelandt une mission de reacute-flexion et de prospective dans le domaine de la santeacute mentale qui donnera lieu un an plus tard agrave un rapport intituleacute De la psychiatrie vers la santeacute mentale Un rapport dans lequel on parle peu des psychologues si ce nest pour dire que leur formation est insuffisante et quun internat en psychologie est neacutecessaire ce dont on reparlera beaucoup dans les anneacutees sui-vantes En aoucirct 2001 Psyclihos travaille sur le 1
er rap-
port deacutetape du groupe de travail de la DGS sur leacutevolution des meacutetiers en santeacute mentale Des psychologues de toute la France choqueacutes et inquiets se reacuteunissent au sein du Collectif Na-tional des Psychologues de la FPH Les me-sures preacuteconiseacutees par le 2
egraveme rapport deacutetape
paru en janvier 2002 mettent le feu aux poudres Pour rappel le rapport insiste sur le deacuteveloppement des reacuteseaux de santeacute la mise en place de proceacutedures de protocoleshellip Et surtout il preacutevoit des niveaux dintervention hieacuterarchiseacutes avec des intervenants de 1
egravere
ligne des professionnels de soins primaires et des intervenants speacutecialiseacutes et deacutejagrave des glisse-ments de compeacutetences vers les infirmiers et les meacutedecins geacuteneacuteralistes Il est agrave nouveau question de transfert de com-peacutetences en 2003 avec le rapport Berland sur la deacutemographie des professions de santeacute au titre eacuteloquent Coopeacuteration des professions de santeacute le transfert de tacircches et de compeacute-tences Le chapitre qui nous concerne sinti-tule Un transfert de compeacutetences en psychia-trie difficile agrave organiser Le Pr Berland eacutecrit Les auditions que jai pu mener lors de la mis-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 26
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
sion deacutemographie des professions de santeacute et les eacutechanges que jai pu avoir avec les psy-chiatres ont reacuteveacuteleacute de reacuteelles difficulteacutes agrave envi-sager le transfert de compeacutetences dans le champ de cette speacutecialiteacute En effet si certains professionnels considegraverent souhaitable la mise en perspective de collaborations organiseacutees avec les psychologues cliniciens dautres la trouvent inutile ou non souhaitablehellip Il est neacute-cessaire denvisager la part de lactiviteacute aujour-dhui assureacutee par les psychiatres qui doit ecirctre confieacutee en toute collaboration agrave des psychologues praticiens formeacutes agrave la fois par les faculteacutes de psychologie et les faculteacutes de meacutedecine pour construire ce nouveau meacutetier qui reacutepond agrave un besoin clairement identifieacute Au mecircme moment est diffuseacute le rapport Cleacutery Melun intituleacute Plan dactions pour le deacutevelop-pement de la psychiatrie et la promotion de la santeacute mentale qui reprend les principales pro-positions des rapports preacuteceacutedents par ex con-cernant la reacuteorganisation des soins en psychia-trie Concernant la formation des psycho-logues Ces formations sont tregraves diverses sui-vant les universiteacutes certaines eacutetant speacuteciali-seacutees dans la psychanalyse ce qui aboutit agrave des formations mono reacutefeacuterenceacutees Il en va de mecircme des stages qui sont souvent difficiles agrave trouver et ne permettent pas toujours dassister aux entretiens avec les patients Enfin dans un contexte de plus en plus seacutelectif les examens theacuteoriques et formels prennent le pas sur lac-complissement dun stage et lobtention dune formation clinique Il poursuit Les psychologues souhaitent eux-mecircmes faire progresser cette situation Ils se sont doteacutes dun code de deacuteontologie qui pose des prin-cipes clairs notamment au regard de leur for-mationhellipAvec un stage qui doit correspondre agrave leacutequivalent dun internat en psychologie dont la dureacutee ne devrait pas ecirctre infeacuterieure agrave 2 se-mestres et dont le contenu devrait faire lobjet dune validation finale Toujours en 2003 il faut un rapport eacutecrit par une psychologue pour que le terme soit citeacute 97 fois soit presque dans une page sur deux Cest le rapport de Marie de Hennezel sur Fin de vie le devoir daccompagnement Elle preacuteconise une preacutesence renforceacutee de psy-chologues dans tous les services sensibles
Pour favoriser le maintien agrave domicile des per-sonnes elle demande que lrsquoon eacutetudie la possi-biliteacute drsquoun financement drsquoun forfait de 3 agrave 5 seacuteances avec un psychologue pour un accom-pagnement de fin de vie sur le modegravele de ce qui est proposeacute dans le plan cancerElle de-mande la creacuteation dau moins un mi-temps de psychologue pour chaque service confronteacute agrave la fin de vie des patients Pour elle la Formation universitaire du psycho-logue ne le preacutepare pas neacutecessairement agrave la confrontation avec la mort drsquoautrui et son cor-tegravege drsquoangoisses et de fantasmes Elle ajoute Crsquoest la raison pour laquelle nous estimons qursquoune formation compleacutementaire personnelle (psychanalyse) ou une formation dans le cadre drsquoun DU de soins palliatifs ou drsquoun stage drsquoune semaine au moins dans une uniteacute de soins palliatifs (USP) doit lui permettre d lsquoeacutevaluer srsquoil est precirct ou non agrave travailler dans un service confronteacute agrave la mort des patients srsquoil peut accueillir sans trop drsquoangoisse celles des autres patients familles soignants Pour les psychologues de ville elle pose la question drsquoun conventionnement de la profes-sion puisque seuls les psychologues libeacuteraux inteacutegreacutes dans un reacuteseau (dans le cadre drsquoun groupement de coopeacuteration sanitaire) et reacutemu-neacutereacutes agrave la vacation sont pris en charge par lrsquoassurance maladie Elle ajoute Cela limite consideacuterablement lrsquooffre drsquoaide psychologique agrave domicile En mars 2005 la Commission Peacuterinataliteacute en-fants et adolescents recommande le renforcement des eacutequipes de materniteacute en psychologues dans le but de Mieux prendre en charge la santeacute mentale et les troubles psy-chiatriques de la megravere etou du couple En 2005 le rapport Santeacute justice et dange-rositeacutes pour une meilleure preacutevention de la reacutecidive eacutevoque les formations initiale et conti-nue des psychologues dans le domaine meacutedico-leacutegal qui devraient ecirctre renforceacutees afin de mieux prendre en consideacuteration les probleacutema-tiques relatives agrave la dangerositeacute psychiatrique dans la pratique clinique et la mise en oeuvre de lrsquoexpertise peacutenale Le rapporteur revendique la possibiliteacute pour les psychologues drsquoassurer le suivi du condam-neacute et demande laugmentation des effectifs des services peacutenitentiaires drsquoinsertion et de proba-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion notamment par lrsquointeacutegration de psycho-logues au sein des eacutequipes Dans son rapport sur Le fonctionnement des services dinformation et dorientation lIns-pection geacuteneacuterale de lEducation nationale re-met largement en question le statut des con-seillers dorientation-psychologues Des divergences de vues interviennent sou-vent entre ceux qui sont issus de la psycholo-gie essentiellement clinique et les autres qursquoils aient eacutetudieacute la psychologie du travail ou la so-ciologie lrsquoeacuteconomie le droit lrsquohistoire ou la phi-losophie Lrsquoouverture drsquoesprit des seconds aux questions du marcheacute de lrsquoemploi ou mecircme aux perspec-tives de deacutecentralisation est freacutequente Les psychologues cliniciens semblent plus autocen-treacutes individualistes voulant se concentrer sur leur pratique au jour le jour de conseil et drsquoac-compagnement des individus deacutesireux drsquoap-porter des solutions au cas par cas(sic ) Lrsquoeacutevolution de la profession qui a gagneacute le titre de psychologue en 1991 va dans le sens drsquoune eacutemancipation tout agrave fait eacutetonnante Les COPsy constituent un cas singulier drsquoexercice libeacuteral au sein mecircme de la fonction publique Ils nrsquoont en fait de comptes agrave rendre agrave personne lrsquoautori-teacute des directeurs est purement formelle (hellip) Et comble les conseillers ne sont pas inspecteacutes() Le rapport propose de scinder le corps des COPsy avec dun cocircteacute des psychologues de lenseignement secondaire et de lautre des conseillers dinformation et dorientation Les missions des psychologues de leacuteducation seraient centreacutees sur le deacutepistage et lexamen des eacutelegraveves pour lesquels on craint une inadap-tation la preacutevention des deacutecrochages la preacute-vention des conduites addictives en lien avec le personnel meacutedico-social leacutecoute un premier accompagnement dans les cas de profondes souffrances psychologiques le lien avec les services exteacuterieurs hellip Dans les eacutetablissements les psychologues complegraveteraient et renforceraient leacutequipe eacutedu-cative et meacutedico-sociale Pour lIGEN il est manifeste que les conseil-lers drsquoorientation-psychologues nrsquoont ni le temps ni les compeacutetences ni les moyens de faire face seuls agrave lrsquoensemble des missions que les usagers (au sens large du terme) pour-raient attendre drsquoeux Si beaucoup de responsables ministeacuteriels re-
grettent fortement lappellation de psycho-logues du statut de 1991 il faut reconnaicirctre que peu de personnels souhaitent labrogation totale de cette appellation y compris parmi ceux qui ont eacuteteacute recruteacutes avant 1990 sans avoir fait deacutetudes initiales de psychologie Il convient aussi de signaler quil y a unanimiteacute pour consideacuterer quon ne peut pas faire de psy-chologie clinique ou theacuterapeutique dans les eacutetablissements Tous pensent mecircme que cest impossible En fait en 1991 il aurait fallu creacuteer par la loi un statut de conseiller qui existe dans dautres pays Pour autant les auteurs concluent que la ques-tion de labrogation du statut de psychologue a eacuteteacute poseacutee mais ils ont consideacutereacute que ce neacutetait pas opportun dans le contexte actuel Mais le recrutement doit ecirctre diversifieacute Il srsquoagit de mettre un terme au monopole des li-cencieacutes en psychologie qui de lrsquoavis de la grande majoriteacute de nos interlocuteurs et notam-ment de lrsquoencadrement des services drsquoorienta-tion et des formateurs nrsquoest nullement imposeacute par lrsquoexercice des missions et a reacuteduit la diver-siteacute intellectuelle qui caracteacuterisait le corps avant 1991 En outre le poids excessif des li-cencieacutes en psychologie a favoriseacute des attitudes drsquoindividualisme et de repli au deacutetriment des autres facettes de la profession Dans le rapport fait au nom de la mission dinformation sur la famille et les droits de lenfant en 2006 Valeacuterie Peacutecresse et Patrick Bloche recommandent de faire prendre en charge par lassurance-maladie les consulta-tions des mineurs et de leur famille aupregraves de psychologues sur prescription meacutedicale afin dameacuteliorer la prise en charge des enfants et de leur famille On reparle encore de formation des psycho-logues en 2006 avec le rapport de la mission parlementaire de Jean-Paul GARRAUD sur la dangerositeacute Il comprend un chapitre impor-tant relatif agrave lexpertise psychologique et au psychologue expert on eacutetait agrave leacutepoque en pleine affaire dOutreau Il souligne encore une fois lrsquoheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute des diplocircmes tous les psy-chologues ne suivent pas une formation en psychopathologie clinique et peuvent avoir des formations theacuteoriques tregraves diverses Il conviendrait de redeacutefinir le champ drsquointerven-tion des psychologues fondeacute sur leur qualifica-
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tion professionnelle et drsquoenvisager les possibili-teacutes de lrsquoarticulation de leurs expertises avec celles effectueacutees par les psychiatres Organiser une confeacuterence de consensus sur lrsquoexpertise psychologique afin de reacutefleacutechir sur les objectifs et les limites des expertises psy-chologiques lrsquoidentiteacute lrsquoeacutethique et la deacuteontolo-gie des experts leur solitude ainsi que sur les modaliteacutes pertinentes de reacutealisation des exper-tises et de leur eacutevaluation Ceci est resteacute un vœu pieux agrave ce jour hellip Il revendique Une plus grande qualification des formations des psychologues Outre une maturiteacute professionnelle une forma-tion particuliegravere est neacutecessaire (connaissance des diffeacuterents types et champs drsquoexpertise des proceacutedures judiciaires aspects criminolo-giques deacuteontologiqueshellip) Cette speacutecialisation pourrait deacutecouler drsquoun cur-sus post-universitaire en psychologie clinique et pathologique agrave lrsquoexemple des DU sur la pratique de lrsquoexpertise psychologique ou la psy-chologie leacutegale (Universiteacute Lille Aix-Marseille Rouen Poitiershellip) En 2007 les psychologues sont les stars du rapport de lIGAS consacreacute agrave Gestion et utili-sation des ressources humaines dans 6 eacuteta-blissements de santeacute speacutecialiseacutes en psy-chiatrie le terme psychologue apparaicirct 224 fois Les reacuteveacutelations sont lagrave encore fracassantes Il faut adapter le statut et le cursus de forma-tion et de carriegravere des psychologues pour mieux utiliser leurs compeacutetences et les inteacutegrer dans les eacutequipes Les problegravemes de peacutenurie de psychiatres doivent ecirctre anticipeacutes par une seacuterie de mesures - augmenter les attributions des psychologues en leur permettant dans certains cas deffec-tuer des actes jusque lagrave reacuteserveacutes aux meacutede-cins - ouvrir une formation de manager de structure psychiatrique agrave des cadres intermeacutediaires type cadre supeacuterieur de santeacute psychologue cadre socio-eacuteducatif Il serait possible douvrir le concours de cadre supeacuterieur de santeacute agrave dautres professions soi-gnantes psychologues eacuteducateurs speacuteciali-seacutes assistants de service social Les psychologues peuvent-ils remplacer les psychiatres et agrave quel prix Ce nest pas seulement parce quon manque
de psychiatres cest aussi parce que les psy-chologues repreacutesentent une certaine tradition de la psychiatrie europeacuteenne pas uniquement arc-bouteacutee sur les traitements chimiotheacuterapeu-tiques Cest aussi parce quils possegravedent en principe des compeacutetences permettant de deacuteve-lopper des aspects tregraves importants en psychia-trie - eacutevaluation des capaciteacutes cognitives et mise au point de programmes de reacutehabilitation - psychotheacuterapies de diverses natures eacutegale-ment de soutien dans les cas de traitement meacute-dicamenteux lourd - supervision de groupes de soignants pour eacuteviter les pheacutenomegravenes de chroniciteacute de mal-traitance - encadrement deacutequipes notamment de pro-fessionnels dhorizons divers Il est clair quil serait eacutegalement inteacuteressant de pouvoir leur confier des accueils de 1
egravere ligne
degraves lors que nombre de demandes de consul-tation signifient plutocirct une souffrance psychique quune pathologie psychiatrique La question de savoir sils devraient avoir le droit de prescrire ou de renouveler des pres-criptions au long cours meacuterite decirctre poseacutee Une telle eacutevolution neacutecessiterait une speacutecialisa-tion apregraves le diplocircme geacuteneacuteral de psychologue peut-ecirctre linstauration de ce que daucuns ap-pellent un internat et cette fois commun avec linternat en psychiatrie En attendant davoir notre ordonnancier si tant est que nous le souhaitions les tacircches speacuteci-fiques en psychiatrie pour les psychologues tout ce qui sapparente au bilan agrave leacutevaluation aux psychotheacuterapies de diverses obeacutediences Voilagrave ce que pensent les politiques et les admi-nistratifs de notre meacutetier mais ccedila nest pas la reacutealiteacute de notre meacutetier Tout dabord quelques chiffres sur la deacutemogra-phie des psychologues Nous sommes de plus en plus nombreux de 5500 eacutequivalents temps plein en 1997 agrave 11500 en 2009 preuve que notre rocircle est de plus en plus reconnu par les eacutetablissements Il reste encore beaucoup agrave faire en clinique priveacutee ougrave ils ne sont que 350 ETP La preacutecariteacute est tou-jours le lot de notre profession Il y a deux fois plus de psychologues agrave temps partiel que dans les autres emplois non meacutedicaux 40 de psy-chologues sont agrave temps partiel dans le public plus des trois quarts dans le priveacute soit le
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double La profession est tregraves feacuteminiseacutee avec 8 femmes sur 10 psychologues elles ont en moyenne cinq ans de moins que leurs con-fregraveres masculins la moyenne dacircge eacutetant de 42 ans Les femmes de moins de 40 ans repreacute-sentent 38 des effectifs nationaux La densiteacute nationale des psychologues est de 37 psychologues pour 100000 habitants soit un psychologue pour 2700 Par comparaison celle des psychiatres est de 22 pour 100000 habitants La densiteacute en psychologues libeacuteraux est de 7 Concernant les secteurs dactiviteacute 87 des psychologues sont salarieacutes Un tiers exerce dans un eacutetablissement de santeacute principalement du secteur public ougrave 7 sur 10 sont employeacutes agrave plein temps Lexercice en libeacuteral ne concerne que 8 des effectifs Comment les psychologues perccediloivent-ils leur meacutetier Dana Castro et Marie Santiago ont publieacute dans Le Journal des psychologues ndeg 233 deacutec 2005- janv 2006 les Reacutesultats dune enquecircte na-tionale sur Evolution des repreacutesentations et construction identitaire du meacutetier de psy-chologue Les donneacutees ont eacuteteacute recueillies agrave partir de 93 questionnaires suite agrave une enquecircte nationale lanceacutee par le Journal des Psychologues aupregraves de ses lecteurs fin 2004 Les reacutesultats montrent que les psychologues ont une image assez steacutereacuteotypeacutee de leur meacute-tier qui ne se modifie pas significativement ni au cours des eacutetudes ni agrave lentreacutee dans la vie professionnelle Au deacutebut de leurs eacutetudes 50 des reacutepondants perccediloivent le psychologue comme un speacutecialiste de laide et de leacutecoute Pour 27 cest un meacutetier qui sexerce en solitaire 30 disent ne pas en avoir une repreacutesentation preacute-cise La repreacutesentation de la profession eacutevolue pro-gressivement Apregraves quelques anneacutees dexer-cice le psychologue perccediloit davantage sa fonc-tion certes encore comme un meacutetier daide et deacutecoute pour la moitieacute dentre eux mais qui sexerce en eacutequipe pour 21 selon des moda-liteacutes et avec des outils speacutecifiques au premier rang desquels lentretien et lexamen psycholo-giques pour 18 des reacutepondants La repreacutesentation du meacutetier se modifie-t-elle au
cours du cursus universitaire - Non pour 22 des reacutepondants pour lesquels elle reste identique tout au long du parcours - Oui pour 36 pour lesquels elle se modifie gracircce aux enseignements theacuteoriques en lien avec la clinique et la psychopathologie - Encore oui pour 34 pour lesquels elle se transforme gracircce aux stages et au contact des professionnels Dune maniegravere geacuteneacuterale les psychologues comptent sur eux-mecircmes et leurs compeacutetences en matiegravere dexpeacuterience dapprentissage sur le tas de solidariteacute et de travail en eacutequipe plutocirct que sur la qualification qui elle valorise les titres les connaissances formelles la revendi-cation de lautonomie et les distinctions statu-taires Seul 1 des reacutepondants eacutevoque les no-tions dorganisation du travail en terme de sta-tut professionnel de cadre A de reacutemuneacuteration de formation ou de titre proteacutegeacute de psycho-logue Autant dire quil reste beaucoup de tra-vail pour avoir une repreacutesentation profession-nelle qui puisse ecirctre partageacutee tant par les psy-chologues que par leurs partenaires profes-sionnels ougrave compeacutetence personnelle et qualifi-cation professionnelle sont indispensables Pourtant 78 des reacutepondants deacutecrivent des difficulteacutes au sein de leur institution Un sur 5 estime que ses collegravegues ne connaissent pas son meacutetier et quils en ont une image neacutegative qui est veacutecue comme deacutevalorisante 17 se sentent isoleacutes dans les eacutequipes avec lesquelles ils travaillent Une eacutetude plus reacutecente puisquelle date de 2010 vient compleacuteter la preacuteceacutedente il sagit de celle de Elise Marchetti Claude Lafrogne et Sandrine Schoenenberger eacutegalement publieacutee dans le Journal des psychologues ndeg 283 deacutec 2010- janv 2011 et qui sintitule Que pensent-ils de nous Etude des repreacutesentations so-ciales du psychologue Que pensent les psychologues deux-mecircmes Ils eacutevoquent lobjet de leur travail la psycheacute le cadre de leur activiteacute (cadre theacuteorique pra-tique eacutethique) et le contenu mecircme de leur tra-vail agrave savoir leacutevaluation et laccompagnement Chez les professionnels du meacutedico-social nos collegravegues deux repreacutesentations saffrontent Les eacuteducateurs techniques et les reacuteeacuteducateurs (peacutedicure podologue masseur kineacutesitheacutera-peute ergotheacuterapeute psychomotricien ortho-
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phoniste orthoptiste ou dieacuteteacuteticien) ont une vi-sion neacutegative le psychologue se confond avec le psychanalyste le charlatan en lien eacutetroit avec la psychiatrie la folie Les personnels administratifs et les eacuteducateurs ont une vision plus positive et concregraveteet sont plus attacheacutes au cadre cadre de travail du psychologue lui-mecircme mais aussi la contribu-tion quil peut apporter dans le cadre dun tra-vail pluridisciplinaire Quant aux sujets de la population geacuteneacuterale on doit distinguer ceux qui ont deacutejagrave eu recours au psychologue et ceux qui nont jamais consulteacute Ceux qui nont jamais consulteacute ont un discours plutocirct positif mais abstrait centreacute sur la dualiteacute problegraveme-reacutesolution (motifs-beacuteneacutefices) Les autres qui sont plus jeunes et plutocirct des femmes cherchent agrave deacutefinir ce quest un psy-chologue avec une vision plus concregravete de notre activiteacute de nos meacutethodes et une eacutevoca-tion de la sphegravere affective et du veacutecu person-nel Toutefois les sujets ayant deacutejagrave consulteacute un psychologue ont tendance agrave le confondre avec le speacutecialiste meacutedical cest-agrave-dire le psy-chiatre Dans Transformation de la psychiatrie et pratiques des psychologues LASAR Labora-toire danalyse socio-anthropologique du risque Universiteacute de Caen 2002 sous la direction dAnne Golse Le discours dAnne Golse sociologue est plus optimiste Elle eacutecrit La profession de psycho-logue se visibilise de plus en plus que ce soit dans la prise en charge des malades mentaux ou de la souffrance psychique On le voit dans la croissance deacutemographique certes encore modeste de cette profession mais cela sappreacute-hende eacutegalement dans la maniegravere dont les textes administratifs mentionnent (psychiatres psychologues) ou bien (psychiatres ou psycho-logues) Mais cette eacutemergence nouvelle dune certaine pariteacute dans les textes vient eacutegalement reconnaicirctre que de plus en plus de demandes sont directement adresseacutees au psychologue et marque lindividualisation de cette profession agrave coteacute de celles de psychiatres ou dinfirmiers Dans un rapport au Conseil national de lOrdre des meacutedecins en 2001 sur le suivi du malade mental il est dit que les psychologues pren-nent de plus en plus de place dans le monde de la psychiatrie relayant ou mecircme remplaccedilant les psychiatres dont le nombre va en diminuant
tregraves seacuterieusement Toutefois les psychologues ne sont pas satis-faits de leur place au sein de la psychiatrie pu-blique ni personnel meacutedical ni personnel pa-rameacutedical ils elles ont du mal agrave trouver leur place dans lunivers hospitalier marqueacute par lexistence de ce partage clair Le psychologue agrave la fois dedans et dehors eacuteprouve une ab-sence de lien avec linstitution et pour certains un sentiment dinexistence institutionnelle chro-nique Le psychologue nest pas dans le soin mecircme sil contribue aux soins ce qui renvoie agrave sa neacutecessaire place dexteacuterioriteacute et agrave la trans-versaliteacute de sa fonction Comme leacutecrivait Co-lette Chiland en 1983 le statut du psychologue clinicien est une position intermeacutediaire et sin-guliegravere qui le maintien dans un espace pro-fessionnel eacutetriqueacute Certains ressentent de lamertume agrave ecirctre reacuteduits au rocircle de psychotheacute-rapeutes etou estiment ne pas ecirctre reconnus comme des professionnels agrave part entiegravere ils se qualifient de sous-psychiatres quand deacutepen-dants du psychiatre ils ne peuvent directement recevoir les patients qui font appel agrave eux Cette revendication des psychologues est devenue pour certains un carcan qui limite le champ de leur intervention Les psychologues sont lobjet dambivalence Ils peuvent ecirctre consideacutereacutes comme la profession montante en raison de la chute de la deacutemographie des psychiatres et de la de-mande sociale qui leur est adresseacutee les psy-chologues pourraient ecirctre en 1
egravere ligne pour
supplanter ces absences mais la mise en cause de leur statut et de leur formation par le reacutecent statut de psychotheacuterapeute les fragilise Pour conclure je citerai Marc Turpyn au col-loque Le psychologue clinicien le singulier et le collectif La profession de psychologue est-elle un symptocircme de lrsquoinstitution hospita-liegravere Un certain nombre de signes permet depuis longtemps de le penser son identiteacute indeacutefinis-sable sa situation drsquoexception dans un en-semble institutionnel globalement meacutedical son inexistence dans les instances de lrsquohocircpital les oublis reacuteguliers dont elle fait lrsquoobjet dans les textes sa position institutionnelle hors hieacuterar-chie les interrogations reacutecurrentes sur ses sta-tuts lrsquoincompreacutehension de ses outils de travail par les administrations etc Ce qui est nouveau ce sont les nombreuses
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tentatives pour mettre un terme agrave cette position symptomatique volonteacute de faire entrer la pro-fession dans le champ meacutedical fiches meacutetier deacutefinition de compeacutetences introduction de speacute-cialiteacutes preacute-identifieacutees en articulation avec les neurosciences et les approches comportemen-tales circulaire drsquoapplication visant au controcircle ou agrave la disparition des activiteacutes de FIR etc Nrsquooublions pas que la preacutecariteacute entretenue des psychologues le deacutesir de reconnaissance la peur ndash comme lrsquoa montreacute reacutecemment la mise en application du deacutecret sur le titre de psycho-theacuterapeute ndash poussent aussi agrave la normalisation Normaliser la profession serait sans doute la reacuteduire agrave lrsquoombre drsquoelle-mecircme
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Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebut
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine
M AI 1999 PROPOSITION DrsquoAMENDEMENT
PAR B ACCOYER
Devant lrsquoabsence de reacuteglementation autour de lrsquoexercice de la psychotheacuterapie et dans un contexte de lutte contre les deacuterives sectaires sous couvert de psychotheacuterapie un premier amendement est proposeacute par Bernard Accoyer meacutedecin et deacuteputeacute Ce premier amendement porte sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute il est proposeacute le 4 mai 1999 agrave lrsquooccasion de lrsquoexamen du projet de loi relatif agrave la Couverture maladie universelle (CMU) OCTOBRE 1999 PROPOSITION DE LOI PAR
BACCOYER
Lrsquoamendement preacuteceacutedent ayant eacuteteacute refuseacute BAccoyer deacutepose le 13 octobre 1999 la pre-miegravere proposition de loi (ndeg 1844) visant agrave reacute-glementer le titre de psychotheacuterapeute Lrsquounique article preacutecise Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est strictement reacuteserveacute drsquoune part aux titulaires du diplocircme de docteur en meacutedecine qualifieacute en psychiatrie et drsquoautre part aux titulaires drsquoun diplocircme de troisiegraveme cycle en psychologie Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve deux professions de la santeacute mentale sont formeacutees par les universiteacutes franccedilaises les psycho-logues et les meacutedecins psychiatres Les condi-tions daccegraves et dutilisation de ces titres sont eacutetroitement encadreacutees par la loi Pourtant il existe un grave vide juridique concernant lexercice de la psychotheacuterapie La profession de psychotheacuterapeute nest en effet agrave ce jour toujours pas deacutefinie par le code de la santeacute publique Ainsi de trop nombreuses per-sonnes insuffisamment qualifieacutees voire non qualifieacutees se deacuteclarent et sinstituent psycho-theacuterapeutes en toute impuniteacute faisant courir les plus grands dangers agrave des personnes qui
par deacutefinition sont vulneacuterables et risquent de voir leur deacutetresse et leur pathologie aggra-veacutees MARS 2000 est enregistreacutee agrave la Preacutesidence de lAssembleacutee nationale sous le ndeg 2288 une pro-position de loi relative agrave lexercice de la profes-sion de psychotheacuterapeute par les deacuteputeacutes MM Jean-Michel Marchand Andreacute Aschieri Mme Marie-Heacutelegravene Aubert MM Yves Cochet et Noeumll Mamegraverehellip AVRIL 2000 PROPOSITION DE LOI DE
BACCOYER
26 avril 2000 nouvelle proposition de loi de BAccoyer Loi ndeg2342 relative agrave la prescription et agrave la conduite des psychotheacuterapies Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve En labsence de disposition du code de la santeacute publique concernant lusage des psychotheacutera-pies quiconque le souhaite peut actuellement visser sa plaque de psychotheacuterapeute et preacutetendre soigner (hellip) Ainsi le rapport de la mission interministeacuterielle de lutte contre les sectes remis en feacutevrier 2000 au Premier mi-nistre signale que certaines techniques psy-chotheacuterapiques sont devenues un outil au ser-vice de linfiltration sectaire et il suggegravere au se-creacutetariat dEtat agrave la Santeacute de cadrer ces pra-tiques Cest la raison pour laquelle javais dores et deacutejagrave deacuteposeacute le 13 octobre 1999 avec quatre-vingt-un collegravegues une proposition de loi ndeg1844 visant agrave reacuteserver lusage du titre de psychotheacuterapeute agrave des personnes titulaires de diplocircmes universitaires() Dans ce con-texte il convient deacutesormais de consideacuterer les psychotheacuterapies comme un veacuteritable traite-ment A ce titre cest leur prescription et leurs applications qui apparaissent comme devant ecirctre reacuteserveacutees agrave des professionnels deacuteten-teurs de diplocircmes universitaires attestant dune formation institutionnelle garantie dune compeacutetence theacuteorique pouvant ecirctre doubleacutee
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dune expeacuterience pratique et dun travail sur soi (hellip) Cependant certains professionnels bien que non-psychiatres ou non-psychologues cliniciens preacutesentent de solides connaissances et une expeacuterience de la patho-logie mentale et du fonctionnement psychique Il convient donc quun jury composeacute duniversi-taires et de professionnels soit habiliteacute agrave vali-der leurs compeacutetences et agrave autoriser lexercice des psychotheacuterapies agrave ceux qui pratiquent deacute-jagrave depuis plus de cinq anneacutees agrave compter de promulgation de la preacutesente loi
PROPOSITION DE LOI Article unique Il est inseacutereacute apregraves larticle L 360 du code de la santeacute publique un article L 360-1 ainsi reacutedigeacute Les psychotheacuterapies sont des traitements meacutedico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes meacutedecins quali-fieacutes en psychiatrie et psychologues clini-ciens Les professionnels qui dispensent des psychotheacuterapies depuis plus de cinq ans agrave la date de promulgation de la preacute-sente loi pourront poursuivre cette activiteacute theacuterapeutique apregraves eacutevaluation de leurs connaissances et pratiques par un jury composeacute duniversitaires et de profession-nels dont la composition est fixeacutee par deacute-cret en Conseil dEtat
OCTOBRE 2003 AMENDEMENT AU PROJET DE LOI SUR LE CODE DE LA SANTEacute PUBLIC B AC-
COYER
8 Octobre 2003 agrave lrsquoAssembleacutee nationale B Ac-coyer deacutepose un amendement ndeg71 Les psychotheacuterapies sont des traitements meacute-dico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes en psychiatrie de psychologues cliniciens et meacutedecins ayant sui-vis les formations requises Crsquoest la 3eme version (ndeg336) qui est adopteacutee agrave lrsquounanimiteacute le 8 octobre 2003 par lrsquoAssembleacutee Nationale Les psychotheacuterapies constituent des outils theacuterapeutiques utiliseacutes dans le traite-ment des troubles mentaux Les diffeacuterentes ca-teacutegories de psychotheacuterapie sont fixeacutees par deacute-cret du ministre chargeacute de la Santeacute Leur mise en œuvre ne peut relever que de meacutedecins
psychiatres ou de meacutedecins et psychologues ayant les qualifications professionnelles re-quises fixeacute par ce mecircme deacutecret Lrsquoagence Na-tionale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute apporte son concours agrave lrsquoeacutelaboration de ces conditions (hellip) On ne parle plus ici de lrsquousage drsquoun titre de psy-chotheacuterapeute mais drsquoune deacutefinition de la psy-chotheacuterapie JANVIER 2004 AMENDEMENT ACCOYER ANNU-
LANT LE PREacuteCEacuteDENT
Le 19 janvier 2004 lrsquoamendement Accoyer de-venu entre temps amendement 363 About-Matteacutei annulant le preacuteceacutedent est voteacute par le Seacutenat en ces termes Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacute-serveacute aux professionnels inscrits au registre national de psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dis-penseacutes de lrsquoinscription les titulaires drsquoun di-plocircme de docteur en meacutedecine les psycho-logues titulaires drsquoun diplocircme drsquoeacutetat et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations Les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent article sont fixeacutees par deacutecret Ici les psychanalystes reacuteguliegraverement enregis-treacutes dans les annuaires de leurs associations font leur apparition dans la liste des personnes habiliteacutees agrave user du titre de psychotheacuterapeute
AVRIL 2004 AMENDEMENT DUBERNARD
8 avril 2004 est voteacute agrave lrsquoAssembleacutee nationale lrsquoamendement devenu depuis amendement 344 preacutesenteacute par Jean-Marie Dubernard rap-porteur de la commission des affaires cultu-relles familiales et sociales
POLITIQUE DE SANTE PUBLIQUE (Nordm 1364)
(DEUXIEME LECTURE)
Amendement Nordm 344 preacutesenteacute par M Jean-Michel Dubernard rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles familiales et sociales Article 18 quater La conduite des psychotheacuterapies neacuteces-site soit une formation theacuteorique et pra-tique en psychopathologie clinique soit une formation reconnue par les associa-tions de psychanalystes (hellip) Lrsquousage du
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titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au registre national des psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dispen-seacutes de lrsquoinscription sur la liste viseacutee agrave lrsquoali-neacutea preacuteceacutedent les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psy-chologue dans des conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 portant diverses dispositions drsquoordre social nordm85-772 du 25 juillet 1985 et les psychanalystes reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans les annuaires de leurs asso-ciations
Dans lrsquoexposeacute sommaire on retrouve pour conduire des psychotheacuterapies il est neacutecessaire drsquoavoir suivi une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie La condition de lrsquoinscrip-tion sur le registre national est maintenue (hellip)Lrsquoamendement continue agrave preacutevoir que les titu-laires drsquoun diplocircme de meacutedecine les psycho-logues et les psychanalystes sont dispenseacutes de lrsquoenregistrement Ces professionnels devront satisfaire agrave lrsquoobligation de formation mention-neacutee au premier alineacutea de lrsquoarticle
9 AOUT 2004 LOI SUR LE TITRE DE PSYCHOTHEacute-
RAPEUTE ARTICLE 52
Le 28 juillet 2004 a eu lieu la reacuteunion de la commission mixte paritaire qui reacutevise lrsquoamende-ment qui est examineacute en seacuteances publiques par lrsquoAssembleacutee Nationale et le Seacutenat le 30 juil-let 2004 et devient le 09 aoucirct 2004 la loi ndeg2004-806 lrsquoarticle 52 relative agrave la politique de santeacute publique Sa parution est dans le JO ndeg185 du 11 aoucirct 2004 page 14277 texte ndeg 4 Dans cette loi larticle 18 quater revu par la commission mixte a eacuteteacute inteacutegralement repris et devient larticle 52 de la dite Loi
Article 52 Lusage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes Linscription est enregistreacutee sur une liste dresseacutee par le repreacutesentant de lEtat dans le deacutepartement de leur reacutesidence profes-sionnelle Elle est tenue agrave jour mise agrave la disposition du public et publieacutee reacuteguliegravere-ment Cette liste mentionne les formations suivies par le professionnel En cas de transfert de la reacutesidence professionnelle dans un autre deacutepartement une nouvelle
inscription est obligatoire La mecircme obli-gation simpose aux personnes qui apregraves deux ans dinterruption veulent agrave nou-veau faire usage du titre de psychotheacutera-peute Linscription sur la liste viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent est de droit pour les titulaires dun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par larticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions dordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations Un deacutecret en Conseil dEtat preacutecise les modaliteacutes dapplication du preacutesent article et les conditions de formation theacuteoriques et pratiques en psychopathologie clinique que doivent remplir les personnes viseacutees aux deuxiegraveme et troisiegraveme alineacuteas
Cet article introduit comme condition de lrsquousage du titre une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie clinique alors qursquoil stipule dans le mecircme temps que lrsquoinscription est de droit pour certains professionnels ce qui pose-ra beaucoup de problegravemes pour lrsquoeacutecriture des projets de deacutecret 2005-2009 AVANT-PROJET DrsquoAPPLICATION DE
LA LOI
Les concertations avec les professionnels con-cerneacutes par lrsquoeacutecriture drsquoun avant-projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute deacutebutent en 2005 Beaucoup de versions vont voir le jour et susciter de vives reacuteactions des professionnels Le ministegravere reacuteunit les organi-sations professionnelles agrave plusieurs reprises pour leur soumettre ces projets Quelques exemples des diffeacuterentes versions de lrsquoavant-projet de deacutecret de loi Version de lrsquoavant projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute 10 janvier 2006
Art1 Lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute neacutecessite une deacutemarche volontaire de la part des professionnels pratiquant les psychotheacuterapies Inscription sur une liste deacutepartementale (hellip) Art2 Lrsquoinscription sur la liste deacutepartemen-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tale est subordonneacutee pour les professionnels viseacutes au 3
egraveme ali-
neacutea lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique lrsquoattestation de lrsquoobtention du diplocircme de docteur en meacutedecine ou de lrsquoun des di-plocircme viseacutes au deacutecret ndeg 90-255 du 22 mars 1990 modifieacute (liste des diplocircmes permettant de faire usage professionnel du titre de psychologue) ou de lrsquoinscrip-tion agrave un annuaire drsquoassociations de psy-chanalystes pour les autres professionnels
Lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique Le cas eacutecheacuteant lrsquoattestation de lrsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profession reacute-glementeacutee dans le champ sanitaire et so-cial Une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le do-maine de la pratique de la psychotheacutera-pie parmi les quatre approches sui-vantes analytique systeacutemique cognitivo-comportementaliste inteacutegrative La deacuteclaration sur lrsquohonneur mentionne notamment lrsquointituleacute et la date drsquoobtention du diplocircme la dureacutee de la formation le nom et les coordonneacutees de lrsquoorganisme de formation public ou priveacute qui a deacutelivreacute le diplocircme (hellip) Art8 Le cahier des charges susviseacute deacutefi-nit les modaliteacutes de la formation en psy-chopathologie clinique laquelle est drsquoun niveau master Il vise agrave permettre au pro-fessionnel souhaitant user du titre de psy-chotheacuterapeute drsquoacqueacuterir Une connaissance du fonctionnement psychique Une capaciteacute de discrimination de base des situations pathologiques en santeacute mentale Une connaissance de la diversiteacute des theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie Une connaissance des 4 principales ap-proches de psychotheacuterapie vali-deacutees scientifiquement (analytique systeacute-mique cognitivo-comportementaliste in-teacutegrative) (hellip)
Il est eacutevoqueacute un niveau master pas de men-
tion drsquoune formation universitaire la loi ne parle que drsquoune formation agrave la psychopathologie cli-nique et stipule ce que seraient les approches psychotheacuterapiques valables scientifiquement ce qui nrsquoest pas sans questionner Titre ouvert aux deacutetenteurs drsquoun diplocircme relatif agrave une pro-fession reacuteglementeacutee dans les champs sani-taires et sociaux ne correspond pas aux preacute requis de la formation en psychopathologie cli-nique Par la suite le descriptif des diffeacuterentes ap-proches de psychotheacuterapie disparaicirct au profit drsquoune connaissance des principales ap-proches utiliseacutees en psychotheacuterapie sans preacute-cision Est indiqueacute le nombre drsquoheures de for-mation theacuteorique (150 heures dans une ver-sion 500 dans une autrehellip) et de stage pra-tique Est stipuleacute que la formation en psychopa-thologie clinique peut ecirctre confieacutee agrave lrsquoUniversiteacute ou agrave des organismes passant convention avec lrsquoUniversiteacute Pour les professionnels inscrits de droit on retrouve les docteurs en meacutedecine quelles que soient leurs speacutecialiteacutes les psycho-logues quelle que soit leur formation et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement inscrits dans un an-nuaire drsquoassociation de psychanalystes ce qui nrsquoest pas un titre proteacutegeacute On exige par ailleurs de ces mecircmes professionnels une formation compleacutementaire en psychopathologie viseacutee agrave lrsquoalineacutea 4 de lrsquoarticle 52 ce qui posera pro-blegraveme certaines professions pouvant faire usage du titre de psychotheacuterapeute de droit doivent dans le mecircme texte de loi attester drsquoune formation compleacutementaire Pour tous les professionnels le cas eacutecheacuteant une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le domaine de la pratique de psychotheacuterapie une attestation drsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profes-sion reacuteglementeacutee par le code de la santeacute pu-blique ou le code de la famille et de lrsquoaction so-ciale Le cahier des charges deacutefinit les modaliteacutes de la formation en psychopathologie clinique pour acqueacuterir ou valider une connaissance des fonctionnements et des processus psychiques une connaissance des critegraveres de discerne-ment des grandes pathologies psychiatriques une connaissance des diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie une connais-sance des principales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le Ministegravere de la Santeacute ne parvient pas agrave faire aboutir lrsquoeacutecriture de deacutecrets drsquoapplication de-vant faire face aux contestations des diffeacuterents professionnels Au printemps 2008 le Ministegravere de la Santeacute deacutecide drsquoarrecircter un des projets de deacutecret drsquoap-plication de lrsquoarticle 52 soumis au CNESER (Conseil National de lrsquoEnseignement Supeacuterieur et de la Recherche) le 16 juin 2008 Dans la note de preacutesentation on retrouve il ne srsquoagit pas de creacuteer une nouvelle profession ni drsquoen-cadrer la formation et la pratique de la psycho-theacuterapie mais de preacuteciser les conditions dans lesquelles il peut ecirctre fait usage de ce titre Il y est exigeacute pour tous professionnels drsquoavoir valideacute une formation theacuteorique de 400 heures (cest-agrave-dire infeacuterieure au total de la formation en psychopathologie clinique drsquoun Master de Psychologie clinique) et un stage pratique de 5 mois Possibiliteacutes de dispenses partielles de forma-tion selon les cateacutegories professionnelles con-cerneacutees (meacutedecins meacutedecins psychiatres psy-chologues psychanalystes) 18 MARS 2009 PROJET DE LOI PORTANT REacute-
FORME DE LrsquoHOcircPITAL ET RELATIF AUX PATIENTS
Agrave LA SANTEacute ET AUX TERRITOIRES
23 JUILLET 2009 ARTICLE 91 DE LA LOI HPST
Lrsquoarticle 91 de la loi HPST du 21 juillet 2009 opegravere une modification de lrsquoarticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 pour reacutesoudre les difficulteacutes rencontreacutees agrave eacutecrire un deacutecret drsquoapplication Il modifie lrsquoarticle 52 portant sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 52 de la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 modifieacute par lrsquoarticle 91 de la loi ndeg 2009
-879 du 21 juillet 2009 Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes [hellip] Un deacutecret en Conseil drsquoEacutetat preacutecise les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent ar-ticle et les conditions de formation theacuteo-rique et pratique en psychopathologie cli-nique que doivent remplir lrsquoensemble des professionnels souhaitant srsquoinscrire au registre national des psychotheacuterapeutes Il deacutefinit les conditions dans lesquelles les ministres chargeacutes de la santeacute et de lrsquoen-
seignement supeacuterieur agreacuteent les eacutetablis-sements autoriseacutes agrave deacutelivrer cette forma-tion Lrsquoaccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires drsquoun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit drsquoexercer la meacutedecine en France ou drsquoun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-chologie ou la psychanalyse Le deacutecret en Conseil drsquoEacutetat deacutefinit les conditions dans lesquelles les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions drsquoordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations peuvent beacute-neacuteficier drsquoune dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique [hellip] Le deacutecret en Conseil drsquoEtat preacutecise eacutegale-ment les dispositions transitoires dont pourront beacuteneacuteficier les professionnels jus-tifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacuterapie agrave la date de publication du deacutecret
Il nrsquoy a plus de notion de professionnels inscrits de droit la formation en psychopatho-logie clinique est exigible de tous et lrsquoaccegraves agrave cette formation requiert un niveau de diplocircme eacuteleveacute titre de docteur en meacutedecine master de psychologie ou de psychanalyse Y sont tou-jours mentionneacutes les psychanalystes reacuteguliegrave-rement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations 20 MAI 2010 DEacuteCRET DrsquoAPPLICATION RELATIF Agrave LrsquoUSAGE DU TITRE DE PSYCHOTHEacuteRAPEUTE (CF
ANNEXE)
Le 20 mai 2010 paraicirct le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute publieacute au JO ndeg0117 du 22 mai 2010 (deacutecret ndeg 2010-534) Ce deacutecret deacutefinit les critegraveres de formation en psychopathologie clinique exigeacutee fixe les con-ditions drsquoagreacutement des eacutetablissements de for-mation preacutecise les dispenses partielles ou to-tales de formation dont peuvent beacuteneacuteficier les meacutedecins psychologues et psychanalystes et enfin arrecircte les dispositions transitoires appli-cables aux psychotheacuterapeutes en exercice agrave
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la date de publication du deacutecret Il nrsquoy est tou-jours pas fait mention de formation agrave la pra-tique psychotheacuterapique Il preacutecise une condition de diplocircme minimal pour avoir accegraves agrave cette formation Elle est reacute-serveacutee aux personnes titulaires drsquoun doctorat de meacutedecine ou drsquoun master ayant pour men-tion ou pour speacutecialiteacute la psychologie ou la psy-chanalyse Les psychiatres sont exempteacutes de formation compleacutementaire Les meacutedecins non psy-chiatres seront contraints agrave une formation com-pleacutementaire On retrouve la notion de psychologue clinicien qui ne correspond pas agrave un titre proteacutegeacute comme tel ni un parcours de formation identifieacutee Les psychologues clini-ciens nrsquoont pas de dispense totale et devront se soumettre agrave une formation theacuteorique et pra-tique compleacutementaire La formation theacuteorique comprend 400 heures drsquoenseignement pour acqueacuterir ou valider des connaissances relatives au deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques aux critegraveres de discernement des grandes patholo-gies psychiatriques aux diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie aux princi-pales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie Le stage est drsquoune dureacutee minimale de cinq mois Les professionnels justifiant drsquoau moins 5 ans de pratique de la psychotheacuterapie peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale apregraves avis de la commission reacutegionale drsquoinscription Le deacutecret ne preacutecise pas la cateacutegorie professionnelle nrsquoappartenant agrave aucune des cateacutegories preacuteceacutedentes que lrsquoon voit en effet apparaicirctre dans lrsquoannexe du deacutecret Le deacutecret a renforceacute le niveau exigeacute pour agreacuteer les eacutetablissements de formation Les psychologues notamment par le biais de leurs organisations professionnelles et syndi-cales ont deacuteposeacute un recours juridique contre le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute le 12 juillet 2010 Ils contestaient notam-ment que lrsquoon exige drsquoeux des formations com-pleacutementaires qui sont deacutejagrave incluses dans leur formation initiale Le recours a eacuteteacute examineacute le mercredi 21 sep-tembre 2011 Le rapporteur public a conclu au rejet de lrsquoensemble des requecirctes porteacute contre le deacutecret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 arrecirct du Conseil drsquoEtat du 27 octobre 2011 Ce deacutecret
est jugeacute conforme agrave lrsquoarticle 52 de la loi ndeg2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique modifieacutee par la loi ndeg2011-940 du 10 aoucirct 2011-art 47 (V) Les organisations professionnelles de psychologues sont en pourparler et eacutevoquent une modification de lrsquoannexe du deacutecret qui pourrait ecirctre en reacuteeacutecri-ture pour mettre agrave pariteacute psychologues et psy-chiatres pour la dispense totale de lrsquoenseigne-ment theacuteorique et du stage srsquoil a eacuteteacute effectueacute pendant les eacutetudes Fin 2011 les bureaux concerneacutes au Ministegravere de la Santeacute et au Ministegravere de lrsquoenseignement Supeacuterieur et de la Recherche examinent un projet de modification de lrsquoannexe du deacutecret du 20 mai 2010 afin de preacutevoir une dispense de formation theacuteorique compleacutementaire et de stage pour les titulaires du titre de psychologue ayant accompli le stage professionnel lieacute agrave lrsquoob-tention de ce titre dans les conditions preacutevues agrave lrsquoart4 du deacutecret du 20 mai 2010 Une dis-pense de toute formation theacuteorique mais reacuteali-sation drsquoun stage de 2 mois dans les conditions de lrsquoart4 du deacutecret pour les titulaires du titre de psychologue dont le stage professionnel lieacute agrave lrsquoobtention de ce titre nrsquoa pas eacuteteacute reacutealiseacute dans les conditions de cet article (voir sites des orga-nisations professionnelles et syndicales)
CONCLUSION
Au deacutecours de ce long cheminement pour lrsquoeacutela-borer une loi portant sur lrsquousage du titre de psy-chotheacuterapeute on remarquera lrsquoimpasse faite sur la formation agrave la pratique de la psychotheacute-rapie elle-mecircme Ce titre pourra ecirctre en effet deacutelivreacute agrave des personnes dont on nrsquoaura pas exi-geacute de formation agrave la psychotheacuterapie mais une formation agrave la psychopathologie clinique Une confusion suppleacutementaire dans la visibiliteacute des professions et leurs missions est introduite par le biais drsquoun nouveau titre de psychotheacuterapeute Il est agrave souligner que concernant les profes-sions reacuteglementeacutees dont font partie les psy-chologues la pratique de la psychotheacuterapie peut sous reacuteserve drsquoune formation compleacute-mentaire personnelle faire partie de leur activi-teacute Le titre de psychotheacuterapeute ne leur est donc pas neacutecessaire (Cf argumentaires sur le site des organisations professionnelles et syn-dicales)
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Decret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 1 Linscription sur le registre national des psy-chotheacuterapeutes mentionneacute agrave larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee est subordon-neacutee agrave la validation dune formation en psy-chopathologie clinique de 400 heures mini-mum et dun stage pratique dune dureacutee mi-nimale correspondant agrave cinq mois effectueacute
dans les conditions preacutevues agrave larticle 4Laccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires dun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit dexercer la meacutedecine en France ou dun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-
chologie ou la psychanalyse Article 2 Par deacuterogation aux dispositions de larticle preacuteceacutedent les professionnels mentionneacutes au cinquiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi preacuteciteacutee sont dispenseacutes en tout ou partie de la formation et du stage dans les conditions
preacutevues par lannexe 1 du preacutesent deacutecret Article 3 La formation mentionneacutee agrave larticle 1er vise agrave permettre aux professionnels souhaitant user du titre de psychotheacuterapeute dacqueacuterir
et de valider des connaissances relatives 1deg Aux deacuteveloppement fonctionnement et
processus psychiques 2deg Aux critegraveres de
discernement des grandes pathologies psy-
chiatriques 3deg Aux diffeacuterentes theacuteories se
rapportant agrave la psychopathologie 4deg Aux
principales approches utiliseacutees en psycho-
theacuterapie Article 4 Le stage pratique mentionneacute agrave larticle 1er seffectue agrave temps plein ou agrave temps partiel de faccedilon continue ou par peacuteriodes fraction-
neacuteesIl est accompli dans un eacutetablissement
public ou priveacute deacutetenant lautorisation men-tionneacutee agrave larticle L 6122-1 du code de la santeacute publique ou agrave larticle L 313-1-1 du code de laction sociale et des familles Toutefois le site du stage ne peut ecirctre le
lieu de travail de la personne en formationLe stage est placeacute sous la responsabiliteacute conjointe dun membre de leacutequipe de for-mation dun eacutetablissement agreacuteeacute en appli-
cation des articles 10 et 15 et dun profes-sionnel de leacutetablissement mentionneacute au
deuxiegraveme alineacutea maicirctre de stageIl donne
lieu agrave un rapport sur lexpeacuterience profes-sionnelle acquise soutenu devant les res-ponsables du stage et un responsable de la
formation de leacutetablissement agreacuteeacuteLe
stage est valideacute par le responsable de la
formation Article 5 Le contenu de la formation theacuteorique et pra-tique mentionneacutee agrave larticle 1er les critegraveres et modaliteacutes de son eacutevaluation ainsi que les objectifs du stage sont deacutefinis par un cahier des charges pris par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur et publieacute au Journal officiel
de la Reacutepublique franccedilaise Article 6 Leacutetablissement de formation sassure au moment de linscription que le candidat jus-tifie de lun des diplocircmes ou titres de forma-tion mentionneacutes au quatriegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 ou dun di-plocircme ou titre de formation reconnu eacutequiva-lent dans un autre Etat membre de lUnion europeacuteenne ou un autre Etat partie agrave lac-
cord sur lEspace eacuteconomique europeacuteen CHAPITRE II LE REGISTRE NATIONAL DES
PSYCHOTHERAPEUTES Article 7 ― Linscription sur la liste deacutepartementale
mentionneacutee au deuxiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 est effectueacutee par le preacutefet du deacutepar-tement de la reacutesidence profession-
nelle principale du demandeurElle
est gratuite Elle doit avoir eacuteteacute effec-tueacutee avant toute utilisation du titre de
psychotheacuterapeuteDans le cas ougrave le
professionnel exerce dans plusieurs sites en tant que psychotheacuterapeute il est tenu de le deacuteclarer et de mention-ner les diffeacuterentes adresses de ses
lieux dexerciceEn cas de change-
ment de situation professionnelle le professionnel en informe les services
du preacutefet - La demande est adresseacutee au directeur geacute-
neacuteral de lagence reacutegionale de santeacute
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dans le ressort duquel se situe la reacute-sidence professionnelle du deman-deur Celui-ci deacutelivre un accuseacute de reacuteception dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute apregraves reacuteception de lensemble des piegraveces justificatives mentionneacutees agrave larticle 8 et assure linstruction pour le compte du preacutefet Il fait connaicirctre agrave ce dernier son avis sur la demande dinscription dans le deacutelai de 45
joursLe silence gardeacute par lautoriteacute
preacutefectorale agrave lexpiration dun deacutelai de deux mois agrave compter de la reacutecep-tion du dossier complet vaut deacutecision
de rejet de la demande - Lensemble des listes deacutepartementales
constitue le registre national des psy-
chotheacuterapeutes Article 8 I ― En vue de leur inscription sur la liste deacutepartementale les professionnels fournis-
sent 1deg La copie dune piegravece didentiteacute 2deg Lattestation de lobtention du titre de for-mation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute publique ou du diplocircme de
niveau master mentionneacute agrave larticle 6 3deg
Lattestation de la formation en psychopa-thologie clinique mentionneacutee agrave larticle 1er agrave lexception des professionnels beacuteneacuteficiant
dune dispense totale 4deg Le cas eacutecheacuteant
lattestation denregistrement pour les pro-fessions et titres reacuteglementeacutes par le code de la santeacute publique et le code de laction
sociale et des familles II - Les professionnels appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee fournissent en outre se-
lon les cas 1deg Soit lattestation de lobten-
tion du titre de formation de speacutecialiste en
psychiatrie 2deg Soit lattestation de lobten-
tion de lun des diplocircmes mentionneacutes au deacutecret du 22 mars 1990 susviseacute permettant de faire usage professionnel du titre de psy-chologue ou lautorisation obtenue en appli-cation des alineacuteas II et III de larticle 44 de
la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee 3deg Soit
lattestation de lenregistrement reacutegulier dans un annuaire dassociation de psycha-
nalystesCette attestation est eacutetablie par le
preacutesident de lassociation Elle est accom-pagneacutee dune copie de linsertion la plus reacute-cente au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise concernant lassociation et men-
tionnant son objetIII - Les modaliteacutes de
preacutesentation de la demande dinscription et notamment la composition du dossier ac-compagnant la demande sont fixeacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute publieacute au Journal officiel de la Reacutepublique fran-
ccedilaise Article 9 La liste deacutepartementale mentionne pour
chaque professionnel 1deg Son identiteacute 2deg
Son lieu dexercice principal et sil y a lieu
ses lieux dexercice secondaires 3deg Le cas
eacutecheacuteant la mention et la date dobtention des diplocircmes relatifs aux professions de santeacute mentionneacutees dans la quatriegraveme partie du code de la santeacute publique ou agrave la profes-sion de psychologue la date de lautorisa-tion obtenue en application des alineacuteas II et III de larticle 44 de la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee ou le nom de lassociation de psy-chanalystes dans lannuaire de laquelle le professionnel est reacuteguliegraverement enregistreacute
4deg Le nom de leacutetablissement de formation
ayant deacutelivreacute lattestation de formation en psychopathologie clinique ainsi que la date
de deacutelivrance de cette attestationCe docu-
ment preacutesente la liste des inscrits selon leur
profession dorigineCette liste est tenue
gratuitement agrave la disposition du public Elle est publieacutee chaque anneacutee au recueil des
actes administratifs de la preacutefecture
CHAPITRE III AGREMENT DES ETABLISSE-
MENTS DE FORMATION Article 10 ― Les eacutetablissements autoriseacutes agrave deacutelivrer
la formation preacutevue agrave larticle 1er sont agreacuteeacutes pour quatre ans par les ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves avis dune commission reacutegionale dagreacute-
ment - La commission reacutegionale dagreacutement est
composeacutee de six personnaliteacutes quali-fieacutees titulaires et de six personnaliteacutes
qualifieacutees suppleacuteantesCes person-
naliteacutes sont nommeacutees pour trois ans
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psy-chanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quaucune des trois cateacutegories de professionnels men-tionneacutees au cinquiegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 sus-viseacutee ne soit majoritaire au sein de la
commissionParmi ces personnali-
teacutes siegravegent deux professeurs des universiteacutes speacutecialiseacutes en psychia-
trie psychologie ou psychanalyseLe directeur geacuteneacuteral de lagence reacute-gionale de santeacute deacutesigne le preacutesident
de la commissionLe mandat des
membres de la commission est re-
nouvelable une fois Article 11 Lavis motiveacute de la commission est rendu
au regard des eacuteleacutements suivants 1deg La
conformiteacute du contenu de la formation pro-poseacutee aux conditions poseacutees aux articles
1er 2 3 4 et 5 du preacutesent deacutecret 2deg La
conformiteacute des conditions et modaliteacutes de validation de la formation theacuteorique et pra-tique preacutevues par leacutetablissement au regard des dispositions preacutevues par larrecircteacute men-
tionneacute agrave larticle 5 du preacutesent deacutecret 3deg
Lengagement de leacutetablissement dans une deacutemarche deacutevaluation de la qualiteacute de la formation dispenseacutee Il fait lobjet dun dos-sier indiquant la structure publique ou pri-veacutee de son choix agrave laquelle sera confieacutee leacutevaluation en cause ainsi que le processus deacutevaluation retenu Ce dossier preacutecise en outre le statut de leacutevaluation la meacutethode utiliseacutee les indicateurs retenus et les diffeacute-rentes phases de leacutevaluation lidentiteacute et la qualification des eacutevaluateurs ainsi que le
calendrier preacutevisionnel de leacutevaluation 4deg
La qualiteacute de leacutequipe peacutedagogique respon-sable qui est composeacutee notamment densei-gnants permanents de professionnels de santeacute ainsi que de personnes autoriseacutees agrave porter le titre de psychotheacuterapeute Cette eacutequipe est placeacutee sous lautoriteacute dun con-seil scientifique comprenant notamment un
titulaire dun titre de formation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute pu-
blique 5deg Ladeacutequation des moyens peacuteda-
gogiques par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes
anneacutees de formation 6deg La conformiteacute des
locaux en matiegravere de seacutecuriteacute et daccessi-biliteacute ainsi que leur adeacutequation par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes anneacutees de for-
mationLes eacutetablissements denseigne-
ment priveacutes doivent en outre satisfaire aux prescriptions des articles L 731-1 agrave L 731-
17 du code de leacuteducation Article 12 La personne physique ou morale juridique-ment responsable dun eacutetablissement de formation deacutesirant assurer la formation mentionneacutee agrave larticle 1er eacutetablit un dossier
de demande dagreacutementCe dossier est
adresseacute au plus tard six mois avant la date de louverture de la formation au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute dans le ressort duquel leacutetablissement a son
siegravege socialCelui-ci en accuse reacuteception
dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6
juin 2001 susviseacuteLa composition de ce
dossier est fixeacutee par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur Il comporte notamment les statuts de leacutetablissement de formation et sa capaciteacute daccueil la description des forma-tions deacutelivreacutees la description des locaux et des moyens peacutedagogiques Il preacutecise sagissant de la formation en psychopatho-logie clinique le contenu de la formation theacuteorique et pratique deacutelivreacutee le descriptif du corps enseignant (effectifs qualiteacute quali-fication) la nature des activiteacutes et de la par-ticipation agrave la recherche de leacutequipe respon-
sable de la formation Article 13 Tout dossier deacuteposeacute est transmis par le di-recteur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute au secreacutetariat de la commission dans un deacutelai dun mois agrave compter de laccuseacute de
reacuteception de la demande initialeLa com-
mission se reacuteunit sur convocation de son preacutesident et dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 8 juin 2006 susviseacute Elle rend son avis dans le deacutelai de deux mois agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 41
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
compter de sa saisineLe repreacutesentant de
leacutetablissement de formation est entendu par la commission reacutegionale sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de la candi-
dature ou agrave la demande de la commissionLavis est notifieacute agrave leacutetablissement qui a in-
troduit la demande Article 14 En cas davis neacutegatif et dans un deacutelai dun mois suivant sa notification le repreacutesentant de leacutetablissement de formation peut de-mander au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute de convoquer une nou-
velle reacuteunion de la commissionCelle-ci
siegravege dans une formation eacutelargie agrave len-semble de ses membres titulaires et sup-
pleacuteantsSon avis se substitue au premier
avis rendu Article 15 La deacutecision dagreacutement intervient au plus tard six mois apregraves le deacutepocirct de la demande initiale En cas de recours dans les condi-tions preacutevues agrave larticle 14 ce deacutelai est pro-
longeacute de deux moisLe silence de ladmi-
nistration agrave lexpiration de ce deacutelai vaut deacute-
cision de rejetLa suspension ou le retrait
de lagreacutement sont prononceacutes par deacutecision motiveacutee des ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves que leacutetablissement a eacuteteacute mis agrave mecircme de preacute-senter ses observations lorsque le contenu ou les modaliteacutes dorganisation de la forma-tion cessent decirctre conformes aux condi-tions preacutevues agrave larticle 11 du preacutesent deacute-
cret CHAPITRE IV DISPOSITIONS TRANSI-
TOIRES Article 16
I ― Les professionnels justifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacutera-pie agrave la date de publication du preacutesent deacutecret peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale mentionneacutee agrave larticle 7 alors mecircme quils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplocircme preacutevues aux articles 1er et 6 du preacutesent deacutecret Cette deacuterogation est accordeacutee par le preacutefet du deacutepartement de la reacutesi-dence professionnelle du demandeur apregraves avis de la commission reacutegionale dinscription Le professionnel preacutesente
cette autorisation lors de sa demande dinscription sur la liste deacutepartementale
des psychotheacuterapeutes II - La commission mentionneacutee au I est preacutesi-
deacutee par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute ou par la personne quil a reacuteguliegraverement deacutesigneacutee pour le repreacutesenter Elle comprend six person-naliteacutes qualifieacutees titulaires et six person-naliteacutes suppleacuteantes appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee et nommeacutees par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psychanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quau-cune de ces trois cateacutegories de profes-sionnels ne soit majoritaire au sein de la commission Ses membres sont nom-meacutes pour une dureacutee de trois ans renou-
velable une foisLa commission se reacuteu-
nit dans les conditions fixeacutees par le deacute-
cret du 8 juin 2006 susviseacuteLes frais de
deacuteplacement et de seacutejour de ses membres sont pris en charge dans les conditions preacutevues par la reacuteglementation
applicable aux fonctionnaires de lEtatLa commission sassure que les forma-tions preacuteceacutedemment valideacutees par le pro-fessionnel et son expeacuterience profession-nelle peuvent ecirctre admises en eacutequiva-lence de la formation minimale preacutevue agrave larticle 1er et le cas eacutecheacuteant du di-plocircme preacutevu agrave larticle 6 Elle deacutefinit si neacutecessaire la nature et la dureacutee de la formation compleacutementaire neacutecessaire agrave linscription sur le registre des psycho-
theacuterapeutesLe professionnel est en-
tendu par la commission sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de son dossier ou agrave la demande de la commis-
sion Article 17 Les professionnels qui souhaitent obtenir une autorisation dinscription sur le registre des psychotheacuterapeutes en application de larticle 16 preacutesentent dans le deacutelai dun an
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 42
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
agrave compter de la publication du preacutesent deacute-cret un dossier en ce sens dans les condi-
tions preacutevues agrave larticle 7Cette demande
est accompagneacutee des piegraveces justificatives notamment administratives attestant de
lexercice de la psychotheacuterapieA la reacutecep-
tion du dossier complet il est deacutelivreacute agrave linteacuteresseacute un accuseacute de reacuteception deacutelivreacute dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute Celui-ci permet au pro-fessionnel qui utilisait preacuteceacutedemment le titre de psychotheacuterapeute de continuer agrave lutiliser
jusquagrave lintervention de la deacutecisionLe si-
lence gardeacute pendant plus de six mois sur une demande preacutesenteacutee au titre du I de lar-ticle 16 vaut deacutecision de rejet Dans les cas ougrave en application de ces dispositions il est demandeacute au candidat de justifier dune for-mation compleacutementaire celle-ci doit ecirctre effectueacutee avant le 1er janvier 2014 Si cette exigence nest pas remplie le preacutefet retire le professionnel des inscrits sur la liste deacute-
partementale des psychotheacuterapeutes Article 18 Les dispositions du preacutesent deacutecret entrent
en vigueur agrave compter du 1er juillet 2010Pour lapplication du preacutesent deacutecret agrave Saint-Pierre-et-Miquelon les compeacutetences deacutevo-lues au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute par le preacutesent deacutecret sont exerceacutees par les services chargeacutes de lad-
ministration territoriale de la santeacute Article 19 Le ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales la ministre de lenseignement supeacuterieur et de la re-cherche la ministre de la santeacute et des sports et la ministre aupregraves du ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales chargeacutee de loutre-mer sont chargeacutes chacun en ce qui le concerne de lexeacutecution du preacutesent deacutecret qui sera pu-blieacute au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise
ANNEXE NOMBRES DHEURES DE FORMATION
EN PSYCHOPATHOLOGIE CLINIQUEEXIGEacuteES DES CANDIDATS AU TITRE DE
PSYCHOTHEacuteRAPEUTE
THEgraveME de formation
PSYCHIATRES Dispense totale
MEacuteDECINS non psychiatres
PSYCHOLOGUES cliniciens
PSYCHOLOGUES non cliniciens
PSYCHANALYSTES Reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans leur annuaires
PROFESSIONNELS nappartenant agrave aucune des cateacutego-ries preacuteceacutedentes
Deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques
0 h
0 h
0 h
0 h
0 h
100 h
Critegraveres de discernement des grandes pathologies psychiatriques
0 h
0 h
50 h
100 h
100 h
100 h
Theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Principale ap-proches utili-seacutees en psycho-theacuterapie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Stage
0 mois
2 mois
2 mois
5 mois
2 mois
5 mois
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 43
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute CSAPA Espace Murger - Service de Psychiatrie
Adulte du Pr Jean Pierre Leacutepine Hocircpital Fernand Widal
L a preacuteoccupation des pouvoirs publics de
reacuteglementer la pratique officielle de la
psychotheacuterapie provoque des turbu-
lences dans le petit monde des psychologues
qui se targuent drsquoen effectuer sous les formes
les plus diverses et qui se voient sommeacutes de
faire la preuve de leur formation dans ce do-
maine agrave deacutefaut de faire de mecircme en ce qui
concerne leur compeacutetence ce qui par ailleurs
nrsquoest guegravere deacutemontrable
Chacun drsquoentre eux peut bien entendu invoquer
son expeacuterience ineffable ou le prestige accordeacute
agrave sa theacuteorie de reacutefeacuterence pour estimer leacutegitime
de srsquoaffranchir drsquoune telle justification tout en
ne perdant pas de vue qursquoun statut estampilleacute
par lrsquoautoriteacute administrative peut garantir la
poursuite sereine de telles activiteacutes Pour les
plus eacuteclectiques le choix drsquoune eacutecole certifiante
ressemblera agrave un mariage de raison
Crsquoest donc au prix drsquoune soumission agrave lrsquoautoriteacute
que lrsquoexercice drsquoune telle liberteacute peut espeacuterer
se perpeacutetuer Crsquoest lagrave lrsquoune des formes de la
reacutesignation peu glorieuse certes agrave laquelle on
pourrait preacutefeacuterer le discernement formulation
bien plus acceptable au regard de lrsquoestime de
soi Crsquoest ce dont semblent avoir manqueacute celui
ou celle ou ceux qui ont cru bon drsquoaller couiner
dans une oreille des plus compatissantes que
la pratique de la psychotheacuterapie devait ecirctre reacute-
serveacutee agrave des professionnels persuadeacutes de sa-
voir y faire et capables de preacutesenter des ga-
ranties plutocirct qursquoagrave des gougnafiers mecircme pas
fichus drsquoexhiber la moindre preuve convain-
cante de la leacutegitimiteacute de leurs preacutetentions Ce
qui est drsquoailleurs la reacutealiteacute Mais comment
srsquoeacutetonner drsquoune telle beacutevue si lrsquoon srsquoen rap-
porte agrave la ceacutelegravebre Loi de Murphy qui eacutenonce
que sil y a plusieurs faccedilons de faire quelque
chose et que lune delles peut aboutir agrave une
catastrophe alors quelquun la choisira
Les mecircmes qui reacuteclamaient la mise en place
drsquoune reacuteglementation officielle reacuteservant le titre
de psychotheacuterapeute agrave des professionnels de
qualiteacute ducircment formeacutes agrave cet effet sont parmi
les premiers agrave protester contre les formes don-
neacutees agrave cette derniegravere par une souveraineteacute deacute-
ficitaire dont lrsquoexercice autoritaire nous rappelle
que nous sommes destineacutes agrave nous faire ap-
prendre ce que lrsquoon sait deacutejagrave par des gens qui
nrsquoy connaissent rien Agrave lrsquoheure de la prolifeacutera-
tion des reacutefeacuterentiels et des protocoles reacuteclamer
encore un peu plus de controcircles et de veacuterifica-
tions suspicieuses ne peut que servir de via-
tique aux frileux de la subjectiviteacute qui sont
friands de contraintes rassurantes Et on ne
srsquoeacutetonnera pas de les voir se formaliser drsquoen
avoir appeleacute agrave Raminagrobis comme dans la
ceacutelegravebre fable de Jean de La Fontaine Le
chat la belette et le petit lapin
Crsquoeacutetait un chat vivant comme un deacutevot ermite
Un chat faisant la chattemite
Un saint homme de chat bien fourreacute gros et
gras
Arbitre expert sur tous les cas
Et de voir se faire croquer tout uniment secta-
teurs et protestataires tout marris drsquoavoir con-
senti agrave lrsquoincompeacutetence et la condescendance
de deacutecideurs comme on dit le sort de leurs
activiteacutes Drsquoougrave la singularisation des heacutesitants
ameacutenagements survenus qui vident du proceacute-
deacute la geacuteneacuteralisation qursquoil visait au profit de re-
connaissances professionnelles plus contrai-
gnantes encore par la judiciarisation des liber-
teacutes du mecircme tonneau Et ce qui ne peut agrave lrsquoeacutevi-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 44
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dence valoir pour tous nrsquoa que peu de chances
de valoir davantage pour chacun Ce seraient
donc des organisations professionnelles qui se
verraient deacutecerner des preacuterogatives pour les
beacuteneacuteficiaires qui auront eu la bonne ideacutee de srsquoy
glisser Cela veacuterifie tout agrave la fois la meacuteta-loi de
Cooper qui eacutenonce qursquoune prolifeacuteration de
nouvelles lois creacutee une prolifeacuteration de nou-
veaux vides juridiques et ce bon vieux pro-
verbe qui dit que le clou qui deacutepasse attire le
marteau
On savait deacutenombrer quelques centaines de
types de psychotheacuterapies pleacutethore drsquoautant
plus deacuterisoire que cette recension ne concerne
le plus souvent que des techniques psychotheacute-
rapiques certes impliqueacutees dans des disposi-
tifs agrave viseacutee theacuterapeutique mais certainement
incapables de deacutefinir la psychotheacuterapie car
comment eacutetablir un modegravele de lrsquoindeacutefinissable
Pour autant il sera difficile de deacutemontrer que la
formation certifieacutee agrave une technique psychotheacute-
rapique est assimilable agrave la performance de sa
mise en oeuvre Car qursquoen est-il vraiment dans
la reacutealiteacute de ces audacieuses pratiques Srsquoagit
-il drsquoune illusion entretenue par les theacuterapeutes
sur lrsquointeacuterecirct de leurs manœuvres Les patients
qui srsquoy exposent ne font-ils que changer de re-
gistre de repreacutesentations ou accegravedent-ils reacuteelle-
ment agrave une autre dimension de leur ecirctre Et
comment srsquoaccommodent-ils des aventures
parfois interminables dans lesquelles de telles
situations les plongent
Ces derniers qui se sont aperccedilus que le destin
commenccedilait agrave leur masser les eacutepaules srsquoils
nrsquoacceptent la perspective du changement que
par neacutecessiteacute et la neacutecessiteacute que parce que
leur sentiment drsquoexistence se trouve en deacutelica-
tesse se trouvent le plus souvent agrave la re-
cherche drsquoun sentiment perdu celui de la com-
pleacutetude Et ce sont eux qui deacutecident finalement
si leur rencontre avec un ou une psychologue
doit prendre cette tournure apregraves avoir eacutepuiseacute
tout ce qui leur avait jusque-lagrave permis drsquoy
eacutechapper Ils nrsquoont plus confiance dans la reacuteali-
teacute qui nrsquoest elle-mecircme apregraves tout qursquoun pres-
sentiment collectif Crsquoest que le patient qui se
reacutesout agrave consulter fait la preuve qursquoil a reacuteussi agrave
surmonter sa honte de devoir neacutecessiter une
telle deacutemarche ce qui deacutemontre lrsquoexistence de
la premiegravere ressource personnelle qui lui ap-
partient Si le patient neacuteglige ce qui le pousse agrave
changer alors le changement lui-mecircme est neacute-
gligeacute Il doit rencontrer une attitude telle qursquoil en
ressentira de la consideacuteration premiegravere res-
source theacuterapeutique en retour agrave la disposition
du psychotheacuterapeute
Et puis on voit tous les jours des patients aller
mieux en deacutepit de nos subtiles interventions
peut-ecirctre gracircce aux perfectibiliteacutes de celles-ci
Le patient met son talent agrave notre service mais
pour le bon deacuteroulement des choses il doit ecirctre
eacuteclaireacute sur ses responsabiliteacutes Prisonnier des
circonstances ce qui le rend malheureux le
patient soucieux de participer agrave son eacutemancipa-
tion doit inciter son ou sa psychotheacuterapeute
par des questions simples et bienveillantes agrave
reformuler ce qursquoil comprend de la situation et agrave
exprimer son ressenti Il est essentiel que le
theacuterapeute se sente eacutecouteacute informeacute et respec-
teacute Il ne doit pas craindre de lrsquoimportuner
puisque de toute faccedilon ce sera le cas En preacute-
servant la liberteacute de penseacutee de ce dernier et en
veillant agrave le faire participer aux orientations de
la theacuterapie le patient doit mettre une grande
conviction agrave le convaincre qursquoil est la personne
concerneacutee en premier lieu par le choix de celle-
ci avec la capaciteacute de reacutefleacutechir et de prendre
les deacutecisions qui le concernent agrave partir des in-
formations qursquoil partage avec lui Le patient de-
vra eacutegalement precircter attention aux signes de
conduites addictives ou aux troubles obses-
sionnels compulsifs du psychotheacuterapeute Un
signe drsquoappel agrave connaicirctre est la position con-
descendante ou le silence obstineacute ou encore
la somnolence difficilement dissimuleacutee qui sont
sans rapport avec les attentes drsquoeacutecoute et de
compreacutehension que le patient tente drsquoexprimer
Le patient doit savoir que la preacutevalence du sui-
cide de la deacutepression du syndrome deacutecision-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 45
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
nel de lrsquoalcoolisme et de la toxicomanie est
bien supeacuterieure chez les psychotheacuterapeutes agrave
celle de la population geacuteneacuterale Il srsquoefforcera
donc de lui faciliter la vie par de petites atten-
tions ou remarques gratifiantes afin de ne pas
alimenter les fameux dysfonctionnements dont
les protocoles theacuterapeutiques se sont enticheacutes
Enfin les interlocuteurs ne devront jamais
perdre de vue que lrsquoon nrsquoest jamais autant deacuteccedilu
que par les illusions que lrsquoon perd Bref pour le
privilegravege drsquoune synergie additive de bon aloi le
patient et son psy doivent parvenir agrave se persua-
der que leur liberteacute de manoeuvre consiste agrave
faire tout ce que permet la longueur de la
chaicircne qui les assujettit Et la principale recom-
mandation exigeacutee pour les deux acteurs de ces
proceacutedeacutes interactifs tant pour le patient que
pour son psy semble devoir se fonder sur une
robuste et saine suspicion mutuelle La reacutecipro-
citeacute est la clef de tous les rapports humains
Si lrsquoon veut bien eacutecarter un instant les passion-
nantes preacutesentations de cas superbement rap-
porteacutes par leurs auteurs et dont les colloques
sont friands ougrave tout est eacutelucideacute et dans les-
quelles tout semble srsquoexpliquer facilement ougrave
la posture adopteacutee par le ou la psychotheacutera-
peute srsquoest trouveacutee bien venue ougrave ses inter-
preacutetations se sont reacuteveacuteleacutees pertinentes et ses
interventions judicieuses qui auront abouti agrave
un reacutesultat suffisamment satisfaisant pour ecirctre
exposeacute on srsquoautorisera agrave penser que ces preacute-
sentations sont sans doute davantage drsquoineacutevi-
tables reconstructions que la traduction fidegravele
du deacuteroulement des eacuteveacutenements de lrsquoordre de
lrsquoimplacable authenticiteacute dont se montre ca-
pable une cameacutera de surveillance de distribu-
teur de billets de banque Apregraves tout si le men-
songe est le secret de la vie amoureuse crsquoest
aussi le ciment de la vie sociale La subjectiviteacute
srsquoinsinue partout peut-ecirctre plus encore dans
les souvenirs que dans les activiteacutes de percep-
tion Un souvenir est un mensonge qui dit tou-
jours la veacuteriteacute a eacutecrit Jean Cocteau recons-
truction conjecturale mais sincegravere expression
dans lrsquoinstant de sa remeacutemoration puisque tout
peut ecirctre exact sans que rien ne soit vrai En
theacuteorie tout srsquoexplique en pratique tout se
complique Ce nrsquoest pourtant pas une raison
pour faire les gros yeux aux garnements de la
psychotheacuterapie Qui srsquointeacuteresserait agrave la pein-
ture dans le seul but de devenir trafiquant
drsquoœuvres drsquoart
Or ce que redoute la theacuterapeutique crsquoest lrsquoer-
reur la faute restant beaucoup plus inconce-
vable qursquoelle est exceptionnelle et lrsquoeacutechec trop
reacutecurrent tandis que ce queacutevite la circonspec-
tion mdash en ne versant daucuns cocircteacutes mdash crsquoest la
partialiteacute Crsquoest donc vrai quelle apparaicirct ordi-
naire commune qursquoelle ne se dissipe pas
comme le fait le theacuteorique dans ses cabrioles
et si elle ne fait pas toujours la preuve drsquoune
grande inventiviteacute elle nrsquoest pas hanteacutee par
lrsquoexigence de la coheacuterence ce spectre des pe-
tits esprits Elle ne cherche pas non plus agrave sus-
citer la contradiction ni ne vise agrave se singulari-
ser en prenant une position mais elle aspire agrave
conserver lrsquoesprit ouvert agrave tous les possibles
quitte agrave cultiver le paradoxe Crsquoest sans doute
pour cette raison que quand lrsquoadresse agrave un pa-
tient se reacutevegravele theacuterapeutique ce nrsquoest pas une
surprise totale crsquoest le plus souvent lrsquoaboutis-
sement drsquoune deacutemarche heuristique Ceux qui
srsquoembarrassent dans un diagnostic ce qursquoils
srsquoimaginent indispensable avant toute entre-
prise et auquel ils finissent par croire et ce fai-
sant faire croire implicitement au patient qursquoil
srsquoapplique agrave lui mecircme quand ils ne cegravedent pas
agrave la tentation de lui en faire la reacuteveacutelation peu-
vent finir par srsquoenfermer dans une illusion com-
mune Une telle disposition est assimilable
dans son essence au preacutesupposeacute On voit la
difficulteacute apparaicirctre dans les efforts drsquoy faire
piegravece et que cela ne preacutesage rien de bon
Pourtant on a bien souvent vu la situation theacute-
rapeutique eacutevoluer favorablement en deacutepit de
ces preacutemisses douteuses Qursquoen penser Si
lrsquoon considegravere que la tacircche fondamentale du
psychotheacuterapeute est bien de reacutesoudre des
problegravemes de maniegravere efficace et dynamique
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 46
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
si lrsquoon peut srsquoeacutecarter un tant soit peu des con-
ceptions traditionnelles des problegravemes psycho-
pathologiques mettre en doute lrsquoexistence de
deacuteficits agrave reacuteparer ou agrave compenser chez le pa-
tient srsquoautoriser agrave penser que la reacutesistance au
changement de ce dernier nrsquoa rien agrave voir avec
la rentabiliteacute speacutecifique de symptocircmes en
terme de pouvoir interpersonnel on peut envi-
sager drsquointroduire des solutions qui ne srsquoentre-
tiennent pas elles-mecircmes et deviennent des
obstacles au changement Alors le theacuterapeute
peut se contenter drsquoamorcer un changement et
deacutecliner la neacutecessiteacute de srsquoengager agrave lrsquoaccompa-
gner jusqursquoagrave son terme Et quand les venues
du patient deviennent plus rares se souvenir
que Freud deacuteclarait que la cure est termineacutee
quand le patient ne vient plus
On connaicirct les dispositions favorables du pa-
tient agrave srsquoidentifier au profil qursquoon lui propose Et
si les patients se montrent rarement agrave la hau-
teur de ce que lrsquoon attend drsquoeux crsquoest parce
que lrsquoon attend quelque chose de leur part qui
soit agrave la hauteur de nos preacutetendues compeacute-
tences dont rappelons-nous il srsquoagit de reacutegle-
menter la mise en oeuvre Or lrsquoobjectif du theacute-
rapeute peut-il ecirctre leacutegitimement de confirmer
ses convictions Srsquoil interpregravete les causes du
mal-ecirctre de ses patients en fonction dun scheacute-
ma geacuteneacuteral et preacuteeacutetabli ne les trahit-il pas Et
serait-il bien congru de proposer des theacuterapies
en precirct-agrave-porter mecircme en demi-taille plutocirct
que faire dans le sur mesure en fonction des
ressources que le patient a lrsquoair de preacutesenter
Les deux acteurs de lrsquoaffaire risquent de rater
ce qursquoils recherchent implicitement en croyant y
gagner quelque chose le theacuterapeute la confir-
mation de ses convictions et le patient un
eacuteclaircissement de ses difficulteacutes en mecircme
temps que son adoption par une autoriteacute qui
lrsquoenteacuterine Toute clarteacute se paie drsquoun mystegravere et
comme une conscience claire est le signe
drsquoune mauvaise meacutemoire on nrsquoen saura pas
beaucoup plus les ideacutees nettes et distinctes
chegraveres agrave Reneacute Descartes nrsquoont guegravere fait la
preuve de leur eacutevidence La responsabiliteacute du
theacuterapeute srsquoeacutemaille de tant de deacuteterminants
que ce dernier est tout agrave fait capable de se ran-
ger agrave ce qursquoil croit justifieacute Mais la croyance
nrsquoest pas seulement une ideacutee que lrsquoesprit pos-
segravede crsquoest eacutegalement une ideacutee qui possegravede
lrsquoesprit Le plus grand deacuteregraveglement de lrsquoesprit
est de croire que les choses sont parce que
lrsquoon veut qursquoelles soient Les psychologues sa-
vent si bien identifier les situations qui se precircte-
ront au beacuteneacutefice de leur clairvoyance qursquoils
sont eacutegalement fortement sujets agrave lrsquoisseacutegoureacutee
facirccheuse pathologie qui deacutesigne un don parti-
culier pour toujours chercher drsquoabord dans la
mauvaise poche
Toutefois une relation de confiance une fois
installeacutee ccedila commence agrave rouler mais au fil du
temps la roue finit par prendre du jeu et les
orientations agrave srsquoinstaller dans le confort agrave srsquoen-
liser dans lrsquoanamnegravese agrave travailler obstineacutement
la reacutepeacutetition agrave se contenter de pointer des meacute-
canismes quant ccedila ne se reacuteduit pas agrave la pro-
duction de regrettables rationalisations Il srsquoagit
plutocirct de reacuteapprendre des conduites au patient
apregraves qursquoil en ait renouveleacute le choix agrave srsquoenga-
ger dans des activiteacutes qui permettent de modi-
fier substantiellement les modes de penseacutee Le
but ultime de la psychotheacuterapie nest pas seu-
lement deacuteliminer des comportements deacuteplo-
rables cest dapprendre agrave mieux geacuterer ses
propres processus mentaux agrave affronter avec
plus de reacuteussite des situations oppressantes et
agrave deacutevelopper des opeacuterations psychiques plus
performantes et une maniegravere drsquoecirctre au monde
plus eacutepanouissante une expression de la
sphegravere psychique privileacutegiant la valorisation
des aspirations individuelles qui deacutebouche sur
la preacutedilection pour lrsquoespace inteacuterieur caracteacuteri-
seacute sur lequel on pense souvent ecirctre suscep-
tible de pouvoir agir Mais comment juger ac-
ceptable que le patient se retrouve dans la po-
sition de celui qui la cleacute de son appartement agrave
la main se voit contraint drsquoactionner la son-
nette pour rentrer chez lui
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 47
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Tout ceci pour suggeacuterer une approche zeacuteteacute-
tique des psychotheacuterapies pour autant qursquoelle
puisse ecirctre soupccedilonneacutee de participer agrave lrsquoactua-
lisation de la confusion des genres qui permet-
trait drsquoeffectuer la distinction entre drsquoune part la
psychotechnique de la theacuterapie que la revendi-
cation du titre de psychotheacuterapeute tendrait agrave
certifier au prix drsquoun reacuteductionnisme preacutejudi-
ciable agrave la pratique clinique et au meacutepris drsquoune
certaine creacuteativiteacute et la conduite drsquoun projet
psychotheacuterapique circonspect avec des tech-
niques approprieacutees et individualiseacutees jouant le
rocircle drsquoun outil directionnel
Les psychologues sont censeacutes distinguer le
subjectif de lrsquoirrationnel Il ne sagit pas dex-
clure la subjectiviteacute ni mecircme de la reacuteduire
mais de la conserver au cœur de la pratique de
la psychologie clinique Cest lagrave au cœur de la
subjectiviteacute de lindividuel que celle-ci peut
justifier sa speacutecificiteacute En revanche on ne se
preacuteoccupera pas des ayatollahs de la psycha-
nalyse au masque douloureux et au regard fil-
trant arborant un air drsquoen savoir long ni des
forceneacutes du dressage cognitif qui se deacutesolent
de ne pas voir le patient marcher mieux que
cela dans la combine Pas plus drsquoailleurs que
de tous les gardes-frontiegraveres des succegraves qui
leur eacutechappent qui sont des envieux comme
tous les censeurs Agrave Theacuterapik Park les psy-
chotheacuteraptors chassent tout autant en meute
qursquoen snipers
Il est important de tendre vers une pratique
permissive en accordant au patient la possibili-
teacute de reacutealiser que lorigine des changements se
trouve en lui comme il pense de celle des pro-
blegravemes qui sont les siens qui pourra de cette
faccedilon acqueacuterir une autonomie dans son pro-
cessus de traitement Mais lrsquoon a appris que ce
reacutesultat ne peut ecirctre obtenu que si lrsquoon accorde
au patient la possibiliteacute de tricher Cette faculteacute
le poussera rarement agrave en user mais sa virtua-
liteacute qursquoil est en mesure de srsquoapproprier facilite-
ra bien souvent la survenue des identifications
rechercheacutees par le theacuterapeute parce que le
patient en fera ainsi plus facilement son affaire
Crsquoest en quelque sorte entrer par la porte de
derriegravere dans le champ complexe de la forma-
tion du reacuteel
Cette approche zeacuteteacutetique estomperait eacutegale-
ment la suspicion de thaumaturgie qui revien-
drait au professionnel qui srsquoappuyant sur la
conviction qursquoil y a quelque chose agrave soigner
chez le patient au titre de lrsquoadheacutesion de ce der-
nier agrave la proposition drsquoune telle assertion
srsquoexempterait du titre en vertu de lrsquoautorisation
qursquoil srsquooctroierait agrave lui-mecircme de pratiquer Pen-
ser par soi-mecircme crsquoest souvent penser tout
seul ou pire penser comme tout le monde
Mieux vaut peut-ecirctre penser contre soi-mecircme
et se faire agrave soi-mecircme les objections des
autres Toutes les psychotheacuterapies ont leurs
chimegraveres apregraves lesquelles elles courent sans
jamais les attraper Mais avantageusement en
chemin elles srsquooctroient des opportuniteacutes qui
ne sont pas toutes neacutegligeables Et sans ou-
blier que quand la sinceacuteriteacute confine agrave lrsquoarbi-
traire on en vient agrave regretter lrsquohypocrisie
comme lrsquoa magistralement exprimeacute Descartes
on peut deacutecider que lrsquoon nrsquoest sucircr de rien et
que lrsquoon nrsquoest mecircme pas sucircr que lrsquoon nrsquoest sucircr
de rien cesser de consideacuterer que les pro-
blegravemes compliqueacutes neacutecessitent forceacutement des
solutions compliqueacutees Il y a aussi des psycho-
theacuterapies qui durent des anneacutees et un mauvais
esprit pourrait eacutetablir une comparaison avec les
banques qui quoiqursquoun virement par ordinateur
ne prenne qursquoune seconde aiment en faire tout
un plat afin que les fonds demeurent un mo-
ment dans leur systegraveme et leur rapportent
Comme nous vivons irreacutesistiblement dans un
monde de repreacutesentations la seacuteduction du titre
peut exciter la convoitise mdash celle-ci constituant
la plus formidable des motivations humaines mdash
de psychotheacuterapeutes en quecircte de reconnais-
sance Mais ce sont les ideacutees les plus seacutedui-
santes qui ont le plus souvent besoin de se re-
maquiller Le terme de trompe-couillon deacutesi-
gnant le maquillage en langue verte est trop
illustratif dans le domaine des psychotheacuterapies
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 48
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
pour deacutecourager complegravetement la tentation de
srsquoinsurger contre lrsquoeacuteventualiteacute de sa pertinence
Le titre de psychotheacuterapeute ressemble agrave la
queue du Mickey de notre enfance qursquoil fallait
attraper pour avoir un tour gratuit de manegravege
On peut bien courir encore longtemps apregraves
son obtention mais si lrsquoon veut finir de rouler le
peacutetard il faudra bien se reacutesoudre au bout drsquoun
moment agrave cesser de rechercher le petit bout de
shit tombeacute sur la moquette marron
Alors psychotheacuterapeute agrave quel titre quand la
proposition theacuterapeutique tiendrait tout entiegravere
en quatriegraveme de couverture Et lrsquoon peut ajou-
ter agrave notre accablement la conjoncture imagi-
naire que nous ne nous en remettrons jamais
et deacutecider que la psychotheacuterapie est devenue
un business Bien sucircr ces consideacuterations ne
srsquoappliquent pas aux psychotheacuterapeutes pour
lesquels rien nrsquoest impossible eacutequipeacutes du tout
agrave lrsquoego agrave soi qui sont si lrsquoon peut dire la protu-
beacuterance de la profession Elles ne srsquoappliquent
pas davantage agrave ces professionnels dont
lrsquoinaptitude est semblable agrave celle des jeunes
paresseux ces mammifegraveres arboricoles de la
forecirct breacutesilienne auxquels il arrive freacutequem-
ment drsquoempoigner leurs propres pattes agrave la
place des branches si bien qursquoils tombent des
arbres
Enfin lrsquoexigence de ce titre fait voir se multiplier
des instituts de formation agrave la psychotheacuterapie
neacutes de la derniegravere pluie qui ne feraient que
precirccher pour leur paroisse agrave des ouailles fasci-
neacutees par la quecircte de la qualification Il suffirait
alors de deacutetenir le titre de psychotheacuterapeute
pour le devenir tandis que ceux ou celles qui
en possegravedent la compeacutetence et qui se risquent
agrave en pratiquer verraient fragiliseacutee leur deacutetermi-
nation agrave y recourir sans lrsquoestampille de sa sa-
cralisation Crsquoest ainsi qursquoun meacutecanicien de la
relation identifieacute comme speacutecialiste du soin et
de la gestion des relations interpersonnelles
viendra disqualifier la prodigieuse diversiteacute des
fonctionnaliteacutes de la psychologie clinique agrave la-
quelle nous sommes tous attacheacutes Et lrsquoon ver-
ra des psychotheacuterapeutes nantis de bons certi-
ficats srsquoeacutevertuer dans la profession et y forger
leur reacuteussite juste pour prouver que crsquoest pos-
sible Les exigences des employeurs se mon-
treront de plus en plus impeacuteratives sur ce point
les assureurs jouant le rocircle drsquoagences de nota-
tion et lrsquoon nrsquoengagera deacutesormais que des
eacutebeacutenistes qualifieacutes comme caissiers chez Ikea
Quand le doute est leveacute il deacutebouche sur une
incertitude et le psychotheacuterapeute ballotteacute au
greacute des vagues de lrsquooceacutean du deacutesir de nou-
velles contraintes reacuteglementaires dans sa lutte
contre la deacutereacuteliction par tous les temps se
trouve embarrasseacute par le choix impossible
entre deux deacutesillusions voir que lrsquoeacutetendue du
champ de la pratique de la psychotheacuterapie se
precircte deacutesormais deacutecideacutement mal agrave son entre-
prise ou constater combien ccedila va ecirctre difficile
de lrsquoentreprendre agrave ses propres conditions
Crsquoest comme eacuteprouver le deacutesappointement de
la dame constatant que la lunette des toilettes
nrsquoest pas abaisseacutee ou la consternation du
monsieur qui deacutecouvre que la mecircme lunette ne
tient pas releveacutee Mais quitte agrave voyager sur le
Titanic pourquoi pas en premiegravere classe
La vie professionnelle nous rappelle combien le
monde peut paraicirctre singulier lorsqursquoon le re-
garde apregraves avoir fait un simple pas sur le cocircteacute
Lrsquoexercice de la psychotheacuterapie srsquoassaisonne
de pas mal drsquohumiliteacute et drsquoun peu de creacuteativiteacute
Peut-on ecirctre agrave la fois malin et intelligent Les
psychologues cliniciens pratiquent volontiers
lrsquousage des deux adverbes fondamentaux qui
eacuteveillent lrsquointelligence des enfants pourquoi
et comment Lrsquointelligence incite agrave la reacute-
flexion et la reacuteflexion conduit au scepticisme
Le scepticisme lui megravene agrave lrsquoironie Lrsquoironie
cette meacutelancolie de la luciditeacute agrave son tour se
preacutesente agrave lrsquoesprit mdash qui se trouve en apport
direct avec lrsquohumour mdash qui fait si bon meacutenage
avec la fantaisie Et la vie devient une chose
deacutelicieuse aussitocirct qursquoon deacutecide de ne plus la
prendre tout agrave fait au seacuterieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 49
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute des pa-
tients migrants africains
Jacqueline Faure Hocircpital Tenon Page 50
gt Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacute-
moignage drsquoune pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute Page 60
gt Seacutejour de vacances quelle place pour le psy-
chologue
Ceacuteline Le Bivic Hocircpital Eacutemile Roux Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques
transversaliteacute de nos cliniques
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 50
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants
africains une approche originale avec lrsquoassociation URACA
Jacqueline Faure Service des maladies infectieuses et
tropicales Centre de la dreacutepanocytose Hocircpital Tenon
Lrsquohomme universel nrsquoexiste pas il est inscrit
dans une culture dans un cadre Or ce cadre
est universel il nrsquoexiste pas drsquohomme sans cul-
ture
L rsquohocircpital Tenon est situeacute agrave lrsquoEst de Paris
bon nombre de patients migrants infec-
teacutes par le VIH y sont soigneacutes Du fait de
lrsquoexistence drsquoune materniteacute au sein de lrsquohocircpital
beaucoup de femmes migrantes apprennent
leur seacuteropositiviteacute agrave lrsquoinfection par le VIH-sida
au cours du suivi de leur grossesse La grande
majoriteacute de ces patients est originaire drsquoAfrique
de lrsquoOuest
Degraves 1993 nous avons mis en place un parte-
nariat avec lrsquoassociation URACA pour aider
les patients en difficulteacute face au diagnostic de
lrsquoinfection par le VIH-sida et aussi les soignants
rencontrant des problegravemes dans la prise en
charge de certains patients
Au deacutebut les soignants et moi-mecircme pensions
que la plupart des patients africains ne com-
prenaient rien Peu agrave peu avec lrsquoaide drsquoURA-
CA nous avons pris conscience que nous-
mecircmes ne les comprenions pas toujours ou
bien encore que nous ne savions pas nous
faire comprendre drsquoeux
Cette association daide aux Africains intervient
dans diffeacuterents domaines accueil aide juri-
dique sociale solidariteacute preacutevention informa-
tion recherche dans le domaine de la santeacute
(toxicomanie SIDA dreacutepanocytose troubles
psychiatriques) et propose aussi des consulta-
tions drsquoethnomeacutedecine
Ainsi bien souvent les difficulteacutes avec les pa-
tients drsquoorigine eacutetrangegravere sont lieacutees agrave des pro-
blegravemes de communication et de compreacutehen-
sion mutuelles dans la relation soignant-soigneacute
En comprenant lrsquoeacuteveacutenement migratoire et son
impact dans la deacutecouverte drsquoune maladie
grave en eacutetant sensibiliseacutes agrave lrsquoimportance de la
dimension culturelle dans le soin nous avons
ainsi ameacutelioreacute lrsquoaccueil et la prise en charge de
ces patients
Un systegraveme culturel est constitueacute drsquoune
langue drsquoun systegraveme de parenteacute drsquoun corpus
de techniques et de maniegraveres de faire (la pa-
rure la cuisine les arts les techniques de
soins les techniques de maternagehellip) Tous
ces eacuteleacutements eacutepars sont structureacutes de maniegravere
coheacuterente par des maniegraveres de penser les re-
preacutesentations [] Les repreacutesentations permet-
tent aux individus dun mecircme groupe dappreacute-
hender le monde selon les modaliteacutes com-
munes repreacutesentations de la mort de la con-
ception
Jemploie ce mot culture agrave contrecœur avec
la crainte decirctre mal compris Par ce terme je
ne deacutesigne pas leacutecume luxueuse dune civilisa-
tion mais lesprit tregraves particulier dun peuple
insaisissable
Cette prise en charge globale avec lrsquoassocia-
tion URACA srsquoeffectue sous 4 formes
1 le soutien communautaire
2 la meacutediation culturelle
3 la consultation dethnomeacutedecine une prise
en charge transculturelle
4 la formation mutuelle partage de savoir
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 51
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
1 LE SOUTIEN COMMUNAUTAIRE
Je me sens coupeacute en deux diviseacute une partie
de moi-mecircme nrsquoest pas ici nous dit tel patient
La deacutecision la plus terrible que jrsquoaie eu agrave pren-
dre dans ma vie crsquoest de rester ici pour me soi-
gner et ecirctre ainsi seacutepareacutee des miens raconte
cette femme dans un sanglot difficilement con-
tenu
Crsquoest tregraves dur drsquoecirctre seulehellipJe ne suis pas ha-
bitueacuteehellipici quand tu sors de ta maison per-
sonne ne se parlehellip
Le soutien communautaire drsquoURACA srsquoorga-
nise de plusieurs faccedilons
Visite hebdomadaire au chevet du patient avec
le port dun repas africain par la nourriture
par le dialogue dans la langue quand cest pos-
sible par la preacutesence de ses pairs quelque
chose du pays est ainsi recreacuteeacutee et apaise le
malade
Accueil quotidien au sein de lrsquoassociation re-
pas atelier couture atelier informatique aides
dans les deacutemarches administratives assem-
bleacutee des femmes Tout ceci dans une am-
biance comme au pays
Ces visites sont proposeacutees aux malades isoleacutes
du fait du diagnostic ou qui nrsquoont pas de famille
ici
La migration est une eacutepreuve qui provoque
chez le sujet une deacutestabilisation une fragiliteacute
lieacutees agrave diffeacuterentes pertes
perte de lrsquoenveloppe culturelle la culture struc-
ture le psychisme humain dans la migration il
nrsquoy a plus ce cadre culturel Changer drsquounivers
implique la perte brutale drsquoune langue drsquoun
systegraveme de reacutefeacuterence drsquoun systegraveme de co-
dage des perceptions des sensations et des
repreacutesentations en un mot une acculturation
[] La perte de lrsquoenveloppe culturelle va donc
provoquer des modifications de lrsquoenveloppe
psychique [hellip]
la perte de repegraveres difficulteacutes au niveau du
changement de climat de la nourriture dans
les deacuteplacements dans la ville dans les deacute-
marches administratives Difficulteacutes et mecircme
souffrance dans la perte de la langue drsquoorigine
Julia Kristeva drsquoorigine bulgare psychanalyste
et eacutecrivain dit ceci hellip il y a mort dans la perte
drsquoune langue natalehellip
la perte drsquoune certaine identiteacute ecirctre Camara
ou Toure ecirctre peul ou bambara nrsquoest pas so-
cialement reconnu le migrant devient un eacutetran-
ger un noir puis agrave lrsquohocircpital eacuteventuellement un
seacuteropositif
la perte du groupe lrsquoisolement est douloureu-
sement ressenti pour tout eacutetranger La solitude
pour un Africain crsquoest mortelhellip nous explique
Monsieur Diarra meacutediateur ethnoclinicien agrave
URACA
Autant drsquoeacuteleacutements qui favorisent un eacutetat de vul-
neacuterabiliteacute propice agrave une deacutecompensation soma-
tique ou psychologique (deacutepression) Le dia-
gnostic drsquoune maladie grave vient renforcer
cette fragiliteacute La solitude dans les chambres
individuelles de nos hocircpitaux modernes - que
nous occidentaux appreacutecions beaucoup - peut
ecirctre mal supporteacutee par le patient africain elle
est mecircme parfois anxiogegravene Un Africain nest
jamais seul Au pays sil est hospitaliseacute sa fa-
mille lentoure dort dans sa chambre
Par ces visites hebdomadaires un tissu rela-
tionnel est ainsi creacuteeacute qui peut se poursuivre agrave
la sortie Le soutien communautaire permet au
patient isoleacute dans la preacutecariteacute de retrouver ce
lien structurant du groupe qui lui faisait deacutefaut
depuis son deacutepart dAfrique Soutien qui va lrsquoai-
der agrave mieux supporter sa maladie et agrave mieux se
soigner Pour un Africain appartenir au groupe
est vital cest pourquoi la grande crainte du
malade est que son entourage soit au courant
du diagnostic et le rejette Le malade ne peut
pas ou ne veut pas partager sa souffrance
avec ses proches La honte la crainte de lex-
clusion peuvent le conduire agrave un retrait difficile
agrave supporter Pour lAfricain lisolement est in-
concevable Sa force vitale est en relation
constante avec celle des ancecirctres proches et
lointains et des membres du groupe La plus
grande calamiteacute consiste agrave en ecirctre retrancheacute et
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 52
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reacuteduit ainsi agrave une existence deacuteficiente sans
protection voueacutee au neacuteant
Cette association communautaire nrsquoest pas
speacutecifiquement cibleacutee SIDA bien que ses
membres soient formeacutes agrave cette pathologie A
lrsquohocircpital elle apporte son aide agrave tout patient
quelle que soit sa maladie Le patient pourra
srsquoil le souhaite aborder son diagnostic et il nrsquoest
pas rare qursquoil le fasse Apaisement et soulage-
ment pour lui de constater que ce dont il
souffre ne fait pas peur Il peut retrouver con-
fiance en lui
2 LA MEacuteDIATION CULTURELLE
Le meacutediateur ethnoclinicien connaicirct bien la cul-
ture du patient originaire drsquoAfrique de lrsquoOuest et
il parle plusieurs langues (peul bambara sara-
koleacute wolof hellip) Il intervient dans diffeacuterentes
situations
Pour faciliter la communication entre le meacutede-
cin et le patient quand des explications concer-
nant la maladie le traitement nrsquoont pas eacuteteacute
comprises Il ne srsquoagit pas drsquoune simple inter-
preacutetation mais drsquoune formulation adapteacutee agrave la
personne agrave sa culture Les messages de preacute-
vention concernant la sexualiteacute par exemple
seront mieux accepteacutes et entendus si la sensi-
biliteacute du patient voire sa pudeur sont respec-
teacutees
Pour aider agrave la reacutesolution de conflits entre pa-
tient-soignant ou patient-famille ou soignant-
famille
Reacutecemment nous avons organiseacute une meacutedia-
tion culturelle pour une patiente ne parlant pas
du tout le franccedilais accompagneacutee de son fils
maicirctrisant parfaitement notre langue Le meacutede-
cin lrsquoassistante sociale le meacutediateur et moi-
mecircme eacutetions reacuteunis pour essayer de com-
prendre le conflit familial Tout eacutetranger utilise
la langue eacutetrangegravere comme un pansement
comme une sorte drsquoonguent de cregraveme sur les
anciennes blessureshellip La langue seconde ne
permet pas drsquo acceacuteder agrave son for inteacuterieur ex-
plique Julia Kristeva Ainsi le fils pouvant tout
agrave fait communiquer avec nous en franccedilais
srsquoest spontaneacutement adresseacute au meacutediateur en
bambara De toute eacutevidence sa langue natale
lui permettait drsquoecirctre au plus pregraves de la situation
douloureuse qursquoil vivait avec sa megravere
Le meacutediateur apporte des eacuteclaircissements sur
le contexte culturel sur le sens de tel conflit
familial sur la place des uns et des autres dans
telle famille (la place de lrsquooncle maternel par
exemple le systegraveme de filiation) Il aide les soi-
gnants souvent deacutestabiliseacutes par le manque de
repegraveres ou qui interpregravetent mal telle attitude
Par exemple lrsquoextension de la deacutenomination
fregravere sœur cousin megravere dans lrsquoentourage du
patient Les soignants ne savent plus qui est
qui Des doutes surgissent voire de la suspi-
cion Les soignants ont lrsquoimpression drsquoecirctre ma-
nipuleacutes ou trompeacutes
Le meacutediateur ethnoclinicien tient selon la for-
mule de T Nathan une sorte de position du
diplomate entre deux univers antagonistes
3 LA CONSULTATION DETHNOMEacuteDECINE UNE
PRISE EN CHARGE TRANSCULTURELLE
La culture permet un codage de lrsquoensemble de
lrsquoexpeacuterience veacutecue par un individu elle permet
drsquoanticiper le sens de ce qui peut survenir et
donc de maicirctriser la violence de lrsquoimpreacutevu et
par conseacutequent du non-sens
Angoisse de mort deacutecompensation psychia-
trique (ideacutees suicidaires syndrome anxio-
deacutepressif eacutetat deacutelirant) incompreacutehension ou
deacuteni du diagnostic deacutetresse psychologique
autant de reacuteactions face agrave la maladie grave qui
peuvent concerner tout patient (occidental ou
non) mais qui neacutecessitent pour certains pa-
tients migrants une approche tenant compte du
contexte de la migration et des speacutecificiteacutes cul-
turelles
Cette maladie je sais drsquoougrave ccedila vient mon pegravere
mrsquoa donneacutee en sorcellerie nous dit cette pa-
tiente qui ne prend pas ses meacutedicaments et
dont lrsquoeacutetat srsquoaggrave
Je suis travailleacute je le sens crsquoest les parents
de ma femme qui nrsquoont jamais accepteacute notre
mariage crsquoest eux qui font des choses sur
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 53
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
moihellip
Ou bien encore ce patient en phase asympto-
matique de lrsquoinfection par le VIH-sida qui ex-
plique Je ne suis pas malade la preuve le
meacutedecin ne me donne pas de traitement
Ainsi dans certains cas le patient en difficulteacute
en souffrance peut refuser de se soigner au
prix drsquoune aggravation de son eacutetat se santeacute De
plus les messages de preacutevention ne sont pas
entendus et les risques de propagation du virus
sont accrus
Cette consultation qui srsquoinspire de lrsquoethnopsy-
chiatrie reacuteunit autour du patient (accompagneacute
ou non de membres de sa famille ou de
proches)
- leacutequipe de lassociation URACA le Dr Mous-
sa Maman meacutedecin et theacuterapeute traditionnel
qui dirige les entretiens le meacutediateur ethnocli-
nicien la psychologue Pendant 10 ans cette
eacutequipe a eacuteteacute compleacuteteacutee par la preacutesence des
tradipraticiens africains gueacuterisseurs tradition-
nels du Nord Beacutenin qui sont venus une fois par
an pour une dureacutee de deux mois (cette action
originale a pu se mettre en place gracircce agrave des
creacutedits le Sidaction par exemple qui nrsquoexistent
plus aujourdrsquohui)
- leacutequipe soignante le meacutedecin reacutefeacuterent les
infirmiegraveres la psychologue linterne les ex-
ternes lassistante sociale sage-femme kineacute-
sitheacuterapeutehellip Les soignants ont ainsi accegraves
en situation clinique agrave lunivers culturel du pa-
tient
Le recours aux pratiques traditionnelles est tregraves
freacutequent en Afrique Les systegravemes traditionnels
de soin relegravevent drsquo une logique complexe
drsquoune rationaliteacute profonde (T Nathan) avec
une capaciteacute agrave srsquoadapter aux nouvelles situa-
tions aux nouvelles maladies Cette deacute-
marche ne remet pas en cause la confiance
envers notre meacutedecine moderne La theacuterapie
traditionnelle apporte des protections fonda-
mentales (T Nathan)
Tregraves souvent en Afrique les theacuterapies tradition-
nelles se deacuteroulent en groupe avec la famille
et ceux qui ont une affiniteacute avec le malade Ici agrave
lhocircpital les participants sont reacuteunis en cercle
autour du patient Le groupe constitue une en-
veloppe psychique qui est en soi theacuterapeu-
tique Les soignants par leur preacutesence accor-
dent une place agrave lrsquoidentiteacute culturelle du patient
agrave ses maniegraveres de vivre de se soignerhellip
Dans les cultures de tradition orale les eacuteveacutene-
ments importants de la vie tels que la nais-
sance le mariage la maladie la mort (avec
lrsquoimportance des ancecirctres) sont penseacutes diffeacute-
remment Il existe une reacutealiteacute invisible on ac-
corde vie force et pouvoir au mineacuteral au veacutegeacute-
tal agrave lrsquoanimal Le sang le lait maternel ont des
pouvoirs beacuteneacutefiques ou maleacutefiques
Les speacutecialistes de lrsquoanthropologie pensent
que le modegravele de lrsquoorganisation sociale com-
munautaire plus freacutequent dans les socieacuteteacutes
non industrialiseacutees ougrave le groupe maintient une
preacutegnance importante sur lrsquoindividu favorise
une expeacuterience du corps veacutecu comme global
il nrsquoy a pas de rupture entre lrsquohomme et le cos-
mos le corps est permeacuteable On lui reconnaicirct
une dimension transcendante et la maladie
qui plus est chronique comme la dreacutepanocy-
tose peut ecirctre inteacutegreacutee dans une reacutealiteacute plus
large exteacuterieure au corps de la meacutedecine des
hocircpitaux
Lors de ces consultations drsquoethnomeacutedecine les
deux systegravemes culturels occidental et tradition-
nel sont reconnus lrsquoun nrsquoexcluant pas lrsquoautre
Le patient peut aborder en toute confiance des
preacuteoccupations qui lui sont speacutecifiques sans
craindre le ridicule Les deux systegravemes de re-
preacutesentations occidentales et traditionnelles
dans lesquels navigue le migrant peuvent
coexister sans sopposer Paradoxalement
lrsquoapproche traditionnelle donne dans certains
cas sens et coheacuterence au discours meacutedical
scientifique Il est difficile de rendre compte
drsquoune consultation drsquoethnomeacutedecine (de mecircme
qursquoil est difficile de parler drsquoune seacuteance de psy-
chotheacuterapie ou drsquoanalyse bien que ce ne soit
pas du mecircme ordre) Il ne srsquoagit pas drsquoune con-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 54
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sultation traditionnelle ce nrsquoest ni le lieu ni le
cadre Nous sommes dans lrsquoentre-deux
Le nom la parenteacute lrsquoappartenance ethnique la
langue natale sont des eacuteleacutements systeacutematique-
ment abordeacutes Ces reacutefeacuterences agrave la filiation agrave
lrsquoethnie rappellent implicitement au malade le
lien agrave sa famille et son appartenance agrave un
groupe Les tradipraticiens se preacutesentent aussi
se nomment racontent dougrave ils viennent Le
dialogue qui srsquoinstaure est bien souvent eacutenig-
matique pour lrsquooccidental Le langage allusif
meacutetaphorique suggestif qui est utiliseacute est tout
agrave fait entendu par le patient agrave la diffeacuterence des
soignants qui sont deacuteconcerteacutes du moins lors
des premiegraveres consultations Peu agrave peu les
soignants vont se familiariser Par la suite ils
peuvent communiquer diffeacuteremment avec tel
patient et mieux deacutecoder sa maniegravere drsquoecirctre ou
de srsquoexprimer
Les repreacutesentations ancestrales de la maladie
et les eacutetiologies traditionnelles (possession es-
prits ou ancecirctres meacutecontents sorcellerie trans-
gression de tabous ou non respect de rituels
familiaux) ne sont pas systeacutematiquement eacutevo-
queacutees et lorsqursquoelles le sont crsquoest toujours de
maniegravere implicite La maladie comme lrsquoacci-
dent la perte drsquoun emploi ou toute autre mani-
festation de malchance de malheur est le
signe drsquoun deacutesordre -dont il faut comprendre le
sens- et qui concerne non seulement le patient
mais aussi sa famille
Monsieur C originaire du Mali connaicirct bien les
diffeacuterents modes de transmission et nous en
discutons ensemble et dans ce mecircme entre-
tien perplexe il se questionne Je ne sais
pas drsquoougrave ccedila vienthellip
Chez nous la maladie quelle soit physique ou
mentale ne concerne pas uniquement lindividu
toucheacute mais aussi sa famille tout le
groupe (M Maman Journeacutee transculturelle
Des gueacuterisseurs agrave lhocircpital des soignants au
village 29 septembre 2001 hocircpital Tenon
Paris) Derriegravere lhistoire de lindividu se profile
toujours le devenir de la communauteacute toute en-
tiegravere [ ] La cause du mal qui rompt leacutequilibre
dun organisme fait peser une lourde menace
sur le corps social
Bien souvent agrave lissu de ces consultations le
patient va contacter la famille au pays qui elle
aussi va intervenir selon ses coutumes par des
priegraveres rituels ou sacrifices
La proposition dune prise en charge transcul-
turelle nest pertinente que si elle fait sens pour
le patient sil se reconnaicirct des liens avec sa
culture dorigine Le patient peut ecirctre occiden-
taliseacute (eacutetudes supeacuterieures vivant en France
depuis de nombreuses anneacutees hellip) ou dorigine
rurale analphabegravete ayant gardeacute des liens avec
son village il peut ecirctre musulman ou chreacutetien
Les indications sont variables
- incompreacutehension du diagnostic Lrsquoexemple
de Monsieur K malgreacute une seacuterologie positive
il reste persuadeacute de nrsquoecirctre pas malade Cepen-
dant il accompagne aux consultations sa
femme et leur fille toutes les deux seacuteropositives
et sous traitement
- refus du traitement les causes sont mul-
tiples Mme T vient reacuteguliegraverement agrave ses con-
sultations le meacutedecin veut deacutesormais lui pres-
crire un traitement qursquoelle refuse Si je dis que
je suis seacuteropositive personne ne voudra se
marier avec moi Une autre patiente
srsquoinquiegravete Je ne veux pas du traitement si je
deviens indeacutetectable alors ougrave sera le virus
- problegraveme drsquoobservance les causes sont va-
rieacutees preacutecariteacute incompreacutehension ou refus du
diagnostic probleacutematique personnelle plus pro-
fonde
- souffrance psychique le patient peut ecirctre
tregraves observant ses reacutesultats biologiques sont
satisfaisants le patient va tregraves bien selon le
meacutedecin mais persiste en lui une douleur mo-
rale difficile parfois agrave repeacuterer Il faut savoir deacute-
coder le sens du sourire (qui ne signifie pas
toujours la joie) lrsquoabsence de plainte Julia
Kristeva explique que les eacutetrangers sont expo-
seacutes aux maladies psychosomatiques ils sont
dans cet espegravece de vernis de la langue se-
conde mais le fond reste douloureux et le fond
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 55
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
eacuteclate sous la forme de la migraine quand ce
nrsquoest pas le cancerhellip
- pathologie psychiatrique troubles du com-
portement (deacutelire agitation violencehellip) syn-
drome deacutepressif risque suicidaire angoisse de
mort plaintes somatiques sans cause orga-
nique (douleurs diffuses sensation de malaise
le corps parle ccedila chauffe ccedila se deacuteplace)
- fin de vie angoisse isolement
- conflits conjugaux ou familiaux aggraveacutes ou
reacuteactionnels agrave la pathologie (risque de divorce
tel mari qui nrsquoassume plus ses responsabiliteacutes
sexualiteacute devenue difficile impossible (refus du
preacuteservatif par exemple)
- Lrsquoannonce du diagnostic Lrsquoannonce drsquoune
maladie grave est toujours une eacutepreuve pour
tout malade Crsquoest un moment-cleacute dans la prise
en charge du patient Dans le cas de lrsquoinfection
par le VIH la formulation peut ecirctre une donneacutee
brutale Tel ce meacutedecin qui annonce agrave
une femme enceinte vih2 asymptomatique
vous avez le SIDA Veacuteritable violence ver-
bale qui provoque un choc psychique avec
risque suicidaire si ce nrsquoest la fuite et le refus
de soin
Actuellement chez certains soignants on as-
siste agrave une banalisation du diagnostic lieacute aux
possibiliteacutes de traitement Mais crsquoest oublier le
deacutecalage avec le niveau de connaissance du
malade et crsquoest aussi meacuteconnaicirctre les effets
sur le patient de la reacutealiteacute dramatique de la ma-
ladie au pays Certains ont vu des proches
mourir du SIDA drsquoune mort lente sans soin et
dans la solitude Tous les patients eacutevoquent
une forte angoisse Deux mois apregraves il y a en-
core en moi cette grande peur quand le meacutede-
cin mrsquoa parleacute En entendant les propos de
lrsquoinfirmier Je vous apporte vos meacutedicaments
du SIDA Mme B nous raconte comment elle
a protesteacute et reacuteagi vivement Vous ne devez
pas dire cela Ainsi dans certains cas le meacute-
decin peut utiliser drsquoautres formulations le
virus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Dans les cultures de tradition orale les mots
ont une force un pouvoir Prononcer le mot SI-
DA activerait en quelque sorte le potentiel mor-
tel de cette maladie Ainsi dans certains cas le
meacutedecin peut utiliser drsquoautres formules le vi-
rus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Deux ou trois consultations ont lieu ainsi agrave lhocirc-
pital pour chaque malade Les tradipraticiens
vont dire ce quils ont vu et vont donner leurs
indications theacuterapeutiques le suivi peut se
poursuivre apregraves leur retour au village ougrave ils
continuent si crsquoest neacutecessaire agrave travailler
pour le patient Les situations sont tregraves varieacutees
et les reacuteponses le sont tout autant
QUELQUES EXTRAITS DE CONSULTATION
Ce patient ne se sent pas malade il nrsquoa aucun
signe de la maladie il ne comprend pas pour-
quoi le meacutedecin insiste pour qursquoil prenne un
traitement qui plus est agrave vie On lui rappelle
qursquoau pays le gueacuterisseur a lui aussi son labo-
ratoire qursquoil voit et qursquoil peut demander de
faire des choses agrave celui qui vient le consulter
pour sa protection ce parfois toute la vie
Cette analogie explicite permet de confirmer la
validiteacute de lrsquoapproche meacutedicale Ce mode drsquoex-
pression imageacutee qui est familiegravere au patient
voir dans le sable faire des rituels pour la
protection reacutesonne en lui et lrsquoaide agrave adheacuterer
aux prescriptions meacutedicales Moi-mecircme jrsquoem-
ploie souvent le terme protection pour parler
du beacuteneacutefice de la tritheacuterapie jrsquoutilise des
images qui font sens pour le patient et je com-
prends mieux celles qursquoil utilise lui-mecircme De
mecircme il mrsquoarrive de lui signaler nos expres-
sions speacutecifiquement franccedilaises ou nos pro-
verbes afin de lui faire connaicirctre aussi notre
propre maniegravere drsquoexprimer certaines choses
Tel autre patient srsquoaggrave il prend mal ses
traitements et il vit dans une grande preacutecariteacute
Drsquoembleacutee lors du premier entretien psycholo-
gique il mrsquoexplique que sa sœur au pays a par-
leacute de sorcellerie Au cours de la consultation
drsquoethnomeacutedecine on lui demande de solliciter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 56
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sa famille au pays pour savoir ce qui doit ecirctre
fait aupregraves de la riviegravere sacreacutee qursquoil a eacutevoqueacutee
En Afrique les deacutefunts les ancecirctres doivent
ecirctre veacuteneacutereacutes par des rituels propres agrave chaque
famille si ce rituel a eacuteteacute abandonneacute des con-
seacutequences neacutegatives peuvent rejaillir sur un de
ses membres mecircme tregraves eacuteloigneacute On peut re-
marquer qursquoici lrsquohypothegravese de la sorcellerie est
eacutecarteacutee crsquoest une autre eacutetiologie traditionnelle
qui est avanceacutee agrave laquelle le patient adhegravere il
va contacter en effet son oncle au sujet de la
riviegravere sacreacutee Le patient devient actif non seu-
lement pour srsquooccuper des choses du pays
mais aussi pour faire des deacutemarches ici sa si-
tuation meacutedicale et sociale va consideacuterable-
ment srsquoameacuteliorer il trouve par la suite un heacute-
bergement puis un travail
Pour cette autre patiente un long temps de la
seacuteance va ecirctre consacreacute au reacutecit de la deacutecou-
verte de sa maladie de son bouleversement
de son angoisse concernant lrsquoavenir Des pa-
roles apaisantes lui sont dites puis on va lui de-
mander drsquoeacutecrire ses recircves de telle et telle nuit
au cours desquelles les gueacuterisseurs
travailleront pour elle Suite au rapport de ses
recircves ils lui prescrivent un traitement elle de-
vra se laver avec une preacuteparation agrave base de
plantes Conjointement le suivi psychologique
classique se poursuit elle reprend confiance
dans la vie
Aacute tel autre il est demandeacute drsquoapporter une petite
boicircte en bois ou encore un tissu blanc et un
parfum Aacute un autre il est dit drsquoaller chercher un
certain nombre de cailloux le long drsquoun cours
drsquoeau ici en France Certaines prescrip-
tions sont plus compliqueacutees sacrifices rituels
agrave effectuer au pays objets agrave rapporter Cela
peut prendre plusieurs semaines Si la pres-
cription est impossible agrave reacutealiser par le patient
lui-mecircme sur place ou par sa famille en
Afrique les gueacuterisseurs le feront en son nom agrave
leur retour au pays Dans la meacutedecine tradition-
nelle lrsquouniteacute cosmique crsquoest-agrave-dire la parenteacute
homme-nature est constamment preacutesente
Lrsquohomme est relieacute au monde mineacuteral veacutegeacutetal
ou animal mais aussi agrave celui des deacutefunts des
esprits et bien-sucircr agrave sa famille agrave son groupe
LE SUIVI DE GROSSESSE DE MME T
Depuis des anneacutees la patiente souffre en plus
de lrsquoinfection par le VIH de troubles du compor-
tement difficiles agrave diagnostiquer elle a un suivi
psychiatrique qui ne suffit pas agrave la soulager
Elle traverse des peacuteriodes drsquoagitation drsquoagres-
siviteacute et mecircme de violence Dans ses crises
elle peut aller jusqursquoagrave lrsquoautomutilation ou la ten-
tative de suicide Agrave drsquoautres moments elle est
totalement abattue leacutethargique Bien qursquoelle
connaisse sa maladie lieacutee au VIH lrsquoobservance
de sa tritheacuterapie est fonction de son eacutetat psy-
chique Elle a beacuteneacuteficieacute agrave plusieurs reprises de
consultations drsquoethnomeacutedecine en particulier
lors de cette derniegravere grossesse Du fait des
mauvais reacutesultats biologiques car elle ne prend
plus ses antireacutetroviraux le risque de contami-
nation megravere-enfant est particuliegraverement eacuteleveacute
Tregraves deacuteprimeacutee elle est transfeacutereacutee dans le ser-
vice de psychiatrie de notre hocircpital et le psy-
chiatre accepte qursquoagrave cocircteacute des traitements clas-
siques (antideacutepresseurs anxiolytiques) elle
fasse les soins traditionnels prescrits Elle a
donc une permission pour aller au marcheacute agrave
cocircteacute de lrsquohocircpital acheter un œuf blanc Elle doit
ensuite mettre cet œuf dans une grosse boicircte
drsquoallumettes exercice un peu difficile car lrsquoœuf
risque de se casser Le tout est mis dans une
calebasse recouverte drsquoun tissu blanc qursquoelle
entrepose sous son lit plus preacuteciseacutement agrave la
tecircte du lit En effet il est important qursquoelle
dorme avec cette calebasse pregraves de sa tecircte
pendant un certain nombre de nuits Puis la ca-
lebasse avec son contenu (lrsquoœuf dans la boicircte)
est remise aux gueacuterisseurs de retour au pays
ils vont effectuer leur travail agrave la termitiegravere sa-
creacutee A son retour en France le Dr Maman
remet un onguent agrave la patiente preacuteparation
faite agrave partir de lrsquoœuf et drsquoautres eacuteleacutements Elle
doit mettre reacuteguliegraverement cette pommade au-
tour de son nombril jusqursquoagrave lrsquoaccouchement
Lrsquoeacutetat psychique de la patiente srsquoameacuteliore elle
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 57
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reprend correctement son traitement lrsquoenfant
naicirct et ne sera pas contamineacute par le VIH Dans
les anneacutees qui suivront son eacutetat psychologique
se deacutegradera agrave nouveau nous nrsquoavons jamais
reacuteussi agrave la stabiliser compleacutetement Nrsquoayant ja-
mais bien suivi sa tritheacuterapie elle deacutecegravede agrave la
suite des complications du sida
A partir de cet exemple nous pouvons voir le
principe de non-seacuteparativiteacute principe essentiel
agrave lrsquoœuvre dans la meacutedecine traditionnelle afri-
caine Nous sommes ici dans un systegraveme de
penseacutee primordiale magique qui fonctionne
par analogie nous sommes dans le non-
seacutepareacute agrave la diffeacuterence de la penseacutee scientifique
qui individualise Dans ce cas clinique on voit
comment tout est relieacute il y a identiteacute entre la
grossesse et lrsquoœuf passage de lrsquohumain agrave
lrsquoanimal et aussi passage drsquoun continent agrave
lrsquoautre les gueacuterisseurs travaillant agrave distance
pour la patiente Citons agrave ce propos Pierre
Lembeye psychiatre et psychanalyste hellip
nous pouvons parler de rsquorsquonon-seacuteparativiteacutersquorsquo de
la meacutedecine traditionnelle par rapport agrave la meacute-
decine occidentale qui privileacutegie le mode seacutepa-
ratif et dont le maicirctre mot est diffeacuterence tandis
que celui des socieacuteteacutes anhistoriques est identi-
teacute La science en particulier la meacutedecine a
fait des progregraves en isolant en seacuteparant Citons
aussi Jean Benoist Lrsquoopposition carteacutesienne
entre le corps et lrsquoacircme a libeacutereacute la biologie et
donc la meacutedecine des interdits qui sacralisent
le corps hellip Lrsquoesprit lrsquoacircme tout ce qui eacutetait cou-
ramment deacutesigneacute par ces termes srsquoest prodi-
gieusement eacuteloigneacute de lrsquohorizon meacutedical
(Benoist 1993) A lrsquohocircpital crsquoest bien lrsquoorgane
malade que lrsquoon soigne mais rarement la per-
sonne dans sa globaliteacute et encore moins son
groupe familial Nous pensons analysons sur
le mode seacuteparatif celui de la coupure et selon
Pierre Lembeye La psychanalyse avec lrsquohy-
pothegravese de lrsquoinconscient opegravere aussi une cou-
pure avec le conscient Les lapsus les recircves
sont des manifestations de lrsquoinconscient alors
que dans la tradition africaine il nrsquoy a pas cette
seacuteparation par exemple chez les Ashantis au
Ghana si un homme recircve qursquoil couche avec sa
voisine il est puni et sa voisine aussi De
mecircme la psychiatrie pense aussi les probleacutema-
tiques sur le mode de la coupure le terme
schizophreacutenie provient de schizo du grec
schizein signifiant fractionnement fissure divi-
sion (P Lembeye) Dans les traitements tradi-
tionnels crsquoest la question du lien qui est au pre-
mier plan Nous avons lrsquoexemple de ce beacutebeacute
acircgeacute de huit mois enfant-cordon preacutesentant
des troubles du comportement et dont le traite-
ment est deacutecrit par Eacuteric de Rosny hellip le cor-
don ombilical le retenant aux entrailles de
lrsquoautre monde nrsquoaurait pas eacuteteacute coupeacute hellip Il srsquoagit
de lui crever les yeux crsquoest-agrave-dire de lui
rendre invisible le monde des Ancecirctreshellip (De
Rosny 1996 123-133)
La penseacutee magique qui est agrave lrsquoœuvre dans les
theacuterapies traditionnelles a-t-elle deacuteserteacute notre
systegraveme de penseacutee occidentale Dominique
Folscheid professeur de philosophie nous rap-
pelle ceci Notre meacutedecine moderniste est
due agrave lrsquoessor de la rationaliteacute mais on a oublieacute
que dans la Gregravece Antique la rationaliteacute deacutebu-
tante (avec les philosophes) srsquoaccompagnait
drsquoune vie mystique florissante Rappelons le
serment drsquoHippocrate premier code de deacuteonto-
logie meacutedical Je jure par Apollon meacutedecin
par Esculape par Hygeacutee et Panaceacutee par tous
les dieux et toutes les deacuteesseshellip Dans son
livre La nuit les Yeux ouverts Eacuteric de Rosny
cite Pierre Fegravevre Ce monde de la gueacuterison et
de la sorcellerie a quelque chose drsquounheimlich
(agrave la fois lsquolsquomysteacuterieuxrsquorsquo et lsquolsquoinquieacutetantrsquorsquo) et pour-
tant il eacuteveille des reacutesonances au plus profond
de nous-mecircmes et lrsquoon ne sait pas les-
quelles (de Rosny 1996 17) Nous-mecircmes
sans en avoir veacuteritablement conscience fonc-
tionnons sur le mode du lien du non-seacutepareacute
par exemple Reneacute Spitz psychiatre et psycha-
nalyste a deacutecrit en 1946 lrsquohospitalisme alteacutera-
tion physique grave srsquoinstallant chez le tregraves
jeune enfant placeacute en institution et seacutepareacute de
sa megravere crsquoest pourquoi aujourdrsquohui en peacutediatrie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 58
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
on facilite la preacutesence de la megravere qui peut dor-
mir au chevet de son enfant un autre
exemple celui du syndrome de glissement des
personnes acircgeacutees hospitaliseacutees qui coupeacutees de
leur environnement habituel se laissent mourir
et dans un autre registre que dire de lrsquoabsence
de chambre ndeg13 dans nos hocircpitaux nos hocirc-
tels
4 FORMATION MUTUELLE PARTAGE DE SAVOIR
Un eacutechange des savoirs srsquoest instaureacute entre les
soignants de lrsquohocircpital et lrsquoassociation
1 au niveau de lrsquoassociation les membres
drsquoURACA sont formeacutes agrave la pathologie du sida
les meacutedecins apportent leur connaissance meacute-
dicale avec des mises agrave jour sur lrsquoeacutevolution de
la pathologie et des traitements Des reacuteunions
agrave thegraveme sont organiseacutees avec un eacutelargisse-
ment agrave drsquoautres pathologies (heacutepatites dreacutepa-
nocytose)
2 au niveau des soignants formation en situa-
tion clinique participation au cycle annuel de
confeacuterences drsquoUraca voyages drsquoeacutetude dans le
village du Dr Maman au Nord-Beacutenin effectueacutes
par des meacutedecins psychiatres psychologues
assistante sociale infirmiegraveres de lrsquoAP-HP
(participation agrave des theacuterapies traditionnelles
dont le culte de danses de possession expeacute-
rience drsquoune certaine situation migratoire vil-
lage dans la brousse repegraveres diffeacuterents cadre
culturel autre adaptation au climat agrave la nourri-
turehellip)
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tion drsquoE de Rosny eacuted Karthala 2006
LrsquoAfrique de lrsquooraliteacute et lrsquoaccueil de lrsquoEacutecriture
Paris Revue Christus ndeg225 2010
Collectif
La notion de personne en Afrique Noire Ed
LHarmattan 1973
Soins et cultures 2egravemes
Rencontres Transcul-
turelles de Tenon-Uraca Les Cahiers de
lrsquoURACA ndeg12 juin 2005 (teacuteleacutechargeable sur le
site wwwuracaorg)
Pratiques theacuterapeutiques et cultures regards
croiseacutes 3egravemes
Rencontres Transculturelles de
Tenon-Uraca 2010 videacuteos de la journeacutee en
ligne sur wwwuracaorg)
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 60
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune
pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute
L e propos de cette preacutesentation sera de
teacutemoigner de leacutevolution drsquoune pratique
de psychologue au sein dun pocircle de peacute-
diatrie bien speacutecifique celui de lrsquoHocircpital Ray-
mond Poincareacute de Garches Laccueil denfants
en deacutecompensation neuro respiratoire souf-
frant de polyhandicap de maladies chroniques
ou arrivant suite agrave un eacuteveacutenement traumatique
brutal (accident intoxication insuffisance respi-
ratoire) rend la preacutesence du psychologue neacute-
cessaire
Avec Jean en phase terminale nous reacutefleacutechi-
rons au rocircle du psychologue dans lrsquoaccom-
pagnement des enfants en fin de vie
Dautres cas cliniques preacutesenteacutes agrave loral illus-
treront ensuite les modaliteacutes de la prise en
charge post-traumatique denfants et de
leurs familles
Enfin nous terminerons par exposer la speacutecifi-
citeacute de notre travail aupregraves des soignants
ACCOMPAGNER DES ENFANTS GRAVEMENT MA-
LADES OU EN FIN DE VIE
Lors de notre premiegravere rencontre Jean nous
dit Je sais que je vais mourir mais les meacutede-
cins sont trop lacircches pour me le dire et mes
parents sont trop tristes pour mrsquoen parler
Nous lui reacutepondons Je ne te connais pas
mais en tout cas je trouve que cest super que
tu puisses en parler et que tu ne gardes pas
tout ccedila pour toi
Tregraves eacutetonneacute il reprend Alors lagrave crsquoest bizarre
drsquohabitude degraves que je dis que je vais mourir
tout le monde me dit rdquoMais arrecircte Nrsquoimporte
quoi Ne raconte pas des becirctisesrdquo Mais moi je
ne suis pas fou je sais ce que je dis et pour-
quoi je le dis et je veux pouvoir en parler
La question redoutable est tregraves vite apparue
Est-ce que crsquoest vrai que je vais mourir Il
faut alors pouvoir reacutepondre Je pense que si
tu dis ccedila crsquoest que tu as de bonnes raisons de
le penserhellip Tu es le seul agrave savoir exactement
ce que tu vis Raconte-moi qursquoest-ce qui te fait
dire ccedila
Jour apregraves jour gracircce agrave un travail psycholo-
gique Jean exprime de plus en plus sa souf-
france Se sentant eacutecouteacute il entre progressive-
ment dans une autre phase celle de lrsquoaccepta-
tion
Accompagner un enfant en fin de vie crsquoest
avant tout rester agrave son eacutecoute affronter les
questions qui mettent si mal agrave lrsquoaise (mecircme si
et surtout si on ne sait pas comment y reacute-
pondre ) Et crsquoest aussi accueillir ses interroga-
tions sur sa propre mort pour lutter contre la
solitude la peur lrsquoangoisse la colegravere
ACCOMPAGNER LES FAMILLES
Avec la megravere de Jean nous deacutecouvrons ce qui
se joue autour de la porte Degraves que nous nous
preacutesentons elle nous reacutepond Merci on nrsquoa
besoin de rien (Puis sortant de la
chambre) mais surtout vous ne lui dites pas
qursquoil va mourir vous ne lui parlerez de rien -
Oh moi non mais lui il en parle beaucoup
Tregraves surprise la megravere accepte alors de venir
en parler dans notre bureauhellip Lrsquoaccompagne-
ment commence
En phase terminale Jean perd toute autonomie
motrice et tous ses sens agrave lrsquoexception de la
vue Il ne peut plus parler Sa megravere terroriseacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 61
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
par la situation demande aux eacutequipes de lui
donner quelque chose pour dormir deacutefiniti-
vement Nous lui montrons alors qursquoune com-
munication subsiste gracircce agrave lrsquoinstauration drsquoun
code (lettres sur un tableau) avec des signes
de tecircte et des clignements drsquoœil Elle srsquoaperccediloit
alors que Jean cherche avant tout agrave savourer
les petits bonheurs de chaque jour Elle reste
ainsi jusquau bout en lien avec son fils
Accompagner les parents cest accueillir
leur eacutepuisement leurs doutes leur ambiva-
lence parfois mecircme leur demande deuthana-
sie et leur redonner une image positive deux-
mecircmes pour leur permettre drsquoinvestir lrsquoinstant
preacutesent et ainsi favoriser un accompagnement
de qualiteacute
ACCOMPAGNER AUSSI LES AUTRES ENFANTS HOS-
PITALISEacuteS ET LEURS FAMILLES
Il nous semble important de susciter des
occasions drsquoaborder le sujet de la mort en lais-
sant les familles libres de saisir ou non ces op-
portuniteacutes
ACCOMPAGNER LES SOIGNANTS
DANS LIMMEacuteDIATETEacute DE LA REacuteALITEacute CLINIQUE
En deacutecalage les eacutequipes srsquointerrogent
Doit-on vraiment lui infliger ccedila jusqursquoau bout
Sa megravere a peut-ecirctre raison on devrait peut-
ecirctre lrsquoendormir pour qursquoil ne se sente pas humi-
lieacute drsquoecirctre si diminueacute Moi je ne supporterais
pashellip Les soignants sont alors tellement preacute-
occupeacutes par la deacutecision qursquoils pensent devoir
prendre qursquoils ne se rendent pas compte que
cette megravere est en train de vivre lrsquoun des plus
grands moments drsquoamour avec son fils Le psy-
chologue devient alors le lien entre les diffeacute-
rents protagonistes en rapportant certains des
propos de Jean Je suis bienhellip Comme ce
rayon de soleil est beau aujourdrsquohuihellip La
communication se remet agrave fonctionner Leurs
regards se posent alors diffeacuteremment sur lui
La peacuteriode de fin de vie drsquoun patient con-
fronte chaque soignant agrave ses limites Chacun
perd ses illusions de toute-puissance et se re-
trouve confronteacute agrave sa propre angoisse de mort
Certains deacutestabiliseacutes ne peuvent pas suppor-
ter lideacutee decirctre confronteacute agrave la proximiteacute de la
mort Pour surmonter sans trop de seacutequelles
la confrontation reacutepeacuteteacutee agrave la maladie grave et agrave
la mort il est neacutecessaire que chacun puisse
ecirctre attentif agrave soi-mecircme agrave ses propres be-
soins pour ecirctre dans un juste rapport agrave lrsquoautre
Il sagit decirctre toucheacute sans ecirctre impliqueacute affecti-
vement cest agrave dire sans tomber dans leacutemotivi-
teacute
Apregraves chaque deacutecegraves le psychologue est
lagrave pour inviter ceux qui le deacutesirent agrave mettre en
mots ce qui a eacuteteacute veacutecu La parole partageacutee per-
met de ne pas fixer des souvenirs culpabili-
sants ou anxiogegravenes
AU LONG COURS LE TRAVAIL INSTITUTIONNEL
Le soutien des eacutequipes pluridisciplinaires
est une part tregraves importante du travail du psy-
chologue en milieu hospitalier Lrsquoeacutecoute et les
eacutechanges contribuent agrave ce que tregraves lentement
les habitudes et les mentaliteacutes eacutevoluent Ces
rencontres pourront selon les situations avoir
lieu de faccedilon formelle ou informelle (le plus
souvent dans les couloirs)
Le soutien au long cours des eacutequipes fait par-
tie inteacutegrante du travail institutionnel Diffeacuterents
outils permettent de lrsquoaccompagner au mieux
LA REacuteUNION DE SYNTHEgraveSE
Dans notre service la reacuteunion de syn-
thegravese hebdomadaire permet de se poser pour
reacutefleacutechir en eacutequipe pluridisciplinaire agrave ce que
nous vivons Il est primordial drsquoaider chaque
intervenant agrave mettre des mots sur les situations
rencontreacutees surtout quand les points de vue
sont divergents Mais il srsquoagit drsquoun travail de
longue haleine car si nous nrsquoy sommes pas
vigilants les discussions restent tregraves meacutedicales
et eacutevitent drsquoaborder lrsquoenfant et sa famille dans
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 62
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
leur globaliteacute Le psychologue par sa faccedilon de
relever les paradoxes de poser les questions
eacutethiques ou simplement de faire entendre une
autre approche que celle purement somatique
aide les eacutequipes agrave reacutefleacutechir agrave leur maniegravere
drsquoaborder les familles
LA SYNTHEgraveSE DES SYNTHEgraveSES
Une fois par an nous prenons le temps
de relire les moments forts de lrsquoanneacutee en met-
tant des mots sur ce qui a reacuteussi ou eacutechoueacute ce
qui nous a manqueacute ce qui nous a marqueacute
choqueacute ou qui est resteacute incompris Mettre des
mots agrave distance sur des malentendus (en lien
avec une famille ou un fonctionnement interne)
permet davancer en eacutequipe Nous veillons
aussi agrave reprendre point par point les eacuteleacutements
positifs rappeler les enfants sauveacutes les fa-
milles qui remercient et valoriser les eacutequipes
est essentiel pour maintenir la motivation et
lrsquoinvestissement de chacun
ET LE PSYCHOLOGUE DANS TOUT CcedilA
Face agrave ces enfants gravement malades ou en
fin de vie nous devons apprendre agrave nous
adapter Il nous faut par exemple pour pouvoir
accueillir un enfant sans aucune autonomie
respiratoire dans notre bureau apprendre au
minimum les gestes de reacuteanimation agrave effectuer
en attendant qursquoun soignant prenne la relegraveve
Alors que nous avons appris agrave ne pas toucher
il nous faut comprendre ce que le patient nous
dit non plus agrave travers des mots mais agrave travers
des maux agrave travers son corps une poigneacutee
de main un regard une mimiquehellip nous de-
vons sentir lrsquoexpression non verbale de lrsquoan-
goisse Deacuteceler si le patient a besoin de silence
ou au contraire srsquoil attend nos questions En-
fin il faut quelquefois avec une extrecircme deacuteli-
catesse et une grande attention chercher agrave re-
formuler ce que le patient nous dit avec des
lettres montreacutees sur un tableau un hochement
de tecircte ou simplement un regard
Ecirctre psychologue va souvent de pair avec une
invitation permanente agrave se remettre en ques-
tion Il srsquoagit drsquoaccepter de douter plutocirct que de
chercher des certitudes Pour srsquoadapter agrave la
speacutecificiteacute de chaque situation il nous faudra
surtout ecirctre creacuteatif et oser inventer Dans le
cas contraire notre travail restera sans doute
superficiel car il apparaicirctra comme en deacuteca-
lage par rapport aux situations veacutecues par les
patients et les eacutequipes qui les prennent en
charge
Au niveau institutionnel le travail du psycho-
logue ne porte de fruits qursquoagrave tregraves long terme
Alors ne nous deacutecourageons pas (Le deacutecou-
ragement nrsquoest-il pas notre pire ennemi ) Veil-
lons agrave prendre soin de nous soyons attentifs agrave
nos propres besoins Ne nous barricadons pas
devant la deacutetresse mais au contraire appre-
nons agrave ralentir et agrave ressentir ce qui est toucheacute
en nous Comme leacutequilibriste sur la corde
nous devons essayer davancer en souplesse
pour ne tomber ni dans lindiffeacuterence ni dans la
fusion avec les situations dramatiques rencon-
treacutees
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Geacuteriatrie Hocircpital Eacutemile Roux
M esure 1 du plan Alzheimer 2008-
2012 deacuteveloppement et diversifica-
tion des structures de reacutepits
Parce qursquoils sont contraints de veiller constam-
ment sur les malades les aidants sont soumis
agrave une pression permanente Il existe des struc-
tures qui leur permettent de souffler en offrant
par ailleurs une prestation theacuterapeutique aux
malades pendant une ou plusieurs demi-
journeacutees
Afin drsquoeacutelargir les missions des accueils de jour
qui ne srsquoadressent qursquoaux personnes malades
ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees les plates-formes drsquoac-
compagnement et de reacutepit Il srsquoagit drsquooffrir aux
aidants et aux couples des activiteacutes de soutien
de reacutepit agrave domicile ou en couple et de deacutevelop-
pement de la vie sociale
Il existe des actions de reacutepit agrave domicile de
garde agrave domicile de nuit drsquoactiviteacutes sociales
culturelles pour le couple maladeaidant et de
seacutejours vacances
Jacqueline agrave la fin drsquoun seacutejour vacances mrsquoa
confieacute deux feuilles de cahier manuscrites Jrsquoai
eacutecrit ccedila Vous le lirez si vous voulez
Je me legraveve agrave 7h Prise des meacutedicaments de
Guy Je deacutejeune moment tranquille je fais ma
toilette Je vais ouvrir les volets chez maman Il
est 8h30 Je preacutepare les meacutedicaments et le pe-
tit deacutejeuner de Guy Quelques fois je le fais
manger si je peux Je fais les lits je com-
mence agrave preacuteparer le deacutejeuner Passage du
SSIAD Pendant ce temps je preacutepare une les-
sive pratiquement une tous les jours Apregraves le
passage du SSIAD souvent il a besoin drsquoaller
aux toilettes le deacuteculotter nettoyer les WC le
reculotter ranger la salle de bain et finir ce qui
a eacuteteacute commenceacute (je ne peux rien faire en sui-
vant) Souvent fais de lrsquoadministratif preacuteparer
le courrier aller agrave la poste et au pain Il vient
avec moi il faut lrsquoaider agrave monter dans la voiture
et souvent lrsquoaider agrave descendre Il est 11h il faut
eacutetendre le linge lrsquoaider agrave faire sa gym preacuteparer
et porter le plateau agrave maman Midi Lrsquoheure de
preacuteparer et donner les meacutedicaments Mettre le
couvert couper les aliments lrsquoaider Pour lui il
faut bien 90 min de pose pour deacutejeuner
Apregraves desservir le preacuteparer pour la sieste le
deacuteculotter et reculotter lrsquoaider agrave se coucher
finir de ranger la cuisine lever et plier le linge
Il est environ 14h Petite pause 15h-15h30 la
sieste est finie Sortie dans le jardin toujours
accompagneacute Lrsquoaider agrave srsquohabiller agrave se deacutesha-
biller 16h prise des meacutedicaments et goucircter
Quelquefois passages agrave la sortie de lrsquoeacutecole
des petits enfants et leur papa Aux beaux
jours travail agrave lrsquoexteacuterieur (plus de 2000m2) La
tonte du gazon est faite par mon garccedilon et jrsquoai
agrave peu pregraves 40h par an par la caisse de retraite
compleacutementaire Jrsquoai une aide-meacutenagegravere 3 h
le mardi matin et 1 h le mercredi matin Jrsquoen
profite pour aller faire les courses ou aller chez
le docteur le dentiste ou le coiffeur ou autre
chose Et 3h le jeudi apregraves-midi Lagrave crsquoest mon
repos hebdomadaire et pas toujours Je vais agrave
lrsquoaquagym avec 2 amies mais juste en peacuteriode
scolaire On est loin des 2 jours de congeacutes par
semaine mais jrsquoen demande pas tant Vers 17h
-17h30 petite promenade dans le jardin apregraves
preacuteparation du dicircner 19h prise des meacutedica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 64
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
ments Le dicircner pour lui il faut compter 90 min
Ensuite desservir Vers 20h30 je vais deacuteshabil-
ler maman Pour lrsquoinstant elle se couche sans
aide mais au deacutebut du printemps jrsquoallais la cou-
cher vers 22h Entre-temps je deacuteshabille Guy
passage aux toilettes prise des meacutedicaments
et apregraves le coucher
Il est 22h Je respire un peu Je fais un brin de
toilette Je prends mon somnifegravere et je me
couche Je mrsquoendors ou je ne mrsquoendors pas Lagrave
on peut pleurer Personne ne le voit Dans la
nuit je me legraveve une ou deux fois quand il a be-
soin de faire son pipi
Et cela 365 jours par an Et je ne me plains
pas Il y a pire Il y a aussi mieux
Jacqueline est comme 35 millions de fran-
ccedilais Elle fait partie des personnes que lrsquoon
nomme aidant familial drsquoun proche Il srsquoagit de
son mari Cela fait 12 ans qursquoil est malade Le
quotidien de Jacqueline est rythmeacute autour de
son eacutepoux et de sa pathologie eacutevolutive
En geacuterontologie le mot aidant est utiliseacute voire
parfois revendiqueacute Un aidant mais qursquoest-ce
que crsquoest Selon lrsquoassurance maladie crsquoest
celui qui apporte seul ou en compleacutement de
lrsquointervention des professionnels lrsquoaide humaine
rendue neacutecessaire par la perte drsquoautonomie de
la personne acircgeacutee ou destineacutee agrave preacutevenir une
perte drsquoautonomie et qui nrsquoest pas salarieacute pour
cette aide
Depuis une quinzaine drsquoanneacutees le veacutecu des
aidants familiaux fait lrsquoobjet de recherches On
sait aujourdrsquohui que 800 000 personnes sont
recenseacutees comme eacutetant en eacutetat de deacutepen-
dance en France crsquoest-agrave-dire qursquoelles ne peu-
vent pas effectuer de maniegravere autonome les
actes de la vie courante Et que cela est forte-
ment correacuteleacute agrave lrsquoavanceacutee en acircge la personne
aideacutee a 76 ans en moyenne
Si le lien familial preacutedomine lrsquoaidant peut aussi
ecirctre un ami ou un voisin Il srsquoagit le plus sou-
vent drsquoune femme acircgeacutee de plus de 50 ans
Bien que deux tiers des aidants srsquooccupent
quotidiennement de la personne aideacutee 60
drsquoentre eux continuent agrave avoir une activiteacute sala-
rieacutee
Lrsquoaide agrave un proche dure en moyenne 7 ans
Dans la relation drsquoaide plusieurs probleacutema-
tiques sont en jeu le deuil du parent conjoint
tel qursquoil eacutetait auparavant le renversement des
rocircles de lrsquoordre des geacuteneacuterations la crainte face
agrave son propre vieillissement les difficulteacutes de
communication avec le proche malade la
crainte de la perte du lien
La relation drsquoaide a ses apports la majoriteacute
des aidants disent se sentir utile et trouver du
plaisir dans cette relation Mais elle a aussi ses
limites et ses risques On sait aujourdrsquohui que
la mortaliteacute des aidants augmenterait de 63
que le risque de deacutepression est multiplieacute par 3
Dans cette aide au quotidien le rythme la reacute-
peacutetition lrsquoeacutevolution de la maladie peuvent ame-
ner agrave des sentiments drsquoisolement de surme-
nage et drsquoeacutepuisement
Si plus de 60 des personnes atteintes de la
maladie drsquoAlzheimer ou apparenteacutees vivent agrave
leur domicile crsquoest gracircce agrave un aidant familial
qui toute la journeacutee est dans le faire Lrsquoaidant
familial contrairement agrave lrsquoaidant professionnel
nrsquoest pas formeacute agrave cet accompagnement il base
sa relation agrave partir drsquoun lien affectif avec la per-
sonne qursquoil aide Il peut ecirctre reacutemuneacutereacute sil a
lrsquoacircge de travailler et qursquoil nrsquoest pas son conjoint
Il nrsquoa pas drsquoheures fixes
On peut donc comprendre le besoin parfois de
se poser un peu
Plutocirct que le mot vacances est apparu reacute-
cemment le mot reacutepit
Des seacutejours de reacutepit pour les aidants
Une expression forte qui vient nommer la souf-
france du proche dans la relation drsquoaide
Agrave croire que la personne dite aideacutee nrsquoa elle
pas besoin de temps de pause et que son quo-
tidien lui suffit parfaitement La femme de
Pierre me dira mon meacutedecin et son neuro-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 65
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
logue mrsquoavaient deacuteconseilleacute de lrsquoemmener ici
En France les vacances sont un droit pour les
salarieacuteshellip
Mais au fait agrave quoi ccedila sert des vacances Eh
bien avant tout agrave couper avec le quotidien An-
dreacute Comte-Sponville eacutevoque les vacances
comme un moment de liberteacute
Srsquoaccorder une pause crsquoest ainsi que nous
avons nommeacute le seacutejour de vacances que je
vais vous preacutesenter
Le seacutejour est proposeacute par une caisse de re-
traite compleacutementaire qui contacte ses adheacute-
rents Le point commun est qursquoil existe entre un
adheacuterent et un de ses proches une relation
drsquoaide au quotidien Le projet a eacuteteacute construit et
penseacute avec une association qui intervient dans
lrsquoaccompagnement de lrsquoavanceacutee en Acircge
Le groupe est composeacute en moyenne de 7
couples la moyenne drsquoacircge des aidants est de
74 ans et celle des aideacutes de 80 ans
Les participants viennent de la France entiegravere
Ils ne se connaissent pas Nous ne les con-
naissons pas
La majoriteacute des aideacutes preacutesentent des pro-
blegravemes cognitifs ou des difficulteacutes motrices
Le lieu est une structure de vacances (type reacute-
sidence hocircteliegravere) adapteacutee aux personnes han-
dicapeacutees
Le seacutejour a eacuteteacute penseacute avec la preacutesence de
deux personnes dite en fil rouge de la se-
maine la coordonnatrice de lrsquoassociation creacutea-
trice du projet et la psychologue Partager le
quotidien du petit deacutejeuner au dicircner de lrsquoac-
cueil jusqursquoau deacutepart
Drsquoautres intervenants (intervenant en Taiuml-Chi
Chuan une socio-estheacuteticienne intervenant en
chant et expression corporelle activiteacute autour
de la terre) rejoignent le groupe en deacutecaleacute afin
de conserver une alternance des pratiques
mais aussi une preacutesence renforceacutee en milieu
de semaine moment ougrave nous pouvons com-
mencer agrave seacuteparer les duos
Lrsquoaspect meacutedicaliseacute parfois neacutecessaire est re-
layeacute par des infirmiegraveres libeacuterales qui intervien-
nent sur le lieu de vacances
Le planning de la semaine est proposeacute avec
des activiteacutes ensemble seacutepareacutees en groupe
individuelles toujours dans la proposition et
non dans la contrainte Le rythme des journeacutees
srsquoadapte tous les jours
Les objectifs de la semaine
Permettre agrave chacun aidant comme aideacute de
srsquoaccorder veacuteritablement une pause en profi-
tant pleinement du site et drsquoun accompagne-
ment qui facilite leur quotidien pendant la se-
maine (absence de tacircches meacutenagegraveres repas
servis au restaurant possibiliteacute drsquoaccompagne-
ment de la personne aideacutee pour quelques
heures proposition drsquoanimations proposition
de temps dlsquoeacutechanges et de paroles)
Favoriser lrsquoacquisition et le partage drsquooutils mecirc-
lant expeacuteriences et connaissances que les per-
sonnes pourront reacuteutiliser une fois de retour au
domicile
Nous ne nommons pas les personnes par leur
fonction aidant ou aideacute mais par leur preacutenom
Chaque duo est composeacute drsquoune personne
ayant un badge vert et lrsquoautre saumon Ainsi
certaines activiteacutes sont proposeacutees agrave tous et
drsquoautres agrave chaque groupe de couleur diffeacuterente
Lrsquoanalyse des questionnaires de satisfaction ou
du bilan oral nous confortent encore dans lrsquoideacutee
que ces objectifs reacutepondent bien agrave ceux des
personnes et sont atteignables dans le cadre
de ces seacutejours
Crsquoest lrsquooccasion de partager une semaine de
vacances tout agrave fait diffeacuterente du quotidien et
des repegraveres de chacun Le groupe se creacutee degraves
les premiegraveres heures de rencontre agrave lrsquoarriveacutee
Tout au long de la semaine chacun eacutevolue
dans sa propre probleacutematique
Les aidants deacutecouvrant drsquoautres pairs eacutechan-
geant avec drsquoautres prenant distance vis agrave vis
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 66
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
de leur veacutecu et deacutecouvrant le comportement de
leur proche avec drsquoautres personnes profes-
sionnels ou non
Les aideacutes qui se sont saisis des possibiliteacutes
offertes de faire autrement deacutecouvrir drsquoautres
vivre des moments de plaisir malgreacute le handi-
cap ou la maladie Eacutechanger avec drsquoautres qui
vivent des situations similaires
Lrsquoeacutevolution du groupe dans lequel une con-
fiance mutuelle srsquoinstalle et permet des interac-
tions et des eacutechanges tregraves riches humaine-
ment Chacun a pu recevoir et apporter agrave
lrsquoautre qursquoil soit aideacute ou aidant
Durant tout le seacutejour tout le monde peut se po-
ser deacutecouvrir lrsquoautre se deacutecouvrir dans des
moments partageacutes individuels ou collectifs
Proposer plein drsquounivers diffeacuterents des compeacute-
tences diffeacuterentes (prof de tai-chi le corps
penseacute le chant le savoir de lrsquoeacutemotion la socio-
estheacuteticienne le mieux avec soi-mecircme)hellip
Et le psychologue dans tout ccedila
Dans ce type de vacances jrsquointerviens en bi-
nocircme avec la responsable du seacutejour du deacutebut
du seacutejour jusqursquoau deacutepart des participants
Je me preacutesente en tant que psychologue Pour
la plupart crsquoest la premiegravere fois qursquoils rencon-
trent quelqursquoun de cette profession Vous allez
mrsquoanalyser me demande Jacques au deacutebut
du seacutejour Finalement vous ecirctes sympas les
psys Vous croyez qursquoil en y en pregraves de chez
moi me demandera-t-il en fin de seacutejour
Je suis tout le temps avec eux du soir au ma-
tin Pas tregraves acadeacutemique comme cadre de tra-
vail et pourtant comme souvent la clinique
vient nous proposer de penser autrement
Le rocircle essentiel du psychologue est que du
deacutebut agrave la fin du seacutejour il propose ce que je
nomme des bras psychiques Les 4 bras les
bras du cadre formel et les bras psychiques Fil
rouge tout le long du seacutejour Crsquoest par ce cadre
-lagrave que chacun va pouvoir se deacutetendre libeacuterer
la parole Lacirccher le faire du quotidien pour
tendre vers le vivre le ressentir et le partager
durant le seacutejour
Pour le psychologue partager le quotidien (du
petit deacutejeuner au dicircner) crsquoest ne pas ecirctre tout
le temps dans la distance mais ecirctre dans la
juste distance Alterner des moments formels
proposition de groupes de parole durant le seacute-
jour pour les personnes en situations drsquoaider et
celles qui reccediloivent de lrsquoaide) et de temps infor-
mels Crsquoest ecirctre disponible Crsquoest garantir lrsquoexis-
tence du maintien de la vie psychique et recon-
naicirctre la personne en tant que sujet pensant
ressentant deacutesirant
Tisser des liens Lacirccher le bras de son malade
changer de bras Faire confiance agrave lrsquoautre et
deacutecouvrir ainsi que lrsquoon peut soutenir lrsquoautre
dans ce qursquoil est capable de donner Faire con-
fiance est possible si le cadre est suffisamment
contenant pour se lrsquoautoriser
Deacutecloisonner les rocircles et les fonctions de cha-
cun Les cloisons tombent Le fil qui nous tient
et nous unit dans le lien agrave lrsquoautre reste Prendre
soin de soi
Exemple du massage des mains avec la socio-
estheacuteticienne En groupe de parole eacutemerge
alors que les mains ne servent pas qursquoagrave se te-
nir ou tenir lrsquoautre les mains se croisent dans
le relationnel et la communication Ne plus ecirctre
dans le soigner la maladie mais dans le pren-
dre soin de ce qui nous lie agrave lrsquoautre
Accompagner lrsquoaidant agrave cheminer vers le si
moi je vais mieux alors lui ira peut ecirctre mieux
au lieu de si il va bien je vais bien
Durant le seacutejour je prends des notes tous les
soirs sur chaque participant Notes drsquoimpres-
sion de ressenti et de questions qui me per-
mettent de comprendre lrsquoeacutevolution psycho-
dynamique de chacun et de chaque duo
Deux fois en moyenne durant le seacutejour jrsquoap-
pelle une collegravegue afin de pouvoir parler pen-
ser et eacutelaborer le veacutecu partageacute
Je propose un moment de reacuteflexion sur la rela-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 67
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
tion drsquoaide avec les aidants Je propose un
temps de parole et drsquoeacutechange sur le veacutecu de
lrsquoaideacute
Lors du bilan le rocircle de la psychologue est tou-
jours valoriseacute Non confondu avec les temps
drsquoanimation crsquoest un espace drsquoeacutechange de soi
et de lrsquointime qui est possible parce qursquoun lien
de confiance dans le quotidien srsquoest creacuteeacute Nous
partageons nos savoirs ceux de ma connais-
sance avec ceux de leur expeacuterience Jrsquoai deacute-
couvert ce que crsquoest une psy Ce nest pas si
grave ccedila srsquoavegravere mecircme plutocirct utile
Ces seacutejours sont lrsquooccasion aussi pour les pro-
fessionnels intervenants drsquoenrichir leurs con-
naissances et leurs pratiques vis-agrave-vis de ce
qursquoest la relation aidant-aideacute en partageant leur
quotidien pendant quelques jours
Comprendre le lien aidantaideacute dans ce qui se
joue au quotidien au plus intime au plus pro-
fond
Le seacutejour ne dure qursquoune semaine Cette se-
maine est en dehors du quotidien de chacun
Elle montre que de vivre eacutechanger rire parta-
ger du plaisir avec drsquoautres est possible et es-
sentiel Elle permet ainsi aux couples ou duos
de se ressourcer et de repeacuterer les plaisirs qui
fondent et nourrissent leur relation partageacutee
Merci de votre attention
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 68
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Hocircpital Saint Louis
gt Laccompagnement psychologique par teacuteleacute-
phone dans les maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere Page 69
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale de
grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Hocircpital Jean Verdier Page 78
gt Psychologue clinicien aupregraves du personnel
missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
Page 82
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 69
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les
maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere
L a Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des
Maladies de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) a
eacuteteacute creacuteeacutee en 2001 par le Ministegravere des
Solidariteacutes de la Santeacute et de la Famille A la
disposition du grand public et des profession-
nels de terrain elle a pour mission lrsquoaide au
diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale so-
ciale et psychologique des patients et de leur
famille
La Cellule est nicheacutee au cœur de lrsquohocircpital de la
Pitieacute-Salpecirctriegravere dans lrsquoune des trois loges au-
trefois destineacutees aux alieacuteneacutes Elle a la particu-
lariteacute de ne pas accueillir physiquement le pu-
blic auquel elle srsquoadresse lrsquoaide qursquoelle pro-
pose srsquoeffectue essentiellement par teacuteleacutephone
En juin 2003 jrsquointegravegre pour un tiers-temps de
psychologue lrsquoeacutequipe deacutejagrave composeacutee drsquoun meacute-
decin coordinateur drsquoun meacutedecin attacheacute
drsquoune assistante sociale drsquoune assistante de
recherche clinique et drsquoune secreacutetaire
A cette eacutepoque je treacutebuche agrave lrsquoenvi sur lrsquoimpro-
nonccedilable Creutzfeldt-Jakob et examine drsquoun
œil dubitatif ma fiche de poste comment assu-
rer un soutien psychologique exclusivement
teacuteleacutephonique Eacutetait-ce reacutealisable efficace ad-
missible
PREacuteAMBULE
Les Maladies de Creutzfeldt-Jakob sont con-
nues de longue date les premiers cas ont eacuteteacute
deacutecrits par Creutzfeldt et Jakob dans les an-
neacutees 1920 Ce sont des maladies neurodeacutegeacute-
neacuteratives rares (qui se traduisent par une deacute-
mence et une grabatisation) 15 cas par mil-
lion drsquohabitants et par an dans tous les pays ougrave
existe une surveillance eacutepideacutemiologique En
France elles concernent une centaine de cas
par an
Principalement connues du grand public sous
le nom de maladie de la vache folle il existe
pourtant trois formes diffeacuterentes de MCJ avec
pour chacune drsquoelles ses speacutecificiteacutes On les
classe en fonction de leur mode de transmis-
sion la forme sporadique (aleacuteatoire) les
formes heacutereacuteditaires (MCJ geacuteneacutetiques syn-
drome de Gertsmann-Straussler-Scheinker
Insomnie Fatale Familiale) et les formes ac-
quises (formes iatrogegravenes des hormones de
croissance variante de la MCJ)
Le poste de psychologue avait eacuteteacute creacuteeacute pour se
consacrer principalement au travail drsquoeacutecoute
des personnes agrave risque de deacutevelopper une
MCJ suite agrave un traitement par hormones de
croissance contamineacutees Puis il srsquoest eacutetendu agrave
lrsquoeacutecoute de toute personne concerneacutee directe-
ment ou non par une MCJ quelle qursquoen soit la
forme
DE LrsquoENTRETIEN PONCTUEL AU SUIVI
La nature teacuteleacutephonique des entretiens psycho-
logiques est le fait drsquoune indeacutepassable reacutealiteacute
la dimension nationale du champ drsquointervention
de la Cellule exclut lrsquoeacuteventualiteacute drsquoentretiens en
face agrave face Mais si en 2011 les suivis psycho-
logiques par teacuteleacutephone se deacuteveloppent agrave
grands pas en 2003 rien nrsquoeacutetait moins eacutevident
que cette forme drsquoaccompagnement lagrave
Agrave cette eacutepoque drsquoailleurs la prise en charge
psychologique au sein de la Cellule se limitait agrave
la proposition drsquoun entretien teacuteleacutephonique pour
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 70
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
faire le point agrave des personnes qui avaient ap-
peleacute pour une toute autre demande principale-
ment drsquoordre meacutedical ou social Agrave lrsquooccasion de
ces demandes certains appelants manifes-
taient des signes de souffrance lieacutee agrave leur si-
tuation peur de la maladie du risque de la deacute-
velopper anxieacuteteacute suite agrave lrsquoannonce de la mala-
die drsquoun proche imminence de son deacutecegraves etc
Les membres de lrsquoeacutequipe les informaient alors
de la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par la psycho-
logue de la Cellule pour parler des difficulteacutes
qursquoils traversaient en ces moments critiques
Ces entretiens teacuteleacutephoniques ponctuels (de 45
minutes) eacutetaient destineacutes agrave contenir les an-
goisses et la deacutetresse des appelants Puis au
besoin jrsquoorganisais un suivi psychologique de
proximiteacute (psychologues ou psychiatres libeacute-
raux Centres Meacutedico-Psychologiques
(CMP)
Ainsi la proceacutedure entretien ponctuel - reacuteorien-
tation nous semblait reacutepondre au besoin ponc-
tuel drsquoeacutetayage des appelants et correspondre
aux exigences de fonctionnement en plate-
forme nationale de la Cellule Circonscrite pla-
nifieacutee et probablement eacuteconomique sur le plan
psychique cette proceacutedure nous rassurait-elle
aussi Quand bien mecircme elle a plieacute sous le
poids de la reacutealiteacute et a consideacuterablement eacutevo-
lueacute depuis 2003
En effet alors que le nombre annuel de ma-
lades concerneacutes par les MCJ demeure stable
le volume annuel drsquoentretiens psychologiques
lui est passeacute de 40 agrave 260 en huit ans Ainsi
110 personnes ont eacuteteacute suivies ou ont beacuteneacuteficieacute
de seacutequences de soutien de plus de 3 entre-
tiens teacuteleacutephoniques Cela repreacutesente 84 des
personnes ayant eu un premier contact avec le
psychologue Et tandis que la proceacutedure preacute-
voyait un ou deux entretiens la dureacutee des sui-
vis est en moyenne de neuf mois (de trois se-
maines agrave trois ans) drsquoune rythmiciteacute allant drsquoun
entretien hebdomadaire agrave un entretien men-
suel en fonction des besoins Comment expli-
quer cette eacutevolution
Faut-il incriminer les traditionnels obstacles re-
latifs agrave la prise en charge psychologique de
proximiteacute rareteacute des psychologues dans cer-
taines reacutegions surcoucirct financier drsquoune theacuterapie
CMP engorgeacuteshellip Peut-ecirctre mais ils ne suf-
fisent pas agrave expliquer lrsquoaugmentation remar-
quable du nombre drsquoentretiens psychologiques
ni lrsquoallongement de la dureacutee des suivis
Aujourdrsquohui nous pouvons avancer drsquoautres
arguments pour expliquer cette eacutevolution ce
sont les particulariteacutes de la maladie tout autant
que celles lieacutees agrave la teacuteleacutephonie qui ont engen-
dreacute ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique
LE CADRE
Un constat les orientations pourtant
travailleacutees (contact teacuteleacutephonique avec le psy-
chologue de proximiteacute informations deacutetailleacutees
sur les speacutecificiteacutes de la maladie et leur impact
sur lrsquoentourage) nrsquoont qursquoexceptionnellement
abouti les patients demandaient agrave reprendre
contact avec la psychologue de la Cellule Par-
tant de ce constat le dispositif drsquoaide psycholo-
gique proposeacute par le psychologue aux per-
sonnes qui appelaient a rapidement eacutevolueacute
Les quelques hypothegraveses concernant la difficul-
teacute du recours agrave la proximiteacute seront abordeacutees
tout au long de cet article
Agrave lrsquoheure actuelle quelle que soit la forme de
MCJ lrsquoappelant contacte la Cellule pour une
demande drsquoaide principalement drsquoordre meacutedi-
cal Les deux meacutedecins nrsquoeacutetant pas preacutesents agrave
la Cellule en permanence crsquoest la secreacutetaire
qui recueille les attentes Elle preacutesente le fonc-
tionnement global de la Cellule et eacutevoque sys-
teacutematiquement la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par
la psychologue Lorsqursquoelle ressent particuliegrave-
rement intenseacutement la deacutetresse de lrsquoappelant
elle insiste sur lrsquoimportance drsquoun entretien avec
la psychologue qui connaicirct tregraves bien la mala-
die un argument de poids pour les personnes
deacutesempareacutees qui heacutesitent pourtant agrave demander
de lrsquoaide
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 71
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Rares sont ceux qui demandent spontaneacutement
un entretien psychologique Mais rares sont
ceux qui le refusent lorsqursquoil leur est proposeacute
Cette invitation agrave ecirctre entendu loin de court-
circuiter la deacutelicate question de la demande
theacuterapeutique nous semble plutocirct lui permettre
drsquoadvenir Agrave ce titre nul doute que le deacutevelop-
pement du nombre de suivis psychologiques
reacutealiseacutes agrave la Cellule est en rapport direct avec
les qualiteacutes drsquoaccueil et lrsquoacuiteacute intuitive de sa
secreacutetaire
Ainsi cette derniegravere prend note des disponibili-
teacutes horaires de lrsquoappelant et apregraves avoir re-
cueilli lrsquoaccord preacutealable de ce dernier me les
transmet au plus vite Mon premier appel au
cours duquel nous eacutevoquons la situation de
crise a souvent lieu dans les 48 heures Cette
reacuteactiviteacute de prise de contact est un eacuteleacutement
deacuteterminant dans lrsquoeacutetablissement drsquoun lien de
confiance la premiegravere pierre drsquoun espace con-
tenant
Nous ne reacutealisons pas ou peu drsquoentretiens en
urgence la Cellule ne srsquoapparente pas agrave une
permanence drsquoeacutecoute 24h24 Drsquoailleurs la
simple date de rendez-vous sur mon agenda a
suffit agrave me calmer (hellip) Jrsquoeacutetais compleacutetement
bloqueacutee paniqueacutee et je me suis remise agrave pen-
ser et agrave geacuterer le quotidien que je ne geacuterais
plus
Ce premier entretien a une tonaliteacute toute parti-
culiegravere Agrave lrsquoinverse peut-ecirctre drsquoun premier ren-
dez-vous en face agrave face lrsquoentretien teacuteleacutepho-
nique semble provoquer un relacircchement des
meacutecanismes de deacutefenses et lrsquoeacutemergence des
processus primaires affolement pleurs pen-
seacutees parfois deacutesorganiseacutees coq agrave lrsquoacircne Lrsquoap-
pelant se deacuteverse deacuteballe tout en vrac Un
relacircchement induit drsquoabord par lrsquoabsence
drsquoinformations visuelles cette sorte de veacutecu
drsquoanonymat qui autorise la leveacutee de la cen-
sure Vous ne me voyez pas alors je peux
tout dire sans conseacutequences Pourtant nom
preacutenom situation familiale et localisation geacuteo-
graphique pourraient objectivement freiner le
veacutecu drsquoanonymat Il nrsquoen est rien Ce premier
entretien ndash et les quelques suivants - souli-
gnent ainsi la primauteacute du voir sur le savoir de
lrsquoautre
Un relacircchement doublement favoriseacute par le fait
que lrsquoappelant demeure dans un espace qui lui
est propre familier choisi Je suis dans ma
chambre jrsquoai fermeacute la porte Je me suis ins-
talleacutee dans ma voiture pour notre rendez-vous
ici je suis tranquille et en seacutecuriteacute
Notons que le psychologue nrsquoeacutechappe pas agrave
cet effet de relacircchement calfeutreacute qursquoil est
dans son espace soustrait au poids du regard
de lrsquoautre Un relacircchement du corps qui favo-
rise le flottement neacutecessaire agrave son travail
drsquoeacutecoute des processus inconscients agrave lrsquoœuvre
chez lrsquoappelant
Dans la tregraves grande majoriteacute des cas le pre-
mier appel donne lieu agrave un second rendez-vous
teacuteleacutephonique dont nous convenons ensemble
des termes (date et heure) Le choix de la du-
reacutee des entretiens (toujours de 45 minutes) deacute-
coule certainement de notre pratique de lrsquoentre-
tien en face-agrave-face mais il srsquoest aveacutereacute tout agrave fait
pertinent dans la pratique de lrsquoentretien teacuteleacute-
phonique puisque trois quarts drsquoheure laissent
le temps agrave la personne drsquoeacutelaborer ses ressen-
tis Cette dureacutee nrsquoest pas drsquoembleacutee annonceacutee
mais plutocirct suggeacutereacutee Nous allons en rester lagrave
pour aujourdrsquohui parce qursquoil est lrsquoheurehellip nous
nous retrouvons donc lehellip agravehellip conclut systeacute-
matiquement nos entretiens
Crsquoest freacutequemment au deacutecours du troisiegraveme
entretien que les questions se posent sur la
poursuite et les modaliteacutes de la prise en
charge Vous consultez ougrave Je vous dois
combien Jrsquoai droit agrave combien drsquoentre-
tiens Agrave ces questions la prise en charge
exclusivement teacuteleacutephonique (aucun deacuteplace-
ment) la gratuiteacute (la Cellule prend en charge
tous les entretiens) et la possibiliteacute drsquoecirctre suivi
tant que le besoin srsquoen fait sentir srsquoapparente agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 72
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
un apaisant holding winicottien Dans ma si-
tuation crsquoest incroyable drsquoavoir le droit de se
laisser porterhellip
Les particulariteacutes du dispositif de suivi teacuteleacutepho-
nique semblent ainsi reacutepondre aux exigences
de la reacutealiteacute des appelants La premiegravere drsquoentre
-elles lrsquoabsence de deacuteplacement et la grande
souplesse drsquoorganisation qui en deacutecoule allegravege
consideacuterablement leur quotidien phagocyteacute par
la maladie Une theacuterapie en cabinet aurait eacuteteacute
inconciliable avec notre reacutealiteacutehellip tout autant
qursquoinfiltreacute de sentiments de culpabiliteacute
Comment prendre le temps de me plaindre
alors qursquoelle est en train de mourirhellip Je sais
que crsquoest important de parler mais je nrsquoaurais
pas pris le temps de consulter pour moi tandis
que ce temps est si preacutecieuxhellip je veux le pas-
ser aupregraves drsquoellehellip ccedila me soigne de ne pas
perdre une minute Ainsi pourtant installeacutes
chez eux ils peuvent srsquoabsenter sans culpabili-
teacute excessive Je ne suis pas loin de lui mais je
suis en consultation juste pour moihellip Je suis
seule avec lui
La seconde particulariteacute du suivi psychologique
par teacuteleacutephone compareacute agrave un dispositif theacutera-
peutique classique reacuteside dans le fait que crsquoest
le psychologue qui appelle systeacutematiquement
le patient Au moment ougrave lrsquoeacutetayage social fami-
lial et parfois professionnel se fissure et ougrave la
difficulteacute drsquoappeler agrave lrsquoaide se fait sentir cette
deacutemarche inverseacutee nrsquoest pas deacutenueacutee drsquoeffet
theacuterapeutique Crsquoest toujours nous qui de-
mandons partout de lrsquoaidehellip et lagrave quel repos
que ce soit vous qui veniez jusqursquoagrave moihellip Je
nrsquoaurais pas eu la force de faire une deacutemarche
de plushellip ccedila mrsquoaide agrave continuerhellip
Enfin ajoutons que dans ce temps extra-
ordinaire ougrave tout leur coucircte ougrave crsquoest nous qui
donnons tout de nous tout notre temps toute
notre eacutenergiehellip la gratuiteacute de la prise en
charge est un eacuteleacutement important pour les per-
sonnes qui appellent Cette gratuiteacute de soins
repreacutesentative des modaliteacutes de prises en
charge psychologiques agrave lrsquohocircpital contribue agrave
restaurer leur sentiment drsquoecirctre consideacutereacutees et
reconnues dans leur souffrance On srsquooccupe
aussi de moi
Neacuteanmoins certains appelants qui avaient en-
visageacute de consulter en libeacuteral ainsi precircts agrave de-
mander de lrsquoaide se deacuteplacer et payer leur
seacuteance srsquoeacutetaient vus confronteacutes agrave un autre
obstacle somme-toute infranchissable le ca-
ractegravere indicible du veacutecu des MCJ Comment
parler agrave quelqursquoun qui nrsquoa jamais vu cette mala-
die monstrueuse (hellip) Il faut la voir pour sa-
voirhellip Ici (agrave la Cellule) je suis en seacutecuriteacute vous
savez de quoi je parle sans que jrsquoen parle vrai-
ment (hellip) vous avez les mecircmes images que
moi dans la tecircte Pour ces appelants qui cher-
chent une communauteacute drsquoexpeacuterience le psy-
chologue se doit drsquoecirctre un sujet dont le savoir
nrsquoest pas que supposeacute
SUIVI POUR QUI SUIVI POUR QUOI
Nous distinguons trois cateacutegories drsquoappelants
les personnes malades crsquoest agrave dire symptoma-
tiques leur entourage (conjoints enfants pa-
rents fregraveres et sœurs) et les personnes agrave
risque de deacutevelopper la maladie (drsquoorigine geacute-
neacutetique ou iatrogegravene) Les appels des profes-
sionnels (assez rares) ne seront pas traiteacutes
dans cet article
En huit ans seulement trois personnes ma-
lades ont eacuteteacute en contact avec le psychologue
par teacuteleacutephone et nrsquoont beacuteneacuteficieacute que de deux
entretiens en moyenne En effet dans la majo-
riteacute des cas la maladie est suspecteacutee tardive-
ment apregraves une longue peacuteriode drsquoerrance meacute-
dicale Si bien que le patient deacutejagrave tregraves sympto-
matique est rarement en capaciteacute de parler
suffisamment distinctement (dysarthrie) pour
beacuteneacuteficier drsquoun entretien teacuteleacutephonique Drsquoautant
que les troubles neuropsychologiques et psy-
chiatriques associeacutes agrave une freacutequente anoso-
gnosie et une eacutevolution preacutecipiteacutee de la mala-
die rendent complexes la mise en place drsquoun
suivi
Monsieur K prend contact avec la Cellule ef-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 73
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
frayeacute par la deacutegradation de son eacutetat il tremble
tombe et perd la meacutemoire Il craint drsquoecirctre atteint
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob dont il se
sait agrave risque suite agrave un traitement par hor-
mones de croissance contamineacutees Je nrsquoose
pas en parler on va me regarder bizarrement
et srsquoinquieacuteter peut-ecirctre pour rien Mais lrsquoentre-
tien est difficile agrave mener au regard des troubles
cognitifs et dysarthriques de Monsieur K Nous
convenons neacuteanmoins drsquoun rendez-vous teacuteleacute-
phonique la semaine suivante Le jour-dit je
lrsquoappelle agrave son domicile Il ne se souvient ni de
moi ni de la raison de mon appel Il comprend
agrave peine les mots que je prononce Il raccroche
Crsquoest donc principalement agrave lrsquoentourage du ma-
lade que srsquoadresse le soutien psychologique
par teacuteleacutephone un entourage deacutemuni devant
cette maladie que personne ne connaicirct qui
effraie tout le monde et qui laisse chacun en
proie agrave un profond sentiment drsquoisolement Freacute-
quemment rencontreacute au deacutecours drsquoautres pa-
thologies neurodeacutegeacuteneacuteratives le sentiment
drsquoisolement semble pourtant exacerbeacute par les
speacutecificiteacutes de cette maladie meacuteconnue que
les meacutedias ont tocirct fait drsquoassimiler agrave une forme
de peste contagieuse foudroyante
monstrueuse Des qualificatifs qui srsquoillustrent
parfois crucircment dans la reacutealiteacute par un compor-
tement exageacutereacutement eacutevitant du corps meacutedical
Ils portent des masques des gants et entrent
prudemment dans la chambre Que dire en-
core de lrsquoamalgame de toutes les formes de
MCJ avec la plus meacutediatiseacutee drsquoentre-elles -la
vache folle - si ce nrsquoest qursquoil en ajoute au senti-
ment drsquoeacutetrangeteacute qursquoelles provoquent deacutejagrave
Ce nrsquoest pas un animal crsquoest un ecirctre hu-
main Mais ce nrsquoest pas tant la maladie qui
est contagieuse que lrsquoidentification menaccedilante
qursquoelle propose lrsquoidentification agrave lrsquoEcirctre animal
archaiumlque et agrave lrsquoEcirctre deacutement qui nrsquoest plus lui-
mecircme agrave la fois posseacutedeacute et deacuteposseacutedeacute de
son humaniteacute Les MCJ quelle qursquoen soit la
forme figureraient-elles la barbarie au sens
eacutetranger et sauvage du terme
Les familles sont comme prises au piegravege de
ces repreacutesentations collectives dont la vio-
lence inouiumle (jamais entendue) semblent les
expulser aux confins de la communauteacute hu-
maine Quand on a dit ce qursquoil avait tout le
monde a disparuhellip On a eu beau expliquer
qursquoil nrsquoy avait pas de risque de transmission
les gens sont terrifieacutes et prennent leur distance
Il nrsquoy a plus personne agrave qui parler Mais cette
expulsion nrsquoest pas toujours le fait du monde
exteacuterieur Lrsquoentourage peut se retirer spontaneacute-
ment du monde pour se soustraire au regard
que ce dernier pourrait porter sur lui Je ne
voulais pas qursquoon nous regarde comme des
becircteshellip alors jrsquoai disparu de la circulation
Dans ce contexte de mise en quarantaine dic-
teacutee ou spontaneacutee la seule ideacutee de lrsquoexistence
de la Cellule fait fonction de terre drsquoasile de
support identificatoire Un support identifica-
toire renarcissisant Ici je peux reprendre
forme humainehellip il y a quelqursquoun au bout du fil
Quelqursquounhellip et je me sens quelqursquoun en mi-
roir Parce qursquoavec tout ce qui nous arrive je
me sens tantocirct comme un chien galeux tantocirct
trimbaleacute comme un objethellip et de par son nu-
meacutero drsquoappel unique doubleacute drsquoune prise en
charge globale un support identificatoire struc-
turant Jrsquoai lrsquoimpression qursquoelle part en mor-
ceauxhellip petit bout par petit bouthellip lrsquoeacutequilibre la
tecircte la marche la vision la parolehellip sa vie
part en lambeauxhellip et moi je nrsquoarrive plus agrave
me rassemblerhellip Mais il y a tout le monde
(meacutedecins assistante sociale psychologue)
ici agrave la Cellulehellip ccedila me rassure de savoir que
vous parlez tous la mecircme langue que vous
faites corps
Outre lrsquoentourage des malades des personnes
dites agrave risque font appel agrave la Cellule des per-
sonnes agrave risque de MCJ suite agrave un traitement
par hormones de croissance contamineacutees et
des personnes agrave risque de MCJ drsquoorigine geacute-
neacutetique Dans les deux cas le veacutecu subjectif de
risque prend en otage les perspectives drsquoave-
nir Parce qursquoil annonce en mecircme temps le pire
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 74
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et la possibiliteacute drsquoy eacutechapper parce qursquoil
nrsquoindique ni la victime ni lrsquoheure de la catas-
trophe le risque peut donner agrave cette derniegravere
un caractegravere omnipreacutesent Quand je vais
bien je me prends agrave espeacuterer que je ne serai
jamais malade que tout ccedila nrsquoeacutetait qursquoun cau-
chemar Mais quand je me sens mal le risque
drsquoecirctre malade se transforme en fataliteacute Je me
sens condamneacutee (hellip) Finalement que ce soit
par lrsquoespoir ou la fataliteacute crsquoest un peu lagrave tout le
temps un peu partout en moi
Et si des moments drsquoaccalmie subsistent crsquoest
souvent un eacuteleacutement de la reacutealiteacute preacutesent ou agrave
venir qui vient attiser les angoisses drsquoecirctre ma-
lade
Concernant le drame des hormones de crois-
sance contamineacutees ce sont principalement les
diffeacuterentes eacutetapes du procegraves (ouverture en
2008 4 mois drsquoaudience rendu de justice en
2009 et mise en appel en 2010) qui ont deacuteclen-
cheacute une recrudescence des appels des per-
sonnes agrave risque Crsquoest cette histoire de pro-
cegraves (hellip) je lis tous les articles dans la presse
(hellip) Depuis je vais reacuteguliegraverement sur le site de
lrsquoInvs pour veacuterifier le nombre de deacutecegraves leurs
acircgeshellip Je me dis que moi crsquoest bon je suis
plus vieille ou jrsquoai reccedilu les hormones plus tard
(hellip) Je comprends ce procegraves mais je le mau-
dis Je me sentais bien ces derniers temps
Jrsquoavais construit mon petit igloo avec mon mari
dedans Et lagrave je souhaite hurler qursquoon mrsquoa cas-
seacute mon igloo Durant tout le deacuteroulement du
procegraves certains de ces jeunes agrave risque ont
eacuteteacute deacutebordeacutes par un puissant sentiment
drsquoambivalence entre le deacutesir et la peur qursquoon
leur reconnaisse le preacutejudice subi crsquoest agrave dire
le coucirct psychique de se savoir contamineacute Re-
connaissance qui aurait signeacute la reacutealiteacute du
risque qursquoils encouraient Si le procegraves vient agrave
statuer que je suis victime je ne pourrai plus
me dire que crsquoest juste un cauchemar et que je
vais me reacuteveiller (hellip) et puis jrsquoai peur que ccedila se
traduise par le deacuteclenchement de la maladie
Paradoxe de cette victimation crsquoest la meacutede-
cine qui a rendu malade Dire que crsquoeacutetait
pour me soignerhellip quelle ironiehellip Je nrsquoai pas
de symptocircme je sais mais je suis deacutejagrave morte
De peur Et en ces temps juridiques agiteacutes la
Cellule et ses meacutedecins tout particuliegraverement
se sont vus parfois pris dans les mecircmes filets
ambivalents On a fait confiance aveugleacutement
agrave la meacutedecine Comment pouvions-nous imagi-
ner que le mal viendrait de lagrave ougrave on lrsquoattendait
le moins A qui faire confiance maintenant
Notamment encourageacutes par les associations
avec lesquelles la Cellule entretient des liens
eacutetroits certains parents de jeunes agrave risque
ont fait appel agrave nous Notre vie est faite de
hauts et de bas Lorsqursquoon apprend qursquoun
jeune est mort toute lrsquohistoire remonte et puis
le temps passe et on fait comme si ccedila nrsquoexistait
plus Mais ces oscillations crsquoest de la tor-
ture Comment ne pas eacutevoquer aussi le veacutecu
dramatique de ces autres parents qui ont perdu
leur enfant parfois il y a longtemps Des pa-
rents encore submergeacutes par la peine et rongeacutes
par un fort sentiment de culpabiliteacute drsquoavoir
donneacute le feu vert aux meacutedecins pour gagner
quelques centimegravetreshellip drsquoavoir moi-mecircme
fait les injections drsquohormones Un sentiment de
culpabiliteacute exacerbeacute par la relaxe geacuteneacuterale des
preacutevenus apregraves 20 ans de proceacutedure Il y a
des victimes il faut des coupables (hellip) Crsquoest
comme si la Justice nous avait deacutesigneacutes cou-
pables agrave leur place
Dans ce contexte ougrave preacutedominent les senti-
ments de culpabiliteacute et parfois de honte le teacuteleacute-
phone est un outil de grand secours puisqursquoil
permet aux personnes de se soustraire au re-
gard de lrsquoAutre Cet Autre objet drsquoimplacables
projections accusatrices Je nrsquoaurais pas pu
consulter un psychologue en face-agrave face Jrsquoau-
rais eu trop peur de lire sur son visage le deacute-
goucirct le rejet le jugementhellip lagrave je peux dire ce
que je veux je ne vois pas votre reacuteactionhellip
crsquoest moins dur Mais pourquoi le psychologue
de la Cellule se precircte-il si rarement aux projec-
tions de nature perseacutecutrice Reacutepond-il agrave la
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 75
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
neacutecessiteacute de sauvegarder un bon objet Un
bon objet inteacuteriorisable susceptible de restaurer
a minima le narcissisme parental
Concernant les formes heacutereacuteditaires de MCJ
dans la majoriteacute des cas lorsque le diagnostic
tombe le malade est deacutejagrave au stade terminal de
la maladie Les membres agrave risque de la fa-
mille se retrouvent donc confronteacutes agrave deux
drames simultaneacutes la perte imminente de leur
proche et lrsquohorreur de leur possible devenir
Voilagrave en une fraction de seconde le monde
bascule Je regardais ma megravere mourir jrsquoima-
ginais que jrsquoallais finir comme elle et je pensais
agrave mes enfants qui auraient peut-ecirctre le mecircme
destin Puis viennent les angoisses pour les
fregraveres et sœurs leurs enfants crsquoest lrsquoheacuteca-
tombehellip
Comment en parler aux enfants Peut-on
continuer agrave vivre normalement en sachant que
tout peut basculer en quelques mois Je
nrsquoarrecircte pas de pleurer est-ce le deacutebut de la
maladie Faut-il faire le test geacuteneacutetique
Autant de questions difficiles agrave adresser agrave lrsquoen-
tourage Jrsquoai appeleacute la Cellule parce que je ne
veux pas affoler mon mari mes enfantshellip (hellip)
et je ne suis pas encore precircte agrave me retrouver
en consultation de geacuteneacutetique (hellip) ce serait trop
reacuteel (hellip) pour lrsquoinstant quand je raccroche je
peux faire comme si ccedila nrsquoexistait pas
NATURE DE LrsquoESPACE TEacuteLEacutePHONIQUE
Mais de quelle nature est cet espace teacuteleacutepho-
nique pour autoriser le patient agrave maintenir en
dehors de sa reacutealiteacute le contenu qursquoil y deacutepose
Lrsquoabsence de corps en preacutesence et lrsquoimmateacuteria-
liteacute de la voix comme unique canal de commu-
nication seraient-elles la clef du choix des pa-
tients drsquoun suivi teacuteleacutephonique plutocirct qursquoen cabi-
net Le teacuteleacutephone permettrait-il au patient de
srsquoaffranchir ponctuellement drsquoun trop de reacuteel et
de se proteacuteger de lrsquoeffraction qursquoopegravere la crudi-
teacute de ses preacuteoccupations mateacuterielles orga-
niques mais aussi existentielles Serait-elle la
figuration de ce temps intra-uteacuterin ougrave tout de la
reacutealiteacute sauf la megravere eacutetait en dehors ce temps
ougrave le lien intime avec elle nrsquoeacutetait que sons Je
vous parle et vous me parlez aussi dans le
creux de lrsquooreillehellip Vous ecirctes un peu mon es-
pace proteacutegeacute mon espace secret Ce temps
reacutevolu ougrave le lieu de rencontre (le ventre mater-
nel) entre la megravere et lrsquoenfant eacutetait lrsquoobjet de tous
les fantasmes Que dire drsquoautre en effet du lieu
de rencontre entre le psychologue et le pa-
tient qursquoil nrsquoest que scegravene psychique pur es-
pace temporel un ensemble chacun chez soi
Un espace qui srsquooffrirait donc plus encore et
plus subitement agrave la reacutegression du patient que
le divan de lrsquoanalyste ou lrsquoentretien agrave domicile
Parce qursquoelle les prive drsquoinformations agrave carac-
tegravere visuel (regards mimiques postures ges-
tuelles) et puisque rien ne fait obstacle ni chez
le patient ni chez le psychologue aux diffeacute-
rentes repreacutesentations fantasmatiques que
chacun a de lrsquoautre la teacuteleacutephonie se precircte agrave
une activiteacute imaginaire deacutebrideacutee Seules des
informations agrave caractegravere sonore telles que le
timbre de la voix les rythmes tons silences
intonations et bruits ambiants (il allume une ci-
garette elle ferme une porte la voix reacutesonne
comme dans un espace vide) donnent force et
forme agrave lrsquoespace theacuterapeutique Elles seules et
dans une immeacutediateteacute remarquable suffisent agrave
faire surgir le visage le corps et le lieu de
lrsquoautre Des lapsus agrave caractegravere visuels srsquoim-
miscent drsquoailleurs dans le discours des pa-
tients et du psychologue Je vois drsquoici la tecircte
que vous faites Nos rencontres teacuteleacutepho-
niques On se voit la semaine prochaine Des
deacutetails comme la silhouette la couleur des
yeux des cheveux des vecirctements un canapeacute
des photos au mur des sourcils fronceacutes ou une
moue deacutefaite sont-ils lrsquoexpression paroxystique
de lrsquoactiviteacute fantasmatique agrave lrsquoœuvre dans la
relation transfeacutero-contre-transfeacuterentielle entre
le patient et son theacuterapeute
Pourquoi lrsquoimage de cette patiente-lagrave tarde agrave se
construire en moi apparaicirct puis disparaicirct sans
que je puisse la saisir Parce qursquoelle joue agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 76
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
cache-cache avec son pegravere malade qui ne
doit pas la voir dans cet eacutetat de terreur Pour-
quoi ai-je oublieacute drsquoappeler ce patient aujour-
drsquohui alors que son nom est surligneacute dans mon
agenda Parce qursquoil me reacutepegravete chaque fois
que tout le monde lrsquooublie Pourquoi cet
autre patient a-t-il exceptionnellement deman-
deacute agrave deacuteplacer son rendez-vous Parce qursquoil
eacutetait justement question lors de notre dernier
entretien de deacuteplacer son agressiviteacute pour
eacutepargner sa femme malade
Pourquoi cette megravere au beau milieu de son
suivi donne-t-elle mon numeacutero au fils qui ne
lrsquoeacutecoute plus Pourquoi ce fils accepte-t-il
drsquoappeler le psychologue de sa megravere Pour-
quoi le psychologue accepte-t-il de suivre seacute-
pareacutement deux membres de la mecircme famille
tandis qursquoil heacutesiterait agrave le faire en cabinet
Parce que les espaces ndash uniquement fantas-
meacutes- sont bien distincts en lui et que leur rela-
tion reacuteclame drsquoecirctre tierciseacutee
Pourquoi cette demande impeacuterieuse de me voir
en consultation Parce que cette patiente non
reconnue par la justice dans son statut de
victime des hormones de croissance contami-
neacutees a besoin drsquoecirctre reconnue au sens pre-
mier du terme par le psychologue
Pourquoi cette crainte en moi agrave lrsquoideacutee de voir
ces patients-lagrave comme on pourrait avoir agrave
craindre de transgresser la regravegle fondamentale
drsquoabstinence Dans ce contexte de suivi teacuteleacute-
phonique -qui induit lrsquoeacuterotisation du lien agrave la
voix et un sentiment paradoxal de grande
proximiteacute voir serait-il devenu un eacutequivalent de
toucher et lrsquoacting out agrave eacuteviter
Ces quelques exemples de questionnements
du psychologue autour des manifestations
transfeacutero-contre-transfeacuterentielles agrave lrsquoœuvre
dans le suivi teacuteleacutephonique nous semblent rele-
ver drsquoun processus de type theacuterapie drsquoinspira-
tion analytique Un processus qui se partage
souvent en deux temps un temps de plainte et
un temps drsquoeacutelaboration psychique complexe au
cours duquel le patient rapporte spontaneacutement
ses recircves Des recircves dont le mateacuteriel fait lrsquoobjet
drsquointerpreacutetations par le psychologue
SUIVI TEacuteLEacutePHONIQUE AVEC OU SANS FIN
Il arrive qursquoapregraves le deacutecegraves de son proche le
patient srsquointerroge sur la leacutegitimiteacute de la pour-
suite du suivi comme si la survie du malade
avait jusqursquoici conditionneacute son droit agrave en beacuteneacutefi-
cier Il nrsquoen est rien alors tout ne srsquoarrecircte pas
pour moi non plus Cet espace temporel
sans corps en preacutesence qui a proteacutegeacute le pa-
tient des angoisses inheacuterentes agrave la reacutealiteacute
drsquoune seacuteparation annonceacutee permet et catalyse
mecircme parfois le travail de deuil Vous ecirctes un
peu comme mon fregravere [mort depuis 3 mois] je
ne le vois pas mais il est lagravehellip je ne le vois pas
mais je lrsquoentends parfoishellip comme avec vous
jrsquoapprends agrave dialoguer agrave lrsquointeacuterieur de moi avec
lui
La sortie du dispositif de soutien teacuteleacutephonique
est longuement travailleacute eacutevocation de lrsquoapregraves
eacutelaboration de la seacuteparation espacement pro-
gressif des entretiens Un cheminement au
cours duquel surgissent plus explicitement les
traces du caractegravere transitionnel de lrsquoespace
teacuteleacutephonique Un espace qui sans ecirctre une
permanence drsquoeacutecoute a eacutetayeacute le sentiment de
permanence drsquoobjet Je ne vous ai jamais
vuehellip alors je nrsquoai pas peur de ne plus vous
voir Vous ecirctes un peu comme toujours lagrave
CONCLUSION
La Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des Mala-
dies de Creutzfeldt-Jakob a pour mission lrsquoaide
au diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale
sociale et psychologique des patients et de leur
famille Lrsquoaide proposeacutee srsquoeffectue essentielle-
ment par teacuteleacutephone
La faisabiliteacute et la leacutegitimiteacute drsquoun soutien psy-
chologique exclusivement teacuteleacutephonique a eacuteteacute
lrsquoobjet de nombreuses interrogations pour le
psychologue quelle est la nature de cet es-
pace particulier drsquoaccompagnement Quels en
sont les beacuteneacutefices Peut-on soutenir un veacuteri-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 77
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
table travail psychique dans le cadre de ce dis-
positif Est-il leacutegitime de parler de travail psy-
chotheacuterapeutique
Les 110 suivis psychologiques effectueacutes agrave la
Cellule depuis 2003 nous permettent aujour-
drsquohui drsquoaffirmer que notre travail de psycho-
logue ne se limite pas agrave une pure fonction de
soutien En effet bien que tregraves eacuteloigneacute de la
situation analytique le processus agrave lrsquoœuvre
dans le dispositif teacuteleacutephonique semble srsquoappa-
renter agrave celui drsquoun dispositif de type psychotheacute-
rapeutique drsquoinspiration analytique le cadre
est poseacute et penseacute par le psychologue
(entretiens de 45 minutes notion de rendez-
vous teacuteleacutephoniques rythmiciteacute souvent hebdo-
madaire suivi au long cours) lrsquoassociation
libre est encourageacutee lrsquointerpreacutetation des dires
lrsquoanalyse des recircves lrsquoanalyse du transfert et du
contre-transfert par le psychologue est freacute-
quente et le patient effectue un veacuteritable travail
drsquoeacutelaboration psychique au deacutecours du suivi
Lrsquoexpeacuterience nous deacutemontre que les particulari-
teacutes de lrsquoaccompagnement teacuteleacutephonique
(notamment privation drsquoinformations visuelles)
ne freinent pas le processus theacuterapeutique
Elles pourraient mecircme le favoriser
(relacircchement du systegraveme deacutefensif)
Ainsi ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique agrave lrsquohocircpital est au service drsquoune
difficulteacute des personnes qui y ont recours la
crainte et ou lrsquoimpossibiliteacute drsquoaller consulter un
psychologue en face-agrave face
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
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PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 78
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots
en images
Natascia Serbandini
Service de gyneacutecologie-obsteacutetrique Hocircpital Jean Verdier
A pregraves avoir eacutevoqueacute briegravevement les speacute-
cificiteacutes du deuil peacuterinatal je vais vous
preacutesenter une pratique nouvelle au sein
de lrsquoAPHP un groupe de parole hospitalier
destineacute aux femmes ayant fait une interruption
meacutedicale de grossesse Ce groupe est neacute en
2008 un an apregraves sa creacuteation nous avons choi-
si drsquointroduire une cameacutera lors des seacuteances
Enfin je deacutecrirai lrsquoimpact de la cameacutera sur le
groupe et le projet de film que nous sommes
en train de reacutealiser
LES SPEacuteCIFICITEacuteS DU DEUIL PEacuteRINATAL
La deacutecouverte dune pathologie fœtale incu-
rable pendant la grossesse est un eacuteveacutenement
hautement traumatique pour les parents du fu-
tur beacutebeacute Lhocircpital Jean Verdier unique Centre
Pluridisciplinaire de Diagnostic Preacutenatal du 93
accueille et accompagne les parents degraves lrsquoan-
nonce du diagnostic jusqursquoagrave lrsquointerruption meacutedi-
cale de grossesse quand les parents la deman-
dent
Le deuil peacuterinatal preacutesente des speacutecificiteacutes qui
le distinguent du deuil classique il est toujours
accompagneacute drsquoun fort sentiment de culpabili-
teacute amplifieacute dans le cadre des Interruptions Meacute-
dicales de Grossesse par la prise de deacutecision
(Tous les textes en italique sont issus de teacutemoi-
gnages de femmes lors du groupe de parole)
Pendant le travail je le sentais encore mon
beacutebeacute est neacute vivant jrsquoavais vraiment cette sen-
sation qursquoil voulait se battre Jrsquoai enleveacute tout cet
espoir de vie et je me demande de quel droit
Crsquoest cette impression drsquoavoir le choix sur sa
vie ou sa mort crsquoest tellement lourd agrave porter
Une autre speacutecificiteacute est lrsquoabsence drsquoun veacutecu
partageacute avec cet enfant en dehors de la gros-
sesse Geneviegraveve Delaisi de Parseval
(psychanalyste) Comment faire le deuil de ce
qui nrsquoa pas eu lieu drsquoon ne sait quoi et de
presque rien Lrsquoobjet perdu reste agrave perdre
comment accepter la seacuteparation drsquoavec un ecirctre
que lrsquoon nrsquoa pas connu
Le deuil est un processus intrapsychique con-
seacutecutif agrave la perte drsquoun objet drsquoattachement par
lequel le sujet reacuteussit progressivement agrave se deacute-
tacher de celui ci Jean Philippe Legros
(psychologue psychanalyste au centre de meacute-
decine foetale Cochin-St Vincent de Paul) dans
lrsquoarticle L lsquoarrecirct de vie in utero ou lrsquoerrance des
fœtus un possible deuil preacutecise que dans le
deuil peacuterinatal il srsquoagit drsquoun deacutetachement sans
renoncement
Ensuite il srsquoagit drsquoun deuil feacuteminin un deuil
veacutecu tregraves diffeacuteremment dans le couple
Mon mari lui a pris sa deacutecisionhellipje ne dis pas
que ccedila a eacuteteacute facile ccedila a ducirc ecirctre dur pour lui
aussi moi je la portais je la sentais bouger
Cette mort est intoleacuterable pour la megravere en lien
avec le sentiment drsquoomnipotence propre agrave la
grossesse intoleacuterable pour la megravere qui con-
naissait ce beacutebeacute et qui a ressenti ses mouve-
ments
Ce sentiment de toute puissance est amplifieacute
par le fait que la demande drsquoInterruption Meacutedi-
cale de Grossesse revient agrave la femme seule
signataire selon la loi
Je sais qursquoil souffre qursquoil est malheureux il a
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 79
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
la mecircme peine et la mecircme tristesse que moi
mais il ne llsquoexprime pas pareil il y a une culpa-
biliteacute plus importante chez la megravere
La perte du beacutebeacute est parfois difficilement re-
connue par les pegraveres qui nrsquoosent pas manifes-
ter leur souffrance et qui se projettent plus rapi-
dement dans lrsquoavenir
Leur deacutetresse reacutesulte en grande partie de la
mise agrave mal de la fonction contenante protec-
trice de la femme enceinte qursquoils assuraient
avant lrsquointerruption
Ce deuil est deacutepourvu drsquoune dimension so-
ciale Franccediloise Moleacutenat (peacutedopsychiatre) dit
Iil existe une cicatrice dans le corps de la
megravere mais pas de cicatrice sociale
Beaucoup de personnes mrsquoont dit crsquoest
dingue que lrsquoadministration franccedilaise se mecircle
de ccedila (en parlant de la reconnaissance agrave la
Mairie) alors qursquoil nrsquoy a mecircme pas de beacutebeacute il
eacutetait pas neacute
Les rituels autour du deuil ont une fonction psy-
chique ils offrent au mort un deacutedommagement
symbolique Ils assurent une reconnaissance
de la peine des proches par le groupe
Crsquoest seulement depuis quelques anneacutees que
les rites et rituels sociaux autour des beacutebeacutes
morts in utero ont pris leur place agrave travers la
reconnaissance agrave lrsquoEtat Civil et lrsquoeacutevolution des
pratiques drsquoaccompagnement dans les materni-
teacutes (preacutesentation du corps du beacutebeacute organisa-
tion drsquoobsegraveques)
Ce travail est reacutealiseacute dans le but de creacuteer et
drsquoancrer des souvenirs de cet enfant afin de
faire des parents des parents
Jrsquoavais toujours une photo de mon fils dans
mon portefeuille jrsquoen avais besoin Crsquoest peut
ecirctre parce que je ne voulais pas qursquoon me dise
que crsquoeacutetait rien
LE GROUPE DE PAROLE Agrave JEAN VERDIER
Lors des entretiens avec le gyneacutecologue ou
dans le cadre drsquoun suivi psychologique quelque
temps apregraves les Interruptions Meacutedicales les
femmes eacutevoquaient de maniegravere reacutecurrente leur
solitude lrsquoimpossibiliteacute de partager leur souf-
france et le temps passant de ne plus pouvoir
parler de leur beacutebeacute dans le cercle familial et
amical Cet oubli de lrsquoentourage et la reprise
drsquoune vie normale est source de culpabiliteacute
elles avaient le sentiment drsquoabandonner agrave nou-
veau leur beacutebeacute
Jrsquoai lrsquoimpression que personne ne me com-
prend jrsquoai lrsquoimpression drsquoecirctre seule au monde
de me noyer je survis Les gens ne peuvent
pas comprendre notre situation je nrsquoarrive pas
agrave leur dire ma souffrance immense
De cela est neacutee lrsquoideacutee de proposer un espace
drsquoeacutechanges entre femmes sous forme de
groupe de paroles Ce projet a eacuteteacute creacuteeacute agrave lini-
tiative commune du gyneacutecologue responsable
du Centre de Diagnostic Anteacutenatal et de moi-
mecircme
Il srsquoagit drsquoun groupe ouvert agrave toutes les femmes
ayant veacutecu une Interruption Meacutedicale de Gros-
sesse agrave Jean Verdier
Le groupe se reacuteunit une fois par mois pendant
une heure et demie et est co-animeacute par un bi-
nocircme psychologuepsychiatre et meacutedecinsage
femme
Le groupe constitue un cadre de confiance
une enveloppe psychique comme le dit An-
zieu propice agrave la mise en commun des charges
affectives et agrave lrsquoaccompagnement du deuil
De plus comme le rappelle Jean Philippe Le-
gros apregraves la perte drsquoun enfant par IMG la
crainte de la megravere contrairement aux parents
drsquoenfants porteurs drsquohandicap est lrsquoabsence du
regard des autres dans le reacuteel Cet ecirctre invi-
sible pour les yeux cet enfant que personne
drsquoautre nrsquoa connu risque de disparaicirctre Drsquoougrave
lrsquoimportance de creacuteer un espace physique (par
rapport aux espaces virtuels les forums sur
Internet tregraves freacutequenteacutees par les megraveres en-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 80
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
deuilleacutees) et psychique au sein de lrsquohocircpital afin
de reconnaicirctre lrsquoexistence de ces beacutebeacutes et per-
mettre agrave ces femmes drsquoecirctre megraveres
Les autres nous parlent comme si on avait
perdu quelque chose crsquoest quand mecircme un
ecirctre vivant crsquoeacutetait quand mecircme notre enfant
Lrsquoobjectif principal du groupe est de permettre
le partage drsquoexpeacuterience de ce deuil si particu-
lier drsquoecirctre rassureacutee par le parcours des autres
dans un cadre de reacutefeacuterence suffisamment
bon pour le dire avec les mots de Winnicott
Crsquoest vrai que discuter avec drsquoautres per-
sonnes qui lrsquoont veacutecu il y a longtemps et qui ont
su deacutepasser certaines eacutetapes ccedila aide ccedila
donne des cleacutes pour passer agrave lrsquoeacutetape suivante
LrsquoIDEacuteE DU FILM DES MOTS EN IMAGES
Le groupe a eacuteteacute tregraves freacutequenteacute degraves le deacutebut
Apregraves un an de fonctionnement le gyneacutecologue
a proposeacute drsquointroduire une camera afin de fil-
mer les seacuteances pour teacutemoigner de cette expeacute-
rience positive et faire connaicirctre cette pratique
Cette proposition a eacuteteacute discuteacutee par les
femmes au sein du groupe elles ont adopteacute
cette ideacutee et ont eacutelaboreacute avec nous les objectifs
du film
Teacutemoigner autour du deuil peacuterinatal en deacutecri-
vant les diffeacuterentes eacutetapes et souligner les beacute-
neacutefices drsquoun groupe de parole
A partir de leur veacutecu permettre une reacuteflexion
visant agrave ameacuteliorer les pratiques soignantes
dans les accompagnements du deuil peacuterinatal
agrave lrsquohocircpital
Nous avons filmeacute six seacuteances dune heure
trente avec deux techniques une cameacutera fixe
et une cameacutera mobile Ensuite nous avons eacuteta-
bli ensemble un plan pour le film reacutecit en ordre
chronologique du deacuteroulement de lrsquoIMG Les
diffeacuterents chapitres
Lrsquoannonce et la deacutecision lrsquohospitalisation le
retour agrave la maison lrsquoenterrement lrsquoentourage
lrsquoautopsie la grossesse drsquoapregraves le groupe
La preacutesence de la cameacutera a eu un impact sur
le deacuteroulement des seacuteances les theacutematiques
ont eacuteteacute eacutetablies agrave lrsquoavance ce qui a permis de
structurer davantage les seacuteances tout en gar-
dant la liberteacute drsquoaborder les questions eacutevo-
queacutees spontaneacutement par les femmes
Comme le dit Winnicott lrsquoenfant existe dans les
yeux de sa megravere le visage de lrsquoenfant que lrsquoon
nrsquoa pas vu ne permet pas agrave la megravere de se re-
connaicirctre comme megravere
Le film vient srsquoinscrire dans cette neacutecessiteacute de
reconnaissance de laisser une trace de cette
preacutesence de ce beacutebeacute qui nrsquoa plus de corps
physique mais qui existe dans lrsquohistoire fami-
liale
La preacutesence de la cameacutera a donc eu des effets
beacuteneacutefiques pour les femmes mais aussi pour
les soignants la richesse du mateacuteriel clinique
recueilli nous a permis drsquoobserver lrsquoeacutevolution
des femmes dans le processus de deuil et
drsquoanalyser leur posture au sein du groupe ainsi
que celle des animateurs
Si le groupe a fonction de portage pour cer-
taines pour drsquoautres crsquoest le lieu ougrave elles peu-
vent donner un sens agrave ce qursquoelles ont veacutecu en
partageant leur expeacuterience avec drsquoautres
Nous avons constateacute en visionnant les
seacuteances que plusieurs femmes qui semblent
ecirctre dans un deuil normal continuent agrave freacute-
quenter le groupe alors que leur interruption
remonte agrave il y a trois ou quatre ans
Le besoin de continuer agrave eacutevoquer leur beacutebeacute
nrsquoest pas un signe de deuil pathologique mais
une neacutecessiteacute de la ceacuteleacutebration de la meacutemoire
de ces beacutebeacutes disparus Ces femmes veulent
garder comme le dit Jean Philippe Legros une
dose homeacuteopathique du trauma qui gueacuterit de
lui en ne se seacuteparant jamais
Quand jrsquoai dit agrave ma responsable que je mrsquoab-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 81
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
sentais pour venir au groupe de parole elle
mrsquoa dit Ben tu en as deacutejagrave un (enfant) qui est lagrave
pourquoi tu continues agrave aller agrave ce groupe Je
lui ai dit Crsquoest pas parce que jrsquoai reacuteussi agrave
avoir un petit garccedilon que je vais compleacutetement
oublier ce qui concerne mon premier enfant
justement lui il nrsquoest pas lagrave crsquoest pour ccedila que
je continue agrave aller au groupe pour parler de lui
pour le faire exister
Aujourdrsquohui le projet du film est en cours nous
avons imagineacute deux versions
- une version courte de 20 minutes un teacutemoi-
gnage du groupe sur le deuil peacuterinatal agrave diffu-
ser agrave lrsquoexteacuterieur
- une version longue de 52 minutes destineacutee
aux femmes et en interne agrave lrsquohocircpital Jean Ver-
dier
Le premier montage a eacuteteacute visionneacute par les
femmes qui ont participeacute aux choix des extraits
Nous espeacuterons pouvoir le diffuser dans un ave-
nir proche agrave un large nombre de professionnels
de santeacute
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Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions
enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis
Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
P our cette preacutesentation des missions du
psychologue clinicien aupregraves du per-
sonnel agrave
lrsquoAP-HP nous avons choisi de commencer par
reprendre quelques eacuteleacutements agrave lrsquoorigine de la
creacuteation de nos postes
Dans une seconde partie nous deacutefinirons et
preacutesenterons la diversiteacute des missions speacuteci-
fiques aux psychologues du personnel sur site
A la fois clinique et institutionnelle notre pra-
tique nous amegravene agrave ecirctre en contact reacutegulier
avec les diffeacuterents acteurs internes ou ex-
ternes agrave lrsquoinstitution concerneacutes par la protec-
tion de la santeacute au travail Ainsi cette collabo-
ration neacutecessite un important travail de deacuteve-
loppement et drsquoentretien du reacuteseau
Ensuite nous envisagerons les divers ques-
tionnements souleveacutes par ce poste position-
nement parfois drsquoeacutequilibriste cadre speacutecifique
de prise en charge ou encore limites de cette
pratique
HISTORIQUE
Par la loi de 1983 concernant les droits et obli-
gations des fonctionnaires les personnels hos-
pitaliers de par leur statut sont proteacutegeacutes par
leur administration
A la fin des anneacutees 90 le deacuteveloppement de la
preacutevention des violences apparaicirct comme pri-
mordial puis une circulaire intituleacutee Preacutevention
et accompagnement des situations de vio-
lence est reacutedigeacutee en deacutecembre 2000
Le constat de lrsquoaugmentation de la violence au
quotidien dans les hocircpitaux a fait naicirctre au sein
de lrsquoAP-HP des preacuteoccupations et des de-
mandes au niveau institutionnel Ceci a mobili-
seacute un ensemble drsquoacteurs concerneacutes par la
protection de la santeacute des personnels Ainsi la
mise en place drsquoune cellule drsquoaccueil et de
prise en charge des agents victimes de vio-
lence agrave lrsquoAP-HP eacutemane de ces travaux Deux
postes de psychologues cliniciennes ont eacuteteacute
creacuteeacutes au Siegravege en 2000 et 2001 puis drsquoautres
postes de psychologues cliniciens aupregraves du
personnel ont vu le jour sur diffeacuterents sites de
lrsquoAP-HP
Face agrave lrsquoamplification des violences en milieu
hospitalier lrsquoAP-HP a eacutegalement meneacute en 2004
une campagne drsquoinformation sur le thegraveme
Violences de patients drsquoaccompagnants de
visiteurs comment soutenir les personnels qui
en sont victimes Ces derniers ignorent sou-
vent leurs droits et les circuits internes pour ob-
tenir le meilleur accompagnement dans leurs
deacutemarches Lrsquoeacutelaboration drsquoun guide a permis
de deacutecrire les diffeacuterentes modaliteacutes de prise en
charge en cas drsquoagression prise en charge
meacutedico-psychologique sociale meacutedico-
administrative ou encore juridique
Au-delagrave de la preacutevention et de la prise en
charge de la violence agrave lrsquohocircpital les missions
du psychologue clinicien aupregraves du personnel
sont orienteacutees vers deux axes principaux la
clinique individuelle et collective et les activiteacutes
institutionnelles
DEacuteFINITION DU POSTE ET MISSIONS SPEacuteCIFIQUES
Le poste de psychologue du personnel a pour
fonction principale de creacuteer un espace drsquoeacutecoute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 83
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et de prise en charge individuelle ou collective
pour tout le personnel de lrsquohocircpital
Toute personne professionnelle de lrsquohocircpital
peut si elle en a la neacutecessiteacute (si elle le sou-
haite) prendre rendez vous pour une premiegravere
consultation et ce quel qursquoen soit le motif pro-
fessionnel ou personnel
Les bureaux permettent de garantir la confiden-
tialiteacute
Les consultations se font sur rendez-vous afin
drsquoeacuteviter lrsquoattente et pour preacuteserver la discreacutetion
Ils sont libres et totalement confidentiels
Des rendez-vous en soireacutee peuvent ecirctre ameacute-
nageacutes
Le deacutelai maximum drsquoobtention drsquoun rendez-
vous est environ de 15 jours
Le nombre de consultations deacutepend de la de-
mande initiale Il peut aller drsquoun seul entretien agrave
plusieurs Lorsque la personne deacutesire ou neacute-
cessite une prise en charge plus longue elle
est orienteacutee agrave lrsquoexteacuterieur Il est preacuteciseacute agrave tout
agent en deacutebut drsquoentretien que ce lieu de con-
sultation a pour vocation un accompagnement
agrave court ou moyen terme
Il est eacutevident que la fonction de psychologue du
personnel est agrave viseacutee clinique crsquoest agrave dire
- que le psychologue du personnel nrsquointervient
pas directement dans les eacutevaluations utiles agrave la
gestion du personnel et nrsquoeacutemettent aucun avis
concernant lrsquoaptitude au poste de travail des
agents reccedilus en consultation (ce qui est de
lrsquounique ressort du meacutedecin du travail) hellip
- que le psychologue du personnel nrsquoest pas
psychologue du travail donc nrsquointervient pas
dans le reclassement les mobiliteacutes profession-
nelles le recrutementhellipMais nos missions
srsquoaccordent bien sur avec celles du CRH si neacute-
cessaire
Le psychologue du personnel comme les
autres psychologues cliniciens de lrsquoeacutetablisse-
ment deacutepend directement du directeur de lrsquoeacuteta-
blissement et a des liaisons fonctionnelles
avec le drh par exemple ou le meacutedecin du tra-
vail
Il rend un bilan annuel quantitatif indiquant cer-
taines donneacutees de son activiteacute tout en preacuteser-
vant lrsquoanonymat et la confidentialiteacute Il peut arri-
ver que ce bilan soit preacutesenteacute aux instances
types CHSCT
Globalement le temps de travail du psycho-
logue du personnel se reacutepartit comme suit
pratique clinique drsquoune part activiteacutes institu-
tionnelles drsquoautre part
LA PRATIQUE CLINIQUE
bull Clinique individuelle soutien psychologique
du personnel en difficulteacute par entretien indivi-
duel
Notre pratique montre que les deux aspects
professionnels et personnels sont souvent in-
triqueacutes qursquoil peut srsquoagir de souffrance au tra-
vail mais aussi de souffrance personnelle qui
peut avoir des reacutepercussions dans le travail
Les motifs principaux agrave lrsquoorigine de la de-
mande
- sur le plan professionnel sont conflits inter
eacutequipe situations de violence au travail
manque de communication difficulteacutes face aux
pathologies perte du sens du travail voire eacutepui-
sement professionnel
- sur le plan personnel sont difficulteacutes fami-
liales sociales deuils seacuteparations probleacutema-
tiques psychopathologiques maladies chro-
niqueshellip
Ces personnes ne se sont jamais adresseacutees agrave
un professionnel du soin psychique par meacute-
connaissance des professions parfois mais par
meacutefiance eacutegalement et arrivent souvent en
portant des souffrances extrecircmement lourdes
et de longue date
Cateacutegories dominantes qui consultent soi-
gnants et administratifs encadrement
quelques personnels techniques et meacutedico-
techniques et tregraves peu de meacutedecins
Il est difficile drsquoeacutetablir une moyenne du nombre
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 84
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
drsquoagents reccedilus par an sur lrsquoensemble des
postes du personnel Toutefois les demandes
de consultations sont en constantes augmenta-
tions sur la plupart des sites de lrsquoAPHP mais
aussi du fait des regroupements amenant les
psychologues agrave ecirctre solliciteacutees sur plusieurs
eacutetablissements
bull Clinique collective
Les interventions collectives peuvent se
preacutesenter sous deux formes les groupes de
parole et les deacutebriefings psychologiques
Le Groupe de parole permet de creacuteer un lieu
drsquoexpression et drsquoeacutechanges sur un thegraveme don-
neacute ou une probleacutematique speacutecifique au service
(comme par exemple lrsquoagressiviteacute et la violence
des patients notamment aux urgences ou en-
core lrsquoimplication eacutemotionnelle des soignants
lieacutee agrave lrsquoaccompagnement en fin de vie hellip)
Le Deacutebriefing psychologique intervention
collective ponctuelle suite agrave un eacuteveacutenement diffi-
cile ou traumatique (suicide drsquoun patient deacutecegraves
drsquoun personnel agression du personnel par un
patient ou son entouragehellip)
Force est de constater eacutegalement que les de-
mandes de reacutesolution de conflit formuleacutees
comme telles sont aussi tregraves preacutesentes et il
semble utile de distinguer la neacutecessaire reacutesolu-
tion drsquoun conflit qui nrsquoest pas forcement le lieu
et le temps du groupe de parole de la volonteacute
drsquoy trouver un sens Il va de soi que le psycho-
logue nrsquointervient en aucun cas comme meacutedia-
teur car il nrsquoen a pas la formation speacutecifique
mecircme si certaines interventions peuvent par-
fois avoir des effets drsquoapaisement du conflit
Pour ces raisons et preacutealablement agrave toute in-
tervention collective il est important drsquoavoir pu
deacutefinir avec les participants leurs attentes et
pas seulement celles lieacutees au demandeur geacute-
neacuteralement lrsquoencadrement ou la direction
LES ACTIVITEacuteS INSTITUTIONNELLES
bull1- Deacuteveloppement et entretien du reacuteseau
En interne Assistant social du personnel meacute-
decine du travail DRH CRH chef du person-
nel direction des soins psychologues du per-
sonnel drsquoautres sites psychologues des ser-
vices psychiatres hellip
En externe orientation vers les CMP pour les
prises en charge agrave plus long terme etou pour
les suivis psychiatriques orientation vers des
lieux de consultations speacutecialiseacutes (addictologie
consultation douleur troubles du sommeil
troubles du comportement alimentaire associa-
tion drsquoaide aux victimes theacuterapie familiale hellip)
2- Participation aux groupes de travail et de
preacutevention preacutevention des addictions de
lrsquoeacutepuisement professionnel des risques psycho
-sociauxhellip
3- Faire connaicirctre ces postes et notre activiteacute
- A lrsquooccasion drsquoune arriveacutee sur site ou lors
drsquoune creacuteation de poste
- Preacutesentation dans les services directement
aupregraves des eacutequipes
- Preacutesentation lors de formations sur site
propre (accueil des nouveaux arrivants ou sur
des theacutematiques en lien avec nos missions) ou
au Centre de Formation Continue du Personnel
Hospitalier (intervention dans le cadre de la for-
mation Preacutevention du risque psychique et de
lrsquoeacutepuisement professionnel agrave lrsquohocircpital)
- Preacutesentation du rapport drsquoactiviteacutes au Comiteacute
drsquoHygiegravene Seacutecuriteacute et Conditions de Travail
QUESTIONNEMENTS ENJEUX LIMITES
Ce poste nous amegravene en permanence
- agrave repreacuteciser nos missions ce que nous pou-
vons faire et aussi ne pas faire depuis notre
place particuliegravere au sein de lrsquoinstitution
- agrave nous confronter agrave certaines limites
- agrave devoir nous adapter agrave une clinique aussi
riche que varieacutee
Plusieurs limites donc
La question du cadre
- absence de paiement pas de psychotheacutera-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 85
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
pie ce nrsquoest pas agrave lrsquoemployeur de payer on
connaicirct par ailleurs la neacutecessiteacute du paiement
- reacutegulariteacute des horaires il est difficile souvent
impossible pour des personnels ayant des ho-
raires variables qui travaillent en alternance de
pouvoir respecter un horaire fixe de rendez
vous Les annulations les reports sont freacute-
quents agrave cause des changements drsquohoraires
subis par les agents eux-mecircmes Parfois de
notre fait eacutegalement
La question de la confiance
- biais dans la relation
Nous avons le mecircme employeur donc il existe
un biais dans la relation de soutien psycholo-
gique (theacuterapeutique) Pourtant eacutetablir une re-
lation de confiance institutionnelle avec les
agents est essentiel Et faire partie de la mecircme
institution peut parfois paradoxalement rassu-
rer et favoriser une deacutemarche qui ne serait par
ailleurs pas faite
Ayant eacuteteacute recruteacute par la mecircme direction la
question de la confidentialiteacute du travail du
psychologue peut se poser (la confidentialiteacute
est rappeleacute agrave chaque premiegravere rencontre)
- Neacutecessaire et juste distance entre lrsquoinstitution
de son propre travail (visites meacutedicales effec-
tueacutees par un autre meacutedecin du travail attitude
discregravete au sein de lrsquoeacutetablissement hellip)
- Se pose la question du secret partageacute dans
lrsquointeacuterecirct de lrsquoagent et avec son accord cer-
taines informations peuvent parfois ecirctre com-
muniqueacutees (assistantes sociales du personnel
meacutedecin du travailhellip) et inversement
Comment et quand reacuteorienter
- au rythme de chacun (cette premiegravere deacute-
marche a deacutejagrave parfois eacuteteacute extrecircmement longue
et difficile)
- ne marche pas toujours du 1er
coup (combien reviennent parce que cela nrsquoa
pas accrocheacute trop cher tous ces arguments
connus qui peuvent cacher un pas precirct agrave)
Autres limites agrave cette pratique
- question de la neutraliteacute quant au fait de pou-
voir recevoir deux parties drsquoun conflit Nous
sommes lagrave pour tous les agents Et crsquoest bien
lagrave toute la diffeacuterence avec les GH qui ont agrave dis-
position plusieurs psychologues du personnel
- difficulteacute si une personne reccedilue en individuel
participe eacutegalement agrave un groupe de parole hellip
- tous les risques de glissement potentiels aux
places que lrsquoinstitution veut nous faire prendre
lorsque par exemple en lrsquoabsence de meacutedecin
du travail on propose agrave la place de rencon-
trer la psychologue du personnel lorsqursquoil faut
absolument trouver une solution risque drsquoecirctre
interpelleacute en vue de reacutesoudre un conflit avec
ce que cela suppose de rapiditeacute et drsquoefficience
allant agrave lrsquoencontre de la possibiliteacute de penser et
drsquoeacutelaborer
CONCLUSION
Pour le psychologue exercer aupregraves du per-
sonnel appelle parfois agrave des positions drsquoeacutequili-
bristes et neacutecessite de garder une certaine
souplesse
Lrsquointeacuterecirct de ce poste est de faciliter lrsquoaccegraves au
psychologue permettant agrave un public qui nrsquoau-
rait pas forcement fait cette deacutemarche de venir
consulter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 86
Clocircture de la journeacutee
gt Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
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Clocircture de la journeacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 87
Clocircture de la journeacutee
C ette journeacutee nous a permis de partager
la diversiteacute de nos pratiques La ri-
chesse des interventions nous teacutemoi-
gnent de la vivaciteacute des psychologues hospita-
liers Cest bien la speacutecificiteacute de nos pratiques
qui assure la peacuterenniteacute de nos postes et leur
creacuteation
Jai commenceacute la journeacutee par des remercie-
ments cest ainsi que je vais la clore
Je remercie
le Comiteacute scientifique qui a construit ce pro-
gramme riche et ambitieux qui je lespegravere vous
aura apporteacute de nouvelles ressources
Le Comiteacute drsquoorganisation et les beacuteneacutevoles qui
nous ont reacuteserveacute un accueil souriant et dyna-
mique
Cleacutement ingeacutenieur du son agrave la technique
gracircce agrave qui vous pourrez entendre les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nous vous demandons donc un peu de pa-
tience avant de pouvoir retrouver les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nheacutesitez pas agrave nous rejoindre ce qui renforce
toujours notre dynamisme
En vous remerciant de votre preacutesence qui fait
le succegraves de cette journeacutee et nous poussera
qui sait agrave nous retrouver avec notre quart de
siegravecle -)
Dernier deacutetail administratif noubliez pas de
remplir le questionnaire deacutevaluation de la jour-
neacutee et surtout de rendre votre badge en par-
tant Cest important pour nous
Merci agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
BULLETIN DrsquoADHESION
Cotisation annuelle incluant lrsquoabonnement au journal et laccegraves agrave lespace adheacuterent sur notre site
internet
Membres actifs Titulaire 45 euro
Contractuel ou retraiteacute 30 euro
Membres associeacutes Jeune diplocircmeacute lt3ans sans emploi 25 euro
Eacutetudiant (master 1 ou 2) 15 euro
Justificatif obligatoire agrave joindre copie du haut du bulletin de salaire du diplocircme ou du certificat de
scolariteacute
Renseignements concernant lrsquoadheacuterent
Nom
Preacutenom
Adresse personnelle
Teacuteleacutephone
Courriel
Adresse professionnelle (preacuteciser le nom du chef de service)
Teacuteleacutephone
Courriel (pour recevoir nos Bregraveves)
Date et signature
A adresser avec votre chegraveque agrave lordre de Psyclihos agrave
Christine SCHWANSE psychologue
Heacutematologie Adulte - Myosotis 3 Hocircpital Saint Louis
par courrier 1 Avenue Claude Vellefaux ndash 75 010 Paris
Association des Psychologues Cliniciens Hospitaliers de lrsquoAssistance Publique
Hocircpitaux de Paris
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 6
8h30 Accueil des participants
9h-9h30 Ouverture
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
9h30 - 11h Ecirctre psychologue ou
faire de la psychologie Statut
fonctions quelles compeacutetences
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute
Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Lariboisiegravere
gt P s y c h o l o g u e c l i n i c i e n e n
psychotraumatologie du savoir-faire
au savoir-ecirctre
Clara Duchet Tenon
gt Aider agrave penser limpensable en
oncologie
Anna Elli Pardo Saint-Louis
11h - 11h30 Pause
11h30 - 13h Loi HPST titre de
psychotheacuterapeutehellip Quels changements
pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen
membre du CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des
textes officiels
Nadine Labbeacute Cochin
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous
avez manqueacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Sainte Peacuterine
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Fernand Widal
13h -14h30 Repas libre
14h30 - 16h Uniteacute dans la diversiteacute
des pratiques transversaliteacute de nos
cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Fernand
Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute
des patients migrants
Jacqueline Faure Tenon
gt P sycho logue en r eacutean imat i on
peacutediatrique teacutemoignage drsquoune pratique
en eacutevolution
Muriel Derome Raymond Poincareacute
gt Seacutejour de vacances quelle place pour
le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Eacutemile Roux
16h - 17h30 Cliniques particuliegraveres
pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Saint
Louis
gt Laccompagnement psychologique par
teacuteleacutephone dans les maladies de
Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Pitieacute Salpecirctriegravere
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale
de grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Jean Verdier
gt Psychologue clinicien aupregraves du
personnel missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Saint Louis
Le programme de la journeacutee
Demandez le programme
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Ouverture de la journeacutee
gt Allocution douverture
Alain Burdet DRH AP-HP
gt Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
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Ouverture
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 8
Ouverture de la journeacutee
Psyclihos 20 ans deacutejagrave
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
J e vais commencer par quelques remer-
ciements rapides
En premier lieu vous Monsieur Burdet
vous nous avez fait lhonneur douvrir cette
journeacutee Plus quun honneur votre soutien
nous a eacuteteacute si preacutecieux
Quand nous avions eacutevoqueacute avec vous lideacutee
dune journeacutee anniversaire mais alors de faccedilon
encore lointaine dans nos esprits votre encou-
ragement sans faille degraves lannonce de cette
eacuteventualiteacute nous a donneacute leacutenergie daffronter
lorganisation de cet eacuteveacutenement
Cest pourquoi au nom des membres du con-
seil dadministration des comiteacutes scientifiques
et dorganisation je tiens agrave vous remercier cha-
leureusement de votre soutien et du solide inteacute-
recirct que vous teacutemoignez agrave notre profession
Cet engagement de la Direction des res-
sources Humaines de lAPHP agrave nos cocircteacutes
comme il y a 20 ans nous permet de nous re-
trouver dans ce bel amphi pour partager cette
journeacutee Et nous remercions aussi lInstitut de
Formation des Cadres de Santeacute APHP pour
lefficaciteacute de son aide logistique et de la ges-
tion des inscriptions jusqursquoagrave ce jour et mecircme au
-delagrave
Mes remerciements vont aussi agrave vous tous qui
ecirctes ici aujourdrsquohui Nombre dentre vous nous
connaissent deacutejagrave en tant qursquoadheacuterents actuels
ou passeacutes souvent dune grande fideacuteliteacute au
cours des anneacutees Dautres nous suivent avec
inteacuterecirct sans nous avoir (encore ) rejoints et de
nombreux jeunes collegravegues nous deacutecouvrent
ou ont deacutejagrave deacutecouvert notre site internet
Notre site internet sur lequel vous pouvez
suivre lactualiteacute de notre association nous re-
joindre ou vous inscrire agrave notre infolettre Les-
pace adheacuterent propose de nombreux services
comme les postes agrave pourvoir agrave lAP-HP ou agrave la
FPH qui inteacuteressent tous collegravegues quils soient
titulaires contractuels ou en recherche dem-
ploi Bien eacutevidemment ces services sont reacuteser-
veacutes agrave nos adheacuterents tout comme nos bregraveves
par mail qui vous informent de lactualiteacute et nos
journaux
Degraves sa creacuteation Psyclihos sest donneacute pour
rocircle de teacutemoigner de lrsquoapport de la Psychologie
Clinique agrave lrsquohocircpital et den rsquoaffirmer la preacutesence
Informer communiquer et ecirctre un relais entre
les psychologues eacutechanger non seulement
entre pairs mais ecirctre aussi un interlocuteur
pour linstitution quant agrave notre profession
Lrsquohistoire de lrsquoassociation est intimement lieacutee agrave
celle de notre profession puisque Psyclihos voit
sa naissance en janvier 1991 quelques jours
avant cla parution du deacutecret qui fonde le statut
de psychologue hospitalier
1991 -2011 vingt ans de psychologie agrave lhocircpi-
tal nous y voilagrave
Les 20 ans de Psyclihos ont eacuteteacute loccasion
unique de nous replonger dans les archives de
notre association Nous partageons la richesse
de ce singulier voyage dans le temps dans le
Numeacutero speacutecial 20 ans du journal de Psyclihos
que vous trouverez dans vos pochettes
Il retrace lhistoire de Psyclihos agrave travers celle
de la psychologie agrave lhocircpital en sarrecirctant sur
les grandes dates qui ont jalonneacute le meacutetier de
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 9
Ouverture de la journeacutee
psychologue
1991 le deacutecret portant statut particulier de psy-
chologue hospitalier 1996 le code de deacuteonto-
logie 2003 la deacutecentralisation de gestion au
sein de lAP-HP et les conseacutequences que nous
vivons depuis pour nen citer que quelques
uneshellip
Cette plongeacutee historique loin decirctre nostal-
gique nous permet de rappeler au fil des ar-
ticles parus durant ces deux deacutecennies dans
nos journaux combien lactualiteacute de notre pro-
fession sappuie sur son passeacute Connaicirctre cette
histoire notamment pour nos plus jeunes col-
legravegues nous semble neacutecessaire pour com-
prendre les enjeux qui traversent actuellement
notre profession Il est dailleurs eacutetonnant de
lire combien des articles pourtant anciens gar-
dent toute leur fraicirccheur traitant deacutejagrave de pro-
bleacutematiques qui apparaissent reacutecurrentes ou
abordant des questionnements qui aujourdhui
pourraient sembler novateurshellip
Cest donc autour de quelques grands thegravemes
toujours actuels comme la deacuteontologie des
psychologues la saga des concours sur titres
la Fiche meacutetier la fonction FIR la Psychiatrie
de liaison ou les psychotheacuterapies et la loi que
nous vous invitons agrave plonger dans notre journal
speacutecial
Nous retrouvons aujourdrsquohui certains de ces
sujets dans le programme de cette journeacutee
Il illustre les champs drsquointerventions qui ani-
ment lrsquoassociation depuis sa creacuteation la fonc-
tion de psychologue les changements induits
par la leacutegislation la diversiteacute des pratiques et
les cliniques particuliegravereshellip
Nous souhaitons pouvoir teacutemoigner de la ri-
chesse et de la diversiteacute des pratiques des psy-
chologues cliniciens agrave lhocircpital Bien sucircr en 20
ans la place des psychologues hospitaliers a
eacutevolueacute leur nombre aussi La varieacuteteacute des inter-
ventions teacutemoigne de la richesse des champs
dexercice possibles parfois insoupccedilonneacutes au
sein de notre institution quest lAP-HP
Derriegravere un titre un peu provocateur nous sou-
haitons vous mobiliser dans lancrage toujours
neacutecessaire de notre profession au sein de
lAPHP Le cadre de notre exercice est toujours
fragile voire mis agrave mal En ces temps heurteacutes
et parfois incertains nous espeacuterons pouvoir
partager notre eacutenergie pour proteacuteger notre
exercice si particulier Ecirctre psychologue agrave lhocirc-
pital cest bien sucircr ecirctre agrave la rencontre des pa-
tients et de leurs proches dans leurs singulari-
teacutes mais aussi des eacutequipes soignantes sans
oublier la participation agrave la vie institutionnelle
comme ce sera abordeacute dans les diffeacuterentes in-
terventions que vous allez entendre aujour-
dhui
Sans plus attendre nous ceacutedons la place agrave la
premiegravere session de la matineacutee dans le vif du
sujet ecirctre psychologue ou faire de la psycho-
logie statut fonctions quelles compeacute-
tences modeacutereacutee par Benoicirct Verdon long-
temps psychologue hospitalier maintenant au
sein de lUniversiteacute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 10
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Modeacuterateur Benoicirct Verdon Universiteacute Paris Descartes
gt Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Annie Kurtz Hocircpital Lariboisiegravere Page 11
gt Psychologue clinicien en psychotrauma-
tologie du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Page 15
gt Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Hocircpital Saint-Louis Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la
psychologie
Statut fonctions quelles compeacutetences
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 11
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Ecirctre ou ne pas ecirctre neuropsychologue
Neuropsychologue une espegravece nouvelle Plus reacutesistante
Mieux adapteacutee agrave la vie hospitaliegravere ou aux institutions
Plus respecteacutee des meacutedecins prescripteurs
Annie Kurtz
Service de Neurologie Hocircpital Lariboisiegravere
La reacutealiteacute objective drsquoune atteinte ceacutereacutebrale agrave
lrsquoorigine des troubles preacutesenteacutes par le patient
ne doit jamais occulter le fait drsquoune histoire
drsquoun eacutequilibre psychique et drsquoune individualiteacute
malmeneacutee
Charte des CPCN - Collegraveges des Psycho-
logues Cliniciens speacutecialiseacutes en Neuropsycho-
logie
J rsquoai bien imprudemment accepteacute il y a
quelques mois de prendre la parole pour
ceacuteleacutebrer les 20 ans de lrsquoassociation Psy-
clihos De plus jrsquoai accepteacute de vous faire parta-
ger mes reacuteflexions sur la place du psychologue
dans le champ de la santeacute et cerise sur le gacirc-
teau pour la deacutefense et lrsquoillustration de la neu-
ropsychologie clinique
Mon propos nrsquoest pas de poleacutemiquer mais de
reacutefleacutechir ensemble aux charmes et aux dangers
que repreacutesente le terme de
neuropsychologue si priseacute par certains ac-
tuellement
La preacutesence de psychologues au sein des ser-
vices hospitaliers est ancienne ils ou elles as-
surent agrave la fois le travail de bilan et celui de
soutien aupregraves des patients Mais le genre
neuropsychologue nrsquoexiste que depuis peu
Le terme neuropsychologue seacuteduit beaucoup
les jeunes collegravegues et mecircme certains para-
meacutedicaux comme les orthophonistes les ergo-
theacuterapeutes et mecircme quelques kineacutesitheacutera-
peutes Nombreux sont ceux dans le champ de
la neuropsychologie qui revendique le label
de neuropsychologues Depuis quelques an-
neacutees les lettres de motivation qui accompa-
gnent les demandes de stages srsquoadressent agrave la
neuropsychologue que je suis censeacutee ecirctre et
les candidates et candidats deacuteclarent leur
passion pour le meacutetier de
neuropsychologue Et je mrsquointerroge sur cette
ferveur
Quelle deacutefinition de la neuropsychologie pou-
vons-nous faire nocirctre Il y a 10 ans en mars
2001 le Collegravege des Psychologues Cliniciens
speacutecialiseacutes en Neuropsychologie (CPCN) pour
les Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Psychologie deacutefinis-
sait ainsi la neuropsychologie
La neuropsychologie est la discipline qui traite
des relations entre les processus mentaux
sous-tendant le raisonnement lrsquoattention la
meacutemoire la perception les gnosies les
praxies le langage le comportement eacutemotion-
nel et lrsquoactiviteacute du cerveau Lors des leacutesions ceacute-
reacutebrales les conseacutequences concerneront agrave la
fois lrsquoefficience de la cognition et lrsquoadaptabiliteacute
des conduites de lrsquoindividu Cette neacutecessaire
appreacuteciation analytique et syntheacutetique du psy-
chisme humain caracteacuterise lrsquoapproche neurop-
sychologique
La neuropsychologie est un champ multidisci-
plinaire ougrave se retrouvent diffeacuterents meacutetiers et
les zones de recouvrement peuvent ecirctre larges
pour certains Je milite aujourdrsquohui pour deacute-
fendre le fait qursquoun bilan reacutealiseacute par un psycho-
logue mecircme si les tests utiliseacutes par drsquoautres
intervenants sont identiques reste un bilan dif-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 12
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
feacuterent Ce travail drsquoanalyse et synthegravese rappe-
leacute dans la deacutefinition citeacutee fonde la totaliteacute de
nos pratiques en neuropsychologie
Lrsquoacte le plus freacutequent est le bilan bilan pour
plaintes mneacutesiques diagnostic diffeacuterentiel entre
deacutepression et maladie neurodeacutegeacuteneacuterative seacute-
quelles drsquoaccident vasculaire seacutequelles de
traumatisme cracircnien et nous intervenons eacutega-
lement dans le suivi et la reacutehabilitation dans les
services de soins de suite Mecircme dans le cadre
drsquoune eacutevaluation en vue drsquoune reacuteeacuteducation
nous savons devoir tenir compte des mouve-
ments psychiques agrave lrsquoœuvre dans tout individu
et qui vont peser sur ce travail
Notre code de deacuteontologie speacutecifie que le res-
pect de la vie psychique fonde notre action ce
respect de la vie psychique tout au long de nos
anneacutees drsquoeacutetudes nous avons eacuteteacute formeacutes agrave y
porter une attention toute particuliegravere Nos ac-
quis nos savoirs modifient notre approche
Quel peut ecirctre le sens pour un ou une psycho-
logue agrave vouloir changer de nom
Nrsquoest-ce pas alors en gardant notre position de
psychologue et donc aussi clinicien que nos
actions prennent sens dans la prise en soin
des patients
Ce que je redoute le plus est que cette appella-
tion neuropsychologue ne confine les psycho-
logues dans un exercice limiteacute agrave la passation
des tests et au traitement des chiffres qui en
reacutesultent Comme si le neuropsychologue ne
devait mettre en œuvre aucun savoir clinique Il
est vrai que la formation donneacutee par lrsquouniversiteacute
conditionne en partie nos pratiques et cer-
taines universiteacutes ne semblent plus accorder
de place agrave la structure de la personnaliteacute ni aux
aspects thymiques dans leur master de neu-
ropsychologie Replacer le patient dans son
histoire reste primordial quels que soient les
avatars neurologiques
Qursquoavons-nous agrave gagner en devenant
neuropsychologue
Les offres drsquoemploi sont nombreuses et les
jeunes diplocircmeacutes ne restent pas longtemps
sans emploi Les meacutedecins psychiatres neu-
rologues ou geacuteriatres avec qui nous collabo-
rons veulent travailler avec des
neuropsychologues Le risque me paraicirct
grand qursquoils recherchent essentiellement des
testeurs pour leurs publications ou leurs con-
sultations Dans les recherches il srsquoagit pour
des collegravegues formeacutes agrave la psychologie pendant
au moins 4 ans puis speacutecialiseacutes en deuxiegraveme
anneacutee de Master cest-agrave-dire apregraves 5 anneacutees
drsquoeacutetudes drsquoappliquer des protocoles de test
dont ils nrsquoont mecircme pas eu la possibiliteacute de dis-
cuter le contenu et le choix des outils (Les
textes nous reconnaissent pourtant la liberteacute du
choix de nos outils)
La pratique de la neuropsychologie peut ecirctre
passionnante agrave condition de ne pas ecirctre ins-
trumentaliseacutee par les meacutedecins En preacuteparant
mon intervention il mrsquoest apparu que je pour-
rais citer comme eacutetude de cas nombre de si-
tuations de souffrance de nos collegravegues dans
les institutions Je pourrais vous preacutesenter des
vignettes cliniques ougrave les psychologues se
mettent en danger en srsquoenfermant dans cette
appellation qui convient si bien agrave nos collegravegues
drsquoautres disciplines et agrave nos employeurs Dans
les consultations meacutemoire la place faite aux
neuropsychologues peut ecirctre tregraves diffeacuterente
suivant les attentes et les projets de leurs par-
tenaires meacutedicaux ou institutionnels et parfois
ces exigences entraicircnent une veacuteritable souf-
france pour nos collegravegues Peut-on exercer son
savoir-faire et son savoir ecirctre de psychologue
quand on attend de nous de recevoir 4 ou 6
patients par jour Ces bilans TGV laissent peu
de place agrave lrsquointersubjectiviteacute du psychologue et
du patient alors que dans drsquoautres lieux lrsquoeacuteva-
luation peut respecter la singulariteacute du patient
de sa famille et la deacuteontologie du psychologue
Il y a des temps dans la pratique drsquoun bilan
neuropsychologique qui restent des temps cli-
niques Avant drsquoentreprendre un bilan le psy-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 13
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
chologue speacutecialiseacute en neuropsychologie
comme tous les psychologues doit pouvoir in-
terroger la demande de qui vient cette de-
mande le patient le meacutedecin ou la famille et
qursquoen attendent ces diffeacuterents partenaires
Comment cet examen srsquoinscrit-il dans le projet
theacuterapeutique
Lrsquoentretien preacuteliminaire ne consiste pas agrave re-
prendre lrsquoanamnegravese au sens meacutedical histoire
de la maladie mais au sens psychologique
entendre lrsquohistoire drsquoun sujet Comme lrsquoa eacutecrit
Emmanuelle Truong-Minh actuelle preacutesidente
du CPCN agrave propos de ce temps drsquoun bilan
Inscrite dans la relation porteacutee par le langage
crsquoest cette preacutesence agrave lrsquoautre qui fonde notre
action Dans le temps de la consultation que je
reacutealise un entretien que je propose des tests
que JE parle ou que JE eacutecoute je suis lagrave au
moins lagrave de maniegravere absolue et entiegravere Pour
la personne agrave mon sens il nrsquoest rien de plus
preacutecieux que lrsquoeacutetablissement de cette relation
clinique Car ces instants ougrave lrsquoobjectivation de
difficulteacutes qursquoelles soient psychopathologiques
ou neuropsychologiques risque drsquoadvenir sont
fondamentaux dans le parcours de vie le par-
cours de santeacute et le parcours de la maladie de
la personne Pouvoir prendre appui sur cette
relation permet la mise en perspective des diffi-
culteacutes permet de supporter le traumatisme
psychique eacuteventuel permet de srsquoeacutecrouler peut-
ecirctre sans ecirctre seul
Je me souviens drsquoun patient qui mrsquoa eacuteteacute adres-
seacute pour plaintes mneacutesiques et eacuteventuelles seacute-
quelles drsquoun AIT Ce monsieur de 60 ans eacutetait
marieacute pegravere de 3 enfants cadre dirigeant dans
une entreprise A la suite de son accident
ischeacutemique transitoire il avait le sentiment de
ne plus pouvoir faire face agrave ses obligations pro-
fessionnelles Sa vie professionnelle eacutetait para-
siteacutee par le danger de voir ses difficulteacutes cons-
tateacutees par les autres surtout par son respon-
sable hieacuterarchique Degraves le deacutebut de lrsquoentretien
il semblait eacuteprouver une certaine inhibition an-
xieuse son expression spontaneacutee restait fac-
tuelle et retenue Apregraves quelques eacutepreuves
drsquoattention et de meacutemoire sans reacutesultat patho-
logique je mrsquoautorisai agrave abandonner les
eacutepreuves pour poursuivre lrsquoentretien au cours
duquel jrsquoappris que la veille il avait accompa-
gneacute sa megravere contre son greacute dans une institu-
tion pour patients souffrant de maladie
drsquoAlzheimer Alors qursquoil a des fregraveres et sœurs il
avait eacuteteacute seul agrave faire cette deacutemarche contraint
et forceacute par la santeacute chancelante de son
eacutepouse atteinte drsquoun cancer du seinhellip quand
jrsquoeacutevoque avec lui la possibiliteacute drsquoaller en parler
avec un psy il me dit y avoir deacutejagrave penseacute mais
renonceacute parce qursquoil avait peur de srsquoeffondrer
Nous avons la responsabiliteacute de notre bilan
mais nous ne pouvons deacutelivrer un diagnostic
(crsquoest de la compeacutetence du meacutedecin) pourtant
lrsquoentretien dit de restitution est un temps
drsquoeacutechange privileacutegieacute qui rend au patient sa
place de sujet mais ce temps-lagrave prend du
temps et on ne nous le donne pas toujours
Le temps de lrsquoexamen psychologique nrsquoest pas
celui des examens compleacutementaires prescrits
par les meacutedecins On sait bien qursquoil est toujours
utile de faire preacuteciser la demande de refuser
de tester Monsieur X ou Y on teste une hy-
pothegravese pas un individu de dire non parfois
parce qursquoon sait qursquoon ne reacutepondra pas agrave la
question ou parce que les conditions de lrsquoexa-
men ne respectent pas le patient ou notre auto-
nomie professionnelle Le questionnement sur
lrsquoobjet de la demande est dans le champ de
compeacutetence des psychologues nous avons eacuteteacute
formeacutes agrave ce travail La demande des meacutedecins
de lrsquoeacutequipe du patient ou de sa famille doit ecirctre
analyseacutee
Peut-on imaginer que se faire connaicirctre
comme neuropsychologue lorsqursquoon est psy-
chologue serait un moyen drsquoeacutechapper agrave la diffi-
culteacute de maintenir notre position singuliegravere
dans le monde de la santeacute
Certes la pratique de la neuropsychologie re-
quiert des connaissances sur le fonctionne-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 14
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
ment du cerveau sur les troubles cognitifs as-
socieacutes aux leacutesions ceacutereacutebrales sur la significa-
tion des localisations anatomo-cliniques et ce
travail permanent de reacuteflexion et drsquoeacutechange
avec les autres intervenants dans la prise en
charge drsquoun patient est enrichissante et parfois
passionnante comme peuvent lrsquoexprimer les
lettres de motivation des demandes de stages
Mais pratiqueacutee par des psychologues elle pour
reste un lieu privileacutegieacute ougrave la parole du patient
peut ecirctre entendue pas seulement sur ses
troubles ou ses capaciteacutes preacuteserveacutees mais sur
ce qursquoil comprend de ce qui lui arrive sur son
ressenti et le psychologue est preacutesent pour
lrsquoaccompagner dans ce nouveau travail psy-
chique Ecirctre speacutecialiseacute en neuropsychologie
est une position exigeante comme pour
chaque psychologue crsquoest lrsquoabsolue neacutecessiteacute
drsquoactualiser nos connaissances sur les patholo-
gies les nouveaux outils mais crsquoest aussi
prendre le risque de partager nos doutes sur
notre approche drsquoun patient dont on prend en
compte lrsquohistoire le contexte affectif social
professionnel Crsquoest une tacircche difficile que
drsquoessayer drsquoaborder un patient dans sa globali-
teacute et pas seulement sur ses troubles cognitifs
Personnellement je ne suis jamais sucircre drsquoavoir
bien analyseacute lrsquoensemble des eacuteleacutements que le
patient me permet drsquoappreacutehender jrsquoai la
chance de ne pas ecirctre seule dans mon service
et de pouvoir partager mes doutes avec mes
collegravegues
Enfin le terme neuropsychologue peut repreacute-
senter une menace pour le corps des psycho-
logues
Nous expeacuterimentons chaque jour la difficulteacute agrave
deacutefendre notre place de psychologue On nous
reproche notre image floue drsquoecirctre des
eacutelectrons libres dans les services drsquoecirctre des
produits de luxe sans nomenclature de nos
activiteacutes (si ce nrsquoest dans la CCAM qui ne con-
cerne que les meacutedecins) Le texte qui eacuteclaire
notre champ drsquoactiviteacute le seul qui ait une valeur
leacutegale est celui de 1985 qui deacutefinit notre statut
et nous savons bien combien lrsquoincitation au res-
pect de ce texte est une tacircche reacutecurrente pour
nous Jrsquoai commenceacute agrave travailler agrave lrsquoAP-HP en
1971 la publication de ce texte puis des circu-
laires de 1991 ont repreacutesenteacute un moment drsquoes-
poir mais jrsquoai appris tout au long de mes an-
neacutees drsquoexpeacuterience que ce travail drsquoexplicitation
de ce qursquoest un psychologue nrsquoa pas de fin
Parfois la confusion qui regravegne dans lrsquoesprit de
nos employeurs les arrangent bien pour
exemple des postes de neuropsychologues
animateurs offerts dans les EPHAD Parfois
cette confusion est sincegravere tel nouveau chef
de service qui travaille depuis de longues an-
neacutees avec des psychologues et qui reccediloit de la
DRH un rappel sur le temps FIR et qui srsquoeacutetonne
de son contenuhellip
Notre code de deacuteontologie est une reacutefeacuterence
indispensable pour nous mais nrsquoest toujours
pas un texte opposable agrave un employeur
Ces textes ont eacuteteacute eacutecrits pour les psycho-
logues ce sont des repegraveres pour les psycho-
logues Il a existeacute un mouvement qui souhaitait
diffeacuterencier les psychologues et les neuropsy-
chologues avec la volonteacute drsquoobtenir un statut agrave
part Quand on connaicirct la difficulteacute drsquoune recon-
naissance leacutegale la fragiliteacute du corps des psy-
chologues toujours precirct agrave se morceler en cen-
taines drsquoassociationshellip on peut se demander si
le meacutetier de psychologue nrsquoest pas effective-
ment en danger et se revendiquer neuropsy-
chologue peacutedopsychologue comme le laisse
entendre lrsquoactuelle fiche meacutetier nous expose
encore plus hellip (heureusement cette fiche doit
ecirctre remplaceacutee en 2012)
Notre seule protection repose sur les textes de
loi qui deacutefinissent le titre de psychologue il nrsquoy
a pas de titre de neuropsychologue ni de titre
de psychologue clinicien et ce nrsquoest pas lrsquoaven-
ture du titre de psychotheacuterapeute ni les travaux
en cours agrave la DGOS qui doivent nous rassu-
rerhellip
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 15
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Psychologue clinicien en psychotraumatologie
du savoir-faire au savoir-ecirctre
Clara Duchet Hocircpital Tenon Universiteacute Paris Descartes
E n 1997 un deacutecret du ministegravere de la
Santeacute creacutee le reacuteseau des CUMP
(Cellules dUrgence Meacutedico-
Psychologique) propulsant des psychologues
cliniciens sur le terrain de lurgence aux cocircteacutes
de meacutedecins psychiatres et de parameacutedicaux
De nouvelles missions soffrent agrave ces profes-
sionnels peu formeacutes au deacutepart pour intervenir
dans ces contextes de catastrophes collectives
(accidents agrave retentissement majeur catas-
trophes naturelles guerres terrorisme etc)
Peu agrave peu des reacuteflexions et groupes de travail
speacutecifiques se creacuteent (au sein notamment de
lAFORCUMP - Association de recherche et de
formation des CUMP) afin de mieux deacutefinir les
fonctions et les compeacutetences de chacun dans
ce domaine bientocirct nommeacute
psychotraumatologie Cette nouvelle cli-
nique (dans sa forme institutionnelle et dans
sa dimension traumatique en situations
extrecircmes) a souleveacute de nombreux deacutebats
passionneacutes agrave propos de la leacutegitimeacute ou non de
lintervention de terrain (sur les sites et aux
abords des catastrophes) Cependant il sagira
plutocirct de discuter ici de la speacutecialisation eacuteven-
tuellement neacutecessaire des psychologues dans
ce domaine - du cocircteacute du savoir-faire - comme
des retrouvailles avec une position de clinicien
classique - du cocircteacute du savoir-ecirctre et de la
subjectivation
Agrave lrsquoheure ougrave se multipliaient donc diffeacuterentes
formes de violence et notamment au moment
de lrsquoeacutepoque terroriste parisienne (attentats
meacutediatiseacutes St Michel Port-Royal 1995-1996)
les psychologues ont vu leur champ drsquoaction et
leurs fonctions srsquoeacutelargir des nouvelles mis-
sions et nouvelles structures se deacuteveloppaient
pour venir au secours des victimes agrave la de-
mande de nos gouvernants et de psychiatres
militaires expeacuterimenteacutes dans ce domainehellip Jrsquoai
eu la chance de participer agrave ce processus degraves
le deacutebut et tregraves rapidement je me suis poseacutee
des questions sur ces interventions qui mrsquoap-
paraissaient pour ainsi dire hors cadre
Hors cadre parce que dans lrsquourgence
Hors cadre parce que nombre drsquointerventions
avaient lieu sur le terrain peu apregraves la catas-
trophe loin du confort du cabinet ou de lrsquohocircpi-
tal
Je me souviens agrave lrsquoeacutepoque mrsquoecirctre rueacutee sur le
code de deacuteontologie en vigueur depuis le 22
mars 1996 et me rassurer en lisant
La mission fondamentale du psychologue est
de faire reconnaicirctre et respecter la personne
dans sa dimension psychique Son activiteacute
porte sur la composante psychique des indivi-
dus consideacutereacutes isoleacutement ou collectivement
Oufhellip nous nrsquoeacutetions donc pas compleacutetement
hors-cadrehellip cependant je nrsquoavais pas vrai-
ment appris agrave travailler sur les bancs de la fac
Sans la demande du patient (mecircme pour lrsquoen-
fant le parent eacutetait demandeur sinon lrsquoinstitu-
tion scolairehellip)
Sans un cadre institutionnel classique
Et certainement pas en prise directe avec la
reacutealiteacute drsquoun eacuteveacutenementhellip
Quelques options universitaires tout de mecircme
assureacutees par des enseignants ayant participeacute agrave
des missions humanitaires mrsquoavaient deacutejagrave per-
mis drsquointerroger des dispositifs de soins hors
norme
Dans nos deacutebuts jrsquoai donc co-animeacute un groupe
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 16
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
de travail destineacute speacutecifiquement aux
psychologues pour reacutefleacutechir agrave notre pratique
Voici comment nous nous repreacutesentions alors
les choses
Nouvelles missionshellip = hellip nouvelles compeacute-
tences Ce que jrsquoai nommeacute dans mon introduc-
tion savoir-faire
1 NOUVELLES COMPEacuteTENCES REQUISES
ndash DU COcircTEacute DU SAVOIR-FAIRE
Lors des soins immeacutediats ou
defusing (cagraved sur le terrain dans les
heures qui suivent lrsquoattentat la catastrophe
naturelle la prise drsquootages lrsquoaccident col-
lectif etc)
Le psychologue doit reconstruire un cadre en
fonction de la situation qui se preacutesente agrave lui
crsquoest-agrave-dire en labsence de cadre deacutefini
(configuration du lieu dureacutee de la mission
nombre de sujets agrave prendre en charge etc
sont inconnus agrave lrsquoavance) Ceci neacutecessite de sa
part une capaciteacute dadaptation une souplesse
psychique dans son intervention ainsi qursquoun
cadre theacuteorique interne solide pour ne pas ceacute-
der nous mecircme agrave la panique ou au deacuteborde-
ment eacutemotionnel Le cadre theacuteorique solide
renvoyait surtout pour nous aux eacutecrits sur le
traumatisme et agrave ce qursquoon appelait alors la
victimologie
Pour illustrer ce propos je peux vous parler
drsquoune mission effectueacutee agrave Pointe Noire au Con-
go lorsque nous eacutetions chargeacutes avec un psy-
chiatre militaire de lrsquoeacutevaluation psychopatholo-
gique des ressortissants franccedilais en pleine
guerre civile (octobre 1997) Nous avons effec-
tivement ducirc nous adapter agrave lrsquoabsence de cadre
rassurant dans le sens ougrave nos deacuteplacements
eacutetaient extrecircmement limiteacutes en raison du con-
texte drsquoinseacutecuriteacute permanente marqueacute par des
tirs quotidiens drsquoarmes automatiques Il srsquoagis-
sait eacutegalement drsquoinventer des lieux de consulta-
tions et des modes drsquoapproches originaux pour
cette population bien souvent cloicirctreacutee dans les
appartements deacutevasteacutes par les milices armeacutees
Mais je souhaite citer drsquoautres situations moins
exceptionnelles afin de vous montrer agrave quel
point le psychologue dans ce travail drsquourgence
peut ecirctre ameneacute agrave reacutealiser des entretiens dans
des lieux inhabituels voire insolites comme agrave
bord drsquoun avion lorsque nous avons proceacutedeacute au
rapatriement des victimes du crash drsquoavion du
Seacuteneacutegal (en feacutevrier 1997) ou dans un car lors-
que nous avons accompagneacute les familles des
enfants victimes de lrsquoavalanche des Orres ou
encore dans un aeacuteroport lors de lrsquoaccueil de
populations reacutefugieacutees (du Congo ou du Kosso-
vo) ou dans une citeacute universitaire pour la prise
en charge des victimes drsquoattentats etc
Ici le psychologue doit ecirctre precirct agrave aller vers les
victimes sans attendre une demande de leur
part (drsquoautant plus que les personnes sont sou-
vent en eacutetat de choc de confusion de sideacutera-
tion etc) Alors rappelons-le que notre forma-
tion nous apprend plutocirct agrave travailler avec la de-
mande du patient comme principe inheacuterent agrave
la rencontre theacuterapeutique
Ensuite le psychologue est ameneacute agrave srsquointerro-
ger sur la position de neutraliteacute bienveillante
Alors que neutraliteacute signifie ne pas eacutemettre de
jugements de critiques de deacutesapprobation
nous voyons comment dans lrsquourgence le clini-
cien peut (je dirais mecircme doit) juger de lrsquoadap-
tation drsquoun comportement par exemple quitte agrave
deacutecider drsquoune hospitalisation ou drsquoun rapatrie-
ment En effet le psychologue doit savoir repeacute-
rer et informer les victimes des symptocircmes
psychopathologiques eacuteventuels favoriser la
demande de prise en charge theacuterapeutique ul-
teacuterieure si besoin est repeacuterer et orienter les
personnes les plus fragiles en faisant bien la
distinction entre eacutetat de stress aigu et entreacutee
potentielle dans une pathologie traumatique
Mecircme si ces fonctions de diagnostic drsquoeacutevalua-
tion drsquoorientation existent dans le cadre de
notre profession celles qui visent agrave informer agrave
lrsquoavance et agrave preacutevenir relegravevent habituellement
plutocirct de la speacutecificiteacute meacutedicale
Par ailleurs sur le terrain la position et latti-
tude du psychologue sont encore une fois un
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 17
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
peu particuliegraveres pour lui puisqursquoil doit assurer
une preacutesence rassurante contenante (voire
maternante au sens de Winnicott) apporter de
la chaleur et de lhumaniteacute Lrsquointervention drsquour-
gence se situe du cocircteacute du holding Ferenczi
en charge des soldats en prise avec des neacute-
vroses de guerre soulignait deacutejagrave ce pheacuteno-
megravene de reacutegression des patients les faisant re-
venir agrave un stade archaiumlque (en proie agrave des an-
goisses violentes et massives de destruction
morcellementhellip) et agrave des comportements in-
fantiles (ne plus savoir marcher perdre son
autonomie pour les besoins de la vie quoti-
dienne etc) Ici le traumatisme est externe et
agit par effraction physique et psychique deacute-
sorganisant les modaliteacutes deacutefensives habi-
tuelles On dit aussi que le traumatisme est en-
treacute par tous les pores de la peau et envahit
tous les sens (visuels olfactifs auditifs etc) Il
srsquoagit alors pour le psychologue drsquoexercer une
veacuteritable fonction de pare-excitation
drsquoenveloppe protectrice (Au sens de D Winni-
cott et de D Anzieu) fonction qui peut srsquoac-
compagner de gestes apaisants
Travailler dans ce type de dispositif ne srsquoimpro-
vise pashellip Ainsi le psychologue doit avoir reccedilu
une formation speacutecifique A lrsquoappui un nouvel
Extrait du code de deacuteontologie des psycho-
logues chapitre compeacutetences
Le psychologue tient ses compeacutetences de
connaissances theacuteoriques reacuteguliegraverement mises
agrave jour drsquoune formation continue et drsquoune forma-
tion agrave discerner son implication professionnelle
dans la compreacutehension drsquoautrui
Pour notre domaine drsquointervention la for-
mation porte avant tout sur
1 La clinique traumatique la symptomatologie
de la neacutevrose traumatique de lrsquoESPT mais
aussi de tous les eacutetats de deacutesorganisa-
tion aigus des comportements de panique col-
lective etc elle porte eacutegalement sur le fonc-
tionnement psychique entraveacute par le trauma
donnant lieu agrave des reacuteameacutenagements transi-
toires parfois tregraves eacuteloigneacutes drsquoune clinique clas-
sique
2 La dynamique de groupe un groupe pris
dans une catastrophe repreacutesente une enve-
loppe psychique groupale qui elle-mecircme peut
se trouver effracteacutee par la violence de lrsquoeacuteveacutene-
ment le collectif est alors briseacute et ne pourra
plus fonctionner comme avanthellip Que la prise
en charge soit groupale ou bien mecircme indivi-
duelle il est fondamental drsquoecirctre au clair avec
ces concepts de la clinique groupale
Nous venons de pointer les principales con-
naissances et compeacutetences neacutecessaires au
psychologue qui intervient dans lrsquourgence ou
dans des dispositifs de soins exceptionnels mis
en place suite agrave des eacuteveacutenements qui sortent de
lrsquoordinairehellip pour autant ce savoir-faire nrsquoa de
sens que srsquoil srsquoarticule avec un savoir-ecirctre
propre agrave la fonction habituelle du psychologue
2 LORSQUE LE SAVOIR-FAIRE REJOINT
LE SAVOIR-EcircTRE
Je poursuis ma lecture du code de deacuteontologie
(chapitre compeacutetences) le psychologue est
garant de ses qualifications particuliegraveres et deacute-
finit ses limites propres compte tenu de sa for-
mation et de son expeacuterience Il refuse toute in-
tervention lorsqursquoil sait ne pas avoir les compeacute-
tences requises Ainsi il doit savoir sil peut
assurer un soin immeacutediat dans lrsquourgence ou srsquoil
doit refuser ce type de mission en fonction de
ses limites personnelles et professionnelles de
sa vulneacuterabiliteacute (changeante au fil du temps et
de son histoire personnelle) de ses projections
eacuteventuelles
Il est inviteacute eacutegalement agrave repeacuterer et agrave connaicirctre
ses propres reacuteactions psychiques agrave leacutecoute de
ce type de patients de ce qui tient parfois de
lintoleacuterable savoir ou apprendre agrave repeacuterer
ses limites personnelles ses propres fan-
tasmes de sauveur ou ses mouvements
drsquoidentification agrave la victime crsquoest agrave dire ses
propres eacutelans contre-transfeacuterentiels Ces con-
naissances restent largement favoriseacutees par un
travail personnel au cours duquel le psycho-
logue a appris agrave ecirctre eacutecouteacute et par la mise en
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 18
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
place de supervision reacuteguliegravere
Dans le cadre de lrsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue est le seul agrave de-
voir se passer drsquoinstrument (pas de mateacuteriel
meacutedical ni de theacuterapeutique meacutedicamenteuse
ou encore de mateacuteriel technique reacuteserveacutes aux
meacutedecins infirmiers secouristes etc) De ce
fait comme lrsquoexprime Colette Chiland il devient
son propre instrument celui qui permet de
comprendre et drsquointervenir agrave mains nues
Lrsquooriginaliteacute de sa formation vient du travail sur
soi que le clinicien a effectueacute pour acqueacuterir
une certaine maicirctrise de lui-mecircme comme ins-
trument Autrement dit ce que le psychologue
met au service de lrsquoautre ce ne sont pas seule-
ment ses connaissances mais aussi son appa-
reil psychique sa psycheacute son fonctionnement
sa capaciteacute de ressentir de comprendre et
drsquoeacutelaborer Le savoir du clinicien devient un sa-
voir vivant incarneacute ougrave il paie de sa personne
Crsquoest principalement cette position qui le dis-
tingue drsquoun autre intervenant
Dans la clinique du traumatisme il est fonda-
mental de prendre conscience de ce qursquoon
eacuteprouve lors de lrsquoeacutecoute drsquoun blesseacute psychique
aux prises avec des pheacutenomegravenes drsquoeffractions
internes afin de ne pas ecirctre gouverneacute par des
reacuteactions non controcircleacutees dans la compreacutehen-
sion du patient et dans la reacuteponse qursquoon lui
donnera Nous voyons comment cette eacutecoute
ne peut se contenter drsquoun savoir plaqueacute elle
doit ecirctre au contraire un travail actif qui permet
des allers ndash retours entre probleacutematique per-
sonnelle et ressenti du patient sans que cette
premiegravere nrsquointerfegravere de maniegravere neacutegative Et
crsquoest bien en restant sensible et en acceptant
de le rester dans les limites que nous venons
de fixer que le sujet se sentira libre drsquoexprimer
eacutemotions penseacutees honteuses sentiments de
culpabiliteacute et drsquohumiliation inheacuterents agrave la dyna-
mique traumatique
Enfin nous le savons bien lrsquoeacutecoute srsquoexerce
dans un double registre ce qui est dit et ce qui
nrsquoest pas dit le contenu manifeste et le conte-
nu latent Ces dimensions concernent tout au-
tant le clinicien qui doit savoir se taire pour lais-
ser lrsquoautre parler et parler pour lui faciliter la pa-
role Dans notre contexte drsquourgence meacutedico-
psychologique le psychologue doit eacutegalement
chercher agrave eacutetablir petit agrave petit et degraves que pos-
sible une distinction entre fantasmes
(individuels) et eacuteveacutenements reacuteels (veacutecus par
tous) pour diffeacuterencier angoisse interne
(subjective) et peur (objective) des objets ex-
ternes
Il est ainsi un passeur agrave ce moment de frac-
ture dans lrsquohistoire du sujet Il fait alors le lien
entre le passeacute la bregraveche traumatique et la
reconstruction agrave venir
EN CONCLUSION
Dans un contexte hors du commun puisque
hors cadre et souvent hors demande il me
paraicirct essentiel de garder nos re-
pegraveres classiques de psychologue clinicien
Soulignons que nous restons pour le patient un
psychologue supposeacute savoir Dans cette cli-
nique deacuteroutante et violente bien entendu le
cadre interne tapisseacute de connaissances speacuteci-
fiques devient opeacuterant et garant de notre pro-
fessionnalisme Nous voyons finalement agrave quel
point la speacutecialisation est en partie incontour-
nable (mais comme pour tout autre type de cli-
nique les soins psychiques aupregraves de sujets
deacutependants en fin de vie de patients psycho-
tiques de nourrissons de familles de sans-
logishellip ne srsquoimprovisent pas drsquoavantage) sans
nous faire perdre de vue le socle de formation
commun qui nous reacuteunit et met en exergue la
speacutecificiteacute du Psychologue qui se caracteacuterise
bien par son orientation vers lrsquoeacutecoute qui prend
sens eacutecoute drsquoune parole drsquoun trajet drsquoune
rupture dans la continuiteacute discours drsquoun sujet
agent de son propre destin
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 19
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Aider agrave penser limpensable en oncologie
Anna Elli Pardo Oncologie meacutedicale Hocircpital Saint-Louis
J ai commenceacute agrave travailler agrave lhocircpital
comme psychologue en oncologie agrave la fin
des anneacutees 80
Le contexte eacutetait diffeacuterent de maintenant
Deux choses mavaient beaucoup marqueacutee et
interpelleacutee
- le manque de prise en charge de la douleur
- lattitude qui consiste agrave cacher la maladie et
sa graviteacute aux patients
La douleur neacutetait pas une cible de laction theacute-
rapeutique elle avait une valeur diagnostique
supposeacutee sameacuteliorer avec les traitements de
la maladie sans une attention particuliegravere agrave son
traitement (1)
Le meacutedecin eacutetait perccedilu comme deacutetenteur dune
veacuteriteacute qui faisait loi
Voilagrave quelques propos quil neacutetait pas rare
dentendre de la part du meacutedecin au patient
Faites-moi confiance ne pensez agrave rien la chi-
miotheacuterapie cest mon problegraveme vous pensez
agrave gueacuterir on aura toujours une moleacutecule pour
vous soigner on va se battre
Au deacutecegraves du patient on pouvait entendre il
est mort mais en reacutemission
Et le meacutedecin sadressant agrave moi ne parlez
pas de la mort aux patients vous savez on a
deacutejagrave vireacute une psychologue
Plusieurs eacuteveacutenements vont faire eacutevoluer la meacute-
decine et son discours dans la prise en charge
du patient
Agrave la fin du XXegraveme siegravecle lOrganisation Mon-
diale de la Santeacute (circulaire du 19-1-1994) a
deacutefini comme prioriteacute la lutte contre la dou-
leur
La creacuteation des eacutequipes anti-douleur sera un
eacuteveacutenement important ainsi que la recherche de
nouveaux antalgiques Lrsquoeacutevolution de cette
prise en charge va se reacutepandre en canceacuterolo-
gie et dans la meacutedecine en geacuteneacuteral
Les premiers Eacutetats Geacuteneacuteraux de la Ligue
contre le Cancer ont donneacute la parole aux pa-
tients il y a eu une demande de psychologues
dans les services pour une prise en compte de
la deacutetresse psychique
Le Plan Cancer en 2006 va donner des direc-
tives qui reacuteglementent aujourdhui la consulta-
tion dannonce et les soins de supports
La psycho-oncologie neacutee aux Eacutetats-Unis arrive
aussi en Europe et cest en 1994 quest creacuteeacutee
la Socieacuteteacute Franccedilaise de Psycho-Oncologie
(SFPO)
Son but est de deacutevelopper des outils des meacute-
thodes pour deacutepister et ainsi traiter preacutecoce-
ment les risques des difficulteacutes psychologiques
Elle sinscrit dans une approche bio-psycho-
sociale de la maladie canceacutereuse La speacutecifici-
teacute nest pas la prise en compte de la subjectivi-
teacute du patient mais ladaptation de celui-ci aux
diffeacuterentes situations traverseacutees pendant la ma-
ladie Cette discipline qui eacutetudie les attitudes
psychologiques et eacutemotionnelles survenant
pendant la maladie canceacutereuse pourrait laisser
croire quil y a des reacuteactions speacutecifiques agrave cette
maladie Son approche est de plus en plus co-
gnitivo-adaptative avec protocoles reacutefeacuterentiels
deacutemarche qualiteacute
Dans le champ de la psycho-oncologie on
trouve le terme de psycho-oncologue
Ce mot est utiliseacute de faccedilon un peu anarchique
on y trouve le psychologue le psychiatre mais
aussi dautres professionnels intervenant au-
pregraves des malades et de leur famille Ce nest
pas parce que nous avons quelques connais-
sances en oncologie que nous pouvons utiliser
ladjectif oncologue
Ce terme peut ecirctre source de confusion il ne
deacutefinit pas notre speacutecificiteacute et il me paraicirct aussi
seacutegreacutegatif dune pathologie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 20
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
Cest pour cela que nous voulons garder le
terme de psychologue clinicien
Dans ce mot il y a la dimension clinique cest agrave
dire lobservation du patient agrave son chevet
Mon travail consiste agrave accompagner soutenir
le patient dans ce parcours difficile quil entre-
prend avec la maladie
Le cancer produit un remaniement identitaire
pour le sujet ce qui neacutecessite de lui offrir un
espace de parole
Cest la psychanalyse qui de mon point de vue
offre les meilleurs outils pour travailler la cli-
nique du reacuteel Cest avec notre propre parcours
analytique que nous psychologues pouvons
bien prendre en compte la dimension incons-
ciente propre agrave lhumain
Je ne me situe donc pas dans le champ de la
psycho-oncologie au discours trop normatif
Notre clinique dans un service dhospitalisation
Cest agrave tout stade deacutevolution de la maladie
quun travail theacuterapeutique peut se mettre en
place avec le psychologue
On a beaucoup parleacute du dispositif dannonce
annonce du diagnostic visant agrave assurer agrave la fois
une bonne administration du soin et son
humanisation
Ces consultations cherchent agrave atteacutenuer limpact
traumatique Il est proposeacute au patient de ren-
contrer un psychologue
Il nest pas rare que le patient me dise ils ne
se rendent pas compte il y a trop dinforma-
tions drsquoun seul coup je nai pas encore reacutealiseacute
que jai un cancer et on me parle de perruque
pour la perte des cheveux de dieacuteteacuteticien de
psy mais je nen suis pas lagrave moi
Pour les patients cest la deacutecouverte brutale du
diagnostic puis le choc des traitements Nous
savons que le temps psychique nest pas le
temps meacutedical et que dans cette clinique cest
au cas par cas que nous pouvons intervenir ce
qui est traumatique pour un patient ne lest pas
pour un autre
Un patient me disait reacutecemment le cancer
menvahit je ne pense quagrave ccedila je ne peux plus
lire regarder un film il est omnipreacutesent Voilagrave
une description du reacuteel
Il sagit de faire entendre agrave une eacutequipe meacutedi-
cale tourneacutee plus vers la maladie que vers le
malade et ce dans une organisation tregraves tech-
nique et de plus en plus sophistiqueacutee la neacuteces-
siteacute de prendre en compte la subjectiviteacute du pa-
tient dans un espace qui en paraicirct deacutepourvu
La demande de leacutequipe vis agrave vis du psy peut
correspondre agrave une demande de compliance
au traitement que le patient refuse elle sou-
haite aussi souvent que le psy reacuteconforte le pa-
tient agrave qui on a donneacute une mauvaise nouvelle
Comme dit Jeacuterocircme Alric dans son article Qui
eacutecoute quoi la sphegravere psychologique de-
vient une fonction constituante de la personne
globale au mecircme titre que la sphegravere digestive
dermatologique et dont il faut soccuper (2)
Au psychologue de faire valoir aupregraves du pa-
tient lintention de lui donner une place pour
entendre et faire entendre sa position subjec-
tive
Souvent je suis interpelleacutee par les soignants
dans des situations de deacutetresse par exemple
quand les antalgiques se reacutevegravelent inefficaces
ou sont refuseacutes Dans les entretiens les pa-
tients deacuteplient leur histoire leur roman fami-
lial La douleur physique se mecircle agrave la souf-
france psychique
Une patiente qui avait un cancer du sein avec
des meacutetastases osseuses me disait jai mal
lagrave en me montrant sa poitrine
Je lui avais demandeacute si elle en avait parleacute au
meacutedecin
Elle me reacutepondit en me regardant droit dans les
yeux cette douleur-lagrave le meacutedecin ne peut
pas me la soigner cest lhistoire avec mon ma-
ri qui me fait mal Celui-ci lavait quitteacutee et elle
se retrouvait seule avec son jeune fils
En quelques mots elle avait situeacute ce qui la fai-
sait souffrir au-delagrave des localisations meacutetasta-
tiques Elle savait faire la diffeacuterence entre le
physique et ce qui venait lagrave sajouter agrave sa
propre histoire douloureuse
Comme dit Clavreul dans Lordre meacutedical la
souffrance renvoie le sujet qui leacuteprouve agrave son
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 21
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
fantasme cest-agrave-dire agrave sa propre histoire et au
discours quil peut tenir sur son histoire Il y a
un seul discours qui se tienne sur la souf-
france et cest celui de la personne qui
leacuteprouve (3)
Un patient encore reacutecemment me disait ne pas
vouloir devenir grabataire comme son pegravere
Il seacutetait occupeacute de lui depuis son plus jeune
acircge il poussait la chaise roulante dans ses deacute-
placements il eacutetait sa beacutequille Mon patient ar-
riveacute en fin de vie voudra jusqursquoau bout se deacute-
placer aux toilettes et rester indeacutependant dans
les gestes du quotidien
Aux soignants qui ne comprenaient pas pour-
quoi il sobstinait agrave vouloir faire tout seul des
gestes devenus si difficiles il a fallu dire sans
reacuteveacuteler le pourquoi combien ceacutetait important
pour le patient de garder cette indeacutependance
Ceacutetait pour lui sa digniteacute sa liberteacute sa volonteacute
Je voudrais mettre laccent sur la singulariteacute de
ces rencontres avec des patients deacutejagrave tregraves gra-
vement atteints et qui degraves le premier entretien
se saisissent de cette possibiliteacute de parole
Il y a la douleur et lautre versant de la souf-
france langoisse
Monsieur O est un patient algeacuterien qui a eacuteteacute
opeacutereacute drsquoun cancer du poumon Avant linterven-
tion chirurgicale il se sentait precirct agrave affronter
cette eacutepreuve cest apregraves quil a senti ses
forces diminuer Jai changeacute je ne suis plus le
mecircme quavant en fait je crois que je nai pas
accepteacute lopeacuteration Il dit regretter il aurait preacute-
feacutereacute vivre avec son cancer il serait mort avec
Ce qui semble bouleverser ce patient nest pas
tant la maladie en elle-mecircme que ses conseacute-
quences Avec ce bout de corps quon lui a reti-
reacute cest aussi toute une part de lui qui semble
partie
Leacutepreuve du cancer entraicircne toujours une at-
teinte de linteacutegriteacute corporelle
Ce corps qui est traiteacute par le meacutedical de faccedilon
organique biologique revient souvent dans le
discours des patients Ce qui eacutemerge cest
lhorreur des amputations des meacutetastases qui
se reacutepandent agrave linteacuterieur du corps mais aussi
ce qui se donne agrave voir agrave toucher Un corps en-
dommageacute que le patient a du mal agrave reconnaicirctre
comme le sien qui se bouche qui enfle qui
eacutetouffe
Le corps peut devenir un objet agrave controcircler per-
seacutecuteur qui nest plus investi de deacutesir Cette
parole descriptive du corps peut prendre toute
la place dans le discours du patient avant que
quelque chose du subjectif nrsquoapparaisse
Cest dans un deuxiegraveme temps que Monsieur
O apregraves avoir exprimeacute limpossibiliteacute daccep-
ter cette perte anatomique ndash une partie du pou-
mon ndash pourra associer sur dautres pertes qui
viennent sintriquer entre passeacute et preacutesent
Langoisse de mort est tregraves freacutequente dans
cette pathologie dans les entretiens il ne sagit
pas de viser directement ce que nous pensons
ecirctre lobjet de cette angoisse mais de soutenir
dans la conversation les deacutetours de cette indi-
cible
Lintervention aupregraves de la famille nest pas
rare
Monsieur L 63 ans a un cancer de la vessie et
il est deacutecrit par leacutequipe soignante comme tregraves
exigeant et peacutenible Je deacutecide daller me preacute-
senter
Il me fait une description assez preacutecise de sa
maladie qui a deacutebuteacute il y a quelques mois Je
lui demande ce quil pense lui de tout ccedila Il me
regarde attend plusieurs secondes et me reacute-
vegravele que sa femme a une maladie heacutematolo-
gique agrave surveiller et quil sinquiegravete beaucoup
pour elle Ils nont pas denfant Il ajoute que
dans le service on ne lui fait pas grand-chose
son eacutetat ne srsquoameacuteliore pas quil serait mieux
avec sa femme En mecircme temps elle ne peut
pas soccuper de lui agrave la maison Il part dans
un SSR (soins de suite et de reacuteeacuteducation)
Quelques semaines apregraves il revient dans le
service et il demande agrave me voir Il va ecirctre tregraves
direct On vient de lui parler de son mauvais
pronostic agrave court terme il veut que je le ren-
contre avec sa femme Il me dit Elle deacuteprime
Si je meurs elle va se laisser mourir Pour moi
cest insupportable Effectivement sa femme
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 22
Ecirctre psychologue ou faire de la psychologie
est tregraves deacuteprimeacutee affaiblie par sa maladie
mais elle accepte de voir son geacuteneacuteraliste et
prendre un traitement On lui trouve un heacuteber-
gement agrave la Maison des Parents pour lui eacuteviter
lrsquohocirctel Elle sera sur place pour voir son mari
elle pourra eacutechanger avec les familles heacuteber-
geacutees agrave la Maison des Parents Petit agrave petit elle
tisse des liens Son mari deacutecline rapidement je
la vois dans la chambre elle me parle de lui
des choses quils aimaient faire ensemble Elle
est calme rassureacutee par la preacutesence de
lrsquoeacutequipe Apregraves la mort de son mari nous nous
sommes revues puis teacuteleacutephoneacute et rapidement
elle prend la deacutecision de deacutemeacutenager agrave Annecy
pregraves dune amie Elle aura un suivi heacutematolo-
gique lagrave-bas
Jai souvent penseacute agrave cet homme dont le dis-
cours eacutetait centreacute sur la plainte et qui a changeacute
rapidement de registre agrave partir du moment ougrave
on a pris en compte sa souffrance et soutenu
sa femme aupregraves de lui
Dans notre travail il me paraicirct important de
rendre compte aux eacutequipes de nos interven-
tions pour permettre aux soignants des eacuteclair-
cissements sur la souffrance psychologique
des patients Cela peut permettre un change-
ment de rapport soignant-patient dans des si-
tuations ougrave le patient par langoisse sous-
jacente se montre peacutenible pour lrsquoeacutequipe voire
agressif agrave son eacutegard
Toujours pour ce qui concerne la famille une
reacuteelle eacutevolution a eacuteteacute la prise en compte des
enfants du patient Degraves le diagnostic et tout le
long de la maladie une attention particuliegravere de
la part de leacutequipe permet deacuteviter les situations
dramatiques que lon rencontrait dans le pas-
seacute lorsque lenfant deacutecouvrait la graviteacute de la
maladie du parent la veille de la mort de celui-
ci sans avoir eu la possibiliteacute de sy preacuteparer et
den parler
Pour conclure je dirai que la science et la tech-
niciteacute ont beaucoup eacutevolueacute agrave lhocircpital mais quil
y a eu peu de changement du cocircteacute de la prise
en compte meacutedicale de la dimension subjective
des patients
On est passeacute dune prise en charge de la dou-
leur qui eacutetait nieacutee agrave des situations parfois de
surmeacutedicalisation La meacutedecine malgreacute ses
progregraves consideacuterables ne peut pas soulager
toute les douleurs et encore moins de faccedilon
systeacutematique et protocolaire Elle doit tenir
compte de la singulariteacute de chaque patient
De mecircme sil y a encore une vingtaine dan-
neacutees on ne donnait pas suffisamment dinfor-
mations meacutedicales sur la maladie et le devenir
du patient on est passeacute aujourdhui agrave un trop
dinformations dans loptique de dire la veacuteriteacute
au malade et de le preacuteparer sur le chemin de
sa fin de vie
Il nest pas rare que je rencontre un patient agrave
qui on a asseneacute une veacuteriteacute meacutedicale quil ne
voulait pas entendre Pour le patient il sagit de
pouvoir se deacuteprendre de ce savoir meacutedical qui
peut venir empecirccher toute penseacutee le cristalli-
ser dans une angoisse de mort et entraicircner le
sujet vers une mort psychique avant la mort
reacuteelle
Nous sommes lagrave pour partager ce temps avec
lui ce temps qui est incertain et qui permet au
sujet davoir des interrogations exprimer des
affects
Le psychologue dorientation analytique peut
apporter agrave ses eacutequipes un eacuteclairage des situa-
tions
Une collaboration avec les meacutedecins est agrave en-
courager encore faut-il que les meacutedecins puis-
sent prendre le temps et donc se deacutetacher
dune pure gestion des soins pour penser et
analyser leur pratique
1 Baszanger I 1995 Douleur et meacutedecine La
fin dun oubli Le Seuil
2 Alric J 2004 Qui eacutecoute quoi Essai de
repeacuterage de deux postures deacutecoute possible agrave
lhocircpital Eregraves in Collectif sous la direction de
Patrick Ben Soussan Le cancer approche psy-
chodynamique chez ladulte
3 Clavreul J 1978 LOrdre meacutedical Paris Le
Seuil
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 23
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Modeacuterateur Franccediloise Adriansen CA de Psyclihos
gt Le psychologue entre les lignes des textes
officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin Page 24
gt Titre de psychotheacuterapeute si vous avez man-
queacute le deacutebuthellip
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine Page 32
gt Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal Page 43
Loi HPST titre de psychotheacuterapeutehellip
Quels changements pour le meacutetier de
psychologue
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 24
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Le psychologue entre les lignes des textes officiels
Nadine Labbeacute Hocircpital Cochin
V ingt ans se sont eacutecouleacutes depuis la creacutea-tion de Psyclihos Depuis de nombreux rapports textes officiels ont eacuteteacute diffuseacutes
qui concernent la santeacute dune maniegravere geacuteneacute-rale et plus particuliegraverement la santeacute mentale Quelle place nous psychologues avons-nous dans ces eacutecrits De fait lorsque lon interroge la bibliothegraveque des rapports publics sur le site de la Documen-tation franccedilaise sur le terme Psychologue on saperccediloit que seule une liste constitueacutee dune petite cinquantaine de reacutefeacuterences apparaicirct un peu plus toutefois que pour le terme psychiatre qui apparaicirct dans 47 rapports mais beaucoup moins que celui dinfirmier qui apparaicirct dans 121 rapports Jai choisi parmi ces textes ceux qui mont sem-bleacute les plus significatifs dune certaine image du psychologue vu par les politiques ou ladmi-nistration Je vais maintenant vous preacutesenter cette compilation dextraits dans un ordre chro-nologique Lun des premiers rapports qui cite les psycho-logues porte sur les Strateacutegies drsquoutilisation des antiretroviraux dans lrsquoinfection par le VIH en 1998 Il affirme Le soutien par les psy-chologues est lune des pratiques diverses des services hospitaliers qui meacuteritent drsquoecirctre deacuteve-loppeacutees La mecircme anneacutee un rapport sur les Uniteacutes agrave encadrement eacuteducatif renforceacute et leur ap-port agrave lheacutebergement des mineurs deacutelin-quants fait agrave la demande de lInspection Geacuteneacute-rale des Affaires Sociales preacuteconise Afin de preacutevenir lusure des eacutequipes et aussi de leur apporter une certaine capaciteacute de recul il faut mettre en place des proceacutedures de soutien au moment des crises et de supervision dans les-quelles le recours au psychologue simpose En 2000 un rapport au Premier ministre Lionel Jospin Pour une nouvelle politique publique
daide aux victimes fait le constat suivant Pour le reacuteseau de lINAVEM (Feacutedeacuteration natio-nale daide aux victimes et de meacutediation qui comprend 150 associations) les emplois de psychologue repreacutesentent seulement 9 des emplois salarieacutes Cet aspect pourtant fonda-mental de laide aux victimes nest pas suffi-samment deacuteveloppeacute En 1994 lintervention dun psychologue con-cernait environ un quart des associations daide aux victimes Le rapport propose la creacuteation de centres daide pour enfant-adolescent et adulte com-prenant obligatoirement des psychologues cli-niciens Des groupes de parole et deacutecoute pour en-fants victimes seraient animeacutes par des psycho-logues scolaires ayant suivi une formation speacute-cifique ou des psychologues cliniciens exteacute-rieurs Le projet dinteacutegration de psychologues clini-ciens dans les milieux scolaires semble alors ecirctre au cœur de la nouvelle politique publique daide aux victimes Une politique ambitieuse sur le papier hellip Les suites don-neacutees agrave ce rapport ont eacuteteacute la creacuteation dun numeacutero national daide aux victimes en 2001
Pourtant en 2000 on sinteacuteresse beaucoup agrave nous le rapport du Haut comiteacute de la santeacute pu-blique sur la souffrance psychique des ado-lescents et des jeunes adultes consacre un paragraphe au rocircle du psychologue dans le chapitre intituleacute Lrsquoinstitution scolaire Bilan en CM2 Il est eacutecrit
Le recours agrave un psychologue dans le milieu scolaire est pratiquement limiteacute aux tests drsquoorientation Lrsquoabsence de psychologue dans le secondaire semble faire partie de cette mau-vaise image de la psychiatrie qui persiste dans le grand public Le regard drsquoun psychologue exteacuterieur agrave lrsquoeacuteta-blissement dans des reacuteunions reacuteguliegraveres de synthegravese et de concertation peut ecirctre preacutecieux
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Ces contacts auraient de plus lrsquoavantage de relier les prises en charge de situations diffi-ciles entre lrsquointeacuterieur et lrsquoexteacuterieur des eacutetablisse-ments et de faire se connaicirctre les profession-nels des diffeacuterentes structures Ainsi 20 des adolescents pensent avoir be-soin de consulter un psychologue mais 137 disent avoir renonceacute du fait de difficulteacutes finan-ciegraveres Toujours en 2000 au colloque sur lrsquoEnfance maltraiteacutee la Ministre deacuteleacutegueacutee agrave lrsquoEnfance et agrave la famille reacuteclame Un psy pour chaque enfant Dans son second rapport Claire Brisset la deacute-fenseure des enfants sinteacuteresse eacutegalement au rocircle des psychologues et agrave leur formation Pour elle les psychologues souffrent depuis longtemps dun problegraveme didentiteacute du fait dune reconnaissance tardive de leur profes-sion et de lexistence de plusieurs types de psychologues recruteacutes agrave des niveaux deacutetudes diffeacuterents en reacutefeacuterence aux psychologues sco-laires et conseillers dorientation- psycho-logues La Deacutefenseure des Enfants propose d -Institutionnaliser les psychotheacuterapies den-fants et dadolescents par des psychologues cliniciens sur prescription du psychiatre et rembourseacutees par la Seacutecuriteacute sociale De la mecircme faccedilon quun meacutedecin speacutecialiste prescrit des seacuteances de kineacutesitheacuterapie qui sont alors rembourseacutees par la seacutecuriteacute sociale un psychiatre aussi bien dans le public que dans le priveacute doit pouvoir prescrire des theacuterapies effectueacutees par un psychologue clinicien Cette mesure qui se pratique deacutejagrave dans cer-tains pays europeacuteens comme lAllemagne ne peut ecirctre mise en place quaux conditions sui-vantes - quune formation homogegravene de psychologie clinique sanctionneacutee par un diplocircme unique soit organiseacutee - que cette formation permette dacceacuteder agrave un nouveau statut de psychologue clinicien recon-nu par lensemble des administrations concer-neacutees - que cette formation soit agrave la fois theacuteorique et pratique Cette reacuteforme permettrait de - mieux utiliser les compeacutetences des nombreux psychologues qualifieacutes actuellement deacutepour-vus dun emploi agrave temps plein ou contraints faute de poste dexercer dautres meacutetiers
Dans cette hypothegravese le psychiatre aurait le rocircle danimateur de leacutequipe soignante et de supervision des psychotheacuterapies meneacutees par les psychologues cliniciens En outre un tel scheacutema devrait pouvoir sappli-quer non seulement dans les structures pu-bliques mais aussi dans le secteur libeacuteral Les psychologues cliniciens peu nombreux en libeacute-ral pourraient alors sinstaller en cabinet (au mecircme titre que les infirmiegraveres ou les masseurs kineacutesitheacuterapeutes) En ce deacutebut des anneacutees 2000 les politiques sinteacuteressent beaucoup aux questions relatives agrave la santeacute en juillet 2000 Martine Aubry alors ministre de lemploi et de la solidariteacute confie aux Drs Piel et Roelandt une mission de reacute-flexion et de prospective dans le domaine de la santeacute mentale qui donnera lieu un an plus tard agrave un rapport intituleacute De la psychiatrie vers la santeacute mentale Un rapport dans lequel on parle peu des psychologues si ce nest pour dire que leur formation est insuffisante et quun internat en psychologie est neacutecessaire ce dont on reparlera beaucoup dans les anneacutees sui-vantes En aoucirct 2001 Psyclihos travaille sur le 1
er rap-
port deacutetape du groupe de travail de la DGS sur leacutevolution des meacutetiers en santeacute mentale Des psychologues de toute la France choqueacutes et inquiets se reacuteunissent au sein du Collectif Na-tional des Psychologues de la FPH Les me-sures preacuteconiseacutees par le 2
egraveme rapport deacutetape
paru en janvier 2002 mettent le feu aux poudres Pour rappel le rapport insiste sur le deacuteveloppement des reacuteseaux de santeacute la mise en place de proceacutedures de protocoleshellip Et surtout il preacutevoit des niveaux dintervention hieacuterarchiseacutes avec des intervenants de 1
egravere
ligne des professionnels de soins primaires et des intervenants speacutecialiseacutes et deacutejagrave des glisse-ments de compeacutetences vers les infirmiers et les meacutedecins geacuteneacuteralistes Il est agrave nouveau question de transfert de com-peacutetences en 2003 avec le rapport Berland sur la deacutemographie des professions de santeacute au titre eacuteloquent Coopeacuteration des professions de santeacute le transfert de tacircches et de compeacute-tences Le chapitre qui nous concerne sinti-tule Un transfert de compeacutetences en psychia-trie difficile agrave organiser Le Pr Berland eacutecrit Les auditions que jai pu mener lors de la mis-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
sion deacutemographie des professions de santeacute et les eacutechanges que jai pu avoir avec les psy-chiatres ont reacuteveacuteleacute de reacuteelles difficulteacutes agrave envi-sager le transfert de compeacutetences dans le champ de cette speacutecialiteacute En effet si certains professionnels considegraverent souhaitable la mise en perspective de collaborations organiseacutees avec les psychologues cliniciens dautres la trouvent inutile ou non souhaitablehellip Il est neacute-cessaire denvisager la part de lactiviteacute aujour-dhui assureacutee par les psychiatres qui doit ecirctre confieacutee en toute collaboration agrave des psychologues praticiens formeacutes agrave la fois par les faculteacutes de psychologie et les faculteacutes de meacutedecine pour construire ce nouveau meacutetier qui reacutepond agrave un besoin clairement identifieacute Au mecircme moment est diffuseacute le rapport Cleacutery Melun intituleacute Plan dactions pour le deacutevelop-pement de la psychiatrie et la promotion de la santeacute mentale qui reprend les principales pro-positions des rapports preacuteceacutedents par ex con-cernant la reacuteorganisation des soins en psychia-trie Concernant la formation des psycho-logues Ces formations sont tregraves diverses sui-vant les universiteacutes certaines eacutetant speacuteciali-seacutees dans la psychanalyse ce qui aboutit agrave des formations mono reacutefeacuterenceacutees Il en va de mecircme des stages qui sont souvent difficiles agrave trouver et ne permettent pas toujours dassister aux entretiens avec les patients Enfin dans un contexte de plus en plus seacutelectif les examens theacuteoriques et formels prennent le pas sur lac-complissement dun stage et lobtention dune formation clinique Il poursuit Les psychologues souhaitent eux-mecircmes faire progresser cette situation Ils se sont doteacutes dun code de deacuteontologie qui pose des prin-cipes clairs notamment au regard de leur for-mationhellipAvec un stage qui doit correspondre agrave leacutequivalent dun internat en psychologie dont la dureacutee ne devrait pas ecirctre infeacuterieure agrave 2 se-mestres et dont le contenu devrait faire lobjet dune validation finale Toujours en 2003 il faut un rapport eacutecrit par une psychologue pour que le terme soit citeacute 97 fois soit presque dans une page sur deux Cest le rapport de Marie de Hennezel sur Fin de vie le devoir daccompagnement Elle preacuteconise une preacutesence renforceacutee de psy-chologues dans tous les services sensibles
Pour favoriser le maintien agrave domicile des per-sonnes elle demande que lrsquoon eacutetudie la possi-biliteacute drsquoun financement drsquoun forfait de 3 agrave 5 seacuteances avec un psychologue pour un accom-pagnement de fin de vie sur le modegravele de ce qui est proposeacute dans le plan cancerElle de-mande la creacuteation dau moins un mi-temps de psychologue pour chaque service confronteacute agrave la fin de vie des patients Pour elle la Formation universitaire du psycho-logue ne le preacutepare pas neacutecessairement agrave la confrontation avec la mort drsquoautrui et son cor-tegravege drsquoangoisses et de fantasmes Elle ajoute Crsquoest la raison pour laquelle nous estimons qursquoune formation compleacutementaire personnelle (psychanalyse) ou une formation dans le cadre drsquoun DU de soins palliatifs ou drsquoun stage drsquoune semaine au moins dans une uniteacute de soins palliatifs (USP) doit lui permettre d lsquoeacutevaluer srsquoil est precirct ou non agrave travailler dans un service confronteacute agrave la mort des patients srsquoil peut accueillir sans trop drsquoangoisse celles des autres patients familles soignants Pour les psychologues de ville elle pose la question drsquoun conventionnement de la profes-sion puisque seuls les psychologues libeacuteraux inteacutegreacutes dans un reacuteseau (dans le cadre drsquoun groupement de coopeacuteration sanitaire) et reacutemu-neacutereacutes agrave la vacation sont pris en charge par lrsquoassurance maladie Elle ajoute Cela limite consideacuterablement lrsquooffre drsquoaide psychologique agrave domicile En mars 2005 la Commission Peacuterinataliteacute en-fants et adolescents recommande le renforcement des eacutequipes de materniteacute en psychologues dans le but de Mieux prendre en charge la santeacute mentale et les troubles psy-chiatriques de la megravere etou du couple En 2005 le rapport Santeacute justice et dange-rositeacutes pour une meilleure preacutevention de la reacutecidive eacutevoque les formations initiale et conti-nue des psychologues dans le domaine meacutedico-leacutegal qui devraient ecirctre renforceacutees afin de mieux prendre en consideacuteration les probleacutema-tiques relatives agrave la dangerositeacute psychiatrique dans la pratique clinique et la mise en oeuvre de lrsquoexpertise peacutenale Le rapporteur revendique la possibiliteacute pour les psychologues drsquoassurer le suivi du condam-neacute et demande laugmentation des effectifs des services peacutenitentiaires drsquoinsertion et de proba-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion notamment par lrsquointeacutegration de psycho-logues au sein des eacutequipes Dans son rapport sur Le fonctionnement des services dinformation et dorientation lIns-pection geacuteneacuterale de lEducation nationale re-met largement en question le statut des con-seillers dorientation-psychologues Des divergences de vues interviennent sou-vent entre ceux qui sont issus de la psycholo-gie essentiellement clinique et les autres qursquoils aient eacutetudieacute la psychologie du travail ou la so-ciologie lrsquoeacuteconomie le droit lrsquohistoire ou la phi-losophie Lrsquoouverture drsquoesprit des seconds aux questions du marcheacute de lrsquoemploi ou mecircme aux perspec-tives de deacutecentralisation est freacutequente Les psychologues cliniciens semblent plus autocen-treacutes individualistes voulant se concentrer sur leur pratique au jour le jour de conseil et drsquoac-compagnement des individus deacutesireux drsquoap-porter des solutions au cas par cas(sic ) Lrsquoeacutevolution de la profession qui a gagneacute le titre de psychologue en 1991 va dans le sens drsquoune eacutemancipation tout agrave fait eacutetonnante Les COPsy constituent un cas singulier drsquoexercice libeacuteral au sein mecircme de la fonction publique Ils nrsquoont en fait de comptes agrave rendre agrave personne lrsquoautori-teacute des directeurs est purement formelle (hellip) Et comble les conseillers ne sont pas inspecteacutes() Le rapport propose de scinder le corps des COPsy avec dun cocircteacute des psychologues de lenseignement secondaire et de lautre des conseillers dinformation et dorientation Les missions des psychologues de leacuteducation seraient centreacutees sur le deacutepistage et lexamen des eacutelegraveves pour lesquels on craint une inadap-tation la preacutevention des deacutecrochages la preacute-vention des conduites addictives en lien avec le personnel meacutedico-social leacutecoute un premier accompagnement dans les cas de profondes souffrances psychologiques le lien avec les services exteacuterieurs hellip Dans les eacutetablissements les psychologues complegraveteraient et renforceraient leacutequipe eacutedu-cative et meacutedico-sociale Pour lIGEN il est manifeste que les conseil-lers drsquoorientation-psychologues nrsquoont ni le temps ni les compeacutetences ni les moyens de faire face seuls agrave lrsquoensemble des missions que les usagers (au sens large du terme) pour-raient attendre drsquoeux Si beaucoup de responsables ministeacuteriels re-
grettent fortement lappellation de psycho-logues du statut de 1991 il faut reconnaicirctre que peu de personnels souhaitent labrogation totale de cette appellation y compris parmi ceux qui ont eacuteteacute recruteacutes avant 1990 sans avoir fait deacutetudes initiales de psychologie Il convient aussi de signaler quil y a unanimiteacute pour consideacuterer quon ne peut pas faire de psy-chologie clinique ou theacuterapeutique dans les eacutetablissements Tous pensent mecircme que cest impossible En fait en 1991 il aurait fallu creacuteer par la loi un statut de conseiller qui existe dans dautres pays Pour autant les auteurs concluent que la ques-tion de labrogation du statut de psychologue a eacuteteacute poseacutee mais ils ont consideacutereacute que ce neacutetait pas opportun dans le contexte actuel Mais le recrutement doit ecirctre diversifieacute Il srsquoagit de mettre un terme au monopole des li-cencieacutes en psychologie qui de lrsquoavis de la grande majoriteacute de nos interlocuteurs et notam-ment de lrsquoencadrement des services drsquoorienta-tion et des formateurs nrsquoest nullement imposeacute par lrsquoexercice des missions et a reacuteduit la diver-siteacute intellectuelle qui caracteacuterisait le corps avant 1991 En outre le poids excessif des li-cencieacutes en psychologie a favoriseacute des attitudes drsquoindividualisme et de repli au deacutetriment des autres facettes de la profession Dans le rapport fait au nom de la mission dinformation sur la famille et les droits de lenfant en 2006 Valeacuterie Peacutecresse et Patrick Bloche recommandent de faire prendre en charge par lassurance-maladie les consulta-tions des mineurs et de leur famille aupregraves de psychologues sur prescription meacutedicale afin dameacuteliorer la prise en charge des enfants et de leur famille On reparle encore de formation des psycho-logues en 2006 avec le rapport de la mission parlementaire de Jean-Paul GARRAUD sur la dangerositeacute Il comprend un chapitre impor-tant relatif agrave lexpertise psychologique et au psychologue expert on eacutetait agrave leacutepoque en pleine affaire dOutreau Il souligne encore une fois lrsquoheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute des diplocircmes tous les psy-chologues ne suivent pas une formation en psychopathologie clinique et peuvent avoir des formations theacuteoriques tregraves diverses Il conviendrait de redeacutefinir le champ drsquointerven-tion des psychologues fondeacute sur leur qualifica-
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
tion professionnelle et drsquoenvisager les possibili-teacutes de lrsquoarticulation de leurs expertises avec celles effectueacutees par les psychiatres Organiser une confeacuterence de consensus sur lrsquoexpertise psychologique afin de reacutefleacutechir sur les objectifs et les limites des expertises psy-chologiques lrsquoidentiteacute lrsquoeacutethique et la deacuteontolo-gie des experts leur solitude ainsi que sur les modaliteacutes pertinentes de reacutealisation des exper-tises et de leur eacutevaluation Ceci est resteacute un vœu pieux agrave ce jour hellip Il revendique Une plus grande qualification des formations des psychologues Outre une maturiteacute professionnelle une forma-tion particuliegravere est neacutecessaire (connaissance des diffeacuterents types et champs drsquoexpertise des proceacutedures judiciaires aspects criminolo-giques deacuteontologiqueshellip) Cette speacutecialisation pourrait deacutecouler drsquoun cur-sus post-universitaire en psychologie clinique et pathologique agrave lrsquoexemple des DU sur la pratique de lrsquoexpertise psychologique ou la psy-chologie leacutegale (Universiteacute Lille Aix-Marseille Rouen Poitiershellip) En 2007 les psychologues sont les stars du rapport de lIGAS consacreacute agrave Gestion et utili-sation des ressources humaines dans 6 eacuteta-blissements de santeacute speacutecialiseacutes en psy-chiatrie le terme psychologue apparaicirct 224 fois Les reacuteveacutelations sont lagrave encore fracassantes Il faut adapter le statut et le cursus de forma-tion et de carriegravere des psychologues pour mieux utiliser leurs compeacutetences et les inteacutegrer dans les eacutequipes Les problegravemes de peacutenurie de psychiatres doivent ecirctre anticipeacutes par une seacuterie de mesures - augmenter les attributions des psychologues en leur permettant dans certains cas deffec-tuer des actes jusque lagrave reacuteserveacutes aux meacutede-cins - ouvrir une formation de manager de structure psychiatrique agrave des cadres intermeacutediaires type cadre supeacuterieur de santeacute psychologue cadre socio-eacuteducatif Il serait possible douvrir le concours de cadre supeacuterieur de santeacute agrave dautres professions soi-gnantes psychologues eacuteducateurs speacuteciali-seacutes assistants de service social Les psychologues peuvent-ils remplacer les psychiatres et agrave quel prix Ce nest pas seulement parce quon manque
de psychiatres cest aussi parce que les psy-chologues repreacutesentent une certaine tradition de la psychiatrie europeacuteenne pas uniquement arc-bouteacutee sur les traitements chimiotheacuterapeu-tiques Cest aussi parce quils possegravedent en principe des compeacutetences permettant de deacuteve-lopper des aspects tregraves importants en psychia-trie - eacutevaluation des capaciteacutes cognitives et mise au point de programmes de reacutehabilitation - psychotheacuterapies de diverses natures eacutegale-ment de soutien dans les cas de traitement meacute-dicamenteux lourd - supervision de groupes de soignants pour eacuteviter les pheacutenomegravenes de chroniciteacute de mal-traitance - encadrement deacutequipes notamment de pro-fessionnels dhorizons divers Il est clair quil serait eacutegalement inteacuteressant de pouvoir leur confier des accueils de 1
egravere ligne
degraves lors que nombre de demandes de consul-tation signifient plutocirct une souffrance psychique quune pathologie psychiatrique La question de savoir sils devraient avoir le droit de prescrire ou de renouveler des pres-criptions au long cours meacuterite decirctre poseacutee Une telle eacutevolution neacutecessiterait une speacutecialisa-tion apregraves le diplocircme geacuteneacuteral de psychologue peut-ecirctre linstauration de ce que daucuns ap-pellent un internat et cette fois commun avec linternat en psychiatrie En attendant davoir notre ordonnancier si tant est que nous le souhaitions les tacircches speacuteci-fiques en psychiatrie pour les psychologues tout ce qui sapparente au bilan agrave leacutevaluation aux psychotheacuterapies de diverses obeacutediences Voilagrave ce que pensent les politiques et les admi-nistratifs de notre meacutetier mais ccedila nest pas la reacutealiteacute de notre meacutetier Tout dabord quelques chiffres sur la deacutemogra-phie des psychologues Nous sommes de plus en plus nombreux de 5500 eacutequivalents temps plein en 1997 agrave 11500 en 2009 preuve que notre rocircle est de plus en plus reconnu par les eacutetablissements Il reste encore beaucoup agrave faire en clinique priveacutee ougrave ils ne sont que 350 ETP La preacutecariteacute est tou-jours le lot de notre profession Il y a deux fois plus de psychologues agrave temps partiel que dans les autres emplois non meacutedicaux 40 de psy-chologues sont agrave temps partiel dans le public plus des trois quarts dans le priveacute soit le
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
double La profession est tregraves feacuteminiseacutee avec 8 femmes sur 10 psychologues elles ont en moyenne cinq ans de moins que leurs con-fregraveres masculins la moyenne dacircge eacutetant de 42 ans Les femmes de moins de 40 ans repreacute-sentent 38 des effectifs nationaux La densiteacute nationale des psychologues est de 37 psychologues pour 100000 habitants soit un psychologue pour 2700 Par comparaison celle des psychiatres est de 22 pour 100000 habitants La densiteacute en psychologues libeacuteraux est de 7 Concernant les secteurs dactiviteacute 87 des psychologues sont salarieacutes Un tiers exerce dans un eacutetablissement de santeacute principalement du secteur public ougrave 7 sur 10 sont employeacutes agrave plein temps Lexercice en libeacuteral ne concerne que 8 des effectifs Comment les psychologues perccediloivent-ils leur meacutetier Dana Castro et Marie Santiago ont publieacute dans Le Journal des psychologues ndeg 233 deacutec 2005- janv 2006 les Reacutesultats dune enquecircte na-tionale sur Evolution des repreacutesentations et construction identitaire du meacutetier de psy-chologue Les donneacutees ont eacuteteacute recueillies agrave partir de 93 questionnaires suite agrave une enquecircte nationale lanceacutee par le Journal des Psychologues aupregraves de ses lecteurs fin 2004 Les reacutesultats montrent que les psychologues ont une image assez steacutereacuteotypeacutee de leur meacute-tier qui ne se modifie pas significativement ni au cours des eacutetudes ni agrave lentreacutee dans la vie professionnelle Au deacutebut de leurs eacutetudes 50 des reacutepondants perccediloivent le psychologue comme un speacutecialiste de laide et de leacutecoute Pour 27 cest un meacutetier qui sexerce en solitaire 30 disent ne pas en avoir une repreacutesentation preacute-cise La repreacutesentation de la profession eacutevolue pro-gressivement Apregraves quelques anneacutees dexer-cice le psychologue perccediloit davantage sa fonc-tion certes encore comme un meacutetier daide et deacutecoute pour la moitieacute dentre eux mais qui sexerce en eacutequipe pour 21 selon des moda-liteacutes et avec des outils speacutecifiques au premier rang desquels lentretien et lexamen psycholo-giques pour 18 des reacutepondants La repreacutesentation du meacutetier se modifie-t-elle au
cours du cursus universitaire - Non pour 22 des reacutepondants pour lesquels elle reste identique tout au long du parcours - Oui pour 36 pour lesquels elle se modifie gracircce aux enseignements theacuteoriques en lien avec la clinique et la psychopathologie - Encore oui pour 34 pour lesquels elle se transforme gracircce aux stages et au contact des professionnels Dune maniegravere geacuteneacuterale les psychologues comptent sur eux-mecircmes et leurs compeacutetences en matiegravere dexpeacuterience dapprentissage sur le tas de solidariteacute et de travail en eacutequipe plutocirct que sur la qualification qui elle valorise les titres les connaissances formelles la revendi-cation de lautonomie et les distinctions statu-taires Seul 1 des reacutepondants eacutevoque les no-tions dorganisation du travail en terme de sta-tut professionnel de cadre A de reacutemuneacuteration de formation ou de titre proteacutegeacute de psycho-logue Autant dire quil reste beaucoup de tra-vail pour avoir une repreacutesentation profession-nelle qui puisse ecirctre partageacutee tant par les psy-chologues que par leurs partenaires profes-sionnels ougrave compeacutetence personnelle et qualifi-cation professionnelle sont indispensables Pourtant 78 des reacutepondants deacutecrivent des difficulteacutes au sein de leur institution Un sur 5 estime que ses collegravegues ne connaissent pas son meacutetier et quils en ont une image neacutegative qui est veacutecue comme deacutevalorisante 17 se sentent isoleacutes dans les eacutequipes avec lesquelles ils travaillent Une eacutetude plus reacutecente puisquelle date de 2010 vient compleacuteter la preacuteceacutedente il sagit de celle de Elise Marchetti Claude Lafrogne et Sandrine Schoenenberger eacutegalement publieacutee dans le Journal des psychologues ndeg 283 deacutec 2010- janv 2011 et qui sintitule Que pensent-ils de nous Etude des repreacutesentations so-ciales du psychologue Que pensent les psychologues deux-mecircmes Ils eacutevoquent lobjet de leur travail la psycheacute le cadre de leur activiteacute (cadre theacuteorique pra-tique eacutethique) et le contenu mecircme de leur tra-vail agrave savoir leacutevaluation et laccompagnement Chez les professionnels du meacutedico-social nos collegravegues deux repreacutesentations saffrontent Les eacuteducateurs techniques et les reacuteeacuteducateurs (peacutedicure podologue masseur kineacutesitheacutera-peute ergotheacuterapeute psychomotricien ortho-
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phoniste orthoptiste ou dieacuteteacuteticien) ont une vi-sion neacutegative le psychologue se confond avec le psychanalyste le charlatan en lien eacutetroit avec la psychiatrie la folie Les personnels administratifs et les eacuteducateurs ont une vision plus positive et concregraveteet sont plus attacheacutes au cadre cadre de travail du psychologue lui-mecircme mais aussi la contribu-tion quil peut apporter dans le cadre dun tra-vail pluridisciplinaire Quant aux sujets de la population geacuteneacuterale on doit distinguer ceux qui ont deacutejagrave eu recours au psychologue et ceux qui nont jamais consulteacute Ceux qui nont jamais consulteacute ont un discours plutocirct positif mais abstrait centreacute sur la dualiteacute problegraveme-reacutesolution (motifs-beacuteneacutefices) Les autres qui sont plus jeunes et plutocirct des femmes cherchent agrave deacutefinir ce quest un psy-chologue avec une vision plus concregravete de notre activiteacute de nos meacutethodes et une eacutevoca-tion de la sphegravere affective et du veacutecu person-nel Toutefois les sujets ayant deacutejagrave consulteacute un psychologue ont tendance agrave le confondre avec le speacutecialiste meacutedical cest-agrave-dire le psy-chiatre Dans Transformation de la psychiatrie et pratiques des psychologues LASAR Labora-toire danalyse socio-anthropologique du risque Universiteacute de Caen 2002 sous la direction dAnne Golse Le discours dAnne Golse sociologue est plus optimiste Elle eacutecrit La profession de psycho-logue se visibilise de plus en plus que ce soit dans la prise en charge des malades mentaux ou de la souffrance psychique On le voit dans la croissance deacutemographique certes encore modeste de cette profession mais cela sappreacute-hende eacutegalement dans la maniegravere dont les textes administratifs mentionnent (psychiatres psychologues) ou bien (psychiatres ou psycho-logues) Mais cette eacutemergence nouvelle dune certaine pariteacute dans les textes vient eacutegalement reconnaicirctre que de plus en plus de demandes sont directement adresseacutees au psychologue et marque lindividualisation de cette profession agrave coteacute de celles de psychiatres ou dinfirmiers Dans un rapport au Conseil national de lOrdre des meacutedecins en 2001 sur le suivi du malade mental il est dit que les psychologues pren-nent de plus en plus de place dans le monde de la psychiatrie relayant ou mecircme remplaccedilant les psychiatres dont le nombre va en diminuant
tregraves seacuterieusement Toutefois les psychologues ne sont pas satis-faits de leur place au sein de la psychiatrie pu-blique ni personnel meacutedical ni personnel pa-rameacutedical ils elles ont du mal agrave trouver leur place dans lunivers hospitalier marqueacute par lexistence de ce partage clair Le psychologue agrave la fois dedans et dehors eacuteprouve une ab-sence de lien avec linstitution et pour certains un sentiment dinexistence institutionnelle chro-nique Le psychologue nest pas dans le soin mecircme sil contribue aux soins ce qui renvoie agrave sa neacutecessaire place dexteacuterioriteacute et agrave la trans-versaliteacute de sa fonction Comme leacutecrivait Co-lette Chiland en 1983 le statut du psychologue clinicien est une position intermeacutediaire et sin-guliegravere qui le maintien dans un espace pro-fessionnel eacutetriqueacute Certains ressentent de lamertume agrave ecirctre reacuteduits au rocircle de psychotheacute-rapeutes etou estiment ne pas ecirctre reconnus comme des professionnels agrave part entiegravere ils se qualifient de sous-psychiatres quand deacutepen-dants du psychiatre ils ne peuvent directement recevoir les patients qui font appel agrave eux Cette revendication des psychologues est devenue pour certains un carcan qui limite le champ de leur intervention Les psychologues sont lobjet dambivalence Ils peuvent ecirctre consideacutereacutes comme la profession montante en raison de la chute de la deacutemographie des psychiatres et de la de-mande sociale qui leur est adresseacutee les psy-chologues pourraient ecirctre en 1
egravere ligne pour
supplanter ces absences mais la mise en cause de leur statut et de leur formation par le reacutecent statut de psychotheacuterapeute les fragilise Pour conclure je citerai Marc Turpyn au col-loque Le psychologue clinicien le singulier et le collectif La profession de psychologue est-elle un symptocircme de lrsquoinstitution hospita-liegravere Un certain nombre de signes permet depuis longtemps de le penser son identiteacute indeacutefinis-sable sa situation drsquoexception dans un en-semble institutionnel globalement meacutedical son inexistence dans les instances de lrsquohocircpital les oublis reacuteguliers dont elle fait lrsquoobjet dans les textes sa position institutionnelle hors hieacuterar-chie les interrogations reacutecurrentes sur ses sta-tuts lrsquoincompreacutehension de ses outils de travail par les administrations etc Ce qui est nouveau ce sont les nombreuses
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tentatives pour mettre un terme agrave cette position symptomatique volonteacute de faire entrer la pro-fession dans le champ meacutedical fiches meacutetier deacutefinition de compeacutetences introduction de speacute-cialiteacutes preacute-identifieacutees en articulation avec les neurosciences et les approches comportemen-tales circulaire drsquoapplication visant au controcircle ou agrave la disparition des activiteacutes de FIR etc Nrsquooublions pas que la preacutecariteacute entretenue des psychologues le deacutesir de reconnaissance la peur ndash comme lrsquoa montreacute reacutecemment la mise en application du deacutecret sur le titre de psycho-theacuterapeute ndash poussent aussi agrave la normalisation Normaliser la profession serait sans doute la reacuteduire agrave lrsquoombre drsquoelle-mecircme
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Titre de psychotheacuterapeute si vous avez manqueacute le deacutebut
Virginie Rocard Hocircpital Sainte Peacuterine
M AI 1999 PROPOSITION DrsquoAMENDEMENT
PAR B ACCOYER
Devant lrsquoabsence de reacuteglementation autour de lrsquoexercice de la psychotheacuterapie et dans un contexte de lutte contre les deacuterives sectaires sous couvert de psychotheacuterapie un premier amendement est proposeacute par Bernard Accoyer meacutedecin et deacuteputeacute Ce premier amendement porte sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute il est proposeacute le 4 mai 1999 agrave lrsquooccasion de lrsquoexamen du projet de loi relatif agrave la Couverture maladie universelle (CMU) OCTOBRE 1999 PROPOSITION DE LOI PAR
BACCOYER
Lrsquoamendement preacuteceacutedent ayant eacuteteacute refuseacute BAccoyer deacutepose le 13 octobre 1999 la pre-miegravere proposition de loi (ndeg 1844) visant agrave reacute-glementer le titre de psychotheacuterapeute Lrsquounique article preacutecise Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est strictement reacuteserveacute drsquoune part aux titulaires du diplocircme de docteur en meacutedecine qualifieacute en psychiatrie et drsquoautre part aux titulaires drsquoun diplocircme de troisiegraveme cycle en psychologie Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve deux professions de la santeacute mentale sont formeacutees par les universiteacutes franccedilaises les psycho-logues et les meacutedecins psychiatres Les condi-tions daccegraves et dutilisation de ces titres sont eacutetroitement encadreacutees par la loi Pourtant il existe un grave vide juridique concernant lexercice de la psychotheacuterapie La profession de psychotheacuterapeute nest en effet agrave ce jour toujours pas deacutefinie par le code de la santeacute publique Ainsi de trop nombreuses per-sonnes insuffisamment qualifieacutees voire non qualifieacutees se deacuteclarent et sinstituent psycho-theacuterapeutes en toute impuniteacute faisant courir les plus grands dangers agrave des personnes qui
par deacutefinition sont vulneacuterables et risquent de voir leur deacutetresse et leur pathologie aggra-veacutees MARS 2000 est enregistreacutee agrave la Preacutesidence de lAssembleacutee nationale sous le ndeg 2288 une pro-position de loi relative agrave lexercice de la profes-sion de psychotheacuterapeute par les deacuteputeacutes MM Jean-Michel Marchand Andreacute Aschieri Mme Marie-Heacutelegravene Aubert MM Yves Cochet et Noeumll Mamegraverehellip AVRIL 2000 PROPOSITION DE LOI DE
BACCOYER
26 avril 2000 nouvelle proposition de loi de BAccoyer Loi ndeg2342 relative agrave la prescription et agrave la conduite des psychotheacuterapies Dans lrsquoexposeacute des motifs on retrouve En labsence de disposition du code de la santeacute publique concernant lusage des psychotheacutera-pies quiconque le souhaite peut actuellement visser sa plaque de psychotheacuterapeute et preacutetendre soigner (hellip) Ainsi le rapport de la mission interministeacuterielle de lutte contre les sectes remis en feacutevrier 2000 au Premier mi-nistre signale que certaines techniques psy-chotheacuterapiques sont devenues un outil au ser-vice de linfiltration sectaire et il suggegravere au se-creacutetariat dEtat agrave la Santeacute de cadrer ces pra-tiques Cest la raison pour laquelle javais dores et deacutejagrave deacuteposeacute le 13 octobre 1999 avec quatre-vingt-un collegravegues une proposition de loi ndeg1844 visant agrave reacuteserver lusage du titre de psychotheacuterapeute agrave des personnes titulaires de diplocircmes universitaires() Dans ce con-texte il convient deacutesormais de consideacuterer les psychotheacuterapies comme un veacuteritable traite-ment A ce titre cest leur prescription et leurs applications qui apparaissent comme devant ecirctre reacuteserveacutees agrave des professionnels deacuteten-teurs de diplocircmes universitaires attestant dune formation institutionnelle garantie dune compeacutetence theacuteorique pouvant ecirctre doubleacutee
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dune expeacuterience pratique et dun travail sur soi (hellip) Cependant certains professionnels bien que non-psychiatres ou non-psychologues cliniciens preacutesentent de solides connaissances et une expeacuterience de la patho-logie mentale et du fonctionnement psychique Il convient donc quun jury composeacute duniversi-taires et de professionnels soit habiliteacute agrave vali-der leurs compeacutetences et agrave autoriser lexercice des psychotheacuterapies agrave ceux qui pratiquent deacute-jagrave depuis plus de cinq anneacutees agrave compter de promulgation de la preacutesente loi
PROPOSITION DE LOI Article unique Il est inseacutereacute apregraves larticle L 360 du code de la santeacute publique un article L 360-1 ainsi reacutedigeacute Les psychotheacuterapies sont des traitements meacutedico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes meacutedecins quali-fieacutes en psychiatrie et psychologues clini-ciens Les professionnels qui dispensent des psychotheacuterapies depuis plus de cinq ans agrave la date de promulgation de la preacute-sente loi pourront poursuivre cette activiteacute theacuterapeutique apregraves eacutevaluation de leurs connaissances et pratiques par un jury composeacute duniversitaires et de profession-nels dont la composition est fixeacutee par deacute-cret en Conseil dEtat
OCTOBRE 2003 AMENDEMENT AU PROJET DE LOI SUR LE CODE DE LA SANTEacute PUBLIC B AC-
COYER
8 Octobre 2003 agrave lrsquoAssembleacutee nationale B Ac-coyer deacutepose un amendement ndeg71 Les psychotheacuterapies sont des traitements meacute-dico-psychologiques des souffrances mentales Comme toute theacuterapeutique leur prescription et leur mise en oeuvre ne peuvent relever que de professionnels qualifieacutes en psychiatrie de psychologues cliniciens et meacutedecins ayant sui-vis les formations requises Crsquoest la 3eme version (ndeg336) qui est adopteacutee agrave lrsquounanimiteacute le 8 octobre 2003 par lrsquoAssembleacutee Nationale Les psychotheacuterapies constituent des outils theacuterapeutiques utiliseacutes dans le traite-ment des troubles mentaux Les diffeacuterentes ca-teacutegories de psychotheacuterapie sont fixeacutees par deacute-cret du ministre chargeacute de la Santeacute Leur mise en œuvre ne peut relever que de meacutedecins
psychiatres ou de meacutedecins et psychologues ayant les qualifications professionnelles re-quises fixeacute par ce mecircme deacutecret Lrsquoagence Na-tionale drsquoAccreacuteditation et drsquoEvaluation en Santeacute apporte son concours agrave lrsquoeacutelaboration de ces conditions (hellip) On ne parle plus ici de lrsquousage drsquoun titre de psy-chotheacuterapeute mais drsquoune deacutefinition de la psy-chotheacuterapie JANVIER 2004 AMENDEMENT ACCOYER ANNU-
LANT LE PREacuteCEacuteDENT
Le 19 janvier 2004 lrsquoamendement Accoyer de-venu entre temps amendement 363 About-Matteacutei annulant le preacuteceacutedent est voteacute par le Seacutenat en ces termes Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacute-serveacute aux professionnels inscrits au registre national de psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dis-penseacutes de lrsquoinscription les titulaires drsquoun di-plocircme de docteur en meacutedecine les psycho-logues titulaires drsquoun diplocircme drsquoeacutetat et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations Les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent article sont fixeacutees par deacutecret Ici les psychanalystes reacuteguliegraverement enregis-treacutes dans les annuaires de leurs associations font leur apparition dans la liste des personnes habiliteacutees agrave user du titre de psychotheacuterapeute
AVRIL 2004 AMENDEMENT DUBERNARD
8 avril 2004 est voteacute agrave lrsquoAssembleacutee nationale lrsquoamendement devenu depuis amendement 344 preacutesenteacute par Jean-Marie Dubernard rap-porteur de la commission des affaires cultu-relles familiales et sociales
POLITIQUE DE SANTE PUBLIQUE (Nordm 1364)
(DEUXIEME LECTURE)
Amendement Nordm 344 preacutesenteacute par M Jean-Michel Dubernard rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles familiales et sociales Article 18 quater La conduite des psychotheacuterapies neacuteces-site soit une formation theacuteorique et pra-tique en psychopathologie clinique soit une formation reconnue par les associa-tions de psychanalystes (hellip) Lrsquousage du
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titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au registre national des psychotheacuterapeutes (hellip) Sont dispen-seacutes de lrsquoinscription sur la liste viseacutee agrave lrsquoali-neacutea preacuteceacutedent les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psy-chologue dans des conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 portant diverses dispositions drsquoordre social nordm85-772 du 25 juillet 1985 et les psychanalystes reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans les annuaires de leurs asso-ciations
Dans lrsquoexposeacute sommaire on retrouve pour conduire des psychotheacuterapies il est neacutecessaire drsquoavoir suivi une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie La condition de lrsquoinscrip-tion sur le registre national est maintenue (hellip)Lrsquoamendement continue agrave preacutevoir que les titu-laires drsquoun diplocircme de meacutedecine les psycho-logues et les psychanalystes sont dispenseacutes de lrsquoenregistrement Ces professionnels devront satisfaire agrave lrsquoobligation de formation mention-neacutee au premier alineacutea de lrsquoarticle
9 AOUT 2004 LOI SUR LE TITRE DE PSYCHOTHEacute-
RAPEUTE ARTICLE 52
Le 28 juillet 2004 a eu lieu la reacuteunion de la commission mixte paritaire qui reacutevise lrsquoamende-ment qui est examineacute en seacuteances publiques par lrsquoAssembleacutee Nationale et le Seacutenat le 30 juil-let 2004 et devient le 09 aoucirct 2004 la loi ndeg2004-806 lrsquoarticle 52 relative agrave la politique de santeacute publique Sa parution est dans le JO ndeg185 du 11 aoucirct 2004 page 14277 texte ndeg 4 Dans cette loi larticle 18 quater revu par la commission mixte a eacuteteacute inteacutegralement repris et devient larticle 52 de la dite Loi
Article 52 Lusage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes Linscription est enregistreacutee sur une liste dresseacutee par le repreacutesentant de lEtat dans le deacutepartement de leur reacutesidence profes-sionnelle Elle est tenue agrave jour mise agrave la disposition du public et publieacutee reacuteguliegravere-ment Cette liste mentionne les formations suivies par le professionnel En cas de transfert de la reacutesidence professionnelle dans un autre deacutepartement une nouvelle
inscription est obligatoire La mecircme obli-gation simpose aux personnes qui apregraves deux ans dinterruption veulent agrave nou-veau faire usage du titre de psychotheacutera-peute Linscription sur la liste viseacutee agrave lalineacutea preacuteceacutedent est de droit pour les titulaires dun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par larticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions dordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations Un deacutecret en Conseil dEtat preacutecise les modaliteacutes dapplication du preacutesent article et les conditions de formation theacuteoriques et pratiques en psychopathologie clinique que doivent remplir les personnes viseacutees aux deuxiegraveme et troisiegraveme alineacuteas
Cet article introduit comme condition de lrsquousage du titre une formation theacuteorique et pratique en psychopathologie clinique alors qursquoil stipule dans le mecircme temps que lrsquoinscription est de droit pour certains professionnels ce qui pose-ra beaucoup de problegravemes pour lrsquoeacutecriture des projets de deacutecret 2005-2009 AVANT-PROJET DrsquoAPPLICATION DE
LA LOI
Les concertations avec les professionnels con-cerneacutes par lrsquoeacutecriture drsquoun avant-projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute deacutebutent en 2005 Beaucoup de versions vont voir le jour et susciter de vives reacuteactions des professionnels Le ministegravere reacuteunit les organi-sations professionnelles agrave plusieurs reprises pour leur soumettre ces projets Quelques exemples des diffeacuterentes versions de lrsquoavant-projet de deacutecret de loi Version de lrsquoavant projet de deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute 10 janvier 2006
Art1 Lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute neacutecessite une deacutemarche volontaire de la part des professionnels pratiquant les psychotheacuterapies Inscription sur une liste deacutepartementale (hellip) Art2 Lrsquoinscription sur la liste deacutepartemen-
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tale est subordonneacutee pour les professionnels viseacutes au 3
egraveme ali-
neacutea lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique lrsquoattestation de lrsquoobtention du diplocircme de docteur en meacutedecine ou de lrsquoun des di-plocircme viseacutes au deacutecret ndeg 90-255 du 22 mars 1990 modifieacute (liste des diplocircmes permettant de faire usage professionnel du titre de psychologue) ou de lrsquoinscrip-tion agrave un annuaire drsquoassociations de psy-chanalystes pour les autres professionnels
Lrsquoattestation de la certification de la for-mation en psychopathologie clinique Le cas eacutecheacuteant lrsquoattestation de lrsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profession reacute-glementeacutee dans le champ sanitaire et so-cial Une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le do-maine de la pratique de la psychotheacutera-pie parmi les quatre approches sui-vantes analytique systeacutemique cognitivo-comportementaliste inteacutegrative La deacuteclaration sur lrsquohonneur mentionne notamment lrsquointituleacute et la date drsquoobtention du diplocircme la dureacutee de la formation le nom et les coordonneacutees de lrsquoorganisme de formation public ou priveacute qui a deacutelivreacute le diplocircme (hellip) Art8 Le cahier des charges susviseacute deacutefi-nit les modaliteacutes de la formation en psy-chopathologie clinique laquelle est drsquoun niveau master Il vise agrave permettre au pro-fessionnel souhaitant user du titre de psy-chotheacuterapeute drsquoacqueacuterir Une connaissance du fonctionnement psychique Une capaciteacute de discrimination de base des situations pathologiques en santeacute mentale Une connaissance de la diversiteacute des theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie Une connaissance des 4 principales ap-proches de psychotheacuterapie vali-deacutees scientifiquement (analytique systeacute-mique cognitivo-comportementaliste in-teacutegrative) (hellip)
Il est eacutevoqueacute un niveau master pas de men-
tion drsquoune formation universitaire la loi ne parle que drsquoune formation agrave la psychopathologie cli-nique et stipule ce que seraient les approches psychotheacuterapiques valables scientifiquement ce qui nrsquoest pas sans questionner Titre ouvert aux deacutetenteurs drsquoun diplocircme relatif agrave une pro-fession reacuteglementeacutee dans les champs sani-taires et sociaux ne correspond pas aux preacute requis de la formation en psychopathologie cli-nique Par la suite le descriptif des diffeacuterentes ap-proches de psychotheacuterapie disparaicirct au profit drsquoune connaissance des principales ap-proches utiliseacutees en psychotheacuterapie sans preacute-cision Est indiqueacute le nombre drsquoheures de for-mation theacuteorique (150 heures dans une ver-sion 500 dans une autrehellip) et de stage pra-tique Est stipuleacute que la formation en psychopa-thologie clinique peut ecirctre confieacutee agrave lrsquoUniversiteacute ou agrave des organismes passant convention avec lrsquoUniversiteacute Pour les professionnels inscrits de droit on retrouve les docteurs en meacutedecine quelles que soient leurs speacutecialiteacutes les psycho-logues quelle que soit leur formation et les psy-chanalystes reacuteguliegraverement inscrits dans un an-nuaire drsquoassociation de psychanalystes ce qui nrsquoest pas un titre proteacutegeacute On exige par ailleurs de ces mecircmes professionnels une formation compleacutementaire en psychopathologie viseacutee agrave lrsquoalineacutea 4 de lrsquoarticle 52 ce qui posera pro-blegraveme certaines professions pouvant faire usage du titre de psychotheacuterapeute de droit doivent dans le mecircme texte de loi attester drsquoune formation compleacutementaire Pour tous les professionnels le cas eacutecheacuteant une deacuteclaration sur lrsquohonneur faisant eacutetat des autres formations suivies dans le domaine de la pratique de psychotheacuterapie une attestation drsquoobtention drsquoun diplocircme relatif agrave une profes-sion reacuteglementeacutee par le code de la santeacute pu-blique ou le code de la famille et de lrsquoaction so-ciale Le cahier des charges deacutefinit les modaliteacutes de la formation en psychopathologie clinique pour acqueacuterir ou valider une connaissance des fonctionnements et des processus psychiques une connaissance des critegraveres de discerne-ment des grandes pathologies psychiatriques une connaissance des diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie une connais-sance des principales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie
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Le Ministegravere de la Santeacute ne parvient pas agrave faire aboutir lrsquoeacutecriture de deacutecrets drsquoapplication de-vant faire face aux contestations des diffeacuterents professionnels Au printemps 2008 le Ministegravere de la Santeacute deacutecide drsquoarrecircter un des projets de deacutecret drsquoap-plication de lrsquoarticle 52 soumis au CNESER (Conseil National de lrsquoEnseignement Supeacuterieur et de la Recherche) le 16 juin 2008 Dans la note de preacutesentation on retrouve il ne srsquoagit pas de creacuteer une nouvelle profession ni drsquoen-cadrer la formation et la pratique de la psycho-theacuterapie mais de preacuteciser les conditions dans lesquelles il peut ecirctre fait usage de ce titre Il y est exigeacute pour tous professionnels drsquoavoir valideacute une formation theacuteorique de 400 heures (cest-agrave-dire infeacuterieure au total de la formation en psychopathologie clinique drsquoun Master de Psychologie clinique) et un stage pratique de 5 mois Possibiliteacutes de dispenses partielles de forma-tion selon les cateacutegories professionnelles con-cerneacutees (meacutedecins meacutedecins psychiatres psy-chologues psychanalystes) 18 MARS 2009 PROJET DE LOI PORTANT REacute-
FORME DE LrsquoHOcircPITAL ET RELATIF AUX PATIENTS
Agrave LA SANTEacute ET AUX TERRITOIRES
23 JUILLET 2009 ARTICLE 91 DE LA LOI HPST
Lrsquoarticle 91 de la loi HPST du 21 juillet 2009 opegravere une modification de lrsquoarticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 pour reacutesoudre les difficulteacutes rencontreacutees agrave eacutecrire un deacutecret drsquoapplication Il modifie lrsquoarticle 52 portant sur lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 52 de la loi ndeg 2004-806 du 9 aoucirct 2004 modifieacute par lrsquoarticle 91 de la loi ndeg 2009
-879 du 21 juillet 2009 Lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute est reacuteserveacute aux professionnels inscrits au re-gistre national des psychotheacuterapeutes [hellip] Un deacutecret en Conseil drsquoEacutetat preacutecise les modaliteacutes drsquoapplication du preacutesent ar-ticle et les conditions de formation theacuteo-rique et pratique en psychopathologie cli-nique que doivent remplir lrsquoensemble des professionnels souhaitant srsquoinscrire au registre national des psychotheacuterapeutes Il deacutefinit les conditions dans lesquelles les ministres chargeacutes de la santeacute et de lrsquoen-
seignement supeacuterieur agreacuteent les eacutetablis-sements autoriseacutes agrave deacutelivrer cette forma-tion Lrsquoaccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires drsquoun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit drsquoexercer la meacutedecine en France ou drsquoun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-chologie ou la psychanalyse Le deacutecret en Conseil drsquoEacutetat deacutefinit les conditions dans lesquelles les titulaires drsquoun diplocircme de docteur en meacutedecine les personnes autoriseacutees agrave faire usage du titre de psychologue dans les conditions deacutefinies par lrsquoarticle 44 de la loi ndeg 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses disposi-tions drsquoordre social et les psychanalystes reacuteguliegraverement enregistreacutes dans les an-nuaires de leurs associations peuvent beacute-neacuteficier drsquoune dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique [hellip] Le deacutecret en Conseil drsquoEtat preacutecise eacutegale-ment les dispositions transitoires dont pourront beacuteneacuteficier les professionnels jus-tifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacuterapie agrave la date de publication du deacutecret
Il nrsquoy a plus de notion de professionnels inscrits de droit la formation en psychopatho-logie clinique est exigible de tous et lrsquoaccegraves agrave cette formation requiert un niveau de diplocircme eacuteleveacute titre de docteur en meacutedecine master de psychologie ou de psychanalyse Y sont tou-jours mentionneacutes les psychanalystes reacuteguliegrave-rement enregistreacutes dans les annuaires de leurs associations 20 MAI 2010 DEacuteCRET DrsquoAPPLICATION RELATIF Agrave LrsquoUSAGE DU TITRE DE PSYCHOTHEacuteRAPEUTE (CF
ANNEXE)
Le 20 mai 2010 paraicirct le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute publieacute au JO ndeg0117 du 22 mai 2010 (deacutecret ndeg 2010-534) Ce deacutecret deacutefinit les critegraveres de formation en psychopathologie clinique exigeacutee fixe les con-ditions drsquoagreacutement des eacutetablissements de for-mation preacutecise les dispenses partielles ou to-tales de formation dont peuvent beacuteneacuteficier les meacutedecins psychologues et psychanalystes et enfin arrecircte les dispositions transitoires appli-cables aux psychotheacuterapeutes en exercice agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 37
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
la date de publication du deacutecret Il nrsquoy est tou-jours pas fait mention de formation agrave la pra-tique psychotheacuterapique Il preacutecise une condition de diplocircme minimal pour avoir accegraves agrave cette formation Elle est reacute-serveacutee aux personnes titulaires drsquoun doctorat de meacutedecine ou drsquoun master ayant pour men-tion ou pour speacutecialiteacute la psychologie ou la psy-chanalyse Les psychiatres sont exempteacutes de formation compleacutementaire Les meacutedecins non psy-chiatres seront contraints agrave une formation com-pleacutementaire On retrouve la notion de psychologue clinicien qui ne correspond pas agrave un titre proteacutegeacute comme tel ni un parcours de formation identifieacutee Les psychologues clini-ciens nrsquoont pas de dispense totale et devront se soumettre agrave une formation theacuteorique et pra-tique compleacutementaire La formation theacuteorique comprend 400 heures drsquoenseignement pour acqueacuterir ou valider des connaissances relatives au deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques aux critegraveres de discernement des grandes patholo-gies psychiatriques aux diffeacuterentes theacuteories se rapportant agrave la psychopathologie aux princi-pales approches utiliseacutees en psychotheacuterapie Le stage est drsquoune dureacutee minimale de cinq mois Les professionnels justifiant drsquoau moins 5 ans de pratique de la psychotheacuterapie peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale apregraves avis de la commission reacutegionale drsquoinscription Le deacutecret ne preacutecise pas la cateacutegorie professionnelle nrsquoappartenant agrave aucune des cateacutegories preacuteceacutedentes que lrsquoon voit en effet apparaicirctre dans lrsquoannexe du deacutecret Le deacutecret a renforceacute le niveau exigeacute pour agreacuteer les eacutetablissements de formation Les psychologues notamment par le biais de leurs organisations professionnelles et syndi-cales ont deacuteposeacute un recours juridique contre le deacutecret relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacutera-peute le 12 juillet 2010 Ils contestaient notam-ment que lrsquoon exige drsquoeux des formations com-pleacutementaires qui sont deacutejagrave incluses dans leur formation initiale Le recours a eacuteteacute examineacute le mercredi 21 sep-tembre 2011 Le rapporteur public a conclu au rejet de lrsquoensemble des requecirctes porteacute contre le deacutecret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 arrecirct du Conseil drsquoEtat du 27 octobre 2011 Ce deacutecret
est jugeacute conforme agrave lrsquoarticle 52 de la loi ndeg2004-806 du 9 aoucirct 2004 relative agrave la politique de santeacute publique modifieacutee par la loi ndeg2011-940 du 10 aoucirct 2011-art 47 (V) Les organisations professionnelles de psychologues sont en pourparler et eacutevoquent une modification de lrsquoannexe du deacutecret qui pourrait ecirctre en reacuteeacutecri-ture pour mettre agrave pariteacute psychologues et psy-chiatres pour la dispense totale de lrsquoenseigne-ment theacuteorique et du stage srsquoil a eacuteteacute effectueacute pendant les eacutetudes Fin 2011 les bureaux concerneacutes au Ministegravere de la Santeacute et au Ministegravere de lrsquoenseignement Supeacuterieur et de la Recherche examinent un projet de modification de lrsquoannexe du deacutecret du 20 mai 2010 afin de preacutevoir une dispense de formation theacuteorique compleacutementaire et de stage pour les titulaires du titre de psychologue ayant accompli le stage professionnel lieacute agrave lrsquoob-tention de ce titre dans les conditions preacutevues agrave lrsquoart4 du deacutecret du 20 mai 2010 Une dis-pense de toute formation theacuteorique mais reacuteali-sation drsquoun stage de 2 mois dans les conditions de lrsquoart4 du deacutecret pour les titulaires du titre de psychologue dont le stage professionnel lieacute agrave lrsquoobtention de ce titre nrsquoa pas eacuteteacute reacutealiseacute dans les conditions de cet article (voir sites des orga-nisations professionnelles et syndicales)
CONCLUSION
Au deacutecours de ce long cheminement pour lrsquoeacutela-borer une loi portant sur lrsquousage du titre de psy-chotheacuterapeute on remarquera lrsquoimpasse faite sur la formation agrave la pratique de la psychotheacute-rapie elle-mecircme Ce titre pourra ecirctre en effet deacutelivreacute agrave des personnes dont on nrsquoaura pas exi-geacute de formation agrave la psychotheacuterapie mais une formation agrave la psychopathologie clinique Une confusion suppleacutementaire dans la visibiliteacute des professions et leurs missions est introduite par le biais drsquoun nouveau titre de psychotheacuterapeute Il est agrave souligner que concernant les profes-sions reacuteglementeacutees dont font partie les psy-chologues la pratique de la psychotheacuterapie peut sous reacuteserve drsquoune formation compleacute-mentaire personnelle faire partie de leur activi-teacute Le titre de psychotheacuterapeute ne leur est donc pas neacutecessaire (Cf argumentaires sur le site des organisations professionnelles et syn-dicales)
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Decret ndeg2010-534 du 20 mai 2010 relatif agrave lrsquousage du titre de psychotheacuterapeute
Article 1 Linscription sur le registre national des psy-chotheacuterapeutes mentionneacute agrave larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee est subordon-neacutee agrave la validation dune formation en psy-chopathologie clinique de 400 heures mini-mum et dun stage pratique dune dureacutee mi-nimale correspondant agrave cinq mois effectueacute
dans les conditions preacutevues agrave larticle 4Laccegraves agrave cette formation est reacuteserveacute aux titulaires dun diplocircme de niveau doctorat donnant le droit dexercer la meacutedecine en France ou dun diplocircme de niveau master dont la speacutecialiteacute ou la mention est la psy-
chologie ou la psychanalyse Article 2 Par deacuterogation aux dispositions de larticle preacuteceacutedent les professionnels mentionneacutes au cinquiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi preacuteciteacutee sont dispenseacutes en tout ou partie de la formation et du stage dans les conditions
preacutevues par lannexe 1 du preacutesent deacutecret Article 3 La formation mentionneacutee agrave larticle 1er vise agrave permettre aux professionnels souhaitant user du titre de psychotheacuterapeute dacqueacuterir
et de valider des connaissances relatives 1deg Aux deacuteveloppement fonctionnement et
processus psychiques 2deg Aux critegraveres de
discernement des grandes pathologies psy-
chiatriques 3deg Aux diffeacuterentes theacuteories se
rapportant agrave la psychopathologie 4deg Aux
principales approches utiliseacutees en psycho-
theacuterapie Article 4 Le stage pratique mentionneacute agrave larticle 1er seffectue agrave temps plein ou agrave temps partiel de faccedilon continue ou par peacuteriodes fraction-
neacuteesIl est accompli dans un eacutetablissement
public ou priveacute deacutetenant lautorisation men-tionneacutee agrave larticle L 6122-1 du code de la santeacute publique ou agrave larticle L 313-1-1 du code de laction sociale et des familles Toutefois le site du stage ne peut ecirctre le
lieu de travail de la personne en formationLe stage est placeacute sous la responsabiliteacute conjointe dun membre de leacutequipe de for-mation dun eacutetablissement agreacuteeacute en appli-
cation des articles 10 et 15 et dun profes-sionnel de leacutetablissement mentionneacute au
deuxiegraveme alineacutea maicirctre de stageIl donne
lieu agrave un rapport sur lexpeacuterience profes-sionnelle acquise soutenu devant les res-ponsables du stage et un responsable de la
formation de leacutetablissement agreacuteeacuteLe
stage est valideacute par le responsable de la
formation Article 5 Le contenu de la formation theacuteorique et pra-tique mentionneacutee agrave larticle 1er les critegraveres et modaliteacutes de son eacutevaluation ainsi que les objectifs du stage sont deacutefinis par un cahier des charges pris par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur et publieacute au Journal officiel
de la Reacutepublique franccedilaise Article 6 Leacutetablissement de formation sassure au moment de linscription que le candidat jus-tifie de lun des diplocircmes ou titres de forma-tion mentionneacutes au quatriegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 ou dun di-plocircme ou titre de formation reconnu eacutequiva-lent dans un autre Etat membre de lUnion europeacuteenne ou un autre Etat partie agrave lac-
cord sur lEspace eacuteconomique europeacuteen CHAPITRE II LE REGISTRE NATIONAL DES
PSYCHOTHERAPEUTES Article 7 ― Linscription sur la liste deacutepartementale
mentionneacutee au deuxiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 est effectueacutee par le preacutefet du deacutepar-tement de la reacutesidence profession-
nelle principale du demandeurElle
est gratuite Elle doit avoir eacuteteacute effec-tueacutee avant toute utilisation du titre de
psychotheacuterapeuteDans le cas ougrave le
professionnel exerce dans plusieurs sites en tant que psychotheacuterapeute il est tenu de le deacuteclarer et de mention-ner les diffeacuterentes adresses de ses
lieux dexerciceEn cas de change-
ment de situation professionnelle le professionnel en informe les services
du preacutefet - La demande est adresseacutee au directeur geacute-
neacuteral de lagence reacutegionale de santeacute
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dans le ressort duquel se situe la reacute-sidence professionnelle du deman-deur Celui-ci deacutelivre un accuseacute de reacuteception dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute apregraves reacuteception de lensemble des piegraveces justificatives mentionneacutees agrave larticle 8 et assure linstruction pour le compte du preacutefet Il fait connaicirctre agrave ce dernier son avis sur la demande dinscription dans le deacutelai de 45
joursLe silence gardeacute par lautoriteacute
preacutefectorale agrave lexpiration dun deacutelai de deux mois agrave compter de la reacutecep-tion du dossier complet vaut deacutecision
de rejet de la demande - Lensemble des listes deacutepartementales
constitue le registre national des psy-
chotheacuterapeutes Article 8 I ― En vue de leur inscription sur la liste deacutepartementale les professionnels fournis-
sent 1deg La copie dune piegravece didentiteacute 2deg Lattestation de lobtention du titre de for-mation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute publique ou du diplocircme de
niveau master mentionneacute agrave larticle 6 3deg
Lattestation de la formation en psychopa-thologie clinique mentionneacutee agrave larticle 1er agrave lexception des professionnels beacuteneacuteficiant
dune dispense totale 4deg Le cas eacutecheacuteant
lattestation denregistrement pour les pro-fessions et titres reacuteglementeacutes par le code de la santeacute publique et le code de laction
sociale et des familles II - Les professionnels appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee fournissent en outre se-
lon les cas 1deg Soit lattestation de lobten-
tion du titre de formation de speacutecialiste en
psychiatrie 2deg Soit lattestation de lobten-
tion de lun des diplocircmes mentionneacutes au deacutecret du 22 mars 1990 susviseacute permettant de faire usage professionnel du titre de psy-chologue ou lautorisation obtenue en appli-cation des alineacuteas II et III de larticle 44 de
la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee 3deg Soit
lattestation de lenregistrement reacutegulier dans un annuaire dassociation de psycha-
nalystesCette attestation est eacutetablie par le
preacutesident de lassociation Elle est accom-pagneacutee dune copie de linsertion la plus reacute-cente au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise concernant lassociation et men-
tionnant son objetIII - Les modaliteacutes de
preacutesentation de la demande dinscription et notamment la composition du dossier ac-compagnant la demande sont fixeacutees par arrecircteacute du ministre chargeacute de la santeacute publieacute au Journal officiel de la Reacutepublique fran-
ccedilaise Article 9 La liste deacutepartementale mentionne pour
chaque professionnel 1deg Son identiteacute 2deg
Son lieu dexercice principal et sil y a lieu
ses lieux dexercice secondaires 3deg Le cas
eacutecheacuteant la mention et la date dobtention des diplocircmes relatifs aux professions de santeacute mentionneacutees dans la quatriegraveme partie du code de la santeacute publique ou agrave la profes-sion de psychologue la date de lautorisa-tion obtenue en application des alineacuteas II et III de larticle 44 de la loi du 25 juillet 1985 susviseacutee ou le nom de lassociation de psy-chanalystes dans lannuaire de laquelle le professionnel est reacuteguliegraverement enregistreacute
4deg Le nom de leacutetablissement de formation
ayant deacutelivreacute lattestation de formation en psychopathologie clinique ainsi que la date
de deacutelivrance de cette attestationCe docu-
ment preacutesente la liste des inscrits selon leur
profession dorigineCette liste est tenue
gratuitement agrave la disposition du public Elle est publieacutee chaque anneacutee au recueil des
actes administratifs de la preacutefecture
CHAPITRE III AGREMENT DES ETABLISSE-
MENTS DE FORMATION Article 10 ― Les eacutetablissements autoriseacutes agrave deacutelivrer
la formation preacutevue agrave larticle 1er sont agreacuteeacutes pour quatre ans par les ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves avis dune commission reacutegionale dagreacute-
ment - La commission reacutegionale dagreacutement est
composeacutee de six personnaliteacutes quali-fieacutees titulaires et de six personnaliteacutes
qualifieacutees suppleacuteantesCes person-
naliteacutes sont nommeacutees pour trois ans
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psy-chanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quaucune des trois cateacutegories de professionnels men-tionneacutees au cinquiegraveme alineacutea de lar-ticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 sus-viseacutee ne soit majoritaire au sein de la
commissionParmi ces personnali-
teacutes siegravegent deux professeurs des universiteacutes speacutecialiseacutes en psychia-
trie psychologie ou psychanalyseLe directeur geacuteneacuteral de lagence reacute-gionale de santeacute deacutesigne le preacutesident
de la commissionLe mandat des
membres de la commission est re-
nouvelable une fois Article 11 Lavis motiveacute de la commission est rendu
au regard des eacuteleacutements suivants 1deg La
conformiteacute du contenu de la formation pro-poseacutee aux conditions poseacutees aux articles
1er 2 3 4 et 5 du preacutesent deacutecret 2deg La
conformiteacute des conditions et modaliteacutes de validation de la formation theacuteorique et pra-tique preacutevues par leacutetablissement au regard des dispositions preacutevues par larrecircteacute men-
tionneacute agrave larticle 5 du preacutesent deacutecret 3deg
Lengagement de leacutetablissement dans une deacutemarche deacutevaluation de la qualiteacute de la formation dispenseacutee Il fait lobjet dun dos-sier indiquant la structure publique ou pri-veacutee de son choix agrave laquelle sera confieacutee leacutevaluation en cause ainsi que le processus deacutevaluation retenu Ce dossier preacutecise en outre le statut de leacutevaluation la meacutethode utiliseacutee les indicateurs retenus et les diffeacute-rentes phases de leacutevaluation lidentiteacute et la qualification des eacutevaluateurs ainsi que le
calendrier preacutevisionnel de leacutevaluation 4deg
La qualiteacute de leacutequipe peacutedagogique respon-sable qui est composeacutee notamment densei-gnants permanents de professionnels de santeacute ainsi que de personnes autoriseacutees agrave porter le titre de psychotheacuterapeute Cette eacutequipe est placeacutee sous lautoriteacute dun con-seil scientifique comprenant notamment un
titulaire dun titre de formation mentionneacute agrave larticle L 4131-1 du code de la santeacute pu-
blique 5deg Ladeacutequation des moyens peacuteda-
gogiques par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes
anneacutees de formation 6deg La conformiteacute des
locaux en matiegravere de seacutecuriteacute et daccessi-biliteacute ainsi que leur adeacutequation par rapport au projet peacutedagogique et agrave leffectif des eacutelegraveves dans les diffeacuterentes anneacutees de for-
mationLes eacutetablissements denseigne-
ment priveacutes doivent en outre satisfaire aux prescriptions des articles L 731-1 agrave L 731-
17 du code de leacuteducation Article 12 La personne physique ou morale juridique-ment responsable dun eacutetablissement de formation deacutesirant assurer la formation mentionneacutee agrave larticle 1er eacutetablit un dossier
de demande dagreacutementCe dossier est
adresseacute au plus tard six mois avant la date de louverture de la formation au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute dans le ressort duquel leacutetablissement a son
siegravege socialCelui-ci en accuse reacuteception
dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6
juin 2001 susviseacuteLa composition de ce
dossier est fixeacutee par arrecircteacute conjoint des mi-nistres chargeacutes de la santeacute et de lenseigne-ment supeacuterieur Il comporte notamment les statuts de leacutetablissement de formation et sa capaciteacute daccueil la description des forma-tions deacutelivreacutees la description des locaux et des moyens peacutedagogiques Il preacutecise sagissant de la formation en psychopatho-logie clinique le contenu de la formation theacuteorique et pratique deacutelivreacutee le descriptif du corps enseignant (effectifs qualiteacute quali-fication) la nature des activiteacutes et de la par-ticipation agrave la recherche de leacutequipe respon-
sable de la formation Article 13 Tout dossier deacuteposeacute est transmis par le di-recteur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute au secreacutetariat de la commission dans un deacutelai dun mois agrave compter de laccuseacute de
reacuteception de la demande initialeLa com-
mission se reacuteunit sur convocation de son preacutesident et dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 8 juin 2006 susviseacute Elle rend son avis dans le deacutelai de deux mois agrave
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
compter de sa saisineLe repreacutesentant de
leacutetablissement de formation est entendu par la commission reacutegionale sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de la candi-
dature ou agrave la demande de la commissionLavis est notifieacute agrave leacutetablissement qui a in-
troduit la demande Article 14 En cas davis neacutegatif et dans un deacutelai dun mois suivant sa notification le repreacutesentant de leacutetablissement de formation peut de-mander au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute de convoquer une nou-
velle reacuteunion de la commissionCelle-ci
siegravege dans une formation eacutelargie agrave len-semble de ses membres titulaires et sup-
pleacuteantsSon avis se substitue au premier
avis rendu Article 15 La deacutecision dagreacutement intervient au plus tard six mois apregraves le deacutepocirct de la demande initiale En cas de recours dans les condi-tions preacutevues agrave larticle 14 ce deacutelai est pro-
longeacute de deux moisLe silence de ladmi-
nistration agrave lexpiration de ce deacutelai vaut deacute-
cision de rejetLa suspension ou le retrait
de lagreacutement sont prononceacutes par deacutecision motiveacutee des ministres chargeacutes de la santeacute et de lenseignement supeacuterieur apregraves que leacutetablissement a eacuteteacute mis agrave mecircme de preacute-senter ses observations lorsque le contenu ou les modaliteacutes dorganisation de la forma-tion cessent decirctre conformes aux condi-tions preacutevues agrave larticle 11 du preacutesent deacute-
cret CHAPITRE IV DISPOSITIONS TRANSI-
TOIRES Article 16
I ― Les professionnels justifiant dau moins cinq ans de pratique de la psychotheacutera-pie agrave la date de publication du preacutesent deacutecret peuvent ecirctre inscrits sur la liste deacutepartementale mentionneacutee agrave larticle 7 alors mecircme quils ne remplissent pas les conditions de formation et de diplocircme preacutevues aux articles 1er et 6 du preacutesent deacutecret Cette deacuterogation est accordeacutee par le preacutefet du deacutepartement de la reacutesi-dence professionnelle du demandeur apregraves avis de la commission reacutegionale dinscription Le professionnel preacutesente
cette autorisation lors de sa demande dinscription sur la liste deacutepartementale
des psychotheacuterapeutes II - La commission mentionneacutee au I est preacutesi-
deacutee par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegionale de santeacute ou par la personne quil a reacuteguliegraverement deacutesigneacutee pour le repreacutesenter Elle comprend six person-naliteacutes qualifieacutees titulaires et six person-naliteacutes suppleacuteantes appartenant agrave lune des trois cateacutegories mentionneacutees au cin-quiegraveme alineacutea de larticle 52 de la loi du 9 aoucirct 2004 susviseacutee et nommeacutees par le directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute qui les choisit en raison de leurs compeacutetences dans les domaines de la formation et de leur expeacuterience professionnelle dans le champ de la psychiatrie de la psychanalyse ou de la psychopathologie clinique sans quau-cune de ces trois cateacutegories de profes-sionnels ne soit majoritaire au sein de la commission Ses membres sont nom-meacutes pour une dureacutee de trois ans renou-
velable une foisLa commission se reacuteu-
nit dans les conditions fixeacutees par le deacute-
cret du 8 juin 2006 susviseacuteLes frais de
deacuteplacement et de seacutejour de ses membres sont pris en charge dans les conditions preacutevues par la reacuteglementation
applicable aux fonctionnaires de lEtatLa commission sassure que les forma-tions preacuteceacutedemment valideacutees par le pro-fessionnel et son expeacuterience profession-nelle peuvent ecirctre admises en eacutequiva-lence de la formation minimale preacutevue agrave larticle 1er et le cas eacutecheacuteant du di-plocircme preacutevu agrave larticle 6 Elle deacutefinit si neacutecessaire la nature et la dureacutee de la formation compleacutementaire neacutecessaire agrave linscription sur le registre des psycho-
theacuterapeutesLe professionnel est en-
tendu par la commission sil en formule le souhait au moment du deacutepocirct de son dossier ou agrave la demande de la commis-
sion Article 17 Les professionnels qui souhaitent obtenir une autorisation dinscription sur le registre des psychotheacuterapeutes en application de larticle 16 preacutesentent dans le deacutelai dun an
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
agrave compter de la publication du preacutesent deacute-cret un dossier en ce sens dans les condi-
tions preacutevues agrave larticle 7Cette demande
est accompagneacutee des piegraveces justificatives notamment administratives attestant de
lexercice de la psychotheacuterapieA la reacutecep-
tion du dossier complet il est deacutelivreacute agrave linteacuteresseacute un accuseacute de reacuteception deacutelivreacute dans les conditions fixeacutees par le deacutecret du 6 juin 2001 susviseacute Celui-ci permet au pro-fessionnel qui utilisait preacuteceacutedemment le titre de psychotheacuterapeute de continuer agrave lutiliser
jusquagrave lintervention de la deacutecisionLe si-
lence gardeacute pendant plus de six mois sur une demande preacutesenteacutee au titre du I de lar-ticle 16 vaut deacutecision de rejet Dans les cas ougrave en application de ces dispositions il est demandeacute au candidat de justifier dune for-mation compleacutementaire celle-ci doit ecirctre effectueacutee avant le 1er janvier 2014 Si cette exigence nest pas remplie le preacutefet retire le professionnel des inscrits sur la liste deacute-
partementale des psychotheacuterapeutes Article 18 Les dispositions du preacutesent deacutecret entrent
en vigueur agrave compter du 1er juillet 2010Pour lapplication du preacutesent deacutecret agrave Saint-Pierre-et-Miquelon les compeacutetences deacutevo-lues au directeur geacuteneacuteral de lagence reacutegio-nale de santeacute par le preacutesent deacutecret sont exerceacutees par les services chargeacutes de lad-
ministration territoriale de la santeacute Article 19 Le ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales la ministre de lenseignement supeacuterieur et de la re-cherche la ministre de la santeacute et des sports et la ministre aupregraves du ministre de linteacuterieur de loutre-mer et des collectiviteacutes territoriales chargeacutee de loutre-mer sont chargeacutes chacun en ce qui le concerne de lexeacutecution du preacutesent deacutecret qui sera pu-blieacute au Journal officiel de la Reacutepublique franccedilaise
ANNEXE NOMBRES DHEURES DE FORMATION
EN PSYCHOPATHOLOGIE CLINIQUEEXIGEacuteES DES CANDIDATS AU TITRE DE
PSYCHOTHEacuteRAPEUTE
THEgraveME de formation
PSYCHIATRES Dispense totale
MEacuteDECINS non psychiatres
PSYCHOLOGUES cliniciens
PSYCHOLOGUES non cliniciens
PSYCHANALYSTES Reacuteguliegraverement enre-gistreacutes dans leur annuaires
PROFESSIONNELS nappartenant agrave aucune des cateacutego-ries preacuteceacutedentes
Deacuteveloppement fonctionnement et processus psychiques
0 h
0 h
0 h
0 h
0 h
100 h
Critegraveres de discernement des grandes pathologies psychiatriques
0 h
0 h
50 h
100 h
100 h
100 h
Theacuteories se rapportant agrave la psychopatholo-gie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Principale ap-proches utili-seacutees en psycho-theacuterapie
0 h
100 h
50 h
100 h
50 h
100 h
Stage
0 mois
2 mois
2 mois
5 mois
2 mois
5 mois
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Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Psychotheacuterapeute agrave quel titre
Patrice Nomineacute CSAPA Espace Murger - Service de Psychiatrie
Adulte du Pr Jean Pierre Leacutepine Hocircpital Fernand Widal
L a preacuteoccupation des pouvoirs publics de
reacuteglementer la pratique officielle de la
psychotheacuterapie provoque des turbu-
lences dans le petit monde des psychologues
qui se targuent drsquoen effectuer sous les formes
les plus diverses et qui se voient sommeacutes de
faire la preuve de leur formation dans ce do-
maine agrave deacutefaut de faire de mecircme en ce qui
concerne leur compeacutetence ce qui par ailleurs
nrsquoest guegravere deacutemontrable
Chacun drsquoentre eux peut bien entendu invoquer
son expeacuterience ineffable ou le prestige accordeacute
agrave sa theacuteorie de reacutefeacuterence pour estimer leacutegitime
de srsquoaffranchir drsquoune telle justification tout en
ne perdant pas de vue qursquoun statut estampilleacute
par lrsquoautoriteacute administrative peut garantir la
poursuite sereine de telles activiteacutes Pour les
plus eacuteclectiques le choix drsquoune eacutecole certifiante
ressemblera agrave un mariage de raison
Crsquoest donc au prix drsquoune soumission agrave lrsquoautoriteacute
que lrsquoexercice drsquoune telle liberteacute peut espeacuterer
se perpeacutetuer Crsquoest lagrave lrsquoune des formes de la
reacutesignation peu glorieuse certes agrave laquelle on
pourrait preacutefeacuterer le discernement formulation
bien plus acceptable au regard de lrsquoestime de
soi Crsquoest ce dont semblent avoir manqueacute celui
ou celle ou ceux qui ont cru bon drsquoaller couiner
dans une oreille des plus compatissantes que
la pratique de la psychotheacuterapie devait ecirctre reacute-
serveacutee agrave des professionnels persuadeacutes de sa-
voir y faire et capables de preacutesenter des ga-
ranties plutocirct qursquoagrave des gougnafiers mecircme pas
fichus drsquoexhiber la moindre preuve convain-
cante de la leacutegitimiteacute de leurs preacutetentions Ce
qui est drsquoailleurs la reacutealiteacute Mais comment
srsquoeacutetonner drsquoune telle beacutevue si lrsquoon srsquoen rap-
porte agrave la ceacutelegravebre Loi de Murphy qui eacutenonce
que sil y a plusieurs faccedilons de faire quelque
chose et que lune delles peut aboutir agrave une
catastrophe alors quelquun la choisira
Les mecircmes qui reacuteclamaient la mise en place
drsquoune reacuteglementation officielle reacuteservant le titre
de psychotheacuterapeute agrave des professionnels de
qualiteacute ducircment formeacutes agrave cet effet sont parmi
les premiers agrave protester contre les formes don-
neacutees agrave cette derniegravere par une souveraineteacute deacute-
ficitaire dont lrsquoexercice autoritaire nous rappelle
que nous sommes destineacutes agrave nous faire ap-
prendre ce que lrsquoon sait deacutejagrave par des gens qui
nrsquoy connaissent rien Agrave lrsquoheure de la prolifeacutera-
tion des reacutefeacuterentiels et des protocoles reacuteclamer
encore un peu plus de controcircles et de veacuterifica-
tions suspicieuses ne peut que servir de via-
tique aux frileux de la subjectiviteacute qui sont
friands de contraintes rassurantes Et on ne
srsquoeacutetonnera pas de les voir se formaliser drsquoen
avoir appeleacute agrave Raminagrobis comme dans la
ceacutelegravebre fable de Jean de La Fontaine Le
chat la belette et le petit lapin
Crsquoeacutetait un chat vivant comme un deacutevot ermite
Un chat faisant la chattemite
Un saint homme de chat bien fourreacute gros et
gras
Arbitre expert sur tous les cas
Et de voir se faire croquer tout uniment secta-
teurs et protestataires tout marris drsquoavoir con-
senti agrave lrsquoincompeacutetence et la condescendance
de deacutecideurs comme on dit le sort de leurs
activiteacutes Drsquoougrave la singularisation des heacutesitants
ameacutenagements survenus qui vident du proceacute-
deacute la geacuteneacuteralisation qursquoil visait au profit de re-
connaissances professionnelles plus contrai-
gnantes encore par la judiciarisation des liber-
teacutes du mecircme tonneau Et ce qui ne peut agrave lrsquoeacutevi-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 44
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
dence valoir pour tous nrsquoa que peu de chances
de valoir davantage pour chacun Ce seraient
donc des organisations professionnelles qui se
verraient deacutecerner des preacuterogatives pour les
beacuteneacuteficiaires qui auront eu la bonne ideacutee de srsquoy
glisser Cela veacuterifie tout agrave la fois la meacuteta-loi de
Cooper qui eacutenonce qursquoune prolifeacuteration de
nouvelles lois creacutee une prolifeacuteration de nou-
veaux vides juridiques et ce bon vieux pro-
verbe qui dit que le clou qui deacutepasse attire le
marteau
On savait deacutenombrer quelques centaines de
types de psychotheacuterapies pleacutethore drsquoautant
plus deacuterisoire que cette recension ne concerne
le plus souvent que des techniques psychotheacute-
rapiques certes impliqueacutees dans des disposi-
tifs agrave viseacutee theacuterapeutique mais certainement
incapables de deacutefinir la psychotheacuterapie car
comment eacutetablir un modegravele de lrsquoindeacutefinissable
Pour autant il sera difficile de deacutemontrer que la
formation certifieacutee agrave une technique psychotheacute-
rapique est assimilable agrave la performance de sa
mise en oeuvre Car qursquoen est-il vraiment dans
la reacutealiteacute de ces audacieuses pratiques Srsquoagit
-il drsquoune illusion entretenue par les theacuterapeutes
sur lrsquointeacuterecirct de leurs manœuvres Les patients
qui srsquoy exposent ne font-ils que changer de re-
gistre de repreacutesentations ou accegravedent-ils reacuteelle-
ment agrave une autre dimension de leur ecirctre Et
comment srsquoaccommodent-ils des aventures
parfois interminables dans lesquelles de telles
situations les plongent
Ces derniers qui se sont aperccedilus que le destin
commenccedilait agrave leur masser les eacutepaules srsquoils
nrsquoacceptent la perspective du changement que
par neacutecessiteacute et la neacutecessiteacute que parce que
leur sentiment drsquoexistence se trouve en deacutelica-
tesse se trouvent le plus souvent agrave la re-
cherche drsquoun sentiment perdu celui de la com-
pleacutetude Et ce sont eux qui deacutecident finalement
si leur rencontre avec un ou une psychologue
doit prendre cette tournure apregraves avoir eacutepuiseacute
tout ce qui leur avait jusque-lagrave permis drsquoy
eacutechapper Ils nrsquoont plus confiance dans la reacuteali-
teacute qui nrsquoest elle-mecircme apregraves tout qursquoun pres-
sentiment collectif Crsquoest que le patient qui se
reacutesout agrave consulter fait la preuve qursquoil a reacuteussi agrave
surmonter sa honte de devoir neacutecessiter une
telle deacutemarche ce qui deacutemontre lrsquoexistence de
la premiegravere ressource personnelle qui lui ap-
partient Si le patient neacuteglige ce qui le pousse agrave
changer alors le changement lui-mecircme est neacute-
gligeacute Il doit rencontrer une attitude telle qursquoil en
ressentira de la consideacuteration premiegravere res-
source theacuterapeutique en retour agrave la disposition
du psychotheacuterapeute
Et puis on voit tous les jours des patients aller
mieux en deacutepit de nos subtiles interventions
peut-ecirctre gracircce aux perfectibiliteacutes de celles-ci
Le patient met son talent agrave notre service mais
pour le bon deacuteroulement des choses il doit ecirctre
eacuteclaireacute sur ses responsabiliteacutes Prisonnier des
circonstances ce qui le rend malheureux le
patient soucieux de participer agrave son eacutemancipa-
tion doit inciter son ou sa psychotheacuterapeute
par des questions simples et bienveillantes agrave
reformuler ce qursquoil comprend de la situation et agrave
exprimer son ressenti Il est essentiel que le
theacuterapeute se sente eacutecouteacute informeacute et respec-
teacute Il ne doit pas craindre de lrsquoimportuner
puisque de toute faccedilon ce sera le cas En preacute-
servant la liberteacute de penseacutee de ce dernier et en
veillant agrave le faire participer aux orientations de
la theacuterapie le patient doit mettre une grande
conviction agrave le convaincre qursquoil est la personne
concerneacutee en premier lieu par le choix de celle-
ci avec la capaciteacute de reacutefleacutechir et de prendre
les deacutecisions qui le concernent agrave partir des in-
formations qursquoil partage avec lui Le patient de-
vra eacutegalement precircter attention aux signes de
conduites addictives ou aux troubles obses-
sionnels compulsifs du psychotheacuterapeute Un
signe drsquoappel agrave connaicirctre est la position con-
descendante ou le silence obstineacute ou encore
la somnolence difficilement dissimuleacutee qui sont
sans rapport avec les attentes drsquoeacutecoute et de
compreacutehension que le patient tente drsquoexprimer
Le patient doit savoir que la preacutevalence du sui-
cide de la deacutepression du syndrome deacutecision-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 45
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
nel de lrsquoalcoolisme et de la toxicomanie est
bien supeacuterieure chez les psychotheacuterapeutes agrave
celle de la population geacuteneacuterale Il srsquoefforcera
donc de lui faciliter la vie par de petites atten-
tions ou remarques gratifiantes afin de ne pas
alimenter les fameux dysfonctionnements dont
les protocoles theacuterapeutiques se sont enticheacutes
Enfin les interlocuteurs ne devront jamais
perdre de vue que lrsquoon nrsquoest jamais autant deacuteccedilu
que par les illusions que lrsquoon perd Bref pour le
privilegravege drsquoune synergie additive de bon aloi le
patient et son psy doivent parvenir agrave se persua-
der que leur liberteacute de manoeuvre consiste agrave
faire tout ce que permet la longueur de la
chaicircne qui les assujettit Et la principale recom-
mandation exigeacutee pour les deux acteurs de ces
proceacutedeacutes interactifs tant pour le patient que
pour son psy semble devoir se fonder sur une
robuste et saine suspicion mutuelle La reacutecipro-
citeacute est la clef de tous les rapports humains
Si lrsquoon veut bien eacutecarter un instant les passion-
nantes preacutesentations de cas superbement rap-
porteacutes par leurs auteurs et dont les colloques
sont friands ougrave tout est eacutelucideacute et dans les-
quelles tout semble srsquoexpliquer facilement ougrave
la posture adopteacutee par le ou la psychotheacutera-
peute srsquoest trouveacutee bien venue ougrave ses inter-
preacutetations se sont reacuteveacuteleacutees pertinentes et ses
interventions judicieuses qui auront abouti agrave
un reacutesultat suffisamment satisfaisant pour ecirctre
exposeacute on srsquoautorisera agrave penser que ces preacute-
sentations sont sans doute davantage drsquoineacutevi-
tables reconstructions que la traduction fidegravele
du deacuteroulement des eacuteveacutenements de lrsquoordre de
lrsquoimplacable authenticiteacute dont se montre ca-
pable une cameacutera de surveillance de distribu-
teur de billets de banque Apregraves tout si le men-
songe est le secret de la vie amoureuse crsquoest
aussi le ciment de la vie sociale La subjectiviteacute
srsquoinsinue partout peut-ecirctre plus encore dans
les souvenirs que dans les activiteacutes de percep-
tion Un souvenir est un mensonge qui dit tou-
jours la veacuteriteacute a eacutecrit Jean Cocteau recons-
truction conjecturale mais sincegravere expression
dans lrsquoinstant de sa remeacutemoration puisque tout
peut ecirctre exact sans que rien ne soit vrai En
theacuteorie tout srsquoexplique en pratique tout se
complique Ce nrsquoest pourtant pas une raison
pour faire les gros yeux aux garnements de la
psychotheacuterapie Qui srsquointeacuteresserait agrave la pein-
ture dans le seul but de devenir trafiquant
drsquoœuvres drsquoart
Or ce que redoute la theacuterapeutique crsquoest lrsquoer-
reur la faute restant beaucoup plus inconce-
vable qursquoelle est exceptionnelle et lrsquoeacutechec trop
reacutecurrent tandis que ce queacutevite la circonspec-
tion mdash en ne versant daucuns cocircteacutes mdash crsquoest la
partialiteacute Crsquoest donc vrai quelle apparaicirct ordi-
naire commune qursquoelle ne se dissipe pas
comme le fait le theacuteorique dans ses cabrioles
et si elle ne fait pas toujours la preuve drsquoune
grande inventiviteacute elle nrsquoest pas hanteacutee par
lrsquoexigence de la coheacuterence ce spectre des pe-
tits esprits Elle ne cherche pas non plus agrave sus-
citer la contradiction ni ne vise agrave se singulari-
ser en prenant une position mais elle aspire agrave
conserver lrsquoesprit ouvert agrave tous les possibles
quitte agrave cultiver le paradoxe Crsquoest sans doute
pour cette raison que quand lrsquoadresse agrave un pa-
tient se reacutevegravele theacuterapeutique ce nrsquoest pas une
surprise totale crsquoest le plus souvent lrsquoaboutis-
sement drsquoune deacutemarche heuristique Ceux qui
srsquoembarrassent dans un diagnostic ce qursquoils
srsquoimaginent indispensable avant toute entre-
prise et auquel ils finissent par croire et ce fai-
sant faire croire implicitement au patient qursquoil
srsquoapplique agrave lui mecircme quand ils ne cegravedent pas
agrave la tentation de lui en faire la reacuteveacutelation peu-
vent finir par srsquoenfermer dans une illusion com-
mune Une telle disposition est assimilable
dans son essence au preacutesupposeacute On voit la
difficulteacute apparaicirctre dans les efforts drsquoy faire
piegravece et que cela ne preacutesage rien de bon
Pourtant on a bien souvent vu la situation theacute-
rapeutique eacutevoluer favorablement en deacutepit de
ces preacutemisses douteuses Qursquoen penser Si
lrsquoon considegravere que la tacircche fondamentale du
psychotheacuterapeute est bien de reacutesoudre des
problegravemes de maniegravere efficace et dynamique
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 46
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
si lrsquoon peut srsquoeacutecarter un tant soit peu des con-
ceptions traditionnelles des problegravemes psycho-
pathologiques mettre en doute lrsquoexistence de
deacuteficits agrave reacuteparer ou agrave compenser chez le pa-
tient srsquoautoriser agrave penser que la reacutesistance au
changement de ce dernier nrsquoa rien agrave voir avec
la rentabiliteacute speacutecifique de symptocircmes en
terme de pouvoir interpersonnel on peut envi-
sager drsquointroduire des solutions qui ne srsquoentre-
tiennent pas elles-mecircmes et deviennent des
obstacles au changement Alors le theacuterapeute
peut se contenter drsquoamorcer un changement et
deacutecliner la neacutecessiteacute de srsquoengager agrave lrsquoaccompa-
gner jusqursquoagrave son terme Et quand les venues
du patient deviennent plus rares se souvenir
que Freud deacuteclarait que la cure est termineacutee
quand le patient ne vient plus
On connaicirct les dispositions favorables du pa-
tient agrave srsquoidentifier au profil qursquoon lui propose Et
si les patients se montrent rarement agrave la hau-
teur de ce que lrsquoon attend drsquoeux crsquoest parce
que lrsquoon attend quelque chose de leur part qui
soit agrave la hauteur de nos preacutetendues compeacute-
tences dont rappelons-nous il srsquoagit de reacutegle-
menter la mise en oeuvre Or lrsquoobjectif du theacute-
rapeute peut-il ecirctre leacutegitimement de confirmer
ses convictions Srsquoil interpregravete les causes du
mal-ecirctre de ses patients en fonction dun scheacute-
ma geacuteneacuteral et preacuteeacutetabli ne les trahit-il pas Et
serait-il bien congru de proposer des theacuterapies
en precirct-agrave-porter mecircme en demi-taille plutocirct
que faire dans le sur mesure en fonction des
ressources que le patient a lrsquoair de preacutesenter
Les deux acteurs de lrsquoaffaire risquent de rater
ce qursquoils recherchent implicitement en croyant y
gagner quelque chose le theacuterapeute la confir-
mation de ses convictions et le patient un
eacuteclaircissement de ses difficulteacutes en mecircme
temps que son adoption par une autoriteacute qui
lrsquoenteacuterine Toute clarteacute se paie drsquoun mystegravere et
comme une conscience claire est le signe
drsquoune mauvaise meacutemoire on nrsquoen saura pas
beaucoup plus les ideacutees nettes et distinctes
chegraveres agrave Reneacute Descartes nrsquoont guegravere fait la
preuve de leur eacutevidence La responsabiliteacute du
theacuterapeute srsquoeacutemaille de tant de deacuteterminants
que ce dernier est tout agrave fait capable de se ran-
ger agrave ce qursquoil croit justifieacute Mais la croyance
nrsquoest pas seulement une ideacutee que lrsquoesprit pos-
segravede crsquoest eacutegalement une ideacutee qui possegravede
lrsquoesprit Le plus grand deacuteregraveglement de lrsquoesprit
est de croire que les choses sont parce que
lrsquoon veut qursquoelles soient Les psychologues sa-
vent si bien identifier les situations qui se precircte-
ront au beacuteneacutefice de leur clairvoyance qursquoils
sont eacutegalement fortement sujets agrave lrsquoisseacutegoureacutee
facirccheuse pathologie qui deacutesigne un don parti-
culier pour toujours chercher drsquoabord dans la
mauvaise poche
Toutefois une relation de confiance une fois
installeacutee ccedila commence agrave rouler mais au fil du
temps la roue finit par prendre du jeu et les
orientations agrave srsquoinstaller dans le confort agrave srsquoen-
liser dans lrsquoanamnegravese agrave travailler obstineacutement
la reacutepeacutetition agrave se contenter de pointer des meacute-
canismes quant ccedila ne se reacuteduit pas agrave la pro-
duction de regrettables rationalisations Il srsquoagit
plutocirct de reacuteapprendre des conduites au patient
apregraves qursquoil en ait renouveleacute le choix agrave srsquoenga-
ger dans des activiteacutes qui permettent de modi-
fier substantiellement les modes de penseacutee Le
but ultime de la psychotheacuterapie nest pas seu-
lement deacuteliminer des comportements deacuteplo-
rables cest dapprendre agrave mieux geacuterer ses
propres processus mentaux agrave affronter avec
plus de reacuteussite des situations oppressantes et
agrave deacutevelopper des opeacuterations psychiques plus
performantes et une maniegravere drsquoecirctre au monde
plus eacutepanouissante une expression de la
sphegravere psychique privileacutegiant la valorisation
des aspirations individuelles qui deacutebouche sur
la preacutedilection pour lrsquoespace inteacuterieur caracteacuteri-
seacute sur lequel on pense souvent ecirctre suscep-
tible de pouvoir agir Mais comment juger ac-
ceptable que le patient se retrouve dans la po-
sition de celui qui la cleacute de son appartement agrave
la main se voit contraint drsquoactionner la son-
nette pour rentrer chez lui
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 47
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
Tout ceci pour suggeacuterer une approche zeacuteteacute-
tique des psychotheacuterapies pour autant qursquoelle
puisse ecirctre soupccedilonneacutee de participer agrave lrsquoactua-
lisation de la confusion des genres qui permet-
trait drsquoeffectuer la distinction entre drsquoune part la
psychotechnique de la theacuterapie que la revendi-
cation du titre de psychotheacuterapeute tendrait agrave
certifier au prix drsquoun reacuteductionnisme preacutejudi-
ciable agrave la pratique clinique et au meacutepris drsquoune
certaine creacuteativiteacute et la conduite drsquoun projet
psychotheacuterapique circonspect avec des tech-
niques approprieacutees et individualiseacutees jouant le
rocircle drsquoun outil directionnel
Les psychologues sont censeacutes distinguer le
subjectif de lrsquoirrationnel Il ne sagit pas dex-
clure la subjectiviteacute ni mecircme de la reacuteduire
mais de la conserver au cœur de la pratique de
la psychologie clinique Cest lagrave au cœur de la
subjectiviteacute de lindividuel que celle-ci peut
justifier sa speacutecificiteacute En revanche on ne se
preacuteoccupera pas des ayatollahs de la psycha-
nalyse au masque douloureux et au regard fil-
trant arborant un air drsquoen savoir long ni des
forceneacutes du dressage cognitif qui se deacutesolent
de ne pas voir le patient marcher mieux que
cela dans la combine Pas plus drsquoailleurs que
de tous les gardes-frontiegraveres des succegraves qui
leur eacutechappent qui sont des envieux comme
tous les censeurs Agrave Theacuterapik Park les psy-
chotheacuteraptors chassent tout autant en meute
qursquoen snipers
Il est important de tendre vers une pratique
permissive en accordant au patient la possibili-
teacute de reacutealiser que lorigine des changements se
trouve en lui comme il pense de celle des pro-
blegravemes qui sont les siens qui pourra de cette
faccedilon acqueacuterir une autonomie dans son pro-
cessus de traitement Mais lrsquoon a appris que ce
reacutesultat ne peut ecirctre obtenu que si lrsquoon accorde
au patient la possibiliteacute de tricher Cette faculteacute
le poussera rarement agrave en user mais sa virtua-
liteacute qursquoil est en mesure de srsquoapproprier facilite-
ra bien souvent la survenue des identifications
rechercheacutees par le theacuterapeute parce que le
patient en fera ainsi plus facilement son affaire
Crsquoest en quelque sorte entrer par la porte de
derriegravere dans le champ complexe de la forma-
tion du reacuteel
Cette approche zeacuteteacutetique estomperait eacutegale-
ment la suspicion de thaumaturgie qui revien-
drait au professionnel qui srsquoappuyant sur la
conviction qursquoil y a quelque chose agrave soigner
chez le patient au titre de lrsquoadheacutesion de ce der-
nier agrave la proposition drsquoune telle assertion
srsquoexempterait du titre en vertu de lrsquoautorisation
qursquoil srsquooctroierait agrave lui-mecircme de pratiquer Pen-
ser par soi-mecircme crsquoest souvent penser tout
seul ou pire penser comme tout le monde
Mieux vaut peut-ecirctre penser contre soi-mecircme
et se faire agrave soi-mecircme les objections des
autres Toutes les psychotheacuterapies ont leurs
chimegraveres apregraves lesquelles elles courent sans
jamais les attraper Mais avantageusement en
chemin elles srsquooctroient des opportuniteacutes qui
ne sont pas toutes neacutegligeables Et sans ou-
blier que quand la sinceacuteriteacute confine agrave lrsquoarbi-
traire on en vient agrave regretter lrsquohypocrisie
comme lrsquoa magistralement exprimeacute Descartes
on peut deacutecider que lrsquoon nrsquoest sucircr de rien et
que lrsquoon nrsquoest mecircme pas sucircr que lrsquoon nrsquoest sucircr
de rien cesser de consideacuterer que les pro-
blegravemes compliqueacutes neacutecessitent forceacutement des
solutions compliqueacutees Il y a aussi des psycho-
theacuterapies qui durent des anneacutees et un mauvais
esprit pourrait eacutetablir une comparaison avec les
banques qui quoiqursquoun virement par ordinateur
ne prenne qursquoune seconde aiment en faire tout
un plat afin que les fonds demeurent un mo-
ment dans leur systegraveme et leur rapportent
Comme nous vivons irreacutesistiblement dans un
monde de repreacutesentations la seacuteduction du titre
peut exciter la convoitise mdash celle-ci constituant
la plus formidable des motivations humaines mdash
de psychotheacuterapeutes en quecircte de reconnais-
sance Mais ce sont les ideacutees les plus seacutedui-
santes qui ont le plus souvent besoin de se re-
maquiller Le terme de trompe-couillon deacutesi-
gnant le maquillage en langue verte est trop
illustratif dans le domaine des psychotheacuterapies
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 48
Quels changements pour le meacutetier de psychologue
pour deacutecourager complegravetement la tentation de
srsquoinsurger contre lrsquoeacuteventualiteacute de sa pertinence
Le titre de psychotheacuterapeute ressemble agrave la
queue du Mickey de notre enfance qursquoil fallait
attraper pour avoir un tour gratuit de manegravege
On peut bien courir encore longtemps apregraves
son obtention mais si lrsquoon veut finir de rouler le
peacutetard il faudra bien se reacutesoudre au bout drsquoun
moment agrave cesser de rechercher le petit bout de
shit tombeacute sur la moquette marron
Alors psychotheacuterapeute agrave quel titre quand la
proposition theacuterapeutique tiendrait tout entiegravere
en quatriegraveme de couverture Et lrsquoon peut ajou-
ter agrave notre accablement la conjoncture imagi-
naire que nous ne nous en remettrons jamais
et deacutecider que la psychotheacuterapie est devenue
un business Bien sucircr ces consideacuterations ne
srsquoappliquent pas aux psychotheacuterapeutes pour
lesquels rien nrsquoest impossible eacutequipeacutes du tout
agrave lrsquoego agrave soi qui sont si lrsquoon peut dire la protu-
beacuterance de la profession Elles ne srsquoappliquent
pas davantage agrave ces professionnels dont
lrsquoinaptitude est semblable agrave celle des jeunes
paresseux ces mammifegraveres arboricoles de la
forecirct breacutesilienne auxquels il arrive freacutequem-
ment drsquoempoigner leurs propres pattes agrave la
place des branches si bien qursquoils tombent des
arbres
Enfin lrsquoexigence de ce titre fait voir se multiplier
des instituts de formation agrave la psychotheacuterapie
neacutes de la derniegravere pluie qui ne feraient que
precirccher pour leur paroisse agrave des ouailles fasci-
neacutees par la quecircte de la qualification Il suffirait
alors de deacutetenir le titre de psychotheacuterapeute
pour le devenir tandis que ceux ou celles qui
en possegravedent la compeacutetence et qui se risquent
agrave en pratiquer verraient fragiliseacutee leur deacutetermi-
nation agrave y recourir sans lrsquoestampille de sa sa-
cralisation Crsquoest ainsi qursquoun meacutecanicien de la
relation identifieacute comme speacutecialiste du soin et
de la gestion des relations interpersonnelles
viendra disqualifier la prodigieuse diversiteacute des
fonctionnaliteacutes de la psychologie clinique agrave la-
quelle nous sommes tous attacheacutes Et lrsquoon ver-
ra des psychotheacuterapeutes nantis de bons certi-
ficats srsquoeacutevertuer dans la profession et y forger
leur reacuteussite juste pour prouver que crsquoest pos-
sible Les exigences des employeurs se mon-
treront de plus en plus impeacuteratives sur ce point
les assureurs jouant le rocircle drsquoagences de nota-
tion et lrsquoon nrsquoengagera deacutesormais que des
eacutebeacutenistes qualifieacutes comme caissiers chez Ikea
Quand le doute est leveacute il deacutebouche sur une
incertitude et le psychotheacuterapeute ballotteacute au
greacute des vagues de lrsquooceacutean du deacutesir de nou-
velles contraintes reacuteglementaires dans sa lutte
contre la deacutereacuteliction par tous les temps se
trouve embarrasseacute par le choix impossible
entre deux deacutesillusions voir que lrsquoeacutetendue du
champ de la pratique de la psychotheacuterapie se
precircte deacutesormais deacutecideacutement mal agrave son entre-
prise ou constater combien ccedila va ecirctre difficile
de lrsquoentreprendre agrave ses propres conditions
Crsquoest comme eacuteprouver le deacutesappointement de
la dame constatant que la lunette des toilettes
nrsquoest pas abaisseacutee ou la consternation du
monsieur qui deacutecouvre que la mecircme lunette ne
tient pas releveacutee Mais quitte agrave voyager sur le
Titanic pourquoi pas en premiegravere classe
La vie professionnelle nous rappelle combien le
monde peut paraicirctre singulier lorsqursquoon le re-
garde apregraves avoir fait un simple pas sur le cocircteacute
Lrsquoexercice de la psychotheacuterapie srsquoassaisonne
de pas mal drsquohumiliteacute et drsquoun peu de creacuteativiteacute
Peut-on ecirctre agrave la fois malin et intelligent Les
psychologues cliniciens pratiquent volontiers
lrsquousage des deux adverbes fondamentaux qui
eacuteveillent lrsquointelligence des enfants pourquoi
et comment Lrsquointelligence incite agrave la reacute-
flexion et la reacuteflexion conduit au scepticisme
Le scepticisme lui megravene agrave lrsquoironie Lrsquoironie
cette meacutelancolie de la luciditeacute agrave son tour se
preacutesente agrave lrsquoesprit mdash qui se trouve en apport
direct avec lrsquohumour mdash qui fait si bon meacutenage
avec la fantaisie Et la vie devient une chose
deacutelicieuse aussitocirct qursquoon deacutecide de ne plus la
prendre tout agrave fait au seacuterieux
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 49
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Modeacuterateur Patrice Nomineacute Hocircpital Fernand Widal
gt La dimension culturelle dans leacutecoute des pa-
tients migrants africains
Jacqueline Faure Hocircpital Tenon Page 50
gt Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacute-
moignage drsquoune pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute Page 60
gt Seacutejour de vacances quelle place pour le psy-
chologue
Ceacuteline Le Bivic Hocircpital Eacutemile Roux Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques
transversaliteacute de nos cliniques
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 50
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
La dimension culturelle dans leacutecoute des patients migrants
africains une approche originale avec lrsquoassociation URACA
Jacqueline Faure Service des maladies infectieuses et
tropicales Centre de la dreacutepanocytose Hocircpital Tenon
Lrsquohomme universel nrsquoexiste pas il est inscrit
dans une culture dans un cadre Or ce cadre
est universel il nrsquoexiste pas drsquohomme sans cul-
ture
L rsquohocircpital Tenon est situeacute agrave lrsquoEst de Paris
bon nombre de patients migrants infec-
teacutes par le VIH y sont soigneacutes Du fait de
lrsquoexistence drsquoune materniteacute au sein de lrsquohocircpital
beaucoup de femmes migrantes apprennent
leur seacuteropositiviteacute agrave lrsquoinfection par le VIH-sida
au cours du suivi de leur grossesse La grande
majoriteacute de ces patients est originaire drsquoAfrique
de lrsquoOuest
Degraves 1993 nous avons mis en place un parte-
nariat avec lrsquoassociation URACA pour aider
les patients en difficulteacute face au diagnostic de
lrsquoinfection par le VIH-sida et aussi les soignants
rencontrant des problegravemes dans la prise en
charge de certains patients
Au deacutebut les soignants et moi-mecircme pensions
que la plupart des patients africains ne com-
prenaient rien Peu agrave peu avec lrsquoaide drsquoURA-
CA nous avons pris conscience que nous-
mecircmes ne les comprenions pas toujours ou
bien encore que nous ne savions pas nous
faire comprendre drsquoeux
Cette association daide aux Africains intervient
dans diffeacuterents domaines accueil aide juri-
dique sociale solidariteacute preacutevention informa-
tion recherche dans le domaine de la santeacute
(toxicomanie SIDA dreacutepanocytose troubles
psychiatriques) et propose aussi des consulta-
tions drsquoethnomeacutedecine
Ainsi bien souvent les difficulteacutes avec les pa-
tients drsquoorigine eacutetrangegravere sont lieacutees agrave des pro-
blegravemes de communication et de compreacutehen-
sion mutuelles dans la relation soignant-soigneacute
En comprenant lrsquoeacuteveacutenement migratoire et son
impact dans la deacutecouverte drsquoune maladie
grave en eacutetant sensibiliseacutes agrave lrsquoimportance de la
dimension culturelle dans le soin nous avons
ainsi ameacutelioreacute lrsquoaccueil et la prise en charge de
ces patients
Un systegraveme culturel est constitueacute drsquoune
langue drsquoun systegraveme de parenteacute drsquoun corpus
de techniques et de maniegraveres de faire (la pa-
rure la cuisine les arts les techniques de
soins les techniques de maternagehellip) Tous
ces eacuteleacutements eacutepars sont structureacutes de maniegravere
coheacuterente par des maniegraveres de penser les re-
preacutesentations [] Les repreacutesentations permet-
tent aux individus dun mecircme groupe dappreacute-
hender le monde selon les modaliteacutes com-
munes repreacutesentations de la mort de la con-
ception
Jemploie ce mot culture agrave contrecœur avec
la crainte decirctre mal compris Par ce terme je
ne deacutesigne pas leacutecume luxueuse dune civilisa-
tion mais lesprit tregraves particulier dun peuple
insaisissable
Cette prise en charge globale avec lrsquoassocia-
tion URACA srsquoeffectue sous 4 formes
1 le soutien communautaire
2 la meacutediation culturelle
3 la consultation dethnomeacutedecine une prise
en charge transculturelle
4 la formation mutuelle partage de savoir
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 51
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
1 LE SOUTIEN COMMUNAUTAIRE
Je me sens coupeacute en deux diviseacute une partie
de moi-mecircme nrsquoest pas ici nous dit tel patient
La deacutecision la plus terrible que jrsquoaie eu agrave pren-
dre dans ma vie crsquoest de rester ici pour me soi-
gner et ecirctre ainsi seacutepareacutee des miens raconte
cette femme dans un sanglot difficilement con-
tenu
Crsquoest tregraves dur drsquoecirctre seulehellipJe ne suis pas ha-
bitueacuteehellipici quand tu sors de ta maison per-
sonne ne se parlehellip
Le soutien communautaire drsquoURACA srsquoorga-
nise de plusieurs faccedilons
Visite hebdomadaire au chevet du patient avec
le port dun repas africain par la nourriture
par le dialogue dans la langue quand cest pos-
sible par la preacutesence de ses pairs quelque
chose du pays est ainsi recreacuteeacutee et apaise le
malade
Accueil quotidien au sein de lrsquoassociation re-
pas atelier couture atelier informatique aides
dans les deacutemarches administratives assem-
bleacutee des femmes Tout ceci dans une am-
biance comme au pays
Ces visites sont proposeacutees aux malades isoleacutes
du fait du diagnostic ou qui nrsquoont pas de famille
ici
La migration est une eacutepreuve qui provoque
chez le sujet une deacutestabilisation une fragiliteacute
lieacutees agrave diffeacuterentes pertes
perte de lrsquoenveloppe culturelle la culture struc-
ture le psychisme humain dans la migration il
nrsquoy a plus ce cadre culturel Changer drsquounivers
implique la perte brutale drsquoune langue drsquoun
systegraveme de reacutefeacuterence drsquoun systegraveme de co-
dage des perceptions des sensations et des
repreacutesentations en un mot une acculturation
[] La perte de lrsquoenveloppe culturelle va donc
provoquer des modifications de lrsquoenveloppe
psychique [hellip]
la perte de repegraveres difficulteacutes au niveau du
changement de climat de la nourriture dans
les deacuteplacements dans la ville dans les deacute-
marches administratives Difficulteacutes et mecircme
souffrance dans la perte de la langue drsquoorigine
Julia Kristeva drsquoorigine bulgare psychanalyste
et eacutecrivain dit ceci hellip il y a mort dans la perte
drsquoune langue natalehellip
la perte drsquoune certaine identiteacute ecirctre Camara
ou Toure ecirctre peul ou bambara nrsquoest pas so-
cialement reconnu le migrant devient un eacutetran-
ger un noir puis agrave lrsquohocircpital eacuteventuellement un
seacuteropositif
la perte du groupe lrsquoisolement est douloureu-
sement ressenti pour tout eacutetranger La solitude
pour un Africain crsquoest mortelhellip nous explique
Monsieur Diarra meacutediateur ethnoclinicien agrave
URACA
Autant drsquoeacuteleacutements qui favorisent un eacutetat de vul-
neacuterabiliteacute propice agrave une deacutecompensation soma-
tique ou psychologique (deacutepression) Le dia-
gnostic drsquoune maladie grave vient renforcer
cette fragiliteacute La solitude dans les chambres
individuelles de nos hocircpitaux modernes - que
nous occidentaux appreacutecions beaucoup - peut
ecirctre mal supporteacutee par le patient africain elle
est mecircme parfois anxiogegravene Un Africain nest
jamais seul Au pays sil est hospitaliseacute sa fa-
mille lentoure dort dans sa chambre
Par ces visites hebdomadaires un tissu rela-
tionnel est ainsi creacuteeacute qui peut se poursuivre agrave
la sortie Le soutien communautaire permet au
patient isoleacute dans la preacutecariteacute de retrouver ce
lien structurant du groupe qui lui faisait deacutefaut
depuis son deacutepart dAfrique Soutien qui va lrsquoai-
der agrave mieux supporter sa maladie et agrave mieux se
soigner Pour un Africain appartenir au groupe
est vital cest pourquoi la grande crainte du
malade est que son entourage soit au courant
du diagnostic et le rejette Le malade ne peut
pas ou ne veut pas partager sa souffrance
avec ses proches La honte la crainte de lex-
clusion peuvent le conduire agrave un retrait difficile
agrave supporter Pour lAfricain lisolement est in-
concevable Sa force vitale est en relation
constante avec celle des ancecirctres proches et
lointains et des membres du groupe La plus
grande calamiteacute consiste agrave en ecirctre retrancheacute et
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 52
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reacuteduit ainsi agrave une existence deacuteficiente sans
protection voueacutee au neacuteant
Cette association communautaire nrsquoest pas
speacutecifiquement cibleacutee SIDA bien que ses
membres soient formeacutes agrave cette pathologie A
lrsquohocircpital elle apporte son aide agrave tout patient
quelle que soit sa maladie Le patient pourra
srsquoil le souhaite aborder son diagnostic et il nrsquoest
pas rare qursquoil le fasse Apaisement et soulage-
ment pour lui de constater que ce dont il
souffre ne fait pas peur Il peut retrouver con-
fiance en lui
2 LA MEacuteDIATION CULTURELLE
Le meacutediateur ethnoclinicien connaicirct bien la cul-
ture du patient originaire drsquoAfrique de lrsquoOuest et
il parle plusieurs langues (peul bambara sara-
koleacute wolof hellip) Il intervient dans diffeacuterentes
situations
Pour faciliter la communication entre le meacutede-
cin et le patient quand des explications concer-
nant la maladie le traitement nrsquoont pas eacuteteacute
comprises Il ne srsquoagit pas drsquoune simple inter-
preacutetation mais drsquoune formulation adapteacutee agrave la
personne agrave sa culture Les messages de preacute-
vention concernant la sexualiteacute par exemple
seront mieux accepteacutes et entendus si la sensi-
biliteacute du patient voire sa pudeur sont respec-
teacutees
Pour aider agrave la reacutesolution de conflits entre pa-
tient-soignant ou patient-famille ou soignant-
famille
Reacutecemment nous avons organiseacute une meacutedia-
tion culturelle pour une patiente ne parlant pas
du tout le franccedilais accompagneacutee de son fils
maicirctrisant parfaitement notre langue Le meacutede-
cin lrsquoassistante sociale le meacutediateur et moi-
mecircme eacutetions reacuteunis pour essayer de com-
prendre le conflit familial Tout eacutetranger utilise
la langue eacutetrangegravere comme un pansement
comme une sorte drsquoonguent de cregraveme sur les
anciennes blessureshellip La langue seconde ne
permet pas drsquo acceacuteder agrave son for inteacuterieur ex-
plique Julia Kristeva Ainsi le fils pouvant tout
agrave fait communiquer avec nous en franccedilais
srsquoest spontaneacutement adresseacute au meacutediateur en
bambara De toute eacutevidence sa langue natale
lui permettait drsquoecirctre au plus pregraves de la situation
douloureuse qursquoil vivait avec sa megravere
Le meacutediateur apporte des eacuteclaircissements sur
le contexte culturel sur le sens de tel conflit
familial sur la place des uns et des autres dans
telle famille (la place de lrsquooncle maternel par
exemple le systegraveme de filiation) Il aide les soi-
gnants souvent deacutestabiliseacutes par le manque de
repegraveres ou qui interpregravetent mal telle attitude
Par exemple lrsquoextension de la deacutenomination
fregravere sœur cousin megravere dans lrsquoentourage du
patient Les soignants ne savent plus qui est
qui Des doutes surgissent voire de la suspi-
cion Les soignants ont lrsquoimpression drsquoecirctre ma-
nipuleacutes ou trompeacutes
Le meacutediateur ethnoclinicien tient selon la for-
mule de T Nathan une sorte de position du
diplomate entre deux univers antagonistes
3 LA CONSULTATION DETHNOMEacuteDECINE UNE
PRISE EN CHARGE TRANSCULTURELLE
La culture permet un codage de lrsquoensemble de
lrsquoexpeacuterience veacutecue par un individu elle permet
drsquoanticiper le sens de ce qui peut survenir et
donc de maicirctriser la violence de lrsquoimpreacutevu et
par conseacutequent du non-sens
Angoisse de mort deacutecompensation psychia-
trique (ideacutees suicidaires syndrome anxio-
deacutepressif eacutetat deacutelirant) incompreacutehension ou
deacuteni du diagnostic deacutetresse psychologique
autant de reacuteactions face agrave la maladie grave qui
peuvent concerner tout patient (occidental ou
non) mais qui neacutecessitent pour certains pa-
tients migrants une approche tenant compte du
contexte de la migration et des speacutecificiteacutes cul-
turelles
Cette maladie je sais drsquoougrave ccedila vient mon pegravere
mrsquoa donneacutee en sorcellerie nous dit cette pa-
tiente qui ne prend pas ses meacutedicaments et
dont lrsquoeacutetat srsquoaggrave
Je suis travailleacute je le sens crsquoest les parents
de ma femme qui nrsquoont jamais accepteacute notre
mariage crsquoest eux qui font des choses sur
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 53
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
moihellip
Ou bien encore ce patient en phase asympto-
matique de lrsquoinfection par le VIH-sida qui ex-
plique Je ne suis pas malade la preuve le
meacutedecin ne me donne pas de traitement
Ainsi dans certains cas le patient en difficulteacute
en souffrance peut refuser de se soigner au
prix drsquoune aggravation de son eacutetat se santeacute De
plus les messages de preacutevention ne sont pas
entendus et les risques de propagation du virus
sont accrus
Cette consultation qui srsquoinspire de lrsquoethnopsy-
chiatrie reacuteunit autour du patient (accompagneacute
ou non de membres de sa famille ou de
proches)
- leacutequipe de lassociation URACA le Dr Mous-
sa Maman meacutedecin et theacuterapeute traditionnel
qui dirige les entretiens le meacutediateur ethnocli-
nicien la psychologue Pendant 10 ans cette
eacutequipe a eacuteteacute compleacuteteacutee par la preacutesence des
tradipraticiens africains gueacuterisseurs tradition-
nels du Nord Beacutenin qui sont venus une fois par
an pour une dureacutee de deux mois (cette action
originale a pu se mettre en place gracircce agrave des
creacutedits le Sidaction par exemple qui nrsquoexistent
plus aujourdrsquohui)
- leacutequipe soignante le meacutedecin reacutefeacuterent les
infirmiegraveres la psychologue linterne les ex-
ternes lassistante sociale sage-femme kineacute-
sitheacuterapeutehellip Les soignants ont ainsi accegraves
en situation clinique agrave lunivers culturel du pa-
tient
Le recours aux pratiques traditionnelles est tregraves
freacutequent en Afrique Les systegravemes traditionnels
de soin relegravevent drsquo une logique complexe
drsquoune rationaliteacute profonde (T Nathan) avec
une capaciteacute agrave srsquoadapter aux nouvelles situa-
tions aux nouvelles maladies Cette deacute-
marche ne remet pas en cause la confiance
envers notre meacutedecine moderne La theacuterapie
traditionnelle apporte des protections fonda-
mentales (T Nathan)
Tregraves souvent en Afrique les theacuterapies tradition-
nelles se deacuteroulent en groupe avec la famille
et ceux qui ont une affiniteacute avec le malade Ici agrave
lhocircpital les participants sont reacuteunis en cercle
autour du patient Le groupe constitue une en-
veloppe psychique qui est en soi theacuterapeu-
tique Les soignants par leur preacutesence accor-
dent une place agrave lrsquoidentiteacute culturelle du patient
agrave ses maniegraveres de vivre de se soignerhellip
Dans les cultures de tradition orale les eacuteveacutene-
ments importants de la vie tels que la nais-
sance le mariage la maladie la mort (avec
lrsquoimportance des ancecirctres) sont penseacutes diffeacute-
remment Il existe une reacutealiteacute invisible on ac-
corde vie force et pouvoir au mineacuteral au veacutegeacute-
tal agrave lrsquoanimal Le sang le lait maternel ont des
pouvoirs beacuteneacutefiques ou maleacutefiques
Les speacutecialistes de lrsquoanthropologie pensent
que le modegravele de lrsquoorganisation sociale com-
munautaire plus freacutequent dans les socieacuteteacutes
non industrialiseacutees ougrave le groupe maintient une
preacutegnance importante sur lrsquoindividu favorise
une expeacuterience du corps veacutecu comme global
il nrsquoy a pas de rupture entre lrsquohomme et le cos-
mos le corps est permeacuteable On lui reconnaicirct
une dimension transcendante et la maladie
qui plus est chronique comme la dreacutepanocy-
tose peut ecirctre inteacutegreacutee dans une reacutealiteacute plus
large exteacuterieure au corps de la meacutedecine des
hocircpitaux
Lors de ces consultations drsquoethnomeacutedecine les
deux systegravemes culturels occidental et tradition-
nel sont reconnus lrsquoun nrsquoexcluant pas lrsquoautre
Le patient peut aborder en toute confiance des
preacuteoccupations qui lui sont speacutecifiques sans
craindre le ridicule Les deux systegravemes de re-
preacutesentations occidentales et traditionnelles
dans lesquels navigue le migrant peuvent
coexister sans sopposer Paradoxalement
lrsquoapproche traditionnelle donne dans certains
cas sens et coheacuterence au discours meacutedical
scientifique Il est difficile de rendre compte
drsquoune consultation drsquoethnomeacutedecine (de mecircme
qursquoil est difficile de parler drsquoune seacuteance de psy-
chotheacuterapie ou drsquoanalyse bien que ce ne soit
pas du mecircme ordre) Il ne srsquoagit pas drsquoune con-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 54
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sultation traditionnelle ce nrsquoest ni le lieu ni le
cadre Nous sommes dans lrsquoentre-deux
Le nom la parenteacute lrsquoappartenance ethnique la
langue natale sont des eacuteleacutements systeacutematique-
ment abordeacutes Ces reacutefeacuterences agrave la filiation agrave
lrsquoethnie rappellent implicitement au malade le
lien agrave sa famille et son appartenance agrave un
groupe Les tradipraticiens se preacutesentent aussi
se nomment racontent dougrave ils viennent Le
dialogue qui srsquoinstaure est bien souvent eacutenig-
matique pour lrsquooccidental Le langage allusif
meacutetaphorique suggestif qui est utiliseacute est tout
agrave fait entendu par le patient agrave la diffeacuterence des
soignants qui sont deacuteconcerteacutes du moins lors
des premiegraveres consultations Peu agrave peu les
soignants vont se familiariser Par la suite ils
peuvent communiquer diffeacuteremment avec tel
patient et mieux deacutecoder sa maniegravere drsquoecirctre ou
de srsquoexprimer
Les repreacutesentations ancestrales de la maladie
et les eacutetiologies traditionnelles (possession es-
prits ou ancecirctres meacutecontents sorcellerie trans-
gression de tabous ou non respect de rituels
familiaux) ne sont pas systeacutematiquement eacutevo-
queacutees et lorsqursquoelles le sont crsquoest toujours de
maniegravere implicite La maladie comme lrsquoacci-
dent la perte drsquoun emploi ou toute autre mani-
festation de malchance de malheur est le
signe drsquoun deacutesordre -dont il faut comprendre le
sens- et qui concerne non seulement le patient
mais aussi sa famille
Monsieur C originaire du Mali connaicirct bien les
diffeacuterents modes de transmission et nous en
discutons ensemble et dans ce mecircme entre-
tien perplexe il se questionne Je ne sais
pas drsquoougrave ccedila vienthellip
Chez nous la maladie quelle soit physique ou
mentale ne concerne pas uniquement lindividu
toucheacute mais aussi sa famille tout le
groupe (M Maman Journeacutee transculturelle
Des gueacuterisseurs agrave lhocircpital des soignants au
village 29 septembre 2001 hocircpital Tenon
Paris) Derriegravere lhistoire de lindividu se profile
toujours le devenir de la communauteacute toute en-
tiegravere [ ] La cause du mal qui rompt leacutequilibre
dun organisme fait peser une lourde menace
sur le corps social
Bien souvent agrave lissu de ces consultations le
patient va contacter la famille au pays qui elle
aussi va intervenir selon ses coutumes par des
priegraveres rituels ou sacrifices
La proposition dune prise en charge transcul-
turelle nest pertinente que si elle fait sens pour
le patient sil se reconnaicirct des liens avec sa
culture dorigine Le patient peut ecirctre occiden-
taliseacute (eacutetudes supeacuterieures vivant en France
depuis de nombreuses anneacutees hellip) ou dorigine
rurale analphabegravete ayant gardeacute des liens avec
son village il peut ecirctre musulman ou chreacutetien
Les indications sont variables
- incompreacutehension du diagnostic Lrsquoexemple
de Monsieur K malgreacute une seacuterologie positive
il reste persuadeacute de nrsquoecirctre pas malade Cepen-
dant il accompagne aux consultations sa
femme et leur fille toutes les deux seacuteropositives
et sous traitement
- refus du traitement les causes sont mul-
tiples Mme T vient reacuteguliegraverement agrave ses con-
sultations le meacutedecin veut deacutesormais lui pres-
crire un traitement qursquoelle refuse Si je dis que
je suis seacuteropositive personne ne voudra se
marier avec moi Une autre patiente
srsquoinquiegravete Je ne veux pas du traitement si je
deviens indeacutetectable alors ougrave sera le virus
- problegraveme drsquoobservance les causes sont va-
rieacutees preacutecariteacute incompreacutehension ou refus du
diagnostic probleacutematique personnelle plus pro-
fonde
- souffrance psychique le patient peut ecirctre
tregraves observant ses reacutesultats biologiques sont
satisfaisants le patient va tregraves bien selon le
meacutedecin mais persiste en lui une douleur mo-
rale difficile parfois agrave repeacuterer Il faut savoir deacute-
coder le sens du sourire (qui ne signifie pas
toujours la joie) lrsquoabsence de plainte Julia
Kristeva explique que les eacutetrangers sont expo-
seacutes aux maladies psychosomatiques ils sont
dans cet espegravece de vernis de la langue se-
conde mais le fond reste douloureux et le fond
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 55
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
eacuteclate sous la forme de la migraine quand ce
nrsquoest pas le cancerhellip
- pathologie psychiatrique troubles du com-
portement (deacutelire agitation violencehellip) syn-
drome deacutepressif risque suicidaire angoisse de
mort plaintes somatiques sans cause orga-
nique (douleurs diffuses sensation de malaise
le corps parle ccedila chauffe ccedila se deacuteplace)
- fin de vie angoisse isolement
- conflits conjugaux ou familiaux aggraveacutes ou
reacuteactionnels agrave la pathologie (risque de divorce
tel mari qui nrsquoassume plus ses responsabiliteacutes
sexualiteacute devenue difficile impossible (refus du
preacuteservatif par exemple)
- Lrsquoannonce du diagnostic Lrsquoannonce drsquoune
maladie grave est toujours une eacutepreuve pour
tout malade Crsquoest un moment-cleacute dans la prise
en charge du patient Dans le cas de lrsquoinfection
par le VIH la formulation peut ecirctre une donneacutee
brutale Tel ce meacutedecin qui annonce agrave
une femme enceinte vih2 asymptomatique
vous avez le SIDA Veacuteritable violence ver-
bale qui provoque un choc psychique avec
risque suicidaire si ce nrsquoest la fuite et le refus
de soin
Actuellement chez certains soignants on as-
siste agrave une banalisation du diagnostic lieacute aux
possibiliteacutes de traitement Mais crsquoest oublier le
deacutecalage avec le niveau de connaissance du
malade et crsquoest aussi meacuteconnaicirctre les effets
sur le patient de la reacutealiteacute dramatique de la ma-
ladie au pays Certains ont vu des proches
mourir du SIDA drsquoune mort lente sans soin et
dans la solitude Tous les patients eacutevoquent
une forte angoisse Deux mois apregraves il y a en-
core en moi cette grande peur quand le meacutede-
cin mrsquoa parleacute En entendant les propos de
lrsquoinfirmier Je vous apporte vos meacutedicaments
du SIDA Mme B nous raconte comment elle
a protesteacute et reacuteagi vivement Vous ne devez
pas dire cela Ainsi dans certains cas le meacute-
decin peut utiliser drsquoautres formulations le
virus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Dans les cultures de tradition orale les mots
ont une force un pouvoir Prononcer le mot SI-
DA activerait en quelque sorte le potentiel mor-
tel de cette maladie Ainsi dans certains cas le
meacutedecin peut utiliser drsquoautres formules le vi-
rus de la maladie la maladie qui passe de
lrsquohomme agrave la femme la grande maladie
Deux ou trois consultations ont lieu ainsi agrave lhocirc-
pital pour chaque malade Les tradipraticiens
vont dire ce quils ont vu et vont donner leurs
indications theacuterapeutiques le suivi peut se
poursuivre apregraves leur retour au village ougrave ils
continuent si crsquoest neacutecessaire agrave travailler
pour le patient Les situations sont tregraves varieacutees
et les reacuteponses le sont tout autant
QUELQUES EXTRAITS DE CONSULTATION
Ce patient ne se sent pas malade il nrsquoa aucun
signe de la maladie il ne comprend pas pour-
quoi le meacutedecin insiste pour qursquoil prenne un
traitement qui plus est agrave vie On lui rappelle
qursquoau pays le gueacuterisseur a lui aussi son labo-
ratoire qursquoil voit et qursquoil peut demander de
faire des choses agrave celui qui vient le consulter
pour sa protection ce parfois toute la vie
Cette analogie explicite permet de confirmer la
validiteacute de lrsquoapproche meacutedicale Ce mode drsquoex-
pression imageacutee qui est familiegravere au patient
voir dans le sable faire des rituels pour la
protection reacutesonne en lui et lrsquoaide agrave adheacuterer
aux prescriptions meacutedicales Moi-mecircme jrsquoem-
ploie souvent le terme protection pour parler
du beacuteneacutefice de la tritheacuterapie jrsquoutilise des
images qui font sens pour le patient et je com-
prends mieux celles qursquoil utilise lui-mecircme De
mecircme il mrsquoarrive de lui signaler nos expres-
sions speacutecifiquement franccedilaises ou nos pro-
verbes afin de lui faire connaicirctre aussi notre
propre maniegravere drsquoexprimer certaines choses
Tel autre patient srsquoaggrave il prend mal ses
traitements et il vit dans une grande preacutecariteacute
Drsquoembleacutee lors du premier entretien psycholo-
gique il mrsquoexplique que sa sœur au pays a par-
leacute de sorcellerie Au cours de la consultation
drsquoethnomeacutedecine on lui demande de solliciter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 56
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
sa famille au pays pour savoir ce qui doit ecirctre
fait aupregraves de la riviegravere sacreacutee qursquoil a eacutevoqueacutee
En Afrique les deacutefunts les ancecirctres doivent
ecirctre veacuteneacutereacutes par des rituels propres agrave chaque
famille si ce rituel a eacuteteacute abandonneacute des con-
seacutequences neacutegatives peuvent rejaillir sur un de
ses membres mecircme tregraves eacuteloigneacute On peut re-
marquer qursquoici lrsquohypothegravese de la sorcellerie est
eacutecarteacutee crsquoest une autre eacutetiologie traditionnelle
qui est avanceacutee agrave laquelle le patient adhegravere il
va contacter en effet son oncle au sujet de la
riviegravere sacreacutee Le patient devient actif non seu-
lement pour srsquooccuper des choses du pays
mais aussi pour faire des deacutemarches ici sa si-
tuation meacutedicale et sociale va consideacuterable-
ment srsquoameacuteliorer il trouve par la suite un heacute-
bergement puis un travail
Pour cette autre patiente un long temps de la
seacuteance va ecirctre consacreacute au reacutecit de la deacutecou-
verte de sa maladie de son bouleversement
de son angoisse concernant lrsquoavenir Des pa-
roles apaisantes lui sont dites puis on va lui de-
mander drsquoeacutecrire ses recircves de telle et telle nuit
au cours desquelles les gueacuterisseurs
travailleront pour elle Suite au rapport de ses
recircves ils lui prescrivent un traitement elle de-
vra se laver avec une preacuteparation agrave base de
plantes Conjointement le suivi psychologique
classique se poursuit elle reprend confiance
dans la vie
Aacute tel autre il est demandeacute drsquoapporter une petite
boicircte en bois ou encore un tissu blanc et un
parfum Aacute un autre il est dit drsquoaller chercher un
certain nombre de cailloux le long drsquoun cours
drsquoeau ici en France Certaines prescrip-
tions sont plus compliqueacutees sacrifices rituels
agrave effectuer au pays objets agrave rapporter Cela
peut prendre plusieurs semaines Si la pres-
cription est impossible agrave reacutealiser par le patient
lui-mecircme sur place ou par sa famille en
Afrique les gueacuterisseurs le feront en son nom agrave
leur retour au pays Dans la meacutedecine tradition-
nelle lrsquouniteacute cosmique crsquoest-agrave-dire la parenteacute
homme-nature est constamment preacutesente
Lrsquohomme est relieacute au monde mineacuteral veacutegeacutetal
ou animal mais aussi agrave celui des deacutefunts des
esprits et bien-sucircr agrave sa famille agrave son groupe
LE SUIVI DE GROSSESSE DE MME T
Depuis des anneacutees la patiente souffre en plus
de lrsquoinfection par le VIH de troubles du compor-
tement difficiles agrave diagnostiquer elle a un suivi
psychiatrique qui ne suffit pas agrave la soulager
Elle traverse des peacuteriodes drsquoagitation drsquoagres-
siviteacute et mecircme de violence Dans ses crises
elle peut aller jusqursquoagrave lrsquoautomutilation ou la ten-
tative de suicide Agrave drsquoautres moments elle est
totalement abattue leacutethargique Bien qursquoelle
connaisse sa maladie lieacutee au VIH lrsquoobservance
de sa tritheacuterapie est fonction de son eacutetat psy-
chique Elle a beacuteneacuteficieacute agrave plusieurs reprises de
consultations drsquoethnomeacutedecine en particulier
lors de cette derniegravere grossesse Du fait des
mauvais reacutesultats biologiques car elle ne prend
plus ses antireacutetroviraux le risque de contami-
nation megravere-enfant est particuliegraverement eacuteleveacute
Tregraves deacuteprimeacutee elle est transfeacutereacutee dans le ser-
vice de psychiatrie de notre hocircpital et le psy-
chiatre accepte qursquoagrave cocircteacute des traitements clas-
siques (antideacutepresseurs anxiolytiques) elle
fasse les soins traditionnels prescrits Elle a
donc une permission pour aller au marcheacute agrave
cocircteacute de lrsquohocircpital acheter un œuf blanc Elle doit
ensuite mettre cet œuf dans une grosse boicircte
drsquoallumettes exercice un peu difficile car lrsquoœuf
risque de se casser Le tout est mis dans une
calebasse recouverte drsquoun tissu blanc qursquoelle
entrepose sous son lit plus preacuteciseacutement agrave la
tecircte du lit En effet il est important qursquoelle
dorme avec cette calebasse pregraves de sa tecircte
pendant un certain nombre de nuits Puis la ca-
lebasse avec son contenu (lrsquoœuf dans la boicircte)
est remise aux gueacuterisseurs de retour au pays
ils vont effectuer leur travail agrave la termitiegravere sa-
creacutee A son retour en France le Dr Maman
remet un onguent agrave la patiente preacuteparation
faite agrave partir de lrsquoœuf et drsquoautres eacuteleacutements Elle
doit mettre reacuteguliegraverement cette pommade au-
tour de son nombril jusqursquoagrave lrsquoaccouchement
Lrsquoeacutetat psychique de la patiente srsquoameacuteliore elle
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 57
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
reprend correctement son traitement lrsquoenfant
naicirct et ne sera pas contamineacute par le VIH Dans
les anneacutees qui suivront son eacutetat psychologique
se deacutegradera agrave nouveau nous nrsquoavons jamais
reacuteussi agrave la stabiliser compleacutetement Nrsquoayant ja-
mais bien suivi sa tritheacuterapie elle deacutecegravede agrave la
suite des complications du sida
A partir de cet exemple nous pouvons voir le
principe de non-seacuteparativiteacute principe essentiel
agrave lrsquoœuvre dans la meacutedecine traditionnelle afri-
caine Nous sommes ici dans un systegraveme de
penseacutee primordiale magique qui fonctionne
par analogie nous sommes dans le non-
seacutepareacute agrave la diffeacuterence de la penseacutee scientifique
qui individualise Dans ce cas clinique on voit
comment tout est relieacute il y a identiteacute entre la
grossesse et lrsquoœuf passage de lrsquohumain agrave
lrsquoanimal et aussi passage drsquoun continent agrave
lrsquoautre les gueacuterisseurs travaillant agrave distance
pour la patiente Citons agrave ce propos Pierre
Lembeye psychiatre et psychanalyste hellip
nous pouvons parler de rsquorsquonon-seacuteparativiteacutersquorsquo de
la meacutedecine traditionnelle par rapport agrave la meacute-
decine occidentale qui privileacutegie le mode seacutepa-
ratif et dont le maicirctre mot est diffeacuterence tandis
que celui des socieacuteteacutes anhistoriques est identi-
teacute La science en particulier la meacutedecine a
fait des progregraves en isolant en seacuteparant Citons
aussi Jean Benoist Lrsquoopposition carteacutesienne
entre le corps et lrsquoacircme a libeacutereacute la biologie et
donc la meacutedecine des interdits qui sacralisent
le corps hellip Lrsquoesprit lrsquoacircme tout ce qui eacutetait cou-
ramment deacutesigneacute par ces termes srsquoest prodi-
gieusement eacuteloigneacute de lrsquohorizon meacutedical
(Benoist 1993) A lrsquohocircpital crsquoest bien lrsquoorgane
malade que lrsquoon soigne mais rarement la per-
sonne dans sa globaliteacute et encore moins son
groupe familial Nous pensons analysons sur
le mode seacuteparatif celui de la coupure et selon
Pierre Lembeye La psychanalyse avec lrsquohy-
pothegravese de lrsquoinconscient opegravere aussi une cou-
pure avec le conscient Les lapsus les recircves
sont des manifestations de lrsquoinconscient alors
que dans la tradition africaine il nrsquoy a pas cette
seacuteparation par exemple chez les Ashantis au
Ghana si un homme recircve qursquoil couche avec sa
voisine il est puni et sa voisine aussi De
mecircme la psychiatrie pense aussi les probleacutema-
tiques sur le mode de la coupure le terme
schizophreacutenie provient de schizo du grec
schizein signifiant fractionnement fissure divi-
sion (P Lembeye) Dans les traitements tradi-
tionnels crsquoest la question du lien qui est au pre-
mier plan Nous avons lrsquoexemple de ce beacutebeacute
acircgeacute de huit mois enfant-cordon preacutesentant
des troubles du comportement et dont le traite-
ment est deacutecrit par Eacuteric de Rosny hellip le cor-
don ombilical le retenant aux entrailles de
lrsquoautre monde nrsquoaurait pas eacuteteacute coupeacute hellip Il srsquoagit
de lui crever les yeux crsquoest-agrave-dire de lui
rendre invisible le monde des Ancecirctreshellip (De
Rosny 1996 123-133)
La penseacutee magique qui est agrave lrsquoœuvre dans les
theacuterapies traditionnelles a-t-elle deacuteserteacute notre
systegraveme de penseacutee occidentale Dominique
Folscheid professeur de philosophie nous rap-
pelle ceci Notre meacutedecine moderniste est
due agrave lrsquoessor de la rationaliteacute mais on a oublieacute
que dans la Gregravece Antique la rationaliteacute deacutebu-
tante (avec les philosophes) srsquoaccompagnait
drsquoune vie mystique florissante Rappelons le
serment drsquoHippocrate premier code de deacuteonto-
logie meacutedical Je jure par Apollon meacutedecin
par Esculape par Hygeacutee et Panaceacutee par tous
les dieux et toutes les deacuteesseshellip Dans son
livre La nuit les Yeux ouverts Eacuteric de Rosny
cite Pierre Fegravevre Ce monde de la gueacuterison et
de la sorcellerie a quelque chose drsquounheimlich
(agrave la fois lsquolsquomysteacuterieuxrsquorsquo et lsquolsquoinquieacutetantrsquorsquo) et pour-
tant il eacuteveille des reacutesonances au plus profond
de nous-mecircmes et lrsquoon ne sait pas les-
quelles (de Rosny 1996 17) Nous-mecircmes
sans en avoir veacuteritablement conscience fonc-
tionnons sur le mode du lien du non-seacutepareacute
par exemple Reneacute Spitz psychiatre et psycha-
nalyste a deacutecrit en 1946 lrsquohospitalisme alteacutera-
tion physique grave srsquoinstallant chez le tregraves
jeune enfant placeacute en institution et seacutepareacute de
sa megravere crsquoest pourquoi aujourdrsquohui en peacutediatrie
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 58
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
on facilite la preacutesence de la megravere qui peut dor-
mir au chevet de son enfant un autre
exemple celui du syndrome de glissement des
personnes acircgeacutees hospitaliseacutees qui coupeacutees de
leur environnement habituel se laissent mourir
et dans un autre registre que dire de lrsquoabsence
de chambre ndeg13 dans nos hocircpitaux nos hocirc-
tels
4 FORMATION MUTUELLE PARTAGE DE SAVOIR
Un eacutechange des savoirs srsquoest instaureacute entre les
soignants de lrsquohocircpital et lrsquoassociation
1 au niveau de lrsquoassociation les membres
drsquoURACA sont formeacutes agrave la pathologie du sida
les meacutedecins apportent leur connaissance meacute-
dicale avec des mises agrave jour sur lrsquoeacutevolution de
la pathologie et des traitements Des reacuteunions
agrave thegraveme sont organiseacutees avec un eacutelargisse-
ment agrave drsquoautres pathologies (heacutepatites dreacutepa-
nocytose)
2 au niveau des soignants formation en situa-
tion clinique participation au cycle annuel de
confeacuterences drsquoUraca voyages drsquoeacutetude dans le
village du Dr Maman au Nord-Beacutenin effectueacutes
par des meacutedecins psychiatres psychologues
assistante sociale infirmiegraveres de lrsquoAP-HP
(participation agrave des theacuterapies traditionnelles
dont le culte de danses de possession expeacute-
rience drsquoune certaine situation migratoire vil-
lage dans la brousse repegraveres diffeacuterents cadre
culturel autre adaptation au climat agrave la nourri-
turehellip)
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La nuit les yeux ouverts eacuted Seuil 1996
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LrsquoAfrique de lrsquooraliteacute et lrsquoaccueil de lrsquoEacutecriture
Paris Revue Christus ndeg225 2010
Collectif
La notion de personne en Afrique Noire Ed
LHarmattan 1973
Soins et cultures 2egravemes
Rencontres Transcul-
turelles de Tenon-Uraca Les Cahiers de
lrsquoURACA ndeg12 juin 2005 (teacuteleacutechargeable sur le
site wwwuracaorg)
Pratiques theacuterapeutiques et cultures regards
croiseacutes 3egravemes
Rencontres Transculturelles de
Tenon-Uraca 2010 videacuteos de la journeacutee en
ligne sur wwwuracaorg)
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 60
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Psychologue en reacuteanimation peacutediatrique teacutemoignage drsquoune
pratique en eacutevolution
Muriel Derome Hocircpital Raymond Poincareacute
L e propos de cette preacutesentation sera de
teacutemoigner de leacutevolution drsquoune pratique
de psychologue au sein dun pocircle de peacute-
diatrie bien speacutecifique celui de lrsquoHocircpital Ray-
mond Poincareacute de Garches Laccueil denfants
en deacutecompensation neuro respiratoire souf-
frant de polyhandicap de maladies chroniques
ou arrivant suite agrave un eacuteveacutenement traumatique
brutal (accident intoxication insuffisance respi-
ratoire) rend la preacutesence du psychologue neacute-
cessaire
Avec Jean en phase terminale nous reacutefleacutechi-
rons au rocircle du psychologue dans lrsquoaccom-
pagnement des enfants en fin de vie
Dautres cas cliniques preacutesenteacutes agrave loral illus-
treront ensuite les modaliteacutes de la prise en
charge post-traumatique denfants et de
leurs familles
Enfin nous terminerons par exposer la speacutecifi-
citeacute de notre travail aupregraves des soignants
ACCOMPAGNER DES ENFANTS GRAVEMENT MA-
LADES OU EN FIN DE VIE
Lors de notre premiegravere rencontre Jean nous
dit Je sais que je vais mourir mais les meacutede-
cins sont trop lacircches pour me le dire et mes
parents sont trop tristes pour mrsquoen parler
Nous lui reacutepondons Je ne te connais pas
mais en tout cas je trouve que cest super que
tu puisses en parler et que tu ne gardes pas
tout ccedila pour toi
Tregraves eacutetonneacute il reprend Alors lagrave crsquoest bizarre
drsquohabitude degraves que je dis que je vais mourir
tout le monde me dit rdquoMais arrecircte Nrsquoimporte
quoi Ne raconte pas des becirctisesrdquo Mais moi je
ne suis pas fou je sais ce que je dis et pour-
quoi je le dis et je veux pouvoir en parler
La question redoutable est tregraves vite apparue
Est-ce que crsquoest vrai que je vais mourir Il
faut alors pouvoir reacutepondre Je pense que si
tu dis ccedila crsquoest que tu as de bonnes raisons de
le penserhellip Tu es le seul agrave savoir exactement
ce que tu vis Raconte-moi qursquoest-ce qui te fait
dire ccedila
Jour apregraves jour gracircce agrave un travail psycholo-
gique Jean exprime de plus en plus sa souf-
france Se sentant eacutecouteacute il entre progressive-
ment dans une autre phase celle de lrsquoaccepta-
tion
Accompagner un enfant en fin de vie crsquoest
avant tout rester agrave son eacutecoute affronter les
questions qui mettent si mal agrave lrsquoaise (mecircme si
et surtout si on ne sait pas comment y reacute-
pondre ) Et crsquoest aussi accueillir ses interroga-
tions sur sa propre mort pour lutter contre la
solitude la peur lrsquoangoisse la colegravere
ACCOMPAGNER LES FAMILLES
Avec la megravere de Jean nous deacutecouvrons ce qui
se joue autour de la porte Degraves que nous nous
preacutesentons elle nous reacutepond Merci on nrsquoa
besoin de rien (Puis sortant de la
chambre) mais surtout vous ne lui dites pas
qursquoil va mourir vous ne lui parlerez de rien -
Oh moi non mais lui il en parle beaucoup
Tregraves surprise la megravere accepte alors de venir
en parler dans notre bureauhellip Lrsquoaccompagne-
ment commence
En phase terminale Jean perd toute autonomie
motrice et tous ses sens agrave lrsquoexception de la
vue Il ne peut plus parler Sa megravere terroriseacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 61
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
par la situation demande aux eacutequipes de lui
donner quelque chose pour dormir deacutefiniti-
vement Nous lui montrons alors qursquoune com-
munication subsiste gracircce agrave lrsquoinstauration drsquoun
code (lettres sur un tableau) avec des signes
de tecircte et des clignements drsquoœil Elle srsquoaperccediloit
alors que Jean cherche avant tout agrave savourer
les petits bonheurs de chaque jour Elle reste
ainsi jusquau bout en lien avec son fils
Accompagner les parents cest accueillir
leur eacutepuisement leurs doutes leur ambiva-
lence parfois mecircme leur demande deuthana-
sie et leur redonner une image positive deux-
mecircmes pour leur permettre drsquoinvestir lrsquoinstant
preacutesent et ainsi favoriser un accompagnement
de qualiteacute
ACCOMPAGNER AUSSI LES AUTRES ENFANTS HOS-
PITALISEacuteS ET LEURS FAMILLES
Il nous semble important de susciter des
occasions drsquoaborder le sujet de la mort en lais-
sant les familles libres de saisir ou non ces op-
portuniteacutes
ACCOMPAGNER LES SOIGNANTS
DANS LIMMEacuteDIATETEacute DE LA REacuteALITEacute CLINIQUE
En deacutecalage les eacutequipes srsquointerrogent
Doit-on vraiment lui infliger ccedila jusqursquoau bout
Sa megravere a peut-ecirctre raison on devrait peut-
ecirctre lrsquoendormir pour qursquoil ne se sente pas humi-
lieacute drsquoecirctre si diminueacute Moi je ne supporterais
pashellip Les soignants sont alors tellement preacute-
occupeacutes par la deacutecision qursquoils pensent devoir
prendre qursquoils ne se rendent pas compte que
cette megravere est en train de vivre lrsquoun des plus
grands moments drsquoamour avec son fils Le psy-
chologue devient alors le lien entre les diffeacute-
rents protagonistes en rapportant certains des
propos de Jean Je suis bienhellip Comme ce
rayon de soleil est beau aujourdrsquohuihellip La
communication se remet agrave fonctionner Leurs
regards se posent alors diffeacuteremment sur lui
La peacuteriode de fin de vie drsquoun patient con-
fronte chaque soignant agrave ses limites Chacun
perd ses illusions de toute-puissance et se re-
trouve confronteacute agrave sa propre angoisse de mort
Certains deacutestabiliseacutes ne peuvent pas suppor-
ter lideacutee decirctre confronteacute agrave la proximiteacute de la
mort Pour surmonter sans trop de seacutequelles
la confrontation reacutepeacuteteacutee agrave la maladie grave et agrave
la mort il est neacutecessaire que chacun puisse
ecirctre attentif agrave soi-mecircme agrave ses propres be-
soins pour ecirctre dans un juste rapport agrave lrsquoautre
Il sagit decirctre toucheacute sans ecirctre impliqueacute affecti-
vement cest agrave dire sans tomber dans leacutemotivi-
teacute
Apregraves chaque deacutecegraves le psychologue est
lagrave pour inviter ceux qui le deacutesirent agrave mettre en
mots ce qui a eacuteteacute veacutecu La parole partageacutee per-
met de ne pas fixer des souvenirs culpabili-
sants ou anxiogegravenes
AU LONG COURS LE TRAVAIL INSTITUTIONNEL
Le soutien des eacutequipes pluridisciplinaires
est une part tregraves importante du travail du psy-
chologue en milieu hospitalier Lrsquoeacutecoute et les
eacutechanges contribuent agrave ce que tregraves lentement
les habitudes et les mentaliteacutes eacutevoluent Ces
rencontres pourront selon les situations avoir
lieu de faccedilon formelle ou informelle (le plus
souvent dans les couloirs)
Le soutien au long cours des eacutequipes fait par-
tie inteacutegrante du travail institutionnel Diffeacuterents
outils permettent de lrsquoaccompagner au mieux
LA REacuteUNION DE SYNTHEgraveSE
Dans notre service la reacuteunion de syn-
thegravese hebdomadaire permet de se poser pour
reacutefleacutechir en eacutequipe pluridisciplinaire agrave ce que
nous vivons Il est primordial drsquoaider chaque
intervenant agrave mettre des mots sur les situations
rencontreacutees surtout quand les points de vue
sont divergents Mais il srsquoagit drsquoun travail de
longue haleine car si nous nrsquoy sommes pas
vigilants les discussions restent tregraves meacutedicales
et eacutevitent drsquoaborder lrsquoenfant et sa famille dans
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 62
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
leur globaliteacute Le psychologue par sa faccedilon de
relever les paradoxes de poser les questions
eacutethiques ou simplement de faire entendre une
autre approche que celle purement somatique
aide les eacutequipes agrave reacutefleacutechir agrave leur maniegravere
drsquoaborder les familles
LA SYNTHEgraveSE DES SYNTHEgraveSES
Une fois par an nous prenons le temps
de relire les moments forts de lrsquoanneacutee en met-
tant des mots sur ce qui a reacuteussi ou eacutechoueacute ce
qui nous a manqueacute ce qui nous a marqueacute
choqueacute ou qui est resteacute incompris Mettre des
mots agrave distance sur des malentendus (en lien
avec une famille ou un fonctionnement interne)
permet davancer en eacutequipe Nous veillons
aussi agrave reprendre point par point les eacuteleacutements
positifs rappeler les enfants sauveacutes les fa-
milles qui remercient et valoriser les eacutequipes
est essentiel pour maintenir la motivation et
lrsquoinvestissement de chacun
ET LE PSYCHOLOGUE DANS TOUT CcedilA
Face agrave ces enfants gravement malades ou en
fin de vie nous devons apprendre agrave nous
adapter Il nous faut par exemple pour pouvoir
accueillir un enfant sans aucune autonomie
respiratoire dans notre bureau apprendre au
minimum les gestes de reacuteanimation agrave effectuer
en attendant qursquoun soignant prenne la relegraveve
Alors que nous avons appris agrave ne pas toucher
il nous faut comprendre ce que le patient nous
dit non plus agrave travers des mots mais agrave travers
des maux agrave travers son corps une poigneacutee
de main un regard une mimiquehellip nous de-
vons sentir lrsquoexpression non verbale de lrsquoan-
goisse Deacuteceler si le patient a besoin de silence
ou au contraire srsquoil attend nos questions En-
fin il faut quelquefois avec une extrecircme deacuteli-
catesse et une grande attention chercher agrave re-
formuler ce que le patient nous dit avec des
lettres montreacutees sur un tableau un hochement
de tecircte ou simplement un regard
Ecirctre psychologue va souvent de pair avec une
invitation permanente agrave se remettre en ques-
tion Il srsquoagit drsquoaccepter de douter plutocirct que de
chercher des certitudes Pour srsquoadapter agrave la
speacutecificiteacute de chaque situation il nous faudra
surtout ecirctre creacuteatif et oser inventer Dans le
cas contraire notre travail restera sans doute
superficiel car il apparaicirctra comme en deacuteca-
lage par rapport aux situations veacutecues par les
patients et les eacutequipes qui les prennent en
charge
Au niveau institutionnel le travail du psycho-
logue ne porte de fruits qursquoagrave tregraves long terme
Alors ne nous deacutecourageons pas (Le deacutecou-
ragement nrsquoest-il pas notre pire ennemi ) Veil-
lons agrave prendre soin de nous soyons attentifs agrave
nos propres besoins Ne nous barricadons pas
devant la deacutetresse mais au contraire appre-
nons agrave ralentir et agrave ressentir ce qui est toucheacute
en nous Comme leacutequilibriste sur la corde
nous devons essayer davancer en souplesse
pour ne tomber ni dans lindiffeacuterence ni dans la
fusion avec les situations dramatiques rencon-
treacutees
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 63
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
Seacutejour de vacances quelle place pour le psychologue
Ceacuteline Le Bivic Geacuteriatrie Hocircpital Eacutemile Roux
M esure 1 du plan Alzheimer 2008-
2012 deacuteveloppement et diversifica-
tion des structures de reacutepits
Parce qursquoils sont contraints de veiller constam-
ment sur les malades les aidants sont soumis
agrave une pression permanente Il existe des struc-
tures qui leur permettent de souffler en offrant
par ailleurs une prestation theacuterapeutique aux
malades pendant une ou plusieurs demi-
journeacutees
Afin drsquoeacutelargir les missions des accueils de jour
qui ne srsquoadressent qursquoaux personnes malades
ont eacuteteacute deacuteveloppeacutees les plates-formes drsquoac-
compagnement et de reacutepit Il srsquoagit drsquooffrir aux
aidants et aux couples des activiteacutes de soutien
de reacutepit agrave domicile ou en couple et de deacutevelop-
pement de la vie sociale
Il existe des actions de reacutepit agrave domicile de
garde agrave domicile de nuit drsquoactiviteacutes sociales
culturelles pour le couple maladeaidant et de
seacutejours vacances
Jacqueline agrave la fin drsquoun seacutejour vacances mrsquoa
confieacute deux feuilles de cahier manuscrites Jrsquoai
eacutecrit ccedila Vous le lirez si vous voulez
Je me legraveve agrave 7h Prise des meacutedicaments de
Guy Je deacutejeune moment tranquille je fais ma
toilette Je vais ouvrir les volets chez maman Il
est 8h30 Je preacutepare les meacutedicaments et le pe-
tit deacutejeuner de Guy Quelques fois je le fais
manger si je peux Je fais les lits je com-
mence agrave preacuteparer le deacutejeuner Passage du
SSIAD Pendant ce temps je preacutepare une les-
sive pratiquement une tous les jours Apregraves le
passage du SSIAD souvent il a besoin drsquoaller
aux toilettes le deacuteculotter nettoyer les WC le
reculotter ranger la salle de bain et finir ce qui
a eacuteteacute commenceacute (je ne peux rien faire en sui-
vant) Souvent fais de lrsquoadministratif preacuteparer
le courrier aller agrave la poste et au pain Il vient
avec moi il faut lrsquoaider agrave monter dans la voiture
et souvent lrsquoaider agrave descendre Il est 11h il faut
eacutetendre le linge lrsquoaider agrave faire sa gym preacuteparer
et porter le plateau agrave maman Midi Lrsquoheure de
preacuteparer et donner les meacutedicaments Mettre le
couvert couper les aliments lrsquoaider Pour lui il
faut bien 90 min de pose pour deacutejeuner
Apregraves desservir le preacuteparer pour la sieste le
deacuteculotter et reculotter lrsquoaider agrave se coucher
finir de ranger la cuisine lever et plier le linge
Il est environ 14h Petite pause 15h-15h30 la
sieste est finie Sortie dans le jardin toujours
accompagneacute Lrsquoaider agrave srsquohabiller agrave se deacutesha-
biller 16h prise des meacutedicaments et goucircter
Quelquefois passages agrave la sortie de lrsquoeacutecole
des petits enfants et leur papa Aux beaux
jours travail agrave lrsquoexteacuterieur (plus de 2000m2) La
tonte du gazon est faite par mon garccedilon et jrsquoai
agrave peu pregraves 40h par an par la caisse de retraite
compleacutementaire Jrsquoai une aide-meacutenagegravere 3 h
le mardi matin et 1 h le mercredi matin Jrsquoen
profite pour aller faire les courses ou aller chez
le docteur le dentiste ou le coiffeur ou autre
chose Et 3h le jeudi apregraves-midi Lagrave crsquoest mon
repos hebdomadaire et pas toujours Je vais agrave
lrsquoaquagym avec 2 amies mais juste en peacuteriode
scolaire On est loin des 2 jours de congeacutes par
semaine mais jrsquoen demande pas tant Vers 17h
-17h30 petite promenade dans le jardin apregraves
preacuteparation du dicircner 19h prise des meacutedica-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 64
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
ments Le dicircner pour lui il faut compter 90 min
Ensuite desservir Vers 20h30 je vais deacuteshabil-
ler maman Pour lrsquoinstant elle se couche sans
aide mais au deacutebut du printemps jrsquoallais la cou-
cher vers 22h Entre-temps je deacuteshabille Guy
passage aux toilettes prise des meacutedicaments
et apregraves le coucher
Il est 22h Je respire un peu Je fais un brin de
toilette Je prends mon somnifegravere et je me
couche Je mrsquoendors ou je ne mrsquoendors pas Lagrave
on peut pleurer Personne ne le voit Dans la
nuit je me legraveve une ou deux fois quand il a be-
soin de faire son pipi
Et cela 365 jours par an Et je ne me plains
pas Il y a pire Il y a aussi mieux
Jacqueline est comme 35 millions de fran-
ccedilais Elle fait partie des personnes que lrsquoon
nomme aidant familial drsquoun proche Il srsquoagit de
son mari Cela fait 12 ans qursquoil est malade Le
quotidien de Jacqueline est rythmeacute autour de
son eacutepoux et de sa pathologie eacutevolutive
En geacuterontologie le mot aidant est utiliseacute voire
parfois revendiqueacute Un aidant mais qursquoest-ce
que crsquoest Selon lrsquoassurance maladie crsquoest
celui qui apporte seul ou en compleacutement de
lrsquointervention des professionnels lrsquoaide humaine
rendue neacutecessaire par la perte drsquoautonomie de
la personne acircgeacutee ou destineacutee agrave preacutevenir une
perte drsquoautonomie et qui nrsquoest pas salarieacute pour
cette aide
Depuis une quinzaine drsquoanneacutees le veacutecu des
aidants familiaux fait lrsquoobjet de recherches On
sait aujourdrsquohui que 800 000 personnes sont
recenseacutees comme eacutetant en eacutetat de deacutepen-
dance en France crsquoest-agrave-dire qursquoelles ne peu-
vent pas effectuer de maniegravere autonome les
actes de la vie courante Et que cela est forte-
ment correacuteleacute agrave lrsquoavanceacutee en acircge la personne
aideacutee a 76 ans en moyenne
Si le lien familial preacutedomine lrsquoaidant peut aussi
ecirctre un ami ou un voisin Il srsquoagit le plus sou-
vent drsquoune femme acircgeacutee de plus de 50 ans
Bien que deux tiers des aidants srsquooccupent
quotidiennement de la personne aideacutee 60
drsquoentre eux continuent agrave avoir une activiteacute sala-
rieacutee
Lrsquoaide agrave un proche dure en moyenne 7 ans
Dans la relation drsquoaide plusieurs probleacutema-
tiques sont en jeu le deuil du parent conjoint
tel qursquoil eacutetait auparavant le renversement des
rocircles de lrsquoordre des geacuteneacuterations la crainte face
agrave son propre vieillissement les difficulteacutes de
communication avec le proche malade la
crainte de la perte du lien
La relation drsquoaide a ses apports la majoriteacute
des aidants disent se sentir utile et trouver du
plaisir dans cette relation Mais elle a aussi ses
limites et ses risques On sait aujourdrsquohui que
la mortaliteacute des aidants augmenterait de 63
que le risque de deacutepression est multiplieacute par 3
Dans cette aide au quotidien le rythme la reacute-
peacutetition lrsquoeacutevolution de la maladie peuvent ame-
ner agrave des sentiments drsquoisolement de surme-
nage et drsquoeacutepuisement
Si plus de 60 des personnes atteintes de la
maladie drsquoAlzheimer ou apparenteacutees vivent agrave
leur domicile crsquoest gracircce agrave un aidant familial
qui toute la journeacutee est dans le faire Lrsquoaidant
familial contrairement agrave lrsquoaidant professionnel
nrsquoest pas formeacute agrave cet accompagnement il base
sa relation agrave partir drsquoun lien affectif avec la per-
sonne qursquoil aide Il peut ecirctre reacutemuneacutereacute sil a
lrsquoacircge de travailler et qursquoil nrsquoest pas son conjoint
Il nrsquoa pas drsquoheures fixes
On peut donc comprendre le besoin parfois de
se poser un peu
Plutocirct que le mot vacances est apparu reacute-
cemment le mot reacutepit
Des seacutejours de reacutepit pour les aidants
Une expression forte qui vient nommer la souf-
france du proche dans la relation drsquoaide
Agrave croire que la personne dite aideacutee nrsquoa elle
pas besoin de temps de pause et que son quo-
tidien lui suffit parfaitement La femme de
Pierre me dira mon meacutedecin et son neuro-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 65
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
logue mrsquoavaient deacuteconseilleacute de lrsquoemmener ici
En France les vacances sont un droit pour les
salarieacuteshellip
Mais au fait agrave quoi ccedila sert des vacances Eh
bien avant tout agrave couper avec le quotidien An-
dreacute Comte-Sponville eacutevoque les vacances
comme un moment de liberteacute
Srsquoaccorder une pause crsquoest ainsi que nous
avons nommeacute le seacutejour de vacances que je
vais vous preacutesenter
Le seacutejour est proposeacute par une caisse de re-
traite compleacutementaire qui contacte ses adheacute-
rents Le point commun est qursquoil existe entre un
adheacuterent et un de ses proches une relation
drsquoaide au quotidien Le projet a eacuteteacute construit et
penseacute avec une association qui intervient dans
lrsquoaccompagnement de lrsquoavanceacutee en Acircge
Le groupe est composeacute en moyenne de 7
couples la moyenne drsquoacircge des aidants est de
74 ans et celle des aideacutes de 80 ans
Les participants viennent de la France entiegravere
Ils ne se connaissent pas Nous ne les con-
naissons pas
La majoriteacute des aideacutes preacutesentent des pro-
blegravemes cognitifs ou des difficulteacutes motrices
Le lieu est une structure de vacances (type reacute-
sidence hocircteliegravere) adapteacutee aux personnes han-
dicapeacutees
Le seacutejour a eacuteteacute penseacute avec la preacutesence de
deux personnes dite en fil rouge de la se-
maine la coordonnatrice de lrsquoassociation creacutea-
trice du projet et la psychologue Partager le
quotidien du petit deacutejeuner au dicircner de lrsquoac-
cueil jusqursquoau deacutepart
Drsquoautres intervenants (intervenant en Taiuml-Chi
Chuan une socio-estheacuteticienne intervenant en
chant et expression corporelle activiteacute autour
de la terre) rejoignent le groupe en deacutecaleacute afin
de conserver une alternance des pratiques
mais aussi une preacutesence renforceacutee en milieu
de semaine moment ougrave nous pouvons com-
mencer agrave seacuteparer les duos
Lrsquoaspect meacutedicaliseacute parfois neacutecessaire est re-
layeacute par des infirmiegraveres libeacuterales qui intervien-
nent sur le lieu de vacances
Le planning de la semaine est proposeacute avec
des activiteacutes ensemble seacutepareacutees en groupe
individuelles toujours dans la proposition et
non dans la contrainte Le rythme des journeacutees
srsquoadapte tous les jours
Les objectifs de la semaine
Permettre agrave chacun aidant comme aideacute de
srsquoaccorder veacuteritablement une pause en profi-
tant pleinement du site et drsquoun accompagne-
ment qui facilite leur quotidien pendant la se-
maine (absence de tacircches meacutenagegraveres repas
servis au restaurant possibiliteacute drsquoaccompagne-
ment de la personne aideacutee pour quelques
heures proposition drsquoanimations proposition
de temps dlsquoeacutechanges et de paroles)
Favoriser lrsquoacquisition et le partage drsquooutils mecirc-
lant expeacuteriences et connaissances que les per-
sonnes pourront reacuteutiliser une fois de retour au
domicile
Nous ne nommons pas les personnes par leur
fonction aidant ou aideacute mais par leur preacutenom
Chaque duo est composeacute drsquoune personne
ayant un badge vert et lrsquoautre saumon Ainsi
certaines activiteacutes sont proposeacutees agrave tous et
drsquoautres agrave chaque groupe de couleur diffeacuterente
Lrsquoanalyse des questionnaires de satisfaction ou
du bilan oral nous confortent encore dans lrsquoideacutee
que ces objectifs reacutepondent bien agrave ceux des
personnes et sont atteignables dans le cadre
de ces seacutejours
Crsquoest lrsquooccasion de partager une semaine de
vacances tout agrave fait diffeacuterente du quotidien et
des repegraveres de chacun Le groupe se creacutee degraves
les premiegraveres heures de rencontre agrave lrsquoarriveacutee
Tout au long de la semaine chacun eacutevolue
dans sa propre probleacutematique
Les aidants deacutecouvrant drsquoautres pairs eacutechan-
geant avec drsquoautres prenant distance vis agrave vis
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 66
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
de leur veacutecu et deacutecouvrant le comportement de
leur proche avec drsquoautres personnes profes-
sionnels ou non
Les aideacutes qui se sont saisis des possibiliteacutes
offertes de faire autrement deacutecouvrir drsquoautres
vivre des moments de plaisir malgreacute le handi-
cap ou la maladie Eacutechanger avec drsquoautres qui
vivent des situations similaires
Lrsquoeacutevolution du groupe dans lequel une con-
fiance mutuelle srsquoinstalle et permet des interac-
tions et des eacutechanges tregraves riches humaine-
ment Chacun a pu recevoir et apporter agrave
lrsquoautre qursquoil soit aideacute ou aidant
Durant tout le seacutejour tout le monde peut se po-
ser deacutecouvrir lrsquoautre se deacutecouvrir dans des
moments partageacutes individuels ou collectifs
Proposer plein drsquounivers diffeacuterents des compeacute-
tences diffeacuterentes (prof de tai-chi le corps
penseacute le chant le savoir de lrsquoeacutemotion la socio-
estheacuteticienne le mieux avec soi-mecircme)hellip
Et le psychologue dans tout ccedila
Dans ce type de vacances jrsquointerviens en bi-
nocircme avec la responsable du seacutejour du deacutebut
du seacutejour jusqursquoau deacutepart des participants
Je me preacutesente en tant que psychologue Pour
la plupart crsquoest la premiegravere fois qursquoils rencon-
trent quelqursquoun de cette profession Vous allez
mrsquoanalyser me demande Jacques au deacutebut
du seacutejour Finalement vous ecirctes sympas les
psys Vous croyez qursquoil en y en pregraves de chez
moi me demandera-t-il en fin de seacutejour
Je suis tout le temps avec eux du soir au ma-
tin Pas tregraves acadeacutemique comme cadre de tra-
vail et pourtant comme souvent la clinique
vient nous proposer de penser autrement
Le rocircle essentiel du psychologue est que du
deacutebut agrave la fin du seacutejour il propose ce que je
nomme des bras psychiques Les 4 bras les
bras du cadre formel et les bras psychiques Fil
rouge tout le long du seacutejour Crsquoest par ce cadre
-lagrave que chacun va pouvoir se deacutetendre libeacuterer
la parole Lacirccher le faire du quotidien pour
tendre vers le vivre le ressentir et le partager
durant le seacutejour
Pour le psychologue partager le quotidien (du
petit deacutejeuner au dicircner) crsquoest ne pas ecirctre tout
le temps dans la distance mais ecirctre dans la
juste distance Alterner des moments formels
proposition de groupes de parole durant le seacute-
jour pour les personnes en situations drsquoaider et
celles qui reccediloivent de lrsquoaide) et de temps infor-
mels Crsquoest ecirctre disponible Crsquoest garantir lrsquoexis-
tence du maintien de la vie psychique et recon-
naicirctre la personne en tant que sujet pensant
ressentant deacutesirant
Tisser des liens Lacirccher le bras de son malade
changer de bras Faire confiance agrave lrsquoautre et
deacutecouvrir ainsi que lrsquoon peut soutenir lrsquoautre
dans ce qursquoil est capable de donner Faire con-
fiance est possible si le cadre est suffisamment
contenant pour se lrsquoautoriser
Deacutecloisonner les rocircles et les fonctions de cha-
cun Les cloisons tombent Le fil qui nous tient
et nous unit dans le lien agrave lrsquoautre reste Prendre
soin de soi
Exemple du massage des mains avec la socio-
estheacuteticienne En groupe de parole eacutemerge
alors que les mains ne servent pas qursquoagrave se te-
nir ou tenir lrsquoautre les mains se croisent dans
le relationnel et la communication Ne plus ecirctre
dans le soigner la maladie mais dans le pren-
dre soin de ce qui nous lie agrave lrsquoautre
Accompagner lrsquoaidant agrave cheminer vers le si
moi je vais mieux alors lui ira peut ecirctre mieux
au lieu de si il va bien je vais bien
Durant le seacutejour je prends des notes tous les
soirs sur chaque participant Notes drsquoimpres-
sion de ressenti et de questions qui me per-
mettent de comprendre lrsquoeacutevolution psycho-
dynamique de chacun et de chaque duo
Deux fois en moyenne durant le seacutejour jrsquoap-
pelle une collegravegue afin de pouvoir parler pen-
ser et eacutelaborer le veacutecu partageacute
Je propose un moment de reacuteflexion sur la rela-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 67
Uniteacute dans la diversiteacute des pratiques transversaliteacute de nos cliniques
tion drsquoaide avec les aidants Je propose un
temps de parole et drsquoeacutechange sur le veacutecu de
lrsquoaideacute
Lors du bilan le rocircle de la psychologue est tou-
jours valoriseacute Non confondu avec les temps
drsquoanimation crsquoest un espace drsquoeacutechange de soi
et de lrsquointime qui est possible parce qursquoun lien
de confiance dans le quotidien srsquoest creacuteeacute Nous
partageons nos savoirs ceux de ma connais-
sance avec ceux de leur expeacuterience Jrsquoai deacute-
couvert ce que crsquoest une psy Ce nest pas si
grave ccedila srsquoavegravere mecircme plutocirct utile
Ces seacutejours sont lrsquooccasion aussi pour les pro-
fessionnels intervenants drsquoenrichir leurs con-
naissances et leurs pratiques vis-agrave-vis de ce
qursquoest la relation aidant-aideacute en partageant leur
quotidien pendant quelques jours
Comprendre le lien aidantaideacute dans ce qui se
joue au quotidien au plus intime au plus pro-
fond
Le seacutejour ne dure qursquoune semaine Cette se-
maine est en dehors du quotidien de chacun
Elle montre que de vivre eacutechanger rire parta-
ger du plaisir avec drsquoautres est possible et es-
sentiel Elle permet ainsi aux couples ou duos
de se ressourcer et de repeacuterer les plaisirs qui
fondent et nourrissent leur relation partageacutee
Merci de votre attention
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 68
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Modeacuterateur Martine Shindo Hocircpital Saint Louis
gt Laccompagnement psychologique par teacuteleacute-
phone dans les maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere Page 69
gt Parents face agrave linterruption meacutedicale de
grossesse des mots en images
Natascia Serbandini Hocircpital Jean Verdier Page 78
gt Psychologue clinicien aupregraves du personnel
missions enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
Page 82
Cliniques particuliegraveres
Pratiques innovantes
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 69
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Laccompagnement psychologique par teacuteleacutephone dans les
maladies de Creutzfeldt-Jakob
Marie-Lise Babonneau Hocircpital Pitieacute Salpecirctriegravere
L a Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des
Maladies de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) a
eacuteteacute creacuteeacutee en 2001 par le Ministegravere des
Solidariteacutes de la Santeacute et de la Famille A la
disposition du grand public et des profession-
nels de terrain elle a pour mission lrsquoaide au
diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale so-
ciale et psychologique des patients et de leur
famille
La Cellule est nicheacutee au cœur de lrsquohocircpital de la
Pitieacute-Salpecirctriegravere dans lrsquoune des trois loges au-
trefois destineacutees aux alieacuteneacutes Elle a la particu-
lariteacute de ne pas accueillir physiquement le pu-
blic auquel elle srsquoadresse lrsquoaide qursquoelle pro-
pose srsquoeffectue essentiellement par teacuteleacutephone
En juin 2003 jrsquointegravegre pour un tiers-temps de
psychologue lrsquoeacutequipe deacutejagrave composeacutee drsquoun meacute-
decin coordinateur drsquoun meacutedecin attacheacute
drsquoune assistante sociale drsquoune assistante de
recherche clinique et drsquoune secreacutetaire
A cette eacutepoque je treacutebuche agrave lrsquoenvi sur lrsquoimpro-
nonccedilable Creutzfeldt-Jakob et examine drsquoun
œil dubitatif ma fiche de poste comment assu-
rer un soutien psychologique exclusivement
teacuteleacutephonique Eacutetait-ce reacutealisable efficace ad-
missible
PREacuteAMBULE
Les Maladies de Creutzfeldt-Jakob sont con-
nues de longue date les premiers cas ont eacuteteacute
deacutecrits par Creutzfeldt et Jakob dans les an-
neacutees 1920 Ce sont des maladies neurodeacutegeacute-
neacuteratives rares (qui se traduisent par une deacute-
mence et une grabatisation) 15 cas par mil-
lion drsquohabitants et par an dans tous les pays ougrave
existe une surveillance eacutepideacutemiologique En
France elles concernent une centaine de cas
par an
Principalement connues du grand public sous
le nom de maladie de la vache folle il existe
pourtant trois formes diffeacuterentes de MCJ avec
pour chacune drsquoelles ses speacutecificiteacutes On les
classe en fonction de leur mode de transmis-
sion la forme sporadique (aleacuteatoire) les
formes heacutereacuteditaires (MCJ geacuteneacutetiques syn-
drome de Gertsmann-Straussler-Scheinker
Insomnie Fatale Familiale) et les formes ac-
quises (formes iatrogegravenes des hormones de
croissance variante de la MCJ)
Le poste de psychologue avait eacuteteacute creacuteeacute pour se
consacrer principalement au travail drsquoeacutecoute
des personnes agrave risque de deacutevelopper une
MCJ suite agrave un traitement par hormones de
croissance contamineacutees Puis il srsquoest eacutetendu agrave
lrsquoeacutecoute de toute personne concerneacutee directe-
ment ou non par une MCJ quelle qursquoen soit la
forme
DE LrsquoENTRETIEN PONCTUEL AU SUIVI
La nature teacuteleacutephonique des entretiens psycho-
logiques est le fait drsquoune indeacutepassable reacutealiteacute
la dimension nationale du champ drsquointervention
de la Cellule exclut lrsquoeacuteventualiteacute drsquoentretiens en
face agrave face Mais si en 2011 les suivis psycho-
logiques par teacuteleacutephone se deacuteveloppent agrave
grands pas en 2003 rien nrsquoeacutetait moins eacutevident
que cette forme drsquoaccompagnement lagrave
Agrave cette eacutepoque drsquoailleurs la prise en charge
psychologique au sein de la Cellule se limitait agrave
la proposition drsquoun entretien teacuteleacutephonique pour
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 70
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
faire le point agrave des personnes qui avaient ap-
peleacute pour une toute autre demande principale-
ment drsquoordre meacutedical ou social Agrave lrsquooccasion de
ces demandes certains appelants manifes-
taient des signes de souffrance lieacutee agrave leur si-
tuation peur de la maladie du risque de la deacute-
velopper anxieacuteteacute suite agrave lrsquoannonce de la mala-
die drsquoun proche imminence de son deacutecegraves etc
Les membres de lrsquoeacutequipe les informaient alors
de la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par la psycho-
logue de la Cellule pour parler des difficulteacutes
qursquoils traversaient en ces moments critiques
Ces entretiens teacuteleacutephoniques ponctuels (de 45
minutes) eacutetaient destineacutes agrave contenir les an-
goisses et la deacutetresse des appelants Puis au
besoin jrsquoorganisais un suivi psychologique de
proximiteacute (psychologues ou psychiatres libeacute-
raux Centres Meacutedico-Psychologiques
(CMP)
Ainsi la proceacutedure entretien ponctuel - reacuteorien-
tation nous semblait reacutepondre au besoin ponc-
tuel drsquoeacutetayage des appelants et correspondre
aux exigences de fonctionnement en plate-
forme nationale de la Cellule Circonscrite pla-
nifieacutee et probablement eacuteconomique sur le plan
psychique cette proceacutedure nous rassurait-elle
aussi Quand bien mecircme elle a plieacute sous le
poids de la reacutealiteacute et a consideacuterablement eacutevo-
lueacute depuis 2003
En effet alors que le nombre annuel de ma-
lades concerneacutes par les MCJ demeure stable
le volume annuel drsquoentretiens psychologiques
lui est passeacute de 40 agrave 260 en huit ans Ainsi
110 personnes ont eacuteteacute suivies ou ont beacuteneacuteficieacute
de seacutequences de soutien de plus de 3 entre-
tiens teacuteleacutephoniques Cela repreacutesente 84 des
personnes ayant eu un premier contact avec le
psychologue Et tandis que la proceacutedure preacute-
voyait un ou deux entretiens la dureacutee des sui-
vis est en moyenne de neuf mois (de trois se-
maines agrave trois ans) drsquoune rythmiciteacute allant drsquoun
entretien hebdomadaire agrave un entretien men-
suel en fonction des besoins Comment expli-
quer cette eacutevolution
Faut-il incriminer les traditionnels obstacles re-
latifs agrave la prise en charge psychologique de
proximiteacute rareteacute des psychologues dans cer-
taines reacutegions surcoucirct financier drsquoune theacuterapie
CMP engorgeacuteshellip Peut-ecirctre mais ils ne suf-
fisent pas agrave expliquer lrsquoaugmentation remar-
quable du nombre drsquoentretiens psychologiques
ni lrsquoallongement de la dureacutee des suivis
Aujourdrsquohui nous pouvons avancer drsquoautres
arguments pour expliquer cette eacutevolution ce
sont les particulariteacutes de la maladie tout autant
que celles lieacutees agrave la teacuteleacutephonie qui ont engen-
dreacute ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique
LE CADRE
Un constat les orientations pourtant
travailleacutees (contact teacuteleacutephonique avec le psy-
chologue de proximiteacute informations deacutetailleacutees
sur les speacutecificiteacutes de la maladie et leur impact
sur lrsquoentourage) nrsquoont qursquoexceptionnellement
abouti les patients demandaient agrave reprendre
contact avec la psychologue de la Cellule Par-
tant de ce constat le dispositif drsquoaide psycholo-
gique proposeacute par le psychologue aux per-
sonnes qui appelaient a rapidement eacutevolueacute
Les quelques hypothegraveses concernant la difficul-
teacute du recours agrave la proximiteacute seront abordeacutees
tout au long de cet article
Agrave lrsquoheure actuelle quelle que soit la forme de
MCJ lrsquoappelant contacte la Cellule pour une
demande drsquoaide principalement drsquoordre meacutedi-
cal Les deux meacutedecins nrsquoeacutetant pas preacutesents agrave
la Cellule en permanence crsquoest la secreacutetaire
qui recueille les attentes Elle preacutesente le fonc-
tionnement global de la Cellule et eacutevoque sys-
teacutematiquement la possibiliteacute drsquoecirctre contacteacute par
la psychologue Lorsqursquoelle ressent particuliegrave-
rement intenseacutement la deacutetresse de lrsquoappelant
elle insiste sur lrsquoimportance drsquoun entretien avec
la psychologue qui connaicirct tregraves bien la mala-
die un argument de poids pour les personnes
deacutesempareacutees qui heacutesitent pourtant agrave demander
de lrsquoaide
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 71
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Rares sont ceux qui demandent spontaneacutement
un entretien psychologique Mais rares sont
ceux qui le refusent lorsqursquoil leur est proposeacute
Cette invitation agrave ecirctre entendu loin de court-
circuiter la deacutelicate question de la demande
theacuterapeutique nous semble plutocirct lui permettre
drsquoadvenir Agrave ce titre nul doute que le deacutevelop-
pement du nombre de suivis psychologiques
reacutealiseacutes agrave la Cellule est en rapport direct avec
les qualiteacutes drsquoaccueil et lrsquoacuiteacute intuitive de sa
secreacutetaire
Ainsi cette derniegravere prend note des disponibili-
teacutes horaires de lrsquoappelant et apregraves avoir re-
cueilli lrsquoaccord preacutealable de ce dernier me les
transmet au plus vite Mon premier appel au
cours duquel nous eacutevoquons la situation de
crise a souvent lieu dans les 48 heures Cette
reacuteactiviteacute de prise de contact est un eacuteleacutement
deacuteterminant dans lrsquoeacutetablissement drsquoun lien de
confiance la premiegravere pierre drsquoun espace con-
tenant
Nous ne reacutealisons pas ou peu drsquoentretiens en
urgence la Cellule ne srsquoapparente pas agrave une
permanence drsquoeacutecoute 24h24 Drsquoailleurs la
simple date de rendez-vous sur mon agenda a
suffit agrave me calmer (hellip) Jrsquoeacutetais compleacutetement
bloqueacutee paniqueacutee et je me suis remise agrave pen-
ser et agrave geacuterer le quotidien que je ne geacuterais
plus
Ce premier entretien a une tonaliteacute toute parti-
culiegravere Agrave lrsquoinverse peut-ecirctre drsquoun premier ren-
dez-vous en face agrave face lrsquoentretien teacuteleacutepho-
nique semble provoquer un relacircchement des
meacutecanismes de deacutefenses et lrsquoeacutemergence des
processus primaires affolement pleurs pen-
seacutees parfois deacutesorganiseacutees coq agrave lrsquoacircne Lrsquoap-
pelant se deacuteverse deacuteballe tout en vrac Un
relacircchement induit drsquoabord par lrsquoabsence
drsquoinformations visuelles cette sorte de veacutecu
drsquoanonymat qui autorise la leveacutee de la cen-
sure Vous ne me voyez pas alors je peux
tout dire sans conseacutequences Pourtant nom
preacutenom situation familiale et localisation geacuteo-
graphique pourraient objectivement freiner le
veacutecu drsquoanonymat Il nrsquoen est rien Ce premier
entretien ndash et les quelques suivants - souli-
gnent ainsi la primauteacute du voir sur le savoir de
lrsquoautre
Un relacircchement doublement favoriseacute par le fait
que lrsquoappelant demeure dans un espace qui lui
est propre familier choisi Je suis dans ma
chambre jrsquoai fermeacute la porte Je me suis ins-
talleacutee dans ma voiture pour notre rendez-vous
ici je suis tranquille et en seacutecuriteacute
Notons que le psychologue nrsquoeacutechappe pas agrave
cet effet de relacircchement calfeutreacute qursquoil est
dans son espace soustrait au poids du regard
de lrsquoautre Un relacircchement du corps qui favo-
rise le flottement neacutecessaire agrave son travail
drsquoeacutecoute des processus inconscients agrave lrsquoœuvre
chez lrsquoappelant
Dans la tregraves grande majoriteacute des cas le pre-
mier appel donne lieu agrave un second rendez-vous
teacuteleacutephonique dont nous convenons ensemble
des termes (date et heure) Le choix de la du-
reacutee des entretiens (toujours de 45 minutes) deacute-
coule certainement de notre pratique de lrsquoentre-
tien en face-agrave-face mais il srsquoest aveacutereacute tout agrave fait
pertinent dans la pratique de lrsquoentretien teacuteleacute-
phonique puisque trois quarts drsquoheure laissent
le temps agrave la personne drsquoeacutelaborer ses ressen-
tis Cette dureacutee nrsquoest pas drsquoembleacutee annonceacutee
mais plutocirct suggeacutereacutee Nous allons en rester lagrave
pour aujourdrsquohui parce qursquoil est lrsquoheurehellip nous
nous retrouvons donc lehellip agravehellip conclut systeacute-
matiquement nos entretiens
Crsquoest freacutequemment au deacutecours du troisiegraveme
entretien que les questions se posent sur la
poursuite et les modaliteacutes de la prise en
charge Vous consultez ougrave Je vous dois
combien Jrsquoai droit agrave combien drsquoentre-
tiens Agrave ces questions la prise en charge
exclusivement teacuteleacutephonique (aucun deacuteplace-
ment) la gratuiteacute (la Cellule prend en charge
tous les entretiens) et la possibiliteacute drsquoecirctre suivi
tant que le besoin srsquoen fait sentir srsquoapparente agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 72
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
un apaisant holding winicottien Dans ma si-
tuation crsquoest incroyable drsquoavoir le droit de se
laisser porterhellip
Les particulariteacutes du dispositif de suivi teacuteleacutepho-
nique semblent ainsi reacutepondre aux exigences
de la reacutealiteacute des appelants La premiegravere drsquoentre
-elles lrsquoabsence de deacuteplacement et la grande
souplesse drsquoorganisation qui en deacutecoule allegravege
consideacuterablement leur quotidien phagocyteacute par
la maladie Une theacuterapie en cabinet aurait eacuteteacute
inconciliable avec notre reacutealiteacutehellip tout autant
qursquoinfiltreacute de sentiments de culpabiliteacute
Comment prendre le temps de me plaindre
alors qursquoelle est en train de mourirhellip Je sais
que crsquoest important de parler mais je nrsquoaurais
pas pris le temps de consulter pour moi tandis
que ce temps est si preacutecieuxhellip je veux le pas-
ser aupregraves drsquoellehellip ccedila me soigne de ne pas
perdre une minute Ainsi pourtant installeacutes
chez eux ils peuvent srsquoabsenter sans culpabili-
teacute excessive Je ne suis pas loin de lui mais je
suis en consultation juste pour moihellip Je suis
seule avec lui
La seconde particulariteacute du suivi psychologique
par teacuteleacutephone compareacute agrave un dispositif theacutera-
peutique classique reacuteside dans le fait que crsquoest
le psychologue qui appelle systeacutematiquement
le patient Au moment ougrave lrsquoeacutetayage social fami-
lial et parfois professionnel se fissure et ougrave la
difficulteacute drsquoappeler agrave lrsquoaide se fait sentir cette
deacutemarche inverseacutee nrsquoest pas deacutenueacutee drsquoeffet
theacuterapeutique Crsquoest toujours nous qui de-
mandons partout de lrsquoaidehellip et lagrave quel repos
que ce soit vous qui veniez jusqursquoagrave moihellip Je
nrsquoaurais pas eu la force de faire une deacutemarche
de plushellip ccedila mrsquoaide agrave continuerhellip
Enfin ajoutons que dans ce temps extra-
ordinaire ougrave tout leur coucircte ougrave crsquoest nous qui
donnons tout de nous tout notre temps toute
notre eacutenergiehellip la gratuiteacute de la prise en
charge est un eacuteleacutement important pour les per-
sonnes qui appellent Cette gratuiteacute de soins
repreacutesentative des modaliteacutes de prises en
charge psychologiques agrave lrsquohocircpital contribue agrave
restaurer leur sentiment drsquoecirctre consideacutereacutees et
reconnues dans leur souffrance On srsquooccupe
aussi de moi
Neacuteanmoins certains appelants qui avaient en-
visageacute de consulter en libeacuteral ainsi precircts agrave de-
mander de lrsquoaide se deacuteplacer et payer leur
seacuteance srsquoeacutetaient vus confronteacutes agrave un autre
obstacle somme-toute infranchissable le ca-
ractegravere indicible du veacutecu des MCJ Comment
parler agrave quelqursquoun qui nrsquoa jamais vu cette mala-
die monstrueuse (hellip) Il faut la voir pour sa-
voirhellip Ici (agrave la Cellule) je suis en seacutecuriteacute vous
savez de quoi je parle sans que jrsquoen parle vrai-
ment (hellip) vous avez les mecircmes images que
moi dans la tecircte Pour ces appelants qui cher-
chent une communauteacute drsquoexpeacuterience le psy-
chologue se doit drsquoecirctre un sujet dont le savoir
nrsquoest pas que supposeacute
SUIVI POUR QUI SUIVI POUR QUOI
Nous distinguons trois cateacutegories drsquoappelants
les personnes malades crsquoest agrave dire symptoma-
tiques leur entourage (conjoints enfants pa-
rents fregraveres et sœurs) et les personnes agrave
risque de deacutevelopper la maladie (drsquoorigine geacute-
neacutetique ou iatrogegravene) Les appels des profes-
sionnels (assez rares) ne seront pas traiteacutes
dans cet article
En huit ans seulement trois personnes ma-
lades ont eacuteteacute en contact avec le psychologue
par teacuteleacutephone et nrsquoont beacuteneacuteficieacute que de deux
entretiens en moyenne En effet dans la majo-
riteacute des cas la maladie est suspecteacutee tardive-
ment apregraves une longue peacuteriode drsquoerrance meacute-
dicale Si bien que le patient deacutejagrave tregraves sympto-
matique est rarement en capaciteacute de parler
suffisamment distinctement (dysarthrie) pour
beacuteneacuteficier drsquoun entretien teacuteleacutephonique Drsquoautant
que les troubles neuropsychologiques et psy-
chiatriques associeacutes agrave une freacutequente anoso-
gnosie et une eacutevolution preacutecipiteacutee de la mala-
die rendent complexes la mise en place drsquoun
suivi
Monsieur K prend contact avec la Cellule ef-
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Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
frayeacute par la deacutegradation de son eacutetat il tremble
tombe et perd la meacutemoire Il craint drsquoecirctre atteint
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob dont il se
sait agrave risque suite agrave un traitement par hor-
mones de croissance contamineacutees Je nrsquoose
pas en parler on va me regarder bizarrement
et srsquoinquieacuteter peut-ecirctre pour rien Mais lrsquoentre-
tien est difficile agrave mener au regard des troubles
cognitifs et dysarthriques de Monsieur K Nous
convenons neacuteanmoins drsquoun rendez-vous teacuteleacute-
phonique la semaine suivante Le jour-dit je
lrsquoappelle agrave son domicile Il ne se souvient ni de
moi ni de la raison de mon appel Il comprend
agrave peine les mots que je prononce Il raccroche
Crsquoest donc principalement agrave lrsquoentourage du ma-
lade que srsquoadresse le soutien psychologique
par teacuteleacutephone un entourage deacutemuni devant
cette maladie que personne ne connaicirct qui
effraie tout le monde et qui laisse chacun en
proie agrave un profond sentiment drsquoisolement Freacute-
quemment rencontreacute au deacutecours drsquoautres pa-
thologies neurodeacutegeacuteneacuteratives le sentiment
drsquoisolement semble pourtant exacerbeacute par les
speacutecificiteacutes de cette maladie meacuteconnue que
les meacutedias ont tocirct fait drsquoassimiler agrave une forme
de peste contagieuse foudroyante
monstrueuse Des qualificatifs qui srsquoillustrent
parfois crucircment dans la reacutealiteacute par un compor-
tement exageacutereacutement eacutevitant du corps meacutedical
Ils portent des masques des gants et entrent
prudemment dans la chambre Que dire en-
core de lrsquoamalgame de toutes les formes de
MCJ avec la plus meacutediatiseacutee drsquoentre-elles -la
vache folle - si ce nrsquoest qursquoil en ajoute au senti-
ment drsquoeacutetrangeteacute qursquoelles provoquent deacutejagrave
Ce nrsquoest pas un animal crsquoest un ecirctre hu-
main Mais ce nrsquoest pas tant la maladie qui
est contagieuse que lrsquoidentification menaccedilante
qursquoelle propose lrsquoidentification agrave lrsquoEcirctre animal
archaiumlque et agrave lrsquoEcirctre deacutement qui nrsquoest plus lui-
mecircme agrave la fois posseacutedeacute et deacuteposseacutedeacute de
son humaniteacute Les MCJ quelle qursquoen soit la
forme figureraient-elles la barbarie au sens
eacutetranger et sauvage du terme
Les familles sont comme prises au piegravege de
ces repreacutesentations collectives dont la vio-
lence inouiumle (jamais entendue) semblent les
expulser aux confins de la communauteacute hu-
maine Quand on a dit ce qursquoil avait tout le
monde a disparuhellip On a eu beau expliquer
qursquoil nrsquoy avait pas de risque de transmission
les gens sont terrifieacutes et prennent leur distance
Il nrsquoy a plus personne agrave qui parler Mais cette
expulsion nrsquoest pas toujours le fait du monde
exteacuterieur Lrsquoentourage peut se retirer spontaneacute-
ment du monde pour se soustraire au regard
que ce dernier pourrait porter sur lui Je ne
voulais pas qursquoon nous regarde comme des
becircteshellip alors jrsquoai disparu de la circulation
Dans ce contexte de mise en quarantaine dic-
teacutee ou spontaneacutee la seule ideacutee de lrsquoexistence
de la Cellule fait fonction de terre drsquoasile de
support identificatoire Un support identifica-
toire renarcissisant Ici je peux reprendre
forme humainehellip il y a quelqursquoun au bout du fil
Quelqursquounhellip et je me sens quelqursquoun en mi-
roir Parce qursquoavec tout ce qui nous arrive je
me sens tantocirct comme un chien galeux tantocirct
trimbaleacute comme un objethellip et de par son nu-
meacutero drsquoappel unique doubleacute drsquoune prise en
charge globale un support identificatoire struc-
turant Jrsquoai lrsquoimpression qursquoelle part en mor-
ceauxhellip petit bout par petit bouthellip lrsquoeacutequilibre la
tecircte la marche la vision la parolehellip sa vie
part en lambeauxhellip et moi je nrsquoarrive plus agrave
me rassemblerhellip Mais il y a tout le monde
(meacutedecins assistante sociale psychologue)
ici agrave la Cellulehellip ccedila me rassure de savoir que
vous parlez tous la mecircme langue que vous
faites corps
Outre lrsquoentourage des malades des personnes
dites agrave risque font appel agrave la Cellule des per-
sonnes agrave risque de MCJ suite agrave un traitement
par hormones de croissance contamineacutees et
des personnes agrave risque de MCJ drsquoorigine geacute-
neacutetique Dans les deux cas le veacutecu subjectif de
risque prend en otage les perspectives drsquoave-
nir Parce qursquoil annonce en mecircme temps le pire
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 74
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et la possibiliteacute drsquoy eacutechapper parce qursquoil
nrsquoindique ni la victime ni lrsquoheure de la catas-
trophe le risque peut donner agrave cette derniegravere
un caractegravere omnipreacutesent Quand je vais
bien je me prends agrave espeacuterer que je ne serai
jamais malade que tout ccedila nrsquoeacutetait qursquoun cau-
chemar Mais quand je me sens mal le risque
drsquoecirctre malade se transforme en fataliteacute Je me
sens condamneacutee (hellip) Finalement que ce soit
par lrsquoespoir ou la fataliteacute crsquoest un peu lagrave tout le
temps un peu partout en moi
Et si des moments drsquoaccalmie subsistent crsquoest
souvent un eacuteleacutement de la reacutealiteacute preacutesent ou agrave
venir qui vient attiser les angoisses drsquoecirctre ma-
lade
Concernant le drame des hormones de crois-
sance contamineacutees ce sont principalement les
diffeacuterentes eacutetapes du procegraves (ouverture en
2008 4 mois drsquoaudience rendu de justice en
2009 et mise en appel en 2010) qui ont deacuteclen-
cheacute une recrudescence des appels des per-
sonnes agrave risque Crsquoest cette histoire de pro-
cegraves (hellip) je lis tous les articles dans la presse
(hellip) Depuis je vais reacuteguliegraverement sur le site de
lrsquoInvs pour veacuterifier le nombre de deacutecegraves leurs
acircgeshellip Je me dis que moi crsquoest bon je suis
plus vieille ou jrsquoai reccedilu les hormones plus tard
(hellip) Je comprends ce procegraves mais je le mau-
dis Je me sentais bien ces derniers temps
Jrsquoavais construit mon petit igloo avec mon mari
dedans Et lagrave je souhaite hurler qursquoon mrsquoa cas-
seacute mon igloo Durant tout le deacuteroulement du
procegraves certains de ces jeunes agrave risque ont
eacuteteacute deacutebordeacutes par un puissant sentiment
drsquoambivalence entre le deacutesir et la peur qursquoon
leur reconnaisse le preacutejudice subi crsquoest agrave dire
le coucirct psychique de se savoir contamineacute Re-
connaissance qui aurait signeacute la reacutealiteacute du
risque qursquoils encouraient Si le procegraves vient agrave
statuer que je suis victime je ne pourrai plus
me dire que crsquoest juste un cauchemar et que je
vais me reacuteveiller (hellip) et puis jrsquoai peur que ccedila se
traduise par le deacuteclenchement de la maladie
Paradoxe de cette victimation crsquoest la meacutede-
cine qui a rendu malade Dire que crsquoeacutetait
pour me soignerhellip quelle ironiehellip Je nrsquoai pas
de symptocircme je sais mais je suis deacutejagrave morte
De peur Et en ces temps juridiques agiteacutes la
Cellule et ses meacutedecins tout particuliegraverement
se sont vus parfois pris dans les mecircmes filets
ambivalents On a fait confiance aveugleacutement
agrave la meacutedecine Comment pouvions-nous imagi-
ner que le mal viendrait de lagrave ougrave on lrsquoattendait
le moins A qui faire confiance maintenant
Notamment encourageacutes par les associations
avec lesquelles la Cellule entretient des liens
eacutetroits certains parents de jeunes agrave risque
ont fait appel agrave nous Notre vie est faite de
hauts et de bas Lorsqursquoon apprend qursquoun
jeune est mort toute lrsquohistoire remonte et puis
le temps passe et on fait comme si ccedila nrsquoexistait
plus Mais ces oscillations crsquoest de la tor-
ture Comment ne pas eacutevoquer aussi le veacutecu
dramatique de ces autres parents qui ont perdu
leur enfant parfois il y a longtemps Des pa-
rents encore submergeacutes par la peine et rongeacutes
par un fort sentiment de culpabiliteacute drsquoavoir
donneacute le feu vert aux meacutedecins pour gagner
quelques centimegravetreshellip drsquoavoir moi-mecircme
fait les injections drsquohormones Un sentiment de
culpabiliteacute exacerbeacute par la relaxe geacuteneacuterale des
preacutevenus apregraves 20 ans de proceacutedure Il y a
des victimes il faut des coupables (hellip) Crsquoest
comme si la Justice nous avait deacutesigneacutes cou-
pables agrave leur place
Dans ce contexte ougrave preacutedominent les senti-
ments de culpabiliteacute et parfois de honte le teacuteleacute-
phone est un outil de grand secours puisqursquoil
permet aux personnes de se soustraire au re-
gard de lrsquoAutre Cet Autre objet drsquoimplacables
projections accusatrices Je nrsquoaurais pas pu
consulter un psychologue en face-agrave face Jrsquoau-
rais eu trop peur de lire sur son visage le deacute-
goucirct le rejet le jugementhellip lagrave je peux dire ce
que je veux je ne vois pas votre reacuteactionhellip
crsquoest moins dur Mais pourquoi le psychologue
de la Cellule se precircte-il si rarement aux projec-
tions de nature perseacutecutrice Reacutepond-il agrave la
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 75
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
neacutecessiteacute de sauvegarder un bon objet Un
bon objet inteacuteriorisable susceptible de restaurer
a minima le narcissisme parental
Concernant les formes heacutereacuteditaires de MCJ
dans la majoriteacute des cas lorsque le diagnostic
tombe le malade est deacutejagrave au stade terminal de
la maladie Les membres agrave risque de la fa-
mille se retrouvent donc confronteacutes agrave deux
drames simultaneacutes la perte imminente de leur
proche et lrsquohorreur de leur possible devenir
Voilagrave en une fraction de seconde le monde
bascule Je regardais ma megravere mourir jrsquoima-
ginais que jrsquoallais finir comme elle et je pensais
agrave mes enfants qui auraient peut-ecirctre le mecircme
destin Puis viennent les angoisses pour les
fregraveres et sœurs leurs enfants crsquoest lrsquoheacuteca-
tombehellip
Comment en parler aux enfants Peut-on
continuer agrave vivre normalement en sachant que
tout peut basculer en quelques mois Je
nrsquoarrecircte pas de pleurer est-ce le deacutebut de la
maladie Faut-il faire le test geacuteneacutetique
Autant de questions difficiles agrave adresser agrave lrsquoen-
tourage Jrsquoai appeleacute la Cellule parce que je ne
veux pas affoler mon mari mes enfantshellip (hellip)
et je ne suis pas encore precircte agrave me retrouver
en consultation de geacuteneacutetique (hellip) ce serait trop
reacuteel (hellip) pour lrsquoinstant quand je raccroche je
peux faire comme si ccedila nrsquoexistait pas
NATURE DE LrsquoESPACE TEacuteLEacutePHONIQUE
Mais de quelle nature est cet espace teacuteleacutepho-
nique pour autoriser le patient agrave maintenir en
dehors de sa reacutealiteacute le contenu qursquoil y deacutepose
Lrsquoabsence de corps en preacutesence et lrsquoimmateacuteria-
liteacute de la voix comme unique canal de commu-
nication seraient-elles la clef du choix des pa-
tients drsquoun suivi teacuteleacutephonique plutocirct qursquoen cabi-
net Le teacuteleacutephone permettrait-il au patient de
srsquoaffranchir ponctuellement drsquoun trop de reacuteel et
de se proteacuteger de lrsquoeffraction qursquoopegravere la crudi-
teacute de ses preacuteoccupations mateacuterielles orga-
niques mais aussi existentielles Serait-elle la
figuration de ce temps intra-uteacuterin ougrave tout de la
reacutealiteacute sauf la megravere eacutetait en dehors ce temps
ougrave le lien intime avec elle nrsquoeacutetait que sons Je
vous parle et vous me parlez aussi dans le
creux de lrsquooreillehellip Vous ecirctes un peu mon es-
pace proteacutegeacute mon espace secret Ce temps
reacutevolu ougrave le lieu de rencontre (le ventre mater-
nel) entre la megravere et lrsquoenfant eacutetait lrsquoobjet de tous
les fantasmes Que dire drsquoautre en effet du lieu
de rencontre entre le psychologue et le pa-
tient qursquoil nrsquoest que scegravene psychique pur es-
pace temporel un ensemble chacun chez soi
Un espace qui srsquooffrirait donc plus encore et
plus subitement agrave la reacutegression du patient que
le divan de lrsquoanalyste ou lrsquoentretien agrave domicile
Parce qursquoelle les prive drsquoinformations agrave carac-
tegravere visuel (regards mimiques postures ges-
tuelles) et puisque rien ne fait obstacle ni chez
le patient ni chez le psychologue aux diffeacute-
rentes repreacutesentations fantasmatiques que
chacun a de lrsquoautre la teacuteleacutephonie se precircte agrave
une activiteacute imaginaire deacutebrideacutee Seules des
informations agrave caractegravere sonore telles que le
timbre de la voix les rythmes tons silences
intonations et bruits ambiants (il allume une ci-
garette elle ferme une porte la voix reacutesonne
comme dans un espace vide) donnent force et
forme agrave lrsquoespace theacuterapeutique Elles seules et
dans une immeacutediateteacute remarquable suffisent agrave
faire surgir le visage le corps et le lieu de
lrsquoautre Des lapsus agrave caractegravere visuels srsquoim-
miscent drsquoailleurs dans le discours des pa-
tients et du psychologue Je vois drsquoici la tecircte
que vous faites Nos rencontres teacuteleacutepho-
niques On se voit la semaine prochaine Des
deacutetails comme la silhouette la couleur des
yeux des cheveux des vecirctements un canapeacute
des photos au mur des sourcils fronceacutes ou une
moue deacutefaite sont-ils lrsquoexpression paroxystique
de lrsquoactiviteacute fantasmatique agrave lrsquoœuvre dans la
relation transfeacutero-contre-transfeacuterentielle entre
le patient et son theacuterapeute
Pourquoi lrsquoimage de cette patiente-lagrave tarde agrave se
construire en moi apparaicirct puis disparaicirct sans
que je puisse la saisir Parce qursquoelle joue agrave
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 76
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
cache-cache avec son pegravere malade qui ne
doit pas la voir dans cet eacutetat de terreur Pour-
quoi ai-je oublieacute drsquoappeler ce patient aujour-
drsquohui alors que son nom est surligneacute dans mon
agenda Parce qursquoil me reacutepegravete chaque fois
que tout le monde lrsquooublie Pourquoi cet
autre patient a-t-il exceptionnellement deman-
deacute agrave deacuteplacer son rendez-vous Parce qursquoil
eacutetait justement question lors de notre dernier
entretien de deacuteplacer son agressiviteacute pour
eacutepargner sa femme malade
Pourquoi cette megravere au beau milieu de son
suivi donne-t-elle mon numeacutero au fils qui ne
lrsquoeacutecoute plus Pourquoi ce fils accepte-t-il
drsquoappeler le psychologue de sa megravere Pour-
quoi le psychologue accepte-t-il de suivre seacute-
pareacutement deux membres de la mecircme famille
tandis qursquoil heacutesiterait agrave le faire en cabinet
Parce que les espaces ndash uniquement fantas-
meacutes- sont bien distincts en lui et que leur rela-
tion reacuteclame drsquoecirctre tierciseacutee
Pourquoi cette demande impeacuterieuse de me voir
en consultation Parce que cette patiente non
reconnue par la justice dans son statut de
victime des hormones de croissance contami-
neacutees a besoin drsquoecirctre reconnue au sens pre-
mier du terme par le psychologue
Pourquoi cette crainte en moi agrave lrsquoideacutee de voir
ces patients-lagrave comme on pourrait avoir agrave
craindre de transgresser la regravegle fondamentale
drsquoabstinence Dans ce contexte de suivi teacuteleacute-
phonique -qui induit lrsquoeacuterotisation du lien agrave la
voix et un sentiment paradoxal de grande
proximiteacute voir serait-il devenu un eacutequivalent de
toucher et lrsquoacting out agrave eacuteviter
Ces quelques exemples de questionnements
du psychologue autour des manifestations
transfeacutero-contre-transfeacuterentielles agrave lrsquoœuvre
dans le suivi teacuteleacutephonique nous semblent rele-
ver drsquoun processus de type theacuterapie drsquoinspira-
tion analytique Un processus qui se partage
souvent en deux temps un temps de plainte et
un temps drsquoeacutelaboration psychique complexe au
cours duquel le patient rapporte spontaneacutement
ses recircves Des recircves dont le mateacuteriel fait lrsquoobjet
drsquointerpreacutetations par le psychologue
SUIVI TEacuteLEacutePHONIQUE AVEC OU SANS FIN
Il arrive qursquoapregraves le deacutecegraves de son proche le
patient srsquointerroge sur la leacutegitimiteacute de la pour-
suite du suivi comme si la survie du malade
avait jusqursquoici conditionneacute son droit agrave en beacuteneacutefi-
cier Il nrsquoen est rien alors tout ne srsquoarrecircte pas
pour moi non plus Cet espace temporel
sans corps en preacutesence qui a proteacutegeacute le pa-
tient des angoisses inheacuterentes agrave la reacutealiteacute
drsquoune seacuteparation annonceacutee permet et catalyse
mecircme parfois le travail de deuil Vous ecirctes un
peu comme mon fregravere [mort depuis 3 mois] je
ne le vois pas mais il est lagravehellip je ne le vois pas
mais je lrsquoentends parfoishellip comme avec vous
jrsquoapprends agrave dialoguer agrave lrsquointeacuterieur de moi avec
lui
La sortie du dispositif de soutien teacuteleacutephonique
est longuement travailleacute eacutevocation de lrsquoapregraves
eacutelaboration de la seacuteparation espacement pro-
gressif des entretiens Un cheminement au
cours duquel surgissent plus explicitement les
traces du caractegravere transitionnel de lrsquoespace
teacuteleacutephonique Un espace qui sans ecirctre une
permanence drsquoeacutecoute a eacutetayeacute le sentiment de
permanence drsquoobjet Je ne vous ai jamais
vuehellip alors je nrsquoai pas peur de ne plus vous
voir Vous ecirctes un peu comme toujours lagrave
CONCLUSION
La Cellule Nationale de Reacutefeacuterence des Mala-
dies de Creutzfeldt-Jakob a pour mission lrsquoaide
au diagnostic et agrave la prise en charge meacutedicale
sociale et psychologique des patients et de leur
famille Lrsquoaide proposeacutee srsquoeffectue essentielle-
ment par teacuteleacutephone
La faisabiliteacute et la leacutegitimiteacute drsquoun soutien psy-
chologique exclusivement teacuteleacutephonique a eacuteteacute
lrsquoobjet de nombreuses interrogations pour le
psychologue quelle est la nature de cet es-
pace particulier drsquoaccompagnement Quels en
sont les beacuteneacutefices Peut-on soutenir un veacuteri-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 77
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
table travail psychique dans le cadre de ce dis-
positif Est-il leacutegitime de parler de travail psy-
chotheacuterapeutique
Les 110 suivis psychologiques effectueacutes agrave la
Cellule depuis 2003 nous permettent aujour-
drsquohui drsquoaffirmer que notre travail de psycho-
logue ne se limite pas agrave une pure fonction de
soutien En effet bien que tregraves eacuteloigneacute de la
situation analytique le processus agrave lrsquoœuvre
dans le dispositif teacuteleacutephonique semble srsquoappa-
renter agrave celui drsquoun dispositif de type psychotheacute-
rapeutique drsquoinspiration analytique le cadre
est poseacute et penseacute par le psychologue
(entretiens de 45 minutes notion de rendez-
vous teacuteleacutephoniques rythmiciteacute souvent hebdo-
madaire suivi au long cours) lrsquoassociation
libre est encourageacutee lrsquointerpreacutetation des dires
lrsquoanalyse des recircves lrsquoanalyse du transfert et du
contre-transfert par le psychologue est freacute-
quente et le patient effectue un veacuteritable travail
drsquoeacutelaboration psychique au deacutecours du suivi
Lrsquoexpeacuterience nous deacutemontre que les particulari-
teacutes de lrsquoaccompagnement teacuteleacutephonique
(notamment privation drsquoinformations visuelles)
ne freinent pas le processus theacuterapeutique
Elles pourraient mecircme le favoriser
(relacircchement du systegraveme deacutefensif)
Ainsi ce dispositif innovant de prise en charge
psychologique agrave lrsquohocircpital est au service drsquoune
difficulteacute des personnes qui y ont recours la
crainte et ou lrsquoimpossibiliteacute drsquoaller consulter un
psychologue en face-agrave face
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 78
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Parents face agrave linterruption meacutedicale de grossesse des mots
en images
Natascia Serbandini
Service de gyneacutecologie-obsteacutetrique Hocircpital Jean Verdier
A pregraves avoir eacutevoqueacute briegravevement les speacute-
cificiteacutes du deuil peacuterinatal je vais vous
preacutesenter une pratique nouvelle au sein
de lrsquoAPHP un groupe de parole hospitalier
destineacute aux femmes ayant fait une interruption
meacutedicale de grossesse Ce groupe est neacute en
2008 un an apregraves sa creacuteation nous avons choi-
si drsquointroduire une cameacutera lors des seacuteances
Enfin je deacutecrirai lrsquoimpact de la cameacutera sur le
groupe et le projet de film que nous sommes
en train de reacutealiser
LES SPEacuteCIFICITEacuteS DU DEUIL PEacuteRINATAL
La deacutecouverte dune pathologie fœtale incu-
rable pendant la grossesse est un eacuteveacutenement
hautement traumatique pour les parents du fu-
tur beacutebeacute Lhocircpital Jean Verdier unique Centre
Pluridisciplinaire de Diagnostic Preacutenatal du 93
accueille et accompagne les parents degraves lrsquoan-
nonce du diagnostic jusqursquoagrave lrsquointerruption meacutedi-
cale de grossesse quand les parents la deman-
dent
Le deuil peacuterinatal preacutesente des speacutecificiteacutes qui
le distinguent du deuil classique il est toujours
accompagneacute drsquoun fort sentiment de culpabili-
teacute amplifieacute dans le cadre des Interruptions Meacute-
dicales de Grossesse par la prise de deacutecision
(Tous les textes en italique sont issus de teacutemoi-
gnages de femmes lors du groupe de parole)
Pendant le travail je le sentais encore mon
beacutebeacute est neacute vivant jrsquoavais vraiment cette sen-
sation qursquoil voulait se battre Jrsquoai enleveacute tout cet
espoir de vie et je me demande de quel droit
Crsquoest cette impression drsquoavoir le choix sur sa
vie ou sa mort crsquoest tellement lourd agrave porter
Une autre speacutecificiteacute est lrsquoabsence drsquoun veacutecu
partageacute avec cet enfant en dehors de la gros-
sesse Geneviegraveve Delaisi de Parseval
(psychanalyste) Comment faire le deuil de ce
qui nrsquoa pas eu lieu drsquoon ne sait quoi et de
presque rien Lrsquoobjet perdu reste agrave perdre
comment accepter la seacuteparation drsquoavec un ecirctre
que lrsquoon nrsquoa pas connu
Le deuil est un processus intrapsychique con-
seacutecutif agrave la perte drsquoun objet drsquoattachement par
lequel le sujet reacuteussit progressivement agrave se deacute-
tacher de celui ci Jean Philippe Legros
(psychologue psychanalyste au centre de meacute-
decine foetale Cochin-St Vincent de Paul) dans
lrsquoarticle L lsquoarrecirct de vie in utero ou lrsquoerrance des
fœtus un possible deuil preacutecise que dans le
deuil peacuterinatal il srsquoagit drsquoun deacutetachement sans
renoncement
Ensuite il srsquoagit drsquoun deuil feacuteminin un deuil
veacutecu tregraves diffeacuteremment dans le couple
Mon mari lui a pris sa deacutecisionhellipje ne dis pas
que ccedila a eacuteteacute facile ccedila a ducirc ecirctre dur pour lui
aussi moi je la portais je la sentais bouger
Cette mort est intoleacuterable pour la megravere en lien
avec le sentiment drsquoomnipotence propre agrave la
grossesse intoleacuterable pour la megravere qui con-
naissait ce beacutebeacute et qui a ressenti ses mouve-
ments
Ce sentiment de toute puissance est amplifieacute
par le fait que la demande drsquoInterruption Meacutedi-
cale de Grossesse revient agrave la femme seule
signataire selon la loi
Je sais qursquoil souffre qursquoil est malheureux il a
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 79
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
la mecircme peine et la mecircme tristesse que moi
mais il ne llsquoexprime pas pareil il y a une culpa-
biliteacute plus importante chez la megravere
La perte du beacutebeacute est parfois difficilement re-
connue par les pegraveres qui nrsquoosent pas manifes-
ter leur souffrance et qui se projettent plus rapi-
dement dans lrsquoavenir
Leur deacutetresse reacutesulte en grande partie de la
mise agrave mal de la fonction contenante protec-
trice de la femme enceinte qursquoils assuraient
avant lrsquointerruption
Ce deuil est deacutepourvu drsquoune dimension so-
ciale Franccediloise Moleacutenat (peacutedopsychiatre) dit
Iil existe une cicatrice dans le corps de la
megravere mais pas de cicatrice sociale
Beaucoup de personnes mrsquoont dit crsquoest
dingue que lrsquoadministration franccedilaise se mecircle
de ccedila (en parlant de la reconnaissance agrave la
Mairie) alors qursquoil nrsquoy a mecircme pas de beacutebeacute il
eacutetait pas neacute
Les rituels autour du deuil ont une fonction psy-
chique ils offrent au mort un deacutedommagement
symbolique Ils assurent une reconnaissance
de la peine des proches par le groupe
Crsquoest seulement depuis quelques anneacutees que
les rites et rituels sociaux autour des beacutebeacutes
morts in utero ont pris leur place agrave travers la
reconnaissance agrave lrsquoEtat Civil et lrsquoeacutevolution des
pratiques drsquoaccompagnement dans les materni-
teacutes (preacutesentation du corps du beacutebeacute organisa-
tion drsquoobsegraveques)
Ce travail est reacutealiseacute dans le but de creacuteer et
drsquoancrer des souvenirs de cet enfant afin de
faire des parents des parents
Jrsquoavais toujours une photo de mon fils dans
mon portefeuille jrsquoen avais besoin Crsquoest peut
ecirctre parce que je ne voulais pas qursquoon me dise
que crsquoeacutetait rien
LE GROUPE DE PAROLE Agrave JEAN VERDIER
Lors des entretiens avec le gyneacutecologue ou
dans le cadre drsquoun suivi psychologique quelque
temps apregraves les Interruptions Meacutedicales les
femmes eacutevoquaient de maniegravere reacutecurrente leur
solitude lrsquoimpossibiliteacute de partager leur souf-
france et le temps passant de ne plus pouvoir
parler de leur beacutebeacute dans le cercle familial et
amical Cet oubli de lrsquoentourage et la reprise
drsquoune vie normale est source de culpabiliteacute
elles avaient le sentiment drsquoabandonner agrave nou-
veau leur beacutebeacute
Jrsquoai lrsquoimpression que personne ne me com-
prend jrsquoai lrsquoimpression drsquoecirctre seule au monde
de me noyer je survis Les gens ne peuvent
pas comprendre notre situation je nrsquoarrive pas
agrave leur dire ma souffrance immense
De cela est neacutee lrsquoideacutee de proposer un espace
drsquoeacutechanges entre femmes sous forme de
groupe de paroles Ce projet a eacuteteacute creacuteeacute agrave lini-
tiative commune du gyneacutecologue responsable
du Centre de Diagnostic Anteacutenatal et de moi-
mecircme
Il srsquoagit drsquoun groupe ouvert agrave toutes les femmes
ayant veacutecu une Interruption Meacutedicale de Gros-
sesse agrave Jean Verdier
Le groupe se reacuteunit une fois par mois pendant
une heure et demie et est co-animeacute par un bi-
nocircme psychologuepsychiatre et meacutedecinsage
femme
Le groupe constitue un cadre de confiance
une enveloppe psychique comme le dit An-
zieu propice agrave la mise en commun des charges
affectives et agrave lrsquoaccompagnement du deuil
De plus comme le rappelle Jean Philippe Le-
gros apregraves la perte drsquoun enfant par IMG la
crainte de la megravere contrairement aux parents
drsquoenfants porteurs drsquohandicap est lrsquoabsence du
regard des autres dans le reacuteel Cet ecirctre invi-
sible pour les yeux cet enfant que personne
drsquoautre nrsquoa connu risque de disparaicirctre Drsquoougrave
lrsquoimportance de creacuteer un espace physique (par
rapport aux espaces virtuels les forums sur
Internet tregraves freacutequenteacutees par les megraveres en-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 80
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
deuilleacutees) et psychique au sein de lrsquohocircpital afin
de reconnaicirctre lrsquoexistence de ces beacutebeacutes et per-
mettre agrave ces femmes drsquoecirctre megraveres
Les autres nous parlent comme si on avait
perdu quelque chose crsquoest quand mecircme un
ecirctre vivant crsquoeacutetait quand mecircme notre enfant
Lrsquoobjectif principal du groupe est de permettre
le partage drsquoexpeacuterience de ce deuil si particu-
lier drsquoecirctre rassureacutee par le parcours des autres
dans un cadre de reacutefeacuterence suffisamment
bon pour le dire avec les mots de Winnicott
Crsquoest vrai que discuter avec drsquoautres per-
sonnes qui lrsquoont veacutecu il y a longtemps et qui ont
su deacutepasser certaines eacutetapes ccedila aide ccedila
donne des cleacutes pour passer agrave lrsquoeacutetape suivante
LrsquoIDEacuteE DU FILM DES MOTS EN IMAGES
Le groupe a eacuteteacute tregraves freacutequenteacute degraves le deacutebut
Apregraves un an de fonctionnement le gyneacutecologue
a proposeacute drsquointroduire une camera afin de fil-
mer les seacuteances pour teacutemoigner de cette expeacute-
rience positive et faire connaicirctre cette pratique
Cette proposition a eacuteteacute discuteacutee par les
femmes au sein du groupe elles ont adopteacute
cette ideacutee et ont eacutelaboreacute avec nous les objectifs
du film
Teacutemoigner autour du deuil peacuterinatal en deacutecri-
vant les diffeacuterentes eacutetapes et souligner les beacute-
neacutefices drsquoun groupe de parole
A partir de leur veacutecu permettre une reacuteflexion
visant agrave ameacuteliorer les pratiques soignantes
dans les accompagnements du deuil peacuterinatal
agrave lrsquohocircpital
Nous avons filmeacute six seacuteances dune heure
trente avec deux techniques une cameacutera fixe
et une cameacutera mobile Ensuite nous avons eacuteta-
bli ensemble un plan pour le film reacutecit en ordre
chronologique du deacuteroulement de lrsquoIMG Les
diffeacuterents chapitres
Lrsquoannonce et la deacutecision lrsquohospitalisation le
retour agrave la maison lrsquoenterrement lrsquoentourage
lrsquoautopsie la grossesse drsquoapregraves le groupe
La preacutesence de la cameacutera a eu un impact sur
le deacuteroulement des seacuteances les theacutematiques
ont eacuteteacute eacutetablies agrave lrsquoavance ce qui a permis de
structurer davantage les seacuteances tout en gar-
dant la liberteacute drsquoaborder les questions eacutevo-
queacutees spontaneacutement par les femmes
Comme le dit Winnicott lrsquoenfant existe dans les
yeux de sa megravere le visage de lrsquoenfant que lrsquoon
nrsquoa pas vu ne permet pas agrave la megravere de se re-
connaicirctre comme megravere
Le film vient srsquoinscrire dans cette neacutecessiteacute de
reconnaissance de laisser une trace de cette
preacutesence de ce beacutebeacute qui nrsquoa plus de corps
physique mais qui existe dans lrsquohistoire fami-
liale
La preacutesence de la cameacutera a donc eu des effets
beacuteneacutefiques pour les femmes mais aussi pour
les soignants la richesse du mateacuteriel clinique
recueilli nous a permis drsquoobserver lrsquoeacutevolution
des femmes dans le processus de deuil et
drsquoanalyser leur posture au sein du groupe ainsi
que celle des animateurs
Si le groupe a fonction de portage pour cer-
taines pour drsquoautres crsquoest le lieu ougrave elles peu-
vent donner un sens agrave ce qursquoelles ont veacutecu en
partageant leur expeacuterience avec drsquoautres
Nous avons constateacute en visionnant les
seacuteances que plusieurs femmes qui semblent
ecirctre dans un deuil normal continuent agrave freacute-
quenter le groupe alors que leur interruption
remonte agrave il y a trois ou quatre ans
Le besoin de continuer agrave eacutevoquer leur beacutebeacute
nrsquoest pas un signe de deuil pathologique mais
une neacutecessiteacute de la ceacuteleacutebration de la meacutemoire
de ces beacutebeacutes disparus Ces femmes veulent
garder comme le dit Jean Philippe Legros une
dose homeacuteopathique du trauma qui gueacuterit de
lui en ne se seacuteparant jamais
Quand jrsquoai dit agrave ma responsable que je mrsquoab-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 81
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
sentais pour venir au groupe de parole elle
mrsquoa dit Ben tu en as deacutejagrave un (enfant) qui est lagrave
pourquoi tu continues agrave aller agrave ce groupe Je
lui ai dit Crsquoest pas parce que jrsquoai reacuteussi agrave
avoir un petit garccedilon que je vais compleacutetement
oublier ce qui concerne mon premier enfant
justement lui il nrsquoest pas lagrave crsquoest pour ccedila que
je continue agrave aller au groupe pour parler de lui
pour le faire exister
Aujourdrsquohui le projet du film est en cours nous
avons imagineacute deux versions
- une version courte de 20 minutes un teacutemoi-
gnage du groupe sur le deuil peacuterinatal agrave diffu-
ser agrave lrsquoexteacuterieur
- une version longue de 52 minutes destineacutee
aux femmes et en interne agrave lrsquohocircpital Jean Ver-
dier
Le premier montage a eacuteteacute visionneacute par les
femmes qui ont participeacute aux choix des extraits
Nous espeacuterons pouvoir le diffuser dans un ave-
nir proche agrave un large nombre de professionnels
de santeacute
Retrouvez
toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
les enregistrements des con-
feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
wwwpsyclihosorg
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 82
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
Psychologue clinicien aupregraves du personnel missions
enjeux limites
Isabelle Fretigny Hocircpital Saint Louis
Elodie Travers Hocircpital Henri Mondor
P our cette preacutesentation des missions du
psychologue clinicien aupregraves du per-
sonnel agrave
lrsquoAP-HP nous avons choisi de commencer par
reprendre quelques eacuteleacutements agrave lrsquoorigine de la
creacuteation de nos postes
Dans une seconde partie nous deacutefinirons et
preacutesenterons la diversiteacute des missions speacuteci-
fiques aux psychologues du personnel sur site
A la fois clinique et institutionnelle notre pra-
tique nous amegravene agrave ecirctre en contact reacutegulier
avec les diffeacuterents acteurs internes ou ex-
ternes agrave lrsquoinstitution concerneacutes par la protec-
tion de la santeacute au travail Ainsi cette collabo-
ration neacutecessite un important travail de deacuteve-
loppement et drsquoentretien du reacuteseau
Ensuite nous envisagerons les divers ques-
tionnements souleveacutes par ce poste position-
nement parfois drsquoeacutequilibriste cadre speacutecifique
de prise en charge ou encore limites de cette
pratique
HISTORIQUE
Par la loi de 1983 concernant les droits et obli-
gations des fonctionnaires les personnels hos-
pitaliers de par leur statut sont proteacutegeacutes par
leur administration
A la fin des anneacutees 90 le deacuteveloppement de la
preacutevention des violences apparaicirct comme pri-
mordial puis une circulaire intituleacutee Preacutevention
et accompagnement des situations de vio-
lence est reacutedigeacutee en deacutecembre 2000
Le constat de lrsquoaugmentation de la violence au
quotidien dans les hocircpitaux a fait naicirctre au sein
de lrsquoAP-HP des preacuteoccupations et des de-
mandes au niveau institutionnel Ceci a mobili-
seacute un ensemble drsquoacteurs concerneacutes par la
protection de la santeacute des personnels Ainsi la
mise en place drsquoune cellule drsquoaccueil et de
prise en charge des agents victimes de vio-
lence agrave lrsquoAP-HP eacutemane de ces travaux Deux
postes de psychologues cliniciennes ont eacuteteacute
creacuteeacutes au Siegravege en 2000 et 2001 puis drsquoautres
postes de psychologues cliniciens aupregraves du
personnel ont vu le jour sur diffeacuterents sites de
lrsquoAP-HP
Face agrave lrsquoamplification des violences en milieu
hospitalier lrsquoAP-HP a eacutegalement meneacute en 2004
une campagne drsquoinformation sur le thegraveme
Violences de patients drsquoaccompagnants de
visiteurs comment soutenir les personnels qui
en sont victimes Ces derniers ignorent sou-
vent leurs droits et les circuits internes pour ob-
tenir le meilleur accompagnement dans leurs
deacutemarches Lrsquoeacutelaboration drsquoun guide a permis
de deacutecrire les diffeacuterentes modaliteacutes de prise en
charge en cas drsquoagression prise en charge
meacutedico-psychologique sociale meacutedico-
administrative ou encore juridique
Au-delagrave de la preacutevention et de la prise en
charge de la violence agrave lrsquohocircpital les missions
du psychologue clinicien aupregraves du personnel
sont orienteacutees vers deux axes principaux la
clinique individuelle et collective et les activiteacutes
institutionnelles
DEacuteFINITION DU POSTE ET MISSIONS SPEacuteCIFIQUES
Le poste de psychologue du personnel a pour
fonction principale de creacuteer un espace drsquoeacutecoute
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 83
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
et de prise en charge individuelle ou collective
pour tout le personnel de lrsquohocircpital
Toute personne professionnelle de lrsquohocircpital
peut si elle en a la neacutecessiteacute (si elle le sou-
haite) prendre rendez vous pour une premiegravere
consultation et ce quel qursquoen soit le motif pro-
fessionnel ou personnel
Les bureaux permettent de garantir la confiden-
tialiteacute
Les consultations se font sur rendez-vous afin
drsquoeacuteviter lrsquoattente et pour preacuteserver la discreacutetion
Ils sont libres et totalement confidentiels
Des rendez-vous en soireacutee peuvent ecirctre ameacute-
nageacutes
Le deacutelai maximum drsquoobtention drsquoun rendez-
vous est environ de 15 jours
Le nombre de consultations deacutepend de la de-
mande initiale Il peut aller drsquoun seul entretien agrave
plusieurs Lorsque la personne deacutesire ou neacute-
cessite une prise en charge plus longue elle
est orienteacutee agrave lrsquoexteacuterieur Il est preacuteciseacute agrave tout
agent en deacutebut drsquoentretien que ce lieu de con-
sultation a pour vocation un accompagnement
agrave court ou moyen terme
Il est eacutevident que la fonction de psychologue du
personnel est agrave viseacutee clinique crsquoest agrave dire
- que le psychologue du personnel nrsquointervient
pas directement dans les eacutevaluations utiles agrave la
gestion du personnel et nrsquoeacutemettent aucun avis
concernant lrsquoaptitude au poste de travail des
agents reccedilus en consultation (ce qui est de
lrsquounique ressort du meacutedecin du travail) hellip
- que le psychologue du personnel nrsquoest pas
psychologue du travail donc nrsquointervient pas
dans le reclassement les mobiliteacutes profession-
nelles le recrutementhellipMais nos missions
srsquoaccordent bien sur avec celles du CRH si neacute-
cessaire
Le psychologue du personnel comme les
autres psychologues cliniciens de lrsquoeacutetablisse-
ment deacutepend directement du directeur de lrsquoeacuteta-
blissement et a des liaisons fonctionnelles
avec le drh par exemple ou le meacutedecin du tra-
vail
Il rend un bilan annuel quantitatif indiquant cer-
taines donneacutees de son activiteacute tout en preacuteser-
vant lrsquoanonymat et la confidentialiteacute Il peut arri-
ver que ce bilan soit preacutesenteacute aux instances
types CHSCT
Globalement le temps de travail du psycho-
logue du personnel se reacutepartit comme suit
pratique clinique drsquoune part activiteacutes institu-
tionnelles drsquoautre part
LA PRATIQUE CLINIQUE
bull Clinique individuelle soutien psychologique
du personnel en difficulteacute par entretien indivi-
duel
Notre pratique montre que les deux aspects
professionnels et personnels sont souvent in-
triqueacutes qursquoil peut srsquoagir de souffrance au tra-
vail mais aussi de souffrance personnelle qui
peut avoir des reacutepercussions dans le travail
Les motifs principaux agrave lrsquoorigine de la de-
mande
- sur le plan professionnel sont conflits inter
eacutequipe situations de violence au travail
manque de communication difficulteacutes face aux
pathologies perte du sens du travail voire eacutepui-
sement professionnel
- sur le plan personnel sont difficulteacutes fami-
liales sociales deuils seacuteparations probleacutema-
tiques psychopathologiques maladies chro-
niqueshellip
Ces personnes ne se sont jamais adresseacutees agrave
un professionnel du soin psychique par meacute-
connaissance des professions parfois mais par
meacutefiance eacutegalement et arrivent souvent en
portant des souffrances extrecircmement lourdes
et de longue date
Cateacutegories dominantes qui consultent soi-
gnants et administratifs encadrement
quelques personnels techniques et meacutedico-
techniques et tregraves peu de meacutedecins
Il est difficile drsquoeacutetablir une moyenne du nombre
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 84
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
drsquoagents reccedilus par an sur lrsquoensemble des
postes du personnel Toutefois les demandes
de consultations sont en constantes augmenta-
tions sur la plupart des sites de lrsquoAPHP mais
aussi du fait des regroupements amenant les
psychologues agrave ecirctre solliciteacutees sur plusieurs
eacutetablissements
bull Clinique collective
Les interventions collectives peuvent se
preacutesenter sous deux formes les groupes de
parole et les deacutebriefings psychologiques
Le Groupe de parole permet de creacuteer un lieu
drsquoexpression et drsquoeacutechanges sur un thegraveme don-
neacute ou une probleacutematique speacutecifique au service
(comme par exemple lrsquoagressiviteacute et la violence
des patients notamment aux urgences ou en-
core lrsquoimplication eacutemotionnelle des soignants
lieacutee agrave lrsquoaccompagnement en fin de vie hellip)
Le Deacutebriefing psychologique intervention
collective ponctuelle suite agrave un eacuteveacutenement diffi-
cile ou traumatique (suicide drsquoun patient deacutecegraves
drsquoun personnel agression du personnel par un
patient ou son entouragehellip)
Force est de constater eacutegalement que les de-
mandes de reacutesolution de conflit formuleacutees
comme telles sont aussi tregraves preacutesentes et il
semble utile de distinguer la neacutecessaire reacutesolu-
tion drsquoun conflit qui nrsquoest pas forcement le lieu
et le temps du groupe de parole de la volonteacute
drsquoy trouver un sens Il va de soi que le psycho-
logue nrsquointervient en aucun cas comme meacutedia-
teur car il nrsquoen a pas la formation speacutecifique
mecircme si certaines interventions peuvent par-
fois avoir des effets drsquoapaisement du conflit
Pour ces raisons et preacutealablement agrave toute in-
tervention collective il est important drsquoavoir pu
deacutefinir avec les participants leurs attentes et
pas seulement celles lieacutees au demandeur geacute-
neacuteralement lrsquoencadrement ou la direction
LES ACTIVITEacuteS INSTITUTIONNELLES
bull1- Deacuteveloppement et entretien du reacuteseau
En interne Assistant social du personnel meacute-
decine du travail DRH CRH chef du person-
nel direction des soins psychologues du per-
sonnel drsquoautres sites psychologues des ser-
vices psychiatres hellip
En externe orientation vers les CMP pour les
prises en charge agrave plus long terme etou pour
les suivis psychiatriques orientation vers des
lieux de consultations speacutecialiseacutes (addictologie
consultation douleur troubles du sommeil
troubles du comportement alimentaire associa-
tion drsquoaide aux victimes theacuterapie familiale hellip)
2- Participation aux groupes de travail et de
preacutevention preacutevention des addictions de
lrsquoeacutepuisement professionnel des risques psycho
-sociauxhellip
3- Faire connaicirctre ces postes et notre activiteacute
- A lrsquooccasion drsquoune arriveacutee sur site ou lors
drsquoune creacuteation de poste
- Preacutesentation dans les services directement
aupregraves des eacutequipes
- Preacutesentation lors de formations sur site
propre (accueil des nouveaux arrivants ou sur
des theacutematiques en lien avec nos missions) ou
au Centre de Formation Continue du Personnel
Hospitalier (intervention dans le cadre de la for-
mation Preacutevention du risque psychique et de
lrsquoeacutepuisement professionnel agrave lrsquohocircpital)
- Preacutesentation du rapport drsquoactiviteacutes au Comiteacute
drsquoHygiegravene Seacutecuriteacute et Conditions de Travail
QUESTIONNEMENTS ENJEUX LIMITES
Ce poste nous amegravene en permanence
- agrave repreacuteciser nos missions ce que nous pou-
vons faire et aussi ne pas faire depuis notre
place particuliegravere au sein de lrsquoinstitution
- agrave nous confronter agrave certaines limites
- agrave devoir nous adapter agrave une clinique aussi
riche que varieacutee
Plusieurs limites donc
La question du cadre
- absence de paiement pas de psychotheacutera-
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 85
Cliniques particuliegraveres pratiques innovantes
pie ce nrsquoest pas agrave lrsquoemployeur de payer on
connaicirct par ailleurs la neacutecessiteacute du paiement
- reacutegulariteacute des horaires il est difficile souvent
impossible pour des personnels ayant des ho-
raires variables qui travaillent en alternance de
pouvoir respecter un horaire fixe de rendez
vous Les annulations les reports sont freacute-
quents agrave cause des changements drsquohoraires
subis par les agents eux-mecircmes Parfois de
notre fait eacutegalement
La question de la confiance
- biais dans la relation
Nous avons le mecircme employeur donc il existe
un biais dans la relation de soutien psycholo-
gique (theacuterapeutique) Pourtant eacutetablir une re-
lation de confiance institutionnelle avec les
agents est essentiel Et faire partie de la mecircme
institution peut parfois paradoxalement rassu-
rer et favoriser une deacutemarche qui ne serait par
ailleurs pas faite
Ayant eacuteteacute recruteacute par la mecircme direction la
question de la confidentialiteacute du travail du
psychologue peut se poser (la confidentialiteacute
est rappeleacute agrave chaque premiegravere rencontre)
- Neacutecessaire et juste distance entre lrsquoinstitution
de son propre travail (visites meacutedicales effec-
tueacutees par un autre meacutedecin du travail attitude
discregravete au sein de lrsquoeacutetablissement hellip)
- Se pose la question du secret partageacute dans
lrsquointeacuterecirct de lrsquoagent et avec son accord cer-
taines informations peuvent parfois ecirctre com-
muniqueacutees (assistantes sociales du personnel
meacutedecin du travailhellip) et inversement
Comment et quand reacuteorienter
- au rythme de chacun (cette premiegravere deacute-
marche a deacutejagrave parfois eacuteteacute extrecircmement longue
et difficile)
- ne marche pas toujours du 1er
coup (combien reviennent parce que cela nrsquoa
pas accrocheacute trop cher tous ces arguments
connus qui peuvent cacher un pas precirct agrave)
Autres limites agrave cette pratique
- question de la neutraliteacute quant au fait de pou-
voir recevoir deux parties drsquoun conflit Nous
sommes lagrave pour tous les agents Et crsquoest bien
lagrave toute la diffeacuterence avec les GH qui ont agrave dis-
position plusieurs psychologues du personnel
- difficulteacute si une personne reccedilue en individuel
participe eacutegalement agrave un groupe de parole hellip
- tous les risques de glissement potentiels aux
places que lrsquoinstitution veut nous faire prendre
lorsque par exemple en lrsquoabsence de meacutedecin
du travail on propose agrave la place de rencon-
trer la psychologue du personnel lorsqursquoil faut
absolument trouver une solution risque drsquoecirctre
interpelleacute en vue de reacutesoudre un conflit avec
ce que cela suppose de rapiditeacute et drsquoefficience
allant agrave lrsquoencontre de la possibiliteacute de penser et
drsquoeacutelaborer
CONCLUSION
Pour le psychologue exercer aupregraves du per-
sonnel appelle parfois agrave des positions drsquoeacutequili-
bristes et neacutecessite de garder une certaine
souplesse
Lrsquointeacuterecirct de ce poste est de faciliter lrsquoaccegraves au
psychologue permettant agrave un public qui nrsquoau-
rait pas forcement fait cette deacutemarche de venir
consulter
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 86
Clocircture de la journeacutee
gt Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
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Clocircture de la journeacutee
PSYCLIHOS Le Journal Bulletin Ndeg18 Janvier 2012 Page 87
Clocircture de la journeacutee
C ette journeacutee nous a permis de partager
la diversiteacute de nos pratiques La ri-
chesse des interventions nous teacutemoi-
gnent de la vivaciteacute des psychologues hospita-
liers Cest bien la speacutecificiteacute de nos pratiques
qui assure la peacuterenniteacute de nos postes et leur
creacuteation
Jai commenceacute la journeacutee par des remercie-
ments cest ainsi que je vais la clore
Je remercie
le Comiteacute scientifique qui a construit ce pro-
gramme riche et ambitieux qui je lespegravere vous
aura apporteacute de nouvelles ressources
Le Comiteacute drsquoorganisation et les beacuteneacutevoles qui
nous ont reacuteserveacute un accueil souriant et dyna-
mique
Cleacutement ingeacutenieur du son agrave la technique
gracircce agrave qui vous pourrez entendre les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nous vous demandons donc un peu de pa-
tience avant de pouvoir retrouver les interven-
tions de cette journeacutee sur notre site internet
Nheacutesitez pas agrave nous rejoindre ce qui renforce
toujours notre dynamisme
En vous remerciant de votre preacutesence qui fait
le succegraves de cette journeacutee et nous poussera
qui sait agrave nous retrouver avec notre quart de
siegravecle -)
Dernier deacutetail administratif noubliez pas de
remplir le questionnaire deacutevaluation de la jour-
neacutee et surtout de rendre votre badge en par-
tant Cest important pour nous
Merci agrave tous
Elodie Sacircles preacutesidente de Psyclihos
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toute lrsquoactualiteacute de Psyclihos
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feacuterences ainsi que le journal
des 20 ans
sur notre site internet
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Membres associeacutes Jeune diplocircmeacute lt3ans sans emploi 25 euro
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Justificatif obligatoire agrave joindre copie du haut du bulletin de salaire du diplocircme ou du certificat de
scolariteacute
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Preacutenom
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