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Compte-rendu de réunion

Compte-rendu des ateliers de l’Anaforcal, JPA 2003

En accord avec le président de l’Anaforcal, Jean-Pôl Dumur,nous avons pensé qu’il était utile de présenter une synthèsedes travaux fructueux effectués dans ces ateliers. Pour desraisons de volume des textes et de place disponible dans leprésent numéro, cinq ateliers ont été retenus, en accord avecle président Dumur. Nous espérons que cette initiative vousconvienne et, dans l’affirmative, elle sera renouvelée.

La rédaction

Compte-rendu de l’atelier Anaforcal 2003 :la dermatite atopique (DA)J.F. Stalder a, A. Khoury b, F. Luquiau c, A. Cheynel d

a Nantes, Franceb Épernay, Francec Angers, Franced Chambéry, France

1. Introduction

Il a été posé au départ que le diagnostic positif de la DAétait connu. Cet atelier s’est donc attaché à proposer uneméthode de prise en charge globale d’un patient atteint deDA. Chacune des phases préalables à cette prise en chargesera détaillée auparavant et en particulier : diagnostic du« head and neck dermatits », bilan et traitement.

2. Matériel et méthodes

Neuf allergologues exclusifs et trois médecins généralis-tes pratiquants l’allergologie sont venus participer à cet ate-lier. Le choix de petits exposés par l’expert universitaireillustrés par une iconographie adéquate et faisant référence àdes données bibliographiques assorties de leur niveau depreuve a été fait pour permettre échanges, questions etcontroverses entre experts et participants.

L’évaluation de l’atelier s’est faite sur un pré-test – post-test.

3. Résultats

3.1. Un seul diagnostic particulier a été détaillé en raisonde son retentissement social chez l’adolescent et l’adultejeune, c’est la « Head and neck dermatitis ».

Il s’agit d’une localisation affichante avec squames dubord du cuir-chevelu, atteinte importante du visage respec-tant parfois la zone médiofaciale à l’inverse de la séborrhée.Les lésions s’accompagnent de prurit et de brûlures.

Cette forme clinique est caractérisée par sa sensibilité auxirritants non spécifiques comme stress, vent et chaleur. Lacolonisation par le Pityrosporum ovalae est fréquente.

3.2. Le bilan

Faire l’évaluation objective des lésions ne se discute pas.Il sera quantifié par le Scorad dont l’intérêt n’est plus àdémontrer.

3.2.1. Le bilan étiologiqueCelui de l’allergologue, ne s’envisage pas en première

intention chez un atopique bien amélioré par le traitementclassique. Les dermato-pédiatres européens ont élaboré unedémarche pragmatique tenant compte de la prévalence de lamaladie, du risque, du coût du bilan et du bénéfice potentielde celui-ci. Les conclusions en sont les suivantes :

• la DA du nourrisson n’a pas besoin de bilan de départ.(cette affirmation a obtenu le consensus de la salle) ;

• une DA avec Scorad à 15 n’a pas besoin de bilan ;• le bilan doit être entrepris à bon escient car son risque est

de provoquer le désarroi des familles lorsque chaqueintervenant donne un avis différent sur la conduite à tenirpouvant être à l’origine de l’échec du traitement.

3.2.2. Le bilan biologiqueLes IgE totales sont sans intérêt pour orienter le diagnos-

tic.

3.2.3. Les testsSi les tests cutanés aux pneumallergènes et aux trophaller-

gènes ont un intérêt et une validité démontrés, il manque enrevanche aux patch-tests, aux acariens et autres pneumaller-gènes un seuil prédictif qui permettrait d’en faire un outil deréférence.

3.3. Le traitement

3.3.1. Traitement symptomatique ou thérapeutique de baseassocie toilette et émollients

La toilette est essentielle avec eau et savon ou syndet.L’eau peut être utilisée sous forme de douche ou de baincourt. La dureté de l’eau n’a pas fait la preuve de son effetdélétère. Pour le savon, le surgras ou les syndets sont préfé-rables.

Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique 44 (2004) 199–217

www.elsevier.com/locate/revcli

doi:10.1016/j.allerg.2003.12.001

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Quant aux émollients, tous ne sont pas égaux car certainsont un caractère relipidant. Ils ont été répertoriés (cf. Ta-bleau 1) selon leur sophistication et leur galénique. Il faut

évaluer au cas par cas le meilleur rapport qualité/prix et nepas oublier le risque potentiel de sensibilisation à certainscomposants.

Tableau 1fourni par monsieur le Professeur Stalder (les prix sont approximatifs)

Laboratoire Produit Innocuité Tolérance Reconstituantlipidique

Prix moyenQ/100 ml

A-Derma Exomega + + + 6,5Crème de soin + + 0Dermalibour + + 0 14,5

Avene Cold Cream parabens + 0 12,5Lait au cold cream + 7Crème peau intolérante + 32Trixera + + 5,5

Bioderma Atoderm + + 0 9Cold cream + + 0 15Hydrabio parabens, urée, parfums – 0 12,5Hydrasept parfums + 0 12

Biorga Cold cream d’uriage + + 0 10emolliente d’uriage + + + 8hydrolipidique + + + 4

Charlieu Topic10 urée 10 % – 0 5Topicrem + + 0 3

Chauvin LipidermCoryne De Bruynes Dermagor

Cold cream CeratCS Atodiane + + + 4

Effadiane parabens + + 9Ducray Ichtyane + propylène 0 9

Ikeriane + AHA 0 8Galderma Nutraplus urée – + 18

Cétaphil émulsion + + 0 6,5Cétaphil crème + 0 30

Jaldes IdeltLa Roche Posay Cold cream + + 0 7,5

Lipikar lanoline, parabens, parfum + + 7Toleriane + + 0 6,5Xeroderm urée 3 %, lanoline, parabens – 0 10,5

LED Ichtyosoft 0 + 0 15Lierac Lieracanti

DessèchementLiphaderm Delta 6 parabens + + 25Lutsia Nioleol

Crème + + + 13Lait + + + 9

XeramanceAvec parfum parfum + + 8Sans parfum + + + 8

Neutrogena Crème D parabens + 0 10Émulsion corporelle hydratante lanoline, urée, parfum – + 6

Pierre Fabre Dexeryl Lanoline, parabens + 0 1,75 remb.SSRoc Dermato Cold cream fluide parabens + 0 6

Crème AB5 parabens + + 22Enydrial parabens + + 7Urexine parabens, urée + + 10

Roger Cavailles Soin hydratant corporel Lanoline, urée – 0 4SVR Cold cream + + 0 9

Xerial urée, parabens – 0 11Topialyse émulsion parabens + + 5Xerialine urée, parabens – 0 15

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La tolérance du produit et son acceptabilité sont des pointsessentiels. L’utilisation d’urée, humectant de choix, est ainsilimitée par son effet de cuisson au moment de l’applicationen particulier chez l’atopique sur les zones fissurées.

La sensibilisation aux constituants contenus dans les topi-ques locaux est source de beaucoup de questions. Cettefréquence, étudiée dans une étude prospective récente, mon-tre que le risque d’allergie de contact est sous-estimé même sila prévalence des sensibilisations aux émollients est faible(2,5 %) comparée à celle aux métaux (19,3 %). Le risque desensibilisation s’accroît avec l’âge de l’enfant. Finalement lechoix souvent empirique du clinicien est fondé sur un certainnombre de critères :

• la présence de composants actifs ;• la composition du produit et en particulier l’ajout de

céramides et d’acides gras essentiels qui tente d’apporterune crédibilité théorique qui reste cependant àdémontrer ;

• la forme galénique où l’excipient joue le rôleprimordial ;

• l’absence de toxicité du produit et la simplicité de sacomposition.

L’observance du patient reposera sur la bonne apprécia-tion de l’émollient par le sujet, son agrément à l’utiliser et soncoût.

3.3.2. Les dermocorticoïdesMédicament symptomatique clé du fait de leur rôle anti-

inflammatoire. La majorité des parents étant prévenus desdangers de la « cortisone » voire pour certains franchementcorticophobes, il importe d’expliquer le rôle essentiel de cetraitement dans la prise en charge de l’enfant atopique eninsistant sur les points suivants :

• les dermocorticoïdes sont un traitement incontournableau cours de la DA ;

• leur utilisation pertinente est à la base de la complianceet finalement du résultat thérapeutique dans la grandemajorité des cas ;

• la corticothérapie locale est le « pompier » de l’inflam-mation avec pour corollaires :C moins l’inflammation est maîtrisée et plus le risque de

poussée (reprise du feu) est grande ;C l’essentiel n’est pas d’utiliser une corticothérapie mais

de mettre l’enfant en émission.En pratique, le traitement sera appliqué une seule fois par

jour ce qui améliore la compliance. Son mode d’arrêt brutalou étalé dans le temps est discuté.

Il n’existe aucun consensus européen sur l’utilisation desdermocorticoïdes (certains pays n’utilisent que l’hydrocorti-sone alors qu’en France son indication dans l’eczéma a étésupprimée)

En cas de surinfection, les dermocorticoïdes seront entre-pris 24 à 48 heures après le début de l’antibiothérapie géné-rale.

La stratégie de prise en charge du traitement local de laDA est fondée sur nos connaissances des causes de la mala-die selon le schéma 1 ci-dessous.

3.3.3. La corticothérapie généraleElle demeure un traitement d’exception

3.3.4. Les antibactériensIls ont peu de place.Les antiseptiques locaux ne diminuent que modérément la

colonisation microbienne de la peau (sujet normal : 101 destaphylocoques blanc contre 105 à 107 avec staphylocoquesdorés chez un atopique) or ils peuvent avoir des effets secon-daires bien que ce risque soit plus théorique que pratique. Lachlorhexidine est la mieux tolérée. Les antiseptiques qui nepiquent pas seront préférés aux autres (ex. : Diaseptyl sansalcool mais non remboursé ou Hexomédine à l’eau qui de-mande une préparation).

Les antibactériens modifient la flore résidente et peuventprovoquer des résistances. Ils peuvent par ailleurs entraînerdes allergies croisées par sensibilisation aux conservateurs.

Ces différentes remarques devraient avoir une incidencesur les modalités de prescription des traitements car ceux-ciont un coût.

Schéma 1

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3.3.5. Les antibiotiquesPar voie générale, ils sont réservés aux surinfections dont

le diagnostic est clinique, repérable sur l’inflammation majo-rée et les lésions croûteuses. Les macrolides seront surtoutprescrits pendant huit à dix jours, l’acide fucidique (qui esttrès cher) ou la pristinamycine sont aussi efficaces.

Un cas particulier est celui du nourrisson érythrodermiqueavec adénopathies inflammatoires chez qui l’association sul-faméthoxazole–triméthoprime est rapidement efficace.

Par voie locale, l’antibiothérapie est sans intérêt.

3.3.6. La puvathérapie

Les UV qui agissent en tant qu’immunosuppresseurs sontutilisés chez l’enfant plus grand. Les UVB sont préférés carutilisés en très petite quantité et le risque carcinogène estfaible. Ces traitements ne sont pratiqués que par des derma-tologues selon des protocoles biens codifiés.

Les indications sont limitées :• aux formes étendues dépassant 50 % de la surface

corporelle ;• aux formes UV sensibles (améliorées l’été) ;• et à certaines formes localisées (ex. : mains).

3.3.7. Le traitement de la douleurIl ne doit pas être négligé et peut parfois nécessiter l’usage

de morphiniques.Les antihistaminiques antiprurigineux sont utilisés par

principe mais leur utilité n’est pas démontrée.

3.3.8. Les cures thermales

Elles peuvent rendre service en tant que prise en chargemais l’eau thermale en soi n’a aucun intérêt. De plus, la curedure trois semaines alors que la DA existe 365 jour/an.Malgré tout, les soins et surtout l’intéressement de l’enfant àson traitement, sa responsabilisation pourront aider l’enfantsi les rapports avec les soignants sont de qualité.

3.3.9. Nouveaux traitements immunomodulateursNous parlerons brièvement du tacrolimus (Protopic®)

chez le sujet d’âge supérieur à deux ans et de l’ascomycine(Elidel®) pour l’enfant d’âge inférieur à deux ans. Le premiera une activité égale à un corticoïde classe II et le second declasse I–II. Ce sont des produits peu absorbés par la peaudont les effets secondaires ne sont que théoriques actuelle-ment. Ce sont des épargneurs de corticoïdes locaux. Ils ont uneffet suspensif et sont indiqués dans les eczémas rebelles enparticulier du visage et du cou.

Il faut préciser que seuls les dermatologues et les pédiatrespourront les prescrire.

3.3.10. L’éviction des acariens

Elle sera préconisée de principe dès qu’une suspiciond’allergie est émise.

3.4. La prise en charge

La DA doit être prise en charge de façon complète. Dansdes formes résistantes, avis d’expert et approche multidisci-

plinaire sont nécessaires. Cette solution est plus gratifiantepour le patient ou ses parents et le médecin car l’améliorationest plus significative. Les différents points importants decette prise en charge sont :

• l’explication au patient de sa maladie (schéma 1), indis-pensable pour définir la stratégie de traitement ;

• l’explication du traitement dans ses détails qui permetune prise en charge active par le patient ou ses parents ;

• l’appréhension des facteurs psychologiques qui aggra-vent la DA, comme le stress et le vécu de cette DA ainsique les conséquences sur la qualité de vie du patient, desparents et de la fratrie.

Cette approche éducative rationnelle forte existe dans lespays scandinaves. En Allemagne, la constitution de réseaupour les patients atopiques s’est avérée bénéfique. C’est aussil’objectif de « l’école de l’atopie » qui a été créée à Nantespar monsieur le Professeur Stalder entouré d’une équipemultidisciplinaire incluant dermatologue, pédiatre, allergo-logue, psychiatre, infirmière, diététicienne. Le coût de cetteprise en charge est non négligeable. L’objectif de la premièreconsultation, longue d’environ 90 minutes, est d’établir undiagnostic pédagogique et d’aboutir à un ou deux objectifsthérapeutiques présentés sous forme de contrat (comme parexemple : faire diminuer le Scorad de 20 points). Un cahierde suivi est remis au patient ou à sa famille. Des informationsciblées et personnalisées sont données (ces matériels éduca-tifs peuvent être demandés à La Roche-Posay qui a participéà l’élaboration du projet). Le Scorad est l’élément de sur-veillance le plus objectif à utiliser d’une consultation surl’autre (en général J0, J30 et J65 cette dernière consultationétant réservée aux cas rebelles). L’évaluation de la qualité devie (sur démangeaisons, insomnies, douleurs…) se fera grâceau score de Finley.

La consultation doit faire comprendre et accepter troisobjectifs :

• normaliser la barrière épicutanée qui, congénitalementdéficiente, est capable de se sensibiliser aux facteurs del’environnement et susceptible de faire des poussées ;

• traiter les poussées sans l’aide d’autrui ;• responsabiliser l’enfant pour éviter le conflit quotidien

parent-enfant au moment des soins.Des efforts sont à prévoir dans le sens du consensus.

4. Discussion

4.1. Le bilan

Les controverses existent car chaque « spécialiste » entendce mot selon ses compétences particulières. Les allergolo-gues consultés pour une DA seront sollicités pour faire des« tests », rarement en première intention mais plutôt après leséchecs de traitements locaux successifs et pour apprécier laglobalité de la maladie atopique. Mais quels tests : pneumal-lergènes, trophallergènes, épicutanés ? systématiques ounon ? Il n’y a pas eu consensus peut-être du fait que nos deuxexperts étaient dermatologues.

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Le fait que plusieurs médecins tiennent des discours dif-férents sur l’attitude thérapeutique à adopter est dommagea-ble pour la réussite du traitement et ne devrait pas exister.Mais tous les médecins ne sont pas formés à la même école etles patients ne sont pas raisonnables de multiplier les consul-tants. D’où l’intérêt du travail en équipe ou en réseau. Unethèse a été élaborée sur le vécu des familles face à la multi-plicité des discours.

4.2. Le traitement

4.2.1. Les dermocorticoïdesLà encore des controverses existent sur l’opportunité des

traitements dégressifs vs traitement à la demande. Le traite-ment dégressif est compliqué et donc moins facile à suivremais ce n’est qu’un avis d’expert. Le fait que le traitement nedoit être appliqué qu’une seule fois par jour n’a pas poséproblème.

4.2.2. Les cures thermales

Si notre expert universitaire était peu convaincu de leurintérêt, notre expert Anaforcal les pensait comme une priseen charge satisfaisante et une bonne remise au point. Lesparticipants ont peu pris part au débat.

4.2.3. L’éviction des acariensCette mesure qui semble un peu aléatoire sous nos latitu-

des, sauf cas particulier, prend tout son intérêt à la Guade-loupe ou à la Réunion où les acariens sont extrêmementprésents.

5. Conclusion

La dermatite atopique est une affection fréquente de mé-canisme non univoque pour laquelle la discordance des dis-cours médicaux augmente l’inquiétude des familles. Sonbilan est fondamental qui demande la mise en place deniveaux de référence. Sa prise en charge globale, multidisci-plinaire devrait améliorer son pronostic. L’école de l’atopie aété mise en place à Nantes par monsieur le Professeur Stalderet pourrait devenir une « école de l’asthme et de l’atopie » quipermettrait un rapprochement entre dermatologues et aller-gologues sur la question.

Références

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[10] Vabres P. Poitiers. Dermatite Atopique : données génétiques actuel-les. Rev fr Allergol Immunol Clin Avril 2002 ;42(3) :I.317–23.

[11] Taieb A. Immunomodulation et dermatite atopique. Rev fr AllergolImmunol Clin Juin 2002 ;42(4):I.367–72.

[12] Catteau B. CHU Lille. DA : épidémiologie et données cliniquesactuelles. I.373–7.

[13] Barzegar C, Pradalier A. Approche thérapeutique de la DA. I.410–24.

Livres :

Dermatite atopique, journée de Lyon, mai 2000. J. Libbey. Ed Eurotexpar Afdapa.L’enfant allergique : Approche psychothérapique. S. CADY, collec-tion thérapie, 1 vol. 288 p, Paris, Dunod 2000.

Quatre adresses internet :

1. Société française de dermatologie : www.sfdermato.org ou www.s-fdermato.net École de l’Atopie : Évaluation d’une expérience d’édu-cation thérapeutique chez 40 malades. J.M. Chavigny, F. Adiceom,G. Bernier, M. Debons, J.F. Stalder Nantes.

2. Anaforcal : www.sfaic.com/anaforcal ou www.anaforcal.org3. [email protected] : le Scorad et belle iconogra-

phie (anglais)4. www.ncchta.org/exesumm/summ437.htm. Revue générale des traite-

ments de la DA publiée par le groupe Cochrane fondé sur la médecinepar les preuves (evidence based medecine) : liste critique complètedes traitements utilisés.

Allergie et intolérance aux médicamentsanti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)C. Dzviga, D. Giarmachi, M. Agell Perello, M.-F. Fardeau

1. Objectifs

Les objectifs fixés par les experts et les organisateursétaient :

• établir les critères d’imputabilité : valeur prédictive del’histoire clinique ;

• exploration : tests cutanés, tests de provocation–réintroduction ;

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• proposer une conduite pratique : éviction ou alternati-ve(s) thérapeutiques ;

• avoir des notions sur les mécanismes d’allergie et into-lérance aux AINS.

2. Participants

Les participants étaient pour la plupart des allergologuesexclusifs, quelques pneumo-allergologues, un ophtalmolo-giste, un pédiatre. Presque tous avaient une pratique de l’al-lergie médicamenteuse en milieu hospitalier et les objectifsdes experts répondaient à leurs attentes.

3. Rappel théorique

C. Dzviga a fait un rappel sur les réactions aux médica-ments : mécanismes, tableaux cliniques, méthodes diagnos-tiques, et mesures thérapeutiques. Il a ensuite abordé le casparticulier des réactions aux anti-inflammatoires non stéroï-diens, en insistant sur la démarche diagnostique conditionnéepar le recrutement : un service de dermatologie voit de façonpréférentielle les manifestations cutanées retardées, un ser-vice d’allergologie recrute plutôt les manifestations aiguësrespiratoires ou généralisées…

3.1. Pharmacologie des AINS

Elle est utile à connaître, car certaines réactions auraientun mécanisme lié à la pharmacologie des AINS, par inhibi-tion de la cyclo-oxygénase, diminution de la production desprostaglandines et production accrue de leucotriènes C4 syn-tase (LTC4) (Fig. 1). La structure chimique détermine desfamilles dont la sélectivité d’inhibition des cyclo-oxygénasesest plus ou moins forte :

La deuxième partie de l’atelier, consacrée à un travail ensous-groupes sur deux cas cliniques, a été l’occasion dediscussions et d’échanges entre les participants et les expertset a permis de dégager les étapes du diagnostic et de la priseen charge.

4. Démarche diagnostique et prise en charge

4.1. La première consultation

4.1.1. Elle doit être programmée le plus tôt possible aprèsla réaction, et permet d’établir les critères d’imputabilité :

• l’imputabilité intrinsèque est précisée par un interroga-toire minutieux qui confronte la chronologie des mani-festations avec la liste de tous les médicaments pris ;

Figure 1

Tableau 1

Classification des AINS selon la structure1. Indoliques 6. Acide arylacanoiqueIndocid Buféxamac (Parfenac® …)Sulindac Diclofénac (Voltarene®,

Artotec® …)Étodolac (Lodineº…)

2. Salycylates 7. FenamatesAspirine Nifluril®

3. Pyrazolés 8. OxicamPhénylbutazone Méloxicam (Mobic®)

Piroxicam (Feldène®, Brexin® …)Ténoxicam (Tilcotil® ...)

4. Paraminophénols 9. CoxibsPhénacétine (plus disponible en France)Célécoxib (Célébrex®)

Rofécoxib (Vioxx®)5. Arylpropioniques 10. AutresIbuprofen (Nurefen®, Nureflex® …)Kétoprofen (Profenid®, Ketum®, ..)Naproxene (Apranax® ...) Nimésulide (Nexen®)Flurbiprofène (Antadys®, Cébutid® ...)Acide tiaprofénique (Surgam® …)

Classification des AINS selon la sélectivité1. anti-Cox 1 sélectif : 3. Anti-Cox 2 préférentiels :Aspirine Nimésulide (Nexen®)

Méloxicam (Mobic®)Etodolac (Lodine®)Nabumétone (Nabucox®)

2. Anti-Cox 1 préférentiels : 4. Anti-Cox 2 sélectifs :Acide niflumique (Nifluril®)Diclofénac (Voltarène® ….) Célécoxib (Celébrex®)Kétoprofène (Profénidº® …) Rofécoxib (Vioxx®)Ibuprofène (Advil® ….) piroxicam(Feldène®….)

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• l’imputabilité extrinsèque est démontrée par la consulta-tion des banques de données et la compatibilité desréactions avec les médicaments pris.

4.1.2. Préciser ensuite le caractère de la réaction :• immédiat-retardé ;• identifier les signes de gravité :

C asthme ;C atteinte cutanéomuqueuse, photosensibilisation ;C choc ;C atteinte hépatique, rénale…

4.1.3. Pratiquer les premières investigations• contrôle de la fonction respiratoire : les examens ulté-

rieurs ne seront pratiqués que si elle est normale ;• caractérisation d’un terrain atopique : les examens ulté-

rieurs seront pratiqués en dehors d’une période critiquepour les pneumallergènes saisonniers ;

• recherche de facteurs favorisants : terrain lupique, HIV,hépatites…

4.1.4. Proposer les première mesures• donner la liste des médicaments risquant d’entraîner des

réactions croisées : AINS, fibrates, thiomersal ;

• protection solaire ;• arrêt des traitements pouvant interférer au cours des

investigations ultérieures :C b-bloquants : arrêt avant les tests cutanés et les tests de

réintroduction, peuvent être maintenus éventuelle-ment pour les patch-tests ;

C neuroleptiques, corticoïdes : arrêt avant les patch-tests ;

C anti-H1 ; arrêt avant prick-tests et IDR.

4.1.5. Informer le patient et recueillir son consentement

4.2. La suite des investigations

Tous les tests aux médicaments doivent être effectués enmilieu spécialisé. Les patch-tests et photo-patch-tests, enparticulier pour les AINS, peuvent, si la réaction de départn’a pas été sévère, s’effectuer en ambulatoire.

4.2.1. Les tests cutanés

4.2.1.1. Les tests cutanés à lecture immédiate. Ils présententpeu d’intérêt dans le cas des AINS.

Pricks-tests. Très souvent négatifs, ils sont possibles, maisnon conseillés avec la molécule suspecte, même après uneréaction immédiate ;

IDR. Également non conseillées dans le cas des AINS.

4.2.1.2. Les tests cutanés à lecture retardée. Les patchs-tests. Ils sont peu dangereux : on peut tout tester, en respec-tant le mode préparatoire préconisé par les centres de recher-che. C. Dzviga a donné quelques « recettes » lorsque l’on nepeut pas faire préparer les patchs par la pharmacie hospita-lière :

• un petit comprimé fait environ 0,2 ml, à diluer avec1,8 ml d’eau => préparation à 10 %, un gros compriméfait environ 0,8 ml, à diluer avec 9,2 ml d’eau => prépa-ration à 10 % ;

• conservation : dans l’eau, ne pas conserver, dans lavaseline à 10 % : trois mois.

Ils ne doivent pas être posés sur une peau bronzée.En cas d’érythème pigmenté fixe (EPF) tester sur les

zones pigmentées séquellaires et parfois dans l’eczéma ilpeut être intéressant de tester le produit sur les zones attein-tes.

Tester :• un médicament de chacune des principales classes ;• les coxibs ne croisent pas entre eux, on peut donc en cas

de suspicion de réaction à l’un des deux, tester l’autre ;• les excipients « à effet notoire » (par exemple essence de

Lavandin pour le Ketum) ;Les photo-patch-tests. Il s’agit de la technique de réfé-

rence en particulier dans les allergies de contact aux AINS.L’irradiation par les UVA (surtout) et les UVB (accessoire-ment) modifie la molécule qui devient un allergène. La com-paraison entre les tests non irradiés et les irradiés permet dedifférencier les allergies de contact des photo-allergies(comme par exemple avec le Ketum gel). La lecture à la 72e

ou 96e heure permet de voir une différence entre les troisséries : certains produits vont réagir, en général en UVA, et nedonner aucune réaction sur les zones non irradiées.

4.2.2. Examens biologiquesActuellement ils restent réservés à quelques centres de

recherche et pour les AINS aucun test in vitro n’apported’argument fort pour ou contre une allergie.

4.2.3. Les tests de provocationDans le cadre des réactions aux AINS, les tests de provo-

cation orale (TPO), ou de réintroduction, sont réalisés le plussouvent pour proposer un traitement de remplacement dansla même classe thérapeutique, et plus rarement pour prouverla responsabilité d’un médicament.

Ils peuvent être pratiqués en ambulatoire uniquement dansles cas où la clinique de départ est bien connue, lorsqu’elle aété bénigne, en pratique uniquement eczéma léger et EPF,lorsque les tests cutanés sont négatifs et si l’on réintroduitune molécule différente de la molécule responsable de l’acci-dent initial.

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Ils doivent impérativement être réalisés en milieu spécia-lisé dans tous les autres cas : clinique plus sévère (ou incon-nue), tests cutanés positifs ou de valeur mal déterminée.

Il faut respecter un délai de quatre à six semaines après laréaction. Les réactions aux tests évoluent dans le temps : ilspeuvent se négativer quelques mois ou années après l’acci-dent initial.

4.2.3.1. Les contre-indications des tests de réintroduction.Elles sont presque toutes contenues dans la clinique de l’ac-cident médicamenteux.

Contre-indications classiques. Femme enceinte, chocanaphylactique, asthme non stabilisé, dermatoses bulleuses,atteinte rénale, hépatique ou cardiaque (syndromes d’hyper-sensibilité), vascularité, syndrome de Fernand-Widal

Ne pas tester. Les médicaments pris au cours d’une réac-tion sévère, les médicaments connus pour donner des réac-tions croisées avec ceux-ci, les médicaments de la mêmeclasse.

Le choix des tests est déterminé par le caractère de laréaction clinique

4.3. À chaque forme clinique correspond unephysiopathologie particulière, et la sensibilité des examenscomplémentaires en dépend.

4.3.1. Réactions liées à l’effet pharmacologiqued’inhibition des prostaglandines

4.3.1.1. Insuffısance rénale et apparition d’œdème. Lesœdèmes apparaissent trois à six jours après l’introduction del’AINS. Il s’agit ici d’une baisse de la production des prosta-glandines commune à tous lesAINS. Le risque d’insuffisancerénale est élevé et à réintroduction d’un AINS, y compris unanti-cox2, est très fortement déconseillé.

4.3.1.2. Manifestations hépatiques. les hépatites aiguës doi-vent être explorées en milieu hospitalier, la réintroductionn’est pas recommandée.

4.3.2. Réactions liées à la production de leucotriènes

4.3.2.1. Tableaux cliniques : urticaire, angio-œdème, rhi-nite, asthme. Diagnostic : le TPO à doses croissantes avecdétermination d’un seuil, permet le diagnostic, mais un ris-que de déclencher des réactions sévères existe.

4.3.2.2. Traitement• Le remplacement par un anti-cox 2 peut être proposé,

mais l’on manque actuellement de données pharmaco-épidémiologiques suffisantes.

• L’utilisation d’un antileucotriène type Singulair peutsembler justifiée, mais n’est pas validée.

• L’administration du médicament à une dose inférieureau seuil trouvé au TPO a pu être proposée pourl’aspirine.

• L’induction de tolérance est classiquement proposéepour la salazopyrine ou l’aspirine

4.3.2.3. Facteur de risque : terrain atopique

4.3.3. Hypersensibilité IgE dépendante : possible mais pasprouvée

4.3.3.1. Hypersensibilité retardée• Allergie de contact :

C clinique à aspects polymorphes : eczéma photodéclen-ché avec extension des lésions et rémanence, érythèmepolymorphe de contact ;

C mécanisme : type IV, délai d’apparition moyen septjours ;

C diagnostic : photo-patch-tests :- batterie standard ICRDG ;- tester un AINS de chaque famille (dilution 1–5–

10 %) ;- thiomersal ;- fibrate ;- essence de lavandin.

Cette batterie en simple et en UVA (5 joules) pré-sente un risque faible si les dilutions sont respectées.

- réintroduction des molécules : pour celles qui ontdonné des tests négatifs Possible en ambulatoireselon la clinique ;

- facteur de risque : terrain atopique, sexe (femme),sensibilisation fréquente aux topiques courants.

• Érythème pigmenté fixe : l’exploration est possible enambulatoire, les patch-tests réalisés sur les zones pig-mentées séquellaires sont performants.

• Syndrome d’hypersensibilité : DRESS (Drug Rash withEosoniphilia and Systemic Syndrom).

• Les patch-tests peuvent être pratiqués en milieu hospita-lier avec de grandes précautions.

• Toxidermies bulleuses : leur prise en charge, leur traite-ment et leur exploration sont réservés à quelques centresspécialisés.

5. Conclusion

L’intolérance aux AINS soulève encore bien des ques-tions :

• pourquoi le terrain atopique est-il un facteur de risque del’intolérance ?

• comment intégrer l’efficacité de la « désensibilisation »dans une théorie strictement enzymatique ?

• quelle valeur donner à certains patchs tests positifs encas d’atteinte rénale, ou d’œdème de Quincke ?

• va-t-on toujours pouvoir proposer les « Cox 2 » commealternative dans les réactions immédiates (l’augmenta-tion des cas d’anaphylaxie rapporté pour le célécoxib neconfirme pas cette proposition).

Le test de provocation à dose croissante reste l’examen debase des réactions de type immédiat, mais il est souventintéressant d’utiliser les photos-patch- tests dans les nom-breuses autres circonstances cliniques. Cela permet la plu-

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Page 9: Compte-rendu des ateliers de l'Anaforcal, JPA 2003

part du temps, lorsque la clinique n’a pas été trop sévère, depouvoir réintroduire un AINS : on choisira une moléculen’ayant pas réagit au niveau des tests, et si possible avecsélectivité le plus possible Cox2.

Références

[1] Demoly P. Hypersensibilité aux anti-inflammatoires non stéroïdiensOpa pratique no 159 octobre 2002 pp. 6–7.

[2] Martin-Garcia C, Hinojosa M, Berges B, Camacho E, Garcia Rodri-guez R, Alfaya T, et al. Safety of a cyclo-oxygénase-2 inhibiteur inpatients with aspirine asthma Chest 2002 Jun;121(6):1812–7.

[3] Milpied-Homsi B. Eczéma de contact aux anti-inflammatoires nonstéroïdiens topiques. Immunologie clinique etAllergologie. J-F Nico-las, F. Cousin, J. Thivollet, ed. John Libbey, Eurotext, Paris 2001,pp. 109–19.

[4] Barbaud A. Toxidermies aux AINS. Immunologie clinique et Aller-gologie J.-F. Nicolas, F. Cousin, J. Thivollet, ed. John Libbey, Euro-text, Paris 2001, 121–32.

La dermatite des mainsP. Amblard, A. Khoury, A. Cheynel, F. Luquiau

Le but de cet atelier la dermatite de la main, composéd’une majorité d’allergologues, est d’arriver à donner uneétiquette étiologique à une dermatite de la main en utilisant laclinique, l’interrogatoire et les tests qui sont à notre portée.

Dans la première partie, l’iconographie du Pr Amblardnous rappelle les éléments cliniques du diagnostic positif etdes diagnostics différentiels, point de départ de discussionsentre praticiens.

Dans la deuxième partie, nous avons retenu trois diagnos-tics de dermite de la main : la dermite de contact aux protéi-nes, la dermite d’irritation et l’eczéma allergique. À partir detrois cas cliniques, nous confrontons nos expériences person-nelles, méthodes, diagnostics, interrogatoires, l’ordonnancethérapeutique et tous les éléments de l’ordonnance de pré-vention.

Première partie

Les diapositives du Pr Amblard illustrent six diagnosticsde dermatite de la main :

• l’eczéma de contact ;• et cinq diagnostics différentiels : dermatite d’irritation,

aiguë ou chronique, dermatite de contact aux protéinesanimales et végétales, dysidrose et le psoriasis de lamain.

1. L’eczéma de contact

L’eczéma de contact débute cinq à sept jours après lecontact allergisant et dans un délai de 24 à 48 heures lors des

contacts ultérieurs. Il évolue en quatre phases : érythéma-teuse prurigineuse, vésiculeuse, suintement avec croûtellespuis desquamation. Le grattage crée une lichénification et ilpeut exister une extension des lésions à distance. Les testsépicutanés seront positifs.

La pulpite est le plus souvent une dermite de contact avecdisparition des empreintes digitales. La pulpe des doigts estsèche, craquelée, crevassée, sanguinolente. Les professionsconcernées le plus souvent sont les horticulteurs, les cuisi-niers (ail, oignon), les prothésistes dentaires…

2. La dermite d’irritation

La dermite d’irritation, de mécanisme non immunologi-que, se définit comme une atteinte de la couche cornéelimitée aux zones d’application de l’agent agressif. En règle,il n’y a pas de bulles, sauf s’il s’agit d’un effet caustique. Leprurit est absent. Il existe une sensation de douleur vraie.C’est une affection multifactorielle due aux microtraumatis-mes répétés, à la fréquence et à la durée de lavage des mains,d’exposition au froid ou à l’humidité, aux graisses, aux huilessolubles, aux hydrocarbures aromatiques, aux solvants, auciment à pH alcalin, à l’ammoniaque…

Les dermatites aiguës sont caractérisées par un érythèmediffus, macules ou maculopapules évoluant en vésiculobullesavec, parfois, un aspect de brûlure chimique.

La dermatite chronique se reconnaît à une sécheresseintense avec desquamation de la face dorsale des mains,disparition des empreintes digitales des doigts et de la paumede la main, par des crevasses profondes, apparition de sillonsou lignes de Beau : dépressions transversales souvent incrus-tées de salissures. Les patch-tests ont une réponse irritative.La dermite d’irritation peut faire le lit de l’eczéma allergiquede contact (ex : utilisation de la crème Cetavlon par lesinfirmières, dermite des mains des ménagères, des shampoui-neuses).

3. La dermatite de contact

La dermatite de contact aux protéines animales et végéta-les est une dermatite d’aspect eczémateux qui se compliquede poussées urticariennes. Elle se manifeste 3 à 30 minutesou quelques heures après le contact déclenchant (viandes,poissons, trypsine de l’intestin des poissons, alpha amylasede certaines farines, latex, liquide amniotiques des va-ches…).

Cette dermite résulte de phénomènes irritatifs et immuno-logiques. Les pricks et scratch-tests sont positifs.

Deux autres diagnostics différentiels fréquemment ren-contrés sont également commentés :

4. La dysidrose

Dermatose vésiculeuse ou bullo-vésiculeuse évoluant parpoussées, touchant la face latérale des doigts, avec respect de

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Page 10: Compte-rendu des ateliers de l'Anaforcal, JPA 2003

la face dorsale et de la paume des mains. Il s’agit d’éruptionseconde, soit à une infection mycosique ou bactérienne, avececzéma à distance, soit par sensibilisation à un allergèneagissant par voie systémique : le nickel (TPO au nickelpositif, en phase quiescente puis régime alimentaire d’exclu-sion sans nickel efficace), TPO au baume du Pérou ; oufavorisée par la prise de certains médicaments (contraceptifs,aspirine, paracétamol) — le tabac : dysidrose des gros fu-meurs — la chaleur, par trouble isolé de la sudation (différentd’une hyperhydrose).

Le traitement consiste en l’utilisation de dermocorticoïdeset certains préconisent l’injection de toxine botulique tous lesquatre mois.

5. Le psoriasis

Le psoriasis : aspect non caractéristique de la paume desmains : nappe érythématosquameuse, mais aspect caractéris-tique sur la face dorsale des mains et des doigts avec atteinteunguéale en dé à coudre (signe non pathognomomique),éruption érythémato-squameuse ± prurigineuse (50 %), par-fois psoriasis pustuleux (diagnostic différentiel de la dysi-drose), d’aspect cutané proche de la dermatite de contact auxprotéines. Le signe de grattage à la curette est positif. À partirdu diagnostic de psoriasis des mains, rechercher des lésionssur les faces convexes du corps : coudes, genoux, flancs etrégion lombaire.

Une biopsie faite au niveau de la face dorsale de la mainsou de la face antérieure du poignet confirme le diagnostichistologie typique de parakératose et épaississement de lacouche cornée. La complication à craindre est le psoriasispustuleux généralisé.

Traitement du psoriasis des mains : corticoïdes avec pan-sement occlusif classe 2 ou 1 proposé dans notre atelier, tousles jours une semaine, puis en dégressif. Une puvathérapielocale est possible et l’utilisation de rétinoïdes pour le pso-riasis pustuleux. C’est une maladie polygénique, sans guéri-son.

Deuxième partie

Le Pr Amblard nous propose une discussion fondée sur lesobservations d’un jeune apprenti chocolatier, puis celled’une infirmière de 28 ans. Le Dr Khoury présentera lesproblèmes diagnostiques et thérapeutiques posés par uneapprentie coiffeuse.

1. Première histoire clinique

Un apprenti chocolatier dans une pâtisserie, consulte pourdes lésions très prurigineuses des mains s’étendant à la faceantérieure des avant-bras et au décolleté.

L’examen objective un eczéma aigu du dos des mains, unérythème diffus des mains et de la face antérieure des avant-bras. Ces lésions s’apaisent un peu le soir et redémarrentrapidement à la reprise du travail.

Produits manipulés : farine de blé, margarine, beurre,sucre-glace, amidon de maïs (pour préparer les chocolats deNoël), produits d’entretien (toujours avec des gants).

ATCD : petites poussés d’eczéma dans l’enfance et durantl’apprentissage en pâtisserie.

Un court arrêt de travail et une semaine de cours théori-ques favorisent la disparition de l’urticaire et presque totale-ment de l’eczéma.

Nous retenons quatre points forts :• la forte suspicion de pathologie professionnelle, ryth-

mée par le travail ;• le choix et l’interprétation des tests cutanés :

C prick-tests avec aéro-allergènes et avec les produitsmanipulés au laboratoire. Blatte, alpha-amylase, fa-rine de blé, farine de seigle, levure de boulanger : testsnégatifs ;

C pricks avec les allergènes natifs : farine modifiée etamidon de maïs apportés : apparition en moins de20 minutes d’une vingtaine de petites papules urtica-riennes.

• La batterie ICDRG testée est négative.• Le diagnostic de dermatite aux protéines repose sur les

prick-tests et non sur les patch-tests ;

Tableau 1

Eczéma de contact allergique Dermatite irritative Dermatite de contact aux protéinesanimales et végétales

Clinique Eczéma aigu vésiculo-suintant Lésions érythémateuses, sèches, cre-vassées.

Exacerbation d’un eczéma

Eczéma chronique, squameux, sec,lichénifié

Rarement vésicules, suintement Érythème, vésicules

Urticaire associéePlaintes Prurit intense Douleur et parfois sensation de brû-

luresPrurit

Délai de survenue 5 à 7 jours après le premier contact 3 à 30 minutes 30 à 60 minutes après le contact24 à 48 heures après réintroductionDiagnostic Patch-tests positifs Tests ET irritatifs Prick-tests positifsFaux positifs Scratch-tests positifsAgents en cause Chrome, nickel, caoutchouc, résines

(liste non exhaustive)Caustiques, solvants, savons déter-gents

Protéines animales et végétales

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Page 11: Compte-rendu des ateliers de l'Anaforcal, JPA 2003

• la dermatite aux protéïnes est une association d’eczémaet d’urticaire qui touche les métiers de l’alimentation(boulangers, poissonniers, charcutiers, bouchers, per-sonnels de restauration, commerces de fruits légumes) ;

• arrêt de travail et traitement corticoïde non dégressifpuisqu’il y a suppression de la cause pendant l’arrêt detravail.

Un certificat de déclaration de maladie professionnelle estremis au patient pour le médecin du travail et une réorienta-tion est envisagée (dossier cotorep).

2. Deuxième histoire clinique

Une infirmière de 28 ans, consulte pour un eczéma du dosdes mains et de la face antérieure des poignets évoluant parpoussées. Il a tendance à s’étendre sur la face antérieure desavant-bras. Ces manifestations s’améliorent un peu pendantles vacances mais sans disparaître. Actuellement, la pousséeest très invalidante car des crevasses se sont installées au dosdes doigts et la peau est globalement très irritée.

Le traitement corticoïde local par Locoïd crème épaisseest très moyennement efficace.

2.1. Premier point

La suspicion de maladie professionnelle a nécessité unarrêt de travail pour réaliser un bilan. Cette reconnaissanceest importante en vue d’une réorientation.

• Tests épicutanés avec BSE + Euxyl K 400, benzalko-nium, chlorhexidine, hydrocortisone, bétaméthasone,budésonide (lecture des corticoïdes à J7).

Résultats : parabens +++ ; IPPD + (peu pertinent) ; sesqui-terpènes ; lactones (douteux, pas de pertinence) ; benzalko-nium (douteux, assez pertinent).

•Prick -latex : négatif.•Prélèvement bactériologique montrant d’assez nombreu-

ses colonies de staphylocoques dorés.La réparation cutanée est obtenue par un traitement local

par fucidine.Une ordonnance de prévention précise la bonne méthode

de lavage et le séchage des mains, le choix de gants en vinyleet de gants de coton à l’intérieur des gants de caoutchouc,leur utilisation à bon escient, le graissage de l’épiderme, lechoix de crèmes barrières sans parabens.

La sensibilisation aux parabens est insuffisante pour faireune déclaration de maladie professionnelle.

2.2. Deuxième point

Un an plus tard, après une nette amélioration, l’eczémas’accentue de nouveau et se crevasse malgré l’éviction desparabens et l’utilisation de gants. Reprendre un bilan estnécessaire.

Les tests épicutanés avec les produits utilisés au travail età la maison sont négatifs.

Il n’y a pas de nouvel allergène en cause. Il s’agit d’unedermite d’irritation avec allergie aux parabens sur fond deterrain atopique.

L’ordonnance de prévention est renforcée : éviter le portde bagues sous les gants ; déclaration écrite pour gants sanslatex et choix de crème pour les mains : crème main LED,s’adsorbe et protège, crème SVR émulsion 60 % ou crèmeBépanthène (très grasses, à utiliser le soir). Un choix decrème barrière ou gants liquides est proposé (Vidal) : Sperid,Lipotop, Repair, Protec, Bariéderm (Uriage) en sachant queces gants liquides partent dès le troisième lavage. Les crèmesgraissantes utilisées avant le travail protègent également del’eau, à choisir sans parfums, mais sans conservateurs estplus difficile.

Pour cette patiente, pas de déclaration de maladies profes-sionnelle, ni changement d’orientation.

3. Troisième histoire clinique

• Une apprentie en école de coiffure, présente des lésionsérythémateuses, prurigineuses fissurées au niveau desmains. Parfois, aspect sec desquamatif évoluant parpoussées, aggravation pendant les stages, atténuation enpériode de cours et en vacances.Antécédents : aucun. Elle effectue plusieurs sham-pooings par jour.Patch-tests avec BSE + batterie coiffure : négatifs.Le diagnostic est celui de dermite irritative, à traiter parémollients : Xerand, Cérat si sécheresse cutanée ++,corticoïdes légers. Le conseil : éviter les contacts fré-quents avec l’eau et les produits sensibilisants, utilisergants ou crèmes protectrices.

• Cinq ans après, la patiente consulte pour de nouvelleslésions identiques au niveau des mains plus quelqueslésions du visage. Elle a ouvert un salon de coiffure, asouvent les mains dans l’eau. Ce jour, grosse poussée,surtout au niveau du cuir chevelu.Antécédent : notion de psoriasis du cuir chevelu, déjàtraité : calcipotriol ⇒ aggravation puis bétamétasone ⇒amélioration. Pendant les vacances : amélioration deslésions.Elle est sous anti-Hl + dermocorticoïdes mains et cuirchevelu. Elle vient de se faire une teinture, pas de notionde stress.Aucune autre localisation cutanée de psoriasis. L’exa-men du cuir chevelu confirme le diagnostic d’eczéma(d’ailleurs aggravé par Dévonex et amélioré par Dipro-sone) et l’absence de lésions de psoriasis sur le corps.Les patch-tests avec BSE, batterie coiffure, produitsd’hygiène personnelle, latex sont faits : PPD +++, tein-ture capillaire +++.Tester tous les composants de la teinture capillaire encause (fabricant contacté) permettra l’éviction optimale.Le diagnostic de psoriasis est alors remis en cause, etpour celui d’eczéma allergique à la PPD.

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Le traitement associe Betnéval lotion ou Locoïd fluide,un anti-histaminique de première génération plus sédatifque ceux de 2e génération vis-à-vis du prurit de l’ec-zéma, et surtout l’arrêt de contact avec toute teinturecontenant de la PPD. Pour elle-même éventuellement,elle peut utiliser les couleurs dédicace de l’Oréal (sansPPD).

4. Conclusion

La visualisation de ces six dermatites des mains était lapremière étape nécessaire.

Puis l’implication active du patient quant à ses antécé-dents (atopie ou non, métiers antérieurs), quant à la totalitédes produits utilisés au travail et à domicile, leur fréquenced’utilisation, leur dilution, la lecture des fiches techniques,les précisions quant au geste professionnel et au poste detravail confirmées par le médecin du travail, tout ces élémentssont indispensables à connaître pour une prise en chargeefficace de la dermatite des mains. Les soins locaux adaptéset le suivi de l’ordonnance de prévention pourront éviterrécidive et déclarations itératives d’inaptitude profession-nelle.

Références

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[3] Pr Guillet G. La dermatite atopique : épidémiologie, clinique, la partde l’allergie (mise au point) Allergie et Immunologie, vol. XXXIIno 10-2000.

[4] Pr J.M. La chapelle les dermites des mains : une approche holistiquedu problème. Allergologie pratique no 61 Juillet 2002.

[5] Progrès en dermato-allergologie : compte-rendu Gerda 2001 Ed Johnlibbey Eurotex, Paris.

[6] Taïeb A. Immunomodulation et dermatite atopique. Rev Fr AllergolImmunol Clinique, Juin 2002 vol. 42, p. 367–72.

Immunothérapie spécifique : indications,contre-indications ; incidents, accidentsM. Tunon de Lara, A. Magnan, J.-F. Fontaine,M.-H. Davigo-Houssin

1. Introduction

L’allergologue libéral est bien entendu confronté dans sapratique au choix du meilleur traitement pour son patient,dans une vision globale de la maladie allergique mais aussiune approche personnalisée et pratique. Le but de cet étalierétait de répondre à la nécessité pour le praticien allergologued’actualiser ses arguments décisionnels en matière d’immu-

nothérapie spécifique, dans le cadre des consensus thérapeu-tiques et des textes légaux qui marquent l’évolution despratiques médicales.

2. Matériel et méthode

Les ateliers ont été préparés après revue de la bibliogra-phie, en particulier le consensus de l’Organisation mondialede la santé de 1998, publié en France en 1999 dans la revuefrançaise d’allergologie. Nous avons ainsi déterminé nosobjectifs pédagogiques, les ayant faits valider par nos expertsles Prs Tunon de Lara et Magnan. Au début de la séance, lerecueil des besoins de chaque participant sur paper board aégalement permis de mettre en avant les points qu’il fallaitrésoudre avant la fin de l’atelier et de définir la typologie dugroupe.

Nous avons choisi de travailler à partir de la résolution decas cliniques. Trois cas cliniques par séance, les participantsdevant travailler en groupe sur un seul cas, chacun constituésde trois enveloppes, pour respecter une progression commelors une véritable prise en charge clinique, avec secondaire-ment une mise en commun et une discussion des pointsdécisifs. L’apport de nos experts s’est fait au fur et à mesuredes questions soulevées, dans la plus grande simplicité etconvivialité, mais aussi la rigueur, autant de nos expertshospitaliers, différents pour chaque sujet, que de notre expertAnaforcal, avec toute son expérience pratique, venue alimen-ter celle des participants.

Pour la séance sur les indications et contre-indications,avec comme expert hospitalier le Pr Tunon de Lara, lesobjectifs étaient les suivants :

• lister les incidents observables dans une immunothéra-pie spécifique injectable et sublinguale ;

• lister les accidents possibles dans une immunothérapiespécifique injectable et sublinguale ;

• lister les facteurs de risques de ces incidents etaccidents ;

• lister les précautions à prendre pour la réalisation desinjections, notamment sur le plan médicolégal.

Les cas cliniques insistaient sur des situations pratiques deconsultation

libérale, mettant en jeu la responsabilité propre de l’aller-gologue. Dans l’un, il s’agissait d’une enfant de cinq anssouffrant de rhinite persistante, avec sensibilité immédiateaux acariens. Dans un autre, il s’agissait d’un homme de25 ans, boulanger mais aussi porteur d’une rhinite pollinique,et d’un asthme aggravé au travail. Et dans le troisième, unedame de 56 ans, suspecte d’allergie aux hyménoptères.Étaient demandés les arguments et les contre arguments pourla mise en route d’une immunothérapie spécifique, ainsi queles précautions à prendre.

Pour la séance sur les incidents–accidents, avec commeexpert le Pr Magnan, les objectifs étaient les suivants :

• lister les indications d’une immunothérapie spécifiquedans l’allergie aux pneumallergènes et dans l’allergieaux venins d’hyménoptères ;

210 Compte-rendu de réunion / Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique 44 (2004) 199–217

Page 13: Compte-rendu des ateliers de l'Anaforcal, JPA 2003

• citer trois contre-indications d’une immunothérapiespécifique ;

• lister les contre-indications d’une immunothérapie spé-cifique en rapport avec la pathologie traitée, en rapportavec une pathologie associée.

Les cas cliniques de cette séance s’appuyaient, pour lepremier cas sur l’histoire d’un homme de 50 ans, venantd’arriver dans la région et demandant à poursuivre une désen-sibilisation injectable au chat. Le second cas parlait unefemme de 35 ans en désensibilisation injectable polliniquemais devant partir quelque temps à l’étranger (poursuite dessoins par autrui). Le troisième, d’un apiculteur de 50 ans,allergique aux abeilles. Étaient demandées les précautions àprendre dans la réalisation pratique, avant la décision et encours de traitement, ainsi que les mesures à envisager enparticulier sur le plan légal.

3. Résultats

Lors de la première session (7A-indications et contre-indications), la mise en commun des cas cliniques a permisde mettre en évidence les points suivants :

• d’abord à l’anamnèse, importance de la description dessignes cliniques et de leurs circonstances de survenue etde pérennisation, de leur évolutivité en fonction desthérapeutiques suivies, de l’habitus, de la vie profession-nelle. Attention portée sur les pathologies concomitanteset leurs traitements, en particulier pour la décision dedésensibilisation aux hyménoptères, en raison de l’âgedes patients concernés ;

• importance également du bilan cutané par pricks, et pourcertains, mais pas tous, de la recherche du seuil deréactivité cutanée aux IDR pour les venins ;

• discussion de la place de la biologie, qui semblait à laplupart non indispensable et non prédominante dans laprise de décision de désensibilisation, sauf pour leshyménoptères ;

• place d’un temps d’évaluation des mesures d’éviction,pour les acariens, associé au traitement antihistamini-que, avant la décision d’immunothérapie spécifique,d’un à trois mois pour la grande majorité desparticipants ;

• importance d’un bilan respiratoire préalable à la désen-sibilisation, avec épreuves fonctionnelles respiratoires(EFR) à partir du moment où il y a des signes cliniquesd’asthme ou des antécédents personnels, si l’âge le per-met, et même dès présence d’antécédents familiaux pourcertains participants.

Pour la seconde session (7B-incidents–accidents), nousavons discuté des points suivants :

• le respect de la déontologie envers un confrère instiga-teur de désensibilisation, confronté à la nécessaire ré-évaluation de l’indication d’une désensibilisation, quandles conditions de vie changent ;

• la prise en considération de tous les paramètres (habitusactuel et prévisible, réactivité aux allergènes in vivo

pendant cette désensibilisation, effet des thérapeutiquesanti-allergiques nécessaires associées), et surtout étatclinique respiratoire, à chaque consultation dedésensibilisation ;

• savoir interroger régulièrement le patient sur les patho-logies associées et leurs traitements, dont les bêta-bloquants par voie générale et les Inhibiteurs d’enzymede conversion de l’angiotensine, y compris en topique(en pensant aux collyres anti-glaucomateux) ainsi quesur leur consommation d’antihistaminique, de bêta-2dilatateur bronchique ;

• savoir confier un traitement de désensibilisation injecta-ble à un confrère, savoir utiliser le carnet de liaison ets’assurer que le patient est bien gardé 30 minutes en salled’attente ;

• ajustement des doses en fonction des réactions locales eta fortiori générale.

Nous avons relu ensemble dans les deux groupes certainspassages du consensus de l’OMS sur la désensibilisation, etdu consensus Aria sur les rhinites allergiques. La discussions’est trouvée aiguillée par des remarques pertinentes et vé-cues quand au cadre légal de la désensibilisation, la place duchariot d’urgence adapté au cabinet médical, la nécessitéd’un consentement éclairé écrit du malade, recommandé parla commission tripartite SFAIC-Snaf- Anaforcal avant demettre en route une désensibilisation. Madame le Dr Gros-claude nous a fait part de son expérience en désensibilisationsublinguale, précisant le début possible à partir de trois ans,le plus souvent cinq ans, non parlant de la possibilité de « spitout » = fait de recracher les gouttes après les deux minutes enbouche, et nous assurant de l’excellente tolérance ainsi queles résultats probants qu’elle a pu constatés sur 15 ans dejà.

4. Discussion

Le praticien allergologue se doit de connaître, ou de relirerégulièrement, le consensus de l’OMS relatif à l’immunothé-rapie spécifique, et dont les principaux points, ceux que nousavons revus ensemble, sont résumés ci-après :

Les buts de l’immunothérapie spécifique :• l’immunothérapie et l’éviction des allergènes sont les

seuls moyens thérapeutiques capables de modifier l’évo-lution naturelle de la maladie. L’immunothérapie n’ex-clue pas l’utilisation des médicaments symptomatiques ;

• les objectifs majeurs du traitement immunologiquessont, à court terme, d’atténuer les réponses aux facteursallergiques déclenchants qui provoquent les symptômeset finalement de tempérer la réponse inflammatoire et deprévenir le passage de l’affection à la chronicité.

L’efficacité de l’immunothérapie aux pollens a été scien-tifiquement documenté pour les pollens de graminées, am-brosia, pariétaire, cèdre. Et l’immunothérapie aux acariensest efficace sur la rhinite pérenne et sur l’hyper-réactivitébronchique.

Les réactions locales de type nodule sous-cutané au pointd’injection sont possibles avec les extraits absorbés sur alu-

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minium et doivent alors faire préférer les extraits sans alumi-nium si la symptomatologie s’avère trop gênante. Les réac-tions systémiques apparaissent le plus souvent dans les30 minutes et il convient alors de réajuster le programmed’immunothérapie.

Les facteurs de risques de réactions systémiques sontl’asthme non contrôlé ou avec un VEMS inférieur à 70 % dela valeur prédite, des symptômes exacerbés par une exposi-tion allergénique en cours, un degré élevé d’hypersensibilité,le changement de flacon d’un vaccin non standardisé, l’erreurde dosage, la mise au point incorrecte de la dose, l’absence derepos après l’injection ou injection à domicile, le début del’anaphylaxie mortelle survenant alors dans les 20 minutessuivant l’injection. Les réactions systémiques peuvent êtrepotentialisées par les bêta-bloquants. Les fortes réactionslocales ne permettent pas de prévoir la survenue de réactionsystémique. Les traitements d’entretien sont moins risquésque lors de la phase de progression des doses. Une prémédi-cation anti-allergique peut diminuer les risques de réactionsystémique. La cause de la mort chez la plupart des patientsest une défaillance respiratoire.

Les mesures de précaution sont l’examen clinique avantl’injection avec un interrogatoire préalable (état respiratoire,exposition allergénique) et une période d’attente de 30 minu-tes. Selon le consensus, le matériel indispensable à la réali-sation des injections d’extraits allergéniques dans de bonnesconditions de sécurité doit aussi comprendre de l’adrénalineinjectable, un matériel d’oxygénation, des antihistaminiqueset corticoïdes injectables.

La voie sublinguale suivie de déglutition, le vaccin devantêtre retenu une à deux minutes avant d’être avalé, et la voiesublinguale avec rejet après ces minutes sont validées enFrance, pour des doses plus fortes que des doses équivalentesen injectables, sans effets systémiques chez les adultes, avecdes effets locaux toujours tolérables et résolutifs en moinsd’un quart d’heure.

Chez l’enfant, l’immunothérapie spécifique est possible àpartir de deux ou trois ans, le plus souvent après cinq ans.Mise précocement en route, elle peut modifier le cours natu-rel de la maladie allergique, par exemple en cas de rhinocon-jonctivite, limitant le risque d’apparition ultérieure d’unasthme. Il est possible de désensibiliser les enfants aux ve-nins d’hyménoptères si nécessaire.

Les contre-indications relatives à l’immunothérapie spé-cifique comprennent :

• les maladies immunopathologiques et les immunodéfi-ciences sérieuses

• les affections malignes ;• les psychopathologies sévères ;• les traitements par bêta-bloquants, même en topique ;• une médiocre observance ;• un asthme échappant au contrôle de la pharmacopée ou

avec VEMS toujours inférieur à 70 % de la valeurprédite- sauf pour les venins d’hyménoptères

• les maladies cardio-vasculaires importantes — sauf pourles venins d’hyménoptères ;

• les enfants au dessous de cinq ans — sauf pour les veninsd’hyménoptères ;

• la grossesse n’est pas une contre-indication à la pour-suite de cette thérapeutique, mais mieux vaut ne pasdébuter celle-ci au cours de la grossesse.

Les indications selon les allergènes sont, pour les pollino-ses, la maladie allergique trop sévère et durable. Pour lesacariens, l’indication est claire si les mesures d’évictionn’améliorent pas le patient. Pour les animaux, on peut désen-sibiliser si l’éviction est insuffisante ou impossible. Pour lesmoisissures, si la pertinence est établie et seulement avecl’extrait alternaria, cette thérapeutique peut être choisie. Onne désensibilise pas les allergies alimentaires. Et dans le casde la dermite atopique, l’efficacité de l’immunothérapie spé-cifique aux pneumallergènes n’est pas démontrée.

La décision de prescrire une immunothérapie spécifique etle choix des modalités de suivi revient à l’allergologue, quitient compte de la sévérité de la maladie, des mesures d’évic-tion et de leurs effets, de l’efficacité des thérapeutiques dis-ponibles, des risques encourus, une pharmacothérapie d’ap-point pouvant être nécessaire.

5. Conclusion

Indications, contre-Indications, incidents et accidents sontconnus de tous les allergologues mais cet atelier a permis unrafraîchissement de nos références décisionnelles pour cettethérapeutique, recadrant le problème dans ses objectifs àlong terme, remettant en lumière toutes les conditions néces-saires préalables et les conditions d’application pratique.

Références

[1] Commission tripartite SFA, SNAF, Anaforcal, guide de bonne prati-que médicale en allergologie : hyposensibilisation spécifique paren-térale. Rev, Fr Allergol Immunol 1990;30(1):41–3.

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[9] Consensus ARIA 2001 lors du congrès de pneumologie de languefrançaise de janvier 2002, Nice Acropolis.

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[11] Muller U. Quand débuter et arrêter la désensibilisation aux veninsd’hyménoptères. Rev Fr Allergol Immunol 2002;42:330–4.

[12] Moller C. Dreborg : pollen immunotherapy reduces the developmentof asthma in children with seasonal rhinoconjonctivitis (The PatStudy). Jaci 2002;109(2):251–6.

Visage et allergie : œil allergiqueL. Helleboid, C. Frick, C. Mouton-Faivre, J. Flabbee

L’atelier portait sur le diagnostic des conjonctivites. Aprèsun rappel sur l’anatomie de l’œil, puis sur la classification desallergies oculaires, ont été évoqués, le diagnostic positif, lediagnostic différentiel des conjonctivites et de façon suc-cincte leurs traitements. Une place particulière a été faite à laconjonctivite vernale.

1. Rappel sur l’anatomie de l’œil et sur les zonespouvant être le siége de manifestations allergiques

L’examen ophtalmologique doit être systématique et, exa-miner toutes les zones « sensibles » :

• les paupières sont le siège d’eczéma de contact ou d’af-fections d’autre nature, il faut savoir demander un avisdermatologique en cas d’hésitation sur le diagnostic ;

• le bord palpébral et la racine de cils sont le siège deblépharites, allergiques ou non : rosacée palpébrale.L’infection des glandes de Meibomius est responsablede chalazion qui évolue vers l’enkystement. Le traite-ment est alors chirurgical. L’orgelet est dû à l’infectiondes glandes annexes des cils, son évacuation est généra-lement spontanée.

• l’examen de la conjonctive palpébrale supérieure se faiten retournant la paupière. La technique pour retournercette paupière est la suivante : le sujet regardant vers lebas, on tire la paupière en avant et on la retourne enprenant appui sur un trombone ou un coton-tige ;

• examen de la zone limbique qui est la jonction entre laconjonctive et la cornée ;

• dans le cas de conjonctivites allergiques, la cornée est lesiège d’une atteinte indirecte : kératite, ulcération, res-ponsables d’un symptôme à rechercher impérativement :la baisse de la vision ;

• le film lacrymal : il capte les pneumallergènes et lesrépartit sur toute la surface du globe. Il agit de mêmeavec les irritants et les médiateurs de l’inflammation.

2. Les conjonctivites

On en distingue cinq grands types :• la conjonctivite aiguë allergique dont le modèle est la

conjonctivite pollinique ;

• la conjonctivite chronique per-annuelle (exemple del’allergie aux acariens) ;

• la kérato-conjonctivite de la dermatite atopique ;• la kérato-conjonctivite vernale ;• la conjonctivite giganto-papillaire des porteurs de

lentilles.

2.1. La conjonctivite aiguë allergique

Les signes cliniques classiques sont connus, mais il fautévoquer une autre étiologie devant l’existence de symptômesqui doivent faire absolument pratiquer un examen ophtalmo-logique. Une douleur signe l’atteinte cornéenne de même quela diminution de l’acuité visuelle, le blépharospasme.

Un myosis unilatéral doit être également recherché.Il faut penser au diagnostic d’herpès cornéen, favorisé par

la prescription des collyres corticoïdes.À côté de l’allergie aux pneumallergènes, il faut savoir

dans de rares cas de conjonctivites aiguës, évoquer une ori-gine alimentaire (observation personnelle de Laurent Helle-boid sur une allergie alimentaire aux oignons).

2.2. Les conjonctivites chroniques

Aucun signe clinique ou aspect ne sont typiques de l’ori-gine allergique, celle-ci n’est prouvée que par les tests deprovocation oculaire (TPC). Cependant, il est classiqued’évoquer le diagnostic de conjonctivite chronique allergi-que devant :

• un prurit de l’angle interne de l’œil, un gonflementpalpébral, une rhinorrhée associée ;

• l’efficacité des traitements antérieurs en sachant qu’encas de sécheresse oculaire, tout collyre apporte une amé-lioration plus ou moins importante. De même les corti-coïdes sont efficaces sur la plupart des pathologies ;

• la présence de follicules qui appartiennent au systèmeimmunitaire de l’œil n’est pas forcément pathologique(elle est même fréquente chez l’enfant en dehors de touteinfection). Elle peut se rencontrer lors d’infections vira-les, à chlamydiae ou lors de la maladie de Lyme ;

• les papilles ne sont que des signes banals d’une inflam-mation locale.

Le diagnostic différentiel des conjonctivites chroniques :En premier lieu, il faut évoquer la sécheresse oculaire. Le

manque de larmes est peu fréquent comme en témoigne letest de Schirmer qui provoque le plus souvent un larmoie-ment réflexe. En revanche, il s’agit plus souvent d’une alté-ration du film lacrymal. Celui-ci est une sorte de gel composéd’eau, de mucines qui permettent l’adhésion sur la cornée etd’une couche lipidique sécrétée par les glandes de Meibo-mius. Cette couche lipidique a un pouvoir tensioactif quipermet le glissement et la diminution de l’évaporation del’eau.

Le signe évocateur d’une sécheresse oculaire est la sensa-tion de brûlure.

L’origine de la sécheresse peut être une blépharite, unesécheresse post-virale (infection à adénovirus) qui peut per-

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Page 16: Compte-rendu des ateliers de l'Anaforcal, JPA 2003

sister plusieurs mois, voire plusieurs années. Elle peut êtreégalement iatrogène, liée aux conservateurs des collyres quiont un effet anti-tensio-actifs, ainsi qu’au port de lentillessouples hydrophiles.

On connaît également une cause hormonale à la séche-resse oculaire : les androgènes augmentent la sécrétion la-crymale. À la ménopause, les androgènes comme les hormo-nes féminines diminuent. Le THS ne peut donc en aucun cascompenser cette sécheresse.

Enfin, le travail sur écran, en diminuant le clignementpalpébral favorise la sécheresse oculaire.

En second lieu, les blépharites, qui sont l’inflammation durebord palpébral, avec présence de croûtes et parfois chutedes cils. Elles sont infectieuses, séborrhéiques, ou bien liées àune rosacée oculaire. Faire la différence entre ces différentesétiologies est souvent difficile.

On doit également signaler le cas particulier des bléphari-tes liées au traitement par roaccutane.

La rosacée oculaire peut également toucher l’enfant etdans ce cas là, elle est isolée sans atteinte dermatologique.C’est un diagnostic qu’il ne faut pas oublier.

NB : le Démodex n’est pas responsable de l’atteinte pal-pébrale, il profite seulement des conditions locales pour sedévelopper.

Le traitement de la rosacée oculaire est d’abord local :Application de compresses chaudes sur les paupières pen-

dant deux à cinq minutes, puis massage du bord palpébralpour vider les glandes enflammées. Ceci est à réaliser une àdeux fois par semaine.

En cas de présence de croûtes, un nettoyage avec unecompresse imprégnée de Bléphagel® par exemple, est utile.

La rosacée s’accompagne de sécheresse oculaire, que l’ontraite par des gels en unidoses pour éviter la présence deconservateurs. Selon le produit utilisé, la viscosité est varia-ble et le choix du produit est laissé à l’appréciation du patient.

En cas d’atteinte plus sévère, une antibiothérapie par voiegénérale par cycline est à débuter. Il faut prévenir le patientdu risque de photosensibilisation et chez l’enfant, l’alterna-tive thérapeutique est représentée par les macrolides.

Le schéma thérapeutique suivant peut être proposé :Tolexine 50 : 2 par jour pendant 1 mois, puis 1 par jour

pendant 1 mois et enfin diminution progressive.Il est à noter que toutes les cyclines n’ont pas une effica-

cité égale.Autres étiologies non allergiques des conjonctivites chro-

niques :Les conjonctivites virales qui évoluent sur 15 jours, trois

semaines, conjonctivites au cours de la maladie de Lyme, desinfections à chlamydiae.

Troubles de la vision, notamment de la convergenceIrritation par les cosmétiques, par les irritants profession-

nels

2.3. La kérato-conjonctivite vernale

Sa physiopathologie est inconnue en dehors du rôle dé-clenchant des UV. Il existe aussi probablement des facteurshéréditaires.

Dans 50 % des cas, on retrouve un terrain atopique. Unedésensibilisation peut être proposée en cas de corrélationclinique entre la positivité du test et l’aggravation des symp-tômes. Elle peut améliorer la kérato-conjonctivite sans laguérir et permet de diminuer le recours à la corticothérapielocale. Celle-ci reste le traitement incontournable de lakérato-conjonctivite vernale.

Pour éviter le passage systémique du collyre, il estconseillé au moment de son instillation, de pincer la base dunez pour bloquer le canal lacrymo-nasal.

On sait que le risque de glaucome cortisonique apparaîtaprès trois à quatre semaines de traitement avec susceptibilitépersonnelle. Les pommades cortisonées à appliquer dans lecul-de-sac conjonctival inférieur, permettent de diminuer laquantité de corticoïdes administrée.

Les poussées sont traitées pendant trois ou quatre jours.L’utilisation de collyre refroidi, anti-inflammatoire non sté-roïdien ou anti-dégranulant, soulage efficacement le patientet permet également une diminution de l’utilisation des cor-ticoïdes.

2.4. La kérato-conjonctivite atopique

Elle s’intègre dans le cadre d’une dermatite atopique et estrarement isolée. En plus de la conjonctivite, on observesouvent une blépharite, un eczéma palpébral.

L’inflammation conjonctivale est souvent sévère et en-traîne souvent des complications cornéennes de gravité va-riable (de la simple kératite ponctuée superficielle à l’ulcèrecornéen néovascularisé qui peut s’infecter, se perforer etlaisser une cicatrice opaque). Là encore le traitement le plusefficace est la cortisone avec le risque de glaucome en casd’utilisation prolongée.

2.5. La conjonctivite giganto-cellulaire des porteurs delentilles

Elle est liée à une réaction immunitaire provoquée par lesdépôts protéiques à la surface des lentilles et des prothèsesoculaires.

Son délai d’apparition est variable et le symptôme princi-pal est l’intolérance aux lentilles avec raccourcissement dutemps de port.

Son traitement consiste à diminuer les dépôts par net-toyage soigneux des lentilles, augmentation de la fréquencedes déprotéinisation et plus souvent passage aux lentillesmensuelles ou journalières.

Références

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[2] Bertel F, Mortemousque B, Sicard H, André C. test de provocationconjonctival au Dermatophagoides pteronissinus dans le diagnosticdes conjonctivites allergiques aux acariens domestiques. J Fr Ophtal-mol 2001;24:581–9.

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[3] Bielory L. Allergic and immunologic disorders of the eyes. Part II:Ocular allergy. J Allergy Clin Immunol, 2000;106:1019–32.

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Cosmétologie et allergiesA. Pons-Guiraud, C. Frick, C. Mouton, J. Flabbee

1. Introduction

Le code de santé publique définit comme cosmétiquetoute substance ou préparation autre que les médicamentsdestinée à être mise en contact avec les diverses partiessuperficielles du corps humain ou avec les dents, les muqueu-ses en vue de les nettoyer, protéger ou maintenir en bon état.

Les cosmétiques sont des produits de composition com-plexes et ils sont de plus en plus souvent responsables deréactions d’intolérance irritatives ou allergiques. Le diagnos-tic d’allergie est souvent difficile à confirmer. Il s’appuie à lafois sur un interrogatoire précis, un examen soigneux deslésions dermatologiques, ce qui nécessite très souvent lacollaboration entre allergologue et dermatologue, et enfin laréalisation de tests d’allergologie.

2. L’interrogatoire

Des questions fondamentales sont à poser :• où l’eczéma a-t-il débuté ? cette localisation aidera à

s’orienter vers la responsabilité d’allergènes précis :C au niveau du visage : cosmétique, produit aéroporté …. ;C paupières : vernis à ongles, maquillage …. ;C lèvres : maquillage, dentifrice, objets nickelés ;C cuir chevelu : shampooing, gel coiffant, produits de

coloration ;C nuque : produits de coloration, nickel.

• quand l’eczéma a-t-il débuté et comment évolue-t-il ?• les poussées sont-elles rythmées par les contacts, éven-

tuellement avec un rythme professionnel. L’interroga-toire doit passer en revue tout l’environnement cutané dupatient : application de médicaments topiques, produitsde toilette, cosmétiques, allergènes professionnels, mé-nagers. Il faudra également penser à une possible der-mite par procuration.

3. L’examen des lésions

3.1. La dermite irritative

C’est une réaction cutanée localisée non immunologiqueproduite par des substances irritantes. Ces substances peu-vent être n’importe quel agent physique ou chimique qui

appliqué à une concentration donnée et pendant un tempssuffisant est capable de provoquer des lésions cellulaires. Ceslésions sont soit aiguës, dues à une exposition à une subs-tance caustique ou à des contacts brefs et répétés. Elles sontchroniques, provoquées par des agressions répétées de lapeau, dans ce cas, elles touchent très souvent les mains.

Les savons sont le plus souvent responsables par altérationde la couche cornée qui favorise la déshydratation cutanée.

Ces lésions chroniques sont également favorisées par unepeau sèche, fragile, comme au niveau du cou, des paupières,sur la peau atopique ou sur la peau des patients diabétiques.Les autres produits irritants sont les shampooings, les cosmé-tiques non adaptés soit au type de peau, soit à la météorolo-gie. Le propylène glycol, l’urée, le lactate d’ammonium, sontdes irritants en fonction de leur concentration dans les pro-duits finis. Les rétinoïdes, le peeling, font parties des nouvel-les molécules irritantes.

3.2. L’eczéma de contact

Il est produit par la pénétration cutanée d’un allergène.Il commence par une phase de sensibilisation qui est plus

ou moins longue (plusieurs années parfois), puis une phased’induction avec un intervalle libre de 12 à 96 heures entre lecontact déclenchant et l’apparition des lésions cutanées,Celles-ci passent par différentes phases :

• phase érythémato-vésiculeuse avec prurit ou sensationde brûlures, érythème diffus, œdème, apparition devésicules ;

• rupture des vésicules par grattage ;• assèchement des vésicules, fissuration de la peau,

desquamation ;• réparation avec très souvent une pigmentation

cicatricielle.Mais il faut se rappeler le polymorphisme clinique des

lésions dues aux cosmétiques : prurit, érythème léger, eczé-matides, eczéma, pigmentation prurigineuse, chéilite et der-mite péri-orale, dermite aéroportée, dermite par procuration,anomalies unguéales, digito-pulpite, dysidrose, urticaire decontact qui est de plus en plus fréquente liée à l’utilisation deprotéines végétales dans les shampooings, sérums tenseurs.

Éléments de diagnostic différentiel entre eczéma decontact et dermite d’irritation

Eczéma de contact Dermite d’irritationLésions cutanées Bords émiettés Bords netsTopographie Peut déborder la zone

de contact avec l’aller-gène

Limitées à la zone decontact

Symptômes Prurit Sensation de brûlureHistologie Spongiose, exocytose Nécrose épidermiqueTests épicutanés Positifs Négatifs ou irritation

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Page 18: Compte-rendu des ateliers de l'Anaforcal, JPA 2003

4. Les allergènes ubiquitaires des cosmétiques

4.1. Les parfums

Ils restent les premiers allergènes des cosmétiques. Lasensibilisation peut se faire par voie directe ou indirecte,manuportée, aéroportée, par procuration. Certaines localisa-tions de l’eczéma aux parfums sont classiques : visage, cou,paupières, mais il faut y penser aussi devant des lésions desaisselles, des lésions rétro-auriculaires ou des mains, notam-ment sur des peaux atopiques.

4.2. Les huiles essentielles

Elles font parties des parfums mais entrent aussi dans lacomposition des produits d’aromathérapie. Les plus réacti-ves seraient l’huile de Cananga, l’huile d’Ylang-ylang, larose de Bulgarie, la lavande, le jasmin, le santal, la vanille,l’amande douce. Il faut penser à une pérennisation possibledes réactions par ingestion d’épices ou d’arômes qui ont desmolécules terpéniques, cinnamiques, vanilliques identiquesà celles des parfums ou des huiles essentielles. Il faudra donccompléter les tests d’allergie en testant en pricks et en patchsdes épices. Il faut se rappeler que le baume du Pérou estégalement un bon marqueur de l’allergie aux parfums.

4.3. Les conservateurs

Depuis le retrait du méthyl-chloro-isothiazolinone (Ka-thon CG), l’Euxyl K400 est un des plus allergisants. Il estcomposé de 80 % de phénoxy-éthanol et

20 % méthyl-dibromo-glutaronitrile qui est la partie aller-gisante. En revanche, il semble que les parabens ne soient pastrès réactogènes. Le formol et les libérateurs de formol (qua-ternium 15) sont également souvent en cause. Il faut égale-ment citer le thiomersal et le chlorure de benzalkonium.

4.4. Les émulsifiants

Le cocoamidopropylbétaïne souvent retrouvé positif esten fait responsable par le dimétylamidopropylamine(DMAPA) agent de synthèse. Le test au CAPB est souventirritatif et donc sa responsabilité est difficile à prouver. Onnote une augmentation du nombre de sensibilisations vis-à-vis des gallates. La lanoline et l’amercol restent des allergè-nes vedettes surtout sur les peaux atopiques.

5. Les allergènes responsables selon la localisation del’eczema

5.1. Au niveau des paupières

L’épiderme est mince, fragile donc très souvent le lieu deréactions, les allergènes rencontrés sont la colophane, la

résine paratoluènesulfonamide des vernis à ongles, la para-phénylènediamine (PPD), les parfums, le nickel. Devant uneczéma des paupières, il ne faut pas ignorer les diagnosticsdifférentiels représentés par la dermatite atopique, la dermiteséborrhéique, les infections locales, le psoriasis, la dermiteaux corticoïdes ou la rosacée.

5.2. Les lèvres

Les allergènes responsables sont l’huile de ricin, propo-lis, la cire blanche, la colophane, les parfums, les produitsde tatouage permanents (chrome, cobalt, palladium, fer), lesépices.

5.3. Le cuir chevelu

On retrouve la responsabilité des shampooings, voluma-teurs, crèmes capillaires, produits de coloration. Des réac-tions de type immédiat peuvent être observées (œdème, urti-caire) par l’utilisation de protéines soit de blé, d’élastine oude collagène. La PPD reste l’allergène majeur des produits decoloration. La sensibilisation à ce produit commence souventau niveau des paupières où la peau est plus fine. Il faut savoirpenser aux réactions croisées avec une substance de la fa-mille dite en para, ainsi qu’aux réactions croisées avec lescolorants vestimentaires, le plus souvent le disperse orange.

Il faut signaler que les produits de la marque L’Oréal®,Dédicace® et Rénovative® ne contiennent pas de PPD.

5.4. Au niveau des ongles

La résine paratoluène sulfonamide est à l’origine desdermites de contact au niveau des ongles mais également àdistance : lèvres, paupières et cou. Les résines époxy sontégalement retrouvées comme allergènes des pathologies un-guéales.

5.5. Les photoprotecteurs

Ils sont responsables soit de photosensibilisation ou d’al-lergie de contact. L’oxybenzone voit actuellement son utili-sation en nette diminution remplacée par le benzophénone, lemétoxycinnamate, le Parsol®. Le Meroxyl® et Tinosorb®

seraient moins allergisants.Le diagnostic de l’eczéma aux cosmétiques :Le moyen le plus simple d’assurer le diagnostic d’un ec-

zéma aux cosmétiques est représenté par l’épreuve d’évic-tion qui permet la guérison des lésions et évite leur récidive.

Les patch-tests : il semble utile de tester à la fois la batteriestandard européenne en y ajoutant les produits personnels dupatient ainsi qu’une batterie arôme-épices, la lecture de cespatch-tests se fait à 48 et 96 heures selon les critères del’ICDRG.

216 Compte-rendu de réunion / Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique 44 (2004) 199–217

Page 19: Compte-rendu des ateliers de l'Anaforcal, JPA 2003

Critères de l’ICDRG(–) Réaction négative(+ ?) Réaction douteuse : érythème discret(+) Réaction faible : érythème, infiltration discrète et papules éventuelles(++) Réaction importante : érythème, infiltration, papules, vésicules(+++) Réaction très importante : érythème intense, infiltration, vésiculescoalescentes, bulles(IR) : Test irritatif(NT) Non testé

Pour certaines substances très irritantes, on réalise destests ouverts (open-tests) : on applique la substance à testersur l’avant-bras sans occlusion. Des tests semi-ouverts peu-vent également être réalisés en diminuant la substance à10 %, puis en l’appliquant sur la peau et en laissant sécher30 minutes et enfin en réalisant une occlusion de 48 heurespar micropore.

En cas de négativité de ces tests, un test d’usage ouROAT-test (repeated open application-test), consiste à appli-quer sur une surface précise du tégument, le plus souvent laface antérieure de l’avant-bras ou au plis du coude, le produitfini, à raison d’une à deux fois par jour. Si au bout de14 applications il n’y a pas de réaction au niveau cutané, leproduit est considéré comme n’étant pas responsable de laréaction.

Les photo-patch-tests : on pose deux batteries de tests dontune seule sera irradiée par certaines longueurs d’ondes d’UV.

Il faut également savoir réaliser des prick-tests notammentlors de réactions d’urticaire de contact.

Devant un test positif, il faut se poser la question de lapertinence du test : la positivité explique-t-elle la pousséeactuelle ou témoigne-t-elle d’une sensibilité ancienne sasrapport ?

Il faut connaître la notion de sensibilisation de groupeavec plusieurs allergènes avec des groupements chimiquescommuns (PPD et groupes en para : sulfamides, anesthési-ques locaux). Ces réactions croisées expliquent la récidived’un eczéma malgré l’éviction de l’allergène.

6. Le traitement

La dermatite d’irritation est traitée par modification deshabitudes, du mode d’application du produit ou bien suppres-sion du cosmétique. Les allergies se traitent par l’éviction duproduit, des pulvérisations d’eau thermale, une hydratationsimplement par exemple de la vaseline non parfumée et dansles cas les plus sévères, application des corticostéroïdes.

7. Notion de cosmétovigilance

L’étiquetage complet surtout sur les produits cosmétiquesest obligatoire depuis les directives européennes. La seuleconnaissance de tous les composants des produits finis per-met de retrouver la pertinence des tests et donc d’informer lespatients sur la conduite à tenir. La nomenclature des diffé-rents composants, selon la norme INCI (International No-menclature Cosmetics Ingrédients), permet à tout le mondede s’y retrouver. Cette nomenclature est disponible auprès dela AFSSAPS.

En cas de réaction à un cosmétique, une déclarationauprès du Revidal, réseau de vigilance en dermato-allergologie permet de faire un relevé de toutes les réactionsdéclarées avec un certain suivi et donc à la fois d’en informerl’industriel fabricant ainsi que les consommateurs. Ceci per-met de déboucher soit sur un retrait du produit, ou sur unemodification dans sa composition.

Références

[1] Pons-Guiraud A. « Quoi de neuf dans l’allergie aux cosmétiques ? ».Cours du Gerda, Nancy, 1998. John Libbey Eurotext.

[2] Vigan M. Allergie aux cosmétiques, Quoi de neuf. Cours du Gerda,Dijon, 2002. John Libbey Eurotext.

[3] Milpied-Homsi B. Le point sur les tensio-actifs. Cours du Gerda,Dijon, 2002. John Libbey Eurotext.

217Compte-rendu de réunion / Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique 44 (2004) 199–217


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