Changeonsl’Afrique
15 propositions pour commencer …
Novembre 2003
Avant propos
Le Réseau « Dialogues sur la gouvernance en Afrique » travailledans la région ouest et centrale du continent depuis octobre 1999 àpromouvoir une refondation de la gouvernance, afin de la rendrelégitime et conforme aux valeurs et aux besoins des Africains. CeRéseau est composé d’acteurs africains et non africains, engagésdans l’action, la réflexion et soucieux de promouvoir à la fois auniveau des citoyens africains et du monde un dialogue sur la gestiondes affaires publiques en Afrique.
L’ambition du Réseau est :
– d’une part de créer un espace public interafricain de dialogue etde réflexion sur la gouvernance,
– et d’autre part d’élaborer et de proposer les principes permettantd’enraciner les pratiques d'une gouvernance adaptée aux réalitésafricaines face aux défis du 21ème siècle.
Nous sommes convaincus dans le Réseau que l'Afrique doit trouverses formes spécifiques de gouvernance, tout en répondant à desquestions communes à toutes les sociétés du monde.
Le processus entamé est guidé par quelques principes simples quesont la mise en relation et la conjonction de la réflexion et del’action.
Dans une première phase, le Réseau a mis l’accent sur la collected’expériences, le recueil des points de vue et des attentes desdifférents milieux (approche collégiale), dans les différents pays
(approche territoriale), sur différents aspects de la gouvernance(approche thématique). Une masse importante de fichesd’expériences ou d’analyses a été progressivement rassemblée. Enmai 2002, le Réseau a décidé d’engager une deuxième phase qui aconsisté en la systématisation des matériaux recueillis pour dégagerune vision africaine des questions de gouvernance et saconcrétisation sous la forme de propositions pour le changement.
Construits à partir de l’expérience et de l’analyse des réalitésafricaines, confrontés aux réflexions venant du reste du monde, leprojet de Charte africaine pour une gouvernance légitime etles cahiers de propositions qui vous sont présentés ici permettentd’entamer une nouvelle étape, celle du retour sur le terrain.
Ces documents sont en effet des invitations aux dialogues dans tousles secteurs, institutionnels ou non, de la société de nos différentspays : dialogues sur la pertinence des principes de gouvernance misen lumière, dialogues pour préciser, approfondir et développer lespropositions de changement pour construire ensemble les stratégiesde changement nécessaires à leur mise en œuvre.
Le Réseau continuera avec tous ses partenaires actuels ou à venir, àfaciliter ces dialogues. Il mettra tous ses moyens au service de laconstruction d’une vision commune de la gouvernance pour changerl’Afrique.
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SommaireContexte et enjeux.......................................................................................7La crise africaine participe de la crise mondiale de gouvernance..............................................7…mais, elle prend des formes spécifiques en Afrique…............................................................8… qui appellent des réponses africaines à des défis communs.................................................9Le nouveau regard de la gouvernance légitime.....................................................................10
Projet de Charte africaine pour la gouvernance légitime..............................................................................12
…soutenue par 15 propositions pour changer l’Afrique et contribuer au débat mondial sur la gouvernance...........................................................14
Pour construire une gouvernance locale légitime......................................151.Faire de la construction du consensus le fondement de la démocratie locale ..................162. Inverser l’approche de l’organisation des compétences en partant de la légitimité du local......................................................................................................................................... 173. Sortir les délibérations sur les affaires locales du cadre exclusif des assemblées descollectivités locales ..........................................................................................................184. Prémunir l’action publique contre les risques de dérive et d’abus de pouvoir..................19
Pour refonder des Etats capable de relever les défis du développement ducontinent.....................................................................................................21
5. Consacrer le principe de la pluralité juridique dans les constitutions...............................226. Créer un conseil national des communautés et des collectivités territoriales ..................237. Mettre la coopération au service du développement......................................................248. Renforcer la légitimité des systèmes électoraux et de représentativité...........................259. Renforcer la légitimité de l’action publique en assurant la qualité des prestations desadministrations.................................................................................................................2610. Promouvoir une culture républicaine ancrée dans les valeurs de l’Afrique.....................27
Pour une gouvernance régionale efficace pour sortir l’Afrique de samarginalité..................................................................................................29
11. Gérer les territoires par des conventions entres les acteurs..........................................3012. Garantir la mobilité des personnes et des biens...........................................................3113. Assurer la représentation des citoyens et des organisations socioprofessionnelles dansles institutions d’intégration..............................................................................................3214. Gérer collectivement les biens communs, matériels et immatériels..............................3315. Bâtir un système éducatif et de formation adapté aux besoins de l’intégration.............34
ANNEXE.....................................................................................................35
Membres du réseau - 2003..........................................................................41
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Contexte et enjeux
La crise africaine participe de la crise mondiale degouvernance...
La gouvernance est devenue depuis quelques années un thème à la mode quetout discours sur l’avenir de l’Afrique (et d’autres continents endéveloppement) se doit d’inclure pour être recevable.Souvent réduite à une liste de recettes universelles que tout Etat se doit derespecter comme fondement de sa légalité, la gouvernance, au sens où nousl’entendons, est l’art de gouverner en articulant la gestion de la chosepublique à différentes échelles de territoires, du local au mondial,l’art de réguler les relations au sein de chaque société.
L’Afrique est certes en crise de gouvernance, mais elle n’est pas la seule danscette situation. La crise est mondiale parce qu’elle est celle du principe del’Etat nation comme forme d’organisation des sociétés. Elle a simplement desformes spécifiques en Afrique, liées à l’histoire et à la place actuelle de cecontinent dans le monde.
Le dépassement des crises actuelles de la gouvernance ne résultera pas del’application d’un « kit » prédéfini de règles uniformes. Les Africains doivent,dans le domaine de la gouvernance comme dans celui du développement,élaborer leur vision de l’avenir et entrer en dialogue avec le reste du mondepour répondre aux défis communs.
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…mais, elle prend des formes spécifiques en Afrique…
Cette crise de la gouvernance mondiale prend des formes spécifiques en Afrique, ens’exprimant de manière particulière aux différentes échelles de régulation sociale etde gestion de la chose publique.
Car l’écrasante majorité de la population africaine vit dans des situations d’extrêmepauvreté. Plus d’un quart des pays africains sont directement ou indirectementtouchés par des conflits provoquant ainsi plus de 10 millions de réfugiés et depersonnes déplacées. 150 à 200 millions d'africains vivent dans des Etats où lestensions internes pourraient évoluer vers des guerres civiles. Le continent africainest de plus en plus marginalisé sur la scène internationale car il représente moins de3% dans le commerce mondial.
Plus de 48 ans après les « indépendances », les discours sur la souveraineténationale et sur l'unité semblent devenir une rhétorique pour des Etats devenusdépendants de l'aide internationale même pour leur fonctionnement courant. DesEtats qui sont à la fois trop distants pour gérer de façon intégrée les problèmes dessociétés et trop petits et faibles pour constituer une communauté de destin et unespace d'échanges dans un monde qui se globalise. La situation du continent resteenfin marquée par le décalage toujours plus grand entre « les pays légaux » et les «pays réels ».
La crise de la gouvernance en Afrique est aussi une crise multiforme de la société quiva bien au-delà de l’Etat et concerne les relations entre les individus, les espacesdomestiques (la famille) et les espaces publics, qui fragilise les uns comme les autres.Ce qui est en cause, ce sont les formes de représentation, les structures, lesprocessus, les institutions autour desquels les sociétés africaines contemporainesdécident des modalités de gestion du pouvoir, de répartition des ressourcespubliques, d’arbitrage entre différents intérêts individuels et de groupes.
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… qui appellent des réponses africaines à des défiscommuns
Les débats et propositions actuelles sur la place et le devenir du continent africaindans le monde insistent à la fois sur les processus de marginalisation qui résultentdes modes actuels d’insertion dans l’économie mondiale et sur la nécessité d’ymettre un terme. Les propositions de rupture qui émergent de nos jours mettentl’accent sur la nécessité de promouvoir de nouveaux dispositifs partenariaux,compatibles avec l’avènement du continent africain à une position de plus granderesponsabilité aux plans économique, politique et culturel.
Dans la phase actuelle de mondialisation et de globalisation économique, l'Afrique nepourra faire entendre sa voix que si elle parvient à construire son propre projet. Eneffet, pour exister et compter l’Afrique devra inventer ou découvrir des modes degouvernance appropriés et efficaces par rapport aux défis contemporains du XXIesiècle. La pertinence de ces nouveaux modes de gouvernance se mesurera par leurcompatibilité avec les projets de modernité que les élites et les citoyens africainsambitionnent de promouvoir. En d’autres termes, il s’agit de formuler et faireémerger des codes de conduite, des modes de régulation et de gestion qui soient à lamesure des défis actuels des sociétés africaines : exister et compter avec des valeurset des apports culturels propres, dans un monde globalisé.
Cette construction d'une nouvelle gouvernance africaine est-elle, pour autant, uneaventure singulière à l'Afrique, entièrement déterminée par les spécificités ducontinent ? L'échange d'expériences et de réflexions entre régions du monde, auNord comme au Sud, révèle qu'au travers des spécificités de chaque situation sedessinent des défis communs et qu'il est possible d'y répondre en partageant desproblématiques et des modes d'action communs. Les Africains doivent se persuaderque l’on ne répond pas à la pensée unique par le repli identitaire mais par l'échangeet la mutualisation des expériences et des idées.
L'ambition de la Charte africaine pour une gouvernance légitime, que nousproposons à l’ensemble des acteurs africains, est de tracer des perspectives derefondation de la gouvernance, tant à l’échelle globale, qu’aux niveaux continental,
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régional et local, et de ce fait, contribuer à l’avènement d’une Afrique responsable deson avenir et de son apport au Monde.
Le nouveau regard de la gouvernance légitime
Le débat actuel sur la gouvernance traduit un souci légitime, surtout de la part desEtats et de leurs partenaires, d’asseoir et de promouvoir des règles de gestionpublique qui soient à la fois efficaces et soucieuses d’une utilisation appropriée desressources engagées, mesurée par des indicateurs de bonnes pratiques.
Ce débat, fort opportun aujourd’hui en Afrique, traduit un souci légitime de gérer «en bon père de famille » des ressources nationales et internationales de plus en plusrares. Mais, le débat doit être remis à l’endroit ; la définition d’instruments de mesure et desuivi ne saurait se substituer à l’identification préalable des changements voulus parles protagonistes.
Une fois que les défis du changement d’attitudes et de pratiques sont identifiés etvalidés avec les intéressés, il est possible de définir des stratégies et des modalitéspour les relever. Il devient alors crucial de se donner des indicateurs ou desmarqueurs de progrès vers les changements voulus, et par là d’évaluer la pertinenceet l’efficacité des stratégies déployées à cette fin.
Une nouvelle gouvernance en Afrique naîtra donc d’un processus de constructioncollective d’un système de valeurs, de structures et de mode de faire, qui trouvera salégitimité dans sa capacité à concilier l’unité nécessaire à toute collectivité humaineet la diversité d’un monde de plus en plus complexe.La question de la légitimité est de ce fait centrale dans le débat sur la définition deprincipes et de nouvelles modalités (les règles du jeu) de gestion de l’espace public ;d’où le concept de la gouvernance légitime.
Nous définissons la gouvernance légitime comme l’art de gérer les affairespubliques et d’exercer les pouvoirs au service du BIEN COMMUN avecl’adhésion et sous le contrôle de ceux sur qui s’exercent ces pouvoirs. Les
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valeurs fondamentales sur lesquelles s’appuie cette vision des questions degouvernance sont : l’équité comme principe guidant l’action publique et le respectde l’autre comme modalité de mise en relation entre les acteurs de l’espace public.
L’approche de la gouvernance légitime se fonde aussi sur une triple nécessité :
- d’abord la nécessité de relier les initiatives, les expériences et les propositionsfaites à différentes échelles de gouvernance (du local au mondial) et de fairele lien entre débats africains et autres espaces internationaux de débat,
- ensuite, celle de lier l’action à la réflexion, c'est-à-dire d’ancrer lespropositions dans l’expérience concrète des acteurs,
- et enfin celle de partir et de satisfaire les besoins et les aspirations(matérielles et immatérielles) des populations.
Enfin, les « modes de faire » de la gouvernance légitime doivent être :
- consensuels : la recherche du consensus (le consentement des parties) est larègle première pour la prise de décision ;
- inclusifs : ne laisser aucun groupe ni individu au bord de la route ;
- enracinés dans l’histoire et la mémoire collective des acteurs et de leurssociétés.
Les acteurs de la gouvernance légitime doivent être solidaires, se mettre dansl’attitude d’assumer pleinement leurs responsabilités et enfin avoir une maîtrise,donc ne pas subir les changements que l’évolution de leurs sociétés et du mondeexigent. Ces différents éléments peuvent être réunis dans un "projet de charte africaine sur lagouvernance légitime".
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Projet de Charte africaine pour la gouvernance légitime
Cette charte énonce des "valeurs" et des "principes directeurs" quidoivent guider la démarche des différents acteurs dans la recherchede réponses légitimes aux problèmes concrets de la gouvernance.
Objectif
1- La gouvernance légitime est l’art de gérer les affaires publiques etd’exercer les pouvoirs au service du bien commun avec l’adhésion etsous le contrôle de ceux sur qui s’exercent ses pouvoirs.
Valeurs
2- L'équité est au fondement de la légitimité de l'action publique car toutsentiment d'injustice suscite la méfiance, la résistance et finalementl'exclusion et le conflit.
3- Le respect de l'autre permet l'écoute, le dialogue, la reconnaissancede la différence sans lesquels le sens du bien commun ne peut êtreconstruit collectivement.
Principes directeurs de l'action
4- L'enracinement de la gouvernance, c'est la prise en compte desréalités culturelles, socio-économiques et politiques des sociétésafricaines, dans leurs diversités, comme matrice de sa légitimité.
5- La participation de tous aux affaires publiques conditionne
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l'expression des besoins de chacun et la recherche collective de réponsedans l'intérêt commun.
6- Les stratégies de changements nécessaires pour construire l'avenir del'Afrique ne peuvent être impulsées de l'extérieur ou imposées par uneminorité à toute la société. La gouvernance doit permettre la maîtrise duchangement par l'ensemble des acteurs africains.
7- La responsabilité, c'est l'obligation de répondre de ses paroles, de sesdécisions, de ses actes. Chacun est responsable en proportion du pouvoirqu'il détient.
8- La recherche de solutions doit privilégier le consensus si l'on veut allerdans le sens du bien commun.
9- La gestion des affaires publiques ne doit pas créer l'exclusion mais aucontraire s'appuyer sur la solidarité et la renforcer.
10- Les acteurs de la scène publique, aux différents niveaux (du local aumondial) doivent coopérer pour résoudre des problèmes communs selon leprincipe de subsidiarité et non s'approprier des compétences exclusivespour justifier de leur existence.
L'intérêt d'une telle charte est de servir de référence dans la recherche de processusconcrets de changement. En retour, sa pertinence se mesure à sa capacité à éclairerle sens des propositions de changement pour une gouvernance légitime.
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…soutenue par 15 propositions pour changerl’Afrique et contribuer
au débat mondial sur la gouvernance
En s'appuyant sur la collecte d'expériences et d'analyses, réalisée dans les années2000 - 2003, le réseau souhaite aujourd'hui mettre en débat un certain nombre depropositions de changement pour fonder une gouvernance légitime. Elles neconcernent pas tous les domaines où le changement est nécessaire. Mais ellescouvrent les trois niveaux de gouvernance sur lesquels nous pouvons agirdirectement : la gouvernance locale, la refondation de l'Etat et l'intégrationrégionale. La contribution de l'Afrique au débat mondial sur la gouvernance trouveralà matière à sa propre légitimité.
L'énoncé des ces propositions est une invitation aux dialogues ; c'est dire qu'il nes'agit pas de propositions achevées : elles doivent être débattues, approfondies,transformées et appropriées.
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Pour construire une gouvernance locale légitime
L’hypothèse sous-jacente à ce thème est que la proximité est un facteur delégitimation de la gouvernance puisqu’elle met en relation directe le besoin social telqu’il est vécu par les acteurs et la décision publique qui lui répond. Il est certain quela gestion des affaires publiques au plus près de la population offre de grandsavantages : meilleure connaissance des attentes, possibilité de dialogue direct, plusde flexibilité dans les réponses, pouvoir de contrôle des citoyens sur les responsablespublic. Le local est l’échelle où se bâtit la base du « vivre ensemble », mais,c’est aussi le lieu où les acteurs entrent dans des alliances ou des conflits d’intérêtscomplexes.
Le local est l’espace sur lequel se projette toute la complexité du monde, il subit ainsiles effets de décisions, d’actions venues d’ailleurs, hors de sa portée. Il en résulte quenombre de problèmes vécus au niveau local ont une ampleur et une portée qui vontbien au delà de l’échelle locale et exige une compréhension des références à uneéchelle plus vaste. La gouvernance locale ne peut être efficace que si les relationsavec les autres échelles de pouvoir sont prises en compte et donnent lieu à échanges,à négociation, à coopération. Les économies locales redynamisées et mises enrelation avec les autres échelles, sont la base de la construction des économiesnationales. La gouvernance locale efficace doit être capable de prendre en compte ladiversité des intérêts, entre les membres de la communauté locale et avec les autreséchelles, et de construire des réponses conformes aux valeurs partagées.
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1.Faire de la construction du consensusle fondement de la démocratie locale
La recherche de la majorité, comme modalité de prise de décision, devient une quêtepermanente et prioritaire au détriment de la négociation entre les protagonistes dela vie locale. Dans les instances délibérantes on cherche de moins en moins à réunirtous les groupes autour d’une vision partagée. On se contente de la réunion du plusgrand nombre de voix pour l’adoption de son projet. Le recours au consensus n’estpas la règle, il est l’exception. Ce système de décision génère des malentendus, desfrustrations et généralement des heurts et des tensions que l’usage exclusif de lamajorité comme modalité de prise de décision alimente et perpétue. Les taux de nonparticipation au vote et le rejet systématique par les minorités des décisions au seindes instances sont des signes révélateurs. Le consensus comme modalité de gestionnégociée des enjeux et des aspirations permet à tous et à chacun de se reconnaîtredans les décisions prises et le niveau local s’y prête. C’est probablement la rançon dela citoyenneté qui fait tant défaut aujourd’hui et est aussi une condition essentielle dela légitimation de l’action publique.
Ce qu’il faut faire :
➔ Retenir le consensus comme la règle dans la modalité de préparation des décisionsdans les instances locale
➔ Ne recourir au vote que comme l’exception pour sortir des situations de blocage
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2. Inverser l’approche de l’organisationdes compétences en partant de la
légitimité du local
Dans toutes les expériences de décentralisation en cours le transfert descompétences et de ressources s'est confronté à des difficultés de mise en œuvre. Lesacteurs locaux estiment que l’Etat ne veut leur transférer que des difficultés. L’Etatest aussi fortement soupçonné de profiter des reformes de décentralisation pour sedécharger sur le local des missions sensibles pour lesquelles il a des difficultés. Or,dans les textes fondateurs, le transfert des compétences de l’Etat aux collectivités debase n’est pas facultatif ; c’est une obligation à la fois légale et politique.
Cette situation est révélatrice d’un profond malaise qui trouve sa source dansl’approche actuelle de répartition des compétences entre l’Etat et les collectivitésqu’il urge de revoir. Il faut inverser la démarche en donnant d’abord au niveau localle droit et la possibilité de se prononcer sur les missions qu’il peut et qu’il doitprendre en charge. De sorte que, de façon consensuelle, il puisse dans un dialogueavec l’Etat, déterminer de façon objective ce que l’Etat doit apporter comme appuiaux collectivités locales. L’efficacité de l’action publique locale reste fortement liée àla libre détermination par le local de sa propre sphère de compétences et de ladéfinition par défaut de celle qui revient alors à l’Etat.
Ce qu’il faut faire :
➔ Laisser en priorité le niveau local proposer les compétences qu’il veut partageravec les autres échelles, principalement avec l’Etat
➔ Changer d’approche en passant de la notion de partage de compétences à lanotion de coopération entre échelles sur les domaines de compétences
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3. Sortir les délibérations sur les affaireslocales du cadre exclusif des assemblées
des collectivités locales
Généralement élues au suffrage universel direct, les assemblées des collectivités ontseules, l’exclusivité de la délibération sur les affaires locales. Ce choix, confronté àcertains objectifs de la décentralisation, suscite à l’expérience des interrogations.Quelle articulation existe-t-il entre les dynamiques institutionnelles en cours et lesdynamiques sociales ? Quelle est la validité de l’exclusivité de la voie du seul suffrageuniversel pour la constitution des assemblées délibérantes par rapport à la prise encharge de toutes les légitimités présentes au niveau local ? Le monopole des partispolitiques pour la représentation locale dans certains pays n’exclut-il pas de plus enplus de nombreux acteurs de la vie publique locale ? Le système de la démocratiereprésentative donne t-il de la visibilité à toutes les opinions et permet –il à chaqueindividu de se reconnaître dans les élus et dans les institutions locales actuelles ? Ilimporte, dans l’optique de la construction d’une démocratie locale légitime deconsacrer des espaces et de définir des mécanismes, à la fois d’inclusion et departicipation, de tous les acteurs locaux.
Ce qu’il faut faire :
➔ Inclure les représentants de toutes les légitimités (traditionnelles, religieuses, etpolitiques) dans les assemblées chargées de délibérer sur les affaires locales
➔ Reconnaître et favoriser l’émergence de nouvelles modalités de délibération sur lavie locale tels que le référendum local et la consultation obligatoire de certainsgroupes sociaux ou professionnels pour certaines décisions
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4. Prémunir l’action publique contreles risques de dérive et d’abus de
pouvoir
Les citoyens, dès lors, qu’ils ont choisi leurs élus, ne sont pas autorisés à s’immiscerdans la gestion quotidienne des affaires locales qui devient, alors, un espaced’exclusivité des instances délibératives locales. Dans les faits, les citoyens doiventattendre les prochaines élections pour évaluer, pour juger l’action des élus et déciderou non de renouveler leur mandat. Cette logique est d’autant plus dommageable queles élus rompent très vite avec l’obligation de rendre compte à leurs électeurs. Enconséquence, ils faussent et décrédibilisent l’action publique locale. Les citoyens noninformés, se détournent de la vie publique locale. Ce constat est caractéristique de lacrise actuelle de gouvernance au niveau local. Un changement de méthode s’impose.Une dimension fondamentale du contrôle de l’action des élus entre deux électionsserait la consécration de moments et d’espaces où, à l’initiative des citoyens, les élusseraient amenés à rendre compte de la mise en œuvre de l’action publique et du suivides dossiers et des délibérations prises.
Ce qu’il faut faire :
➔ Rendre obligatoire l’accès des citoyens aux informations dans des délais, selon unequalité et une régularité qui assure une simultanéité entre l’action et le contrôle
➔ Définir aux élus des moments précis et obligatoires pendant lesquels s’exerce ledevoir de rendre compte du mandat confié et des décisions prises et des choixopérés
➔ Prévoir et organiser les mécanismes généraux et spécifiques d’interpellation dansle fonctionnement régulier des institutions locales et de la vie publique locale
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Pour refonder des Etats capable de relever les défisdu développement du continent
L’Etat-nation issu des indépendances continue encore à avoir mal à sa légitimité caril a de plus en plus du mal à assurer durablement le bien-être et la sécurité despopulations. L’Etat, malgré les quatre décennies de construction, n’a aujourd’huiencore d’autres moyens d'emprise sur les populations que la violence,l’unilatéralisme et le clientélisme.
Il est donc resté un objet étranger aux sociétés africaines, d’où l’incapacité pour luide trouver des réponses adéquates à ces questions pourtant anciennes quiinterpellent la gouvernance en Afrique. Quel ancrage ces Etats ont dans la société ?Est-ce qu’ils œuvrent pour le bien de tous ?
Au-delà de la légitimité politique, que les élections au suffrage universel cherchentlaborieusement à conférer, l'enjeu fondamental de la légitimation des états africainsactuels, au sens voulu par la gouvernance légitime, appelle à l'élargissement de lasphère institutionnelle de gestion des affaires publiques.
Mais la légitimité ne peut se construire en ignorant les aspirations, les dynamiquesainsi que les contraintes des communautés locales. Pour que l’Etat soit une instancelégitime, il doit d’abord connaître et reconnaître la diversité de ses composantes(territoriales, socio-économiques, culturelles, ethniques politique…). Il peut, à partirde ce moment, bâtir les facteurs d’unité de la communauté nationale : les règlescommunes, les grands programmes d’action, le projet de société. Il a aussi uneresponsabilité particulière dans une articulation toujours à réactualiser de ladiversité et de l’unité. L’Etat doit, alors non seulement articuler son action avec celledes acteurs locaux, mais son efficacité est de plus en plus tributaire des relationsrégionales (intégration régionale) et internationales (mondialisation) dans lesquellesles pays sont impliqués.
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5. Consacrer le principe de la pluralitéjuridique dans les constitutions
La légitimation de l’Etat africain sur les bases d’une société plurielle, serait lareconnaissance d’une pluralité juridique conforme à l’appartenance simultanée dechaque individu en même temps à un Etat et à une ou des communautés. Lareconnaissance constitutionnelle des communautés conduit nécessairement àaccepter l’idée de l’existence et de la légitimité de droits particuliers propres auxdifférentes composantes sociologiques constitutives des nations plurielles.L’architecture institutionnelle de telles nations plurielles devra alors être conçuepour offrir des lieux de légitimation et de génération de droits particuliers à coté dudroit général. Les droits particuliers, s’attachant à la vie des communautés,traiteront de questions à fortes charges identitaires (droits de succession, droitsfonciers…) et seront produites au niveau d’instances au sein desquelles le mode dereprésentation permettra l’expression effective des autorités tirant leur légitimité deces communautés (ex. Chefferies coutumières).
Ce qu’il faut faire :
➔ Refonder les constitutions pour les ancrer dans le réel africain et en faire un acteinstituant pour les sociétés africaines
➔ Organiser des consultations régionales et collégiales sur les projets deconstitution
➔ Recenser et systématiser l’utilisation dans la vie publique des modes derégulation traditionnelle (utilisé par les communautés)
➔ Faire du droit coutumier le lieu vivant et permanent d’invention par lescommunautés de leurs propres règles
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6. Créer un conseil national descommunautés et des collectivités
territoriales
Les formes de représentation politique ont rarement tenu compte du caractèrepluriel des sociétés africaines et de la nécessité de bâtir des nations qui senourrissent de la diversité de ses territoires et de ses communautés. La refondationde l'Etat en Afrique, au sens voulu par la gouvernance légitime, appelle àl'élargissement de la sphère institutionnelle de gestion des affaires publiques. Danscette perspective, la mise en place d’un Conseil National des Communautés et desCollectivités Territoires va dans le sens de l’approfondissement de la légitimité deslois et des règlements, par la reconnaissance qui est faite, dans les processuslégislatifs de l’organisation de la nation bâtie sur des collectivités territoriales, maisaussi sur des communautés. L’ancrage dans le réel se ferait dans trois directions :1°) par la création d’un cadre national de prise en charge effective de toutes lescomposantes territoriales et sociales de la nation; 2°) par l’immersion dans le champrépublicain de détenteurs de légitimité jusqu’ici ignorés ou marginalisés par lescadres institutionnels courants; 3°) par la mise en place d’un cadre unifié deconcertation nationale, doté de pouvoirs étendus de proposition et d’interpellation.
Ce qu’il faut faire :
➔ Mettre en place dans les institutions similaires existantes (Conseil Economique etSocial et Conseil des Collectivités) un système de représentation de chaquecomposante communautaire et définir un mode d’exercice des mandats
➔ Doter ce conseil national de compétences propositionnelles et consultatives
➔ Attribuer à ce conseil un pouvoir de saisine des hautes autorités juridiques etd’auto-saisine sur les affaires locales
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7. Mettre la coopération au service dudéveloppement
Il est aujourd’hui possible d’établir entre tous les protagonistes de l’aide publique audéveloppement un cadre de partenariat qui rationalise celui-ci et le rende plusefficace. Dans cette optique, l’on doit, accepter que ce soit les partenaires des paysbénéficiaires des dotations financières, qui définissent les orientations et fixent lesobjectifs et les priorités. Les organisations ou pays « bailleurs de fonds » doivents’engager à appuyer ces choix en exigeant en retour des résultats. L’acceptation deces principes du partenariat stratégique doit faire l’objet d'une codification et d’uneorganisation systématique, nécessitant l’élaboration d’une Charte pour le partenariatau développement et la mise en place de mécanismes institutionnels, nationaux etinternationaux, de coordination de l’aide au développement.
Ce qu’il faut faire :
➔ Se mettre d’accord avec nos partenaires sur une Charte du partenariat pour lacoopération au développement
➔ Inverser la vision de la conditionnalité de l’aide au développement, la conditionétant la mise en oeuvre de la Charte africaine pour une gouvernance légitime
➔ Assurer la transparence de l’aide aux yeux des populations
➔ Proposer dans les pays une stratégie de développement à long terme à laquelleon invite les différents bailleurs à coopérer
➔ Proposer une nouvelle ingénierie de l’aide permettant de sortir de l’approche parprojet
➔ Créer des espaces d’apprentissage communs à l’échelle africaine pour améliorerla pertinence de l’aide
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8. Renforcer la légitimité dessystèmes électoraux et de
représentativité
La conception que l’Etat africain est pluriel et qu’il soit composé de plusieurscommunautés amène à poser le problème des principes sur lesquels se fondent lessystèmes électoraux et de représentation. La généralisation du suffrage universelbâti sur le principe du « une personne, une voix » participe du non enracinement desinstitutions actuelles de la république et de leur éloignement des véritablesdynamiques sociales. Les processus démocratiques en construction doivent êtreapprofondis dans le sens de les doter de plus de légitimité, en les conciliant avec lesmodes de représentation auxquels les communautés se réfèrent en priorité et quileur « parlent ». Il est nécessaire que, dans les textes électoraux, les autres modesd’expression du suffrage, propres aux différentes communautés nationales et quidonnent un rôle transparent aux différents dépositaires de légitimité (traditionnelles,religieuses et socioprofessionnelles), soient reconnus.
Ce qu’il faut faire :
➔ Garantir la représentation des minorités dans les textes électoraux
➔ Introduire le principe des grands électeurs dans les lois électorales, afin de leurdonner un rôle transparent
➔ Supprimer des textes électoraux le monopole de représentation qui est dévolu auxpartis politiques
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9. Renforcer la légitimité de l’action publiqueen assurant la qualité des prestations des
administrations
La discussion préalable sur le projet de société n’ayant pas été menée, l’entreprisede « démantèlement des Etats », conduite durant les années 1980 et 1990, agrandement contribué à affaiblir les administrations publiques. L’accroissement de lapauvreté et la multiplication des foyers de guerre qui s’allument un peu partout dansle continent témoigne de la nécessité d’un Etat crédible et respecté, capabled’organiser la redistribution des revenus et la solidarité nationale, de gérer lasécurité des biens et des personnes. Etroitement lié à la qualité de la gouvernance, leniveau de satisfaction des besoins économiques, sociaux, culturels et de sécuriténous dit long sur le chemin à parcourir pour refonder des Etats viables sur lecontinent. Dans cette perspective, la vision du service public doit être entièrementrevue, notamment pour ce qui concerne les administrations publiques. Celles-cidoivent rompre avec la culture de « l’administration d’occupation et decolonisation », et revenir dans la société : grâce à une plus grande proximité desservices publics, une plus grande attention aux besoins des usagers et à la qualité deses prestations, la libération d’espaces d’initiatives et de décision au profit des autresacteurs. Acquerrant ainsi une légitimité, une assise sociale, une utilité socialereconnues, l’action publique sera véritablement en mesure de conduire lestransformations nécessaires au développement. Cela nécessite des interventionsconvergentes sur le renforcement des capacités des autres acteurs, l’amélioration ducadre réglementaire et éthique de l’action publique, la déconcentration et ladécentralisation des services publics, le recentrage de l’administration centrale surla conduite des missions régaliennes de l’Etat.
Ce qu’il faut faire :
➔ Remettre les problèmes communs au centre de la coopération entre institutionsau lieu de mettre les institutions au centre de cette coopération
➔ Décentraliser et déconcentrer les services et les ressources publiques➔ Soumettre publiquement et régulièrement les services publics à une évaluation
de légitimité de leur action et de la qualité de leurs prestations➔ Adapter le contenu des formations des agents de l’administration aux réalités des
pays et aux besoins des usagers
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10. Promouvoir une culturerépublicaine ancrée dans les valeurs
de l’Afrique
La culture républicaine s’attache à la conscience que les acteurs institutionnels, lesindividus et les communautés ont de leurs droits et de leurs obligations vis-à-vis de lacollectivité et la volonté qu’ils manifestent de traduire effectivement cette consciencedans tous leurs actes publics. C’est une œuvre de longue haleine qui s’acquiert parun approfondissement de la démocratie, l’élargissement de l’espace public,l’éducation des citoyens, mais aussi par la mise en place de dispositifs de contrôle etde coercition qui assurent la conformation de tous les acteurs de l’espace public àl’ensemble des règles édictées et des mesures prises par les assemblées.
Ce qu’il faut faire :
➔ Passer d’une vision patrimoniale et solitaire du pouvoir à une vision collective etsolidaire de l’exercice du pouvoir
➔ Renforcer le statut et la fonction des magistrats et des auxiliaires de justice pourconforter l’Etat de droit
➔ Officialiser les principales langues nationales et transcrire dans ces langues leslois et règlements
➔ Faire contribuer les différents espaces de transmission et d’évolution des valeursà l’émergence d’une culture citoyenne
➔ Faire des fondements éthiques de la constitution la source d’inspiration desinstitutions, lois et règlements
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Pour une gouvernance régionale efficace pour sortirl’Afrique de sa marginalité
Historiquement, la sous région de l’Afrique de l'Ouest s’est forgée une réalitéd’intégration sociale et culturelle parfois assez poussée. Cette intégration estattestée de nos jours encore par une identité et ou une grande parenté des languesparlée, des coutumes, la similarité des institutions endogènes et par les mouvementsmigratoires qui se déroulent sur de vastes espaces. Cette forme historiqued’intégration est le fait des peuples et s’est forgée sur une longue période d’histoirecommune. Cette longue tradition de brassage et d’intégration sociale et culturelledevrait constituer un modèle intéressant pour les tentatives d’intégrationéconomiques et politiques, initiées par les acteurs étatiques et institutionnels.
La compétition qu'apportent la libéralisation et la mondialisation, dans les actuelleséconomies de pénurie de l’Afrique, sont surtout porteuses de différenciation et decrises sociales. Or, le marché régional constitue le plus fort gisement potentield'activités pour l'avenir. C'est aussi dans les perspectives des évolutionsdémographiques régionales que peut s'inscrire l'essor des échanges régionaux sur lemoyen et long terme. Le jeu des complémentarités régionales et la compétition surles marchés nationaux constituent un puissant stimulant du développement del'économie régionale. L’espace régional doit pouvoir offrir à des Etats fragilisés, uncadre maîtrisé d’échange de biens et services, d’harmonisation des politiques, derèglement des conflits et d’alliance stratégique face au reste du monde.
Mais la réussite d’un tel processus, long, coûteux et surtout exigeant en renoncementet en pertes de souveraineté, nécessite, au-delà des mécanismes techniques etinstitutionnels un projet politique suffisamment explicite. Ce projet politique doit êtrelargement discuté et progressivement validé avec tous les acteurs. C’est en cela queles politiques d’intégration régionale doivent s’inscrire dans une problématique plusglobale de gouvernance régionale, qui ne se limite pas aux seules dimensionsinstitutionnelles, financières et économiques.
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11. Gérer les territoires par desconventions entres les acteurs
L’aménagement du territoire régional est l’un des aspects fondamentaux del’intégration. Le continent est marqué par un double mouvement : l’hypertrophie desvilles et de leurs environs et un déplacement des populations vers les zones côtières.Les déséquilibres qui en résultent de ce phénomène sont importants : pression surles ressources, atteintes à l’environnement, problèmes de cohabitation, de sécurité,etc. La gestion concertée des territoires au delà des frontières actuelles est unmoyen pertinent de gestion de ces difficultés que les Etats pris isolément sontincapables de résoudre. La réalisation de grands projets régionaux structurantscomme le prévoit le NEPAD se heurte aussi à un manque de moyens qui ne peut êtrecompensé que par la mise en commun des moyens disponibles dans le cadre d’unepolitique régionale concertée.
La démarche proposée est caractérisée par la contractualisation de la gestion desterritoires par l’intervention des acteurs publics et privés, institutionnels et noninstitutionnels qui peuvent conclure des conventions du type contrats dedéveloppement territorial ou contrats de solidarité territoriale.L’approche des « pays frontières » peut constituer un point de départ intéressant.Les « pays –frontière » étant des territoires au confluent de deux ou plusieurs pays etoù se polarisent des relations entre des hommes, des activités et des ressources depart et d’autre des frontières, leur gestion peut privilégier une concertation entreautorités nationales, locales (décentralisées), régionales et acteurs privés. Cetteconcertation doit aboutir à la mise en commun et à la gestion commune de certainesinfrastructures (écoles, centre de santé marchés) et de certains services (actesadministratifs, environnement, sécurité)
Ce qu’il faut faire :➔ Cartographier chaque territoire avec ses spécificités : richesse, environnement,
risques, démographie➔ Instaurer une démarche inclusive des acteurs publics, privés, institutionnels, non
institutionnels dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des projets➔ Elaborer des projets de développement spécifiques à chaque territoire➔ Reconnaître la complémentarité et la solidarité comme fondement de la
coopération entre les territoires par des conventions fondées sur une démarcheinclusive
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12. Garantir la mobilité des personnes et des biens
La mobilité est l’un des enjeux majeurs de l’intégration en raison des potentialitésqu’elle offre sur le plan des échanges humains et économiques. Elle s’inscrit dans unlarge processus d’échanges séculaires et de brassage entre les peuples du continent.Reconnu comme un des droits fondamentaux des citoyens des différentes régions, ledroit à la mobilité est dans les faits constamment remise en cause par les Etats etleurs démembrements. La liberté de circulation des personnes et des biens ne peutêtre effective que si l’on supprime les contrôles aux frontières intérieures ou à tout lemoins s’ils deviennent exceptionnels. Pour ce faire, il peut être opportun d’instituerdes mécanismes de contrôle par les organisations socio-professionnelles régionalesavec l’élaboration d’un rapport annuel constatant : le nombre de violations du droit àla mobilité, identifiant les auteurs et proposant des sanctions contre les Etatdéfaillant. Les actions en manquement devront être déférées devant les juridictionscommunautaires.
Ce qu’il faut faire :
➔ supprimer les contrôles aux frontières
➔ Ouvrir les actions en justice aux citoyens en cas de non respect du droit à lamobilité
➔ Instituer un système de contrôle des écarts par la revue des pairs
➔ Instituer un contrôle citoyen sur la revue des pairs proposée par le NEPAD
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13. Assurer la représentation des citoyens et desorganisations socioprofessionnelles dans les
institutions d’intégration
Les processus d’intégration régionale sont caractérisés par une approche purementgouvernementale qui ne prend pas suffisamment en compte les autres acteurs. Il enrésulte un déficit de légitimité de l’action institutionnelle qui ne peut être combléeque par l’appropriation du processus d’intégration par les peuples. Une des voies dela légitimation des actions organisations d’intégration est de les ouvrir à laparticipation des citoyens et de leurs organisations socio-professionnelles ; tant en cequi concerne les mécanismes de prise de décision que la mise en œuvre et le contrôlede ces dernières. La responsabilité des institutions régionales d’intégration doit aussipouvoir être engagée en cas de manquement à leurs obligations.
Ce qu’il faut faire :
➔ Mettre en place une représentation des organisations non étatiques dansl’architecture institutionnelle des organisations d’intégration régionale
➔ Prévoir et organiser des moments obligatoires de compte rendu des organisationsd’intégration régionale aux citoyens
➔ Permettre aux organisations d’intégration régionale d’engager leur responsabilitédevant les citoyens
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14. Gérer collectivement les biens communs,matériels et immatériels
Certains biens sont naturellement des biens partagés. On pourrait les définir à partirde deux catégories : les ressources naturelles (cours d’eau, forêt, etc..) et certainesinfrastructures publiques notamment dans les régions transfrontalières (transport,éducation, santé, et marché). Leur immatriculation au titre de biens communsrégionaux peut constituer un moyen de prévention de la plupart des conflits fondéssur la question de l’accès aux richesses et aux services.
Il faut garantir une gestion partagée des biens régionaux à partir de la mise en placede conventions entre tous les acteurs publics et privés en faisant intervenir nonseulement les Etats mais aussi et surtout les collectivités locales et les organisationsprofessionnelles. Les exemples des réalisations de l’OMVS et des marchéstransfrontaliers peuvent servir de point de départ à une mise en commun des moyenset à un partage des ressources et des prérogatives.
Ce qu’il faut faire :
➔ Inventorier les ressources disponibles et leur condition de renouvellement
➔ Négocier et définir des modes d’utilisation des ressources naturelles
➔ Co-gérer les biens publics régionaux et les ressources naturelles
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15. Bâtir un système éducatif et de formationadapté aux besoins de l’intégration
L’école est le lieu d’acquisition des savoirs et des compétences. En Afrique, lesfaiblesses majeures du système éducatif sont le taux élevé d’analphabétisme, lesmoyens financiers limités, la perte d’image de l’école quant à son utilité, soninadaptation aux besoins. Au-delà de la question d’un accès universel à l’éducation età la formation, le défi du continent est de construire son autonomie intellectuelle etformer les ressources humaines capables d’impulser le développement du continent.La définition de contenus véritablement africains et l’harmonisation de ce contenu auniveau régional sont une garantie de l’adaptation de l’enseignement aux besoins maissurtout aux réalités de l’Afrique. Les deux repères devront être : l’enracinementnécessaire à la valorisation des savoirs et des principes africains de vie et l’ouverturesuffisante à la compréhension du monde et de ses réalités. Le développement desressources humaines du continent et leur utilisation optimale sont les facteursdéterminants du développement économique et social.
La recherche scientifique africaine a du mal à suivre la rapidité des innovations et lamultiplication exponentielle des connaissances. Les Etats africains seuls ne peuventpas mobiliser les moyens suffisants pour suivre le rythme du changement dans cedomaine. L’intégration régionale peut agir à un triple niveau. D’une part, elle peutpermettre une spécialisation de la recherche et de la formation en fonction desspécificités de chaque zone (Exemple : le coton au Mali et au Burkina ; l’arachide auSénégal ; le café et le cacao en Côte-d’ivoire, etc.). D’autre part elle permettrait unemeilleure allocation des ressources destinées à l’innovation par le regroupement desressources financières et humaines et faciliterait le partage des résultats et leurutilisation régionale. Enfin la mise en place de mécanismes particuliers de captagedes compétences de la diaspora pourrait optimiser le rôle des ressources humainesexpatriées sans que leur retour ne soit nécessaire.
Ce qu’il faut faire :
➔ Définir les contenus des formations en fonction des besoins et des réalités de l’Afrique➔ Spécialiser la recherche et la formation en fonction de la spécificité de chaque région➔ Mutualiser et partager les moyens et les résultats de la recherche et de l’innovation➔ Capitaliser et valoriser les compétences de la diaspora
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ANNEXE
Cartographies des propositions
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37
Cartographie des propositions pour la gouvernance locale
Sortir la délibération collective du cadre institutionnel des
collectivités locales
Prémunir l'action publique contre les risques de dérive
et d'abus de pouvoir
Faire de la construction du consensus le fondement de
la démocratie locale
Inverser l'approche de l'organisation des
compétences en partant de la légitimité du local
Définir des moments invariables pendant lesquels s'exerce le
devoir de rendre compte
Prévoir et organiser les mécanismes
d'interpellation dans le fonctionnement des institutions locales
Organiser une simultanéité entre l'action et le contrôle
principe de responsabilité
principe de la
participation
Laisser le niveau local proposer les compétences à partager avec
les différents niveaux
principe d'une ingénierie institutionnelle fondée sur
la subsidiarité
Passer du partage des compétences à l'apprentissage de la coopération entre niveaux
et domaines
Principe de solidarité
Reconnaître et favoriser l'émergence d'espaces publics diversifiés de
délibération
Créer une assemblée locale inclusive de tous les espaces
publics de délibération
principe de la participation
Principe de l'enracinement
Principe de solidarité
Retenir le consensus comme mode de préparation des
décisions
Ne recourir au vote que pour sortir des situations de
blocages
Principe du consensus
Principe de solidarité
principe de la participation
Gouvernance Locale
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Cartographie des propositions pour une refondation des Etats
Consacrer le principe de pluralité juridique dans la constitution
Promouvoir une culture républicaine ancrée dans
les valeurs africaines
Renforcer la légitimité de l'action publique en assurant
la qualité des prestations des administrations
Renforcer la légitimité des principes
électoraux et de représentativité
Mettre la coopération au service du
développement
Créer un conseil national des communautés et des collectivités territoriales
Mettre en place un système de représentation
pour chaque collège et définir un mode
d'excercice des mandats
Doter le Conseil national de compétences
propositionnelles et consultatives
Attribuer au Conseil national un pouvoir de
saisine et d'auto-saisine
principe de la maitrise du
changement par tous les acteurs
principe de responsabilité
principe de la participation
Principe du consensus
Se mettre d'accord sur une Charte du partenariat pour la
coopération au développement
principe de responsabilité
principe de la maitrise du changement par
tous les acteurs
Inverser la vision de la
conditionnalité de l'aide
Proposer une nouvelle ingénierie de l'aide permettant de sortir de
l'approche par projet
Assurer la transparence de l'aide aux yeux des populations
Proposer une stratégie de développement à long terme à laquelle on invite les
différents bailleurs à coopérer
Créer des espaces d'apprentissage communs à
l'échelle africaine pour améliorer la pertinence de l'aide
Faire des fondements éthiques de la constitution la source d'inspiration des
institutions, des lois et réglements
Faire contribuer les différents espaces de transmission et d'évolution des valeurs à
l'émergence d'une culture citoyenne
Officialiser les principales langues nationales et transcrire dans ces langues
les textes de lois et de règlements
Renforcer le statut et la fonction des magistrats et auxilaires de
justice pour conforter l'Etat de droit
Passer d'une vision patrimoniale et solitaire du pouvoir à une vision dynamique et solidaire
principe de responsabilité
Principe de l'enracinement
principe de la maitrise du changement par tous les acteurs
Adapter le contenu des formations des agents de
l'administration aux réalités et besoin du pays
principe de la maitrise du
changement par tous les acteurs
principe de responsabilité
principe de la participation
Décentraliser et déconcentrer les services et les ressources publiques
Remettre les problèmes communs au centre de la
coopération entre institutions au lieu de mettre les institutions au centre
Soumettre publiquement et régulièrement les services publics à une évaluation de la
légitimité de leur action
Supprimer le monopole des représentations des partis politiques
Garantir la représentation des minorités dans les textes électoraux
Introduire le principe des grands électeurs dans la loi électorale
principe de la participation
principe de la maitrise du changement par tous les acteurs
principe de responsabilité
Recenser et systématiser les modes de régulation
traditionnels
Faire du droit coutumier le lieu vivant et permanent d'invention par la communauté de ses propres règles
Refonder les constitutions pour les ancrer dans le réel africain et en faire
un acte instituant pour la société
Organiser des consultations nationales collégiales et
inter-collégiales sur le projet de constitution
Principe de l'enracinement
principe de la participation
Principe du consensus
Refondation de l'Etat
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Cartographie des propositions pour une gouvernance régionale
Gérer les territoires par des
conventions entre les acteurs
Bâtir un système éducatif et de formation adapté aux
besoins de l'Afrique
Gérer collectivement les biens communs,
matériels et immatériels
Assurer la représentation des citoyens et des organisations socio-professionnelles dans les
institutions d'intégration
Garantir la mobilité des personnes et
des biens
Prévoir et organiser des moments obligatoires de
compte rendu des organisations
d'intégration régionale aux citoyens
principe de la participation principe de
responsabilité
Permettre aux organisation
d'intégratin régionale d'engager leur
responsabilité devant les citoyens
principe de la maitrise du
changement par tous les acteurs
Mettre en place une représentation des
organisations non étatiques dans les organisations d'intégration régionale
Définir les contenus des formations en
fonction des besoins et des
réalité de l'Afrique
Spécialiser la recherche et la
formation en fonction de la spécificité de
chaque région
Mutualiser et partager les moyens et les résultats de la recherche et de l'innovation
Capitaliser et valoriser les
compétences de la diasporaprincipe de la
maitrise du changement par tous les acteurs
Principe de l'enracinement
Supprimer les contrôles aux frontières
Ouvrir les actions en justice aux citoyens en cas du non respect du
droit à la mobilité
Instituer un système de contrôle des écarts par la Revue des pairs
Instituer un contrôle citoyen sur la revue
des pairs
principe de responsabilité
principe de la participation
Cartographier chaque territoire avec ses
spécificités : richesse, environnement, risques,
démographie...
Elaborer des projets de
développement spécifiques à
chaque territoire
Instaurer une démarche inclusive des acteurs publics, privés,
institutionnels, non institutionnels dans l'élaboration, la mise en oeuvre
et l'évaluation des projets
Reconnaître la complémentarité et la solidarité comme fondements de la coopération entre
les territoires
principe de la participation
Principe du consensus
principe de la maitrise du changement par tous les
acteurs
Principe de solidarité
principe de responsabilité
principe d'une ingénierie
institutionnelle fondée sur la subsidiarité
Négocier et définir des
modes d'utilisation des
ressources naturelles
Cogerer les biens publics régionaux et
les ressources naturelles
Inventorier les ressources
disponibles et leur condition de
renouvellementPrincipe du consensus
Principe de solidarité
principe de la maitrise du
changement par tous les acteurs
principe de responsabilité
principe d'une ingénierie
institutionnelle fondée sur la subsidiarité
Gouvernance régionale
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Membres du réseau - 2003
Comité d'Initiative
Ousmane Sy - Coordinateur du réseau
Fadel Diamé - directeur de le FRAO
Antoine Sawadogo
John Igué
Alhassane Condé
Jean Freyss - FPH
Appui méthodologique et technique
Momar Dieng - FRAO
Sidiki Abdoul Daff
Cheikh Ba
Falilou Mbacké Cissé
Karine Goasmat - FPH
Au niveau national, les travaux du réseau ont été conduits par des animateursnationaux avec l'appui de personnes ressources dans les pays suivants : Bénin,Burkina Faso, Cameroun, Gambie, Guinée Conakry, Guinée Bisau, Mali, Sénégal,Togo.
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Le réseau
Site web : http://www.afrique-gouvernance.net
Prendre contact avec le Centre de ressources : Sidiki Daff : [email protected]
Karine Goasmat : karine @afrique-gouvernance.net
Soutenu par : La Direction du Développement et de la Coopération Suisse (DDC)
(http://www.deza.admin.ch)La Fondation Rurale d'Afrique de l'Ouest (FRAO) ( http://www.frao.org)
La Fondation Charles Léopold Mayer (FPH) (http://www.fph.ch)