Guillaume Apollinaire
Calligrammes
Pomes de la paixet de la guerre(1913-1916)
la mmoiredu plus ancien de mes camarades
REN DALIZEmort au Champ dHonneur
le 7 mai 1917.
artyuiop dbut de la table page suivantebibliographie propos
Guillaume Apollinaire
Pote, romancier, journaliste franais,(n Rome le 26 aot 1880, mort Paris le 9 novembre 1918.)
N d'une mre issue de la noblesse polonaise, Angelica Kostrowicka, et de pre inconnu, Guillaume Apollinaire, arrive
Monaco en 1887, puis poursuit des tudes aux lyces de Cannes et de Nice.
Peu avant de s'engager dans l'arme franaise en dcembre 1914, il tombe amoureux de Louise de Coligny-Chtillon, qu'il surnomme
Lou, rencontre Nice. Mais la jeune femme ne l'aimera jamais, ou du moins, pas comme il le voudrait; et si elle le rejoint au
rgiment pendant une semaine (il connatra dans ses bras un rotisme violent qui marquera jamais sa plume) ils rompent en
mars 1915. En avril, il part avec le 38e rgiment d'artillerie de campagne pour le front de Champagne. Malgr les vicissitudes du
front, il crit ds qu'il le peut pour tenir et rester pote. La guerre est pour lui l'occasion de se dclarer vrai Franais . En 1915, dans un train, il rencontre Madeleine Pags avec laquelle il se fiancera.
Transfr sur sa demande au 96e rgiment d'infanterie avec le grade de sous-lieutenant, il est bless la tte par un clat d'obus le
17 mars 1916, alors qu'il lit "le Mercure de France" dans sa tranche, est vacu sur Paris o il est trpan en mai 1916. Aprs une longue convalescence, il se remet progressivement au travail,
fait jouer sa pice "Les Mamelles de Tirsias" en juin 1917 et publie "Calligrammes" en 1918.
Guillaume Apollinaire meurt le 9 novembre 1918 de la grippe espagnole, affaibli par sa blessure et les gaz de combat.
source wikipdia
artyuiop dbut de la table page prcdente page suivante
Otto Dix
Peintre allemand de La Nouvelle Objectivit et de l'Expressionnisme(n prs de Gera en 1891, mort prs de Constance, Singen, en 1969)
Otto Dix s'engage volontairement en tant que soldat lors de la Premire Guerre mondiale, et combattra en France et en Russie. L'horreur de la guerre le marque normment et devient alors la base de ses oeuvres.
A son retour Dresde, il fonde le Groupe 1919 avec Conrad Felixmller (1897-1977) et ralise des collages dada. En 1922, Dix s'installe
Dsseldorf o il intgre l'association artistique Das Junge Rheinland. Il se marie avec Martha Koch en 1923. Entre 1925 et 1927, Dix habite et
travaille Berlin o sa peinture critique atteint son apoge. Il devient un artiste du mouvement de la Nouvelle Objectivit, dont il est un des
pres fondateurs. En 1927, il est nomm professeur la Kunstakademie de Dresde.
Aprs la prise du pouvoir par les nazis en 1933, Otto Dix est l'un des premiers professeurs d'art tre renvoy. La mme anne, il
commence une migration intrieure dans le sud-ouest de l'Allemagne (en 1933 Randegg puis en 1936 Hemmenhofen), o il
peint des paysages. En 1937, ses oeuvres sont dites dgnrs par les nazis. 260 d'entre elles sont retirs des muses et une partie est
brle, d'autres sont exposs lors de l'exposition nazi art dgnr (Entartete Kunst).
En 1938, Dix est arrt et enferm pendant deux semaines par la Gestapo. Durant ces temps difficiles, il peint une reprsentation de St
Christophe la demande de la brasserie de Kstritz.source wikipdia
artyuiop dbut de la table page suivantepage prcdente
table
Ondes
Liens
Les fentres
Paysage
Les collines
Arbre
Lundi rue Christine
Lettre-ocan
Sur les prophties
Le musicien de Saint-Merry
La cravate et la montre
Un fantme de nues
voyage
Cur couronne et miroir
Tour
travers lEurope
Il pleut
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable suivanteretour la premire page propos bibliographie
Liens
Cordes faites de cris
Sons de cloches travers lEuropeSicles pendus
Rails qui ligotez les nationsNous ne sommes que deux ou trois hommes
Libres de tous liensDonnons-nous la main
Violante pluie qui peigne les fumesCordes
Cordes tissesCbles sous-marins
Tours de Babel changes en pontsAraignes-Pontifes
Tous les amoureux quun seul lien a lis
Dautres liens plus tnusBlancs rayons de lumire
Cordes et Concorde
Jcris seulement pour vous exalter sens sens chris
Ennemis du souvenirEnnemis du dsir
Ennemis du regretEnnemis des larmes
Ennemis de tout ce que jaime encore
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Les fentres
Du rouge au vert tout le jaune se meurtQuand chantent les aras dans les forts natales
Abatis de pihisIl y a un pome faire sur loiseau qui na quune aile
Nous lenverrons en message tlphoniqueTraumatisme gant
Il fait couler les yeuxVoil une jolie jeune fille parmi les jeunes Turinaises
Le pauvre jeune homme se mouchait dans sa cravate blancheTu soulevas le rideau
Et maintenant voil que souvre la fentreAraignes quand les mains tissaient la lumire
Beaut pleur insondable violetsNous tenterons en vain de prendre du repos
On commencera minuitQuand on a le temps on a la libert
Bigorneaux Lotte multiples Soleils et lOursin du couchantUne vielle paire de chaussures jaunes devant la fentre
ToursLes Tours ce sont les rues
PuitsPuits ce sont les places
PuitsArbres creux qui abritent les Cpresses vagabondes
Les Chabins chantent des airs mourirAux Chabines marronnes
Et loie oua-oua trompette au nord
O les chasseurs de ratonsRaclent les pelleteriestincelant diamantVancouvertO le train blanc de neige et de feux nocturnes fuit lhiver ParisDu rouge au vert tout le jaune se meurtParis Vancouvert Hyres Maintenon New-York et les AntillesLa fentre souvre comme une orangeLe beau fruit de la lumire.
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Paysage
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
VOICI LA MAISON O NAISSENT LES TOILES ET LES DIVINITS
CET ARBRISSEAU QUI SE PRPARE FRUCTIFIER TE RESSEMBLE
UN CIGARE ALLUM QUI FUME
VOUS AMANTS COUCHS ENSEMBLE
VOUS SPAREZ MES MEMBRES
page suivantepage prcdentetable
Les collines
Au-dessus de Paris un jourCombattaient deux grands avionsLun tait rouge et lautre noirTandis quau znith flamboyaitLternel avion solaire
Lun tait toute ma jeunesseEt lautre ctait lavenirIls se combattaient avec rageAinsi fit contre LuciferLArchange aux ailes radieuses
Ainsi le calcul au problmeAinsi la nuit contre le jourAinsi attaque ce que jaimeMon amour ainsi louraganDracine larbre qui crie
Mais vois quelle douceur partoutParis comme une jeune filleSveille langoureusementSecoue sa longue chevelureEt chante sa belle chanson
O donc est tombe ma jeunesseTu vois que flambe lavenirSache que je parle aujourdhuiPour annoncer au monde entierQuenfin est n lart de prdire
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
2 les collines
Certains hommes sont des collinesQui slvent dentre les hommes
Et voient au loin tout lavenirMieux que sil tait le prsent
Plus net que sil tait pass
Ornement des temps et des routesPasse et dure sans tarrterLaissons sibiler les serpents
En vain contre le vent du sudLes Psylles et londe ont pri
Ordre des temps si les machinesSe prenaient enfin penserSur les plages de pierreries
Des vagues dor se briseraientLcume serait mre encore
Moins haut que lhomme vont les aiglesCest lui qui fait la joie des mers
Comme il dissipe dans les airsLombre et les spleens vertigineux
Par o lesprit rejoint le songe
Voici le temps de la magieIl sen revient attendez-vous des milliards de prodiges
Qui nont fait natre aucune fableNul les ayant imagins
Profondeurs de la conscienceOn vous explorera demainEt qui sait quels tres vivantsSeront tirs de ces abmesAvec des univers entiers
Voici slever des prophtesComme au loin des collines bleuesIl sauront des choses prcisesComme croient savoir les savantsEt nous transporteront partout
La grande force est le dsirEt viens que je te baise au frontO lgre comme une flammeDont tu as toute la souffranceToute lardeur et tout lclat
Lge en vient on tudieraTout ce que cest que de souffrirCe ne sera pas du courageNi mme du renoncementNi tout ce que nous pouvons faire
On cherchera dans lhomme mmeBeaucoup plus quon ny a cherchOn scrutera sa volontEt quelle force natra delleSans machine et sans instrument
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
les collines
Les secourables mnes errentSe compntrant parmi nous
Depuis les temps qui nous rejoignentRien ny finit rien ny commence
Regarde la bague ton doigt
Temps des dserts des carrefoursTemps des places et des collines
Je viens ici faire des toursO joue son rle un talismanMort et plus subtil que la vie
Je me suis enfin dtachDe toutes choses naturelles
Je peux mourir mais non pcherEt ce quon na jamais touch
Je lai touch je lai palp
Et jai scrut tout ce que nulNe peut en rien imaginer
Et jai soupes maintes foisMme la vie impondrableJe peux mourir en souriant
Bien souvent jai plan si hautSi haut quadieu toutes les choses
Les trangets les fantmesEt je ne veux plus admirerCe garon qui mine leffroi
Jeunesse adieu jasmin du tempsJai respir ton frais parfumA Rome sur des chars fleurisChargs de masques de guirlandesEt des grelots du carnaval
Adieu jeunesse blanc NolQuand la vie ntait quune toileDont je contemplais le refletDans la mer MditerranePlus nacre que les mtores
Duvete comme un nid darchangesOu la guirlande des nuagesEt plus lustre que les halosmanations et splendeursUnique douceur harmonies
Je marrte pour regarderSur la pelouse incandescenteUn serpent erre cest moi-mmeQui suis la flte dont je joueEt le fouet qui chtie les autres
Il vient un temps pour la souffranceIl vient un temps pour la bontJeunesse adieu voici le tempsO lon connatra lavenirSans mourir de sa connaissance
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
les collines
Cest le temps de la grce ardenteLa volont seule agira
Sept ans dincroyables preuvesLhomme se divinisera
Plus pur plus vif et plus savant
Il dcouvrira dautres mondesLesprit languit comme les fleurs
Dont naissent les fruits savoureuxQue nous regarderons mrir
Sur la colline ensoleille
Je dis ce quest au vrai la vieSeul je pouvais chanter ainsi
Mes chants tombent comme des grainesTaisez-vous tous vous qui chantez
Ne mlez pas livraie au bl
Un vaisseau sen vint dans le portUn grand navire pavois
Mais nous ny trouvmes personneQuune femme belle et vermeille
Elle y gisait assassine
Une autre fois je mendiaisLon ne me donna quune flammeDont je fus brl jusquaux lvres
Et je ne pus dire merciTorche que rien ne peut teindre
O dons es-tu mon amiQui rentrais si bien en toi-mmeQuun abme seul est restO je me suis jet moi-mmeJusquaux profondeurs incolores
Et jentends revenir mes pasLe long des sentiers que personneNa parcourus jentends mes pas toute heure ils passent l-basLents ou presss ils vont ou viennent
Hivers toi qui te fais la barbeIl neige et je suis malheureuxJai travers le ciel splendideO la vie est une musiqueLe sol est trop blanc pour mes yeux
Habituez-vous comme moi ces prodiges que jannonce la bont qui va rgner la souffrance que jendureEt vous connatrez lavenir
Cest de souffrance et de bontQue sera faite la beautPlus parfaite que ntait celleQui venait des proportionsIl neige et je brle et je tremble
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
les collines
Maintenant je suis ma tableJcris ce que jai ressenti
Et ce que jai chant l-hautUn arbre lanc que balance
Le vent dont les cheveux senvolent
Un chapeau haut de forme est surUne table charge de fruits
Les gants sont morts prs dune pommeUne dame se tord le cou
Auprs dun monsieur qui savale
Le bal tournoie au fond du tempsJai tu le beau chef dorchestre
Et je ple pour mes amisLorange dont la saveur estUn merveilleux feu dartifice
Tous sont morts le matre dhtelLeur verse un champagne irrelQui mousse comme un escargotOu comme un cerveau de pote
Tandis que chantait une rose
Lesclave tient une pe nueSemblable aux sources et aux fleuves
Et chaque fois quelle sabaisseUn univers est ventr
Dont il sort des mondes nouveaux
Le chauffeur se tient au volantEt chaque fois que sur la routeIl corne en passant le tournantIl parat perte de vueUn univers encore vierge
Et le tiers nombre cest la dameElle monte dans lascenseurElle monte monte toujoursEt la lumire se dploieEt ces clarts la transfigurent
Mais ce sont de petits secretsIl en est dautres plus profondsQui se dvoileront bienttEt feront de vous cent morceaux la pense toujours unique
Mais pleure pleure et repleuronsEt soit que la lune soit pleineOu soit quelle nait quun croissantAh! pleure pleure et repleuronsNous avons tant ri au soleil
Des bras dor supportent la viePntrez le secret dorTout nest quune flamme rapideQue fleurit la rose adorableEt do monte un parfum exquis
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Arbre
A Frdric Boutet.
Tu chantes avec les autres tandis que les phonographes galopentO sont les aveugles o sont-ils alls
La seule feuille que jaie cueillie sest chang en plusieurs mirageNe mabandonnez pas parmi cette foule de femmes au march
Ispahan sest fait un ciel de carreaux maills de bleuEt je remonte avec vous une route aux environs de Lyon
Je nai pas oubli le son de la clochette dun marchand de coco dautrefois
Jentends dj le son aigre de cette voix venirDu camarade qui se promne avec toi en Europe
Tout en restant en Amrique
Un enfant Un veau dpouill pendu ltal
Un enfantEt cette banlieue de sable autour dune pauvre ville au fond de lest
Un douanier se tenait l comme un ange la porte dun misrable paradis
Et ce voyageur pileptique cumait dans la salle dattente des premires
Engoulevent BlaireauEt la Taupe-Ariane
Nous avions lou deux coups dans le transsibrienTour tour nous dormions le voyageur en bijouterie et moi
Mais celui qui veillait ne cachait point un revolver arm
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Tu tes promen Leipzig avec une femme mince dguis en hommeIntelligence car voil ce que cest quune femme intelligente
Et il ne faudrait pas oublier les lgendesDame-Abonde dans un tramway la nuit au fond dun quartier dsert
Je voyais une chasse tandis que je montaisEt lascenseur sarrtait chaque tage
Entre les pierresEntre les vtements multicolores de la vitrine
Entre les charbons ardents du marchand de marronsEntre deux vaisseaux norvgiens amarrs Rouen
Il y a ton image
Elle pousse entre les bouleaux de la Finlande
Ce beau ngre en acier
La plus grande tristesseCest quand tu reus une carte postale de La Corogne
Le vent vient du couchantLe mtal des caroubiers
Tout est plus triste quautrefoisTous les dieux terrestres vieillissent
Lunivers se plaint par ta voixEt des tres nouveaux surgissent
Trois par trois
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Lundi rue Christine
La mre de la concierge et la concierge laisseront tout passerSi tu est un homme tu maccompagneras ce soir
Il suffirait quun type maintnt la porte cochrePendant que lautre monterait
Trois becs de gaz allumsLa patronne est poitrinaire
Quand tu auras fini nous jouerons une partie de jacquetUn chef dorchestre qui a mal la gorge
Quand tu viendras Tunis je te ferai fumer du kief
a a lair de rimer
Des piles de soucoupes des fleurs un calendrierPim pam pim
Je dois fiche prs de 300 francs ma probloqueJe prfrerais me couper le parfaitement que de les lui donner
Je partirai 20 h. 27Six glaces sy dvisagent toujours
Je crois que nous allons nous embrouiller encore davantage
Cher monsieurVous tes un mec la mie de pain
Cette dame a le nez comme un ver solitaireLouise a oubli sa fourrure
Moi je nai pas de fourrure et je nai pas froidLe danois fume sa cigarette en consultant lhoraire
Le chat noir traverse la brasserie
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Ces crpes taient exquisesLa fontaine coule
Robe noire comme ses onglesCest compltement impossible
Voici monsieurLa bague en malachite
Le sol est sem de sciureAlors cest vrai
La serveuse rousse a t enleve par un libraire
Un journaliste que je connais dailleurs trs vaguement
coute Jacques cest trs srieux ce que je vais te dire
Compagnie de navigation mixte
Il me dit monsieur voulez-vous voir ce que je peux faire deaux-fortes et de tableaux
Je nai quune petite bonne
Aprs djeuner caf du Luxembourg
Une fois l il me prsente un gros bonhommeQui me dit
coutez cest charmant Smyrne Naples en Tunisie
Mais nom de Dieu o est-ceLa dernire fois que jai t en Chine
Cest il y a huit ou neuf ansLHonneur tient souvent lheure que marque la pendule
La quinte major
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Lettre-Ocan........................................................................................................................................................................................................................
Je traverse la ville nez en avant et je la coupe en 2Jtais au bord du Rhin quand tu partis pour le Mexique
Ta voix me parvient malgr lnorme distanceGens de mauvaise mine sur le quai la Vera Cruz
........................................................................................................................................................................................................................
Juan Aldama - Correos - Mexico - 4 centavos - U.S. Postage 2 cents 2REPUBLICA MEXICANA TARJETA POSTAL
11 45 29-5 14 Rue des Batignolles Les voyageurs de lEspagne devant faire le voyage de Coatzacoalcos pour
sembarquer je tenvoie cette carte aujourdhui au lieu de profiter du courrier de Vera Cruz qui nest pas sr. Tout est calme ici et nous sommes dans
lattente des vnements.T S F
Sur la rive gauche devant le pont dInaArrtez cocher
Vive le RoyEvviva il Papa
la gueule mon vieux padnon si vous avez une moustache
La Tunisie tu fondes un journalJacques ctait dlicieux
bas la calotteDes clefs jen ai vu mille et mille
Hou le croquantVive la Rpublique
Zut pour M. ZunBONJOUR NOMO NORA
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
TU NE CONNATRA JAMAIS BIEN LESMAYAS
Te souviens-tu du tremblement de terre entre 1885 et 1890on coucha plus dun mois sous la tente
BONJOUR MON FRRE ALBERT MEXICO........................................................................................................................................................................................................................
Jeunes filles Chapultepec
Haute de 300 mtresSirnes ou ou ou ou ou ou Hou Hou Hou
Autobus ro ro ro ro ting ting ro o changement de section ting tingGramophones z z z z ou ou ou o o o o o o
o o o o o de vos jardins fleuris fermez les portesLes chaussures neuves du pote
cr cr cr cr cr cr crrue St-Isidore la Havane cela nexiste +
ChirimoyaA la crme
Pendeco cest + quun imbcileil appelait lindien Hijo de la Cingada
pritaire de 5 ou 6je me suis lev 2 h. du matin et jai dj bu un mouton
Le cablogramme comportait 2 mots EN SURETAllons circulez Mes
ture les voyageurs pour chatouTous saint Luca est maintenant Poitiers
et comment jai brl le dur avec ma gerce
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Sur les prophties
jai connu quelques prophtessesMadame Salmajour avait appris en Ocanie tirer les cartes
Cest l-bas quelle avait eu encore loccasion de participer une scne savoureuse danthropophagie
Elle nen parlait pas tout le mondeEn ce qui concerne lavenir elle ne se trompait jamais
Une cartomancienne cretane Marguerite je ne sais plus quoiEst galement habile
Mais Madame Deroy est la mieux inspireLa plus prcise
Tout ce quelle ma dit du pass tait vrai et tout ce quelleMa annonc sest vrifi dans le temps quelle indiquait
Jai connu un sciomancien mais je nai pas voulu quil interroget mon ombreJe connais un sourcier cest le peintre norvgien Diriks
Miroir bris sel renvers ou pain qui tombePuissent ces dieux sans figure mpargner toujours
Au demeurant je ne crois pas mais je regarde et jcoute et notezQue je lis assez bien dans la main
Car je ne crois pas mais je regarde et quand cest possible jcoute
Tout le monde est prophte mon cher Andr BillyMais il y a longtemps quon fait croire aux gens
Quils nont aucun avenir quils sont ignorants jamaisEt idiots de naissance
Quon en a pris son parti et que nul na mme lideDe se demander sil connat lavenir ou non
Il ny a pas desprit religieux dans tout celaNi dans les superstitions ni dans les prophtiesNi dans tout ce que lon nomme occultismeIl y a avant tout une faon dobserver la natureEt dinterprter la natureQui est trs lgitime
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Le musicien de Saint-Merry
Jai enfin le droit de saluer des tres que je ne connais pasIls passent devant moi et saccumulent au loinTandis que tout ce que jen vois mest inconnuEt leur espoir nest pas moins fort que le mien
Je ne chante pas ce monde ni les autres astresJe chante toutes les possibilits de moi-mme hors de ce monde et des astres
Je chante le joie derrer et le plaisir den mourir
Le 21 du mois de mai 1913Passeur des morts et les mordonnantes mriennesDes millions de mouches ventaient une splendeur
Quand un homme sans yeux sans nez et sans oreillesQuittant le Sbasto entra dans la rue Aubry-le-Boucher
Jeune lhomme tait brun et de couleur de fraise sur les jouesHomme Ah! Ariane
Il jouait de la flte et la musique dirigeait ses pasIl sarrta au coin de la rue Saint-Martin
Jouant lair que je chante et que jai inventLes femmes qui passaient sarrtaient prs de lui
Il en venait de toutes partsLorsque tout coup les cloches de Saint-Merry se mirent sonner
Le musicien cessa de jouer et but la fontaineQui se trouve au coin de la rue Simon-Le-Franc
Puis saint-Merry se tutLinconnu reprit son air de flte
Et revenant sur ses pas marcha jusqu la rue de la VerrerieO il entra suivi par la troupe des femmes
Qui sortaient des maisons
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Qui venaient par les rues traversires les yeux fousLes mains tendues vers le mlodieux ravisseur
Il sen allait indiffrent jouant son airIl sen allai terriblement
Puis ailleurs quelle heure un train partira-t-il pour Paris
ce momentLes pigeons des Moluques fientaient des noix muscades
En mme tempsMission catholique de Bma quas-tu fait du sculpteur
AilleursElle traverse un pont qui relie Bonn Beuel et disparait travers Ptzchen
Au mme instantUne jeune fille amoureuse du maire
Dans un autre quartierRivalise donc pote avec les tiquettes des parfumeurs
En somme rieurs vous navez pas tir grand-chose des hommesEt peine avez-vous extrait un peu de graisse de leur misre
Mais nous qui mourons de vivre loin lun de lautreTendons nos bras et sur ces rails roule un long train de marchandises
Tu pleurais assise prs de moi au fond dun fiacre
Et maintenantTu me ressembles tu me ressembles malheureusement
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Nous nous ressemblons comme dans larchitecture du sicle dernierCes hautes chemines pareilles des tours
Nous allons plus haut maintenant et ne touchons plus le sol
Et tandis que le monde vivait et variait
Le cortge des femmes long comme un jour sans painSuivait dans la rue de la Verrerie lheureux musicien
Cortges cortgesCest quand jadis le roi sen allait Vincennes
Quand les ambassadeurs arrivaient ParisQuand le maigre Suger se htait vers la SeineQuand lmeute mourait autour de Saint-Merry
Cortges cortgesLes femmes dbordaient tant leur nombres tait grand
Dans toutes les rues avoisinantesEt se htaient raides comme balle
Afin de suivre le musicienAh! Ariane et toi Pquette et toi Amine
Et toi Mia et toi Simone et toi MaviseEt toi Colette et toi la belle GeneviveElles ont pass tremblantes et vaines
Et leurs pas lgers et prestes se mouvaient selon la cadenceDe la musique pastorale qui guidait
Leurs oreilles avides
Linconnu sarrta un moment devant une maison vendreMaison abandonne
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Aux vitres brisesCest un logis du seizime sicle
La cour sert de remise des voitures de livraisonsCest l quentra le musicien
Sa musique qui sloignait devint langoureuseLes femmes le suivirent dans la maison abandonne
Et toutes y entrrent confondues en bandeToutes toutes y entrrent sans regarder derrire elles
Sans regretter ce quelles ont laissCe quelles ont abandonn
Sans regretter le jour la vie et la mmoireIl ne resta bientt plus personne dans la rue de la Verrerie
Sinon moi-mme et un prtre de saint-MerryNous entrmes dans la vieille maison
Mais nous ny trouvmes personne
Voici le soir Saint-Merry cest lAnglus qui sonne
Cortges cortgesCest quand jadis le roi revenait de Vincennes
Il vint une troupe de casquettiersIl vint des marchands de bananes
Il vint des soldats de la garde rpublicaineO nuit
Troupeau de regards langoureux des femmesO nuit
Toi ma douleur et mon attente vaineJentends mourir le son dune flte lointaine
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
La cravate et la montre
LA CRAVATEDOULOUREUSE QUE TU PORTES ET QUI TORNE
O CIVILIS OTE-LA SI TU VEUX BIEN RESPIRER
COMME LON SAMUSE BIENMon cur
les yeuxlenfant
Aglala main
Tircissemaine
linfini redress par un fou de philosopheles Muses aux portes de ton corps
le bel inconnuet le vers dantesque luisant et cadavrique
les heures
Il est 5 enfinEt tout sera fini
la beaut de la vie passe la douleur de mourir
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Un fantme de nues
Comme ctait la veille du quatorze juilletVers les quatre heures de laprs-midi
Je descendis dans la rue pour aller voir les saltimbanques
Ces gens qui fonts des tours en plein airCommencent tre rares Paris
Dans ma jeunesse on en voyait beaucoup plus quaujourdhuiIls sen sont alls presque tous en province
Je pris le boulevard Saint-GermainEt sur une petite place situe entre Saint-Germain-des-Prs et la
statue DantonJe rencontrai les saltimbanques
La foule les entourait muette et rsigne attendreJe me fis une place dans ce cercle afin de tout voir
Poids formidablesVilles de Belgique souleves bras tendu par un ouvrier russe de
LongwyHaltres noirs et creux qui ont pour tige un fleuve fig
Doigts roulant une cigarette amre et dlicieuse comme la vie
De nombreux tapis sales couvraient le solTapis qui ont des plis quon ne dfera pas
Tapis qui sont presque entirement couleur de la poussireEt o quelques taches jaunes ou vertes ont persist
Comme un air de musique qui vous poursuit
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Vois-tu le personnage maigre et sauvageLa cendre de ses pres lui sortait en barbe grisonnante
Il portait ainsi toute son hrdit au visageIl semblait rver lavenir
En tournant machinalement un orgue de BarbarieDont la lente voix se lamentait merveilleusement
Les glouglous les couacs et les sourds gmissements
Les saltimbanques ne bougeaient pasLe plus vieux avait un maillot couleur de ce rose violtre quont aux
joues certaines jeunes filles fraches mais prs de la mort
Ce rose-l se niche surtout dans les plis qui entourent souvent leur bouche
Ou prs des narinesCest un rose plein de tratrise
Cet homme portait-il ainsi sur le dosLa teinte ignoble de ses poumons
Les bras les bras partout montaient la gardeLe second saltimbanque
Ntait vtu que de son ombreJe le regardait longtemps
Son visage mchappe entirementCest un homme sans tte
Un autre enfin avait lair dun voyouDun apache bon et crapule la fois
Avec son pantalon bouffant et les accroche-chaussettes
Naurait-il pas eu lapparence dun maquereau sa toilette
La musique se tut et ce furent des pourparlers avec le publicQui sou sou jeta sur le tapis la somme de deux franc cinquanteAu lieu des trois francs que le vieux avait fixs comme prix des tours
Mais quand il fut clair que personne ne donnerait plus rienOn se dcida commencer la sanceDe dessous lorgue sortit un tout petit saltimbanque habill de rose pulmonaireAvec de la fourrure aux poignets et aux chevillesIl poussait des cris brefsEt saluait en cartant gentiment les avant-brasMains ouvertes
Une jambe en arrire prte la gnuflexionIl salua ainsi aux quatre points cardinauxEt quand il marcha sur une bouleSon corps mince devint une musique si dlicate que nul parmi les spectateurs ny fut insensibleUn petit esprit sans aucune humanitPensa chacunEt ces musique des formesDtruisit celle de lorgue mcaniqueQue moulait lhomme au visage couvert danctres
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Le petit saltimbanque fit la roueAvec tant dharmonie
Que lorgue cessa de jouerEt que lorganiste se cacha le visage dans les mains
Aux doigts semblables aux descendants de son destinFtus minuscules qui lui sortaient de la barbe
Nouveaux cris de Peau-RougeMusique anglique des arbres
Disparition de lenfantLes saltimbanques soulevrent les gros haltres bout de bras
Ils jonglrent avec les poids
Mais chaque spectateur cherchait en soi lenfant miraculeuxSicle sicle des nuages
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Voyage
ADIEU AMOUR NUAGE QUI FUISET NA PAS CHU PLUIE FCONDE
REFAIS LE VOYAGE DE DANTE
TLGRAPHE
OISEAU QUI LAISSETOMBER
SES AILES PARTOUT
O VA DONC CE TRAIN QUI MEURT AU LOINDANS LES VALS ET LES BEAUX BOIS FRAIS DU
TENDRE T SI PALE
LA DOUCE NUIT LUNAIRE ET PLEINE DTOILES
CEST TON VISAGE QUE JE NE VOIS PLUS
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Cur couronne et miroir
MON CUR PAREIL UNE FLAMME RENVERSE
LES ROIS QUI MEURENTTOUR TOUR
RENAISSENT AU CUR DES POTES
DANS CE MIROIR JE SUIS ENCLOS VIVANT ET VRAI COMME ON IMAGINE LES ANGES ET NON COMME SONT LES REFLETS
Guillaume Apollinaire
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Tour
A R.D.
Au Nord au sudZnith Nadir
Et les grands cris de lEstLOcan se gonfle lOuest
La Tour la RoueSadresse
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
travers lEurope
A M. Ch.
RotsogeTon visage carlate ton biplan transformable en
hydroplanTa maison ronde o il nage un hareng saur
Il me faut la clef des paupiresHeureusement que nous avons vu M Panado
Et nous somme tranquille de ce ct-lQuest-ce que tu vois mon vieux M.D
90 ou 324 un homme en lair un veau qui regarde travers le ventre de sa mre
Jai cherch longtemps sur les routesTant dyeux sont clos au bord des routes
Le vent fait pleurer les saussaiesOuvre ouvre ouvre ouvre ouvre
Regarde mais regarde doncLe vieux se lave les pieds dans la cuvette
Una volta ho inteso dire ch vuoije me mis pleurer en me souvenant de vos enfances
Et toi tu me montres un violet pouvantableCe petit tableau o il y a une voiture ma rappel le jourUn jour fait de morceaux mauves jaunes bleus verts et rougesO je men allais la campagne avec une charmante chemine tenant sa chienne en laisseIl ny en a plus tu nas plus ton petit mirlitonLa chemine fume loin de moi des cigarettes russesLa chienne aboie contre les lilasLa veilleuse est consumeSur la robe on chu des ptalesDeux anneaux prs des sandalesAu soleil se sont allumsMais tes cheveux sont le trolley travers lEurope vtue de petits
feux multicolores
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Il pleut
Il pleut des voix de femmes comme si elles taient mortes mme dans le souvenircest vous aussi quil pleut merveilleuses rencontres de ma vie gouttelettes et ces nuages cabrs se prennent hennir tout un univers de villes auriculairescoute sil pleut tandis que le regret et le ddain pleurent une ancienne musiquecoute tomber les liens qui te retiennent en haut et en bas
Ondes Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
tendardsLa petite auto
La mandoline lillet et le bambou
Fumes
Nimes
La colombe poignarde et le jet deau
2 e canonnier conducteur
Veille
Ombre
Cest Lou quon la nommait
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable suivantetable prcdente
Je n'oublierai jamais ce voyage nocturne o nul de nous ne dit un motO dpart sombre o mouraient nos 3 phares
O nuit tendre d'avant la guerreO villages o se htaient les
MARECHAUX-FERRANTS RAPPELESENTRE MINUIT ET UNE HEURE DU MATIN
Vers LISIEUX la trs bleueOu bien
Versailles d'orEt 3 fois nous nous arrtmes pour changer un pneu qui avait clat
La petite auto
Le 31 du mois dAot 1914je partis de Deauville un peu avant minuit
Dans la petite auto de Rouveyre
Avec son chauffeur nous tions trois
Nous dmes adieu toute une poqueDes Gants furieux se dressaient sur lEurope
Les aigles quittaient leur aire attendant le soleilLes poissons voraces montaient des abmes
Les peuples accouraient pour se connatre fondLes morts tremblaient de peur dans leurs sombres demeures
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Les chiens aboyaient vers l-bas o taient les frontiresJe men allais portant en moi toutes ces armes qui se battaient
Je les sentaient monter en moi et staler les contres o elles serpentaient
Avec les forts les villages heureux de la BelgiqueFrancorchamps avec lEau Rouge et les pouhons
Rgion par o se font toujours les invasionsArtres ferroviaires o ceux qui sen allaient mourir saluaient encore
une foie la vie coloreOcans profonds o remuaient les monstres
Dans les vieilles carcasses naufragesHauteurs inimaginables o lhomme combat
Plus haut que laigle ne planeLhomme y combat contre lhomme
Et descend tout coup comme une toile filanteJe sentais en moi des tres neufs pleins de dextrit
Btir et aussi agencer un univers nouveauUn marchant dune opulence inoue et dune taille prodigieuse
Disposait un talage extraordinaireEt des bergers gigantesques menaient
De grands troupeaux muets qui broutaient les parolesEt contre lesquels aboyaient tous les chiens sur la route
Et quand aprs avoir pass laprs-midiPar Fontainebleau
Nous arrivmes ParisAu moment o lon affichait la mobilisation
Nous comprmes mon camarade et moiQue la petite auto nous avait conduits dans une poque Nouvelle
Et bien qutant dj tous deux des hommes mrsNous venions cependant de natre
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
La mandoline lillet et le bambou
batailles la terre tremble comme une mandolineFEMME COMME LA BALLE TRAVERS LE CORPS LE SON
TRAVERSE la vrit car la RAISON c'est ton Art
Que cet oeillet te disela loi des odeurs
qu'on n'a pas encorepromulgue et qui viendra
un jourrgner sur
nos cerveauxbien +
prcise & + subtileque les sons qui nous dirigent
Je prfre ton nez tous tes organes
mon amieIl est le trne de la futur SAGESSE
Onez de la pipe les odeurs cendre
fourneau y forgent les chanesO
univers infiniment dlies qui lient les autres raisons formelles
O
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Fumes
Et tandis que la guerreEnsanglante la terreJe hausse les odeursPrs des couleurs-saveurs
Des fleurs ras du sol regardent par bouffesLes boucles des odeurs par tes mains dcoiffesMais je connais aussi les grottes parfumesO gravite lazur unique des fumesO plus doux que la nuit et plus pur que le jourTu ttends comme un dieu fatigu par lamour
Tu fascines les flammesElles rampent tes piedsCes nonchalantes femmesTes feuilles de papier
La brave bouffarde qui aide chasser le cafard
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
Et je fu m e du ta bac de ZoNE
table page suivantepage prcdente
Nmes
A mile Lonard.
Je me suis engag sous le plus beau des cieuxDans Nice la Marine au nom victorieux
Perdu parmi 900 conducteurs anonymesje suis un charretier du neuf charroi de Nmes
LAmour dit Reste ici Mais l-bas les obuspousent ardemment et sans cesse les buts
Jattends que le printemps commande que sen ailleVers le nord glorieux lintrpide bleusaille
Les 3 servants assis dodelinent leurs frontsO brillent leurs yeux clairs comme mes perons
Un bel aprs-midi de garde lcurieJentends sonner les trompettes dartillerie
Jadmire la gaiet de ce dtachementQui va rejoindre au front notre beau rgiment
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Nimes
Le territorial se mange une salade lanchois en parlant de sa femme malade
4 pointeurs fixaient les bulles des niveauxQui remuaient ainsi que les yeux des chevaux
Le bon chanteur Girault nous chante aprs 9 heuresUn grand air dopra toi lcoutant tu pleures
Je flatte de la main le petit canon grisGris comme leau de Seine et je songe paris
Mais ce ple bless ma dit la cantineDes obus dans la nuit la splendeur argentine
Je mche lentement ma portion de bufJe me promne seul le soir de 5 9
Je selle mon cheval nous battons la campagneJe te salue au loin belle rose tour Magne
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
La colombe poignarde et le jet deau
Douces figures poignardesChres lvres fleuries
MIA MAREYEYETTE LORIE
ANNIE et toi MARIEO tes-vous jeunes filles
MAIS prs d'un jet d'eau qui pleure et qui priecette colombe s'extasie
Tous les souvenirs de nagureO mes amis partis en guerreJaillissent vers le firmament
Et vos regards en l'eau dormantMeurent mlancoliquement
O sont-ils Braque et Max JacobDerain aux yeux gris comme l'aube
O sont Raynal Billy DalizeDont les noms se mlancolisent
Comme des pas dans une gliseO est Cremnitz qui s'engagea
Peut-tre sont-ils morts djDe souvenirs mon me est pleine
Le jet d'eau pleure sur ma peine
CEUX QUI SONT PARTIS LA GUERREAU NORD SE BATTENT MAINTENANT
Le soir tombe sanglante merJardins o saignent abondamment
le laurier rose fleur guerrire
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
2e canonnier conducteur
Me voici libre et fier parmi mes compagnonsLe rveil a sonn et dans le petit jour je salueLa fameuse Nancenne que je nai pas connue
Les 3 servants bras dessus bras dessous se sont endormis sur lavant-trainEt conducteur par mont par val sur le porteurAu pas au trop ou au galop je conduis le canonLe bras de lofficier est mon toile polaireIl pleut mon manteau est tremp et je messuie parfois la figureAvec la serviette-torchon qui est dans la sacoche du sous-vergeVoici des fantassins aux pas pesants aux pieds boueuxLa pluie les pique de ses aiguilles le sac les suit
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
AS-TU CONNU LA PUTAIN DE NANCYQUI A FOUTU LA VXXXXX TOUTE LARTILLERIE
LARTILLERIE ne sest pas aperuquelle avait mal au
SACR NOM DE DIEU QUELLE ALLURENOM DE DIEU QUELLE ALLURE
CEPENDANT QUE LA NUIT DESCEND
table page suivantepage prcdente
FantassinsMarchantes mottes de terreVous tes la puissanceDu sol qui vous a faitsEt cest le sol qui vaLorsque vous avancezUn officier passe au galopComme un ange bleu dans la pluie griseUn bless chemine en fumant une pipeLe livre dtale et voici un ruisseau que jaimeEt cette jeune femme nous salue charretiersLa Victoire se tient aprs nos jugulairesEt calcule pour nos canons les mesures angulairesNos salves nos rafales sont ses cris de joieSes fleurs sont nos obus aux gerbes merveilleusesSa pense se recueille aux tranches glorieuses
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
SALUT MONDE DONT JE SUIS LA LANGUE LOQUENTE QUE SA BOUCHE O PARISTIRE ET TIRERA TOUJOURS AUX ALLEMANDS
table page suivantepage prcdente
Veille
Mon cher Andr RouveyreTroudla la Champignon Tabatire
On ne sait quand on partiraNi quand on reviendra
Au Mercure de FranceMars revient tout couleur desprance
Jai envoy mon papierSur papier quadrill
Jentends les pas des grands chevaux dartillerie allant au trot sur la grand-route o moi je veille
Un grand manteau gris de crayon comme le ciel menveloppe jusqu loreille
QuelCiel
TristePiste
OVa lePleSourire
De la lune qui me regarde crire
SOUVENIRS DE PARIS AVANT LA GUERRE ILS SERONT BIEN PLUS DOUX APRS LA VICTOIRE
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Ombre
Vous voil de nouveau prs de moiSouvenirs de mes compagnons morts la guerre
Lolive du tempsSouvenirs qui nen faites plus quun
Comme cent fourrures ne font quun manteauComme ces milliers de blessures ne font quun article de journal
Apparence impalpable et sombre qui avez prisLa forme changeante de mon ombreUn Indien lafft pendant lternit
Ombre vous rampez prs de moiMais vous ne mentendez plus
Vous ne connatrez plus les pomes divins que je chanteTandis que moi je vous entends je vous vois encore
DestinesOmbre multiple que le soleil vous garde
Vous qui maimez assez pour ne jamais me quitterEt qui dansez au soleil sans faire de poussire
Ombre encre du soleilcriture de ma lumire
Caisson de regretsUn dieu qui shumilie
C'est Lou qu'on la nommait
Il est des loups de toute sorteJe connais le plus inhumainMon cur que le diable l'emporteEt qu'il le dpose sa porteN'est plus qu'un jouet dans sa main
Les loups jadis taient fidlesComme sont les petits toutousEt les soldats amants des bellesGalamment en souvenir d'ellesAinsi que les loups taient doux
Mais aujourd'hui les temps sont piresLes loups sont tigres devenusEt les Soldats et les EmpiresLes Csars devenus VampiresSont aussi cruels que Vnus
J'en ai pris mon parti RouveyreEt mont sur mon grand chevalJe vais bientt partir en guerreSans piti chaste et l'il svreComme ces guerriers qu'pinal
Vendait Images populairesQue Georgin gravait dans le boisO sont-ils ces beaux militairesSoldats passs O sont les guerresO sont les guerres d'autrefois
tendards Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Case dArmonsLoin du Pogeonnier
Reconaissance
S P.
Vise
1915
Carte Postale
Saillant
Guerre
Mutation
Oracle
14 juin 1915
De la batterie de tir
chelon
Vers le sud
Les soupirs du servant de Dakar
Toujours
Fte
Madeleine
Les saisons
Venu de Dieuze
La nuit davril 1915
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable suivantetable prcdente
La I re dition 25 exemplaires de Case dArmons a t polygraphie sur papier quadrill, lencre violette, au
moyen de glatine, la batterie de tir (45e batterie, 38e Rgiment dartillerie de campagne) devant lennemi, et le
tirage a t achev le 17 juin 1915.
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Loin du pigeonnier
Et vous savez pourquoi
Pourquoi la chre couleuvre se love de la mer jusqu' l'espoir attendrissant de l'Est
Hexadres
barbels
mais un secret collines bleuen sentinelle
dans la Fort ou nous chantons
Malourne 75 Canteraine
O gerbes des 305 en droute
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Reconnaissance
Mademoiselle P
Un seul bouleau crpusculairePlit au seuil de lhorizon
O fuit la mesure angulaireDu cur lme et la raison
Le galop bleu des souvenancesTraverse les lilas des yeux
Et les canons des indolencesTirent mes songes vers
lescieux
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
S P
Au marchal des logisRen Berthier
Quest-ce quon y metDans la case darmons
Espce de poilu de mon cur
Pan pan panPerruque perruque
Pan pan panPerruque canon
Pour lutter contre les vapeursles lunettes pour protger les yeux
au moyen dun masque nocivit gazun tissu tremp mouchoir des nez
dans la solution de bicarbonate de sodium
Les masques seront simplement mouills des larmes de rire de rire
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Vise
A Madame Ren Berthier.
Chevaux couleur cerise limite des Zlandes
Des mitrailleuses dor coassent les lgendes
Je taime libert qui veilles dans les hypoges
Harpe aux cordes dargent pluie ma musique
Linvisible ennemi plaie dargent au soleil
Et lavenir secret que la fuse lucide
Entends nager le Mot poisson subtil
Les villes tour tour deviennent des clefs
Le masque bleu comme met Dieu son ciel
Guerre paisible ascse solitude mtaphysique
Enfant aux mains coupes parmi les roses oriflammes
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
15
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
carte
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Saillant Andr Level
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
Rapidit attentive peine un peu dincertitudeMais un dragon pied sans armesParmi le vent quand survient la
torpille arienneLe balai de verdureTen souviens-tuIl est ici dans les pierresDu beau royaume dvast
Mais la couleuvre me regarde dresse comme une pe
Vive comme un cheval pifUn trou dobus propre comme une salle de bainBerger suivi de son troupeau mordorMais o est un cur et le svasticaA Ancien nom du renomLe crapaud chantait les saphirs nocturnes
Lou Lou Verzy
Et le long du canal des filles sen allaient
SalutLe Rapace
SALUT
Graindebl
VIVELE
CAPISTON
table page suivantepage prcdente
Guerre
Rameau central de combatContact par lcoute
On tire dans la direction des bruis entendus Les jeunes de la classe 1915
Et ces fils de fer lectrissNe pleurez donc pas sur les horreurs de la guerre
Avant elle nous navions que la surfaceDe la terre et des mers
Aprs elle nous aurons les abmesLe sous-sol et lespace aviatique
Matres du timonAprs aprs
Nous prendrons toutes les joiesDes vainqueurs qui se dlassent
Femmes Jeux Usines CommerceIndustrie Agriculture Mtal
Feu Cristal VitesseVoix Regard Tact part
Et ensemble dans le tact venu de loinDe plus loin encore
De lAu-del de cette terre
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Mutation
Une femme qui pleuraitEh ! Oh ! Ha !
Des soldats qui passaientEh ! Oh ! Ha !
Un clusier qui pchaitEh ! Oh ! Ha !
Les tranches qui blanchissaientEh ! Oh ! Ha !
Des obus qui ptaientEh ! Oh ! Ha !
Des allumettes qui ne prenaient pasEt tout
A tant changEn moi
ToutSauf mon Amour
Eh ! Oh ! Ha !
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Oracles
Je porte votre bagueElle est trs finement cisele
Le sifflet me fait plus plaisirQuun palais gyptien
Le sifflet des tranchesTu sais
Tout au plus si je narrte pasLes mtros et les taxis avec
O guerreMultiplication de lamour
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
Petit
Sifflet
2 trous
Avec un fil
on prend
la mesure
du doigt
table page suivantepage prcdente
14 juin 1915
On ne peut rien direRien de ce qui se passe
Mais on change de SecteurAh ! voyageur gar
Pas de lettresMais lespoir
Mais un journalLe glaive antique de la Marseillaise de Rude
Sest chang en constellationIl combat pour nous au ciel
Mais cela signifie surtoutQuil faut tre de ce temps
Pas de glaive antiquePas de Glaive
Mais lEspoir
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
De la batterie de tir
Au marchal des logis F. Bodard.
Nous sommes ton collier FranceVenus des Atlantides ou bien des Ngrities
Des Eldorados ou bien des CimmriesRivire dhommes forts et dobus dont lorient chatoie
Diamants qui closent la nuits Roses France
Nous nous pmons de volupt ton cou pench vers lEst
Nous sommes lArc-en-terreSigne plus pur que lArc-en-Ciel
Signe de nos origines profondestincelles
O nous les trs belles couleurs
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
chelon
Grenouilles et rainettesCrapauds et crapoussins
Ascse sous les peupliers et les frnesLa reine des prs va fleurir
Une petite hutte dans la fortL-bas plus blanche est la blessure
Le Ciel
CoquelicotsFlacon au col dor
On a pendu la mort la lisire du bois
On a pendu la mortEt ses beaux seins dors
Se montrent tour tour
rose toujours vive France
Embaume les espoirs dune arm qui halte
Le Loriot chante
Nest-ce pas rigolo
Enfin une plume dpervier
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
Lor
vet
Le s
ac
mal
ice
La tr
ouss
e
bout
ons
On
tire
cont
re a
vion
sV
errd
un
table page suivantepage prcdente
Les soupirs du servant de Dakar
C'est dans la cagnat en rondins voils d'osierAuprs des canons gris tourns vers le nord
Que je songe au village africainO l'on dansait o l'on chantait o l'on faisait l'amour
Et de longs discoursNobles et joyeux
Je revois mon pre qui se battitContre les Achantis
Au service des AnglaisJe revois ma sur au rire en folieAux seins durs comme des obus
Et je revoisMa mre la sorcire qui seule du village
Mprisait le selPiler le millet dans un mortier
Je me souviens du si dlicat si inquitantFtiche dans l'arbre
Et du double ftiche de la fconditPlus tard une tte coupe
Au bord d'un marcage pleur de mon ennemiC'tait une tte d'argent
Et dans le maraisC'tait la lune qui luisait
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
C'tait donc une tte d'argentL-haut c'tait la lune qui dansait
C'tait donc une tte d'argentEt moi dans l'antre j'tais invisible
C'tait donc une tte de ngre dans la nuit profondeSimilitudes Pleurs
Et ma surSuivit plus tard un tirailleur
Mort Arras
Si je voulais savoir mon geIl faudrait le demander l'vque
Si doux si doux avec ma mreDe beurre de beurre avec ma sur
C'tait dans une petite cabaneMoins sauvage que notre cagnat de canonniers-servants
J'ai connu l'afft au bord des marcagesO la girafe boit les jambes cartes
J'ai connu l'horreur de l'ennemi qui dvasteLe Village
Viole les femmesEmmne les filles
Et les garons dont la croupe dure sursauteJ'ai port l'administrateur des semaines
De village en villageEn chantonnant
Et je fus domestique ParisJe ne sais pas mon geMais au recrutementOn m'a donn vingt ansJe suis soldat franais on m'a blanchi du coupSecteur 59 je ne peux pas dire oPourquoi donc tre blanc est-ce mieux qu'tre noirPourquoi ne pas danser et discourirManger et puis dormirEt nous tirons sur les ravitaillements bochesOu sur les fils de fer devant les bobossesSous la tempte mtalliqueJe me souviens d'un lac affreuxEt de couples enchans par un atroce amourUne nuit folleUne nuit de sorcellerieComme cette nuit-ciO tant d'affreux regardsclatent dans le ciel splendide
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Toujours
ToujoursNous irons plus loin sans avancer jamais
Et de plante en planteDe nbuleuse en nbuleuse
Le don Juan des milles et trois comtesMme sans bouger de la terre
Cherche les forces neuvesEt prend au srieux les fantmes
Et tant d'univers s'oublientQuels sont les grands oublieurs
Qui donc saura nous faire oublier telle ou telle partie du mondeO est le Christophe Colomb qui l'on devra l'oubli d'un continent
PerdreMais perdre vraiment
Pour laisser place la trouvaillePerdre
La vie pour trouver la Victoire
Vers le Sud
ZnithTous ces regretsCes jardins sans limiteO le crapaud module un tendre cri dazurLa biche du silence perdu passe viteUn rossignol meurtri par lamour chante surLe rosier de ton corps dont jai cueilli les rosesNos curs pendent ensemble au mme grenadierEt les Fleurs de grenade en nos regards closesEn tombant tour tour ont jonch le sentier
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Fte
Feu d'artifice en acierQu'il est charmant cet clairage
Artifice d'artificierMler quelque grce au courage
Deux fusantsRose clatement
Comme deux seins que l'on dgrafeTendent leurs bouts insolemment
IL SUT AIMERQuelle pitaphe
Un pote dans la fortRegarde avec indiffrence
Son revolver au cran d'arrtDes roses mourir d'esprance
Il songe aux roses de SaadiEt soudain sa tte se penche
Car une rose lui reditLa molle courbe d'une hanche
L'air est plein d'un terrible alcoolFiltr des toiles mi-closesLes obus caressent le mol
Parfum nocturne o tu reposesMortification des roses
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Les saisons
C'tait un temps bni nous tions sur les plagesVa-t'en de bon matin pieds nus et sans chapeau
Et vite comme va la langue d'un crapaudL'amour blessait au cur les fous comme les sages
C'tait un temps bni Le temps du vaguemestreOn est bien plus serr que dans les autobus
Et des astres passaient que singeaient les obusQuand dans la nuit survint la batterie questre
C'tait un temps bni Jours vagues et nuits vaguesLes marmites donnaient aux rondins des cagnats
Quelques aluminium o tu t'ingniasA limer jusqu'au soir d'invraisemblables bagues
C'tait un temps bni La guerre continueLes Servants ont lim la bague au long des mois
Le Conducteur coute abrit dans les boisLa chanson que rpte une toile inconnue
As-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait militaireAs-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait artiflotA la guerre
As-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait militaireAs-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait artiflotA la guerre
As-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait militaireAs-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait artiflotA la guerre
As-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait militaireAs-tu connu Guy au galopDu temps qu'il tait artiflotA la guerre
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop
Madeleine
table page suivantepage prcdente
Madeleine Venu de Dieuze
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
La nuit d'avril 1915
L. de C.-C.
Le ciel est toil par les obus des BochesLa fort merveilleuse o je vis donne un balLa mitrailleuse joue un air triples-croches
Mais avez-vous le motEh ! oui le mot fatal
Aux crneaux Aux crneaux Laissez l les pioches
Comme un astre perdu qui cherche ses saisonsCur obus clat tu sifflais ta romanceEt tes mille soleils ont vid les caissons
Que les dieux de mes yeux remplissent en silenceNous vous aimons vie et nous vous agaons
Les obus miaulaient un amour mourirUn amour qui se meurt est plus doux que les autres
Ton souffle nage au fleuve o le sang va tarirLes obus miaulaient
Entends chanter les ntresPourpre amour salu par ceux qui vont prir
Le printemps tout mouill la veilleuse l'attaqueIl pleut mon me il pleut mais il pleut des yeux morts
Ulysse que de jours pour rentrer dans IthaqueCouche-toi sur la paille et songe un beau remords
Qui pur effet de l'art soit aphrodisiaque
Mais orgues aux ftus de la paille o tu dorsL'hymne de l'avenir est paradisiaque
Case dArmons Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Lueurs des tirsL a grce exile
La boucle retrouve
refus de la colombe
Les feux du bivouac
Les grenadines repentantes
Tourbillon de mouches
Ladieu du cavalier
Le palais du tonnerre
Photographie
Linscription anglaise
Dans labri-caverne
Fuse
Dsir
Chant de lhorizon en Champagne
Ocan de terre
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable suivantetable prcdente
La boucle retrouve
Il retrouve dans sa mmoireLa boucle de cheveux chtains
T'en souvient-il n'y point croireDe nos deux tranges destins
Du boulevard de la ChapelleDu joli Montmartre et d'Auteuil
Je me souviens murmure-t-elleDu jour o j'ai franchi ton seuil
Il y tomba comme un automneLa boucle de mon souvenirEt notre destin qui t'tonneSe joint au jour qui va finir
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
La grce exile
Va-t-'en va-t'en mon arc-en-ciel Allez-vous-en couleurs charmantes
Cet exil t'est essentiel Infante aux charpes changeantes
Et l'arc-en-ciel est exil Puisqu'on exile qui l'irise
Mais un drapeau s'est envol Prendre ta place au vent de bise
Les Grenadines repentantes
En est-il donc deux dans GrenadeQui pleurent sur ton seul pch
Ici l'on jette la grenadeQui se change en un uf coch
Puisqu'il en nat des coqs InfanteEntends-les chanter leurs ddains
Et que la grenade est touchanteDans nos effroyables jardins
Refus de la colombe
Mensonge de l'AnnonciadeLa Nol fut la PassionEt qu'elle tait charmante et sadeCette renonciation
Si la colombe poignardeSaigne encore de ses refusJ'en plume les ailes l'ideEt le pome que tu fus
Tourbillon de mouches
Un cavalier va dans la plaineLa jeune fille pense luiEt cette flotte MytilneLe fil de fer est l qui luit
Comme ils cueillaient la rose ardenteLeurs yeux tout coup ont fleuriMais quel soleil la bouche erranteA qui la bouche avait souri.
Les feux du bivouac
Les feux mouvants du bivouacclairent des formes de rveEt le songe dans l'entrelacsDes branches lentement s'lve
Voici les ddains du regretTout corch comme une fraiseLe souvenir et le secretDont il ne reste que la braise
L'adieu du cavalier
Ah Dieu ! que la guerre est jolieAvec ses chants ses longs loisirsCette bague je l'ai polieLe vent se mle vos soupirs
Adieu ! voici le boute-selleIl disparut dans un tournantEt mourut l-bas tandis qu'elleRiait au destin surprenant
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Le palais du tonnerre
Par l'issue ouverte sur le boyau dans la craie
En regardant la paroi adverse qui semble en nougat
On voit gauche et droite fuir l'humide couloir dsert
O meurt tendue une pelle la face effrayante deux yeux rglementaires qui servent l'attacher sous les caissons
Un rat y recule en hte tandis que j'avance en hte
Et le boyau s'en va couronn de craie sem de branches
Comme un fantme creux qui met du vide o il passe blanchtre
Et l-haut le toit est bleu et couvre bien le regard ferm par quelques lignes droites
Mais en de de l'issue c'est le palais bien nouveau et qui parat ancien
Le plafond est fait de traverses de chemin de fer
Entre lesquelles il y a des morceaux de craie et des touffes d'aiguilles de sapin
Et de temps en temps des dbris de craie tombent comme des morceaux de vieillesse
ct de l'issue que ferme un tissu lche d'une espce qui sert gnralement aux emballages
Il y a un trou qui tient lieu d'tre et ce qui y brle est un feu semblable l'me
Tant il tourbillonne et tant il est insparable de ce qu'il dvore et fugitif
Les fils de fer se tendent partout servant de sommier supportant des planches
Ils forment aussi des crochets et l'on y suspend mille choses
Comme on fait la mmoire
Des musettes bleues des casques bleus des cravates bleues des vareuses bleues
Morceaux du ciel tissus des souvenirs les plus purs
Et il flotte parfois en l'air de vagues nuages de craie
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Sur la planche brillent des fuses dtonateurs joyaux dors tte maille
Noirs blancs rouges
Funambules qui attendent leur tour de passer sur les trajectoires
Et font un ornement mince et lgant cette demeure souterraine
Orne de six lits placs en fer cheval
Six lits couverts de riches manteaux bleus
Sur le palais il y a un haut tumulus de craie
Et des plaques de tle ondule
Fleuve fig de ce domaine idal
Mais priv d'eau car ici il ne roule que le feu jailli de la mlinite
Le parc aux fleurs de fulminate jaillit des trous penchs
Tas de cloches aux doux sons des douilles rutilantes
Sapins lgants et petits comme en un paysage japonais
Le palais s'claire parfois d'une bougie la flamme aussi petite qu'une souris
palais minuscule comme si on te regardait par le gros bout d'une lunette
Petit palais o tout s'assourdit
Petit palais o tout est neuf rien rien d'ancien
Et o tout est prcieux o tout le monde est vtu comme un roi
Une selle est dans un coin cheval sur une caisse
Un journal du jour trane par terre
Et cependant tout parat vieux dans cette neuve demeure
Si bien qu'on comprend que l'amour de l'antique
Le got de l'anticaille
Soit venu aux hommes ds le temps des cavernes
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop table page suivantepage prcdente
Tout y tait si prcieux et si neuf
Tout y est si prcieux et si neuf
Qu'une chose plus ancienne ou qui a dj servi y apparat
Plus prcieuse
Que ce qu'on a sous la main
Dans ce palais souterrain creus dans la craie si blanche et si neuve
Et deux marches neuves
Elles n'ont pas deux semaines
Sont si vieilles et si uses dans ce palais qui semble antique sans imiter l'antique
Qu'on voit que ce qu'il y a de plus simple de plus neuf est ce qui est
Le plus prs de ce que l'on appelle la beaut antique
Et ce qui est surcharg d'ornements
A besoin de vieillir pour avoir la beaut qu'on appelle antique
Et qui est la noblesse la force l'ardeur l'me l'usure
De ce qui est neuf et qui sert
Surtout si cela est simple simple
Aussi simple que le petit palais du tonnerre
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Photographie
Ton sourire m'attire commePourrait m'attirer une fleur
Photographie tu es le champignon brunDe la fort
Qu'est sa beautLes blancs y sont
Un clair de luneDans un jardin pacifique
Plein d'eaux vives et de jardiniers endiablsPhotographie tu es la fume de l'ardeur
Qu'est sa beautEt il y a en toiPhotographie
Des tons alanguisOn y entend
Une mlopePhotographie tu es l'ombre
Du SoleilQu'est sa beaut
Linscription anglaise
Cest quelque chose de si tnu de si lointainQue dy penser on arrive le trop matrialiserForme limite par la mer bleuePar la rumeur dun train en marchePar lodeur des eucalyptus des mimosasEt des pins maritimes
Mais le contact et la saveur
Et cette petite voyageuse alerte inclina brusquement la tte sur le quai de la gare MarseilleEt sen allaSans savoirQue son souvenir planeraitSur un petit bois de la Champagne o un soldat sefforceDevant le feu dun bivouac dvoquer cette apparition travers la fume dcorce de bouleauQui sent lencens minenTandis que les volutes bleutres qui montentDun cigare crivent le plus tendre des nomsMais les nuds de couleuvres en se dnouantcrivent aussi le nom mouvantDont chaque lettre se love en belle anglaiseEt le soldat nose point acheverLe jeu de mots bilingue que ne manque point de susciterCette calligraphie sylvestre et vernale
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Dans l'abri-caverne
Je me jette vers toi et il me semble aussi que tu te jettes vers moiUne force part de nous qui est un feu solide qui nous soudeEt puis il y a aussi une contradiction qui fait que nous ne pouvons nous apercevoirEn face de moi la paroi de craie s'effriteIl y a des cassuresDe longues traces d'outils traces lisses et qui semblent tre faites dans de la starineDes coins de cassures sont arrachs par le passage des types de ma piceMoi j'ai ce soir une me qui s'est creuse qui est videOn dirait qu'on y tombe sans cesse et sans trouver de fondEt qu'il n'y a rien pour se raccrocherCe qui y tombe et qui y vit c'est une sorte d'tres laids qui me font mal et qui viennent de je ne sais oOui je crois qu'ils viennent de la vie d'une sorte de vie qui est dans l'avenir dans l'avenir brut qu'on n'a pu encore cultiver ou lever ou humaniserDans ce grand vide de mon me il manque un soleil il manque ce qui claireC'est aujourd'hui c'est ce soir et non toujoursHeureusement que ce n'est que ce soirLes autres jours je me rattache toiLes autres jours je me console de la solitude et de toutes les horreursEn imaginant ta beautPour l'lever au-dessus de l'univers extasiPuis je pense que je l'imagine en vainJe ne la connais par aucun sensNi mme par les motsEt mon got de la beaut est-il donc aussi vainExistes-tu mon amourOu n'es-tu qu'une entit que j'ai cre sans le vouloirPour peupler la solitudeEs-tu une de ces desses comme celles que les Grecs avaient doues pour moins s'ennuyerJe t'adore ma desse exquise mme si tu n'es que dans mon imagination
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Fuse
La boucle des cheveux noirs de ta nuque est mon trsorMa pense te rejoint et la tienne la croiseTes seins sont les seuls obus que j'aime
Ton souvenir est la lanterne de reprage qui nous sert pointer la nuit
En voyant la large croupe de mon cheval j'ai pens tes hanches
Voici les fantassins qui s'en vont l'arrire en lisant un journal
Le chien du brancardier revient avec une pipe dans sa gueule
Un chat-huant ailes fauves yeux ternes gueule de petit chat et pattes de chat
Une souris verte file parmi la mousse
Le riz a brl dans la marmite de campementa signifie qu'il faut prendre garde bien des choses
Le mgaphone crieAllongez le tir
Allongez le tir amour de vos batteries
Balance des batteries lourdes cymbalesQu'agitent les chrubins fous d'amour
En l'honneur du Dieu des Armes
Un arbre dpouill sur une butte
Le bruit des tracteurs qui grimpent dans la valle
vieux monde du XIXe sicle plein de hautes chemines si belles et si pures
Virilits du sicle o nous sommes canons
Douilles clatantes des obus de 75Carillonnez pieusement
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Dsir
Mon dsir est la rgion qui est devant moiDerrire les lignes boches
Mon dsir est aussi derrire moiAprs la zone des armes
Mon dsir c'est la butte du MesnilMon dsir est l sur quoi je tire
De mon dsir qui est au-del de la zone des armesJe n'en parle pas aujourd'hui mais j'y pense
Butte du Mesnil je t'imagine en vainDes fils de fer des mitrailleuses des ennemis trop srs d'eux
Trop enfoncs sous terre dj enterrs
Ca ta clac des coups qui meurent en s'loignant
En y veillant tard dans la nuitLe Decauville qui toussote
La tle ondule sous la pluieEt sous la pluie ma bourguignotte
Entends la terre vhmenteVois les lueurs avant d'entendre les coups
Et tel obus siffler de la dmenceOu le tac tac tac monotone et bref plein de dgot
Je dsireTe serrer dans ma main Main de Massiges
Si dcharne sur la carte
Le boyau Gthe o j'ai tirJ'ai tir mme sur le boyau NietzscheDcidment je ne respecte aucune gloireNuit violente et violette et sombre et pleine d'or par momentsNuits des hommes seulement
Nuit du 24 septembreDemain l'assautNuit violente nuit dont l'pouvantable cri profond devenait plus intense de minute en minuteNuit qui criait comme une femme qui accoucheNuit des hommes seulement
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Chant de l'horizon en Champagne
M. Joseph Grani.
Voici le ttin rose de l'euphorbe verruqueVoici le nez des soldats invisibles
Moi l'horizon invisible je chanteQue les civils et les femmes coutent ces chansons
Et voici d'abord la cantilne du brancardier bless
Le sol est blanc la nuit l'azureSaigne la crucifixion
Tandis que saigne la blessureDu soldat de Promission
Un chien jappait l'obus miauleLa lueur muette a jailli
savoir si la guerre est drleLes masques n'ont pas tressailli
Mais quel fou rire sous le masqueBlancheur ternelle d'ici
O la colombe porte un casqueEt l'acier s'envole aussi
Je suis seul sur le champ de batailleJe suis la tranche blanche le bois vert et roux
L'obus miauleJe te tuerai
Animez-vous fantassins passepoil jauneGrands artilleurs roux comme des taupes
Bleu-de-roi comme les golfes mditerranensVelouts de toutes les nuances du veloursOu mauves encore ou bleu-horizon comme les autresOu dteintsVenez le pot en tteDebout fuse clairanteDanse grenadier en agitant tes pommes de pinAlidades des triangles de vise pointez-vous sur les lueursCreusez des trous enfants de 20 ans creusez des trousSculptez les profondeursEnvolez-vous essaims des avions blonds ainsi que les avettes
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Moi l'horizon je fais la roue comme un grand Paoncoutez renatre les oracles qui avaient cess
Le grand Pan est ressuscitChampagne viril qui moustille la Champagne
Hommes faits jeunes gensCamlon des autos-canons
Et vous classe 16Craquements des arrives ou bien floraison blanche
dans les cieuxJ'tait content pourtant a brlait la paupire
Les officiers captifs voulaient cacher leurs nomsil du Breton bless couch sur la civire
Et qui criait aux morts aux sapins aux canonsPriez pour moi Bon Dieu je suis le pauvre Pierre
Boyaux et rumeur du canonSur cette mer aux blanches vagues
Fou stoque comme ZnonPilote du cur tu zigzagues
Petites forts de sapinsLa niche attend la becquePointe-t-il des nez de lapins
Comme l'euphorbe verruque
Ainsi que l'euphorbe d'iciLe soleil peine boutonneJe l'adore comme un Parsi
Ce tout petit soleil d'automne
Un fantassin presque un enfantBleu comme le jour qui s'couleBeau comme mon cur triomphantDisait en mettant sa cagoule
Tandis que nous n'y sommes pasQue de filles deviennent bellesVoici l'hiver et pas pasLeur beaut s'loignera d'elles
Lueurs soudaines des tirsCette beaut que j'imagineFaute d'avoir des souvenirsTire de vous son origine
Car elle n'est rien que l'ardeurDe la bataille violenteEt de la terrible lueurIl s'est fait une muse ardente
Il regarde longtemps l'horizonCouteaux tonneaux d'eauxDes lanternes allumes se sont croisesMoi l'horizon je combattrai pour la victoire
Je suis l'invisible qui ne peut disparatreJe suis comme l'ondeAllons ouvrez les cluses que je me prcipite et renverse tout
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Ocan de terre
G. de Chirico.
J'ai bti une maison au milieu de l'OcanSes fentres sont les fleuves qui s'coulent de mes yeux
Des poulpes grouillent partout o se tiennent les muraillesEntendez battre leur triple cur et leur bec cogner aux vitres
Maison humideMaison ardente
Saison rapideSaison qui chante
Les avions pondent des ufsAttention on va jeter l'ancre
Attention l'encre que l'on jetteIl serait bon que vous vinssiez du ciel
Le chvrefeuille du ciel grimpeLes poulpes terrestres palpitent
Et puis nous sommes tant et tant tre nos propres fossoyeurs
Ples poulpes des vagues crayeuses poulpes aux becs plesAutour de la maison il y a cet ocan que tu connaisEt qui ne repose jamais
Lueurs des tirs Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Obus couleur de lune
Merveille de la guerre
Exercice
lItalie
La traverse
Il y a
Lespionne
L e chant damour
Aussi bien que les cigales
Simultanits
Du coton dans les oreilles
coute sil pleut coute sil pleut
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable suivantetable prcdente
Merveille de la guerre
Que c'est beau ces fuses qui illuminent la nuitElles montent sur leur propre cime et se penchent pour regarderCe sont des dames qui dansent avec leurs regards pour yeux bras et curs
J'ai reconnu ton sourire et ta vivacit
C'est aussi l'apothose quotidienne de toutes mes Brnices dont les chevelures sont devenues des comtesCes danseuses surdores appartiennent tous les temps et toutes les racesElles accouchent brusquement d'enfants qui n'ont que le temps de mourir
Comme c'est beau toutes ces fusesMais ce serait bien plus beau s'il y en avait plus encore
S'il y en avait des millions qui auraient un sens complet et relatif comme les lettres d'un livrePourtant c'est aussi beau que si la vie mme sortait des mourants
Mais ce serait plus beau encore s'il y en avait plus encoreCependant je les regarde comme une beaut qui s'offre et s'vanouit aussittIl me semble assister un grand festin clair a giornoC'est un banquet que s'offre la terreElle a faim et ouvre de longues bouches plesLa terre a faim et voici son festin de Balthasar cannibale
Qui aurait dit qu'on pt tre ce point anthropophageEt qu'il fallt tant de feu pour rtir le corps humain
C'est pourquoi l'air a un petit got empyreumatique qui n'est ma foi pas dsagrableMais le festin serait plus beau encore si le ciel y mangeait avec la terre
Il n'avale que les mesCe qui est une faon de ne pas se nourrir
Et se contente de jongler avec des feux versicolores
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Merveille de la guerre
Mais j'ai coul dans la douceur de cette guerre avec toute ma compagnie au long des longs boyauxQuelques cris de flamme annoncent sans cesse ma prsenceJ'ai creus le lit o je coule en me ramifiant en mille petits fleuves qui vont partoutJe suis dans la tranche de premire ligne et cependant je suis partout ou plutt je commence tre partoutC'est moi qui commence cette chose des sicles venirCe sera plus long raliser que non la fable d'Icare volant
Je lgue l'avenir l'histoire de Guillaume ApollinaireQui fut la guerre et sut tre partoutDans les villes heureuses de l'arrire
Dans tout le reste de l'universDans ceux qui meurent en pitinant dans le barbel
Dans les femmes dans les canons dans les chevauxAu znith au nadir aux 4 points cardinaux
Et dans l'unique ardeur de cette veille d'armes
Et ce serait sans doute bien plus beauSi je pouvais supposer que toutes ces choses dans lesquelles je suis partoutPouvaient m'occuper aussiMais dans ce sens il n'y a rien de faitCar si je suis partout cette heure il n'y a cependant que moi qui suis en moi
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
Exercice
Vers un village de l'arrireS'en allaient quatre bombardiersIls taient couverts de poussire
Depuis la tte jusqu'aux pieds
Ils regardaient la vaste plaineEn parlant entre eux du pass
Et ne se retournaient qu' peineQuand un obus avait touss
Tous quatre de la classe seizeParlaient d'antan non d'avenir
Ainsi se prolongeait l'ascseQui les exerait mourir
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
l'Italie
Ardengo Soffici.
L'amour a remu ma vie comme on remue la terre dans la zone des armes
J'atteignais l'ge mr quand la guerre arrivaEt dans ce jour d'aot 1915 le plus chaud de l'anneBien abrit dans l'hypoge que j'ai creus moi-mmeC'est toi que je songe Italie mre de mes penses
Et dj quand von Kluck marchait sur Paris avant la MarneJ'voquais le sac de Rome par les Allemands
Le sac de Rome qu'ont dcritUn Bonaparte le vicaire espagnol Delicado et l'Artin
Je me disaisEst-il possible que la nation
Qui est la mre de la civilisationRegarde sans la dfendre les efforts qu'on fait pour la dtruire
Puis les temps sont venus les tombes se sont ouvertesLes fantmes des Esclaves toujours frmissants
Se sont dresss en criant SUS AUX TUDESQUESNous l'arme invisible aux cris blouissants
Plus doux que n'est le miel et plus simples qu'un peu de terreNous te tournons bnignement le dos Italie
Mais ne t'en fais pas nous t'aimons bienItalie mre qui es aussi notre fille
Nous sommes l tranquillement et sans tristesseEt si malgr les masques les sacs de sable les rondins nous tombions
Nous savons qu'un autre prendrait notre placeEt que les Armes ne priront jamais
Les mois ne sont pas longs ni les jours ni les nuitsC'est la guerre qui est longue
ItalieToi notre mre et notre fille quelque chose comme une surJ'ai comme toi pour me rconforterLe quart de pinardQui met tant de diffrence entre nous et les BochesJ'ai aussi comme toi l'envol des compagnies de perdreaux des 75Comme toi je n'ai pas cet orgueil sans joie des Boches et je sais rigolerJe ne suis pas sentimental l'excs comme le sont ces gens sans mesure que leurs actions dpassent sans qu'ils sachent s'amuserNotre civilisation a plus de finesse que les choses qu'ils emploientElle est au-del de la vie confortableEt de ce qui est l'extrieur dans l'art et l'industrieLes fleurs sont nos enfants et non les leursMme la fleur de lys qui meurt au Vatican
La plaine est infinie et les tranches sont blanchesLes avions bourdonnent ainsi que des abeillesSur les roses momentans des clatementsEt les nuits sont pares de guirlandes d'blouissementsDe bulles de globules aux couleurs insouponnes
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
lItalie
Nous jouissons de tout mme de nos souffrancesNotre humeur est charmante l'ardeur vient quand il faut
Nous sommes narquois car nous savons faire la part des chosesEt il n'y a pas plus de folie chez celui qui jette les grenades que
chez celui qui plume les patatesTu aimes un peu plus que nous les gestes et les mots sonores
Tu as ta disposition les sortilges trusques le sens de la majest hroque et le courageux honneur individuel
Nous avons le sourire nous devinons ce qu'on ne nous dit pas nous sommes dmerdards et mme ceux qui se dgonflent sauraient
l'occasion faire preuve de l'esprit de sacrifice qu'on appelle la bravoure
Et nous fumons du gros avec volupt
C'est la nuit je suis dans mon blockhaus clair par l'lectricit en bton
Je pense toi pays des 2 volcansJe salue le souvenir des sirnes et des scylles mortes au moment
de MessineJe salue le Colleoni questre de Venise
Je salue la chemise rougeJe t'envoie mes amitis Italie et m'apprte applaudir aux hauts
faits de ta bleusailleNon parce que j'imagine qu'il y aura jamais plus de bonheur ou de
malheur en ce mondeMais parce que comme toi j'aime penser seul et que les Boches
m'en empcheraientMais parce que le got naturel de la perfection que nous avons l'un et l'autre si on les laissait faire serait vite remplac par je ne sais quelles
commodits dont je n'ai que faireEt surtout parce que comme toi je sais je veux choisir et qu'eux voudraient nous forcer ne plus choisirUne mme destine nous lie en cette occase
Ce n'est pas pour l'ensemble que je le disMais pour chacun de toi Italie
Ne te borne point prendre les terres irrdentesMets ton destin dans la balance o est la ntre
Les rflecteurs dardent leurs lueurs comme des yeux d'escargotsEt les obus en tombant sont des chiens qui jettent de la terre avec leurs pattes aprs avoir fait leurs besoins
Notre arme invisible est une belle nuit constelleEt chacun de nos hommes est un astre merveilleux
nuit nuit blouissanteLes morts sont avec nos soldatsLes morts sont debout dans les tranchesOu se glissent souterrainement vers les Bien-Aimes Lille Saint-Quentin Laon Maubeuge VouziersNous jetons nos villes comme des grenadesNos fleuves sont brandis comme des sabresNos montagnes chargent comme cavalerie
Nous reprendrons les villes les fleuves et les collinesDe la frontire helvtique aux frontires batavesEntre toi et nous Italie
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
lItalie
Il y a des patelins pleins de femmesEt prs de toi m'attend celle que j'adore
Frres d'Italie
Ondes nuages dltresMtalliques dbris qui vous rouillez partout
frres d'Italie vos plumes sur la tteItalie
Entends crier Louvain vois Reims tordre ses brasEt ce soldat bless toujours debout Arras
Et maintenant chantons ceux qui sont mortsCeux qui vivent
Les officiers les soldatsLes flingots Rosalie le canon la fuse l'hlice la pelle les
chevauxChantons les bagues ples les casques
Chantons ceux qui sont mortsChantons la terre qui bille d'ennui
Chantons et rigolonsDurant des annes
ItalieEntends braire l'ne boche
Faisons la guerre coups de fouetsFaits avec les rayons du soleil
ItalieChantons et rigolons
Durant des annes
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
La traverse
Du joli bateau de Port-VendresTes yeux taient les matelots
Et comme les flots taient tendresDans les parages de Palos
Que de sous-marins dans mon meNaviguent et vont l'attendantLe superbe navire o clame
Le choeur de ton regard ardent
Il y a
Il y a un vaisseau qui a emport ma bien-aimeIl y a dans le ciel six saucisses et la nuit venant on dirait des asticots dont natraient les toiles
Il y a un sous-marin ennemi qui en voulait mon amour
Il y a mille petits sapins briss par les clats d'obus autour de moi
Il y a un fantassin qui passe aveugl par les gaz asphyxiants
Il y a que nous avons tout hach dans les boyaux de Nietzsche de Gthe et de Cologne
Il y a que je languis aprs une lettre qui tardeIl y a dans mon porte-cartes plusieurs photos de
mon amour
Il y a les prisonniers qui passent la mine inquiteIl y a une batterie dont les servants s'agitent autour des picesIl y a le vaguemestre qui arrive au trot par le chemin de l'Arbre isolIl y a dit-on un espion qui rde par ici invisible comme l'horizon dont il s'est indignement revtu et avec quoi il se confondIl y a dress comme un lys le buste de mon amourIl y a un capitaine qui attend avec anxit les communications de la T.S.F. sur l'AtlantiqueIl y a minuit des soldats qui scient des planches pour les cercueilsIl y a des femmes qui demandent du mas grands cris devant un Christ sanglant MexicoIl y a le Gulf Stream qui est si tide et si bienfaisantIl y a un cimetire plein de croix 5 kilomtresIl y a des croix partout de-ci de-lIl y a des figues de Barbarie sur ces cactus en AlgrieIl y a les longues mains souples de mon amourIl y a un encrier que j'avais fait dans une fuse de 15 centimtres et qu'on n'a pas laiss partirIl y a ma selle expose la pluieIl y a les fleuves qui ne remontent pas leur coursIl y a l'amour qui m'entrane avec douceurIl y avait un prisonnier boche qui portait sa mitrailleuse sur son dosIl y a des hommes dans le monde qui n'ont jamais t la guerreIl y a des Hindous qui regardent avec tonnement les campagnes occidentalesIls pensent avec mlancolie ceux dont ils se demandent s'ils les reverrontCar on a pouss trs loin durant cette guerre l'art de l'invisibilit
Obus couleur de lune Calligrammes Guillaume Apollinaire
artyuiop page suivantepage prcdentetable
L'espionne
Pale espionne de l'AmourMa mmoire peine fidle
N'eut pour observer cette belleForteresse qu'une heure un jour
Tu te dguises ta guise
Mmoire espionne du curTu ne retrouves plus l'exquise
Ruse et le cur seul est vainqueur
Mais la vois-tu cette mmoireLes yeux bands prte mourir
Elle affirme qu'on peut l'en croireMon cur vaincra sans coup frir
Le chant damour
Voici de quoi est fait le chant symphonique de l'amour Il y a le chant de l'amour de jadis Le bruit des baisers perdus des amants illustresLes cris