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L AUTONOME La revue de la Fédération autonome de l’enseignement Volume 5 Numéro 4 Mai 2012

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L’AUTONOMELa revue de la Fédération autonome de l’enseignement

Volume 5 Numéro 4 Mai 2012

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S3MOT DU PRÉSIDENTLe piège américain

4-5La lutte contre la hausse des droits de scolarité :une revendication qui nous concerne

6-7-8DOSSIERLes écoles à charte :vers l’éclatement de l’école publique

9-10-11DOSSIERQuand votre emploi dépenddes résultats de vos élèves

12-13DOSSIERLe modèle américain :De réforme en réformevers une conception néolibérale de l’école

14-15DOSSIERConditions de travail aux États-Unis :Se mobiliser pour ne pas perdre ses acquis

16-17La bataille des enseignantes et enseignants de la Colombie-Britannique…Une nécessaire solidarité !

17-18-19BRÈVES

6-7-8

SOISPAS

TIMIDESOISPAS

TIMIDE

PHOTOSMartine DoyonPatrick LamotteGuy F. Raymond

RÉVISION LINGUISTIQUE ET CORRECTIONMartine LagacéSylvie Pelletier

GRAPHISME ET MISE EN PAGEMardigrafe inc.

IMPRESSIONImprimerie Philippe Lévesque Inc.

DÉPÔT LÉGALBibliothèque et Archives nationales duQuébec, 2012Bibliothèque et Archives Canada, 2012ISSN : 1923-5488

RÉDACTRICE EN CHEFLiette D’Amours

RÉDACTIONPierre-André ChampouxYves CloutierWilfried CordeauArmand DuboisChristian LeblancDenis LetourneuxMarie-Eve RancourtPierre St-Germain

COLLABORATION SPÉCIALEJacques Goldstyn

100 % PC

Cette revue est imprimée sur un papier certifié Éco-Logo, blanchi sanschlore, contenant 100 % de fibres recyclées postconsommation, sansacide et fabriqué à partir de biogaz récupérés.

La reproduction de cette revue, en tout ou en partie, est autorisée à condition de mentionner la source.

12-13

16-1714-15

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L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 20123

MOT DU PRÉSIDENT

Les dérives anticipées par l’application au monde scolaire despropositions de François Legault et de sa CAQ ont de quoiinquiéter. Quand on approfondit la question, on se rend

rapidement compte que ces orientations relèvent davantage del’exercice comptable que d’une profonde réflexion sur les véritablesenjeux relatifs à l’école et à notre travail.

L a vision marchande de l’éducation n’est toutefois pas récenteet s’inscrit en continuité avec un courant observé depuis plusieursannées, lié notamment à la décentralisation de l’État, et à cechapitre, les exemples ne manquent pas. Que l’on pense au librechoix des établissements où chaque parent magasine son école ;où l’enfant n’est plus un élève, mais un client ; où l’on ne parleplus de population d’élèves, mais de clientèle ; où la formationse module en fonction des exigences du marché du travail, auxdépens de la formation citoyenne ; où les écoles publiques sontnon seulement en concurrence avec le privé, mais aussi entreelles pour décrocher leur part de marché en offrant le meilleurprojet pédagogique particulier. Bien que déplorable, un constats’impose : l’école est de plus en plus soumise aux règles dumarché.

L’approche Legault n’est pas vraiment nouvelle en soi.Largement inspirée du secteur privé et axée sur la rentabilité, cetteapproche ne tient pas la route en gestion publique, particulièrementen éducation. Il n’y a qu’à jeter un coup d’œil chez nos voisins duSud pour s’en assurer. Plusieurs expérimentations ont permisd’en constater les ratés et les nombreuses faiblesses : un plusgrand individualisme et une compétition malsaine entre le personnel,une falsification des résultats scolaires, etc., car au-delà de larémunération et de l’évaluation du personnel enseignant, c’esttoute la philosophie de la gestion par résultats qui pose problème.

Ainsi, une question fondamentaledemeure : comment mesure-t-on

le rendement et l’améliorationdes résultats en éducation?

S’il est possible pourune entreprise d’accroîtresa production et ses ventes

année après année, unprof peut-il vraimentaméliorer indéfiniment

ses résultats ? Commentmesure-t-on ces facteurs deproductivité lorsqu’on change

d’élèves chaque automne ?Lorsque certains d’entre eux

vivent des problèmespersonnels,

proviennent de famille dysfonctionnelle ou économiquement endifficulté ? Lorsque d’autres éprouvent des difficultés ou deshandicaps divers? Ne pourrait-il pas alors devenir tentant, pourne pas dire plus « avantageux », de délaisser les cas les plus lourdset ayant moins de chances de réussir « au profit » de ceux dontle rapport « énergie investie versus possibilité réelle de réussite »est le plus grand? Quelle place réserve-t-on à l’écoute et aux rapportshumains dans cet univers de rendement, d’efficacité et deproduction de résultats? Quelle place accorde-t-on aux sortieset activités ou encore aux digressions et échanges qui ne sontpas « essentiels » et centrés sur le programme qui devra êtreévalué et qui servira ultimement à notre propre évaluation?

Des études menées sur ces approches démontrent qu’ellesne peuvent mener qu’à un rétrécissement de la formation et àune déshumanisation du système d’éducation. L’école n’est ainsiplus au service de l’élève et de l’éducation, mais à celui d’unmarché, d’une bureaucratie et de la production de diplômes etde main-d’œuvre.

Encouragé par les représentants des directions d’éta blissement, et plus particulièrement par la Fédérationquébécoise des directions d’établissement d’enseignement(FQDE), Legault mène la réforme actuelle un cran plus loin sur leplan administratif. En prônant l’abolition des commissions scolaireset une plus grande autonomie des écoles, ces groupes visent aussid’autres objectifs dont celui, à peine voilé, de faire éclater lemouvement syndical. S’ils disent souhaiter que l’on donne plusde pouvoirs à l’école, dans les faits, ils cherchent plutôt à procurerplus de pouvoirs aux directions qui trouvent trop lourde la gestionde la convention collective et souhaitent pouvoir y passer outrequand bon leur semble. Les mesures d’évaluation et de contrôleenvisagées sont autant de façons d’encadrer le travail desenseignantes et enseignants, de restreindre leur autonomieprofessionnelle et d’astreindre cette dernière aux critères et à lavision pédagogique de la direction.

Autre réalité inquiétante : la propension des différents partisà se redéfinir actuellement en fonction du programme de la CAQet à en récupérer certaines idées pour séduire une partie del’électorat. Il faudra donc dans le cadre de la prochaine campagneélectorale, interpeller tous les partis et leur faire part de notreopposition à ces projets désintégrateurs de l’école publique afind’éviter tout glissement en ce sens. Ces projets mettent l’écolepublique en danger. Plus que jamais, il nous appartient de ladéfendre.

PIERRE ST-GERMAIN

Le piège américain

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Au moment d’écrire ces lignes, plus de

190000 étudiantes etétudiants sont en grève

générale illimitée. Lorsque vous les lirez, l’issue de la

lutte sera peut-être scellée, peut-être pas.

Reculera, reculera pas le gouvernement

Charest?

UNE HAUSSE INJUSTE ET UN RECUL SOCIAL

Chose certaine, la hausse annoncée de1625 $, qui portera le coût d’une annéeuniversitaire à près de 3 800 $, aura defâcheuses conséquences. D’abord, parcequ’une hausse des droits de scolarité aurapour effet de réduire l’accessibilité auxétudes supérieures, ce que l’expériencerécente en Angleterre (baisse de près de9 % des inscriptions1) et plusieurs études2

ont démontré. Ensuite parce que cettemesure engendre une double discri -mination. La première est fondée sur lestatut socio-économique puisque ce sont,a priori, les moins nantis et la strateinférieure de la classe moyenne qui ferontles frais de cette hausse. La deuxième,quant à elle, est fondée sur le sexe. En effet,

puisque les femmes ont en moyenne unrevenu de travail équivalant à 78 % decelui des hommes, elles prendront doncplus de temps à rembourser leur detteet le fardeau de l’endettement seraproportionnellement plus lourd pour elles.

L’ÉDUCATION, C’EST PLUS QU’UN EMPLOI

Dans sa rhétorique, le gouvernement tentede nous faire oublier que l’éducation est undroit fondamental et une des clés del'exercice de la citoyenneté. En effet,l’éducation nous permet de développernotre esprit critique, de réfléchir à desconcepts parfois plus théoriques oucomplexes, d’être un acteur engagé de lavie politique, économique, sociale etdémocratique de notre société et non pas

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LA LUTTE CONTRE LA HAUSSE DES DROITS DE SCOLARITÉ

Denis Letourneux, vice -président à la Vie politique

UNE REVENDICATION QUI NOUS CONCERNE

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d’être confiné au rôle de simple spectateur.Loin d’être exclusivement un gain individuel,l’éducation d’une personne est donc enpremier lieu une richesse qui profite àl’ensemble de la société dans laquelleévolueront le personnel enseignant, lessociologues, les psychologues ou encoreles médecins actuellement sur les bancsd’école.

À QUI LA RUE ? À NOUS LA RUE !

La lutte que les étudiantes et étudiantsmènent avec passion, courage et déter -mination doit dépasser les murs des cégepset des universités. Comme le dit le dicton,« savoir c’est pouvoir ». En ce sens, cettelutte est celle de la démocratisation et del’accès au savoir et au pouvoir. Elle estégalement celle de la justice sociale, del’égalité et de la redistribution de la richesse,des enjeux qui nous concernent touteset tous.

Or, il semble que le gouvernement nereculera pas facilement. Les étudianteset étudiants non plus. Alors, qu’est-ce quifera pencher la balance d’un côté ou del’autre ? C’est NOUS. Nous, citoyenneset citoyens québécois ; nous, ensei -gnantes et ensei gnants ; nous, parents et

grands-parents… Déjà, de nombreusesor ga ni sations, dont la FAE, rassembléesau sein de la Coalition opposée à latarification et à la privatisation des servicespublics appuient activement la lutteétudiante. Il revient à chacun d’entre nous,tant collectivement qu’individuel lement, desortir dans la rue, quand cela nous estpossible, aux côtés des étudiantes etétudiants, d’écrire des lettres ouvertes,d’interpeller nos élus, bref, de souffler surcette braise pour que le feu, qui animecette lutte, brûle tant et aussi longtempsque nous n’obtiendrons pas victoire.

1. Agence France Presse, Angleterre : baisse desinscriptions à l’université après une haussedes frais, La Presse, [en ligne], 30 janvier 2012,[http://www.cyberpresse.ca/international/europe/201201/30/01-4490704-angleterre-baisse-des-inscriptions-a-luniversite-apres-la-hausse-des-frais.php], (consulté le8 mars 2012).

2. Statistique Canada, Revenu familial et participationaux études postsecondaires, 3 octobre 2003, [enligne], [http://www.statcan.gc.ca/bsolc/olc-cel/olc-cel?catno=11F0019MIF2003210&lang=fra], (consultéle 8 mars 2012) et Ministère de l’Éducation, duLoisir et du Sport (MELS), Les frais de scolarité, l’aidefinancière aux études et la fréquentation desétablissements d’enseignement postsecondaire,2007 [en ligne] [http://www.mels.gouv.qc.ca/sections/modesFinancement/pdf/droits_scolarite.pdf],(consulté le 8 mars 2012).

L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 20125

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Au tournant des années1990, la qualité de l’école

publique américaine et sacapacité limitée à lutter

contre le décrochage et lesinégalités sociales

favorisent l’émergence demultiples modèles visant à

relancer le réseaud’enseignement public.

Ainsi, l’école à charte naît àla fois du désir de favoriser

un espace d’innovationpédagogique pour

développer de nouvellesapproches et de la volonté

d’offrir aux parents laliberté de choisir un

établissement qui puisserépondre à leurs valeurs etaux besoins spécifiques de

leurs enfants.

Plus spécifiquement, c’est en 1991 qu’estadoptée, au Minnesota, la premièrelégislation favorisant la création d’écoles

à charte. Depuis, plusieurs États ont emboîtéle pas et l’Administration Obama est mêmeen train d’en faire une norme. Tant et si bien queles États-Unis comptent aujourd’hui environ5000 écoles à charte, fréquentées par près de1,5 million d’élèves sur l’ensemble de sonterritoire. En 2009, on estimait à plus de 365000le nombre d’élèves figurant sur des listesd’attente pour entrer dans une école à charte.

L’ÉCOLE EN PPP

Le modèle de l’école à charte repose surune certaine déréglementation del’éducation – déjà fort décentralisée auxÉtats-Unis. Ce dernier permet à n’importequel groupe (religieux, privé, commercial,communautaire, parents, enseignants, etc.)de fonder sa propre école. En contrepartie,l’État accorde une charte autorisantl’établissement à recevoir le mêmefinancement qu’une école publique touten dérogeant à la plupart des normes etobligations établies par l’administrationlocale en matière d’éducation publique.L’école demeure gratuite et ouverte à tous.La plupart du temps, le recrutement s’opèrepar tirage au sort. L’établissement profited’une période d’essai de trois à cinq anspour atteindre ses objectifs et voir sa charterenouvelée.

L’autonomie dont l’école bénéficie estvaste, tant sur les plans pédagogiquequ’administratif (gestion des ressourcesfinancières, matérielles et humaines). Bienqu’elle doive se soumettre aux examens

nationaux (qui évaluent surtout les mathéma -tiques de base, la lecture et l’écriture),l’institution peut établir son propreprogramme et décider de ses prioritésd’enseignement, voire expérimenter sespropres contenus ou approches pédago -giques. Si bien qu’elle se présente le plussouvent comme une école à vocationparticulière (qui peut être aussi bienethnique, confessionnelle que pédagogique :sciences, musique, sports, etc.).

Dans sa gestion, l’école à charte a lapossibilité d’échapper au régime collectifdes relations du travail (95 % s’y sous -trairaient), d’établir ses propres horaireset calendriers scolaires, et de lever sespropres fonds complémentaires pourbonifier les ressources dont elle dispose.Ces fonds peuvent provenir d’entreprises,de fondations, ou même de compagniesfinancières spéculatives.

La réforme que l’Administration Bushavait instaurée en 2002 (No Child Left Behind )désignait déjà l’école à charte comme unlaboratoire d’innovation pédagogique pouvantpermettre à certaines communautés de seréapproprier leur école publique et de semobiliser pour atteindre les normesnationales fixées par les nouveaux examensuniformisés. Depuis son arrivée au pouvoiren 2008, Barack Obama a franchi un pas deplus en faisant de l’école à charte l’une despierres angulaires de son programme Raceto the Top (voir article p. 12). En incitant tousles États à se concurrencer pour se mériterle droit de se partager un bonus financier de4,3 milliards de dollars, l’Administration Obamaa largement encouragé les admi nistrationslocales à décentraliser leur réseau d’éducation

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LES ÉCOLES À CHARTE

Wilfried Cordeau

VERS L’ÉCLATEMENT DE L’ÉCOLE PUBLIQUE

DOSSIER

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et à miser sur l’école à charte pour, soi -disant, stimuler l’innovation et laperformance scolaires.

Et pourtant, en se soustrayant ainsi à uncertain contrôle central, le mouvement desécoles à charte a donné lieu à plusieurs dériveset controverses, dont la moindre n’est pas dedéstructurer le système d’éducation publiquelui-même.

DES BÉNÉFICES DOUTEUXPOUR LES ÉLÈVES

En dérogeant à toute forme de curriculumnational, certaines écoles à charteprivilégient l’enseignement des matièresde base et mettent l’accent sur lapréparation intensive des examensnationaux, au détriment de plusieurs autresdisciplines et du développement d’uneculture générale et commune. De même,la liberté accordée quant aux programmeset aux choix pédagogiques a égalementdonné lieu à des dérives idéologiques,comme l’illustrent les controverses surl’enseignement de certaines thèsesfondamentalistes ou créationnistes.

Par ailleurs, la prétendue performancede l’école à charte n’est pas démontrée.Réalisée en 2009 par une équipe del’Université Stanford en Californie, laprincipale étude menée sur le sujet révèleque seulement 17 % des écoles à charteobtiennent aux tests nationaux desrésultats supérieurs à ceux des écolespubliques. En fait, 37 % des écoles à charteatteignent des résultats inférieurs et 46 %des résultats équivalents à ceux de l’écolepublique1.

Dénonçant la politique éducative deGeorge W. Bush, l’ex-ministre del’Éducation, Diane Ravitch, porte un regardtrès critique sur les écoles à charte : « Toutd’abord, les établissements de bon niveaurecrutent leurs élèves dans les famillesles plus mobilisées scolairement. Ensuite,ils acceptent moins d’élèves de languematernelle étrangère, handicapés ou sansdomicile fixe, ce qui leur procure unavantage par rapport aux écoles publiques.Enfin, ils ont le droit de renvoyer dans lepublic les éléments qui “font tache”2. »

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DES CONDITIONS DE TRAVAIL INACCEPTABLES POUR LES PROFSL’intérêt principal de l’école à charte : prétendrefavoriser « l’innovation pédagogique ». Et pourdécouvrir le « Saint-Graal » pédagogique, elleest prête à essayer toutes les formules favorisantla réussite scolaire. Toutefois, ce qu’elle a surtoutà offrir, ce sont des conditions de travaildéréglementées et à l’abri des rapports collectifs.Pas de syndicat, pas de convention collective :telle est la clé. Et ce, d’autant plus que certainesde ces écoles sont financées ou dirigées pardes entreprises à but lucratif ou de grossesfondations privées.

Ainsi, le directeur d’établissement règneen maître dans son école. Il dispose de toutela latitude pour recruter et choisir ses enseignants(et les congédier), puisque la sécurité d’emploin’est pas garantie, voire abolie. Les conditionsde travail étant individuelles et non collectives,il a le loisir de les payer au mérite, en fondantleur évaluation sur la performance de leursélèves (voir article p. 9). Leur encadrement etleur réussite commandent, par ailleurs, ledéploie ment de toutes les énergies dispo -nibles. C’est pourquoi le temps est répartidiffé remment : journées et semaines de travailplus longues, cours du soir, vacances pluscourtes, disponibilité sur appel pour répondreaux questions des élèves ou des parents, etc.Les écoles les plus « performantes » peuventimposer jusqu’à 60% de temps d’ensei gnementde plus qu’à l’école publique. Dans un telcontexte, pas étonnant de constater unroulement important du personnel enseignantdans ces établissements.

En fait, les charter schools ont été lelaboratoire d’essai de la flexibilité des conditionsde travail et du management privé en éducation.Durant des années, elles ont fait l’objetd’expérimentation des théories néolibéralesvoulant imputer aux « acteurs » de l’éducation– au premier titre, les profs – la pleine ou la grandepartie de la responsabilité de l’échec ou dusuccès des élèves.

L’ÉCOLE PUBLIQUE ETCOMMUNE MENACÉE

Le modèle de l’école à charte n’a rien d’inno -vateur. Il ne fait qu’implanter, établissement

par établissement, les mécanismes de gestionde l’entreprise privée (désyndicalisation, paieau mérite, approche client) et la dynamiquede concurrence qui s’avère le moteur detout marché. Or, celles-ci sont totalementincompatibles avec l’idée d’un service publicuniversel qui repose sur une école commune,de proximité et de mixité sociale.

Depuis 1994, l’Alberta a autoriséla création d’une quinzaine d’écoles« autonomes » (à charte)3. L’Angleterre, quidisposait déjà d’un réseau parallèle au seindu système public, a franchi un pas de plusà la dernière rentrée scolaire en autorisant lacréation « d’écoles libres » (Free Schools)inspirées des écoles à charte. Dans les deuxcas, on constate les mêmes dérives et lacunesqu’aux États-Unis. Ces écoles, en prétendantaccroître la performance du réseau scolaire,favorisent l’accélération de la ségrégationsocio-économique, la reproduction d’une éliteau sein d’un réseau parallèle, la fragmentationdu réseau public en unités autonomes ethétérogènes, la mise en danger de l’école dequartier, l’éclatement des curriculums et dela culture commune, la désyndicalisation despersonnels scolaires et, enfin, la privatisationde la gouverne de l’école publique. Partout,elles contribuent à mettre en place un marchédes diplômes qui déstructure la missionmême de l’éducation.

Malgré les principes vertueux dont sespromoteurs tentent de la draper, l’écoleà charte demeure une stratégie de désen -gagement de l’État en éducation. Sous sonimpulsion, l’école, en tant qu’institutioncommune, se fragmente en unités et enréseaux à plusieurs vitesses, tournés vers lasatisfaction d’objectifs et d’intérêts individuelsplutôt que collectifs. Ce sont donc à terme,l’égalité des chances et la cohésion socialequi en sont les premières menacées.

1. Center for Research on Education Outcomes (CREDO),Multiple Choice : Charter School Performance in 16states, Stanford University, juin 2009, 51 pages.

2. Diane RAVITCH, « Volte-face d’une ministre américaine »,Le Monde diplomatique, octobre 2010, p. 19

3. Actuellement, l’Alberta compte treize écoles autonomes(8 150 élèves), 123 écoles privées pouvant êtresubventionnées jusqu’à 60 % (24640 élèves), et 1450écoles publiques (416000 élèves).

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L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 20129

Plus que jamais, le vocabulaire des

directions d’établissement,des bureaucrates des

commissions scolaires et des fonctionnaires du

ministère de l’Éducation,du Loisir et du Sport(MELS) est parsemé

d’expressions comme« atteinte des résultats »,

« objectifs fixés »,« données mesurables »

ou « reddition de compte ».Si bien que l’on a parfois

l’impression de s’adresser à un gestionnaire

d’usine désireux desatisfaire l’avidité des actionnaires.

Cette comparaison n’est pas fortuite.En filigrane de ce discours – censéfavoriser la réussite pour tous les

élèves et l’efficacité dans l’utilisation desressources – règnent des principes degestion contestables, et très en vogue cheznos voisins du Sud. Mais revoyons, d’abordbrièvement, en quoi le projet de loi no 88, quia modifié la Loi sur l’instruction publique auQuébec, a transformé en profondeur lespratiques et les liens entre les acteurs dumonde de l’éducation.

La convention de gestion et de réussiteéducative de votre établissement est issuede la convention de partenariat conclue entrevotre commission scolaire et le MELS. Cedocument précise les buts et les objectifsmesurables devant être pris en compte pourélaborer le plan stratégique de la commissionscolaire. Le MELS procédera éventuellementà l’évaluation de la mise en œuvre du planstratégique de votre commission scolaire.

Une fois le plan stratégique de votrecommission scolaire modifié en ce sens, lacommission scolaire et votre directiond’établissement concluent une convention degestion et de réussite éducative, laquelletient compte du plan de réussite de l’école.Cette dernière convention relaie dans votreétablissement les buts et les objectifs de laconvention de partenariat.

Un projet de convention de gestion etde réussite éducative doit être soumis pourapprobation au conseil d’établissement, aprèsconsultation du personnel de l’établissement.Par la suite, le plan de réussite de l’école estétabli en tenant compte du plan stratégiquede la commission scolaire ainsi que du projetéducatif de l’école.

UNE INSPIRATION DOUTEUSE

Voilà pour la situation qui prévaut actuellementau Québec. Le modèle de gestion à l’origine

Yves Cloutier

QUAND VOTRE EMPLOI DÉPENDDES RÉSULTATS DE VOS ÉLÈVES

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de ces changements s’inspire largement desméthodes de gestion destinées au secteurprivé, élaborées aux États-Unis dans lesannées 70 et 80. Appliquées au secteur del’éducation, les caractéristiques1 de ce modèleentraînent :

� une standardisation de l’enseignement etde l’apprentissage à l’aide de normes derendement définies, élevées, et imposéespar l’administration scolaire ;

� un accent mis sur la littératie et lanumératie2 ;

� un enseignement en fonction de résultatsprédéterminés et uniformisés;

� l’emprunt d’idées de réformes issues dusecteur privé, au détriment de la mise enplace de solutions propres au secteur del’éducation;

� une responsabilisation fondée sur les testset liée aux systèmes d’inspection, depunition et de récompense;

� un contrôle sous forme de surveillancecontinue des données.

Les « ingrédients » précédents fontpartie intégrante de la recette typique adoptéepar plusieurs administrations scolairesaméricaines depuis la fin des années 90. Untrain de mesures est venu donner force deloi à ces principes : financement lié auxrésultats des établis sements, et parconséquent, des élèves ; mesuresdisciplinaires ou congédiements desenseignantes et enseignants ou des directionsd’établissement ne parvenant pas à atteindreles objectifs de réussite scolaire fixés; haussesde salaire pour le personnel enseignantréussissant à atteindre les objectifs et enfin,fermeture d’écoles jugées insuffisammentperformantes. Est-il besoin de mentionnerque les taux de réussite et de diplomationdes élèves américains n’ont pas augmenté,malgré l’application souvent intégrale decette recette.

Ce modèle de gestion importé dusecteur privé, de même que les mesuresprises pour en assurer la mise en place,sont particulièrement mal adaptés auxservices publics comme l’éducation.Imaginez le financement du réseau de lasanté fondé sur le taux de mortalité ou de

morbidité des patients hospitalisés, et doncdu rendement réel, supposé ou attendu, dupersonnel médical et infirmier. Fixer desobjectifs, et exiger qu’ils soient atteintscoûte que coûte, sied davantage à la gestiond’une chaîne de montage qu’à une écoleou un hôpital.

Dans le cas de l’éducation, le principalfacteur du décrochage scolaire demeurel’origine socio-économique des élèves,facteur pour lequel aucun systèmed’éducation ne peut remédier directement.La forte demande exercée par le secteurtertiaire sur les jeunes travailleurs a aussiune incidence certaine sur l’assiduité et laréussite scolaire. Or, congédier ou hausserle salaire d’un enseignant n’aura aucunimpact sur ces deux facteurs du décrochage,et donc en fin de compte, sur la réussitescolaire tant recherchée.

Par contre, menacer de réduire lefinancement d’un établissement ou de congédierdes enseignants dont les élèves n’obtiennentpas les résultats escomptés provoque quasiimmanquablement dans le milieu une réaction,et celle-ci n’est pas nécessairement celleattendue. Voici à cet effet quelques exemplesaméricains de dérapages liés à cette logiquede reddition de compte et d’objectifs à atteindre.

UNE MESURE VOUÉE L’ÉCHEC

En 2011, les directions d’établissement et lepersonnel enseignant de plusieurs écoles del’Atlanta Public Schools (APS) ont été impliquésdans un scandale qui consistait à modifierles résultats des élèves à des examens, demanière à hausser artificiellement les taux deréussite. Certains enseignants n’ont pashésité à parler de culture mafieuse pourqualifier les pressions exercées sur eux parles directions d’établissement et l’APS.

Toujours en 2011, la Baltimore PublicSchools a admis que la chute observée desrésultats scolaires des élèves de certainsétablissements était attribuable à unesurveillance accrue des procédés decorrection, ayant mis au jour des cas defraude et de falsification. De tels exemplesde falsification ont aussi été observés dansles états du Maryland, de la Californie, del’Ohio et du Texas.

L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 201210

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Pendant ce temps au Québec, lesmodifications apportées par le projet de loino 88 à la Loi sur l’instruction publique (LIP)ne permettent toutefois pas aux commissionsscolaires et aux directions d’établissement demettre en place des procédures aussicontraignantes en matière d’évaluation del’enseignement. Cependant, les grandeslignes de la philosophie de la gestion parrésultats sont clairement perceptibles danscertains articles de la LIP qui ont été amendés.À titre d’exemple, l’article 209.2 stipule que :« La commission scolaire et le directeur dechacun de ses établissements conviennentannuellement, dans le cadre d’une conventionde gestion et de réussite éducative, desmesures requises pour assurer l’atteinte desbuts fixés et des objectifs mesurables prévusà la convention de partenariat conclue entrela commission scolaire et le ministre. »

Ces fameuses « mesures requises »sont pour l’instant limitées dans leur portée.Toutefois, les effets des « buts fixés et desobjectifs mesurables » se font déjà sentirauprès du personnel enseignant dans plusieursétablissements, sous forme de pressionsdiverses visant à assurer l’atteinte des objectifs,par l’entremise… des notes des élèves. Or,ce sont justement les résultats des élèves,provenant d’examens administrés directementpar les conseils scolaires ou les États, quiservent à évaluer le personnel enseignantaux États-Unis, avec les consé quences quel’on sait.

Bien que le Québec n’ait pas (encore)emprunté la voie de l’évaluation du personnelenseignant par l’entremise des résultatsscolaires, il semble évident que les fondementsidéologiques de la gestion par résultats sont déjàen place dans la Loi sur l’instruction publique.Hélas, comme le démontre le discoursdémagogique de certains, il est plus facile des’attaquer aux services publics, et aux hommeset aux femmes qui y œuvrent, qu’aux véritablescauses des problèmes sociaux. L’exempleaméricain est, à ce chapitre, éloquent.

1. Andy HARGREAVES et Dennis SHIRLEY, La face cachéede la Réforme de l’éducation, Rapport commandé parla Fédération canadienne des enseignantes et desenseignants, 2011.

2. Connaissances et savoir-faire en lecture et enmathématique.

11L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 2012

Page 12: Volume 5 Numéro 4 Mai 2012 L’AUTONOME - lafae.qc.ca · PDF fileAu moment d’écrire ces lignes, plus de 190000 étudiantes et étudiants sont en grève générale illimitée. Lorsque

La lutte contre la réforme occupe une

place importante dans lesbatailles menées par la

FAE. Bien que de naturepédagogique, la réforme de

l’éducation est d’abord etavant tout une redéfinition

globale de l’éducation, de ses méthodes, de ses

finalités et de son rôlesocial. Loin d’être

exclusive au Québec, cettemutation du modèle

d’enseignement se déroulesimultanément dans

l’ensemble de l’occidentdepuis les 30 dernières

années à des rythmes etdes degrés différents.

Indépendamment des mesures à la pièce,cette transformation globale du modèled’enseignement se fonde principalement

sur deux approches en interaction : « l’incorpo -ration économique, qui transforme [lessystèmes d’enseignement] en vaste réseaud’entreprises de formation de “capital humain”et la compétition sociale généralisée, quidevient le mode de régulation du systèmelui-même1. »

Aux États-Unis, les réformes législativessont courantes. Toutes les lois s’inscrivent dansun processus quasi permanent de réforme.Aussitôt adoptées, les lois américaines sontsujettes à des reauthorizations périodiques :elles sont alors amendées et adoptées ànouveau. Les lois américaines sont doncconstamment soumises au processus deconsultation, de pression, de reposi -tionnement et de réforme politique. Ainsi, laElementary and Secondary Education Act(Loi sur l’instruction publique amé ricaine) aété adoptée en 1965, sous la présidence deLindon B. Johnson, et réadoptée régulière -ment au cours de l’histoire. Les deux dernièresreauthorizations ont eu lieu en 1994 et en2002, la prochaine étant sur la table à dessinde l’Administration Obama.

LA RÉFORME DE 2002 : NO CHILD LEFT BEHIND

Dès son arrivée au pouvoir, le président desÉtats-Unis, George W. Bush, a procédé àune réforme en profondeur du systèmed’éducation fédéral connue sous l’appellation

No Child Left Behind Act. Cette loi présentela plus importante intrusion du gouvernementfédéral américain dans les champs decompétences des États depuis 1965. Drapéede nobles intentions, cette réforme prétendaitvouloir aider les élèves en difficulté en ciblantprioritairement les milieux défavorisés etsous-financés. Elle prévoyait principalementmesurer la performance des écoles enévaluant les résultats des élèves. Parl’administration aux élèves de testsnationaux uniformisés et par l’introductionde l’évaluation de la performance desenseignants, l‘Administration Bush pensaitoffrir à chaque élève un environnementd’apprentissage sain où il pourrait s’épanouir.La loi prévoyait une série de mesurespunitives graduées − allant de la réprimandepublique à la fermeture complète del’établissement – mises en place pour inciterles écoles et les enseignantes et enseignantsconsidérés peu performants à le devenir.

Dix ans après avoir été mis en place, lenouveau modèle s’avère un échec sur toutela ligne. Tricherie massive aux tests nationaux,falsification des résultats des élèves, fermeturede centaines d’écoles « non performantes »,mise à pied subite d’enseignantes etenseignants syndiqués nuisant à la« rentabilité » des écoles. Certains établis -sements ont même été fermés un jourmettant à pied leur personnel syndiqué pourrouvrir le lendemain en réembauchant lemême personnel, non syndiqué cette fois-ci.

Lorsqu’une école ne se classe pas bienaux examens nationaux pendant plusieurs

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LE MODÈLE AMÉRICAIN

Pierre-André Champoux

DE RÉFORME EN RÉFORMEVERS UNE CONCEPTIONNÉOLIBÉRALE DE L’ÉCOLE

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années, les commissaires d’État se voientautorisés à procéder à un « réaménagementtotal » de l’école. Cette très grande latitudeleur permet de dicter des changementsradicaux dans la mission de l’école, dans lesrelations de travail, pouvant même procéderà sa fermeture.

LA LOI DE 2009 : VERS UNENOUVELLE RÉFORME DEL’ÉDUCATION

En réaction à la récente crise économique,le président Obama a ratifié, en 2009, uneloi visant à réinvestir plus de quatre milliardsde dollars dans l’économie américaine. Enpremier lieu, le gouvernement démocratevisait ainsi à stimuler l’économie par desinvestissements massifs dans lesinfrastructures, les petites entreprises et enéducation. Il cherchait à faire de l’écoleaméricaine l’une des plus performantes etcompétitives au monde. Par l’adoption del’American Recovery and Reinvestment Act,le gouvernement créait le Race to the Topfund, un fonds d’investissement destiné àrécompenser les États dont le systèmescolaire s’avérerait le plus performant avecle double objectif de dynamiser des initiativeset des réformes pédagogiques d’États ainsique de favoriser l’établissement de réformeslégislatives visant à aligner les politiquesd’États aux nouvelles normes scolaires2.

Pour obtenir ces fonds fédéraux, lesÉtats doivent poser leur candidature à unesorte de concours. En 2010, seulement

15 États et le District de Columbia sur les40 ayant présenté des projets lors de lapremière phase ont été sélectionnés commefinalistes. Par la création de ce fondsd’investissement en éducation, Washingtonentend mettre en concurrence les différentsÉtats pour l’obtention de crédits supplé -mentaires en éducation, mais son objectifprincipal est de préparer le terrain législatifdes États pour la mise en place de la prochaineréforme fédérale en éducation3. Selonplusieurs analystes, cette nouvelle réformeplacerait les écoles à charte au cœur deschangements en éducation (voir article p. 6).

Un regard sur la situation américaineapporte un éclairage nouveau sur notre proprelutte contre la réforme. Une étude des systèmeseuropéens nous mènerait sensiblement auxmêmes conclusions. Bien qu’en apparencedifférent du système américain et européen,le modèle qui s’implante actuellement auQuébec est le même dans son essencepolitique : Incorporation de l’éducation ausystème économique et compétition commenouvelle norme de régulation. On a ici unemeilleure idée du vrai visage de la réformeau Québec.

1. LAVAL, Christian, La nouvelle école capitaliste, ÉditionsLa Découverte, août 2011, 240 p.

2. WHILDEN,Blakely Elizabeth. The Elementary and SecondaryEducation Act : A Primer on Reauthorization in 2010, [Enligne], [www.congressweb.com/aascu/docfiles/ESEA%20PRIMER%20FINAL.pdf], (consulté le XX avril 2012).

3. Ibid.

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Aux États-Unis, l’année 2011 a été

difficile sur le plan des relations du travail.

Plusieurs États ont adopté des lois attaquant

directement les droitssyndicaux, et plus

particulièrement celui denégociation collective

des salariés de la fonctionpublique. Plusieurs d’entre

eux se sont également vus imposer, par des

gouvernements d’État,d’importantes réductions

des bénéfices de leursrégimes de retraite etd’assurance ainsi que

des concessions salariales.

Révocation du droit des travailleuses ettravailleurs de la fonction publique à lanégociation collective ; imposition

unilatérale des conditions salariales ; réductiondes bénéfices des régimes de retraite tantpour les rentes futures que celles verséesactuellement ; diminution des couverturesd’assurance médicale et interdiction deprélever à la source les cotisations syndicalesdes non-membres d’un syndicat ; réductiond’effectif ; etc. Voilà ce que les Assembléeslégislatives de plusieurs États ont adopté avec,pour résultats, des attaques de front auxorganisations syndicales et leurs membres àtravers tout le pays.

Rendues à différentes étapes desprocessus législatifs, ces lois sont en vigueurou en voie de l’être dans plus de la moitiédes États. Dans certains cas, les syndicatsont réussi à négocier des aménagements àleurs conditions de travail. Dans d’autres, ilsont, avec le soutien de la population, fortementrésisté pour contrer ces attaques.

WISCONSIN : BRAS DE FER ET SOLIDARITÉ

La situation qui sévit actuellement auWisconsin illustre bien cette situation. Ennovembre 2010, les citoyennes et citoyensde cet État élisaient le candidat républicain,Scott Walker, comme gouverneur. Lacampagne électorale s’est jouée princi -palement sur la question du déficitbudgétaire de l’État. Dès son entrée enfonction, le gouverneur est allé de l’avantavec des mesures d’austérité budgétaireparticulièrement drastiques notamment

en éducation et en santé. Parallèlement,il accordait des réductions d’impôt auxentreprises et aux personnes à haut revenu.

À la mi-mars 2011, après plusieurssemaines de joute politique et de bras de feravec les syndicats, le gouverneur Scott a faitadopter sa loi antisyndicale (2011 WisconsinAct 10). Celle-ci modifie le droit auxnégociations collectives de la très grandemajorité des salariés de l’État notamment,en limitant les sujets de négociation au seulsalaire de base. Celui-ci, par ailleurs, ne peutfaire augmenter la masse salariale au-delàde l’indice des prix à la consommation ce quiexclut, par conséquent, les autres élémentsde la rémunération tels la progression dansl’échelle salariale, les heures supplémentaires,les vacances, les primes d’assurance et lescotisations au régime de retraite.

Les enseignantes et enseignants sontégalement soumis à cette loi. Un nouveau« système de discussion » visant à régler lesdifférends entre les parties a été mis en place,mais rien n’oblige les commissions scolairesà rencontrer le syndicat. De plus, lescommissions scolaires doivent désormaisproduire un manuel de l’employé quiremplacera, à terme, les conventionscollectives.

Cette loi touche également de pleinfouet les organisations syndicales. Ainsi,chaque année, un vote d’allégeance syndicaledoit être tenu ; si 51 % des voix s’avèrent enfaveur du syndicat en place, l’accréditationest maintenue pour les douze prochains mois.Dans le cas contraire, l’accréditation estimmédiatement révoquée et une nouvelledemande d’accréditation ne peut être

L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 201214

CONDITIONS DE TRAVAIL AUX ÉTATS-UNIS

Christian Leblanc

SE MOBILISER POUR NE PASPERDRE SES ACQUIS

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effectuée avant un an. Pour ce qui est descotisations syndicales, l’obligation de retenueà la source est abolie. Ainsi, toute personnequi désire mettre fin à son adhésion doitaviser le syndicat. Elle ne sera, de ce fait,plus tenue de verser sa cotisation syndicale.Enfin, le droit de grève est retiré.

Les syndicats représentant lespersonnels de la fonction publique ontvivement réagi à ces attaques. Ils ont obtenule soutien de la population, égalementfrappée par les coupes qui ont affecté laclasse moyenne. Des manifestationsregroupant plusieurs dizaines de milliersde personnes se sont organisées dans lesrues de Madison où siège l’administrationgouvernementale du Wisconsin et dansplusieurs autres villes. En parallèle, uneprocédure spéciale, propre à quelques Étatsseulement, a été mise en œuvre pourdestituer le gouverneur. Son enclenchementnécessitait la signature d’une pétition d’aumoins 540 000 noms alors que plus d’unmillion de personnes l’avaient déjà signée.Le processus suit toujours son cours.

L’orientation de l’État du Wisconsin est-elle partagée et appliquée ailleurs auxÉtats-Unis? Est-ce un mouvement de fond?Certains accusent les syndicats d’être, engrande partie, responsables des déficitsbudgétaires causés, entre autres, par larémunération trop élevée des fonctionnaireset les régimes de retraite, première cause,selon certains, des déficits des États.

Des analyses ont démontré que cen’était pas tout à fait le cas1. Pour un emploiéquivalent, les fonctionnaires gagnaient enmoyenne 4 % de moins que les employésdu secteur privé. Et sur le plan des régimesde retraite, aucun lien ne peut être démontréentre l’importance du déficit des États où lessalariés sont syndiqués et ceux où ils ne lesont pas.

Par ailleurs, on remarque que dans lesÉtats gouvernés par un républicain, desattaques directes aux droits syndicaux et àla négociation collective ont été réussies ou,à tout le moins, tentées, alors que dans lesÉtats représentés par les démocrates, desententes ont pu être négociées. S’agit-il là

d’une manœuvre purement politique etidéologique? Il est d’ailleurs connu qu’auxÉtats-Unis, les grandes organisationssyndicales soutiennent le Parti démocrateen leur versant plusieurs millions de dollarslors des campagnes électorales. Ainsi, lesattaques du Parti républicain sont une façonindirecte de s’en prendre au Parti démocratepour l’affaiblir.

L’hypothèse de la vague de fond ne peutdonc être retenue. Tout en demeurant conscientde la situation économique, on note uneimportante résistance de la population devant

les attaques aux droits syndicaux. Le Wisconsinn’en est pas le seul exemple, on peut aussimentionner l’Ohio où les citoyennes et citoyensont réussi, par référendum, à renverser ladécision du gouverneur d’attaquer le droit denégociation. Les élections de novembre prochainseront sûrement un bon indicateur de la suitedes événements.

1. MCCARTIN, J. Convenient Scapegoat : Public Workersunder Assault, Dissent magazine, printemps 2011, [Enligne] [http://dissentmagazine.org/article/?article=3825].

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Réunies en Conseilfédératif, les personnes

déléguées de la Fédération autonome de

l’enseignement (FAE) ont unanimement décidé

d’appuyer l’importantelutte que mène le

personnel enseignant de la Colombie-Britannique.

Cette bataille n’est pas sansrappeler celle menée au

Québec contre la Loiconcernant les conditionsde travail dans le secteur

public, adoptée le15 décembre 2005 sous

bâillon, et qui estactuellement contestée

devant les tribunaux.

En mars dernier, les 41000 membres de laFédération des enseignantes et ensei -gnants de la Colombie-Britannique

(BCTF) ont voté pour trois jours de grèveafin de protester contre le projet de loino 22. Celui-ci vise notamment à prolongerunilatéralement la convention collectivearrivée à échéance en juin dernier etviendrait, par le fait même, retirer auxenseignantes et enseignants leur droit degrève et les empêcher d’exercer toutmoyen de pression. Il impose également lerecours à un médiateur pour la négociationet fixe le délai pour en arriver à unenouvelle entente au 31 août 2012.

Ce projet de loi limite également lamarge de manœuvre du médiateur, enstipulant que la convention ne peut entraînerdes coûts plus élevés que la précédente. Parconséquent, les demandes visant à diminuerle nombre d’élèves par classe, à offrirdavantage de services aux élèves endifficulté ou à améliorer les conditionssalariales des enseignantes et enseignantss’avèrent impossibles à satisfaire… à moinsde sabrer ailleurs dans les conditions detravail ce qui aurait pour conséquence dedéshabiller Pierre pour habiller Paul !

Résultat : le médiateur a les mains tellementliées qu’il se voit contraint d’imposer, àquelques détails près, la même conventioncollective et de geler, jusqu’en juin 2013, lessalaires des enseignantes et enseignantsainsi que le budget dévolu à l’éducation.

DES ATTAQUES AU DROIT À LA LIBRE NÉGOCIATION

Ce projet de loi no 22 est le dernier élémentd’une série d’attaques envers le droit à lalibre négociation du personnel enseignant. Eneffet, en 2002, deux lois (Education ServicesCollective Agreement Act et Public EducationFlexibility and Choice Act) sont venues limiterle droit à la libre négociation des enseignanteset enseignants de la Colombie-Britannique.Ces lois, qui ont récemment été déclaréesinconstitu tionnelles par la Cour suprême dela Colombie-Britannique, retiraient des objetsde négociation, le nombre et le type d’élèvesdans les classes, éliminant du coup des sujetsinhérents aux conditions de travail qui onttoujours été au cœur des reven dications.Dans sa décision, la Cour donnait un délai d’unan au gouvernement pour modifier cette loiet rectifier la situation, l’échéance ayant été

L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 201216

UNE NÉCESSAIRE SOLIDARITÉ!LA BATAILLE DES ENSEIGNANTES ET ENSEIGNANTS DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE…

Marie-Eve Rancourt

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REMISE DES PRIX DU CONCOURS

Le mercredi 21 mars dernier avait lieu la remise des prix duconcours La persévérance a aussi un visage. Rappelons quece concours, organisé par la FAE, souligne la persévérance

des élèves inscrits à la formation professionnelle ou à l’éducationdes adultes, et qu’il s’inscrit dans le cadre de la Semainequébécoise des adultes en formation, laquelle se déroulait cetteannée du 24 mars au 1er avril.

Les lauréates et le lauréat du concours sont : mesdamesSarah-Maude Pelletier-Lavigne du Centre intégré de formationde Granby dans la catégorie formation professionnelle, Marie-Josée Gauthier du Centre multiservice de Sainte-Thérèsedans la catégorie éducation des adultes, Thuy Truc Thanh Thacdu Centre Pauline-Julien de Montréal dans la catégoriefrancisation, Emmanuelle Deschamps-Jetté du Centre LeTremplin de Laval dans la catégorie formation à distance, etenfin, M. Martin Charrette de l’établissement Archambaultde Sainte-Anne-des-Plaines dans la catégorie éducation enmilieu pénitentiaire.

La FAE tient également à remercier toutes lesenseignantes et tous les enseignants qui ont collaboré àce concours et contribué à en faire, encore cette année,un véritable succès.

Félicitations aux lauréates et au lauréat ainsi qu’àleurs enseignantes !

BRÈVES

fixée au mois d’avril 2012. À la lumière de ce qui précède, le projetde loi no 22 satisfait-il aux exigences de la Cour suprême de laColombie-Britannique ou représente-t-il plutôt… un outrage autribunal ?

DES ENSEIGNANTES ET ENSEIGNANTSDÉCIDÉS À SE BATTRE

Chose certaine, ce projet de loi a suscité une grogne sans équivoqueau sein du personnel enseignant qui y voit un affront envers laprofession et un non-respect de la décision de la Cour suprême. LaFédération des enseignantes et enseignants de la Colombie-Britannique(BCTF) a reçu de nombreux appuis et ses membres sont décidés

à se battre pour le contester. Au moment d’écrire ces lignes, toutesles possibilités d’action sont explorées, rien n’a été mis de côté.

Le contexte actuel en Colombie-Britannique ressemble à celuide nombreux pays ou provinces : les gouvernements, après s’êtreprivés de revenus en diminuant les impôts des plus riches et desentreprises, imposent d’importantes compressions budgétairesdans les services publics. Dans ce contexte, il est plus que jamaisnécessaire de contester ces mesures d’austérité qui servent deprétexte pour attaquer le droit à la libre négociation et plusspécifiquement, pour affaiblir le réseau de l’éducation. Il faut êtreunis et solidaires et se rappeler que la lutte des enseignantes etenseignants de la Colombie-Britannique, c’est aussi la nôtre. LaFAE suivra de près ce conflit et a déjà offert son appui au BCTF.

L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 2012

LA PERSÉVÉRANCE A AUSSI UN VISAGE

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BRÈVES

Par ce concours, le mouvement cherche non seulementà valoriser les élèves qui lancent des projets ou des actionsvisant à contrer l’intimidation et la violence en milieu scolaire,

mais aussi à les encourager à devenir des pour mettre fin àce grave problème. Demandez à vos élèves de nous faire connaîtreles solutions qu’ils ont trouvées ou mises en œuvre pour créer unclimat plus harmonieux et plus respectueux, un milieu de vie quifavorise davantage l’épanouissement de toutes et tous ainsi que lerespect des différences.

Le projet à soumettre doit clairement témoigner d’un geste,d’une action ou d’une œuvre réalisés par l’élève, la classe oul’école en vue de sensibiliser le milieu scolaire au problème del’intimidation à l’école ou en vue d’agir directement pour le prévenir.

Le projet ou l’action doivent avoir été réalisés entre le 1er septembre2011 et le 23 mai 2012 et avoir été enregistrés sur le site Internetdu mouvement (www.heros-mouvement.ca) au plus tard

le 23 mai 2012. Les détails du concoursse trouvent au verso des affiches demême que sur le site .

Les gagnantes et gagnantsremporteront des prix d’une valeurde 100 $ pour une participation individuelle,200 $ pour une participation de classe et 400 $ pour les projetsconcernant toute une école. De plus, 75 t-shirts arborant le logo

seront donnés lors d’un tirage au sort effectué parmil’ensemble des participations au concours.

Le nom des personnes gagnantes, celui de leur enseignanteou enseignant et les projets sélectionnés seront dévoilés le30 mai 2012. Tous les projets certifiés seront mis en ligne sur lesite du mouvement . Les projets gagnants seront égalementnommés lors du Congrès de juin 2012 et seront valorisés dansl’édition de septembre de la revue L’Autonome.

L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 201218

QUAND ON INTIMIDE !

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Le 6 mars dernier, la Fédération autonome de l’enseignementdévoilait les résultats d’une recherche1 portant sur le décrochagescolaire des filles. Cette étude, pilotée par le comité de la

condition des femmes de la FAE, visait à apporter un éclairagenouveau sur les causes inhérentes à l’abandon des études et sesconséquences. Cette recherche nous apprenait notamment que deuxfacteurs spécifiques peuvent amener les filles à décrocher : desdifficultés reliées à l’adversité familiale (contraintes ou violence) et desdifficultés d’apprentissage.

Suscitant un vif intérêt des médias, ces résultats ont étérévélés lors d’une conférence de presse tenue en présence dela chercheuse, Isabelle Marchand, membre de l’Institut de rechercheet d’études féministes (IREF) de l’UQÀM, de Lise Gervais,coordonnatrice de Relais-femmes, organisme qui a collaboré auprojet, et de Pierre St-Germain, président de la FAE.

Cet événement a permis à de nombreux journalistes sur place, ycompris des représentants de médias anglophones, de s’intéresser àun aspect méconnu du décrochage scolaire, trop souvent occulté par

celui des garçons. Cela aentraîné la réalisation de plusd’une trentaine d’entrevues,à la télévision, pour la presseécrite et à la radio. Sur leplan radiophonique, lemessage a été entendu àtravers tout le Québec.Mentionnons, entre autres,la tribune téléphonique de l’émission Maisonneuve en direct ou encorel’entrevue à Désautels sur le réseau français de Radio-Canada. Ainsi,cette présence dynamique de la FAE dans les médias a permis d’enrichirla réflexion de milliers de citoyennes et citoyens sur un thème complexeet ignoré.

1. L’analyse qualitative a été réalisée à l’été 2011 auprès de 26 femmes âgées de 19 à54 ans qui ont quitté l’école depuis au moins deux ans sans avoir obtenu de diplômed’études secondaires.

L’AUTONOME VOL. 5 NO 4 MAI 201219

LES MÉDIAS SE FONT L’ÉCHO DE L’ÉTUDE SUR LE DÉCROCHAGE DES FILLES

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BRÈVES

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