Vol4.No11.12.Ayad

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    Applied Semiotics / Smiotique applique 4: 11/12(2002) : 217-228 217

    Moderato Cantabile de Marguerite Duras : tudedes stratgies dinteraction et des procds

    dargumentation utiliss par linterlocuteur

    Liliane Ayad2

    Terre et ciel que je puis chanter dun style bas

    Non point tels quils taient, mais tels quils ntaient pas.

    Du Bartas, Premire Semaine

    Considr par les critiques comme une uvre singulire, occupantune place part dans lensemble de la production romanesque de Marguerite

    Duras, le rcit de Moderato Cantabile, troitement li aux thmes exploi-ts par la romancire , se situe par les techniques utiliss et les recherchesparticulires qu[il rvle], un peu lcart de cette production. Une femme,un homme, un enfant et de lalcool sont premire vue, les ingrdients habi-tuels des rcits durassiens. Cependant, luvre nous attire par sa composi-tion savante autour d un rcit mince et linaire o, ds le dbut, lvidencedun fait-divers criminel soppose par anti-phrase lunivers virtuel o lesfaits ne sont crs que par le biais de la conversation.

    Anne et Chauvin venaient de se connatre. Mais, tentant de dchiffrerlnigme qui entoure le meurtre tragique du caf, ils vont dcouvrir eneux-mmes une passion naissante et progressante mesure que leurs ren-dez-vous se succdaient. Cest alors quils seront entrains vivrelhypothse avance par Chauvin pour expliquer le crime qui devient le cou-ronnement de la passion et du dsir au lieu den tre la destruction. Dansleur dernire rencontre, Anne, comme lassassine, dcouvre en elle ce dsirdtre tue par un amant qui en venait dsirer sa mort. Ils se quitteront d-

    finitivement sur ces mots: Je voudrais que vous soyez morte, dit Chauvin.

    Cest fait, dit Anne Desbaresdes.

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    1. Brisant latmosphre paisible de la leon de piano laquelle Anne Desbaresdes, pousedun jeune industriel, avait accompagn son enfant comme d habitude, un cri clate au caftout proche, juste au milieu de la sonatine de Diabelli, dont louvrage porte le nom. Unhomme venait dassassiner sa compagne, avant de se jeter son cou dans une treintepassionne. trangement bouleverse par ce drame, Anne ne put sempcher de pntrerdans le caf, tentant de dcouvrir les vritables raisons du meurtre. Elle y rencontra Chauvin,

    tmoin du crime, et la conversation sengagea. Anne se rendrait alors au caf, peu prs la mme heure, le lendemain et les jours suivants. Laventure singulire du roman se rduit cinq conversations entretenues par les deux tres dans lespace dune dizaine de jours.

    Anne et Chauvin vont essayer de refa ire sous nos yeux lit inraire du couple tragique aupoint que au mom ent de leur sparation ils auraient dj vcu virtuellement le dramequils imaginrent.

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    La structure du livre repose donc notamment sur lopposition, le con-traste. Laccomplissement virtuel de la passion des deux personnagessoppose lexprience vcue par lassassin et sa victime.

    On ne peut donc dissocier les deux couples: cest le couple vivant quiexplique le couple dtruit; mais cest le couple dtruit qui rend possible cequi se produit chez les vivants: la dcouverte et lexprience dune certaineforme de passion fascine par la mort.

    Lensemble du rcit repose sur cette superposition variable de deuxplans ; lunivers modr et rassurant de la bourgeoisie quillustrent les le-ons hebdomadaires de piano, est oppos lunivers triste, voire misrabledu proltariat dont est issu Chauvin et que nous dcouvrons au coucher du

    soleil, avec le retour des ouvriers puiss. Le drame indcent et tragique dudsir et de la passion charnelle unissant le couple inconnu, donne plus devigueur lexprience intime qui dchire les mes des deux interlocuteurs,mais cette fois il a lieu en profondeur, sur le plan intrieur, pressenti et doncinvisible. La nature des propos changs entre ceux-ci souligne loppositionentre le dsir nullement voil quprouve Chauvin et la faim sexuelle jamaisavoue dont est proie Anne Desbaresdes.1

    Telle est donc la composition savante et efficace de Moderato Cantabile.Jamais la romancire navait mieux associ lvnement extrieur etlvnement intrieur qui sont les deux ples de plusieurs de ses rcits, ni sibien mis en valeur le rle que le destin des autres peut jouer dans notre vie.Jamais surtout navait t plus clair et plus motiv son refus de la psycho-logie.

    Marguerite Duras se propose de nous faire pouser une aventure tellequelle est vcue: dans le secret de ltre. (...)/ Ce queModerato Cantabilerend

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    admirablement sensible cest que pour Marguerite Duras, aimer et dsirerjusqu vouloir mourir nest pas une ralit quon raconte ou quon analysedu dehors, mais une exprience quon ne peut comprendre quen la vivant.

    Il serait nanmoins noter que cette superposition entre les deux plansopposs entrane lun se mtamorphoser graduellement pour se confondredans lautre. La passion de Chauvin et Anne se confond parfaitement avec lafin du rcit, avec le drame qui les a, au dpart, rapprochs. Le dcalage allantdcroissant va finir par unir lhypothse et la dcouverte. Lexplication ducrime et lexprience intime concident vers la fin pour se confondre exacte-ment.

    Le progrs de la passion chez Anne et Chauvin devient perceptible au

    lecteur non pas direcxtement (ce qui serait le dformer, le priver de sa ralittout intrieur), mais par la comprhension croissante quils manifestent lgard du couple dtruit.

    Cest alors que se dessine, sous les yeux du lecteur, ce mouvement dontluvre constitue une vritable qute, le mouvement vers lautre, vers le...sortir de soi, si tu veux, se fondre dans.

    Nous avons consacr la premire partie du prsent travail lanalyse des

    divers plans ambigus, entranant le lecteur habilement sur la voie dune d-croissance progressive de ce dcalage, jusqu laboutissement de luvre la fusion parfaite des deux clans opposs. Il sagit notamment des structuresprofondes de laction. Nous avons de mme cru indispensable de joindre ltude des parcours actantiels, celle des modes de narration. Or, selon Ge-nette, les deux principaux continents de lunivers littraires sont la fictionet la diction. Il fallait donc se pencher sur le caractre esthtique caractri-sant les crits durassiens. Une partie part traite de ce contraste entre la pa-

    role et le sentiment, entre le verbe et lindicible, entre lloquence et le silencequi constitue proprement parler, le vritable pivot autour duquel tourne lercit; la pierre de touche sur laquelle se tisse lintrigue. Or, cest par certainsprocds dargumentation utiliss par les deux interlocuteurs que leurconversation nous entrane vers la dcouverte de leur intimit. Enfin, unedernire partie est rserve la rhtorique figuratique et son rle persuasif.Nous dcouvrons alors comment Anne Desbaresdes reprsente lloquencede ce qui est tu, du non dit, alors que Chauvin, lui, dirigeant leur dialogue

    avec habilet et tnacit, russira laccoucher de la vrit qui est en elleet quelle se refuse admettre ou dire.

    De se drouler entirement dans la profondeur des corps et le secretdes curs, cette aventure charnelle prend une intensit poignante.

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    Comme dans tout roman, laction de Moderato Cantabile a lieu dansune dure bien dtermine. La saison dabord, cest lt dont la lourde cha-leur favorise lexplosion du drame, et qui est explicitement associ parlauteur des ides de pourrissement et de mort. Anne Desbaresdesslance dans sa qute, veille par le meurtre qui a lieu dans le caf. Mais cenest que progressivement quelle parviendra dcouvrir la ralit du drame,celle du moins dont elle sera convaincue grce la version de Chauvin.

    Marguerite Duras se plat voquer, et avec un gal souci de posie lesmoments dattente et dimmobilit dun tre recueilli au milieu dune (scne)gorge de chaleur et dt.

    De plus, tout se passe en fins daprs-midi, aux crpuscules, quand la

    ville sallume de toutes ses lumires. Tout au long des cinq rencontres entreAnne et Chauvin, lacclration du temps et lurgence, cette urgence de d-couvrir la vrit, rappelle lattention des lecteurs limportance de ces entre-vues. Elles ont lieu la mme heure; et la progression du temps et la suc-cession des minutes sont soigneusement souligns chaque fois. Au dbut,le couple peroit la sirne des usines indiquant la fin dune journe de travail, six heures. Quelques minutes aprs, cest le dferlement dans le caf, desouvriers puiss. Et, les rencontres sachvent au moment bien dtermino le soleil se couche. A cette urgence de vivre rendue plus accrue par lafuite du temps soppose la pesanteur, la lenteur dont est dpeinte la soiredans la demeure bourgeoise, o il parat que la relation entre le matre de lamaison et son pouse Anne Desbaresdes est dpourvue de toute intimit. Ilen ressort videmment une lumire quant la valeur du temps, son caractrefragile aux yeux des amoureux.

    Il suffira en effet apparemment de dix jours, et de cinq rencontres qui

    les runissent, pour que le couple prsent parcoure le cheminement moralqui avait (...) conduit les deux amants tragiques au seuil de la mort.

    En outre, laventure de notre couple concide avec lpoque de la florai-son des magnolias. Anne a lhabitude den porte une son corsage lors desdners organiss chez elle. Elle aura une, entre les seins, au cours de sa ren-contre avec Chauvin. De cette fleur se dgage nanmoins, une odeur per-ante, celle de la mort, au sein de la vie.

    On devine ds lors quel symbolisme Marguerite Duras a dlibrmentassoci la fleur de magnolia. Si son panuissement reprsente toutelaspiration la vie, la bouffe de sensualit et le dsir de bonheur (...) sonfltrissement rapide suggre, paralllement au coucher de soleil qui prside la fin de chacune des rencontres, la progression dramatique du temps etlapproche inluctable de la mort.

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    Le lieu de laction savre alors dune grande importance. Se droulantdans une ville portuaire, la mer reprsente lailleurs, lespace ouvert sans fin,symbole de la libert. La mer cest aussi le port; lactivit des hommes, le tra-vail laboureux qui loigne le vice et le vainct. Une ligne de dmarcation setrace cependant, car les rencontres du couple ont lieu dans un espace clos.Le caf reflte la contrainte de lamour et le vin quon y sert nous rappellelimmoralit.

    Le cadre de vie et les tats dme se mlent, renforant lquivalenceconstruite entre la situation spatiale et la situation affective.

    Situ au centre de la ville, le caf est mi-chemin sparant les quartierspopulaires dont les hommes travaillent dans le port et les usines, du quartier

    rsidentiel bourgeois, habit par les propritaires des usines et leur famille.Entre ces deux extrmes, le caf, lieu facilitant les relations de connivence,soppose par lambiance de la convivialit populaire et de lintimit prolta-rienne qui y rgne, avec la salle manger et avecle sallon de la grande maisono le mari dAnne Desbaresdes runit ses amis. Lpisode de ce dner o londvore le saumon et le canard lorange, mais dans une atmosphre tendueet froide occupe un chapitre part. Le lecteur averti peut videmment y d-celer un contraste apparent avec les autres chapitres du livre. Le ton de lanarration assur par le pass dfini, la description dtaille, soppose au restedu roman o laternance des temps divers et labsence de prsentation d-taille, en dehors de quelques intrusions du narrateur sur des personnagessans figures sont les rgles qui prvalent. Ici, au caf, lessentiel de la narra-tion est assur par le dialogue, les propos changs dans lintimit, mais audner de Monsieur Desbaresdes, cest une narration traditionnelle que lonprvoit. lordre et la solennit du rituel mondain, les rencontres du caf,par le naturel de la parole, fonctionnent par antithse. Lici est alors renduplus accueillant que lailleurs.

    Par le seul fait quAnne vienne plusieurs reprises dans ce caf, quelley consomme, et en abondance, une boisson populaire, ce vin rouge quelleboit avec un plaisir de moins en moins contrl, elle transgresse des rglesnon crites mais impratives de son milieu.

    La scne du dner voque de mme un dtail dont limportance nestpoint ngliger. Alors que les invits sont en train de suivre des yeux les

    mouvements tranges de la matresse de maison, celle-ci guette la fentre audessous de laquelle se tient Chauvin. Cest dailleurs cette mme fentrequAnne avait lhabitude de humer le parfum des magnolias dans le jardinlorsquelle ignorait encore que Chauvin tait l. Ce dcalage entre le haut ose trouve Anne et le bas do son protagoniste essaie de latteindre rend plus

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    accrue la distance qui les spare tant quAnne participait aux activits bour-geoises auxquelles elle stait donne.

    Procd habile de destabilisation, le paradoxe dans lensemble de

    luvre frappe limagination du lecteur et maintient lmotion. Monstresde la vrit , les ides et les situations paradoxales autour desquelles se tisselintrigue, destabilisent le recepteur, le conduisent et le mnent rflchir;cest alors quil decouvre le message ultime de lmetteur du rcit.

    Renverser la pense commune est un jeu dautant plus attrayant quilconduit des vrits trs profondes.

    Entre le dedans et le dehors slve de mme une autre cloison tanche.

    Tandis que lenfant, le petit dAnne, est en train de jouer dehors, celle-ciconsomme les verres de vin au caf, et se perd dans ses conversations avecun inconnu. Cest son rle normalde mre qui est ainsi dni en faveur decette trange intimit du dedans.

    Limpression fondamentale dambigut et dincertitude qui se dgagealors de ces rencontres, conduit le lecteur dcouvrir le paradoxe vritabledu rcit; cest dire le clivage dans son extension la plus vaste (toi/moi,bruit/silence, douleur/joie). Il sagit de cette plnitude dun amour qui

    trouve son accomplissement dans la mort demande par lun des amants lautre.

    Si toute histoire est histoire des personnages, une analyse approfondiedu rle acatantiel de chacun deux, de leurs fonctions narratives et de leurinteraction semble dune importance considrable. A premire vue, selon lesmodles actantiels prns par A.J. Greimas, il sagit notamment de cetteaction persuasive manant du destinateur (Chauvin dans notre cas) et pro-voquant des effets sur une cible, le destinataire-sujet.

    Communication (= manipulation)

    Destinateur objet (destinataire)

    (sujet manipulateur)

    Sujet

    (sujet oprateur)

    Or, laction du rcit de Moderato Cantabile ne peut tre rduite laqute dun objet, entame par un sujet qui devient destinataire du su-jet-manipulateur, agissant sur laxe du savoir ou de la communication pour

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    initier Anne dans sa qute. Toujours se fondant sur la base de linteractionentre ces deux personnages, on devrait plutt tudier le rle de chacun deuxen partant des trois positions fondamentales proposes par Claude Br-mond. Cela nous permettra dtudier, sans passer par le dtour dun modletrs abstrait, les rles et les modalits assums par chaque personnage. En cesens, Anne Desbaresdes est le patient affect par le processus. Le coupleinconnu est alors lagent qui initie ce processus et Chauvin linfluenceur quiintervient pour former ltat desprit, lattente, lespoir et les craintes du pa-tient.

    Chauvin est donc le personnage dont le point de vue [que nous ne quit-tons jamais] oriente la perspective narrative. Le roman se transforme grce

    au rle actanciel de Chauvin, en un rcit focalisation interne , sappuyantuniquement sur linformation dont dispose ce personnage. Nous remar-quons alors que la figure de ce protagoniste, devenu ainsi une sourcedinformation intradigtique, nest point dcrite. On peut la dduire si nousvoulons.

    En effet, le principe mme de ce mode narratif implique en toute ri-gueur que le personnage focal ne soit jamais dcrit, ni mme dsign delextrieur, et que ses penses ou ses perceptions ne soient jamais analysesobjectivement par le narrateur.

    De sa part, Anne repre les informations narratives qui lui sont transmi-ses par ce personnage servant de point focal. Linformation narrativeconsiste alors en un reflet subjectif de lhistoire, reconstruit partir de la per-ception de Chauvin et de son exprience antrieure. Cest en effet sur sonsavoir, sa perception et sa psychologie que linformation narrative sappuira.

    Ensuite, cest Anne qui entre en jeu car elle va reconstruire un reflet sub-

    jectif de lhistoire telle quelle la peroit travers les suggestions du focalisa-teur. Anne devient ainsi une conscience travers laquelle linformation com-plte son trajet obligatoire du narrateur au lecteur.

    Dans notre cas, le narrateur a choisi de sclipser derrire son person-nage focal afin de mettre en valeur le seul savoir de ce dernier. Laction deluvre repose donc pour lessentiel sur lactivit proprement linguistiquedun locuteur. En ce sens, le dire de Chauvin constitue un acte illocu-tionnaire explicitant la force que ses paroles sont susceptibles de recevoir.Parce que Chauvin parat bien connatre le milieu social do est issue Anneet quil distingue bien ses dsirs refouls et ses intentions voiles, la forceillocutionnaire de son nonc produit sur elle leffet voulu:

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    Dire que L (locuteur) [Chauvin] signifie (veut dire) quelque chose par xquivaut : L entend que lnonciation de x produise un effet sur A (audi-teur) [Anne] grce la reconnaissance de ses intentions. Se trouvent alorsconjointes signification et intentions.

    De plus, les trois conditions circonscrites par Searle pour laccomplis-sement dun acte illocutionnaire, correspondent au cas Chauvin. En premierlieu, Chauvin, tenant de la vrit, est en position dautorit. A cette condi-tion prparatoire se joint alors la condition de sincrit vue que Chauvindsire que lacte ordonn soit accompli. Enfin, le locuteur a lintention,par ce quil dit, damener Anne excuter cet acte. Chauvin accomplit ainsila condition essentielle qui parfait son acte illocutionnaire.

    Cette perspective smiologique nous entrane alors, au-del des rseauxdactions, une analyse des rseaux de significations que refltent le dialoguedes deux interlocuteurs.Cest en fait, dans et par le langage que lhomme seconstitue en sujet.

    Quune absence dhistoire (sur le plan de la fiction)engendre une his-toire dense (sur le plan de lcriture), quau degr zro de laction corres-ponde un sens plein, une marque signifiante de la parole, que lvnement (le

    drame),soit en quelque sorte transfus du monde ordinairement copi (rel,rve ou fiction) au mouvement mme des mots qui fixent ce monde commedes yeux, ce peut tre l le dpart duvres absolument RALISTES.

    Si Duras a excell enchevtrer des situations opposes, entrecroiserdes histoires ambiges, aborder des thmes contradictoires, tels la passionet la mort, bref nuancer cet entrelacement de faits qui devient potique ,cette discontinuit des tres, des mots et des choses se traduit par un langageet une criture formant des contrepoints correspondant avec le clivage qui

    plane sur le rcit;cest--dire une coute imperceptible, mais tenace, des en de des

    mots et des mes, de leurs marges obscures, indfinies, tremblantes, etquelle parvient traduire, dans cette syntaxe dsorganise en apparence,inacheve, presque incorrecte, et qui, cependant, dit mieux que tout les fac-tures, les trous, les dilutions.

    Occupant une position dominante, Chauvin russit transmettre son

    interlocutrice (domine), son message par des procds formels bien dter-mins. Dans ses propos, il use des verbes dits illocutionnaires. Des verbestels ordonner, demander, conseiller qui se rptent souvent, outre lestours impratifs quils utilisent, font de son nonc obligatoirement agen-tif.

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    Le Piano & lenfant:

    ...mon fils joue un peu (...) enfin, on samuse beaucoup avec le piano

    Quoi faire de lenfant? Quoi aire de lenfant, en face de la socit? Cest

    deux intolrables, si vous voulez, lintolrable de lenfant et lintolrable de lasocit. Quoi faire dun enfant / quand on la fait, nest-ce pas? Je croisquen ce moment, partout dans le monde, toute maternit est dramatique.

    Anne & Duras

    Cest vrai, cest bien une douleur dentendre bien jouer, pour moi;quand les gens jouent trs bien, je suis la fois enchante, blouie et au dses-poir.

    Calme et facile, la parole glisse alors de la bouche dAnne. Les petits ver-res de vin servis par la Patronne du caf, dlient sa langue et lentranent surla piste perilleuse o la mnent les propos de son protagoniste. Au fil de sesquestions adresses Chauvin, Mme Anne Desbaresdes cherche lucidernon pas le meurtre mais la passion amoureuse, celle qui a amen les amants prendre la dcision du crime. Les propos de Chauvin, ayant pour fin de

    persuader son interlocutrice, reposent notamment sur largument par ana-logie (a simili). Il sagit de lextrapolation de sa relation avec Anne dans lesliens intimes qui unissait sa victime, le meurtrier. Lisotopie admet alorscomme phore, lamour du couple du caf et comme thme, la relation faireadmettre entre Chauvin et Anne.

    Ce qui est compar, ce sont des rapports (impliquant la prsence dequatre termes) et non deux entits [] Le principe consiste affirmer quea est b ce que c est d.

    Dans ce cas, lanalogie peut tre nonce sous la forme algbrique:

    Chauvin a Anne c

    =

    Le meurtrier b La victime d

    Peu peu il ne sagit plus du meurtre mais de quelque chose qui ne se ditpas, qui jamais nest dfini, qui slabore dans lvolution de la relation entre

    Chauvin et Mme Anne Desbaresdes : le dsir quils ont lun de lautre, le d-sir sexuel et la question de son accomplissement, de son aboutissement, dela jouissance, comme dpossession de ltre, comme perte de soi. Unamour fou, qui ne saccomplit pleinement que dans la mort , les attiredonc lune lautre. Cest alors quinterviennent dans le rcit les arguments

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    fonds sur la logique formelle. vitant de traiter le problme dans sa com-plexit, Chauvin opte pour la partition. Il tente de reconstituer lhistoire ducouple inconnu tape par tape, la ramenant ainsi chacune de ses compo-santes et forant Anne dinduire elle-mme, par lensemble des dtails parsquil avance, la conclusion gnrale. Incapable de contrdire chacune desconclusions partielles, Anne est conduite indubitablement adopter le pointde vue de Chauvin. Ce couple tait uni par une passion envahissante.Or, labipolarit du rcit mane de ce sens profond que donne Duras la passionqui ne trouve son accomplissement que dans la mort.

    En vue demmener son interlocutrice sur le terrain de la contrainte etdaccentuer le caractre persuasif de ses propos, Chauvin a recours soit des

    questions rhtoriques ou questions de style qui ne requirent pas de rponse autrement dit une sorte daffirmation dguise en question soit, unpeu plus tard, des questions suggestives induisant la rponse que doit pro-noncer Anne. Les tours interrogatifs jouent alors un rle subjectif de primeimportance. Chauvin en use incessament afin dengager sa partenaire desaveux complets.Cest chauvin qui mne le jeu, le long des cinq conversa-tions. Cest grce cette stratgie manipulatrice quil guidera Anne vers larponse finale.

    Mais cest notamment sur le concept de la causalit que reposelargumentation de Chauvin. Dabord, cest la cause immdiate de lactemeurtrier, laquelle se rvle par le baiser affol que pose lhomme sur labouche de la femme quil vient de tuer. Or, si cet acte est commis paramour, quelles en sont les causes profondes ou mdiates? Ces amou-reux taient-ils, comme Anne et Chauvin, destins vivre spars pour desraisons sociales? La mort tait-elle lunique voie qui pourrait les unir ja-mais? Aprs avoir entran Anne pour quelques temps sur la piste des causeslointaines de lacte, Chauvin aboutira la cause dite finale. Nos deux inter-locuteurs nenvisagent plus alors une explication, mais le dessein du coupleinconnu.

    Le parce que devient un pour que; autrement dit un phnomnesexplique comme tant le moyen dune fin.

    Au lieu de sintresser aux causes, Anne, sous les pressions de Chauvin,glisse alors vers la consquence de lacte. Cette argumentation dite pragma-

    tique convient le mieux la persuasion. Cest ainsi que Chauvin parvient atteindre son objectif vis, le mme que celui du couple; je veux que voussoyez morte, lance-t-il imprieusement son interlocutrice. Les tours imp-ratifs quil emploie renforce chez le lecteur lide de la souverainet quilexerce sur Anne. laide de formules premptoires telles que : Parlez-moi,

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    parlez-moi encore, dpchez-vous de parler. Continuez,..., il prouve de plusen plus son autorit.

    Face aux pressions de Chauvin, Anne adopte son tour des astuces de

    dfense. ses paroles suggestives, elle rpond par des questions-relais oucontre-questions. Par prudence, ou par crainte, elle rplique son locuteurpar des questions telles que:

    Aux propos persuasifs destins la convaincre, Anne oppose en outreun silence obstin. Moyen de persuasion aussi efficace que les mots,largument du silence occupe une place considrable dans le rcit durassien.Ce procd pousse trop loin la provocation puisquil est un moyen derompre ou de suspendre la communication.

    Par le biais de ces conversations qui abondent en des procdsdargumentation, lauteur de Moderato Cantabile semble rechercher, entreces deux zones antagonistes le dedans dun tre et son dehors ce quiest au cur de lhomme. Elle traque la priphrie du silence, la rgion trem-blante du dsir, (...) le bonheur simple, qut, impossible. Le drame nig-matique que revit Anne nous est alors dpeint en toute minutie et les argu-ments avancs par Chauvin sont une tentative de percer le mystre de la pas-

    sion, de dcouvrir avec un minimum de mots, ce que Duras appelle la vri-t des tnbres.

    Le point de dpart qui dclenchera la parole et frayera la voie au dia-logue est ce cri qui jouerait le rle initiateur et en mme temps nigmatiquedabord que revt la madeleine proustienne. Il clate au beau milieu de laleon de piano, rompant ainsi dune manire secrtement ironique, la petitephrase de la sonatine de Diabelli. Le tempo modr et chantant que le titremme du roman dsigne, est dun coup perturb. Le cri pera tout le rituel

    de la petite ville maintenu par la rumeur de la mer parvenant de loin et celledes hommes sortant des usines et passant par le caf en face de limmeubleo mademoiselle Giraud donne ses leons.

    Nul doute que tout cela reprsente pour Anne la brusque rvlationdun autre univers que celui o se droule sa vie ordinaire, un univers dontelle gardera dsormais linoubliable nostalgie.

    Ds ce cri et son arrt soudain, Anne sinterroge sur labsolu destructeur

    de la passion; et le couple prsent sexaltera lvocation du couple pass. Lecri ntait dailleurs pas celui dune femme qui subit la violence dun crime.Lassassin lui-mme, indiffrent la prsence de la foule, a des posturesamoureuses lgard du cadavre de sa matresse. Le cri de la femme tueprend alors tout son sens: jouissance et dpossession, confondues avec la

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    mise mort. Cest autour de ce double tempo simultan, celui du quotidien,celui de la tragdie , que tourne laction du rcit.

    Une technique particulire, usant du mode rptitif est sans doute lun

    des procds dargumentation quadoptent la fois le protagoniste et soninterlocutrice.

    Lcole du Nouveau Roman a t assez friande de ce procd quibrouille leffet de rel, insiste sur la perception et situe lintrt de la lecturedans les dplacements parfois minimes que lcriture introduit dans la rpti-tion.

    Le texte de Moderato Cantabile raconte n fois lincident qui sest pass

    une seule fois dans la fiction. Mais, il est voqu diffremment selon le pointde vue de chaque personnage. De sa part, Anne essaie tout prix dluciderle mystre qui fait de la perte de soi, une vritable jouissance. Desvoyez-vous insistant et sollicitant son partenaire sont repris dans la bonnepartie de ses rpliques. En mme temps, elle tente de fuir les pressions deson protagoniste. Elle mentit nous dit-on; elle mentit de nouveau Audbut de leur conversation, cest un refus obstin qui se rvle par la rpti-tion de certains termes chers Duras. Les termes rien, peut-tre, vie,

    mort, peur, silence(s), sont repris tour tour soit par linterlocutrice,le narrateur ou le protagoniste.

    Mais, lattitude obstine quadopte Anne se transforme petit petit,peut-tre avec livresse due la consommation itrative et inhabituelle de vinrouge. Cette transformation graduelle parat clairement dans ses propos, aucours des rencontres suivantes. Marqu maintes reprises domissions, sondiscours devient de plus en plus drout. Cest alors quapparat le plus clai-rement cette aptitude dont est doue notre auteur Notre-Dame-des-Mots,

    Notre-Dame-du-Silence, du balbutiement confus que fait le silence. Letrouble dAnne est rendu illustre par sa prdilection pour le silence et sonimpuissance face aux propos laconiques, allusifs, chargs de sous-entendusque lui lance son soupirant. Elle glisse alors inconsciemment du couple pas-s la rencontre actuelle.

    Au fur et mesure quAnne et Chauvin sefforcent de reconstituerlhistoire du couple pass, des similitudes de plus en plus nombreuses appa-raissent entre ce couple et eux-mmes.

    Or, une application de la catgorie nouvelle de transformation narra-tive introduite dans lanalyse du rcit par Todorov semble ici indispensable.Une relation troite lie le prdicat de base, dans le rcit durassien, au prdicattransform. Les transformations qui soprent alors dans lme dAnne do-

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    minent et dterminent le droulement linaire du rcit. Cest ainsi queChauvin passe de la tentative de reconstitution une invention hypothtiquede ce qui a pu conduire les deux amants couronner leur passion dans lesang. Il sagit notamment de transformations de subjectivation, o il ex-ploite, par la suite, le prdicat du meurtre et le relie ltat dAnne, sans queces deux prdicats puissent sidentifier. Il parvient alors suggrer son in-terlocutrice son point de vue.

    Chauvin, qui mne le jeu la plupart du temps, sarrange pour faire d-vier la conversation du couple inconnu la personne mme dAnne, sonpass, sa vie prsente.

    Les transformations de subjectivation permettent son discours

    dacqurir un sens sans que celui-ci devienne pure information. Selon To-dorov, de telles transformations doivent toujours se rfrer des actionsdnotes par les verbes croire, penser, avoir limpression, considrer, etc.Ce sous-ensemble de verbes est aisment reprables dans les paroles deChauvin.

    Chauvin utilise aussi les figures, lments qui visent directement le r-cepteur pour agir sur lui en vue de pousser son interlocutrice adopter son

    point de vue et la forcer avouer sa passion.Les figures de pense, ainsi caractrises par lcart entre la pense

    dite et la pense vraie.

    les signifis en relation de substitution dans la mtaphore et la mto-nymie

    Parmi les figures danalogie, le discours de Chauvin use de mtaphoreset des comparaisons o, en opposition avec la mtaphore, il ny a pas seule-

    ment le comparant et le compar mais aussi le modalisateur comparatif.Comme nous lavons bien vu, le rcit de Moderato Cantabile, se d-

    roulant en quelques jours, la mme heure, dans ladmirable prsence dusoleil couchant, constitue au fond une reprsentation aussi intense que vive,dun adultre virtuel glissant dune passion fatale, ne dans une premirerencontre, la mort ardemment souhaite. Serait-ce une simple analyse psy-chologique pareille celle o excellaient les traditionalistes? Ou par contre,sagit-il dune recherche formelle et technique sloignant de toute intrigue

    lexemple des nouveaux romanciers? Par son rcit original, Marguerite Du-ras sloigne en toute vidence de la psychologie traditionnelle trop expliciteusant des dialogues et des scnes vcus pour aboutir des conclusions quine seront que suggres. Ayant allg luvre de tout ce qui est description,analyse, discours, au profit dun art souverain de la suggestion, elle en fait

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    Liliane AYAD

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    une pice dart unique. Mais, il reste souligner que si elle participe au re-nouvellement du roman, elle refuse de se plier aux tendances strictementformelles, en vogue lors de la publication de luvre. Par le droulementlinaire, lintrigue cohrente et simple, la progression naturelle de la narra-tion, son rcit, loin de dconcerter le lecteur, lentrane sans peine, dcelerson contenu humain. Modr et chantant, tel est le mouvement mme durcit associant, sans affectation aucune, lextrieur lintrieur et dessinantainsi tape par tape, la progression vidente et irrsistible dune passion.Pointillistes et heurts, les dialogues servent alors jouer le rle dun rideau labri duquel mrit peu peu, la vrit du sentiment. Duras possdelaptitude de donner une prsence trs sensible aux personnages comme au

    dcor et latmosphre. Cest cette uvre particulire qui a fait loriginalitde ses crits:

    ...ce que je raconte dans Moderato Cantabile, cette femme qui veut tretue, je lai vcu... et partir de l les livres ont chang (...) je pense que letournant, le virage vers... vers la sincrit sest produit l.

    cest ce mlange inimitable de sensualit et de rigueur, de distance et desaisie brutale qui la spare des terres glaces du nouveau roman

    Cet aperu succint tout en pointant loriginalit de lesprit durassien nenous rappelle-t-il pas la phrase clbre de Jean-Jacques Rousseau:

    Lecteurs vulgaires, pardonnez-moi mes paradoxes: il en faut fairequand on rflchit; et, quoi que vous puissiez dire, jaime mieux tre homme paradoxes quhomme prjugs? (mile, livre second)

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