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8 22 AVRIL 2005 Vigne et vin Côteaux du Loir Renaud signe ses premiers vins Son jeune domaine est une belle mosaïque de vignes cosmopolites étendue entre le Loir, l’Escotais et le Long où petit à petit, Renaud apprend son métier de vigneron. Originaire de Vendôme, Renaud Guettier a finalement choisi sa voie après pas mal d’années d’études et de voyages. En spécialiste de la physiologie des plantes, il sait que tout commence par le sol. Il faut réveiller la terre endor- mie, parfois intoxiquée et inerte en la grattant, les pre- mières années doucement puis de plus en plus profond pour redonner l’envie aux racines de plonger. Un coup d’œil à la flore qui repousse spontanément suffit pour savoir si le sol est vivant ou bien amorphe. Il faut agir vite mais avec doigté et du vieux matériel récupéré, adapté grâce à la complicité d’un beau-père bricoleur. La vélo- cité est de rigueur pour culti- ver des grandes mères sculp- tées par le temps, dépassant parfois les 80 printemps. Ici, il y a de tout mais certains ter- roirs sont exceptionnels par la qualité de leur sol et par leur exposition. Quelques unes ont fière allure comme celle-ci dans son lit jaune de dents de lion fleuries avec ces beaux ceps à quatre têtes, taillée à « amets », le nom local du courçon. La modernité vitico- le n’est pas passée partout ici, c’est la chance des terroirs délaissés, des trésors séjour- nent encore. Certains vignes pentues gardent en mémoire le pas du cheval. Elles n’ont pas connu le tracteur. Qu’il s’agisse de pineau d’Aunis ou de chenin, la recette de base est la même. Le vigneron est là pour initier la rencontre de la vigne et de son terroir minéral profond. C’est une sorte d’entremetteur manœu- vrant avec dessein pour récol- ter de beaux raisins mûrs. «Si l’on s’emploie à maîtriser le ren- dement et que l’on récolte une vendange saine alors on peut se passer de pas mal de pharmacie Lycée viticole d’Amboise Démonstration de matériel le 29 avril Dans le but d’améliorer la formation à la conduite des tracteurs, le conseil d?admi- nistration du Lycée viticole d’AMBOISE a retenu pour 2005, le projet d’acquisition d’un tracteur enjambeur école . « Dans le même temps nous avions étudié les projets et solutions proposés par les constructeurs. Nous organisons le vendredi 29 avril une démonstration de matériel viti- cole au cours de laquelle seront présentés : un tracteur enjam- beur école, qui fonctionne dans une autre région à la satisfac- tion de ses acquéreurs depuis plusieurs mois . des matériels de travail et d’entretien des sols sur d’autres tracteurs » relate Bernard Deschamps, le provi- seur du lycée. Les viticulteurs sont conviés, l’après-midi à partir de 14h00 dans les vignes autour du lycée (fin prévue vers 17h). La séquence minimale de démons- tration du tracteur école dure environ une demi heure , et que celle de présentation des autres matériels de travail et d’entretien des sols dure une demi heure également: plusieurs séquences successives auront lieu. œnologique. Après, le reste s’en- clenche naturellement presque tout seul » explique sûr de lui, malgré sa récente expérience le jeune vigneron. « Débourber sans enzymes, ça marche très bien, attendre le déclenchement naturel des fermentations sans levures, c’est possible »OBJECTIF : QUALITÉ DU VIN ET COMPLÉMENTARITÉ DES PRODUCTIONS Renaud n’est pas du milieu viticole. Il apprend à son ryth- me avec l’avantage des novices. Il travaille allégé du poids des habitudes, sans a priori, se fiant à son bon sens, à ses connaissances acquises en stage, à la fac de bio ou à l’Enita de Dijon tout en engrangeant l’expérience des bons vignerons qu’il ren- contre. La dégustation de ses premières cuvées montre qu’il apprend vite. Les millésimes en devenir sont en barriques de trois vins achetées en Bourgogne. Les raisins appor- tés jusqu’au chai en caisse rencontreront peu le soufre durant leur cheminement qui durera de 18 à 24 mois. « Du SO2, j’en verserai à la mise, très peu, pour qu’il soit absorbé tout de suite, juste pour que le vin conserve la mémoire du soufre ». En attendant, les chenins encore en fermentation sont fins, aromatiques et structu- rés. Les rouges encore diffi- ciles à apprécier sont encore dominés par des arômes fer- mentaires réduits mais pré- sentent de la matière, des tanins solides sans être agres- sifs et des teintes de bon augure. Vallée du Loir oblige, le vigneron attend beaucoup d’un assemblage pineau d’Aunis doté d’une pointe de grolleau. Un vin qui n’inon- derait pas les narines des saveurs caractéristiques de poivre noir. Un cru davanta- ge marqué par le terroir livrant discrètement la sil- houette de ses cépages. « Certains de nos vins mérite- raient une mise en bouteille dès maintenant mais je ne suis pas équipé pour la mise, j’attendrai donc l’achèvement des fermen- tations sur les chenins pour déplacer un embouteilleur » . Pour l’instant Renaud règne sur un domaine parsemé, trois hectares et demi de vignes en Sarthe à Dissay- sous-Courcillon et St Pierre de Chevillé mais aussi à Bueil-en-Touraine, Epeigné- sur-Dême. L’idéal serait de regrouper un peu le parcellai- re autour de Bueil-en- Touraine et ne pas dépasser sept ou huit hectares, pas plus pour avoir le temps de rester un vigneron à taille humaine, de cultiver la vigne, de vinifier et de bien vendre son vin. L’objectif n’est pas la spéciali- sation viticole mais plutôt l’harmonie entre productions. Avec Elodie, sa compagne, actuellement à l’INRA, le projet est de s’installer sur l’exploitation familiale que Rémi Tondereau, son beau père, a conservé en polycultu- re élevage. « Avec le découplage imposé par la nouvelle PAC, chaque parcelle retournera à terme à sa vocation agrono- mique, du fourrage destiné à l’engraissement de génisses sur les terres humides, des grandes cultures dans les champs pro- fonds et bien drainés et enfin de la vigne pour les sols pauvres mais bien orientés ». Renaud Guettier s’installe avec un projet modeste pour avoir le temps de rester vigneron à taille humaine, cultiver la vigne, vinifier et bien vendre son vin. Les viticulteurs sont conviés, l’après-midi à partir de 14h00 dans les vignes autour du lycée

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Page 1: Vigne et vin Côteaux du Loir Renaud signe ses premiers vins · Vigne et vin Côteaux du Loir Renaud signe ses premiers vins Son jeune domaine est une belle mosaïque de vignes cosmopolites

8 22 AVRIL 2005

Vigne et vinCôteaux du Loir

Renaud signe ses premiers vinsSon jeune domaine est unebelle mosaïque de vignescosmopolites étendueentre le Loir, l’Escotais etle Long où petit à petit,Renaud apprend sonmétier de vigneron.

� Originaire de Vendôme,Renaud Guettier a finalementchoisi sa voie après pas mald’années d’études et devoyages. En spécialiste de laphysiologie des plantes, il saitque tout commence par le sol.Il faut réveiller la terre endor-mie, parfois intoxiquée etinerte en la grattant, les pre-mières années doucementpuis de plus en plus profondpour redonner l’envie auxracines de plonger. Un coupd’œil à la flore qui repoussespontanément suffit poursavoir si le sol est vivant oubien amorphe. Il faut agir vitemais avec doigté et du vieuxmatériel récupéré, adaptégrâce à la complicité d’unbeau-père bricoleur. La vélo-

cité est de rigueur pour culti-ver des grandes mères sculp-tées par le temps, dépassantparfois les 80 printemps. Ici, ily a de tout mais certains ter-roirs sont exceptionnels par laqualité de leur sol et par leurexposition. Quelques unes ontfière allure comme celle-cidans son lit jaune de dents delion fleuries avec ces beauxceps à quatre têtes, taillée à« amets », le nom local ducourçon. La modernité vitico-le n’est pas passée partout ici,c’est la chance des terroirsdélaissés, des trésors séjour-nent encore. Certains vignespentues gardent en mémoirele pas du cheval. Elles n’ontpas connu le tracteur. Qu’ils’agisse de pineau d’Aunis oude chenin, la recette de baseest la même. Le vigneron estlà pour initier la rencontre dela vigne et de son terroirminéral profond. C’est unesorte d’entremetteur manœu-vrant avec dessein pour récol-ter de beaux raisins mûrs. « Sil’on s’emploie à maîtriser le ren-dement et que l’on récolte unevendange saine alors on peut sepasser de pas mal de pharmacie

Lycée viticole d’Amboise

Démonstration de matériel le 29 avril� Dans le but d’améliorer laformation à la conduite destracteurs, le conseil d?admi-nistration du Lycée viticoled’AMBOISE a retenu pour2005, le projet d’acquisitiond’un tracteur enjambeurécole . « Dans le même tempsnous avions étudié les projets etsolutions proposés par lesconstructeurs. Nous organisons

le vendredi 29 avril unedémonstration de matériel viti-cole au cours de laquelle serontprésentés : un tracteur enjam-beur école, qui fonctionne dansune autre région à la satisfac-tion de ses acquéreurs depuisplusieurs mois . des matériels detravail et d’entretien des sols surd’autres tracteurs » relateBernard Deschamps, le provi-seur du lycée.

Les viticulteurs sont conviés,l’après-midi à partir de 14h00dans les vignes autour du lycée(fin prévue vers 17h). Laséquence minimale de démons-tration du tracteur école dureenviron une demi heure , et quecelle de présentation des autresmatériels de travail et d’entretiendes sols dure une demi heureégalement: plusieurs séquencessuccessives auront lieu.

œnologique. Après, le reste s’en-clenche naturellement presque

tout seul » explique sûr de lui,malgré sa récente expériencele jeune vigneron. « Débourbersans enzymes, ça marche trèsbien, attendre le déclenchementnaturel des fermentations sanslevures, c’est possible »…

OBJECTIF : QUALITÉ DU VIN ETCOMPLÉMENTARITÉ DESPRODUCTIONS

Renaud n’est pas du milieuviticole. Il apprend à son ryth-me avec l’avantage desnovices. Il travaille allégé dupoids des habitudes, sans apriori, se fiant à son bon sens,à ses connaissances acquisesen stage, à la fac de bio ou àl’Enita de Dijon tout enengrangeant l’expérience desbons vignerons qu’il ren-contre. La dégustation de sespremières cuvées montre qu’ilapprend vite. Les millésimesen devenir sont en barriquesde trois vins achetées enBourgogne. Les raisins appor-tés jusqu’au chai en caisserencontreront peu le soufredurant leur cheminement quidurera de 18 à 24 mois. « DuSO2, j’en verserai à la mise, trèspeu, pour qu’il soit absorbé toutde suite, juste pour que le vinconserve la mémoire du soufre ».En attendant, les cheninsencore en fermentation sontfins, aromatiques et structu-rés. Les rouges encore diffi-ciles à apprécier sont encoredominés par des arômes fer-mentaires réduits mais pré-sentent de la matière, destanins solides sans être agres-sifs et des teintes de bonaugure. Vallée du Loir oblige,le vigneron attend beaucoupd’un assemblage pineaud’Aunis doté d’une pointe de

grolleau. Un vin qui n’inon-derait pas les narines dessaveurs caractéristiques depoivre noir. Un cru davanta-ge marqué par le terroirlivrant discrètement la sil-houette de ses cépages.« Certains de nos vins mérite-raient une mise en bouteille dèsmaintenant mais je ne suis paséquipé pour la mise, j’attendraidonc l’achèvement des fermen-tations sur les chenins pourdéplacer un embouteilleur ».Pour l’instant Renaud règnesur un domaine parsemé,trois hectares et demi devignes en Sarthe à Dissay-sous-Courcillon et St Pierrede Chevillé mais aussi àBueil-en-Touraine, Epeigné-sur-Dême. L’idéal serait deregrouper un peu le parcellai-re autour de Bueil-en-Touraine et ne pas dépassersept ou huit hectares, pas pluspour avoir le temps de resterun vigneron à taille humaine,de cultiver la vigne, de vinifieret de bien vendre son vin.L’objectif n’est pas la spéciali-sation viticole mais plutôtl’harmonie entre productions.Avec Elodie, sa compagne,actuellement à l’INRA, leprojet est de s’installer surl’exploitation familiale queRémi Tondereau, son beaupère, a conservé en polycultu-re élevage. « Avec le découplageimposé par la nouvelle PAC,chaque parcelle retournera àterme à sa vocation agrono-mique, du fourrage destiné àl’engraissement de génisses surles terres humides, des grandescultures dans les champs pro-fonds et bien drainés et enfin dela vigne pour les sols pauvresmais bien orientés ».

Renaud Guettier s’installe avec un projet modeste pour avoir le temps de rester vigneron à taille humaine,cultiver la vigne, vinifier et bien vendre son vin.

Les viticulteurs sont conviés, l’après-midi à partir de 14h00 dans les vignes autour du lycée