86
1 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une exposition proposée par l’Académie des sciences en partenariat avec la Conférence des directeurs des instituts universitaires de formation des maîtres (CDIUFM), l’Institut national de recherche pédagogique (INRP) et son Musée national de l’éducation, l’IUFM de l’académie de Versailles, le Palais de la découverte, le SCÉRÉN (Services culture éditions ressources pour l’éducation nationale) [CNDP]. Commissariat Béatrice Ajchenbaum-Boffety (communication pédagogique, Académie des sciences), Pierre Kahn (IUFM de l’académie de Versailles) pour les sections I et II, Pierre Léna (Académie des sciences) pour la section III. Comité scientifique présidé par Pierre Kahn Thérèse Charmasson (Centre de recherche en histoire des sciences et des techniques, Cité des sciences et de l’industrie), Jeannine Deunff (Inspection générale de l’éduca- tion nationale et INRP), Pierre Fontes (IUFM de l’académie de Versailles), Ségolène Le Men (École normale supérieure de Paris), Édith Saltiel (INRP - La main à la pâte), Gérard Torchet (IUFM de l’académie de Versailles). Graphisme Studio Rousseau - Dominique Giroudeau Réalisation technique Atelier de graphisme du Palais de la découverte Coordination Béatrice Ajchenbaum-Boffety

Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

  • Upload
    others

  • View
    3

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

1

Sciences à l’école :quelle histoire !

Une exposition proposée par l’Académie des sciences en partenariat avec la Conférence des directeurs

des instituts universitaires de formation des maîtres (CDIUFM), l’Institut national de recherche pédagogique

(INRP) et son Musée national de l’éducation, l’IUFM de l’académie de Versailles, le Palais de la découverte, le SCÉRÉN (Services culture éditions ressources pour

l’éducation nationale) [CNDP].

CommissariatBéatrice Ajchenbaum-Boffety (communication pédagogique, Académie des sciences),

Pierre Kahn (IUFM de l’académie de Versailles) pour les sections I et II,Pierre Léna (Académie des sciences) pour la section III.

Comité scientifi que présidé par Pierre KahnThérèse Charmasson (Centre de recherche en histoire des sciences et des techniques, Cité des sciences et de l’industrie), Jeannine Deunff (Inspection générale de l’éduca-tion nationale et INRP), Pierre Fontes (IUFM de l’académie de Versailles), Ségolène Le Men (École normale supérieure de Paris), Édith Saltiel (INRP - La main à la pâte), Gérard Torchet (IUFM de l’académie de Versailles).

GraphismeStudio Rousseau - Dominique Giroudeau

Réalisation techniqueAtelier de graphisme du Palais de la découverte

CoordinationBéatrice Ajchenbaum-Boffety

Page 2: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

2

Principales sources iconographiques Archives de l’Académie des sciences, Association nationale Les Petits Débrouillards, association Science Technologie Société (ASTS), Bayard Presse, Bibliothèque du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), Cité des sciences et de l’industrie de La Villette, Centre d’entraînement aux méthodes d’éducation active (CÉMÉA), Comité de liaison enseignants - astronomes (CLEA), Centre historique des Archives nationales, Cinémathèque Robert-Lynen de la Ville de Paris, collection privée Jeannine Deunff, collection privée Pierre Fontes, collection privée Henri Georges, collection privée Jean-Charles Rousseau, Conservatoire de l’éducation et des méthodes pédagogiques de Niort (donation Francis Gires), École des sciences de Bergerac, École supérieure de physique et chimie industrielles de la Ville de Paris (ESPCI), Graine de chimiste, La Hulotte, La main à la pâte, Musée national de l’éducation, Observatoire de Paris, Palais de la découverte, Planète Sciences, Réunion des musées nationaux (RMN), SCÉRÉN, UNESCO.

Photographies de Brigitte Eymann,photographies et dessins de Dominique Giroudeau.

RemerciementsJean Audouze, Francine Best, Diileep Bhagwut (section de l’enseignement scientifi que et technologique, UNESCO), Laurence Bobis (Observatoire de Paris), Annette Bon (INRP), Henri Chamoux (INRP), Annie Chassagne (Institut de France), François Chevalérias (Inspection de l’éducation nationale), Patrice de Cormeille (Président de la Société Paul Bert), Goery Delacote (The Center for Informal Learning and Schools, Exploratorium de San Francisco), Christiane Demeulenaere-Douyère (Archives nationales), Renaud d’Enfert (IUFM de l’Académie de Versailles), Jean Denis (DESCO), Catherine Dorison, Henri Georges, André Giordan (Laboratoire de didactique et épistémologie des sciences, Université de Genève), Francis Gires, Mireille Hartmann-Hibon, Bertrand Hervo (Éditions Ouest France), Jean-Michel Host, Nicole Hulin (Centre Alexandre Koyré), Boutaïeb Kaddani (Cité des sciences et de l’industrie), Nelly Kuntzmann, Jacqueline Lalouette (Université Paris XIII), Joël Lebeaume (Science, technique, éducation et formation, ENS de Cachan), Dominique Lerch, Jean- Louis Martinand (Science, technique, éducation et formation, ENS de Cachan), Bernard Monthubert (Institut coopératif de l’école moderne - ICEM - pédagogie Freinet), Béatrice de Pastre-Robert (Cinémathèque Robert- Lynen de la Ville de Paris), Henri Portier (ICEM, pédagogie Freinet), Annie Renonciat (Université Paris VII et Centre d’étude de l’écriture et de l’image), Brigitte Rozet (CNAM), Jean-Pierre Sarmant (IGEN) Blandine Savrda (Cité des sciences et de l’Industrie), Françoise Saghaar-Bessière (Musée départemental de l’éducation, Saint-Ouen-l’Aumône), Monique Sicard, Suzanne Soupizet, Andrée Tiberghien (CNRS, ENS lettres et sciences humaines, Université Lyon II), Hervé Tugaut (Musée national de l’éducation), Dominique Vitale (Muséum national d’histoire naturelle), Pierre Weibel (Service national des productions audiovisuelles, SCÉRÉN [CNDP]),

ainsi que Jean-Marie Bouchard, Brice Goineau, Marc Jamous,David Jasmin, Claudine Larcher, Jocelyne Reboul,

Nicolas Poussielgue, François Vergne(équipe de La main à la pâte).

Page 3: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

3

Sciences à l’école :quelle histoire !Une suite de 27 panneaux

• 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté) de présentation générale de l’exposition Sciences à l’école : quelle histoire ! ; et 4 x 1 panneau récapitulatif ouvrant chaque section. Non numéroté, chacun de ces 4 panneaux, dont la partie inférieure est illustrée par une frise, comporte le titre de la section.

• 1833-1960 De la leçon de choses à la leçon de sciences– 1833-1920 : Naissance d’un mythe (7 panneaux)– 1920-1960 : Dynamique de la routine (5 panneaux)

• 1960-1995 L’Éveil et ses suites : Un espoir déçu (5 panneaux)

• 1995-2004 La main à la pâte et la rénovation : Un nouveau départ (5 panneaux)

DE LA LEÇON DE CHOSES

À LA LEÇON DE SCIENCES

Naissance d’un mythe1833-1920

I. 1 Manières d’instruireLeçon de choses, leçon de tout

I. 2 Manières d’instruireLeçon de choses, leçon de sciences

I. 3 Ambitions et intentions Un enseignement utile

I. 4 Ambitions et intentions La vertu éducative de la science

I. 5 La science à votre portée La cause du peuple

I. 6 La science à votre portéeEn sortant de l’école

I. 7 La science en majestéTriomphe du progrès

Dynamique de la routine1920-1960

I. 8 Prescriptions et usagesL’épreuve du réel

I. 9 La leçon de choses contre la leçon de chosesLes sciences chez Freinet

I. 10 Sciences des fi lles, sciences des garçons (1880-1950)Identités et disparités

I. 11 Les images et leurs usages (1880-1940)L’enseignement par l’aspect

I. 12 Les images et leurs usages (1880-1940)Les sciences à l’écran

Page 4: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

4

L’ÉVEIL ET SES SUITES Un espoir déçu

1960-1995

II. 1 L’Éveil contre la leçon de chosesUne démarche nouvelle

II. 2 L’Éveil et les sciencesQuelle place pour les sciences ?

II. 3 L’Éveil et les sciencesUn paysage en mutation

II. 4 Au lendemain de l’ÉveilLes sciences en sommeil

II. 5 Au lendemain de l’ÉveilL’éducation informelle

La main à la pâte ET LA RÉNOVATION Un nouveau départ

1995-2004

III. 1 Une histoire d’histoiresLa croisée des chemins

III. 2 Quoi de neuf ?10 principes

III. 3 Quoi de neuf ?Tous en scène

III. 4 Faire écoleModèle adaptable, modèle exportable

III. 5 Sciences et éducationUn enjeu planétaire

Page 5: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

5

Pourquoi une exposition sur l’histoire de l’enseignement des sciences à l’école primaire ?

Ce projet a pris naissance dans un contexte particulier, marqué par un intérêt nouveau de la communauté scientifi que, un peu partout dans le monde, pour l’état médiocre et la nécessaire rénovation de l’éducation scientifi que élémentaire. En France, l’Académie des sciences s’est souciée dès 1996 de la place, de la nature et des formes de celle-ci et a su mobiliser la puissance publique, en focalisant l’effort sur les sciences d’observation et d’expérimentation, à côté d’autres actions portant sur les mathématiques. La rénovation importante que La main à la pâte et, à sa suite, le Plan de rénovation des sciences et des technologies à l’école (PRESTE) ont voulu impulser dans ce domaine en est le résultat.

L’ambition de cette exposition, destinée en priorité aux formateurs et aux en-seignants, est d’accompagner la dynamique de rénovation de l’enseignement des sciences engagée à l’école primaire depuis quelques années en l’inscrivant dans une histoire bicentenaire. En effet, les mutations de la société, la place dévolue aux sciences, celle qu’occupe l’école, les transformations internes au système scolaire et celles qui affectent l’enseignement scientifi que s’enchevêtrent aujourd’hui, suscitant confusions et malentendus qui brouillent jusqu’à la mémoire des pratiques. L’exemple de la leçon de choses, ou, mieux, des leçons de choses, est ici emblématique : leur défi nition implicite et supposée communément partagée vole en effet en éclats lors-qu’on y regarde de plus près : est-elle leçon sur les choses ou par les choses, leçon de tout ou seulement leçon de sciences, pédagogie traditionnelle ou active ? La main à la pâte n’en serait-elle qu’une métamorphose ? Il s’agit donc d’identifi er des spécifi cités et des continuités que la succession des réformes a tendance à masquer au profi t de deux représentations diamétralement opposées : l’idée que tout change tout le temps, d’un côté, et l’idée que rien ne change ou que tout se répète, de l’autre.

L’école primaire n’est plus ce qu’elle fut jusqu’au début des années 1960 : l’école du peuple, séparée d’un secondaire réservé aux enfants de la bourgeoisie et que les élèves de la « communale » ne fréquentaient qu’exceptionnellement. Il a ainsi fallu attendre la Cinquième République pour voir enfi n l’école s’unifi er et passer d’une organisation en ordres d’enseignements séparés à une organisation en degrés.

L’école primaire est désormais devenue le premier moment commun d’une sco-larité qui s’impose à tous les enfants jusqu’à 16 ans, et sa vocation est de préparer à l’entrée en 6e. Pourtant, elle garde quelques-unes de ses spécifi cités historiques, à commencer par celle-ci : ce sont des maîtres polyvalents, et non des spécialistes différenciés par matière, qui y enseignent. L’enseignement des sciences d’expérimen-tation et d’observation y a donc une identité disciplinaire moins marquée que son ho-mologue du second degré. Intitulé aujourd’hui « Sciences et technologie », il semble peu se préoccuper de faire savoir aux élèves qu’ils font de la physique, de la biologie ou de la technologie : l’essentiel est de construire une culture scientifi que générale, et

Page 6: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

6

même, plus fondamentalement encore, un « sens » scientifi que, fait d’esprit critique et expérimental. Telle est en tout cas la philosophie de la rénovation actuelle.

N’est-ce pas précisément ce sens scientifi que qui fait encore si souvent défaut à l’entrée en 6e, lorsque les élèves sont soumis aux contraintes de l’apprentissage plus académique de savoirs disciplinaires dont il n’est pas sûr qu’ils aient toujours le temps ou l’occasion de saisir la signifi cation ? Le moment primaire reste donc un moment privilégié pour ce que le philosophe Gaston Bachelard appelait une « for-mation de l’esprit scientifi que ». Les sciences à l’école primaire ont ce projet propre, que leur histoire permet de mettre en perspective, avec ses ruptures éclatantes et ses continuités plus secrètes, tant il est vrai qu’elles sont à la fois fi lles de leur temps et fi lles de leur mère.

Quelle organisation ? Une présentation à la fois chronologique et thématique s’est rapidement imposée :

les trois grandes sections de l’exposition correspondent aux trois modèles pédagogi-ques dominants qui se sont succédé de 1833 (loi Guizot) à nos jours.

Les deux premières sections ont été confi ées à un même commissaire (Pierre Kahn). La troisième, quant à elle, relève directement de l’Académie des sciences. Nous avons voulu, par cette division des tâches et des responsabilités, marquer net-tement la différence entre la partie proprement historique et l’actualité de l’enseigne-ment des sciences expérimentales et d’observation à l’école primaire.

Chaque section est précédée d’un panneau synoptique qui précise l’intention générale de la partie, le dispositif institutionnel et des dates marquantes en matière d’histoire de l’école et d’histoire politique. Le découpage interne de chaque section permet d’explorer différents thèmes. Les transformations de l’enseignement des sciences ne peuvent en effet se comprendre en-dehors des transformations propres à l’école qui, elles-mêmes, doivent être rapportées aux transformations de la société. Aussi les manières d’instruire, leurs ambitions et leurs variations pratiques ont-elles été mises en relation avec les contextes économique, institutionnel, idéologique et culturel qui en infl échissent le sens et en expliquent l’inégal succès.

On pourra s’étonner, peut-être, de ne rencontrer aucune référence à l’histoire des sciences dans cette exposition. Mais nous ne pouvons que constater l’étanchéité en-tre les sciences vivantes d’une part, leur enseignement d’autre part, et prendre acte du faible impact de l’actualité scientifi que sur les programmes - du moins au regard de l’observation courante : il s’agit en effet là de sujets que la recherche n’a pas ou n’a que fort peu explorés jusqu’alors. Mettre en regard l’histoire de l’enseignement des sciences à l’école primaire et l’histoire des sciences pouvait donc induire des corrélations entre ces domaines que rien, de fait, ne justifi e. On est tenté d’ajouter : « malheureusement ».

Page 7: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

7

1ère sectionDe la leçon de choses à la leçon de sciences, 1833-1969

Cette section est elle-même divisée en deux moments distincts : 1833-1920 et 1920-1960. La première période (1833-1920) représente « l’âge de la conquête » : le mouvement, limité au début, et plein encore de réticences, puis de plus en plus affi rmé pour culminer avec les grandes réformes républicaines, conduit les sciences à devenir, sinon le principal enseignement de l’école primaire (ce qu’il n’a jamais été), du moins l’un des plus représentatifs des espoirs affi chés par le « nouveau régime » scolaire annoncé par Jules Ferry.

Trois facteurs se conjuguent pour donner son essor à ce mouvement. – L’institutionnalisation d’un enseignement primaire dépendant de l’État. La loi

Guizot (1833) a été la première à opérer cette institutionnalisation, et c’est la raison pour laquelle elle constitue le premier moment de notre chronologie. Non qu’il n’y ait pas eu d’enseignement primaire en France avant Guizot, mais il était laissé soit à l’initiative communale, soit aux congrégations enseignantes (notamment l’Institut des Frères des écoles chrétiennes, fondé par Jean-Baptiste de la Salle à la fi n du XVIIe siècle). Certes, l’enseignement des sciences n’a pas une grande place dans les programmes prévus par la loi Guizot : les sciences ne seront enseignées que dans les écoles primaires supérieures, enseignement intermédiaire créé par Guizot pour combler le fossé existant entre un secondaire réservé aux élites sociales et l’école du peuple qu’est l’école primaire élémentaire. Mais s’amorce ici un processus de sco-larisation qui sera continûment croissant tout au long du XIXe siècle et qui va voir les enseignements de l’école primaire progressivement s’étoffer et se diversifi er. En 1882, quand l’école deviendra obligatoire, il apparaîtra avec la force de l’évidence que des éléments de sciences physiques et naturelles doivent être enseignés à tous les petits Français, dès le début de leur scolarité. Mais c’est une évidence qui, de la loi Guizot aux lois Ferry, a mis cinquante ans à s’imposer : les leçons de sciences ne sont pas une pratique immémoriale de l’enseignement primaire.

– Le deuxième facteur dont le développement de l’enseignement scientifi que, au XIXe siècle, va bénéfi cier, est à la fois social et culturel : c’est le prestige que la science acquiert de plus en plus dans un monde où l’idée de progrès est en passe de devenir un véritable mythe. Le « scientisme », ce culte de la science si caractéristique des sociétés industrielles du XIXe siècle, va constituer une justifi cation supplémen-taire et forte de l’intérêt d’un enseignement scientifi que élémentaire, qui ne doit pas être seulement un enseignement des résultats principaux ou fondamentaux de la science, ni même de ses méthodes, mais aussi de ses valeurs. Comme le note Jean Hébrard1, évoquant la période de la IIIe République : « Plus rapidement que le collège ou le lycée, le primaire devient le lieu d’une célébration des valeurs rationnelles, des sciences et des techniques, de l’effi cacité des savoirs, bref, de la modernité. Elle s’oppose tout à la fois à l’archaïsme du milieu rural dans lequel elle est immergée et à l’esthétisme qui prévaut alors dans l’enseignement secondaire, qui cherche à perpé-tuer une culture générale fondée sur l’enseignement des lettres ».

– Le dernier facteur est pédagogique. L’enseignement des sciences à l’école pri-maire a été porté par l’engouement que le monde des responsables de l’instruction publique a eu pour la leçon de choses. La leçon de choses est l’expression même

1. « Petite histoire de l’enseignement des sciences à l’école primaire » in La main à la pâte, Les sciences à l’école primaire, Flammarion, 1996, p. 122.

Page 8: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

8

d’un enseignement « intuitif », qui passe alors pour être la forme la plus adaptée à la marche naturelle de l’esprit de l’enfant : des faits aux idées, du concret à l’abstrait, des « choses » aux « mots ». Il faut que l’enfant commence par voir, par observer ; et ce n’est que progressivement qu’on peut le conduire aux idées générales. L’enseignement des sciences est bien ici exemplaire : où mieux que dans les sciences physiques et na-turelles l’enfant est-il amené à observer avant de généraliser ? N’est-ce pas d’ailleurs la méthode de la science elle-même, et non seulement de son enseignement ? Ainsi leçons de choses et enseignement primaire des sciences ont-ils fi ni par sceller leurs destins au point de voir les premières devenir l’autre nom du second : pour un petit écolier du début du XXe siècle, faire des sciences, c’était faire des leçons de choses.

La deuxième période va de la fi n de la Première Guerre Mondiale jusqu’aux années 1960. La dynamique qu’avaient souhaitée les initiateurs de la leçon de choses s’enlise dans la routine . L’élan primitif est retombé. La leçon de choses s’était voulue le moyen d’une rénovation pédagogique qui rende l’enfant actif et ne l’accable plus sous le poids des « leçons de mots ». Mais tout se passe comme si elle avait été rattra-pée par la forme scolaire la plus traditionnelle. Les sciences entrent progressivement dans les épreuves du certifi cat d’études ; elles ont leur programme, leurs exercices, et leurs leçons ont beau être « de choses », il faut bien les apprendre… par cœur !

Malgré l’entrée à l’école de nouvelles techniques comme le cinéma, qui promet-taient de donner aux leçons de choses un deuxième élan et d’ouvrir à l’élève de l’école primaire des horizons moins familiers ; malgré aussi l’apparition du mouvement de « l’éducation nouvelle » dont Freinet nous a paru représenter un témoignage signifi -catif ; malgré même des instructions offi cielles novatrices, celles de 1923, demandant aux maîtres de recourir avec les enfants à de véritables expérimentations, et non plus seulement à l’observation, et de passer de l’enseignement par l’aspect à l’enseigne-ment par l’action, les sciences s’installent, signe peut-être au fond de leur reconnais-sance, dans le train-train des travaux et des jours de l’école.

Page 9: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

9

2e sectionL’Éveil et ses suites

Un espoir déçu1960-1994

Tout commence ici avec les grands bouleversements qui ont affecté l’école à partir des années 1960. L’enseignement des sciences s’inscrit alors dans un nouveau modèle pédagogique : la pédagogie d’éveil. L’heure est à la rénovation.

Rénovation institutionnelle d’abord : le primaire devient, au cours de ces années-là, l’antichambre d’un second degré désormais ouvert à tous, que la création du col-lège unique (1975) va vouloir défi nitivement incarner. L’école affi che comme jamais une ambition démocratique. L’unifi cation du primaire et du secondaire, ouvrant à tous une scolarité plus longue, exonère en partie l’école primaire de ses missions les plus instrumentales.

Rénovation pédagogique ensuite. D’une part, le monde a profondément changé. Les savoirs scientifi ques se complexifi ent, et la technologie envahit l’univers matériel, faisant du monde familier de l’enfant une boîte noire : l’observation ne suffi t plus à comprendre le mode de fonctionnement des objets. À une culture des « choses », l’école tend à substituer une culture des « démarches » appliquées à la connaissance des phénomènes, tributaire d’un modèle « secondaire » des savoirs scientifi ques. D’autre part, l’enfant apparaît derrière l’élève ; la nouvelle pédagogie d’éveil doit prendre en compte son individualité, voire sa créativité. Enfi n, les normes traditionnelles de l’autorité sont, à l’école et en dehors de l’école, battues en brèche ; la pédagogie d’éveil doit aussi permettre d’instaurer dans les classes un nouveau climat, un nouveau rapport des adultes aux enfants.

Dans ce paysage scolaire redessiné, où les frontières entre les disciplines s’es-tompent, où il est recommandé aux enseignants de se préoccuper davantage de faire acquérir aux élèves des méthodes et des démarches que des savoirs pratiques et po-sitifs, où il faut partir du questionnement des enfants et non plus de l’observation, les sciences font partie des « disciplines » ou, mieux encore, des « activités » d’éveil… et la leçon de choses devient le symbole d’une pédagogie traditionnelle et surannée !

L’Éveil a suscité bien des critiques, donné lieu à bien des caricatures : apprentissage sans ordre, questions stériles, tâtonnements expérimentaux ridicules… Les instruc-tions offi cielles de 1985, signées de Jean-Pierre Chevènement, auront tôt fait, non sans injustice, de l’enterrer, au nom d’une école recentrée sur les « savoirs ». Mais l’Éveil meurt plus facilement dans les textes que dans les mémoires ; longtemps, les cahiers de sciences s’intituleront « cahiers d’éveil » et l’essor de la didactique des sciences, contemporain de la pédagogie d’éveil, a maintenu son esprit encore vivace.

Cependant, pendant près de dix ans, c’est surtout en-dehors de l’école (dans les musées, centres de culture scientifi que et technique, associations et magazines…) qu’il va continuer de souffl er.

Béatrice AJCHENBAUM-BOFFETYcommunication pédagogique de l’Académie des sciences,

commissaire de l’exposition.

Pierre KAHNIUFM de l’académie de Versailles,

commissaire de la partie historique de l’exposition.

Page 10: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

10

3e section La main à la pâte et la rénovation

Un nouveau départ1995-2004

La conviction que le temps consacré à l’enseignement des sciences est pris sur celui des apprentissages fondamentaux (parler, lire, écrire, compter) entérine l’échec du tiers temps pédagogique et contribue largement à la régression de l’enseignement scientifi que à l’école primaire. C’est pour inverser cette tendance, doublée d’une dé-rive vers un enseignement trop souvent théorique et livresque, que se met en place, à partir de 1996, l’opération La main à la pâte ; elle vise à favoriser une pratique de la science par l’exploration, l’expérimentation et l’argumentation, incitant à la maî-trise des langages. Cette opération s’inscrit dans un dispositif plus large de mise en relations et de coopération de multiples partenaires – enseignants, formateurs, scientifi ques, universitaires, familles et personnes-ressources... – les uns avec les autres. S’inspirant largement de cette expérience à laquelle elle s’est associée dès 1996, l’Éducation nationale lance le PRESTE en 2000, qu’elle accompagne bientôt de nouveaux programmes pour l’école primaire. C’est par ce mouvement ainsi engagé pour réconcilier les sciences et l’école primaire qu’il nous a semblé nécessaire de clore notre parcours.

Témoigner de l’exemple français, tel qu’il s’élabore dans notre pays mais aussi tel qu’il fait école, s’adapte ou se transforme en-dehors de nos frontières à l’aube du XXIe siècle, n’est évidemment pas sans risques, faute d’une distance suffi sante : les suites de l’Éveil nous conduisent à ce moment où l’histoire cesse d’être celle du passé, et où elle cesse alors sans doute d’être de l’histoire : peut-on être un historien de l’actualité ? Aux historiens du futur de comprendre le sens du devenir actuel de l’enseignement scientifi que primaire ; mais aux acteurs contemporains, dont certains seront, nous l’espérons, des visiteurs de cette exposition, de produire ce sens.

Béatrice AJCHENBAUM-BOFFETYcommunication pédagogique de l’Académie des sciences,

commissaire de l’exposition.

Page 11: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

13

Dates marquantes1802 : création des lycées.1804 : Napoléon sacré empereur.1806-1808 : création de l’Université impériale ; organisation de l’enseignement secon-

daire d’État par Napoléon.1815-1830 : Restauration (Louis XVIII : 1815-1824 ; Charles X : 1824-1830).1830 : les Trois Glorieuses, début de la monarchie de juillet (Louis-Philippe).1833 : loi Guizot, première loi à organiser globalement l’enseignement

primaire public sur l’ensemble du territoire.1848 : chute de Louis-Philippe, proclamation de la IIe République (février); projet de loi (Hippolyte Carnot), prévoyant la gratuité et l’obligation de

l’école primaire. Abandonné sans discussion à l’Assemblée nationale (juin);

Louis Napoléon Bonaparte élu président de la République (décembre).1850 : loi Falloux – renforce l’éducation religieuse à l’école primaire – limite l’instruction du peuple aux connaissances élémentaires (lire,

écrire, compter); – oblige les communes de plus de 800 habitants à ouvrir une école de

fi lles.1851- 1852 : coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte (décembre 1851); instaure

le Second Empire sous le nom de Napoléon III (novembre 1852).1867 : loi Duruy (ministre 1863-1869) ; relance la politique de l’instruction

primaire. La loi du 10 avril étend la gratuité de l’école primaire en permettant plus

facilement aux communes d’opter pour la gratuité totale et en organi-sant la gratuité des fournitures. Victor Duruy développe aussi les cours d’adultes, comme les bibliothèques scolaires; il encourage l’instruction primaire par la création de concours cantonaux et l’institution de la dis-tribution des prix ; il envisage la mise en place d’un certifi cat d’études primaires ; il redéfi nit rigoureusement les conditions des épreuves du brevet de capacité. Duruy permet également à la culture primaire de se renforcer : passage de l’histoire et de la géographie des matières facul-tatives aux matières obligatoires ; développement de l’enseignement de la gymnastique; introduction des langues vivantes dans les matières fa-cultatives des programmes des écoles normales. Enfi n, Duruy soutient activement le mouvement de rénovation pédagogique dont l’infl uence ne cessera de croître jusqu’à la guerre de 1914-1918.

1870-71 : guerre contre la Prusse ; défaite de l’armée française à Sedan ; chute du Second Empire ; proclamation de la IIIe République.

1879 : Jules Ferry nommé ministre de l’instruction publique.1881 : loi Ferry instituant la gratuité totale de l’école primaire.1882 : loi Ferry instituant l’obligation de l’instruction et la laïcité des

enseignements; premières instructions offi cielles pour l’école primaire.

1886 : loi Goblet (impose notamment la laïcité des enseignants).1894 : début de l’affaire Dreyfus.1905 : séparation des Églises et de l’État.1914-1918 : Première Guerre mondiale.

Page 12: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

14

Dispositif institutionnel

L’organisation de l’enseignement en France est doublement divisée : • séparation sociale entre le primaire et le secondaire, le peuple et les notables, • séparation entre les sexes.

Séparation des ordres scolaires primaire et secondaire

PRIMAIRE SECONDAIREÉcole primaire élémentaire : depuis 1868 et, tout d’abord, pour le seul département de la Seine, elle est organisée en 3 niveaux de 2 ans chacun : cours élémentaire (7-9 ans), moyen (9-11 ans) et supérieur (11-13 ans). 1880 : création du certifi cat d’études primaires.

Lycée classique : créé en 1802, payant, il est dominé par les humanités (grec et surtout latin). Il conduit au baccalauréat, qui ouvre l’accès à l’Université. Les élèves peuvent y entrer en 6e (11 ans) ou plus tôt : le « petit lycée » (9e, 8e, 7e ) dispense les enfants de la bourgeoisie de fréquenter l’école primaire.

Enseignement primaire supérieur : prévu dès la loi Guizot. Après son abandon de fait par la loi Falloux (1850), il est relancé par la IIIe République et connaît dès lors un grand succès populaire.

L’enseignement secondaire spécial :créé par Victor Duruy en 1865, c’est un en-seignement « intermédiaire » à visée profes-sionnelle. Sans latin, il privilégie les langues et les sciences appliquées. Dans un premier temps, la durée de la scolarité est plus courte que celle du lycée classique (4 ans au lieu de 7) et il ne conduit pas au baccalauréat. Il évolue toutefois : la durée des études s’al-longe progressivement (5 ans en 1881, 6 ans en 1886) et, en 1881, un baccalauréat de l’en-seignement spécial est créé. L’enseignement spécial devient l’enseignement secondaire moderne en 1891. La réforme de 1902 réalise l’unité du secondaire en réunissant les deux enseignements, « classique » et « moderne » (sans latin).

Écoles normales d’instituteurs :généralisées à l’ensemble des départements, d’abord pour les garçons par Guizot (1833), puis pour les fi lles par les Républicains (1879), elles sont moins des instituts de formation professionnelle que des lieux (internats) où le futur instituteur apprend les codes et les valeurs relatifs à sa mission sociale et à son magistère. L’admission se fait sur concours dont l’âge varie en fonction des législations et des politiques scolaires. À partir de 1887, les élèves y entrent à 16 ans, dotés du brevet élémentaire nécessaire pour enseigner à l’école primaire élémentaire. Ils y préparent le brevet supérieur.L’instituteur est communal jusqu’en 1889, fonctionnaire ensuite (loi du 19 juillet).

Les enseignants sont formés par l’Université.

Page 13: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

15

Séparation fi lles / garçons

PRIMAIRE SECONDAIRELa loi Guizot (1833) organise l’enseigne-ment primaire des garçons. Une ordonnance de 1836 étend certaines dispositions de 1833 à l’enseignement des fi lles. L’enseignement primaire féminin rattrape progressivement son retard sur celui des garçons. Un décret de 1880 prévoit la création d’une école normale de jeunes fi lles dans chaque département, et la loi de 1882 institue l’obligation d’instruc-tion jusqu’à 13 ans pour les enfants des deux sexes. Les programmes sont les mêmes, à l’exception des « exercices militaires » (gar-çons) et des « travaux à l’aiguille » (fi lles).Cette identité offi cielle des programmes n’empêche pourtant pas des disparités dans les contenus enseignés et dans les modèles éducatifs des écoles de fi lles et des écoles de garçons, qui restent séparées.

C’est en 1880 que la loi Camille Sée crée l’enseignement public secondaire féminin, en double décalage avec son homologue masculin. Décalage dans le temps (il est créé 78 ans plus tard) et dans sa conception même : programmes spécifi ques (absence de latin et de philosophie, mais un cours de morale et de psychologie appliquée à l’édu-cation), scolarité plus courte ne conduisant pas au baccalauréat et ne donnant pas accès aux facultés.

Page 14: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

16

Manières d’instruire

Leçon de choses, leçon de tout

L’enfant est naturellement tout yeux, tout oreilles.Octave Gréard

directeur de l’enseignement primairedu département de la Seine,

sous le ministère de Victor Duruy - 1875.

La leçon de choses va mettre du temps à s’identifi er à la leçon de sciences. Sous l’infl uence de Marie Pape-Carpantier (1812-1878), elle se développe d’abord dans les « salles d’asile » (ancêtres des écoles maternelles). Contre un enseignement jugé trop abstrait et verbeux, elle propose un « enseignement par les yeux », « intuitif », concret, qui doit rendre l’enfant actif.

Inventée pour s’opposer à la « leçon de mots », la leçon de choses est tout d’abord une forme d’enseignement prévue pour s’adapter à tous les sujets.

La leçon de choses se présente volontiers comme une histoire de choses : elle pas-se aussi par les livres de lecture et par les récits informatifs et moralisateurs. Elle est alors une leçon d’information romancée sur des réalités naturelles utiles à l’homme et sur les réalités industrielles, et elle tient volontiers à cette occasion un discours édifi ant sur les prodiges de la science et de ses applications.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Leçon de choses, cours méthodique, Livre du maître, par le Dr. Saffray, 1880.

Table des matières de Premières leçons de choses usuelles, par Eudoxie Dupuis, Delagrave, 1919, 1ère édition 1878. Collection privée Pierre Fontes.

La science en images : leçon de choses illustrées, Série encyclopédique Glucq, Histoire du grain de blé, 1880-1884. Collection privée Henri Georges.

La nouvelle lecture rationnelle, par F.A. Noël, «Dixième leçon de choses. L’eau», page de couverture et page 84.

Le tour de la France par deux enfants : page de couverture et pages 110-111. Ouvrage d’Augustine Fouillée, publié sous le pseudonyme de G. Bruno (1ère édition 1877, 411e et dernière édition en 1961). En 1888, après de nombreuses rééditions, près de trois millions d’exemplaires étaient déjà diffusés dans les écoles.

Histoires et Leçons de choses pour les enfants (1858), collection privée Jean-Charles Rousseau. Cet ouvrage réunit les récits de Marie Pape-Carpantier parus dans la Revue de l’éducation nouvelle. L’expression leçon de choses est héritée des « Objects Lessons » introduites dès le début du XIXe siècle aux Etats-Unis d’Amérique.

Salle d’asile de petits enfants. Lithographie, Paris, vers 1840. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

panneau

I.1

Page 15: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

17

Manières d’instruire

Leçon de choses, leçon de sciences

Regarder, écouter, palper, fl airer, goûter, c’est Observer.Georges Colomb

Extrait de L’enseignement scientifi que à l’école.

Leçon sur les choses, au moyen de choses et par ces choses : la leçon de choses, introduite dans les matières obligatoires de l’école primaire à partir de 1882, devient leçon de sciences. Elle s’inscrit dans des manuels - dont l’édition se développe à la même époque - et propose des exposés didactiques selon une progression déterminée par le programme. La méthode d’exposition se veut inductive, allant du connu à l’in-connu, du simple au composé, du concret à l’abstrait.

Les histoires de choses racontées dans les livres de lecture ne disparaissent pas pour autant du paysage scolaire.

Mais la science scolaire doit aussi être attractive : c’est surtout dans les promena-des scolaires et les musées scolaires, fortement préconisés, que la leçon de choses illustre la pédagogie intuitive et active dont elle se réclame.

Constitué par le maître avec le concours de ses écoliers, au lieu d’être acquis tout d’une pièce, et constamment enrichi par eux avec l’aide des parents d’élèves et des relations de voisinage, le musée scolaire est l’auxiliaire de la leçon de choses. Les promenades scolaires, voire les loisirs du maître ou des enfants, sont l’occasion de recueillir insectes, plantes ou minéraux de la région. Les collections, disposées sui-vant un ordre rationnel dans une armoire de préférence vitrée, réunissent des objets réellement utiles à l’enseignement primaire : aussi doivent-elles s’attacher, comme les leçons de choses, à tirer méthodiquement profi t des ressources locales plutôt que se spécialiser ou rassembler des objets curieux ou exotiques.

[Les passages en italiquesont extraits du Dictionnaire pédagogique

de Ferdinand Buisson, 1882-87,article « Musée scolaire »].

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Leçons de sciences physiques et naturelles avec leurs applications. Cours moyen et supérieur, par Drouard Ch., Manevy A., Drouard P. Bricon et Lesot Éd. Collection privée Pierre Fontes.

L’enseignement scientifi que à l’école, cours élémentaire, par G. Colomb, Librairie Armand Colin, rééd. 1925. Collection privée Pierre Fontes.

… En somme, observez tout ce que le livre vous raconte, si ce n’est pas au moment même où vous le lisez, que ce soit à la première occasion favorable.Tenez ! il faut se conduire tout le temps comme si on soupçonnait le livre de vous raconter quelquefois des mensonges ou de vous dire des choses fausses ; vous

panneau

I.2

Page 16: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

18

devez donc vérifi er, contrôler ce qu’il vous dit toutes les fois que c’est possible, vous prendrez ainsi l’habitude d’observer et de critiquer vos observations et vous deviendrez, de cette façon, des hommes raisonnables qui ne seront plus dupes des mots, c’est-à-dire des hommes de bon sens, des esprits équilibrés, des hommes de progrès ainsi qu’il convient que soient de bons Français.

G. ColombExtrait de la préface

L’enseignement scientifi que à l’école, cours moyen, cours supérieur, par G. Colomb, Librairie Armand Colin. Collection privée Pierre Fontes.

Éléments usuels des sciences physiques et naturelles, cours élémentaire. Premières leçons de choses, par Gaston Bonnier et A. Seignette, Paris, librairie générale de l’enseignement. Collection privée Pierre Fontes.

L’année préparatoire d’enseignement scientifi que, cours élémentaire, par Paul Bert, Armand Colin, rééd. 1914. Collection privée Pierre Fontes.

Photographie de Paul Bert dans son laboratoire : image confi ée par la Société Paul Bert et reproduite grâce à son aimable autorisation. Remerciements à Patrice de Cormeille, président de la Société Paul Bert.

Programme de 1882 en sciences pour le cours moyen, Bulletin administratif du ministère de l’Instruction publique, 1882.

Emploi du temps, circonscription de Gaillac, Musée national de l’éducation.Au commencement de chaque année scolaire, le tableau de l’emploi du temps par jour est dressé par le directeur de l’école et, après approbation de l’inspecteur primaire, il est affi ché dans les classes.

Extrait de l’arrêté de 1887 cité dans Traité de pédagogie scolaire,

précédé d’un cours élémentaire de Psychologie appliquée à l’Éducationet suivi d’un appendice contenant des notions d’administration scolaire,

par I. Carré et Roger Liquier, 8e édition, Librairie Armand Colin, 1907, p. 244.

Cahier de sciences d’Henry Géniole ; cours supérieur de l’école de garçons, Paris VIIe, Musée national de l’éducation.

Couverture de cahier d’école : « le principe d’Archimède ». Collection privée Henri Georges. Le matériel pédagogique est lui aussi l’occasion d’intégrer les sciences dans le paysage fa-milier de l’écolier.

Salle de classe, musée scolaire et collection de minéralogie du Musée national de l’éducation.

Un musée scolaire « acheté : Musée industriel scolaire, « planches de leçon de choses, vêtement », par C. Dorangeon et Delagrave, vers 1890. Musée national de l’éducation.

Le livre auxiliaire des maîtres pour l’organisation de musées scolaires, par E. Bannewarth, Paris, Fernand Nathan, page de couverture. Collection privée Pierre Fontes.

Une promenade scolaire, page de cahier datée du vendredi 21 mars 1884, Musée national de l’éducation, et gravure, collection privée Jean-Charles Rousseau.

Page 17: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

19

Ambitions et intentions

Un enseignement utile

Que doit apprendre le maître à son élève ?— Évidemment, ce que celui-ci aura besoin de savoir plus tard.

I. Carré et Roger Liquier, Traité de pédagogie scolaire, 1907.

Au XIXe siècle, il revient au primaire de dispenser des savoirs utiles, la réfl exion plus spéculative étant le privilège du secondaire. L’enseignement des sciences y est donc « usuel » et pratique.

Sous le ministère Duruy, la présence facultative des sciences à l’école s’appuie sur une argumentation socio-économique : améliorer la formation professionnelle. À l’image de l’Association polytechnique (1830) et l’Association philotechnique (1848), les cours d’adultes deviennent alors l’un des principaux vecteurs de l’instruction scien-tifi que et préparent le formidable essor de l’éducation populaire à la fi n du siècle.

Cette argumentation économique perdra de son importance avec Jules Ferry. Il s’agit alors surtout d’enseigner la science du point de vue de ses applications quoti-diennes dans la vie courante, en matière d’agriculture, d’hygiène, d’industrie.

Rattaché aux leçons de choses, l’enseignement des sciences appliqué à l’agri-culture comporte des leçons faites en classe à l’aide de petites expériences (labours, engrais…) et des exercices pratiques aux champs ou dans le jardin de l’école (choix des outils, des modes de culture, des espèces, greffage et taille des arbres, apicul-ture…). Pour autant, cet enseignement n’est pas professionnel. Il vise surtout, tout en faisant la guerre à la routine et à certains préjugés, si vivaces dans les campagnes, à enraciner les enfants dans leur milieu, à le leur faire mieux connaître et mieux aimer, et à combattre ainsi l’exode rural.

L’intérêt de l’administration scolaire pour l’enseignement agricole n’est pour autant pas nouveau, même si Jules Ferry lui donne un sens plus politique et culturel que ses prédécesseurs, avant tout soucieux d’améliorer la productivité de l’agriculture.

Ainsi, dès l’avènement de Napoléon III, l’accent est mis sur l’introduction de l’enseignement de l’agriculture et de l’horticulture dans l’enseignement général et en particulier dans l’enseignement primaire. Une collaboration active s’instaure dès 1850 entre les instances chargées de l’agriculture et le ministère de l’Instruction publique. Plusieurs enquêtes, dont on a conservé les réponses, sont conduites auprès des écoles normales en 1848, en 1855 et en 1869, auprès des conseils généraux en 1850, “ sur l’utilité et les moyens d’adjoindre quelques notions d’agriculture à l’enseignement pri-maire des communes rurales ” et la part respective de l’enseignement théorique et de l’enseignement pratique dans l’enseignement de l’agriculture et de l’horticulture.

« Il semble que cet enseignement se soit répandu assez largement dans les écoles normales, puis les écoles primaires à partir des années 1860, avant même que le décret du 2 juillet 1866 ne place “ l’horticulture et les notions élémentaires d’agri-culture ” parmi les objets de l’enseignement des écoles normales et que ne soit fi xé,

panneau

I.3

Page 18: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

20

le 30 décembre 1867, le programme de l’enseignement agricole et de l’enseignement horticole dans les écoles primaires rurales et les écoles normales. Les rapports des inspections conduites par les inspecteurs d’agriculture dans différentes écoles nor-males entre 1865 et 1871 permettent de se faire une idée de la manière dont celui-ci était dispensé, même si le problème reste toutefois souvent de savoir à qui ce cours doit être confi é ».

Thérèse Charmasson « L’enseignement agricole et horticoledans les écoles normales et les écoles primaires, 1838-1879 »,

Annales d’histoire des enseignements agricoles, n°1, octobre 1986, pp 45-58.Voir aussi Thérèse Charmasson, Anne-Marie Lelorrain, Yannick Ripa,

ss. la dir. de Thérèse Charmasson.L’enseignement agricole et vétérinaire, de la Révolution à la Libération,

Textes offi ciels avec introduction, notes et annexes,Paris, INRP - Publications de la Sorbonne, 1992.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Lectures courantes des écoliers français à l’usage des écoles des deux sexes, par Caumon et Pla, Paris Librairie Ch. Delagrave, 1889, page de couverture et pp.166-167.

Il faut régler, autant que possible, l’ordre des leçons par l’ordre des saisons(Bulletin administratif du ministère de l’Instruction publique, 1882).

Planche d’histoire naturelle : « les ennemis et les auxiliaires des cultivateurs ». Collection privée Henri Georges.

Au jardin. Travaux de sarclage. École publique de Bournan (Indre et Loire), Musée national de l’éducation.

Le foie cirrhosé de l’alcoolique, moulage de plâtre, Musée national de l’éducation.

Photographie de la classe devant la planche « L’alcool empoisonne lentement », leçon d’anti-alcoolisme, Pas-de-Calais, Musée national de l’éducation.

La science en images : leçon de choses illustrées. Histoire du verre, Série encyclopédique Glucq. Collection privée Henri Georges.

École de Mannevillette, carte postale, Musée national de l’éducation.

Page 19: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

21

Ambitions et intentions

La vertu éducative de la science

Les sciences peuvent seules enseigner la non-crédulitésans enseigner le scepticisme, ce suicide de la raison.

Paul Bert, 1881.

L’insistance mise sur l’observation dans les leçons de choses n’a pas seulement une signifi cation « pédagogique » : en effet, à cette époque, l’observation passe aussi pour être la première étape de la méthode expérimentale, et savoir observer pour la vertu cardinale de l’esprit scientifi que. Leçon de sciences, la leçon de choses apparaît ainsi comme une initiation scientifi que.

Toutefois, écrit Jean Hébrard, « L’expérience ne sert pas ici à confi rmer ou in-fi rmer une hypothèse. Elle a seulement pour ambition de permettre à l’enfant d’ob-server des phénomènes qui n’auraient pas attiré son attention si une manipulation, venue au bon moment, n’avait arrêté son regard. La leçon de choses n’est, en ce sens, rien d’autre qu’une accumulation d’observations pertinentes dont la récurrence forge progressivement, dans la mémoire de l’enfant, le matériau empirique dont pourra naître la claire conscience d’une relation de cause à effet ou d’une loi. »

Cf. Jean Hébrard,Histoire de l’enseignement des sciences, INRP, 1997et La main à la pâte, les sciences à l’école primaireprésenté par Georges Charpak, Flammarion, 1996.

L’absence d’appareils spéciaux pour réaliser les expériences de physique et de chimie, même des plus simples, n’est donc point une diffi culté qui doive arrêter les maîtres. Il est le plus souvent facile de simplifi er ces appareils ou de les confection-ner avec les objets les plus usuels. Un encrier peut fournir une excellente lampe à alcool ; un pot de fl eurs peut être transformé en un fourneau à charbon, etc. (Traité de pédagogie scolaire, op. cit., p. 438.)

L’enseignement primaire des sciences obéit ainsi à des préoccupations plus éle-vées : former l’esprit de la jeunesse à une certaine positivité, et délivrer les enfants des superstitions et autres croyances archaïques qui dominent encore le monde rural. Cette ambition éducative, présente dès la loi Guizot, s’affi rme particulièrement dans un contexte anticlérical sous l’impulsion du positiviste Jules Ferry.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Cahier d’Antoinette Escurat, normalienne : « L’induction, applications pédagogiques ». Collection privée Béatrice Ajchenbaum-Boffety.

Leçon de physique, la bobine de Ruhmkorff. Photographie Musée national de l’éducation.

panneau

I.4

Page 20: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

22

Leçons de physique faites par Madame Curie de janvier à novembre 1907 pour les enfants de quelques amis.Document aimablement communiqué par Rémi Langevin (université de Bourgogne), son petit-neveu.

Élevant seule ses deux fi lles qu’elle est soucieuse d’instruire au-dessus des routines, Marie Curie conçoit l’idée d’une école coopérative dans laquelle d’éminents maîtres - savants et amis associés au projet - appliqueront de nouvelles méthodes d’enseignement à leurs enfants. Pendant près de deux ans (1907-1909), Jean et Henriette Perrin, Paul et Jeanne Langevin, le sinologue Édouard Chavannes et son épouse Alice, le sculpteur Magrou… dispensent ainsi des cours de toutes disciplines à une dizaine de garçons et fi lles, parmi lesquels Francis Per-rin, Jean Langevin, Isabelle Chavannes, Irène Curie. Marie Curie se charge de la physique, à laquelle elle consacre le jeudi après-midi dans un local désaffecté de l’École de physique : construction d’appareils, manipulations et expérimentations - au cœur de la démarche scienti-fi que - se substituent à l’enseignement classique, qu’elle juge rébarbatif, abstrait et stérilisant. Isabelle Chavannes a, par la suite, repris et rédigé les notes prises durant ces leçons, entre janvier et novembre 1907.

Cf. Physique élémentaire pour les enfants de nos amis.Leçons de Marie Curie recueillies par Isabelle Chavannes en 1907.

Préf. Yves Quéré, postf. Hélène Gispert.Avant-propos d’Hélène Langevin-Joliot, Rémi Langevin,

EDP Sciences, 2003.

Portrait d’Auguste Comte. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Le laboratoire scolaire, physique, chimie, catalogue par A. Petitot, exposition universelle de 1900, Paris, Société nationale de produits chimique. Collection privée Pierre Fontes.

Les sciences physiques et naturelles à l’école primaire, par la méthode expérimentale, avec leurs applications à l’agriculture, à l’industrie, à l’hygiène et à l’économie domestique, par P. Chauvet, J. Jeanjean, ss la dir. d’Antoine Pizon, Cours moyen et supérieur, Société d’Édition du Nord, page de couverture.

Photographie de Claude Bernard. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Caricature de Jules Ferry. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Allégorie de la fée électricité éclairant l’Europe (in La France superstitieuse, collection privée Jean-Charles Rousseau).

Page 21: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

23

La science à votre portée

La cause du peuple

Depuis que la science enrichit l’industrie de ses mille applications pratiques,chacun a voulu pénétrer au coeur du sanctuaire.

Amédée Guillemin,La presse scientifi que des deux mondes, 1862.

Le mouvement de propagation des connaissances engagé au siècle des Lumières, grâce aux Encyclopédistes notamment, s’affi rme dans la seconde moitié du XIXe siè-cle sous le nom de vulgarisation. S’appuyant sur une presse et une édition en pleine expansion, celle-ci touche un très large public que l’essor de l’instruction populaire a préparé à recevoir les rudiments de la connaissance scientifi que.

Pour diffuser la science populaire, les bibliothèques scolaires (instituées en 1862) ne sont pas en reste. L’instituteur, en vertu de ses travaux auxiliaires, peut et doit travailler à leur prospérité, réalisant ainsi leur mission : propager les connaissan-ces utiles et la bonne semence jusqu’au sein des familles. Ouvrages de vulgarisation scientifi que français ou traduits (Histoire d’une chandelle, de Michael Faraday, 1861, – The Chemical History of a Canddle – trad. W. Hughes, Paris, 1865) et livraisons périodiques réunies en volumes y fi gurent en bonne place, parmi les livres d’instruc-tion et de récréation destinés au prêt. Ces publications, également achetées par les écoles comme livres de prix et par les parents comme livres d’étrennes ou pour la bibliothèque familiale, vont atteindre un public très hétérogène.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

La science à portée de la main (La science en images, collection Henri Georges) 1ère page intérieure et pages 19 et 29.

4e leçon des Notes prises au cours d’astronomie faits par Arago. Notes prises par un auditeur anonyme du cours d’astronomie d’Arago, et surchargées de la main de ce dernier. Document conservé à la bibliothèque de l’Observatoire de Paris et reproduit grâce à son aimable autorisation.

L’Astronomie populaire de François Arago, œuvre posthume, tome premier, 1854. Ouvrage conservé à la bibliothèque de l’Observatoire de Paris et reproduit grâce à son aimable autorisation.

Portrait de F. Arago, document conservé à l’Observatoire de Paris. Photographie Observatoire de Paris, reproduite grâce à son aimable autorisation.

* Les merveilles de l’industrie, réunion de livraisons périodiques, 1873, par Louis Figuier.C’est en 1856 que Louis Figuier (1819-1894), docteur en médecine, professeur à l’École de pharmacie de Paris (1853), renonce à l’enseignement pour se consacrer entièrement à la vulgarisation scientifi que, dont il fait fi gure d’initiateur. Dès 1851, il publie les premiers tomes de l’Exposition et histoire des principales découvertes scientifi ques modernes. De 1857 à sa mort, il entreprend de réunir les chroniques scientifi ques qu’il a publiées dans La

panneau

I.5

Page 22: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

24

presse depuis 1855 en un recueil annuel, L’année scientifi que et industrielle. Par la suite paraîtront notamment Les Merveilles de la science (1867-1869, 4 vol., 2 vol. de suppléments en 1889-1890), Les Merveilles de l’industrie (1873-1877, 4 vol.), Vies des savants illustres (1866-1870, 5 vol.).

La science à portée de la main, Série encyclopédique Glucq. Collection privée Henri Georges.

Les Terres du ciel, par Camille Flammarion, 1877. Collection privée Jean-Charles Rousseau.Camille Flammarion (1842-1925), d’abord destiné à l’état ecclésiastique, puis apprenti chez le photographe Nadar à Paris, suit les cours de l’Association polytechnique et se passionne pour l’astronomie. Engagé à l’Observatoire comme calculateur - et plus tard au Bureau des Longitudes - , il publie en 1862 La pluralité des mondes habités, début de sa considérable œuvre de vulgarisateur. L’astronomie populaire, qui paraît en 1880, dépassera les 100 000 exemplaires en 1900.Fondateur à l’école Turgot de cours d’astronomie populaire et passionné d’instruction po-pulaire, il fonde la revue L’astronomie en 1882 puis, en 1887, la Société astronomique de France. Sa notoriété tient pour beaucoup à la diversité de ses activités et à la dimension « spi-ritualiste » de son intérêt pour l’astronomie.

* Les mystères de la science, par Louis Figuier. C’est sous ce titre que Louis Figuier reprend, en 1892-93, l’Histoire du merveilleux dans les temps modernes, d’abord publiée en 1860.

* La science illustrée, 1888, dirigée par Louis Figuier jusqu’à sa mort.

* Le monde avant la création de l’homme, d’après Zimmermann, par Camille Flammarion, 1886.

* Les pourquoi de Melle Suzanne, par Émile Desbeaux, Ducrocq, 1881.

* Cours public au Conservatoire des Arts et Métiers (Le magasin pittoresque, 1882).

Les illustrations dont les références sont précédées d’un astérisque sont emprun-tées à La science pour tous. Sur la vulgarisation scientifi que en France de 1850 à 1914, dirigé par Bruno Béguet. Paris, Bibliothèque du Conservatoire national des Arts et Métiers (CNAM), 1990, et reproduites avec l’aimable autorisation de la Bibliothèque du CNAM.

Page 23: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

25

La science à votre portée

En sortant de l’école

Vous verrez combien la science de messieurs les savants est amusante pour les petites fi lles, bien que ces messieurs prétendent quelquefois le contraire.

Jean Macé, Histoire d’une bouchée de pain, 1861.

Instruire sans ennuyer et sans déplaire : c’est à l’idéologie de « l’éducation récréati-ve » que la vulgarisation scientifi que du XIXe siècle emprunte ses idéaux et ses formes.

A la science sérieuse des programmes et des manuels répond une science amu-sante, parfois sous la plume des mêmes auteurs.

Tournant le dos à la science scolaire, une science foraine se développe, qui puise à deux traditions : celle des cabinets des merveilles où s’entassent des collections hétéroclites d’objets insolites ou curieux, celle des illusionnistes et autres physiciens ambulants, plus récente. Elle propose au regard fasciné des badauds les fi gures d’un monde mystérieux et troublant. Le spectacle d’anomalies endocriniennes ou anato-miques, comme celui d’inventions à haute valeur technologique ajoutée, inaugure un genre nouveau : l’attraction scientifi que.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Récréations physiques (1861) par A. Castillon, Hachette, Bibliothèque rose. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Extrait de L’idée fi xe du savant Cosinus (1899), écrit et illustré sous le pseudonyme de Christophe par Georges Colomb, sous-directeur du laboratoire de botanique à la Sorbonne, également auteur de La famille Fenouillard (1895), Le sapeur Camember (1896) et de manuels primaires. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Extrait de La science amusante : «La pièce échappée», par Tom Tit (pseudonyme de l’ingénieur Arthur Good), Larousse, 1ère éd. 1890.

* Les récréations scientifi ques par G. Tissandier, Masson, 1881.

* La science amusante 3e série : tranches et 1ère page de couverture.

Mademoiselle Irma Lostau, sujet scientifi que;Fête foraine, le scaphandrier;Fête foraine, les balançoires». Documents conservés au Musée des arts et traditions populaires, © RMN.

* «Le pendule de Foucault», extrait de La science amusante, 2e série, 1891

Les illustrations dont les références sont précédées d’un astérisque sont emprun-tées à La science pour tous, Sur la vulgarisation scientifi que en France de 1850 à 1914, dirigé par Bruno Béguet. Paris, Bibliothèque du CNAM, 1990, et reproduites avec l’aimable autorisation de la bibliothèque du CNAM.

panneau

I.6

Page 24: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

26

La science en majesté

Triomphe du progrès

Salut à toi, dans ton divin éclat,Vénus de l’industrie, aux hommes inconnue !La vapeur, de ses fl ots épais,Fait un trône à tes pieds de reine.

Charles Poitvin, 1854.

A la faveur de l’essor du capitalisme, du libre-échange, du développement du machinisme, les expositions nationales, nées à la fi n du siècle précédent, deviennent internationales, voire “ universelles ”, vers le milieu du XIXè siècle.

Réalisées à la gloire des entrepreneurs et des ingénieurs - et des ouvriers dans une moindre mesure - ces expositions exaltent le progrès scientifi que et technique et af-fi chent les valeurs qui lui sont alors associées : bien-être et prospérité, progrès moral et social. A grand renfort d’attractions et de festivités diverses, d’agencement d’effets spéciaux de plus en plus sophistiqués, on assiste à la démonstration de la supériorité de la science et de la culture modernes et occidentales sur des mondes différents, considérés comme primitifs, arriérés ou décadents.

Aux produits de l’économie s’ajoutent les oeuvres d’art, aux expositions géné-ralistes, les expositions thématiques. Du reportage offi ciel à la photo-souvenir, en passant par le cliché commercial, la toute jeune photographie contribue largement au rayonnement de ces manifestations et au culte qu’elles célèbrent.

«La science fait dans le progrès le rôle d’utilité. Vénérons cette servante magnifi que».Victor Hugo,

L’Art et la Science, William Shakespeare, 1854.

Dans le climat scientiste qui imprègne la deuxième moitié du XIXe siècle, les savants font également l’objet d’une véritable vénération, à la fois à l’école et à l’exté-rieur de l’école. Non loin des inventeurs (Thomas Edison) et des ingénieurs (Gustave Eiffel), et à côté des scientifi ques politiquement engagés (Paul Bert ou Marcelin Ber-thelot) trône la statue de Louis Pasteur, « bienfaiteur de l’humanité ».

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Exposition universelle de 1900 : le Palais de l’électricité;Exposition universelle de 1900 : le Palais des mines et de la métallurgie et la Tour Eiffel en construction; Exposition internationale de l’électricité (1881) : tramway électrique de Siemens reliant la place de la Concorde au Palais de l’Industrie. Documents conservés au Centre historique des Archives nationales, Paris. Photographies reproduites avec son aimable autorisation.

Arrivée à l’Exposition, extraits de La famille Fenouillard (1895), écrit et illustré sous le pseudonyme de Christophe par Georges Colomb. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Portraits de Gustave Eiffel, Thomas Edison, Marcelin Berthelot. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Assiette célébrant la gloire de Pasteur , Archives de l’Académie des sciences, Paris.

panneau

I.7

Page 25: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

29

Dates marquantes

1918 : manifeste des Compagnons de l’Université nouvelle en faveur d’une école unique, au nom de la démocratisation de l’enseignement.

1921 : fondation de la Ligue internationale pour l’éducation nouvelle (LIPEN).

1923 : nouvelles instructions offi cielles pour l’enseignement primaire ; elles s’inscrivent dans la continuité de celles de 1887, mais innovent en préconisant le tâtonnement expérimental (élève non seulement observateur, mais également expérimentateur).

1924 : le secondaire féminin commence à s’identifi er avec le secondaire masculin.

1924 : le ministre de l’instruction publique du Cartel des Gauches, François-Albert, crée une commission de l’école unique.

1927-1930 : la gratuité s’étend progressivement à toutes les classes des lycées.1932 : transformation du ministère de l’instruction publique en ministère de

l’éducation nationale.1935 : Célestin et Élise Freinet ouvrent à Vence une école privée

« prolétarienne ».1936 : Front populaire ; le ministre Jean Zay prolonge la scolarité obligatoire

jusqu’à 14 ans. (création de la classe de fi n d’études primaires, mise en place en 1937).

1939-1945 : Seconde Guerre mondiale.1941 : Jérôme Carcopino, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse

du maréchal Pétain, transforme les écoles primaires supérieures en « collèges modernes ».

1944 : droit de vote accordé aux femmes.1947 : – plan Langevin-Wallon ; jamais appliqué, il prévoyait une

école unique et obligatoire jusqu’à 18 ans, avec un « cycle de détermination » à partir de 15 ans, où les élèves pouvaient choisir entre études littéraires, scientifi ques ou techniques;

– début de la Guerre froide, du baby-boom et des années de prospérité, les « Trente glorieuses ».

1957 : nouvelles instructions offi cielles pour l’école primaire. Elles seront les dernières à assurer la continuité avec celles de 1887.

Page 26: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

30

Dispositif institutionnel

Le dualisme des ordres scolaires et des sexes reste dans cette période fortement marqué. Toutefois, des évolutions apparaissent, qui en nuancent la rigueur.

Ordres scolaires primaire et secondaire

PRIMAIRE SECONDAIRE

École primaire élémentaireElle reste l’école du peuple et ses modèles pédagogiques comme son organisation font preuve, des années 1880 à la Seconde Guer-re mondiale, d’une remarquable stabilité. En 1938, Jean Zay, ministre de l’éducation nationale du Front populaire, fait passer la scolarité obligatoire de 13 à 14 ans en créant les classes de fi n d’études.

Enseignement primaire supérieur (EPS)Durant la première moitié du XXe siècle, son succès ne se dément pas et ses effectifs vont croissant. Les écoles primaires supérieures se rapprochent alors progressivement du secondaire moderne. Le Front populaire aligne leurs programmes sur ceux du premier cycle de la section moderne des lycées. En 1941, sous le régime de Vichy, elles sont transformées en « collèges modernes ». Mais les cours complémentaires, autre volet de l’EPS, ne sont pas affectés par cette réforme.

Écoles normales d’instituteursElles restent le fl euron du dispositif primaire. La discipline quasi monacale à laquelle les élèves-maîtres, dans la période précédente, étaient soumis, s’assouplit et le niveau des études s’élève. Le brevet supérieur (1932), puis le baccalauréat (1945) sont exigés pour enseigner à l’école primaire.

Les lycées sont encore réservés à une po-pulation socialement privilégiée. La gratuité des études, instituée pour la 6e en 1927, est généralisée en 1930 (sauf pour les classes élémentaires, c’est-à-dire avant la 6e). Le secondaire sera pourtant boudé par les bons élèves des milieux populaires qui continue-ront à lui préférer l’école primaire supé-rieure. La création d’un examen d’entrée en 6e (1933) restreint d’ailleurs l’ouverture du secondaire que pouvait favoriser la gra-tuité. Néanmoins, le statut des personnels enseignants (1925), comme les programmes (1926) des classes élémentaires de lycée et de l’école primaire, s’uniformisent. Le « pe-tit lycée », offi ciellement supprimé en 1945, disparaît petit à petit.

La section moderne créée en 1902 connaît un réel succès, malgré la résistance de cer-tains enseignants, farouches partisans des humanités classiques, et malgré sa dispari-tion provisoire de 1923 à 1925 (dès 1924, une 6e et une 5e modernes sont rétablies).

Page 27: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

31

Filles et garçons

PRIMAIRE SECONDAIRELes sexes sont toujours en principe sépa-rés à l’école primaire (2 339 écoles mixtes en France en 1958). Les programmes, très semblables, se différencient plus nettement à partir de 1923 : celui des fi lles comprend notamment l’enseignement ménager.

En général, fi lles et garçons continuent d’être scolarisés dans des établissements différents, et leurs professeurs sont du même sexe qu’eux. Mais le cursus des lycées de fi lles fi nit par s’aligner sur celui des lycées de garçons. La réforme engagée par Léon Bérard en 1924 conduit à l’assimilation des deux enseignements secondaires, masculin et féminin.

Page 28: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

32

Prescriptions et usages

L’épreuve du réel

Le grand ennemi de l’éducateur, c’est l’habitude.Instructions relatives au nouveau plan d’études

des écoles primaires élémentaires,20 juin 1923.

Les tourmentes du monde n’affectent guère les instructions offi cielles… 1923, 1938, 1945, 1957 : les textes qui régissent l’enseignement des sciences – et l’ensei-gnement primaire en général – affi chent une belle stabilité. Le contenu des livres de classe, bien logiquement, ne varie guère non plus, mais les illustrations s’adaptent aux changements d’époque, du moins quand les ouvrages ne sont pas réimprimés à l’identique. Conformément aux instructions de 1945, les manuels s’intitulent plus souvent « leçons d’observation » que « leçons de choses ».

À « l’enseignement par l’aspect » s’ajoute, en 1923, l’expérimentation, ou « ensei-gnement par l’action », qui veut décupler l’effi cacité de l’art pédagogique en donnant un rôle plus actif à l’écolier (Instructions relatives au nouveau plan d’études des écoles primaires élémentaires, 20 juin 1923).

Idéalement réalisée par les élèves (et non par le maître) et destinée à confi rmer ou infi rmer une hypothèse (plutôt qu’à stimuler l’intérêt de l’enfant), l’expérimentation semble toutefois davantage un modèle à atteindre qu’une pratique effective.

À leur sortie de l’école normale, les élèves maîtres sont munis d’un nécessaire scientifi que garni de quelques appareils simples et de quelques produits. Une me-sure à l’effi cacité toute relative, si l’on en juge par les sanctions dont l’inspection menace ceux qui n’expérimentent ni n’observent et… le trop bon état de conservation de certains instruments scientifi ques ! Ces appareils seraient-ils les cautions d’une expérience dessinée au tableau noir plutôt que les outils d’une expérience réelle ?

Cf. Marc Chamoux, Inventaire descriptif d’anciens instruments scientifi ques dans les établissements scolaires. Biographie des inventeurs et constructeurs de ces instruments. Avec une liste de 700 instruments repérés. Mémoire pour l’INRP, Service d’histoire de l’éducation, 1997. Et Inventaire des instruments scientifi ques anciens dans les établissements scolaires mis en ligne sur [http://www.inrp.fr/she/instruments/]etPhysique, côté cours, Cabinets de physique dans l’enseignement secondaire au XIXe siècle, collection Francis Gires; catalogue de l’exposition organisée par la Ville de Périgueux, le Musée du Périgord et Francis Gires, 2 juillet/24 novem-bre 1997, Musée du Périgord, Périgueux, 1997. Catalogue consultable sur le site Internet de l’École des sciences de Bergerac [http://www.eds24.fr.st/cabphys]. Exposition conservée au Conservatoire de l’éducation et des méthodes pédago-giques, musée Bernard d’Agesci de Niort - ouverture prévue en 2005 - (donation Francis Gires).

Qui dit usage dit usure (Instructions relatives au nouveau plan d’études des écoles primaires élémentaires, 20 juin 1923). Sans bruit, la leçon de choses s’est installée dans le train-train des leçons de sciences ordinaires, avec ses résumés à apprendre par cœur et, ce qui en commande probablement tout le curriculum réel, ses épreuves

panneau

I.8

Page 29: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

33

inscrites au certifi cat d’études. Insidieusement, elle vient à se confondre avec la leçon de mots, qu’elle avait eu pourtant vocation, à l’origine, de suppléer.

Dès 1891, des sujets de sciences (ou d’histoire, ou de morale) doivent servir de support à l’épreuve de composition française du Certifi cat d’études primaires (CEP). À partir de 1917, l’épreuve de sciences gagne en autonomie : les candidats doivent dé-sormais faire une composition sur les connaissances scientifi ques usuelles, évaluée davantage sur l’exactitude des connaissances que sur la qualité de la rédaction.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

L’enseignement scientifi que à l’école, cours moyen, Paris, Armand Colin, 1927.

Les sciences au certifi cat d’études, CM-CEP (préparation au certifi cat d’études primaires, écoles de fi lles), Delagrave Librairie, 1933.

Les sciences au cours moyen 2e année. Leçons de choses - classe de 7e des lycées et collèges, Hatier 1941.

Leçons de choses, cours moyen et supérieur, Classiques Hachette, 1956.

Exercices d’observation, cours moyen 1ère et 2e années, Société universitaire d’édition et de librairie, 1967.

Documents Musée national de l’éducation.

Dessin : écoliers en classe avec leur institutrice. Collection privée Jean-Charles Rousseau.

Dessins extraits de L’enseignement scientifi que à l’école, cours moyen, par G. Colomb, Librairie Armand Colin, 1936 (16e édition). Instruments rassemblés au Conservatoire de l’éducation et des méthodes pédagogiques de Niort (donation Francis Gires) et photographiés par Francis Gires.

– fi g. 89 (page 87) / photographie d’un pyromètre à levier ;– fi g. 166 (page 172) / photographie d’un faisceau magnétique (assemblage

d’aimants en fer à cheval) ;– fi g. 161 (page 166) / photographie d’une cage de Faraday.

En regard des instruments scientifi ques complexes dont sont équipées les écoles normales, les gravures des manuels présentent des objets très simplifi és, sans qu’il soit possible de déterminer si cette schématisation est celle du dessin ou de l’instrument lui-même, adapté et « bricolé » pour l’usage du primaire.

Texte des épreuves du certifi cat d’études primaires proposées le 7 juin 1919 au Donjon, reco-pié par Antoinette Escurat, institutrice. Collection privée Béatrice Ajchenbaum-Boffety.

Certifi cat d’études primaires délivré à Melle Pinaud Marie le 13 juin 1934 à Angoulême. Musée national de l’éducation

Page 30: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

34

La leçon de chosescontre la leçon de choses

Les sciences chez Freinet

Quittons donc le manuel et laissons vivre nos élèves.Célestin Freinet,

Clarté ou le Bulletin français de l’internationale de la pensée,1925.

Dans le sillage de l’« éducation nouvelle », l’école moderne de Freinet revivifi e la leçon de choses. D’une part, l’enseignement des sciences ne se fait pas dans les livres, mais dans la vie (promenades, observations directes de la nature…) et au gré des cir-constances. D’autre part, la méthode naturelle d’apprentissage que prône Freinet pri-vilégie le tâtonnement expérimental ; c’est là un procédé pédagogique essentiel parce que conforme à la créativité enfantine qu’il faut faire entrer à l’école. Les questions simples et des incitations motivantes du maître doivent conduire les élèves à adopter une attitude de recherche et à développer l’ensemble de leurs possibilités. L’échec étant source d’inhibition, l’école doit inciter l’enfant à poursuivre ses essais plutôt que de chercher à le domestiquer et de le sanctionner.

Les dispositifs mis en place importent donc davantage que les contenus auxquels ils s’appliquent. Ce n’est pas tant l’enseignement des sciences qui préoccupe Freinet qu’une rénovation globale de la pédagogie et même des fi nalités de l’école primaire : une école de la vie où l’élève cède la place à l’enfant, et une école émancipée pour un travailleur émancipé.

Freinet et ses disciples vont ainsi expérimenter et élaborer un certain nombre de principes, mis en œuvre grâce à des techniques qui évoluent avec le temps. La primauté de l’expression libre (texte libre) va de pair avec la volonté de socialiser l’enfant par le rassemblement et la mise au point collective de travaux individuels, qui font ensuite l’objet d’une diffusion (par l’imprimerie, le journal scolaire ou la cor-respondance scolaire, mais aussi la radio et le cinéma). Si les activités scientifi ques entendent privilégier le tâtonnement expérimental, il s’agit également d’enrichir et de renouveler les contenus eux-mêmes (grâce aux enquêtes, aux observations et aux expériences), et de favoriser les apprentissages scolaires en développant la personna-lité de l’enfant (avec la Bibliothèque de travail - BT - ou les fi chiers autocorrectifs), et en instaurant des relations coopératives entre le maître et ses élèves. Enfi n, les publications du mouvement s’emploient à encourager la production de ressources par et pour les maîtres (revue L’Éducateur, « bandes enseignantes »). En 1928, Frei-net fonde ainsi la Coopérative de l’Enseignement Laïc (CEL) pour publier les outils produits par le mouvement (notamment la revue L’imprimerie à l’école, qui devient L’Éducateur prolétarien en 1932, puis L’Éducateur en 1947).

Les conceptions de Freinet ont connu une postérité non limitée au courant de l’école moderne. En témoigne notamment la pédagogie institutionnelle, fondée par Fernand Oury au lendemain de la Libération.

Le plan Langevin-Wallon qui, après la guerre de 1939-45, a porté les espoirs d’une rénovation profonde du système d’enseignement, s’est aussi réclamé de la péda-gogie Freinet.

panneau

I.9

Page 31: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

35

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Pionniers Alpes maritimes, du 6/4/37, «Au musée d’histoire naturelle»;

Bibliothèque de travail, 26 mars 1937, «Les abeilles, Observations faites par les élèves de l’école des Charbonniers (Vosges) et complétées par leur instituteur : Lorrain»;

L’Éducateur prolétarien, 15 mai 1937 n° 16, page 285, «Le fi chier de sciences», par Roger Boyau;

L’Éducateur prolétarien, 25 mai 1936 n° 16, page 323, «Les abeilles à l’école».Nous n’allons plus chercher dans les livres ni dans les programmes la base essentielle de notre effort éducatif. Toute pédagogie est faussée qui ne s’appuie pas, d’abord, sur l’éduqué, sur ses besoins, ses sentiments et ses aspirations les plus intimes. Nous scruterons donc l’âme de l’enfant et nous avons, pour y parvenir, une technique qui s’est révélée suffi samment opérante : la rédaction libre, l’imprimerie à l’école et la correspondance interscolaire.

Extraits d’un article de C. Freinet de 1929,reproduit dans Elise Freinet, Naissance d’une pédagogie populaire.

Historique de l’Ecole Moderne, Bibliothèque de l’École Moderne, Paris, 1963,et Petite collection Maspéro, Éd. La Découverte, 1981.

Étude du milieu par les correspondances scolaires reçues par la coopérative scolaire de Fontaine-les-Grès, Aube, «Les pommes, le cidre»; I «Importance de la production de cidre, IV «Le cidre».

L’école s’attarde encore parfois à pratiquer la traditionnelle leçon de cho-ses pour parvenir à une connaissance méthodique de la poule, par exem-ple. (…) La leçon se fera sur la poule immobile – morte si besoin est – afi n d’examiner à l’aise bec et langue, pattes et plumes. Or, l’enfant voit d’abord vivre la poule et c’est dans sa fonction de poule vivante et agissante qu’il apprend à en connaître par le détail les caracté-ristiques particulières. Et cette connaissance vivante est seule défi nitive.

Célestin Freinet,Méthode naturelle de lecture,

Éditions de l’École Moderne française, 1961et Œuvres pédagogiques, 2, Paris, Le Seuil, 1994.

Étude du milieu par les correspondances scolaires reçues par la coopérative scolaire de Fontaine-les-Grès, Aube : «Le roulage»; «Les diffi cultés du paludier»; «La récolte du sel».

Qui aura la prétention d’immobiliser dans un livre une vie aussi mobile et aussi diverse selon les régions que celle de nos petits écoliers ?

Célestin Freinet,Clarté ou le Bulletin français de l’internationale de la pensée, 1925,

cité dans Freinet et la pédagogie, par Liliane MauryParis, PUF 1988, page12.

Portrait de Célestin Freinet avec ses élèves.Documents Musée national de l’éducation.

Page 32: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

36

Sciences des fi lles,sciences des garçons

(1880 - 1950)Identités et disparités

Prenez garde de ne pas vous égarer en courant dans le domaine scientifi que ; puissiez-vous, en sortant du cours de chimie générale, savoir confectionner un pot-au-feu.

Discours de Jules Verneau lycée de fi lles d’Amiens,

Le progrès de la Somme, 30 juillet 1893.

La loi Ferry de 1882 prévoit l’obligation d’instruction pour les deux sexes, et un programme de sciences identique pour les fi lles et les garçons. Pourtant, la mixité n’existe en principe ni pour les élèves ni pour les maîtres, et les institutrices ont fait à l’école normale moins de sciences que leurs collègues masculins… Tout concourt en somme à soupçonner, derrière l’identité formelle du programme, une disparité réelle des études scientifi ques primaires. Les Instructions offi cielles de 1923 rendront d’ailleurs cet écart plus visible, notamment en associant l’enseignement ménager à l’enseignement scientifi que des fi lles.

Sans perdre son caractère essentiel d’éducation, sans se changer en atelier, l’école primaire peut et doit préparer, prédisposer, en quelque sorte, les garçons aux futurs travaux de l’ouvrier et du soldat, les fi lles aux soins du ménage et aux ouvrages de femmes.

Arrêté du 27 juillet 1882,réglant l’organisation pédagogique

et le plan d’études des écoles primaires publique, extraits.

Notre répartition du programme de sciences physiques et naturelles des cours moyen et supérieur convient aux écoles urbaines de garçons; elle ne saurait con-venir aux écoles de garçons des campagnes ni aux écoles de fi lles, qui doivent donner en plus un enseignement agricole ou maritime ou ménager et n’ont les unes que deux heures et demi, les autres que deux heures, comme dans les villes, à consacrer par semaine à l’enseignement scientifi que.

Les programmes offi ciels des écoles primaires élémentaires, 1923-1924.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Les sciences appliquées à la classe de fi n d’études primaires, Écoles rurales de garçons, par René Jolly, Fernand Nathan, 1949. Musée national de l’éducation.

Les sciences appliquées à la classe de fi n d’études primaires, Écoles de fi lles, Certifi cat d’études primaires, par René Jolly, Fernand Nathan, 1948. Collection privée Monique Sicard.

École de fi lles de Baugé : leçon de botanique. Musée national de l’éducation.

École primaire de fi lles, leçon de repassage. Musée national de l’éducation.

Travail du bois en atelier. Musée national de l’éducation.

En amphithéâtre : les élèves d’une école normale primaire de fi lles. Musée national de l’éducation.

panneau

I.10

Page 33: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

37

Les images et leurs usages

L’enseignement par l’aspect

La connaissance doit nécessairement débuter par les sens.Jean Amos Comenius, 1658

Dans le sillage de Comenius (1592-1670), qui fait de l’enfance l’âge de l’éveil des sens, la IIIe République promeut la pédagogie par l’image sur les supports les plus variés. Panneaux muraux, couverture de cahiers, « bons points », chromos publici-taires… illustrent un modèle de science encyclopédique consistant à collectionner, identifi er et classer des séries de sujets en miniature.

Langage universel, stimulant de la curiosité enfantine, l’image s’avère un instru-ment de connaissance à part entière, mais aussi de formation morale. Ces exigences commandent les normes esthétiques qu’elle doit respecter.

Faire suivre à l’enfant des « leçons de choses sans les choses » : telles sont à la fois la raison d’être de manuels illustrés, les risques qu’ils présentent et les craintes qu’ils suscitent. Si les images peuvent être utiles, c’est sous certaines conditions : dessins au trait et schémas plutôt que photographie, coloriage en aplats de couleurs bien dis-tinctes, absence de relief et de perspective…: une grammaire des formes de l’image pédagogique est élaborée, destinée à faciliter la compréhension des contenus. Ces normes restent inchangées jusqu’au milieu du XXe siècle.

Textes rédigés avec le concours de Ségolène Le Men, directrice des études littéraires, École normale supérieure, Paris, et auteur notamment de « L’enfance et le texte », in Le grand atlas des littératures, ouvrage coll. dirigé par Anne-Marie Christin, Éd. Encyclopaedia universalis, 1990,et« La science enfantine et l’histoire du regard », in La science pour tous, ouvrage coll. dirigé par S. Le Men, collection Les dossiers du musée d’Orsay, Éd. Réunion des musées nationaux, Paris, 1994.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Chromos publicitaires de la chocolaterie d’Aiguebelle (Drôme) : portraits de Buffon et de Lavoisier. Collection privée Henri Georges.Ces chromos, comportant une image publicitaire au verso, étaient donnés à l’unité à l’occa-sion d’un achat (de chocolat ou de chicorée par exemple). Réunis en séries de 6 vignettes le plus souvent, ils étaient ensuite collés par les enfants qui les collectionnaient dans des albums pouvant contenir jusqu’à un millier d’images.Beaucoup de ces séries thématiques (antialcoolisme, médecine pratique, expositions interna-tionales..) ont une visée pédagogique ou didactique.

Leçons de sciences physiques et naturelles avec leurs applications. Cours moyen et supérieur par Ch. et P. Drouard, A. Manevy, Éd. Bricon et Lesot.

Jusqu’à ce jour, les ouvrages similaires ne comprenaient que des dessins en noir. Nos éditeurs n’ont pas hésité à s’imposer de lourds sacrifi ces pour mettre, partout où c’était utile, ces dessins en couleurs, de façon à procurer l’illusion complète des choses et à permettre de donner un véritable enseignement par l’aspect, comme le recommandent tous les maîtres de la pédagogie.

panneau

I.11

Page 34: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

38

Ces dessins, tous originaux, ont été exécutés avec le plus grand soin ; ils donnent au livre ce caractère artistique que préconise la circulaire ministérielle du 24 sep-tembre 1899, où il est parlé des tableaux en couleur et du sentiment du beau qu’il faut développer de bonne heure chez les enfants. Science et esthétique ne s’excluent pas ; au contraire.

Extrait de l’Avertissement, page 2.

Images fi xes : les vues pour lanternes magiques

La lanterne magique peut et doit être autre chose qu’un jouet d’enfant sans portée. Anonyme, Le magasin pittoresque, 1877

A l’engouement de l’administration scolaire pour l’enseignement par l’aspect et les leçons de choses correspond un intérêt croissant pour l’usage des projections lu-mineuses, qui deviennent un outil pédagogique d’avant-garde.

D’abord sources de divertissement liées au développement du marché et de l’in-dustrie du jouet, les premières projections lumineuses, par lanternes magiques, pro-posent ainsi, à côté des vues qui privilégient les thèmes traditionnels (caricatures, diableries…) et le répertoire spécifi quement lié à l’enfance, une production destinée à transmettre des connaissances sous forme de récréation instructive.

Progressivement, les domaines récréatif et didactique se différencient par leurs techniques et leurs supports. L’enseignement par l’aspect, plutôt que de se dévelop-per dans la production des marchands de jouets, va faire appel à des vues et à des instruments spécifi quement conçues pour sa mission : positifs photographiques très appréciés pour leur qualité technique, leur fi nesse et leur précision, et, plus tard, vues sur papier, plus économiques, solides et maniables que le verre.

Lors de la projection, ces vues, comportant parfois une légende ou un court texte, sont accompagnées du commentaire oral du conférencier.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Histoire des animaux, deux vues sur verre numérotées par plaque pour lanterne-jouet, juxtaposées de gauche à droite. n°7 / Le Cerf // n°8/ Le Loup, 2e moitié du XIXe siècle. Musée national de l’éducation.« Chaque animal fait l’objet d’une mise en situation dramatique ou pittoresque dans son environnement ».

(Cat.153 in Images lumineuses,Tableaux sur verre pour lanternes magiques

et Vues sur papier pour appareils de projection,par Annie Renonciat,

inventaire des collections du Musée national de l’éducation,volume 1, sous la direction d’Armelle Sentilhes

INRP, 1995, page 141.)

Appareil de projection, Musée national de l’éducation.

3 vues didactiques d’astronomie : vues uniques sur verre, début du XXe siècle. (Cat. 156 et 157 in Images lumineuses, op. cit.). Musée national de l’éducation.

Enseignement par les projections lumineuses, manuscrit de J. Blain, instituteur, école com-munale laïque de Saint-Forgeux, 1894-1895, Musée national de l’éducation.

Page 35: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

39

Les images et leurs usages

La science à l’écran

Images fi xes : les vues pour « appareils de projection »

L’appareil de projection est devenu un puissant moyen d’instruction.Nouveau Larousse illustré

1897-1904.

Davantage qu’auprès des enfants, c’est dans les cours et conférences publiques pour apprentis et adolescents que se répand l’usage pédagogique de la lanterne de projection : lanterne magique perfectionnée, elle prend, dans cet emploi, le nom d’«appareil de projection ». Les pédagogues, d’abord réticents devant un instrument soupçonné d’encourager la paresse chez l’élève, doivent s’incliner : moyen de faire venir les jeunes gens aux cours du soir, il est aussi le moyen de les retenir et de les faire revenir.

Facultatifs, les cours d’adultes et d’apprentis sont renforcés en 1895. L’enseigne-ment peut y porter sur les matières du primaire ou comprendre des cours théoriques ou pratiques appropriés aux besoins de la région, des conférences ou lectures sur des sujets très divers. Ils visent alors moins à donner une instruction élémentaire à des adultes demeurés illettrés qu’à apporter un complément d’instruction à l’immen-se foule des enfants qui ne peuvent bénéfi cier du primaire supérieur. Le personnel ordinaire des maîtres et maîtresses , avec le concours de toutes les bonnes volontés, est invité à enrayer l’apathie des esprits et des cœurs dans tout le pays, et principale-ment dans les bourgades isolées, où la vie intellectuelle est si faible.

Les passages en italiques sont extraits du Traité de pédagogie scolaire, précédé d’un cours élémentaire de Psychologie appliquée à l’éducation et suivi d’un appen-dice contenant des notions d’administration scolaire, par I. Carré et Roger Liquier, 8e édition, Librairie Armand Colin, 1907, pp. 197-198.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Vue extérieure du cœur, et notice d’accompagnement (page 4 : « circulation du sang ») Vue photographique sur verre et photographie Musée national de l’éducation.

Vues sur papier : Leçons d’anatomie : Système veineux et Système artériel et livret d’accom-pagnement La circulation et la respiration. Musée national de l’éducation.

La revue Après l’École, « revue illustrée d’enseignement populaire » (1895-1911) est l’œuvre de René Leblanc, inspecteur général de l’enseignement primaire et très actif promoteur des « œuvres post-scolaires ». Chaque livraison reproduit des textes de conférences dont l’insti-tuteur peut s’inspirer, mais aussi, en suppléments gratuits, des planches de vues imprimées en noir ou en couleur sur du papier transparent, permettant au maître de fabriquer des diapo-sitives. Il agrémente ainsi les cours du soir de projections lumineuses qui contribuent à leur succès, tout en instruisant son public des récents développements de la science et des derniers progrès techniques.

panneau

I.12

Page 36: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

40

« Liquides en équilibre » (Cat. 281 in Images lumineuses, op. cit.), vues coloriées au pochoir, imprimées sur papier transparent, éditées par Mazo, Paris, vers 1915. Musée national de l’éducation.

« Copernic, Kepler, Galilée » (Cat.194 ibidem) vues coloriées au pochoir, imprimées sur papier transparent, éditées par E. Mazo, 1916-1920. Musée national de l’éducation.La maison Mazo édite également des vues sur papier, conçues « en vue de la projection sur écran », et accompagnées d’un livret explicatif, comportant un commentaire de chaque vue pour le conférencier. Leur concepteur, Henri Arnould, professeur aux Arts et Métiers, défend ardemment la con-viction, partagée par beaucoup de pédagogues de son temps, d’une supériorité pédagogique des images fi xes sur le cinéma, dont la concurrence se profi le. À ses yeux, alors que la succession et la fugacité des images cinématographiques ne permet-tent pas de graver les idées, la vue fi xe est seule en mesure de transmettre des connaissances méthodiques et rigoureuses, surtout s’il s’agit d’un dessin : simple, concis, immédiatement lisible, il est mieux adapté à l’usage pédagogique que la photographie, et protège ainsi les vertus de l’enseignement magistral.

Textes rédigés avec le concours d’Annie Renonciat, Maître de conférences à l’Université Paris 7 (Histoire éditoriale de l’image), auteur notamment de

Images lumineuses. Tableaux sur verre pour lanternes magiques et vues sur papier pour appareils de projection. Collections du Musée national de l’éducation, INRP, 1995.« Vues fi xes et/ou cinéma dans l’enseignement, naissance d’une polémique (1916-1922) », communication au colloque européen Archives du cinéma pédagogique et scientifi que à l’heure du multimédia, organisé par l’École normale supérieure Fontenay/Saint-Cloud les 21 et 22 oc-tobre 1999 ; publiée dans Béatrice de Pastre-Robert, Monique Dubost, Françoise Massit-Folléa (textes réunis par) Cinéma pédagogique et scientifi que. À la redécouverte des archives, Lyon, ENS, 2004.« L’art pour enfant : actions et discours, du XIXe siècle aux années 1930 », dans L’image pour enfants : pratiques, normes, discours (France et pays francophones, XVIe-XXe siècles), études réunies et présentées par Annie Renonciat, Poitiers, La Licorne, 2003. Voir aussi : Lanternes magiques, tableaux transparents, Ségolène Le Men, Nelly Kunzmann, JJ. Tatin-Courier et al., Éd. Réunion des musées nationaux, 1995.]

Images animées : le cinématographe

Le cinématographe détruit ces effets de l’ignorance qui se croit avisée parce qu’elle est méfi ante et bornée.

Augustin Bessou, Revue pédagogique, 1920

Spectacle éducatif dont l’utilité est reconnue dans le contexte périscolaire, le ci-néma, dans le cadre scolaire, ne fait pas toujours l’unanimité. Pour les uns, il vivifi e l’enseignement du maître, réduit le verbalisme, révèle la diversité vivante de l’univers et suscite l’attention des élèves. Pour les autres, il favorise la passivité intellectuelle et décourage l’effort : où l’on voit qu’on peut à la fois être partisan de l’enseignement par l’aspect et se défi er des illusions et du pouvoir de l’image.

De façon générale, il convient de combiner projections fi xes et cinématographi-ques, ralenties ou animées, et d’encadrer la séance par la parole et l’écrit : la projec-tion cinématographique doit illustrer, et non remplacer, le discours du maître.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Image extraite de La leçon de projection, production non identifi ée, années 1920, reproduite avec l’aimable autorisation de la cinémathèque de Saint-Étienne (droits réservés).

Page 37: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

41

L’Amblyostome, fi lm de 4min 30s de la série « Scientia » ; production Eclair, juillet 1913. © Emetcom. Remerciements à Marc Sandberg.

Montrer un être étrange et exotique sous une forme spectaculaire : tel est l’objectif de ce fi lm de zoologie, qui se préoccupe peu de présenter scienti-fi quement l’amblyostome, métamorphose d’un batracien appelé axolotl. La vulgarisation se veut attractive, mais aussi didactique, comme l’atteste la redondance entre l’image et les intertitres.La grande majorité des fi lms relatifs à l’observation du vivant produits dans le premier tiers du XXe siècle se consacre à montrer l’invisible et l’inconnu : il s’agit en effet de permettre la confrontation de l’enfant avec le réel quand celui-ci ne peut être à sa portée directe. Aussi l’infi niment petit, les animaux exotiques ou étranges, les contrées lointaines, comme les phénomènes physiques et chimiques de fait réservés au laboratoire, pren-nent-ils ici une importance inédite. Tournant le dos à l’univers familier des leçons de choses reproduit dans les manuels, cette orientation prolonge la tradition de la science spectaculaire et des projections à vues fi xes de la fi n du siècle précédent. Préoccupations esthétiques et pédagogiques sont étroitement associées : en témoigne, par exemple, le privilège dont jouit le cinéma muet, puis la volonté de le faire perdurer par le choix délibéré de versions muettes même après l’apparition du fi lm sonore. En plaçant le maître, dépositaire de la parole et du savoir, au centre de la pratique de la projection dans la classe, le fi lm muet valorise également les qualités intrinsèques de l’image, dont les cadrages, les mouvements, les « effets spéciaux » (fondus enchaînés, ralentis, accélérés…), voire la colori-sation par diverses techniques, font l’objet d’attentions particulières.

Film fi xe, séquence extraite de « Hippopotame et crocodile », Musée national de l’éducation.

La bonne voisine, film de 3min 15s, réalisé par Jean Benoît-Lévy sur un scénario de Maurice Flamand, 1928, production Offi ce public d’hygiène social de la Seine. Images reproduites avec l’aimable autorisation de Liliane Jolivet et de l’association Arts et Éducation.

À visée édifi ante, histoire édifi ante. Tous les ingrédients de la fi ction se trouvent ici réunis : des personnages exemplaires et fort contrastés (les « bonne » et « mauvaise » voisines) interprètent dans des décors « réalistes » (un intérieur salubre et pimpant qui respire le dynamisme et le bonheur / un appartement sale et délabré où règnent le désœuvrement et la maladie) un scénario bien connu, le combat du Bien contre le Mal. Au centre du dispositif, la visite du médecin, dont le « diagnostic » suscite l’intervention de la bonne voisine. En quelques séquences, la situation initiale est réparée. Terrassant ses adversaires de son seul pouvoir de conviction, l’hygiène a triomphé. Simplifi catrice sans doute, cette fable a une cible : le milieu urbain, mo-deste et féminin (les pères sont absents) où se déroule l’action. Sur ces familles veille l’ombre tutélaire de la science médicale.

L’air liquide, film de 12min 10s, réalisé autour de 1920 ; production non identifiée. Collection cinémathèque Robert-Lynen de la Ville de Paris - droits réservés.

L’économie du découpage, le cadre frontal et resserré sur les strictes composantes de la démonstration - instruments, gestes, manipulateur - nous font assister ici à l’exécution d’une expérience à tous points de vue magistrale. Théâtralisée par une sobriété somme toute très travaillée, la séquence fait du scientifi que le détenteur de la vérité cachée des choses et du laboratoire le lieu même où s’accomplissent à la fois la révélation et la transmission du savoir. Le laboratoire devient ainsi aux yeux de tous le théâtre pédagogique de la science en action.

Page 38: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

42

Antérieure à l’apparition du fi lm scientifi que, cette mise en scène était déjà celle de Pasteur, donnant dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, le 7 avril 1864, le cours public sur - ou plutôt contre - la génération spontanée qui, à grand renfort de projecteur et de faisceau lumineux, va lui assurer la victoire défi nitive dans la controverse qui l’oppose alors à Pouchet.

« Ce soir, projections lumineuses », photographie Musée national de l’éducation.

Textes rédigés avec le concours de Béatrice de Pastre-Robert, directrice de la ciné-mathèque Robert-Lynen de la Ville de Paris, auteur notamment de

Le cinéma des écoles et des préaux, Films d’enseignements et d’éducation des origines à 1940, livret pédagogique, Cinémathèque Robert-Lynen de la Ville de Paris, Mairie de Paris, 1998 (avec la collaboration d’Emmanuelle Devos) ;La Cinémathèque de la Ville de Paris : 80 ans au service de l’image à l’école, actes du colloque Cinéma-École, Aller-Retour, textes rassemblés par Didier Nourrisson et Paul Jeunet, Publications de l’Université de Saint-Étienne, dé-cembre 2001 ;De la science au spectacle : des monstres à l’écran, communication au colloque Jarry : le monstre 1900, Institut français de Heidelberg, février 2001.

Voir aussi : “ L’audio-visuel au service de l’enseignement : projections lumineuses et cinéma scolaire, 1880-1940 ”, par Armelle Sentilhes , La Gazette des archives, 2e trimestre 1996, nouvelle série n° 173, pp. 165-182.

Page 39: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

43

QUELQUES FIGURES

ARAGO François (1786-1853). Astronome, physicien, enseignant, administrateur, homme d’État, il fi t à l’Observatoire de Paris (ou au Collège de France), dont il fut le directeur, un « cours public d’astronomie élémentaire » de 1813 à 1847. Ce cours est à peu près textuellement reproduit dans les 4 volumes de L’Astronomie popu-laire, parus en 1854. C’est également à Arago, élu membre (1809) puis secrétaire perpétuel (1830) de l’Académie des sciences, que l’on doit la création, en 1835, des Compte rendus des séances de l’Académie des sciences ; hebdomadaires, ceux-ci publient toutes les communications présentées en séances et sont ouverts aux non-académiciens. En permettant la diffusion immédiate des travaux scientifi ques, ils vont devenir une sorte de tribune de la vie scientifi que et renouvellent l’image de l’Académie des sciences, qui acquiert alors une réputation internationale.

BERNARD Claude (1813-1878). Ses recherches et ses découvertes, de 1843 (doc-torat en médecine) à 1860, lui valent la notoriété et la création d’une chaire de phy-siologie générale que le gouvernement fonde pour lui à la faculté des sciences de Pa-ris. Professeur de médecine expérimentale au Collège de France (1855), professeur de physiologie comparée au Muséum d’histoire naturelle (1868) ; sénateur (1869), il est élu membre de l’Académie des sciences (1854), de l’Académie de médecine (1861), puis de l’Académie française (1869).Son ouvrage Introduction à l’étude de la médecine expérimentale, publié en 1865, énonce les règles de l’expérimentation dans les sciences biologiques et consacre la notion de déterminisme biologique dans les phénomènes vitaux.

BERT Paul (1833-1886). Physiologiste, docteur en médecine et en science, profes-seur au Muséum d’histoire naturelle puis à la Sorbonne, membre de l’Académie des sciences, Paul Bert fut également un homme politique éminent : préfet du Nord, dé-puté de l’Yonne, ministre de l’Instruction publique dans le cabinet Gambetta (1881-82), gouverneur général en Annam et au Tonkin. Grand réformateur, il contribua notamment à l’adoption de la gratuité et de l’obligation de l’instruction primaire. Partisan enthousiaste de l’enseignement scientifi que, il est l’auteur d’ouvrages scien-tifi ques majeurs, d’un manuel de science, d’un manuel d’instruction civique et de morale et de livres de lecture scolaires à thématique scientifi que.

BUISSON Ferdinand (1841-1932). Républicain de la première heure, il refuse de prêter serment à l’Empereur après l’agrégation de philosophie et s’exile en Suisse. Nommé par Jules Ferry directeur de l’enseignement primaire (1879 - 1896), il est l’un des grands acteurs des lois scolaires de la République qu’il marque de l’em-preinte de son protestantisme libéral. Il dirige la publication du Dictionnaire de pédagogie (1882-1887, 2e édition 1911). Élu député radical-socialiste (1902-1924), il fut aussi président de la Ligue de l’enseignement, puis de la Ligue des droits de l’homme. Prix Nobel de la paix 1927.

COMTE Auguste (1798-1857) est le créateur de la philosophie positive et l’inven-teur du mot même de « positivisme ». Sa pensée, qui fait du savoir scientifi que un savoir exemplaire, car exemplairement objectif, et qui attribue à la science des vertus éducatives générales, a inspiré nombre de Républicains qui allaient mettre en place la IIIe République et réaliser son œuvre scolaire. Son infl uence s’étendit au-delà de nos frontières (au Brésil notamment).

Page 40: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

44

CURIE Marie (1867-1934). Née à Varsovie, Marie Sklodowska vient à Paris pour-suivre des études supérieures alors inaccessibles aux jeunes fi lles en Pologne. Les recherches qu’elle entreprend d’abord seule, puis avec Pierre Curie, qu’elle a épousé en juillet 1895, les conduisent en 1898 à la découverte du polonium, puis du radium. En 1903, ils reçoivent, avec Henri Becquerel, le Prix Nobel de physique pour la dé-couverte de la radioactivité.Après la mort accidentelle de Pierre Curie en 1906, Marie devient chargée de cours, puis professeur : succédant à son mari, elle est la première femme à occuper une chaire en Sorbonne. En 1911, elle reçoit un second Prix Nobel, de chimie cette fois, pour la découverte du radium et la détermination de son poids atomique.Élue membre de l’Académie nationale de médecine en 1922, Marie Curie ne fut jamais membre de l’Académie des sciences, à laquelle elle a présenté sa candidature en 1911 : L’Académie lui préféra Edouard Branly, et Marie ne se représenta pas. Pierre et Marie Curie ont eu deux fi lles : Irène, née en 1897, et Ève, née en 1904.

FERRY Jules (1832-1893). Avocat, membre du corps législatif en 1869, maire de Paris en 1870, élu député en 1871 (gauche républicaine), il est nommé ministre de l’Instruction publique en 1879, portefeuille qu’il conserve une fois élu président du Conseil en 1880-1881 et 1883-1885. Libéral, anti-jacobin, positiviste et anticlérical – adversaire de la loi Falloux dès 1850 –, il s’attache à limiter l’accès des congré-gations à l’enseignement avant de réformer l’enseignement primaire, de développer les écoles normales d’instituteurs et de transformer l’enseignement secondaire. Son nom reste par ailleurs associé à une vaste politique d’expansion coloniale (Tunisie, Congo, Madagascar, Tonkin…). Renversé en mars 1885, Jules Ferry, sénateur en 1891, devient à la veille de sa mort président du Sénat.

FREINET Célestin (1896-1966). Dans les années 1920, comme d’autres jeunes ins-tituteurs marqués par le massacre de la Grande guerre, Célestin Freinet voit dans une réforme de la pédagogie le moyen de construire un monde plus juste et plus humain, en même temps qu’il s’engage dans le syndicalisme révolutionnaire.Dès 1924, Freinet introduit l’imprimerie dans sa classe rurale des Alpes maritimes, fait connaître ses expériences et suscite des vocations : correspondance scolaire, créa-tion d’une « Coopérative d’Entr’aide pédagogique » (1926) puis d’une « Coopérative de l’enseignement laïc » (CEL, 1928), édition de revues (L’Imprimerie à l’école, 1926, La Gerbe, 1927…) : le mouvement Freinet est lancé. Violemment pris à parti par ses détracteurs, peu soutenu par son administration, Freinet fonde en 1935, avec son épouse Élise, une école privée « prolétarienne » qui promeut ses méthodes. La Seconde Guerre mondiale interrompt les activités du mou-vement, qui redémarre à la Libération. En 1964, l’école Freinet est reconnue comme école expérimentale par le ministère de l’éducation nationale.Les conceptions de Freinet ont connu une postérité non limitée au mouvement de l’école moderne qu’il a fondée (Création de l’« Institut coopératif de l’école mo-derne » - ICEM - en 1947 ; création de la Fédération internationale des mouvements d’école moderne - FINEM - en 1957).En témoigne notamment la pédagogie institutionnelle, fondée par Fernand Oury au lendemain de la Libération. Pour Oury, fortement marqué par l’approche psycha-nalytique, les formes de travail coopératif envisagées par Freinet ne suffi sent pas. Il faut faire de la classe un lieu fortement institutionnalisé, au sein duquel les enfants

Page 41: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

45

pourront avoir une action instituante : le « Conseil », moment où les élèves règlent les problèmes et les confl its survenus au sein du groupe et déterminent les règles de celui-ci, en est le moyen principal.Le plan Langevin-Wallon qui, après la guerre de 1939-45, a porté les espoirs d’une rénovation profonde du système d’enseignement, s’est aussi réclamé de la pédagogie Freinet (voir infra).

Cf. L’éducation nouvelle, Angela Médici, PUF, coll. « Que sais-je ? » 1990 (13e édition).

GUIZOT François (1787-1874). « Ce protestant a été élevé par une mère très croyante, son père, un soyeux nîmois, ayant été guillotiné par les Jacobins. Il a reçu à Genève une éducation sévère, mais solide et large; il connaît l’allemand, l’anglais et l’italien. A vingt-cinq ans, en 1812, il est nommé professeur d’histoire moderne à la Sorbonne et sera un grand professeur. Sous la Restauration, il s’oppose, avec les libé-raux, au gouvernement ultraroyaliste, qui suspend ses cours quelques années. Mais ce n’est pas un libéral. Il fait partie des «doctrinaires» qui veulent fi xer la Révolution et refusent à la fois le retour à l’Ancien Régime et de nouvelles avancées politiques. Il ne participe pas à la révolution de 1830. Homme d’ordre, centralisateur, il devient ministre de l’instruction publique en 1832, dans un gouvernement résolu à combat-tre aussi fermement les ultras que le parti du mouvement. Il est résolu à développer l’instruction primaire car, à la différence des ultras, il y voit un facteur d’ordre, et non de désordre social. «L’ignorance, écrit-il en 1816, rend le peuple turbulent et féroce». Mais pour que l’instruction assure «l’ordre public et le repos de l’avenir», on ne saurait la livrer au hasard : elle intéresse au premier chef l’Etat. Dans les débats du début de la monarchie de Juillet, alors que le roi a promis une loi pour organiser la liberté de l’enseignement, Guizot est persuadé que les initiatives privées et com-munales sont insuffi santes. Il est partisan de ce qu’un auteur anonyme appelle en 1831, pour la première fois, le «service public d’enseignement». En jouant à la fois sur la loi, l’administration et la pédagogie, il fait de l’école, selon le titre de Christian Nique, une affaire d’État. »

Antoine Prost,extrait de «Il y a 170 ans, Guizot créait l’école primaire»,

Le Monde de l’Éducation n° 314, mai 2003, pp. 70-71.Reproduit avec l’aimable autorisation du Monde de l’Éducation.

Cf. Comment l’école devint une affaire d’État : 1815-1840 par Christian Nique, Éd. Nathan, 1990.

PAPE-CARPANTIER Marie (1815-1878). D’abord surveillante de « salle d’asile » (institution destinée à accueillir les enfants pauvres de moins de 7 ans, trop petits pour rester seuls chez eux ou dans la rue quand les parents travaillent), Marie Pape-Carpantier devient directrice de salles d’asile à La Flèche (1835), puis au Mans (1842). Nommée directrice de la première école normale maternelle (Paris, 1848) pour former les femmes qui s’occuperont de jeunes enfants, elle crée ses propres outils éducatifs, parmi lesquels le boulier numérateur à boules de tailles et de cou-leurs différentes, la toupie spectrale pour enseigner les couleurs, les comparer, leur donner un nom et les replacer dans l’ordre physique, les aiguilles horaires à principe visible pour expliquer pourquoi la petite et la grosse aiguilles ne tournent pas à la même vitesse, ou le lavabo à nappe globulaire, un lavabo en zinc à prix très modique, de 1,75m de diamètre, où douze enfants peuvent se laver en même temps.Ces objets, qu’accompagne la Notice sur l’éducation des sens et quelques instru-ments pédagogiques décrivant ses inventions, sont présentés lors de l’Exposition universelle de 1878. Auteur d’une quarantaine d’ouvrages pédagogiques (Conseils

Page 42: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

46

sur la direction des salles d’asile - 1845 - Histoires et leçons de choses pour les enfants - 1858 - ), elle fut la première femme à s’exprimer à la Sorbonne, grâce à Victor Duruy, devant des instituteurs réunis à l’occasion de l’Exposition universelle de 1867.Source : Anne Chanteux, in exposition Portraits d’Inventives, Conservatoire national des arts et métiers, © CNAM, 2004.

Cf. Marie Pape-Carpantier : fondatrice de l’école maternelle, par Colette Cosnier, Paris, Fayard, 2003. L’invention du jeune enfant au XIXe siècle : de la salle d’asile à l’école mater-nelle, par Jean-Noël Luc, Paris, Belin, 1997.

PASTEUR Louis (1822-1895). Chimiste et biologiste, auteur de très nombreux tra-vaux qui lui valent tôt la notoriété et son élection à l’Académie des sciences (1862) dont il fut également Secrétaire perpétuel (1887), créateur et premier directeur de l’Institut Pasteur (1889), il fut également membre de l’Académie de médecine (1873) et de l’Académie française (1881). Louis Pasteur a d’abord voué un attache-ment sentimental à l’Empire qu’incarne, à ses yeux, Napoléon III. Après la défaite militaire de Sedan et la chute du Second Empire, c’est dans la IIIe République que Pasteur place son espérance en un avenir éclairé et amélioré par la science. En retour, et en récompense de ses mérites, la République fera de lui un héros, emblématique du nouveau culte de la science.

Plan LANGEVIN-WALLON (1947)A la Libération, une commission chargée de concevoir une réforme générale du système d’enseignement est constituée sous la présidence du physicien (et commu-niste) Paul Langevin, puis, à la mort de celui-ci, du psychologue (et communiste) Henri Wallon. Le plan Langevin-Wallon propose une rupture totale avec l’ancienne organisation scolaire. Au nom de la démocratisation de l’enseignement, il envisage une école unique obligatoire jusqu’à 18 ans, divisée en trois cycles (6-11 ans, 11-15 ans, 15-18 ans). Le dernier cycle (dit « de détermination ») se divise lui-même en trois séries, d’égale valeur culturelle : une série scientifi que, une série littéraire et une série technologique. Les conceptions pédagogiques du plan Langevin-Wallon sont héritées de celles de l’éducation nouvelle, notamment de Célestin Freinet. Le plan Langevin-Wallon n’a jamais été appliqué, mais il a constitué une référence quasi mythologique pour toute la gauche française militant pour l’école unique.

Page 43: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

49

Dates marquantes1958 : naissance de la Ve République, dont Charles De Gaulle est le premier

président.1959 : loi Debré instituant entre l’État et les établissements privés le système

des « contrats ». L’ordonnance Berthoin (6 janvier) prolonge la scolarité obligatoire

jusqu’à 16 ans, préparant l’ouverture du collège à tous les enfants du primaire ; les cours complémentaires deviennent des collèges d’enseignement général (CEG).

1962 : fi n de la guerre d’Algérie ; référendum sur l’élection du président de la République au suffrage universel.

1963 : réforme Fouchet-Capelle : création des collèges d’enseignement secondaires (CES).

1964 : expérimentation du « tiers temps pédagogique ».1968 : événements de mai-juin.1969 : – Georges Pompidou élu président de la République; – arrêté (7 août) instituant une tripartition des disciplines scolaires (15

heures sont consacrées aux mathématiques et au français, 6 heures à l’éducation physique, 6 heures aux « disciplines d’éveil », qui incluent les sciences).

1974 : Valéry Giscard d’Estaing élu président de la République ; droit de vote à 18 ans.

1975 : loi Simone Weil sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG) ; loi d’orientation en faveur des personnes handicapées.

1975 : réforme Haby instituant le collège unique.1975 : loi d’orientation en faveur des personnes handicapées (30 juin).1977 : publication des instructions offi cielles concernant l’Éveil ; l’expression

« disciplines d’éveil », déjà concurrencée par celle d’«activités » d’éveil, y disparaît complètement.

1981 : François Mitterrand devient le premier président socialiste de la Ve République.

1982 : création, par le ministère Savary, des zones d’éducation prioritaire (ZEP), associant des écoles primaires et un collège.

1983 : rapport de Louis Legrand au ministre de l’éducation nationale, Pour un collège démocratique, qui préconise la « pédagogie différenciée ».

1984 : échec du projet de réforme d’Alain Savary pour un service public et laïque unifi é intégrant l’enseignement privé.

1985 : Jean-Pierre Chevènement, ministre de l’éducation nationale ; publication de nouveaux Programmes et instructions pour l’école élémentaire ; la référence à l’Éveil disparaît ; nouvel objectif : conduire, à l’horizon 1992, 80% d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat ; création d’un « baccalauréat professionnel » préparé dans les « lycées professionnels » nouvellement créés.

1989 : Lionel Jospin ministre de l’éducation nationale ; loi d’orientation (« Nouvelle politique pour l’École ») plaçant « l’élève au centre du système éducatif » ; organisation de l’école primaire en trois cycles et institution du projet d’école.

1991 : (à partir de) création des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), remplaçant les écoles normales d’instituteurs et les centres pédagogiques régionaux (CPR).

1992 : première Science en fête.

Page 44: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

50

Dispositif institutionnel

PRIMAIRE SECONDAIREL’école primaire change d’abord dans ses fi nalités. La prolongation de la scolarité obligatoire (1959) va en faire l’anticham-bre d’un secondaire de plus en plus ouvert à tous. L’école primaire vise désormais à préparer aux études secondaires. Le concours d’entrée à l’école normale témoigne d’une élévation progressive mais rapide du niveau de recrutement :

1945 : le concours se situe après la classe de 3e ; c’est au sein de l’école normale que les élèves maîtres préparent le baccalauréat, désormais exigé des instituteurs;

1969 : le concours se situe après le bacca-lauréat, préparé au lycée;

1986 : les candidats à l’école normale doivent être titulaires d’un DEUG pour se présenter au concours;

1991 : avec la création des IUFM, les can-didats au concours de professeur des écoles doivent être titulaires d’une licence.

En 1964 sont lancées des expérimentations relatives au « tiers temps pédagogique ». Elles aboutissent, en 1969, à une nouvelle réparti-tion des matières de l’enseignement primaire en trois parties (de durées inégales) : l’une est consacrée aux disciplines « fondamentales » (français, mathématiques), l’autre à l’édu-cation physique, la troisième aux disciplines d’éveil, incluant les sciences. Ces dernières font partie des activités à dominante intellec-tuelle (avec l’histoire et la géographie), à côté des activités d’éveil à dominante esthétique (arts plastiques, musique). Le passage de 30 à 27 heures libère le sa-medi après-midi.

L’institut pédagogique national (IPN), héri-tier du Musée pédagogique fondé par Jules Ferry (1879) devenu institut national de re-cherche et de documentation pédagogiques (INRDP), puis institut national de recherche pédagogique (INRP), va jouer, sous la hou-lette de Louis Legrand, un rôle important dans la conception et la diffusion de la péda-gogie d’éveil.

Avec la prolongation de la scolarité obligatoi-re jusqu’à 16 ans, le secondaire perd progres-sivement son caractère socialement élitiste.Deux voies s’ouvrent désormais aux élèves pour continuer leurs études :• les collèges d’enseignement général (CEG,

créés en 1959), issus de la transformation des cours complémentaires ;

• les collèges d’enseignement secondaire (CES, créés en 1963). Ils constituent (jus-qu’à la 3e) le premier cycle de l’enseigne-ment du second degré, et sont des établis-sements distincts des lycées.

Dès lors, selon les textes, le « lycée » désigne les établissements d’enseignement à partir de la seconde.

Les CES proposent 4 fi lières :• classique ;• moderne ;• moderne court : reprend l’enseignement

des CEG ;• transition : à la place des classes de fi n

d’études.Ont vocation à y enseigner les professeurs certifi és (CAPES créé en 1950) et agrégés, et les professeurs d’enseignement général de collège (PEGC), corps de professeurs biva-lents créés en 1969, spécialement destinés à ce cycle d’études.

En 1975, la réforme René Haby créé le col-lège unique. CEG et CES sont supprimés et fondus dans une structure unique, le collège, qui accueille tous les élèves à partir de la 6e, sans fi lières. Cependant, des différenciations subsistent• après la 5e : les élèves peuvent préparer un

certifi cat d’aptitude professionnel (CAP) dans un lycée d’enseignement profession-nel (LEP) ou être orientés vers une classe de relégation : classe pré-professionnelle de niveau (CPPN) ou classe de pré-ap-prentissage (CPA) ;

• après la 3e : les élèves peuvent alors préparer un brevet d’aptitude professionnel (BEP) dans un LEP, ou un baccalauréat de techni-cien dans un lycée technique, ou encore un baccalauréat général (littéraire, économique ou scientifi que) de fait le plus prestigieux.

ex-secondaire traditionnel, conduisant aux études longues et générales

Page 45: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

51

À partir de 1975, la partition primaire / secondaire perd son sens. Ces deux ordres, jusque là séparés, deviennent deux degrés d’un même « système éducatif ». L’ère de l’enseignement de masse a commencé. Après le primaire, devenu un vérita-ble premier degré, tous les enfants accèdent à un second degré dont le premier cycle (jusqu’à la troisième) est commun. Le deuxième cycle du second degré est lui aussi progressivement touché par l’unifi cation du système éducatif : en 1985, les lycées d’enseignement professionnel (LEP) deviennent des « lycées professionnels » (LP), administrés de la même façon que les lycées techniques (dits aujourd’hui « techno-logiques ») et les lycées généraux; les lycées professionnels peuvent conduire, après le BEP, à un bac professionnel, juridiquement égal aux autres, c’est-à-dire ouvrant de droit aux formations de l’enseignement supérieur.

La création des instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM - décret du 14 janvier 1991), désormais rattachés à l’enseignement supérieur, constitue le dernier maillon du processus d’unifi cation. Les instituteurs sont progressivement remplacés par des professeurs des écoles recrutés au niveau de la licence. Les IUFM proposent des préparations aux concours de recrutement, agrégation exceptée, et assurent la formation professionnelle des professeurs des écoles et des professeurs certifi és ou agrégés. Ils assurent également, en liaison avec les inspections académiques, la for-mation continue des enseignants, les MAFPEN ayant disparu.

Les écoles normales, où les instituteurs étaient jusqu’alors formés, disparaissent; il en va de même des centres pédagogiques régionaux (CPR), qui encadraient ad-ministrativement, sous l’autorité des inspections générales, le stage des professeurs du second degré. Il s’agit de donner une culture professionnelle commune à tous les enseignants en un lieu de formation désormais unique.

Filles et garçons

Entre 1958 et la fi n des années 1960, la mixité s’inscrit dans les textes (1963 pour les CES, 1965 pour l’enseignement primaire) et se généralise dans les faits.

Page 46: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

52

Quelques repères institutionnels

1879 : Jules Ferry fonde le Musée pédagogique ; 1882 : une bibliothèque lui est rattachée ;1932 le Musée pédagogique est rebaptisé Centre national de documentation

pédagogique (CNDP) ;1956 : le CNDP devient l’Institut pédagogique national (IPN), doté d’une

triple mission : recherche pédagogique, information et documentation, diffusion de moyens didactiques (émissions de télévision...) auprès des établissements scolaires ; à la même époque sont créés les centres régionaux de recherche pédagogique (dans chaque académie) placés sous sa tutelle (puis sous celle de l’INRDP);

1959 : on rattache à l’IPN l’enseignement par correspondance ;1970 : l’IPN se scinde en deux : s’y substituent l’Institut national de recherche

et de documentation pédagogique (INRDP) et l’Offi ce français des techniques modernes d’éducation (OFRATEME) ;

1976 : l’INRDP perd ses fonctions de documentation et devient l’Institut national de recherche pédagogique (INRP), tandis que l’OFRATEME reprend les fonctions de documentation et d’enseignement à distance et redevient, comme en 1955, le CNDP ;

1980 : le CNDP perd ses attributions pour l’enseignement par correspondance, confi ées à un Centre national d’éducation par correspondance (CNEC) ;

réunies aux collections constituées sur place par le CRDP, les collections du CNDP sont transférées à Rouen, donnant naissance au Musée national de l’éducation, rattaché à l’INRP.

1986 : en mars, le CNEC devient le Centre national d’enseignement à distance (CNED) et l’INRP devient l’Institut national de recherche en éducation et formation (INREF) ;

en octobre, l’INREF redevient l’INRP ;2002 : le CNDP devient Services culture éditions ressources pour l’éducation

nationale (SCÉREN).

Page 47: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

53

L’Éveilcontre la leçon de choses

Une démarche nouvelle

Le but n’est plus d’apprendre des connaissances, mais d’amener l’enfant à cons-truire ses connaissances en partant de ses besoins et de ses intérêts, ainsi il se cons-truira une méthode.

Louis Legrand, 1970Les activités d’éveil à dominante intellectuelle au cours préparatoire,

Recherches pédagogiques 51, Institut national de recherche et de documentation pédagogique,

1971, p. 31.

L’intention de la leçon de choses était d’éviter la passivité des « leçons de mots ». Rendait-elle pour autant l’enfant véritablement actif ? L’idée d’éveil vient d’une ré-ponse négative à cette question : l’élève ne sera actif que si le questionnement prime sur l’observation. La vérité n’est pas à découvrir dans les choses ; elle résulte d’une démarche créatrice et interrogative et d’un tâtonnement expérimental qui exigent du maître de tenir compte du vécu et des représentations des élèves. Le modèle magis-tral et expositif de la leçon est battu en brèche. Le maître reste néanmoins celui qui sollicite l’activité des élèves en fonction d’objectifs préalablement défi nis, celui qui suscite les questions et aide à les formuler, qui guide la découverte et veille à la struc-turation fi nale des connaissances.

IllustrationJouer avec des piles et des ampoules en cours préparatoire ? Un exemple d’activité scientifi -que d’éveil. Les enfants réalisent des montages et les expliquent par des dessins.

Ici, 4 montages différents sont représentés : montage réalisé sans mettre de fi l ; un fi l enroulé autour d’un des bras de la pile et autour du culot de la lampe ; montage avec une pile ronde ; quelquefois, le dessin est faux : c’est le groupe voisin, invité à refaire le montage, qui aidera à effectuer les rectifi cations.

A la même époque, de nombreux ouvrages concernant l’enseignement des scien-ces fl eurissent à l’étranger. L’intérêt renouvelé pour cet enseignement vient d’un choc, provoqué par le lancement du premier Sputnik dans l’espace et ressenti d’abord aux États-Unis, qui s’interrogent sur leur retard dans la course à l’espace. On citera, au Royaume-Uni et en Afrique subsaharienne anglophone, le projet Nuffi eld Junior Science et Science from 5 to 13; aux Etats-Unis, Science Curriculum Improvement Study (SCIS) et Elementary Science Study (ESS); en Allemagne, les projets Sacht Unterricht, différant selon les Länder : en Union soviétique, des publications desti-nées à l’éducation scientifi que des « pionniers », etc.

L’importance du projet Nuffi eld, qui donna lieu à la parution, en 1966, de 4 volu-mes, conduit les chercheurs de l’INRDP à en publier une traduction résumée (1972).

panneau

II.1

Page 48: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

54

IllustrationsActivités scientifi ques d’éveil, INRDP, Fondation Nuffi eld 1972 ;

Teacher’s Guide 1 et 2, Apparatus et Animals and Plants, pages de couverture, Nuffi eld Foundation, Nuffi eld Junior Science, Colins Ed. 1ère édition 1967.

Illustrations de la page 148 de Teacher’s Guide 2.

Ourselves, activities and experiments Teacher’s Guide, African Primary Science Programm. Cette publication est l’une des ressources produites dans le cadre de l’African Primary Science Program (APSP), une opération (1965-1976) fi nancée par l’US Agency for Interna-tional Development, qui a contribué à la mise en place du Science Educational Programme for Africa (SEPA).

Your body, Safe and Sound, par Sonya Leff, page de couverture (The Nervous System, miniature anonyme), Penguin Primary Project, Penguin Education, 1972.Au Royaume-Uni encore, le Penguin Primary Project (1972), qui concerne les enfants de 6 à 12 ans, organise en liaison avec l’UNESCO un enseignement scientifi que intégré.

Page 49: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

55

L’Éveil et les sciences

Quelle place pour les sciences ?

Ce que nous devons rechercher, ce n’est donc pas un programme (une somme de connaissances indispensables à la pratique de telle ou telle discipline), mais c’est un cheminement qui permette à l’enfant de s’éveiller à la connaissance par l’activité, par l’expérience sans cesse recommencée, mais jouée chaque fois sur un registre différent.

Les activités d’éveil à dominante intellectuelle au cours préparatoire,Recherches pédagogiques 51,

Institut national de recherche et de documentation pédagogiques,1971, page 37.

L’Éveil n’est pas né uniquement d’une réfl exion sur l’enseignement des sciences et ne lui est pas spécialement destiné. Constituant central d’un mouvement général de rénovation de la pédagogie, l’Éveil est une des clés du passage espéré de la « péda-gogie traditionnelle » à la « pédagogie moderne ». Les activités d’éveil à dominante scientifi que ne sont qu’un élément de cette pédagogie globale.

En regroupant plusieurs domaines traditionnellement séparés de l’enseignement primaire, désormais désignés au moins autant par le terme d’« activités » que par celui de « disciplines », l’Éveil contribue au décloisonnement disciplinaire des en-seignements et affi che ses ambitions éducatives générales. Les apprentissages ne se réduisent pas à leur dimension intellectuelle : il s’agit d’éveiller toutes les facultés de l’enfant (intelligence, imagination, sensibilité…), pour développer l’ensemble de sa personnalité. Ainsi, la notion de projet est-elle essentielle à la compréhension des activités d’éveil.

Gaston Bachelard, tant dans sa philosophie de la connaissance que dans son effort pour penser la complémentarité entre l’esprit scientifi que et l’âme poétique, a sans aucun doute inspiré l’Éveil.

Mais celui-ci doit aussi beaucoup à la remise en cause, dans les années 1970-1975, de la mesure du quotient intellectuel (QI), et, plus généralement, des tests et de leur utilité pour l’orientation.

Les travaux d’Howard Gardner, co-directeur du Projet Zero, professeur de psy-chologie à la Harvard Graduate School of Education (États-Unis) et professeur de neurologie à la faculté de médecine de Boston, s’inscrivent dans le prolongement de cette conception critique.

Ils contribuent à faire progresser l’idée d’une éducabilité générale des enfants et à multiplier les situations d’éducation globale. Selon Gardner, le test du QI, largement utilisé - et notamment en France - pour déterminer les aptitudes des individus, ignore la diversité des formes d’intelligence et n’en explore qu’un type restreint.

Cf. : Les formes de l’intelligence, Éd. Odile Jacob, 1999. Les personnalités exceptionnelles, Éd. Odile Jacob, 1999, Gribouillages et dessins d’enfants, Éd. Pierre Mardaga, 1997.

panneau

II.2

Page 50: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

56

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

L’enfant et la nature, Initiation à l’environnement naturel, une méthodologie, par les Conseillers pédagogiques de Paris, l’Offi ce National des Forêts, la Faisanderie de Sénart, 4e édition, 1995. Pages 1, 20-21 (fi ches 1), 30-31 (fi che 5), reproduites avec l’aimable autorisation de l’Offi ce National des Forêts. ©ONF.Menées ici sur la forêt, la plupart des activités scientifi ques d’éveil sont aussi l’occasion de faire du français, de l’histoire, du dessin …

Guide pédagogique de biologie, collection Bornancin, cours moyen, Éd. Nathan, 1982. Pages 167 (tableau 30, « Les médicaments ») et 170 (fi gures 1 et 2), reproduites avec l’aimable autorisation des Éditions Nathan. © Éd. Nathan.

Page 51: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

57

L’Éveil et les sciences

Un paysage en mutation

Dispositifs, prescriptions et outils

J’ai toujours été frappé du fait que les professeurs de sciences plus encore que les autres si possible ne comprennent pas qu’on ne comprenne pas. Peu nombreux sont ceux qui ont creusé la psychologie de l’erreur, de l’ignorance et de l’irréfl exion. Les professeurs de scien-ces imaginent que l’esprit commence comme une leçon, qu’on peut toujours refaire une cul-ture nonchalante en redoublant une classe, qu’on peut faire comprendre une démonstration en la répétant point par point. Ils n’ont pas réfl échi au fait que l’adolescent arrive dans la classe de physique avec des connaissances empiriques déjà constituées. Il s’agit alors, non pas d’acquérir une culture expérimentale, mais bien de changer de culture expérimentale, de renverser les obstacles amoncelés par la vie quotidienne ».

Gaston Bachelard,La formation de l’esprit scientifi que, 1938.

A partir de l’Éveil, l’administration scolaire cesse d’avoir le monopole des pres-criptions pédagogiques. Elle continue de régir les programmes et les instructions, mais le discours didactique et pédagogique va relever de plus en plus de l’ordre universitaire et savant, dont les vecteurs principaux seront, d’une part, l’INRDP, sous l’impulsion de Victor Host et, d’autre part, les laboratoires universitaires de didacti-que nouvellement créés.

Inspirés par ces travaux de recherche, des publications du ministère de l’éducation nationale, éditées par le CNDP, et des manuels répondent à la fois au relèvement du niveau de la formation des maîtres et aux nouveaux dispositifs de cette formation, qu’assurent désormais des professeurs d’écoles normales issus du secondaire.

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

Photographie de Victor Host (1914- 1998).De 1970 à 1978, Victor Host a été responsable de la section « didactique des sciences » dans le département « didactique des disciplines », alors dirigé par Louis Legrand, à l’Institut national de recherche pédagogique. Il s’est efforcé de dégager la didactique des sciences du monde spécialisé des chercheurs et des universitaires pour la faire mieux connaître des acteurs du monde éducatif et associatif.

Recherches pédagogiques : Activités d’éveil scientifi ques à l’école élémentaire, Paris, INRDP

I. Objectifs, méthodes, moyens, n° 62, 1973 ; page de couverture ;II. Première approche des problèmes écologiques, n° 70, 1975, page de couverture ; III. Initiation physique et technologique, n° 74, 1975, page de couverture et page 186;IV. Initiation biologique, n° 86, 1976, page de couverture ;V. Démarches pédagogiques en initiation physique et technologique, n° 108, 1980, page

de couverture ;VI. Éléments d’évaluation, n° 110, 1980, page de couverture.

panneau

II.3

Page 52: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

58

Activités d’éveil au cycle moyen, fi ches d’accompagnement des instructions offi cielles, n°1, octobre-décembre 1981, 2, janvier-mars 1982, 3, avril-juin 1982, pages de couverture et fiches Arts plastiques, Travaux manuels, Éducation musicale, Sciences expérimentales, Sciences sociales, Thème interdisciplinaire ; © Centre national de documentation pédagogi-que, reproduit avec l’aimable autorisation du CNDP.

L’éveil de l’enfant par les activités scientifi ques, Raymond Tavernier, Bordas Pédagogie 1972, ©Bordas, 1972, reproduit avec l’aimable autorisation des Éditions Bordas.

Activités d’éveil pour les enfants de 9 à 11 ans, tome 1 : Initiation aux sciences expérimentales, cours moyen, boîtier et pages 51 (fi ches 9A1) et 57 (fi che 9B). © Fernand Nathan, 1980. Document reproduit avec l’aimable autorisation des Éditions Nathan.

Contestations et caricatures

Le danger est de prendre le parti d’exploiter l’occasionnel au jour le jour en suivant les intérêts fugaces et anarchiques des différents éléments du groupe. Les enfants en viennent alors à observer superfi ciellement n’importe quoi, n’importe comment sans savoir exploiter les intérêts qui se sont dégagés. Les disciplines d’éveil deviennent alors très vite bavardage stérile. Si l’on se propose de faire éclater les barrières qui séparent les disciplines, ce n’est pas pour tomber dans un amateurisme généralisé, c’est pour permettre une formation de l’esprit.

Les activités d’éveil à dominante intellectuelle au cours préparatoire,Recherches pédagogiques 51,

Institut national de recherche et de documentation pédagogique,1971, p.42.

L’Éveil fut très vite, souvent au nom d’un attachement à une conception plus tra-ditionnelle de l’enseignement, l’objet de contestations et de critiques. Il fut accusé de remplacer les apprentissages par un bavardage sans plan, ni résumé, ni synthèse; de se perdre en tâtonnements expérimentaux stériles, voire absurdes; de bafouer l’idée même de vérité scientifi que, parfois arbitrée par un vote des élèves… Ces critiques ont d’autant plus fragilisé l’Éveil qu’il n’a pas toujours échappé, dans les faits, aux caricatures auxquelles on voulait alors le réduire, et dont ses promoteurs avaient d’ailleurs eu clairement conscience.

IllustrationLe poisson rouge dans le Perrier, par J-P. Despin et M-C. Bartholy, Éd. Critérion. Page de couverture et table des matières. Tous droits réservés.Publié en 1983, Le poisson rouge dans le Perrier est un pamphlet contre la pédagogie enseignée dans les écoles normales. Pour ses auteurs, l’Éveil en constitue la caricaturale illustration. Le titre provocateur entend dénoncer les aberrations auxquelles est supposé conduire le tâtonnement expérimental préconisé par l’Éveil.Cette publication donna le coup d’envoi d’une polémique toujours actuelle menée, au nom d’une école centrée sur les savoirs, contre l’idée même de pédagogie et de formation pédagogique, quel que soit le niveau d’enseignement considéré. Cette controverse, dont on peut juger les termes tendancieux, en raison de la concurrence qu’elle tend à instaurer entre savoir et pédagogie, s’est progressivement focalisée sur la situation de l’enseignement secondaire.

Page 53: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

59

Cf. De l’école, par Jean-Claude Milner, Seuil, 1984,Pourquoi ont-ils tué Jules Ferry, par Philippe Némo, Grasset, 1991;Écrits sur l’enseignement, par Jacqueline de Romilly, Éditions de Fallois, 1991;L’enseignement de l’ignorance, par Jean-Claude Michéa, Climats, 1999,etc.

Documents audiovisuels

Accompagnant l’importante rénovation pédagogique des années 1970, la télévision nationale, pour la première fois, diffuse des émissions de formation des enseignants, à tous les niveaux et dans toutes les disciplines. Dès lors, elle entre dans les classes.

Sont proposés des extraits de deux de ces premières émissions d’une cinquantaine de minutes, produites par le Centre national de documentation pédagogique (CNDP) - Ateliers de pédagogie magazine - et consacrées ici à l’éveil à dominante scientifi -que : Approches du vivant à l’école élémentaire (9min 49s), et Objets et phénomènes physiques (12min 28s).

Ces deux montages ont été réalisés par le Service National des Productions Audiovi-suelles du SCÉRÉN (Services Culture Editions Ressources pour l’Education natio-nale), avec le concours de Jeannine Deunff, inspectrice générale honoraire (groupe de l’enseignement primaire) chargée de recherche à l’INRP de 1971 à 1979 (section didactique des sciences, dirigée par Victor Host). Montage : Brigitte Houget; confor-mation : Pascal Ouvrard ; mixage : Marie-Odile Dupont. © SCÉRÉN, juin 2003.Emissions originales disponibles au Service National des Productions Audiovisuelles, 31 rue de la Vanne 92120 Montrouge.[www.sceren.cndp.fr]

Page 54: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

60

Au lendemain de l’Éveil

Les sciences en sommeil

De nos jours, la formation élémentaire assure l’acquisition des instruments fonda-mentaux de la connaissance : expression orale et écrite, lecture, calcul.

École élémentaire. Programmes et instructions,CNDP et ministère de l’éducation nationale,1985.

C’est dans un contexte d’insistance sur l’instruction républicaine défi nie par un cadrage et une limitation des contenus (lire, écrire, compter), associée à une grande méfi ance devant l’idée de rénovation pédagogique que les instructions de 1985 met-tent offi ciellement fi n à l’Éveil.

Après les fortes critiques des «disciplines d’éveil», l’accent ainsi porté sur les ap-prentissages dits « fondamentaux » et la défi ance croissante envers les sciences, sup-posées génératrices de chômage et de nuisances pour l’homme et son environnement, provoquent un net refl ux d’intérêt pour les sciences à l’école et ouvrent une longue période de stagnation pour leur enseignement à l’école primaire, pourtant obligatoire dans les textes.

De fait, le programme de sciences et de technologie de 1985, élaboré sur le modèle universitaire sans grand souci de faisabilité et déconnecté des réalités de la classe et des grandes questions de société, n’est pas réellement mis en œuvre dans les classes.

Cependant, l’esprit de l’Éveil n’a pas complètement cessé de souffl er.Pas plus que certaines pratiques pédagogiques qu’il a contribué à développer,

telles les classes de découverte, la théorie de l’Éveil n’est morte avec lui. Les profes-seurs d’IUFM - anciennement professeurs d’écoles normales - continuent d’appliquer, dans la formation des enseignants, des idées assez proches des conceptions antérieu-res. C’est ainsi que, dans le prolongement de l’Éveil, ils s’attachent à promouvoir la démarche expérimentale, la prise en compte des représentations des élèves et des obstacles dans l’apprentissage des sciences, ou la mise en place d’une éducation à l’environnement ou à la santé. Ces préoccupations les conduisent parfois à soutenir des thèses de didactique des sciences.

Illustrations

École élémentaire, Programmes et instructions, CNDP et ministère de l’éducation nationale, 1985 : 1ère page de couverture, et pages 51-52.

L’enseignement scientifi que, comment faire pour que ça marche ?, par Gérard De Vecchi et André Giordan, Nice, Z’édition, 1ère édition 1988 et Delagrave, nouvelle édition augmentée 2002.

panneau

II.4

Page 55: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

61

Les origines du savoir, Delachaux, 1987. Didactique des sciences, Coll. « Que sais-je ? », PUF, 1989.L’intérêt nouveau pour la didactique des sciences encourage les éditeurs à créer des collections consacrées à la formation des enseignants. Ces trois ouvrages dépasseront les 30 000 exemplaires.

Thèse de Pierre Antheaume : Objectifs et activités spécifi ques de formation professionnelle d’enseignants non spécialistes dans une discipline scientifi que : la biologie, 1993.

Nouveaux regards sur l’enseignement et l’apprentissage de la modalisation en sciences Programme de recherche INRP-LIREST (resp. Jean-Louis Martinand) 2 vol. INRP 1992 et 1994.

Dans cette période, le développement des classes transplantées, ouvrant sur l’étu-de des milieux et permettant de comprendre des notions comme celle d’écosystème, de « niche écologique », de chaîne alimentaire… est à porter au crédit de l’Éveil et de son bilan. A partir de 1982, les instructions offi cielles reconnaissent le caractère bénéfi que des classes de découverte dépaysées dans une localité d’accueil, allant même jusqu’à recommander que chaque enfant puisse en bénéfi cier, au moins une fois dans sa scolarité.

Ces classes sont pourtant antérieures à l’Éveil : héritées des « classes sanitaires » organisées pour faire profi ter les enfants des bienfaits du « grand air » (1953 : première classe de neige de Vanves transplantée en Savoie pendant 4 semaines; août 1957 : offi -cialisation des classes de neige), elles se diversifi ent dans les années 1960 en prenant appui sur l’engagement de nombreux enseignants au sein des mouvements d’éducation populaire : première classe de forêt en 1959, première classe de mer en 1964 dans le Finistère (circulaires ministérielles n°461 du 27 novembre 1964 et n° 450 du 14 novembre 1968), classes de poney, de vendanges... En 1971, les circulaires officielles consacrent les classes vertes (circulaire ministérielle n° 71 du 6 mai 1971). En 1987 et 1988 naissent offi ciellement les classes culturelles, et en 1993 les classes d’environne-ment, qui se substituent aux classes de découverte (circulaire du 17 février). Cf. Classes transplantées, un pari gagné, par Jean Rioult et Yannick Tenne, Nathan pédagogie, 1995.

IllustrationsDes enfants de cours préparatoire en classe de mer à Camaret, 1992, et des extraits des travaux qu’ils ont réalisés à cette occasion (collection privée).

C’est également en-dehors de l’espace scolaire que les institutions prennent le relais de l’école : les musées mettent en place, à côté de leurs expositions, des ani-mations pédagogiques, et les centres de culture scientifi que, technique et industrielle (CCSTI), tels le Palais de la découverte ou la Cité des sciences et de l’industrie de La Villette, qui s’ouvre en mars 86 à Paris, accueillent des classes.

Page 56: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

62

IllustrationsAteliers mis en place au Palais de la découverte (Le son, 1989 ; les insectes, 1991 ; préparation d’un hygroscope, 1988) ; photographies Chantal Rousselin, reproduites avec l’aimable autorisation du Palais de la découverte. © Palais de la Découverte. Remerciements à Michel Briantais.Au cours des années 1986/87, le Palais de la découverte a souhaité remplacer les activités de tiers-temps pédagogique qu’il animait dans les écoles par des activités d’éveil et de découverte proposées dans ses murs. C’est ainsi que dans les différents départements scientifi ques, des ateliers ont été progressivement mis en place pour des groupes scolaires de niveau cours moyen, ainsi que les jeunes visiteurs. Au-delà d’un éveil aux sciences, le Palais a souhaité favoriser la pratique expérimentale par les jeunes eux-mêmes : c’est en manipulant des objets, en faisant des expériences qu’ils sont amenés à découvrir les sciences, et les animateurs prennent en compte la curiosité et l’élaboration des raisonnements. Au début ont été proposés des expériences amusantes en chimie, un atelier « chercheurs en herbe » (puzzles et mathématiques) et en physique du son. Plus tard ont été créés des ateliers de géologie, de biologie et d’astronomie.

Classe Villette à la Cité des sciences et de l’industrie, © CSI/ A. Baumann, et groupe d’enfants d’une classe Villette près d’un téléscope : © CSI : A. Legrain. Photographies reproduites avec l’aimable autorisation de la Cité des sciences et de l’industrie de La Villette. Remerciements à Boutaieb Kaddani.Les premières « classes Villette », classes de découverte scientifi que d’une semaine organisées par la Cité à l’intention des élèves du premier et du second degré, sont créées offi ciellement en juin 1986 et connaissent un succès immédiat. Suivront, à partir de 1992, les classes autonomes et les cycles pédagogiques. Les premières, mises en place sur le modèle des classes Villette, sont des séjours en autonomie où un enseignant du primaire, qui a déjà participé à une classe Villette, prend en charge les activités sur le site. Les cycles pédagogiques sont destinés aux enfants des écoles primaires de la région parisienne : en alternance pendant un mois, activités en classes et activités à la Cité des enfants (une demi-journée hebdomadaire) sont consacrées à l’étude d’un thème scientifi que ou technique.Tout enseignant venant en classe Villette, en classe autonome ou cycle pédagogique a préalablement bénéfi cié d’un stage de 4 jours.L’orientation actuelle [2004] consiste à privilégier la formation initiale (PE2) ou continue d’enseignants-relais, susceptible de démultiplier les formations.

Page 57: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

63

Au lendemain de l’éveil

L’éducation informelle

Il paraît évident qu’un effort spécifi que des éducateurs doit venir répondre aux be-soins nouveaux qui découlent du progrès accéléré des sciences et de la technologie, et de l’impact de ce progrès sur la vie professionnelle, économique et sociale. Au-delà, c’est aussi « l’acculturation », la « mise en culture » des sciences et des techni-ques pour quoi plaident de multiples voix, et vers quoi tendent diverses initiatives, préparant, épaulant, et prolongeant l’action éducative.

Extrait de « Les leçons de la déconvenue »,par Michel Hulin,

Alliage n° 1, automne 1989.

L’expression d’«éducation informelle » est empruntée à L’appareil d’information sur la science et la technique, par Paul Caro et Jean-Louis Funck-Brentano, rapport commun Académie des sciences - CADAS, n° 6, Éd. Tec & Doc Lavoisier, 1996, page 94 : « Un grand nombre d’associations s’efforcent d’organiser des loisirs scientifi ques, essentiellement pour les jeunes. Cette activité prend la forme de clubs dont les mem-bres élaborent ensemble un projet. La construction de petites fusées est un thème par-ticulièrement populaire. Des animateurs, ou à l’occasion des chercheurs profession-nels, fournissent un encadrement permanent ou temporaire. Il s’agit là d’une pratique ancienne de l’éducation informelle dont l’objectif est de fournir des occupations pour meubler le temps libre des jeunes. Le sport et la musique remplissent ordinairement cette fonction, mais la science devient une composante notable ».

Au moment où l’enseignement des sciences sommeille ou décline à l’école, les activités parascolaires à caractère scientifi que se développent : des associations pro-posent des interventions de type expérimental ou technologique, des revues pour les jeunes ouvrent ou renforcent leurs rubriques scientifi ques. Le « loisir scientifi que » va également bénéfi cier de ce nouvel intérêt. Ainsi, de 1992 à 1994, durant l’été, sous l’appellation « Vacances, plaisir des sciences », une caravane des sciences montée sous la tutelle du ministère de la recherche et de la technologie, en partenariat avec les groupes Villages Vacances Familles, Renouveau, Fédération des œuvres laïques (FOL) et Touristra, parcourt les centres de séjour et offre aux vacanciers, huit jours durant, de faire des sciences en famille, avec des séances d’astronomie, d’hologra-phie, de préhistoire, de chimie… Graine de Chimiste, l’ANSTJ, entre autres associa-tions, sont les acteurs de l’opération.

IllustrationsActes des journées Communication, Éducation et Culture scientifi que et industrielle (CECSI) de Chamonix.

Créées en 1979 par l’INRP en lien avec l’université de Rouen et le CNRS, les journées CECSI de Chamonix réunissent chaque année les milieux

panneau

II.5

Page 58: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

64

associatifs et, plus récemment, universitaires, autour d’un thème différent, pour faire le point en matière d’innovation et de recherche sur l’éducation scientifi que. Aujourd’hui [2004], les Journées internationales sur la Communication, l’Éducation et la Culture scientifi ques, techniques et industrielles sont or-ganisées par l’UMR STEF (unité mixte de recherches sciences, techniques, éducation, formation - École normale supérieure de Cachan), le LDES (laboratoire de didactique et d’épistémologie des sciences, université de Genève) et le CRCMD (centre de recherche sur la culture et les musées de Dijon, université de Bourgogne). Selon les thèmes qu’elles programment, elles sont aidées par les ministères français de la culture, de la recherche et des nouvelles technologies et bénéfi cient du soutien de divers partenaires (IUFM, associations, écoles doctorales, etc.).

Lâcher d’un ballon expérimental conçu par des jeunes ; photographie reproduite avec l’aimable autorisation de Planète Sciences. Remerciements à Valérie Péron.

L’Association nationale des clubs scientifi ques - ANCS - devenue l’Asso-ciation nationale sciences techniques, jeunesse - ANSTJ - en 1977, puis Planète Sciences en 2002, est née en 1962 à l’initiative d’enseignants et de scientifi ques proches des activités du Palais de la Découverte et des clubs Jean Perrin, notamment pour encadrer les constructions de fusées par les jeunes avec le soutien du Centre national d’études spatiales (CNES). Le développement de projets en équipes, propres aux activités spatiales, a ensuite été appliqué à d’autres domaines d’expérimentation : l’astronomie, l’environnement, la météorologie, l’énergie solaire, l’informatique, la robo-tique et la télédétection.L’association organise la première Expo Sciences au Palais de la Découver-te en 1966, son premier centre de vacances à dominante scientifi que pour les jeunes de 10 à 12 ans en 1971 et le premier stage sur l’éveil scientifi que et technique pour les élèves-inspecteurs départementaux de l’Éducation nationale et les professeurs d’écoles normales en 1976. Ses antennes ter-ritoriales interviennent dans les établissements scolaires, organisent des séjours et des animations pendant les vacances, proposent des formations d’enseignants et d’animateurs pour les ateliers scolaires et les classes de découvertes.

Cf. http://www.planete-sciences.org

Stagiaires du comité de liaison enseignants - astronomes (CLEA) étudiant l’écliptique et l’équateur céleste autour d’une sphère ; photographie reproduite avec l’aimable autorisation du CLEA. Remerciements à Christian et Claudine Larcher.

Le comité de liaison enseignants - astronomes naît en 1976 ; l’astronomie ne fait alors pas explicitement partie des programmes français, mais beau-coup d’enseignants s’y intéressent et disposent déjà d’une riche expérience avec leurs élèves dans ce domaine. Le CLEA a pour objectif de promou-voir l’enseignement de l’astronomie à tous les niveaux du parcours scolaire, de la maternelle à l’université, et de participer à la formation des maîtres en leur proposant stages, outils et documents (comme des publications thématiques : en 1991, le premier numéro des Cahiers Clairaut, bulletin de liaison trimestriel, est consacré à l’« astronomie à l’école élémentaire »).A la fi n des années 80 et au début des années 90, le CLEA, en cela pré-curseur des universités d’été, développe largement les écoles d’été qui réunissent, pendant une douzaine de jours, 70 à 100 stagiaires, dont des enseignants du primaire, encadrés par des astronomes et des professeurs de lycée.

Cf. http://www.ac-nice.fr/clea

Page 59: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

65

Jouer et comprendre, Les Cahiers de l’Animation Vacances Loisirs, Dossier n° 8, Paris, CÉMÉA, 2002, page 48. Documents reproduits avec l’aimable autorisation des CÉMÉA. Remerciements à Annie Abramowicz.

Association de jeunesse et d’éducation populaire, les centres d’entraîne-ment aux méthodes d’éducation active (CÉMÉA), créés en 1937 autour des valeurs de l’éducation nouvelle, exercent leur action en France et dans les pays en voie de développement, notamment en Afrique francophone, à tra-vers l’organisation de centres de vacances, la formation d’animateurs pour les temps de loisirs et le perfectionnement d’enseignants. Dans les années 1970, sous l’impulsion d’enseignants particulièrement motivés, ils s’enga-gent dans des actions de culture scientifi que pour tous, en constituant des groupes d’activités de découvertes techniques et scientifi ques« L’activité scientifi que réside dans la démarche » : plutôt que de diffuser les résultats de la recherche, ils s’efforcent de promouvoir une « alphabétisation scientifi que » en visant le développement d’attitudes (rigueur, curiosité, esprit critique, coopération) et la construction de savoir-faire opératoires (savoir observer, mesurer, formuler une hypothèse, bâtir une expérience…) qui laissent à l’enfant la maîtrise de son activité et de son apprentissage et privilégient l’expérimentation. « Pour comprendre, il faut chercher et entre-prendre » : les activités de découvertes techniques et scientifi ques s’atta-chent à placer les jeunes dans des situations de projet.

Cf. http://www.cemea.asso.fr

Affiche Graine de Chimiste, de l’école à l’université, reproduite avec l’aimable autorisation de Graine de chimiste ; deux garçonnets en cours de manipulation ; affi che réalisée lors des rencontres de 1990 par l’École Buffon, classe de cours moyen 1ère année (1er prix dans la catégorie cours moyen). © Graine de chimiste. Remerciements à Janine Thibault et Dominique Davout.

Organisée au Palais de la Découverte en 1990, cette manifestation, clôtu-rée par un concours d’affi ches sur le thème de la chimie, est la première organisée par le groupe de recherche en didactique de la chimie (GRE-DIC), de l’Université Pierre et Marie Curie, qui souhaite faire connaître ses travaux de recherche auprès des responsables institutionnels. 1 650 enfants encadrés par des animateurs scientifi ques formés pour l’occasion ont ainsi pu manipuler ou fréquenter deux ateliers, l’un permettant de mener à bien une fabrication de produits courants (crème de beauté, rouge à lèvres…) l’autre, plus axé sur l’apport de notions (approche de l’acidité, détection de traces de sang…). La création de Graine de Chimiste, en avril 1991, est le fruit de cette opé-ration, dans laquelle la démarche expérimentale a pu faire concrètement la preuve des valeurs éducatives dont elle est porteuse et qu’elle développe chez l’enfant : sens de l’organisation et de la précision, souci de rigueur et de sécurité, soin, concentration, autonomie…Depuis lors, l’association - qui a suscité des vocations en Belgique, en An-gleterre, au Portugal… - organise dans les écoles ou des centres de loisirs scientifi ques des ateliers où chaque enfant travaille individuellement et s’approprie, par les manipulations en relation avec des produits de la vie courante, savoirs et savoir-faire scientifi ques. La méthode associe la mise en confi ance de l’enfant, les émotions, le jeu et la rigueur du protocole ex-périmental et de la gestuelle qu’il sollicite.

Nourrir les hommes, malle-exposition de l’ASTS. Photographie reproduite avec l’aimable autorisation de l’ASTS. Remerciements à Linda Abbas.

Page 60: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

66

L’Association Science Technologie et Société (ASTS), née en 1981, s’est donné pour mission d’explorer et de faire connaître les relations qui exis-tent entre l’évolution scientifi que et technologique et le développement de la société, et se veut un lieu de médiation entre la science et les citoyens. Elle organise des rencontres, des débats et des ateliers, conçoit et réalise des malles pédagogiques et des expositions itinérantes et interactives qui s’adressent aux collectivités, écoles, centres de loisirs et de vacances et constituent des supports d’animation, de réfl exion et d’échanges pour des publics très divers. Elle publie les actes et comptes rendus des manifesta-tions qu’elle organise.

Cf. http :www.asts.asso.fr

Magazine Boum ta science n° 1 (septembre 1993) page de couverture, formulaire de présentation et affi che «Cinéboum».Documents «Petits Débrouillards», reproduits avec l’aimable autorisation de l’association. Remerciements à François Deroo.

L’association nationale Les Petits Débrouillards, née en 1980 au Québec où la découvre un animateur de l’ANSTJ, est présente en France depuis 1984 : elle propose aux enfants et adolescents de découvrir les sciences expéri-mentales dans des clubs, ateliers, centres de vacances, classes de découver-te, musées, et même l’école depuis le milieu des années 1990. Elle assure des sessions de formation d’animateurs ou participe à leur encadrement avec divers mouvements d’éducation populaire (Francas, Confédération nationale des foyers ruraux, clubs Léo Lagrange, Maisons des jeunes et de la culture). Sa notoriété se diffuse assez rapidement par voie de presse, et des associations régionales se créent au début des années 1990, alors que les échanges internationaux se multiplient. La Fédération internationale des Petits Débrouillards accueille aujourd’hui une vingtaine de pays.Le magazine Boom ta science, d’abord inspiré par la revue québécoise Je me Petit Débrouille, naît en 1991. La formule, qui donne naissance en 1993 à un mensuel couleur distribué par abonnement, est abandonnée en 1996. En octobre 1998 paraissent aux éditions Albin Michel les 6 premiers tomes de l’Encyclopédie des Petits Débrouillards, relue et parrainée par l’Acadé-mie des sciences. En 2003, 50 ouvrages ont été publiés, traduits en chinois, coréen ou italien…

Okapi n° 435, 1990, supplément « L’histoire de l’univers » ; Astrapi : couverture de « Vive la science » ;Images Doc n° 2, 1989, double page photos couleur consacrée au Nautile ;Pomme d’Api n°349, mars 1995 : page de couverture et dépliant de bas de page ;Le Club Youpi des petits scientifi ques n° 84 :fi che pédagogique « Le vent » page 2, et fi che complémentaire grand format page 3.

© Bayard Presse, extraits de magazines reproduits avec son aimable autorisation. Remerciements à Catherine Béchaux, Marc Beynié, Emmanuel Chanut, Florence Dutruc, Bertrand Fichou et Françoise Récamier.

Les sujets de « sciences » occupent une place de choix dans les publica-tions pour la jeunesse du groupe Bayard Presse depuis leur apparition avec Pomme d’Api en 1966. Depuis le milieu des années 80, à mesure que la palette se diversifi e par segmentation du lectorat en tranches d’âge, la part consacrée aux sciences monte en puissance. A mi-distance entre Okapi. 100 % ado (1971), destiné aux 10-15 ans, et Astrapi. Le grand rendez-vous des 7-11 ans (1978), et après Youpi. Le petit journal des grands curieux (1988) pour les 5-8 ans, est lancé en 1989 Ima-ges Doc. Des découvertes plein les yeux, à l’intention des 8-12 ans.

Page 61: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

67

Astrapi, bimensuel généraliste mixte, se dote en 1985-86 d’« Explicamini » puis, en 1986-88, d’une double page « science », irrégulière, avant d’ac-cueillir, début 1996, le Professeur Zak. Depuis 1995, Youpi comprend un « cahier d’expériences » et un « carnet Nature », tandis que la rubrique scientifi que d’Images Doc, qui constitue un des 4 piliers du magazine aux côtés des rubriques « animaux », « monde » et « Histoire », propose des ex-périences aux enfants. En 1996 est créé Le Club Youpi. Rendez-vous des petits scientifi ques, un périodique réservé aux enseignants, qui reprend les sujets scientifi ques traités dans Youpi et comporte une fi che pédagogique favorisant leur exploitation en classe.

De 1997 à 2000 est publié Le Club sciences Images Doc. Le magazine-découvertes, supplément à la rubrique scientifi que du magazine, lui-même assorti d’un livret complémentaire pour les enseignants.

extraits de La Hulotte, n° 14 (septembre 1973), page de couverture et page 35, et n° 66 (dé-cembre 1991), pp. 3 et 15. ©La Hulotte, documents reproduits avec son aimable autorisation.

L’essor des magazines scientifi ques pour la jeunesse commande d’évoquer la formidable destinée de La Hulotte ; fi gure quasi ancestrale au rayon-nement intact depuis sa création en 1972, cette revue pionnière est restée seule de son espèce.Instituteur dans les Ardennes, Pierre Déom a l’idée d’initier ses élèves à la riche nature environnante et monte un réseau de clubs «Connaître et proté-ger la nature» (CPN). Parallèlement, il conçoit et ronéote un petit bulletin mensuel de format A4, bulletin de liaison du réseau, dont le numéro 1, comportant 8 pages, paraît en janvier 1972. Les 5 premières livraisons de La Hulotte sont d’abord distribuées de façon artisanale à 1 000 exemplai-res dans un rayon d’une cinquantaine de kilomètres. Devant l’intérêt que suscite son entreprise, Pierre Déom crée, pour la développer, l’association « L’Épine noire des Ardennes » en novembre 1972, avant de mettre fi n à son activité d’enseignant pour s’y consacrer à plein temps.Plus tard viendra la création d’une SAS (société par action simplifi ée) de 7 personnes chargées de veiller sur les jours de La Hulotte, une revue à diffusion mondiale forte, en 2003, de 150 000 abonnés, et désormais se-mestrielle : Pierre Déom en est en effet resté l’auteur exclusif. Aidé d’une documentaliste qui rassemble l’information dans les publications savantes, il dessine manuellement à la plume toutes les illustrations et rédige les tex-tes, relus par des scientifi ques avant parution. La revue, qui allie rigueur, humour, esthétique… a ainsi conquis un lectorat très large.

Cf. http://www.lahulotte.fr

Malgré tous ces efforts, l’éducation scientifi que reste un parent pauvre de l’école primaire.

Page 62: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

68

QUELQUES FIGURES

BACHELARD Gaston (1884-1962). Licencié de mathématiques et agrégé de phi-losophie, Bachelard devient professeur d’histoire et de philosophie des sciences à la Sorbonne de 1940 à 1954. En faisant de l’observation non le point de départ de la démarche scientifi que mais un « obstacle épistémologique », il fournit aux critiques de la leçon de choses, au moment de l’Eveil, une importante justifi cation théorique. D’une façon générale, ses réfl exions sur la formation de l’esprit scientifi que eurent une grande infl uence sur la didactique contemporaine des sciences.Il est l’auteur de très nombreux ouvrages réédités à plusieurs reprises, parmi lesquels : Le nouvel esprit scientifi que (1934) ; La formation de l’esprit scientifi que. Contribu-tion à une psychanalyse de la connaissance scientifi que (1938) ; L’eau et les rêves. Essai sur l’imagination de la matière (1942) ; Le rationalisme appliqué (1949).

LEGRAND Louis (1931- ). Professeur de philosophie, inspecteur départemental, inspecteur d’académie, directeur du département « Didactique des disciplines » de l’IPN et professeur de sciences de l’éducation. Défenseur de l’École moderne, et plus largement, des « mouvements pédagogiques », il anime, à partir de 1981, la commis-sion chargée de préparer une rénovation des collèges. Le « rapport Legrand » qui en résulte préconise une pédagogie différenciée, pour prendre en compte l’hétéro-généité des élèves. Il suggère également de renforcer la coordination du travail des adultes chargés, au collège, des mêmes élèves (« équipe éducative »), et recommande de faire des collèges des lieux de vie à part entière (où l’instruction soit associée à l’éducation, civique notamment).L’ensemble de sa carrière témoigne de sa réfl exion et de son action pour une école démocratique. Parmi ses nombreuses publications : Pour un collège démocratique. Rapport au ministre de l’Éducation nationale. La documentation française, 1983. Enseigner la morale aujourd’hui ? 1991 ; Les différenciations de la pédagogie Paris, 1995 ; Éducation nationale : résultats insuffi sants, peut mieux faire ! 2000. Pour une pédagogie de l’étonnement, 1969 ; Une méthode active pour l’école d’aujourd’hui, 1971.

PIAGET Jean (1896-1980). Suisse de langue française, Piaget fi t d’abord des étu-des de biologie avant de s’intéresser à la psychologie de l’enfant, qu’il considère d’ailleurs comme le prolongement de l’embryogenèse : le développement de l’intel-ligence enfantine ne s’arrête pas à la naissance. Du bébé jusqu’à l’adulte, Piaget dis-tingue quatre formes (ou « stades ») d’organisation intellectuelle. 1 – L’intelligence sensori-motrice (jusqu’à 2 ans) ; 2 – l’intelligence préopératoire (de 2 à 6 ans) ; 3 – le stade des opérations concrètes (de 6 à 11-12 ans) ; 4 – enfi n, la pensée abstraite et formelle caractéristique de l’intelligence adulte. La conception de Piaget n’est pas en elle-même une théorie pédagogique : elle s’intéresse au développement intellectuel et cognitif de l’individu et non aux façons d’apprendre. Elle a néanmoins fortement infl uencé le monde pédagogique au moment de l’Éveil, et Piaget lui-même s’est pro-noncé en faveur des méthodes actives de l’éducation scolaire.Il a notamment publié : Le jugement et le raisonnement chez l’enfant, 1925 ; La représentation du monde chez l’enfant, 1926 ; L’équilibration des structures cogniti-ves, 1975 et, avec B. Inhelder, La psychologie de l’enfant, 1966.

Page 63: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

71

Chronologie de la rénovation

1995– nouveaux programmes pour l’enseignement primaire » (arrêté du 22 février,

BOEN du 9 mars);– Georges Charpak, prix Nobel de physique 1992, conduit un groupe de scien-

tifi ques et de représentants du ministre de l’éducation nationale, François Bayrou, dans des quartiers défavorisés de Chicago où, à l’initiative de Léon Ledermann, prix Nobel de physique 1988, une méthode d’enseignement des sciences fondée sur l’expérimentation, Hands on, est en place depuis quel-ques années. Ceci s’inscrit dans le cadre d’une action plus vaste, menée par la National Academy of Sciences des Etats-Unis, et soutenue par la National Science Foundation.

– Rapport sur les activités scientifi ques nord-américaines et leur compatibilité avec le contexte français, commandé à l’INRP par le directeur des écoles, Marcel Duhamel (décembre).

1996– l’organisation, par le ministère de l’éducation nationale, d’un séminaire de

réfl exion à Poitiers (avril), regroupant inspecteurs de l’éducation nationale (IEN), inspecteurs pédagogiques régionaux-inspecteurs d’académie (IPR-IA) et inspecteurs généraux de l’éducation nationale (IGEN), Georges Charpak, Pierre Léna et Yves Quéré, académiciens des sciences, des représentants du ministère de l’éducation nationale (direction des écoles et enseignement supé-rieur), un représentant des IUFM, de l’école des mines de Nantes, de l’INRP et de la Cité des sciences et de l’industrie de La Villette, marque le départ offi ciel de l’opération ;

– La circulaire du 19 juillet (BOEN du 5 septembre) lance l’opération dans cinq départements, avec le soutien de l’Académie des sciences, de l’école des mi-nes de Nantes, de l’école polytechnique et de l’institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon. 350 classes s’engagent à titre volontaire;

– à Vaulx-en-Velin (Rhône), plusieurs écoles adoptent et développent la démar-che à partir de documents pédagogiques traduits de l’américain, les Insight ;

– parution de La main à la pâte, les sciences à l’école primaire, ouvrage col-lectif préfacé par Georges Charpak, (Éd. Flammarion) ; il devait apparaître comme une sorte de « manifeste » de l’opération et dépasser les 50 000 exem-plaires ;

– motion unanime de soutien à La main à la pâte, votée par l’Académie des sciences en comité secret (juillet).

1997– en soutien à cette expérimentation, l’IGEN publie vingt « fi ches connaissan-

ces » associées aux programmes de 1995 et rédigées par Jean-Michel Bérard, inspecteur général de l’éducation nationale.

Page 64: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

72

1997-98– l’opération s’étend et touche 2 000 écoles, soit environ 4 000 classes et

100 000 élèves ;– création des prix de La main à la pâte : 11 lauréats, venus de 9 départements,

sont récompensés ;– premier Bulletin de liaison « La main à la pâte », publié par l’Académie des

sciences et l’INRP.

1998-99– sous l’impulsion de Claude Allègre, ministre de l’éducation nationale, 300

classes de Seine-Saint-Denis s’engagent dans l’opération, avec des moyens spécifi ques.

1998– ouverture du site Internet de La main à la pâte (avril) ;

– l’Académie des sciences dépose la marque La main à la pâte® auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (juin);

– élaboration des 10 principes de La main à la pâte (août);

– première session de « Graines de sciences », rencontre entre enseignants et scientifi ques, à la Fondation des Treilles, Var (octobre).

1999– colloque « À propos de La main à la pâte : les sciences et l’école primaire » à

la Bibliothèque nationale de France (janvier);

– mise en place du réseau Main à la pâte de sites Internet départementaux;

– rapport de Jean-Pierre Sarmant (IGEN), commandé par Claude Allègre sur La main à la pâte et l’enseignement des sciences à l’école primaire (juin).

1999-2000– la Dordogne, les Pyrénées orientales, Paris et d’autres écoles dispersées dans

31 départements se lancent offi ciellement dans l’opération.

2000– un correspondant « sciences » de La main à la pâte auprès de l’Académie des

sciences est nommé dans chaque IUFM;

– Jack Lang, ministre de l’éducation nationale, lance le PRESTE - plan de rénovation de l’enseignement des sciences et de la technologie à l’école - généralisable en 3 ans (BOEN du 15 juin 2000) et dote les écoles de moyens spécifi ques en matériel expérimental;

– la direction de l’enseignement scolaire (DESCO) et l’Académie des sciences défi nissent dans une résolution commune les rôles respectifs du PRESTE et de La main à la pâte ;

– rapport de l’IGEN (groupe de l’enseignement primaire), L’enseignement des sciences et de la technologie à l’école primaire (septembre, mise à jour jan-vier 2001) ;

Page 65: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

73

– conférence internationale Transition to Sustainability in the XXIst Century, The Contribution of Science and Technology, à Tokyo, de l’InterAcademy Panel, soulignant l’urgence d’une action internationale pour l’enseignement scientifi que de base (mai) ;

– signature de multiples accords entre l’Académie des sciences et ses parte-naires d’autres pays (Chine, puis Brésil, etc.) pour une collaboration sur ce thème (à partir de novembre).

2001– mise en place d’un réseau de centres géographiques pilotes de La main à

la pâte ;

– création des prix « Mémoires professionnels » de La main à la pâte.

2002– nouveaux programmes applicables pour tous les cycles à la rentrée 2002 ;

parution de documents d’application des programmes et du document d’ac-compagnement, Enseigner les sciences à l’école, signé conjointement par le ministère de l’éducation nationale et l’Académie des sciences ;

– rapport de l’IGEN, établissant un premier bilan du PRESTE : environ 15% des classes font des sciences, sans que toutes aient une démarche d’investi-gation effective.

2003– le ministère Luc Ferry, en charge de l’éducation nationale, maintient le

groupe de travail dirigé par Jean-Pierre Sarmant ; ce groupe organise des séminaires nationaux de formation (avril) et élabore un guide à l’intention des formateurs pour adapter les actions de formation aux différents publics du premier degré.

2003-2004– ce groupe prépare un second document d’accompagnement des programmes,

Découvrir le monde, destiné aux enseignants de maternelle et cosigné par le ministère chargé de l’éducation nationale, l’Académie des sciences et l’Aca-démie des technologies (à paraître en août 2004).

Page 66: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

74

Dispositif institutionnel

PREMIER DEGRÉ

1995 : l’école maternelle devient une école à part entière, avec ses propres programmes.

1997 : relance de l’éducation prioritaire (assises nationales de Rouen), avec redéfi ni-tion et extension de la carte des zones d’éducation prioritaires (ZEP) : « Donner plus de moyens à ceux qui en ont moins ». La logique de territoire des ZEP évolue vers une lo-gique de réseau avec la création des réseaux d’éducation prioritaires (REP) en 1999.

1998 : mise en place des contrats éducatifs locaux (CEL) dont l’objectif est de mieux articuler le temps scolaire avec les temps périscolaire et extrascolaire pour rendre accessible au plus grand nombre d’enfants les activités organisées sur ces deux der-niers temps.

SECOND DEGRÉ

1989 : la loi d’orientation organise la scolarité du collège en trois cycles (adaptation, central, orientation) et prévoit la défi nition d’un projet d’établissement dans chaque collège.

1998 : suppression des missions académiques à la formation des personnels de l’édu-cation nationale (MAFPEN), chargées de la formation continue des personnels du second degré. Les IUFM, associés à la formation continue du premier degré, contri-buent désormais à celle du second, en association avec les inspections d’académie.

2003 : retour vers des formations en alternance au collège.

Page 67: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

75

Une histoire d’histoires

La croisée des chemins

« La clé du succès réside dans notre capacité à adapter à ce monde notre système éducatif d’où doit émerger la sagesse qui permettra de maîtriser les choix entre le raisonnable et l’émotionnel ».

Georges Charpak, Enfants, chercheurs et citoyens,1998.

En 1995, les sciences de la nature – physique, chimie, technologie, sciences de la vie, sciences de la Terre – n’ont pas à l’école primaire la place qu’elles méritent. Mal-gré leur présence dans les programmes, malgré le dynamisme des milieux associatifs et parascolaires, l’enseignement des sciences, trop souvent théorique et livresque, est insuffi samment dispensé.

Depuis plusieurs années pourtant, les choses ont mûri. Préoccupés par les caren-ces persistantes, scientifi ques, chercheurs, responsables éducatifs et sociétés savantes ont entrepris de travailler à faire évoluer concrètement la situation.

De 1992 à 1995, une commission mise en place par la Société française de phy-sique (SFP) à l’initiative de Pierre Léna (qui en fut le président en 1989), et présidée par Françoise Balibar, s’attache à faire le point sur l’enseignement des sciences expé-rimentales à l’école élémentaire et à réfl échir à la manière de susciter, chez les futurs professeurs des écoles, l’envie de les enseigner. Ses travaux aboutissent à un constat et deux idées-force. 1. Le manque de formation initiale des étudiants et le peu d’heures consacrées à

l’enseignement scientifi que en IUFM ne sauraient être corrigés par un rattrapage. Il faut viser, chez les actuels et futurs professeurs des écoles, la formation d’une culture scientifi que et technique. Celle-ci doit s’appuyer sur un dispositif centré autour de la « leçon de sciences », pour convaincre que « enseigner les sciences, c’est possible », et de la « salle de sciences », pour montrer que « les sciences, c’est formidable ».« Enseigner les sciences, c’est possible ». Le meilleur moyen de démontrer aux étudiants d’IUFM qu’ils sont capables de faire une leçon de sciences est de les obliger à en fabriquer par eux-mêmes, avec l’aide de leurs enseignants ; une con-clusion qui prend à rebours la demande de fi ches et autres recettes, et l’idée qu’un surcroît de pédagogie abolira les diffi cultés du métier.La leçon de sciences est une séquence pédagogique centrée autour d’un thème et de durée variable. Elle forme la base de l’enseignement des sciences à l’école élé-mentaire. Elle doit persuader le futur professeur des écoles que « bâtir une leçon de sciences est possible parce qu’il l’a déjà fait ».« Les sciences, c’est formidable ». La salle de sciences, commune à toutes les disciplines scientifi ques, ouverte en libre accès, permet de faire pratiquer les sciences : toucher, fabriquer, observer, interroger, lire, se renseigner… dans un lieu attrayant et stratégique du centre IUFM.

2. Salle de sciences et leçons de sciences doivent s’intégrer à la vie professionnelle des professeurs grâce à des mesures d’accompagnement illustrant l’idée qu’« on

panneau

III.1

Page 68: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

76

sort de l’IUFM, on ne le quitte pas ». Tout un dispositif doit favoriser, chez les enseignants, la fréquentation de l’IUFM comme centre de formation permanente, de ressources et de recherche pédagogique. La communauté scientifi que, enfi n, doit s’impliquer pour stimuler les échanges entre universitaires ou chercheurs et formateurs scientifi ques en IUFM et insuffl er son dynamisme à tous.

Extraits du Rapport de la Commission IUFM de la S.F.P.,Bulletin de la S.F.P. n° 104, mai 1996, pp.24-26.

IllustrationsLa culture scientifi que et technique pour les professeurs des écoles, coord. par Bernard Andries et Isabeau Beigbeder, Hachette Éducation - CNDP, Paris, 1994, page de couverture.Publié au terme d’un séminaire organisé conjointement par la direction des écoles et la direction des enseignements supérieurs en janvier 1993, cet ouvrage récapitule réfl exions et perspectives d’action pour que les sciences soient réellement et bien enseignées à l’école.

La salle de sciences de l’École des sciences de Bergerac ©, document reproduit avec son aimable autorisation. Remerciements à Jean-Louis Alayrac.

Photographie de Françoise Balibar.

Depuis son origine, l’Académie des sciences joue un rôle d’évaluation, d’expertise et de conseil désintéressé en rédigeant des études et des rapports sur des thèmes choi-sis à son initiative ou par les pouvoirs publics, et en émettant des avis, messages, mo-tions, prises de position, déclarations, voeux et recommandations. L’action qu’elle en-treprend en 1996 s’inscrit donc pour partie dans une tradition ancienne. En soutenant La main à la pâte, les académiciens font plus que se prononcer sur le bien-fondé d’une disposition : ils interviennent directement dans le champ de l’enseignement scolaire.

En lançant une expérimentation en 1996, susceptible de rester marginale comme d’infi ltrer progressivement le système, les ministres successifs de l’éducation natio-nale font preuve d’un pragmatisme inédit jusqu’alors en prenant en compte le facteur temps, longtemps négligé en matière de réformes. Désormais, aux côtés de l’admi-nistration scolaire et des didacticiens, seuls jusqu’alors à traiter légitimement d’ensei-gnement – des sciences en particulier –, il faut compter avec l’Académie des sciences et la communauté scientifi que.

IllustrationsLa vie des sciences, tome 6, n°1, janvier-février 1989, « Sur la rénovation du système éducatif » ; page de couverture et pp. 46-47 ;

déclaration de l’Académie des sciences sur les Instituts universitaires de formation des maîtres (28 mai 1990) ;

note de l’Académie sur les projets de rénovation pédagogique des lycées (1er juillet 1991) ;

message de l’Académie des sciences sur l’enseignement supérieur scientifi que et technique et la recherche universitaire (9 mai 1995) ;

Page 69: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

77

déclaration de l’Académie des sciences sur le lancement de l’expérience « Enseignement des sciences à l’école » (11 juillet 1996).

« Développement de l’enseignement des sciences à l’école primaire », BOEN n° 31 du 5 septembre 1996.

La main à la pâte, les sciences à l’école primaire, présenté par Georges Charpak, © Éditions Flammarion, 1996; page de couverture reproduite avec l’aimable autorisation des Éditions Flammarion.

Georges Charpak et une jeune polytechnicienne dans une classe d’école primaire. Guide de découverte de La main à la pâte, p. 6.

Regards d’enfants sur la science : dessins collectés par l’UNESCO.À la suite de la conférence mondiale sur la science, tenue à Budapest, en 1999, l’UNESCO, souhaitant établir les assises d’un enseignement scientifi que qui réponde au mieux aux be-soins et intérêts des enfants, lance, auprès des enfants de 8 à 12 ans de tous les états membres de cette organisation, une campagne destinée à comprendre le regard qu’ils portent sur la science et la technologie au XXIe siècle. De 1999 à 2000, elle rassemble ainsi plus de 1 000 dessins sur 6 thèmes : « Qu’est-ce que la science ? », « La meilleure éducation scientifi que », « Science et paix », « Les fi lles et la science », « Notre environnement », « Santé et nutrition ». Dessins reproduits avec l’aimable autorisation de l’UNESCO, section de l’enseignement scientifi que et technologique. Remerciements à Diileep Bhagwut.

Page 70: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

78

Quoi de neuf ?

10 principes

« En toute matière, lettres ou sciences, notre enseignement est resté trop verbal. Le temps n’est plus cependant où il suffi sait d’être homme du monde et de savoir discourir sur les choses. S’agit-il de science ? On expose surtout des résultats. Ne vaudrait-il pas mieux initier aux méthodes ? On les ferait tout de suite pratiquer ; on inviterait à observer, à expérimenter, à réinventer. Comme on serait écouté ! Comme on serait entendu !

Henri Bergson, La pensée et le mouvant, 1938.

Dès 1998 sont élaborés les 10 principes de La main à la pâte, qui en constituent la charte. Éduquer par les sciences, faire faire des sciences aux enfants, rapprocher les maîtres de la science en action, aider et accompagner les enseignants : telles sont les spécifi cités de La main à la pâte.

Éduquer par les sciences

Les vertus éducatives de la science - portées, dans la leçon de choses, à la fois par l’idéologie scientiste et un discours moral - ne sont pas absentes de La main à la pâte. Elle voit dans la science une école d’objectivité et d’universalité, de modestie et de to-lérance, un apprentissage de l’argumentation, et espère que les qualités développées dans les activités scientifi ques seront transposables à l’ensemble des comportements scolaires et sociaux.

« Dans la liste – que chacun prolongera à son gré – de nos apprentissages, celui des sciences n’échappe pas à ce double statut : lieu d’écoute de ces vénérables ques-tions que l’homme, depuis qu’il est homme, se pose sur le monde, la science est aussi une permanente réactualisation de ces questions ainsi qu’un formidable outil pour le modifi er, voire le maîtriser.

Elle est donc elle aussi porteuse de vertus. Non pas qu’elle recèle en elle-même la moindre valeur éthique… En revanche, l’enseignement que nous en recevons, les comportements qu’elle induit, les modes de pensée qu’elle requiert, tout cela est sus-ceptible de modifi er notre vision du monde et nos conduites, tout cela est susceptible de véhiculer des vertus au sens qui vient d’être dit. »

Yves Quéré, La science institutrice, Éd. Odile Jacob, 2002, pp. 75-76.

« (…) à l’école primaire, l’objectif est à la fois plus simple et plus ambitieux [qu’au lycée] : il s’agit d’ouvrir les enfants aux réalités du monde, de les habituer à observer et à raisonner, et d’affermir ainsi leur esprit, c’est-à-dire de lui donner plus de force, c’est-à-dire encore – au sens qui est propre, même s’il est un peu suranné – de lui conférer des vertus [le goût de la vérité, la faculté de modestie, l’esprit de justesse, le don d’imagination, le sens de la langue].

Yves Quéré, «Les enjeux de la culture scientifi que»Actes du colloque « À propos de La main à la pâte,

Les sciences et l’école primaire », pp.27-31.

panneau

III.2

Page 71: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

79

IllustrationsLes 10 principes de La main à la pâte, Guide de découverte, septembre 99, p. 9 ;

Enfants, chercheurs et citoyens, ss la dir. de G. Charpak, page de couverture, © Éd. Odile Jacob, 1998. Reproduit avec l’aimable autorisation des Éditions Odile Jacob.

Faire faire des sciences aux enfants

La démarche préconisée par La main à la pâte privilégie la construction des connaissances par l’exploration, l’observation, l’expérimentation et la discussion, reprenant en cela une innovation pédagogique née avec l’Éveil. Ici, en proposant des séquences construites, programmées et inscrites dans la durée, le maître reste le pilote.

Pour répondre à une question concrète, les élèves réalisent eux-mêmes des expé-riences pensées par eux, et discutent pour en comprendre l’apport. Accords et désac-cords entre les enfants sont in fi ne arbitrés par les faits expérimentaux, permettant de différencier conviction et argumentation. On apprend progressivement, en se trom-pant ; l’erreur n’est pas une faute.

Les échanges entre les enfants et la tenue d’un cahier d’expériences, qui garde la mémoire du travail effectué (questions, observations, arguments, discussion, erreurs commises) attestent l’importance attachée à la réfl exion et à la nécessité de l’expri-mer tant à l’oral qu’à écrit.

IllustrationsExtraits de « Notre sablier », dossier réalisé par Alain Moritz, professeur des écoles, école maternelle Les Violettes, à Colmar (Haut-Rhin). Ce travail, effectué en classe de grande section de maternelle durant l’année scolaire 2000-2001, a obtenu l’un des trois premiers prix ex æquo de La main à la pâte en 2001.

Extraits de Qui sème le doute… récolte un p’tit chercheur, travail mené en 2002-2003 dans les 7 classes de petites, moyennes et grandes sections de l’école maternelle Victor Hugo, à Montesson (Yvelines), encadrées par Mesdames Myriam Hannecart, Florence Ducasse,Catherine Rousseau, Isabelle Lagrange, Maguy Calot, Caroline Saouzanet,Estelle Lamaudière, Aurélie Costenin, et Monsieur Yoann Desbos. Coordonné parMadame Mouchel, inspecteur de l’éducation nationale de la circonscription du Vésinet, ce projet a reçu en 2003 l’un des prix de La main à la pâte avec mention spéciale.

MultimediaLa main à la pâte : les principes en images, montage de 2min 20s. © INRP - DESCO - La main à la pâte.

Page 72: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

80

Rapprocher les maîtres de la science en marche

Il s’agit, en réunissant enseignants du primaire et scientifi ques autour de prati-ques de sciences (hors programmes notamment), de rapprocher deux mondes qui se connaissent peu ; de modifi er l’image de la science – complexe, inaccessible, voire inquiétante – que peuvent avoir certains enseignants ; et de lever les inhibitions des maîtres en leur démontrant qu’ils peuvent adopter une démarche scientifi que sur des questions qu’ils ne connaissent pas a priori.

Poursuivant ces objectifs, une université d’automne annuelle réunit enseignants du primaire et scientifi ques, depuis octobre 1998, dans les rencontres « Graines de sciences » à l’invitation de la Fondation des Treilles.

IllustrationsEnseignants du primaire et scientifi ques lors d’une session de « Graines de sciences » à la Fondation des Treilles (Var).

Graines de sciences, sous la direction d’Isabelle Catala, Pierre Léna et Yves Quéré, 1999;Graines de sciences 2, sous la direction d’Isabelle Catala-Blanc, David Jasmin et Pierre Léna, 2000;Graines de sciences 3, sous la direction de David Jasmin, Jean-Marie Bouchard et Pierre Léna, 2001;Graines de sciences 4, sous la direction de David Wilgenbus, Jean-Marie Bouchard et Pierre Léna, 2002;Graines de sciences 5, sous la direction de David Wilgenbus, Béatrice Salviat et Marc Julia, 2003;à paraître : Graines de sciences 6 (août 2004)

Ces publications, fruits des rencontres annuelles, résultent de multiples allers et retours entre les scientifi ques, rédacteurs du texte, et les enseignants, relecteurs critiques et exigeants.

Ouvrages publiés par les Éditions Le Pommier, avec le soutien de la Fondation des Treilles ; © Éditions Le Pommier, images reproduites avec leur aimable autorisation.

Aider et accompagner les maîtres

Parrains et accompagnateurs scientifi ques (universitaires, ingénieurs, étudiants en sciences ou élèves de grandes écoles) aident le maître, à sa demande, à faire faire des sciences en classe, sans se substituer à lui.

Le site Internet national de La main à la pâte [www.inrp.fr/lamap] et les prati-ques de réseaux (consultants scientifi ques et pédagogiques, listes de diffusion et sites Internet départementaux) offrent de multiples ressources et s’efforcent de favoriser leur mutualisation.

Page 73: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

81

IllustrationsExtraits de la charte de l’accompagnement scientifi que, mise en ligne sur le site Internet de La main à la pâte [http://inrp.fr/lamap/reseau/parrain/accueil.html] :

L’accompagnateur est une personne volontaire de formation scientifi que (étudiant, élève ingénieur, doctorant…), de niveau minimum Bac +2, qui suit une classe enga-gée dans l’opération La main à la pâte, sans être rétribuée.Il a connaissance des dix principes de La main à la pâte et des programmes des différents cycles de l’école primaire.

EngagementL’accompagnateur s’engage, dans le cadre d’un projet La main à la pâte, à suivre ré-gulièrement les activités scientifi ques d’une classe selon un rythme et des modalités défi nis en concertation avec l’enseignant.Il n’est pas question pour lui de remplacer l’enseignant, ce dernier restant responsable du déroulement de la séance, de la pédagogie et de l’autorité au sein de la classe.

RôlesLe rôle de l’accompagnateur n’est pas de préparer ou mener les séances à la place de l’enseignant, ni de prendre en charge la logistique du matériel. Le maître reste le spécialiste de l’apprentissage dans la classe.L’accompagnateur cherche à faire expliciter le projet de l’enseignant, à discuter avec lui pour en assurer la cohérence et la faisabilité, et pour en identifi er les enjeux et les objectifs. Il répond ainsi aux demandes de l’enseignant concernant ce projet. Ensem-ble, ils se mettent d’accord sur le déroulement des activités que les élèves mèneront et les acquisitions identifi ables qu’ils en retireront.

Pendant la période de préparation des séances, l’accompagnateur peut proposer des ressources documentaires et suggérer des expériences qu’il met au point avec l’ensei-gnant. Il s’efforce de répondre à ses questions et l’aide à repérer les concepts, les dé-marches et les savoirs-faire en jeu. Ils se mettent d’accord sur l’organisation pédagogi-que de la séance, sa planifi cation, le niveau de formulation visé pour la conclusion».

Des scientifi ques vus et dessinés par des enfants.Document n° 1 : émane d’un enfant de CM1 n’ayant pas fait de sciences en classe.Documents n° 2 et 3 : réalisés par Mylène, élève de CM1 qui a fait des sciences en classe avec un accompagnateur scientifi que venant de l’ESPCI, établissement visité au cours de l’année.Document n° 4 : dessin d’un élève de CM2 ayant fait peu de sciences en classe (sans accompagnement).

L’image d’un scientifi que, d’une scientifi que ou d’une équipe de scientifi ques se construit très tôt dans l’esprit des enfants. Dans le cadre de l’Espace des Sciences de l’École supérieure de physique et chimie industrielles de la Ville de Paris (ESPCI), Marie-Odile Lafosse-Marin a entrepris d’étudier cette image pour en tenir compte dans l’enseignement des sciences et son accompagnement par des scientifi ques. Pour ce faire, elle collecte et analyse des dessins d’enfants, et note si ces derniers ont ou non fait des sciences en classe, avec ou sans accompagnement scientifi que lorsque c’est le cas. Selon l’expérience des enfants dans ce domaine, l’image qu’ils ont des scientifi ques diffère.

MultimediaVisite du site Internet de La main à la pâte ; montage de 3min 17s, réalisé par Marc Jamous, à partir d’un projet proposé par Jean-Marie Bouchard.

Page 74: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

82

Quoi de neuf ?

Tous en scène

De nombreux acteurs sont mobilisés au sein de l’école et à ses côtés.Ministère de l’éducation nationale,

La rénovation de l’enseignement des scienceset de la technologie à l’école, 2002.

La main à la pâte et le PRESTE

S’appuyant sur La main à la pâte, lancée par l’Académie des sciences, et s’inscri-vant dans sa fi liation, le PRESTE – Plan de rénovation des sciences et de la technologie à l’école – mis en place par l’éducation nationale, entend privilégier une démarche d’investigation scientifi que chaque fois qu’elle est possible, centrer l’enseignement sur des thèmes proches des préoccupations de l’individu et de la société, constituer un ensemble cohérent de connaissances s’intégrant dans une culture, et contribuer à valoriser l’image de la science auprès des jeunes.

L’action de l’Académie des sciences

• Impulsé par l’Académie des sciences, le développement de La main à la pâte s’est appuyé dès le début sur le concours de la direction des écoles (aujourd’hui direction de l’enseignement scolaire, DESCO), de la délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain (DIV), de la direction de la technolo-gie (DT), de l’institut national de recherche pédagogique (INRP) et de l’inspection générale de l’éducation nationale (IGEN). D’autres partenaires publics ou privés - l’Académie des technologies, la direction aux relations internationales et à la coopération (DRIC) et la direction de l’évaluation et de la prospective (DEP) du mi-nistère chargé de l’éducation nationale, l’école des mines de Nantes (EMN), l’école polytechnique (ministère de la défense), l’École normale supérieure de Paris (ENS), l’école supérieure de physique et chimie industrielles de la ville de Paris (ESPCI), la conférence des directeurs des IUFM (CDIUFM), la Fondation des Treilles, le cen-tre international d’études pédagogiques (CIEP), le ministère des affaires étrangères, l’association des écoles françaises à l’étranger du ministère des affaires étrangères (AEFE)…, sont aujourd’hui associés à l’opération.

Selon les ressources locales, collectivités territoriales, formateurs, parents, ac-compagnateurs scientifi ques, étudiants, scientifi ques se mobilisent : dans La main à la pâte, l’école est « l’affaire de tous ».

panneau

III.3

Page 75: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

83

• Les prix de La main à la pâte. Chaque année depuis 1997, ils sont décernés, sous l’égide de l’Académie des sciences, à des écoles ou classes de l’enseignement primaire qui ont mis en œuvre au cours de l’année scolaire précédente, des activités scientifi ques expérimentales, illustrant l’esprit et de la démarche de La main à la pâte. Quatre-vingt-un lauréats ont ainsi été distingués par le jury depuis la création de ces prix.

Un prix « mémoires professionnels » de La main à la pâte, également placé sous l’égide de l’Académie des sciences, a été créé en 2001 sur proposition de Jacques Friedel. Il récompense deux mémoires professionnels réalisés par des professeurs des écoles stagiaires (en deuxième année d’IUFM) et consacrés, dans l’esprit de La main à la pâte, à l’enseignement des sciences à l’école primaire (maternelle incluse).

Le fi nancement de ces prix est assuré par les redevances de la marque et les cessions de droits d’auteur et d’honoraires par les membres de l’équipe La main à la pâte. Par ailleurs, de nombreux éditeurs et sociétés s’associent aux prix remis par l’Académie des sciences en offrant aux lauréats des livres, magazines, cédéroms et matériels pédagogiques.

• Le comité de la marque La main à la pâte®, présidé par un académicien, a pour mission d’accorder, de suspendre ou de refuser, à des produits et services commer-ciaux, le droit d’usage de la marque, propriété de l’Académie des sciences comme le logo qui lui est associé.

IllustrationsRéunion du jury des prix de La main à la pâte, présidé par Georges Charpak.

Remise des prix de La main à la pâte dans la grande salle des séances du palais de l’Institut de France. Georges Charpak en compagnie de Ségolène Royal, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, chargée de l’enseignement scolaire, (1997) ; de Claude Bar-tolone, ministre délégué à la ville auprès du ministre de l’emploi et de la solidarité (1998) ; de Claude Allègre, ministre de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie (1999) ; de Jack Lang (2000), ministre de l’éducation nationale; de Jean-Luc Mélenchon, mi-nistre de l’enseignement professionnel (2001) ; de Xavier Darcos, ministre délégué à l’ensei-gnement scolaire (2002) ; de Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine (2003).

Moment musical lors de la cérémonie de remise des prix 2000 : Pierre et le loup, conte sym-phonique pour enfants, opus 67 de Sergheï Prokoviev, arrangement pour quintette et récitant avec l’Ensemble Calliopée (Karine Lethiec, alto, Véronique Marin, cello, Renaud Debazeille, clarinette, Cécile Daroux, fl ûte, Frédéric Lagarde, piano) et le récitant, Anatole Lepigeon.

Prix 2002 : accueil des enfants autour d’un goûter.

Page 76: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

84

L’action de l’éducation nationale

En lançant le PRESTE (Plan de rénovation des sciences et de la technologie à l’école), l’éducation nationale fait doublement œuvre d’innovation :

– elle préconise une démarche d’investigation ;– elle défi nit les dispositifs et les moyens fi nanciers et humains nécessaires

à une mise en œuvre nationale : des groupes de pilotage départementaux et académiques associant tous les acteurs (enseignants, formateurs IUFM, maîtres-ressources, inspecteurs de l’éducation nationale, partenaires scien-tifi ques).

De plus, en prévoyant d’équiper les écoles, le PRESTE met fi n à près d’un siècle de relative indifférence quant à la présence de matériel expérimental à l’école primaire.

Aboutissant aux Programmes rénovés (2002) de l’enseignement des sciences et de la technologie à l’école, le plan de rénovation mis en place par l’éducation natio-nale a proposé un dispositif d’aides :

– avec les séminaires interacadémiques organisés en 2000-2001 pour soutenir la mise en place du PRESTE, puis les séminaires interacadémiques d’avril 2003, consacrés à la formation ;

– avec la publication d’un document d’accompagnement des programmes 2002, Enseigner les sciences à l’école, ainsi que des documents d’application de ces programmes, réunis en Fiches connaissance.

Illustrations« Le plan de rénovation de l’enseignement des sciences et de la technologie à l’école ». Ce dépliant, réalisé pour la direction de l’enseignement scolaire (DESCO) du ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, et produit par l’INRP (avec la collabora-tion de l’agence Noir et Blanc), a été diffusé à 350 000 exemplaires à la rentrée scolaire 2002.

Enseigner les sciences à l’école. Accompagnement des programmes Cycles 1, 2 et 3Ministère de la jeunesse, de l’éducation et de la recherche, direction de l’enseignement sco-laire (DESCO), Académie des sciences, La main à la pâte, Éd. SCÉREN, collection École, octobre 2002. © CNDP. Reproduit avec l’aimable autorisation du SCÉREN [CNDP]. Cet ouvrage, auquel a largement participé l’équipe de La main à la pâte, est le fruit d’une colla-boration entre acteurs d’horizons divers : enseignants du primaire et du secondaire, inspecteurs de l’éducation nationale, inspecteurs d’académie-inspecteurs pédagogiques régionaux, inspec-teurs généraux de l’éducation nationale, formateurs IUFM, universitaires et scientifi ques.Complété par un cédérom contenant la version intégrale du document, ainsi que des illustra-tions et animations pédagogiques, Enseigner les sciences à l’école est diffusé gratuitement, depuis janvier 2003, dans toutes les classes françaises.

Fiches connaissances. Documents d’application des programmes, cycles 2 et 3Ministère de la jeunesse, de l’éducation et de la recherche, direction de l’enseignement scolaire (DESCO), Éd. SCÉREN, collection École, octobre 2002. © CNDP. Reproduite avec l’aimable autorisation du SCÉREN [CNDP], cette publication est la reprise, adaptée, des fi ches de 1997 rédigées par l’IGEN Jean-Michel Bérard.

Page 77: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

85

Faire écoleModèle adaptable,modèle exportable

Signes, symboles, élans, chutes, départs, rapports, discordances, tout y est pour rebondir, pour chercher, pour plus loin, pour autre chose. Entre eux, sans s’y fi xer, l’auteur poussa sa vie.Tu pourrais essayer, peut-être, toi aussi ?

Henri Michaux, Plume, Postface, 1938.

En coopération avec des organismes internationaux - tels l’International Council for Science (ICSU), l’InterAcademy Panel (IAP) et l’UNESCO – et avec les Acadé-mies des sciences et les ambassades françaises, l’Académie des sciences a noué des partenariats avec de nombreux pays conscients de la nécessité de réformer l’ensei-gnement des sciences à l’école primaire.

Il s’agit de faire partager l’expérience acquise en France non en reproduisant un modèle mais en adaptant au contexte local les dispositifs, les ressources et les techniques de formation pour répondre au mieux aux besoins des pays concernés, respecter leur culture et leur permettre progressivement de mener leur projet de façon autonome. La main à la pâte offre ainsi une large gamme de services destinés aussi bien aux décideurs, aux formateurs et aux scientifi ques qu’aux enseignants.

Pour les décideurs :réception ou envoi de délégations, organisation de séminaires bilatéraux (Chine, Israël, Etats-Unis) ou internationaux (Asie du Sud Est, Amérique du Sud…), aide à la rédaction de programmes scolaires de sciences (Afghanistan, Vietnam, Algérie…), expertise des dispositifs de coordination et d’accompa-gnement des réformes (Chine, Égypte, Ile Maurice…). Le site international [http://www.icsu.org/events/icsu-iap] placé sous les aus-pices de l’ICSU et de l’IAP et régulièrement mis à jour, inventorie les divers programmes et actions consacrées, dans le monde, à l’enseignement rénové des sciences à l’école primaire.

Pour les formateurs :formation de formateurs en France et à l’étranger, mise en place d’un site Inter-net d’échanges entre des formateurs (France-Chine), création, en 2004, d’une école d’été pour des formateurs français et étrangers à Erice (Italie).

Pour les scientifi ques :accueil de chercheurs étrangers ; participation aux colloques internationaux ; adoption par certains pays du modèle français de réseau de consultants scien-tifi ques et pédagogiques.

Pour les enseignants :traduction et adaptation de ressources pédagogiques produites en France ; aide à la création de sites Internet ; création du site Internet Mapmonde [http://www.mapmonde.org/], destiné à soutenir et mettre en synergie les dispositifs des pays partenaires et à permettre un partage de ressources libre de droits.

panneau

III.4

Page 78: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

86

Illustrationspage d’accueil du site international en français [http://www.icsu.org/events/icsu-iap], placé sous les auspices de l’ICSU et de l’IAP ;

délégation de La main à la pâte conduite par Georges Charpak en Chine en avril 2002 : séminaire et visite d’une école primaire ;

des formateurs marocains et chinois en formation en France avec l’équipe de La main à la pâte animée par Édith Saltiel ;

La main à la pâte, Les sciences à l’école primaire, traductions en vietnamien et en chinois; pages de couverture ;

Enseigner les sciences à l’école, document d’accompagnement des programmes, traduction en chinois, page de couverture.

Des projets coopératifs internationaux concrétisent cette ouverture.

• Sur les pas d’Ératosthène propose, depuis octobre 2000, à des élèves de 8 à 14 ans, de mesurer le rayon de la Terre à partir de leur classe, selon la méthode élaborée trois siècles avant notre ère par Ératosthène, alors directeur de la grande bibliothè-que d’Alexandrie. À l’aide d’un bâton et d’une distance, mesurer la Terre devient un jeu d’enfant ». Ce projet passe par des échanges et des comparaisons de mesures sur Internet entre les nombreuses classes françaises et étrangères qui y participent.Près de 100 écoles se relaient chaque année tout autour du globe pour reproduire les observations et les mesures d’Ératosthène. La diversité des pays facilite l’obtention de résultats précis : les mesures qu’ont effectuées les partenaires engagés, souvent très éloignés en latitude, sont en effet mises à disposition de tous. Ce projet, qui repose sur la coopération entre les classes et l’utilisation des nouvelles technolo-gies pour l’échange des données, exige incontestablement un investissement assez lourd qui bouscule parfois le cadre strict des horaires alloués à l’enseignement des sciences. Mais, en observant et en expérimentant, la grande majorité des élèves qui vont jusqu’au bout du projet acquièrent les bases d’une démarche scientifi que d’in-vestigation.L’on retrouve le protocole expérimental et les outils pédagogiques destinés à ac-compagner les enseignants dans la réalisation des activités sur le site [www.inrp.fr/lamap/eratos].

• L’Europe des découvertes. Ce projet, élaboré par 8 pays européens, permet à des classes d’élèves de 8 à 14 ans de se documenter et d’échanger sur quelques gran-des découvertes et de les reproduire en classe avec du matériel simple. Les élèves rendent compte de leurs travaux sur un site Internet et enrichissent ainsi, d’année en année, l’encyclopédie des découvertes scientifi ques européennes commencée en 2001-2002.

MultimediaSur les pas d’Eratosthène, montage de 4min 25s, réalisé par Brice Goineau. Images d’André Laugier. Droits réservés.

Page 79: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

87

Illustrationsphotos d’élèves au travail avec le gnomon à Alexandrie ;

report de mesures dans une classe égyptienne ;

les pages d’accueil du site Ératosthène [www.inrp.fr/lamap/eratos] en français et en anglais ;

L’Europe des découvertes : les découvertes en cours d’exploration en Europe ;

une classe de cycle 3 de Saint-Germain-et-Mons (24) construit une maquette du télégraphe de Chappe. © École des sciences de Bergerac, document reproduit avec son aimable autorisa-tion. Remerciements à Jean-Louis Alayrac ;

des jeunes fi lles égyptiennes au travail avec un gnomon.

Page 80: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

88

Sciences et éducation

Un enjeu planétaire

Il n’y a de progrès, pour nul écolier au monde, ni en ce qu’il entend, ni en ce qu’il voit, mais seulement en ce qu’il fait.

Alain, Propos sur l’éducation, 1932.

Mieux vaut une fois vu que cent fois entendu, une fois fait que cent fois vu.Proverbe chinois.

Depuis 1996, une réelle transformation s’est produite en France, qui concerne la place et la nature de l’enseignement des sciences et de la technologie à l’école primai-re, le rapport des maîtres à la science, la qualité et la créativité dont ils font preuve. Néanmoins, l’enseignement basé sur l’investigation est encore loin de concerner la majorité des écoles, et cette évolution demeure fragile, notamment dans ses aspects les plus stratégiques : matériel disponible dans les classes, sentiment d’insécurité qu’éprouvent encore certains enseignants vis-à-vis de l’enseignement scientifi que. Si le lien avec la pédagogie de la langue a été fait dès le début, le lien avec les mathéma-tiques reste encore largement à construire.

S’agissant de formation, la place des sciences dans le cursus des professeurs des écoles en IUFM (fl ux de sortie de 13 000 par an, et bientôt 15 000) a été fortement réduite par la réforme des études de 2002, sciences et technologie se voyant refuser le statut de dominante de formation.

Au collège, l’infl échissement de certaines pratiques dans un sens plus expérimen-tal, plus ouvert à une démarche d’investigation marque timidement, ici ou là, l’impact de La main à la pâte sur les pratiques pédagogiques. (Il est à noter que les nouveaux programmes de science du collège, qui pourraient entrer en application à la rentrée 2005 en classe de sixième, font explicitement référence à la « démarche d’investiga-tion », à la prise en compte des programmes du primaire et à la rénovation en cours dans celui-ci).

Prenant appui sur un modèle né aux Etats-Unis tout en s’inspirant tant des expé-riences d’enseignement des sciences qui ont émaillé son histoire que de son propre travail d’adaptation, la France a su créer chez elle, inspirer et soutenir dans de nom-breux pays des actions originales. Innover, adapter, échanger : tels sont les principes qui guident l’action de La main à la pâte, adossée aux pédagogues comme aux scientifi ques.

Un peu partout sur la planète, quel que soit le degré de développement, émerge une prise de conscience nouvelle : la nécessité de préparer les enfants, adultes de demain, à comprendre et si possible maîtriser un monde que sciences et techniques révolutionnent. Non pas en accumulant des connaissances trop vite dépassées, mais en s’ouvrant au raisonnement, à l’esprit critique, à l’observation et l’expérimentation, au sens de l’échange argumenté, grâce à une pédagogie insérée dans la diversité des personnalités, des langues et des cultures.

panneau

III.5

Page 81: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)

89

Illustrations (de gauche à droite et de haut en bas)

France : séances La main à la pâte. © INRP-DESCO, La main à la pâte.

Sao Carlos, Brésil : activités horticoles. © Centre de divulgation scientifi que et culturelle de Sao Carlos (CDCC).

Sao Carlos : autour des changements d’état © CDCC.

Mexico, Mexique : un groupe d’enseignants des quartiers pauvres découvre la science. © Pierre Léna.

Haïti : les élèves gonfl ent les poumons d’un lapin. © Association Défi .

Figueiro da Foz, Portugal : botanique dans le cadre de L’Europe des découvertes. © Maria da Luz.

Bogota, Colombie : une classe de CE2 de l’école La Giralda. Module sur les mélanges : phase de discussion. © Paméla Lucas.

Hangzhou, Chine : une activité sur les vers de terre. © Pierre Léna.

Grande section de maternelle du lycée français de Buenos Aires, Argentine, classe de Laura Pacheco : travail sur l’électricité, et recyclage du papier. © Laura Pacheco.

Chine : écrire avec les sciences dans une classe maternelle, recherche de la graphie la plus pertinente pour exprimer « fl otte ou coule ». © Pierre Léna.

Nankin, Chine, classe de CM1 : « Que deviennent les aliments que nous mangeons ? »© David Jasmin.

Phnom Penh, Cambodge : une classe de 6e dans l’école de la faculté de pédagogie, adaptation du module « les leviers » du document d’accompagnement des programmes français. © Ecole des sciences de Bergerac.

Parvis de la grande bibliothèque d’Alexandrie, Égypte : pour mesurer le rayon de la Terre, une classe égyptienne fait des relevés le jour du solstice d’été, là même où Ératosthène vécut et fi t ses mesures il y a 25 siècles. © Pierre Léna.

Le Caire, Égypte : une classe de CE2 travaille sur les cinq sens. © Édith Saltiel.

Page 82: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)
Page 83: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)
Page 84: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)
Page 85: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)
Page 86: Sciences à l’école : quelle histoire · 2012-09-11 · 3 Sciences à l’école : quelle histoire ! Une suite de 27 panneaux • 5 panneaux introductifs : 1 panneau (non numéroté)