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Vous avez imprimé cette page depuis L'Obs. L'Obs, actualité du jour en direct — http://nouvelobs.com Hollande, autopsie d'une présidence A un an de la présidentielle, l'historien Pierre Rosanvallon, auteur du “Bon Gouvernement”, dresse un bilan du quinquennat et se demande pourquoi le “président normal” a tant déçu. Entretien. L'OBS. Votre dernier ouvrage, publié en septembre dernier, s'appelle «le Bon Gouvernement». Alors que François Hollande termine sa quatrième année à l' Elysée et que la présidentielle commence à se profiler à l'horizon, on peut dresser un premier bilan et se demander s'il a «bien gouverné»? A en croire les sondages, ce n'est pas l'avis des Français... Pierre Rosanvallon. Le bilan est en effet assez sombre. Domine le constat d'un flottement permanent, d'une sorte d'incapacité à maintenir un cap. Les projets mal ficelés et les reculs désordonnés n'ont pas cessé de s'enchaîner depuis quatre ans, le psychodrame de l'écotaxe ayant constitué la première illustration spectaculaire de ces jeux de balancier. On disait autrefois: «Gouverner c'est prévoir.» Il faudrait plutôt dire dans le cas présent que cela a été de naviguer à vue, de réagir au jour le jour, de multiplier les effets d'annonce sans suite. Des changements positifs n'ont été opérés que dans les cas où il y avait un choix binaire à trancher, opposant deux visions bien identifiées, entre lesquelles l'arbitrage arithmétique était simple à opérer. Cela a été le cas pour le mariage pour tous. Mais cela ne marche pas comme cela dans la plupart des domaines. Disant cela, je suis aussi conscient qu'il ne faut pas être naïf. Il est objectivement difficile de réformer le pays tant les coalitions négatives sont toujours les plus faciles à former. Il en résulte mécaniquement une certaine préférence pour l'immobilisme. Il faut En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies permettant de vous proposer des services et offres adaptés à vos centres d'intérêt. En savoir plus Fermer ×

Rosanvallon Sur Holande

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Rosanvallon sur Hollande

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Hollande, autopsie d'une présidence

A un an de la présidentielle, l'historien Pierre Rosanvallon, auteur du “Bon Gouvernement”,dresse un bilan du quinquennat et se demande pourquoi le “président normal” a tant déçu.Entretien.

L'OBS. Votre dernier ouvrage, publié en septembre dernier, s'appelle «le Bon Gouvernement». Alors que

François Hollande termine sa quatrième année à l'Elysée et que la présidentielle commence à se profiler à

l'horizon, on peut dresser un premier bilan et se demander s'il a «bien gouverné»? A en croire les sondages, ce

n'est pas l'avis des Français...

Pierre Rosanvallon. Le bilan est en effet assez sombre. Domine le constat d'un flottement permanent, d'une sorte d'incapacité

à maintenir un cap. Les projets mal ficelés et les reculs désordonnés n'ont pas cessé de s'enchaîner depuis quatre ans, le

psychodrame de l'écotaxe ayant constitué la première illustration spectaculaire de ces jeux de balancier. On disait

autrefois: «Gouverner c'est prévoir.»

Il faudrait plutôt dire dans le cas présent que cela a été de naviguer à vue, de réagir au jour le jour, de multiplier les effets

d'annonce sans suite. Des changements positifs n'ont été opérés que dans les cas où il y avait un choix binaire à trancher, opposant

deux visions bien identifiées, entre lesquelles l'arbitrage arithmétique était simple à opérer. Cela a été le cas pour le mariage

pour tous. Mais cela ne marche pas comme cela dans la plupart des domaines.

Disant cela, je suis aussi conscient qu'il ne faut pas être naïf. Il est objectivement difficile de réformer le pays tant les coalitions

négatives sont toujours les plus faciles à former. Il en résulte mécaniquement une certaine préférence pour l'immobilisme. Il faut

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négatives sont toujours les plus faciles à former. Il en résulte mécaniquement une certaine préférence pour l'immobilisme. Il faut

aussi tenir compte du fait qu'avec la globalisation, le monde est devenu plus complexe, plus incertain et qu'elle limite l'autonomie

de décision des Etats. Mais il faut en même temps bien insister sur le défaut de méthode qui n'a pas cessé de produire ses effets

délétères: l'insuffisance de délibération, de consultation. «Bien gouverner» aujourd'hui, ce ne peut plus être gouverner d'en haut,

c'est faire avancer une société en l'impliquant, en la faisant travailler sur elle-même.

Dans ce contexte, quelle a été sa façon de gouverner? A-t-il été le «président normal» qu'il avait promis d'être

durant la campagne?

Le thème du «président normal» était l'expression d'un désir de démocratisation, de rendre le pouvoir moins lointain. François

Hollande a réussi sur ce point en termes que je dirais comportementaux et psychologiques. C'est un homme direct et chaleureux,

sans arrogance ; on le sent plutôt proche des gens.

Mais la normalité aurait aussi dû signifier une présidence qui descend de son piédestal en termes institutionnels: c'est-à-dire qui

rend des comptes, qui mène une action lisible, fixe un cap, qui fait preuve de responsabilité. C'est là que le bât blesse, car le

rapport entre les citoyens et le pouvoir n'a pas été modifié dans le sens de ce que j'ai appelé un «bon gouvernement».

Ce déficit s'est d'autant plus fait sentir que la fonction du Parlement s'est atrophiée. Il ne fait dorénavant plus qu'approuver ou

repousser les projets de lois. Cela conduit à une simplification et à un appauvrissement de la vie démocratique. Soit on est dans la

majorité, soit on est dans l'opposition. Il n'y a pas de position intermédiaire.

C'est la tragi-comédie des frondeurs. Ils veulent peser dans le débat, mais sans aller jusqu'à prendre le risque de faire tomber le

gouvernement. Ils sont donc condamnés à l'impuissance. Il y a certes toujours des débats parlementaires, mais qui relèvent du

marchandage de détail et se traduisent généralement par l'enflure des textes: pour calmer la grogne de tel individu, de tel petit

groupe, de telle région, on rajoute des articles pas forcément utiles. L'adoption parlementaire des textes est du même coup de

plus en plus longue et il en résulte des lois qui partent dans tous les sens, sans que l'on puisse parler de progrès du débat

démocratique.

C'est le résultat d'une succession de petits arrangements qui sont de l'ordre de la corruption douce. Il est probablement

impossible de revenir à la vision parlementaire d'autrefois. Mais il faut faire revivre et agrandir les «fonctionnalités

démocratiques» qui étaient les siennes, en matière d'évaluation des politiques publiques, de surveillance des pouvoirs,

d'animation du débat.

Il y aurait sur ce point une véritable révolution démocratique à accomplir. Elle n'a été esquissée qu'en matière d'intégrité de la

classe politique avec la création de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie publique, décidée à la suite de l'affaire

Cahuzac. C'est une avancée qu'il faut saluer, d'autant plus que l'institution, qui a l'œil sur la nomenklatura (9000 personnes sont

surveillées), a vite fait la preuve de son utilité.

Certains affirment qu'il y a aussi une demande de pouvoir fort, d'autorité.

Il y a une double demande des citoyens : une attente de normalité et de proximité d'un côté, et de l'autre la volonté d'être rassuré

et protégé par un commander in chief. A l'heure où se multiplient les tensions internationales et les menaces terroristes, c'est

essentiel. On peut dire que François Hollande a été à la hauteur des situations qu'il a fallu affronter.

Mais on peut remarquer en même temps que la tentation pour les pouvoirs est aujourd'hui de mettre l'accent sur cette fonction.

Quand on envoie des avions bombarder une cible, la parole se fait acte, la volonté s'accomplit immédiatement. Ce pourrait être

aussi la voie d'une dérive, celle d'un substitut aux difficultés internes, qui valoriserait cette vision «militaire» de la volonté.

Venons-en maintenant aux grands choix de politique intérieure du mandat Hollande. A-t-il manifesté une

vision pour la France?

Sur ce terrain - celui des politiques économiques, sociales, sociétales - nous sommes en panne. Et pas simplement les Français. Le

problème est plus largement celui des grandes démocraties qui font face à l'épuisement du modèle social du XXe siècle. Nous

sommes du même coup en manque d'une redéfinition de ce que veut dire le progrès social au XXIe siècle. Il n'y a plus aujourd'hui

de véritable pensée de gauche opérationnelle. Surnagent seules des nostalgies et des impatiences.

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Aujourd'hui, il n'y a dans la gauche de gouvernement que deux voies qui s'affrontent. D'une part, ce qu'on pourrait appeler une

«gauche de l'adaptation», qui se définit surtout par la lutte contre les «archaïsmes», dont le seul objet est «la modernisation» au

sens le plus large du terme, et qui ne s'inscrit pas dans une vision progressiste, au sens propre - c'est typiquement la posture de

quelqu'un comme Macron. Et, d'autre part, une «gauche de l'autorité», qui réinvente le vieux radicalisme et l'intransigeance

laïque, incarnée par Manuel Valls : une gauche qui ne se définit plus tant dans le domaine économique et social que sur le terrain

de la sécurité et de l'identité.

Et vous voyez bien que, lorsque je dis «gauche de l'autorité», «gauche de l'adaptation», on peut enlever le mot «gauche» et mettre

simplement «politique de l'adaptation» ou «politique de l'autorité».

Le président entouré de Manuel Valls et Emmanuel Macron / © Manach & Bienvenu pour L'OBS

Hollande est-il plus près de Valls ou de Macron?

De Macron, probablement. Valls tient un discours sécuritaire et d'intransigeance républicaine très traditionnel que ne semble pas

partager le président de la République.

On a parfois l'impression qu'il gère la France comme les congrès du PS, avec des calculs de courants et des

synthèses qui finissent par vider les décisions de leur contenu.

Tel qu'on peut le voir, c'est un homme de la réactivité au quotidien, pas de la vision. Un homme totalement immergé dans l'espace

politicien aussi. Or avoir barre sur ce milieu, c'est s'intéresser prioritairement aux susceptibilités et aux carrières de quelques

centaines de personnes qui forment le petit cercle des caciques du parti et des grands élus. C'est ce qu'il faut faire pour gérer le

milieu politique et conserver l'appui du Parlement, autant que celui du parti.

Mais ce milieu vit de plus en plus coupé de la société (il est même aussi coupé de la plupart des élus de terrain). Pour ceux qui le

composent, ce qui compte c'est en effet d'abord de prendre des positions et d'adopter des postures qui feront croître leur

influence. C'est toute la différence avec gouverner un pays, où ce sont les forces sociales enracinées dans le réel qui comptent.

Vous avez signé l'appel à l'organisation d'une primaire à gauche: est-ce une solution aux maux que vous

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Vous avez signé l'appel à l'organisation d'une primaire à gauche: est-ce une solution aux maux que vous

diagnostiquez? Et comment le chef de l'Etat peut-il s'y inscrire?

J'ai signé la pétition non pas au premier chef pour faire rentrer le président sortant dans ce qui serait le carcan de la désignation

par les militants, mais parce qu'il y a un besoin impératif de délibération et de discussion dans le pays. La primaire conjugue deux

vertus: elle permet de sortir du choix des appareils et d'ouvrir un débat dans la société. Nous avons grand besoin de cela, pour

réduire l'écart des citoyens à la chose publique. Quant au président en place, il est évident que s'il a une forte légitimité, il n'a pas

à craindre ce type d'épreuve.

Cela déboucherait sur une situation tout de même compliquée…

Ce qui est compliqué, ce sont les conditions de l'acquisition de la confiance du public. Celle-ci ne se décrète plus. La définition

classique de l'autorité, c'est le fait de pouvoir s'imposer sans discussion et sans violence. Alors, j'espère qu'on peut s'imposer sans

violence, mais sans discussion, non. Le propre de la démocratie c'est justement la discussion.

L'autorité à l'ancienne n'a plus sa place dans les démocraties. Dans une primaire, on peut reconnaître une forme de prééminence à

celui qui est encore dans les habits de la fonction présidentielle, mais l'on ne saurait admettre l'a priori d'autorité que donnerait

en soi une position. Ou ce serait alors avoir bien peu de considération pour la personne concernée.

Héritier de Mitterrand, Hollande l'est aussi de Delors. On aurait pu imaginer que cette filiation l'incite à se

soucier du dialogue social et notamment à prendre soin du lien avec la CFDT. La réforme du Code du Travail

a montré au contraire une fracture avec l'ensemble des syndicats et la tentation de passer en force. Comment

comprendre une telle stratégie?

Il y a eu une erreur de méthode fondamentale. Tout d'abord du point de vue du dialogue social, ce qui est, sur un sujet comme

celui du travail, assez surprenant. Mais surtout, il y a eu un problème dans la conception même de la loi. On a voulu mettre trop

de choses dedans, ce qui a rendu la discussion plus confuse et l'adoption plus difficile. Lorsqu'on additionne cinquante sujets,

chacun va plus facilement y trouver matière à opposition. C'est le problème des lois fourre-tout : elles sont illisibles et cumulent

du même coup les procès d'intention et de multiples oppositions localisées. On a tort de présenter pour de grandes lois des textes

qui ne sont qu'obèses.

Le Premier ministre a affirmé que le compte personnel d'activité (CPA) était «la grande réforme sociale du quinquennat», c'est

son expression. Mais, à ce moment-là, pourquoi ne pas avoir fait une loi centrée sur cette innovation? Les organisations

syndicales n'auraient peut-être pas suivi à 100%, mais sachant que la CGT est pour la sécurité sociale professionnelle [dont le

CPA est présenté par le gouvernement comme la première étape, NDLR], on aurait pu alors avoir une véritable discussion et

aller de l'avant. Et discuter ensuite de flexibilité en ayant fait la preuve de son attention à la protection des gens.

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Pierre de Villiers, chef d'Etat-major des armées françaises et François Hollande / © Manach & Bienvenu pour L'OBS

Au total, peut-on parler de gâchis pour qualifier la présidence Hollande? Ou en tout cas d'occasion manquée?

C'est certain. L'histoire a patiné, et le lien entre le mot «gauche» et les mots «exercice du pouvoir» et «avenir» s'est évaporé.

Cette démonétisation de l'idée de gauche est très grave, car elle nourrit les nouvelles formes de populisme, d'extrême droite, mais

aussi le populisme d'extrême gauche.

Lorsque Manuel Valls dit que la gauche peut disparaître, il oublie donc seulement que la politique suivie par

son gouvernement y a contribué…

La gauche est en coma artificiel et le gouvernement y a sa très grande part de responsabilité. Mais la faute en incombe aussi à la

gauche de posture, la gauche du «c'était mieux avant», qui idéalise les années Mitterrand, le vieux programme commun, les

Trente Glorieuses… Cette gauche est hélas très puissante dans le monde intellectuel et dans le milieu des salariés les mieux

protégés. Dans l'électorat de Mélenchon il y a plus de profs et de fonctionnaires retraités qui regrettent les enthousiasmes

militants de leur jeunesse que de jeunes précaires.

Dans quel état Hollande va-t-il laisser la France?

Dans un état de sidération et d'inquiétude. Inquiétude, parce que celle-ci naît de l'indétermination. Pour la combattre, il faut

rendre le monde plus intelligible et surtout plus prévisible.

Prenons la question des réfugiés : si on dit de façon très vague, avec un air menaçant, que des millions de réfugiés vont arriver à

nos portes et nous envahir, on alimente l'angoisse. Les choses se présentent différemment si on adopte clairement une vision

prospective du problème en le rationalisant, en voyant comment il va se poser dans le temps, en discutant des solutions de long

terme.

Le même raisonnement vaut pour la peur du déclassement social. Le déclassement, c'est le fait de se trouver en situation de

descente sociale par rapport à ses parents ou par rapport à sa propre situation précédente. Cette menace ne concerne au final

qu'un petit nombre de gens. Pourtant la peur de ce déclassement touche la majorité de la population, parce que, ce qui est perçu

n'est pas la probabilité de l'événement, mais sa gravité. Peu de Français, en termes statistiques, finiront au RSA, mais être au RSA

est une telle catastrophe morale et matérielle qu'on le ressent comme une menace immédiate.

On attribue à Hollande une personnalité calme. Est-ce un facteur qui aide à raisonner les inquiétudes?

La sérénité qui émane de sa personne, en particulier dans les épreuves les plus dramatiques, est en tout cas plus rassurante que

l'agitation déstabilisante de son prédécesseur. Cela dit, la façon dont le pouvoir exécutif canalise les attentes ne peut qu'engendrer

la déception. Il faut en même temps agir au sommet et «décentraliser» les impatiences.

Prenons l'exemple des inquiétudes liées au climat. C'est très bien de réussir la COP21, mais si la mise en œuvre concrète implique

des décisions publiques immédiates fortes (voir le débat récent sur les pesticides), elle doit aussi se faire au niveau local; qu'il

s'agisse par exemple des économies d'énergie ou du traitement des déchets. A cet échelon, les citoyens peuvent avoir le sentiment

d'avancer par eux-mêmes et de ne pas être toujours en position d'attente que le sommet agisse à leur place. Raisonner les

inquiétudes, c'est voir que l'on peut avoir concrètement prise sur les réalités, devenir un acteur du changement.

Personne ne pense que tout va être résolu d'un coup de baguette magique. Les Français peuvent comprendre les contraintes à

condition d'avoir un récit qui les organise, de partager une vision qui donne du sens quotidien à ce qu'ils vivent. Voilà ce qui nous

manque, voilà ce que la gauche, écartelée entre la dynamique de l'adaptation et la dynamique de l'autorité, est aujourd'hui

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manque, voilà ce que la gauche, écartelée entre la dynamique de l'adaptation et la dynamique de l'autorité, est aujourd'hui

incapable de produire. Notre société civile est très vivante, la France de 2016 ne marcherait d'ailleurs pas sans toutes les

associations d'entraide, d'alphabétisation, de prise en charge des plus démunis qui agissent sur le terrain. La société civile est en

marche, la société politique est en panne.

Après les attentats de Bruxelles, nous sommes sans doute entrés dans une nouvelle ère de demande de

sécurité. Comment concilier ces impératifs avec la défense des libertés et la vitalité démocratique?

Nous aurons besoin de plus en plus de mesures durables de sécurité. Nul ne saurait lésiner sur les moyens à déployer en la

matière. Mais nous aurons aussi besoin d'une société plus solidaire, plus forte, qui fasse davantage corps, pour résister aux

intimidations et aux chantages des terroristes. Et il y a du travail à faire pour cela !

Il nous faut également veiller à la solidité des garanties constitutionnelles à déployer pour que la gestion des situations d'urgence

ne dérive pas insidieusement vers des formes d'État autoritaire. Plus un pouvoir est fort, plus il faut de contre-pouvoirs, d'Etat de

droit et de vigilance citoyenne.

Propos recueillis par Éric Aeschimann et François Armanet

Pierre Rosanvallon, bio express

Professeur au Collège de France et fondateur de La République des idées, Pierre Rosanvallon est l'auteur de nombreux

essais, tous édités au Seuil, dont «la Contre-démocratie», «la Société des égaux», et, l'an passé, «le Bon Gouvernement»,

quatrième et dernier volet de sa réflexion sur les démocraties contemporaines.

Paru dans "L'Obs" du 31 mars 2016.

Les 1ères pages du "Bon Gouvernement" de Pierre Rosanvallon

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