9
ARTICLE ORIGINAL Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces Long-term morphologic results of a 32 successive patients series presenting unilateral complete cleft lip and palate with surgery at early age R. Le Pendeven * , V. Martinot-Duquennoy, P. Pellerin Service de chirurgie plastique esthe ´ tique et reconstructrice de Lille, ho ˆ pital Roger-Salengro, rue E ´ mile-Laine, 59000 Lille, France Rec¸u le 7 janvier 2008 ; accepte´ le 15 mai 2008 MOTS CLÉS Fente labiopalatine unilatérale totale ; Résultats à long terme ; Résultats morphologiques ; Prise en charge néonatale Résumé Objectif. Le but de cette étude rétrospective était de décrire et d’évaluer les résultats morphologiques à long terme de patients porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces à Lille. Patients et me´thodes. Trente-deux patients porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales non syndromiques ont été opérés précocement par le même chirurgien, à l’âge moyen de 70,4 jours, suivant deux protocoles. Le « groupe 1 » a bénéficié d’une cheïlorhinoplastie suivant la technique de Millard typique en condition néonatale, associée à une fermeture du palais dans le même temps. Le « groupe 2 » a bénéficié d’une cheïlorhinoplastie dérivée du Millard, en condition néonatale, associée à une fermeture du palais selon la technique de Wardill au dixième mois de vie. Les critères d’évaluation étaient les anomalies anatomiques résiduelles après chirurgie des nez, lèvres, palais primaire et secondaire après en moyenne 17 ans de recul. Re´sultats. Nos résultats montrent que les techniques de Millard et ses dérivées sont globa- lement satisfaisantes, même si le nombre de retouches et d’ajustements complémentaires a été Annales de chirurgie plastique esthétique (2009) 54,715 * Auteur correspondant. 3, rue Denis-Godefroy, 59000 Lille, France. Adresse e-mail : [email protected] (R. Le Pendeven). 0294-1260/$ see front matter # 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.anplas.2008.05.003

Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

ARTICLE ORIGINAL

Résultats morphologiques à long terme d’unesérie de 32 patients successifs porteurs de fenteslabiopalatines unilatérales totales opérées enconditions précoces

Long-term morphologic results of a 32 successivepatients series presenting unilateral complete cleftlip and palate with surgery at early age

R. Le Pendeven *, V. Martinot-Duquennoy, P. Pellerin

Service de chirurgie plastique esthetique et reconstructrice de Lille, hopital Roger-Salengro, rue Emile-Laine, 59000 Lille, France

Recu le 7 janvier 2008 ; accepte le 15 mai 2008

Annales de chirurgie plastique esthétique (2009) 54, 7—15

MOTS CLÉSFente labiopalatineunilatérale totale ;Résultats à long terme ;Résultatsmorphologiques ;Prise en chargenéonatale

* Auteur correspondant. 3, rue DenisAdresse e-mail : ronanlependeven@

0294-1260/$ — see front matter # 20doi:10.1016/j.anplas.2008.05.003

RésuméObjectif. — Le but de cette étude rétrospective était de décrire et d’évaluer les résultatsmorphologiques à long terme de patients porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totalesopérées en conditions précoces à Lille.Patients et methodes. — Trente-deux patients porteurs de fentes labiopalatines unilatéralestotales non syndromiques ont été opérés précocement par le même chirurgien, à l’âge moyen de70,4 jours, suivant deux protocoles. Le « groupe 1 » a bénéficié d’une cheïlorhinoplastie suivantla technique de Millard typique en condition néonatale, associée à une fermeture du palais dansle même temps. Le « groupe 2 » a bénéficié d’une cheïlorhinoplastie dérivée du Millard, encondition néonatale, associée à une fermeture du palais selon la technique de Wardill au dixièmemois de vie. Les critères d’évaluation étaient les anomalies anatomiques résiduelles aprèschirurgie des nez, lèvres, palais primaire et secondaire après en moyenne 17 ans de recul.Resultats. — Nos résultats montrent que les techniques de Millard et ses dérivées sont globa-lement satisfaisantes, même si le nombre de retouches et d’ajustements complémentaires a été

-Godefroy, 59000 Lille, France.yahoo.fr (R. Le Pendeven).

08 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Page 2: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

8 R. Le Pendeven et al.

important (87 %). Les anomalies postchirurgicales concernant la lèvre rouge (discontinuité,excès muqueux) étaient fréquentes (53 %) et facilement corrigeables. Les chirurgies secondairesconsistaient principalement en des retouches minimes de lèvre (46 %), des reprises de palais(53 %) et des rhinoplasties (40 %).Conclusion. — La prise en charge précoce des fentes est une possibilité qui nous était donnéegrâce aux progrès de l’anesthésie-réanimation. L’absence de séquelles irrattrapables par lachirurgie secondaire des premiers cas opérés et présentés dans cette étude a incité l’équipe àpoursuivre dans cette voie.# 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSUnilateral completecleft lip and palate;Long term results;Morphologic results;Neonatal management

Summary

Study objective. — The aim of this retrospective study is to describe and evaluate the long termmorphologic results of patients who present unilateral complete cleft lip and palate.Patients and methods. — Thirty-two patients with non syndromic unilateral complete cleft lipand palate were operated early by the same surgeon, at the mean age of 70,4 days old, with twooperating procedures. The first group was operated of cheiloplasty with the Millard methodduring the neonatal period, associated to the closure of the palate in the same time. The secondgroup was operated with a modified Millard method during the neonatal period associated to aclosing of the palate by the Wardill method at the age of ten months old. The criteria ofevaluation were the anatomic remaining abnormalities after surgery of nose, lips, primary andsecondary palate (back of 17 years).Results. — Our results show that Millard method and derived are taken as a whole effective,even if the number of secundary surgery and supplementary adjustments was sizeable (87%). Thepostoperative abnormalities concerning red lip (discontinuity, mucous excess) were frequent(53%), but easily correctable. The secondary surgeries were for mainly minor touch up of lip(46%), second time palate surgeries (53%), and rhinoplasties (40%).Conclusion. — Progress in anesthesia and reanimation allowed us to assure an early managementof clefts. The absence of incorrigible after-effects by a secondary surgery of the first-operatedpatients encouraged the team to continue in this way.# 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Introduction

La réparation anatomique qui, outre la restitution morpho-logique, vise à redonner la fonction phonatoire, auditive etune dynamique de croissance normale, est l’objectif de laprise en charge pluridisciplinaire des enfants porteurs defentes faciales. Mais au-delà, l’épanouissement personnel etl’intégration sociale en sont le but ultime.

Une grande variété de protocoles existe [1—6]. Ils dif-fèrent dans les calendriers et techniques opératoires, dansl’approche et les priorités données aux aspects de ce projetglobal. Le faible nombre de séries [7—12] rapportant lesrésultats à long terme (supérieurs à 18 ans de suivi) depatients opérés rend néanmoins difficile la comparaison deces protocoles.

Les patients ont été pris en charge par une équipe multi-disciplinaire composée actuellement de deux chirurgiens,deux orthophonistes, d’un orthodontiste et d’une psycholo-gue auxquels s’associent les ORL. Elle prend en charge lesfentes labiopalatines depuis 1982 et traite en moyenne 100nouveaux cas par an, assurant ainsi le suivi de plus de 2000patients, de leur naissance jusqu’à la fin de leur croissance.

Ayant choisi initialement de pratiquer une chirurgie encondition néonatale et de privilégier dans le calendrierchirurgical l’obtention d’une phonation de qualité, il nousa semblé important de savoir si ce n’était pas au prix derésultats morphologiques inférieurs aux standards et au prixde troubles de la croissance supérieurs à ceux relevés dans lalittérature.

Cette étude a donc pour objectif de présenter etd’évaluer les résultats morphologiques à long terme d’ungroupe homogène de patients porteurs de fentes labioma-xillo-palatines unilatérales totales non syndromiques opérésen conditions néonatales. Deux protocoles différents, pra-tiqués à l’époque, ont été comparés. Il s’agira égalementd’étudier les facteurs influençant ces résultats.

Patients et méthodes

Patients

De 1985 à 1989, 40 enfants porteurs d’une fente unilatéraletotale ont été pris en charge successivement. Huit d’entreeux présentant une forme syndromique ont été exclus. Dansla cohorte des 32 patients restants, on dénombrait dix fillespour 22 garçons, 14 fentes unilatérales totales droites, 18unilatérales totales gauches. Tous ont été opérés précoce-ment par le même chirurgien, à l’âge moyen de 70,4 jours.Deux protocoles ont été successivement employés. De 1985 à1988, la cheilorhinoplastie était une intervention de Millardtypique et associée à une staphyloraphie dans le mêmetemps, en condition néonatale. De 1988 à 1989, la cheilo-rhinoplastie était une variante dite d’Onizuka en conditionnéonatale, puis Wardill pour le palais ultérieurement (auminimum à sept mois, le plus souvent à dix mois). Pour cegroupe, le palais antérieur était fermé à partir de quatre ans.Nous appelons « groupe 1 » le premier protocole (Millard

Page 3: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Figure 1 Tracé des lambeaux selon Millard. A : lambeau deberge interne ; B : lambeau de berge externe.

Figure 3 Tracé des lambeaux selon la variante d’Onizuka. A :lambeau de berge interne ; B : lambeau de berge externe. ; C :lambeau de seuil.

Résultats morphologiques de patients porteurs de fentes labiopalatines 9

associé à staphyloraphie partielle en un temps), et« groupe 2 » le second (variante d’Onizuka puis Wardill).

Calendrier et techniques opératoires

Cheilorhinoplastie en condition néonatale au premiermois de vieLa technique est codifiée et reproductible. Suivant le prin-cipe de l’avancée-rotation, elle consistait de 1985 à 1988 enune intervention de Millard typique associée à une adhésionvélaire. Pour la lèvre, elle utilisait un lambeau triangulairede berge externe inséré dans une ouverture arciforme sur laberge interne (Fig. 1 et 2).

De 1988 à 1989, ce lambeau triangulaire de berge externe(lambeau B) était inséré dans une ouverture entre un lam-beau de seuil en haut (lambeau C) et un lambeau de lèvre endedans sur la berge interne (lambeau A), auquel était rajoutéun lambeau trapézoïdal sur la ligne cutanéomuqueuse,dérivé du roll-flap de Millard (Fig. 3). Le point de rotationdu lambeau C était placé au point médiocolumellaire, réali-sant la variante d’Onizuka (Fig. 4).

Enfin, une plastie musculomuqueuse amenait sur la facebuccale de la berge interne, un triangle de berge externe(Fig. 5 et 6).

Figure 2 Lambeaux et reconstruction selon Millard. A : lam-beau de berge interne ; B : lambeau de berge externe.

Uranostaphyloraphie à dix moisElle était faite selon la technique de Veau-Wardill-Kilner[13]. Deux lambeaux de fibromuqueuse palatine, pédiculéssur l’artère palatine postérieure, sont levés et décollés dansle plan sous-périosté. Après fracture du crochet de la ptéry-goïde, et parfois section transversale du plan nasal au bordpostérieur des lames palatines, on procède à la fermeture duvoile en trois plans et à la suture sur la ligne médiane desdeux lambeaux.

La réparation vélopalatine était réalisée au dixième moisde vie. Cette date est pour nous un compromis intéressantentre la période de croissance rapide maxillofaciale qui la

Figure 4 Point de rotation du lambeau C dans la varianted’Onizuka.

Page 4: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Figure 5 Dessin de la plastie en Z de la muqueuse. 1 : bergeinterne ; 2 : berge externe ; 3 : frein de lèvre ; A : sommet dulambeau muqueux allant en A0.

10 R. Le Pendeven et al.

précède, pendant laquelle toute opération se traduirait pard’importants troubles de croissance, et l’âge de début dubabil, qui débute à un an.

Gingivopériostoplastie avec ou sans greffe osseuseentre quatre et cinq ansLa fermeture du palais primaire était réalisée à partir del’âge de quatre ans. Elle consiste en des sutures des plansgingivovestibulaires, gingivopalatins, et du plan muco-

Figure 6 Muqueuse après plastie en Z. 1 : berge interne ; 2 :berge externe ; 3 : frein de lèvre ; A : sommet du lambeaumuqueux allant en A0.

périosté nasal avec un amarrage périostomusculairecomplémentaire sur la base de l’épine nasale. La greffeosseuse n’est pas systématique et dépend du capital osseuxinitial apporté par la dentition lactéale. Elle est parfoisprécédée d’une préparation orthodontique quand le déca-lage de l’arcade est trop important.

Traitements secondaires éventuelsLes échecs fonctionnels et morphologiques graves justifientla reprise totale dès leur reconnaissance. L’incompétencevélopharyngée résistant à la rééducation pendant un an surun voile anatomiquement correct est traitée avant cinq ans,âge d’entrée à l’école, par sphinctéroplastie de type Hynes-Ortichochea. Excès muqueux, imperfections d’alignementde la ligne cutanéomuqueuse, cicatrices élargies sont cor-rigés à l’occasion d’un geste vélopalatin ou gingival. Laseptorhinoplastie finale peut être réalisée précocement pourmotif fonctionnel de respiration nasale, ou à la demande dupatient pour des motifs esthétiques, et ce avant la périodepubertaire. L’infra-ou la rétromaxillie est corrigée par uneintervention de Lefort I en fin de croissance.

Méthodes

Consultation pluridisciplinaireL’ensemble des patients était suivi de la naissance à la fin dela croissance, au cours des consultations multidisciplinairesqui réunissaient chirurgiens, orthophonistes, orthodontistes,psychologues. Un suivi O.R.L régulier dépistait et traitaitégalement les otites séromuqueuses chroniques à l’originede surdités de transmission et par conséquent de troubles dulangage et d’audition.

L’étude présentée est une étude rétrospective appréciantles résultats morphologiques globaux (lèvre et palais).

Critères d’évaluation des résultatsLes critères d’évaluation choisis sont les scores chirurgicauxinitiaux et finaux concernant les anomalies anatomiques desnez, lèvres, palais primaire et secondaire, scores présentésdans un travail précédent [14]. Ces scores sont des sommesde points attribués aux différentes anomalies morphologi-ques initiales (avant toute chirurgie) et résiduelles (aprèsl’ensemble des reprises chirurgicales). Il s’agit en fait dupresurgical severity score (PSS) et postopérative surgicalscore (PRS), scores auxquels l’équipe a ajouté un score dedéformation du palais secondaire (Tableaux 1—3).

Ces scores, disponibles en temps réel sur une base dedonnée informatique, ont été vérifiés lors de révisions dedossiers par deux chirurgiens différents qui les ont réévaluésau moyen d’une documentation photographique (datant demoins de quatre ans dans 75 %).

L’appréciation des résultats était basée sur l’évolution deces scores. Un coefficient a été calculé (A = (score initial —score final)/score initial) et nous a permis d’apprécier lerésultat : A > 0,5 = très bon résultat (Fig. 7),0,33 < A < 0,5 = bon résultat (Fig. 8), A < 0,33 = mauvaisrésultat (Fig. 9).

Facteurs influençant les résultatsDes variables pouvant influencer les résultats morphologi-ques ont été étudiées : l’âge initial de prise en charge, leprotocole chirurgical et la gravité initiale de la fente.

Page 5: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Tableau 1 Calcul du score de gravité initial d’une fenteunilatérale totale.

Anomalie morphologique Nombre de points

Déviation septale 1Capotage alaire 1Columelle courte 1Hypoplasie du bourgeon médian 1Fente labiale totale 3Protrusion prémaxillaire 1Fente alvéolaire unilatérale 1Endomaxillie 1Fente palatine 3Fente vélaire 3Largeur > 10 mm 3

Tableau 3 Calcul du score de gravité finale des palaisprimaire et secondaire d’une fente unilatérale totale.

Anomalie persistante Nombrede points

Palais primaireVestibule Etroit 1

Excessif 2Fistule vestibulaire 2

Prémaxillaire Protrusion/supraclusion/rétrusion

2

Rotation 1Protrusion et supraclusion 4Protrusion, supraclusion etrotation

5

Alvéole Fermée sans fusion 1Fistule 2

Petit fragment Endomaxillie antérieure 1Endomaxillie totale 3

Position Inframaxillie/rétromaxillie 10

Palais secondaireVoûte Fistule 2

Communication bucconasale 6Dépression du lambeauvomérien

1

Jonction palais-voile

Fistule 1Communication bucconasale 6

Voile Voile court 6Voile fistulisé 1Désunion luette 2Communication bucconasale 6Lâchage total 8Lâchage muscle 4Pharyngoplastie 2

Résultats morphologiques de patients porteurs de fentes labiopalatines 11

Analyse statistiqueL’étude statistique utilisait le test de Fisher, seul test appli-cable à de petites séries.

Résultats

Les résultats sont présentés avec un délai postopératoireminimum de 15 et 20 ans maximum, soit 17,4 ans enmoyenne. Dix-sept patients (53 %) ont bénéficié d’une fer-meture en un temps (groupe 1), 15 patients (46 %) ontbénéficié d’une fermeture en deux temps (groupe 2).Vingt-trois patients (72 %) présentaient une fente de gravitéfaible (10 � score initial � 13), neuf patients (28 %) présen-taient une fente de gravité moyenne (14 � scoreinitial � 16). Aucun ne présentait une fente de gravité impor-tante (17 � score initial � 19). Neuf enfants ont été pris en

Tableau 2 Calcul du score de gravité final des nez et lèvresd’une fente unilatérale totale.

Anomalie persistante Nombrede points

NezDéviation septale 2Anomalie du triangle mou 1Hypoplasie aile narinaire 3Enroulement excessif/insuffisant 1Seuil narinaire trop large/trop étroit 1Seuil trop haut/trop bas 1Columelle trop courte 1Base columelle trop large/trop étroite 1

LèvreArc de Cupidon et philtrum trop large 2Arc de Cupidon et philtrum trop étroit 4Hauteur de lèvre insuffisante/excessive 1Déhiscence du muscle orbiculaire 3Lambeau triangulaire en mauvaise position 2Ligne cutanéomuqueuse discontinue/décalée 1Encoche lèvre rouge/excès muqueux 1Lèvre rouge trop fine 6Lèvre rouge trop épaisse 2

Immobilité du voile 7

charge avant un mois (28 %), 22 entre un mois et un an (68 %)et un après un an (3 %) (Tableaux 4 et 5).

Chirurgie secondaire

Quatre patients n’ont pas bénéficié de chirurgie secondaire.On compte pour l’ensemble des traitements secondaires

toutes techniques confondues : sept reprises totales delèvre, 15 retouches minimes de lèvre, 11 reprises totalesdu palais, sept autoplasties du palais, 15 pharyngoplasties(Hynes , San Venero Rosselli),13 rhinoplasties, un Lefort 1.Le détail de la chirurgie secondaire est rapporté dans leTableau 6.

Anomalies résiduelles

Les anomalies résiduelles (Tableau 7) les plus fréquentes : 29anomalies du triangle mou, 16 anomalies de hauteur delèvre, 17 anomalies de la lèvre rouge (excès muqueux etdiscontinuité de ligne cutanéomuqueuse), 11 anomalies dupetit fragment du maxillaire supérieur.

On remarque que certaines anomalies semblent dépendrede la technique chirurgicale réalisée : lèvre trop fine (trois

Page 6: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Figure 7 Très bon résultat. A : fente unilatérale totale gauche, fente palatine supérieure à 1 cm, avec capotage alaire et déviationseptale. Score initial 13 ; B,C,D : après chirurgie, anomalie du triangle mou, déviation septale, insuffisance de hauteur et petitediscontinuité de la ligne cutanéo-muqueuse. Score final 5. A = 0,58.

12 R. Le Pendeven et al.

groupe 1, zéro groupe 2), anomalie du petit fragment (dixgroupe 1, un groupe 2), position du maxillaire (huit groupe 1,deux groupe 2).

Influence de la gravité initiale, techniqueopératoire et date de prise en charge

Toutes techniques, âges et groupes de gravité initialeconfondus, on obtient 18 « très bons et bons résultats » soit56 % (six pour groupe 1 et 12 pour groupe 2), 14 « moyens et

Figure 8 Bon résultat. A : fente unilatérale totale gauche, fenteseptale. Score initial 13; B,C,D : après chirurgie, anomalie du trian

mauvais résultats » soit 43 % (11 pour groupe 1 et trois pourgroupe 2).

La répartition des résultats selon la gravité initiale etl’âge de prise en charge initial est détaillée dans les Tableaux8 et 9.

Discussion

La prise en charge de la lèvre en condition néonatalea essentiellement été défendue par Desaï [15] qui ne

palatine supérieure à 1 cm, avec capotage alaire et déviationgle mou, lèvre rouge trop fine. Score final 7. A = 0,41.

Page 7: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Figure 9 Mauvais résultat. A : fente unilatérale totale droite, avec capotage alaire et déviation septale. Score initial 13.B, C, D :anomalie du triangle mou, déviation septale, seuil trop haut et trop large, fistule palatine, voile trop court, pharyngoplastie. Scorefinal : 14. A = �0,7.

Résultats morphologiques de patients porteurs de fentes labiopalatines 13

constatait pas de majoration de troubles de la croissancecraniofaciale. Les bénéfices attendus de cette chirurgieétaient que les nouveau-nés conservaient l’aptitude à faireune réparation tissulaire de type fœtal, c’est-à-dire sans ouavec moins de tissus cicatriciel. Malheureusement, le para-mètre « âge initial de prise en charge » s’est avéré nonsignificatif au test de Fisher, la série étant trop réduite.

Il semble, dans cette étude, que le second protocole(variante d’Onizuka puis fermeture du palais ultérieure-ment) est source de moins mauvais résultats que le premier

Tableau 4 Répartition des patients selon protocole, gra-vité initiale.

Protocole Gravité initiale

Groupe 1 : 17 Faible gravité : 11Gravité moyenne : 6Gravité importante : 0

Groupe 2 : 15 Faible gravité : 10Gravité moyenne : 3Gravité importante : 0

Tableau 5 Répartition des patients selon protocole, âge deprise en charge.

Protocole Âge de prise en charge

Groupe 1 = 17 < 1 mois : 31 mois—1 an : 13> 1 an : 1

Groupe 2 = 15 < 1 mois :61 mois—1 : 9> 1 an : 0

(Millard typique et staphyloraphie dans le même temps,résultats significatifs au test de Fisher). Le passage de 35à 80 % « très bons et bons résultats » confirme cette conclu-sion. Néanmoins, les cohortes sont trop petites, pour préci-ser qui, du calendrier ou de la technique opératoire,influence le plus le résultat.

L’expérience du chirurgien et la courbe d’apprentissagechirurgicale sont des facteurs importants qui expliquentégalement la différence de résultats entre les deux grou-pes. Il s’agissait du début de notre expérience et il y a là unbiais de résultats à éliminer, en reprenant des séries pluslongues.

Le paramètre « influence de gravité initiale » sur lesrésultats s’est avéré non significatif au test de Fisher, lasérie étant trop réduite.

Nos résultats montrent que les techniques de Millard etses dérivées sont globalement satisfaisantes (56 % de bons ettrès bons résultats tout protocole confondu), mais la chirur-gie réparatrice des séquelles chirurgicales ou des anomaliesprimaires résiduelles a été souvent nécessaire (87 %).

Tableau 6 Chirurgie secondaire selon protocole opéra-toire.

Chirurgie secondaire Groupe 1 Groupe 2

Reprise totale de lèvre 6 1Retouches minimes de lèvre 6 9Reprise totale du palais 10 1Autoplastie du palais 5 2Pharyngoplasties :

sphinctéroplastie de Hynes,San Venero Rosselli

12 3

Rhinoplastie 9 4Lefort1 1 0

Page 8: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Tableau 8 Appréciation des résultats selon protocole et âge de

Âge Très bon résultat Bon r

Groupe 1Âge � 1 mois 1 21 mois < âge < 1 an 2 11 an � 1 an 0 0

Groupe 2Âge � 1 mois 4 11 mois < âge < 1 an 6 11 an � 1 an 0 0

Tableau 7 Anomalies résiduelles morphologiques aprèschirurgie primaire.

Anomalies résiduellesmorphologiques

Groupe 1 Groupe 2

Nez et lèvreAnomalie du triangle mou 14 15Déviation septale 7 7Hypoplasie de l’aile 1 2Aile (trop basse/haute) 10 6Enroulement de l’aile

(excessif/insuffisant)3 7

Seuil trop large/trop étroit 4 8Hauteur de lèvre blanche

(insuffisante)2 8

Cicatrice (hypertrophique/large)) 2 3Lèvre rouge trop fine 3 0Excès muqueux/

discontinuité L.C.M5 12

Palais primaireFistule vestibulaire 3 2Protrusion/rétrusion

prémaxillaire2 0

Fistule alvéolaire/absencede fusion

3 4

Anomalie du petit fragment(endo.ant)

10 1

Palais secondaireC.B.N 3 1Position maxillaire (rétro/infra) 8 2Pharyngoplastie/Hynes/San Venero 12 3

Tableau 9 Appréciation des résultats selon protocole et groupe

Gravité Très bon résultat Bo

Groupe 1Groupe faible gravité 2 2Groupe gravité moyenne 1 1Groupe forte gravité 0 0

Groupe 2Groupe faible gravité 8 2Groupe gravité moyenne 2 0Groupe forte gravité 0 0

14 R. Le Pendeven et al.

Ces chirurgies secondaires consistaient principalement,en des retouches minimes de lèvre (46 % des patients), desreprises de palais (53 % des patients) et des rhinoplasties(40 % des patients).

Les anomalies postchirurgicales concernant la lèvre rouge(discontinuité, excès muqueux) étaient fréquentes (53 % despatients) et facilement corrigeables. L’insuffisance de hau-teur de lèvre blanche était retrouvée chez 31 % des patients(majoritairement avec la variante d’Onizuka 80 %).

Les techniques de Millard s’accompagnent presque tou-jours, dans notre série, de défauts du nez : anomalies dutriangle mou (90 %), anomalies de position de l’aile (50 %),anomalies d’enroulement de l’aile (31 %).

Les objectifs initiaux de cette étude étaient de présentersimplement les résultats morphologiques à long terme.Cependant, d’autres paramètres nous ont paru intéressantsà inclure dans l’étude : certaines anomalies semblaient êtreimputables préférentiellement à un protocole chirurgical(anomalie du petit fragment et du maxillaire). Les résultatsde la série concluent que le premier protocole engendre plusd’anomalies du petit fragment du maxillaire supérieur que lesecond (résultats significatifs au test de Fisher). En revan-che, on ne peut pas conclure que la chirurgie en un tempsengendre plus d’anomalie du maxillaire que la chirurgie endeux temps (résultats non significatifs au test de Fisher).

Conclusion

La prise en charge néonatale des fentes était initialementune possibilité qui nous était donnée grâce aux progrès del’anesthésie-réanimation. Très vite, il a pu être prouvé quele bénéfice familial et affectif était énorme. Il était impor-tant de vérifier que les protocoles choisis n’engendraient pas

prise en charge.

ésultat Résultat moyen Mauvais résultat

0 03 70 1

1 00 20 0

de gravité.

n résultat Résultat moyen Mauvais résultat

1 62 20 0

1 10 10 0

Page 9: Résultats morphologiques à long terme d’une série de 32 patients successifs porteurs de fentes labiopalatines unilatérales totales opérées en conditions précoces

Résultats morphologiques de patients porteurs de fentes labiopalatines 15

de séquelles irrattrapables. Certes les défauts résiduelsexistaient, mais ils étaient le plus souvent perfectibles pardes reprises ou retouches.

Ainsi, l’absence de résultats catastrophiques a autorisél’équipe à poursuivre dans cette voie de la chirurgie précoceet même plus précoce, en conditions néonatales, avecactuellement des âges moyens d’intervention entre dix et21 jours.

Il faudra bien évidemment publier également les résultatssur la croissance et la phonation.

Références

[1] Montoya P, Bigorre M. Prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines au centre hospitalier universitaire de Montpellier.Ann Chir Plast Esthet 2002;143—9.

[2] Bardot J, Casanova D. Prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines au centre hospitalier universitaire de Marseille. AnnChir Plast Esthet 2002;47:159—66.

[3] Oger P, Malek R, Martinez H. Prise en charge des fentes labio-palatines par l’équipe de l’hôpital Robert-Debré à Paris. AnnChir Plast Esthet 2002;47:138—43.

[4] de Mey A, Malevez C. Prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines à l’hôpital des Enfants Reine Fabiola de Bruxelles. AnnChir Plast Esthet 2002;47:124—40.

[5] Pellerin P, Martinot V, Capon-Degardin N. Prise en charge desfentes labio-maxillo-palatines au sein du service de chirurgie

plastique du centre hospitalier de Lille. Ann Chir Plast Esthet2002;47:106—15.

[6] Talmant JC, Lumineau JP. Prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines par l’équipe du docteur Talmant à Nantes.Ann Chir Plast Esthet 2002;47:116—25.

[7] Enemark H, Bolund S. Evaluation of unilateral cleft lip and palatetreatment: a long term results. Cleft Palate 1990;27(4):354—61.

[8] Christofides E, Potgieter A. A long-term subjective assessmentof the scar in unilateral cleft lip repairs using the Millardtechnique without revisional surgery. Br J Plast Surg 2005.

[9] Becker M, Svensson H. Millard repair of unilateral isolated cleftlip: a 25-year follow-up. Scand J Plast Reconstr Hand Surg1998;32:387—94.

[10] Williams HB. A method of assessing cleft lip repairs: comparisonof Le Mesurier and Millard tecniques. Plast Reconstr Surg1995;96:549—61.

[11] Chhoudhary SMS. Effect of Veau-Wardill-Kilner type of cleftpalate repair on long-term midfacial growth. Plast ReconstrSurg 2003;111:576—82.

[12] Hugh G, Thomson MD. A long-term appraisal of the unilateralcomplete cleft lip repair: one surgeon experience. PlastReconstr Surg 1995;96(3):549—61.

[13] Kilner TP. Cleft lip and palate repair technique. St Thomas HospRep 1937;2:127.

[14] Mortier PB, Martinot VL, Anastassov Y. Evaluation of the resultof cleft lip and palate surgical treatment: preliminary report.The Cleft Palate Craniofacial Journal 1997;34(3).

[15] Desai S.N: Neonatal surgery of the cleft and palate; WorldScientific.