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 1 Régulations et projets dans les pôles de compétitivité Bossard-Préchoux Véronique*, Bréchet Jean-Pierre** * Doctorante 1 , ** Professeur Laboratoire dEconomie et de Management de Nantes (LEMNA)  Institut dEconomie et de Management de Nantes - IAE Chemin de la Censive du Tertre, BP 62232 44322 Nantes, Cedex 3, France Tel : (33) 2 40 14 12 20 Fax : (33) 2 40 74 61 83 E-Mail : jean-pierre.b rechet@univ- nantes.fr Résumé : Quels sont les fondements théoriques utiles et pertinents pour se saisir des dynamiqu es dacteurs que représentent les pôles de compétitivité, clusters ou réseaux dentreprises ? Cette q uestion conduit directement à la construction de laction collective,  comprise et analysée ici dans une perspective régulationniste nourrie de la théorie de la régulation sociale de J.-D. Reynaud. Ce qui est en jeu dans ce cadre, cest lintérêt théorique et méthodologique dune lecture de laction collective fondée sur le projet. Partant du terrain dun pôle de compétitivité, larticle propose dinstruire la question de lémergence, de lautonomie et du contrôle du collectif dacteurs que représente le pôle. Lanalyse met en évidence limportance des projets collaboratifs de R&D dans le pôle de compétitivité, qui donnent naissance à des micro-collectifs. La dynamique démergence et de régulation de ces projets collaboratifs finit par faire du collectif dacteurs un acteur collectif , doté dun projet densemble.  Mots-clés : pôle de compétitivité, action collective, projet, régulation, autonomie. 1  Au sein du Centre de Gestion Scientifique de MINES ParisTech sous la direction de Frédérique Pallez et de Jean-Pierre Bréchet (co-direction). Le mémoire de Master Recherche, réalisé en 2008 sous la direction de Jean-Pierre Bréchet et  Nathalie Schieb-Bienfait à lIEMN-IAE (Université de Nantes), portait sur la participation des PME aux pôles de compétitivité, et interrogeait, dans ce cadre, les concepts de projet, daction collective et de régulation ; il nourrit ici pour  partie la réflexion et fournit le matériau empirique.  

Régulations Et Projets Dans Les Pôles de Compétitivité

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    Rgulations et projets dans les ples de comptitivit

    Bossard-Prchoux Vronique*, Brchet Jean-Pierre**

    * Doctorante1, ** Professeur

    Laboratoire dEconomie et de Management de Nantes (LEMNA)

    Institut dEconomie et de Management de Nantes - IAE

    Chemin de la Censive du Tertre, BP 62232

    44322 Nantes, Cedex 3, FranceTel : (33) 2 40 14 12 20Fax : (33) 2 40 74 61 83

    E-Mail : [email protected]

    Rsum : Quels sont les fondements thoriques utiles et pertinents pour se saisir des dynamiqu es dacteurs quereprsentent les ples de comptitivit, clusters ou rseaux dentreprises? Cette question conduit directement la

    construction de laction collective,comprise et analyse ici dans une perspective rgulationniste nourrie de la thorie de

    la rgulation sociale de J.-D. Reynaud. Ce qui est en jeu dans ce cadre, cest lintrt thorique et mthodologique dune

    lecture de laction collective fonde sur le projet. Partant du terrain dun ple de comptitivit, larticle propose

    dinstruire la question de lmergence, de lautonomie et du contrle du collectif dacteurs que reprsente le ple.Lanalyse met en vidence limportance des projets collaboratifs de R&D dans le ple de comptitivit, qui donnent

    naissance des micro-collectifs. La dynamique dmergence et de rgulation de ces projets collaboratifs finit par faire du

    collectif dacteurs un acteur collectif, dot dun projet densemble.

    Mots-cls :ple de comptitivit, action collective, projet, rgulation, autonomie.

    1Au sein du Centre de Gestion Scientifique de MINES ParisTech sous la direction de Frdrique Pallez et de Jean-Pierre

    Brchet (co-direction). Le mmoire de Master Recherche, ralis en 2008 sous la direction de Jean-Pierre Brchet etNathalie Schieb-Bienfait lIEMN-IAE (Universit de Nantes), portait sur la participation des PME aux ples de

    comptitivit, et interrogeait, dans ce cadre, les concepts de projet, daction collective et de rgulation ; il nourrit ici pour

    partie la rflexion et fournit le matriau empirique.

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    INTRODUCTION

    Quels sont les fondements thoriques utiles et pertinents pour se saisir des dynamiques dacteurs que

    reprsentent les ples de comptitivit, clusters ou autres rseaux dentreprises ? Cette question

    amne directement celle de la construction de laction collective, ici une action collective initie,

    porte et vcue par des entreprises, des acteurs institutionnels et diverses parties prenantes. La

    question premire de laction collective conduit alors articuler deux regards thoriques

    complmentaires : une lecture de laction collective comme conception et expression dun projet

    (Brchet et Desreumaux, 2006), et une lecture des phnomnes densemble comme rencontre de

    rgulations (au sens de la thorie de la rgulation sociale - dsormais TRS - de J.-D. Reynaud 2).

    Cest en portant notre attention sur un ple de comptitivit industriel que nous souhaitons contribuer

    ldification de cette perspective thorique intgrative : les dynamiques dacteurs au sein des ples

    de comptitivit - dispositif cr il y a trois ans seulement - sont parvenues aujourdhui un stade de

    structuration qui semble propice une rflexion sur la construction de laction collective. Le cas

    tudi servira dillustration de la problmatique autonomie-contrle qui orientera notre propos. Cette

    problmatique, au cur de toute lecture dinspiration rgulationniste, se nourrira elle-mme de

    lapproche de J.-D. Reynaud (cf. encadr 1) qui comprend toute rgulation comme rencontre de

    rgulations (et notamment de rgulations dites de contrle et autonomes ), afin de comprendre

    comment plusieurs rgulations dorigine diffrente entrent en conflit ou se composent dans une

    rgulation commune, voire conjointe (Reynaud, 1997 : XVIII). Nous retenons cette approche

    rgulationniste car elle a en son cur ce qui est a priorien jeu ici : la question de lorigine des rgles

    et des rgulations que la TRS endognise explicitement. Les collectifs nexistent qu travers les

    projets et les rgles quils se reconnaissent et font vivre (Brchet et Desreumaux, 2006). Nous

    verrons que lintgration de ces aspects dinvention des rgles et de rgulation sinscrit aussi dans

    une pistmologie de laction collective comme apprentissage, comme dynamique de construction de

    savoirs et de relations (Hatchuel et Weil, 1992 ; Hatchuel, 2000).

    Aprs une prsentation du ple de comptitivit tudi (1), nous nous intresserons son mergence,

    entre contrle et autonomie. Pour ce faire nous poserons les fondements de la lecture thorique

    retenue (2). Nous verrons comment ce ple nat dans le cadre du dispositif de contrle initi par

    lEtat, travers le projet initial et les premires rgles quavancent les quelques grands donneurs

    dordre, acteurs dun noyau dur lorigine du dpt de dossier (3). Mais cest ensuite travers les

    projets collaboratifs auxquels certains acteurs participent que la dynamique densemble prend corps.

    2Cf. Brchet (2008), pour une prsentation de synthse de la TRS.

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    Nous la comprendrons dans le cadre de la problmatique autonomie-contrle en lien avec la

    construction des relations et des savoirs quelle recouvre (4, 5). Nous serons alors en en mesure de

    discuter des dynamiques qui lient les projets partiels et le projet densemble pour nourrir notre effort

    thorique et mthodologique (6).

    Encadr 1 : La thorie de la rgulation sociale de J.-D. Reynaud

    Les acteurs sociaux se constituent dans la mesure o ils entreprennent une action collective ou, dit autrement, se dotentdun projet, savoir dun ensemble de rgles qui les constituent en source autonome de rgulation. Cette lecture

    sapplique laction collective en gnral, donc lentrepriseen particulier, mais aussi aux rgulations plus collectives

    qui impliquent des entreprises et ventuellement des organisations diverses un niveau plus englobant (filires, rseaux

    dentreprises). La question se pose alors de savoir, quel que soit le niveau danalyse (organisation ou ensemble

    dorganisations) auquel on raisonne, comment stablit une rgulation densemble ou comment plusieurs rgulationsdorigine diffrente entrent en conflit ou se composent.

    Reprenant directement les termes de J.-D. Reynaud, une lecture de laction collective par la thorie de la rgulation

    sociale (TRS) peut tre synthtise en trois propositions : 1. Les rgles nont de sens que rapportes aux fins dune action commune (pour simplifier, quelle que soit la varit de

    ces fins : un projet). Cest parce quelles sont lies ce projet quelles sont obligatoires. En ce sens elles sont toujoursinstrumentales.

    2. Un ensemble de rgles est li la constitution dun groupe social. En tenant compte de la proposition prcdente, nous

    dirons : dun acteur collectif. Elles constituent son identit. Elles fixent aussi ses frontires. Elles dterminent qui

    appartient, mais aussi qui est exclu. Leur champ de validit est d pendant des frontires de lacteur et de son

    environnement et les dtermine.

    3. Sauf dans les cas trs rares o un groupe social est isol ou dans le cas, qui mrite une tude particulire, de lensemble

    le plus englobant (la socit globale, lEtat-nation), un ensemble de rgles est li la position dun acteur collectif dans

    un ensemble plus vaste. Il slabore donc dans un rapport social ou plutt dans des rapports sociaux (dalliance,

    dopposition, de hirarchie) (Reynaud, 1989/1997 : 80).

    Le concept de rgulation, qui renvoie lide que cest lactivit de rgulation qui fait la rgle, peut se comprendre sur

    deux facettes : la rgulation est initiative ; la rgulation met en jeu des effets de composition. Toute rgulation est aussilexpression dun pouvoir de rguler mme si des phnomnes mergents, non-intentionnels participent de la rgulation

    densemble. Toute rgle a des auteurs et des destinataires.

    En premier lieu, la rgulation cest la capacit de prendre des initiatives et dlaborer de s rgles (Reynaudin de Terssac,

    2003 : 103). Linvention et la cration des rgles sont lies la vie des changes et des collectifs, de faon extrmement

    gnrale, du fait que des acteurs dcident de rgles et de dispositifs par lesquels ils encadrent et font vivre leurs rapports

    et leurs actions.

    En second lieu, la TRS prend appui sur la reconnaissance de la pluralit des sources de rgulation, pour comprendrecomment des systmes sociaux se constituent et voluent. La rgulation est toujours rencontre de rgulations.

    Une part essentielle de linterprtation de cette construction de la rgulation densemble qui se forme et

    sinstitutionnalise repose sur le traitement de la question fondamentale du rapport entre contrle et autonomie :

    - la rgulation de contrle correspond aux rgles voulues et imposes par la structure de pouvoir qui souhaite dfinir les

    finalits et les modalits daction du collectif dacteurs.

    - la rgulation autonome manifeste que les acteurs auxquels sapplique le contrle disposent toujours dune certaineautonomie qui permet une forme plus ou moins prononce dopposition mais qui est aussi interprtation, ajustement et

    adaptation face lincompltude de la rgle.

    Cest la rencontre ou le jeu de la rgulation de contrle et de la rgulation autonome que J.-D. Reynaud nomme

    rgulation conjointe, reconnaissant quil puisse y avoir parfois rgulation commune au sens dun partage du territoire ,

    plus que rgulation rellement conjointe. Il est trs important de souligner que, dans la TRS, une rgle nest pas par

    elle-mme une rgle de contrle ou une rgle autonome. Elle ne lest que par la place de celui qui lmet et par lusage

    qui en est fait. Contrle et autonomie dsignent un usage de la rgle non sa nature (Reynaud,in de Terssac 2003 : 104).

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    1. DES CLUSTERS AUX PLES DE COMPTITIVIT

    1.1.UNE VARIT DEXPRESSION POUR UNE RAL IT PLURI ELLE

    Un cluster est, pour M. Porter, un groupe d'entreprises et d'institutions partageant un mme

    domaine de comptences, proches gographiquement, relies entre elles et complmentaires

    (Porter, 1999). De nombreux travaux ont montr lintrt de tels clusters : linnovation, la

    productivit et lentrepreneuriat sont favoriss par les synergies qui se crent grce aux rseaux et

    aux relations personnelles au sein du cluster.

    En France, lEtat a voulu favoriser lmergence densembles dentreprises de ce type en crant en

    2005 des ples de comptitivit : des structures associant sur un territoire les acteurs du monde

    conomique et de la recherche pour soutenir linnovation et le dveloppement local, afin de renforcerla comptitivit des entreprises et de dvelopper lemploi.

    Les rapprochements des diffrents acteurs (entreprises, laboratoires de recherche et organismes de

    formation) favoriseront la comptitivit, grce aux conomies dchelle permises par la

    spcialisation, la flexibilit autorise par la proximit, mais surtout grce linnovation et la

    circulation des connaissances qui natront des interactions au sein des ples. Les acteurs sont en effet

    invits travailler ensemble des projets collaboratifs dinnovation, qui reprsentent le cur de

    lactivit des ples et le principal facteur de comptitivit.

    Le dispositif des ples de comptitivit est largement pilot par lEtat, qui a dans un premier temps

    slectionn les ples, qui lance dsormais deux fois par an des appels projets collaboratifs en

    accordant certains des fonds, et participe lanimation des ples en finanant notamment leur

    structure.

    Un ple de comptitivit se dfinit donc comme un dispositif associant sur un territoire donn ,

    des entreprises, centres de recherche et organismes de formation engags dans une dmarche

    partenariale (stratgie commune de dveloppement) destine dgager des synergies autour de

    projets innovants conduits en commun en direction dun (ou de) march(s) donn(s)3. Cette

    dfinition trs large a donn naissance des ples plurivalents :

    - La cration dun ple de comptitivit a souvent consist soutenir des in itiatives

    prexistantes, et repose alors sur une tradition historique de collaboration entre acteurs dun

    territoire. Les ples ont ainsi souvent formalis, habill, des relations existantes.

    - Dans dautres cas, la cration dun ple a consist faire natre de nouvelles initiatives,

    cherchant crer des relations entre acteurs jusqualors indpendants.

    3Source : http://www.competitivite.gouv.fr/spip.php?rubrique39

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    - Certains ples de comptitivit se sont constitus dans une logique de filire (lautomobile

    par exemple) ; d'autres ont t crs autour d'une thmatique (lenfant, la mer, etc.).

    - Les ples de comptitivit peuvent vouloir se positionner comme des clusters de niveau

    mondial ou, plus modestement, participer de la revitalisation d'un tissu conomique local

    fragile, en renforant lancrage des entreprises surun territoire.

    De cette varit, tant dans la gense que dans le contenu ou dans les objectifs, mergent des formes

    bien diffrentes, et un ple de comptitivit nest en dfinitive pas ncessairement caractris par la

    complmentarit entre acteurs ou par un mme domaine de comptences selon les termes de

    Porter4.

    Bien quon parle souvent des ples de comptitivit comme des clusters la franaise , une

    diffrence majeure existe entre clusters et ples de comptitivit. Un cluster est en effet un

    phnomne spontan, il peut exister sans tre reconnu ou sans mme que ses membres aient

    conscience dy appartenir (Porter, 1998: 79). Ceci semble indiquer que ni lintentionnalit, ni la

    structuration ne sont ncessaires pour que naisse un cluster, qui reprsente une dmarche ascendante

    ( bottom-up). On peut penser lexemple de la Silicon Valley. A contrario, les ples de

    comptitivit tels quils ont finalement t dfinissinscrivent dans une dmarche descendante

    ( top-down) impulse par lEtat en direction des entreprises. Reste discuter de leur propre effort

    de structuration endogne, ce que nous tenterons de faire par la suite.

    1.2.LE TERRAIN DU PLE DE COMPTITIVIT EMC2

    Le travail danalyse men sappuie sur une tude du ple de comptitivit industriel EMC2

    (Ensembles mtalliques et composites complexes5), implant en Pays de la Loire, sur le thme

    transversal des matriaux composites. Ce ple compte ce jour environ 130 membres, dont 70% de

    PME, quelques grands groupes et 35 40 laboratoires et coles, reprsentant au total prs de 100 000

    emplois.

    Cinq grands donneurs dordre ont t particulirement impliqus dans le projet de cration du ple.

    Ils travaillent dans cinq secteurs dactivit diffrents, ayant recours aux matriaux composites :

    laronautique, la plaisance, la construction navale (civile et militaire) et lautomobile. Un certain

    dsquilibre semble exister entre ces grands groupes et un tissu industriel caractris par des

    4On peut penser que cette dfinition trs large sert le double objectif assign aux ples de comptitivit, de soutenir non

    seulement le dveloppement local, avec limpratif court terme dattirer le plus vite possible un grand nombre

    demplois pour dynamiser les territoires, mais aussi linnovation, avec limpratif long terme de constituer un pleayant une reconnaissance internationale, constituant une rfrence, ce qui entrane invitablement une spcialisation

    (Dtrie,in Porter, 1999, xii).5http://www.pole-emc2.fr

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    entreprises petites et moyennes. Le ple voit ainsi ses axes de dveloppement dicts principalement

    par les besoins de ces donneurs dordre.

    La structure danimation du ple est hberge par la Chambre rgionale de commerce et dindustrie.

    Une Socit dconomie mixte rgionale est galement un partenaire privilgi, qui, de plus, apporte

    deux animateurs en soutien au ple. Atlanpole, la technopole des Pays de la Loire, dlgue une

    personne mi-temps comme animateur du ple et fait bnficier le Ple EMC2 de son rseau. Un

    autre animateur est directement salari du ple.

    Le travail ralis ne constitue pas proprement parler une tude de cas, mais plutt une illustration

    de nos propos par une confrontation au terrain, qui a permis de recueillir des donnes intressantes et

    de progresser dans la comprhension des ples de comptitivit, phnomne encore peu tudi en

    raison de sa courte existence.Dans cette dmarche exploratoire qualitative, les donnes ont t collectes entre mars et aot 2008

    par des entretiens individuels de 60 90 minutes en moyenne. Au cours des dix entretiens raliss,

    sur un mode principalement non-directif, des questions trs gnrales sur ce que reprsente le ple

    permettaient dinitier la conversation. Une part de semi-directivit tait souvent introduite en fin

    dentretien afin de prciser les donnes.

    Parmi les personnes rencontres, quatre sont des chefs dentreprise membres du Ple EMC2, lune

    est lanimateur principal de la structure danimation du ple EMC2 . Des entretiens complmentaires

    (des chefs dentreprises concernes par le ple mais non membres, ainsi que des membres dautres

    ples) ont permis de confronter les lments collects sur le Ple EMC2. Des propos recueillis sur le

    site internet du ple EMC2 ont galement t utiliss.

    Une tude approfondie dun ple de comptitivit non labellis, le Cluster West , a permis de

    comparer la dynamique du ple labellis EMC2 et la dynamique dacteurs nayant pas t labelliss

    ple de comptitivit , mais ayant cr une structure daction collective. Ltude, en cours depuis

    juin 2008, a donn lieu plusieurs entretiens et runions, et sest avre particulirement instructive

    dans la comprhension des concepts de rgulation et projets dans laction collective. Nous y

    reviendrons.

    Dautre part, la participation desconfrences, tables rondes et groupes de travail sur le thme des

    clusters, ples de comptitivit et rseaux interentreprises, ainsi que des recherches documentaires

    approfondies, ont servi enrichir et prciser certains lments.

    Les donnes recueillies ont ensuite t codes de manire systmatique, par unit de sens. Des mta-

    catgories ont merg de ce processus de codage (dissymtrie de pouvoir ; construction de relations ;

    projets de R&D ; pilote), qui ont contribu construire la rflexion expose ci-aprs.

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    Ces premiers lments de cadrage du terrain de ltude tant donns, nous voudrions maintenant

    prciser le rfrentiel thorique sur lequel nous allons nous appuyer pour lanalyse.

    2. LA CONSTRUCTION DE LACTION COLLECTIVE COMME PROJET

    Le cadre gnral dans lequel nous nous inscrivons est de nature rgulationniste au sens de la TRS de

    J.-D. Reynaud. Mais il convient de le prciser et surtout den complter la prsentation , en ce qui

    concerne la problmatique de la construction de laction collective.

    Une lecture dynamique de laction collective ne va pas de soi. Elle nous loigne des lectures

    habituelles en termes morphologiques qui tendent postuler lentreprise. Il sagit de se saisir comme

    ralit majeure, non dune entit dj l avec ses frontires et ses pratiques donnes, mais de

    laction qui se construit et des phnomnes de mtamorphose de lorganisation (perspective

    dveloppementale). Elle suppose que lon soit en mesure de se saisir des phnomnes dmergence

    et de rgulation de laction.

    La question de lacte dentreprendre et de lmergence de lorganisation (entreprise, rseau

    dentreprises, etc.), ou plus largement des rgulations, est centrale (perspective entrepreneuriale).

    Laction collective est dabord projet sur lenvironnement et projet sur elle-mme. On pourrait dire

    quelle est conception dans la perspective artificialiste initie par H. Simon au milieu des annes

    1960. Considrant que toute action collective met en jeu des dynamiques de savoirs et de relations

    comme nous le verrons ci-aprs (Hatchuel et Weil, 1992 ; Hatchuel, 2000, 2005), nous comprenons

    le projet daction collective comme effort de conception et de rgulation de laction fond sur

    lanticipation (Brchet et Desreumaux, 2006). Cette dfinition exprime clairement que lactivit de

    conception est insparable de lactivit de rgulation (elle met en jeu des rapports de prescription

    pourrait-on dire sur un mode proche, avec Hatchuel). Dans lesprit de la TRS de J.-D. Reynaud, le

    projet se dfinit aussi comme lensemble des rgles quun collectif se reconnat et par lesquelles il se

    cre6. Une part essentielle de linterprtation de cette construction de la rgulation densemble qui se

    forme et sinstitutionnalise pour une part et pour un temps, repose alors sur le traitement de la

    question fondamentale de la dialectique contrle versusautonomie (cf.encadr 1).

    Il nous faut revenir sur ce qui est fondamentalement en jeu dans la construction de laction.

    A. Hatchuel, souhaitant dpasser les mtaphysiques de laction qui rsument celles-ci un principe ou

    un sujet totalisateur (le profit, la stratgie, le chef, le leader), pose les bases dune axiomatique de

    laction collective. Partant dune opposition entre lconomie, associe la prise en compte prioritaire

    6Le projet daction collective au sens o nous lentendons recouvre et articule le politique et le stratgique (perspective

    multidimensionnelle) : les aspects de politique gnrale et de stratgie sont constitutifs du projet de lentreprise ( la fois

    projet politique, projet conomique, projet organisationnel) (Brchet, 1994, Desreumaux et Brchet, 1998, 2007 ; Brchet

    et Desreumaux, 2004, 2006).

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    des savoirs, et la sociologie, associe la prise en compte prioritaire des relations, lauteur retient pour

    fonder son propos, un principe de non-sparabilit entre savoirs et relations, qui constitue linvariant

    principal de leffort de thorisation. Laction collective en tant quelle est apprentissage se comprend

    alors comme le rsultat de processus de rationalisation dfinis comme efforts de construction des

    savoirs et des relations irrductiblement lis. Du fait quil ny a pas autonomie de laconnaissance par

    rapport aux relations, ni possibilit de reconnatre des relations indpendamment des savoirs dtenus,

    laction collective ne peut tre que le fruit dune reconstruction des relations compatible avec une

    modification des savoirs ou dune reconstruction des savoirs compatible avec une modification des

    relations. Partant de ces prmisses, A. Hatchuel propose le concept de rapport de prescription :

    certaines configurations de savoirs et de relations rendent possible la prescription du savoir dun acteur

    vers un autre. La hirarchie pure correspondrait au rapport de prescription qui fait que le savoir du chef

    est accept par son subordonn du seul fait que ce dernier le reconnaisse comme chef. Lexpertise, par

    contraste, sinscrit dans un rapport de prescription qui repose sur la reconnaissance par un acteur de la

    pertinence du savoir de lautre. Se trouve ainsi explicite, selon lauteur, linterdpendance des savoirs

    (le contenu de la prescription) et des relations (la nature du rapport), qui se retrouve sous des formes

    diverses et instables dans les diverses figures de la prescription : la hirarchie, la matrise douvrage,

    lanimation, lassistance, la facilitation, laccompagnement, le conseil, etc.

    Si laction collective se dploie toujourscomme un mouvement conjoint des savoirs et des relations,

    aucun acteur ne peut en dterminer le cours, sauf, en thorie, disposer dun savoir infini et

    sinscrire dans des relations avec autrui qui lui permettent une prescription extrme.

    Le projet, dans lapproche entrepreneuriale, dveloppementale et multidimensionnelle retenue7, se

    comprend comme nous lavons indiqu comme leffort de construction des relations et des savoirs

    lorigine du collectif, en tant quil est conception et rgulation du collectif.

    Ce sont les lments de cet effort de thorisation que nous allons maintenant solliciter et interroger

    partir de lanalyse de notre terrain, structure par la problmatique autonomie- contrle au cur de la

    construction des collectifs dacteurs(cf. encadr 1).

    3. UNE MERGENCE PROBLMATIQUE

    3.1.LE CONTEXTE POLITIQUE DAPPARITION

    Nous avons prsent plus haut les ples de comptitivit comme un dispositif initi et rgul par

    lEtat: cest lEtat, dtenteur du pouvoir dinitiative, qui, au dpart, fixe les rgles (slection, accs

    aux subventions, animation, coordination des ples). Comment alors mettre en relation des

    7En rfrence Desreumaux et Brchet (2007).

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    acteurs, entreprises, laboratoires, coles et universits, pour quils sapproprient le dispositifdes

    ples de comptitivit qui leur est propos ?

    - Au commencement de la dmarche, le dispositif des ples propos par lEtat reprsente un

    cadre dmergence rgul dont les acteurs locaux vont devoir se saisir.

    - A la faveur dun certain opportunisme, ou dune ncessit ressentie, quelques acteurs qui se

    connaissent vont alors se mettre en ordre de marche et tablir les rgles dune possible rgulation.

    Dans le cas du Ple EMC2, on retrouve la prsence des cinq membres fondateurs, qui, prenant

    conscience des possibilits offertes par le dispositif des ples, se rassemblent pour un premier

    engagement dans la dmarche propose par lEtat.

    - LEtat slectionne ensuite un certain nombre de ples selon des critres destins mettre en

    vidence leur capacit susciter la cration de richesses nouvelles forte valeur ajoute, leur

    visibilit internationale, leur engagement dans des partenariats effectifs raliss travers des projets

    communs et leur stratgie de dveloppement conomique. En somme, la slection porte sur le projet

    collectif possible tabli par les acteurs locaux. Le Ple EMC2 est ainsi labellis en 2005.

    Il faut alors sinterroger sur la dynamique de construction du ple, sur lmergence et la constitution

    de la communaut dacteurs qui se mobilisent.

    3.2.ENTRE CONTRLE ET AUTONOMIE:LMERGENCE DU PLE RGIONAL

    La cration du ple EMC2 en 2005 sest appuye sur des dmarches collectives existantes, telles que

    des organisations professionnelles (UIMM), des ples industriels (Neopolia), des comits de

    dveloppement (Mtallurgie), etc. Ces collectifs dacteurs prexistants ont ainsi servi de support

    linitiative de lEtat. Il sest agi de modifier des relations en les formalisant dans le cadre du ple de

    comptitivit et en leur imposant de nouvelles rgles : dans un premier temps au moins, lors des

    premires runions de ces acteurs dans le cadre du ple, laction est encadrepar les rgles mises

    par lEtat. Puis petit petit, ces acteurs fondateurs, accompagns par la structure danimation du ple

    EMC2, vont tablir leurspropres rgles de fonctionnement. Ce faisant, ce collectif dacteurs affirme

    son autonomie au sens de J.-D. Reynaud.

    Lexploitation des donnes recueillies sur le ple EMC2 montre au premier abord un ple qui

    merge sous la domination des membres fondateurs :

    Le ple a encore un peu de mal se dgager de lemprise des donneurs dordre pour vivre sa vie plus

    sereinement, de faon plus autonome (lanimateur principal de la structure danimation EMC2 - 17-

    06-08).

    Le Ple EMC2 est peru par les personnes interroges comme un outil au service de quelques grands

    donneurs dordre, qui cherchent ainsi en tirer profit, notamment en matire de financements publics

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    10

    (Directeurs des entreprises 6 et 7). Ces donneurs dordre sont ainsi considrs comme les

    utilisateurs finaux du dispositif, une perception renforce par le fait quils sont aussi lorigine de

    la cration du ple :

    Les donneurs dordre avaient dj des projets importants sur le dveloppement de ces technologies,

    avant la cration du ple, et le ple na fait que renforcer a, et aider un peu aussi trouver des

    financements publics pour certains de ces projets (lanimateur principal de la structure danimation

    EMC2 - 17-06-08).

    Les membres fondateurs, cherchant servir leurs intrts, crent autour deux un rseau, un ple au

    sens figur de ce qui attire, qui entrane 8. Ils entranent ainsi dans leur sillage lquipe

    danimation, qui vient renforcer ce noyau initiateur, autour duquel le ple se construit comme une

    organisation hirarchise, par couches concentriques, en attirant dautres acteurs9. En rsultent des

    relations de pouvoir dissymtriques (Reynaud,in Brchet, 2008) :

    Les entreprises qui sont dans le ple ont la quasi-ncessit daccompagner des grands groupes dans

    leur dveloppement. Quand je dis la quasi-obligation, cest li au poids des donneurs dordre sur eux,

    donc un certain rapport de force quand mme, un rapport de dpendance (lanimateur principal de la

    structure danimation EMC2 - 17-06-08).

    On observe autour de ce noyau dur une premire couronne dacteurs, une quipe moteur :

    Mais peut-tre quon a notre petit rseau qui fonctionne bien, donc qui merge et qui sont les 10% qui

    sortent de liceberg, et quon ne voit pas les 90% autres sur lesquels lquipe danimationrame pour

    essayer de les convaincre. Cest possible. Mais je pense il y a quand mme une bonne quipe moteur.

    Cela concerne peut tre une trentaine dentreprises (sur environ 80 PME adhrentes) (Directeur

    Entreprise 922-08-08).

    Au-del de cette premire couronne dacteurs, les autres membres simpliquent moins dans le ple.

    Le plus souvent parce quils sont galement contraints par leurs relations, ou plutt ici labsence des

    bonnes relations :

    Eux ils connaissent, ils ont des relais chez [un donneur dordre]effectivement, et comme cest une bote

    qui a lintention de grossir, bon bah [ce donneur dordre]les a quelque part mon avis accompagns, et

    donc a utilis le ple pour les accompagner. Moi je nai pas de contact l-bas (Directeur Entreprise 6

    09-07-08).

    8Daprs le dictionnaire Le Robert (2009).

    9 Nous reprsentons ici le noyau dur comme associant les membres fondateurs et lquipe danimation. Il estintressant de remarquer que dans certains ples de comptitivit (mais ce nest pas le cas dans EMC2), lquipe

    danimation est parfois compose de salaris de grandes entreprises fondatrices, dtachs auprs dun ple.

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    Noyau dur :Fondateurs

    + structure

    danimation

    1re couronne

    2mecouronne

    F igure 1 : Un ple qui se construi t par couches concentr iques

    Quelques acteurs donnent ainsi naissance un collectif grce aux relations qui se formalisent dans le

    cadre du ple de comptitivit. Les rgles dont se dotent ce collectif viennent alors simposer aux

    autres acteurs qui rejoignent le ple, compris ici comme un dispositif de rgulation de contrle.

    4. DES RELATIONS SOURCE DE CONTRLE

    On vient de le voir, les relations (ou leur absence) conditionnent la construction du ple. Or la

    construction des savoirs en lien avec les aspects dinnovation sinscrit dans un contexte relationnel:

    les PME fortement impliques, qui constituent ce que nous avons appel la premire couronne ,

    sont dpendantes des donneurs dordre, souvent la fois en termes de marchs et en termes de

    technologies. Lexpertise de ces PME est ainsi reconnue par les donneurs dordre, mais la

    dissymtrie de pouvoir amne souvent ces derniers sapproprier cette expertise.

    Il y a des conflits au sein du ple, notamment au niveau de la proprit intellectuelle et industrielle. Cela se

    rgle pas toujours trs facilement, les principaux conflits sont en gnral entre les donneurs dordre et les

    PME. Toujours le rapport de force, on peut ne plus avoir que le rapport de force. [] Certaines entreprises

    vous diraient que de toutes faon, au bout du compte,concernant la proprit intellectuelle on fait ce que

    [les donneurs dordre nous ont dit], parce que sinon(lanimateur principal de la structure danimation

    EMC2 - 17-06-08).

    Nous on est quand mme que sous-traitants Alors sous-traitants, on a notre savoir-faire, on essaie

    de se diffrencier par rapport notre savoir-faire, donc obligatoirement on ne peut pas ltaler trop.

    Parce quon perd notre lgitimit (Directeur Entreprise 719-08-08).

    Les rgles labores par lEtat portent pourtant une attention particulire aux accords de proprit

    intellectuelle dans les ples de comptitivit, afin de protger les PME et de rduire pour elles les

    risques dun partage de leurs connaissances. Il sagit l de rgles de contrle, exognes. Mais leur

    incompltude favorise lapparition dune rgulation autonome qui remet en cause la rgle de

    contrle : les acteurs se dotent de rgles de fonctionnement qui, ici, vont lencontre deces rgles de

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    contrle. Une rgle informelle semble ainsi autoriser lappropriation par les grands donneurs dordre

    des savoirs des PME. Cette rgle simpose aux PME de par la dpendance due la dissymtrie de

    pouvoir. Elle contente pourtant, dans la plupart des cas, les PME, qui ne peuvent se permettre de

    perdre des marchs :

    Aujourdhui, il y a des mutations technologiques chez les donneurs dordre, il faut que les PME les

    suivent, sinon dautres le feront etcelles qui ne suivent passortiront. Donc cest la fois une ncessit

    de dveloppement et daccompagnement des volutions stratgiques, et une ncessit de dpendance

    (lanimateur principal de la structure danimation EMC2 - 17-06-08).

    Ces rgles de fonctionnement sur la proprit intellectuelle peuvent sembler acceptables pour les

    deux parties dans la mesure o il y a un change : le donneur dordre bnficie des savoirs de la PME

    et lui fournit en contrepartie des marchs. Pour autant, les relations restent source de contrle et de

    dpendance, les acteurs ne sextraient pas ici des relations habituelles de subordination entre

    donneurs dordre et sous-traitants.

    5. DES RELATIONS SOURCE DAUTONOMIE

    Lexploitation des donnes amne toutefois prendre en compte des contextes de relations autres

    que ceux que nous venons de prsenter : la participation un ple de comptitivit serait aussi un

    vecteur dautonomie grce la mise en relation des acteurs au cours des runions, groupes de

    rflexion, formations et diverses manifestations organiss au sein du ple . Cest bien en constituantun rseau de nouvelles relations que les PME pourront sortir de la dpendance envers les donneurs

    dordre, ce dont elles ont conscience, et ce vers quoi veut tendre le Ple EMC2:

    Cest la possibilit de consolider des relations existantes []mais aussi de souvrir sur de nouveaux

    marchs [].EMC2offre de nombreuses opportunits de contacts (Directeur Entreprise 11donnes

    recueillies sur le site internet du ple EMC2).

    Le ple offre ainsi un rseau essentiel pour permettre de nouer de nouvelles relations, et se doter

    ainsi dautonomie vis--vis des grands donneurs dordre:

    Il faut tre prsent pour faire partie un peu du rseau. Sinon Tous les acteurs sont l. [] La

    vocation du ple, cest pas de faire des runions, cest pas le Lions Club, a va plus loin que a, mais

    le ct aprs-runion autour du caf, cest primordial(Directeur Entreprise 609-07-08).

    Ce ct Lions Club est mis en avant la fois par les animateurs et par les participants au ple, qui

    tous admettent que les relations informelles, leffet machine caf, est essentiel, parce que lors

    des rencontres entre membres du ple, le rapport de force est amoindri, dans la mesure o la relation

    change de niveau.

    Et donc on parle avant tout de technique, de stratgie et de dveloppement, avant de parler du prixde la prestation []. On nest pas du tout dans une relation commerciale ce moment l. Donc le

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    rapport de force est affaibli, il ne disparat pas, mais il est affaibli (lanimateur principal de la

    structure danimation EMC2 - 17-06-08).

    Le ple est ainsi un outil de mise en relation, la fois inter-PME, mais aussi entre PME et grands

    donneurs dordre, PME et laboratoires, universits ou coles. Les manifestations organises par le

    ple permettent de multiplier les rencontres entre acteurs proches gographiquement. Ces relations

    font natre une proximit organisationnelle, une comprhension entre des acteurs htrognes. Les

    acteurs doivent tre sur la mme longueur dondes pour avoir envie de travailler ensemble.

    Plus on arrivera faire que ces gens l, telle cole telle entreprise tel groupe, parlent ensemble, se

    connaissent ; soient l autour de la table, plus ils vont discuter dautre chose, et tout a fait que la

    mayonnaise prend et on a envie daller plus loin (lanimateur principal de la structure danimation

    EMC2 - 17-06-08).

    Plusieurs interlocuteurs ont voqu cette mayonnaise qui doit prendre, une expression

    particulirement image qui montre bien quel point il doit y avoir interaction des diffrents

    ingrdients ou acteurs du ple pour crer plus quune juxtaposition, mais une envie de

    travailler ensemble, et la confiance, un bon feeling entre les personnes et les entreprises . La

    confiance qui se construit va inciter les entreprises travailler des projets collaboratifs dinnovation.

    Dans ces projets, les savoirs qui schangent, dans des relations plus quilibres car fondes sur la

    confiance, permettent chacun des membres de gagner en autonomie, en dveloppant de nouveaux

    savoirs et des relations nouvelles.La prsentation officielle des ples de comptitivit, mais galement les donnes empiriques, montrent

    que cest dans les projets collaboratifs de recherche et dveloppement (dsormais R&D) que va se

    jouer le ple. Le dispositif offre la fois une aide au montage de ces projets, un accs certains

    financements flchs vers les ples, mais, surtout, il favorise les relations qui permet tent didentifier

    des partenaires potentiels pour ces projets.

    Dans un premier temps, les projets de R&D sont souvent proposs aux membres du ple par la

    structure danimation, et impliquent trs largement les cinq membres fondateurs, qui recherchent une

    expertise particulire. On retrouve ici le noyau dur lorigine du ple, qui entrane avec lui les

    autres acteurs. Avec le temps, les relations noues au sein du ple permettent certains acteurs

    priphriques de se positionner comme chefs de file de projets de R&D :

    On a un sujet quon a mont nous-mmes, dont on est chef de file, on a trouv des partenaires, on

    la prsent, il a t accept, et donc il avance vite (Directeur Entreprise 820-08-08).

    Il y a des projets quon a monts nous-mmes, et cest mme nous qui avons fait adhrer les

    partenaires EMC2 (Directeur Entreprise 922-08-08).

    Ces acteurs accdent ainsi une certaine autonomie vis--vis des grands donneurs dordre, et

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    peuvent alors bnficier du dispositif des ples de comptitivit en sortant des relations de

    dpendance et en accdant une plus grande autonomie, renforant ainsi leur propre comptitivit.

    Ce sont ainsi les projets de R&D qui viennent donner vie au ple, crant un cercle vertueux o les

    relations font natre la confiance, qui permet daccder davantage dautonomie.

    6. DISCUSSION : PROJETS MULTIPLES ET RGULATIONS DE LACTION COLLECTIVE

    6.1.DES PROJETS PARTIELS VERS LE PROJET DENSEMBLE

    On la vu, cest dans les projets de R&D qumerge le ple. Comment ? Un projet de R&D amne

    des acteurs entrer en relation.

    Dans un premier temps, au sein de chaque projet, chaque acteur cherche faire prvaloir ses propres

    intrts, mais ces acteurs doivent ensemble se doter de rgles de fonctionnement. Dans le cas du pleEMC2, le poids des donneurs dordre leur donne un grand pouvoir dans la rgulation, et les projets

    servent alors souvent les intrts de ces donneurs dordre.La figure 2 ci-dessous montre ainsi un

    ple polaris , si lon ose dire,autour dun noyau dur qui tente de faire prvaloir ses intrts. Les

    projets manent essentiellement des grands donneurs dordre lorigine du ple.

    F igure 2 : 1retape du ple Une polar isation autour du noyau dur

    Dans une seconde tape, les relations tant favorises par le dispositif des ples de comptitivit, les

    acteurs priphriques parviennent mieux se connatre. Ils peuvent ainsi envisager de travailler

    ensemble et deviennent alors force de proposition pour construire des projets de R&D, gagnant ainsi

    en autonomie.

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    F igure 3 : 2metape du ple Une autonomisati on des acteur s priphriques

    A ce stade, au sein des projets de R&D, les acteurs doivent apprendre travailler en tant que

    collectif, et pour cela se doter de rgles de fonctionnement. Le ple nous semble alors reprsenter un

    collectif dacteurs sans projet collectif, mais qui toutefois tend devenir un collectif dacteurs

    collectifs . En effet, on peut considrer chaque projet de R&D comme un micro-collectif, dot

    dune rgulation autonome. Le ple regroupe alors ces micro-collectifs, qui restent indpendants.

    On observe que les entreprises impliques dans ces projets de R&D font voluer leurs perspectives

    en termes de march et de technologie. On retrouve bien ici la constitution de savoirs lie de

    nouvelles relations. Il y a un avant et un aprs projet de R&D, nous disent nos interlocuteurs : il

    y a apprentissage dans laction collective, et la rflexion collective rejaillit sur les projets

    dentreprises, ce quipermet par la suite denvisager dautres projets collaboratifs de R&D. Apparat

    alors une dimension collective.

    On peut ainsi imaginer une phase ultrieure, o les micro-collectifs ns des projets de R&D

    interagissent, et donnent naissance un vritable acteur collectif dot dun projet collectif. Il semble

    intressant pour illustrer ces conjectures de se tourner vers un autre exemple que nous avons puobserver : un ple de comptitivit non-labellis, le Cluster West . Dans ce cas, la dynamique

    collective avait t initie pour rpondre lappel projets lanc par lEtat dans le cadre du dispositif

    des ples de comptitivit. Ce ple na pas t labellis, mais ses membres fondateurs ont dcid de

    poursuivre laction engage, hors de la rgulation de contrle impose par le dispositif des ples de

    comptitivit. Cest bien ici la dfinition dune rgulation autonome qui a permis au collectif

    dexister: les acteurs ont t rapidement confronts la ncessit de se doter de rgles pour

    fonctionner hors du cadre des ples labelliss, ce qui a sans doute acclr le processus de rgulation,

    et donc laction collective. On observe au dpart dans le Cluster West la mme dynamique que dans

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    le ple EMC2 : limplication des acteurs dans des projets de R&D donne naissance des micro-

    collectifs et fait voluer les projets des entreprises membres du ple. Mais il semble que le Cluster

    West ait dpass le stade du collectif dacteurs collectifs. Nous avons pu observer que dans le

    Cluster West, les rgulations autonomes de chaque projet de R&D se rencontrent et donnent lieu

    une ngociation, do dcoule un projet collectif articulant les projets partiels 10. Les projets partiels

    des entreprises qui interagissent dans le ple voluent en effet dans une mme direction, et se

    fondent dsormais sur une rflexion collective et sur les apprentissages permis par laction collective.

    Un projet densemble fdratif se dessine alors, qui permet lmergence dun acteur collectif.

    F igur e 4 : un acteur coll ectif et un projet collectif

    On peut se demander si ce nest pas seulement partir de cette tape quun ple se trouve en mesure

    de remplir les objectifs initiaux fixs aux ples par lEtat de soutien linnovation et de

    dveloppement local, dpassant les objectifs personnels des acteurs des ples. On voit ici la difficult

    de larticulation des projets partiels et du projet densemble, qui ncessite la dfinition de nouvelles

    rgles de fonctionnement dun collectif. Mais cette mergence dun collectif semble difficile sans

    une structure de pilotage.

    6.2.LANIMATION ET LE PILOTAGE DE LACTION COLLECTIVE

    Il nous semble qu lorigine, les entreprises participent aux ples de comptitivit de faon passive,

    parce quil faut y tre. Lintrt que reprsentent les financements flchs vers les ples constitue

    une premire motivation participer des projets de R&D, au dpart pour faire advenir un projet

    dentreprise prexistant: chacun a ses objectifs propres. Puis, laction collective au sein des projets

    de R&D permet un apprentissage, llaboration de rgles qui permettent de travailler ensemble. Et

    les diffrents projets dentreprises voluent, sarticulent dans cet apprentissage:

    10La TRS associe dailleurs la rgulation conjointe lexistence dune ngociation collective.

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    Le ple, je crois, a t et reste un vecteur de relations qui amne maintenant, [] pour ses adhrents,

    avoir des petits clustersqui se montent et qui dveloppent des choses (lanimateur principal de la

    structure danimation EMC2 - 17-06-08).

    Chaque projet de R&D va se doter dune rgulation, dfinir le contenu du projet et les oprations

    raliser (rgles defficacit), les partenaires et le fonctionnement du collectif (rgles de coopration),

    les rgles de divisions de travail et de hirarchie. Cette rgulation va ainsi fixer les modalits de

    coordination et le cadre de cohsion adquats (Segrestin, 2006), et permettre la confiance et

    lchange entre les partenaires, et donc laction collective au sein du projet de R&D :

    Le facteur cl du fonctionnement dun projet cest la confiance mutuelle entre les partenaires

    (Directeur Entreprise 922-08-08).

    Chaque projet de R&D donne ainsi naissance un micro-collectif. Ces diffrentes sources de

    rgulation vont alors se rencontrer. Cest le plus gnralement du ct du pilote que peut merger

    loffre de rgulation conjointe, raison de sa responsabilit politique dans la mise en forme et le

    fonctionnement des systmes daction concerns (Paradeise,in de Terssac, 2003 : 46).

    Dans une dmarche ascendante, la rgulation autonome de chaque projet donne naissance, grce

    lintervention dun pilote, une rgulation inter-projets conjointe ou commune, en partie

    conjointe si les acteurs adoptent des super-rgles, simplement commune sil ny a que partage du

    territoire11. Dans un ple de comptitivit, cest lquipe permanente danimation qui tient ce rle de

    pilote. Cette structure va contribuer une vritable rencontre des rgulations, une ngociation

    facilitant une rflexion collective, plutt quune simple agrgation de multiples rgulations

    autonomes qui prive lorganisation de projet collectif (Paradeise, in de Terssac, 2003 : 46). Cest

    donc grce lintervention dun pilote que ces rgulations vont se rencontrer pour permettre

    lmergence dun projet collectif, et donner naissance au ple comme mta-organisation.

    Cette question du pilotage, quivalent un pouvoir managrial, rend ncessaire une structure

    danimation. Si lon pense que les ples de comptitivit peuvent tre bien plus que les clusters

    spontans tels que la Silicon Valley, il est indispensable de les piloter. Le terrain montre le rlecapital de ces structures danimation, la fois dans EMC2 et dans le Cluster West.

    CONCLUSION

    Quest-ce quun ple de comptitivit? Lexpression elle-mme suggre deux entres possibles pour

    conclure cette contribution : la notion de ple et la notion de comptitivit.

    La notion de ple ou de clusternest pas dnue dambigit. Encore faut-il tre en mesure de la

    11Les termes de rgulation mixte proposs par Crozier et Friedberg pourraient ici sembler appropris pour dcrire cette

    rencontre de rgulations (Crozier et Friedberg, 1977).

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    18

    problmatiser et de lapprcier. Nous lavons fait en cherchant comprendre comment un collectif

    dacteurs sinscrivait dans des rgulations (inities par ltat ou par certains membres du ple),

    respectant les rgles qui encadrent leurs initiatives mais produisant aussi leurs propres rgles.

    Produire des rgles propres, cest se doter dun projet, faire vivre une autonomie ; cest aussi mettre

    en place une activit de rgulation qui sera elle-mme rencontre dune rgulation de contrle et

    dune rgulation autonome. On comprend mieux alors que les rgles ne sont pas des rgles de

    contrle ou des rgles autonomes par nature, mais bien selon lusage qui en est fait (cf. encadr 1).

    Un ple peut tre un collectif dacteurs plus ou moins clat, plus ou moins vivant, plus ou moins

    concentr hirarchiquement. Il peut tre un acteur collectif au sens o les actions des membres se

    rencontrent, convergent, et finissent par produire un projet dans lequel les acteurs sinvestissent.

    Donc des ensembles de rgles que les acteurs adoptent et font vivre. Il est dailleurs intressant de

    remarquer ici que, dans un ple non labellis sur lequel ont galement port nos travaux,

    lmergence dunprojet collectif, et donc dun acteur collectif, a t plus rapide que dans le ple

    EMC2. Une quipe danimation trs dynamique a permis la mise en place de nombreux projets

    collaboratifs qui ont fdr les acteurs et ont permis lmergence dun vritable projet collectif.

    Lexistence dun projet fort a rapidement permis de fonder un collectif actif. Symboliquement, on

    observe ainsi dans ce ple non labellis que des entreprises concurrentes sont parfois amenes

    travailler ensemble au sein dun mme projet de R&D, lment tangible dune vritable action

    collective, alors mme que dans les ples, les quipes danimation veillent viter la prsence de

    concurrents au sein dun projet.

    Nous proposons alors de mesurer le succs dun ple de comptitivit limplication de ses

    membres et lapparition dun projet collectif, la reconnaissance du projet collectif tant le corollaire

    de ce succs.

    Lexpression ple de comptitivit nous confronte aussi la question mme de la comptitivit : ce

    qui est fondamentalement en jeu dans les ples, cest la comptitivit des entreprises dun territoire.

    La comptitivit est parfois associe lide de spcificit au sens de Williamson, mais ce

    rapprochement est discutable (Brchet et Saives, 2001). Une premire question tiendrait donc ce

    quapporte lancrage territorial (Saives, 2002). Mais une seconde question, assez immdiate, porte

    sur la dynamique de construction des comptences, en lien avec la dynamique de construction du

    collectif telle que nous avons pu ltudier. Cest bien en dveloppant ensemble des comptences

    singulires (propres ou partages) que les acteurs dun collectif pourront oprationnaliser leur projet

    et faire vivre le collectif, permettant denraciner leur comptitivit dans le rseau et le territoire

    daccueil. Paradoxalement, les comptences collectives du ple tant plus fortes que la somme des

    comptences initiales de chacun des membres, il semble que cest en liant leurs comptences celles

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    19

    dun collectif que les acteurs gagnent en autonomie et en capacit de mettre en uvre leurs projets

    propres. Mais il reste approfondir le lien entre la dynamique des projets et celle des comptences

    pour pouvoir poursuivre le travail sur la question de la construction des collectifs en y adjoignant la

    question incontournable du dveloppement des comptences, qui fait que les collectifs sont viables

    en univers disput sur les ressources et les dbouchs.

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