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Collège de Keranroux Brest Les 4ème B vous présentent

Recueil final de nouvelles

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travail d'écriture collaborative mené avec une classe de quatrième en collège grâce à une coanimation à distance de six heures ( en visio ) avec Hervé Jubert auteur jeunesse

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Collège de KeranrouxBrest

Les 4ème B vous présentent 

Recueil

De

Trois Nouvellesfantastiques

Écrites par les Quatrièmes BDu

Collège de KéranrouxÀ Brest

Accompagnés par : Hervé Jubert , auteur de littérature jeunesse

Mme Floc'h, professeur de Français et la documentaliste du collège

« Écrire c'est le plaisir de vivre avec une pensée, de la mûrir, de la vêtir, de la faire forte et belle  » Antoine Albalat

« L'un écrit parce qu'il voit ; l'autre parce qu'il entend » Karl Kraus

LA LOGE NUMÉRO 13LA LOGE NUMÉRO 13

Londres, 1904

«- Peter !!! Peter  !! »Pas de réponse.«- Peter ?!  » Toujours pas de réponse. L’acteur embarrassé s’approcha des coulisses. Des murmures nous parvinrent de l’arrière de la scène et quelques secondes plus tard, nous perçûmes un bruit sourd semblable au fracas d'un meuble qui tombe. Le silence se fit dans la salle comble. Soudain un hurlement aigu retentit.«- Élisabeth  !!!  » Intrigué, je quittai ma place au milieu du public et m’avançai vers les loges. Arrivé dans le long couloir sombre, je vis un attroupement de comédiens agglutinés devant la porte défoncée de la loge d’Élisabeth Je me frayai un passage dans le petit groupe apeuré et entrai dans la loge. Un spectacle peu ragoûtant m’y attendait. Élisabeth Montgomery était là, pendue avec la corde grâce à laquelle on levait le rideau. Elle était en costume de scène, vêtue d’une simple tunique vert pastel et d’un collant d’un vert bouteille plus soutenu. Elle n’avait pas de maquillage et pourtant je remarquai des taches de fond de teint et de fard à paupières sur le bas de sa tunique. Étant donnée la position de la chaise, un doute m'envahit: s'était-elle suicidée ou bien l'y avait-on aidé ? La loge était aussi dérangée que si une tornade y était passée. Une ampoule du miroir grésillait, une autre était cassée. La glace du miroir était fêlée et du maquillage était tombé par terre. Je remarquai que les phalanges de l'actrice avaient bleui comm si elle avait frappé quelque chose. J’attendais un médecin pour me le confirmer, mais je crus voir des marques de lutte sur ses bras et sur son cou ce qui pouvait expliquer le désordre de la pièce. Un seul problème pourtant demeurait et il n'était pas des moindres. La porte était fermée de l’intérieur et la loge ne possédait aucune fenêtre.

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Le lendemain du meurtre, je retournai au théâtre * « Duke of York » pour poursuivre l’enquête. J’étais un nouveau membre de la brigade. À l’entrée du théâtre, des journalistes tentaient d’interroger les policiers qui restaient muets comme le leur avait demandé le commissaire. Un sergent nous escorta jusqu’à la loge. Le cadavre avait été emporté à la morgue le soir même et il avait été minutieusement examiné par le médecin légiste en présence du commissaire. En me voyant arriver, ce dernier s'avança vers moi et déclara:

«- Bonjour Ollan, d’après Avery , la victime présente des contusions qui montrent bien qu’elle s’est battue. De plus, le maquillage par terre renforce l’hypothèse de la lutte entre la victime et son agresseur.

- Mais la porte était fermée de l’intérieur ! Comment a-t-il fait pour entrer et pour sortir?

- Ça, ça reste encore un mystère. Sans doute un fantôme! Ha!Ha!Ha!  »Ce qui le faisait rire m’effrayait quelque peu, car, en effet, qui pouvait traverser les murs à part un fantôme?  - Bon comme tout a déjà été inspecté ici, je vais scruter les alentours. Vous venez avec moi, Johnson?  »

Nous traversâmes le couloir des loges. Chacune d’entre elles était minutieusement inspectée par mes collègues. Nous arrivâmes dans les coulisses de la scène. Je n’aimais pas cet endroit car il était surplombé par des passerelles qui pouvaient idéalement servir à jeter des projectiles ou même à couper des cordes pour que les sacs des contre-poids tombent et nous écrasent. Johnson s'apercevant de mon trouble me demanda si tout allait bien, j'acquiesçai pour ne pas révéler mes faiblesses. Tout m’avait semblé normal sur la scène et dans les coulisses jusqu’à ce qu’une corde attire mon attention. Elle était coupée.... coupée au couteau et il s'agissait d'une corde identique à celle qui suspendait la pauvre comédienne défunte. Je demandai à Johnson de rester là et je rejoignis le hall d’entrée où étaient réunis les acteurs. Je demandai à l’un d’entre eux de venir me voir. Je connaissais cet acteur de vue. Il s’appelait Chris Brown, c’était le mari de la sœur

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du commissaire et il figurait en bonne place sur les clichés de famille exposés dans le bureau de celui-ci. Il passait parfois la porte du commissariat en fin de journée pour demander à son beau-frère de se joindre à lui pour une partie de cricket.

«  - Bonjour. Chris Brown je présume ? Je suis l'inspecteur Ollan. Je suppose qu’on vous a déjà interrogé?

- Oui, le commissaire et un sergent si je ne me trompe pas.

- Bien cela ne vous dérange pas que je vous interroge moi aussi?

- Pas de problème.- Bien. Savez-vous si Elizabeth Montgomery avait des

ennemis parmi les comédiens ou d’autres personnes?-Je crois que Catherine Mc Cain, l’actrice qui joue la

mère de Wendy, ne s’entendait pas bien avec elle, mais elle ne serait pas allée jusqu’à la tuer. Je trouvais Elizabeth très tendue ces derniers temps, comme si elle avait vu quelque chose qu’elle n’aurait pas dû voir.

- Inquiétant en effet. Auriez-vous des informations plus précises à ce sujet?

- Non, rien de plus.- Accepteriez-vous d'être mes yeux et mes oreilles au

théâtre ?- Bien sûr, ce serait un plaisir d’aider la police.- Merci, à plus tard.  »Escorté de deux policiers et Johnson, je me dirigeai vers

Mrs. Mc Cain.

«  -Mrs. Mc Cain ? Bonjour. Veuillez me suivre, s'il vous plaît. Nous avons des questions à vous poser !

-Moi ?? Mais je n'ai rien fait  !!!-Nous verrons cela. Suivez-moi. »

Une fois au commissariat, je commençai l'interrogatoire:« -Mrs. Mc Cain, qu'elle était la raison de votre dispute

avec la victime?-Qui vous en a parlé?-Ici, c'est moi qui pose les questions. Maintenant,

veuillez répondre !  -Cette péronnelle m’a volé le rôle de Peter Pan*. Il était

à moi jusqu'à ce qu'elle supplie le metteur en scène de lui 13

donner le rôle principal alors que je suis bien plus talentueuse que cette débutante !

-Je vois. Que faisiez-vous au début de la représentation?-Je me maquillais.-Avez-vous des témoins pour le confirmer?-Oui, ma maquilleuse.-Merci. Vous pouvez partir, mais ne quittez pas la ville.»

Une fois qu'elle fut sortie, je pris le téléphone et j'appelai le théâtre où je demandai que la maquilleuse de Mme Mc Cain soit amenée au commissariat. Vingt minutes plus tard, elle était là et me confirma les propos de l’actrice. Elle semblait sincère et je la crus. « Fausse piste ! » pensai-je, « Cela eut été trop facile !! »

Après cette déception, je me rendis de nouveau au Duke of York. Une fois sur place, je croisai Mrs. Mc Cain qui affichait un sourire de satisfaction. Je me rendis dans la loge de Chris Brown. Celui-ci buvait un scotch.« - Bonjour Ollan, quel bon vent vous amène? Catherine n'était donc pas coupable.- Les nouvelles vont vite, je vois, mais je ne suis pas encore certain de son innocence.- Innocente ou non, elle n'a pas manqué de vous décrire comme une brute qui arrête sans raison toute personne qu'il soupçonne. Sachez que la pièce va reprendre avec Catherine dans le rôle de Peter.- La pièce va reprendre ?! Mais le coupable est encore en liberté !- Oui, mais le commissaire a donné son accord. Il assure que des policiers patrouilleront dans le théâtre pour garantir notre sécurité.- Je trouve cette décision très risquée.- Je le pense aussi, mais un ordre est un ordre!- Quand la pièce doit-t-elle reprendre?- Le plus tôt possible nous a dit le metteur en scène… Il faudrait peut-être laisser quelqu'un devant la loge de Catherine Mc Cain, ne pensez-vous pas?- Cela va de soi.

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- D'ailleurs, je me propose pour ce rôle...- Si ça peut vous faire plaisir.- Et comment! J'ai le béguin pour cette actrice. Je

compte bien tenter ma chance et en profiter pour la raccompagner chez elle. »

Après une nuit mouvementée passée à réfléchir à cette enquête qui nous donnait du fil à retordre, je me réveillai épuisé. Je me levais pour prendre mon café, quand tout à coup le téléphone sonna.

« - Inspecteur Ollan, j'écoute.- John Warldof, le procureur général à l'appareil.- Que puis-je faire pour vous?- Je vous confie une mission, la routine, une affaire

d’opium...- Je regrette, cela m’est impossible en ce moment.

Personne ne vous a prévenu, je suis déjà sur une autre affaire...

- Cela m'intéresse peu. Je vous confie cette affaire, elle est prioritaire! Vous n'avez pas à me contredire !

- Mais ma précédente affaire doit être résolue le plus rapidement possible pour éviter d'autres victimes.

- Alors, dites à votre stagiaire de prendre votre place. Personne n'y verra d'inconvénients.

- Mais enfin je ne peux pas le laisser ainsi, il n'a aucune expérience...je...

- Au revoir Ollan...  - Mais…mais…- ...Mon supérieur m'avait raccroché au nez! Je n'y croyais

pas. La tasse que je tenais m'échappa des mains et explosa contre le carrelage avec fracas. Je bouillonnais de colère. Il fallait que je me défoule et pour ça j'avais ma petite idée...

Extrait du journal du stagiaire Johnson

Vendredi 29 décembre 1904

Je frappai à la porte du domicile de mon supérieur qui n'était autre que monsieur Ollan... Pas de réponse. Bizarre. J'entendais des bruits sourds et lointains dans cet immeuble qui par ailleurs semblait

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étrangement vide. J'attendis quelques minutes puis je frappai de nouveau à la porte qui finit par s'ouvrir rageusement. Je découvris mon supérieur suant dans l'entrée. Il me proposa un thé que j'acceptai.Dans l'appartement régnait une atmosphère tendue. L'inspecteur Ollan avait disparu derrière la porte de la cuisine pour préparer le thé . C'est alors que je remarquai des trous dans les murs et des traces de sang sur le sol.

Tout à coup j'entendis un bruit, le plus effrayant que vous ne puissiez jamais entendre... Je me précipitai dans la cuisine où je trouvai mon supérieur comme en état de transe. Il traversait la cuisine de long en large à grands pas ; il hurlait, frappait de toutes ses forces les murs. Ses phalanges étaient en sang, les veines de son cou ressortaient sous l'effet de la colère. J'étais stupéfait, je ne savais que faire. 

Puis, subitement, il redevint calme et me regarda comme si rien ne s’était passé. Quel homme singulier !

Ciel ! J'avais eu une nouvelle crise, en présence de mon assistant ! Johnson n'avait pourtant pas l'air trop secoué. Je décidai d'enquêter sur cette fameuse fumerie d'opium en partie pour me changer les idées.

Nous trouvâmes l’adresse facilement. L'immeuble était  délabré, sale, isolé et silencieux. Il était situé dans une ruelle obscure. Nous poussâmes la porte. Une fois à l'intérieur, nous fûmes pris d'une quinte de toux du fait de la fumée qui se dégageait des pipes. Une dizaine de personnes étaient allongées sur des tapis. Nous nous dirigeâmes vers un chinois qui semblait être le propriétaire de la fumerie.

«  - Bonjour, Mr. Chang ?- A qui ai-je l'honneur?- Jack Ollan, inspecteur de police. Voici mon stagiaire

Johnson.- En quoi puis-je vous aider?- Nous venons vous interroger à propos du cadavre que

nous avons retrouvé hier matin à côté de votre fumerie.- Un cadavre???- Oui.»Johnson dut sortir un moment, car il ne se sentait pas

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bien. Au même moment, sans doute sous l'effet de la fumée, je vis soudain apparaître un dragon à la place de mon interlocuteur. Que m'arrivait-il? Saisi de peur, je me mis à frapper ce dragon qui me semblait plus que réel or ce n'était autre que Mr. Chang. Je cognai, je cognai, je cognai jusqu'au moment où Johnson revint et me ceintura m'empêchant ainsi de tuer mon pauvre interlocuteur.Le soir même, le commissaire m’appela pour me signifier que le procureur Warldof me demandait de prendre des jours de congé forcé. En clair, j’étais suspendu. Je n’avais plus l’autorisation d’enquêter.

Le lendemain, Johnson m'appela pour me prévenir que la pièce serait jouée le soir même et que de nombreux spectateurs étaient attendus. Johnson était désormais le seul membre du commissariat à me faire confiance et à me tenir informé de l'évolution des choses. En apprenant cette nouvelle, je raccrochai et appelai aussitôt le directeur du théâtre que j'avais aidé sur une précédente affaire. Je lui demandai de me remettre une invitation pour la pièce. Il accepta. Le soir venu, je me rendis donc au théâtre. Une charmante ouvreuse me conduisit à ma place. La pièce commença.

-Peter! Peter!Pas de réponse.

- Peter!Toujours pas de réponse.

Un cri retentit! Je compris aussitôt que Mrs Mc Cain avait été tuée. Je me précipitai vers sa loge dont j’enfonçai la porte. À l'intérieur, le même spectacle que quelques jours auparavant m'attendait : le miroir brisé exactement de la même façon et Mrs Mc Cain pendue. Le commissaire observait le cadavre qui se balançait légèrement.

- Ollan, comme vous pouvez le voir, il s'agit du même mode opératoire et donc sans doute du même tueur...Mais...au fait... que faites-vous ici ?...Vous êtes suspendu!Il s'énerva et me dit:- Vous êtes suspendu et vous venez sur une scène de crime sans en avoir la permission !! Vous n’avez pas honte! Maintenant, dégagez!!

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Il était rare que le commissaire s'emporte de la sorte.- Johnson, raccompagnez Ollan jusqu’à la sortie.En me raccompagnant, Johnson entama une discussion

avec moi.- Je suis navré, monsieur l'inspecteur, mais le

commissaire est sur les nerfs avec ce double meurtre. Nous n'avons aucune piste et Mr. Brown a disparu.

- C'était lui qui gardait la loge. Ne pensez-vous pas qu’il pourrait être le tueur?

- Le commissaire ne serait pas content d'entendre cela et puis d'ailleurs Mr. Brown n'avait pas les clefs de la loge.

- Qui en avait les clefs?- Seulement Mrs. Mc Cain car tous les doubles ont été

refondus sur ordre du commissaire- Surprenant. Continuez à me tenir informé des

avancées de l'enquête s’il vous plaît.- Bonne soirée inspecteur- Bonne soirée Johnson.»

Toute la nuit, un doute me rongea. Et si Chris était un fantôme? À ce moment-là, je me souvins que le commissaire m'avait demandé de prendre une photo de la scène de crime au théâtre- scène du crime sur laquelle se trouvait alors Chris. Je devais en avoir le cœur net! La pellicule non développée était toujours dans mon appareil. C'était l'occasion! Je me levai et sortis dans la rue à la recherche d'un photographe. J'en connaissais un sur Regent street. J'eus la chance de trouver un cab malgré l'heure matinale, mais je fus moins chanceux quand j'arrivai face à la devanture du magasin: l'inscription CLOSED s'affichait en grand sur la vitrine.Je connaissais une autre boutique un peu étrange où se vendaient mille et une choses et où l'on développait aussi des photos. Ce magasin se trouvait en face de High Park et il était géré par un vieil homme plutôt surprenant.J’y arrivai à pied cette fois-ci, mon cab étant reparti après m'avoir déposé à Regent Street. Comme je le pensais, l'échoppe était ouverte. Cela ne me surprit guère étant donné la singularité de la bâtisse et de son propriétaire.L'homme m'accueillit. Il était doté d'une barbe blanche,

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Abasourdi par cette découverte et encore profondément meurtri par la mort de mon stagiaire, je me lançai fébrilement dans des recherches sur ce Chris que je connaissais en définitive si peu. Je parcourus les journaux traquant le moindre indice qui me permettrait de comprendre cette histoire. Je découvris enfin le nom de Chris dans un journal vieux de huit mois environ, à la page des avis de décès. Je me plongeai dans la lecture de cet article avec avidité.

DISPARITION BRUTALE DE CHRIS BROWN

Chris Brown, acteur de talent confirmé, avait postulé pour le rôle principal dans la pièce intitulée « Peter Pan ou le petit garçon qui ne voulait pas grandir» de J. M. Barrie. Il avait à priori toutes les chances de l'obtenir. Malheureusement au dernier moment le metteur en scène et l’auteur avaient choisi de donner sa chance à une jeune première, Élisabeth Montgomery. Désespéré, ne pouvant accepter cette décision qui mettait un terme à sa carrière, nous avons appris qu'il a mis fin à ses jours hier, en se pendant dans la loge numéro 13 du fameux théâtre « Duke of York » …

Connor O' Brian

FIN

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Panique À

Paris

PANIQUE À PARISPANIQUE À PARIS

Paris, 1910

Paris, 18h30, Raymond Le Braz faisait les cent pas dans son bureau. Anxieux, il parlait à sa femme.

«- Je suis inquiet à cause de cette histoire de crue*. Si l’eau monte jusqu’à l’usine, cela causera une panne qui touchera les ascenseurs et les horloges.

- Il ne faut pas t’inquiéter. Si tu veux, avec les enfants, nous allons visiter la Tour Eiffel. Viens avec nous pour changer d’air.

- Non merci, je rentrerai plus tôt ce soir pour me reposer. Amusez-vous bien ! »

Vingt heures, rue de la Tour Eiffel. Rachelle Le Braz tenait ses deux enfants par la main afin d'être sûre de ne pas les perdre dans la foule affolée qui quittait la capitale noyée sous les eaux. Arrivée au sommet de la Tour, la famille le Braz admira la ville inondée. L'eau était montée au-dessus du niveau des ponts. Des passerelles de fortune avaient été installées dans les rues afin de permettre aux gens de circuler et d'accéder aux bâtiments dévastés par la crue de la Seine. Les femmes criaient, effrayées, à la vue des rats qui remontaient des égouts devenus inutiles. Lassée de ce triste spectacle, Rachelle décida de redescendre.

Elle regarda, l'esprit ailleurs, les portes de l'ascenseur se fermer. Celui-ci entama la descente si lentement que cela leur laissa le temps une nouvelle fois d'admirer le paysage. La machine était arrivée environ à la moitié de son trajet quand soudainement, elle s'immobilisa dans un grand bruit de ferraille. Ses occupants se mirent à crier. De l'ascenseur, ils avaient une vue d'ensemble sur toute l'ampleur des dégâts. Et nulle doute n'était permis, il s'agissait d'une panne générale !Tout ce qui fonctionnait grâce à l'usine à air comprimé s'était arrêté: les horloges, les ascenseurs et même les

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lampes. La ville paraissait comme endormie, plongée dans la pénombre. Subitement, le ciel s'embrasa, on entendit un grand bruit d'explosion. La tour Eiffel trembla et Rachelle crut distinguer au loin la silhouette de deux trains qui s'étaient violemment heurtés. Ses enfants, paniqués, se mirent à crier : « Au secours ! » Juliette s'accrocha à la jambe de sa mère dans un mouvement désespéré pour ne pas la perdre. Quant à la mère, elle était horrifiée. Elle observait le carnage qui se déroulait en bas, impuissante. Le liftier, lui, gardait son sang-froid. Il se mit sur la pointe des pieds et ouvrit la trappe du plafond de l'ascenseur. Rachelle le regarda d'un air interrogateur.

« - En haut de la Tour se trouve l'ancien appartement de Gustave Eiffel et pour y accéder il y a une échelle qui va de l'ascenseur à l'habitation » lui expliqua-t-il

L'homme aida la mère à passer par la trappe, puis ce fut au tour des enfants et enfin il s'y engagea. Les petits commencèrent la pénible ascension de l'échelle, le liftier restant derrière eux pour prévenir la moindre chute. La mère qui les avait précédés, les attendait en haut et les encourageait de la voix.

Ils finirent par arriver en sûreté dans l'habitat où une odeur pestilentielle de renfermé les assaillit dès l'entrée. L'appartement était en désordre: sièges renversés, poussière maculant les meubles... Sur le lit se dessinait une forme de corps comme si une personne avait dormi là peu de temps auparavant. Du fait de la panne, l'appartement était plongé dans la semi-obscurité.

Rachelle trouva une bougie dont la cire était bizarrement encore liquide et l'alluma afin de visiter l'appartement. Elle coucha les petits dans la première chambre qu'elle découvrit. Puis elle emprunta une autre porte qui s'ouvrait sur un bureau attenant à la chambre dans laquelle dormait le liftier. Elle aperçut un petit secrétaire dont le tiroir entrouvert laissait dépasser des papiers. Curieuse, elle l'ouvrit en grand afin de regarder ce dont il s’agissait. Plusieurs documents tombèrent par terre et elle s'agenouilla pour les inspecter. Stupéfaite, elle reconnut les plans de la nouvelle usine de son époux, plans censés être secrets! Horrifiée, Rachelle se mit à fouiller fébrilement 24

dans la pile de papiers restée dans le tiroir. Elle y trouva le reste des plans et cinq lettres que Rachelle reconnut être écrites en allemand.

- Eh bien, faites comme chez vous?!Rachelle se tourna pour découvrir un homme d'une belle prestance, grand, au regard ténébreux. Surprise, elle eut un mouvement de recul.

- Qui êtes-vous?? Comment êtes-vous rentré??- Mais c'est à moi de vous poser ces questions. Et à qui

appartiennent les enfants qui dorment à côté?- Ces enfants sont les miens et nous... nous sommes ici à

cause de la panne d'ascenseurRachelle se tut. L'inconnu venait de sortir un revolver et

la visait. Il s'assit.- Prenez vos aises, gardez votre calme, personne ne

viendra ici. J'ai mis hors d'état de nuire votre liftier! Et si vous me racontiez tout par le menu. Je sens que votre histoire va me passionner. » Rachelle n'en était pas sûre du tout. En effet, elle avait reconnu Fantômas, le célèbre bandit dont les exploits faisaient les choux gras de la presse. Sa véritable identité lui avait été révélée dans les lettres que Rachelle avait eu le temps de lire. Elle était maintenant en grand danger premièrement parce qu'elle venait d'apprendre par les dites lettres que le bandit était en correspondance avec les Allemands à qui il voulait vendre les plans et deuxièmement parce qu'elle connaissait désormais son véritable visage. Il allait falloir jouer serré, car s'il apprenait qu'elle savait tout, il la tuerait certainement.

Faute de rénovation, l'usine* serait heureusement bientôt remplacée par une usine mécanique flambant neuve. Des rongeurs avaient sectionné les câbles. La nuit même de la montée des eaux, Gaston, le contremaître, était allé inspecter les machines comme à son habitude. Et ce n'était pas de tout repos puisque l'usine avait été surnommée « le labyrinthe ». Une fois parvenu à la dernière machine, Gaston s'était trouvé face à un horrible rat qui avait grimpé le long de ses jambes. Il s'était alors évanoui de peur. À son réveil, il avait entendu un bruit strident. Il était allé voir ce qui se passait. L'un des câbles endommagés par les rats laissait

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s'échapper de l'air ce qui produisait ce bruit aigu.Deux jours plus tard, il racontait sa mésaventure à son

patron.«  - Alors, mon petit Gaston, c'est quoi ce désordre? Il

n'y a plus rien qui fonctionne ?- Toutes les lumières et machines se sont arrêtées !  - J'ai bien vu ! Ah la, la ! Je leur avais bien dit à la mairie

! À la moindre inondation... Et les nouvelles ne sont pas bonnes. Deux trains se sont rentrés dedans. Il y aurait des morts. » Le chien aboyait furieusement. « Ah, la, la ! Mais, arrête Hugues, enfin ! Pourquoi es-tu énervé comme ça ?

- Laissez-moi lui parler. Étant jeune, je comprenais les canidés et je crois que je peux encore y arriver.

- Vous parlez la langue des chiens, Gaston ? Alors ça ! Bravo, vous êtes un homme plein de ressources ! Si vous perdez votre emploi à cause de cette fichue panne, vous pourrez toujours travailler dans un cirque! Bon, allez-y, j'aimerais bien voir ça !

- Qu'y a-t-il Hugues ?Le chien répondit à Gaston:

- J'ai aperçu une ombre qui ne m'est pas inconnue. »Le contremaître traduisit les propos de l’animal. L’employé et le patron se regardèrent les yeux écarquillés.

Le chien mena les deux hommes à l’endroit où il avait vu l’ombre. Surprise ! Ils y trouvèrent un vieux papier sur lequel était écrit en lettres de sang: «  Il n’y a que la mort qui tue ! » Puis le bouledogue les entraîna dans un coin encore plus reculé de l'usine. Là-bas, alors que tous les ouvriers devaient être partis, ils tombèrent sur un jeune garçon d'une pâleur extrême qu'ils reconnurent aussitôt.Stupéfaits, les deux hommes se regardèrent: ce jeune homme était mort deux semaines auparavant ! Comment pouvait-il se tenir debout devant eux alors qu'il était censé être enterré?

« -Pincez-moi, Gaston. Je suis en plein cauchemar...Rachid, c'est toi ?! Mais tu es mort, tu ne peux pas être là !

- Ah, monsieur le directeur !...Et ce cher contremaître !...Je suis bien content de vous voir. »Tout en parlant, Rachid Zoubiri arracha un câble ce qui produisit

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une énorme étincelle.« - Mais arrête, tu es devenu fou !!! continua le

directeur. C'est toi qui es à l'origine de cette panne ?- Fou? Non ! Juste en colère. Et vous savez très bien

pourquoi...- Oui, mais... euh...Je suis désolé si ce n'était pas toi qui

as volé ces documents, mais il n'y avait que cette possibilité car c'est toi qui étais de garde cette nuit-là. Sur qui d'autre voulais-tu que portent mes soupçons ?

- Bravo, monsieur le directeur. La vérité sort enfin de votre bouche. Mais c'est un peu tard.Il arracha un nouveau câble.

- Arrête s'il te plaît ! Le chaos dans lequel nous sommes plongés, ne te suffit pas! Nous allons trouver un moyen de tout arranger, je te le promets! Nous découvrirons l'identité du véritable coupable.

- C'est tout ce que je voulais entendre. Mais faites vite ! Je veux que vous restauriez mon honneur ! Sinon.. je peux encore semer la panique dans Paris. Et maintenant vous ne pouvez plus rien contre moi ! »Sur ces mots, à la stupéfaction des deux hommes et du chien, la silhouette de Zoubiri s'évanouit.

Gaston proposa à son employeur de mener l'enquête avec Hugues. Qui avait bien pu voler les plans d'une usine pas encore construite, si ce n'était pas Zoubiri ? Hugues les quitta pour aller voir ses collègues à quatre pattes et glaner ainsi quelques informations. Il mena l'enquête avec succès. Sa piste les conduisit à un Allemand. Celui-ci s'avéra être un espion. Mais si ce dernier comptait acheter les plans de l'usine pour le compte de son pays, en revanche ce n'était pas lui qui les avait dérobés.

Pendant ce temps Rachelle expliquait à Fantômas que Zoubiri, un employé de l'usine, était mort par sa faute.

- Quand vous avez volé les plans de l'usine, Zoubiri a été accusé à tort, il a été renvoyé de l’usine et il a tout perdu ! C’est devenu un sans-abri. Il dormait sous le pont de l’Alma où il est mort noyé lors du dernier débordement de la Seine.

Pris de remords et ne voyant pas ce que pourrait lui apporter la mort des quatre personnes présentes dans l'appartement, Fantômas, laissa la famille du directeur

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dans l'appartement et sortit . La curiosité l'emportant sur tout le reste, Rachelle décida de le suivre. Alors que le liftier reprenait ses esprits tout en portant la main sur l’énorme bosse qui ornait désormais son front, la jeune femme lui demanda de garder ses enfants puis elle quitta l'appartement à la poursuite de Fantômas.

Quelques minutes plus tard, ce dernier filait dans la rue en direction de l'opéra Garnier, Rachelle sur ses talons. Le voleur marchait d’un bon pas, l'air décidé comme s’il avait un rendez-vous. Arrivé devant l'entrée, le bandit hésita un instant puis s'engouffra dans l'Opéra.

« - Bonjour, Herr Shultz, dit Fantômas.- Arh ! Ponchour ! Afez-fous ce que je fous ai demandé ?- Oui, j’ai les documents que vous souhaitiez.- Arh ! Vite ! Vite ! Donnez- les moi!

Fantômas tendit les plans à l'espion qui les consulta rapidement.

- Tenez, pour fotre peine.L'espion lui remit une sacoche en cuir.

- Merci, au revoir. »Puis les deux conspirateurs se séparèrent.

N'écoutant que sa colère, Rachelle, qui avait assisté à la scène cachée derrière un pilier, se précipita sur Fantômas, et lui lança :

« - Pourquoi avez-vous fait ça ? Pour de l'argent ?- Pourquoi j'ai fait quoi ?- Pourquoi avez-vous vendu les plans de l'usine ?- Les plans de l'usine ? Ce n'étaient pas les plans de

l’usine de votre mari mais ceux de l'appartement de monsieur Eiffel. Et, rassurez-vous, j'enverrai un mot à la police pour innocenter monsieur Zoubiri. Madame, ce fut un plaisir de vous rencontrer, termina-t-il avec un petit sourire narquois en direction de la jeune femme.

Et sur ce, il disparut.

Quelques jours plus tard, voici ce qu'on pouvait lire dans les journaux:

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L'OUVRIER DE L'USINE D'AIR COMPRIME INNOCENTE !

Rachid Zoubiri, ancien employé de l'usine d'air comprimé, décédé le mois dernier, a été innocenté du vol des plans de la nouvelle usine d'air comprimé tenus secrets. Le vrai coupable n'était autre que le célèbre bandit Fantômas. Celui-ci comptait vendre les plans aux Allemands. Mais, apprenant que cet employé était mort par sa faute, il leur a remis les plans de l'appartement de Gustave Eiffel et le célèbre voleur a restitué les précieux documents à la femme du propriétaire de l'usine.

Voir page 3

A la minute où l'innocence de Zoubiri fut proclamée, l'électricité revint, les horloges se remirent en marche comme par enchantement. La Seine mit elle quelques temps avant de retrouver son lit. Rachelle rentra chez elle où elle trouva son mari joyeux. Elle lui demanda pourquoi il était aussi satisfait. Il lui répondit que l’usine était réparée. C'était un vrai miracle ! Elle lui restitua alors les plans volés.

« - Comment les as-tu eus ?- C'est une longue histoire... Lis le journal et tu

comprendras... Mais au fait les enfants sont-ils là?- Oui, Ils sont revenus avec le liftier, ils dorment dans

leur chambre. »Rachelle et son époux étaient exténués. Ils s'écroulèrent

sur leur lit et s'endormirent aussitôt.

Au réveil, le mari se tourna vers sa femme et lui dit « - J'ai fait un drôle de rêve... Mon contremaître

comprenait le langage chien... - Moi aussi, j'étais coincée dans la Tour Eiffel avec les

enfants le coupa Rachelleenfants le coupa Rachelle - Et l'usine était en panne à cause de Rachid... renchérit

Raymond.

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- Et J'y rencontrais Fantômas qui avait volé les plans de ton usine termina t-elle.

Les deux époux se regardèrent et se précipitèrent dans le salon. Avaient-ils rêvé ou était-ce la réalité ? Seule solution pour vérifier tous ces faits rocambolesques: le journal. Les enfants jouaient tranquillement avec leur jeu de carte dans le salon. Mais sur le quotidien, aucune trace, rien ne semblait avoir jamais existé.

La Seine, quant à elle, commençait tout doucement à redescendre..

FIN

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LA VENGEANCE AU GOUT DE CENDRESLA VENGEANCE AU GOUT DE CENDRES

New-York, 1868

Un jour d’hiver, alors que je raccommodais une magnifique robe de satin appartenant à Mme de Montmartre, je laissai mon esprit vagabonder. Dire que quelques mois auparavant je n'étais encore qu'une jeune fille malheureuse..

Mais laissez-moi vous conter mon histoire.

Depuis ma naissance, j'étais affligée d'un hideux bec-de-lièvre et d'un dos bossu. Ces deux difformités faisaient de moi un être extrêmement laid. Malgré cela, je n'étais pas dépourvue d'un certain charme. Mes parents travaillaient au musée Barnum* en tant que guide, interprète. Dans ce grand bâtiment de quatre étages, installé depuis 1811 au 820 Lexington Avenue, le public venait découvrir la reconstitution des obsèques de Napoléon, des personnages de cire, des aquariums. Les spectateurs pouvaient également assister à des saynètes de théâtre et bien évidemment y observer des personnes anormalement petites, poilues ou difformes qui étaient exhibées pour leur plus grand plaisir. C'était pour cette raison qu’à plusieurs reprises mes parents avaient tenté d’exploiter mon physique. J'exécrais ce bâtiment. Toute mon enfance, j'y avais subi la vue de ces affreuses créatures. Mon jeune âge m'avait malheureusement contrainte à accompagner mes parents. Cela m'avait rendue dure, forte, méchante et asociale. D'ailleurs, les monstres* du musée Barnum se méfiaient continuellement de moi. Peut-être étais-je un monstre physiquement mais mes parents aussi étaient des monstres...d'un autre genre. Ils ne voulaient rien entendre lorsque j'abordais le sujet du travail et rentraient tous les soirs dans notre misérable masure avec leur médiocre salaire. Cette vie continua durant de longues années jusqu'à l'âge de mes quatorze ans.

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Par un après-midi d’été ensoleillé alors que je terminais mes achats à la boulangerie, un homme distingué s’arrêta et me tendit une lettre, le sourire aux lèvres. Cela faisait plusieurs fois que je l'apercevais accompagnant une vieille dame qui me fixait avec ses yeux bleus scintillants et son air sympathique. Elle portait chaque jour des robes qui me semblaient de plus en plus majestueuses et nobles. Ce jour-là, j'étais quant à moi vêtue de mes habituelles guenilles. Mes longs cheveux roux étaient emmêlés. Méfiante, je pris la lettre d'une main hésitante et la glissai sous mon gilet de laine. Munie de cette missive, je me remis en route tout en me cachant sous mon voile déchiré qui me servait de protection contre la morsure du froid mais aussi contre les moqueries sur mon physique. Je préférais donc rendre mon visage inaccessible autant que possible. Je me demandai pourquoi une femme si riche s’intéressait à moi. Arrivée à mon domicile, je pris la lettre. Aucun nom, ni aucune adresse ne figurait sur l'enveloppe. Je la décachetai lentement avec un sentiment d’inquiétude. C’est seulement quand je découvris son contenu que la joie emplit mon cœur ainsi que tout mon corps.

Mademoiselle,

Mme de Montmartre recherche en vain de nouvelles employées pour accomplir différentes tâches selon les connaissances et acquis. Je vous prie donc, si cela vous intéresse, de vous présenter le samedi 23 décembre à cette adresse: 34 Fountain street.

CordialementMonsieur Hastings, secrétaire personnel de Mme de Montmartre

Je m'étais donc présentée au domicile de Mme de Montmartre qui était une majestueuse et magnifique maison à mille lieues de mon humble domicile. J'avais mis pour cette occasion la plus belle tenue dont je disposais. Cette dernière était composée d'une petite robe à fleurs colorées roses et jaunes qui mettait ma chevelure flamboyante en valeur et que j'avais moi-même confectionnée. De plus je m'étais appliquée à remonter ma crinière rousse en un épais

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chignon inspiré des nobles dames que je croisais dans la rue. J'étais à peine arrivée devant l'hôtel particulier de Mme de Montmartre et je m'apprêtais à saisir le heurtoir en laiton quand un majordome ouvrit la porte.

C'était la porte du paradis! À l'intérieur, devant mes yeux ébahis s'étalaient des objets rares, des meubles rutilants qui donnait à l'ensemble un caractère exotique. Par les fenêtres, on apercevait un immense parc fleuri. C'était tout simplement magnifique! Je n'avais jamais vu un tel luxe! Mon cœur palpitait. J'étais à la fois anxieuse de rencontrer Mme de Montmartre et jalouse de toutes ses richesses. J'eus l'envie soudaine de quitter les lieux, mais je décidai de laisser ma rancœur de côté et de prendre en main ma vie pour changer mon destin.    J’attendis mon tour pour passer l'entretien au milieu de nombreuses jeunes filles visiblement plus âgées que moi. Les entrevues s'enchaînaient et ce fut bientôt à moi de pénétrer dans le bureau orné de précieuses tapisseries où s'était installée mon futur employeur, Mme de Montmartre. 

« - Entrez, mademoiselle. N'ayez pas peur. Quel est votre nom ?

- Je me nomme Pauline, madame, répondis-je poliment.- Vous vous demandez sans doute pourquoi j'aimerais

vous prendre à mon service ?- Oui effectivement je me pose beaucoup de questions.

À cet instant, Madame s'approcha de moi, me prit le menton, et me regarda dans le blanc des yeux.

- Votre physique m'intéresse. Et je peux voir la perle qui se cache en vous. Croyez-le ou non! Je me reculai rapidement, perplexe et inquiète, mais bien décidée à ne pas me laisser intimider

- Animal farouche. Parfait. J'aimerais faire de vous ma dame de compagnie. Elle me regarda alors avec un drôle d'air.

- Cette robe, l'avez-vous faite vous-même ?- Oui je l'ai réalisée avec mes maigres moyens.

Pourquoi?- Vous avez un don: cette tenue est charmante! Les

travaux d'aiguille apaisent l'âme. Nous broderons ensemble, 40

mon enfant. »Sur ce, Madame me congédia.

Voilà donc comment je me retrouvais en train de raccommoder la longue traîne d'une formidable robe ornée de pierres précieuses. Je venais de terminer et je ramassais mes affaires afin de regagner mon logis. Je pourrais vous dire que cette journée avait été difficile, mais tout le travail que l'on me donnait ici, m'était agréable.

Dehors il faisait froid en ce soir de décembre et dans ce silence glacé on n' entendait que les craquements de feuilles, des miaulements de chats et des éclairs suivis de grondements. Pas âme qui vive! Mon attention fut retenue par une boutique. Sur son enseigne était inscrit "Irma la voyante "et dans la vitrine des promesses comme "Vous cherchez le Bonheur, la Richesse et l'Amour, entrez !". Un serpent se lovait dans la vitrine. Très intriguée, je rentrai chez moi l'esprit encore en proie à de nombreuses interrogations.

Le lendemain matin, très fatiguée de la nuit que je venais de passer à réfléchir, je retournai à la boutique de la voyante dans l'espoir de découvrir ce que mon futur me réservait. Alors que je passais le seuil de la porte, je ressentis un terrible frisson sans doute dû à l'extrême froideur de la pièce. L'endroit étant désert, j'en fis le tour et remarquai pêle-mêle des bocaux remplis d'animaux morts, des poupées vaudou plantées d'épingles...

Tout à coup, une ombre se glissa derrière moi. Je me retournai et aperçus celle qui devait être Irma, la voyante. Elle me pria de la suivre dans une pièce adjacente. Au milieu de celle-ci se trouvait une boule de cristal qui irradiait de mille feux. Je me sentis mal à l’aise face à cette étrange personne. C'était pourtant une belle jeune femme toute de mauve vêtue, mais une inquiétante lueur noire aux reflets métalliques brûlait dans son regard. Un silence pesant régnait. Soudain la voix d'Irma retentit derrière moi pour me proposer un thé. Quelques instants plus tard, elle posa devant moi une tasse fumante qui exhalait une odeur fruitée. Tentée par ce parfum exquis, je décidai d'y goûter. Tandis

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que j'y trempais mes lèvres, la cartomancienne me prit la main. 

« - Belle ligne de vie. Aucune brisure. Par contre, vous repasserez pour l'amour... ça vous laisse sans voix. Non mais, ma petite, avec votre tête et votre bec de lièvre, vous ne risquez pas de rencontrer le prince charmant.

-Ne remuez pas le couteau dans la plaie je vous prie.-Mais justement j'ai la solution. »À ce moment, la voyante me tendit un

miroir...Brutalement je vis mon visage se métamorphoser. Mon bec de lièvre s'estompa, mon palais se referma, mon dos se redressa et tous mes pustules disparurent. J'étais devenue absolument magnifique. Incrédule et heureuse, je lui demandai :

«-Mais que m'arrive-t-il ?-Et bien, réfléchissez un peu mademoiselle, dit-elle. Ce

n'est pas du thé que je vous ai donné mais une potion que vous pourrez utiliser afin d'embellir votre corps.

-Merci infiniment ! je vous suis extrêmement reconnaissante.

- Ce n'est pas tout, ma chère enfant.- Mais quoi donc !!!!

Elle me tendit un morceau de tissu, plié en quatre.- Grâce à la magie de cet objet, vous pourrez prendre

votre destinée en main mais attention ! cela fera ressortir vos instincts maléfiques, qu'il vous faudra contrôler ! Faites- en bon usage ! Je compte sur vous. »

Encore sous le choc de ces révélations, je rentrai chez moi car il se faisait déjà tard. Dans ma modeste chambre, j'observai l'objet de plus près. C'était une sorte de longue cape en velours noir. Lorsque je m’en couvris, elle sembla engloutir tout mon corps. Les questions se bousculaient dans ma tête. Pourquoi la voyante m'avait-t-elle fait le don de cette cape ? Et cette potion pour devenir belle ? Existait-t-il un lien avec madame de Montmartre ? Ou bien avec mes parents ? Après mûres réflexions, je décidai que j'allais prendre ma revanche et que j'allais utiliser cette cape et cette potion à cette fin.

L'heure de la vengeance avait enfin sonné. Dans quelques heures, le musée serait réduit en cendres. J'avais

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tout planifié dans les moindres détails. Aucune erreur ne devait survenir.

J'avais récupéré les clefs dans la poche de l'uniforme de mon père et je me trouvais dans un coin sombre situé dans une ruelle derrière le bâtiment. Je compris en cet instant tout l'intérêt de la cape d'invisibilité que m'avait procurée la voyante. Je m'en revêtis afin que personne ne me remarque. J'étais tout à la fois nerveuse et hésitante, mon cœur battait la chamade. Je pris mon courage à deux mains et insérai la clé dans la porte... Je n'avais hélas pas prévu que cette dernière grincerait aussi fort. Le chien du gardien aboya, réveillant son maître. Je me raidis de peur. « Tout est fini !» pensai-je. Mais soudain, une force venue du plus profond de mon corps balaya mon angoisse. A partir de ce moment-là tout s'enchaîna. Afin d´échapper à l'odorat de l'animal, je montai au deuxième étage où sans réfléchir j'allumai le feu grâce aux lanternes suspendues. L’incendie prit à proximité de la magnifique tribu de singes, tribu unique en son genre mais que je trouvais ignoble. D'ailleurs tout ce que ce musée contenait, n’était à mes yeux que des horreurs sans nom. Très vite des cris sourds venant de l'extérieur retentirent, les flammes atteignaient déjà le premier étage et éveillaient les bêtes fauves qui s'affolaient. Je ne contrôlais plus rien. « Pourquoi ai-je agi ainsi ?»pensais-je. Sans doute voulais-je barrer le chemin au molosse ou peut-être était-ce l'emprise de la cape. Mais il était trop tard pour la retirer, le mal était fait. Je pris mes jambes à mon cou et m'enfuis par l'escalier de secours. Ma cape se déchira en s'accrochant à une branche. Je ne m'en aperçus qu'en rentrant. J'avais regagné ma chambre le plus discrètement possible afin de ne pas réveiller mes parents qui devaient déjà dormir à cette heure tardive.

Ma nuit fut agitée, le sommeil me fuyait. Cette cape m'obsédait. Au matin je décidai de restaurer l'objet maléfique avec l'aide de Mme de Montmartre et de lui confier mon terrible secret. Je m'avançai vers son fauteuil qui se balançait d'avant en arrière dans un mouvement monotone.

« - Bonjour Madame. Souhaiteriez-vous que nous raccommodions ensemble de menus travaux afin de vous  

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distraire? - Ah, mon enfant te voilà ! J'accepte bien volontiers ta

proposition. Viens, installe-toi. »Nous étions concentrées sur notre travail afin de ne pas

abîmer nos mains lorsque Mme aperçut la cape qui dépassait de mon sac et me demanda inquiète: 

« - Quel est ce tissu que je vois dans ton sac, Pauline? »Elle m'appelait si rarement par mon prénom que cela m'étonna énormément. Gênée, je répondis:

« - Madame, croyez-vous en la magie?- C'est une bien étrange question.» Sa voix semblait

hésitante. «De quel genre de magie parles-tu?- Je dirais... de la magie noire. » Son visage se crispa, elle détourna les yeux et

m'ordonna : « - Apporte-moi cet objet, je te prie.  Je lui tendis ma cape, les mains tremblantes.   - Mais dis-moi, cette cape est déchirée ! Nous allons réparer cela ! » dit-elle mystérieusement.   Tandis que nous recommencions notre travail d'aiguille, je réalisais que Mme de Montmartre avait totalement éludé le sujet de la magie, comme si cela la dérangeait.Soudain elle se tourna vers moi et d'une voix interrogative me dit: 

« - As-tu entendu parler de l'incendie qui a eu lieu au musée Barnum hier au soir? » Cette phrase me noua la gorge et d'une voix peu assurée, je répondis: 

« - Heu... j'ai eu vaguement connaissance de cette histoire...

- Ah, oui ? J’ai gardé l'article de journal. Voudrais-tu le lire ? 

- Oui, bien volontiers » répondis-je par politesse.  Elle me tendit la gazette « Le p'tit New-Yorkais ». Mme

de Montmartre sembla satisfaite que j'accepte sa proposition. Son sourire était narquois, comme si elle se doutait de ce que j'avais fait. Lorsque j'arrivai au passage des victimes, je refusai d'en lire davantage, mais avant que je lui rende son papier, Madame me regardant de haut, me fit cette réflexion :

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« - Il ne me semble pas que tu aies lu entièrement l'article. N'est-ce pas?" 

A contrecœur je me replongeai donc dans ma lecture. À ce moment-là, mes yeux se fixèrent sur deux noms redoutés, ceux de mes parents. Des larmes remplirent mes yeux et mon cœur se serra. Ma respiration se fit haletante, la panique me gagna. C'est alors que je me souvins de tout le mal qu’ils m’avaient fait endurer durant toutes ces années. Écartelée entre tristesse et vengeance, je quittai brutalement la pièce sans plus me soucier de Mme de Montmartre.

Plus tard, une fois ressaisie, alors que je m'étais installée sous une porte cochère à l'extérieur de l'hôtel particulier de ma maîtresse, je repensai, perplexe, au comportement de Mme de Montmartre qui, lorsque je lisais l'article, s’était montrée très distante, très froide bien qu'elle m'ait appelée par mon prénom. Pensive, je scrutais l'horizon de cette ville grouillante aux immeubles gigantesques quand je vis Mme de Montmartre quitter sa demeure. Je décidai de la suivre. J'enfilai ma cape fraîchement reprisée et m’élançai derrière elle. Je la vis s'arrêter devant l’échoppe d'Irma la voyante et rentrer dans l'officine. Je collai mon visage à la vitrine et, là, j'assistai médusée à la métamorphose de madame de Montmartre. Sa nouvelle apparence me semblait vaguement familière : à bien y regarder c'était celle d'Irma la voyante. Je réalisai qu'elles ne formaient toutes deux qu’une seule et même personne. Désemparée, je ne savais plus quoi penser ! Pouvais-je faire confiance à cette personne?Une partie de moi voulait s'enfuir, l'autre souhaitait rester pour savoir ce qu'Irma comptait faire. Ma curiosité l'emporta. Le temps que je me ressaisisse, elle avait disparu.

Brusquement une main se posa sur mon épaule. Je sursautai et me retournai vivement ! C'était Madame de Montmartre... J'étais bien décidée à lui demander des explications. Irma me conseilla de m’asseoir sur la marche, devant la boutique et m’expliqua :

« - Tu sais, mon enfant, maintenant que tu connais ma double identité, je pense que je te dois des explications. Lorsque j'étais petite, j'adorais les livres de magie et un jour

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j'en ai découvert un sur les potions. Aussitôt j'ai décidé d'en réaliser une. Son odeur était si délicate et alléchante que je la bus sans me méfier. Son effet fut impressionnant. Ma métamorphose fut immédiate. Je t’ai fait boire cette même potion, Pauline, pour que tu deviennes comme moi et que tu vives avec moi. J'aimerais faire de toi ma fille. Tu serais ainsi à l'abri du besoin !»

Sur le moment, je ne sus pas quoi répondre à la proposition de Mme de Montmartre. Très perturbée, je rentrai chez moi.

La maison était vide et silencieuse. Pour me détendre et réfléchir à la suggestion qui m’avait été faite, je m'allongeai sur mon galetas. Plus les minutes défilaient, plus je me disais que l'acte que j'avais commis, si terrible fut-il, pourrait m'être bénéfique. La proposition de Mme de Montmartre m'attirait. Que faire? J'étais désormais orpheline! J'avais besoin de quelqu'un qui veille sur moi, une personne dont je serai comprise, d'une mère telle que je n'en avais jamais eu. Je résolus à prendre ma vie en mains et abandonnai mon domicile sans le moindre regret. Je me présentai devant la demeure de Mme de Montmartre et y pénétrai. Dans son magnifique salon aux tentures incarnadines, Mme de Montmartre, sous l'apparence de l’énigmatique Irma m’attendait. Je n'eus pas à parler, elle me prit dans ses bras et s'exclama: « Merci, mon enfant, ma fille! »

Je n'eus jamais à regretter d'avoir pris cette décision car Irma – je l'appelais ainsi par commodité - prit soin de moi et m'enseigna la magie. Je m'épanouis ainsi dans cet univers et m'y sentis enfin à ma place. Voici donc comment les plus belles années de ma vie commencèrent à l'aube de mes quatorze ans .

FIN

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Galerie des personnages

Wendy

PaulineRachelle

Ollan

Les f

antô

mes

« La beauté, ce n'est pas avoir un beau

physique

C'est avoir un bon cœur, un bel esprit

une belle âme... »

« Le pire des sentimentsC'estDe se sentir remplir »

Eva

ANNEXESHISTORIQUES

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L'intérieur

Vieille carte postale

Le théâtre Duke of York

Nina Bouicicault, dans le rôle de Peter Pan au Duke of York's Theatre (décembre 1904)

Annexe 1

La première de Peter PanLa première de Peter PanLondres , 1904Londres , 1904

Elle est jouée pour la première fois sur la scène du Duke of York's Theater à Londres, en décembre 1904, le 27, avec un léger retard pour Noël, dû à des problèmes techniques nés de dispositifs scéniques sophistiqués.

C'est une pantomime intitulée Peter Pan, ou le garçon qui refusait de grandir. Dérivée de l'arlequinade et de la commedia del arte, la pantomime, "the panto ", est en Grande-Bretagne le spectacle traditionnel pour les enfants à la période de Noël. Dans le cadre d'un authentique théâtre ou plus modestement d'une représentation d'amateurs, la majorité des jeunes britanniques, jeunes ou moins jeunes, les adultes accompagnant les enfants ou participant à l'organisation, a donc l'occasion d'assister à une pantomime et/ou, d'y jouer un rôle.

Toutes sortes d'animaux sont sur scène, le rôle titre est joué par une femme en collants. Parmi les acteurs figure souvent un homme d'âge mûr habillé et maquillé de façon extravagante. Il convient en outre de passer d'un décor réaliste à un monde imaginaire. Musique, éclairages et effets spéciaux sont impressionnants. Certains acteurs se spécialisent dans ce type de spectacle, d'autres, par ailleurs célèbres, y participent à l'occasion très volontiers. L'œuvre de Barrie s'inscrit donc clairement dans une tradition culturelle nationale.

La pièce réunit quelque cinquante acteurs, danseurs, musiciens, chanteurs, un orchestre au complet et tout un ballet volant qui évolue au dessus de la scène grâce à un système de poulies très sophistiqué. C'est un grand succès !Sur le rideau de scène, de grands dessins rendent hommage à Alice au pays des merveilles et aux pirates de l'Ile au trésor.

Quelques photos de la pièce :

Sources :- http://www.forumuniversitaire.com- https://www.flickr.com/photos/peterpanchronicles/sets/72157608587252988/

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http://paris1900.lartnouveau.com/crue1910/les_lieux.htm

Les bouches du métro inondées et le zouave du pont de l'Alma encore visible

Les passerelles et autres barques pour se déplacer

Annexe 2

CRUE DE LA SEINE , PARIS , 1910

En janvier 1910, Paris connaît l'une des plus importantes crues de la Seine de son histoire.Commencée le 21 janvier, la crue atteint son maximum, 8,62 mètres sur l'échelle hydrométrique le 28 janvier. La moitié de la ville est inondée et plus de 200 000 parisiens sont sinistrés. Cette crue a affecté aussi de nombreuses villes riveraines du fleuve pendant plusieurs semaines avant et après cette date, la montée des eaux s'étant faite en une dizaine de jours, tandis que la décrue a demandé environ 35 jours. Lors de cette grande crue de 1910, les députés, pour réamorcer la reprise du travail, se rendent à l'Assemblée nationale en barque. Le zouave du pont de l'Alma, sur lequel les Parisiens ont l’habitude de mesurer la montée de la Seine, a de l’eau jusqu’aux épaules.

Cette crue de la Seine est occasionnée par la conjonction de plusieurs facteurs :

- pluviométrie importante ;- neige et gel ;- débordement de plusieurs cours d'eau :Yonne, Loing, Grand Morin.- sous-sols saturés dans tout le bassin parisien (en forme de

cuvette).Le 28 janvier 1910, des centaines de rues sont envahies par une eau

glacée et de plus en plus polluée car les égouts refluent. En effet, des dizaines de milliers de fosses d'aisance dans les sous-sols qui ne sont pas raccordés aux collecteurs municipaux sont inondées. Les bateaux-citernes qui doivent évacuer hors de Paris les résidus ne peuvent plus passer sous les ponts. La situation sanitaire devient préoccupante, des cas de typhoïde et de scarlatine sont signalés

L'inondation a causé des dégâts d'un montant de 400 millions de francs-or (soit l'équivalent de plus d'1,6 milliards d'euros) en ce qui concerne les dommages directs auxquels il faut ajouter 50 millions de francs-or distribués à titre de secours.

La crue de la Seine a aussi causé des dommages, les horloges se sont toutes arrêtées sur la même heure.

Sources :http://fr.wikipedia.org/wiki/Crue_de_la_Seine_de_1910" \t "_tophttp://paris1900.lartnouveau.com/cartes_postales_anciennes/la_crue_de_1910.htm

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A l'intérieur de l'usine, vers 1905http://www.bletteryjp.fr/lieux-divers/Paris-usine-air-comprime.html

Le 21 janvier 1910, l’usine produisant et distribuant (par 350km de canalisation) l’air comprimé est inondée dans le XIIIe arrt, ce qui a pour effet de stopper les horloges publiques, les ascenseurs et nombre de machines artisanales. Toutes les pendules de la capitale furent bloquées sur 10h 53, le temps des inondations.

De 1890 aux années 1980, cette entreprise distribua de l’air comprimé, dans tout Paris, sous forme de bonbonnes ou par un réseau de tuyaux pour gonfler les pneumatiques, mouvoir les ascenseurs, faire tourner les roulettes des dentistes.

La cheminée et la halle de l’usine font l'objet d'une inscription au titre des historiques depuis le 29 juin 1994, et ont été réhabilitées à l'occasion de la transformation du site pour accueillir l'école nationale supérieure d'architecture de Paris-Val de Seine dans le cadre de l’opération d'aménagement Paris Rive Gauche. Un nouveau bâtiment de sept étages a été construit à côté.Depuis avril 2007, les étudiants de l'école nationale d'architecture de Paris s'y sont installés.

En 1890, la Compagnie Parisienne de l’Air Comprimé, une entreprise en plein essor achète le terrain, occupé jusqu'alors par une école privé pour y construire une usine la Société Urbaine d’Air Comprimé (SUDAC). A l’origine, il s’agissait de produire de l’air comprimé uniquement pour faire fonctionner les horloges publiques, notamment celles des gares, en  leur envoyant une pulsation toutes les minutes ( chaque impulsion d’air comprimé faisait avancer les aiguilles) . L’air était comprimé par des machines à vapeur brûlant du charbon dans les trois usines de la société, puis expédié jusqu’aux horloges via des tuyaux posés dans les égoûts.

Trop peu rentables, ces horloges seront arrêtées en 1927.  Mais entre-temps, la Compagnie des Horloges Pneumatiques, devenue la Compagnie parisienne de l’Air comprimé (CPAC), a trouvé de nouveaux débouchés comme les ascenseurs hydrauliques et la petite industrie parisienne.

Sources : http://lafabriquedeparis.blogspot.fr/2011/12/la-sudac-un-siecle-dair-comprime-au.html

L'usine SUDAC vue par Tardi(Brouillard au Pont de Tolbiac)

La fin du XIXe siècle connut une compétition aujourd’hui oubliée entre deux modes de transport de l’énergie : l’électricité et l’air comprimé.

La société urbaine d'air compriméLa société urbaine d'air comprimé

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Vue extérieure du Barnum Museum, "Entrée Broadway"(Source: London Stereoscopic Company, 1858 - Meserve-Kunhardt Collection.)

Incendie du musée en 1865 (Source: C. P. Cranch, oil painting (c. 1865) - Pittsford Picture Framing, Inc.)

Une affiche

« C'était une nuit où la température était sous zéro degré et le bâtiment détruit fut longtemps comme un énorme bloc de glace suite à l'arrosage des pompiers...»

Phineas Taylor Barnum (1810-1891)

Il fut le showman américain le plus influent du XIXème siècle, le fondateur du premier musée public et le créateur de la piste moderne au cirque. Outre ses qualités « d’exhibitionniste », il était passé maître dans l’art de la publicité et de la communication. Grand manipulateur et subtil magicien de la simulation et du simulacre, Barnum était le plus fin connaisseur de la société du spectacle de son temps. Il fera de son nom « une marque » connue de tous.

Le Musée BarnumLe Musée BarnumNew-York , 1865New-York , 1865

En 1841, bien que sans un dollar, il achète le Scudder's American Museum, qu'il renomme Barnum's Museum, celui-ci s'installe bientôt au coin de Ann Street et de Broadway dans un immeuble acheté Il s'ouvre en 1842 et il fait fortune et paie ses dettes en un an. Ses nombreuses expositions - spectacles et son amphithéâtre de 3000 places. L’American Museum va devenir la vitrine la plus célèbre du siècle. De 1842 à 1865, le musée accueillit plus de 30 millions de spectateurs, ce qui est collossal. Tout ça pour 25 cents (moitié prix pour les enfants!)

En 1855, Barnum se retrouve en faillite et est forcé de vendre son musée américain pour payer des dettes. Il part en tournée en Europe avec sa troupe. Il est de retour en 1860, il reprend en charge le vieux museum, promptement remonté, à l'angle de Broadway et de Ann Street et le dirige encore avec succès jusqu'au 13 juillet 1865 date d'un incendie spectaculaire qui détruisit l' "American Museum". Il s'installe à un autre emplacement mais brûle à nouveau en 1868.

En 1870, Barnum organise une exposition itinérante composée d’une ménagerie, d’une caravane et d’un cirque. Son premier spectacle à Brooklyn, s’est déroulé devant 10 000 personnes. En avril 1874 Barnum ouvre son hippodrome romain à New York, qui allait devenir Le Grand Cirque.

Barnum mit l’excentricité au centre du monde par l’exposition de curiosités et de Freaks vrais ou faux, en leur donnant un visage et un théâtre. Son programme : Lilliputien, femme à barbe, sirène, garçon à tête de chien, homme animal, frères siamois, cannibales australiens, géant chinois, femmes sans corps, etc. Pour marquer les consciences, il était prêt à tout, de la fantaisie la plus burlesque à la plus atroce abjection.Barnum meurt le 7 avril 1891 à l’apogée de sa popularité.

Le barnum'museum

Annexe 3

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Tom Pouce : l'attraction principale du spectacle de Barnum

Extrait du Canadien, 24 juillet 1848

Extrait du Canadien, 24 juillet 1848

Sources :- http://medarus.org/NM/NMPersonnages- http://www.artefake.com/BARNUM.html

Les monstres du MuséeLes monstres du Musée

Le Général Tom Pouce ( ou Tom Thumb ) fut la plus grande attraction de Barnum.

Charles S. Stratton, de son vrai nom, originaire de Bridgeport au Connecticut (EU), mesurait 63cm de hauteur et pesait 7 kilos quand il a été embauché par Barnum en 1842. Outre son physique si particulier, l’enfant de Lilliput donnait des échantillons de son savoir-faire en chant, danse et mime.

« Je pris beaucoup de peine pour éduquer mon petit prodige ; je lui consacrai bien des heures de jour et de nuit, mais je fus récompensé de mes soins par le succès, car l’enfant avait naturellement beaucoup de finesse et un grand amour du badinage. Il devint bientôt fou de moi, de mon côté je lui étais et je lui suis demeuré très attaché. Je crois encore très fermement que le monde n’a jamais vu de curiosité naturelle plus intéressante et plus extraordinaire que Tom Pouce. Ce petit bonhomme ne tarda pas à devenir de favori du public. »

Barnum.

Tom Pouce mourut en 1883, à l’âge de 45 ans, après avoir fait la fortune de son « propriétaire » (environ 20 millions d’euros) et enchanté le public international. Dans ses voyages européens, de 1844 à 1847, le général divertit, entres autres, la Reine Victoria, le roi Louis-Philippe, et la royauté d’autres grands pays, de Bruxelles à Dublin.

Ces « monstres » ont fait le bonheur du cinéma : Elephant man de David Lynch 1980

En 1884, à Londres, John Merrick, dit L'homme éléphant (John Hurt) est un phénomène de foire comme nombre d'êtres humains affectés de difformités ou d'anomalies physiques congénitales graves.Le « propriétaire » de l'homme éléphant se nomme Bytes (Freddie Jones). Le Dr Frederick Treves (Anthony Hopkins), grand chirurgien réputé de Londres, intrigué par l'apparence visuelle terrible de l'homme-éléphant, présentant d'atroces difformités monstrueuses qu'il n'avait de sa vie encore jamais vues de ses propres yeux, demande à Bytes de pouvoir l'examiner plus en détail. John Merrick a 21 ans et ne semble pas pouvoir s'exprimer verbalement. Le Dr Treves emprunte alors l'homme-éléphant à son propriétaire pour quelques jours contre une somme d'argent le temps de l'étudier et de le présenter à ses confrères.

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La loge n°13 p 7( Alexi, Antoine, Eva, Mélodie, Suliana , Tristan, Yann)

Panique à Paris p 21( Cléo, Enora, Flavie, Inès, Nicolas, Pierre, Samuel)

La vengeance au goût de cendres p 35( Ema, Julie, Justine, Kesya, Nazir, Nicolas, Robinson, Vincent )

Annexes :

- annexe 1 p 51

- annexe 2 p 53

- annexe 3 p 57

TABLE DES MATIERES

La classe de 4ème B